Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques (session ordinaire 2005-2006)

Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2005-2006 - 52ème jour de séance, 118ème séance

1ère SÉANCE DU JEUDI 19 JANVIER 2006

PRÉSIDENCE de M. Jean-Luc WARSMANN

vice-président

Sommaire

      ENGAGEMENT NATIONAL POUR LE LOGEMENT
      (suite) 2

      MOTION DE RENVOI EN COMMISSION 10

      ARTICLE PREMIER A 19

      AVANT L'ARTICLE PREMIER 21

      ARTICLE PREMIER 21

      APRÈS L'ARTICLE PREMIER 24

La séance est ouverte à neuf heures trente.

ENGAGEMENT NATIONAL POUR LE LOGEMENT (SUITE)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, portant engagement national pour le logement.

M. Luc-Marie Chatel - Nul n'ignore la délicate situation dans laquelle se trouvent nombre de nos concitoyens en matière de logement. Les Français éprouvent de grandes difficultés à se loger, quelle que soit leur situation particulière, les plus touchés étant toutefois ceux qui perçoivent les revenus les plus modestes. Aucune région, qu'elle soit en expansion démographique ou non, et qu'elle soit urbaine ou rurale, n'est à l'abri de ce phénomène.

Trois millions de Français sont aujourd'hui mal logés, et 5,5 millions se trouvent dans une situation particulièrement fragile. Les chiffres de 2005 ne sont guère rassurants : les loyers ont augmenté de 4,7 % et les prix à l'achat de 15,5 %.

Le logement demeurant un problème crucial dans la vie quotidienne de nos compatriotes, je voudrais saluer la détermination et la volonté du Gouvernement actuel. Depuis plusieurs années, vous avez en effet déployé de nombreux efforts, Monsieur le ministre : 239 quartiers sensibles, représentant 1,5 million de nos compatriotes, bénéficient désormais des crédits de la nouvelle agence pour la rénovation urbaine, et le Gouvernement a annoncé à l'automne une augmentation des crédits destinés à la destruction des barres vétustes datant des années 1950 et 1960. Saluons enfin la loi de cohésion sociale, dont vous avez été le principal artisan avec l'appui de Marc-Philippe Daubresse, alors ministre délégué au logement, et dont les objectifs sont particulièrement ambitieux : construction de 500 000 logements sociaux en cinq ans, signature de 200 000 conventionnements d'habitation à loyers maîtrisés et remise sur le marché de 100 000 logements vacants.

Ce projet de loi, qui s'inscrit dans la continuité de votre action, devrait permettre d'amplifier encore ses effets, en libérant de nouveaux espaces fonciers disponibles, en encourageant les communes à construire davantage, en renforçant l'accès au logement, et en modernisant le fonctionnement des opérateurs présents dans ce secteur.

Je voudrais néanmoins attirer votre attention sur deux points particuliers, auxquels notre famille politique est particulièrement sensible. S'agissant tout d'abord de l'accession à la propriété des Français les plus modestes, nous avons trop longtemps considéré que l'accès au parc des HLM constituait une fin en soi, et le cantonnement de certaines catégories d'emplois et de revenus dans ces quartiers a parfois débouché sur une sorte de ghettoïsation. Nous considérons à l'inverse que les populations logées dans des HLM ont vocation à accéder à la propriété - c'est parfois l'objectif d'une vie, mais c'est aussi une assurance retraite idéale. Nous serons donc très sensibles aux dispositifs prévus en ce sens.

Une grande partie de la population, titulaire de contrats à durée déterminée ou d'intérim, éprouve en outre les plus grandes difficultés pour devenir propriétaire de son logement. Certes, la Fédération bancaire vient de donner pour instruction d'assouplir les conditions d'accès au crédit pour ce type de personnes, et le Premier ministre a annoncé l'extension du dispositif Locapass, mais ces initiatives demeurent insuffisantes : si nous voulons adresser un message fort à nos concitoyens, en particulier aux jeunes, il nous faut aller plus loin. C'est pourquoi je présenterai un amendement tendant à instaurer un fonds de garantie, qui permettra de cautionner les crédits immobiliers consentis aux titulaires de CDD ou de contrats d'intérim, sur le modèle de la BDPME ou de la SOFARIS (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Axel Poniatowski - L'insuffisance de logements sociaux n'exige pas que la loi SRU soit modifiée, mais plutôt qu'elle soit complétée, afin que davantage de communes prennent part à l'effort de construction.

En effet, les grands principes de cette loi me semblent bons, car elle œuvre en faveur de la solidarité nationale et de la mixité sociale du logement. Toutefois, si le critère de 20 % de logements sociaux permet de concilier la nécessaire solidarité nationale et la capacité d'absorption de nos communes, les villes qui dépassent largement ce seuil, atteignant parfois des taux de 40 ou 50 %, sont dans l'erreur. Comment ne pas voir que ces communes sont devenues des mines de problèmes et de tensions, qui peuvent dégénérer dans les quartiers où l'intégration devient difficile ?

Il nous faut donc compléter les dispositions de la loi SRU, afin d'éviter une trop grande concentration de difficultés dans des espaces relativement restreints. Parfois, on assiste même à des difficultés d'intégration à l'envers, les populations les plus aisées quittant ces quartiers.

Par ailleurs, il manque au moins un million de logements en France, tant les programmes de construction de logements locatifs ont été insuffisants ces dernières années. Et cette situation pénalise de nombreuses catégories sociales, car ces logements ne sont pas seulement destinés aux populations assistées. Du fait de la flambée des prix de l'immobilier, l'achat ou même la location d'un logement est devenu un véritable parcours du combattant pour nos compatriotes, un combat souvent perdu d'avance. La population concernée par le logement social s'est donc accrue, incluant désormais ceux dont les revenus sont tout simplement insuffisants pour accéder à un logement dans des conditions classiques.

Pensons ainsi aux jeunes, qui doivent affronter de nombreuses difficultés, qu'il s'agisse de la recherche d'un travail ou d'un logement ; aux veuves qui ne perçoivent qu'une demi pension ; ou bien aux foyers dont le parcours professionnel ou familial a été heurté ou meurtri - autant de compatriotes que nous ne pouvons pas laisser sur le bord de la route. Sans logement décent, chacun sait bien que la pente qui mène à d'autres problèmes est raide et rapide !

Je propose donc que les communes de plus de 1 500 habitants non concernées par la réglementation existante soient désormais tenues d'offrir un minimum de 5 % de logements sociaux. Ces villes de 1 500 habitants situées hors agglomération ont en effet une moindre densité de population et offrent plus d'espace libre. Le prix du foncier y est donc moins élevé, et le coût des programmes de construction plus faible. Il existe d'ailleurs un paradoxe à ne vouloir construire que dans des zones déjà très urbanisées, alors que la moitié de la population française réside dans des villes de moins de 10 000 habitants, dont le rythme de croissance a doublé depuis 1999.

Fixer le seuil à 5 % présenterait en outre l'avantage de concilier les différents impératifs : participer à l'effort de construction de logements sociaux, sans pour autant susciter de difficultés d'intégration, ni surcharger financièrement les communes. Exiger un taux supérieur serait en effet malvenu, car ces villes ne disposent pas toujours d'équipements collectifs suffisants pour absorber un flux plus important de nouveaux habitants.

Bon nombre de petites communes ont déjà réalisé de tels programmes, Monsieur le ministre, sans y être obligées pour le moment. Ma proposition ne relève donc ni d'une idéologie de droite, ni de gauche, mais du simple bon sens. Il s'agit seulement de loger davantage de nos compatriotes dans des conditions décentes grâce à une plus grande solidarité. Tel est l'esprit de l'amendement que j'ai déposé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Martial Saddier - Comme la plupart de mes collègues, je voudrais tout d'abord saluer ce projet de loi. Trouver un logement ou tout simplement changer d'habitation est en effet devenu l'une des principales préoccupations de nos concitoyens.

Qui n'a pas dans son entourage une personne à la recherche d'un logement ? Quel élu local ne reçoit pas chaque semaine des demandeurs de logement ? Quel maire n'a pas dans sa commune une longue liste d'attente ? Et quel chef d'entreprise ne se tourne pas aujourd'hui vers les élus locaux dans l'espoir d'aider certains de ses salariés à se loger ?

Merci donc pour vos nombreuses mesures, propres à favoriser l'accession sociale à la propriété, à faciliter la mobilisation du foncier, à soutenir l'hébergement d'urgence, à donner plus de pouvoirs aux élus locaux, notamment en ce qui concerne le surloyer. Je rappelle que ces mesures s'ajoutent aux nombreuses actions déjà engagées par le Gouvernement depuis 2002 dans ce domaine.

Permettez-moi à présent d'aborder quelques problèmes plus délicats.

Le logement social est indispensable - ma commune en compte plus de 30% - et la rotation des habitants dans ces logements l'est tout autant. Aussi devons-nous nous efforcer d'adapter autant que possible la taille du logement à l'évolution de la famille.

Le texte comporte de nombreuses mesures pour libérer le foncier. Je rappelle que les opérateurs font l'objet de nombreux recours administratifs, et que la notion de projet préalable représente un lourd handicap - les tribunaux administratifs annulent d'ailleurs fréquemment les opérations de logement social sur la base de ce motif. Plus le foncier est cher, plus les procédures juridiques se multiplient, jusqu'à devenir presque systématiques dans certaines régions.

En qualité de secrétaire général de l'association nationale des élus de la montagne, j'attire votre attention sur les zones de montagne, très touristiques et parfois frontalières - les accords bilatéraux entre l'Union européenne et la confédération helvétique permettent ainsi aux Suisses d'avoir leur résidence principale en France, ce qui fait exploser le coût de l'habitat et du foncier, sans parler du relief qui rend difficile la construction de logements, notamment sociaux.

Il n'y a pratiquement plus que des résidences secondaires dans nos joyaux touristiques - 70 % dans le pays du Mont-Blanc, 72 % à Chamonix, 92 % aux Contamines Montjoie. Les villages meurent, les habitants locaux ne peuvent plus acheter tant les logements sont devenus chers, les saisonniers ne peuvent plus se loger à proximité de leur lieu de travail. Il faut en effet compter entre 10 000 et 12 000 euros le mètre carré bâti à Chamonix, tandis que les terrains constructibles coûtent environ 1500 euros le mètre carré !

S'agissant des saisonniers, d'autres ont engagé avant moi le combat - je pense notamment à Patrick Ollier - et le dispositif expérimental mis en place a fait ses preuves à la mer comme à la montagne, et fait l'unanimité des acteurs locaux.

M. François Brottes - C'est vrai.

M. Martial Saddier - Pourquoi ne pas graver ce dispositif dans la loi ?

Avec l'association nationale des élus de la montagne, avec les parlementaires de Haute-Savoie, nous avons beaucoup travaillé en amont de ce texte. J'ai pour ma part rendu un rapport au Premier ministre portant sur la situation particulière des zones touristiques frontalières et des zones de montagne, et j'ai déposé un certain nombre d'amendements pour favoriser sur ces territoires la mixité sociale, l'accession sociale à la propriété, ainsi que certaines opérations de démolition-reconstruction.

Ce texte, avec le concours de la représentation nationale, permettra d'améliorer la situation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. François Brottes - Le hasard de l'organisation de nos travaux fait intervenir le président de l'association nationale des élus de la montagne après son secrétaire général.

Nos querelles sur cette question du logement sont indécentes. Au même titre que l'école est obligatoire, le logement doit être un droit, y compris pour les trois millions de mal logés. Le droit d'avoir un toit, de se chauffer, bref le droit de chacun à la dignité doit être une obligation de la Nation. J'énonce là une évidence, et pourtant ceux qui dorment dehors, ceux qui en meurent, ceux qui squattent, ceux qui sont en colocation malgré eux, ceux qui vivent dans des logements insalubres, sont de plus en plus nombreux, car le traitement fiscal du logement, par lequel des niches fiscales sont accordées sans contrepartie sociale - je pense au dispositif de Robien - est une machine infernale à fabriquer de l'exclusion. En effet, outre que ce dispositif ne profite qu'à ceux qui ont des moyens, il favorise la spéculation, notamment sur le foncier, et encourage les uns à choisir leurs voisins, et les autres à sélectionner leurs administrés.

