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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

3ème séance du jeudi 9 novembre 2006

Séance de 22 heures
21ème jour de séance, 44ème séance

Présidence de M. Éric Raoult
Vice-Président

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La séance est ouverte à vingt-deux heures.

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LOI DE FINANCES POUR 2007 -seconde partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007.

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agriculture, pêche, forêt et affaires rurales (suite)

questions

M. Francis Saint-Léger - L’agriculture de montagne se caractérise par les revenus les plus faibles au plan national mais aussi, paradoxalement, par les soutiens publics les moins importants, même s’ils ont été renforcés depuis 2002. La PHAE a été augmentée de 70 % et l’ICHN revalorisée de 30 %. Ce sont les deux éléments majeurs de l’équilibre des exploitations de montagne ; la compensation qu’ils assurent, encore que partielle, est indispensable en raison des lourds handicaps de cette filière liés au relief, à l’altitude, au climat.

À partir de 2008, avec le décofinancement, les modalités d’attribution de la PHAE ne risquent-t-elles pas d’être modifiées ? Il ne faudrait pas que les actuels bénéficiaires soient pénalisés. Quant à l’ICHN, elle doit être revalorisée en 2007, et je soutiendrai l’amendement du rapporteur Alain Marleix prévoyant de la majorer de 10 %, ce qui fera un total de 40 % en cinq ans. Même si l’objectif de 50 % n’est pas atteint, c’est sans précédent. Comme l’a rappelé le rapporteur, il n’y avait eu aucune avancée sous la législature précédente.

Enfin, les besoins de modernisation des bâtiments d’élevage sont importants, malgré les efforts de votre ministère. Si les enveloppes n’ont jamais été aussi importantes, le plan du Gouvernement est victime de son succès : dans mon département, certains dossiers ne peuvent recevoir de suite favorable et les crédits alloués ne permettent pas de résorber les files d’attente. Monsieur le ministre, quelles sont vos intentions sur ces trois points ?

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche  Monsieur le député, je connais votre attachement à l’agriculture de montagne. Nous comptons rajouter cette année 5 % supplémentaires à l’augmentation des ICHN. La PHAE est, quant à elle, préservée, sur la base d’un montant total de 260 millions d’euros, incluant l’actuelle PHAE et les CTE à renouveler. L’aide à la mécanisation sera poursuivie, puisqu’elle figurera dans le futur plan de développement rural. Les spécificités des zones de montagne sont reconnues dans le plan de modernisation des bâtiments d’élevage, puisque les surcoûts sont compensés par une aide plus élevée de l’État, et la clé de répartition des enveloppes régionales leur applique un coefficient plus avantageux. Nous bénéficierons également de crédits « pastoralisme » dans le cadre du FEADER, en particulier pour le massif pyrénéen. En cumulant tous les dispositifs, nous avons donc un taux d’aide important, qui tient bien compte des difficultés particulières aux zones de montagne.

M. Antoine Carré - Ma question porte sur l’investissement en forêt privée. Le programme « forêt » au sein du budget de l’agriculture pour 2007 prévoit quatre actions : développement économique de la filière bois, mise en œuvre du régime forestier, amélioration de la gestion et de l’organisation de la forêt, prévention des risques et protection de la forêt. Or, la ligne budgétaire consacrée à l’aide à l’investissement forestier hors plan chablis de la loi de finances pour 2006, d’un montant de 3,8 millions d’euros, ne semble pas être reconduite dans le budget 2007. C’est un sujet d’inquiétude pour les propriétaires forestiers.

Monsieur le ministre, devant la commission des affaire économiques, vous avez annoncé que seraient affectés 4,4 millions d’euros d’aide aux investissements forestiers en sus du plan chablis. Le confirmez-vous ? Je souhaiterais, d’autre part, des indications sur les évolutions des crédits de reboisement.

Enfin, serait-il possible de compléter le programme « forêt », dans son action 3, d’un paragraphe « aide à l’investissement forestier hors plan chablis » doté de 4,4 millions, ce qui répondrait aux fortes attentes des sylviculteurs privés ? J’insiste sur l’importance d’un financement pérenne de l’investissement, sur le remplacement des dispositifs d’aide post-tempête par un nouveau dispositif, et sur une aide publique soutenue et conséquente à la forêt privée.

M. le Ministre – Monsieur le député, vous êtes président de l’Inventaire forestier national ; une responsabilité importante ! Nous avions un moment pensé supprimer les aides aux investissements hors plan chablis, parce que notre pays se « reforeste » spontanément, mais nous avons finalement pensé, après votre intervention, que ce serait un mauvais signal. Nous maintenons donc 4,4 millions d’euros pour ces aides, grâce à une prise en charge par l’ONF à partir de 2007 des forêts domaniales touchées par la tempête et à un cofinancement du FEADER porté à 55 % pour le plan chablis. Les investissements sylvicoles hors tempête bénéficieront également des cofinancements du FEADER pour la période 2007-2013. Nous utilisons toutes les marges de manœuvre pour continuer à aider les propriétaires de forêts privées.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier - Lancé le 1er janvier 2005 et s’adressant à tous les éleveurs bovins, ovins et caprins des filières lait et viande, le plan de modernisation des bâtiments d’élevage répond avec succès à la nécessité de rénovation des exploitations dont le parc de bâtiments est ancien. Les objectifs initiaux sont pleinement réalisés aujourd’hui.

Toutefois, ce plan est dépassé par son succès, si bien qu’en 2005, sur 9 000 demandes d’aides, 5 000 dossiers seulement ont pu être traités dont, en Lozère, 46 dossiers sur 92. Il paraît donc irréaliste d’envisager la résorption complète de la file d’attente en 2007 si des crédits supplémentaires ne sont pas débloqués. Le plan de modernisation des bâtiments d’élevage est pourtant nécessaire, et son attrait est réel. Mais, dès mai 2006, les crédits prévisionnels apparaissaient, dans notre département, insuffisants pour répondre à toutes les demandes, compte tenu des dossiers de 2005 en attente. Certes, les demandes d’aides déposées en 2006 pourront être financées par le FEADER, ce qui est une excellente nouvelle, mais ces crédits ne suffiront pas à résorber rapidement la file d’attente. Il faut donc à la fois trouver une solution satisfaisante pour l’avenir et débloquer les financements nécessaires au règlement de dossiers en instance, pour éviter un engorgement en 2007 aussi. Qu’en sera-t-il, Monsieur le ministre ?

M. le Ministre – Comme vous l’avez souligné, le plan de modernisation des bâtiments d’élevage connaît un grand succès. Un effort inégalé a été accompli pour qu’il en soit ainsi, puisque, au total, en 2005 et 2006 près de 300 millions ont été délégués à cette fin en autorisations d’engagement. L'Etat a engagé 93,6 millions sur ces deux années, montants complétés par autant de crédits communautaires, et les collectivités territoriales ont parfaitement joué le jeu, leurs concours passant de 27,5 millions en 2005 à 80 millions en 2006. De plus, pour faciliter la transition FEOGA-FEADER, une avance de 4,39 millions de crédits « État » a été déléguée aux régions, qui constituent une avance sur 2007. Pour 2007, le budget prévoit des autorisations d’engagement à hauteur de 60 millions, en hausse de 15 millions, et la loi de finances rectificative pour 2006 proposera un rattrapage de 20 millions en crédits de paiement.

Pour la période 2007-2013, la réapparition des programmations régionales FEADER entraîne une prévision de 242 millions de crédits « État » et de 77 millions de crédits des collectivités, qui appelleront 320 millions du FEADER. De plus, 150 millions de financements complémentaires sont désormais prévus, à hauteur de 60 millions de l’État et de 90 millions des collectivités.

Dans ces conditions, on peut s’attendre à ce qu’une grande partie du retard soit résorbé fin 2007. Cela étant, de nouvelles demandes émanent de la filière porcine. De plus, la profession commence à demander l’application de critères – favoriser, par exemple, les zones de montagne. Je suis favorable au maintien d’un dispositif national, car je souhaite éviter des polémiques interrégionales. Je suis convaincu que l’augmentation des financements permettra d’aider les départements qui, tels la Lozère, mènent une politique active de modernisation des bâtiments d’élevage.

M. Louis-Joseph Manscour – Ce soir, la Martinique vient à la rescousse de la Bretagne (Sourires) et vous entendrez par ma voix les questions que Mme Lebranchu souhaitait vous poser, Monsieur le ministre. Ma collègue observe que les crédits de gestion de crises des offices sont réduits, comme ceux du soutien aux structures professionnelles. C'est sans doute la suite logique de la réforme de la PAC et de la LOA, mais cela confirme l'absence réelle de stratégie agricole nationale, si bien qu’un appel est fait au Gouvernement à chaque nouvelle crise. Or, répondre à l'urgence ne suffit pas, il faut aussi une stratégie, une « eurocomptabilité », et des services réactifs. Mais vos solutions se traduisent en général par des restructurations par le biais de cessations d'activité et d’agrandissements. Est-ce un résultat ? Est ce une volonté ?

Prenons l'exemple de l'aviculture. Certes, 63 millions sont disponibles, mais les dossiers sont complexes et les critères mouvants. Certains aviculteurs n'ont reçu que 1 000 euros de l'État, et ce sont les collectivités locales qui ont porté le soutien à 3 000 ou à 5 000 euros comme le prévoit la règle de minimis. Pouvez-vous améliorer le dispositif, et penser aux grands oubliés que sont les éleveurs de dindes et de poulets à l’exportation ?

Surtout, où en est l'organisation de l'interprofession volaille ? Il faut anticiper l'arrêt des restitutions. La profession y est prête, certains industriels aussi.

Dans ce contexte tendu, les aides à l'installation sont un outil précieux, mais les crédits, insuffisants, seront sortis du contrat de projet. De plus, les pratiques sont différentes, pas toujours contrôlées par l'État. Même si les CDOA sont multipartites, vous devez, Monsieur le ministre, demander aux préfets de veiller au respect des plans départementaux pour favoriser l'installation.

Que pensez-vous, par ailleurs, du rôle des SAFER ? Si elles ne peuvent préempter les DPU avec les terres, comment permettre à des jeunes de s'installer ?

S’agissant enfin des fruits et légumes, nous sommes inquiets de la réforme proposée par la Commission européenne. Sous prétexte d’accorder des aides – en fonction de critères que nous contestons – on fait courir à la filière un risque de grave dérégulation. Quel est votre avis à ce sujet ? Une étude d'impact est indispensable, car nous considérons que la régionalisation des aides permettrait le maintien de l'organisation de la filière.

