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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2005-2006 - 61ème jour de séance, 143ème séance

2ème SÉANCE DU JEUDI 9 FÉVRIER 2006

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

      ÉGALITÉ DES CHANCES (suite) 2

      APRÈS L'ART. 3 (suite) 2

      ORDRE DU JOUR DU MARDI 21 FÉVRIER 2006 12

La séance est ouverte à quinze heures.

ÉGALITÉ DES CHANCES (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi pour l'égalité des chances.

APRÈS L'ART. 3 (suite)

M. Gaëtan Gorce - L'amendement 444 est défendu.

M. Laurent Hénart, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Avis défavorable.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes - Cet amendement visait à harmoniser les dispositions du CNE et celles du CPE. Or, le développement de l'emploi des jeunes exige des mesures spécifiques afin que les entreprises puissent les embaucher et ainsi mettre un terme à leur précarité. Le CPE doit être une véritable incitation à l'embauche. Conformément aux propos tenus par M. le Premier ministre le 16 janvier, le Gouvernement ouvrira un débat plus général sur le contrat de travail et nous pourrons alors discuter avec les partenaires sociaux de l'opportunité d'une harmonisation des divers contrats existants. Avis défavorable.

M. Bernard Accoyer - Rappel au Règlement.

Nous discutons enfin d'un nouvel amendement après de longues heures passées à examiner une série de sous-amendements... (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. René Dosière - Obstruction !

M. Bernard Accoyer - ...et une matinée où il n'a pas même été possible de débattre. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) Je souhaite revenir sur ce qui s'est passé depuis une dizaine de jours dans cet hémicycle. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Didier Migaud - L'UMP est minoritaire !

M. le Président - Je vous en prie ! De là à ce que M. Accoyer demande le quorum... (Sourires)

M. Bernard Accoyer - Je ne le ferai pas : nous avons suffisamment vu l'opposition multiplier les manœuvres les plus caricaturales afin d'éviter le vrai débat.

M. Jean-Pierre Blazy - Parole d'expert !

M. Bernard Accoyer - Je me souviens encore des discours enflammés et des affirmations péremptoires de la gauche sur les emplois-jeunes, alors qu'il ne s'agissait que de mesures parking, sans lendemain, financées par l'argent public.

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Où est votre baguette, Monsieur le Président ?

M. Bernard Accoyer - Vous avez fait croire à la jeunesse que son avenir était assuré alors que vous n'aviez prévu aucune indemnisation chômage ni aucun droit à la formation. Vous avez menti pendant cinq ans à la jeunesse de France ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Et depuis dix jours, vous continuez de lui faire croire que des emplois publics constitueraient une solution.

M. Jean-Pierre Blazy - Qu'avez-vous fait pendant cinq ans ?

M. Bernard Accoyer - C'est inacceptable. Avec le CIVIS, le Gouvernement, lui, a offert de véritables emplois aidés à ceux qui en ont vraiment besoin, faute d'avoir pu disposer d'une formation.

M. Henri Emmanuelli - Ce n'est pas sérieux !

M. Bernard Accoyer - Ce sont 350 000 emplois dans le secteur privé que nous avons ainsi créés. Vous, vous avez laissé ces jeunes sur le bord du chemin ! Avec le triplement des contrats en alternance,...

M. Henri Emmanuelli - Cela suffit !

M. Bernard Accoyer - ...nous mettons le pied à l'étrier à des milliers de jeunes afin de les insérer durablement dans la vie professionnelle. Enfin, le CPE vient compléter l'ensemble des moyens que nous avons mis en œuvre pour améliorer la situation de l'emploi.

