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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

2ème séance du mardi 13 février 2007

Séance de 15 heures
60ème jour de séance, 137ème séance

Présidence de M. Jean-Louis Debré

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La séance est ouverte à quinze heures.

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convocation du congrès du parlement

M. le Président – M. le Président de la République m’a fait savoir qu’il avait convoqué le Congrès du Parlement le 19 février afin de lui soumettre trois projets de loi.

Le Congrès sera réuni à Versailles le 19 février à partir de 11 heures. L’ordre du jour a été ainsi fixé : le matin, vote sur le projet de loi constitutionnelle relatif au corps électoral en Nouvelle-Calédonie ; l’après-midi, vote sur le projet de loi constitutionnelle relatif au statut pénal du chef de l’État puis vote sur le projet de loi constitutionnelle relatif à l’interdiction de la peine de mort.

Il est pris acte de cette convocation.

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QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

banlieues

M. Pierre Bourguignon – Ma question concerne la banlieue et, comme telle, tous les habitants de la République. La banlieue concentre tous les aspects de la vie urbaine, qu’ils soient positifs – nouveaux centres de recherche publics ou privés, nouvelles formes culturelles, multiplex – ou négatifs, difficultés sociales notamment. La semaine dernière, a été publié le manifeste des villes de banlieue, porté par des centaines de maires de tous bords politiques adhérant à l’association des maires des villes et banlieues de France que je préside (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Nous y faisons douze propositions aux candidats à l’élection présidentielle mais je tiens aujourd’hui à rappeler plus précisément quelques éléments d’actualité.

Je viens d’apprendre que dans des villes de banlieue de la région parisienne où le taux de logements sociaux dépasse les 30 % – Créteil, Ivry, Limeil-Brévannes, Montreuil – des bungalows susceptibles d’accueillir des SDF seront installés sur des terrains de l’assistance publique des hôpitaux de Paris sans aucune concertation avec les maires ni accompagnement social, au mépris des règles d’urbanisme. Le Gouvernement a-t-il décidé de renouer avec les cités d’urgence ? Est-ce là votre solution pour que ceux qui campent à Paris partent ailleurs et que les difficultés sociales s’aggravent encore dans ces communes ?

Enfin, s’agissant de la sécurité, en quoi la suppression de la police de proximité a-t-elle été bénéfique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire Les banlieues ne doivent pas être un enjeu politicien (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) : c’est un problème suffisamment important pour que ceux qui n’ont rien fait ne viennent pas donner des leçons alors qu’ils en auraient tant à recevoir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Grâce à M. de Villepin et à M. Borloo, la France a mené une politique dynamique de construction de logements sociaux alors que la gauche n’avait rien fait (Protestations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Du reste, le porte-parole du parti socialiste a confirmé qu’en cas de victoire aux élections, la nouvelle majorité conserverait l’ANRU !

Quant à la police de proximité, si elle avait été si remarquable, pourquoi les Français auraient-ils condamné votre politique ? La délinquance avait augmenté avec vous de 14 %, nous l’avons fait reculer de 9 % ! Et l’on me demande de renouer avec une stratégie qui avait conduit notre pays à enregistrer plus de 4 millions de crimes et de délits ! Que le parti socialiste dise donc aux Français qu’en cas de victoire, il s’inscrira dans la lignée de M. Jospin ! Cet excellent message permettra d’avoir un grand débat républicain : les Français veulent-ils un retour en arrière ou souhaitent-ils que la politique de sécurité qui a fait ses preuves continue ? Décidément, nous ne sommes pas d’accord ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

moulinex

M. Claude Leteurtre - J'associe à ma question tous les députés du Calvados et de Basse-Normandie.

En septembre 2001, Moulinex fermait ses portes et 3 700  salariés étaient licenciés. La semaine dernière, 597 anciens salariés des usines Moulinex ont assisté au procès qu'ils ont engagé contre leur ancien employeur devant le tribunal des prud'hommes de Caen. Ils veulent connaître la vérité sur la gabegie financière qui a entraîné la faillite d'un des fleurons de notre industrie ; ils ont également demandé une indemnisation. Le jugement du tribunal ne sera rendu qu'en septembre 2007 soit tout juste six ans après le dépôt de bilan. À ce propos, je vous laisse juge de l'attitude du dernier PDG du groupe qui, bien que mis en examen, a eu le culot de demander 176 000 euros d'indemnité pour cause de licenciement économique ! Le ministre en charge du dossier à l'époque aurait dû être sensible au problème puisqu'il était l'élu du département des Vosges, lieu d'implantation d'usines du groupe SEB qui a bien profité de cette liquidation. Malgré nos alertes, celui-ci n'a pas mis sur la table les moyens qui s’imposaient. A ce jour, beaucoup trop d'anciens salariés du groupe n’ont toujours pas trouvé de solution. Face à une situation aussi dramatique, le travail des cellules de reclassement a-t-il été efficace ?

Quel est donc le bilan du reclassement des licenciés de Moulinex, et sur quels critères les résultats des cellules de reclassement sont-ils évalués ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes En septembre 2001, le dossier Moulinex devenait une catastrophe industrielle, en particulier pour la Basse-Normandie, qui perdait 2 880 emplois dans l’entreprise et 700 dans la sous-traitance. Cent millions ont alors été consacrés à un plan d’accompagnement au reclassement des salariés. Depuis, 1 438 emplois ont été retrouvés…

Plusieurs députés socialistes – Quels emplois ?

M. le Ministre délégué - …sous forme de création d’entreprise, de CDI ou de CDD supérieurs à six mois, et 1 375 personnes ont bénéficié de dispositifs de santé, comme le plan amiante, ou de mesures relatives à leur âge. Cent onze millions ont été consacrés à la revitalisation, et on estimait au 30 juin dernier que 4 100 emplois avaient été créés dans la région, où le taux de chômage a baissé de 10 %, comme pour l’ensemble de la France, au cours de la dernière année. Ces dispositifs ont aussi bénéficié à la ville de Falaise, qui était particulièrement touchée, et qui a retrouvé des emplois dans l’agroalimentaire – les entreprises Normandie plats cuisinés et Tartefrais notamment.

Jamais le contrat de plan État-région n’aura consacré autant au dynamisme économique et au développement de l’emploi dans la région (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Quant aux Euromoteurs, de Saint-Lô, qui sont eux aussi soumis à l’effet Moulinex, je les ai rencontrés vendredi dernier et me suis engagé à accompagner leur cellule de reclassement et la revitalisation du territoire. C’est ce que nous allons faire ensemble, avec les élus de la Manche (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

airbus

M. le Président – La parole est à M. Gremetz… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) J’étais sûr que cela vous ferait cet effet !

M. Maxime Gremetz – Ils sont contents de m’entendre !

La semaine dernière, Monsieur le ministre de l’industrie, notre collègue Demilly, du groupe UDF, vous a interrogé sur l'avenir du site d’Airbus de Méaulte. Votre réponse n’avait hélas aucun contenu. L'inquiétude et la colère ne cessent de grandir chez les salariés d'Airbus et de EADS, comme chez les sous-traitants, alors que le « plan Power 8 » prépare une nouvelle saignée industrielle et humaine : abandon de certains sites d'Airbus, délocalisations, réduction de 80 % des sous-traitants, externalisations… L’objectif est une réduction des coûts de 5 milliards d'ici 2010 et de 2 milliards par an pour la suite. C'est toute une branche qui est menacée par les orientations, plus financières qu'industrielles, des actionnaires d'EADS, qui recherchent une rentabilité maximum au détriment de la production, comme le montrent Lagardère et Daimler-Chrysler qui profitent de cette situation pour dilapider la trésorerie du groupe.

Vous devez recevoir cet après-midi, Monsieur le ministre, les organisations syndicales de Méaulte. Vous devez savoir ce que vous allez leur dire !

