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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2005-2006 - 4ème jour de séance, 10ème séance

2ème SÉANCE DU VENDREDI 7 OCTOBRE 2005

PRÉSIDENCE de M. Éric RAOULT

vice-président

Sommaire

      LOI D'ORIENTATION AGRICOLE (suite) 2

      ART. 2 (suite) 2

      APRÈS L'ART. 2 5

      APRÈS L'ART. 6 11

      ART. 3 (précédemment réservé) 19

      APRÈS L'ART. 3 (précédemment réservé) 22

      ART. 4 22

      APRÈS L'ART. 4 23

      ORDRE DU JOUR DU LUNDI 10 OCTOBRE 2005 25

La séance est ouverte à quinze heures.

LOI D'ORIENTATION AGRICOLE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi d'orientation agricole.

ART. 2 (suite)

M. le Président - L'adoption de l'amendement 477 rectifié à la fin de la séance précédente fait tomber les amendements 181, 182 et 183.

M. François Guillaume - En cas de cession du bail, le repreneur proposé par le sortant n'a pas forcément l'aval du propriétaire. Si le tribunal paritaire, saisi, confirme ce choix, le propriétaire ne peut que l'accepter. Mais si le nouveau fermier ne verse pas ses fermages, qui en garantit le paiement ? Il serait normal que ce soit le sortant qui a cédé le bail, pour la durée qui reste à couvrir. Tel est l'objet de mon amendement 82 rectifié.

M. Antoine Herth, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - La commission n'a pas accepté cet amendement. La disposition est prévue dans le droit commercial, me signale Madame Barèges, mais pour six mois seulement. L'étendre dans le domaine qui nous occupe à la durée du bail qui reste à courir créerait une charge trop importante pour le cédant.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche - Même avis.

M. François Guillaume - Pourtant le problème est réel. Dans ce cas, le bailleur a été privé de la libre disposition de son bien par le tribunal et a dû accepter un fermier dont il ne voulait pas, peut-être pour de bonnes raisons. Nous ne sommes plus dans le cas classique où il a accepté un risque et, éventuellement, doit s'adresser au tribunal pour engager une procédure d'éviction. Aussi, ne tombons pas dans le juridisme : en pratique, il est aussi difficile d'évincer un fermier que d'expulser un locataire de son appartement ; il aura semé, il faut le laisser récolter, et c'est un an de gagné... Les voies de retardement sont multiples. Le bons sens serait que celui qui a placé le propriétaire dans cette situation assume le paiement des fermages.

Donc, j'aimerais bien qu'on m'oppose de vrais arguments, ou qu'on m'indique une solution - pas forcément celle que je propose -, mais que le ministre y réfléchisse pour présenter une solution au Sénat. Sinon, le bail cessible ne réussira pas car les propriétaires ne l'accepteront pas.

M. Henri Houdouin - Effectivement, en cas de non paiement, qui est responsable ? Ce n'est pas le propriétaire, mis dans cette situation, qui doit en pâtir. Je souhaite vraiment que la question soit revue.

Mme Brigitte Barèges, rapporteure pour avis de la commission des lois - Actuellement, pour les baux commerciaux, la garantie que vous demandez existe, mais est limitée à six mois. Je ne fais aucun juridisme, mais j'ai l'habitude des procédures judiciaires. A titre personnel, je pense qu'en effet on pourrait mieux sécuriser le paiement, mais avec une limite dans le temps, pour un an par exemple, ce qui permet d'entamer la procédure d'éviction.

M. François Guillaume - Je retire l'amendement 82 rectifié.

M. le Ministre - Je remercie M. Guillaume de nous avoir alertés sur ce problème et je m'engage à l'examiner plus précisément avant la fin de la discussion de ce projet pour répondre à son appel.

M. Michel Raison - L'amendement 1071 de Mme Morano est défendu.

M. le Rapporteur - La commission ne l'a pas examiné. A titre personnel, je ne suis pas favorable à la reconduction du bail pour 18 ans en cas de cession à un jeune agriculteur. Le bailleur sera certainement attentif au renouvellement des générations et sensible au problème soulevé.

M. le Ministre - Même avis.

M. François Brottes - On peut toujours imaginer que les bailleurs auront la fibre sensible, mais mieux vaut certainement sécuriser complètement les investissements faits par un jeune qui reprend un bail, en repartant à zéro. C'est ce que fait cet amendement, et nous le soutenons.

L'amendement 1071, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Simon - En cas de cession, le bailleur est aussi partie prenante, il ne faut pas l'oublier. Par l'amendement 448, nous proposons donc que, s'il dispose d'un candidat à la reprise aux mêmes conditions que celles fixées par le sortant à son candidat repreneur, il puisse choisir librement le cessionnaire sans arbitrage du tribunal paritaire.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement qui compliquerait un système qu'il faut laisser se roder. Il est vrai que la proposition avait l'avantage de restaurer l'esprit de dialogue.

M. le Ministre - Sagesse.

M. François Guillaume - J'approuve pour ma part cet amendement, qui réglerait déjà une partie des problèmes que j'ai évoqués.

M. Michel Raison - J'y suis favorable aussi ; il respecte pleinement l'esprit de la loi.

M. Jacques Le Guen - Le fait que le bailleur puisse choisir un autre candidat ne risque-t-il pas d'entraîner un détournement de moyens financiers ?

M. François Brottes - Nous sommes en train de créer un nouveau métier, celui de négociateur en baux - qui se fera verser une commission par celui qui offre le bail et par celui qui cherche...Voilà ce que vous voulez substituer aux SAFER.

Plusieurs voix UMP - Cela se fait déjà !

M. Yves Simon - Je ne peux pas vous laisser dire cela, Monsieur Brottes, puisqu'il n'y aura pas de révision de prix. Le bailleur pourra choisir un autre cessionnaire à condition que cela soit au même prix. Cela permettra d'encombrer un peu moins nos tribunaux, tout en préservant le prix trouvé par le sortant.

M. Henri Emmanuelli - On reste entre soi, quoi...

M. Yves Simon - Ce n'est pas du tout cela !

M. François Guillaume - Pour apaiser toutes les craintes, on pourrait indiquer clairement que le bailleur garantit au preneur sortant le paiement qui lui est dû.

M. le Rapporteur - Les défenseurs de l'amendement m'ont convaincu...

L'amendement 448, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - L'amendement 184 tombe.

M. le Rapporteur - L'amendement 289 est de précision.

Mme Brigitte Barèges, rapporteure pour avis - L'amendement 185 a le même objet.

Les amendements 289 et 185, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jacques Le Guen - L'amendement 461 rectifié est défendu.

M. Michel Raison - L'amendement 866 également.

M. Jean Dionis du Séjour - L'amendement 930 aussi.

M. Louis Cosyns - Notre amendement 1033, identique à ceux de mes collègues, a pour but d'autoriser les bailleurs qui s'inscriront dans la logique du fonds agricole et accepteront un bail cessible, à céder leur patrimoine à des investisseurs ayant pour objectif de détenir un patrimoine et non de se livrer à l'exploitation agricole. Dès lors que le nouveau dispositif conduira les agriculteurs à privilégier l'achat de fonds agricoles plutôt que l'achat de terres agricoles, il est logique de permettre aux bailleurs qui souhaiteraient réaliser leur patrimoine d'accéder à un marché plus ouvert. La suppression du droit de préemption avec révision de prix s'impose donc.

M. François Brottes - C'est la fin de l'agriculture !

M. le Rapporteur - Ces amendements n'ont pas été examinés par la commission mais ils sont satisfaits par l'amendement 1050 précédemment voté.

M. le Ministre - En effet.

M. Jean Gaubert - La douceur d'une après-midi d'automne ne justifie pas de laisser passer cet amendement, qui remet en cause non seulement la possibilité d'une préemption par la SAFER, mais également la possibilité pour l'exploitant lui-même d'acheter le bien, puisqu'on ne lui reconnaît plus de priorité.

M. Henri Emmanuelli - C'est l'agriculture des proprios !

M. Jean Gaubert - C'est un amendement extrêmement dangereux, qui change complètement la nature du rapport des agriculteurs avec leur terre et permet à des sociétés d'investissement de prendre le dessus.

M. François Brottes - C'est l'agriculture des fonds de pension !

M. Henri Emmanuelli - Pour cette agriculture-là, il n'y aura pas de subventions, ne vous faites pas d'illusions !

M. André Chassaigne - Jusqu'à ce moment du débat, nous avions seulement entendu parler d'agriculteurs, mais voilà un amendement, approuvé par le rapporteur, qui révèle le véritable objectif de ce texte : liquider l'agriculture que nous connaissons pour la remplacer par une agriculture ouverte aux capitaux et aux fonds de pensions ! Ne voit-on pas que cela a conduit à la catastrophe dans les pays anglo-saxons ?

Le résultat, ce sera l'abandon de territoires entiers, parallèlement à des investissements financiers dans les secteurs les plus rentables. Vous organisez la financiarisation de l'agriculture et la recherche de la seule rentabilité ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean Auclair - Qu'avez-vous contre la rentabilité ?

M. André Chassaigne - Les conséquences seront très graves pour notre agriculture, c'est pourquoi je m'exprime avec colère.

M. François Guillaume - J'aimerais avoir des précisions sur le sens de cet amendement. Actuellement, le marché foncier est déjà ouvert, mais les SAFER peuvent exercer leur droit de préemption dans les conditions fixées par la loi. Si l'amendement signifie que l'on pourra s'exonérer de ce droit de préemption, je suis fondamentalement contre !

MM. Henri Emmanuelli et Jean Gaubert - Très bien !

M. Jean-Charles Taugourdeau - Je rejoins les inquiétudes de nos collègues socialistes mais je ne partage pas la colère de M. Chassaigne !

M. le Rapporteur - Ces amendements n'ont pas été examinés par la commission, mais ils ont été satisfaits par le vote de l'amendement 1050 : dans le cas des baux cessibles, la SAFER perd son droit de préemption. L'amendement 1050 a en outre institué un droit de préférence pour le preneur, comme le demandaient MM. Taugourdeau et Guillaume.

Les quatre amendements identiques sont retirés.

