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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

2ème séance du mardi 17 octobre 2006

Séance de 22 heures 30
7ème jour de séance, 15ème séance

Présidence de M. Maurice Leroy
Vice-Président

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La séance est ouverte à vingt-deux heures trente.

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LOI DE FINANCES POUR 2007 (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2007.

M. Michel Bouvard – Dernière de la législature, la loi de finances pour 2007 s’inscrit dans la continuité des précédentes, marquée qu’elle est par une volonté de maîtrise de la dépense publique dans un contexte de croissance plus forte. Elle ne constitue pas pour autant un aboutissement : des améliorations demeurent possibles et nécessaires, notamment pour que le Parlement puisse remplir au mieux sa mission de contrôle.

La maîtrise de la dépense publique est renforcée, avec un objectif de zéro en valeur, qui fait suite à l’objectif zéro en volume des exercices précédents. Même si cet objectif n’est pas tout à fait atteint – et l’analyse de notre rapporteur général est parfaitement fondée –, cette continuité dans la maîtrise de la dépense et dans le respect de l’autorisation parlementaire est sans précédent.

S’attaquant aux causes structurelles du déficit, que la Cour des comptes avait identifiées bien avant les rapports Camdessus et Pébereau, la loi de finances pour 2007 marque la première diminution significative des dépenses de personnel – premier poste budgétaire de l’État – et du stock de la dette. La réduction de 15 000 du nombre des emplois publics n’équilibrera pas la charge des nouveaux retraités de la fonction publique d’État, mais elle marque l’entrée dans un cercle vertueux. Cette diminution n'affecte pas les priorités que sont la sécurité et la justice, missions régaliennes de l'État, ni la recherche et l'enseignement supérieur, pour lesquels l’effort de la nation reste inférieur à celui des principaux pays de l'OCDE.

La recherche et l'enseignement supérieur bénéficieront ainsi de 1 600 emplois supplémentaires. En revanche, l'enseignement du second degré, dont le nombre d’élèves diminue, verra ses effectifs se réduire. C’est là une mesure cohérente, surtout lorsque l'on sait, depuis le rapport remis par la Cour des comptes à la commission des finances, que le nombre d'enseignants non affectés est de 49 460, dont 3 430 n'exercent aucune fonction et 2 690 n'exercent que des fonctions adaptées. Dans cette deuxième catégorie figurent 2 100 équivalents temps plein concernés par la procédure dite de réadaptation, évoquée par le rapport de la Cour des comptes, repris par notre collègue Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. « La réadaptation, disent les documents officiels, est une procédure destinée à permettre à des enseignants, temporairement incapables de faire face à des élèves, d'être affectés à des “emplois leur permettant d'exercer des activités à caractère pédagogique ou éducatif adaptés à leur situation et de recouvrer la capacité d'assurer la plénitude des fonctions prévues par leur statut”. Leur réinsertion peut consister soit à reprendre un service normal d'enseignement en présence d'élèves, soit à être affectés en “réemploi” au sein du ministère, soit enfin à engager une reconversion dans un autre emploi de la fonction publique de l'État, ou en dehors de celle-ci. » Monsieur le ministre, je ne doute pas que les audits que vous avez lancés nous permettront de savoir combien de ces enseignants se sont effectivement reconvertis dans la fonction publique de l’État ! Bref, pour ce qui est de la gestion des ressources humaines, les marges de progrès sont considérables.

De même, la réduction des effectifs du ministère de l'équipement s'inscrit dans la logique de la décentralisation, puisque les compétences de l'État se sont réduites avec le transfert de la plus grande partie du réseau routier national aux départements. Encore faudra-t-il, comme je le rappelle en vain chaque année, que cette réduction porte aussi sur les structures centrales de l'État, et pas seulement sur les postes territoriaux. L'évaluation des besoins doit être la règle, et la capacité des responsables à user de la fongibilité asymétrique autorisée par la LOLF et à utiliser au mieux les ressources humaines doit être développée. Je suis d’autre part préoccupé par une pratique fréquente que la MILOLF a constatée sur le terrain, qui consiste à procéder à la suppression pure et simple des postes non pourvus en fin d'année, alors même que certains responsables de budgets opérationnels de programme attendent la vacance d'un poste d'une catégorie pour le remplacer par un poste d'une autre catégorie, plus adapté à leurs besoins.

Rien ne justifie non plus le maintien de services de l'État lorsqu’ils correspondent à des compétences transférées aux collectivités locales. Leur suppression permettrait d’ailleurs de réduire l’inflation réglementaire dénoncée par le président de notre commission.

Après un cycle de hausse continue depuis plusieurs décennies, l'objectif de réduction de la dette devient une réalité. Il s'agit bien d'une urgence : en 2007, l'État devra encore rembourser 72,8 milliards d'euros de dette à moyen et long terme, tout en finançant un déficit budgétaire de 41,6 milliards. C'est tout de même 13,2 milliards de moins qu'en 2006. Certes, la diminution du stock de dette est financée en partie par la cession d'actifs de l'État et par des opérations de trésorerie, mais cette pratique est légitime. Elle est utilisée par nombre de collectivités territoriales ; un ancien ministre du budget, aujourd'hui adjoint aux finances de la Ville de Paris, en a lui-même usé en cédant les titres que la Ville détenait dans la Compagnie nationale du Rhône, bien de la nation privatisé par le gouvernement Jospin.

Malgré cet effort, la charge de la dette représentera en charge nette, avant les opérations de couverture de taux, 39 191 millions, soit plus des deux tiers du produit de l'impôt sur le revenu. C'est l'honneur de notre majorité, à la veille des échéances électorales, de n'avoir pas cédé à la facilité de la dépense et de présenter ce budget de responsabilité. J’évoquais tout à l’heure, en réponse aux motions de procédure, les conditions de mise en œuvre du budget 2002 – avec la cession d’Autoroutes du Sud de la France parce que les recettes de licences de téléphonie mobile n’étaient pas arrivées. Je me souviens aussi des manifestations de femmes de gendarmes, et des redéploiements de crédits pour financer des mesures en faveur de la police et de la gendarmerie, assurés pour certains à partir de lignes budgétaires qui n’existaient plus ! Tout cela est loin : la LOLF est passée par là, mais la pratique est aussi différente.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État - Et vous y êtes pour quelque chose, Monsieur Bouvard !

M. Michel Bouvard – Il nous reste cependant du chemin à parcourir. En effet, la loi de finances pour 2007 n’échappe pas à la pratique qui consiste à sortir une partie de la dépense publique du budget de l'État pour la confier à des opérateurs. Le Parlement a certes obtenu, à l'occasion de la modification de la LOLF et avec le soutien de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'économie et des finances, l’intégration des opérateurs dans les programmes et les rapports annuels de performance pour obtenir cette consolidation de la dépense publique par mission et programme que la LOLF avait déjà recherchée en affichant la dépense fiscale à côté de la dépense budgétaire. Mais de nouvelles pratiques apparaissent, au travers de l'affectation de ressources budgétaires à ces opérateurs. Nous nous en sommes d’ailleurs inquiétés lors de votre audition par la commission. Près de 1,5 milliard de recettes sont affectées cette année, via des dispositions nouvelles, aux articles 24 – Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire –, 25 – Conservatoire du littoral et des rivages lacustres –, 27 – Agence nationale de la recherche et OSEO –, 28 – Agence nationale des titres sécurisés – et 30 – Centre des monuments nationaux.

Si les recettes affectées ont quelquefois un lien avec l’organisme bénéficiaire, comme les droits de timbres des passeports pour l’Agence nationale des titres sécurisés, ce n’est pas toujours le cas : il en est ainsi des droits de francisation et de navigation des bateaux, affectés au Conservatoire du littoral, ou des droits de mutation de l'État pour le Centre des monuments nationaux. Il n'est nullement mon intention de remettre en cause un effort nécessaire en faveur des monuments, ni de reprocher aux ministres de préserver leurs capacités d'investissement, mais la méthode est mauvaise : elle ampute les recettes de l'État, comme le faisait la dépense fiscale – que l'on a réintégrée dans les documents budgétaires à l'occasion de la LOLF –, mais ces recettes ne seront plus lisibles dans le budget de l'État. Cela m'a conduit, après avoir déposé plusieurs amendements de suppression des articles correspondants, à demander que chacune de ces mesures soit limitée à une année, afin que le Parlement puisse s'interroger à chaque loi de finances sur leur pertinence au regard des résultats obtenus.

Au-delà, c'est tout le débat sur le rôle des agences, et plus largement des opérateurs publics, qui est ouvert. Ces opérateurs permettent une plus grande souplesse de gestion, mais sont aussi – et l’ont été sous toutes les majorités – des outils de débudgétisation massive.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances – C’est vrai !

M. Michel Bouvard - Il importe donc de mieux les intégrer dans la logique d'évaluation et de contrôle de la LOLF. Chaque opérateur bénéficiaire de ressources affectées pourrait ainsi être tenu de produire, au moment de la loi de règlement, un rapport annuel de performance justifiant l'usage qu’il en a fait. Cette disposition, qui relève du législateur organique, ne peut être adoptée par amendement, mais rien n'interdit au Gouvernement de la proposer…

Je tiens enfin à saluer les progrès accomplis en matière de projets annuels de performance, même si les objectifs et les valeurs cibles restent trop flous dans certains ministères, et les indicateurs trop peu renseignés. Il sera nécessaire d'associer les acteurs de terrain à la définition de ces indicateurs, lesquels ne doivent pas devenir trop nombreux : nous étions quelques-uns à craindre une bureaucratie des indicateurs dans certains ministères… et nous y sommes. C’est d'autant plus fâcheux que les systèmes d'information ne sont pas encore au rendez-vous – et j’aimerais, Monsieur le ministre, en savoir plus sur leur état d’avancement, car ils sont une des conditions de la réussite de la réforme.

