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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2005-2006 - 19ème jour de séance, 44ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 2 NOVEMBRE 2005

PRÉSIDENCE de Mme Paulette GUINCHARD

vice-présidente

Sommaire

      LOI DE FINANCES POUR 2006
      -deuxième partie- (suite) 2

      SÉCURITÉ, SÉCURITÉ CIVILE (suite) 2

      QUESTIONS 12

      Sécurité 18

      ÉTAT B 18

      Sécurité civile 20

      ÉTAT B 20

      ORDRE DU JOUR DU JEUDI 3 NOVEMBRE 2005 21

La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq.

LOI DE FINANCES POUR 2006 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006.

SÉCURITÉ, SÉCURITÉ CIVILE (suite)

Mme la Présidente - Nous poursuivons l'examen des crédits relatifs à la sécurité et à la sécurité civile.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense - Des incidents en Seine-Saint-Denis retenant le ministre de l'intérieur, je propose que nous débutions ce débat par l'examen des crédits de la gendarmerie nationale. A mon arrivée au ministère de la défense en 2002, la gendarmerie nationale se trouvait dans une situation indigne de sa réputation, une situation fortement marquée par les événements de 2001 rappelés par M. Voisin. Depuis, plus de trois ans ont passé et nous pouvons saluer le remarquable redressement de cette institution au service de la sécurité de notre pays (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

Aujourd'hui, la complémentarité entre les deux forces assurant la sécurité intérieure - l'une civile, l'autre militaire - est clarifiée. La mutualisation de nombreux outils et structures est une réalité concrète. Cette évolution permet d'obtenir de bons résultats, notamment en matière de sécurité générale et de police judiciaire mais également sur le plan de la sécurité routière. Plus de 12 000 gendarmes ont contribué à la baisse exceptionnelle du nombre de victimes sur la route - 5 500 en 2004 contre 8 000 en 2000. Et en la matière, chaque vie économisée, c'est une famille préservée de la douleur. La gendarmerie consacre également ses efforts à la lutte contre l'immigration irrégulière : durant les neuf premiers mois de l'année, 4 000 faits ont été constatés en métropole, soit une augmentation de 97% par rapport à 2004. Contre le travail illégal, enfin, la coordination des unités a été renforcée par la création de l'Office central de lutte contre le travail illégal, confié à la gendarmerie, qui diligente la moitié des procédures.

Ces résultats, source d'une grande satisfaction, sont le reflet d'une politique clairement définie dans ses objectifs et respectée dans ses moyens. Tout d'abord, la réaffirmation du statut militaire de la gendarmerie, source de son efficacité, a permis d'améliorer son action.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour la gendarmerie - Très bien !

Mme la Ministre - Depuis 2002, je me suis employée à remédier aux dérives constatées les années précédentes. Ainsi, j'ai décidé le retour au recrutement des officiers au sein des écoles supérieures militaires, interdit de manière absurde par mon prédécesseur (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP). Ensuite, la gendarmerie a bénéficié d'une place significative dans le nouveau statut général des militaires. Enfin, un général a été nommé à la tête de la direction générale de la gendarmerie nationale, ce qui ne s'était pas vu depuis des années ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis - Très bien !

Mme la Ministre - Cette identité militaire a également été renforcée par la contribution de la gendarmerie à l'action des armées hors de nos frontières. Près de 600 militaires de la gendarmerie sont déployés en opérations extérieures. Deux escadrons sont actuellement en Côte d'Ivoire et un troisième est en alerte rapprochée. Les gendarmes français sont également présents dans d'autres pays, tel le Kosovo ou la Bosnie, où ils remplissent des missions de police civile et militaire, sous mandat de l'ONU ou de l'OTAN, ou encore au profit de l'Union européenne.

Du reste, depuis septembre 2004, une force de gendarmerie européenne a été créée sur ma proposition. Doter ainsi l'Europe de forces à déploiement rapide et donc adaptées aux phases de sortie de crises permet de renforcer la visibilité et l'efficacité de sa politique de sécurité et de défense.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis - Très bien !

Mme la Ministre - Ce projet de budget pour 2006 permet de respecter les engagements pris dans la loi d'orientation pour la sécurité intérieure. Malheureusement cette dernière n'ayant pas été annualisée, malgré mes demandes en ce sens, certains budgets annuels accusent du retard. Cette année, le programme gendarmerie s'élève à 7,3 milliards, ce qui représente 48% du total de la mission « sécurité ». Les crédits qui lui sont alloués augmentent de 400 millions par rapport à 2005.

Le projet de budget 2006 donne ainsi un véritable coup d'accélérateur à notre politique en faveur des effectifs, des équipements et de l'immobilier de la gendarmerie.

Les moyens de la gendarmerie sont d'abord consacrés aux hommes et aux femmes qui font la force de cette institution. J'ai décidé de créer 2 000 emplois de gendarmes en 2006, qui viennent s'ajouter aux 1 300 emplois de policiers créés par le ministère de l'intérieur. Au total, 5 100 emplois auront été créés en quatre ans (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP). En outre, pour respecter l'objectif de 19 500 réservistes en 2005, force essentielle à l'action quotidienne de la gendarmerie, les crédits consacrés à la constitution de cette réserve augmentent de 13% en 2006. Rappelons également que ce budget comprend 18,4 millions pour la mise en œuvre du plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées, qui permettra une meilleure organisation des effectifs de la gendarmerie en améliorant notamment le taux d'encadrement.

Quant aux équipements des gendarmes, leur modernisation a été élevée au rang de priorité dans la loi d'orientation pour la sécurité intérieure et la loi de programmation militaire. La progression du budget d'équipement de la gendarmerie est confirmée puisque la dotation globale augmente de 20% et passe de 460 à 550 millions. Seront ainsi livrés plus de 2 000 véhicules de brigade et de police de la route, plus de 12 000 pistolets automatiques et plus de 24 000 tenues d'intervention.

Pour préparer l'avenir, de nombreuses commandes seront également passées en 2006 en vue de renforcer la protection et l'armement des personnels, ainsi que la mobilité et les capacités d'intervention des unités.

Des moyens supplémentaires seront enfin consacrés à l'immobilier : comme MM. Folliot, Caillaud et Voisin l'ont souligné, les conditions de travail et de vie sont essentielles pour le moral et l'équilibre familial, et partant pour l'efficacité des personnels.

J'ai en effet trouvé l'immobilier de la gendarmerie dans un état calamiteux à mon arrivée (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Si beaucoup a déjà été fait, la tâche sera longue. Il est impossible de rattraper en quelques mois plusieurs années de déshérence.

En matière de logement, des efforts financiers importants ont ainsi été consentis depuis 2002, tant pour les investissements que pour les loyers. Si les crédits ont globalement augmenté de 242 millions, ce projet de loi les fera encore vigoureusement progresser. Ils atteindront 200 millions pour les investissements, soit une hausse de 73%, et 394 millions pour les loyers - plus 16%.

Tous les dispositifs juridiques prévus par la LOPSI seront par ailleurs utilisés dans ce domaine, notamment les partenariats avec les collectivités locales et l'usage du crédit-bail. Nous accompagnerons ainsi le renouvellement du parc immobilier tout en faisant preuve de justice à l'égard des collectivités, puisque les loyers augmenteront parallèlement.

La réforme de la gendarmerie joue enfin un rôle important dans la modernisation de l'Etat. A ce titre, la réforme des communautés de brigades est aujourd'hui achevée. Le principe novateur de mutualisation des moyens, qui permet de renforcer l'efficacité des petites unités, tout en conservant une couverture de 95% de notre territoire, est ainsi devenu une réalité. Cette réforme a été bien comprise par les autorités administratives et judiciaires, mais aussi par une grande majorité d'élus.

La réorganisation du commandement territorial, que j'ai décidée en 2004, a en outre pris effet au 1er juillet 2005. Elle constitue une des actions prioritaires de la stratégie de réforme du ministère de la défense, en modifiant profondément la chaîne territoriale du commandement, simplifiée et adaptée à l'organisation des autres administrations territoriales.

Les premiers échos sont très favorables, car cette réforme renforce la proximité entre la population et les groupements de gendarmerie tout en raccourcissant la chaîne hiérarchique.

J'ai également engagé la gendarmerie sur la voie de nouveaux modes de gestion. Je souhaite en effet externaliser la gestion des logements domaniaux ainsi que ceux de la gendarmerie, sans remettre en cause ses besoins opérationnels ni son identité. Ce n'est pas une question idéologique, mais pragmatique : il s'agit simplement d'offrir de meilleures conditions de logement et de travail aux gendarmes. Ces opérations seront donc lancées en 2006 et mises en œuvre avant la fin de l'année.

Plus que jamais, par son caractère militaire, par les moyens que nous lui avons alloués, mais aussi par sa faculté d'adaptation constante à son environnement, la gendarmerie démontre qu'elle est un pilier essentiel de la sécurité en France.

