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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2005-2006 - 53ème jour de séance, 123ème séance

3ème SÉANCE DU MARDI 24 JANVIER 2006

PRÉSIDENCE de Mme Hélène MIGNON

vice-présidente

Sommaire

      ENGAGEMENT NATIONAL POUR LE LOGEMENT
      (suite) 2

      APRÈS L'ART. 5 QUINQUIES 2

      AVANT L'ART. 6 10

      ART. 6 11

      APRÈS L'ART. 6 18

      ART. 7 18

      APRÈS L'ART. 7 19

      ART. 7 BIS 19

      ORDRE DU JOUR DU MERCREDI 25 JANVIER 2006 24

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

ENGAGEMENT NATIONAL POUR LE LOGEMENT (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, portant engagement national pour le logement.

APRÈS L'ART. 5 QUINQUIES

M. François Brottes - L'amendement 401 vise à protéger les accédants à la propriété, qui se trouvent en situation grandissante d'insécurité, compte tenu de la précarité que le Gouvernement installe en multipliant les contrats de travail à l'essai - notamment avec le contrat nouvelle embauche et maintenant le CPE.

Je me permets de rappeler notre opposition, non pas à l'accession sociale à la propriété, mais au fait qu'elle soit intégrée dans les 20 % de logements sociaux. Si M. le ministre proposait un taux de 30 %, intégrant 10 % de logements en accession sociale à la propriété, nous soutiendrions volontiers cette proposition, mais nous notons qu'en réalité, on vise à supprimer des logements locatifs au bénéfice de l'accession à la propriété, ce qui ne manquera pas d'aggraver la crise du logement.

M. Gérard Hamel, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - La commission a repoussé cet amendement car les contrats de crédits prévoient des reports de mensualité pour les situations les plus difficiles. Par ailleurs, il n'est pas opportun de prévoir dans la loi des dispositions qui régissent les rapports entre emprunteurs et banques.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement - Même avis.

M. François Brottes - Je ne peux pas vous laisser dire que des dispositions existent, qui n'entraîneraient pas de pénalités et n'imposeraient pas une assurance, trop coûteuse pour des ménages modestes. Vous vous targuez de soutenir l'accession sociale, mais vous repoussez d'un revers de manche une disposition concrète.

Mme Martine Billard - M. le rapporteur n'a jamais été au chômage, sinon, il saurait qu'il faut payer une assurance.

M. Jacques Myard - C'est une attaque personnelle inadmissible !

M. Maurice Giro - Connaissez-vous la vie des gens ?

Mme Martine Billard - J'ai été cinq fois au chômage ! Cette assurance, si vous pouvez l'acquitter, ne vous couvre que pendant deux ans ! Cet amendement va beaucoup plus loin et permettra de régler des situations, malheureusement très fréquentes.

M. Michel Piron - Je souhaite que le débat ne s'engage pas sur des procès d'intention. Le contrat de travail que M. Brottes dénonce est à durée indéterminée, et entraîne toutes les conséquences d'un CDI auprès des banques. C'est l'engagement que celles-ci sont en train de prendre.

L'amendement 401 mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jacques Myard - Il ne s'agit pas de se focaliser sur une seule catégorie de logement. C'est la raison pour laquelle, Monsieur le ministre, je pense que votre projet de loi manque d'allant sur les aides aux primo acquérants.

Nous avons besoin de logements sociaux - j'ai pour ma part multiplié par trois leur nombre dans ma commune ces dix dernières années - et il nous faut de la diversité en la matière : ce sera d'ailleurs le sens de l'un de mes amendements portant sur le logement intermédiaire, aboli par la LOV en 1997.

Il n'en demeure pas moins qu'aujourd'hui, dans les commissions d'attribution, nous constatons que de jeunes ménages - aux revenus plutôt élevés, tournant autour de 4 000 euros - sont demandeurs. Les prix ont en effet fortement augmenté en région parisienne et ces couples ne disposent pas toujours du capital initial nécessaire à l'achat.

Si votre projet de loi comporte des avancées certaines en matière d'accession sociale à la propriété, il me semble donc dans l'intérêt du Gouvernement de favoriser ces premières acquisitions sur le marché libre, par le biais de l'amendement 398, ce qui soulagera d'autant la demande de logements sociaux.

M. le Rapporteur - Vos vœux sont exaucés ! Ce texte contient un certain nombre de dispositifs fiscaux  comme le Robien modifié, le Borloo populaire, la TVA à 5,5 %, le prêt à 0 % ou le bail à construction - qui permettent à ces familles d'accéder plus facilement à la propriété. Il est toujours possible d'imaginer des dispositions complémentaires, mais vos aspirations me semblent pour l'essentiel satisfaites. Avis défavorable.

M. le Ministre de l'emploi - Même avis.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'article L. 301-2 fixe la politique d'aide au logement, et non les conditions d'accession à la propriété. Il est évident que l'objet de l'amendement de notre collègue ne correspond pas à celui de cet article.

Nous sommes d'ailleurs plusieurs à nous demander pourquoi cet amendement, qui rajoute à la politique de soutien au logement tout ce qui concerne l'accession sociale, a été déclaré recevable, alors même que l'article 40 a été opposé à nombre des nôtres, qui établissaient de simples équivalences en matière d'APL ou de FSL, sans dépenses supplémentaires. J'espère que l'on nous aura expliqué ces mystérieuses subtilités avant la fin de cette mandature.

Cet amendement montre bien que l'on essaye de confondre deux notions tout aussi légitimes, mais qui ne doivent pas être abordées de la même manière. Lorsque l'on évoque l'équation un homme, une femme, une famille égalent un toit, on parle de « logement ». Lorsque l'on dit que chacun doit avoir le droit à passer du logement locatif à la propriété, on parle de « parcours d'habitat ». L'article L. 301-2 traite du « logement ».

M. Jacques Myard - Monsieur le rapporteur, je ne dis pas que le Gouvernement n'a rien fait ; d'ailleurs, je le soutiens. Mais j'estime qu'il faut aller plus loin. Monsieur Le Bouillonnec, je ne suis pas analphabète et je pense que l'article L. 301-2 couvre une partie de l'aide aux primo acquérants.

Compte tenu des difficultés que rencontrent un nombre croissant de couples jeunes et moins jeunes - dont je sais que vous vous souciez, Monsieur le ministre - je pense qu'il est impératif que de telles aides figurent de manière claire. C'est la raison pour laquelle je maintiens cet amendement qui, même s'il peut être jugé redondant, vise l'intérêt général.

L'amendement 398 mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Présidente - L'amendement 397 rectifié initialement placé après l'article 5 quinquies a été déplacé après l'article 8 sexies.

Mme Christine Boutin - Je regrette que le Gouvernement n'ait pas repris à son compte, en levant le gage, la mise en place d'un droit opposable au logement.

Mon amendement 400 rectifié vise à créer une nouvelle forme de société civile immobilière par capitalisation. Je rappelle à ce propos qu'une proposition de loi allant en ce sens avait été signée par une centaine de parlementaires et devait faire partie d'un ensemble législatif dit « logement pour tous ». Il s'agit donc de permettre au locataire d'un logement social d'en devenir propriétaire en achetant progressivement des parts de son habitation. En effet, un revenu minimum, une couverture maladie, l'éducation mais également la garantie d'un toit constituent autant d'outils d'insertion. Permettre à une personne d'être propriétaire de son logement doit être considéré comme un moyen de lutter contre l'exclusion. Pour accroître le nombre d'accédants à la propriété, il faut alléger les exigences initiales, notamment celles concernant l'apport personnel. Les SCI de capitalisation que je propose ont donc pour objet la détention, la gestion et l'entretien de l'immeuble composé de différents appartements qui représentent chacun un lot. L'occupant du logement social va acquérir peu à peu des parts de SCI, correspondant à son lot, par le biais de son loyer dont une fraction sera destinée à cela. Par ailleurs, il est prévu dans cet amendement que les SCI de capitalisation seront créées par les organismes HLM. Tout locataire d'un logement situé dans l'immeuble social pourra acquérir par tranches les parts du lot représentatif de son logement et devenir associé de la SCI. Le locataire devient propriétaire après avoir acquis la totalité des parts du lot représentatif de son logement. Il devient, à ce titre, associé gérant de la société civile immobilière. Le locataire doit être une personne physique dont les ressources ne dépassent pas les plafonds habituels. Les organismes d'habitations à loyer modéré auraient en charge la gestion des immeubles et ils attribueraient en location les logements concernés. Dans la perspective de redessiner le système du logement, ce nouveau moyen encourage l'accession dans les quartiers que l'on souhaite requalifier, où l'on permet à des ménages modestes d'acquérir un logement dans des zones géographiques dont ils sont exclus par le niveau des prix.

M. le Rapporteur - Avis favorable...

M. Jacques Myard - Très bien !

M. le Rapporteur - ...même si la gestion d'un tel dispositif semble difficile.

M. le Ministre de l'emploi - Avis favorable.

M. Jacques Myard - Embrassons-nous, Folleville ! (Sourire)

M. le Ministre de l'emploi - Nous proposerons néanmoins de compléter ce dispositif au Sénat en y incluant des garanties en cas d'incident de parcours de l'acquéreur des parts. Je lève le gage. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Dumont - Mme Boutin fait non seulement preuve de mémoire mais d'une vraie culture de l'accession sociale à la propriété. En effet, ce dispositif s'est jadis appelé la « location-attribution » et a permis à certains d'entre nous de devenir propriétaires. Je rappelle que cette disposition a été mise à mal, sinon à mort, voilà trente-cinq ans, suite à une manipulation d'information. Depuis, je me bats pour qu'elle soit réintroduite, car je suis favorable à tout ce qui peut favoriser l'accession à la propriété, y compris très sociale et pour tous les types de logements, y compris du neuf, à condition que le processus soit sécurisé, comme M. le ministre vient d'ailleurs de le rappeler.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Nous voterons cet amendement, mais il faudra s'inquiéter en effet de ses possibilités d'application.

L'amendement 400 rectifié, mis aux voix, est adopté.

Mme Martine Billard - Je me suis abstenue, car je crains pour ma part les conflits de copropriétés.

