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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du vendredi 17 novembre 2006

Séance de 9 heures 30
26ème jour de séance, 55ème séance

Présidence de M. Jean-Luc Warsmann
Vice-Président

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

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loi de finances pour 2007-seconde partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007.

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Transports

M. le Président – Je rappelle que la discussion des crédits de cette mission a eu lieu à titre principal en commission élargie.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer – Devant cette commission élargie, le 8 novembre, j’ai tenté de répondre à vos questions en toute clarté. Je remercie les rapporteurs qui, ayant accompli un travail minutieux et d’une grande valeur, ont émis une appréciation positive sur l’action du Gouvernement dans de nombreux domaines de la politique des transports.

De fait, la politique de sécurité a permis d’épargner 8 700 vies et 110 000 blessés entre 2002 et 2005. Au cours des neuf premiers mois de 2006, le nombre de tués sur la route a encore diminué de 15,3 %. Ces résultats sont encourageants et nous entendons poursuivre cette politique en 2007 et, de manière générale, renforcer la sécurité de tous les modes de transport en augmentant les crédits d’entretien des routes et de renouvellement des voies ferrées, ainsi que les investissements pour la sécurité maritime.

Comme le soulignent plusieurs rapporteurs, nous avons consenti un effort important pour les investissements dans les infrastructures. La création de l’AFITF, l'agence de financement des infrastructures de transport de France, et l’affectation de 4 milliards de recettes de privatisation des sociétés concessionnaires d’autoroute ont permis d’accélérer considérablement les chantiers de construction, ce dont profitent le secteur du BTP et l’emploi.

Outre les chantiers dont la liste avait été arrêtée lors du CIADT de 2003, l’AFITF a permis d’accélérer des opérations en contractualisation avec les régions. Les résultats sont encourageants. Elle est également un outil permettant de réorienter des ressources qui proviennent uniquement du secteur routier vers le financement de projets ferroviaires, maritimes et fluviaux, donc pour le développement d’un système multimodal. Certains ont regretté que l’indépendance de l’AFITF ne facilite pas le contrôle parlementaire, même si des parlementaires siègent à son conseil d’administration. Je m’engage donc à améliorer votre information, à transmettre aux commissions le rapport d’activité annuel de l’agence et à en discuter avec vous.

Notre politique vise également à mieux protéger l’environnement. Certes, la route assure encore 80 % des transports de marchandises. Mais je souhaite, par une politique volontariste, encourager le développement des autres modes de transport. M. Saddier a bien voulu souligner mon engagement en faveur des autoroutes ferroviaires ou maritimes. Hier, le Président de la République et moi-même avons pris avec nos partenaires espagnols l’engagement de lancer avant la fin de l’année l’appel à projet pour l’autoroute maritime entre le nord-ouest de l’Espagne et le nord de la France. Les transports fluviaux, avec une croissance de 30 % depuis 2002, connaissent aussi un succès grandissant. S’agissant de la circulation routière, le recul de 1,4 % enregistré cette année concerne surtout les voitures particulières. Mais il faut souligner le dynamisme des transports collectifs, en particulier des TER grâce à la SNCF et aux régions.

De plus en plus, nous mènerons des politiques incitatives, par exemple en adaptant le montant des péages routiers au niveau de pollution du véhicule, afin de favoriser les comportements vertueux et de faire mieux respecter l’environnement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Explications de vote

Mme Annick Lepetit – Le budget que vous nous présentez est le reflet de décisions déjà prises – la décentralisation et la privatisation des sociétés concessionnaires d'autoroutes qui ont pour conséquence le dévoiement du rôle de l'AFITF – plus que d’une réelle volonté politique.

La diminution de 4 % des crédits s’explique ainsi par le transfert des routes nationales : à périmètre constant, ce budget est simplement reconduit par rapport à 2006.

Sur les 16 180 kilomètres de routes transférées, 13 % sont en très mauvais état, faute d'entretien régulier. N’accorder que 185 millions aux départements pour les mettre aux normes est très insuffisant. Nous proposerons par amendement d’accroître ces moyens.

Quant au programme « transports terrestres et maritimes », censé favoriser le rééquilibrage des modes de transport, ses crédits baissent de 9 % ! Alors que le transport routier est responsable de 94 % des émissions de gaz à effet de serre liés aux transports, le Gouvernement montre qu’il ne s’intéresse ni à la diversification des modes de transport ni au développement durable.

Le rail est ainsi particulièrement sanctionné dans ce budget. Nous sommes bien loin des promesses de mars 2006 sur la régénération : 1 500 km du réseau ont été mis en ralentissement, et bien d'autres tronçons ne sont plus aux normes. Dans son audit, l'École polytechnique de Lausanne préconisait d’augmenter de 500 millions par an les crédits affectés au réseau pour en garantir la qualité. Bien loin de cela, vous annoncez 110 millions de crédits supplémentaires en 2006 et 260 en 2007 pour le renouvellement des voies et le traitement des ralentissements. Pendant ce temps, le réseau se dégrade. En février dernier, un train Corail a déraillé à Saint-Flour à cause de la rupture d'un rail, ce qui aurait pu avoir des conséquences plus graves si la voie avait été en remblai.

De surcroît, sur les 110 millions inscrits pour 2006, 70 ont simplement été transférés de la ligne « contribution au désendettement » à la ligne « subvention de régénération », et le reste a dû être pris sur les ressources de RFF et de la SNCF. Même observation pour 2007 : seul le versement de 46 millions de l’AFITF découle d’une véritable volonté politique, le reste relevant d’économies, de réalisations d’actifs ferroviaires ou d’augmentations de péage à la charge des collectivités locales.

L’AFITF ne devait initialement consacrer le produit de la cession des autoroutes – dont seuls quatre milliards sur quatorze lui ont été versés – qu’aux projets du CIADT – à 75 % dédiés au fer. Or, elle est désormais en charge des contrats de plan, des transports urbains et même de la protection du littoral ! Au bout du compte, la route recueille 45 % des crédits, les autres modes de transport se partagent le reste. Plus grave encore : il manque à l’AFITF sept milliards pour financer les projets prévus jusqu’en 2012 : lesquels sacrifierez-vous ? Pour trouver de nouvelles recettes, vous ne comptez que sur le partenariat public-privé : le porter à un tel degré est déraisonnable.

Hélas, ce budget confirme aussi la non-reconduction des subventions de l’État aux plans de déplacements urbains.

Les cinquante millions consacrés aux transports en commun en site propre ne suffiront pas à corriger les profondes disparités qui subsistent, surtout s’ils sont aussi affectés à des projets nouveaux.

En Île-de-France, le désengagement de l’État en matière de transports collectifs est alarmant. Il faut absolument revoir à la hausse la participation de l’État au futur contrat de projets, comme vous l’avez annoncé en commission. Le chèque transport ne saurait à lui seul promouvoir l’utilisation des transports collectifs, ni compenser l’augmentation des frais pour nos concitoyens. Il aurait mieux valu rétablir la TIPP flottante !

Enfin, les crédits du transport aérien diminuent de 13 %. Mme Saugues l’a dit : ce n’est pas à la mesure des défis actuels.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous voterons contre l’adoption de ces crédits.

M. Charles de Courson – En commission élargie, M. Folliot a énuméré les nombreux problèmes liés aux transports, de l’impact des retraites sur les comptes des entreprises publiques aux contraintes environnementales. Je n’en rappellerai ici que deux.

Tout d’abord, la dette de 8,2 milliards de la SNCF devra, en application des normes IFRS, être intégrée aux comptes de l’entreprise pour 2007 ; ainsi, son passif net serait de 3,4 milliards. L’absence de toute contrepartie contraindrait la présidente à saisir le procureur pour recapitaliser l’entreprise. Plusieurs d’entre nous ont été choqués par le refus du ministre du budget de déposer un amendement gouvernemental à la loi de finances initiale permettant à la SNCF d’inscrire cette contrepartie dans son bilan. On ne peut tout de même pas engager l’État à hauteur de 8,2 milliards par une simple lettre ministérielle : une disposition législative s’impose ! D’ailleurs, l’UDF fut seule à demander, tout en la soutenant, que la loi Fillon aille plus loin. En effet, la seule solution raisonnable consiste à éliminer peu à peu les régimes spéciaux en soumettant tous les nouveaux entrant au régime général. Ainsi, nous sortirions d’un système de plus en plus inégalitaire tout en maintenant ses bénéficiaires actuels dans leurs droits acquis.

L’AFITF, ensuite. L’UDF avait soutenu la première version de son financement, qui comprenait le produit de la cession des autoroutes. Dix-huit mois plus tard, le Gouvernement chamboule tout en lui consacrant quatre milliards seulement de ces dividendes : c’est inacceptable ! Dès 2008, l’AFITF ne sera donc plus en mesure de financer ses projets. Dans la longue liste des farces et attrapes budgétaires, cet incroyable montage fait bonne figure ! Jugez plutôt : l’État cède des actifs et reverse une partie du dividende ainsi obtenu à l’AFITF qui, à son tour, verse des fonds de concours à l’État, lui permettant du même coup d’afficher un budget en diminution !

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques pour les transports aériens – C’est une véritable machine à tromper les citoyens !

M. Charles de Courson – D’autant plus que le ministre des transports, de son côté, argue que ces fonds de concours permettront de financer davantage de projets !

Mme la Rapporteure pour avis – C’est ubuesque !

M. Charles de Courson – Et je passe sur le montage organisé avec l’UNEDIC, qui paie 550 millions de créances alors que la dotation budgétaire baisse d’autant ! Quel budget d’artifice !

Mme la Rapporteure pour avis – Quelle clairvoyance !

M. Charles de Courson – Je plains votre successeur, Monsieur le ministre : il n’aura d’autre solution pour boucler son budget que de céder d’autres actifs publics et d’en consacrer le produit à l’AFITF. Ce n’est pas sérieux.

Mme la Rapporteure pour avis – Merci de le dire !

M. Charles de Courson – Il y a pourtant de bonnes choses dans ce budget, en matière de transports aériens ou de sécurité routière par exemple. Hélas, les défauts l’emportent sur les qualités : c’est pourquoi l’UDF ne le votera pas.

M. François Liberti – Alors que les transports sont la première source d’émissions de gaz à effet de serre, ce budget, une fois de plus, n’est pas à la hauteur du défi. Les crédits de la mission diminuent de 5,3 %, le niveau des dépenses n’est maintenu que grâce aux fonds de concours des collectivités, et 1,4 milliard est à mettre au compte d’une recette ponctuelle – la cession des autoroutes.

Surtout, le mythe du marché régulateur guide votre action, avec son corollaire, le laisser-faire. Ainsi, aucun soutien n’est accordé aux tarifs du rail, ce qui aiderait pourtant les régions à investir et à rouvrir des lignes. De même, la dette de RFF est maintenue à 730 millions, bien que les péages de la SNCF soient en hausse constante, entravant ainsi la nécessaire modération tarifaire.

Les crédits de fonctionnement des infrastructures fluviales diminuent également, de dix millions. Pourtant, un kilogramme de pétrole permet de déplacer des marchandises sur 275 kilomètres de voies navigables quand il ne permet d’en faire que 50 par la route ; le gain écologique est donc réel !

Enfin, le montant de l’aide au démarrage a été divisé par quatre depuis 2001, alors que son périmètre s’est élargi à tous les transports combinés.

En revanche, vous confirmez vos choix en faveur de la route, pourtant responsable de 94 % des émissions de gaz à effet de serre dans les transports, puisque l’AFITF y consacre 45 % de ses crédits. N’est-il pas temps d’en considérer les conséquences, d’autant plus que le pavillon français perd des parts de marché dans un secteur, le transport routier, où l’on ne peut s’aligner sur les pratiques de concurrents à bas coûts ?

