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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

2ème séance du mercredi 1er mars 2006

Séance de 21 heures 30
66ème jour de séance, 155ème séance

Présidence de M. Yves Bur
Vice-Président

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La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

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recherche (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de programme pour la recherche.

ART. 2 A

M. Pierre-Louis Fagniez – Cet article concerne la création du Haut conseil de la science et de la technologie placé aux côtés du Président de la République. Soit il convient d’en définir les missions et la composition, soit, comme je le pense, il est préférable de laisser en la matière toute latitude au Président de la République. Je rappelle que le général de Gaulle disposait également d’un Haut conseil dédié à la recherche et qu’il n’avait pas été nécessaire d’en préciser les contours et les missions. Il en est de même actuellement aux États-Unis, puisque M. Hollande ne cesse de s’y référer. Il me semble en revanche fondamental, à la veille des élections présidentielles, que chaque candidat fasse de la recherche un enjeu essentiel et dise de qui il compte s’entourer et pour quoi faire.

M. Jean-Michel Dubernard, président et rapporteur de la commission des affaires culturelles Le Haut conseil s’inspire du comité des sages que le général de Gaulle avait mis en place lors de la création de la Direction générale de la recherche scientifique et technique. M. Fagniez a parfaitement résumé le point de vue de la commission quant à son organisation. Nous avons seulement souhaité une publication annuelle de ses travaux, ainsi qu’une véritable intégration de la dimension européenne et des transferts de technologie. Le Sénat avait dans un premier temps préparé une série d’amendements techniques détaillant par exemple la composition du Haut conseil mais il les a finalement retirés, ceci relevant du décret. Le Gouvernement et le Président de la République ont besoin de l’éclairage des spécialistes afin de fixer les grandes orientations scientifiques.

M. Pierre Cohen – Les débats sur les enjeux scientifiques sont d’autant plus nécessaires que nos concitoyens sont troublés suite aux problèmes liés au sida, au sang contaminé ou à l’ESB. Ils se demandent si les scientifiques sont toujours neutres à l’égard des intérêts économiques, par exemple sur les OGM. Si la création d’un Haut conseil, au plus haut niveau de l’État, me semble importante, pourquoi celui-ci devrait-il être lié à la seule Présidence de la République et au Gouvernement ? Il devrait s’élargir également vers le Parlement. L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques joue un rôle extraordinaire et contribue à donner des orientations importantes à notre recherche scientifique, mais il ne permet pas d’avoir un débat régulier sur les enjeux scientifiques auxquels nous sommes confrontés. Je regrette que vous conceviez le Haut conseil d’une manière aussi étroite.

M. le Rapporteur – L’amendement 115 est rédactionnel et introduit « Le Haut conseil de la science et de la technologie » dans le code de la recherche.

M. François Goulard, ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche - Avis favorable.

L'amendement 115, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Claeys – Le Parlement doit être en effet associé à la réflexion du Haut conseil. L’agence de biomédecine, par exemple, rend chaque année un rapport au Gouvernement et au Parlement. Il faudrait qu’il en soit de même pour le Haut conseil car l’État stratège sera d’autant plus efficace que le Parlement sera éclairé. Tel est le sens de l’amendement 342.

M. le Rapporteur – Avis défavorable. Le Haut conseil aura d’autant plus de poids s’il relève du Président de la République, clé de voûte de nos institutions. M. Cohen a fait référence à l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques. Il est complété par l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé, et ce n’est pas moi qui contesterai son action. Enfin, un amendement 119 de la commission précise que le Haut conseil devra publier un rapport annuel, qui sera évidemment à la disposition des parlementaires.

M. le Ministre délégué – Même avis. J’ajoute que sur le plan juridique, le Haut conseil ne peut pas être une autorité indépendante : il donne des avis et ne rend pas de décisions.

M. Pierre Cohen - Pour répondre au président Dubernard, je dirai que si toutes les autorités sont implicitement concernées dans la mesure où le Haut conseil rend ses avis au Président de la République, il est inutile de mentionner le gouvernement. Par ailleurs, ne me prêtez aucune critique à l’endroit de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques, auquel je participe le plus souvent possible et dont je respecte, avec l’ensemble de la communauté scientifique, le travail éminent. Je souhaiterais cependant qu’au-delà de cette activité propre à l’institution parlementaire, les sommités qui siègent au Haut conseil viennent présenter leurs travaux au Parlement dans le cadre de grands débats réguliers.

M. Daniel Garrigue - Il faut veiller au respect du principe de la séparation des pouvoirs. Dans la mesure ou le législateur peut s’appuyer sur ses propres instances – dont l’OPECST –, il est légitime que le pouvoir exécutif dispose des avis éclairés du Haut conseil.

M. François Brottes - Je ne suis pas certain qu’il y ait autant d’étanchéité entre les pouvoirs et je rappelle que le Parlement contrôle l’activité de l’exécutif. De l’avis du ministre, le Haut conseil travaillera-t-il en toute transparence et les commissions permanentes des assemblées parlementaires accéderont-elles aisément à ses avis ? Si vous étiez en mesure de nous indiquer que les décrets d’application le confirmeront, nous pourrions considérer que notre amendement est satisfait.

M. Alain Claeys - Je suis très attaché à la séparation des pouvoirs mais je ne suis pas certain qu’il s’agisse du principe le plus opératoire pour ce qui concerne la science et l’avancée de la connaissance. Ayons en mémoire les propos tenus cet après-midi par notre collègue Christian Blanc : les structures, c’est une chose, mais elles ne doivent pas faire perdre de vue la réflexion collective que nous devons tous mener. Il ne me semblerait pas déplacé que le Haut conseil fasse le lien entre les pouvoirs exécutif et législatif pour les éclairer tous deux. Tel est le sens de notre amendement, même si j’espère que les décrets d’application viendront préciser les choses.

M. le Ministre délégué – S’agissant des avis du Haut conseil, je puis vous confirmer qu’ils seront publics par principe ; au reste, un amendement de votre commission va le préciser ultérieurement.

L'amendement 342, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur – L’amendement 116 est de codification.

L'amendement 116, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Claeys – L’amendement 27 est défendu.

L'amendement 27, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Daniel Garrigue - Je retire mon amendement 41.

M. le Rapporteur – Le Haut conseil ayant naturellement vocation à faire le lien entre la recherche académique et ses applications, notre amendement 117 tend à ce que la dimension « transfert de technologie » soit présente dans toutes ses réflexions.

L'amendement 117, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. François Brottes - L’amendement 28 est défendu.

L'amendement 28, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Charzat - Dans son discours introductif de présentation du texte au Sénat, le 16 décembre dernier, Gilles de Robien a plaidé pour que notre pays contribue plus activement à l’avènement d’une recherche européenne. Dès lors, il est pour le moins surprenant que la dimension européenne soit la grande absente de ce projet de loi de programme. Puisque tout le monde s’accorde sur l’idée que la recherche franco-française n’a pas d’avenir, nous proposons, par notre amendement 270, de rappeler que l’Europe existe et que le Haut conseil devra tenir compte des préconisations de Barcelone comme des recommandations de la Commission européenne. De même, les multiples agences eu autres structures, déjà créées ou en projet, doivent elles aussi se soucier davantage de la dimension européenne.

M. Daniel Garrigue - Mon amendement 40 procède de la même intention de renforcer le lien entre notre recherche nationale et la politique européenne, alors que chacune des deux a tendance à se développer de manière séparée. Il faut créer un lien, et le Haut conseil semble le mieux placé pour y veiller. Sans susceptibilité d’auteur, je pense que mon amendement est le mieux rédigé dans la mesure où, à la différence des deux autres, il ne tend pas à subordonner la politique de recherche française à un cadre européen supposé préexistant et imposé : il se situe plus en amont et tend à permettre au Haut conseil de jouer pleinement son rôle de conseil de l’exécutif avant les Conseils européens ou les Conseils des ministres européens de la recherche. D’autre part, mon amendement ne nous enferme pas dans le cadre européen, mais prévoit les coopérations internationales qui peuvent être fécondes – par exemple avec les États-Unis, la Chine, le Japon, l’Inde ou la Russie.

M. le Rapporteur – Nous partageons tous le même objectif et, sur ce sujet, l’amendement 118 de la commission a été adopté à l’unanimité, sa rédaction ayant été jugée meilleure que celle du 270. Quant à l’amendement 40, arrivé ultérieurement, il a été considéré comme satisfait par le 118.

M. le Ministre délégué – Le Gouvernement partage votre objectif de rendre cohérentes nos politiques nationale et communautaire et de faire en sorte que la France pèse sur l’orientation de la politique de recherche européenne. Placé auprès du Président de la République, le Haut conseil sera un organe administratif et ce statut ne le prédispose pas à émettre des avis – éventuellement critiques – sur la politique européenne, cette prérogative revenant en propre à l’autorité politique. Dans cette optique, c’est la rédaction de votre amendement 118 qui a semblé la mieux adaptée et le Gouvernement est par contre défavorable aux amendements 270 et 40.

M. Pierre Cohen - Les propos du ministre appellent quelques commentaires. Dans notre esprit, le Haut conseil avait vocation à réunir des sommités pour débattre d’enjeux scientifiques d’intérêt général. Si je vous ai bien compris, Monsieur le ministre, vous considérez qu’il n’a pas à venir sur le terrain des autorités politiques pour formuler des critiques sur les orientations communautaires…

M. le Ministre délégué – En effet.

M. Pierre Cohen - Soit, mais la frontière peut être difficile à délimiter. J’estime par exemple que les membres du Haut conseil seront dans leur rôle s’ils estiment que le PCRD ne met pas suffisamment l’accent sur tel ou tel domaine scientifique. Ce n’est pas critiquer l’Europe que de contester la pertinence d’une orientation stratégique dans le domaine dont on a la charge.

M. Daniel Garrigue - Je persiste à défendre mon amendement. D’abord parce que l’Europe, c’est nous, ce n’est pas une vache sacrée… Ensuite, parce que du fait des liens croissants entre la recherche nationale et la recherche européenne, empêcher le Haut conseil de formuler des avis sur cette dernière serait le rendre invalide. Enfin, parce qu’il me paraît nécessaire qu’il puisse donner son appréciation scientifique sur les coopérations internationales dont je réaffirme l’importance.