Mme Barèges, rapporteure pour avis - L'amendement 1018 est retiré car il est satisfait.

M. Philippe Feneuil - L'amendement 881 rectifié est défendu.

M. le Rapporteur - Il n'a pas été retenu par la commission. Il s'agit d'une disposition fiscale portant à 25% le taux de déduction forfaitaire : nous y reviendrons plus en détail lors de l'examen des amendements de la commission des finances qui ont été réservés. Je vous demande donc, Monsieur Feneuil, de bien vouloir retirer votre amendement.

M. Philippe Feneuil - Je le retire, mais je vous pose une question : est-il incitatif de passer de 14 à seulement 15% ?

M. le Rapporteur - L'amendement 290 est rédactionnel

L'amendement 290, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 2 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté

APRÈS L'ART. 2

M. le Rapporteur - L'amendement 658 a été repoussé par la commission. Il s'agit certes d'une idée extrêmement intéressante, mais qui créerait une nouvelle niche fiscale et qui aurait sa place en loi de finances. Faute d'éléments pour trancher la question, nous demandons le retrait de l'amendement tout en invitant à la réflexion sur ce point.

M. Philippe Feneuil - Une fois de plus, je retire mon amendement, mais essayons d'y réfléchir malgré tout.

Mme Barèges, rapporteure pour avis - La SAFER adresse aujourd'hui au vendeur une offre selon ses propres conditions si elle estime que le prix est exagéré, le vendeur pouvant demander au tribunal la révision du prix. L'amendement 999 rectifié ne vise pas à supprimer ce mécanisme, mais à renverser sa mise en œuvre selon le modèle appliqué pour le droit de préemption du fermier. Selon les articles L. 412.1 et suivants du code rural, le fermier peut en effet demander au tribunal paritaire des baux ruraux de fixer le prix après enquête et expertise. Cet amendement permettrait de garantir un prix juste et de rétablir la logique de la vente des biens : c'est au vendeur de proposer le prix initial, et non à l'acheteur. En matière de droit de préemption par les collectivités locales, l'article L. 211-5 du code de l'urbanisme prévoit ainsi que, faute d'un accord amiable, le prix est fixé par le tribunal.

Pour répondre par avance aux objections, transférer du tribunal de grande instance au tribunal des baux ruraux la compétence pour fixer le prix en matière de préemption par la SAFER permet de confier le contentieux à une seule juridiction, le tribunal des baux ruraux étant aujourd'hui compétent lorsque les fermiers exercent leur droit de préemption.

En outre, priver la SAFER de la possibilité de fixer le prix ne l'empêchera pas de poursuivre son action : la SAFER pourra toujours vendre sans difficulté les biens qu'elle acquiert car le prix fixé par le tribunal sera équivalent à celui dont bénéficie un fermier exerçant son droit de préemption.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné cet amendement et s'en remet à l'appréciation du ministre.

M. le Ministre - A première vue, le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement, mais nous n'avons pas eu le temps de le faire expertiser.

M. François Guillaume - Vous avez tout à fait raison, Monsieur le ministre. Cet amendement changerait abruptement la donne en matière foncière. Et vous le savez bien, la fixation des prix par le tribunal paritaire est une source considérable de revenus pour les avocats. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Ce qui fait la joie des avocats ne fait pas l'affaire des paysans. Ne nous lançons pas dans le développement de procédures parallèles dont vous ne soupçonnez pas les conséquences, Madame la rapporteure. Par ailleurs, la SAFER ne fait pas ce qu'elle veut, car elle est soumise à des règles précises.

M. Henri Emmanuelli - Bravo !

M. André Chassaigne - Les conséquences de cet amendement complexe, qui n'a pas été examiné en commission, sont difficiles à saisir. Mais je voudrais profiter de l'occasion pour demander à M. le rapporteur et à M. le ministre quel rôle ils entendent donner à la SAFER.

Si l'exploitation en faire-valoir direct n'est pas constituée en fonds, la SAFER pourra intervenir de manière classique, avec une possibilité de révision des prix. Mais imaginons que quelques mois avant la vente, l'exploitant transforme son entreprise en fonds agricole : dans quelles conditions la SAFER interviendra-t-elle, puisque ce fonds est constitué non seulement de l'immobilier mais aussi du nantissement ?

Je souhaiterais des éclaircissements sur les moyens d'intervention dont la SAFER continuera à bénéficier.

Mme Barèges, rapporteure pour avis - Je ne fais pas de corporatisme. J'ai l'impression que personne ici ne connaît la procédure. En cas de contestation, c'est au vendeur de saisir le TGI, ce qui coûte beaucoup plus cher que de saisir le tribunal paritaire devant lequel le recours à un avocat n'est pas obligatoire. Et selon moi, ce n'est pas au vendeur d'aller se justifier : la lourdeur de la procédure dissuade de nombreux vendeurs de saisir le tribunal, compte tenu de la lenteur de la justice.

M. Jean Gaubert - Je voudrais rappeler mes collègues à certaines réalités : la SAFER a contribué à contenir le prix des terres. Cela peut déplaire à certains, mais c'est ainsi qu'on a permis à des jeunes de s'installer. Libéraliser le marché va conduire à une nouvelle hausse des prix, qui ont déjà augmenté de 31% depuis 1996. Vous ne pourrez plus prétendre que les jeunes auront accès à la terre si vous coupez les ailes à la SAFER et si vous permettez à des investisseurs extérieurs d'entrer sur le marché ! Ne venez pas dire que vous souhaitez favoriser un modèle où les agriculteurs deviennent propriétaires de leur terre s'ils en ont les moyens ; toutes vos propositions vont dans le sens inverse !

L'amendement 999 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Louis Léonard - L'amendement 652 mérite des explications, étant donné l'archaïsme de certaines remarques faites sur ces bancs. Il vise à revaloriser les locaux d'habitation. Dans l'Ouest, de plus en plus de locaux d'habitation liés aux exploitations sont vendus à des étrangers ou à des Parisiens (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Les propriétaires ne veulent plus les inclure dans les baux de fermage parce qu'ils sont sous-évalués. En Charente-Maritime par exemple, un arrêté préfectoral fixe les prix annuels de location d'une maison d'habitation dans le cadre du statut de fermage entre 360 et 3 490 euros. Dans le cadre du régime commun du bail d'habitation, les prix pratiqués vont de 4 200 à 8 400 euros ! Les jeunes agriculteurs sont de ce fait souvent obligés d'aller s'installer loin de leur exploitation, notamment dans les zones périurbaines. Notre amendement - c'est son caractère social - permettra à de jeunes agriculteurs de rester dans les bâtiments d'habitation de leur exploitation, que les propriétaires loueront plus volontiers si les prix sont corrects. Il évitera une trop grande désertification et la transformation de beaux bâtiments d'exploitation en résidences secondaires.

M. Jean Dionis du Séjour - Qui veut faire l'ange fait la bête... Les écarts considérables entre loyers des preneurs et loyers du secteur banalisé sont vécus par les propriétaires - à tort ou à raison - comme une spoliation. M. Léonard l'a expliqué : l'exclusion systématique des maisons des baux de fermage a des conséquences catastrophiques sur les lieux d'habitation des fermiers qui - ne faisons pas d'angélisme ! - sont les premiers à payer.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Je reconnais la réalité du problème sur le terrain, mais il est trop risqué d'augmenter les loyers substantiellement, du jour au lendemain. En termes de flux, vous avez raison ; ce sont les stocks qui créent la difficulté.

M. le Ministre - L'argument social de M. Léonard est très recevable, mais l'amendement détricote un équilibre fondé sur les intérêts des uns et des autres. Une expertise supplémentaire serait souhaitable sur l'ensemble des départements, pour vérifier que la correction d'effets pervers existants n'entraînerait pas des conséquences encore plus négatives.

M. Jean Gaubert - Il faut résoudre le problème des jeunes agriculteurs chassés de leurs lieux d'exploitation. Toutefois, ainsi rédigé, l'amendement ne prend pas en compte l'ensemble du problème, notamment la normalisation des logements - logements « de fonction », logements de qualité aménagés par les propriétaires, ou encore par les fermiers eux-mêmes. Si l'on ne fait rien, les jeunes agriculteurs continueront d'être chassés ; si l'on adopte l'amendement, au fil du temps, les agriculteurs aménageront à leur compte une maison pour laquelle ils paieront un loyer d'autant plus cher.

M. André Chassaigne - J'approuve l'avis du rapporteur et la sagesse du ministre. Le statut du fermage et du métayage repose sur un équilibre et des articles comme l'article L. 411-11 mentionnent tant les bâtiments d'exploitation et que les bâtiments d'habitation. Ce n'est pas au détour d'un amendement que nous réglerons ce problème, qui demande un véritable dialogue social.

M. Jean-Louis Léonard - Je me félicite du tour que prend cette discussion, car elle est importante. Nous avons, Monsieur le rapporteur, traité le problème des stocks dans le deuxième alinéa de l'amendement. M. Gaubert évoquait la nature des logements : il est vrai qu'avoir des bâtiments loués à très bas prix n'incite pas les propriétaires à y faire des travaux. Enfin, j'admets, Monsieur Chassaigne, que notre démarche est incomplète. Je fais confiance à M. le ministre pour continuer à travailler rapidement sur le sujet, et je retire donc mon amendement (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean Dionis du Séjour - Je suis sur la même longueur d'onde que M. Léonard et je retire l'amendement 908, d'autant que se posent, comme l'a dit le rapporteur, la question des baux nouveaux et celle des baux anciens. Le Gouvernement va nous présenter un projet de loi sur le logement : pensez-vous, Monsieur le ministre, pouvoir y traiter cette question ?

M. le Ministre - Je m'engage à la traiter dans le premier texte législatif qui se présentera.

M. Jean Auclair - L'amendement 566 va dans le même sens : la réaffectation à d'autres usages agricoles d'un terrain ou d'un bâtiment est en effet devenue très difficile. La protection du preneur est si bien assurée qu'aujourd'hui, les propriétaires sont de plus en plus réticents à louer ! Ma proposition initiale avait été rejetée en commission. J'ai donc ajouté « à condition que son épouse ou ses enfants ne demandent pas pour eux-mêmes la poursuite du bail ».