Mme la Présidente - La discussion sur cet amendement est terminée.

M. le Rapporteur - La loi SRU a mis en place une société de garantie à l'accession. L'amendement 49 vise à supprimer le dispositif de garantie de financement et d'acquisition des locaux non vendus pour les seules coopératives HLM.

M. François Scellier, rapporteur pour avis de la commission des finances -L'amendement 13 est identique.

M. Jean-Louis Dumont - L'amendement 395 aussi.

Nous sommes également attentifs à l'abondance des textes législatifs et aux contraintes règlementaires excessives.

Les fonds de garantie ressemblant trop souvent à des fonds d'épargne collectifs au bénéfice de l'Etat, il conviendrait de garantir aux accédants à la propriété apportant une contribution que cet argent ne leur sera pas repris : il faut être plus rigoureux, et plus moral.

Les amendements 49, 13 et 395, acceptés par le Gouvernement , mis aux voix, sont adoptés.

M. le Rapporteur pour avis - L'amendement 14 rectifié prévoit que les SEM bénéficient d'une exonération d'impôt sur les sociétés sur les plus-values réalisées lors de la cession d'immeubles, à condition que ces sommes soient réinvesties dans un délai de quatre ans dans une opération de construction de logements locatifs sociaux. Ce dispositif vise à favoriser l'accession sociale à la propriété ainsi que la construction de logements sociaux. Il doit également aider les SEM à mettre en œuvre l'engagement de construire 33 000 logements dans le cadre du plan de cohésion sociale.

M. Rodolphe Thomas - L'amendement 405 rectifié a le même objectif. Il convient en effet de faciliter les opérations des SEM grâce à une politique incitative.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre de l'emploi - Les discussions avec le ministère des finances sont en bonne voie et nous ne pouvons qu'être favorables à une telle mesure. Néanmoins, le dossier n'étant pas complètement bouclé, je souhaite que ces amendements soient retirés en attendant la deuxième lecture.

L'amendement 14 rectifié et l'amendement 405 rectifié sont retirés.

M. Rodolphe Thomas - L'objectif de ce projet de loi est de développer l'offre de logements. L'augmentation des remises sur le marché peut être un moyen de redynamiser certains quartiers en difficulté. L'offre de logements privés peut également favoriser l'intégration de populations aux profils très variés. Tous les propriétaires doivent être mobilisés pour participer au renouveau de quartiers délaissés, et seuls ceux qui sont conventionnés avec l'ANAH sont concernés. On observe, dans les zones franches urbaines, un nombre de locataires bien supérieur à celui des propriétaires occupants, ce qui entraîne un manque préoccupant de mixité sociale. L'amendement 79 rectifié vise à y remédier en incitant les propriétaires à occuper leur logement situé en ZFU, en les exonérant de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant cinq ans.

M. le Rapporteur - L'amendement 50 est presque identique. Inciter les propriétaires à habiter leur logement est un moyen de favoriser la mixité sociale dans les zones franches urbaines. Seul l'article de référence du code diffère. J'invite donc M. Thomas à retirer l'amendement 79 rectifié.

M. le Ministre de l'emploi - Je comprends votre souci d'augmenter le nombre de propriétaires dans certains quartiers, mais la raison pour laquelle vous liez cet amendement à des zones franches urbaines, qui ont une vocation quasi exclusivement économique, m'échappe. Il risque en outre d'entraîner une augmentation du nombre de vacances, les propriétaires ne mettant pas le bien en location pour pouvoir bénéficier de l'allocation. Enfin, cet amendement tombe indiscutablement sous le coup de l'article 40. Avis défavorable.

M. Rodolphe Thomas - Il est vrai que la zone franche urbaine est un concept à dominante économique, mais il faut jouer sur tous les tableaux pour réussir une redynamisation urbaine, et en particulier sur la mixité sociale.

J'accepte de retirer l'amendement 79 rectifié au profit de celui de la commission.

L'amendement 50, mis aux voix, est adopté.

M. Luc-Marie Chatel - L'accès au crédit, et notamment au crédit immobilier, des titulaires de contrats de travail à durée déterminée ou d'intérim est un sujet de préoccupation récurrent. Les contrats de ce type se multiplient et donnent lieu aujourd'hui à une véritable discrimination en matière d'accès au crédit, vis-à-vis des titulaires de contrats à durée indéterminée qui peuvent fournir des garanties aux établissements bancaires. Deux décisions récentes vont dans le bon sens : l'extension du dispositif loca-pass, qui facilite le cautionnement des loyers, et les marques de bonne volonté de la fédération bancaire française, qui a demandé à ses établissements de considérer les contrats nouvelle embauche et les CDD comme des CDI. Mais c'est insuffisant. Une récente note interne d'un établissement financier bien connu va d'ailleurs parfaitement à l'encontre de cette recommandation.

Par l'amendement 32 rectifié, je propose donc de créer un outil qui a maintes fois démontré son efficacité : un fonds de garantie, tel qu'il en existe par exemple pour permettre aux PME d'accéder au crédit bancaire. L'État et les partenaires financiers pourraient contribuer à un fonds de garantie similaire destiné aux titulaires de ce type de contrats. La rédaction que je propose est suffisamment large pour que les détails soient fixés par un décret après concertation avec les principaux partenaires. Au moment où l'on essaie d'appliquer des mesures pour l'emploi qui ont réussi dans d'autres pays d'Europe, cette mesure constituerait un signal fort pour les travailleurs.

M. le Rapporteur - Cet amendement est très intéressant, mais le Conseil national de l'habitat doit rendre son rapport sur le sujet incessamment. Je vous propose de retirer cet amendement, dans l'attente de ses conclusions.

M. le Ministre de l'emploi - Les activités discontinues, quelle que soit la forme du contrat, posent indiscutablement un problème pour l'accès au crédit. Il semble qu'un dispositif de régulation soit en train d'être mis au point avec les organismes bancaires - bien que pour l'instant, les choses restent très conceptuelles : tout le monde est d'accord sur le principe, mais non sur les modalités ! Dans l'hypothèse où nous ne pourrions pas vous proposer un dispositif pratique et opérationnel en deuxième lecture, je soutiendrais votre amendement. En attendant, je vous demande de nous laisser essayer d'aller au bout d'une solution concertée.

M. Luc-Marie Chatel - Il est urgentissime de trouver une réponse, et j'espère que le Conseil national de l'habitat y parviendra. J'accepte de retirer l'amendement 32 rectifié à condition que vous nous présentiez des propositions en deuxième lecture.

M. François Brottes - Je reprends cet amendement, qui a été retiré sous une pression amicale, mais insistante. M. Chatel est un spécialiste reconnu des freins à la consommation, et je note qu'il reconnaît que la situation précaire des titulaires des contrats qu'il a cités en est un. Il assimile le contrat nouvelle embauche, et l'aurait fait certainement du contrat première embauche s'il existait, à un contrat à durée déterminée. Quant au ministre, il a une façon beaucoup plus pudique que nous d'appeler la précarité puisqu'il parle d'activités discontinues !

Le résultat reste pourtant le même. Ce qui n'est pas conceptuel, Monsieur le ministre, c'est le refus systématique des banques d'accorder un prêt, sauf caution des parents, des grands-parents, des oncles et des cousins, et c'est la précarité réelle de ces contrats de travail. L'existence d'un tel fonds de garantie permettrait donc, même si ce n'est qu'un pis-aller, d'apporter des solutions à des situations inextricables. Nous voyons tous, dans nos permanences, des gens qui ne sont ni en marge, ni sans emploi, ni sans compétences, mais qui ne peuvent sortir de l'intérim et n'ont donc pas accès au crédit. Nous souhaitons donc soumettre cette proposition au vote de l'Assemblée, quitte...

M. Jacques Myard - On a compris, abrège !

M. François Brottes - ...à améliorer le dispositif d'ici à la deuxième lecture.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'un de nos collègues vient de crier « Abrège » : c'est anormal ! Vous constatez, Madame la présidente, que nous nous efforçons de rendre ce débat paisible ; nous avons d'ailleurs adopté des amendements. Mais nous devons pouvoir nous expliquer sur ce texte important, sachant que les députés que nous sommes sont toujours un peu frustrés d'examiner des textes dont la matrice principale a été élaborée par le Sénat. Nous avons donc besoin de temps.

M. Brottes a rappelé combien nous regrettons que le ministre repousse l'examen de la question importante soulevée par l'amendement de M. Chatel au nom de problèmes techniques - ou plutôt à cause de son impréparation aux conséquences sociales de la modification du contrat de travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme la Présidente - En général, lorsqu'un amendement est repris, la discussion ne continue pas. Toutefois, je l'autorise ici car je la crois logique.

M. Jacques Myard - Respectez le Règlement !

M. Michel Piron - On m'accordera, je pense, le temps d'exprimer mon souhait de voir cet amendement retiré, car le Conseil national de l'habitat planche actuellement sur un dispositif global. Il serait dommage de se précipiter : prenons le temps de nourrir notre réflexion de celle du CNH.

Mme Martine Billard - Si l'on se met à citer les contrats, nous serons certainement toujours en retard sur l'imagination du Gouvernement !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Excellente remarque !

Mme Martine Billard - Une autre formule est nécessaire. Faudra-t-il adopter celle du ministre ? Elle ne fera pourtant pas la fortune des personnes concernées.

En outre, les intermittents du spectacle et les signataires de CDD ou de contrats saisonniers en général connaissent de semblables difficultés pour trouver à se loger. Enfin, les assurances refusent à certaines personnes atteintes de maladies graves ou dégénératives la garantie nécessaire à l'obtention d'un crédit immobilier.

Le Parlement doit trouver une solution pour ceux de nos concitoyens, de plus en plus nombreux, qui appartiennent à ces catégories, afin de leur permettre d'accéder à la propriété ou, à défaut, à la location. (Applaudissements sur certains bancs du groupe socialiste)

Mme la Présidente - Je suis saisie par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public sur l'amendement 32 rectifié.

M. François Brottes - Rappel au Règlement, pour signaler à M. Myard que nous avons toutes sortes de moyens pour abréger les débats.