Au-delà de ces observations, je souhaite saluer le travail immense qu’a représenté pour l’administration la mise en œuvre de la LOLF. L’encadrement comme les agents de la fonction publique sont très motivés et même si le message n’est pas encore passé partout, malgré aussi quelques articles de presse chagrins, il faut surtout mesurer le chemin parcouru. C’est l’honneur de cette majorité que d’avoir su appliquer cette réforme consensuelle dans le même esprit de rassemblement. En espérant que ces quelques observations soient entendues, je vous assure, Monsieur le ministre, de mon soutien à ce projet de loi de finances pour 2007 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Thierry Carcenac – Didier Migaud, tout à l’heure, a critiqué ce projet de loi de finances dans son exception d’irrecevabilité.

M. le Ministre délégué – Sans conviction !

M. Thierry Carcenac - Je m’en tiendrai pour ma part à l’article 18 de la loi de finances, qui met fin à 128 ans de monopole de la fabrication des monnaies par l'État, et donc au budget annexe des monnaies et médailles. Cette décision importante, annoncée depuis des mois, est aujourd’hui gérée dans la précipitation, et la création d’un établissement public industriel et commercial soulève de nombreuses interrogations. Cette décision est liée au fait que la LOLF restreint le contenu des budgets annexes, mais un projet législatif eût été préférable. En effet, l'activité de frappe des euros est devenue minoritaire aux Monnaies et Médailles, notamment en raison de l'importance des stocks constitués lors du passage à l'euro, du fait d’une mauvaise appréciation des besoins.

Un seul article, mais ne comprenant pas moins de 37 alinéas, prétend régir le nouvel établissement des Monnaies de Paris et donc ses 712 employés, dont 516 ouvriers d'État. Le débat sur cet article nous permettra de revenir sur la définition des missions des Monnaies de Paris, sur ses moyens en personnel et sur la dotation de l'État en bâtiments et fonds propres. Pour l’heure, je souhaite vous interroger sur le projet industriel que vous envisagez. L’exposé des motifs est en effet fort bref : « Le changement de statut juridique s'accompagne de l'élaboration d'un véritable projet industriel de moyen terme ouvrant à la Monnaie de Paris de nouvelles perspectives de développement des activités industrielles et commerciales ». J’espère que vous nous en direz un peu plus !

Les membres du personnel que j’ai eu l’occasion de rencontrer, comme les organisations syndicales, sont inquiets de cette modification et souhaitent un engagement fort du Gouvernement quant au maintien du monopole de frappe, qui devient dans l’article la frappe « à titre exclusif » des monnaies, et quant aux missions de l'EPIC. Vous conviendrez aussi que les délais de mise en œuvre de la réforme sont très courts : le budget annexe sera supprimé dès le 31 décembre, alors qu’un délai d’un an avait été prévu pour la transformation de l'Imprimerie nationale en société en 1993.

En ce qui concerne la dotation, nous n'avons aucune explication, pas plus que sur les charges pesant sur les bâtiments du Quai Conti – notamment la toiture – et sur le bâtiment de Pessac – qui contiendrait de l’amiante. Par ailleurs, que deviendront les disponibilités de 81 millions figurant au bilan 2005, les autres réserves du passif – soit 180 millions – et les 90 millions du fonds de roulement ? Enfin, quel va être le sort des différentes catégories de personnel : fonctionnaires des finances, fonctionnaires techniques, ouvriers d'État ou contractuels, alors que l’accord d'entreprise pourrait modifier leurs règles statutaires ? Je tiens à souligner le haut niveau de qualification de ces employés et l’excellence de leur production. Des réponses du Gouvernement à ces questions dépendra leur confiance dans votre projet d’EPIC.

M. le Ministre délégué - Je vous répondrai !

M. Nicolas Perruchot – Lors de sa présentation de ce budget, vous avez, Monsieur le ministre, employé l’expression de « dream budget ». J’ai bien peur qu’elle ne désigne en fait que « le budget dont vous auriez rêvé » ! Certes, en écoutant le rapporteur général, j’ai presque eu envie d’y croire…

M. le Ministre délégué – C’est un bon début !

M. Nicolas Perruchot - Mais pourquoi n’avez-vous pas fait ce que vous prétendez faire aujourd’hui dès 2002 ?

M. le Rapporteur général – Je l’ai expliqué !

M. Nicolas Perruchot – Vous avez effectivement rappelé les erreurs du départ, mais il est bien dommage de n’avoir trouvé la clef que pour la dernière présentation budgétaire ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UDF) Comment expliquer, malgré vos discours, que les gens que nous recevons chaque jour dans nos circonscriptions se plaignent d’une baisse de leur pouvoir d’achat ? Vous nous présentez un budget quasiment idyllique, mais la réalité est tout autre.

En 2002, nous avons été élus pour réduire à la fois les prélèvements obligatoires, les déficits publics, la dette et la dépense publique. Or, le bilan est négatif sur tous les plans et ce n’est que grâce à des artifices cosmétiques que ce projet de loi de finances est présentable (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP). Croyez bien que j’aurais préféré qu’il en soit autrement ! Mais le carré que vous nous présentez, Monsieur le ministre – dépenses, impôts, déficit et dette – n’est pas un carré magique, mais tragique. En février 2002, Jacques Chirac promettait de baisser l’impôt sur le revenu d’un tiers. Au final, selon vous, la baisse aurait été de 20 % entre 2002 et 2007. Mais vous vous fondez sur la baisse du produit de l’impôt pour arriver à ce résultat. En réalité, ce ne sont pas les classes moyennes – la cible que vous désigniez –, qui en ont profité : ce sont ceux qui se trouvent aux deux extrémités du barème, les bas revenus, grâce à la revalorisation de la prime pour l’emploi, et les plus aisés, grâce au bouclier fiscal, qui permet de plafonner l’ISF sans le dire.

Les prélèvements obligatoires, eux, sont passés de 42,8 % en 2002 à 43,7 % pour le budget que vous présentez : encore un engagement qui n’aura pas été tenu. Cette augmentation correspond à presque un point de la richesse nationale. Mais dans le même temps, les prélèvements obligatoires ont baissé de 4,5 points entre 2000 et 2004 aux États-Unis, de 3,7 points entre 1998 et 2004 au Canada, et encore de 3,2 points en Suède, de 2,8 en Pologne et de 2,6 aux Pays-Bas… En définitive, en France, sur la mandature, 51 % de la richesse nationale auront été prélevés par la sphère publique et la pression fiscale et sociale se sera accrue de près d’un point. La baisse des impôts n’est donc qu’un leurre. Qui respecte donc le mieux les citoyens : ceux qui présentent des budgets toujours meilleurs, ou ceux qui dénoncent leurs dérives constantes ?

Un bref bilan permettra de répondre à la question. Commençons par la dépense publique : elle est en hausse de 3,4 % à 982 milliards, soit 52,9 % du PIB contre 52,6 % en 2002. Votre priorité n’a donc pas été de faire baisser son poids dans la richesse nationale : vous avez laissé la dérive se poursuivre, et elle aura ainsi crû de 162 milliards entre 2002 et 2007, pour atteindre 57 % de la richesse nationale.

Ce qui touche au déficit public signe aussi un échec . Après avoir explosé entre 2001 et 2003, il s’est certes réduit ensuite, passant de 3,7 % du PIB en 2004 à 2,7 % en 2006, et à 2,5 % en 2007. Toutefois, au rythme où se fait la résorption, nous atteindrons l’équilibre budgétaire en 2030…

Et que dire de la perte d’autonomie fiscale des collectivités locales ? En 2006, leurs dépenses totales, hors amortissement de la dette, se sont élevées à 178,9 milliards, progressant de 6 %, et l’investissement public local, particulièrement dynamique, a augmenté de 7 %. L’évolution est assez claire : dans les régions, les dépenses et la fiscalité sont en hausse, selon le schéma classique de la gestion socialiste ; dans les départements, si rigoureuse que soit leur gestion, les transferts de charges voulus par l‘État, qui tend à les transformer en guichet social, font croître les dépenses ; enfin, dans les communes et les intercommunalités, les charges de personnel progressent de 4,7 % en 2006 après 5 % en 2005, contribuant pour 28 % à l’évolution des dépenses de fonctionnement.

En réalité, le système actuel incite à la dépense. En cela, la réforme de la taxe professionnelle est un exemple caractéristique de ce qu'il ne faut pas faire. L'aménagement du plafonnement de la taxe professionnelle à 3,5 % de la valeur ajoutée de chaque entreprise tend une nouvelle fois à déresponsabiliser les élus locaux. En effet, ceux qui n'ont pas augmenté ce taux entre 1995 et 2004 verront les entreprises installées dans leurs communes et plafonnées à la valeur ajoutée ne bénéficier d'aucune baisse de leur taxe ; mais les élus moins vertueux qui auront augmenté la taxe pendant cette même période verront les entreprises plafonnées à la valeur ajoutée bénéficier d'une réduction d'autant plus élevée que la hausse des taux aura été forte.

Plus grave encore, les communes qui ont augmenté leur taux de taxe professionnelle à compter de 2006 ne bénéficieront du produit de cette hausse que sur l'assiette des entreprises dont la taxe professionnelle n'est pas plafonnée à 3,5 % de la valeur ajoutée ; plus précisément, les communes devront rembourser à l'État, deux ans plus tard, le coût de la hausse du taux de la taxe professionnelle sur les entreprises plafonnées. Cette mesure aboutit à réduire d'autant plus l'autonomie fiscale des communes que la part de l'assiette plafonnée de la taxe professionnelle dans l'assiette totale de la commune est élevée. Est-ce un système vertueux que celui par lequel l’État encourage à augmenter la fiscalité ?

