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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

2ème séance du mercredi 29 novembre 2006

Séance de 15 heures
33ème jour de séance, 72ème séance

Présidence de M. Jean-Louis Debré

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La séance est ouverte à quinze heures.

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questions au gouvernement

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

lutte contre le sida

M. Christian Ménard – La journée mondiale de lutte contre le sida aura lieu ce vendredi 1er décembre. Votre mobilisation, Monsieur le ministre, est à la hauteur de l’enjeu. En 2005, 6 700 personnes ont appris leur séropositivité, dont un quart étaient infectées depuis moins de six mois. Environ 130 000 personnes vivent aujourd’hui avec le virus. L’épidémie a touché plus de 60 millions de personnes dans le monde, dont 25 millions en sont mortes.

Après avoir rencontré les acteurs de terrain, vous avez annoncé une campagne de sensibilisation à la prévention, et notamment la mise en circulation du préservatif à vingt centimes. La prévention, en effet, est une priorité : en l’absence de vaccin ou même de traitement curatif, la lutte contre l’épidémie repose entièrement sur les campagnes de communication, le dépistage, l’accès au préservatif et la lutte contre les discriminations, ainsi que sur un effort de recherche international – la France se situe d’ailleurs en bonne place dans ce domaine. Pouvez-vous détailler les mesures prises pour enrayer ce fléau ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités Le nombre de nouvelles contaminations a eu beau baisser en 2005, il n’y a pas lieu de s’en réjouir : aujourd’hui, plus de 130 000 personnes sont encore victimes du sida en France. Grâce à l’opération de prévention que nous lancerons dès le 1er décembre – et qui est appelée à durer – des préservatifs à vingt centimes seront mis en vente avec le soutien des buralistes et des marchands de journaux. Tous les lycées de France en seront pourvus, et nous souhaitons étendre cette offre aux centres sociaux, aux discothèques et aux cinémas. Le préservatif doit devenir un réflexe : c’est la meilleure protection, pour les jeunes comme pour les autres.

Ainsi que le recommande le Conseil national du sida, il faut intensifier le dépistage, second volet de notre action : trop de Français apprennent leur infection trop tard, limitant les possibilités de traitement et augmentant le risque de contamination. En 2007, nous mettrons par ailleurs en place la consultation pluridisciplinaire, qui permettra d’améliorer le traitement des patients.

Le regard que nous portons sur la maladie doit changer : il faut lutter contre les discriminations liées au sida. La nouvelle convention Belorgey et le renforcement des campagnes de prévention y contribueront.

Avec Unitaid et le réseau Esther, notre action dépasse les frontières de la France. Surtout, nous devons nous opposer à la tentation de certains pays de limiter l’accès des séropositifs à leur territoire – tentation absurde, car elle incite les malades à mentir sur leur état de santé, et surtout éthiquement insupportable. Je proposerai donc une motion au sommet européen des ministres de la santé afin que les réunions sur le sida se tiennent non plus à New York, mais à Genève, où les victimes du sida peuvent se rendre sans restriction aucune ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

EADS-AIRBUS

M. Henri Emmanuelli – En l’absence du Premier ministre, du ministre d’État et du ministre de l’économie, je remercie les éminents membres du Gouvernement qui ont bien voulu se déplacer aujourd’hui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Plusieurs députés UMP – Et Royal ? Et Hollande ? Où sont-ils ?

M. Henri Emmanuelli – Je m’adresse donc au Gouvernement. La commission des finances a, hier soir, auditionné l’état-major d’EADS. Or, le Premier ministre prônait il y a peu le patriotisme économique. Vous comprendrez l’étonnement et l’incompréhension du groupe socialiste, partagés par l’ensemble de l’opposition et même par certains membres de la majorité… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Michel Herbillon – Nous n’avons pas besoin d’Emmanuelli comme porte-parole !

M. Henri Emmanuelli – Mais si, on a parfois besoin d’Emmanuelli, même dans vos rangs ! Incompréhension, disais-je, au vu des tergiversations du Gouvernement sur le financement de l’A350. Les avions de ce gabarit représentent 40 % du marché mondial. Sans une décision précise et rapide – soit avant le 1er décembre – nous laisserons au concurrent américain une inacceptable longueur d’avance, voire un monopole qui lui permettrait, grâce à cette rente de situation, de faire du dumping sur les autres créneaux. Le Gouvernement va-t-il enfin garantir ce financement – soit une levée des obligations assortie d’une garantie des États concernés à hauteur de 30 ou 40 % ?

M. Jean-Michel Fourgous – Demandez donc les 35 heures chez Boeing !

M. Henri Emmanuelli – Je ne comprendrais pas votre mutisme sur un sujet qui engage pourtant l’avenir du secteur aéronautique européen ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie Nous aimons tous Airbus et EADS et, tous, nous souhaitons leur succès.

Plusieurs députés socialistes – Cela ne suffit pas !

M. le Ministre délégué – Airbus fabrique de très nombreux A320, un secteur dans lequel l’entreprise domine le marché mondial. L’A380, quant à lui, connaît un certain retard et nous devrons, à terme, intervenir pour résoudre les problèmes de financement, comme l’a annoncé le Premier ministre. L’A350, enfin, est au cœur du marché, et la France souhaite sa réalisation. Cependant, la décision est désormais entre les mains du conseil d’administration d’EADS…

M. Henri Emmanuelli – Mais vous y siégez vous-mêmes !

M. le Ministre délégué – …et, si elle était prise, la France l’accueillerait favorablement. Le cas échéant, il faudra ensuite travailler avec les autres pays impliqués pour définir les modalités de soutien de ce projet dont nous souhaitons le succès ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP)

Acces aux soins

M. Jean-Christophe Lagarde – Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé. En 1997, l'assurance maladie et le syndicat MG France, alors majoritaire, avaient créé le dispositif du médecin référent, ainsi conçu que le patient qui s’engageait par un contrat annuel à être fidèle à son médecin de famille bénéficiait automatiquement du tiers payant. Plus de 6 000 généralistes et deux millions d'assurés étaient concernés. Mais, depuis la mise au point du mécanisme du médecin traitant, fin 2004, le tiers payant n'est plus automatique, ce qui n’est pas anormal en soi, puisque c'est davantage la situation sociale et économique du patient qu'il faut prendre en compte que sa fidélité au médecin.

Institué avec l'accord du syndicat à présent majoritaire, la CSMF, le nouveau dispositif instaure le parcours de soins coordonné. Toutefois, cette réforme ne dit rien de l'avenir réservé aux médecins référents et l’avenant qui devait être signé à ce sujet avant novembre 2005 n'a jamais vu le jour. Il résulte de ce vide juridique que, sur les deux millions de patients concernés, au moins un million et demi, ceux qui n'ont pas droit à la CMU, perdent peu à peu le bénéfice du tiers payant lorsque leur contrat annuel arrive à son terme. Autrement dit, le sort des assurés dépend désormais de la décision de chaque caisse primaire d'assurance maladie, si bien que les malades ne sont plus égaux devant la maladie selon qu'ils habitent, par exemple, Paris ou l'Essonne. Cette situation est d’autant plus inadmissible que des dizaines de milliers de familles n'ont plus d'argent pour se nourrir dès le 20 du mois. Chacun comprend donc que de très nombreux malades ne consultent pas, faute de pouvoir faire l’avance de frais médicaux, ce qui entraîne parfois l’aggravation de leurs pathologies.

Ce n’est qu’aujourd'hui, avec plus d'un an de retard, que la CNAM et les syndicats de médecins libéraux se réunissent pour traiter de ce dossier. Vous avez, Monsieur le ministre, fixé au 31 janvier 2007 la date limite d'un accord. Mais pouvez-vous nous dire les raisons du considérable retard pris dans les négociations qui devaient régler la transition entre le dispositif du médecin référent et celui du médecin traitant ? Pouvez-vous, d’autre part, garantir que tous les malades ayant des problèmes financiers seront traités également sur l'ensemble du territoire et que les critères financiers et sociaux des familles seront les principaux éléments dont il sera tenu compte pour accorder le tiers payant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités  Bien davantage qu’à moi, votre question s’adresse au directeur de la CNAM et aux syndicats conventionnels qui, contrairement à leur engagement, n’ont pas trouvé le temps de régler la question du médecin référent. Parce que j’estimais que le problème n’avait que trop longtemps traîné, j’ai proposé au Parlement un amendement disposant que si aucun accord n’était trouvé avant le 31 janvier 2007, le Gouvernement résoudrait le problème. Je me félicite qu’une réunion soit finalement organisée à ce sujet aujourd’hui, mais j’ai la faiblesse de penser que le vote de cet amendement n’y est pas étranger.

S’agissant de l’accès aux soins, la carte Vitale permet à présent que les remboursements de frais médicaux aient lieu sous cinq jours. Mais il est exact que pour les personnes dont les ressources excèdent de peu le plafond d’éligibilité à la CMU, l’avance de fonds pose problème. Le sachant, certaines caisses primaires d’assurance maladie ont réglé la question de leur propre initiative. Cependant, tous les assurés doivent être traités également. Aussi, si les partenaires conventionnels ne s’accordent pas aujourd’hui, le Gouvernement assumera cette responsabilité, afin que ce dossier resté trop longtemps en suspens soit enfin réglé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

sapeurs-pompiers

M. André Chassaigne - À quelques jours de la Sainte-Barbe, ma question, qui s'adresse au ministre délégué aux collectivités territoriales, concerne l’ensemble des sapeurs-pompiers dont je tiens, au nom du groupe des députés communistes et républicains, à saluer le dévouement et le courage (« Démagogie ! » sur les bancs du groupe UMP). Mais les hommages ne suffisent pas et il est urgent de satisfaire leurs nombreuses revendications pendantes plus de deux ans après la promulgation de la loi de modernisation de la sécurité civile. Les sapeurs-pompiers professionnels, au lendemain d'une nouvelle journée de revendication qui fait suite à la forte mobilisation de la semaine précédente (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), ces sapeurs-pompiers si souvent en première ligne, notamment dans les quartiers difficiles, sollicitent la réouverture de négociations portant, pour tenir compte de la dangerosité de leur métier, sur le rétablissement de la nouvelle bonification indiciaire, mais aussi sur un vrai plan de carrière et sur un départ à la retraite à 55 ans dans des conditions acceptables. Ces revendications sont légitimes.

Quant aux sapeurs-pompiers volontaires, ils veulent se voir servie la prestation de fidélisation et de reconnaissance, nouvelle illustration d'une charge imposée à une collectivité territoriale et non compensée. En effet, la contribution de l'État ne couvre pas la moitié du coût de cette prestation qui, à l'avenir, sera versée aux seuls sapeurs-pompiers volontaires justifiant de vingt ans de service, alors que la cotisation portera sur l'ensemble des effectifs. Dans le seul département du Puy-de-Dôme, pour les années 2005 et 2006, les contribuables locaux devront supporter à ce titre une charge de quelque 1,1 million… (« La question ! » sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Veuillez conclure.

M. André Chassaigne – Quelles suites donnerez-vous, Monsieur le ministre, à ces questions, qui ont trait à la reconnaissance due aux sapeurs-pompiers ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales – Votre référence à Sainte-Barbe, dont on sait le destin tragique – elle eut la tête tranchée par son propre père – (« Chirac ! » sur les bancs du groupe socialiste) me donne l’occasion de rendre hommage à tous les sapeurs-pompiers (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). J’observerai pour commencer que chacun peut légitimement exprimer des revendications par le biais des organisations syndicales et que celles-ci peuvent décider, comme certaines l’ont fait, d’exercer le droit de manifester. Rien, en revanche, ne peut légitimer les débordements inacceptables (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) de certains manifestants, qui ont dégradé le mobilier urbain, entravé la circulation et, surtout, blessé, parfois très grièvement, des policiers et des gendarmes. Les organisations syndicales unanimes comme, je l’espère, les groupes politiques, ont condamné ces exactions (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Des sanctions disciplinaires et judiciaires doivent être prises dans les meilleurs délais (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Ensuite, après que la lumière aura été faite sur ces actes délictueux, les discussions devront reprendre. Elles porteront sur la bonification indiciaire et sur l’application de l’accord Jacob. La réflexion devra aussi se poursuivre sur la fin de carrière. Chacun devra être dans son rôle : les départements, pour définir l’équilibre souhaitable entre la charge financière et la satisfaction des revendications ; les syndicats, pour proposer des solutions ; l’État, en sa qualité de garant de la qualité et de la continuité du service public.

S’agissant de la prestation de fidélisation, je vous rassurerai sans nul doute en vous indiquant que, cette nuit, le Sénat a abondé la DGF de 12 millions.

L’État tiendra ses engagements en finançant la moitié de la prestation. Le département du Puy-de-Dôme bénéficiera naturellement du même régime, Monsieur Chassaigne (Sourires). L’État participera ainsi à la légitime reconnaissance de l’action des sapeurs-pompiers volontaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

Logement social

M. Alain Suguenot – Depuis bientôt quatre ans, le Gouvernement a fait de la relance du logement social une priorité. Au prix d’un effort considérable, près de 100 000 nouveaux logements ont été financés en 2006, soit deux fois plus qu’en 2002 (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Les Français, en particulier les plus modestes d’entre eux, souhaitent acquérir un jour leur logement : il semble anormal qu’un locataire vive pendant trente ans dans un logement HLM sans pouvoir l’acheter ou accéder à une autre forme de propriété foncière. Les remboursements d’échéance étant très proches du montant des loyers, il y a sans doute lieu d’agir.

Vous avez pris de nombreuses mesures pour satisfaire cette demande sociale, Monsieur le ministre de la cohésion sociale, que ce soit en faveur des jeunes, en signant une convention avec l’Union nationale des foyers de jeunes travailleurs, ou bien dans la loi adoptée en juillet dernier – élargissement du prêt à taux zéro, TVA à 5,5 % dans les zones de rénovation urbaine ou encore maison à 100 000 euros. À cela s’ajoute une autre mesure dont l’Assemblée débattra bientôt : la réforme des sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif.