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Même avis.

M. Jean Auclair - Nous nous sommes fait traiter par nos collègues de l'opposition de libéraux.

M. André Chassaigne - Ultralibéraux !

M. Jean Auclair - M. Gaubert m'a aussi violemment attaqué en commission. Qu'il le sache, cet amendement avait été présenté le 2 octobre 1998 par M. Bapt ! Je sais bien qu'il y a un fossé, au parti socialiste, entre ultragauchistes et très libéraux...

M. Henri Emmanuelli - Quel grossier personnage !

M. Jean Auclair - Vous êtes là, Monsieur Emmanuelli, pour représenter les ultragauchistes. Peut-être M. Bapt représente-t-il la tendance libérale Strauss-Kahn... Quoi qu'il en soit, il avait déposé cet amendement à l'occasion de la loi Glavany.

L'amendement 566, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Je laisse M. Feneuil présenter l'amendement 291 de la commission.

M. Philippe Feneuil - Avant la loi sur les territoires ruraux, tous les associés d'une société devaient participer effectivement à l'exploitation. Cette contrainte, qui restreignait la possibilité de faire appel à des apporteurs de capitaux, a donc été levée le 23 février 2005. L'amendement 291 parachève cette modernisation des baux ruraux en permettant à l'exploitant locataire de mettre ses biens loués à disposition d'une société.

M. Michel Raison - L'amendement 149 est identique.

M. le Ministre - Avis favorable.

M. François Guillaume - Pour expliquer mon désaccord avec cet amendement, il faut rappeler l'historique des solutions que nous avons trouvées en la matière. La première préoccupation a été que les entreprises soient suffisamment rentables pour faire vivre une famille. On a donc constitué les GAEC, groupements agricoles d'exploitation en commun, dans lesquels chacun reste chef d'exploitation. On a ensuite voulu répondre aux difficultés rencontrées lors d'un héritage, par celui qui reprenait l'exploitation et qui devait racheter le capital foncier à ses frères et sœurs. On a alors mis en place des EARL, les exploitations agricoles à responsabilité limitée : l'un des héritiers est le gérant exploitant et les autres détiennent une partie du capital, sans participer à l'exploitation. La formule disparaît au fur et à mesure que l'exploitant peut racheter leurs parts aux cohéritiers. Naturellement, les frères et sœurs trouvent que leurs parts ne sont pas très rentables et rechignent aux augmentations de capital... On a donc créé une troisième catégorie de sociétés : les GFA, groupements fonciers agricoles, qui permettent de régler le problème foncier. Chaque cohéritier reçoit des parts et le GFA loue l'exploitation à un exploitant...

Et nous voilà en train de mélanger tout ça ! On veut donner aux EARL les mêmes avantages qu'aux GAEC, notamment en matière de transparence, et Bruxelles commence à s'inquiéter ! Pour finir, il n'y aura plus de transparence nulle part. Cet amendement ne fait que semer la confusion et je ne le voterai pas.

M. Philippe-Armand Martin - Je ne partage pas l'avis de M. Guillaume. En matière de rachat aux frères et sœurs, qu'il s'agisse de capital ou de foncier, les choses sont très différentes selon les régions. Les EARL constituent une bonne solution, mais aujourd'hui, le gérant d'une société civile d'exploitation composée de plusieurs holdings détenues par ses ayants droit ne peut pas mettre à disposition de l'EARL les baux dont il est preneur, car l'EARL ne serait pas composée exclusivement de personnes physiques. Cet amendement permet de corriger cette faille, dans la mesure où les personnes morales - les holdings - sont minoritaires dans le capital de l'EARL.

M. Jean Gaubert - J'ai scrupule à intervenir : c'est une vraie réunion de l'UMP ! Tout cela aurait gagné à être réglé plus tôt. Depuis une heure dix que nous travaillons, l'opposition n'a pas pris la parole plus de dix minutes !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - Il faut avancer !

M. Jean Gaubert - J'avais cru comprendre qu'il s'agissait d'une loi de simplification. Or, vous rajoutez tant d'ovnis, à chaque article, que personne ne s'y retrouve plus ! M. Guillaume a expliqué que plusieurs outils existaient déjà pour régler le problème soulevé, et il ne les a même pas tous cités. Si les gens ne s'en sont pas servis pour régler les problèmes, il n'est pas utile d'en créer un autre ! En tout cas, ne parlez plus de simplification, car les agriculteurs ne vous croiront plus.

M. le Président - Monsieur le président de la commission des affaires économiques, nous avons traité 28 amendements en une heure dix. Ce n'est pas si mal ! Et il est vrai que la plupart des interventions sont venues de l'UMP.

M. le Président de la commission - Mais à ce rythme-là, nous y serons encore à la fin de la semaine prochaine ! Le Règlement prévoit que pour chaque amendement, un député intervient pour et un contre.

M. le Président - Je vais l'appliquer...

M. le Président de la commission - J'aimerais que vous soyez entendu sur tous les bancs.

M. André Chassaigne - Il est néanmoins naturel de débattre sur cet amendement, car il s'agit d'une des dispositions les plus importantes de ce projet de loi. Ses auteurs ont parlé de « parachever » l'évolution allant de l'agriculture exercée directement par les fermiers ou propriétaires à la constitution de sociétés. Lorsque les capitaux étaient apportés par des membres de la famille, ceux-ci devaient participer effectivement à l'exploitation. Ce verrou a sauté le 23 février 2005 à l'occasion de la loi sur les territoires ruraux. Aujourd'hui, vous voulez aller encore plus loin : dans le cadre du statut des baux ruraux, des biens loués pourraient être mis à disposition d'une société d'exploitation... C'est complètement nouveau ! C'est une véritable financiarisation de l'agriculture ! Désormais, des sociétés d'exploitation pourront détenir des baux ruraux, injecter des capitaux et faire travailler des salariés agricoles sur des propriétés détenues par des fonds de pension. C'est une révolution !

Si on laisse faire cela, demain, le céréalier beauceron sera à la merci des actionnaires de Panzani et l'éleveur breton de ceux de Danone ! Au moins dois-je reconnaître que la majorité avance à visage découvert : il s'agit de faire entrer coûte que coûte notre agriculture dans le modèle capitalistique ultralibéral où la recherche de profits à court terme prime sur toute autre préoccupation. Dans un tel système, gare aux exploitations que les actionnaires ne jugeront pas susceptibles de procurer des dividendes suffisants. Le Gouvernement n'avait pas eu le culot de l'exprimer aussi brutalement, sans doute parce qu'il savait que la majorité parlementaire, elle, ne reculerait devant rien !

Les amendements 291 et 149, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean Gaubert - L'amendement 988 rectifié est défendu.

M. le Rapporteur - Avis personnel favorable, l'amendement permettant d'apporter une correction utile.

L'amendement 988 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Gaubert - L'amendement 989 supprime le monopole du Crédit agricole pour la délivrance de certains types de prêts aux propriétaires ruraux. Cette situation traditionnelle est manifestement devenue obsolète.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre - Sagesse.

L'amendement 989, mis aux voix, est adopté.

M. Philippe Feneuil - Les amendements identiques 203 rectifié, 411 et 628 rectifié sont défendus.

M. Jean Dionis du Séjour - Identique aux trois précédents, l'amendement 934 de nos collègues de Courson et Sauvadet vise à permettre au métayer de mettre le bail à la disposition d'une société d'exploitation. Cette faculté ayant été donnée aux fermiers, rien ne justifie que les bailleurs disposent sur les métayers d'un pouvoir discrétionnaire tendant à entraver leur autonomie de gestion.

J'en viens à mon amendement 905 car il traite également du métayage. Dans nombre de régions où le foncier coûte très cher - notamment les régions viticoles du Sud-Ouest -, le bail à métayage connaît un regain d'intérêt. Mon amendement vise par conséquent à renforcer l'autonomie juridique du métayer et à supprimer la conversion de plein droit du métayage en fermage introduite par la loi du 1er août 1984.

M. le Rapporteur - La commission est défavorable aux amendements identiques 203 rectifié, 411, 628 rectifié et 934, le problème soulevé étant réglé par ailleurs ; elle n'a pas examiné l'amendement 905, auquel je suis personnellement défavorable.

M. le Ministre - Sagesse sur l'ensemble de ces amendements.

M. André Chassaigne - En 1984, la loi Rocard a permis aux métayers d'accéder à un meilleur statut sans préjudice des intérêts bien compris de l'ensemble des parties, rompant ce faisant avec un système archaïque. Il est aujourd'hui envisagé de revenir sur cette avancée majeure et cette nouvelle tentative de fragilisation des agriculteurs les plus modestes doit être solennellement dénoncée. Ne profitez pas, chers collègues de l'opposition, de l'ambiance de travail propre au vendredi après-midi pour tenter de faire passer de mauvais coups. On ne peut pas porter préjudice à l'ensemble des métayers pour régler les problèmes particuliers de telle ou telle région, fût-elle la Champagne. J'en appelle à la responsabilité de chacun pour repousser cet amendement.

M. Jean-Louis Léonard - Ayant la parole, j'indique que mon amendement 1092 rectifié, qui a le même objet, est défendu. Mais je voulais surtout préciser à M. Chassaigne que personne ne conteste l'utilité du régime issu de la loi de 1984. Vingt ans après, il convient cependant de tirer le bilan de son application et de le rationaliser. Que constate-t-on ? Les conversions qui devaient naturellement se faire dans l'esprit du dispositif légal ont eu lieu, et c'est très bien ainsi ! En revanche, le maintien du régime de la conversion automatique a un effet pervers - en particulier dans les régions viticoles où les cours du foncier ont explosé - en ce qu'il décourage nombre de propriétaires de recourir au métayage, de peur de subir les effets d'une transformation de droit en fermage, au bout de quelques années seulement. Résultat, les terres sont confiées à des entreprises d'exploitation et des jeunes très motivés pour s'installer sous le statut de métayers sont empêchés de le faire. L'objectif n'est donc pas de démolir le dispositif issu de la loi de 1984 mais de corriger ses effets indésirables.