M. François Sauvadet - Il a raison.

M. Nicolas Perruchot - J’en viens à la dette, qui n'en finit pas de croître. Ainsi, la dette publique continue d’augmenter en valeur absolue. Qui plus est, l'objectif de baisse de deux points de PIB du niveau de la dette publique entre 2006 et 2007 est impossible à tenir compte tenu de l'endettement actuel, à moins de céder massivement des actifs publics.

Un citoyen à qui l’on demanderait : « Quelle est la couleur politique d’un gouvernement qui augmente la dépense, les prélèvements obligatoires et la dette ? » répondrait certainement : « Un gouvernement de gauche ». C'est là votre drame, Monsieur le ministre ! Vous avez longtemps critiqué la gauche et sa façon de gérer car elle aboutissait à une augmentation des déficits publics, de la dette et des prélèvements obligatoires. Vous avez aussi critiqué sa volonté d'entraver l'autonomie des collectivités. Or, à quelques détails près, vous avez mené la même politique. De cette insincérité dans la présentation, les Français ont plus qu'assez. Ils attendent de la transparence, de la vérité, du courage, de l'honnêteté, car c'est un préalable au redressement de la France. Durant cinq ans, votre politique a été très similaire à une politique de gauche. Ainsi va la France ; un coup à droite, un coup à gauche, mais ce sont toujours les Français qui paient ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. le Ministre délégué – Et c’est sans doute pourquoi vous allez voter avec la gauche !

M. André Chassaigne – Mon collègue Jean-Claude Sandrier a dit l’obstination du Gouvernement et de sa majorité à bafouer avec un effroyable cynisme les principes républicains de liberté, d’égalité et de fraternité pour promouvoir le règne sans partage des lois du marché et leur cortège d’injustice…

M. Jean-Claude Sandrier - Très bien !

M. André Chassaigne - J'évoquerai pour ma part la situation de nos collectivités locales, que votre politique asphyxie de manière délibérée. Car votre stratégie est bien de faire le siège de ces derniers remparts d’un État-providence qui vous scandalise tant ! En étranglant les finances locales, vous voulez étrangler les services publics locaux et garantir ainsi la pénétration croissante de la logique de marché dans les moindres interstices de notre territoire et de notre tissu économique. C’est que les collectivités locales sont un des socles de la République mais souvent aussi des creusets de résistance au libéralisme qui, par nature, broie les hommes au profit de l'argent. Par leur proximité, leur vitalité culturelle et sociale, leur rôle en faveur de l'emploi et de l'investissement public – elles sont à l’origine de 70 % des réalisations –, nos collectivités locales sont un moteur indispensable à notre pays. Porter atteinte, comme vous le faites, au principe constitutionnel de leur libre administration par une politique autoritaire de blocage des concours financiers de l'État et d'assèchement des ressources fiscales est proprement inadmissible. Ce l’est d’autant plus que vous vous déchargez cyniquement sur elles de votre responsabilité, en les accusant injustement d'être responsables des déficits publics.

Certes, nous avons la satisfaction de voir qu'après quelques incertitudes, vous avez dû, Monsieur le ministre, sous la pression des élus locaux et de leurs associations, reconduire le contrat de croissance et de solidarité entre l'État et les collectivités locales.

M. le Ministre délégué – Quelle mauvaise foi !

M. André Chassaigne - Il n'en demeure pas moins que pour les communes, notamment, l'indice dit « panier du maire » est bien supérieur à l'inflation. Or, celles qui ne touchent que la dotation forfaitaire verront celle-ci augmenter de 1 % seulement, ce qui est notoirement insuffisant. Ainsi, les seules dépenses de restauration scolaire ont progressé de 7 à 8 % depuis le début de l'année – et encore ne sont-ce là que les éléments de base de la restauration. Alors que la fréquentation des restaurants scolaires ne cesse de croître, on mesure à quelles difficultés sont confrontées les communes.

Vous affirmez par ailleurs comme un motif particulier de satisfaction que les compensations des transferts de compétences aux collectivités locales se font à l'euro près…

M. le Ministre délégué – Oui.

M. André Chassaigne - Mais que signifie pareille référence quand ces transferts touchent des secteurs où les besoins ne cessent de croître de façon alarmante ? Les associations, à l'occasion de la Journée mondiale de refus de la misère, se sont une nouvelle fois alarmées de la situation des plus démunis, qu’il s’agisse de santé, de logement ou d'emploi. Alors que le nombre d'allocataires des minima sociaux a augmenté de 100 000 en 2005 pour atteindre 3,5 millions ; alors que quelque trois millions de personnes sont sans logement ou mal logées en France ; alors qu’un million d'enfants vivent dans la grande pauvreté, vous osez nous donner des leçons de bonne gestion,…

M. le Ministre délégué – Du tout ! Je n’ai rien dit !

M. André Chassaigne - …vous abritant derrière une politique de bon père de famille…

M. le Ministre délégué - Je n’ai pas prononcé ces mots !

M. André Chassaigne - …pour justifier la baisse de la dépense publique et le désengagement de l'État ! C’est se moquer de ceux qui sont en difficulté, et notamment des petites communes, dont beaucoup ne disposent plus du minimum vital.

La vérité, c’est que vous vous défaussez de vos responsabilités sur les élus locaux, les laissant veiller seuls à la préservation des services publics et à la cohésion sociale, les laissant seuls face à l'urgence sociale, à la précarité accrue d'un nombre sans cesse croissant de nos concitoyens. Voilà quelles sont les conséquences de votre politique ! Mais, non content de dissimuler votre indigence politique derrière les oripeaux de la bonne gestion,…

M. le Ministre délégué – Voilà un discours tout en nuances…

M. André Chassaigne - …vous entendez en outre priver les collectivités de leurs ressources fiscales. Le plafonnement de la taxe professionnelle est une mesure scandaleuse, qui ne peut conduire qu’à une hausse des taxes payées par les ménages et à la fermeture ou à la privatisation de services publics locaux – et pour quelle efficacité économique ? Vous savez pertinemment que ce plafonnement génère des effets d'aubaine et que, dès la promulgation de la loi, des bureaux spécialisés ont conseillé aux grands groupes de restructurer leurs bases de taxe professionnelle afin de profiter au maximum de ce plafonnement.

Nous vous avons demandé de bien vouloir au moins différer d'un an l'application de cette mesure, mais nous n'avons pas été entendus. Vous savez pourtant qu'une majorité d'élus locaux estime que cette mesure injuste et injustifiable conduit nos collectivités dans une impasse, et plus fortement encore les communautés de communes et d'agglomération qui ont adopté la taxe professionnelle unique. Mais je comprends que vous teniez à la maintenir, puisqu’elle est emblématique de votre politique, qui ne vise qu'à drainer les richesses du pays vers les marchés financiers au mépris de l'intérêt général.

M. Jean-Claude Sandrier - Absolument.

M. André Chassaigne - Étrangler les collectivités pour mettre au pas la démocratie locale, tuer dans l’œuf toute velléité de politique publique volontariste, tel est le sens – en forme de non-sens – de votre politique. Il faut habiter Neuilly-sur-Seine…

M. le Ministre délégué – Pour ma part, je suis maire de Meaux !

M. André Chassaigne - …pour trouver opportun de stabiliser en volume les dépenses locales ! Et il faut vivre dans une tour d’ivoire pour ne pas mesurer l’aggravation de la misère et de la faillite territoriale.

De quel droit imposer aux collectivités des contraintes manifestement contraires au principe constitutionnel de libre administration ? De quel droit porter des jugements scandaleux sur la gestion des collectivités où les besoins sociaux sont les plus criants, comme l’a fait récemment mon compatriote, le ministre des collectivités, en déclarant que « personne ne comprendrait qu’une collectivité augmente les impôts locaux au titre des compétences nouvelles confiées par la loi et, en même temps, considère être assez riche pour mettre en place une politique de subventionnement généreuse dans des secteurs où elle n’a aucune obligation » ? M. Hortefeux est pourtant membre du conseil général d’Auvergne, où la marge de manœuvre budgétaire n’est que de 23 %. Quant aux départements, 90 % de l’augmentation de leurs dépenses de fonctionnement découlent des transferts de compétences.

Ces propos d’un cynisme confondant m’inspirent, Monsieur le ministre, la question suivante : comment osez-vous prétendre que l’action que vous menez est encore politique au sens noble du terme, alors qu’elle ne vise qu’à conforter la monarchie absolue du marché, dont vous êtes l’un des plus zélés serviteurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

Mme Martine Billard - Dans les cinq minutes qui me sont imparties, j’ai choisi, comme fil conducteur pour la lecture de ce projet de budget, la lutte contre l’effet de serre, présentée à l’envi comme une urgence absolue, du reste parfaitement justifiée puisqu’on estime que la température moyenne pourrait augmenter de 1,4 à 5,8 degrés en un siècle ! En outre, la France a adhéré à l’objectif de diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre avant 2050. Comment cette urgence se traduit-elle dans votre budget ?

Tout d'abord, par la disparition de la ligne « lutte contre le changement climatique », au sein de la mission « écologie et développement durable » : en termes d'affichage de la politique de l'État, on pourrait rêver mieux ! Au reste, c'est l’ensemble du budget de l'environnement et du développement durable qui est en baisse. Si les crédits de certaines actions consacrées à la protection de la biodiversité – comme les parcs naturels – augmentent, les actions de lutte contre l'effet de serre sont dérisoires eu égard aux périls qui menacent la planète.

Pas trace, non plus, de grand programme pour le développement des énergies renouvelables, domaine dans lequel notre pays reste désespérément à la traîne. Hormis la prolongation du dégrèvement fiscal pour les particuliers réalisant des travaux d'isolation et la montée en charge de l’application du taux réduit de TVA sur l'installation de réseaux d'énergie d'origine renouvelable – attendue depuis longtemps –, les autres dépenses fiscales – comme le dégrèvement sur la taxe foncière à raison des travaux d’économie d’énergie dans les organismes HLM et les SEM – sont tellement faibles qu’il n’a pas été jugé utile de les chiffrer.

