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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2004-2005 - 60ème jour de séance, 145ème séance

1ère SÉANCE DU JEUDI 10 FÉVRIER 2005

PRÉSIDENCE de M. François BAROIN

vice-président

Sommaire

        DÉVELOPPEMENT DES TERRITOIRES RURAUX
        (CMP) 2

        ACCORDS INTERNATIONAUX 17

        CONTRAT DE VOLONTARIAT
        DE SOLIDARITÉ INTERNATIONALE
        (deuxième lecture) 17

        ART. 4 22

        ART. 5 23

        ART. 7 ET 8 BIS 24

        EXPLICATIONS DE VOTE 24

        ERRATUM 24

La séance est ouverte à neuf heures trente.

DÉVELOPPEMENT DES TERRITOIRES RURAUX (CMP)

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre soumettant à l'approbation de l'Assemblée le texte de la CMP sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte de la CMP.

M. Yves Coussain, rapporteur de la CMP - En plus d'une année de travail conclue jeudi par la réunion de la commission mixte paritaire, ce projet de loi, fruit de l'effort de la représentation nationale pour donner un nouveau souffle à nos campagnes, a été considérablement enrichi : il comporte désormais 250 articles contre 76 au départ. La diversité des sujets abordés répond à la variété des problèmes rencontrés en zone rurale.

Concernant les zones de revitalisation rurale, les ZRR, l'exonération de taxe professionnelle, auparavant réservée aux créations d'activités commerciales et aux reprises d'activités commerciales et artisanales, a été étendue aux reprises d'activités libérales. Le dispositif sera appliqué dès cette année. De même, l'exonération d'imposition sur le revenu bénéficiera désormais aux créations d'activités libérales durant quatorze ans, contre sept auparavant. Ainsi, les ZRR deviendront fiscalement très attractives.

Dans le domaine du foncier et du bâti, le dispositif d'amortissement exceptionnel sur l'immobilier industriel, étendu aux travaux de rénovation, a été prolongé jusqu'en 2007 ; l'exonération de charges sur le foncier bâti a été portée de deux à cinq ans. Par ailleurs, pour les logements acquis et rénovés avec une aide financière de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, nous avons institué pour quinze ans une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties, ainsi qu'une déduction forfaitaire de 40 % des revenus locatifs bruts tirés des logements acquis neufs en ZRR. Enfin, le périmètre à l'intérieur duquel ces exonérations seront applicables a été élargi de près de 10 %, ce qui illustre notre volonté d'aider les zones les plus fragiles à se dégager de la spirale du déclin et de la désertification. Dans ces conditions, comment soutenir que ce projet manque de lignes directrices et de moyens financiers ? Ce serait totalement faux et contraire à l'intérêt des territoires ruraux, qui doivent être incités à croire en leur avenir.

Le soutien fiscal au tourisme en milieu rural a été renforcé : la réduction d'impôt sur le revenu, autrefois réservée aux seules résidences de tourisme, bénéficiera également aux villages résidentiels et aux meublés de tourisme ; l'obligation de disposer d'un permis de construire pour en bénéficier a été supprimée et le dispositif a été prorogé jusqu'en 2010.

Les mesures fiscales prévues pour faciliter la vie des agriculteurs ont été complétées par l'introduction d'un « coefficient multiplicateur », très attendu par la profession, pour réguler les prix des fruits et légumes en période de crise. D'autre part, les règles encadrant la publicité pour certaines boissons alcoolisées font maintenant l'objet d'un consensus : la rédaction proposée par le Gouvernement en deuxième lecture au Sénat est tout à fait dans l'esprit de celle votée à l'Assemblée nationale. L'interdiction de représenter le contexte de consommation demeure, mais non celle relative aux qualités intrinsèques du produit.

En revanche, la commission mixe paritaire a dû renoncer à rattacher les entreprises paysagères au régime social agricole car cette disposition relève du règlement. Cependant, l'exigence d'au moins 10% d'activités non paysagères retenue dans le récent décret, ne nous paraît pas de nature à stimuler l'activité de ces entreprises et devrait donc, à notre sens, être revue.

Le Gouvernement a tenu ses engagements en introduisant au Sénat un article qui permettra de réduire le coût de l'équarrissage sans mettre en danger la santé des consommateurs.

S'agissant du patrimoine rural bâti, le projet de loi favorise l'hébergement et, partant, l'embauche des salariés saisonniers et des apprentis.

Il permettra également de mieux protéger les zones agricoles et naturelles dans les espaces périurbains grâce à l'instauration de périmètres spécifiques.

Un dispositif de concertation préalable en cas de projet de réorganisation de services publics locaux a été adopté. La mesure, inspirée par un souci de démocratie locale, garantit la préservation en milieu rural d'une offre de services publics de qualité pour tous. L'encouragement à l'installation des professionnels de santé bénéficiaires de la faculté donnée aux collectivités territoriales d'octroyer des aides au maintien ou à l'installation.

Par ailleurs, en cas de carence des laboratoires nationaux et départementaux, l'administration pourra agréer des laboratoires privés pour faire les analyses nécessaires au contrôle du respect des dispositions sanitaires.

Sur l'ensemble de ces sujets, ce texte apporte à nos concitoyens des solutions concrètes, conformément à sa vocation de « boîte à outils ». Parce qu'il a été amélioré par les apports de nombreux parlementaires - dont l'implication constante doit être saluée -, il répond aux attentes, aux difficultés, aux espoirs du monde rural. Je suis convaincu qu'il fera date. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur de la commission mixte paritaire - Les questions relatives aux activités cynégétiques ont été longuement débattues dans cet hémicycle depuis 2002, notamment lors de la discussion de la loi « chasse » du 30 juillet 2003. Il importait en effet d'assainir un climat délétère, d'améliorer l'image d'un sport trop souvent caricaturé et de redonner confiance aux chasseurs et aux ruraux qui sont attachés à cette pratique. Le principe même de cette activité étant menacé par quelques détracteurs, il fallait la réformer pour assurer une bonne cohabitation avec les autres usagers de la nature, les agriculteurs et les forestiers.

La loi de juillet 2003 a permis de franchir une première étape. Le volet chasse opportunément inclus dans le présent projet en marquera une deuxième et nous pouvons tous nous féliciter du texte adopté à une large majorité par la CMP, grâce à une identité de vues remarquable entre les rapporteurs des deux assemblées.

Ce texte ne modifie pas l'équilibre général issu de la deuxième lecture. Sur la question longuement débattue à l'Assemblée des moyens d'assistance électronique, le Sénat s'est finalement rallié à notre point de vue selon lequel il est préférable de poser le principe de l'interdiction, hormis pour les moyens expressément autorisés par arrêté ministériel.

La CMP a par ailleurs adopté la rédaction du Sénat sur l'obligation de prévenir la police ou la gendarmerie avant de charger un animal accidenté dans un véhicule. Sans être persuadés que cette rédaction soit pleinement opérante, nous nous en remettons à la sagesse de nos collègues sénateurs.

S'agissant de l'équilibre agro-sylvo-cynégétique, le subtil compromis trouvé à l'Assemblée en deuxième lecture a été préservé. Ces dispositions ouvrent à n'en pas douter une ère nouvelle dans les relations entre chasseurs, agriculteurs et propriétaires forestiers. Elle permettront d'atteindre l'objectif que nous nous sommes fixé dans la discussion de ce projet : permettre une chasse responsable et respectueuse des autres usages de la nature et de la faune.

Certains sujets n'ont pas été épuisés lors de la discussion de ce volet chasse entre la représentation nationale et le Gouvernement, plus précisément le ministre chargé de la chasse.

Certains amendements avaient été retirés en deuxième lecture, contre l'engagement du ministre de les satisfaire par voie réglementaire. Promesse a été tenue s'agissant du timbre amende et des moyens d'assistance électronique - à l'exception notable du sonnaillon. En revanche, il n'en est pas allé de même s'agissant de la révision régulière de la liste des espèces chassables. Le principe de cette révision, qui vise à la régulation des espèces protégées lorsqu'elles sont trop prolifiques, a donc été adopté en CMP contre l'avis du Gouvernement. Cette révision doit s'accompagner d'une régulation si nous ne voulons pas avoir à revenir sur cette disposition ultérieurement.

Il serait bon que le ministre chargé de la chasse, absent ce matin, sache que nous avions l'habitude depuis 2002 de travailler en symbiose avec son prédécesseur. Cette période semble révolue : nous sommes dans l'ignorance complète du contenu des décrets et de leurs dates de publication. Mme Bachelot avait pourtant pris l'heureuse initiative de soumettre ses projets d'actes réglementaires à la représentation nationale. De même, le groupe de travail qu'elle avait mis en place sur la simplification est aujourd'hui en sommeil.

Nous avons été blessés, et le terme est faible, par la décision prise par le ministre le 17 janvier sur les dates de fermeture de la chasse : elle a bafoué le compromis qui nous semblait accepté par son cabinet, et ce sans même que l'on daigne nous informer.

Il reste beaucoup à faire. Outre la publication des décrets, la modification des dates d'ouverture de la chasse à la perdrix et au renard et la poursuite des mesures de simplification, je pense à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, qui nous est envié par tous nos voisins européens et dont il faut assurer le financement pérenne. Je pense aussi au problème franco-français des dates de chasse aux oiseaux migrateurs, qu'il faut régler en prenant en considération l'accord AEWA, le guide interprétatif de la directive « oiseaux » dont le ministre aurait dû demander qu'il soit annexé à la directive, et les conclusions de l'Observatoire de la faune sauvage, même si elles n'ont pas été adoptées à l'unanimité.

Soyez sûrs que nous serons vigilants pour que ces problèmes soient réglés, et que notre souhait de travailler de concert avec les services du ministère en charge de la chasse reste intact. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Francis Saint-Léger, rapporteur de la commission mixte paritaire - Le texte de compromis auquel la CMP est parvenue est riche et complexe, à l'image de la diversité de nos territoires.

Nous avons trouvé sur la plupart des sujets des solutions législatives équilibrées. Je salue ainsi les efforts que nous déployons pour inciter les professionnels, notamment libéraux, à s'installer en zone de revitalisation rurale. Quant aux autres problèmes, les avoir soulevés est déjà un premier pas. Je pense notamment à la distribution de certains produits vétérinaires nocifs, au ramassage des champignons ou au financement par nos communes de montagne des installations dédiées aux nouveaux loisirs de neige, auquel s'est intéressé notre collègue Michel Bouvard. Ces loisirs alternatifs - randonnée nordique, raquette, escalade hivernale, ski jöering - ont un potentiel de croissance important et permettront aux stations françaises de diversifier leur offre. L'architecture financière de ces projets sera étudiée par un groupe de travail constitué par la DATAR. Je pense surtout à la prolifération du loup, problème que soulève depuis longtemps notre commission. S'il faut réguler cette prolifération nuisible, les obstacles juridiques, pratiques et financiers sont réels. Il appartient désormais au Gouvernement de répondre à cette inquiétude.

