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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

2ème séance du mercredi 18 octobre 2006

Séance de 21 heures 45
8ème jour de séance, 17ème séance

Présidence de M. Jean-Luc Warsmann
Vice-Président

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La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq.

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LOI DE FINANCES POUR 2007 (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2007.

MOTION DE RENVOI EN COMMISSION

M. le Président – J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une motion de renvoi en commission déposée en application de l’article 91, alinéa 7, du Règlement.

M. Augustin Bonrepaux – À l’approche des élections, vous promettez beaucoup : de réduire le déficit, la dette, les impôts, la dépense publique. Et le rapporteur général de s’extasier sur ce qu’il appelle des records historiques !

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances – Miraculeux !

M. Augustin Bonrepaux – Ce sont surtout des records historiques du déficit, de la dette et des prélèvements obligatoires. Voyons cela.

L’audit de juillet 2002 estimait le déficit entre 2,4 % et 2,5 % du PIB. Vous l’avez immédiatement aggravé par votre collectif, comme l’a reconnu hier le rapporteur général, puisque vous avez inscrit 2,5 milliards de crédits complémentaires, 2,5 milliards pour vos priorités – justice, police, défense –, et, encore 2,5 milliards pour diminuer l’impôt sur le revenu. Erreur funeste !

C’est cette baisse des impôts, non financée et reconduite chaque année qui a aggravé le déficit pour rien, sauf pour faire des cadeaux aux privilégiés. Dix milliards ont été ainsi gaspillés, le président de la commission des finances l’a reconnu. Je lui donne acte du fait qu’après les avoir votés, il les a aussi régulièrement déplorés, y compris dans la presse en 2005…

M. Didier Migaud – Cela s’appelle un acte de contrition.

M. Augustin Bonrepaux – Ce qui ne l’a pas empêché de voter une nouvelle réduction d’impôts au budget 2006.

Comparons maintenant la situation que vous allez laisser à celle que vous avez trouvée. En 2002, selon l’audit, vous avez trouvé un déficit à 2,6 %. Il sera de 2,9 % à la fin de cette année. Où est le progrès ? La dette était de 56,2 % du PIB fin 2001 ; elle sera de 66,6 % fin 2006 et vous promettez de la ramener à 63,7 % fin 2007. Où est le progrès ? De plus, vous ne la diminuez que grâce aux cessions d’actifs, en particulier des sociétés d’autoroutes, dont les profits vont enrichir les sociétés privées au détriment des investissements pour l’avenir. Quant au chômage, il est revenu au niveau de 2002, grâce aux emplois aidés, et au transfert de 300 000 chômeurs vers le RMI, qu’on semble oublier. Où est le progrès ?

M. Didier Migaud – Voilà de bonnes questions !

M. Augustin Bonrepaux – Enfin, le ministre des finances a annoncé hier la plus forte progression du pouvoir d’achat sur cinq ans… pour 2008. Faites donc la comparaison avec le gouvernement Jospin. Et allez le dire aux petits retraités, aux fonctionnaires, aux salariés modestes, qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts quand leurs revenus stagnent tandis que toutes leurs charges augmentent, y compris leurs impôts ! Car vos « records » s’agissant des impôts, ne profitent pas à tous : les prélèvements obligatoires sont passés de 43,1 % du PIB en 2002 à 44,3 %, soit 18 milliards de plus. Certes, les impôts de l’État sont revenus de 15,5 % en 2002 à 15 % en 2006. mais au profit de qui ? Seulement des plus aisés, avec la baisse de l’impôt sur le revenu et celle de l’ISF, qui pendant cinq ans a été votre obsession.

M. Michel Bouvard – Mais non, son produit augmente tous les ans !

M. Augustin Bonrepaux – Et certains auraient même voulu aller plus loin. C’était tellement populaire au moment des élections, qu’ils ont été priés de retirer leurs amendements. Mais ils se promettent de recommencer si le peuple leur en donne les moyens.

On nous a dit qu’il s’agissait par là de lutter pour l’emploi et contre les délocalisations. Mais parmi les expatriés célèbres, celui que le ministre a chargé d’un rapport souvent cité a-t-il l’intention de revenir de Suisse ? Est-ce que tel autre, soutien de M. Sarkozy, a renoncé pour autant à s’expatrier en Belgique ? Quel est donc le bilan pour l’emploi ?

En fait, les baisses d’impôt n’ont concerné que les contribuables les plus aisés. Tous les autres ont subi de fortes augmentations. D’abord, les prélèvements pour la Sécurité sociale sont passés de 21,4 % du PIB en 2004 à 22,6 % en 2006. S’y ajoutent les déremboursements de médicaments, la hausse du ticket modérateur et du forfait hospitalier, celle des cotisations aux mutuelles qui ont dû prendre le relais. Et surtout, le taux de prélèvement des collectivités locales est passé de 4,9 % à 5,7 %. Comme il était facile de prendre les élus comme boucs émissaires ne songeant, selon le président de la commission des finances, qu’à dépenser plus car la dépense publique serait électoralement payante !

Revenons à la réalité des chiffres. Vous ne cessez de critiquer les collectivités locales…

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État Mais non !

M. Augustin Bonrepaux – Vous ne faites que cela. Les taux de fiscalité locale n’ont augmenté que de 0,1 % en 2003, de 0,3 % en 2004 et 2005 et de 0,1 % en 2006. Ce sont les transferts de l’État qui sont la cause de l’aggravation. D’ailleurs, même si son auteur, M. Mariton, a dénaturé la réalité, le rapport sur la fiscalité locale de 2005 le prouve bien. Il fait état d’un rapport d’Alain Guegan, directeur de recherches du CNRS, qui démontre que les taux ont augmenté sous les gouvernements Balladur et Juppé, sont restés stables puis ont diminué de 1997 à 2001, avant de repartir à la hausse à partir de 2003. Est-ce là un hasard ? Non, bien sûr. C’est qu’en 1993, le gouvernement Balladur avait imposé un effort particulier aux collectivités en instituant le pacte de stabilité ; puis en 1997, le gouvernement Jospin a mis en place le pacte de croissance et de solidarité ; tandis qu’en 2003, vous avez transféré quantité de charges nouvelles aux collectivités. Chaque fois que vous avez été au pouvoir, vous vous êtes défaussés sur les collectivités.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Mensonge !

M. Augustin Bonrepaux – Les augmentations d’impôt auxquelles vous avez contraint les collectivités tiennent à trois raisons principales : la décentralisation bien sûr, mais aussi l’obligation pour elles de participer au financement de compétences de l’État et la réduction drastique des subventions.

La décentralisation tout d’abord. Pour 2005, l’État doit 850 millions aux collectivités et pour 2006, plus d’un milliard déjà. C’est dire que si les comptes de l’État sont équilibrés, ils le sont sur le dos des collectivités ! Et ce n’est pas fini ! Le transfert des TOS sera loin d’être intégralement compensé, car le nombre de postes était insuffisant dans les établissements avant le transfert et les collectivités doivent combler les manques. La liste des compensations par département, qui figure dans le rapport, comporte de multiples erreurs – preuve d’ailleurs que l’État ne fonctionne pas aussi bien que vous le prétendez ! Alors que la date limite pour l’exercice du droit d’option était fixée au 31 août, le Gouvernement n’est même pas capable de dire combien de TOS ont été transférés aux collectivités. Le chiffre avancé pour l’Ariège est ridicule, à peine 10 % du chiffre réel. Il y a aussi le transfert des routes nationales, dont les représentants des élus à la commission consultative d’évaluation des charges ont reconnu, à l’unanimité, qu’il se traduirait par une charge supplémentaire pour les collectivités, et donc une augmentation de la fiscalité locale.

Votre réforme de la taxe professionnelle, dont les élus commencent à mesurer les conséquences, a été elle aussi particulièrement néfaste. Là où les bases diminuent et où la taxe professionnelle ne peut pas être augmentée – certains départements sont plafonnés à 65 % et certaines communautés de communes jusqu’à 90 % –, les collectivités n’ont d’autre solution que d’augmenter les impôts des ménages, pourtant les plus injustes. Au lieu d’engager une réforme courageuse de cet impôt, en mettant les entreprises à contribution de manière plus équitable, vous avez préféré, là encore, vous défausser sur les collectivités.

Non contents de leur transférer des charges non compensées, vous demandez en outre aux collectivités de participer au financement de compétences de l’État. Ainsi chaque fois que l’État souhaite réaliser une ligne de TGV, il se tourne vers les régions et les départements.

M. Jean-Louis Dumont – Le TGV Est, ce sont les collectivités qui l’ont payé !

M. Augustin Bonrepaux – Vous sollicitez même les départements pour les routes demeurées nationales. Est-ce l’esprit de la décentralisation ? Vous demandez aux communes de participer au financement des bureaux de poste. Vous les invitez même à encourager l’installation des médecins, tandis que les départements financeront leur formation. Autant de dépenses supplémentaires pour les collectivités, et donc de causes d’augmentation de la fiscalité locale !