Le dégrèvement fiscal de Robien continue, quant à lui, de mobiliser des sommes considérables – 400 millions, quand le total des autres dégrèvements soumis à conditions sociales n’excède pas 235 millions. Las, des montants comparables ne sont pas prévus pour combattre le dérèglement climatique dans le bâtiment, pourtant directement responsable de 25 % de nos émissions de gaz à effet de serre. La lutte contre le réchauffement s’est manifestement arrêtée à la porte du bâtiment !

Après avoir connu des coupes claires chaque année depuis 2002, le budget de l’ADEME stagne.

Quant à la mission Transports, elle fait également l’impasse sur la réduction des gaz à effet de serre. Certes, à lire l’argumentaire du programme « transports terrestres et maritimes », il semble désormais de bon ton, dans la rhétorique ministérielle, de lier la politique des transports au développement durable. Le secteur des transports est du reste un très gros consommateur d’énergie et représente presque 30 % des émissions françaises. Dans le document budgétaire, vous louez les performances environnementales des modes de transport complémentaires à la route, performances qui commandent de procéder au financement d’infrastructures nouvelles, notamment ferroviaires. Tout le monde s’accorde aussi pour exiger un plan ambitieux de rénovation des réseaux de transports collectifs, de développement des transports combinés – rail et route, fleuve et route – et des autoroutes ferroviaires. Dès lors, on pouvait imaginer que le Gouvernement inscrirait des moyens suffisants pour moderniser les infrastructures non routières et qu’il abonderait les lignes dévolues aux projets de transports collectifs des collectivités, dans le cadre des contrats de projets. Or, quelle déception de constater que les crédits du programme « transports terrestres et maritime » sont en baisse – de 11,5 % –, notamment pour les actions « transports collectifs et ferroviaires » – moins 12 % – et « régulation, contrôle, sécurité et sûreté des transports terrestres » – moins 17 %. Les autorisations d'engagement pour l'action « infrastructures fluviales et portuaires » diminuent par rapport à la loi de finances de cette année. Nous ne sommes donc pas près de sortir du tout-camion et du tout-voiture pour les particuliers !

Finalement, que vous ne passiez pas du discours aux actes ne nous étonne pas, non plus, du reste, que la priorité donnée, cette année encore, à la baisse de l’impôt sur le revenu au profit des 10 % de contribuables les plus riches. Au total, vous allez distribuer 7 milliards de cadeaux fiscaux aux plus favorisés, au détriment des ménages dans le besoin, qui devront se contenter des 500 millions de prime pour l’emploi. Quant aux allocataires de l'allocation de parent isolé, ils verront leur revenu baisser, au nom – nous dit-on sans rire – de l'équité, et 131 millions seront ainsi économisés sur le dos des plus fragiles.

Enfin, à bientôt un an des événements de l'automne 2005, votre projet de budget fait l'impasse sur l’action en faveur des quartiers les plus en difficultés. Si les crédits de paiement consacrés à la rénovation urbaine augmentent, le programme « développement et amélioration de l'offre de logement » diminue. Quant au lien social, les crédits consacrés à l'action « équité sociale, territoriale et soutien » stagnent. On est décidément bien loin des déclarations de la fin de l’année dernière !

En définitive, on ne peut que douter de l'efficacité de la baisse des impôts et de la multiplication des aides et autres exonérations en guise de politique de relance de l'emploi, lorsqu'on voit les chiffres plus que modestes des créations d'emplois dans le secteur de la restauration – pourtant négociées en contrepartie des aides versées.

Pour nous, une diminution des dépenses de l'État consentie pour servir les intérêts de ceux qui n’ont besoin de rien et qui s’exerce au détriment du traitement des urgences du moment n’est pas un bon objectif. En revanche, la relance des transports collectifs et la priorité donnée à l'efficacité énergétique dans le bâtiment auraient beaucoup plus d'effets positifs pour l'emploi et répondraient à l’obligation de renforcer la lutte contre l'effet de serre. Sans doute le film d’Al Gore est-il arrivé trop tard pour que le Président de la République demande à son Gouvernement de faire le nécessaire dans le présent budget ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste)

M. Yves Cochet - Très bien !

M. Yves Deniaud – Comme cela a été dit et répété, cette loi de finances est la dernière de la législature ; elle donne donc l'occasion de comparer ce qui a été fait au cours de celle-ci et ce qui s’est fait sous la précédente.

Commençons par le déficit : en 2002, il se situait à 49 milliards pour un PIB de 1 512 milliards. Bien entendu, la loi de finances initiale l'avait estimé à 18 milliards de moins – excusez du peu ! Au reste, la loi de finances pour 2002 constitue le plus gros mensonge budgétaire de l'histoire contemporaine, après celle de 1993, que l’on doit aux mêmes auteurs. J’espère, chers collègues de l’opposition, que vous n’aurez pas l’occasion de battre vos propres records !

En 2006, le déficit sera de 42,7 milliards, pour un PIB de 1 783 milliards, et le projet de loi de finances qui nous est soumis le ramène à 41,6 milliards, pour un PIB de 1 856 milliards.

Alors, comme d'habitude, les plus grands menteurs de notre histoire budgétaire récente nous accusent d'insincérité. Pourtant, chaque année, depuis quatre ans, les dépenses ont été exécutées exactement pour le montant voté par le Parlement…

M. Paul Giacobbi - A l’euro près ! (Sourires)

M. Yves Deniaud - En 1997, vous aviez pris le pouvoir en bénéficiant d’une croissance fortement ascendante. Las, vous l’avez gaspillée pour nous léguer une France en situation de croissance atone, entravée par l’énorme surcroît de charges que vous avez créé en cinq ans.

Même si nous avons pâti de cinq ans de croissance moindre, la situation financière de la France sera, en mai 2007, meilleure que celle que vous nous aviez laissée. L'an dernier, à la même époque, vous nous serviez les mêmes arguments qu'aujourd'hui sur l'insincérité du budget. Vous disiez ne pas croire à notre prévision de croissance, comme, du reste, un certain nombre de Nostradamus de la prévision économique. Vous avez eu tort, puisque la croissance sera bien au niveau où nous l'avions estimée.

En 2007 le Gouvernement table sur la même fourchette raisonnable de 2 % à 2,5 % de croissance. Les prévisionnistes sont d'accord et cela ne me rassure pas ; par contre, la gauche n'y croit pas, et cela me donne confiance ! Plus sérieusement, Monsieur le ministre, je vous sais gré de n'avoir nullement tenu compte de l'effet accélérateur d'une bonne croissance sur les recettes fiscales. En 2006, le pays bénéficiera de 5 milliards de recettes supplémentaires. Je nous souhaite la même bonne surprise en 2007, mais je vous félicite de ne pas les avoir anticipées. J’espère que ceux qui auront à les utiliser sauront faire preuve de la même sagesse.

Bien entendu, nous nous réjouissons d'une hausse des dépenses limitée à 0,8 %, soit 1 % de moins que l'inflation, estimée, elle, à 1,8 %. Ce qui nous réjouit surtout, c'est que cet effort sans précédent est lié aux effets de la réforme de l'État, annoncée depuis des décennies, mais jamais véritablement entreprise auparavant. Depuis 2002, notre commission des finances le demandait et mettait tout en œuvre pour aider le Gouvernement à aller dans ce sens. Dès lors, nous saluons comme il le mérite le travail d'audit que le Gouvernement a engagé car il porte ses fruits. Et vous me permettrez d’associer à cet hommage les indéniables progrès du contrôle parlementaire.

M. le Ministre délégué – Absolument.

M. Yves Deniaud - Qu'il s'agisse du travail traditionnel du rapporteur général et des rapporteurs spéciaux ou de la mise en application de la LOLF et de sa surveillance rigoureuse par le Parlement dans le cadre de la MILOLF, il convient de saluer la nouvelle efficacité du contrôle parlementaire, ainsi que la qualité de notre dialogue avec l'exécutif.

Vous me permettrez d’y ajouter le travail de la Mission d'évaluation et de contrôle des dépenses publiques. D’ailleurs, je vous remercie d'avoir décrit, dans votre document de présentation, la politique immobilière comme un « chantier pilote » de la réforme de l'État. Nous avons en effet réalisé un travail considérable sur ce dossier, qui a fait l'objet d'une couverture médiatique croustillante, mais hélas justifiée. Les décisions nécessaires ont été prises rapidement et sérieusement, suivant nos recommandations et avec la participation de notre rapporteur, Georges Tron.

M. le Ministre délégué - C’était la moindre des choses !

M. Yves Deniaud - C'est surtout un exemple de bonne coopération entre le Parlement, qui a su jouer pleinement son rôle de contrôle, et un Gouvernement qui a su l'écouter. Nous ne pouvons que souhaiter qu'il en soit de même pour les autres sujets que nous avons traités – financement du service public ferroviaire, du droit d'asile, représentation de l'État à l'étranger, gouvernance des universités ou encore marchés d'armement…

Ce qui est essentiel, c'est que les attitudes aient changé au sein du Gouvernement, mais aussi dans les administrations et au Parlement. L’opinion publique s’intéresse désormais au sujet et chacun a pris conscience que la réforme de l'État ne pouvait plus attendre. Nous devons réexaminer en permanence et en profondeur les méthodes et les habitudes, en recherchant constamment une meilleure efficacité et une meilleure productivité…

Si la diminution des coûts est certes un impératif absolu, la réduction des effectifs ne saurait en aucun cas être systématique, ni aveugle : elle doit résulter d'une amélioration de la qualité et de la productivité de certains services. Notons d’ailleurs que, si 48 000 postes ont été créés en lois de finances de 1998 à 2002, il n’y aura eu que 33 000 suppressions de 2003 à 2007. C’est que la population française s'est accrue, pendant cette période, de deux millions de personnes, soit l’équivalent de la ville de Paris. Nous avons bien conscience que ces habitants supplémentaires ont eux aussi besoin de fonctionnaires…

Et puisque que nous venons d’adopter un texte relatif à la participation dans les entreprises, permettez-moi de vous donner un conseil : pour impliquer les fonctionnaires dans la réforme de l'État, nous devons les associer aux gains de productivité réalisés, en faisant progresser leur carrière et leur rémunération en fonction des résultats financiers dégagés, dont une part doit effectivement leur revenir.

