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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

3ème séance du mardi 7 novembre 2006

Séance de 21 heures 30
19ème jour de séance, 38ème séance

Présidence de M. Yves Bur
Vice-Président

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La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

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loi de finances pour 2007 -seconde partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007.

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sécurité, sécurité civile (suite)

M. le Président – Nous poursuivons l’examen des crédits relatifs à la sécurité et à la sécurité civile.

M. Christian Kert – Je n’ai que cinq minutes pour évoquer deux dossiers importants : le renouvellement de notre flotte de bombardiers d’eau et la procédure d’agrément de sécurité civile aux associations.

M. Sarkozy a tenu son engagement de reconstituer notre flotte de canadairs, dramatiquement amputée au cours des dernières années. L’acquisition de deux Dash 8 est un premier pas – quoique ces appareils peu maniables en zone de relief tourmenté suscitent quelques réticences chez les pilotes. Reste la question des six trackers obsolètes que les pilotes souhaitent remplacer par des canadairs de nouvelle génération, comme vient de le faire l’Espagne. Or, on semble s’orienter vers une solution mixte comprenant l’achat d’un monomoteur Air tracker contenant trois tonnes de retardant : ne risquons-nous pas là d’acquérir un appareil dont nous soupçonnons déjà qu’il sera inadapté ? C’est une question d’autant plus sensible que les bombardiers d’eau rendent de grands services aux riverains de la Méditerranée.

Ensuite, une circulaire d’application précise les missions de sécurité civile qui peuvent être confiées aux associations agréées. La loi de modernisation de la sécurité civile dont elle découle présageait une véritable coordination telle que la souhaitaient les comités communaux des feux de forêt. Or, des réticences professionnelles semblent faire obstacle à l’agrément, alors même que ces comités peuvent d’ores et déjà participer aux missions de prévention et de sauvegarde. Au strict plan juridique, il est certes difficile d’agréer une association départementale puisque seuls les comités communaux qu’elle regroupe ont une fonction opérationnelle. Néanmoins, l’application de la loi n’interdit pas de faire preuve d’imagination ! Ainsi, les membres des comités pourraient adhérer, moyennant une somme symbolique, aux associations départementales que l’on chargerait de missions spécifiques. Inutile de rappeler le travail de prévention qu’effectuent ces comités des feux de forêt : leur refuser un agrément semble bien incohérent, alors que dans le même temps on étend leur champ de compétence au sein de notre dispositif de prévention.

Enfin, les récents textes de modernisation de la sécurité civile semblent ignorer les services communaux de protection civile urbaine, créés en 1951, qui répondent pourtant bien souvent aux soucis des élus municipaux en matière de prévention et de gestion des risques. Les maires doivent-ils continuer à leur confier des missions de sécurité civile ?

M. Bernard Derosier - Au nom du groupe socialiste, je tiens à déplorer l’absence de M. Sarkozy qui, après leur avoir asséné tant de contrevérités cet après-midi, ne daigne pas honorer les députés de sa présence ce soir. J’y vois une forme de mépris à l’égard de l'Assemblée nationale.

La sécurité civile est l’affaire de tous. Des citoyens, d’abord : ils revendiquent à juste titre l’égalité d’accès aux secours. Des sapeurs-pompiers ensuite : le dévouement et l’esprit de solidarité qui ont poussé ces hommes et ces femmes à s’engager les honorent, qu’ils soient professionnels ou volontaires. Cette année encore, ils ont payé un lourd tribut en accomplissant leurs missions : le groupe socialiste tient à leur rendre hommage et à exprimer à leur famille toute sa compassion face au drame qui les frappe. Enfin, la sécurité civile est l’affaire de l’État et des collectivités territoriales. Pourtant, le budget ne permet pas d’appréhender l’effort global qu’ils consacrent à la sécurité civile, car la mission concernée est tronquée : elle couvre par nature une politique interministérielle, mais le document qu’on nous présente est placé sous la tutelle unique du ministre de l’intérieur. On m’opposera qu’un document de « politique transversale » a été créé : précisément, il ne fait que confirmer l’urgence de modifier l’architecture générale de la mission ! L’action de l’État ne pourrait qu’y gagner en cohérence et en lisibilité.

Mais il y a pire : ce budget occulte entièrement le rôle des collectivités locales. Elles prennent pourtant en charge la plupart des missions de secours auxquelles elles contribuent à hauteur de trois milliards d’euros alors que l’État n’y consacre que 500 millions ! Actuellement, l’État décide et les départements paient. Le principe de libre administration des collectivités, pourtant garanti par la Constitution, n’est donc pas respecté.

Ces dernières années, les charges des services départementaux d’incendie et de secours ont beaucoup augmenté ; l’association des départements de France prévoit une croissance de 5 % par an durant les prochaines années, cependant que la contribution des conseils généraux augmenterait de 7 à 8 % par an d’ici à 2010. Le Gouvernement a donc beau jeu de prétendre maîtriser les dépenses, alors qu’il ne fait que reporter les charges sur les collectivités !

Trois exemples concrets illustrent combien ce budget n’est pas à la hauteur des enjeux de gestion de ce service public. Tout d’abord, la création de la prestation de fidélisation et de reconnaissance devait initialement récompenser l’engagement citoyen des sapeurs-pompiers volontaires et encourager le volontariat. Intention louable, mais vite tempérée par une gestion lourde et complexe qui coûte chaque année plus de 63 millions aux SDIS. Or, l’État a limité sa participation à cette nouvelle dépense obligatoire à 50 %, en contradiction avec l’article 72, alinéa 2, de la Constitution qui prévoit la compensation de toute charge nouvelle imposée aux collectivités.

Il apparaît en outre que les sapeurs-pompiers volontaires refusent le bénéfice de cette prime qui limite le montant des indemnités qui leur sont versées. Loin d'encourager le volontariat, elle pourrait donc le décourager.

La même logique est à l'œuvre avec le projet Antares, qui a pour but d’améliorer l’interopérabilité des moyens concourant aux missions de sécurité civile. Personne ne niera la nécessité d'améliorer la coordination des services chargés de la protection des personnes, des biens et de l'environnement, ni celle de renforcer la sécurité des personnels intervenant sur le terrain. Mais le projet a été élaboré sans concertation suffisante avec les acteurs locaux et sans porter une attention suffisante à ses conséquences financières pour les SDIS et pour les budgets des départements, lesquels devront une fois de plus supporter le poids d'une décision prise à un autre niveau.

Le troisième exemple est fourni par l’attribution inconsidérée de points de nouvelle bonification indiciaire – NBI – à certains personnels de la fonction publique territoriale. Décision inconsidérée, parce que ceux qui l'ont prise n'en ont absolument pas mesuré les conséquences financières, sans doute parce qu'ils savaient que la charge serait supportée par d’autres. Je ne reviendrai pas ici sur les différentes péripéties de cette réforme, ni sur les multiples erreurs de procédures, notamment l'absence de consultation de la Conférence nationale des SDIS et du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Tout cela manifestait une certaine incompétence et la décision a d’ailleurs été annulée. Il est temps que la Direction de la défense et de la sécurité Civile ne s'occupe plus de la question du statut des fonctionnaires territoriaux que sont les sapeurs-pompiers professionnels. C’est en tout cas la proposition que je fais.

Depuis, un nouveau texte a été proposé, dans un plus grand respect des règles de procédure garantissant la transparence de la prise de décision. On ne peut s'empêcher cependant d'éprouver une certaine inquiétude quant à l'évolution de ce dossier.

Les exemples sont nombreux d'un mode de fonctionnement qui porte atteinte au principe d'autonomie financière des collectivités territoriales, aggrave la dégradation de leurs finances et entrave l'exercice de leurs compétences. Ils sont révélateurs du déséquilibre qui caractérise actuellement le dispositif de sécurité civile en France. Alors même qu'il doit être le principal responsable en matière de sécurité des biens et des personnes, l'État se défausse sur les collectivités territoriales, leur laissant la charge de moderniser la sécurité civile. Et alors que le Gouvernement ne cesse de nous assurer de sa volonté de concertation, on a constaté à plusieurs reprises un parfait mépris pour les représentants des sapeurs-pompiers et des collectivités territoriales.

J’observe au passage que, si la loi d’août 2004 a reconnu le caractère dangereux du métier de sapeur-pompier, aucune disposition réglementaire n’est venue depuis concrétiser cette reconnaissance de la dangerosité. Il est temps de le faire et aussi de penser aux métiers que les pompiers, qui avec l’âge deviendraient moins aptes à accomplir leur dangereuse mission, pourraient exercer au sein de la fonction publique territoriale au moment de leur reconversion.

Dans la mesure où ce budget ne permet en aucun cas d'offrir une vision claire et cohérente de la politique de sécurité civile en France ; dans la mesure où il a été élaboré, une fois de plus, sans souci du principe de libre administration et d'autonomie financière des collectivités territoriales ; et dans la mesure où il ne répond pas de façon satisfaisante aux attentes des citoyens, qui veulent un accès égal, en tous points du territoire, à un service public de qualité, géré dans un souci de préservation des deniers publics, le groupe socialiste votera contre les crédits de la mission « sécurité civile ».

M. Nicolas Perruchot - Commenter la mission « sécurité civile » en quelques minutes est un exercice ardu. Plutôt que de redonner des chiffres et des pourcentages qui ont déjà été commentés, je voudrais apporter un éclairage local et dire comment les élus de proximité que nous sommes vivent ces problématiques.

S’agissant tout d’abord de l’organisation territoriale, il y a encore beaucoup à faire, car force est de constater que sur le terrain, le découpage entre zones de police et zones de gendarmerie n’est pas toujours compatible avec la cohérence territoriale que nous mettons en place, notamment quand nous créons des communautés d’agglomération ou des communautés de communes. Les équipements publics, les travaux de voirie ou les zones d’habitation suivent, eux, une logique territoriale. Il faut donc retravailler sur la cohérence des zones de police, et ce d’autant plus qu’il apparaît que les statistiques sont en général meilleures là où la collaboration de l’État et des collectivités locales, de la police nationale et locale, est bonne.

Le rapport fait état d’une évolution importante de la délinquance des mineurs, puisque nous sommes passés de 13 500 mineurs interpellés en 2003 à plus de 15 000 en 2005. Le ministre d’État a rappelé tout à l’heure la nécessité d’évoluer sur les peines planchers. Je crois effectivement qu’il faut y réfléchir. Mais je pense aussi qu’il faudrait créer des lits de pédopsychiatrie, car nous sommes parfois face à des gamins un peu fous.

Je crois à l’importance de la prévention et je constate que dans ma ville, les correspondants de nuit font un travail remarquable. C’est en partie grâce à eux que la ZUP est calme. Dans le texte sur la prévention, je pense donc qu’il faudra reconnaître leur rôle de travailleurs sociaux.

Je voudrais dire un mot des gens du voyage, non pour les stigmatiser bien sûr, car la République les respecte, même si nos concitoyens ont parfois un peu de mal à comprendre leur façon de vivre, mais pour illustrer les difficultés que nous rencontrons parfois sur le terrain. Il y a une semaine, à Blois, s’est produit un drame terrible : un jeune nomade, semi-sédentarisé, qui tirait des pigeons sur le terrain où il vit, a malheureusement tué son enfant de cinq ans. Cette personne a été entendue par la police judiciaire, gardée à vue quelques heures puis relâchée, car on a considéré que c’était un accident. À mes yeux comme à ceux de beaucoup de gens, il s’agit plutôt d’un homicide involontaire, qui mériterait un autre traitement. J’en dirai d’ailleurs deux mots au garde des sceaux, car je crois que c’est mon rôle. En tout cas, l’émoi est grand dans la population. Ce drame pose aussi le problème des gens qui utilisent des armes et des territoires sans le moindre permis de chasse. Je crois que la création d’un fichier des permis de chasser serait utile et permettrait d’éviter certains drames.

Je voudrais pour conclure évoquer les GIR, qui constituent un outil intéressant. Mais ces GIR sont-ils réservés aux gros départements riches, dans lesquels les préfets de région ont leur bureau ? Je pose la question, car cela fait maintenant un certain temps que j’appelle de mes vœux quelques enquêtes dans le Loir-et-Cher. Je serais en tout cas intéressé par un bilan territorial de l’action des GIR, car il me semble qu’il y a malheureusement beaucoup de départements qu’elle ne concerne pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Émile Zuccarelli – Je centrerai ma brève intervention sur le financement des SDIS et, plus précisément, sur l'implication des communes et des intercommunalités.

L'article L. 1424-35 du code général des collectivités territoriales donne pouvoir aux conseils d'administration des SDIS de fixer les participations financières des communes et des EPCI. Or, ces conseils d’administration sont très largement dominés par les représentants des départements, de sorte que le niveau communal et intercommunal a parfois l'impression de subir des décisions arbitraires.

Il n’est pas normal qu'une collectivité puisse en taxer unilatéralement une autre. Ce type d'anomalie s'est rencontré jadis avec les fameux contingents d'aide sociale, imposés là encore par les départements aux communes. Le législateur, dans sa sagesse, l’a fait disparaître en renvoyant aux départements, avec les compensations adéquates, le poids intégral de ces charges, dont il décidait souverainement.

Une anomalie analogue se présente donc pour les SDIS, d’autant plus gênante que leur budget explose, partout en France, avec un triplement des contributions des collectivités entre 1997 et 2004.

Par la loi du 27 février 2002, le législateur a décidé de supprimer les contributions des communes à compter de 2006 pour les remplacer par un prélèvement sur les dotations d’État, puis de limiter les budgets des exercices suivants. C’était une mesure avisée, chaque collectivité étant à même d’assumer les résultats de ses propres décisions. C’était aussi une décision judicieuse, car elle aidait les communes à accepter – fût-ce en gémissant – une situation anormale puisque contraire au principe républicain de non hiérarchisation des collectivités. Las, dès la loi du 13 août 2004, cette clarification était reportée au 1er janvier 2008 et les propos de M. Sarkozy au 113e congrès des sapeurs-pompiers, le 7 octobre dernier, laissent craindre un nouveau report pour deux ou trois ans.

Une telle fuite en avant est très inquiétante. Il est sans doute tentant de laisser filer le budget des SDIS et de faire des annonces avantageuses à la faveur de la chaleur d’un congrès de pompiers, mais ces décisions ne sont pas propices à une bonne gestion d’un service public aussi essentiel que celui des SDIS.

Je prévois que le Gouvernement me répondra en se retranchant derrière le fait qu’aucun projet de loi n’a été déposé à ce jour et peut-être me servira-t-il l’argument – pourtant quasi risible – que la situation que l’on envisage de prolonger permet de gager la participation des maires aux décisions ; le problème, c’est qu’en l’occurrence, s’ils participent à quelque chose, c’est aux dépenses et non aux décisions ! Je souhaite donc plutôt, Madame et Monsieur les ministres, que vous nous rassuriez sur ces différents points. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Jean-Pierre Decool – Mon intervention tendra à décrire ma position sur le budget général, l'importance des sapeurs-pompiers volontaires dans le dispositif de sécurité civile et l’avancée majeure que constitue la prestation de fidélisation et de reconnaissance.

Mettant l’accent sur le retour aux grands équilibres, ce budget dote la France de solides objectifs en matière de désendettement, de croissance, de compétitivité et de hausse du pouvoir d'achat. Nos concitoyens pourront ainsi apprécier une situation budgétaire responsable, qui n'hypothèque pas l'avenir de nos enfants et permet à la France de rester un pays leader dans l'Union européenne. Une France dynamique, porteuse des valeurs du travail et de l'effort, optimiste et croyant en ses capacités et son avenir.