L'amendement 270, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'amendement 118, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – L’amendement 40 tombe.

M. le Rapporteur – L’amendement 119 rectifié vise tout d’abord à renforcer la transparence des travaux du Haut conseil en posant le principe de la publication d’un rapport annuel. Dans son deuxième alinéa, que la commission a adopté à l’initiative de M. Claeys, il précise que le Haut conseil peut consulter le Comité consultatif national d’éthique.

Mme Anne-Marie Comparini - Dans mon esprit, le Haut conseil devait être une haute autorité indépendante ayant pour mission d’éclairer la société tout entière ; mon amendement 201 précise donc que ses avis sont publics et qu’il établit un rapport annuel d’activité, remis au Président de la République et au Parlement puis rendu public.

M. Alain Claeys - Notre amendement 272 est défendu.

M. le Rapporteur – Ces deux amendements sont satisfaits par l’amendement 119 rectifié.

M. le Ministre délégué – Avis favorable à l’amendement 119 rectifié sous réserve d’un sous-amendement ayant un double objet : d’une part, la suppression du deuxième alinéa, car il faut s’en tenir à la procédure établie de saisine du Comité consultatif national d’éthique – et éviter que les conseils se saisissent les uns les autres ; d’autre part, au premier alinéa, l’ajout des mots « dans le respect des dispositions de la loi du 17 juillet 1978 », afin de garantir le respect du secret qui s’impose à certaines questions d’intérêt national, et notamment de défense nationale.

M. le Président – Peut-être le rapporteur acceptera-t-il de rectifier son amendement en ce sens. Je vous laisse juges de la nécessité de préciser que le Haut conseil respecte la loi…

M. le Rapporteur – J’accepte les deux suggestions du Gouvernement.

M. Alain Claeys – La deuxième est peut-être superflue, en effet, mais je n’y suis pas hostile ; en revanche, il me paraît souhaitable que le Haut conseil puisse être éclairé sur certains sujets par le Comité d’éthique.

M. François Brottes - Rappel au Règlement. Le Gouvernement peut-il réellement défendre un sous-amendement qui va à l’encontre de l’amendement lui-même ? Aurait-il des privilèges par rapport aux parlementaires ?

M. le Président – Le débat parlementaire autorise les sous-amendements.

M. le Rapporteur – Je rectifie l’amendement de la commission conformément aux deux souhaits du Gouvernement.

L'amendement 119, 2e rectification, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Les amendements 201 et 272 tombent.

M. Pierre Cohen - Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 22 heures 10, est reprise à 22 heures 20.

M. Claude Birraux, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire – L’amendement 59 rectifié, vise à conférer au Haut conseil de la science et de la technologie une certaine autonomie, en lui donnant la possibilité de s’autosaisir, faculté contrebalancée par une obligation de transparence. Faute de ces dispositions, le Haut conseil risque de servir de simple caution à des décisions politiques prises au préalable, ce qui serait hautement préjudiciable à sa crédibilité.

Cet amendement fait également de tous les pouvoirs publics, y compris le Parlement, les destinataires des travaux du Haut conseil.

Comme le faisait remarquer Jean-Claude Lehman, ancien président de l’académie des technologies, il faut instaurer une certaine « connivence » entre tous les acteurs de la recherche. Pour y parvenir, nous devons faire circuler l’information en organisant la publicité des travaux du Haut conseil, et en lui donnant la capacité de s’autosaisir de toute question relevant de sa compétence.

J’ajoute qu’une telle disposition ne portera nullement atteinte aux prérogatives de l’exécutif. Sans être trivial ou désagréable, je voudrais seulement éviter que ce conseil se contente de deux réunions statutaires par an !

Mme Anne-Marie Comparini - Si cette instance doit être une structure destinée à éclairer le Président de la République, le Gouvernement et le Parlement, elle doit pouvoir décider en toute liberté des sujets dont elle traite. Notre amendement 200 repose sur la même analyse que celle de M. Birraux.

M. Pierre Cohen – L’amendement 367 va dans le même sens que celui défendu par le rapporteur pour avis. Il faut en effet que nous puissions prendre connaissance des débats du Haut conseil, ce qui implique a minima un rapport annuel et la publication de ses travaux, dont nous pourrions alors discuter soit au sein de l’Office parlementaire, soit lors du vote du budget.

M. le Rapporteur – Avis défavorable sur ces trois amendements (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Ministre délégué – Alors que le Haut conseil aurait pu être créé par simple décret, nous avons suivi le Sénat qui souhaitait que son existence figure dans la loi, de même que les grands traits de sa mission. Avec le principe de publicité des travaux, vous entrez en revanche dans le fonctionnement du Haut conseil, domaine qui relève du pouvoir réglementaire (Rires sur plusieurs bancs du groupe socialiste), selon l’article 34 de la Constitution.

Je suis donc d’avis défavorable, mais je précise que le décret relatif au Haut conseil lui accordera un droit d’initiative.

M. le Rapporteur – Comme vient de le souligner le ministre, il ne s’agit pas d’une opposition de principe, mais de forme.

M. Alain Claeys – Que faites-vous donc des symboles ? Vous nous expliquez que c’est pour faire plaisir au Sénat que vous avez renoncé à créer le Haut conseil par décret ; si vous n’acceptez pas nos propositions, il ne sera qu’un cabinet du Président de la République ! Vous vous gargarisez sans cesse de la « respiration de la recherche », de sa nécessaire « ouverture », de sa liberté, et pourtant vous refusez cet amendement de bon sens pour des raisons parfaitement incompréhensibles. Dans une démocratie qui respire normalement, nous devons favoriser une certaine convergence entre les pouvoirs publics et l’ensemble de la société sur des sujets aussi importants que la recherche.

C’est pourquoi je vous demande de revoir votre position, particulièrement étriquée, Monsieur le ministre, au regard des enjeux et de la liberté dont vous vous réclamez.

M. Jean-Yves Le Déaut - Je pensais que nous allions pouvoir avancer rapidement sur ce sujet : il existe en effet un consensus depuis les états généraux de Grenoble, et cet amendement avait été adopté à l’unanimité par la commission. Si nous voulons éviter un affrontement camp contre camp, comme ce fut le cas pour la programmation pluriannuelle des moyens, il faudrait que vous fassiez preuve d’un peu de souplesse !

Et quand vous sortez de votre chapeau l’article 34 de la Constitution, en affirmant que la possibilité pour le Haut conseil de se saisir de sujets stratégiques et essentiels pour l’avenir relève du domaine réglementaire, les bras m’en tombent !

M. le Ministre délégué – Relisez donc l’article 34 !

M. Jean-Yves Le Déaut – Comment pouvez-vous répondre à M. Birraux, vice-président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques et personnalité scientifique reconnue : « Circulez, il n’y a rien à voir ! Nous donnerons des instructions au Haut conseil » ? Ressaisissez-vous !

M. le Ministre délégué – Vous me demandez de m’autosaisir ? (Sourires)

M. Jean-Yves Le Déaut - Suivez l’avis de notre rapporteur pour avis !

M. Pierre Cohen – Puisque le ministre a visiblement besoin de réfléchir, nous allons devoir recourir à une méthode qui a déjà porté ses fruits tout à l’heure.

M. le Président – Je vous vois venir !

M. Pierre Cohen - S’agit-il seulement de créer un conseil scientifique au service du Président de la République ? C’est tout de même grave ! Je demande donc une suspension de séance pour que le ministre se reprenne.

La séance, suspendue à 22 heures 29, est reprise à 22 heures 31.

M. François Brottes – Dans la mesure où l’amendement 119 rectifié renvoie déjà à un rapport du Haut conseil faisant état de ses travaux, je propose un sous-amendement 386 à l’amendement 59 rectifié, afin de supprimer sa deuxième phrase – « il publie ses travaux .» J’espère que le ministre acceptera enfin de considérer que les scientifiques qui siégeront dans ce Haut conseil ne seront pas seulement des membres de cabinets secrets, mais aussi des scientifiques de renom, qui ont donc la capacité de s’autosaisir…

M. Claude Birraux, rapporteur pour avis – Je ne souhaite pas modifier le texte de mon amendement.

Le sous-amendement 386, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'amendement 59 rectifié, mis aux voix, est adopté.
Les amendements 200 et 367 tombent.

M. Alain Claeys - L’amendement 271 est défendu.

Mme Anne-Marie Comparini – L’amendement 199 également. Il y a une incompréhension sur ce qu’est ce Haut conseil de la science et de la technologie. Le Gouvernement affirme cependant, dans l’exposé des motifs du texte, vouloir solenniser l’existence du Haut conseil. Autant donc aller jusqu’au bout de la démarche. S’il s’agit vraiment de répondre au défaut de pilotage de la recherche française et de retrouver, pour reprendre l’expression de notre collègue Birraux, une connivence avec le monde scientifique – j’évoquais pour ma part hier « l’indépendance qui restaure la confiance » –, il relève bien du Parlement de fixer la composition et le mode de désignation des membres du Haut conseil. Les discussions que nous avons eues sur les amendements de M. Garrigue et de M. Birraux n’ont fait que renforcer ma conviction sur ce point.

M. Noël Mamère - L’amendement 29 tend à ouvrir la porte du Haut conseil à des personnalités qui ne sont pas issues de la communauté scientifique, comme le prévoyait le texte initial. Il serait en effet dommage de se priver d’un regard extérieur souvent utile à la prise de décision. De la même manière, on pourrait y associer les « demandeurs de recherche » – c’est-à-dire des représentants de consommateurs ou de malades à qui leur parcours militant confère un savoir précieux. Qu’il s’agisse de santé ou d’innovations technologiques susceptibles d’avoir des conséquences sur l’environnement et la santé comme les OGM, les acteurs de la société civile ont leur mot à dire. Nous ne défendons pas autre chose quand nous parlons de démocratie participative. L’Office d’évaluation des choix scientifiques et technologiques avait organisé il y a quelques années, sous la houlette de M. Le Déaut, une conférence des citoyens à l’image de celle qui existe au Danemark depuis 1989. Hélas, nous ne nous inspirons pas de ces méthodes, sauf pour tordre le cou aux préconisations des citoyens – qui avaient demandé par exemple un moratoire sur les OGM...