Cette loi de finances est sincère, mes chers collègues ; elle marque une nette amélioration de la santé financière de l'État, malgré l’intégration des mesures fiscales décidées l'an dernier, soit une perte de recettes de 3,8 milliards d'euros ; elle contribue enfin à la croissance et au pouvoir d'achat. C'est donc une des meilleures lois de finances que nous ayons connues, et nous la voterons avec conviction.

J'émettrai toutefois un regret et une suggestion. Le regret concerne les dépenses d'investissement civil de l'État : je suis fermement convaincu qu’il est nécessaire de maîtriser les dépenses de fonctionnement de l'État, mais je regrette que nous n'ayons pas dégagé des ressources supplémentaires pour l'équipement de notre pays, notamment en faveur des engagements déjà souscrits. La France continue à avoir besoin d'investissements routiers, autoroutiers, universitaires, ferroviaires et portuaires… Il est donc regrettable que nous ayons retardé des opérations profitables dont le financement devait être partagé avec l’Union européenne et les collectivités locales, et dans lesquelles le financement de l'État devait jouer un rôle de levier.

Nous devons rompre avec de telles habitudes ! Nous avons inscrit en moyenne annuelle deux milliards de crédits de plus que le Gouvernement précédent – c'est mieux, mais ce n'est pas terrible ! L’État doit en effet conserver un rôle majeur dans l’équipement de notre pays.

M. Michel Bouvard - Très bien !

M. Yves Deniaud – Il ne doit pas se défausser sur les collectivités locales ou des agences extérieures, sur lesquelles le Parlement ne doit pas abandonner son contrôle budgétaire !

Une suggestion, enfin : comme la presse s’en en fait écho ce matin, les allégements de charges sociales atteignent désormais un montant de 25,6 milliards par an. Cet effort est indispensable si nous voulons que nos entreprises demeurent compétitives, et qu’elles assurent la croissance et l’emploi, mais ce système de pompes aspirantes et refoulantes engendre des pertes en raison de ses coûts de gestion, et il ne fait pas apparaître le poids qui pèse réellement sur les investissements dans notre pays. Alors que la moyenne des charges est de 32 % en Europe, un tel chiffre n’est atteint qu’à partir d’1,5 SMIC en France. Au niveau du SMIC, le poids des cotisations sociales n’est que de 20 % compte tenu des allégements ! Je soutiens donc fermement la « barémisation » dont le président de la commission des finances se fait souvent l’avocat : nous devons intégrer les allégements de charges dans le barème fiscal, afin que l’effort consenti soit plus simple et surtout plus visible.

Ces réflexions étant faites, il me semble que nous avons bien travaillé pendant cinq ans pour redresser nos finances. Votre budget, Monsieur le ministre, mérite toute notre approbation pour son sérieux et sa fiabilité. Tout ce que nous pouvons souhaiter, c’est que les budgets à venir lui ressemblent comme des frères ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Ministre délégué - Merci beaucoup !

M. Paul Giacobbi – J’ai toujours eu un faible pour le surréalisme dans le domaine artistique… Je ne peux donc qu'admirer ce budget, qui traite avec élégance d'un monde largement imaginaire ! Vous avez dit que ce budget était un « dream budget », Monsieur le ministre, et il existe effectivement bien des décalages entre ce projet de budget et ce que devrait être l'année 2007.

Comme à l’accoutumée, votre analyse de la situation pétrolière a quelque chose de surprenant. Vous aviez déjà prévu, l’an dernier, un cours du pétrole de 27,5 dollars par baril lors du débat d’orientation, puis de 38 lors de la présentation du budget, alors qu’il était évident qu’il s’établirait à au moins à 50 dollars – de fait, le cours s’est établi à 55 ! Pour 2007, vous prévoyez curieusement un cours de 70 dollars, alors que la tendance lourde est à la baisse et que le cours du jour est à moins de 60. L'évolution de la situation internationale, en particulier en Iran, pourrait à l’inverse faire craindre une très forte augmentation des prix – bien au-delà de 70 dollars le baril. Dans ces deux hypothèses, votre prévision est donc fausse : elle est trop élevée de 15 dollars, ou trop basse d’autant !

Votre analyse des perspectives économiques est, hélas, du même tonneau. Vous prévoyez certes deux scénarii alternatifs, qui reposent sur des hypothèses de croissance variant de 1,5 à 3 %, mais vous n'intégrez pas l'incertitude qui pèse sur les prix de l'énergie. Vos analyses prévisionnelles sont donc à l'image de vos prévisions pétrolières : elles entretiennent avec le réel un rapport complexe et poétique, qui doit plus à l'art de la présentation qu’à la science économique…

Pourquoi nous présenter différents scénarii, si vous n’en tirez pas la moindre conséquence dans la loi de finances ? La rigueur et l'orthodoxie, dont vous vous targuez sans cesse, auraient dû vous conduire à fonder votre budget sur la fourchette basse de la prévision, qui n'est d'ailleurs pas une hypothèse pessimiste, mais réaliste ! Si vous avez fait le pari d'une croissance au moins égale à celle de 2006, c’est au mépris de vos propres analyses !

Quant à la LOLF, votre présentation ne manque pas d’élégance, mais elle fait l’impasse sur l’essentiel : le développement des systèmes d’information budgétaire et comptable. Au milieu de plusieurs pages d’autocongratulation, vous admettez implicitement votre retard, puisque vous indiquez qu'il faudra attendre 2009 pour la mise en place d'un système d'information unifié. La référence aux expériences étrangères, au Canada, en Australie ou en Nouvelle-Zélande, montre pourtant qu’il ne saurait exister de véritable réforme budgétaire sans système d’information…

Outre cet aspect technique, je rappelle que la LOLF devrait impliquer une comptabilisation de la situation patrimoniale réelle, ainsi qu’une analyse exhaustive de l'ensemble des flux, notamment des dépenses. Or, ce budget repose largement sur la débudgétisation des dépenses, et même sur la dissimulation des dettes ! Le programme exceptionnel d'investissements en faveur de la Corse, qui n’a plus rien d’un programme ni d’une exception, en est un exemple modeste, mais très révélateur. Le total des crédits de paiement prévus pour l'année 2007 est en effet d'un peu plus de 8 millions d'euros, alors qu’on pourrait attendre au moins 130 millions, le montant prévu étant au total de 2 milliards sur quinze ans. Quel écart entre le rêve et la réalité ! Mon seul conseil général consacre 24 millions aux investissements routiers… Avec vous, il y a donc loin de la coupe aux lèvres !

Aux huit millions de crédits prévus sont censés s’ajouter des « fonds de concours attendus » – 18 millions qui devraient provenir du loto sportif, de l’AFITF mais aussi de l'agence de l'eau... C’est une débudgétisation de masse ! Rappelons en outre que vous aviez annoncé en 2006 des arrêtés de subvention, qui devaient permettre l’engagement des travaux. Mais vous avez ensuite expliqué que les paiements des agences étaient retardés jusqu’en juin 2006, voire jusqu’en 2007, et vous avez même suggéré aux maîtres d’ouvrage de demander des crédits relais à leur banque !

J’estime ces dettes à plus de 10 millions pour l’ensemble des maîtres d’ouvrage en Haute-Corse, alors même que vous prévoyez de nouvelles autorisations de programme et que vous ne consentez donc que 8 millions d’ouvertures de crédits de paiement – ce qui ne permettra même pas d’apurer la moitié des dettes contractées au cours des exercices antérieurs dans l’ensemble de la Corse au titre du PEI. Pendant ce temps, le préfet de région nous abreuve d’informations surréalistes sur des programmes mirobolants dont on ne voit jamais le début de l’exécution – ce qu’il attribue au manque de dynamisme des maîtres d’ouvrages locaux ou à des défauts d’ingénierie. Sans doute verrons-nous, au cours de 2007, se multiplier des effets d’annonce budgétaire car il ne se passe plus de semaines sans que le Gouvernement n’annonce des ouvertures de crédits. L’unité de compte étant la centaine de millions d’euros, ce budget n’a pas fini de nous faire rêver ! Le Gouvernement semble évoluer dans un monde parallèle dans lequel les actionnaires de Suez sont déjà d’accord sur la parité fixée par MM. Mestrallet et Cirelli, un monde dans lequel il est inconcevable qu’un industriel d’origine indienne puisse réussir une OPE à l’encontre d’un groupe européen emblématique de l’industrie du Vieux Continent parce qu’un indigène ignore le code des bonnes manières ou la grammaire de ce monde rêvé de l’économie dont parlait M. Breton, un monde dans lequel il suffit de vanter à la télévision le plus gros avion du monde pour en faire la réussite commerciale et technique que l’on sait avec l’Airbus A 380, un monde dans lequel la croissance économique résulterait d’une incantation gouvernementale baptisée « volontarisme économique », un monde dans lequel un voyage présidentiel fait vendre des centrales nucléaires à l’Inde et des avions Rafale à l’Arabie Saoudite, bref, un monde rêvé.