M. le Ministre – Plutôt qu’une question, c’était un inventaire ! S’agissant des fruits et légumes, j’ai eu l’occasion de dire que j’attends les propositions définitives de la Commission européenne. Nous sommes très attentifs à la réforme, car la définition d’un dispositif de gestion de crise, inexistant à ce jour, est nécessaire. S’agissant du rôle des SAFER et de l’installation, je répondrai par écrit à Mme Lebranchu, car le dossier, complexe, demande des explications circonstanciées. Pour autant, je rappelle que, s’agissant de l’installation, notre effort ne s’est pas relâché. Ce sujet peut certes trouver place dans les contrats de plan État-régions, mais nous avons tenu à ce qu’il demeure une priorité nationale. Nous ne baissons pas la garde, d’autant que le nombre d’installations aidées repart à la hausse dans de nombreux départements.

S’agissant de la filière avicole, nous avons fait joué la solidarité nationale, vous le savez. Vingt millions ont été débloqués en faveur des éleveurs et 11 millions ont été dirigés vers les grandes entreprises exportatrices et la recherche. En tout, la filière a reçu 65 millions après que la crise due à la grippe aviaire s’est déclenchée, dont la moitié est allée aux éleveurs, et nous venons d’obtenir une nouvelle enveloppe de 15 millions qui sera complétée par des aides européennes, ce qui nous permettra d’aller plus loin. Je rappelle que les premières aides, de mille euros, ont été débloquées très rapidement. Ensuite, l’Union européenne a traîné les pieds, mais la solidarité nationale s’est manifestée très fortement, puisque la consommation a retrouvé ses taux antérieurs.

Il est vrai que la filière « dinde » est dans une mauvaise situation. Cela tient à des difficultés structurelles et à la concurrence d’autres viandes blanches. Un effort de commercialisation et de marketing supplémentaires serait peut-être nécessaire.

La crise a montré qu’une interprofession était nécessaire, mais l’État ne peut l’imposer. Éleveurs, industriels et exportateurs doivent l’organiser ; je suis prêt à les y aider.

M. François Brottes – Alors que je vous ai connu, Monsieur le ministre, très actif dans le groupe parlementaire d’études sur la forêt et le bois, je sens que vous vous désengagez progressivement de cette filière, alors même que nos forêts ne sont pas encore complètement remises des grandes tempêtes de 1999. Confirmez-vous le maintien des crédits destinés nettoiement et au reboisement ? Confirmez-vous une mesure favorable aux investissements sylvicoles dans le PDRH ? Et, si tel est bien le cas, comment financerez-vous ces aides ? La hausse de 10 millions du budget forêt n’est qu’apparente, puisqu’elle permet tout juste de compenser l’augmentation du taux de cotisation des pensions des personnels fonctionnaires. Je me félicite du maintien de l’enveloppe prévue pour le versement compensateur – en espérant qu’elle ne fera l’objet d’aucun gel budgétaire – mais je m’inquiète de la réduction mécanique des cofinancements européens, qui se feront au détriment des investisseurs forestiers.

Autre sujet de préoccupation : le désengagement de l’État sur le budget de la prévention des risques. La pérennité du service de restauration des terrains de montagne s’en trouve menacée, ce qui pourrait porter un préjudice considérable à bien des territoires.

M. le Ministre – Le plan chablis, pour lequel vous vous étiez beaucoup battu, a été bien tenu par les gouvernements successifs. L’effort se poursuivra jusqu’au bout, car on voit dans nos paysages, qui portent encore les traces des tempêtes, qu’il est encore nécessaire. Nous avons donc mis de l’argent dans le budget pour 2007, mais aussi dans le programme de développement rural dit hexagonal, car il ne concerne ni la Corse ni l’outre-mer.

Vous m’interrogez sur les crédits d’investissement sylvicole. Il y a ceux qui sont dans le plan chablis. Mais les propriétaires s’inquiétaient pour ceux que le changement de réglementation communautaire aurait pu menacer. Comme je l’ai indiqué à la profession, nous continuerons ces investissements au cours de la programmation européenne 2007-2011. Nous avons proposé aux propriétaires forestiers les niveaux de financement correspondants, qui sont ceux que j’indiquais tout à l’heure, et il y a eu accord. On peut bien sûr toujours s’interroger sur la poursuite des financements communautaires. S’ils baissaient, nous réagirions.

L’ONF intervient aussi dans le plan chablis, mais également pour le RTM. Dans le contrat d’objectifs que l’État a signé le 24 juin avec l’Office, les 6 millions versés au RTM ont été retenus comme base pour le périmètre des actions. Cela veut dire que ni le périmètre, ni les actions ne diminuent en 2007. Mais c’est vrai que nous sommes en financement constant. D’où mon souhait que cette politique soit de plus en plus interministérielle et que d’autres ministères viennent conforter le financement du service RTM.

Mme Geneviève Gaillard – Le Gouvernement vient d’annoncer le développement massif du bioéthanol E 85. Pour cela, on programme la construction de 54 nouvelles usines de production, qui s’ajouteraient aux 16 déjà en fonctionnement ou en cours de réalisation. Et on prévoit 500 ou 600 « pompes vertes » en 2007.

Sachant que les agriculteurs doivent affecter 15 % de leurs surfaces pour leur seule autosuffisance et que, pour maintenir un niveau minimal de biodiversité, il faut qu’une exploitation conserve 10 % de ses surfaces en prairie et en jachère, sachant aussi que sur les 75 % restants, il faudrait en mobiliser la moitié pour atteindre la production souhaitée, il ne resterait plus que 35 % pour la production alimentaire !

Il faudrait 18 à 20 millions d’hectares pour substituer les biocarburants au pétrole. C’est bien sûr impossible, compte tenu de la surface agricole utile. Mais même en restant très en deçà de cette superficie, un conflit avec la filière alimentaire est à craindre.

J’avais demandé une évaluation énergétique et écologique des conditions de production des biocarburants. Je renouvelle cette demande. Il faudrait d’ailleurs au préalable affiner les méthodes de calcul des bilans énergétiques, notamment afin de tenir compte des coproduits. Allez-vous donc financer les études nécessaires ?

M. le Ministre – N’était l’amitié que j’ai pour vous, je dirais que si l’on vous écoutait, on n’aurait jamais construit de TGV ni d’Airbus ! Après avoir reproché pendant des années aux gouvernements d’en rester aux énergies classiques, vous reprochez maintenant à celui-ci de vouloir promouvoir les biocarburants et vous essayez pour cela de créer une grande peur.

Mme Geneviève Gaillard – Je demande un bilan énergétique, c’est tout !

M. le Ministre – Il appartient au ministère de l’industrie de vous le donner. Je ne suis pas moi-même capable, techniquement, de le faire. Je vous accorde que si nous décidons de promouvoir les biocarburants, il faudra bien les produire, sauf à faire du thatchérisme et du blairisme et à refuser toute agriculture dans le pays pour importer massivement du Brésil ! Mais ce n’est pas ce que je souhaite, ni ce que souhaitent les agriculteurs français !

Mme Geneviève Gaillard – Moi non plus !

M. le Ministre – Donc, il faudra bien les produire. Cela veut dire qu’il y aura moins de jachères et que nos assolements et nos cultures se modifieront progressivement – moins de maïs, plus de colza… Mais vous avez raison, il ne faudrait pas faire d’un bien un mal. Nous devrons donc gérer tout cela progressivement. Ne soyez pas critique simplement parce que c’est ce gouvernement qui met l’accent sur les biocarburants…

Mme Geneviève Gaillard - Il faut toujours rester critique.

M. le Ministre – En tout cas, ne nous faites pas de procès d’intention. Nous progresserons par étapes, et ce d’autant plus que les techniques progresseront. Pour le moment, on n’utilise qu’une partie de la plante. On utilisera ensuite la totalité de celle-ci. Et l’on ne fera pas avec elle que des carburants, mais aussi de la biochimie. Ainsi le chanvre pourrait se substituer à certaines matières plastiques. Dans le bilan énergétique et écologique, il faudra donc comparer ce que l’on produit à partir de plantes avec ce que l’on produit à partir du pétrole et autres matières chimiques. Intuitivement, je pense que le bilan des plantes sera meilleur. Mais il faudra, c’est vrai, bien gérer toutes ces étapes.

Si j’ai été un peu vif au début de ma réponse, c’est que je vous ai trouvée passéiste, alors que tout le monde voit bien qu’il s’agit là d’une voie d’avenir pour la France comme pour nos agriculteurs. N’ayons pas peur avant que les choses commencent !

Mme Geneviève Gaillard - Il faut anticiper, prévoir !

M. le Ministre – Oui, mais après nous avoir reprochés de ne pas faire assez pour les biocarburants, ne nous reprochez pas maintenant d’en faire trop !

M. François Brottes – L’agriculture biologique remplit une mission d’intérêt général. C’est une filière qui s’organise avec le soutien de l’ensemble de la profession et il n’y a plus aujourd’hui d’opposition avec l’agriculture raisonnée. Cette filière correspond à une attente des consommateurs, qui sont de plus en plus nombreux à s’y intéresser. Je m’en réjouis.

Ce qui m’inquiète en revanche, c’est de voir se tarir le financement des réseaux spécialisés dans le développement de cette agriculture biologique. Nous en avons un exemple avec le réseau de Rhône-Alpes et l’association ADABIO, qui viennent de perdre, semble-t-il, les crédits qui devaient soutenir, en deuxième affectation, le plan d’aménagement régional concerté bio, soit plus de 141 000 euros. Comme cela fait perdre du même coup le cofinancement européen du FEOGA, le manque à gagner pour ce réseau serait de 282 000 euros. Comment justifier cette mesure ? Quel soutien envisagez-vous pour ces réseaux ?

Autre sujet d’inquiétude pour l’agriculture biologique : il semblerait que les crédits nationaux ne soient reconduits qu’à 80 % et que la filière ne soit plus éligible aux nouveaux contrats de plan – les contrats de projet.

Le troisième sujet d’inquiétude concerne le FEADER. Nous craignons que l’agriculture biologique passe à la trappe des soutiens accordés dans le cadre du deuxième pilier de la PAC, pour cause de montée en charge de la filière biocarburants. Nous craignons aussi que l’État abandonne ses aides à la conversion à l’agriculture biologique, laissant ainsi les régions seules dans ce domaine.

M. le Ministre – L’agriculture biologique, c’est quelque chose qui marche, car de plus en plus de producteurs estiment que cela leur permet de mieux valoriser leur production. C’est donc un choix qui n’est pas seulement idéologique mais aussi économique.

