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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

2ème séance du jeudi 9 novembre 2006

Séance de 15 heures
21ème jour de séance, 43ème séance

Présidence de M. Maurice Leroy
Vice-Président

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La séance est ouverte à quinze heures.

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CONVENTIONS ET ACCORDS INTERNATIONAUX

L’ordre du jour appelle le vote, selon la procédure d’examen simplifiée, sur quatre projets de loi autorisant l’approbation d’accords internationaux.

M. le Président – Conformément à l’article 107 du Règlement, je vais mettre aux voix l’article unique de chacun de ces textes.

L’article unique du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord France-Brésil relatif à la construction d’un pont routier sur le fleuve Oyapock , mis aux voix, est adopté.
L’article unique du projet de loi autorisant l’approbation du protocole modifiant la convention portant création d’Europol, mis aux voix, est adopté.
L’article unique du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord France-Norvège-Royaume-Uni relatif à la propriété commune d’un système de sauvetage sous-marin, mis aux voix, est adopté.
L’article unique du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord France-Suisse relatif au raccordement de l’autoroute A35 à la RN2, mis aux voix, est adopté.

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LOI DE FINANCES POUR 2007 -seconde partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007.

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TRAVAIL ET EMPLOI (suite)

État B

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement  L’amendement 176 apporte une précision technique.

M. Yves Jego, suppléant M. Alain Joyandet, rapporteur spécial de la commission des finances Avis favorable.

L'amendement 176, mis aux voix, est adopté.

M. François Brottes - L’amendement 129 est défendu.

M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles – Avis défavorable. La mesure proposée contrecarrerait les efforts déployés par le Gouvernement en faveur du secteur de l’hôtellerie-restauration, essentiel pour notre économie, dont témoigne notamment l’accord de croissance du 17 mai dernier.

L'amendement 129, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « travail et emploi » ainsi modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

ART. 57

M. François Brottes - L’amendement 128 rectifié supprime cet article.

L'amendement 128 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur spécial suppléant – Les amendements 1 et 2 sont rédactionnels.

Les amendements 1 et 2, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés, de même que l’article 57 ainsi modifié.

APRÈS L'ART. 57

M. le Ministre – L’amendement 175 tend à mettre en œuvre l’aide aux extras dans les hôtels, cafés et restaurants, telle qu’elle est prévue dans le contrat de croissance signé le 17 mai entre le Gouvernement et les représentants de la profession.

L'amendement 175, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

ART. 58

L'article 58, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 58

M. le Ministre – L’amendement 174 vise a inciter les départements à mettre en œuvre le contrat d’avenir pour aider les titulaires de minima sociaux à reprendre un emploi.

L'amendement 174, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. Maxime Gremetz - Rappel au Règlement. J’avais des choses à dire sur ces sujets et ils ont été traités au pas de charge. Je demande une suspension de séance afin de pouvoir m’organiser pour la suite du débat.

M. le Président – M. Gremetz ayant la délégation de son groupe, la suspension est de droit.

La séance, suspendue à 15 heures 10, est reprise à 15 heures 15.

ART. 59

M. le Rapporteur spécial suppléant – Les amendements 3 et 4 sont rédactionnels.

Les amendements 3 et 4, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Ministre – L’amendement 196 vise à simplifier les expérimentations Martin Hirsch.

M. le Rapporteur spécial suppléant – Avis favorable : par cet amendement, le Gouvernement lève les inquiétudes de la commission sur le financement de cette expérimentation.

L'amendement 196, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur spécial suppléant – Les amendements 5 et 6 sont rédactionnels.

Les amendements 5 et 6, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Rapporteur spécial suppléant – L’amendement 150 rectifié vise à réorganiser la conclusion de contrats d’avenir par les collectivités locales de sorte qu’elle ne soit pas contradictoire avec les règles de la fonction publique territoriale.

M. le Ministre – Avis favorable.

M. Maxime Gremetz - Je profite de l’examen de cet amendement pour faire quelques remarques sur l’ensemble de l’article 59, inacceptable à plusieurs titres. En effet, il modifie les modalités d’application d’une loi récemment votée et surtout transfère, même à titre expérimental, le versement de la prime pour l’emploi aux départements. Il s’agit pourtant d’une prime nationale qui respecte l’égalité de traitement sur l’ensemble du territoire ! Mme Vautrin ne pouvait être plus claire lors de l’examen du texte à l’Assemblée le 29 novembre 2005 : l’État seul en assurera le financement, disait-elle. Finalement, ce sont les départements qui paient. Et ce n’est pas tout : ils peuvent dorénavant majorer le montant de cette prime à leur gré ! Vous dénaturez le sens initial de la mesure en ouvrant la porte aux inégalités de traitement, car la prime dépendra désormais des ressources départementales et alourdira la charge déjà excessive des conseils généraux. Je rappelle que l’État ne prend en charge que la moitié du milliard d’euros consacré par les départements – véritables vaches à lait – au RMI, auquel vous ajoutez désormais le financement de la prime pour l’emploi ! Quelle générosité de la part de l’État ! Vive la décentralisation !

L’Association des départements de France nous a par ailleurs alertés sur la multiplication des contrats aidés. Plutôt que cet énième transfert de charges, ne faudrait-il pas toiletter le dispositif d’insertion, de sorte que ceux qui en ont le plus besoin ne soient pas systématiquement laissés au bord du chemin ? Nous voterons contre cet article 59 qui fait reposer sur les budgets de départements déjà exsangues le poids d’un dispositif dont l’État se désengage.

M. le Rapporteur spécial suppléant – Je vais m’efforcer d’aider M. Gremetz à sortir de la confusion où il se trouve…

M. Maxime Gremetz - Merci, Monsieur le professeur ! Je suis si confus, en effet !

M. le Rapporteur spécial suppléant - …malgré lui, cela va de soi : nul ne songerait à l’accuser de mauvaise foi. L’article 59 découle directement des modifications constitutionnelles qui permettent l’expérimentation de certains dispositifs. Loin de la refuser, les départements la réclament afin d’étendre leur marge de manœuvre dans un domaine complexe et varié. Quant à la prime pour l’emploi, l’État n’en transfère pas la charge aux départements, mais les autorise à y ajouter un complément afin d’améliorer le dispositif. Pour ma part, j’avais souhaité que l’on institue un contrat unique fusionnant les contrats existants : j’espère que l’amendement que j’ai déposé à cet effet, refusé ici pour raisons de procédure, pourra être examiné au Sénat. Quoi qu’il en soit, l’expérimentation en question permet de ne pas engager des politiques publiques avant de les avoir testées. Rassurez-vous, Monsieur Gremetz : il n’y a ici ni transfert de charges, ni contrainte faite aux collectivités !

M. Maxime Gremetz – Je n’y connais peut-être rien, mais je fais confiance à l’association des départements de France, qui détient certainement plus d’intelligence que vous et moi réunis : je ne fais que reprendre son avis !

L'amendement 150 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur spécial suppléant – Les amendements 151 et 7 sont rédactionnels.

Les amendements 151 et 7, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Rapporteur spécial suppléant – L’amendement 152, que je défends à titre personnel, clarifie l’alinéa 12.

L'amendement 152, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur spécial suppléant – Les amendements 8, 9 et 10 sont rédactionnels.

Les amendements 8, 9 et 10, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Rapporteur spécial suppléant – L’amendement 154, que je présente à titre personnel et que soutient l’association des départements de France, vise à simplifier la passation de contrats d’avenir en faisant des départements l’interlocuteur unique.

L'amendement 154, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur spécial suppléant – L’amendement 11 est rédactionnel.

L'amendement 11, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur spécial suppléant – L’amendement 157 rectifié vise à laisser aux départements qui le souhaitent la faculté de limiter l’expérimentation à une partie de leur territoire.

L'amendement 157 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre – Le Gouvernement accompagnera financièrement les expérimentations. L’amendement 197 précise qu’il versera au département les 1 000 euros de la prime de retour à l’emploi.

M. le Rapporteur spécial suppléant - Avis favorable. Cela répond à certaines interrogations.

L'amendement 197, mis aux voix, est adopté.

M. Gaëtan Gorce - L’amendement 134 est défendu.

M. le Rapporteur spécial suppléant – L’amendement 158 est identique.

M. le Ministre – Ces amendements visent à organiser de manière collective la remontée des informations sur les expérimentations. Il y a là un souci de transparence. En même temps, la nature des expérimentations est si variée qu’il est difficile de généraliser. Je préférerais donc que l’on se donne un peu de temps. Sagesse.

Les amendements identiques 134 et 158, mis aux voix, sont adoptés.
L'article 59 modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 60

M. le Rapporteur spécial suppléant – L’amendement 13 supprime cet article. La commission a eu un débat sur cette question des cotisations sociales pour les contrats d’apprentissage et de professionnalisation. Elle souhaite que le Gouvernement éclaire l’Assemblée.

M. le rapporteur pour avis - L’amendement 20 de M. Christ est identique.

M. le Ministre - Nous menons une politique globale, et c’est à ce titre que nous accordons 1600 euros par contrat d’apprentissage et même 2200 euros dans les cas difficiles. De même le fonds de modernisation de l’apprentissage met 250 millions par an à la disposition des régions pour améliorer les centres d’apprentissage. Dans ces conditions, le Gouvernement ne peut accepter cet amendement de suppression.

M. Maxime Gremetz – Il y a déjà 25 milliards d’exonérations patronales, mais il se trouve des gens qui veulent encore en rajouter ! Et ensuite, on parlera du déficit de l’UNEDIC et autres organismes sociaux. Le ministre refuse donc fort justement que l’on supprime cette suppression d’exonération de cotisations employeurs pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. Autant dire que les patrons seront exonérés de tout. C’est dépasser la mesure, surtout à la veille des élections. Cet amendement est une véritable insulte pour les salariés qui vivent dans la difficulté.

M. Gilles Carrez – Le seul but de la commission des finances en adoptant cet amendement était de favoriser le développement des contrats d’apprentissage et de professionnalisation. Je salue d’ailleurs la réussite du Gouvernement, car leur nombre a beaucoup augmenté en deux ans.

Cela étant, ce ne serait pas une bonne idée de supprimer un article qui rétablit les cotisations au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles dans ce cas, d’autant que les jeunes sont très concernés. Les 15-29 ans représentent 20 % des salariés, mais 36 % des victimes des accidents du travail. Il ne serait pas bon de ne plus inciter les employeurs à être attentifs à la prévention.

Et il ne s’agit pas ici des exonérations de cotisations d’ordre général, lesquelles sont très utiles. Ces 20 milliards …

M. Maxime Gremetz - 25 milliards ! Écoutez l’avis de la Cour des comptes !

M. Gilles Carrez - …ont permis de créer des centaines de milliers d’emplois, notamment dans les petites entreprises. Mais elles ne portent en aucun cas sur les cotisations d’accident du travail.

En outre, si l’article 60 était supprimé, en tant que rapporteur général, je serais amené à demander au Gouvernement un gage pour la mission Travail, comme ce fut le cas l’an dernier à propos du rétablissement de l’échéancier des cotisations d’apprentissage. Il s’agit de 75 millions, et je ne suis pas sûr que le budget 2007 soit si généreux avec le ministère du travail qu’il puisse se permettre cette dépense.

M. Gaëtan Gorce – Le ministre a repoussé l’amendement pour des motifs financiers, mais il s’agit d’abord de se soucier de la sécurité et de lutter contre les accidents du travail, dont le nombre a beaucoup augmenté ces dernières années. Il se produit chaque jour 2000 accidents du travail avec interruption d’activité. Il faut donc se montrer vigilant.

Je me permets de revenir sur l’expérimentation pour clarifier notre position. Les socialistes ne sont pas hostiles à l’expérimentation en ce qui concerne l’insertion, mais ils préfèrent un contrat unique au plan national. Nous sommes également préoccupés par les difficultés croissantes des départements en raison des responsabilités qu’on leur confie dans ce domaine. L’insertion doit être une priorité nationale, donc relever de la responsabilité de l’État.

M. Francis Vercamer - Un membre de l’UDF a cosigné cette proposition, mais il me semble que l’exonération de certaines catégories seulement ne peut qu’embrouiller les employeurs. On ferait mieux de réfléchir une bonne fois pour toutes au système des exonérations, dont la Cour des comptes estime qu’il n’a pas vraiment d’influence sur l’emploi. En attendant, les cotisations du travail doivent rester standardisées. Le groupe UDF ne votera donc pas cet amendement.

M. Marc Laffineur - Je comprends bien l’esprit qui a guidé ces amendements, mais je pense qu’ils vont aboutir exactement à l’inverse de ce qui était souhaité. Le budget du travail est spécialement bien équilibré. Devoir réaliser 75 millions d’économies ne peut que le mettre en grande difficulté. Je suis donc contre ces amendements.

M. Jean-Marie Binetruy – La commission des affaires sociales, elle, leur a donné un avis favorable. Elle juge important de montrer aux entreprises que tout est fait pour favoriser l’apprentissage et les contrats de professionnalisation.

Les amendements 13 et 20, identiques, mis aux voix, ne sont pas adoptés.
L'article 60, mis aux voix, est adopté.

après l'Art. 60

M. le Rapporteur spécial suppléant – L’amendement 15 rectifié a pour objet de pérenniser le comité central de coordination de l’apprentissage dans le BTP, auquel il manquait une base légale. Le comité, organisme historique, a un rôle reconnu. Il représente aujourd’hui 101 centres de formation, 76 000 apprentis et plus de 3 000 enseignants. À l’heure où le secteur du BTP a besoin de procéder à des recrutements massifs, il faut conforter tous les outils qui en ouvrent l’accès aux plus jeunes.

M. le Ministre – Avis très favorable.

M. Maxime Gremetz – Pourquoi ne s’intéresser qu’à une seule branche ? Pourquoi ne pas proposer la même chose pour la métallurgie ou l’automobile, et toutes les branches qui ne trouvent pas de main-d’œuvre ? Parce que cet amendement répond, clairement, à la demande d’un lobby ! Mais nous sommes censés légiférer dans l’intérêt général, pas dans celui des corporations. Il est intolérable que la représentation nationale se laisse embobiner de cette façon.

En outre, vous voulez remplacer le mot « taxe » par celui de « cotisation ». Cotisation de qui, basée sur quels critères ? Les cotisations répondent à une définition très précise. Les cotisations patronales et salariales font l’originalité de notre système. Elles ne peuvent être confondues avec les taxes. Et le « comité central de coordination » doit aussi être renommé : « comité de concertation et de coordination ». Concertation avec qui ? Le lobby des bâtiments et travaux publics, bien sûr ! Je suis donc absolument contre cet amendement, pour des raisons morales. Il est urgent de préserver la dignité de la représentation nationale, alors que des articles circulent qui la mettent en cause et qui n’ont pas été démentis. Bien sûr que les groupes pharmaceutiques invitent souvent les députés ! Moi, je n’y suis jamais allé. Par principe.

Plusieurs députés UMP – Nous n’avons jamais été invités !

M. Maxime Gremetz – Je ne donnerai pas de noms, mais je connais des députés qui acceptent – et des Picards, qui plus est ! Je demande un scrutin public sur cet amendement.

M. le Président – Sur l’amendement 15 rectifié, je suis saisi, par le groupe communiste et républicain, d’une demande de scrutin public.

M. le Rapporteur spécial suppléant – Vous allez encore m’accuser de vouloir vous donner des leçons, Monsieur Gremetz, mais notre différence d’âge ne me le permettrait pas. Le comité, que vous accusez d’être issu de je ne sais quel lobby, a été créé le 15 juin 1949. Depuis, il fonctionne de façon paritaire, avec cinq organisations de salariés du BTP et quatre d’employeurs. L’amendement 15 rectifié n’est certainement issu d’aucune pression patronale, puisque les organisations d’employeurs n’y étaient pas très favorables. Ce sont les organisations de salariés qui ont insisté pour donner une base juridique au comité ! Le scrutin public permettra de connaître les positions de chacun sur cette demande. Nous ne cherchons pas à conforter une branche au détriment des autres : nous voulons conforter un outil qui permet de former les jeunes à des métiers pleins de noblesse et qui fonctionne bien, parce que ce sont les organisations syndicales qui le pilotent. Votre envolée vous place plutôt du côté des employeurs que des salariés.

M. Maxime Gremetz - Laissez-moi me placer où je veux, c’est-à-dire du côté de l’intérêt général.

M. Francis Vercamer - Les artisans du bâtiment sont très hostiles à cet amendement. Le groupe UDF s’abstiendra donc.

M. Maxime Gremetz - Merci, Monsieur le rapporteur, d’avoir rappelé l’histoire. Je vais maintenant pouvoir replacer les choses dans leur contexte. Le comité a été créé au lendemain de la guerre, pour reconstruire la France. Les gens qui ont fait de grandes études sont tellement plus modernes que moi qu’ils veulent perpétuer ce qui existait à l’époque, et qui était d’ailleurs parfaitement acceptable, alors que tout a changé ! Les artisans, qui sont les principaux constructeurs de logements, ne soutiennent pas cet amendement : ce sont les grands groupes du BTP qui le veulent !

À la majorité de 23 voix contre 1, sur 29 votants et 24 suffrages exprimés, l’amendement 15 rectifié est adopté.

M. Maxime Gremetz – Ils pourront vous payer un bon repas !

M. Patrice Martin-Lalande – C’est scandaleux de dire cela !

Art. 61

M. le Rapporteur spécial suppléant - L’amendement 14 tend à supprimer cet article.

M. le Rapporteur pour avis – L’amendement 124 est identique.

L’apprentissage est une priorité pour le Gouvernement, qui a dégagé des moyens importants pour revaloriser le statut d’apprenti et pour accompagner les entreprises. Il pourrait paraître paradoxal de priver, en supprimant cet article, les centres de formation des apprentis du produit d’une taxe payée par les entreprises de plus de 250 salariés, d’autant que nous savons combien les artisans et les petites entreprises sont prêts à s’investir pour l’apprentissage. Mais l’AFPA, pour sa part, s’inquiète de ce que cette contribution se substitue à une recette pérenne provenant de l’État.

C’est pourquoi nous nous sommes élevés contre cette disposition en demandant à M. le ministre de trouver une solution financière afin que les entreprises puissent continuer à alimenter les fonds régionaux de l’apprentissage et que l’AFPA puissent également bénéficier de moyens pérennes. Je rappelle que sur un budget global de un milliard, l’AFPA bénéficie de 700 millions en provenance de l’État, de 49 millions versés par divers organismes publics, de 120 millions provenant des collectivités territoriales et, enfin, de 130 millions de ressources propres.

Il est par ailleurs regrettable que les régions se désengagent parfois du soutien à l’AFPA. Je rappelle à nos collègues élus régionaux qu’ils sont compétents dans le domaine de l’apprentissage.

M. Gaëtan Gorce - L’amendement 127, bien qu’identique, se fonde sur une autre approche. Il doit être compris en relation avec l’amendement rejeté précédemment, prévoyant d’abonder l’AFPA à hauteur de 200 millions. Il n’est pas acceptable d’affecter la surtaxe d’apprentissage à l’AFPA. Il me semble que M. le rapporteur spécial parle même de détournement. Ce mode de financement, en outre, va-t-il durer ? Enfin, cette recette est aléatoire puisqu’elle dépend du comportement des entreprises. M. le ministre doit donc nous dire pourquoi l’AFPA a été privée de 200 millions et comment il compte assurer le complément de son budget. Nous retirerons éventuellement notre amendement, certes, puisqu’il vaut mieux 85 millions que rien du tout, mais tout de même, vous placez l’AFPA et l'Assemblée nationale dans une situation impossible.

Je comprends que l’on s’interroge sur le comportement des régions, mais je rappelle que c’est la loi qui a organisé la concurrence entre l’AFPA et des structures de formation privées, ce qui a rendu ambiguë sa mission au moment même où l’on considère qu’un effort particulier de formation doit être accompli. Il serait bon, Monsieur le ministre, que vous dissipiez les inquiétudes qui se sont fait jour.

M. le Ministre – Un budget comprend des recettes et des dépenses, or, je rappelle que le vote sur les recettes a déjà eu lieu à l'Assemblée nationale. Nous avons donc voulu, ce qui me paraît sain, laisser les recettes de l’apprentissage à l’apprentissage et arrêter de financer le FUP par la surtaxe. Néanmoins, le problème du financement de l’AFPA est posé. Nous avons considéré qu’il était possible, pour une fois, de la financer à partir de l’excédent du FUP mais cela ne règle pas fondamentalement la question. J’ai donc besoin de l’accord du ministère des finances pour qu’une affectation pérenne du FUP à hauteur de 140 ou 150 millions soit rendue possible au Sénat.

M. le Rapporteur spécial suppléant – La commission souhaite également que les régions soient interrogées sur certains désengagements.

Compte tenu des propos de M. le ministre, je retire l’amendement 14.

L'amendement 14 est retiré.

M. le Rapporteur pour avis – Pour les mêmes raisons, je retire l’amendement 124 mais je rappelle combien le groupe d’études sur l’artisanat et sur les entreprises, présidé par M. Christ, souhaitait que l’on débatte de cette question.

L'amendement 124 est retiré.

M. Gaëtan Gorce – Je retire également l’amendement 127 mais les propos de M. le ministre ne nous satisfont pas. Des incertitudes demeurent et on ne peut considérer que le FUP a vocation à financer l’AFPA. On a trop souvent vu des excédents utilisés pour des « bonnes œuvres » faute d’affecter de véritables moyens.