M. Philippe Auberger - C’est vraiment le meilleur des mondes !

M. Paul Giacobbi – Non, ce n’est pas Brave new world mais Sad new world !

M. Jean-Louis Dumont - C’est du corse? (Sourires)

M. Paul Giacobbi – Je ne le parle malheureusement que très peu, contrairement à l’anglais.

Après les hallucinations économiques, le réveil sera brutal et douloureux. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Philippe Auberger – Ce budget constitue une heureuse inflexion par rapport aux budgets précédents, et surtout ceux de la législature socialiste. Le déficit budgétaire continue en effet de décroître sensiblement : 41,6 milliards sont annoncés contre 42,7 milliards attendus en exécution pour cette année. Nous sortirons ainsi de la zone des déficits publics excessifs, au sens du pacte de stabilité. Pour la première fois, les dépenses publiques marquent une inflexion significative : celles de l’État diminueront d’un point en volume l’année prochaine. Compte tenu des départs à la retraite et de la démographie scolaire, 15 000 postes de fonctionnaires ou d’enseignants ne seront pas remplacés. C’est la première fois que l’on assiste à un tel effort de réduction des effectifs. Les deux réformes fiscales lourdes qui ont été votées l’année dernière – sur l’impôt sur le revenu et sur la taxe professionnelle – seront financées grâce au bon rendement de l’impôt en 2006 : les plus values fiscales sont en effet estimées entre 5 et 7 milliards. Enfin, à la suite de la publication du rapport Pébereau, la décrue de notre endettement public par rapport au PIB se trouve sérieusement amorcée avec deux points en 2006 et un point en 2007, ce qui laisse espérer que nous revenions en dessous de la limite des 60 % fixée par le traité de Maastricht dès 2009 ou 2010. L’assainissement de nos dépenses publiques est donc engagé. Les jeunes générations y trouveront un gage de confiance dans l’économie, les finances et la politique suivie, ce qui est nécessaire pour consolider la consommation, l’investissement, donc la croissance. Chacun sait que les anticipations ont de plus en plus de place dans le comportement de nos concitoyens et que s’ils redoutent de nouvelles hausses des prélèvements obligatoires, ils privilégieront l’épargne par rapport à la consommation.

Enfin, ce PLF comporte un nombre très limité de nouvelles dispositions fiscales, ce qui contraste avantageusement avec les lois de finances précédentes.

M. Michel Bouvard - Très bien.

M. Philippe Auberger – L’instauration de dispositions particulières concernant les « gazelles », ces entreprises nouvelles dont la croissance est très rapide, est particulièrement bienvenue même si à l’usage il faudra sans doute simplifier un dispositif qui risque de provoquer des contentieux.

Je regrette en revanche que le Gouvernement ait renoncé à introduire une disposition d’imposition minimale à l’impôt sur le revenu, ce qui empêcherait les titulaires de revenus importants d’échapper à l’impôt en utilisant les niches fiscales. Certes, le dispositif Malraux était un peu complexe et le Conseil constitutionnel l’a annulé ; certes, il n'était pas possible l'année dernière de revoir le dispositif concernant l'outre-mer mais il n'en reste pas moins que pour des raisons de justice fiscale et de moralisation, il est indispensable de plafonner l'ensemble des dispositifs de déduction, de réduction ou de crédit d'impôt de sorte qu'il ne soit pas possible à un contribuable de réduire sa base imposable de plus d'une fraction significative – 20 % par exemple. Certains abus dans ce domaine frisent parfois l'incivisme.

Nos concitoyens sont préoccupés par trois sujets, et d’abord par l'évolution de leur pouvoir d'achat. Il est vrai que le passage à l'euro au début de 2002 les a perturbés en leur faisant perdre un certain nombre de repères. Certains commerçants ou prestataires de service en ont de plus profité pour arrondir leurs prix. L'autre élément important a été l'augmentation des prix de l'immobilier mais seuls les propriétaires en ont profité. Les locataires, encore très nombreux, ont connu une évolution bien moindre de leur pouvoir d'achat hors logement compte tenu de l'indexation des loyers sur le coût de la construction, ou, en cas de nouveau bail, du prix du marché.

M. Jean-Louis Dumont - Les charges ont également augmenté.

M. Philippe Auberger - Les pouvoirs publics ne peuvent en l’occurrence maîtriser le prix de l’énergie.

Une politique vigoureuse d'accession à la propriété pour ceux dont les revenus peuvent supporter un endettement accroîtra le pouvoir d'achat hors logement. Des efforts viennent d'être faits – amélioration du prêt à taux zéro, facilité d'accession sociale à la propriété par financement spécifique de la charge foncière – mais encore faut-il que ces mécanismes parviennent à donner leur pleine mesure.

M. Jean-Louis Dumont - Quel volontarisme !

M. Philippe Auberger - Il ne faut pas relâcher notre effort dans ce domaine.

Second problème auquel on se trouve confronté en matière d'évolution du pouvoir d'achat : l'écrasement de la hiérarchie des salaires. Il n'est pas rare de rencontrer des diplômés de l'enseignement supérieur qui se voient proposer un SMIC comme premier salaire.

M. Michel Bouvard - Très juste.

M. Philippe Auberger - Comment dès lors encourager les jeunes à poursuivre leurs études ? Le système d'allégement des charges qui a été mis en place depuis une dizaine d'années au bénéfice des entreprises s’essouffle. Il coûte de plus en plus cher – plus de 20 milliards au budget de 2007 – quand ses effets sur l’emploi sont de plus en plus incertains. Une récente étude de deux spécialistes de la DREES publiée par la revue Solidarité et santé estime qu'entre 1990 et 2003 la baisse des charges patronales aurait permis la création de 250 000 emplois seulement. Le mécanisme d'allégement des charges patronales en sifflet de un à 1,6 SMIC a un effet pervers en rendant fortement progressif le coût en charges sociales d'une augmentation des salaires. Le conseil d'orientation pour l'emploi a estimé qu'on ne pouvait supprimer ce mécanisme et la Cour des comptes, dans un rapport récent, en a quant à elle critiqué les effets sans trancher le problème de son maintien. Certains proposent d'en assortir l'application d'engagements précis en matière de création d'emplois ou d'évolution des salaires, ce qui semble compliqué et peu opérationnel. La sagesse est de diminuer progressivement l'échelle des salaires à laquelle ce mécanisme s'applique, ce qui avait été engagé mais n'a pas été poursuivi. Cela permettrait d'alléger un fardeau qui devient budgétairement insupportable et d'éviter que le système actuel concerne un nombre croissant de salariés, ce qui conduit à un écrasement excessif de l'échelle des salaires. Il restera cependant toujours indispensable d’encourager l'embauche de salariés au SMIC, ce qu’un mécanisme d'allégement spécifique des charges sociales ne peut à lui seul permettre. Il faut encourager ces salariés à entrer ou à rester dans le marché du travail, ce à quoi tend la prime pour l'emploi, mécanisme indispensable pour que l’incitation à travailler au niveau du SMIC soit suffisante. Je salue donc l'effort que représente la dotation supplémentaire de un milliard qui permettra d'augmenter sensiblement le montant de la PPE en avoisinant un treizième mois. Toutefois, j'aurais aimé que celle-ci soit réformée sur trois points.

Il conviendrait tout d’abord d’en simplifier le barème sans tenir compte de la situation du conjoint ou de la situation familiale, car il s’agit d’un encouragement individuel. Ensuite, un écart doit être maintenu entre les revenus d’assistance et les revenus du travail, c’est-à-dire que les aides aux titulaires de revenus d’assistance doivent être plafonnées à 80 % du SMIC. Enfin, la prime doit être mensualisée et figurer sur la feuille de paie, de sorte que sa liquidation et son paiement soient enfin confiés aux URSSAF.

Sous bénéfice de ces observations, ce budget pour 2007 comporte de bonnes, et même de très bonnes, orientations. Il marque un net infléchissement vers l’assainissement des finances publiques, qui ne peut que recevoir notre approbation (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Alain Claeys – Nos collectivités locales souffrent et ont de plus en plus de mal à mener les politiques publiques indispensables pour préserver un tissu de solidarité ainsi que notre système d’intégration. Votre gouvernement, Monsieur le ministre, comme ceux qui l’ont précédé depuis 2002, n’aime pas les collectivités territoriales, quoi que laissent entendre les slogans sur « la France d’en bas ». Cette législature sera marquée d’une pierre noire pour tous les élus locaux.

M. le Rapporteur général – Jamais autant n’a été fait !

M. Alain Claeys - La décentralisation a été totalement dévoyée. Depuis cinq ans, l’État n’a de cesse d’étrangler les collectivités, de mettre en cause la gestion des élus locaux dans le but de les diaboliser.

M. le Rapporteur général – Les régions !

M. Alain Claeys - Je vous parlerai tout à l’heure des départements, que beaucoup de vos amis président. Il n’y a pas d’un côté un État bon gestionnaire et de l’autre des collectivités dispendieuses.

M. le Ministre délégué – Certaines le sont !

M. Alain Claeys - Il y a en réalité un Gouvernement qui a décentralisé massivement des compétences sans compensations adéquate ni visibilité financière, a accumulé les retards dans l’exécution des contrats de plan, a désengagé l’État de ses compétences, propres ou partagées, a transféré des recettes dont l’évolution reste très en deçà de celle des dépenses, un Gouvernement qui a baissé les impôts des plus favorisés et réduit les moyens de l’État, et qui a voulu transférer ses déficits.

Et il y a les collectivités qui ont dû faire face aux besoins et aux aspirations de leurs habitants, à leur demande de proximité et de solidarité ; des collectivités qui ont dû faire des choix difficiles pour éviter que les contribuables ne soient trop pénalisés. Il a fallu qu’elles se substituent à un État défaillant, dirigé par des gouvernements renonçant à des missions indispensables pour la cohésion nationale.