Le budget qui vous est présenté confirme l'engagement du Gouvernement, ainsi que ma détermination personnelle, à poursuivre dans cette voie. La sécurité deviendra une réalité quotidienne en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire - Je voudrais tout d'abord remercier les rapporteurs pour leur excellent travail, mais aussi saluer l'action du président de la commission des finances.

Qu'avons-nous fait des moyens que vous avez mis à notre disposition ? Voilà la seule question qui importe. Quelles ont été nos réussites, nos difficultés, et de quelles orientations avons-nous maintenant besoin ? Bref, quel doit être notre programme d'action au terme de ces trois premières années ?

J'ai voulu, porté, défendu et fait voter en 2002 la loi de programmation pour la sécurité intérieure, alors même que le scepticisme prévalait sur de nombreux bancs - cette loi d'orientation résisterait-elle à l'épreuve du temps ? 2006 sera sa quatrième année d'application pleine et entière.

J'avoue ne pas comprendre ceux qui redoutaient en 2002 que la LOPSI ne se résume à une pure pétition de principe et qui se refusent aujourd'hui à voter des moyens et des effectifs supplémentaires pour la police. Où est la cohérence ?

S'il reste encore des progrès à faire, la situation actuelle n'a rien à voir avec celle des lois de programmation précédentes. Mme Alliot-Marie et moi-même avons en effet tout mis en œuvre pour atteindre nos objectifs. La LOPSI restera sans doute une référence pour les résultats obtenus et le respect des engagements.

Alors que la délinquance avait augmenté de 15% entre 1997 et 2002, franchissant la barre symbolique des quatre millions de crimes et délits, elle a en effet baissé de 8% depuis 2002, sans que l'appareil statistique ait été modifié. Je ne sais pas s'il est totalement fiable, mais il est toujours le même !

M. Maxime Gremetz - Vous n'êtes pas de bonne foi !

M. le Ministre d'Etat - Le différentiel est donc considérable : 350 000 crimes et délits en moins chaque année ! J'imagine que tous les groupes de l'assemblée auront à cœur de féliciter les policiers et les gendarmes pour ce résultat (Applaudissements sur bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste). Je ferai part, n'en doutez pas, de votre réaction aux intéressés !

La délinquance sur la voie publique, qui touche le plus nos compatriotes, a reculé de 22% depuis 2002. Mieux encore : le taux d'élucidation des affaires est passé de moins de 25% en 2001 à 32,4% en 2005, soit une progression sans précédent de 7,5 points. Les policiers et les gendarmes travaillent davantage et mieux, c'est incontestable.

M. Jean-Pierre Blazy - Et les cambriolages ?

M. le Ministre d'Etat - Si vous voulez dissimuler votre gêne, vous devriez plutôt faire semblant de ne pas entendre. Mais vous avez raison, Monsieur Blazy, le taux d'élucidation doit encore progresser.

M. Maxime Gremetz - Vous avez mis le feu aux banlieues ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Ministre d'Etat - Laissez-nous parler de choses sérieuses, Monsieur Gremetz ! La priorité est de réprimer plus énergiquement les récidivistes, car nul ne peut souhaiter une amélioration du taux d'élucidation et refuser d'agir contre eux ! Ce sont toujours les mêmes qui reviennent devant les tribunaux.

Pour plus d'efficacité, nous devons également faire entrer de plain-pied notre police dans l'ère de la modernité. Donnons à la police scientifique et technique accès aux empreintes génétiques et à des fichiers nouveaux. Comment, en effet, retrouver davantage de coupables si vous votez systématiquement contre la création de fichiers d'empreintes génétiques ? (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste). Ces fichiers peuvent sauver des vies humaines ! Je pense notamment aux violences sexuelles.

M. Jean-Pierre Blazy - C'est nous qui avons créé le fichier des empreintes génétiques.

M. Maxime Gremetz - Heureusement que la CNIL est là !

M. le Ministre d'Etat - Reste la question des violences contre les personnes, comme l'a souligné à juste titre M. Léonard. Elles sont en hausse globale de 4%. La question de la hausse des violences sur les personnes a marqué les deux ou trois dernières décennies.

Aujourd'hui, on constate que les violences les plus graves régressent. Ainsi, en 2005, les vols à main armée ont diminué de 14%, les homicides de 7,5% et les viols de 5%. Mais il est vrai que les mauvais traitements d'enfants ont progressé de 10% et les coups et blessures volontaires, notamment dans la sphère familiale, de 7%. Cette augmentation est-elle réelle, ou est-elle due, Monsieur Lagarde, au fait que les femmes et les enfants ont enfin levé la loi du silence pourtant si répandue dans notre culture ? Peu importe : l'essentiel est de trouver des réponses approfondies à chaque forme de violence. Qu'une femme soit frappée par un inconnu ou par un parent ne change rien : elle reste une victime.

C'est pourquoi je souhaite changer nos méthodes face aux violences intrafamiliales. La brigade anti-criminalité n'est pas adaptée pour intervenir dans ce domaine. Nous mettrons sur pied, avec les directeurs généraux de la police et de la gendarmerie, des équipes spécifiques pour intervenir au sein des familles dans des départements-test. Ces équipes comprendront des femmes et des psychologues afin de mieux recréer les conditions du dialogue.

En outre, je souhaite faire évoluer la loi de telle sorte que la victime ait d'autres solutions que de quitter son domicile en pleine nuit, alors que l'agresseur y reste. C'est lui qui doit en être extrait ! Sur ce sujet, je suis persuadé qu'un consensus pourra être trouvé sur tous les bancs de cette assemblée.

La lutte contre le proxénétisme nous a déjà valu des débats passionnants et passionnés. Au cours des neuf premiers mois de 2005, 542 individus ont été mis en cause, 755 victimes ont été sorties des réseaux, 27 réseaux internationaux de proxénétisme et une filière de trafic de nouveaux-nés bulgares ont été démantelés et 1 600 prostituées ont été mises en cause pour racolage. Les riverains affectés en ont été grandement soulagés.

Nous avons réorienté l'action des services de police et de gendarmerie autour de la victime, mais il reste encore de grands progrès à accomplir dans ce domaine. Trop souvent, les victimes attendent ensanglantées dans les commissariats, ou sont reçues dans le même lieu que le coupable, ou, encore hébétées par leur agression, ne rentrent chez elles qu'avec l'adresse d'un service social. Les commissariats de police et les brigades de gendarmerie existent pour les victimes avant tout ! Elles y sont chez elles. On doit leur procurer le nom de la personne en charge du dossier et les tenir au courant de l'évolution de la procédure.

Avocat de formation et de profession, je reconnais volontiers le droit d'un délinquant à avoir un avocat dès son arrestation. Mais pourquoi la victime n'a-t-elle pas ce droit dès son agression ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Trop de victimes souffrent deux fois : du choc de leur agression d'abord, puis du sentiment que tout le monde s'en moque et que ce sont elles qui gênent !

M. Gérard Léonard, rapporteur pour avis de la commission des lois pour la sécurité - Très bien !

M. le Ministre d'Etat - J'en viens aux objectifs chiffrés pour 2006. Le nombre de crimes et délits, toutes zones confondues, devra, pour la cinquième année consécutive, baisser de 4%, et la délinquance de voie publique de 2 à 5%. Le taux d'élucidation, quant à lui, devra augmenter car il est un indice très intéressant de l'activité des services. Deux crimes ou délits sur trois ne sont pas résolus. Au travail quantitatif sur la baisse de la délinquance, nous devons associer un effort qualitatif afin de satisfaire les victimes et de retrouver davantage de coupables.

En ce qui concerne l'immigration clandestine, j'ai fixé un objectif très ambitieux de 25 000 expulsions - contre 12 000 en 2002. Ce doublement est indispensable.

S'agissant de la ZAPI et de l'expulsion des étrangers en situation irrégulière, Monsieur Le Fur, la chancellerie a donné son accord pour l'utilisation de la salle d'audience après réalisation des travaux d'aménagement. Enfin !

La justice doit être là où sont les magistrats. A ce titre, plutôt que de sortir des délinquants dangereux de prison, les forces de l'ordre seraient ravies que les magistrats se déplacent à leur tour ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Les fonctionnaires, les militaires et le public courraient ainsi moins de risques. En outre, la raison suggère d'utiliser la visioconférence pour des audiences de procédure - lorsqu'il s'agit de signifier une mise en examen, un délai de recours ou une étape de la procédure, par exemple. Les droits de la défense n'en souffriraient pas et on éviterait ainsi la situation anormale où, dans de petites ou moyennes villes, l'extraction de détenus occupe toutes les forces disponibles : plus une patrouille n'y circule !

La culture du résultat implique enfin la reconnaissance des mérites, individuels et collectifs. En 2005, 26 700 fonctionnaires de police vont bénéficier, à titre individuel, d'une prime de résultats exceptionnels grâce à la dotation de dix millions d'euros. La prime collective de 400 euros concernera 18% des effectifs globaux, soit 14 000 personnes.