M. Maxime Gremetz – Je reprends l’amendement 127 car je n’ai aucune confiance dans la parole du Gouvernement. La majorité du Sénat étant encore plus conservatrice que celle de l’Assemblée, on ne peut pas savoir en outre ce qui sera effectivement décidé. M. le ministre peut se faire blackbouler ! J’ajoute que les régions ne peuvent pas tout faire, et j’ai les plus grandes craintes pour le service public de la formation professionnelle.

L'amendement 127, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Liebgott – Le groupe socialiste s’est abstenu.

M. le Ministre – L’amendement 195 propose une nouvelle rédaction de l’article 61.

L'amendement 195, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté et l’article 61 est ainsi rédigé.

APRÈS L'ART. 61

M. le Rapporteur spécial suppléant – L’amendement 125 rectifié vise à supprimer les inégalités dans le traitement de l’accès au CESU. Il s’agit d’ajouter un certain nombre de bénéficiaires à la liste de ceux qui sont déjà prévus et de permettre, lorsque l’ensemble des salariés bénéficient de ce dispositif, que le chef d’entreprise puisse également en bénéficier.

M. le Ministre – Avis favorable. L’entrepreneur individuel, quel que soit son statut juridique, doit pouvoir en effet en bénéficier. Je lève le gage.

M. le Rapporteur pour avis – Je rappelle que, grâce au CESU, 500 000 emplois ont été créés dans le secteur des services à la personne en trois ans, dont 97 500 en 2005 Sur les neuf premiers mois de 2006, la croissance globale est supérieure à 18 % ; elle est de 30 % dans le secteur de la santé, de 43 % dans le soutien scolaire, de 100 % dans le secteur du travail temporaire. Le CESU est une réussite !

L'amendement 125 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le rapporteur spécial suppléant – L’amendement 126 rectifié tend à aligner le régime fiscal et social des agents publics bénéficiant du CESU sur celui des agents privés. C’est une mesure d’équité.

M. le Ministre – Le CESU a ouvert le champ de toute une nouvelle économie. Il convient d’en adapter en permanence le dispositif. Le Gouvernement est donc favorable à l’amendement et lève le gage.

L'amendement 126 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Nous avons terminé l’examen des crédits de la mission « travail et emploi ».

La séance, suspendue à 16 heures 15, est reprise à 16 heures 20.

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agriculture, pêche, forêt et affaires rurales

M. le Président – Nous abordons l’examen des crédits de la mission « agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ».

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques – L’examen des crédits de la mission « agriculture » pour 2007 s’inscrit dans un contexte particulier, notamment avec le début d’une nouvelle ère budgétaire pour la PAC. 2007 sera en effet la première année d’application pleine et entière de la réforme des droits de paiement unique – DPU – en France ainsi que la première année de la programmation 2007-2013 de la politique de développement rural. Le rapporteur de la loi d’orientation agricole, que j’ai été, n’oublie pas que 2007 sera également l’année où les dispositions de cette loi achèveront d’entrer en vigueur. Je vous remercie à cet égard, Monsieur le ministre, de la mobilisation et de la disponibilité de vos services qui ont permis aux principales mesures de la loi d’être applicables dès cette année. Certaines d’entre elles trouvent d’ailleurs une traduction concrète dans le projet de budget que nous examinons, le ministère de l’agriculture finançant à lui seul près de 40 millions d’euros d’exonérations de charges de sociales en faveur de l’emploi, prévues par la loi d’orientation et par la loi relative au développement des territoires ruraux.

Les marges de manœuvre du ministère de l’agriculture sont réduites cette année. Toutefois, grâce à une augmentation globale de 1 % de ses crédits, à d’importants efforts de redéploiement interne et à la restriction des dépenses de personnel et de structure, les actions engagées depuis 2002 pourront se poursuivre l’année prochaine. Le ministère pourra ainsi aider les exploitants à relever les nouveaux défis : maîtrise des risques sanitaires et des aléas, modernisation des exploitations, gestion de la ressource en eau, réduction des pollutions, développement de nouvelles productions et de nouveaux modes de commercialisation. Des choix ont cependant dû être opérés. Ainsi, au sein du programme 154 qui concentre à lui seul 30 % des moyens du ministère, les dispositifs dont les crédits avaient fortement augmenté l’an passé, comme le PMPOA ou le plan de modernisation des bâtiments d’élevage, régressent cette année. Un « plan végétal pour l’environnement » a cependant été créé pour attribuer des aides aux équipements, afin de favoriser une gestion rationnelle des intrants, des produits phytosanitaires ou de l'énergie dans le secteur des productions végétales.

La revalorisation des ICHN est inférieure à ce qui avait été promis au début de la législature. En revanche, la dotation de la prime herbagère agro-environnementale – PHAE – augmente, afin de permettre le renouvellement des CTE herbagers, qui s’effectue désormais dans ce cadre, et d'anticiper la fin des cofinancements communautaires pour les engagements pris à compter de 2008.

La donne budgétaire est passablement bouleversée par les priorités retenues dans le cadre de la programmation 2007-2013 du FEADER, qui s'inscrit en outre dans un contexte de rigueur, puisque l'enveloppe budgétaire affectée à la France diminue de 16 % sur la période. Je regrette que les dotations affectées aux mesures agro-environnementales et territoriales accusent une baisse de 8,6 % en crédits de paiement. Elles permettront néanmoins à quelque 2 300 nouveaux exploitants de conclure un contrat d'agriculture durable. Il convient ici de privilégier les agriculteurs en conversion biologique ou les jeunes agriculteurs. Les crédits consacrés à l'agriculture raisonnée, qui sont également en baisse, permettront cependant d'accompagner une seconde tranche de 1 500 exploitations dans une démarche d'agriculture durable.

Les crédits du programme 227 diminuent de 3,7 %. Seuls ceux affectés à la promotion internationale des produits sont revalorisés de 20 %, après deux années consécutives de baisse. L'aide à l'assurance récolte, préoccupation d’avenir, disposera de 30 millions en crédits de paiement. Il est cependant urgent que les décrets d'application des articles 62 et 63 de la loi d'orientation agricole, qui sont prêts, bénéficient d'un arbitrage interministériel favorable.

Si les moyens affectés à l'INAO et à la politique de sélection végétale et de génétique animale sont préservés, on ne peut cependant qu'appeler à un renforcement de ces postes budgétaires dans la perspective des réformes de la politique de qualité et de la loi sur l'élevage adoptées dans le cadre de la loi d’orientation agricole. Je rappelle que l’Institut national de la qualité s’est vu assigner de nombreuses missions nouvelles.

En ce qui concerne le programme 149, je me félicite de la pérennisation des moyens de l'Office national des forêts dans le contrat d'objectifs et de moyens qu’il vient de signer avec l'État. L'inscription de son action dans une nouvelle démarche d'amélioration de la productivité, de valorisation du bois et de développement durable, ainsi que la modernisation de ses modalités d'intervention, notamment avec la possibilité de prendre des parts dans des sociétés privées, lui permettront d’accroître ses capacités d'intervention.

Bien qu'elle mobilise peu de crédits, je tiens à souligner la création d'un poste budgétaire « promotion des initiatives collectives pour la valorisation de la biomasse », qui financera aussi bien des actions ponctuelles au niveau régional – promotion du bois, développement de la filière, études d'impact environnemental – qu’une première évaluation de la situation de la France par rapport aux engagements internationaux pris dans le cadre du protocole de Kyoto. Cette initiative s'inscrit en effet pleinement dans la démarche de valorisation des productions forestières promue par la loi d'orientation agricole et par le plan forestier national présenté en juin.

Je salue enfin les efforts du ministère de l'agriculture en matière de gestion de la masse salariale et des frais de fonctionnement. Grâce à une politique de gestion active du personnel, il a diminué d'environ 15 millions d'euros sa masse salariale, tout en mettant en œuvre une politique salariale favorable aux agents et en améliorant le service rendu aux usagers, c'est-à-dire aux exploitants – simplification des formalités administratives, développement des téléprocédures, démarches qualité. Le versement mi-octobre d'une avance correspondant à 50 % du montant des aides PAC liées aux droits à paiement unique dues au titre de l'année 2006 pour 370 000 exploitants – soit 3 milliards d'euros – témoigne de l'efficacité de ces réformes.

Dans un contexte budgétaire difficile, le ministère de l'agriculture et de la pêche respecte ses engagements, tout en faisant des économies sur ses structures et en lançant de nouveaux projets. La commission des affaires économiques donne donc un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission agriculture, pêche, forêt et affaires rurales. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Aimé Kerguéris, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques – Dans un contexte budgétaire difficile, en particulier pour le ministère de l'agriculture et de la pêche dont les moyens ne progresseront que de 1 % en 2007, je ne puis que me féliciter de l'augmentation du budget affecté à la politique de gestion durable de la pêche et de l'aquaculture.

Cette augmentation de l'ordre de 88 % répond aux engagements pris l'année dernière pour préparer l'avenir de la pêche française et mettre en œuvre un projet global pour ce secteur, à la fois en termes de gestion de la ressource, de rentabilité de la filière et d'attractivité du métier. Bien que modeste – 60 millions d'euros en crédits de paiement sur un total de 5 milliards pour l'ensemble du budget de l'agriculture –, le budget de la pêche permettra de mettre en œuvre ce plan d'avenir et de financer la participation de l'État à la première année de programmation des nouveaux contrats de projet État-régions et au Fonds européen pour la pêche.

Le plan de sauvetage et de restructuration de la pêche, doté de 80 millions pour 2006 et 2007, financera à la fois des audits financiers et des mesures de prise en charge d'intérêts ou d'avances remboursables de trésorerie et d'actions de restructuration éligibles à des cofinancements nationaux et communautaires. Mon seul regret est que ce plan, qui se substituera aux soutiens accordés dans le cadre du Fonds de prévention des aléas à la pêche, ne reprenne pas le principe d'action collective qui prévalait jusqu'alors. Un engagement fort de la profession dans ce processus de modernisation est indispensable. Les textes relatifs aux différents dispositifs sont donc très attendus, tout comme les études d'impact sur les conséquences, port par port, du plan de sortie de flotte qui l'accompagne.

Ce projet de loi de finances entérine une forte augmentation de crédits sur les postes de dépenses qui constituent les deux leviers de la réforme : les actions d'adaptation de la filière et les actions de suivi des milieux et de gestion durable de la ressource halieutique. Ainsi 25 millions d'euros – contre 9 en 2006 – seront consacrés à la flotte de pêche, afin de financer à la fois les investissements de sécurité et de modernisation habituels et les aides à la restructuration des entreprises. Les crédits dédiés aux investissements à terre seront quant à eux doublés, pour atteindre 3 millions d'euros.

Les crédits dévolus au suivi des milieux et à la gestion durable de la ressource halieutique augmentent de plus de 150 %. L'ajustement de l'effort de pêche bénéficiera de 10 millions d’euros en 2007, contre 3 millions en 2006. Le contrôle des pêches verra ses moyens doubler en 2007, afin de mieux répondre aux exigences communautaires et d’éviter de nouveaux contentieux et de nouvelles pénalités financières.

J’attire enfin votre attention sur trois chantiers importants : la mise en place du statut de « société de pêche artisanale », la mutualisation des risques par un dispositif euro-compatible et adapté au secteur, et la prise en compte, dans le domaine conchylicole, de la spécificité de cette activité agricole qui s'exerce en milieu marin. Cette dualité pose plus de problèmes aux professionnels qu'elle n'en résout. Des adaptations sont nécessaires sur le rôle d’équipage, avec une définition de la navigation « culture marine », sur les cotisations ENIM, qui doivent être déconnectées du navire, sur les règles de sécurité.

Autre sujet important, celui des aides de l'IFOP, qui faute d'instructions se sont vu réduire à la portion congrue, voire non affectées. Dans le seul Morbihan, plus de 70 dossiers, déposés en temps voulu, n'ont toujours rien reçu. Ce dysfonctionnement ne doit pas se reproduire dans le cadre du FEP : derrière un dossier, il y a une entreprise et des emplois.

Je reprends enfin les conclusions de l'excellent rapport de notre collègue Hélène Tanguy pour insister sur la nécessaire valorisation du produit pêché, y compris des 70 % de la part des co-produits. Cette matière première est aujourd’hui gaspillée, alors qu’on pourrait tirer profit de ces produits, riches en oligoéléments, en médecine, en cosmétique ou en diététique. Des projets d'usine de valorisation sont en cours, notamment à Lorient. Il y a là des initiatives à soutenir.

Au vu de l'évolution favorable des crédits consacrés à la pêche au sein de la mission agriculture, pêche, forêt et affaires rurales et des engagements pris par le Gouvernement pour assurer l'avenir de la pêche française, je vous invite à adopter ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Alain Marleix, rapporteur spécial de la commission des finances pour l’agriculture, la pêche, la forêt et les affaires rurales Rappelons d’abord que l'ensemble des soutiens financiers publics à l'agriculture, à la pêche et au monde rural dépasse les 30 milliards d'euros, les moyens budgétaires du ministère de l'agriculture et de la pêche ne représentant sur cet ensemble que 5 milliards, dont moins de 3 sur la mission que nous examinons.

Il faut en effet tenir compte des versements au titre de la PAC, estimés à 10,5 milliards en 2007, dont 9,5 au titre du premier pilier. La PAC est la seule véritable politique publique intégrée au niveau communautaire – et elle doit le rester. L'effort de la nation en faveur de l'agriculture ne peut donc être mesuré sans tenir compte des financements de l'Union européenne. Contrairement aux idées reçues, ceux-ci augmentent, et les montants sont garantis au moins jusqu'en 2013. Le budget national contribue à ces financements, au travers du prélèvement opéré sur les recettes de l'État au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes.

Il faut y ajouter la protection sociale agricole, qui représente 13 milliards, et dont le budget relève aujourd'hui de la loi de financement de la sécurité sociale. En effet, l'importance du financement public en matière de protection sociale agricole justifie d'en tenir compte au titre de l'effort de la nation en faveur des agriculteurs : 11,2 milliards permettent de financer l'assurance maladie et l'assurance vieillesse des exploitants agricoles, en plus de cotisations professionnelles qui représentent seulement 20 % des recettes du Fonds de financement des prestations sociales agricoles.

La situation financière de ce fonds, qui a succédé au BAPSA en 2005, est assez préoccupante, avec un déficit courant de 2 milliards. La remise à plat du financement du FFIPSA devra se faire en même temps que celle des régimes spéciaux, dans un souci d'équité envers les agriculteurs et en tenant compte du poids d'une démographie pénalisante. Je souhaite cependant insister sur les avancées récentes en matière de retraites agricoles. Après les mesures adoptées en loi d'orientation agricole, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 reprend une proposition de nos collègues Yves Censi, Marc Le Fur et Daniel Garrigue pour permettre aux exploitants agricoles « laissés pour compte » des plans successifs de revalorisation des retraites agricoles, qui sont surtout des femmes, d'obtenir des droits identiques à ceux qui sont concernés par ces plans. Cette mesure d'équité devrait concerner 300 000 retraités agricoles dès janvier 2007, lesquels bénéficieront ainsi de plusieurs centaines, voire plusieurs milliers d'euros de plus chaque année.

Les collectivités territoriales, régions et départements, apportent aussi au monde agricole des aides financières à hauteur de près d'un milliard. Les dépenses en faveur du secteur agricole représentent ainsi 20 % des dépenses d'intervention économique de ces collectivités, notamment dans le cadre des contrats de plan État-régions. Je dois cependant regretter l'attitude de certaines collectivités – et tout particulièrement de l'Association des régions de France –, qui n'ont pas répondu aux demandes du ministère pour évaluer ces dépenses. Je considère que cette attitude est contraire aux règles de transparence qui doivent s'appliquer dès que des fonds publics sont concernés.

M. André Chassaigne - Commencez par donner l’exemple !

M. le Rapporteur spécial - Pour mesurer l’ensemble des concours publics à l'agriculture, il faut également tenir compte des dépenses fiscales dont l'objet principal contribue aux programmes du ministère de l'agriculture et de la pêche, car il s'agit d'un levier financier important en faveur des agriculteurs, notamment dans le cadre de la mise en œuvre de la LOA. Avec 3,3 milliards, ces dépenses fiscales représentent l'équivalent de près des deux tiers des crédits ministériels, et elles augmentent de 30 % par rapport à 2006.

J'en arrive aux crédits budgétaires du ministère de l'Agriculture et de la pêche, qui s'élèvent à 5 milliards en crédits de paiement, soit 50 millions d'augmentation par rapport à l'an dernier. Tout en s'inscrivant dans les règles de discipline budgétaire, avec une progression de 1 % en euros courants, soit un peu plus que le 0,8 % du budget de l'État, ce budget confirme la volonté du Gouvernement de soutenir financièrement les évolutions structurelles de l'agriculture et de la pêche. Il est réparti en sept programmes, rattachés à quatre missions. S'y ajoutent les crédits du compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural », pour un montant de 98 millions, directement alimenté par la taxe sur le chiffre d'affaires payée par les agriculteurs.

Je me contente d'évoquer ici les autres programmes, mais on ne peut pas ne pas en parler lorsque l'on discute du budget de l'agriculture. Pour le programme « sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », les crédits, en hausse de 3,5 %, dépassent désormais 500 millions. Les actions financées permettent à la fois de prévenir les risques sanitaires pour le consommateur et les risques économiques pour le producteur. Des mesures nouvelles sont prévues en matière de lutte contre les maladies transmises par les aliments et de lutte contre les épizooties, avec 9 millions supplémentaires pour la prévention et la lutte contre la grippe aviaire.

L'enseignement agricole confirme sa réputation d'excellence.

M. François Sauvadet - Elle est parfaitement justifiée !

M. le Rapporteur spécial - Sa performance est reconnue par les audits interministériels effectués en 2006 à la demande du Gouvernement, lesquels soulignent la contribution positive des établissements publics et privés à l'insertion professionnelle des jeunes et des adultes. Le nombre des élèves est en augmentation et leur taux d'insertion professionnelle en progression constante – 85 % en moyenne. Ces performances sont obtenues dans le cadre d'un budget en reconduction pour 2007, avec 1,3 milliard, ce qui prouve que la maîtrise des coûts, grâce notamment à la rationalisation des implantations et de l'affectation des personnels, n’est pas incompatible avec le maintien d'un service de haute qualité. Je rappelle les avancées que nous avons obtenues l'an dernier, après cinq ans d’abandon, en faveur des maisons familiales rurales, avec le respect de la loi de 1984 par un abondement de 15 millions. La majorité a tenu ses engagements.

Parallèlement, le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche agricoles progresse de 5,7 %, pour atteindre 277 millions. La structuration des établissements d'enseignement autour de sept pôles régionaux de compétitivité et l'articulation de leur activité avec les établissements de recherche constituent un facteur de progrès pour la qualité des formations dispensées.

J’en viens aux principales mesures nouvelles pour 2007 pour la mission « agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ». La mise en œuvre de la loi d'orientation agricole se poursuit. Des crédits sont prévus pour compenser, à hauteur de 40 millions, les exonérations de charges sociales destinées à alléger le coût de la main-d'œuvre dans les entreprises de travaux agricoles et forestiers et dans les exploitations qui recourent à l'emploi de salariés occasionnels, notamment grâce aux contrats vendange.

Les crédits de promotion internationale des produits progressent de 20 %, afin de favoriser l'implantation des produits français partout dans le monde. La mission que j'ai effectuée aux États-Unis au printemps dernier m'a fait voir la nécessité de mieux soutenir nos exportations agro-alimentaires, face aux autres pays d'Europe notamment, mais aussi face aux pays d'Amérique latine.

M. François Sauvadet - Très bien !

M. le Rapporteur spécial - La PMTVA bénéficie d'une hausse de dotation de 8 millions, soit + 5 %. La priorité budgétaire donnée à ce dispositif de soutien marque la volonté du Gouvernement d'assurer la pérennité de ce secteur de production, dont l'importance est de premier ordre car il contribue à l'activité économique sur de vastes territoires qui, sinon, seraient soumis à une déprise irréversible.

Les ICHN permettent de consolider les activités d'élevage dans les zones difficiles du point de vue géographique, économique et climatique, ce qui est particulièrement le cas de la montagne.

M. André Chassaigne – Les promesses n’ont pas été tenues !

M. François Brottes - Les plus 50 %, on les attend toujours !

M. le Rapporteur spécial - Pour 2007, ce poste est doté de 232 millions de crédits nationaux et, grâce à la majoration de 5 % du taux de cofinancement de l'Union européenne, la dotation totale augmente de 18 millions. Cette hausse bénéficiera aux aides versées au titre des 25 premiers hectares primés pour les exploitations en zone de montagne et de haute montagne. Je défendrai tout à l'heure un amendement, adopté par notre commission des finances, pour augmenter de 5 % supplémentaires le montant de l'ICHN, conformément aux engagements pris par la majorité.

M. André Chassaigne - Il manquera toujours 10 % !

M. le Rapporteur spécial – En 2003, le ministre de l'agriculture s'était engagé à porter à 50 % sur trois ans le différentiel d'indemnisation des 25 premiers hectares par rapport aux hectares suivants, afin d'aider les exploitations de taille modeste à se maintenir sur l'ensemble du territoire. Cet engagement a été repris par le Président de la République à Murat, en octobre 2004, et il en a reparlé à Cournon, en octobre dernier. Des avancées significatives ont déjà été accomplies : une augmentation de 10 % à 20 % en 2004, puis de 20 % à 30 % en 2005, et 5 % encore l'année prochaine, grâce aux crédits communautaires. Je pense, avec beaucoup de mes collègues de zones de montagne notamment, que le budget national aussi peut encore faire un effort supplémentaire en 2007.