M. Luc-Marie Chatel - Je souhaite, après ces échanges qui ont montré combien la question soulevée par mon amendement préoccupe chacun d'entre nous, donner une explication de vote. Mon amendement répond à cette préoccupation...

Mme la Présidente - Je vous interromps, car le vote est annoncé, et vous vous êtes déjà exprimé tout à l'heure.

A la majorité de 77 voix contre 33, sur 111 votants et 110 suffrages exprimés, l'amendement 32 rectifié n'est pas adopté.

M. Rodolphe Thomas - L'amendement 620 vise à la création d'un répertoire des crédits aux particuliers permettant aux établissements de s'informer de la situation d'endettement des emprunteurs. Géré par la Banque de France, il protègerait les consommateurs en n'en ouvrant l'accès aux établissement de crédit que si l'emprunteur les y autorise.

M. le Rapporteur - Avis défavorable : il s'agit d'un problème sensible, qu'il faut envisager de manière plus globale et sur lequel la commission souhaite engager une concertation avec les établissements de crédit avant de statuer.

Mme la Présidente - Le bruit dans lequel le débat se déroule gênant tout le monde, je suspendrai la séance après que le ministre se sera exprimé, afin que les esprits se calment.

M. le Ministre de l'emploi - Quant à moi, j'ai les idées claires et je suis très calme. Je souhaite, comme le prévoient les textes, que soit saisi le Conseil consultatif du secteur financier, tant le sujet est large. En matière de surendettement, les procédures initiées à l'époque où le crédit immobilier constituait l'essentiel des créances à gérer représentent aujourd'hui moins de 8 % des cas concernés. Je suis heureux de constater que le nombre de procédures de surendettement a baissé de 6 %.

Je demande le retrait de cet amendement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Nous avons déjà discuté de ce dispositif lors de l'examen des propositions relatives au surendettement. Il ne suffit pas de confier un répertoire à la Banque de France pour protéger le consommateur et l'emprunteur. Un dispositif de protection ne doit pas altérer la capacité d'emprunt. Nous sommes donc opposés à un répertoire national qui ne repose pas sur le principe de protection.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - Nous allons nous efforcer de poursuivre le débat dans la sérénité, et peut-être ne sera-t-il pas nécessaire, Madame la Présidente, de suspendre la séance.

Mme la Présidente - En effet, puisque le calme est revenu.

M. Rodolphe Thomas - Certes, il y a une baisse de 6 %, mais c'est toujours trop ! Chaque année, on envisage ce dispositif, et chaque année, il est rejeté. Je maintiens l'amendement.

L'amendement 620, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Ministre de l'emploi - L'amendement 275 vise à renforcer les capacités de la Caisse de refinancement de l'habitat et permettra de diminuer le coût des obligations contractées par l'Etat pour aider à ce refinancement.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

Plusieurs députés socialistes - On n'a rien compris !

L'amendement 275, mis aux voix, est adopté.

M. François Brottes - Au nom de mon groupe, je demande une suspension de séance pour réunir mon groupe, compte tenu de ce qui se passe dans l'hémicycle.

La séance, suspendue à 22 heures 30 est reprise à 22 heures 35.

M. le Rapporteur pour avis - Voilà plusieurs jours que nous discutons âprement de la façon dont nous allons amplifier la politique menée en faveur de la construction et de l'accès au logement, tant en matière de location que de propriété. En effet, il nous a semblé que l'accès à la propriété méritait d'être également encouragé, pour des raisons sociales mais aussi économiques. La situation d'un retraité varie fortement selon qu'il est propriétaire ou non du logement qu'il occupe, si bien qu'il faudrait inciter les futurs retraités à devenir propriétaires de leur logement.

L'article 108 de la loi du 21 août 2003 a créé le PERP, qui offre à tous la possibilité de se constituer une retraite complémentaire, alors que seuls les fonctionnaires bénéficiaient d'une telle faculté au titre de la PREFON. Les versements sont déductibles sous certaines conditions et dans la limite d'un plafond global, tandis que les prestations, servies sous forme de rentes à la sortie du dispositif sont imposables selon les règles applicables aux pensions.

Mais le PERP ne fonctionne pas comme nous le souhaiterions : l'assurance vie lui est préférée, et les bénéficiaires potentiels ne sont pas séduits par une sortie sous forme de rentes, seule possibilité actuelle.

Nous nous sommes donc demandé si le PERP ne pouvait pas être réorienté en vue de favoriser l'accès à la propriété avant la retraite, question à laquelle la commission des finances a répondu de façon positive. Je rappelle d'ailleurs que j'avais déposé en ce sens une proposition de loi, qui avait recueilli l'approbation de nombreux collègues. La commission des finances a donc adopté l'amendement 15, modifié à l'instigation du président Méhaignerie.

Il est toutefois apparu que l'absence d'imposition lors de la sortie en capital n'était sans doute pas totalement justifiable, si bien que le rapporteur au fond a déposé un sous-amendement pour y remédier.

J'indiquerai seulement que la sortie en capital n'a rien de révolutionnaire, puisque le PERCO prévoit déjà cette possibilité en matière de logement. N'oublions pas non plus les difficultés qu'éprouvent les personnes en fin d'activité pour trouver une assurance leur permettant de garantir leur prêt, cette assurance étant d'un coût très élevé au-delà de soixante ans. Telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes très attachés à cet amendement, que la commission des finances a bien voulu adopter.

M. le Rapporteur - Même si nous partageons tous le souci de favoriser l'accès à la propriété, la commission des finances a repoussé l'amendement 15 rectifié, qui présente en effet l'inconvénient de prévoir un double avantage fiscal, lors de la constitution de l'épargne et lors de la sortie en capital. Mais compte tenu de l'intérêt de cet amendement, j'ai déposé le sous-amendement 684, qui tend à rendre imposable le capital, tout en permettant un étalement de l'impôt sur cinq ans afin d'éviter une imposition trop forte au moment du départ à la retraite. Ce dispositif serait dès lors ouvert sans plafond de ressources, et il constituerait une incitation fiscalement équitable et novatrice en faveur de l'accession à la propriété.

M. le Ministre de l'emploi - Le Gouvernement ne partage pas l'avis de la commission des finances sur ce sujet fondamental. Il est en effet proposé de transformer une sortie sous forme de rente en une sortie plus rapide en capital, qui ne permettrait pas de sécuriser le placement sur le long terme, ni de valoriser l'investissement.

Il faudrait par ailleurs apporter la même modification s'agissant de la PREFON, du dispositif dit « Madelin » et de l'ensemble des mutualisations salariales. En l'absence d'un basculement de tous les dispositifs, l'adoption de cette proposition menacerait donc gravement le système existant.

M. le Rapporteur pour avis - J'entends bien les arguments du ministre, mais la sortie en capital devront servir à l'accession à la propriété, elle ne saurait avoir lieu au début de la constitution du capital.

Quant à la deuxième objection, une sortie en capital pour le logement est déjà prévue par le PERCO, dispositif identique au PERP à ceci près qu'il s'agit de versements collectifs effectués par l'entreprise, avec une possibilité d'abondement individuel.

M. le Ministre de l'emploi - Sur le plan technique, je rappelle que le PERCO n'est pas un système d'assurance, mais que les fonds accumulés sont investis dans des OPCVM.

Mme Marylise Lebranchu - J'avoue ne pas avoir tout à fait saisi le sens de cet argument.

J'ajoute que si nous n'avons pas toujours soutenu les dispositifs en faveur de l'épargne retraite pour diverses raisons de fond, je vois deux objections particulières contre l'amendement qui nous est proposé : tout d'abord, nous ne pouvons pas accepter un tel avantage fiscal, même si les jeunes retraités rencontrent effectivement de très grandes difficultés pour obtenir des prêts complémentaires auprès des banques. D'autre part, compte tenu des difficultés rencontrées par les personnes arrivant à l'âge de la retraite pour accéder au crédit - y compris pour faire de simples travaux dans leur logement -, il me semble dangereux de revenir sur la garantie de revenu que leur procure le complément retraite et je ne voterai pas un dispositif qui ne me semble pas au point sur le plan technique. Je suggère plutôt au ministre de se rapprocher de Bercy pour que soient étudiées avec l'attention qu'elles méritent les conditions faites aux seniors pour accéder au crédit. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Martine Billard - L'amendement visant les retraités accédant pour la première fois à la propriété de leur résidence principale, l'on peut légitimement se demander s'il n'a pas qu'une portée symbolique, le nombre de ménages concernés me semblant assez restreint... Il ne me paraît pas très raisonnable de renoncer à un complément de retraite pour se lancer dans un projet d'accession manifestement assez difficile à monter. Rien ne garantit que ces dispositions compliquées ne seront pas balayées par une nouvelle loi !

M. le Rapporteur pour avis - Le système proposé n'est pas aussi compliqué que vous le dites et, de plus, le PERP ne fonctionne pas bien : donnons-lui une nouvelle chance en le rendant plus incitatif.

Le sous-amendement 684, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 15 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

AVANT L'ART. 6

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Notre amendement 342 a miraculeusement survécu à l'article 40 ! A l'annonce de ce texte, nous n'avions pas imaginé qu'il puisse ne contenir aucune disposition tendant à aider les locataires à faire face à des loyers toujours plus élevés, la proportion de leur revenu consacrée au poste logement ne cessant de progresser, en particulier s'ils sont titulaires de minima sociaux et qu'ils perçoivent ou non l'APL. Pourtant, le projet du Gouvernement n'en traite pas. Aussi avions-nous fait adopter par notre commission une série d'amendements, tendant notamment à indexer le montant de l'APL de manière plus réaliste, à supprimer le délai de carence dans son versement, à exiger que les montants dus soient versés en totalité - sans décote d'aucune sorte, ce qui revient à supprimer le récent décret ayant relevé de 14 à 25 € le seuil de versement de l'aide - ou à servir trimestriellement l'allocation si son montant mensuel reste insuffisant pour couvrir les dépenses liées à sa liquidation.