Sur tous les autres sujets, la CMP est parvenue à des compromis auxquels il nous revient de donner corps. Pour faire pièce aux arguments que j'entends souvent, je vais essayer d'identifier les grands axes de ce texte pour ce qui est de la montagne. Ils sont au nombre de trois.

Le premier fonde une stratégie claire : pour développer nos territoires de montagne, il faut organiser leur représentation politique. L'échelon de référence devient le massif, entité plus pertinente que les découpages administratifs traditionnels. Le « comité de massif » voit ses pouvoirs et ses responsabilités renforcés, tandis que des « ententes de massif » pourront impulser une stratégie adaptée. Le texte réaffirme également les principes généraux de notre politique de la montagne, qui est une politique de développement durable et équitable.

Le deuxième axe consiste à mettre le développement et la vie économique au cœur de la politique de la montagne, trop longtemps focalisée sur le seul souci de protection du patrimoine naturel. Nos montagnes n'ont pas vocation à devenir des espaces déshumanisés. Le texte reconnaît donc d'intérêt général l'agriculture, le pastoralisme, l'exploitation des forêts, l'artisanat, le petit commerce et les services médicaux en zone de montagne. Nous favorisons le logement des travailleurs saisonniers et réformons les règles régissant les sections de communes.

Nos territoires de montagne sont les premiers intéressés aux dispositifs fiscaux dont bénéficieront les ZRR. En effet, presque toutes les communes de montagne bénéficient du classement en ZRR, plus cohérent et stable que d'autres zonages comme celui de la prime d'aménagement du territoire, qui exclut injustement certains territoires comme la Lozère. Le statut de ZRR nous permet ainsi d'exonérer d'impôt sur le revenu, pendant quatorze ans, la création d'activités industrielles, artisanales, commerciales ou libérales, et d'exonérer de taxe professionnelle la création et la reprise de ces activités. Nous encourageons par ailleurs la construction : pour les bâtiments industriels, nous portons à cinq ans l'exonération de taxe foncière et prorogeons de deux ans le dispositif d'amortissement exceptionnel. Pour les logements, nous complétons les aides de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat par une exonération de taxe foncière de quinze ans. Nous accordons enfin à ceux qui construisent pour louer une déduction forfaitaire de 40 % des revenus de loyer.

Je me félicite des aides en faveur des professionnels libéraux, dont la pénurie est patente dans nos communes de montagne, notamment dans le secteur médical.

Dernier axe de ce volet montagne : l'assouplissement des règles d'urbanisme. On ne fait pas assez confiance aux élus pour développer raisonnablement nos territoires : les règles d'urbanisme sont souvent sur-protectrices, voire contre-productives. Il n'y a cependant pas de vie possible dans nos montagnes sans constructions, et il ne s'agit pour autant ni de sacrifier notre patrimoine naturel, ni de « bétonner » la montagne.

Notre assemblée a assoupli les règles d'urbanisation des rivages lacustres et des abords des axes routiers, poursuivant ainsi dans la ligne de la loi Urbanisme et Habitat de 2003.

S'agissant des unités touristiques nouvelles, nous avions introduit dans le texte des dispositions réglementaires pour inciter le Gouvernement à publier un décret. Il l'a fait, et nous ne pouvons que nous féliciter de voir ces articles maintenant rétablis dans une rédaction proprement législative. Nous avons aussi rénové les procédures d'installation des centrales hydrauliques, des stations d'épuration et des équipements de télécommunication.

Le texte qu'il vous est demandé d'adopter règle un grand nombre des problèmes propres à la montagne et ouvre la possibilité de trouver des solutions aux autres. Il ressort de la navette parlementaire plus équilibré, plus utile et plus complet. Je remercie tous ceux qui ont contribué à son élaboration, en particulier Yves Coussain, le président Ollier et l'ensemble des ministres, qui se sont montrés sensibles à nos attentes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales - Je voudrais saluer à cette tribune l'accord auquel la commission mixte paritaire est parvenue. Les débats dans les deux assemblées ont mobilisé beaucoup de talents, d'énergie et de passion au cours de l'année écoulée, mais toujours pour servir le monde rural. Je remercie tout particulièrement les rapporteurs pour leur important travail et pour les bonnes relations que nous avons établies, ainsi que le président Ollier, dont la connaissance du monde rural a été souvent déterminante. Le travail parlementaire a permis des avancées substantielles. Au total, plus de 3 700 amendements ont été discutés et il était donc naturel que la CMP ait un ordre du jour chargé.

Elle a examiné 86 articles. Elle en a adopté 30 dans la rédaction proposée conjointement par les deux rapporteurs et a conservé la rédaction de l'une ou l'autre des deux chambres pour 39 autres. Ces 69 articles s'ajouteront aux 173 déjà adoptés après la deuxième lecture. La CMP a supprimé un article relatif à la compensation par l'Etat des charges résultant pour les collectivités territoriales des transferts, créations et extensions de compétences réalisés par la présente loi. Cet article, qui avait été adopté contre l'avis du Gouvernement, était inutile puisque la Constitution donne déjà cette garantie. La CMP a enfin confirmé la suppression de 16 articles.

Le travail des deux commissions a permis, à chaque lecture, de rapprocher les positions du Gouvernement et du Parlement. L'esprit d'ouverture et de dialogue a été constant, et le Gouvernement a toujours pris acte de la volonté du législateur lorsque certains amendements étaient adoptés contre son avis. Ce texte est aussi le fruit d'un travail interministériel comme il en existe peu : ont travaillé avec le ministère de l'agriculture Gilles de Robien, Frédéric de Saint-Sernin, Philippe Douste-Blazy, Xavier Bertrand ou Serge Lepeltier notamment. Je remercie leurs équipes et celles des assemblées pour ce travail en commun. Certes, sur une demi-douzaine d'articles, la CMP a retenu des solutions qui ne sont pas celles qu'aurait préféré le Gouvernement, mais c'est là toute la noblesse du débat parlementaire !

Toutefois, l'article 34 bis, qui prévoit l'application du taux réduit de TVA pour la transformation de bâtiments agricoles en logements, dans les ZRR, pose un sérieux problème de compatibilité communautaire. C'est donc la seule disposition qui fera l'objet d'un amendement substantiel du Gouvernement, les autres amendements relevant d'un simple travail de relecture.

Ce projet de loi constitue une véritable boîte à outils qui permettra de faciliter les projets et d'encourager le dynamisme des acteurs ruraux. Il donnera de nouvelles possibilités d'agir en prenant en compte toute la variété des territoires. Il n'est pas vrai que ce texte n'a pas de ligne directrice claire ! Mais il doit répondre à une multitude de problèmes parce que le monde rural est lui-même très divers, ce qui est d'ailleurs illustré par les nombreux enrichissements apportés par le Parlement. De nombreuses mesures importantes avaient déjà été adoptées en deuxième lecture, relatives par exemple aux allègements fiscaux et sociaux en ZRR, à l'ouverture des interprofessions agricoles sur l'agriculture biologique et les produits de montagne, au statut des entreprises équestres, au transport de personnes, au dispositif d'aménagement foncier, à l'installation des professionnels de santé, aux associations foncières pastorales, aux plans de gestion cynégétique, à la reconnaissance de l'intérêt général de l'agriculture, au CNASEA ou à la création d'une agence de communication agricole. L'accord de la CMP porte sur des dispositions tout aussi emblématiques, telles que le dispositif des zones de revitalisation rurale, l'adaptation de la loi Evin à la publicité sur le vin, dans des conditions de consensus remarquables, le marché des fruits et légumes - et je tiens à souligner la rapidité de réaction du Gouvernement sur ce sujet - la protection des espaces agricoles et naturels périurbains, l'aménagement foncier, les zones humides et les sites Natura 2000, l'équilibre des activités cynégétiques, les unités touristiques nouvelles en montagne ou encore le service public de l'équarrissage.

En ce qui concerne la chasse, Monsieur Lemoine, peut-être vos paroles ont-elles dépassé votre pensée. Vous vous êtes montré quelque peu injuste à l'égard de Serge Lepeltier, qui ne peut être là aujourd'hui. Des divergences existent certes, sur les dates de fermeture de la chasse, mais elles ne doivent pas vous faire négliger l'énorme travail de concertation qui a été mené. Le texte d'aujourd'hui fait l'objet d'un large consensus entre les deux chambres et le ministre de l'écologie. J'ai bien noté vos sujets de préoccupation et je les transmettrai à Serge Lepeltier, dont les qualités d'écoute sont bien connues. Si des malentendus subsistent, je sais qu'il ne manquera pas de venir les lever, mais je crois que nous sommes arrivés à un bon point d'équilibre.

Venons-en à la suite des événements. La deuxième lecture a permis d'identifier des sujets de réflexion à approfondir. Ainsi que je m'y suis engagé, nous allons continuer à travailler ensemble sur tous ces points, ainsi que sur la rédaction des décrets d'application afin qu'ils restent parfaitement dans l'esprit de la loi. Dominique Bussereau et moi y sommes particulièrement attachés et veillerons à ce que ces décrets soient publiés le plus rapidement possible. Une mission interministérielle sera constituée pour veiller à leur élaboration et poursuivre le travail en commun qui a permis l'élaboration du projet.

L'ambition du Gouvernement pour l'avenir du monde rural ne s'arrête pas à ce dispositif législatif. Il doit se combiner avec la démarche globale et cohérente que nous avons engagée en faveur du développement des territoires ruraux, menée par le ministère de l'agriculture avec le concours d'autres ministères. Je pense en particulier au plan de développement des industries agroalimentaires ou à la loi d'orientation et de modernisation pour l'agriculture que nous sommes en train de préparer.