L'idée de la récompense, qui provoqua jadis tant de débats et de polémiques, est désormais entrée dans les mœurs : je souhaite bien du courage à un futur ministre qui souhaiterait supprimer ces primes ! Chacun apprécie ce qui est juste. Je tiens à rendre hommage aux organisations syndicales qui, Messieurs Decocq et Blazy, ont été associées à l'élaboration de ce dispositif et ont permis de l'améliorer.

Devant le succès de cette démarche, j'ai obtenu que le montant de l'enveloppe de primes soit porté à quinze millions d'euros - soit trois fois la dotation de 2004. Pour la gendarmerie, 14 000 militaires avaient bénéficié d'une prime en 2004 ; l'enveloppe, de trois millions d'euros en 2005, est portée à six millions en 2006. Voilà une nouvelle culture qui devrait satisfaire le président de la commission des finances !

MM. Caresche, Blazy et Vanneste ont évoqué les violences urbaines. On ne peut pas accepter que les habitants de certains quartiers paient de leur vie une sécurité dégradée et moindre que dans les quartiers plus favorisés.

M. Christian Vanneste - C'est une évidence !

M. le Ministre d'Etat - M. Chevènement avait dit « sauvageons », d'autres disent « voyous ». Quoi qu'il en soit, il faut cesser de dire « les jeunes » ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) On stigmatise ainsi toute une génération, et on donne le sentiment d'excuser l'inexcusable sous couvert de jeunesse ! Lorsqu'un quinquagénaire commet un délit, les médias ne parlent pas de « vieux » ! On ne qualifie pas un agresseur par son âge, la couleur de sa peau ou son physique. Il n'y a donc aucune raison de parler de « jeunes ». Un violeur dans une tournante est un barbare, celui qui commet un crime est un assassin, un voleur est un vandale, et tous les trois sont des voyous, mais ce ne sont pas des « jeunes » ! Cette expression crée un amalgame inadmissible.

M. François Grosdidier - C'est le vocabulaire des socialistes !

M. le Ministre d'Etat - Bien sûr, pour éviter tout problème de violence urbaine, ou pourrait continuer à faire ce que l'on fait depuis si longtemps : rien. Les policiers et les gendarmes cessent alors de se rendre dans certains quartiers, où règnent calmement les bandes et l'argent de la drogue, où fleurissent les trafics et l'économie souterraine. C'est le calme suspect des trafiquants qui ne veulent pas être dérangés.

M. François Grosdidier - C'est le bon temps sous Jospin !

M. le Ministre d'Etat - Les choses doivent changer. C'est déjà le cas en Seine-Saint-Denis depuis cinq jours. Il ne s'y passe plus une nuit sans que la police multiplie les interpellations ou que la justice - au courage de laquelle je rends hommage - multiplie les condamnations en comparution immédiate. Ainsi, 34 interpellations ont eu lieu la nuit dernière, 15 la nuit d'avant et 20 la nuit précédente.

Je suis persuadé que certains faits de violence urbaine ne se seraient jamais produits si tant de voyous ne s'étaient pas imaginé que l'on pouvait impunément brûler la voiture de son voisin ! Le jour où chacun comprendra que c'est grave et puni sévèrement, il y aura, je vous le garantis, moins d'incendies de voitures ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Blazy - Il y en a de plus en plus !

M. le Ministre d'Etat - Nous avons un problème d'effectifs, dont il faut essayer de parler concrètement. J'ai dégagé, à effectifs constants, 2 000 personnels - dix-sept compagnies républicaines de sécurité et sept escadrons de gendarmes mobiles, qui faisaient jusqu'à présent de l'ordre public - pour les mettre à la disposition des directions de la sécurité publique et qu'ils puissent ainsi s'installer, par périodes de trois mois, dans les quartiers les plus difficiles, aux heures les plus difficiles, afin d'y faire des interpellations. Dans un département comme le vôtre, Monsieur Blazy, où il y a en moyenne quinze CRS chaque nuit, il y en aura désormais cent. C'est un mouvement sans précédent. (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

J'ajoute que nous avons changé les méthodes d'interpellation et de travail des compagnies républicaines de sécurité : plutôt que de les faire intervenir par grandes compagnies, nous les faisons intervenir désormais par modules de deux. Les résultats sont spectaculaires.

Nous avons par ailleurs réorienté complètement l'action des renseignements généraux : ils n'ont plus à faire des notes sur le climat politique ou social, ils sont bien plus utiles à lutter contre le terrorisme et contre l'économie souterraine. Et nous avons recentré les GIR sur l'aspect patrimonial de la délinquance.

Que les choses soient donc claires : la police et la gendarmerie doivent être les bienvenues dans tous les quartiers de nos cités et de nos villes. Il n'y a pas un centimètre de la République qui soit interdit à ces deux services publics ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Blazy - On est d'accord.

M. le Ministre d'Etat - Et que l'on ne dise pas que la présence de la police peut être provocante pour certains ! Si elle l'est, c'est que ces « certains » ont quelque chose à se reprocher. Moi, je connais des tas de gens qui sont ravis de voir des policiers ou des gendarmes dans leurs quartiers !

Permettez-moi, Monsieur Vanneste, de vous donner quelques résultats concernant l'action des GIR : en 2004, ils ont permis l'interpellation de quelque 20 000 trafiquants de tous niveaux, du trafiquant international au petit revendeur, soit 14 % de plus qu'en 2003. Et au 30 juin 2005, les GIR de métropole avaient procédé à la saisie de 93 kilos de cocaïne, 50 000 comprimés d'ecstasy, 5 tonnes de cannabis. Des services qui ne se parlaient pas travaillent désormais ensemble et, chaque année, les résultats sont meilleurs.

Un mot de la vidéosurveillance et des caméras embarquées. En 2006, la police nationale aura 500 nouvelles caméras, ce qui lui en fera 600. Mon objectif est que tous les véhicules, de police comme de gendarmerie, qui interviennent de nuit, puissent être dotés de caméras et aient ainsi les moyens d'avoir la preuve judiciaire de ce qui s'est passé. Nous sommes en train de tester du côté de Lyon un camion avec caméra blindée et je peux vous dire qu'il est plus dissuasif pour les délinquants qui jettent des pierres que toute autre arme non létale : ils ont compris qu'en cas d'interpellation, le tribunal aurait une preuve !

M. Maxime Gremetz - Alors, ils se cagoulent !

M. le Ministre d'Etat - L'autre grand avantage de la caméra est qu'elle met la police et la gendarmerie à l'abri de toute polémique et de toute contestation. Trois systèmes existent : la caméra peut être portée à la boutonnière, elle peut être placée à l'avant du véhicule, ou encore à l'arrière. C'est grâce à de telles caméras que nous avons pu interpeller ceux qui ont failli lyncher ce malheureux policier de la BAC. Ils étaient tous cagoulés, mais les images ont permis de reconnaître la forme d'une gourmette, qui fut ensuite retrouvée lors d'une perquisition.

C'est donc une façon d'avoir une police et une gendarmerie beaucoup plus modernes.

M. Lagarde nous demande de transformer en contravention l'infraction d'occupation sauvage d'un hall d'immeuble. Je tiens pour ma part à ce que ce comportement, qui fait partie de ceux qui rendent la vie des gens impossible, continue à être considéré comme un délit, car sinon, les services de police et de gendarmerie ne peuvent pas mettre en garde à vue et interpeller, ils ne peuvent que dresser contravention à des individus qui n'ont en général pas de compte en banque, pas leurs papiers sur eux et qui ne sont de toute façon pas très impressionnés.

M. Maxime Gremetz - Demandez à Azouz Begag ce qu'il en pense ! Il connaît mieux les choses que vous !

M. le Ministre d'Etat - Cela étant, Monsieur Lagarde, je suis tout à fait prêt à constituer un groupe de travail avec tous les parlementaires intéressés par le sujet. Je ne veux simplement pas que nous adressions un message d'indulgence...

M. Jean-Christophe Lagarde - Il faudrait remplacer par un autre délit !

M. le Ministre d'Etat - Alors, créons ce groupe de travail et donnons-nous deux mois pour aboutir à un résultat.

Un mot, Monsieur Blazy, sur le pistolet à impulsion électrique - que je n'appelle pas Tazer, car il s'agit d'une marque. Le budget que nous vous proposons permettra d'en acquérir 1 000 pour la police et 700 pour la gendarmerie. Si nous recourons à ces armes non létales, c'est parce que nous voulons en finir avec cette maladie française qui fait que, comme les forces de l'ordre ne peuvent pas se servir de leurs armes, on est obligé de les faire intervenir en grand nombre, passant ainsi en un instant du trop peu au trop plein ! Si vous avez des policiers et des gendarmes qui peuvent se servir de leur arme, parce qu'elle est non létale, vous avez des policiers et des gendarmes plus efficaces en plus petit nombre.

