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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du mercredi 6 décembre 2006

Séance de 11 heures 30
37ème jour de séance, 81ème séance

Présidence de Mme Hélène Mignon
Vice-Présidente

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La séance est ouverte à onze heures trente.

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ratification de l’ordonnance sur les saci

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, ratifiant l’ordonnance du 21 août 2006 relative aux sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif pour l’accession à la propriété.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes Ce projet de loi marque l’aboutissement de la réforme des sociétés anonymes de crédit immobilier, entreprise par la loi portant engagement national pour le logement et poursuivie par l’ordonnance du 25 août 2006. Cette réforme a été menée dans un climat de concertation avec la représentation nationale (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), grâce à la création d’un « comité des sages », ainsi qu’avec le monde du logement, et les SACI y ont été étroitement associées. Le projet de loi respecte tous les engagement qui avaient été pris par le Gouvernement. Le Sénat y a apporté des améliorations et le travail de concertation s’est poursuivi, comme le montrent les discussions qui ont eu lieu hier entre le Crédit immobilier de France développement et la Société de crédit immobilier des chemins de fer.

Ce projet de loi transforme donc les SACI, en faisant de l’accession sociale à la propriété leur objet principal. Elles deviennent des sociétés anonyme coopératives d’intérêt collectif pour l’accession à la propriété – SACICAP –. L’outil que constituaient les SACI dans le domaine immobilier est préservé : les parlementaires ont en effet souhaité que la réforme ne remette pas en cause leur organisation en filiales immobilières et financières, qui avait permis de développer des compétences appréciables. Les SACI pourront continuer à détenir ces filiales, sur lesquelles elles s’appuieront pour leur activité dans le domaine de l’accession sociale à la propriété. Les dividendes de ces filiales constitueront des ressources financières pour les SACICAP, qui devront en consacrer un tiers, de même qu’un tiers de leurs propres bénéfices, à des projets concernant des habitations modestes.

L’ancrage local des nouvelles sociétés sera renforcé. Les élus locaux, qui ont un rôle important à jouer en matière d’accession à la propriété et dont la connaissance des marchés est précieuse, figureront obligatoirement parmi leurs associés, de même d’ailleurs que les organismes HLM locaux. Ce regroupement de tous les acteurs locaux favorisera les projets alliant offre locative sociale et accession sociale à la propriété, au bénéfice des personnes aux ressources modestes. Les différents associés des SACICAP seront regroupés par collèges, dont au moins un pour les collectivités territoriales et un pour les organismes de logement social.

La coordination nationale des SACICAP sera assurée par l’Union d’économie sociale pour l’accession à la propriété, constituée par transformation de l’actuelle chambre syndicale des SACI. Le dialogue avec l’État et les autres partenaires sera ainsi assuré. L’UES-AP définira, par convention avec l’État, des objectifs pour l’ensemble des SACICAP et pourra aussi leur adresser des recommandations. La première convention, que nous sommes en train d’élaborer, est relative aux maisons à cent mille euros et à des logements en accession sociale à la propriété. L’UES-AP devra aussi veiller à ce que les SACICAP consacrent bien les sommes relevant du dividende social au logement modeste, et entretiendra des liens forts avec l’Union sociale pour l’habitat. L’ordonnance prévoit une contribution exceptionnelle des SACICAP à la politique du logement : 350 millions ont été versés le 30 octobre, dont 250 pour la Caisse des dépôts et consignations et le reste pour l’ANRU, et une nouvelle contribution de 150 millions est prévue pour mars 2007.

Un élément important de la réforme est que les SACICAP n’auront plus le statut d'établissement de crédit que les SACI avaient conservé pour des raisons historiques alors qu'elles ne distribuaient plus de prêts immobiliers depuis longtemps. Les activités bancaires, que les SACI exerçaient auparavant directement, sont en effet maintenant concentrées au sein de filiales financières qui, ensemble, constituent le Crédit immobilier de France. Les SACICAP n’ayant plus ce statut, elles ne seront plus incluses dans le futur réseau bancaire et il n’y aura plus d’imbrication. Cela ouvre la possibilité d'un rapprochement industriel entre le CIF et d'autres acteurs bancaires, qui se fera, comme Jean-Louis Borloo s'y était engagé, à l'initiative du CIF.

Une période de transition s'ouvre maintenant. Les nouvelles SACICAP seront opérationnelles à compter du 1er janvier 2008. Elles constitueront des outils précieux au service de la politique locale d'accession sociale à la propriété et de l'ensemble des actions en faveur des ménages disposant de ressources modestes. J’appelle donc à ce que chaque commune, chaque département et chaque région y fasse appel, afin de satisfaire les besoins de logement de nos concitoyens. Même si en effet le Gouvernement a doublé le nombre de logements sociaux construits, d’important problèmes demeurent, dans ce secteur comme pour les personnes à revenu moyen qui éprouvent toujours d’énormes difficultés pour se loger (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Gérard Hamel, rapporteur de la commission des affaires économiques – Le Gouvernement a été habilité par la loi portant engagement national pour le logement à réformer par ordonnance le statut des sociétés anonymes de crédit immobilier. L'ordonnance relative aux sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété a été publiée le 25 août 2006 et le présent projet de loi vise à la ratifier, ainsi qu’à y apporter des modifications.

Les SACI constituent une famille spécifique d'organismes HLM. Elles ont une double activité, dans le secteur immobilier et dans celui du crédit. Elles sont actionnaires de sociétés anonymes d'HLM et détiennent des filiales de promotion immobilière et des filiales financières. Les SACI sont aussi des acteurs de proximité qui financent du logement social locatif et en accession à la propriété, et qui assurent des missions sociales en partenariat avec les collectivités. Régies par la loi du 15 mai 1991, elles ont connu des évolutions importantes, notamment en raison de la banalisation des prêts à l'accession à la propriété et de la création du prêt à taux zéro. En outre, elles ont entièrement filialisé leur activité de crédit. Le Gouvernement a souhaité consacrer ces évolutions dans un cadre législatif, notamment en identifiant distinctement leur pôle financier.

L'objectif de l'ordonnance consiste donc à recentrer l’activité de ces sociétés sur l'accession sociale à la propriété. Les règles de gouvernance et l'objet des SACICAP sont strictement définis, cependant que l'organisation en réseau et les modalités de contrôle sont préservées. Les SACICAP, étant des sociétés coopératives, suivront donc les règles de la loi de 1947, mais elles auront toutefois un statut particulier. En effet, l'ordonnance définit des règles strictes d'affectation des résultats et de limitation de la rémunération du capital et prévoit la présence obligatoire de certains types d'associés.