Malheureusement, ce projet de loi ne permettra pas de sortir de cette spirale, mais c'est votre choix politique, et votre droit - encore faut-il que vous le reconnaissiez publiquement.

Vous devez assumer le fait que, dans le logement construit, la part de logements sociaux recule, que l'écart se creuse entre la demande de logement social et l'offre - 1,5 million de demandes aujourd'hui.

Vous devez assumer le fait que la précarisation des contrats de travail interdit à beaucoup l'accès au logement faute de ressources pérennes, que votre absence de volontarisme en matière de développement des énergies renouvelables dans l'habitat met en péril la solvabilité des ménages modestes, compte tenu du prix de l'énergie depuis la privatisation des entreprises publiques.

Vous devez encore assumer votre renoncement à en finir avec les ghettos, même après la crise récente, car votre majorité fait tout pour sacrifier la mixité sociale, en proposant d'élargir le périmètre des logements éligibles aux fameux 20 %, en envisageant d'alléger la contrainte et de la renvoyer au niveau intercommunal.

Vous devez assumer votre réticence à donner plus de poids aux déclarations d'utilité publique favorables à la mise en place volontariste de la mixité sociale.

Vous devez enfin assumer le fait de perpétuer - pour le coup, vous n'êtes pas les seuls responsables - un système qui rapporte plus aux communes qui ne construisent pas de logements sociaux qu'à celles qui en créent !

Voici un texte d'affichage où la technicité des mesures tente de camoufler avec subtilité l'absence de moyens pour réhabiliter, reconstruire, favoriser l'accueil des plus modestes.

En cinq minutes, je ne peux qu'aller à l'essentiel...

M. Michel Piron - Sans caricature !

M. François Brottes - ....et vous encourager à plus d'audace - vous en avez eu un peu, en matière de maîtrise du foncier, celle de l'enrichissement sans cause et celle de la machine à spéculer et à exclure.

On dit que « Quand le bâtiment va, tout va ». En l'espèce, le bâtiment ne va pas trop mal, mais il n'en va pas de même de la construction de logements pour les plus modestes.

Par ailleurs, la crise du logement n'est pas l'apanage des villes, elle touche aussi le secteur rural, notamment les zones de montagne, où le logement locatif se raréfie, de même que les terrains constructibles du fait des nombreuses zones protégées, ce qui favorise la maîtrise du foncier par des gens très fortunés qui mettent progressivement dehors les populations locales. C'est une des raisons pour lesquelles nous devons étendre à tout le pays l'application de la règle des 20%. Nous avons déposé des amendements en ce sens.

Monsieur le ministre, l'engagement national pour le logement ne peut être d'aucune efficacité sans un engagement local dans chacune des communes, que ce soit à Neuilly ou à la campagne.

La dignité est l'affaire de tous, et s'il est vrai que la gauche n'a pas le monopole du cœur, les communes de droite ne doivent pas avoir le monopole des zones résidentielles.

Avec le vote de la loi SRU, nous avons lancé la dynamique, qui commence aujourd'hui à porter ses fruits - vous l'avez vous-même reconnu.

Pour l'instant, compte tenu des menaces qui pèsent sur la mixité sociale, nous ne pouvons qu'être extrêmement inquiets. Aussi attendrons-nous la fin de l'examen de ce projet pour nous prononcer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

La discussion générale est close.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement -Monsieur le président du conseil national de l'Habitat, s'il y a bien une institution qui connaît la réalité du problème du logement sur notre territoire, c'est celle-ci, et je vous remercie de la présider de cette manière, Monsieur Piron. Evidemment, nos analyses de la situation convergent.

Nous sommes d'accord sur l'idée de la territorialisation, même si sa mise en œuvre est délicate. C'est vrai aussi que nous avons besoin de stabilité et de programmation sur le long terme pour mener des actions de grande envergure.

M. Abelin a appelé notre attention, tout comme MM. Piron et Thomas notamment, sur le seuil de versement des 24 euros. Nous sommes prêts à en débattre, tout comme nous avons rétabli de fait une forme d'automaticité entre les indices et l'APL. Quand à la discussion entre l'office HLM et le Gouvernement sur la cession sociale d'une partie du parc, nous en dirons quelques mots au moment de l'examen des amendements.

Madame Lepetit n'a probablement pas lu le texte, car autrement, comment pourrait-elle prétendre qu'il n'y a pas de contrepartie sociale aux avantages fiscaux ?

Plusieurs députés socialistes - Elle parlait du dispositif Robien !

M. Jean-Louis Borloo, ministre - Justement ce projet de loi prévoit des contreparties sociales ! Quant au dispositif Robien, qu'il est de bon ton à gauche de critiquer, je rappelle qu'il a permis de relancer le logement.

M. Jean-Louis Dumont - Il fallait le limiter dans le temps !

M. Jean-Louis Borloo, ministre - Vous avez manifestement un problème avec le concept fiscal et avec la propriété populaire ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) Dans l'« accession sociale », c'est l'« accession » qui vous dérange, comme nous le verrons lorsque nous examinerons l'article 55.

M. Michel Piron - Pour eux, c'est un gros mot !

M. Jean-Louis Borloo, ministre - Les inquiétudes de Mme Lepetit quant à la délégation du contingent préfectoral, objectivement, n'ont pas lieu d'être : les textes sont précis.

Mme Jacquaint s'est également inquiétée des ambitions du Gouvernement, mais elles doivent être comprises à partir des faits que nous connaissons : notre ambition, c'est la loi de programmation et ce sont des dispositions financières très importantes ; les faits, eux, plaident pour nous. Je ne pense pas là non plus que ses inquiétudes soient fondées. Je rappelle que les logements pour les plus démunis et les logements très sociaux sont en constante augmentation depuis quatre ans.

Mme Boutin, à juste titre, attire notre attention sur le logement d'urgence. Le texte prévoit la construction de deux fois 5 000 logements d'urgence dans le secteur traditionnel de l'urgence d'une part, dans les résidences sociales et hôtelières d'autre part.

M. Rodolphe Thomas a raison de s'inquiéter du prix du foncier : c'est là l'origine de nos difficultés alors que la densité de population, dans notre pays, est l'une des plus faibles d'Europe. Quel paradoxe ! La rationalisation de la mise en constructibilité de certains terrains, grâce à ce texte, permettra d'aller dans le bon sens. Je le remercie d'avoir souligné les efforts que nous avons faits pour le prêt à taux zéro et la TVA à 5,5% dans le cadre de l'accession sociale à la propriété. Je le remercie également d'avoir attiré notre attention sur la difficulté que représente le seuil de 24 euros.

M. Jacques Le Guen a évoqué les spécificités des nuisances dues aux aérodromes militaires. Avec M. Perben, nous essaierons de répondre à cette question avant la fin de la session.

M. Dumont a rappelé l'importance du domaine foncier de l'Etat et la difficile mise à disposition de ses terrains. C'est précisément pourquoi nous avons prévu un certain nombre de dispositifs, outre la délégation interministérielle, qui permettront de vendre en dessous des appréciations des domaines. J'ai noté sa proposition concernant une coopération directe avec les collectivités territoriales et je lui confirme mon accord total pour une expérimentation.

J'indique à Mme Lebranchu, à propos de l'extension du programme de rénovation urbaine à un certain nombre de villes moyennes de Bretagne, que ce programme, qui n'est pas de droit commun, n'est pas non plus permanent et ne vise pas à financer les PALULOS. Il est exceptionnel et c'est un « coup de rein » majeur de la République pour transformer en profondeur des quartiers en déshérence. L'intervention moyenne pour les 200 quartiers inclus dans le programme est de l'ordre de 200 à 300 millions. C'est l'équivalent de deux cents ou trois cents ans d'autofinancement de ces villes ! Le débat sur ce programme a lieu avec les collectivités territoriales et je suis à ce propos extrêmement choqué que certaines considèrent que ce qui se passe dans leurs quartiers n'est pas leur affaire alors que l'Etat, lui, s'engage massivement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Incompétence !

M. Jean-Louis Borloo, ministre - Mais pourquoi donc 90 % d'entre elles s'investissent et que seules 10 % renâclent ?

M. Marie-Jeanne a attiré notre attention sur les DOM, en particulier sur la Martinique, et s'est inquiété quant à la ligne budgétaire unique. Or, la LBU progresse, contrairement à ce qu'il a dit. En cas de difficultés, nous vérifierions que les redéploiements ont été effectifs, et d'autant plus que les financements disponibles sont supérieurs aux demandes.

M. Pemezec a eu raison de rappeler que, contrairement à une idée reçue, la densité de population est très faible dans les ZUP. L'urbanisation a visage humain est donc possible.

M. Périssol a justement posé le problème : il s'agit d'offrir à chacun la possibilité de se loger, que ce soit par l'accession à la propriété ou par la location. Cela modifie notre regard sur les cessions : pourquoi serait-il quasiment interdit au locataire d'un parc social de devenir accédant à la propriété ? M. Périssol soutient donc à la fois la mobilité dans le parc HLM, le prêt à taux zéro, dont il est l'initiateur, et les logements d'urgence, lui qui a su en créer près de 20 000 dans des délais très brefs.

Mme Robin-Rodrigo souhaite que l'on relance le logement social et très social. C'était fascinant ! Elle ne devait manifestement pas être là lorsque j'ai donné les chiffres de nos réalisations et elle ne devait pas savoir que le PLAI s'est effondré sous le gouvernement de M. Jospin, alors que, pour notre part, nous avons doublé le PLS.

Je remercie M. Nicolin d'avoir souligné que le secteur du logement représente 22 % du PIB. Je puis l'assurer que nous étudierons avec M. Perben la question du développement des VEFA.

M. Bernard Debré a rappelé la nécessaire relance du PLI. C'est ce que nous faisons : pour cette année, notre objectif est de 2000. Le Gouvernement, en outre, a d'ores et déjà donné son accord quant à la décote de 30 % sur les cessions.

M. Cohen s'est livré à une véritable charge contre un Gouvernement qui tente de répondre à une question cruciale. Le vrai problème est de savoir comment l'ancienne majorité en est arrivée là : diviser par deux la production de logement social, quel exploit ! Il est difficile de relancer la machine, mais nous y parvenons grâce à une prise de conscience généralisée.

M. Grand a confirmé la volonté d'un certain nombre de maires qui accueillent tous les mois de nouveaux habitants, surtout dans son département, l'Hérault, de tendre à la réalisation de 20 % de logements sociaux. Il souhaite également un débat sur l'accession sociale à la propriété, et il va donc avoir lieu.

Je remercie M. Raoult pour avoir qualifié notre politique de pragmatique et de volontariste et pour avoir notamment souligné les premiers résultats de l'Agence Nationale de la Rénovation Urbaine.

Mme Lignières-Cassou, comme M. Poniatowski, ont posé la question de la contribution des communes de moins de 3 500 habitants à ce grand plan d'engagement national. Mme Lignières-Cassou a souligné qu'un certain nombre de « villes centre » ont besoin du soutien des collectivités pour contribuer à cette production de logements.

Nous donnons des instructions aux préfets pour qu'il y ait des financements spécifiques pour les toutes petites communes. Et le sujet du seuil à retenir reste ouvert.

Prenant l'exemple de Satory, M. Pinte a évoqué la question des terrains appartenant à l'État ou à des entreprises publiques. Si elle a peu avancé pendant vingt ans, ce n'est pas que les gouvernements successifs l'aient trouvée sans intérêt. Elle a au contraire fait l'objet de nombreux rapports. C'est plutôt que la difficulté est réelle, les ministères ou les entreprises publiques ayant d'autres priorités et ne se montrant donc en général guère pressés de se défaire desdits terrains, sans parler du problème de leur valorisation. Il y avait donc toujours une bonne raison de ne pas trancher. Désormais, le Premier ministre sera l'arbitre et nous disposons d'un outil interministériel, la DIDOL, qui pourra être opérateur et appliquer des décotes importantes. Je rendrai visite à M. Pinte à Satory et je pense que le transfert de propriété pourra se faire dans l'année qui vient au profit du très beau programme lié à ce site.