M. Richard Mallié - La question !

M. Maxime Gremetz - Dites-le nous ! Ne vous dérobez pas une nouvelle fois ! Les salariés d'Airbus de Toulouse, Nantes, Saint-Nazaire et Méaulte attendent un engagement fort de l'État. Le Gouvernement va-t-il enfin prendre ses responsabilités et accroître la part de l’État dans le capital, pour garantir le développement industriel du secteur aéronautique et préserver tous les sites du pays ? Alors que le carnet de commandes d’Airbus est plein pour les cinq prochaines années, va-t-il résister ou céder aux requins de la finance, signer un nouvel abandon de la politique industrielle et technologique française et donc laisser détruire de l'emploi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe UDF)

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie - Je sais que vous êtes particulièrement attentif à la situation de l’emploi dans votre département de la Somme. EADS a aujourd’hui une charge de travail très importante. Il produit l’A 320. Le projet d’A 380 a du retard, ce qui a des conséquences financières sur le groupe, mais celui-ci a quand même décidé de se lancer dans l’A 350, se donnant ainsi des perspectives. Cette décision soulève des questions industrielles : il faut notamment savoir où l’on développera, et quoi. Cela suppose une concertation étroite entre tous les acteurs et une répartition équitable entre la France et l’Allemagne. Les syndicats français et allemands se sont rencontrés hier. Le Premier ministre s’est entretenu avec la chancelière Merkel et il a reçu M. Gallois, qui rencontre aujourd’hui le ministre de l’économie allemand. Le processus de concertation est donc bien engagé. Nous tenons aussi à ce qu’elle ait lieu avec les élus locaux, et EADS s’y est engagé. Vous y serez donc associés dans le département de la Somme (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

rénovation urbaine

M. Jean-Pierre Nicolas – L'Agence nationale pour la rénovation urbaine fête ses trois ans d'existence. Vous l’avez voulue, Monsieur le ministre de la cohésion sociale, avec une détermination de tous les instants, pour en faire l'outil déterminant du programme national de rénovation urbaine, qui constitue l'un des piliers de votre politique de cohésion sociale. Le logement peut être un terrible outil de discrimination sociale et d’humiliation, mais il peut aussi constituer un formidable ascenseur social. L'agence doit donc rénover en profondeur les quartiers les plus en difficulté, par des démolitions, constructions et réhabilitations et par la création d'équipements de proximité. Cette action commence à porter ses fruits, comme je peux le constater tous les jours à Évreux, dans le quartier de la Madeleine, qui est en train de changer d'âme sous l'impulsion du maire.

L’État et ses partenaires, notamment l'UESL, la Caisse des dépôts et consignations et la Caisse de garantie du logement social, ont doté l'Agence de moyens financiers sans précédent. L'État compte renforcer encore sa participation dans le cadre du projet de loi instituant le droit opposable au logement. Ce sont ainsi près de 35 milliards qui seront consacrés à ce devoir national que constitue la rénovation urbaine, pour quelque 500 quartiers.

Certes, les financements sont indispensables, mais encore faut-il que les collectivités et les bailleurs sociaux aient la capacité de réaliser ces programmes. Monsieur le ministre, pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur la situation de ce chantier prioritaire et sur ses perspectives ? (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement  Le « plan Marshall des banlieues », dont on entendait parler depuis trente ans, a désormais cours. Il consiste à casser définitivement la ségrégation territoriale, qui fait que dans un habitat différent, finissent par se développer une culture, une économie – parfois même une justice – propres au quartier. Grâce à des voiries, des espaces et des équipements publics nouveaux, il vise à transformer l’intégralité de l’habitat, et même à raser les bâtiments lorsque cela s’avère nécessaire.

Aujourd’hui, 450 des 500 quartiers sont en chantier. Le programme a été porté à 35 milliards d’euros. Le comité d’évaluation et de suivi, qui s’est réuni il y a un mois, a salué son succès. Je remercie d’ailleurs certains de nos amis socialistes qui ont déclaré vouloir maintenir l’agence nationale de rénovation urbaine, si – par extraordinaire – ils venaient au pouvoir. La semaine dernière, les maires, les directions départementales de l’équipement, les SA et les offices d’HLM se sont réunis pendant deux jours pour échanger leurs expériences.

Ce programme ne peut que continuer ! Dans une partie de ces quartiers, la vie a changé et le sourire est revenu sur le visage des mamans et des enfants (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP). C’est le plus grand chantier civil jamais entrepris en France depuis le début du siècle.

M. Albert Facon - Prêcheur !

M. le Ministre - Quelles que soient les vociférations et les postures, ce programme républicain ne cessera pas (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

désendettement

M. Jacques Remiller – Notre collègue Gilles Carrez, rapporteur général du budget et président du comité des finances locales estime que « le rétablissement des comptes publics s’impose. La dette accumulée depuis vingt-cinq ans n’autorise plus aucune dérive, sauf à laisser un fardeau insupportable aux générations futures, confrontées de surcroît au défi du vieillissement de la population » (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Ne vociférez pas, vous qui avez endetté la France depuis vingt-cinq ans et dont le seul programme est de continuer (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) ! Gilles Carrez continue ainsi : « Le rétablissement est possible, et loin d’être le signe d’une politique de rigueur, il est lui-même créateur de richesses et de croissance, tant le poids des dépenses publiques et des prélèvements obligatoires handicape aujourd’hui le développement de notre pays et tire vers le bas le pouvoir d’achat. »

L’objectif de la seconde conférence nationale des finances publiques, à laquelle assistaient les élus, les partenaires sociaux, les représentants de l'État et de la Sécurité sociale, était de rappeler la nécessité du désendettement et de faire le point sur « la stratégie de désendettement » mise en œuvre par le Gouvernement à la demande du Président de la République. Monsieur le ministre des finances, pouvez-vous nous dire quelles propositions en sont ressorties ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l’industrie Merci d’avoir rappelé l’importance de cette conférence, qui s’est tenue hier à Bercy sous la présidence du Premier ministre, en présence des organisations syndicales, des acteurs de la dépense publique et des représentants des collectivités locales.

Nous avons entendu les conclusions du rapport de Gilles Carrez sur le désendettement et le vieillissement, deux défis auxquels la nation se doit de répondre. Une politique vigoureuse de désendettement, conforme aux orientations du rapport Pébereau et aux engagements européens de la France doit être engagée pour atteindre la stabilité en 2010 et faire passer l’endettement sous la barre des 60 %. La Commission européenne a encouragé la France dans cette voie, afin qu’elle ne soit plus en infraction avec les règles de l’Union (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

absences de courte durée des enseignants

M. Jean-François Régère – Les parents sont attachés à la réussite de leurs enfants et attentifs à la présence continue des enseignants, dont les absences suscitent des inquiétudes, surtout en période de pré-examen. C’est l’égalité des chances, mais aussi l’image du service public, sa qualité et sa continuité dont il est question.

Vous avez décidé, monsieur le ministre de l’éducation nationale, de mettre en place, dès la rentrée de 2005, un nouveau dispositif de remplacement par les professeurs de l’établissement, pour les absences inférieures à 15 jours. Ce dispositif s’est-il avéré efficace ? Avez-vous prévu les moyens nécessaires à son maintien et à son amélioration ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche - Parce que les parents sont en droit d’attendre que leurs enfants suivent tous les cours, toute l’année scolaire, le Premier ministre et la majorité m’ont demandé de définir un dispositif permettant les remplacements de courte durée. Je l’ai conçu sur la base du volontariat, étant entendu que les absences ainsi remplacées sont payées en heures supplémentaires. À mon arrivée au ministère, on estimait à deux millions les heures d’absence prévisibles, deux millions d’heures pendant lesquelles les élèves seraient en classe sans enseignants et donc sans suivre de cours. Fin 2006, un million d’heures avaient été remplacées. Étant donné ce que j’ai considéré n’être qu’un demi-succès, j’ai fixé, pour l’année scolaire 2006-2007, l’objectif plus ambitieux encore de faire remplacer 1,5 million d’heures d’absences de courte durée ; 61 millions ont été budgétés à cette fin. Je puis vous assurer que cet objectif sera atteint, si bien qu’à la fin de l’année, trois heures d’absence de courte durée sur quatre auront été remplacées. On le voit, lorsqu’on fait appel au sens du service public des enseignants, on n’est jamais déçu. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Suppressions d’emplois dans le groupe alcatel-lucent

M. Alain Gouriou – Quelques semaines à peine après que la fusion entre Alcatel et Lucent Technologies a été conclue, la direction du groupe annonce la suppression de 12 500 emplois. On rejoue un scénario hélas désormais connu, en arguant de résultats inférieurs aux prévisions pour 2006 – mais toujours bénéficiaires, ce qui permet de verser un dividende aux actionnaires – pour supprimer massivement des emplois. La fusion d’Alcatel et de Lucent avait été présentée comme porteuse d'espoir, les complémentarités apparaissant nombreuses. Mais, dès la présentation de la fusion, en avril, la suppression de 9 000 emplois était annoncée. Il s'agit maintenant de supprimer 16 % des effectifs, à 90 % en Europe de l'Ouest et en Amérique du Nord. Le mariage tourne au cauchemar.