Pourriez-vous nous préciser, Monsieur le ministre, où en sont tous ces dossiers, et nous indiquer, en réponse aux interrogations de nombreux maires, comment les collectivités locales peuvent-elles aussi contribuer à la politique d’accession à la propriété pour tous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement Vous avez rappelé à juste titre que la production de logements a doublé en France, pour atteindre 540 000 cette année ! Il était temps ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Le nombre de logements sociaux est en outre passé de 40 000 à 95 000 cette année.

M. Jacques Desallangre – Mais où sont-ils ?

M. le Ministre – Imaginez où en serait la crise du logement sans cela !

Avec l’Union nationale des foyers de jeunes travailleurs, nous avons également signé une convention prévoyant 10 000 logements supplémentaires. Alors que les jeunes travailleurs et les apprentis ont besoin d’être accueillis et encadrés pour quelques mois seulement, ils paient aujourd’hui le prix de retards colossaux en la matière !

Vous connaissez la ligne suivie par le Gouvernement et la majorité : accession de tous ceux qui le souhaitent à la propriété et relance du secteur locatif social. Pour cela, nous avons adopté la TVA à 5,5 %, les prêts de 40 ans accordés aux collectifs territoriales mettant à disposition des terrains et des primes de 10 000 euros par accession. À compter du 1er janvier prochain, le portage réalisé par la Caisse des dépôts permettra également à nos compatriotes d’acheter dans un premier temps le seul bâti, de façon à ce que le coût du crédit ne dépasse pas celui de la location : pendant quinze ou vingt ans, il sera possible de louer pour un euro les terrains, avant d’exercer éventuellement une option d’achat. En résumé, c’est la maison à 100 000 euros !

Enfin, pour le prix d’une location traditionnelle en HLM, il sera possible d’acquérir des maisons écologiques de qualité, adaptées aux personnes à mobilité réduite. Voilà l’action du Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

développement des biocarburants

M. Jean-Pierre Decool – Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. Depuis quelques années, la question de l'approvisionnement énergétique de la France se pose avec de plus en plus d’acuité : l'évolution du cours des énergies fossiles impose des adaptations.

Attentif à ces défis, le Gouvernement mène une politique favorable au développement des énergies alternatives, en donnant le feu vert aux pompes à éthanol ou bien encore en lançant le plan biocarburants en 2004. Les biocarburants sont en effet un atout pour nous préparer efficacement à la diminution des ressources pétrolières et renforcer notre indépendance énergétique. Mais c'est aussi un atout pour notre politique de développement durable, priorité à laquelle des moyens financiers et humains notables ont déjà été consacrés. Le soutien aux biocarburants participe en effet de l’application du protocole de Kyoto, entré en vigueur dans notre pays en février 2005. Les biocarburants donnent enfin aux agriculteurs, en particulier aux plus jeunes d'entre eux, un projet pour leur avenir.

Toutefois, nous ne pouvons pas ignorer certaines interrogations : certains avancent des chiffres sujets à caution, prétendant que le manque de surface cultivable handicapera le développement des biocarburants. Pouvez-vous donc nous indiquer, Monsieur le ministre, quelles sont les potentialités de notre secteur agricole et ses facultés d’adaptation à cette nouvelle demande ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche  Les biocarburants nous permettront effectivement de relever trois grands défis : la lutte contre l’effet de serre, l’indépendance énergétique et la création de nouveaux emplois. Ce ne sont pas moins de 21 usines qui sont aujourd’hui en cours de construction ou d’extension !

Comment atteindrons-nous les objectifs ambitieux que nous avons fixés ? Nous allons doubler, d’ici à l’an prochain, le taux actuel d’incorporation obligatoire – 1,75 % –, avant de le porter à 7 % en 2010 et à 10 % en 2015. Nous développerons également l’E85 et l’huile de colza.

Avons-nous les terrains nécessaires pour cela ? Il faudra en effet deux millions d’hectares en 2010, que nous obtiendrons en récupérant 1,3 million d’hectares mis en jachère, ce qui conduira les agriculteurs à modifier leurs assolements – le maïs, qui demande beaucoup d’eau, pourrait notamment être remplacé par le colza. Grâce aux évolutions de la recherche, nous pourrons par ailleurs utiliser un jour la totalité des plantes, que ce soit pour les biocarburants ou pour la biochimie.

N’ayons donc aucune crainte : nous pourrons continuer à produire pour notre propre alimentation, nous resterons le premier exportateur de produits agroalimentaires au monde, et nous resterons les meilleures élèves d’Europe pour les biocarburants. Tel sera le très beau résultat des politiques menées par Jean-Pierre Raffarin et Dominique de Villepin avec l’aide de cette majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

fermeture de l’usine well au vigan

M. William Dumas – Le département du Gard est touché depuis plusieurs mois par de nombreuses suppressions d'emplois : 290 à la Verrerie du Languedoc du groupe Perrier, 95 à Syngenta, groupe phytosanitaire suisse, et les 300 annoncées vendredi chez Well. Cette entreprise appartient à Natexis, banque d'investissement des banques populaires. Elle emploie plus de 400 personnes, pour 60 millions de chiffre d'affaires. Le plan proposé en octobre, qui prévoyait la suppression de 149 postes, est suspendu et l’on vient de nous annoncer l'arrêt total et définitif de la production.

Pourtant, Natexis, établissement à caractère mutualiste et coopératif, enregistre d’excellents résultats : son produit net bancaire est en hausse de 29 %, son résultat brut d'exploitation de 47 % et le résultat net du groupe de 56 %. Une fusion, en avril 2007, avec Ixis, du groupe Caisse d'épargne, va donner naissance à Natixis. Que penser de la grande campagne de publicité qui vient d’être lancée – « gestionnaire de 500 milliards d'euros dans le monde » ou « vous n'imaginez pas le potentiel de développement qui se cache derrière Natixis » : provocation ou indécence à l'égard des salariés de Well ?

Well a bénéficié à plusieurs reprises d’aides publiques, compte tenu de sa situation en zone de rénovation rurale. La fermeture de ce site de production, qui emploie une main d'œuvre locale, jeune et pleine de savoir-faire serait un véritable cataclysme social et économique pour l'ensemble du secteur viganais. Face à une telle situation, qui n’est pas due à des fonds de pensions internationaux, mais à un fonds d'investissements français, on peut se demander ce qu’est devenu ce patriotisme économique dont vous nous vantez tant les vertus.

M. Jean-Marc Roubaud – Démago !

M. William Dumas – Quelles dispositions comptez-vous prendre pour amener les responsables du groupe à tout faire pour maintenir cette unité de production et sauver ainsi une partie de l'emploi dans les vallées cévenoles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie  Je comprends votre amertume. C’est pour éviter ce genre de situations que nous avons mis en place de nombreux instruments pour le secteur textile-habillement : l’accord de partenariat que Gérard Larcher et moi avons signé en début d’année avec l’ensemble des partenaires sociaux, les deux pôles de compétitivité dans le secteur du textile, les garanties offertes afin que les entreprises puissent investir et créer de l’activité, parce qu’il y a des secteurs où c’est nécessaire… (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Aujourd’hui, puisque Well a pris cette décision, il va devoir en assumer toutes les conséquences (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste). Comme la loi de cohésion sociale le prévoit, Well et son actionnaire principal Natexis devront prendre en charge la reconversion de tous les salariés, leur formation et la réindustrialisation du bassin. Qu’ils se le disent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

formation professionnelle dans la fonction publique

M. André Schneider – Monsieur le ministre de la fonction publique, vous avez, le 21 novembre, signé avec des organisations syndicales un protocole d'accord relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie. C'est le premier accord de ce type signé depuis dix ans : c’est dire s’il était attendu. C’est un des éléments majeurs de la réforme de l'État menée par le Gouvernement. Il permettra aux fonctionnaires de se former et d'évoluer tout au long de leur carrière. Il s'inscrit en cela dans la continuité des accords du 25 janvier 2006. Pourriez-vous rappeler devant la représentation nationale les grandes lignes de cet accord essentiel ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique – Cet accord très important répond à notre souci d’assurer une progression de carrière à tous les agents de la fonction publique, lesquels ont bénéficié d’un accroissement significatif de leur pouvoir d’achat grâce aux accords du 25 janvier dernier.

Cet accord sur la formation leur permet maintenant d’évoluer, en instituant un droit individuel à la formation de vingt heures par an, cumulable sur six ans (« Oh ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) et en leur donnant la possibilité, contre une allocation, de se former en dehors du temps de travail. Nous mettons également en place un congé de professionnalisation de six mois, qui permettra à ceux qui attendaient une telle opportunité de préparer une deuxième carrière. Nous organisons aussi la validation des acquis de l’expérience. Cela représente un véritable plan de personnalisation de la formation. Comme vous l’avez dit, nous avons, en moins d’un an, bouclé deux accords dans la fonction publique, alors que rien n’avait été fait depuis dix ans. C’est à l’engagement personnel du Premier ministre sur ce sujet que nous le devons (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

création de places en établissements spécialisés pour les handicapés

M. Jean-Michel Ferrand – La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances amène des évolutions fondamentales pour les personnes handicapées. Elle traduit notre volonté de renforcer la solidarité nationale à l'égard des plus vulnérables et de faire de leur insertion une priorité. Les efforts réalisés par le Gouvernement pour rattraper notre retard ont permis, conformément au programme de création 2003-2007, d'améliorer sensiblement la capacité d'accueil des foyers d'accueil médicalisés et des maisons d'accueil spécialisées. Mais c’est insuffisant : trop de personnes handicapées attendent encore ! Il faut accélérer les créations de places. Que comptez-vous faire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille Comme vous avez raison, Monsieur Ferrand ! C’est à une véritable révolution que nous invite la loi de 2005 (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) pour que la différence des uns cesse de buter sur l’indifférence des autres. En toute personne handicapée, on doit voir les possibilités, les talents et le projet de vie bien avant le handicap. Il est vrai qu’en 2002, le retard que nous avons trouvé faisait honte à notre pays (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Plusieurs députés socialistes – Des chiffres !

M. le Ministre délégué – Le Président de la République a décidé de faire de la politique du handicap l’une des priorités de son quinquennat. Grâce aux efforts que nous avons entrepris, nous aurons, en cinq ans, créé deux fois plus de places que pendant les cinq années précédentes.

Ce qui veut dire que nous aurons mis fin aux situations dramatiques qui conduisaient à envoyer à l’hôpital des enfants autistes ou à contraindre leurs parents à les garder à la maison, au lieu de les voir accueillis dans des structures adaptées. Ces situations étaient souvent tragiques, et nous avons tout fait pour les corriger.

Nous voulons aussi humaniser nos maisons pour personnes handicapées en luttant contre leur vétusté. À cet effet, 150 millions ont été mobilisés cette année…

M. Henri Emmanuelli - Ce sont les départements qui financent !

M. le Ministre délégué – Et nous irons encore plus loin l’année prochaine, en prévoyant des prêts à taux zéro pour tous les travaux d’humanisation ; 385 millions supplémentaires seront en outre dégagés pour moderniser les établissements.

Cet effort sans précédent, c’est le travail des Français qui l’a rendu possible, avec la Journée de solidarité… (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Pour nous, c’est la solidarité par le travail qui enrichit la France, pas la solidarité par l’impôt, si chère à d’autres alors qu’elle appauvrit notre pays en retardant sa croissance ! (Même mouvement) Grâce à cet effort et aux économies que nous réalisons sur l’assurance maladie, nous pouvons soutenir les maisons d’accueil spécialisées, les foyers d’accueil médicalisés, les services pour les enfants autistes et rattraper peu à peu le retard que nous avait légué la majorité précédente ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

directive postale

M. François Brottes – Dans chacune de ses interventions, M. Bas nous inflige une litanie de chiffres, mais les réalités de terrain auxquelles nous sommes confrontés ne nous permettent jamais de vérifier qu’ils correspondent à quoi que ce soit de concret ! Il doit y avoir un couac quelque part ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste)

C’est le 11 décembre prochain que le Gouvernement va exprimer la position de la France au Conseil des ministres européens où sera examinée la proposition de nouvelle directive postale. Monsieur le ministre délégué à l’industrie, vous avez l’obligation de nous dire si, oui ou non, vous allez définitivement sacrifier la poste à ce libéralisme qui tue à petit feu le service public. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Et ne me répondez pas une fois de plus que vous allez maintenir le service universel et que cela suffira au bonheur des Français, car vous savez très bien que cela ne donne aucune garantie : pas plus sur le maintien du prix unique du timbre que sur celui des bureaux de poste de plein exercice ou de la distribution du courrier six jours par semaine.

Au reste, en dix-neuf mois, vous n'avez toujours pas été capable de prendre les décrets d'application sur le service universel postal, ce qui montre bien le peu de cas que vous faites d’une question qui concerne pourtant tous les Français. C’est bien votre responsabilité qui est une nouvelle fois mise en jeu, comme lorsque vous avez accepté, en novembre 2002, d’ouvrir à la concurrence le secteur de l’énergie pour les ménages, ce qui aura pour effet d’augmenter les prix dès le 1er juillet prochain ; comme, aussi, lorsque vous ne répondez pas clairement à Henri Emmanuelli sur la position de l’État actionnaire au sein du conseil d’administration d’EADS ; comme, enfin, en mai 2005, lorsque vous avez ouvert, dans votre loi de dérégulation postale, tous les métiers de la poste à la concurrence – même les lettres recommandées – et favorisé – voire encouragé – la fermeture des bureaux de poste au profit de « points poste » chez les commerçants, ou d'agences postales communales, lesquels n'apportent pourtant pas les mêmes services aux usagers. (« La question ! » sur les bancs du groupe UMP)

Vous avez refusé toutes nos propositions visant à confirmer les missions de service public de la banque postale, sans laquelle des centaines de milliers de familles n'auraient pas accès aux services bancaires. Pis, vous avez préféré engager sa privatisation progressive : c'est ainsi que va disparaître la spécificité du livret A et que vous faites prendre le risque aux communes qui acceptent de créer une agence postale communale, en lieu et place d'un vrai bureau de poste, de se voir retirer cette possibilité par la Commission européenne, sous la pression des autres banques.