La nouvelle gouvernance des SACICAP garantira leur ancrage territorial et social par la répartition des associés en deux collèges au minimum, composé pour l’un de collectivités territoriales, pour l'autre, d'organismes HLM. L’ordonnance préserve le rôle de la chambre syndicale des SACI, transformée en union d'économie sociale. Dans le cadre de la réforme, les SACI apportent à l'État une contribution exceptionnelle de 500 millions, dont 350 millions en 2006 et 150 millions en 2007. En outre, les SACICAP devront affecter une part de leur bénéfice et des dividendes de leurs filiales à des actions sociales dans le domaine de l'habitat. L'ordonnance fixe au 31 décembre 2007 la fin de la période transitoire. Je rappelle que le pôle financier des SACI, le Crédit immobilier de France, a anticipé la réforme en se réorganisant en réseau dès 2003.

Le projet ratifie l'ordonnance en la modifiant pour ce qui concerne le dividende social des SACICAP. Le texte prévoit le maintien de l'organisation en réseau des filiales financières des SACI et la faculté pour les SACICAP de prendre des participations dans des sociétés du secteur concurrentiel. Les principales modifications apportées par le Sénat visent à préciser les règles de composition du sociétariat des SACICAP et à relever le pourcentage maximal des droits de vote pouvant être attribué au collège d'associés composés de SACICAP et ne disposant pas de la majorité des droits de vote. Je souhaite appeler l'attention sur le relèvement du pourcentage des droits de vote dont pourront disposer les collèges rassemblant d'autres SACICAP. En effet, le collège d'associés des SACICAP intégrera les associés des sociétés anonymes et des sociétés coopératives d'HLM dans le conseil d'administration desquelles les SACICAP font partie du pacte majoritaire.

La commission, estimant que l'ordonnance réformant le statut des SACI respectait les engagements pris par le Gouvernement lors de l'examen du projet portant engagement national pour le logement, n'a apporté qu'une modification au projet, pour tenir compte du cas particulier de la Société de crédit immobilier des chemins de fer – la SOCRIF – qui sert les agents de la SNCF et leurs familles. L'ordonnance dote la SACICAP issue de la transformation de la SOCRIF d'un statut particulier, conforme à son objet social et organise ses relations avec l'Union d'économie sociale pour l'accession à la propriété en fonction de cette spécificité. La commission a adopté un amendement visant à permettre à sa filiale, la Société financière pour l'accession à la propriété – la SOFIAP –, de poursuivre la distribution de produits et services bancaires adaptés aux agents de la SNCF et à leurs familles, démarche radicalement différente de celle des filiales financières régionales contrôlées par le Crédit immobilier de France développement – le CIFD.

Compte tenu de ce vous venez de nous indiquer, Monsieur le ministre, j’aimerais avoir la certitude que son président a pris un engagement écrit précisant que la séparation entre le CIFD et la SOFIAP sera entérinée d'ici à mars 2007. En ma qualité de membre du comité des sages, je souhaiterais vous entendre garantir que vous veillerez au respect de cet accord. À mon sens, l'amendement déposé par le président de notre commission et nos collègues de Courson et Dumont serait alors satisfait et j’en proposerais le retrait.

Je me félicite de cette réforme, qui correspond aux évolutions des SACI et qui s'inscrit en outre dans la continuité de la politique active menée par le Gouvernement depuis 2002 en faveur de l'accession sociale à la propriété.(Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Si chacun note avec satisfaction le respect du calendrier prévu pour la ratification de l'ordonnance relative aux SACI, la méthode choisie par le Gouvernement pour cette réforme suscite toujours critiques et inquiétudes. Présenté au débotté, par voie d'amendement, le 25 janvier dernier, ce projet de réforme a échappé à l'examen du Conseil d'État et provoqué la stupéfaction du mouvement HLM. L'élaboration de cette réforme souffrait donc, dès l’origine, des deux tares majeures que sont l'absence de contrôle et l'absence de concertation. Pire, l'amendement présenté par le Gouvernement a organisé le contournement du Parlement. De toute évidence, le ministère de la cohésion sociale et du logement entendait ainsi garder les coudées franches pour procéder, à sa guise, à la réforme des SACI. Face à l'indignation générale causée par cette méthode cavalière, le Gouvernement a accepté la création d’un « comité des sages », chargé de conduire une mission d'expertise sur la réforme. Mais, Monsieur le ministre, la concertation avec le Parlement ne peut se limiter à de telles créations. Elle doit s’exercer en commission et dans cet hémicycle et l’on ne sache pas que légiférer par ordonnance soit la forme la plus aboutie de la démocratie…

M. Jean-Louis Dumont – D’autant que, pour cette ratification, le Gouvernement a déclaré l’urgence !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – …À cela s’ajoute que les parlementaires de l’opposition n’ont pas été conviés à participer aux travaux du comité des sages, sauf à considérer qu’ils y étaient représentés par le président de l’Union sociale pour l’habitat !

Le projet et l’ordonnance continuent de pâtir de sévères défauts. Je traiterai en premier lieu de l’objectif affiché. Si l’on s’en tient aux termes de l'article premier de l'ordonnance, les SACICAP ont pour objet « de réaliser toutes opérations d'accession à la propriété de l'habitat destinées à des personnes dont les revenus sont inférieurs aux plafonds de ressources mentionnés à l'article 244 quater J du code général des impôts ». Or, ces plafonds de ressources sont ceux du nouveau prêt à taux zéro, dont le bénéfice est désormais accordé à des ménages pouvant gagner jusqu'à 7 500 euros par mois. On voit que la création des SACICAP ne favorisera nullement une accession à la propriété vraiment sociale. De même, le coût exorbitant du foncier sur la majeure partie de notre territoire rend très improbable la réalisation annuelle des 15 000 à 20 000 « maisons à 100 000 euros » prévues par le projet de convention.

Si, comme le Gouvernement l’allègue, la réforme des SACI avait pour objectif véritable de relancer l'accession sociale à la propriété, elle devrait donc être revue de fond en comble. Mais ce but affiché n'est qu'un leurre. En réalité, la réforme vise essentiellement à fournir des ressources financières nouvelles à l'État. Aussi bien, l'objectif réel de l'ordonnance ne figure pas dans son article premier mais dans son article 5, qui dispose, sans plus de justification, que « lors de la transformation des SACI en SACICAP, les fonds propres de ces nouvelles sociétés [...] sont soumis à un prélèvement ». En termes moins choisis, cela s'appelle un hold-up.

M. Jean-Louis Dumont – Exactement !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Estimé à 1,2 milliard en janvier, le montant de ce « prélèvement » a été ramené à 500 millions par le comité des sages. Sur cette somme, 250 millions doivent être versés à la Caisse des dépôts et consignations, 150 millions à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale et 100 millions à l'Agence nationale de rénovation urbaine. Comme à son habitude, le Gouvernement met donc, une nouvelle fois, ses partenaires à contribution pour pallier son propre désengagement mais, en l'espèce, cette stratégie dépasse les limites et porte d'abord atteinte au respect dû au Parlement. En effet, alors même que l'ordonnance n'a pas encore été ratifiée, les cent millions attribués à l'ANRU sont déjà portés à son crédit dans le projet de loi de finances pour 2007 ! Cette stratégie menace ensuite l'équilibre financier des SACI, dont certaines devront emprunter pour payer leur quote-part du prélèvement prévu par l'ordonnance. Par ailleurs, toutes redoutent que le prélèvement dit « exceptionnel » ne le soit pas.

