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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

2ème séance du mardi 7 novembre 2006

Séance de 15 heures
19ème jour de séance, 37ème séance

Présidence de M. Jean-Louis Debré

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La séance est ouverte à quinze heures.

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QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

CHÔMAGE DANS LES ARDENNES

M. Philippe Vuilque – En toute occasion, le Gouvernement se félicite de la baisse du chômage, alors même que celle-ci demeure très relative, les chiffres de l’emploi restant bien moins favorables que sous le gouvernement de Lionel Jospin (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Il s’agit en outre d’une baisse en trompe-l’œil, liée pour une large part à la contraction de la population active et à des radiations massives de demandeurs d’emploi. La réalité, dans certains secteurs de l’économie, reste très préoccupante. Dans celui de la sous-traitance automobile et de la fonderie, elle est même dramatique, ces domaines étant touchés de plein fouet par les délocalisations. La crise de l’industrie automobile a entraîné une augmentation de près de 40% des défaillances de sous-traitants.

Mon département des Ardennes en offre la triste illustration : le taux de chômage y est supérieur de quatre points à la moyenne nationale, et ce sont près de 2 000 emplois qui risquent de disparaître dans les mois qui viennent. Thomé-Génot, APM, Vistéon, la liste est longue des entreprises qui sont menacées. Et elle est longue, aussi, la liste des femmes et des hommes qui ont perdu ou qui vont perdre leur emploi. C’est une véritable saignée pour notre département.

L’indifférence, voire la condescendance, du Gouvernement n’arrange rien. Les élus du département ont demandé à être reçus par MM. Borloo et Larcher, malheureusement sans succès. Pour toute réponse, nous avons droit à des effets d’annonce sans aucune concertation avec les décideurs locaux. Les salariés de l’entreprise Thomé-Génot, à Mouzonville, victimes du pillage de leur entreprise par un patron américain, demandent également à être reçus. Je viens d’apprendre qu’ils le seront enfin, demain : mieux vaut tard que jamais !

Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre, en liaison avec les décideurs locaux, pour aider le secteur de la sous-traitance automobile en général, dans les Ardennes en particulier ? En l’absence de plan social, va-t-il accepter la demande des salariés de Thomé-Génot d’une compensation de 30 000 euros ? Merci de m’apporter une réponse précise. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité  Je vous prie d’excuser l’absence de Gérard Larcher : il participe en ce moment même au Conseil européen sur l’emploi. Dans notre pays, la baisse du chômage est bien réelle (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains), puisque 200 000 emplois ont été créés au cours des douze derniers mois. Et puis, Monsieur Vuilque, vous n’avez pas le monopole des Ardennes : Mme Poletti et M. Warsmann appellent depuis longtemps l’attention sur les difficultés particulières de ce département, frappé de plein fouet par les difficultés des équipementiers automobiles. Les drames humains qui en découlent, chacun d’entre nous les mesure : l’objectif du Gouvernement est de trouver des solutions durables pour accompagner les Ardennes. À ce titre, je rappelle que nous avons lancé plusieurs dispositifs dans votre département : nous y avons expérimenté le contrat de transition professionnelle, labellisé la maison de l’emploi de Charleville-Mézières et signé deux conventions de rénovation urbaine, l’une pour Charleville et l’autre pour Sedan.

S’agissant du reclassement des chômeurs ardennais, le Premier ministre, à la demande de Mme Poletti et de M. Warsmann (Murmures sur les bancs du groupe socialiste), a alloué 3 millions supplémentaires au contrat territorial. Et le rendez-vous que vous avez sollicité avec les ministres Larcher et Loos aura lieu dans les tout prochains jours (Même mouvement). Vous le savez, le ministre délégué à l’industrie a demandé à l’AFI d’examiner de quelle manière pouvait être envisagée une reprise – même partielle – de l’entreprise Thomé-Génot. Cela fait partie du programme de travail de l’AFI, développé conjointement avec le président du conseil général des Ardennes. Comme vous le voyez, le Gouvernement est totalement mobilisé pour l’emploi dans votre département et il est déterminé à proposer rapidement des solutions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

FRACTURE NUMÉRIQUE

M. Stéphane Demilly – Monsieur le ministre délégué à l’aménagement du territoire, je souhaite appeler l’attention sur une situation qui n’a que trop duré puisqu’elle concerne l’inégalité territoriale pour l’accès à la téléphonie mobile et au haut débit. Que ces deux technologies de communication soient d’abord déployées dans les zones urbaines fortement peuplées, cela se comprend. Mais qu’elles soient encore aux abonnés absents dans les zones moins peuplées – et donc moins rentables – plusieurs années après, cela est inacceptable parce que contraire au principe d’égalité entre tous les citoyens. Cette fracture numérique renforce l’existence d’une France à deux vitesses : d’un côté celle de la modernité, de l’autre une réserve d’Indiens. En effet, l’installation des commerçants, des artisans et des professions libérales est étroitement liée à la présence de ces réseaux de communication. Dans nos villages, les gens en ont assez de devoir monter en haut d’un arbre ou dans le clocher de l’église pour capter un minimum de réseau ! (Exclamations sur divers bancs) Monsieur le ministre, quelle réponse le Gouvernement entend-il apporter à ce mécontentement grandissant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire - Monsieur le député, nous n’entendons pas les mêmes mécontentements et je regrette qu’en tant que député de la Somme et membre de la famille politique qui préside le conseil général, vous n’ayez pas incité ce dernier à signer la charte de département innovant avec l’opérateur historique pour accélérer le développement des réseaux internet ADSL à haut débit ! (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP)

En juin 2005, 3 000 communes rurales étaient en zone blanche pour la téléphonie mobile ; il n’y en plus que 1 500 aujourd’hui. Il y en avait 27 dans la Somme ; elles ne sont plus que 13. S’agissant de l’Internet à haut débit, 80 % des foyers français étaient desservis en juin 2005 : il y a en aujourd’hui 90 %, et même 91 % dans la Somme. Restent donc 9 % de foyers non couverts. En juillet dernier, avec le ministre de l’industrie, nous avons accordé deux licences WiMax par région pour assurer la couverture des dernières zones blanches et je viens de faire débloquer, avec le Premier ministre et le ministre d’État, une enveloppe de 10 millions pour les communes rurales les plus fragiles économiquement, de sorte que l’État leur accorde une subvention couvrant 80 % de l’équipement satellitaire leur permettant d’accueillir l’Internet à haut débit. Bref, nous serons à 100 % de couverture d’ici le mois de juin prochain. Pour les entreprises, c’est le très haut débit – 100 mégabits – que nous apportons dans 2 500 zones d’activité, en sus de 2 mégabits symétriques dans toutes les zones rurales sans zone d’activité. Pour nous, la couverture numérique est une affaire de justice sociale et nous sommes le premier pays de l’Union européenne en matière de desserte des zones les plus fragiles. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Panne d’électricité

M. Michel Vaxès – Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie. Samedi dernier, dix millions d’Européens étaient touchés par une panne d’électricité due à une défaillance du réseau allemand. Celle-ci s’inscrit dans la lignée des incidents survenus en Italie et en Grande-Bretagne, suite à la libéralisation, c’est-à-dire à la déréglementation du secteur.

L’imputer à un petit coup de froid n’est pas crédible ! La fédération allemande des consommateurs d’énergie dénonce plutôt l’état déplorable du réseau. Des responsables politiques exhortent les groupes énergétiques à investir davantage dans les infrastructures de transport. À l’échelle européenne, on estime d’ailleurs les besoins d’investissement à 1 600 milliards.

Cette défaillance prouve une fois de plus que soustraire le secteur énergétique à la puissance publique n’est pas la bonne solution. Elle justifie l’ouverture d’une commission d’enquête, dont le groupe communiste fera la demande dans quelques jours.

Quelles garanties apportez-vous sur la fiabilité de notre réseau, dans le contexte européen d’ouverture à la concurrence et de privatisation que nous condamnons ? Comment comptez-vous défendre le service public comme le feront demain, dans un autre domaine, les agents de la SNCF ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l’industrie Effectivement, samedi soir, en Allemagne, on a décidé d’interrompre deux lignes de 400 000 volts pour laisser passer un navire sur l’Elbe. À ce moment, l’Europe orientale était en surcapacité et l’Europe occidentale en sous-capacité. De ce fait, en quelques instants il a manqué 10 000 mégawatts pour faire face à la demande à l’ouest. L’interconnexion des réseaux a alors fonctionné (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Grâce au professionnalisme des équipes d’EDF et de RTE, auxquelles je rends hommage, nous avons disposé au bout d’une heure et demie de 5 000 mégawatts grâce à la mise en action du réseau hydroélectrique.

En 1977, j’étais à New York… (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Suite à un incident de même type, la côte Est avait été plongée dans l’obscurité et il avait fallu trois jours pour rétablir le réseau. En Europe, on n’a eu besoin que d’une heure et demie. (Même mouvement)

Effectivement il y a eu un incident en Allemagne, et nous avons demandé qu’une commission d’enquête s’en saisisse, notamment pour affiner les prévisions – encore que l’électricité y soit pour une grande part d’origine éolienne, ce qui limite les prévisions. Mais l’essentiel est que, grâce au professionnalisme du personnel, nous ayons fait face à cette défaillance. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Panne d’électricité

M. Jean Proriol – Ma question porte également sur la panne d’électricité géante qui a affecté samedi l’ouest du continent européen. Le réseau allemand saturé et défaillant a sollicité le nôtre auquel il est connecté. Aussitôt, le système de délestage préventif a coupé l’alimentation électrique de cinq millions de foyers sur l’ensemble du territoire, dont 140 000 en Auvergne.

La libéralisation et l’ouverture des marchés n’ont rien à voir avec la liberté de circulation sur une rivière allemande. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Ces 60 minutes de trou noir ont évité le pire, et je dis à mon tour ma reconnaissance à RTE et EDF, deux bons élèves de l’Europe de l’énergie, qui ont rétabli le courant au plus vite tout en assurant la solidarité avec l’Allemagne.

Mais cela souligne l’insuffisance de la production, donc la nécessité d’investir dans des pays qui ont fait d’autres choix énergétiques que le nôtre, ainsi que la fragilité des lignes de transport. « C’est la fin de l’ère de l’insouciance », a prévenu Pierre Gadonneix, le président d’EDF. Pendant 15 ans, nous avons cru être en surcapacité ; ce mythe vient de s’écrouler. Cette « europanne » est un électrochoc.

Dès lors, ne faut-il pas revoir en urgence nos règles de construction de lignes à haute et très haute tension, et investir dans les transports ? Il faut aussi encourager la diversification des sources d’approvisionnement et les économies d’énergie.

L’énergie sera la grande question du siècle. Le traité de Rome, dont nous célébrerons le cinquantième anniversaire le 25 mars, eut pour moteur la CECA. L’énergie pourrait bien être celui de l’Europe des 25 à l’avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et plusieurs bancs du groupe UDF)

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l’industrie Vous posez bien la question (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Face aux enjeux énergétiques, vous avez raison, il faut des groupes transnationaux, des groupes qui aient la capacité d’investir massivement pour préparer l’avenir. Grâce à la possibilité que nous lui avons donnée de faire appel au marché financier, EDF va investir plus de 40 milliards dans les cinq ans à venir, notamment dans le réseau de transport et les lignes à très haute tension.

M. André Chassaigne – Et les actionnaires ?

M. le Ministre – Mais il faut que chacun prenne ses responsabilités, pour que l’on puisse faire passer ces lignes sur l’ensemble du territoire. Enfin, en France et au dehors, au-delà du parc nucléaire qui assure la consommation quotidienne, il faut avoir des centrales en état de répondre aux pics de consommation…

M. Henri Emmanuelli – On les a fermées !

M. le Ministre - …notamment des centrales à gaz.

M. Maxime Gremetz - Et à charbon !

M. le Ministre - Toute la politique du Gouvernement tend à répondre à ces défis, dont l’enjeu dépasse cependant le cadre national. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP)

Commande de la Sncf À l’entreprise bombardier

M. Jean-Paul Anciaux – À la profonde déception d’Alstom et de ses salariés, l’entreprise canadienne Bombardier a remporté le contrat de renouvellement des trains régionaux d'Île-de-France, un marché de 4 milliards. Bombardier avait déjà emporté, en 2001, un marché d’autorails de 1,6 milliard au détriment d’Alstom. Le conseil d’administration de la SNCF, dont l’État est le seul actionnaire, a justifié la décision récente par un prix inférieur de 10 % environ à celui que proposait Alstom. Or, c’est parce qu’elle s’est vu attribuer sans appel d’offres le marché du métro de Montréal et celui de Toronto que la société canadienne peut proposer à l’étranger des prix inférieurs à ceux de ses concurrents. Alstom, qui emploie des dizaines de milliers de salariés en France, s’indigne à bon droit, d’autant plus qu’en procédant comme il l’a fait, le Canada a violé l’accord passé avec l’Union européenne dans le cadre de l’OMC. L’indignation est vive à l’usine d’Alstom du Creusot, comme dans les autres sites de l’entreprise.

Avec mes collègues Lellouche et Reiss, je vous demande donc de me dire, Monsieur le ministre des transports, si les conditions juridiques de l’attribution du marché de remplacement des trains d’Île-de-France ont été rigoureusement définies et si des engagements précis d’accords de sous-traitance et de partenariat ont été passés entre Bombardier et Alstom. J’aimerais enfin connaître votre sentiment personnel sur l’issue de cet appel d’offres. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer  Je comprends l’émotion de ceux, dont vous vous faites le porte-parole, de l’entreprise Alstom dont, tout récemment encore, je suis allé vanter à l’étranger, en compagnie du Président de la République, l’extrême compétence et le savoir-faire. La procédure d’appel d’offres a été scrupuleusement respectée, et les avis juridiques recueillis ont montré qu’il n’y avait pas lieu d’en exclure Bombardier, dont l’offre était de quelque 9 % inférieure à celle d’Alstom. Mais celle-ci ayant formé un recours, il appartiendra à la justice de se prononcer. L’important, c’est l’emploi en France. Or Bombardier est aussi une entreprise de droit français, qui a des usines dans notre pays, et la commande qui lui a été passée est si considérable que la charge de travail devra être répartie. Comme Mme Idrac, présidente de la SNCF, j’ai donc souhaité que des discussions s’engagent pour organiser cette répartition entre les usines de Bombardier et celles d’Alstom. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

destruction d’OGM

M. Gérard Dubrac – Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux. Depuis plusieurs années, des autorisations de mise en culture de semences d'organismes génétiquement modifiés sont accordées par le ministère de l'agriculture, sur avis scientifique donné par la commission du génie biomoléculaire et par la commission du génie génétique. Or, année après année, des champs d'OGM cultivés en toute légalité sont saccagés en toute illégalité. Une nouvelle fois, samedi, comme cet été dans le Gers, un agriculteur de la Gironde a été victime de ces destructions, José Bové et quelque cent cinquante « faucheurs volontaires » s’étant réunis sur son exploitation pour y dégrader 2 000 tonnes de maïs transgénique. Et pour conforter sa démarche de candidat aux élections présidentielles, caméras et micros ont été convoqués pour relayer ces actions délictueuses ! La multiplication et l'ampleur des atteintes aux biens peuvent conduire à toutes sortes de dérapages. Cette situation est inacceptable. Non seulement les faucheurs s'en prennent à des biens privés mais ils attaquent également l'intégrité morale de nos agriculteurs qui sont pourtant entièrement dans leur droit (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Ces actions terroristes sont intolérables (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). L'opinion publique, qui s'émeut à juste titre des agressions commises dans les banlieues, est également scandalisée par les destructions de parcelles transgéniques menées par les militants anti-OGM, qui sont de véritables délinquants (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

À l'heure où tous les moyens sont mis en œuvre pour lutter contre la délinquance dans nos banlieues, pouvez-vous, Monsieur le garde des sceaux, nous dire quelles mesures vous entendez prendre pour assurer le respect de la loi et défendre nos agriculteurs dans nos campagnes ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice  M. José Bové et 150 autres manifestants s’en sont pris en effet à quelque 2 000 tonnes de maïs appartenant à un agriculteur girondin (« Ce sont des voyous ! » sur les bancs du groupe UMP). Une circulaire de la Chancellerie de 2004 rappelle les conditions d’exploitation des parcelles ensemencées d’OGM et les sanctions qu’encourent ceux qui les dégradent.

Mme Martine Lignières-Cassou - Et la loi ?

M. le Garde des Sceaux - Les peines prévues sont lourdes : elles vont jusqu’à deux années de prison, et jusqu’à dix ans si la sécurité des personnes est affectée. La garde à vue dont M. Bové a fait l’objet était donc parfaitement fondée, car nous vivons dans un État de droit dont les règles valent pour tous, altermondialistes compris. Comme vous l’avez rappelé, l’État ne permet les mises en cultures de ces parcelles qu’après avoir strictement appliqué le principe constitutionnel de précaution. Dans ces conditions, nul ne peut s’attaquer à des biens privés ni remettre en cause le droit des agriculteurs à cultiver ces parcelles. Les peines prévues dans les textes seront appliquées, comme il est normal dans un État de droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

dérégulation du marché de l’énergie

M. Pierre Ducout – Je souhaite d’abord faire observer à Mme Vautrin qu’elle a eu tort de répondre avec mépris à M. Vuilque alors qu’il exprimait la souffrance des milliers de Français qui ont perdu leur emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Monsieur le ministre de l’économie, je reviens sur la panne géante provoquée par le passage d’un bateau dans l’est de l’Allemagne et qui a coupé l’électricité à 10 millions d’Européens et à 5 millions de Français. L’interconnexion des réseaux européens est l’auxiliaire de la dérégulation du secteur de l’énergie : elle permet en effet de pallier les insuffisances d’investissement des uns par le maintien de la capacité de production et de transport des autres – c’est le cas de la France –, ce qui ne fait qu’accroître d’ailleurs notre vulnérabilité. Cette conception est d’autant plus condamnable que le ministre de l’industrie a reconnu hier qu’il connaissait les risques encourus par l’Europe à cause du réseau électrique allemand depuis 2005.