Le laisser-faire que vous prônez nuit aussi à la politique de sécurité. Ainsi, vous cédez au lobby routier en exonérant les employeurs de cotisations sociales, alors que les camionneurs sont souvent impliqués dans des accidents – ce qu’expliquent notamment les rudes conditions de travail auxquelles ils sont soumis. De même, les crédits du transport aérien diminuent de 12,9 % : c’est dramatique ! Que pèsera la création de trente postes de contrôleurs face à une concurrence accrue qui contraint les opérateurs à recourir à des sous-traitants peu qualifiés pour les activités de maintenance ?

Enfin, dans le secteur maritime, vous concentrez vos efforts sur le pavillon RIF. En effet, 55 millions seulement sont consacrés à l’entretien des infrastructures des ports autonomes. Quant à l’enseignement maritime, il voit son budget tout juste maintenu, alors que les difficultés de recrutement sont avérées. Avez-vous le secret espoir d’utiliser le RIF pour recourir à des équipages étrangers sous-rémunérés et pratiquer le dumping social ?

Au total, ce budget consacre un désengagement de l’État, alors même que la crise énergétique et le haut niveau de pollution atmosphérique exigeraient qu’il s’implique davantage. Une fois de plus, vous évacuez le débat sur les recettes du secteur des transports, vous contentant de compter sur le marché pour organiser ce secteur. C’est pourquoi le groupe communiste et républicain ne votera pas ce budget.

M. Michel Bouvard – Le groupe UMP vous remercie, Monsieur le ministre, ainsi que toute votre équipe, pour la qualité du travail accompli ainsi que celle des relations établies avec la représentation nationale.

La commission élargie a permis de répondre à de nombreuses questions, même si certaines restent en suspens comme celle de la dette ferroviaire, le financement de la liaison nouvelle Lyon-Turin et du projet Seine-Nord, le transfert des parcs des DDE aux départements, les conséquences de l’annulation du décret relatif au transport routier et d’une manière plus générale, le financement à long terme des infrastructures de transport.

Cette législature, comme entre 1993 et 1997 où nous avions fait voter la création de RFF et la décentralisation des services régionaux de voyageurs – que le groupe socialiste avait combattues –, a permis de nombreuses avancées : décentralisation de la majeure partie du réseau routier national et donc décroisement des financements, renouvellement et modernisation du réseau ferroviaire, renouveau de la politique portuaire avec les projets Le Havre Port 2000 et Marseille XXL, ouverture du fret ferroviaire à la concurrence, réforme depuis longtemps attendue du Syndicat des transports d’Île-de-France, politique de sécurité routière, dont les résultats sont avérés, mise en place de financements de grande ampleur pour les infrastructures.

Les crédits de la mission « transports » diminuent de 1,7 %, comme il est logique après la décentralisation du réseau routier national. Mais les crédits de l’AFITF progressent de 15 % par rapport à 2006 pour s’établir à 2,2 milliards d’euros, alors qu’ils n’étaient que de 900 millions en 2005. Si la moitié de ces crédits est consacrée aux transports ferroviaires et fluviaux, il n’a jamais été question, contrairement à ce que certains prétendent, que l’AFITF ne finance pas d’infrastructures routières. Ceux qui ont en leur temps supprimé le FITTVN sont d’ailleurs mal placés pour aujourd’hui critiquer le fonctionnement et les priorités de l’AFITF !

Nous nous félicitons du financement de trois lignes nouvelles de TGV, le TGV Est qui doit être bientôt livré, le TGV Rhin-Rhône et le TGV Perpignan-Figueras ; de la hausse des crédits d’entretien des routes nationales demeurées dans le patrimoine de l’État ainsi que des 180 millions d’euros prévus pour la compensation du transfert aux départements. Nous nous réjouissons de même de l’augmentation des crédits destinés à la sécurité maritime.

Ce budget est donc un bon budget. Des problèmes demeurent néanmoins qu’il faudra résoudre. C’est le cas de celui de la dette ferroviaire, laquelle n’avait pas diminué entre 1997 et 2002. Il faudra de même assurer durablement le financement des infrastructures. Les ressources actuellement affectées à l’AFITF ne suffiront pas et, au-delà des partenariats public-privé qui constituent une véritable avancée, il faudra trouver d’autres solutions innovantes. Il faudra de même encourager la multimodalité et poursuivre la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Nous aurons à relever demain tous ces défis. Pour l’heure, ce budget pour 2007 marque de bonnes orientations avec le renforcement de la politique d’investissement. C’est pourquoi le groupe UMP lui apportera son soutien total (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

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Transports

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État B

M. le Ministre – L’amendement 139 majore de 1 251 154 euros, au profit des régions, le droit à compensation au titre des services régionaux de voyageurs et porte à 191 551 384 euros le montant du droit à compensation du transfert des routes nationales aux départements. Ces ajustements s’expliquent par le fait que le projet de budget avait été élaboré avant la réunion de la commission consultative d’évaluation des charges. Par cet amendement, nous tenons légitimement compte de ses observations et apportons la preuve, contrairement à ce que certains voudraient laisser accroire, que les transferts sont bien compensés à l’euro près. En aucun cas, les augmentations de la TIPP auxquelles viennent de procéder les régions ne peuvent s’expliquer par une insuffisance de compensation des compétences transférées.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial de la commission des finances pour les transports routiers, ferroviaires, fluviaux et maritimes – La commission des finances n’a pas examiné cet amendement, qu’à titre personnel, j’approuve. Je partage totalement l’analyse du ministre sur les justifications données par les régions à l’augmentation de la part régionale de la TIPP. Alors qu’elles allèguent l’insuffisance de la compensation des transferts, citant souvent l’exemple des routes nationales, cet amendement apporte la preuve du contraire.

M. Michel Bouvard – Sans compter que ce sont les départements, et pas les régions, qui se sont vu transférer les routes nationales, sans qu’ils aient, eux, la possibilité de moduler la part de la TIPP qui leur revient ! Nous voterons bien sûr cet amendement.

Tout en vous donnant acte, Monsieur le ministre, de la compensation scrupuleuse des transferts, je rappelle que n’ont toujours pas été réglées la question des postes actuellement non pourvus dans les DDE et celle de la base de compensation – pied de corps ou moyenne de corps.

L'amendement 139, mis aux voix, est adopté.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial – L’amendement 180 minore de 15 millions d’euros les crédits du programme « soutien et pilotage des politiques de l’équipement » pour majorer du même montant ceux du programme « transports terrestres et maritimes ». La commission s’inquiète en effet du financement des tarifs sociaux de la SNCF, en particulier du tarif famille nombreuse. Il semblerait que les compensations de l’État s’étiolent au fil des ans, pouvant laisser craindre une remise en cause du dispositif à l’occasion d’arbitrages budgétaires au sein de la SNCF. Or, ces tarifs familiaux sont un élément essentiel de la politique familiale, très symbolique de l’importance que nous accordons à celle-ci et très lisible par nos concitoyens.

M. le Ministre – Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Mais soyez rassurés, il n’a aucunement l’intention de réduire les avantages consentis aux titulaires de la carte famille nombreuse. Alors même que le train est le mode de transport le moins polluant, son utilisation est coûteuse pour les familles nombreuses, pour lesquelles la voiture présente rapidement un avantage compétitif. Nous souhaitons promouvoir l’usage du train par ces familles, et le tarif famille nombreuse y contribue. Il n’est pas question de le remettre en cause. Je précise à l’intention du rapporteur que la carte famille nombreuse donne droit à des réductions dans tous les trains de la SNCF sans quotas de places ni exception. Son maintien est une priorité pour le Gouvernement, je m’en suis encore récemment entretenu avec mon collègue Philippe Bas, qui y est très attaché.

Je vous demande donc de retirer cet amendement.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial – Merci de ces précisions sur cet élément important de notre politique familiale. Je retire l’amendement 180.

Les crédits de la mission « transports », modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

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Contrôle et exploitations aériens

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État C

Les crédits de la mission « contrôle et exploitation aériens », mis aux voix, sont adoptés.

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Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route

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État d

Mme Annick Lepetit – Dès lors que le Gouvernement a décidé de transférer aux départements une large part du domaine routier national, il paraît logique de leur attribuer aussi le produit des amendes générées par les radars automatiques installés sur ce domaine, afin qu’ils disposent des moyens de réaliser les investissements nécessaires et d’assurer leur rôle en matière de sécurité des infrastructures. C’est l’objet de l’amendement 68, et des deux qui suivront.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial – Cet amendement n’a pas été examiné par la commission. Je voudrais d’abord souligner que la situation des départements, dans le cadre de la décentralisation du domaine routier, est saine et justifiée. Ensuite, vous prenez ces crédits sur le programme « fichier national du permis de conduire ». Or, la réforme prévue de ce fichier est indispensable à la bonne marche de la politique de sécurité routière. Elle permettra entre autres l’ouverture du site internet de consultation des points, grâce auquel nos concitoyens pourront connaître leur situation au jour le jour. Il serait particulièrement dommage de supprimer ces crédits, quand par ailleurs les règles arrêtées afin que les départements puissent réaliser les investissements sur le domaine routier sont tout à fait satisfaisantes.

La répartition du produit des amendes des radars automatiques se fait entre le compte d’affectation spéciale qui a été créé l’année dernière et l’AFITF, le surplus devant, grâce à un amendement de Michel Bouvard, être attribué aux conseils généraux. Cela permet donc à la fois d’intéresser les conseils généraux à cette politique, de la financer et d’abonder l’Agence. L’an dernier, nous nous étions interrogés sur la justification des crédits de l’AFITF relatifs à la sécurité routière. Démonstration a été faite que les travaux qu’ils ont permis de réaliser, en particulier des mises à deux fois deux voies, ont entraîné une diminution de l’accidentalité. La répartition des fonds entre ces trois bénéficiaires me semble donc devoir assurer la cohérence de notre politique de sécurité routière. Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. le Ministre – Même avis.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances pour les transports aériens et la météorologie  Cet amendement pose tout de même une vraie question. Je pense que la solution qu’il propose n’est pas la bonne mais, Monsieur le ministre, si les conseils généraux fixaient un loyer d’occupation du domaine public départemental pour les radars, cette délibération serait-t-elle illégale ?

M. le Ministre – Je crois que nous n’avons pas la même conception de la décentralisation. Je considère que l’intérêt général est l’affaire de l’ensemble des collectivités publiques, qui s’en partagent la charge. Votre conception étonnamment patrimoniale de la prise en charge de l’intérêt général me paraît totalement décalée.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial – Je regrette que vous le preniez comme cela. Y a-t-il des radars sur les anciennes routes départementales ?

M. le Ministre – Évidemment !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial – Évidemment que non !

M. le Ministre – On peut en mettre sur des voies communales !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial – Il n’y a aucun cas de radar automatique installé sur des voiries qui étaient communales ou départementales avant le transfert du 1er janvier. Aucun.

M. le Ministre – Il y en aura !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial – Mais il faudra l’autorisation du président du conseil général ! Il faudra négocier avec les détenteurs du domaine public.

M. le Ministre – Et comment fait-on pour les radars mobiles ?

M. Charles de Courson, rapporteur spécial – Pourquoi ne répondez-vous pas plutôt à ma question : si un conseil général décide d’un loyer, cette délibération est-elle légale ?

M. le Ministre – Le débat que vous ouvrez est politique : on ne peut se contenter d’un point de vue juridique. La question n’est rien moins que de savoir qui a la responsabilité de la sécurité des Français. Je pense que c’est l’État, et qu’il doit mettre en mesure l’ensemble des collectivités publiques d’assumer cette charge avec lui. Votre question dénote, je vous le dis avec amitié et avec respect, une vision de la prise en charge de l’intérêt général qui est très loin de la mienne (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Charles de Courson, rapporteur spécial – Je suis choqué de cette réponse. Mon conseil général mène une politique de sécurité extrêmement active. Nous avons fait des investissements considérables. Ce n’est pas de la seule responsabilité de l’État. Quant au problème que j’ai soulevé, il vient d’un défaut de la loi de décentralisation : vous ne pouvez pas installer un radar fixe automatique sans l’accord du propriétaire du domaine public. C’est incontestable.