Je vous réponds d’abord sur le FEADER. Les mesures agricoles sont accompagnées par des mesures agro-environnementales. Nous avons à ce titre un cofinancement européen. Pour la période 2007-2013, le soutien à l’agriculture biologique sera en bonne place dans notre programme, qu’il s’agisse des aides à la conversion ou des aides au maintien. Nous avons prévu, sur les sept ans du programme,156 millions d’euros, dont près de 70 du FEADER, ce qui fait à peu près 86 millions de crédits nationaux. Les collectivités locales apportent également souvent leur appui à l’agriculture biologique.

En revanche, effectivement, les réseaux d’animation ne seront plus financés dans le cadre des contrats de projet, que le Gouvernement a recentrés sur l’investissement. Ils bénéficieront cependant d’un soutien à hauteur de 2,7 millions en 2007. J’examinerai plus précisément le cas que vous venez de mentionner.

D’autre part, le crédit d’impôt institué par la loi d’orientation agricole représente 2 000 euros pour un agriculteur qui maintient ses surfaces en agriculture biologique. Il faudra faire un bilan avec le ministère des finances.

Nous faisons donc des efforts et on peut faire mieux dans ce secteur plein d’avenir qu’est l’agriculture biologique, comme pour l’agriculture raisonnée. Il y a là des attentes auxquelles l’État doit répondre avec l’aide des collectivités territoriales.

M. Jean Lassalle - J’ai trouvé le ministre très convaincant sur le bioéthanol et je ne reviens donc pas sur le sujet.

En revanche j’appelle son attention sur le classement de certaines communes en zone de montagne. Dans ma région, sans que l’altitude soit toujours élevée, il y a des pentes très fortes, sur lesquelles il y a beaucoup d’accidents, mais on n’obtient pas ce classement.

En second lieu, des agriculteurs perdent leurs primes parce que leur dossier a été déposé avec un peu de retard ou n’a pas été examiné à temps, et cela dans une proportion inquiétante. J’avais suggéré que le dossier passe de nouveau par les mairies où l’on s’en occupait très bien et où la publicité faite par affichage lu par chacun rendait inutile le recours à des contrôleurs. De plus les nouveaux fonctionnaires qui font les mêmes études que ceux de la DIREN, enthousiasmés par l’ours et le loup, courent la montagne et n’ont plus le temps de s’occuper des agriculteurs.

Enfin je veux me faire l’écho de certaines inquiétudes sur la prime à la vache allaitante et sur la prime à l’herbe.

Monsieur le ministre, si vous pouviez m’obtenir quelques reclassements en communes de montagne avant les élections, ce serait formidable ! (Rires sur tous les bancs)

M. le Ministre – Je connais bien le dossier montagne, et la circonscription de M. Lassalle. Mon ancien directeur de cabinet avait reçu des élus de Pyrénées-Atlantiques au sujet du reclassement. Le travail est en cours. On ne manquerait pas de me le rappeler si je le perdais de vue.

Sur les primes, je suis choqué quand un agriculteur les perd parce qu’il a passé une échéance qui ne lui a pas toujours été rappelée, et que l’on n’est pas sûr qu’il a toujours reçu les documents voulus. En cas de recours gracieux, je fais toujours vérifier qui est vraiment responsable. J’estime que les fonctionnaires peuvent très bien appeler l’agriculteur quand un dossier n’arrive pas, plutôt que d’attendre qu’un délai expire pour sanctionner (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UDF). J’ai donné des instruction dans ce sens.

Enfin, pour la prime à la vache allaitante, les crédits augmentent de 8 millions au budget et pour la prime à l’herbe, ils sont du même ordre que ceux qui étaient consacrés à la PHAE et au CTE herbager. Il n’y a donc pas de désengagement. Et les crédits restent à environ 260 millions par an avec les financements communautaires.

M. François Rochebloine – Pour prolonger le propos de Jean Lassalle, je connais le cas d’un GAEC en difficulté car, malgré un recours gracieux, il n’a pas obtenu satisfaction.

Les retenues d’eau collectives dans les collines sont essentielles pour maintenir une agriculture de qualité, mais très difficiles à réaliser. Dans ma circonscription, l’ASA d’irrigation des coteaux du Jarez, qui regroupe des arboriculteurs, a suivi un véritable parcours du combattant, sans aboutir. Dans ce département qui n’en finit plus de guérir ses friches industrielles, les friches progressent aussi sur les coteaux. Ces jeunes agriculteurs ont relevé le défi par une reconversion dans les productions fruitières. Mais cela nécessite des réserves minimales en eau. Leur projet collectif d’irrigation avait été accepté puis, suite à des procédures contestables, arrêté il y a un an.

Alors que la sécheresse est plus fréquente, l’hydraulique agricole joue un rôle important. Votre ministère prévoit 7 millions pour la création de retenues d’eau de proximité. Pensez-vous que cela soit suffisant ? Au-delà des aspects financiers, comment soutenir la profession confrontée à des normes de plus en plus draconiennes sur l’environnement et assouplir les procédures d’autorisation ? Plus précisément, comment aider les arboriculteurs du Jarez à réaliser leur projet ? Il y a urgence. Je ne doute pas de votre bonne volonté (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UDF).

M. le Ministre – Presque toutes les régions de France ont besoin de retenues de substitution. Cela pose un problème financier et un problème juridique. Le premier peut se régler. Les crédits inscrits, plus ceux qui n’ont pas été consommés sur le budget précèdent et les cofinancements des agences de l’eau, des collectivités territoriales et de l’Europe y suffisent. Dans ma région, aucun projet de taille raisonnable n’a été bloqué pour cette raison. En revanche, le problème tient aux procédures et, dans mon département de Charente-Maritime, ils l’ont tous été par les tribunaux administratifs.

M. François Rochebloine – Eh oui ! merci, Madame Lepage !

M. le Ministre – Que trois personnes constituent une association et elles obtiennent un arrêt, quand même le tribunal administratif ne prononce pas un sursis à exécution. Avec les sécheresses qui se multiplient, la situation est de plus en plus difficile. J’en ai parlé avec Mme Ollin pour essayer de simplifier et de déconcentrer les procédures. Je dis toujours aux agriculteurs de s’entourer de toutes les précautions juridiques.

M. François Rochebloine – Les deux préfets de la Loire et du Rhône avaient donné leur accord !

M. le Ministre – Les préfets donnent leur accord, les services de l’État instruisent, puis on va à l’annulation… Donc le besoin existe, l’argent est disponible, mais les procédures nous entravent. Je vais essayer des les faire évoluer, si le ministère de l’écologie veut bien le faire avec moi.

M. François Liberti – Je vous remercie de la réponse que vous m’avez apportée hier sur la viticulture. Vous avez, comme moi, estimé que l’arrachage massif n’était pas acceptable. Alors ne l’acceptez pas, dites-le à Bruxelles au nom de la France et empêchez qu’on y procède.

En Languedoc-Roussillon où l’on a arraché 100 000 hectares depuis vingt ans et restructuré les deux tiers du vignobles en cépages de meilleure qualité, un nouvel arrachage massif serait un immense gâchis.

À propos des importations et de la dérégulation, de la disparition des AOC laissant la porte ouvert à la fraude et aux vins « coca-cola », vous m’avez répondu également que ce n’était pas acceptable. Alors, il ne faut pas l’accepter : il faut soustraire la production viticole à l’OMC, juguler les importations camouflées, d’Espagne notamment, et promouvoir les AOC.

Nous avons proposé des états généraux de la viticulture française, et j’ai senti que vous n’y étiez pas hostile, même si vous ne vous êtes pas engagé. Ce serait un signal fort pour les viticulteurs et pour nos partenaires. Ce serait aussi une façon de fédérer les régions, face à l’ultralibéralisme. Je vous le demande, acceptez d’ouvrir cet espace de débat, pour construire un autre avenir. Il est grand temps, je vous l’assure.

M. le Ministre – Effectivement, les situations sont très différentes selon les régions, et même dans une région comme la vôtre, où l’Aude par exemple est encore plus en difficulté que l’Hérault.

S’agissant des propositions européennes, je répète que nous sommes opposés à l’importation de moûts, à l’ouverture de nouveaux droits de plantation, à l’arrachage massif de 400 000 hectares. Si arrachage il y avait, l’effort devrait être partagé entre les pays, et l’arrachage doit pouvoir être temporaire, en fonction des distorsions entre offre et demande.

Nous attendons de l’Europe qu’elle traite la viticulture comme un secteur d’avenir. J’ai en effet été profondément exaspéré, lors de la première présentation du plan : on se serait cru en train de parler de la sidérurgie des années 1970, c’est-à-dire d’un secteur condamné quoi qu’il arrive ! Or, la consommation de vin va croissant dans le monde. Des pays s’y ouvrent, comme l’Inde et la Chine. L’avance que possède la France en termes de qualité et de notoriété est donc un atout. Il faut adapter l’offre à la demande, mais en aucune façon entrer dans un plan de suppression des vignobles.

Nous essayons donc de transformer le plan de l’Europe en projet d’avenir pour un secteur qui doit progresser, tout en prévoyant un traitement social pour ceux qui ne reviendront pas sur le marché, soit du fait de leur âge – avec des mesures de préretraite – soit parce que la qualité de leur production ne le permet pas. Nous nous sommes déjà doté d’outils, avec les comités de bassin et le comité national, mais je reste très ouvert aux discussions que vous proposez. J’ai d’ailleurs l’intention de recevoir tous les élus des régions concernées. Mais surtout, gardons une attitude positive. Nous possédons une richesse extraordinaire. N’abandonnons pas nos atouts au moment même où le marché mondial demande des produits de qualité, ceux sur lesquels nous possédons une avance – on voit bien que des pays comme l’Australie, qui ont trop planté, commencent à leur tour à connaître des difficultés. L’Europe est en train d’évoluer par rapport à ses premières propositions et nous faisons front commun avec les Espagnols et les Italiens, même si nous sommes parfois en concurrence.

M. André Chassaigne - Excellente réponse sur les vins !

Après l’annonce du président Chirac concernant la revalorisation des retraites agricoles, chacun de nous a souhaité connaître les catégories de retraités concernées et les moyens de financement mis en œuvre. Le Gouvernement a fait état d'une augmentation de 600 euros par an pour un exploitant, avec une carrière de 32 ans, et de 900 euros pour un aide familial ou un conjoint avec une carrière de 27 ans. Certes, c’est loin d'être négligeable, mais tous les retraités concernés ne bénéficieront pas d’une telle revalorisation. Vous prétendez que les grands bénéficiaires seront les actuels laissés-pour-compte, mais en refusant d'abroger définitivement le décret Vasseur et d'étendre le bénéfice de la retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aux aides familiaux, comme le prévoit la loi, vous ne répondez que très partiellement aux revendications. Vous oubliez également l'immense majorité des 1 895 000 retraités non salariés agricoles, dont la pension reste bien loin des 85 % du SMIC.

