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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2005-2006 - 12ème jour de séance, 28ème séance

3ème SÉANCE DU JEUDI 20 OCTOBRE 2005

PRÉSIDENCE de M. Jean-Luc WARSMANN

vice-président

Sommaire

LOI DE FINANCES POUR 2006 (suite) 2

ART. 23 2

ART. 24 5

ART. 25 13

APRÈS L'ART. 25 14

ART. 26 17

ART. 27 19

APRÈS L'ART. 27 20

ART. 28 22

ART. 29 24

ORDRE DU JOUR
DU VENDREDI 21 OCTOBRE 2005 25

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

LOI DE FINANCES POUR 2006 (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2006.

M. le Président - Je rappelle qu'à la demande du Gouvernement, les amendements portant articles additionnels après l'article 9, ainsi que les articles 10 à 22 et les articles additionnels s'y rattachant sont réservés jusqu'après l'examen de l'article 29.

ART. 23

M. Augustin Bonrepaux - On ne peut examiner ces articles concernant les collectivités locales sans évoquer la réforme des finances locales, en seconde partie. Sans tenir compte des travaux de la commission spécialement créée à cet effet, le Gouvernement institue un plafonnement dont la charge sera tout entière portée par les collectivités. Depuis le début de ce débat, je demande des simulations afin d'avoir une idée de l'état des finances locales après la réforme. Il serait bon de nous les transmettre sous peu car nous en discuterons dès le 16 novembre.

Tous les élus locaux doivent prendre conscience du traitement qu'ils vont subir. Les régions, qui tirent leurs ressources exclusivement du foncier bâti et de la taxe professionnelle, seront privées de la moitié de l'évolution de la taxe professionnelle malgré un transfert de compétences accru, notamment concernant le ferroviaire. Quant aux départements, ils ne pourront pas faire face au transfert du RMI, bientôt à celui des TOSS et des routes, s'ajoutant aux nouvelles charges qui pèseront sur eux avec la mise en œuvre de la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées et de la loi de modernisation de la sécurité civile, sans accroître la pression fiscale sur les ménages. De surcroît, vous allez leur supprimer ce soir un centaine de millions de crédits.

Enfin, les communautés de communes à taxe professionnelle unique seront les plus en difficulté. Si elles ne peuvent compter sur l'évolution de la taxe professionnelle parce que les entreprises disparaissent, par quel miracle continueront-elles à supporter toutes les charges qui leur incombent ? Une de leurs tâches essentielles est le développement économique et, partant, l'aide à l'installation d'entreprise. Mais comment feront-elles quand l'Etat lui-même, par votre faute, n'en a plus les moyens ? Dans mon département, M. Estrosi me répond qu'il n'a plus de crédits d'Etat pour l'installation d'entreprises. Cessez donc d'affirmer dans l'hémicycle que l'emploi est votre priorité !

M. Jean-Pierre Brard - Le contrat de croissance et de solidarité, qui assure aux collectivités locales un concours de l'Etat indexé sur l'évolution du taux d'inflation prévisionnelle et du taux de croissance, était prévu à l'origine pour une durée de trois ans afin de permettre aux collectivités de mieux prévoir leurs ressources. Or, il est reconduit d'année en année et sa reconduction effective a lieu fort tard, au mieux en septembre. Afin de remédier à cette situation préjudiciable aux relations entre l'Etat et les collectivités, nous proposons, par l'amendement 428, de prévoir de nouveau la reconduction du contrat pour une période de trois ans. Au vu de l'origine politique très diverse des signataires, il ne vous aura pas échappé que cet amendement correspond à l'intérêt général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances - La commission ne l'a pas examiné. Je note qu'il est co-signé par les maires de grandes villes, ce qui explique le voisinage de MM. Brard et Grouard, respectivement maires de Montreuil et d'Orléans ou encore de Mme Le Brethon, maire de Caen.

Le contrat de croissance et de solidarité représente une charge considérable pour les finances de l'Etat. En 2006, ce contrat coûtera un milliard d'euros supplémentaire à l'Etat, soit une augmentation de 2,4 %, tandis que les dépenses générales de l'Etat ne progresseront que de 1,8 %. Si l'on ajoute les dégrèvements - la partie des impôts locaux que l'Etat prend à sa charge -, qui représenteront en 2006 un surcoût de plus de 2 milliards d'euros par rapport à 2005, plus de 3 milliards d'euros seront transférés du budget de l'Etat à celui des collectivités locales.

S'il est légitime que les collectivités bénéficient de la croissance - ce contrat est indexé à 33 % de la croissance en sus de l'inflation -, il serait dangereux, compte tenu de l'état des finances publiques, de l'inscrire dans un engagement pluriannuel. Rappelons que le ministre annonçait hier qu'il faudrait peut-être prévoir pour le budget de l'Etat en 2007 une augmentation nulle en valeur. Il n'en demeure pas moins que les concours de l'Etat aux collectivités locales doivent rester indexés sur la croissance car ce sont elles qui réalisent les trois quarts de l'investissement civil en France et elles financent très largement les politiques de solidarité et de l'emploi. Avis défavorable.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat - Avis également défavorable. Sur ces questions, M. Carrez et moi-même, élus de petites villes, avons peut-être plus de recul. Cela dit, cette proposition transcende largement les clivages politiques traditionnels, et nous nous en félicitons !

M. le Rapporteur général - Hugues Martin, le maire de Bordeaux, est également signataire !

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Pour autant, l'heure est plutôt à la maîtrise des dépenses. Notons que l'Etat a respecté ses engagements rubis sur l'ongle cette année et continuera dans cette voie en 2006. Ne demandons donc pas l'impossible - des contrats de deux ans, de trois ans : pourquoi pas des baux emphytéotiques ?

M. Jean-Pierre Brard - Très bien ! Mais serez-vous encore là ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Espérons-le !

M. Jean-Pierre Brard - En somme, vous me répondez : « Faites ce que je dis, mais ne faites pas ce que je fais ». Cet amendement s'inspire en effet directement des méthodes du Premier ministre, qui a choisi de présenter dans ce projet de loi de finances une réforme pour deux années, 2006 et 2007, et ce que fait le Premier ministre, vous n'acceptez pas que nous le fassions ! Que voulez-vous, je suis cartésien, et vous me semblez manquer de cohérence. Les maires n' ont-ils pas clairement affiché leur refus d'une gestion à la petite semaine ? Pour autant, je suis persuadé que votre ville de Meaux a adhéré à une association de communes, laquelle fait valoir des préoccupations spécifiques, sinon, vous qui êtes un gestionnaire avisé dans votre commune - on ne peut hélas en dire autant au niveau de l'Etat - vous ne dépenseriez pas aussi inconsidérément son argent ...

Des villes comme Orléans ou Bordeaux sont des villes-centres qui ont besoin de planifier d'autant qu'elles ont des charges liées à leur centralité.

M. le Rapporteur général - Le tramway par exemple !

M. Jean-Pierre Brard - Comme à Noisy-le-Sec (Sourires). Je rappelle à mes collègues que cet amendement a été cosigné par des personnalités aussi différentes que les maires de Bordeaux, d'Argenteuil, d'Orléans ou moi-même, ce qui témoigne de la force et de la légitimité de notre revendication.

L'amendement 428, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Nous le dirons au maire de Bordeaux !

M. Augustin Bonrepaux - Il faut arrêter de dire que l'Etat fait l'effort de reverser une dotation aux départements, car il ne fait que ce qui est prévu par la loi.

M. Jean-Pierre Brard - Son devoir !

M. Augustin Bonrepaux - L'Etat reverse en vérité aux départements ce qu'il leur a pris, car ne l'oublions pas, la DGF était à l'origine une taxe locale.

Vous nous rétorquez que l'Etat reverse aussi les dégrèvements, mais outre que les collectivités locales ne sont pour rien dans cette décision qui fut celle du Parlement, il est tout de même normal que vous procédiez de la sorte, à moins que vous ne vouliez priver les collectivités de toute ressource !

Monsieur le ministre, vous ne cessez d'exiger des collectivités qu'elles réduisent leurs dépenses, mais voulez-vous donc qu'elles renoncent aux compétences que vous leur avez transférées ? Qu'elles n'assurent plus les services publics laissés à l'abandon par l'Etat ? Qu'elles ne favorisent plus la création d'entreprise ?

Comment pouvez-vous vous targuer de telles hausses des dotations, quand vous en reprenez une partie ? En fait de contrat de progression, il s'agirait plutôt de contrat de régression, car c'est près de 10 % des dotations que vous allez reprendre au titre de la compensation de la taxe professionnelle.

Aussi mon amendement 184 tend-il à faire évoluer l'ensemble des dotations suivant l'inflation majorée non pas de 33 %, mais de 50 % de la croissance, comme c'est le cas pour la DGF.

Je suis d'autant plus persuadé du bien-fondé de cette proposition que nous avons entendu ce matin que toutes les communes - y compris Versailles - devaient augmenter leurs impôts pour financer leurs nouvelles compétences.

M. Hervé Mariton - C'est faux !

M. Augustin Bonrepaux - Evidemment, vous avez tant de taxes professionnelles dans la Drôme que vous ne vous sentez sans doute pas concerné !

M. Jean-Pierre Brard - Il a une centrale nucléaire !

M. Augustin Bonrepaux - Et vous vous permettez de donner des leçons !

M. le Rapporteur général - La commission n'a pas examiné cet amendement, mais figurez-vous que j'ai pour lui beaucoup de sympathie, car il me rappelle un temps où, dans l'opposition, je le déposais chaque année avec M. Bouvard. Nous nous heurtions alors à l'opposition obstinée du président de la commission des finances de l'époque, qui nous accusait de démagogie à l'égard des collectivités locales. Ce président, c'était Augustin Bonrepaux ! Et aujourd'hui que j'assume sa fonction, je me sens plus attentif aux finances de l'Etat ; aussi ne puis-je que reprendre les excellents arguments qui étaient les siens pour vous demander à mon tour de rejeter cet amendement.

M. Jean-Pierre Brard - Esprit de vengeance !

M. Jean-Louis Idiart - C'est la loi du talion !

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Même avis.

M. Augustin Bonrepaux - En 1997, nous avons remplacé le contrat de stabilité qui ne prenait en compte que l'inflation par le contrat de croissance, faisant ainsi progresser les dotations selon l'inflation majorée de 33 %. Nous ne pouvions pas tout faire en même temps ! Mais surtout, il n'y avait pas à cette époque autant de transferts de charges qu'aujourd'hui ! Et je ne suis pas le seul à les dénoncer, puisqu'Etienne Pinte nous en a lui aussi dressé la liste.