Dans un esprit d'ouverture, de dialogue et de partenariat, nous avons pu améliorer ce texte de façon très concrète. Merci à tous ceux qui y ont contribué (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - Je veux dire, au nom de la commission, combien nous avons nous aussi apprécié le partenariat avec le Gouvernement sur ce texte, qui concerne plusieurs ministères parce qu'il s'inscrit dans une logique d'aménagement du territoire. La présence de trois rapporteurs illustre cette pluridisciplinarité. Le Gouvernement a été ouvert aux propositions du Parlement, et je tiens à lui rendre un hommage mérité, auquel j'associe tous les ministres présents et passés qui ont contribué à ce texte.

Nous sommes parvenus à un équilibre satisfaisant. L'Assemblée nationale a fait son travail, la CMP le sien. Elle a en particulier permis une grande avancée : l'adoption d'un amendement relatif au coefficient multiplicateur sur les fruits et légumes, qui répond à une question d'une brûlante actualité.

Au sujet de la TVA à 5,5 %, Monsieur le secrétaire d'Etat, nous acceptons vos arguments, et nous voterons l'amendement de suppression afin de ne pas compromettre les discussions en cours.

Sur la chasse, il faudrait lever le malentendu. Ce qu'a dit M. Lemoine doit être entendu par le Gouvernement ; je compte sur vous pour faire passer le message à M. Lepeltier car l'engagement pris ici même par Mme Bachelot n'a pas été tenu. Je souhaite que nous ayons rapidement un entretien avec lui, afin que ne subsiste aucune amertume.

Enfin, le Président Debré a souhaité que les rapporteurs aient un « droit de suite » sur les textes adoptés ; nous voulons que ce soit le cas pour celui-ci, et c'est pourquoi nous saisissons la main que vous nous avez tendue à propos des décrets et autres textes réglementaires d'application. Nous vous faisons confiance, mais il est du rôle des parlementaires de vérifier que les lois votées sont bien appliquées. Je proposerai donc en fin d'année de réunir la commission pour faire le point avec vous, Monsieur le secrétaire d'Etat.

M. le Secrétaire d'Etat - Avec plaisir.

M. le Président de la commission des affaires économiques- Je renouvelle mes remerciements à tous pour le travail remarquable qui a été accompli : au Gouvernement, aux rapporteurs et à tous les participants au débat, sans oublier les administrateurs de la commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. François Brottes - J'associe à mon propos l'ensemble des élus du groupe socialiste, et plus particulièrement Jean Gaubert, Jean-Paul Chanteguet, Geneviève Perrin-Gaillard et Henri Nayrou, qui ont participé avec moi à la discussion de ce texte.

L'annonce de ce projet de loi avait suscité un grand espoir dans le monde rural, dont les habitants et les élus avaient le sentiment que seule comptait la politique de la ville, et que la dérégulation à marche forcée dans les secteurs de la poste, de l'énergie, des transports et des télécommunications allait inévitablement les exclure des « dynamiques nouvelles » annoncées. La fin des fonds structurels européens et les coupes drastiques dans le budget de l'Etat et dans les effectifs de fonctionnaires les laissaient imaginer un « abandon en rase campagne »... Ils avaient l'intuition que la réforme de la politique agricole commune allait complètement déstabiliser l'activité agricole, indispensable aux territoires ruraux.

Le texte auquel nous aboutissons a quelque chose d'un « livre de la jungle »... Il commence comme un conte de fées, en affirmant que « l'Etat est garant de la solidarité nationale en faveur des territoires ruraux et de montagne », et il se termine dans une logorrhée qui n'est guère refondatrice pour les territoire ruraux. Ce fut un bon « texte occupationnel » avant les élections cantonales et régionales, mais déjà à l'époque il n'avait pas réussi à convaincre...

Qu'avons-nous obtenu de ce long processus parlementaire qui a débuté il y a plus d'un an ?

Certes, quelques dispositions ont un intérêt technique et pratique qu'on ne saurait nier. Je pense en particulier aux nouveaux droits des saisonniers - même si la caisse pivot et le guichet unique restent à inventer -, aux avancées obtenues en dernière lecture sur la réhabilitation de l'immobilier de tourisme ; à la question des lacs de montagne ou des unités touristiques nouvelles, sur lesquelles le Gouvernement a fait preuve d'une bonne écoute ; ou encore à la réforme des procédures d'aménagement de l'espace rural - mais les moyens seront-ils au rendez-vous pour la gestion du foncier ?

Fallait-il obligatoirement passer par la loi pour prendre les mesures proposées ? Lors de son dépôt en septembre 2003, le projet comportait 76 articles ; il en compte désormais près de 240, mais je laisse le soin au Président Debré d'utiliser ce texte comme exemple de ce qu'il faut éviter de faire... Je reconnais que, sur cette question de forme, on pourrait trouver d'autres exemples dans le passé.

M. le Secrétaire d'Etat - En effet !

M. François Brottes - En revanche, nous avons un désaccord fondamental sur la stratégie. Un chapitre est consacré à l'agriculture alors qu'un grand texte d'orientation nous est annoncé pour le printemps prochain : vous avez mis la charrue avant les bœufs ! Comment parler du développement des territoires ruraux en le déconnectant de l'activité agricole et de la réforme de la PAC ? Que seraient la vie rurale, l'économie rurale, l'agrotourisme, l'entretien de l'espace en plaine ou en montagne, sans l'activité agricole ?

C'est par les modalités de la mutation annoncée qu'il fallait commencer, et je suis certain que nous devrons revoir les modalités du développement rural à l'issue du prochain débat annoncé.

Ce n'est pas l'amendement de dernière minute sur la gestion de crise dans le secteur des fruits et légumes, par lequel vous tentez de réinventer les mécanismes mis en place par la loi sur les nouvelles régulations économiques, qui va donner un signal suffisant.

M. Jean Dionis du Séjour - Cela n'a rien à voir !

M. François Brottes - A l'inverse, le volume qu'a pris le volet « chasse » de ce texte révèle un malaise. Le rapporteur a tiré à vue sans sommations ! Le chasseur est mis en scène comme un agent d'intérêt général, mais au mépris d'une vision équilibrée des usages de la nature et de la bonne gestion des espèces.

Pour le reste, une fois de plus, vous confondez « charité » et « solidarité ». Les territoires ruraux n'ont que faire de la condescendance (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Conforter les zones de revitalisation rurale est une chose, mais cela masque la volonté de banaliser l'abandon.

L'abandon, nous le mesurons à la politique de démantèlement des services publics, aux fausses solutions relatives à l'accès aux soins. Désormais, les services postaux pourront être développés par les cafetiers ou les épiciers !

M. Yves Coussain, rapporteur - Caricature !

M. François Brottes - Désormais les populations rurales devront payer plus d'impôts locaux pour accéder à ce qui est gratuit en ville, qu'il s'agisse du retour des médecins, du maintien des vétérinaires ou de l'installation du haut débit. Une fois de plus, la solidarité de l'Etat est absente de ce texte.

M. Yves Coussain, rapporteur - Démagogie !

M. François Brottes - Votre refus systématique de toute péréquation prend des proportions grossières : aux territoires les plus pauvres les charges, aux plus riches les services !

Je reconnais que la deuxième lecture a donné au Sénat l'occasion de limiter la casse, mais la question du logement rural n'est toujours pas traitée, et il n'y a rien de nouveau à propos de la montagne où l'impact des accidents du relief, de la rigueur des variations climatiques sur les modes d'exploitations agricoles, le coût des constructions et des déplacements ne sont toujours pas pris en compte. Beaucoup trop de problèles sont laissés en suspens, notamment en ce qui concerne les services à la population.

Que retiendront les Français de ce texte ? Quelques mesures techniques que l'on pourrait saluer s'il ne fallait pas attendre indéfiniment les décrets d'applications, les moyens, ou les précisions, souvent repoussés à une prochaine concertation.

M. le Président de la commission des affaires économiques - Ne soyez pas pessimiste !

M. François Brottes - Le développement rural mérite autre chose qu'un « arbre à palabres » et malgré ma tendresse pour la filière bois, je dirai que la sève de l'incantation ne saurait constituer l'énergie d'une politique d'avenir.

Parce que les conséquences de la réforme de la PAC n'ont pas été traitées, parce que la péréquation et la solidarité ne sont pas au rendez-vous, parce que vous créez de faux espoirs, le groupe socialiste votera contre ce texte de condescendance à l'égard des territoires ruraux. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. le Président de la commission des affaires économiques - Quel dommage !

M. Jean Dionis du Séjour - Nous voilà au terme d'une très longue séquence parlementaire, ouverte le 9 décembre 2003 en commission des affaires économiques. Permettez-moi de rendre hommage à Hervé Gaymard et à ses successeurs pour leur qualité d'écoute et leur action en faveur des agriculteurs. Je salue également le travail du président de la commission des affaires économiques et de nos trois rapporteurs.

Quel bilan pouvons-nous tirer de ce parcours législatif de quinze mois ?

Commençons par les critiques, l'UDF est aussi là pour cela !

M. Jean-Paul Bacquet - Mais elle vote toujours !

M. Jean Dionis du Séjour - Il faut le reconnaître, ce texte, dans sa globalité, manque de cohérence, et je regrette l'absence de lisibilité de cette loi qui aurait dû prendre en compte la diversité du monde rural. Je l'ai souvent répété, les réponses ne peuvent pas être les mêmes chez Jean Lassalle, dans le rural en déclin, et chez moi, dans le péri-urbain rural.

M. le Président de la commission des affaires économiques - Cela s'appelle l'aménagement du territoire et c'est ce que nous faisons !

M. Jean Dionis du Séjour - L'UDF demandait que les dispositifs fiscaux soient massivement ciblés sur le rural profond très en difficulté pour éviter le saupoudrage des moyens, mais il y a encore du chemin à parcourir dans ce domaine.

Ce texte marque tout de même des avancées, qu'il s'agisse de l'assouplissement de la loi Evin, qui permettra d'améliorer la promotion des produits viticoles, ou du volet chasse où le travail parlementaire, auquel a activement participé Charles de Courson, a permis de déboucher sur un dispositif d'indemnisation durable des dégâts forestiers. Je me réjouis encore que l'on ait pu résoudre la question de l'usage d'un véhicule dans l'action de chasse.

Je salue par ailleurs le travail des députés de la montagne.

Quant au secteur des fruits et légumes, un coefficient multiplicateur entre le prix d'achat et le prix de vente a enfin été mis en place. J'avais alerté notre assemblée, dès la deuxième lecture, sur la gravité des crises traversées par cette filière, et déposé un amendement qui n'avait pas été retenu. Mon collègue, Daniel Soulage, a heureusement pu le faire adopter au Sénat, et c'est un signal fort que nous donnons à tous les producteurs qui pourront aborder cette nouvelle campagne de production plus sereinement. Je veux ici témoigner de leur profonde satisfaction. Je pense à eux, aujourd'hui, mais aussi à Jean-Michel Ferrand, député UMP et précurseur en la matière, et je remercie tous ceux qui nous ont aidés, en particulier Hervé Gaymard et Patrick Ollier.