Il est paradoxal de constater aujourd’hui l’absence d’une politique européenne de l’énergie digne de ce nom alors que l’Europe s’est construite sur cette nécessité. Le marché ne doit pas commander la gestion d’un bien public de première nécessité et le manque d’investissement des opérateurs privés dans l’entretien et le développement des infrastructures est dangereux pour la pérennité du service alors que la demande ne cesse de croître. De nombreux responsables du secteur électrique aux États-Unis, que nous avons rencontrés en septembre 2003 après le black-out qui a paralysé la côte Est, reconnaissaient que les bons investissements dans les réseaux de transport ne peuvent être apportés que par des intervenants publics (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Comptez-vous demander un moratoire sur l’ouverture totale du marché de l’électricité le 1er juillet 2007 en exigeant le rapport demandé au sommet de Barcelone en 2002 sur les conséquences de cette ouverture ? Pensez-vous vraiment par naïveté technocratique ou pour des raisons idéologiques que le marché est susceptible de résoudre les questions de puissance et d’indépendance énergétiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l’industrie Je suis heureux de constater qu’enfin vous vous posez les bonnes questions ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Enfin, vous vous rendez compte qu’il convient de permettre à nos grandes entreprises d’aller de l’avant ! Je sais bien que, pour résoudre les problèmes liés aux lignes très haute tension, vous voulez marier EDF et GDF. Nous, nous pensons qu’il faut donner à EDF les moyens d’aller de l’avant et d’investir massivement tout en respectant ses missions de service public.

La France n’a de leçons à recevoir de personne. Nous avons pris nos responsabilités dans le cadre d’un mémorandum sur l’énergie qui a été discuté à Bruxelles et transformé en livre vert sur proposition de la France. Oui, la France mène un combat exemplaire grâce à ses entreprises EDF et GDF de manière à ce que nous disposions des plus grands groupes énergétiques dans les domaines du gaz, de l’électricité et du nucléaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

grève à la sncf

M. Éric Woerth – Six des huit syndicats de la SNCF ont appelé à la grève, de ce soir 20 heures à jeudi matin 8 heures.

M. Maxime Gremetz - Bravo !

M. Éric Woerth - Une fois encore, des centaines de milliers d’usagers seront pris en otages par une minorité de salariés dont les revendications sont disparates et constituent sans doute un alibi pour bloquer encore une fois notre pays. Leurs revendications ? La défense du fret – que les syndicats ont d’ailleurs largement contribué à couler – du service public, de l’emploi et des salaires, et même de certains guichetiers d’Île-de-France qui avaient vendu frauduleusement des billets. Ce sont là autant de prétextes à la relance d’une grève rituelle et politique, d’ailleurs contre les intérêts du service public.

M. Maxime Gremetz - Arrêtez !

M. Éric Woerth – L’échec des tentatives de négociations entre la SNCF et les syndicats illustre une fois de plus la volonté de ces derniers d’entretenir un dialogue social d’un autre temps…

M. Maxime Gremetz - Le « Mur de Berlin », ose dire Mme Idrac.

M. Éric Woerth - …avec en toile de fond leur incapacité à s’entendre entre eux. Il serait temps d’instaurer plus de transparence dans la prise de décision d’une grève, notamment en soumettant sa reconduction au vote des salariés.

Comment concilier la légitimité des actions revendicatrices avec la nécessité d’un service minimum ? Comment une entreprise comme la SNCF peut-elle être aussi performante sur le plan technologique et aussi ringarde en matière de dialogue social ? (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer  Je regrette d’autant plus cette grève qu’elle aurait pu être évitée. Les six organisations syndicales ont lancé leur mot d’ordre voilà plusieurs semaines mais la plateforme de revendications n’a été mise au point qu’il y a quelques jours. J’ajoute que la présidente de la SNCF a fait des propositions la semaine dernière en matière de recrutement, de négociation salariale, de renforcement du fret. Il était donc possible de négocier ! La grève ne saurait être que la conséquence ultime d’un désaccord durable lorsque les négociations ont échoué et non un préalable à la discussion. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) C’est cela, l’innovation sociale ! C’est comme cela que l’on parviendra à concilier les droits des usagers et le droit de grève !

M. Maxime Gremetz – En citant le mur de Berlin ?

M. le Ministre – Le service garanti prévoit la circulation d’au moins 30 % de trains. J’ai bon espoir que ce sera le cas demain. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

situation des buralistes frontaliers

M. Céleste Lett – Élu d’une circonscription frontalière de la Moselle, je souhaite aborder la question de l'accompagnement des buralistes après la juste décision d'interdire de fumer dans tous les établissements publics. Cette profession a fait entendre hier ses inquiétudes, qui concernent notamment les buralistes frontaliers, déjà malmenés par la hausse du prix du tabac. M. le Premier ministre a chargé M. Mallié d'une mission pour faire un bilan du contrat d'avenir signé en 2003 et aboutir à des propositions concrètes.

Comment, Monsieur le ministre délégué au budget, le Gouvernement compte-t-il apaiser les inquiétudes d'une profession d'autant plus respectable qu'elle collecte aussi des impôts pour le compte de l'État ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État L’interdiction de fumer dans les lieux publics s’inscrit dans le contexte de la lutte contre le cancer, qui est une priorité du Gouvernement. Notre objectif est cependant d’apporter une réponse concrète aux buralistes, par le biais de mesures d’accompagnement auxquelles nous travaillons dans le cadre du contrat d’avenir. L’évaluation des résultats du premier contrat d’avenir en atteste, et les représentants de la profession, en particulier le président de la confédération, le reconnaissent : nous avons tenu nos engagements, notamment budgétaires.

Il s’agit maintenant de préparer le prochain contrat d’avenir, qui entrera en vigueur au début de l’année prochaine. Je m’appuie pour cela sur le travail accompli par M. Mallié, qui remettra son rapport dans quelques jours. Il n’y aura pas de tabou : tous les sujets seront abordés. Nous pourrons ainsi tirer les enseignements de ce qui a été fait – mesures d’accompagnement, effort particulier en faveur des bureaux de tabac situés en zone frontalière, particulièrement exposés à la concurrence. Je pense aussi à l’évolution des missions dans les prochaines années, avec le partenariat de service public que nous avons expérimenté avec succès pour le paiement automatisé des amendes. La diversification ira bien au-delà : les discussions ont commencé, et nous attendons là encore les conclusions du rapport Mallié. Nous évoquerons enfin la rémunération de la vente du tabac, dans un esprit de concertation.

Nous agissons méthodiquement : sans perdre de vue l’objectif de santé publique, nous avons à cœur de veiller à ce que cette profession puisse construire son avenir en tenant compte des évolutions et des attentes de la société française, aussi bien en zone urbaine qu’en zone rurale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

exercice des missions régaliennes de l’État

M. Bernard Derosier - Une fois de plus, Monsieur le Premier ministre, des dysfonctionnements sont apparus dans l’exercice des missions régaliennes de l'État, dont vous avez la responsabilité. Vendredi dernier, nous apprenions par la presse nationale et régionale l'arrestation dans le sud de la France d'un trafiquant de drogue. Le magistrat instructeur saisi de l'affaire ordonne une perquisition au domicile de ce trafiquant, situé dans le département du Nord, et la gendarmerie de Grenoble est chargée de cette perquisition. Les gendarmes apprennent alors qu'ils ne pourront pas effectuer leur mission, sous prétexte que le domicile en question se trouve en zone sensible. Des informations contradictoires circulent. L'émotion est grande. Y a-t-il des zones de non-droit sur le territoire de la République ? (Interruptions sur les bancs du groupe UMP ; quelques applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) L'autorité administrative, c'est-à-dire le préfet, est-elle intervenue pour empêcher la justice de mener sa mission à bien ? Ce serait paradoxal, au moment où le ministre de l'intérieur accuse les magistrats de démissionner face à la délinquance ! Est-ce la hiérarchie de la gendarmerie qui a interdit la perquisition ? Un communiqué du ministre de l'intérieur nous apprend que ni le préfet, ni le commandant de gendarmerie n'étaient informés du projet. Quelle est donc la réalité des faits ? La représentation nationale est impatiente de vous entendre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire - Si les propos que vous tenez n’étaient pas si graves, je me contenterais de dire que vous ne manquez pas de culot, quand on sait la situation que vous nous avez laissée (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste) et quand on se souvient des cris d’orfraie que vous a inspirés l’action déterminée des forces de l’ordre pour que plus un seul centimètre carré de la République ne demeure une zone de non-droit. Vous n’avez rien fait, vous n’avez rien voté, et vous vous permettez de donner des leçons ! Vraiment, vous auriez mieux fait de vous taire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste)

Je veux d’ailleurs prendre la défense de l’action des gendarmes, que vous insultez gravement par votre question. Personne ne leur a donné l’ordre de ne pas intervenir à Roubaix (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Mieux : les gendarmes de la section de recherches de Grenoble, qui ont procédé à deux perquisitions et ont renoncé à la troisième, agissaient en qualité d’officiers de police judiciaire. Ils étaient donc sous l’autorité d’un magistrat, et je m’étonne que vous demandiez au Premier ministre et au ministre de l’intérieur de rendre des comptes sur leur action ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Et vous me rappeliez au respect de l’indépendance de la justice ! C’est l’arroseur arrosé !

Ne vous inquiétez donc pas. Notre politique reste la même : nous ferons le travail que vous n’avez pas fait (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste), et jusqu’à la dernière minute. Cette perquisition aura lieu quand la justice le décidera ; et comme toujours, je fournirai les moyens que ces messieurs me demanderont. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

plan hiver

M. Patrick Beaudouin – La distribution de tentes aux sans-abri par une association caritative a inscrit de façon spectaculaire la question de l'urgence à l'agenda médiatique. Cet épisode ne doit pas masquer, sous la rhétorique de la nouveauté, l'émergence d'une véritable politique publique, articulée autour du dispositif d'accueil, d'hébergement et d'insertion. Celui-ci a fait l'objet, en mars 2005, d’une réflexion globale, qui a donné naissance à un référentiel national, bible commune des travailleurs et des bénévoles de l'urgence sociale. Il s'avère particulièrement utile dans ce secteur où l'État doit coordonner les nombreuses associations qu'il subventionne, et qui mènent un travail remarquable au quotidien en faveur des plus vulnérables et des sans-abri. J'ai salué l'efficacité et la cohérence de cette politique dans mon rapport budgétaire sur la mission solidarité et intégration. Pour assurer le devoir de solidarité nationale, le Gouvernement a mis en œuvre une politique volontariste qui repose sur quatre piliers : plan de cohésion sociale, plan triennal 2007-2009, plan hiver et rapport de Fleurieu. Ces quatre piliers permettent de lier l'urgence et sa finalité, l'insertion. Aujourd'hui, l'urgence revêt – et c'est un paradoxe – un caractère permanent. Elle ne se suffit pas à elle-même et doit s'inscrire dans une démarche de réinsertion personnalisée.

Vous venez d'annoncer le lancement du plan hiver 2006-2007, avec un nombre de places d'hébergement pour les sans-abri revu à la hausse et une pérennisation au-delà de la période hivernale. Pouvez-vous nous exposer les nouveautés de ce plan, la politique de réinsertion mise en œuvre, et affirmer la volonté partagée des différents acteurs de la rendre plus pertinente et plus cohérente ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité - Je vous remercie, Monsieur le député, du travail que vous avez effectué dans le cadre du rapport budgétaire de la mission solidarité et intégration. Nous avons lancé le plan Hiver 2006-2007 avec l’idée que l’accueil d’urgence constituait la première étape de la réinsertion sociale, et qu’il fallait mettre à profit ce premier contact avec nos concitoyens les plus en difficulté pour entamer leur insertion ou leur réinsertion. Nous tiendrons l’objectif fixé de cent mille places d’urgence – ce qui représente une dépense de plus d’un milliard d’euros. Six mille places seront disponibles dès le 1er novembre, et huit mille places supplémentaires pourront être mobilisées en cas de grand froid.

Au-delà de l’accueil d’urgence, nous expérimentons depuis quelques semaines l’hébergement de stabilisation qui consiste à accompagner 24 heures sur 24 et sur une période plus longue, des personnes en situation de profonde exclusion. La principale difficulté de l’accueil d’urgence réside dans l’extrême hétérogénéité des publics accueillis. La réponse ne peut consister qu’en une palette diversifiée de solutions aidant chacun à redémarrer. C’est en ce sens que s’est engagé le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

conférence de nairobi sur le réchauffement climatique

M. Gilbert Meyer – Sous l’égide de l’ONU, s’est ouverte hier à Nairobi la douzième Conférence internationale sur le climat, à laquelle participent quelque deux cents pays. Le rapport remis en début de semaine dernière par l’économiste Nicolas Stern met en lumière les incidences socio-économiques catastrophiques du réchauffement climatique. Le rapport de Christian de Boissieu, qui reprend les 28 propositions du groupe de travail « facteur 4 », mis en place par le Gouvernement, va dans le même sens. La Conférence de Nairobi suscite l’espoir que de nouveaux engagements seront pris pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. En même temps que cette Conférence se déroulent des négociations au titre de la Convention des parties au traité de Rio, signée par 189 des 192 membres des Nations unies, ainsi que la deuxième réunion des parties au protocole de Kyoto ratifié, lui, par 156 pays.

Madame la ministre de l’écologie et du développement durable, quelles propositions défendra la délégation française à Nairobi et qu’attend concrètement notre pays de cette conférence ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Nelly Olin, ministre de l’écologie et du développement durable - La Conférence de Nairobi, qui s’est ouverte hier, fait suite à celle de Montréal de l’an passé, laquelle avait permis des avancées significatives, notamment pour l’après-Kyoto. À la dernière minute, sous la pression de certains pays, dont la France, les États-Unis avaient accepté de rester à la table des négociations et entrouvert la porte pour l’après-2012. Au cours des discussions qui se poursuivent, nous avons bien l’intention d’amener les États-Unis à modifier leur comportement et d’infléchir la position du Canada qui s’apprêterait à quitter le protocole de Kyoto.

Je me rendrai moi-même la semaine prochaine à Nairobi, où une délégation française est déjà présente. Notre pays est très engagé, sur le plan national et sur le plan international, dans la lutte contre le réchauffement climatique, et les voix conjointes du Président de la République et du Premier ministre ne manquent pas de porter. Nous avons obtenu de réelles avancées à Montréal, notamment financières, car force est de constater que jusqu’alors les financements n’avaient pas été au rendez-vous. La France a d’ailleurs largement contribué à alimenter le nouveau fonds dédié. Nous allons maintenant inciter les pays en développement, comme la Chine et l’Inde, à poursuivre leur croissance mais en veillant à ce qu’elle soit la plus sobre possible en carbone, et inviter les autres à adopter des modèles de croissance plus soutenables. Notre pays s’est, pour sa part, déjà engagé à diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 et le Premier ministre a récemment présenté un pacte national pour le développement durable et l’environnement. Avec toutes ces mesures, nous avons bel et bien engagé la lutte contre le réchauffement climatique, à laquelle nous essaierons à Nairobi de rallier le plus grand nombre de pays. Lorsque la France a, la première, soutenu l’idée de créer une organisation des Nations Unies de l’environnement, elle était seule. L’Allemagne l’a peu après rejointe et maintenant cent pays, dont la Tunisie tout récemment, ont repris cette idée. Nous pensons, grâce à cette organisation, pouvoir faire entendre notre voix encore plus fort. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

La séance, suspendue à 15 heures 55, est reprise à 16 heures 15.

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énergie -cmp- (suite)

L’ordre du jour appelle les explications de vote et le vote par scrutin public sur le texte de la commission mixte paritaire pour les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au secteur de l’énergie.

M. François Brottes - Monsieur le ministre, si l’heure n’est pas encore au bilan de l’application de votre texte, le moment est venu d’en dénoncer les faux-semblants, avant et après son passage au Sénat.

Tout a commencé par un mensonge (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), ici même, le 14 juin 2005, quand Nicolas Sarkozy affirmait : « C’est un engagement du Gouvernement : EDF et GDF ne seront pas privatisés. Le Président de la République l’a rappelé solennellement lors du Conseil des ministres. » Quelques mois plus tard, après une hausse de plus de 44 % de ses bénéfices sur le dos des consommateurs, GDF est privatisé. Il fallait présenter la mariée avec ses plus beaux atours. La privatisation, c’est augmenter, encore et toujours, les dividendes des actionnaires !

Votre texte de loi est un démantèlement idéologique, le plaisir de casser les grandes entreprises publiques, pour donner des gages à ceux qui aiment vous voir supprimer des milliers de postes de fonctionnaires, mais viennent ensuite se plaindre du manque d’enseignants, de gendarmes, d’infirmières. C’est une privatisation sans concertation : le juge des référés vient d’ordonner la poursuite de la procédure d’information des représentants du personnel de GDF, à laquelle vous avez tenté de vous soustraire. C’est une privatisation sans protection contre des augmentations de tarif ou une OPA de Gazprom. 

C’est, en outre, une fusion annoncée sans condition : plus on avance dans le temps, plus vos arguments sur l’attractivité d’une fusion tombent les uns après les autres, le périmètre du futur groupe s’amenuisant jour après jour. « Nous avons fait davantage de concessions que nous l’imaginions », avoue le président de GDF. Et ce n’est pas terminé ! Ni la Commission européenne, ni l’Autorité des marchés financiers, ni les actionnaires de Suez n’ont encore dit leur dernier mot. Monsieur le ministre, c’est un chèque en blanc que vous demandez au Parlement de signer !

Les tarifs réglementés rejoindront très vite les prix du marché. Les usagers n’échapperont donc pas à des augmentations – elles figurent d’ailleurs noir sur blanc dans le contrat entre l’État et GDF –, conséquence mécanique de la mise en œuvre provisoire de votre tarif de retour, que vous appelez vous-même « tarif transitoire ». Ce sont les consommateurs qui financeront le rabais accordé provisoirement aux entreprises, puisque EDF négociera une augmentation du tarif réglementé, et la CSPE, qui doit en principe financer le service public et les énergies renouvelables, sera elle aussi mise à contribution pour consentir une « remise » aux industriels.