Les mauvais coups se sont multipliés tout au long de la législature. Le plafonnement de la taxe professionnelle, dans le budget 2006, a fait perdre des marges de manœuvre importantes aux collectivités locales et porte atteinte à leur autonomie financière en ne leur laissant aucune autre possibilité qu’augmenter les impôts sur les ménages. En outre, depuis la loi de finances pour 2003, France Télécom est assujettie aux impôts locaux dans les conditions du droit commun et doit donc payer la taxe professionnelle au titre des établissements implantés sur tout le territoire. Ces impôts étaient auparavant prélevés au profit de l’État, qui en reversait une partie au fonds national de péréquation. Pour neutraliser ces pertes, l’État opère un prélèvement sur les budgets locaux dont les modalités de calcul sont très défavorables pour de nombreuses communes et intercommunalités. France Télécom a en effet réduit l’activité de nombreux établissements, ou les a fermés ; or si les collectivités concernées perdent ces recettes, elles continuent pourtant à être prélevées comme si les établissements étaient toujours sur leur territoire. Et cette critique n’est pas le fait des seuls socialistes. De nombreux maires de votre majorité sont intervenus à ce sujet. L’État est plus chiche pour transférer des recettes que pour en récupérer !

Le prélèvement est calculé à partir des bases constatées en 2003. En 2004, la perte de bases au niveau national s’est établie à 8 %, et même à 30 % pour certaines communes. Les mouvements de restructuration en cours font craindre des pertes importantes de bases fiscales dans les années à venir. Si rien n’est fait, les communes continueront pourtant de compenser des recettes qu’elles n’ont plus. Ce n’est pas acceptable ; les collectivités locales ne sont pas responsables de la politique d’abandon social menée depuis cinq ans.

Je parlerai à présent des départements. Il serait injuste de ma part d’imputer à la majorité UMP de mon département l’augmentation des impôts de l’an passé. C’est l’État qui en porte la responsabilité. L’augmentation constante du nombre de bénéficiaires du RMI, sans compensations suffisantes, met tous les départements en difficulté. Ajoutez-y les lois sur le handicap et la protection de l’enfance, le transfert des routes nationales et du fonds de solidarité logement, et demandez à vos amis dans les départements comment ils justifient l’augmentation des impôts à laquelle ils sont contraints cette année ! Les départements ne font que payer la politique de pots cassés menée par votre gouvernement.

Monsieur le ministre, on ne construit pas un projet politique sur la division, sur l’opposition entre les Français, sur la stigmatisation. Ces principes, qui doivent s’appliquer aux relations entre l’État et les élus locaux, sont systématiquement bafoués. Il faut reconstruire aujourd’hui un contrat de confiance entre les institutions, à défaut de quoi notre démocratie sera en danger. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Yves Cochet - La question de l’énergie est de nouveau d’actualité, et elle l’est à mon avis, désormais, pour toujours. Depuis le début de l’ère industrielle, nous sommes habitués à une énergie abondante et très bon marché. Même au cours actuel, elle est encore bon marché. L’hypothèse du présent budget est certes plus prudente que celle de M. Sarkozy dans le budget pour 2005, qui était de 36,5 dollars le baril, alors que celui-ci a été en réalité de 58 dollars.

Les hydrocarbures représentent plus de 60 % de la consommation planétaire d’énergie. La France est totalement dépendante des hydrocarbures extérieurs, qui nous coûteront en 2006 50 milliards d’euros, en devises, pour acheter du gaz russe et du pétrole saoudien. C’est l’équivalent de plus d’un million d’emplois. Comment créer ces emplois en France et non à l’étranger ? Non pas, comme vous l’avez dit en préparant la malheureuse opération de fusion entre GDF et Suez, par une garantie d’approvisionnement dans des contrats avec la Russie, dont le Financial Times affirme d’ailleurs qu’elles sont inexistantes ! Par la sobriété énergétique, c’est-à-dire les économies d’énergie, nous pouvons à la fois économiser énormément de devises et créer énormément d’emplois. Par la réhabilitation thermique du patrimoine ancien, par le développement des transports collectifs, par la réduction des vitesses maximales autorisées sur autoroute, par l’incitation au télétravail, par la semaine de quatre jours, par le développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique, par la relocalisation de l’économie et par la reconversion écologique de l’industrie. On ne voit hélas rien de tout cela dans votre budget.

Vous avez retenu une hypothèse « pifométrique » de 70 dollars pour le cours moyen du baril de pétrole. Si depuis janvier 2002, les cours sont nettement orientés à la hausse, il est difficile de faire des prévisions. Nous irons sans doute au-delà de votre estimation – comme cette année.

J’en viens aux biocarburants. Ils sont à la mode.

M. Jean-Louis Dumont - Le diester !

M. Yves Cochet - Ici, c’est le bioéthanol ! M. Loos a dit cet après-midi, lors de la séance des questions au Gouvernement, tout le bien qu’il pensait de l’E 85. Alors qu’il y a trop d’essence en Europe, on ne parle que de la filière alcool. Ainsi le soutien fiscal au bioéthanol est-il multiplié par deux dans votre budget, pour atteindre 550 millions d’euros. C’est un cadeau aux lobbys betteraviers et céréaliers ; mais le bilan agricole, environnemental, énergétique et économique du bioéthanol n’en fait pas un « pétrole vert » – et je m’étonne qu’un ingénieur comme M. Loos puisse ignorer les principes élémentaires des lois de la thermodynamique. Plus que de biocarburants, on devrait d’ailleurs parler d’agrocarburants. Quoi qu’il en soit, cette mode un peu ridicule ne fera que creuser le déficit de notre commerce extérieur, via les importations de flexfuel du Brésil – dont la productivité primaire végétale n’a rien à voir avec celle des plaines céréalières de la Beauce ou du Nord-pas-de-Calais. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Marc Laffineur - Ce dernier budget de la législature est sincère et sérieux. Comme les précédents, qu’il surpasse, il vise à remettre la France sur le chemin vertueux de la croissance et de l’emploi et est articulé autour de quatre priorités : la maîtrise du déficit et l’assainissement des dépenses publiques, le soutien à l’emploi et au pouvoir d’achat, la préparation de l‘avenir et la restauration de l’autorité de l’État. C’est un budget courageux et sans faux-semblants pour une année électorale : il tranche avec le dernier budget du gouvernement Jospin, qui avait conduit notre pays à creuser son déficit malgré quatre années de croissance.

M. Jean-Louis Idiart - On creuse, on creuse, et on ne trouve pas le gaz !

M. Marc Laffineur - Vous n’avez en effet trouvé que la défaite.

Ce budget est un budget bilan, qui résume les engagements pris lors des dernières élections et les résultats obtenus.

M. Augustin Bonrepaux - Un bilan qui n’est pas glorieux !

M. Marc Laffineur – Nous faisons baisser le chômage, Monsieur Bonrepaux. Depuis bientôt cinq ans, nous nous attachons à restaurer les conditions de la confiance afin d’assainir les fondamentaux de notre économie. C’est tout l’enjeu de la politique de maîtrise de la dépense publique et de la réduction du déficit public. En quatre ans, le déficit public est passé de 4,2 % à 2,5 % du PIB. Pour parvenir à ce résultat, le Gouvernement a affecté la totalité des surplus fiscaux et des recettes de privatisation au désendettement. Pendant quatre années consécutives, le budget s’est fondé sur une stabilisation des dépenses en euros constants ; en 2007, ce mouvement sera amplifié avec une baisse de 1 % en volume, soit une stabilisation en euros courants.

Cet effort sans précédent a permis de ramener le déficit budgétaire de 56,9 milliards d’euros en 2003 à moins de 41,6 milliards en 2007. Après avoir atteint des sommets – 66,6 % du PIB –, notre dette rapportée au PIB commence à décroître.

Ce quinquennat budgétaire a aussi été marqué par des engagements en faveur de l’emploi, du pouvoir d’achat et de l’égalité des chances, afin de créer pour chacun les conditions d’une véritable « croissance sociale ». Le taux de chômage est repassé durablement sous la barre des 10 % – il s’élève aujourd’hui à 8,9 % – et le nombre des demandeurs d’emploi a diminué de 280 000 en un an, ce qui témoigne de la pertinence des dispositifs lancés : plan de cohésion sociale, développement des services à la personne, retour à l’emploi des bénéficiaires de minima sociaux, contrat nouvelles embauches – 600 000 ont déjà été signés –, emploi des jeunes et des seniors. Cette politique en faveur de l’emploi ne doit pas obérer le pouvoir d’achat. C’est tout le sens de la revalorisation de la prime pour l’emploi, dont le montant maximal aura plus que doublé entre 2002 et 2007, passant de 467 à 948 euros  ce qui constitue un véritable treizième mois. Avec une revalorisation de son barème de 500 millions dans le projet de budget, l’effort financier consacré à la PPE atteindra 4,2 milliards l’année prochaine. L’année 2007 verra aussi l’application de la grande réforme fiscale votée l’an dernier, qui permettra de redistribuer aux Français quelque 3,9 milliards. Le montant du premier tiers provisionnel baissera ainsi de 8 % en moyenne. 80 % de la baisse bénéficie aux revenus inférieurs à 3 500 euros par mois. Sur l’ensemble de la législature, les contribuables auront vu leur feuille d’impôts fondre de 20 %, soit l’équivalent de 9,6 milliards.

Il n’est pas de bon budget sans attention portée à l’avenir. Comme ces prédécesseurs, ce budget renforce donc l’attractivité de notre territoire et prépare notre pays à l’économie de la connaissance. Cela passe par une fiscalité plus favorable aux entreprises et aux entrepreneurs et par un réinvestissement dans la recherche-développement et l’innovation. La réforme fiscale votée l’an dernier instaure pour la première fois un « bouclier fiscal », qui plafonne à 60 % des revenus les impôts que le contribuable verse à l’État. Cela permettra de lutter contre la délocalisation des patrimoines et la pénalisation du travail, tout comme l’instauration pour l’impôt sur le revenu d’un taux marginal supérieur de 40 %, qui place la France au même niveau que ses concurrents européens.