Quelle va être la position du gouvernement français le 11 décembre prochain, à Bruxelles ? Nos concitoyens doivent savoir que la mort annoncée du secteur réservé, c'est la suppression du moyen, pour la poste, de financer le prix unique du timbre, le maintien de100 000 facteurs et la proximité d'un nombre suffisant de bureaux de poste.

M. le Président – Veuillez conclure.

M. François Brottes - Quelles seront les modalités de financement du service public après la libéralisation que vous êtes en passe d'accepter ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur de nombreux bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie - Monsieur Brottes, j’ai déjà eu l’occasion de vous répondre à ce sujet il y a deux ou trois semaines. La proposition de directive qui sera examinée par le Conseil de la semaine prochaine a vocation, d’après la Commission européenne, à s’appliquer en 2009. Comme vous avez posé énormément de questions, je vais tenter d’éclairer la représentation nationale en simplifiant un peu le débat.

À ce jour, il y a déjà eu deux directives postales,…

M. Jacques Desallangre - Toutes deux exécrables !

M. le Ministre délégué - …pour limiter le secteur réservé aux plis de moins de 50 grammes, tout le reste étant ouvert à la concurrence. La poste bénéficie de ce service réservé en échange du service universel qu’elle doit assurer.

Que voulons-nous ? Que la nouvelle directive nous permette de résoudre les problèmes juridiques auxquels nous risquons d’être confrontés. Si cette directive sort de la moulinette du Parlement européen et du Conseil, il faudra qu’elle tranche toutes les questions que vous avez posées. Dès lors, pourquoi voudriez-vous que je brade le service universel lors du prochain Conseil ? La seule chose que je défendrai – et je l’ai déjà écrit au commissaire McCreevy – c’est que nous sommes déterminés à conserver notre capacité à faire fonctionner le service postal universel dans notre pays. Si nous n’obtenons pas de garanties claires à ce sujet, nous n’aurons aucune raison de soutenir cette proposition de directive. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Régime d’indemnisation des catastrophes naturelles en outre-mer

M. Joël Beaugendre - Ma question, à laquelle j’associe Mme Louis-Carabin, porte sur le régime de couverture des catastrophes naturelles dans les DOM. Monsieur le ministre, ce n'est qu'à la suite du passage du cyclone Hugo, en 1989, que le législateur a étendu le régime des catastrophes naturelles à l'outre-mer, instaurant ainsi une égalité de protection et d'indemnisation entre les assurés des DOM et ceux de la métropole. La caisse centrale de réassurance a donc pu indemniser, outre les risques de catastrophes naturelles, les dégâts liés aux cyclones et ouragans. Ce régime a été actualisé en 2000, pour une période de cinq ans.

Pour 2007, l'équilibre financier du système a été remis en cause par la décision de la caisse centrale de réassurance de revoir son seuil d'intervention et de se désengager des risques dans les DOM. Ainsi, ne seraient plus couverts que les sinistres liés à la sécheresse et aux inondations, alors qu'une partie des recettes de la surprime est légalement réservée à l'indemnisation des assurés dans les DOM.

De plus, en raison de la dégradation des résultats des assurances de catastrophes naturelles, due, pour l’essentiel, à la sécheresse et aux inondations survenues en métropole, une augmentation des coûts de réassurance est prévue. Monsieur le Ministre, une fois de plus, la remise en cause de ce système de solidarité a de graves conséquences pour les assurés, les industriels, les artisans, les commerçants, les professionnels du tourisme et les collectivités.

En effet, les assureurs couvrant les risques d'entreprises et de collectivités dans les DOM adoptent la position d'avant l'année 1989. Ils revoient les conditions de maintien sur le marché de l'assurance dans les DOM et abandonnent l'ensemble des risques encourus par nos acteurs économiques, pour préserver leur compétitivité. Certaines compagnies d'assurances procèdent d'ores et déjà à la résiliation, à titre conservatoire, des contrats passés avec les collectivités.

Les maires, ayant l'obligation d'assurer les bâtiments communaux, sont inquiets quant au financement à prévoir, dès 2007, pour honorer la hausse des primes d'assurance. Face à l'inquiétude grandissante des différents acteurs économiques des DOM, quel engagement l'État entend-il prendre pour sauvegarder et pérenniser l'actuel régime, lequel constitue un support indispensable au développement de nos régions ? L'outre-mer attend une réponse précise. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. François Baroin, ministre de l’outre-mer - Je tiens à vous rassurer d’emblée : en 2007, il n’y aura aucune modification dans l’application des traités de réassurance entre la caisse centrale de réassurance et les compagnies. Cela signifie que pour l’application des décrets comme pour la définition et la qualification des catastrophes naturelles ou bien encore les seuils d’intensité, les règles retenues après le cyclone Hugo seront toujours en vigueur en 2007.

Une réflexion est en cours, mais soyez assuré que le Gouvernement ne présentera pas de projet de loi avant d’avoir consulté les élus locaux, les assureurs et les assurés. Des consultations ont d’ailleurs lieu actuellement.

Dans les départements d’outre-mer, la prise en compte du risque de catastrophes naturelles – cyclones, tsunamis, séismes… – est une ardente obligation. Elle doit être intégrée dans toutes les politiques publiques menées pour ces départements tant au niveau national qu’au niveau local – logement, voirie, protection des personnes…

S’il ne serait pas raisonnable de prétendre que le projet de loi pourra être adopté avant la fin de cette législature, notre objectif est qu’il soit fin prêt pour la prochaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

garde des jeunes enfants

M. Pierre Cardo – Le Gouvernement a présenté un ambitieux plan petite enfance qui prévoit de créer en cinq ans 12 000 places de crèches et 60 000 places chez les assistantes maternelles, d’autoriser les micro-crèches, de lever tous les obstacles au développement des places d’accueil et de faciliter le recrutement de professionnels de la petite enfance

Plusieurs députés socialistes – Avec quel argent ?

M. Pierre Cardo - Si on ne peut que souscrire à un tel plan, il n’en reste pas moins que beaucoup de collectivités sont confrontées à des difficultés quasi-insurmontables (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Tout d’abord, en raison des nouvelles orientations des CAF qui se désengagent des contrats enfance et des contrats temps libre au profit d’un soutien à la création de places de crèche. Ensuite, parce que ces nouvelles orientations s’ajoutent à la réglementation particulièrement contraignante issue d’un décret du 1er août 2000 repris à l’article R. 2324-42 du code de la santé publique, selon lequel les personnels chargés de l’encadrement des enfants doivent être titulaires du diplôme d’État d’éducateur de jeunes enfants ou du diplôme professionnel d’auxiliaire de puériculture.

Or, certaines structures, notamment associatives, cherchant à satisfaire les besoins spécifiques des enfants de familles monoparentales ou de parents ayant des horaires de travail décalés, ont organisé un accueil de nuit, de week-end et d’urgence. Elles ont également soutenu dans des quartiers sensibles la démarche de femmes à faible niveau de qualification en leur permettant de devenir assistante maternelle. Hélas, à cause de ce décret, cette solution de professionnalisation, permettant de créer des emplois, s’est réduite. Et comme dans ces quartiers, les emplois de nuit et de week-end trouvent d’autant moins preneurs que la qualification augmente, le nombre de places offertes aux familles diminue, ainsi que le financement de la CAF puisqu’il se limite aux créations de places. Je rappelle pour simple mémoire que le décret en question a été signé par quatre ministres, Mme Royal, Mme Aubry, Mme Gillot et M. Chevènement (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Que compte faire le Gouvernement pour remédier à ses conséquences ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille - Notre politique familiale vise à développer les services aux familles, notamment en développant les modes de garde des jeunes enfants.

M. Maxime Gremetz - Cela ne suffit pas !

M. le Ministre délégué – Malgré un effort sans précédent avec 72 000 places de crèches créées entre 2002 et 2008, les parents de 240 000 enfants sur les 2,4 millions de moins de trois ans que compte notre pays, n’ont toujours pas de solution de garde. L’ambition de notre plan petite enfance est de pouvoir en offrir une pour tout enfant de moins de trois ans…

Plusieurs députés socialistes – Avec quels moyens ?

M. le Ministre délégué – …en mobilisant les crédits d’action sociale et familiale des CAF. Il y aura 60 000 places de plus chez les assistantes maternelles et 40 000 en crèche.

Mais nous devons aussi diversifier les modes de garde en développant les crèches d’entreprise, les crèches rurales, les micro-crèches… Tout en veillant à la qualité de l’accueil des enfants, garantie indispensable, il convient de ne pas en rajouter sur les normes administratives, si contraignantes qu’elles conduisent parfois à des situations ubuesques. Ainsi dans une petite crèche rurale de vingt places, la directrice doit occuper son poste à plein temps et n’est pas autorisée à s’occuper des enfants : le coût de son poste en vient ainsi à représenter la moitié du coût de fonctionnement de la crèche. Ne serait-il pas possible de mutualiser la direction entre plusieurs structures ? Un décret qui doit paraître en fin d’année le permettra. De même, est–il normal qu’une directrice de crèche ne puisse pas être comptabilisée parmi le personnel s’occupant des enfants, notamment dans les petites structures ? La révision du décret de 2000, dont vous avez rappelé les signataires, l’autorisera (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Enfin, pourquoi des personnes ayant toutes les qualifications requises pour être assistantes maternelles ne pourraient-elles pas se regrouper à trois dans un local adapté pour y accueillir des enfants en-dehors de chez elles ? C’est en assouplissant ainsi les règles que nous trouverons des solutions, sans nullement baisser la garde sur la qualité de l’accueil (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président – Nous en avons terminé avec les questions.

La séance, suspendue à 15 heures 55, est reprise à 16 heures 15, sous la présidence de M. Raoult.
PRÉSIDENCE de M. Éric RAOULT
vice-président

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prévention de la délinquance (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la prévention de la délinquance.

Art. 9 (précédemment réservé) (suite)

M. Michel Vaxès - Notre amendement 307 a pour objet de supprimer les alinéas 1 à 13 de cet article, qui permet la création dans chaque commune d’un traitement automatisé de données, issues des CAF, des inspecteurs d’académie et des directeurs d’établissements, concernant les mineurs soumis à l’obligation scolaire. Le texte ne prévoit aucun contrôle de ce traitement automatisé par l’autorité judiciaire. Peut-être cela figurera-t-il dans le futur décret en Conseil d’État ? Celui-ci traitera-t-il aussi du droit de consultation des données et du droit d’opposition ?

La lutte contre l’absentéisme et le « décrochage » scolaire sont assurément indispensables à la prévention de la délinquance, dans la mesure où les enfants et adolescents qui commettent des délits sont majoritairement des jeunes en échec scolaire. Il semble que ce paramètre compte davantage que les dysfonctionnements familiaux. Il est donc à prendre en compte avec beaucoup de sérieux. Mais cet article ne propose rien d’autre que la constitution d’un fichier municipal, sans en préciser l’utilisation. Que pourront bien faire les maires dudit fichier ? Rien, faute de moyens pour mener des actions de soutien scolaire. Mais il aurait été étonnant que le Gouvernement propose de telles mesures, alors qu’il est en train de faire disparaître les réseaux d’aide spécialisée aux élèves en difficulté.

M. Noël Mamère - Mon amendement 508 est identique.

La prévention de la délinquance se voit donc inscrite comme une des missions des établissements scolaires. Cette modification du code va-t-elle entraîner des changements dans les programmes des élèves et dans la formation des professeurs ? Cela mériterait d’être précisé.

Je crois en tout cas que cet article 9 est dangereux. J’ai été quasiment conspué, hier, par des collègues de la majorité quand j’ai évoqué le fichier « base élèves » de l’éducation nationale, qui va centraliser bientôt toutes les données relatives aux élèves et qui gardera la trace de tout ce qui leur sera arrivé. On a pourtant déjà vu les dangers du fichier STIC, dans lequel se sont retrouvées des personnes qui avaient simplement été témoins d’un accident de circulation. Résultat, on leur a refusé un emploi !

On se demande en quoi des informations personnelles sur les prestations familiales amélioreraient le suivi de l’assiduité scolaire. Les objectifs visés ne légitiment en rien les moyens déployés. Les principes encadrant la restriction des libertés individuelles, à savoir la juste proportionnalité des mesures et leur justification, ne sont pas respectés. Le projet offre en effet trop peu de garanties quant à l’utilisation et à la transmission des données. Comment la transmission de données relatives à des enfants en âge scolaire pourrait-elle ne pas porter atteinte à la vie privée des familles concernées ? Elles seront stigmatisées.

L’article 2 de la loi du 6 janvier 1978 dispose pourtant qu’aucune décision administrative ou privée impliquant une appréciation sur un comportement humain ne peut avoir pour seul fondement un traitement automatisé d’informations donnant une définition du profil ou de la personnalité de l’intéressé. Il est vrai que vrai que vous n’avez pas plus à faire des lois que des avis de la CNIL !

En outre, il n’existe aucune garantie que l’enregistrement de données nominatives ne porte pas atteinte au principe de présomption d’innocence tel que le définit la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Autrement dit, ce projet de loi porte un coup – fût-il oblique – aux principes de la République.

M. Philippe Houillon, président et rapporteur de la commission des lois – Avis défavorable. Vous compliquez bien les choses ! Dresser la liste des enfants soumis à obligation scolaire est une mission ancienne des maires, qui figure dans le code de l’éducation nationale : nous ne l’avons pas inventée ! Quant à l’article 9, il ne fait que permettre au maire de disposer d’informations fiables sur l’absentéisme scolaire. Enfin, la CNIL a donné un avis favorable au traitement automatisé des données.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire – Même avis. Je m’étonne que vous refusiez de confier aux maires des informations sur les enfants absentéistes. Il s’agit pourtant, je le rappelle, d’un projet relatif à la prévention de la délinquance. Or, les mineurs auteurs de délits sont plus souvent absentéistes qu’assidus, reconnaissez-le ! Nous prenons là des mesures de prévention, afin d’éviter à certains gamins de commettre des bêtises qui nous forcent à appliquer des sanctions que vous nous reprochez par ailleurs !