M. Jean Dionis du Séjour - Je partage l'analyse de Jean-Louis Léonard à ce sujet.

Les amendements 203 rectifié, 411, 628 rectifié et 934, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'amendement 905, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 292 rectifié, identique au 1092 rectifié, répond à la problématique du métayage.

M. Jean-Louis Léonard - J'ai déjà défendu l'amendement 1092. Le métayage, notamment dans la viticulture, permet l'installation des jeunes, grâce à l'apport des propriétaires. Je ne comprendrais pas que l'on s'accroche à cette mesure contre-productive.

M. le Ministre - Sagesse sur les deux amendements

M. François Guillaume - Je suis opposé à la suppression du transfert automatique. Dans le droit de propriété figurent l'usus et l'abusus. Le système du métayage a été longtemps critiqué car les propriétaires abusaient de leurs droits. Il serait pour le moins maladroit de prendre aujourd'hui une telle mesure.

M. André Chassaigne - Monsieur le ministre, vous avez parlé de sagesse et vous avez raison. Vous avez évoqué ce matin le dialogue social que vous avez su nouer sur certains articles de ce projet. Sur ce point précis, évitons toute décision hâtive. J'ai reçu hier un courrier du syndicat départemental des fermiers et métayers viticoles du Rhône, qui nous demande instamment de ne pas revenir sur cette avancée. L'ensemble des familles syndicales est opposé à ce texte. Avant de voter un tel amendement, vous devez établir, Monsieur le ministre, un contact avec toutes les organisations concernées.

Les amendements 292 rectifié et 1092 rectifié, mis aux voix, sont adoptés.

M. François Brottes - l'amendement 773 permet au Gouvernement de réaliser après le vote de la loi ce qu'il n'a pas eu le temps de faire avant : l'analyse par ses services des conséquences de l'installation du fonds agricole et de la cessibilité du bail, notamment sur les procédures de remembrement et de requalification des sols. Il ne s'agit pas là d'une approche polémique, mais une telle disposition serait utile pour éviter les imbroglios qui risquent de se produire.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas retenu cet amendement.

M. le Ministre - le Gouvernement n'y est pas favorable non plus, mais je considère que cette question est intéressante et je m'engage à dresser un bilan au bout d'un certain temps.

L'amendement 773 mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - A la demande de la commission, les articles 3 à 6 sont réservés jusqu'après l'examen des amendements portant article additionnel après l'article 6.

APRÈS L'ART. 6

M. le Rapporteur - L'amendement 307 est de simplification, puisqu'il aligne le régime fiscal de produits très proches.

M. Jean-Charles Taugourdeau - L'amendement 23 a le même objet.

M. le Rapporteur - Je ne peux qu'y être favorable sur le fond.

M. le Ministre - Le Gouvernement également, mais il préférerait que ces amendements soient renvoyés en loi de finances rectificative.

Les amendements 307 et 23 sont retirés.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Si la commission des finances ne s'est pas saisie de l'article premier, il n'en reste pas moins que la création du fonds suscite un débat sur la fiscalité qui l'accompagne et des inquiétudes chez les personnes concernées. C'est à ce titre que nous avons souhaité apporter un certain nombre de solutions. L'objet de l'amendement 258 est de fiscaliser les plus-values au moment d'une mutation, en s'inspirant d'une disposition récente de la loi Dutreil sur les fonds de commerce qui fixe le seuil d'imposition à 300 000 euros.

Lorsque la transmission est réalisée en une fois, elle pose peu de problèmes. Mais le plus souvent, le fonds est transféré par étapes, le père transmettant à son fils son exploitation sur plusieurs années. Nous avons proposé que, dans cette hypothèse, il y ait une neutralité fiscale. Il ne s'agit pas là d'un éclatement du fonds qui, lui, ne justifierait pas un traitement fiscal particulier.

Le seuil de 300 000 euros ne concerne pas uniquement les grands patrimoines, contrairement à ce que voudrait laisser croire notre collègue Gaubert. Une exploitation banale de 75 vaches allaitantes, à raison de 2 000 euros par tête et de la valeur du matériel, atteint aisément ce seuil.

Il en va de même avec un quota laitier entre 350 000 et 400 000 euros, ou un élevage porcin de 200 truies. De toute façon, si nous l'adoptons aujourd'hui, ce seuil restera valable pendant plusieurs années, et il faut se donner un peu de marge pour les évolutions à venir.

Les mutations sur plusieurs années sont un usage. Il ne faudrait pas que le fonds agricole apparaisse comme un désavantage fiscal, alors qu'il s'agit de faciliter les transmissions.

M. Jean Dionis du Séjour - L'amendement 931 est défendu.

M. Philippe Feneuil - Mon amendement 1106 rectifié est identique. Je rends hommage à la commission des finances. Mes inquiétudes sur le fonds agricole sont dissipées puisque l'on tient compte de la spécificité des filières et de l'installation progressive, à laquelle correspond une cessation progressive. Cette disposition conviendra tout à fait au secteur viticole dans lequel les stocks jouent un grand rôle.

M. le Rapporteur - La commission, impressionnée par le travail de M. Le Fur, a adopté cet amendement.

M. le Ministre - Le Gouvernement n'est favorable ni à l'amendement 1106 rectifié, ni à l'amendement 285. Procéder par tranches successives ne correspond pas à l'esprit dans lequel vous avez voté cette disposition. Cela étant, le moment venu, le Gouvernement sera favorable au contenu de l'amendement 257, à condition de le reprendre en loi de finances.

M. Jean Gaubert - Est-ce confusion ou naïveté ? Je ne sais, mais nous sommes ici loin de la réalité. La majorité des exploitations, et toutes celles que vous avez prises en exemple, sont imposées au bénéfice réel et pratiquent donc forcément l'amortissement et la réévaluation ou la dépréciation des stocks. En amortissant, année après année, on diminue la valeur d'un bien, lequel se dévalue en réalité moins qu'on ne le fait figurer dans les comptes de l'exploitation. De ce fait, il y a une plus-value, qui correspond simplement à l'impôt qui n'a pas été payé année après année. Quant aux stocks, j'ai découvert à l'occasion des problèmes de la vache folle, que certaines exploitations, laitières en particulier, ont obtenu, par tolérance, de ne pas réévaluer les stocks. Ne pas le faire dégage aussi une plus-value.

Je considère que ce qui nous est proposé est démagogique. De plus, cela n'a aucun intérêt pour le repreneur car le prix de cession n'en sera nullement modifié. Il dépend uniquement de l'offre et de la demande, jamais du régime d'imposition. Il n'est donc pas anormal que celui qui vend paye enfin l'impôt qu'il aurait dû payer auparavant s'il avait amorti et réévalué les stocks normalement.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Il est faux de dire que cette disposition n'aura aucun effet pour le repreneur. Si le vendeur sait qu'il doit supporter une charge fiscale, il essaiera de la répercuter sur l'acheteur.

Ensuite, les considérations de M. Gaubert sur la comptabilité réelle s'appliquent tout aussi bien aux entreprises industrielles ou artisanales, et elles bénéficient de ce seuil de 300 000 euros. Pourquoi voulez-vous pénaliser les entreprises agricoles par rapport aux autres ? Evidemment, la loi Dutreil ne pouvait pas couvrir le fonds agricole, puisqu'il n'existait pas. Vous pourriez nous reprocher de prendre une disposition spécifique en faveur du monde agricole, mais en l'occurrence il s'agit simplement de lui appliquer la norme générale.

Monsieur le ministre, ce dispositif général n'a pas été adopté en loi de finances, mais dans une loi spécifique, la loi Dutreil. Pourquoi ne pas faire de même dans ce cas ?

M. le Ministre - Pour des raisons de calendrier.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Alors, adoptons cette disposition et si on en adopte une de même nature en loi de finances, nous pourrons nous adapter au Sénat ou en CMP. Penons déjà date.

Enfin, ce dispositif est propre à la cession progressive. Si l'on avait éclaté le fonds en différents éléments, je comprendrais votre objection ; mais elle ne vaut pas : il reste entier et on le transmet en tranches successives sur plusieurs années.

M. Jean Gaubert - Je souhaite répondre.

M. le Président - Vous venez de vous exprimer. Le président de la commission avait raison de me demander une application stricte du Règlement, et c'est ce que je vais faire maintenant. Je passe au vote.

M. le Ministre - Je ne lève pas le gage.

Les amendements identiques 258, 931 et 1106 rectifié, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean Gaubert - Rappel au Règlement. Je n'ai pas abusé du temps de parole. Puisque l'on ne me permet plus de répondre pour éclairer le débat, je demande une suspension de séance.

M. le Président - Effectivement vous n'avez pas abusé de la parole et ce débat se passe dans de très bonnes conditions. Chacun a pu s'exprimer. Je donne la parole pour répondre au rapporteur ou au ministre, mais pas pour ajouter des éléments d'explication ultérieurs. Cela étant, la suspension est de droit.

La séance, suspendue à 17 heures, est reprise à 17 heures 10.

M. Philippe-Armand Martin - Mon amendement 420 vise à favoriser l'investissement dans les exploitations agricoles en permettant aux exploitants de constituer une réserve spéciale d'autofinancement, soumise à l'impôt sur le revenu au taux de 15% et exonérée de CSG et de CRDS ; c'est la transposition des dispositions applicables aux PME.

M. Philippe Feneuil - Mon amendement 882 rectifié est défendu.

M. le Rapporteur - Avis défavorable car mieux vaut consolider le mécanisme de déduction pour investissement et de déduction pour aléas avant d'imaginer un dispositif nouveau.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Même si l'on comprend l'objectif, la charge financière d'un tel dispositif, qui correspond à une revendication ancienne, serait extrêmement lourde. Nous parlerons du renforcement de la DPI et de la DPA à l'article 20.

L'amendements 420, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 882 rectifié.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Nous venons de débattre du fond de l'amendement 257 à l'occasion des transmissions étalées sur un, deux ou trois ans. Par souci de cohérence, je vous demande d'adopter cette disposition qui exonère les plus-values en cas de transmission en une seule fois dans la limite de 300 000 euros.

