Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques (session ordinaire 2005-2006)

Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2005-2006 - 17ème jour de séance, 40ème séance

3ème SÉANCE DU JEUDI 27 OCTOBRE 2005

PRÉSIDENCE de Mme Paulette GUINCHARD

vice-présidente

Sommaire

PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2006 (suite) 2

ART. 30 2

APRÈS L'ART. 30 12

ART. 31 12

APRÈS L'ART. 31 16

ART. 32 16

APRÈS L'ART. 32 18

ART. 33 19

ART. 34 20

ART. 35 22

ART. 36 22

APRÈS L'ART. 36 23

ART. 37 25

ORDRE DU JOUR
DU VENDREDI 28 OCTOBRE 2005 30

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

PROJET DE LOI DE FINANCEMENT
DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2006 (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

ART. 30

M. Jean-Luc Préel - Nous aurions besoin de temps pour aller au fond des problèmes posés par cet article 30.

Tout d'abord, la tarification à l'activité ou T2A. J'y suis favorable depuis l'origine car elle remplace le système de la dotation globale qui pénalisait tous les établissements dont l'activité était en augmentation. En revanche, je constate que sa mise en œuvre est problématique dans le secteur public : la part de financement reposant sur la T2A avait été fixée à 25% en 2005 et jamais les budgets des hôpitaux n'ont été aussi complexes et techniques - coexistence de la dotation globale et de la tarification à l'activité, multiplication des coefficients - et adoptés si tardivement - la plupart des établissements n'ont voté leur budget qu'en juin 2005. Il aurait été nécessaire de leur permettre de repartir sur des bases saines.

Monsieur le ministre, quel sera le niveau de T2A à atteindre dans les établissements publics en 2006 ?

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités - Cela relève du règlement !

M. Jean-Luc Préel - Se pose également la question de la définition et du niveau des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation ou MIGAC - ressources qui ne sont pas liées à l'activité - dans la construction du budget des hôpitaux publics.

Autre difficulté, le risque inflationniste. M. Mattei, alors ministre de la santé, avait indiqué que les établissements bâtiraient leur budget en fonction de leur activité réelle. Beaucoup espéraient donc disposer d'un budget correspondant mieux à leur activité. Pour lutter contre ce risque inflationniste, on a soumis les hôpitaux à des contrats d'objectifs et de moyens, dont le respect donne lieu à des reversements et la violation à des pénalités financières.

Bref, cette réforme de la tarification a pour résultat un budget plus complexe, proche du système de « lettre-clé flottante » que nous dénoncions en son temps.

M. Jacques Domergue, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour l'assurance maladie et les accidents du travail - Non !

M. Jean-Luc Préel - S'agissant de la convergence entre privé et public, elle se révèle complexe. La part de financement de la T2A dans les établissements privés est de 100%, honoraires des praticiens exclus. De nombreuses cliniques traversent une période difficile en raison des restructurations et de mises aux normes nécessaires mais coûteuses. La rémunération des personnels est inférieure de 20 à 25% à celle pratiquée dans le secteur public. Rappelons que la convergence totale était fixée à 2012, avec une étape intermédiaire en 2008 où le taux de convergence devait atteindre 50%. Ce projet de loi, en supprimant l'étape intermédiaire de 2008 rend impossible une convergence totale en 2012.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Tout à fait !

M. Jean-Luc Préel - Monsieur le ministre, préparez-vous le report de cette échéance ?

M. Philippe Vitel - La mise en place de la T2A dans les établissements publics et privés constitue une mesure phare de la réforme de l'assurance maladie. Elle est un outil de modernisation de l'hospitalisation publique et donc, à terme, un moyen de prévenir sa disparition. Si les établissements privés ont fait preuve d'un grand sens des responsabilités en appliquant la T2A, son introduction dans le secteur public est plus longue et difficile. Mais, comme l'objectif initial de 100% de convergence en 2014 semblait trop éloigné, nous avons choisi l'an dernier d'avancer cette date butoir à 2012, avec une étape intermédiaire de 50% en 2008.

Où en sommes-nous aujourd'hui ? La Fédération de l'hospitalisation de France, présidée par M. Evin, vient de publier un document fort intéressant, intitulé « Hôpitaux publics et cliniques privées : une convergence tarifaire faussée », qui montre la difficulté du secteur public hospitalier à adhérer à cette mutation. Monsieur Evin, sans vouloir verser dans la polémique, il me semble que les exemples choisis dans cette brochure sont quelque peu arbitraires. La principale modalité de financement de la T2A est le forfait par séjour ou groupe homogène de séjour - GHS. Or, vous ne prenez que des exemples de GHS hétérogènes pour montrer que le secteur public prend en charge les actes les plus coûteux et les moins rentables.

En revanche, je partage votre point de vue sur la mauvaise évaluation des MIGAC, même si vous passez totalement sous silence les missions d'intérêt général remplies par le secteur privé. Une fois la T2A généralisée dans le secteur public, nous pourrons mieux identifier les MIGAC car la comparaison entre hôpitaux et cliniques reposera sur des critères objectifs. Par conséquent, il est indispensable de maintenir des objectifs clairs : 50% de convergence en 2008 et 100% en 2012. L'hôpital public doit vivre cette mutation comme un défi, non comme une contrainte. Il a tout à y gagner, et fera mieux qu'aujourd'hui la démonstration de ses excellentes performances. Je le répète : la T2A en garantit la sauvegarde !

Mme Jacqueline Fraysse - L'article 30 poursuit l'implacable mise en œuvre de la convergence entre public et privé, malgré les spécificités si différentes de ces deux entités que vous souhaitez rapprocher à tout prix.

La FHF explique parfaitement qu'il est incohérent de mettre tous les établissements de santé, commerciaux ou non, sur le même plan financier.

Les tarifs du privé et du public ne sont pas bâtis sur les mêmes critères : alors que le salaire des médecins est incorporé dans les tarifs de l'hôpital, les médecins libéraux des cliniques commerciales perçoivent des honoraires.

Dans le public, l'essentiel des coûts est dû à des prestations réalisées pendant les séjour. Dans le privé, au contraire, les examens d'imagerie sont souvent effectués dans des laboratoires indépendants des cliniques.

Les hôpitaux reçoivent près de 80% des hospitalisations, tandis que les cliniques privées ne prennent en charge que les pathologies produisant des actes, comme l'endoscopie ou la coronarographie.

En revanche, le secteur privé prend en charge 55% des hospitalisations chirurgicales complètes et 90% de la chirurgie ambulatoire. Une telle répartition, naturellement, n'est pas sans conséquences sur les tarifs ! La planification des interventions et la mise en place de protocoles facilitent l'optimisation de la prise en charge, ce qui explique les coûts parfois supérieurs du public pour les mêmes pathologies.

Mais les cliniques privées ne s'occupent le plus souvent que des pathologies les plus simples, laissant les plus lourdes - donc les plus coûteuses - à l'hôpital. Dans les GHS par exemple, le privé absorbe 74% des sinusites chroniques, contre 26% au public ; mais le public assume 67% des tumeurs ORL, contre 33% pour le privé. Quant aux interventions chirurgicales portant sur l'ORL, alors que 56% des pathologies dento-faciales sont assumées par le privé contre 44% par le public, celui-ci prend en charge 85% des stomatites. De tels exemples montrent bien le caractère inégalitaire de ce mode de rémunération.

En outre, n'oublions pas l'action sociale de l'hôpital, qui échappe à l'activité commerciale. Les profils différents des patients peuvent expliquer les différences de coût. Ainsi, le public prend davantage en charge les personnes très âgées - de plus de 85 ans - et, à l'autre bout de la vie, les grands prématurés, qui exigent des soins coûteux et de longue durée.

L'hôpital accueille tous les usagers, quelle que soit leur situation sociale. Cette obligation essentielle du service public a une incidence directe sur le coût en termes de durée de séjour, de polypathologies et de créances irrécouvrables.

L'hôpital finance également des services sociaux - les assistantes sociales - sur son propre budget. Les établissements privés n'assurent presque jamais l'activité de garde sur place, contrairement au public où elle représente une vingtaine de gardes et astreintes pour les gros centres hospitaliers, et plusieurs dizaines dans les CHU. On prend les patients quand ils arrivent, 24 heures par jour et 365 jours par an. Le coût est cinq fois plus élevé que si on les accueille en période d'activité normale.

Le terme « urgences » dissimule bien des réalités : les services d'urgence les plus complets sont les SAU, assurés par 280 hôpitaux publics et 3 cliniques privées. Les autres services tels que les UPATOU ne permettent qu'une première prise en charge, qui débouche le plus souvent sur une réorientation vers les SAU publics. Si ces différents services sont complémentaires, ils ne sont pas pour autant comparables. Seuls ceux qui sont vraiment indispensables sont à la charge des hôpitaux.

Les hôpitaux participent à de nombreuses actions de santé publique, à l'accueil et à la formation des étudiants - les budgets relatifs aux missions d'intérêt général l'oublient souvent.

Toutes ces activités échappent au mode de calcul du budget des hôpitaux dans le cadre de la T2A. Le rapprochement que vous souhaitez ne les prend pas en compte.

Rapprocher, pourquoi pas ? Mais on ne peut pas aligner les missions de l'hôpital public sur le mode de financement et de rémunération des services privés.

Une telle convergence est irréaliste, car elle accentuera les difficultés financières du tissu public hospitalier. Nous demanderons donc la suppression de l'article 30.

M. Claude Evin - Je souhaite rappeler à M. Vitel que la responsabilité de la FHF que j'assume est sans aucune connotation politique, car son conseil d'administration est composé de membres de tous les groupes politiques et adopte ses positions à l'unanimité.

J'exprime donc ici la préoccupation de nombre d'hospitaliers - pas tous, bien sûr, mais au moins ceux de l'hôpital public, auquel nous sommes tous attachés.

Nous avons déjà plusieurs fois débattu du nouveau mode d'allocation de ressources.

Avant tout, je tiens à dire que nous n'avons pas de divergences sur le passage de la dotation globale à la tarification à l'activité. A preuve, la loi hospitalière de 1991 prévoyait déjà une expérimentation sur cinq ans de ce qu'on appelait alors la « tarification à la pathologie ». Mais cela n'ayant pas été fait, c'est le titre IV de la loi de 1999 portant création de la CMU qui posa les fondements de ce qui devait devenir la T2A.

C'est en revanche sur les modalités de mise en œuvre de cette mesure qu'il y a débat, même si je tiens pour ma part à être très nuancé, car je comprends parfaitement l'esprit qui animait les choix de Jean-François Mattei en 2002.

Les effets de l'application au 1er janvier 2004 de ce nouveau mode de ressources sans expérimentation commencent à se faire sentir. Certes, je comprends que plus de dix ans après les premiers textes de loi, devant l'absence de résultats, on se décide à agir ! Mais nous commençons à percevoir les effets pervers de cette mesure. Si nous ne les maîtrisons pas rapidement, l'offre de soins en sera peut-être affectée à l'avenir.

C'est tout l'enjeu du débat ! Le Gouvernement ne mesure pas précisément les effets pervers de cette mesure.

Des tarifs identiques s'appliqueront-ils un jour au public et au privé ? L'a priori est intellectuellement recevable : on sanctuarise les missions d'intérêt général dans les MIGAC pour finir, toute chose étant égale par ailleurs, par dire qu'à intervention égale, il doit y avoir coût égal dans le public et le privé.

Malheureusement, la réalité est différente ! On ne peut pas isoler dans les MIGAC l'ensemble des missions de l'hôpital public.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour les recettes et l'équilibre général - C'est cela qu'il faut analyser !

M. Claude Evin - Nous en sommes là aujourd'hui : une mécanique de marche forcée vers l'harmonisation des tarifs public-privé. A ce propos, qu'entendez-vous par un objectif de 50% en 2008 ? 50% de quoi, vu que personne ne sait quel sera le tarif final de 2012 ? M. Domergue saura peut-être me répondre.