Les événements climatiques majeurs que connaît notre pays depuis plusieurs années justifient un effort de solidarité particulier envers les agriculteurs et conchyliculteurs qui en pâtissent. À cette fin, le Fonds national de garantie contre les calamités agricoles a été doté par l'État en collectif budgétaire au cours des dernières années ; il devra l'être de nouveau cette année, pour indemniser les victimes de la sécheresse du printemps et du début de l'été. Le budget 2007 comporte également une dotation qui permettra de réaliser environ 250 millions de prêts bonifiés, lesquels sont particulièrement attendus par les jeunes agriculteurs, dans un contexte de hausse des taux du marché.

Parallèlement, l’État incite les agriculteurs à se prémunir contre les conséquences économiques des sinistres. Dans cette optique, la création de retenues d'eau de proximité mobilisera 7 millions, au titre de l'hydraulique agricole. De plus, la dotation destinée à l'assurance récolte augmente de 20 %, pour aider à la souscription des nouveaux contrats proposés par les assureurs. Cette démarche novatrice doit être encouragée et consolidée, car il s'agit vraisemblablement de l'axe principal du prochain farm bill aux États-Unis, qui va sans doute être finalisé très bientôt, maintenant que les élections sont passées.

Les mesures agro-environnementales s'inscrivent dans le futur plan de développement rural et bénéficient donc d'un cofinancement communautaire. Le budget pour 2007 comporte une dotation de 121 millions pour de nouveaux contrats en faveur des prairies exploitées dans le respect de l'environnement. Ces contrats ont vocation à faire suite aux engagements actuels des bénéficiaires de la prime à l'herbe, ainsi que des bénéficiaires de CTE herbagers qui arrivent à échéance. Cette prime atteint 76 euros à l'hectare, et la répartition se fait en association avec les organisations professionnelles agricoles au niveau départemental. Les éleveurs et le monde rural sont légitimement très attachés à ces contrats, lesquels contribuent à la qualité des milieux et au maintien d'une activité pastorale dynamique.

Le plan végétal environnemental, nouvelle mesure d'aide aux équipements qui permettent une gestion rationnelle des intrants, bénéficie de 10 millions pour réduire les pollutions.

Quant au PMPOA, il sera doté de 37 millions. La date de dépôt des dossiers a en effet été repoussée au 31 décembre 2006, pour répondre aux nombreuses demandes des éleveurs qui doivent mettre aux normes leurs équipements de traitement des effluents.

Dans le même sens, le plan de des bâtiments d'élevage est victime de son succès !

M. Michel Bouvard - Très bien !

M. le Rapporteur spécial - 35 millions sont budgétés en 2007, afin de bénéficier d'un cofinancement communautaire pour un montant équivalent. Une rallonge de 20 millions devrait être proposée dans le collectif de fin d'année pour honorer les dossiers en attente en 2006.

Le budget du programme « forêt » progresse de 3,4 % pour accompagner une nouvelle approche de l'intervention de l'État dans cette filière. La gestion de la forêt publique s'inscrit dans le cadre du nouveau contrat signé entre l'État et l'ONF, lequel vise à la fois à améliorer la productivité de cet office, à assurer la meilleure valorisation du bois qu'il exploite et à inscrire son action dans une démarche de développement durable. De plus, les crédits de l'action « développement économique de la filière forêt bois » augmentent de 45 % pour s’établir à 37 millions. Les investissements productifs qui seront ainsi réalisés doivent permettre d'améliorer la valeur ajoutée du secteur.

Comme l’a excellemment rappelé Aimé Kerguéris, les crédits de la pêche et de l'aquaculture sont doublés par rapport à 2006. Ils s'élèvent désormais à 60 millions et permettront de financer le plan d'avenir pour la pêche annoncé par le Gouvernement en juin dernier. Ce plan propose un projet de développement à moyen terme comprenant une stratégie pour la pêche française : il vise à optimiser l'exploitation durable des stocks, avec une réduction de la facture énergétique et une meilleure valorisation, sur un marché des produits de la mer en expansion. Il comporte également un volet d'accompagnement de l'aquaculture, afin qu'elle s'inscrive dans l'avenir de la gestion intégrée des zones côtières. Ces activités sont en effet très exposées à des risques climatiques, sanitaires et économiques, ce qui justifie un effort de recherche et de suivi de la sécurité sanitaire, pour la sécurité des consommateurs.

Ces mesures nouvelles sont gagées par la rationalisation des structures. La réforme des offices, avec la création d’une agence de paiement unique, la fusion des établissements en trois pôles et le regroupement de leurs services centraux à Montreuil, permet ainsi de mutualiser les moyens et de réduire les coûts de fonctionnement. De même, la masse salariale du ministère est en légère diminution. Dans huit départements, la fusion expérimentale de ses services déconcentrés avec ceux du ministère de l’équipement permettra de mieux répondre aux attentes des usagers et des collectivités.

Le projet budget de l’agriculture pour 2007 consolide les acquis et prépare l’avenir, tout en respectant la discipline budgétaire et en optimisant la performance de gestion. La commission des finances vous demande donc de l’adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Nous en revenons à la discussion générale.

M. Marc Le Fur - Au nom du groupe UMP, je tiens à saluer le travail exhaustif et pertinent des rapporteurs, qui nous ont largement éclairés.

Une politique est la conjonction d’objectifs, de moyens et de résultats. La vôtre, Monsieur le ministre, améliore la vie quotidienne des agriculteurs et prépare l’avenir, tout en renforçant la justice sociale.

Au chapitre de la vie quotidienne, d’abord, la principal exigence des agriculteurs – et des agricultrices, qui remplissent les dossiers – est la diminution de la paperasse.

M. Germinal Peiro - C’est loin d’être réussi !

M. Marc Le Fur - Au contraire : la prime à l’abattage le prouve. Pour trois bêtes quittant l’exploitation, les éleveurs devaient auparavant envoyer un dossier à la DDA – celle des Côtes d’Armor en recevait jusqu’à 21 000 dans l’année ! Les abattoirs se chargent désormais directement de la procédure : quel gain de temps, sans compter les nombreux contentieux évités pour envois en retard ! De même, vous avez dès votre arrivée organisé les contrôles en rédigeant une charte, puis accepté l’un de mes amendements à la loi d’orientation prévoyant une information préalable. Aujourd’hui, le système fonctionne bien mieux, dans le respect du droit des personnes ! Néanmoins, leur nombre ne diminue pas : aux contrôles du ministère de l’agriculture s’ajoutent ceux du ministère de l’environnement.

Mme Geneviève Gaillard - C’est bien normal !

M. Marc Le Fur - Oui, mais peut-être faudrait-il songer à restreindre le zèle de nos contrôleurs.

M. Germinal Peiro - Vous n’êtes pas sérieux !

M. Marc Le Fur - Les droits à paiement unique, encore inconnus il y a peu, ont permis aux agriculteurs de toucher une avance en octobre avant d’en toucher le solde en décembre. C’est dire le travail effectué par les agriculteurs et leurs organisations, mais aussi par les fonctionnaires des services d’économie agricole des départements.

M. François Brottes - Il en est ainsi partout en Europe !

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche Non : la France est en avance dans ce domaine.

M. Marc Le Fur – Sur tous ces sujets, votre politique est un succès.

Avec l’extension à toutes les surfaces, notamment pâturées, du versement des primes au titre de la politique agricole commune, des difficultés risquent de surgir en zone bocagère, en particulier : je tenais à vous en alerter.

La vie quotidienne, hélas, est aussi rythmée par des crises et, tout comme vos prédécesseurs, vous en avez eu votre lot : viticulture, arboriculture, fièvre catarrhale – qui risque de mettre au chômage technique de nombreux employés d’abattoirs… La grande crise récente, pourtant, est avicole : l’agro-alimentaire en souffre toujours, comme en témoignent les licenciements à l’usine Tilly en Bretagne. Je salue les efforts très prompts que vous avez consentis pour y faire face. Ainsi, l’aide d’urgence, très précieuse pour les plus petits exploitants notamment, a permis en quelques jours aux aviculteurs de toucher mille euros.

Restons vigilants quant à la dotation aux offices…

M. François Sauvadet - C’est vrai !

M. Marc Le Fur - …car une nouvelle crise peut éclater d’un jour à l’autre. Comme MM. les rapporteurs, je me félicite de la mise en place de l’assurance récolte, qui est une mesure moderne, simple et efficace. Une dernière question toutefois : où en est l’organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes ?

Voilà pour le quotidien. Venons-en à l’avenir, que vous avez si bien su anticiper. Ainsi, vous resterez dans l’histoire de votre ministère celui qui a simplifié la dotation aux jeunes agriculteurs. Vous avez également permis qu’elle soit exonérée de cotisations sociales, et bientôt de l’impôt sur le revenu. Ces mesures concrètes favorisent l’installation des jeunes. De même, vous avez résolu les problèmes qui menaçaient l’enseignement et la formation agricoles.

Mme Geneviève Gaillard – Non, pas dans les écoles vétérinaires !

M. Marc Le Fur – Le plan bâtiment élevage est une autre mesure essentielle, dotée d’un budget important.

M. François Sauvadet – Il y a de nombreuses files d’attente !

M. Marc Le Fur – Pourquoi, cependant, la production porcine n’y figure-t-elle pas ? J’espère que vous pourrez résoudre cette anomalie dans un dispositif par ailleurs très bienvenu.

M. André Chassaigne – Dites-le donc aux agriculteurs qui attendent des subventions !

M. Marc Le Fur – Nous sommes victimes de notre propre succès ! Vous n’aviez rien fait, alors que nous proposons un plan efficace, que nous compléterons en loi de finances rectificative.

M. André Chassaigne – Vous serez loin du compte !

M. le Ministre – Vous auriez dû agir en votre temps : nous aurions gagné cinq ans !

M. Marc Le Fur – Préparer l’avenir, c’est aussi ouvrir de nouveaux espaces de liberté : je vous remercie d’avoir ouvert les quotas laitiers sans terre. Un agriculteur cessant son activité laitière percevra ainsi 16 600 euros pour 120 000 litres. Confirmerez-vous qu’il pourra néanmoins poursuivre sa production de viande bovine ? Quoi qu’il en soit, dans les Côtes d’Armor, 28 millions de litres de lait pourront ainsi être affectés à de jeunes agriculteurs. C’est du reste une expérimentation encadrée, car elle respecte les projets agricoles départementaux : sera-t-elle étendue à tous les départements volontaires ?

Autre débat d’avenir important que vous avez ouvert : l’énergie, qui est tantôt un problème, tantôt une opportunité.

M. Jean Dionis du Séjour – Tout à fait !

M. Marc Le Fur – Un problème, par son coût croissant. Vous avez accepté le remboursement de cinq centimes par litre pour le fioul rouge : sera-t-il prolongé jusqu’au terme de la législature ? En tout état de cause, je rejoins ceux de nos collègues qui travaillent à ces questions : l’énergie est aussi une chance !

MM. Jean Dionis du Séjour et François Sauvadet – Oui ! L’UMP rejoint l’UDF !

M. Marc Le Fur – Ainsi, l’huile peut devenir aux zones d’élevage ce que la betterave est déjà aux zones de grande culture. Nos agriculteurs ne demandent qu’à devenir énergiculteurs ! Où en sont les décrets d’application de la loi d’orientation en ce domaine ?

M. Jean Dionis du Séjour - Très bien !

M. Marc Le Fur – D’autre part, je souhaiterais vous féliciter d’une mesure essentielle, prise cet été dans l’indifférence générale, qui permet aux agriculteurs de devenir producteurs d’électricité à la ferme en leur offrant des prix de rachat satisfaisants.

Enfin, votre politique traduit une volonté de justice sociale. Ainsi, l’aide au remplacement prévue par la loi d’orientation agricole a permis à certains agriculteurs de prendre, pour la première fois, quelques jours de congé l’été dernier. Je souhaite aussi revenir sur les progrès effectués en matière de retraites agricoles : c’est nous qui avons fait la mensualisation, et nous encore qui avons financé la retraite complémentaire obligatoire, que la majorité précédente avait voté comme un vœu pieux !

M. Germinal Peiro – Pas du tout : c’était la loi !

M. Marc Le Fur – Et je le répète : nous l’avons financée ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) De même, nous avons facilité le départ à la retraite au terme de carrières longues. Grâce à la loi Fillon, 62 000 agriculteurs qui ont commencé jeunes et cotisé 40 ans ont pu partir en retraite, et certains en avaient les larmes aux yeux. Restaient les petits retraités, les « laissés-pour-compte », dont 75 % à 80 % de femmes. M. Garrigue, M.Censi et moi-même y avons travaillé. Le 5 octobre le Président de la République a bien voulu dire l’intérêt qu’il portait à nos conclusions et, dans le cadre du PLFSS, nous avons voté la suppression des coefficients de minoration très pénalisants pour ceux qui n’avaient pas des carrières complètes. Mais il reste à agir sur la retraite complémentaire obligatoire et en particulier les droits de réversion pour les hommes.

M. François Sauvadet – Oui.

M. Marc Le Fur – Je souhaiterais que les candidats à la présidence de la République prennent position sur ces sujets.

M. Germinal Peiro – C’est fait.

M. Marc Le Fur – Le groupe UMP soutient, à travers ce budget, votre politique qui est pertinente sur le plan économique et juste sur le plan social. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Germinal Peiro – Avec ce dernier budget de la législature, vient l’heure du bilan. Mais auparavant, Monsieur le ministre, je tiens à dire que nous n’avons pas eu à nous plaindre de votre attitude personnelle (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UDF). Votre courtoisie a permis au débat de bien se dérouler. Nous ne partageons pas vos choix, mais au moins vous acceptez que le Parlement dans son entier joue son rôle.

M. le Ministre – Merci.

M. Germinal Peiro – Mais je dois vous dire aussi, au nom des députés socialistes, que nous déplorons votre action depuis cinq ans. (Rires sur tous les bancs)

M. le Ministre – Deux ans seulement.

M. le Rapporteur spécial – L’essentiel, c’est que les agriculteurs soient contents.

M. Germinal Peiro – Ce budget est à l'avenant d'une politique inadéquate, de choix inconséquents. Le monde agricole est unanime : il ne correspond pas aux besoins. Votre bilan est un passif et vos tours de passe-passe, vos promesses ne trompent plus personne.

M. Jean Dionis du Séjour – Tu te forces !

M. Germinal Peiro – Annoncer un budget de 30 milliards, quand vous n'en disposez véritablement que de cinq, jette le discrédit sur vos discours. L'arbitrage gouvernemental vous ayant accordé 1 % d'augmentation en euros courants, c'est une baisse que vous auriez dû annoncer en regard de l'inflation. Les promesses faites à l'occasion de la loi d’orientation nécessitent bien plus.

L'Assemblée permanente des chambres d’agriculture a dénoncé les gels successifs de crédits et l'insuffisance des moyens alloués au financement des crises. La FNSEA est catastrophée de l'état du FFIPSA, et critique l’absence de marge de manœuvre pour les offices agricoles. Vous organisez la fin des politiques de gestion de crises et vous appliquez à l'agriculture les recettes du laisser-faire. Votre choix est mortifère.

En commission, vous avez expliqué qu'il importe de se doter des moyens nécessaires face aux aléas climatiques et aux crises. Ce ne sont que des mots : vous diminuez de 6 % les crédits de l'action « adaptation des filières ». Il n'est plus possible de mener des actions nationales structurantes. Vous méprisez la régulation des marchés au moment où nous connaissons une grave crise viticole. Vous avez dit hier que l'on ne pouvait pas accepter l'arrachage proposé par le projet de réforme de l'OCM viticole. Mais votre politique n'offre pas d'autre perspective. Vous rejetez la régulation des crises sur les mécanismes assurantiels. En 1999, avec la création de la déduction pour aléas, nous avions relancé le débat sur ces mécanismes. Vous avez repris l'idée, mais les 30 millions de crédits pour l'assurance récolte, même avec une hausse de 5 millions, sont très insuffisants. L'Espagne en a accordé six fois plus. Si vous mettez en place un nouveau mécanisme d'assurance récolte, l'État doit s'impliquer fortement au démarrage.

M. François Sauvadet – C’est vrai.

M. Germinal Peiro – Sur l’environnement également, vous affichez votre volontarisme. Mais le premier acte de votre majorité, en 2002, a été de supprimer les contrats territoriaux d'exploitation, qui associaient des objectifs contractualisés de production, d'emploi et d'environnement. Vous avez promu à la place les contrats d'agriculture durable. Mais vous ne leur accordez que 78,3 millions de crédits, ce qui exclut toute ouverture de nouveau contrat. Vous projetez 2 000 contrats pour 2007. C'est très faible au regard de l'objectif de 10 000 contrats par an affiché en 2002. Et Il n'est plus possible de financer le flux des CTE herbagers arrivant à expiration.

De même les crédits d'accompagnement et de stimulation de l'agriculture biologique diminuent de 20 à 40 %. En clair, des structures associatives vont devoir mettre la clé sous la porte.

S’agissant de la gestion des droits à paiement unique, votre choix des références historiques fige les situations antérieures. Le 25 octobre, le Gouvernement nous a répondu en substance qu'il était normal que 80 % des aides aillent toujours à 20 % des agriculteurs. En refusant la redistribution, vous confortez l'injustice et brisez les espérances.

Quant à l'évolution de la prime herbagère agro-environnementale, elle inquiète les agriculteurs. Il va falloir trouver 160 millions dans le budget après 2007. Quelles sont vos pistes ?

Nous nous inquiétons également à propos de l'enseignement public agricole, délaissé, le privé attirant 62 % des élèves. La feuille de route tablait sur un équilibre 55 % contre 45 %. On en est loin et l'écart ne cesse de se creuser, les moyens financiers et humains diminuant depuis quatre ans. Pourtant le rapport que vous aviez commandé sur le sujet a montré que tous les acteurs demandent plus de moyens.

Ne pouvant évoquer comme je le voudrais le plan bâtiments d'élevage, le plan végétal, le programme de maîtrise des pollutions d’origine agricole, la sécurité sanitaire et les farines animales, la forêt, la montagne,... je dirai quand même un mot de la faible progression des moyens alloués à l'installation. Favoriser celle-ci, c'est maintenir une agriculture forte. Or elle est de plus en plus difficile, le prix du foncier devient exorbitant. Certes, vous rendez la dotation aux jeunes agriculteurs non imposable. Mais beaucoup sont trop pauvres pour l’être de toute façon. Le fonds agricole n'améliore pas les choses. L'érosion continue. Or elle pèse aussi sur le régime social agricole.

Ceci me conduit à aborder, pour terminer, la situation dramatique du FFIPSA. En commission, j’ai approuvé le geste fait en direction des retraités agricoles. Il est pourtant bien modeste, symbolique même. Votre bilan se résume à la mensualisation. Vous nous critiquiez lorsque nous avons adopté la RCO. Mais votre inaction tranche avec l'effort considérable du gouvernement Jospin.

Depuis 2004, le déficit cumulé du FFIPSA atteint 6,3 milliards, plus que le budget de votre ministère ! Mais vous ne faites rien. Pis, le 9 décembre 2005, vous vous êtes félicité de voir le FFIPSA « sur la voie du rétablissement financier ». C'était de la science-fiction.

Cette année, le président de la MSA, Gérard Pelhate, a dit son inquiétude devant le désengagement de l'État et le syndicat majoritaire parle de situation intenable pour l'avenir du régime. M. Pelhate se trompe, disiez-vous. Mais le 11 octobre dernier, le comité de surveillance du FFIPSA, présidé par Yves Censi, a constaté un « manque total de perspectives » et proposé le recours à un emprunt sur dix ans.

Finalement, le bilan est bien sombre. C'est celui d'un abandon par l’État masqué par des promesses illusoires. Plus personne n'est dupe. Votre action fait des victimes que votre budget ne sauvera pas.

M. André Chassaigne - Très bien.

M. François Sauvadet – Ce budget est celui d’une année de grands choix pour la France. On verra qui aura à l’appliquer mais quoi qu’il advienne, la France devra montrer la plus grande détermination, lors du rendez-vous européen de 2008, face à ceux qui voudraient en profiter pour revoir les fondamentaux de la PAC. Le cadre financier qui a été négocié jusqu’à 2013 doit être conservé. On voit se dessiner deux grandes orientations, entre ceux qui voudraient abandonner l’agriculture de production – mais assurer l’alimentation du monde reste un défi, y compris pour l’Europe – et ceux qui veulent maintenir la France parmi les grands pays producteurs et exportateurs et ouvrir des discussions nouvelles à l’OMC, sur la qualité et la sécurité alimentaire et la préservation de l’environnement par exemple. Dans tous les cas, la loi d’orientation agricole reste le cadre dans lequel nous devons travailler.