Compte tenu de l'attitude de l'opposition, je vous demande, Monsieur le président, une suspension de séance de trois-quarts d'heure. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. le Président - Plusieurs collègues ont demandé la parole.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles - Ce matin, la commission des affaires culturelles a organisé une table ronde sur la presse quotidienne nationale et régionale, à laquelle ont participé, entre autres collègues, M. Françaix, dont l'apport à nos débats fut particulièrement important, et Mme Pecresse, que je salue. Je suis stupéfait que pendant ce temps-là, en séance publique, aucun amendement n'ait pu être discuté. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) J'ajoute, en revanche, qu'un amendement comparable à celui présentement défendu par le groupe socialiste a déjà été discuté et rejeté hier. Je m'associe à la demande de suspension de séance formulée par M. Accoyer.

M. René Dosière - Au nom du groupe socialiste, je défends à nouveau cet amendement, que nous voterons bien entendu.

M. Jean-Marc Ayrault - Je suis indigné par les propos de M. Dubernard.

M. le Président de la commission - C'est une habitude !

M. Jean-Marc Ayrault - Pas du tout : je n'ai rien contre vous et je respecte votre fonction. Néanmoins, vous ne pouvez pas nous faire la leçon. Vous n'étiez présent ni cette nuit ni ce matin. Nous menons une importante bataille politique sur la conception que nous nous faisons du droit social et nous avons le devoir de la défendre. On nous accuse depuis plusieurs heures de faire de l'obstruction. Or, vous avez lancé une véritable propagande en faisant croire que l'affaire était terminée, que le CPE était voté, au point même de tromper la presse. Quelle n'a pas été la stupéfaction de certains de nos concitoyens, ce matin, persuadés que la bataille était finie, lorsque nous leur avons dit que l'article 4, sur un projet qui en comporte 28, n'avait pas même été examiné ! En procédant ainsi, vous avez pris le risque que des députés UMP considèrent également que le débat était terminé, au point de regagner leur circonscription. (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Vous êtes minoritaires, et c'est pour cela que vous demandez une suspension de séance. Oui, Monsieur le président Debré, on ne peut continuer ainsi.

Mme Muguette Jacquaint - M. Accoyer se dit stupéfait. Je suis quant à moi stupéfaite de l'entendre dire que ce texte, et le CPE en particulier, constituent une nouvelle chance pour les jeunes en difficulté. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre ! Tout le monde, associations, syndicats, familles, même l'abbé Pierre vous ont dit que la précarité était responsable du développement de la pauvreté.

M. Thierry Mariani - Elle radote !

Mme Muguette Jacquaint - On peut avoir un emploi et être pauvre. Or, que faites-vous avec ce texte, sinon accroître la précarité ? Vous imposez un peu plus de difficultés aux mêmes personnes quand d'autres vivront encore plus dans l'opulence. Voilà ce qui est révoltant !

Nous voterons cet amendement.

La séance, suspendue à 15 heures 15, est reprise à 15 heures 35.

M. Alain Joyandet - Rappel au Règlement. Monsieur le Président, notre groupe a été très choqué que la légitimité du vote du CPE, intervenu très tôt ce matin même, ait été mise en cause à plusieurs reprises, certains de nos collègues de l'opposition s'étant crus autorisés à parler de « pseudo vote », comme s'il y avait ici des votes valables et d'autres qui ne le seraient pas...

M. Jacques Myard - C'est une insulte à la représentation nationale !

M. Alain Joyandet - Venus nombreux soutenir l'amendement du Gouvernement, les députés de la majorité ont exprimé un vote indiscutable, le rapport des voix étant - comme du reste sur la plupart des autres amendements - de un à deux. Les insinuations que nous avons entendues sont donc très choquantes,...

M. Henri Emmanuelli - Tant que le vote solennel de l'ensemble du texte n'est pas intervenu, il est juridiquement faux de considérer la mesure comme adoptée.

M. Alain Joyandet - ...certains allant jusqu'à dire que le CPE n'aurait pas été voté, ce qui constitue un véritable déni de démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Henri Emmanuelli - Arrêtez ce cinéma grotesque !

M. Alain Joyandet - Je me garderai bien de mettre en cause le président Ayrault car il a participé très activement à nos débats, lesquels ont souvent été riches et constructifs...