Cela étant, n'est-il pas légitime que les tarifs varient en fonction des différences entre le public et le privé ? Ainsi, le statut de la fonction publique implique un coût plus élevé que les rémunérations relevant de la convention collective, il existe un repos de sécurité pour les médecins hospitaliers que les libéraux n'ont pas et la structure de l'activité n'est pas la même pour un hôpital public - lequel doit produire en moyenne 117 GHS pour réaliser 80% de son activité - que pour la clinique privée qui n'a besoin pour le faire que de 56 GHS.

Nous devrions nous poser ces questions, mais c'est vrai que nous n'avons pas les données nécessaires - les travaux de méthodologie pour l'élaboration d'une échelle des coûts commune entre le public et le privé ne sont toujours pas achevés.

Si les missions de service public de l'hôpital ne sont plus financées demain, qui les assumera ? Si nous en arrivons à une unification des tarifs entre le public et le privé, comment imaginer baisser les tarifs de l'hôpital - que le privé prétend 40% plus élevés que les siens - sans toucher à l'emploi, alors que 70% des budgets hospitaliers couvrent des dépenses de personnel ? Et si l'on choisit d'augmenter les tarifs des cliniques, qui peut garantir que le déficit actuel de l'assurance maladie pourra le supporter ?

Je souhaiterais, Monsieur le ministre, que vous nous communiquiez le rapport de l'IGAS, selon lequel la mise en place de la T2A serait particulièrement inflationniste.

Si je pouvais vous convaincre de la perversité d'au moins un ce ses effets, je n'aurais pas fait œuvre inutile ce soir.

M. Gérard Bapt - Très bien.

M. le Président de la commission - Permettez-moi, suite aux propos de M. Vittel, de m'interroger sur l'évolution de la Fédération hospitalière de France : est-elle devenue un groupe de pression ? Un syndicat de l'administration hospitalière ? Une machine politique qui s'organise en vue des prochaines échéances ? Comment ne pas le penser quand un haut responsable de cette fédération, auditionné par la MECSS met en cause plusieurs ministres de la santé, dont M. Mattei, et ce dans des conditions inacceptables ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Oublions cela, car le président de cette fédération, homme éminemment respectable, est au courant. J'ai du reste eu l'occasion de travailler avec lui lors de la préparation de sa réforme de 1991, dont il regrette qu'elle soit si peu appliquée.

Pourquoi n'est-on pas capable d'appliquer les réformes qui ont été votées ? Pourquoi les départements créés en 1991 n'ont-ils pas été mis en place ? C'est bien facile d'en rejeter la responsabilité sur l'individualisme des médecins, alors qu'une administration efficace aurait eu les moyens d'agir.

Pourquoi, en 1996, les centres de responsabilité n'ont-ils pas été institués ?

Pourquoi mon amendement Liberté, à la loi de 1991, n'a-t-il jamais abouti ?

Posons-nous ces questions !

Enfin, pourquoi l'hôpital public existe-t-il ? Pourquoi sommes-nous un certain nombre à avoir choisi d'y entrer ? Parce qu'il est en charge d'une mission formidable : soigner les malades (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Je me souviens d'un ouvrage que j'ai écrit il y a une dizaine d'années, « L'Hôpital a oublié l'Homme ». Eh bien, la situation est encore pire aujourd'hui, et je n'en veux comme exemple que la campagne contre les incivilités déclenchée par la Fédération hospitalière de France. S'est-elle seulement demandé pourquoi ces incivilités existaient ? N'a-t-elle pas pensé que des gens inquiets, malades, face à une structure qui leur paraissait peut-être désorganisée, pouvaient se laisser aller à de telles extrémités ? Plutôt que de s'interroger, elle a préféré lancer cette campagne, ce qui a été très mal vécu par le personnel qui est au contact des patients. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Tian - Les cliniques privées ont fait un réel effort pour mettre en place la T2A, et l'on peut s'étonner que les hôpitaux publics, qui en avaient pourtant les moyens, n'y soient pas parvenus.

N'oublions pas, par ailleurs, que les cliniques ont réalisé des sacrifices tant humains que financiers pour se restructurer - un tiers d'entre elles ont disparu ou se sont regroupées.

La guerre public-privé est aujourd'hui révolue, et nous n'en sommes plus au temps où les cliniques ne soignaient que les riches et les hôpitaux les pauvres. Nos concitoyens n'en sont plus là, ils veulent simplement que la gestion soit plus transparente et que les normes s'imposent à tous - notamment les normes d'hygiène, pour lutter contre les maladies nosocomiales.

De toutes manières, la réglementation, la montée des plaintes et des exigences de nos concitoyens conduiront les directeurs d'hôpitaux comme les présidents d'assistances publiques à évoluer, notamment dans le sens d'une plus grande transparence.

Je ne sais pas si nous parviendrons un jour à la convergence, mais en tout état de cause, n'oublions pas que les cliniques privées ont déjà consenti des efforts colossaux et que leur demander de converger entre elles serait signer l'arrêt de mort d'une partie de cette profession. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Ministre - Beaucoup d'orateurs se sont exprimés sur ce sujet et je voudrais vous expliquer dans quel esprit nous avons rédigé cet article. S'il n'est pas question de renoncer à l'objectif de convergence en 2012, il n'est pas utile de s'attacher à des symboles, comme l'échéance de 2008.

Je sais que les parlementaires et les élus locaux qui siègent dans les conseils d'administration de beaucoup d'hôpitaux veulent aujourd'hui y voir clair. Je l'assume : on ne peut pas dire que 2005 ait été marquée du sceau de la lisibilité...

M. Jean-Marie Le Guen - Très bien.

M. le Ministre - ...mais je me suis engagé à ce que cela change, notamment en ce qui concerne les différentes campagnes budgétaires. Cela m'a d'ailleurs permis de tordre le cou à l'idée selon laquelle les trois quarts des établissements seraient dans le rouge, alors qu'un ONDAM de plus de 3% représente deux milliards de plus pour les hôpitaux. Nous devons donc continuer à moderniser l'hôpital public, les cliniques privées mais aussi les PSPH.

M. le Président de la commission - Il ne faut pas oublier les 10,5 milliards du plan « Hôpital 2007 ».

M. le Ministre - Je salue M. Mattei, qui a porté cette réforme indispensable. La représentation nationale et le Gouvernement sont aux côtés des professionnels dans cette œuvre de modernisation, mais il ne s'agit pas d'ajouter des réformes aux réformes : il s'agit maintenant de les faire vivre. A l'issue du PLFSS, je vous présenterai de nouvelles orientations pour aller au-delà du plan « Hôpital 2007 », et sur le plan de la gouvernance, et sur la complémentarité entre établissements.

Je n'ai guère rencontré d'opposition à la T2A, car tout le monde souhaite plus de transparence. Au-delà de son taux, qui sera communiqué à la fin de l'année - je ne fais aucun mystère, Monsieur Préel, mais je dois y voir clair - c'est le contenu qui importe. Au lieu d'une convergence précipitée, je préfère une convergence réussie : nous avons besoin de connaître les missions d'intérêt général de l'hôpital et les moyens financiers qui leur seront dévolus. Compte tenu des efforts de modernisation et des impératifs de bonne gestion de l'assurance maladie, il n'est pas possible d'augmenter les MIGAC et d'augmenter en même temps fortement le taux de T2A car celle-ci est au départ inflationniste.

Je ne vous propose pas de renoncer à la convergence mais je vous propose d'y voir clair. Je recevrai un rapport de l'IGAS que je vous communiquerai à la fin de l'année afin que, dès le début de 2006, nous puissions mettre en place une mission sur les coûts à la charge des hôpitaux et des cliniques. Je comprends que cet article déchaîne des passions, mais il faut aussi savoir nous rassembler pour moderniser notre système de soins. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Claude Evin - Très bien !

Mme Jacqueline Fraysse - Nous sommes tous attachés à l'hôpital public et nous sommes ouverts à la complémentarité entre secteurs public et privé, mais vous avez regretté vous-même, Monsieur le ministre, un défaut de transparence.

M. le Ministre - De lisibilité, et pour 2005. Ce sera différent en 2006.

Mme Jacqueline Fraysse - La transparence fait également défaut. Je ne partage pas votre optimisme quant au financement des hôpitaux. Vous le savez d'ailleurs mieux que moi parce vous êtes harcelé de rendez-vous par les présidents de conseils d'administration des hôpitaux...

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances - Voilà à quoi servent les maires, maintenant.

Mme Jacqueline Fraysse - ...qui sont en déficit chronique. Dans ma circonscription, l'hôpital Foch est en déficit et l'ARH exige non seulement que 260 postes y soient supprimés mais que l'on y parvienne à une meilleure rationalisation et une meilleure rentabilité. Certes, il faut rationaliser, mais quid de ces hôpitaux endettés qui consacrent une partie de leurs moyens à engraisser les banques ? Donnez-moi au moins acte de ce que le problème se pose !

A cela s'ajoutent donc la T2A et le plan « Hôpital 2007 » qui ouvre au capital privé le financement du bâti et de l'équipement de l'hôpital public. Il faut raisonner différemment. M. Dubernard disait tout à l'heure que l'hôpital a oublié l'homme, mais ce n'est pas vous qui lui ferez retrouver la mémoire. Les hôpitaux seront en concurrence et des déséquilibres territoriaux et salariaux se feront jour, peut-être même serons-nous confrontés à une guerre des salaires en raison de l'établissement de pôles de compétences.

Notre amendement 134 vise donc à supprimer cet article.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis défavorable. Nous ne devons plus raisonner en terme d'opposition entre les secteurs public et privé, mais au contraire en terme de complémentarité, car l'offre de soins est globale. A travers la T2A, le financement des établissements privés, naguère fondé sur le prix de journée, et celui des établissement publics, fondé sur le budget global, se rapprochent. Monsieur Evin, vous avez affirmé que la T2A aurait des effets pervers parce qu'elle est inflationniste.

M. Claude Evin - C'est aussi ce qu'a dit M. le ministre.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Mais il en a été de même lorsque l'on a proposé de financer les établissements sur la base du PMSI. Nous avons besoin d'inciter à une meilleure efficacité. Cette notion fait parfois peur dans les établissements publics, comme si elle ne devait pas s'y appliquer. M. le ministre l'a dit : il faut évaluer les MIGAC. C'est la clé de tout. Si on ne le fait pas, il ne sera pas possible de comparer les tarifs entre hôpitaux publics et privés alors qu'il est indispensable de faire en sorte que l'assurance maladie puisse financer au plus juste prix. La Fédération hospitalière de France est d'accord pour considérer que dans certains hôpitaux, des activités, comme par exemple la chirurgie, pourraient être interrompues : il n'est aucunement question de fermer des hôpitaux mais de dégager de marges de manœuvre, d'obtenir des lits supplémentaires pour les soins de suite ou pour les personnes âgées.

Il est donc indispensable de prôner la convergence et de faciliter la montée en charge de la T2A dans tous les hôpitaux publics. Au demeurant, certains confondent parfois ces deux notions. Je crois que si nous supprimons cet objectif de 50% en 2008, nous compromettrons celui de 100% en 2012. Il faut au contraire continuer dans cette voie, encourager les hôpitaux à être inventifs, à rompre avec certains blocages comme celui du statut des praticiens hospitaliers, et je prône, dans le cadre d'un rapprochement et d'une complémentarité des établissements, la conjugaison, dans les deux types d'établissements, d'une rémunération forfaitaire, sur la base salariale et d'une rémunération incitative, proportionnelle à l'activité.

M. le Ministre - Avis défavorable.

L'amendement 134, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Philippe Vitel - L'amendement 75 est défendu.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 98 est identique.

M. Dominique Tian - L'amendement 87, également identique, a pour objet de fixer les priorités qui doivent guider les directeurs d'agences régionales dans la modulation du taux de convergence des établissements. Il garantit par ailleurs que la revalorisation des tarifs et du coefficient de transition n'aura pas pour effet d'annuler l'évolution annuelle des tarifs. C'est en quelque sorte un filet de protection.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Ces amendements, qui visent à garantir un niveau de ressources aux établissements, auraient pour conséquence de modifier l'économie générale du dispositif de convergence car ils rompent avec le principe de neutralité financière et sont contraires à l'équité. En effet, les établissements ayant bénéficié d'avantages tarifaires en raison de leur activité verraient ces avantages pérennisés. Le décret d'application auquel renvoie la loi sera modifié d'ici la fin de l'année pour tenir compte des changements introduits par le présent texte et je m'engage à y préciser les modalités d'évolution du coefficient de transition, notamment s'il y a regroupement total d'établissements sur un même site. Je vous demande donc de retirer vos amendements.