Votre loi confirme la démission de l’État au profit du régulateur, puisque les programmes d’investissement des transporteurs de gaz naturel seront soumis à l’approbation de la CRE. Vous imaginez les conséquences sur la desserte du gaz ! La logique purement financière de votre démarche portera le coup de grâce aux missions de service public et d’aménagement du territoire.

La panne de samedi confirme la nécessité d’organiser un grand pôle public autour d’EDF et de GDF, et d’adopter une approche similaire au niveau européen. En frôlant la catastrophe, nous avons mesuré les limites de la pénurie orchestrée. Or, l’intérêt du marché n’est-il pas, justement, d’organiser la pénurie, de prendre les usagers en otage pour faire grimper les prix ?

La privatisation de GDF est anticonstitutionnelle. En effet, Gaz de France est une entreprise ayant la qualité de service public national ou de monopole de fait sur son périmètre d’action, et la Constitution prévoit que de telles entreprises doivent appartenir au secteur public. Comme monopole de fait, elle continuera à jouer un rôle de péréquation tarifaire et assumera seule la fourniture de gaz naturel au tarif réglementé à tous les clients domestiques et à ceux des clients non domestiques qui le souhaitent. Votre loi confie donc à une entreprise privée le monopole de la distribution publique de gaz. En imposant aux collectivités locales de troquer un concessionnaire public pour un monopole privé, vous portez atteinte aux principes constitutionnels de la libre administration des collectivités locales et de la liberté contractuelle. Enfin, votre loi n’offre aucune garantie en matière de continuité du service public.

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera contre la privatisation de GDF. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Jean Dionis du Séjour - Nous arrivons au terme d’un très long débat sur lequel chacun aura pu s’exprimer. L’UDF a apporté son soutien à la première partie du texte concernant l’ouverture à la concurrence. Mais comme nous le savons bien dans le Sud-Ouest, même avec de grandes équipes, il ne peut pas y avoir de grand match sans arbitre respecté ; la concurrence ne peut bien fonctionner sans un régulateur fort. Or, la France n’aime pas les régulateurs. Sur la CRE, tous les jacobins, de droite comme de gauche, s’en sont donné à cœur joie, rajoutant qui des parlementaires, qui des consommateurs, qui des problèmes de médiation… Ce fut un vrai festival anti-européen ! Le Sénat, bastion du girondisme, a certes remis les choses à peu près en place, et nous avons évité le pire : plus de parlementaires – nous pourrons faire notre travail avant de faire celui de la CRE – ni de médiation sans rapport avec la régulation. Mais le résultat est une véritable usine à gaz. Tandis que la CRE surveille les marchés, un comité est chargé du règlement des différends. Et nous ne pouvons que redouter des litiges entre ces deux composantes.

Nous avons également des consommateurs, et là, le projet est franchement un peu pervers. Peut-être à juste titre, la CRE est soupçonnée d’être anti-tarif ; mais l’État, plutôt que de lui dire ouvertement de s’en tenir à ses prérogatives – les tarifs n’y figurant pas, lui colle deux consommateurs dans les pattes ! L’UDF a le plus grand respect pour les mouvements de consommateurs, mais il y a là un risque de confusion que nous devons dénoncer.

Le deuxième sujet important concerne le tarif de retour. Le débat est essentiel, puisqu’il s’agit de la rente nucléaire et de son appropriation. Bien entendu, nous étions tous d’accord pour considérer qu’il fallait qu’EDF investisse fortement dans le renouvellement de ses réseaux de transport et qu’il fallait trouver une solution pour les entreprises qui ont subi jusqu’à 70% de hausse de tarif. Il reste un sentiment de malaise et de déception lorsqu’on entend des personnalités aussi éminentes que le président Méhaignerie dire : « je ne crois plus aux chiffres, ni à ceux de Bercy ni à ceux d’EDF ». En effet, nous n’avons jamais disposé des données permettant d’arriver à un bon compromis. Quel est le prix de revient du kilowattheure nucléaire : 25, 30, 40 euros ? Au terme de deux mois de débats, nous ne le savons toujours pas et la confusion qui a été entretenue ne nous a pas permis de légiférer en toute clarté.

Le troisième sujet concerne la privatisation de Gaz de France. Disons-le tout net, nous considérons que privatiser l’entreprise est une faute contre l’intérêt national. Une faute, car ce n’est pas à une crise que le secteur énergétique est confronté mais à une véritable révolution ; une faute car la part du gaz dans l’énergie consommée en Europe passera, dans les vingt prochaines années, de 20 à 40%... (M. Yves Cochet s’exclame) Et même s’il faut éviter les amalgames démagogiques, comment ne pas voir la panne de la fin de la semaine dernière comme un signal d’alerte sur la fragilité de notre organisation ? Une faute, enfin, car il est de la responsabilité de l’État de tenir, via notre politique de l’énergie, nos engagements de long terme en matière d’environnement et, notamment, de lutte contre le réchauffement climatique. Dans ce combat vital, le gaz a vocation à jouer un rôle majeur. Nous considérons que la privatisation de Gaz de France privera l’État d’un levier d’action essentiel, au moment où le gaz devient de plus en plus stratégique du fait de l’épuisement des énergies fossiles, de la croissance de la demande et de la montée des préoccupations environnementales.

Le groupe UDF ne retrouve pas, dans la privatisation de Gaz de France, l’intérêt national. En conséquence, il votera contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Daniel Paul – Les textes sur l'énergie passent et, hélas, se ressemblent. Ceux qui ont été discutés ces deux dernières années n'ont fait que réduire toujours plus la place de la puissance publique dans la conduite et le contrôle de la politique énergétique, pour laisser la place aux intérêts financiers privés et au marché. Et ce texte marque une nouvelle étape, gravissime, en livrant à la finance un pan supplémentaire de notre économie nationale, en l'occurrence des activités hautement stratégiques : l'achat, le transport, le stockage et la distribution de gaz . Il tend en outre à généraliser la concurrence pour la fourniture d'électricité et de gaz, la filialisation des réseaux de distribution, la privatisation rampante de la distribution de gaz, ainsi que celle, ouverte, du réseau de transport.

L'énergie concentre pourtant des enjeux économiques, environnementaux et sociaux absolument cruciaux. Et cette décision politique intervient au moment où le capitalisme industriel laisse la place à un capitalisme financier, ce qui consiste à abandonner aux agents boursiers des intérêts industriels, économiques et sociaux gigantesques. Les «réformes» que vous introduisez n'en sont que plus graves, car, non seulement vous privatisez un bien public, mais le capitalisme financier auquel vous le livrez rend sa gestion encore plus incertaine.

Comment admettre que, pour ce qui a trait à la négociation des contrats à long terme ainsi qu'à l'approvisionnement du pays et à la fourniture de nos concitoyens en énergie, aux choix d'investissements dans les infrastructures gazières, dans les oléoducs et les terminaux méthaniers, ainsi qu'aux orientations stratégiques de la recherche sur l'énergie, le poids des actionnaires privés sera désormais plus lourd que celui des représentants de l'État et des salariés de l'entreprise ? Ainsi, la première considération qui guidera désormais les décisions industrielles delà politique gazière de la France sera exclusivement d'ordre financier et devra satisfaire avant tout des intérêts privés ! Et n’allez pas nous faire croire au patriotisme économique des actionnaires ! La débâcle de France Télécom et l'affaire EADS sont autant de preuves d’incompatibilité entre la satisfaction de l'intérêt général et la priorité donnée à la rentabilité financière!

De façon significative, les avantages supposés de ce projet – qualifié abusivement de projet industriel – ont fait long feu : les contreparties attendues par la Commission européenne constituent, pour Gaz de France, des attaques directes contre le caractère intégré de l'entreprise, lequel était pourtant l’un des points forts de l'entreprise gazière puisqu’il permettait une péréquation des investissements entre ses différentes activités – inégalement rentables. Et ce n'est pas tout. Les contrats de long terme sont aussi directement attaqués, et le nouveau groupe créé devrait se voir contraint d’en céder une partie, ainsi que de renoncer à tout développement portuaire sur le territoire national. Quant au périmètre du nouveau groupe, il est singulièrement rabougri par rapport au géant qui était promis, du fait des coups de boutoir répétés de la Commission européenne.

Si votre majorité est réellement soucieuse du projet industriel, pourquoi casser les synergies entre EDF et Gaz de France, leur culture d'entreprise et leurs services communs ? Quel sens cela a-t-il d'avoir, en 2004, scindé l'entreprise publique d'électricité et de gaz pour, deux ans plus tard, faire le choix d’allier Gaz de France avec un autre électricien ? Je rappelle que la possibilité de fusion n'a été sérieusement étudiée, ni par la commission Roulet, ni par notre Assemblée, et que, pour le projet de fusion qui nous occupe aujourd'hui, votre majorité n'a pas fait montre d'autant de prudence vis-à-vis de l'avis de la Commission européenne que pour ce qui concerne le rapprochement des entreprises... Il est vrai qu'il s'agit de casser un opérateur public au profit d'un groupe privé !

Alors, certes, tout le monde ne sera pas perdant dans cette opération ! Les 5 ou 6 euros supplémentaires rognés par les actionnaires lors de la discussion des modalités financières de la fusion devraient permettre à ceux-ci d'empocher au final 5 à 6 milliards… Autant d'argent distrait des ressources du pays, pour ne pas dire volé aux usagers ! Allez-vous vous opposer à cette nouvelle spoliation ? Prenez-vous l’engagement de revenir devant le Parlement si les prétentions des actionnaires sont confirmées ?

Sans doute la question des coopérations entre entreprises énergétiques est-elle pertinente. La raréfaction des énergies fossiles, les incertitudes du secteur, le contexte géopolitique de certains pays producteurs, la déréglementation des différentes activités de production et de fourniture sont effectivement préoccupants. Mais votre réponse, au lieu de tendre à résoudre ces problèmes, ne fait qu'alimenter la machine de guerre dans le domaine énergétique. Or, cette guerre énergétique, vous avez largement contribué à l'organiser, en livrant à la concurrence et aux capitaux privés des entreprises publiques qui avaient su prouver leur efficacité. Vous avez préféré suivre aveuglément le dogme libéral, sans vous soucier de la capacité de ce marché à assurer une répartition équitable des ressources, un prix modéré pour les consommateurs, des relations stables avec les pays producteurs, une continuité d'approvisionnement et des installations gazières et électriques sécurisées.

Dans quelques minutes, vous prendrez la décision, lourde de conséquences, de privatiser Gaz de France, sans hésiter à renier la parole de l’État, donnée, en son temps, par un ministre de la République. Mais l’histoire ne s’arrêtera pas au vote de votre majorité de passage ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP ; applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste) Nous l'avons dit, nous œuvrons, nous, à une organisation bien différente du secteur énergétique, au service des citoyens et du service public, avec un pôle cent pour cent public regroupant EDF et Gaz de France, dans la perspective d’une coopération énergétique à l’échelle européenne.

C'est donc sans aucune hésitation que nous voterons contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. Serge Poignant – Nous allons nous prononcer définitivement sur un texte important, qui a fait l’objet hier d’un accord majoritaire en CMP avec nos collègues du Sénat. Ce débat fera référence dans notre législature. Référence de ce que, nous députés, pouvons faire de bien. Ainsi, tout le mois de juillet a été mis à profit pour écouter et prendre le temps de se faire une opinion argumentée. Merci encore à vous, Messieurs les ministres, d'avoir bien voulu nous le donner, à vous Monsieur le président de la commission des affaires économiques d'avoir bien voulu l'organiser très judicieusement, et à vous, Monsieur le rapporteur Jean-Claude Lenoir, d'avoir longuement et pertinemment travaillé, y compris sur d'éventuelles solutions alternatives. Merci à vous, également, Monsieur le président de la commission des finances et au rapporteur pour avis, Hervé Novelli, pour leurs propositions intéressantes.

Référence, aussi, parce que nous avons très largement débattu depuis le 7 septembre, avec un premier vote le 3 octobre dernier. Référence, aussi, hélas, pour ce que nous pouvons faire de nettement moins bien – et c'est un euphémisme : je veux parler, bien sûr, des dizaines de milliers d'amendements déposés par nos collègues de l'opposition. Heureusement, ils se sont rendus compte de leur erreur en cours de débat. Puisse cet exemple servir de leçon pour le futur !

Le texte qui revient de la CMP confirme et complète celui que nous avons adopté le 3 octobre. Face à l’ouverture totale des marchés européens à compter du 1er juillet 2007 et à l'augmentation des prix, il nous fallait légiférer, et les nouveaux consommateurs professionnels comme les nouveaux consommateurs domestiques, s'ils le demandent, pourront rester au tarif réglementé. Le tarif d'électricité transitoire d'ajustement, voté le 3 octobre, sera amélioré en faveur des PME-PMI tout en maintenant un équilibre avec les capacités d'investissement de l'opérateur. Merci, Messieurs les ministres d'avoir bien voulu considérer que nous votons sur un plafond à ne pas dépasser et que vous ajusterez ce tarif au mieux de l'intérêt général – et notamment des PME.

Quant à l'article 10, dont l’opposition fait un casus belli, eh bien, oui, nous pensons avec le Sénat et avec le Gouvernement qu'il était nécessaire de donner à Gaz de France les moyens de nouer des alliances et de ne pas rester dans l’immobilisme, dans le contexte de concentration sans précédent que nous connaissons aujourd'hui.

Vous nous avez parlé ce matin des risques de pénuries et de rupture d'approvisionnement, et c'est bien dans ce contexte que nous devons nous placer pour légiférer. Vous nous avez reproché de préférer les profits au service public et de privilégier la rémunération des actionnaires.

En réalité, nous affirmons notre volonté de maintenir un service public fort,…

M. Henri Emmanuelli - C’est faux !

M. Serge Poignant - …spécialité bien française, comme l’a dit ce matin François Loos. Mais il ne doit pas s’exercer exclusivement au sein d'entreprises strictement publiques, car il nous faut considérer notre environnement et l'économie de marché, qui est une réalité, que vous le vouliez ou non.

On nous parle de dogmatisme, ou de reniement de la parole de Nicolas Sarkozy. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste) Faut-il, une dernière fois, vous rappeler les déclarations de Laurent Fabius, en 2001, ou celles de Dominique Strauss-Kahn, en 2002, tous deux candidats aux plus hautes responsabilités. Je les cite : « une entreprise investie de missions de service public, peut, sans tabou, nouer des partenariats industriels…

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire - Fabius !

M. Serge Poignant - …qui se traduisent par une alliance capitalistique. C'est dans ce cadre, avec pour objectif un projet industriel et social ambitieux que nous serons ouverts pour faire évoluer, le moment venu, le statut de Gaz de France » ou encore : « le changement de statut d'EDF et l'ouverture de son capital sont compatibles avec le maintien du service public. La part de l'Etat devra être suffisante pour assurer un ancrage incontestable, sans pour autant graver dans le marbre le seuil de 50 % ». Où sont, chers collègues de l’opposition, le dogmatisme et l’idéologie ? Ayez au moins l’honnêteté intellectuelle de reconnaître à M. Sarkozy – comme à MM. Fabius et Strauss-Kahn – le droit d’adapter sa position à l’évolution du contexte.

Monsieur le ministre de l’économie et des finances, ce matin, vous vous êtes engagé une nouvelle fois à revenir devant notre commission des affaires économiques pour nous tenir informés de l'état d’avancement du projet de fusion entre Gaz de France et Suez, que je considère personnellement comme un bon projet.

Pour l'heure, dans sa grande majorité, le groupe UMP votera le texte qui revient de la CMP. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

À la majorité de 315 voix contre 191 sur 512 votants et 506 suffrages exprimés, le projet de loi, compte tenu du texte de la CMP, est adopté.
La séance, suspendue à 16 heures 45, est reprise à 17 heures sous la présidence de M. Warsmann.
PRÉSIDENCE de M. Jean-Luc WARSMANN
vice-président

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Suspension des travaux de l’assemblÉe

M. le Président – La Conférence des présidents propose à l’Assemblée, conformément à l’article 28, alinéa 2, du Règlement, de suspendre ses travaux la dernière semaine de décembre et la première semaine de janvier.

Il en est ainsi décidé.

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LOI DE FINANCES POUR 2007 – seconde partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007.

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sécurité, sécurité civile

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial de la commission des finances pour la sécurité – La mission « sécurité » se compose du programme « police nationale » et du programme « gendarmerie nationale », organisés pour mener à bien une mission singulière de l’État : assurer la sécurité. C’est une mission difficile et risquée, et ce sont des métiers exposés, qui demandent de ceux qui les exercent autorité, endurance et sang-froid. C’est aussi une mission exigeante, car elle emporte une obligation de résultat. Je m’attacherai à répondre à trois questions : nos policiers et nos gendarmes ont-ils les moyens de travailler ? Obtiennent-ils les résultats souhaités ? Concourent-ils à la réforme de l’État ?

Les crédits de paiement du programme « police nationale » s’élèveront à 8,199 milliards, en augmentation de 2,3 %, ceux du programme « gendarmerie nationale » à 7,844 milliards, en hausse de 2,9 %. L’évolution des crédits reflète la mise en œuvre de la dernière tranche de la LOPSI, ce qui me donne l’occasion d’en dresser un premier bilan, globalement satisfaisant.

Pour les personnels, la loi a été respectée. Mille emplois seront créés dans la police en 2007, ce qui portera à 6 200 le total des créations de postes depuis 2002, pour un objectif fixé à 6 500 postes. Le taux de réalisation est donc de 95,4 %. Dans la gendarmerie, 950 emplois seront créés en 2007 ; 950 autres resteront à créer pour parvenir aux 7 000 emplois prévus par la LOPSI. L’évolution a aussi été qualitative, et deux opérations d’une portée considérable sont en cours : « Corps et carrière » dans la police, qui tend à « amaigrir » l’encadrement supérieur et à renforcer l’échelon d’exécution et de contact. Le nombre d’OPJ va continuer de croître, mais ce sont déjà pour un tiers des gradés et des gardiens. Dans la gendarmerie, l’application du programme d’adaptation aux grades et responsabilités exercées – PAGRE – permettra de doubler le nombre d’officiers. En sept ans, plus de 7 000 postes d’officiers auront été créés et, dès 2007, 750 emplois de sous-officiers seront transformés en emplois d’officiers.