M. Jean-Pierre Gorges – C’est d’utilité publique !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial – Cela ne suffit pas.

M. Michel Bouvard – La politique de sécurité est un tout, assumé par l’État et mis en œuvre par l’ensemble des collectivités publiques. L’amendement qui nous est proposé peut certes paraître séduisant mais, l’an dernier, nous nous étions interrogés sur ce que nous devions faire du surplus des sommes dégagées par les radars automatiques, après la part consacrée à l’entretien des radars et à l’AFITF. Historiquement, les fonds issus d’amendes de police ont toujours été répartis entre les départements, selon des règles de péréquation, pour financer des travaux de sécurité. J’avais donc déposé un amendement, que le Gouvernement a bien voulu accepter, visant à ce que le surplus reste affecté aux départements. Ce ne sont pas des sommes négligeables, puisque cela représente environ 60 millions en 2006. Le Parlement ayant voté cette règle, il me paraît difficile de revenir dessus très vite, et il me semble qu’elle répond au souci de nos collègues socialistes.

M. François Liberti – Le vrai problème est celui des conditions financières dans lesquelles s’est faite la décentralisation. La compensation à l’euro près n’est pas assurée, et la confusion des réponses du ministre et du rapporteur montre votre embarras. Le transfert n’a pas pris en compte certaines charges de personnel, non plus que les charges financières liées aux avances que sont obligés de faire les départements en attendant la compensation. Il en est exactement de même pour le RMI et les autres charges qui ont été transférées aux collectivités locales. L’amendement socialiste mérite réflexion. Il n’est aucunement en contradiction avec les règles fixant la répartition du produit des amendes de police.

L'amendement 68, mis aux voix, n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route », mis aux voix, sont adoptés.

après l'Art. 62

Mme Annick Lepetit – Les amendements 67 rectifié et 28 rectifié sont défendus.

Les amendements 67 rectifié et 28 rectifié, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. François Liberti – Qu’est-il advenu de l’amendement déposé par Michel Bouvard sur la dérégulation des salaires des chauffeurs routiers ?

M. Michel Bouvard – Je l’ai retiré : le problème a été réglé au Sénat dans le texte relatif à la participation.

M. le Président – Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs aux transports.

La séance, suspendue à 10 heures 30, est reprise à 10 heures 35.

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médias

Mme la Présidente – Nous en arrivons à l’examen des crédits relatifs aux médias. Je rappelle que la discussion de ces crédits a eu lieu à titre principal en commission élargie.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication – Mesdames et Messieurs les députés, je tiens à vous remercier pour le travail remarquable que vous avez accompli dans ce domaine qui prend une part sans cesse croissante dans la vie quotidienne des Français. Je tiens en particulier à féliciter les rapporteurs M. Martin-Lalande et Mme Bourragué pour la qualité de leurs travaux. Votre vote positif, que j’appelle de mes vœux, permettra de traduire en actes notre politique en faveur de la diversité culturelle, de la création, de l’emploi et du pluralisme, enjeux essentiels au moment où se font jour des mutations profondes, non seulement des technologies, mais aussi des usages de l’information et de l’économie des médias. L’essor de l’internet, les évolutions de la presse écrite – qui lutte pour survivre –, le bouleversement du paysage audiovisuel avec le lancement réussi de la télévision numérique terrestre et l’arrivée prochaine de la télévision du futur : tous ces changements, il incombe aux pouvoirs publics de les anticiper et de les accompagner.

Ce budget est un bon budget, non parce qu’il augmente, mais parce que chacune des augmentations de crédits renforce durablement la spécificité du service public, en développant une offre de qualité en TNT et en haute définition et en favorisant la sauvegarde du patrimoine audiovisuel. La progression de la dotation publique de France Télévisions, l’augmentation des dotations d’ARTE France, l’accélération du plan de sauvegarde et de numérisation de l’INA, mais aussi la négociation du contrat d’objectifs et de moyens avec RFI, vont dans ce sens.

La diversité et le pluralisme sont également des valeurs clés de la presse écrite. En présentant à l’Assemblée nationale constituante, en 1945, le budget de l’information, André Malraux, auquel le président de l'Assemblée nationale a rendu hommage cette semaine, comme je le ferai le 23 novembre, jour du 30e anniversaire de sa mort, déclarait : « La liberté existe pour et par ceux qui l’ont conquise ». La presse écrite est la sœur de cette liberté si chèrement acquise et constitue un pilier de notre démocratie. Votre vote positif sur les lois de finances pour 2005 et 2006 a permis de lui consacrer des moyens exceptionnels. Or, avec un budget de 274 millions, le projet de loi de finances pour 2007 représente un montant de crédits supérieur de plus de 22 % à ce qu’il était il y a deux ans. Comme en 2005 et en 2006, j’ai en effet souhaité soutenir les efforts du secteur en vue d’assurer son indépendance économique et son développement futur.

Ce budget porte une politique d’avenir, cohérente et efficace, dans un secteur des médias en pleine mutation, où notre pays dispose de nombreux talents et atouts auxquels nous devons donner toute leur chance (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Charles de Courson – En commission élargie, le groupe UDF a apporté son soutien à votre budget. Je réitérerai néanmoins l’expression de certaines inquiétudes quant à l’avenir de nos médias, au premier rang desquels la situation de la presse écrite. Nous souhaitons la tenue rapide d’états généraux, qui doivent inclure la presse régionale. Ce secteur est menacé par l’arrivée de quotidiens gratuits, à Paris puis en province.

Par ailleurs, l’UDF regrette que vous n’ayez pas saisi l’occasion de la création de la chaîne d’information internationale pour rationaliser notre paysage audiovisuel extérieur. Ainsi, pourquoi ne pas avoir mutualisé les moyens de TV5 Monde, de Canal France international et de la radio en langue arabe RMC, filiale de RFI ? Quelles mesures comptez-vous prendre, d’autre part, pour améliorer la couverture de la TNT et de Radio bleue ?

Les chaînes indépendantes sur le câble et le satellite ont été omises dans le projet de loi qui va venir en discussion devant le Sénat. Vous avez prévu des avantages pour les opérateurs analogiques, oubliant qu’elles aussi placent de grands espoirs dans les nouveaux modes de diffusion numérique. Elles n’ont pas été autorisées à exploiter la TNT nationale, et leurs chances d’accéder à la TNT locale sont minces.

Pour conclure, l’amendement déposé par le groupe UDF et adopté en commission élargie permettra, sans modifier l’assiette de la redevance, d’exonérer les centres de formation des apprentis du paiement de la redevance au même titre que les établissements d’enseignement publics ou privés. J’espère qu’il recueillera votre soutien. Le groupe UDF votera cette mission (Applaudissements sur les bancs des commissions).

M. François Liberti – Les crédits de l’audiovisuel public, en augmentation de 2,57 %, pour atteindre 2,79 milliards, serviront en priorité à la révolution numérique. Je rappelle que la situation de la presse écrite d’information générale et politique à l’échelon national est toujours incertaine. Les difficultés éprouvées par Le Monde, Libération ou L’Humanité ne sont que des exemples parmi d’autres d’une crise qui tient à la baisse des recettes publicitaires, à la diminution de la diffusion et à l’augmentation des coûts.

On constate une tendance accrue à la pensée unique ainsi qu’à une frilosité des rédactions devant les pouvoirs établis. Comment ne pas évoquer les deux récentes opérations policières, à quelques jours d’intervalle, dont la médiatisation excessive a suscité de vives réactions de la part du syndicat national des journalistes ? Les caméras avaient été convoquées à ce déploiement de forces digne d’une fiction télévisée ! Des policiers désapprouvent d’ailleurs cette médiatisation, qui détruit l’effet de surprise et crée des tensions inutiles.

Alors que l’élection présidentielle de 2002 a montré les dangers de cette « sécurité spectacle », les principaux responsables des médias publics s’engouffrent à nouveau dans une communication ultra-sécuritaire qui ne profite qu’à l’extrême droite et à Nicolas Sarkozy.

M. le Ministre – C’est n’importe quoi !

M. François Liberti – Monsieur le ministre, pensez-vous vraiment que la neutralité des médias soit en la circonstance respectée ?

En second lieu, je m’associe à André Chassaigne pour évoquer une fois de plus les inquiétudes du syndicat national des journalistes de Radio France : suite à de nouvelles coupes budgétaires à Radio France, les journalistes de France Bleue, qui sont également les correspondants régionaux de France Inter et de France Info, devront réduire le volume d’information à l’antenne. Or, les reportages des radios locales représentent plus de la moitié du temps d'information. Cette situation étant perçue comme une catastrophe pour une radio de service public en cette année électorale, la grève du 26 septembre dernier a été d’une ampleur historique : 100 % de grévistes dans 23 rédactions, un taux de 50 % à 85 % dans 14 rédactions et une seule, sur un total de 42, se tenant à l’écart du mouvement ! Or, en commission élargie, vous n’avez pas répondu à nos questions sur le sujet, Monsieur le ministre…

De même, un des articles du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle promet des chaînes « bonus » aux opérateurs privés historiques TF1, M6 et Canal Plus. En contrepartie, il leur est demandé de libérer au plus vite leur fréquence analogique. Ce « bonus » n'est pas du goût des nouveaux entrants de la TNT qui dénoncent les « risques de déstabilisation » et une possible confiscation de cette technologie. Là encore, votre explication en commission élargie n’a pas du tout convaincu.

L'audiovisuel et la presse ne peuvent être régis par les seules lois du marché, la défense du pluralisme des idées et des expressions artistiques impliquant une intervention publique régulatrice. Ce projet de budget ne répondra pas à cette nécessité et nous nous y opposerons donc (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. le Ministre – Et les crédits pour L’Humanité ? (Sourires)

M. Emmanuel Hamelin – En matière d'audiovisuel, le Gouvernement a un bon bilan : lancement réussi de la TNT, perspective d'un réel développement des télévisions locales, chantier de la Haute Définition et de la télévision mobile personnelle.

S’agissant de l'audiovisuel extérieur et même si nous aurions aimé qu'il se réorganise à l'occasion de la création de la chaîne française d'information internationale, nous ne pouvons que nous féliciter du lancement prochain de France 24.

Le budget du service public de l'audiovisuel augmentera de plus de 112 millions en s’établissant à 3,7 milliards, soit une progression de 3,1 %. En 2007, pour la troisième année consécutive, le montant de la redevance audiovisuelle reste inchangé à 116 euros en France métropolitaine et 74 euros outre-mer. Les ressources du compte de la redevance devraient dépasser 2,7 milliards en 2007, soit une progression de 2,6 %. Je tiens également à souligner l'amélioration des outils qui permettent d'évaluer l'activité des organismes du secteur public de l'audiovisuel ainsi que l’application de la LOLF.

La presse écrite contribue à l'information des citoyens et à la diffusion des courants de pensée et d'opinion. Sa vitalité et son avenir sont des enjeux majeurs. Les lois de finances pour 2005 et 2006 ont accru ses moyens de près de 30 %. Je ne peux que me réjouir de leur pérennisation en 2007. Dans un contexte marqué par le développement des nouvelles technologies et de la presse gratuite, le Gouvernement s’attache à accompagner les profondes mutations du secteur. France 24 vise à offrir un point de vue français sur l'actualité du monde pour un public international. Fin 2005, la chaîne d’information internationale a bénéficié d'une dotation exceptionnelle de 15 millions, dont 2 millions pour son fonctionnement et 13 millions pour son équipement. Pour la première année de la chaîne, les crédits votés en LFI pour 2006 s'élèvent à 65 millions, dont 12 millions au titre de la subvention d'investissement. Le montant de la subvention à la société proposé pour 2007 s'établit à 70 millions.