Ce projet concerne des choix techniques qui engagent l’avenir de la société. Ce n’est pas aux laboratoires pharmaceutiques et aux seuls experts de décider à notre place : c’est à la société d’évaluer les risques qu’elle court en fonction des avantages que lui apporte telle ou telle technique.

Le Gouvernement ne se risque pas à définir la composition du Haut conseil, qu’il renvoie à un décret. Trop souvent, notre assemblée est ainsi « enjambée » : souvenons-nous de l’article 49-3 que l’on nous a imposé pour l’adoption du CPE, ou de la bataille que nous avons dû livrer tout à l’heure pour que le Gouvernement accepte d’écouter la représentation nationale en retenant un calcul en euros constants. Il revient bien au Parlement de définir le cadre et l’esprit qui doivent présider à l’élaboration de ce décret, même si nous déplorons que trop de lois renvoient au décret et fassent ainsi de notre assemblée une armée des ombres. L’amendement 30 insiste donc sur la diversité des disciplines et des parcours représentés au sein du Haut conseil et sur la nécessité que ses membres soient réellement actifs et engagés.

M. le Rapporteur – La commission est défavorable à l’ensemble de ces amendements. Nous sommes, nous aussi, des représentants du peuple : cela ne nous empêche pas de reconnaître que certains détails relèvent du règlement.

M. le Ministre délégué – Avis défavorable. Il est incontestable que nous sommes dans le domaine réglementaire. Si nous suivons M. Mamère, je crains que le Haut conseil n’ait plus de scientifique que le nom. 

M. Noël Mamère – Nous ne disons pas, Monsieur le ministre, qu’il ne faut pas de scientifiques au Haut conseil, mais simplement que les choix qui engagent notre avenir n’appartiennent pas à eux seuls. Dois-je vous rappeler les avis rendus par l’Académie des sciences sur l’innocuité de l’amiante, ou par l’Académie de médecine, qui s’est prononcée contre le principe de précaution, que le Président de la République a pourtant fait inscrire dans la Constitution ? Les tribunaux d’Orléans et de Versailles n’ont-ils pas relaxé les faucheurs d’OGM au motif qu’ils avaient appliqué ce principe de précaution ? Ne laissons pas les experts décider seuls de notre avenir.

M. Christian Blanc – J’appuie l’amendement de Mme Comparini. Ce serait un signe fort et compris du monde de la recherche que d’indiquer que le caractère discrétionnaire des nominations n’est plus la règle. On me dira qu’une telle précision est du domaine réglementaire. Je ne suis pas suffisamment expert pour en juger, mais il me semble que le Parlement pourrait estimer que c’est de sa compétence. Resterait au Conseil d’État à le dire…

M. le Ministre délégué – Au Conseil constitutionnel !

M. Christian Blanc – Au Conseil d’État, avant.

M. le Ministre délégué – Mais le Conseil d’État s’est déjà prononcé et il a estimé que nous étions là dans le domaine réglementaire.

M. Christian Blanc – Je voudrais par ailleurs confirmer à M. le rapporteur, qui cet après-midi m’a accusé, dans son style caractéristique, d’être en dehors de la réalité, que ce que je disais était exact, à savoir que le LETI de Grenoble a déposé en 2005 sensiblement autant de brevets que le MIT. Entre 1998 et 2004, le MIT en a déposé 1 031, contre 893 pour le LETI.

Je suis un peu étonné de voir que les pilotes du présent projet ne connaissent pas cette réalité française et ne se demandent pas pourquoi et comment un site de recherche comme le LETI est capable d’une telle performance. Le LETI est aujourd’hui au premier rang mondial, par millions de dollars investis dans la recherche. Je crois qu’il serait utile d’avoir ces éléments en tête quand on s’attaque à la question de la recherche.

M. François Brottes - Très bien.

Mme Marylise Lebranchu – Soit ce Haut conseil n’a pas de missions bien définies, n’est écouté par personne, ne sert à rien, et dans ce cas, on peut effectivement y nommer qui l’on veut, soit il a un rôle important à jouer, comme éclairer les décideurs et les citoyens sur les enjeux et les résultats de la recherche, et alors sa composition mérite d’être exposée ici. Je pense, Monsieur le ministre, que vous pourriez faire la synthèse des propositions qui viennent de vous être faites sur ce sujet.

M. le Rapporteur – Je m’empresserai, Monsieur Blanc, de vérifier moi-même ce qu’il en est des brevets. Sans mépriser le moins du monde le LETI, j’ai du mal à croire que ce site en dépose autant que le MIT, sauf peut-être dans un domaine précis tel que la microélectronique. Vous dites que je ne connais pas bien le système. Je crois tout de même connaître un peu l’enseignement supérieur et la recherche. Et les nombreuses auditions auxquelles la commission a procédé ont permis à tous ses membres, dont Mme Comparini qui a été très présente, ce qui ne fut pas votre cas, d’avoir une idée assez précise dudit système. Enfin, cet après-midi, j’ai simplement dit qu’il valait mieux progresser à pas rapides et sûrs qu’en faisant des sauts de libellule en dehors de la réalité.

M. François Brottes - Lorsqu’un gouvernement crée un organisme, il est de tradition qu’il dise au moins comment il compte le composer. Je veux bien que la chose soit du domaine réglementaire, mais nous demandons au moins un éclairage, Monsieur le ministre.

L'amendement 271, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'amendement 199, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'amendement 29, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l’amendement 30.

M. Claude Birraux, rapporteur pour avisMon amendement 58 dit simplement que la composition du Haut conseil doit tenir compte de la diversité des disciplines et des institutions de la recherche française. La science est en effet de plus en plus pluridisciplinaire et c’est le mixage ou l’alchimie qui s’opèrent entre des disciplines parfois éloignées qui, souvent, la fait progresser. Il faudrait que le Haut conseil puisse bénéficier de telles fécondations croisées.

M. le Rapporteur – Amendement d’ordre réglementaire.

M. le Ministre délégué – Nous avions envisagé de créer ce Haut conseil par décret, conformément à l’avis du Conseil d’État (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), haute juridiction que nous devons respecter. Le Sénat a introduit dans la loi le principe de la création de cette instance, mais c’est au règlement qu’il appartiendra d’en fixer la composition et le fonctionnement.

Je peux seulement vous dire qu’évidemment, nous nous attacherons à nommer des personnalités dont la légitimité et la compétence soient incontestables, car c’est la condition même de la crédibilité du futur Haut conseil. Nous veillerons aussi à exaucer le vœu de M. Birraux. Il y aura des équilibres à trouver, comme toujours lorsqu’une nouvelle instance se met en place.

L'amendement 58, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Noël Mamère - Mon amendement 31 tend à ce que le Haut conseil respecte la parité hommes-femmes, conformément à la réalité sociologique et à la nécessité de faire par conséquent davantage participer les femmes aux décisions publiques.

M. le Rapporteur – Défavorable, pour la raison déjà maintes fois exposée.

M. le Ministre délégué – Cet amendement est satisfait par l’article 21 bis introduit par le Sénat, qui pose un principe général de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes pour toutes les nominations aux comités, conseils et organes de direction.

M. Noël Mamère - Quelle différence faites-vous entre représentation équilibrée et représentation paritaire ?

M. le Ministre délégué – Sachant qu’il y aura, comme je l’ai dit, des équilibres nombreux à trouver – entre les disciplines, entre les différents organismes de recherche –, il peut se faire qu’il y ait un rapport de 60-40 en faveur d’un genre ou d’un autre.

L'amendement 31, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Anne-Marie Comparini - Dans mon amendement 202, qui est identique au 120 de la commission, je propose que le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie assure auprès de la société le dialogue et le partage de l’information sur les stratégies scientifiques et techniques arrêtées par le Haut conseil.

M. le Rapporteur - Avis favorable. La mise en place du Haut conseil impose de revoir les missions du CSRT et permettra de lui donner cette dimension d’interface entre la science et la société.

M. le Ministre délégué – Le conseil supérieur de la recherche et de la technologie a été institué par le règlement. Il serait pour le moins étrange de le modifier par une loi !

M. Jean-Yves Le Déaut - Et l’ANR ?

M. le Ministre délégué – Je suis donc défavorable à ces amendements, même si je partage votre objectif.

M. le Rapporteur – Dans ces conditions, je retire l’amendement 120.

Mme Anne-Marie Comparini - Je maintiens le mien !

M. Alain Claeys – Nous n’y comprenons plus rien. Je souscris à l’objectif de Mme Comparini, que je croyais partagé par le rapporteur, et voilà que celui-ci se laisse convaincre par un argument de forme.

M. le Rapporteur - Parce qu’il est clair !

M. Alain Claeys - Cet amendement montre la nécessité pour le Haut conseil de disposer d’un relais auprès de l’opinion. Le rapporteur nous a certes dit que nous pouvions nous-mêmes tenir ce rôle, en tant qu’incarnation de la démocratie représentative, mais il avait reconnu aussi, juste avant de retirer son amendement, que le Conseil supérieur pouvait remplir cette fonction d’intermédiaire. Le rapporteur préfère assurément la démocratie participative à la démocratie représentative !

On ne sait toujours pas ce qui ressort du décret ou de la loi, mais la complexité que nous avons dénoncée apparaît de plus en plus clairement. Cela fait maintenant une heure et demie que vous essayez de caractériser ces deux structures ! Vous nous avez expliqué qu’il fallait simplifier les procédures, donner plus de liberté et de lisibilité, mais pour l’instant, personne n’est capable ni de définir les rôles respectifs du Haut conseil de la science et du conseil supérieur de la recherche et de la technologie, ni de savoir ce qui relève de la loi, du décret ou du Conseil d’État !

M. le Président – Le plus difficile, c’est de faire respecter l’article 34 de la Constitution.

M. Pierre Cohen - Tout cela est en effet très compliqué, et je ne comprends pas le revirement du président de la commission.