L’évolution intervenue permet aussi que les personnels soient mieux utilisés. Différentes réformes l’ont permis, et en premier lieu l’entrée en vigueur de la nouvelle carte police-gendarmerie, dont on entendait dire en 2002 qu’elle était utopique. Elle est pourtant achevée en métropole, et elle le sera outre-mer courant 2007. D’autre part, la « zonalisation » qui s’applique désormais à toutes les unités mobiles, est un gage d’efficacité mais aussi d’économie puisqu’elle dispense l’État du versement d’indemnités de déplacement. Elle améliore la qualité de vie des personnels, qui peuvent désormais exercer leur métier là où ils résident. La police a également lancé le programme EDFA, très important effort de rationalisation de ses effectifs ; en ne prenant plus en compte les effectifs théoriques mais les effectifs souhaités, on améliore sensiblement l’allocation des gradés et gardiens sortant des écoles.

La réussite de la LOPSI est tout aussi frappante pour ce qui est des matériels et des équipements. La tenue des policiers et des gendarmes a été complètement transformée, chacun dispose maintenant d’un gilet pare-balle alors que c’était une exception, et la distribution d’un nouveau pistolet, commun aux deux corps, s’achèvera en 2007. Alors qu’avant 2002, la progression du système de transmission sécurisé propre à la police se caractérisait par son extrême lenteur, l’ensemble du territoire sera couvert au deuxième semestre 2007. La mise au point de ce système, dit « Acropol », avec EADS, est un exemple original de partenariat public-privé.

J’en viens à l’immobilier, et je me ferai moins louangeur car, pour ce volet de la LOPSi, les objectifs n’ont pas été atteints. Pour la police, nous n’en sommes pas loin, puisqu’on s’approche des 100 000 mètres carrés annuels de locaux prévus. Pour la gendarmerie en revanche, presque un tiers du programme immobilier restera à réaliser fin 2007. Or, le sujet est sensible car, pour les gendarmes, la brigade n’est pas seulement un lieu de travail, c’est aussi leur résidence et celle de leur famille. Si, en 2007, 4 000 logements seront mis en chantier, après que quelque 2 500 l’auront été en 2006, force est de reconnaître qu’un retard certain a été pris au démarrage. C’est que la mesure n’avait pas été entièrement prise du mauvais état du parc immobilier de l’arme. Pour m’être rendu en différentes gendarmeries du territoire avec mes collègues rapporteurs, je puis témoigner d’avoir visité des locaux presque indignes. C’est un retard considérable qu’il nous fallait combler. La lenteur générale de la maîtrise d’ouvrage publique n’a rien arrangé, et les partenariats publics-privés prévus par l’article 3 de la LOPSI n’ont été lancés que tardivement. Enfin, des conservatismes divers se sont manifestés, au Conseil d’État comme parmi les architectes, qui ont également contribué à ces retards mais, désormais, les chantiers sont lancés.

Qu’en est-il des résultats obtenus au regard des moyens alloués ? Je tiens à souligner qu’ils peuvent maintenant être appréciés par référence à un outil statistique constant, « l’état 4001 », dont l’analyse permet les constats suivants. En 1996 et 1997, la délinquance a baissé de 1,9 % ; elle a augmenté de 15,4 % entre 1998 et 2002, et baissé de nouveau de 8,2 % entre 2002 et 2005. Cette courbe incontestable se poursuit en 2006.

M. Jean-Pierre Blazy – C’est faux.

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial – La réalité objective que retrace l’état 4001, ce sont 338 000 crimes et délits en moins. Quant à la délinquance sur la voie publique, elle a connu une chute encore plus spectaculaire, de 16 %. Il est vrai que les crimes et les délits contre les personnes ont augmenté, mais l’honnêteté commande de dire que sont comptabilisés dans cette rubrique les violences conjugales, naguère tues, maintenant déclarées.

Les résultats doivent aussi s’apprécier à l’aune d’autres indicateurs, dont le taux d’élucidation des affaires. Il est passé de 26 % pour l’ensemble des crimes et délits en 2002 à 33 % aujourd’hui grâce à l’action conjointe de la police et de la gendarmerie.

L’effort est très net en matière de sécurité routière puisque nous sommes passés en dessous de la barre des 5 000 tués par an. En équivalents temps plein, ce sont 11 000 policiers qui se consacrent en permanence à la lutte contre la délinquance routière et 12 600 gendarmes. Il faudra néanmoins progresser s’agissant de la sécurité des motocyclistes puisque le risque qu’ils encourent est vingt fois supérieur à celui des automobilistes.

Concernant la lutte contre l’immigration irrégulière, 1 100 agents supplémentaires ont été affectés à la PAF depuis 2002. Alors que les mesures d’éloignement touchaient en 2002 19 000 personnes, 23 000 personnes ont été concernées pour le seul premier semestre de cette année. Je salue donc les efforts de la PAF, de la gendarmerie et de la sécurité publique en la matière. J’ajoute que la gendarmerie et la PAF contribuent substantiellement à renforcer les centres de rétention administratifs, auxquels le budget de 2007 consacre 48 millions de crédits de paiement.

Cette évolution positive résulte d’une re-motivation des personnels qui se sentent désormais dirigés, soutenus, reconnus. Les policiers peuvent en outre se concentrer sur des tâches exclusivement policières, 2 000 emplois administratifs ayant été créés depuis 2002. Autre élément d’efficacité, cette fois concernant la gendarmerie : l’organisation en communautés de brigades de 18 à 20 gendarmes, qui permet une présence nocturne sur le terrain, au moment où les délinquants agissent.

M. Jean-Pierre Blazy - Ils agissent aussi pendant la journée !

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial – Le fichier national automatisé des empreintes génétiques contient 300 000 profils génétiques et 4 821 rapprochements ont été facilités permettant de confondre des coupables ou d’innocenter des prévenus. Plus de 1 500 policiers sont affectés à la police scientifique, dont le service est particulièrement satisfaisant. Enfin, le logiciel Ariane permettra aux policiers et aux gendarmes de mieux travailler ensemble.

Certes, d’autres gains de productivité peuvent être réalisés, je pense en particulier aux gardes statiques, ainsi qu’aux transfèrements et extractions pour la justice. Ce sujet tenait à cœur à notre regretté collègue Gérard Léonard, qui l’a a souvent évoqué à cette tribune. La justice doit d’ailleurs prendre sa part de ces efforts. J’ai visité voilà un an un superbe tribunal, à Roissy, sur la zone d’attente, qui a coûté cher…

M. Thierry Mariani, rapporteur pour avis de la commission des lois pour la sécurité civile C’est la gauche qui l’a construit !

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial – …mais qui est toujours inoccupé. Il est scandaleux que pour des raisons de principes des magistrats refusent d’y travailler alors que cela éviterait aux forces de l’ordre de nombreux déplacements. De même, il doit être possible d’aller plus loin s’agissant de l’installation de caméras de surveillance. À Strasbourg, 148 caméras couvrent l’essentiel de la ville. Ce réseau a été cofinancé par la ville et la communauté urbaine et il semble que les policiers y trouvent leur compte, au vu des résultats. La préfecture de Paris, quant à elle, est sous-dotée puisque l’on dénombre seulement 295 caméras. J’espère que nous éviterons sur cette question des considérations par trop théoriques.

Police et gendarmerie ont-elles contribué à la nécessaire réforme de l’État ? Les marchés communs entre les deux institutions ont été développés, notamment concernant l’achat des pistolets, ce qui était impensable il y a encore cinq ans. De même, je salue l’initiative de M. Sarkozy qui a permis de faire gagner du temps et de l’argent aux policiers grâce à la possibilité de rachat de jours de RTT. Il en va de même s’agissant de la réserve, système qui fonctionne parfaitement dans la gendarmerie et qui a été appliqué dans la police. La réforme de l’État, c’est aussi la création de nouvelles voies de promotion interne. La voie d’accès professionnelle se développera en 2007. Cela implique aussi de nouvelles formes de recrutement : le système des cadets, créé en 2004, permettra à de nombreux jeunes de tester leur vocation et, peut-être, de travailler demain dans la police. Je songe enfin aux classes préparatoires intégrées existant dans les grandes écoles de police et qui favorisent de réelles promotions. La prime au résultat est également un élément fondamental. Elle monte en puissance puisqu’elle s’élevait à 10 millions en 2005 dans la police, à 15 millions en 2006 et qu’elle sera de 20 millions en 2007. Nous devrions nous en inspirer pour d’autres administrations, tout en évitant le saupoudrage ou la banalisation. Enfin, les centres Défense deuxième chance permettent de mettre en valeur les compétences pédagogiques des personnels militaires. La gendarmerie y contribue grandement.

Pour toutes ces raisons, la commission des finances a suivi son rapporteur et conclu à la nécessité d’adopter le budget pour 2007. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Georges Ginesta, rapporteur spécial de la commission des finances pour la sécurité civile - Les crédits de la mission sécurité civile s’élèvent à 429,4 millions d’euros pour 2007. Ils représentent cependant moins de 8 % de l’effort national en faveur des services d’incendie et de secours. Avec les autres ministères qui concourent à la sécurité civile, on aboutit à un total de 902,4 millions, auxquels s’ajoutent les services opérationnels fournis par les services départementaux d’incendie et de secours – SDIS –, dont les dépenses s’élevaient à 4,7 milliards dans le budget 2006. La sécurité civile représente donc un budget global de 5,6 milliards, supérieur à celui de l’action extérieure de l’État – 2,3 milliards –, de la culture – 2,7 milliards – ou de l’agriculture – 3 milliards –, et proche de celui de la justice – 6,3 milliards.

Depuis l’achèvement de la départementalisation en 2001, les dépenses des SDIS ont augmenté en moyenne de 9,5 % par an. Elles ont encore progressé de 5,3 % entre 2005 et 2006. Les structures créées par la loi de modernisation de la sécurité civile du 13 août 2004 n'ont pas encore enrayé cette évolution : le niveau de la dépense est aujourd’hui à la limite du supportable pour les contribuables, sans que cela soit justifié par les services rendus. Or ces ressources font défaut dans d'autres secteurs.

L'article 10 de la LOLF prohibe les crédits évaluatifs. Trois lignes budgétaires de la sécurité civile étaient systématiquement sous-dotées en loi de finances initiale. La Direction de la défense et de la sécurité civile – DDSC – du ministère de l'intérieur a fait de gros efforts pour doter suffisamment les dépenses de carburant et de produits retardant en 2007. En revanche, les crédits des colonnes de renfort ont été dimensionnés a minima : un abondement devra donc intervenir.

Votre rapporteur spécial aurait souhaité qu'en application de la LOLF, l'échéancier des crédits de paiement relatifs aux flottes aériennes figure dans le projet annuel de performances.

Le transfert de l'École nationale des officiers de sapeurs-pompiers à Aix-en-Provence est prévu avant l'été 2007. Le contrat d'établissement entre l'État et l'école devrait être conclu rapidement – il s’agit d'une obligation de la LOLF. Il faut également homogénéiser le niveau de recrutement et de formation des sapeurs pompiers, afin d'éviter les comportements répréhensibles d'éléments radicaux dans certains départements lors de manifestations, où le commandement lui-même se voit contesté.

Le rapport du comité interministériel d'audit des programmes de mai 2006 a estimé que la DDSC n'avait pas retenu les procédures adéquates pour laisser aux responsables de budgets opérationnels de programme une autonomie de gestion suffisante. La DDSC oppose qu'elle ne dispose pas de services déconcentrés, mais délocalisés. Elle fait également valoir la spécificité de la sécurité civile, où la volatilité des dépenses justifie un système de gestion prudentielle.

L’élaboration de la LOLF avait vu un débat sur la question de savoir s'il fallait limiter la mission sécurité civile aux services du ministère de l'intérieur, ou l'étendre aux interventions des autres ministères chargés de la prévention. Votre rapporteur spécial et la commission des finances du Sénat soutiennent la démarche du ministre de l'intérieur visant à la création d'une mission interministérielle.

La DDSC assume la fonction de pilotage national des SDIS. Celle-ci est la conséquence de l'article premier de la loi de modernisation de la sécurité civile, qui dispose que « l'État est garant de la cohérence de la sécurité civile au plan national. Il en définit la doctrine et coordonne ses moyens. ». Dans le respect du principe de la libre administration des collectivités, la DDSC devrait néanmoins renforcer son action en la matière.

La question qui se pose est de savoir si le service public de la sécurité civile est piloté dans sa globalité. Jusqu'à la loi de modernisation de la sécurité civile, la situation était déséquilibrée : l'État prenait les décisions, les collectivités en supportant les conséquences financières.

MM. Bernard Derosier et Jean-Paul Bacquet – Cela n’a pas changé !

M. Georges Ginesta, rapporteur spécial – La loi a donc créé la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, qui a vocation, sous la présidence du sénateur Éric Doligé, à devenir une instance de concertation et de dialogue. Elle doit fournir aux conseils généraux des éléments pour contrer l'accroissement des dépenses des SDIS. Votre rapporteur spécial estime qu’il faut lui donner un droit de consultation obligatoire avec avis conforme.

Les causes de l’augmentation des coûts sont connues : ce sont désormais les conseils généraux qui votent le budget des SDIS, mais leur gestion manque encore de transparence.

M. Jean-Paul Bacquet - Très juste.

M. Georges Ginesta, rapporteur spécial - Les conseils généraux négocient actuellement des conventions avec les SDIS, qui devraient permettre une programmation des investissements et une maîtrise de l'endettement.

La mutualisation des moyens des SDIS est encore embryonnaire. La loi de modernisation de la sécurité civile a donné aux SDIS la possibilité de créer des établissements publics interdépartementaux, mais cette disposition n'est pas encore appliquée. Il faudrait utiliser le fonds d'aide à l'investissement des SDIS – FAI – comme levier. La mutualisation permettrait des économies de l’ordre de 20 % à 25 % : sur plus de 350 millions d'achats par an, les élus locaux se priveraient ainsi chaque année de l'équivalent d'un FAI – 70 millions d'euros.

La coordination entre les différents acteurs de secours – SAMU, sapeurs-pompiers, ambulanciers – devrait être renforcée, notamment grâce au développement de plateformes communes « 15-18 ».

M. Jean-Paul Bacquet - Très bien.

M. Georges Ginesta, rapporteur spécial - Les SDIS n'ont pas encore pris le tournant de la gestion publique par la performance. La DDSC a élaboré un outil unifié de recueil et de traitement de l'information statistique relative aux SDIS, Infosdis, qui doit devenir un ensemble d'indicateurs, de ratios et de référentiels permettant aux SDIS de se comparer entre eux.

Il serait utile d'informer les contribuables sur les dépenses des SDIS par une mention spécifique sur leur feuille d'impôts locaux (« Très bien ! » sur plusieurs bancs), afin de susciter une prise de conscience. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste)

On comptabilise 10 000 sapeurs-pompiers professionnels de plus entre 1997 et 2005. Le décret du 31 décembre 2001 sur la réduction du temps de travail n'explique pas la poursuite des recrutements : entre 2004 et 2005, l’effectif a encore augmenté de 958.

M. Jean-Paul Bacquet - Surtout pour des tâches administratives !

M. Georges Ginesta, rapporteur spécial - Il faut une pause dans les recrutements !

Depuis le décret de décembre 2001, les sapeurs pompiers professionnels assurent entre 90 et 100 jours de garde de 24 heures par an, ce qui signifie 270 jours chômés par an. 70 % de l'activité est concentré sur 50 % du temps. Or, dans de nombreux SDIS, on constate encore une présence en effectifs du même ordre à 3 heures du matin et à 16 heures. Une plus grande souplesse des régimes de garde est nécessaire. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs)

Le faible nombre annuel de gardes de 24 heures n'est pas sans dommage : il faut refonder la cohésion des équipes de secours, et pour cela travailler plus. Le décret de décembre 2001 a prévu une évaluation du régime des gardes avant le 1er juin 2007. Sans anticiper sur ces travaux, on devrait examiner la possibilité d'harmoniser les régimes de garde au niveau national, afin de ne plus autoriser de gardes supérieures à 12 heures.

En conclusion, votre rapporteur spécial vous propose d'adopter les crédits de la mission sécurité civile. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Bernard Derosier - Quel dommage !

M. Alain Gest - C’est un rapport courageux !

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour la gendarmerie nationaleL'examen des crédits de la gendarmerie est une excellente occasion d'évoquer le travail accompli par les militaires de l'arme. N’ayant pour cela que cinq minutes, soit deux fois moins que mes collègues pour la police et la sécurité civile, j’y mettrai deux fois plus d’ardeur.

L'action de la gendarmerie outre-mer, comme celle des unités intervenant dans des secteurs particuliers comme la montagne ou le milieu aquatique, sont autant d'illustrations de la nécessité de préserver le statut militaire des gendarmes. Toute démocratie se doit en effet d’avoir un système dual de forces de police.

J'ai constaté en Guyane que les gendarmes accomplissent leurs missions dans des conditions particulièrement difficiles : leur engagement mérite l'hommage et le soutien de la représentation nationale. Il existe dans ce département des enclaves de non-droit, aux mains d'étrangers en situation irrégulière, et le contexte militaire s'apparente à celui d'une OPEX. Malgré l’insuffisance des moyens, la gendarmerie s'attache à remplir efficacement ses missions.

Les instruments juridiques et les règles d'engagement doivent tenir compte de l'importance de l'immigration illégale et de la grande perméabilité des frontières. En matière de lutte contre l’orpaillage illégal, il faut renforcer la coordination des moyens de l’État. Une cellule associant le préfet, le procureur et le commandant supérieur des forces armées en Guyane définit la stratégie globale en la matière : la gendarmerie doit y être associée.