Symboles de cette France généreuse et ouverte, nos pompiers volontaires sont la base de notre dispositif d'incendie et de secours. En France, sur les 250 000 sapeurs-pompiers, 80 % sont des volontaires. Citoyens responsables, ces hommes et ces femmes ont choisi de conserver une disponibilité suffisante pour répondre immédiatement à toute alarme du centre de secours dont ils dépendent. Cette organisation permet un maillage étroit du territoire, indispensable pour garantir l'égalité des citoyens face aux secours. Chaque jour, la mission des pompiers est particulièrement exigeante. Conscients de cette réalité, les centres de secours doivent attirer sans cesse de nouveaux volontaires, les écoles de jeunes sapeurs-pompiers jouant à cet égard un rôle essentiel.

Faut-il rappeler toute l'importance qui s’attache à l’enjeu de fidéliser ces sapeurs-pompiers volontaires, de les protéger, de leur permettre de rester aptes – physiquement et psychologiquement – et de leur assurer une reconnaissance, pendant mais aussi en fin de carrière ? C'est dans cet esprit que la prestation de fidélisation et de reconnaissance a été créée en 2004. Elle constitue un nouveau régime de retraite complémentaire par capitalisation, applicable depuis le 1er janvier 2005 ; il est financé à 50 % par l'État, par les SDIS et par le volontaire, qui cotise à hauteur de 50 euros par an. La PFR donne droit à tout volontaire retraité de plus de 55 ans, et justifiant de vingt ans d'ancienneté, d'obtenir une retraite complémentaire.

Cette mesure emblématique de la loi de modernisation de la sécurité civile répond à une demande présentée par la fédération des sapeurs pompiers depuis près de vingt-cinq ans. Elle tend à fidéliser les volontaires, par une incitation concrète à prolonger leur engagement, ce qui contribue à la sauvegarde d’un service public de secours de proximité. Elle exprime aussi de manière tangible la reconnaissance de la nation pour leur action.

C'est pourquoi, j'ai été fort surpris quand, participant au Congrès départemental des sapeurs-pompiers du Nord, j’ai été interpellé sur un éventuel désengagement de l'État du financement de cette prestation. D’après mes interlocuteurs, l’État envisagerait de ne pas honorer son projet de la financer à hauteur de 50 %. Je n’ose le croire…

M. Paul Giacobbi – Mais si, osez, cher collègue. Vous avez été bien informé !

M. Jean-Pierre Decool – …compte tenu de l’attention constante du Gouvernement en faveur des sapeurs-pompiers volontaires. Pouvez-vous, Madame et Monsieur les ministres, m'éclairer sur ce point ?

Par ailleurs, alors que ces hommes et ces femmes sont au service de nos concitoyens de jour comme de nuit, la représentation nationale et l'État ne peuvent admettre qu'ils soient victimes d'attaques violentes, comme nous pouvons, hélas, le constater depuis quelques années. Cela est intolérable et je soutiendrai toute initiative en faveur du renvoi en cour d'assises des auteurs de violences contre les sapeurs-pompiers.

M. Paul Giacobbi – Je partage l’analyse de notre collègue Zuccarelli sur le report de la départementalisation des SDIS. Les annonces faites sont aussi lâches qu’absurdes.

En matière de sécurité, le ministre d’État, qui exerce le pouvoir depuis plus de quatre ans, se flatte d’avoir profondément réformé les méthodes : il doit donc assumer l’intégralité des résultats et reconnaître que ce qui se passe engage pleinement sa responsabilité.

Selon les chiffres – forcément incontestables – de la Documentation française, entre 2002 et 2005, la Corse a connu 949 attentats à l’explosif, alors qu’il y en avait eu 547 entre 1998 et 2001 et 1349 entre 1994 et 1997…

M. Bernard Derosier – Qu’en dit M. Sarkozy ?

M. Paul Giacobbi – Le gouvernement de Lionel Jospin avait donc obtenu une baisse de 60 % des attentats, sans rien céder, notamment au plan judiciaire ; en revanche, votre gouvernement a laissé augmenter cette forme bien particulière de criminalité de 73 % et s’installer un climat où il est devenu courant de voir les parquets généraux plaider la relaxe dans des procès concernant la grande criminalité organisée. Il est légitime de se demander si cette pratique résulte d’une intimidation, de la corruption par les réseaux du crime organisé, d’une instruction gouvernementale ou de la combinaison des trois.

J’ai questionné le ministre d’État à ce sujet et il m’a fait une réponse pour le moins sidérante, tendant à comparer le nombre d’attentats sur cinq ans – entre 1997 et 2002 – et celui constaté en deux ans. Inutile d’être polytechnicien pour comprendre qu’il y a un biais ! M. Vaillant a également saisi son successeur pour l’inviter à reconnaître les faits et à rétablir la vérité des chiffres. Dans le même ordre d’idée, je souhaiterais que le rapporteur spécial Le Fur nous explique comment la gendarmerie nationale peut – si j’en crois la page 49 de son rapport – assurer la prise en charge de 453 480 personnes en Haute-Corse alors que le département ne compte pas plus de 140 000 habitants… Il y a sûrement une explication rationnelle et j’attends avec impatience de la connaître.

Par ailleurs, j’ai interrogé à plusieurs reprises le Gouvernement sur le comportement scandaleux de certains parquets généraux d’assises et je déplore que personne n’ait pu m’expliquer les raisons de leur incroyable complaisance.

S’agissant des atteintes aux dépositaires de l’autorité publique, qui se sont multipliées sous « vos » années, je dois dire que la solidarité qu’a manifestée Mme Alliot-Marie aux gendarmes en se rendant sur place à chaque occasion a été particulièrement appréciée. Permettez-moi, Madame la ministre, de vous en remercier au nom des pelotons de gendarmerie et de la population corses.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour la gendarmerie nationaleC’est très bien de le dire !

M. Paul Giacobbi – Mais la prise en compte de ces atteintes est extrêmement récente. Pour habiter à portée de voix d’une gendarmerie ayant fait l’objet de deux plastiquages depuis 2002, j’ai été extrêmement choqué de la légèreté avec laquelle ces affaires ont été traitées. Les préfets se sont permis de déclarer que de très faibles quantités d’explosif avaient été utilisées et que, de ce fait, les dégâts étaient minimes, ce qui ne correspond en rien à la réalité. J’ai personnellement constaté qu’un portail en fer forgé avait été complètement tordu par le choc et que deux véhicules avaient été gravement endommagés. Mentir pour minimiser un attentat à l’explosif contre une gendarmerie est pour le moins contradictoire avec la nouvelle politique de criminalisation de toutes les atteintes aux forces de l’ordre. Il est vrai qu’à l’époque, la presse se souciait moins de ces questions…

S’agissant, enfin, de la sécurité dans les quartiers sensibles, nous avons entendu pendant trois ans ce gouvernement présenter les GIR comme la panacée, à l’occasion de conférences de presse quasi mensuelles, après qu’il eut démantelé la police de proximité et coupé les vivres aux associations. Or depuis quelques temps, il n’en est plus jamais question ! Que sont devenus les GIR ? Les opérations de perquisition spectacle coproduites par le cabinet du ministre d’État et TF1 ont-elles vocation à les remplacer ? On se souvient de cette perquisition à La Courneuve, largement annoncée à l’avance et couverte par la télévision, où la mobilisation de 600 policiers n’a pas permis de saisir une seule arme ou un gramme de drogue. À perquisitionner dans de telles conditions, vous n’auriez pas trouvé une trace de cacao chez la Marquise de Sévigné ! (Sourires sur les bancs du groupe socialiste)

Malgré le spectacle, les chiffres sont têtus : entre 2001 et 2005, les crimes et délits contre les personnes sont passés de 279 610 à 354 836, soit une augmentation de plus de 25 %. Dans quel pays oserait-on dire que la criminalité contre les personnes ne représente que 10 % des problèmes de sécurité quand c’est au moins de la moitié qu’il s’agit ? Ce n’est pas sérieux ! Partout à l’étranger on affirme que la France ne parvient plus à assurer la sécurité des personnes dans les banlieues. Même The Economist, pourtant bienveillant à l’égard de M. le ministre d’État, a analysé les conséquences d’un tel échec. Je ne terminerai pas sans dire combien l’étalage de chiffres sortis de leur contexte, en fin d’après-midi, était pitoyable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Michel Hunault – Ce budget sur la sécurité et la sécurité civile est le dernier de la législature. C’est donc l’occasion d’examiner la politique qui a été menée, que je tiens d’ailleurs à saluer. L’opposition a incriminé les chiffres cités, mais elle aurait dû se montrer un peu plus modeste compte tenu de son bilan. Quoi qu’il en soit, la discussion générale méritait mieux.

M. le ministre d’État a salué le courage des forces de l’ordre et je m’associe à son hommage. Il me semble qu’il convient d’intensifier la lutte contre la criminalité organisée – filières de la prostitution, de la drogue, de l’immigration clandestine. Le Gouvernement a créé les GIR afin de mieux coordonner les actions des gendarmes, des policiers et des douaniers et de mieux s’attaquer à l’économie souterraine.

M. Jean-Pierre Blazy – Le bilan est mince.

M. Michel Hunault – Il faut cependant aller encore plus loin. La directive de l’Union européenne sur le blanchiment de l’argent et le financement du terrorisme mériterait ainsi d’être rapidement transposée. Il convient également d’intensifier la coopération européenne et internationale. J’insiste pour que cette lutte se fasse dans le strict respect du droit, en particulier au moment des arrestations et des gardes à vue.

Je salue le rôle exemplaire des sapeurs-pompiers volontaires. L’Assemblée nationale a voté à l’unanimité, il y a deux ans, une loi leur accordant des avantages. Il faut que la solidarité nationale s’applique encore plus largement.

Enfin, M. le ministre d’État a appelé à faire montre d’une plus grande sévérité à l’égard des récidivistes. En l’état de la législation, ils peuvent bénéficier des mêmes remises de peine et des mêmes libérations conditionnelles que les autres détenus. J’ai présenté un amendement, qui n’a pas été adopté, visant à remettre en cause cette automaticité. Une modification de la loi s’impose donc.

Je rends hommage à ce gouvernement qui veut rétablir l’État de droit.

M. Paul Giacobbi – Il serait temps !

M. Michel Hunault – La volonté politique est là, des crédits ont été votés. Un tel objectif devrait nous réunir alors que certains préfèrent se livrer à des manoeuvres électorales.

Je salue enfin M. le ministre d’État qui souhaite engager les travaux du nouvel hôtel de police de Nantes, chantier qui était attendu depuis vingt ans et dont j’espère qu’il pourra poser la première pierre avant les échéances du printemps. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense  Ce budget est le dernier de la période de programmation de la LOPSI. Il est donc temps de dresser le bilan de son exécution. Avec 5,5 milliards, les crédits du programme « gendarmerie » augmentent de 2,9 % par rapport à 2006, hausse plus importante que celle des crédits de l’ensemble de la mission « sécurité ». Les gendarmes y voient d’ailleurs un signe de la confiance nationale.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis  Très bien.

Mme la Ministre – J’ai veillé à ce que les crédits votés soient sanctuarisés et utilisés exclusivement pour la gendarmerie. Ce sont plus de 100 000 gendarmes qui assurent la sécurité des Français sur 96 % de notre territoire. En 2007, 950 emplois de gendarmes seront créés, ce qui porte à 6 050 le nombre d’emplois créés en cinq ans, soit une hausse de 6 % des effectifs. J’ajoute que ces chiffres correspondent au maximum d’élèves que nos écoles de gendarmerie peuvent intégrer.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis – C’est juste.

Mme la Ministre – Je veille également à ce que les gendarmes recrutés sur ces nouveaux emplois soient prioritairement affectés aux missions d’ordre et de sécurité publique afin qu’ils soient le plus possible sur le terrain.

L'effort porte aussi sur la réserve, dont le rôle est essentiel. Les crédits que j'y consacrerai en 2007 pour la gendarmerie atteindront 41 millions. Le nombre de réservistes devrait être de 25 000, ce qui représente un doublement par rapport à 2002. Force complémentaire des gendarmes d'active, les réservistes apportent une aide déterminante sur le terrain. En les faisant défiler pour la première fois le 14 juillet dernier sur les Champs-Élysées, j'ai voulu que la nation leur rende hommage.

Au-delà des effectifs, je veille à la condition des personnels. Le plan d'adaptation des grades aux emplois que j'ai décidé en 2004 est mis en œuvre pour la troisième année consécutive. Il vise à reconnaître à leur juste niveau les responsabilités exercées par les cadres de la gendarmerie. Il s'agit d'une réforme majeure destinée à renforcer la capacité d'encadrement de la gendarmerie en ouvrant notamment de nouvelles perspectives aux sous-officiers. Avec 18 millions supplémentaires en 2007, 750 postes d'officiers et 634 postes de sous-officiers supérieurs seront créés par transformation de postes de sous-officiers.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis – Très bien.

Mme la Ministre – En trois ans, ce sont 64 millions qui auront été consacrés au PAGRE avec, à la clé, 2 500 emplois d'officiers créés pour renforcer l'encadrement de la gendarmerie.

Les crédits d'investissement ouverts au titre de la LOPSI augmentent de 10 % en 2007. Ils s'élèvent à 220 millions. Avec les crédits que la gendarmerie reçoit par la LPM, ce sont 570 millions qui auront été débloqués, soit 4 % de crédits d'équipement de plus qu'en 2006. La gendarmerie a donc bénéficié, au même titre que les armées, de l'effort budgétaire réalisé par la LPM.

En 2007, le ministère de la défense commandera les nouveaux véhicules blindés de la gendarmerie, les véhicules actuels datant de la fin des années 60 et leur taux de disponibilité étant inférieur à 50 %.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis – Tout à fait.

Mme la Ministre – 97 millions d'autorisations d'engagement permettront de commander dans les prochains mois les 78 premiers véhicules. La cible totale, je le confirme, est de 122 véhicules. L'appel d'offres permettra la notification du marché début 2007 pour une livraison en 2008.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis – Très bien.

Mme la Ministre – Le renouvellement du parc d'hélicoptères s'ajoute à celui des véhicules. En 2006, les marchés de renouvellement des hélicoptères d'intervention EC145 ont été lancés. Quatre appareils seront livrés en 2007. Douze hélicoptères de surveillance et d’intervention – EC135 – seront commandés en 2006, les livraisons intervenant à partir de début 2008.

Les principaux équipements prévus par la LOPSI sont déployés ou en voie de l’être : nouvelles tenues, gilets pare-balle, pistolets de nouvelle génération. La gendarmerie mobile est progressivement équipée du nouveau véhicule de groupe : 718 des 1 016 véhicules prévus sont livrés ou commandés ; les autres le seront en 2007.

100 millions d’euros seront consacrés aux télécommunications et à l’informatique.

L’immobilier est un élément clé de la condition des gendarmes, leur disponibilité permanente imposant de les loger, ce qui constitue une difficulté particulière par rapport à la police. En plus des 220 millions d'euros prévus par la LOPSI, j'ai obtenu 400 millions qui permettront de réaliser cinq opérations immobilières de grande ampleur – dont le regroupement de la gendarmerie à Issy-les-Moulineaux – selon la procédure de l'article 3 de la LOPSI. Si nous avons choisi cette procédure, Monsieur Folliot, c’est pour aller plus vite. Ayant mis en vente un grand nombre d’emprises ou d’immeubles de La Défense, je sais en effet que les procédures sont très longues. La procédure choisie permettra en outre à l’État d’être de nouveau propriétaire en fin de programme. Bref, c’est une opération gagnante.

Plus de 4 000 unités logement seront mises en chantier en 2007, et les constructions domaniales augmenteront de 130 % par rapport aux années passées.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis - C’est nécessaire.