Pour la première fois, nous disposons d’une évaluation précise de l’absentéisme : permettez-moi d’en informer la représentation nationale. Entre les mois de septembre et de février de la dernière année scolaire, le taux moyen d’absentéisme est passé de 2,4 % à 6,4 %, c’est-à-dire de 100 000 à 280 000 élèves !

M. Jean-Pierre Blazy – Mais que fait M. de Robien ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué Et encore n’est-ce qu’une moyenne : les chiffres sont plus élevés dans certains secteurs ! En outre, certaines absences ne sont pas signalées par les établissements.

M. Jean-Pierre Blazy – C’est une faute !

M. Christian Estrosi, ministre délégué – Il faut donc agir au plus vite. Ainsi, nous donnons aux maires les moyens de peser sur les établissements pour qu’ils leur transmettent ces informations, ainsi qu’à l’inspection académique. C’est une mesure préventive que vous devriez accepter unanimement ! Le Gouvernement veut ici prévenir, pour éviter d’avoir à réprimer.

M. Jean-Pierre Blazy – Je soutiens les amendements de suppression de l’article et le groupe socialiste a par ailleurs déposé des amendements visant à en supprimer les alinéas les plus controversés. Rendez-vous compte de ce que vous nous annoncez : les résultats de votre politique en matière d’absentéisme sont catastrophiques ! Et encore, nous dites-vous, toutes les absences ne sont pas enregistrées ! Le droit prévoit pourtant que les chefs d’établissements et directeurs d’écoles les signalent. Une nouvelle fois, vous vous défaussez sur le maire, en lui confiant une responsabilité qui n’est pas la sienne, car il n’est ni directeur, ni proviseur. Ne lui demandez pas d’accomplir les tâches des autres !

D’autre part, vous répondiez hier soir à M. Cohen que la CNIL avait donné un avis favorable à la constitution par le maire d’un ficher recensant des données à caractère personnel. Permettez-moi de revenir sur cet avis : la CNIL reconnaît que le suivi de l’activité scolaire, et notamment l’établissement d’une liste des élèves soumis à l’obligation de scolarité, font partie des compétences du maire, mais s’interroge sur la pertinence qu’il y a à enrichir cette liste d’informations, transmises par les caisses d’allocations familiales, relatives aux élèves ayant reçu un avertissement pour absentéisme. Elle estime que les inspecteurs d’académie sont seuls en charge de vérifier que les enfants se conforment à l’obligation scolaire et que, par conséquent, ils doivent être les seuls récipiendaires de ces informations. Reconnaissez que cet avis est loin d’être favorable ! En outre, la CNIL recommande que les décrets d’application de la loi précisent les modalités d’échange et d’utilisation de ces données par les maires. En effet, nous courons là le risque d’une utilisation malveillante de ces fichiers.

M. le Président – Nous n’avons examiné qu’un tiers des amendements et passé quatre heures quarante en rappels au Règlement ou suspensions de séance. M. Goasguen a raison de me recommander moins de mansuétude.

M. Jean-Marie Le Guen – Avez-vous compté le nombre d’heures de présence du ministre d’État ?

M. Jacques-Alain Bénisti – Nous estimons que les politiques de prévention de la délinquance de ces dernières années – de droite comme de gauche – ont échoué. Or, à vous écouter, on croirait que tout va très bien !

M. Jean-Pierre Blazy – Au contraire : tout va mal !

M. Jacques-Alain Bénisti – Cet échec est dû au manque de coordination entre les acteurs impliqués et surtout à l’absence de suivi des actions menées auprès des enfants qui posent problème. Un tel suivi, qui permettrait d’identifier les raisons qui poussent chaque jeune à l’absentéisme, est indispensable. Pourtant, vous proposez que l’on ne fasse rien !

M. Jean-Pierre Blazy – Non, je n’ai pas dit cela !

M. Jacques-Alain Bénisti – Au contraire, nous proposons un changement de méthode. Les chefs d’établissement, d’ailleurs, en sont les premiers demandeurs ! Autrefois, chacun s’occupait de ses problèmes ; aujourd’hui, nous décidons de prévenir la délinquance par la coordination !

M. Jean-Marie Le Guen – Mais qui décide ?

M. Jacques-Alain Bénisti – Vous refusez chacune de nos propositions, mais vous n’en faites aucune ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; MM. Vaxès et Le Guen demandent à prendre la parole)

M. le Président – L’Assemblée étant largement informée, je vais mettre les amendements aux voix.

M. Michel Vaxès – On doit pouvoir réagir à cette interpellation, Monsieur le président !

M. le Président – La réaction n’est pas prévue dans le Règlement, Monsieur Vaxès.

Les amendements 307 et 508 rectifié, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Pierre Blazy – L’amendement 379 tend à clarifier l’article. La situation actuelle est mauvaise, le ministre l’a reconnu, et la violence scolaire s’aggrave, les chiffres le prouvent. Le Gouvernement, aux affaires depuis cinq ans, ne peut nier sa responsabilité (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Si l’absentéisme gagne et que les chefs d’établissements ne signalent pas les cas, n’est-ce pas un défaut d’autorité de votre part ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Pour le reste, le problème est de savoir comment le maire peut agir. Lorsque nous étions au pouvoir, nous avons adressé aux autorités académiques de nombreuses directives et circulaires…

M. Claude Goasguen – Qui n ‘ont pas été respectées…

M. Jacques-Alain Bénisti – Ce qui montre l’échec de votre politique.

M. Jean-Pierre Blazy – …dont certaines rappelaient que les cas d’absentéisme devaient être signalés aux maires. Nous avons aussi mis au point le dispositif de veille éducative auquel est ensuite venu s’ajouter le dispositif de réussite éducative. Des mécanismes existent donc et je souhaite que l’on en reste au droit commun, à condition qu’il soit appliqué. Si les cas d’absentéisme étaient effectivement et précocement signalés aux maires, ils pourraient engager la prévention du décrochage scolaire, sans qu’il soit besoin d’un fichier automatisé.

M. Jacques-Alain Bénisti – Il se trouve que le droit commun ne suffit pas à régler le problème.

M. Jean-Pierre Blazy – Des listes existent ; pourquoi les automatiser ?

M. Claude Goasguen – L’éducation nationale en a déjà !

Un député du groupe UMP – Restons-en donc à la plume Sergent-major…

M. Jean-Pierre Blazy – Je maintiens que si l’éducation nationale fait son travail, et si les dispositifs de droit commun sont appliqués, cela suffit à permettre aux maires de décider des mesures de prévention du décrochage scolaire et de l’absentéisme.

M. le Rapporteur – Avis défavorable.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Vous sommez l’éducation nationale de prendre ses responsabilités alors qu’elle est très mobilisée et que M. de Robien a défini un programme de réussite éducative personnalisée. Mais vous savez pertinemment que l’éducation nationale ne peut tout faire…

M. Jean-Pierre Blazy – Et le maire, lui, pourrait tout ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué  Alors qu’il tient du suffrage universel sa légitimité, vous refusez d’en faire le pivot du dialogue avec l’ensemble des institutions agissant dans sa commune. Je ne vous comprends pas.

M. Jean-Pierre Blazy – Caricature !

M. Christian Estrosi, ministre délégué En veillant à prévenir l’absentéisme scolaire, le maire n’est-il pas dans son rôle de prévention ? Pour ce qui est de la procédure, l’alinéa 6 de l’article précise que, comme il se doit, le décret en Conseil d’État déterminant les conditions du traitement automatisé des données sera pris après avis de la CNIL. Répondant, il y a peu, à M. Montebourg, le ministre d’État a rappelé que l’extension du fichier des empreintes génétiques a permis d’améliorer considérablement le taux d’élucidation des affaires criminelles (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Qu’a-t-on donc à craindre des fichiers constitués pour assurer la sécurité des personnes et des biens ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Jean-Pierre Blazy – Et pendant ce temps, les violences contre les personnes continuent d’augmenter !

M. Christian Estrosi, ministre délégué Au fil de la législature, l’opposition a systématiquement présenté des recours devant le Conseil constitutionnel ou le Conseil d’État lorsque nous votions la création de fichiers et elle s’est systématiquement fait débouter. Une fois encore, vous tentez une manœuvre dilatoire (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) mais, cette fois aussi, raison sera donnée au Gouvernement.

M. Michel Vaxès – Je soutiens l’amendement, qui a le même esprit que les deux amendements précédents. C’est faire injure aux enseignants de prétendre qu’ils ne feraient pas le point sur l’absentéisme dans leurs classes…

M. Jacques-Alain Bénisti – C’est M. Blazy qui le dit !

M. Michel Vaxès – C’est le ministre, Monsieur Bénisti, alors qu’ils font bel et bien le point…

M. Claude Goasguen – En utilisant des fichiers…

M. Michel Vaxès – Il n’y a pas défaillance de l’éducation nationale, mais une forte mobilisation, doublée d’une aussi forte détresse due à l’absence de moyens. Face à l’absentéisme et au décrochage scolaire, les seules réponses ne peuvent être la constitution de fichiers et la réprimande du maire ! En réalité, vous vous défaussez sur les maires des responsabilités que l’État n’assume plus. Comment prétendre affronter les causes de l’échec scolaire sans psychologues, sans éducateurs spécialisés, sans assistantes sociales ? Mais vous passez ces questions sous silence, et les réponses que vous apportez ne sont pas les bonnes. Ce n’est pas ainsi que vous réussirez à réduire l’absentéisme. Pour changer les choses, comme vous affirmez vouloir le faire, il faudrait donner à l’éducation nationale les moyens qui lui font défaut. Je constate, une nouvelle fois, que ce texte qui se dit de prévention n’est que de répression et de contrôle social (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Cette philosophie n’est pas la nôtre.

M. Serge Grouard – Il y a quelque chose de surréaliste dans ce débat où l’on s’acharne à faire entendre la petite musique de la suspicion en nous prêtant l’intention de vouloir tout contrôler. L’absentéisme est une réalité et il n’est pas sérieux de prétendre que le Gouvernement en est responsable alors que le phénomène ne cesse de s’aggraver depuis trente ans. Nous proposons donc des mesures propres à le juguler. Il n’est pas du ressort de la loi de disposer ce que le maire doit faire, mais elle lui donne la possibilité d’agir. À Orléans par exemple, mairie, éducation nationale et conseil général ont créé, ensemble, en 2003, un atelier de remotivation où transite, chaque année, une centaine d’adolescents exclus du système scolaire. Le taux de réussite est de 50 à 60 % et les jeunes gens ainsi réinsérés ne posent plus aucun problème. Pourquoi, enfin, un tel esclandre à propos de ce fichier automatisé – comme s’il n’en existait pas d’autres, y compris sur les mises en fourrière de voitures ? Cessons de fantasmer sur les fichiers. Celui dont il s’agit ici va me permettre d’adopter une approche plus globale dans ma ville. C’est une simple question de bon sens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jacques-Alain Bénisti – Très bien !

L'amendement 379, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – Qui sont ces jeunes absentéistes ? Sont-ils tous des délinquants ? Je ne le crois pas. Ce sont plutôt des jeunes en errance et en difficulté, dont nous devons aider les familles. Voilà la question !

MM. Pierre Cardo, Jacques-Alain Bénisti et Claude Goasguen – Cela n’a rien à voir !

Mme Patricia Adam – Ce sont souvent les enfants de femmes seules…

M. Jacques-Alain Bénisti – C’est vrai !

Mme Patricia Adam – …qui travaillent dur, commencent tôt le matin ou finissent tard le soir. Les enfants restent souvent seuls à la maison, car leurs mères n’ont pas les moyens d’employer quelqu’un. Or, que proposez-vous ? De ficher ces gamins s’ils ne se lèvent pas le matin ! Ce n’est pas de cela que nous avons besoin, mais plutôt d’un véritable service public de la petite enfance et d’aides pour les familles. Parlons de ces sujets avant de jouer la carte sécuritaire !

M. Claude Goasguen – Ce n’est pas le sujet !

Mme Patricia Adam – Hélas, il n’y a plus aujourd’hui de politique familiale, comme le dénoncent toutes les associations, notamment l’UNAF. Vous allez demander au maire de remplacer l’instituteur, qui venait autrefois frapper à la porte de la maison quand un enfant ne se rendait pas à l’école,…

M. Jean-Christophe Lagarde – C’est fini !

Mme Patricia Adam – …puis l’assistante sociale de la médecine scolaire. C’est que vous avez supprimé la plupart des postes.

M. Pierre Cardo – Mais non, ce n’est pas nous !

Mme Patricia Adam – Comme il n’y a plus d’assistantes sociales dans les établissements scolaires, vous allez demander aux maires de les remplacer.

M. Jean-Pierre Blazy – Avec l’argent du contribuable local !

Mme Patricia Adam – Ils vont devoir recréer des postes là où vous les avez supprimés. Voilà une conception de la décentralisation que nous ne saurions accepter !

C’est pourquoi nous demandons, par l’amendement 688, de supprimer tous ces alinéas qui portent, par ailleurs, atteinte aux libertés fondamentales. Qui n’a pas connu une famille dont un enfant aurait fait l’école buissonnière pendant quelques jours ?

M. Jacques-Alain Bénisti – Personne !

Mme Patricia Adam – S’agissait-il pour autant de jeunes délinquants ?

M. Pierre Cardo – Mais ce n’est pas la question !

Mme Patricia Adam – Plus de 95 % des enfants que vous allez ficher ne sont pas des délinquants ! Ce texte n’est qu’une fuite en avant vers toujours plus de sécurité, avec des moyens en baisse pour les politiques de proximité. Comme l’a fort bien démontré M. Zanchi, vous demandez aux maires de gérer un nouveau système de surveillance destiné à remplacer la police de proximité que l’État n’assume plus.