J'ai noté le souhait de M. Goasguen de développer les permis de construire valant division. Ils existent déjà, à nous de les faire mieux connaître de façon que les acteurs de terrain se les approprient. J'ai bien noté aussi sa remarque sur Paris Nord Est. Il y a trois opérations d'intérêt national en Ile-de-France. Dominique Perben et moi allons regarder les choses de près et j'espère pouvoir répondre à M. Goasguen avant la fin du débat.

Je comprends les interrogations de M. Ducout, mais il n'est pas vrai qu'il ait fallu attendre la crise des banlieues pour que les constats de carence prévus par la loi soient demandés. Les préfets ont été réunis en juin et la circulaire de demande de constat date du 21 août.

M. Beaudouin a exposé les difficultés auxquelles il est confronté dans les villes de sa circonscription. Nous en avons pris note.

M. Meyer a évoqué le problème des encombrants collectifs et la difficulté de répercuter les charges. L'article 1382 permet d'y répondre, mais le problème est surtout d'identifier les responsables.

M. Bonrepaux a décrit la situation en Ariège et insisté sur la nécessité d'une action massive de l'Agence nationale de rénovation urbaine dans ce département. Je suis tout à fait convaincu de la nécessité d'une relance du logement conventionné rural. C'est ce que nous avons fait en 2005 et continuerons à faire en 2006. Mais les département ont aussi un rôle à jouer. J'ajoute que dans la convention de décembre 2004, il y avait 44 000 PALULOS demandés. Nous en avons mis 57 000 à disposition. Il n'y a, quoi qu'il en dise, aucun dossier qui n'ait pu être financé en 2005 pour des raisons budgétaires ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Regardez mieux les chiffres !

M. Jean-Louis Borloo, Ministre - Je vais vous donner des chiffres terribles ! Vous savez combien vous avez mis pour les quartiers en grande difficulté au titre de la restructuration urbaine pendant cinq ans ? 38 millions d'euros ! Nous, nous mettons dans les programmes 6 milliards d'euros par an !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Vos chiffres sont truqués !

M. le Ministre - Bon, vous mettiez plus d'argent pour faire deux fois moins que nous ! Vous êtes des héros de la République ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Vous avez raison, Monsieur Chatel, de parler des CDD dans leur rapport à l'accession à la location, à la consommation ou à la propriété. Avec les partenaires sociaux, nous avons avancé sur la garantie des risques locatifs et nous sommes prêts à étudier avec vous un point complémentaire concernant l'accession à la propriété.

M. Saddier a attiré l'attention du Gouvernement sur les zones de montagne et sur les zones transfrontalières - sans parler de celles qui sont les deux à la fois et de toutes celles soumises au phénomène de la saisonnalité. Je crois que le bilan est bon et qu'il faut poursuivre le programme. M. Brottes fait partie de la même fédération que M. Saddier. Il en a exprimé la pluralité. Pour le reste, je crois avoir répondu à ses interrogations.

Ce qui me frappe dans tout ce débat, c'est que l'opposition ne traite pas des éléments principaux de ce projet de loi, qui était demandé par tous et qui est au fond largement consensuel. Pas un mot sur le fait que pour aider les maires bâtisseurs, les exonérations de TFPB soient compensées par l'État pendant quinze ans ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Rien sur le fait que lorsqu'il y aura une plus-value, une petite partie de celle-ci sera affectée à la collectivité locale. C'est pourtant une première dans l'histoire de la fiscalité française ! Rien sur la libération du foncier ! Cela fait vingt-cinq ou trente ans qu'un certain nombre de mesures étaient réclamées. Nous les prenons enfin, mais tout ce que vous trouvez à dire, c'est que vous n'aimez pas l'accession sociale à la propriété ni le PLS ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) Et vous nous donnez des leçons, vous qui avez mis ce pays dans une crise du logement comme il n'en avait pas connue depuis la guerre. L'année noire du logement aura été l'année 2000 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Quand vous aviez besoin de notre vote, vous ne disiez pas cela !

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer - Depuis quatre ans, dans le cadre de l'effort de redressement qui a été engagé, nous avons constaté un certain nombre de blocages, qu'il s'agisse du caractère trop restrictif de certains documents d'urbanisme, des craintes des investisseurs ou de la pénurie de foncier. Nous avons donc pris des mesures d'urgence. La première est la mobilisation du foncier public, dans le but de construire 20 000 logements. Je crois que nous dépasserons ce chiffre. J'en profite pour répondre à M. Pinte qu'au-delà de cette volonté affirmée de mobilisation et du rôle de la Délégation interministérielle au développement de l'offre de logements, il nous faut regarder les choses au cas par cas pour trouver chaque fois la meilleure façon de surmonter les difficultés.

Les raisons pour lesquelles certains terrains ne sont pas mis sur le marché sont parfois extrêmement complexes, et la mobilisation de tous est nécessaire pour régler tous les cas particuliers.

Concernant la problématique foncière, Monsieur Piron, vous avez souhaité à juste titre que le maire soit placé au centre du dispositif : le projet permet d'augmenter les ressources fiscales des communes en les autorisant à densifier certains secteurs ouverts à l'urbanisation pour réaliser des logements, avec un pourcentage de logements sociaux ; nous pourrons ainsi répondre aux besoins.

M. Abelin, qui partage notre diagnostic sur les risques engendrés par la pénurie foncière, a approuvé les orientations de ce projet. Celui-ci est très concret, tourné vers l'action, comme Mme Boutin l'a souhaité avec beaucoup d'enthousiasme. Les mauvaises querelles sur les chiffres sont donc particulièrement malvenues.

M. Marie-Jeanne a évoqué les difficultés particulières rencontrées dans l'Outre-mer en matière foncière : le Gouvernement est évidemment prêt à aider les collectivités concernées à lever les obstacles.

Comme l'a dit M. Pemezec, ce projet doit aider à dépasser les politiques malthusiennes. C'est pourquoi il remet les maires au cœur de l'action, notamment pour accepter une densification volontaire maîtrisée.

M. Dumont a évoqué le cas particulier des régions de l'Est - Alsace, Lorraine et Champagne-Ardenne ; je suis tout à fait prêt à examiner avec leurs élus la possibilité d'un programme foncier spécifique.

Monsieur le ministre Périssol, il faut en effet que les constructions se fassent là où les besoins sont manifestes. C'est tout l'intérêt de cette politique de libération volontariste du foncier. Nous savons tous qu'il existe des emprises foncières publiques au cœur des grandes villes, que le Premier ministre a appelé à utiliser. Il faut en particulier relancer la construction de logements dans Paris, et M. Goasguen a évoqué le secteur des Batignolles.

Nous réfléchissons également aux simplifications de procédures qui pourraient encore être apportées. Par ailleurs, nous travaillons sur plusieurs opérations d'intérêt national en région parisienne, l'achèvement des villes nouvelles et la raréfaction des ZAC ayant largement contribué au ralentissement de la construction de logements au cours des dernières années.

Enfin, je voudrais dire à mon tour à M. Saddier combien j'ai été sensible à son évocation des problèmes propres aux zones touristiques de montagne. Je me rendrai prochainement dans les Alpes, pour faire le point en particulier sur la problématique du logement des saisonniers.

MOTION DE RENVOI EN COMMISSION

M. le Président - J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 7, du Règlement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Les critiques et les propositions entendues dans la discussion générale justifient pleinement le renvoi en commission de ce projet.

Annoncé en novembre 2003 à l'occasion du débat budgétaire, celui-ci porte les stigmates de sa genèse longue et laborieuse. Baptisé « Propriété pour tous » par M. de Robien, il s'est transformé en « Habitat pour tous » avec M. Daubresse, avant une nouvelle métamorphose en «Engagement national pour le logement» sous l'inspiration de M. Borloo, appellations qui témoignent des mutations considérables de son contenu. Imaginé à l'origine pour contraindre les organismes HLM à vendre leur patrimoine, il a été totalement réécrit, au point de ne plus comporter actuellement une seule mesure en ce sens. Cette transformation radicale trahit l'improvisation des différents ministères et leur impuissance à définir un cap précis en matière de logement.

Les gouvernements successifs ont d'ailleurs profité du mystère entourant les objectifs et les dispositions du texte pour promettre tout et son contraire, en renvoyant systématiquement au projet en cours de rédaction les réponses aux attentes pressantes qui étaient exprimées. De cette Arlésienne, personne ne savait rien, mais chacun espérait beaucoup.

La consternation a donc été générale lorsqu'en octobre dernier, le projet a enfin été rendu public. Présenté depuis des mois comme une panacée, censé être l'expression d'un « engagement national pour le logement », il ne comportait finalement que 11 articles, d'ordre technique pour la plupart !

Le décalage était spectaculaire avec l'ampleur de la crise à résoudre, devenue une véritable crise de société. Si en effet le « non-logement » ne concerne qu'environ 86 000 personnes, le « mal-logement », c'est-à-dire l'occupation d'un logement inconfortable, insalubre, surpeuplé ou précaire, touche plus de trois millions de nos concitoyens. En outre, le poids des dépenses liées au logement n'ayant cessé d'augmenter dans le budget des ménages, l'ensemble de la classe moyenne subit à son tour les effets de la crise.

Chaque année, de multiples rapports rappellent aux pouvoirs publics cette triste réalité. L'été dernier, les incendies meurtriers dans plusieurs immeubles parisiens ont hélas rappelé l'étendue des problèmes liés à la sur-occupation. A l'automne, ce sont les scènes de violence dans les quartiers sensibles qui ont souligné l'urgence de briser les ghettos urbains et de construire davantage de logements sociaux au cœur de toutes les communes.

Devant une telle situation, tout retard dans l'action de l'autorité publique est coupable. Il ne suffit pas de répéter sans cesse que le nombre de mises en chantier en 2005 a dépassé les niveaux atteints depuis vingt-cinq ans !

Certes on a dénombré 400 000 mises en chantier au cours des douze derniers mois, contre 300 000 les années précédentes. On construit plus, mais pour qui ?

L'augmentation du nombre de constructions ne profite pas aux ménages modestes : 20 % seulement des mises en chantier supplémentaires concernent des logements sociaux, et encore faut-il s'interroger sur leur caractère vraiment social. En effet, en février dernier, le ministre alors en charge du logement s'était réjoui que 75 000 logements sociaux aient été financés en 2004, contre 40 000 en 2000 ; mais sur les 75 000 agréments accordés, seuls 57 000 ont servi à la création de logements neufs, 18 000 ayant été affectés à l'acquisition de logements déjà existants. Pire, sur les 57 000 logements nouveaux, seuls 38 000 auront vraiment un caractère social ; 20 000 agréments serviront en effet à réaliser des PLS, dont les loyers sont de 50 % supérieurs à ceux des HLM classiques. La construction neuve de logements vraiment sociaux, à savoir PLUS et surtout PLAT, est donc restée en 2004 à l'étiage 2001 (M. Piron s'exclame). Or le nombre de demandeurs de logements sociaux n'a cessé de croître ; il excède désormais 1,3 million de personnes.

En outre, le plan de programmation de la loi de cohésion sociale grave dans le marbre l'augmentation régulière du pourcentage de PLS. Si les engagements du plan sont tenus, il atteindra en effet 32 % en 2005, 37 % en 2006 et 40 % en 2007 !

Cette progression est en complet décalage avec les besoins. Alors que les constructions des logements les plus sociaux - PLAI - ne représentent que 5 % des constructions annuelles, 50 % des demandeurs de logements sociaux rentrent dans leurs critères ! Le plan de programmation est donc vicié par une erreur stratégique majeure, qu'il nous faut absolument corriger.