Plusieurs députés socialistes - N'en parlez pas au passé ! Ce n'est pas fini !

M. Alain Joyandet - Chacun a su tenir un langage de vérité pour exposer ses arguments et pas un seul amendement n'est passé au travers des explications nécessaires, au risque de quelques redites. Las, la montée d'une forme d'obstruction de plus en plus insistante n'a pas permis d'examiner plusieurs dispositions très intéressantes de ce projet de loi et, au nom de mon groupe, je regrette que ceux qui se livrent à ces manœuvres aient décidé de faire en sorte que la discussion n'ait pas lieu. On a le droit de ne pas être d'accord,...

Mme Muguette Jacquaint - Encore heureux !

M. Alain Joyandet - ...pas de bloquer l'institution parlementaire comme le fait l'opposition depuis plusieurs jours. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Depuis le premier jour de l'examen de ce texte, il y a eu 106 rappels au Règlement, et, depuis 10 heures 30 ce matin, nous n'avons fait que cela... Puisque le Règlement m'y oblige, je vais donner la parole à tous ceux qui souhaitent s'exprimer dans ce cadre mais il serait bon que nous puissions enfin nous mettre au travail sur le fond.

M. Maurice Leroy - Merci, Monsieur le Président, de me donner la parole pour ce 107e rappel au Règlement... Je n'avais pas prévu de prendre la parole, mais trop c'est trop ! Je rappelle à l'ensemble de mes collègues que nous sommes tous appelés à siéger, alternativement, au gré de l'alternance démocratique, dans la majorité ou dans l'opposition... (Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président de la commission - Sauf les hommes et les femmes libres ! Comparini libérée, Rochebloine libéré !

M. Maurice Leroy - Souffrez, Monsieur le Président Dubernard, qu'il y ait encore quelques minutes d'expression libre dans cet hémicycle.

Monsieur le Président Debré, ce que nous vivons en ce moment correspond très précisément à ce que vous avez dénoncé dans votre discours du 3 janvier dernier, à l'occasion des vœux au Président de la République. Ce fut d'ailleurs un magnifique discours et je suis fier d'avoir eu l'honneur d'y assister avec le reste du Bureau de notre Assemblée...

M. le Président - Oubliez-moi un peu et concluez ! (Sourires)

M. Maurice Leroy - J'invite nos collègues de l'UMP à le relire...

Plusieurs députés socialistes - Ils devraient l'apprendre par cœur !

M. Maurice Leroy - Vous y dénonciez à juste titre les amendements gouvernementaux de cinq pages - en l'occurrence sur les droits d'auteur - déposés nuitamment et discutés à l'emporte-pièce. Est-il illogique que l'on s'expose à un ralentissement des débats en agissant de la sorte ?

Pour ce qui la concerne, l'UDF se flatte d'avoir été constructive dans ce débat important mais les conditions de travail détestables qui nous sont faites, alors que plane sur nos échanges l'ombre du 49-3, ne permettent pas de bâtir un véritable contre-projet au CPE. Je veux dire à mes collègues de l'UMP qu'il n'y a pas lieu de trop se réjouir car en agissant ainsi, ce n'est pas la gauche qu'on affaiblit mais le Parlement tout entier.

M. le Président de la commission - Monsieur Ayrault, j'ai un grand respect pour vous et pour votre fonction de président de groupe. Tout à l'heure, vous avez cru bon d'affirmer que je n'avais pas participé à la séance de la nuit dernière. C'est faux : j'étais là jusqu'à une heure du matin et je ne suis sorti de séance que pour préparer la très riche table ronde de notre commission sur la presse de ce matin, à laquelle les membres du groupe socialiste ont activement participé, en particulier MM. Françaix et Nayrou.