En Guyane comme en Guadeloupe, il faut encourager le recrutement local, qui reste insuffisant. Les gendarmes métropolitains affectés outre-mer bénéficiant d'une indemnité, une forme de réciprocité se justifierait pleinement.

Faute de temps, je n’évoquerai pas le manque de moyens d’aéromobilité, les modalités de relève et la durée de la présence des escadrons de gendarmerie mobile, l’insuffisance du soutien sanitaire, en particulier pour les opérations Anaconda, et des moyens de communication, l’inadaptation de certains moyens de locomotion, la participation des forces armées en Guyane – FAG – à des actions menées avec la gendarmerie ni le dimensionnement des moyens nécessaires à la surveillance du Centre spatial guyanais.

Dans les milieux particuliers que constituent la montagne et le milieu aquatique, la gendarmerie remplit à la fois des missions de secours et de police judiciaire. Le partage des missions de secours avec les CRS ou les pompiers n'a pas fait la preuve de son efficacité. Il ne tient pas compte de l'aspect judiciaire des interventions et entraîne des surcoûts qu'il est contestable de faire supporter par le contribuable. Une clarification sur l'ensemble du territoire serait donc utile. Puisque toutes les zones de montagne sont situées en zone de gendarmerie, les missions de secours, à l’instar des missions de police judiciaire, devraient y relever exclusivement de sa compétence.

Une visite auprès de la gendarmerie des transports aériens m’a permis de constater que ses missions sont de même nature que celles de l'ensemble des gendarmes et justifient pleinement son appartenance au programme « gendarmerie nationale ». J’y insiste après le débat ouvert l’an passé à ce sujet en commission des finances.

J’appelle maintenant l'attention de la représentation nationale sur deux points. Je m’interroge sur la légitimité du centre national de prospective de la gendarmerie. Je souhaiterais, concernant la gestion des achats, qu’on ouvre plus largement les possibilités d'allotissement, de façon que des PME-PMI puissent soumissionner pour un ou plusieurs lots.

Les crédits du programme « gendarmerie » s'élèvent à 7,884 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 7,484 milliards en crédits de paiement, en progression de 6,18 % pour les premières et de 2,92 % pour les seconds. Cette augmentation traduit l'importance accordée à la mission « sécurité », et à l'action de la gendarmerie en particulier.

Force est de constater, en cette dernière année d'exécution de la LOPSI, que ses objectifs n’auront pas été atteints à son terme. Fin 2007, seuls 6 050 emplois sur les 7 000 prévus auront été créés, soit un déficit de 950 postes. Les crédits d'investissement alloués en 2007 au titre de la LOPSI s'élèvent à 220 millions d'euros, avec des autorisations d'engagement en baisse de 17 % et des crédits de paiement en hausse de 10 % par rapport à 2006. Ces montants ne permettront pas de combler le retard accumulé.

M. Jean-Pierre Blazy - Voilà un rapporteur honnête !

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis – Seule la prorogation de la loi pour une année supplémentaire permettrait d’atteindre les objectifs fixés, tant en matière d'emplois que d’équipements.

Les crédits d'investissements permettront d’assurer un taux de disponibilité des hélicoptères de la gendarmerie supérieur à 80 %, de poursuivre leur renouvellement et de lancer la commande, que je réclame depuis deux ans, de 78 engins blindés CVAB-MOS destinés à remplacer les VBRG. Un abondement exceptionnel de 400 millions d'euros est destiné au financement de projets immobiliers. Des partenariats public-privé avec autorisation d'occupation temporaire du domaine public permettront de développer et de moderniser le parc domanial, avec notamment le lancement de cinq opérations majeures. Je m’interroge toutefois sur le bien-fondé des modalités juridiques de l’une d’elles. Une solution entièrement domaniale aurait été préférable pour la réalisation du siège de la DGGN à Issy-les-Moulineaux, sous réserve qu’ait été affecté à la gendarmerie nationale le produit de la vente de ses emprises délaissées après le regroupement des services de la DGGN. Depuis 2002, je dénonce la situation préoccupante du parc immobilier en général et du parc domanial en particulier, qui subit un décrochage par rapport au parc locatif. Malgré l'augmentation des charges de loyer qui en résulteront, le recours au dispositif du bail emphytéotique administratif permettra de mettre un terme à une situation intolérable.

Si j’avais disposé de plus de temps, j’aurais souhaité traiter d’autres enjeux majeurs pour la gendarmerie. Je ne ferai que les citer : le transfèrement des détenus, qui devraient logiquement relever de l’administration pénitentiaire ; les capacités d’intervention complémentaires au GIGN que sont les PIZG et les GMP ; l’action et les moyens des réserves, très opérationnelles, de la gendarmerie.

En conclusion, je tiens à rendre hommage au courage, au professionnalisme, au dévouement et à l’efficacité des gendarmes dans l’exercice de leurs périlleuses missions qu’ils mènent bien souvent au péril de leur vie. La commission de la défense a donné un avis favorable aux crédits du programme « gendarmerie nationale 2007 » et j’invite l'Assemblée à se prononcer dans le même sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP)

M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis de la commission des lois pour la sécurité – En cette dernière année d’exécution de la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure votée au tout début de la législature, le bilan que l’on peut en dresser est tout à fait satisfaisant. La précédente loi d’orientation de 1995, qui n’avait bénéficié que d’un début d’application en 1996 et 1997, avait donné de premiers résultats en matière de lutte contre la délinquance.

M. Alain Gest - Très bien !

M. Jean-Pierre Blazy - Contre-vérité !

M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis – Ce n’est pas avec la police de proximité qu’il a mise en place que le gouvernement socialiste qui a dirigé notre pays de 1997 à 2002 a respecté la loi de programmation de 1995.

M. Jean-Pierre Blazy - Nous en reparlerons.

M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis – La programmation de la LOPSI de 2002 a été respectée année après année. Les engagements pris pour la police nationale ont été respectés en totalité pour la police, et en quasi-totalité pour la gendarmerie.

La LOPSI, que la majorité, unie et solidaire, a voté d’une seule voix, a refondé les principes régissant l’organisation de la sécurité intérieure sur le territoire national. Parmi les premières décisions du quinquennat, il faut rappeler la création du Conseil de sécurité intérieure par décret du 15 mai 2002, organe placé sous la présidence du chef de l’État et appelé à mieux coordonner encore l’ensemble des forces de sécurité ; le placement sous commandement unique de la police et de la gendarmerie nationales ; la refonte, ambitieuse et réussie, des divers dispositifs concourant à la sécurité intérieure, notamment grâce à une meilleure coordination interministérielle.

Au niveau local, a été achevé le redéploiement des forces de police et de gendarmerie, lequel n’avait pas jusque-là été mis en œuvre, en dépit des recommandations de l’excellent rapport Carraz-Hyest. Ce redéploiement, qui a concerné 65 départements, a été une totale réussite. Nos dispositifs sont maintenant à la fois plus clairs et plus efficaces. Une nouvelle doctrine d’utilisation des forces mobiles, qui a fait ses preuves lors des troubles urbains de novembre dernier, a également vu le jour avec un commandement national pour ce qui reste de responsabilités nationales et une déconcentration au niveau des préfets pour ce qui peut et doit être déconcentré. Ainsi sept départements ont-ils la possibilité permanente de recourir immédiatement aux forces mobiles. A également été prise la décision nécessaire et courageuse de recentrer les forces de sécurité sur leur mission fondamentale qui, outre la prévention bien sûr, demeure de permettre l’arrestation et la traduction la plus rapide possible devant la justice des délinquants et des criminels. Un quart de plus des effectifs de la police et 20 % de plus de ceux de la gendarmerie disposent maintenant de la qualification d’officier de police judiciaire, ce qui a permis d’accroître l’activité judiciaire des forces et, partant, de faire diminuer de manière incontestable la délinquance et la criminalité. (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

La programmation financière ambitieuse de la LOPSI a été respectée. Le budget pour 2007 y concourra, intégralement pour la police et quasi-intégralement pour la gendarmerie. Alors que l’objectif fixé était de recruter 6 500 policiers supplémentaires, 6 200 l’auront été fin 2007. Pour la gendarmerie, il y aura eu un peu plus de 6 000 recrutements supplémentaires pour un objectif initial de 7 000. Nous qui avons voté la LOPSI puis, année après année, les crédits de la police et de la gendarmerie, pouvons être fiers du travail accompli avec le Gouvernement.

Des efforts considérables ont également été consentis en matière d’équipement. J’ai pu constater, lors de mes déplacements sur le terrain, que les véhicules sont désormais plus nombreux, mieux entretenus, donc plus disponibles. Un effort sans précédent a aussi été fait pour la sécurité des forces puisque nos policiers et nos gendarmes disposent maintenant tous individuellement d’un gilet pare-balles plus facile à porter. Le SNEG a également été une belle réussite.

Le rapprochement des fichiers se poursuit, comme celui entre le STIC et le JUDEX, qui seront d’ailleurs bientôt dépassés, avec la création d’un dispositif unique, Ariane.

La reconfiguration des carrières a été opérée dans le cadre du protocole de 2004 sur les carrières pour la police et du PAGRE pour la gendarmerie. Au terme du dispositif, plus d’un policier sur deux aura bénéficié d’une promotion personnelle au-delà des promotions ordinaires. Ce rattrapage s’est accompagné de dispositifs sociaux nouveaux : prêts à taux zéro, créations de places de crèche…, que vous vous êtes engagé, Monsieur le ministre, à continuer de privilégier à l’avenir.

Si ces résultats sont encourageants, notamment la baisse globale de la délinquance, à comparer à la hausse qui s’était produite sous la précédente législature, les succès de la sécurité routière, de la lutte contre le terrorisme, contre l’immigration clandestine, deux sujets restent préoccupants. La violence contre les personnes, tout d’abord, est en augmentation.

M. Jean-Pierre Blazy – En très forte augmentation !

M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avisIl faudra durcir notre politique et la rendre plus efficace. Par ailleurs, les mineurs sont plus délinquants qu’hier. Il faudra là aussi faire preuve de fermeté et mettre en place un dispositif de prévention plus adapté. Ce sera l’objet de la loi que nous examinerons bientôt.

Le budget de la police, soit 8,5 milliards en CP, augmente en 2007 de 2,3 %, ce qui est un effort considérable au regard de la progression moyenne de 0,8 % du budget de la nation. Le budget de la gendarmerie, où le retard était encore plus important, augmente, quant à lui, de 3 %, pour atteindre 7,5 milliards en CP.

Nous avons beaucoup avancé, mais il reste beaucoup à faire. C’est pourquoi la commission a proposé une année supplémentaire pour la mise en œuvre complète de la loi d’orientation de 2002.

Avec ce budget 2007, la sécurité de nos concitoyens est mieux garantie. Il sera nécessaire dans l’avenir de prolonger l’effort. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Thierry Mariani, rapporteur pour avis – Rapporteur pour avis à l’automne 2002, je saluais l’augmentation significative du budget de la sécurité pour 2003. Je me réjouis que l’effort ait été maintenu au cours des cinq dernières années. Les crédits de 2007 s’inscrivent dans cette perspective en insistant sur la modernisation des moyens.

En 2002, je relevais également les quatre chantiers majeurs de la sécurité civile : le fonds d’aide à l’investissement des SDIS, le personnel, les moyens techniques, l’adaptation aux nouvelles menaces. Je salue les efforts de tous ceux qui ont contribué à honorer les promesses ; la loi de modernisation de la sécurité civile, dont 80 % des décrets d’application ont déjà été publiés, en constitue le meilleur exemple.

Le fonds d’aide à l’investissement des SDIS, le FAI, d’abord bien accueilli, est aujourd’hui très critiqué : on conteste l’insuffisante consommation des crédits, la pertinence des investissements, la complexité des procédures. Le Gouvernement souhaite donc privilégier son affectation à la mutualisation des moyens interdépartementaux et au financement d’équipements stratégiques. Le Gouvernement a d’ores et déjà décidé de flécher une fraction des crédits du FAI en faveur du programme ANTARES, soit 13 millions d’euros en CP et 118 millions en autorisations d’engagement.

La demande de reconnaissance de la dangerosité de l’activité de sapeur-pompier, longtemps restée sans réponse, est aujourd’hui satisfaite par son inscription dans la loi de modernisation. Si le dispositif de fin de carrière des sapeurs-pompiers professionnels a été amélioré, il faudra cependant trouver de nouvelles pistes pour les aider à trouver des emplois adaptés à leur condition physique en fin de carrière.

La crise du volontariat inquiète depuis longtemps les responsables de la sécurité civile. Le Gouvernement n’a pas ménagé ses efforts en vue d’y remédier, avec la création de la prestation de fidélisation et de reconnaissance, qui récompense financièrement le dévouement des volontaires et, plus récemment, la signature d’un plan d’action en faveur du développement du volontariat, qui s’ajoute au dispositif fiscal mis en place l’an dernier.

Afin de renforcer les capacités de formation, le transfert de l’École nationale des officiers de sapeurs-pompiers à Aix-en-Provence et Vitrolles a été avancé à l’été 2007, tandis que le pôle de défense civile de Cambrai fonctionnera dès le début de l’année prochaine.

Plusieurs accidents dramatiques ont été déplorés en 2006. Mais la problématique de la sécurité des sapeurs-pompiers s’est déplacée sur le terrain des incivilités et violences. En 2005, 728 actes d’incivilité ou d’agression, touchant 1 124 sapeurs-pompiers, ont été recensés. Parce que ces atteintes à l’intégrité physique d’hommes et de femmes qui se consacrent au secours de la population sont intolérables, je soutiens les initiatives du Gouvernement visant à les sanctionner plus sévèrement.

La structure et le dimensionnement de la flotte d’avions correspondent aux besoins de la lutte contre les incendies. Le bilan des interventions du bombardier gros porteur Dash 8 devrait convaincre sur ses qualités, d’autant que celui est très rentable, puisqu’il exécute, hors de la saison des feux, des missions de transport.

Le processus de renouvellement de la flotte d’hélicoptères est parvenu à son terme. Une attention particulière est portée à la sécurité des interventions aériennes : suite aux accidents dramatiques de l’été 2005 et de juin dernier, des enquêtes ont été ouvertes et des groupes de travail constitués pour améliorer la doctrine d’emploi, la formation des équipages et les équipements des appareils.

L’interopérabilité des réseaux de communication visée par le programme ANTARES doit permettre d’améliorer les conditions d’intervention. L’État prend en charge le projet d’infrastructure complémentaire, qui devrait être achevé en 2010, à charge pour les SDIS d’assurer la migration de leurs équipements. Plusieurs expérimentations sont en cours. Je me réjouis de l’effort réalisé par ce budget pour le déploiement de cet outil.

Les nombreuses catastrophes de ces dernières années – AZF, inondations, attentats terroristes – confirment la nécessité d’être en mesure de répondre aux défis nouveaux, et donc le bien-fondé de la révision des plans d’intervention, du renforcement des formations aux risques NRBC et de l’acquisition de matériels à haute technologie.

Le bilan satisfaisant des incendies de 2006 témoigne de la pertinence des choix effectués : alors que le nombre de départs de feu était le même qu’en 2005, les surfaces brûlées ont été divisées par plus de trois. Le prépositionnement des moyens, le guet aérien armé, le renfort du Dash 8, mais aussi la coopération avec Météo France, le suivi judiciaire et le débroussaillement expliquent ce succès.

Je me félicite que le débroussaillement associe nos concitoyens à la lutte contre les incendies. Cependant, l’obligation de débroussailler sur une étendue de cinquante mètres peut entraîner certaines aberrations, et je prends acte, Monsieur le ministre, de votre volonté de trouver des solutions pour minimiser le coût de cette opération pour nos concitoyens.

Nos successeurs, quels qu'ils soient, devront s’attacher à construire une véritable culture de sécurité civile, afin que cette préoccupation trouve un écho dans la population hors des circonstances dramatiques. La sensibilisation des élèves et l'apprentissage des gestes de premier secours, prévus par la loi de modernisation, doivent ainsi être encouragés avec force par les ministères de l'intérieur et de l'éducation nationale.

Le problème du financement des services d'incendie et de secours est à nouveau posé, du fait du prochain report de la suppression des contributions communales. Parallèlement, le renforcement de la coopération européenne devra figurer dans les futures priorités.

Au terme de mon intervention, je souhaite remercier les 250 000 sapeurs-pompiers sans lesquels la politique de modernisation serait restée un vœu pieux. Leur dévouement, leur courage et leur conscience professionnelle sont autant de gages pour que la mutation de la sécurité civile se poursuive sereinement dans les années à venir.

Pour toutes ces raisons, la commission des lois a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « sécurité civile ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire Mes premiers mots seront pour évoquer le souvenir de Gérard Léonard. J’avoue que j’ai un peu de mal à m’habituer à participer à ces débats hors la présence d’un collègue qui faisait honneur à l'Assemblée nationale. Passionné des questions de police, Gérard Léonard a accompli un travail remarquable au sein de votre commission des lois, de 2002 à 2005, et je sais que ses compétences étaient reconnues bien au-delà des bancs de la seule UMP…

M. Jean-Pierre Blazy – En effet.

M. le Ministre d’État – Évoquer le souvenir d’un ami, c’est signifier que sa vie n’a pas été inutile. Je me devais de rendre hommage à Gérard Léonard, la disparition de son fils, à quelques semaines de la sienne, rendant les circonstances encore plus douloureuses.

Je remercie les rapporteurs de leur présentation argumentée – et souvent passionnée – de ce dernier budget de la sécurité de la législature, qui est aussi le dernier de la LOPSI. Il traduit l'aboutissement de la politique que nous menons depuis cinq ans, l'examen du projet de loi de finances étant heureusement devenu celui des résultats obtenus, autant que des moyens déployés. Depuis 2002, sous l’autorité du Président de la République, avec Mme Alliot-Marie et les Premiers ministres successifs, nous menons une nouvelle politique de la sécurité et les résultats sont au rendez-vous.