S’agissant de l’audiovisuel extérieur, le programme regroupe l'ensemble des crédits consacrés par le ministère des affaires étrangères, et vise deux objectifs majeurs : rendre accessibles les programmes audiovisuels français aux publics étrangers et à nos compatriotes expatriés ; favoriser la diversité culturelle et la démocratisation des pays du Sud en soutenant la modernisation de leurs médias. Pour 2007, le montant total de l'action audiovisuel extérieur, qui s'élève à 160 millions, est quasiment stable par rapport à 2006.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera les crédits de la mission « médias » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Patrick Bloche – Un rendez-vous budgétaire est toujours, dit-on, un moment de vérité, comme l’illustrent en l’occurrence les crédits de la mission « médias » et du compte spécial « avances à l’audiovisuel public ». Nous reconnaissons au Gouvernement le mérite de la cohérence : oui, ces propositions budgétaires sont en parfait accord avec son incapacité à prendre la mesure des enjeux ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Comment ne pas être saisi par ce manque criant de volontarisme ? Comment ne pas regretter l’absence de réponse face à des changements profonds qui risquent de porter atteinte au pluralisme et à l’indépendance ?

M. Jean-Pierre Gorges – Qu’avez-vous fait lorsque vous étiez au pouvoir?

M. Jean-Pierre Gorges – Alors que les moyens de l’audiovisuel public doivent être renforcés pour relever le défi de la révolution numérique, nous ne pouvons qu’être inquiets. Sous prétexte d’adaptation technologique, le projet relatif à la télévision du futur qui sera examiné au Sénat concentrera dans les mains de quelques puissants industriels les chaînes de télévision, les programmes et l’information. Toute ressemblance avec la loi Gasparri de 2004 qui, en Italie, n’a fait que renforcer la position de Médiaset, groupe détenu par M. Berlusconi, serait évidemment fortuite. TF1, Canal Plus et M6 pourront bénéficier d’une nouvelle chaîne « bonus » lors de l’extinction de leur signal en analogique. Comme si cela ne suffisait pas, un autre cadeau est fait à l’ensemble des groupes audiovisuels privés éditeurs de la TNT en leur donnant une priorité pour l’obtention d’une autorisation d’émettre en haute définition ou en télévision mobile. Le service public ne risque-t-il pas d'être marginalisé ? On ne peut qu’être inquiet à cet égard tant la stagnation du montant de la redevance audiovisuelle empêche depuis quatre ans toute évolution des ressources publiques. Cette année encore, celles-ci n'augmentent que très faiblement – de 0,7 % en euros constants – alors que les ressources propres augmentent, elles, de 3,6 %. Cela ne peut conduire qu'à faire la part trop belle aux recettes publicitaires et à la course à l'audience. Quelle place le service public occupera-t-il s'il n'obtient de sa tutelle que des moyens lui permettant de survivre ? Pourra-t-il réaliser sa mutation en haute définition et, surtout, demeurer une véritable alternative pour les téléspectateurs ?

Nous exprimons la même inquiétude quant à l'avenir des radios publiques. Depuis trois ans, l'augmentation des moyens alloués à Radio France s'explique principalement par la dotation accordée pour les travaux de la Maison de la radio. La marge de manœuvre est donc insignifiante. Comment, dans ces conditions, le premier groupe radiophonique français peut-il maintenir son rang face à la concurrence des radios commerciales, étendre la diffusion de la FM, déployer la radio numérique ou encore développer des chaînes thématiques ? De même pour Radio France internationale qui devra, avec un budget en baisse de 3 %, poursuivre la numérisation de sa production engagée depuis 2003 et développer son offre sur internet.

Le secteur de la presse écrite est lui aussi en pleine mutation. Cette année, pour la première fois, internet a dépassé les journaux et les magazines comme principal fournisseur d'informations aux lecteurs européens.

M. Jean-Pierre Gorges – Telle est l’évolution, voilà tout !

M. Patrick Bloche – C'est particulièrement vrai pour la France, où la presse écrite traverse une crise de grande ampleur. Les exemples de France Soir, L'Humanité ou Libération illustrent ce déclin du lectorat et les difficultés que connaissent nombre de titres historiques. Le chiffre d’affaires de la presse nationale d'information diminue de près de 4 % quand celui de la presse gratuite augmente de 5 %. Alors, là où il aurait fallu engager un effort considérable pour sauver la presse d'information quotidienne et pour garantir aux citoyens un véritable pluralisme,…

M. Jean-Pierre Gorges – Il n’y a pas de pluralisme ! Il n’y a que des gauchistes dans la presse écrite !

M. Patrick Bloche – …le Gouvernement préfère diminuer les aides : 178 millions pour 2005, 172 millions pour 2006 et seulement 164,5 millions pour 2007. Le montant global des aides directes à la presse, hors AFP, a diminué de près de 10 % en deux ans.

M. le Ministre – Et de 63 % avec Mme Tasca !

M. Patrick Bloche – Vous êtes face à une période de crise, Monsieur le ministre, et cessez de nous renvoyer à la période 1997-2002, quand il n’y avait pas de journaux gratuits et que l’internet était beaucoup moins développé ! Le Gouvernement doit relever ces défis au nom du pluralisme et de la liberté d’expression.

M. Jean-Pierre Gorges – Quel pluralisme ? Les journalistes sont à gauche à 95 % !

M. Patrick Bloche – Là où il aurait donc fallu un véritable plan Marshall en faveur de la presse écrite, vous préférez prendre le risque de voir se réaliser la triste prédiction de Ray Bradbury dans Fahrenheit 451 : « Je me souviens des journaux qui mouraient comme des papillons géants. On n'en voulait plus. Ça ne manquait plus à personne ». Le pire, les socialistes ne peuvent ni ne veulent s'y résoudre et ils voteront donc contre ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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Médias

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État b

M. Patrick Bloche – L’amendement 278 vise à verser 16 millions au programme « presse » afin de majorer les crédits de l’action « aide aux quotidiens nationaux d’information politique et générale à faibles ressources publicitaires », et à diminuer d’un même montant le programme « chaîne française d’information internationale ». Celle-ci, société anonyme détenue à parité par TF1 et France Télévisions, est financée uniquement par la redevance.

M. le Ministre – Non.

M. Patrick Bloche – Elle ne commencera à émettre que le 6 décembre sur le câble et le satellite et sera dotée pour 2007 de 70 millions, auxquels s’ajoutent 16 millions de crédits non consommés ouverts dans le PLF pour 2006. Le présent amendement propose de réduire la dotation prévue de 16 millions d’euros et de compenser par un financement à parité entre TF1 et France Télévisions. Il est en effet scandaleux qu’un groupe privé participe à France 24 sans débourser un centime ! Grâce à cet amendement, l’effort financier serait réparti plus équitablement, tandis que d’autres actions de la mission « médias » pourraient bénéficier de moyens renforcés – je pense à l’aide destinée aux quotidiens nationaux d’information politique et générale à faibles ressources publicitaires.

Comme le rappelle le « bleu » budgétaire, le maintien du pluralisme de la presse ne consiste pas à favoriser la création de nouveaux acteurs, mais à préserver les conditions actuelles d’expression du pluralisme en luttant contre la disparition des titres. Compte tenu des difficultés financières d’une grande partie de la presse nationale, nous devons accroître nos efforts ! Comment pourrait-on accepter, dans ce temple de la diversité d’expression qu’est notre Assemblée, que disparaissent des titres tels que L’Humanité, Libération, France Soir ou la Croix, à six mois des choix fondamentaux qui attendent les Français ?

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial de la commission des finances – La commission n’a pas examiné cet amendement. Soucieux du maintien du pluralisme de la presse, nous suivons de près les difficultés traversées par les quotidiens que vous avez cités. On ne saurait reprocher au Gouvernement une quelconque faiblesse : non seulement les aides à la presse ont augmenté de 22 % depuis 2004 mais elles sont aujourd’hui recentrées sur la presse quotidienne d’information politique générale. Il reste que les difficultés de la presse ne peuvent être réglées par les seules aides financières de l’État !

S’agissant de France 24, le financement prévu ne repose pas sur la redevance, comme vous l’affirmez, mais sur des crédits budgétaires. Surtout, ne déshabillons pas Pierre pour habiller Paul. Au moment où Al Jazira vient de se mettre à l’anglais, ce n’est pas le moment de baisser la garde !

M. le Ministre – Avis défavorable. Je vous rappelle que Libération n’entre pas dans la catégorie des quotidiens à faibles recettes publiques soutenus par l’État ! Sans faire de chantage, je vous signale qu’en refusant de voter le budget, vous priveriez Libération de mesures fiscales favorables… Nous devons garder à l’esprit que l’avenir de la presse ne passera pas seulement par les soutiens budgétaires consentis par l’État : nous devons favoriser les apports de capital en accordant des aides fiscales à ceux qui souhaiteraient investir dans la presse quotidienne d’information politique générale.

J’ajoute que nous travaillons avec Bercy sur l’ouverture du mécénat aux entreprises de presse, puisque les lecteurs, ceux de L’Humanité par exemple, souhaitent parfois apporter leur concours financier à la diversité de la presse.

J’en viens au lancement de la chaîne française d’information internationale, qui permettra au journalisme français de rayonner partout dans le monde. Contrairement à ce qu’affirme M. Bloche, pas un euro ne sera prélevé sur la redevance ! Nous ne toucherons ni au budget de France Télévisions, ni à celui de TF1 !

J’espère que vous aurez à cœur de visiter la nouvelle rédaction et que vous saurez admirer les efforts réalisés en seulement huit mois ! Loin d’être une vitrine publicitaire de la France, cette chaîne portera un regard libre sur l’actualité dans le monde. Elle sera en concurrence avec CNN, BBC World et Al Jazira, mais elle pourra se greffer sur les réseaux de journalistes de l’AFP et de Radio France internationale.

Au moment où France 24 démarre, il n’est pas question d’amputer ses crédits ! Quand ses journalistes diront qu’ils manquent de moyens, devrai-je répondre que les socialistes ont proposé d’amputer leurs crédits ?

M. Patrick Bloche – Vous menez une politique de Gribouille en matière d’audiovisuel extérieur ! Vos choix ont été dénoncés sur tous les bancs de cet hémicycle : la mission d’information parlementaire proposait un projet radicalement différent du vôtre. Je répète qu’il est scandaleux que France Télévisions et TF1 soient placées à parité dans une chaîne financée exclusivement sur des fonds publics !

M. le Ministre – En tout cas, pas sur la redevance !

M. Patrick Bloche – Peu importe ! Ce sont des fonds publics ! Les députés de la mission d’information avaient prévu un tout autre schéma de financement ! TF1 doit être mise à contribution, ou bien être écartée de la chaîne.

C’est un bien triste héritage que vous nous laisserez en 2007 : le paysage audiovisuel extérieur sera d’une incohérence totale à cause de votre politique de saupoudrage, dont TV5 subit déjà les conséquences. M. Kert nous a rappelé cette semaine que cette chaîne n’était plus diffusée en Roumanie !

Je rappelle enfin que l’objet de notre amendement n’est pas de déshabiller Pierre pour habiller Paul, pratique pourtant courante chez vous. France 24 ne devant être lancée qu’à la fin de l’année, elle n’a nul besoin des 16 millions que vous voulez reporter ! Nous ferions mieux de redéployer ces montants en faveur du pluralisme et de la liberté d’expression dans la presse. Comme vous l’avez montré dans votre réponse à notre collègue Françaix, lors des questions au Gouvernement, l’État ne fait pas grand-chose face aux difficultés de la presse écrite !