En France, où le groupe Alcatel-Lucent emploie 12 000 personnes, dont 2 000 dans le Grand Ouest, la direction annonce la suppression de 1 500 emplois. Avec de telles saignées, on peut s'interroger sur la survie de ces sites. L'équilibre des bassins d'emplois est gravement compromis et les salariés d’Alcatel n'en peuvent plus de ces suppressions massives à répétition. Plus généralement, l’industrie d'équipement des télécommunications voit ses effectifs se réduire comme peau de chagrin. De 1995 à 2006, plus de 55 000 postes ont été supprimés chez Alcatel, Nortel vient d'annoncer la suppression de 2 900 postes, l'ex-Sagem voit ses activités de télécommunications remises en cause… Cette situation ne contribue t-elle pas à aggraver le déficit commercial record de 29,2 milliards que connaît la France après cinq ans de gouvernement de droite ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Veuillez poser votre question.

M. Alain Gouriou - Il y a quelques années, M. Tchuruk souhaitait « une entreprise sans usines » ; Mme Russo, patronne du groupe Alcatel-Lucent envisage-t-elle aujourd'hui « une entreprise sans salariés » ? Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous définir la politique industrielle du Gouvernement dans ce secteur stratégique, et nous dire quelles mesures vous envisagez de prendre pour vous opposer à ces suppressions d'emplois et pour maintenir en France ce potentiel de recherche et ces activités industrielles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie  Comme beaucoup d’élus et comme le personnel d’Alcatel-Lucent, vous vous inquiétez des annonces faites par la direction du groupe, ce qui se conçoit. Il n’empêche que, grâce à la fusion, Alcatel-Lucent est devenu le premier équipementier mondial de télécommunications, et nous avons à cœur de voir les entreprises françaises bénéficier de la mondialisation (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Alain Bocquet - Vous vous moquez !

M. le Ministre délégué - Quelle que soit la situation du groupe, nous attendons que sa direction prenne des décisions adéquates, qu’il s’agisse du reclassement de tous les salariés dont les postes sont supprimés, si possible sur la base du volontariat, ou du maintien en France des activités de recherche et des sites de production. Ces différents volets supposent une concertation, qui se déroule en ce moment même au sein du comité d’entreprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

vehicules « propres »

M. Jean-Marie Sermier - Ma question s'adresse au ministre des transports. Le transport routier est à l'origine d'un cinquième des émissions de CO2 en France et en Europe, dont une petite partie est imputable aux voitures particulières. Les réductions d’émissions rendues possible par l’amélioration du rendement énergétique des véhicules n'ont pas suffi à contrebalancer les effets de l'augmentation du trafic et de la taille des voitures. Vous avez donc confié en octobre à M. Jean-Pierre Beltoise le soin de vous faire des propositions tendant à inciter nos concitoyens à utiliser les véhicules les moins polluants, en envisageant notamment une modulation des tarifs des péages d'autoroute en fonction du degré de pollution des moteurs. M. Beltoise vous a remis son rapport la semaine dernière. Pourriez-vous, Monsieur le ministre, détailler ses propositions, nous dire si elles peuvent être mises en œuvre et quels bénéfices ont peut en attendre pour l'environnement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer  Les transports sont à l’origine d’un quart des émissions de CO2, dont le trafic routier pour deux tiers. Nous avons donc décidé diverses mesures d’ordre réglementaire visant à limiter cette pollution, notamment par des incitations fiscales à l’acquisition de véhicules « propres ». Mais il m’a semblé nécessaire de faire davantage, éventuellement en modulant les tarifs des péages autoroutiers afin de favoriser l’utilisation des véhicules propres. J’ai demandé à M. Beltoise de me soumettre des propositions à ce sujet, ce qu’il a fait au terme d’une concertation approfondie. Il conviendra, en premier lieu, d’élaborer un projet de loi permettant cette modulation.

Le rapport suggère ensuite de s’orienter, pour les véhicules particuliers, vers un système de badges comparable à celui du télépéage, pour que l’indication du niveau de pollution soit certaine et facile à démontrer au moment du passage du péage. Pour les poids lourds, il propose une réduction de 20 % du tarif pour les véhicules qui répondent à la norme Euro 4 ou Euro 5. La même réduction serait consentie aux véhicules particuliers émettant moins de 130 grammes de CO2 par kilomètre parcouru. Cet objectif est une incitation à aller plus vite que ce que demande la Commission – une moyenne de 130 grammes en 2012. Je pense que ces deux dispositifs pourront être mis en place début 2008. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP)

coopération avec l’afrique

M. Jacques Godfrain – Vous allez participer dans quelques jours aux côtés du Président de la République, Madame la ministre de la coopération, au sommet France-Afrique. Aux côtés des chefs d’État et de gouvernement se retrouvera cette fois-ci l’Afrique qui réussit – des chefs d’entreprise, présidents d’association ou d’ONG, témoins et acteurs d’une Afrique qui évolue.

Les Africains en ont assez de l’image qui est donnée de leur continent – celle de la corruption, des guerres civiles et des endémies. Ce sommet sera une belle réponse à tous ceux qui désespèrent de l’Afrique.

Le Président de la République a joué un rôle moteur dans les progrès du développement et de l’aide au développement. L’objectif de 0,7 % du PIB, la taxe sur les billets d’avion…

M. Michel Lefait - Sauf les siens !

M. Jacques Godfrain - …pour financer la lutte contre les pandémies, la défense des matières premières – en particulier le coton – dans le commerce international… Tout cela est largement dû à ses efforts.

La France est très attachée à sa politique de coopération. Dans les plus petits villages, ONG et associations oeuvrent au coude à coude : la coopération décentralisée est un succès. Où en est notre politique de coopération ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie – Oui, il faut changer le regard porté sur l’Afrique. Elle n’est pas ce continent à la dérive qu’on nous dépeint trop souvent. Parce que nous croyons en son avenir, nous avons, sous l’impulsion du Président de la République, doublé notre aide au développement sous ce quinquennat. Nous militons pour que l’Afrique ne reste pas à l’écart de la mondialisation et soit au cœur de l’agenda international, aussi bien au G8 qu’à l’ONU ; nous avons mis en place les financements innovants du développement, avec la taxe sur les billets d’avion. Pour la France, l’Afrique est au cœur de l’équilibre mondial : nous ne lutterons pas efficacement contre l’immigration clandestine, les pandémies ou les atteintes à l’environnement sans développer ce continent. C’est dans cet esprit que sont organisés les sommets Afrique-France. Le prochain sera ouvert jeudi à Cannes. À tous ceux qui critiquent ces sommets, je réponds que, s’ils étaient inutiles, ils ne seraient pas imités par l’Union européenne, l’Amérique latine, la Chine ou le Japon. Et à tous ceux qui parlent encore de « Françafrique », je dis que notre politique de coopération est fondée sur le dialogue avec les Africains, sur la culture du résultat et de l’évaluation. C’est un partenariat moderne et efficace que nous avons désormais avec l’Afrique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