M. le Président – Je vais donner la parole à M. Le Guen, puis à M. Bénisti.

M. Claude Goasguen – Rappel au Règlement. Je veux bien écouter les uns et les autres pendant des heures, mais notre Règlement prévoit que s’expriment celui qui défend l’amendement, puis la commission et le Gouvernement et enfin un orateur pour et un autre contre. Nous n’avons pas besoin que trois ou quatre députés interviennent tour à tour sur le même amendement ! Cela fait des jours que nous entendons les mêmes arguments sans que le débat avance !

M. Jean-Pierre Blazy – Vous étiez passé maître en la matière pendant la précédente législature !

M. le Président – Vous avez raison, Monsieur Goasguen : je vais donner la parole au rapporteur et à la commission…

M. Jean-Marie Le Guen – Rappel au Règlement !

M. le Président – …mais si vos collègues veulent faire à leur tour des rappels au Règlement, ils en auront le droit…

M. Claude Goasguen – Nouveau rappel au Règlement. Je veux simplement que le Règlement soit respecté !

M. le Président – À votre demande, il le sera scrupuleusement. Je donne donc la parole à la commission, puis au Gouvernement. Nous entendrons ensuite M. Le Guen.

M. le Rapporteur – La commission a rejeté l’amendement 688.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Même position.

M. Jean-Marie Le Guen – Rappel au Règlement. Le ministre est sorti du cadre de ce débat en reprochant à l’opposition de ne pas avoir voté plusieurs lois comportant des dispositions relatives aux fichiers. Par ailleurs, nous attendons que le ministre d’État veuille bien assister à nos débats.

M. Claude Goasguen – Le Gouvernement est représenté !

M. Jean-Marie Le Guen – Le ministre d’État refuse de venir, préférant se goberger avec les députés de la majorité place Beauvau.

Nous aimerions également des explications sur les fichiers du ministère de l’intérieur, dont plusieurs rapports ont démontré les dysfonctionnements. Selon l’Observatoire de la délinquance, un tiers au moins des noms y figurent à tort.

M. Claude Goasguen – Ce n’est pas un rappel au Règlement !

M. Jean-Marie Le Guen – On peut douter de l’efficacité de tels fichiers. Au lieu de chercher qui a voté en leur faveur, ou non, mieux vaudrait s’interroger sur leur fonctionnement. Nous avons eu bien raison de les refuser !

M. Noël Mamère – Rappel au Règlement. Étant non inscrit, je ne dispose pas de la faculté de demander une suspension de séance, mais il serait bon que mes collègues de l’opposition prennent cette initiative. Cela permettrait d’apaiser les esprits, bien échauffés pour le moment !

Hier, M. Lagarde s’est inquiété du recul de la fonction parlementaire. Il y a de quoi, avec cette restriction faite sur les amendements rectifiés. Alors, certes, je comprends que vous ne supportiez pas que la discussion dure : vous êtes pressés et vous n’avez rien à faire de ce texte, dont vous savez très bien qu’il ne sera jamais mis en œuvre. Vous vous contentez donc de faire comme si, ce qui va encore donner du grain à moudre à ceux qui pensent que la politique ne sert à rien. Il est vrai que le ministre de l’intérieur se fiche des députés comme de sa première chemise (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Il ne vient pas s’expliquer devant eux et ne s’intéresse plus beaucoup au texte lui non plus, depuis que la communication a été faite et que le bon peuple de France est rassuré.

Monsieur Goasguen, il paraît vous êtes le porte-parole de votre groupe sur ce texte. Vous a-t-on entendu faire des propositions, depuis le début de la discussion ? Vous a-t-on vu opposer des contre-arguments à nos interventions, au lieu de dire simplement que vous en avez assez de nous entendre ? Je préfère de beaucoup des gens comme M. Cardo ou M. Lagarde, qui font des propositions constructives et cherchent à améliorer le texte. Car c’est cela, le travail parlementaire : améliorer un texte, si l’on y croit, et sinon le combattre.

Pour en revenir aux fichiers, ce n’est pas en stigmatisant certaines catégories de la population et en en faisant des cibles du contrôle social que vous lutterez contre la délinquance. Les maires savent bien que la suppression des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté contribue à rejeter les familles encore un peu plus dans l’exclusion. Ils savent que la modification des zones d’éducation prioritaire contribue à la stigmatisation des établissements scolaires.

M. le Président – Veuillez en revenir au Règlement.

M. Noël Mamère – Ils savent les effets de la réduction des subventions aux associations de soutien scolaire ou aux lieux de parentalité, de la disparition des assistants sociaux dans les établissements, de la suppression des emplois jeunes dans l’éducation. Alors ne venez pas nous dire que vous apportez des solutions miracle.

M. le Président – Monsieur Mamère, veuillez conclure.

M. Noël Mamère - Surtout, vous êtes en train d’attribuer au maire des fonctions qui ne sont pas les siennes.

M. Claude Goasguen – Il serait temps d’appliquer le Règlement, et du même coup de montrer un peu de respect pour l’institution parlementaire. Lorsque je ne connais pas un problème, je me contente d’écouter. En tant qu’inspecteur général de l’éducation nationale, je peux vous assurer que ce que j’entends depuis une heure sur l’absentéisme scolaire a de quoi faire sourire. Je vous signale tout de même que l’éducation nationale est dotée de fichiers, que personne n’a jamais remis en cause.

M. Noël Mamère – Pas centralisés !

M. Jean-Marie Le Guen – Parlons donc de l’éducation nationale cinq minutes !

M. Claude Goasguen – Parlez-en, cela me fera rire. Vous avez cet art extraordinaire de parler de tout sans rien savoir. Pour ma part, je n’ai aucune envie de dire à un gouvernement qu’il a tort alors que je partage ses opinions. Cela ne vous plaît peut-être pas, mais c’est la loi de la majorité. Et si vous faites un effort de mémoire, vous verrez qu’il y a quelques années, vous vous étiez montré particulièrement silencieux lorsque le gouvernement de gauche, dont on connaît les résultats, proposait des solutions dans ce domaine.

M. Noël Mamère – Pas moi !

L'amendement 688, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Blazy – Il me semble qu’une suspension de séance est nécessaire pour permettre au ministre de l’éducation nationale de venir s’expliquer devant l'Assemblée nationale. M. Estrosi a donné des chiffres terrifiants sur l’absentéisme scolaire, qui montrent que le droit commun de l’éducation nationale est totalement défaillant. Enregistrer en si peu de temps une croissance aussi vertigineuse révèle un problème majeur, dont l’article 9 prétend se défaire sur le maire. Le risque est grand de voir celui-ci se transformer en super-commissaire, super-juge, super-travailleur social et maintenant super-inspecteur d’académie. Ce n’est pas possible !

La séance, suspendue à 17 h 20, est reprise à 17 h 30.

M. Pierre Cardo – Par mon amendement 88, je propose qu’au lieu de mettre en œuvre un traitement automatisé de données personnelles relatives aux enfants scolarisés dans sa commune, le maire crée un observatoire local de l’assiduité scolaire, qui serait notamment destinataire de toutes les données relatives à l’absentéisme scolaire. Pour ma part, j’ai créé un observatoire des parcours scolaires, qui, avec les cellules de veilles et les conseils locaux de prévention, me permet de bien appréhender la situation des jeunes en rupture avec le système éducatif. Je fais en outre observer que, dans sa rédaction actuelle, le texte du Gouvernement est trop centré sur la commune et ne permet pas de suivre la situation des jeunes qui ne sont plus scolarisés dans le territoire communal. Lorsqu’au cours de son parcours scolaire, un jeune de ma commune est amené à fréquenter un établissement d’une autre ville, je dois pouvoir suivre son assiduité, surtout si ses parents ne sont pas vraiment en mesure de l’accompagner. Ce qui compte, ce n’est pas de prévoir dans le détail tel ou tel instrument de suivi, mais de faire en sorte que les maires puissent détecter le symptôme de malaise que constitue l’absentéisme et proposer un traitement adapté, en liaison avec d’autres intervenants.

À nos collègues de l’opposition qui dénoncent une baisse continue des moyens, je voudrais rappeler la mise en place des équipes de réussite éducative et le financement du dispositif des adultes relais – qu’ils avaient créé sans prévoir les moyens nécessaires. Ne voyons pas tout en négatif et faisons confiance aux acteurs locaux. Quand un gamin part sur un chemin qui n’est pas le bon, il faut d’abord s’être mis en mesure de le déceler, et, ensuite, proposer collectivement des solutions adaptées.

Quant au fait de savoir si l’absentéisme scolaire aurait ou non explosé au cours des dernières années, cela pose l’éternel problème de la sous ou sur-déclaration : lorsque l’on demande aux responsables de porter une attention particulière à tel ou tel problème, certains font du zèle, pendant que d’autres mettent un point d’honneur à minimiser la réalité. N’oublions jamais que la statistique est parfois la forme la plus sophistiquée du mensonge.

M. Jean-Christophe Lagarde – Si je partage assez largement ce que vient d’exprimer Pierre Cardo, je ne suis pas persuadé qu’il faille créer dans la loi un observatoire de l’assiduité scolaire pour chacune de nos 36 000 communes, ne serait-ce que parce que certains maires ne considèrent pas que le suivi de cette question entre directement dans le champ de leurs compétences.

Notre amendement 533, au lieu de charger chaque maire de mettre en œuvre un traitement de données, tend à lui donner les moyens de se faire transmettre les données existantes, telles qu’elles figurent dans les fichiers de l’éducation nationale, déclarés à la CNIL. Pourquoi recréer, à grands frais, des instruments qui existent déjà ?

Ce qui est essentiel, c’est que le maire reçoive des chefs d’établissements les informations utiles, puisse vérifier que les signalements nécessaires ont bien été faits et coordonne sur cette base son action globale de prévention de la délinquance.

Sans vouloir créer de polémique, je veux insister sur un dernier point, lié à mon expérience de surveillant d’externat dans un collège de Bondy pendant sept ans, lorsque j’étais étudiant. À cette époque, l’administration de l’établissement nous avait donné instruction de ne rien faire avant 22 demi-journées d’absence consécutives ! Vous imaginez ce que cela représente ! Un élève pouvait rester dans la nature pendant plus de dix jours sans que personne ne réagisse. J’ose espérer que les choses ont changé, mais lorsque des chefs d’établissement refusent de traiter le problème de l’absentéisme, il faut bien que les maires puissent alerter qui de droit et agir pour que cela change.

M. Claude Goasguen – Très bien !

M. le Rapporteur – L’amendement 88 a été repoussé par la commission, qui n’a pas jugé réaliste la proposition de M. Cardo de créer un observatoire de l’assiduité dans chacune de nos 36 000 communes. Cela alourdirait considérablement le système, sans tenir compte des dispositifs de scolarisation intercommunaux qui existent dans la plupart de nos campagnes.

La commission n’a pas examiné l’amendement 533 et, à titre personnel, j’y suis plutôt défavorable. D’abord, sa rédaction n’est pas satisfaisante, la notion de « données automatisées » n’étant pas juridiquement recevable. Si les fichiers de données peuvent faire l’objet d’un traitement automatisé, le concept de « données automatisées » n’est pas valide. Sur le fond, la proposition de M. Lagarde pose le problème du croisement des informations. Si le maire s’appuie sur un seul fichier, il lui sera impossible de procéder aux recoupements nécessaires. Votre amendement, Monsieur Lagarde, me semble proposer une fausse bonne idée et je vous invite par conséquent à le retirer. À défaut, je me verrais contraint d’émettre un avis défavorable.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Vous proposez, Monsieur Cardo, de remplacer la mise en œuvre d’un traitement automatisé par la création d’un observatoire. À l’instar de votre rapporteur, je n’y suis pas favorable, d’autant que le code de l’éducation permet déjà au conseil départemental de l’éducation nationale de créer en son sein une section spécialisée pour traiter de tout ce qui concerne l’assiduité scolaire. Dès lors, vous pouvez considérer que votre proposition est satisfaite.

Quant à la proposition de M. Lagarde, je plaide à mon tour pour son retrait, car inciter le maire à renoncer à créer un traitement propre, c’est le rendre dépendant des données de l’éducation nationale et l’empêcher de croiser les informations sur l’absentéisme.

M. Jacques-Alain Bénisti – Hier, j’ai insisté sur la nécessité de bien distinguer ce qui relève de la protection de l’enfance de ce qui a trait à la prévention de la délinquance. L’ensemble des représentants des travailleurs sociaux et des enseignants sont éminemment favorables à cette distinction. Or, depuis près de dix jours que nous débattons de ce texte, nous voyons régulièrement émerger des propositions relatives à la protection de l’enfance, plutôt qu’à la prévention. Tous les jeunes qui désertent le système scolaire ne sont pas forcément des délinquants en puissance. Nombre d’entre eux ont surtout besoin d’une écoute attentive, dans le cadre de groupes de coordination et d’aide éducative. Au reste, il est prévu, dans le texte relatif à la protection de l’enfance, de créer des comités de santé et de citoyenneté, destinés, avec le concours de l’ensemble de la communauté éducative et des services sociaux, à aider les jeunes à raccrocher au système. Cessons de mélanger protection de l’enfance et prévention de la délinquance.

L'amendement 88, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Christophe Lagarde – Le rapporteur et président de la commission des lois m’a invité à retirer l’amendement 533. Je ne le ferai pas car il me paraît difficile, dangereux, et d’ailleurs pas nécessairement utile, que chaque maire crée dans sa commune un fichier propre recoupant les données relatives à l’absentéisme et celles fournies par les organismes de prestations familiales. Ce qu’il faut, c’est simplement que ces informations leur soient transmises : les maires ont déjà toutes sortes de liens avec les écoles, les CAF… Mais je propose de rectifier comme suit mon amendement en ajoutant, après les mots « se faire transmettre les données », les mots « en vue d’effectuer un traitement automatisé… ».

M. le Rapporteur – Avis défavorable à cette rectification.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Même avis.

L'amendement 533 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Blazy – L’amendement 380 est défendu.