M. François Liberti – Sans remettre en cause l’effort consenti par l’État depuis 2004 en faveur de la presse, notamment celle qui bénéficie de faibles recettes publicitaires, nous trouvons qu’il serait bon de reporter les 16 millions non consommés en 2006 sur une autre ligne budgétaire. Le seul objet de cet amendement est donc de renforcer l’aide de l’État.

L'amendement 278, mis aux voix, n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « médias », mis aux voix, sont adoptés.

APRÈS L'ART. 49

M. le Rapporteur spécial – Par l’amendement 96, nous demandons la création d’une annexe au projet de loi de finances, afin de rassembler toutes les informations disponibles sur l’audiovisuel extérieur français. Je note que vous avez donné votre accord de principe en commission élargie, Monsieur le ministre.

Un tel document obligerait l’État à développer une vision exhaustive des participations publiques dans ce secteur, objet de nombreuses critiques – empilement des structures et des coûts de fonctionnement, insuffisante adéquation des modes de communication aux usages propres à chaque région du monde, absence de synergies entre des intervenants pourtant complémentaires, comme TV5 Monde, Radio France internationale ou Canal France international.

Du fait de la création de France 24, qui échappera à la tutelle administrative des autres opérateurs, mais aussi du développement des projets européens d’ARTE et du positionnement particulier de France Télévisions, actionnaire d’Euronews et de nombreux opérateurs extérieurs, une rationalisation s’impose. J’ajoute qu’il faut désormais dialoguer avec plusieurs administrations, aux positions parfois divergentes, depuis que le Conseil de l’audiovisuel extérieur français a cessé d’exister.

Relevons enfin la qualité très inégale des documents budgétaires actuels. L’examen du « bleu » révèle un grand décalage entre les objectifs et les indicateurs sous la responsabilité du Premier ministre, en lien avec le ministre de la culture, et ceux dépendant du ministère des affaires étrangères. En particulier, le projet annuel de performances rédigé par ce dernier ministère nous semble très insuffisant : doté d’une seule action et d’indicateurs de performance très critiquables, il ne répond nullement aux attentes des parlementaires.

La création d’un jaune transversal permettrait d’unifier le discours de l’État et de mettre en cohérence les différents opérateurs de l’audiovisuel extérieur. Tel est l’objet de notre amendement.

M. le Ministre – Défavorable. Les projets et les rapports annuels de performances comportent déjà des informations précises sur chacun des organismes de l’audiovisuel extérieur. Si nous avons effectivement besoin d’une perspective plus globale, un outil existe : le document de politique transversale de l’action extérieure de la France. Nous l’améliorerons, de même que le projet annuel de performances. Je rappelle enfin mon engagement de réactiver le Conseil de l’audiovisuel extérieur français, qui pourrait se pencher sur les différents organes actuels.

M. le Rapporteur spécial – Je prends acte des engagements du Gouvernement qui vont dans le sens souhaité. Plus vite nous améliorerons la cohérence, mieux cela vaudra. À titre personnel, je considère donc que nous pourrions ne pas voter cet amendement, si le Gouvernement est prêt à agir rapidement en ce qui concerne le conseil de l’audiovisuel extérieur et un document plus précis.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Après les engagements du Gouvernement, nous pouvons retirer l’amendement.

L’amendement 96 est retiré.

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Avances à l’audiovisuel public

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État D

M. le Rapporteur spécial – L’an dernier, le compte des concours financiers « avances à l’audiovisuel public » était présenté sous la forme d’une mission à un seul programme, en violation de la lettre comme de l’esprit de la LOLF. Suite aux critiques du rapporteur spécial et à une décision du Conseil constitutionnel du 29 décembre 2005, cette mission est désormais constituée de trois programmes regroupant les cinq opérateurs : le programme « télévision » réunit France Télévisions et ARTE France ; le programme « radio » réunit Radio France et Radio France internationale ; et le programme « patrimoine audiovisuel » concerne l’Institut national de l’audiovisuel. C’est un progrès. Mais pour se conformer totalement à la LOLF, chaque opérateur bénéficiant d’une affectation du produit de la redevance devrait disposer d’un programme distinct.

L’amendement 97 vise à structurer la mission en autant de programmes que d’opérateurs, c’est-à-dire cinq. Un tel découpage permettrait de se passer du vote, redondant avec celui sur le compte de concours financiers, de l’article 63 procédant à la répartition du produit de la redevance entre les cinq opérateurs. De plus, ce serait une incitation à mieux harmoniser les dispositifs de performance de chaque programme et les contrats d’objectifs et de moyens que chaque opérateur doit, selon l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986, signer avec l’État.

M. le Ministre – Laissez-moi un peu de travail pour mon deuxième mandat – si le peuple le veut, bien sûr ! (Sourires) Nous avons déjà franchi une étape avec la répartition en trois programmes. En faire un par opérateur risquerait d’entraîner une contagion dans d’autres secteurs, alors que nous cherchons à former des blocs de cohérence. J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement.

M. le Président de la commission – Cette fois je ne peux retirer l’amendement, qui est dans la logique de la LOLF. Le Parlement doit être informé pour voter les crédits.

M. Charles de Courson – Le groupe UDF soutient cet amendement. Outre que cela correspond à la structure budgétaire mise en place, si l’on distingue entre les cinq opérateurs, le Parlement pourra jouer son rôle et transférer des crédits de l’un à l’autre.

L'amendement 97, mis aux voix, est adopté.
Les crédits de la mission « avances à l’audiovisuel public », ainsi modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

Art. 63

M. le Rapporteur spécial – L’amendement 285 supprime l’article, en conséquence du vote précédent.

M. le Ministre – Défavorable.

L'amendement 285, mis aux voix, est adopté. L’article 63 est ainsi supprimé.

après l'Art. 63

M. Patrick Bloche – Notre amendement 279 exonère de redevance audiovisuelle les étudiants bénéficiant d’une bourse à caractère social et notre amendement 280 les titulaires de l’allocation de solidarité spécifique.

Mme Muguette Jacquaint et M. François Liberti – Très bien.

M. le Rapporteur spécial – La commission ne les a pas examinés. Nous souhaiterions tous faire preuve de générosité. Mais, sur les exonérations, nous avons déjà progressé, puisque le nombre de foyers concernés est passé de 4 à 5 millions, pour un montant de 140 millions. Ce dégrèvement donnant lieu à compensation intégrale – même si c’est moins dans les faits – ce serait une dépense supplémentaire d’importance pour l’État. À titre personnel, j’émets donc un avis défavorable.

M. le Ministre – Défavorable.

Les amendements 279 et 280, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Patrick Bloche – En réformant la redevance, le Gouvernement l’a adossée à la taxe d’habitation, créant ainsi une confusion pour le contribuable, qui a l’impression que son produit va aux collectivités locales. De plus, le régime des exonérations a été aligné sur celui de la taxe d’habitation. De ce fait, 900 000 foyers qui étaient exonérés – bénéficiaires du RMI, d’une allocation de solidarité, personnes de plus de 60 ans non imposables, veuves ou invalides – risquent de ne plus l’être. Le dégrèvement a été maintenu pour 2007, mais ensuite ? C’est une véritable bombe à retardement. Notre amendement 281 propose donc que l’avis d’imposition à la redevance soit émis avec celui de l’impôt sur le revenu, afin de souligner que la redevance est perçue par l’État.

M. le Rapporteur spécial – La commission a rejeté cet amendement. Redevance et taxe d’habitation sont les deux contributions qui concernent le plus grand nombre de contribuables – environ 20 millions. Cet adossement permet de faire des économies sur la perception de la redevance, dont le coût s’élevait à 150 millions. On n’a évidemment pas voulu introduire une confusion en faisant croire que le produit de la redevance allait aux collectivités locales. Dans l’avis que les contribuables reçoivent, les deux impositions sont présentées séparément, sur deux pages de couleur différente. On pourrait peut-être améliorer encore la présentation, mais un regroupement avec l’avis d’imposition de l’impôt sur le revenu serait une perte d’argent public.

M. le Ministre – La réforme que nous avons menée est un grand progrès qui permettra d’importantes économies de gestion. Je n’ai pas d’objection à ce qu’on clarifie les choses par une meilleure information, en précisant au verso de l’avis d’imposition quel emploi est fait de la redevance – nos concitoyens ignorent souvent qu’elle participe au financement d’organismes tels que Radio France.

M. François Liberti – Il faudrait surtout signaler qui la perçoit !

M. le Ministre – Absolument. Mais ne bouleversons pas l’équilibre d’une réforme efficace.

M. Charles de Courson – Cet amendement aboutirait en outre à une augmentation de la fraude fiscale. Juridiquement, tout citoyen doit certes déposer une déclaration d’impôt ; mais en réalité, nombreux sont ceux qui ne le font pas, puisqu’ils n’ont pas à en payer. La redevance poserait donc un problème.

M. Patrick Bloche – Nombre de nos concitoyens pensent encore que la redevance est perçue par les collectivités locales. En outre, la réforme n’a pas produit les effets escomptés en matière de réduction de la fraude, puisque l’État, qui comptait percevoir jusqu’à 60 millions supplémentaires, n’en a perçu que 15. Mais surtout, je m’étonne qu’aucun de nos collègues n’ait évoqué la bombe à retardement que dévoile notre amendement, un million de contribuables modestes, aujourd’hui redevables de la taxe d’habitation mais exonérés de redevance, devront, dès l’année prochaine, s’acquitter des deux !

Mme Muguette Jacquaint – C’est un vrai problème.

L'amendement 281, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles – Le Gouvernement a consenti d’importants efforts pour rénover le statut des étudiants en centres de formation des apprentis. L’amendement 93 vise à l’harmoniser avec celui des autres étudiants en matière de redevance audiovisuelle.

M. le Président de la commission – La commission des finances y est très favorable !

M. le Ministre – J’inventerai pour l’occasion un concept politique fécond : la sagesse bienveillante ! Et en cas d’adoption, je lèverai le gage.

L'amendement 93, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – À l’unanimité.

M. le Rapporteur spécial – Le Parlement est désormais impliqué dans la négociation de contrats d’objectifs et de moyens entre les organismes de l’audiovisuel public et l’État, sur lesquels les commissions des affaires culturelles et des finances peuvent rendre un avis sous six semaines, comme elles l’ont fait cet été pour Radio France, par exemple.

Pourtant, les COM ne sont pas toujours respectés. Le lancement décalé de la TNT et le recentrage de certains objectifs ont ainsi rendu caduque une partie des COM de France Télévisions et d’ARTE. Ces modifications a posteriori sont légitimes, mais doivent prendre la forme d’un avenant qui anticipe tout changement stratégique majeur, tel que celui qu’a négocié l’AFP. L’amendement 98 vise à ce qu’il soit transmis au Parlement dans les mêmes conditions que les contrats de projets eux-mêmes.

M. le Ministre – Avis favorable : le Parlement doit être au cœur de cette démarche partenariale. Je constate que la multiplication de l’offre télévisuelle n’intéresse pas les députés socialistes : pas un seul d’entre eux n’est resté en séance pour adopter cette mesure si pertinente !

L'amendement 98, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs aux médias.

La séance, suspendue à 11 heures 40, est reprise à 11 heures 45.

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enseignement scolaire

M. le Président – Nous abordons l’examen des crédits relatifs à l’enseignement scolaire.

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial de la commission des finances – Le budget de l’enseignement scolaire est, avec 59,5 milliards d’euros, le plus gros budget de l’État, et de loin, puisque le service de la dette ne représente que 40 milliards, le budget de la défense 35, le budget de la recherche 20, les autres budgets étant presque tous inférieurs à 10 milliards. Il représente plus que le produit de l’impôt sur le revenu – 57 milliards –, plus que celui de l’impôt sur les sociétés – 46 milliards. Près de 97 % de ses crédits sont affectés à la rémunération des personnels avec 1 070 000 équivalents temps plein travaillé, le budget de la défense, qui vient en deuxième, n’en comptant lui que 335 000, soit le tiers. Si l’on ajoute l’enseignement supérieur et la recherche, ce sont 53 % des fonctionnaires de l’État qui se trouvent placés sous votre autorité, Monsieur le ministre.