Pour l’heure, plutôt que de jouer à donner de bons et de mauvais points à l’un ou l’autre « camp », je voudrais évoquer quelques uns des grands défis devant lesquels nous sommes placés. Le premier est, dans le cadre du renchérissement du coût de l’énergie, celui des biocarburants. Je tiens à saluer les efforts du Gouvernement en la matière. À l'initiative de la représentation nationale, des objectifs d’évolution de la part des biocarburants dans la consommation ont été inscrits dans la loi d'orientation agricole – nous avons également entrouvert la porte des huiles végétales, mais il faut encore avancer. Je propose la mise en place d’un comité de pilotage et de suivi des biocarburants, associant utilisateurs, consommateurs, industriels, agriculteurs, pouvoirs publics et parlementaires. L'agriculture française doit être au rendez vous des biocarburants. Pour cela, nous devons faire preuve d’une grande détermination. Par exemple, à la suite du rapport demandé par le ministre de l’économie à Alain Prost, l’E85 va être distribué à la pompe, mais ce n’est pas suffisant : il faut aussi que les fabricants automobiles s’engagent dans cette voie. Le défi est donc aussi industriel, et ne peut être relevé que collectivement.

Le deuxième défi est celui de la gestion des crises. Vous n’avez pas été épargné : fièvre catarrhale, grippe aviaire, huîtres du bassin d’Arcachon, crise viticole... Il faut avoir les moyens budgétaires de faire face aux crises sanitaires, surtout dans les secteurs qui ne bénéficient pas d'aides compensatoires, comme ceux du porc ou de la volaille. Il faut également établir un diagnostic approfondi de la crise vitivinicole. Je connais l’existence du rapport Martin, et j’aurais souhaité que l’UDF y soit plus étroitement associée. Je voudrais aussi qu’il soit un peu moins confidentiel : il faut un débat public sur le sujet. Nous devons aussi mener une réflexion sur nos capacités d’exportation : beaucoup d’organismes y travaillent, et j’ai le sentiment que cela entraîne une forte dilution des moyens consacrés à la présence de nos industries agroalimentaire à l’étranger. Le problème de l’investissement dans la forêt privée reste posé. Or, l’investissement dans ce secteur ne doit pas connaître d’à-coups : il s’agit de politiques à long terme. Il faut donc suivre de très près, de ce point de vue, le dossier des pôles d’excellence rurale. Quant à la gestion des marchés, je trouve que nos offices sont financièrement désarmés. Une réflexion doit être ouverte sur le rôle et les moyens qu’on veut leur donner. La question reste en suspens.

En ce qui concerne la gestion des crises et des aléas, le fonds des calamités sera doté en fonction des besoins – j’espère d’ailleurs que cela ne sera pas nécessaire. Mais il faut absolument faire le point sur l’assurance récolte et les perspectives de son extension, à la suite de l’excellent rapport de Christian Ménard. L’État ne peut pas s’exonérer de sa responsabilité en la matière : il doit y consacrer des moyens importants, comme le fait l’Espagne. L’assurance récolte ne peut pas fonctionner avec les seules contributions des agriculteurs. Il faudrait d’ailleurs réunir l’ensemble des acteurs concernés pour faire un point sur ses conditions d’application sur le terrain, qui ont suscité des critiques. Mais en matière de gestion des crises, il faut également se préoccuper de communication. Un comité de communication doit pouvoir faire en sorte que le principe de précaution ne soit pas un accélérateur de crise, mais qu’il soit perçu comme un facteur de sécurité pour le consommateur. Ce n’est pas le ministère de la santé qui doit piloter cette communication, mais celui de l’agriculture, avec les professionnels – car il n’y aura pas de politique durable en matière de sécurité alimentaire sans l’implication des professionnels eux-mêmes, comme le prouve la crise des huîtres du bassin d’Arcachon. Je compte sur votre détermination dans ce domaine.

Troisième défi : l'exigence de production, qui doit être compatible avec la protection de l’environnement et l'aménagement du territoire. Le plan bâtiment était une des conditions de l’amélioration de la sécurité environnementale, mais les moyens n’ont pas été à la hauteur des attentes. Des files d’attente se sont constituées, et je ne suis pas sûr que les moyens dégagés par la loi de finances rectificative suffisent à les résorber. Quant au plan végétal, il permet d’accompagner les investissements en matière de production végétale. On ne préservera pas, en effet, l’environnement par le seul biais de la contrainte : il faut aussi des incitations. Cela fait des années que les producteurs ont pris conscience de l’impérieuse nécessité de faire coïncider production et préservation de l’environnement, sécurité et qualité alimentaire. Quant aux zones sensibles, si les crédits pour la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes sont encourageants, ceux de la prime herbagère agro-environnementale suscitent plutôt la déception. Quant à l’indemnité compensatoire de handicaps naturels, vous savez qu’elle soulève une forte attente.

Quatrième défi : les charges franco-françaises. La simplification de toutes ces tracasseries administratives qui submergent les exploitants agricoles est plus que nécessaire. En la matière, le chantier est encore devant nous, même si vous avez fait preuve de volonté. Je m’interroge également sur la perspective d’abandon des prêts bonifiés : je sais que le différentiel n’est pas assez important lorsque les taux des marchés financiers sont très bas, mais beaucoup de spécialistes annoncent un relèvement. Est-il opportun d’abandonner les prêts bonifiés précisément maintenant ? Je ne le pense pas. Enfin, il faut absolument inscrire nos politiques dans la durée. J’ai en mémoire les débats sur les CTE, puis sur les CAD… Toutes ces mesures qui sont abandonnées au bout de deux ou trois ans sont nuisibles. Il faut que les agriculteurs aient le temps de s’approprier les outils nouveaux.

Cinquième défi : celui de l'avenir, qui soulève les questions de l'installation, de la formation et de la recherche. Les installations aidées sont de moins en moins nombreuses, car elles restent très compliquées. Il faut simplifier et améliorer l’accès à ces aides, surtout dans le cadre du défi de la transmission générationnelle et alors que le dispositif des droits à paiement unique va complexifier la donne. En matière d’enseignement, je réaffirme l’attachement de l’UDF à la spécificité de l’enseignement agricole. L’alternance et les maisons familiales par exemple sont de beaux exemples de réussite. Je souhaite simplement que la déconcentration que vous avez amorcée permette de donner un peu de fluidité au niveau infrarégional. Le contingentement du nombre de places n’est pas une réponse à la hauteur du défi, d’autant que nous devrons mettre en place des formations nouvelles, comme celles des futurs salariés de l’agriculture. Quant à la recherche, il est essentiel de poursuivre les efforts. Je regrette que le débat qui devait suivre la mission d’information sur les OGM n’ait pas eu lieu. Quant à ceux qui, au nom d’opinions qui peuvent être discutées, violent des propriétés privées, ils doivent être sévèrement sanctionnés. Ce n’est pas acceptable (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP). Le débat public est légitime, mais pas de telles violences dans un État de droit.

Enfin, il faut parler de la solidarité entre la ville et la campagne. Je suis quelque peu choqué par le sort fait au FFIPPSA, à la création duquel j’étais opposé. On ne peut le laisser ainsi en déshérence : nous en sommes à 5 ou 6 milliards qui manquent ! Ce ne sont pas les agriculteurs qui combleront le trou. Il faudra donc faire appel à la solidarité. Je souhaite que l’on en finisse au plus vite avec cette période de grande incertitude.

La solidarité joue et continue de jouer en faveur des retraités, mais de grâce, n’opposons pas ce qui a été fait hier à ce qui se fait aujourd’hui ! Il est normal de reconnaître à travers les retraites le rôle des agriculteurs. Je souhaite également, à ce propos, que l’on aborde la question des pensions de réversion.

Enfin, nous avons une mission commune : légitimer à nouveau les aides agricoles. Il n’est pas une agriculture au monde qui ne soit accompagnée par les pouvoirs publics. Doit-on continuer à le faire à travers l’impôt ou par la revalorisation des prix et un nouveau partage des marges ? Quoi qu’il en soit, on ne pourra vouloir durablement compétitivité, aménagement du territoire, diversité et sécurité alimentaire, et préservation de l’environnement sans concours publics ou prix rémunérateurs.

Vous avez toujours été à l’écoute du Parlement, Monsieur le ministre, et au nom de l’UDF, je vous en sais gré. Vous avez même repris des propositions de parlementaires, signe de votre volonté de dialogue et de rassemblement. Nous voterons ce budget en souhaitant que nos réflexions seront prises en compte dans l’intérêt de notre pays, dont l’avenir passera par une agriculture forte et un monde rural vivant (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

M. André Chassaigne – En écoutant M. Le Fur, je pensais à ce vieux dicton : « Aimons la vérité qui nous reprend et défions-nous de celle qui nous flatte » !

Monsieur le ministre, vous avez entendu le discours visionnaire du Président de la République, le 6 octobre dernier à Cournon d'Auvergne. Vous avez donc mesuré à leur juste niveau les défis que M. Chirac invite à relever et les perspectives novatrices qu'il assigne à notre agriculture. Je doute cependant que ce budget, qui aurait bien eu besoin du Trésor de Rackham le Rouge, les prenne en compte, comme l’illustre votre politique de la montagne. M. Chirac déclare qu’il faut la poursuivre quand votre budget constitue une étape supplémentaire vers sa disparition. Ainsi, au mépris des engagements pris par votre prédécesseur de revaloriser durant cette mandature l’ICHN de 50 % pour les 25 premiers hectares, vous ne portez cette revalorisation qu’à 35% en vous glorifiant cette année d'une hausse de 5 % ! Le manque à gagner est estimé à 20 millions pour le seul Massif Central. Il est nécessaire qu’une revalorisation plus forte soit votée aujourd’hui et nous soutiendrons tout amendement allant dans ce sens.

Quant à la PHAE, qui représente près de 30 % du revenu agricole dans ce même Massif Central, vous la dotez seulement de 260 millions alors que le minimum vital est estimé à 310 millions par les organisations syndicales – d’autant plus que l’attribution de cette prime est assortie de conditions environnementales toujours plus contraignantes pour les exploitations bénéficiaires, celles qui connaissent par ailleurs le plus de difficultés.

Nous nous sommes tous félicités du « plan bâtiments » qui apporte une bouffée d'oxygène aux exploitants les plus modestes. Mais, là encore, à l'opposé des visées présidentielles, vous proposez un programme sans commune mesure avec les défis auxquels l'agriculture familiale est confrontée. La prise en compte du retard accumulé par l'État pour financer ce plan est tardive et insuffisante. Ce sont des centaines de dossiers qui sont en souffrance dans les directions départementales de l'agriculture. Pour le seul département du Puy-de-Dôme, 150 dossiers sont en attente depuis le 1er janvier 2006 et il en arrive tous les jours. L'insuffisance de financement est d'ores et déjà chiffrée à 5,21 millions. Quant à la rallonge financière arrivée voilà une quinzaine de jours, elle n'a couvert que douze dossiers bloqués depuis 2005. Ce bel atour tenait davantage des faux bijoux de la Castafiore que de son émeraude ! Enfin, une politique de montagne n'a pas d'avenir sans une action déterminée permettant l'installation de nombreux jeunes agriculteurs. Monsieur le ministre, là encore vous n'avez pas su traduire dans ce budget le volontarisme de M. Chirac dont les propos étaient pourtant sans ambiguïté : « L'agriculture de la France passe par un renouvellement des générations. S'installer est bien plus qu’un projet professionnel, c'est un choix de vie. » À l'image des budgets précédents, vous continuez à exclure des milliers de jeunes du bénéfice de la DJA en ne faisant pas évoluer les conditions nécessaires à son obtention. Ainsi, non seulement vous réduisez à néant les vocations qui s'inscrivent pourtant dans le « choix de vie » exprimé par M. Chirac, mais vous tuez dans l'œuf les possibilités de voir se développer une nouvelle forme de travail paysan, une agriculture qui privilégie la diversification et la qualité des produits dans le cadre d'un aménagement harmonieux du territoire et du respect de l'environnement.

En ce qui concerne la politique forestière, vous n'avez pas mieux entendu le voeu présidentiel d'accorder « la priorité aux produits renouvelables en consolidant la filière bois ». Ainsi, les actions « gestion de la forêt » et « prévention des risques » voient leurs crédits amputés de 6 % et 5 %.

M. François Brottes – Exact.

M. André Chassaigne – Ce choix alarmant pour l'avenir de nos massifs forestiers suscitera un profond mécontentement. Il relève d’une forme de mépris à l'égard de tous les professionnels de la filière qui se sont mobilisés durant de longues années pour revivifier l'énorme potentiel de nos forêts.

La mission interministérielle « recherche et enseignement supérieur » est quant à elle en hausse de 5,7 %. Mais il serait naïf de se laisser séduire par cet affichage. Ces crédits affectés à la structuration de l'enseignement supérieur et de la recherche autour de sept pôles de compétitivité sur les technologies du vivant et de l'environnement ont en effet un objectif louable ; mais, quand on connaît la philosophie usée jusqu'à la corde qui inspire cette politique – baisse des charges fiscales et sociales ou attribution de fonds publics à des entreprises par ailleurs florissantes –, on ne peut que douter de sa capacité à relever les défis évoqués par le Président Chirac. En fait, les grands groupes autour desquels se structureront ces pôles risquent d'être les seuls bénéficiaires de cette compétitivité que le plus sérieusement du monde un ministre auvergnat vient de présenter comme étant le moteur de la politique d'aménagement du territoire. J'invite le Gouvernement à venir faire partager ce point de vue à tous les paysans et plus précisément à ceux du Livradois-Forez qui, depuis des années, paient au prix fort les conséquences désastreuses de cette compétitivité avec l'anéantissement de l'activité économique des bassins d'emploi ruraux et la disparition des services publics à la campagne.

Par ailleurs, nous regrettons vivement que la question centrale du revenu paysan ne soit pas posée. Les effets conjugués de la baisse des prix, de la sécheresse et de la hausse du gasoil ne sont pas les seuls maux dont souffrent nos paysans : ils sont littéralement pillés par les trusts bancaires et industriels ! S'ils sont rackettés quand ils achètent leurs moyens de production, ils le sont une nouvelle fois lorsqu'ils vendent à des prix dérisoires leurs produits à de quasi-monopoles ! Ne croyez-vous pas qu'il est temps de reconnaître le métier d'agriculteur en revenant à une politique de prix rémunérateurs à la hauteur de la qualité de nos produits ? L'avenir de nos territoires ruraux et de nos agriculteurs est compté si l'Europe ne revient pas à un système de préférence communautaire avec le développement de coopérations équilibrées sous l’égide de l’ONU et de la FAO.

L'agriculture est à la croisée des chemins. Sa vocation à nourrir les hommes se double aujourd'hui d'une capacité à fournir les matières premières pour des activités d'avenir telles que la chimie végétale ou la production de biocarburants. Prendre ce virage exige une volonté politique que je ne n'entrevois pas dans ce budget, pas plus que la nécessité de s'attaquer aux tabous idéologiques. Laisser croire que la course à la concentration permettra à l'Europe d'être compétitive est une duperie. Même en ayant recours à toutes les performances technologiques, notre agriculture ne parviendra pas à damer le pion aux latifundia brésiliens. Quant aux avantages que pourrait tirer le consommateur de cette course effrénée au productivisme, ils sont illusoires. La baisse des prix agricoles ne conduit pas à la diminution des prix alimentaires ; au contraire, elle accroît l'accumulation financière de la grande distribution en sacrifiant nos paysans et nos territoires ruraux.

Toutes les analyses confortent les défis énoncés par le Président de la République. Elles nous invitent à répondre au plus vite à cette question : serons-nous capables demain de nourrir correctement les huit milliards d'êtres humains qui vivront sur notre planète en sachant préserver les équilibres écologiques ? La réponse mérite autre chose qu'un catalogue de recettes anciennes inscrivant notre agriculture dans le sillon idéologique tracé par les politiques dévastatrices qui ont inspiré les réformes successives de la PAC et les récentes soumissions aux diktats de l'OMC. Depuis la réforme de la PAC, en 1992, qui institutionnalisa l'abandon d'une politique de prix rémunérateurs, nous assistons à une véritable fuite en avant productiviste, orchestrée à l'échelle planétaire. La démarche conduite aujourd'hui pour franchir une nouvelle étape dans la libéralisation des échanges agricoles est strictement identique. Sous la houlette de l'OMC, l'Europe a passé la vitesse supérieure. Avec les DPU, vous instituez le découplage des aides qui favorise des rentes de situation scandaleuses et pervertit la vocation du métier d'agriculteur. Et ce n'est pas la mise en place du second pilier des aides européennes, auquel est assigné le noble objectif de développer la ruralité, qui masquera la duperie d'un parti pris libéral ! Vous savez bien que sans une remise en cause de la doctrine productiviste, ces aides pourtant indispensables à la vitalité d'une agriculture respectueuse des territoires et des équilibres environnementaux sont condamnées. Dans votre logique, elles ne sont qu'une médecine douce pour accompagner la liquidation programmée de centaines de milliers d'exploitations. En effet, comment laisser croire qu'à l'horizon 2013, avec les pays entrants et à budget constant, le montant des aides européennes sera maintenu ? Comme pour les retraites agricoles, dont la revalorisation globale est sans cesse repoussée avec le secret espoir que le déficit démographique épongera le trop plein de l'ardoise, n'y a-t-il pas pour les actifs agricoles le même calcul machiavélique fondé sur le scénario si souvent évoqué d'un seuil maximum de 150 000 exploitations ? D'ailleurs, la loi d'orientation agricole a déblayé le terrain avec l'objectif de façonner nos exploitations agricoles pour qu'elles épousent la logique productiviste des entreprises. Ainsi, le « fonds agricole » va renchérir les terres et accroître la concentration foncière au détriment des jeunes agriculteurs tandis que le fameux « bail cessible » laisse désormais aux bailleurs la possibilité d'expulser leur fermier à tout moment.

Le rôle que vous assignez au Fonds national de garantie contre les calamités agricoles est clair : plutôt que de le financer en sollicitant les profits considérables du système assurantiel, il est transformé en tiroir-caisse chargé de renflouer les assurances privées.

À l'opposé de L'Étoile mystérieuse que sont les propos du Président de la République invitant à l'offensive contre la domination des États-Unis, votre politique fait de la France l'élève zélé d'un libéralisme que les peuples rejettent de plus en plus. Quel terrible décalage, en cette fin de Ve République, entre les appels lénifiants du chef de l'État et la prosaïque réalité de votre politique. Vous la mettez certes en œuvre avec le sourire et dans un respect, louable, des avis divergents. Il n’empêche que vous la mettez en œuvre ! Décidément, la belle fusée lancée en Auvergne aura fait long feu : Objectif Lune n’a pas été atteint ! (Sourires)

Au final, les grandes orientations de votre budget sont sans ambiguïté sur la volonté du Gouvernement de livrer ce qui reste de notre agriculture familiale aux trusts de l’agro-alimentaire. Dans ces conditions, les députés communistes se prononceront bien sûr contre (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. Louis Guédon – Avec ses 20 000 marins pêcheurs, auxquels il convient d’ajouter quelque 50 000 emplois induits, la pêche doit rester un secteur économique prépondérant dans notre pays. La consommation annuelle de poisson, passée entre 1988 et 2003 de 17,5 à 23 kilos, au-delà de sa contribution à l’amélioration de notre alimentation, démontre toute l’importance de cette production pour notre balance commerciale, déficitaire pour les produits de la mer. Notre pays se doit de réagir face au problème de la ressource halieutique qui se traduit par une production en baisse et des prix en hausse. Sorties de flotte, raréfaction de la ressource, diminution du nombre de marins, absence de renouvellement de la flottille, rigueur des quotas imposés par la Commission européenne : autant de facteurs qui exigent de notre pays une politique volontariste, attendue par les professionnels et indispensable à l’économie d’un pays dont le littoral est le plus important d’Europe.

Le budget global de la pêche pour 2007 s’élève à 60 millions d’euros, en augmentation de 87 % par rapport à 2006. Ce n'est là qu'un début compte tenu de l'ampleur de la tâche, mais il reste que l’ensemble des postes de la filière sont concernés par cette progression. Les crédits consacrés au suivi statistique et scientifique de la ressource passent ainsi de 670 000 à 1 884 000 euros, attestant d’une détermination à mieux appréhender ladite ressource. L’effort consenti, comme je l’indiquais déjà l’an passé, n’atteindra toutefois son objectif que si on favorise la confiance et la communication entre scientifiques, professionnels et élus du littoral. Je renouvelle à ce sujet ma demande de constitution d'un groupe de travail permanent, associant des représentants de ces trois collèges. Alors que l’isolement actuel des différents partenaires fait chaque jour sentir ses méfaits, l’efficacité d’une telle structure reposera sur la transparence, l'échange des observations, l'utilisation des données scientifiques et expérimentales et le suivi opérationnel de ses travaux.

La restructuration de la flottille fait en 2007 l’objet d’un effort particulier avec un nouveau poste doté de 19 millions d’euros. L'effort également consenti pour le suivi du milieu et la gestion durable de la ressource, dont les crédits augmentent de 233 %, est de nature à redonner confiance aux professionnels si les moyens humains suivent, notamment pour assurer le suivi des résultats obtenus et faire partager les objectifs.

Les crédits de l’OFIMER augmentent de 35 %, pour s’établir à cinq millions d’euros. Les ressources provenant des taxes doivent être affectées à des actions transparentes et destinées à soutenir la filière.