M. Jean-Louis Dumont – Il y en aura d’autres !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – L'obligation faite aux SACICAP de constituer « une réserve de disponibilités » laisse en effet craindre que ces organismes soient régulièrement dépossédés de leurs ressources.

Sur le fond comme sur la forme, cette manière d'agir n'est décidément pas acceptable. C'est pourquoi le groupe socialiste votera résolument contre ce projet de loi de ratification. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. François Scellier – En dépit des efforts de M. Le Bouillonnec, ce texte important ne déchaînera pas les passions. La réforme du statut des SACI a fait l'objet d'un large débat lors de la discussion de la loi portant engagement national pour le logement. Nous nous devions d'adapter un outil qui, depuis sa création en 1908 et après la réforme de 1991, a prouvé son efficacité en matière d'accession sociale à la propriété. L'objectif de la réforme est effectivement de recentrer les missions des SACI. Pour soutenir la réforme, le groupe UMP, particulièrement attaché à la pérennité de l'organisation de ce réseau, a souhaité obtenir des assurances de la part du Gouvernement, qu’il s’agisse de la préservation de l'organisation en réseau et de l'affirmation de l'ancrage territorial, de la pérennité des activités concurrentielles, du maintien de l'intégrité du groupe ou du caractère exceptionnel de la contribution financière.

Parallèlement à la discussion de la loi portant engagement national pour le logement, une concertation a donc été menée avec les représentants des SACI, des députés – j’en étais, aux cotés de mes collègues Pierre-André Périssol, Gérard Hamel et Michel Piron –, de sénateurs et du Gouvernement.

M. Jean-Louis Dumont – C’est bien ce que nous disions !

M. François Scellier – Je me félicite du respect du calendrier prévu et de l'inscription rapide de ce texte à l'ordre du jour du Parlement, quelques mois seulement après la publication de la loi. Les dispositions du projet sont assez complexes. Au terme de la réforme, le 1er janvier 2008, les cinquante-huit SACI se transformeront en SACICAP, et l'Union économique et sociale pour l'accession sociale à la propriété succédera à la chambre syndicale.

La vocation sociale du réseau des SACICAP est réaffirmée et leur rôle clairement recentré sur l’accession sociale à la propriété, priorité du Gouvernement et de sa majorité. Dans cette perspective, une convention sera prochainement signée avec ces sociétés prévoyant la construction de 20 000 logements en accession sociale à la propriété, dont 15 000 maisons à 100 000 euros au cours des cinq prochaines années. Nous serons, bien entendu, très attentifs à l’atteinte de ces objectifs.

Afin de favoriser la mixité sociale, le projet de loi dispose que les SACICAP pourront exercer des activités d'aménageur et de prestataire de services dans le domaine de l'habitat, ce qui est une bonne chose. Il préserve également leur compétence territoriale, au niveau régional : cela était nécessaire pour maintenir un dispositif de proximité. En matière de gouvernance, il précise que les associés seront répartis en deux collèges, l'un formé par les collectivités territoriales et leurs groupements, l'autre par les organismes HLM. Cela confirme l'importance du rôle des collectivités territoriales, acteurs-clés sur le plan local de la politique du logement en général, et du logement social en particulier, et conforte l'appartenance des SACICAP à la famille du logement HLM.

Le projet de loi garantit aux SACICAP la possibilité de détenir des filiales concurrentielles dans le domaine de l'habitat et du crédit immobilier. La préservation de l'intégrité du groupe était pour nous une exigence : nous avons été entendus. Les filiales financières ont en effet une mission sociale de prêt aux ménages modestes pour leur permettre d'accéder à la propriété, qu’il convenait de préserver. Les ressources propres de ces filiales leur permettront de contribuer, sur la base du volontariat, au financement d'actions en faveur du logement social par le biais du dividende social. L’article 2 du projet de loi donne un cadre légal aux conventions conclues entre l'État et les SACICAP sur ce point. Il dispose qu'au moins un tiers des dividendes et des bénéfices résultant de l'activité des filiales financières des SACICAP sera consacré à des actions sociales dans le domaine de l'habitat. Il précise en outre qu'en cas de non-utilisation de ces réserves de disponibilité au cours de deux exercices, celles-ci seront prélevées et reversées, sur proposition de l'organe central, l’UES-AP, à une autre SACICAP.

L'accord intervenu, concernant la contribution financière des SACI à la politique du logement social répond à nos préoccupations ainsi qu'à celles des acteurs. Nous considérions que les prélèvements opérés sur les fonds propres des SACI devaient être librement consentis et qu’ils devaient revêtir un caractère exceptionnel.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Et vous y croyez ?

M. François Scellier – Nous nous félicitons donc du compromis trouvé sur un versement exceptionnel de 500 millions d'euros pour financer des opérations d'accession sociale à la propriété.

M. Jean-Louis Dumont – Pour payer les dettes de l’État au mouvement HLM !

M. François Scellier – Trois cent cinquante millions d'euros ont été versés au 31 octobre 2006, dont 250 millions à la Caisse des dépôts et 100 millions à l'ANRU. Un versement de 150 millions aura enfin lieu au printemps 2007. La ventilation de ces sommes destinées à la construction, à la réhabilitation et aux aides à la personne est précisée à l'article 5 de l'ordonnance.

Grâce au dialogue, nous avons abouti à une réforme équilibrée qui répond aux besoins en logement des personnes disposant de ressources modestes. C’est pourquoi le groupe UMP votera sans aucune réticence ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Maxime Gremetz – Dans le peu de temps qui nous est imparti pour débattre de ce projet de loi ratifiant l'ordonnance prévue à l'article 51 de la loi bien mal nommée loi portant engagement national pour le logement, je rappellerai tout d'abord notre réserve sur les ordonnances, grave anomalie institutionnelle que nous n’avons jamais acceptée, ni de la droite, ni de la gauche, et dont hélas, ce Gouvernement fait grand usage. De surcroît, le principe de l'ordonnance dont nous débattons a été introduit par voie d'amendement gouvernemental. La manoeuvre ne trompe personne : elle visait simplement à contourner la procédure habituelle qui exige, notamment, que les projets de loi soient préalablement soumis à l'avis du Conseil d'État.