santé mentale et délinquance

M. Serge Blisko - Le monde de la santé mentale est aujourd’hui en grève (Protestations sur les bancs du groupe UMP). N’en soyez pas étonnés : cela fait des mois que les professionnels de santé, les associations de malades et leurs familles s’opposent résolument aux dispositions relatives à la santé mentale du projet de loi sur la délinquance. Des millions de personnes – les malades, mais aussi leurs proches et leurs familles - sont concernées. Nous ne parlons pas seulement de psychiatrie, mais de libertés publiques qui sont une fois de plus mises à mal par votre obsession sécuritaire. (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Trois mots nous viennent aujourd’hui à l'esprit : incohérence, confusion et gâchis (Même mouvement). Incohérence d'abord. Les promesses et les volte-face se sont multipliées. Vous aviez d'abord fait machine arrière en décidant de légiférer par ordonnance, avant que le Conseil Constitutionnel ne censure cet article. Retour au point de départ : la santé mentale est conservée dans les mesures relatives à la prévention de la délinquance. Vous vous obstinez donc dans la voie de l'amalgame et de la confusion. Après les immigrés, les demandeurs d'asile, les jeunes de banlieue, les enfants de 3 ans, voici maintenant les malades mentaux assimilés à des délinquants ! C’est la République des suspects ! C’est un gâchis (Interruptions sur les bancs du groupe UMP ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Là où le monde psychiatrique et les associations attendaient une réforme globale de la loi de 1990, vous nous présentez une réforme bâclée et parcellaire. Le Gouvernement fait primer l’acharnement sécuritaire sur les objectifs de santé publique. Allez-vous, Monsieur le ministre de l’intérieur, écouter la voix des professionnels, des malades et des familles ? Allez-vous retirer le volet santé mentale du projet de loi sur la délinquance ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Président - La parole est à M. Bas (Huées sur les bancs du groupe socialiste).

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille - Je me dis parfois que nos compatriotes doivent se lasser de voir instrumentaliser les sujets de société les plus graves à des fins de polémique politicienne ! (Même mouvement) Le Gouvernement n’a pas attendu la question de M. Blisko pour se préoccuper de la santé mentale ! (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Président – Nous ne sommes pas dans une arène !

M. le Ministre délégué - C’est lui qui a créé le plan de santé mentale – et non la gauche ! (Même mouvement) C’est lui qui a créé les groupes d’entraide mutuelle ; c’est lui aussi qui, pour la première fois, a reconnu le handicap psychique dans la loi du 11 février 2005 sur les personnes handicapées ! (Huées sur les bancs du groupe socialiste) Il n’a pas davantage attendu pour mettre l’accent sur les préoccupations d’humanité pour les malades mentaux comme pour les personnes qui les entourent, qui sont parfois les premières victimes des actes de violence qui sont commis. (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste)

Nous avons la volonté, avec la communauté psychiatrique tout entière, de réformer les règles de l’hospitalisation d’office, qui remontent à une loi de 1838 inspirée par des motifs de police. (Huées ininterrompues sur les bancs du groupe socialiste) Nous voulons ajouter à cet impératif de sécurité des préoccupations de soins et d’humanité et des garanties supplémentaires pour tous nos compatriotes atteints d’affections mentales. Ce que nous faisons est juste ; nous continuerons donc ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

emploi des personnes handicapées dans la fonction publique

M. Gérard Cherpion – En février 2005, notre Assemblée votait en faveur des personnes handicapées une des lois les plus importantes de cette législature. Conformément au souhait du Président de la République, elle ouvrait la voie à des avancées dans plusieurs domaines : la scolarisation des enfants handicapés par l’éducation nationale, l’accessibilité des bâtiments publics et des transports collectifs, avec la fixation d’un délai contraignant pour la mise aux normes des bâtiments anciens, l’insertion des personnes handicapées dans le monde du travail. Dans ce dernier domaine, les employeurs publics étaient invités à se montrer exemplaires ; un fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique était institué pour encourager administrations, collectivités territoriales et hôpitaux publics à accueillir plus largement des salariés handicapés.

Ces mesures représentent un chantier considérable, qui exige une mobilisation de tous les services d’État. Pouvez-vous, Monsieur le ministre, nous dresser un bilan d’étape ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - La parole est à M. Bas. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille - La loi sur l’égalité des droits et chances, la citoyenneté et la participation des personnes handicapées, qui a été voulue par le Président de la République et qui restera sûrement comme l’une des grandes lois de la République, a été suivie de nombreuses autres initiatives.

En 2002, quand nous avons organisé la première rentrée scolaire de la législature, il n’y avait que 89 000 enfants handicapés inscrits à l’école. Grâce à M. de Robien et au travail qui a été fait, il y en a eu 160 000 à la dernière rentrée scolaire. Nous avons recruté 4 000 auxiliaires de vie scolaire, nous en recruterons 2 000 de plus pour la prochaine rentrée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Citons aussi les maisons départementales des personnes handicapées, qui offrent à celles-ci un endroit unique pour connaître leurs droits et les faire valoir ; le plan Emploi, que nous avons arrêté, avec Gérard Larcher, le 15 novembre dernier ; l’accessibilité des bâtiments ; la prestation de compensation du handicap. Citons encore toutes les initiatives prises pour faciliter la vie quotidienne. Nous allons ainsi créer une carte infalsifiable de stationnement et nous avons pris un décret pour que nos concitoyens handicapés soient mieux accueillis dans les bureaux de vote. Un isoloir pourra accueillir ceux qui sont en fauteuil roulant et un assesseur pourra lire les bulletins aux aveugles.

Voilà des mesures pratiques qui font réellement avancer la cause des handicapés dans notre pays, afin que demain la différence des uns ne bute plus sur l’indifférence des autres ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

emploi

M. Bernard Perrut - L’emploi constitue la première des préoccupations de nos concitoyens et le Gouvernement en a fait sa priorité. Ce n’est pas un hasard si le chômage diminue fortement, passant sous la barre des 9 %, ce n’est pas un hasard si des emplois sont créés et si les entreprises retrouvent confiance. Un changement de méthode est à l’origine de cette évolution : privilégier l’emploi durable plutôt que l’assistanat et engager les réformes dont le marché du travail a besoin.

Quel bilan tirez-vous aujourd’hui, monsieur le ministre, de cette action constante et résolue ? Je pense aux réformes de structure telles que le rapprochement entre l’ANPE et l’UNEDIC ou la création des maisons de l’emploi ; je pense aussi aux mesures prises pour favoriser l’embauche dans les PME, aux 745 000 CNE qui ont été signés et aux 230 000 entreprises qui se créent par an. Vous avez développé les emplois dans les secteurs porteurs comme celui des services à la personne, vous avez baissé les charges sur les bas salaires et vous avez modernisé les contrats aidés pour favoriser le retour à l’emploi durable des personnes les plus éloignées de l’emploi.

L’un des principaux enjeux du débat démocratique qui s’ouvre sera l’emploi. Mais compte tenu des résultats obtenus, les Français ont le choix entre le retour en arrière et la poursuite des réformes qui réussissent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes Oui, cette majorité et les gouvernements qu’elle a soutenus peuvent être fiers du résultat : 150 000 demandeurs d’emploi de moins aujourd’hui qu’en 2002. Voilà la réalité des chiffres. Nous avons notamment enregistré, cette année, une baisse de 13 % du nombre de chômeurs de longue durée.

M. Patrick Roy – Et les érémistes ?

M. le Ministre délégué - Cela est le fruit d’un certain nombre de textes tels que le plan de cohésion sociale et le plan de services à la personne. C’est le fruit de la bataille pour l’emploi ouverte par le Premier ministre il y a 18 mois.

Nous avons modernisé le service public pour l’emploi, afin de mieux accompagner les hommes et les femmes en transition professionnelle. Ils le seront notamment grâce aux conventions de reclassement personnalisé et au droit individuel à la formation – droit que nous sommes le premier des pays de l’Union européenne à mettre en place. On verra bientôt que les 800 000 CNE signés ont contribué à créer dans les petites et moyennes entreprises de vrais emplois, de même que les emplois de service à la personne sont de vrais emplois, avec de belles conventions collectives !