Il faut compter aussi avec la très forte diminution des subventions d’équipement. Au moment même où l’État a transféré les routes nationales aux départements, il a réduit leurs dotations d’équipement. La suppression du FNDAE s’est traduite par une forte diminution des subventions pour les communes et les communautés de communes. Pis, l’article 26 du présent PLF puise dans les fonds des agences de bassin, alimentés par les redevances des consommateurs, pour financer le Conseil supérieur de la pêche ! C’est un comble, et l’emblème de vos tripatouillages ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) Vous ne financez pas le nouvel organisme que vous créez, et vous venez amputer les recettes des agences de bassin, laissant aux collectivités la responsabilité de combler le déficit en augmentant les redevances des consommateurs. Si ce n’est pas là se défausser sur les élus locaux !

Cette diminution des subventions d’équipement compromet l’avenir des territoires ruraux. La réduction drastique des crédits de la culture pour l’entretien des monuments historiques paralyse de nombreux chantiers. Pour la région Midi-Pyrénées, les crédits de la culture ont été divisés par dix, si bien qu’ils ne représentent même plus le tiers de ceux consacrés, gaspillés devrais-je dire, à la réintroduction des ours slovènes dans nos montagnes. Le château d’Estaing dans l’Aveyron, certainement en raison de son grand intérêt historique, capte la plupart de ces crédits tandis que la restauration des magnifiques peintures du XVe siècle de la cathédrale Notre-Dame-de-la-Sède à Saint-Lizier dans l’Ariège sont à l’arrêt depuis juillet 2005, sans que l’on sache quand ils pourront reprendre.

M. Jean-Louis Dumont – Scandaleux !

M. Augustin Bonrepaux – Voilà votre conception de l’aménagement du territoire !

M. Jean-Louis Dumont – Le ministre est insensible à ces considérations.

M. Augustin Bonrepaux – J’en viens aux contrats de plan. Monsieur le ministre, vous avez tout à l’heure travesti la réalité, en affirmant que les retards pris dans leur exécution l’avaient été essentiellement dans les années 2000-2001. Il est vrai que certains projets n’étaient pas alors prêts, notamment dans le domaine ferroviaire.

Cependant, à partir de 2001 et 2002, de très importants crédits ont été consacrés aux contrats de plan. Ensuite, jusqu’en 2005, des réductions draconiennes ont eu lieu et seule la vente des autoroutes vous a permis, les échéances électorales approchant, d’inverser la tendance en 2006. Mais de tels crédits ne sont pas renouvelables, Monsieur le ministre ! M. de Robien, hostile à ces privatisations, ne s’y est pas trompé, lui qui disait fort justement, à l’époque : « On vend une fois, puis on pleure trente ans » ! De fait, comment les travaux routiers seront-ils financés désormais ?

Je parlerai d’un département que je connais bien, l’Ariège. Alors que, sur les trois opérations prévues dans le contrat de plan, une seule a pu être engagée, les travaux, en panne, ne reprendront qu’au printemps prochain, et sept années auront été nécessaires pour achever une opération qui aurait dû être menée à terme en quatre ans. C’est un record ! Quant aux deux autres opérations, elles ont dû être abandonnées, et chacun se demande comment elles seront financées. Pour ce qui est de l’éducation, l’État a engagé 2 % – je dis bien 2 % – de ce qui était prévu pour l’antenne universitaire de Foix ! Comment parler d’aménagement du territoire dans ces conditions ? Ce que je décris vaut pour l’ensemble du territoire, que chacun en prenne conscience, et ceux qui s’apprêtent à voter ce budget seront peut-être moins enthousiastes. Peut-on parler d’aménagement du territoire alors que le FNADT est à sec ? Ayant constaté cet assèchement et considéré qu’à quelques mois des élections cette situation pourrait vous être préjudiciable, vous avez inventé les pôles d’excellence ruraux…

M. Michel Bouvard – Excellente initiative !

M. Augustin Bonrepaux – À ceci près que les études ne commenceront qu’en 2007 et que les pôles seront financés à partir de 2008 sans que l’on sache comment !

M. Michel Bouvard – C’est faux !

M. Augustin Bonrepaux – En réalité, vous avez oublié l’esprit de la décentralisation. On aurait pu penser qu’elle s’assortirait de la déconcentration de la décision, mais au lieu de cela, le Gouvernement a appliqué ses règles propres, qui consistent à décentraliser les charges et à recentraliser les dépenses, puisque les décisions se prennent dans le cercle restreint du cabinet du ministre, selon des critères mystérieux – ou si peu. La plupart des départements dirigés par la droite, l’Ain, la Corrèze, le Cantal, la Lozère, l’Aveyron pour ne citer que ceux-là, peuvent mener de front quatre ou cinq projets, mais ce n’est le cas ni du Gers, ni de l’Ariège. C’est certainement au nom de l’égalité républicaine que votre politique d’aménagement du territoire consiste à ne débloquer les crédits que pour les départements gérés par la droite ! (« Caricature ! » sur les bancs du groupe UMP) Cela n’a rien d’une caricature, c’est la triste réalité d’une politique politicienne (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Et pour terminer, les zones rurales n’auront que des miettes de ce qui est prévu dans les contrats de projet. Vous devriez pourtant vous rappeler qui a créé la politique d’aménagement du territoire !

Avant de voter ce projet de budget prétendument vertueux, examinez la situation de vos services publics, le financement de vos projets, les déficits des comptes administratifs de vos collectivités, auxquelles l’État n’est pas en mesure de payer ce qu’il leur doit ! Vous vous rendrez compte alors que la situation des finances publiques est bien plus inquiétante que ne le dit ce projet, qui ne mérite pas votre confiance. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. le Ministre délégué – Si j’ai bien compris, vous avez présenté ce soir pour la dernière fois une motion dans le cadre d’un projet de loi de finances. Certains, qui vous regretteront, penseront que vous avez été tel que vous-même, très légèrement excessif et peut-être un tout petit peu partisan…

M. René Dosière – Mais non ! Plein de conviction !

M. le Ministre délégué – …et, en tout état de cause caricatural. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Didier Migaud - Pas du tout !

M. le Ministre délégué – Par reconnaissance pour le parlementaire que vous aurez longtemps été, il aurait sans doute été de bon ton que j’invite votre Assemblée à adopter votre motion de renvoi en commission (Sourires), mais encore aurait-il fallu pour cela que y mettiez du vôtre… (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Augustin Bonrepaux – Souhaitez-vous que je reprenne mon argumentation ?

M. le Ministre délégué – …pour me convaincre de faire passer à la trappe les mois de travail qui nous ont été nécessaires pour trouver les solutions propres à redresser la situation catastrophique que nous avons trouvée en arrivant aux affaires (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Je me concentrerai sur l’importante question des collectivités territoriales, car je ne peux vous laisser dire qu’elles n’ont pas augmenté leurs impôts…

M. Augustin Bonrepaux - Je n’ai pas dit cela !

M. le Ministre délégué – …ce que dément le rapport présenté par le sénateur Bourdin au nom de l'Observatoire des finances locales. Les Français mesurent d’ailleurs assez clairement ce qui se passe quand la gauche est au pouvoir (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). De même, s’agissant des relations entre l’État et les collectivités locales, vous avez été très dur. Mais qui a supprimé la part salariale de la taxe professionnelle ? Je ne donnerai aucun nom, car je ne veux pas paraître peser dans un débat interne au parti socialiste…

M. Didier Migaud – Vous avez suffisamment à faire dans votre camp…

M. le Ministre délégué – Vous devriez me remercier, Monsieur Migaud… Mais qui, par ailleurs, a supprimé la vignette ? Et qui la part régionale des DMTO ?

Pour ce qui est de la compensation des transferts, nous respectons les textes à la lettre…

M. Didier Migaud – Pas à l’euro près, tant s’en faut !

M. le Ministre délégué – …et les articles 13 et 14 du projet prévoient un transfert de 800 millions aux départements et de 1,4 milliard aux régions. À l’instar du président de votre commission des finances, j’en appelle à la transparence sur le montant des dégrèvements et sur celui des dotations, payées rubis sur l’ongle (Dénégations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) aux collectivités, notamment pour couvrir les dépenses de RMI. J’aurai aimé, Monsieur Bonrepaux, un mot de remerciement à ce sujet, car le Gouvernement est allé au-delà de ce que prévoit la loi. Nous aurions aimé que M. Jospin se montre aussi zélé quand il a annoncé la création de l’APA sans un centime pour la financer !

S’agissant de la taxe professionnelle, j’assume la réforme engagée, qui permet de mettre enfin les relations entre les collectivités et les entreprises au clair en plafonnant cette imposition à 3,5 %.

Moi, je connais des communes qui n’ont jamais augmenté leurs taux avant la réforme de la TP, et je n’ai pas de raison de penser qu’elles le feront après. Il va bien falloir que, dans notre pays, nous assumions la responsabilité partagée, et que celui qui augmente les impôts prenne de temps en temps la mesure des conséquences que cela peut avoir pour le contribuable. On ne peut pas se plaindre des délocalisations d’entreprises et ne pas voir que la fiscalité locale risque d’avoir une incidence majeure sur de telles décisions.