M. le Rapporteur – Il a une raison technique !

M. Pierre Cohen - Le conseil supérieur de la recherche et de la technologie a pour rôle de donner un avis sur les lois et les budgets qui le concernent. Avec votre texte, il devient un relais auprès de la société – fonction que vous avez refusée tout à l’heure au Haut conseil. Au final, le Haut conseil débat, mais ne publie rien, et le conseil supérieur engage le débat avec la société. D’accord, mais qu’au moins le Parlement ait le droit d’intervenir !

Vous êtes en train de faire du Haut conseil de la science et de la technologie un cabinet plutôt obscur. Les scientifiques que vous aurez réussi à convaincre d’y participer ne seront que les conseillers scientifiques du Président de la République. Il devrait au contraire avoir pour ambition de créer un débat sur les enjeux scientifiques qui serve au Président et au Gouvernement certes, mais aussi au Parlement, au Haut conseil et à même à l’Agence – qui n’a même pas de conseil scientifique ni de possibilité de débattre des orientations de la recherche !

M. Alain Claeys – À ce point du débat, nous devons vraiment être éclairés sur l’articulation entre le Haut conseil, l’agence et le conseil supérieur de la recherche et de la technologie. J’aimerais que le ministre nous dise précisément à quel échelon l’État stratège définit ses orientations. Nous avons une agence qui n’a pas de conseil scientifique et un Haut conseil qui est à la seule disposition du Président de la République.

M. le Rapporteur – Et du Gouvernement.

M. Alain Claeys – Mme Comparini essaye de créer une cohérence entre ce Haut conseil et le conseil supérieur, mais comment intervient la représentation nationale dans les choix scientifiques ? Quelle articulation y a-t-il entre le Haut conseil et l’agence ?

M. le Ministre délégué – Nous nous sommes déjà largement exprimés sur ce sujet lors de la discussion générale et je suppose que vous en avez débattu aussi en commission.

Plusieurs députés socialistes – Non !

M. le Ministre délégué – Le projet de loi définit le rôle du Haut conseil : éclairer les pouvoirs publics sur les grandes orientations de la recherche. Quant au CSRT, vous connaissez bien sa mission, qui n’est pas affectée par le présent texte : il se prononce sur les textes qui sont relatifs à la recherche. Son avis n’est pas requis sur les grandes orientations.

Contrairement à certaines personnalités, telles que le rapporteur du Conseil économique et social, nous ne pensons pas que l’ANR doive constituer une sorte d’autorité scientifique nouvelle. Ceux qui parlent d’empilement n’ont pas bien analysé le projet de loi : l’ANR est une agence de gestion de procédures qui doit lancer des appels à projets, …

M. Pierre Cohen - Sur quelles bases ?

M. le Ministre délégué - …analyser les réponses, effectuer des choix et gérer l’affectation des crédits. Les orientations, elles, sont prises par l’État. C’est l’État qui est le lieu de la synthèse : il ne peut pas y en avoir d’autre. C’est lui qui choisit les grands thèmes, qui décline les priorités, qui assure la cohérence entre les organismes de recherche, les universités et l’agence de procédure. L’INSERM ne peut pas mener une politique différente de celle de l’ANR ! Dans l’État, c’est précisément la nouvelle direction générale de la recherche et de l’innovation qui fera la synthèse. Elle organisera des conférences réunissant les représentants des grands organismes scientifiques et des secteurs économiques concernés par la recherche finalisée. À partir des grandes orientations, elle définira des thématiques plus précises, déclinées à leur tour par les grands organismes et par l’ANR, qui n’a pas à avoir de politique scientifique autonome.

Aujourd’hui, les organismes et les orientations qu’ils mettent en œuvre sont soumis à la tutelle de l’État. L’action de l’ANR, un outil nouveau, doit être coordonnée avec la leur. Cette architecture n’a rien d’extraordinaire : elles est même tout à fait conforme à ce qui se fait dans tous les grands pays scientifiques. Je conteste l’idée selon laquelle la détermination des priorités serait du ressort de la communauté scientifique : c’est au Gouvernement, au pouvoir démocratiquement désigné de faire des choix. L’année dernière, nous avons érigé en priorité les maladies émergentes : c’est du ressort du politique, pas du scientifique. Et choisir comme autre priorité la politique de l’énergie, se traduit dans le nucléaire, avec l’EPR, dans le secteur des biocarburants et dans la recherche sur la pile à combustible. Qui d’autre que le Gouvernement, sous le contrôle du Parlement, peut faire des choix de cette nature ? La communauté scientifique ne peut se prononcer que sur la recherche qui est de son ressort, et non sur des choix de société. Des considérations économiques, géostratégiques ou environnementales peuvent influencer les choix, mais ils restent de la responsabilité et de l’honneur du politique.

Voilà notre conception des choses. Elle est très claire, et j’ajoute que tous les grands pays de la recherche pratiquent de la même façon.

M. Pierre Cohen - Je remercie M. le ministre, car s’il n’a pas répondu à M. Claeys sur le Haut conseil, il a confirmé toutes nos inquiétudes. Le Haut conseil sera inféodé au Président de la République et, c’est une première, le Gouvernement donnera des orientations à l’ANR, laquelle ne disposera pas de conseil scientifique et ne comptera aucun membre élu. En outre, sa puissance financière déséquilibrera les organismes de recherche. Enfin, compte tenu des appels à projets, l’ensemble des scientifiques devront se positionner par rapport au Gouvernement. M. Dubernard, maintenant, ne peut plus invoquer la liberté des chercheurs.

M. le Ministre délégué – N’importe quoi !

M. Pierre Cohen - Vous avez été très clair, Monsieur le ministre, comme en témoignera le compte rendu analytique. Nous décortiquerons vos propos, particulièrement graves pour l’avenir de notre recherche.

M. Noël Mamère – Le Gouvernement a montré que ce texte organise l’opacité, et combien il se défie de la participation des citoyens et de leurs représentants. Je tombe des nues lorsque j’entends dire que c’est au Gouvernement de décider des choix de la recherche. Le Parlement n’existe-t-il pas ? Avons-nous débattu des choix énergétiques ? Qui a décidé de l’EPR ou d’ITER alors que l’énergie éolienne, en Allemagne, produit 18 000 mégawatts contre 200 seulement dans notre pays ? Si nous continuons à ce rythme, il faudra quarante ans pour honorer nos engagements européens en la matière. Que dire lorsque le Gouvernement, en contradiction avec des directives européennes, autorise la disséminations des OGM ? Que dire lorsqu’il prend le risque, dans le projet de loi à venir sur les OGM, de maintenir le secret industriel quant aux conséquences de ces organismes sur la santé ? Non seulement vous êtes inféodés aux grands semenciers internationaux mais vous laissez les chercheurs devenir des apprentis sorciers ! S’agissant de la grippe aviaire, chacun sait que le problème essentiel est de savoir quand le virus mutera et sera dangereux pour l’espèce humaine. Avez-vous mis en place des politiques de recherche et de prévention…

M. le Ministre délégué – Oui !

M. Noël Mamère - …après en avoir débattu avec notre Assemblée ? Non. Faut-il revenir sur l’amiante ou les pesticides ? Avons-nous débattu ici de leurs conséquences ? Le Gouvernement n’a pas à décider à notre place ! Je suis quant à moi attaché à la séparation des pouvoirs.

L'amendement 202, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article 2 A modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 2 B

M. le Rapporteur – L’amendement 121 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 121 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, et l’article 2 B est ainsi rédigé.

AVANT L'ART. 2

M. Noël Mamère - L’amendement 32 dispose qu’un débat sera organisé tous les cinq ans en vue de définir les outils et les priorités de la politique nationale de recherche et d’innovation. Certes, des discussions régulières sont prévues dans le cadre de la LOLF, mais notre stratégie de recherche ne saurait se résumer à l’exécution budgétaire. La représentation nationale doit se saisir de ces questions. J’ajoute qu’un tel amendement permettrait d’éviter d’être confronté à une crise comme celle que nous venons de connaître.

M. le Rapporteur – Avis défavorable sur cet amendement anticonstitutionnel : le législateur ne peut pas imposer l’organisation d’un débat en séance publique.

L'amendement 32, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit – L’ANR a été créée sous forme de GIP en février 2005. Le Gouvernement prévoyait de la transformer en EPIC, mais nous ne voulons pas qu’elle devienne employeur. Le syndicats comme les états généraux de la recherche refusent en effet de doter l’ANR de telles sommes, ce qui impliquerait non seulement la création massive de CDD, mais, à terme la fin du CNRS et des autres EPST en tant qu’organismes de recherche. Ceux-ci ne pourront plus avoir de politiques scientifiques propres et se transformeront en agence de prêt de main-d’œuvre pour des programmes dont ils ne décideront pas. L’ANR pourrait se limiter à initier des programmes de coopération entre organismes et universités. Nous demandons que son budget soit plafonné à 700 millions en 2010 ; il faut également augmenter les crédits de base des laboratoires. L’ANR doit être dotée d’un conseil scientifique représentatif de la communauté scientifique. Elle doit être en outre un complément des organismes ou des établissements d’enseignement supérieur. Enfin, il convient de freiner le fort développement des CDD, qui risquent de décourager les étudiants. Tel est le sens de l’amendement 74.

M. le Rapporteur – Avis défavorable. Les missions et la composition du conseil scientifique de l’Agence relèvent du domaine règlementaire.

L'amendement 74, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 2

M. Pierre-Louis Fagniez – Les PRES constituent un des éléments centraux de cette loi. Grâce à eux, l’université pourra enfin coopérer et travailler avec les autres organismes de recherche. La situation française est en effet spécifique. Si l’on supprimait nos grandes écoles, le CNRS ou l’INRA, nous pourrions sans doute faire de l’Université le cœur de notre dispositif de recherche, et ces organismes deviendraient des agences de moyens, comme il en existe dans de nombreux pays. Mais nous ne sommes pas mûrs pour nous orienter vers ce type de réforme. Je comprends donc M. Blanc : c’est parce que nous sommes tributaires d’une histoire singulière en la matière que nous n’avons pas opéré une vaste réforme de l’université et des organismes de recherche.