Les moyens du contrôle des pêches maritimes augmentent de près de 90%, passant de 1,45 à 2,75 millions d’euros. Une telle augmentation laisse craindre que, pour répondre aux exigences, souvent arbitraires, de Bruxelles, les contrôles, portant sur des postes connus de tous et dénoncés par tous, ne se multiplient. De telles contraintes non ciblées démoralisent et déstabilisent des professionnels honnêtes qui, en cette période difficile pour l'équilibre de leurs entreprises, ont bien du mal à supporter les reproches qui leur sont adressés, et les pénalités qui peuvent s’ensuivre. Puissent les crédits affectés à la recherche scientifique apporter la preuve de l'existence de stocks de certaines espèces ! La lumière doit ainsi être rapidement faite sur les stocks de thon rouge en Atlantique et sur les perspectives de reproduction de l’espèce. Il convient d’actualiser les connaissances, en prenant en compte les observations quotidiennes des professionnels. La crise surprenante de l'anchois, d’ordinaire abondant sur nos côtes, en raison de l’importance économique de cette espèce, une réponse adaptée. Un plan d'organisation du marché, évitant les ventes directes et faisant de l’OFIMER une véritable structure interprofessionnelle, serait sans doute nécessaire. Les professionnels s'interrogent sur la nécessité de prélever, comme par le passé, des taxes au profit de cet organisme, alors qu’il n'a plus les moyens d'aider à la commercialisation des pêches.

On le voit, une redéfinition des quotas s’impose. La notion d'antériorité, retenue par l'administration, donne lieu à un négoce, non au profit de la filière ni de l'économie des ports, mais de l'armement des navires. Chacun est bien conscient qu’une bonne gestion des quotas garantit un approvisionnement régulier et durable. Mais défendant nos intérêts nationaux, soyons indifférents à la pression de certains armements étrangers.

Les crédits prévus pour la restructuration de la flottille augmentent de 72 %, pour s’établir à six millions d’euros. Cela devrait permettre d’améliorer la sécurité de nos marins et de renforcer l’attrait de la filière pour les jeunes. Les bateaux de l'an 2000 n'étaient plus ceux des années soixante. Aujourd’hui, le coût du carburant, que n’équilibre plus le Fonds de prévention des aléas pêche, impose de réfléchir à de nouveaux types de navires, plus économes en carburant – dont le coût est incompressible –, et donc permettant d'assurer l'équilibre des armements. Mais, pour peu que cette espérance mette un certain temps à se concrétiser, des mesures immédiates sont nécessaires. Dans un souci de responsabilité, la profession a élaboré un projet de « garantie couverture investissement », qui pourrait succéder au FPAP et apporter deux garanties, celle de l’excédent brut d'exploitation et celle, en cas de cession d'un nouveau navire ou de la création d'une entreprise après dix ans d’exercice, d'une valeur minimale de rachat. Bénéficieraient de ces garanties les adhérents s’acquittant d’une cotisation à cette « couverture investissement », laquelle pourrait atteindre 50 % du coût du projet et bénéficier d'une déduction fiscale. Une « couverture carburant pêche » pourrait de même être instituée, elle aussi déductible du résultat imposable.

Les crédits affectés au suivi de la ressource aquacole augmentent de 56 %. On ne peut à ce sujet se satisfaire des zones actuellement reconnues au niveau européen. Il faut tenir compte de la consommation croissante de poissons d’élevage, qui exige le développement de zones littorales consacrées à l’aquaculture. Il faut aussi tirer les leçons de la fragilité récemment apparue dans certains bassins ostréicoles. Il faut également répondre aux préoccupations de qualité des eaux et de la biomasse, de richesse du plancton et d’identification d’éventuels éléments toxiques.

Les aléas des deux dernières années en ce domaine, s'ajoutant pour la pêche aux aléas sur les armements, ne sont pas compatibles avec le développement durable de nos zones littorales, alors même qu’il s’agit d’activités pluriséculaires aux techniques parfaitement maîtrisées.

Votre volonté, Monsieur le ministre, d’aider la pêche est indéniable. Le succès de votre politique reposera sur la volonté des hommes, la qualité de leurs relations, la transparence et l'échange de leurs travaux. Elle reposera également, au niveau européen, sur la volonté des États et de leurs gouvernements de dépasser les discussions théoriques et technocratiques habituelles pour régler les problèmes concrets qui se posent cruellement aux professionnels de la pêche et aux populations du littoral qui dépendent de son économie.

Le groupe UMP votera bien sûr ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Louis-Joseph Manscour – Je ne partage pas vos opinions politiques, Monsieur le ministre, mais je tiens, en préambule à cette intervention, à vous dire combien j’apprécie votre ouverture d’esprit, dont j’ai encore eu la preuve lors de votre visite à la Martinique. L’estime que je vous porte ne saurait néanmoins effacer mes insatisfactions, mes interrogations, mes inquiétudes, ma soif d’espérance.

Dans le bref temps de parole qui m’est imparti, je ne me livrerai pas à une analyse critique des chiffres de votre budget mais, en cette fin de législature, dresserai le bilan des cinq dernières années de politique agricole outre-mer, notamment en Martinique. J’associe à mon intervention notre collègue Victorin Lurel, retenu à Pointe-à-Pitre pour accueillir les concurrents de la Route du Rhum et qui m’a prié de vous dire combien il est attentif aux problèmes de l’agriculture et combien il sera vigilant face aux enjeux de l’avenir.

Ces cinq dernières années furent cinq années de désarroi, d’incertitudes, d’angoisse même pour les agriculteurs d’outre-mer, non que votre ministère, Monsieur le ministre, soit resté inactif, mais les mesures prises ont été soit insuffisantes, soit inadaptées, puisque la crise de l’agriculture perdure. Ainsi, la valeur ajoutée marchande agricole a-t-elle continûment régressé de 2 %, en moyenne, chaque année depuis 2002. Durant ces cinq années, nos professionnels ont assuré avec courage la survie de leurs exploitations. Des centaines d’entre elles ont néanmoins déposé leur bilan en Martinique, faisant disparaître près de 6 500 emplois. La filière ananas, restructurée en 2000 autour de l’usine de transformation SOCOMOR, est au bord de la faillite. La production a chuté de 70 % en moins de trois ans, et l’avenir des producteurs s’assombrit avec la suppression l’année prochaine des aides du POSEIDOM. Les producteurs de melons, de légumes et de cultures maraîchères ne se portent pas mieux.

La filière pêche est en sous-capacité, avec une production de moins de 6 000 tonnes en Martinique pour une demande locale de 14 000 tonnes, et se trouve fragilisée par les règlements européens qui visent paradoxalement à la réduction de l’effort de pêche. Cela dissuade de nombreux jeunes d’intégrer cette filière.

Les planteurs de canne sont tout aussi inquiets. Les négociations entamées avec le Gouvernement il y a trois mois sur la compensation du prix de la tonne de canne sont loin d'aboutir. Quant aux planteurs de banane, ils sont près du découragement. Endettés, certains sont tentés de vendre leurs terres à des promoteurs immobiliers. Les « planteurs de béton » vont-ils donc les remplacer ?

Vous avez pu le constater lors de votre visite aux Antilles en juillet, Monsieur le ministre : c'est tout le tissu économique et social qui se délite. Mes collègues et moi-même n'avons eu de cesse de vous alerter sur l'urgence de concevoir pour les DOM une agriculture de développement. J’ai ainsi proposé le lancement d'un « plan Marshall » pour l'agriculture domienne. Mais il y a eu tant de promesses et d’espoirs déçus ! Alors que je vous invitais à sanctuariser dans une loi spécifique à l'outre-mer de véritables outils de développement, de modernisation et de compétitivité pour notre agriculture, vous m’avez répondu que vous y réfléchissiez avec M. Baroin. Qu'en est-il aujourd'hui, à l’heure où la XIIe législature touche à sa fin ?

Un tel dispositif devrait relever au moins trois défis. Le défi économique, qui consiste à enrichir de manière cumulative la valeur ajoutée produite, comme on a su le faire il y a dix ans en créant l'AOC pour le rhum. Le défi social, qui vise à assurer un revenu juste et une couverture sociale digne aux agriculteurs. Le défi environnemental enfin : il impose de préserver les terres agricoles des spéculations immobilières et des pollutions.

Il faut bien sûr prendre en compte l'insularité de nos territoires, les risques climatiques et la maîtrise de la pollution des sols par les pesticides. À ce titre, il est urgent d’envisager l’indemnisation des agriculteurs victimes de la pollution de leurs sols par le chlordécone, comme le préconise la mission parlementaire à laquelle j'ai participé. Il faut aussi se doter de mécanismes de redressement des exploitations en difficulté, et réorienter les productions vers des secteurs nouveaux, comme les biocarburants.

La valorisation des productions domiennes est également primordiale. En assurant la promotion de la banane antillaise, c'est tout le modèle agro-alimentaire français et européen, solidaire et social, que nous dressons face au modèle agro-alimentaire américain, libéral et peu soucieux des conditions de travail et de l'environnement.

Nos régions disposent de ressources non négligeables et de formidables gisements humains. Certes, les futurs contrats de projet réservent une place prépondérante à la diversification agricole, ce qui ouvrira des perspectives intéressantes à nos régions insulaires. Mais votre budget et votre politique ne sont pas à la hauteur des ambitions que nous nourrissons pour l’outre mer.

M. Philippe Folliot – Comme nombre de mes collègues, je voudrais d’abord saluer l’action et l’engagement personnel qui sont les vôtres, Monsieur le ministre, ainsi que l’écoute dont vous avez toujours fait preuve.

Je ferai ensuite une proposition que d’aucuns jugeront peut-être iconoclaste : il s’agit de changer le nom de votre ministère. Il me semble en effet que l’on devrait plutôt vous qualifier de ministre des agricultures, tant les activités et secteurs dont vous avez la charge sont divers. Qu’y a-t-il en effet de commun entre les grandes cultures céréalières de la Beauce et l’agriculture telle qu’elle est pratiquée dans nos moyennes montagnes du Massif Central, entre l’élevage en Bretagne et celui du Sud-Ouest ?

Je laisse à mes excellents collègues François Sauvadet et Jean Dionis du Séjour le soin d’évoquer, au nom du groupe UDF et apparentés, la viticulture, la filière fruits et légumes, les problématiques environnementales, la coexistence avec Natura 2000 ou les biocarburants, sujet auquel notre groupe a toujours attaché une grande importance.

Je partage la position de mes collègues sur les retraites agricoles. C’est un enjeu de solidarité, d’équité et de justice. Nous avons un intérêt commun à faire en sorte que ce dossier continue à progresser, et nous pouvons donner acte au Gouvernement des avancées intervenues depuis 2002, même s’il reste encore un long chemin à parcourir.

J’évoquerai maintenant l’agriculture de moyenne montagne et de piémont, essentielle pour l’économie des territoires concernés, puisqu’elle y emploie en général directement entre 20 % et 50 % de la population active. Dans le canton de Vabre, au cœur des monts de Lacaune, dont je suis l’élu, 40 % des actifs travaillent dans l’agriculture, soit le décuple de la moyenne nationale, ce qui signifie que les décisions prises auront là un impact dix fois plus important que sur l’ensemble du territoire. C’est une réalité qu’il nous faut garder sans cesse à l’esprit.

Le pivot de cette agriculture de moyenne montagne est l’indemnité compensatrice des handicaps naturels – ICHN. L’appellation en elle-même est importante : il ne s’agit pas d’une aumône faite aux agriculteurs, mais des moyens que la collectivité leur octroie pour faire face à ces handicaps naturels. L’objectif qui a été fixé – revaloriser de 50 % le montant de cette ICHN sur les vingt-cinq premiers hectares – est louable, mais il ne faut pas pour autant baisser la garde.

Je lance aussi un plaidoyer en faveur des mesures agri-environnementales de soutien à la production de l’herbe. Je me félicite qu’elles soient prises en compte par le plan 2007-2013, mais il reste un point en suspens : la nécessaire prise en compte d’installations nouvelles. En effet, l’installation des jeunes agriculteurs ne doit pas être une politique ou une stratégie parmi d’autres, mais bien l’une des priorités de l’action du ministère dans ces territoires. Compte tenu de l’importance des activités agricoles dans ces zones, il est impératif d’assurer le renouvellement des générations et d’apporter du sang neuf.

Un mot sur les surfaces en herbe engagées en gestion extensive. Il est important que les exploitations les moins extensives – nombreuses dans le Tarn – soient aussi prises en compte dans le programme 2007-2013, ce qui suppose de revoir la clé de répartition par rapport à la surface agricole utile.

En tous domaines, il faut soutenir l’investissement, car c’est à partir du moment où l’on n’investit plus que la situation devient vraiment préoccupante. S’agissant du plan de modernisation des bâtiments d’élevage, les dotations doivent être suffisantes pour que l’effort d’adaptation soit poursuivi…

M. François Sauvadet – Tout à fait !

M. Philippe Folliot – Et je me félicite que les prêts bonifiés ne soient pas sacrifiés. Jean Dionis du Séjour reviendra tout à l’heure sur les enjeux d’une bonne gestion de l’eau et sur l’importance des retenues collinaires : je n’en parle donc pas !

Quelques mots sur la filière porcine, dont chacun connaît les difficultés. Bien entendu, je soutiens le projet d’AOC du jambon de Lacaune, dont le ministre a pu apprécier la qualité gustative…

M. le Ministre – Excellent !

M. Philippe Folliot – C’est une démarche de première importance, que nous espérons voir aboutir rapidement.

S’agissant de la gestion des déchets de l’abattoir de Lacaune, je demande que l’on privilégie la filière écologique de l’auto-combustion sur place, en délivrant les autorisations nécessaires.

Le temps me manque pour parler de la forêt, alors qu’elle fait vivre 500 000 personnes et couvre 27 % de notre territoire. J’indique simplement que la diminution des crédits qui y sont consacrés nous inquiète.

Un mot rapide sur la complexité encore excessive des procédures administratives, qui décourage nombre d’agriculteurs, malgré l’effort de simplification auquel s’astreint le ministère. Bientôt, il faudra avoir une maîtrise en droit pour remplir les formulaires et un doctorat pour les traiter ! (Sourires)

En tant que vice-président de la mission d’information sur les enjeux relatifs aux OGM, je déplore que l’idée d’organiser un débat au Parlement sur le sujet n’ait pas été retenue. Il y a trois semaines, j’interrogeais le ministre délégué à la recherche à ce sujet et il me répondait : « Pourquoi pas ? »…

M. Germinal Peiro – Nous en sommes témoins !

M. Philippe Folliot – Depuis, le ministre délégué aux relations avec le Parlement a fait savoir qu’il n’en était plus question !

M. Germinal Peiro – Cacophonie gouvernementale !

M. Philippe Folliot – Pis : un véritable déni de démocratie ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Si l’on veut éviter les violences de la semaine dernière, si l’on ne veut plus que certains continuent à vouloir imposer leurs vues par la force, il faut un débat démocratique sur les OGM au Parlement. Il en va de notre crédit auprès des Français. Monsieur le ministre, je sais que vous mesurez l’importance du sujet…

M. le Ministre – En effet.

M. Philippe Folliot – Aussi, je vous demande de peser de toute votre influence pour qu’un tel débat ait lieu. Sinon, les atteintes à la propriété privée continueront et la violence sera considérée comme un moyen d’agir parmi d’autres…

M. François Liberti – La première des violences, c’est de refuser que le débat ait lieu.

M. Philippe Folliot – Monsieur le ministre, votre budget ne résoudra pas tous les problèmes en suspens, mais il va dans le bon sens et je me joindrai à mes collègues de l’UDF pour l’approuver. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Daniel Garrigue – Monsieur le ministre, je m’associe aux propos qui ont été tenus sur tous les bancs de notre assemblée pour saluer votre efficacité et votre détermination à trouver des solutions novatrices dans tous les domaines.

Dans le temps qui m’est imparti, je parlerai de la viticulture et des retraites agricoles.

Notre viticulture, chacun le sait, connaît des temps difficiles, du fait de la baisse tendancielle de la consommation. Ce que l’on dit moins, c’est que nos résultats à l’export ne sont plus ce qu’ils étaient, en particulier sur les marchés les plus proches. Pendant longtemps, on a mis en avant la concurrence des vins de l’hémisphère sud ; soit, mais il faut aussi reconnaître que certains de nos partenaires – en particulier les Italiens et les Espagnols – ont su mieux que nous adapter leur offre pour répondre aux attentes des consommateurs. Ils s’efforcent en effet de proposer des produits de qualité constante, présentant un rapport qualité-prix favorable, et en quantité suffisante pour être toujours disponibles. Nous avons des efforts à faire pour les rattraper, et je sais, Monsieur le ministre, que vous en avez pris la mesure. Nous devons structurer notre offre et lever les obstacles qui freinent l’accès à la grande distribution. Il semble que le négoce ne sait pas – ou ne veut pas ? – toujours le faire et les comités de bassin, sur lesquels nous fondions de grands espoirs, ne fonctionnent pas partout avec la même efficacité. En pays de Loire, quelques belles réussites ont été enregistrées ; ailleurs, le bilan est plus mitigé. Une nouvelle organisation doit être retenue pour aider plus efficacement nos viticulteurs. Les conclusions des travaux de notre collègue Philippe Martin sont donc attendues avec impatience.

S’agissant des retraites agricoles, l’effort engagé dès 1994 a été poursuivi avec constance sous cette législature. La retraite complémentaire – la RCO – est financée depuis 2003 et nous avons tenu notre promesse de mensualiser les pensions. La réforme a coûté cher, et les retraités n’ont pas toujours l’impression que leur situation s’en est trouvée améliorée, mais nous avions pris un engagement et nous pouvons nous honorer de l’avoir tenu.

Par ailleurs, grâce aux amendements au PLFSS pour 2007 que nous avons défendus avec Marc Le Fur et Yves Censi, les mesures annoncées par le Président de la République entreront en vigueur dès l’an prochain. Et je refuse, Monsieur Peiro, que vous les qualifiiez de mesures de fin de mandat : c’est vous qui avez voté des prestations au début de 2002 en laissant à vos successeurs le soin de les financer…

M. Germinal Peiro – C’est faux !

M. Daniel Garrigue – Nous, nous prenons à la fin de 2006 des décisions qui trouveront à s’appliquer dès le début de 2007 !

Pour répondre aux attentes du monde agricole, nous nous attachons aussi à mettre fin à l’injustice des minorations, lesquelles restent sans commune mesure avec celles qui se pratiquent dans d’autres régimes de retraite. À l’origine de cette situation, il y avait le souci de bien prendre en compte la situation des chefs d’exploitation. Le résultat, c’est que d’autres catégories ont été un peu sacrifiées, qu’il s’agisse des conjoints ou des aides familiaux.

Bien entendu, ces mesures n’épuisent pas toutes les attentes, mais elles permettent de franchir un pas important. Merci, Monsieur le ministre, de votre détermination à conduire, depuis plusieurs années, une politique de solidarité et de justice sociale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean Dionis du Séjour - Permettez-moi d’évoquer mon département à cette tribune : l’année qui s’achève fut, pour le Lot-et-Garonne, moins catastrophique que les précédentes. Ce n’est pas encore le Pérou, mais c’est mieux. Pour autant, certains secteurs restent piégés dans une tourmente structurelle. À ce titre, je suis solidaire des viticulteurs de ma circonscription comme de ceux de la France entière. L’offre viticole nationale, en effet, excède la demande de 40 %. L’appui de l’État leur est dû : en quoi consistera-t-il ?

Reconnaissons-le cependant : l’année 2006 n’a pas été des plus mauvaises, pour les céréales comme pour les fruits et légumes. Je me souviens pourtant être monté à cette même tribune au cours de l’hiver 2004 pour relayer le désespoir d’agriculteurs qui me demandaient, la gorge serrée, s’il fallait replanter et perdre une nouvelle récolte ou arrêter. Ils durent alors faire une fois de plus la preuve d’une résistance qui leur est coutumière.

Ils veulent aujourd’hui comprendre pourquoi la crise s’atténue : est-ce la conjoncture, le changement climatique, ou bien l’entrée dans un cycle de longue durée qu’évoquent certains experts ? Si l’État stratège existe, c’est maintenant qu’il doit le prouver en aidant les agriculteurs à orienter leur avenir. La loi d’orientation a, il est vrai, ouvert notre agriculture à une vision entrepreneuriale, mais n’a pas tracé de perspectives à long terme sur les sujets essentiels. Aujourd’hui, j’en évoquerai trois.

L’hydraulique agricole d’abord : il faut aider l’agriculture à affronter la multiplication des épisodes de sécheresse – la température a ainsi gagné deux degrés en soixante ans dans le Sud-Ouest ! Une véritable politique de gestion de l’eau doit permettre d’économiser les ressources existantes tout en en créant de nouvelles. Or, en la matière, ce projet de budget est archaïque !

M. Germinal Peiro – C’est clair !

M. Jean Dionis du Séjour – Vous prétendez consacrer à cette question 18 millions en crédits de paiement. Regardons-y de plus près : ils comprennent 8 millions qui seront affectés à des opérations hydrauliques extérieures au plan de retenues de substitution – dont la présentation reste d’ailleurs assez vague. Il reste donc 10 millions : c’est d’autant moins suffisant qu’il y en avait quatorze l’an dernier ! L’État se désengage ainsi d’un domaine pourtant essentiel. Chacun ici salue votre sens du dialogue, Monsieur le ministre. Oubliez donc un instant que vous êtes le responsable politique d’une administration trop souvent influencée par un discours environnemental désuet, et redevenez l’élu de la Charente-Maritime et de ses paysages blanchis par la sécheresse ! Soyez un écologiste du XXIe siècle, alliez enfin la conservation et la production de l’eau ! Le groupe UDF proposera d’ailleurs par amendement d’abonder les crédits alloués à la création de ressources.