Sur tous ces sujets, nous avons, Monsieur Bonrepaux, bien des différences, comme nous en avons aussi sur les CPER. À la fin de l’année, ceux-ci seront exécutés à hauteur de 81 %, soit un peu plus que les précédents, qui, à la même étape, étaient exécutés pour 79 %. Nous n’avons donc pas à rougir de notre action et nous continuerons à honorer nos engagements, comme nous l’avons fait pour le FNADT, puisque j’ai indiqué que nous allions abonder cette enveloppe, ce qui me paraît la moindre des choses au regard des engagements pris devant les Français.

Monsieur Bonrepaux, vous êtes un parlementaire engagé, courageux et fort de ses convictions. Même si je ne les partage pas, je vous dois donc beaucoup de considération et de respect. Pour autant, je ne puis qu’inviter votre Assemblée à rejeter sans état d’âme cette motion que je désapprouve totalement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président de la commission – Par amitié pour Augustin Bonrepaux, je voudrais, pour tenter d’instiller le doute dans son esprit, lui faire cadeau de ce petit livre rouge d’Yves Fréville, dont nul ne conteste la rigueur intellectuelle.

Le Président de la région Bretagne a déclaré à la tribune du Conseil régional qu’il ne fallait pas s’inquiéter de son projet de relever de 25 % les impôts puisque 50 % des administrés ne les paient pas. Il parlait, bien sûr, de la taxe d’habitation. Monsieur Bonrepaux, lorsque vous dites que l’État transfère des compétences sans toujours assurer une compensation intégrale, c’est une vérité. Mais, dans le même temps, l’État prend en charge une part croissante des impôts : sur 180 milliards de dépenses locales, la TH ne fournit que 12 milliards, le foncier bâti 15 milliards, et les dotations d’État 79 milliards. Il n’est pas un seul autre pays européen où le taux de prise en charge de l’État soit comparable…

M. Charles de Courson – Si, au Royaume Uni !

M. le Président de la commission – Soit, mais c’est un cas spécial compte tenu de la période Thatcher.

Dans la ville de Pamiers que vous connaissez bien et qui compte 15 000 habitants, le pourcentage des personnes imposées au taux plein ne dépasse pas 30 % ; le taux des non-imposés – y compris pour la TH – atteint 36 % et, naturellement, les 34 % restants représentent la proportion des ménages dégrevés partiellement. Cela veut dire que la dépense continuera à progresser, parce que face à 180 milliards de dépenses, la part de la TH ne représente que 12 milliards. Et lorsqu’on entend des élus dire à la tribune que l’on peut augmenter de 25 % les impôts puisque, de toute façon, 50 % n’en paient pas, on a envie de dire : arrêtons cette démagogie si nous voulons responsabiliser nos compatriotes.

Quant à la taxe professionnelle, je félicite le Gouvernement. J’ai dit à cette tribune que je suis dans une communauté d’agglo où 65 % des bases sont plafonnées. Je ne peux donc répercuter que sur 35 %. Mais quand je vois le nombre d’entreprises soumises à la compétition mondiale qui subissaient des augmentations de 10 ou 15 % par an – en même temps, d’ailleurs, que l’augmentation des tarifs d’EDF –, j’estime que ce qui a été fait en matière de plafonnement de la TP rend service à l’emploi. On ne peut pas défiler un jour pour l’emploi et protester le lendemain contre une telle mesure.

Puis-je avoir, cher Monsieur Bonrepaux, instillé un peu de doute dans votre esprit ? C’est mon seul souhait et je vous suggère de lire ce livre pour que vous puissiez mettre un peu d’eau dans votre vin. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Dans les explications de vote, la parole est à M. Migaud.

M. Didier Migaud – Je voudrais saluer avec une certaine émotion l’intervention de notre collègue Bonrepaux, qui s’exprime pour la vingt-cinquième fois sur un PLF, puisqu’il est élu depuis 1981 sans jamais avoir été battu par le suffrage universel…

M. le Ministre délégué – Excellente circonscription !

M. Michel Bouvard – Cela ne suffit pas !

M. Didier Migaud – C’est par son travail, Monsieur le ministre, que notre collègue a conservé sa circonscription aussi longtemps. Augustin Bonrepaux a démontré qu’il méritait la confiance renouvelée de ses électeurs de l’Ariège et, depuis vingt-cinq ans, il défend l’ensemble de nos concitoyens avec beaucoup de conviction et de compétence. Bien au-delà des bancs de la gauche, chacun reconnaît que c’est un excellent spécialiste de la fiscalité locale et ses interventions sont toujours appréciées. Elles méritent d’autant plus de considération qu’il obtient difficilement des réponses sur le fond. Il lui est souvent répondu sur un mode polémique car il est difficile de réfuter ses arguments. Et je veux lui dire, au nom du groupe socialiste, qu’un budget sans Augustin Bonrepaux n’aura pas la même saveur, tant est remarquable la passion qu’il sait mettre à la défense de ses convictions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Notre collègue a la passion de son pays et des finances locales : cela mérite respect et considération. Il sait que le groupe socialiste est à ses côtés et que nous aurions souhaité qu’il puisse continuer. Il a fait un choix différent, mais j’espère qu’il pourra mener encore le combat sur le collectif budgétaire, afin de porter haut, une fois encore, la parole du groupe socialiste.

Monsieur le ministre, vous avez fait un peu l’impasse sur un certain nombre de questions. Pis, vous avez répondu de manière polémique et en prenant un peu de liberté avec votre souhait affiché d’en finir avec la langue de bois. Hier vous avez interpellé M. Sandrier : « Augmenteriez-vous les dépenses, les impôts et les déficits, comme vous avez si bien su le faire entre 1997 et 2002 ? » Comment, Monsieur le ministre, pouvez-vous proférer de telles contrevérités ? Le niveau des impôts est-il aujourd’hui moins élevé qu’il ne l’était en juin 2002 ? Vous savez bien que non !

En ce qui concerne les dépenses, je ne reprendrai pas l’argumentation de M. Carrez – lorsqu’il est dans ses fonctions de rapporteur, et non de flatteur général. Et je ne reprendrai pas davantage celle de M. de Courson, mais, la vérité, c’est que la dépense publique a plutôt augmenté depuis juin 2002…

M. Charles de Courson – Eh oui !

M. Didier Migaud – Quoi que vous disiez, vous ne maîtrisez pas l’évolution des dépenses, alors pourtant, que vous avez remis en cause des politiques publiques essentielles. J’aimerais connaître votre réponse mais je comprends que vous préfériez changer de pied, comme on dit au rugby.

S’agissant des déficits, Augustin Bonrepaux a opportunément rappelé que l’audit de 2002 faisait apparaître, dans les hypothèses les plus défavorables, un déficit de nos comptes publics de l’ordre de 2,5 %. Cinq ans après, nous n’en sommes même pas revenus à ce chiffre et nous avons aujourd’hui un déficit aggravé par rapport à celui que vous aviez trouvé en arrivant. Comment pouvez-vous exprimer une telle satisfaction devant une aussi forte dégradation des comptes publics ? La main sur le cœur, vous avez regretté les critiques de l’UDF et de la Cour des comptes. Mais elles correspondent à la réalité ! Il est donc difficile de les balayer.

C’est pour cela qu’il nous semble indispensable de revenir devant la commission des finances pour lui permettre de poursuivre son travail. Un certain nombre de points importants méritent en effet d’être clarifiés, compte tenu des propos contradictoires des uns et des autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Pierre Brard – Il s’agit donc de décider de renvoyer ce texte en commission et je dois dire qu’avant d’entendre M. Bonrepaux, ma religion n’était pas faite… (Sourires sur divers bancs). Mais son argumentation m’a semblé, Monsieur le ministre, bien plus convaincante que la vôtre, surtout lorsqu’il a démontré que vous aviez baissé les impôts au profit des plus riches – j’ai du reste produit hier, à la tribune, des graphiques très éloquents à cet égard. On nous dit qu’ils s’expatrient, comme si on pouvait emmener son pays à la semelle de ses souliers, avec les billets de banque !

M. Charles de Courson – Et Thorez ?

M. Jean-Pierre Brard – L’un était à Londres, l’autre à Moscou, et tous deux défendaient la patrie profanée.

M. Copé n’a pas parlé de Johnny Hallyday, qui est pourtant un expert en la matière... À cela s’ajoute le débat entre le président de la commission des finances et Augustin Bonrepaux. Vous voyez donc qu’il faut retourner devant la commission !

S’agissant des compensations versées aux collectivités locales, le ministre prétend qu’elle se fait à l’euro près. Ce serait peut-être vrai si l’on raisonnait de façon statistique, et si nous tenions une épicerie ! Mais comment peut-on ignorer les dommages causés par votre politique, notamment en matière de RMI ? Vous avez pris à parti nos collègues socialistes…

M. Didier Migaud – Bien injustement !

M. Jean-Pierre Brard – …les accusant d’avoir supprimé la part salariale de la taxe professionnelle. C’est exact – mais faut-il comprendre que vous êtes en faveur de son rétablissement, monsieur le ministre ? Vous avez également évoqué la suppression de la vignette… Sur ce point, j’avoue que je n’étais pas d’accord avec Laurent Fabius : il était acceptable de supprimer la vignette sur les 2 CV, mais pas sur les Porsche !