Les chercheurs nous ont fait part de leurs inquiétudes quant aux statuts juridiques des PRES, et en particulier s’agissant de l’EPCS. Par exemple, le Collège de France a peur de perdre son identité s’il s’associe à la rue d’Ulm, à Paris VI ou à l’INSERM. M. le ministre délégué m’a répondu : comme pour les pôles de compétitivité, il sera possible de ne pas recourir aux nouvelles structures proposées dans la loi et de faire appel, par exemple, à la loi de 1901. Dans ce cas, néanmoins, les PRES disposeront-ils des mêmes moyens alloués par l’État ?

M. Jean-Yves Le Déaut - L’idée selon laquelle notre système universitaire est à la fois trop émietté et trop cloisonné est largement partagée et nous sommes par conséquent favorables aux PRES, du reste validés par les états généraux de Grenoble. Les pôles seront favorables à la pluridisciplinarité, aux regroupements géographiques pertinents. Et qui peut s’opposer à ce que grandes écoles et universités travaillent ensemble ? Cependant, après que vous avez renoncé à la notion de campus, nous voyons apparaître celle de réseau thématique qui ne laisse pas de nous inquiéter. Il semble – et l’exemple de l’Institut d’économie de Paris va dans ce sens – que votre idée, plutôt que d’irriguer l’ensemble du réseau de recherche, partout sur le territoire, en favorisant l’émulation entre les plus avancés et les autres, soit de constituer quatre ou cinq grandes entités au profit desquelles seraient concentrés tous les moyens au détriment de toutes les autres ! L’idée initiale de mise en cohérence et de valorisation globales est donc dévoyée et nous défendrons plusieurs amendements tendant à revenir sur l’organisation des réseaux thématiques que vous préconisez.

M. Alain Claeys - J’ai longtemps pensé que le problème central des universités était celui de leur « gouvernance » et que les propositions de réforme du mandat présidentiel ou de meilleure coordination des conseils d’administration apporteraient un réel progrès. On perd en effet trop souvent de vue l’idée simple – mais essentielle – selon laquelle la logique facultaire crée, pour faire simple, des difficultés de relation entre les universités – souvent très récentes – et les UFR. Je pense notamment aux problèmes liés au budget global, à l’immobilier, à l’évaluation de la masse salariale, à la valorisation de la recherche ou à la mutualisation des ressources. Tant que ces questions ne seront pas réglées, les difficultés de gouvernance des universités resteront entières.

Proposés à l’origine par la Conférence des présidents d’université et reprise par le collectif « Sauvons la recherche », les PRES visent à corriger les dérives suscitées par la création anarchique – souvent à l’initiative des responsables politiques – d’universités sur une aire géographique relativement restreinte. Ils tendent à initier une politique de sites, dont nous ne mettons pas en cause le bien-fondé. Par contre, il faut éviter que ceux qui auront vocation à susciter des PRES n’aient pas les moyens de leurs ambitions, sinon le système ne réussira pas. Pouvez-vous, Monsieur le ministre, nous apporter des précisions sur les deux questions centrales : mode de gouvernance et moyens financiers ? Dans le cadre des plans quadriennaux, les universités obtiendront-elles l’ouverture de crédits visant à favoriser la coopération entre universités ?

Favorables aux PRES, nous sommes hostiles aux réseaux thématiques – lesquels procèdent, par transformations successives, de la vieille notion de campus. Comme l’a expliqué Jean-Yves Le Déaut, nous redoutons que ces réseaux ne visent qu’à faire émerger un certain nombre de pôles d’excellence ayant vocation à capter tous les moyens disponibles, alors même que la réforme des universités n’est pas faite. Nous y voyons un risque sérieux de démantèlement du système universitaire et d’assèchement de certaines entités. Par ailleurs, les modes de gouvernance envisagés pour les réseaux ne nous conviennent pas.

Quelques questions pour conclure. Aujourd’hui, quelles sont les réformes qui restent à mener pour que l’université dispose d’une réelle autonomie par rapport aux organismes qui la composent ? Sur quels leviers agir en priorité : la contractualisation avec l’État, l’évaluation, le budget global ? Quel mode de gouvernance préconisez-vous pour les PRES ? Pourquoi avoir inventé les réseaux thématiques, qui font courir un risque réel à nos universités toujours pas réformées ?

M. Pierre Cohen – Issu de la CPU, le concept de PRES a fait consensus aux états généraux de la recherche de Grenoble, même si les discussions à leur sujet montrent qu’il eût été préférable de réformer de front la recherche et l’université. Comme l’a rappelé M. Fagniez, il n’est pas inimaginable de faire muter les organismes de recherche en agences de moyens, mais les universités ne sont aujourd’hui pas prêtes à assumer l’intégralité de la recherche française. Les PRES ont vocation à assurer la bonne articulation entre les politiques scientifiques nationales et les politiques de recherche régionales, menées notamment par les universités. L’utilité d’une instance de coordination dans des agglomérations qui comptent parfois trois ou quatre universités ne fait aucun doute. Cela permettra de mutualiser les moyens, de coordonner les programmes scientifiques – en évitant les doublons – et de susciter les dynamiques interdisciplinaires qui font souvent défaut. Tout cela va donc dans le bon sens.

Par contre, nous refusons la confusion des genres qui vous conduit à vous abriter derrière les pôles pour remettre au goût du jour une idée qui vous tarabuste depuis longtemps et que vous aviez voulu formaliser autrefois, avec les universités technologiques, et, plus récemment, avec les campus. Je veux parler bien sûr des réseaux thématiques, dont MM. Le Déaut et Claeys ont bien décrit les travers. Concentration des moyens et des thèmes – via une utilisation ciblée des appels d’offres de l’ANR : le système n’est pas conforme à l’idée que nous nous faisons de ce que doit être l’appareil de recherche national. Au reste, M. Dubernard a clairement indiqué que les réseaux thématiques constitueraient une forme dépourvue d’assise territoriale…

M. le Rapporteur - Je n’ai pas dit cela. J’ai dit que l’approche n’était pas forcément territoriale. Il y a une nuance.

M. Pierre Cohen – Créés sur un mode informel, les réseaux pourront se constituer en GIP ou sous la forme nouvelle de l’EPCS, ce à quoi nous ne nous opposons pas par principe. Par contre, il nous semble beaucoup plus grave d’envisager qu’ils puissent fonctionner sous le régime de la fondation…

M. le Rapporteur - Vous n’êtes pas épris de liberté !

M. Pierre Cohen - Les fondations de recherche existent déjà et on en dénombre quatre ou cinq. En son temps, Mme Haigneré avait tenté de les multiplier mais nous nous sommes toujours opposés à cette orientation manifestement contraire à nos traditions et à la vocation de notre système. Dès lors, nous ne pouvons que déplorer que votre projet tente d’y revenir.

M. Hervé Novelli - Au sein de notre système de recherche, les universités devraient évidemment jouer un rôle majeur. Malheureusement, elles ne font pas la course en tête dans les classements internationaux : selon celui de l’université de Shanghai, on ne compte que quatre universités françaises dans les cent premières mondiales ; dans celui du Times, le premier établissement français est vingt-septième, et c'est Polytechnique, et dans les cinquante premiers établissements, seulement deux sont français.

Prenons exemple sur nos voisins : les universités anglaises, allemandes, suédoises ou celles des anciens pays de l'Est gèrent leur budget et recrutent leur personnel de façon indépendante. Il convient tout d’abord de renforcer les responsabilités des agents comptables et des chefs des services financiers des universités, et de permettre à celles-ci d’affecter librement leurs ressources propres – redevances de brevets, recettes de formation continue, recettes des contrats de recherche... Il faut aussi offrir aux établissements plus de souplesse dans l'organisation des emplois. Tout cela va de pair avec une plus grande responsabilisation des équipes de recherche, qui doit s’accompagner de la création d’outils d'évaluation décentralisée.

Il faudrait aussi un système d'incitation à l'innovation, avec des possibilités accrues de coopération avec les entreprises ; des chaires cofinancées par l'université et des partenaires extérieurs, permettant de recruter les professeurs les plus compétents.

Enfin, une nouvelle gouvernance est nécessaire. Les conseils d'administration doivent être plus représentatifs, plus resserrés et dotés de véritables pouvoirs de décision. Les financeurs – État, collectivités locales, organismes extérieurs tels qu’entreprises ou fondations – devraient tous y avoir des représentants.

Je souhaiterais que le Gouvernement me réponde très clairement sur ce sujet très important, sur lequel j’ai déposé un amendement à l’article 16.

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche - Ces questions, en effet très importantes, sont souvent abordées lorsque nous rencontrons des universitaires, mais elles débordent du cadre de ce projet et méritent une concertation très approfondie. Les universités ont d’ailleurs déjà un degré d’autonomie important avec la globalisation des crédits, à laquelle va s’ajouter la possibilité pour elles de se regrouper dans des pôles de recherche. Nous sommes très ouverts à la discussion avec les intéressés, mais nous ne pouvons pas prendre de décisions maintenant ; je vous invite donc à retirer votre amendement.

M. le Ministre délégué – Je devais une réponse à M. Fagniez : en matière de soutien de l’État aux PRES, il n’y aura pas d’exclusive ; le PRES pourra avoir choisi un mode d’organisation associatif – mais dans la plupart des cas, il s’agira d’établissements publics.

Monsieur Novelli, je confirme que les universités disposent déjà d’espaces de liberté, notamment en matière de recrutement des enseignants-chercheurs ou de ressources propres. S’agissant de la composition des conseils d’administration, le juge constitutionnel a rappelé les règles qui s’imposent au législateur. La Conférence des présidents d’université est très ouverte aux discussions sur ces sujets, qui méritent en effet une discussion approfondie. Cette loi sur la recherche contribuera à l’excellence universitaire que nous souhaitons tous car la recherche tire l’enseignement supérieur vers le haut ; les créations d’emplois vont d’ailleurs majoritairement se faire à l’université.