M. Dominique Tian - Je retire mon amendement.

M. Philippe Vitel - Je fais de même.

M. Jean-Luc Préel - Moi aussi.

M. le Ministre - Je vous en remercie.

M. Philippe Vitel - L'amendement 76 est défendu.

M. Dominique Tian - L'amendement 88 est défendu.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 100 également.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Une progression régulière de la fraction tarifaire est assurée dans le cadre de la réforme du financement des établissements de santé, avec un objectif de 100% en 2012. Imposer une progression annuelle uniforme n'est pas opportun car il convient de nous laisser une marge d'appréciation afin que nous puissions agir avec pragmatisme. Ainsi la progression pourra être ralentie ou accélérée en cas de besoin.

M. Dominique Tian - Je retire mon amendement.

M. Philippe Vitel - Moi également.

M. Jean-Luc Préel - Et moi de même.

M. le Ministre - Je vous remercie.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis et Mme Jacqueline Fraysse - C'est un jeu de rôle !

M. le Ministre - Nullement. Je sais dans quel esprit ces amendements ont été déposés, et il est important que le débat ait lieu. C'est pourquoi j'ai pris soin d'expliciter ma position. Je comprends tout à fait vos préoccupations et je suis sensible à la confiance que vous me témoignez en acceptant de retirer vos amendements.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis - L'amendement 51 maintient la disposition selon laquelle l'objectif de convergence des tarifs devra être atteint à 50% en 2008. Nous voulons démontrer que la réforme de l'hôpital public n'est pas seulement nécessaire ; elle est aussi une chance puisqu'elle permettra aux hôpitaux de s'adapter aux nouvelles exigences de qualité et de sécurité et d'utiliser au mieux les moyens considérables mobilisés au sein de l'ONDAM, 2,5 milliards d'euros supplémentaires ayant été versés au titre de l'année 2005. Personne ne peut dire que l'hôpital est étranglé !

La tarification à l'activité est l'un des outils de la modernisation. Pour les directeurs de CHU, la poursuite de la mise en place de la T2A doit se faire à plusieurs conditions : tarifs stables en 2006-2007 ; liste des dispositifs ou des médicaments coûteux stable ; MIGAC mieux évaluées et chiffrées. Nous devons faire en sorte que les hôpitaux s'inscrivent dans une autre démarche et que les meilleurs soient récompensés. Cela ne signifie pas pour autant qu'il ne faille pas accompagner les hôpitaux en difficulté, c'est d'ailleurs le rôle des ARH, à travers des contrats clairs de modernisation et de restructuration. Qui peut accepter l'idée que les prix entre CHR et CHU soient aussi disparates ? Un séjour en service de médecine chirurgie obstétrique est évalué au CHR de Metz à 1 150 euros et à 3 126 euros au CHU de Clermont-Ferrand ! Il y a trois ans, la mission d'information sur l'organisation interne de l'hôpital a produit des recommandations qui méritent d'être prises en compte : le diagnostic, comme les remèdes, étaient bons.

Si nous abandonnons cette étape intermédiaire, nous donnerons le premier signal du renoncement et jamais nous n'atteindrons les objectifs que nous nous sommes fixés en 2012. J'ai été de ceux qui, en 1996, ont mis en place le principe de la réforme de la tarification des établissements médicosociaux. Nous nous interrogions alors pour savoir si la mise en œuvre devait se faire au début ou à la fin de l'année 1999. Dix ans plus tard, nous n'avons toujours pas achevé cette réforme, pourtant moins ambitieuse que celle de l'hôpital ! Avec l'aide des outils que sont les SROS de troisième génération, nous voulons inscrire l'hôpital dans une dynamique de modernisation et le mettre réellement au service des malades. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Vitel - L'amendement 77 est défendu.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis favorable.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur - Supprimer l'échéance de 2008 revient à remettre en cause la T2A, que tous appelaient de leurs voeux. Revenir en arrière, alors que nous avons voté il y un an une tendance à la convergence à 50% en 2008, c'est danser le tango et revenir à une certaine forme d'archaïsme. Il faut, je le crois, se fixer un cap et le tenir. Pour avoir moi-même longtemps exercé à l'hôpital public, j'en connais bien les atouts et les défauts. Chacun sait ce qu'il faudrait faire pour le moderniser. Le problème est que les réformes sont sans cesse reportées. Dans l'un de ses rapports, le Haut conseil de l'assurance maladie - où siègent des parlementaires de tous bords -, déplore l'extrême lenteur du redéploiement des moyens et souligne la nécessité d'une organisation plus efficace, qui supposerait des décloisonnements. Qu'est-ce à dire, sinon qu'il faut arrêter d'opposer public et privé, mais au contraire organiser leur complémentarité pour replacer le malade au centre du système de soins ? Il faut réfléchir à la meilleure façon de mettre en place la tarification à l'activité et évaluer le plus finement possible les MIGAC, du public comme du privé - car celui-ci en a également. L'échéance fixée de 2008 ne doit pas faire peur. Pourquoi revenir en arrière ? Il faut adopter les amendements de la commission et de M. Vitel.

M. le Ministre - Pour toutes les raisons que j'ai exposées tout à l'heure, la sagesse serait de s'en tenir au texte du Gouvernement.

M. Gérard Bapt - Tout à fait.

M. le Ministre - Ce qui compte pour moi avant tout, c'est de réussir dans les faits la convergence. C'est pourquoi, tout en comprenant ce qui les a motivés, je suis défavorable à ces amendements, qui n'auraient que valeur de symbole. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Claude Evin - Je ne voudrais pas ici polémiquer avec le président Dubernard. Les hospitaliers apprécieront ses propos ! Puisqu'il reproche à la Fédération hospitalière de France de n'avoir pas toujours accompagné les réformes, dois-je lui rappeler que cette organisation a longtemps été présidée par des parlementaires du même bord politique que lui ? La FHF, où siègent des élus de toutes tendances et un grand nombre de professionnels, représente l'hôpital public dans toute sa diversité. Toute polémique sur sa représentativité est donc sans fondement.

L'hôpital public est intimement convaincu de la nécessité de se moderniser, de remplir le plus efficacement possible ses missions de service public tout en respectant les contraintes financières de l'assurance maladie. De grâce donc, pas de caricatures ! Avec ce débat sur la convergence et la tarification à l'activité, ne rallumons pas la guerre entre public et privé.

Une seule remarque, Monsieur le ministre : la progression de 3,44% de l'ONDAM hospitalier ne concerne pas le seul hôpital public puisque les enveloppes sont fongibles et que leur répartition entre public et privé n'est pas encore connue. Enterrons la hache de guerre, car sur le terrain, l'important est d'organiser la complémentarité des deux secteurs. Il n'en reste pas moins qu'il faudra bien financer les missions de service public - quels que soient d'ailleurs les établissements, publics ou privés, qui les exercent.

On nous dit que dans le privé, la tarification à l'activité est partout la règle. Mais les honoraires des médecins libéraux exerçant en clinique sont exclus des enveloppes. Et la CNAM n'est pas capable de nous en communiquer le montant, ne disposant que d'un chiffre global qui englobe également les honoraires des médecins de ville.

Dépassons les clivages idéologiques. A cet égard, j'apprécie la position du ministre, qui s'appuie sur la réflexion menée par différentes commissions où travaillent ensemble représentants de l'hospitalisation privée et de l'hospitalisation publique. Vouloir accélérer par trop la convergence nuirait à l'exercice des missions de service public et ne serait pas neutre non plus s'agissant du risque inflationniste pointé par le ministre.

M. Paul-Henri Cugnenc - Je salue le sens de la nuance de M. Evin qui traduit parfaitement la position de la Fédération hospitalière de France, instance où siègent des élus et des professionnels de toutes tendances.

Nous souhaitons tous une complémentarité entre public et privé, mais nous ne pouvons accepter que le secteur privé soit caricaturé comme il l'a été en étant qualifié de « secteur commercial ». Non, il n'y a pas d'un côté les grippe-sous, avides de profits, du privé, et les seigneurs, désintéressés, du public. Il est inadmissible de qualifier ainsi le secteur privé... Alors que certains d'entre nous n'auraient pas voté ces amendements, ils le feront en réponse à cette agression intolérable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gérard Bapt - Ayant commis tout à l'heure un crime de lèse-majesté qui m'a valu un regard furibond de mon maître, le Pr Dubernard, et comme j'ai le plus grand respect pour mes maîtres, à l'université comme à l'hôpital...

M. Dominique Tian - Vous n'êtes donc pas un soixante-huitard !

M. Gérard Bapt - ...je souhaiterais ajouter quelques mots. Pour avoir siégé au conseil d'administration du CHU de Toulouse, j'ai vu les efforts faits par les administrations successives pour regrouper les services, mettre en place les pôles... et mesuré combien la tâche était difficile. Il faut faire preuve d'une grande patience, ménager les susceptibilités, respecter les territoires des uns et des autres, parfois attendre le départ en retraite d'un chef de service avant de pouvoir opérer un regroupement. Aussi, avant de désigner du doigt tel ou tel ou d'opposer « réformateurs » et « conservateurs », comme s'il s'agissait de deux camps adverses, faudrait-il faire preuve de plus de mesure et de sérénité. Il ne s'agit pas d'une guerre entre public et privé - pour ma part, n'ayant pas eu la possibilité de devenir praticien universitaire, j'ai travaillé successivement dans les deux secteurs et c'est une grande richesse. Je suis ainsi très heureux d'avoir appris hier, par une dépêche AFP, que le cours des actions de la Générale de santé avait gagné 8,4% en deux séances et que la direction du groupe attendait une progression encore plus forte, qui devrait « mécaniquement faire suite à la mise en place de la nouvelle tarification ». Simplement, alors que la situation du privé est florissante, il est normal, dans un souci de complémentarité, de tenir compte des inquiétudes du secteur public. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Laurent Wauquiez - Je vous prie d'excuser le caractère modeste de mon intervention, connaissant moins bien le sujet que les orateurs précédents. Une observation tirée de mon expérience de terrain : il faut dépasser le clivage entre hôpitaux public et privé, car nombre d'hôpitaux public attendent avec impatience la mise en place de la tarification à l'activité dans la mesure où elle viendra récompenser leurs efforts de modernisation. Personnellement, je voterai cet amendement car il donne un outil de modernisation supplémentaire aux hôpitaux publics qui vont de l'avant. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Les amendements 51 et 77, mis aux voix, sont adoptés.

Mme la Présidente - Les amendements 79, 90 et 102 rectifié sont identiques.

M. Philippe Vitel - Mon amendement 79 tend à ce que les sanctions prononcées par l'ARH à l'encontre d'un établissement ne puissent s'appliquer qu'à partir d`une analyse globale de l'activité à l'échelle du territoire d'influence de la structure.

Les amendements 79, 90 et 102 rectifié, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Luc Préel - Nos amendements 262 et 263 visent respectivement à supprimer les paragraphes III et IV de l'article. Telle qu'elle nous avait été présentée par M. Mattei, la tarification à l'activité consiste à rémunérer l'établissement en fonction de l'activité de soins distribués aux patients. Dès lors, comment justifier les pénalités en cas de hausse subite de l'activité, due par exemple à l'excellence d'un service ? Il est possible qu'un service n'ayant posé que 100 stimulateurs cardiaques l'année dernière soit amené à en implanter 150 cette année si un afflux de patients se présente, même si les conventions d'objectifs et de moyens passées - souvent sous la contrainte - avec l'ARH ne l'ont pas prévu...