M. le Ministre délégué – Vous étiez pourtant dans la majorité !

M. Jean-Pierre Brard – Je ne me souviens pas que vos collègues du défunt RPR aient protesté !

M. Michel Bouvard – Mais si ! J’avais déposé un amendement !

M. Jean-Pierre Brard – La galéjade ne saurait tenir lieu d’argumentation, Monsieur le ministre. Votre argumentation ne m’a pas convaincu ! Retournons donc en commission le temps qu’il faudra pour peser vos propositions, notamment sur la taxe professionnelle.

M. Michel Bouvard – Augustin Bonrepaux est un homme passionné, et chacun sait que la passion empêche parfois de voir certains faits ! Cela n’enlève rien à l’amitié que je porte au parlementaire respecté qu’il est : président de la commission des finances sous la précédente législature, il a su faire sa place à l’opposition et œuvrer en faveur de certaines avancées décisives dans le contrôle parlementaire, en particulier pour la mise en œuvre de la LOLF. Il a ensuite co-présidé la MEC, en compagnie d’Yves Deniaud. J’ai mené également bien des combats communs avec M. Bonrepaux, notamment pour la défense des communes de montagne…

M. Hervé Mariton – L’ours et le loup !

M. Michel Bouvard – …et je reconnais bien volontiers qu’il a toujours défendu les collectivités locales, même lorsque des gouvernements appartenant à sa propre majorité ne prenaient pas suffisamment en compte leurs intérêts légitimes !

M. René Dosière – Prenez-le donc en exemple !

M. Michel Bouvard – Mais sur cette question, notre collègue nous a fait une présentation très complète, ce qui démontre bien que nous disposons maintenant de tous les éléments nécessaires. Il n’y a donc pas lieu de revenir devant la commission ! S’il manquait effectivement certains documents, ceux-ci ont été transmis à la commission des finances…

S’agissant de la compensation des charges transférées, je pense comme lui qu’elle n’a pas été effectuée à l’euro près. Il n’en reste pas moins que nous avons beaucoup progressé sur ce sujet, notamment grâce à l’adoption d’un encadrement constitutionnel et législatif.

Je ne reviendrai pas sur la suppression de certains impôts, qui a rigidifié les comptes des collectivités locales, ni sur le plafonnement des droits de mutation, ni sur la suppression des crédits « Barangé », qui contribuaient pourtant à l’équipement des écoles, ni sur l’impact de la loi de 2002 sur les services d’incendie et de secours. Je noterai seulement que si cette dernière loi a été adoptée à l’unanimité, il faut reconnaître que nous n’avons pas fait preuve d’une vigilance suffisante sur ses conséquences. Je ne crois pas non plus nécessaire de rappeler que nous avons dû embaucher des fonctionnaires territoriaux supplémentaires en raison des 35 heures, ce qui n’a pas été sans un certain coût budgétaire. L’APA a, du reste, eu le même effet, car la loi n’a pas compensé cette charge nouvelle, qui a en outre évolué de façon dynamique. Sans doute le transfert du RMI aura-t-il les mêmes conséquences, et sans doute aurions-nous pu faire mieux sur tous ces sujets, mais le système n’a jamais été aussi équitable qu’aujourd’hui !

À l’occasion de nombreux déplacements en province, en compagnie de M. Brard, de M. de Courson et de M. Migaud, j’ai pu constater que de nombreux problèmes se posaient en matière de FNADT, de tourisme ou encore de patrimoine. Ceux qui suivent ces questions depuis de nombreuses années savent pourquoi nous en sommes arrivés là : c’est que, sous toutes les majorités, des autorisations de programme ont été délivrées au-delà des crédits de paiement disponibles. Nous sommes donc tous en partie responsables de la situation actuelle ! Si les contrôleurs financiers n’ont pas autorisé certains budgets opérationnels de programme, c’est que les crédits de paiement disponibles ne permettent même pas d’honorer les factures échues !

N’oublions pas non plus les explications du ministre : des décrets d’avance ont été pris cet été pour abonder le FNADT, et des mesures ont été prévues pour les crédits du patrimoine. À cela s’ajoutent les dispositions nouvelles qui seront adoptées à l’occasion du collectif budgétaire. Ne laissons donc pas la passion nous aveugler ! Malgré certaines difficultés, la situation actuelle est plutôt équitable et honnête.

Voilà pourquoi nous ne devons pas voter la motion de renvoi en commission, malgré toute l’amitié que nous portons à Augustin Bonrepaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Charles de Courson – Nous regretterons en effet M. Bonrepaux, qui est une des figures de notre Assemblée… Cela fait vingt-cinq ans qu’il siège parmi nous !

M. Jean-Pierre Brard – C’est une oraison funèbre ! (Rires)

M. Charles de Courson – Sur le fond, j’ai eu le loisir d’étudier la dérive des transferts de charges dans mon département, qui n’est pas des plus laxistes, puisque la fiscalité locale y est au plus bas. Il existe plus de 40 millions d’euros de différentiel avec les compensations, si l’on prend en compte l’APA, les 35 heures, le RMI et les SDIS. À qui la faute ? Tous les gouvernements successifs ont contribué à démanteler l’autonomie fiscale des collectivités locales.

Le ministre a rappelé avec raison que l’opposition actuelle y a, elle aussi, largement contribué. En son temps, j’avais répondu à M. Strauss-Kahn, qui nous affirmait fièrement qu’il allait supprimer la part salariale de la taxe professionnelle, qu’il était un tchatchérien : il faut en effet penser que les collectivités locales sont irresponsables pour les alimenter à coups de dotations fixées par l’État, dans le seul but de réguler la dépense locale. Une telle conception, qui imprègne toute la technostructure du ministère des finances, est une énorme erreur ! Elle conduit à déresponsabiliser les acteurs locaux !

Je note également qu’Augustin Bonrepaux n’est pas allé jusqu’au bout de son analyse. Comme l’a rappelé le président Méhaignerie, nous avons en effet accumulé tout un ensemble de dispositions qui ne font qu’inciter à la dépense. Pour y remédier, il faudrait revoir intégralement les dégrèvements, mais nul n’a voulu s’attaquer à ce problème. Chacun sait pourtant que les communes les plus riches bénéficient d’énormes compensations, à l’image de Paris. Il faut que nous réduisions les dotations budgétaires au profit de la fiscalité locale !

Sur ce point, qu’a fait la gauche en cinq ans ? Rien ! Et que fait l’actuelle majorité ?

M. Michel Bouvard – Bien des choses !

M. Charles de Courson – Pas du tout ! Les finances locales n’ont en rien été modernisées ! Pouvez-vous me citer un seul exemple d’impôt local remplacé par un autre ? Je le répète pourtant depuis des années : seule l’affectation de la CSG aux élus régionaux et départementaux permettrait de responsabiliser les comportements. Personne ne veut aller jusque là, mais ça viendra ! Vous ne posez donc pas les vrais problèmes, et c’est le cas aussi en matière de péréquation. L’UDF ne votera donc pas cette motion.

M. René Dosière – Je voudrais faire un rappel au Règlement, pour rappeler que lorsque la majorité actuelle, qui comprenait à ce moment-là l’UDF, a constitutionnalisé les recettes fiscales des collectivités locales, elle a constitutionnalisé les dégrèvements au sein de ces recettes. J’avais, à l’époque, proposé de considérer ces dégrèvements comme des subventions. À ce moment-là, c’était possible et cela aurait permis d’atténuer les inconvénients de la situation actuelle. Dès lors que cette majorité les a sacralisés en tant que recette fiscale, on ne peut plus y toucher. Monsieur Méhaignerie, il faut assumer vos responsabilités. Vous aviez le moyen de faire mieux.

La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n’est pas adoptée.

M. Augustin Bonrepaux – Je voudrais faire un rappel au Règlement, pour remercier le ministre, le président de la commission des finances et mes collègues de l’opposition et de la majorité de leurs propos aimables.

Monsieur le ministre, je n’ai jamais contesté l’augmentation des impôts locaux : j’ai fait remarquer que, contrairement à ce qui s’était passé précédemment, les taux avaient augmenté. Mais les élus ne sont pas aussi irresponsables que cela, puisque, de 1997 à 2001, les taux avaient globalement baissé !

Le ministre a évoqué des crédits du FNADT : comme je l’ai déjà dit en commission, ils ne sont jamais arrivés en Ariège. Pour chacun de nos projets, on nous a répondu qu’il n’y avait plus de crédits. Où sont-ils donc passés ?

Par ailleurs, nous n’avons jamais contesté le plafonnement de la taxe professionnelle : nous l’avons même proposé ! Ce que nous contestons, c’est qu’il se fasse au détriment des ménages.