M. le Rapporteur - Favorable

M. le Ministre - Autant le Gouvernement était défavorable à l'amendement 258, autant nous sommes favorable à celui-ci sur le fond. Un renvoi à la loi de finances, très proche et déjà étudiée par la commission des finances, serait toutefois préférable, conformément au principe de l'annualité budgétaire et des règles de fonctionnement du Parlement.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Je fais pleinement confiance au ministre pour veiller à l'intégration de cet amendement en loi de finances. Je le retire donc au vu de son engagement sur le principe.

M. le rapporteur - Je laisse à M. Le Fur le soin de présenter l'amendement 281, 2e rectification, identique au 259 rectifié de la commission des finances, à l'exception toutefois du gage. Comment aider l'agriculture tout en alourdissant la fiscalité sur les produits agricoles ?

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - La création du fonds agricole ne doit pas donner lieu à une fiscalité supplémentaire. Mais bien entendu, il convient de disposer d'un acte authentique pour l'enregistrement du fonds et pour le bail cessible. Par l'amendement 259 rectifié, nous proposons qu'il soit soumis à un droit d'enregistrement fixe de 75 euros. Je me réjouis que la commission saisie au fond partage notre analyse.

M. le Ministre - Le Gouvernement est favorable à l'amendement 259 rectifié, qui donne satisfaction au rapporteur, et lève le gage.

M. le Président - Dans ces conditions, les deux amendements sont identiques.

M. Jean Gaubert - Je tiens à souligner tout ce qui différencie un fonds artisanal et commercial du fonds agricole. Ce dernier contient des éléments qui ont déjà fait l'objet d'une fiscalisation, alors que le fonds artisanal et commercial n'est pas évalué année après année en valeur de bilan. Mais nous y reviendrons en loi de finances.

Concernant les amendements en discussion, nous allons les approuver, parce que notre souci est de rendre le coût de l'installation d'un jeune le plus faible possible. Or cette mesure est quasiment la première en ce sens : toutes les autres dispositions vont au contraire renchérir le coût de l'installation, qu'il s'agisse du fonds lui-même ou de la majoration du bail cessible. C'est le preneur qui en supportera le coût.

Les amendements identiques 281, 2e rectification, et 259 rectifié, mis aux voix, sont adoptés

M. Philippe Feneuil - L'amendement 879 est défendu

M. Jean-Charles Taugourdeau - Mon amendement 53 étant en partie satisfait, je le retire.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Les mutations à titre gratuit sont exonérées à hauteur des trois quarts de leur valeur patrimoniale en dessous de 76 000 euros, puis sont taxées à 50% au-delà de ce seuil. Ce montant, fixé en 1983, n'a jamais été revalorisé : la commission des finances propose donc de relever le seuil à 120 000 euros en raison de l'appréciation de la terre et de l'immobilier nécessaire aux exploitations.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas accepté l'amendement 879 car il tombe dans le champ de la réforme générale de la fiscalité annoncée par le Gouvernement. Elle est en revanche favorable à l'amendement 260, bien qu'il relève plutôt de la loi de finances : mais il est important de marquer dès maintenant une telle orientation.

M. le Ministre - J'émets le même avis sur l'amendement 879, mais le 260 a sa place en loi de finances. Je vous rappelle les mesures que nous vous proposons pour 2006 sur les abattements de donations, les délais de rappel et les transmissions à titre gratuit. Pour des raisons budgétaires que vous connaissez, le Gouvernement s'est limité à un certain nombre de dispositions et nous ne pouvons aller plus loin.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Cet amendement a été adopté par la commission des finances qui se veut le gardien du temple de la loi de finances : mes collègues sont toujours soucieux de veiller à la bonne répartition des genres. Nous restons cependant sur notre position. A notre avis, il serait bon d'enrichir la loi d'orientation agricole en portant le seuil en question à 120 000 euros. Si nous avons bien noté votre souci d'un examen en loi de finances, quid du montant ? Fixons-le maintenant. Si vous le portez à 120 000 euros, je retire l'amendement, sans quoi il faudra un débat.

M. le Ministre - Ma position est de fixer ce montant à 120 000 euros, mais il faudra l'accord de M. Breton et de M. Copé.

L'amendement 879, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Au vu des engagements souscrits par le ministre, je retire l'amendement 260

M. Philippe Feneuil - L'amendement 880 est défendu.

M. le Rapporteur - Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. Comme il rejoint l'amendement que nous avons déjà repoussé, j'y suis défavorable à titre personnel. Il relève de la réforme générale de la fiscalité qui a été annoncée par le Gouvernement.

M. le Ministre - Comme nous sommes dans le domaine délicat de l'ISF, je ne peux qu'être défavorable à ce moment précis du débat.

M. Philippe Feneuil - Je retire l'amendement.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Sortons des questions fiscales pour aborder la règle des cent mètres. Cette disposition synallagmatique, en interdisant de construire à moins de cent mètres d'une installation classée - or, de ce fait, toutes nos fermes sont classées ! - y interdit du même coup tout développement d'exploitations. C'est une situation redoutable où les gens se bloquent entre eux, surtout dans les zones rurales denses. Or, nombreux sont les cas où les parties concernées serait d'accord pour déroger à la règle, ce que le caractère d'ordre public de celle-ci rend impossible. L'amendement 743 rectifié vise à permettre de telles dérogations. Pour qu'elle perdurent, il faut créer une servitude - ce qui est somme toute banal dans notre droit. Nous permettrons ainsi à ceux qui souhaitent s'installer dans le monde rural de ne pas être freinés par une règle abstraite et venue de Paris. Laissons les gens s'entendre entre eux ! Evitons les querelles inutiles !

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre - L'avis du Gouvernement est très réservé : je comprends la démarche de Monsieur Le Fur, et j'ai toute confiance en sa sagesse, mais nous touchons là au noyau dur de notre droit et il faut agir avec grande prudence.

M. Michel Raison - J'ajoute à la défense de M. Le Fur que ce problème touche également les zones rurales à faible densité de population : un exploitant qui aurait cru sortir de son village il y a dix ans s'en trouve aujourd'hui rattrapé. Je comprends la crainte du ministre, mais s'il y a accord entre les deux parties et existence d'une servitude, on évitera la multiplication des dérogations tout en réglant les quelques situations aujourd'hui inextricables.

M. François Guillaume - L'amendement apporte une mauvaise réponse à une bonne question. Ce n'est pas une convention privée qui réglera le problème : quiconque rachèterait la maison d'un fils qui a, par accord dérogatoire, construit à moins de cent mètres de l'exploitation de son père, pourrai ne pas en supporter les conséquences.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - D'où la servitude !

M. François Guillaume - Le ministre a donc raison d'être prudent. Il faut étudier le problème, mais ne pas adopter ce système.

M. François Brottes - Cette question a déjà souvent été traitée dans cet hémicycle, tantôt avec dureté, tantôt avec souplesse. Peu à peu, les voisins changent, surtout dans les zones périurbaines. Les parties qui étaient d'accord peuvent ne plus l'être car elles ne supportent plus le chant du coq et les odeurs agricoles. Il faut donc être prudent avant de modifier les règles. L'article L. 111-3 rend tout à fait possibles des dérogations à l'échelle départementale. En outre, ce ne sont pas les cent mètres qui sont dans la loi, mais le principe de réciprocité. On aurait tort de se précipiter sans mesurer le déséquilibre induit, alors qu'un article de loi permet déjà la dérogation si nécessaire.

M. André Chassaigne - En effet, nous n'avons pas intérêt à adopter ce type d'amendement à la va-vite, alors que le problème, bien réel, demande une tout autre réflexion. On peut toujours parler de servitude, mais le jour où les nuisances mènent au tribunal, la servitude ne tient plus !

M. Jean-Charles Taugourdeau - C'est faux !

M. André Chassaigne - Ne nous précipitons donc pas.

M. Jean Gaubert - Le problème se pose en Bretagne plus qu'ailleurs : l'espace y est très mité, et les problèmes de voisinage liés à l'élevage nombreux. A ma connaissance, les quelques dérogations accordées par les préfets ont toutes été annulées par les tribunaux administratifs. La jurisprudence se fait donc aujourd'hui en fonction de ce qu'a expliqué M. Le Fur. Les gens ne demandent qu'à vivre en bonne compagnie !

M. Jean-Charles Taugourdeau - En compagnie des cochons ?

M. Jean Gaubert - Maire depuis vingt ans, j'ai soutenu le développement de villages où se trouvaient des fermes. Le pire, pour un paysan, est de se retrouver isolé : alors naissent l'incompréhension et la suspicion, parfois jusqu'au procès. Je souhaite donc une solution dans le cadre de ce qu'a proposé M. Le Fur, avec une servitude opposable, donc inscrite dans l'acte notarié.

L'amendement 743 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Gaubert - L'amendement 772 pose la question des opérations en cours d'aménagement foncier et de remembrement. Auront-elles une incidence sur le niveau des DPU ?

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Il est impossible d'imposer des règles financières concernant les exploitants dans les procédures d'aménagements fonciers, car elles concernent les propriétés et non les exploitations. Je souhaite régler le sort des droits à paiement unique après aménagement foncier par voie réglementaire, à partir des bases du règlement européen.

L'amendement 772 est retiré.

M. Jean-Louis Léonard - L'amendement 649 sur le droit de préemption des SAFER était provocateur : je le retire, ainsi que les amendements 652 rectifié et 651. Je retire également le 650 car j'ai obtenu satisfaction avec le 1050.

L'amendement 653, lui, procède d'un constat : certains propriétaires sont dans une misère noire et n'ont pas de quoi subvenir à leurs besoins. Or, étant propriétaires, ils sont contraints par un bail à ferme et ne bénéficient pas de la solidarité nationale. Le mécanisme que je propose leur donne, à condition que leur revenu soit inférieur à un SMIC et demi - il s'agit souvent de retraités - droit à un congé de vente. Il ne s'agit pas d'une restriction au fermage mais d'une mesure sociale, qui ne concerne que peu de gens, mais qui sont tous dans une situation dramatique.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Je comprends l'intérêt de cet amendement, mais j'y suis défavorable. Il vise à créer une possibilité de reprise, certes pour des propriétaires au revenu modeste, mais qui interfère avec l'économie traditionnelle du fermage. Pour l'avenir, les propriétaires ayant choisi de conclure un bail cessible pourront, arrivés à l'échéance, exercer leur droit de reprise en toute liberté.