L'amendement 184, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - M. Mariton n'a de cesse de nous rappeler à la bonne gestion, mais je ne supporte pas que l'on parle la bouche pleine à côté de ceux dont les assiettes sont vides. M. Mariton, assis sur une mine d'or, certes un peu radioactive, n'a pas qualité pour nous donner des conseils.

L'article 23, mis aux voix, est adopté.

ART. 24

M. Augustin Bonrepaux - Je voudrais dénoncer l'hypocrisie de cet article et de son exposé sommaire, où l'on nous explique que les départements ne perdront rien, et que leur dotation de compensation sera même majorée. Tout serait donc pour le mieux, comme avait tenté de m'en persuader le ministre des collectivités locales au comité des finances locales.

En fait, il est évident qu'une fois encore les plus pauvres seront mis à contribution, comme en témoigne l'exemple de la Creuse, sur laquelle le prélèvement sera tel qu'elle devra augmenter ses impôts locaux. Il en va de même pour la Lozère, ou pour mon département, pour lequel le prélèvement sera de 436 000 euros.

Le Gouvernement prétend compenser à l'euro près, mais comment en serait-il ainsi s'il nous reprend, comme dans mon département, la moitié de ce qu'il nous verse ?

Le déficit des départements s'élève cette année à 1 milliard, soit deux fois plus que l'an dernier. Comment vont-ils payer maintenant qu'on leur réduit la DGE ? Vous tirez argument du fait qu'une dotation est très faible pour la supprimer. Pourquoi ne pas plutôt l'augmenter, pourquoi ne pas la transférer aux services départementaux d'incendie et de secours, dont les crédits d'équipement ne sont pas suffisants ?

Peut-être serait-il équitable de faire porter l'effort sur les départements aussi riches que les Hauts-de-Seine, mais, de grâce, n'étouffez pas encore un peu plus les collectivités les plus pauvres. Vos propositions sont inacceptables et je défendrai un amendement tendant à supprimer cet article.

M. Jean-Louis Idiart - Je suis toujours stupéfait d'entendre l'Etat nous donner des leçons de vertu alors qu'il continue à ponctionner impunément l'ensemble des collectivités, sans que la dette ni le déficit ne soient maîtrisés. Il est aberrant de sermonner les principales collectivités et de prétendre que si les résultats obtenus ne sont pas au rendez-vous, c'est de la faute des élus locaux ! Dans mon département, la Haute-Garonne, qui n'est certes pas le plus pauvre de France, nous étions parvenus à stabiliser la fiscalité depuis plusieurs années. Mais, depuis deux ans, de transferts en désengagements de l'Etat, nous nous sommes vus contraints d'alourdir la pression fiscale, ne fût-ce que de manière modérée. Dans ce contexte, les nouvelles annonces d'amputation de la DGE à hauteur de 70 % sont particulièrement inacceptables. Mobilisées pour participer à la modernisation des grands axes routiers internationaux, nos collectivités doivent à présent faire face au désengagement de l'Etat. On organise, à Barcelone ou ailleurs des grand-messes sur l'aménagement du territoire et sur les grands équipements structurants, mais, pendant ce temps, l'Etat nous sucre nos crédits et nous nous en trouvons gravement pénalisés. Il en va de même pour les travaux de désenclavement des départements les plus ruraux : après avoir obtenu une participation massive des collectivités locales, l'Etat se désengage, laissant élus locaux et population dans le désarroi. Il est grave, Monsieur Mariton, de mettre en cause les collectivités lorsque l'on n'est pas soi-même irréprochable dans le respect de la parole donnée. Cela contribue à casser la relation de confiance entre l'Etat et les collectivités, laquelle est pourtant au cœur historique de la décentralisation. Méfiez-vous : en rompant ce lien de confiance, c'est à l'idée même de décentralisation contractuelle que vous portez atteinte. Dès lors, tous vos discours sur le partenariat et sur l'aménagement concerté du territoire ne sont que du blabla (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Louis Dumont - En 1972, lors des premiers transferts de l'Etat aux départements concernant les routes, le rapporteur financier du modeste conseil général de la Meuse alertait déjà, au travers d'un rapport très dense, sur le risque de faillite de nos collectivités. Plus de trente ans après, nous n'avons guère progressé et les transferts des charges non compensés se sont multipliés...

M. Philippe Auberger - Ça ! 1982 est passé par là !

M. Jean-Louis Dumont - Seule éclaircie dans un département passablement sinistré par les grandes crises sidérurgiques, nous avions obtenu qu'une ligne à grande vitesse s'arrête enfin en Meuse en 2007. Bien entendu, la région Lorraine et les principales villes du département s'étaient mobilisées pour participer au financement de la LGV. Insatiable, l'Etat nous en demande toujours plus et le point de rupture sera bientôt atteint. A l'évidence, les beaux discours sur l'Etat régulateur et solidaire ne sont pas suivis d'effets et les présents articles du PLF pour 2006 montrent bien que vous n'êtes pas décidés à honorer vos engagements. Evidemment, nous comprenons tous que les liens du département de M. Mariton avec la filière thermonucléaire lui permettent d'envisager l'avenir avec sérénité et l'inclinent même à nous donner des leçons. Mais nous n'avons pas tous la chance de bénéficier de telles recettes de taxes professionnelles...

M. Hervé Mariton - Evitez de pointer sur moi un doigt vengeur ! (Sourires)

M. Jean-Pierre Brard - Il désigne le cœur du réacteur !

M. Jean-Louis Dumont - Monsieur le ministre, il faut passer aux actes ! Il est bien de parler de solidarité, mais mieux encore de nous donner les moyens de la traduire en actions, en particulier dans les départements dont le budget est exsangue. Lorsque nous venons plaider notre cause dans vos cabinets, nos interlocuteurs regardent le plafond, font de vagues promesses et nous fixent un nouveau rendez-vous sous plusieurs semaines. Pour les départements tels que le mien, une perte de ressources de 500 000 euros - peccadille pour beaucoup ! - est proprement insupportable, en particulier lorsqu'elle affecte des services aussi essentiels pour la population que les SDIS. Est-ce à dire que nos populations ne méritent pas le même degré de sécurité que toutes les autres ? En banalisant le transfert des compétences sans aucune forme de compensation, la méthode de décentralisation introduite par Jean-Pierre Raffarin a condamné à mort la France rurale.

M. Hervé Mariton - Permettez-moi de dire d'emblée que personne, dans ce débat important, ne cherche à donner de leçon à quiconque. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) Nul ne prétend que la conduite de l'Etat soit irréprochable ou que ses relations avec les collectivités soient toujours idéales. Les exemples de dysfonctionnements abondent et nul ne cherche à se poser en modèle de vertu. Il faut cependant admettre que l'entrée récente dans une nouvelle phase de décentralisation a fait naître des attentes chez nos concitoyens qu'il sera essentiel de ne pas décevoir, d'autant que nous ne disposons pas de marges de manœuvre budgétaires nous permettant de baisser la garde sur l'exigence de modération de la dépense. Les Français nous exhortent à faire preuve de responsabilité et l'Etat comme les collectivités locales doivent tenir compte de cette exigence. Loin de donner des leçons à tel ou tel, c'est à cette responsabilité partagée que nous vous appelons. Tous les élus locaux ici présents qui ont participé aux auditions de la commission d'enquête sur l'évolution de la fiscalité locale sont d'accord pour passer à l'acte et pour traduire tout cela dans la loi. Nous croyons tous aux vertus de la décentralisation et nul ne fait preuve de méfiance à l'égard des collectivités. L'Etat lui-même est favorable à la décentralisation...

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Diantre, c'est nous qui l'avons achevée !

M. Hervé Mariton - Et c'est bien parce que nous tenons tous à la décentralisation qu'il ne faut pas l'abîmer par des choix injustifiés. Ce sont ceux qui appuient trop fort sur la dépense et sur l'impôt qui mettent en cause la décentralisation. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Y a-t-il matière à discussion ? La réponse est oui. Je souhaite que le Gouvernement justifie la réforme de la DGE. Mais j'insiste aussi sur le fait que la décentralisation est une responsabilité, Monsieur Bonrepaux, et non pas seulement un changement de guichet ; des discussions reconventionnelles amènent l'Etat à apporter près de 500 millions en plus, mais l'Etat n'a pas vocation à toujours payer. Le sénateur Mercier, président du conseil général du Rhône - et qui n'appartient pas à l'UMP - a expliqué devant la commission d'enquête que pour modérer sa dépense, il a fait un lien entre les deux gros postes de dépenses que sont le RMI et l'APA, et considéré que des allocataires du RMI pouvaient être mobilisés pour offrir des prestations dans le cadre de l'APA ; ainsi, la somme des dépenses se trouve minorée : c'est un exemple de gestion responsable des compétences décentralisées.

Concernant la décentralisation de certaines routes nationales, les conseils généraux vont se voir transférer les sommes nécessaires pour le fonctionnement et vont globalement y gagner en termes d'investissement.

M. Augustin Bonrepaux - Avec quels crédits ? Précisez !

M. Hervé Mariton - Les crédits ont été clairement présentés devant la commission.

M. Augustin Bonrepaux - Je défends notre amendement 321 de suppression de cet article.

Quand on nous a transféré les routes nationales, Monsieur Mariton, le ministre des collectivités locales de l'époque, M. Devedjian, nous a dit : « L'Etat n'a plus les moyens de faire les travaux sur les routes nationales, nous vous les donnons ; si vous ne les prenez pas, nous n'y ferons plus rien ». Où sont les moyens d'investissement transférés par l'Etat ? Il n'y en a pas ! Même chose pour les SDIS : on ne nous laisse pas les moyens de financer les investissements nécessaires.

En ce qui concerne le RMI, le déficit atteint un milliard pour 2005. Comment pourrions-nous faire pour payer sans augmenter les impôts ?

Evidemment, quand on a beaucoup de moyens, on peut être vertueux... Mais j'attends de voir l'effet de cette réforme dans des communautés de communes situées dans des zones industrielles dont les bases se réduisent ! Comment pouvez-vous prétendre que vous voulez accroître l'attractivité de nos territoires afin de créer des emplois ?

M. le Rapporteur général - Je reviens à l'objet de l'article... Il s'agit de réformer la DGE des départements. Celle-ci représente quelque 450 millions et comporte deux parties. Un peu plus de 200 millions correspondent à d'anciennes dotations rurales qui avaient été globalisées dans la réforme Defferre de 1982 : cette partie ne bouge pas.