Enfin, je voudrais faire remarquer au ministre qu’il est entré dans un débat autrement plus large : en omettant de critiquer un candidat, il a pris position ! (Sourires)

M. le Président – J’appelle maintenant dans le texte du Gouvernement les articles de la première partie.

Article premier

L'article premier, mis aux voix, est adopté.

avant l'Art. 2

M. Didier Migaud – La loi de finances pour 2006 a posé le principe du bouclier fiscal. Nous avions combattu ce plafonnement de l’impôt, qui parachève l’entreprise de remise en cause de la progressivité du système fiscal et de démantèlement de l’impôt de solidarité sur la fortune menée par la majorité depuis cinq ans. Ce dispositif ne vise en réalité que les ménages les plus aisés, imposables à l’ISF : il offre à 10 000 de nos concitoyens les plus aisés un cadeau de 250 millions ! Il est donc injuste. Par ailleurs, nous sommes opposés à ce que les collectivités locales soient sollicitées pour rembourser des contribuables qui auraient tout à fait les moyens d’acquitter leurs impôts locaux. Qu’une collectivité locale doive donner de l’argent à un redevable de l’ISF ne correspond pas à notre conception de la justice fiscale. Enfin, ce bouclier fiscal a été mis en place alors même que vous abandonniez toute idée de plafonnement des niches fiscales – à tel point qu’on finit par douter de la volonté du président de la commission des finances de concrétiser cet engagement qu’il renouvelle chaque année ! L’amendement 112 supprime donc l’article premier du CGI issu de l’article 74 de la dernière loi de finances.

M. le Rapporteur général – La commission a rejeté cet amendement. En réalité, l’idée du bouclier fiscal remonte à la fin des années 1980 : en 1990, l’impôt sur le revenu, l’ISF et la CSG cumulés ne devaient pas excéder 85 % du revenu. Mais à l’époque, le remboursement ne pouvait avoir lieu qu‘au titre de l’ISF ! Notre dispositif est beaucoup plus juste : il prend en compte l’impôt sur le revenu et l’ISF, mais aussi les impôts locaux – taxe d’habitation et impôt foncier sur la résidence principale. Le tout est plafonné à 60 %, mais le dégrèvement n’est pas réservé aux redevables de l’ISF : certaines personnes aux revenus modestes peuvent entrer dans le dispositif, du fait par exemple d’impôts locaux importants. En termes de justice fiscale, la progression est donc indiscutable. Dans une démocratie, l’impôt ne peut pas être confiscatoire. Ce bouclier fiscal concerne plusieurs dizaines de milliers de contribuables, dont une grande majorité de personnes aux revenus modestes. Contrairement, Monsieur Emmanuelli, au dispositif que vous aviez imaginé il y a quinze ans, polarisé sur l’ISF, nous nous sommes intéressés à l’ensemble des Français.

M. le Ministre délégué – Le bouclier fiscal est l’un des piliers de notre réforme fiscale. Je peux comprendre que l’opposition soit critique, mais le petit rappel historique du rapporteur général a permis de remettre les choses en perspective : les socialistes avaient élaboré un dispositif semblable, avant que l’idéologie ne reprenne ses droits. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Je veux insister sur l’impératif de justice qui nous a guidés : 90 % des bénéficiaires de la réforme appartiennent au premier décile de l’impôt sur le revenu ! Sans ce bouclier, ils seraient victimes d’une injustice criante, puisqu’ils seraient imposés à plus de 60 % de leur revenu. Enfin, ce dispositif est une mesure d’attractivité du territoire. Nous devons avoir les yeux rivés sur ce qui se passe dans le reste du monde, et notamment en Europe. Nous devons être fiscalement compétitifs. Il ne s’agit pas de tout brader, mais de s’assurer qu’on ne souffrira pas de délocalisations préjudiciables à nos emplois. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Le bouclier fiscal est un instrument majeur de ce point de vue. Pour toute ces raisons, j’invite votre assemblée à repousser avec force cet amendement.

M. Henri Emmanuelli – Cet amendement est très symbolique. Lorsque le ministre parle d’idéologie, je préfère penser conviction, et nous n’avons pas la même conception de ce qu’est la justice fiscale. Ce gouvernement a pris l’habitude de ne pas rendre compte de ce qu’il fait, mais de se référer constamment au passé pour faire le procès de ses prédécesseurs. Nos compatriotes commencent à s’en lasser. Et puisque vous vous reportez à ce qu’ont fait les socialistes « avant que l’idéologie ne reprenne ses droits », vous souvenez-vous que c’est M. Juppé qui a supprimé le dispositif ? Ne me faites pas croire qu’il avait été saisi par l’idéologie socialiste ! Ce genre de propos ne fait pas avancer le débat.

En réalité, selon la bonne vieille méthode, vous mettez en avant quelques cas, aberrants, c’est vrai, de personnes disposant d’un patrimoine important mais de faibles revenus, et qui pouvaient être obligées de liquider une partie de leurs biens pour acquitter leurs impôts. Et vous vous servez de ces cas exceptionnels – qui, même s’ils posent un problème, ne feront pleurer personne, n’exagérons rien ! – pour faire un cadeau de 250 millions à dix mille personnes. Tout à l’heure, le ministre nous parlait avec emphase du sort merveilleux qui attendait les bénéficiaires de la prime pour l’emploi, alors que face au bénéfice fiscal offert par le bouclier, on est dans un rapport de 90 à 4 000 euros ! Voilà votre politique ! En réalité, depuis cinq ans, vous n’avez de cesse de faire reculer l’impôt progressif au bénéfice de la taxation indirecte, comme le prouve le fait que les prélèvements obligatoires ne diminuent pas malgré la baisse de l’impôt sur le revenu.

M. Carrez nous dit que le dispositif sera plus juste : faudrait-il vous remercier…

M. le Rapporteur général – Oui !

M. Henri Emmanuelli – …de votre immense générosité qui obligera les collectivités locales à financer la résorption de cette injustice ? Savez-vous que la taxe d’habitation et la taxe professionnelle constituent l’essentiel des revenus d’un département ? Comment pourrai-je expliquer aux 90 % des habitants des Landes qui gagnent moins du salaire moyen que je dois les taxer pour libérer une poignée de riches de leur prétendue servitude fiscale ? Vous commettez là une lourde erreur politique. Vous me verrez mobiliser tous les moyens légaux à ma disposition dès que se présentera le premier cas de remboursement de riches propriétaires côtiers sur le dos de ceux qui paient la taxe d’habitation. C’est une aberration qui illustre votre état d’esprit.

Je devrais pourtant vous remercier, Monsieur le ministre : je viens d’apprendre que le fisc me devait 217 euros au titre de l’impôt sur le revenu. Formidable !

M. le Ministre délégué – Vous allez pouvoir consommer et participer ainsi à la croissance !

M. Henri Emmanuelli – Je devais onze mille euros, auxquels il faut soustraire le paiement de la femme de ménage, des cotisations au parti et au groupe parlementaire, et de l’atelier protégé départemental : au bout du compte, l’État me doit de l’argent !

M. le Ministre délégué – Ne nous dites pas tout : cela relève du secret fiscal !

M. Henri Emmanuelli – J’ai le droit de le rompre, pour ce qui me concerne. Et pendant ce temps, mon chauffeur et mes collaborateurs, eux, auront à payer bien plus ! Et encore ne suis-je pas concerné par le bouclier fiscal, car je serais même mieux loti. Si j’avais voulu être riche, je n’aurais pas fait de politique et je serais resté où j’étais…

M. le Ministre délégué – C’est-à-dire ?

M. Henri Emmanuelli – À la compagnie financière Edmond de Rothschild, où je gagnais à trente-deux ans plus que je ne gagne aujourd’hui !

M. Charles de Courson – Quelle régression sociale !

M. Henri Emmanuelli – Quoiqu’il en soit, les mots ont un sens : ne nous parlez pas de justice fiscale, alors que vous baissez les impôts sans toucher aux niches fiscales. C’est scandaleux !

M. le Rapporteur général – M. Emmanuelli s’inquiète pour les collectivités locales contraintes de rembourser au titre de la taxe d’habitation ou de l’impôt foncier.

M. Henri Emmanuelli – Je m’inquiète pour tout !

M. le Rapporteur général – Rassurez-vous : le dispositif a été amélioré.

M. Augustin Bonrepaux – Dites plutôt qu’il a été aggravé !

M. le Rapporteur général – En pratique, les collectivités locales ne seront pas concernées par le remboursement dès lors que la somme de l’impôt sur le revenu et de l’impôt sur la fortune dépassera 60 % des revenus ; quant au remboursement des cas où le seul effet des impôts locaux conduit à dépasser ce seuil…

Plusieurs députés socialistes – Cela revient exactement au même !

M. le Rapporteur général – …il ne représentera que douze à quinze millions, qui seront prélevés par préciput sur les trente-huit milliards d’euros de la dotation globale de fonctionnement. Vous faites donc tout une histoire pour bien peu…

Plusieurs députés socialistes – C’est le principe qui est choquant !

M. Henri Emmanuelli – Nous en reparlerons lorsque l’affaire sera en place publique !

M. Jean-Pierre Brard – Depuis la Révolution, les symboles comptent en France, et vous les maniez mal. Abrités derrière votre « bouclier fiscal » – cette expression mérite à elle seule une thèse de sémantique – vous permettez aux riches d’accumuler les écus tandis que vous ignorez la majorité trop pauvre pour être assujettie à l’impôt sur le revenu. Vous êtes impitoyables avec les petites gens.