M. Jean-Pierre Door, rapporteur - Allons donc ! De telles variations relèvent de l'hypothèse d'école.

M. Jean-Luc Préel - Pas du tout ! Cela arrive fréquemment et il serait fort malvenu de rétablir l'équivalent de lettres clés flottantes pour venir pénaliser les établissements les plus actifs.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Même avis. Il faut que la progression de l'activité soit cohérente à l'échelle d'un territoire donné. Il ne faut pas encourager les gonflements d'activité artificiels et veiller plutôt à développer les complémentarités. Je me dois aussi de rappeller, Monsieur Préel, que le rôle premier des ARH n'est pas de punir ni de sanctionner.

Les amendements 262 et 263, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Les amendements 309, 310 et 311 sont rédactionnels.

Les amendements 309, 310 et 311, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'article 30 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 30

M. Jean-Marie Le Guen - L'amendement 121 3e rectification est défendu.

L'amendement 121 3e rectification, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Marie Le Guen - Notre amendement 191 rectifié vise à ce que six mois après la publication de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport de l'IGAS sur les pratiques de dépassement d'honoraires médicaux, notamment en secteur hospitalier.

L'amendement 191 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gérard Bapt - Décidemment, vous n'aimez pas la transparence !

ART. 31

M. Jean-Luc Préel - Cet article traite de la répartition des crédits finançant la prise en charge des patients dans les unités de soins de longue durée. Il est vrai qu'une certaine confusion tend à s'installer à ce sujet, dans la mesure où, nombre d'établissements possédant à la fois des unités de long séjour et des maisons de retraite, un même patient peut passer d'un régime à un autre si son état le justifie, sans parfois même changer de chambre. Cela ne facilite pas la prise en charge par la CNSA, d'autant que les fameuses conventions tripartites promises depuis des lustres ne sont toujours pas signées partout. Il est devenu indispensable de préciser les référentiels de répartition des crédits si l'on veut tenter de s'y retrouver, la séparation arbitraire entre le sanitaire et le médicosocial étant venue compliquer encore la situation. Nous plaidons pour l'instauration d'un financement sain, adapté à chacun quel que soit son état.

Mme Jacqueline Fraysse - Je m'étonne que le ministre, qui parle de transparence et de lisibilité à longueur de séance, ait sèchement repoussé l'amendement de M. Le Guen tendant à ce que l'IGAS produise un rapport sur les dépassements. La représentation nationale n'a-t-elle pas le droit d'en être informée ?

M. le Ministre - J'ai donné tous les éléments d'information utiles à ce sujet en séance, cet après midi.

Mme Jacqueline Fraysse - Permettez-moi d'en douter ! L'approche du problème de la répartition des moyens que retrace l'article 31 nous semble excessivement financière et sans doute trop rigide. A l'issue des auditions que nous avons menées, il nous semble indispensable de bien appréhender la situation médicale individuelle de chaque patient susceptible d'être transféré. Tout doit être fait pour éviter que des personnes en fin de vie, âgées ou dépendantes, ne soient orientées vers des services insuffisamment médicalisés pour les accueillir correctement. De même, nous refusons l'idée qu'une surveillance constante, 24 heures sur 24, puisse se transformer en simple surveillance de jour à la faveur d'un changement de référentiel ou que les fonctions jusqu'alors exercées par un infirmier soient désormais confiées à un aide-soignant. Il n'est pas envisageable d'opérer une ventilation des places et des crédits selon une clé de répartition arbitraire, au motif que la date du 1er janvier 2007 risquerait de ne pas être respectée. Comme nous, vous avez sans doute reçu de nombreux gestionnaires d'établissements : tous s'inquiètent des conséquences d'une répartition automatique à partir de critères qui demeurent inconnus.

Enfin, ils attirent notre attention sur l'absence de prise en compte des personnes adultes handicapées. Cet article 31, où les considérations comptables priment, suscite donc nombre d'interrogations et d'inquiétudes. Au mieux, il ne répond pas aux problèmes posés ; au pire, il aggravera la situation. Par l'amendement 135, nous vous proposons donc sa suppression. Avant d'envisager ce transfert, il nous faut rencontrer les personnes et les établissements visés et procéder à une évaluation. Nous ne sommes pas encore prêts.

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Monsieur le ministre délégué, hier, vous n'avez pas répondu aux questions que Mme Guinchard, M. Terrasse et moi-même vous avons adressées à propos des personnes âgées et de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA.

Le transfert des unités de soins de longue durée, les USLD, aux établissements de santé, prévu à l'article 12 de la loi du 11 février 2005, a été repris dans un projet d'ordonnance de simplification du droit avant de réapparaître dans ce texte à l'article 31. Cette opération pose question. Les USLD, à 95% publiques, accueillent des personnes atteintes de polypathologies graves qui nécessitent des soins permanents. Quant au référentiel, auquel nous travaillons depuis 1997, sa définition se révèle également complexe. De nombreux établissements de santé en France accueillent des personnes dont l'état de santé est proche de celles reçues dans les hôpitaux en service de gériatrie. Or, en France, le forfait soin en établissement pour personne âgée est de 0,21, contre 2 en Suède et mieux encore au Canada. Ce forfait ne permet pas de garantir la présence d'un médecin et d'une infirmière la nuit, pourtant indispensable, et vous transférez les USLD en maisons de retraite sans que les principales victimes, les conseils généraux, aient leur mot à dire ! Même les grands groupes privés reconnaissent que le forfait soin actuel est trop faible. Monsieur Vitel, vous le savez puisque vous avez reçu les représentants des établissements associatifs et privés en tant que président du groupe d'étude sur les personnes âgées.

Cette situation n'est pas sans conséquences sur l'accueil des personnes âgées : en quatre ans à peine, à Paris, la moyenne d'âge des entrants en établissements a augmenté de deux ans. Parce que nous avons fait le choix du maintien à domicile, les personnes sont aujourd'hui transférées en établissement seulement en cas de polypathologie, ce qui nécessite bien sûr une grande qualité de soins. Compte tenu de l'allongement de la vie, ce transfert risque de causer de nombreux problèmes dans un avenir proche.

M. Jacques Le Guen - Concernant le dossier sensible de la convergence, la mise en œuvre des conventions tripartites a demandé aux établissements de fournir un effort financier majeur depuis 2002, partiellement compensé par la création de la dotation minimale de convergence. Malheureusement, cette dotation est plafonnée à 35% et cela n'est pas suffisant pour garantir un accueil de qualité et des personnels soignants en nombre suffisant. Compte tenu du vieillissement de la population et des soins de plus en plus lourds à prodiguer, il apparaît nécessaire d'augmenter cette dotation. Nous avons fait le choix sociologique du maintien à domicile mais une fracture du col du fémur peut faire basculer, du jour au lendemain, une personne de 85 ans dans la dépendance. Nous devons avoir les moyens de l'accueillir.

M. Philippe Vitel - Très bien !

M. Bur remplace Mme Guinchard au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE de M. Yves BUR

vice-président

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille - Le vieillissement de la population est un défi majeur. Pour preuve de la rapide transformation du secteur de l'accueil des personnes âgées, une comparaison : il y a dix ans, les personnes entrant en maison de retraite avaient en moyenne 75 ans et y séjournaient dix ans ; aujourd'hui elles ont au moins 83 ans et leur séjour est de deux à trois ans. Pour faire face à ce défi, le Gouvernement a lancé le plan « vieillissement solidarité » qui prévoyait initialement la création de 10 000 places en établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, 8 500 en service de soins infirmiers à domicile et d'autres encore en accueil de jour et hébergement temporaire. Du point de vue des autorisations de financement, ce plan sera achevé au début de l'année 2006.

M. Jacques Le Guen - Très bien !

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement a donc décidé de poursuivre ce plan en doublant le nombre de places. Parce que cela n'est pas suffisant, j'ai demandé au commissariat général au Plan d'évaluer les besoins des personnes âgées, en accueil ou en service à domicile, à l'horizon 2015.

C'est dans ce cadre que s'inscrit notre débat sur l'article 31. Vous avez rappelé que la loi du 11 février 2005 a prévu le regroupement sous un même statut de tous les établissements qui offrent des soins aux personnes âgées et dépendantes et qui les hébergent. Un projet d'ordonnance avait été effectivement rédigé mais nous avons préféré ne pas précipiter ce transfert : mieux vaut d'abord mettre au point un référentiel qui permettra d'évaluer le nombre respectif des personnes nécessitant des soins qui relèvent de l'hôpital et de celles qui peuvent être accueillies en maisons de retraite. Rappelons que les hôpitaux ont ouvert des USLD faute de places suffisantes en maisons de retraites.

Le Gouvernement, conscient de l'effort à fournir pour répondre à ce besoin croissant, a augmenté de 9% les moyens médicosociaux pour les personnes âgées dépendantes dans cette loi de financement. Si l'on ajoute les fonds provenant de la journée nationale de solidarité, cette augmentation s'élève à plus de 13% pour l'an prochain. Je ne crois pas possible en 2006 d'aller plus loin que cet effort, déjà considérable.

Mme Jacqueline Fraysse - J'ai défendu l'amendement 135 de suppression de l'article.

L'amendement 135, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 21 est de précision.

L'amendement 21, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Je défends l'amendement 202 rectifié. Vous ne nous avez pas répondu, Monsieur le ministre : nous sommes d'accord avec l'idée du référentiel, mais regardez du côté des EHPAD : il y a sûrement des patients en USLD qui devraient être en EHPAD, mais le contraire est vrai aussi ! Le Parlement et les conseils généraux doivent avoir droit à la parole sur ce sujet.

Madame la rapporteure le disait hier : il ne faudrait pas que le budget de ces établissements soit brusquement diminué ! Vous annoncez des augmentations, mais venez voir, sur le terrain, ce qui se passe dans les CROS. La CNSA propose de réduire de 0,21 à 0,18 le nombre de soignants par lit à chaque création d'établissement. D'un seul coup, on débarrasserait ces USLD, mais nous n'avons pas la permanence de soins suffisante.

Que fait la CNSA quant à la répartition territoriale et au financement des 10 000 places que vous annoncez ? Où seront-elles créées ? Qui sont les investisseurs ? Ces questions récurrentes restent sans réponse.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - Même avis.

Mme Paulette Guinchard - Je me permets d'ajouter quelques arguments après ces avis négatifs. La réforme de la tarification date de 1997 : j'ai moi-même signé le décret prévoyant sa mise en œuvre pour 2001. J'en savais les limites, mais aussi l'urgence. Aujourd'hui, toutefois, la question est posée d'une organisation des USLD sur tout le territoire, impliquant aussi les hôpitaux de proximité. Ce qui pose le problème de la filière gériatrique à l'hôpital. Vous dites, Monsieur le ministre, que certaines personnes n'ont peut-être pas leur place dans les services de gériatrie des hôpitaux. Je n'en suis pas certaine. L'enjeu de cette filière est très important, vous le savez. Je tiens à le répéter : ce que l'on votait en 1997 et ce que je signais en 2001 en matière de réforme de la tarification ne correspond plus aux besoins actuels. Les gens entrent de plus en plus tard dans les maisons de retraite et ils y restent de moins en moins longtemps - sept à neuf mois en moyenne. A la question de la dépendance s'ajoute désormais celle de la qualité de la fin de vie des personnes âgées. C'est une question de société nouvelle et très importante, à laquelle je ne crois pas que PATOS soit en mesure de répondre. Réfléchissons aux moyens qui doivent y être affectés de manière cohérente sur l'ensemble du territoire, tant au niveau sanitaire qu'au niveau humain.

L'amendement 202 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jacques Domergue, rapporteur - L'amendement 22 est défendu.

M. le Ministre délégué - Nous avons associé la Caisse nationale de solidarité à un groupe de travail chargé d'établir le référentiel. Cette participation satisfait l'amendement 22.

Mme Cécile Gallez, rapporteure de la commission des affaires culturelles pour l'assurance vieillesse - La commission retire l'amendement 22.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 281 est défendu.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - Avis favorable. Le Gouvernement est attentif à ce que l'avis sur le référentiel des fédérations d'établissements les plus représentatives soit reconnu. Il est légitime de disposer de l'avis de l'organe délibérant de l'établissement avant la décision commune du préfet et de l'agence régionale de l'hospitalisation, d'où le bien-fondé de l'amendement 281.