Sur les 250 millions qui restent, une première part d'environ 160 millions est répartie selon un mécanisme de taux de concours. Une autre est versée en fonction de la voirie et bénéficie notamment aux départements ruraux dits « DFM », désormais au nombre de 63. Une autre, fonction du potentiel fiscal, est destinée aux départements les plus pauvres. Enfin, une partie - environ 15 millions - va aux SDIS. La seule qui est modifiée est la première, le système étant devenu absurde.

Certes, l'Etat va faire une économie de l'ordre de 100 à 120 millions. Mais en même temps, il va verser aux départements 300 millions à travers les contrats de croissance et à peu près autant à travers les dégrèvements.

M. Augustin Bonrepaux - Cela n'a rien à voir !

M. le Rapporteur général - Mais si, il faut regarder l'addition ! Sur les 160 millions de la part « taux de concours », il est proposé de conserver environ 60 millions, qui vont être intégrés dans la dotation de compensation. Certains diront que ce n'est pas très équitable parce qu'on va traiter tous les départements de la même manière.

M. Michel Bouvard - Pas équitable du tout !

M. le Rapporteur général - Mais dans sa grande générosité, l'Etat veille à prendre des mesures transitoires en 2006 et rajoute 100 millions pour terminer les opérations en cours. Au total, le système est tout à fait équilibré.

M. Augustin Bonrepaux - Pas du tout !

M. le Rapporteur général - Monsieur Bonrepaux, 600 millions en plus et 100 millions en moins, cela fait quand même 500 millions de plus ! Vous, vous nous avez supprimé en 1998 une part des droits de mutation, en 1999 la vignette, en 2000 la part salariale de la taxe professionnelle, en 2001 la part régionale de la taxe d'habitation ! Entre 1997 et 2002, les collectivités locales ont perdu des milliards, alors qu'on ne nous donne pas de leçons ce soir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-François Copé, ministre délégué - M. Carrez a parfaitement résumé l'état d'esprit dans lequel M. Hortefeux et moi-même avons entrepris cette réforme.

Il ne s'agit pas ici d'une mesure d'économie. Les 100 millions d'euros qu'évoquait le rapporteur général sont secondaires au regard de la nécessité de réfléchir, tous ensemble et au-delà de nos différences - à ce titre, les énervements de ce soir me désolent - à la modernisation de nos finances publiques. Où est la dépense publique efficace, Monsieur Bonrepaux, avec des taux de concours à 2,77 % et des masses aussi faibles par rapport aux budgets d'investissements des départements ?

M. Carrez l'a rappelé : seule la fraction la plus déséquilibrée de la première part de DGE est concernée. La pire manière d'utiliser l'argent public, c'est le saupoudrage, qui mène à des situations grotesques où la faiblesse des taux de concours entraîne une contribution de l'Etat sans rapport avec l'intérêt des investissements et incompréhensible pour les citoyens contribuables.

Quelles garanties apportons-nous ? Tout d'abord, je m'engage à ce que les opérations en cours soient intégralement soldées. Il n'y a pas de remise en cause des engagements pris par l'Etat en 2005, et c'est à ce titre que sont inscrits 98,4 millions d'euros dans le projet pour 2006.

Ensuite, je le rappelle, seule la première fraction de la première part est supprimée : la voirie et le potentiel fiscal seront basculés dans la dotation de compensation de la DGF des départements.

Troisièmement, tous les départements dont le taux de concours dépasse 3,25 % pour 2002-2004 verront leur DGF abondée d'un montant équivalent à celui de la DGE qui dépassait ce seuil. Partout où l'effort de l'Etat était significatif, il sera poursuivi. Evitons le saupoudrage, et ne conservons que les actions lisibles !

Enfin, la compensation spécifique aux SDIS est mise en place à hauteur de la fraction de la première part qui était versée directement.

Pour chaque simulation, nous devons mettre les ressources en perspective. Dans votre département, Monsieur Bonrepaux, on récupère 1 800 000 euros de DMTO, et quinze millions dans le vôtre, Monsieur Idiart. Vous voyez qu'il y a des plus comme des moins dans la décentralisation !

M. Augustin Bonrepaux - Mais vous n'y êtes pour rien !

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Vous parlez de solidarité à longueur de journée : j'ai bien le droit de vous poser quelques questions ! Puisque vous ne montrez jamais qu'une partie des choses, le rapporteur et moi-même devons éclairer votre assemblée en allant jusqu'au bout !

Nous pouvons envisager, Monsieur Bouvard, l'évolution du dispositif vers plus de péréquation. Le coefficient de prélèvement de 3,25 % pourrait diminuer pour les départements qui sont à la DFM et rehaussé pour les autres. Ce que je refuse, ce sont des bouts de subventions saupoudrées et illisibles. Nous devons avoir des masses financières claires pour tout le monde, et cela demande du temps. Je vous propose d'y travailler en vue de la deuxième délibération.

M. Nicolas Perruchot - M. Mariton a cité le président du conseil général du Rhône qui a, l'an dernier, effectué des contrôles sur les RMI dans son département, et y a découvert plusieurs centaines de cas frauduleux. Je vous suggère, Monsieur Bonrepaux, de faire de même chez vous : lorsqu'on ne peut plus rien attendre de l'Etat, il faut s'interroger sur l'empilement des dossiers qu'on a à traiter.

J'en profite pour soulever la question légitime de l'utilité des départements. A nos 36 000 communes s'ajoutent les communautés urbaines, les syndicats de pays, les conseils généraux et les régions : un magma incompréhensible pour les citoyens et pour nos partenaires extérieurs ! J'espère que le Parlement débattra un jour du rôle des conseils généraux, car la discussion actuelle montre qu'il existe dans notre pays une strate administrative de trop.

M. Augustin Bonrepaux - Je vous remercie, Monsieur le ministre, d'avoir rendu hommage à M. Defferre. Les droits de mutation datent de la première décentralisation - ce n'est pas vous qui avez transféré cette ressource évolutive aux départements ! Croyez-vous donc que seul le département du Rhône effectue des contrôles et recourt à des contrats d'insertion, des contrats d'avenir et des contrats RMA ? J'en ai moi-même fait beaucoup. Mais c'est toujours le département qui paie !

D'autre part, j'ai constaté, au cours de la commission d'enquête, que le Rhône augmentait régulièrement les impôts de 5 %, ce que ne fait pas l'Ariège qui est beaucoup plus pauvre.

J'aimerais bien avoir la même taxe professionnelle et les mêmes droits de mutation que les Hauts-de-Seine ou les Alpes-Maritimes !

Vous dites, Monsieur le rapporteur général, qu'on donne 600 millions supplémentaires. Mais votre rapport indique que les transferts aux collectivités locales diminuent de 478,2 millions d'euros. Ne racontez donc pas n'importe quoi !

M. le Rapporteur général - Vous vous trompez de page !

M. Augustin Bonrepaux - Ne nous renvoyez pas, comme M. Mariton, àce que l'Etat fait par ailleurs, car l'Etat fait de moins en moins, et les collectivités locales de plus en plus !

C'est vrai, il ne faut pas saupoudrer. On aurait pu affecter les crédits de la première part à la deuxième part concernant la dotation voirie : voilà qui eût été simple et efficace ! Mais, Monsieur le ministre, ne faites pas ce que vous condamnez ! Vous créez dans la DDR une part de 20 millions - prise aux collectivités locales - et qui sera ouverte à tous, y compris aux communes ! N'est-ce pas là du saupoudrage ? Tout cela n'est pas cohérent. En l'état, nous rejetons l'article 24.

L'amendement 321, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur général - Les amendements 335 et 337 sont rédactionnels.

Les amendement 335 et 337, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. Michel Bouvard - Je tiens à remercier le rapporteur général pour l'objectivité, la clarté et la précision de sa présentation de la réforme de la DGE. Il a souligné à juste titre que la minoration de 3,25 % également appliquée à tous les départements était l'un des points faibles du dispositif.

Sur le fond, je regrette la suppression du lien entre l'intervention de l'Etat sous forme de DGE et les investissements, même si j'en comprends les raisons. Certains départements investissent plus que d'autres. Un département qui s'efforce de maîtriser ses dépenses de fonctionnement pour consacrer une part à l'investissement est un département bien géré.

Je ne suis pas hostile par principe à cette réforme, mais l'affaire des 3,25 % pose problème. Lorsqu'on ne raisonne pas en termes de pourcentages mais de valeur absolue, il faut rapporter les chiffres au budget de la collectivité, bien sûr, et à sa population, car il est plus facile de compenser le manque à gagner par des recettes fiscales pour les départements les plus peuplés. Par exemple, le prélèvement sur le département de la Savoie va être de 1 711 000 euros, et de 1 394 000 pour les Yvelines : je vous laisse apprécier la différence de population et de budget !

Cette mesure pénalise donc les départements qui ont les plus faibles densités, qui sont aussi les départements qui auront le plus de mal à faire face au transfert de la voirie nationale. Il faut reconnaître que la négociation sur ce transfert se termine dans de bien meilleures conditions qu'elle n'avait commencé : l'administration a fait l'effort de prendre en compte la situation des départements qui ont de nombreux ouvrages d'art et, au final, la compensation est sinon juste, du moins équitable. La réforme de la DGE doit traduire la même équité. J'ai été très sensible à l'ouverture faite par le ministre du budget quant à une différenciation entre les départements éligibles à la dotation de fonctionnement minimale, pour lesquels le prélèvement serait moins important, et les départements les plus peuplés. Je sais également que ce qui va se faire pour la prise en compte des longueurs de voirie se traduira par une majoration de la DGF. Reste que les collectivités prévoient leurs budgets à long terme. Elles avaient tenu compte dans leurs projections de l'évolution normale de la DGF, mais pas de ce prélèvement nouveau qui intervient alors qu'elles ont pour la plupart déjà organisé leur débat d'orientation budgétaire. L'amendement 53 tend donc à supprimer la minoration de 3,25 %, mais je suis tout à fait ouvert à la discussion.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable. Les amendements de Michel Bouvard sont toujours d'une grande subtilité, et celui-ci revient ni plus ni moins à supprimer tout l'article ! Appliquer un forfait de 3,25 % à tous les départements pose problème et je comprends bien qu'il faille une modulation, mais on ne peut l'improviser ce soir. J'attire votre attention sur le fait que tous les départements DFM ne méritent pas obligatoirement d'être aidés plus que les autres. Certains départements urbains peuvent être en grande difficulté. Jusqu'à l'année dernière, il y avait 24 départements DFM, qui connaissaient des difficultés objectives. Avec la réforme qui est intervenue, on a distingué les départements urbains et les moins peuplés. Aujourd'hui, il y a 63 départements DFM, dont 37 urbains et je vous assure que certains d'entre eux, comme la Seine-Saint-Denis, sont pauvres et en grande difficulté ! Le taux de modulation ne doit donc pas reposer que sur la différence entre départements DFM et urbains.