Quant au financement de cette revalorisation, nous ne savons rien, hormis l'explication confuse du ministre délégué à la sécurité sociale sur le fait que la mesure aurait été inscrite dans le texte initial du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous attendons donc de vous des informations concrètes.

La réalité, c’est que vous ne voulez pas assumer le déficit structurel du FFIPSA, qui atteint 6 milliards en cumul. Le fait que son financement soit dorénavant assuré par la loi de financement de la sécurité sociale n'a qu'un but : dispenser l'État du versement d'une subvention d'équilibre au titre de la solidarité nationale, ce qui risque de provoquer la faillite du FFIPSA. Il est pourtant urgent de le sortir de l'impasse, car le Fonds est contraint d’éponger son déficit avec des prêts d'équilibre. C’est une stratégie suicidaire, qui provoque la colère du président de la MSA.

Que proposez-vous pour répondre à ces différents problèmes ? N'est-il pas temps de faire participer à l'effort de solidarité nationale l'ensemble des industries agroalimentaires, mais aussi les assurances et le secteur bancaire, qui ont constitué de véritables trésors de guerre grâce au travail de nos agriculteurs ?

M. le Ministre – Le financement du FFIPSA est un problème difficile. Les causes essentielles du déficit courant ne sont ni une mauvaise gestion, ni une dérive des dépenses, mais un rendement plus faible qu’attendu des taxes sur les tabacs et la suppression du versement au régime de la contribution sociale de solidarité des sociétés. Il faut donc modifier les règles de compensation démographiques. Le président du comité de surveillance du FFIPSA, Yves Censi, a proposé une participation de l’État, au titre de la solidarité nationale, et une hausse de la compensation inter-régimes, mais vous savez que les autres régimes y sont fortement opposés. L’an passé, l’État a repris 2,5 milliards de dette et le solde est inscrit en créance sur l’État dans les comptes du Fonds. Le déficit cumulé prévisionnel pour la fin de l’année est de 3,3 milliards, au titre des années 2005 et 2006. Pour l’instant, nous n’avons pas trouvé de solution. Nous y travaillons. En attendant, le PLFSS prévoit une autorisation de découvert de 7,1 milliards, mais il faut trouver une solution pérenne.

Pour ce qui est des retraites, vous avez voté dans la loi d’orientation une mesure bénéficiant à près de 15 000 retraités, essentiellement des femmes, pour un coût de 20 millions. Le nouveau système qui entrera en vigueur au 1er janvier 2007 devrait bénéficier, lui, à 300 000 personnes. La durée minimale d’activité permettant de bénéficier des revalorisations sera ramenée de 32 ans et demi à 22 ans et demi. Une décote constante par années de carrière manquantes se substituera au système de décote actuel et en fera baisser les taux. Ces deux mesures coûteront 162 millions en 2007 et 205 en 2008 – année où le taux de décote sera encore abaissé. Dès 2007, la pension d’un chef d’exploitation pourra ainsi augmenter de 12 % pour une carrière de 32 ans et demi. Pour les conjoints et aides familiaux, l’augmentation pourra atteindre 22 %, pour la même durée, et 41,9 % pour une carrière de 27 ans et demi. Il restera beaucoup à faire à la prochaine majorité, mais l’avancée est importante.

M. François Liberti – Depuis plusieurs mois, la pêche au thon rouge fait l'objet d'une campagne médiatique visant à justifier par avance des mesures drastiques de cessation d’activité. De telles mesures frapperaient durement la flotte des pêcheurs senneurs de la méditerranée française, qui comprend 32 navires bien identifiés et emploie 500 marins embarqués, sans compter plusieurs milliers d’emplois induits.

La campagne 2006 a confirmé des pratiques illégales en Atlantique, où des senneurs de sardines et de thons blancs ont capturé environ 1 500 tonnes de thon rouge. C’est bien connu de la direction des pêches, mais le passe-droit demeure. Pourquoi ? En Italie, près de 10 000 tonnes de thon rouge ont été capturées par une centaine de navires – le quota est d’environ 3 700 tonnes, pour 42 thoniers senneurs officiellement recensés. La Croatie met actuellement en cage des thons de quatre kilos, alors que la réglementation fixe une taille minimale de dix kilos – et cette dérogation risque d’être reconduite pour 2007. Et pourquoi l'Espagne, en usant de différents procédés de pêche, peut-elle capturer le double de son quota, camoufler et sous-déclarer ses prises ? À quel niveau se montent en réalité les prises de la flotte turque, composée de 130 navires, pour la plupart non répertoriés ? Pourquoi des pays riverains se voient-ils attribuer des quotas de pêche alors qu'ils n'ont pas de flotte, développant un trafic de flotte étrangère, non contrôlée et non répertoriée ? Et que dire de la pêche sportive dont les prises sont commercialisées ?

Bien sûr qu’il faut remettre de l’ordre dans la pêche au thon rouge : c’est indispensable pour préserver la ressource. Mais il n'est pas acceptable de faire croire que ce sera fait en tuant la pêche méditerranéenne française, dont la flotte est encadrée et dont les quotas sont passés de 11 500 tonnes en 1994 à 6 000 aujourd’hui – preuve que le respect de l'antériorité des quotas de pêche n'existe plus. Une réduction des prises, des temps de pêche ou de la flottille signifierait l’arrêt de l'activité à court terme. Les thoniers senneurs méditerranéens réclament la mise en œuvre d’un plan global pour toute la Méditerranée, pour faire cesser les activités des bateaux non enregistrés, un contrôle des stocks de chaque pays, y compris les pays émergents, la suppression des mesures dérogatoires, l’interdiction de la pêche sportive au thon rouge et un accompagnement financier en cas d’extension des arrêts biologiques.

À quelques jours de la prochaine réunion de l'ICCAT, à Dubrovnik, les pêcheurs méditerranéens vous demandent de prendre position sur ces propositions de fond et de défendre avec une extrême fermeté la pêche française de Méditerranée.

M. le Ministre – Cette affaire est très complexe et, effectivement, très médiatisée. J’ai essayé, il y a quelques semaines, de mettre autour d’une même table les pêcheurs de thon de l’Atlantique et de la Méditerranée et les représentants de Greenpeace et autres organisations, afin qu’ils puissent dialoguer autrement qu’avec des lances à incendie. Ce ne sont pas les écologistes qui se sont fâchés avec les pêcheurs au bout de quelques minutes, mais les pêcheurs méditerranéens avec ceux de l’Atlantique !

M. François Liberti - On ne peut pas accepter que des quotas de thon blanc camouflent la pêche de thon rouge !

M. le Ministre – C’est un autre sujet.

La réunion de l’ICCAT qui va se tenir le 17 novembre à Dubrovnik sera très dure pour la France. Nous possédons en effet l’une des flottes les plus performantes – et il n’y a pas de raison d’en rougir : nous avons investi pour cela. Mais le vrai problème est celui de l’insuffisance des contrôles au niveau international et l’opacité du système de commercialisation et d’engraissement en cage flottante.

Les mesures décidées devront tenir compte de la situation du stock. Quoi qu’il en soit, la France n’a pas l’intention de laisser le champ libre à ceux qui pensent qu’il suffit de mettre en cause nos pêcheurs pour régler le problème. Au sein de la délégation européenne, nous demanderons le maintien du total admissible de capture – TAC – et du quota européen ; nous demanderons à ce que ce TAC soit respecté, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, à cause de la pêche illégale. Nous demanderons, sur les tailles minimales et les saisons de pêche, des mesures réglementaires qui pèsent équitablement sur toutes les flottilles. Nous demanderons que les opérateurs de cages d’engraissement participent aux mesures de gestion. Nous exigerons enfin un renforcement notable des mesures de contrôle et du rôle de l’ICCAT, seule garante d’une mise en œuvre de la réglementation par tous les pays concernés. Ceux qui jouent le jeu ne doivent pas être pénalisés par rapport à ceux qui trichent. Les pêcheurs sont les premiers à vouloir préserver la ressource. Or la demande de thon rouge est forte, en particulier sur le marché japonais.

M. le Président – Le groupe communiste et républicain vient d’épuiser son temps de parole. Mme Gaillard me jette des regards éplorés : l’indulgence que j’ai témoignée à son collègue François Brottes la contraint à attendre que tous les membres du groupe UMP posent leur question avant de pouvoir poser la sienne. Si M. le ministre et M. le rapporteur spécial n’y voient pas d’inconvénient, je vous propose donc de faire intervenir Mme Gruny, puis Mme Gaillard, et ensuite leurs collègues masculins.

Mme Pascale Gruny - Pour une fois, c’est un avantage d’être une femme !

Produits à partir de ressources renouvelables et domestiques, les biocarburants vont permettre d'accroître l'indépendance énergétique de la France et des Etats européens. Le rendement énergétique des filières de production d'éthanol est plus de deux fois supérieur à celui de la filière essence. En outre, les biocarburants permettront de maintenir ou de créer des emplois, principalement en zone rurale, comme en témoigne l'installation de l'usine d'Origny-Sainte-Benoîte dans mon département de l'Aisne.

Je me félicite que le Gouvernement s’engage dans une politique de promotion des biocarburants. L’Union européenne a aussi été un promoteur actif des biocarburants et autres carburants d'origine renouvelable, notamment au travers de deux directives, l’une fixant les objectifs d’incorporation et l’autre autorisant un soutien spécifique pour les biocarburants.

Parmi les conditions indispensables à la pérennisation d'une filière biocarburants en France figure la protection aux frontières de l'Union européenne, dont le cadre n'est pas encore parfaitement défini. Tout l'enjeu réside dans la possibilité de maintenir des droits de douane sur les importations afin de stabiliser la filière pendant au moins cinq à dix ans. La France doit, dans le respect des règles du commerce international, se préserver de la concurrence, notamment brésilienne, si elle ne veut pas voir étouffer dans l'œuf sa filière : le Brésil est le premier producteur et exportateur mondial d'alcool de canne à sucre. En 2005, l'Union européenne avait produit 750 000 tonnes d'éthanol pour une consommation de 950 000 tonnes, et ce pays 12 millions de tonnes !