M. François Rochebloine – Très bien !

M. Jean Dionis du Séjour – J’en viens aux huiles végétales pures (« Ah ! » sur divers bancs), sujet qui me tient à cœur.

M. le Ministre – À raison !

M. Jean Dionis du Séjour – Je défends depuis longtemps ce biocarburant dont le bilan environnemental et énergétique est meilleur que ceux de l’éthanol et des diesters. Aujourd’hui, les ventes d’huile ne cessent d’augmenter. Dans le Lot-et-Garonne, le commissaire du Gouvernement a approuvé la décision de la communauté de communes du Villeneuvois d’autoriser l’utilisation de ces huiles, malgré la décision contraire du tribunal administratif. Tout cela fait un peu « pagaillous », Monsieur le ministre, mais vous savez bien que la justice tranchera certainement en faveur des huiles végétales pures : sa décision ne manquera pas de faire jurisprudence !

Un bonheur ne venant jamais seul, M. Perben espérait récemment obtenir l’aval interministériel pour que les camions-bennes roulent à l’huile végétale.

M. le Ministre – Je l’espère aussi !

M. Jean Dionis du Séjour – Excellente nouvelle ! Par ailleurs, le remarquable rapport de MM. Herth et Poignant sur les biocarburants défend la standardisation et le développement de cette filière. Tout cela, pourtant, prendra bien du temps. Or, aujourd’hui, le milieu agricole atteint à peine l’autoconsommation.

M. François Sauvadet – Arrachée de haute lutte !

M. Jean Dionis du Séjour – Rendez-vous compte : l’Allemagne, elle, a autorisé la commercialisation des huiles végétales aux particuliers voilà six ans !

C’est donc aujourd’hui qu’il faut agir. Quand publierez-vous le décret autorisant cette commercialisation dans le monde agricole ? Vous l’aviez promis avant la fin de l’année.

M. le Ministre – Aucun problème : je tiendrai ma promesse.

M. Jean Dionis du Séjour – Encore une bonne nouvelle ! D’autre part, quand autoriserez-vous les bus à rouler à l’huile végétale ? Enfin, quand les premiers protocoles d’expérimentation entre l’État et les collectivités locales seront-ils signés ?

Certains, comme M. Chassaigne, pensent que les biocarburants demeureront un outil agricole marginal. Peut-être, mais en marché tendu, la marge fait la croissance !

Troisième point : les retraites agricoles, dont le Président de la République a annoncé en octobre la revalorisation. Bravo, Monsieur le ministre : la tâche n’a pas dû être simple.

M. le Ministre – En effet !

M. Jean Dionis du Séjour – Cette mesure dotée de 162 millions concerne 300 000 personnes. Cependant, la loi Fillon – que l’UDF a votée – fixe le niveau des retraites à 85 % du SMIC : nous n’en sommes pas encore là ! Quel est donc votre calendrier ?

M. Germinal Peiro – Il est un peu tard pour l’établir !

M. Jean Dionis du Séjour – Enfin, le Gouvernement a choisi, à l’approche des élections, de ne rien faire quant au déficit de 6 milliards du FFIPSA. Ce n’est pas une décision habile : rappelez-vous ce qu’il en a coûté à M. Jospin de ne pas agir sur les retraites ou la sécurité sociale.

Vous avez, Monsieur le ministre, réussi à pacifier les relations entre les agriculteurs et l’État : ce n’est pas rien ! Votre formation à l’UDF vous y a sans doute aidé… (Rires sur divers bancs) En effet, vous avez toutes les qualités d’un radical du Lot-et-Garonne, qui écoute et négocie.

M. Germinal Peiro – Et qui vote Bayrou !

M. Jean Dionis du Séjour – Quant à nous, nous voterons ce budget : voyez comme l’UDF est toujours surprenante ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et sur plusieurs bancs du groupe UMP)

M. François Guillaume – Plutôt que de revenir sur les grandes orientations de votre budget, que j’approuve, j’insisterai sur la nécessité de bien défendre notre agriculture auprès de Bruxelles et de l’OMC.

L’Europe d’abord : l’acharnement avec lequel Mme Fischer Boel, commissaire chargée de l’agriculture, prétend ouvrir prématurément le débat sur une nouvelle réforme de la PAC est d’autant plus préoccupant que ses intentions sont d’inspiration malthusienne. Ainsi, elle propose une réduction de 400 000 hectares de la superficie viticole de l’Union. Les vins du nouveau monde occuperaient aussitôt la place abandonnée et notre potentiel agricole serait gravement affecté. De même, le développement des productions non alimentaires, du biodégradable aux biocarburants, entraîne le redressement du cours des denrées et offre une bouffée d’oxygène à nos agriculteurs asphyxiés. Est-ce cette embellie qui conduit la Commission à insister en faveur de la réduction de la dépense agricole ? Objectif d’ailleurs permanent et, hélas, soutenu par une opinion publique que l’on nourrit d’exemples ponctuels de subventions excessives pour décrédibiliser le système. Il faut pourtant compenser l’insuffisance des prix agricoles. Toutes les agricultures des pays industrialisés sont d’ailleurs aidées et, surtout, les prix de revient des grandes productions agricoles européennes étant supérieurs aux prix du marché, l’intervention publique est indispensable. Le réseau d’information comptable agricole doit permettre d’en fixer le niveau équitable. Si le principe n’est pas en cause, les modalités doivent en effet être ajustées : les aides doivent être dégressives et plafonnées à hauteur du type d’exploitation que l’on veut promouvoir dans l’Union. C’est à vous, Monsieur le ministre, d’en simplifier l’affectation, l’administration et le contrôle, en appliquant le découplage total, assorti d’un engagement de produire du bénéficiaire, en exceptant cependant de la mesure le troupeau allaitant, afin d’éviter la désertification des régions traditionnelles d’élevage. Cette simplification aurait l’avantage de réduire le personnel affecté à la gestion des primes ou de permettre de l’affecter à des tâches plus valorisantes.

Quand au FEADER, le Fonds européen agricole pour le développement rural, la moitié de ses crédits va au financement de l’espace rural, des services et emplois non agricoles, c’est-à-dire de ce qui devrait relever du volet territorial des plans régionaux 2007-2013. Comme en outre, dans cette période, les fonds structurels européens ne financeront plus des territoires mais des projets ponctuels, il est à craindre que les grandes collectivités urbaines ne les accaparent. Je vois dans tout cela une machination. On culpabilise le paysan au sujet de la dépense communautaire, que l’on veut orienter vers d’autres objectifs, au détriment d’une activité qui tient encore le premier rang mondial pour les produits agroalimentaires et le second rang pour les produits agricoles. Je suis sûr, Monsieur le ministre, que vous mesurez le danger et que vous veillerez à le prévenir.

Un autre danger qui nous menace est l’affaiblissement de la résistance communautaire à l’OMC. Le commissaire européen est tenté de faire de nouvelles concessions, notamment sur l’accès au marché, pour débloquer la négociation. Les offres communautaires sont subordonnées à un effort comparable des grands exportateurs. Ainsi le groupe de Cairns, qui représente 36 % du commerce mondial, doit supprimer les boards, organismes d’État qui centralisent les exportations et en favorisent le subventionnement occulte, et les États-Unis doivent cesser de fixer un prix minimum par le système de deficiency payments, qui favorise l’exportation. Dans ce domaine, la résistance repose essentiellement sur la détermination française, c’est-à-dire la vôtre. Nous serons à vos côtés pour ce bras de fer prolongé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe-Armand Martin – Malgré la discipline budgétaire, votre budget augmente, et je m’en félicite. Certes, une hausse de 1 % peut sembler mineure…

M. Germinal Peiro – C’est une baisse !

M. Philippe-Armand Martin – …mais ce sont 50 millions en plus par rapport à l’an dernier.

Nos deux priorités sont, d’une part, de relever les défis économiques et de surmonter les aléas et les crises et, d’autre part, de réaffirmer la place de l’agriculture dans les territoires ruraux. Avec 545 000 exploitations où travaillent 1 100 000 personnes, elle participe en effet à l’aménagement du territoire et à notre rayonnement.

Malgré l’effort budgétaire consenti, je souhaite vous faire part de quelques inquiétudes. D’abord, si les retraites agricoles ont été revalorisées, elles restent trop faibles pour assurer un revenu décent. Il faut donc faire un effort en leur faveur.

Ensuite, il faut faciliter l’usage des biocarburants, qui offrent de nouveaux débouchés, par une défiscalisation importante. Il est prévu un taux d’incorporation de biocarburant dans les carburants de 5,75 % en 2008 et de 7 % en 2010, soit plus que ce qu’exige l’Union européenne. Pour cela, il faut stabiliser le barème de défiscalisation, passé de 38 euros à l’hectolitre en 2005 à 33 euros en 2006 pour le bioéthanol, et maintenir les droits de douane à 19 euros l’hectolitre. Il faut imposer aux distributeurs de carburants une taxe générale sur les activités polluantes et assurer la protection aux frontières de l’Europe.

Enfin, je voudrais évoquer la situation des offices et en particulier de l’INAO. Sa subvention d’État diminue, moins que dans d’autres cas, c’est vrai. Mais les vignerons y sont très attachés et on a élargi ses missions. Dès lors, comment fonctionnerait-il avec moins de moyens ? L’INAO promeut les AOC, qui contribuent largement à nos exportations. Il faut vraiment lui donner les moyens nécessaires à son fonctionnement. En outre, il faut veiller à ce que les crédits affectés aux offices soient bien mis à leur disposition. En 2006 ils étaient suffisants mais, en fin d’année, il restera 5 millions non engagés.

La reconduction des crédits de l’agriculture contribuera au dynamisme du secteur. C’est bien l’intérêt des exploitants qui doit nous guider. J’espère donc, Monsieur le ministre, que vous tiendrez compte de mes remarques, qui correspondent à l’attente de nombreux agriculteurs, des viticulteurs de la Marne notamment (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Joël Beaugendre – L’agriculture est fondamentale pour la Guadeloupe où la banane et la canne à sucre, qui couvrent la majeure partie des terres, procurent l’une 12 000 et l’autre 15 000 emplois.

La pollution des sols est un sujet sensible. En 2005, dans un rapport concluant une mission d’information sur l’utilisation du chlordécone et autres pesticides aux Antilles, j’ai mis en évidence l’ampleur des dommages. Les aspects sanitaires et écologiques de cette pollution ont été largement pris en compte, mais l’aspect économique a été négligé. Les agriculteurs, privés de revenus, s’endettent. Il faut les soutenir financièrement pour éviter les cessations d’activité. La solidarité nationale doit donc s’exercer, et s’accompagner d’un effort pour la reconversion.

Lors du débat budgétaire l’an dernier, vous m’avez assuré que le principe de la solidarité nationale à l’égard des agriculteurs antillais était acquis et vous annonciez une évaluation de l’impact économique des mesures prises, au titre du principe de précaution, pour éviter de proposer des produits impropres à la consommation. Qu’en est-il ?

Lors de son audition devant la commission des affaires économiques, M. Baroin a annoncé qu’une indemnisation serait accordée. Pouvez-vous le confirmer ? L’État a-t-il arrêté le plan de soutien aux agriculteurs dont la production comportera des résidus de chlordécone supérieurs aux limites maximales autorisées, comme la mission d’information le proposait ?

D’autre part, l’avenir de la filière traditionnelle de production de la banane préoccupe les professionnels. La banane, premier produit d’exportation en volume est en crise du fait de la concurrence des pays d’Amérique latine, où le coût de la main-d’œuvre est très faible. Conscient de ces enjeux, le Gouvernement a mené des actions pragmatiques et pris des décisions essentielles, qui se traduisent dans vos budgets successifs. Mais l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2006 d’un régime tarifaire unique, qui implique la suppression des contingents, a accru la concurrence. Il importe de soutenir suffisamment les producteurs. Ceux de la Guadeloupe ont estimé que le montant de l’aide devait être calculé sur la base de l’aide moyenne de 2000-2002. Qu’en est-il ?

Avec de meilleurs revenus, les professionnels pourraient relancer la production, améliorer le rendement, et respecter leurs engagements de consolider et moderniser la filière pour relever le défi de la concurrence.

Il importe aussi de tenir compte des particularités de chacune des régions productrices, et de l'importance que revêt ce secteur pour leur équilibre économique.

Nous approchons de la fin de la législature et l’outre-mer n’a pas fait l’objet, contrairement à ce qui était prévu, d'une loi d'orientation traitant de ses spécificités agricoles : insertion des jeunes agriculteurs dans le tissu économique de la Guadeloupe, transmission des exploitations, mobilisation du foncier inexploité, coût et disponibilité du fret maritime et aérien pour les marchandises agricoles, diversification, développement des biocarburants… Il faut faire face aux nouveaux défis qui menacent la pérennité de notre agriculture et ébranlent la confiance des professionnels de ce secteur essentiel au maintien de l’activité dans nos régions ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Christian Ménard – Monsieur le ministre, permettez-moi d’abord de saluer tout le travail que vous avez réalisé durant ces années et les avancées que vous avez fait faire à notre agriculture.

Mon intervention portera sur l'assurance-récolte. Le 11 février 2004, j'avais eu l'honneur de remettre au Premier ministre un rapport sur la gestion des risques climatiques en agriculture, où je développais l'idée d'une assurance récolte qui donnerait aux agriculteurs victimes d'aléas climatiques la possibilité financière de redémarrer rapidement leur entreprise. Cette assurance a vu le jour et je me félicite que 60 000 agriculteurs y souscrivent déjà. Ce développement rapide ne doit cependant pas nous satisfaire : l’assurance doit devenir plus efficace et se pérenniser.

Pour cela, l'État doit lui octroyer une enveloppe plus importante. Les 30 millions prévus pour 2007 sont nettement insuffisants : ils ne permettent que d’étendre l’assurance qui existe déjà au maïs fourrage-ensilage et de la développer dans la viticulture. Or, il faut impérativement l’étendre aux fourrages. Par ailleurs, le Fonds national de garantie des calamités agricoles nuit au développement de l'assurance-récolte : pourquoi les agriculteurs s'assureraient-ils pour des récoltes qui sont couvertes par le FNGCA ? Même si la couverture du Fonds est bien moindre, le maintien des deux systèmes crée le trouble parmi les agriculteurs. Il est plus que temps d’appliquer le dispositif prévu en 2005, concernant notamment l'exclusion du bénéfice du FNGCA lorsque le taux de pénétration de l'assurance est supérieur à 30 % des surfaces. Il faut établir un calendrier dès aujourd'hui.

Une autre difficulté réside dans l’incapacité des assureurs à trouver une réassurance privée suffisante. Ce n’est pas une intervention gratuite de l'État que je demande, mais une prestation qui serait rémunérée par les professionnels. La capacité de couverture des réassureurs français est d’environ 400 millions. C’est très nettement insuffisant pour répondre aux besoins créés par un aléa climatique important : ce sont 2 à 3 milliards qu’il faudrait pour nous mettre à l'abri, comme pour les attentats. Mais l'inscription d'une réassurance climatique de 500 millions nous permettrait de faire face à la plupart des aléas. Cette partie supplémentaire, rémunérée par les professionnels de l’assurance, devrait bénéficier de la garantie de l’État. J’ai tenté de déposer un amendement en ce sens, mais il a été refusé pour des causes que j’ignore.

Un autre gros problème de l'assurance-récolte demeure celui de l'arboriculture. S'il est vrai que dans certaines régions, qui connaissent des taux de sinistres extrêmement élevés, l'on peut s’interroger sur le bien-fondé de cette culture, il n'en demeure pas moins que l'État doit relever son taux de prise en charge des primes des contrats à la culture de fruits de 35 à 45 %. En outre, dans ces cas précis, les élus et les professionnels devraient demander l’appui des régions, comme cela se fait en Espagne – mais nous ne savons pas encore le faire.

La dotation pour aléas peut compléter l'assurance-récolte, et l'État doit la rendre plus attractive. Il peut défiscaliser ce produit au bout d'une certaine durée de souscription, ou permettre sa transmission par exemple. Le coût serait fort peu élevé pour la collectivité, car le dispositif ne jouerait qu'une fois dans la vie professionnelle de l'agriculteur.

Enfin, la France doit poursuivre sa réflexion dans le cadre communautaire. Dans le mémorandum qu'elle a déposé le 20 mars dernier, elle affirme qu'un soutien financier pourrait être assuré par l'utilisation partielle du point de pourcentage de modulation prévu conformément à l'accord de Luxembourg de juin 2003. Nous devons absolument aller plus loin : l'assurance-récolte peut nous servir de tremplin pour de futures assurances couvrant les risques sanitaires et de marché. Nous devons faire de cette idée un objectif prioritaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Jacques Briat – Nos collègues de gauche vous ont demandé, comme à leur habitude, de l’argent – toujours plus d’argent. Pour ma part, je voudrais vous féliciter, Monsieur le ministre, de ne pas être tombé dans ce travers. Après les décennies du toujours plus, vous avez imposé la volonté du toujours mieux. Il y avait urgence, en matière agricole comme ailleurs, à rationaliser et à évaluer la dépense plutôt que de l’accroître systématiquement.

Ce n’était pas facile : l’agriculture vient de connaître une série impressionnante de calamités, climatiques, économiques ou sanitaires – sans oublier un certain nombre de déficits. Votre ministère a toujours répondu présent. J’ai une pensée pour les producteurs de fruits et les viticulteurs de mon département, qui ont connu en 2004 et 2005 des crises difficiles et que vous avez soutenus. Vous avez, Monsieur le ministre, réussi à apaiser nos campagnes. Les agriculteurs vont mieux.

M. Germinal Peiro – Ils ne le savent pas !

M. Jacques Briat – Il n'y a pas si longtemps, la profession était démobilisée, désemparée et ne croyait plus en son avenir. Depuis quelques mois, je sens un changement très net. Il y a plusieurs raisons à cela, mais les mesures annoncées pour les biocarburants ont indubitablement créé un nouvel espoir. Les agriculteurs avaient besoin d’une perspective, et leur changement d’état d’esprit est déjà perceptible.

Mais cet espoir ne doit pas être déçu. Après les annonces, les votes et les promesses, les mesures doivent être rapidement appliquées, notamment pour ce qui est de l’huile végétale pure : c’est un circuit de production court, qui intéresse directement de nombreux producteurs locaux. Il faudra aussi autoriser la commercialisation de ces huiles végétales pures pour les véhicules à usage collectif : tout cela est indispensable si nous voulons que des jeunes s’installent dans nos campagnes. Comment les motiver si la profession ne croit plus en son avenir ? Vos mesures, tant celles de la loi d'orientation que celles du présent budget, vont dans ce sens.

J’en viens à la question des retraites agricoles. Bien sûr, nous avons financé la retraite complémentaire, la mensualisation et d’autres mesures liées. Ce sont des progrès indéniables, mais les retraites restent bien modestes. Il faut donc reposer la question de la TVA sociale, qui produirait des avancées substantielles. Ce type de financement serait particulièrement adapté à l'agriculture, puisque 80% de la protection sociale y est aujourd'hui déjà assurée par la solidarité nationale. Cela permettrait un financement plus large, une contribution sur les produits importés et une baisse des charges des entrepreneurs agricoles, le tout dans un système économique où la fixation des prix est plus liée au marché qu'à une stricte répercussion des coûts.

M. Jean Dionis du Séjour – Il faut qu’il prenne sa carte à l’UDF !

M. Jacques Briat – Il faut engager des discussions à ce sujet. De nombreux propriétaires exploitants souhaitent également savoir si, prenant leur retraite, ils continueront à bénéficier du dispositif des DPU, au titre d'un rattachement fiscal optionnel de ces DPU au foncier non exploité. Ils n’ont toujours pas de réponse sur la doctrine fiscale qui s’appliquera.

Je voudrais également appeler votre attention sur la commercialisation des semences transgéniques. Des variétés sont inscrites au catalogue national des pays qui ont transposé la directive européenne, et donc, de fait, au catalogue européen. Des multinationales peuvent donc commercialiser dans notre pays ces variétés de semences, alors que les PME françaises, elles, en sont empêchées et perdent à cause de cela des marchés. Étrange paradoxe ! Ceux qui combattent ces variétés dans notre pays œuvrent au profit des multinationales !

Enfin, Monsieur le ministre, je voudrais vous remercier pour l’écoute et la réactivité dont vous avez fait preuve lors des différentes crises qui ont touché mon département, ainsi que pour les suites que vous avez bien voulu donner à l'audit lancé par le préfet sur la production fruitière en Midi-Pyrénées et sur le chasselas de Moissac, qui est une de nos fiertés.

Vous le voyez, cher Jean Dionis du Séjour, nos circonscriptions étant voisines, j’ai abordé les mêmes problèmes que vous…

M. Jean Dionis du Séjour - C’est vrai.

M. Jacques Briat - …mais si nous avons aussi tous les deux des radicaux, ce ne sont néanmoins pas les mêmes ! (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Alfred Almont - Présenté pour la deuxième année conformément aux dispositions de la LOLF, ce projet de loi de finances consacre au ministère de l'agriculture et de la pêche près de 50 millions supplémentaires. C'est là un signe fort. Votre département bénéficie, Monsieur le ministre, d’une mission spécifique – agriculture, pêche et affaires rurales – et de trois missions interministérielles – enseignement scolaire, recherche et enseignement supérieur, sécurité sanitaire – qui se déclinent en sept programmes. Le Gouvernement sera ainsi à même de répondre aux trois grandes priorités définies pour 2007 : pour relever les défis économiques et surmonter les aléas ainsi que les crises auxquels les agriculteurs et les pêcheurs doivent faire face, il renforce les outils de soutien au revenu et à la compétitivité des filières ; pour réaffirmer la place de l'agriculture dans les territoires ruraux, il intègre plusieurs mesures nouvelles importantes ; enfin, pour anticiper grâce à la modernisation du ministère, il met l'accent sur la simplification administrative et sur la formation des jeunes.