A vous maintenant, Monsieur le secrétaire d'Etat, de faire vivre ce dispositif et de le défendre à Bruxelles. La sortie du décret doit être pour vous une urgence....

Il restera, s'agissant des filières agricoles, à traiter du coût du travail et des distorsions de concurrence avec les nouveaux pays membres de l'Union. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez annoncé une mission interministérielle qui devait arrêter la position du Gouvernement sur ce sujet : où en sommes-nous ?

L'UDF s'était abstenue en première et deuxième lectures. En première lecture, Jean Lassalle avait critiqué la succession de mesures à la charge des collectivités territoriales en ZRR...

M. François Brottes - Il avait raison !

M. Jean Dionis du Séjour - En deuxième lecture, j'avais quant à moi regretté le rejet par le Gouvernement de nos propositions pour résorber les crises dans le secteur des fruits et légumes.

Grâce au nouvel équilibre auquel la CMP a abouti, l'UDF a pu obtenir satisfaction, et c'est avec bonheur que nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Paul Bacquet - Comme d'habitude !

M. André Chassaigne - Nous clôturons une longue année de débats riches et exaltants sur l'avenir de nos territoires ruraux, mais nos espoirs furent déçus et il se dégage ce matin, de cette assemblée, une ambiance de lendemain de fête ratée, je n'oserais parler de gueule de bois.

Au final, cette boîte à outils ressemble à ces caisses que l'on trouve dans les brocantes, pleines d'objets rouillés avant même d'avoir servis... à moins qu'il ne s'agisse du bocal des illusions perdues !

Pourquoi ce gâchis ?

Le démantèlement des services publics a évidemment éclairé d'un jour nouveau les motivations réelles du Gouvernement à l'égard de nos territoires ruraux, et les promoteurs de cette loi ne se sont pas donné les moyens de la réussite. Alors que la politique d'aménagement du territoire n'a jamais autant manqué d'ambition, le Gouvernement apparaît prisonnier du carcan budgétaire du traité de Maastricht, et refuse d'accorder le moindre euro supplémentaire à nos territoires.

Et que dire de la décision de placer la PAC sous les fourches de l'OMC et du capitalisme mondialisé !

Surtout, ce texte procède de la même logique que votre décentralisation. La responsabilité du développement économique en milieu rural est laissée à d'hypothétiques investisseurs privés, et surtout aux collectivités territoriales, en particulier les communes ! L'Etat abandonne nos territoires, comme en témoigne le sort des maisons de service public.

Au fil des discussions se sont en outre agrégées à ce projet diverses dispositions inacceptables. Je pense notamment à la remise en question, insidieuse, de la loi littoral, au profit des promoteurs immobiliers sans vergogne. J'ai en mémoire les cris d'orfraie poussés sur tous les bancs de l'Assemblée lorsque je m'étais élevé contre ce projet. Les nombreuses critiques qui se sont élevées par la suite ont pourtant montré combien j'avais raison.

M. Jérôme Bignon - Il a raison.

M. André Chassaigne - De même, l'enseignement agricole privé n'a plus désormais qu'une place symbolique, alors même que l'enseignement agricole public voit ses moyens budgétaires lourdement amputés.

M. le Président de la commission des affaires économiques - C'est absolument faux.

M. André Chassaigne - Notre déception est d'autant plus grande que les quelques avancées politiques que nous aurions pu espérer sont, au final, bien minces. J'ai bataillé, et je n'étais pas le seul, sur la question fondamentale des prix agricoles, c'est-à-dire de la rémunération du travail des agriculteurs, rognée sous l'effet de crises de prix de plus en plus fréquentes. Le Gouvernement n'a cessé, à l'Assemblée, de louvoyer sur le sujet... pour, finalement, déposer quelques amendements mineurs en seconde lecture, au Sénat, sans que nous puissions donc en débattre. L'un de ces amendements, qui réintroduit les coefficients multiplicateurs, est néanmoins intéressant, et il faut se féliciter qu'il ait résisté aux discussions, feutrées, de la CMP, dont mon groupe est exclu.

M. le Président de la commission des affaires économiques - Il faut vous entendre avec les autres groupes de l'opposition !

M. André Chassaigne - Devant l'impossibilité de faire avancer des dossiers pourtant essentiels pour nos territoires ruraux, j'ai essayé de profiter de ce débat pour atténuer des problèmes qui empoisonnent la vie quotidienne de leurs habitants. L'Assemblée nationale s'était montrée compréhensive sur un amendement de bon sens, destiné à pacifier les relations entre certains propriétaires forestiers et les cueilleurs de champignons. Mais, hélas, quitte à laisser s'envenimer la situation, le Sénat a préféré ne pas modifier la réglementation, au mépris des souhaits de nombreux élus des petites communes rurales. De même, j'avais obtenu une amélioration des dispositions concernant le grand gibier victime d'une collision avec un véhicule, facilitant notamment leur application sur les routes de montage enneigées. Mais là encore, le Sénat a écarté cette proposition.

Quel déni de démocratie ! En CMP, les députés de la majorité ont capitulé en rase campagne devant l'aveuglement de sénateurs si éloignés des réalités du terrain qu'ils représentent davantage eux-mêmes que les collectivités territoriales...

M. le Président de la commission des affaires économiques - Même les sénateurs communistes ?

M. André Chassaigne - Pour toutes ces raisons, le groupe communiste et républicain votera contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste)

M. Serge Poignant - Le texte que nous examinons aujourd'hui comporte 250 articles contre 76 à l'origine, preuve qu'il s'est beaucoup enrichi au fil du débat parlementaire, même si son architecture demeure inchangée.

Le groupe UMP partage l'objectif du Gouvernement (« C'est heureux ! » sur les bancs du groupe UMP) de rendre les territoires ruraux à la fois plus dynamiques sur le plan économique et plus attrayants pour ceux qui y vivent. Pour y parvenir, ce texte s'articule autour de trois axes majeurs : conforter le développement économique et l'attractivité des territoires ruraux, garantir une meilleure offre de services à la population, protéger les espaces spécifiques ou sensibles.

Pour soutenir le développement économique, le dispositif des ZRR a été actualisé. Toute une panoplie de mesures incitatives est prévue : exonération de taxe professionnelle ou d'impôt sur les sociétés pour les entreprises qui s'y créent, exonération de taxe foncière sur le bâti pendant cinq ans, création de sociétés d'investissement pour le développement rural, dispositions fiscales et financières spécifiques visant à encourager les activités agricoles et touristiques ainsi que la pluriactivité, mesures en faveur des travailleurs saisonniers et des groupements d'employeurs.

Pour favoriser le maintien des services publics de proximité, les règles de cumul d'un emploi public et d'un emploi privé ont été assouplies dans les petites communes, le régime juridique des maisons de services publics adapté pour leur permettre d'accueillir aussi des services privés. Enfin, assurance a été donnée que la population et les élus locaux seront désormais mieux informés des projets de réorganisation des services publics.

Pour améliorer l'offre de soins, diverses exonérations et aides des collectivités ont été prévues pour inciter les professionnels de santé à s'installer en milieu rural.

Pour renforcer la protection des espaces sensibles, le projet de loi comporte un chapitre consacré aux sites Natura 2000, qui précise notamment la définition des zones spéciales de protection et de conservation, et renforce le rôle des élus dans leur gestion. Des exonérations spécifiques de taxe sur le foncier non bâti figurent également dans ce chapitre.

Une attention particulière a été portée à la montagne, comme en témoignent de nombreuses mesures : création des ententes de massifs, assouplissement des procédures des UTN, développement des activités agricoles, pastorales et forestières, révision des règles de constructibilité sur les rives des lacs de montagne...

Le volet du texte relatif à la chasse a été enrichi au cours du débat parlementaire, et l'équilibre agro-sylvo-cynégétique se trouve mieux défini.

En définitive, ce projet de loi complète l'action globale conduite par le Gouvernement en faveur du monde rural, dont je veux pour preuve les mesures décidées au CIADT de septembre 2003, les dispositions incluses dans d'autres textes relatives à la couverture du territoire en téléphonie mobile et haut débit, les projets d'infrastructures et la future loi de modernisation agricole.

M. André Chassaigne - Bref, c'est le paradis champêtre !

M. Serge Poignant - La CMP est parvenue facilement à un accord sur les différents points du texte restant en discussion. Je tiens d'ailleurs à souligner ici l'excellent travail des rapporteurs et des présidents de commission des deux assemblées.

Quelques exemples de cet excellent travail. Le texte actualise les critères de délimitation du périmètre des ZRR autour d'un EPCI à fiscalité propre. La CMP a confirmé l'extension, dans ces zones, du régime d'exonération de la taxe professionnelle aux reprises d'activités commerciales, artisanales et libérales. Elle a également confirmé la compensation, par l'Etat et au profit des collectivités, des exonérations de taxe professionnelle.

Elle a renforcé et prorogé jusqu'en 2010 les réductions d'impôts accordées au titre des investissements immobiliers locatifs réalisés dans des résidences de tourisme classées en ZRR ainsi que dans d'autres catégories de zones rurales.

Elle a confirmé le texte adopté en deuxième lecture par le Sénat, sur amendement du Gouvernement, pour ce qui est de l'encadrement de la publicité sur le vin. La Haute assemblée a aménagé le dispositif prévu à l'article 4 A : cette publicité pourra comporter « des références aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d'origine », ainsi que « des références objectives à la couleur et aux caractéristiques olfactives du produit ». Je ne peux que m'en féliciter, vous connaissez tous mon engagement sur ce sujet.

L'article 4 bis A dispose qu'un coefficient multiplicateur entre le prix d'achat et le prix de vente des fruits et légumes peut être instauré en période de crise conjoncturelle, le taux de ce coefficient étant fixé conjointement par les ministres de l'économie et de l'agriculture et sa durée d'application ne pouvant excéder trois mois. La CMP a confirmé le dispositif de soutien à la filière fruits et légumes, qui traverse des crises récurrentes depuis cinq ans. Ainsi l'article 8 ter autorise, tout en les encadrant sur une période déterminée, les annonces de prix aux consommateurs pour les fruits et légumes frais, celles-ci devant porter sur des produits ayant fait l'objet d'un accord entre le fournisseur et son client quant au prix de cession. Je salue, comme d'autres avant moi, l'action de M. Ferrand sur ce point.