C'est une arme qui a été testée et d'ailleurs tous ceux qui l'utilisent l'ont d'abord testée sur eux-mêmes. La première pression sur la gâchette permet de déclencher un petit faisceau laser lumineux qui montre à l'agresseur qu'il est en joue et qu'il doit s'arrêter. De plus, il y a sur chaque munition une puce qui peut retransmettre les conditions dans lesquelles cette munition a été utilisée. C'est important, car la police et la gendarmerie sont d'autant plus respectées qu'elles peuvent rendre compte à chaque instant de la façon dont elles utilisent leurs armes.

Je souhaite par ailleurs que tous les nouveaux gardiens de la paix reçoivent une formation au maniement du tonfa, arme très intéressante qui permet de faire face à trois agresseurs.

Avec les caméras et les armes non létales apparaissent donc une nouvelle police et une nouvelle gendarmerie.

Il y a une polémique sur la police de proximité. Moi, je dois dire que je ne sais pas du tout ce que signifie cette expression car, par définition, un policier ou un gendarme doit être sur le terrain - et est donc, par définition, de proximité. La doctrine de la police de proximité a conduit, entre 1997 et 2002, d'une part, à un mouvement sans précédent de manifestation chez les gendarmes, de l'autre, à une explosion de la délinquance. Pourquoi ? Parce qu'on a négligé la police de soirée et de nuit pour mettre de la police dite de proximité le matin, à une heure où les voyous ne sont pas levés !

M. Jean-Pierre Blazy - Caricature !

M. le Ministre d'Etat - La police doit être de proximité à l'heure où les voyous sont de sortie !

Une police et une gendarmerie de proximité, c'est une police et une gendarmerie qui interpellent. Nous avons donc réorienté l'action des services, en considérant qu'un îlotier qui fait son petit tour de quartier ne gêne pas beaucoup les trafiquants... Nous voulons une police et une gendarmerie très présentes, très proches, mais pour arrêter les délinquants, et non pour faire des relations publiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Blazy - Il faut les deux !

M. le Ministre d'Etat - S'agissant des effectifs, vous avez parlé des adjoints de sécurité. Depuis trois ans, les ADS sont mieux rémunérés car notre gouvernement - et non pas la gauche, qui parle pourtant beaucoup de politique sociale - a créé leur régime indemnitaire ; ils sont mieux formés car nous avons augmenté de trois mois leur scolarité ; ils sont mieux encadrés, grâce à la réforme des corps et carrières ; et ils sont mieux intégrés dans le monde du travail.

M. Jean-Pierre Blazy - Vous supprimez des postes !

M. le Ministre d'Etat - C'est vrai, mais parce que nos ADS sont mieux formés, mieux payés et mieux encadrés. J'ai ainsi pu stabiliser leurs effectifs à 11 300. Avec 15 000 ADS, on avait 15% de délinquance en plus et avec 11 300, on a 8% de délinquance en moins ! C'est la démonstration implacable du fait que la question centrale dans la fonction publique n'est pas celle des effectifs : avec moins, on peut faire mieux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste)

Monsieur Vanneste, hors ADS, les effectifs de police du Nord sont en augmentation, et ils vont être renforcés dans les mois à venir grâce à la création d'un service régional de police des transports. A ce sujet, je me souviens que l'une de mes premières réunions en 2002 fut avec la RATP et la SNCF d'Ile-de-France, où l'on avait constaté une augmentation de 22% des crimes et délits dans les transports en commun entre 2001 et 2002 ; entre 2004 et 2005, on a enregistré une baisse de 18%, après la création d'un service régional de police des transports unique pour les huit départements de la couronne parisienne. Nous voulons que, progressivement, toutes les régions puissent se doter d'une telle police.

A Tourcoing, la tendance est à une légère baisse des effectifs sur les neuf premiers mois de l'année, mais elle sera compensée d'ici à deux mois.

Monsieur Decocq, vous avez raison de dire qu'il ne faut pas confondre action sociale et prévention : donner le RMI à quelqu'un, ce n'est pas le détourner de la violence ! Et le fait est que la politique sociale a touché ses limites : on a envoyé les jeunes en vacances l'été, on a essayé de les envoyer en vacances l'hiver, jusqu'au jour où une minorité d'entre eux se sont comportés en voyous et où les communes touristiques d'été et d'hiver n'ont plus voulu les recevoir. Les jeunes des quartiers ne nous demandent pas l'aumône...

M. Maxime Gremetz - Ils ne demandent pas le kärcher !

M. le Ministre d'Etat - ...ils demandent une formation pour avoir un travail.

Monsieur Lagarde, il est exact que les effectifs de policiers sont plus importants à Paris que dans la petite couronne, du fait de la préfecture de police, mais il faut reconnaître que la présence de nombreux bâtiments dans la capitale entraîne un supplément de travail. Les effectifs du Val-d'Oise ont été augmentés de 348 personnes depuis 2002 ; je les renforcerai encore dans la petite couronne, même si je considère qu'en Ile-de-France c'est la grande couronne qui est la moins favorisée.

En ce qui concerne l'immobilier, contrairement à ce qu'affirme M. Blazy, les progrès sont déjà très importants : de 47 000 m² mis en chantier en 2003, nous sommes passés cette année à 76 000 ; certes, nous ne sommes pas parvenus à l'objectif de la LOPSI, qui était de 100 000 m². Par ailleurs, nous sommes passés de moins de 100 millions d'autorisations de programme à 158 millions en moyenne annuelle.

En 2005, l'hôtel de police de Lille et celui de Lyon-Montluc ont été mis en chantier. Tous les grands projets immobiliers de la police seront engagés en 2006, en particulier le regroupement à Levallois-Perret de la DST et des RG, le nouveau cantonnement de CRS à Meaux et la plateforme logistique nationale pour la police à Limoges. Quant au commissariat de Villiers-le-Bel, il sera mis en chantier dès le deuxième trimestre 2006 et livré au troisième trimestre 2007 ; il en coûtera 5 millions, et je suis certain, Monsieur Blazy, que vous aurez à cœur de rendre hommage au Gouvernement qui vous donne un commissariat que vous n'aviez pas obtenu de vos propres amis ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Blazy - Ce n'est pas dans ma circonscription !

M. le Ministre d'Etat - Je le sais, mais il n'empêche !

Monsieur Le Fur, vous avez regretté, à juste titre, qu'aucun contrat de partenariat public-privé n'ait été encore conclu en application de l'article 3 de la LOPSI, mais pour la première fois en 2006, 81 millions d'autorisations d'engagements sont ouverts pour six opérations en location avec option d'achat : l'internat de l'école des commissaires de police de Saint-Cyr-au-Mont-Dore, le commissariat annexe de Meaux, les commissariats de Château-Thierry, Meyzieu, Montereau et Voiron. A cela s'ajoute un effort considérable pour augmenter le nombre de places en centre de rétention : j'avais trouvé 1 000 places en juin 2002, nous en sommes à 1 800 places et nous serons à 2 540 en juin 2007. Cela représente un coût, mais on ne peut augmenter les expulsions si l'on n'a pas davantage de places.

Quelques mots sur les visas biométriques. En 2006, 32 consulats en seront équipés, et en 2007, la totalité. En effet, on rentre dans notre pays légalement et on s'y maintient illégalement : la première filière d'immigration clandestine, c'est celle des visas de tourisme. On demande un visa de trois mois, au bout de ce délai, on ne repart pas et, selon un phénomène curieux, on perd ses papiers et on perd la mémoire. De ce fait, quand la police vous arrête, il est difficile de vous ramener à l'endroit d'où vous venez... Avec les visas biométriques, l'empreinte digitale rendra la mémoire à ceux qui l'ont perdue et permettra de reconstituer les papiers de ceux qui n'en ont plus.

Cela facilitera aussi l'obtention de laissez-passer consulaires de la part de pays qui se comportent d'une façon qui n'est pas admissible : on ne peut pas accepter que, dans certains cas, la France donne 250 000 visas par an et n'obtienne que 25 % des laissez-passer consulaires qu'elle demande en retour. J'ai décidé que dorénavant, il y aura un lien entre l'augmentation du nombre de visas et celle du nombre de laissez-passer consulaires : il n'est pas normal que la France ouvre davantage ses portes si, dans le même temps, elle ne peut pas raccompagner chez eux des gens qui n'ont pas à rester sur son territoire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). J'ajoute que je signerai à la fin de ce mois le décret qui fera payer le billet de retour des clandestins aux chefs d'entreprise indélicats qui les ont fait venir.

Monsieur Descamps, en Indre-et-Loire, notamment près de Loches, le règlement intérieur des terrains aménagés pour les gens du voyage semble appliqué avec difficulté. Les gestionnaires des aires d'accueil sont confrontés aux réticences des occupants pour payer les dépenses liées à leur stationnement ainsi que les coûts, nombreux, induits par les dégradations. Je sais que les élus de votre département ont formulé des propositions ; je vais toutes les examiner avec attention, en coordination avec le ministre de l'équipement. D'ores et déjà, je peux dire que le projet de décret prévoyant une limitation à vingt-quatre heures du délai laissé au juge pour prendre une décision d'expulsion a été récemment adressé pour avis au ministre de la justice.