Cet amendement visait à forcer la main au réseau des sociétés de crédit immobilier pour les contraindre à participer au financement de la politique gouvernementale de la ville et du logement en y affectant une part significative de leur trésorerie. Lors du débat, le ministre avait rappelé que le changement de statut des sociétés de crédit immobilier impliquait que la Société centrale de crédit immobilier s’acquitte d'une forme de droit d'entrée, d'un montant de 500 millions d'euros, destiné à financer les nouvelles orientations de la politique d'accession sociale à la propriété. Quelles sont donc ces orientations qui exigeraient de solliciter la trésorerie de ces sociétés et d'instituer un tel prélèvement dans la durée ? Les annonces faites depuis plusieurs mois peinent à trouver une traduction concrète. Il est avéré que la construction de logements sociaux n'est pas aussi élevée qu'on a voulu le faire croire et les fameuses maisons à 100 000 euros ont quelque peine à sortir de terre…

M. le Rapporteur – Ça commence.

M. Maxime Gremetz – …mais peut-être s’agit-il seulement pour le Gouvernement de faciliter les cessions de logements HLM mis en vente par les bailleurs.

Bref, 500 millions d'euros seront très prochainement ponctionnés sur les ressources des SACI et plusieurs autres centaines de millions pourront être régulièrement mobilisées, sans que, dans le même temps, le Gouvernement s’engage de son côté à la même hauteur.

En matière de politique du logement, le législateur privilégie trop souvent l'incitation fiscale et le recours massif à des recettes « contraintes », provenant d'autres caisses que de celles du budget général. Comment ne pas songer aux 2,15 milliards d'euros que l'État s'apprête à prélever sur la Caisse des dépôts, correspondant au produit des plus-values de cession de parts des sociétés d'épargne, pour alimenter l'équilibre du budget général ? Aux 500 millions d'euros ponctionnés sur les sociétés de crédit immobilier, aux 700 millions d'euros confisqués aux collecteurs du 1 % logement – en réalité devenu 0,46 %, à force d’être lui-même ponctionné…

M. François-Michel Gonnot – Surtout sous les gouvernements de gauche !

M. Maxime Gremetz – Toutes ces sommes se substituent en fait à ce que devrait être la contribution de l'État au financement de la politique de rénovation urbaine.

Ces choix, très contestés, sont en effet des plus contestables au regard de l'importance des besoins de logements dans notre pays. Les chiffres du rapport relatif au « mal-logement », publié en octobre par la Fondation Abbé Pierre, parlent d'eux-mêmes : 3 307 500 personnes sont très gravement mal logées dans notre pays, contraintes de vivre à l'hôtel, en camping, en squat, dans des logements de fortune dépourvus de confort, et près de 5 670 000 vivent dans des logement insalubres ou surpeuplés. Ce sont au total dix millions de personnes, soit quelque 15 % de la population française, qui sont mal logées.

Face à une telle situation, nous ne trouverions pas scandaleux de relever de quelques dixièmes de point les taux du barème de l'impôt sur le revenu ou sur les plus-values de cession, sans parler de ceux du barème de l’impôt sur la fortune, si les sommes ainsi collectées étaient affectées à la politique du logement et permettaient de mettre un terme à la scandaleuse situation de « mal-logement » subie par des millions de nos compatriotes.

Mais solliciter les SACI revient à demander aux accédants à la propriété, qui s’efforcent, coûte que coûte, de rembourser leurs emprunts, de participer au financement de la politique du logement, tandis que les spéculateurs immobiliers bénéficient, eux, d'une généreuse défiscalisation de leurs investissements stratégiques à moyen et long terme. Là est bien le scandale. Souvenez-vous de l’abbé Pierre, qui s’était déplacé jusqu’ici lorsque certains députés, de vos rangs, souhaitaient remettre en question l’article 55 de la loi SRU faisant obligation aux communes d’avoir au moins 20 % de logements sociaux quand une commune comme Neuilly-sur-Seine n’en compte que 1,9 %, pour crier son indignation et clamer que de telles propositions faisaient honte à notre pays ? Ce projet de loi aussi fait honte à notre pays.

Du principe du recours à une ordonnance validé par un amendement de dernière minute, nous arrivons à un texte soumis à déclaration d'urgence, tendant à accélérer et à pérenniser les prélèvements sur les fonds des sociétés de crédit immobilier.

Pendant ce temps-là, les spécialistes de la vente à la découpe, aidés par le régime des sociétés foncières, mis en place par un amendement du sénateur Philippe Marini, hélas picard comme moi mais ultra-conservateur, lui…

M. François-Michel Gonnot – Oh là là !

M. Maxime Gremetz – Vous êtes picard vous aussi, mais du côté de M. Marini ! Les spécialistes de ventes à la découpe, disais-je, et les spéculateurs de tous poils peuvent dormir tranquilles : ce n'est pas encore demain qu'ils seront mis à contribution pour que soit effectivement garanti le droit au logement.

Pour toutes ces raisons, le groupe communiste et républicain votera contre ce texte.

Mme Chantal Robin-Rodrigo – Réforme par amendement, sans avis du Conseil d’État ni examen en commission, recours contestable aux ordonnances, urgence sur le texte, alors que la réforme des SACI est en discussion depuis plus de dix ans… On ne peut vraiment qu’être très critique sur la méthode. Au fond, ce que veut le Gouvernement, c’est ponctionner 500 millions pour abonder son budget, tout en tentant de masquer son désengagement de la politique du logement.

M. Jean-Louis Dumont – C’est bien l’essentiel.

Mme Chantal Robin-Rodrigo – Les administrateurs bénévoles et les salariés des SACI qui ont tant œuvré pour aider les familles modestes à accéder au logement, et qui y ont réussi grâce à une gestion rigoureuse, méritaient mieux.

Sur la demande de l’État, le Crédit immobilier de France a créé des filiales qui représentent une part importante du marché, et assument des missions sociales et très sociales. Les SACI ont passé convention avec l’ANAH pour aider les bénéficiaires de l’APA à transformer leur logement ; elles prêtent sans intérêt aux locataires de HLM désireux d’acheter leur logement. Elles aident également les débiteurs de bonne foi, facilitent la location–accession, travaillent avec les caisses d’allocations familiales. Bref, elles n’ont pas attendu votre injonction pour agir avec leurs partenaires ou mobiliser leurs fonds propres pour des actions très sociales.

Leurs missions étaient donc bien définies. Mais il vous fallait le prétexte d’une nécessaire transformation pour mieux organiser ce hold-up de 500 millions. Je souhaiterais au moins connaître les grandes lignes de la convention d’engagement entre votre ministère et les SACI que vous êtes en train d’élaborer. Quel est l’objectif de construction pour les maisons à 100 000 euros ? Quel est-il pour l’accession sociale dans les quartiers qui font l’objet d’une opération de renouvellement urbain avec l’ANRU ? Allez-vous définir avec précision les missions très sociales auxquelles 500 millions devraient être consacrés à partir de 2008 ?