Comme à M. Emmanuelli, votre ministère me remboursera une certaine somme cette année. Je n’ai pourtant pas non plus choisi la politique pour l’argent : je touche toujours autant qu’un ouvrier qualifié de la métallurgie parisienne, et je finance des projets à droite et à gauche – plutôt à gauche, en fait. Si je ne paie pas d’impôt, c’est parce qu’il n’est pas assez progressif ! Vous mentionnez souvent les couches moyennes : elles sont prêtes à payer l’impôt, pourvu qu’elles sachent pourquoi ! Et cessez d’invoquer la compétitivité ou l’attractivité : ce sont des attrape-nigauds pour effrayer les petits-bourgeois. L’impôt sur le revenu en France ne représente que 3 % du PIB, contre 10 % en moyenne en Europe : pourquoi payons-nous moins cet impôt pourtant plus juste ? Vous mettez en lumière des cas exceptionnels, alors que la plupart de ceux qui bénéficieront du bouclier fiscal sont riches. On peut certes citer des petites gens qui, ayant toujours été pauvres, possèdent néanmoins un pré en montagne ou un terrain francilien qu’une vague spéculative a soudain renchéris. Or ces gens, vous avez le pouvoir de les exonérer. Mais vous les utilisez comme alibi.

Il faut rétablir la progressivité de l’impôt et élargir, comme le pense M. Méhaignerie lui-même, l’assiette de l’ISF en y intégrant notamment les biens professionnels et les œuvres d’art, qu’utilisent si souvent les fraudeurs. Pourtant, le Gouvernement s’en désintéresse. Que faites-vous contre ce Russe, certainement pas devenu riche à l’époque du rouble soviétique, aujourd’hui propriétaire d’une modeste masure de 90 millions d’euros qu’il loue 350 000 euros par semaine ? Rien ! M. Sarkozy prétend s’en prendre aux voyous, mais dès qu’ils sont riches, le voilà qui fait des génuflexions ! Il y a pourtant bien de l’argent à prendre dans la mafia russe ! On m’oppose que la mafia chinoise est pire : faites donc un lot, et combattez-les avec une égale énergie ! Cessez de vous acharner sur les pauvres gens tout en protégeant ceux qui devraient plus contribuer au budget de notre nation.

M. Charles de Courson – Il n’existe aucun lien entre les quelques milliers d’euros que versera une collectivité et la responsabilité fiscale. La possession d’un bien immobilier, par exemple, peut très bien entraîner le franchissement du seuil de 60 % : cette mesure technocratique est absurde et inefficace, et encore ne représente-t-elle que douze millions d’euros, selon des estimations qui, de toute façon, ne valent rien !

L'amendement 112, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Augustin Bonrepaux – L’amendement 113 vise à supprimer l’article 1649-0 A du code général des impôts. Le plafonnement des impositions en fonction du revenu ne fait que parachever la remise en cause de la progressivité du système fiscal et le démantèlement de l’ISF que poursuit inlassablement le Gouvernement depuis 2002. Ne serait-il pas plus juste de plafonner les niches fiscales, pour les ramener à leur véritable but qu’est l’emploi, au lieu d’en faire des cadeaux fiscaux ? Vous aurez bien du mal à faire croire que votre dispositif concerne les catégories modestes : c’est pour ceux qui paient l’ISF que vous le créez, et nous proposons donc de le supprimer.

Réduire l’ISF doit, selon vous, faire revenir des expatriés ou éviter des délocalisations. Mais cet expatrié en Suisse, que le ministre a chargé d’un rapport, va-t-il revenir parce qu’il y a le bouclier fiscal ? Est-ce qu’un des soutiens les plus lumineux de M. Sarkozy va renoncer à partir en Belgique ? La défense de l’emploi est un prétexte pour améliorer la situation des privilégiés, ce qui est votre seul souci.

M. le Rapporteur général – Contre. Vous prétendez que depuis 2002, nous avons constamment voulu démanteler l’ISF.

M. Augustin Bonrepaux – C’est vrai !

M. le Rapporteur général – En 2002, cet impôt rapportait 2,2 milliards et en 2006 il rapporte 3,6 milliards. Le nombre de contribuables a augmenté de 50 %.

M. Augustin Bonrepaux – Cela pourrait rapporter encore plus !

M. le Rapporteur général – Vous auriez mieux fait de demander qu’on transfère un impôt aussi productif, plutôt que la TIPP, pour financer le RMI.

L'amendement 113, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Éric Besson – Le rendement de l’ISF peut croître avec l’augmentation de la fortune, tandis que la cotisation moyenne par contribuable a baissé, et le rapporteur général le sait parfaitement.

Le ministre a dit à M. Emmanuelli que rendre une partie du revenu aux individus, c’est leur permettre de participer à la croissance. Effectivement, le comportement des consommateurs aisés a changé : il y a quelques années encore, la propension à consommer diminuait avec l’augmentation des revenus, laquelle conduisait plutôt à l’épargne. Aujourd’hui les gens à hauts revenus tendent davantage à consommer et le secteur du luxe se porte très bien.

M. Michel Bouvard – Il travaille beaucoup à l’exportation.

M. Éric Besson – Les hauts revenus ont diminué leur taux d’épargne, tandis que les gens modestes ont dû s’endetter. Vous avez donc inventé la croissance portée par les inégalités – ou plutôt vous l’avez importée puisque cette croissance inégalitaire portée par la consommation des très hauts revenus au détriment des plus modestes est la thèse des néoconservateurs, que Bush a mise en œuvre, comme Berlusconi l’a fait et comme vous le faites en France.

Cela fait cinq ou six fois que vous retouchez l’ISF depuis le début de la législature, et cette fois vous le faites insidieusement par le biais du bouclier fiscal. Nous demandons, par l’amendement 116, que les assujettis à l’ISF ne puissent y échapper totalement grâce à ce bouclier fiscal et restent au moins redevables d’une cotisation minimale à ce titre.

L'amendement 116, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Louis Dumont – Nous dénonçons la participation des collectivités territoriales au financement du bouclier fiscal, pour un montant que nous évaluons à 43 millions. Notre amendement 117 supprime ce mécanisme. D’ailleurs, même dans les rangs de la majorité, il y a certainement des discussions sur ce point. Les collectivités locales n’ont pas à participer à cette nouvelle inégalité fiscale.

L'amendement 117, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Marylise Lebranchu – Notre amendement 114 a le même objectif. C’est l’État qui a choisi de créer le bouclier fiscal. Il n’est pas normal que les collectivités locales en supportent les conséquences. Je pense à une commune que je connais, où 90 % des contribuables ont de petits revenus, et où sur un très beau site, une douzaine de demeures sont habitées par des assujettis à l’ISF. Évidemment, ces maisons coûtent bien plus à la collectivité pour le ramassage des ordures ménagères, la voirie, l’assainissement, que celles qui sont sur de petites parcelles.

M. Michel Bouvard – Eh oui !

Mme Marylise Lebranchu – Pourtant les habitants de ces dernières vont supporter en partie le remboursement d’une niche fiscale. Même si cette somme est symbolique, l’effet psychologique de cette injustice sera dramatique.

M. le Rapporteur général – Avis défavorable. En fait, ce n’est pas comme cela que les choses vont se passer.

M. Didier Migaud – Mais si !

M. le Rapporteur général – Non, ce ne sont pas les habitants pauvres d’une commune qui vont payer pour ceux qui sont aisés. Les dépassements liés aux impôts locaux seraient additionnés au niveau national, pour un total qui serait au maximum de 12 millions, lesquels seront prélevés, par un système de solidarité, sur les 38 milliards de la DGF. Le plafonnement ne pose aucun problème aux collectivités territoriales.

M. le Ministre délégué – Défavorable.

Mme Marylise Lebranchu – Si l’on vous écoute, à quoi bon discuter sur une somme epsilonesque ! Mais de toute façon c’est un principe qui est en jeu. Pourquoi faudrait-il faire prendre en charge solidairement par toutes les collectivités locales sur leur DGF une remise faite à quelques-uns ? Si c’est l’ISF qui vous gêne, dites-le et qu’on en discute. Mais n’utilisez pas un tel artifice, qui est profondément injuste.

L'amendement 114, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Augustin Bonrepaux - Pourquoi donc mettre à contribution les collectivités si leur apport est aussi minime que vous le prétendez ?

Notre amendement 115 vise à exclure les EPCI de toute participation au mécanisme du bouclier fiscal, inique en lui-même mais qui le deviendrait encore davantage si ces établissements devaient le financer eux aussi. Votre réforme de la taxe professionnelle les pénalise déjà lourdement. Le président de la commission des finances nous a certes expliqué qu’il n’en était rien dans sa communauté d’agglomération, à Rennes. Mais dans les zones d’industries en déclin, comme le textile, où les rentrées de taxe professionnelle ne peuvent être accrues, les structures intercommunales n’ont d’autre solution que d’augmenter la fiscalité des ménages. Et voilà qu’on va les ponctionner encore au seul profit de quelques contribuables privilégiés !