J'en viens à ma réponse aux deux rapporteurs de la missions « sécurité civile », que je veux remercier pour leur lucidité et la profondeur de leur analyse.

En ce qui concerne les services opérationnels, le Dash s'est avéré être un avion extrêmement efficace et apprécié des pilotes, qui nous a bien servi cet été. Deux exemplaires ont été achetés. Quant à l'hélicoptère bombardier d'eau AirCrane, que nous avions loué en 2005, nous le relouerons en 2006. C'est vrai que c'est cher - 4 millions pour trois mois et 150 heures de vol - mais c'est le seul qui soit efficace dans les situations très complexes, notamment en Corse, dans des reliefs très escarpés. On ne peut pas se passer de cet hélicoptère - je parle sous le contrôle de M. Rocca Serra.

Il faudra par ailleurs revoir notre stratégie pour ne faire intervenir notre flotte qu'en cas de danger pour des vies humaines. Nous avons perdu deux pilotes cet été en Ardèche, pour un feu qui ne menaçait ni bâtiment, ni être humain. Nous devons faire plus attention quand nous engageons notre flotte, car nos pilotes émérites ne regardent pas le danger et le terrain est risqué. Je n'ai pas l'intention de me rendre trois ou quatre fois par an à Marseille pour présider des funérailles bouleversantes.

Le Canadair perdu en 2004 a été remplacé par un avion loué avec option d'achat en 2006 pour 21 millions. Quant à celui perdu en 2005, il sera remplacé pour la saison de feu 2006.

Je rappelle qu'une enquête de la sécurité civile et une enquête judiciaire ont été ouvertes, mais que nous n'avons toujours aucune explication sur les causes de l'accident. J'ai envie de suivre l'avis du rapporteur et de privilégier l'achat d'un Dash pour remplacer les deux Tracker perdus cet été. Le Dash transporte en effet trois fois plus d'eau et de produits retardant qu'un Tracker, pour un même prix à l'achat et un moindre coût d'entretien. Un Dash 8 commandé en 2006 pourrait être livré en 2007.

Suite aux trois accidents de l'été, une réflexion de fond a été engagée, comme l'ont rappelé MM. Mariani et Kert. Tous les pilotes y œuvrent, et je veux saluer ici le travail remarquable de Météo France, ainsi que la mobilisation de tous les pompiers. La police et la gendarmerie ont arrêté 160 auteurs présumés de départs de feux, dont 50 ont été placés en garde-à-vue ! N'oublions pas que la prévention la meilleure reste la dissuasion par la sanction.

Nous avons par ailleurs augmenté, pour 2006, notre capacité de lutte contre les inondations, grâce à l'acquisition de deux nouvelles pompes à haut débit pour 1 million d'euros. Nous avons ainsi une des plus grosses capacités de pompage mobile d'Europe.

M. le rapporteur de la commission des lois a mis l'accent sur certains défauts de l'architecture de la mission « sécurité civile », et c'est vrai qu'il nous reste des progrès à accomplir avant de pouvoir tirer pleinement profit du principe de responsabilité. Cela étant, je rappelle que l'organisation décentralisée de la lutte contre les feux au Portugal a entravé le bon déroulement des opérations du fait de l'impossibilité à mobiliser l'ensemble des moyens du pays pour éteindre des incendies qui dépassaient le simple cadre de la région.

Par ailleurs, la mission « sécurité civile » a la particularité de financer une activité opérationnelle par nature irrégulière et imprévisible, la ligne « secours d'extrême urgence », laquelle est passée de 160 000 euros à 20 millions, car je n'oublie pas les populations du Gard, ni celles du delta du Rhône.

MM. Ginesta et Mariani, tout comme M. Derosier, se sont interrogés sur l'équilibre financier des SDIS, suite à l'augmentation de leurs dépenses. Reconnaissez cependant que le climat est apaisé, comme en témoigne le dernier congrès des sapeurs-pompiers. Je voudrais en profiter pour saluer le remarquable travail de la conférence nationale des SDIS, présidée par le sénateur Doligé.

Le rythme de croissance des dépenses des SDIS, ces dernières années, est resté soutenu, même s'il ne fut que de 7% en 2004, contre 35% en 2000. La Cour des comptes a relevé les causes de cette évolution, qu'il s'agisse de l'augmentation des effectifs ou de la réforme des indemnités, mais l'essentiel reste que le climat est apaisé.

Pour ce qui est du volontariat, notre pays compte 250 000 pompiers, dont 200 000 volontaires. Sans le volontariat, il n'y a plus de pompiers, mais outre qu'il est de plus en plus difficile d'en recruter, les nouveaux restent de moins en moins longtemps, ce qui pose le problème de leur efficacité sur le terrain. Pour cette raison, nous avons prévu dans le projet de loi de finances de permettre aux entreprises qui engagent des volontaires de déduire de leurs impôts les charges payées sur les heures où les volontaires travaillent pour les pompiers. Parce que les sapeurs-pompiers volontaires se dévouent pour les autres, il est normal que la nation leur consacre un effort supplémentaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Les premiers résultats se font déjà sentir, puisque nous sommes passés à 207 000 sapeurs-pompiers volontaires.

Par ailleurs, je reste convaincu que les secours doivent rester de la responsabilité de l'Etat en cas de crise nationale, et de la responsabilité du département dans les autres cas.

S'agissant de la coordination entre les SAMU et les SDIS, les textes prévoient une interconnexion entre les différents services d'urgence. Une circulaire conjointe Intérieur-Santé a été signée en mars 2004, et les directions des hôpitaux et de la sécurité civile ont constitué un groupe d'appui pour régler les difficultés locales. Déjà dix départements ont souhaité réunir les centres 15 et 18, ce qui est mieux pour les victimes. Je rappelle que les interventions assurées par les SDIS, à la demande de la régulation médicale du centre 15, sont financées par les sièges des SAMU.

Venons-en à la force européenne, Monsieur Mariani. C'est vrai qu'il serait souhaitable que l'Europe se dote d'avions bombardiers d'eau qu'elle mettrait à la disposition des pays en crise.

M. Caillaud a posé la question du temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels, et je vous renvoie au décret de 2001.

En conclusion, je vous demanderai de me juger sur les seuls résultats, et si la stratégie n'est pas bonne, on en changera. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

QUESTIONS

Mme Chantal Brunel - Marne-la-Vallée et ses environs ont connu un développement extraordinaire, qui s'est accompagné d'un accroissement de la population. Pour satisfaire les nouveaux besoins, un nouvel arrondissement, regroupant 350 000 habitants, a été créé, entraînant la construction d'une nouvelle préfecture à Torcy, qui sera ouverte au public le 2 janvier 2006.

Le nord-ouest de la Seine-et-Marne - Marne-la-Vallée, Pontault-Combault, Chelles -connaît des problèmes de sécurité particuliers. Une délinquance particulièrement violente s'est développée au Val Maubué. Depuis quelques mois, certains quartiers se ghettoïsent tandis que des bandes rivales s'affrontent. Je rappelle que la circonscription de sécurité publique de Noisiel-Torcy couvre une population sédentaire de 92 000 habitants, sans parler des 100 000 personnes qui y viennent chaque jour pour étudier, travailler, ou faire leurs achats.

Il existe actuellement en Seine-et-Marne, un district nord et un district sud, de 500 000 habitants chacun environ. La création d'un district de police recouvrant le territoire de la nouvelle sous-préfecture de Torcy est nécessaire pour assurer la sécurité des citoyens. Qu'en est-il ?

M. le Ministre d'Etat - C'est prévu. Je vous ferai parvenir une réponse écrite plus détaillée.

M. Gérard Cherpion - L'effort entrepris depuis 2003 en matière immobilière se poursuit et de nombreux commissariats seront encore en 2006 mis en chantier ou rénovés. Je me permets d'appeler votre attention sur celui de Saint-Dié-des-Vosges, dont les 75 fonctionnaires accomplissent un travail remarquable, qui se traduit par une baisse de 15% de la délinquance depuis 2003 et par un taux d`élucidation proche de 50%. Mais les locaux du commissariat, qui datent des années 1970, ont été conçus pour un effectif de 35 à 40 personnes. Le bâtiment ne dispose ni de parking, ni de local technique, ni de local pour les victimes, ce dernier étant une de vos priorités. Dès la fin 2002, j'avais saisi vos services au sujet d'une opération de relogement. Un terrain adéquat avait été identifié près du centre-ville, mais il n'y a pas de suites concrètes. Puis-je espérer de bonnes nouvelles au cours des mois à venir ?

M. le Ministre d'Etat - Le ministère a bouclé l'étude de faisabilité du projet de nouveau commissariat et l'a transmise à la commune de Saint-Dié pour qu'elle détermine le montant du loyer qui sera facturé aux services de police. La balle est dans son camp. Quand elle voudra bien faire connaître ce montant, l'opération pourra commencer.