L'article 40 de la Constitution ayant été opposé à nos propositions, nous demandons, par l'amendement 342, que le Gouvernement remette chaque année au Parlement un rapport sur l'impact des aides à la personne sur la solvabilité de leurs bénéficiaires. Dans le dispositif actuel, nous déplorons que le Gouvernement ait seul l'initiative de la révision du montant des aides, de la fixation de leurs modalités de versement et de la revalorisation du ticket modérateur. Il y a des failles dans le système et notre groupe souhaite attirer l'attention sur les conséquences très négatives de l'augmentation continue des loyers, les ménages devant y consacrer une part toujours plus importante de leur revenu, au détriment des autres postes de dépenses essentiels que constituent la santé, l'éducation des enfants ou les loisirs. Peut-on raisonnablement parler d'engagement national pour le logement si rien n'est fait pour renforcer la solvabilité des locataires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Michel Piron - Notre collègue rouvre l'éternel débat sur les mérites respectifs de l'aide à la pierre et de l'aide à la personne, en oubliant que le problème essentiel auquel nous sommes confrontés est celui de la pénurie de logements. Nous devons donner la priorité à la production de nouveaux logements, en vue d'exercer une pression déflationniste sur le montant des loyers. Croire que l'aide à la personne prime sur l'aide à la personne, c'est prendre le risque d'alimenter la hausse des prix...

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Cela n'a jamais été le cas : souvenez-vous des mesures prises par le gouvernement Balladur !

M. Michel Piron - Et je m'étonne que l'opposition reproche au Gouvernement de garder l'initiative du calendrier d'actualisation des aides ou de la définition de leurs modalités de versement. Tel a toujours été le cas, et cela n'a jamais paru gêner aucun des gouvernements qu'elle a soutenus. Je le répète : la priorité est de produire de nouveaux logements sociaux, pas d'aménager les aides à la personne. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Rapporteur - S'agissant de l'APL, les amendements que la commission avait acceptés à l'article 6 ont effectivement été jugés irrecevables au titre de l'article 40...

Mme Annick Lepetit - Pas au Sénat !

M. le Rapporteur - Et nous ne jugeons pas utile de demander au Gouvernement un rapport de plus. Il faut être raisonnable, d'autant que la LOLF dispose que des rapporteurs spéciaux peuvent être chargés de collecter ce type de renseignements.

M. le Ministre de l'emploi - Même avis.

M. François Brottes - Il ne s'agit évidemment pas de demander un rapport à ce gouvernement mais au gouvernement en général... La réponse du ministre est en outre bien sibylline, s'agissant d'amendements qui, pour être tombés sous le couperet de l'article 40, n'en avaient pas moins suscité un consensus en commission. Il est tout de même extraordinaire, Monsieur le président Ollier, que nous discutions parfois des heures en séance d'amendements dont la commission n'a jamais été saisie et que d'autres soient escamotés alors que nous les avons adoptés pratiquement à l'unanimité ! Et puis, le ministre a beaucoup de pouvoirs... dont celui de reprendre les amendements qui n'ont pas franchi le cap de l'article 40. Il serait intéressant de connaître la position du Gouvernement sur des amendements que les commissaires ont adoptés à une large majorité !

Mme la Présidente - Monsieur Brottes, le ministre prend la parole quand il le désire, mais en aucun cas sur l'injonction d'un député.

L'amendement 342, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 6

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Nous aurions voulu aider le Gouvernement à tenir sa promesse de revenir sur le relèvement de 15 à 24 euros du seuil de versement de l'aide au logement, qui avait notamment scandalisé le médiateur de la République.

Par ailleurs, il serait dangereux de traiter la question des aides à la pierre et des aides au logement sans s'intéresser aux conditions de vie des personnes concernées. Si l'on ne se préoccupe plus aujourd'hui que de l'aide à la pierre sans se soucier de tous ceux qui n'arrivent plus à payer leur loyer, l'engagement national est faussé.

Je me doute bien que vous ne tarderez pas à nous parler des statistiques, et de ces 80 000 logements, mais ceux qui connaissent le problème du logement savent bien que ce chiffre-là ne correspond pas forcément à du logement social, que 70% des demandeurs de logements ne peuvent pas accéder au PLS. Vous voici en train de financer largement un dispositif auquel seule une infime partie des locataires peut accéder, alors que vous ne consacrez que peu de moyens au PLAI qui concerne pourtant 50 % des demandeurs de logements ! Si vous ne prêtez pas attention aux problèmes que rencontrent aujourd'hui les locataires, ils ne pourront conserver leur logement, sans pour autant pouvoir accéder aux logements très sociaux qui manquent déjà.

Oui à l'aide à la construction, à condition qu'elle soit cohérente et parallèle à l'aide aux locataires !

Nous avons posé le problème du lien entre l'indexation des loyers et des APL, et je rappelle que sous le gouvernement Balladur, les loyers n'ont pas augmenté, ce qui veut bien dire que les instruments peuvent être utilisés avec pertinence pour que le taux d'effort des locataires reste raisonnable.

Par ailleurs, s'agissant de l'ANAH, je rappelle qu'elle s'est consacrée pendant des années à l'amélioration de l'habitat. Lui donner aujourd'hui pour vocation de soutenir le logement social privé peut être pertinent, et mérite en tout cas quelques explications du ministre. Prenons garde toutefois que l'ANAH ne concurrence d'autres instruments qui relèvent de l'État - je pense notamment à l'ANRU. Je rappelle qu'en la matière les pouvoirs des maires ont été élargis par la loi de cohésion sociale, que des procédures d'accompagnement du logement insalubre peuvent être lancées à l'échelle du département. Enfin, il est toujours difficile d'admettre que demain un instrument public comme l'ANAH puisse utiliser les aménagements fiscaux.

Le ministre entend-il faire de l'agence un acteur unique de l'intervention de l'État dans le domaine du logement social privé ?

M. Jean-Louis Dumont - Je ne referai pas l'historique des interventions financières de l'État en faveur du patrimoine privé à réhabiliter, de la reconquête des centres-villes, ni de l'action de Louis Besson qui a redonné un souffle nouveau à l'ANAH en étendant ses pouvoirs pour répondre à la pénurie du logement. Pour autant, nous ne devons pas oublier la reconquête du bâti ancien qui, assaini et rénové, est devenu un logement social. De ce fait, les résidants devenaient éligibles aux aides à la personne, et l'enveloppe de cette aide a beaucoup augmenté. On a ainsi vu augmenter chaque année les budgets consacrés à cette aide dans des proportions importantes. Puis, petit à petit, la solvabilisation des plus modestes a perdu de sa vigueur, et si les loyers étaient parfois maîtrisés du fait de l'aide à la pierre, les charges augmentaient de plus en plus. C'est un phénomène qui a touché aussi bien le patrimoine privé que le patrimoine social public, et nous avons déjà eu l'occasion, sous de précédentes majorités, de réfléchir à la manière de maîtriser l'évolution du loyer et des charges, car lorsque l'on croise le taux d'effort et le reste à vivre, on peut aboutir à des situations catastrophiques où il ne reste que quelques euros pour finir le mois.

Faut-il pour autant augmenter les enveloppes de l'APL ? On pourrait au moins en améliorer la gestion, comme le réclame le groupe socialiste. Le couperet de l'article 40 est tombé, mais que cela ne nous empêche pas d'en discuter, car la lutte pour le logement en dépend.

Quant à l'ANAH, je ne suis pas opposé à son évolution, mais qu'elle agisse aux côtés des opérateurs publics, pour donner véritablement un sens à la réhabilitation.

En conclusion, oui à la solvabilisation, qui passe par le croisement d'interventions publiques et privées.

Mme Claude Darciaux - Comment ne pas être d'accord avec le ministre sur la question des aides à la pierre et de la construction de logements sociaux ? Pour autant, nous ne pouvons nous désintéresser de la situation des plus modestes qui vivent dans des conditions difficiles. Comment accepter que l'aide au logement  ne soit pas revalorisée? Alors qu'elle bénéficie à plus de 6 millions d'allocataires, dont les trois quarts ont des revenus inférieurs au SMIC, elle ne joue plus son rôle de solvabilisateur, tant elle a été amputée depuis 2002.

Un député UMP - Les 35 heures !

Mme Claude Darciaux - Il faudrait peut-être cesser un jour de nous renvoyer aux 35 heures et aux emplois-jeunes ! Nous devons penser à ces familles pour lesquelles la revalorisation n'a pas eu lieu chaque année, et nous demandons qu'elle soit indexée sur le nouvel indice de référence des loyers. En cinq ans, le taux d'effort a augmenté de 2,5 points pour les salariés, 3 points pour les étudiants, 5 points pour les allocataires des minima sociaux, les aides ayant été sacrifiées depuis deux ans, alors même que les loyers et les charges augmentaient. Vous n'ignorez sans doute pas que le forfait des charges n'est pas revalorisé et ne reflète pas le poids des charges par rapport au loyer, qui ne cesse de croître surtout depuis l'augmentation du prix du gaz.

De surcroît, environ 200 000 locataires ont été exclus du bénéfice de ces aides du fait de la modification du plafond des ressources et du décret de 2004 qui a supprimé l'abattement pour frais de garde d'enfants. Le seuil de versement de l'aide au logement a été relevé de 15 à 24 euros et ce sont aujourd'hui 120 000 ménages modestes qui sont aujourd'hui privés d'une prestation représentant 288 euros par an. Or, nous savons combien une telle prestation est importante lorsque nous recevons dans nos CCAS des familles, souvent des femmes seules avec leurs enfants, qui, après avoir payé leur loyer et leurs charges, ne disposent plus en début de mois que de 15 ou 20 euros. Nous demandons le versement de l'aide, quel que soit son montant.

Nous demandons également la suppression du mois de carence, qui, jusqu'en 1995, n'existait pas. Nous ne pouvons accepter une telle mesure, d'autant plus que le premier mois d'entrée dans le logement entraîne des frais importants.

Le FSL permet aux familles les plus démunies d'accéder à un logement décent, et il est en cela un facteur essentiel de cohésion sociale. Mais le transfert aux départements des crédits consacrés au FSL, dans le cadre de la décentralisation, creuse les inégalités entre les collectivités. Le montant des crédits demeure insuffisant d'autant plus que les missions attribuées au FSL ont été élargies aux impayés. Comment les départements vont-ils pouvoir faire face à l'augmentation de ces charges nouvelles ?