M. Jean-Louis Léonard - L'échéance étant lointaine, certains propriétaires ont largement le temps de passer l'arme à gauche ! La mesure que je propose est transitoire et doit être utilisée avec parcimonie : il existe des commissions ad hoc pour cela. On pourrait faire un geste pour ces gens - nous en avons tous dans nos CCAS.

L'amendement 653, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Brottes - L'amendement 1014 vise à résoudre un problème très courant en zone de montagne, mais pas seulement. Lorsqu'un jeune reprend une installation, la maison d'habitation reste occupée par l'ancien exploitant. On ne va pas le pousser vers une lointaine maison de retraite, peut-être en ville ! Or, si le repreneur ne trouve pas un logement à proximité, ce qui est fréquent, il lui est très difficile de mener son activité. On pourrait donc permettre la construction, dans le périmètre de l'exploitation, d'un bâtiment - voire d'un logement à caractère social - pour le repreneur et sa famille, bien qu'il s'agisse d'une zone agricole, donc non constructible. C'est une mesure certes dérogatoire, et qu'il faut donc bien encadrer, mais indispensable.

M. le Rapporteur - Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais je reconnais bien là l'attachement de M. Brottes à ses zones de montagne... Quoi qu'il en soit, ce dispositif touche au logement et il convient de le rattacher à la prochaine loi Borloo.

M. Jean-Charles Taugourdeau - Je préférerais qu'on réfléchisse au moyen d'inciter les exploitants à la retraite à quitter leur logement. Tôt ou tard, à force de construire dans les exploitations, des logements reviendront à des non exploitants qui seront confrontés aux lois sur l'eau, l'air, le bruit et autres... Il est tout de même dommage d'encourager le mitage du territoire sans véritable raison puisque, tous comptes faits, tout le monde finit par mourir !

M. François Brottes - J'ai au moins dix cas dans ma circonscription de reprises d'exploitation qui vont échouer faute de logement à une distance raisonnable ! On ne peut ni faire chambre commune avec l'ancien exploitant, ni l'envoyer ailleurs ! D'autant qu'il ne trouvera pas plus de logements à proximité... Le problème existe partout, pas seulement dans les zones de montagne. Certes, chacun finit par mourir, donc on n'a pas besoin de tant de logements qu'on puisse parler de mitage ! Et ces habitations bénéficieront strictement à des exploitants agricoles.

Je connais des jeunes qui couchent dans leur voiture, pour avoir repris une exploitation dans ces conditions ! C'est peut-être anecdotique, mais il faut trouver une réponse. Je ne suis pas contre celle de trouver un logement à l'exploitant sortant, mais que faire lorsqu'on ne trouve pas ? Et il ne sera jamais facile, humainement, de l'arracher au cadre où il voulait finir sa vie.

L'amendement 1014, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jacques Le Guen - L'amendement 1067 est défendu.

M. le Rapporteur - La commission ne l'a pas examiné. A titre personnel, ne disposant pas d'assez d'éléments, j'y suis plutôt défavorable.

M. le Ministre - Même avis.

M. Jacques Le Guen - Dans la conchyliculture, les producteurs dépendent de l'ENIM lorsqu'ils sont embarqués et de la MSA dans le cas contraire. Or, la MSA accorde une exonération de cotisations pendant cinq ans aux jeunes installés, ce qui n'est pas le cas de l'ENIM. Cet amendement me semble donc répondre à un simple problème d'équité.

M. le Ministre - Je comprends votre souci et je vais faire étudier votre proposition par l'ENIM. 

M. Jacques Le Guen - Dans ce cas je retire l'amendement 1067.

M. le Rapporteur - L'amendement 312 est identique à celui que va défendre M. Feneuil.

M. Philippe Feneuil - L'amendement 883, 2e rectification, revient sur un vieux débat concernant l'assiette des cotisations sociales. L'exploitant locataire déduit ses charges de l'assiette de ses cotisations sociales. Le propriétaire exploitant les déduit de son revenu cadastral, lequel n'a pas évolué depuis... ma naissance, au moins ! Il y a donc une disparité entre ces deux catégories d'exploitants. Cette proposition a déjà été présentée des dizaines de fois, mais je ne pouvais pas ne pas y revenir...

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Les agriculteurs ne comprendraient pas que nous ne fassions rien au sujet des cotisations sociales, dont le poids est souvent insupportable, et tel est l'objet de l'amendement 261 rectifié. Quelle est la situation actuelle ? Alors que le salarié ne paie de cotisations sociales que sur son travail, l'agriculteur propriétaire-exploitant est taxé sur une base qui comprend à la fois son travail et son patrimoine. Une telle inégalité de traitement n'est plus acceptable. En 1994, nous avons obtenu du gouvernement de l'époque que la « rente du sol » puisse être déduite de la base, en fonction du revenu cadastral des terres. Et le dispositif trouvait alors sa logique dans le fait que la révision des revenus cadastraux était présentée comme imminente. Vingt ans après, elle n'est toujours pas intervenue et nous ne sommes pas dans un régime d'indexation à même de garantir un traitement équitable des différentes situations. C'est pourquoi notre amendement tend à baser la déduction pour « rente du sol » non plus sur le revenu cadastral mais sur le barème des locations des terres agricoles, tel qu'il résulte du statut du fermage. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP)

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné cet amendement et j'invite ses auteurs à le retirer. En réalité, il n'est pas temps de légiférer à ce sujet. Lorsque, conformément à l'engagement du Président de la République, la taxe sur le foncier non bâti aura été progressivement supprimée et que les revenus cadastraux auront été revus, nous serons au pied du mur ! Pour l'heure, l'adoption de ces amendements risquerait de compromettre l'équilibre des comptes du FFIPSA.

M. le Ministre - Même analyse que votre rapporteur. Je vois bien l'intérêt de ces amendements et je comprends l'intention de leurs auteurs, mais votre collègue Yves Censi, président du conseil de surveillance du FFIPSA, pourrait témoigner de la fragilité de sa situation financière ; dès lors, il ne me semble envisageable de se priver d'une recette de 70 millions alors que nous n'avons déjà pas les moyens d'assurer le désendettement du fonds.

M. François Guillaume - Au risque de surprendre certains - bien que ma position n'ait pas varié depuis vingt-cinq ans ! -, je partage l'avis du ministre. S'agissant de l'assiette des cotisations, Marc Le Fur a raison : il est inéquitable d'inclure le loyer des terres et il faut mettre fin à cette situation. Il en va autrement pour ce qui concerne les taux : si, en moyenne, les agriculteurs perçoivent une pension de retraite dérisoire - le montant des retraites agricoles se situe dans une fourchette comprise entre 4 500 et 14 000 euros par an ! -, c'est aussi parce qu'ils ont refusé, en tant qu'actifs, de cotiser dans des proportions équivalentes à celles des autres catégories professionnelles et l'indispensable compensation démographique ne pourra pas tout régler. Des cotisations faibles, c'est bien, mais cela ne peut pas procurer des pensions suffisantes.

Moralité, il faut réformer le système mais l'on ne peut exonérer les agriculteurs du paiement de cotisations équivalentes à celles des autres secteurs d'activité. Je défendais déjà cette position lorsque j'étais président de la FNSEA et un très instructif rapport de la Cour des comptes a confirmé son bien-fondé.

M. le Ministre - Bravo pour cette position très responsable !

M. Jean Gaubert - Les éléments sur lesquels sont assises les cotisations sociales agricoles sont hors d'âge : songez que l'on se réunit encore en préfecture pour fixer arbitrairement des régimes forfaitaires pouvant conduire à taxer des personnes n'ayant dégagé aucun revenu ! Il n'est que temps de s'attaquer aux problèmes d'assiette car l'équité commande de fixer les cotisations en fonction du revenu réalisé. Tout autre mode de calcul conduit à des aberrations.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Je comprends les arguments du Gouvernement et notre intention n'est évidemment pas de mettre en difficulté le FFIPSA. Les gouvernements successifs semblent vouloir ignorer le problème, alors que, localement, les propriétaires exploitants les mieux conseillés - et souvent les plus prospères - trouvent des solutions, notamment en se mettant en société sous le régime de l'EARL. Qui est perdant ? Les plus petits qui, parce qu'ils n'ont pas les moyens de se constituer en société, paient le maximum de cotisations. Il est donc indispensable de réformer l'assiette ; s'agissant des taux, je pense que la banalisation du régime ne serait pas défavorable à la profession. Monsieur le ministre, si vous êtes d'ores et déjà en mesure de fixer un calendrier de travail pour approfondir ces questions, je suis prêt à retirer mon amendement.

M. le Ministre - Nous avons déjà abordé le sujet lors de l'examen de la loi pour le développement des territoires ruraux et j'entends bien la volonté des parlementaires d'avancer sur ces questions. Il m'est difficile de fixer un calendrier dès à présent mais, conformément aux engagements que nous avons pris hier avec M. Méhaignerie, un groupe de travail sera réuni pour proposer des solutions dans les meilleurs délais.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Je retire l'amendement 261 rectifié.

M. Philippe Feneuil - Sans doute ne me suis-je pas montré plus convaincant que mes prédécesseurs et croyez bien que je le regrette. Plusieurs ministres successifs se sont déjà engagés à régler le problème... Mais puisque Dominique Bussereau le fait à son tour, je retire moi aussi mon amendement !

Les amendements 312, 883, 2e rectification, et 261 rectifié sont retirés.

M. Philippe-Armand Martin - Les personnes dirigeant une exploitation dont l'importance est inférieure aux seuils d'assujettissement et supérieure à un minimum fixé par décret acquittent une cotisation dite de solidarité, non génératrice de droits. Mon amendement 6 tend à la supprimer, car cette cotisation frappe des personnes à revenus modestes - notamment, dans ma région, de petits viticulteurs - sans rien leur apporter en retour.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement, jugeant qu'il n'était pas inséré à la place qui conviendrait. Mais vous devriez obtenir satisfaction prochainement, Monsieur Martin !