Sans emboîter le pas à M. Leroy, je voudrais vous dire, Monsieur le Président, combien les réformes que vous envisagez me semblent pertinentes, en particulier celle qui consisterait à dédoubler la commission des affaires sociales, avec d'un côté le sanitaire et social, de l'autre, l'éducation, la culture, la recherche... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Pour en revenir au sujet qui nous occupe, laissez-moi vous dire que je suis stupéfait de recevoir dans ma permanence autant de jeunes, pour certains issus de grandes écoles, qui ne se voient proposer que des stages, durant lesquels on les exploite avant de les jeter comme des kleenex !

M. Jean-Marc Ayrault - Si je comprends bien, M. Dubernard reçoit dans sa permanence des jeunes qui le supplient de les engager en CPE ou en CNE !

Je ne suis pas d'accord avec les conclusions de M. Joyandet. Certes, nous avons eu un débat approfondi et les sous-amendements que nous avions déposés à l'amendement du Gouvernement sur le CPE ont bien fait apparaître la philosophie du dispositif. Nous avons donc fait œuvre utile. Mais pour nous, ce débat n'est pas terminé. Nous avons déposé 80 autres amendements après l'article 3 et nous souhaitons pouvoir les présenter, recevoir une réponse de la commission et du Gouvernement, dialoguer, bref poursuivre le travail. Les amendements sont là et nous sommes prêts à les défendre.

M. le Président - Je suis prêt, également, et je ne souhaite qu'une chose : que l'on avance. Mais j'ai l'impression que l'on recule.

M. le Rapporteur - L'amendement du groupe socialiste...

M. Gaëtan Gorce - On ne l'a pas défendu !

M. le Rapporteur - Si. M. Ayrault s'est exprimé hier contre un sous-amendement de la commission qui prévoyait pour le CPE une procédure d'évaluation calquée sur celle qui existe pour le CNE, c'est-à-dire menée par une commission à laquelle participent les partenaires sociaux. Ce sous-amendement ayant été adopté hier, en dépit du fait que certains trouvaient que c'était une mauvaise idée, l'amendement du groupe socialiste est satisfait. Avis défavorable, donc.

M. Jean-Marc Ayrault - Notre amendement n'a rien à voir. Je constate en tout cas que l'évaluation du CNE n'a pas eu lieu, contrairement à l'engagement du Premier ministre de ne rien changer avant que ce bilan ait été fait !

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement, je le répète, est défavorable.

L'amendement 444, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard - Nous examinons un projet censé répondre à l'urgence sociale mise en évidence par la crise des banlieues, mais à part son titre, je ne vois pas grand-chose dans ce projet qui réponde à ce qui s'est passé en novembre et décembre. Pour lutter contre les discriminations, le Gouvernement précarise l'ensemble de la jeunesse de moins de 26 ans !

Nous sommes contre le CPE, mais nous essayons de limiter les dégâts. C'est pourquoi je défends un amendement 127 qui a pour objet de protéger les femmes enceintes au cours des deux premières années de la période d'essai. Nous avons présenté hier sur le même sujet des sous-amendements, qui ont été repoussés de justesse. J'espère que nous serons aujourd'hui assez nombreux pour garantir cette protection aux femmes enceintes et leur éviter d'aller ensuite se défendre devant les prud'hommes pour obtenir une compensation financière. Je rappelle en effet que la majorité a supprimé l'obligation de réintégrer dans son poste un salarié injustement licencié. Mieux vaut donc protéger avant.

M. le Rapporteur - L'article L. 122-25-2 du code du travail offre une protection supérieure à celle qui est demandée ici, puisqu'il dispose que l'on ne peut pas rompre le contrat de travail d'une femme enceinte et qu'il ajoute à cette période de neuf mois le congé maternité pris après la naissance, soit dix semaines, et une période de sécurité de quatre semaines, soit en tout trois mois et demi.

Si nous vous avions suivi hier, Madame Billard, nous aurions eu des femmes enceintes protégées pendant douze mois et demi sous n'importe quel contrat de travail, sauf en CPE, où elles n'auraient été protégées que pendant neuf mois. C'est l'exemple typique d'un amendement bien intentionné mais dangereux, puisqu'il soustrairait des salariés de l'ordre public social.