L'amendement 281, mis aux voix, est adopté.

Mme Danièle Hoffman-Rispal - L'amendement 268 est défendu. La France manque de gériatres. Ce sont pourtant des médecins compétents et dévoués, mais un peu isolés - comme je le suis parfois dans cette assemblée, n'étant pas médecin... Nous devons de l'estime à cette profession, car nous en aurons tous besoin un jour ! Ne risque-t-elle pas d'être découragée par le transfert des USLD en EHPAD ?

Certains crédits destinés aux personnes âgées passent par la CNSA, que nous ne contrôlons plus. Comment articuler la capacité d'accueil avec les SROS et les schémas gérontologiques deuxième génération que plusieurs départements ont déjà élaborés ?

M. le Président - L'adoption de l'amendement 281 fait tomber l'amendement 268.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 282 est défendu.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Avis favorable, pour les mêmes raisons que sur l'amendement 281.

L'amendement 282, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 312 est rédactionnel.

L'amendement 312, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 283 est défendu.

L'amendement 283, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel - De nombreux établissements de santé gèrent à la fois une maison de retraite et une USLD, pour laquelle il faut prévoir la signature d'un convention distincte en raison de sa spécificité et de la procédure de redéfinition.

L'amendement 284, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 31 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 31

M. le Ministre délégué - L'amendement 229 2e rectification porte sur un sujet grave : les soins palliatifs à domicile. Nous partageons tous l'objectif d'alléger les douleurs des personnes en fin de vie à leur domicile, notamment dans le monde rural.

La loi du 9 juin 1999, qui permet à des professionnels libéraux de participer à ces soins, a été rendue inapplicable par une décision de justice de 2004. L'amendement vise à donner une base légale sûre à de telles interventions en inscrivant dans la loi les contrats de santé publique ou les accords interprofessionnels sur la base desquels elles pourront être pratiquées.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

Mme Paulette Guinchard - Les questions de la qualité de la fin de vie et des soins palliatifs se posent de manière inédite au sein des maisons de retraite et des services de long séjour. Votre amendement est un élément de réponse, mais encore très insuffisant. Nous devrons impérativement réfléchir sur les formations professionnelles ainsi que sur l'accroissement des liens entre les champs médicosocial et sanitaire : il y a urgence.

L'amendement 229 2e rectification, mis aux voix, est adopté.

ART. 32

Mme Paulette Guinchard - Cet article tente de répondre à différentes questions -financement de certains médicaments, organisation des pharmacies - que rencontrent les maisons de retraite. Mais il repousse également la date d'application de la réforme de la tarification. Je suis certes prudente quant aux raisons pour lesquelles la mise en place de cette réforme a pris du temps. Je sais fort bien que des crédits étaient prévus dans le budget de 2002, que les financements ont été gelés puis arrêtés et qu'il a fallu la canicule et la volonté de M. Falco pour les réaffecter. Même si nous ne sommes pas d'accord sur le système de financement retenu - la suppression du jour férié - l'argent est collecté, mais son affectation pour les personnes âgées n'apparaît pas clairement. La « réserve » consacrée aux maisons de retraite actuellement à la CNSA serait évaluée à 400 millions. Qu'en est-il vraiment ? Si je voulais être un rien polémique, je poserais la question différemment : où va l'argent du jour férié ? Vous devez nous le dire, Monsieur le ministre.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 209 tend à supprimer cet article. Il est insupportable que l'application des conventions tripartites soit repoussée d'année en année en raison de l'insuffisance des financements. Quand et dans quelles conditions arriverons-nous au terme de ces conventions ? Il serait temps de le préciser de manière ferme et définitive.

L'amendement 209, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur - L'amendement 53 de M. Bur est défendu.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - Même avis.

L'amendement 53, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gérard Dubrac - Les soins pharmaceutiques au sein des établissements médicosociaux doivent contribuer à une prise en charge de qualité de leurs résidents grâce aux pharmaciens d'officine. Or, le choix laissé aux établissements concernés d'intégrer les médicaments remboursables dans la tarification des prestations qu'ils assurent les incitera à dégrader la qualité du service fourni. En effet, ce sont les personnes hébergées dans les établissements médicosociaux qui subiront in fine les conséquences des mesures de rationalisation des dépenses pharmaceutiques, sous forme d'une sélection des résidents à l'admission et de listes de produits exclus des tarifs de prestations de soins, avec comme conséquence inéluctable une prise en charge moins bonne en établissement qu'à domicile. L'amendement 235 vise donc à adapter le dispositif d'intégration des médicaments dans les tarifs des prestations de soins.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable. Faire prendre en charge par l'enveloppe de médecine de ville les médicaments délivrés aux personnes âgées hébergées en établissements médicalisés soulève plusieurs problèmes et rend plus difficile l'action du médecin coordinateur.

M. Gérard Dubrac - Non.

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement souhaite proposer aux établissements, sur la base des conclusions d'un rapport de l'IGAS, la possibilité d'opter pour la réintégration des médicaments dans leur forfait.

L'amendement 235, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Marie Le Guen - L'amendement 203 est défendu.

L'amendement 203, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Paulette Guinchard - L'article 32 prévoit la réintégration des médicaments dans le forfait soins des établissements pour personnes âgées. Il faut toutefois éviter une limitation de la prescription de certaines spécialités en raison de leur prix. Nous proposons donc, par l'amendement 270, de prévoir une liste de médicaments coûteux à exclure de ce tarif de soins.

L'amendement 270, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Marie Le Guen - L'amendement 204 est défendu.

L'amendement 204, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. Gérard Dubrac - La création de pharmacies à usage intérieur - PUI - desservant les établissements d'un même groupement de coopération médicosociale peut induire des risques pour la sécurité des résidents des établissements médicosociaux, notamment en raison de la pénurie de pharmaciens diplômés pour assurer la gérance de ces pharmacies, en particulier en milieu rural. L'amendement 236 vise donc à supprimer les dispositions relatives au fonctionnement des PUI.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Favorable.

M. le Ministre délégué - Cet article présente une innovation à laquelle les pharmaciens d'officine seront sans doute sensibles : il leur permet d'exercer la gérance de pharmacies des établissements pour personnes âgées et dépendantes. Je suis donc défavorable à l'amendement, qui supprimerait cette possibilité.

M. Gérard Dubrac - Je ne vois pas comment un pharmacien dans une officine pourrait assurer ce type de gérance tout en laissant sa pharmacie ouverte. Nous manquons de diplômés et certains de mes collègues ne peuvent même pas prendre une semaine de congés par an faute de pouvoir se faire remplacer. Comment pourraient-il abandonner le comptoir pour rendre un service dans un autre lieu ?

L'amendement 236, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Cécile Gallez, rapporteure - Le V de cet article abroge le sixième alinéa de l'article L. 5125-17 du code de la santé publique qui interdit aux titulaires d'une autorisation d'exploitation d'une officine d'exercer toute autre activité pharmaceutique du fait que tous leurs diplômes sont enregistrés pour l'exploitation de l'officine. Ce dispositif conduit à ce que la totalité de l'interdiction d'exercice d'une activité pharmaceutique hors de celle de l'exploitation de l'officine est levée, et pas seulement pour la gestion d'une pharmacie à usage intérieur. Un pharmacien d'officine pourra donc avoir des activités pharmaceutiques dans des laboratoires, dans une autre officine ou dans quelque autre cadre dès lors que l'activité de pharmacie est conforme aux règles professionnelles définies par l'Ordre des pharmaciens et est enregistrée selon les règles fixées par le code de la santé publique. L'amendement 23 propose de limiter l'assouplissement à la possibilité pour un même pharmacien de gérer une officine et une PUI.

M. le Ministre délégué - Sagesse.

L'amendement 23, mis aux voix, est adopté.

M. Gérard Dubrac - L'amendement 237 est défendu.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable.

L'amendement 237, mis aux voix, est adopté.

Mme Cécile Gallez, rapporteure - Le dernier alinéa du VI de cet article fixe deux critères à l'appui desquels le préfet attribuera la gérance d'une PUI : la compatibilité avec l'exercice personnel de sa fonction par le pharmacien et la proximité de l'officine du pharmacien. Mais ce critère de proximité ne résout pas le cas où plusieurs officines seraient présentes sur la commune d'implantation de l'établissement et où leurs titulaires seraient candidats à la gérance de la pharmacie à usage intérieur. L'amendement 24 propose que le choix du préfet soit arrêté après une procédure de mise en concurrence.

M. le Ministre délégué - Je vous prie de bien vouloir retirer cet amendement car la mesure proposée par le Gouvernement sur la base des conclusions d'un groupe de travail vise à permettre à un pharmacien libéral d'assurer la gérance d'une PUI afin de pallier les difficultés ponctuelles des établissements pour recruter des pharmaciens en milieu rural. L'interdiction, pour un pharmacien associé, d'avoir une activité pharmaceutique en dehors de son officine a été levée. Cependant, cette possibilité ayant été encadrée par une procédure d'autorisation, une mise en concurrence est sans objet.

Mme Cécile Gallez, rapporteure - Je retire donc l'amendement.

L'amendement 24 est retiré.

L'article 32 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 32

Mme Cécile Gallez, rapporteure - Les logements foyers pour personnes âgées sont des petites structures peu médicalisées où en principe les personnes arrivent valides. Par l'amendement 240 rectifié, je demande qu'on ne leur impose pas une convention tripartite comme aux EHPAD, mais qu'ils puissent choisir de rester au forfait soins. Cette option devrait être réversible : un foyer logement qui aura renoncé à la convention tripartite pourra quelques années plus tard déposer un dossier de transformation en EHPAD. Dans certains cas, il devrait pouvoir associer une partie EHPAD et une partie foyer logement et associer les deux tarifications. D'autre part, l'APA à domicile étant beaucoup plus faible qu'en établissement, il conviendrait que ce soit cette dernière qui s'applique aux personnes les plus lourdement handicapées. Enfin, il conviendrait de définir des normes de sécurité précises et de ne pas imposer de changements de chambre aux personnes lorsqu'elles deviennent dépendantes.

M. le Ministre délégué - Je vous remercie d'avoir soulevé ce problème, car c'est vrai qu'il est difficile pour de nombreux foyers logements d'exercer leur droit d'option entre ces trois formules proposées dans le cadre du conventionnement. Le Gouvernement partage notre objectif de trouver des formules plus souples de tarification. Un groupe de travail a été constitué à cet effet, et je souhaite que nous attendions ses conclusions avant de retenir la proposition de Mme Gallez, dont nous ne connaissons d'ailleurs pas le coût. L'objectif de votre amendement est bon, mais nous manquons de visibilité pour l'adopter en l'état. Pourriez-vous le retirer ?

Mme Cécile Gallez, rapporteure - Ce dossier me tient particulièrement à cœur, mais je comprends votre position, aussi accepterai-je de le retirer si vous vous engagez à m'associer à l'étude qui sera menée à ce sujet.

M. le Ministre délégué - Bien sûr, d'autant plus que nous savons tout le travail que vous avez accompli en tant que rapporteure de ce projet de loi.

Mme Cécile Gallez, rapporteure - Je retire l'amendement 240 rectifié.

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Je le reprends, car il a le mérite de soulever de vrais problèmes. Beaucoup de foyers logements ne peuvent pas aujourd'hui passer en EHPAD, en raison du bâti qui ne le permet pas en milieu urbain. Quant aux normes de sécurité relevant du type « J », prenons garde qu'une réglementation trop draconienne ne puisse être respectée par nombre de foyers, lesquels devront alors être fermés.

Mme Paulette Guinchard - Mme Gallez n'aurait en effet pas dû retirer son amendement. La question du foyer logement a été posée dès la mise en œuvre de la réforme de la tarification et j'avais même demandé un rapport à ce sujet, sur lequel vous vous êtes du reste appuyée, Madame. On peut au moins se féliciter que la CNSA offre un lieu où responsables et fonctionnaires pourront réfléchir : souhaitons qu'ils puissent nous faire très vite des propositions sur les foyers logements.