M. le Rapporteur – Avis défavorable.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Avis défavorable.

M. Jean-Marie Le Guen – C’est l’économie générale de ce texte que je voudrais dénoncer. Notre collègue Grouard nous explique que les maires et les conseils généraux vont travailler à rescolariser les élèves avec lesquels l’éducation nationale a des problèmes. S’il s’agit d’admonester les familles et les élèves concernés, voire de les sanctionner, ce n’est pas au maire qu’il appartient de le faire. Il y a d’autres autorités pour cela.

M. Serge Grouard – Mais ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. Jean-Marie Le Guen – À vous suivre, chers collègues, notamment M. Goasguen qui s’est prévalu de son titre d’inspecteur général de l’éducation nationale…

M. Claude Goasguen – C’est un très beau titre que je possède et dont je ne me prévaux pas.

M. Jean-Marie Le Guen – …l’éducation nationale n’aurait finalement plus qu’à se préoccuper des élèves qui entrent dans le moule, tous ceux qui posent des problèmes étant renvoyés au traitement des mairies, des conseils généraux, des associations, comme si ces acteurs devaient jouer le rôle de voiture-balai pour tous les naufragés du système scolaire. Chacun sait que des dizaines de milliers d’élèves, notamment en Île-de-France, sortent chaque année du système scolaire sans qualification, après avoir été souvent déscolarisés. L’éducation nationale estime-t-elle que cela ne la concerne plus ? Souhaite-t-elle ne plus travailler que pour un seul type d’élève, sinon idéal, disons dans la moyenne ?

Votre intention de confier aux maires la responsabilité du traitement social de tous les enfants déscolarisés est peut-être louable. Mais, outre que ce ne saurait être qu’une rustine, je la juge, pour ma part, dangereuse.

M. Serge Grouard – Je pourrais être d’accord avec M. Le Guen si le dispositif prévu était celui qu’il décrit. Mais tel n’est pas le cas. Il est question d’un conventionnement entre les communes, le conseil général et l’éducation nationale et les actions sont conduites sous l’autorité de l’éducation nationale, en présence d’un enseignant. Bien d’autres partenaires pourraient d’ailleurs être associés à ce réapprentissage de la citoyenneté, par exemple les SDIS pour ce qui relève notamment de la sécurité routière.

Voyez-vous, Monsieur Le Guen, je suis tous les jours, comme tous les maires, en première ligne et j’essaie de trouver des solutions.

L'amendement 380, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur – L’amendement 518 récrit la fin de l’alinéa 5 pour tirer les conséquences d’un amendement adopté par le Sénat à l’alinéa 9, ce que la Haute assemblée avait oublié de faire.

L'amendement 518, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Les amendements 381 et 545 tombent.

MM. Jean-Pierre Blazy et Serge Grouard – Pourquoi ?

M. le Président – Parce qu’ils ne peuvent plus se rattacher à la fin de l’article 5, que vient de modifier l’amendement 518. Cela étant, si vous souhaitez en dire quelques mots, je vous donne la parole.

M. Jean-Pierre Blazy – Nous sommes contre le principe d’un traitement automatisé des donnés relatives à l’absentéisme et, en tout état de cause, souhaitons donner aux familles toutes garanties sur l’utilisation qui sera faite de ce fichier.

Je regrette que M. Goasguen soit parti car je lui aurais rappelé qu’en 1998, il avait avec d’autres députés d’un groupe qui n’était pas encore l’UMP – dont M. Sarkozy –, saisi le Conseil constitutionnel au motif qu’un fichier prévu par le gouvernement de l’époque pour lutter contre la fraude fiscale pouvait présenter un risque pour les libertés. Votre appréciation est donc largement à géométrie variable.

Avec cet article 9, par lequel vous prétendez renforcer les pouvoirs des maires, vous allez surtout les mettre dans une position extrêmement délicate. Vous leur faites croire que les nouveaux moyens dont vous les dotez leur permettront de lutter efficacement contre la délinquance. C’est un leurre et une façon pour l’État de se défausser de ses responsabilités.

M. le Président – Je vous confirme, Monsieur Grouard, que les amendements 381 et 545 tombent, dans la mesure où ils ne peuvent plus se rattacher à l’alinéa 5 de l’article.

M. Serge Grouard - Il me semblait intéressant que le maire puisse inclure dans le traitement automatisé de données à caractère personnel celles relatives aux jeunes de plus de seize ans quittant le système scolaire. Ils ne sont plus en situation d’absentéisme mais pourraient cependant avoir besoin d’aide. Tel était l’objet de mon amendement.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Le Gouvernement y était favorable. Puisqu’il tombe, il faudra, en deuxième lecture, lui trouver une meilleure place.

M. le Rapporteur – L’amendement 181 est rédactionnel.

L'amendement 181, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur – Seule une infime partie – entre 0 et 0,2 % – des cas d’absentéisme font l’objet d’un signalement à l’inspection d’académie, alors que d’après les chiffres de l’éducation nationale, 2 à 10 % des élèves manquent plus de quatre demi-journées dans le mois, ce qui peut leur valoir un avertissement, et 1 % des élèves plus de dix jours par mois. Il faut que le maire puisse être informé de ces absences, révélatrices d’un échec scolaire. Or, le texte actuel ne prévoit que la transmission des informations ayant fait l’objet d’un signalement. L’amendement 517 tend donc à que les directeurs d’établissements saisissent l’inspecteur d’académie dès lors que les conditions légales pour prononcer un avertissement sont réunies.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Favorable.

L'amendement 517, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Pierre Blazy - Lorsque les maires n’ont pas souhaité développer la démarche de veille éducative prévue par la loi du 1er août 2003, il n’y a pas de raison de les informer de l’absentéisme des élèves de leur commune. Tel est le sens de notre amendement 382, qui réaffirme le primat de l’éducatif dans la prévention de l’absentéisme.

Malheureusement, M. Borloo, auteur de cette loi, n’est pas là, ni d’ailleurs M. de Robien, ni le ministre de la ville, ni même le ministre de l’intérieur. Je lis par ailleurs qu’une députée qui n’est pas là non plus, Mme Morano, a déclaré à l’AFP que Mme Royal ne participait pas à nos débats actuels. C’est vrai, mais je trouve plus étrange que le ministre de l’intérieur ne vienne pas défendre son projet. Sa venue à un moment ou un autre serait tout de même souhaitable.

M. le Président – Votre commentaire sur la déclaration de Mme Morano à l’AFP faisait-il partie de la défense de votre amendement 382 ?

M. Jean-Pierre Blazy – Si l’on veut un débat serein, évitons un certain type de déclarations.

M. le Rapporteur – La commission n’a pas examiné cet amendement, qui ne part pas d’une mauvaise idée, mais il me semble, à titre personnel, qu’il faut plutôt raisonner dans l’autre sens : c’est parce que les maires vont recevoir un certain nombre d’informations sur l’absentéisme qu’ils vont être incités à développer des systèmes de veille éducative.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Même avis.

M. Noël Mamère - On voit bien ici qu’il s’agit toujours de repérer et de stigmatiser, non d’aider les élèves. Si l’intention première était d’aider, il faudrait commencer par mettre en place un système de veille éducatif, qui s’adresse, lui, à tous les élèves, sans stigmatiser personne.

Nous n’avons peut-être pas à commenter les déclarations d’une députée à l’extérieur, Monsieur le président, mais nous sommes quand même bien obligés de constater que le ministre de l’intérieur n’est pas là pour répondre à nos questions sur son projet.

M. le Président – Je faisais simplement remarquer en toute courtoisie qu’un collègue qui n’est pas présent en séance peut quand même faire une déclaration à l’AFP. Ce n’est pas encore interdit !

M. Jean-Christophe Lagarde - Il me semble pour ma part que cet amendement pousserait les maires à mettre en place la veille éducative instaurée par M. Borloo. S’ils veulent des informations, ils s’engageront dans cette démarche. C’est plutôt dans ce sens-là que cela doit marcher.

M. Philippe Tourtelier – Pourquoi un maire recevrait-il des informations qui visiblement ne l’intéressent pas s’il ne s’est pas engagé dans une démarche de veille éducative ? Le fichier se justifierait s’il était accompagné d’une démarche éducative ; s’il ne sert qu’à faire baisser les statistiques de l’absentéisme, il peut être bon de rappeler que l’école n’est ni une garderie, ni une maison. En refusant cet amendement, vous rapprochez encore le maire du policier.

L'amendement 382, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Michel Dubernard, président et rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales  Certains membres de la commission des affaires culturelles se sont inquiétés de l’utilisation que les maires pourraient faire des données personnelles. Afin d’apaiser leurs craintes, la commission a donc adopté un amendement de Mme Boutin précisant que les renseignements relatifs aux avertissements pour absentéisme sont communiqués au maire à titre purement informatif, et non dans le but d’étendre ses pouvoirs d’intervention. Mme Boutin, pour laquelle j’ai beaucoup d’admiration, le défendra mieux que moi, comme elle le fit si brillamment en commission.

Mme Christine Boutin – Je soutiens naturellement mon amendement et n’ai rien d’autre à ajouter, sinon pour dire que j’étais absente en commission, contrairement à ce qu’a dit M. Dubernard. Il s’agit là d’un problème personnel entre lui et moi : je refuse que l’on se moque ainsi de moi !

M. le Rapporteur pour avis – Mme Boutin était présente en commission : ses propos figurent au compte rendu !

Mme Christine Boutin – Je n’y étais pas lors de la discussion de cet amendement.

M. Jean-Christophe Lagarde – À vrai dire, on s’en moque un peu !

M. le Rapporteur – La commission des lois a rejeté cet amendement, car sa formulation pourrait empêcher la création d’un fichier.

Mme Patricia Adam – C’est pour cela que nous le voterons !

M. Christian Estrosi, ministre délégué Avant tout, permettez-moi une brève réponse à M. Mamère. En tant que maire, vous avez un devoir de recensement et d’inspection scolaire. Le présent article ne fait que renforcer cette mission, afin que le maire puisse mieux s’assurer que les enfants de sa commune – notamment ceux qui ouvrent droit à des allocations familiales – sont bien scolarisés. C’est grâce à de telles données que le maire de Perpignan a pu se rendre compte que des enfants de gens du voyage, âgés de douze ans, n’avaient jamais été scolarisés ! Il est donc dans l’intérêt du maire de pouvoir s’assurer du contraire.

M. Jean-Christophe Lagarde – Oui, mais les policiers ne vont plus chercher ces enfants depuis longtemps !

M. Christian Estrosi, ministre délégué Quant à l’amendement 108, le Gouvernement y est favorable, sous réserve de le rédiger comme suit : « À l’alinéa 11, remplacer les mots “il communique au maire” par les mots “il informe le maire en lui communiquant”. »

M. le Rapporteur pour avis – Cette modification reflète parfaitement l’esprit de l’amendement, et j’y suis très favorable.

Mme Patricia Adam – Ce n’est pas du tout la même chose !

M. le Président – En effet, cela change complètement l’amendement. Vous souhaiteriez donc que Mme Boutin retire son amendement 108 pour le remplacer par un nouvel amendement rédigé comme vous l’avez dit ?

Mme Christine Boutin – Je n’y suis pas du tout favorable : cela change tout ! Je maintiens mon amendement tel quel.

M. Noël Mamère – Un mot d’abord en réponse à M. le ministre : certes, les maires ont une obligation de recensement, mais ils ne sont pas tenus pour autant de se substituer aux personnels de l’éducation nationale ! En confiant aux maires des informations via les caisses d’allocations familiales, vous remettez en cause le principe de protection des données personnelles et de la vie privée !

C’est précisément ce principe que vise à protéger l’amendement de Mme Boutin – qui en a d’ailleurs déposé plusieurs autres qui vont dans le même sens. Cessez de stigmatiser les populations les plus fragiles ! Vous invoquez la prévention : parlons-en donc ! Pourquoi ne pas renforcer les cellules de veille éducative, cesser de remettre en cause les RASED et les ZUP, garantir la présence d’assistantes sociales dans les écoles, conserver leurs subventions aux associations éducatives ? Voilà de véritables mesures préventives ! Comme le dit justement Mme Boutin dans l’exposé sommaire de son amendement, « aucun transfert de responsabilités ne doit avoir lieu de la part des services de l’éducation nationale vers les maires ». Tel Ponce Pilate, vous délestez l’État de ses responsabilités en en chargeant les maires, pour ensuite vous dédouaner d’éventuels dysfonctionnements !

Mme Patricia Adam – L’amendement 108, que nous voterons, est important car il remet en cause le sens général de l’article 9 en réaffirmant le principe de respect des compétences de chacun, et notamment de l’éducation nationale. L’État ne doit pas s’en délester sur les maires ; il devrait plutôt donner à ses services éducatifs les moyens d’exercer leurs missions. Il faut certes que le maire soit informé, mais à la condition qu’un dispositif de veille éducative fonctionne efficacement.

M. Jean-Christophe Lagarde – Nous voterons également l’amendement de Mme Boutin. Son exposé sommaire précise à juste titre que la liste des élèves ayant reçu un avertissement pour absentéisme ne doit être communiquée au maire qu’à titre d’information, et ne doit en aucun cas lui imposer une intervention. Il s’agit de faire du maire un coordonnateur et non un censeur !

M. le Président – Nous avons donc un amendement 730 du Gouvernement…

M. Christian Estrosi, ministre délégué  Non, c’est un amendement de la commission des affaires culturelles, que le Gouvernement acceptera sous réserve qu’il soit rédigé comme je l’ai dit tout à l’heure.

M. le Rapporteur pour avis – J’ai sans doute été trop rapide dans ma manière de relater la discussion en commission. D’autre part, je précise que, sachant que l’amendement prêtait à controverse, j’en ai déposé un second, dans le même esprit, auquel le Gouvernement est favorable.

M. le Président – C’est pourquoi nous allons passer au vote de l’amendement 730, déposé à titre personnel par le président Dubernard et approuvé à titre personnel par le rapporteur de la commission des lois et par le Gouvernement, puis de l’amendement 108, présenté par M. Dubernard au nom de la commission des affaires sociales et par Mme Boutin. Si l’amendement 730 est adopté, l’amendement 108 tombe.