Avec les contrats aidés et les contrats d’avenir, nous donnons en même temps une nouvelle chance à ceux qui n’ont pas eu leur première chance. Citons aussi les 310 000 CIVIS et rappelons qu’il n’y a jamais eu autant de contrats d’apprentissage.

Mais il y a encore des jeunes et des moins jeunes qui « galèrent ». Et chaque année, chiffre terrible, 70 000 jeunes sortent du collège sans qualification. Nous devrions tous défiler dans les rues pour qu’il n’y ait pas, chaque année, ces 70 000 jeunes qui risquent de ne connaître que la galère comme avenir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La séance, suspendue à 16 heures, est reprise à 16 heures 15.

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prévention de la délinquance -deuxième lecture-

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire - Voici à nouveau, devant vous, le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, adopté en deuxième lecture au Sénat, le 11 janvier. C’est à dessein que le Gouvernement n’a pas demandé l’urgence sur ce texte : pour la première fois, la prévention de la délinquance fait l’objet d’un débat devant le Parlement, et il était nécessaire que celui-ci puisse avoir lieu, avec pour seules exigences celles de la qualité et de la sincérité. Notre attente n’a pas été déçue : le texte a été conforté, complété et, quand c’était nécessaire, clarifié.

C’est un projet de loi ambitieux, pragmatique et, par-dessus tout, juste. Nous avons voulu, tout d’abord, être ambitieux. Il y a un peu plus d’un mois, le 11 janvier, je présentais les chiffres de la délinquance pour la période 2002-2006. Personne ne l’a contesté : la délinquance, qui avait augmenté de 17,8 % entre 1997 et 2002, a diminué de 9,4 % depuis, soit 1 153 000 victimes épargnées. Le Gouvernement aurait pu se satisfaire de ce bilan ; notre réaction a été inverse. Nous avons pensé que la lutte contre la délinquance devait prendre une nouvelle dimension, pour éviter la violence avant d’avoir à la combattre. C’est la raison pour laquelle j’ai défendu un projet de loi sur la prévention de la délinquance ; c’est en effet la première fois qu’un gouvernement propose une réforme d’ensemble de cette politique, qui n’est ni seulement une politique pénale ni seulement une politique sociale, et que l’on se donne les moyens de sortir de la dialectique caricaturale qui oppose prévention et répression.

Qui contestera…

M. Patrick Roy - Nous !

M. le Ministre d’État - Cela n’est pas très grave. La certitude de la sanction est la première étape de la prévention, et pour éviter que des jeunes tombent dans la délinquance, il vaut mieux apporter des réponses pénales rapides, diversifiées, adaptées à chaque âge, plutôt que d’entretenir un sentiment d’impunité en prononçant des sanctions dont le seul effet est de discréditer l’autorité de ceux qui les prononcent.

Avec mon collègue Pascal Clément, garde des Sceaux, nous avons voulu inscrire dans ce projet de loi une réforme de l’ordonnance de 1945 sur la justice des mineurs. Il s’est agi, tout d’abord, de diversifier les réponses, depuis l’obligation des devoirs scolaires pour un enfant de onze ans jusqu’à l’éloignement du milieu pour un temps limité en vue de soustraire les jeunes les plus fragiles à l’influence des caïds. Je me suis rendu la semaine dernière en Seine-Saint-Denis, où un réseau de trafic de drogue a été démantelé. On m’a indiqué qu’un jeune guetteur touchait jusqu’à cent euros par jour. Comment voulez-vous que le trafic de drogue ne gangrène pas nos jeunes, quand il offre des rétributions qu’ils ne pourraient pas gagner avec un travail honnête ? Lorsque la vieille dame chez qui ils stockaient la drogue a voulu se révolter, les trafiquants lui ont ébouillanté le bras. C’est dire que le combat contre les trafiquants doit être sans pitié, car ce sont des gens qui pervertissent une partie de notre jeunesse (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). L’éloignement du quartier est un élément essentiel pour préserver ces jeunes.

Nous avons voulu également apporter une réponse plus ferme, en créant l’avertissement judiciaire et l’obligation de réparation. Enfin, nous avons souhaité une réponse plus rapide, car la rapidité est parfois tout aussi importante que le contenu ; nous ne voulons plus qu’un mineur ait dans sa poche une convocation au tribunal dans six mois, car il est alors amené à penser qu’il peut agir en toute impunité.

Avec mon collègue Xavier Bertrand, ministre de la santé, nous avons également fait un choix audacieux en matière de lutte contre la toxicomanie : celui d’être moins durs en théorie pour être plus efficaces en pratique. Il ne sert à rien de sanctionner d’un an d’emprisonnement la consommation de cannabis, car aucun tribunal ne prononcera une telle peine : elle est donc trop lourde et inapplicable. En même temps, nous avons levé un interdit social, car se droguer n’est pas un acte banal, en dépit de tous les mondains qui ont pu défendre l’idée qu’il existait des drogues douces, avec le résultat que la France est aujourd’hui championne d’Europe pour la consommation de drogue chez les plus jeunes (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Jacques Godfrain - Très bien.

M. le Ministre d’État - Ce texte est ambitieux, enfin, sur deux questions qui étaient incontournables, à commencer par l’excuse de minorité. Des actes de plus en plus graves sont commis par des personnes de plus en plus jeunes. Au prétexte de leur minorité, on s’est convaincu qu’il fallait attendre qu’elles soient majeures pour agir ; moyennant quoi, il est alors trop tard. Avec ce texte, l’excuse de minorité pourra être plus facilement écartée par le magistrat, s’agissant de jeunes de plus de seize ans. Car enfin, pour la victime, quelle différence cela fait-il que son bourreau soit majeur ou mineur ?

La seconde question est celle de l’écart entre les peines prévues et celles prononcées. Nos concitoyens ne comprennent plus pourquoi certains délinquants peuvent commettre des infractions à répétition sans que la peine prévue par la loi soit jamais appliquée. Désormais, en cas de récidive, la juridiction devra motiver le choix de la peine qu’elle prononce. J’ai reçu récemment, avec ses proches, la jeune institutrice qui a été brutalisée sauvagement à Châlons-en-Champagne. Ils m’ont raconté ce qu’elle avait dû subir, ainsi que l’attitude de ses agresseurs à l’audience, qui reconnaissaient de sang-froid l’avoir frappée à la tête, s’être acharnés sur elle alors qu’elle était à terre, l’avoir piétinée, et qui ne se sont vu infliger qu’une peine d’un mois de prison ferme ! Je remercie le parquet d’avoir fait appel de cette décision, au nom de la cohésion sociale et du respect de la victime, car à un moment donné, la société se révolte face à un tel décalage entre des faits d’une gravité exceptionnelle, et les réponses qui leur sont apportées. Une telle clémence était indue (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Imaginez ce qui doit se passer dans la tête des enfants témoins de telles violences, dans l’école, sur une fonctionnaire de l’État ! S’en prendre à ceux qui représentent l’autorité de l’État, que ce soit dans des missions d’ordre public ou n’importe quelle autre fonction, comme celle d’assistante sociale, est un facteur aggravant. Le dire me semble plus pertinent que de faire de longs discours sur la qualité des fonctionnaires de France (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). D’ailleurs, les fonctionnaires ne veulent plus de discours, mais des faits.

Pour répondre aux enjeux de la prévention, nous avons souhaité un texte pragmatique, qui ne se contente pas d’être une définition sans portée de la prévention de la délinquance. Au contraire, j’ai voulu, à travers le plan « vingt-cinq quartiers » créé il y a quatre ans, aborder toutes les questions, et d’abord celle de la place du maire : qui, mieux que le maire, peut être le pivot de la prévention de la délinquance ? L'Assemblée nationale et le Sénat ont compris ce choix. Les débats, grâce à l’association des maires de France, ont conforté et clarifié leurs responsabilités, étendu leur capacité d’appréciation quant à l’application de la loi. Ils ont fait litière de la crainte selon laquelle ils pourraient être responsables de l’application d’une sanction.