L’appareil statistique n’ayant pas changé depuis dix ans, les chiffres sont incontestables. Alors qu’entre 1997 et 2002, l’appareil statistique indique que la délinquance avait augmenté de 15 %, les mêmes données – pas moi, j’y insiste, mais le même appareil de recueil statistique – démontrent qu’elle a baissé de 8,8 % depuis 2002. En cinq ans de gouvernement socialiste, la délinquance a augmenté de 15 % ; à l’issue de cinq ans de notre propre gouvernement, elle a baissé de 8,8%. Et si les résultats actuels se confirment le mois prochain, nous aurons connu cinq années consécutives de baisse de la délinquance. C’est du jamais vu.

Tous les indicateurs montrent l’ampleur de l’engagement de nos 150 000 policiers et de nos 120 000 gendarmes. Ainsi le taux d’élucidation n’a cessé de se redresser. Alors qu’en 2002, les forces de l’ordre ne trouvaient qu’un coupable sur quatre, elles en arrêtent aujourd’hui un sur trois. Et ce sont les mêmes forces. Si nous obtenons de meilleurs résultats avec les mêmes forces, c’est bien que notre politique est meilleure que la précédente. Ce n’est tout de même pas le fait du hasard.

Je rappelle aussi que notre politique de sécurité routière a permis d’épargner 8 500 vies, dont 609 depuis le début de cette année. N’est-ce pas la meilleure réponse à opposer à ceux qui s’agacent de la multiplication des radars ou de la fermeté des contrôles ? Merci, mesdames et messieurs les députés, de tenir bon face aux protestations injustifiées de certains. Pensons avant tout aux 8 500 familles qui n’ont pas eu à pleurer un proche. Je suis pour ma part persuadé que nous avons fait les bons choix et que les Français comprennent notre politique.

S'agissant de la lutte contre l'immigration clandestine, je fixe l'objectif de 28 000 reconduites exécutées en 2007 ; en 2002 il y en a eu à peine 10 000. Je fixe des objectifs clairs et je les assume sans faiblesse. Si l’on n’expulse pas les personnes sans papiers, à quoi sert de donner des papiers aux autres ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Notre devoir, c’est d’exécuter les décisions de justice et je m’y tiens strictement. Je tiens aussi à dire que j’ai été particulièrement choqué, ne serait-ce qu’au nom du respect dû aux victimes de la Shoah, que certains se soient crus autorisés à comparer les expulsions d’immigrés sans papiers à la déportation (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe UMP). Je voudrais que l’on m’explique en quoi le fait de reconduire dans leurs pays d’origine des personnes entrées illégalement chez nous peut être assimilé à de la déportation !

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis – C’est tout simplement indécent !

M. le Ministre d’État – Je n’entends pas fuir les aspects moins positifs : les violences aux personnes augmentent. Mais elles représentent 10 % des actes de délinquance. Cela signifie donc que 90 % des formes de violence baissent, cependant que seulement 10 % des actes connaissent une augmentation…

M. Jean-Pierre Blazy – Mais ce sont les plus graves !

M. le Ministre d’État – Sur les 10 % d’actes violents envers des personnes, 5 % sont des violences crapuleuses et 5 % des violences commises au sein de la famille. Les violences crapuleuses, généralement liées à des vols et perpétrées par des personnes inconnues de la victime, baissent. Ce qui augmente, ce sont les 5 % des violences aux personnes commises par des proches de la victime, souvent à l’intérieur de la famille…

M. Jean-Pierre Blazy - Parlez-nous aussi de la délinquance financière !

M. le Ministre d’État – Encore faut-il se poser les bonnes questions sur l’augmentation statistique des violences intrafamiliales : assiste-t-on à une montée alarmante de la violence au cœur des familles ou faut-il plutôt considérer que la chape de plomb qui recouvrait ces fléaux est en train de se soulever ?

M. Jean-Pierre Blazy - Un peu facile !

M. le Ministre d’État – Ce qu’il faut aussi considérer, c’est que les policiers et les gendarmes ne sont pas forcément les mieux armés pour combattre la violence au sein du foyer, lorsque le conjoint se fait bourreau ou que le parent martyrise ses propres enfants. Face à ces drames, il faut commencer par poser le bon diagnostic, avant d’envisager les bons remèdes. J’ai donc demandé aux directeurs généraux de la police et de la gendarmerie d’envisager de nouveaux moyens d’agir efficacement contre les violences intrafamiliales. La violence domestique est une maladie : elle doit être considérée en tant que telle pour être soignée efficacement. Le projet de loi de prévention de la délinquance que je vous soumettrai prochainement vise précisément à répondre à la question des violences familiales. Il instaure l'obligation de suivi thérapeutique du conjoint violent dans le cadre du suivi socio-judiciaire, afin d'éviter la récidive, et la création d'une infraction autonome permettant de sanctionner ceux qui se livrent à des violences habituelles au sein du couple. Pour mieux lutter contre la hausse des violences et mauvais traitements à enfants, je veux également mettre en place une vraie coordination du travail social, grâce au partage des informations détenues sur le cas d'un enfant par les travailleurs sociaux. On ne peut pas déplorer la hausse des violences aux personnes et refuser ces solutions de bon sens. Je souhaite enfin qu’il soit établi une fois pour toutes que c’est au bourreau de quitter le domicile conjugal, pas à la victime de fuir en pleine nuit, au péril de sa vie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Blazy – Là-dessus, nous avons toujours été d’accord.

M. le Ministre d’État – S’agissant des violences et mauvais traitements à enfants, j’entends qu’une véritable coordination du travail social entre enfin dans les faits. Je ne supporte pas l’idée que l’on puisse s’abriter derrière le secret professionnel pour ne pas dénoncer certaines situations. Si les travailleurs sociaux chargés d’accompagner le petit Nicolas, du quartier de Hautepierre, à Strasbourg, avaient mis en commun leurs informations, le drame qui est survenu n’aurait peut-être pas eu lieu. Le secret professionnel est justifié, mais il doit s’incliner devant le martyre d’un enfant.

Pour ce qui concerne les violences aux dépositaires de l’autorité publique, qui s’accroissent également, c’est l’effet de l’activité d’une police qui va au contact, entre dans les cités, démantèle les trafics. Les policiers ne sont ni des animateurs sportifs, ni des travailleurs sociaux, ni des chargés de relations publiques. Leur fonction, éminemment respectable, c’est d’interpeller les fauteurs de trouble et de les déférer à la justice. Et si 3 000 d’entre eux ont été attaqués depuis le début de l’année, c’est qu’ils entrent aujourd’hui dans les cités où, sous la législature précédente, on leur demandait de ne pas aller !

M. Jean-Pierre Blazy – C’est faux !

M. le Ministre d’État – Vous savez pertinemment que c’est la réalité.

Le projet de loi de finances pour 2007 comprend un certain nombre de mesures destinées à soutenir les forces de l’ordre. Je partage la préoccupation ancienne de votre rapporteur Guy Geoffroy de fidéliser nos forces. Au budget 2007 du programme « police nationale », 33 millions sont consacrés à l’action sociale et un effort est fait pour fidéliser les fonctionnaires, notamment dans les régions difficiles, avec 200 prêts à taux zéro, 100 places de crèches et 1 000 logements réservés en plus rien que pour l’Île-de-France. Aider des fonctionnaires à devenir propriétaires de leur logement est la meilleure façon de les fidéliser. Je rappelle également qu’au terme de la réforme des corps et carrières de 2003, un gardien de la paix ou un lieutenant de police est obligé de rester cinq ans dans sa première région d’affectation. On peut chercher à avoir des policiers qui connaissent mieux l’environnement sans gaspiller les moyens. Ce que je dis pour les policiers vaut pour les gendarmes. Après le meurtre du petit Mathias dans la Nièvre, j’avais rencontré la famille. À cette occasion, de nombreux habitants m’avaient dit que les gendarmes tournaient trop vite pour bien connaître le milieu local.

D’autre part, lorsque des agressions de policiers ou de gendarmes deviennent des guets-apens comme aux Tarterêts, aux Mureaux, à Épinay-sur-Seine, ce sont des crimes, et les criminels ne vont pas en correctionnelle, mais aux assises. Tous ceux qui s’en prendront aux forces de l’ordre doivent le savoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Lorsque j’ai présenté une loi d’orientation au printemps 2002, la majorité m’a fait confiance, l’opposition a dénoncé des pétitions de principe. Elle jugerait, disait-elle, sur les faits. Je la comprends d’ailleurs, tant de fois la parole de l’État a été bafouée… Les sceptiques posaient des questions en 2002. J’espère qu’ils auront l’honnêteté de reconnaître les faits en 2006.

Sur les effectifs, nous avions promis de recruter 6200 fonctionnaires supplémentaires en cinq ans.

M. Jean-Pierre Blazy – 6 500.

M. le Ministre d’État – Parole a été tenue et pour la première fois la police nationale dépasse les 150 000 agents. Quelle conclusion en tire l’opposition ?

S’agissant des équipements, nous avions promis une nouvelle arme, le Sig-Sauer, une nouvelle tenue, un gilet pare-balles pour chacun, de nouvelles armes non létales. Tous les policiers sont dotés du Sig-Sauer, tous auront la nouvelle tenue en fin d‘année, et nous avons acheté 1 000 pistolets à impulsion électrique. Là encore, parole tenue. Quelles conclusions en tirez-vous, Messieurs de l’opposition ? D’autre part, je crois beaucoup à l’efficacité des caméras dans les véhicules de police notamment lors des violences urbaines. Les voyous ont plus peur de la caméra, qui est une preuve judiciaire, que des canons à eau. Je n’avais rien promis, mais nous allons les généraliser. Depuis quelques jours 400 véhicules légers supplémentaires en sont équipés dans 17 départements, et je souhaite en équiper la police de nuit. Outre qu’elle fournit des preuves, la caméra met policiers et gendarmes à l’abri des polémiques sur de prétendues brutalités. S’il y en a, je n’hésite pas à les sanctionner. Mais les forces de l’ordre représentent la République, et la brutalité que je veux dénoncer, c’est celle des délinquants (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Est-ce un hasard si, depuis que l’on filme les embarquements dans la zone d’attente à Roissy, il n’y a plus de polémique sur la prétendue brutalité de la police de l’air et des frontières ? Je souhaite qu’à l’avenir tous les policiers et tous les gendarmes soient dotés d’armes non létales dont ils pourront se servir et que leurs interventions soient filmées.

Promesse tenue aussi sur l’immobilier, qui était sans doute le dossier le plus difficile. En 2005 et 2006, comme prévu dans la LOPSI, 100 000 mètres carrés ont été mis en chantier. Pour cela, il a fallu de nouvelles procédures car aujourd’hui, dans notre pays, quand on dépose une demande de permis de construire, il faut s’attendre à sept ans de procédures avant de poser la première pierre ! J’en suis à inaugurer des commissariats dont la construction a été décidée par mon antépénultième prédécesseur. Ce n’est pas raisonnable. Depuis quatre ans, nous avons achevé les hôtels de police de Nîmes, Bordeaux, Bobigny et Montpellier, les commissariats centraux des 4e et 11e arrondissements à Paris, les commissariats de police des quartiers Nord et Noailles à Marseille et les centres de rétention administrative de Marseille, Toulouse, Lille, Vincennes. Les CRA offriront bientôt 2 400 places contre 800 à mon arrivée. En 2007 seront livrés les grands projets immobiliers de Lyon, de Lille et de l'hôtel de police d'Argenteuil. Nous lancerons la construction du commissariat de Clichy-sous-Bois, du commissariat central du 20e arrondissement de Paris, du pôle logistique national à Limoges. Nous poursuivrons le grand chantier de la DDSP de Seine-Saint-Denis à Bobigny, le projet immobilier de Nantes, dont on parle depuis vingt ans, le chantier de l'hôtel de police de Pointe-à-Pitre. L'acquisition d'un nouvel immeuble dans le 19e arrondissement permettra un regroupement beaucoup plus fonctionnel des services de la préfecture de police. On le voit, le Gouvernement a agi avec le souci de la population et non en se demandant quelle était la couleur politique du maire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Telle est notre conception de la République. Qu’on compare donc les bilans ! Cela étant, je le répète, l’administration ne maîtrise pas toujours les délais. C’est pourquoi l’article 3 de la LOPSI prévoit des dispositions dérogatoires pour accélérer la réalisation de certains de ces projets.

Je reviens maintenant au budget 2007. Le budget de la Police nationale, à plus de 8 milliards, progressera de 2,5 %, soit 1,5 point de plus que le budget de l’État en moyenne. Mais avoir obtenu cet argent crée des obligations de résultat, et je l’ai dit aux policiers et aux gendarmes. C’est cela le contrat de confiance entre eux et la nation. Qui pourrait accepter, comme cela a été fait dans l’éducation nationale il y a quelques années, qu’on donne plus de moyens et qu’on ait moins de résultats ? De plus, je sais très bien que si nous relâchions la pression, les résultats faibliraient. Je le dis à la hiérarchie : les moyens qui vous sont donnés vous créent une obligation.

Plus qu'un budget, je vous présente aujourd'hui un projet annuel de performance qui fixe des objectifs. Cela a créé une polémique. Mais qu’attend-on ? Que je fixe des « orientations » qu’on suivra, si le temps le permet ? Non, j’ai fixé des objectifs précis : faire baisser la délinquance de voie publique d'au moins 2 %, réaliser 4 000 interpellations d'« aidants » à l'immigration irrégulière, augmenter d'un point le taux d'élucidation des crimes et délits, réaliser 28 000 expulsions. Ce que je veux, c’est développer une culture du résultat. Ce budget comporte d’ailleurs une véritable révolution puisque j’y ai fait inscrire 20 millions pour la prime de résultat, et aucune organisation syndicale ne l’a contesté. On verra si celui qui me succédera supprimera ces 20 millions de pouvoir d’achat en plus pour récompenser environ 30 000 fonctionnaires. Par exemple, à Marseille, j’ai demandé qu’on donne une prime aux policiers de la BAC des quartiers nord, dont l’une des capitaines nous a fourni des renseignements capitaux, aux fonctionnaires de la police judiciaire qui ont mené remarquablement ses interrogatoires, aux forces mobiles qui ont fait un remarquable travail de terrain pour recueillir des informations. Les fonctionnaires qui ont réussi, en trois jours, à déférer à la justice les présumés coupables d’avoir transformé une jeune fille de 26 ans en torche vivante ont fait plus que leur travail et méritent d’être récompensés (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Ces hommes et ces femmes qui, pendant les 48 heures de garde à vue, n’ont pas dormi une minute, se sont relayés pour les interrogatoires, ont démonté de faux alibi, l’ont fait aussi pour cette jeune fille qui souffrait le martyre entre la vie et la mort. De même, lors des vingt-sept nuits d’émeute de novembre 2005, nous avons eu 14 000 fonctionnaires sur le terrain. Nous pouvons être fiers d’eux : il n’y a pas eu une seule victime dans leurs rangs, pas un mort parmi les émeutiers. Quelle démocratie peut en dire autant ? Pas les États-Unis, pas la Grande-Bretagne. Mais la France a montré au monde qu’elle avait la maîtrise du maintien de l’ordre, alors que dans tant de pays démocratiques on a ouvert le feu en semblables circonstances. Nos policiers, nos gendarmes devraient être applaudis sur tous les bancs, eux qui ont procédé à 7 000 interpellations sans tirer un seul coup de feu, alors même qu’ils comptaient des blessés par balle dans leurs rangs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur divers bancs)

La prime est, en moyenne de 400 euros – qui prétendra que cela soit négligeable ? – et elle a été versée à un quart de l’effectif. C’est une nouvelle culture que celle-là : nous ne retirons rien à ceux qui font leur travail, mais nous donnons plus à ceux qui font davantage (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). C’est cela l’égalité républicaine, mais c’est une révolution !

J’en viens au système de transmission Acropol, celui-là même qui me valait, en 2002, une plainte par semaine. Fin 2007, Acropol couvrira l’ensemble du territoire, et je n’entends plus aucune plainte ; le problème est réglé.

Plus de 300 bornes seront connectées au fichier des empreintes digitales d’ici fin 2007. Quant au fichier national des empreintes génétiques, il m’a valu, en 2002, une polémique outrageante lorsque je l’ai créé…

M. Jean-Pierre Blazy – Ce n’est pas vous qui l’avez créé !

M. le Ministre d’État – …fichier qui, s’il avait été efficace, aurait empêché que Guy Georges ne viole douze jeunes filles. Il y a aujourd’hui cent fois plus de profils et d’empreintes dans ce fichier qu’il n’y en avait en 2002. D’ailleurs, avant mai 2002, cet embryon de fichier n’avait permis d’élucider que trois affaires…

M. Jean-Pierre Blazy – Mais il existait !

M. le Ministre d’État – …alors qu’au 1er octobre 2006, il a permis de confondre les auteurs de 4 821 affaires (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Ce ne sont là ni des mots ni des phrases mais des chiffres : je vous dis, Mesdames et messieurs les parlementaires, ce que nous avons fait avec l’argent que vous nous avez alloué, je vous dis que le taux d’élucidation de crimes sexuels est maintenant de près des deux tiers.

Augmenter le nombre des caméras, augmenter le nombre des fichiers, augmenter les moyens de la police scientifique, voilà ce qui nous fera passer de la culture de l’aveu à celle de la preuve. C’est ce que je souhaite.

Tenant compte des propositions de M. Claude Goasguen, nous avons décidé une interdiction administrative d’entrée dans les stades à l’encontre d’une centaine de voyous. Si des malades poussent des cris de singe quand ils voient un joueur noir ou se permettent de faire le salut nazi, leur place est dans un hôpital psychiatrique ; ils n’ont rien à faire dans un stade français. Quel que soit le club considéré, tout supporter qui, parce qu’il a lancé des engins explosifs, est responsable de l’amputation de deux doigts d’un jeune pompier doit rendre compte de ses actes devant la justice.

M. Jean-Pierre Blazy – Nous en sommes tous d’accord.

M. le Ministre d’État – Pour mettre fin à une incohérence administrative telle que les terminus n’étaient jamais contrôlés, j’ai tenu à créer un service de police ferroviaire fort de 2 500 policiers et gendarmes, et il s’en est suivi une baisse de 3,4 % de la délinquance dans les transports en commun – RER, TER et métro. Nous ferons la même chose pour les autobus, à la sécurité desquels 4 000 policiers et gendarmes supplémentaires sont affectés depuis le 26 octobre.