En matière d'offre de soins, le texte autorise les collectivités à accorder des aides pour favoriser l'installation ou le maintien de professionnels de santé, dans les zones déficitaires. La CMP a confirmé le dispositif introduit à l'Assemblée visant à exonérer d'impôt sur le revenu les gardes effectuées par les médecins dans les petites communes.

Je ne reviens pas sur le volet chasse, à l'amélioration duquel notre collègue Jean-Claude Lemoine a beaucoup travaillé.

En conclusion, n'en déplaise à nos collègues Brottes et Chassaigne, ce texte rompt avec la politique menée par le précédent gouvernement, qui avait aggravé la fracture territoriale. Non, ce texte n'est ni un livre de la jungle, ni une boîte à outils rouillés. C'est la traduction d'un véritable engagement en faveur du monde rural, conformément au souhait du Président de la République et dans le droit fil du CIADT de septembre 2003. Ce texte pragmatique répond à la diversité des attentes du monde rural. Pour toutes ces importantes raisons, le groupe UMP le votera, en se félicitant de cet excellent aboutissement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Thierry Mariani - Ce projet de loi particulièrement complet, qui aborde la ruralité sous toutes ses facettes, a été enrichi tout au long du débat parlementaire de dispositions innovantes et courageuses. Ces avancées législatives sont le fruit, d'une part, de la très forte mobilisation des parlementaires de la majorité, d'autre part de l'ouverture et de la capacité d'écoute du Gouvernement. A elle seule, cette méthode de travail serait pour nous source de satisfaction.

Mais nous nous félicitons également bien sûr que le texte réponde aux attentes légitimes, exprimées de longue date par nos agriculteurs et qu'il était devenu urgent de satisfaire. Je pense en particulier à l'article 4 A qui assouplit la loi Evin et à l'article 4 bis A qui encadre les marges de la grande distribution en période de crise conjoncturelle de la filière fruits et légumes. Les aménagements obtenus par voie d'amendement, expression d'une volonté politique forte, montrent comment il est possible d'avancer quand tous, gouvernants, députés, sénateurs, experts et professionnels, se mobilisent pour agir dans le même sens. Sur ces deux sujets, nombre de parlementaires mènent depuis plusieurs années des campagnes de sensibilisation sur les dispositions législatives à prendre. Questions, amendements, propositions de loi, rapports, demandes d'audience : nous avons utilisé tous les moyens à notre disposition pour sensibiliser, expliquer, convaincre et rallier. Le résultat de ce combat incessant, ce sont les articles 4 A et 4 bis A. Il ne relèvent ni de la démagogie, ni de l'électoralisme, mais répondent à des attentes dont la légitimité est incontestable.

L'article 4 A constitue une grande victoire pour la viticulture et pour tous les parlementaires qui, depuis des années, s'élèvent contre certaines aberrations de la loi Evin. L'amendement de conciliation du Gouvernement va certes moins loin que celui du Sénat ou que celui qui a été présenté ici en deuxième lecture, à l'initiative du groupe d'études sur la viticulture, mais il arrive à point nommé. Retenu par la CMP, cet amendement né de l'audace sénatoriale, de l'enthousiasme des députés et de la sagesse du Gouvernement est un encouragement pour la viticulture, au moment où celle-ci traverse une crise sans précédent. Il témoigne de la volonté du Gouvernement d'accompagner les viticulteurs dans leur entreprise de reconquête. Ils ne sont ni des attentistes, ni des assistés. Ils savent que leur avenir est entre leurs mains. Mais ils ont besoin d'être soutenus et non entravés. Elu d'une circonscription viticole, je mesure chaque jour les conséquences de cette crise. Quand la viticulture va mal, c'est l'ensemble de nos campagnes qui souffrent. Ce sont des équilibres régionaux et de nombreux emplois qui sont menacés. Cet article annonce un engagement des pouvoirs publics en faveur de la filière viticole.

Quant à l'article 4 bis A, il résulte d'un long travail de sensibilisation sur les difficultés rencontrées par les producteurs de fruits et légumes. Ce secteur a en effet connu une crise majeure en 2004 et les parlementaires se sont mobilisés, tout particulièrement ceux des Bouches-du-Rhône, du Vaucluse et du Sud-Ouest. Nous vous avons amicalement harcelé tout au long de l'été. Cet article est une première mesure en faveur du secteur. Il devra être complété, de façon que les producteurs puissent vendre leurs récoltes sans être soumis au diktat des distributeurs. Je me félicite que notre ardeur n'ait pas été vaine. Trop souvent nos concitoyens jugent nos débats à mille lieues de leurs préoccupations. Ce texte répond à des attentes légitimes.

Permettez-moi toutefois un bémol. Dans ma région, c'est aujourd'hui la fermeture de la chasse à certains oiseaux migrateurs. L'incompréhension persiste entre les chasseurs et le Gouvernement. Nous avons demandé aux sociétés de chasse de réaliser des études. Elles les ont faites, elles les ont payées, sans résultat. « Nous avons l'impression d'être un peu cocus », nous disent leurs responsables. (Sourires)

Malgré ce bémol, je voterai ce projet. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jérôme Bignon - Elu d'un territoire rural, je suis satisfait de ce texte. Mais élu de la baie de Somme, administrateur du Conservatoire du littoral et président de Rivages de France, je suis indigné de l'atteinte portée à la loi littoral par l'alinéa 10 bis de l'article 75 sexies.

Les amendements du Sénat visant à modifier cette loi, à part celui qui crée le Conseil national du littoral auquel je suis naturellement favorable, ont été abandonnés à l'issue du combat courageux mené par le Gouvernement. La législation ne sera revue qu'après la consultation de ce Conseil national. Je regrette que l'amendement de M. Gélard ait été maintenu. Nous sommes en train de porter atteinte à une loi fondatrice. Il y a des lois auxquelles on ne touche pas. En septembre 2004, pendant la préparation du CIADT, un consensus avait été trouvé pour rechercher des solutions réglementaires. Nous avions commencé à le faire pour les estuaires.

Dès 1976, Jacques Chirac avait déclaré : « Les zones littorales non urbanisées doivent rester en l'état ». C'était il y a presque trente ans. Alors que nous venons d'accueillir à Paris une Conférence internationale sur la biodiversité qui a fait grand bruit, que nous légiférons pour protéger les zones humides, que le Gouvernement s'apprête à lancer un appel à projets pour la gestion intégrée des zones côtières, on n'hésite pas à porter atteinte à la loi littoral, au motif qu'elle ne serait pas claire. Les juristes sont des gens spécieux. J'en suis un : je sais de quoi je parle. Pour une décision du tribunal administratif de Rennes, faut-il ouvrir la boîte de Pandore ? On va construire dans les petits estuaires. On a déjà oublié le tsunami, alors que les attaques faites par l'homme aux zones côtières ont amplifié les effets de la catastrophe. Il y a deux millions de kilomètres de littoral dans le monde ; chaque jour, dix kilomètres sont dénaturés. Ce texte va aggraver la situation, alors que 70 % de la population mondiale vit déjà sur la grande bande côtière.

Je ne peux déposer d'amendement sur un article voté conforme. Un signal malheureux a été adressé à tous ceux qui croient possible de concilier préservation de l'environnement et développement économique. Alain écrivait : « Il n'y a de bonheur possible pour personne sans le soutien du courage. » Le courage manquerait-il au Gouvernement ? Monsieur le secrétaire d'Etat, après le combat solide de M. Lepeltier, puis-je espérer que votre réponse apaisera mes craintes ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP)

La discussion générale est close.

M. le Secrétaire d'Etat - Je remercie Serge Poignant et Thierry Mariani d'avoir souligné les avancées contenues dans ce texte pragmatique et ambitieux. A mon tour je veux saluer le travail accompli par Jean-Michel Ferrand sur la question des fruits et légumes. Vous l'avez rappelé, ce texte marque une rupture avec la précédente législature. Le Gouvernement, qui en est conscient, est fier d'avoir redressé la barre. Je remercie l'ensemble du groupe UMP pour son soutien.

Monsieur Dionis du Séjour, je suis heureux que le groupe UDF approuve ce texte.

M. Jean-Paul Bacquet - C'est tellement inattendu !

M. le Secrétaire d'Etat - Vous regrettez que ce projet ne s'inspire pas des orientations de la DATAR. Or, il reprend bien leur logique en apportant des solutions adaptées aux différents problèmes que rencontrent nos différentes campagnes. Le dispositif des zones de revitalisation rurale est réservé aux campagnes fragiles. La problématique n'est pas la même en zone périurbaine.

Le Gouvernement a accepté l'apport du Parlement et il a immédiatement mis en œuvre les conclusions du rapport Canivet.

S'agissant de la mission interministérielle sur les distorsions de concurrence, le Gouvernement a confié une mission parlementaire à Jacques Le Guen, qui a commencé ses auditions. Il formulera ses propositions dans les prochains mois.

Monsieur Chassaigne, vous dites avoir « la gueule de bois » comme un lendemain de fête. Ne serait-ce pas plutôt la tête de bois, voire la langue de bois ? Quant à M. Brottes, il a tenu un discours excessif, alors que le Gouvernement a fait la preuve de son sens de l'écoute, ce que d'ailleurs vous avez bien voulu reconnaître.

Nous avons parfois l'occasion d'avancer ensemble. Je regrette qu'il n'y ait pas consensus sur ce texte, qui nous rassemble beaucoup plus que vous voulez le dire.

Monsieur Brottes, parler de « condescendance » du Gouvernement à l'égard des territoires ruraux est totalement contradictoire avec les actions pragmatiques menées sur le terrain et au Parlement depuis des années en faveur des territoires ruraux. Alors que le Gouvernement met en place une boîte à outil, qu'il accepte qu'elle soit doublée par le Parlement, vos mots ont sans doute dépassé votre pensée.

Quant à l'expression « d'arbre à palabres », Monsieur Chassaigne, la logique de discours que vous dénoncez n'a-t-elle pas été celle de la majorité de gauche ? M. Poignant a rappelé tout à l'heure la multiplicité des discours tenus ces dernières années. Or, vous avez été quinze ans au pouvoir depuis 1981 (Rires sur les bancs du groupe UDF).