L'amendement 240 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Ministre délégué - L'amendement 368 tend à permettre une évaluation des soins courants pratiqués sur les patients hospitalisés. Les procédures administratives sont à ce point inextricables que certaines recherches ne peuvent être menées à bien.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis favorable à cet amendement qui permettra de simplifier la recherche dans le domaine des soins courants.

M. Pierre-Louis Fagniez - C'est un sujet que nous connaissons puisque nous avons déjà discuté, lors de l'examen de la loi santé publique, de la recherche biomédicale, dans laquelle il était difficile d'intégrer l'évaluation des soins courants. La loi sur l'assurance maladie nous a donné l'occasion d'inciter les chercheurs à évaluer leurs pratiques de soins courants, et cet amendement, aujourd'hui, vient donc relier ces deux lois.

L'amendement 368, mis aux voix, est adopté.

ART. 33

M. Jean-Luc Préel - Les CAARUD jouent un rôle important dans la prévention de la toxicomanie et les soins délivrés aux toxicomanes. Par cet article, vous transférez à l'assurance maladie le financement de ces centres, aujourd'hui pris en charge par l'Etat, alors qu'il s'agit là d'une de ses fonctions régaliennes. On peut se demander si l'assurance maladie ne fait pas un mauvais héritage, d'autant plus que c'est toujours un représentant de l'Etat qui définira la dotation attribuée et non l'assurance maladie ou l'ARH : ceci est incohérent.

M. Jean-Marie Le Guen - Il est logique que l'assurance maladie prenne en charge ces centres d'accueil, d'autant plus que la lutte contre la toxicomanie n'est plus perçue aujourd'hui comme une discipline exclusivement de prévention. Nous sommes bel et bien dans la gestion des risques.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 210 tend à supprimer l'article 33.

L'amendement 210, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Ministre délégué - L'amendement 227 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 227 rectifié, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 221 rectifié prévoit que les dotations seront réparties par le directeur de l'ARH. Il est contradictoire de confier ce rôle au préfet dès lors que les CAARUD sont transférés à l'assurance maladie.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - Tant que le médicosocial ne dépend pas des ARH, il continuera à dépendre des préfets.

M. Jean-Marie Le Guen - Bravo !

M. le Ministre délégué - Avis défavorable.

M. Jean-Luc Préel - Que l'Etat se charge alors du financement !

Mme Paulette Guinchard- Cet article témoigne du lien entre le médicosocial et le sanitaire. Pour avoir travaillé avec ces structures, je sais qu'il est préférable qu'elles soient financées par l'assurance maladie, mais il faut reconnaître aussi le rôle des préfets et des DRASS dans le développement de ces centres, qui n'auraient jamais pu être financés autrement.

M. Gérard Bapt - Je saisis cette occasion pour demander à M. le ministre où en est l'expérimentation des ARS et quelles sont les régions concernées.

L'amendement 221 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Ministre - L'amendement 228 est défendu.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis favorable.

L'amendement 228, mis aux voix, est adopté.

M. Jacques Domergue, rapporteur - L'amendement 313 est rédactionnel.

L'amendement 313, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 33 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 34

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Monsieur le ministre, je me permets de vous rappeler que vous n'avez toujours pas donné de réponse concernant les capacités d'accueil sur le territoire.

Je pourrais trouver intéressante la disposition prévue par l'article 34 : un certain nombre de crédits de la CNSA, non consommés en 2004 et en 2005, seraient ainsi utilisés pour cofinancer, notamment avec les conseils généraux, des opérations d'investissement. Mais comment et sur quelle base de répartition ? Le texte ne répond pas à ces questions.

Nous avons déposé des amendements concernant les prix de journée, autre sujet qui me tient à cœur. J'avais expliqué lors de l'examen du PFLSS pour 2005 que nous avons un vrai souci avec les règles de comptabilité publique qui conduisent à répercuter sur le prix de journée le coût d'amortissement des travaux d'humanisation dans les EHPAD. Il ne s'agit pourtant que d'une simple règle de comptabilité sur laquelle nous avons tenté d'attirer l'attention des gouvernements successifs. Cette répercussion est telle que les tarifs à la journée deviennent inabordables pour nos aînés et dépassent ceux pratiqués par les établissements privés. Je sais qu'un décret est en préparation depuis des mois, mais les conseillers généraux et moi-même aimerions obtenir une réponse.

M. Philippe Vitel - En lui donnant des missions médicosociales, l'article 34 fait intervenir la CNSA hors de son champ de compétences. Je suis curieux des détails que pourra nous fournir le Gouvernement, car je m'inquiète pour l'équilibre financier de la CNSA. L'amendement 80 tend donc à supprimer le III de cet article.

M. Dominique Tian - L'amendement 66 est identique. L'objectif de la CNSA est en quelque sorte détourné pour financer les opérations menées par les conseils généraux.

Les amendements 80 et 66, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Ministre - Je précise que l'ensemble des ressources prises dans les comptes de la CNSA, s'élevant à 13,9 milliards d'euros, sont exactement équilibrées en dépenses.

M. Jacques Domergue, rapporteur - L'amendement 314 est de précision.

L'amendement 314, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jacques Domergue, rapporteur - L'amendement 25 est défendu.

L'amendement 25, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jacques Domergue, rapporteur - L'amendement 26 est rédactionnel.

L'amendement 26, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Jacques Domergue, rapporteur - L'amendement 315 est de précision.

L'amendement 315, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Jacques Domergue, rapporteur - L'amendement 27 est défendu.

M. le Ministre délégué - Avis favorable.

Mme Paulette Guinchard - Le besoin d'investissement est très important sur l'ensemble du territoire : nous souhaiterions que des chiffres précis concernant les réserves de la CNSA nous soient communiqués et que, comme représentants de la nation, nous soyons tenus informés de leur emploi. La mission de contrôle des comptes de la sécurité sociale pose d'ailleurs les mêmes questions sur l'affectation, sur l'amortissement, sur les prix de journée. Nous sommes arrivés à des coûts moyens supérieurs à une pension moyenne ! Nous devons entreprendre un immense travail de réflexion sur l'organisation, la compétence, la répartition des crédits entre l'assurance maladie, la CNSA et les conseils généraux, ainsi que sur les questions d'investissement.

M. Dominique Tian - Pourquoi ne pas destiner ces fonds aux établissements qui ont signé des conventions tripartites et qui sont toujours dans l'attente des places décidées par les CROSS ?

M. le Ministre délégué - La première question concerne le besoin de modernisation des EHPAD, dont deux tiers sont déjà conventionnés. Je n'ai pas voulu que les réserves de la journée de solidarité puissent être utilisées pour les dépenses de fonctionnement et de médicalisation et je réfléchis actuellement à leur bon emploi. La plupart des recettes dévolues aux personnes âgées serviront au financement de l'APA, le reste s'ajoutant aux crédits de l'assurance maladie. Nous devons veiller à ce qu'il s'agisse d'un plus, qui ne se substitue pas à l'effort de l'assurance maladie. Il est en effet essentiel que celle-ci ne se désengage pas des EHPAD à la faveur de la création de la CNSA.

L'amendement 27, mis aux voix, est adopté.

L'article 34 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 35

Mme Jacqueline Fraysse - A l'occasion de la loi sur la santé publique, l'ONIAM s'est vu confier la mission de réparer les dommages imputables à une vaccination obligatoire, à une contamination par le VIH et à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins réalisée en application de mesures d'urgence ou de menace sanitaire grave. Ces nouvelles missions devaient être financées par une dotation de l'Etat. Or le Gouvernement propose d'abroger cette disposition financière de compensation, ce qui revient à les financer par une dotation versée par les organismes d'assurance maladie à compter de 2006. Nous n'adhérons pas aux arguments employés par le Gouvernement pour justifier ce désengagement, selon lesquels la raréfaction des contaminations entraînerait une diminution des demandes d'indemnisation et les préjudices indemnisés sont liés à des activités de soins. L'affaire du sang contaminé a abouti à la reconnaissance de la responsabilité de l'Etat. Il convient donc que les indemnisations continuent d'être assurées sur fonds d'Etat et non par la sécurité sociale, afin de ne pas entretenir de confusion. C'est pourquoi nous proposons par notre amendement 138 de supprimer cet article.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis défavorable. Le fonds d'indemnisation des personnes contaminées par le VIH lors d'une transfusion va être fondu dans l'ONIAM et le nombre de bénéficiaires potentiels ne cesse de diminuer : cet amendement est donc inutile.

M. le Ministre délégué - Même avis.

L'amendement 138, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 35, mis aux voix, est adopté.

ART. 36

M. Jean-Luc Préel - Au ministre qui regrettait hier que peu de personnes bénéficient de l'aide à l'acquisition d'une CMU complémentaire, je rappelle que nous avons, nous, toujours défendu l'idée d'une aide personnalisée à la santé, qui aurait notamment évité tout effet de seuil. Nous espérons qu'une telle aide sera un jour mise en place, qui permettra d'aider vraiment chacun en fonction de ses ressources.

Mme Jacqueline Fraysse - A l'instar de la prime pour l'emploi, l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé est d'une grande perversité. Toutes deux semblent répondre à un souci de justice sociale. La première se présente comme un surplus de pouvoir d'achat pour les salariés modestes, la seconde comme le moyen pour des personnes qui autrement ne le pourraient pas de souscrire une complémentaire.

Pourtant, la PPE n'a d'autre fonction que de faire prendre en charge par le contribuable l'augmentation des bas salaires, à la grande satisfaction des employeurs qui apprécient à sa juste mesure ce coup de pouce à la politique de modération des salaires qui prévaut depuis plus de vingt ans. Quant à l'aide à l'acquisition d'une complémentaire, elle n'aurait pas de raison d'être si le niveau de remboursement du régime de base n'avait pas autant diminué. Alors que cette diminution favorise le privé, cette aide enfonce le clou en instituant une subvention publique, autrement dit supportée par les contribuables, aux complémentaires. L'urgence serait de rétablir un taux de remboursement décent par le régime de base. En vingt ans, le taux moyen est tombé de plus de 80% à 75%, ce qui, selon l'OCDE, place la France au douzième rang seulement des pays industrialisés.

L'aide à l'acquisition d'une complémentaire ne permet d'ailleurs nullement d'échapper aux difficultés croissantes d'accès aux soins, nées du démantèlement de notre système solidaire de protection sociale. Son montant est en effet dérisoire : 200 euros par an pour une personne seule âgée de 25 à 59 ans, soit à peine plus du quart du prix d'une complémentaire parmi les moins coûteuses aujourd'hui.

M. Jean-Marie Le Guen - Dans cet article, vous augmentez le taux de la taxe sur les organismes complémentaires. Les assurés en feront les frais, directement si les complémentaires décident d'augmenter leurs cotisations, indirectement si elle décident en contrepartie de diminuer les remboursements, par exemple ceux des médicaments à SMR insuffisant.

Vous revalorisez le forfait de la CMU qui passera de 304 à 340 euros par an, afin de se rapprocher la réalité des coûts, ce qui est une bonne chose.

Vous augmentez de façon assez substantielle l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé - improprement qualifiée de crédit d'impôt, puisqu'elle est prise en charge par le budget de l'assurance maladie. Cela pourrait paraître une bonne mesure. Aujourd'hui seuls 10% des deux millions de personnes sans couverture complémentaire bénéficient de cette aide. Hélas, du fait de dispositions adoptées dans le projet de loi de finances, 60 000 familles vont se trouver exclues du bénéfice de la CMU. Au total, le bilan est largement négatif.

L'article 36, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 36

M. le Ministre délégué - La loi du 13 août 2004 institue divers avantages fiscaux et sociaux au profit des contrats dits responsables des organismes de protection complémentaire. Pour en bénéficier, ces contrats doivent exclure le remboursement des majorations de ticket modérateur et des dépassements d'honoraires prévus en cas de non-respect du parcours de soins, prendre en charge en revanche toutes les prestations liées aux consultations et prescriptions du médecin traitant, et inclure des prestations de prévention. Il était prévu que ces contrats entrent en vigueur le 1er janvier 2006.

Après une large concertation avec l'ensemble des organismes complémentaires, il apparaît nécessaire d'aménager le dispositif sur quatre points. Tel est l'objet de l'amendement 233 3rectification.