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 6 est retiré.

M. le Ministre - L'amendement 395, auquel j'ai fait allusion lors de la discussion générale, vise à supprimer la cotisation de solidarité à la charge des associés de société qui ne participent pas aux travaux. Cet amendement s'inscrit pleinement dans l'esprit de ce projet de loi puisqu'il favorise l'évolution de l'exploitation agricole : en évitant de pénaliser les revenus de capitaux des non exploitants, il contribuera à développer l'investissement dans les exploitations sous forme sociétaire.

M. le Rapporteur - Avis très favorable. Les amendements qui suivent ne diffèrent que sur la forme. Je demande donc à leurs auteurs de les retirer pour se rallier à celui du Gouvernement.

M. Philippe Feneuil - Notre amendement 802 rectifié étant satisfait, je le retire.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - La commission des finances a adopté à l'unanimité un amendement analogue, le 262 rectifié, que nous retirons. Nous nous sommes réjouis lorsque le Premier ministre a annoncé à Rennes cette mesure de nature à faciliter grandement la transmission des exploitations. Jusqu'ici, les personnes qui restaient dans la société qu'elles avaient transmise s'acquittaient de la cotisation sans en retirer de bénéfice. Les 20 millions d'euros que coûte cette bonne et intéressante mesure seront par ailleurs recyclés vers l'agriculture.

M. Jean Gaubert - Je ne peux que confirmer les propos qui viennent d'être tenus. Si cette mesure tend à réduire le budget des prestations sociales, elle facilite le désengagement progressif des cédants. Je connais un couple qui devait verser une cotisation annuelle de 4 800 euros, après avoir laissé des fonds dans l'exploitation cédée à un jeune afin que celui-ci ne soit pas contraint à emprunter.

Depuis un certain temps, j'appelais de mes vœux la suppression de cette cotisation mais, étant moi-même concerné, je répugnais à insister.

L' amendement 395, mis aux voix, est adopté

M. Philippe-Armand Martin - Monsieur le rapporteur, est-ce à cet amendement que vous faisiez précédemment allusion en m'invitant à retirer l'amendement 6 ?

M. le Rapporteur - Oui, il devrait satisfaire votre demande.

M. Philippe-Armand Martin - Mais il ne s'agit pas du même problème. Mon amendement concernait des exploitants individuels et non des associés. Puis-je donc le reproposer ?

M. le Président - C'est impossible.

M. Philippe-Armand Martin - On m'a trompé !

M. le Président - Le mot est fort. On s'est trompé, on ne vous a pas trompé.

Les amendements 314, 2e rectification, 501 et 780 tombent

M. André Chassaigne - J'ai évoqué dans ma motion de renvoi en commission l'amendement 683, qui vise à assujettir les industries agroalimentaires à une cotisation de solidarité pour contribuer au financement des retraites agricoles. Aujourd'hui, seuls les agriculteurs cotisent. Or leur travail profite en particulier aux industries agroalimentaires...

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Cet amendement relève du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

M. le Ministre - Avis défavorable, sur la forme comme sur le fond.

L'amendement 683, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Simon - Je me réjouis du précédent vote mais je souhaite relever une anomalie : depuis le 1er janvier, les retraités qui touchent 8 000 euros par an payent CSG et RDS.

ART. 3 (précédemment réservé)

M. Jean Gaubert - L'amendement 492 vise à supprimer cet article qui a trait à l'un des piliers de la relation entre propriétaires et fermiers depuis 1945. Les interrogations qu'il suscite ne sont pas le fruit d'élucubrations. Certes, les représentants de la propriété foncière agricole se sont déclarés satisfaits, mais d'autres ont peut-être du souci à se faire... J'approuve votre volonté de toiletter les textes, Monsieur le ministre, mais, en raison de sa valeur emblématique, celui-ci mérite qu'on n'y touche qu'avec d'infinies précautions. Je souhaite donc que vous nous indiquiez les éléments que vous souhaitez modifier. Je ne me fais pas d'illusion : la majorité votera sans doute l'habilitation. Mais la représentation nationale est en droit de demander des éclaircissements.

M. André Chassaigne - Notre amendement 670 est également de suppression. Le statut du fermage, adopté en 1945 grâce aux luttes menées dans l'entre-deux-guerres, a en effet une forte valeur symbolique. Le modifier par ordonnance est inacceptable, d'autant que des retouches d'apparence anodine peuvent en cacher de plus importantes. Il faut donc, sans précipitation, nous préciser ce qu'elles seront, sachant qu'il aurait été plus démocratique, et plus habile, de modifier ce statut avec notre assentiment.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé les amendements de suppression. La majorité fait toute confiance au Gouvernement pour ce toilettage et le ministre a d'ailleurs promis en commission qu'il nous fournirait des précisions - sans doute allons-nous les avoir.

Monsieur Chassaigne, le statut du fermage a effectivement une grande valeur symbolique, mais la matière est très complexe et l'Assemblée ne peut passer des heures à faire un travail aussi technique.

M. le Ministre - Je réponds volontiers à la demande de la majorité comme de l'opposition, demande parfaitement légitime étant donné l'importance du statut du fermage pour notre droit et pour la vie rurale.

En recourant aux ordonnances, nous ne voulons pas toucher au contenu du statut, mais simplifier et moderniser sa rédaction et clarifier les cas de résiliation. Par exemple, la formule « ainsi qu'il est dit dans le code civil » utilisée dans différents articles du code rural sera remplacée par un simple renvoi ; il sera tenu compte des codifications successives ; nous supprimerons les références à des dispositifs qui n'existent plus, comme l'indemnité viagère de départ, et prendrons comme référence de l'âge de la retraite celui à partir duquel il n'y a plus de minoration ; seront abrogées enfin les dispositions transitoires périmées.

Il ne s'agit donc que d'un toilettage technique, destiné à rendre le texte plus compréhensible pour ses utilisateurs. Le faire en séance prendrait en effet énormément de temps. Mais je réitère mon engagement d'informer les commissions de toutes les aspects de ce toilettage.

M. André Chassaigne - Cependant, vous restez dans le vague. Je m'attendais à ce que vous apportiez des précisions de fond sur ce que contiendront les ordonnances. Le texte est certes compliqué. Mais les dispositions relatives à la résiliation, par exemple, sont essentielles. Pouvez-vous nous préciser très clairement, lundi par exemple, quels seront les changements sur ce point ?

M. Jean Gaubert - Il est normal de toiletter le statut qui comporte nombre d'éléments désuets. En revanche, vous parlez aussi de clarification des différents textes, ce qui est du rôle du Parlement...

M. le Ministre - Nous ne voulons que rendre le statut plus clair pour ceux qui le lisent.

M. Jean Gaubert - Dont acte. Nous aurions presque envie de retirer notre amendement pour vous faire plaisir. Mais nous voudrions vraiment ne pas être floués.

M. le Ministre - Je sais gré aux orateurs de l'opposition du ton qu'ils ont adopté. J'ai été pendant dix ans commissaire de la commission des lois, et j'ai toujours été surpris de constater que l'on vote des textes mais que l'on n'en abroge jamais. Le but que nous poursuivons est bien la simplification. J'en mettrai par écrit tous les éléments. Je vous en donne ma parole de ministre et ma parole d'homme.

M. Philippe Feneuil - Dans la viticulture, le métayage est encore fréquent. C'est souvent une association permettant au propriétaire et au locataire de prendre des décisions en commun, par exemple pour le rajeunissement des plantations. Je vous demande d'y être très attentif - des bruits courent - et il serait très important pour nous d'avoir des détails.

M. le Ministre - Je les donnerai lundi.

M. Jean Gaubert - L'amendement 492 est retiré.

M. André Chassaigne - Je maintiens l'amendement 670.

L'amendement 670, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 293 est rédactionnel. L'amendement 186 de la commission des lois est identique.

Les amendements 293 et 186, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

L'amendement 493 est retiré.

M. le Rapporteur - L'amendement 294 encadre l'habilitation en supprimant la notion de « modernisation », trop imprécise. La commission n'a pas examiné le sous-amendement 1053 de M. Chassaigne, ni le sous-amendement 1113 du Gouvernement, mais à titre personnel je suis favorable à ce dernier.

M. le Ministre - Le Gouvernement est favorable à l'amendement, sous réserve que soit adopté son sous-amendement 1113, qui tend, après les mots « sans objet », à rédiger ainsi la fin de l'amendement : « , en clarifiant les dispositions ambiguës et en adaptant les dispositions qui le nécessitent aux nouvelles législations ».

M. André Chassaigne - Mon sous-amendement 1053 tendait à supprimer les mots « ou devenues sans objet » qui pouvaient être interprétés de diverses manières. Je le retire - de même que l'amendement qui suit -, le sous-amendement du Gouvernement apportant les précisions nécessaires.

Le sous-amendement 1053 et l'amendement 671 sont retirés.

M. le Ministre - Comme il faut toujours répondre à la bonne volonté par la bonne volonté, et pour rassurer M. Gaubert, je rectifie mon sous-amendement en remplaçant le mot « clarifiant » par le mot « précisant ».

M. François Brottes - Je vous suggère de l'améliorer encore en remplaçant l'expression « nouvelles législations », un peu vague, par les mots « législations en vigueur ».

M. le Ministre - D'accord pour cette deuxième rectification.

Le sous-amendement 1113, 2e rectification, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 294 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 494 est retiré.

M. François Guillaume - Monsieur le ministre, nous vous faisons bien entendu confiance pour rédiger des ordonnances qui respectent l'esprit de la politique des structures. Je comprends néanmoins la position de nos collègues de l'opposition, qui participent à nos travaux sans esprit polémique et souhaitent être rassurés sur le fait que cette politique à laquelle ils croient ne sera pas mise en cause. Il serait bon que tous ceux qui le souhaitent puissent vous envoyer leurs propositions, à charge pour vous d'arbitrer ensuite.