Pour certains, juger du budget de l’enseignement scolaire est extrêmement simple. Si le nombre de postes augmente fortement, c’est un excellent budget. S’il augmente peu, c’est un budget médiocre. S’il diminue, c’est un très mauvais budget. Peu importe que les enseignants enseignent ou non, que l’argent public soit ou non utilisé à bon escient ! Ces jugements à l’emporte-pièce ne sont pas ceux des députés, de tous bords d’ailleurs, qui connaissent la réalité de l’enseignement – et d’ailleurs M. Allègre ne disait rien d’autre naguère.

Examinant un tel budget, nous ne pouvons pas nous priver de comparaisons internationales. Je me fonderai notamment sur le rapport de l’OCDE de septembre 2006 et les résultats de l’audit commandé par le Gouvernement sur la grille horaire dans les lycées généraux et technologiques. Avec 6,1 % de son PIB consacré à l’éducation, la France se situe nettement au-dessus de la moyenne de l’OCDE, précédée seulement par les États-Unis et la Suède. Si l’on prend en compte non pas la dépense totale, mais la dépense publique consacrée à l’enseignement, elle se classe même première. Le coût annuel de formation d’un élève français du secondaire s’élève à 8 653 dollars, soit le plus élevé au monde après les États-Unis, où ce coût est de 9 590 dollars. La France dépense pour l’enseignement secondaire en moyenne 25 % de plus que les autres pays de l’OCDE. Et la dépense moyenne annuelle par lycéen a crû de 50 % en euros constants de 1990 à 2004, pour s’établir aujourd’hui à près de 10 000 euros. Selon le rapport de l’OCDE, la dépense par élève du second cycle du secondaire est supérieure de 32 % à la moyenne de l’OCDE et de 35 % à la moyenne des pays européens. De ce constat, l’audit commandé par le Gouvernement conclut que l’allocation des moyens est défavorable à l’enseignement supérieur. Les dépenses qui y sont consacrées se situent en effet, elles, en dessous de la moyenne.

Les résultats des élèves français dans le secondaire sont-ils supérieurs pour autant ? Hélas, non ! D’après l’enquête PISA de l’OCDE, qui a porté sur un échantillon de 250 000 élèves dans 41 pays, pour la compréhension écrite, la France obtient 496 points alors que la moyenne est de 494… et que la Finlande en obtient 543. Pour les mathématiques, la France se situe au seizième rang avec 511 points pour une moyenne de 500. Pour la culture scientifique, son score est également de 511 points pour une moyenne de 500.

Que penser d’un système qui, tout en dépensant en moyenne 25 % de plus que les autres, ne donne que de tels résultats. Cela montre que le problème n’est pas celui des moyens. Il faut comprendre les raisons de cette situation et tenter de réformer le système, afin de le rendre plus efficace.

Quelles sont donc les causes du surcoût observé dans le secondaire, et plus particulièrement dans les lycées ? Pour les identifier, je me suis appuyé sur deux rapports de la Cour des comptes, l’un d’avril 2003 sur la gestion du système éducatif, l’autre de janvier 2005 sur les enseignants « qui n’enseignent pas », et sur les audits lancés par le Gouvernement.

Première cause de surcoût : le sous-emploi des personnels. La Cour des comptes ne propose pas, contrairement à la candidate socialiste à l’élection présidentielle, que les enseignants fassent 35 heures par semaine, mais elle a relevé certains dysfonctionnements. Elle évalue ainsi à 32 000 équivalents temps plein le nombre d’enseignants n’ayant ni classe ni activité pédagogique. Les remplaçants inoccupés représentent 9 500 ETP, les décharges non statutaires 4 000, les surnombres disciplinaires 2 500… Plusieurs mesures de ce projet de budget commencent à résorber ce sous-emploi.

Deuxième cause de surcoût : un système de décharges obsolète. Celles-ci représentent 32 000 ETP, dont 12 000 « pas ou peu justifiées ».

Troisième cause de surcoût : un nombre extrêmement élevé d’options et de matières rares. On compte 250 matières enseignées, et sur les six millions d’heures enseignées, 20 % le sont devant moins de 15 élèves, le pic se situant dans l’enseignement professionnel et celui des langues.

Quatrième cause de surcoût : un nombre particulièrement élevé d’heures de cours. L’audit conclut sur ce point que « l’investissement massif dans le volume d’heures d’enseignement n’a amélioré ni la performance ni l’équité dans les lycées français ». L’horaire annuel des lycées français est de 20 % supérieur à la moyenne européenne, avec une charge hebdomadaire pouvant aller, y compris le travail à la maison, jusqu’à 45 heures, ce qui est déraisonnable.

Mme Chantal Bourragué – Tout à fait.

M. le Rapporteur spécial – Certains horaires pourraient sans doute être réduits et les moyens ainsi dégagés consacrés à un soutien individualisé des élèves les plus en difficulté. L’équité ne consiste pas en effet à donner plus à tous mais plus à ceux qui en ont réellement besoin. L’OCDE a calculé qu’un élève français suit 7 500 heures de cours entre l’âge de sept et quatorze ans, alors que la moyenne de ses pays est de 6 850 et que cet horaire tombe même à 5 500 heures en Finlande, soit 25 % de moins alors même que ce pays obtient les meilleurs résultats dans l’enquête PISA. Une délégation de parlementaires et de collaborateurs du ministre gagnerait certainement à se rendre en Finlande pour étudier les raisons du succès de ce pays.

Cinquième cause de surcoût : un taux record de redoublement. Quarante pour cent des élèves français âgés de 15 ans ont déjà redoublé, alors que la moyenne n’est que de 13 % dans l’OCDE, laquelle note que « ce taux inutilement élevé de redoublement ne prévient pas l’échec scolaire. » Un travail de pédagogie sera nécessaire auprès de nos enseignants dont beaucoup pensent, à tort, que la meilleure solution pour un élève en difficulté consiste à le faire redoubler. Mieux vaudrait prendre assez tôt des mesures de soutien individualisé ou organiser des études surveillées, de façon que les élèves les plus en difficulté ou les plus fragiles du fait de leur situation familiale puissent, s’ils le souhaitent, et en accord avec leurs parents, être encadrés dans leur travail hors des heures de cours obligatoires.

Sixième cause de surcoût : un taux d’encadrement pédagogique élevé, et en hausse continue. On compte 12,2 élèves par enseignant dans le secondaire en France contre plus de 15 en Allemagne et aux États-Unis, et une moyenne de 13,6 dans l’OCDE. Le nombre d’élèves par enseignant tombe même à 10,6 si l’on ne considère que les lycées, pour une moyenne OCDE de 13, soit un écart de 25 %.

Des mesures ont commencé à être prises pour remédier à ces causes de surcoût. Je vous remercie, Monsieur le ministre, de les avoir engagées, car le plus difficile est toujours d’ouvrir la voie.

Les crédits pour 2007 sont en hausse de 1,3 % à périmètre constant. Les chiffres, eux, sont en baisse, mais il faut compter avec les TOS, qui seront à la charge des départements et des régions à partir du 1er janvier, et avec le forfait d’externat de l’enseignement privé, qui sortent du budget. Le budget s’élève à 59,5 milliards, contre 59,7 l’an passé, mais ces deux mesures comptent pour environ un milliard. Pour faire très vite, le primaire représente 16 milliards, le secondaire 28, le programme « vie de l’élève » 6 milliards, l’enseignement 7, le soutien de la politique de l’éducation nationale 1 milliard et l’enseignement technique agricole 1,3. Les budgets qui baissent sont ceux qui comptaient des TOS ou le forfait d’externat. Les crédits de personnel représentent 93 % du budget, et même 97 % selon une conception élargie. On compte 4 623 équivalents temps plein en moins, mais 50 000 contrats aidés en plus : au total, le nombre de personnes placées face aux élèves augmente donc massivement – ce qui posera un problème si les contrats aidés doivent disparaître.

La suppression des 4 600 postes n’entraîne pas de baisse de l’encadrement pédagogique. La réduction du nombre d’élèves dans le secondaire entraîne certes une diminution du nombre d’enseignants, mais la hausse dans le primaire provoque une augmentation corrélative. Quant à la baisse du nombre des stagiaires, elle s’explique par celle des postes mis au concours : les départs en retraite ont été moins nombreux que prévus, car la réforme a poussé de nombreux enseignants à les différer. Le ministère a donc réduit ses recrutements, et il y a moins de stagiaires. Enfin, l’enseignement des langues étrangères dans le primaire est de plus en plus assuré par des titulaires, et l’on compte donc 200 assistants de langues en moins. L’encadrement pédagogique reste donc constant : 23 élèves par enseignant dans le primaire, et 12,2 dans le secondaire. Ceux qui se plaindront tout à l’heure de la baisse des crédits ne feront donc pas état de la réalité.

Mme Muguette Jacquaint – Ne parlez pas pour les autres !

M. le Rapporteur spécial – Les priorités pour 2007 sont la promotion de l’égalité des chances et le renforcement des services sanitaires et sociaux – l’objectif est d’un infirmier par établissement en 2010, et le Gouvernement crée des postes dès cette année. Un effort a été accompli, à taux d’encadrement pédagogique constant, dans la gestion des moyens, avec, outre la diminution des postes dans le secondaire, le renforcement des moyens consacrés aux remplacements de courte durée – remplacements qui s’améliorent par ailleurs avec l’application de la loi Fillon – ou l’intéressement du personnel aux gains de productivité – grâce à diverses mesures, dont la transformation de postes d’instituteurs en postes de professeurs des écoles.

Vous n’êtes pas en charge de l’enseignement agricole, mais beaucoup d’entre nous s’étaient émus, l’année dernière, de ce que l’État n’avait pas tenu au plan budgétaire ses engagements pour les maisons familiales rurales. C’est fait, et j’en remercie les deux ministres. Quelques progrès restent toutefois à accomplir, dont une meilleure prise en compte du nombre réel des élèves. Nous voudrions aussi connaître les raisons de la forte réduction, au cours des cinq dernières années, des crédits de formation dans l’enseignement agricole public.

En ce qui concerne l’enseignement privé, incontestablement, la règle 80-20 n’est plus d’actualité : à cinq postes créés ou supprimés dans le public correspond un poste dans le privé. Les élections présidentielle et législatives seront une occasion de réfléchir à un assouplissement de cette règle historique – qui n’est d’ailleurs pas écrite – mais en veillant à ne pas rallumer la guerre scolaire. Je suis favorable à une proportion plus conforme à la réalité du nombre des élèves, mais à la condition d’abroger l’amendement Charasse – sauf si c’est le Conseil d’État qui s’en charge. Tout maire, en effet, peut refuser l’inscription dans son école publique d’un enfant d’une autre commune – car c’est une charge financière supplémentaire. Mais, du fait de cet amendement socialiste, il ne peut refuser son inscription dans une école privée, et est donc obligé d’en assumer la charge. Ce n’est pas tenable. Les maires s’en plaignent beaucoup. La suppression de cet amendement est un préalable avant de revoir la répartition entre le public et le privé.

En ce qui concerne la recherche de performance, les améliorations pourraient être amplifiées. Le contenu des projets annuels de performance est plus clair et la stratégie plus précise, mais il demeure des lacunes, dont la principale est la faiblesse de l’analyse des coûts. Il n’y a pas de comptabilité analytique. Les objectifs et les indicateurs sont en progrès. Certains indicateurs ont été supprimés et d’autres, indispensables, créés, tels que ceux sur le taux de redoublement – alors que nous savons qu’il y a une spécificité française dans ce domaine –, ou sur la proportion du personnel enseignant dans plusieurs disciplines, alors que nous sommes nombreux à considérer que la bivalence est un « plus » à encourager. Le fait qu’ils n’aient pas été prévus dès l’origine montre combien le ministère était éloigné de la culture de l’efficience.