Mme la Ministre - Les efforts engagés depuis plusieurs années portent leurs fruits. Le nombre des livraisons fera plus que doubler en 2007 par rapport à la moyenne 2003-2006, avec plus de 3000 unités logement.

Le succès de la formule du bail emphytéotique administratif n'est plus à démontrer. J’attire néanmoins votre attention sur le risque de l'augmentation des charges de loyers, d'autant que certains opérateurs se montrent particulièrement gourmands. Je souhaite donc qu’une concertation ait lieu avec le ministère pour obtenir qu’ils modèrent leurs ardeurs. J'ai également demandé au ministre délégué au budget d'aménager le décret de 1993 relatif aux subventions d'investissement, afin de le rendre plus attrayant pour les collectivités locales, ce qui pourrait être une alternative au BEA.

Pour les gendarmes et pour leurs familles, il est aussi important d’améliorer l’entretien du parc immobilier. J’ai constaté personnellement que certains casernements étaient indignes de serviteurs de l’État à qui l’on demande tant. C'est pourquoi j'ai décidé de lancer une première phase d'externalisation de la gestion des logements. Ce dossier a pris du temps : complexe, il a aussi suscité des réticences nées d’un certain conservatisme.

Quoi qu'il en soit, la première phase concernera trois ensembles : les régions de gendarmerie du Nord et de Picardie, 14 casernes domaniales d'Île-de-France et 6 casernes domaniales de la région PACA. Les trois appels d'offres aboutiront à la sélection des lauréats à la fin du premier trimestre prochain.

La mise en œuvre de la LOPSI pour la gendarmerie est l’une des réussites du Gouvernement, et le rapport de M. Le Fur le reconnaît. Comme pour la police, tous les objectifs quantitatifs ne sont pas encore atteints, mais nous avons bien progressé. Je regrette simplement que la LOPSI n’ait pu être annualisée comme l’a été la loi de programmation militaire.

En tout état de cause, la gendarmerie dispose aujourd'hui des moyens et des effectifs nécessaires à l'exercice de ses missions. Le « coup d'accélérateur » que j'ai donné depuis deux ans – avec votre soutien – a permis de combler presque tous les retards nés des difficiles négociations budgétaires de l'été 2004. Je me félicite donc de pouvoir mettre à la disposition du ministre de l’intérieur une gendarmerie nationale prête à remplir les missions qui lui sont confiées. C’est un beau chemin qui a été parcouru ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

Grâce à ces années d'efforts et de réformes, la gendarmerie présente en 2007 un nouveau visage, celui de la renaissance. En 2002, elle se trouvait dans une situation alarmante. En près de cinq années, des progrès considérables ont été réalisés ; le dynamisme et l'optimisme sont de retour, et les résultats le prouvent, qu’il s’agisse de la lutte contre la délinquance ou de la sécurité routière – en Corse aussi, Monsieur Giacobbi. Les chiffres que vous avez cités, qui me paraissent d’ailleurs faibles, sont ceux de la population estivale. Élue d’une ville touristique, je connais les besoins que cela entraîne en matière de sécurité.

En ce qui concerne les attentats, nous ne pouvons que les déplorer. En Corse comme au Pays basque, la violence est cyclique. S’il est normal que le ministre de la défense manifeste son soutien aux gendarmes et à leurs familles, il serait bon que les élus locaux condamnent davantage ces actes et manifestent eux aussi leur solidarité. (MM. Giacobbi et Zuccarelli protestent) Lorsque des attentats sont perpétrés au Pays basque, je stigmatise toujours, en tant qu’élue locale, ceux qui prennent la responsabilité de porter atteinte à la vie des autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Je vous incite à faire de même, et de la façon la plus visible qui soit !

M. Paul Giacobbi – Nous le faisons, et nous risquons notre vie !

M. Émile Zuccarelli – Vous y allez un peu fort !

Mme la Ministre – Je note aussi les succès récents de la gendarmerie dans un domaine dans lequel elle complète désormais l'action de la police nationale, la lutte contre l'immigration irrégulière. Il faut que l’on sache que la loi est respectée sur notre territoire. Sur les huit premiers mois de l'année, le nombre de personnes mises en cause pour immigration illégale par la gendarmerie a augmenté de 60 %.

Je veux enfin saluer l'action de la gendarmerie contre le terrorisme. Grâce à l'action quotidienne des unités, à l'emploi d’unités spécifiques, elle assure la protection des « points sensibles » en France et à l'étranger.

La gendarmerie de 2007 n'est plus celle de 2002. D'abord, le caractère militaire de la gendarmerie est conforté – et je remercie M. Folliot de l’avoir reconnu : retour au recrutement des officiers via les écoles supérieures militaires, place significative de la gendarmerie dans le nouveau statut général des militaires, nomination d'un officier général à sa tête. La coopération avec les armées est une réalité quotidienne, qui va bien au-delà des 5 % d'activité militaire dont j'entends parler de temps à autre. La gendarmerie maritime et la marine oeuvrent main dans la main à la défense de nos côtes et à la sécurité de nos ports. La gendarmerie et l'armée de l'air sont en liaison permanente pour assurer la défense de l'espace aérien, comme l'a montré l'interception récente d'un ULM aux environs de la centrale nucléaire de Flamanville.

Comme vous l’avez souligné dans votre rapport, Monsieur Folliot, l'action de la gendarmerie sur certains territoires, notamment outre-mer, requiert un lien étroit avec l'armée de terre et une disponibilité et des savoir-faire propres à une force armée.

Je suis favorable à une « inter-armisation » poussée de nos moyens. J’ai ainsi demandé à l'armée de l'air et à l'armée de terre de mettre à disposition du GSIGN, à Satory, des moyens aéroportés de façon permanente.

Le caractère militaire de la gendarmerie n'empêche pas une excellente collaboration avec la police dans les structures et actions communes. Je pense notamment aux groupements régionaux d'intervention, au réseau des attachés de sécurité intérieure ou au fichier national des empreintes génétiques. Mais la gendarmerie est une force armée parmi d'autres, conformément à nos principes républicains qui ont toujours évité le regroupement des forces de sécurité. II est essentiel pour la démocratie qu’elle demeure sous la responsabilité du ministre de la défense.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis - Très bien !

Mme la Ministre - Les cadres d'emploi de la gendarmerie se sont diversifiés. Son action est loin de se limiter à ses missions de police. Elle intervient d’abord dans le cadre de multiples opérations intérieures. Grâce à la réaffirmation de son caractère militaire, les missions exercées sous l'autorité du chef d’état major des armées sont aussi en pleine expansion. Près de six cents gendarmes servent actuellement en opérations extérieures. Sur les des théâtres en cours de stabilisation, leur savoir-faire est extrêmement utile et apprécié. Je compte d’ailleurs favoriser ces déploiements. Pour la première fois, le budget que je vous présente comporte une provision de 15 millions d'euros pour les OPEX de la gendarmerie. Comme pour les armées, cette provision est égale aux deux tiers des surcoûts annuels constatés en moyenne chaque année.

La gendarmerie exerce aussi ses missions dans un cadre européen au sein de la force de gendarmerie européenne dont j'avais proposé la création en 2003 à Rome et qui est devenue réalité en 2004. Je suis convaincue qu'à l'avenir, la gendarmerie travaillera de façon de plus en plus étroite avec les armées et que ses missions seront de plus en plus liées à l'Europe de la défense et de la sécurité.

Depuis 2002, ses missions ont changé et ses moyens ont évolué. Son organisation interne a également été transformée. Avec Nicolas Sarkozy…

M. Jean-Pierre Blazy – Qui n’est pas là !

Mme la Ministre – …nous avons réussi, dans les délais prévus, les redéploiements entre les forces de police et de gendarmerie. Les communautés de brigade, dont le concept était très novateur, ont toutes été constituées. On compte désormais 1068 communautés de brigades et 654 brigades territoriales autonomes. La réforme, bien comprise, a été menée à la satisfaction de tous. Je suis prête à m’entretenir avec les élus qui le souhaitent pour examiner les ajustements nécessaires. Le ministre d’État partage également cette volonté de pragmatisme. Oui, Monsieur Blazy, les gendarmes assurent depuis toujours une police de proximité, avec une détermination et une motivation très appréciées, et un savoir-faire qui nous est envié. Les premiers retours d’expérience de cette nouvelle organisation sont très positifs.

Depuis cinq ans, la gendarmerie a été une priorité de mon action. Elle a été l’une des priorités budgétaires de la LOPSI et de la loi de programmation militaire. Le renforcement de ses moyens et la rénovation de son organisation ont permis de répondre aux objectifs de sécurité fixés par le ministre de l'intérieur. Engagée tous azimuts, y compris dans un cadre européen, la gendarmerie nationale constitue un élément-clé de notre politique de défense et de sécurité. Elle contribue à la sécurité des Français, à la préservation de la stabilité intérieure et de nos institutions. Sa disponibilité totale, fruit de son statut, sa discipline militaire, son moral retrouvé, son encadrement renforcé en font une force d'avenir qui attire de plus en plus de jeunes candidats. Il est essentiel que notre pays continue de disposer de forces de sécurité complémentaires, légitimement fières de leurs différences, mais déterminées à agir ensemble.

Ne nous trompons en effet jamais de priorité. Notre premier devoir est d’assurer la sécurité de nos concitoyens. Il en va de la cohésion de notre pays, il en va de l’avenir de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales – En l’absence du ministre d’État, mais aussi de celle de M. Gremetz, ce qui devrait nous permettre d’aller plus vite (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains), je répondrai aux orateurs qui sont intervenus dans la discussion générale.

M. Desallangre a longuement évoqué la police de proximité. Créée en 1995 – n’en usurpez donc pas la paternité ! –, celle-ci a été, sinon dévoyée, du moins mal orientée entre 1997 et 2002 où ont été délaissés, parmi ses missions, interpellations et investigations. C’est pourquoi le ministre d’État a souhaité réorienter l’action de la police afin, notamment, que les fonctionnaires soient présents sur le terrain aux heures où se produisent majoritairement les actes de délinquance, et non pas seulement jusqu’à 19 heures !

M. Bernard Derosier – Avec le succès que l’on sait !

M. Jean-Pierre Blazy – Cette réponse n’est pas assez complète.

M. le Ministre délégué – Peut-être, mais il est un constat simple, Monsieur Blazy : si la police de proximité avait fonctionné, la délinquance aurait diminué. Or, elle a augmenté de 14,5 % entre 1997 et 2002 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Les crédits de fonctionnement et d’investissement consacrés à la sécurité publique ne sont pas en recul, Monsieur Desallangre. Ils augmentent au contraire de trois millions d’euros par rapport à 2006. Si la masse salariale diminue quelque peu, il est vrai, il y aura néanmoins davantage de fonctionnaires affectés à des missions de police judiciaire.

M. Bernard Derosier – C’est de la magie !

M. le Ministre délégué – Si les infractions à la législation sur les stupéfiants ont augmenté de 33 % en quatre ans, c’est tout simplement parce que les forces de l’ordre effectuent un remarquable travail d’investigation (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). En ce domaine tout particulièrement, Monsieur Derosier, si on ne cherche rien, on ne trouve rien ! Le ministre d’État a demandé aux policiers d’enquêter. Les résultats ne se sont pas fait attendre.

M. Bernard Derosier – Pas à Roubaix !

M. le Ministre délégué – M. Desallangre a regretté que des informations chiffrées sur la performance de la police nationale ne soient pas disponibles département par département. Ces informations existent, et je les tiens à votre disposition, de même sans doute que le préfet de l’Aisne. Les rapports de MM. Le Fur et Geoffroy contiennent également toutes les données que vous cherchez. Les indicateurs de performance ont tous été renseignés, à l’exception de deux d’entre eux, pour lesquels les outils informatiques de calcul ne sont pas encore au point, mais ils le seront courant 2007.

Monsieur Blazy, la violence ne stagne pas, comme vous le prétendez : elle régresse. Seules les violences intrafamiliales sont en hausse mais, de cela, peut-on accabler la police et la gendarmerie ?

En matière de lutte contre la délinquance, chacun doit faire preuve d’humilité.

M. Bernard Derosier – Ce n’est pas la qualité première de Nicolas Sarkozy !

M. le Ministre délégué – Jamais il n’a prétendu que tous les problèmes avaient été résolus. Il a seulement indiqué que l’action engagée allait dans le bon sens. Je vous rappelle qu’entre 1998 et 2002, les violences contre les personnes avaient augmenté de 48 %.

M. Paul Giacobbi – C’est faux !

M. le Ministre délégué – S’agissant de la responsabilité des mineurs, votre aveuglement ne laisse pas de surprendre. Qui peut soutenir qu’un mineur aujourd’hui a quelque chose à voir avec un mineur de 1945 ? C’est le même aveuglement qui vous fait réclamer le retour de la police de proximité, laquelle n’avait pourtant pas fait ses preuves. (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

Vous avez regretté, Monsieur Blazy, de n’avoir pas été destinataire des rapports d’exécution de la LOPSI.

M. Jean-Pierre Blazy – Tous les parlementaires le regrettent.

M. le Ministre délégué – Depuis 2003, les rapports annuels ont été transmis au Parlement lors du débat budgétaire. D’ailleurs, Monsieur Blazy, vous avez vous-même reconnu avoir personnellement reçu le rapport 2006.

M. Jean-Pierre Blazy – Oui, dans le couloir tout à l’heure. Ce n’est pas sérieux !

M. le Ministre délégué – L’avez-vous ? La réponse est oui. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

S’agissant des effectifs, à la fin 2007, 6 200 fonctionnaires supplémentaires auront été recrutés en cinq ans au titre de la LOPSI et les effectifs de la police nationale auront globalement augmenté de plus de 9 000 unités. Sur ces 6 200 recrutements, 2 000 auront eu lieu sur des postes administratifs, techniques et scientifiques. On peut toujours trouver l’effort insuffisant. Il est en tout cas sans précédent.

Pour ce qui est du délai d’incorporation dans les écoles de police, il a été ramené de 24 mois en 2002 à 11 mois en 2006.

En matière de lutte contre l’immigration clandestine, des progrès très nets ont été enregistrés – la situation, aussi bien outre-mer qu’en métropole, l’exigeait. Alors qu’en 2002, seules 10 000 reconduites à la frontière avaient été exécutées, grâce aux nouveaux moyens mis en œuvre, ce chiffre a doublé. Et, Monsieur Blazy, ce ne sont pas les interpellations d’étrangers en situation irrégulière qui expliquent que le taux d’élucidation des affaires soit passé de 24 % à 33 % en quatre ans. En effet, on dénombre moins de 80 000 interpellations de clandestins chaque année pour plus de trois millions de crimes et délits. Le coût d’une rétention, que vous demandiez à connaître, s’élève à 875 euros, comme indiqué dans le PAP. S’agissant enfin de l’Institut national des hautes études de sécurité, c’est en effet Nicolas Sarkozy qui a donné une nouvelle impulsion à cet organisme prestigieux…

M. Jean-Pierre Blazy – En mettant les chercheurs à la porte !

M. le Ministre délégué – …en lui laissant le soin de créer en son sein l’Observatoire national de la délinquance, que MM. Caresche et Pandraud appelaient de leurs vœux. La création de cet observatoire a conduit à une réorganisation de l’établissement en trois pôles, dont un département « formation, études et recherches » et un département « intelligence économique et gestion de crises ». Pour le reste, gardons-nous des procès de personnes.