Par mon amendement 83, je propose de viser au 2° de cet article, non seulement les « règles », mais également les « procédures » applicables en cas de résiliation ou de non renouvellement des baux. En effet, les procédures sont parfois utilisées par les fermiers pour retarder l'échéance de la résiliation. De même, elles font bien souvent obstacle à l'application des décisions préfectorales prises à l'encontre de ceux qui contreviennent à la politique des structures : quand, par exemple, un préfet interdit à un agriculteur d'exploiter telle parcelle, il transmet le dossier au procureur, lequel, la plupart du temps, le classe sans suite... La multiplication de ces cas de non sanction donne le sentiment que la politique des structures existe bien dans les textes, mais qu'elle n'est pas appliquée.

M. le Rapporteur - La commission a adopté cet amendement particulièrement pertinent.

M. le Ministre - Avis favorable, bien sûr.

L'amendement 83, mis aux voix, est adopté.

M. André Chassaigne - La procédure des ordonnances suscitant notre méfiance, notre amendement 672 a pour objet de placer des garde-fous.

M. le Rapporteur - La commission étant moins méfiante que M. Chassaigne, elle n'a pas retenu cet amendement !

M. le Ministre - Que M. Chassaigne se rassure : cette habilitation ne saurait remettre en cause ni les droits du preneur au renouvellement de son bail ni les protections dont il bénéficie, que nous voulons bien au contraire garantir par une simplification du droit. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable.

L'amendement 672, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Charles Taugourdeau - Mon amendement 10 visait à étendre l'habilitation donnée au Gouvernement aux modifications rendues nécessaires par la pratique de l'agroforesterie - qui consiste à associer arbres et cultures et a un intérêt économique et environnemental indéniable -, mais le rapporteur m'ayant indiqué qu'il était anticonstitutionnel, je le retire.

M. Michel Raison - Même position en ce qui concerne le 647, identique.

Les amendements 10 et 647 sont retirés,

M. Jean Gaubert - Pourrions-nous connaître la raison de cette inconstitutionnalité ?

M. le Rapporteur - Le Conseil constitutionnel a rappelé, dans sa décision 2004-510 DC, que seul le Gouvernement peut demander l'habilitation et que celle-ci ne peut être élargie.

M. François Brottes - Il peut être utile de procéder par ordonnance, notamment pour codifier, et je crois me souvenir d'une initiative parlementaire concernant le code de l'énergie. Il ne faudrait pas interdire au Parlement de recommander au Gouvernement de prendre des ordonnances. Mais si je comprends bien, le Conseil Constitutionnel aurait déjà statué pour l'éternité...

M. le Président - Je vous rappelle que nous parlons de deux amendements qui viennent d'être retirés...

M. le Rapporteur - Je vous propose, Monsieur Brottes, d'en rediscuter une fois que j'aurai recueilli de plus amples informations.

L'article 3 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 3 (précédemment réservé)

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - L'amendement 187 est défendu.

M. Michel Raison - Les amendements 485 rectifié et 967 également.

M. le Président - Ces trois amendements sont identiques.

Les amendements 187, 485 rectifié et 967, acceptés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

ART. 4

M. le Rapporteur - Les amendements 295 et 296 sont rédactionnels.

Les amendements 295 et 296, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

M. Philippe Feneuil - Je retire l'amendement 636, au profit de celui de la commission.

M. le Rapporteur - Après l'adoption de la loi d'orientation agricole, toutes les EARL relèveront de plein droit du régime de l'impôt sur le revenu, mais il est prévu une phase de transition de trois mois, pendant laquelle les entreprises soumises de plein droit à l'impôt sur les sociétés pourront opter entre le maintien de ce régime et le nouveau régime. Ce choix suppose une réflexion approfondie et, par l'amendement 297, nous proposons de porter à six mois la durée de cette phase transitoire.

L'amendement 297, approuvé par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 4 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 4

M. Philippe Armand-Martin - L'amendement 397, 2e rectification, tend à un alignement des exonérations fiscales consenties aux exploitants constitués en société d'exploitation par l'article 151 septies du code général des impôts. Il semble logique que l'ensemble des plus-values réalisées dans une exploitation agricole bénéficient des mêmes exonérations, quelle que soit la forme de la société.

M. le Rapporteur - Avis défavorable

M. le Ministre - Avis favorable. Et je lève le gage.

L'amendement 397, 2e rectification, mis aux voix, est adopté.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - L'amendement 254 rectifié permettra aux agriculteurs de se conformer plus facilement aux normes environnementales. Dans l'état actuel de la législation, un agriculteur qui réalise seul un tel investissement ne sera pas imposé au titre de la taxe professionnelle, alors que deux agriculteurs qui s'associent dans ce but, sous la forme d'un GIE, seront imposables. Cette différence de traitement, au détriment des petits exploitants, n'a pas de raison d'être. L'amendement fera en outre progresser la cause de l'environnement.

M. le Rapporteur - La commission a accepté cette disposition de bon sens.

M. le Ministre - Monsieur Le Fur, avez-vous pris en compte les observations de la DLF ?

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis - Oui, la taxe professionnelle sera appliquée comme s'il s'agissait d'un investissement direct par un agriculteur.

M. le Ministre - Dans ce cas, avis favorable. S'il reste des divergences sur la rédaction exacte, nous reverrons cela ensemble avant l'adoption définitive de la loi. Je lève naturellement le gage.

L'amendement 254 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Gaubert - L'amendement 774 apporte une réponse à l'absence actuelle de moyens de coercition dans le cas où le propriétaire ne veut pas louer au fermier désigné par la CDOA. Les DPU seront désormais versés à la réserve départementale si la CDOA refuse son accord. Cette disposition simple permettra aux jeunes agriculteurs de s'installer plus facilement en tarissant les demandes illégitimes - sans accord de la CDOA, pas de DPU !

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Avis défavorable également : l'amendement n'est pas conforme à la réglementation européenne.

M. Jean Gaubert - En quoi ?

M. François Guillaume - Cette mesure est la seule en effet qui garantirait que soit appliquée l'interdiction faite à un exploitant, après avis de la CDOA, d'exploiter des parcelles. Actuellement, le procureur, saisi, classe généralement sans suite et l'agriculteur continue d'exploiter. Si on le prive de primes, on peut être sûr qu'il obtempérera !

M. le Ministre - Monsieur Gaubert, la réglementation européenne prévoit explicitement que le transfert des DPU entre agriculteurs pourra s'effectuer avec ou sans transfert de foncier. A contrario, la location de ces droits ne pourra se faire qu'avec le transfert d'un nombre équivalent d'hectares. La mesure que vous proposez ne serait donc ni correcte en droit, ni même applicable. Cependant, la loi Glavany de 1999 garantit que la réglementation du contrôle des structures s'appliquera lors de tout transfert de foncier aboutissant à la mise en valeur par un exploitant de nouvelles terres. Et, en cas d'infraction, les sanctions pécuniaires propres au contrôle des structures sont lourdes !

M. Jean Gaubert - Vous savez bien que, dans la pratique, ces sanctions ne sont pas appliquées ! Je ne puis vous suivre, dans la mesure où on passe d'un système où les droits étaient attachés à la terre à un système où ils le sont à l'exploitant. Mais surtout, les règles de subsidiarité permettent à chaque pays d'adapter sa politique des droits à paiement unique - à preuve, ce qu'ont fait les Espagnols et les Allemands. J'aurais préféré que vous annonciez une expertise supplémentaire, plutôt que de faire cette réponse bien peu fondée !

M. le Ministre - Je vous fournirai les textes.

L'amendement 774, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Charles Taugourdeau - L'amendement 42 vise à harmoniser la définition de l'activité agricole, afin qu'un exploitant qui s'installe sache à quel droit se référer.

M. Philippe-Armand Martin - Il existe aujourd'hui quatre définitions de l'agriculture : sociale, fiscale, juridique et économique. L'amendement 398 a pour objet de permettre au Gouvernement d'unifier, par voie d'ordonnance, la définition de l'agriculteur, ce à quoi les organismes sociaux et fiscaux ne peuvent que gagner.

M. Philippe Feneuil - Même argument à l'appui de l'amendement 631.

M. le Rapporteur - Avis défavorable : ces amendement aussi sont contraires à l'article 38 de la Constitution.

M. le Ministre - Même avis.

Les amendements 42, 398 et 631, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean Gaubert - Notre amendement autorisant à constituer un GAEC entre conjoints s'est vu opposer l'article 40. J'aimerais que le président de la commission des finances s'en explique au cours d'une prochaine séance, car il y a distorsion évidente dans la mesure où on peu former des GAEC entre concubins ou entre pacsés - et, de plus, c'est scandaleusement défavorable à l'industrie du mariage ! (Sourires).

M. André Chassaigne - J'avais moi aussi un amendement similaire, qui figurait dans la liasse des amendements distribués et qui n'a pas non plus été soumis à discussion. Ce projet de loi favorise beaucoup l'agriculture sociétaire, mais oublie les GAEC... et néglige une revendication ancienne, fondée sur l'égalité dans le couple.

M. le Président - L'amendement 673 a été déclaré irrecevable au regard de l'article 40 de la Constitution. C'est par erreur qu'il s'est trouvé dans la liasse.

M. André Chassaigne - Ne pourrions-nous cependant revenir sur ce sujet lundi ?

M. François Guillaume - Un tel amendement aurait de graves conséquences. Ce n'est pas tant l'impossibilité du GAEC entre conjoints que la possibilité du GAEC entre pacsés qui est scandaleuse ! On considérerait les deux conjoints comme chefs d'exploitation, ce qui peut emporter le doublement des aides et des surfaces. Autrement dit, ce serait un détournement de la politique anti-cumuls, et j'y suis très hostile.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu lundi 10 octobre, à 16 heures.

La séance est levée à 19 heures 25.

            La Directrice du service
            du compte rendu analytique,

            Catherine MANCY

ORDRE DU JOUR

DU LUNDI 10 OCTOBRE 2005

SEIZE HEURES : 1re SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 2341) d'orientation agricole.

Rapport (n° 2547) de M. Antoine HERTH, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

Avis (n° 2544) de Mme Brigitte BARÈGES, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Avis (n° 2548) de M. Marc LE FUR, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 2e SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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