Pour le reste, je ne reviens pas sur les critiques qui figurent dans le rapport. La mise en œuvre de la LOLF a fait l’objet d’un effort considérable de la part de l’administration centrale, mais beaucoup reste à faire au niveau académique. Aucun objectif stratégique, aucune cible de résultat n’a été communiqué aux académies ! Et l’administration centrale a eu beau globaliser les dépenses, elle maintient un fléchage. Un mot sur les audits : depuis le temps qu’on les attendait ! L’audit sur l’organisation des examens produit ses premiers effets, et vous avez commencé à analyser les résultats de celui sur les décharges statutaires. L’audit sur la grille horaire des lycées vient de sortir – ses recommandations rejoignent largement celles de mon rapport de l’an dernier – de même que celui sur la grille horaire des collèges. Trois autres sont en cours.

Je terminerai par quelques recommandations. Tout d’abord, et évidemment, il est indispensable de mesurer la valeur ajoutée dans chaque établissement et chaque classe. On ne peut pas se contenter de classer les établissements en fonction de leurs résultats aux examens, qui dépendent largement du niveau des élèves au moment de leur entrée dans l’établissement. Il faut un test à l’entrée et à la sortie de chaque classe – bien que je comprenne que cela ne puisse être mis en œuvre d’un seul coup : on pourrait commencer, pour les lycées, par un test à l’entrée de la seconde et à la sortie de terminale par exemple. Ces tests doivent par ailleurs être rendus publics. L’exigence de transparence de nos concitoyens sera de plus en plus forte, d’autant que Mme Royal comme l’UMP se dirigent vers un desserrement des contraintes de la carte scolaire. Cette mesure de la valeur ajoutée doit être croisée avec celle du coût de formation des élèves dans chaque établissement. Ce dernier indicateur est plus simple à établir, avec nos moyens informatiques, et l’ensemble donne le niveau d’efficience.

Il faut aussi alléger les horaires du secondaire. Une partie des heures ainsi dégagées doit être mise à la disposition des chefs d’établissement – et non des recteurs ou des inspecteurs d’académie – qui pourront ainsi améliorer le suivi des élèves en difficulté, ou organiser de petits groupes… Il est important de leur donner plus de liberté dans ce domaine. Je recommande aussi de réduire le nombre d’options dans les secteurs à faibles débouchés et de rationaliser l’offre globale d’options, de limiter les redoublements, de réduire le suivi individualisé aux seuls élèves qui en ont besoin et d’informer les élèves plus tôt sur les débouchés de chaque filière. Notre système d’orientation est ubuesque : le nombre de jeunes qui se précipitent dans une formation en sport, en psychologie ou en sociologie, par exemple, est complètement absurde. Il faut les informer bien avant le bac.

Il faut aussi revoir en profondeur la sélection et la formation des enseignants : les compétences académiques ont à l’évidence leur importance, mais il faut aussi savoir gérer la diversité des élèves ou tenir une classe – il faut leur apprendre, au lieu de jeter directement les étudiants d’IUFM dans une classe. On pourrait même faire entrer dans la sélection leur capacité à innover. J’ajoute qu’il faut se préoccuper de donner confiance aux élèves : lorsqu’on dit à un élève qu’il est mauvais, il le devient. C’est ce que les sportifs appellent le mental : quand les All Blacks proclament qu’ils vont gagner, ils le font plus facilement ! Chacun est libre de vérifier ce principe au niveau électoral…

Il faut aussi développer la bivalence : c’est bon pour les élèves, et cela facilite l’adéquation entre les heures dues et les heures faites. Une prime est déjà instaurée, mais on pourrait aussi réserver une partie des places mises au concours du CAPES à des enseignants bivalents. À mon avis, ce ne serait pas très compliqué techniquement, et je rappelle que M. Ayrault a lui-même prôné la bivalence : c’est donc une proposition largement partagée par les élus, si ce n’est par les syndicats d’enseignants. Enfin, il faut évaluer plus précisément le nombre d’heures payées et non faites, et donner plus de liberté aux chefs d’établissement dans leur utilisation.

Grâce à la LOLF, grâce à la volonté du ministre, grâce à une forte mobilisation de l’appareil, la demande récurrente de la commission des finances quant à une optimisation de l’argent de l’État est en cours. Soyez-en félicité. Dans la campagne électorale qui s’ouvre, il faudra distinguer entre ceux qui souhaitent mettre de l’argent là où c’est nécessaire, comme dans l’enseignement supérieur, et ceux qui, de manière irresponsable et démagogique, demandent toujours plus, même là où l’argent est mal utilisé. Pour toutes ces raisons, je vous propose, mes chers collègues, d’adopter le budget de l’enseignement scolaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Irène Tharin, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturellesLe budget de la mission « enseignement scolaire » est de loin le premier de l'État, avec 59,5 milliards de crédits en 2007, soit 22 % des dépenses totales de l'État. Le défi à relever, aujourd'hui, n'est plus celui de l'augmentation des moyens, mais celui de leur meilleure utilisation en vue d'une plus grande efficacité du système éducatif. Selon les deux audits de modernisation de l'État, établis conjointement par les inspections générales des finances et de l'éducation nationale, et publiés le 17 octobre, le coût annuel moyen d'un collégien a augmenté de 33 % en quinze ans, et celui d'un lycéen de 50 %, sans que les performances des élèves soient à la hauteur de cet investissement.

À cet effort, il faut associer les parents. Historiquement, l'école de la République se concevait comme un sanctuaire aussi protégé que possible des influences extérieures, notamment celle des familles. On est passé, au fil des années, à un modèle d’école ouverte sur la société. J’ai donc choisi le rôle et la place des parents dans le fonctionnement de l'école pour thème de mon intervention.

Évoquons, avant cela, les points forts du projet de budget pour 2007. Les crédits diminuent d'environ 2 %, en euros constants, en raison, d’une part, du transfert aux collectivités de 23 403 équivalent temps plein de personnels techniciens, ouvriers et de services, et, d'autre part, de la diminution des effectifs d'élèves. En effet, bien que le nombre d’élèves augmente légèrement dans le primaire, les établissements publics et privés du second degré ont perdu 224 300 élèves depuis 1990. Pour tenir compte de cette évolution démographique, le projet de loi de finances prévoit la suppression de 2 400 emplois dans le secondaire, dont 2 000 dans le public. En revanche, il est prévu de créer 500 emplois de professeurs des écoles et 100 emplois dans les écoles privées. Le nombre de postes aux concours de recrutement des deux niveaux restera stable : 11 000 pour le premier degré, 10 000 pour le second. Cette rationalisation des crédits permettra par ailleurs de créer 300 postes d'infirmières et 50 emplois d'assistants de service social pour la rentrée 2007, afin de respecter les engagements de la loi d'orientation pour l'avenir de l'école.

Ce budget concentre l’effort sur les catégories d'élèves qui en ont le plus besoin : 89 000 bourses au mérite sont ainsi ouvertes pour les élèves boursiers reçus avec mention au brevet, et les programmes personnalisés de réussite éducative, à destination des élèves en difficultés, montent en puissance. Au 1er janvier 2007, 1 000 assistants pédagogiques seront recrutés afin d'accompagner la généralisation de ce dernier dispositif. Le projet de loi de finances prévoit en outre le financement de 50 000 emplois vie scolaire, recrutés sur des contrats d'avenir, et affectés à des tâches administratives ou fonctions d'assistance éducative dans le premier et le second degrés. Enfin, il est créé pour les élèves en situation de handicap 166 unités pédagogiques d'intégration, pour lesquelles 200 emplois d'enseignants et 166 emplois d'auxiliaires de vie scolaire seront pourvus.

Je terminerai ce tour d'horizon par deux remarques, dont la première concerne l'enseignement des langues vivantes. Outre la généralisation de l'enseignement d'une langue vivante à l'école primaire, la loi d'orientation a mis l'accent sur la nécessité d’une amélioration dans le secondaire, notamment en procédant au dédoublement des classes lorsque les effectifs le justifient.

Ma seconde remarque porte sur l'orientation. Dans mon rapport remis au Premier ministre le 8 septembre 2005, j'avais formulé des propositions tendant à améliorer l'orientation tant au niveau scolaire qu'universitaire. J'insistais notamment sur l'importance de l'apprentissage, dès l'âge de 14 ans, pour contrer l'échec scolaire et l'abandon prématuré des études. J’en appelais en outre à une amélioration des relations entre l'école et l'entreprise, avec l’inscription dans les programmes d’une véritable éducation à l'orientation.

Je me réjouis d’avoir été entendue. L'apprentissage junior est devenu une réalité, et l'apprentissage est à présent une voie d'orientation comme les autres. La création de l'option « découverte professionnelle » mériterait toutefois d'être étendue. Une circulaire du 27 mars 2006 prévoit en particulier qu'au lycée, dix heures par an soient consacrés, à titre expérimental, à l'information sur les métiers et l'enseignement supérieur. Par ailleurs, tous les recteurs ont été invités à coordonner l'action des différents services de l'État et des établissements publics compétents en matière d'orientation. Il conviendrait, en outre, d'améliorer la formation des conseillers d'orientation psychologues, afin de pallier leur manque de connaissance du monde économique et du marché de l'emploi. Enfin, le décret du 11 septembre 2006 institue un délégué interministériel à l'orientation chargé, notamment, d'établir un schéma national de l'orientation et de l'insertion professionnelle.

C'est par le biais de l'orientation que j'aborderai le rôle des parents. L'institution se substitue souvent aux familles dans les choix essentiels pour l'avenir des enfants. Si un récent sondage montre que 77 % des parents et 74 % des enseignants estiment que l'école fonctionne bien, les appréciations sont plus contrastées quant aux relations entre l'école et les parents. L'école doit s'appuyer sur des compétences extérieures ; le Gouvernement en a consacré le principe, en adoptant un décret en date du 28 juillet 2006 consolidant le rôle et la place des parents d'élèves à l'école. La collaboration entre l'institution et les familles, mais aussi avec les associations, est reconnue comme une condition de la réussite scolaire. Cette exigence avait été particulièrement mise en évidence dans le cadre du débat national sur l'école qui s'est déroulé de septembre 2003 à mars 2004 à la demande du Président de la République.

Une large concertation a été menée pour la préparation du décret du 29 juillet 2006 et de la circulaire du 25 août sur le rôle et la place des parents à l'école. Fait rare : ces textes ont été approuvés par tous les acteurs du système éducatif. Les parents se voient ainsi reconnaître des droits d'information, de participation et de réunion.

Le droit d'information signifie que les parents ont accès aux informations nécessaires au suivi de la scolarité de leurs enfants et à celles relatives à l'organisation de la vie scolaire. Le conseil d'école ou, dans le secondaire, le conseil d'administration doit prévoir les conditions d'organisation du dialogue avec les parents. Des réunions de rentrée doivent être organisées au cours desquelles le règlement intérieur de l'établissement est présenté aux parents. Des rencontres trimestrielles avec les parents sont également prévues pour faire le point sur la situation de leur enfant et les informer des actions de soutien personnalisé envisagées. Les livrets et bulletins scolaires devront à cette occasion être remis en mains propres aux parents par un enseignant de la classe, afin d’engager un dialogue. S'il y a lieu, il est prévu de s'assurer de l'aide d'un interprète.

Les parents sont représentés dans les différentes instances scolaires tels que le conseil d'école, les conseils de classe ou les commissions d'appel compétentes en matière d'orientation. Pour ce qui est des recours exercés par les parents contre les décisions des conseils de classe, depuis dix ans, le nombre d’appels baisse et le taux d’appels satisfaits augmente.