M. le Rapporteur général - Le bouclier fiscal joue aussi pour des contribuables qui ne sont pas assujettis à l’ISF, mais paient des impôts locaux très élevés. C’est le cas par exemple de personnes veuves qui ne disposent que de revenus modestes tout en possédant un pavillon à forte valeur locative, et qui ont besoin d’être protégées d’impôts locaux confiscatoires par rapport à leurs revenus. Beaucoup de contribuables de ma commune m’ont ainsi fait part de leurs inquiétudes après l’augmentation de 20 % de la taxe sur le foncier bâti décidée par la région Île-de-France. Le système que nous proposons, qui prend en compte les impôts locaux, est beaucoup plus juste que celui que vous aviez mis en place il y a quinze ans et ne concernait que les contribuables redevables de l’ISF. Avis défavorable à l’amendement.

M. le Ministre délégué – Même avis.

M. Augustin Bonrepaux - Vos propos, Monsieur le rapporteur général, sont en contradiction avec ceux du président de la commission des finances qui nous a expliqué tout à l’heure que, dans la plupart des communes, les personnes aux revenus modestes ne payaient pas de taxe d’habitation – il semblait d’ailleurs le regretter, nous accusant d’avoir institué trop de dégrèvements et d’exonérations ! Comment pourraient-elles dès lors être concernées par le bouclier fiscal ? Quant au foncier bâti, il doit vraiment atteindre une valeur très élevée pour que la taxe acquittée justifie un plafonnement. Mais en ce cas, il peut aussi procurer des revenus.

Le mécanisme proposé est d’autant moins acceptable qu’il va pénaliser les communautés de communes et d’agglomération les plus en difficulté.

L'amendement 115, mis aux voix, n'est pas adopté.

Art. 2

M. Jean-Claude Sandrier – Cet article confirme votre obstination à conduire une réforme particulièrement injuste que nous avions dénoncée avec vigueur l'an passé. Les Français doivent savoir de quoi il retourne : votre prétendue baisse des impôts n’est que tour de passe-passe. Depuis cinq ans, les lois de finances et les lois comportant des dispositions fiscales présentent une continuité certaine : d’une part, baisse de l'impôt progressif sur le revenu, renforcement des niches fiscales, baisse de l'imposition du patrimoine et des entreprises, d’autre part augmentation d'autres prélèvements comme la CSG ou la taxe d'habitation.

Le coût budgétaire des seuls changements intervenus dans le barème de l'impôt sur le revenu entre 2002 et 2007 s'élèvera à 8,33 milliards d'euros. À vous en croire, 68 % des réductions d’impôts bénéficieront aux contribuables modestes et moyens, étant entendu que vous situez le revenu moyen à 3 500 euros par mois. La ficelle est assez grosse quand 90 % des salariés français gagnent moins de 2 900 euros par mois ! En vérité, vos mesures auront essentiellement profité aux 10 % des contribuables les plus riches.

La situation s'est aggravée avec la réduction du nombre des tranches du barème de l'impôt sur le revenu et la mise en place du bouclier fiscal. Quatre cents millions d'euros profiteront ainsi à 15 000 contribuables et 30 % des baisses d'impôts à seulement 5 % des Français les plus aisés. À l’inverse, un salarié célibataire gagnant 1 450 euros nets par mois paiera en 2007 100 euros d'impôt sur le revenu de moins qu'en 2002, mais 200 euros de plus de CSG, sans parler de sa taxe d'habitation.

Ceux à qui, déjà, votre réforme ne rapporte rien voient aussi leurs prélèvements augmenter : hausse de la CSG pour les salariés, son assiette de calcul ayant été portée à 97 % du salaire brut, de la taxe d’habitation, de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, des droits sur les tabacs, pour ne rien dire de la hausse du prix de l'énergie et du coût du logement. En réalité, vous mettez à contribution les ménages modestes et moyens pour compenser les allégements accordés aux plus aisés.

L'impôt sur le revenu ne représente en France que 3,2 % du PIB, contre 10 % en moyenne en Europe. Il faudra nous expliquer si, comme l’a dit M. Méhaignerie, les Allemands paient trois fois moins d’impôt sur le revenu que les Français, comment celui-ci peut rapporter trois fois plus en Allemagne qu’en France. Que faites-vous pour lutter contre les paradis fiscaux et empêcher le dumping fiscal et social qui sévit en Europe, induisant une concurrence déloyale, totalement faussée ?

En vérité, vous souhaitez en finir avec la progressivité de l'impôt, principe pourtant inscrit dans la Déclaration des droits de l'homme et adopté dans tous les grands pays démocratiques pour des raisons évidentes. La progressivité est en effet le moyen le plus juste de faire contribuer les hauts revenus aux dépenses communes en fonction de leurs moyens. Il repose sur une idée qui vous est apparemment devenue étrangère, à savoir que les revenus d’une personne ne résultent pas seulement de ses mérites personnels mais aussi du bon fonctionnement de la société, sans lequel elle ne pourrait déployer l'activité qui lui procure ses revenus. Un chef d'entreprise ne peut ainsi s'enrichir que s'il trouve une main-d'œuvre bien formée et peut profiter d’infrastructures et de services publics efficaces.

L'attractivité d'un territoire ne repose pas seulement sur le niveau des prélèvements obligatoires. Comment d’ailleurs parler de caractère confiscatoire de l’impôt quand, au contraire, le principe républicain de sa progressivité vise à garantir l'intérêt général qui est aussi l'intérêt de tous ?

Nous voterons donc contre cet article 2, sauf à ce que notre amendement, qui propose de restaurer une véritable progressivité de l’impôt, soit adopté.

M. Augustin Bonrepaux – Cet article prouve que le Gouvernement persévère dans l’erreur malgré les analyses du président de la commission des finances qui expliquait dès juillet 2005 que huit milliards d’euros de réductions d’impôts avaient été dépensés en pure perte. Or, vous en accordez deux de plus ! Et comment sont-ils financés ? Mystère…

Vous n’avez pas voulu l’an passé traiter globalement le problème des niches fiscales qui permettent pourtant, Henri Emmanuelli l’a démontré, à des contribuables aux revenus confortables d’échapper à l’impôt. Les députés de la majorité ont vidé de son contenu l’amendement en question, si bien qu’il n’est pas étonnant qu’il ait été ensuite censuré par le Conseil constitutionnel.

La Cour des comptes faisait valoir dans son rapport de 2005 qu’il n’était guère responsable de diminuer les impôts tant que le déficit et la dette n’avaient pas été réduits. La commission Pébereau mise en place par le Premier ministre recommandait elle-même de ne pas les diminuer tant que les finances publiques n’avaient pas été restaurées. C’est pourtant dans cette voie que vous poursuivez pour satisfaire votre clientèle électorale.

M. Jean-Pierre Brard - Monsieur le ministre, vous avez décidément du mal à dire la vérité aux Français. Il faudrait leur dire clairement que votre objectif n’est pas d’instaurer la justice fiscale mais de porter un coup supplémentaire au principe de la progressivité de l’impôt, qui est pourtant l’un des principes républicains essentiels.

La part de l’impôt sur le revenu dans les recettes publiques n’est que de 17,3 %, représentant 3,2 % du PIB. C'est l'un des taux les plus faibles d'Europe. L’impôt sur le revenu représente en effet 25,1 % des recettes publiques en Allemagne, 29,8 % au Royaume-Uni et 53,2 % au Danemark, la moyenne se situant à 25,8 % dans l'Union européenne à Quinze.

Il n'existe aujourd'hui aucune étude officielle sur le bilan des baisses d'impôts que vous avez décidées. Il serait pourtant utile. Depuis 2003, la croissance française est tirée presque exclusivement par la consommation des ménages. Plus exactement, tout a été fait pour pousser les Français à puiser dans leur épargne. En réalité, vous avez assis la croissance sur l'endettement des ménages, comme l’a excellemment démontré Jacques Myard. Ne nous dites pas que le pouvoir d'achat s’accroît – c’est faux. Le chiffre de 2,8 % avancé par M. Breton s'appuie sur le revenu disponible brut des ménages, salarial mais aussi patrimonial. Or, en 2006, le pouvoir d'achat du salaire moyen, dans les entreprises non financières, a baissé de 1 %, après avoir reculé de 0,7 % et de 1,4 % les années précédentes. Dans la fonction publique, le pouvoir d'achat a reculé de 0,2 %. Mais les revenus de la propriété de l'entreprise ont, eux, progressé de 5,1 % en 2005 et de 4,4 % en 2006… Cherchez l'erreur !

Vous nous dites avoir conçu la baisse des prélèvements obligatoires comme un outil de lutte contre l'atonie de la croissance. Cette réponse n’est pas la bonne, puisqu'elle favorise les plus hauts revenus, ceux dont la propension à épargner est la plus forte et, par symétrie, la propension à consommer la plus faible. Comment prétendre favoriser la croissance par ce moyen ?

L'erreur stratégique est donc de taille. L'idéologie libérale dont vous vous réclamez tend à promouvoir une fiscalité prétendument simple, neutre, efficace et ne perturbant pas la concurrence. La fiscalité se réduit au seul financement des missions régaliennes et n’a pas pour objectif de corriger les inégalités. Le financement des missions régaliennes doit donc être assis sur des impôts « efficaces » et « économiquement neutres » tels que la TVA et, le cas échéant, des impôts proportionnels. Les réformes fiscales néolibérales prétendent ainsi améliorer les conditions de l'offre en favorisant les profits et en réduisant les missions de l'État. Dans cette perspective, l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés sont nécessairement jugés « confiscatoires » et l'ISF est déclaré nuire au développement et à l'investissement des entreprises. Mais aucune analyse sérieuse ne corrobore cet aveuglement idéologique.