Monsieur Ollier, nous continuerons à travailler avec le Parlement à la rédaction des décrets. Nous sommes tout à fait conscients, avec l'ensemble des ministres concernés, que cette loi devra comporter un service « après-vote » : la rédaction des décrets, la mise en œuvre sur le terrain et enfin une éventuelle modification du texte au vu des évolutions. Ce texte ne clôt pas définitivement la question de l'avenir du monde rural. Il doit être envisagé comme un chantier permanent.

Monsieur Bignon, rassurez-vous, le Gouvernement ne manque pas de courage ! La disposition que vous dénoncez à l'article 75 sexies a été adoptée contre son avis au terme d'un long débat au Sénat.

M. Jérôme Bignon - Pas à l'Assemblée nationale !

M. le Secrétaire d'Etat  - En tant que président de Rivages de France, je vous sais directement concerné par cette mesure que la commission mixte paritaire n'a pas remise en cause. Bien que nous soyons conscients des difficultés que pose la rédaction actuelle de cet article relatif à l'aménagement du littoral, le Gouvernement ne souhaite pas, à ce stade, aller contre l'avis du Parlement. Le dispositif prévoit un décret en conseil d'Etat, je vous propose de vous associer à sa préparation. Faire avancer le monde rural, c'est une affaire de pragmatisme, de bon sens et de partenariat. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. le Président - Avant de mettre aux voix le texte de la commission mixte paritaire, conformément au troisième alinéa de l'article 113 du Règlement, je vais appeler l'Assemblée à statuer sur les amendements dont je suis saisi.

M. le Secrétaire d'Etat - Par l'amendement 1, nous souhaitons supprimer les paragraphes II et III de l'article premier septies afin de lever le gage.

L'amendement 1, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 2 vise à supprimer l'article 3 quater, relatif à la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, la TACA. En effet, sa rédaction est totalement identique aux dispositions figurant dans la loi du 9 août 2004 pour le soutien à la consommation et à l'investissement et la loi de finances rectificative pour 2004. Il avait été introduit, en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, pour parer au cas où la loi de finances rectificative pour 2004 n'aurait pas été encore votée.

M. Serge Poignant - Je me range à l'avis du ministre mais souhaite que l'application de cet article se fasse rapidement. Le nouveau mode de calcul de la TACA pose en effet problème aux petits commerces non alimentaires.

L'amendement 2, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 3 vise à supprimer l'article 34 bis relatif à l'application du taux réduit à tous les travaux de transformation de bâtiments agricoles situés dans des zones de revitalisation rurale en logements locatifs.

Cette disposition constitue une infraction patente au droit communautaire : seuls les travaux de construction sur les logements fournis dans le cadre de la politique sociale peuvent bénéficier d'un taux réduit de TVA et la directive du 22 octobre 1999 sur les services à forte intensité de main-d'œuvre exclut formellement les travaux de construction du dispositif de TVA à taux réduit. Aller à l'encontre du droit communautaire, ce serait s'exposer à un contentieux immédiat et risquer d'affaiblir la position française auprès de la Commission pour négocier l'extension du taux réduit de TVA à d'autres activités à forte intensité de main-d'œuvre telle la restauration.

Enfin, soumettre à un régime particulier des travaux portant sur une catégorie de bâtiments situés dans des zones déterminées, ce serait régionaliser la TVA et remettre en cause le principe de l'unicité de l'impôt.

M. Yves Coussain, rapporteur - Cette disposition, introduite au Sénat en deuxième lecture, m'avait causé une agréable surprise. Elle avait l'avantage d'encourager la transformation de bâtiments agricoles en logements. Pour autant, le risque de contrevenir au droit communautaire est réel : je me range à l'avis du Gouvernement.

M. François Brottes - La suppression de cette disposition me cause un immense regret. Une fois de plus, on nous chante l'air du « c'est la faute à l'Europe ». Mais l'Union européenne autorise que l'on déroge au droit commun pour soutenir des territoires dont la fragilité justifie des mesures de discrimination positive.

Malgré l'accord de l'ensemble des parlementaires, nous sommes contraints, en dernière délibération, de repousser cette disposition. Celle-ci, extrêmement utile et attendue, constituait pourtant un véritable levier pour le logement en zone rurale.

Nous voterons pour notre part contre la suppression de cet article.

M. Jean Dionis du Séjour - Depuis le début de cette mandature, favoriser la transformation de l'important patrimoine immobilier autrefois dédié aux activités agricoles en logements d'habitation a été notre ligne directrice. Il s'agit, en effet, d'un enjeu considérable pour la vitalité démographique de nos territoires ruraux. Cette disposition s'inscrivait donc dans une continuité législative.

Toutefois, si le premier argument du ministre, selon lequel il s'agit de construction et non de réparation, ne me convainc pas, le second est plus pertinent : la territorialisation de la TVA est en effet difficile à plaider à Bruxelles. L'UDF défend la construction d'un véritable marché unique et d'une politique fiscale cohérente : je soutiendrai donc le Gouvernement sur cet amendement.

M. Serge Poignant - Je persiste à penser que ce taux réduit de TVA, qui avait fait l'objet d'un accord en CMP, était une bonne mesure. Nous ne pouvons cependant qu'être sensibles au risque de faire échouer la négociation globale sur le périmètre d'application du taux réduit. A l'instar de notre rapporteur Yves Coussain, j'appelle donc mes collègues de l'UMP à voter l'amendement du Gouvernement.

M. André Chassaigne - Encore une fois, on nous sort du chapeau les contraintes de la construction européenne. Qu'il s'agisse du devenir des postes, du maintien des services publics ou des aides aux territoires ruraux, c'est toujours le même discours ! Et il s'accompagne aujourd'hui d'un argument outrancier : l'adoption de cette mesure pourrait compromettre la négociation en cours sur l'application du taux réduit !

Ces arguments cachent sans doute autre chose, car ce serait au contraire faire preuve de volontarisme politique que d'adopter des mesures véritablement incitatives pour répondre au problème du logement social en zone rurale.

J'observe enfin que les agrandissement de logements sur des bâtiments agricoles sont de plus en plus soumis à une simple autorisation de travaux, et non à un permis de construire. La discussion est donc possible, y compris sur les notions de construction et de rénovation.

M. le Secrétaire d'Etat - L'argument européen ne sort pas du chapeau : c'est la réalité des textes ! Je puis vous rassurer, Monsieur Chassaigne, le Gouvernement n'a pas d'intention cachée ; il ne souhaite nullement détruire le monde rural !

Il y aurait en revanche tout intérêt à travailler sur l'évolution du concept de construction-rénovation pour ce qui concerne les anciens bâtiments. Voilà un vrai sujet pour la prochaine conférence de la ruralité, qui nous permettra peut-être de trouver des solutions qui ne remettent pas en cause le principe d'unicité fiscale sur le territoire.

L'amendement 3, mis aux voix, est adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 4 vise à lever le gage à l'article 35.

L'amendement 4, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

L'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire modifié par les amendements qui viennent d'être adoptés, mis aux voix, est adopté.

La séance, suspendue à 11 heures 35, est reprise à 11 heures 45.

ACCORDS INTERNATIONAUX

L'ordre du jour appelle le vote, selon la procédure d'examen simplifiée, sur sept projets de loi, dont six adoptés par le Sénat, autorisant l'approbation d'accords internationaux.

M. le Président - Conformément à l'article 107 du Règlement, je vais mettre aux voix l'article unique de chacun de ces textes.

L'article unique de l'accord France-Tadjikistan relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure, est adopté.

L'article unique de l'accord France-Slovaquie relatif à la coopération en matière d'affaires intérieures, est adopté .

L'article unique de l'accord France-Bulgarie relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure est adopté.

L'article unique du protocole à la convention concernant l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes est adopté.

L'article unique de la convention internationale pour la protection des végétaux est adopté.

L'article unique du traité international sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture est adopté.

L'article unique de l'accord international de 2001 sur le café est adopté.

CONTRAT DE VOLONTARIAT DE SOLIDARITÉ INTERNATIONALE
(deuxième lecture)

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif au contrat de volontariat de solidarité internationale.

M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie - La deuxième lecture à l'Assemblée nationale du projet de loi relatif au contrat de volontariat de solidarité internationale s'inscrit dans le contexte particulier du tsunami en Asie du Sud-Est et de l'élan de solidarité dont nos compatriotes ont su faire preuve. Bien des volontaires se sont engagés auprès des ONG pour des actions humanitaires d'urgence. D'autres partiront à plus long terme, pour des missions de reconstruction, d'assistance ou d'éducation. Il y a donc une véritable nécessité à adopter ce projet de loi au plus vite.

Le rapporteur connaît si bien le texte que je ne ferai pas de long exposé. Toutes les ONG l'ont réclamé, et souhaitent qu'il soit rapidement adopté pour pouvoir préparer leurs changements de statut. Le Gouvernement a voulu améliorer la protection et le statut des volontaires, qui ressortaient d'un décret vieux de dix ans. Je souhaite donc que le texte soit adopté en l'état et je ne pourrai être favorable à aucun amendement, qui retarderait la mise en œuvre de la loi. Car ce texte est le fruit d'une navette fructueuse entre les deux assemblées, et je remercie tous ceux qui y ont contribué. Au nombre de ces enrichissements, on compte l'extension du critère de nationalité des volontaires, leur affiliation à un régime de sécurité sociale, la fourniture d'un certificat de volontariat et la validation de leurs acquis professionnels, la création de la commission nationale de volontariat et un délai d'entrée en vigueur de ces dispositions qui permettra à chacun de se préparer sans précipitation.

La discussion s'engage donc sous de bons auspices. Je veux saluer le travail accompli par le rapporteur, M. Godfrain, la commission des affaires étrangères et les orateurs des différents groupes qui, quel que soit leur vote, ont exprimé leur accord sur les objectifs que nous poursuivions. Si vous adoptez ce texte en l'état, il entrera en vigueur trois mois après sa promulgation. Ce délai sera mis à profit pour publier les décrets d'application et mettre en place la commission nationale de volontariat. Le travail a déjà commencé et mon administration s'engage à respecter les délais qui lui sont impartis. Un courrier sera adressé à toutes les associations concernées. Au terme de ces trois mois, la commission sera réunie pour renouveler les 22 agréments actuels, ce qui ne devrait poser aucun problème.

Je rappelle que le financement des associations de solidarité par le ministère des affaires étrangères ne peut être réglé qu'en loi de finances. Nous avons tenu nos engagements en la matière, et la loi de finances pour 2005 a porté les crédits alloués aux ONG et à la coopération décentralisée de 33,5 à 37 millions.