Mais il faut améliorer les pratiques, eu égard, tout d’abord, à la forte abstention aux élections des représentants des parents d'élèves. De même, mon rapport fait état d'une note d'étape émanant d'inspecteurs généraux de l'éducation nationale qui plaident pour que la participation des parents aille au-delà de la présence formelle aux instances participatives de l'établissement et pour qu'ils soient consultés sur le projet éducatif des établissements. Plusieurs de mes interlocuteurs ont exprimé le souhait que le rôle des parents ne se limite pas au fonctionnement de la cantine et à la préparation de la kermesse.

Tous les acteurs de la communauté éducative s'accordent pour dire que la transformation de la relation entre enseignants et parents passe par la formation. Le cahier des charges réformant le fonctionnement des IUFM, qui sera prochainement adopté, devra proposer un module de formation obligatoire sur les relations avec les familles. De même, la circulaire de rentrée du 25 août 2006 prévoit la mise à disposition des locaux scolaires en dehors des heures de classe pour des séances de formation des parents. Il importe que le Gouvernement confirme ces orientations en indiquant rapidement les financements qui permettront d’encadrer ces activités et de rémunérer les différents intervenants.

Conformément à la demande des chefs d'établissement, il faudrait également apporter une clarification juridique et financière au problème du partage des responsabilités entre les établissements publics et les collectivités territoriales pour toutes les activités périscolaires qui se déroulent dans les établissements.

Mes chers collègues, je vous invite à adopter les crédits de la mission « enseignement scolaire » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Yves Hugon – Je consacrerai ces quelques minutes aux conditions dans lesquelles sont organisés les examens et en particulier le baccalauréat. Mon propos se fonde sur une expérience professionnelle de près de trente ans et sur un rapport d'audit commandé dans le cadre de la réforme de l'État par le ministère du budget. Aujourd'hui, la mobilisation des moyens financiers et surtout humains est mal connue ; les coûts afférents aux examens sont quant à eux appréciés de façon imprécise. Pour 2004, on évaluerait ce poste budgétaire à 150 millions.

Quel est le constat ? Une extrême complexité dans l'organisation due à une inflation du nombre d'épreuves mais également à un souci d'équité des candidats ; un cloisonnement entre « prescripteurs » et « gestionnaires », c'est-à-dire entre ceux qui conçoivent les épreuves et ceux qui organisent leur déroulement ; la lourdeur de l'organisation des examens et plus particulièrement du baccalauréat a pour conséquence directe une réduction importante du temps d'enseignement, notamment au mois de juin ; la symbolique très forte attachée à la nature nationale des diplômes et leur valeur enfin : le baccalauréat demeure un diplôme presque mythique auquel il est difficile de toucher.

Aujourd'hui, sur la « collante » d'un candidat au bac S, il peut y avoir jusqu'à 16 ou 17 épreuves différentes. Je crois savoir que la moyenne sur l'ensemble des bacs est de 12 épreuves. Doit-on continuer à organiser pareille inflation ? Nous avons aujourd'hui 65 bacs professionnels, et 73 épreuves facultatives sont proposées au bac général. Des études précises ont montré que sur un bac à 12 épreuves, on obtiendrait globalement les mêmes résultats avec trois épreuves majeures.

S'il est incontestable que le contenu d'une épreuve, la confection d'un sujet, l'affectation d'un coefficient doivent dépendre du programme abordé pendant l'année, il conviendrait de demander aux responsables de la pédagogie de mieux intégrer la problématique organisationnelle et le coût réel de mise en place lors de la conception des épreuves et la fabrication des sujets. S’agissant par exemple de l'oral de français, le candidat est évalué depuis deux ans sur des objectifs étudiés pendant l'année scolaire. Savez-vous que chaque professeur examinateur à l'oral doit recevoir bien avant le début des épreuves un dossier qui fait parfois plusieurs dizaines de pages, résumant le travail effectué pendant l'année ? Cela entraîne un lourd et coûteux travail de reprographie et de distribution. Il conviendrait de réfléchir à la création d'un véritable pilotage de l'organisation des examens afin de supprimer ce cloisonnement.

Un mot sur le baccalauréat « chronophage ». On évalue aujourd'hui la charge consacrée à l'élaboration des sujets à 500, voire 550 ETP, c'est-à-dire 300 000 à 400 000 heures de travail. Une étude plus fine fait d’ailleurs apparaître des différences importantes selon les académies. De plus, dans les établissements où se déroulent les épreuves, les cours se terminent début juin, voire fin mai, alors que la moitié des enseignants ne serait pas concernés par les corrections ou les interrogations. Quant aux convocations pour les épreuves facultatives, elles interviennent de plus en plus tôt en mai. Faut-il les conserver, ainsi que les épreuves orales de rattrapage ? Ne faudrait-il pas les remplacer par un examen plus attentif du livret scolaire ?

S’agissant du baccalauréat, le véritable enjeu est double : maintenir sa valeur et garantir l'égalité de tous les candidats devant toutes les épreuves subies. Mais alors, la question s'impose : la complexité est-elle garante de la qualité et de l'équité ? En France, nous partons du principe qu'un professeur ne peut corriger ou interroger dans le département où il enseigne, ce qui entraîne d'importants frais de déplacement. En Allemagne, l'organisation est décentralisée à l'extrême et confiée à chaque établissement pour ses propres élèves, évalués et jugés par leurs professeurs sur la base du contrôle en cours de formation. Certes, cette méthode ne serait pas applicable chez nous et entraînerait les plus vives réactions, mais elle existe déjà pour partie en EPS et en physique, où le contrôle continu intervient pour un quart de la note finale. La solution est sûrement intermédiaire et mérite une approche plus approfondie, en concertation étroite avec les personnes concernées. Je suis persuadé que même sur un sujet aussi sensible, où la gestion des deniers publics ne doit pas être oubliée, il est possible de parvenir à un consensus.

Bien entendu, je voterai ce budget.

Mme Martine David – Monsieur le ministre, certains de vos collègues ont présenté un budget moins consternant que celui des années précédentes afin de tenter de faire oublier en partie le désengagement de l'État depuis le début de la législature. En ce qui concerne l'enseignement scolaire, cette manœuvre n'a même pas été utilisée, et vos crédits sont sans rapport avec votre ambition d'égalité des chances. Alors que l'éducation nationale était la priorité de la précédente législature, vous supprimez des postes pour la cinquième année consécutive : depuis 2002, il y a 22 000 adultes de moins dans les établissements scolaires.

Lors du vote de la loi d'orientation sur l'avenir de l'école, le Gouvernement s'était engagé à ce que chacun des quelque 8 000 établissements du secondaire bénéficient des services d'une infirmière. On en est loin. Vous annoncez la création de 300 nouveaux postes d'infirmières, mais il s'agit en fait de 100 ETP qui ne permettront évidemment pas de couvrir les besoins. Pire encore, aucun poste de médecin scolaire n'est créé. Ceci est à comparer avec les PLF pour 1998, 1999 et 2000 qui avaient créé 1 050 postes de médecins, d'infirmières et d'assistantes sociales. Cette interruption de l'effort de rattrapage engagé sous la précédente législature aura des conséquences directes pour de nombreux enfants ayant besoin d'un dépistage précoce mais aussi d'une surveillance médicale que les familles n'ont pas toujours les moyens d'assurer. De même, nous savons combien il est nécessaire que chaque collège dispose d'une infirmière à plein temps pour des raisons sanitaires évidentes mais aussi afin d'initier des actions de prévention et pour accompagner les adolescents souvent fragiles. En l'état actuel, l'objectif affiché reste utopique.

Censée être l'un des grands chantiers du quinquennat, l'intégration des personnes handicapées continue de soulever de sérieux problèmes. Dans de nombreux établissements scolaires, le décalage reste grand entre les annonces et la réalité. Plus gênant, c'est souvent en redéployant des personnels jusqu'alors en charge d'autres actions éducatives que l'assistance aux élèves handicapés est organisée. Sans moyens humains supplémentaires, l'intégration se traduit souvent par une détérioration des conditions de travail des enseignants en charge de ces publics fragilisés. Dans le programme « vie de l'élève », les crédits de l'action « accompagnement des élèves handicapés » baissent même de 3 %. Les subventions globalisées aux établissements publics locaux d'enseignement qui se spécialisent parfois dans l'accueil d'enfants en situation de handicap diminuent quant à elles de 9,2 %, de 134,5 à 122 millions. Le plan Handiscol, adopté lors de la précédente législature, avait pourtant ouvert la voie avec notamment les auxiliaires de vie scolaire et la réforme de l'allocation d'éducation spéciale. Malheureusement, ces moyens ambitieux ont fait long feu et la scolarisation de tous dans des conditions acceptables reste un objectif lointain. J'ajouterai que les nouveaux emplois vie scolaire censés accompagner les enfants en situation de handicap soulèvent des problèmes en terme de qualification et de formation. En effet, l'attention nécessaire à une bonne intégration au sein de la classe ne peut s'improviser et les inquiétudes des parents et des enseignants sont vives.

S’agissant de l'enseignement professionnel, le texte très décrié sur l'égalité des chances préconisait la mise en place du dispositif « apprenti junior ». Nous avons eu l’occasion de dénoncer cette mesure d'affichage inefficace. Décidée après les violences urbaines survenues à l'automne 2005, elle ne résolvait en rien les problèmes de scolarisation des élèves les plus fragilisés et risquait même d'aggraver la situation. Au lieu d'accorder une attention supplémentaire à chaque enfant et de mobiliser les moyens adéquats pour lui offrir une chance de se former, votre gouvernement a choisi scandaleusement de faire sortir des élèves de l'école de façon anticipée. (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Frédéric Reiss – Mais non !

Mme Martine David – Pourtant, le développement de l'apprentissage devrait s’effectuer en parfaite synergie avec celui du service public de l'enseignement professionnel. Alors que la majorité parlementaire précédente avait engagé des efforts significatifs en faveur d’une pédagogie innovante et d’un « lycée des métiers » apte à assurer formation initiale, formation continue et insertion, vous cassez cette belle ambition. De même, la formation des adultes et la validation des acquis de l'expérience subissent une baisse de crédits de 6,3 % et passent de 189 à 177 millions. L'enseignement professionnel ne pourra pleinement participer à la formation des collégiens et lycéens que s'il en a les moyens. Hélas, le lycée professionnel semble ignoré et l'on peut craindre que l'assèchement de ses ressources budgétaires combiné à la réduction de la taxe d'apprentissage ne conduise à la disparition de cette filière et à la privatisation de la formation professionnelle. Il est paradoxal, alors que le chômage reste à un niveau élevé, que des postes demeurent non pourvus dans de nombreux secteurs.

La vocation de l'enseignement professionnel est d'offrir un avenir aux jeunes tout en formant des personnels qualifiés, ce qui suppose un effort budgétaire notable. Tous ceux qui interviennent dans ces établissements sont profondément attachés à la réussite de leurs élèves : ils souhaitent donner une chance d'avenir à ces jeunes, qui ne sont pour eux ni des statistiques, ni des variables d'ajustement.

Vous devez la vérité aux Français, Monsieur le ministre : vous avez fait le choix politique de réduire à marche forcée l'emploi public, au détriment de l’encadrement éducatif et de la qualité de notre système scolaire. On ne peut que désapprouver un choix aussi injuste, aussi inefficace et à si courte vue. L’éducation est semblable à la santé : elle n'a pas de prix !

M. le Rapporteur spécial – Bingo !

Mme Martine David – Vous vous réfugiez derrière des annonces et des formules peu convaincantes. Contrairement à vous, les enseignants et les acteurs du système éducatif mettent des noms et des visages sur les situations sociales et sur les statistiques des élèves en difficulté. Ils vous disent qu’ils souhaitent tout simplement faire mieux encore. Puissiez-vous les entendre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu, cet après-midi, à 15 heures.
La séance est levée à 12 heures 45.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.
Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.
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