Tout d'abord, l'obligation d'inclure dans ces contrats des actions de prévention sera reportée de six mois, afin de laisser le temps à la Haute autorité de santé d'établir une liste objective de ces actions. En deuxième lieu, pour les contrats liés à un accord collectif de branche, un délai supplémentaire de six mois est là aussi nécessaire afin que les partenaires sociaux aient le temps de négocier. Ensuite, les contrats d'entrée de gamme - ne couvrant que les frais d'hospitalisation - auront jusqu'au 1er janvier 2008 pour se mettre en conformité avec les nouvelles exigences. Il est enfin prévu que les contrats de sortie de CMU respectent le cahier des charges des contrats responsables.

M. le Président - Je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public sur cet amendement.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis favorable

M. Jean-Luc Préel - Je regrette le dépôt tardif de cet amendement qui ne nous a pas permis de l'examiner comme il aurait convenu. Il est la conséquence directe de la complexité du parcours de soins, que nous avions en son temps dénoncée. Si le patient pouvait être intégralement remboursé tout en s'exonérant des contraintes du parcours de soins, celui-ci n'aurait plus de raison d'être ! Vous proposez de repousser la date à laquelle les contrats responsables devront comporter des actions de prévention. Ce n'est pas ainsi que l'on améliorera sur ce point notre système de santé, déjà trop axé sur le curatif. J'ai déjà eu l'occasion de déplorer l'absence d'un sous-objectif spécifique prévention et éducation à la santé.

Les mutuelles et les assurances n'appliquant pas les contrats responsables se verront supprimer leurs aides fiscales, nous dit-on. Mais tous leurs contrats devront-ils être responsables ou suffira-t-il qu'elles en proposent un de la sorte, aux côtés d'autres qui pourraient ne pas respecter les critères fixés ? Auquel cas se mettrait en place une médecine à deux vitesses, certains patients pouvant se faire rembourser en totalité dans le cadre de contrats plus coûteux. J'espère que le ministre répondra à cette question importante.

M. Gérard Bapt - Je profite du temps qui reste avant le scrutin public pour évoquer un amendement qui n'existe plus après avoir été déclaré irrecevable. Il devait se situer à ce moment de notre discussion et il tendait simplement à demander au Gouvernement un rapport sur les conséquences sanitaires et sociales de la suppression des dispositions des lois de finances rectificatives pour 2002 et pour 2003 concernant l'aide médicale d'Etat. Les plus vives inquiétudes se sont exprimées à ce sujet, les associations à visées humanitaires s'alarmant du sort réservé aux personnes redevables de l'AME. La façon dont les deux décrets, reprenant des dispositions rejetées à la fois par la CNAM et par les associations, ont été publiés, au cœur de l'été, après que MM. Borloo et Douste-Blazy se sont longuement renvoyé la balle, n'est certainement pas de nature à nous rassurer. A nos yeux, il eût été loisible de déclarer recevable cet amendement car il n'engageait aucune dépense tout en exprimant une préoccupation légitime, dont l'incidence sur la santé publique ne peut échapper à personne.

M. le Président - Monsieur Bapt, vous êtes membre de la commission des finances et vous savez parfaitement pourquoi cet amendement a été déclaré irrecevable.

M. Jean-Marie Le Guen - La présentation inopinée de cet amendement gouvernemental ajoute au baroque qui caractérise désormais la notion de contrat responsable. Nous sommes, je l'avoue, un peu désabusés car tout cela est parfaitement opaque et incompréhensible pour tous les assurés. Pis, à force de compliquer le système, on se prend les pieds dans le tapis des principes ! Mettre en option les éléments de prévention, en donnant aux complémentaires un rôle d'intervention sur les questions de prévention, est tout de même un peu fort au regard des impératifs de santé publique ! D'accord pour faire passer la prévention du champ de l'Etat à celui de l'assurance maladie, laquelle est universelle et n'a plus simplement vocation à rembourser des soins. Mais de là à prévoir que des actes de prévention seront proposés à une partie seulement de la population, il y a un pas que nous refusons de franchir. Sur ce point comme sur tant d'autres, votre politique est totalement contraire aux principes de santé publique.

M. le Ministre délégué - Qu'est-ce qu'un contrat responsable ? C'est un contrat qui bénéficie d'une aide fiscale et sociale pour proposer, en contrepartie, des dispositions plus avantageuses qu'un contrat simple. Naturellement, Monsieur Préel, on pourra continuer de proposer des contrats ne présentant pas les caractéristiques d'un contrat responsable ! Mais les contrats responsables, c'est toujours du mieux ! Et à partir du moment où ils génèrent une dépense sociale et fiscale, il est naturel de demander un effort particulier à l'organisme complémentaire. C'est la raison pour laquelle il est tout à fait souhaitable que ces contrats responsables comportent des dispositions relatives à la prévention. Au final, cela permettra d'améliorer les contrats complémentaires.

A la majorité de 30 voix contre 4, sur 34 votants et 34 suffrages exprimés, l'amendement 233 3rectification est adopté.

M. le Ministre - Je n'ai pas souvenance que le fait d'inciter les complémentaires à prendre des actes de prévention dans les contrats responsables ait fait débat au moment de la réforme de l'assurance maladie. Je vais reprendre les comptes rendus de l'époque mais je suis presque certain que, sur ce point précis, personne n'avait rien trouvé à redire. Comprenons nous : il ne s'agit pas que les complémentaires fassent à la place de l'Etat ou de l'assurance maladie, mais bien qu'elles fassent en plus de l'assurance maladie ! Et il ne faudrait pas faire croire que la prévention sera réservée à certains, puisque la vocation des contrats responsables est précisément de la généraliser. Le contrat responsable est censé être moins cher qu'un contrat non responsable et il tend à protéger l'assuré des évolutions de tarifs puisqu'il se situe dans le parcours de soins. Sachant que 92% des Français sont couverts par une complémentaire santé, les contrats responsables sont clairement destinés à se généraliser.

Il faut aussi savoir, si l'on veut éviter un certain nombre de disparités, que de nombreux contrats complémentaires prennent d'ores et déjà en charge des actes de prévention. Certains couvrent l'ostéodensitométrie, d'autres la prévention bucco-dentaire ou les vaccinations. Nous avons consulté récemment les organismes complémentaires et ils sont désireux de s'engager plus avant dans la voie de la prévention. Dans les années qui viennent, l'Etat et l'assurance maladie doivent faire plus pour la prévention et l'éducation à la santé. Mais il importe que les organismes complémentaires participent à ce mouvement, comme ils seront invités à le faire pour ce qui concerne la santé au travail dans la cadre de la réforme de la branche AT-MP.

ART. 37

M. Jean-Luc Préel - Je n'ai pas très bien compris si les complémentaires - assureurs et mutuelles - seraient pénalisés s'ils proposaient autre chose que des contrats responsables en sus d'un contrat responsable de base. Si chaque organisme peut présenter à la fois un contrat de base - dit responsable - et d'autres contrats, on aura un système de remboursement à plusieurs vitesses...

M. Jean-Marie Le Guen - Soyez sûr que c'est ce qui va arriver !

M. le Ministre - Mais non !

M. Jean-Luc Préel - Nous en arrivons, avec l'article 37, à la désormais célèbre franchise de 18 euros. Pourquoi le ministre a-t-il « oublié » de la présenter aux parlementaires ? Mystère ! En tout cas, il ne s'agit pas d'une mesure de santé publique mais d'une disposition essentiellement comptable, visant à économiser les 100 millions que l'on bascule sur les complémentaires et sur les familles. Par définition, les actes dont le tarif excède 91 euros ne sont pas bénins. La quasi-totalité d'entre eux sont des actes chirurgicaux, hors quelques examens médicaux en gastro-entérologie : naguère, lorsqu'on faisait une coloscopie, le patient était pris charge à 100%. Lorsqu'un malade présente un cancer du côlon et que la maladie peut être familiale, on propose une coloscopie de dépistage aux frères et sœurs et à la famille. C'est un acte de prévention...

Mme Jacqueline Fraysse - Absolument !

M. Jean-Luc Préel - Demain, il sera demandé 18 euros à tout patient subissant l'examen. Est-ce normal ? Et pourquoi 18 euros ? Mais sans doute n'est-ce que le début d'un processus de désengagement plus massif de la solidarité nationale... (M. le ministre fait un signe de dénégation) tendant à mettre toujours plus à contribution les mutuelles et les assurés ?

Mme Jacqueline Fraysse - C'est l'évidence !

M. Jean-Luc Préel - Lorsqu'on a un contrat avec une mutuelle et que celle-ci se voit contrainte de prendre en charge une nouvelle dépense, il est évident qu'elle la répercute sur votre cotisation d'une manière ou d'une autre ! Et si ce n'est pas la complémentaire qui paie, le forfait restera à la charge de la famille. L'on s'oriente donc vers une médecine à plusieurs vitesses, puisque le ministre a dit il y a un instant que les mutuelles pourraient proposer des contrats variables...

M. le Ministre - Je n'ai jamais dit cela !

M. Jean-Luc Préel - Il y aura des contrats de base dits responsables et d'autres contrats, permettant de rembourser notamment les dépassements d'honoraires. Et nous aurons par conséquent une médecine à plusieurs vitesses à très brève échéance. Naturellement, vous pouvez, Monsieur le président, considérer que mon amendement 211 de suppression de l'article est défendu.

M. le Président - Je demande un vote par scrutin public sur l'ensemble des amendements de suppression de l'article 37.

Mme Jacqueline Fraysse - Mon amendement 140 est donc défendu. Je dois dire que nous partageons assez largement les préoccupations que vient d'exprimer M. Préel. Le forfait de 18 euros restant à la charge des assurés pour les interventions médicales lourdes n'est pas seulement critiqué ici puisqu'il fait la quasi unanimité contre lui. Tous le condamnent, qu'il s'agisse de l'ensemble des organisations syndicales de salariés, des associations de patients et d'usagers, de la FNATH, de l'UFC-Que choisir, d'Aides, de plusieurs syndicats de médecins - MG France, la Coordination médicale hospitalière, l'Union des chirurgiens de France -, de la Fédération hospitalière de France, de la Mutualité française... Même la Fédération française des sociétés d'assurance a émis de très vives réserves. Parmi les arguments que développent ces forces aussi nombreuses que diverses, trois critiques principales s'adressent au Gouvernement. La première, c'est une critique de forme puisque le forfait à 18 euros résulte d'un arbitrage gouvernemental, rendu sans concertation aucune et en catimini pour être finalement annoncé à la télévision à la stupéfaction générale. Ainsi, le Gouvernement affiche, au-delà de la décision elle-même, un profond mépris à l'égard de la nouvelle gouvernance qu'il avait prétendu instaurer par la loi du 13 août 2004. La deuxième critique porte sur le fait que cette mesure constitue une nouvelle sanction financière infligée aux assurés, une de plus pourrait-on dire car la liste est déjà longue : multiplication des franchises, sanctions en cas de non présentation du dossier médical personnel, pénalités si l'on ne passe pas par le médecin traitant, etc. L'effort est loin d'être partagé ! Seuls les assurés paieront le prix de ce déremboursement, que ce soit de manière directe ou indirecte. En effet, le surcoût que cette mesure occasionne pour les complémentaires - chiffré, selon l'UNOCAM, de manière totalement irréaliste par le Gouvernement - se répercutera sur le tarif des cotisations. D'après Gilles Johanet, directeur des activités santé des AGF et ancien directeur de la CNAM, l'augmentation devrait atteindre 0,75 à 1,50% en 2006.

Plus important encore - et c'est la troisième critique - cette disposition constitue une rupture radicale avec les fondements de l'assurance maladie. Gilles Johanet souligne que « voir la sécurité sociale se désengager des actes lourds présente une haute signification sur le plan politique » et Jean-Michel Laxalt, président de l'UNOCAM de rappeler que « jusqu'à présent, au-delà d'un certain coût, il y avait une prise en charge totale du patient par le régime obligatoire. »

Certes, cette rupture avait été soigneusement préparée. Jean-François Mattei, notamment, avait rétabli au 1er janvier 2004, un ticket modérateur de 30% sur tous les soins précédant ou faisant suite à des actes cotés K50 ou plus. Or, un rapport du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie établit que cette mesure - touchant en particulier les transports sanitaires, les actes infirmiers et de kinésithérapie - a permis de réaliser seulement un tiers des 600 millions d'euros d'économies attendues. A la lumière de ce précédent, gageons que ce forfait de 18 euros sera sans grand effet sur les dépenses de santé.