Nous voulons, nous, que les personnes en CPE bénéficient de l'ensemble des protections de l'ordre public social et des jurisprudences établies.

M. le Ministre délégué - Nous avons déjà eu ce débat hier soir à l'initiative de M. Tian, ce qui nous a permis de bien faire ressortir que dans ces deux types de CDI que sont le CNE et le CPE, les droits sociaux fondamentaux sont garantis. La protection de la femme enceinte contre le licenciement fait partie de ces droits garantis par ce que l'on appelle l'ordre public social.

Cette protection est assurée par l'article L. 122-25-2 du code du travail : « Aucun employeur ne peut résilier le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constaté et pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit en application de l'article L. 122-26, qu'elle use ou non de ce droit, ainsi que pendant les quatre semaines qui suivent l'expiration de ces périodes. Toutefois, il peut résilier le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressée, non liée à l'état de grossesse, ou de l'impossibilité où il se trouve, pour un motif étranger à la grossesse, à l'accouchement ou à l'adoption, de maintenir ledit contrat. »

Sauf s'il est prononcé pour un des motifs justifiant, par application de l'alinéa précédent, la résiliation du contrat de travail, le licenciement d'une salariée est annulé si, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, l'intéressée envoie à son employeur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, soit un certificat médical justifiant qu'elle est en état de grossesse, soit une attestation justifiant l'arrivée à son foyer, dans un délai de quinze jours, d'un enfant placé en vue de son adoption ; cette attestation est délivrée par le service départemental d'aide sociale à l'enfance ou l'organisme autorisé pour l'adoption qui procède au placement. »

Enfin, point fondamental du droit public social, « les dispositions des précédents alinéas ne font pas obstacle à l'échéance du contrat de travail à durée déterminée. » (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

Plusieurs députés socialistes - Le ministre fait de l'obstruction ! Il lit un article du code en entier !

M. le Ministre délégué - Soulignons également que la réintégration d'une salariée, licenciée en raison de son état de grossesse, est de droit comme l'a rappelé la chambre sociale de la cour de cassation dans son arrêt du 30 avril 2003.

Ainsi, Mesdames et Messieurs les députés, ces deux CDI assortis d'une phase de consolidation de deux ans - voire moins si le salarié a déjà travaillé en intérim, stage ou formation en alternance dans l'entreprise - protègent les femmes enceintes (Mêmes mouvements). Nous répondons aux préoccupations des parlementaires (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président - Merci, Monsieur le ministre !

M. le Ministre délégué - Nous ne saurions être favorables à des amendements qui affaibliraient l'ordre public social par le bégaiement et la répétition ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Bernard Accoyer - L'amendement 127, déposé par Mme Billard, part d'un bon sentiment. Pour autant, comme M. Larcher vient de le démontrer, il aurait conduit à une moindre protection des femmes enceintes. Mme Billard est l'une des parlementaires de l'opposition qui travaillent le plus (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains), je ne peux donc croire qu'elle ignorait l'effet contreproductif de son amendement.

Plusieurs députés socialistes - Machiste !

M. Bernard Accoyer - Cette démarche illustre la volonté de l'opposition de retarder le débat...

Mme Martine Billard - Faux !

Plusieurs députés socialistes - C'est vous qui faites de l'obstruction !

M. Bernard Accoyer - ...à moins qu'il ne s'agisse tout simplement d'une insulte aux droits des femmes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Le CPE est un contrat protecteur... (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Mme Muguette Jacquaint - Arrêtez de dire n'importe quoi !

M. Bernard Accoyer - ...introduit dans le droit du travail par un amendement adopté la nuit dernière à une majorité écrasante. Le CPE est un véritable contrat de travail...