M. Salles a souligné avec bon sens les effets pervers de la réduction du temps de travail dans la police nationale. Outre les recrutements prévus dans la LOPSI, de nombreuses mesures ont dû être prises dès 2002-2003 pour y remédier, comme la possibilité offerte aux fonctionnaires de racheter huit jours de RTT ou de se voir payer leurs astreintes. En réponse à sa question précise, j’indique à M. Salles qu’au 1er octobre dernier, on comptait 156 policiers de plus à Nice qu’au 1er janvier 2002, grâce notamment à la fusion des circonscriptions de Nice et de Villefranche-sur-mer. Pour ce qui est des difficultés des quartiers, qu’il a longuement évoquées, leurs solutions ne relèvent bien sûr pas de la seule politique de sécurité. C’est d’ailleurs pourquoi le ministre délégué à l’aménagement du territoire traite de nouveau des zones urbaines, qui souffrent elles aussi des inégalités territoriales, les quartiers difficiles constituant les nouveaux déserts français. Un appel à projets a d’ailleurs été lancé en octobre dans toutes les régions afin de mobiliser les fonds structurels européens en faveur de ces quartiers.

M. Kert a fait part de son inquiétude concernant l’avion Dash. Certaines interrogations émanaient de membres du personnel navigant mais qui n’avaient pas embarqué sur cet avion, lequel a fait l’unanimité lors de la campagne de feux de forêts de 2006, quant à sa rapidité, la précision de son largage… M. Kert a également évoqué le douzième Canadair : c’est vrai que, pour la première fois depuis 1997, la flotte de bombardiers amphibies sera à son niveau optimal. Quant au Trackair, il est chargé du guet armé aérien et de la surveillance des zones vulnérables. Ce sont deux choses différentes. Il ne faut pas mélanger les genres, car cela risquerait de désorganiser notre flotte.

Monsieur Derosier, sur le caractère tronqué de la mission « sécurité civile », je pense que vous avez raison. La séparation de la mission en deux programmes n’est pas satisfaisante, et le Gouvernement réfléchit donc à leur regroupement, au sein d’une mission interministérielle.

En ce qui concerne le périmètre du document de politique transversale, je vous suggère de voter l’amendement de M. Ginesta, qui prévoit que ce document retrace les dépenses des SDIS, et auquel Nicolas Sarkozy a fait savoir qu’il se rallierait.

La cotisation individuelle obligatoire à la prestation de fidélisation et de reconnaissance est modeste, puisqu’elle a été fixée à 50 euros annuellement. La contribution des collectivités publiques – État et SDIS à parité – est de 375 euros. Les collectivités ont ainsi marqué leur volonté de créer un outil incitatif. Les droits acquis par les sapeurs-pompiers volontaires sont ainsi substantiellement améliorés : après 35 ans de volontariat, ils percevront une rente annuelle de 1 800 euros ; à partir de vingt années, elle atteindra 900 euros, soit le double du système antérieur.

M. Bernard Derosier - Charge nouvelle non compensée !

M. le Ministre délégué – Sur la NBI, je trouve que vous allez un peu loin. Il y aurait beaucoup à dire sur les flottements des uns et des autres. Force est de reconnaître que ni l’administration d’État, ni certains organismes comme le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale n’avaient mesuré toutes les conséquences du décret.

ANTARES, c’est tout sauf une dépense inconsidérée imposée aux collectivités locales. Le décret fondateur a été approuvé à l’unanimité par la Conférence nationale des SDIS, dont vous faites partie. La mutualisation des infrastructures du réseau Acropol au profit des SDIS en est l’élément central. Les expérimentations ont montré que c’était utile et même facteur d’économies.

M. Bernard Derosier - Charge nouvelle non compensée !

M. le Ministre délégué – En ce qui concerne la pénibilité, le relevé d’état signé par quatre organisations représentatives de la profession avait pour objet de clore, au moins provisoirement, la négociation sur la fin de carrière de sapeur-pompier professionnel. Il devait améliorer le régime de la bonification du cinquième dont bénéficient les cadres d’emploi. Le travail interministériel a permis d’apporter des réponses adaptées : reconnaissance du caractère dangereux du métier et des missions de sapeur-pompier et mise en place d’un véritable projet de fin de carrière. Le dispositif fait l’objet d’une évaluation en cours.

Monsieur Zuccarelli, vous avez fait part de votre préoccupation concernant la suppression des contingents communaux d’incendie et de secours.

M. Émile Zuccarelli – Mon impatience !

M. le Ministre délégué – La loi de 2002, complétée par la loi de 2004, avait prévu, à compter du 1er janvier 2008, l’arrêt des contributions des communes et des EPCI au financement des SDIS et leur remplacement par un prélèvement sur la dotation forfaitaire des communes. Des groupes de travail ont été constitués, réunissant des élus, mais des difficultés techniques sont apparues, amenant le report au 1er janvier 2010 de la suppression des contingents communaux. En effet, d’une part, rien n’était prévu pour les contributions des SIVU et des SIVOM, et, d’autre part, la suppression des contingents devait être compensée par un abattement de DGF, lequel ne peut être réalisé dans certaines communes où cette dotation est trop faible.

M. Émile Zuccarelli – Vous avez peur de dire la vérité !

M. le Ministre délégué – Nous ne voulons pas imposer cette charge supplémentaire aux petites communes.

Monsieur Perruchot, vous avez évoqué le redécoupage entre la police et la gendarmerie. Le ministre de l’intérieur et la ministre de la défense ont réalisé cette réforme, qui avait été envisagée il y a vingt ans de cela ! Bien sûr, on peut toujours faire plus, mais il faut aussi reconnaître le travail accompli.

En ce qui concerne les GIR, ceux-ci ont compétence sur l’intégralité d’une région ou d’un ressort de cour d’appel. Autrement dit, le GIR d’Orléans exerce sa compétence à Blois.

M. Nicolas Perruchot - C’est bon à savoir !

M. le Ministre délégué – Les préfets de région et de département font des efforts de coordination pour fixer le programme de ces GIR.

Les fichiers de permis de chasse sont gérés par les fédérations départementales de chasseurs avec les chambres départementales d’agriculture. Il n’existe pas à proprement parler de fichier national, si ce n’est que le fichier AGRIPPA, géré par les préfectures, recense l’ensemble des détentions d’armes soumises à déclaration.

Monsieur Decool, vous avez évoqué la prestation de fidélisation et de reconnaissance, qui a pris effet au 1er janvier 2005, en vous inquiétant d’un risque de désengagement de l’État. Je vous rassure : tous les engagements seront tenus. Au passage, la prestation représente un coût estimé de 60,3 millions d’euros par an, dont la moitié à charge de l’État.

Monsieur Giacobbi, je constate que vous tenez une comptabilité précise des attentats en Corse. Évitons la polémique sur ce sujet…

M. Jean-Pierre Blazy - Sujet embarrassant !

M. le Ministre délégué – L’éradication des actes terroristes nécessite du temps et un travail en profondeur, qui a été intensifié ces quatre dernières années.

M. Paul Giacobbi - Intensifié ? Certains plaident pour la relaxe !

M. le Ministre délégué - Votre amnésie sur les GIR, Monsieur Giacobbi, m’étonne. Constitués en mai 2002, 29 ont été mis en place, dont 21 ayant une compétence calquée sur le ressort de la région administrative et huit rattachés à l’Île-de-France. Si vous pensez que ceux-ci sont inutiles, la réalité, c’est qu’au 30 juin dernier, les GIR ont participé à 2 428 opérations de caractère judiciaire et administratif en métropole, qui ont donné lieu à 17 651 interpellations, dont 4 132 ont fait l’objet d’un mandat de dépôt. Les saisies ont porté sur 1 658 armes, 1 486 véhicules, 5,2 tonnes de résine de cannabis, 108 000 comprimés d’ecstasy, 145 kilos de cocaïne et d’héroïne, et 29,5 millions d’euros. Cela a permis le démantèlement de réseaux de trafic de stupéfiants, de travail dissimulé et d’escroquerie qui alimentaient l’économie souterraine des quartiers sensibles. Ces résultats sont tellement probants qu’il a été décidé de doter les DOM de ce dispositif. Je me réjouis de pouvoir conclure sur cette note optimiste, concernant le bilan des GIR. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

questions

M. Jacques Desallangre – Face aux multiples remises en liberté de délinquants pour vice de procédure, le ministre d’État a tenté de fuir ses responsabilités en accusant la justice de laxisme. Il incite ainsi les policiers à considérer les magistrats comme incompétents, et réciproquement, et il entretient la zizanie entre deux corps pourtant complémentaires. Qui en profitera ? Les délinquants, naturellement.

Justice et police doivent mieux se comprendre et travailler en synergie. À cette fin, je propose de renforcer les expériences croisées : les policiers prétendant à un certain grade d’officier devraient suivre un trimestre de formation commune à l’École nationale de la magistrature, et les magistrats seraient astreints à quelques cours à l’École nationale supérieure de la police. En cours de carrière, on pourrait envisager des détachements ou des mobilités obligatoires : un commissaire pourrait, pendant un ou deux ans, être affecté au parquet tandis qu’un magistrat participerait aux formations de police. Voilà qui accroîtrait sensiblement la compréhension entre la police et la justice. In fine, les délinquants seraient condamnés comme ils le méritent : avec justice et fermeté. La sûreté de la personne et la sécurité de ses biens, libertés fondamentales, en seraient renforcées.

M. le Ministre délégué – Vous avez raison : la nullité d’une procédure anéantit les efforts consentis tout au long d’une enquête. La qualité de la procédure doit être une priorité. Vos propositions sont donc de bon sens ; néanmoins, il me semble qu’elles sont déjà inscrites dans les formations initiales.

M. André Gerin - M. le ministre d’État ne peut pas prétendre être « le ministre des sapeurs-pompiers » alors qu’il ne tient pas sa parole. Les sapeurs-pompiers interviennent en première ligne dans les quartiers difficiles. Pourtant, en juillet dernier, vous les excluiez du bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire destinée aux agents des collectivités intervenant en zone sensible. Le même jour, vous étendiez à la plupart des personnels de catégorie C le bénéfice d’une prime de technicité instituée en 1991 pour les 3 500 adjudants-chefs des pompiers. Peu après, vous abrogiez cette mesure au motif que la Commission nationale des SDIS n’avait pas été consultée. Cet été, les sapeurs-pompiers furent donc victimes d’une double injustice, alors qu’il devaient faire face aux risques de leur métier et aux violences urbaines. Ils sont en effet les premiers à devoir imposer le respect des lois républicaines à des voyous criminogènes que certains responsables politiques osent excuser. Ces hommes et ces femmes d’exception témoignent quotidiennement d’un courage et d’un dévouement exemplaires. Réparer l’injustice qui leur est faite serait les reconnaître à leur juste valeur, comme vous y engage la loi de modernisation de la sécurité civile.

M. le Ministre délégué – C’est avec raison que vous rendez hommage aux sapeurs-pompiers – 200 000 volontaires et 36 000 professionnels – qui effectuent leur travail dans des conditions de plus en plus difficiles. Vous évoquez la prime de 1991 : elle présentait des risques juridiques pouvant entraîner une annulation. Il fallut donc la sécuriser ; du même coup, le nombre de bénéficiaires est passé de trois mille adjudants-chefs à 28 000 agents ! Cette augmentation injustifiée n’est pas même réclamée par les organisations syndicales, et son coût de 50 millions est prohibitif. Il fallait pourtant corriger le système pour ne pas léser les bénéficiaires initiaux : nous les avons donc d’emblée rétablis dans leurs droits – et même demandé aux préfets de fermer les yeux en septembre pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté. Mieux encore : nous avons étendu ce dispositif à 1 500 bénéficiaires supplémentaires, soit une augmentation de 50 % ! Le coût de la mesure nous interdit d’envisager son extension à tous les personnels : cela coûterait 15 à 17 millions d’euros au seul département du Rhône !

M. André Gerin – Soit 0,7 % du budget…

M. le Ministre délégué – Je vous laisse imaginer combien les présidents de conseil général y seraient favorables…

M. Dominique Caillaud – Je me félicite de l’effort important consenti au titre de l’ensemble de la mission « sécurité civile ». La loi de modernisation de 2004 prévoit une politique de sensibilisation citoyenne aux risques de la vie courante, la mise en œuvre de réserves civiles communales et un partenariat accru avec les associations de secouristes agréés. Cette démarche innovante permet un maillage efficace du territoire, en complément de l’action des sapeurs-pompiers et des secouristes militaires.

Son financement est compris dans le programme « coordination des moyens de secours », dont les crédits augmentent cette année de 209 à 296 millions. Pourtant, cette croissance est surtout due aux nécessaires investissements en matière de systèmes de communication intégrés, qui risquent de reporter le soutien aux associations et la sensibilisation du public. Que penser en effet des 230 000 euros consacrés aux pupilles des sapeurs-pompiers, à la Société nationale des sauveteurs en mer et à la Fédération nationale de la protection civile ? Ces deux dernières associations sont pourtant essentielles au maintien d’un réseau de secouristes bénévoles et à la mise en œuvre des réserves communales encore hésitantes. Envisagez-vous donc de consolider leur programmation pluriannuelle ? À défaut, quelles autres missions ou collectivités pourraient relayer ces actions ?

M. le Ministre délégué – Les investissements nécessaires à la modernisation du système informatique de la protection civile ne nuisent en rien au soutien apporté au monde associatif, qui progresse. Au contraire : ils garantissent la mise en œuvre d’une politique volontariste. Il ne s’agit pas d’une ponction, mais d’un redéploiement. Cette action d’aménagement du territoire a d’ailleurs été demandée à l’unanimité par la Conférence nationale des élus, sur une base certes moins élevée que celle que nous proposons. L’agrément des associations permettra néanmoins d’envisager de nouvelles méthodes de travail. La LOLF est ainsi faite : les financements doivent être consacrés aux projets et aux actions plus qu’aux structures. Nous en faisons la démonstration !

M. Mansour Kamardine – Les drames quotidiens au large des côtes mahoraises illustrent à quel point l’immigration clandestine est un enjeu national. Je salue, à ce titre, l’importance du travail accompli depuis le début de l’année. Ces bons résultats ont été obtenus grâce à la conjugaison des moyens en personnel et en matériel. Je pense en particulier à la mobilisation des effectifs de la police nationale et des militaires de la gendarmerie. Je pense aussi aux deux radars de détection en service depuis le début de cette année. Des objectifs clairs et précis ont été fixés au préfet du territoire par le ministre d’État et la représentation nationale a voté les moyens nécessaires à la conduite de cette politique. À tous ceux qui, de près ou de loin, ont favorisé cette action, j’exprime la gratitude de la population mahoraise, qui reprend enfin espoir.

Cependant, les moyens mis à la disposition du préfet montrent des signes d'essoufflement. Il faudrait notamment renforcer les effectifs de la PAF sur la côte ouest et implanter un troisième radar sur la côte est. C'est à ce prix que nous progresserons, étant entendu que l'immigration clandestine est dans une très large mesure à la source de l'insécurité qui frappe à la fois les personnes et les biens sur ce territoire et que celui-ci peut ensuite être une rampe de lancement vers la métropole.

Les forces de police ont donc besoin d'être encouragées et soutenues dans leur mission. La visite sur place du ministre d’État pourrait s'inscrire dans cette perspective. L'inauguration à cette occasion du troisième radar, promis par le Premier ministre lors de sa visite officielle en mai dernier, pourrait également y contribuer.

M. le Ministre délégué – Je vous remercie de saluer l’action résolue des forces de l’ordre à Mayotte. Je ne manquerai pas de transmettre ces compliments au ministre d’État. L’immigration clandestine est un fléau que nous devons combattre sans faiblesse, car elle déstabilise la structure même de votre territoire. Ce combat est l’une des priorités de Nicolas Sarkozy pour l’outre-mer.