En revanche, il renforcera les inégalités en matière de santé et favorisera une « médecine à deux vitesses » pour reprendre l'expression de M. Préel et il accélérera le passage d'un système de protection sociale solidaire à un système d'assurance individuelle voulu par ce Gouvernement.

Monsieur le ministre, Christian Saout, président d'Aides, a posé une question fort lucide que je vous adresse à présent : « le régime complémentaire n'est-il pas en train de devenir le régime de base ? »

M. le Ministre - Non ! Et lisez plutôt les rapports du Haut conseil sur l'avenir de l'assurance maladie !

M. Jean-Marie Le Guen - Concernant la prévention, la Haute autorité de santé me semble sollicitée d'une façon curieuse puisqu'on l'interroge, en somme, sur les actes de prévention dont pourraient se passer les 10% des Français qui n'ont pas de complémentaires.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Mais non !

M. Jean-Marie Le Guen - On ne lui demande pas de se prononcer sur les actes de prévention nécessaires à la santé publique. Répondrait-elle que ces actes de prévention relèvent des contrats responsables plutôt que de l'assurance maladie ? La question est posée.

S'agissant de l'article 37, vous substituez à une sécurité sociale globale une sorte de millefeuille pour assurer la protection de base. Je m'explique : vous accordez aux complémentaires un rôle de plus en plus important et bientôt prépondérant dans l'assurance maladie. Nous passons du ticket modérateur...

Mme Jacqueline Fraysse - ...au co-financement !

M. Jean-Marie Le Guen - En définitive, nous sommes à un moment de rupture avec la politique menée par ce gouvernement. Tout d'abord, Monsieur le ministre, vous vous disiez attaché au dialogue social. Que n'a-t-on entendu sur le temps que vous avez passé à discuter de la réforme de l'assurance maladie avec les partenaires sociaux ! Or, la franchise de 18 euros a été décidée de manière unilatérale.

Mme Jacqueline Fraysse - C'est vrai !

M. le Ministre - Je n'ai pas de leçons à recevoir des socialistes sur ce terrain !

M. Jean-Marie Le Guen - Puis, avec cette décision rejetée de façon unanime, vous organisez la rupture avec tous ceux qui soutenaient votre réforme de l'assurance maladie en août 2004, dont le conseil d'administration de la CNAM et la mutualité.

Enfin, une rupture dans les principes. On avait entendu M. Douste-Blazy se targuer de réformer efficacement l'assurance maladie en excluant tout déremboursement. Cette fois, c'est clair et net, vous recourez au déremboursement ! Pis encore, vous rompez avec l'idée que les complémentaires peuvent prendre en charge le risque lorsqu'il est faible mais que les risques importants doivent être couverts par le régime de base.

Cette franchise de 18 euros, qui suscite tant d'inquiétudes dans notre pays, ne poursuit pas un but financier. Elle devrait vous permettre de réaliser 100 millions d'euros d'économie, soit ce que coûtera la diminution de la taxe sur le chiffre d'affaires des industries pharmaceutiques que vous avez décidée ce matin ! Si cela n'était pas une mesure idéologique, vous vous empresseriez, Monsieur le ministre, de renoncer à cette franchise et de ramener à son niveau la taxe sur l'industrie pharmaceutique. Malheureusement, ces mesures visent à propager une conception de la protection sociale où le régime complémentaire devient le régime de base !

M. Gérard Bapt - Lorsque nous avons appris l'instauration de cette franchise, nous nous sommes demandé comment vous aviez fait, Monsieur le ministre, pour vous tirer ainsi une balle dans le pied...

Cela ne vous ressemble guère, surtout pour 100 millions ! Je lisais dans la presse que vous avez l'habileté de vous tenir à équidistance entre M. de Villepin et M. Sarkozy mais avec cette mesure, vous versez plutôt du côté de M. Sarkozy, même si vous n'en êtes pas encore à utiliser le karcher.

M. Jean Leonetti - Et vous, vous tenez-vous en équilibre entre M. Fabius et M. Hollande ?

M. Gérard Bapt - Vous êtes en train d'instituer le co-financement. L'opposition dans son ensemble votera donc la suppression de l'article 37.

M. le Président - Les amendements 140, 190 rectifié et 211 sont de suppression.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Permettez-moi de rappeler la philosophie de la mesure que nos collègues socialistes appellent « le 18 euros ».

Dans la classification des actes, vieille d'une quarantaine d'années, le K50 - correspondant à l'appendisectomie - était un acte lourd pour l'époque et surtout symbolique : ticket modérateur en deçà, exonération au-delà. Mais on ne savait pas qu'il s'agissait d'un payeur différent dans un cas et dans l'autre.

Aujourd'hui, la classification a bien changé, comme la médecine. On entend dire que certains actes lourds - la coloscopie en est-elle vraiment un, Monsieur Préel ? - ne seront pas intégralement pris en charge. Ce n'est pas sérieux !

Plutôt qu'une démarcation verticale entre actes lourds - qui ne le sont plus - et actes moins lourds, nous avons voulu une démarcation horizontale. Certains types de prises en charge seront exonérés, des femmes enceintes aux nourrissons. Cette philosophie est en conformité avec l'évolution de la médecine.

Vous savez bien que ce ne sont pas les Français qui vont payer, mais les mutuelles. Sur les 8% de Français qui n'ont pas de mutuelle, la moitié ne souhaite pas en avoir et le Gouvernement a fait en sorte que l'autre moitié n'ait pas à payer la quote-part.

M. le Ministre - Cette mesure représente 100 millions d'euros - le Haut conseil sur l'avenir de l'assurance maladie l'a également indiqué ce matin.

M. Jean-Marie Le Guen - 100 à 130 millions !

M. le Ministre - Puis-je poursuivre, à moins que mes arguments ne vous gênent, Monsieur Le Guen ?

M. Jean-Marie Le Guen - Mais c'est un mensonge !

M. le Ministre - Restez calme !

Nous avons clairement indiqué ce montant la semaine dernière aux représentants de l'UNOC. A l'évidence, un tel montant ne fera pas disparaître les déficits !

La philosophie du Gouvernement a été la suivante : après les efforts demandés aux Français en 2004 - avec le choix d'un médecin traitant et le recours aux médicaments génériques - nous sollicitons cette année deux autres acteurs : l'industrie pharmaceutique et les organismes complémentaires.

Compte tenu de l'augmentation des prix des médicaments et de la masse globale de ce secteur, nous avons demandé à l'industrie du médicament d'être au rendez-vous de cette réforme.

Quant aux organismes complémentaires, nous avons fait une étude très fine de l'impact combiné de la réforme de l'assurance maladie et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour nous assurer que le bilan entre les économies qu'ils réaliseraient et les dépenses nouvelles que nous leur demanderions n'entraînerait aucune augmentation des cotisations.

J'assume entièrement ce choix devant la représentation nationale. Le débat a eu lieu, et il est aujourd'hui enrichi par l'avis très intéressant que le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie a donné ce matin.

M. Jean-Marie Le Guen - Non !

M. le Ministre - Vous répéterez plus tard les mêmes arguties que d'habitude. Je vous donne des faits ! Cet avis adopté à l'unanimité fait la lumière sur ce que peuvent - ou doivent - être les tarifs des complémentaires pour l'année à venir. Je vous renvoie aux chiffres que le Haut conseil a avancés, qui montrent que l'effort que nous demandons est possible sans augmentation des cotisations.

Enfin, n'allons pas dire que nous découvrons ce sujet ! En 2002, la Cour des comptes rappelait déjà que les principaux écarts de prise en charge découlaient de la suppression du ticket modérateur pour les actes de coefficient supérieur au K50.

Sur la forme, la présentation du PLFSS est tout sauf moderne : pour respecter le paritarisme - auquel je suis attaché - il faut d'abord transmettre un avant-projet aux caisses de sécurité sociale et au Conseil d'Etat, après quoi il faut attendre quinze jours la présentation du projet en conseil des ministres pour enfin le transmettre aux parlementaires.

Dès l'année prochaine, tout le monde aura tout en même temps, même s'il ne faut pas se méprendre sur la nature de ce qui ne sera qu'un avant-projet. N'allez donc pas faire croire que de telles mesures se prennent en catimini : nous sommes dans le domaine législatif, où le débat est public ! Vous voyez que nous ne sommes ni distraits, ni discrets.

J'irai plus loin encore. On tente de faire croire que cette mesure bouleverse notre système de santé. Dois-je vous rappeler quel gouvernement a créé le forfait hospitalier en 1983 ? On entend que nous privatisons le système : vous connaissez pourtant les chiffres ! La prise en charge par le régime général est passée de 76,5% en 2002 à 76,7% aujourd'hui. Les ménages participaient alors à hauteur de 9,4% contre 9,1% aujourd'hui. Quant aux mutuelles, leur participation reste stable à 7,3%. N'allez donc pas dire que le débat est entre le gros risque et le petit risque ! Tout le monde doit faire des efforts : les Français en ont fait, l'industrie pharmaceutique et les complémentaires peuvent en faire aussi pour nous permettre de conserver notre système de sécurité sociale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Luc Préel - Je tiens à remercier M. le rapporteur d'avoir rétabli la vérité sur le mouvement imprimé au curseur et sur le rôle donné aux complémentaires. Je ne discuterai pas le coût réel de cette mesure, Monsieur le ministre - 100, 130, 200 millions peut-être - mais j'ai deux dépêches contradictoires de l'AFP à ce sujet. Nous verrons l'année prochaine ce qu'il en est...

A la majorité de 28 voix contre 12, sur 40 votants et 40 suffrages exprimés, les amendements 140, 190 rectifié et 211 ne sont pas adoptés.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 222 vise à ajouter aux exceptions déjà prévues dans le texte les actes de prévention et de dépistage. Je suis heureux qu'il soit passé à travers la censure de la commission des finances.

M. Jacques Domergue, rapporteur - Avis défavorable. Le Gouvernement devrait préciser ce qu'il en est car les actes de prévention tels que la mammographie et la coloscopie sont déjà pris en charge.

M. le Ministre - Avis défavorable pour plusieurs raisons : les exonérations existent naturellement dans le cadre d'un dépistage organisé - outre le dépistage du cancer du sein, je souhaite développer d'autres dépistages. D'autre part, un grand nombre de ces dépistages, d'un montant inférieur à 91 euros, ne sont pas concernés. Cette question relève d'un décret, mais tous les actes cotés Z ou R ne sont pas concernés, d'où vient peut-être l'erreur de certains quant aux montants.

Enfin, s'agissant des macrobiopsies ou des biopsies réalisées sous guidage radiographique, le seul problème susceptible de se poser serait celui d'un forfait qui regrouperait des actes qui étaient cotés K et d'autres cotés Z. Notre décret exclura bien, en matière de prévention et de dépistage, l'application de cette limitation du ticket modérateur.

Avis défavorable donc à cet amendement.

L'amendement 222, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 37, mis aux voix, est adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce matin, vendredi 28 octobre, à 9 heures 30.

La séance est levée à 1 heure 30.

            La Directrice du service
            du compte rendu analytique,

            Catherine MANCY

ORDRE DU JOUR
DU VENDREDI 28 OCTOBRE 2005

NEUF HEURES TRENTE - 1re SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 (n° 2575).

Rapport (n° 2609 tomes I à V) de MM. Jean-Pierre DOOR, Jacques DOMERGUE, Mmes Cécile GALLEZ et Marie-Françoise CLERGEAU, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Avis (n° 2610) de M. Yves BUR, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

QUINZE HEURES - 2e SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

VINGT ET UNE HEURES TRENTE - 3e SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


© Assemblée nationale