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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du jeudi 14 décembre 2006

Séance de 9 heures 30
42ème jour de séance, 95ème séance

Présidence de M. Jean-Christophe Lagarde
Vice-Président

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

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transfert des ports maritimes

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi adoptée par le Sénat visant à faciliter le transfert des ports maritimes aux groupements de collectivités.

M. le Président - Le rapport de la commission des affaires économiques porte également sur la proposition de loi de M. Lemière, dont le titre est identique.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer  L’article 30 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales prévoit, dans son article 30, le transfert des ports d'intérêt national aux collectivités territoriales, dont le rôle est ainsi confirmé dans le développement de ces outils économiques essentiels.

Le législateur a retenu un dispositif souple qui autorise toutes les catégories de collectivités territoriales et leurs groupements à se porter candidats. Les groupements de collectivités concernés sont les établissements publics de coopération intercommunale, les communautés urbaines, les communautés de communes ou d’agglomération, ou même les syndicats mixtes regroupant plusieurs catégories de collectivités territoriales.

Sept régions se sont portées candidates, mais également six départements, des communautés d'agglomération, plusieurs communes, une communauté urbaine et une communauté de communes, ce qui montre l'intérêt que cette loi a suscité parmi les collectivités territoriales.

D'ores et déjà, le port de Bayonne a été transféré à la région Aquitaine. Les préfets du Nord-Pas-de-Calais, de Bretagne, de Poitou-Charentes, du Languedoc-Roussillon, de Provence-Alpes-Côte d'Azur et de Guyane ont, en outre, désigné les bénéficiaires dans leurs régions.

Ce transfert s'accompagnera d'une dotation globale de décentralisation, prévue par la loi. La commission consultative sur l'évaluation des charges, qui s'est réunie le 30 novembre, a souhaité que le calcul de cette dernière prenne en considération le déroulement du contrat de plan 2000-2006, notamment la forte progression des crédits cette année. Des propositions seront formulées par le Gouvernement.

Pour deux ports – Dieppe et Caen-Ouistreham –, la région a été la seule collectivité à présenter une candidature, et aucune autre ne s'est manifestée dans les six mois. Dans ce cas de figure, la loi ne permet pas au préfet de désigner un syndicat mixte pour le transfert, et ce malgré l'accord intervenu il y a quelques mois entre les collectivités.

La proposition de loi vise à ouvrir cette possibilité. Elle permettra aux préfets de région de désigner, avant la fin de l’année, un syndicat mixte composé de la région Basse-Normandie et des deux départements de la Manche et du Calvados, pour les ports de Cherbourg et de Caen, et un syndicat mixte regroupant la région Haute-Normandie, le département de Seine-Maritime et la ville de Dieppe, pour le port de Dieppe.

Le Gouvernement émet un avis très favorable sur cette proposition de loi qui permettra d’achever la décentralisation de ces dix-huit ports d’intérêt national.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire - Très bien.

M. Daniel Fidelin, rapporteur de la commission des affaires économiquesNous examinons aujourd'hui la proposition de loi adoptée par le Sénat à l'initiative du sénateur Jean-François Le Grand, visant à faciliter le transfert des ports maritimes aux groupements de collectivités. Cette proposition de loi complète l'article 30 de la loi du 13 août 2004, qui prévoit les modalités de transfert des ports non autonomes au plus tard le 1er janvier 2007. Cette décentralisation est, dans l'ensemble, une réussite. Un premier port, celui de Bayonne, a été transféré dès le mois d'août 2006 à la région Aquitaine.

Les transferts n'ont toutefois pas toujours été faciles, ce qui semble normal eu égard aux enjeux économiques et financiers liés à des infrastructures aussi importantes. Dans les cas de Calais, Boulogne, Port-la-Nouvelle et Sète, plusieurs candidatures ont été soumises à l'autorité administrative, qui a alors envisagé la constitution d'un syndicat mixte ; cependant, les collectivités n'ayant pu s'entendre sur un projet commun, l’initiative a échoué. À l'inverse, pour les ports du Fret et de Roscanvel, en l’absence de candidature, le préfet a dû désigner d’office les communes de Crozon et de Roscanvel comme collectivités attributaires.

Il reste dix-sept ports à transférer avant le 1er janvier. Une collectivité attributaire a été désignée pour quinze d’entre eux. Ce sont souvent les régions qui se sont montrées les plus intéressées, et l'on ne peut que se féliciter de leur implication, après que les communes et les départements ont été les bénéficiaires de la décentralisation des ports en 1983.

Les craintes d’un transfert de charges non compensé étaient infondées : le transfert sera intégralement compensé. La région Aquitaine a déjà reçu le montant correspondant au titre de l'année 2006, et les crédits provisionnels pour 2007 ont été votés en loi de finances initiale.

En outre, la situation relative au transfert du personnel me semble parfaitement claire : l'ensemble des personnels actuellement salariés par les ports est mis à disposition de la collectivité attributaire pendant un an. Au terme de ce délai, les personnels seront entièrement transférés, à l'exception des ouvriers des parcs et ateliers, qui bénéficieront d'une mise à disposition individuelle sans limitation de durée.

L'article 30 de la loi de 2004 pose un problème pour le transfert des deux derniers ports : Dieppe et Caen-Ouistreham. En effet, cet article dispose que toute collectivité territoriale ou groupement de collectivités pouvait, jusqu'au 1er janvier 2006, demander à devenir propriétaire et gestionnaire des ports situés dans son ressort géographique ; au cas où aucune autre demande n'est présentée dans un délai de six mois, le transfert est opéré au profit de la collectivité ou groupement pétitionnaire.

L'enjeu est de taille : le chiffre d’affaires du port de Dieppe s’élevait en 2005 à 5 millions d'euros, pour 1,5 million de tonnes de marchandises traitées. Le port de Caen réalise, quant à lui, un chiffre d'affaires de 9,5 millions d'euros, pour 740 000 tonnes de marchandises.

En Haute-Normandie, la région a été la seule collectivité candidate au transfert de Dieppe. Par la suite, elle a souhaité substituer à sa candidature celle d'un syndicat mixte associant la région, le département de Seine-Maritime, la communauté d'agglomération et la municipalité de Dieppe. Le conseil général a fortement investi sur ce port – 13 millions de subventions, plus 3,8 millions d’avances transformées en subventions – et a créé la ligne transmanche. En outre, le port, situé en ville, bénéficie d’aménagements urbains. Il était donc naturel que ces deux collectivités soient partenaires.

Par ailleurs, la région Basse-Normandie était la seule candidate pour le transfert de Caen-Ouistreham. Toutefois, dans le cadre du projet de constitution d'un syndicat mixte entre la région et le département de la Manche pour acquérir le port de Cherbourg, il est apparu que ce groupement pourrait également accueillir le département du Calvados et recevoir le transfert du port de Caen-Ouistreham, dont la région devait être initialement la seule attributaire.

En l’état, la loi d’août 2004 ne permet pas cette association, qui ouvrirait pourtant la voie à un développement concerté et complémentaire des ports de Caen et de Cherbourg. C’est pourquoi la présente proposition de loi vise à en adapter l’article 30. La commission, qui l’a adoptée sans modification, invite l’Assemblée à faire de même.

M. Jean Lemière - Cette proposition de loi complète le dispositif de transfert des ports non autonomes aux collectivités locales, qui doit avoir lieu avant le 1er janvier 2007. Cependant, la loi d’août 2004 votée à cet effet ne prévoit pas qu’une collectivité initialement candidate puisse en associer d’autres au sein d’un groupement après la clôture des dépôts de candidature au 1er janvier 2006. Or, la région Haute-Normandie souhaite aujourd’hui associer au transfert du port de Dieppe le département de Seine-Maritime, la communauté de communes dieppoise et la commune de Dieppe elle-même. De même, la Basse-Normandie souhaite que les départements de la Manche et du Calvados soient associés à la gestion des ports de Cherbourg et de Caen-Ouistreham.

En l’état, c’est impossible : seules les régions avaient déposé leur candidature dans les délais prévus par la loi. Pourtant, des syndicats mixtes réunissant les collectivités précitées seraient plus aptes à intégrer ces ports dans leur zone d’influence. Le législateur, du reste, encourage de tels groupements. L’unique objet de cette proposition de loi, déjà adoptée par le Sénat, est donc de compléter le deuxième alinéa du II de l’article 30 de la loi d’août 2004, afin de favoriser le développement des ports normands et des littoraux de France. Au nom du groupe UMP, je vous invite à l’approuver.