De 2002 à aujourd’hui, les effectifs de la PAF de Mayotte sont passés de 11 à 118. Cette remise à niveau spectaculaire témoigne de la détermination du ministre d’État. Globalement, les effectifs des services de police de Mayotte ont augmenté de 549 % ! Des chiffres pareils ne peuvent évidemment pas être donnés pour chacune des régions de France.

Pour mieux protéger le territoire des arrivées de clandestins, deux radars ont été installés, en novembre 2005 et en avril 2006. Nous sommes tous convaincus de la nécessité d’un troisième. Je vous confirme qu’il sera prochainement opérationnel. Il devrait être placé sur Petite-Terre, mais vous savez sans doute qu’au moment où je vous parle, une mission sur place examine les conditions de la meilleure installation possible.

Le ministre d’État va également doter, au début de l’année 2007, la PAF de Mayotte de deux nouvelles vedettes rapides. Comme une bonne nouvelle ne va jamais seule, je vous informe qu’un nouveau centre de rétention administrative – qui se substituera à l’actuel, devenu inadapté – sera fonctionnel d’ici 2008, pour une capacité totale de 60 places.

Les résultats sont déjà là, puisque nous sommes passés de 3 970 reconduites à la frontière en 2002 à 10 191 en 2006 – sur les neuf premiers mois.

Le ministre d’État se rendra prochainement à Mayotte pour rencontrer les policiers et l’ensemble des services de l’État qui luttent au quotidien contre l’immigration clandestine.

Mme Chantal Brunel - Bussy-Saint-Georges connaît une croissance démographique très importante et pourrait atteindre le cap des 20 000 habitants en 2007. Cette envolée démographique a des conséquences importantes, telles que la hausse du nombre de jeunes scolarisés et de la fréquentation de la station RER. Le développement de la zone industrielle et l'implantation d'un nouveau grand centre commercial plaident également en faveur d’un renforcement des moyens en matière de sécurité.

Actuellement, 42 policiers municipaux veillent à la sécurité des habitants de Bussy-Saint-Georges, qui peuvent aussi compter sur le poste de police nationale situé à Ferrières-en-Brie, lequel dépend du commissariat de Lagny. Mais les Buxangeorgiens souhaiteraient voir un commissariat s’implanter dans leur commune, compte tenu de l’essor économique et démographique de celle-ci et du coût de la police municipale. Je viens donc vous demander s'il serait possible de répondre positivement à cette attente tout à fait légitime.

M. le Ministre délégué – Je vous remercie de nous avoir appris comment s’appellent les habitants de Bussy-Saint-Georges. Ce n’était pas évident.

En décembre 2002, la mairie avait proposé des locaux pour reloger le bureau de police installé à Lagny, mais l’expertise qui avait été faite avait été négative et le coût de l’aménagement avait été jugé excessif, de sorte que le projet avait été écarté. En mai 2004, il a été relancé. Les services du ministère de l’intérieur ont indiqué à la mairie leurs besoins immobiliers, une proposition nouvelle a été faire en avril 2005 et l’intérêt de créer un bureau de police à Bussy-Saint-Georges a été acté en septembre de la même année. Le SGAP de Versailles a été chargé en novembre 2005 du pilotage de cette opération, le maire devant proposer un terrain.

À la suite de votre intervention de cet été, il a été décidé d’organiser une réunion à Bussy-Saint-Georges pour voir comment concrétiser ce projet qui vous tient à coeur. J’ai le plaisir de vous indiquer qu’elle aura lieu avant la fin de l’année. Je m’y engage.

Mme Chantal Brunel - Merci.

M. Gilles Artigues - Je souhaite attirer l’attention du ministre d’État sur deux problèmes récurrents face auxquels les élus locaux se retrouvent souvent fort démunis : les gens du voyage, d’une part, les squats, de l’autre.

Il y a quelques mois, un quartier de Saint-Étienne a été occupé par les gens du voyage. J’avais alors pris contact avec le ministère. Ce sont aujourd’hui d’autres quartiers qui sont concernés. Il est vrai que la ville ne dispose d’aucun site pour recevoir ces populations. Lorsque le terrain prévu à cet effet sera opérationnel, il n’offrira de toute façon qu’une quinzaine de places, alors que ce sont des centaines de caravanes qui passent chaque année. Vous m’aviez dit que vous partagiez mes préoccupations et que les procédures d’évacuation prévues par la loi du 5 janvier 2000 vous semblaient peu efficaces. Vous vouliez les rendre plus simples et plus rapides. Où en sommes-nous de ce point de vue ?

Autre sujet important que j’ai abordé avec vous en novembre 2005 : les squats. Nous avons, toujours à Saint-Étienne, de nombreux lieux illégalement occupés, qui posent des problèmes divers : logements insalubres, trafics de tous ordre, mendicité parfois agressive… Avec l’arrivée prochaine de la Roumanie en Europe, on peut s’attendre à une amplification de ce phénomène. Comment y répondre d’une manière à la fois humaine et ferme ?

Vous m’aviez par ailleurs annoncé ici l’arrivée sur notre ville d’une équipe de la police aux frontières. Un an après, quel bilan tirez-vous de son action ?

M. le Ministre délégué – Vous avez raison de dire que la procédure d’évacuation prévue par la loi de 2000 est très lourde. C’est bien pourquoi Nicolas Sarkozy avait, en 2003, proposé de pénaliser durement les occupations illicites de terrains par les gens du voyage. Cette disposition a été votée dans la loi de sécurité intérieure. Mais sa mise en œuvre est conditionnée au fait que la commune ait intégralement rempli ses obligations au regard du schéma départemental d’accueil des gens du voyage.

La loi sur la sécurité intérieure a également apporté des réponses concernant les squats, dans la mesure où elle prévoit des sanctions contre les marchands de sommeil et contre la mendicité agressive. Le préfet de la Loire a d’ailleurs accordé le concours de la force publique pour l’évacuation, l’été dernier, de trois squats à Saint-Étienne. Des interpellations ont également eu lieu, visant certaines activités délictueuses. Je ne reviens pas sur les GIR, la ville de Saint-Étienne étant concernée par leur action depuis 2002.

Nicolas Sarkozy s’était engagé à ce qu’une brigade de la police aux frontières intervienne dans votre région : pleinement opérationnelle depuis début octobre, elle est composée de neuf fonctionnaires et elle a déjà contribué au démantèlement, dans la banlieue lyonnaise, d’une filière d’immigration clandestine en provenance d’ex-Yougoslavie et de Moldavie, une quinzaine de personnes ayant été appréhendées.

En application de la LOPSI, la direction départementale de la sécurité publique de la Loire a bénéficié du recrutement de 15 personnels administratifs supplémentaires, ce qui a permis de réaffecter sur la voie publique autant de policiers.

Je ne doute pas que le ministre d’État aura l’occasion de croiser sur place la brigade mobile de recherche de la PAF qui vient d’être créée, puisqu’il se rend chez vous jeudi après-midi.

M. Gilles Artigues – Alors que la crise des banlieues reste hélas d’actualité, la répartition des effectifs de police sur le terrain continue de poser problème, trop de personnels restant affectés à des tâches indues, liées notamment au transfèrement des détenus ou à leur accompagnement à des consultations hospitalières. Il suffirait, pour y remédier, que le ministre d’État prenne un décret autorisant les personnels de l’administration pénitentiaire à porter une arme hors des locaux carcéraux. Y est-il disposé, sachant que pour le seul hôpital Bellevue de Saint-Étienne, en 2005, le suivi médical de 140 détenus a mobilisé 1 700 fonctionnaires pour 11 000 heures de travail ? Est-il envisageable que les personnels de la pénitentiaire soient enfin autorisés à se substituer à la police nationale pour ce type d’opérations ?

M. le Ministre délégué – À partir d’un exemple local, vous évoquez le problème récurrent de l’affectation prioritaire des forces de l’ordre à des missions de sécurité publique. Avec 945 fonctionnaires, dont 735 gradés et gardiens, le département de la Loire se situe légèrement au-dessus de la norme nationale, de même que la ville de Saint-Étienne. J’ai en outre indiqué tout à l’heure que l’affectation de 15 personnels administratifs à la DDSP avait permis de redéployer des agents sur le terrain. Le ministère de l’intérieur est très attentif à la question que vous soulevez, une proportion manifestement excessive de fonctionnaires de police étant affectés à des tâches administratives ou d’assistance aux missions de justice, telles que celles que vous avez décrites. Au total, on estime que 7 millions d’heures sont distraites de l’objectif central de sécurité publique. Du reste, je puis vous indiquer très clairement que le ministère a regretté que le transfert des escortes de détenus aux personnels de l’administration pénitentiaire n’ait pu aboutir ; mais nous ne renonçons pas à cette idée.

Cependant, plusieurs initiatives ont été prises pour tenter de rééquilibrer la situation. Je pense notamment à la création des unités hospitalières sécurisées interrégionales – les UHSI –, qui permettent d’hospitaliser les détenus en milieu carcéral, et à la construction de salles d’audience à proximité immédiate des centres de rétention administrative. Après Marseille et Toulouse, nous avons bon espoir que le projet de Roissy aboutisse avant 2008. Ces premières étapes permettent de réduire le temps consacré aux escortes. Elles doivent être prolongées et amplifiées, car nous partageons le même objectif que vous d’affecter les personnels aux missions prioritaires pour lesquelles ils ont été recrutés.

M. Bernard Schreiner – En imposant l'immatriculation des scooters et des deux-roues de moins de 50 cm3, l'objectif était de favoriser la prévention de l’insécurité routière, de lutter contre les nuisances sonores liées au débridage des moteurs et de permettre la recherche des délinquants qui volent ces engins ou les utilisent pour commettre des délits sur la voie publique. Il apparaît cependant qu’un nombre croissant d'utilisateurs de ces véhicules désormais immatriculés n'ont qu'une hâte : démonter les plaques pour éviter toute poursuite et se livrer impunément à des rodéos et autres gymkhanas sur la voie publique !

Sachant que la date limite relative à l'obligation d’immatriculer l'ensemble du parc a été fixée au 30 juin 2009, je vous saurais gré d'étudier la possibilité de ramener cette échéance au 30 juin 2007, en vue d’accélérer la réalisation des objectifs initiaux.

M. le Ministre délégué – Le pas que vous nous incitez à franchir me semble un peu difficile. Je comprends vos préoccupations, mais il me semble techniquement délicat de donner suite à votre proposition, compte tenu, notamment, des ventes de cyclomoteurs d’occasion qui compliquent la gestion du stock. L’opération d’immatriculation de l’ensemble du parc doit donc s’étaler dans le temps, conformément au calendrier initialement prévu. Toutefois, sur la base du volontariat, il est possible d’anticiper l’application de la mesure et de faire immatriculer le véhicule avant l’échéance de 2009.

M. Patrice Martin-Lalande – Ma question porte sur les dégâts pour les immeubles causés par la sécheresse de 2003, partout en France et, notamment, dans mon département du Loir-et-Cher. Grâce à l’amendement que j’ai fait adopter à la loi de finances pour 2006, après une première tentative en 2005, une procédure d’aide exceptionnelle a permis de mobiliser 180 millions, nos collègues M. Tron et Mme Brunel m’ayant fortement soutenu dans ma démarche.

Quelques questions demeurent cependant. Quel sort sera réservé aux victimes qui n’ont pas pu présenter de demande d’indemnisation dans les délais requis, les artisans se refusant à dresser des devis pour des travaux qu’ils estimaient trop risqués ? Un délai supplémentaire sera-t-il consenti aux victimes de dégâts apparus tardivement, après l’échéance du délai de dépôt des dossiers ?

Le refus de classement en catastrophe naturelle de 142 communes du Loir-et-Cher n’est-il pas lié à la localisation des instruments de mesure hors du département ? Est-il envisageable de rapprocher ces lieux de mesure pour mieux coller à la réalité du terrain ? Des mesures de prévention du risque sécheresse sont-elles à l’ordre du jour, en vue d’adapter les normes de construction et de renforcer la fondation des immeubles, dont la fragilité a souvent été à l’origine des principales dégradations ?

M. le Ministre délégué – Monsieur le député, j’admire la constance avec laquelle vous défendez ce dossier. Après deux questions écrites, vous me posez une question extrêmement bien étayée à laquelle je vais m’efforcer de répondre avec précision. Vous avez cité M. Tron : lui aussi est très vigilant en ce qui concerne une partie de l’Essonne.

Je confirme l’aide exceptionnelle de 180 millions. Comme elle est apparue insuffisante, il a été décidé de la compléter par un abondement de 38,5 millions en LFR. Le total sera donc de 218,5 millions. Dans le Loir-et-Cher, sur 671 dossiers reçus, 272 ont été déclarés éligibles pour un montant de 5,2 millions. Après application des mesures d’encadrement, 3,1 millions ont été attribués, dont 10 % au profit des sinistrés les plus touchés. La répartition du montant de l’aide montre que le quart des bénéficiaires recevra une aide se situant entre 35 000 et 80 000 euros. Les arrêtés individuels d’attribution ont été pris le 6 novembre et la notification ainsi que les premiers versements sont en cours. Sur le plan national, 21 000 dossiers ont été présentés sur 71 départements et 12 100 ont été reconnus éligibles. Les procédures pour accélérer les indemnisations ont été assouplies. Le délai initial fixé au 6 avril 2006 pour déposer le dossier a été prorogé jusqu’au 6 juin et il a été demandé aux préfets d’engager une instruction des dossiers sur la base d’un seul devis, tout en signalant la nécessité de produire le second devis au moment du versement de l’aide.

La localisation des instruments de mesures couvrent en l’occurrence quatre zones avec quatre stations de référence : Alençon, Bricy, Déols et Parçay-Meslay.

S’agissant de la prévention du risque de sécheresse géotechnique, le ministère de l’écologie a mis en place une cartographie de l’aléa retrait-gonflement des argiles. La procédure de PPR est également utilisée dans ce cas et on trouvera dans le règlement du PPR le rappel des règles de la construction sur les sols argileux ainsi que des mesures d’urbanisme. Des mesures afin de réduire la vulnérabilité sont également possibles pour le bâti existant. Aujourd’hui, 200 PPR sècheresse ont été approuvés et 1 200 ont été prescrits. J’ajoute que les règles de construction sur les sols argileux permettent de réduire les dommages liés au retrait-gonflement des argiles pour des surcoûts très raisonnables.

M. Étienne Pinte – L’état du commissariat de police de Versailles est déplorable. J’ai moi-même constaté l’état épouvantable des cellules de garde à vue, du bureau des chefs de poste ainsi que des vestiaires des fonctionnaires de police qui semblent dater du XIXe siècle. Ce ne sont pas des conditions de travail dignes ni des conditions de détention respectueuses. Les locaux destinés à l’accueil devraient quant à eux être rendus accessibles aux personnes handicapées mais aussi sécurisés car les piétons entrent par la même entrée que les véhicules des policiers. Envisagez-vous de budgéter très rapidement des travaux de réhabilitation et de rénovation ?

M. le Ministre délégué – Vous avez raison : les conditions de travail dans ce commissariat sont particulièrement dégradées. De surcroît, le commissariat ne regroupe pas l’ensemble des services de police, qui sont dispersés sur plusieurs sites, y compris à Viroflay. Il a été décidé l’année dernière d’échanger avec le ministère de la culture les trois silos qui avaient abrité les réserves de la Bibliothèque nationale, voisins du bâtiment actuel, avec les bâtiments du fort de Buc que possédait le ministère de l’intérieur. Une réserve foncière est donc disponible qui permet d’envisager la restructuration et l’extension des locaux actuels. Le SGAP de Versailles va engager une étude préalable à ce sujet. Tout cela permettra de régler le problème sur le moyen terme. S’agissant des gardes à vue, une politique ambitieuse a été engagée prévoyant des mises aux normes. Dans ce cadre, 2 500 cellules doivent être traitées ; une première tranche de 524 cellules est en cours de réhabilitation pour un montant de 17 millions, 220 d’entre elles se situant en Île-de-France pour un montant de 9 millions. La cellule de garde à vue du commissariat de Versailles sera réhabilitée l’année prochaine.