Il serait regrettable de réduire notre dépendance à l’égard des énergies fossiles pour la remplacer par une dépendance à l’égard des matières premières agricoles. La solution passe par des négociations dans le cadre de l'OMC, mais aussi par les négociations bilatérales Union européenne-Mercosur. Les solutions pourront être des contingentements en volume ou en pourcentage. En tout état de cause, l'agriculture ne saurait être considérée comme une variable d'ajustement dans ce type de négociation. Or, les négociations du cycle de Doha, lancées en 2001, ont été suspendues sine die par le directeur général de l’OMC en raison de l'impossibilité de trouver un accord entre les grands acteurs de la négociation agricole – Union européenne, États-Unis, Inde, Brésil –, l’accès aux marchés étant le principal sujet de conflit.

Pourriez-vous nous éclairer sur l'état d'avancement des négociations sur l'agriculture à l’OMC et sur la position de la France relativement aux quotas d'importation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Ministre – Nous avons plusieurs fers au feu : l’incorporation directe – diester et éthanol –, l’E85, le B30 et les huiles végétales. Votre région sera aux avant-postes, puisque c’est l’une de celles qui compte le plus de projets de création d’usines, ce qui est important pour l’emploi.

Vous n’avez pas parlé du problème des prix. S’il faut encourager les agriculteurs à se tourner vers les biocarburants, ils ne doivent pas devenir eux-mêmes la variable d’ajustement qui permet de contenir le prix du carburant. Il faudra donc bâtir des contrats par filière pour leur assurer une juste rémunération.

J’en viens à la concurrence. Il ne s’agit pas de construire des usines pour importer - même si celles-ci s’installent souvent à proximité des ports et des voies navigables. Le Brésil se verrait volontiers en fournisseur d’éthanol de l’Europe. Il faut donc nous protéger dans le cadre des négociations à l’OMC. Nous avons d’ailleurs été le fer de lance de la défense européenne. Ce n’était pas facile : le Président de la République est intervenu à plusieurs reprises.

L’élection d’une nouvelle majorité parlementaire aux Etats-Unis crée une marge d’incertitude. Traditionnellement, les démocrates sont plutôt opposés aux politiques de libre échange. Mais si les États-Unis sont prêts à avancer, les négociations pourraient reprendre. La France défendrait alors les mêmes positions : maintien de la préférence communautaire ; libéralisation des échanges, mais pas au détriment de l’agriculture ; préservation de la spécificité du modèle agricole européen – traçabilité, maintien de l’emploi… Nous ne sacrifierons pas l’agriculture sur l’autel du libéralisme international.

Mme Geneviève Gaillard - Je vous remercie d’avoir accepté de me laisser poser ma question dès maintenant.

Les autorités compétentes en la matière, y compris les départements « statistiques » de votre ministère et des ministères de la justice et de l’intérieur, reconnaissent unanimement que les dispositions relatives aux chiens dangereux de la loi de 1999 sont inefficaces. Elles posent aussi des problèmes d’application lorsqu’il s’agit de reconnaître les animaux concernés : il n’est pas rare que des propriétaires de chiens soient malmenés par des forces de l’ordre qui ne connaissent pas grand-chose aux animaux. Les effets pervers sont lourds : les chiens reconnus comme faisant partie de cette catégorie sont saisis et mis en fourrière aux frais du contribuable, puis euthanasiés. À l’occasion d’un cas particulier, le ministre de l’intérieur a souhaité durcir ce texte. La commission interministérielle qui s’est réunie a jugé cela inopportun et a reconnu que le problème ne venait pas des animaux, mais des propriétaires. Elle a conclu que mieux valait insister sur la formation des propriétaires et prévoir des visites vétérinaires permettant d’apprécier le comportement des animaux. Le Sénat a cependant fait une nouvelle tentative lors de l’examen du projet de loi sur la prévention de la délinquance. Un de nos collègues a même déposé une proposition de loi qui aboutirait quasiment à euthanasier tous les chiens dépassant un certain poids !

Pouvez-vous nous confirmer que le comportement d’un chien dépend le plus souvent du propriétaire ? Envisagez-vous d’abroger l’article de la loi de 1999 en question ? Quelles mesures prendrez-vous pour que les chiens, de tout temps compagnons de l’homme, ne fassent pas les frais d’effets de mode ?

M. le Ministre – Si nous constatons tous dans nos communes l’augmentation du nombre des chiens agressifs, ce phénomène est en partie lié aux évolutions de notre société. La loi du 6 janvier 1999 comporte des dispositions à la fois préventives et répressives afin de limiter le nombre de chiens susceptibles d’être dangereux. Le nombre d’animaux mis sous surveillance et ayant entraîné des préjudices corporels à une personne a de fait baissé en 2004 et en 2005. La question d’une modification de la législation et de la réglementation ayant été posée, le Gouvernement a constitué un groupe de travail, où siègent les représentants des associations et des professionnels, afin de formuler des propositions. De nature législative, l’une de ces propositions consisterait à renforcer les pouvoirs des maires et des préfets lorsqu’un chien est susceptible de présenter un danger grave et immédiat. Elle pourrait être reprise dans le projet de loi de prévention de la délinquance.

Il convient aussi d’engager une réflexion sur les bonnes pratiques d’élevage, le rôle du maître étant déterminant dans l’évolution du comportement du chien. La traçabilité des chiens vendus et détenus doit être mieux garantie. À cet effet, les données permettant d’identifier les animaux seront centralisées. Les vétérinaires exerçant en milieu urbain ont un rôle important à jouer et il faut réfléchir au mandat sanitaire qui pourrait leur être donné dans ce domaine. L’objectif est de responsabiliser les propriétaires de chiens.

Enfin, il faut enrichir l’information et la communication sur ce sujet et faire un effort de pédagogie. De nouveaux supports d’information doivent être conçus, pour être diffusés aux enfants scolarisés et aux futurs maîtres.

Notre réflexion se fonde donc sur un volet répressif et sur un volet information, communication et sensibilisation. Bien entendu, je suis curieux de vos suggestions sur ce sujet que vous connaissez bien.

M. Yannick Favennec – Dans notre pays, l’alimentation tient une place importante dans la vie de nos concitoyens et elle constitue à l’évidence un élément de notre culture. Depuis près de cinquante ans, l’évolution des techniques agricoles, l’industrialisation de l’alimentation et les changements de modes de vie ont contribué à modifier en profondeur nos modes alimentaires, si bien que l’alimentation redevient aujourd’hui un problème majeur de santé publique.

Soucieux de la qualité des aliments produits, vous m’avez confié, en février dernier, une mission sur la contribution des filières agricoles à la qualité nutritionnelle des aliments. De ces six mois d’auditions et de visites sur le terrain, j’ai conclu qu’il était impératif de redonner toute leur place aux producteurs, qui se situent à l’interface de l’alimentation et de la santé. À cette fin, les pouvoirs publics et les instituts de recherche agricoles doivent avoir la possibilité de mener une politique de l’alimentation adaptée et d’orienter les filières. L’objectif est de leur donner une vision objective des caractéristiques des produits mis sur le marché, en particulier les produits transformés, qu’il est possible de faire évoluer favorablement.

Parmi les propositions que je vous ai soumises il y a quelques jours, j’ai suggéré la création d’un observatoire sur le thème de l’alimentation. Son rôle serait de faire interpréter les données liées à l’alimentation par des spécialistes, de suivre les évolutions de l’offre alimentaire, d’orienter les interventions publiques et privées, notamment pour répondre aux enjeux du PNMS, et de redonner toute leur place aux producteurs dans la chaîne alimentaire. Cet observatoire pourrait étudier les moyens de mettre en réseau les données réunies, en y agrégeant celles des structures existantes, qu’il s’agisse de l’observatoire de la consommation de l’AFSSA, du CREDOC ou de l’observatoire des consommations alimentaires du CIDIL.

Monsieur le ministre, envisagez-vous de créer cet observatoire, en vue d’améliorer la qualité nutritionnelle de l’offre alimentaire, au profit notamment des personnes défavorisées ? Cela supposerait, me semble-t-il, d’impliquer tous les acteurs de la chaîne alimentaire, du producteur au consommateur, en passant par les industries agroalimentaires et les distributeurs, et établir un véritable partenariat avec les médias.

M. le Ministre – Monsieur Favennec, vous avez été parlementaire en mission pendant six mois à mes côtés pour travailler sur tous ces problèmes et vous avez publié un rapport tout à fait remarquable, que vous remettrez au Premier ministre dans une semaine. L’observatoire de la qualité nutritionnelle des aliments que vous préconisez sera créé. Au-delà de l’étude de la qualité nutritionnelle, l’observatoire se préoccupera aussi de l’aspect économique de l’alimentation. L’étude de faisabilité de cet organisme a été confiée à l’INRA et à l’AFSSA, en vue d’affiner l’approche scientifique de son activité. Comme vous le suggérez, il est également envisageable de réfléchir à la mise en commun des données des différents réseaux et il conviendra de faire en sorte que les consommateurs puissent accéder facilement aux travaux de l’observatoire. Merci, Monsieur le député, d’avoir formulé cette bonne idée, que nous avons reprise au vol. Je gage que, dans quelques mois, vous pourrez venir participer au lancement des travaux de cette structure.

M. Daniel Garrigue – Comme plusieurs de mes collègues avant moi, je souhaite intervenir sur les enjeux qui concernent la forêt. Et ce n’est pas un hasard si nous sommes nombreux à nous y intéresser. En effet, la forêt représente un enjeu important pour beaucoup de nos régions, et elle est à la fois un sujet d’insatisfaction et d’espoir.

Un sujet d’insatisfaction parce que son potentiel est très largement sous-exploité et parce qu’elle exige des investissements dont le retour est très éloigné dans le temps, ce qui n’est pas vraiment adapté à notre environnement économique où tout va de plus en plus vite.

Un sujet d’espoir, aussi, parce qu’elle ouvre des perspectives prometteuses pour tout ce qui touche à l’environnement, qu’il s’agisse du stockage du gaz carbonique ou de l’utilisation du bois comme matériau de construction ou comme source d’énergie.

S’il est un élément qui est venu perturber la donne, c’est bien la tempête de 1999. Pour représenter – comme vous-même, Monsieur le ministre – une région qui a été très touchée, je puis témoigner que tous les engagements ont été tenus, ce qui est particulièrement remarquable pour un programme qui s’étale sur une dizaine d’années.

Je souhaite vous interroger plus particulièrement sur le plan national forestier et sur tout ce qui concerne la mise en valeur économique de la forêt, qu’il s’agisse de la reconstitution des taillis, de l’amélioration de la qualité des bois, de l’organisation de la filière et du volet bois énergie. Qu’en est-il notamment des perspectives ouvertes par les ligno-celluloses ? Quels sont les moyens et les perspectives du plan national ?