M. Michel Vaxès – Rappel au Règlement. J’ai quelques difficultés à comprendre l’ordre de ces votes, ou plutôt, je ne le comprends que trop bien. Ce dont il s’agit, c’est de faire tomber à tout prix l’amendement de Mme Boutin qui, puisqu’il a été adopté en commission, devrait pourtant nous être soumis en premier.

M. le Président – L’amendement 730, susurré à M. Dubernard par le Gouvernement, (M. Dubernard proteste) est ainsi rédigé qu’il doit être mis aux voix en premier.

M. Jean-Marie Le Guen – Quel intrigant quiproquo intra-majoritaire…

M. Philippe Tourtelier – Contrairement à ce que M. Dubernard tente de faire accroire en jouant sur les mots, l’esprit des deux amendements n’est pas le même. Celui de Mme Boutin précise que le maire n’est destinataire de la liste des élèves pour lesquels un avertissement scolaire a été notifié qu’à titre informatif. Avec l’amendement de M. Dubernard, c’est tout autre chose : il va de soi que la liste lui est communiquée. Par ce biais, on transfère au maire ce qui relève de la responsabilité de l’éducation nationale, comme on l’a fait hier pour les juges.

M. le Président – Je rappelle que, selon l’article 100, alinéa 4 de notre Règlement, « lorsqu'ils viennent en concurrence, les amendements sont mis en discussion dans l'ordre ci-après : amendements de suppression et ensuite les autres amendements en commençant par ceux qui s'écartent le plus du texte proposé et dans l'ordre où ils s'y opposent, s'y intercalent ou s'y ajoutent ». Voilà pourquoi le vote sur l’amendement 730 doit intervenir avant le vote sur l’amendement 108.

M. Jean-Pierre Blazy – À quel effarant spectacle nous fait-on assister ? Nous soutenons l’amendement de Mme Boutin, sur lequel nous avons demandé un scrutin public. Aussi précieux soit l’article 100 du Règlement, nous considérons qu’ayant été adopté en commission, cet amendement doit être mis au vote en premier.

Mme Christine Boutin – L’amendement 108 a une forte valeur symbolique. Parce qu’il proscrit la confusion des genres, il consacre le rôle de médiateur et de pacificateur du maire. Ne pas adopter l’amendement, c’est préférer une autre philosophie.

M. le Rapporteur – La commission des lois, saisie au fond, a examiné le seul amendement qui existait alors – l’amendement 108 de Mme Boutin, repris par la commission des affaires sociales. Cet amendement n’est pas que symbolique, il remet en cause l’article 9. Soyons clair : voter l’amendement 108, c’est vider l’article de sa substance.

M. Jean-Christophe Lagarde – Caricature !

M. le Rapporteur –. En revanche, l’amendement 730 est acceptable, car il reprend l’idée symbolique à laquelle tient Mme Boutin sans anéantir l’article. Voilà pourquoi la commission des lois a repoussé l’amendement 108 et pourquoi je suis favorable, à titre personnel, à l’amendement 730.

M. le Rapporteur pour avis – C’est lumineux !

M. Michel Vaxès – Comment M. Dubernard peut-il à la fois présenter un amendement cosigné par la commission des affaires sociales et par Mme Boutin et un amendement déposé à titre personnel qui va contre l’avis ainsi exprimé par la commission qu’il préside ?

M. Jean-Pierre Blazy – Alors que la commission des affaires sociales a fait sien un amendement de Mme Boutin qui pose des garde-fous, son président propose à titre personnel un amendement pirate dont le seul objectif est d’empêcher l’Assemblée d’adopter la première proposition ! Comment peut-on soutenir un point de vue puis son contraire au motif que le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement ont exprimé un avis défavorable ? Une suspension de séance est nécessaire pour éclaircir cet imbroglio.

M. le Président – Le groupe socialiste a demandé un scrutin public. On peut, certes, demander tout et son contraire… (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Jean-Pierre Blazy – Alors là ! De qui parlez-vous ?

M. le Président – Je vous appelle à un peu de retenue. J’invite l’Assemblée à se prononcer sur l’amendement 730 qui, s’il est adopté, fera tomber l’amendement 108. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Jean-Pierre Blazy – Cette procédure est mauvaise. Vous faites n’importe quoi ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Mme Patricia Adam – C’est scandaleux. Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 18 heures 45, est reprise à 18 heures 50.

M. le Rapporteur – Je précise que nous allons voter par scrutin public sur l’amendement 108 de Mme Boutin, repoussé par la commission des lois et le Gouvernement…

Mme Patricia Adam - …mais accepté par la commission des affaires culturelles !

M. le Président – Avant cela, nous voterons à main levée sur l’amendement 730 car il vient en première position. S’il n’était pas adopté, l’Assemblée se prononcerait alors sur l’amendement 108.

M. le Rapporteur – C’est bien cela.

M. Jean-Pierre Blazy – Rappel au Règlement. Je m’interroge, Monsieur le président, sur votre interprétation de l’article 100, qui ne me paraît pas correcte.

M. le Président – Je vous rappelle l’alinéa 4 de l’article 100 : « Lorsqu'ils viennent en concurrence, les amendements sont mis en discussion dans l'ordre ci-après : amendements de suppression et ensuite les autres amendements en commençant par ceux qui s'écartent le plus du texte proposé et dans l'ordre où ils s'y opposent, s'y intercalent ou s'y ajoutent. »

Il s’agit en l’espèce d’amendements qui viennent s’intercaler dans le texte de loi. L’amendement 730, déposé par le président Dubernard, vient en première position, avant l’amendement 108, le premier étant voté à main levée,le second par scrutin public.

M. Jean-Pierre Blazy – C’est une manœuvre !

M. Jean-Marie Le Guen – Rappel au Règlement. Le président Dubernard, rapporteur pour avis, devrait soutenir l’amendement déposé par Mme Boutin, car il a été adopté par sa commission.

Le Gouvernement ne cesse d’intervenir dans nos débats pour éviter un vote démocratique par des procédés si opaques qu’il a fallu que vous répétiez plusieurs fois vos explications ! Nous sommes en effet habitués à voter d’abord sur l’amendement de la commission. Sur le fond, si le Gouvernement est si sûr de sa majorité, pourquoi empêcher le vote par une telle manœuvre ? Vous ne cherchez qu’à bloquer un amendement adopté par la commission, vous immisçant dans les débats parlementaires. Est-ce correct ?

Alors que vous nous présentiez déjà un texte artificiellement monté et présenté, article après article, en l’absence du ministre de l’intérieur, voilà que vous en remettez une couche ! Vous vous moquez vraiment du Parlement !

M. Noël Mamère – Le ministre lui-même a rappelé que cet amendement « pirate » n’émanait pas du Gouvernement, mais bien de M. Dubernard. J’aimerais qu’on m’explique comment le rapporteur pour avis peut déposer à titre personnel un amendement que la commission n’a pas pu examiner, que nous n’avons même pas pu lire, et surtout qui est différent de celui que la commission a adopté. Un tel procédé est-il licite, Monsieur le président ?

M. le Président – Je vous propose de suspendre la séance pendant cinq minutes.

Mme Patricia Adam – Sur ce point, nous sommes d’accord !

M. le Président – L’amendement 730 a été lu en séance, mais nous allons nous assurer qu’il a été distribué à tout le monde.

La séance, suspendue à 18 h 55, est reprise à 19 h.

M. le Rapporteur pour avis – C’est une infinie tristesse qui gagne mon cœur en voyant que j’ai été si mal compris. L’amendement proposé par Mme Boutin a été voté par la commission des affaires sociales, mais le président de la commission des lois, fin juriste, a bien exposé pourquoi il détruirait, s’il était adopté, la philosophie de l’article 9. J’ai donc essayé de déposer une rédaction qui conserverait l’esprit de l’amendement de Mme Boutin, sans présenter les inconvénients dénoncés par le rapporteur. Étant donné l’incompréhension qui l’entoure, je retire l’amendement 730.

M. Jean-Pierre Blazy – Ce n’est pas l’opposition qui fait de l’obstruction ! La majorité a visiblement du mal à se sortir de cette mélasse législative mais, Monsieur le président, vous y avez votre part. L’amendement 730 a été présenté par M. Dubernard à titre personnel, pas au nom de la commission. Vous aviez certes raison sur l’article 100, mais la manœuvre existait bel et bien et vous l’avez cautionnée. Je le regrette, comme je regrette le temps qui a été perdu.

M. le Président – Monsieur Blazy, je n’ai pas entendu le mot « manœuvre »…

M. Christian Estrosi, ministre délégué Dès lors que M. Dubernard a retiré l’amendement 730, le Gouvernement est défavorable à l’amendement 108.

À la majorité de 30 voix contre 10 sur 42 votants et 40 suffrages exprimés, l’amendement 108 n’est pas adopté.

M. Jean-Christophe Lagarde – Nous venons de décider que le maire sera informé de l’absentéisme scolaire. L’alinéa 11 du texte oblige le directeur de l’établissement scolaire ou l’inspecteur d’académie à lui communiquer la liste des élèves domiciliés dans sa commune qui ont reçu un avertissement. L’amendement 534, rectifié par l’ajout du mot « de », vise à ce que seuls les avertissements de moins « de » deux ans soient communiqués. Ainsi, des absences en CE1 ne poursuivront pas l’élève jusqu’en troisième ! S’il n’y a pas eu d’avertissement pendant deux ans, il n’y a pas de raison d’en conserver la trace à la mairie. Cela me paraît un oubli assez sain.

M. le Rapporteur - Cet amendement n’a pas été examiné par la commission. À titre personnel, j’avais été séduit au premier abord, mais j’y suis finalement défavorable. D’abord, on risque d’aboutir indirectement à la mise en place d’un délai de deux ans pour transmettre les informations. Ensuite, l’amendement risque de produire un effet rétroactif. Enfin, et surtout, le projet prévoit qu’un décret précisera la durée de conservation des données. Peut-être cet amendement pourrait-il être retiré.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Il convient bien sûr de limiter la validité de ces avertissements, mais cette disposition est d’ordre réglementaire. Surtout, je vous rappelle que toute sanction est effacée automatiquement du dossier administratif d’un élève au bout d’un an !

M. Jean-Pierre Blazy - Où est-ce écrit ?

M. Jean-Christophe Lagarde - Étant donné que ces explications figureront au Journal officiel, je retire l’amendement 534 rectifié. Il est très clair qu’un enfant ne doit pas être poursuivi par une sanction dans son dossier tout au long de sa scolarité.

M. Noël Mamère – On est toujours confronté au problème du fichier centralisé : des traces pourront subsister beaucoup plus longtemps qu’un ou deux ans.

M. Jean-Christophe Lagarde – Ce serait une mauvaise gestion du fichier.

M. Noël Mamère – Mais on en connaît ! Je ne vous rappellerai pas ce qui s’est passé avec le fichier STIC.

L’amendement 534 rectifié est retiré.

M. Jean-Pierre Blazy – L’amendement 689 est un amendement de cohérence sur les fichiers automatisés.

M. le Rapporteur – Par cohérence, avis défavorable.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Même avis.

M. Philippe Tourtelier – Que se passera-t-il en cas d’abandon en cours d’année scolaire ? Cela ne peut être considéré comme une sanction. Le jeune traînera-t-il cette mention comme un boulet pendant toute la suite de son parcours ?

M. Noël Mamère – Question très pertinente. En Île-de-France, un logiciel – déjà utilisé – considère comme absent tout élève en retard de plus de cinq minutes. Comment cela sera-t-il répercuté dans les fichiers ?

L'amendement 689, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président – Sur le vote de l’article 9, je suis saisi par le groupe socialiste d’une demande de scrutin public.

M. le Rapporteur – L’amendement 182 apporte une précision.

L'amendement 182, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Chantal Brunel – Mon amendement 298 tend à ce que les plans de formation professionnelle destinés prioritairement aux jeunes ayant connu des difficultés scolaires prévoient un volet renforcé relatif à la prévention de la délinquance. Cette formation à dominante civique pourra comprendre diverses mesures, dont une information sur certains comportements à risque. Il s’agit, tout simplement, de renforcer la formation de nos jeunes.

M. le Rapporteur – Avis favorable.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Madame Brunel, le Gouvernement vous remercie de cette proposition car elle renforce sensiblement la rédaction initiale. Avis très favorable.

M. Jean-Christophe Lagarde – L’exposé sommaire fait référence à un élément important – que Mme Brunel n’a pas repris en séance –, en relevant qu’il faut absolument éviter de stigmatiser la filière professionnelle, laquelle est, trop souvent encore, perçue comme une voie de garage ou d’échec. Je tenais à le souligner et je voterai cet amendement.

S’agissant de l’ensemble de l’article 9, le groupe UDF reste très circonspect, et défavorable à l’idée que chaque maire crée son propre fichier, une logique plus globale devant à nos yeux être retenue.

Par ailleurs, et même si le sujet nous éloigne de la prévention de la délinquance, nous souhaiterions que soit envisagée, au cours de la navette, la possibilité de communiquer aux maires les fichiers de la CAF relatifs aux enfants de moins de deux ans, de manière à ce que les communes puissent préparer leur scolarisation à l’école maternelle dans de meilleures conditions. S’il est un fichier dont les maires auraient besoin, c’est bien celui-là !

Mme Chantal Brunel – C’est vrai.

L'amendement 298, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Pierre Blazy – À l’initiative des sénateurs socialistes, le Sénat a voulu donner une base juridique aux écoles de la deuxième chance. Si l’intention est louable, notre collègue Caresche propose, par l’amendement 375 rectifié, d’améliorer la rédaction du dispositif.

Les jeunes sortis sans qualification du système scolaire sont naturellement les plus exposés au risque d’exclusion sociale. Souvent privés de repères, leur chance d’intégration au marché du travail est des plus réduites. Né de ce constat, le concept d’école de la deuxième chance donne la possibilité de suivre un parcours sur mesure de 10 mois à quatre ans, qui intègre des périodes en entreprise.

Au plan professionnel, les jeunes concernés formalisent leurs compétences ; au plan social, ils acquièrent un savoir-vivre avec les autres qui ne peut que leur être profitable. Voilà pourquoi la reconnaissance de ces écoles par une disposition législative se justifie dans un tel texte.