Mme Anne-Marie Comparini – Dans un souci de lisibilité et de simplicité du système, je propose par mon amendement 203 de supprimer la mention de « réseaux thématiques de recherche avancée » : je crois que la structure PRES suffit, ce qui ne veut pas dire que je sois contre les regroupements par thématique.

M. Pierre Lasbordes – Pour éviter la confusion avec d’autres types de réseaux, je propose par mon amendement 375 de substituer au mot « réseaux » le mot « instituts ».

M. le Rapporteur – L’amendement 262 de la commission tend à introduire les « centres thématiques de recherche et de soins ». La commission a rejeté votre amendement, Madame Comparini, le PRES ayant une vocation transversale dans un cadre géographique donné ; vous connaissez celui qui se met en place à Lyon, qui associe les trois universités lyonnaises.

S’agissant des réseaux ou des centres thématiques, je prendrai deux exemples. A Nantes, une équipe très performante dans le domaine de la transplantation associe un service d’urologie, un service de néphrologie, trois unités INSERM, une unité CNRS. Il s’agit d’un réseau local, établi au sein du futur PRES de Nantes. IDEE, structure spécialisée dans l’épilepsie de l’enfant, prend à l’inverse la forme d’un réseau non localisé, qui associe des services de soins situés à Lyon, à Strasbourg et à Paris, ainsi que plusieurs unités de l’INSERM et du CNRS, avec en outre des connexions internationales.

À la lumière de ces exemples, vous comprendrez la nécessité d’accorder une certaine liberté aux chercheurs, qui doivent pouvoir développer leurs structures de façon indépendante.

Pour conclure, la commission a donné un avis défavorable à l’amendement 203, de même qu’à l’amendement 375, le terme d’« instituts » posant autant de difficultés que celui de « réseaux » choisi par le Sénat, tout en étant moins significatif. Quel rapport en effet entre l’institut Pasteur, l’institut Lumière et l’institut de la mode ?

M. le Ministre – Notre recherche souffre de deux faiblesses, Madame Comparini : nos pôles universitaires sont trop petits face à la mondialisation, et nous n’atteignons pas la taille critique dans certaines thématiques, tant les compétences restent dispersées sur l’ensemble de notre territoire.

Par souci de clarté, les PRES désignent des regroupements à caractère territorial, et les campus des structures thématiques. Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement 203. Sagesse, en revanche, sur l’amendement 375, et avis favorable au 262.

M. Jean-Yves Le Déaut – Nous partageons la position de Mme Comparini. Si nous sommes d’accord pour créer des regroupements dès qu’il s’agit de mener une action internationale, de valoriser la recherche ou l’innovation, le distinguo que vous introduisez est inacceptable. Loin de recouvrir une signification purement thématique, il identifiera en effet, sans le dire, des structures d’excellence par opposition au « tout venant » de la recherche : si vous n’instituez que quelques pôles d’excellence, les autres structures perdront leur crédibilité, et donc leurs financements.

Par ailleurs, je m’inquiète des propos de M. Goulard, qui nous explique que le pouvoir décisionnel reviendra au ministère, ainsi que de la manière dont les pôles de compétitivité ont été sélectionnés – sans la moindre transparence et par des experts appartenant à des réseaux d’influence.

Un tel système ne réserve pas un bel avenir aux universités de nos collègues de Limoges, de Poitiers, de Clermont-Ferrand ou de Dunkerque ! S’il ne s’agit pas de tout faire partout, car nous devons effectivement construire des pôles forts, secteur par secteur, n’en revenons pas à une recentralisation de la recherche en concentrant de facto les postes et les moyens disponibles dans la région parisienne ! La création des PRES offre des possibilités de regroupement, et cela nous semble suffisant.

M. Pierre Cohen - Nous sommes tous d’accord pour regrouper les universités et les divers organismes qui coexistent sur un territoire donné, même s’il faudrait préciser la forme juridique de cette coopération et préciser le partage des compétences entre les universités et ces regroupements.

Si nous sommes favorables, comme la communauté scientifique, à l’introduction de plus de coopération et de coordination entre des unités qui se neutralisent parfois, j’aimerais en revanche comprendre ce que recouvriront les « réseaux thématiques ».

Dans le domaine de l’aéronautique, par exemple, des laboratoires qui n’ont pas d’existence indépendante et qui souhaitent coopérer se sont d’ores et déjà rassemblés pour dégager des synergies, en particulier au niveau européen. Mais vous proposez d’aller au-delà en formalisant pareille union et en lui accordant la personnalité morale. Or, nous ne disposons d’aucune précision sur la composition de leurs organes dirigeants. Comprendront-ils les responsables des laboratoires ? Ou bien des équipes de recherche ? Nul ne le sait.

Pis encore, quels seront les liens entre les universités et ces structures, qui bénéficieront d’une dynamique propre, de mesures de défiscalisation, de postes et de moyens supplémentaires ? On peut craindre que toutes les universités, et pas seulement celles de Limoges, Poitiers ou Dunkerque, perdent leur financement et soient ainsi très vite réduites à néant.

L'amendement 203, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l’amendement 375.
L'amendement 262, mis aux voix, est adopté.

M. Frédéric Dutoit - L’amendement 78 est défendu.

L'amendement 78, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Claeys – J’aurais souhaité que le ministre s’exprime sur ces sujets qui engagent l’avenir de nos universités. Les craintes exprimées par mes collègues me semblent en effet fondées, et la CPU s’est opposée, par la voix de son premier vice-président, aux « réseaux thématiques ».

L’amendement 315 tend à supprimer la mention des fondations de coopération scientifique, qui risquent de devenir un nouvel instrument de gouvernance, loin de servir de simples réceptacles pour des moyens financiers supplémentaires : c’est donc une réforme dissimulée de nos universités que vous préparez !

Je souhaiterais donc des réponses précises sur deux sujets : considérez-vous, Monsieur le ministre, que les arguments développés par les présidents d’université sont dépourvus de tout fondement ? Pouvez-vous en outre nous garantir que la création de ces fondations ne remettra pas en cause la gouvernance des universités ?

Si vous voulez éviter que le débat s’enlise pendant des heures sur ce sujet, un peu de clarté serait la bienvenue de votre part.

M. Pierre Cohen - Je regrette que nous n’ayons pas de réponse. Il est tout de même important pour les différentes entités de recherche qui envisagent de créer un PRES de comprendre comment elles vont s’articuler en son sein. Cela pose déjà un problème lorsque les deux entités sont publiques. Que dire alors de la possibilité offerte, au mépris de toute l’histoire des universités et de la recherche, de créer un PRES sous la forme d’une fondation ! Mme Haigneré a essayé sans grand succès de mettre en place des fondations scientifiques. Mais que vous ayez le culot idéologique de prévoir que cette coopération peut s’opérer dans le cadre d’une fondation privée est proprement ahurissant ! L’amendement 316 vise donc à supprimer cette disposition.

M. Dubernard a beau nous affirmer que les universitaires sont suffisamment responsables pour faire ce qu’ils veulent, nous voulons une réponse !

M. Jean-Yves Le Déaut - L’amendement 317 est identique. L’alinéa 8 de l’article 2 prévoit bien qu’une fondation peut devenir un instrument de gouvernance. Or, pour nous, les fondations doivent rester des outils, et non devenir des structures supplémentaires. Il suffirait, avec votre texte, qu’un établissement public constitue un PRES avec une fondation pour qu’il se transforme en un nouvel instrument, démantelant ainsi l’université. Nous souhaitions précisément, au contraire, regrouper des universités afin d’atteindre une taille critique suffisante. Dans le système que vous proposez, un établissement public pourra s’associer avec une fondation pour créer un nouvel établissement, qui deviendra un instrument de gouvernance et qui ne pourra être qu’une structure privée.

Rappelez-vous l’université privée créée par Charles Pasqua. Avec votre système, ce sont des dizaines d’universités Léonard de Vinci qui viendront pomper les crédits publics et polluer le paysage national !

M. Michel Charzat - L’amendement 320 est identique. La création des établissements de coopération scientifique induit déjà un risque d’accroissement des inégalités territoriales : à moyens constants, les ressources financières, scientifiques et humaines vont en effet se concentrer dans les zones d’excellence au détriment des autres. Mais au-delà de cet inconvénient, le mode de gouvernance proposé pour les PRES est inacceptable. Alors qu’ils pourraient être un outil de rééquilibrage entre universités et grandes écoles, entreprises, associations et collectivités locales, ils risquent de devenir un instrument de contournement de l’université, voire de démantèlement du système public. L’alinéa 8 de l’article 2 leur offre en effet la possibilité de prendre la forme de fondations de coopération scientifique, c’est-à-dire de personnes morales de droit privé. C’est un coup supplémentaire porté à la recherche publique : on sous-entend que les organismes de recherche et les universités vont être mis au service du secteur privé. Que des fondations apportent leur soutien financier, via le mécénat, à des programmes de recherche, oui ; qu’elles prennent le contrôle des PRES, non ! Notre amendement vise à empêcher que se creusent les déséquilibres entre recherche publique et recherche privée. Quand comprendrez-vous enfin qu’une recherche de qualité doit valoriser l’institution universitaire au lieu de la démanteler ?

M. François Brottes – Il me semble que nous mettons la charrue avant les bœufs. Nous sommes en train de discuter de l’organisation des PRES. Que la section 1 fixe leurs objectifs, on peut le comprendre. Mais qu’elle prévoie également avec quels outils et selon quelles méthodes ces objectifs seront mis en œuvre ne laisse pas d’étonner. En effet, ils n’existent pas encore : nous n’en discuterons qu’à la section 2. Il aurait donc été de bonne méthode de reporter le vote sur cette partie de l’article, car pour l’heure, nous naviguons à l’aveugle.

M. le Président – Sur le vote des amendements 315 à 321, je suis saisi par le groupe socialiste d’une demande de scrutin public.

M. le Rapporteur – Combien de fois les orateurs qui viennent de s’exprimer ont-ils fait référence aux exemples étrangers ? En Grande-Bretagne, dans les pays scandinaves, au Japon ou aux États-Unis, les fondations sont légion. Il ne s’agit que d’offrir aux chercheurs des possibilités nouvelles en matière de liberté de gestion et de financement : nul ne les contraint à y participer. Avis défavorable, donc, sur tous ces amendements.