Pour notre part, nous proposons d'augmenter le nombre de tranches de l'impôt sur le revenu et de renforcer son rôle redistributif, ce qui sera réellement favorable aux plus modestes et aux classes moyennes. En augmentant le nombre de tranches et, en même temps, le taux marginal et le seuil du minimum imposable, nous allégeons la charge fiscale pour les revenus bas et moyens. Notre proposition conduit aussi à une meilleure progressivité de l’impôt. Enfin, le relèvement du minimum imposable peut inciter au relèvement des salaires. C'est tout le sens de l’amendement 85.

M. le Président – Je suppose que l’avis de la commission est défavorable ?

M. le Rapporteur général – La Commission a rejeté l’amendement car la réforme de l’impôt sur le revenu n’a pas altéré la progressivité du barème. De plus, le dispositif proposé, d’une grande efficacité économique, ne peut être envisagé indépendamment du doublement de la prime pour l’emploi. La réforme est donc équitable, cohérente, juste et efficace et elle doit absolument être appliquée. Avis, donc, défavorable.

M. le Ministre délégué – Vous avez parlé de justice sociale. Je rappelle donc que la réforme ne fait que des gagnants, particulièrement les plus modestes et les classes moyennes (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Comme un débat s’est engagé à propos des classes moyennes, je souligne que 3,6 milliards de baisses d’impôt sur le revenu bénéficieront aux foyers dont les revenus sont compris entre 1 000 et 3 500 euros par mois, soit la tranche choisie par vos amis italiens à présent au pouvoir, qui ont retenu précisément les mêmes critères que nous (MM. Brard et Emmanuelli s’exclament). La réforme met donc la France à la norme européenne, et la simplification du barème est d’une grande utilité. Voilà pourquoi j’invite votre Assemblée à repousser l’amendement.

M. Jean-Pierre Brard – Je constate que vous avez fait l’impasse sur les chiffres que j’ai donnés. Je les rappelle donc : alors que la part de l'impôt sur le revenu dans les recettes publiques françaises ne représente que 17,3 %, elle est de 25,1 % en Allemagne, 29,8 % au Royaume-Uni, 53,2 % au Danemark, et 25,8 % pour la moyenne de l'Union à Quinze. Vous citez l’Italie, mais le mimétisme n’a jamais fait une politique ! On voit maintenant ce qu’il faut penser du modèle suédois ; quand à nos amis italiens, ils savent faire preuve d’une grande créativité, mais je n’ai pas entendu dire que son efficacité était démontrée. Qu’en est-il, pendant ce temps, des chômeurs et des érémistes ? Le rapporteur général nous dit « c’est efficace parce que je le dis », mais il n’appuie ses affirmations sur aucune étude. Produisez donc un bilan, et référez-vous aux chiffres européens, car affirmation ne vaut pas démonstration. En revanche, la démonstration n’a pas besoin d’être faite de l’aggravation des injustices et de la misère, ni des difficultés qu’ont les ménages à finir le mois.

L'amendement 85, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Didier Migaud – Avant de présenter l’amendement 111, je demanderai à la présidence de bien vouloir ne pas anticiper l’avis de la commission, à qui il peut arriver, même si c’est exceptionnel, d’accepter un amendement émanant de l’opposition.

Par cet amendement, nous proposons de supprimer la réduction de l’impôt sur le revenu que vous avez prévue dès le versement du premier tiers. Au-delà, je veux insister sur l’injustice de la politique fiscale que vous menez depuis juin 2002. Depuis cette date, les impôts, cotisations et taxes ont augmenté globalement mais l’impôt sur le revenu a effectivement baissé, et de manière profondément inégalitaire, puisque 10 % des ménages profitent de 60 % du produit de la baisse. La Cour des comptes ayant fait ce calcul pour les années 2003, 2004 et 2005, a elle-même conclu à cette très forte concentration de la réduction d’impôt au bénéfice d’un très petit nombre. Cela traduit toute l’injustice de votre politique : la grande majorité, qui voit son imposition augmenter, finance une réduction qui ne lui profite en rien. Malgré cela, vous accumulez les mesures en ce sens, qu’il s’agisse de l’institution du bouclier fiscal, de l’allégement de l’ISF ou des niches fiscales, que vous continuez de multiplier. À ce sujet, un vrai débat serait nécessaire, car leur plafonnement avait été annoncé l’an dernier, par vous-même, Monsieur le ministre, et par le président de la commission, qui avait auparavant évoqué « l’inefficacité totale » de la réduction d’impôt décidée en 2002, inefficacité que M. Mer avait d’ailleurs fini par reconnaître, ici même. Je me souviens de propos sévères sur l’incohérence et l’injustice de ces niches fiscales qui donnent aux plus hauts revenus de multiples possibilités de ne plus payer d’impôt du tout. Pourtant, vous avez aggravé la situation. Mais les mesures ayant été prises l’an dernier, elles passent maintenant comme lettre à la poste. Vos silences assourdissants, Monsieur le ministre, traduisent votre difficulté à assumer ces dispositions. C’est aussi ce qui explique la précipitation de la présidence, parfois même agacée que la commission tienne à exprimer ses préoccupations…Vous voulez aller vite, Monsieur le Président, parce que nous appuyons là où ça fait mal. Ce que vous préféreriez ne pas nous entendre démontrer, c’est que la politique que soutient la majorité tend à accroître les inégalités. Plusieurs rapports de l’INSEE l’ont déjà établi pour les années 2005 et 2006, et je crains fort que 2007 ne déroge pas à la règle. Votre grande réforme fiscale ne bénéficiera qu’à quelques-uns, au détriment de tous les autres.

L'amendement 111, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Didier Migaud – Le silence de la commission et du Gouvernement reste assourdissant !

M. Charles de Courson – Mon amendement 217 vise à ramener de 8 % à 5 % la réduction du montant des acomptes prévisionnels ou des prélèvements mensuels, afin de permettre un meilleur lissage sur l’année de l’imposition due. Qu’adviendra-t-il pour les contribuables dont le revenu augmente par rapport à l’année de référence ? La régularisation au titre du second semestre risque d’être plus pénalisante que l’avantage consenti au cours du premier. Le rapport écrit de M. Carrez étant peu explicite à cet égard, il nous semble raisonnable de limiter la réduction à 5 %. Bien entendu, tout rapprochement du dispositif conçu par M. Breton avec des échéances électorales connues est à prohiber !

M. le Rapporteur général – Avis défavorable. Un décret précisera que la durée d’application de la réduction sera de l’ordre d’un semestre. Le dispositif étant plafonné à 300 euros, le risque d’avoir à reprendre des avantages versés indûment semble extrêmement faible. La proposition est donc à la fois sûre et équilibrée.

M. le Ministre délégué – Faisons un sort au reproche d’électoralisme : s’il suffisait de réduire les acomptes prévisionnels pour gagner les élections, cela se saurait, et M. Jospin, qui a versé deux PPE en même temps aurait connu un bien meilleur destin…

M. Didier Migaud – Nous vous souhaitons le même !

M. le Ministre délégué – Il fallait placer le curseur au bon niveau en évitant deux écueils : se faire de la trésorerie sur le dos des Français et les exposer au risque d’un ressaut d’impôt excessif. Comme l’a dit votre rapporteur général, avec une réduction de 8 % plafonnée à 300 euros, nous proposons un dispositif tout à fait équilibré, d’autant que le ressaut d’impôt pourra être étalé sur les trois derniers mois de l’année. Tout cela est donc parfaitement supportable, et le fait que la baisse d’impôt profite aux Français dès le début de l’année est bon pour la consommation, bon pour l’investissement et bon pour l’emploi. Un dernier mot pour dire que sera disponible dès le début de l’année prochaine sur le site de mon ministère une calculette électronique permettant de connaître instantanément le montant de l’impôt dû et de choisir les modalités de règlement les mieux adaptées. Avis défavorable, pour ces raisons, à l’amendement de M. de Courson.

L'amendement 217, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article 2, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Pierre Brard – Je demande une suspension de séance d’une demi-heure pour permettre à notre groupe de se réunir.

M. le Président de la commission – Compte tenu de l’heure, je vous propose, Monsieur le président, de lever la séance. (Murmures sur les bancs du groupe UMP)

M. Didier Migaud – Cette proposition nous semble très sage, dans la mesure où nous ne souhaitons pas que nos amendements très importants sur le plafond des niches fiscales soient expédiés en cinq minutes, entre minuit vingt-cinq et minuit trente.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce matin, jeudi 19 octobre, à 9 heures 30.
La séance est levée à 0 heure 25.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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oRdre du jour
du Jeudi 19 octobre 2006

NEUF HEURES TRENTE
1re SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2007 (n° 3341).

Rapport (n° 3363) de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

QUINZE HEURES
2e SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l’ordre du jour de la première séance.

VINGT ET UNE HEURES TRENTE
3e SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l’ordre du jour de la première séance.

© Assemblée nationale