Le travail parlementaire a également permis des avancées réelles s’agissant de la lutte contre le stationnement illicite des gens du voyage, des violences routières, du contrôle des chiens dangereux, du développement des jeux d’argent. Parce que nous devons nous adapter toujours plus rapidement aux nouveaux seuils que franchissent la barbarie et la violence, nous avons été particulièrement vigilants s’agissant des violences dont les forces de l’ordre et certains fonctionnaires sont victimes : pompiers, agents des transports publics, administration pénitentiaire, policiers, gendarmes sont désormais mieux protégés. Ceux qui s’en prendront à eux se retrouveront devant la cour d’assises. Nous disposons également d’un cadre répressif efficace contre cette pratique odieuse qu’est le happy slapping.

Ce texte est juste. À l’automne dernier, à Marseille, des individus ont mis le feu à un bus rempli de passagers. Quelles voix se sont-elles alors élevées pour demander que l’on fasse preuve de clémence à leur endroit ? Aucune. À trop chercher à comprendre, on finit d’ailleurs par tolérer l’intolérable. Il n’y a aucune explication au viol ou à la barbarie : ni le chômage, ni la misère, ni les discriminations, ni l’ennui, ni les barres de HLM ne justifient le fait de brûler vive une jeune fille ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Je me rappelle de longs colloques sur les raisons de l’antisémitisme ou du racisme : y a-t-il une raison pour détester celui qui a les cheveux plus foncés ou qui n’a pas la même religion ? Non. Quel rapport entre Jonathan, frappé à la patinoire de Boulogne, et Ariel Sharon ? Un raciste ou un antisémite doivent le savoir : ils risquent une peine lourde. C’est cela, la véritable prévention en la matière ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

S’agissant du « secret partagé », que n'a-t-on entendu ! Le maire serait chargé du contrôle social, il n’y aurait plus aucune confiance entre les familles et les intervenants sociaux ! Qu'on lise le projet et l'on verra qu'il s'agit seulement d'assurer l'échange d'informations et la coordination entre les nombreux travailleurs sociaux qui interviennent auprès d'une même famille !

S’agissant de la délinquance des mineurs, à entendre certains, nous proposerions une société de la défiance, de la surveillance et de l'emprisonnement. Qu'on lise le projet et l'on verra qu'il ne contient à l'égard des mineurs aucune peine nouvelle privative de liberté ! Les peines que crée le texte sont toutes des sanctions éducatives et protectrices.

S’agissant enfin des hospitalisations d'office, jamais je n’ai assimilé maladie et délinquance (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Comme M. le garde des Sceaux, je pense d’ailleurs qu’il faudra créer des « prisons hôpital » pour les détenus malades psychiatriques, mais il n'en reste pas moins que des drames se sont produits parce que des personnes en situation de souffrance psychologique n'ont pas été convenablement prises en charge ou n'ont pas été suffisamment suivies pendant leurs sorties. J'ai donc souhaité que ce texte comporte une réforme de l'hospitalisation d'office apportant des garanties à la société et aux patients. Ces dispositions permettent ainsi aux maires et aux préfets de prévenir des situations de danger. Elles reconnaissent le rôle du maire et encadrent les conditions de son intervention : aucune hospitalisation d'office ne peut être prononcée sans l'intervention d'un médecin. Ces dispositions renforcent également les garanties des malades et des familles en exigeant une période d'observation pouvant aller jusqu'à 72 heures avant la confirmation de l'hospitalisation d'office. Oui, je respecte le droit des malades, mais je souhaite vous rendre attentifs au droit des victimes !

M. Jean-Marie Le Guen - Nous y voilà ! Vous établissez un parallèle entre délinquants et malades ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Ministre d’État – Comme toujours, M. Le Guen parle avant de réfléchir. La victime n’est pas simplement le malade : c’est aussi la victime innocente qui croise la route d’un malade ! La société doit lui rendre des comptes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Marie Le Guen - C’est l’autre qui est coupable !

M. le Ministre d’État – J’ai été frappé en allant rendre visite, dans la Nièvre, à la famille de ce petit enfant de quatre ans et demi que l’on a découvert noyé et violé. Quand la famille m’a demandé pourquoi nous avions laissé un monstre s’installer près de leur enfant, j’ai considéré que les victimes avaient elles aussi droit à la parole ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Le malade a des droits et je les garantirai mais la victime du malade a également des droits. Voilà le débat qui oppose les bonnes consciences, qui ne font rien, et ceux qui se montrent responsables !

M. Denis Jacquat – Il faut interner M. Le Guen !

M. le Ministre d’État – Ils n’ont rien appris, rien retenu, rien compris ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Marie Le Guen - Vous êtes toujours aussi sûr de vous !

M. le Ministre d’État - Jamais nous n'avons nié, par ailleurs, la nécessité d'une réforme d'ensemble de la loi de 1990 sur les hospitalisations sous contrainte. C'est pour cette raison que Xavier Bertrand a engagé une concertation et a pu réaliser un consensus autour de cette réforme. Grâce à l'action du président de la commission des affaires sociales, M. Dubernard, le Parlement a autorisé le Gouvernement à légiférer par ordonnance. Cette procédure devait permettre d'inclure dans un même texte les dispositions concernant les hospitalisations d'office et les autres éléments de la réforme en distinguant le texte de sanction et le texte de santé. Mais c’était sans compter sur l’opposition !

M. Jean-Marie Le Guen – Sans le Conseil constitutionnel !

M. le Ministre d’État - C'est à sa demande et pour un motif de procédure que le Conseil constitutionnel a fermé la voie que nous avions ouverte !

M. Jean-Marie Le Guen - Il vous a censuré une fois de plus !

M. le Ministre d’État - La réforme de la loi de 1990, attendue par les professionnels et les familles, s'en trouve donc différée et je le regrette.

M. Jean-Marie Le Guen - Regardez comment il traite le Conseil constitutionnel !

M. le Ministre d’État – L’opposition s’est comportée d’une manière politicienne !

M. Jean-Marie Le Guen - Reculez donc, c’est ce que vous avez de mieux à faire !

M. le Ministre d’État - Nous voici placés devant un dilemme : d'un côté nous avons des dispositions nécessaires que le Sénat et l'Assemblée ont très largement approuvées et qui pourraient donc entrer en vigueur très rapidement ; de l’autre, le report de la réforme d'ensemble a fait renaître les craintes des professionnels et des familles à l'égard d'une réforme qui serait limitée aux hospitalisations d'office (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). La stratégie des parlementaires de l’opposition est cohérente : ils sont immobiles avant, pendant, après. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Marie Le Guen - C’est une rhétorique d’agité ! Attention à l’hospitalisation d’office ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Monsieur Le Guen, il y a des limites à ne pas dépasser !

M. le Ministre d’État – Ne lui attachons pas plus d’importance qu’il n’en mérite.

Avec Xavier Bertrand, nous avons donc été attentifs à ces craintes et nous avons considéré que le consensus obtenu sur le projet de réforme de la loi de 1990 tient non seulement à son contenu mais aussi à son caractère global. J’ai hésité et je me suis demandé si nous n’avions pas intérêt à la voter, mais nous sommes à deux mois et demi de l’élection présidentielle et à quelques jours de la fin de la session parlementaire. Je propose donc de retirer du projet ces dispositions pour préserver le consensus des professionnels mais je m’engage, si le peuple français me confie d’importantes responsabilités, à déposer ce texte au début de la prochaine session. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Marie Le Guen - Il a reculé !