M. Jean-Pierre Blazy - Prouvez-le !

M. Bernard Accoyer - ...avec un vrai salaire (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains), qui ouvre le droit à la formation (Mêmes mouvements), à l'indemnisation du chômage (Mêmes mouvements), à une garantie pour louer un logement (Mêmes mouvements). Messieurs et Mesdames de l'opposition, ces droits, vous les aviez refusés à la jeunesse de France, nous les lui avons donnés ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Enfin, la politique du Gouvernement en matière d'emploi des jeunes, contrairement à ce qu'essaiera de faire croire la gauche, est cohérente : CIVIS, extension des contrats jeunes en entreprises à tous les jeunes de moins de vingt-six ans au chômage depuis plus de six mois, multiplication par trois...

M. le Président - Merci, Monsieur Accoyer !

M. Bernard Accoyer - ...des contrats en alternance et enfin CPE. Ce dispositif complet devrait nous rassembler...

M. Jean-Pierre Blazy - Quatre ans que nous attendions la réponse du Gouvernement !

M. Bernard Accoyer - ...mais l'opposition en a décidé autrement. Elle a préféré faire de l'obstruction...

Plusieurs députés socialistes - Vous ne faites pas autre chose en ce moment !

M. Bernard Accoyer - ...et n'a pas hésité à insulter certains des présidents de séance (Huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). En réalité, le parti socialiste, paralysé par les querelles de ses petits chefs, ...

M. le Président - Monsieur Accoyer, concluez !

M. Bernard Accoyer - ...oublie l'essentiel : le débat démocratique sur le problème concret qu'est l'accès des jeunes à l'emploi ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP ; vives protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Marc Ayrault - Monsieur le Président, cette intervention appelle un rappel au Règlement !

M. Henri Emmanuelli - C'est scandaleux !

M. le Président - Monsieur Emmanuelli, taisez-vous !

M. Henri Emmanuelli - Monsieur le Président, vous n'avez pas le droit de me parler sur ce ton ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Alain Vidalies - M. le rapporteur, M. le ministre et M. Accoyer nous ont donné une fort belle leçon sur la protection des femmes enceintes. Il leur aura fallu pas moins de vingt-quatre heures pour se mettre d'accord et nous répondre. Reste que leur démonstration est bancale (Même mouvement) en raison du caractère d'OVNI juridique que sont les CPE et les CNE. En effet, ils ont oublié de préciser que le licenciement d'une salariée, enceinte ou non, durant la période de consolidation n'a pas besoin d'être motivé ! En cas de conflit avec l'employeur, ce dernier pourra toujours invoquer l'exception prévue par l'article L. 122-25-2 du code du travail comme motif de rupture du contrat : la faute grave (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Les donneurs de leçon seraient donc avisés de faire preuve de moins d'arrogance !

M. Bernard Accoyer - Les socialistes sont devenus fous furieux !

M. Alain Vidalies - Enfin, Monsieur Accoyer, vous venez d'affirmer que ce texte offre de nouveaux droits aux jeunes. Quels sont ces fameux acquis ? Premièrement, c'est la fragilisation de l'ensemble des moins de vingt-six ans de ce pays, et non des emplois nouveaux pour les jeunes ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Deuxièmement, c'est le droit pour l'employeur d'embaucher successivement sur le même poste et sans limites des jeunes en CPE (Même mouvement).

Mme Valérie Pecresse - Non !

M. Alain Vidalies - Troisièmement, un jeune de moins de vingt-six ans pourra enchaîner les CPE !

Mme Valérie Pecresse - N'importe quoi !

M. Alain Vidalies - Madame Pecresse, le Gouvernement l'a confirmé. Assumez ce que vous avez voté : la minorité sociale jusqu'à vingt-six ans !

(M. le Premier ministre et plusieurs membres du Gouvernement entrent dans l'hémicycle sous les applaudissements des députés du groupe UMP et les huées des députés du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. le Président - La parole est à M. le Premier ministre (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. François Loncle - Que M. de Villepin commence par se faire élire !