M. Mansour Kamardine – Mayotte comprend 200 000 habitants et est confrontée à divers problèmes tels le chikungunya ou, plus récemment, ce que l’on peut considérer comme une catastrophe maritime, sans disposer pour autant de secours d’urgence. Quelle politique le Gouvernement entend développer pour doter ce territoire de moyens de secours d’urgence ?

M. le Ministre délégué – Nous partageons votre préoccupation en ce qui concerne le chikungunya. Les moyens mobilisables sur place peuvent en effet paraître insuffisants mais l’année dernière, la sécurité civile a été mobilisée et dès la fin janvier de 2006, des renforts nationaux ont été envoyés : 113 personnels issus des formations militaires de la sécurité civile et des SDIS ont été envoyés du 15 février au 15 juin. Cet effort a coûté 1,6 million et cette somme a été bien utilisée. Les dernières statistiques émanant de l’institut de veille sanitaire ne font pas état de la même progression de la maladie que l’année dernière. Cela résulte assurément des actions de prévention et je rends hommage à la forte implication des autorités locales sur ce plan. Si le nombre de personnes atteintes par le chikungunya venait à s’accroître dans des proportions comparables à celles de l’année dernière, les moyens correspondants seraient évidemment mis en place.

S’agissant du naufrage de l’Al Moubarak, je me ferai l’écho de vos préoccupations auprès de M. Perben.

M. Bernard Schreiner – La loi de modernisation de la sécurité civile du 13 août 2004 a créé un nouvel outil de mobilisation civique ayant vocation à soutenir les populations en cas de catastrophe ou de crise majeure : les réserves communales de sécurité civile. Ne serait-il pas utile d’imposer un tel dispositif aux communes qui sont obligées d’être dotées d’un plan communal de sauvegarde ? Ne serait-il pas opportun de prévoir pour les communes qui se sont engagées volontairement dans la création de ces réserves un abondement de DGF afin de financer l’investissement indispensable à l’accomplissement de ces missions ?

M. le Ministre délégué – Les réserves communales de sécurité civile sont reconnues comme des acteurs de secours à part entière. Si l’on songe à les rendre obligatoires, il faudra tout d’abord mettre en œuvre une concertation avec les élus et notamment l’association des maires de France. La bonification de la DGF serait quant à elle difficile à appliquer, celle-ci étant élaborée selon des bases très mécaniques. Y toucher reviendrait à ouvrir la boîte de Pandore et ce n’est pas votre intention.

M. Étienne Pinte - J’adhère à la politique de lutte contre l’immigration clandestine du ministre de l’intérieur ; je ne suis donc pas hostile à l’expulsion de ceux qui n’ont pas d’attaches en France et qui sont entrés illégalement sur notre territoire. Je m’inquiète cependant de constater que de nombreuses familles sont séparées au motif que l’un de leurs membres n’est pas en situation régulière.

Une jeune fille de dix-huit ans, dont la mère et le frère séjournent régulièrement en France, a récemment été expulsée dans des conditions rocambolesques vers le Cap-Vert, où elle a pour toute famille une grand-mère de quatre-vingts ans.

Il y a une dizaine de jours, nous avons évité de justesse, grâce au directeur de cabinet du ministre de l’intérieur, Claude Guéant – que je remercie – l’expulsion d’une jeune mère de famille dont le mari est titulaire d’une carte de résident. Cette expulsion aurait privé de leur mère, de manière inacceptable, trois enfants âgés de cinq ans, trois ans et quinze mois, tous nés en France.

Le ministre de l’intérieur a nommé un médiateur pour étudier le cas des familles qui demandaient leur régularisation dans le cadre de la circulaire du 13 juin 2006. Il a pu obtenir une issue favorable pour un certain nombre de dossiers – pas suffisamment aux yeux des associations, qui se sont mobilisées pour défendre ces familles.

De nombreuses demandes de régularisation qui n’entrent pas dans le cadre de cette circulaire méritent d’autre part un examen attentif au regard de la situation familiale. Le ministre de l’intérieur envisage-t-il de demander aux services préfectoraux de veiller à ce que notre pays respecte le droit de chacun de vivre en famille, et en particulier celui des enfants à être élevés par leurs parents ?

Mme Christine Boutin - Très bien !

M. le Ministre délégué – Chacun connaît l’attention que vous portez à la situation des étrangers sans papiers qui séjournent illégalement en France. Je vous remercie d’avoir néanmoins réaffirmé votre soutien à l’action du ministre de l’intérieur.

Le cas que vous évoquez est celui d’une jeune fille âgée de dix-huit ans, arrivée dans notre pays il y a trois ans avec un visa de tourisme. Elle est restée en France et s’est inscrite dans un lycée. Il est exact qu’un préfet a décidé de la reconduire à la frontière parce qu’elle ne disposait pas d’un titre de séjour. Nous sommes dans un État de droit : cette jeune fille a pu faire valoir ses arguments devant le tribunal administratif de Paris, qui a rejeté sa requête. C’est donc légalement qu’elle a été reconduite le mois dernier dans son pays, le Cap-Vert. Rien ne s’oppose à ce qu’elle y obtienne un visa pour études afin de revenir en France en toute légalité.

Il serait dangereux de laisser croire qu’il est indifférent d’avoir des papiers ou de ne pas en avoir. Cela n’empêche pas d’être attentif à des situations exceptionnelles. Outre le médiateur, qui était une réponse d’urgence, il existe désormais une commission nationale de l’admission exceptionnelle au séjour, compétente pour examiner ces cas particuliers.

M. le Président – Nous en avons terminé avec les questions.

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Sécurité

état b

Mme la Ministre - L’amendement 111 vise à corriger une erreur matérielle dans la répartition des crédits de pension entre les différents programmes des ministères. Cela se fait à somme nulle : les crédits de la mission défense sont diminués de 23,7 millions et ceux de la mission anciens combattants de 3,8 millions, pour rétablir 27,5 millions sur le titre II de la mission « sécurité ». Deux amendements de coordination seront présentés lors de l’examen des budgets de la défense et des anciens combattants.

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial de la commission des finances pour la sécurité – La commission n’a pas examiné cet amendement. S’agissant d’une mesure technique, j’y suis cependant favorable.

L'amendement 111, mis aux voix, est adopté.
Les crédits de la mission « sécurité » ainsi modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

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Sécurité civile

état b

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet – Christine Boutin et moi-même avons cosigné l’amendement 41.

M. Patrice Martin-Lalande - Je m’y associe.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet - L’article 110 de la loi de finances pour 2006 a créé une procédure exceptionnelle d’aide pour les propriétaires des bâtiments fissurés par la sécheresse de 2003. Deux injustices se sont révélées lors de l’examen des dossiers de demande d’aide. Il s’agit d’abord du sort réservé aux communes limitrophes de communes ayant obtenu la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Un abondement particulier a été proposé ; dans le département de l’Essonne, 103 communes ont demandé la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle et 46 l’ont obtenue. Les 55 autres ont demandé le bénéfice de la procédure exceptionnelle, dont 17 sont limitrophes de communes ayant obtenu la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Le taux de subventionnement est de 100% pour leurs habitants, alors qu’il n’est que de 58 % pour ceux des 38 autres communes.

Seconde injustice, seul le confortement nécessaire pour rétablir l’intégrité entière du logement est subventionné. L’interprétation restrictive de cette disposition conduit à ne retenir que 50 % des dossiers présentés. M’étant moi-même rendue dans certains bâtiments, je me suis demandé si on n’attendait pas tout bonnement qu’ils s’écroulent pour reconnaître que leur intégrité était touchée !

Nous proposons d’abonder le fonds pour mesures exceptionnelles pour mettre fin à ces deux injustices.

MM. Patrice Martin-Lalande et Jean-Pierre Gorges – Très bien !

Mme Christine Boutin – Cet amendement a été déclaré recevable par la commission des finances. Ma circonscription abrite la forêt de Rambouillet. Le terrain y est argileux, et les communes ont donc toujours obtenu la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Aucune d’entre elles n’a cependant été retenue cette fois-ci ! Je travaille sur cette question avec les associations, le préfet et le ministère. Il y a vraiment une injustice, car les pavillons concernés appartiennent à des familles de la classe moyenne qui ne peuvent financer les travaux nécessaires. Nous avons essayé de trouver une solution humainement juste.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet et M. Patrice Martin-Lalande – Très bien !

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial - La commission n’a pas eu à se prononcer sur cet amendement. Je comprends parfaitement les arguments de nos collègues, mais je suis plus réservé sur l’origine des crédits ponctionnés, qui sont destinés aux interventions des services opérationnels. Une somme de 30 millions permet de faire voler nos hélicoptères ou nos avions… D’autres solutions seraient sans doute possibles.

M. le Ministre délégué – J’ai bien compris le sens de la démarche. L’Essonne concentre en effet les situations inextricables. J’ai reçu des associations et des riverains : expliquer la procédure relève du parcours du combattant. Vous proposez d’abonder le programme coordination des moyens de secours de 30 millions, ces crédits étant prélevés sur le programme intervention des services opérationnels. Mais 30 millions, c’est le coût de cinq ans de carburant pour tous les avions bombardiers d’eau, ou la totalité de la maintenance de ces avions... Pour autant, votre message a été entendu. Ainsi le Gouvernement proposera-t-il, dans le projet de loi de finances rectificative, 38,5 millions d’euros supplémentaires. Cela suffira-t-il pour couvrir tous les besoins ? Nous examinerons les situations précises dans le cadre d’une concertation.

M. Jean-Pierre Blazy – Le groupe socialiste soutient bien entendu cet amendement. Le ministre évoque une concertation, mais cela ne suffira pas pour financer la réparation des dommages qui ne sont pas aujourd’hui pris en charge au titre des catastrophes naturelles.

Mme Christine Boutin – Je remercie le ministre de sa réponse. J’aimerais néanmoins savoir précisément comment sont financés ces 38,5 millions d’euros supplémentaires, de façon qu’on ne nous objecte pas, alors, qu’il n’est finalement pas possible de dégager ces crédits parce que le fonctionnement de tels ou tels équipements en souffrirait.

M. Patrice Martin-Lalande – Confirmez-vous, Monsieur le ministre, que les 38,5 millions d’euros seront bien affectés, comme les 150 millions initiaux et non comme l’enveloppe de 30 millions allouée l’an passé, réservée aux seuls habitants des communes limitrophes de celles reconnues en état de catastrophe naturelle ? Sera-t-il notamment possible d’examiner les dossiers des habitants qui n’ont pu obtenir de devis de réparation, soit que les entreprises se soient dérobées, pour des raisons que l’on peut comprendre, soit que les dégâts soient apparus après la date limite de dépôt des dossiers ?

M. le Ministre délégué – C’est à la suite d’une concertation approfondie qu’il a été décidé de revaloriser les sommes initialement prévues. L’abondement de 38,5 millions d’euros prévu est gagé par des économies sur la masse salariale du ministère de l’intérieur.

M. Jean-Pierre Blazy – Il serait intéressant de savoir lesquelles !

M. le Ministre délégué – Et ces 38,5 millions viendront abonder les 150 millions plutôt que les 30, Monsieur Martin-Lalande.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet – Étant donné la réponse du ministre, nous retirons l’amendement 41.

Mme Christine Boutin – Nous remercions encore une fois le ministre.

L'amendement 41 est retiré.
Les crédits de la mission « sécurité civile », mis aux voix, sont adoptés.

après l'Art. 51

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial L’amendement 99 de la commission des finances prévoit que le document de politique transversale sur la sécurité civile présente également un état détaillé des dépenses engagées par les collectivités au titre des SDIS. Il a paru intéressant d’éclairer la représentation nationale sur l’action à la fois de l’État et des collectivités en ce domaine. D’autres documents de politique transversale – les fameux « orange » – font état des interventions de tiers comme la Caisse des dépôts ou l’Union européenne.

M. le Ministre délégué – Avis favorable.

L'amendement 99, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Nous en avons terminé avec l’examen des crédits des missions « sécurité et sécurité civile ».

La séance, suspendue à 0 heure 40 le mercredi 8 novembre, est reprise à 0 heure 50.

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administration générale et territoriale de l’état

M. le Président - Nous abordons l’examen des crédits relatifs à l’administration générale et territoriale de l’État.

M. Jean-Pierre Gorges, rapporteur spécial de la commission des financesLa mission « administration générale et territoriale de l’État » regroupe près de 2,5 milliards d’euros de crédits de paiement, soit 0,93 % du budget général de l’État, et comporte trois programmes : le programme « conduite et pilotage des politiques de l’intérieur » finance les fonctions de support du ministère de l’intérieur ; le programme « administration territoriale » couvre la gestion du réseau de préfectures ; le programme « vie politique, cultuelle et associative » finance notamment les partis politiques et sera donc appelé à jouer un rôle clé dans l’organisation des élections de l’an prochain.

Le budget pour 2007 affiche une forte hausse, liée principalement à l’organisation des élections. Avec un montant prévisionnel de 2 497,9 millions d’euros, les crédits de paiement augmentent de 12,9 %. Sur ces crédits, 65 % sont affectés au programme « administration territoriale », 20 % au programme « conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », et 15 % au programme « vie politique, cultuelle et associative ».

La hausse tient pour l’essentiel à l’accroissement des crédits du troisième programme en vue des élections de 2007 ; ce dernier facteur contribue en effet pour 80 % à l’augmentation du budget de la mission. Les crédits de paiement pour la mission relative à l’organisation des élections progressent de 228,1 millions d’euros et représentent un montant quinze fois plus important que celui voté en loi de finances pour 2006. Le programme « administration territoriale », qui regroupe 85 % des emplois, bénéficie d’une augmentation de 1,7 %, soit plus 28,8 millions, liée principalement aux mesures salariales générales catégorielles, nonobstant la suppression de 315 ETPT. Le budget du programme « conduite et pilotage des politiques de l’intérieur » augmente de 27,4 millions d’euros, soit plus 5,8 %, qui s’explique surtout par l’augmentation des crédits relatifs aux affaires financières et immobilières.

L’accent mis cette année sur l’organisation des élections ne doit pas masquer la poursuite de l’effort dans les priorités structurelles du ministère, axées sur la création de nouveaux titres sécurisés, la modernisation de la gestion des ressources humaines et la rationalisation des implantations immobilières.

Les projets engagés au titre de la création de nouveaux titres sécurisés sont au nombre de quatre. Tout d’abord 4,25 millions d’euros en CP et 9,2 millions en autorisations d’engagement sont prévus pour le système d’immatriculation à vie des véhicules, ou SIV, qui doit être opérationnel au premier semestre 2008, après une phase expérimentale en 2007. Les avantages qui en sont attendus concernent tant la simplification des procédures que les gains de productivité pour l’administration et les constructeurs automobiles, la traçabilité des transactions, la lutte contre les fraudes et la coopération internationale.

D’autre part, 20,5 millions en autorisations d’engagement et 13,1 millions en CP sont inscrits pour financer la production des nouveaux passeports électroniques ainsi que l’achat de lecteurs. Le reste du projet de passeport électronique, estimé à 58,13 millions, sera financé par l’Agence nationale des titres sécurisés, dont la création est prévue l’an prochain.