M. Alain Gouriou - La présente proposition de loi vise en effet à faciliter le transfert, avant le 1er janvier prochain, de la propriété et de la gestion des ports maritimes non autonomes d’intérêt national aux collectivités territoriales et à leurs groupements. Des dix-sept ports de métropole concernés, quinze ont déjà été transférés. C’est aux préfets qu’il revenait d’agréer dans les six mois les candidatures de collectivités qui pouvaient, au besoin, se regrouper au sein de syndicats mixtes.

Toutefois, le transfert de trois ports normands pose un problème juridique. À la candidature de la région Basse-Normandie au transfert des ports de Caen-Ouistreham et de Cherbourg, agréée par le préfet dans les délais prescrits, s’est associée celle des départements de la Manche et du Calvados. La loi, cependant, n’autorise pas le préfet à revenir sur sa décision initiale. De même, le département de la Seine-Maritime et la ville de Dieppe souhaitent participer à la gestion du port de Dieppe alors même qu’elle a déjà été irrémissiblement confiée à la région Haute-Normandie.

La proposition de loi vise à surmonter l’obstacle. Compte tenu de la croissance du trafic maritime dans la Manche, les collectivités locales ont tout intérêt à harmoniser leur action pour rendre leurs ports plus compétitifs. Toutes les autres régions littorales ont profité de la décentralisation pour développer les activités portuaires, du commerce à la construction navale, et deux pôles-mer ont même vu le jour, en Bretagne et en Provence-Alpes-Côte d’Azur.

L’État ne doit pas pour autant abandonner sa politique maritime nationale, car les échanges maritimes représentent une part importante de notre commerce extérieur, et les ports français en assurent l’essentiel. L’activité maritime, en plein essor, emploie 320 000 personnes – autant que l’industrie automobile. La présence de l’État aux côtés des régions est donc indispensable pour consolider la place des ports français en Europe. Les pouvoirs publics doivent participer à la modernisation des infrastructures et à l’amélioration des liaisons avec l’hinterland, harmoniser les stratégies de croissance et garantir la sécurité du trafic.

Pour créer la synergie entre initiatives locales nécessaires au développement de nos ports et donner aux collectivités normandes les moyens de mieux moderniser leurs infrastructures, le groupe socialiste votera cette modification législative.

Mme Janine Jambu – J’associe à mon intervention Daniel Paul, député de Seine-Maritime. La proposition de loi que nous examinons vise à autoriser le transfert des ports de Dieppe, de Cherbourg et de Caen-Ouistreham à des groupements de collectivités constitués après le délai de six mois prescrit par la loi pour le dépôt de candidatures au transfert. Les régions restent très majoritaires dans chacun des deux syndicats mixtes concernés – qui associent à la Basse-Normandie les départements de la Manche et du Calvados d’une part, et à la Haute-Normandie le département de Seine-Maritime et la ville de Dieppe de l’autre. Confier la gestion des ports en question à ces groupements permettra en effet d’harmoniser les approches locales.

Nos craintes quant aux dangers de la décentralisation en matière portuaire, engagée par la loi d’août 2004, ne sont pas levées pour autant. Les régions riches se distingueront d’autant plus vite des régions pauvres que les investissements portuaires sont lourds, et que les collectivités ne disposent pas toujours des moyens de gestion suffisants. Elles ignorent généralement l’état de nos ports, du fait de l’abandon déjà ancien de toute politique nationale en la matière. En outre, des groupes privés s’intéresseront sans doute à la gestion des ports, et ce avec un objectif unique : la rentabilité. La politique portuaire exige pourtant une maîtrise publique des investissements et des normes de sécurité. Or, la loi d’août 2004 autorise le transfert de ces missions d’intérêt national. À ce titre, les différents services de l’équipement ont raison de manifester leur inquiétude.

Comment ne pas partager aussi l'inquiétude des personnels des capitaineries face à l'évolution actuelle ? L'introduction de la notion d'« autorité investie du pouvoir de police portuaire » pour désigner le représentant de l'État responsable des opérations de police sensibles, à côté de la traditionnelle « autorité portuaire » qui désigne le représentant de la personne morale chargée de l'administration du port, ne simplifiera pas la situation et est lourde de menace pour les personnels. Comment ne pas craindre que, rapidement, la « mise à disposition » de ces personnels se transforme en « prise en charge financière » par les collectivités locales, avec tous les risques que cela suppose de suppression de postes ou de recours au secteur privé ?

Certes, la commission consultative d'évaluation des charges qui s'est réunie le 30 novembre pour examiner le processus de décentralisation a permis d'aborder plusieurs points litigieux concernant les ports d'intérêt national. Ainsi, la répartition des personnels des capitaineries ne serait pas quantifiée entre les différentes autorités de police – autorité portuaire et autorité investie du pouvoir de police portuaire – et ces personnels feraient l'objet d'une mise à disposition globale avec prise en charge du fonctionnement par l'État. Jusqu'à quand ? Pour les investissements, compte tenu de la faible exécution des contrats de plan État-régions, les autorisations d'engagements pour 2006 seraient ajoutées dans le calcul de la dotation. Ce point restait soumis à un accord interministériel. Les dépenses des CETE et organismes techniques du ministère seront intégrées. Pouvez-vous confirmer que ces différents points sont réellement acquis ? Pouvez-vous également préciser la situation des personnels, officiers de port adjoints et marins, qui ne relèvent pas de cadres d'accueil de la fonction publique territoriale ?

La loi d'août 2004 a imposé aux collectivités territoriales de prendre en charge des structures essentielles pour notre économie mais rendues fragiles par un manque d'investissements depuis des décennies. La même loi les oblige aussi à gérer les évolutions statutaires des personnels et le morcellement des activités portuaires. Ce n'est pas un hasard si cette loi intervient au moment où certains ont voulu imposer la directive portuaire mais ont dû reculer devant l'opposition des personnels et des populations. La loi d'août 2004 comporte les mêmes dangers : attaques contre les statuts, mise en concurrence des services publics, recours aux logiques de rentabilité et non-respect des normes de sécurité.

Nous respectons évidemment les engagements régionaux à l'égard de nos ports mais parce que trop d'inconnues subsistent et que nous n’avons pas confiance dans votre politique, nous ne voterons pas ce texte.

M. le Président – La discussion générale est close.

J’appelle l’article unique de la proposition de loi dans le texte du Sénat.

L’article unique de la proposition de loi, mis aux voix, est adopté.
La séance, suspendue à 10 heures 5, est reprise à 10 heures 20.

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création d’un ordre national des infirmiers (deuxième lecture)

L’ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi portant création d’un ordre national des infirmiers.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la familleAvec cette proposition de loi qui nous revient du Sénat, nous approchons de la réalisation d’un espoir trop longtemps différé, celui de la création d’un ordre national des infirmiers. On le doit à votre initiative, et le Gouvernement s’en réjouit. Je salue Mme Maryvonne Briot, rapporteure, et M. Richard Mallié, président du groupe d’études sur les professions de santé, qui ont su faire émerger un consensus en faveur de la réalisation de ce grand espoir.

Je vous prie d’excuser l’absence du ministre de la santé, M. Xavier Bertrand, qui m’a demandé de représenter le Gouvernement ce matin. Le Gouvernement est tout acquis à l’aboutissement de votre travail. Après le vote du Sénat, éclairé par le remarquable rapport de Mme Sylvie Desmarescaux, je vous confirme l’accord du Gouvernement sur les points d’équilibre de ce texte : le champ de compétence de l’ordre, la représentation des différents modes d’exercice de la profession, la structuration du nouvel ordre en trois échelons – national, régional et départemental – qui assure une présence de proximité, et enfin la création par voie réglementaire d’un Haut conseil des professions paramédicales, qui se substituera à l’actuel Conseil supérieur des professions paramédicales.