M. le Ministre d’État - Ce projet est audacieux et pragmatique, comme le confirme d’ailleurs la réaction du groupe socialiste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Bur remplace M. Jean-Louis Debré au fauteuil présidentiel.
PRÉSIDENCE de M. Yves BUR
vice-président

M. le Président – La parole est à M. Houillon.

M. Jean-Marie Le Guen - Il va nous expliquer pourquoi la majorité et le Gouvernement n’ont pas reculé plus tôt !

M. Philippe Houillon, président et rapporteur de la commission des lois - Le Sénat a adopté ce texte, en deuxième lecture, le 11 janvier. À la suite de ses délibérations, le projet comprend désormais 94 articles, dont 53 ont été adoptés dans les mêmes termes par les deux assemblées – deux articles ayant fait l'objet d'une suppression conforme. Restent donc 41 articles en discussion.

L'Assemblée nationale et le Sénat ont manifesté un très large accord sur les grandes orientations du projet, je pense notamment aux dispositions relatives à la toxicomanie et à la délinquance des mineurs, y compris à la disposition votée par l'Assemblée nationale sur les dérogations à l'atténuation de responsabilité pénale pour les mineurs.

Le Sénat a aussi adopté la disposition, introduite à mon initiative, selon laquelle en matière correctionnelle, lorsque l'infraction est commise en état de récidive légale ou de réitération, le juge doit spécialement motiver le choix de la peine ainsi que sa durée et son mode d'exécution. Il a également voté conformes les articles sur le permis à points et sur le stationnement illégal des gens du voyage. Par ailleurs, de nombreuses dispositions ne restent en navette que pour des raisons rédactionnelles, telles celles relatives à la pédophilie sur Internet ou aux agents privés de sécurité.

En ce qui concerne l'hospitalisation d'office, un large accord s'est exprimé sur la nécessité d'une réforme rapide, mais des objections ont été émises sur la présence de dispositions concernant la psychiatrie dans un texte relatif à la prévention de la délinquance. C’est pourquoi une concertation a été entamée avec les professionnels et les associations représentant les patients et les familles, afin de dessiner les contours d'une réforme d'ensemble des soins sous contrainte, qui aurait été prise par ordonnance. L'annulation par le Conseil constitutionnel, pour des raisons de procédure, de l'habilitation donnée au Gouvernement d'utiliser la voie des ordonnances modifie la situation sans remettre en question l'architecture de la réforme. Grâce aux travaux parlementaires et aux premières étapes de la concertation, il existe cependant une base qui permettra au prochain gouvernement de proposer dans les meilleurs délais un texte consensuel réformant la loi de 1990. Le Gouvernement est donc fondé à demander la suppression des articles 18 à 24.

Le Sénat a par ailleurs apporté certaines améliorations au texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture. Il a ainsi regroupé l'ensemble des dispositions relatives à l'information du maire sur les procédures judiciaires introduites par l'Assemblée nationale aux articles premier et 4 bis. Il a aussi accepté la disposition relative à l'information sur les suites judiciaires données aux infractions commises sur le territoire de la commune et a précisé cette notion. Il a en revanche limité le champ d’information des autorités saisissantes au titre de l'article 40 du code de procédure pénale sur les condamnations prononcées, réservant l’information au maire et supprimant son caractère systématique.

S'agissant des dispositions pénales, de nombreux dispositifs ont été améliorés au Sénat, sans que leur philosophie ne soit remise en cause. Il a par exemple complété utilement l'article 26 bis A, qui crée une infraction spécifique de violences volontaires avec arme sur certaines professions. Il a aussi remanié l'article 26 bis B instituant un délit de détention ou de transport sans motif légitime de substances incendiaires ou explosives destinées à commettre des destructions, en précisant l'élément intentionnel, en encadrant plus précisément l’infraction dans des circonstances de lieu et de temps et en garantissant le respect du principe de proportionnalité. Le Sénat a par ailleurs précisé le régime de la sanction-réparation en y intégrant la sanction-restauration que l'Assemblée avait introduite en première lecture s'agissant des dommages causés à l'environnement.

Certaines dispositions font néanmoins encore l'objet de divergences. À l'article premier, le Sénat a certes accepté le caractère facultatif des contrats intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance dans les communautés urbaines et les communautés d'agglomération, mais il a donné à la commune la plus peuplée un véritable droit de veto, alors que l'Assemblée avait confié le choix de la création à l’EPCI. Votre commission des lois vous proposera d’en revenir à cette rédaction. Quant à l’accompagnement parental proposé par le maire, en première lecture le Sénat avait souhaité que l’avis du président du conseil général soit recueilli, puis l'Assemblée avait rétabli le texte initial du projet de loi, qui prévoyait une simple information. En deuxième lecture, le Sénat a maintenu qu’une simple information du président du conseil général était insuffisante, tout en acceptant une procédure plus souple pour solliciter son avis. Compte tenu de cet effort, nous pourrions retenir la solution à laquelle il est parvenu.

S'agissant du rappel à l'ordre par le maire, le Sénat a refusé l'obligation d'une convocation préalable de la personne concernée, alors que l'Assemblée considérait qu'un certain formalisme était nécessaire pour donner à cette procédure un minimum de solennité. Sur ce point, la commission a adopté un amendement de retour au texte de l'Assemblée. Un désaccord est par ailleurs intervenu sur la question des troubles de voisinage, dû à une position pour le moins évolutive du Sénat. En première lecture, il avait en effet adopté une petite révolution de notre droit, en permettant la résiliation « oblique d'un bail par un tiers ». L’Assemblée avait plus modestement proposé d'autoriser l'engagement de la responsabilité des propriétaires défaillants, mais le Sénat a soudain trouvé cette solution de compromis trop audacieuse ! La commission des lois vous proposera une version adoucie de l'amendement adopté en première lecture, qui ne modifie pas l'article 1384 sacré du code civil. Le Sénat a aussi adopté deux amendements qui modifient assez substantiellement le dispositif relatif aux chiens dangereux, en permettant notamment de placer dans un refuge les chiens de première catégorie n'ayant pas fait l'objet d'une déclaration. La commission a adopté deux amendements de retour au texte de l'Assemblée.

Enfin, le Sénat a adopté en deuxième lecture un certain nombre de dispositions entièrement nouvelles, qui doivent faire l'objet d'un examen particulier compte tenu de la décision du Conseil constitutionnel du 19 janvier 2006 qui a constitutionnalisé la règle parlementaire traditionnelle de « l'entonnoir ». La commission a donc adopté un amendement tendant à supprimer l'article 12 sexies, relatif aux interdiction de stades, qui a incontestablement été adopté selon une procédure irrégulière. En revanche, il peut sembler possible d'accepter l'ajout par le Sénat de l'incrimination du happy slapping, c'est à dire le fait de filmer ou de diffuser des images relatives à certaines infractions. Cette disposition n'est en effet pas entièrement nouvelle, dans la mesure où deux de nos collègues avaient déposé en première lecture un amendement ayant le même objet, même s’il n’a pas été défendu en séance. La commission des lois a par ailleurs adopté un amendement précisant le champ d'application de cette incrimination nouvelle, en opérant une distinction entre celui qui filme et celui qui diffuse les images.

La prévention de la délinquance est une politique globale, qui se fonde à la fois sur des mécanismes de police administrative pour prévenir les troubles à l'ordre public, sur la rénovation des outils répressifs et – c'est l'aspect novateur du projet de loi – sur la mobilisation de l'ensemble des acteurs – travailleurs sociaux, bailleurs, entreprises de transport en commun, aménageurs urbains ou éducation nationale outre les acteurs traditionnels que sont la police, la gendarmerie et la justice. La complexité de la délinquance actuelle explique le nombre des thèmes abordés dans ce projet de loi, sur lesquels les deux assemblées s’accordent largement. Cette deuxième lecture devrait permettre de nous rapprocher plus encore de l'adoption définitive de ce projet, puisque ne demeurent que très peu de sujets de divergence. La commission a adopté une quinzaine d'amendements. Je vous invite à les adopter, ainsi que l'ensemble du projet de loi (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

EXCEPTION D’irrecevabilité

M. le Président - J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une exception d’irrecevabilité déposée en application de l’article 91, alinéa 4, du Règlement.

M. Patrick Roy – Et le ministre s’en va !

M. Jean-Marie Le Guen - Quel sens de l’écoute !

Plusieurs députés UMP - Où est donc Ségolène ?