M. Augustin Bonrepaux - Le Gouvernement décide, les départements payent !

Mme Claude Darciaux - Les aides de l'ANAH ne doivent en aucun cas se faire au détriment des aides à la personne pour les ménages les plus modestes et la cohérence doit être respectée entre les plafonds de loyers et de ressources du secteur privé aidé et ceux du secteur social. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Mme Annick Lepetit - Effectivement, l'APL est la grande absente de ce débat. Alors que nous examinons un texte, attendu depuis trois ans, intitulé « engagement national pour le logement », Il est légitime de s'interroger sur le fait qu'il n'y ait rien sur ce dispositif qui concerne, tout de même, six millions de ménages locataires.

M. Jean Ueberschlag - Jospin aurait pu le faire !

Mme Annick Lepetit - Discutons de l'équilibre entre les aides à la pierre et les aides à la personne ! Je ne suis pas certaine qu'il faille supprimer les unes en faveur des autres.

M. Michel Piron - Qui a dit cela ?

Mme Annick Lepetit - Votre gouvernement ! Et je peux vous le prouver ! Depuis 2002, le budget de l'État consacré aux aides au logement diminue drastiquement.

Mme Claude Greff - Quelles sont vos preuves ? (« Le budget ! » sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Annick Lepetit - Ce sont tout simplement les chiffres ! En voici un que vous ne manquerez pas de connaître, puisqu'il est récent : le budget consacré aux APL a été amputé de 72 millions d'euros en 2006. Quelle que soit la justification que peut apporter le Gouvernement, ce n'est pas ainsi que nous pourrons répondre aux difficultés qui se posent à nos concitoyens. Vous connaissez la réalité de leur situation : flambée des loyers, hausse des charges énergétiques - d'ailleurs, vous avez repoussé un amendement de Martine Billard à ce sujet ; visiblement, l'avenir ne vous concerne pas ! - perte du pouvoir d'achat, empilement des contrats de travail précaires.

Continuons à parler chiffres ! En 2004, le Gouvernement a exclu, par décret, 200 000 bénéficiaires de l'APL en relevant le seuil de non-versement de 15 à 24 euros, ce qui représente une perte annuelle de 288 euros pour ces ménages. Le ministre lui-même a indiqué en commission que la fixation du seuil de versement relevait du domaine réglementaire. Par conséquent, il est logique que nous nous tournions vers lui pour poser un certain nombre de questions.

Reprendra-t-il à son compte les amendements déposés par les députés socialistes et votés à l'unanimité en commission ? Je ne suis élue que depuis 2002, il me paraît donc bizarre que nous ne puissions avoir de débat sur ce sujet essentiel, alors que les sénateurs en ont discuté, et même si le président Méhaignerie nous en a expliqué les raisons.

M. le Président de la commission - Ce n'est pas une bizarrerie, c'est le Règlement !

Mme Annick Lepetit - Il est hallucinant que l'on puisse ainsi évacuer du débat démocratique les aides au logement. J'espère, Monsieur le ministre, que vous répondrez à ces questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Jean Ueberschlag - C'est une députée de 2002, elle ne sait pas que Jospin n'a rien fait !

Mme Annick Lepetit - Et vous, qu'avez-vous fait en quatre ans ?

Mme Marylise Lebranchu - Je souhaite justement répondre à nos collègues qui nous accusent de n'avoir rien fait. Il est vrai que nous n'avons pas fait assez, et nous avons convenu que le seuil de versement de 15 euros n'était pas une solution satisfaisante.

J'entends certains dire que les personnes n'ont qu'à travailler plus de 35 heures... Vous oubliez le taux du SMIC horaire, et le fait que beaucoup aimeraient travailler plus de 32 heures. Dans ma région, les travaux à temps partiel, les travaux saisonniers sont nombreux et souvent les personnes ne travaillent - au mieux - que dix mois par an : ce sont elles qui sont les plus touchées par les problèmes liés aux APL, et elles vivent parfois dans des logements quasi insalubres.

Mme Claude Greff - C'est vous qui ne les avez pas rénovés ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Mme la Présidente - Retrouvons la sérénité de nos débats !

Mme Marylise Lebranchu - Vous avez sûrement raison, Madame Greff et vous ne faites jamais d'erreurs. Ce n'est pas mon cas, et j'ai beaucoup de doutes. Je veux demander au Gouvernement de reprendre l'un de ces amendements, car il est le seul à pouvoir le faire. Face à la carte de paupérisation établie par les CAF...

M. Jean Ueberschlag - Vous avez été dix ans au pouvoir ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Mme Marylise Lebranchu - Cher collègue, nous avons, nous aussi, une certaine légitimité à être ici. Lorsque votre mandat arrivera à son terme, vous aurez l'impression de ne pas avoir assez fait et vous souhaiterez revenir. Si vous croyez pouvoir tout faire dans l'espace d'un mandat, je vous souhaite une bonne retraite.

Nous avions un consensus sur ce dossier. Jusqu'à la fin de ces débats, M. le ministre - et je sais qu'il en est convaincu - peut appeler Bercy afin qu'un geste soit fait en direction d'une population, à ce point résignée qu'elle n'attend même plus de nous de pouvoir vivre dans un logement décent.

Beaucoup disent que ces personnes ne votent pas. C'est effectivement le drame de la France : une grande partie de ceux qui souffrent de l'absence d'aide au logement et ne bouclent pas leurs fins de mois, ne font plus confiance aux politiques, ne nous font plus confiance (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) .

M. Michel Piron - Je ne peux laisser dire que l'aide au logement a disparu alors que l'APL a en l'occurrence été revalorisée le 1er septembre dernier à hauteur de 1,8 %.

Mme Annick Lepetit - J'ai évoqué la loi dont nous débattons aujourd'hui !

M. Michel Piron - J'ajoute qu'en matière de logement social, nous avons réalisé en 2005 deux fois plus de constructions que vous en 2000 avec 80 000 logements sociaux financés. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) Voilà qui est incontestable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. François Brottes - Rappel au Règlement sur un sujet fondamental qui concerne six millions de familles. L'honneur du Parlement est en jeu : le Gouvernement doit nous répondre alors que la commission était unanime sur ces amendements. Je demande donc une suspension de séance afin que M. Borloo appelle Bercy si cela est nécessaire. Il n'est pas acceptable que nous n'ayons pas de réponse, quelle qu'elle soit, sur la suppression du délai de carence et sur l'abaissement du seuil de 24 à 15 €. Les arbitrages existent, certes, mais sur une question pareille, nous ne pouvons être traités par le mépris.

La séance, suspendue à 23 heures 35, est reprise à 23 heures 40.

M. le Ministre de l'emploi - On peut comme vous ne pas construire de logements sociaux ou d'urgence - ou si peu - (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), créer ainsi une tension épouvantable...

M. Augustin Bonrepaux - Répondez aux questions !

M. le Ministre de l'emploi - ...et s'en étonner. Il y a dix-huit mois encore, lorsque des Français ne pouvaient plus payer leur loyer, l'APL était suspendue, pire, des procédures d'annulation du bail étaient engagées. Plus de 100 000 foyers vivaient ainsi sans droit ni titre dans les logements sociaux. Nous avons, nous, immédiatement rétabli l'APL dès lors qu'une convention de reprise du paiement des loyers avait été signée, et personne ne peut considérer que ce ne fut pas une bonne mesure. Le montant total de l'APL s'élève à 12 milliards. La baisse de 72 millions, Madame Lepetit, ne résulte pas d'une modification de l'APL mais de l'amélioration des comptes de l'UNEDIC due à la baisse du chômage. Nous disposons de deux textes essentiels : le programme de rénovation urbaine - 30 milliards sont consacrés à l'amélioration des logements - et le plan de cohésion sociale, grâce auquel nous sommes passés de 80 000 à 100 000 logements sociaux construits par an. Nos engagements sont tenus. Enfin, le texte que nous présentons vise à débloquer certaines situations, notamment dans le domaine foncier, de manière à pouvoir atteindre l'objectif de 120 000 logements sociaux construits dans les deux ou trois ans à venir. Pour y parvenir, nous avons accepté une proposition du Sénat visant à ce que l'État compense intégralement l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Nous avons en outre proposé que dans les quartiers de rénovation urbaine, la TVA passe de 19,6 % à 5,5 % s'agissant de l'accession sociale à la propriété. Nous avons également proposé que les terrains de l'État soient vendus 35 % en dessous du prix des domaines. Ce sont-là des efforts considérables afin de parvenir à tripler le nombre de logements sociaux de qualité grâce au PLAI, au PLUS et au PLS. Nous continuerons par ailleurs à construire des logements d'urgence et des résidences sociales hôtelières. L'APL, enfin, a été revalorisée de 1,8 % et le SMIC a quant à lui été augmenté de 17% en trois ans.

M. Augustin Bonrepaux - Pas pour tout le monde ! Ne racontez pas des salades !

M. le Ministre de l'emploi - Voilà vingt ans que des efforts aussi massifs n'avaient pas été accomplis ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Rapporteur - L'amendement 53 rectifié vise à maintenir les initiales actuelles de l'ANAH.

M. le Ministre de l'emploi - Sagesse.

L'amendement 53 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Martial Saddier - L'amendement 381 est défendu.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'amendement 383 est identique : il précise qu'il est dans les missions de l'ANAH de faciliter l'accès au logement des ménages à revenu modeste, certes, mais aussi des personnes défavorisées. Il s'agit de garantir l'égalité entre les dispositifs de logement social publics et privés.

M. Rodolphe Thomas - L'amendement 388 est identique. Il permet d'assurer la cohérence entre le parc privé aidé et le parc social et de rendre plus lisible la fonction sociale du parc privé, en le faisant participer à l'accueil des personnes défavorisées.