M. Michel Bouvard - Le revenu moyen par habitant !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales - Jean-François Copé vous a proposé de retravailler cette mesure afin de trouver un équilibre plus favorable aux départements les moins favorisés, et notamment, Monsieur Bouvard, aux départements de montagne. Je serais heureux que vous fassiez confiance au Gouvernement et que vous retiriez votre amendement.

M. Jean-Yves Chamard - Il me semble qu'on critique un peu facilement les collectivités locales. Tout est parti de l'absurde augmentation des impôts décidée par les régions, des régions socialistes. A cause des lois elles aussi socialistes - 35 heures, réforme des SDIS et APA - les départements sont aujourd'hui exsangues. A cause de vous, il a même fallu changer la Constitution pour être sûrs de ne plus jamais voir quelque chose comme l'APA !

M. Augustin Bonrepaux - La modification de la Constitution ne donne aucune garantie !

M. Jean-Yves Chamard - Elle prévoit que les nouvelles responsabilités confiées aux collectivités locales sont compensées. Regardez les comptes des départements : pour faire face à ces trois lois, certains ont augmenté massivement leurs impôts et d'autres, et c'est pire, leurs emprunts ! Et voilà le RMI qui nous tombe dessus ! Comment le Gouvernement a-t-il pu accepter que le RMI 2004 soit compensé sur la base de 2004 et que le RMI 2005 le soit sur la base de 2003 ? Pour 2004, Jean-Pierre Raffarin avait pris en compte les nouveaux décrets qui augmentaient le nombre des bénéficiaires du RMI.

Nous avons voté, dans un grand enthousiasme, la prestation de compensation du handicap, mais tous les départements, de droite comme de gauche, sont inquiets de ses conséquences financières. Est-il donc bien raisonnable, au moment où les départements voient leurs dépenses augmenter, de réduire de 120 millions le concours de l'Etat ? Vous me répondrez que vous donnez 500 millions par ailleurs, mais il s'agit d'un pacte qui a été signé entre les collectivités et l'Etat ! J'espère qu'en reprenant l'amendement de Michel Bouvard, quitte à le modifier, le Gouvernement pourra revenir au moins en partie sur cette erreur. Faites attention à ne pas vous mettre toutes les collectivités locales à dos, quelle que soit leur orientation politique !

M. Augustin Bonrepaux - Je crains que M. Chamard n'ait pas bien lu le rapport : jusqu'en 2003, les départements ont réduit leurs impôts et leur situation financière était bonne.

M. Hervé Mariton - Et l'APA arriva !

M. Augustin Bonrepaux - L'APA a été mise en œuvre en 2002 et ce n'est qu'à partir de 2004 que la situation des départements s'est dégradée ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Regardez les tableaux ! L'APA et les 35 heures n'ont rien à voir avec cela : les impôts ont baissé jusqu'en 2004, et depuis ils augmentent ! C'est de notre faute ?

M. Michel Bouvard - Je souligne que je ne me préoccupais pas seulement des départements de montagne : certains d'entre eux sont très peuplés et très urbanisés, comme les Alpes-Maritimes ou la Haute-Savoie. La différence se fait entre les départements DFM et les autres, car la masse budgétaire rapportée à la population est différente. Si l'on devait introduire un critère complémentaire, ce pourrait être le revenu moyen par habitant, pour ne pas demander plus d'impôts à ceux qui gagnent moins. Quoi qu'il en soit, j'ai entendu le Gouvernement et je retire l'amendement 53, ainsi que le 54 qui était lié.

M. Jean-Pierre Brard - Je reprends l'amendement 53 !

L'amendement 53, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 22 heures 55, est reprise à 23 heures 5.

M. Jean-Pierre Brard - Monsieur le Président, j'avoue n'avoir pas compris votre mouvement d'humeur tout à l'heure. Sans doute était-ce une manifestation d'impatience comme il arrive à chacun d'entre nous d'en montrer... Mais si nous voulons travailler dans de bonnes conditions, mieux vaut conserver un tour serein à nos débats. Ayant repris l'amendement 53, je voulais le défendre, ce que vous m'avez empêché de faire en précipitant le vote. Pour autant, le débat n'est pas terminé. J'ai connu notre collègue Michel Bouvard plus indocile et plus résistant alors qu'il défendait ses convictions comme il l'a fait tout à l'heure... avant, hélas, de faire sa génuflexion devant les ministres.

M. le Rapporteur général - C'est parce qu'il sont deux !

M. Jean-Pierre Brard - Il est vrai, même si M. Hortefeux n'a pas été très bavard jusqu'à présent.

M. Michel Bouvard - Mon attitude dépend des indulgences. (Sourires)

M. Jean-Pierre Brard - A quel prix les négociez-vous ? (Sourires)

Ne nous laissons pas enfermer dans le piège qui consisterait à opposer départements ruraux et urbains. Le rapporteur général a fort judicieusement tout à l'heure cité l'exemple de la Seine-Saint-Denis, département urbain très peuplé, qui n'en est pas moins très pauvre. En réalité, le Gouvernement a ruiné tous les départements, grands et petits, ruraux et urbains. Sa stratégie est claire. Il souhaite se décharger du maximum de dépenses sur les collectivités pour faire assumer la responsabilité politique des décisions aux élus locaux. Ne tombons pas dans l'attrape-nigaud que nous tend le Gouvernement lui-même. M. Bouvard, élu de terrain s'il en est, - songez à Bonneval-en-Maurienne -, a raison, mais son esprit de discipline, à moins que ce ne soit la poigne de fer de M. Accoyer, l'a fait plier. Mais il faut continuer de batailler pour que les Français connaissent la vérité telle qu'elle est.

M. le Président - Je n'ai nullement manqué de sérénité, Monsieur Brard. Vous aviez parfaitement le droit de reprendre un amendement retiré. Cela ne vous donnait pas pour autant le droit de reprendre la parole. C'est pourquoi j'ai immédiatement mis l'amendement aux voix.

M. Augustin Bonrepaux - Le Gouvernement refuse le saupoudrage. Soit. Qu'il réforme donc la DGE, mais de façon équitable. L'Etat a-t-il impérativement besoin de ces 127 millions d'euros qu'il s'apprête à prélever, de surcroît au moment où il transfère les routes aux départements ? L'Etat serait-il ruiné au point que le Gouvernement doive ainsi faire les poches de tous ? Nous proposons par notre amendement 322 une mesure d'élémentaire justice, à savoir que l'Etat garantisse à chaque département un niveau de dotation au moins équivalent à celui qu'il a perdu en 2004. Faites au moins l'effort de ne pas ponctionner davantage les départements et de leur laisser les moyens dont ils disposaient l'an passé - je ne dis pas de leur en donner de supplémentaires - en ventilant différemment les différentes parts, par exemple en renforçant celle des SDIS, services qui coûtent de plus en plus cher.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable.

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Avis défavorable.

L'amendement 322, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur général - Les amendements 339 et 338 sont rédactionnels.

Les amendement 339 et 338, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. Michel Bouvard - L'amendement 55 est défendu.

L'amendement 55, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Bouvard - Déjà en 2002, lors de l'examen des dispositions relatives aux SDIS contenues dans la loi sur la démocratie de proximité, nous avions fait valoir que tous les départements ne se trouvaient pas sur un pied d'égalité en matière de risques, comme le confirmait d'ailleurs la cartographie que le ministre de l'intérieur avait fait établir département par département. Ceux où les risques sont plus élevés ont besoin de matériels et d'unités spécialisées, ce qui entraîne des coûts supplémentaires. Par les deux amendements 56 et 57, je demande que pour le calcul de la part de DGE concernant les SDIS soit prise en compte l'exposition aux risques. Cette péréquation ne serait que justice.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé cet amendement. Vous songez certainement, cher collègue, aux risques particuliers des zones de montagne, mais un département urbain comme la Seine-Saint-Denis doit faire face, lui, par exemple aux incendies de voitures dans les cités. La répartition proposée de ces 15 millions d'euros au prorata des répartitions passées paraît équitable.

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Il serait en effet difficile de dresser l'échelle des risques pour chaque département. Par ailleurs, l'objet de cette mesure n'est pas d'opérer une péréquation entre départements. Je vous invite donc à retirer ces amendements.

M. Michel Bouvard - Je reconnais la complexité du problème, mais il est réel. Il faudra bien le traiter un jour. Peut-être aurons-nous l'occasion de reparler des SDIS. Je profite de la présence du ministre délégué aux collectivités territoriales pour évoquer les charges liées aux tunnels internationaux, sujet sur lequel l'un de ses prédécesseurs, Jean-Pierre Chevènement, avait été très clair. Il avait bien voulu considérer que la sécurité de ces ouvrages, qui bénéficient à l'ensemble de la communauté nationale, relève également de l'Etat et non de la seule responsabilité des collectivités territoriales.

Pour autant, compte tenu de la difficulté à évaluer les risques, je retire les amendements 56 et 57.

M. le Président - L'amendement 448 de M. Mariani est défendu.

M. le Rapporteur général - A titre personnel, avis favorable à cet amendement qui vise à préciser que les 15 millions d'euros de la troisième et quatrième part concernent effectivement les investissements des SDIS.

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Même avis.

L'amendement 448, mis aux voix, est adopté.

M. Augustin Bonrepaux - Rappel au Règlement. L'amendement 186, visant à insérer un article additionnel après l'article 27, a été déplacé après l'article 22. Or il concerne les départements et il aurait été souhaitable de l'examiner en présence du ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. le Président - Il a été déplacé après avis de la commission des finances.

M. Augustin Bonrepaux - J'aimerais entendre les explications de la commission !

M. le Rapporteur général - L'amendement 340 est rédactionnel.

L'amendement 340, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L'amendement 341 est également rédactionnel.

L'amendement 341, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L'amendement 444 est de coordination.

L'amendement 444, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L'amendement 343 est également de coordination.

L'amendement 343, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 24, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 25

M. Augustin Bonrepaux - A l'article 25, est organisé le report à 2006 de la régularisation au titre de la DGF pour 2004 qui devait être versée en 2005 aux communes et à leurs groupements. Ce mécanisme fait apparaître une progression de la dotation de solidarité rurale - DSR - de 15 % en 2006. Je ne m'oppose pas à ce report, mais de grâce ne nous le présentez pas comme un cadeau !