Même si la nouvelle PAC a instauré des dispositifs horizontaux de soutien aux revenus des agriculteurs – au premier rang desquels les droits à paiement unique – l'intervention financière de l'État demeure nécessaire pour atténuer les effets des fluctuations des marchés ainsi que ceux des aléas climatiques et des crises sanitaires. Des mesures sont en outre indispensables pour consolider l'activité économique dans les secteurs où les conditions de production rendent celle-ci plus coûteuse, comme c’est le cas dans nos DOM. Je salue à cette occasion les efforts consentis pour compenser les handicaps auxquels ils sont confrontés, y compris les handicaps naturels.

Dans une conjoncture mondiale de plus en plus exigeante sur le plan de la concurrence, à l'heure où l'environnement se trouve enfin au cœur de nos préoccupations, il importe de réaffirmer la place de l'agriculture dans les territoires ruraux. Il faut d'ailleurs reconnaître que, même si la rentabilité des activités agricoles et rurales est très souvent présentée comme incompatible avec un environnement de qualité, l'État s'emploie à assurer le respect des réglementations et à mettre en œuvre, à côté des mesures de compensation, des dispositifs incitant à moderniser les procédés.

Ce projet de budget me semble répondre enfin à l'impératif d'anticipation des grands défis qui attendent notre agriculture, par la volonté affichée d'améliorer et de rationaliser l'organisation des services du ministère et de simplifier les procédures administratives.

Vous connaissez la place importante qu'occupent l'agriculture et la pêche dans l’économie de nos départements et régions d'outre-mer en dépit des lourds handicaps structurels qui les affectent. À cet égard, la production bananière qui représente 50 % de l'ensemble du secteur de l'agriculture en Martinique et qui constitue la seule production à l'exportation avec 280 000 tonnes par an, résume à elle seule les difficultés auxquelles doivent faire face les agriculteurs d'outre-mer. Lors de la conférence qu'elle a tenue à Hong-Kong le 15 décembre 2005, l'OMC a bouleversé l'équilibre précaire de cette filière et placé l'OCM-Banane dans l'impossibilité d'atteindre son double objectif de commercialisation de la production et de maintien de revenus équitables pour les exploitants. Je tiens à vous remercier, Monsieur le ministre, pour vos qualités d’ouverture et de dialogue, mais aussi pour l'énergie que vous avez déployée afin de convaincre la Commission européenne de la nécessité de protéger et de promouvoir une filière menacée de disparition, face à la concurrence déloyale de multinationales dont le processus de production se développe dans des conditions proches de l'esclavage et par ailleurs néfastes à l’exigence de qualité à laquelle nous sommes si attentifs. S'ils ne constituent pas encore une réponse définitive à la contrainte née des décisions de l'OMC s’agissant de l'instauration d'un tarif unique à l'importation que nous considérons comme trop faible et de la disparition simultanée des quotas et contingents tarifaires jusque-là imposés aux importateurs, les résultats déjà obtenus n'auraient jamais pu être envisagés sans votre intervention. Certes, la mobilisation reste de mise car aucune assurance n'est donnée quant à la prise en compte des fluctuations d'un marché, dont on peut déjà penser qu'il se détériorera au cours des deux ou trois prochaines années du fait de la baisse du niveau du tarif unique demandé à l'OMC par les importateurs d’Amérique latine et des multinationales. Il ne faut pas s'y tromper : si l'Union européenne représente une indéniable chance pour le développement économique et social de nos régions éloignées, nous devons demeurer attentifs à ce que la répartition des aides, modifiée par l'importance des besoins des nouveaux pays entrants, prenne toujours en compte nos handicaps – au premier rang desquels l'éloignement des centres d'approvisionnement et des grands marchés ainsi que les surcoûts qui en résultent.

Ce qui est vrai pour l'agriculture l'est aussi pour la pêche. J’attire donc votre attention, Monsieur le ministre, sur la situation de ce secteur confronté outre-mer à des difficultés particulières, liées pour la plupart à une réglementation européenne inadaptée. Il est indispensable que celle-ci, au lieu de proroger d'année en année des statuts dérogatoires, prenne enfin en considération sur le long terme ce secteur, qui dispose d'un important potentiel de développement et de ressources abondantes. Il faut se réjouir que les négociations engagées au Fonds européen pour la pêche en faveur de l'outre-mer aient permis de revoir les plafonds d'une flotte considérée jusqu'alors par Bruxelles comme surdimensionnée. Les professionnels, enfin, ont besoin de garanties pour développer et moderniser leur flotte.

Par ailleurs, la question de la répartition initiale, gérée désormais au niveau national, ne manque pas de susciter des interrogations chez les professionnels du secteur. Je regrette en effet que l'élaboration du FEP-DOM s'effectue aujourd'hui dans le cadre du FEP national alors que les élus du secteur agricole ont pu obtenir de l'autorité nationale le maintien du principe d'une gestion régionale, s'agissant du FEADER. La diminution des fonds consacrés pour la période 2007-2013 – 34 millions au lieu des 38 inscrits dans le document précédent – conduira à un arbitrage politique au niveau de l'État membre, en tenant compte non seulement de l'évolution de la situation de la pêche dans les quatre DOM mais aussi de l'argumentaire qui sera développé par chacun d’eux pour tenter d'obtenir l'enveloppe suffisante. La situation actuelle semble justifier une répartition égalitaire initiale de cette enveloppe. Sans doute faudra-t-il, dans le cadre d'une révision à mi-parcours, retenir l'application du principe de fongibilité du FEP pour permettre une meilleure réaffectation entre les quatre DOM.

Quoi qu'il en soit, nous attendons que le plan d'avenir pour la pêche dissocie les DOM pour tenir compte véritablement de leurs singularités.

Confiant, dans vos engagements, Monsieur le ministre, je voterai ce projet de budget ambitieux et qui met en place de bons outils de développement pour nos régions d'outre-mer (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pierre Morel-A-L'Huissier - Nous abordons l'examen de ce budget à un moment stratégique : au moment où sont redéfinis certains programmes d'aides publiques à l'agriculture pour la période 2007-2013, et à la fin de la première année d'application de la loi d'orientation agricole. Nous entrons dans l'ère d'une agriculture moderne, compétitive et respectueuse de l'environnement. Relever les défis économiques dans une Union élargie qui fait face à une concurrence croissante de pays comme la Chine ou le Brésil, mais également réaffirmer l'importance de l'agriculture dans l'environnement et les territoires ruraux : telles sont les priorités pour 2007. À ce sujet, la mission ruralité, à laquelle j'ai participé, a montré qu’il fallait maintenir un cadrage national et européen fort pour 2007-2013, dans un objectif de solidarité et d'aménagement du territoire. Dans tous les pays européens visités, le soutien aux zones défavorisées a été présenté comme une priorité stratégique. Élu de montagne, j'en profite pour insister sur cette politique volontariste qui doit s'appliquer, là où l'activité agricole est la base même de l'économie locale. Nous savons bien que, sans soutien spécifique pérenne, l'agriculture montagnarde ne sera plus. En Lozère, la part des aides publiques représente entre 15 et 53 % du revenu des exploitants selon les systèmes de production ; 55 % d’entre elles relèvent de la compensation des handicaps naturels ou de la préservation de l'environnement. J'aurai l'occasion d'y revenir dans une question précise tant ICHN et PHAE sont primordiales pour la montagne. Je ne saurais oublier en effet l'importance que revêt le maintien d'un tissu d'exploitations viables et modernes dans le Massif Central. Les agriculteurs représentent encore en Lozère 14 % de la population active. Il est clair que le plan bâtiment, dont le succès est incontestable, contribue au maintien de ce tissu agricole et rural et à la modernisation de l'agriculture.

Au-delà des ICHN, des PHAE et du plan bâtiment, il faut poursuivre les efforts menés dans le cadre de la loi d'orientation agricole pour accompagner les agriculteurs et encourager les jeunes à s'installer. Je salue le nombre important de dispositions de la loi déjà entrées en vigueur et dont certaines trouvent une traduction budgétaire dans ce projet – plan crédit-transmission, contrat emploi-formation agricole, crédit remplacement. L'installation est une priorité de la politique agricole. Les résultats sont probants dans mon département avec 60 installations aidées par an. Le financement du stage de six mois suscitant plusieurs inquiétudes, je souhaiterais toutefois que vous rassuriez les chambres d'agriculture qui portent ces projets : leur rôle doit être reconnu et soutenu. Je me demande d’ailleurs pourquoi elles ont été écartées du dispositif d'exonérations de charges instauré par la loi DTR du 23 février 2005 dans le cadre des ZRR. Ces chambres consulaires ne remplissent-elles pas des missions d'intérêt général ? J'ai par ailleurs déjà eu l'occasion d'appeler à une véritable solidarité nationale concernant leur financement. En attendant, nous demanderons par voie d'amendement, mon collègue Gérard Menuel et moi, une vraie autonomie de gestion pour ces chambres consulaires, pour la suppression du taux d'augmentation maximale du produit de la taxe pour frais de chambre d'agriculture. Cette contrainte se révèle en effet pénalisante pour les petites chambres d'agriculture, qui n'ont pas de ressources propres compte tenu d'une assiette insuffisante. En Lozère, l'impôt ne génère que 900 000 euros là où les dépenses institutionnelles nécessitent 1,1 million. Cette situation ne laisse aucune latitude pour financer des projets. J'appelle donc de mes vœux un système de péréquation.

Solidarité envers les territoires, mais également solidarité envers ses hommes : je salue l'effort soutenu en faveur des retraités du monde agricole, avec la revalorisation, conformément aux conclusions de mes collègues Yves Censi, Marc Le Fur et Daniel Garrigue, des petites retraites agricoles, inscrite dans le PLFSS pour 2007 pour un coût de 162 millions. Cette mesure de justice sociale a néanmoins des incidences sur la situation du FFIPSA dont le déficit cumulé devrait s'élever à 5,4 milliards à la fin de 2007. Je sais, Monsieur le ministre, que vous êtes conscient de ce problème.

J’ai relevé avec satisfaction la volonté du Gouvernement de se doter des moyens nécessaires face aux aléas climatiques et aux crises. S’agissant des calamités agricoles, la commission a retenu les dossiers de 29 départements sur 42. Il a également été décidé d’appliquer un taux spécial aux exploitations pluri-sinistrées, c'est-à-dire touchées durant trois années successives par la sécheresse. S’il faut se féliciter de cette mesure, certains exploitants sinistrés craignent néanmoins, du fait de la perception de ces aides qui ne correspondent pas à la vente de productions, de passer du régime d’imposition au forfait au régime du réel. J'espère qu'une solution sera trouvée en liaison avec le ministère de l'économie, comme ce fut le cas les années précédentes. Pour ce qui est des crises sanitaires, j'ai bien noté votre souci d'adapter les dispositifs de prévention et de protection.

Bien d'autres points pourraient être abordés, notamment l’enseignement technique agricole. Je n’en ai pas le temps. Monsieur le ministre, vous connaissez ma mobilisation en faveur de l'agriculture, je connais la vôtre. C'est pourquoi j'apporterai mon soutien à ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Ministre – Je tiens tout d’abord à remercier les rapporteurs et l’ensemble des orateurs qui sont intervenus dans cette discussion générale. Ce dernier budget agricole de la législature, j’en suis convaincu, alloue les ressources de manière juste et efficace et permet de relever les défis de demain.

Les trois rapporteurs ont eu raison de rappeler la place de l’agriculture dans notre économie. La production agricole française représente 63 milliards d’euros pour 370 000 exploitations. Mais l’agriculture, l’industrie agro-alimentaire, la sylviculture et la pêche emploient 1,8 million de personnes dans notre pays, ce qui représente 7,5 % du total des emplois. Notre pays exporte 40 milliards d’euros de produits agricoles transformés et le solde commercial positif de huit milliards d’euros de l’an passé sera dépassé cette année. Ce sont là les résultats de notre agriculture, innovante, attachée à des productions de qualité et très présente sur les marchés internationaux.

Les moyens du ministère, répartis entre quatre missions, s’élèvent à un peu plus de cinq milliards d’euros, en hausse de 1 % par rapport à 2006. Les missions « sécurité sanitaires, « enseignement supérieur et recherche » et le programme « enseignement technique agricole » au sein de la mission « enseignement scolaire », sont interministériels. Vous avez déjà débattu de la sécurité sanitaire. Vous débattrez bientôt de l’enseignement technique agricole. Je remercie tous ceux d’entre vous qui ont souligné la qualité de cet enseignement, équilibré entre public et privé, qui donne des emplois aux jeunes et permet parfois de les sortir de grandes difficultés. Nul doute que si nous avions dans nos banlieues l’équivalent des maisons familiales rurales, il y aurait moins de problèmes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Les crédits de la mission « agriculture, pêche et affaires rurales » pour 2007 s’élèvent à 2,95 milliards d’euros en crédits de paiement. Ils représentent les trois cinquièmes des crédits du ministère et progressent d’environ 1 % environ. Nous examinerons aussi aujourd'hui les crédits du compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural », qui s’élèvent à 98 millions d’euros et figurent dans une mission et deux programmes à part. Ce compte est alimenté par la taxe sur le chiffre d'affaires dont sont redevables les exploitants agricoles.

Le budget pour 2007 comporte trois priorités claires. La première est de donner à notre agriculture et à notre pêche des moyens de relever les défis économiques et de mieux surmonter les aléas et les crises. La deuxième est de réaffirmer l'importance de l'agriculture dans les territoires ruraux et la place éminente des agriculteurs dans notre société, en insistant sur la formation et l'installation des jeunes. La troisième est de moderniser le ministère pour le mettre vraiment au service de ces ambitions.

L’une de nos priorités est de conforter le revenu des agriculteurs, en particulier dans les zones difficiles. Beaucoup a été fait en ce domaine depuis le début de la législature et c’est encore le cas avec ce budget. Y figurent d’ailleurs 40 millions d’euros pour prendre en charge les exonérations prévues dans la loi d'orientation afin d’alléger le coût de la main-d'œuvre.

Plusieurs d’entre vous, notamment MM. Le Fur, Morel-A-l’Huissier, Sauvadet – mais je sais que cela tient aussi à cœur à M. Marleix –, m’ont interrogé sur l'élevage, plus précisément sur le plan de modernisation des bâtiments d’élevage, sur la prime herbagère agro-environnementale et sur les indemnités compensatoires de handicaps naturels.

Un effort inégalé a été accompli pour le plan bâtiments d'élevage. Au total, en 2005 et en 2006, près de 300 millions d’euros ont été délégués en autorisations d’engagement à ce titre. L'État a engagé 93,6 millions d’euros sur ces deux années, complétés par autant de crédits communautaires et à peu près autant de crédits des collectivités territoriales. Une avance sur 2007 a même été déléguée récemment aux régions. Les autorisations d’engagement pour 2007 progressent de 15 millions d’euros, pour s’établir à 60 millions, et un rattrapage de 20 millions d’euros vous sera présenté en loi de finances rectificative. Sur la période 2007-2013, les prévisions sont de 242 millions d’euros de crédits d’État, 77 millions des collectivités, et 320 millions du FEADER. Au total, 790 millions d’euros sont prévus sur la période, dont 286 en provenance du ministère. Bien sûr, si nous pouvions faire mieux, nous le ferions, ce qui permettrait de résorber plus vite les files d’attente. Si notre politique a en effet été victime de son succès, il ne faut pas, Messieurs Chassaigne et Peiro, nous le reprocher car les gouvernements que vous souteniez n’avaient rien fait du tout !

Pour ce qui est de la prime à l’herbe agro-environnementale, nous avons choisi de l’exclure du cofinancement européen sur la période 2007-2013 afin de permettre, par ailleurs, la mise en œuvre d'un volet déconcentré important, cofinancé, lui, par l’Union. Ce choix ne remet pas en cause l'économie générale du dispositif. Les crédits nationaux qui y seront désormais consacrés seront du même ordre que les crédits nationaux et communautaires consacrés à la PHAE et aux CTE herbagers sur la période 2003-2006, soit 260 millions d’euros par an. En 2007, de façon exceptionnelle, les nouveaux contrats resteront cofinancés car une part importante de crédits communautaires reste mobilisable. Le budget 2007 comporte ainsi 117 millions d’euros pour la prime à l'herbe, complétés par environ 143 millions d’euros de crédits communautaires. L'enveloppe de la future PHAE sera répartie entre les départements sur la base des références historiques afin qu’il n’y ait pas de perdants et que soit préservée la part des départements de montagne. Reste à obtenir l’aval de la Commission européenne. Nous allons lui présenter un cahier des charges qui a fait l'objet d'une concertation étroite avec les organisations professionnelles agricoles.

M. Le Fur a appelé notre attention sur le poids des contrôles. Je suis très attentif à ce que ceux-ci soient mesurés et organisés sans excès. Le pragmatisme et la pédagogie, que nous avons privilégiés, portent leurs fruits et les contrôles se passent aujourd’hui mieux sur le terrain, même si peuvent bien sûr çà et là subsister quelques difficultés.

Je puis rassurer M. Peiro qui s’est inquiété d’une baisse éventuelle des moyens des autres mesures agro-environnementales. En effet, dans le cadre de la programmation du FEADER, les contrats d'agriculture durable en cours seront maintenus jusqu'à leur échéance normale. Par ailleurs, le dispositif pour la période 2007-2013 reposera sur des mesures agro-environnementales territorialisées répondant à deux enjeux prioritaires : la préservation de la biodiversité, avec la directive Natura 2000, et la gestion de l'eau avec la directive-cadre. Ces mesures pourront également servir des enjeux environnementaux locaux. M. Le Fur enfin a évoqué la fièvre catarrhale ovine, dont plusieurs cas ont été repérés dans l’est et le nord du pays. Même si les foyers d’infection sont peu nombreux, cela n’en bloque pas moins les transactions. Le Gouvernement a donc pris de premières mesures de solidarité. D’autres sont en préparation, qui seront très prochainement annoncées. 

J’en viens aux ICHN. Celles-ci ont été fortement revalorisées depuis 2002 : pour les 25 premiers hectares primés, l'augmentation atteint 35 %. En 2007, les paiements, y compris la part communautaire, passeront à près de 520 millions d’euros, contre 450 en 2002. La prime moyenne par bénéficiaire est passée de 4 102 euros en 2002 à 5 160 euros en 2007, soit une augmentation de près de 5 % par an pendant cinq ans – trois fois l'inflation ! Nous examinerons tout à l’heure un amendement de M. Marleix proposant d’aller plus loin encore. Il pose, outre un problème budgétaire au niveau national, un problème juridique au niveau européen. Avec les fortes augmentations intervenues, nous sommes à la limite de pouvoir justifier à la Commission les niveaux de prime par rapport aux handicaps, même en zone de montagne, Monsieur Bouvard.

J’indique à M. Sauvadet que les dotations de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes sont consolidées par ce budget et je précise à M. Le Fur qu'après l'arrêt de la production laitière, il est bien possible de passer à la production de viande bovine.

J'indique aussi à M. Morel-A-l’Huissier que, si les chambres d'agriculture ne bénéficient pas des exonérations de charges, cela tient à un problème de qualification au sens du code des impôts.

J’en viens aux filières végétales. Je confirme à MM. Folliot et Sauvadet que nous allons accélérer en 2007 le plan végétal pour l’environnement, qui constitue pour le secteur végétal le pendant du plan de modernisation des bâtiments d'élevage pour le secteur animal et concerne toutes les filières végétales – grandes cultures, viticulture, fruits et légumes, horticulture et cultures spéciales. II a vocation à intégrer la future programmation du FEADER 2007-2013, et d'autres financeurs, comme les collectivités et les agences de l'eau, pourront aussi y participer. L'objectif est d’aider à la réalisation d'investissements spécifiques permettant aux exploitations agricoles de mieux répondre aux exigences environnementales : réduction des pollutions par les produits phytosanitaires et les fertilisants, réduction de la pression sur la ressource en eau, lutte contre les phénomènes érosifs. Dix millions d’euros y seront consacrés en 2007.

S’agissant des crédits des offices, les moyens dégagés par la nouvelle programmation ont pu être redéployés. Nous avons un grand rendez-vous en 2007, Monsieur Le Fur : la réforme de l’OCM fruits et légumes, qui a aussi été évoquée par MM. Briat et Dionis du Séjour. Les propositions de la Commission européenne restent pour l’instant insuffisantes en ce qui concerne la gestion des crises. Nous devrons défendre notre position, et nous y travaillons déjà avec l’Espagne et l’Italie.

Daniel Garrigue, qui est au cœur du bassin Bergerac Aquitaine, a évoqué les bassins viticoles. Nous avons créé les dix conseils de bassin à la suite du rapport de Bernard Pomel. Ils réunissent les différents maillons de la filière pour l’ensemble des produits. Nous avons privilégié une certaine souplesse et le recours à l’expérimentation. Il faut maintenant définir des stratégies et prendre des engagements, ce qui suppose une forte implication des interprofessions.