M. le Président - Du calme ! Du calme !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre - (Les députés du groupe socialiste et du groupe communiste et républicains, par leurs cris de protestation, couvrent le discours du Premier ministre.) Face aux inégalités, face aux discriminations et aux injustices, face au chômage des jeunes, notre pays s'impatiente. Il attend des réponses. Il veut des décisions. Le projet de loi pour l'égalité des chances, soumis à votre examen depuis plus d'une semaine...

M. Henri Emmanuelli - Justement, où étiez-vous tout ce temps-là ?

M. le Premier ministre - ...ne prétend pas répondre à toutes les difficultés. Mais, avec lui, nous nous attaquons, point par point...

M. François Hollande - Imposteur !

M. le Premier ministre - ...avec détermination et pragmatisme, aux plus importantes d'entre elles : le développement économique des quartiers avec la création de quinze nouvelles zones franches urbaines,...

M. François Hollande - Nous n'en avons pas discuté !

M. le Premier ministre - ...les discriminations avec le renforcement du pouvoir de sanction de la Haute autorité, la formation et l'éducation avec la mise en œuvre de l'apprentissage junior,...

M. Henri Emmanuelli - Ah !

M. le Premier ministre - ...le chômage des jeunes avec une exonération totale des charges pour les chômeurs de plus de six mois.

M. François Hollande - Cette mesure date du Gouvernement Raffarin !

M. le Premier ministre - Sur tous ces points, nous voulons agir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Et puis, il y a l'entrée sur le marché de l'emploi.

M. Yves Durand - Vous auriez dû venir en débattre dès la semaine dernière !

M. le Premier ministre - Les jeunes Français sont aujourd'hui contraints de passer par une succession de contrats à durée déterminée, de contrats d'intérim, de stages, de périodes de chômage. Il faut subir huit à dix ans cet enchaînement de la précarité avant de décrocher enfin un emploi stable et de pouvoir démarrer dans la vie. Vous en conviendrez sur tous les bancs, ce n'est plus acceptable ! Nous avons le devoir de faire plus, le devoir de faire mieux !

Plusieurs députés socialistes - Ces propos sont honteux, scandaleux ! Ce que vous proposez, c'est plus de précarité avec le CPE !

M. le Premier ministre - Notre responsabilité à tous, ce n'est pas d'entretenir les illusions, ce n'est pas de faire croire que nous pouvons offrir à chaque jeune à la fin de ses études un emploi garanti à vie dans l'entreprise. C'est faux, et nous le savons tous. Notre responsabilité, c'est de faire comprendre aux jeunes et à tout le pays que le monde change.

Plusieurs députés socialistes - Le débat ! Le débat !

M. le Président - Un peu de dignité !

M. le Premier ministre - Notre responsabilité est de leur donner les moyens d'accéder rapidement et dans de bonnes conditions à l'emploi.

Plusieurs députés socialistes - Le débat ! Le débat !

M. le Premier ministre - Notre responsabilité est de les aider à s'orienter, de reconnaître leurs efforts, de valoriser leurs stages, de développer les postes en alternance, de leur donner une seconde chance en cas d'échec. Quel choix avons-nous fait ? Pas celui de l'amertume, non plus que de l'immobilisme, mais celui du mouvement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur ceux de l'opposition) Celui de la sécurité plutôt que de la précarité ! (Mêmes mouvements) Voilà ce qu'attendent les Français ! Voilà ce que veut la majorité !

Après un débat démocratique...

Plusieurs députés socialistes - Démission !