M. Jacques Godfrain, rapporteur de la commission des affaires étrangères - Je dois d'abord dire, Monsieur le ministre, quel plaisir ce fut d'avoir affaire à vous et à vos services pour mettre au point ce texte, qui devrait susciter l'unanimité. Ce projet de loi a été adopté par le Sénat le 12 octobre dernier. Sous réserve d'une amélioration rédactionnelle, le Sénat a rejoint l'Assemblée nationale pour supprimer les conditions de nationalité initialement requises pour conclure un contrat de volontariat. Il a adopté sans modification l'article définissant les conditions de démission des volontaires ainsi que leur régime d'indemnisation chômage et de validation des acquis professionnels.

Il a en revanche porté la limitation de la durée cumulée des missions de volontariat à six ans et écarté la requalification des contrats de volontariat en contrats à durée indéterminée, ainsi que la compétence de la juridiction prud'homale. Il s'agit de la divergence la plus importante entre les deux assemblées. La rédaction retenue par le Sénat autorise un volontaire à enchaîner les missions de volontariat pour une durée totale de six ans, la durée du contrat de volontariat étant de deux ans. L'Assemblée nationale avait préféré une durée cumulée de trois ans, jugeant le droit du travail plus approprié pour les missions de longue durée. Afin de ne pas retarder l'adoption définitive du projet, je vous propose de nous rallier au dispositif adopté par le Sénat.

Le Sénat a réintroduit le dispositif d'affiliation des volontaires et de leurs ayants droit à la caisse des Français de l'étranger, qu'il avait adopté en première lecture. Le Gouvernement, qui avait fait adopter en première lecture à l'Assemblée nationale un amendement laissant aux volontaires la liberté de choix de leur organisme de protection sociale, a finalement accepté de se rallier à ce dispositif, que je vous propose d'adopter sans modification. La modification de l'article relatif à l'indemnité du volontaire, pour sa part, est purement formelle. Enfin, le Sénat a, sur proposition du Gouvernement, modifié les dispositions transitoires prévues. Il a maintenu le report de trois mois de l'entrée en vigueur de la loi, conformément au souhait de l'Assemblée nationale en première lecture, mais il a supprimé les dispositions prévoyant que les contrats conclus antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi demeuraient soumis au décret du 30 janvier 1995 et les dispositions prorogeant les agréments délivrés par le ministère des affaires étrangères avant l'entrée en vigueur de la loi.

Nous notons avec satisfaction que le Gouvernement a accepté de ménager un délai de transition entre la publication de la loi et son entrée en vigueur. Dès lors qu'il est en mesure de publier les textes d'application dans ce délai de trois mois et qu'il peut procéder à l'agrément des associations au plus vite, le texte adopté par le Sénat peut être adopté sans modification. L'important est que les associations actuellement agréées et les volontaires ayant un contrat en cours soient pleinement informés des conséquences de l'entrée en vigueur de la loi et des démarches qu'ils doivent entreprendre pour se mettre en conformité avec la situation juridique nouvelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Jean Dionis du Séjour - La commission des affaires étrangères nous propose de voter conformes les articles restant en discussion de ce projet, qui va donc probablement être adopté définitivement aujourd'hui. L'UDF le votera, et j'ajoute que j'y suis personnellement attaché, ayant passé une partie importante de ma vie en Afrique francophone. Ce texte prend une importance toute particulière à quelques semaines du drame qui a eu lieu en Asie. Le travail des ONG et des bénévoles a été unanimement salué - et a valu à Oxfam une nomination pour le prix Nobel de la paix 2005 - et l'on a vu que leur professionnalisme et leur rigueur permettait de faire face aux situations les plus extrêmes. La France s'est mobilisée durant toute cette période, mais doit néanmoins soutenir le développement et la professionnalisation de ses propres ONG. Le volontariat international est en effet un des éléments de son rayonnement à l'étranger et participe à sa politique étrangère.

Ce projet de loi va donner un cadre juridique stable au contrat de volontariat international. Les ONG l'attendaient, et le Gouvernement l'a rédigé en totale concertation avec elles. La deuxième lecture au Sénat a permis de préciser un certain nombre d'éléments, notamment en ce qui concerne le rattachement des volontaires à la caisse des Français de l'étranger, qui leur garantit une protection sociale convenable.

La durée des contrats a suscité de vives discussions. Les sénateurs ont porté la durée globale à six ans au lieu de trois, limite que l'Assemblée nationale avait adoptée à l'unanimité. L'UDF avait soutenu cette position, considérant qu'il fallait responsabiliser les volontaires et éviter qu'ils se lancent à corps perdu dans ce type d'activité aux dépens de leurs intérêts personnels. Les associations d'anciens volontaires constatent en effet qu'un nombre croissant de volontaires - on parle de 30 % - se retrouvent dans une situation de grande précarité, sans ressources et sans couverture sociale. Après des années au service des plus pauvres, le retour est un choc.

Les ONG ont des positions diverses sur cette question essentielle. Pour l'UDF, l'important est de maintenir à deux ans la durée du contrat initial, afin d'obliger le volontaire à reconsidérer son engagement à l'issue de ce délai ; mais il n'y a pas lieu de refuser la souplesse et d'empêcher ceux qui le souhaitent d'en faire un véritable projet de vie en cumulant plusieurs périodes.

Il reste à s'assurer de la volonté du Gouvernement de soutenir financièrement le développement du volontariat international, et en particulier les petites structures, qui n'ont pas encore accès aux fond privés et ne peuvent pas prendre leur élan sans soutien public ; à cet égard, ce texte est de bon augure. La politique française de coopération doit s'appuyer sur toutes les initiatives de la société civile qui témoignent que la France reste porteuse des valeurs d'humanisme et de solidarité. Je veux à ce sujet saluer l'action exemplaire engagée par mon ami Jean Lassalle, qui préside l'association des populations de montagne du monde. Au-delà, en effet, des catastrophes naturelles qui doivent mobiliser en urgence nos moyens, il convient de ne pas oublier les projets qui s'inscrivent dans la durée et qui sont parfois moins médiatiques.

Le groupe UDF apportera son soutien à ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Paul Bacquet - La catastrophe qui a frappé l'Asie du Sud-Est rend la question de l'organisation de la solidarité d'une particulière actualité.

Dans son principe, le contrat de volontariat de solidarité internationale répond aux attentes des associations et des volontaires, mais un contrat suppose un accord entre les parties, sur la base d'un équilibre des devoirs et des droits de chacun. Or, cet équilibre passait par la réalisation de deux conditions : pour les associations, l'assurance d'un engagement financier conséquent de l'Etat qui garantisse le bon déroulement des missions ; pour les volontaires, des garanties sur les conditions de l'accomplissement de celles-ci et sur les conditions de leur retour ; malheureusement, ni l'une ni l'autre ne sont remplies.

Les crédits du ministère pour 2005 permettront au mieux un saupoudrage de subventions au profit de quelques associations, mais les moins grandes, qui sont les plus nombreuses, seront fragilisées.

Concernant le déroulement de la mission du volontaire, la navette parlementaire a permis des avancées, notamment en matière de protection sociale et de préparation aux missions. En revanche, je m'étonne du peu de cas fait du problème majeur qu'est la réinsertion au retour d'une mission. Nous avons même assisté sur ce point à un retour en arrière fort regrettable.

En première lecture, en effet, nous avions mis en évidence les difficultés rencontrées par les volontaires restés trop longtemps loin de France, et nous avions souhaité ramener le temps cumulé des missions de six à trois ans. Convaincu vous-même, Monsieur le rapporteur, vous aviez repris au nom de la commission l'amendement que j'avais présenté avec mon collègue Michel Destot. Que le Gouvernement s'y soit opposé, que certaines grandes ONG aient mené campagne auprès des élus - alors même, d'ailleurs, que les missions qu'elles organisent sont en général de deux ans au plus -, c'est une chose ; mais, Monsieur le rapporteur, j'attendais de vous un peu plus de constance... Ce qui était vrai hier ne le serait-il plus aujourd'hui ? Sans doute contentez-vous le Gouvernement et une partie des associations, mais êtes-vous sûr de rendre service aux volontaires ?

Certes, il est prévu que les associations devront apporter un appui à la réinsertion professionnelle des volontaires, mais quand, comment, avec quels moyens financiers ? En introduisant cette disposition, vous reconnaissez l'existence du problème, mais en vous contentant d'une formulation aussi générale vous n'apportez pas les moyens d'y remédier. De ce fait, les volontaires s'orienteront en priorité vers les plus grandes associations, dont ils pourront davantage espérer une aide en raison de leur assise technique et financière...

Les études démontrent le caractère pénalisant des trop longues missions dans le parcours professionnel. Il ne s'agit pas ici de prendre parti pour telle ou telle association, mais, de voir la réalité en face. Et la réalité, c'est la méfiance des employeurs devant les parcours atypiques, c'est l'impossibilité de mettre en valeur les expériences acquises, c'est l'obligation de demander le RMI parce que l'on n'a plus rien. J'en appelle donc à votre sagesse, Monsieur le rapporteur, lorsque nous en viendrons à ce point dans la discussion des amendements.

Certains font du volontariat un véritable choix de vie, mais beaucoup ne le perçoivent que comme une parenthèse, une pause dans un parcours. Nous devons encourager ces expériences, mais nous devons aussi, par honnêteté vis-à-vis des volontaires, prévenir les difficultés qu'elles peuvent entraîner. J'espère que cette discussion permettra d'apporter à ce texte l'ambition et la vision qui lui manquent.

M. Bruno Bourg-Broc - Les situations de misère intolérable appellent de notre part une mobilisation. Contredisant ce que certains dénoncent comme un ethnocentrisme européen, par définition égoïste, nous ne restons pas aveugles, et chacun agit à son niveau ; c'est pourquoi nous, parlementaires, avons le devoir d'encourager ceux qui souhaitent venir en aide aux plus démunis et participer au développement de leurs pays.

La solidarité internationale fait partie de la tradition française et de la culture de nos concitoyens. L'élan de générosité des Français après le raz-de-marée dévastateur du Sud-Est asiatique en est, si besoin était, une preuve supplémentaire.