Ce sont 2,5 millions en autorisations d’engagement et un million en CP qui sont destinés à financer le pilotage du projet relatif à l’identité nationale électronique sécurisée, sur lequel un partenariat public-privé est envisagé. Ce projet vise à établir une procédure de délivrance commune aux passeports et à la carte d’identité, à doter cette dernière des mêmes caractéristiques biométriques que le passeport, et à offrir un outil d’identification et de signature électroniques.

Enfin, le projet GRÉGOIRE, qui reçoit 12 millions d’euros en autorisations d’engagement et 3 millions en CP, vise à une refonte de l’application de gestion des dossiers de ressortissants étrangers, notamment par l’intégration des technologies biométriques et la constitution d’une base de données sur les flux migratoires.

C’est dans ce contexte que s’inscrit la création d’une agence nationale des titres sécurisés, prévue à l’article 28 du projet de loi de finances. Il s’agit pour la France d’être à la pointe de l’emploi de nouvelles technologies pour la production de titres sécurisés et de développer des synergies en matière d’exploitation de ces titres. L’agence serait dotée de 45 millions d’euros, prélevés sur les taxes de délivrance des passeports, et pourrait bénéficier en cours d’exercice de transferts du programme « administration territoriale ». Les emplois permanents seront pourvus par des fonctionnaires de l’État et des agents non titulaires.

Deuxième priorité du ministère : la modernisation de la gestion des ressources humaines, qui se traduit par la mise en place d’une gestion prévisionnelle. Elle a donné lieu à un protocole d’accord pluriannuel 2006-2010 signé le 4 juillet 2006 avec quatre organisations syndicales du ministère, qui prévoit tout d’abord un plan de requalification des personnels. Les requalifications sont la contrepartie des 1 500 emplois qui devraient être supprimés de 2006 à 2010. Le projet de loi de finances prévoit d’affecter 3,5 millions d’euros à la deuxième tranche de ce plan.

Le protocole d’accord concerne en outre les réformes statutaires, avec la fusion des corps du ministère. Au total, la réforme, qui concerne près de 40 000 agents, permet le passage de seize à trois corps. L’enveloppe catégorielle pour 2007 est évaluée à 900 000 euros. Des réformes importantes des règles statutaires applicables aux corps des catégories B et C seront en outre mises en œuvre dans le cadre de l'accord du 25 janvier 2006 sur l'amélioration des carrières dans la fonction publique. Ces mesures s'élèvent à 4,6 millions d'euros pour 2007.

La politique de revalorisation indemnitaire initiée en 2002 est poursuivie. Elle vise à mettre à niveau de manière progressive le régime indemnitaire du ministère sur la moyenne interministérielle et à créer les conditions d'une meilleure prise en compte du mérite dans les modalités d'attribution de ce régime. En 2007, 13,5 millions seront consacrés à ces objectifs, dont deux millions pour les hauts fonctionnaires.

Enfin, la rationalisation des implantations immobilières de l’administration centrale se poursuit avec le regroupement sur un site unique, à Levallois-Perret, de la direction de la surveillance du territoire, de la direction centrale des renseignements généraux et de la division nationale antiterroriste – une opération qui coûtera 162,7 millions d’euros, auxquels il faut ajouter dix autres millions pour la location simple du site en 2006. De même, le programme national d’équipement des préfectures vise à adapter les locaux aux nouveaux besoins tout en préservant le patrimoine et en garantissant la sécurité des biens et des personnes. Tous ces projets s’inscrivent dans la politique de valorisation du patrimoine du ministère, qui pourrait donner lieu à un audit.

Troisièmement, la recherche de la performance fait l’objet de plusieurs améliorations. Les projets annuels de performance, d’abord, gagnent en clarté ; la stratégie des programmes a été approfondie, bien que sa présentation laisse à désirer, et les objectifs ont été affinés. La justification au premier euro, elle, est plus détaillée mais pourrait être davantage précisée. L’analyse du coût des programmes reste, hélas, embryonnaire. D’autre part, le nombre des indicateurs a diminué pour en affiner la pertinence : avec 15 objectifs et 26 indicateurs tous renseignés, la mission gagne en clarté. Reste à atteindre les valeurs cibles… Ensuite, la LOLF a permis d’associer les services départementaux à l’élaboration des budgets opérationnels de programme et la dépense a été largement déconcentrée – ainsi, les BOP territoriaux rassemblent 99,7 % des dépenses de personnel et 81,2 % des autres crédits. Enfin, la stratégie ministérielle de réforme est désormais remplacée par une feuille de route ministérielle de modernisation qui en détaille les grands projets et prévoit des audits de modernisation. Deux regrets, néanmoins : la multiplication des outils risque de briser l’élan de réforme en en brouillant la lisibilité auprès des agents ministériels, des responsables politiques et de l’opinion ; en outre, les mesures prévues dans la feuille de route ne font l’objet d’aucun chiffrage budgétaire précis, alors que c’était le cas dans la SMR.

Le rapport de la mission conjointe de l’inspection générale de l’administration et du contrôle général économique et financier relative aux dépenses liées aux élections, rendu public en juin dernier, propose plusieurs pistes permettant de dégager des économies, qu’il faut encore chiffrer poste par poste. Trois autres audits sont par ailleurs en cours sur l’agence de délivrance des titres sécurisés, l’indemnisation des refus de concours de la force publique et la modernisation des achats publics.

En somme, le budget de la mission connaît cette année une hausse exceptionnelle que justifie l’échéance électorale du printemps. Celle-ci ne doit pourtant pas masquer la poursuite d’actions prioritaires menées depuis plusieurs années : gestion prévisionnelle des ressources humaines, déconcentration, fongibilité et optimisation de l’emploi des crédits en préfecture, rationalisation de l’implantation immobilière, réforme de l’administration territoriale ou encore développement de nouveaux titres sécurisés. Le ministère de l’intérieur est aujourd’hui l’un des plus impliqués dans l’application de la LOLF, la modernisation de l’État et la recherche de performance.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier, rapporteur pour avis de la commission des lois  C’est certain !

M. le Rapporteur spécial - Pour autant, il faudra poursuivre et évaluer ces réformes, en prenant notamment en compte l’allégement des structures de l’administration territoriale et l’indispensable simplification des relations entre l’État et le citoyen. En attendant, je suis naturellement favorable à l’adoption des crédits de cette mission.

M. le Rapporteur pour avis – Pour la première fois depuis l’entrée en vigueur de la LOLF, nous pouvons établir une comparaison solide avec l’exercice précédent et constatons ainsi une nette augmentation des crédits de la mission – de 12,9 % en crédits de paiement et de 6,4 % en autorisations de programme. La dépense publique doit pourtant être stabilisée, mais cette hausse est sans surprise : la mission comprend les dépenses liées aux élections, qui seront nombreuses en 2007. La démocratie a un coût, et ce coût augmente à mesure que les candidats sont plus nombreux et la diffusion de la propagande électorale plus onéreuse. Certes, le rapport de la mission d’audit de l’inspection générale de l’administration et du contrôle économique et financier évoque plusieurs pistes visant à faire des économies, mais il n’est pas conforme à notre tradition républicaine de changer les règles du jeu à quelques mois des échéances. Je salue donc la sagesse du Gouvernement qui se met à l’abri de tout soupçon de démagogie en reportant ce chantier à la prochaine législature.

La mission « administration générale et territoriale de l’État » couvre aussi le budget des préfectures, qui en représente les deux tiers. Or, j’ai pu constater sur le terrain que les préfectures sont en pointe en matière de réforme budgétaire et territoriale : elles passent avec succès d’une culture de moyens à une culture du résultat. Pour autant, cette nouvelle méthode de gestion pose encore des problèmes. En 2005 déjà, les services centraux et déconcentrés ont consenti un effort considérable pour élaborer les BOP des préfectures qui, de surcroît, sont désormais soumis à l’avis des préfets. Il en fut de même en 2006 : la création d’une comptabilité d’exercice impose aux services gestionnaires le maniement de nouveaux outils encore à l’essai. La transition s’est pourtant bien déroulée : les outils de gestion de performance ont été perfectionnés et les opérations d’exécution menées à bien, malgré quelques tensions inévitables. L’exercice de 2007 sera le premier à requérir la certification des comptes : il faudra donc poursuivre notre effort d’adaptation.

Soyons optimistes : la LOLF, contrairement à ce qu’en disent certains esprits chagrins, n’est pas une pratique ésotérique réservée à quelques adeptes du discours sur la performance. Au contraire, elle régit désormais la vie quotidienne de l’administration territoriale. L’analyse de leurs propres tâches conduit souvent les agents à en améliorer l’exécution, et leur effort est reconnu à sa juste valeur. Les marges de manœuvre qui en découlent permettent d’améliorer les conditions de travail et les résultats sont déjà tangibles. Mme Bernadette Malgorn, secrétaire générale du ministère, l’explique clairement : les services sauront d’autant mieux réaliser ces économies qu’ils sauront comment leur effort sera récompensé.

Outre l’effort budgétaire, les préfectures ont mené une action territoriale double visant à l’amélioration de la cohérence des instruments stratégiques et à la diffusion aux départements des réformes engagées dans les régions – qui devra se poursuivre dans les sous-préfectures.

Tout d’abord, l’articulation entre les différents documents stratégiques est complexe et délicate : à la directive nationale d’orientation et au contrat de plan s’ajoutent les projets d’action stratégique de l’État dans les régions et les départements, les PAP et la feuille de route ministérielle de modernisation. Chacun d’entre eux comporte des objectifs et des indicateurs différents ; aujourd’hui, certains se modernisent – ainsi, les contrats de projet vont remplacer les contrats de plan qui arrivent à échéance. Les PASER et les PASED arrivent également, pour la plupart, à échéance en 2006. La prochaine génération est donc en cours d'élaboration. La DNO est un document évolutif, qui devra être actualisé début 2007 sur la base d'un bilan d'étape réalisé d'ici à la fin de l'année 2006. Le périmètre et le contenu des BOP s'affinent progressivement.

M. Maxime Gremetz – Qui vous a écrit cela ? Vous parlez une langue étrangère !

M. le Rapporteur pour avis – Si vous manquez de culture administrative, ce n’est pas ma faute !

M. Maxime Gremetz – Il faudrait tout de même que les énarques fassent un petit effort pour être intelligibles !

M. le Rapporteur pour avis – Il faut ajouter à ces échéances la mise en œuvre de la prochaine génération des fonds structurels pour la période 2007-2013. L'année 2007 constituera donc une occasion unique de préparer l'articulation entre ces différents documents pour créer un effet de levier optimal et permettra de réduire les coûts de transaction liés à la recherche de la mise en cohérence de ces divers instruments. L'objectif ultime est bien celui d'un meilleur pilotage de la politique territoriale de l'État.

J'en viens maintenant à la modernisation des différents échelons d'administration territoriale de l'État.

En vigueur depuis le 1er janvier 2005, la réforme de l'administration régionale de l'État s'est traduite par le regroupement des services de l'État en neuf pôles régionaux autour du préfet de région. Chaque pôle est piloté par un chef de pôle. Ces chefs de pôles se réunissent autour du préfet de région, des préfets de département, du secrétaire général pour les affaires régionales et du secrétaire général du département chef-lieu de région. La réforme a permis de formaliser les efforts menés depuis plusieurs années par les préfets de région pour mieux coordonner l'action de l'État. Le premier bilan, effectué par les préfets de région à la mi-2006, le montre bien.

M. Maxime Gremetz - Évidemment, ils sont juge et partie !

M. le Rapporteur pour avis - De ce bilan, il ressort néanmoins un point faible : l'insuffisante association du niveau départemental aux travaux des pôles. Précisément, la réforme de l'administration départementale de l'État est entrée, en 2006, dans une phase active. Un bilan d'étape a été réalisé en mai 2006. Des expériences très intéressantes sont menées, certaines apparaissent même avant-gardistes à l'image de celle conduite dans le département du Lot.

Après la réforme de l'administration régionale et l'entrée dans une phase active de celle de l'administration départementale, la question des sous-préfectures se pose avec plus d'acuité. La sous-préfecture est-elle le lieu de la proximité administrative ? Est-elle un simple échelon d'exécution des décisions publiques ou bien un échelon d'exécution et de décision ? L'interministérialité locale existe-t-elle réellement dans un arrondissement ou bien est-ce seulement une réalité départementale ? Faut-il concevoir un modèle unique pour toutes les sous-préfectures ? Faut-il redessiner la carte des sous-préfectures ? Faut-il « rapatrier » tous les sous-préfets au chef-lieu de département ?

En réponse, il convient sans doute de favoriser à la fois le renforcement de la coordination des services déconcentrés par le sous-préfet et une relation plus directe entre l'arrondissement et la région, de faire de la sous-préfecture, dans certains départements, une véritable « maison de l'État » et, enfin, d'assurer un rapport concret, pratique et quotidien entre le citoyen et l'administration.

Au-delà de la permanence de sa fonction de représentation de l'État dans l'arrondissement, le sous-préfet d'arrondissement de demain doit s'emparer de nouvelles missions. D'abord, il doit s'affirmer comme un chef de projet, capable par sa neutralité et ses compétences techniques de fédérer et de coordonner les énergies et les ressources d'un territoire et, le cas échéant d'engager l'État, pour soutenir le développement de projets territoriaux initiés par les collectivités ou par les entrepreneurs locaux.

Ensuite, il doit être investi d'une véritable mission de pilotage des politiques interministérielles conduites dans l'arrondissement, en s'appuyant sur l'ensemble du réseau des services départementaux de l'État. Enfin, il doit être un représentant avancé du préfet de département dans les dispositifs de concertation nécessaires à la construction de projets territoriaux partagés en matière de maintien de l'accès aux services publics.

Plus ponctuellement, mais avec profit, le sous-préfet d'arrondissement doit se voir confier des missions départementales, dès lors par exemple que son arrondissement développe une « spécialité » profitable à l'ensemble du département, comme la politique de la ville ou la sécurité routière. Dans la même logique, je crois que les missions qu’il exerce sous l'autorité fonctionnelle du préfet de région doivent être développées.

Je ne saurais terminer mon propos sans saluer l'action efficace menée par Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux. Au bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, à l'instar de la commission des lois qui a émis un avis favorable, à adopter les crédits de la mission « administration générale et territoriale de l'État » pour 2007. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gilbert Meyer – Je souhaite intervenir sur le nécessaire maintien de la proximité des services déconcentrés de l'État à compétence technique, tels que les directions départementales de l'équipement – DDE – et les directions départementales de l'agriculture et de la forêt – DDAF. Ces administrations ont toujours été des conseils et des partenaires indissociables des activités des communes et de leurs établissements publics.

Aujourd'hui, les structures territoriales de l'État forment un ensemble complexe, cloisonné et peu compréhensible pour le citoyen et l'usager. Une rupture avec les collectivités locales, surtout pour ce qui est de ces deux administrations techniques, créerait encore un écran supplémentaire.

La décentralisation et la mise en œuvre de la LOLF conduisent à modifier sensiblement l'organisation territoriale pour répondre aux nouvelles attentes en matière d'efficacité et de qualité de service. La déconcentration doit permettre, au même titre que la décentralisation, une gestion de proximité. À une démocratie décentralisée de proximité doit correspondre une administration déconcentrée de proximité. Nous vivons en effet dans une société où les responsabilités, les pouvoirs et les conseils doivent toujours être exercés au plus proche du citoyen et de ses attentes. C'est vrai pour les actions de l'État comme pour celle des collectivités.