M. le Premier ministre - ...de près de 17 heures, exclusivement consacrées à ce sujet (Brouhaha sur les bancs de l'opposition), le contrat première embauche a pu être adopté (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; vives protestations sur les bancs de l'opposition). Les amendements de la commission des affaires sociales ont permis d'améliorer ce projet, et je m'en réjouis. Je pense en particulier au décompte plus précis des missions d'intérim dans la période de consolidation de l'emploi, ou à l'amélioration du régime de formation tout au long de la vie. L'approbation du CPE, après une véritable discussion démocratique (« C'est faux ! » sur les bancs de l'opposition), est une bonne nouvelle pour l'emploi des jeunes dans notre pays. Je tiens à vous en remercier tous sur ces bancs (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; brouhaha sur les bancs de l'opposition). Je tiens à saluer cette étape décisive dans la bataille pour l'emploi (Mêmes mouvements) qui nous permettra d'améliorer encore les résultats déjà obtenus.

La démocratie, c'est le débat, mais c'est aussi l'action et le résultat ! (Mêmes mouvements)

Le Gouvernement sera au rendez-vous des Français ! (Les députés de l'opposition brandissent un carton rouge) Monsieur le président Ayrault, nous ne sommes pas dans un stade, ni au théâtre, mais dans l'amphithéâtre de la démocratie ! (Applaudissements nourris sur les bancs de l'UMP ; vives exclamations sur ceux de l'opposition)

Malheureusement, depuis ce matin, la discussion n'avance plus, après plus de 43 heures de débats, dont quatre heures de suspensions de séance, et de très nombreux rappels au Règlement. Je ne peux que constater, avec regret et tristesse, le refus de l'opposition d'examiner sereinement le reste des dispositions du projet de loi sur l'égalité des chances.

Plusieurs députés socialistes - Vous n'êtes jamais venu débattre avec nous !

M. le Premier ministre - Face à l'urgence (Exclamations sur les bancs de l'opposition), vous faites le choix de l'obstruction. Face à l'enjeu de la modernisation de notre pays, vous faites le choix des vieilles tactiques (Mêmes mouvements). Ce n'est pas le mien, ni celui de la majorité. (Mêmes mouvements)

Nous nous faisons une autre idée du débat démocratique, de la politique. (Mêmes mouvements) Ne l'oublions jamais, il y a une ambition qui nous dépasse tous, celle du service de chacun des Français (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

C'est pourquoi en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution (Très vives exclamations sur les bancs de l'opposition), après délibération du Conseil des ministres, j'ai l'honneur, Monsieur le Président, d'engager la responsabilité du Gouvernement sur le vote de l'ensemble du projet de loi pour l'égalité des chances, compte tenu des votes déjà intervenus, et des amendements dont la liste vous est communiquée (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; vives protestations sur les bancs de l'opposition).

M. le Président - Compte tenu de l'engagement de responsabilité du Gouvernement, en application de l'article 155, alinéa premier, du Règlement, le débat est immédiatement suspendu. Le texte sera considéré comme adopté sauf si une motion de censure est déposée avant demain 16 heures 20 et votée dans les conditions prévues à l'article 49.

La séance, suspendue à 16 heures 20, est reprise à 16 heures 50.

M. le Président - Je viens de réunir la Conférence des présidents. Sauf dépôt d'une motion de censure en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, la prochaine séance aura lieu le mardi 21 février à 9 heures 30.

Si je ne suis pas saisi du dépôt d'une motion de censure avant demain, vendredi 10 février à 16 heures 20, le projet de loi du Gouvernement relatif à l'égalité des chances sera adopté. J'en prendrai acte au Journal officiel conformément à la décision de la Conférence des présidents.

La séance est levée à 16 heures 55.

            La Directrice du service
            du compte rendu analytique,

            Catherine MANCY

ORDRE DU JOUR
DU MARDI 21 FÉVRIER 2006

NEUF HEURES TRENTE - 1re SÉANCE PUBLIQUE

Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi (n° 2809) renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs.

Rapport (n° 2851) de M. Guy GEOFFROY, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

QUINZE HEURES - 2e SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Discussion du projet de loi (n° 2427 rectifié) portant réforme des successions et des libéralités.

Rapport (n° 2850) de M. Sébastien HUYGHE, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

VINGT ET UNE HEURES TRENTE - 3e SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.


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