L’entrée en vigueur de la réforme de la taxe professionnelle, désormais plafonnée à 3,5 % de la valeur ajoutée, et la suppression des cotisations patronales au niveau du SMIC pour les entreprises de moins de vingt salariés permettront aux entreprises d’atteindre la taille critique nécessaire pour innover et exporter. Comme celles prises en faveur des PME à forte croissance, dites « Gazelles », ces mesures visent à faire sauter les verrous qui empêchent les entreprises de grandir, en corrigeant des effets de seuil dissuasifs. Mais renforcer l’attractivité de notre territoire passe aussi par des investissements dans la recherche et les infrastructures. Ce budget approfondit les mesures existantes : crédit d’impôt recherche, pôles de compétitivité, Agence pour l’innovation industrielle, Agence nationale de la recherche… En application de la loi de programme pour la recherche, il octroie pour la troisième année consécutive un milliard de plus et 2 000 nouveaux emplois. L’agrément pour la construction de nouvelles unités de biocarburants et le lancement prochain de l’éthanol E 85 anticipent également l’ère de l’après pétrole.

Notre avenir passe enfin par une restauration de l’autorité de l’État dans ses prérogatives régaliennes. Ce budget mène à leur terme la loi de programme relative à la sécurité intérieure, la loi de programmation pour la justice et la loi de programmation militaire, conformément aux engagements pris par le Président de la République. Le rayonnement international de la France et la solidarité envers les pays les plus pauvres ne sont pas en reste : l’engagement de porter l’aide publique au développement à 0,5 % du PIB est respecté, faisant de notre pays le troisième contributeur mondial en la matière.

Ces efforts ne sont pas incompatibles avec la rationalisation des effectifs et la modernisation des services publics. L’absence de remplacement de tous les départs en retraite et les redéploiements de personnel, l’introduction d’une logique de performance et les gains de productivité réalisés dans le cadre de la LOLF et des audits de modernisation dont je vous félicite, Monsieur le ministre, permettront de diminuer de 15 000 emplois les effectifs de l’État, ce qui porte la baisse à 33 000 sur la législature. Il s’agit de rendre le meilleur service public au meilleur coût. Voilà ce que ce projet de loi de finances propose aux Français : un budget qui achève les grands chantiers ouverts et replace la France sur le chemin d’une croissance saine et durable. Avec les collègues du groupe UMP, je vous appelle donc à le voter. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Georges Tron - Pour reprendre la formule par laquelle vous avez répondu tout à l’heure à Didier Migaud, ce budget est un bon budget car il cumule baisse des impôts, des déficits et de la dette, avec une augmentation corollaire de la croissance.

Je m’attacherai pour ma part à la dépense, plus précisément aux crédits des programmes liés à la fonction publique, où les gisements d’économies sont importants. Le débat budgétaire fait la part belle aux recettes, même lorsqu’il s’agit de quelques centaines de millions d’euros, alors que des marges de manœuvre importantes existent sur les dépenses.

2007 marque une étape nouvelle dans la maîtrise de la dépense publique, avec une progression inférieure d’un point à l’inflation. Cet effort – remarquable – doit perdurer.

Il s’accomplit avec le souci de maintenir le service public. D’abord en effet, il va de pair avec la politique de modernisation de l’État. Les lois de programmation sont à ce titre strictement appliquées, tant la loi d’orientation et de programmation pour la justice que la loi de programmation pour la sécurité intérieure et la loi de programmation militaire. Contrairement à ce qui a pu se passer dans un passé pas si lointain, nous ne considérons pas que les équilibres budgétaires puissent justifier leur remise en cause. Ensuite, ces résultats sont obtenus à l’aide d’une méthode moderne et efficace : celle des audits, qui conjuguent collégialité – proposition par les ministres, décision par le Premier ministre – fréquence – au moins un audit dans chaque ministère tous les trois mois – et transparence : tout est présenté en ligne. Au final, 104 audits couvrant 101,5 milliards de dépenses auront été menés dans l’ensemble des ministères et les gains de productivité auront atteint 3 milliards, ce qui est loin d’être négligeable. Les résultats sont donc au rendez-vous et je suis heureux que vous ayez lancé ce matin même 23 audits supplémentaires. Cette méthode de maîtrise de la dépense publique permet d’assurer parfaitement les grandes fonctions régaliennes et la modernisation de l’État.

Les crédits de la fonction publique participent à cet effort global. Ainsi, alors que le débat d’orientation budgétaire prévoyait une augmentation d’1,6 milliard de 2006 à 2007, elle ne sera que de 990 millions. C’est le signe de l’efficacité de la LOLF, qui donne plus de moyens aux ministres pour piloter leur masse salariale, qu’il s’agisse de politique de recrutement, de calendrier d’application des mesures catégorielles ou d’anticipation du GVT. Cette maîtrise des dépenses ne se fait pas au détriment de l’augmentation du pouvoir d’achat des fonctionnaires : 700 millions supplémentaires seront consacrés à la revalorisation du point et à l’augmentation du nombre de points distribués, et des mesures catégorielles s’y ajouteront, qui concerneront notamment la défense, l’intérieur et l’éducation nationale. Nous sommes néanmoins plusieurs à souhaiter voir un peu plus clair entre ce qui relève, dans le pouvoir d’achat des fonctionnaires, de l’augmentation du point d’indice, des mesures catégorielles ou du GVT. Aucun des agrégats existants ne permet de savoir précisément quelles catégories de fonctionnaires bénéficient de chaque disposition. Il faut disposer d’un outil qui permette de mieux les cibler et d’identifier les catégories qui ne sont pas atteintes par les mesures de portée générale.

Le volume des cotisations et contributions sociales versées par l’État augmente de 2,2 % – ce qui n’est pas une surprise. Les dépenses de pensions, qui représentaient 9 % du budget de l’État en 1991, atteignent ainsi 14 % en 2006, soit un doublement en volume. Les charges des pensions, qui absorbaient 47 % de l’augmentation totale des dépenses budgétaires en 2000, sont passées à 60 % l’année dernière. C’est à se demander quelle crédibilité accorder aux projets de remise en cause de la loi Fillon. Avant la réforme des retraites, le besoin de financement des retraites de la fonction publique à l’horizon 2020 se montait à 26 milliards ; depuis, il a été ramené à 12 milliards. Comment remettre cela en cause ?

M. le Rapporteur général - C’est irresponsable !

M. Georges Tron - Enfin, et toujours dans le domaine de la fonction publique, il faut s’interroger sur le contrôle exercé sur les opérateurs de l’État, dont les effectifs vont augmenter de 10 800 personnes en 2007, alors que ceux de l’État connaissent, eux, une réduction en douceur de 30 000 fonctionnaires en cinq ans – soit à peu près le nombre des embauches réalisées dans les deux dernières années de la législature précédente. On assiste en fait à une explosion des emplois cantonnés dans les opérateurs. Entre 1990 et 2004, les effectifs de l’État ont augmenté de 6 % et ceux des établissements publics administratifs de 59 % ; ceux des collectivités territoriales ont augmenté de 23 % et ceux des agents territoriaux des établissements publics administratifs de 90 % ! Il est dommage que les résultats obtenus par le biais des audits soient compromis par la persistance de ces organes de cantonnement.

Monsieur le ministre, si je vous fais confiance, c’est pour de bonnes raisons. Il y a un an, le rapport sur l’immobilier de la mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances avait demandé la mise en œuvre de certaines réformes. Elles l’ont été. Aujourd’hui, on commence à mieux connaître la réalité du patrimoine immobilier de l’État. Je suis convaincu que cette méthode, faite de transparence, de souci du détail et d’évaluation, est la bonne. Ce budget se situe dans la même logique et va donc dans le bon sens (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Pierre Decool – Pour être accepté et donc efficace, l'impôt sur le revenu, qui est au fondement de nos finances publiques, doit être équitable. Ce n’est pas toujours le cas et l’on constate des inégalités, par exemple dans la prise en compte de certaines déductions dans le revenu imposable. Si nous pouvons être fiers de notre système de couverture sociale obligatoire, qui permet à tous d'accéder équitablement aux soins, nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à cotiser auprès de régimes de prévoyance complémentaires, pour des raisons liées tant à l'allongement de la vie qu’aux facultés d’épargne qu’ouvre l’assurance décès. Mais ces initiatives individuelles sont traitées diversement par l'administration fiscale. Les cotisations aux régimes de prévoyance complémentaire sont prises en compte de différentes façons, et cette injustice contribue à créer une sécurité sociale à deux vitesses, au détriment des classes modestes et moyennes.

La loi du 13 août 2004 portant réforme de l'assurance maladie a institué une aide au profit des personnes dont les revenus n’excèdent pas le plafond d'attribution de la CMU complémentaire de plus de 15 %. Si cette disposition est totalement justifiée, elle provoque des inégalités fiscales. De la même façon, la défiscalisation des cotisations aux régimes de prévoyance complémentaire effectuées à titre volontaire par les artisans, commerçants et professions libérales, instituée par la loi Madelin du 11 février 1994, est une excellente mesure. Afin de rétablir l'égalité fiscale et sociale qu’elle brise, il serait donc souhaitable qu’elle soit étendue à l’ensemble des Français. Alors qu'il est plus que jamais nécessaire de maîtriser les dépenses de la sécurité sociale, une telle décision aurait l’avantage de responsabiliser les assurés sociaux tout en améliorant leur prise en charge. J’ai donc déposé, avec 105 de mes collègues, un amendement en ce sens. Ce dispositif encouragera la constitution d'épargnes individuelles, qui permettent à chacun de mieux faire face aux accidents de la vie, et réduira significativement les sommes toujours plus importantes consacrées par l’État et les conseils généraux à la prise en charge des personnes âgées (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.
La séance est levée à 0 heure 45.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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Ordre du jour
du mERCREdi 18 octobre 2006

QUINZE HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Suite de la discussion générale et discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2007 (n° 3341).

Rapport (n° 3363) de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l’ordre du jour de la première séance.

© Assemblée nationale