Toutes les organisations membres de ce conseil ont été consultées. Le décret relatif à la création du Haut conseil des professions paramédicales sera publié en même temps que les décrets d'application de la loi…

M. Richard Mallié - Très bien !

M. le Ministre délégué - …qui sont déjà prêts.

Le Gouvernement est satisfait du résultat de la discussion au Sénat. Comme votre commission, il est donc favorable à l’adoption de ce texte en l’état. Je me réjouis que la réforme puisse entrer en vigueur rapidement : il s'agit d'un acte fort de reconnaissance des missions exercées par des centaines de milliers de professionnels, dans l'intérêt de la santé publique et dans celui des patients. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Maryvonne Briot, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales – Nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture la proposition de loi portant création d'un ordre national des infirmiers, cosignée par 230 députés, que j’ai déposée avec Richard Mallié.

Adopté en première lecture par notre assemblée le 13 juin 2006, puis par le Sénat le 5 octobre, ce texte est le fruit d'une concertation approfondie avec l'ensemble des professionnels concernés, tant lors de son élaboration que dans le cadre de la mission de médiation confiée en mars 2006 à M. Édouard Couty, qui estime que « dans le contexte actuel, avec la création récente des ordres des masseurs-kinésithérapeutes et des pédicures-podologues, on voit mal comment ne pas reconnaître la profession des infirmiers par la création d'une structure de type ordinal. »

L'équilibre du texte repose d’abord sur les missions élargies confiées à l'ordre, qui sera chargé d'élaborer le code de déontologie de la profession, d'organiser l'évaluation des pratiques professionnelles et de diffuser les règles de bonne pratique, en collaboration avec la Haute autorité de santé. L’ordre sera saisi pour avis sur les textes législatifs concernant l'exercice de la profession, ainsi que sur les plans régionaux de développement des formations professionnelles. Il participera au suivi des questions relatives à la démographie de la profession.

L’équilibre du texte repose ensuite sur la structuration de l'ordre en trois niveaux – départemental, régional et national – qui garantit un niveau de proximité suffisant avec les infirmiers et les patients, en créant une commission de conciliation départementale. La compétence disciplinaire sera en revanche confiée aux conseils régionaux et, en appel, au conseil national.

Le texte repose enfin sur une représentation équilibrée de la profession. Les conseillers ordinaux seront élus au sein de trois catégories représentant les principaux modes d'exercice – infirmiers relevant du secteur public, salariés du privé et infirmiers exerçant à titre libéral. Aucune catégorie ne détiendra cependant la majorité des sièges au sein des différentes instances ordinales.

Pour garantir l’indépendance de l’ordre, celui-ci sera financé par une cotisation unique, versée par tous les infirmiers. Compte tenu de leur nombre important – 460 000 –, le montant de cette cotisation restera modeste.

Le Sénat a adopté 23 amendements, dont 18 à l'initiative de sa rapporteure, Mme Sylvie Desmarescaux, dont je salue le travail et le sens de l'écoute. Son implication personnelle a permis d'enrichir le texte sans en altérer la structure ni l'équilibre. Il comporte désormais 9 articles, au lieu de 6 à l’origine. Deux articles ont été adoptés sans modification ; 7 restent donc en discussion.

Hormis des amendements rédactionnels, le Sénat a souhaité harmoniser la procédure disciplinaire de l'ordre infirmier avec celle qui existe pour les autres professions. Les infirmiers salariés du secteur privé seront donc soumis, comme les libéraux, à la compétence disciplinaire de l'ordre. Les infirmiers salariés du secteur public restent soumis aux instances disciplinaires de leur établissement public, celui-ci étant tenu d'informer l'ordre de toute sanction disciplinaire prononcée à leur encontre en raison d'une faute professionnelle.

M. Richard Mallié - C’est la moindre des choses !

Mme la Rapporteure - Le Sénat a d'autre part supprimé le Conseil des professionnels paramédicaux libéraux, institué par la loi du 4 mars 2002, qui n'avait jamais été mis en place faute de décrets d'application. La création des ordres des masseurs kinésithérapeutes, des pédicures podologues et aujourd’hui des infirmiers l’ont progressivement privé de son intérêt : les questions interprofessionnelles pourront être abordées au sein du Conseil supérieur des professions paramédicales, dont la réforme est engagée. M. le ministre vient d’ailleurs de nous annoncer que le décret d’application relatif à la création de ce Haut conseil serait publié en même temps que les décrets d’application de ce texte.

M. Richard Mallié - Très bien !

Mme la Rapporteure – Le ministre de la santé s’est déclaré disposé, lors de la discussion au Sénat, à travailler avec les 14 500 orthophonistes et les 2 000 orthoptistes, qui ne souhaitent pas la création d'un ordre, « pour élaborer leurs règles professionnelles ». En raison de la suppression du Conseil, l'article 6 a fait l'objet d'une réécriture complète s’agissant des dispositions de coordination relatives au contentieux du contrôle technique de la sécurité sociale. Cet article permettra également à un magistrat de l'ordre administratif qui n’est plus en activité de présider la section des assurances sociales des ordres des masseurs kinésithérapeutes et des infirmiers, afin d'élargir les possibilités de recrutement pour la présidence de ces instances.

Trois articles ont enfin été introduits par le Sénat. L’article 7, fruit d’une initiative du groupe socialiste, prévoit la remise au Parlement, dans les deux mois suivant la promulgation de la loi, d’un rapport sur la création de la structure interdisciplinaire qui doit remplacer le Conseil supérieur des professions paramédicales. Les articles 8 et 9 ont été adoptés à l'initiative du Gouvernement. L'article 8 renforce l'efficacité du dispositif de formation continue des médecins et des chirurgiens-dentistes, en permettant à l'État de déléguer à leurs ordres, par convention, la gestion matérielle des instances nationales et régionales compétentes en la matière.

Enfin, l'article 9 précise la nature des règles déontologiques applicables aux pédicures podologues.

Au cours de sa séance du 14 novembre 2006, la Commission des affaires culturelles a adopté l'ensemble de la proposition de loi, sans modification. Votre rapporteure vous invite à faire de même et à donner ainsi aux infirmières et infirmiers un signe tangible de reconnaissance de leur place dans notre système de santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Richard Mallié – Permettez-moi de vous saluer, Monsieur le président, car c’est la première fois que j’interviens sous votre présidence. Je pense que tout se passera bien…

M. le Président – Je n’en doute pas. (Sourires)

M. Richard Mallié – Lorsque Maryvonne Briot et moi-même avons déposé notre proposition de loi tendant à créer un ordre infirmier, le 29 mars dernier, nous espérions bien sûr arriver au bout du chemin qui nous mènerait à l'adoption définitive du texte, mais le pari était osé.

Osé, parce que nous avons dû faire face à ceux qui assuraient que la profession ne voulait pas de cet ordre. Nos détracteurs avaient un temps de retard, car s'il est vrai que la profession a été pendant longtemps divisée sur le sujet, ce n'était plus le cas et les infirmiers de France attendaient impatiemment que leur profession puisse, elle aussi, bénéficier d'une instance ordinale. Osé ensuite car, soyons francs, il n'est jamais simple, à quelques mois de la fin d'une législature de mener un texte jusqu'à son terme. L'ordre du jour étant particulièrement chargé, tant au Sénat qu'à l'Assemblée, il n'est pas toujours aisé de trouver une « fenêtre de tir » pour inscrire un texte comme celui-ci à l'ordre du jour.

Mais nous voilà arrivés au terme de cette aventure, qui a commencé en 2002. Si certaines voix se faisaient alors déjà entendre au sein de la profession pour la création d'un ordre, l'ensemble du corps infirmier n'était toutefois pas encore uni autour de cette demande. Il fallait donc laisser aux uns et aux autres le temps de se concerter et de s'accorder pour aboutir à un projet consensuel.

La discussion qui s'est tenue au Sénat sur ce texte, le 5 octobre dernier, a été d'une grande qualité et les modifications apportées par nos collègues de la chambre haute me semblent être tout à fait pertinentes. Il n'est jamais facile pour l'auteur d'un texte de voir le produit de son travail soumis à de multiples remaniements, mais je pense que nous pouvons être fiers des débats qui ont entouré cette question et de la mobilisation des parlementaires. Je tiens d'ailleurs à saluer le travail remarquable du rapporteur de la proposition au Sénat, Mme Desmarecaux, qui, comme Mme Briot à l'Assemblée, n'a pas ménagé ses efforts pour donner à ce texte le relief qu'il méritait.