Les amendements 381, 383 et 388, acceptés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

Mme Martine Billard - L'amendement 257 subordonne les aides aux bailleurs au fait que les locations respectent le plan départemental d'actions pour les personnes défavorisées. Il demeure en effet des différences entre les locataires du logement social public et ceux du privé : en particulier, la disposition de la loi de cohésion sociale visant à rétablir les APL pour les locataires de bonne foi qui ont eu des difficultés n'a pas été étendue aux locataires des bailleurs privés - alors que d'un autre côté le propriétaire peut faire obstacle à leur accès au fonds de solidarité pour le logement. Ils sont donc particulièrement défavorisés. Un amendement qui traiterait directement du sujet serait frappé d'irrecevabilité au titre de l'article 40.

Je rappelle aussi que si l'allocation logement a connu une hausse de 1,8 %, les loyers, eux, ont augmenté de plus de 4 % ! Même si l'indice a été modifié, l'augmentation des loyers semble pour l'instant rester supérieure. Enfin, lors de la discussion de la loi de cohésion sociale, la commission des affaires sociales avait voté à l'unanimité un amendement de l'UDF proposant le versement trimestriel des aides - considérant qu'un versement mensuel serait une charge de gestion trop lourde. Vous aviez dit que vous essayeriez d'y parvenir, mais depuis, plus rien ! Les locataires des bailleurs privés sont donc constamment exclus des dispositifs proposés depuis un an et demi.

M. le Rapporteur - Cet amendement est trop restrictif par rapport aux conventions ANAH, qui sont beaucoup plus larges et qui en tout état de cause respectent le plan départemental d'actions pour les personnes défavorisées. Avis défavorable.

M. le Ministre de l'emploi - Même avis.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Il est très important que les interventions de l'ANAH dans le patrimoine social privé et dans le secteur public soient équivalentes. Le Gouvernement a manifestement choisi de soutenir fortement le secteur privé, qui contribue à apporter des solutions au logement social. Il est donc naturel que le patrimoine privé soit intégré dans les dispositifs d'aide départementaux. Cet amendement propose une technique pour confondre les patrimoines au bénéfice des plus défavorisés et assure la lisibilité indispensable à ce type d'actions. Il est donc tout à fait pertinent.

L'amendement 257, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Rodolphe Thomas - L'amendement 389 vise à assurer une meilleure complémentarité entre le parc privé aidé et le parc social.

M. Martial Saddier - L'amendement 382 est défendu.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'amendement 384 est identique au 382. Il s'agit d'assurer la cohérence entre les plafonds de ressources du secteur privé aidé et du secteur social. Si l'on veut reconnaître au patrimoine privé une vocation dans le logement social, il faut que les dispositifs qui lui sont applicables soient comparables à ceux du public. Cette mise en cohérence permettra également d'éviter des tentations de favoriser l'un plus que l'autre. À ce propos, les chiffres montrent que l'accompagnement du conventionnement coûte plus cher à l'État dans le parc privé que dans le public. La redistribution des cartes que vous souhaitez doit permettre d'affirmer cette cohérence, pour garantir que les partenariats de l'État sont équitables.

M. le Rapporteur - Avis défavorable sur les trois amendements. Je ne vois vraiment pas comment le préfet pourrait définir des périmètres qui s'accompagneraient de modalités fiscales différentes sur certaines parties du territoire, comme le propose l'amendement 389 ! Quant aux deux autres, l'alignement sur les plafonds HLM pourrait décourager les bailleurs qui souhaitent faire du logement social dans le cadre de l'ANAH.

M. le Ministre de l'emploi - Même avis. En ce qui concerne l'amendement 389, le préfet ne peut pas définir des taux d'aide fiscale pour l'accession à la propriété ! La notion de zonage est courante : la loi définit des dispositifs égalitaires mais elle peut, pour des raisons particulières et qui répondent à des critères constitutionnels, établir un zonage particulier ou autoriser qu'il soit établi de manière réglementaire. Mais le préfet ne peut pas se voir attribuer une capacité fiscale particulière !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'amendement 385 reprend la préoccupation de l'amendement 389 et complète le dispositif en élargissant la faculté d'établir ce périmètre pour le préfet. Il me semble que nous aurions dû examiner les amendements 382 et 384 ensemble, puis le 389 et le 385 ensemble.

M. Martial Saddier - L'amendement 501 rectifié est défendu.

M. Michel Raison - L'amendement 665 rectifié est identique.

M. Rodolphe Thomas - L'amendement 390 rectifié est défendu.

M. le Rapporteur - Avis défavorable sur ces quatre amendements. En ce qui concerne le 390 rectifié en particulier, son objet ne doit pas être réglé par la loi, mais de manière conventionnelle.

M. le Ministre de l'emploi - Même avis.

M. François Brottes - À lire l'exposé des motifs des amendements 501 rectifié et 665 rectifié, on apprend que le dispositif de Robien a été utile dans certains sites, mais pas partout et qu'alors que son objectif était de produire 30 000 logements par an en zone tendue, il en a entraîné 65 000 en 2005, l'excédent constituant pour l'essentiel « une dépense peu utile dans des sites qui n'avaient pas forcément besoin de ce type de logement » (Mme Marylise Lebranchu applaudit) Il n'est même pas besoin de faire appel à l'opposition pour décrier ce dispositif gravissime, qui crée des tensions spéculatives énormes dans certaines régions ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Les amendements 389, 382, 384, 385, 501 rectifié, 665 rectifié et 390 rectifié, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 660 est rédactionnel.

M. le Ministre de l'emploi - Avis défavorable : pourquoi n'inclure parmi les contributeurs aux ressources de l'ANAH que les établissements publics, et en exclure d'autres types de groupements ?

M. le Rapporteur - L'amendement 660 est retiré. L'amendement 240 est de cohérence.

L'amendement 240, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Claude Sandrier - En changeant de nom, l'ANAH aura-t-elle vocation à devenir une agence immobilière sociale ? En effet, sous prétexte d'encourager un conventionnement sans travaux, l'article 6 tend à remettre environ 20 000 logements privés sur le marché, à un niveau certes inférieur au plafond du dispositif Robien, mais bien supérieur à celui des logements locatifs sociaux les moins aidés. Ce sont donc les ménages à revenus moyens qui sont ici visés, au motif que leurs revenus leur permettraient de quitter leurs logements sociaux. Nous n'approuvons pas cette façon de procéder, d'autant que cette mesure s'ajoute à celles qui profitent aux propriétaires, alors que les difficultés d'accès au logement touchent avant tout les demandeurs. Voilà pourquoi l'amendement 387 vise à améliorer l'efficacité de l'assistance et du contrôle dans l'application des conventions conclues par l'ANAH et les propriétaires bailleurs.

M. le Rapporteur - Avis défavorable : cet amendement est déjà satisfait par le droit en vigueur.

M. le Ministre de l'emploi - L'accès au logement passe par la production de logement social, l'accession à la propriété et la reconquête de logements privés vacants. Les conventionnements sans travaux doivent permettre d'atteindre 40 000 conventionnements - soit l'équivalent de toute la production de 2000 ! - cette année, dont la moitié de récupérations de logements vacants. L'objectif est déjà atteint pour moitié. L'ANAH est le meilleur outil de gestion de ce nouveau dispositif. Il ne s'agit donc pas de créer une agence immobilière sociale, mais d'étendre le champ d'intervention de l'ANAH pour augmenter l'offre sociale conventionnée dans le parc privé.

L'amendement 387, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 241 est rédactionnel.

L'amendement 241, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 6 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 6

M. Gilbert Meyer - S'il faut maintenir l'effort de l'État, le patrimoine privé ne doit pas être négligé et l'on doit donner aux particulier les moyens de participer au développement de l'habitat. Un partenariat entre opérateurs publics et secteurs privés est indispensable. L'amendement 77 vise donc à élargir le champ de l'article L. 444-2 de la loi Meyer aux sociétés civiles immobilières familiales. À titre personnel, j'en ai fait l'heureuse expérience : en cinq ans, j'ai remis 250 logements privés sur le marché, et l'offre en faveur des familles nécessiteuses en fut ainsi renforcée.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre de l'emploi - Même avis : nous avions l'an dernier donné notre parole à M. Meyer sur cette amélioration de la loi qui porte son nom. (« Bravo, Monsieur Meyer ! » sur divers bancs)

L'amendement 77, mis aux voix, est adopté.

ART. 7

M. Rodolphe Thomas - Afin d'améliorer la production de logements locatifs privés à loyers maîtrisés, l'amendement 686 vise à améliorer la législation fiscale relative à leur détention. Un loyer unique favoriserait sans distinction les propriétaires, qu'ils acceptent un niveau de loyer intermédiaire, social ou très social. Il vaudrait mieux différencier clairement les taux de majoration : 30 % pour les loyers intermédiaires et 45 % pour les loyers sociaux. Une telle compensation permettrait d'atteindre l'objectif de 14 000 logements à loyers sociaux et 21 000 logements à loyers intermédiaires mis sur le marché en 2006, et le conventionnement n'en serait que plus équitable.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné cet amendement, mais j'y suis favorable à titre personnel.

M. le Ministre de l'emploi - Cet amendement, qui renforce un dispositif voté par le Sénat, aura des effets massifs : muscler la déduction - à hauteur de 45 % - dans les cas de conventionnements avec le parc privé est essentiel ! Une première tentative fut faite en son temps par M. Besson, que le Sénat a renforcée, et à laquelle vous donnez ici toute sa puissance. Un tel effort financier des contribuables et de l'État permettra, je l'espère, d'augmenter de plusieurs milliers par an le nombre de logements mis à disposition. J'y suis donc favorable et je lève le gage.

M. Jean-Louis Dumont - Chacun d'entre nous partage le souci de rapprocher les patrimoines public et privé, afin de permettre aux familles en difficulté de construire leur parcours résidentiel en passant de l'un à l'autre.

Toutefois, nous devons être également attentifs à la qualité des logements privés remis sur le marché. On a vu trop souvent la reconquête d'un patrimoine privé délaissé ou dégradé passer par une remise en état a minima, et souvent suivie d'une nouvelle dégradation rapide. Or, les familles habitant ces logements ne sont pas toujours accompagnées.