M. le Rapporteur général - Cela n'était pas notre intention !

M. Jean-Pierre Brard - La dotation de compensation de la taxe professionnelle ou DCTP, diminue à mesure de l'augmentation du contrat de croissance et de solidarité. Après qu'elle a baissé de 10,64 % en 2005, ce projet de loi lui inflige une nouvelle diminution de 9,48 %. Contrairement à ce que vous affirmez, Monsieur Copé, toutes les dotations ne sont pas en augmentation ! Rappelons que celle-ci avait pour but de compenser les pertes de recette de taxe professionnelles subies par les collectivités en raison des mesures décidées par l'Etat en faveur des entreprises. Par l'amendement 429 rectifié, nous proposons donc d'affecter à la DCTP le montant de la régularisation de la DGF pour 2004 des communes et de leurs groupements, mis en réserve par le comité des finances locales.

M. le Rapporteur général - La commission n'a pas examiné cet amendement. A titre personnel, j'y suis défavorable. Nous avons en effet besoin d'affecter la régularisation de 2004, soit 88 millions d'euros, directement à la DGF de 2006 car on pourra ainsi assurer une progression de la dotation forfaitaire de 1,5 %, contre seulement 1 % en 2005, et garantir une augmentation de 120 millions à la dotation de solidarité urbaine, DSU, et de 80 millions à la DSR.

En tant que président du comité des finances locales, je ne cacherai pas que ce report de la régularisation de 2004 est nécessaire pour parvenir à cette répartition équitable et utile. Il nous est donc impossible de l'affecter à la DCTP.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué - Même avis. Ce mécanisme permettra d'opérer une péréquation pour le monde rural. Pour le monde urbain, il existe le plan Borloo. C'est un choix revendiqué et assumé.

M. Jean-Pierre Brard - Monsieur Hortefeux, ne faites pas appel à Merlin l'Enchanteur pour vous tirer de ce mauvais pas et cessez d'opposer le rural et l'urbain ! Je soutiens également le monde rural que vous laissez trop à l'abandon. Simplement, pourquoi ne pas prendre l'argent pour le monde rural ailleurs ? Vous pourriez peut-être envisager de réduire les cadeaux que vous faites au titre du bouclier fiscal ? C'est une affaire de choix politique. Si l'on ne peut satisfaire tout le monde à la fois, sachez que satisfaire les collectivités locales est un investissement très productif puisqu'elles réalisent les trois quarts de l'investissement civil en France.

L'amendement 429 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 25, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 25

M. Jean-Claude Sandrier - La dotation particulière relative à l'exercice des mandats locaux, créée par la loi du 3 février 1992, est versée par l'Etat aux petites communes rurales pour les aider à payer les indemnités des maires et adjoints et assurer l'indispensable formation des élus. Les communes éligibles à cette dotation, d'un montant de 2 479 euros cette année, ont une population inférieure à 1 000 habitants. L'an dernier, cette dotation a été délivrée selon un nouveau critère : le potentiel financier au lieu du potentiel fiscal. Effet pervers de cette substitution : 1 778 communes ont été soudainement privées de leur dotation.

Après consultation du comité des finances locales, il a été envisagé d'atténuer l'impact de cette réforme en mettant en place un mécanisme de sortie en deux ans. Par l'amendement 236, nous proposons d'aller plus loin et de revenir à la rédaction antérieure.

M. le Rapporteur général - Monsieur Sandrier, cet amendement est en réalité satisfait. En effet, 4 millions environ sont prélevés sur la régularisation de 2004 afin de permettre une transition en douceur pour les communes exclues du dispositif. Certes, ce changement de critère exclut 1 000 communes, mais dans ces communes, la DGF par habitant est en moyenne de 228 euros, alors que celle des quelque 800 communes entrantes avoisine les 93 euros. Le dispositif est donc équitable.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué - C'est vrai que cette disposition a soulevé une vive émotion chez les élus du monde rural, notamment dans ma région, en Auvergne, où 239 communes sont concernées, dont 62 dans le Puy-de-Dôme, où Louis Giscard d'Estaing est député.

M. Augustin Bonrepaux - Et le Cantal ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué - C'est vrai qu'il faut imaginer un dispositif à même de sauvegarder les intérêts de ces élus dont le dévouement est exemplaire, aussi le Gouvernement est-il prêt à étudier une modification des règles de répartition, notamment en assouplissant les seuils d'éligibilité.

M. Augustin Bonrepaux - Je vous remercie de votre réponse car j'avais déjà souligné l'année dernière que la transformation du potentiel fiscal en potentiel financier allait poser problème, en particulier pour les départements. C'est ainsi que le Cantal s'est enrichi en une nuit, au point de sortir du dispositif. Il conviendra donc d'atténuer le poids de la dotation forfaitaire par rapport au potentiel fiscal pour que l'on n'en vienne plus à proclamer soudainement riches des départements comme la Corse du Sud ou la Corse du Nord !

L'amendement 236, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Dans le cadre de la loi de finances pour 2005, l'adoption d'un amendement a donné une garantie de stabilité à la DGF des communautés d'agglomération dont le potentiel fiscal est inférieur d'au moins 50 % au potentiel fiscal par habitant de la catégorie. Les données 2004 font apparaître que les 17 communautés d'agglomération qui bénéficient de cette garantie ne sont pas toujours les plus défavorisées, notamment au regard de critères sociaux tels que le revenu par habitant ou le nombre d'allocataires des APL. Seules quatre des communautés d'agglomération présentant de faibles revenus par habitant bénéficient de cette garantie. Dans le souci d'une meilleure péréquation, l'amendement 241 tend à introduire le critère du revenu par habitant - je pense recevoir l'appui de Michel Bouvard qui était intervenu en ce sens tout à l'heure.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable. Autant le critère du revenu par habitant est pertinent lorsqu'il s'agit de subventionner des actions à caractère social, autant il perd de son sens lorsqu'il est question de construire des écoles ou des routes. Or, la vocation des communautés d'agglomération étant d'abord d'investir, il paraît logique de mesurer leur richesse à l'aune de leur potentiel fiscal ou financier.

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Je me permettrai d'ajouter qu'à force de poser des garanties - celle-ci serait la septième - l'on risque de dénaturer le dispositif. Avis défavorable.

M. Jean-Pierre Brard - Votre commune a beau ne pas compter que des privilégiés, elle n'est pas la plus à plaindre au regard, par exemple, de communautés d'agglomération comme Clichy-Montfermeil, où une misère s'ajoute à une autre.

M. Philippe Auberger - Bien sûr.

M. Jean-Pierre Brard - Vous ne pouvez pas comprendre, vous êtes maire dans les vignes du Seigneur.

M. Philippe Auberger - Je me suis déjà rendu dans cette commune !

M. Jean-Pierre Brard - Comme l'on va au zoo.

Quand on atteint un tel niveau de pauvreté, il est impossible de faire l'impasse sur le revenu par habitant.

Par ailleurs, Monsieur le ministre, la question n'est pas tant celle du nombre de garanties que de leur pertinence, et si celle que je propose est juste, peu importe qu'elle soit la septième. Je vous assure qu'Eric Raoult, député de cette circonscription, et qui présidait cet après-midi, aura du mal à justifier votre position devant ses électeurs.

L'amendement 241, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Monsieur Bonrepaux, votre rappel au Règlement étant justifié, nous appellerons l'amendement 186 ce soir après l'article 27.

M. Jean-Louis Dumont - L'Etat ne compense pas suffisamment les pertes de recettes subies par les communes et les intercommunalités du fait des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties, notamment ouvertes à la construction de logements sociaux.

En effet, à l'exception de la prolongation de l'exonération de 15 à 25 ans - totalement compensée -, l'exonération principale n'est compensée que dès lors que les pertes de recettes sont supérieures à 10 %, et il s'avère en pratique que les compensations sont extrêmement rares, ce qui pénalise les communes qui se lancent dans la construction de logements sociaux.

Ce problème est particulièrement aigu pour les communes qui participent au programme de rénovation urbaine, et qui sont victimes d'un « effet de ciseau » puisque d'un côté les immeubles anciens générateurs de TFPB sont détruits et que les immeubles nouvellement construits sont exonérés de TFPB.

Pour cette raison l'amendement 181 tend à compenser intégralement l'exonération de TFPB pour la totalité de la durée de l'exonération. Chers collègues de la majorité, vous qui avez voté comme un seul homme la révision de la Constitution ne pourrez qu'être sensibles à cet amendement car il permet de relever le défi de la compensation « à l'euro près » !

M. le Rapporteur général - La commission ne l'a pas examiné et je suis tenu de donner un avis défavorable du fait de son coût, évalué à plusieurs centaines de millions. Mais je partage l'argumentation de Jean-Louis Dumont car la situation qu'il a décrite décourage les communes pauvres en logements locatifs sociaux d'en implanter de nouveaux. J'observe qu'il s'agit d'un problème très ancien...

M. Jean-Louis Dumont - Cela n'excuse rien !

M. le Rapporteur général - ... qu'il faudra bien résoudre un jour.

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Le ministre du budget ne peut pas être enthousiasmé par un amendement à un demi-milliard... mais le maire de Meaux - bien que notre commune possède un parc de logements sociaux très supérieur à la norme légale - est sensible au problème que vous soulevez. Je vous propose par conséquent de le traiter dans un autre cadre, puisque vous savez que le Premier ministre a chargé Jean-Louis Borloo, Brice Hortefeux et moi-même d'une mission de réflexion sur la condition de maire bâtisseur de logements sociaux et les contraintes qui s'y attachent. L'objectif est de passer de la coercition à l'incitation, de manière à répondre aux besoins de logement des Français. J'invite donc au retrait de cet amendement très coûteux.

M. Michel Bouvard - Monsieur le ministre, je vous ai écouté avec la plus grande attention car Jean-Louis Dumont pose un vrai problème. Il faut savoir que dans le système actuel, les communes qui ne possèdent pas assez de programmes de logements sociaux au regard de la norme SRU ont plus intérêt parfois à s'acquitter de la pénalité financière qu'à construire, du fait de la perte de recettes en taxe sur le foncier bâti générée par l'implantation de logements sociaux. Autrement dit, mieux vaut aider à construire des programmes privés de standing - pourvoyeurs d'un surcroît de taxe sur le foncier bâti - et régler la pénalité plutôt qu'y échapper en construisant des programmes qui coûteront toujours plus qu'ils ne rapportent ! Le sujet mérite d'être approfondi car la loi SRU a créé des situations inéquitables entre les communes, y compris au sein d'une même agglomération.

M. Augustin Bonrepaux - Notre amendement peut sans doute être amélioré mais je ne puis laisser dire au Gouvernement et à notre commission qu'il coûte cher, puisqu'il tend à créer un dispositif incitatif applicable seulement à compter du 1er janvier 2006. Cela ne coûterait donc rien dans l'immédiat...