À l'article premier, un amendement a ainsi été introduit, à son initiative, afin que l'ordre soit informé des sanctions disciplinaires prises à l’encontre des infirmiers du secteur public pour une faute lourde commise dans l'exercice de leurs fonctions, y compris lorsque l'intéressé n'a pas été déféré devant les structures disciplinaires ordinales. Cette modification me semble conforme à l'esprit du texte, soucieux de mieux protéger les patients. Rappelons que, jusqu’à présent, rien n'empêche une infirmière sanctionnée pour faute professionnelle dans le secteur public d’exercer ensuite librement comme libérale. Sachant que la délégation de tâches amènera les infirmiers à exercer davantage de responsabilités, il est essentiel d’apporter aux Français des garanties supplémentaires quant à la qualité des soins.

À l'article 4, toujours à l’initiative de la rapporteure, le Sénat a supprimé le Conseil interprofessionnel des professions paramédicales. Mesure de bon sens, car outre que cette structure n'avait jamais été mise en place, elle était loin de recueillir une réelle adhésion de la part des professionnels. Nous avons une fâcheuse tendance, dans notre pays, à maintenir sous oxygène des structures vivotantes, voire totalement inexistante, par simple peur de revenir sur ce qui a été acté. C'est ainsi que l'on se retrouve avec quantité de conseils, comités et autres hauts lieux de réflexion, dont l'apport n'est généralement pas à la hauteur de ce que l’on en attendait.

Le présent texte est aujourd’hui arrivé à un point de maturité dont je ne peux que me satisfaire, tant il est attendu par l'ensemble de la profession. Le retard enregistré par la France en la matière n'a en effet que trop duré et il est temps que nous dotions la profession d'une représentation digne de ce nom.

Les infirmiers auront probablement à affronter demain de profondes mutations. J'évoquais tout à l'heure la délégation de tâches, mais nous devons également penser aux problèmes de démographie médicale. Une étude de la caisse autonome de retraite des médecins de France montre en effet que les médecins généralistes ne seront plus que 51 300 en 2025, contre 68 300 en 2006, soit une chute de 25 %, et ce alors que la population vieillit. Les infirmiers auront donc sans doute à assumer des responsabilités encore plus grandes qu’aujourd'hui. La création d’une instance ordinale sera une garantie supplémentaire pour les patients.

La structuration de la profession qu’elle permettra sera également protectrice pour les professionnels. Jusqu'à maintenant, les infirmiers se retrouvaient bien souvent dépourvus de recours face à la demande abusive d'un médecin. Contraints d'appliquer les prescriptions médicales écrites, signées et datées par le médecin, ils n'avaient aucun moyen réel de faire respecter leur droit d'exiger dudit médecin une attitude conforme aux règles professionnelles. La création d'une instance ordinale comblera ce vide juridique.

Cette structuration sera également utile sur le plan international, car elle permettra aux infirmiers français de trouver enfin leur place sur la scène européenne et mondiale. Trop souvent écartés des débats et colloques internationaux faute de représentants uniques, nos professionnels auront désormais la possibilité de peser dans les échanges.

La présente proposition de loi a reçu un soutien rarement vu pour un texte d'origine parlementaire : ce sont en effet plus de 230 députés qui ont adhéré à cette initiative. Parce que ce texte me semble aujourd'hui abouti et parce que l'attente de la profession est forte, je ne peux que vous inviter à le voter en l'état et à doter ainsi la profession d’un outil dont elle aura, demain, plus que jamais besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Catherine Génisson – Je vous salue à mon tour, Monsieur le président. Et je salue le travail de la rapporteure, Mme Briot. Nous ne sommes pas d’accord avec les solutions qu’elle propose, mais je sais, pour en avoir beaucoup discuté avec elle, qu’elle connaît très bien le sujet et je note que ses positions ont évolué depuis le début des travaux sur cette proposition de loi. Cela doit d’ailleurs faire un peu sourire nos collègues de l’UDF à qui l’on disait hier qu’ils se trompaient, mais auxquels on donne aujourd’hui raison.

M. Jean-Luc Préel – En effet.

Mme Claude Greff – Ce n’est pas tout à fait cela.

Mme Catherine Génisson – Nous avons des points d’accord. Nous sommes ainsi tout à fait d’accord pour reconnaître pleinement la profession d’infirmier, dans la diversité de ses modes d’exercice et de ses missions, si indispensables. Nous sommes également d’accord pour satisfaire leurs légitimes revendications.

En ce qui concerne la déontologie, les articles 124-3-11-1 et suivants du code de la santé publique sont suffisamment précis. Et pour ce qui a trait à la formation, le diplôme d’État – garant de la compétence – ne doit pas relever de la décision d’un ordre, mais bien toujours de l’État.

Nous savons tous que c’est le secteur libéral de la profession qui a demandé la création d’un ordre des infirmiers. Les autres secteurs n’y étaient pas favorables, certains y étaient même très opposés. Cette opposition est aujourd’hui moins marquée. Je ne dirai cependant pas, comme M. Mallié, que tout va bien et que tout le monde est content. J’ai reçu beaucoup de lettres d’infirmiers, notamment du secteur hospitalier, qui remerciaient le groupe socialiste de ses positions sur le sujet.

Avec la concrétisation de l’idée, on va voir apparaître les problèmes.

Tout d’abord, qui dit ordre dit cotisation obligatoire. Certes elle sera modique du fait du nombre de membres, mais ce sera néanmoins une cotisation supplémentaire, qui ne sera peut-être pas bien acceptée.

Un sujet plus grave est celui de la représentativité. Les moins de 20 % des professionnels qui réclament l’ordre voudront légitimement être bien représentés, mais la manière dont on compte rééquilibrer les choses n’assurera pas aux infirmiers et infirmières du secteur non libéral une juste représentation.

Enfin, il faudra délimiter précisément le champ de compétences du conseil de l’ordre.

Je regrette la suppression du Conseil interprofessionnel des professions paramédicales. Il n’a servi à rien, nous dites-vous : évidemment, puisque le Gouvernement n’a jamais pris les décrets d’application ! Il aurait pourtant permis de mieux organiser l’offre de soins, en facilitant les relations transversales. Le Haut conseil des professions paramédicales par lequel vous le remplacez aura une fonction beaucoup moins importante, et surtout se trouvera confronté à des corps constitués qui nuiront à ces relations pourtant indispensables.

Je me réjouis que le Sénat ait apporté certaines clarifications, notamment au sujet des sanctions disciplinaires ; néanmoins, quel imbroglio juridique, notamment entre les infirmiers salariés du secteur hospitalier privé et les infirmiers salariés du secteur hospitalier public !

Pour répondre aux légitimes revendications de la profession, il y avait d’autres solutions que la création d’un ordre. Pourquoi n’y aurait-il pas un ordre des infirmiers, nous dites-vous, dès lors qu’il en existe un pour les masseurs-kinésithérapeutes et pour les pédicures-podologues ? Certes, mais en créer un pour ces professions n’était pas non plus une bonne idée… Pourquoi, alors, ne pas en créer également un pour les orthophonistes-orthoptistes ?

M. le Ministre délégué – Ils n’en veulent pas.

Mme Catherine Génisson – Sauf, donc, si nos amendements sont adoptés, mon groupe politique votera contre la création d’un ordre des infirmiers. Je me félicite néanmoins qu’ait été adopté au Sénat, à l’initiative de mes collègues socialistes, un amendement prévoyant la présentation d’un rapport dans les deux mois suivant la promulgation de la loi.

M. Jean-Luc Préel - Monsieur le Président, permettez-moi de vous saluer à mon tour amicalement et de vous féliciter pour votre accession bien méritée à cette fonction.

Je me félicite que ce texte revienne devant notre assemblée, la création d’un ordre des infirmiers étant urgente. Je l’avais déjà proposée en 1998, en 2003 et en janvier 2006 ; je me réjouis que ceux qui avaient voté contre en janvier dernier aient déposé une proposition de loi très proche… Pour ma part, avec le groupe UDF, j’ai voté ce texte en première lecture, après avoir fait rétablir l’échelon régional. La législature touchant à sa fin, il faut espérer aujourd’hui un vote conforme afin que l’adoption soit définitive ; mais il faudra aussi, Monsieur le ministre, pour qu’il ne s’agisse pas d’un texte d’affichage, que les décrets et arrêtés sortent rapidement. Souvenons-nous de ce qu’il est advenu de la création de l’ordre des kinésithérapeutes votée en 1995 : les élections des conseillers n’ayant pas eu lieu avant l’alternance de 1997, elle a été suspendue, puis abrogée en 2002, avant d’être rétablie l’année dernière.