M. Jean-Pierre Decool - Depuis 2002, de nombreuses mesures ont été prises afin de promouvoir le volontariat des sapeurs-pompiers, telles que l'abaissement de l'âge pour devenir volontaire, de 18 à 16 ans, et l'allocation de fidélité instaurée par la loi de modernisation de la sécurité civile du 13 août 2004. Mais le décret du 22 novembre 1996 relatif aux vacations horaires des sapeurs-pompiers volontaires prévoit que les astreintes à domicile peuvent donner lieu à perception de vacations dans la limite de 18 semaines d'astreinte par an. Cela pose problème dans les secteurs en sous-effectif dans lesquels le nombre d'interventions continue à croître. Dans ma circonscription, de nombreux centres d'intervention et de secours sont dans cette situation et ne peuvent assurer la totalité des astreintes, sauf à ce que des pompiers donnent de leur temps sans contrepartie. Serait-il envisageable d'augmenter le quota d'heures d'astreinte volontaire en fonction de l'effectif de chaque centre ?

M. le Ministre d'Etat - La loi de modernisation de la sécurité civile, qui a reconnu le caractère dangereux du métier de pompier, dispose que les activités des sapeurs-pompiers volontaires ne sont pas soumises aux dispositions relatives au temps de travail. Elle laisse aux SDIS, en fonction des spécificités locales, la souplesse nécessaire pour assurer à chaque sapeur-pompier volontaire un temps de repos suffisant ou adapter aux contraintes d'effectifs la réalité de l'organisation du temps de travail. Je vous confirmerai tout cela par courrier.

M. Maxime Gremetz - Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 23 h 20, est reprise à 23 h 45.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier - Les départements à faible densité de population, à forte déprise agricole et aux caractéristiques géographiques montagnardes, comme la Lozère, sont très vulnérables aux risques naturels, et particulièrement aux feux de forêts et aux inondations. Par ailleurs, le manque de médecins affecte les secours à la personne. Et compte tenu du faible potentiel fiscal, les ressources de certains services départementaux d'incendie et de secours - SDIS - sont limitées, voire insuffisantes pour assurer leurs missions. D'autre part, la rénovation du centre de formation de pompiers de Florac, l'école des GRIMP, est difficilement envisageable car elle est financée par le seul budget du SDIS de Lozère. Des inégalités dans la couverture des risques existent donc de fait entre les départements.

Pour les réduire et assurer le financement des SDIS de faible taille, il nous faut réfléchir à de nouvelles formes de financement - éligibilité à la DGF et péréquation nationale - et attribuer une dotation spécifique à l'école de Florac pour son caractère unique et exemplaire. Qu'en pensez-vous ?

M. le Ministre d'Etat - Mes services ont répondu non à toutes vos propositions. Ceci dit, le problème du financement des SDIS, qui nous a longuement occupés, a été partiellement résolu l'an dernier avec l'affectation de la taxe sur les assurances dont l'assiette, pour la première fois, est dynamique. Toutefois, il est vrai que les SDIS de faible taille ont moins de marges de manœuvre que les plus grands puisque le financement des SDIS est constant quelles que soient leur taille, leurs interventions et la puissance du département. Je vous propose donc de créer un groupe de travail - qui comptera, entre autres, le président de la conférence nationale des SDIS, des présidents de SDIS et M. Doligé - pour améliorer le financement des SDIS.

Faut-il que les SDIS soient éligibles à la DGF ? Non, bien sûr, puisque les départements reçoivent déjà la DGF pour financer les SDIS. On ne va pas donner deux fois pour la même chose ! (Sourires) Ce serait contraire à l'intérêt de nos finances publiques...

M. Jean-Christophe Lagarde - ...Et des collectivités locales !

M. le Ministre d'Etat - Commençons par évaluer dans un an les résultats de l'affectation aux SDIS de la taxe sur les assurances, avant d'envisager d'autres formes de financement.

M. Maxime Gremetz - Rappel au Règlement. Lorsque certains rapportent à la presse des propos ou des événements qui se sont déroulés dans l'enceinte de l'hémicycle de manière déformée, cela est préjudiciable à l'ensemble de la représentation nationale. Dans un certain journal, il est indiqué que, dans la nuit du mercredi 26 au jeudi 27 octobre, je me suis installé au perchoir !

M. Charles Cova - C'est vrai !

M. Maxime Gremetz - Perchoir et tribune sont confondus à dessein ! Tous ceux qui ont assisté à cette séance savent que je suis monté à la tribune, et non au perchoir (Protestations sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Ensuite, j'aurais été convoqué par Jean-Louis Debré (Claquements de pupitres sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Jean-Christophe Lagarde - Sur quel article se fonde votre rappel au Règlement ?

Mme la Présidente - Monsieur Gremetz, terminez-en !

M. Maxime Gremetz - Or, tout d'abord, on ne me « convoque »pas ! Mais en réalité, M. Debré est venu le lendemain me témoigner sa compréhension : j'ai eu affaire à un nouveau vice-président qui a perdu la tête en respirant l'air des sommets.

M. Guy Teissier - A la niche !

M. Gilles Artigues - Face à l'épineuse question des squats et de l'immigration clandestine, les élus locaux sont bien souvent démunis. A Saint-Etienne, la multiplication des lieux d'occupation illégale par des familles comptant des enfants en bas âge, installées dans des logements insalubres, avec des trafics en tout genre et une mendicité parfois agressive, exaspère la population. Offrir un logement durable ou d'urgence à ces populations n'est en rien une solution, car cela ne fait que créer un appel d'air et inciter à l'immigration illégale.

Dès lors, comment concilier notre compassion envers ces populations et le maintien de l'ordre public, l'humanité et la fermeté ?

M. le Ministre d'Etat - Le préfet me tient régulièrement informé de la situation dans l'agglomération stéphanoise. Il a donc été décidé de procéder à des interpellations et à des reconduites à la frontière, si l'OFPRA refuse les demandes d'asile. J'ai toutefois décidé qu'il n'y aurait pas d'expulsions d'enfants scolarisés durant l'année scolaire. Car, chaque Français ressent à la fois un sentiment d'exaspération devant la clandestinité et d'humanité devant la détresse.

Par ailleurs, un travail plus discret est effectué par les services de police pour démanteler les filières. Dans ce cadre, nous avons décidé l'implantation d'une brigade mobile de recherche de la police aux frontières - PAF - à Saint-Etienne. Avant la fin de l'année, une dizaine de fonctionnaires de la PAF viendront renforcer les effectifs chargés de la lutte contre l'immigration clandestine.

M. Francis Hillmeyer - M. Vercamer s'associe à cette question sur les polices municipales intercommunales. Selon le code général des collectivités territoriales, celles-ci ne peuvent être créées que dans le cadre d'un EPCI à fiscalité propre. Compte tenu des contrats intercommunaux de sécurité qui lient des collectivités dans un esprit de partenariat entre police municipale et nationale, il serait cohérent de déroger à cette règle initiale et de permettre la création d'une police intercommunale dans tous les EPCI.

En effet, il est essentiel, dans le cadre de ces contrats et en complémentarité avec la police nationale, que la police municipale puisse couvrir l'ensemble d'un même territoire. L'utilisation de cette police serait judicieuse pour régler notamment les problèmes de nuisances sonores diurnes et nocturnes devant lesquels les maires sont aujourd'hui impuissants. Le passage occasionnel d'une simple voiture de police avec contrôles d'identité ne permet pas de régler ce problème récurrent. Certes, ces faits paraissent bien anodins devant l'actualité chargée que nous vivons mais la violence se nourrit parfois de l'exaspération devant des petits riens. Monsieur le ministre, vous devez soutenir les efforts très significatifs qu'ont fourni les maires pour améliorer la sécurité en leur permettant de mutualiser leurs moyens. L'insistance de nombreux parlementaires sur ce sujet depuis quelques années mérite une réponse attentive de l'Etat.

M. le Ministre d'Etat - Pour l'heure, la police municipale doit être sous l'autorité opérationnelle des maires. Jusqu'à présent, il a toujours été refusé que les pouvoirs de police soient transférés au président d'un EPCI. Or il se trouve que le président d'EPCI est souvent un maire. Il n'est donc pas interdit de réfléchir à une évolution en ce sens. On ne peut pas vouloir favoriser le regroupement des communes tout en refusant aux EPCI la somme des compétences municipales. Je n'ai donc pas d'opposition de principe à votre suggestion.

S'il existe aujourd'hui un obstacle juridique, le président d'un EPCI n'étant pas officier de police judiciaire, la police municipale relève exclusivement de la police administrative. Il me semble donc possible de réfléchir à une évolution de la législation en vigueur.

M. Maxime Gremetz - Je voudrais vous interroger sur les centres éducatifs fermés. Un tel centre devait être implanté dans une commune de ma circonscription, sans que j'en sois informé autrement que par la presse ! N'est-ce pas original ?