L’amendement apporte de simples modifications techniques au texte adopté par le Sénat, en corrigeant des erreurs de référence et de formulation, et en renvoyant à un décret la définition des conditions d’attribution des financements publics envisageables.

M. le Rapporteur – La commission n’a pas examiné cet amendement, mais il eût été dommage qu’il ne fût pas défendu, car il propose une rédaction infiniment supérieure à celle qui nous est revenue du Sénat. Avis personnel très favorable.

M. Christian Estrosi, ministre délégué Cet amendement est en effet particulièrement bienvenu, dans la mesure ou 6 % des élèves quittent l’école sans qualification, la proportion atteignant 18 % si l’on compte les jeunes qui ne décrochent ni un BEP, ni un CAP, ni un baccalauréat. C’est parce que cette situation est tout à fait inacceptable que les écoles de la deuxième chance ont un rôle à jouer. L’un des grands paradoxes du temps, c’est qu’alors qu’un nombre croissant de jeunes accèdent aux études, la proportion de ceux qui quittent l’école sans aucune qualification ne cesse de progresser. Cet amendement nous aide à relever ce défi, et le Gouvernement y est tout à fait favorable.

L'amendement 375 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – À l’unanimité.

À la majorité de 28 voix contre 9, sur 38 votants et 37 suffrages exprimés, l’article 9 modifié est adopté.

APRÈS L'ART. 9 (amendements précédemment réservés)

M. Michel Vaxès – La série d’amendements que nous allons défendre est tout à fait conforme à l’objectif du texte de sanctionner la délinquance, dans la mesure où tous visent à renforcer la responsabilité des entreprises donneuses d’ordres à l’égard de leurs sous-traitants et à sanctionner les pratiques abusives.

Cet amendement fait suite notamment au scandale de Metaleurop qui n’a pas jeté moins de 830 salariés à la rue, sans compter les pertes d’emplois indirects. Aujourd’hui encore, l’État et les collectivités territoriales supportent les conséquences sociales, sanitaires et environnementales de ce désastre. Ce cas n’est hélas pas isolé, illustrant les méthodes de gestion, désormais presque ordinaires, des grandes entreprises qui se défaussent de leurs restructurations sur leurs filiales ou leurs sous-traitants et leur imposent, par la domination financière et commerciale anormale qu’elles exercent sur eux, de supprimer des activités et des emplois.

Alors que nous examinons un texte relatif à la prévention de la délinquance, nous souhaiterions que la responsabilité des entreprises soit reconnue au-delà des frontières des sociétés anonymes et que soit prise en compte la réalité des liens de production, de travail, de financement et d’échanges entre unités économiques. Il nous faut adapter notre droit à ces stratégies de fuite et d’évitement.

Le ministre des affaires sociales, lors de la fermeture de Metaleurop, jugeait inacceptable qu’une entreprise puisse fermer l’une de ses filiales sans en assumer les conséquences sociales et environnementales – on ne saurait mieux dire. Dans sa décision du 16 décembre 2004, la cour d’appel de Douai avait établi, sur la base d’un rapport d’expertise, une confusion entre les patrimoines des sociétés Metaleurop Nord et Metaleurop SA et ordonné à celle-ci l’extension de la procédure collective ouverte à l’encontre de celle-là. Les juges avaient estimé que la filiale se trouvait « dans une situation de dépendance financière et décisionnelle » particulièrement marquée et que ses relations avec Metaleurop SA étaient devenues anormales. Cet arrêt, qui constituait une avancée dans la reconnaissance de la responsabilité des sociétés-mères, a, hélas, été invalidé par la Cour de cassation le 19 avril 2005 au motif qu’il manquait de bases légales. En effet, le code du commerce ne définit pas la confusion de patrimoines.

Notre amendement 367 vise à donner un prolongement législatif à cet arrêt de la Cour d’appel de Douai. Il permettrait de lutter contre une forme de délinquance qui induit des désastres sociaux. S’il faut sanctionner les comportements déviants, il faut également sanctionner les patrons voyous.

M. le Rapporteur – La commission a rejeté cet amendement, comme tous ceux qui vont suivre et qui n’ont aucun rapport avec l’objet de ce texte. Je ne vous répondrai pas sur le fond bien que j’en aie envie, tant cet amendement traduit une méconnaissance totale de la jurisprudence, parfaitement établie, en matière d’extension de procédure collective, de confusion des patrimoines… Votre proposition est très réductrice par rapport à celles existantes.

M. le Ministre – Avis défavorable.

L'amendement 367, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Noël Mamère – N’en déplaise au rapporteur, nous allons présenter toute une série d’amendements visant à combler une lacune considérable de ce projet de loi dit de prévention de la délinquance. À travers vos propositions disparates, vous ne visez qu’à accentuer le contrôle social sur certaines catégories ciblées de la population. Vous pénalisez à l’excès la délinquance de proximité et ignorez totalement la délinquance économique, y compris environnementale. Au nom de quoi pourtant serait-elle exclue de ce projet de loi ? Pourquoi certains bénéficieraient-ils du silence ou de la générosité de la loi quand d’autres, les plus démunis bien sûr, sont stigmatisés et sursanctionnés ? C’est une atteinte au principe fondamental d’égalité des citoyens devant la loi.

Notre amendement 42 vise à éviter tout aléa politique pouvant faire obstacle à la poursuite des infractions à la législation et à la réglementation financières avec l’étranger. Celle-ci ne peut être engagée aujourd’hui que sur plainte du ministre de l’économie et des finances. Ces poursuites à l’encontre de grands délinquants qui commettent des infractions mille fois plus graves que les personnes que vous stigmatisez dépendent ainsi du bon vouloir du ministre. Pour remédier à cette lacune, nous proposons d’abroger l’article 458 du code des douanes.

M. Michel Vaxès – L’amendement 361 est identique.

Le rapporteur nous a dit que l’amendement précédent n’avait aucun rapport avec ce projet de loi…

M. le Rapporteur – En quoi les procédures collectives sont-elles concernées ?

M. Michel Vaxès – Cet amendement, comme le précédent, vise bel et bien à prévenir la délinquance, et même une délinquance bien plus grave que celle que vous visez dans votre projet de loi.

M. Jean-Pierre Blazy – Dans ce projet, il manque en effet un volet essentiel. Nous sommes, nous, favorables à la prévention de toutes les formes de délinquance et à la sanction de tous les délinquants. Or, votre texte occulte entièrement la délinquance économique et financière, pourtant si répandue. Les délinquants en col blanc donnent un bien mauvais exemple à l’ensemble de la société, puisque le plus souvent, de par leur position ou leurs fonctions, ils devraient au contraire se montrer exemplaires.

Notre amendement 650 est identique aux précédents, et nous estimons qu’il a parfaitement sa place dans ce projet de loi. Il est étrange que la poursuite des infractions à la législation financière avec l’étranger soit subordonnée à une plainte du ministre des finances, alors même que la mondialisation et la libéralisation des échanges accroissent les risques de ce type de délinquance. J’aurais beaucoup aimé que le ministre de l’intérieur, qui a été ministre de l’économie, s’exprime sur le sujet et nous explique pourquoi son texte ne vise pas toutes les formes de délinquance.

M. le Rapporteur – La commission a repoussé ces amendements. Lorsque vous dites que c’est vous qui les présentez, vous avez raison sur le plan formel, mais chacun sait qu’il s’agit d’amendements du Syndicat de la magistrature (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des députés communistes et républicains et des non-inscrits).

M. Jacques-Alain Bénisti – On voit quelle est l’orientation politique du Syndicat de la magistrature !

M. le Rapporteur – Il a essayé de me les vendre à moi aussi. Je les retrouve mot à mot dans vos propositions.

Mme Patricia Adam – Pourquoi pas, s’ils sont bons ?

M. Noël Mamère – La droite reprend bien les amendements du Medef !

M. le Rapporteur – Nous ne sommes pas ici à un colloque du Syndicat de la magistrature sur la délinquance financière. Ces amendements sont totalement hors sujet. Vous vous êtes faits les porte-parole du Syndicat de la magistrature, et c’est difficilement acceptable (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

M. Christian Estrosi, ministre délégué Ces amendements n’ont rien à voir avec l’esprit d’un texte sur la prévention de la délinquance, la délinquance des mineurs …

Mme Patricia Adam – C’est un projet relatif à la prévention de la délinquance, pas sur la délinquance des mineurs !

M. Christian Estrosi, ministre délégué L’opposition ne veut pas admettre que le Gouvernement propose une grande politique transversale de prévention de la délinquance.

M. Jean-Pierre Blazy – Si elle est transversale, parlons de la délinquance économique !

M. Christian Estrosi, ministre délégué En tout cas, après la démonstration faite par le rapporteur, le masque tombe ! Quel manque d’originalité ! Les groupes socialiste et communiste, ainsi que M. Mamère, se font les petits télégraphistes du Syndicat de la magistrature. Avis défavorable, évidemment.

Mme Patricia Adam – Quelle malhonnêteté !

M. Jean-Pierre Blazy – Il n’y a pas de réponse sur le fond.

M. Noël Mamère – Rappel au Règlement. Le ministre délégué vient de cracher le morceau en avouant que ce projet est un texte sur la délinquance des mineurs…

M. Christian Estrosi, ministre délégué Notamment.

M. Noël Mamère – Eh oui, c’était bien cela, l’objectif du ministre d’État : proposer des peines planchers pour les mineurs récidivistes. Mais une partie de la majorité n’a pas voulu. C’est une politique de circonstance que mène le Gouvernement, une politique de coups médiatiques, qui instrumentalise la peur pour mieux servir une certaine ambition présidentielle.

Et permettez-moi de vous dire, Monsieur Houillon, que nous n’avons pas besoin ici de donneurs de leçons !

Oui, certains des amendements de l’opposition sont inspirés par des syndicats…

Mme Patricia Adam – C’est notre rôle de les entendre !

M. Noël Mamère – Nous sommes des relais démocratiques et certains de nos amendements sont inspirés par tel syndicat, d’autres par des associations et ONG telles que Amnesty international, Médecins du monde… Arrêtez donc de nous donner des leçons !

M. le Rapporteur – Apprenez mieux, alors !

M. Noël Mamère – S’agissant des fraudes fiscales, comment osez-vous nous donner des leçons, alors que des ministres et des représentants du groupe auquel vous appartenez s’affichent avec des gens qui ont commis des fraudes fiscales de plus de quinze millions d’euros, avec des gens qui mettent leur argent en Belgique ou en Suisse ? Arrêtez, s’il vous plaît !

M. le Président – Nous nous sommes un peu éloignés du sujet.

Mme Patricia Adam – Ce n’est pas de notre faute !

M. Noël Mamère – Et l’on est à l’Assemblée, pas à l’école !

M. Michel Vaxès – Sur tous les projets, nous prenons le soin de consulter les acteurs concernés. Qui peut nous le reprocher ? Je pense que la majorité fait de même. Beaucoup de ses amendements sont même carrément dictés par le Medef ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Mais oui, c’est la vérité, Monsieur Bénisti ! Ne la niez pas ! Vous êtes au service d’une classe, nous sommes au service d’une autre, plus nombreuse !

M. Jacques-Alain Bénisti – Quel théâtre !

Mme Patricia Adam – Nous entendons tout de même des choses incroyables ! Un ministre et un président de commission osent reprocher à des députés d’écouter ce qu’ont à dire des associations, des syndicats… Mais c’est notre rôle ! Nous sommes les représentants du peuple, la moindre des choses est de l’écouter ! Et lorsque des propositions nous semblent bonnes, nous les reprenons sous forme d’amendements. Tous les députés font cela. L’effet de manche du président de la commission des lois me paraît donc particulièrement déplacé et irrespectueux. Je ne sais si c’est la déclaration de candidature de M. Sarkozy qui produit cet effet, mais il me semble que la tension monte.

Pour être membre de la commission de la défense, je sais que la délinquance économique pose des problèmes de sécurité intérieure et de défense. Ne pas les aborder dans un projet dit de prévention de la délinquance est surprenant !

M. Jean-Pierre Blazy – Très bien.

M. Jacques-Alain Bénisti – Après nous avoir beaucoup parlé des élections professionnelles dans la police, voilà que l’opposition se transforme en porte-parole du Syndicat de la magistrature. Lors d’un débat auquel je participais sur France Culture, j’ai entendu son secrétaire général faire cette déclaration stupéfiante : avant d’être juge pour enfants, je suis syndicaliste de gauche, le couteau dans les dents…

M. le Président – Entre les dents, plutôt ? (Rires)

M. Jacques-Alain Bénisti – En effet.

Vous dites que vous êtes les représentants du peuple, mais apparemment vous représentez surtout les différents syndicats de gauche !

De quoi parle-t-on aujourd’hui ?

Mme Patricia Adam – On se le demande !

M. Jacques-Alain Bénisti – De prévention de la délinquance. Nous voulons en effet tendre la main à tous ces jeunes en souffrance et leur dire que les maires vont essayer de les sauver de la déviance qu’est la délinquance. Le texte ne traite que de cela, même si vous essayez d’en faire autre chose. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Oui, nous voulons sauver nos enfants. La délinquance des cols blancs n’a rien à voir avec ce sujet. Nous, nous voulons avant tout éviter que des jeunes tombent dans la délinquance et nous faisons des propositions pour cela. Début janvier, nous les compléterons par un texte sur la protection de l’enfance…

Mme Patricia Adam – La délinquance puis la protection de l’enfance : ordre révélateur !

M. Jacques-Alain Bénisti – Vous pourrez ensuite aborder tous les sujets que vous voudrez dans la campagne présidentielle.

Mme Patricia Adam – Nous n’y sommes pas déjà ?

M. Jacques-Alain Bénisti – Pour l’instant, nous nous concentrons sur ce projet.

Les amendements 42, 361 et 650, mis aux voix, ne sont pas adoptés.
La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu, ce soir, à 21 heures 30.
La séance est levée à 20 heures.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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