Enfin prenez-vous l’engagement solennel que cette « contribution » de 500 millions sera la dernière ? Les 59 SACI ont besoin d’un climat de confiance et de respect mutuel pour poursuivre leur œuvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Pierre-André Périssol – Je remercie Jean-Louis Borloo d’avoir tenu le cap, et réalisé une réforme équilibrée dans la concertation. L’État recevra une contribution exceptionnelle, dont 350 millions sont déjà versés, et le Crédit immobilier de France est plus assuré de sa pérennité puisque société mère et filiales auront un statut adapté, et qu’il disposera des moyens financiers et juridiques nécessaires. Notre pays dispose ainsi d’un instrument efficace pour l’accession et l’accession sociale à la propriété, c’est-à-dire capable de consentir des crédits, avec un faible taux de créances douteuses à une clientèle modeste. Un pourcentage du dividende sera consacré à des actions très sociales qui seront donc d’autant plus importantes que le dividende sera élevé.

Mais ceci suppose que l’intégrité des sociétés de crédit immobilier soit maintenue. Il nous faut donc parler des rapports entre le Crédit immobilier de France et la société de crédit immobilier des chemins de fer, donc avec la SNCF. Depuis quelques années, en raison de problèmes d’hommes, une des parties souhaitait la séparation. Le président du Crédit immobilier a donné son accord pour un divorce par consentement mutuel et pour un tribunal arbitral à défaut d’accord sur les modalités de séparation. Il faut en effet être très attentif à ces modalités dont dépend la crédibilité future du réseau, qui n’est absolument pas demandeur. (Assentiment sur les bancs du groupe socialiste) S’il accepte la séparation, elle ne doit pas compromettre sa survie. Il faut donc que les partenaires trouvent des solutions en ce qui concerne la valeur des parts, le rachat de garantie, le refinancement. Nous connaissons les engagements pris par le Crédit immobilier ; Il nous faudrait savoir ce que la SNCF va faire, puisqu’elle est demanderesse. Fait-elle montre du même esprit constructif ? Je voudrais en avoir l’assurance. Quant aux délais pour aboutir, dans la mesure où la société qui va quitter le réseau doit faire un certain nombre de choix, notamment au regard de la loi bancaire, ils en détermineront la durée. Le Crédit immobilier a manifesté clairement sa volonté, mais le délai pour aboutir dépendra aussi de la volonté de l’autre partenaire.

Mme Chantal Robin-Rodrigo – Tout à fait.

M. Pierre-André Périssol – Sur un plan général, je remercie Jean-Louis Borloo et ses collaborateurs pour avoir conduit cette réforme en y associant tous les partenaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Dumont – Je ne peux d’abord que regretter l’urgence. Ce texte méritait mieux. L’amendement initial était tellement incompréhensible qu’il a fallu le réécrire totalement. C’était le signe d’une certaine précipitation. Depuis la loi de 1991, le réseau Crédit immobilier de France avec ses filiales a fait preuve d’un véritable professionnalisme. Et aujourd’hui, la « contribution » – ou plutôt le siphonage – de 500 millions nous inquiète. Qui croira que ce sera le dernier ? Si demain il devait y avoir adossement, je suis persuadé qu’il y aurait un nouveau ticket à payer. Or on constate déjà des dégâts. Un cabinet de notation a mis le réseau sous surveillance et les discussions entre la SNCF, le Gouvernement et le Crédit immobilier de France sur les 500 millions auront des conséquences négatives. Les documents qui circulent, y compris nuitamment, entachent une réputation de professionnalisme. On a parlé de divorce. Lorsque la Caisse des dépôts et la caisse d’épargne se sont séparées, elles ont négocié d’abord, et le Parlement, ensuite, a légiféré.

Mme Chantal Robin-Rodrigo – Ensuite seulement.

M. Jean-Louis Dumont – Aujourd’hui, on veut faire légiférer le Parlement, ce qui a provoqué des réactions en chaîne. Là où l’on pensait qu’il y avait entente, il y a manifestement des désaccords, lesquels, faut-il le rappeler, résultent d’une bataille de personnes, un dirigeant ayant dû laisser sa place à la suite d’un jugement, scorie de l’affaire Elf. Ce n’est pas tolérable : on pourra demain s’adosser auprès de qui l’on veut, l’éthique bancaire l’emportera toujours. Que je sache, un responsable d’un mouvement n’a fait qu’appliquer la loi et accomplir ce pour quoi il avait été désigné.

Mme Chantal Robin-Rodrigo – Très bien !

M. Jean-Louis Dumont – On parle néanmoins maintenant de difficultés de gestion et de ratios…

Mme Chantal Robin-Rodrigo – Cela n’a rien à voir.

M. Jean-Louis Dumont – J’ai signé un amendement d’appel, pour qu’on nous donne des assurances quant au fait que toute personne qui joue un rôle dans le milieu bancaire est soumise à la loi de la République et à l’éthique qui l’accompagne. Au demeurant, la SNCF, qui a mis plus de dix ans à séparer ses biens immobiliers d’avec RFF, n’a guère de leçons à donner… Je vous renvoie au rapport de M. Mariton et à celui de M. Tron.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire – On ne peut pas dire cela. Ce n’est pas la SNCF qui est responsable.

M. Jean-Louis Dumont – La loi avait été votée, elle n’a pas été appliquée, y compris par des grands commis de l’État !

Aujourd’hui, c’est aussi le logement social qui pâtit de la situation : le patron de la Sofaris a bien du mal à valoriser au nom de l’État des biens immobiliers qui auraient pu l’être valorisés depuis longtemps.

Certes, ce texte nous apporte une satisfaction : le choix du statut de l’économie sociale, coopératif. Une observation cependant : les sociétés coopératives d’intérêt collectif ont été introduites par amendement parlementaire, à l’instigation de M. Hascoët, en 2001. En 2003, on a mis en place un statut des SCIC HLM ; pourquoi la commission des sages n’a-t-elle pas retenu cette formule ?

Quant au dividende social, il a été institué par les dirigeants actuels du Crédit immobilier et donne satisfaction. Sera-t-il désormais à destination exclusive des filiales ou des organismes HLM dont les futures SACICAP seront actionnaires, ou pourra-t-il comme aujourd’hui être utilisé au profit de grands projets relatifs au logement social et à l’insertion de populations en difficulté ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

La discussion générale est close.

Mme la Présidente – J’appelle maintenant les articles du projet dans le texte du Sénat.

Article premier

M. le Président de la commission – Monsieur Dumont, je vous rappelle que la création de RFF date de 1997. Or de 1997 à 2002, les responsables étaient le gouvernement que vous souteniez et M. Gayssot, ministre des transports.

M. Jean-Louis Dumont – Et alors ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Vous voulez vous exonérer de vos propres responsabilités en regardant dans le rétroviseur !