M. le Ministre – Les perspectives pour la forêt française sont bonnes. Les essences voient leurs prix progresser : le chêne a retrouvé ses cours d’avant 1999 – plus 10 % pour l’ébénisterie et plus 30 % pour les parquets –, le hêtre est remonté de 15 à 30 % et, dans certaines régions comme les Vosges, les cours du sapin et de l’épicéa ont augmenté de 40 à 50 % ! Quant au pin maritime que l’on trouve dans nos régions, il a retrouvé des niveaux proches de ceux d’avant la tempête. Il s’agit donc d’évolutions extrêmement positives.

Ce redressement semble en outre durable, dans la mesure où il semble obéir à une tendance économique lourde que l’on constate dans tous les pays européens où le rebond économique produit ses effets. On a besoin de plus en plus de résineux pour la construction puisque les prix de l’acier, de l’aluminium et du PVC ont énormément augmenté.

Au premier rang de nos objectifs figure la modernisation de la première transformation, qui, encore trop artisanale, ne peut pas toujours répondre aux besoins. Ensuite, il faut remettre en exploitation des peuplements difficiles d’accès, notamment en zones de montagne.

Parmi les actions déjà entreprises, je citerai la création d’une interprofession France bois forêt, présidée par l’un de vos collègues du groupe UMP ; nous avons conclu un contrat avec l’ONF et l’Office a passé des contrats d’approvisionnement avec les communes forestières. Nous avons aussi intégré dans le socle du plan de développement rural des mesures en faveur de l’investissement sylvicole.

Il nous reste à réaliser des investissements générateurs de valeur ajoutée pour la première transformation, des installations nouvelles dans les secteurs sous-industrialisés, la remise en exploitation de secteurs sous-exploités et à développer tout ce qui concerne le bois énergie. Il y a le programme « 1 000 chaufferies au bois en milieu rural », la mobilisation de la nouvelle filiale de l’ONF-Énergie et la prise en compte de la filière bois dans la lutte contre l’effet de serre, aussi bien par les puits de carbone que par la substitution de biomasse ligneuse aux énergies fossiles. Voilà quelques-unes des pistes sur lesquelles nous travaillons avec l’ONF. Il y a aujourd’hui une indéniable volonté politique d’utiliser la forêt française comme un outil économique. Les forestiers ont désormais une image beaucoup plus moderne de leur patrimoine dont ils mesurent tout le potentiel.

M. Gérard Grignon – Depuis le désastreux arbitrage franco-canadien sur les frontières maritimes autour de Saint-Pierre-et-Miquelon en 1992 et le moratoire sur la morue de 1993 à 1997, la pêche industrielle n'a évidemment plus la place qui était la sienne dans l'activité économique de l’archipel. Il nous faut donc impérativement conserver les quotas dont nous disposons, tout faire pour qu’ils soient traités localement et diversifier nos activités. Vous connaissez les efforts réalisés à Miquelon pour élever des coquilles Saint-Jacques, car votre ministère encadre et soutient ce projet, en vue de le pérenniser.

Ma question portera surtout sur trois points : la morue, le crabe des neiges et les conditions de sorties de flotte.

Monsieur le ministre, compte tenu de l'importance des quotas de morue pour l'archipel, tout doit être fait pour que la société Interpêche puisse maintenir ses 80 emplois, dont nous ne pouvons absolument pas nous passer dans le marasme économique actuel. Et il en est de même des pêcheurs artisans qui capturent une part de ces quotas. Vous savez aussi que les futures discussions franco-canadiennes se dérouleront pendant – ou à la veille – des élections présidentielles et que les Canadiens souhaitent sans doute réduire les quotas de morue – pourtant déjà extrêmement faibles –, voire instituer un moratoire. Ils sont poussés dans cette voie par le COPESAC, organisme de scientifiques et d’écologistes indépendants qui, sans tenir aucun compte de la présence de la France dans la région ni de son avis, exerce une pression pour classer la morue dans la liste des espèces en voie de disparition. Vous comprendrez donc que les salariés d'Interpêche et les pêcheurs ont besoin d'être rassurés. J'interrogerai d'ailleurs votre collègue Baroin sur l'avenir de la convention qui lie leur employeur à l’État, puisqu’elle vient à échéance cette année.

Cela dit, le Canada n’a pas dénoncé le procès-verbal d'accord de 1994. C’est une bonne nouvelle certes, mais cela dissimule vraisemblablement d'autres intentions, pas obligatoirement favorables pour nous. Qu'en pensez-vous ? Et comment envisagez-vous la suite ? Comment vous préparez-vous aux futures négociations dans le cadre du Conseil consultatif franco-canadien ? Avec quels moyens et selon quel calendrier ?

Une autre activité de diversification importante est la pêche au crabe des neiges, principale activité des Nouvelles Pêcheries. Cette activité saisonnière pourrait s’étendre sur toute l’année si les projets de la direction d’ajouter une valeur ajoutée à certains produits canadiens – homard et crevette – ou d’en assurer le transbordement pour leur permettre d’entrer en franchise de droits sur le territoire européen se concrétisaient. Ces projets attendent l’autorisation de transformation de 2 000 tonnes de crustacés, ainsi qu’une dérogation pour la transformation et le transbordement d’un tonnage important de crevettes. Ces dossiers stagnent. Ils appellent une intervention forte auprès de la Commission européenne. Où en sommes-nous ?

La politique commune des pêches ne s’applique pas à Saint-Pierre-et-Miquelon. Le dispositif de sortie de flotte n’y est donc pas étendu. Votre ministère est-il prêt à soutenir le dispositif adapté proposé par le conseil général et à le soutenir financièrement ?

Monsieur le ministre, dès votre prise de fonction, vous m’avez fait connaître votre souhait de venir à Saint-Pierre-et-Miquelon. Ces dossiers justifient un tel déplacement. Vous savez que vous êtes le bienvenu. Quand viendrez-vous ?

M. le Ministre – Je me rends toujours avec beaucoup de plaisir à Saint-Pierre-et-Miquelon. Nous pourrons nous rencontrer à la mi-janvier et discuter de ces dossiers. La négociation annuelle dans le cadre de l’accord de 1994 sur la pêche entre la France et le Canada allant débuter, nous les aborderons avec la volonté de défendre les intérêts de nos pêcheurs. La possibilité de la pêche à la morue est la priorité, et nous allons engager une réflexion sur les conditions du maintien de l’accord inter-pêches. Parallèlement, dans le cadre d’un groupe de travail avec le Canada sur la coopération de proximité, nous veillons à accorder à la pêche maritime toute sa place parmi les possibilités de diversification. Nous ferons preuve de fermeté avec le Canada pour défendre Saint-Pierre-et-Miquelon.

Je suis favorable aux sorties de flotte dans deux cas : quand la ressource exploitée par un navire demandeur d’une aide à la sortie de flotte fonctionne, et quand il n’y a pas d’alternative pour le navire, car toute sortie aidée signifie la perte irrémédiable des capacités. Pour Saint-Pierre-et-Miquelon, où nous manquons de navires pour exploiter nos quotas, je crois qu’il est préférable d’aider au rachat des navires et à leur modernisation. L’État répondra présent pour ces aides à votre flotte, et je viendrai sur place pour les mises au point.

M. Patrice Martin-Lalande – Ma question concerne la viticulture en Loir-et-Cher. Comme le montre le rapport de Bernard Pomel, l’exportation est le principal objectif si l’on veut assurer l’avenir de notre viticulture. La profession ressent comme injustes les campagnes publiques qui donnent l’impression que le vin est le vecteur par excellence de l’alcoolisme, tandis que la consommation des autres alcools est passée sous silence. Elle ne comprend pas que la France pénalise ainsi ses exportations en imposant la mention « Zéro alcool pendant la grossesse ». Les viticulteurs attendent au contraire que les pouvoirs publics fassent valoir à l’exportation la qualité de nos vins, confrontés à une concurrence de plus en plus impitoyable.

Ainsi que je l’avais fait valoir avec les parlementaires et représentants de la viticulture du Loir-et-Cher le 10 mai 2005 auprès du secrétaire d’État à l’agriculture, et auprès de vous dans ma question orale du 28 février 2006, la situation catastrophique de certains viticulteurs de Touraine demande d’urgence des réponses. L’arrachage d’une partie du vignoble semblant inéluctable, nous demandons au Gouvernement, pour éviter les friches, de prendre des mesures en vue de l’optimisation des terres, à l’instar de ce que permettaient autrefois les OGAF, et d’obtenir de Bruxelles des droits à paiement unique supplémentaires.

Que compte faire le Gouvernement pour maintenir le guichet unique pour l’ensemble des dettes fiscales et sociales, avec la non-prise en compte de l’excédent anormal de stock ? Selon quelles modalités prévoit-il, d’une part, de porter à 24 mois la durée des échéanciers de paiement dans les cas les plus graves et, d’autre part, de maintenir une enveloppe d’aide au départ en préretraite ou en conversion professionnelle ? Comment entend-il, en vue de l’assainissement et de l’équilibre du marché, compléter les insuffisants crédits européens au régime de restructuration et de reconversion ? Comment prendra-t-il en charge les frais de mutation des parcelles à échanger afin de sauvegarder les meilleurs terroirs, alors que certaines vignes vont être abandonnées ?

M. le Ministre - Il est vrai que, sur l’ensemble des vignobles de la Loire et de l’Orléanais, c’est l’appellation Touraine qui connaît le plus de difficultés. Nous avons déjà essayé d’aider les viticulteurs du Loir-et-Cher, à votre demande, Monsieur le député, par des aides de trésorerie d’un montant de 150 000 euros, ce en sus des mesures habituelles : distillation de crise, mesures de préretraite… Nous avons par ailleurs obtenu de l’Europe des enveloppes de restructuration que nous pourrions utiliser pour votre vignoble. Je vous propose d’organiser prochainement une réunion de travail avec les représentants de l’appellation Touraine pour examiner les difficultés de celle-ci.

En ce qui concerne le souci de communication que vous évoquez, et la « criminalisation » du vin, nous avons mis en place le Conseil de la modération, présidé par Michel Rouger, qui fait un travail remarquable. Avec ce Conseil, qui donne son avis en amont de toute campagne, nous disposons de l’enceinte de dialogue entre la viticulture, la santé et le monde associatif qui nous manquait.

M. Jean-Marie Binetruy - Thierry Mariani souhaite vous faire part des spécificités de l’agriculture du Vaucluse. À la demande de la chambre d’agriculture de ce département et de la FDSEA, les sept parlementaires du Vaucluse vous ont adressé un courrier visant à vous alerter sur l’incidence du contrat de plan État-région pour 2007-2013 sur l’agriculture vauclusienne. Ils décrivaient ainsi les trois priorités que représentent la compétitivité des entreprises agricoles, la politique foncière et le développement d’un réseau hydraulique moderne.