Mais en dépit des nombreux amendements adoptés au Sénat - plus de 50 articles ont été ajoutés, ce qui témoigne de l'extrême pauvreté du texte présenté en Conseil des ministres -, ce projet demeure largement en deçà des besoins et n'offre pas de solutions efficaces à la crise du logement.

En l'état actuel, ce projet a tout d'un rendez-vous manqué.

Certes, plusieurs dispositions présentent un intérêt réel pour mobiliser le foncier ou développer l'offre de logements. Malheureusement, si leur inspiration est bonne, leur portée est encore beaucoup trop limitée.

II en est d'abord ainsi des mesures relatives à la cession des terrains appartenant à l'Etat. Chacun s'accorde pour juger nécessaire que l'Etat montre l'exemple en mobilisant ses ressources foncières et en vendant ses terrains à un prix privilégié aux bailleurs sociaux ; mais, annoncé à l'automne 2004 lors du débat sur la loi de cohésion sociale, le principe d'une décote tarde à être mis en œuvre.

Devant les sénateurs, le Gouvernement a évoqué la possibilité de fixer cette décote à un niveau maximal de 35%. Du fait de l'envolée des cours de l'immobilier durant les dernières années, ce niveau paraît beaucoup trop modeste. Il reviendrait en fait à céder les terrains appartenant à l'État au prix du foncier établi en 2003. Si la spéculation immobilière a permis à des particuliers d'enregistrer des plus-values notoires, il n'est pas acceptable que l'État en tire également profit lorsqu'il vend ses biens à des bailleurs sociaux.

Surtout, il est impératif que le niveau de la décote soit fixé par la loi et non par un décret. Les propos de certains membres du Gouvernement font en effet craindre que votre bonne volonté, Monsieur le Ministre, ne soit pas partagée par tous vos collègues.

Le ministre du budget annonçait ainsi en octobre qu'il faut valoriser le patrimoine de l'Etat en commercialisant ses biens selon les standards du marché : la générosité du ministère de la cohésion sociale ne semble pas devoir l'emporter sur les calculs financiers du ministère de l'économie... Pour être effectif, le principe de la décote doit donc s'appuyer sur une obligation légale.

Ensuite, les mesures de soutien aux maires bâtisseurs sont insuffisantes. Le Sénat a heureusement voté un amendement visant à partager entre la commune et le propriétaire la plus-value réalisée lors de la vente d'un terrain reclassé en zone constructible. Un tel reclassement augmente en effet la valeur du terrain ; il est donc légitime que la commune espère profiter de la richesse qu'elle a elle-même créée. Toutefois, nous regrettons que le taux de prélèvement de la commune soit limité à 10 % des deux tiers du prix de cession.

Le Sénat a également voté un amendement du groupe socialiste prévoyant la compensation intégrale par l'Etat des pertes de recettes qu'enregistrent les communes, du fait de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les bailleurs sociaux. Cette exonération dure 25 ans pour les logements sociaux. Or, si l'Etat compense intégralement les pertes des dix dernières années, il ne compense celles des quinze premières que si elles sont supérieures à 10% du produit communal de la taxe. Voilà qui désavantage les communes qui construisent des logements sociaux ! Pire encore : les communes qui participent au programme de rénovation urbaine sont victimes d'un effet de ciseau, car les immeubles anciens grâce auxquels elles touchent la taxe foncière sont détruits, tandis que les immeubles nouveaux ne leur permettent plus de la percevoir. A l'automne dernier, j'avais déjà attiré l'attention de M. Borloo, qui a quitté le banc, sur cet inacceptable paradoxe. Le Sénat a donc adopté la compensation intégrale. Patatras ! A peine commençait-on à se réjouir de cette avancée que le ministre demandait une seconde lecture de l'amendement pour en diminuer la portée ! Vous excluez les PLS de cette compensation, que vous limitez par ailleurs aux seules opérations relevant du plan de programmation de la loi de cohésion sociale. Ainsi, les primes vont aux communes qui n'ont rien fait depuis des années, au détriment de celles qui construisent des logements sociaux ! Votre dispositif n'est pas seulement inefficace : il est inéquitable.

La « maison à 100 000 euros », largement médiatisée, est l'une des mesures les plus symboliques de l'engagement national pour le logement. Nous partageons tous l'objectif d'accession sociale à la propriété lorsque l'équilibre financier des ménages et la qualité de l'habitat sont garantis. Le groupe socialiste fait du parcours résidentiel une priorité, et n'a aucune réticence à voir un locataire devenir propriétaire (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Mais nous nous étonnons que la majorité cherche à établir les ménages dans un lieu d'habitat tout en contraignant les salariés à toujours plus de flexibilité professionnelle et de mobilité géographique (Approbations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Si l'expérience des « chalandonnettes » et la charte de décembre 2005 garantissent la bonne qualité des maisons à 100 000 euros, les moyens juridiques qui en assurent le montant sont insuffisants. Rares sont les maires qui peuvent offrir des terrains gratuitement ou à faible prix. Dans les zones immobilières tendues, la réduction du taux de TVA permettra tout juste de couvrir l'acquisition du seul bâtiment.

La maison à 100 000 euros est donc un dangereux mirage. Elle expose les ménages au surendettement : après vingt ans de remboursement de la construction, ils passeront vingt autres années à rembourser le foncier. Pour éviter qu'elle ne soit qu'un effet d'annonce, il faut consacrer à cette mesure des moyens bien supérieurs.

De même, le dispositif fiscal dit « Borloo populaire » entretient l'illusion que le Gouvernement favorise les ménages modestes : les loyers fixés dans ce cadre sont bien trop élevés ! Le Sénat estime qu'ils dépasseraient de 17 % ceux des PLI. Vous prétendez qu'ils seront inférieurs de 30 % aux prix du marché, mais vous prenez comme référence le marché parisien, où les prix sont supérieurs de 30 % à ceux de la province. L'effet du « Borloo populaire » sera donc nul en province, et en région parisienne, le marché est trop tendu pour que les investisseurs renoncent au dispositif de Robien.

Ce « Borloo populaire » n'a de populaire que le nom : le plafond des ressources exigé pour en bénéficier permet à 91 % de la population d'y prétendre ! Il est donc destiné aux ménages de la classe moyenne supérieure bien plus qu'aux ménages modestes, qui souffrent pourtant plus durement de la crise du logement. Vous accordez de nouveaux cadeaux fiscaux, sans en mesurer les effets sociaux. C'est d'autant plus préoccupant que les aides fiscales ont augmenté de 9,3 % dans le budget pour 2006 et dépassent désormais les subventions directement versées par l'Etat. Nous nous associons pleinement aux acteurs du logement qui, inquiets de cette dérive, ont demandé au Gouvernement lors du dernier congrès de l'USH de garantir la transparence et de mieux évaluer l'impact des moyens consacrés au logement.

Ce projet de loi ne souffre pas seulement de la faiblesse des mesures les plus médiatiques ; il fait aussi l'impasse sur les problèmes essentiels que pose la crise du logement. C'est à l'aune de ces lacunes que l'on mesure le mieux le décalage entre les besoins et les solutions présentées. Le Gouvernement reste sourd aux avertissements les plus sévères de l'actualité.

Alors que l'opinion publique était encore sous le choc après les scènes de violence dans les quartiers sensibles, le Président de la République appelait les maires à respecter le quota de 20 % de logements sociaux - votre projet ne comprend aucune mesure les y contraignant - et à mettre « en cohérence les discours et les actes ».

M. Jean-Pierre Brard - C'est prêcher dans le désert !

M. Michel Piron - Vous parlez d'or !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Une telle cohérence est l'objectif de tout élu respectueux de son mandat et de tout gouvernement. Pourtant, il n'a pas inspiré les rédacteurs de ce projet : la formule « mixité sociale » a beau revenir jusqu'à saturation dans le discours gouvernemental, il ne lui est donné aucune traduction législative.

Il faut pourtant que toutes les communes se mobilisent afin de casser les ghettos urbains. Mais depuis trois ans, la majorité y rechigne, quand elle ne s'y soustrait pas. On a même vu, en septembre dernier, une tentative publique d'organiser la résistance et le lobbying des maires sacrifiant la loi à leur égoïsme municipal. Aujourd'hui encore, certains souhaitent intégrer les logements achetés en accession sociale à la propriété dans le quota de 20 % et réduire ainsi la portée de l'article 55 de la loi SRU. D'autres évoquent le taux de 20 % à l'échelle du territoire de l'agglomération : c'est la pire des forfaitures !

Pour faire front à ces démarches, il ne suffit pas, Monsieur le ministre, de demander un état des lieux aux préfets et d'infliger de faibles majorations d'amendes aux maires. Il faut prendre des initiatives fortes et marquer la volonté qu'a l'Etat de faire triompher l'intérêt général sur les intérêts particuliers !

Saisissons l'opportunité de ce projet de loi pour exiger des préfets qu'ils se substituent aux maires défaillants et construisent des logements sociaux, pour lier le montant de la DGF à la réalisation d'HLM, pour imposer un pourcentage de logement social dans tout projet immobilier sous peine d'en suspendre le permis de construire, ou encore pour affecter des coefficients différents à chaque catégorie de logement social, afin d'éviter que certaines communes ne contournent leur obligation de solidarité en ne construisant que des PLS.

Les idées et les solutions ne manquent pas pour briser les ghettos et mettre discours et actes en cohérence, mais le courage et la volonté politique font cruellement défaut à votre projet. Cet engagement national n'a pas les moyens de surmonter l'égoïsme municipal : cela suffit à condamner l'ensemble du texte.

Autre tare de ce projet : l'absence de mesures de solvabilisation des locataires malgré un contexte d'envolée des loyers. Les locataires consacrent désormais 30% de leurs ressources au loyer et aux charges. Pourtant, au fil des budgets, la majorité a porté plusieurs mauvais coups aux APL, dont bénéficient plus de six millions de locataires : après une seule revalorisation en deux ans, elle a limité leur progression à 1,8 % et a, dans la dernière loi de finances, voté une diminution de 1,38 % des crédits qui leur sont consacrés ! Leur pouvoir solvabilisateur a ainsi diminué de 8 % en trois ans.

Vous avez ajouté à cette diminution intolérable des mesures plus ciblées et non moins mesquines : l'exclusion, par exemple, de 200 000 personnes du bénéfice de ces aides par le relèvement du seuil de non-versement de 15 à 24 euros, dont s'est ému le médiateur de la République lui-même et sur lequel vous avez promis de revenir. Engagement purement verbal... Le Gouvernement annonce l'augmentation de trois euros du ticket modérateur dû par les locataires, soit une économie de 180 millions. Or, ramener le seuil de non-versement à 15 euros ne lui coûterait que 50 millions d'euros. Vous prétendez avoir rétabli les APL ?

Cette politique de gribouille est d'autant plus inacceptable qu'elle frappe les ménages modestes. Le Gouvernement a lui-même indiqué que les trois quarts des APL sont versés à des ménages dont les revenus sont inférieurs au SMIC. Le taux d'effort consenti au logement par les bénéficiaires de minima sociaux est passé de 15 % en 2003 à 20 % en 2005 ! Alors que le Gouvernement allège toujours plus la charge fiscale des ménages les plus aisés, il n'hésite pas à rétablir son équilibre budgétaire en exigeant des économies de nos concitoyens les moins favorisés !

Dans son rapport du 3 novembre, le Secours catholique a alerté les pouvoirs publics sur cette dérive, et l'explosion des contentieux locatifs révèle qu'on a dépassé le seuil critique.

Dans ces conditions, la passivité du Gouvernement laisse pantois. Pour la justifier, il cherche à faire croire que les APL ont un effet inflationniste. Mais de 1993 à 1995, le gouvernement Balladur les a gelées et les loyers ont augmenté ; à l'inverse, en 2004 elles n'ont pas été revalorisées et la progression des loyers a été la plus forte depuis 20 ans ! Le Gouvernement avance aussi qu'il met en place un nouvel indice au 1er mars prochain. Mais celui-ci, qui n'est pas aligné sur la seule inflation, peut avoir des conséquences funestes : au troisième trimestre 2005, avec l'indice en vigueur, la hausse était de 0,47% ; elle aurait été de 2,33 % avec le nouvel indice.