M. le Président de la commission – Si du temps a été perdu, c’est sous l’autorité d’un ministre que vous souteniez.

L’amendement 1 que j’ai fait adopter par la commission est important. Monsieur le ministre, je rends hommage au comité des sages que Jean-Louis Borloo et vous-même avez institué à la suite d’une discussion que nous avions eue ici, à l’occasion de laquelle la majorité avait pris par ma voix l’engagement sur l’honneur que ce comité ferait évoluer la situation.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Le débat parlementaire n’a lieu qu’avec la majorité : on s’en souviendra !

M. le Président de la commission – La majorité fait son travail. Celui du comité des sages a été constructif et a permis d’apaiser la situation.

Notre amendement concerne la SOCRIF, filiale de la SNCF, dont la compétence s’étend sur l’ensemble du territoire national. On est arrivé à une situation telle que les deux partenaires ne peuvent plus travailler ensemble sur des objectifs communs, c’est clair ; les efforts de part et d’autre ont tous été voués à l’échec. Ce constat nous amène à chercher comment résoudre le problème.

Mme Chantal Robin-Rodrigo – Ce n’est pas à la loi de le faire.

M. le Président de la commission – J’ai déposé un amendement à titre conservatoire, nous pouvons le voter si c’est nécessaire. Il peut aussi y avoir divorce par consentement mutuel, pour reprendre l’expression utilisée par M. Périssol.

Mme Chantal Robin-Rodrigo – C’est mieux…

M. le Président de la commission – J’y suis favorable, mais il faut qu’il puisse être effectif dans des délais suffisamment courts pour que notre majorité et ce gouvernement puissent s’en porter garants. Monsieur le ministre, je vous demande de nous confirmer que l’article 3 enlève tout obstacle législatif à un tel divorce.

Nous sommes prêts à renoncer à notre amendement si vous nous donnez l’assurance que nous n’avons pas besoin de légiférer sur ce point, que le divorce par consentement mutuel aura bien lieu et que le calendrier permettra à ce gouvernement de se porter garant de l’accord. Je suis au courant des lettres que viennent de recevoir Mme Idrac, M. Borloo et vous-même, Monsieur le ministre, mais je vous demande des garanties. Il faut que le Gouvernement confirme les engagements du président de la chambre syndicale des SACI.

M. Pierre-André Périssol – Il faut aussi l’engagement de la SNCF, que nous n’avons pas encore.

M. le Président de la commission – Nous ne voulons pas voter à tout prix une disposition législative, bien au contraire je préférerais que nous sortions d’ici avec un texte voté conforme. Je préférerais aussi que les uns et les autres, nous ne soyons pas soumis à des pressions personnelles.

Mme Chantal Robin-Rodrigo et M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Nous de même !

M. le Président de la commission – Je suis sourd aux pressions, mais je considère qu’on ne peut pas laisser perdurer une situation qui est ingérable.

Je souhaite donc, Monsieur le ministre, que vous nous apportiez les assurances nécessaires sur l’accord qui pourrait avoir lieu conformément à la lettre du président du Crédit immobilier, M. Sadoun.

M. Jean-Louis Dumont – Il me semblait d’usage que le ministre réponde aux orateurs à la fin de la discussion générale.

Mme la Présidente - Le ministre m’a indiqué qu’il répondrait à l’occasion de la discussion des amendements.

M. Jean-Louis Dumont – Eh bien, s’agissant des amendements, il me semble que depuis quelques jours, on a découvert un problème, comme dans L’Argent, dans Les Rougon-Macquart, d’Émile Zola.

M. Michel Piron – Mon Dieu !

M. Jean-Louis Dumont – La dizaine de pages de littérature d’un camp et de l’autre conduit quand même à s’interroger… J’ai pris l’exemple du constat de divorce qu’a fait le Parlement entre les Caisses d’épargne et la Caisse des dépôts, pour lesquelles les enjeux étaient grands ; on s’aperçoit que pour une participation de 51 % dans une société, le CIF est tout à coup affublé de tous les défauts. Il en irait même de l’avenir du financement du logement en accession à la propriété au bénéfice des cheminots de la SNCF.

Si c’était si grave, les murs de la salle du conseil d’administration ne sont pas blindés au point que cela ne serait pas arrivé à nos oreilles ! Et si le départ de toute cette opération est simplement une affaire de police, certes nécessaire pour respecter l’éthique bancaire, tout cela peut sembler un peu petit. Voyons les choses avec un peu de hauteur ! Cet amendement 2 doit nous permettre d’en appeler à la responsabilité du Gouvernement, car, en définitive, le réseau Crédit immobilier de France, dédié à l’accession sociale et très sociale, a fait la preuve de son efficacité et de son professionnalisme. S’il en est arrivé là, c’est qu’il a été amené à prendre des mesures qui ne faisaient pas l’unanimité, et qui ont même prêté parfois à controverses. Il reste que le réseau a rempli la mission qui lui était assignée. C’est pourquoi les questions posées par l’ensemble de nos collègues méritent des réponses précises. On peut comprendre l’urgence et, pourquoi pas, le vote conforme de la majorité. Cependant, la représentation nationale doit être complètement informée, de manière à ce que l’on ne tombe pas dans les marécages qui peuvent border les opérations bancaires !

S’il doit y avoir séparation, aujourd’hui, de façon solennelle, le Gouvernement doit être le garant que les négociations auront lieu le plus rapidement possible, afin, Monsieur le ministre, que le Crédit immobilier ne subisse pas une nouvelle décote et ne soit pas le seul à payer l’addition, alors qu’au départ, c’est simplement une question d’hommes. Je rappelle qu’au cours des dernières années, l’excellence du travail accompli a souvent été soulignée. Il est donc pour le moins regrettable que l’on en arrive à cette éruption de documents aux relents nauséabonds.

M. le Ministre délégué – Quelques éléments de réponse aux différents orateurs. Je remercie François Scellier et Pierre-André Périssol de soutenir la démarche. Monsieur le rapporteur, je vais, bien entendu, donner une traduction concrète aux engagements que j’ai pris.

Monsieur Dumont, c’est bien une fonction de médiation, de confiance et de garantie que Jean-Louis Borloo s’est engagé à remplir sur ce dossier. La réforme des SACI a confirmé la nécessité de dénouer les liens entre la SOFIAP et le CIFD. C’est du reste, Messieurs Ollier et Hamel, l’objet de vos amendements, qui ont permis de renouer le dialogue. Je rends donc hommage à la contribution de la représentation nationale.