Les CRS et les gendarmes mobiles, qui accomplissent un travail remarquable, ont jusqu’à présent toujours été affectés à l’ordre public. J’essaye de les affecter, autant que possible, à la sécurité publique, et je leur témoigne ma confiance en leur disant : « À vous les quartiers les plus difficiles aux heures les plus difficiles ». À quoi bon des patrouilles aux heures où les voyous ne sont pas levés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Elles doivent avoir lieu du milieu de l’après-midi jusque tard dans la nuit. D’ailleurs, les malfrats ne s’y trompent pas, et les résultats ne se font pas attendre.

Vous aurez constaté que l’on voit beaucoup moins de cars de CRS traversant la France en convoi, et beaucoup moins de CRS tapant le carton en attendant d’hypothétiques manifestations. Au lieu de cela, ils travaillent maintenant en petites unités, ce qui leur permet d’assurer une présence continue, et cette nouvelle définition des tâches m’a permis d’envoyer 4 000 hommes en renfort dans les quartiers difficiles.

Pour autant, il reste beaucoup à faire, je le sais. Je reviens une nouvelle fois sur la question des mineurs, et j’y reviendrai encore : je maintiens qu’un mineur de 2006 n’est pas comparable à un mineur de 1946 et que les multirécidivistes âgés de 16 à 18 ans, qui ont fait ce qu’ils ont fait à Marseille à une jeune femme de 26 ans doivent être traités comme des majeurs (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). D’ailleurs, la majorité qui, en 1946, était fixée à 21 ans a été abaissée à 18 ans ; on doit en tirer les conséquences.

La question des multirécidivistes est elle aussi en suspens. Sachant que 5 % des délinquants sont responsables de 50 % de la délinquance, la société française entend-elle se défendre contre ces 5 % ? Un individu qui comparaît pour la quarante-cinquième fois devant un tribunal correctionnel ne doit-il être puni que pour sa quarante-cinquième infraction ou aussi parce que, quarante-quatre fois, il a ignoré l’avertissement que lui adressait la société ? Comme il existe des peines plafond, il doit exister des peines plancher (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) et je ne vois pas en quoi celles-ci porteraient atteinte à la libre appréciation des juges et non celles-là. Peines plafond et pleines plancher sont toutes deux nécessaires pour que les récidivistes comprennent que la sanction tombera d’emblée. Après le drame de l’autobus incendié à Marseille, on a entendu, partout, que les auteurs de ce crime « risquent » trente ans d’emprisonnement. Eh bien, je ne veux plus que ce soit un « risque » : je veux qu’ils aient la certitude qu’ils iront trente ans en prison (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), car, même si elle survit, leur victime gardera, sa vie durant, les stigmates de ce crime odieux. La première prévention, c’est la certitude de la sanction (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Il y aurait encore beaucoup à dire à propos de ce budget, qui renforce les moyens et qui tend à moderniser l'organisation de la police, mais le temps me manque. Je ne conclurai pas sans évoquer la mission « sécurité civile », dont le budget pour 2007 marque l'aboutissement d'un cycle de modernisation accélérée des moyens. En cinq ans, nous aurons diversifié et modernisé la flotte de bombardiers d'eau, par l'achèvement en 2007 du programme Dash d'un total de 58 millions et par l'acquisition d'un douzième Canadair. Je note que la polémique concernant le Dash s’est éteinte ; il contient deux fois plus d’eau que le Canadair et il peut être utilisé en-dehors des quatre mois de la saison de feu, ce qui est un avantage certain. Nous amorçons le remplacement des Alouettes par l’achat de trois hélicoptères de type EC145, qui peuvent embarquer des commandos, élément qui peut être décisif en cas de braquage. Ces appareils n’ont posé aucun problème à la gendarmerie, mais nous avons déploré deux accidents en montagne. Il est toujours difficile d’admettre qu’il y ait pu y avoir des erreurs de pilotage – la seule chose que je dirai à ce sujet, c’est que j’ai confiance en ces appareils, dans lesquels je me déplace souvent.

Je tiens à ce que les Canadair ne soit utilisés que lorsqu’il faut sauver la population au sol. En Corse, nous avons, pour des raisons inconnues à ce jour, perdu un équipage. Les pilotes doivent respecter strictement les consignes, ce que les gendarmes font toujours. Mais les pilotes de la sécurité civile, qui ont souvent une grande expérience, ont une certaine capacité d’adaptation aux circonstances, qui peut les conduire à négliger les procédures. Or ma responsabilité est engagée chaque fois qu’un pilote ne rentre pas à la maison. Je ne leur demande pas de faire des exploits ! J’ai d’ailleurs autorisé un certain nombre de personnels à ne pas utiliser pendant quelques semaines les EC145, mais pour des raisons psychologiques, nullement par manque de confiance envers ces machines.

MM. Mariani et Ginesta l’ont dit : la saison de feu s’est plutôt bien passée. Nous travaillons mieux, certes, mais la justice a également pris la mesure de la gravité des actes des incendiaires en les condamnant lourdement.

Je remercie M. Mariani pour ses propos et j’ai bien entendu les inquiétudes de M. Ginesta quant au pilotage des SDIS : j’accepterai son amendement relatif à leurs dépenses. Je partage le diagnostic quant au fonds d’aide à l’investissement des SDIS. Les critiques sont pertinentes et le projet de réforme du décret du 16 septembre 2003 permettra de le recentrer vers les orientations nationales que vous souhaitez.

J’en ai conscience : la tâche à accomplir reste immense mais je sais aussi que, comme le dit la formule, quand je me regarde, je m’inquiète, quand je me compare, je me rassure. Que la majorité regarde la situation avant et après 2002, elle n’aura pas à rougir du bilan gouvernemental ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDF)

M. le Président – Nous en venons à la discussion générale.

M. Jacques Desallangre – Je vais rompre avec ce ton laudatif. Montesquieu a bien résumé le caractère fondamental du droit à la sûreté en disant que la liberté politique consiste dans la sûreté ou, du moins, dans l’opinion que l’on a de sa sûreté. Au regard de la préservation de cette liberté publique fondamentale, notre pays traverse une crise grave : la sûreté comprend certes la préservation de l’intégrité physique des personnes mais aussi le droit à des conditions d’existence décentes : droit à la santé, au logement, au respect de l’ensemble des principes républicains garantissant la cohésion sociale. Or, votre politique n’a fait qu’aggraver les conditions d’existence des Français. Rien n’a été fait pour favoriser la mixité sociale, notamment à travers la politique de logements sociaux. Au contraire, vous vous êtes attaché à vider de leur contenu la loi SRU et les mesures visant à rendre obligatoire la présence de 20 % de logements sociaux dans chaque commune. Rien n’a été fait pour promouvoir les services publics, améliorer l’encadrement éducatif, lutter contre la précarisation de l’emploi. Vous n’avez cessé de promouvoir des politiques d’austérité au nom de la réduction du déficit tout en consentant des cadeaux fiscaux aux plus aisés et aux grandes entreprises. De la même façon, vous avez avec acharnement organisé la casse sociale et la désorganisation des services publics – de l’hôpital à La Poste en passant par l’éducation, où vous avez supprimé cette année 8 500 postes.

Et pourtant, les sénateurs de droite membres de la mission d’information sur les politiques conduites dans les quartiers en difficulté ont eux-mêmes réclamé dans leur rapport un certain nombre d’actions dans les domaines du logement social, de l’éducation, de la formation, de l’aide à la vie associative. Vos amis réclament encore plus de médiation sociale et concluent qu’il ne peut y avoir de sécurité sans la population ; et ils notent que la diminution des moyens consacrés à la médiation sociale, ainsi que la reconquête des quartiers par de nouvelles méthodes d’intervention, ont éloigné la police de la population. Oui, ce dont nos quartiers et leurs habitants ont besoin, c'est d'un engagement résolu de l'État à leurs côtés ! Les sénateurs critiquent l’approche sécuritaire du Gouvernement. Nous admettons tous que l'emploi de la force est parfois nécessaire mais il signe toujours un échec. Sans trahir la pensée de Sun Tse, le bon général n'est pas celui qui se met en péril pour tenter de triompher au prix d'un engagement total mais celui qui gagne la guerre avant même d'avoir à la mener. La guerre contre le crime et la délinquance ne se gagnera pas par des opérations coups de poing spectaculaires mais en renforçant le travail méticuleux des forces présentes en tout point et en tout temps. Il faut une police de proximité dont la principale force sera la dissuasion plutôt que la répression. Même vos amis politiques du Sénat l'ont réclamée ! Vous ne pouvez évacuer le problème en disant aux policiers qu’ils ne sont pas des travailleurs sociaux.

Votre politique a échoué. Les atteintes à la personne augmentent et la baisse globale de 8 % du nombre des crimes et délits appelle quant à elle quelques commentaires. Si les vols ont reculé depuis 2002 – moins 14,7% – sous l'effet conjugué d'une surveillance accrue des services de police, du plan Vigipirate et des dispositifs antivols adoptés par les constructeurs automobiles, les crimes et délits contre les personnes, eux, augmentent fortement – plus 16,8 % depuis 2002 –, de même que les infractions à la législation sur les stupéfiants – plus 33,4 %. Les premières victimes de ces atteintes aux biens et aux personnes sont les habitants des quartiers les plus modestes. En 2004, le taux d'atteinte aux biens était de 35 % dans les quartiers difficiles contre 15 % dans les communes rurales et 25 % en moyenne.

L’augmentation de votre budget n’est qu’apparente car les crédits de la sécurité et de la paix publiques diminuent en fait de près de 90 millions. Vous retirez notamment des moyens aux missions de lutte contre la délinquance pour abonder ceux consacrés au maintien de l’ordre. Voilà ce qui s'appelle faire de la politique spectacle ! Le recours de plus en plus fréquent aux CRS est symptomatique. Cela suffit à montrer que vous ne maîtrisez plus la délinquance urbaine et que vous êtes incapable d'empêcher la violence. Les policiers et les magistrats s’opposent à la sur-médiatisation que vous menez à des fins de propagande politique. Alors que l'efficacité policière demanderait moins de spectacles et plus de présence, vous avez supprimé la police de proximité mise en place par Jean-Pierre Chevènement. Vous avez cassé un outil qui devait permettre de faire baisser le niveau de tension et assurer une présence constante de femmes et d'hommes qui connaissent les territoires et qui ont su nouer des relations avec leurs concitoyens. La police de proximité aurait pu être le facteur principal de dissuasion car ce qui empêche les délinquants potentiels de commettre une infraction, ce n'est pas la lourdeur de la peine encourue mais la conviction que le risque de se faire prendre est élevé. Cela, ce ne sont pas les CRS ou les troupes mobiles qui peuvent l'assurer !

Certains indicateurs de performance sont mauvais et d'autres ne sont même pas renseignés. Soit l’indicateur 8.4 évaluant le taux de remise en liberté pour vice de procédure imputable à vos services dans le cadre des rétentions administratives. Il aurait été fort utile pour le contrôle parlementaire mais vous n'avez pas jugé bon de nous fournir les renseignements. En effet, l'ensemble des cases est vide et vos prévisions pour 2007 sont inexistantes. D'une manière générale, nous éprouvons de grandes difficultés pour obtenir des chiffres précis de la part de vos services alors que nous sommes collectivement chargés de contrôler l'action du Gouvernement. Ainsi, un parlementaire ne peut pas obtenir les chiffres de la délinquance et des effectifs de police dans son département.

M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis – Ils sont dans mon rapport !

M. Jacques Desallangre – Ces chiffres vous dérangent-ils ? À quoi sert de créer un indicateur s'il n'est pas renseigné ? Pour lutter contre cette opacité, je propose de renforcer le contrôle parlementaire. Je souhaite également que ces indicateurs soient multipliés et généralisés à l'ensemble des infractions. Une telle évolution permettrait de mesurer l'impact de la formation des fonctionnaires et la rigueur des opérations. Les quelques données dont nous disposons semblent indiquer une dégradation de ce ratio de vices de procédure qui s'élèverait à près de 25 %. Cela semble donc signifier que dans un cas sur quatre vous êtes obligé, par votre faute, de remettre en liberté un individu. Ce constat inacceptable me conduira à présenter une autre proposition visant à renforcer la formation et à améliorer l'interface police-justice. Mais face à ce constat sévère, vous avez tenté de vous dédouaner en accusant les magistrats de tous les maux. Ce type de manipulation est à moyen terme contre-productif car il tend à opposer deux camps qui doivent au contraire travailler ensemble.

L’efficacité suppose de mettre un terme aux propos manichéens et à la politique spectacle. Par la mise en scène de vos actions, vous transformez des opérations policières nécessaires en mesquine propagande ministérielle. Faire accompagner les forces de police par des journalistes sélectionnés (Protestations sur les bancs du groupe UMP) n’augmente en rien la sécurité de nos concitoyens. Au contraire, elle ruine la crédibilité de vos actions, surtout lorsque celles-ci se soldent par un fiasco – par exemple lorsqu’on mobilise des centaines de policiers pour ne procéder qu’à une ou deux interpellations. La sécurité est une affaire sérieuse : moins de spectacle et plus d’efficacité, voilà ce qu’attendent nos concitoyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. Thierry Mariani – L’année 2007 sera celle de tous les changements dans notre vie politique. Mais ce qui ne changera pas, c’est notre détermination à tenir les promesses faites aux Français. Ce budget le prouve, nous voulons terminer le travail et nous engager pour l’avenir. À l’heure des bilans, nous pouvons nous féliciter des bons résultats de notre action : nous avons été efficaces, et la France en avait besoin.

Après une augmentation de 15 % en cinq ans, le seuil des 4 millions de crimes et délits avait été franchi en 2002. Depuis cette date, la délinquance générale a reculé de 8,8 %. Elle a baissé de 0,9 % depuis le début de l’année. La délinquance de voie publique a baissé de 23,7 % depuis 2002, et de 4,1 % depuis janvier. 2006 est la cinquième année consécutive de baisse.

M. Maxime Gremetz – En Picardie, cela augmente !

M. Thierry Mariani – Le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, qui a été adopté par le Sénat et que nous examinerons bientôt, nous donnera une nouvelle occasion de soutenir les victimes et de punir les délinquants.

Je salue le professionnalisme et l’engagement des forces de sécurité intérieure, qui œuvrent chaque jour à la sécurité des Français. Le taux d’élucidation continue de progresser : en 2005, un fait sur trois a été élucidé, contre à peine un sur quatre en 2002.

Les violences aux personnes, qui représentent 10 % des faits de délinquance, avaient augmenté de 48 % entre 1998 et 2002. Pour la première fois depuis 2002, elles ont stagné – et même diminué de 0,5 % depuis le début de l’année.

S’agissant des violences contre les forces de l’ordre, cet automne 2006 abonde en exemples. Récemment, aux Tarterêts, un policier a été frappé à la tête durant quatre minutes par une vingtaine de personnes. De tels actes sont des crimes. Soyez donc assuré de notre soutien à l’amendement qui criminalisera les violences contre les représentants des forces de l’ordre.

En matière de lutte contre l’immigration clandestine, les résultats sont également au rendez-vous. Près de 20 000 reconduites à la frontière ont été exécutées en métropole en 2005, contre à peine 10 000 en 2002. Pour 2007, l’objectif a été fixé à 28 000 : il ne fait pas de doute qu’il sera exécuté.

Quant aux centres de rétention administrative, la gauche ferait bien de rester modeste. Qui les a humanisés ? C’est nous ! M. le ministre énumérait tout à l’heure les centres que nous avons réhabilités…

M. Maxime Gremetz – Il est parti !

M. Thierry Mariani – C’est vous qui nous les aviez laissés dans un état déplorable.

L’année 2007 sera la cinquième et dernière année d’application de la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. Pour la première fois, une loi de programmation aura été scrupuleusement respectée, et les résultats sont là. Le projet annuel de performance 2007 s’inscrit dans une continuité et fixe de nouveaux objectifs : faire baisser à nouveau la délinquance de voie publique d’au moins 2 %, procéder à 4 000 interpellations d’aidants à l’immigration irrégulière, augmenter d’un point le taux d’élucidation des crimes et délits. Pour y parvenir, le budget de la police nationale pour 2007 s’élève à 8,2 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une progression de 2,5 % supérieure d’un point et demi à l’évolution moyenne du budget de l’État.

Le budget de la gendarmerie s’élève pour sa part à 7,48 milliards, en hausse de 2,9 %. La remise à niveau des effectifs engagée en 2002 se poursuit : 1 000 nouveaux recrutements, 850 gardiens de la paix, 6 200 fonctionnaires supplémentaires recrutés en cinq ans. En 2007, les effectifs de la police nationale dépasseront pour la première fois les 150 000 policiers. 42,3 millions sont consacrés au financement des mesures statutaires et indemnitaires. Elles concrétisent la réforme du protocole corps et carrières, qui diminue les effectifs des commissaires et officiers pour augmenter ceux de l’encadrement de terrain. Une dotation additionnelle de 5 millions sera consacrée à la prime de résultat exceptionnel, qu’un quart des policiers toucheront en 2006.

Les engagements en matière d’équipement ont été tenus – déploiement de la nouvelle arme individuelle, avec l’acquisition de 28 200 pistolets Sig-Sauer, gilets pare-balles. Quatre cents véhicules légers supplémentaires sont équipés de caméras embarquées, qui permettront de réunir les preuves judiciaires et de protéger les policiers et les gendarmes accusés de brutalités.

Concernant la coopération entre services et ministères, la modernisation des moyens technologiques se poursuivra en 2007, avec l’achèvement de la couverture ACROPOL, la création de centres de formation et de commandement dans vingt-cinq départements et la montée en puissance des fichiers d’identification. Le caractère interministériel de la mission sécurité amène, enfin, les ministres de l’intérieur et de la défense à collaborer davantage. Le redécoupage des zones de police et de gendarmerie est désormais achevé.