Face à ces enjeux, la dotation budgétaire de 35 millions d’euros pour la région PACA paraît pour le moins insuffisante, notamment pour le Vaucluse, totalement dépendant de l’activité agricole. Cette enveloppe diminue de 63 % par rapport à la programmation 2000-2006, baisse qui pénalisera principalement le Vaucluse, alors que la crise que connaissent actuellement les secteurs des fruits et légumes et de la viticulture appellent des efforts financiers importants. Les programmes de sortie de crise n’y résisteront pas. Il est donc indispensable de rechercher d’autres crédits nationaux, qu’il s’agisse des crédits d’office ou de ceux nécessaires à la sécurisation de la ressource hydraulique. M. Mariani vous demande donc, Monsieur le ministre, si vous serez en mesure de revoir à la hausse la dotation prévue pour la PACA.

M. le Ministre – Suite au courrier de M. Mariani et des autres parlementaires, nous avons considéré qu’il fallait améliorer les propositions de l’État en faveur de la région et dégager des moyens complémentaires. Nous allons donc rajouter un montant significatif, encore soumis à arbitrage, aux 17 millions déjà prévus. Par ailleurs, les plans nationaux pour la viticulture et l’arboriculture seront poursuivis dans le Vaucluse. De manière générale, les offices responsables continueront d’agir au-delà des mesures prévues par le contrat État-région. Enfin, je sais qu’il existe dans le Vaucluse un problème d’irrigation agricole ; nous sommes disposés à mettre en œuvre des programmes d’irrigation adaptés au contexte local.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier – Les systèmes d’élevage à base d’herbe contribuent au maintien des espaces et des paysages, à la préservation de la biodiversité et de la qualité de l’eau, et à la protection contre l’érosion des sols. Instituée en 2003, la prime herbagère agro-environnementale, la PHAE, est destinée à faciliter la souscription de mesures agro-environnementales pour stabiliser les surfaces en herbe, en particulier dans les zones menacées de déprise agricole, comme les massifs, et d’y maintenir des activités respectueuses de l’environnement.

Alors qu’elle était jusqu’à ce jour cofinancée par l’Union européenne, le Gouvernement a décidé, pour les années à venir, de la prendre entièrement à sa charge. Ce choix tient, d’une part, à la diminution des crédits du FEADER alloués à la France pour 2007-2013, et, d’autre part, au souci d’assurer un accès équitable au dispositif.

Vous avez annoncé, Monsieur le ministre, que ces crédits seraient du même ordre que ceux consacrés à la PHAE et aux contrats territoriaux d’exploitation « herbagers » pour 2003-2006. Le montant de l’enveloppe sera donc maintenu, alors que le nombre de bénéficiaires sera, lui, élargi, ce qui revient à instaurer une PHAE moins favorable pour les actuels bénéficiaires de la PHAE ou de CTE herbagers. Et qu’en sera-t-il des jeunes agriculteurs ?

En ma qualité d’élu d'une circonscription de montagne, je me dois de vous rappeler que cette mesure, accompagnée de l’indemnité compensatoire des handicaps naturels, est indispensable pour maintenir un tissu d'exploitations viables et modernes en zones de montagne, dans le Massif Central en particulier. Ces deux dispositifs, cruciaux pour l’aménagement du territoire, doivent être préservés. Je comprends votre souci d’équité, mais la spécificité des territoires à handicaps permanents, où l'élevage extensif est la base même de la société et de l'économie locales, doit être reconnue et faire l'objet d'une attention particulière. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet, Monsieur le ministre ?

M. Michel Bouvard - Très bien !

M. le Ministre – Comme je l’ai indiqué, le Gouvernement a choisi d'exclure la PHAE du cofinancement européen pour la période 2007-2013. En tout état de cause, les crédits nationaux consacrés à la nouvelle mesure seront du même ordre que le cumul des crédits nationaux et communautaires qui avaient été consacrés à la PHAE et aux CTE herbagers pendant la période 2003-2006, soit 260 millions par an. De plus, par exception, en 2007, les nouveaux contrats resteront cofinancés si une part importante de crédits communautaires reste mobilisée pour le cofinancement des contrats conclus avant le 1er janvier 2007. Le budget 2007 prévoit ainsi 117 millions au titre de la prime à l'herbe, qui seront complétés par quelque 143 millions de crédits communautaires. Tout autre dispositif serait impossible à mettre en œuvre, car la Commission européenne ne l’accepterait pas.

Non seulement la PHAE sera maintenue mais, s’agissant de l'indemnité compensatoire des handicaps naturels, une revalorisation des 25 premiers hectares est prévue pour 2007 au bénéfice des zones de montagne, où il est effectivement indispensable de préserver l’agriculture. Vous le voyez, ces mesures sont maintenues, et nous sommes prêts à les augmenter, mais nous devons respecter les règles communautaires. Vous n’avez donc pas de craintes à avoir, et je suis tout disposé à me rendre à nouveau dans votre département pour évoquer ces questions avec vous.

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Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales

État B

Art. 34

M. le Président – J’informe l’Assemblée que je suis saisi par le groupe UDF d’une demande de scrutin public sur l’amendement 120 rectifié.

M. Jean Dionis du Séjour – L’amendement 120 rectifié concerne la gestion de l’eau en agriculture. Le changement climatique est réel, l’ouest de la France a déjà connu un réchauffement de 2 degrés au cours des soixante dernières années et les épisodes de sécheresses se font de plus en plus fréquents. Une nouvelle politique de l’eau, au service de l’agriculture et de l’écologie, alliant économie de la ressource et création de nouvelles ressources, est une nécessité impérieuse. Or, un des points faibles de votre budget, Monsieur le ministre, est qu’en cette matière il va à contresens. Car si 18 millions sont alloués à l’hydraulique agricole, dix seulement le seront en réalité, les huit autres étant consacrés à des opérations conduites outre-mer, dont je ne conteste au demeurant pas l’utilité. Ce montant est insuffisant pour engager la politique indispensable. Je propose donc d’augmenter de 10 millions en crédits de paiement les crédits alloués à l’hydraulique agricole, cette hausse étant compensée par une réduction de 10 millions des crédits du programme « conduite et pilotage des politiques de l’agriculture ».

Je conçois que la compensation que je propose puisse être difficile à mettre en œuvre. L’idée m’est donc venue, au cours du débat, que l’on pourrait procéder autrement. Votre budget, Monsieur le ministre, comporte encore de nombreuses lignes relatives aux charges de bonifications, bonifications qui n’ont plus guère de sens, l’écart avec les taux du marché s’étant considérablement resserré. C’est si vrai que vous les supprimez progressivement, à juste titre. Il me paraît donc possible d’agir par ce biais et je m’en remets à vous, Monsieur le ministre, pour trouver la meilleure solution technique.

M. Alain Marleix, rapporteur spécial de la commission des finances pour l’agriculture, la pêche, la forêt et les affaires rurales – La commission n’a pas examiné l’amendement. Je tiens à souligner l’effort consenti par le Gouvernement en faveur de l’hydraulique agricole, dont les crédits, qui étaient de 14,5 millions en 2006, passeront à 18 millions en 2007…

M. Jean Dionis du Séjour - Mais non ! Ils ne seront que de 10 millions.

M. le Rapporteur spécial - À titre personnel, je suis favorable à ce que cet effort, déjà substantiel, soit encore accru de 5 millions.

M. le Ministre – Vous demandez, Monsieur Dionis du Séjour, une augmentation de crédits de dix millions que nous n’avons pas les moyens de financer. Mais je suis prêt à accepter la proposition du rapporteur spécial, et à vous soumettre un nouvel amendement prévoyant 5 millions d’autorisations d’engagement supplémentaires pour le programme « gestion durable de l’agriculture, de la pêche et du développement rural ».

M. Jean Dionis du Séjour – Je me félicite qu’un mouvement s’engage, et je me rallie à cette proposition.

M. le Président – Je suspends la séance un bref instant pour permettre la rédaction d’un nouvel amendement par le Gouvernement. Monsieur Dionis du Séjour, maintenez-vous votre demande de scrutin public sur l’amendement 120 rectifié ?

M. Jean Dionis du Séjour – Non, Monsieur le Président.

La séance, suspendue à 0 heure 12 le vendredi 10 novembre, est reprise à 0 heure 14.

M. le Président – Je suis saisi par le Gouvernement de l’amendement 207, par lequel les autorisations d’engagement du programme « gestion durable de l’agriculture, de la pêche et du développement rural » sont augmentées de 5 millions, le programme « valorisation des produits, orientation et régulation des marchés » étant diminué d’autant.

M. Jean Dionis du Séjour - Je remercie le ministre pour son écoute et sa réactivité et je retire l’amendement 120 rectifié au profit de celui du Gouvernement. Mais j’aimerais que le ministre précise que ces 5 millions sont bien pour l’hydraulique. Comme ils sont dans la colonne « gestion durable », j’ai peur que leur destination hydraulique se perde un peu dans la tuyauterie, si j’ose dire. (Sourires)

M. Germinal Peiro – Le problème soulevé par M. Dionis du Séjour est important et nous savons tous que le réchauffement climatique rend une action encore plus indispensable, en particulier pour tout le quart sud-est de la France. Mais ce travail en direct donne une impression de bricolage…

M. Jean Dionis du Séjour – Pas du tout !

M. Marc Le Fur – Ne dites pas cela ! On ne pourrait rien bouger ?

M. Germinal Peiro – …il est permis de regretter que des questions aussi sérieuses se règlent sur un coin de table (Protestations sur les bancs du groupe UMP) à minuit passé, après deux minutes de suspension de séance ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) J’ai tout de même le droit de me demander quel effet aura le retrait de 5 millions d’euros sur le programme « valorisation des produits, orientation et régulation des marchés » ! Nous savons tous que c’est un programme nécessaire.

M. André Chassaigne – La loi sur l’eau va bientôt revenir en deuxième lecture et nous aurons alors l’occasion de reparler des problèmes hydrauliques. En attendant, nous voterons contre cet amendement, compte tenu des lignes sur lesquelles il prend. Ce sont toujours les mêmes orientations de non-remplacement des départs en retraite, de réduction des frais de fonctionnement…

M. Jean Dionis du Séjour – Non, ce n’est plus cela du tout.

M. Michel Bouvard – On prend sur les bonifications.

M. André Chassaigne – Dans ce cas, nous nous abstiendrons.

L'amendement 207, mis aux voix, est adopté.