Le dialogue a repris entre la SOCRIF et le CIFD pour que la SOFIAP quitte le réseau CIF. Je confirme que le président de la chambre syndicale des SACI a donné son accord à cette séparation. Un courrier en ce sens – dont j’ai remis copie au président Ollier et à votre rapporteur – a été adressé à M. Borloo et à Mme Idrac. Cet engagement constitue un premier pas important. Par ailleurs, les instances dirigeantes du CIFD se réuniront la semaine prochaine, de même que le comité des sages, en vue de confirmer la démarche. Celle-ci doit aboutir, dans la mesure où les deux parties – SNCF et CIFD – souhaitent que la SOFIAP quitte le Crédit immobilier de France.

Je mesure l’attachement des cheminots à l’accession sociale à la propriété. Mais vous conviendrez que l’enjeu du débat n’est pas là.

S’agissant, Monsieur le rapporteur, Monsieur Gremetz, Madame Robin-Rodrigo et Monsieur Dumont, de la convention portant sur la réalisation de logements, le nombre de 15 000 logements a été inscrit pour cette année, et l’accord prévoit également que les SACICAP devront consacrer 50 millions par an à la réalisation d’actions au titre du dividende social – et je reviendrai ultérieurement sur le prélèvement de 500 millions. Tous les partenariats conclus au niveau local – notamment avec l’ANAH – pourront se poursuivre.

Le dividende social peut servir au portage foncier pour l’accession sociale à la propriété, à la réhabilitation de logements très modestes ou à conclure des baux à réhabilitation pour l’amélioration de logements. Et la liste n’est pas exhaustive !

S’agissant du prélèvement financier, je confirme qu’il s’agira d’un prélèvement unique…

Mme Chantal Robin-Rodrigo – Nous en prenons bonne note ! Merci, Monsieur le ministre, de le préciser.

M. le Ministre délégué – Vous avez évoqué la notation du CIF : bien entendu, la loi de ratification va stabiliser le processus et améliorer naturellement, dans cette période intermédiaire d’incertitude, le classement du réseau par les agences financières. Si les agences de notation ne réagissaient pas, cela tendrait à démontrer que nos débats ne servent à rien et nous aurions du souci à nous faire !

Le président Ollier a demandé si la voie législative s’imposait, dans la mesure où la voie du divorce par consentement mutuel semble possible. Lorsque le capital de la SOFIAP ne sera plus détenu par le CIFD, le CIFD ne sera plus un organe central au sens du code monétaire et financier ; l’accord sera donc juridiquement possible, au travers de l’adoption de l’article 3 nouveau. Je tenais à apporter cette précision, qui vaut engagement du Gouvernement. S’il y a médiation et si – comme vous le souhaitez – un ministre se porte garant, l’accord sera juridiquement bien fondé, sous réserve de l’adoption de cet article 3 nouveau.

M. le Rapporteur – Les différentes interventions ont montré que tout le monde était d’accord pour dénouer les liens qui existent aujourd’hui entre la SOCRIF et le CIFD. Ce qui pose problème, ce sont, bien évidemment, les modalités de la séparation. Monsieur le ministre, en tant que rapporteur, je prends acte de votre engagement de réunir dès la semaine prochaine le comité des sages pour discuter, dans le détail, de ces modalités. Je souscris à l’analyse selon laquelle les différents courriers échangés jusqu’à présent entre les parties ne sont pas suffisants pour finaliser les modalités de ce divorce. Sous réserve des engagements pris, je suis prêt à retirer l’amendement 1, en espérant fermement que nous puissions nous mettre au travail dès la semaine prochaine.

M. Michel Piron – Très sage !

M. le Président de la commission – Je suis attentif à ce que l’on évite tout quiproquo pouvant donner lieu à de mauvaises interprétations. Le constat est donc posé de la nécessité de cette séparation, voyons-en les conditions. Si elle s’opère sous la responsabilité du Gouvernement, je répète que je fais confiance aux ministres, et je suis donc prêt à retirer notre amendement.

Monsieur le ministre, pouvez-vous garantir que les courriers adressés ce matin par M. Sadoun, président de la chambre syndicale des SACI, à M. Borloo et à Mme Idrac sont bien parvenus à leur destinataires et en confirmez-vous les termes ? Je rappelle qu’ils sont très importants, puisqu’ils fixent les conditions de la séparation.

Je vous remercie d’avoir aussi confirmé que le comité des sages se réunirait très vite. Je souhaite que la convention qui doit intervenir pour préciser les termes de l’accord entre la SNCF et la SACI puisse être signée dans les jours qui viennent. À partir de là, nous devrons disposer d’un calendrier de mise en œuvre suffisamment resserré pour que la fin de l’opération intervienne avant fin février 2007. Le Gouvernement peut-il s’engager sur ces différents points ?

Bien entendu, je suis prêt, comme vous l’avez souhaité, à participer très activement au comité des sages. À ce stade, j’ai bon espoir que nous parvenions finalement à un accord.

Mme la Présidente – Sur le vote de l’amendement 2, de MM. Dumont et de Courson, je suis saisie par le groupe des députés communistes et républicains d’une demande de scrutin public.

M. le Ministre délégué – Le mot de confiance ayant été prononcé, je souhaite confirmer au président Ollier et aux auteurs de l’amendement que les trois éléments qui permettent d’opérer cette séparation dans des conditions juridiquement solides – à savoir la réunion du comité des sages, le protocole d’accord SOCRIF-CIFD et le conseil d’administration du CIFD – sont désormais réunis.

M. Charles de Courson – Étant le co-auteur de l’amendement 2 pour ce qui intéresse la commission des finances, je tiens à dire deux ou trois choses. La première, c’est que, s’agissant des crédits immobiliers – et même si M. Périssol peut témoigner que les discussions ont parfois été un peu difficiles –, le Gouvernement nous a globalement entendus et a tenu ses engagements pour protéger les SACI.

L’amendement que j’ai présenté avec M. Dumont avait pour objectif, comme celui de M. Ollier, d’obliger les parties à sortir d’une situation qui nuit au bon fonctionnement de l’ensemble. Le ministre nous dit qu’il y a un accord et vient de nous donner la lettre du président Sadoun…

M. Maxime Gremetz - Vous êtes privilégié.

M. Charles de Courson - Je viens de l’avoir il y a une minute et tout le monde peut la consulter. Je disais donc que dans cette affaire, la sagesse consiste à passer un accord amiable pour sortir de cette situation empoisonnante. Dans ces conditions, M. Dumont et moi sommes d‘accord pour retirer notre amendement 2.

M. Maxime Gremetz - Je le reprends.

M. Pierre-André Périssol – Je remercie le Gouvernement de jouer ce rôle de médiateur et de garant et j’ai bien noté que M. Sadoun avait pris un engagement – écrit – auprès du ministre et de la présidente de la SNCF à la fois sur le but – on se sépare – et sur la méthode – en cas de désaccord, recours à une procédure arbitrale. Mais je voudrais être sûr que le deuxième partenaire est bien dans le même état d’esprit.