M. le Ministre – Je souscris à ce que vient de dire le rapporteur : il y a aussi de bonnes idées à prendre ailleurs !

L’esprit de ce texte, c’est d’abord la confiance. Or, à vous entendre, on dirait que vous ne faites pas confiance aux acteurs de la recherche, qui, eux, font confiance à l’article 2. Laissons aux scientifiques le choix des modalités de coopération – association, groupement d’intérêt public, nouvel établissement public, voire fondation – qu’ils souhaitent pour leurs PRES. Les fondations de coopération scientifique sont conformes à la loi de 1987 sur les fondations d’utilité publique. C’est un outil souple, qui nous est nécessaire pour soutenir la comparaison avec d’autres pays. Chaque établissement décidera de participer ou non à la fondation et fixera sa participation financière. On est loin du démantèlement !

M. Jean-Yves Le Déaut - Décidément, c’est un dialogue de sourds. Nous ne sommes pas hostiles à ce que des fondations financent des établissements publics. Ce que nous refusons, c’est qu’elles gouvernent.

Vous dites que pour créer un PRES, il faut au moins un établissement public à caractère culturel, scientifique et professionnel, mais en France, ce peut être une école. Je veux bien que l’on regarde du côté des États-Unis, Monsieur Dubernard, et que l’on s’inspire des modèles qui marchent bien, mais je n’ai vu nulle part qu’une fondation soit le système de gouvernance !

M. Jean-Michel Fourgous - Et Harvard ?

M. Jean-Yves Le Déaut - C’est une université, que plusieurs fondations viennent soutenir !

Nous ne voulons pas d’un démantèlement des universités, les parties les plus performantes prenant leur autonomie, à l’heure où il faut au contraire des regroupements, très lisibles au niveau international, et, plus que jamais, de la pluridisciplinarité.

M. Pierre Cohen - Nous n’avons jamais été contre les fondations, Monsieur le ministre, nous refusons simplement que vous en fassiez un mode de gouvernance de la recherche. La CPU est d’ailleurs contre cet article. De fait, il serait complètement contraire à notre histoire de confier un tel niveau de gouvernance à une structure privée. Ce serait aussi grave, voire encore plus grave, que de décider en un week-end la privatisation de GDF !

M. le Ministre – C’est le conseil d’administration des universités qui décidera ou non de créer une fondation. La gouvernance, c’est lui !

M. Jean Dionis du Séjour - Le débat se déplace sur la gouvernance de l’université, question légitime. Si la réforme de l’université était facile à faire, cela se saurait. Je crois que nos collègues socialistes posent de bonnes questions, mais je crois aussi qu’à force de renvoyer la réforme à plus tard, on ne bouge pas. Moi, je vis bien cet article 2, car il offre une boîte à outils pour remédier à l’une des faiblesses de la recherche : le caractère embryonnaire du partenariat public-privé. Les fondations peuvent apporter des ressources supplémentaires à la recherche. Vous ne voulez pas, Messieurs, qu’elles soient un niveau de gouvernance, mais comment voudriez-vous qu’elles ne le soient pas, compte tenu de l’importance des montants en jeu ?

M. Alain Claeys - La réponse du ministre éclaircit les choses. Nous sommes d’accord sur les PRES, mais nous sommes contre les réseaux thématiques, car ils font courir à l’université un risque de démantèlement, dans la mesure où ils puiseront en elles leurs pôles d’excellence. Vous dites, Monsieur le ministre, que ce sont les conseils d’administration des universités qui décideront, mais au bout du compte les fondations représenteraient bien un nouveau moyen de gouvernance. Nous ne sommes pas d’accord, la Conférence des présidents d’université non plus. Nous acceptons les fondations comme moyens de collecte, pas comme instruments de gouvernance, et nous demanderons la suppression des réseaux thématiques.

A la majorité de 38 voix contre 11, sur 49 votants et 49 suffrages exprimés, les amendements 315, 316, 317, 320 et 321 ne sont pas adoptés.

M. Pierre Cohen - L’amendement 273 est défendu.

L'amendement 273, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Anne-Marie Comparini - Dans un rapport rendu en octobre 2005, la Cour des comptes proposait que soient franchies sans tarder les étapes préalables à l’octroi aux universités d’une autonomie de gestion accrue. C’est en effet la condition pour que nos universités jouent pleinement leur rôle et soutiennent la comparaison internationale. Je suis bien sûre la première à considérer que cette démarche suppose une concertation avec tous les acteurs, mais il faut savoir lever les tabous. C’est pourquoi je propose, dans mon amendement 204, qu’elles puissent, à leur demande, procéder à une expérimentation en matière de gouvernance afin de devenir des universités de plein exercice.

J’ajoute que ces expérimentations pourraient ensuite servir de base à une loi, comme cela a été le cas pour l’expérimentation des TER.

M. le Rapporteur – Défavorable.

M. le Ministre – La réponse que j’ai faite à M. Novelli s’applique à cet amendement, qui soulève un vrai débat, mais un débat qui n’est pas celui de ce soir et qui devrait de toute façon être précédé d’une grande concertation avec les intéressés. J’ajoute que les universités ont déjà un certain degré d’autonomie et que nous leur apportons ici les moyens de prendre plus d’initiatives et de se montrer plus entreprenantes.

M. Frédéric Dutoit - Je suis d’accord avec le ministre : il faut une concertation avec l’ensemble de la communauté universitaire. Le débat est en train de s’engager.

L’amendement de Mme Comparini nous ferait mettre le doigt dans une logique de décentralisation et de désengagement de l'État de ses missions de service public dans le domaine de l'enseignement. L'enseignement supérieur doit être développé à partir d'un maillage territorial équilibré qui assure l'équité entre les étudiants et qui réduise les inégalités sociales. Il doit reposer sur une coopération entre les universités, alors que la compétition entre elles ne génère que l'éclatement du service public. Or, cet amendement mettrait en péril la qualité de l’enseignement supérieur. Il mettrait les universités en concurrence et sacrifierait les plus petites d’entre elles, qui seraient jugées non viables. Il favoriserait l'autofinancement par la contractualisation, transformant les laboratoires universitaires en prestataires de services pour les grands intérêts privés. Il aurait pour conséquence le désengagement financier de l'État, la remise en cause des règles de fonctionnement démocratique et le développement d’une logique de déréglementation et de privatisation des services publics qui est déjà engagée.

Certes, l'université doit se transformer pour relever ses défis, mais c'est d'un tout autre projet que le vôtre que le pays a besoin. Nous voterons contre cet amendement.

L'amendement 204, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président – Les amendements 75 et 274 à 280 sont identiques.

M. Frédéric Dutoit – L’article 2 réintroduit la notion de campus, mais sous le nom de réseau thématique de recherche avancée. Cette notion de campus avait été introduite par un groupe de pression regroupant une poignée de mandarins, dont un démissionnaire d'un institut de premier plan dont la réforme avait été refusée : il défendait en effet une conception élitiste de la recherche – tout l’argent pour les meilleurs ! – largement refusée par les états généraux. La fondation de coopération scientifique, elle, est la forme juridique du réseau thématique. C’est un nouveau type de structure, de droit privé, qui devrait bénéficier de financements très importants – 300 millions pour 2006. Ces fondations pourront récolter des fonds privés dans le cadre de la loi sur le mécénat, avec des avantages fiscaux.

Devant cette manne, les appétits se sont réveillés. Ainsi, un lobbyiste bien connu et patron de quelques start up dans le domaine de la biologie a déjà lancé un projet d'institut européen de technologie destiné à devenir une vaste pompe à fric – dans le style de la fac Pasqua-Léonard de Vinci. Un autre projet de campus, à Strasbourg, promet d'être un laboratoire social pour le démantèlement du statut du personnel. Vous le voyez, nous sommes bien renseignés… L’amendement 75 demande donc la suppression de l’alinéa 9.

M. Pierre Cohen - Nous avons déjà dit tout le mal que nous pensons des réseaux thématiques tels qu’ils sont proposés. Il en existe déjà, qui fonctionnent et qui permettent à des gens de tout le territoire de travailler ensemble, mais vous voulez aller plus loin et leur donner une personnalité morale. Prenons l’exemple d’une grande université – celle de Toulouse, au hasard – qui a envie de créer un PRES avec d’autres universités, le CNRS et l’INSA par exemple. Cette possibilité est très attendue, et je suis sûr qu’elle aura du succès. Mais si certaines de ses équipes – une qui travaille sur le génopole et une autre en informatique, par exemple – veulent elles aussi dépasser leur cadre, c’est l’université Paul Sabatier qui devra créer des réseaux thématiques, leur donner une structure et un conseil d’administration et, en plus du PRES, qui négociera au nom des sciences du vivant et de l’informatique… L’université va se retrouver dans cinq ou six structures, territoriales et thématiques ! Vous allez stériliser les dynamiques qui pourraient se constituer autour des PRES. Je suis très inquiet de cette disposition.

M. Jean-Yves Le Déaut - Nous avons déjà connu des faits malheureux : les avions renifleurs, le centre mondial informatique, la fac Pasqua… L’Assemblée ferait bien de venir visiter ses locaux vides, pour voir à quoi tous ces milliards ont servi ! Ce texte va offrir la possibilité de créer des entités qui n’auront de grandiose que l’imagination de leurs promoteurs. Vous avez déjà des dossiers sur votre bureau, Monsieur le ministre ! Des projets pharaoniques, dont, pour certains, les universités ne sont mêmes pas au courant – c’est le cas, pour un dossier de 400 millions, dans la circonscription de M. Lasbordes. Et l’on vient parler du contrôle du Parlement ! L’argent est rare, et vous allez le disperser dans des projets qui ne seront pas évalués.