Pour rendre plus solvables des millions de locataires, principales victimes de la crise, il faudrait d'autres mesures que ces médiocres expédients, par exemple une revalorisation sensible des APL et leur indexation sur le niveau de l'inflation ou celui de l'indice de révision des loyers. Il faudrait mieux prendre en compte les charges, dont le poids ne cesse de croître, et renoncer aux économies mesquines sur le mois de carence et sur le seuil de non versement de l'APL.

Que proposons-nous ? D'abord, qu'on agisse sur le taux d'effort des Français. Le président Ayrault l'a dit avec talent. Désormais les Français consacrent en moyenne 30 % de leurs ressources à se loger. Pourtant, les pouvoirs publics ne considèrent ce taux que comme une variable d'ajustement, qui évolue au gré des aides versées. Il faut inverser cette logique, se fixer comme objectif stratégique de ramener le taux d'effort à 25 %, et déterminer le montant de toutes les aides en conséquence, par bassin d'habitat. Une telle ambition obligerait à mieux mesurer l'impact social des avantages fiscaux que vous accordez si généreusement aux investisseurs, et qu'il faudrait toujours assortir de contreparties sociales.

A titre personnel - mais plusieurs collègues et de nombreux acteurs associatifs partagent mon point de vue - je vous propose une autre révolution, qui est de reconnaître l'opposabilité du droit au logement. Dans une décision du 28 décembre 1994, le Conseil constitutionnel a jugé que ce droit était « un objectif à valeur constitutionnelle » et le Conseil économique et social, dans un avis du 14 janvier 2004, a fait sienne cette revendication.

Pourtant lors du débat sur la loi de cohésion sociale, la majorité a refusé nos amendements à ce sujet, considérant que l'opposabilité du droit au logement serait la conséquence heureuse, et lointaine, d'une augmentation massive de la construction. Une fois encore, inversons la démarche. En rendant le droit au logement opposable, à l'horizon des cinq ans à venir, le législateur contraindra tous les acteurs à se mobiliser pour satisfaire les besoins en logement. Bien entendu, les collectivités locales ne pourraient être tenues responsables de la mise en œuvre du droit au logement que si l'Etat leur a fourni toutes les ressources financières nécessaires, et son opposabilité devrait être strictement encadrée pour éviter tout recours abusif. L'exemple de l'Écosse, qui élabore ce droit depuis quelques années, montre que toutes les difficultés techniques peuvent être surmontées dès lors que les pouvoirs publics en ont la volonté politique.

Depuis la fin du 19ème siècle, la République a garanti à ses citoyens l'accès à l'école et l'accès aux soins. Il est temps, au 21ème siècle, qu'elle garantisse l'accès au logement.

M. Gérard Bapt - Très bien !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Pour que le beau titre de votre projet ne reste pas une vague promesse, il est impératif de renvoyer ce texte en commission, afin d'en combler les inacceptables lacunes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Gérard Hamel, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - Vous ne m'avez nullement convaincu, par ce propos qui relève de la discussion générale, de la nécessité d'un retour en commission. L'urgence n'a pas été déclarée sur ce texte et deux lectures sont prévues. Nous y travaillons depuis décembre et nous avons porté jusqu'au 13 janvier la date limite de dépôt des amendements, que nous avons examinés en quelques séances...

M. Pierre Ducout - Examinés, c'est bien excessif. Disons qu'on en a fait la liste.

M. le Rapporteur - La commission a consacré plus de dix heures à ce texte et a examiné, rapidement, les 650 amendements déposés. La motion n'a pas d'objet.

M. le Président - Nous en venons aux explications de vote.

M. Jean-Pierre Brard - Malgré l'opacité que vous voulez maintenir, nous commençons à y voir un peu plus clair, et notre rôle est bien d'éclairer l'opinion. Hier, Monsieur Borloo, tel un Harry Potter du Valenciennois, est venu faire un tour de magie avant de disparaître.

M. Michel Piron - On est tout de suite au cœur du sujet.

M. Jean-Pierre Brard - Avec Harry Potter, certainement, même si M. Borloo n'a pas encore la même notoriété, ni les mêmes droits d'auteurs...

Mme Brigitte Le Brethon - Mais avec le « Borloo populaire ».. (Sourires)

M. Jean-Pierre Brard - C'est un début, effectivement.

Hier donc, M. Borloo m'a accusé de dire des choses inexactes à propos de « son bébé ». Ce doit être son premier enfant, sans doute et il le laisse un peu trop batifoler seul. (Sourires)

Selon M. Borloo, l'année 2000 a été l'année noire du logement. Mais pour Patrick Doutreligne, délégué général de la fondation Abbé Pierre, c'est 2003 la plus mauvaise année pour le logement social depuis 1953.

M. Michel Piron - C'est totalement inexact.

M. Jean-Pierre Brard - S'agissant de l'ANRU, le même M. Doutreligne dit que son comité d'évaluation et de suivi ne se réunit pas souvent et n'a pas de réflexion commune. Dans sa bonté, il considère que cette création a été « un exercice de démocratie intéressant » mais qu'il faut alimenter ce comité. Au fond, il dit comme moi que cela relève du spectacle, et non de la définition d'une vraie politique.

M. Le Bouillonnec nous parlait des maires bâtisseurs. Face à eux, il y a les maires fossoyeurs de notre modèle social : celui-ci est anti-communautariste, et vous développez les ghettos. M. le Bouillonnec a également dit que vous n'avez pas de volonté politique et pas de courage. Pas de courage, certes. Mais de volonté politique, que si ! Vous poursuivez votre objectif avec obstination, avec entêtement,...

M. Charles Cova - Avec constance.

M. Jean-Pierre Brard - Et M. Cova sait de quoi il parle, car je donnerai l'exemple de maires délinquants de son département qui n'appliquent pas la loi SRU.

Seulement, dans le pays de Jacquou le croquant, cette forte volonté politique vous ne pouvez pas l'afficher, car le peuple vous punirait sévèrement. Etant obligés d'avancer masqués, vous voulez donc nous imposer le silence sur le changement des critères qui entrent dans la définition des 20 % de logements sociaux. Mais au vu de ce que veulent faire les députés UMP, le renvoi en commission est indispensable pour nous donner le temps d'alerter l'opinion publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste)

M. François Brottes - M. Le Bouillonnec a fait comme toujours une intervention de grande qualité, sans polémique (Rires sur les bancs du groupe UMP). Il a mis à plat le faux débat sur les chiffres : le dispositif dit « de Robien » a favorisé la spéculation foncière ; l'Etat a dépensé beaucoup plus dans ce dispositif qu'en matière de logement social ; les crédits alloués à la rénovation et la réhabilitation urbaines ont été considérablement réduits, qu'il s'agisse de ceux de l'ANAH ou des PALULOS ; et enfin, l'ANRU aide sans doute certains territoires, mais elle en oblige d'autres à cotiser. Le président du conseil général de l'Ariège a en effet bien montré que les territoires ruraux étaient perdants.

Et c'est l'écart entre la demande sociale d'aujourd'hui et celle d'hier qu'il faut mesurer, plutôt que le nombre absolu de logements sociaux. Celui-ci a certes augmenté grâce à l'impulsion donnée par la SRU, mais il existe aujourd'hui 1,3 million de demandeurs de logements sociaux ! Ce qui nous est proposé n'est donc pas du tout à la hauteur d'un tel défi.

S'agissant du renvoi en commission, le rapporteur a indiqué que les 650 amendements déposés avaient été examinés, mais on pourrait faire le calcul du temps consacré à l'examen de chacun d'entre eux - sans doute est-ce la loi du genre... Il est également vrai que l'urgence n'a pas été déclarée. Toutefois, notre travail sur ce texte a été interrompu par les congés, et nous n'avons pas pu examiner sérieusement l'ensemble des amendements qui viennent d'être déposés. J'ai cru comprendre, Monsieur le rapporteur, que vous avez dû travailler fort tard et dans l'urgence avec les administrateurs de l'Assemblée, que je salue, et nous avons même cru un temps que l'ensemble des amendements de l'opposition avaient été rejetés faute d'être examinés, la majorité en ayant déposé de son côté une quantité astronomique.

Un renvoi en commission, qui permettra un examen plus sérieux et plus serein de ce texte, s'impose donc.

Sur le fond, M. Raoult a eu l'audace de citer cette phrase de Roger Quillot, un homme qui a beaucoup œuvré pour le logement social : « un logement social réussi, c'est un logement invisible ». Il y a sans doute une confusion dans l'esprit de M. Raoult : un logement social qui n'existe pas n'est pas un logement réussi.

Compte tenu de la précipitation des travaux en commission, je vous demande de voter la motion de renvoi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Michel Piron - Quel dommage que votre lyrisme, Monsieur Le Bouillonnec, serve si mal la vérité des chiffres et des faits ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Votre mémoire est particulièrement sélective, car si vous vous souvenez des « chalandonnettes », à juste titre d'ailleurs, vous oubliez votre récente impéritie, de 1998 à 2002. En effet, à qui doit-on la gravité de la crise actuelle, sinon à vous ?

Toutes catégories confondues, PLAI, PLUS et PLS compris, nous avons construit 80 000 logements en 2005, soit deux fois plus que vous en 2000 ! Voilà le résultat de la politique volontariste que nous soutenons, et qui doit s'accentuer dans les années à venir.

Vous occultez également les zones de rénovation urbaine, immense chantier mené par l'ANRU et les collectivités locales. Pour la qualité de nos débats, reconnaissez donc ces quelques faits !

Enfin, il me faut également éclairer votre lanterne, Monsieur Brard. Vous avez fait référence à 2003, « année noire » selon vous, mais en oubliant que la somme des PLAI et des PLUS représentait cette année-là beaucoup plus qu'en 2000, et encore plus si on y ajoute les PLS (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) : 58 090 logements contre 42 262 ! (Même mouvement).

Même si l'évidence n'est pas toujours évidente, comme le disait Jankélévitch, il va de soi que nous vous demandons ne pas adopter la motion de renvoi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Abelin - A voir la véhémence de M. Le Bouillonnec, on se demande si elle ne cache pas un remords : celui d'avoir battu le record du plus faible taux de production de logements sociaux pendant les cinq années où ses amis politiques étaient au pouvoir !

A cette époque, les ministres du logement annonçaient à chaque budget des chiffres mirobolants, vite démentis par des taux de réalisation décevants - de 50% ou 60% -, à tel point qu'au bout de quatre ans un « plan de relance » dut être imaginé ! Comment expliquer de telles déconvenues ? C'est que le logement social ne se décrète pas : il nécessite des bailleurs sociaux impliqués, des élus mobilisés, des investisseurs confiants et une administration soucieuse d'efficacité. Voilà le problème du logement social dans notre pays.

Et quand j'entends MM. Ayrault et Le Bouillonnec annoncer 120 000 logements sociaux de plus par an à partir de 2007, je me dis qu'ils ont tout oublié, ou bien qu'ils n'ont rien appris. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Pour éviter des débats désagréables ou des suspensions de séance intempestives, je voudrais expliquer pourquoi la commission des finances a déclaré soixante-quinze amendements irrecevables au titre de l'article 40.

J'ai dû m'opposer à tout amendement demandant à l'Etat de réhabiliter plus de logements sociaux ou de mettre en place une nouvelle programmation budgétaire. L'aggravation des charges publiques est tout aussi manifeste quand on accorde aux communes un nouveau droit de préemption, ou quand on crée une nouvelle structure d'intervention, par exemple un établissement public foncier.

Au titre de l'article 40, il n'était pas non plus possible d'accroître le champ d'intervention de l'ANRU ou de l'ANAH ou de la caisse de garantie du logement social, qui sont des établissements publics administratifs. Les aides au logement ont également fait l'objet de très importants amendements, adoptés par la commission des affaires économiques, mais qui seront extrêmement coûteux pour l'Etat : qu'il s'agisse du versement trimestriel de l'APL pour en faire bénéficier 120 000 personnes supplémentaires, ou de la suppression du délai de carence, tout cela va au-delà de l'enveloppe budgétaire prévue, pourtant considérable. Selon l'article 40, c'est au Gouvernement qu'il revient de prendre de telles initiatives, et non au Parlement.