M. Michel Bouvard - C'est exact.

M. Augustin Bonrepaux - ...et pas très cher par la suite. Comme l'ont expliqué nos collègues Dumont et Bouvard, lorsque les terrains sont rares - et donc chers... -, mieux vaut laisser faire du logement privé que du locatif social, dans la perspective d'engranger à brève échéance du foncier bâti. Je souhaite que le Gouvernement intègre dans sa réflexion le fait qu'on ne peut plus aujourd'hui construire du logement social avec les seules aides de l'Etat : il faut mettre à contribution les offices HLM, les communes, les départements et les régions. Autre anomalie que je signale au passage, la loi Borloo oblige la région et le département à financer l'ANRU, y compris lorsque aucun programme relevant de leur ressort n'est éligible à un projet de renouvellement urbain ! Une fois de plus, on demande aux plus pauvres de contribuer sans contreparties à des charges qui leur sont extérieures.

Cela étant dit, si le Ministre pouvait s'engager à présenter - sans doute avec Jean-Louis Borloo - de nouvelles pistes de financement du logement social avant la deuxième lecture, nous serions prêts à retirer notre amendement.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Je rappelle que la baisse des taux du livret A - et de la marge - va permettre de diminuer d'au moins 8 % les coûts de construction du logement social...

M. Jean-Louis Dumont - Quel optimisme !

M. le Président de la commission - Et je propose une mesure de simplification : pourquoi ne pas supprimer la subvention d'Etat - de l'ordre de 3 000 euros par logement - pour en revenir à un dispositif de compensation de la TFNB ? La suppression d'un échelon qui en résulterait ne serait-elle pas particulièrement bien ressentie ?

M. Jean-Louis Dumont - Il s'agit d'une piste de réflexion particulièrement intéressante : si un échelon sautait dans l'instruction des dossiers, on gagnerait un temps précieux, d'autant que la subvention d'Etat n'est plus aussi déterminante que par le passé. Là où l'Etat apporte 3 000 euros par logement, les collectivité en mettent 15 000 ! Et alors que le logement social doit être élevé au rang de grande cause nationale, l'on ne peut admettre que certaines communes se désengagent de peur d'y perdre trop de ressources fiscales. Notre amendement visait à permettre au Gouvernement de préciser ses intentions en matière de compensation. Compte tenu de sa position, nous sommes prêts à le retirer car le logement mérite mieux que l'affrontement partisan. C'est une cause commune pour laquelle nous devons tous nous mobiliser. Gagner la bataille du renouvellement urbain, tel doit être l'objectif des quinze prochaines années et je sais que nombre d'élus de la majorité sont sur la même ligne que moi.

M. Jean-Pierre Brard - Je voudrais partager l'enthousiasme de Jean-Louis Dumont mais la réalité, c'est qu'à l'instar des droits à polluer, les pénalités financières introduites par la loi SRU ont créé, pour les communes rétives, un véritable droit à ne pas construire des HLM ! Ainsi, tel vice-président de notre assemblée s'attache à regrouper les maires qui refusent d'appliquer la loi. Il s'agit tout bonnement d'inciter les élus à transgresser les lois de la République !

Il faudrait certainement augmenter très fortement la pénalité applicable aux communes qui ne construisent pas de logements sociaux. Je ne pense pas là au maire de Meaux, mais à certains de ses amis politiques qui refusent ce devoir de solidarité. On pourrait envisager aussi de rendre inéligibles les maires qui refusent en ce domaine d'appliquer la loi.

L'amendement 181 est retiré.

M. Michel Bouvard - L'amendement 82 est défendu.

L'amendement 82, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Bouvard - L'amendement 332 est défendu.

L'amendement 332, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Louis Giscard d'Estaing - L'amendement 440 est défendu.

L'amendement 440, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 26

M. Augustin Bonrepaux - Cet article concerne les transferts de charges aux régions. En matière de formation, celles-ci ont dû faire face à des demandes importantes et donc consentir des efforts supplémentaires. Et la compensation par la TIPP repose sur une base de plus en plus exiguë... En outre, on nous explique comment les régions pourront faire varier la TIPP, mais nous ne savons toujours pas si elles en auront le droit puisqu'un accord préalable de nos partenaires européens est nécessaire !

Les régions doivent prendre en charge dès le 1er janvier les personnels TOS de l'Education nationale. Elles seront immédiatement confrontées aux demandes de ces personnels de bénéficier des mêmes indemnités que les personnels des régions ; et au moins lorsqu'ils deviendront effectivement personnels de la région, elles ne pourront pas refuser, ce qui représentera pour elles des charges très importantes. De plus, Monsieur le ministre, nous ne savons toujours pas ce qu'il en sera de la prise en compte des personnels contractuels, indispensables au fonctionnement des établissements scolaires, qu'ils soient en contrat d'accès à l'emploi, en CES ou en contrat d'avenir. Il y a toujours une participation de l'établissement. On nous avait dit que l'Etat financerait le différentiel, mais j'ai beau interroger les services, je n'obtiens aucune réponse. L'engagement pris sera-t-il tenu ?

M. Jean-Louis Idiart - Je m'associe aux propos de M. Bonrepaux. Je voudrais ajouter que les régions jouent aujourd'hui un rôle particulièrement important, notamment en matière de transports, et seront certainement de plus en plus sollicitées. Il est quand même extraordinaire que la SNCF propose, en raison du mauvais état de certaines voies, que pour aller de Bayonne à Toulouse on passe par Bordeaux ! Les régions sont donc appelées à augmenter leur contribution financière ; mais il faut qu'elles en aient les moyens...

M. Jean-Louis Dumont - En 1971, une très belle et très grande loi a été votée sur la formation professionnelle continue. Non seulement les régions vont en avoir la pleine responsabilité, mais dans le même temps on met en place la validation des acquis, l'équivalence des diplômes en Europe... Et puis, il y a toutes ces personnes qui passent des concours, qui ont envie de réintégrer le monde du travail et reprennent des études.

Mais on a l'impression que votre intention est plutôt d'étrangler les régions, au motif que politiquement, elles ne sont pas du même bord que vous... A l'occasion du tour de régions que j'ai fait dans le cadre de ma mission sur les fonds européens, j'ai pu constater que leurs relations avec l'Etat étaient devenues dramatiques après les régionales !

S'agissant de la compensation par la TIPP, j'observe que vous tenez des propos contradictoires : ou bien le produit de la TIPP augmente, et vous nous mentez quand vous niez le fait que l'augmentation du prix du pétrole enrichisse l'Etat ; ou bien il n'augmente pas ou même diminue, et vous êtes en train de gruger les régions, tandis que les transferts continuent !

Le maintien et la modernisation des TER coûte de l'argent. Est-ce avec la taxe professionnelle plafonnée que l'on financera les trains Corail que la SNCF ne peut plus prendre en charge ? N'est-ce pas une petite opération de strangulation des régions ? Au fond, Monsieur le ministre, en matière de ressources humaines et de transferts, les compensations ne suivent pas ! C'est une opération de transparence, de vérité et de responsabilité qui s'impose !

M. le Rapporteur général - L'amendement 344, 2ème rectification, est rédactionnel.

L'amendement 344, 2ème rectification, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 26, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

M. Augustin Bonrepaux - Monsieur le ministre pourra-t-il répondre aux questions que je lui ai posées ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Il s'agit d'un sujet archiconnu, Monsieur Bonrepaux. Nous venons tous, au cours des trois derniers jours, de montrer que nous pouvions travailler ensemble de manière constructive, et vous partez soudain dans une longue diatribe sur la malheureuse TIPP, alors que vous connaissez très bien les réponses à vos questions !

Je vous propose donc une réponse rapide. D'abord, la modulation de la TIPP pour les régions est un de mes grands combats. La parole républicaine nous engage, et j'espère avoir gain de cause auprès de l'Union européenne d'ici la fin de l'année.

Quant au reste...

M. Augustin Bonrepaux - Les crédits ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Oui, précisément, les crédits dépendent de la commission d'évaluation des charges. Vous connaîtrez les montants des transferts de la TIPP lorsqu'elle aura rendu son avis. A cette heure tardive, saurez-vous vous contenter d'une telle réponse ?

ART. 27

M. Augustin Bonrepaux - Vous dites, Monsieur le ministre, que l'Etat tient toujours ses engagements. Or, il s'est engagé à faire varier la TSCA comme la TIPP, mais le texte indique que c'est impossible ! Cela prouve que votre décentralisation a été faite dans la précipitation, pour délester l'Etat de certaines dépenses en les transférant sur les collectivités locales !

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat - Sur les conventions d'assurance, les départements n'ont pas fait une mauvaise affaire !

M. Augustin Bonrepaux - On nous avait promis une recette évolutive pour le RMI, mais le déficit s'aggrave chaque année. M. Fillon...

M. Michel Bouvard - Excellent ministre !

M. Augustin Bonrepaux - ...nous fit voter en novembre une décentralisation qui devait prendre effet le 1er janvier, date à laquelle nous devions payer sans qu'aucune recette n'ait été inscrite, l'Etat devant verser sa participation à la fin du mois ! En matière de participation, ne refaites pas l'histoire !

Nous disions vrai : le transfert de la recette ne valait pas la compensation indexée sur la DGF. J'ai toujours dit ma préférence pour une dotation globale de décentralisation indexée sur la DGF plutôt que la TIPP !

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Mais ce n'est pas de l'économie !

M. Augustin Bonrepaux - Le déficit est de 462 millions d'euros pour 2004, et dépassera le milliard en 2005. Comment les départements le prendront-ils en charge sans compensation ? M. Mariton nous dit : « Gérez ! ». Oui, mais le Rhône a bien dû, tout en essayant de gérer, augmenter ses impôts... Il faut bien payer les contrats d'insertion, les contrats RMA, les contrats d'avenir ! Vous nous parlez de la commission consultative d'évaluation des charges : elle est mixte, et suit les avis du Gouvernement ! Ce n'est pas une solution.

Enfin, on nous a dit l'an dernier que l'actualisation des bases du RMI ferait l'objet d'un arbitrage du Premier ministre. A-t-il eu lieu, pour que les bases soient revisitées en fonction de la dotation supplémentaire ? Sinon, le déficit de 2004 doublera en 2005, et qu'en sera-t-il en 2006 ? La TIPP, elle, n'augmente que de 0,5 %, et vous allez revaloriser - à juste titre - le RMI à hauteur de l'inflation. Ce sera encore une dépense supplémentaire pour les départements. Il faut un mécanisme permettant de réduire les déficits, pour que les départements n'aient pas à augmenter toujours plus leurs impôts afin de compenser les charges transmises par l'Etat.