Nous défendons, au contraire, des PRES qui soient un réseau d’excellence dans les grandes universités et qui tirent vers le haut de grands secteurs au niveau national. Je soutiens dans ma région des dossiers remarquables sur les matériaux innovants et les produits intelligents, dont l’un des promoteurs va être distingué par un prix américain, mais je n’aurai pas de crédits parce que vous aurez trop donné à des projets bâtis sur du sable, comme celui mené par M. Pasqua parce qu’il avait le pouvoir politique !

M. François Brottes - Quand on fait une pile de cubes, arrive un moment où il faut s’arrêter. C’est quelque chose qu’on apprend dès la troisième année de maternelle : le cube de trop fait s’écrouler la pile. Ici, en voulant le conforter, vous fragilisez l’ensemble. Les PRES sont globalement considérés comme une bonne idée. La loi ne les confine en rien dans un territoire, et ils peuvent aussi être un réseau interdisciplinaire. Pourquoi ajouter, au nom de l’excellence, un réseau thématique ? L’excellence n’appartient pas à ceux qui auraient le loisir, voire le privilège, de se constituer en réseau thématique ! Dans votre logique de financement par projets, ils absorberont peut-être bientôt tous les crédits disponibles. Les autres n’auront plus que leurs yeux pour pleurer. C’est pourquoi nous proposons la suppression de cet alinéa.

M. le Rapporteur – La suppression des réseaux thématiques de recherche avancée serait de toute évidence une grave erreur. Elle nous priverait de la liberté indispensable et empêcherait les structures de prendre un élan, dans un cadre transversal. C’est ce qui existe partout ailleurs.

M. le Ministre – Il peut y avoir des coopérations à la fois territoriales et thématiques. On peut constituer un PRES et un réseau thématique sur les biosciences, par exemple, comme c’est le cas à Lyon. Nous donnons de nouvelles libertés aux acteurs, car nous leur faisons confiance : il ne faut pas partir du principe qu’ils vont faire des bêtises à partir d’outils intelligents !

M. Daniel Garrigue – La recherche se développe énormément en réseaux, tant en France que dans les autres pays. Rester sur une base purement territoriale ne permet pas de rechercher l’excellence. Il peut certes y avoir un lien entre les procédures d’appel à projets et le développement de ces réseaux, mais c’est précisément parce que l’un des intérêts de cette procédure est de favoriser les démarches pluridisciplinaires que les réseaux entrent dans cette logique.

L’opposition nous dit souvent combien elle est attachée à la recherche européenne et au PCRD, mais pour l’instant, il est clair que ce sont nos organismes de recherche qui participent au PCRD, et notamment aux réseaux d’excellence et aux projets intégrés, plutôt que nos universités.

Si celles-ci rencontrent beaucoup plus de difficultés, c’est précisément parce qu’elles ne disposent pas des outils nécessaires pour le faire. Gageons que les réseaux thématiques permettront de favoriser leur intégration dans les réseaux d’excellence, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

M. Pierre Lasbordes - M. Le Déaut a cru bon de mettre en cause un « projet pharaonique » de ma circonscription quand il s’agit seulement d’un projet ambitieux. Les conversations se poursuivent d’ailleurs de manière très positives avec le PRES UniverSud et Paris XI, selon la direction même de cette université.

M. Pierre Cohen – Nous sommes favorables aux PRES, aux réseaux, et à tout ce qui favorise la synergie de la recherche sur les plans national et européen, mais que se passera-t-il lors des appels à projets ou des attributions de postes, entre des structures « territoriales » ou thématiques organisées différemment sur le plan juridique ? Vous ne pouvez vous contenter de dire que ce sera aux conseils d’administration de décider. Vous créez un imbroglio néfaste pour la recherche.

M. le Président – Sur le vote des amendements 75, 274, 275, 276, 277, 278, 279 et 280, je suis saisi par le groupe socialiste d’une demande de scrutin public.

M. François Brottes – J’entends dire que les PRES auraient une vocation territoriale, mais ce n’est pas ce que je lis dans le texte. Dès lors qu’il n’y a pas de contrainte territoriale, un PRES peut très bien se constituer entre plusieurs entités qui appartiennent à des territoires différents. Il ne faudrait pas que ces constitutions se révèlent impossibles au cours de la procédure d’agrément. En outre, les organismes qui constitueront les PRES ne sont pas liés éternellement et des évolutions seront toujours possibles.

À la majorité de 37 voix contre 9, sur 46 votants et 46 suffrages exprimés, les amendements 75, 274, 275, 276, 277, 278, 279 et 280 ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur – L’amendement 122 répond au souhait exprimé par Mme Comparini et vise à associer des entreprises, des collectivités territoriales, des associations ou d’autres partenaires aux réseaux thématiques de recherche avancée.

M. le Ministre – Cet amendement se situe tout à fait dans l’esprit du projet. Avis favorable.

Mme Anne-Marie Comparini – J’ai en effet veillé à ce que l’on mentionne les collectivités territoriales, mais cet amendement ne peut remplacer la démarche qu’avec M. Philip nous avons évoquée hier soir.

M. François Brottes – La constitution des PRES n’implique donc pas de contrainte territoriale ? Je souhaiterais une clarification.

M. le Ministre – C’est l’intensité et la pertinence du projet qui comptent, non le périmètre.

L'amendement 122, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur – L’amendement 125 vise à renforcer la recherche clinique dite recherche biomédicale.

L'amendement 125, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Pierre Lasbordes - L’amendement 228 vise à permettre aux acteurs de la recherche de créer ensemble un établissement de coopération scientifique sans pour autant constituer un PRES.

M. le Rapporteur – Avis défavorable.

M. le Ministre – Avis favorable sur cet amendement tout à fait conforme à l’esprit du texte.

L'amendement 228, mis aux voix, est adopté.

M. Pierre Lasbordes - L’amendement 46 est de cohérence.

M. le Rapporteur – Avis défavorable.

L'amendement 46, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Pierre Lasbordes - L’amendement 383 est de cohérence avec les précédents.

M. le Rapporteur – Avis défavorable.

M. le Ministre – Avis favorable.

M. Jean-Yves Le Déaut – Que se passe-t-il ? M. Lasbordes aurait-il négocié avec le Gouvernement à l’insu de la commission ? Que signifie précisément l’amendement 228 ? Certains voudraient-ils défendre des intérêts particuliers ? Que faut-il comprendre ?

M. Pierre Lasbordes – Je suis choqué que vous m’accusiez d’avoir négocié en douce avec le Gouvernement. L’amendement 228 précise seulement que des organismes de recherche peuvent s’associer sans utiliser la forme juridique du PRES.

M. Jean-Yves Le Déaut – Une unité mixte de recherche, association entre l’université et le CNRS par exemple, n’implique pas nécessairement un PRES : cela existe donc déjà ! Pourquoi un nouveau texte ?

M. Pierre Lasbordes – On doit être libre de pouvoir utiliser la structure juridique de l’EPCS.

M. Jean-Yves Le Déaut - M. Pasqua lui aussi était libre de créer l’université Léonard de Vinci !

M. Pierre Cohen – Pour quelles raisons, à la faveur d’un amendement, des organismes de recherche deviendraient-ils d’abord des EPCS, alors que les PRES, qui sont au cœur de cet article, sont censés primer ?

M. le Président – L’Assemblée a adopté l’amendement 228, puis l’amendement 46, par cohérence. Nous examinons à présent trois autres amendements de cohérence avec le 228.

M. Pierre Cohen - Le mouvement s’accélère alors que le sujet est important puisqu’il semble que cet amendement tend à détourner l’esprit de l’article. Notre rapporteur peut-il justifier son avis défavorable ?

M. le Président – La question de fond a été tranchée avec l’adoption de l’amendement 228.

M. Jean-Yves Le Déaut - Il n’est pas question de voter sans comprendre ! Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue le jeudi 2 mars 2006 à 1 heure 15, est reprise à 1 heure 20.

M. Jean-Yves Le Déaut - Pendant la suspension, je me suis rapproché du rapporteur, qui m’a conseillé – étant défavorable à l’amendement – de m’adresser au Gouvernement. Le ministre m’a alors indiqué que l’amendement visait à donner de la souplesse sans dénaturer l’esprit du texte. Mais après avoir consulté l’auteur du dispositif, M. Lasbordes, je m’aperçois qu’il en va tout autrement, puisque cet amendement tend à permettre à des organismes d’adopter le statut d’EPCS sans qu’une université soit partie prenante à la démarche. Cela revient à permettre à ceux qui le souhaitent de se placer sous les nouveaux régimes – EPCS, puis PRES – en contournant les universités.

M. le Rapporteur – C’est cela qui explique l’avis défavorable de la commission…

M. Jean-Yves Le Déaut - J’ai donc levé un lièvre !

M. le Rapporteur – L’esprit du texte étant de rapprocher les organismes de recherche et l’université, nous ne pouvons être favorables à cette disposition.

Mme Anne-Marie Comparini - Très bien !

M. le Président – L’amendement 228 et un premier amendement de cohérence ayant été adoptés, il convient que l’Assemblée se prononce sur les trois autres amendement de cohérence – 383, 384, 385. Libre à ceux qui ont la faculté de demander ultérieurement une seconde délibération, de le faire s’ils le souhaitent !

M. Jean-Yves Le Déaut - Rien n’oblige de voter la mise en cohérence, au surplus contre l’avis de la commission ! On nous présente au débotté un amendement tendant à compromettre toute la logique de ce qui a déjà été délibéré. Bien entendu, le groupe socialiste ne s’associera pas à cette manœuvre.

Les amendements 383, 384, 385, repoussés par la commission et acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu, ce matin, à 9 heures 30.
La séance est levée à 1 heure 25.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Catherine MANCY

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ordre du jour
du jeudi 2 mars 2006

NEUF HEURES TRENTE - 1re SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion du projet de loi de programme pour la recherche, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence (n° 2784 rectifié).

Rapport (n° 2888) de M. Jean-Michel DUBERNARD, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Avis (n° 2879) de M. Claude BIRRAUX, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

Avis (n° 2837) de M. Jean-Michel FOURGOUS, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

QUINZE HEURES - 2e SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l’ordre du jour de la première séance.

VINGT ET UNE HEURES TRENTE - 3e SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l’ordre du jour de la première séance.

© Assemblée nationale