S'agissant maintenant de l'article 55 de la loi SRU, je n'ai pas opposé l'irrecevabilité aux sanctions financières prévues contre les communes qui n'atteignent pas le seuil de 20 %. Il s'agit en effet d'une sanction, qu'il est possible d'augmenter ou de diminuer par voie d'amendement, au même titre qu'une amende pénale. En revanche, nous ne pouvons pas demander directement aux communes de construire plus de logements sociaux, car cela revient à créer des charges publiques supplémentaires.

M. Jean-Pierre Brard - Cela commence à sentir le séminaire !

Mme Martine Billard - Que faisons-nous là ?

M. le Président de la commission des finances - Vous avez soutenu des gouvernements qui auraient pu réviser notre Constitution et je constate que ceux-ci n'ont jamais souhaité remettre en cause l'article 40. Et en tant que président de la commission des finances, je ne fais donc qu'appliquer cet article, avec la plus grande latitude possible.

Afin qu'un véritable débat puisse cependant avoir lieu sur cette question des 20 %, j'ai accepté des amendements qui tendent à faciliter la réalisation de cet objectif, par exemple en donnant aux communes la possibilité d'imposer de nouvelles servitudes d'urbanisme et de construire plus de logements très sociaux que de logements sociaux.

Je rappelle enfin à tous nos collègues qu'il leur faut gager toute réduction d'impôt ou de cotisation sociale, mais qu'une création de charges ne peut jamais être acceptée, même si elle est pourvue d'un gage.

M. François Brottes - Je remercie le président de la commission des finances pour cette explication de texte ! La plupart des amendements politiques déposés par l'opposition ont en effet été déclarés irrecevables, qu'ils touchent au pouvoir solvabilisateur des aides à la personne, au renforcement de la SRU - on pourrait ainsi diminuer le nombre de logements sociaux, mais non l'augmenter ou les requalifier ! -, à la modification des compétences des offices HLM, au transfert du FSL aux départements ou à l'amélioration du droit de préemption. De tout cela, nous ne pourrons pas débattre !

Or, je constate que ce texte ne nous est pas parvenu vierge d'amendements du Sénat. Est-ce la générosité du président de sa commission des finances qui a donné à l'opposition, et à l'ensemble des parlementaires, le droit de débattre ?

Ici, au contraire, la censure tombe sur les amendements avant le débat en séance, et de manière plus rude qu'au Sénat, alors même que nous discutons du même texte !

Si nous voulons débattre dans la sérénité, le Gouvernement devrait reprendre nos amendements, quitte à s'y opposer, mais pour qu'au moins ils puissent venir en discussion. Si l'on ne peut débattre de rien d'autre que du sexe des anges, pourquoi prendre la peine de venir en séance ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. le Président - La pratique du Sénat est différente, car son règlement ne prévoit pas d'examen préalable des amendements au titre de l'article 40, sauf si le Gouvernement soulève ce moyen. Le conseil constitutionnel, en 1959, a accepté cette disposition.

M. François Brottes - Je demande une suspension de séance pour laisser au Gouvernement le temps de réfléchir à ma question.

La séance, suspendue à 11 heures 30, est reprise à 11 heures 40.

M. François Brottes - J'aimerais comprendre : pourquoi un amendement qui élargit le périmètre de ce qui peut être intégré dans les 20 % de logements sociaux est-il recevable et pas celui qui étend l'application de la loi SRU à d'autres communes, comme nous l'avons proposé ? Pourquoi notre proposition de ne pas transférer le FSL aux départements est-elle considérée comme une dépense nouvelle, et jugée irrecevable à ce titre, alors que l'État est supposé compenser ce transfert à l'euro près ? Nous devons tous faire preuve de bonne foi sur ces questions.

M. le Président de la commission des finances - Je n'ai laissé de la souplesse que sur le moyen d'atteindre les 20 %, mais au-delà, l'article 40 s'applique. Cela étant, sur les 700 amendements, il en reste 625, sans parler des articles sur lesquels vous pouvez ouvrir le débat. Par ailleurs, je vous rappelle que le Conseil constitutionnel surveille l'application de l'article 40, et que la décision finale appartient à notre assemblée, et non au Sénat.

Mme Martine Billard - Je comprends qu'il appartienne à la commission des finances de veiller à l'application de l'article 40, mais il y a tout de même un problème sur l'interprétation du fameux article 55 de la loi SRU, et le périmètre des logements concernés. Un de mes amendements a notamment été jugé irrecevable. On reproche souvent à l'opposition de ne rien proposer, mais quand elle le fait, elle est censurée par une lecture très stricte de l'article 40. J'ai beau n'en être qu'à mon premier mandat, j'ai tout de même constaté, depuis quatre ans, une sévérité accrue dans l'interprétation de cet article.

J'espère maintenant que le débat sera largement ouvert au moment de la discussion des amendements relatifs à la loi SRU, afin que les auteurs d'amendements déclarés irrecevables puissent tout de même défendre leurs idées.

M. le Président de la commission des finances - Cet article 55 est devenu le noyau d'une polémique, alors que si l'on veut réellement prendre en main la question du logement social, il faudrait le réécrire. Je mène moi aussi une politique sociale dans ma commune de 20 000 habitants, mais il n'y a pas que les logements sociaux HLM, il y a aussi les PSLA, l'accession très sociale à la propriété, le logement social privé, les rénovations de l'ANAH. Cette ankylose dans l'application de l'article 55 nuit à la qualité du débat et à l'efficacité de la politique du logement.

M. le Président - J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

ARTICLE PREMIER A

Mme Huguette Bello - Après la loi de programmation de rénovation urbaine d'août 2003 et le volet « logement » du plan de cohésion sociale de décembre 2004, c'est la troisième fois en trois ans que le Parlement examine un projet relatif au logement. La crise, en effet, est d'une ampleur rarement atteinte, ses causes sont multiples et ses conséquences parfois dramatiques. Les régions ne sont pas également touchées mais aucune n'est épargnée et certaines souffrent durement : c'est le cas de l'outre-mer où la crise actuelle s'ajoute à une pénurie de logements déjà ancienne. En un an, le nombre de ménages ayant déposé une demande de logement social a augmenté et s'établit aux alentours de 27 000. En outre, l'habitat insalubre s'accroît en raison des constructions spontanées dites « informelles » tandis que la construction de logements sociaux diminue. En dépit de cette situation critique, la programmation pluriannuelle des crédits prévus par la plan de cohésion sociale ne s'applique toujours pas à l'outre-mer. Pourtant, cet engagement budgétaire sur cinq ans est un élément déterminant pour répondre au défi du logement social.

En s'attaquant aux obstacles qui freinent la construction de logement, ce projet vise à favoriser une augmentation importante et régulière de l'offre de logements dans les années à venir. Néanmoins, la Réunion se heurte à un certain nombre de difficultés, et tout d'abord en ce qui concerne le foncier. En effet, concentrée sur le littoral, la surface disponible ne représente qu'un tiers de la superficie de l'île et est soumise à des arbitrages constants entre l'urbanisation et le monde agricole. En démultipliant la demande de terrains constructibles, la défiscalisation a déséquilibré ce marché et a provoqué une envolée des prix : en dix ans, le prix du mètre carré a ainsi augmenté en moyenne de 125%. Le logement social est évidemment la grande victime de dette spéculation. Sans doute conviendrait-il dès à présent d'instaurer dans les programmes d'investissements immobiliers bénéficiant de la défiscalisation un quota de logements sociaux ce qui, de surcroît, favoriserait la mixité sociale.

La question du foncier aménagé se pose également. Les collectivités, étant donné l'ampleur des besoins et leurs ressources fiscales, ne peuvent financer seules l'aménagement des terrains, d'autant qu'elles doivent respecter de nouvelles obligations européennes. Il y a unanimité pour que de nouvelles dispositions soient prises permettant de sortir de ce blocage. Quant aux coûts de la construction, ils se sont accrus au point que les appels d'offres sont pour la plupart infructueux. Là encore, il y a unanimité pour demander la révision des paramètres de financement des logements sociaux, notamment en ce qui concerne les prix plafonds. Toutes les opérations de logement évolutif social, les LES, sont actuellement déficitaires. Ce type de logement, qui permet aux plus modestes d'accéder à la propriété, est donc en grand danger.

Développer l'accession à la propriété, c'est aussi se pencher sur le PTZ. A la Réunion, la suppression du PTZ 40 a limité le nombre de ses bénéficiaires. Or, si l'on veut aider les ménages aux revenus intermédiaires à accéder à la propriété, il faut absolument le rétablir.

L'augmentation des loyers est l'une des conséquences les plus notables de la crise du logement, et le logement social n'y échappe pas. Il faut donc de toute urgence revaloriser l'allocation logement, dont il n'est plus admissible que le forfait « charges » soit à ce point déconnecté de la réalité des charges locatives.

Il est sans doute possible d'envisager des solutions à ces difficultés en amendant ce projet. Toutefois, si le Gouvernement souhaite apporter une réponse globale, cohérente et durable à la question du logement outre-mer, un texte spécifique serait le bienvenu, et c'est bien volontiers que je participerai alors à la discussion d'un quatrième projet sur le logement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Louis Dumont - Je m'interroge quant à l'application de l'article 40, en particulier concernant le FSL dont la gestion a été transférée et a fait l'objet, nous dit-on, d'une compensation à l'euro prêt. Son retour dans le périmètre de l'Etat ne devrait donc pas soulever de problème, même s'il conviendra sans doute de modifier le budget . Ce sujet mérite discussion. Le président de séance, lorsque nous en débattrons, devra s'assurer que nous puissions avoir un véritable échange de manière à ce que le Gouvernement réponde aux interpellations de l'opposition. J'ajoute que sur une question aussi décisive que le logement, il ne faut pas avancer de chiffres sans dire précisément à quoi ils correspondent, car sinon, on peut discuter interminablement sans avancer.

La construction de logements est difficile alors que les besoins sont immenses. Nos collègues sénateurs ont réalisé un excellent travail, mais ils ont inclus un certain nombre d'articles visant surtout à interpeller le Gouvernement. C'est ainsi que cet article, relatif au zonage, suscite quelques interrogations. Nous savons en effet que les zones, et donc les aides à la pierre, ne correspondent plus aux réalités des prix de l'immobilier malgré quelques rectifications ici ou là. M. Daubresse, me semble-t-il, avait pris conscience de ces difficultés. Les aides, si minces soient-elles, proviennent certes de l'Etat mais également des collectivités territoriales et c'est leur cumul qui seul peut permettre de construire des logements dont les loyers seront compatibles avec les ressources des ménages dans les secteurs concernés. Je sais bien que la définition des zonages ressortit du domaine règlementaire, et sans doute cet article sera-t-il supprimé, mais il convient néanmoins de prendre un engagement quant au devenir de ces zones. J'engage M. le rapporteur spécial de la commission des finances à suivre de près ce problème. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Gérard Hamel, rapporteur de la commission des affaires économiques - L'amendement 34 vise en effet à supprimer cet article. La redéfinition des zonages serait lourde de conséquences mais il conviendra en effet de s'en préoccuper, en l'occurrence dans un cadre règlementaire. Le texte, en outre, privilégie une action sur le prix des logements et des terrains.

M. Dominique Perben, ministre - Je tiens tout d'abord à répondre à Mme Bello. Je rappelle que, contrairement à ce que j'ai pu entendre, la LBU ne diminue pas. Je vous confirme en outre le versement de crédits spécifiques, dès ce premier trimestre, afin d'aider certains organismes HLM ayant des difficultés financières.

La question du zonage est en effet importante. Le système actuel, qui prévoit une définition des zones par arrêté, est suffisamment souple. Je puis vous assurer que le Gouvernement est déterminé à agir en fonction des réalités du terrain. Des décisions ont d'ailleurs été prises récemment en Haute-Savoie et en Ile-de-France où au mois de décembre dernier le zonage de 328 communes a été modifié.