M. Jean-Louis Idiart - M. Mariton en revient toujours au même point...

M. Hervé Mariton - Cela vous va bien de dire ça !

M. Jean-Louis Idiart - Il va chercher une lointaine déclaration d'un président de conseil général pour en faire le modèle de la gestion départementale, en suggérant que tous les autres sont de vilains dépensiers ! Mais l'hirondelle ne fait pas le printemps !

M. Hervé Mariton - On peut s'inspirer des bonnes pratiques !

M. Jean-Louis Idiart - Je vous invite dans mon département, où nous allons faire face à un grave déficit de personnels de l'équipement, ce qui entraînera des charges supplémentaires...

M. Hervé Mariton - Si vous créez des postes, en effet !

M. Jean-Louis Idiart - ...car les administrations locales résistent des quatre fers pour garder leurs personnels. Vous pouvez prétendre ici que les choses se passent bien, mais sur le terrain, les pressions et les besoins sont forts !

Lors de la précédente décentralisation, il a également fallu faire des choix - notamment dans les lycées et collèges - pour rattraper le retard de l'Etat. Pour financer ces dépenses supplémentaires, il ne suffit pas de désengager l'Etat tout en accusant les autres d'être de mauvais gestionnaires !

M. le Rapporteur général - Les amendements 345, 346 rectifié et 347 rectifié sont rédactionnels.

Les amendements 345, 346 rectifié et 347 rectifié, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'article 27, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 27

M. Augustin Bonrepaux - Il y a un différentiel entre les recettes que perçoivent les départements et leurs charges de RMI. Dès 2003, nous avions prévu le transfert des exclus de l'ANPE sur le RMI et montré que les contrats RMA coûteraient plus cher. Nous avions alors demandé une compensation que le Gouvernement, devant la pression des élus de tous bancs, avait acceptée.

Mais le déficit perdure. Si vous vouliez, Monsieur le ministre, montrer que la compensation est faite à l'euro près, il faudrait accepter l'amendement 186 qui prévoit de faire, chaque année, un point sur les dépenses et recettes de l'année précédente. Ainsi, la compensation se ferait effectivement à l'euro près. Il y aurait une autre solution, peut-être plus avantageuse pour le Gouvernement : intégrer dans la base de compensation le surplus de 460 millions constaté en 2004 : le différentiel pour 2005 en serait réduit de moitié. Reste que je ne vois guère comment empêcher les dépenses liées au RMI de s'accroître, dans la situation de paupérisation que nous connaissons et alors que les conditions d'accès au chômage sont de plus en plus difficiles !

Cet amendement est donc le plus important pour les collectivités locales. Si vous l'acceptiez, nous pourrions avoir enfin confiance dans vos promesses. Car, pour l'instant, « l'euro près », c'est un déficit de 460 millions pour 2004 et d'un milliard pour 2005 !

M. le Rapporteur général - Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais il n'est pas recevable sur le plan même des principes.

Lorsque la décentralisation a été engagée, en 1982, un principe a été clairement établi : une photographie des dépenses et des recettes est faite au moment du transfert, qui assure une stricte égalité entre les deux. Ensuite, dépenses et recettes vivent leur vie. Dans aucun transfert de la décentralisation Mauroy-Defferre il n'est ne serait-ce qu'envisagé une clause de revoyure l'année suivante. Pour le RMI en revanche, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a accepté d'accorder un supplément ponctuel de compensation pour 2004. Avec ce principe, les départements ont parfois perdu, parfois gagné. Les transferts de l'aide sociale, au début des années 1980, ont été compensés par des transferts de droits de mutation. Le département du Val-de-Marne, entre une bonne gestion de l'aide sociale et l'évolution des droits de mutation, s'en est plutôt bien sorti !

Une vingtaine d'année après, cette question a fait l'objet de longs débats dans la commission Mauroy, qui a confirmé ce principe. On ne peut imaginer une décentralisation autrement ! Soit l'on exerce réellement ses responsabilités, et il n'y a donc plus lieu de demander de rallonges à l'Etat, soit c'est l'Etat qui finance, mais c'est le contraire de l'idée de décentralisation !

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Je considère moi aussi qu'il faut suivre la règle du jeu établie par la décentralisation Mauroy d'il y a vingt ans, et que le rapport Mauroy de 2000 a confirmée : on arrête le compteur à une date précise et on transfère la ressource correspondant à la dépense à cette date. Malgré cette unanimité, le gouvernement Raffarin a accepté de faire une rallonge, tant sur les SDI que sur le RMI, pour montrer sa bonne volonté en matière de décentralisation.

M. Augustin Bonrepaux - Ce que vous faites ce soir !

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Moi, lorsque je vous écoute, je ne passe pas mon temps à ricaner ! Nous pouvons chacun respecter le point de vue des autres.

Nous avons donc accepté ce supplément, et de belle manière, puisque la rallonge pour le RMI fut de 450 millions, excusez du peu !

M. Augustin Bonrepaux - Elle s'intègre à la base ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Par ailleurs, s'il n'y a pas de clause de revoyure, cela n'empêche pas de mener une réflexion sur la gestion du RMI. L'objectif est de faire baisser le nombre de bénéficiaires, et nous ne pouvons le faire qu'en y travaillant ensemble. C'est dans cet esprit que nous avons décentralisé la gestion de l'insertion vers les départements ou que le Premier ministre a demandé une étude sur le regroupement de l'ensemble des minima sociaux, pour rendre la politique de lutte contre l'exclusion plus efficace. Tout cela donnera lieu à un grand débat en 2006. En attendant, nous agissons de manière parfaitement conforme aux textes. Il n'y a aucune surprise, mauvaise ou bonne : tout était connu à l'avance. Il n'y a donc pas lieu d'approuver votre amendement.

M. Hervé Mariton - Voilà un débat instructif ! M. Idiart a dit tout à l'heure que si des collectivités choisissaient de faire des dépenses supplémentaires, elles auraient tout simplement à augmenter les impôts. C'est lumineux ! Et dans son amendement, M. Bonrepaux explique que le niveau définitif du niveau de la ressource doit être fixé après avoir eu connaissance des dépenses ! Quelle que soit la dépense, la ressource doit donc s'adapter. Et vous appelez ça une décentralisation ? Vous changez le drapeau du guichet, mais c'est l'Etat qui paye ! Il me semble que la décentralisation est porteuse d'autres valeurs. Si son résultat est simplement que quelqu'un constate les dépenses à couvrir, le plus simple est que ce soit celui qui paye qui les constate ! La véritable décentralisation implique un changement dans la gestion ! Votre amendement est totalement incompatible avec le principe même de la décentralisation. Pourtant, je crois que vous voulez, comme nous, qu'elle réussisse. Alors, choisissez les principes adéquats !

M. Augustin Bonrepaux - Dans la décentralisation Defferre, les dépenses transférées suivaient l'évolution de la DGF, laquelle augmentait comme l'inflation, plus les trois quarts de la croissance. Vous, au contraire, transférez une ressource qui n'évolue pas, chacun le reconnaît. Et vous prétendez que c'est juste ? Le ministre parlait tout à l'heure de la bonne évolution des droits de mutation : eux, ont été transférés par la loi Defferre ! De même que les vignettes, dont les recettes ont dans beaucoup de départements été supérieures aux dépenses correspondantes ! Ne dites donc pas que vous faites la même chose ! Vous transférez des dépenses qui augmentent et des recettes qui stagnent ! Nous vous demandons, au moins, de tenir compte du déficit de 2004, que vous avez reconnu à hauteur de 450 millions : accepterez-vous de remettre les compteurs à zéro fin 2004 ?

Vous vous plaignez que les collectivités augmentent les impôts. Pour l'Ariège, le prélèvement au titre de la DGE représente un point d'impôt, mais qui devient un point et demi avec votre réforme de la taxe professionnelle ! Et le RMI représente 4 points qui deviennent 6 ! Pour la seule séance de ce soir, l'addition pour l'Ariège se monte à 7,5 % ! Comment allons-nous faire ?

L'amendement 186, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Bouvard - L'amendement 133 de M. Scellier est défendu : il s'agit de supprimer définitivement la vignette, qui continuait à s'appliquer aux véhicules de société. Cela permettra de simplifier le droit fiscal et de rationaliser les choses, puisque le coût de collecte de la vignette était devenu particulièrement élevé pour son rapport. Mais nous avons justement constaté, dans tous les départements, que le recouvrement n'était pas bien assuré depuis plusieurs années ! Sans compter que le parc des véhicules de société avait mystérieusement tendance à disparaître, et que c'était toujours un des véhicules exonérés de la société qui circulait ! Aucun contrôle ne s'exerçait sur cette fraude massive. Si la fraude peut effectivement justifier de supprimer l'impôt, comme dans le cas de la redevance audiovisuelle, reste que la compensation pour les départements devrait tenir compte de la négligence des services de l'Etat, qui s'est traduite directement par une baisse des recettes pour eux ! C'est l'objet de cet amendement.

M. le Rapporteur général - Avis favorable.

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Avis défavorable. J'appelle votre attention sur le coût de l'opération : 80 millions ! Dans le contexte que nous connaissons, et alors que nous nous sommes fixé la mission de trouver 500 millions de baisse des dépenses, c'est beaucoup ! En tout état de cause, je ne lève pas le gage.

L'amendement 133, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 28

M. Augustin Bonrepaux - Je voudrais me réjouir de cet article relatif aux règles d'éligibilité au FCTVA, que nous demandions depuis longtemps. Plusieurs communes ayant obtenu gain de cause devant le Conseil d'Etat, le Gouvernement ne pouvait faire autrement. Cela étant, ces dispositions auraient pu être prises plus tôt, notamment pour les gendarmeries et les perceptions, les collectivités ayant souvent été obligées de recourir à des montages qui leur ont coûté cher.

M. le Rapporteur général - L'amendement 13 pourrait n'apparaître que rédactionnel, visant à substituer à la notion de « mission d'intérêt général » celle de « réalisation de la satisfaction d'un besoin d'intérêt général ». Nous avons toutefois eu un long débat à ce sujet en commission et c'est à l'unanimité que nous avons donné la préférence à la seconde formulation. Nous avions présent à l'esprit le cas, fréquent, de villages où il n'y a plus ni boulanger ni épicier et où la collectivité se substitue à l'initiative locale défaillante en acquérant des locaux où installer ces commerces. La question de l'éligibilité au FCTVA des équipements réalisés sous maîtrise d'ouvrage locale, puis mis à disposition de tiers pour la satisfaction de besoins d'intérêt général, est soulevée depuis fort longtemps, de manière récurrente, dans toutes les assemblées d'élus locaux. Je remercie donc le Gouvernement de clarifier enfin les choses - même s'il faut reconnaître que le Conseil d'Etat l'y a poussé. Cela étant, nous souhaiterions par cet amendement aller encore plus loin dans la clarification.