Le Gouvernement a pris l’engagement d’arriver à bon port et va réunir rapidement un comité des sages, mais ce n’est pas ce comité qui va décider des modalités financières et juridiques de la séparation. Je voudrais donc que le Gouvernement ne s’engage pas seulement à arriver au but, mais à y arriver en préservant l’intégrité du Réseau Crédit immobilier de France – car pour la SNCF, cela va de soi. Il ne faudrait pas que le Crédit immobilier de France, qui n’est pas demandeur, soit lésé en quoi que ce soit. Mais je pense que tout le monde est d’accord là-dessus.

M. le Ministre délégué – À M. Ollier et M. de Courson, qui m’ont interrogé sur le calendrier, j’indique que M. Borloo a retenu le 28 février comme date de conclusion de la procédure de médiation. Si nous réunissons le comité des sages dès la semaine prochaine, c’est pour ne pas perdre de temps et marquer notre volonté d’aboutir.

À M. Périssol, je voudrais rappeler que l’État joue encore un certain rôle à la SNCF et dans son conseil d’administration. L’engagement que je prends au nom de l’État a donc quelque valeur.

M. le Président de la commission – Votre réponse sur le calendrier est claire, Monsieur le ministre, et je rejoins l’avis général selon lequel la meilleure solution consiste en un bon accord, auquel le Gouvernement apporte sa garantie. Dès lors qu’un tel accord peut être conclu et que le Gouvernement a pris les engagements qu’il a pris, je retire l’amendement 1, car je fais confiance au Gouvernement, et je ne comprends pas, Monsieur Gremetz, que vous repreniez un amendement que nous sommes tous d’accord pour retirer ! Dans ces conditions, nous voterons contre.

Mme la Présidente – J’ai bien noté, Monsieur Gremetz, que vous repreniez l’amendement 2.

M. Maxime Gremetz – Je souhaiterais dire un mot à ce sujet.

Mme la Présidente – Ce n’est pas prévu.

M. Maxime Gremetz – Si, si ! Moi, je ne fais pas confiance au Gouvernement ! Il y a un proverbe qui dit : une fois trompé, tu es un malheureux ; deux fois trompé, tu es le roi des…

Mme la Présidente – L’amendement 1 a été retiré. L’amendement 2, également retiré, a été repris par M. Gremetz.

À la majorité de 32 voix contre 2 sur 34 votants et 34 suffrages exprimés, l’amendement 2 n’est pas adopté.
L’article premier, mis aux voix, est adopté.

Art. 2 à 5

Mme la Présidente – Les articles 2 à 5 ne faisant l’objet d’aucun amendement, je vais les mettre successivement aux voix.

Les articles 2 à 5, successivement mis aux voix, sont adoptés.

explications de vote

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - En quelques minutes, nous avons atteint des sommets, puisque le président de la commission des affaires économiques s’est retrouvé à voter contre son propre amendement ! Pour que les choses soient claires, je précise que le groupe socialiste aurait de toute façon voté contre.

Le problème de fond vient de la façon dont le Gouvernement a choisi de réformer les SACI. Cela faisait des années que les gouvernements successifs – en particulier les ministres du logement – tournaient autour des SACI, pas tant pour les réformer que par intérêt pour leur trésor ! Mais ils ne passaient pas à l’acte. Le Gouvernement actuel, lui, l’a fait ! M. Borloo l’a fait, en force, à la faveur d’un amendement au projet dit ENL. La surprise a été totale. Obligé de reculer un peu, le Gouvernement a créé un « comité des sages », auquel l’opposition n’a pas été conviée. Le travail s’est donc fait dans les petites arrière-cuisines, sans que nous puissions poser certaines questions ! Je ne mets pas en cause ceux qui y ont participé, mais je dénonce la méthode, scandaleuse !

Au départ, M. Borloo voulait 2 milliards. Il semble que le Gouvernement puisse se contenter de 500 millions. Un ministre nous promet qu’il n’y aura pas d’autre « tirage », mais de qui se moque-t-on ?

La façon dont le Gouvernement approche la question des SACI n’est pas la bonne, car il est certain que des structures devront emprunter pour participer au financement gouvernemental. C’est une aberration.

Et puis voilà une lettre qui nous dit : « Il va de soi que cette proposition serait caduque si une disposition législative venait interférer dans le lancement du processus de négociation. » Qui peut accepter que l’on traite ainsi le Parlement ?

J’ajoute que ce n’est pas parce que les deux parties prenantes, la SNCF et la SOCRIF, vont retirer leur appel qu’il n’y aura pas de poursuites. Croyez-vous que le retrait de parties civiles va empêcher la justice d’agir s’il y a eu prise illégale d’intérêt ? Vous savez bien que non, mes chers collègues ! Pour ma part, j’espère bien qu’il y aura des poursuites judiciaires et que la justice passera. Celle-là même que l’on invoque quand l’on nous parle de prévention de la délinquance.

Quand on parle de prise illégale d’intérêts, il n’y a vraiment aucune raison pour que la justice ne fasse pas son travail, même si cela arrangerait la SNCF et la SOCRIF.

Mme la Présidente – Je vous prie de conclure, Monsieur Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Et qu’adviendra-t-il de cet accord, s’il y a un renvoi devant les juridictions ?

Nous ne mettons pas en cause la façon dont nos collègues essayent de régler le problème : ce que nous contestons, c’est que le législateur investisse le champ de cette manière. Il n’aurait pas dû y avoir d’ordonnance : il aurait fallu remettre en chantier l’ensemble du problème des SACI. La méthode que vous avez choisie nous met dans une situation inextricable. En février, le problème ne sera pas réglé, car vous serez bien obligés d’attendre la fin des poursuites pénales – et j’espère que la justice ira jusqu’au bout : je ne sais pas ce qu’elle aura à dire, mais elle doit pouvoir le faire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Maxime Gremetz – Cela fait des années que ça dure, mais il suffit de brandir la menace d’un amendement à l'Assemblée nationale pour que tout s’arrange ! S’il était si facile de contenter tout le monde, ça se saurait. Et l’on apprend qu’il y a des affaires, et des intérêts financiers en jeu… Dans ce cadre, il n’appartient pas au Gouvernement de faire les propositions qu’il nous soumet, et qui sont d’ailleurs l’aveu de son échec à trouver une solution plus tôt.

Je ne peux pas y croire, il y a de la mauvaise foi quelque part. Ces engagements sont « bidon ». Il n’y a pas bien longtemps, on nous a promis que jamais on ne privatiserait GDF, que la participation de l’État ne passerait jamais en dessous de 70 % : c’était la parole d’un ministre d’État, au nom du Gouvernement et du Président de la République, et vous croyez que maintenant je vais vous faire confiance ? Je ne crois que ce que je vois, et, ce que je vois, c’est un gouvernement qui ne tient pas ses engagements.

L'ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.
Prochaine séance cet après-midi à 15 heures.
La séance est levée à 13 heures 20.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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