Avis favorable.

L'amendement 34, mis aux voix, est adopté et l'article premier A est ainsi supprimé.

AVANT L'ARTICLE PREMIER

M. le Rapporteur - L'amendement 301 est rédactionnel.

L'amendement 301, accepté par le Gouvernement , mis aux voix, est adopté.

ARTICLE PREMIER

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Cet article vise à favoriser la mobilisation des terrains publics en faveur du logement. Nous partageons évidemment cet objectif, mais nous considérons que le dispositif législatif actuel est d'autant plus insuffisant qu'il ne permet pas à l'Etat de faire face à ses contradictions : le ministre du budget a en effet évoqué la possibilité de ne pas inclure le patrimoine de tous les ministères dans les ventes potentielles. En outre, une agence spécialisée dans la cession des patrimoines de l'Etat a été créée.

Nous proposons, par l'amendement 302, de remplacer « terrains bâtis » par « immeubles et terrains », afin qu'il soit bien clair que le dispositif peut aussi porter sur les immeubles.

M. Etienne Pinte - Lors de la discussion que nous avions eue il y a quelques mois, le précédent ministre du logement, M. Daubresse, nous avait garanti que les terrains vendus par l'État seraient cédés à la valeur fixée par les Domaines moins 25 %, après quoi M. Borloo nous avait assuré que le dispositif visait aussi les immeubles. C'est pourquoi je propose, dans mon amendement 29 rectifié, de remplacer le mot « terrains » par celui d' « immeubles », qui couvre à la fois le foncier bâti et non bâti.

M. le Rapporteur - Le terme d' « immeuble » recouvre en effet à la fois les terrains et les constructions. Avis favorable, donc, sur le 29 rectifié.

M. Jacques Myard - Bien sûr, un lac est un immeuble !

M. Dominique Perben, ministre - En droit civil, le mot « immeuble » a en effet cette double signification. J'ai donc la même position que la commission.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'usage diffère un peu du droit et il y a des procès où l'on discute du sens à donner au mot « immeubles ». Il importait donc de bien préciser les choses, étant entendu que notre intention était la même.

L'amendement 302 est retiré.

L'amendement 29 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 35 de la commission complète l'alinéa 1 par les mots « ou des objectifs fixés par l'article L.302-8 du code de la construction et de l'habitation ou par le programme local de l'habitat, lorsqu'il existe sur le territoire concerné. »

M. Etienne Pinte - Les objectifs de la loi de programmation pour la cohésion sociale étant limités dans le temps, il convient d'assurer la durabilité des opérations d'intérêt national visées dans l'article 1 en se référant également aux objectifs de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain du 13 décembre 2000 et du programme local de l'habitat. Tel est l'objet de mon amendement 30 rectifié.

Mme Annick Lepetit - Notre amendement 303 a le même objet.

M. Rodolphe Thomas - Le 306 également.

M. le Rapporteur - Ces trois amendements seront satisfaits si celui de la commission est adopté.

M. Dominique Perben, ministre - Ils pourraient donner à penser que des programmes de logements ne pourraient être engagés que dans les communes qui n'ont pas atteint l'objectif de 20 % de logements sociaux. Le gouvernement préfère donc l'amendement de la commission, qui commence par « ou » .

L'amendement 35, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Par conséquent, les amendements 30 rectifié, 303 et 306, qui étaient en discussion commune avec le 35, tombent.

Mme Martine Billard - Notre amendement 246 tend à permettre que la cession du patrimoine public soit aussi l'occasion d'augmenter l'offre de logements en prêts locatifs à usage social et en prêts locatifs aidés d'insertion. Il est clair en effet que tout le monde ne peut pas devenir propriétaire et que la demande de logements locatifs très sociaux est de plus en plus forte, compte tenu de la baisse de revenus d'un grand nombre de nos concitoyens - la proportion de ménages à très bas revenus est passée de 11, 8 % en 1988 à 21,3 % en 2002. Or, l'offre en ce domaine stagne. Ce n'est pas un débat idéologique, il s'agit tout simplement de répondre à un besoin, comme le soulignent toutes les associations de lutte contre l'exclusion.

M. le Rapporteur - La commission est défavorable à cet amendement, qui semble tourné contre les PLS, pourtant bien utiles, en particulier au regard de l'indispensable mixité sociale. Par ailleurs, la loi de cohésion sociale a programmé des objectifs de construction par type de logements. Je considère donc que cet amendement est inutile.

M. Dominique Perben, ministre - Défavorable.

M. Michel Piron - Il y a eu 7 674 PLAI en 2005, 6 032 en 2004, contre seulement 5 009 en 2000. Les chiffres parlent d'eux-mêmes.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Cessons d'opposer les PLAI aux PLS. Ce n'est pas parce qu'on défend les premiers qu'on est contre les seconds ! Et il n'y a pas d'un côté les partisans de la mixité sociale, de l'autre ceux de l'accession sociale à la propriété. L'amendement de Mme Billard est tout à fait pertinent. Il a seulement pour but de rappeler que ce dispositif a vocation à servir à tous les types de logements sociaux, y compris les plus sociaux.

Mme Martine Billard - Foin des calculs de boutiquier : si vous faites mieux que le gouvernement précédent, l'opinion vous en saura gré ! Pour le reste, force est de constater aujourd'hui le manque criant de PLAI. À Paris, où nous avons très peu de disponibilités foncières, il faut profiter de celles qui vont être offertes par les ventes de l'État pour répondre à ce besoin - faute de quoi Paris sera de plus en plus une ville pour riches.

M. Jean-Pierre Brard - Il faut mettre les textes en accord avec vos déclarations. Mme Billard vous donne l'occasion de montrer que nous avons tort de vous soupçonner de ne pas vouloir une vraie mixité ...

Quant à M. Piron, le fait qu'il soit l'un de nos collègues les plus lettrés ne l'oblige pas à faire de l'archéologie sur chaque amendement !

M. Michel Piron - C'est de la radiographie, ce n'est pas la même chose !

M. Jean-Pierre Brard - Le Président Ayrault a dit hier que l'on n'avait peut-être pas fait autant qu'il aurait fallu sous le précédent gouvernement, inutile d'en remettre trois louches ! Ou bien vous soutenez l'amendement de Mme Billard, ou bien vous confirmez, comme nous l'avons dit hier, que vous voulez vider de son contenu l'objectif des 20 %.

M. Dominique Perben, ministre - Non : ou bien cet amendement est inutile, puisque l'article fait référence aux objectifs de la loi de programmation, ou bien il est restrictif, ce qui serait plus gênant encore. Dans les deux cas, j'y suis défavorable.

M. Jean-Louis Dumont - Cette discussion montre que dans cette gestion administrée du logement, on agit moins en fonction du pouvoir d'achat de nos concitoyens qu'en fonction de l'idée que l'on se fait de la cité... Dans les communes de ma région, il y a beaucoup de demandes de PLS : il faudrait y répondre.

L'amendement 246, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Etienne Pinte - L'amendement 31 3° rectification, que j'ai cosigné avec M. Brard, a pour but de tenir compte de la spécificité de la région Ile-de-France, en renvoyant à son schéma directeur d'aménagement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Notre amendement 304 est dans le même esprit. Il nous renvoie au débat sur la décentralisation, à propos de la délégation de l'aide à la pierre : nous avions là aussi demandé de consacrer dans la loi la spécificité de la région Ile-de-France, mais nous n'avions pas obtenu satisfaction, pour des raisons politiques, ou plus exactement pour des raisons vulgairement politiciennes. Nous nous trouvons ainsi dans une situation inextricable, dont un dernier exemple est le refus du département des Hauts-de-Seine d'entrer dans le dispositif de l'agence régionale foncière. Si l'on veut que le dispositif de l'article 1er soit efficace en Ile-de-France, la référence au SDRIF est indispensable.

M. Rodolphe Thomas - Notre amendement 308 a le même objet.

M. le Rapporteur - La commission est favorable à l'amendement 31.

M. Dominique Perben, ministre - Ces amendements substituent à la demande de compatibilité avec les plans d'aménagement définis par les communes une obligation de cohérence avec le schéma régional. C'est élargir la vocation de ce dernier d'une manière qui ne me paraît pas assez réfléchie. Avis défavorable.

M. Jean-Pierre Brard - De toute façon, Monsieur le ministre, les PLU doivent être cohérents avec le SDRIF.

M. Jacques Myard - « Compatibles »...

M. Jean-Pierre Brard - J'ai entendu M. Scellier dire qu'Etienne Pinte et moi-même étions pacsés... Ce n'est certes pas la première fois que nous agissons ensemble - nous l'avons fait en particulier pour obtenir de l'INSEE une meilleure qualité de recensement. Il n'y a pas de mal à ce que des députés qui ne siègent pas sur les mêmes bancs tirent ensemble les conséquences d'une analyse qu'ils partagent... Chacun connaît d'ailleurs l'esprit libre, indocile et rigoureux de notre collègue Pinte, qu'il a notamment manifesté dans sa critique des transferts de charges lors de la discussion de la loi de finances. Je m'honore de pouvoir signer des amendements communs dès lors qu'ils répondent à l'intérêt général, et j'aimerais que l'Assemblée se détermine en fonction de celui-ci. Le fait que des amendements de même nature soient soutenus sur les divers bancs devrait, Monsieur le ministre, vous conduire à retirer vos remarques.

M. Jacques Myard - Je ne suis pas certain que cet ajout soit utile, puisque le SDRIF vaut SCOT (mouvements sur les bancs du groupe socialiste), et doit donc être compatible.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Pas du tout !

M. Jacques Myard - Il y a, d'autre part, un problème d'échelle : les documents du SDRIF sont très larges, alors que des documents précis sont nécessaires à l'établissements des zones et décrets.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Le territoire francilien est compliqué, mais il n'a pas été traité différemment des autres. Les PLU engagés par la plupart des communes doivent être compatibles avec le SDRIF en cours d'élaboration. Tout aménagement se fait naturellement en cohérence de part et d'autre d'une frontière communale. Le seul débat commun à tout le territoire francilien, c'est celui du SDRIF, qu'ont engagé tous les départements. Nous avons donc là un espace partagé - le seul qui soit pertinent. Certaines communautés d'agglomérations ont créé des SCOT, pour incongrus qu'ils soient. Si l'on ne fait pas référence au SDRIF dans la loi, comment gèrera-t-on la cohérence entre les SCOT, les PLU et le SDRIF ? Loin de poser un problème d'incompatibilité, une telle mention favorise l'emboîtement des dispositifs, dont je regrette qu'il n'ait pas été anticipé lors du débat sur la décentralisation.

M. Etienne Pinte - C'est un texte difficile sur lequel les interprétations divergent. Le SDRIF n'a rien à voir avec les SCOT. Si la référence au SDRIF nous enlève la possibilité de nous défendre contre l'Etat tandis que, partout ailleurs en France, les communes ont leur mot à dire, alors j'hésite : il vaut mieux analyser ensemble les tenants et les aboutissants de cette mesure avec l'ensemble des maires franciliens qui l'ont approuvée. Je retire donc l'amendement 31.

M. Jean-Pierre Brard - Dans ce cas, je voterai les amendements identiques qu'ont proposé nos collègues.

Les amendements 304 et 308, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - Les amendements 200 rectifié, 201, 202 et 203 sont rédactionnels.

Les amendements 200 rectifié, 201, 202 et 203, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Le Gouvernement s'est engagé au Sénat à opérer une décote de 25% - et pouvant atteindre 35% dans les zones tendues - sur le prix des terrains cédés par l'Etat pour la construction de logements locatifs sociaux. Il est préférable de la fixer dans la loi, pour garantir les positions ultérieures du Gouvernement en matière d'accompagnement au logement social. Le PLS n'est pas subventionné par l'Etat - qui a donc intérêt à en faire beaucoup - alors que le PLAI, le plus subventionné, est celui que l'on fait le moins, même si plus de la moitié de la population en a besoin. Le Gouvernement utilise de manière illégitime ces financements à des fins de régulation budgétaire. Il faut donc introduire la décote dans la loi.