L'un des acteurs principaux de l'accompagnement est le monde associatif. C'est lorsqu'il est lié aux acteurs privés et publics dans le cadre d'une collectivité locale que l'on obtient des résultats. Or, je souhaiterais que notre débat fasse du lieu de cette cohérence une obligation. Au-delà de la volonté politique et des moyens supplémentaires, le suivi permettra au droit au logement de devenir une réalité : c'est par l'accompagnement pédagogique des familles que la citoyenneté peut être reconquise.

Si j'approuve certains amendements que nous avons adoptés, parce qu'ils permettent un véritable travail de fond, n'oublions pas pour autant notre objectif principal, qui est de mettre en cohérence l'action menée par le monde associatif et l'intervention des communes.

L'amendement 686, mis aux voix, est adopté, et l'article 7 est ainsi rédigé.

APRÈS L'ART. 7

M. Rodolphe Thomas - Pour que le nouvel investissement dit « Borloo Populaire » soit incitatif, son rendement doit être suffisant pour attirer les investisseurs privés, et il nous semble donc nécessaire de porter le déficit foncier à 15 000 euros. Tel est l'objet de notre amendement 498 rectifié.

Des études de professionnels du secteur montrent en effet que la diminution du plafond de loyer et des ressources du locataire conduisent à une dégradation du rendement de l'investissement « Borloo Populaire », dégradation nullement compensée par le nouvel abattement de 30 % qui est proposé.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre de l'emploi - Qui trop embrasse mal étreint, Monsieur Thomas : on ne peut raisonnablement enclencher tous les turbos à la fois ! Afin de reconquérir le parc privé social, nous avons déjà accepté un amendement portant à 45 % la déduction fiscale, compatible et cumulable avec celle de 30 % applicable aux logements vacants, valable jusqu'au 31 décembre 2007. La déduction totale peut donc se monter à 75 %, ce qui devrait permettre de construire 60 000 logements, chiffre considérable eu égard aux capacités de production actuelles.

S'agissant maintenant de ce que vous appelez le « Borloo populaire », nouveau dispositif en faveur du locatif social, l'effort budgétaire consenti est déjà énorme, et il est difficile d'aller plus loin encore.

Pour en revenir à l'amendement de M. Saddier, le dispositif dit « de Robien » a produit des effets positifs d'une grande ampleur (Dénégations sur les bancs du groupe socialiste et les bancs du groupe des députés communistes et républicains), mais nous avons décidé de le recentrer afin d'éviter les désagréments que vous évoquiez.

Au total, nous avons donc un dispositif complet. Avis défavorable.

L'amendement 498, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 7 BIS

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Je souhaiterais revenir sur le scandale du dispositif « de Robien ». Nul n'ignore en effet l'effet de pompe absorbante qu'a jouée une telle défiscalisation pour les finances de l'État, ni la hausse des prix à la construction et des loyers qu'elle a engendrée. J'ajoute que nous dénonçons depuis longtemps de tels octrois d'avantages fiscaux sans contrepartie sur le plan social.

Dans nos communes, notamment dans les territoires où la loi de juillet 2003 espérait utiliser le dispositif de Robien afin de dégonfler les tensions immobilières, l'ensemble des loyers a augmenté sans aucun contrôle. Une telle situation serait peut-être acceptable si elle résultait du seul jeu du marché, mais elle n'est que l'effet de l'avantage fiscal accordé ! Certains ont même construit des logements sans la moindre intention de les louer, pour des raisons uniquement fiscales !

Les objectifs initiaux ne sont donc pas atteints, puisqu'il ne s'agissait certainement pas de construire des logements qui ne seraient pas loués ! En revanche, l'absence de plafonnement des loyers a rendu les logements ainsi construits inaccessibles à la population visée par le logement social et à la catégorie intermédiaire qui n'en bénéficie pas.

Voilà les effets pervers qui nous conduisent à demander la suppression du dispositif « de Robien ». L'État ne doit plus ignorer son coût budgétaire, ni son coût social (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Jean-Louis Dumont - Autant il était possible d'admettre une aide fiscale indirecte pour reconquérir le patrimoine bâti dans les centres-villes et pour revitaliser certains quartiers, sans nécessiter pour autant de nouveaux investissements collectifs, autant de nouvelles aides du type « Méhaignerie » ou « Besson » ne peuvent se concevoir que sous la double réserve d'un véritable besoin locatif et de garde-fous suffisants.

En effet, le rapporteur lui-même a souligné les dérives engendrées par le dispositif « de Robien », et le logement locatif court des risques considérables quand, d'effets « turbo » en effets d'aubaine, la spirale des avantages fiscaux se déclenche. Si le promoteur initial réalise un bénéfice qui peut se justifier par le travail engendré dans le secteur du bâtiment, les acquéreurs successifs vont chercher à maximiser leur profit, au risque d'une dégradation des copropriétés et de la vacance de certains logements. Des mesures fiscales de cette nature doivent donc faire l'objet d'un encadrement et d'une limitation dans le temps.

J'ajoute que lors d'opérations de renouvellement urbain, et même lors de la construction de logements sociaux destinés à des populations parfaitement connues et identifiées dans des communes semi-rurales, des promoteurs sans scrupules ont investi les marchés en pratiquant la surenchère et en promettant monts et merveilles - pour des résultants hélas bien décevants.

Ne mettons donc pas en place une nouvelle machine infernale ! Certes, tous les ministres du logement ont donné leur nom à des dispositifs nouveaux, et ont ainsi marqué leur époque, mais - de grâce - ciblons les publics et maîtrisons les capacités d'investissement afin de ne pas perdre tout contrôle sur le patrimoine qui sera mis sur le marché demain ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Mme Annick Lepetit - Manifestement, le dispositif de Robien est d'abord un produit financier destiné à procurer un avantage fiscal et, loin de résorber la crise du logement, il tend à l'alimenter en favorisant la flambée des loyers plutôt qu'un investissement locatif maîtrisé, susceptible de répondre aux besoins de la population. Au terme de deux années d'existence, il est temps pour les pouvoirs publics d'en dresser le bilan, en notant d'abord qu'il a été accordé sans aucune contrepartie sociale, pas plus pour ce qui concerne le montant des loyers que les ressources des locataires. L'objectif est de permettre aux investisseurs de payer moins d'impôts en logeant des ménages aisés : quelle est l'efficacité sociale d'un tel système ?

Mais il y a pis, puisqu'aux termes du rapport écrit de Gérard Hamel, nombre de logements de Robien ne trouvent pas preneurs parce qu'ils ont été construits dans des zones où les besoins étaient déjà satisfaits : ils restent donc vacants, alors même que la collectivité a été mise à contribution pour aider leurs propriétaires à les acquérir ! Le ministre veut bien admettre - et cela est louable - que le dispositif est perfectible, mais il aurait selon lui le mérite d'avoir mis sur le marché un grand nombre de logements. Mais à quoi cela peut-il bien servir de construire des logements qui ne profitent à personne ? Les fonds publics alloués au dispositif de Robien ne trouveraient-ils pas mieux à s'employer dans des opérations répondant aux besoins les plus criants ? A plusieurs reprises, nous avons demandé en commission que soit établi un bilan coût-efficacité de la mesure et le Gouvernement aurait eu largement le temps de faire réaliser une telle étude. Aujourd'hui, nous renouvelons cette demande, en déplorant que le de Robien ait finalement trahi le Besson, tant dans ses modalités de création et d'application que dans ses résultats. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean Launay - Monsieur le ministre, vous connaissez désormais les effets négatifs du dispositif de Robien et vous ne pourrez pas les corriger en vous contentant de créer le Borloo populaire ! Il convient de revenir sur un système dont les conséquences sociales, fiscales et environnementales sont désastreuses.

Les dégâts sociaux du de Robien tiennent d'abord au fait que les opérations immobilières menées dans ce cadre ne correspondent en rien aux besoins de la population. Dans mon département du Lot, 70 % des ménages sont éligibles au logement social du fait de leur revenu : à l'évidence, les produits de Robien, trop chers, ne s'adressent pas à eux en priorité !

Dégâts fiscaux, ensuite, puisque 300 millions sont mobilisés dans la loi de finances pour 2006 pour le financer, soit six fois les montants dévolus aux PLA-I ! L'effet d'aubaine est réel : il pèse sur le budget de l'État et compromet la réalisation de la mixité sociale.

Dégâts pour l'environnement, enfin, tant la pression exercée sur le foncier disponible tend à favoriser un développement mal maîtrisé.

Dans les territoires ruraux, le foncier disponible existe encore et notre détermination à proposer à la population les logements sociaux dont elle a besoin est plus forte que jamais. Cependant, nous entendons maîtriser notre développement et notre priorité ne saurait être de procurer un surcroît d'avantages sans contreparties aux catégories sociales les plus favorisées et aux promoteurs requins ! L'association des élus du Lot, que j'ai l'honneur de présider, est très sensible à ce thème. Alors, Monsieur le ministre, ne parasitez pas notre volonté de faire progresser l'offre de logements accessibles, y compris dans les communes non assujetties à l'article 55 de la loi SRU, et supprimez sans plus attendre le dispositif de Robien, car il présente plus d'inconvénients que d'avantages. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Michel Piron - Il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Il y a deux ans et demi, lorsque le dispositif de Robien a été créé, il s'agissait d'abord, compte tenu du retard accumulé dans la production de logements, de relancer l'offre le plus fortement possible...

M. Jean-Louis Dumont - Il aurait fallu maîtriser la démarche !

M. Michel Piron - Pour ce qui est de la maîtrise théorique, vous êtes très forts ! Mais lorsqu'il s'agit de passer à la pratique, vous n'avez pas de leçons à nous donner. Au reste, la majorité des logements de Robien sont occupés, et, je vous le demande, où seraient leurs locataires si ces programmes n'existaient pas ? Il est exact qu'une partie du parc est vacante. Mais il est pour le moins hypocrite - et assez paradoxal - de stigmatiser les avantages fiscaux consentis aux propriétaires tout en plaignant ces derniers de ne pas trouver de locataires...

Plusieurs députés socialistes - Mais nous ne les plaignons pas !