Mais construire une administration de proximité, ce n'est pas seulement se rapprocher des élus et des collectivités locales. C'est aussi se tourner davantage vers les usagers. Or, les élus locaux constatent que les moyens donnés à la déconcentration ne permettent pas, ou plus, d'assurer le bon fonctionnement des services techniques de l'État. Ils regrettent que l'organisation actuelle des services techniques de l'État ne tienne plus compte de la réalité territoriale, ce qui pénalise ainsi un service public de proximité. Il importe que ces services, en particulier ceux de la DDE et de la DDAF, puissent continuer à prêter leur indispensable concours aux élus locaux.

Je ne saurais clore mon propos sans mettre le doigt sur la profonde injustice qui régit la péréquation de la dotation globale de fonctionnement. Telle qu’elle est pratiquée, elle conduit en effet à un régime où une collectivité peut toucher dix fois plus qu’une autre ! Prenons par exemple les 400 villes de plus de 20 000 habitants : l’une d’elles a bénéficié d'une DGF de 1 019 euros par habitant, tandis qu’une autre n’en obtenait que 103. Toutes les communes doivent pourtant satisfaire les mêmes besoins et toutes sont les partenaires de l'État pour la mise en œuvre des projets initiés par le Gouvernement. Toutes doivent donc être traitées de la même façon. Une harmonisation des taux n’entraînerait pas forcément une dépense supplémentaire pour l'État. J’aimerais savoir quelles sont les orientations du Gouvernement sur ces deux points. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales – La mission « administration générale et territoriale » se compose de trois programmes : l'administration territoriale, c’est-à-dire les préfectures et sous-préfectures ; la vie politique, cultuelle et associative, avec un accent particulier sur les élections ; la conduite et le pilotage des politiques de l'intérieur, qui couvre les fonctions d'état-major exercées par l'administration centrale, à travers son secrétariat général.

La mission disposera pour 2007 de 2,7 milliards d'euros d'autorisations d'engagement et de 2,5 milliards d'euros de crédits de paiement, soit une progression de près de 13 % par rapport à 2006.

Ce budget nous donne les moyens d'aller plus vite et plus loin dans la modernisation. Cela passe d'abord par l'accélération de plusieurs grands projets structurants et innovants.

La sécurisation des titres est enfin réalisée pour les passeports, qui contiennent sous forme électronique la photographie et l'état civil du titulaire. C'est la première étape d'une modernisation d'ensemble des titres d'identité, qui répond aux normes internationales de circulation mais vise aussi à rendre ces titres plus sûrs et plus faciles à renouveler.

La deuxième étape aboutira en 2009, mais elle se prépare aujourd'hui. Il s'agit d'intégrer les empreintes digitales dans les futurs passeports et les nouvelles cartes d'identité.

Il est à noter que la possession d'un passeport ou d'une carte électronique restera facultative. Les données personnelles et biométriques seront protégées par des dispositifs techniques et des contrôles juridiques renforcés. Les futures cartes d'identité offriront des possibilités de signature électronique favorisant le développement des services et du commerce en ligne dans les meilleures conditions de sécurité.

Une attention toute particulière est portée à la définition d'un réseau de proximité pour le traitement des demandes et la remise des titres. Il devrait comprendre au minimum 2 000 mairies.

Avec le ministre d'État, nous avons tenu à ce que le Parlement soit rapidement saisi de ces réformes majeures. C'est l'objet d'un projet de loi actuellement soumis à la CNIL.

La conduite de ces projets sera confiée à une agence nationale des titres sécurisés, établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre de l'intérieur. L'agence prendra en charge dès le début de 2007 la production des passeports. Elle sera financée en partie par un prélèvement sur les taxes perçues lors de leur délivrance. Ses compétences seront progressivement étendues à d'autres titres. L'objectif est clair : il s'agit de renforcer la qualité des prestations assurées par l'État, en regroupant des compétences aujourd'hui dispersées entre plusieurs ministères.

La modernisation, c'est aussi le nouveau système d'immatriculation des véhicules ou SIV, qui entrera en vigueur en 2008. Fondé sur un numéro unique pour la durée de vie du véhicule et sur une responsabilisation accrue des concessionnaires, il permettra de dématérialiser 60 % des 23 millions d'opérations annuelles touchant l'immatriculation, cependant qu’un lien d’identification avec la région et le département d’origine pourra être maintenu car il serait dommage que les usagers doivent y renoncer. Il s’agit d’une réforme indispensable, non seulement pour remplacer un système de gestion des cartes grises à bout de souffle, mais aussi pour simplifier les démarches des usagers et lutter contre la fraude.

La refonte de l'application de gestion des titres des étrangers sera lancée en 2007, au travers du projet GRÉGOIRE, doté de 3 millions. L'objectif est d'intégrer la dimension interministérielle du traitement des dossiers et de prendre en compte l'introduction des empreintes digitales dans les titres de séjour. Il s'agit, au final, d'accélérer le traitement des dossiers, de mieux combattre la fraude et de fiabiliser nos connaissances statistiques sur l'évolution des flux migratoires. Le déploiement national interviendra en 2009.

Au total, les titres que nous délivrons seront mieux protégés, plus faciles à produire et offriront à leurs détenteurs des services plus performants.

Mais la modernisation ne s'arrête pas à la définition de nouveaux titres. J'en veux pour preuve la refonte du contrôle de légalité.

Si la loi du 13 août 2004 a permis de réduire de 20 % le nombre d'actes transmis aux préfectures, ils étaient encore près de 7 millions en 2005. Chacun comprend qu'un examen exhaustif de ces actes rend impossible un contrôle approfondi.

C'est pourquoi nous avons, avec le ministre d'État, demandé aux préfets en début d'année de se doter de stratégies de contrôle spécialement orientées sur les enjeux principaux que retrace une circulaire de l’année dernière : l’intercommunalité, la commande publique, l’urbanisme et environnement. À chacune des assemblées départementales de maires à laquelle on m’invite, je rappelle précisément ces trois orientations, tout en suggérant aux préfets d’être plus souples pour ce qui concerne la gestion de la fonction publique territoriale, car chacun sait que l’on a plus tendance à ergoter sur les actes des petites communes que sur ceux des grandes collectivités. Le message est toujours le même : respecter la circulaire qui encourage à contrôler ces trois domaines prioritaires.

En parallèle, toutes les collectivités qui le souhaitent auront la possibilité, d'ici la fin de l'année, de transmettre leurs actes sous une forme dématérialisée, via l’application ACTES. Cette faculté, déjà utilisée dans près de 40 départements, va permettre de redéployer de nombreux agents de préfecture vers le conseil et le renforcement de l'expertise juridique de l'État. Pendant l’été, certains élus – notamment un élu des Alpes-Maritimes en pointe sur ces questions – m’ont alerté sur le coût de cette démarche. Pour ma part, je suis persuadé que la dématérialisation entraînera assez rapidement des économies d’échelles conséquentes.

Enfin, cher Jean-Pierre Gorges, un audit de modernisation vient d'être lancé sur les possibilités de mutualisation entre les différents échelons territoriaux de l'État. Comme vous le souhaitez, il intégrera une étude des coûts induits dans ce domaine par les intercommunalités. Une communication gouvernementale portera très prochainement sur l’ensemble des autres audits.

Vous le voyez, la démarche de modernisation est au cœur de notre action. Elle repose sur trois objectifs : simplifier les procédures, réduire les dépenses et améliorer nos résultats. Elle permettra aussi de rendre plus fluides les relations de l'administration avec ses usagers et de libérer les préfectures de tâches purement matérielles, au profit de missions plus qualitatives.

Cela me conduit à la deuxième priorité, qui est de renforcer les compétences des agents, en vue d'offrir un meilleur service aux Français.

Dans les années qui viennent, le ministère de l'intérieur va devoir relever deux défis : le doublement des départs en retraite d'ici 2010-2015 et des missions exigeant des agents plus qualifiés, qu'il s'agisse de sécurité, de développement durable ou de conseil aux collectivités.

Pour y faire face, le plan de requalification que nous avons lancé l'an dernier sera accéléré. Près de 1 100 postes seront ainsi requalifiés dès 2007, spécialement en catégorie C, pour une dépense de 3,5 millions. D'ici 2010, 4 700 postes auront été requalifiés. Cet effort est rendu possible par le non-remplacement dès cette année de 404 départs, dont 315 en préfectures. D'ici 2010, 1 500 emplois seront supprimés.

L'adaptation des compétences passe aussi par une politique de formation ambitieuse, qui atteindra 1,5 % de la masse salariale, contre 1,2 % aujourd'hui. Au final, cela signifie moins d'activité de guichet, et plus de cadres, mieux formés et mieux payés. Les services du ministère seront ainsi en capacité de remplir leurs nouvelles missions et les perspectives de promotion permettront de mieux reconnaître les mérites de chacun.

Ces évolutions s'inscrivent dans le champ plus large des réformes statutaires et notamment de la fusion des corps. À partir du 1er janvier, 40 000 agents d'administration centrale, des préfectures, de la police et de l'outre-mer seront progressivement regroupés en trois corps – attachés, secrétaires et adjoints administratifs –, au lieu de seize aujourd'hui. Cette réforme offrira aux agents des possibilités nouvelles de mobilité et une gestion des ressources humaines plus cohérente. Enfin, 11,4 millions seront consacrés à la poursuite du rattrapage indemnitaire avec les autres ministères, soit deux fois plus qu'en 2006.

Nous voulons apporter la preuve par l'exemple que la modernisation de la fonction publique est possible, pourvu que chacun y trouve son compte : les contribuables, grâce à la diminution du nombre d'emplois ; les citoyens grâce à l'amélioration du service, mais aussi les fonctionnaires, auxquels cette modernisation offre de nouvelles perspectives, en termes de mobilité, de promotion, de responsabilité et de rémunération.

Cette nouvelle approche de l'action publique exige naturellement une adaptation des structures territoriales de l'État. Elle a été lancée en 2005, au niveau régional, avec le regroupement des services déconcentrés en huit pôles permettant au préfet de mieux assurer la cohérence de l'État. Les capacités d'expertise des SGAR ont aussi été renforcées, avec 150 chargés de mission issus de tous les ministères. Comme vous le souhaitez, Monsieur Gorges, les besoins en ce domaine seront précisément évalués en 2007.

La réforme départementale a été engagée en 2006 avec les mêmes objectifs : renforcer l'unité de l'État, la rendre plus visible, mais aussi rationaliser les dépenses. La fusion des DDE et des DDAF dans huit départements entrera en vigueur le 1er janvier. L'expérience la plus emblématique est conduite dans le Lot, avec le regroupement de tous les services de l'État – soit plus de 20 – en trois directions, chargées de la sécurité, des populations et des territoires, avec le renfort d'une direction logistique. Ce projet, largement concerté, ne suscite pas d’opposition.

L'adaptation des structures m'amène à évoquer l'avenir des sous-préfectures, après que Pierre Morel-A-L’Huissier lui a consacré de brillants développements. Je veux vous dire ici ma conviction que si les sous-préfets ont un rôle fondamental à jouer au cœur de l'action publique, ce rôle doit nécessairement évoluer. Il devra désormais reposer sur deux piliers : la sécurité des populations et l'utilité publique, au sens de la capacité à dégager l'intérêt général.

L'exigence de sécurité ne se résume pas à la lutte contre la délinquance. C'est aussi la préservation de l'emploi, la gestion des risques naturels et industriels, ou encore la protection sanitaire et alimentaire. La vocation première du sous-préfet, c’est d'incarner la proximité de l'État dans ces deux objectifs de sécurité et d'utilité publiques. C'est pour moi le préalable à toute réflexion sur le maillage du territoire. Au-delà des symboles, le nombre et l'implantation à venir des sous-préfectures découleront d'abord des missions et des moyens qu'on décidera de leur confier. J’ai personnellement évolué sur ce point, en reconnaissant que le critère démographique n’était sans doute plus le plus pertinent.

Un mot à l’attention de Gilbert Meyer, dont je connais la brillante carrière au sein de la fonction publique territoriale avant qu’il ne devienne maire et parlementaire. Vous avez souligné à juste titre l’importance du conseil délivré aux maires par les services déconcentrés. Il n’est pas question de le mettre en cause, même si la décentralisation oblige à revoir l’implantation des services sur le territoire. Je comprends très bien, cher Gilbert Meyer, que le fait de passer de treize à quatre subdivisions de l’Équipement dans le Haut-Rhin puisse susciter des inquiétudes chez tous les élus. Mais nous préférons quatre subdivisions disposant des capacités d’expertise nécessaires à treize vidées de leurs moyens. C’est le sens de la directive d’orientation pour l’ingénierie publique qui été arrêtée par les ministères de l’équipement et de l’agriculture et qui prévoit de créer des guichets uniques, aujourd’hui mis en place dans la plupart des départements, dont le Haut-Rhin. La fusion expérimentale des DDAF et des DDE va venir renforcer la mutualisation des moyens. Vous évoquez aussi les modalités de péréquation de la DGF. Ce n’est pas à vous, Monsieur Meyer, que je rappellerai qu’il existe des inégalités de recettes fiscales entre les collectivités, qui ne résultent pas de choix délibérés. Nous nous engageons fermement en faveur de celles qui sont structurellement défavorisées. L’État assure un traitement de base identique aux collectivités qui partagent les mêmes critères physiques et les dotations de péréquation – soit 14% de la DGF – viennent en fonction des ressources et des charges de chacun. J’indique d’ailleurs que Colmar bénéficie de cette péréquation au travers de la DSU – pour 1,4 million en 2006 –, ce qui est parfaitement légitime puisque votre commune compte une proportion de logements sociaux supérieure à la moyenne des villes de plus de 10 000 habitants…

M. Maxime Gremetz – Comme Neuilly-sur-Seine !

M. le Ministre délégué – …cependant que son niveau de richesse est inférieur à la moyenne.

Je voudrais, pour conclure, revenir sur ce qui fonde ce projet de budget : l'amélioration de la performance par la rationalisation des dépenses. J'en donnerai quelques exemples.

D'abord, les crédits de fonctionnement courant des préfectures diminueront de 5 % en 2007. Les frais de téléphonie fixe ont déjà diminué de 21 %, les achats informatiques et les dépenses de téléphonie mobile de 10 % et les coûts d'affranchissement de 4 %. Dans le même temps, le délai de traitement des titres reculait de près de 60 % pour les cartes d'identité, de 25 % pour les passeports et de 11 % pour les cartes grises.

L'immobilier, ensuite. La prochaine installation du pôle « renseignements » à Levallois – regroupant la DST, la DCRG et la DNAT – va rassembler en un lieu unique 1 800 agents qui traitent de sujets communs. Cette opération a été réalisée au meilleur coût et permettra d'engager un ambitieux plan de cession et de résiliations de baux à Paris et en région parisienne.

Un mot à présent sur l'organisation des élections présidentielle et législatives de 2007, qui explique l'essentiel de la progression des crédits de la mission AGTE. Nous avons évalué au plus juste – soit à 244 millions – les crédits de paiement nécessaires, en tenant compte de certaines préconisations de l'audit de modernisation sur les dépenses électorales. Il subsiste des incertitudes sur le nombre de candidats ou l’évolution des dépenses postales et c’est pourquoi les autorisations d’engagement ont été estimées à 404 millions.

S’agissant de vos interrogations, Monsieur Gorges, sur l’évolution des 140 mises à disposition pratiquées par le ministère, 17 d’entre elles sont supprimées ou transférées en 2006 et 2007 et au moins 36 dès 2008.

Dans un monde qui bouge, nous répondons aux besoins des Français en démontrant que nous savons aussi transformer l’action publique. M. le ministre d’État et moi-même voulons continuer à progresser dans cette voie sous le double signe de la responsabilité et de la performance. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

Les crédits de la mission « administration générale et territoriale de l’État », mis aux voix, sont adoptés.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce matin, à 9 heures 30.
La séance est levée à 1 heure 45.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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