La profession infirmière est de loin la profession de santé la plus nombreuse. Elle compte en effet 460 000 membres, dont 60 000 exercent à titre libéral. Pourtant, alors que la quasi-totalité des autres professions de santé disposent d’un ordre, elle n’est pas organisée. L’absence d’organe fédérateur conduit à l’éclatement de la représentation, partagée entre plus de 150 associations ou syndicats professionnels, dont la représentativité est très faible puisque seulement 4 % des infirmiers et infirmières adhèrent à une confédération syndicale et 8 % à une association professionnelle.

De ce fait, les pouvoirs publics n’ont pas d’interlocuteur représentatif de la profession. Cette situation conduit en outre à une sous-représentation de la France au Conseil international des infirmières, où elle occupe la trente-septième place sur cent douze, alors qu’elle aurait la première si sa représentation était unifiée. Dans de nombreux pays européens – Espagne, Irlande, Danemark, Italie, Royaume-Uni –, il existe un ordre regroupant les infirmières.

Un collectif réunissant trente-deux organisations et syndicats de la profession s’était formé en 1993 pour réclamer la création d’un ordre ; il avait adopté des recommandations qui ont très largement inspiré la proposition de loi, cosignée par Jean-François Mattei et Philippe Douste-Blazy, que j’avais déposée en 1997 et à laquelle les socialistes s’étaient opposés. Des enquêtes récentes montrent que 65 % à 80 % des infirmières sont favorables à une structure à cotisation obligatoire ; trente-huit associations ont formé le « groupe Sainte-Anne », qui réclame la création d’un ordre.

Il existe donc aujourd’hui un quasi-consensus, même s’il demeure le problème des confédérations syndicales qui souhaitent continuer à représenter l’ensemble des personnels hospitaliers, et notamment les infirmières salariées. Beaucoup d’entre elles ont cependant compris que le rôle d’un syndicat, qui est là pour défendre les intérêts matériels et professionnels, est bien différent de celui d’un ordre, qui a pour but d’organiser la profession de manière démocratique, dans l’intérêt premier des malades.

C’est aussi un acte de reconnaissance envers une profession dont le rôle est essentiel dans notre système de soins, tant sur le plan technique, où leurs responsabilités croissantes exigent une formation initiale et continue de qualité, que dans le soutien moral des malades.

Au moment où se posent de manière de plus en plus aiguë des problèmes de déontologie, de formation, de définition et d’évaluation des bonnes pratiques, les pouvoirs publics ont besoin d’un interlocuteur représentatif. S’agissant des soins palliatifs, par exemple, ou encore du transfert d’activités, il est essentiel que la profession infirmière participe au débat, à égalité avec les autres professions de santé, afin d’aboutir à une juste répartition des tâches.

Cette proposition de loi de l’UMP est très proche du texte dont nous avions discuté en janvier. S’agissant de l’organisation, l’existence d’un niveau départemental permet certes la proximité, mais alourdit le système. Le niveau interrégional, superfétatoire, a été supprimé en première lecture. La santé s’organise de plus en plus au niveau régional : vous ne serez pas étonnés que l’UDF souhaite s’y tenir.

Pour les élections, il est nécessaire que chaque mode d’exercice soit justement représenté ; c’est pourquoi l’UDF avait proposé une élection par collèges définis par décret. Quant à la cotisation, il nous paraît souhaitable qu’elle soit identique pour tous.

Les modifications apportées par le Sénat sont judicieuses, en particulier la suppression – qui figurait dans la proposition de l’UDF – du Conseil des professionnels paramédicaux libéraux, vidé de sa substance par la création des ordres des masseurs-kinésithérapeutes, des pédicures-podologues et des infirmières. Une coordination entre les professionnels de santé demeure cependant nécessaire ; elle pourrait passer par la création d’une Union régionale.

Pour conclure, l’UDF souhaite l’adoption conforme de cette proposition de loi. Il est en effet urgent de regrouper, au sein d’une structure démocratique, infirmiers libéraux et infirmiers salariés, dont les problèmes déontologiques, éthiques et de formation sont identiques. La création de l'ordre des infirmiers ne remet pas en cause le rôle des syndicats, qui est de défendre les intérêts matériels de leurs mandants. Enfin, le ministère ne peut que se réjouir de disposer enfin d'un interlocuteur représentatif de la profession de santé la plus nombreuse.

Nous vous demandons donc avec insistance, Monsieur le ministre, de faire que les décrets et arrêtés soient publiés avant la fin de la législature, afin que la mésaventure connue en 1995 par les kinésithérapeutes ne se renouvelle pas et que la création, tant attendue, d'un ordre des infirmiers ait effectivement lieu.

Mme Janine Jambu – Ainsi, après de nombreuses péripéties, après son retrait de notre ordre du jour – pour sortir le ministre de l'intérieur de l’impasse où il s’était mis à propos de l'hospitalisation d'office – et au terme donc, chacun en conviendra, d'une histoire législative peu commune, la majorité s’apprête à voter une proposition de loi qui ne bénéficiera qu’à une minorité des personnes potentiellement concernées.

Près de 460 000 infirmiers exercent en France sous un statut ou sous un autre. Tous souhaitent voir reconnus leur professionnalisme, leur dévouement et leur savoir-faire. Mais alors que la réflexion sur le travail en réseau, en synergie avec l'ensemble de la communauté médicale, est si nécessaire, vous trouvez le moyen de cloisonner la discipline. À une structure ouverte, couvrant toute la chaîne des soins paramédicaux, la majorité préfère une vision corporatiste. Ne craignons pas de le dire, cette proposition a pour seule motivation de satisfaire une minorité – les infirmiers libéraux, qui représentent un peu plus de 10 % des effectifs – pour répondre à des enjeux qui n'ont rien à voir avec l'intérêt général et encore moins avec l'intérêt de la profession. (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Mme Claude Greff - C’est scandaleux !

Mme Janine Jambu – Les infirmiers salariés, qui sont les plus nombreux, ne sont pas favorables à la création de cet ordre. Les dizaines de courriers que je continue de recevoir en attestent.

M. Richard Mallié – Ils émanent de la CGT, qui n’a rien compris, comme d’habitude !

Mme Janine Jambu - C'est ce qu'a d'ailleurs confirmé la mission Couty chargée de proposer, dans la concertation, la réforme des structures pluridisciplinaires. Cela se comprend fort bien, puisque les missions qui seront assignées à l’ordre sont déjà prévues par la réglementation. À quoi servira donc cette création ? En quoi l’ordre rendra-t-il la formation plus attrayante ? En quoi contribuera-t-il à améliorer les conditions d'exercice, la reconnaissance et la promotion de la profession, le développement des carrières ? En quoi aidera-t-il dans les négociations sur la revalorisation des statuts et des rémunérations ? En rien.

Mme Claude Greff - Il est certain que manifester est plus constructif.

Mme Janine Jambu – Gardez votre sang-froid, et laissez-moi poursuivre. Ne soyons pas dupes : les ordres, qui se limitent à prendre des mesures disciplinaires et éthiques, n'ont jamais permis de progrès dans les domaines que je viens de citer.

M. Richard Mallié – Vous préférez le désordre !

Mme Janine Jambu - On se demande alors pourquoi vous persistez dans cette voie, après avoir confié une mission de conciliation à M. Couty, qui a formulé des propositions équilibrées.

Mme Claude Greff - Ah bon ?

Mme Janine Jambu – Mais vous avez décidé de ne pas les suivre, préférant donner satisfaction aux infirmiers libéraux. C'est regrettable, car tout le monde aurait gagné à la création d'un Haut conseil des professions paramédicales, structure de concertation appelée à se substituer au Conseil supérieur des professions paramédicales. Ce n'était toutefois qu'un pis-aller, et nous aurions préféré que des moyens de fonctionnement soient donnés au Conseil supérieur. Nous l’avions proposé en première lecture, mais vous l’avez refusé, …

Mme Claude Greff - Oh !

Mme Janine Jambu - …promettant la création du Haut conseil pour l’automne – mais rien ne semble venir.