Cette implantation a rencontré l'hostilité de la population locale. Une pétition a ainsi réuni 2 500 signatures et une réunion de concertation a unanimement condamné le projet. Devant pareille mobilisation, pareil centre n'ouvrira pas à Ailly-sur-Somme, mais c'est la pertinence même d'un tel dispositif qui est en cause. Il en aurait en effet coûté de 600 à 1 000 euros par jour et par jeune, réduisant comme peau de chagrin les moyens affectés à la prévention. Sur ma proposition, le conseil général de Picardie a donc décidé d'ouvrir le débat sur cette question.

D'autres instruments de réinsertion existent en effet, moins dispendieux pour les finances publiques, et plus efficaces en matière de prévention. Sur le plan éthique, vous posez en outre l'enfermement comme préalable à toute intervention éducative, et vous marchandisez l'incarcération ! Une partie de ces centres éducatifs fermés est en effet confiée à des acteurs privés. Vous faites la preuve du caractère ultralibéral et ultrarépressif de vos orientations ! (Rires sur bancs du groupe UMP)

Par ailleurs, le centre prévu à Ailly-sur-Somme devait remplacer une maison de retraite, sacrifiant la solidarité intergénérationnelle sur l'autel du tout sécuritaire !

Comment pouvez-vous donc justifier ce dispositif coûteux, qui n'est pas sans rappeler les maisons de correction que M. Peyrefitte avait fermées en 1953 ?

Diverses voix - En 1973 !

M. Maxime Gremetz - Et pourquoi ne pas commencer par construire ces centres à Neuilly-sur-Seine, Monsieur le ministre ? Montrez donc l'exemple !

M. le Ministre d'Etat - Ma réponse sera des plus brèves, car il ne s'agit pas d'une question, mais d'une déclaration. Vous refusez les centres éducatifs fermés ; vous considérez que la délinquance des mineurs ne pose pas un problème majeur et que les équipements doivent être construits d'abord chez les autres, et non chez vous. Je vous en donne acte, et je tiens cette réponse pour suffisamment argumentée... (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. André Chassaigne - En juillet 2004, lors de la discussion du projet de loi relatif à la sécurité civile, j'avais proposé la création d'un CAP de sapeurs-pompiers, en vue de répondre à la demande des organisations syndicales, qui souhaitent que l'obtention de ce diplôme accompagne la qualification au grade de deuxième classe.

Il serait en outre souhaitable de valider ainsi les formations préparant au concours de sapeur-pompier professionnel, que certains départements ont mises en place en milieu scolaire et en coopération avec les SDIS.

De nombreux sapeurs-pompiers non professionnels suivent par ailleurs des formations, gages de la qualité de leur intervention : il s'agirait de valider leurs acquis, ce qui permettrait dans certains cas de les valoriser dans leur activité professionnelle.

Afin de stimuler les vocations, la création d'un tel CAP pourrait enfin être l'aboutissement logique des écoles de sapeurs-pompiers, qui existent en dehors du milieu scolaire.

Votre prédécesseur, Monsieur le ministre, m'a répondu qu'un arrêté de 2001 fixait déjà les conditions de délivrance d'un CAP d'agent de prévention et de sécurité, et qu'un autre arrêté, en date du 28 juin 2002, définissait une mention complémentaire « sécurité civile et entreprise », ces deux titres pouvant être acquis par validation des acquis de l'expérience. Il avait toutefois jugé ma suggestion « excellente » et m'avait indiqué que le Gouvernement allait mobiliser les administrations compétentes sur ce point. Or, malgré les lauriers qui m'ont été tressés, je n'ai pas été informé de l'avancement du dossier. Dans quel délai la création d'un tel CAP pourrait-elle donc avoir lieu, Monsieur le ministre ?

M. le Ministre d'Etat - En juin 2002, a été officiellement créée une mention « sécurité civile et entreprise », classée au niveau 5. La durée de formation est d'une année scolaire, dont neuf semaines au sein d'un SDIS. Assurée par l'éducation nationale, elle est accessible aux sapeurs-pompiers volontaires, qui peuvent faire valider les acquis de leur expérience.

Un baccalauréat professionnel « sécurité et prévention », sanctionnant une scolarité de deux ans, sera en outre délivré dès la session 2006-2007. Plusieurs académies ont par ailleurs déjà mis en place la mention complémentaire au CAP, et je m'assurerai auprès du préfet qu'il en soit de même en Auvergne, Monsieur Chassaigne.

Vous voyez donc que nous sommes passés des intentions aux actes !

M. Thierry Mariani - Je voudrais attirer votre attention, Madame la ministre de la défense, sur la nécessité de rendre effectives les importantes réformes que nous avons votées en mai 2003.

En effet, j'ai pu faire adopter un amendement autorisant enfin la rémunération des indicateurs de la police et de la gendarmerie. Il était inacceptable de laisser les forces de l'ordre sans protection ni encadrement en la matière : trois policiers avaient été poursuivis devant le tribunal de Nanterre pour trafic de stupéfiants, alors qu'ils s'étaient contentés de rémunérer leurs indicateurs en leur rétrocédant une partie des stupéfiants saisis, sans s'enrichir personnellement.

Contrairement aux douanes, la police et la gendarmerie ne pouvaient attribuer à leurs « indics » que des rémunérations insignifiantes, ce qui contraignait certains agents à des extrémités regrettables s'ils voulaient démanteler des réseaux de drogue. L'article 3 de la loi du 9 mai 2004 prévoit donc une rétribution de toute personne étrangère aux administrations publiques qui leur a fourni des renseignements ayant amené directement, soit à la découverte de crimes ou délits, soit à l'identification de leurs auteurs.

Malheureusement, les modalités de cette réforme doivent encore être déterminées par arrêté ministériel conjoint du ministre de la justice, du ministre de l'intérieur, du ministre de la défense et du ministre des finances. Dans ma grande naïveté, je pensais qu'il suffirait de reproduire un dispositif budgétaire existant depuis les années 1950 pour les douanes. Il a été répondu aux questions écrites et orales, que j'ai posées aux quatre ministres concernés, que l'arrêté serait prêt avant la fin de l'année.

D'après les informations qui me sont parvenues, le projet de texte devrait être soumis à la CNIL, alors que le fichier en question ne semble pas ressortir de sa compétence, selon le ministère de l'intérieur. J'ajoute que le fichier actuel des douanes n'est pas transmis à la CNIL et je vois mal un indicateur de police demander la rectification des informations le concernant. Il semblerait enfin que des débats aient encore lieu au sein du ministère de la défense.

C'est pourquoi je profite de la discussion de cette mission, Madame la ministre, pour vous interroger sur l'état de cette procédure et sur la date de publication de cet arrêté, que réclament quotidiennement les policiers et les gendarmes.

Mme la ministre - Si je suis d'accord avec vous sur le fond, je ne vois pas pourquoi nous devrions nous exonérer des règles en vigueur. Nous nous sommes tous mis d'accord sur la procédure à suivre et sur la nécessité de transmettre pour avis le projet à la CNIL, en vue de nous mettre à l'abri de toute surprise juridique.

Tout cela sera fait très rapidement.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier - Je voudrais attirer votre attention, Monsieur le ministre de l'intérieur, sur les sapeurs-pompiers volontaires. Je me réjouis des efforts consentis pour reconnaître leurs efforts, qu'il s'agisse de la prestation de fidélisation et de reconnaissance, créée par la loi du 13 août 2004, ou de votre proposition d'élargir les dispositions sur le mécénat aux entreprises qui acceptent de libérer leurs employés pour qu'ils exercent leurs fonctions de sapeurs-pompiers volontaires.

Cela étant, certaines communes et certains EPCI en milieu rural, qui disposent seulement de quelques agents, consentent des efforts considérables. Ils devraient donc pouvoir bénéficier d'un soutien financier renforcé, notamment quand le préfet du département procède à des réquisitions, comme ce fut le cas en Lozère pendant l'été 2003.

Il serait par ailleurs légitime que les entrepreneurs qui jouent le jeu d'un tel miracle civique puisse être reconnus par un label officiel.

De tels signes seraient hautement appréciables dans un monde trop souvent marqué par l'individualisme.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales - Comme M. Sarkozy s'y est engagé devant les sapeurs pompiers lors du congrès de Bourg-en-Bresse, en 2003, un nouveau dispositif a été créé pour les sapeurs pompiers volontaires. Je vous rappelle que la prestation de fidélisation et de reconnaissance coûte 60,3 millions, assumés pour moitié par l'Etat.

Concernant les administrations et les entrepreneurs partenaires des sapeurs pompiers, le label que vous avez évoqué sera effectivement créé. Ainsi sera officiellement reconnu et valorisé aux yeux de tous le civisme des employeurs qui s'engagent en faveur du volontariat par une convention passée avec les SDIS.