Nous devons être à la hauteur de la générosité et de l'altruisme du peuple français, et faciliter l'engagement volontaire international en lui donnant un cadre juridique efficace et solide. Ce texte attendu a le grand mérite de rassembler des dispositifs épars, tout en comblant les lacunes du précédent système. Il n'était plus possible d'en rester au décret de 1995, qui ne concerne qu'une partie des volontaires et qui n'assure pas une définition correcte des droits et devoirs de l'association et du volontaire.

Ce projet de loi, qui a fait l'objet d'une large concertation avec les associations concernées, créé un nouveau contrat qui répond à ces inconvénients, en organisant une collaboration désintéressée entre une association agréée et une personne majeure pour l'accomplissement d'une mission d'intérêt général à l'étranger.

Ce texte comprend de nombreuses avancées.

Tout d'abord, le Sénat est heureusement revenu sur la limitation de la durée du contrat des volontaires à trois ans, qui répondait peu aux besoins des associations. Le Sénat prévoit ainsi d'autoriser un volontaire à enchaîner les missions de volontariat pour six ans. Par ailleurs, il est prévu d'assurer une formation aux volontaires, qui leur servira à l'issue de leur engagement pour trouver un emploi.

Aux termes de l'article 5, les volontaires et leurs ayants droit seront affiliés à la caisse des Français de l'étranger, qui a le mérite de consolider les droits avec le régime général.

Je salue encore le ralliement du Gouvernement au souhait de l'Assemblée nationale d'un délai de transition de trois mois entre la publication de la loi et son entrée en vigueur, afin de prendre toutes les dispositions nécessaires, et notamment d'agréer le plus rapidement possible les associations.

Il est cependant indispensable que les associations agréées à ce jour et les volontaires ayant un contrat en cours soient informés des conséquences de l'entrée en vigueur de cette loi et des démarches qu'ils doivent entreprendre pour s'y conformer.

J'attire par ailleurs votre attention sur le fait que la contribution financière de l'Etat ne sera fixée que dans le futur décret d'application. Les associations craignent que les enveloppes n'augmentent pas aussi vite que le nombre de volontaires. Je rappelle à ce propos que le Président de la République a inscrit son action internationale sous le signe d'une France attachée au dialogue entre les nations, et que le Gouvernement a engagé en faveur de la coopération et du développement une action déterminée qu'il conviendra de poursuivre.

Ce texte met en place un dispositif à la hauteur de la générosité des volontaires, pour leur permettre de participer au rayonnement de la France à l'étranger, et l'UMP se fera un honneur de le voter. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Ministre délégué - Merci, Monsieur le député.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Mon intervention portera sur les moyens financiers que vous entendez dégager et sur la retraite des anciens volontaires internationaux.

En 1970, les Nations unies avaient fixé à 0,7 % du PNB le montant des aides publiques au développement, mais la France, comme beaucoup d'autres, ne respecte pas cet engagement, pourtant réaffirmé en 2000. Les sénateurs Jean-Marie Poirier et Monique Cerisier-ben Guiga ont rappelé, en 2004, que la part du budget du ministère des affaires étrangères consacré au volontariat n'avait pas évolué depuis plusieurs années. M. Poirier a même montré que les crédits dédiés au volontariat ont été amputés pour 2003 de 10 %, ce qui a placé nombre d'associations dans des situations délicates.

Je souhaite, Monsieur le ministre, qu'un effort budgétaire conséquent soit réalisé.

Par ailleurs, les personnes volontaires avant la création du statut de 1986 ont du mal à faire valider leurs années de volontariat pour la retraite. Il s'agit des coopérants du service national qui ont prolongé de six à huit mois leur temps de mission, de ceux qui n'entrent pas dans les règles permettant la prise en compte de leur service alors que celui-ci a pu être particulièrement long et astreignant, de leurs épouses, des volontaires qui n'ont pu s'inscrire au service national. 20 000 personnes seraient concernées. Il convient de réparer cette injustice.

Parce que ce texte ne répond pas à ces deux préoccupations, le groupe socialiste ne le votera pas en l'état.

La discussion générale est close.

M. le Président - J'appelle, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

L'article 2, mis aux voix, est adopté.

ART. 4

M. Jean-Paul Bacquet - L'amendement 2 tend à limiter la durée cumulée des missions d'un volontaire, pour le compte d'une ou de plusieurs associations, à trois ans, et de le soumettre, en cas de dépassement, aux règle du code du travail.

Il s'agit de permettre le développement des missions de solidarité internationale de longue durée, sans pour autant enfermer ceux qui souhaitent en faire leur métier dans une situation précaire. Par ailleurs, cette durée répond aux conditions fixées par l'article 3 en matière de validation des acquis.

Je rappelle que le rapporteur s'était fait le défenseur, en première lecture, de cette limitation à trois ans, sur laquelle le Sénat est revenu. Il vante aujourd'hui, à la page 8 de son rapport, la souplesse de ce nouveau dispositif, tout en pointant quelques contradictions qui pourraient poser problème.

C'est bien la preuve qu'il faut revenir à la position retenue par l'Assemblée en première lecture.

M. le Rapporteur - Monsieur Bacquet, vous avez vous-même déclaré que l'actualité commandait d'agir dans l'urgence. Qu'attendons-nous donc pour voter ce texte en l'état, afin qu'il puisse entrer en vigueur dans trois mois ?

Je ne pense pas, Monsieur Bacquet, que partir en mission de volontariat international constitue, comme vous l'avez dit, « une pause » dans une carrière. Le mot est pour le moins mal choisi. Les volontaires internationaux ne sont pas des personnes qui pour dissiper un spleen dans leur vie professionnelle partent s'allonger les pieds en éventail au soleil...

M. Jean-Paul Bacquet - Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. Médecin libéral, il m'est arrivé de partir en mission de volontariat...

M. le Rapporteur - Ce n'est pas, disais-je, « une pause », mais une décision grave, souvent philosophiquement fondamentale.

Vous allez cependant avoir satisfaction sur le fond sans qu'il soit nécessaire d'adopter votre amendement. La durée maximale prévue est de deux ans, la durée cumulée pouvant aller jusqu'à six ans. Cela étant, il serait souhaitable que les missions de volontariat effectuées au titre du décret de 1995 soient prises en compte pour le calcul des durées cumulées des missions prévues à l'article 4 du projet. Cela répondrait à votre préoccupation, légitime, je le reconnais. Je pense que le ministre va pouvoir nous répondre sur ce point.

M. le Ministre délégué - Je ne comprends pas pourquoi cette question suscite autant de passion, car qui peut le plus peut le moins. Si la durée cumulée maximale est de six ans, il est bien entendu possible de ne faire que trois ans. Votre proposition créerait une contrainte supplémentaire, sans apporter aucun avantage. D'ailleurs, la plupart des volontaires internationaux n'accomplissent jamais plus de trois ans de mission, mais pourquoi empêcher un volontaire qui serait par exemple parti trois ans à l'issue de ses études, de repartir plus tard, à un autre moment de sa vie, pour la même durée ? Votre amendement retarderait inutilement l'adoption du texte, alors qu'il est de l'intérêt de tous que celui-ci entre en application le plus rapidement possible.

L'amendement 2, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Paul Bacquet - L'amendement 1 vise à favoriser le développement du congé de solidarité internationale et à permettre aux associations de faire appel à des volontaires formés, motivés et déjà insérés dans la vie active. Il complèterait l'article par le texte suivant : « Dans le deuxième alinéa de l'article L. 225-9 du code du travail, le nombre six est remplacé par le nombre douze ». Cet article du code du travail dispose en effet aujourd'hui que le contrat de travail ne peut être suspendu à cet effet plus de six mois. Cet amendement va dans le même sens que le précédent.

M. le Rapporteur - Vous prenez les devants de dispositions qui relèveraient du code du travail, mais n'ont pas leur place dans le présent texte. Je vous propose de soumettre votre proposition, à l'occasion d'un DDOS, après qu'il y aura eu concertation avec les partenaires sociaux.

M. le Ministre délégué - Cet amendement mérite débat et je pense, comme le rapporteur, que des aménagements pourront être ultérieurement envisagés dans un autre cadre. Mais pour l'heure, cet amendement ne me paraît pas opportun. Des absences trop longues sont, qu'on le veuille ou non, source de difficultés de réinsertion au retour. D'ailleurs, aujourd'hui, les congés utilisés par les salariés partant en mission humanitaire sont le plus souvent courts, on l'a vu après la catastrophe d'Asie du Sud-Est où beaucoup ne sont partis que pour trois semaines ou un mois. Enfin, les personnes souhaitant partir douze mois peuvent alors parfaitement être salariés d'une ONG. Je souhaite donc que cet amendement ne soit pas adopté, même si je comprends ce qui l'a inspiré.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Nous sommes tout à fait d'accord avec le rapporteur pour approfondir le sujet dans un autre cadre.

M. le Rapporteur - Il n'est pas certain que la mention d'une mission de volontariat international dans un curriculum vitae soit si néfaste que cela.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Tout à fait.

M. Jean-Paul Bacquet - Cela dépend des entreprises.

M. le Rapporteur - Certes.

L'amendement 1 est retiré.

L'article 4, mis aux voix, est adopté.

ART. 5

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - J'ai déjà défendu l'amendement 3 lors de mon intervention dans la discussion générale.

M. le Rapporteur - Dans cet amendement, vous demandez un rapport. En réalité, vous souhaitez être informés. Je pense que le ministre va pouvoir vous répondre.

M. le Ministre délégué - Nous aussi sommes attachés à la plus grande transparence. Les services du ministère sont à votre entière disposition pour transmettre à la représentation nationale toutes les informations dont elle pourrait avoir besoin. Mais il n'est pas nécessaire que la loi exige expressément la présentation d'un rapport.

L'amendement 3 est retiré.

L'article 5, mis aux voix, est adopté.

ART. 7 ET 8 BIS

L'article 7, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 8 bis.

EXPLICATIONS DE VOTE

M. Jean-Paul Bacquet - Nous avions essayé de tout faire en première lecture pour pouvoir voter ce texte. Arrivant ici ce matin, nous pensions voter contre. Finalement, nous nous abstiendrons, le rapporteur nous ayant convaincus qu'il sera possible d'avancer dans un autre cadre sur toutes les questions que nous avons soulevées. Nous tenons d'ailleurs à le féliciter pour son remarquable rapport.

L'ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

Prochaine séance cet après-midi, à quinze heures.

La séance est levée à 12 heures 45.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      François GEORGE

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ERRATUM

au compte rendu analytique de la 1ère séance du mercredi 9 février 2005

Page 28, il convient de lire :

« L'amendement 31, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 53, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté. »


© Assemblée nationale