Je proteste d’autre part contre les conditions d'adhésion à l’ordre. La cotisation sera obligatoire et, fait sans précédent, pour les infirmiers salariés, elle sera payée par les employeurs, autrement dit par le budget des hôpitaux, dont on connaît la dramatique insuffisance. Et pour les personnels des centres de santé, c'est le budget des collectivités locales qu'il faudra ponctionner ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Mme Claude Greff – Mais non ! Ce n’est pas cela !

Mme Janine Jambu - Ce n'est pas acceptable. Enfin, les cavaliers introduits dans le texte, inadmissibles dans la forme et préoccupants sur le fond, suscitent les plus grandes réserves.

Nous nous prononcerons à nouveau contre la création d’un ordre infirmier qui, comme les autres ordres, agira bien davantage comme un organisme de sanction et de contrôle des personnels que comme un outil de promotion de leur profession. L'heure n'est vraiment pas au cloisonnement, mais à favoriser le travail en réseau de personnels paramédicaux qui interviennent ensemble auprès du malade. L'évolution des compétences et des métiers de la santé impose de développer des organisations interdisciplinaires capables d’édicter des règles professionnelles respectueuses de chacun, dans un seul objectif : améliorer la qualité des soins et celle de notre système de santé. Un ordre ne pourra le faire.

Or, si le métier d'infirmier est formidable, il est aussi usant, ce pourquoi les écoles d'infirmières manquent de candidats – et, fait nouveau, certains élèves infirmiers abandonnent leurs études. Les responsabilités sont de plus en plus grandes et les infirmiers ne sont pas formés à appréhender sans encadrement certaines situations difficiles. Il est donc impératif de revaloriser une profession dont on ne cesse d'élargir le champ de compétence ; ce qui est vrai pour les infirmiers vaut aussi pour les sages-femmes notamment.

De tout cela, il est impératif de tenir compte dans l'évolution des carrières, la rémunération et la formation. Pour toute réponse, la majorité crée un ordre, signe que l'enjeu n'est pas compris.

Mme Claude Greff - Les infirmières, où qu’elles exercent, réclamaient depuis longtemps la reconnaissance effective de leurs compétences et de leur implication dans la prise en charge des malades. La proposition de loi portant création d’un ordre national des infirmiers qui nous est soumise en deuxième lecture résulte d’un travail de qualité fondé sur l’écoute et le dialogue et tendant à ce que chacun se sente mieux représenté. J’en rends hommage à notre rapporteure, ainsi qu’à son homologue du Sénat, grâce à laquelle le texte a été encore enrichi. Penser, comme certains, que vouloir mieux structurer une profession revient à organiser son désordre, c’est méconnaître ses besoins. Même si, c’est exact, elle ne règlera pas tout, la création d’un ordre était nécessaire.

Je tiens à souligner que la profession dans son ensemble bénéficiera des nouvelles dispositions et non, comme cela a été avancé, les seuls infirmiers libéraux. Je regrette d’ailleurs qu’il n’y ait pas eu davantage d’infirmières dans les tribunes pour écouter ce qui s’est dit ce matin. Elles auraient été stupéfaites d’entendre que la profession, à la fois formidable et usante, n’est pas assez connue mais qu’il ne faut surtout pas créer d’ordre ! L’ordre permettra pourtant à ces professionnels tout dévoués à leurs malades de se faire mieux entendre.

Je remercie une nouvelle fois Mme Briot pour la qualité de son travail qui a permis de parvenir à une proposition équilibrée, satisfaisant aux exigences de proximité. Je sais l’importance que, de longue date, M. Préel attache à ces questions, mais si ses propositions n’ont pas été retenues, c’est qu’elles ne répondaient pas exactement aux enjeux…

M. Jean-Luc Préel – Curieusement, c’est pourtant mon texte que l’on retrouve aujourd’hui dans celui qui nous a été soumis !

M. Richard Mallié – C’est faux.

Mme Claude Greff - Monsieur Préel, votre inquiétude est illégitime ; le Gouvernement nous a dit que les décrets étaient prêts et qu’ils n’attendaient plus que le vote de cette proposition de loi.

M. Jean-Luc Préel - Nous verrons bien !

Mme Claude Greff – Avec ce texte, les infirmières salariées du privé seront, comme les infirmières libérales, soumises à la compétence disciplinaire de l’ordre. Dans le secteur public, les choses sont un peu différentes : les infirmières restent soumises à la procédure disciplinaire de l’établissement dont elles dépendent, le président du conseil régional de l’ordre étant informé.

La formation continue des médecins et des chirurgiens-dentistes, autre élément phare de cette proposition de loi, sera déléguée, par convention, aux ordres respectifs de ces professions. Médecins et chirurgiens-dentistes travaillent aujourd’hui main dans la main pour le bien-être du patient.

Les infirmières sont confrontées quotidiennement à la douleur et à la mort, dans des conditions de travail difficiles et avec des responsabilités de plus en plus importantes, une technicité des tâches de plus en plus grande. Il était nécessaire que nous prenions conscience de la nécessité de reconnaissance de cette profession. La création d’un ordre professionnel constitue une première étape. Cela me donne du baume au cœur pour la seconde. Car nous devrons nous donner les moyens pour que cette profession soit valorisée, aimée et pratiquée par le plus grand nombre. La création d’un ordre permettra aux infirmières de parler sous un seul noM. Il s’agit d’un véritable projet de société, dont je suis très fière (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La discussion générale est close.

M. le Ministre délégué – Madame la rapporteure, je vous confirme que le projet de décret instituant le Haut conseil des professions paramédicales n’attend que l’adoption de cette proposition de loi pour être soumis à la concertation. Il en va de même pour tous les décrets d’application de la proposition de loi.

L’ordre des infirmiers sera une référence, un guide et une protection.

Une référence. La profession est soumise à des interrogations éthiques majeures, et ce de plus en plus. Comme Mme Greff l’a rappelé, les infirmiers sont exposés aux questionnements fondamentaux de la vie humaine, la douleur, la maladie, l’agonie. Ils sont toujours là aux moments difficiles de l’existence, devant surmonter leur propre désarroi face aux souffrances d’autrui, pour les soulager. Bien plus qu’une profession, il s’agit d’un engagement humain. Il ne suffit pas d’avoir appris, dans les écoles, les gestes techniques nécessaires ; il faut s’être affranchi de ses réserves face à l’expression de la souffrance, il faut être capable d’aller au-devant d’autrui, et ce non dans les conditions ordinaires de la vie, mais dans celles d’une souffrance souvent très grande. Telle est, pour moi, la première raison pour soutenir les infirmiers, par la création de ce nouvel ordre national.

Il s’agira ensuite d’un guide, pour permettre d’accompagner des évolutions significatives, comme la délégation de tâches nouvelles. Vous avez, en effet, avec la loi de financement de la sécurité sociale, permis aux infirmiers de prescrire pour ce qui relève de leurs compétences. C’était le bon sens même : pourquoi demander au médecin de repasser après l’infirmier ?

Mme Catherine Génisson - C’était prévu dans le plan de soins !

M. le Ministre délégué – Le travail de l’ordre en vue de créer ce guide est indispensable.

Il s’agira, enfin, d’une protection, qui aujourd’hui n’existe pas, alors que la profession est confrontée à de nombreuses difficultés

Madame Génisson, je vous remercie d’avoir souligné nos points d’accord, notamment sur la nécessaire reconnaissance, encore insuffisante, de la profession et de l’évolution de ses compétences. La cotisation, indispensable pour un fonctionnement autonome de l’ordre, pourra rester modique, compte tenu du nombre de professionnels concernés. S’agissant de la représentativité, la proposition de loi crée un équilibre satisfaisant entre les différents modes d’exercice. La profession veut être mieux structurée et organisée : fallait-il le lui refuser ? Nous ne le pensons pas, et c’est la raison pour laquelle le Gouvernement a soutenu l’élaboration de cette proposition de loi.

Monsieur Préel, merci de votre soutien à ce texte. Je sais que vous vous êtes beaucoup investi dans la création d’un ordre national. Comme je l’ai dit, les décrets d’application sont prêts et sortiront rapidement. Les compétences de l’ordre seront clairement délimitées, notamment par rapport à celles des syndicats.