M. Michel Piron - Il est indéniable que le dispositif de Robien a enrichi l'offre de logement locatif. Bien entendu, il convient de l'améliorer, et c'est précisément ce que propose le ministre ! Dès lors, la croisade que mènent certains à son encontre me semble excessive et je demande à chacun de s'efforcer à un jugement plus nuancé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Alain Néri - L'ampleur de la crise du logement ne fait aucun doute et nous ne contestons nullement la nécessité de construire en grand nombre des logements sociaux. Mais le Gouvernement en est encore au stade des bonnes intentions et, même en faisant vite, il ne faut pas moins de trois ans pour faire sortir de terre un programme neuf...

M. Jean Leonetti - Vous vous réveillez aujourd'hui mais vous n'avez rien fait pendant cinq ans !

M. Alain Néri - Notre collègue Jean Launay a parfaitement décrit la pression foncière qui frappe jusqu'aux plus petites communes : forte de 1 300 habitants, ma bonne ville de Beauregard-l'Évêque n'échappe pas à la règle et le mètre carré y coûte désormais 450 francs ! (Murmures sur les bancs du groupe UMP) Je parle en francs parce que raisonner en euros réserve parfois de mauvaises surprises ! (Même mouvement) Dans ces conditions, nous ne sommes plus en mesure de maîtriser l'évolution du foncier et lorsque des opérations immobilières sont réalisées, l'aide de nos collectivités est largement supérieure à celle de l'État.

Je pense, Monsieur le ministre, qu'il y a deux solutions. Tout d'abord, dans nos communes, nombre de logements aujourd'hui insalubres pourraient être réhabilités et remis sur le marché, en développant les OPAH et en leur accordant des crédits supplémentaires. Le développement de ces opérations permettrait de revitaliser les centres bourgs, de donner du travail aux petites entreprises locales et aux artisans, et d'éviter ainsi aux communes d'investir dans les voies et réseaux à la périphérie des villes.

Par ailleurs, le dispositif de Robien n'a pas donné satisfaction, et nombre de logements restent vacants car leurs propriétaires hésitent à les remettre sur le marché, suite aux difficultés qu'ont pu leur causer les précédentes locations, qu'il s'agisse de loyers impayés, ou de dégradations. Dans ma circonscription, ce sont ainsi 500 à 600 logements vacants qui pourraient être à nouveau proposés à la location dès demain, ce qui n'est pas rien ! Il vous suffirait, Monsieur le ministre, de créer un fonds national de garantie des loyers, susceptible de rassurer les propriétaires qui consentiraient à conventionner leurs loyers. Nous pourrions ainsi répondre au droit à chacun de se loger décemment. Aucune espèce animale n'accepte de vivre sans toit. L'homme revendique un droit à un logement décent. Il en va de la dignité de ces personnes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Marylise Lebranchu - Il faut regarder la réalité en face, beaucoup d'opérations sont lancées dans le cadre du dispositif « de Robien », mais souvent pour loger les enfants des propriétaires, alors que les OPAH sont en panne, et que nous manquons de logements sociaux. Parce que ce dispositif est fiscalement intéressant, les opérations se multiplient et les entreprises du bâtiment ne répondent plus aux appels d'offre des communes, moins lucratives. On a l'impression de tout perdre : on ne répond pas à la crise du logement, mais on fait monter les prix pour les collectivités territoriales ! Quant à la réhabilitation de logements, à moins d'être classé en ZUS et de bénéficier de crédits ANRU, elle apparaît très difficile.

La réponse est simple. Il suffirait que le Gouvernement mette fin au dispositif « de Robien » et consacre l'argent ainsi économisé au logement social. Nous pourrions alors trouver un consensus cette nuit, et il ne vous resterait plus qu'à organiser une réunion de Gouvernement avant la reprise de la discussion, la semaine prochaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Et voilà !

M. Philippe Folliot - Nous partageons tous sur ces bancs le souhait que chacun de nos concitoyens dispose d'un logement décent.

J'ai entendu parler du nécessaire rééquilibrage entre l'aide à la pierre et l'aide à la personne. Depuis une dizaine d'années, toutes majorités confondues, l'aide à la personne a été préférée à l'aide à la pierre, sans doute parce que son effet était immédiat, alors qu'une politique ambitieuse d'aide à la pierre prendra du temps, et que ce temps ne correspond pas forcément au temps électoral.

Par ailleurs, le parcours résidentiel est quelque peu bloqué, car nombre de personnes en logements sociaux ont du mal à en sortir, du fait de l'envolée des coûts du foncier. Dans ce contexte, le secteur privé a son rôle à jouer, et le dispositif « de Robien », comme l'a dit un député UMP, a permis à nombre de personnes de se loger dans de bonnes conditions, et de pouvoir libérer des logements HLM. Il est donc essentiel de travailler à l'amélioration et à l'adaptation de ce dispositif, qui a su faire ses preuves, sans parler de ses conséquences économiques très positives pour la filière du bâtiment (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

M. le Ministre de l'emploi - Monsieur Le Bouillonnec, j'ai cru entendre un plaidoyer pour le bouclier fiscal ! Je vous ai en tout cas connu plus précis. Vous pouvez dire que le « Robien » n'est pas bien plafonné, mais en aucun cas qu'il n'est pas plafonné du tout.

Vous ne pouvez pas dire non plus que le propriétaire a intérêt à ne pas louer : s'il ne loue pas, il perd l'avantage fiscal. Monsieur Dumont, les grandes copropriétés privées dégradées ne sont pas des logements de Robien, dont les premiers ont été livrés il y a quelques mois ! Il faut raison garder !

Vous ne risquiez pas d'avoir une pression foncière majeure lorsque vous construisiez 270 000 logements par an. Il s'agissait bien plutôt de dépression, pour les entreprises du bâtiment et pour les terrains. Permettez-moi de vous dire que vous étiez en échec sur la construction globale, tant haut de gamme que bas de gamme, tant privée que publique ! Il nous a fallu tout relancer, voilà la vérité ! Cela l'a été en partie grâce au dispositif Robien.

Gilles de Robien le premier, alors ministre de l'équipement, a dit qu'il fallait adapter ce mécanisme, et c'est ce que nous vous proposons aujourd'hui. Nous modifions le plafond des loyers pour le porter à 70 % des prix du marché, et réservons le dispositif à des locataires dont les revenus ne dépassent pas un certain seuil. Cette dimension sociale que nous lui donnons, en réalité, convient à tous les bancs et vous aurez du mal à voter contre cet article 7 bis, qui est du « Besson », en mieux !

Pour le reste, Madame Lepetit, je me permets de vous rappeler que les promoteurs ont une obligation de garantie des loyers.

Monsieur Néri, nous partageons votre avis sur les vacances. Elles sont particulièrement fortes dans les centres-villes, dans les zones rurales, dans les grandes agglomérations. Nous disposons de trois types de réponse, et de nouveau, j'ai du mal à croire que vous ne voterez pas ce texte.

Lorsque, en tant que maire, vous décidez de rendre un terrain constructible, une partie de la plus-value reviendra à la collectivité. Cela n'avait jamais été fait auparavant ! Vous pouvez également adapter la taxe locale d'équipement. Nous mettons en place des dispositifs pour réduire les contentieux abusifs et scandaleux, sur lesquels vous nous rejoignez.

Je ne doute pas non plus, Monsieur Néri que vous avez voté les dispositifs incitatifs pour les propriétaires « déçus » de la location, qui permettront de réduire la vacance des logements. Nous travaillons par ailleurs avec les partenaires sociaux sur une garantie globale et nationale des risques locatifs. En tant que maire, vous pouvez d'ores et déjà vous appuyer sur la loi Meyer et signer avec un organisme public conventionné FSL une garantie dès la première année de la vacance.

En résumé, ce texte améliore l'offre foncière, aide les maires bâtisseurs, propose une TVA à 5,5 %, réalise la compensation TFPB attendue depuis trente ans : je ne vois vraiment pas pourquoi vous ne le voteriez pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. le Rapporteur - L'amendement 554, troisième rectification, rédactionnel, tire les conséquences de la loi de finances pour 2006 et prévoit qu'un engagement de location peut être suspendu à l'issue d'une période de location d'au moins trois ans pour mettre le logement à disposition d'un ascendant ou d'un descendant.

M. le Rapporteur pour avis - Sans doute faut-il adapter ce dispositif mais il nous semble qu'une baisse trop importante du plafond du loyer rend le dispositif moins attrayant. Le sous-amendement 655 rectifié tend donc à ramener cette baisse à 20 % des prix du marché.

M. le Ministre de l'emploi - Nous avons fait le choix d'avoir deux dispositifs, et souhaitons que le Robien soit beaucoup plus social. Or le sous-amendement pose un problème d'équilibre et nous souhaiterions que vous le retiriez. Avis favorable à l'amendement 554, troisième rectification.

M. le Rapporteur pour avis - Je retire le sous-amendement.

M. François Brottes - Je note que dans le IV de cet amendement, il est proposé que le Gouvernement fasse un rapport, ce qui nous a été refusé pour l'allocation logement. Nous ne sommes pas opposés à ce qu'un bilan de l'application des aides fiscales soit effectué. Mais le rapport comportera-t-il un comparatif avec les investissements publics en matière de logement locatif social ? Par ailleurs, le président de la commission pourrait-il demander à ses services de dresser un tableau comparatif des divers dispositifs d'ici à la deuxième lecture ?

M. le Président de la commission - C'est avec grand plaisir que nous vous donnerons satisfaction.

M. le Rapporteur - Rien n'interdira au Gouvernement d'intégrer un tel comparatif dans son rapport.

M. le Ministre de l'emploi - Nous nous plierons à la volonté de l'Assemblée.

L'amendement 554 troisième rectification, mis aux voix, est adopté.

L'article 7 bis est ainsi rédigé.

La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu, cet après-midi, mercredi 25 janvier, à 15 heures.

La séance est levée à 1 heure 10.

              La Directrice du service
              du compte rendu analytique,

              Catherine MANCY

ORDRE DU JOUR
DU MERCREDI 25 JANVIER 2006

QUINZE HEURES : 1re SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 2709 rectifié), portant engagement national pour le logement.

Rapport (n° 2771) de M. Gérard HAMEL, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

Avis (n° 2765) de M. François SCELLIER, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 2e SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


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