M. Michel Bouvard - Mon amendement 110 a pour objet d’augmenter les moyens du service de restauration des terrains en montagne. Fondé en 1880, ce service est spécialisé dans les zones à risque. Il dirige, pour le compte de l’État ou des collectivités territoriales, les travaux qu’il convient de faire sur les torrents, contre les avalanches, contre les éboulements… Il conseille aussi les collectivités pour leurs documents d’urbanisme et étudie les permis de construire dans les zones exposées aux risques naturels. C’est donc un service vital pour la sécurité des personnes et des biens.

L’Association nationale des élus de la montagne a adopté un vœu unanime en faveur du service RTM, et ce alors que l’État et l’ONF négocient une nouvelle convention pour la période 2007-2011. Il y a plusieurs mois, j’avais demandé, en tant que président de la commission permanente du Conseil national de la montagne, que celle-ci puisse entendre les différents ministres concernés – donc aussi les ministres de l’équipement et de l’écologie – sur le contenu de cette convention. Je renouvelle cette demande.

Les moyens du RTM augmentent certes dans leur partie « agriculture », mais nous n’avons pas de nouvelles du ministère de l’écologie et encore moins de celui de l’équipement, ce qui nous fait craindre que le RTM ne puisse plus accomplir son travail de conseil en urbanisme, chose qui serait très regrettable, car aucune autre structure n’a le même savoir.

La LOLF ne me permettant pas d’aller chercher des crédits pour le RTM dans d’autres missions, la seule solution est un redéploiement interne à la mission « agriculture ». Mais peut-être obtiendrez-vous, Monsieur le ministre, que les autres ministères participent au fonctionnement du RTM dans des conditions satisfaisantes.

M. le Rapporteur spécial – La commission des finances n’a pas examiné cet amendement, mais il n’aura pas échappé à la sagacité de son vice-président que les moyens du RTM augmentent de 10 millions d’euros.

M. Michel Bouvard – Je l’ai dit.

M. le Rapporteur spécial – À titre personnel, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. le Ministre – M. Bouvard sait combien j’aime le RTM (Sourires). D’ailleurs, comme vient de le dire le rapporteur, les moyens de ce service augmentent. J’ai par ailleurs entamé une série de réunions visant à lui assurer un financement plus interministériel, car il n’y a pas de raison pour que le ministère de l’agriculture soit le seul contributeur à ce service, qui est par nature interministériel.

Pour autant, je ne suis pas favorable à cet amendement, qui retire 10 millions aux offices, alors que ceux-ci n’ont pas de moyens en trop. Si l’on veut agir pour le vin, pour les fruits et légumes, il ne faut pas toucher au financement prévu. Je vais essayer d’obtenir des concours supplémentaires pour le financement du RTM, Monsieur Bouvard, mais au nom de l’équilibre global de notre politique agricole, je vous prie de retirer votre amendement.

M. Michel Bouvard – Au bénéfice de cet engagement et sachant que la réunion demandée par la commission permanente du Conseil national de la montagne aura bien lieu, je retire mon amendement, tout en insistant pour que les problèmes d’impayés concernant des travaux exécutés soient réglés. Il faudra pour cela des moyens dans le prochain collectif.

L’amendement 110 est retiré.

M. le Rapporteur spécial – Nous savons tous l’importance pour les territoires défavorisés des indemnités compensatrices de handicap naturel ou ICHN. Après l’immobilisme de la période 1997-2002, l’engagement avait été pris au plus haut niveau de l’État de les augmenter de 50 % au cours de la législature, exercice budgétaire par exercice budgétaire. Le Gouvernement nous propose cette année une hausse de 5 %, ce qui représente un effort important. Dans son amendement 35, le seul qu’elle ait adopté, la commission des finances propose toutefois d’aller plus loin afin de s’approcher davantage de l’objectif qui avait été fixé.

Mais nous sommes conscients que cet amendement poserait un problème juridique au niveau européen, puisque l’on risquerait d’atteindre le plafond. Il poserait aussi un problème financier puisqu’une augmentation de 5 % correspond à 8 millions pour la part nationale. Je l’avais donc gagé sur les crédits d’administrations dont le fonctionnement a été montré du doigt, dont les offices.

M. André Chassaigne – C’est un peu facile !

M. le Rapporteur spécial – Si l’on prend au sérieux les observations de la Cour des comptes, il faut leur donner suite.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier – Vous avez parfaitement raison.

M. le Rapporteur spécial – Mais je reconnais que les offices, sous la pression du Gouvernement, font un effort important pour rationaliser leurs dépenses, et par exemple se regrouper à Montreuil. Dans ces conditions, je suis amené à retirer l’amendement, sous réserve que M. le ministre s’engage de façon solennelle à poursuivre cette politique et à tendre vers l’objectif de revalorisation de 50 % d’ici à la fin de la législature en juin.

M. le Ministre – Beaucoup d’entre vous ont souligné l’importance de l’ICHN pour les zones de montagne. Nous avons fait des efforts, y compris dans le budget de cette année. Aller plus loin aujourd’hui remettrait en cause le fonctionnement du FEADER et diminuer les crédits des offices irait à l’encontre de notre politique qui consiste à promouvoir le rôle de l’INAO, qui a besoin de moyens supplémentaires. Je prends bien sûr l’engagement de poursuivre l’effort déjà engagé sur les ICHN, notamment en zone de montagne et pour les 25 premiers hectares, parce que c’est une politique nécessaire et que les parlementaires le souhaitent.

M. Germinal Peiro - Les amendements de M. Bouvard, de M. Marleix ou de M. Dionis du Séjour sont de bon sens. Mais nous touchons là les limites de l’exercice budgétaire. On proposait de retirer des crédits au chapitre Régulation du marché et aux offices, alors que nous avons dénoncé, avec les professionnels, le peu des moyens dont ces offices disposent et qu’il faut pouvoir lutter contre les aléas du marché. Le ministre a avoué qu’il ne lui resterait pratiquement rien pour faire face à des crises nouvelles, ce qui prouve bien que ce budget de l’agriculture n’est pas bon. Quant à l’engagement pris au sommet de l’État de relever l’ICHN de 50 %, il rejoint toutes les promesses non tenues.

M. le Ministre – Ayant été quelque temps ministre du budget, je peux vous dire que si nous n’avions pas trouvé 1 000 milliards de dette publique et si la gestion précédente avait été convenable, nous aurions plus de moyens pour mettre en œuvre les politiques de l’État ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. André Chassaigne – Il y a certes une demande réelle. Au sommet de l’élevage dans le Puy-de-Dôme le président de la République a exprimé des intentions qui ont conduit les organisations syndicales à se tourner vers le ministre de l’agriculture avec une certaine fermeté. Élu du Cantal, M. Marleix, comme d’autres, subit la pression des éleveurs du Massif Central. On avait promis une hausse de 50 % sur la mandature, on arrive laborieusement à 35 %. Et M. Marleix, en commission des finances, sans qu’on en ait discuté en commission des affaires économiques ni mesuré les conséquences, nous propose comme remède miracle une augmentation de 5 %. Mais c’est un artifice, car on sait bien qu’on n’ira pas jusqu’au bout, et la réponse du ministre le confirme : comment irait-on à 50 % d’ici juin ? Certes, il faut augmenter l’ICHN, mais en abondant les crédits du ministère, pas en prenant des crédits là où il n’y en a déjà pas assez et en supprimant des politiques publiques ! On en verrait les résultats dans les zones de montagne. Utiliser de tels artifices est choquant.

L’amendement 35 est retiré.
Les crédits de la mission « agriculture, pêche, forêts et affaires rurales », modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

Art. 41

M. Pierre Morel-A-L'Huissier – M. Menuel présente l’amendement 26 car il estime qu’une augmentation en pourcentage des contributions aux chambres d’agriculture conduit à ce que ce soient celles des régions où la fiscalité est la plus lourde qui peuvent augmenter le plus leurs ressources fiscales.

Pour ma part, je suis déjà intervenu sur le financement des chambres d’agriculture des départements ruraux à faible population et j’ai signalé que, pour la Lozère, la taxe pour frais de chambre d’agriculture ne représente que 20 % du budget de cet établissement contre 48 % en moyenne nationale. La Lozère est aussi le dernier département de France pour la valeur ajoutée. Enfin, la situation de ce type de chambres est aggravée par la diminution du FEOGA et le retard de paiement de certaines aides. Elles ne peuvent plus assurer leurs missions essentielles. Vous aviez diligenté une inspection générale sur ce problème, chargée de trouver des pistes de travail. Où en est la réflexion sur la situation des chambres d’agriculture un peu fragiles ?

M. le Rapporteur spécial – La commission n’a pas examiné cet amendement. À titre personnel, j’y suis défavorable. L’augmentation demandée signifie un accroissement des charges pour les agriculteurs de ces départements et risquerait d’entraîner des disparités entre chambres au détriment des plus petites. Un encadrement national s’impose.

M. le Ministre – Je fais miens ces arguments. Il est vrai que certaines petites chambres d’agriculture sont en difficulté, et même en grande difficulté outre-mer. Nous avons toujours essayé de trouver des solutions. Par exemple, les chambres régionales des comptes les ont aidées à se restructurer. J’ajoute qu’un système de financement à la carte risquerait d’être anticonstitutionnel.

Enfin, les élections aux chambres d’agriculture auront lieu en janvier, avec une bonne participation je l’espère, puisque ce sera par correspondance. Attendons que nos nouveaux interlocuteurs soient désignés. Je ne suis pas hostile ensuite à rencontrer les représentants de l’assemblée permanente des chambres d’agriculture pour examiner si les dispositions législatives sont adaptées et réfléchir sur les missions d’avenir de ces organismes.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier - Je comprends la position de M. Menuel. Mais je me range aux arguments du rapporteur et du ministre et je retire l’amendement.

L'article 41, mis aux voix, est adopté.

après l'Art. 41

M. Marc Le Fur - L’amendement 115 est un amendement technique. Des quotas ont été instaurés pour gérer la production laitière. Les agriculteurs qui dépassent leur quota doivent être sanctionnés, comme les pays qui dépassent leur quota national le sont. L’amendement 115 permet d’adapter cette taxation aux évolutions européennes.

M. le Rapporteur spécial - Avis favorable.

M. le Ministre - Même avis et je lève le gage.

L'amendement 115, mis aux voix, est adopté.

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Développement agricole et rural

État D

Les crédits de la mission « développement agricole et rural », mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président – Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs à l’agriculture, à la pêche, à la forêt et aux affaires rurales.

La suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2007 est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu, ce matin, à 9 heures 30.
La séance est levée à 0 heure 45.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

© Assemblée nationale