Sécurité

ÉTAT B

Mme la Ministre - Nous nous sommes demandé s'il fallait porter les crédits qui concourent au soutien de la gendarmerie nationale sur le programme « soutien de la politique de défense » -affirmant ainsi l'identité militaire de la gendarmerie -, ou les regrouper avec les autres crédits de la gendarmerie au sein de la mission « sécurité ». Cette solution a été retenue pour plus de clarté. Le Gouvernement propose donc par l'amendement 139 de transférer 602 millions du programme « soutien de la gendarmerie nationale » de la mission « défense » au programme « gendarmerie nationale » de la mission « sécurité ». Ce transfert s'opère par la minoration des crédits de la mission « défense » et la majoration des crédits de la mission « sécurité ».

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial - Le président de la commission des finances a répété notre attachement à une telle organisation, moins pour des raisons de principe que pour contribuer à un bon démarrage de la LOLF, qui nous rassemble tous. Je salue l'élégance et la logique de la réponse de Mme la ministre : c'est une évolution positive.

L'amendement 139, mis aux voix, est adopté.

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial - L'amendement 40 est retiré, mais j'insiste sur la nécessité de contribuer à la performance de nos services publics et de veiller à la gestion optimale de nos crédits.

M. Jean-Pierre Blazy - Le groupe socialiste se satisfait du retrait de cet amendement. Nous sommes tous d'accord pour donner à la police et à la gendarmerie les moyens de travailler dans de bonnes conditions, et il n'est pas utile de différer la livraison de leurs tenues. La raison a donc fini par l'emporter.

Même si la LOLF n'a pas encore porté tous ses fruits, l'amendement précédent du Gouvernement était logique.

L'harmonisation des commandements et la meilleure gestion des ressources humaines et logistiques constituent un « ensemble cohérent d'actions » et doivent à ce titre faire l'objet d'un programme spécifique au sein de la mission « sécurité ». La présentation du Gouvernement procède d'une vision administrative obsolète de l'exercice de la mission « sécurité » car elle ne respecte pas l'intention du législateur exprimée dans la loi d'orientation et de programmation du 29 août 2002.

L'amendement 84 propose donc de regrouper les actions « commandement, ressources humaines et logistique » des programmes « police nationale » et « gendarmerie », afin d'optimiser la gestion des crédits des deux administrations et de favoriser les harmonisations indispensables à une saine gestion du budget de la sécurité. Le financement de ce nouveau programme sera assuré par l'addition des moyens correspondant aux deux actions concernées.

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial - Avis défavorable : actuellement, la fonction support est dans une action « police » au sein du programme « police » et dans une action « gendarmerie » au sein du programme « gendarmerie ». L'intérêt de les avoir dans un même programme, c'est la fongibilité entre les différentes actions. L'amendement 84 vise à regrouper ces deux actions support, et à créer un programme à cette fin. Or, on créerait ainsi une forme de rigidité. En outre, le principe de la LOLF associe un ministre à chaque programme : quel ministre serait donc chargé d'administrer les logistiques réunies de la police et de la gendarmerie ?

Je comprends votre souci de rapprocher les commandes et les gestions de moyens. Mais nous avons beaucoup progressé en la matière depuis deux ans. Le marché de l'arme individuelle est le même pour la police et la gendarmerie - l'économie est de taille. Des fichiers, des offices ou l'organisation des transmissions sont également gérés en commun. La cohérence et la pertinence progressent, même s'il reste encore du chemin à parcourir. Il serait déplacé de créer un pur programme de gestion. Il faut au contraire donner aux responsables - en l'occurrence les directeurs généraux de la police et de la gendarmerie - l'ensemble des moyens de gestion associés à l'action dont ils ont la charge.

M. le Ministre délégué - Même avis. Vous proposez, Monsieur Blazy, de créer au sein de la mission interministérielle un troisième programme regroupant les actions « commandement, ressources humaines et logistique ». Votre amendement a le mérite de souligner la pertinence de la politique de sécurité menée depuis 2002, et je m'en ferai l'écho auprès du ministre d'Etat ! En effet, c'est depuis 2002 que police et gendarmerie sont placées sous une même autorité d'emploi, et qu'elle sont concernées par une même loi de programmation. C'est dans cet esprit que le Gouvernement a décidé en 2004 de constituer une mission « sécurité » dotée d'un programme « police » et d'un programme « gendarmerie ».

La création d'un programme spécifique poserait plus de problèmes qu'elle n'en résoudrait, car elle compliquerait la gestion des deux forces.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis - La commission de la défense n'a pas eu le temps d'examiner cet amendement, mais j'y suis défavorable à titre personnel. L'organisation et les domaines de compétences de la police et de la gendarmerie sont trop différents pour que l'on réunisse les actions « commandement, ressources humaines et logistique » au sein d'un même programme, comme le montre l'exemple de la gestion de la participation de la gendarmerie aux OPEX.

L'amendement 84, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Blazy - La politique en faveur de la sécurité routière constitue un « ensemble cohérent d'actions » et doit à ce titre faire l'objet d'un programme spécifique au sein de la mission « sécurité ». La présentation du Gouvernement procède d'une vision administrative obsolète de l'exercice de la mission « sécurité » car elle ne respecte pas l'intention du législateur exprimée dans la loi d'orientation et de programmation du 29 août 2002.

L'amendement 82 propose donc de regrouper les actions « sécurité routière » des programmes « police nationale » et « gendarmerie », afin d'optimiser la gestion des crédits des deux administrations et de favoriser les rapprochements indispensables, par exemple en matière de politique d'achats. Le financement de ce nouveau programme sera assuré par l'addition des moyens correspondant aux deux actions concernées.

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial - Avis défavorable. Il y a actuellement des actions « sécurité routière » dans les programmes « police » et « gendarmerie ». On ne gagnerait rien à les fédérer, puisque l'on possède déjà l'information. On peut d'ailleurs agglomérer l'action « sécurité routière » avec ce qui se fait dans d'autres administrations, comme le ministère des transports, pour avoir une vue d'ensemble. Lorsque l'on dit que les policiers consacrent 7,5% de leur temps à la sécurité routière et les gendarmes 12%, on agglomère en fait des morceaux d'activité : un gendarme dans une brigade fera tantôt de la sécurité routière, tantôt de la police judiciaire, tantôt de l'ordre public. C'est de cette agglomération qu'est constituée l'action, qui n'est pas un module juridique total - on vote au niveau du programme. Il n'est pas pertinent d'unifier ces actions en un seul programme, car nous ne voterions pas alors sur des effectifs, mais sur des temps de travail partiels, ce qui n'aurait aucun sens.

M. le Ministre délégué - Même avis. Le rapporteur spécial a parfaitement résumé la situation : l'architecture de la mission interministérielle, qui comporte deux programmes, découle logiquement de la LOPSI. La création d'un troisième programme n'apporterait aucune information nouvelle au Parlement, et créerait une rigidité inutile étant donnée que la délinquance est souvent très itinérante.

M. Michel Bouvard - Il faut que les choses soient claires : dans l'architecture budgétaire qui est désormais la nôtre, on peut avoir des missions interministérielles mais pas des programmes interministériels. En l'occurrence, il y a bien une mission interministérielle « sécurité routière », mais chaque ministère garde sa compétence sur les moyens de son action et les effectifs qui y correspondent. On ne peut pas laisser penser qu'une partie de la gendarmerie pourrait demain ne plus dépendre de l'autorité du ministère de la défense.

L'amendement 82, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Présidente - J'appelle les crédits de la mission « sécurité ».

Les crédits de la mission « sécurité », modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

Sécurité civile

ÉTAT B

Mme la Présidente - J'appelle les crédits de la mission « sécurité civile ».

Les crédits de la mission « sécurité civile », mis aux voix, sont adoptés.

Mme la Présidente - Nous avons terminé l'examen des crédits relatifs à la sécurité et à la sécurité civile.

Prochaine séance, cet après-midi, jeudi 3 novembre, à 15 heures.

La séance est levée à 0 heure 30.

              La Directrice du service
              des comptes rendus analytiques,

              Catherine MANCY


ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 3 NOVEMBRE 2005

QUINZE HEURES : 1re SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540).

Rapport (n° 2568) de M. Gilles CARREZ, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Transports ; Contrôle et exploitation aériens ; article 90 ; Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route

Rapport spécial (n° 2568, annexe 37) de M. Charles de COURSON, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Rapport spécial (n° 2568, annexe 38) de M. Hervé MARITON, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Avis (n° 2570, tome XII) de M. Martial SADDIER, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

Avis (n° 2570, tome XIII) de M. Jean-Yves BESSELAT, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

Avis (n° 2570, tome XIV) de Mme Odile SAUGUES, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 2e SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540).

Rapport (n° 2568) de M. Gilles CARREZ, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Transports ; Contrôle et exploitation aériens ; article 90 ; Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route (suite) 

Administration générale et territoriale de l'Etat

Rapport spécial (n° 2568, annexe 2) de M. Jean-Pierre GORGES, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Avis (n° 2573, tome I) de M. Pierre MOREL-A-L'HUISSIER, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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