M. Jean-François Copé, ministre délégué - C'est là que l'affaire se complique ! Je m'étais engagé l'an passé à travailler sur le sujet. Je l'ai fait et l'article 8 répond aux préoccupations que vous exprimiez alors. Mais il faut, à un moment, savoir s'arrêter. La notion de « mission d'intérêt général » fait l'objet d'une jurisprudence fournie et constante du Conseil d'Etat. A être plus précis en parlant de « réalisation de la satisfaction d'un besoin d'intérêt général », des difficultés d'interprétation peuvent apparaître. Il est à craindre que ces ambiguïtés ne se traduisent par un coût supplémentaire pour les finances publiques.

M. le Rapporteur général - Tel n'était pas du tout l'esprit de la commission des finances.

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Je n'en doute pas. Mais je préférerais pour l'heure que vous retiriez cet amendement et que nous continuions de réfléchir ensemble au problème. S'il était maintenu, j'en demanderais le rejet.

M. le Président - « Réalisation de la satisfaction d'un besoin d'intérêt général », reconnaissons que la formulation n'est pas très heureuse !

M. Michel Bouvard - Nous sommes experts en comptes, pas en rédaction !

M. le Rapporteur général - J'accepte de retirer l'amendement mais je souhaite que nous réfléchissions ensemble à une solution d'ici à l'examen du texte au Sénat. On ne peut en effet invoquer ainsi la jurisprudence du Conseil d'Etat. C'est nous qui faisons ici la loi et la haute juridiction n'établit après tout sa jurisprudence qu'à partir de nos travaux.

M. Augustin Bonrepaux - Je pourrais reprendre l'amendement mais ne le ferai pas, préférant que le débat se poursuive dans les semaines à venir. Cela dit, je ne vois absolument pas quels dérapages financiers il pourrait provoquer.

L'amendement 13 est retiré.

M. le Rapporteur général - L'amendement 14 est de coordination.

L'amendement 14, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Michel Bouvard - L'amendement 42 est quasiment historique. Je le redépose à chaque budget depuis des années et s'il n'était pas adopté ce soir, demain encore les élus de la montagne qui tiennent leur congrès annuel vous feraient la même demande, Monsieur le ministre délégué aux collectivités territoriales, puisque vous les honorerez de votre présence. Il s'agit d'une part de rendre éligibles au FCTVA les ouvrages et les travaux de protection contre les risques naturels dans les zones de montagne ; d'autre part de prévoir que l'intégration du coût de ces équipements dans la base de calcul du loyer ne pourra être exigée par personne, à l'exception de la collectivité bailleuse si elle souhaite partager ces coûts. J'espère obtenir enfin satisfaction ce soir, après tant d'années. Ce serait une mesure d'équité, dans la suite logique d'ailleurs de l'éligibilité au FCTVA, décidée il y a plusieurs années, des travaux d'aménagement des alpages.

M. le Rapporteur général - Nous espérons que la force de conviction de M. Bouvard fera fléchir le Gouvernement.

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Cet amendement répond à une vraie préoccupation que partage le Gouvernement...

M. Michel Bouvard - Cela commence bien !

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Avis favorable. Je lève le gage.

L'amendement 42, mis aux voix, est adopté.

M. Michel Bouvard - Sensible à cette avancée, je persévère néanmoins en défendant un amendement souvent adopté à l'unanimité par la commission des finances mais jusqu'à présent toujours repoussé par le Gouvernement. La Cour des comptes le souligne dans tous ses rapports, le patrimoine de notre pays se dégrade. Or, les collectivités ne peuvent pas transformer en musées tous les bâtiments présentant un intérêt architectural ou historique. Quand elles trouvent à en louer certains pour l'exercice d'une activité commerciale ou autre - à condition que le bâtiment reste ouvert au public -, c'est toujours intéressant. Hélas, aujourd'hui pour que les travaux de sauvegarde qu'elles ont entrepris soient éligibles au FCTVA, le montant du loyer doit atteindre 4 % de l'investissement, condition difficile à remplir dans un monument historique où le coût des travaux est souvent très élevé. Par l'amendement 43, je propose que soient éligibles au FCTVA les travaux réalisés par les collectivités sur les monuments historiques classés ou inscrits, quels que soient le mode de location et l'affectation finale de ces édifices.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé cet amendement, considérant que l'on ne pouvait pas tout obtenir la même année. (Sourires)

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Le Gouvernement n'est pas insensible à l'argument de la commission. Avis défavorable.

L'amendement 43, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Bouvard - L'amendement 422 rectifié vise à étendre le bénéfice du FCTVA aux fonds de concours ferroviaires des collectivités, comme cela se fait déjà pour les fonds de concours routiers. Ce serait encourager le transport ferroviaire et la multi-modalité.

M. le Rapporteur général - La commission n'a pas examiné cet amendement.

M. Jean-François Copé, ministre délégué - Avis défavorable.

L'amendement 422 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 28, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 29

M. Jean-Louis Dumont - Evoquant le logement et le renouvellement urbain, nous avons tous dit nos grandes ambitions pour tenter de résoudre la crise du logement. L'amendement 189 tend à majorer la DGF de trois milliards d'euros pour faire face aux obligations des collectivités en matière de logement. Les inquiétudes des maires qui doivent réaliser des opérations de renouvellement urbain sont grandes. M. Van de Maele, directeur de l'ANRU, a rendu visite aux préfets de région pour les inciter à trouver des financements extérieurs à l'Etat, et à se tourner vers les régions et les départements. Il y a quelques jours s'est tenu un conseil d'administration de l'ANRU où l'on a proposé une diminution du taux et la réduction du périmètre des opérations de renouvellement urbain. C'était la débandade ! Grâce une forte intervention de M. Delebarre, président de l'USH, nous sommes revenus à la raison. Reste que j'ai eu à annoncer au maire d'une ville moyenne, appartenant à la majorité, qu'on allait limiter en 2006 une opération de rénovation à un seul quartier dans une ville qui compte 20 000 habitants, et que pour le reste il fallait négocier. Peut-être même allait-il recevoir la visite du directeur de l'ANRU qui lui demanderait des financements supplémentaires... Si l'on veut poursuivre les actions de l'agence, il faut mobiliser de nouveaux fonds. C'est le sens de l'amendement 189.

Je signale d'autre part un danger. Auparavant, on construisait des habitations avant, éventuellement, de démolir les bâtiments qui ne correspondaient plus aux normes. Aujourd'hui, le renouvellement urbain commence par un déménagement des populations, que j'oserais presque comparer à une déportation. Pensez-vous que ces populations fragiles reviendront quand la Foncière aura construit du logement intermédiaire et du logement de standing ? Pour éviter de futures catastrophes sociales, nous avons besoin du soutien de la majorité afin d'obtenir le financement nécessaire pour achever les opérations de l'ANRU.

M. Richard Mallié - Terminez-en !

M. Jean-Louis Dumont - Prenons l'exemple de Marseille où de grandes opérations de l'ANRU vont avoir lieu, il faut mobiliser les opérateurs et les inviter à être plus audacieux !

M. le Président - Monsieur Dumont, je vous prie de conclure.

M. Jean-Louis Dumont - Mon discours est peut-être incantatoire : (Rires sur les bancs du groupe UMP) il deviendra opérationnel si mes collègues de la majorité votent cet amendement.

M. le Rapporteur général - Nous terminons cette séance avec un amendement très modeste (Rires sur tous les bancs) qui vise à augmenter la DGF de 3 milliards d'euros !

M. Jean-Louis Dumont - C'est l'apothéose !

M. le Rapporteur général - C'est au-delà de nos moyens.

M. Jean-Louis Dumont - Ne soyez pas mesquin !

M. le Rapporteur général - En revanche, notons que la DGF augmentera de plus de 1 milliard d'euros, soit presque 3 %, tandis que le budget de l'Etat ne progressera que de 1,8 %.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué - Votre proposition est sympathique mais irréaliste. L'adopter signifierait que le contrat de croissance augmentera de 9,31 % et la DGF de 11 %.

M. Jean-Louis Dumont - Vous jouez petit bras !

L'amendement 189, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 29, mis aux voix, est adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu ce matin, vendredi 21 octobre, à 9 heures 30.

La séance est levée à 1 heure 5.

            La Directrice du service
            des comptes rendus analytiques,

            Catherine MANCY

ORDRE DU JOUR
DU VENDREDI 21 OCTOBRE 2005

NEUF HEURES TRENTE : 1ERE SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540).

Rapport (n° 2568) de M. Gilles CARREZ, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

QUINZE HEURES : 2EME SÉANCE PUBLIQUE

1. Projet de loi (n° 2109) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Agence spatiale européenne relatif au centre spatial guyanais (ensemble trois annexes).

Rapport (n° 2443) de M. Paul QUILÈS, au nom de la commission des affaires étrangères.

2. Projet de loi (n° 2110) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Agence spatiale européenne relatif aux ensembles de lancement et aux installations associées de l'Agence au centre spatial guyanais (ensemble trois annexes).

Rapport (n° 2443) de M. Paul QUILÈS, au nom de la commission des affaires étrangères.

3. Projet de loi, adopté par le Sénat (n° 2175), autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Macédoine relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure.

Rapport (n° 2445) de M. François LONCLE, au nom de la commission des affaires étrangères.

4. Projet de loi, adopté par le Sénat (n° 2177), autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements.

Rapport (n° 2444) de M. Jacques REMILLER, au nom de la commission des affaires étrangères.

5. Projet de loi (n° 2234) autorisant l'approbation de l'accord de siège entre le Gouvernement de la République française et la Communauté du Pacifique.

Rapport (n° 2451) de M. Éric RAOULT, au nom de la commission des affaires étrangères.

6. Projet de loi (n° 2555) autorisant l'approbation de l'accord entre les Gouvernements de la République française, de la République fédérale d'Allemagne, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord et du Royaume des Pays-Bas, relatif à la coopération dans le domaine de la technologie de la centrifugation.

Rapport (n° 2601) de M. Jacques REMILLER, au nom de la commission des affaires étrangères.

(Ces six textes faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée : art. 107 du Règlement).

7. Suite de l'ordre du jour de la première séance.

VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 3EME SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


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