M. le Rapporteur - Avis défavorable : cela relève du domaine règlementaire.

M. Dominique Perben, ministre - Même avis. Comme le Gouvernement s'y est engagé au Sénat, la décote atteindra 35% en zone A et le décret correspondant sera bientôt transmis au Conseil d'Etat. L'engagement étant tenu, vous pourriez retirer cet amendement.

M. François Brottes - Nous le maintenons pour vous être agréable et soutenir votre ministère contre le ministère des finances (Sourires). Sans faire de procès d'intention, je rappelle que c'est celui qui estime le prix des terrains qui met aussi en œuvre la décote : on peut imaginer des pressions visant à intégrer la décote future à l'évaluation initiale...

L'amendement 305, mis aux voix, est adopté.

L'article 1er, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER

Mme Martine Billard - Afin de faire de la politique du logement une politique à la fois sociale et environnementale, l'amendement 276 vise à intégrer aux actions publiques d'aides à l'investissement relatives à l'habitat le label de « haute qualité énergétique » HPE 2000. Une mission parlementaire étudie en ce moment les conséquences de l'effet de serre : nos discours doivent être en cohérence avec les lois que nous votons.

En 2003, le secteur du bâtiment représentait 18% des émissions de gaz carbonique - et même 24% si l'on inclut la consommation d'énergie. Ce taux est le plus important après celui des transports, et il continue à croître légèrement. Si les véhicules particuliers génèrent des émissions comparables, les économies d'énergie dans le bâtiment peuvent se financer elles-mêmes, puisqu'on économise sur la facture énergétique du pays et des ménages et qu'on crée de l'emploi : tout le monde y gagne. La législation prévoit une consommation maximale par mètre carré et une obligation d'énergie renouvelable, mais se limite aux bâtiments chauffés électriquement. Le séminaire gouvernemental de mars dernier sur le développement durable avait prévu d'imposer cette condition à la défiscalisation du dispositif de Robien, mais a fini par reculer devant le lobby des constructeurs.

La durée de vie moyenne d'un bâtiment est supérieure à un siècle. En 2050, un tiers seulement des bâtiments aura été construit après 2000. Le coût d'investissement se retrouve dans la réduction des charges, et les sociétés d'HLM s'y adaptent sans problème. En outre, on ne peut pas accepter les dépenses foncières supplémentaires qu'engendre la spéculation et refuser notre responsabilité dans la lutte contre l'effet de serre.

Nous savons tous que c'est dans le secteur du bâtiment qu'il est le plus simple d'intervenir rapidement. Nicolas Hulot rappelait encore hier matin à la mission qu'il ne fallait pas se contenter de discours : il faut agir. Arrêtons d'attendre, au risque de faire croire que l'on fait joujou dans les missions avant que l'hémicycle ne recule devant la décision.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Je suis d'accord sur le fond - économies sur les charges, protection de l'environnement. Toutefois, le rapport sur les conséquences de l'effet de serre est en cours d'élaboration, et paraîtra en avril : la commission a jugé plus sage de l'attendre avant de prendre toute décision.

M. Dominique Perben, ministre - On ne saurait ramener l'ambition de diminuer les émissions de gaz à effet de serre au vote d'un dispositif qui fait d'ailleurs problème sur le plan juridique, puisqu'il ne s'agit que d'un amendement renvoyant à un décret. Sur le fond, nous en sommes d'accord, la politique de l'environnement devra porter de plus en plus d'une part sur les transports, d'autre part sur l'habitat. Mais on ne peut conditionner l'ensemble des aides publiques au respect d'un label qui est évolutif.

La réglementation thermique 2005, qui va s'imposer à l'ensemble des logements aidés, permettra de diminuer de 15 % l'ensemble des consommations d'énergie. Je comprends très bien votre souci, mais le dispositif proposé n'est pas raisonnable. Aujourd'hui quelque 20 000 logements sociaux respectent le label HPE ; il faut certes faire plus. Mais laissons aux décideurs, élus locaux et responsables d'organismes de construction, la liberté de mettre en œuvre ces mesures.

Mme Claude Darciaux - La représentation nationale s'honorerait d'adopter cet amendement, car le problème de l'environnement sera le problème majeur dans les années à venir.

M. Jacques Myard - Vive le nucléaire !

Mme Claude Darciaux - Pourquoi attendre encore, par exemple que la mission sur les émissions de gaz à effet de serre se prononce ? Profitons de ce projet, d'autant qu'un tel dispositif entraînera une diminution des charges pour les locataires les plus modestes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Pierre Brard - Adopter cet amendement peut être un signal fort et M. Hamel reconnaît qu'il est justifié sur le fond. Il contribue à la protection de l'environnement, et à la diminution des charges, dans une vision à long terme...

M. le Rapporteur - C'est un surcoût.

M. Jean-Pierre Brard - Evidemment, il y a un surcoût. Mais alors, construisons les pavillons sans poser de fenêtres, on vivra au grand air et cela coûtera moins cher ! Ne pas voter cet amendement, c'est continuer à chauffer les courants d'air. Il ne suffit pas de faire des grands discours à Johannesburg ni de changer la Constitution, il faut agir.

Monsieur le ministre, nous vous avons connu plus cartésien : notre collègue propose de s'en tenir à un label, non aux normes qui, évidemment, vont évoluer. Vous nous dites aussi qu'on va réduire la consommation de 15%. Mais vous ne mesurez pas l'ampleur de notre retard. A Fribourg-en-Brisgau, on a divisé les consommations par quatre pour un service équivalent. Tout en allégeant les charges des locataires, nous économiserons les ressources, qui ne sont pas renouvelables. Il faut arrêter de gaspiller.

M. Jacques Myard - Vive le nucléaire !

M. Jean-Pierre Brard - Vous nous dites ensuite de laisser l'initiative aux décideurs. Mais il s'agit aussi de santé publique. Cela exige une décision nationale, comme pour les vaccinations. Pensons aux générations futures, et débarrassons-nous de cette vision à court terme d'épicier qui fait ses comptes tous les soirs.

M. François Scellier, rapporteur pour avis de la commission des finances - Sur le fond, tout le monde est d'accord, mais il ne faut pas recourir à la loi dans tous les domaines. Par exemple, les départements n'ont aucune obligation de respecter des normes exigeantes dans la construction des collèges.

Plusieurs députés socialistes - C'est une erreur !

M. le Rapporteur pour avis - Dans mon département nous avons décidé de le faire (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste). Cela a parfois de telles conséquences sur le coût qu'il vaut mieux laisser les décideurs arbitrer.

Mme Martine Billard - Nous dire qu'on peut encore attendre est proprement irrecevable. Écoutez Nicolas Hulot ! On ne peut plus attendre. L'effet de serre, ses conséquences sur le climat sont là, on le voit avec les sécheresses. Et nos enfants, peuvent-ils attendre ? Non, il ya là un problème d'intérêt général.

M. Michel Piron - Planétaire, quand même, il faut le rappeler.

Mme Martine Billard - Absolument.

On nous demande de laisser la responsabilité aux élus. Je félicite ceux qui agissent. Mais il faut aller plus loin. Et quand il s'agit de la planète, vous répondez en invoquant des surcoûts ! (Protestations sur quelques bancs du groupe UMP)

M. Jacques Myard - Ralbol du romantisme écolo !

Mme Martine Billard - Nicolas Hulot devrait venir donner des explications en séance publique, cela ferait du bien à certains collègues !

M. Jacques Myard - Propos salonards !

Mme Martine Billard - Quant aux surcoûts, on en accepte dans bien d'autres domaines. Et dans celui-ci, où l'enjeu est si important, le surcoût momentané, et qui n'est pas si grand, sera compensé ensuite par la baisse de consommation et donc d'importation.

M. Rodolphe Thomas - Je me retrouve dans ces propos. Effectivement, on fait trop de barres et de tours HLM sans prendre assez de précautions. Mais il est vrai que les normes dont on parle augmenteront les coûts, qui seront répercutés sur le locataire. En tout cas, on ne peut faire fi du débat sur l'environnement, on le voit bien en ce qui concerne l'isolation phonique, car les gens ne parviennent plus à cohabiter en se supportant. Pour autant, proposer n'est pas imposer et il faut aussi laisser un libre choix aux politiques dans le cadre des permis de construire.

M. Yves Simon - Nous sommes tous maîtres d'ouvrage, et nous nous sommes toujours souciés d'économies dans les cahiers des charges. Et nous avons aussi fait des erreurs. J'ai fait construire des pavillons avec chauffage au gaz, et je n'ai pas l'air malin aujourd'hui face aux locataires qui subissent l'augmentation du prix du gaz.

Mme Claude Darciaux - Cela n'a rien à voir.

M. Yves Simon - Soyons donc prudents en même temps que nous sommes exigeants sur la qualité de l'isolation. Le coût du double vitrage qu'on rajoute équivaut à vingt ans d'économies sur le fuel. Il faut le rappeler.

M. Jacques Myard - On en a assez des ayatollahs intégristes !

M. François Brottes - Il faut surtout rappeler que l'énergie la moins chère, c'est celle qu'on ne consomme pas.

La loi d'orientation sur l'énergie n'impose rien en ce qui concerne l'habitat. La charte de l'environnement est plus coercitive. Mais il est logique de voter maintenant cet amendement. Quels sont nos moyens de changer les comportements ? Nous pouvons faire appel à la responsabilité de nos concitoyens, mais cela ne suffit pas toujours. Nous pouvons aussi poser des conditions à l'octroi des aides publiques. C'est le cas ici. Si cet amendement n'est pas parfaitement rédigé, on peut sans doute l'améliorer pendant la navette. Mais donnons un signal fort en première lecture sur ce sujet de fond.

M. le Président - Sur l'amendement 276, je suis saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public.

M. Etienne Pinte - Cet amendement très symbolique ne peut laisser personne indifférent. Dissuader des promoteurs en leur imposant des conditions immédiates risquerait d'aller à l'encontre de notre volonté commune d'améliorer la qualité des immeubles. Je demande donc à mon tour au Gouvernement de trouver une solution pendant les navettes pour permettre au Parlement de voter à l'unanimité le principe inscrit dans l'amendement de Mme Billard. Une étude d'impact sur ses incidences pourrait peut-être nous éclairer. Je souhaite en tout cas que le Gouvernement nous propose un texte en seconde lecture.

M. Michel Piron - Les meilleures intentions du monde ne suffisent pas pour mener de bonnes politiques. Ainsi, les contraintes nouvelles imposées aux constructeurs risquent d'être totalement contre-productives, car il existe déjà de nombreuses normes de qualité ! Je le répète : le mieux peut être l'ennemi du bien. C'est pourquoi je ne souscrirai certainement pas à cet amendement, qui n'a même pas fait l'objet d'une étude d'impact.

M. Jean-Louis Dumont - Ce que nous décidons aujourd'hui, ce sont les charges que subiront demain les locataires. Le prochain congrès de l'union sociale des HLM se prononcera sur le fond de cet amendement, mais il est évident que la prise en compte du développement durable relève de l'investissement ! Vous ne voulez plus d'aides à la pierre ? Eh bien ! Vous aurez de mauvais investissements !

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer - Je ne peux pas m'engager à vous fournir une étude d'impact complète avant la deuxième lecture, Monsieur Pinte, mais je suis tout à fait disposé à vous apporter des éléments complémentaires, qui vous permettront de mieux apprécier les conséquences d'une référence à ce label.

Cela étant, je suis extrêmement réservé sur le fond de cet amendement. Une référence législative à un label unique pourrait en effet donner un coup de frein considérable à la construction dans les années à venir. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP)

A la majorité de 23 voix contre 8 sur 34 votants et 31 suffrages exprimés, l'amendement 276 n'est pas adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 13 heures 5.

            La Directrice du service
            du compte rendu analytique,

            Catherine MANCY

.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


© Assemblée nationale