Madame Jambu, vous avez, parfois en termes un peu vifs, exprimé votre désaccord. Peut-être vous laisserez-vous convaincre quand ce seront les infirmiers eux-mêmes qui vous diront combien l’ordre a fait progresser la reconnaissance de leur profession. Il ne s’agit pas de cloisonner la profession, mais au contraire de lui donner des perspectives et de pouvoir mieux l’associer à d’autres professionnels dans leur travail au chevet des malades.

Les infirmiers sont confrontés quotidiennement à des interrogations éthiques fondamentales. Ils sont très exposés du point de vue psychologique et humain, et ce alors même que l’exercice paramédical n’a pas la solution à tous les problèmes. Le Gouvernement comme la majorité souhaitent répondre à leurs attentes. Nous voulons que le Haut conseil, dont j’ai annoncé la création, joue son rôle, conformément aux conclusions du rapport d’Édouard Couty.

La possibilité de prescrire accordée aux infirmiers par la loi de financement de la sécurité sociale s’inscrit dans une politique sociale et statutaire ambitieuse. L’accord signé par le ministre de la santé, le 19 octobre, avec cinq organisations syndicales représentatives de la fonction publique hospitalière valorise les carrières hospitalières, notamment celles des infirmières et des infirmiers. Les progrès réalisés dans le secteur hospitalier doivent désormais être étendus au secteur libéral, car la négociation conventionnelle a trop longtemps piétiné. Je suis heureux de vous annoncer que la discussion entre les syndicats d’infirmiers et la CNAM a repris cette semaine, et portera sur des sujets aussi importants que les frais de déplacement. En effet, au-delà de cet acte fondateur qu’est la création d’un ordre national des infirmiers, la profession doit être pleinement reconnue : nous le lui devons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – J’appelle les articles de la proposition de loi sur lesquels les deux assemblées n’ont pu parvenir à un texte identique.

article premier

Mme Catherine Génisson - L’amendement 1 vise à supprimer l’article, car la création d’un ordre national ne permettra pas de satisfaire les revendications légitimes de la profession. L’exemple de l’ordre des médecins, inopérant même sur des sujets relevant de sa compétence tels que la permanence des soins, montre combien la structure ordinale n’est plus adaptée à notre époque.

M. le ministre évoquait la mission humaniste des infirmières. Bien plus que leur activité purement technique, c’est cette assistance, cette présence humaine dont elles réclament la reconnaissance – ceux d’entre nous qui ont participé à la mission « fin de vie » le savent bien. Ce n’est pas un ordre qui y contribuera.

Mme Jambu a raison : la désaffection croît dans nos écoles de formation, tant la profession fait peur. Outre la pénibilité du métier, il faut aussi reconnaître la formation pour ce qu’elle est : un cursus d’enseignement supérieur.

Par ailleurs, je m’inquiète que le Gouvernement délègue la gestion de la formation médicale continue à l’ordre des médecins, qui a montré ses limites en la matière.

En somme, la création d’un ordre national des infirmiers n’est pas la solution adaptée aux problèmes de la profession : il faut supprimer l’article.

M. le Ministre délégué – Vous le dites à votre corps défendant !

Mme la Rapporteure – Cet amendement et les suivants sont identiques à ceux que vous aviez déposés en première lecture, et la commission n’y est toujours pas favorable. On ne peut pas demander la reconnaissance des infirmières sans créer un ordre national. Nous – j’appartiens à la profession – ne sommes même pas représentées aux niveaux européen et mondial ! J’admire les infirmières italiennes, qui ont un ordre depuis bien longtemps et participent activement au conseil européen des ordres infirmiers !

En outre, cet ordre comblera un vide juridique en veillant au respect des règles professionnelles.

Les infirmières en souhaitent la création. Je n’y étais moi-même pas favorable en 2003, mais la riche concertation qui a eu lieu depuis m’a fait changé d’avis. Nous arrivons aujourd’hui au terme d’une longue réflexion : il est temps que l’ordre soit créé.

J’ajoute qu’il clarifiera les missions de chacun, et notamment des syndicats – dont la représentativité est relative, étant donné la très faible implication des infirmières…

M. Pierre-Louis Fagniez – Il pourrait en être autrement !

Mme la Rapporteure - En effet : en Espagne et au Portugal par exemple, la création d’un ordre national a fait augmenter le nombre d’adhésions !

M. Alain Joyandet - Exact !

Mme la Rapporteure - Présents dans les conseils d’administration des établissements hospitaliers, les syndicats, en charge des statuts et des conditions de travail, seront confortés dans leur mission. Pour toutes ces raisons, la création d’un ordre s’impose (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Ministre délégué – Même avis. Je suis navré que le groupe socialiste propose la suppression de ce dispositif, que Mme Briot vient de défendre avec tout son cœur et tout le poids de son expérience. Les 460 000 infirmiers et infirmières de France attendent leur reconnaissance – qui passe par la création d’un ordre national – depuis trop longtemps. Je regrette que vous la leur refusiez.

Mme Claude Greff – Vous êtes médecin, Madame Génisson : vous savez combien la reconnaissance des infirmières est importante ! Ne mélangeons pas tout : la désaffection des écoles d’infirmières n’a rien à voir avec la création de l’ordre, même si, ancienne formatrice, je sais combien il est difficile pour des jeunes de s’engager dans une telle formation, et de consentir ensuite un tel engagement humain, un tel don de soi.

La création de l’ordre national est une nécessité. Je regrette moi aussi que le parti socialiste – car c’est bien lui qui parle ici, et non vous-même, Madame Génisson – manifeste de nouveau une opposition systématique.

Mme Catherine Génisson – Je représente le groupe socialiste, et non le parti : la sémantique a son importance (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Si la création de cet ordre comble à un vide juridique, ce n’est que pour moins de 20 % de la profession. En outre, le code de la santé publique couvre les problèmes de responsabilité dans le secteur public. Enfin, je ne suis pas révolutionnaire, mais réformiste…

M. Xavier de Roux – C’est bien dommage !

Mme Catherine Génisson – L’ordre national n’est pas une bonne solution. L’incapacité de l’ordre des médecins à soutenir les praticiens le montre !

Mme Claude Greff – Mais l’ordre des infirmiers sera meilleur !

Mme Catherine Génisson – Les personnes ne sont pas en cause : c’est la structure qui est inadaptée aux besoins des infirmiers et des infirmières.

M. Xavier de Roux - Dites plutôt des travailleurs !

Mme Janine Jambu – Voici la lettre que j’ai reçue d’une infirmière d’Antony : « Infirmière diplômée depuis vingt-quatre ans et exerçant en secteur public, j’attire votre attention sur le fait que les professionnels n’ont pas été consultés quant à la création d’une telle structure. Les infirmiers découvriront qu’ils devront payer pour être inscrits sur un tableau géré par l’ordre. Je refuse l’institution d’un ordre infirmier… »

M. le Ministre délégué – Vous en avez donc trouvé une !

Mme Janine Jambu – « Cela n’apportera rien de nouveau à ma profession. Ma pratique et mon éthique professionnelles sont déjà règlementées par le décret 2004-802 modifiant le code de la santé publique et unifiant dans un seul texte décret de compétence et code de déontologie, s’appliquant tant à l’exercice libéral que salarié… »

M. Xavier de Roux – Quelle science !

Mme Janine Jambu – « Je suis titulaire d’un diplôme d’État m’autorisant à exercer la profession pour laquelle j’ai été formée après une inscription gratuite auprès des autorités sanitaires compétentes sur le fichier ADELI. C'est pourquoi je refuse l'obligation d'adhérer à un ordre professionnel car il s’agit d'une atteinte au principe démocratique et constitutionnel de libre choix d'adhérer ou non à un syndicat ou à une association. Je souhaite une véritable reconnaissance de ma profession, qui passe par une amélioration des études infirmières, par un accès facile à la formation continue, par la reconnaissance du niveau bac+3, par une revalorisation salariale et par une amélioration des conditions de travail. Je risque, en outre, de ne plus être autorisée à exercer ma profession après vingt-quatre années auprès des patients. »

Cela veut tout dire. N’oubliez pas ces personnes !

L'amendement 1, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson – Nombre de professionnels salariés se demandent en effet, même si l’on peut comprendre qu’un ordre implique une cotisation, pourquoi ils devraient payer pour exercer leur métier. L’amendement 2 vise donc à supprimer les mots « obligatoirement tous » dans l’aliéna 6 de cet article. Le Gouvernement peut-il par ailleurs confirmer que le paiement de cette cotisation par les employeurs des infirmiers salariés n’a jamais été prévu ?