Nous avons par ailleurs installé le Conseil national de la viticulture de France, le CNVF, qui a vocation à être un lieu de coordination et d'arbitrage entre les conseils de bassin. Cette nouvelle organisation semble donner satisfaction sur le terrain.

Philippe-Armand Martin a exprimé des préoccupations quant à la composition du futur comité « vins » de l'Institut national des appellations d'origine, dont nous avons veillé à renforcer les moyens. Nous porterons la plus grande attention à la désignation des membres des futurs comités, et notamment de celui dédié au vin, afin de garantir une représentation équitable des différentes familles professionnelles et régions concernées.

J’ai répondu hier à une question d’actualité de M. Liberti sur la viticulture. Comme l’a noté M. Sauvadet, nous « mettons le paquet » sur l’export. Cela donne des résultats : les exportations du vignoble de Bordeaux sont reparties à la hausse, en valeur et en volume. Il faudra continuer à travailler là où la situation reste difficile.

La situation de nos collectivités ultramarines, s’agissant de la banane, a été évoquée par MM. Almont, Manscour et Beaugendre. Nous mettons tout en œuvre pour que la proposition de la Commission puisse être adoptée cette année. Je fais du lobbying auprès de certains Etats membres, comme l’Allemagne, pour m’assurer de leur soutien ou de leur neutralité. Notre objectif est que le règlement soit adopté au Conseil de décembre. Nous avons l’appui du Parlement européen, et la Commission entend bien parvenir à un accord. J’ai réuni lundi à Paris tous les ministres européens ou des pays ACP concernés par la banane pour définir une position commune à l’OMC – défense du droit de douane de la Commission, protection des États ACP et de leurs quotas. Nous allons élaborer notre programme de gestion du soutien aux producteurs de banane. C’est un travail difficile, mais nous y arriverons. Nous avons également pris des mesures pour d’autres productions domiennes – ananas ou melon, avec le nouveau POSEIDOM. Nous tiendrons bien sûr compte, monsieur Beaugendre, du souci que vous avez exprimé quant à la pollution au chlordécone. Nous avons pris toute la mesure du problème, tant en matière d'impact sur la santé qu'en ce qui concerne l'accompagnement des agriculteurs. J'ai constaté sur place, en juillet, l'importance prise par ce dossier. Les préfets ont reçu instruction de proposer des mesures de soutien, et nous procéderons à l'indemnisation des coûts de destruction supportés par les agriculteurs depuis les arrêtés d’interdiction.

Des négociations sont engagées avec la Commission européenne pour que les mesures de reconversion envisagées soient pleinement intégrées dans les plans de développement régional de la Guadeloupe et de la Martinique. Nous veillons au respect des limites maximales de résidus.

Les droits à paiement unique – DPU – ont notamment été évoqués par MM. Sauvadet et Le Fur. M. Briat a soulevé le problème de la transmission des DPU et du foncier. Le DPU n'est pas un accessoire du foncier. Le choix communautaire conduit donc à distinguer l'attributaire des droits à paiement unique du propriétaire du foncier, ce qu’a confirmé le Conseil d'Etat. Nous avons cependant voulu lier au maximum les DPU et le foncier, pour éviter la déprise et les comportements spéculatifs. Le transfert des DPU se fait en France par un système de clauses contractuelles. C’est une réussite, et j’en remercie la profession agricole et les fonctionnaires des directions départementales de l’agriculture : 302 000 clauses ont été signées pour 4,5 millions d'hectares. Le transfert des droits suit au plus près celui du foncier, garantissant ainsi le maintien d'une activité rurale équilibrée sur l'ensemble du territoire. Reste le cas des quelques DPU dormants, moins fréquents chez nous – environ 1 % – que dans les autres pays européens – 1,5 % à 2 %.

M. Le Fur a soulevé le problème de la fiscalisation des DPU, qui sont comptabilisés en même temps que l'aide précédente. Une solution est à l'étude avec les services de M. Copé.

J’en viens aux revenus, et d’abord aux retraites. MM. Le Fur, Folliot, Garrigue et Briat et les rapporteurs ont rappelé les améliorations importantes qui interviendront au 1er janvier 2007 : 300 000 retraités sont concernés par ce qui est une mesure de justice.

MM. Marleix, Peiro et Sauvadet ont évoqué la situation du FFIPSA. Il n'existe aucun risque de non-versement des prestations par ce régime : les engagements pris seront tenus. Il est exact que des difficultés sont apparues depuis 2004 et qu’il faut trouver une solution pour renouer avec l’équilibre. Ce n’est pas facile : compte tenu de la situation démographique du régime, plus de 80 % des recettes proviennent de l'État, et des autres régimes de sécurité sociale, via les mécanismes de compensation. Le déficit n’est pas dû à une mauvaise gestion du régime ou à une dérive incontrôlée des dépenses. Nous étudions actuellement des solutions, parmi lesquelles une modification des règles de compensation démographique. Votre collègue Yves Censi, président du comité de surveillance du FFIPSA, a proposé des solutions fondées à la fois sur une participation de l'État au titre de la solidarité nationale et sur une mobilisation supplémentaire des mécanismes de compensation entre régimes.

J’en viens à la performance de la « ferme France ». Avec le plan biocarburants (« Ah ! » sur les bancs du groupe UDF), nous donnons une dimension nouvelle à notre agriculture. Nous avons donné un vrai coup d’accélérateur.

M. Jean Dionis du Séjour – Sauf sur les huiles végétales pures !

M. le Ministre – Engagé par Jean-Pierre Raffarin en 2004, le plan a en effet été accéléré par Dominique de Villepin. J’avais pour ma part accepté, lorsque j’étais secrétaire d’Etat au budget, de bons amendements de l’UDF. Alors que les biocarburants représentaient 1 % des carburants distribués en 2005, ils en représenteront 1,75 % cette année et 3,5 % en 2007, soit une multiplication par trois et demi en deux ans. Les objectifs ont été votés dans la loi d’orientation agricole : 5,75 % dès 2008, 7 % en 2010 et 10 % en 2015. La France rejoindra alors le peloton de tête de l’Union européenne. Le soutien fiscal représente près de 280 millions pour 2006 et de 550 millions pour 2007 ; 16 usines sont en construction dans douze régions. Avec les agréments de 1 100 000 tonnes qui vont être alloués prochainement, le Gouvernement aura délivré en moins de dix-huit mois 3,7 millions de tonnes d'agréments nouveaux, donnant ainsi une visibilité aux opérateurs de la filière. Deux millions d'hectares, soit 15 % des surfaces cultivées en céréales, betteraves et oléagineux seront nécessaires pour atteindre l'objectif de 7 % en 2010. Cela suppose des changements d’assolement.

Encore faut-il que le développement des biocarburants ne menace pas nos besoins en alimentation et que les cultures destinées aux biocarburants respectent les obligations réglementaires en matière d’environnement. Suite au rapport d'Alain Prost, le développement d'une filière flex-fuel, l’E85, est également engagé. Des mesures fiscales ont été prises pour permettre à l’E85 d'être compétitif, en termes de coût de revient au kilomètre parcouru, avec l'essence, voire avec le gazole. Nous entendons aussi développer le B30, gazole à 30 % de biodiesel, au-delà des flottes d'entreprises et de collectivités locales.

J’en viens aux huiles végétales pures. L’idée du comité de suivi est bonne, Monsieur Sauvadet. La loi d'orientation agricole autorise l'autoconsommation des huiles végétales pures autorisées comme carburant agricole depuis le 1er janvier 2006, et prévoit leur commercialisation au 1er janvier 2007 comme carburant agricole et pour les navires de pêche. Le décret est à la signature.

Les recommandations, préparées en lien avec les professionnels, concernant les méthodes de production des HVP et l'utilisation des tourteaux produits à cette occasion ont été publiées sur notre site internet.

C'est maintenant un cadre pour les collectivités qu'il nous faut trouver. M. Cahuzac à Villeneuve-sur-Lot ou M. Bono à La Rochelle ont ouvert la voie. D’autres collectivités envisagent de suivre.

M. Jean Dionis du Séjour - Il faut aller vite !

M. le Ministre – Quel vecteur législatif peut-on utiliser ? J’ai proposé au Premier ministre d’utiliser la loi constitutionnelle du 27 octobre 2003 qui permet aux collectivités de faire des expérimentations. C’est ce que nous sommes en train de mettre au point, avec Dominique Perben, en pensant, dans un premier temps, aux flottes de véhicules de service des collectivités (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Ne m’applaudissez pas, car la décision n’est pas encore prise ! (Exclamations sur les bancs du groupe UDF)

M. Jean Dionis du Séjour – Quand aboutira-t-on ?

M. le Ministre – L’affaire est en discussion et vous savez que nous arrivons bientôt à la période des cadeaux de fin d’année ! (Sourires) En tout état de cause, il faut aller aussi vite que la justice administrative…

S’agissant des aléas, c’est sur la base du rapport de M. Ménard que nous avons relancé les formules d’assurance récole et M. Sauvadet connaît lui aussi très bien ce dossier. À partir de 2005, les principaux assureurs et organismes de crédit agricoles ont proposé des assurances couvrant la plupart des dommages d’origine climatique. Elles peuvent être souscrites pour toutes les natures de récolte, hors les cultures fourragères, qui sont exclues des garanties compte tenu de la difficulté d’expertiser les pertes.

Le ministère accompagne le développement de l’assurance récolte, en prenant en charge une partie des primes d’assurance : jusqu’à 35 % pour les exploitants, et 40 % pour les jeunes agriculteurs. Dans un contexte contraint, les moyens budgétaires associés augmentent aussi, en passant de 25 à 30 millions.

En 2005 – les chiffres de cette année n’étant pas encore disponibles –, 15 % de la valeur de la production nationale et 25 % de la superficie agricole – hors cultures fourragères – étaient assurés, soit 60 000 contrats, notre pays comptant 370 000 exploitations. Le bilan sectoriel est plus nuancé : les cultures très exposées – comme la vigne ou les fruits et légumes – restent très peu assurées en multirisques et les nouvelles assurances se concentrent sur les grandes cultures. Cela étant, Monsieur Peiro, ne comparez pas notre situation à celle de l’Espagne où il n’y a pas de fonds pour les calamités. C’est pour cette raison que le gouvernement espagnol a mis tous ses œufs dans le panier de l’assurance !

M. Ménard s’est demandé s’il fallait rendre l’assurance récolte obligatoire. Cela semble un peu prématuré. D’abord, le démarrage difficile dans certaines filières tient au fait qu’il n’y a parfois pas de produit d’assurance contre le risque ; ensuite, la question d’une assurance obligatoire en plus de la responsabilité civile soulève un problème juridique. Enfin, l’offre de réassurance privée suffit à couvrir les besoins, mais, si l’on allait plus loin, tel ne serait sans doute pas le cas. Nous devons donc faire preuve de prudence, tout en envisageant tous les scénarios destinés à accompagner l’offre de réassurance privée. M. Herth peut d’ailleurs confirmer que des décrets à ce sujet sont en cours de préparation au Conseil d’État.

La sécheresse de cette année est difficile à gérer en commission de calamités car elle est plus diffuse que certains épisodes précédents et sa carte est plus complexe. Nous avons doté le fonds national de garantie contre les calamités agricoles au cours des dernières années et nous veillerons à l’alimenter pour indemniser les victimes de la sécheresse du printemps et du début de l’été derniers. Nous pensons aussi à ceux, qui, dans le nord de la France, ont vu leurs récoltes détruites par les pluies.

Dans ce contexte, M. Dionis a appelé mon attention sur nos besoins en matière d’hydraulique agricole. Il faut inciter les producteurs à adopter une gestion adaptée de la ressource en eau. Dans ma région, l’assole de maïs a diminué d’environ 20 % depuis deux ou trois ans, en fonction de l’état climatique et, contrairement à ce que disent certains, les producteurs de maïs ont fait preuve de civisme. Un programme décennal de création de retenues de substitution a été lancé l’an dernier avec 4 millions de crédits d’engagement ; 5 millions sont prévus cette année et je souhaite que le ministère de l’agriculture ne soit pas le seul contributeur, les collectivités et les agences de l’eau pouvant nous accompagner. Il y a beaucoup de demandes de contractualisation à cet égard dans le cadre des CPER, sauf en Poitou-Charentes, où la présidente du Conseil régional n’aime ni les agriculteurs, ni le maïs, ni les retenues de substitution…

L’ensemble des crédits nationaux consacrés à ce programme de retenues de substitution pourra bénéficier du FEADER, dans le cadre du programme de développement rural ; les financements communautaires représenteront 50 % du montant des soutiens publics.

Nous accusons un gros retard dans les DOM, au profit desquels il sera nécessaire de mobiliser le FNDAT et le FIDOM ; au total, plus de 25 millions devraient être mobilisés au cours des quatre prochaines années, notamment pour les projets de barrages aux Antilles et de transfert des eaux entre les deux côtes à La Réunion.

Conformément aux attentes de M. Folliot et de plusieurs autres orateurs, le projet de budget pour 2007 prend également en compte le développement des territoires ruraux. Je rappelle que le Gouvernement a décidé de labelliser au moins 300 pôles d’excellence rurale, 176 l’ayant déjà été. Ce sont de bons projets, au profit desquels les collectivités se sont mobilisées. Nous poursuivrons cette politique, notamment en zones de montagne.

Philippe Folliot a également évoqué la filière porcine en montagne. Malheureusement, la Commission européenne nous a fait savoir que l’aide ne pourrait pas être pérennisée au-delà de 2006. Pour aller plus loin, Monsieur Le Fur, nous avons demandé aux organisations professionnelles de définir des priorités.

Quelques mots sur la politique d’installation, qui constitue bien, Messieurs Peiro et Morel-A-L’Huissier, l’une de nos priorités. Comme l’a rappelé Alain Marleix, un effort particulier est prévu sous forme de dépense fiscale. En loi de finances rectificative, il sera proposé que la dotation jeune agriculteur soit totalement exonérée d’IR. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP)

S’agissant des prêts bonifiés aux jeunes agriculteurs, loin de les avoir supprimés, nous en avons diminué les taux pour tenir compte du marché. Ils sont désormais de 1 % en zone défavorisée et de 2,5 % en plaine. Cette politique est donc maintenue. Il est par contre exact qu’en 2007, au vu de la moindre attractivité des prêts bonifiés spéciaux de modernisation et de la montée en puissance d’autres dispositifs, nous avons décidé de les mettre en extinction, après avoir constaté qu’ils ne suscitaient plus beaucoup de demandes.

La politique forestière occupe, Monsieur Chassaigne, une place importante dans ce budget puisque les dotations augmentent de 3,4 %, dans un contexte renouvelé. Pour la première fois depuis les deux tempêtes de 1999, le prix du bois augmente et nous assistons à un redémarrage extraordinaire de la filière bois, porté notamment par la construction et le chauffage – en particulier collectif. Des mesures de réduction de TVA y ont aussi contribué.

Nous gérons la forêt publique dans le cadre d’un nouveau contrat entre l’État et l’ONF et nous augmentons les crédits de développement de la filière bois. Le problème de la RTM, que MM. Marleix et Bouvard ont évoqué, est bien réel. Je précise cependant que l’ONF assurera une part du financement dans le cadre de son contrat d’objectifs avec l’État. Je souhaite que d’autres services de l’État puissent intervenir et je compte sur le soutien de votre commission des finances pour défendre cette idée !

J’en viens à la pêche, à laquelle ce projet de budget consacre une place importante. M. Kerguéris a bien voulu relever nos efforts, ainsi que M. Guédon. Nous doublons les crédits de la pêche et de l’aquaculture – lesquels atteignent 60 millions –, en vue de financer le plan d’avenir pour la pêche, qui comprend des actions en faveur de la modernisation de la flotte et des sorties de flotte. Il permettra aussi de renforcer le contrôle du respect des quotas et des tailles de captures.

M. Kerguéris a évoqué plusieurs points sur lesquels je souhaite lui répondre rapidement. S’agissant du plan de sauvetage et de restructuration, des actions collectives pourront toujours être aidées, par exemple pour tester des moteurs et définir des navires de série. Ces actions collectives pourront bénéficier d’aides du Fonds européen de la pêche.

Créé en 1997, le statut de société de pêche artisanale doit être revu. Pour ce qui concerne la mutualisation des risques, nous travaillons sur l’application à la pêche du système de dotations pour aléas et pour investissement, dont bénéficient déjà les agriculteurs.

M. Aimé Kerguéris, rapporteur pour avis – Très bien !

M. le Ministre – En matière de conchyliculture, certains d’entre vous ont rappelé les problèmes d’Arcachon, de Thau et d’autres sites. J’ai annoncé la création d’un rôle d’équipage propre à ce secteur, ce qui veut dire des brevets et des cotisations à l’ENIM propres et adaptées. C’est une réforme majeure, qui commande de modifier beaucoup de textes et nous nous y employons.

Le système de l’IFOP est très lourd. Mais je confirme que nous ne rendrons pas d’argent à Bruxelles. Toutes les demandes d’aide qui ont été vues au niveau régional seront honorées et nous avons dégagé une enveloppe complémentaire de crédits, tout en accélérant les paiements pour les dossiers les plus anciens.

M. Aimé Kerguéris, rapporteur pour avisExcellente nouvelle !

M. le Ministre – M. Guédon a soulevé d’autres points. S’agissant des relations entre professionnels, scientifiques et élus, j’ai souhaité que, dans le plan d’avenir pour la pêche, soit prévue la constitution d’un conseil prospectif de la pêche, chargé d’établir des plans par pêcherie qui intègrent les besoins en terme d’expertise scientifique. Par ailleurs, les élus seront associés et nous pourrons mieux programmer les besoins scientifiques de la filière.

Pour ce qui concerne l’OFRIMER, le plan d’avenir prévoit une réforme des structures de représentation professionnelle. Nous avons besoin d’une interprofession forte et nous allons réformer le service social des pêches.

Je précise enfin à M. Guédon que les sommes affectées aux contrôles sont destinées à financer l’embarquement d’observateurs sur les navires qui ciblent des espèces sensibles, conformément aux exigences communautaires. La quasi-totalité des marins respecte les contrôles et nous avons mis en place une charte des contrôles pour rappeler les droits et devoirs des pêcheurs et des inspecteurs. Nous avons également une réflexion sur les quotas, en vue d’en améliorer la gestion en créant une réserve nationale de quotas.

Enfin, M. Almont m’a interrogé sur le principe de fongibilité du Fonds européen pour la pêche dans les quatre DOM. Les conditions de gestion de l’enveloppe ayant changé, la fongibilité est désormais possible entre les DOM. Il n’en reste pas moins que les dotations doivent être définies pour chaque DOM et nous sommes en train d’y procéder, en tenant compte de toutes les données socio-économiques. Bien entendu, nous serons heureux de connaître vos propositions en la matière.

M. Guillaume a souligné à juste titre les enjeux qui s’attachent à l’avenir de la PAC. Il convient de rappeler à ceux qui l’attaquent que la PAC représentait 75 % du budget communautaire il y a quelques années encore ; aujourd’hui, elle ne représente plus que 40 % du total. L’accord politique sur les perspectives financières 2007-2013 n’a pu être conclu que parce que la France et les autres États membres ont consenti des concessions pour préserver le plafond de Bruxelles. Naturellement, Monsieur Guillaume, nous n’accepterons pas de modification de l’accord en 2008 ou en 2009. Quelles que soient ses qualités et ses défauts, il se poursuit jusqu’en 2013. Ce qui n’empêche pas de réfléchir à une stratégie pour l’avenir.

À l’OMC, les négociations sont suspendues depuis juillet, et nul ne sait quand les États-Unis seront en mesure de les reprendre, compte tenu des résultats des élections de mardi dernier. S’ils ne font aucune proposition concrète, il ne se passera rien, car l’Europe est fermement opposée à toute nouvelle concession unilatérale. J’ajoute que de nombreux pays européens partagent l’opinion de la France dans ce domaine.

Enfin, s’agissant du FEADER, le programme de développement, déconcentré, simplifié et doté de plus de douze milliards, dont moins de la moitié en crédits européens, vient d’être finalisé au terme d’une concertation et sera transmis à la Commission à la fin du mois.

J’en terminerai par la modernisation du ministère : nous avons regroupé les établissements en trois grands pôles, et l’agence unique de paiement a déjà montré son efficacité en versant dès octobre la moitié des aides – alors que certains pays européens n’ont pas encore versé celles de l’an dernier ! À ce titre, je tiens à féliciter l’ensemble des fonctionnaires qui ont réalisé cet excellent travail.

Nous poursuivons la fusion expérimentale, dans huit départements, entre DDA et DDE. Nous favorisons aussi les télédéclarations...

M. François Rochebloine – Très bien !

M. le Ministre – …qui simplifient la procédure. Certains départements, comme le Gers, reçoivent déjà jusqu’à 40 % de déclarations en ligne. Enfin, le ministère de l’agriculture contribue à la maîtrise de la dépense publique en contenant sa masse salariale.

En somme, ce projet de budget est essentiel : il n’est certes pas le seul outil de réussite de notre agriculture et de notre pêche, mais j’espère que votre vote lui permettra d’y contribuer le plus possible ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 22 heures.
La séance est levée à 20 heures 35.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.
Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.
www.assemblee-nationale.fr

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