M. Maxime Gremetz – Avec la fermeture de commissariats de police, à Albert par exemple !

M. Thierry Mariani – La rationalisation des moyens a atteint son objectif : la réduction de près de 9 % de la délinquance en quatre ans. La coopération entre police et gendarmerie doit être saluée ; elle sera illustrée par le lancement du projet ARIANE, application de rapprochements, d’indentification et d’analyse pour les enquêteurs, fusion des actuels fichiers JUDEX et STIC.

Je reviens sur les violences auxquelles sont confrontés les sapeurs-pompiers. J’ai rappelé les chiffres en tant que rapporteur : les résultats sont au rendez-vous.

L’opposition ne peut continuer à nier les bienfaits d’une politique de sécurité plus ferme. Il est vrai qu’il est plus facile de critiquer que de proposer.

M. Maxime Gremetz – Trente policiers pour sortir un gréviste de la faim du conseil régional de Picardie hier ! C’est cela la réalité !

M. Thierry Mariani – La réalité, c’est une progression de 15 % de la délinquance sous la précédente législature. La seule proposition concrète de Laurent Fabius, Ségolène Royal et de leurs amis socialistes, c’est la police de proximité, déjà mise en œuvre entre 1997 et 2002.

M. Paul Giacobbi – Et avec succès !

M. Thierry Mariani – Elle a conduit à une hausse de 15 % de la délinquance. Nous préférons quant à nous être réalistes et pragmatiques, fermes et justes, avec la sécurité de proximité – qui consiste à affecter et à mobiliser les moyens pour combattre la délinquance où et quand il le faut. En 2007, nous continuerons à créer un sentiment de sécurité fondé sur la réalité. Le groupe UMP votera donc ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Blazy – Je regrette d’autant plus le départ du ministre d’État qu’il a interpellé à plusieurs reprises l’opposition dans son discours. Je lui répondrai donc sur quelques points.

C'est dans un contexte de violences et de tensions dans les quartiers de nos villes, notamment marqué par le drame de Marseille, que nous examinons le dernier budget sécurité de la législature et que sonne l'heure du bilan. Depuis plus de quatre ans, les lois et les budgets Sarkozy passent, mais la violence demeure. Les chiffres sont implacables. En septembre dernier, selon l’Observatoire national de la délinquance, les violences « non-crapuleuses » avaient augmenté de 5,6 % sur les douze derniers mois et les atteintes aux personnes de 6,2 %. Les escroqueries et infractions économiques et financières ont progressé de 4 % en un an, les violences scolaires se sont intensifiées, avec 82 000 faits graves dans les collèges et lycées publics en 2005-2006, et les violences urbaines atteignent un niveau sans précédent.

Nous constatons une multiplication des agressions contre les policiers -–plus de 3 000 depuis le début de l’année, ce qui est inacceptable. Nous adressons naturellement un message de soutien à l'ensemble des policiers ; mais cette nouvelle dégradation de la situation dans les banlieues est de la responsabilité du Gouvernement. La gravité de la situation mérite mieux que des déclarations sur un éventuel renvoi aux assises des auteurs de ces agressions, irréaliste et synonyme de lourdeurs, qui ne garantirait pas une sanction efficace. La grande majorité des syndicats de policiers ne le demandent d’ailleurs pas, préférant une application efficace de la loi.

Plus grave, vous osez prétendre – même si vous êtes, une fois encore ce soir, ministre à temps partiel – que si le nombre des violences non crapuleuses augmente, c'est parce que les femmes portent davantage plainte pour les violences qu'elles subissent au sein de la cellule familiale. Si les agressions de policiers se multiplient, expliquez-vous de même, c'est parce que les policiers et les gendarmes vont désormais dans les quartiers. Cessez de travestir ainsi vos échecs ! Cette fuite en avant ne saurait constituer une vraie politique de sécurité. Nous vous prenons au mot, et nous vous jugeons sur les résultats. Vous auriez fait mieux que nous en matière de délinquance générale ; mais nous sommes au même niveau qu’il y a six ans, avant le pic de 2001-2002, avec 377 500 faits en 2005 et 371 000 en 2000. Il n’y a vraiment pas lieu d’en tirer grande gloire. Des documents du ministère de l’intérieur lui-même montrent que si les violences crapuleuses ont augmenté sous la gauche, elles ont continué de le faire sous la droite. Les chiffres en attestent : nous restons sur les hauts plateaux de la délinquance générale, contrairement à ce que vous ne cessez de promettre depuis 2002.

Les crédits de la LOPSI avaient été ici adoptés à l’unanimité moins une voix en 2002. Cette loi prévoyait la remise annuelle au Parlement d’un rapport d’exécution. Or, aucun de ces rapports ne nous a jamais été remis – fait que les rapporteurs n’ont même pas souligné, oubli curieux, et pour le moins fâcheux, au regard de leur mission de contrôle. J’avais, quant à moi, interrogé le ministre à ce sujet en commission, et je regrette que, nous ayant déjà quittés, il ne puisse me répondre ici. Un de ses collaborateurs vient tout juste, dans un couloir, de me remettre le seul rapport d’exécution qui ait été établi. Il est profondément regrettable que le Parlement soit ainsi traité.

Quoi qu’il en soit, les données en notre possession obligent à relativiser la prétendue bonne exécution de la LOPSI. Les personnels promis ont-ils été recrutés ? Les objectifs ont été atteints, dites-vous, mais qu’en est-il sur le terrain ? Selon le syndicat des commissaires et hauts fonctionnaires de la police nationale, on n’en est qu’à 4 861 emplois sur les 6 500 prévus dans la LOPSI. Le compte n’y est donc pas ! De 1993 à 1997, où vous étiez au pouvoir, vous aviez créé mille postes, quand de 1997 à 2002, nous en avons créé 3 440, et 15 127 si l’on compte les adjoints de sécurité.

M. Nicolas Perruchot – Combien de grands frères ?

M. Maxime Gremetz – Raciste !

M. Jean-Pierre Blazy – Il ne s’agissait pas de grands frères, mais d’adjoints de sécurité dont le rôle sur le terrain était reconnu et apprécié.

D’évidence, la seule priorité de ce budget semble être la lutte contre l’immigration. Alors que les crédits de la police de l’immigration augmentent, ceux de la sécurité et de la paix publiques régressent de 3 %, amputés de 81 millions d’euros par rapport à 2006. Le maintien de la sécurité publique n’est-il donc plus une priorité pour vous ? Il est vrai que les infractions au droit du séjour des étrangers permettent de gonfler le taux d’élucidation des affaires puisqu’en l’espèce, tout fait constaté est élucidé. Pour autant, quels sont le nombre d’expulsions prononcées et celui des expulsions effectives ? Combien coûte la reconduite à la frontière d’un étranger en situation irrégulière et quel est le taux d’échec ? Même si des reconduites à la frontière sont nécessaires, nous ne le nions pas, force est de constater qu’elles sont très coûteuses car elles exigent beaucoup de personnel, ce qui nécessairement se fait au détriment d’autres missions.

Ce sont les effectifs de la police des quartiers, aujourd’hui inadaptés à la réalité de la délinquance dans les banlieues, qu’il faudrait renforcer. La note du préfet de Seine-Saint-Denis en septembre dernier décrivait une situation « explosive » et mettait en lumière les carences d’effectifs, ce constat dépassant bien sûr le cadre de ce seul département. Il y aura plus de 150 000 fonctionnaires de police en janvier 2007, vous vantez-vous. Mais ceux-ci étaient plus de 151 000 en 2002, et encore avez-vous hérité, à votre arrivée au pouvoir, des 3 000 créations d’emplois prévues dans le budget pour 2002. Le décalage entre les postes créés et les affectations sur le terrain tient, entre autres, au délai entre le moment où les candidats réussissent leur concours et celui où ils reçoivent leur première affectation, qui n’a pas été réduit. Pourquoi n’avoir pas créé de nouveaux sites de formation pour tenter de régler ce problème ? De même, trop de policiers sont affectés à des tâches administratives. Nous avons besoin de policiers sur le terrain, non pour des missions auxquelles ils n’ont pas été formés. Il faut ouvrir davantage de postes administratifs aux concours de façon que les actifs soient sur le terrain. Vous l’avez fait, mais pas assez.

Les effectifs de police restent par ailleurs largement inadaptés à la réalité géographique de la délinquance. Le redéploiement entre les forces de police et de gendarmerie n’a pas tout réglé, loin s’en faut.

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial – Vous vous étiez contentés, vous, d’en parler, sans rien faire !

M. Jean-Pierre Blazy – Faute de police de proximité, les quartiers ne vivent plus que les interventions sporadiques des BAC ou des CRS, qui laissent entre temps la population bien démunie contre les violences. Les opérations coup de poing des GIR, que vous ne cessez de célébrer, ne remplacent pas le travail quotidien des forces de police. Qu’il s’agisse de lutte contre l’économie souterraine, de recel ou de trafic de stupéfiants, le bilan des GIR est maigre. À ce sujet, que pensez-vous, Monsieur le ministre absent, du récent rapport sénatorial préconisant de relancer la police de proximité ? Que pensez-vous de la proposition faite aujourd’hui même par le Premier ministre de créer une « police de tranquillité publique » ? N’est-ce pas reconnaître que le démantèlement de la police de proximité a été une grave erreur ? Celle-ci n’était pas une « police des voyous », comme vous l’avez prétendu, mais une police utile qui assurait une présence permanente dans les quartiers et y faisait aussi du renseignement. Son action y était complémentaire des interventions des BAC et des CRS, lesquelles n’avaient d’ailleurs pas cessé.

J’aurais beaucoup aimé que le ministre, hélas déjà parti, s’explique aussi sur la reprise en mains de l’Institut national des hautes études de sécurité, à la tête duquel il a nommé Pierre Monzani. Pourquoi la responsable des Cahiers de l’INHES, Anne Wyvekens, a-t-elle été relevée de ses fonctions à la faveur d’un remaniement de la revue ? Pourquoi également avoir supprimé le département de recherche que dirigeait Christian Mouhanna ? Pourquoi avoir nommé Charles Pasqua au conseil d’administration de l’établissement ? (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) De toute évidence, les chercheurs de l’INHES ne sont plus libres de leurs recherches. Certaines réalités de la délinquance, qui contredisent les grands discours du ministre, à l’évidence dérangent. Vous refusez donc toute réflexion scientifique sérieuse et indépendante sur ces sujets. L’INHES va-t-il devenir un instrument de votre campagne présidentielle, Monsieur le ministre d’État, qui nous avez quittés ? D’instance scientifique, se transformera-t-il en service du ministère chargé de défendre le bilan du ministre ?

Lors de l’examen du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, qui aura lieu prochainement, nous aurons l’occasion de revenir sur votre bilan. Ni l’application de la LOPSI ni l’inflation législative sécuritaire à laquelle vous vous êtes livrés et invitez encore à la veille des échéances électorales de 2007 n’ont apporté de véritables réponses à l’insécurité qui accable toujours autant nos concitoyens, et même plus encore qu’avant 2002 pour ce qui des violences aux personnes, des violences urbaines et des violences scolaires.

Ce projet de budget ne contient d’ailleurs aucune mesure permettant de financer votre future loi. Pis, il réduit les moyens de la sécurité publique. Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Rudy Salles – J'interviens comme chaque année sur le budget de la sécurité, non pour le critiquer ni l'encenser, mais pour essayer de traduire ce que je pense et que pensent aussi nombre de nos concitoyens, lesquels sont quotidiennement confrontés à l’insécurité. Il y a quelques jours, l'incendie d'un autobus à Marseille transformait une jeune étudiante en torche vivante. Quelques jours auparavant, un jeune sapeur-pompier niçois perdait l'usage de sa main en interceptant un explosif artisanal lancé depuis les tribunes d’un stade de football. Ces faits d’une exceptionnelle gravité, hélas, se banalisent. On ne compte plus désormais les voitures brûlées, les véhicules de police ou de pompiers caillassés, les quartiers transformés, la nuit tombée, en camps retranchés. Cette situation est devenue intolérable, et il faut y remédier. Vous avez, Monsieur le ministre, lancé une politique répressive « pour faire changer l'insécurité de camp ». Je ne mets pas en doute votre bonne volonté. Mais force est de constater que la situation ne s’améliore pas. Je n’entends pas m’appuyer sur des statistiques, toujours sujettes à caution. Certains chiffres fournis par l'Observatoire national de la délinquance sont néanmoins éloquents. La délinquance a diminué de 0,77 % dans l'ensemble en 2005, et la tendance se confirme, puisque la baisse est de 0,4 % sur les huit premiers mois de cette année par rapport à la même période de l’année passée. Un regain de violence, corroboré par les chiffres, n’en est pas moins constaté. Si les atteintes aux biens diminuent de 2,7 %, les vols avec violence augmentent, eux, de 5,2 % sur les huit premiers mois de l'année et les atteintes volontaires à l'intégrité physique de 6,7 %.

Encore les chiffres nationaux sont-ils bien inférieurs à ceux relevés dans certaines villes de France : je citerai notamment la ville de Drancy, où les vols avec violence ont augmenté de 92 % depuis huit mois et les vols à main armée de 142 %. Face à ce déchaînement de violence, on ne peut se prévaloir d'une action efficace et se féliciter d'une baisse de la délinquance.

Depuis quelques temps, on ressent une curieuse impression de courir après les problèmes sans pouvoir les rattraper. Mais que la gauche ne vienne pas donner de leçons en la matière. Elle revient avec son concept de police de proximité. J'ai vécu cette époque sur le terrain. La police de proximité consistait à disposer d'effectifs d'îlotiers la journée mais de n'avoir aucun effectif la nuit ou les week-ends. Et puis la politique de la gauche a consisté à généraliser les 35 heures, ce qui a conduit à réduire le nombre de policiers sur le terrain. Et sur ce point, je voudrais rappeler la triste réalité des chiffres. Nice avec 400 000 habitants compte le même nombre de policiers qu'en 1945 alors que la population ne comptait que 200 000 âmes.

Les chiffres de la délinquance, au-delà de leur accroissement spectaculaire, devraient être utilisés pour mieux répartir les effectifs de police sur le terrain. Le nombre d'heures de travail hebdomadaire ayant également diminué, vous comprendrez que je réclame toujours avec autant de force un renforcement des effectifs de police. Il est inconcevable que les quartiers qui nécessitent le plus de renforts en soient autant dépourvus.

Non seulement la répartition géographique des nouveaux effectifs demeure très inégale, mais se pose également le problème de la fidélisation. L'objectif de fidélisation doit être encouragé mais il est encore très insuffisant. Car même si, statutairement, pèse sur les personnels une obligation de rester cinq ans, il n'en demeure pas moins que, passé ce délai, on constate une rotation trop importante et préjudiciable à l’efficacité de la police. Trop de jeunes inexpérimentés se retrouvent dans des quartiers difficiles et au moment où ils commencent à connaître le quartier dans lequel ils évoluent, au moment où se tissent des liens d'une police de proximité qui a complètement disparu, au moment où leurs rapports avec la population génèrent moins de tension, ils demandent une nouvelle affectation. Il importe en effet que les policiers puissent connaître le quartier dans lequel ils sont amenés à évoluer, qu'ils puissent identifier ceux à qui ils ont affaire ; ces mécanismes contribueront à faire baisser les tensions sur le terrain. Le rapport sénatorial « Un nouveau pacte de solidarité pour les quartiers » souligne que les évolutions récentes ont contribué à éloigner la police de la population. Or, comme l'ont souligné les rapporteurs de cette mission d'information, il ne peut y avoir de sécurité sans la population. De plus, entre le départ des policiers et de nouvelles arrivées, les périodes de carence sont bien trop longues et les effectifs s'en trouvent considérablement réduits. Il est grand temps de mettre en place des systèmes de fidélisation telles que des aides d'accession à la propriété ou encore des primes pour ceux qui travaillent dans des zones sensibles, afin de donner envie à ces policiers de rester dans ces quartiers plutôt que d'attendre impatiemment la fin de la période de cinq ans.

Le groupe UDF réclame depuis longtemps la mise en place de telles mesures. Je constate d'ailleurs que le rapport sénatorial mentionné précédemment a esquissé plusieurs pistes de réflexion, avec notamment l’idée d'assurer une rémunération et des perspectives de carrières gratifiantes aux policiers et gendarmes qui interviennent dans les ZUS.

Devant une telle situation, l’exercice de la critique est devenu dérisoire. Si les résultats ne sont pas au rendez-vous, c’est que les problèmes sont beaucoup plus profonds. La crise des banlieues a révélé un malaise au cœur de notre société. Ce ne sont pas simplement des problèmes de police ou de justice ; cela relève de questions d’éducation, d’emploi, d’urbanisme, de culture, sur lesquelles il n’y a plus d’adéquation avec la société telle qu’elle est. Le temps de la « guéguerre » politicienne est révolu. Les Français se désespèrent de cette impasse. Ils demandent de la cohésion nationale, car ils estiment que ces questions sont essentielles pour l’avenir de la société. Je ne me sens plus en mesure d’adresser des bons points ou de formuler des critiques ; je demande, tant au ministre de l’intérieur qu’à l’opposition, de faire, avec humilité, le constat de l’échec des politiques menées depuis vingt-cinq ans. Vouloir faire croire que c’est son propre camp qui a raison et que l’autre a forcément tort n’a plus aucune crédibilité dans l’opinion publique.

La discussion de ce budget est l’occasion de faire le bilan, mais aussi de brosser des perspectives d’avenir. J’en appelle à une nouvelle politique, différente de celles menées depuis vingt-cinq ans, qui soit fondée sur le réalisme, la responsabilité et le sens de la cohésion nationale, à défaut de quoi cette spirale de la violence se poursuivra, avec des conséquences désastreuses pour notre société.

En conclusion, les engagements de la loi d’orientation étant globalement tenus, l’heure n’est pas à l’abandon des efforts nécessaires. Nous devons au contraire rester particulièrement attentifs. Le groupe de l’UDF, en responsabilité, votera donc ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures 30.
La séance est levée à 19 heures 50.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.
Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.
www.assemblee-nationale.fr

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