Mme la Rapporteure – Je rappelle qu’un ordre est une instance indépendante, et que cette indépendance repose sur une cotisation obligatoire. Cette structure étant reconnue par la loi, y appartenir n’est en rien comparable à l’adhésion à un syndicat ou une association. Cette cotisation sera modique...

M. le Ministre délégué – Exactement.

Mme la Rapporteure – …mais, si elle s’établit par exemple à 10 euros, comme l’on compte 460 000 infirmiers, on arrive pour l’ordre à un budget de quelque 4,5 millions. Pardonnez-moi la formule, mais, avec une telle somme, on peut quand même « voir venir ».

Je sais que des syndicats et des infirmières hospitalières refusent de cotiser pour exercer, mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit.

Mme Claude Greff – Très bien ! Bravo !

Mme la Rapporteure – La cotisation permettra de constituer un ordre professionnel. La refuser, c’est refuser la création de l’ordre. Avis défavorable.

L'amendement 2, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson – J’entends bien l’argumentaire passionné de Mme la rapporteure, mais des dérogations à l’inscription obligatoire existent d’ores et déjà, notamment s’agissant du service de santé des armées. Il doit en être en l’occurrence de même pour les infirmiers de l’éducation nationale. Tel est le sens de l’amendement 3.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Le statut militaire exclut par définition l’appartenance à un ordre professionnel. Le Sénat a de plus adopté un amendement visant à préciser que les infirmiers n’ayant pas un statut militaire pourront dépendre de l’ordre infirmier, à la différence des infirmiers ayant un statut militaire. Enfin, l’expérience des infirmiers scolaires sera particulièrement précieuse pour l’ordre, s’agissant en particulier de la promotion de cette profession auprès des jeunes.

L'amendement 3, repoussé par le Gouvernement mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson – L’amendement 4 est défendu.

L'amendement 4, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson – Le conseil de l’ordre est censé édicter des règles de déontologie. Or, un code de déontologie existe déjà au titre des articles 4311-1 et suivants du code de santé publique. L’amendement 5 vise donc à supprimer la première phrase de l’alinéa 8.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Les infirmiers n’ont pas de code de déontologie : des règles professionnelles existent certes, mais qui relèvent de textes règlementaires. Ce sont donc les infirmières qui vont élaborer ce code, qui fera ensuite l’objet d’un décret en Conseil d’État.

L'amendement 5, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson – L’amendement 6 vise à supprimer la strate départementale de l’ordre.

L'amendement 6, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson – Chaque collège représentant les différents modes d’exercice de la profession voudra évidemment être représenté de la façon la plus juste possible. Cela suppose un scrutin proportionnel, sans lequel votre texte ne pourrait être appliqué. L’amendement 7 vise donc à insérer, après l’alinéa 38, l’alinéa suivant : « Il est constitué à la proportionnelle des collèges ci-dessus mentionnés ».

Mme la Rapporteure – Avis défavorable, même si la représentativité au sein de l’ordre pose problème : 80 % des infirmiers sont des salariés, 20 % des libéraux et la proportionnelle stricte reviendrait donc à « noyer » les seconds dans la masse des premiers.

Mme Claude Greff – Et ce n’est pas un syndicat !

Mme la Rapporteure – C’est pourquoi nous avons proposé qu’aucun collège ne puisse avoir la majorité absolue à lui seul. Les salariés ne pourront ainsi obtenir que 50 % au plus, la représentation les libéraux et des infirmiers du secteur privé sera automatiquement majorée : nous n’avons pas tant voulu tenir compte des effectifs que du mode d’exercice du métier.

L'amendement 7, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson – Une concertation s’impose avant de fixer le cadre géographique dans lequel s’installent les conseils de l’ordre. Tel est le sens de l’amendement 11.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable à cet amendement qui vise à fixer le nombre des conseils régionaux. Il y en aura bien sûr autant que de régions : 22.

L'amendement 11, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson – L’amendement 8 vise à rétablir le conseil interprofessionnel des professions paramédicales, qui aurait été plus efficace que des ordres distincts pour les infirmiers, les masseurs-kinésithérapeutes et les pédicure-podologues. En effet, il était bien plus adapté à l’organisation de l’offre de soins en filières et en réseaux, qui implique de reconnaître la délégation et le transfert de compétences.

Mme la Rapporteure – La commission a repoussé cet amendement. La création d’un ordre infirmier permet aux infirmiers de décider des sanctions disciplinaires infligées à leurs pairs, ce qui paraît logique. Nous avons en outre introduit un échelon départemental afin de mettre en place une commission de conciliation, pour éviter de judiciariser les contentieux et d’aller trop vite à une procédure disciplinaire.

M. le Ministre délégué – Défavorable.

Mme Catherine Génisson – Vous savez bien, Madame la rapporteure, que toute la profession infirmière n’est pas soumise à la même procédure disciplinaire. Il y a d’un côté le secteur libéral et les salariés de l’hospitalisation privée, et de l’autre ceux du secteur hospitalier public. Je crains que cela ne donne lieu à un imbroglio juridique.

M. Richard Mallié – Vous avez mal compris. La rapporteure voulait simplement dire que la commission de conciliation prévue au niveau départemental offre une possibilité de conciliation entre les professionnels et les patients qui voudraient engager une procédure judiciaire.

Mme Catherine Génisson – Ces discussions ne sont pas polémiques, mais portent sur le fond du sujet. Le dispositif évoqué par la rapporteure concerne l’exercice libéral de la profession. Dans le secteur hospitalier, ces structures de conciliation existent déjà, que ce soit pour les professions paramédicales ou pour les professions médicales. Si la structure de conciliation que vous proposez est tout à fait justifiée, elle ne concerne donc qu’une partie de la profession.

Mme la Rapporteure – Nous ne voulons pas que les infirmiers salariés du secteur public puissent se voir infliger une double peine en étant sanctionnés à la fois par leur employeur et par l’ordre. Nous avons donc choisi de les soumettre aux instances de l’établissement public employeur, mais celui-ci devra informer l’ordre de la sanction. En effet, les infirmiers du secteur hospitalier qui ont été sanctionnés par leur employeur peuvent actuellement passer à un exercice libéral sans que personne connaisse leurs antécédents. La disposition que nous proposons permet donc d’éviter la double peine tout en garantissant la qualité des soins.

M. Pierre-Louis Fagniez – C’est un bon argument.

M. le Ministre délégué – Nous touchons là à un désaccord de fond. Les auteurs de cette proposition de loi et le Gouvernement pensent que les infirmières ne sont pas des pédicures-podologues et que les pédicures-podologues ne sont pas des masseurs-kinésithérapeutes. Il faut donc reconnaître chacune de ces professions pour ce qu’elle est et éviter de les mélanger lorsqu’il s’agit de répondre à des interrogations d’ordre professionnel ou éthique. Vous semblez au contraire estimer que toutes les professions se valent et doivent être mélangées. C’est une illustration typique de ce qui nous sépare.

L'amendement 8, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson – L’amendement 9 rectifié est défendu. Permettez-moi de revenir un instant sur le précédent : il n’est pas question, Monsieur le ministre, de traiter de la même manière l’ensemble des professions paramédicales. Le Conseil interprofessionnel des professions paramédicales était d’ailleurs organisé en sections professionnelles. Votre argument n’est donc pas recevable.

Je ne conteste évidemment pas la nécessité de garantir la sécurité sanitaire dans le secteur libéral, Madame la rapporteure. J’ai simplement dit que toute la profession n’était pas soumise à la même procédure de sanction.

L'amendement 9 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson – J’ai déjà défendu l’amendement 10.

L'amendement 10, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article premier, mis aux voix, est adopté.

art. 2

L'article 2, mis aux voix, est adopté.

art. 4

L'article 4, mis aux voix, est adopté.

art. 6

Mme Catherine Génisson – L’amendement 12 est défendu.

L'amendement 12, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article 6, mis aux voix, est adopté.

art. 7 à 9

Les articles 7, 8 et 9, successivement mis aux voix, sont adoptés.
L'ensemble de la proposition de loi, mis aux voix, est adopté.
Prochaine séance, cet après-midi, à 15 heures.
La séance est levée à 12 heures 10.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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