Plusieurs députés socialistes – Ce n’est pas son texte !

M. Jean-Marie Le Guen - Ça n’a pas l’air d’être celui des députés de l’UMP non plus, ils s’en vont tous !

M. le Président – Laissez donc parler votre collègue.

M. Jean-Marie Le Guen - Il attend que tout le monde soit parti !

M. Jean-Pierre Blazy – Ce projet que nous examinons en deuxième lecture est toujours aussi controversé. Un mois après la présentation des chiffres de la sécurité pour 2006, force est de constater que le bilan du ministre candidat, qui vient de nous quitter, est bien plus mauvais qu’il ne veut le dire. La délinquance générale reste très élevée, et se maintient depuis cinq ans à un niveau plus que préoccupant. Plus grave, les violences aux personnes ont augmenté de 5,6 %. À l’avant-veille de son départ de la place Beauvau, le ministre a échoué à faire reculer la violence et l’autosatisfaction qu’il affiche tranche avec ce que vivent réellement les Français, qui ont, en 2007, toujours autant besoin de sécurité.

Vous voulez faire croire que la délinquance baisse et que le taux d'élucidation n'a jamais été aussi bon, mais il est artificiellement amélioré par les chiffres relatifs à l’usage des stupéfiants et à l'entrée et au séjour des étrangers – domaine où il y a plus de faits élucidés que de faits constatés ! Voilà le prix que nous payons pour l’abandon de toute politique de prévention depuis bientôt cinq ans. Il ne suffit pas de multiplier les lois. Présenté à quelques mois des élections, ce texte, qui n'a pas vocation à être appliqué, ne relève d’ailleurs évidemment que d'une logique électorale. Depuis cinq ans, M. Sarkozy et M. Perben sont passés, mais la violence s'est durablement enracinée. La police de proximité, présente dans les quartiers, qui alliait prévention et sanction, a été démantelée au profit d'une police d'ordre public destinée à faire du chiffre. Nous en constatons aujourd'hui les conséquences. C’est pourquoi nous proposons la création d’une nouvelle police de quartier pour mieux assurer la sécurité quotidienne. Il est aussi urgent de procéder à une répartition plus juste des effectifs et de donner la priorité au renforcement quantitatif et qualitatif des zones sensibles.

M. Patrick Roy – Bref, d’en revenir au bon sens !

M. Jean-Pierre Blazy - Les dispositions concernant la réforme de l'ordonnance de 1945 sur l'enfance délinquante, adoptées conformes au Sénat, nous inquiètent toujours autant. Du reste, le ministre de l’intérieur a refait le coup, dans l’émission « J'ai une question à vous poser », de la promesse d'une nouvelle réforme. Quelle démagogie déplorable, sachant que nous avons déjà connu quatre réformes de cette ordonnance en cinq ans, toutes couronnées d’échec !

Nous avons une autre conception des choses, bien éloignée de vos effets d'annonce et qui est contenue dans le pacte présidentiel de Ségolène Royal.

Pour prévenir efficacement les violences scolaires, il faut – à l’opposé de votre politique de suppression des postes – renforcer la présence des adultes dans les établissements, qu’il s’agisse de surveillants, d’infirmiers scolaires ou d’assistants sociaux, car elle est essentielle. Nous proposons une politique de prévention précoce de la violence, passant par un encadrement éducatif renforcé, par l’existence de tuteurs référents, par l’installation de brigades des mineurs dans les commissariats des grandes zones urbaines.

Les sanctions, à l’encontre des mineurs violents, doivent être fermes, rapides et proportionnées. Nous pouvons nous retrouver sur ce point. La justice des mineurs est aujourd’hui sinistrée : un plan d’urgence sera mis en place, et prévoira le recrutement de juges des enfants, d’éducateurs, de greffiers ; le budget de la justice sera doublé ; les peines de prison, hormis les cas d’atteintes graves aux personnes, seront supprimées et les centres éducatifs renforcés – si besoin avec encadrement militaire – seront développés.

Je voudrais revenir sur les dispositions du projet de loi relatives aux hospitalisations d’office. Le ministre de l’intérieur,…

M. Patrick Roy - Il n’est plus là, il est en campagne (Protestations sur les bancs du groupe UMP) !

M. Jean-Pierre Blazy - …lors de l’émission « J’ai une question à vous poser », a continué d’entretenir l’amalgame entre maladie mentale et délinquance, en annonçant des prisons-hôpital pour les délinquants souffrant de troubles mentaux.

L'inclusion des dispositions relatives à la santé mentale dans ce texte nous était apparue irrecevable en première lecture. Interpellé finalement par les protestations des professionnels, le ministre aurait pu trouver une porte de sortie en légiférant par ordonnances, mais le Conseil constitutionnel a censuré l’habilitation. M. Sarkozy a d’ailleurs cru bon d’en reporter la responsabilité sur le groupe socialiste, mais c’est bien le Conseil constitutionnel qui l’a censuré ! Enfin, alors que la commission des lois soulignait la nécessité et l’urgence des dispositions contenues dans les articles 18 à 24, nous avons assisté en direct à un recul en règle du Gouvernement…

M. Jean-Marie Le Guen – Toute honte bue !

M. Jean-Pierre Blazy - …sans que le ministre de la santé, d’ailleurs, n’ait souhaité s’exprimer sur le sujet. Pour notre part, nous persistons à refuser l’amalgame entre délinquance et maladie mentale et nous avons présenté en commission – sans succès –des amendements de suppression.

Les maires demandent à jouer un rôle de premier plan dans la prévention de la délinquance, comme pivots et coordonnateurs des politiques locales. Pour autant, l’État ne peut se défausser sur eux, au mépris des compétences dévolues par les lois de décentralisation. Comment les maires pourront-ils réussir là où l'État est défaillant alors qu'ils ne bénéficieront d'aucun moyen supplémentaire ? Cela constituera un nouveau transfert de charges non financées, alors que l'État ne tient déjà pas ses promesses budgétaires concernant les effectifs de policiers, de gendarmes, de magistrats, d'éducateurs de la PJJ, de médecins scolaires ou d’enseignants. Et ce n'est pas le nouveau fonds de prévention de la délinquance qui nous rassurera, tant son financement semble aléatoire. Les maires ne veulent pas être des shérifs, pas plus que des délégués du procureur ou du préfet. Ils entendent jouer leur rôle, dans le strict respect de la séparation des pouvoirs et des compétences, ce qui exclut toute incursion dans la chaîne pénale. Or, ce texte porte atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, en conférant aux maires des pouvoirs quasi judiciaires, comme le rappel à l'ordre prévu à l'article 8. Les nouveaux dispositifs concourent à la confusion la plus totale : on ne sait plus qui fait quoi, du procureur, du maire ou du préfet .Si vous avez dû reculer en première lecture sur certains points, consentant par exemple à rendre facultatif le conseil des droits et des devoirs des familles, l'essentiel demeure et nous inquiète toujours autant, à l’image du secret partagé.

Ce texte fourre-tout aborde dans le désordre le rôle des maires, la toxicomanie, la justice des mineurs, l'éducation ou encore la procédure pénale. Une fois de plus, vous vous méprenez. Il ne suffit pas d'être dur avec le crime ; il faut l’être aussi avec les causes du crime : les inégalités, la pauvreté et la précarité.

Adoptées au Sénat, les dispositions tendant à prévenir la délinquance des mineurs sont contraires à nos principes constitutionnels – la spécificité de la justice des mineurs est un principe fondamental consacré par le Conseil constitutionnel en 1993 – et à nos engagements internationaux – notamment le pacte international relatif aux droits civils et politiques et la convention internationale des droits de l'enfant.

La nouvelle procédure de présentation immédiate du mineur devant le juge des enfants ne garantit pas le respect des droits de la défense et la spécificité de la justice des mineurs est remise en cause par l'extension aux mineurs de la composition pénale. Nous voulons une justice des mineurs rapide, mais pas expéditive.

La complémentarité entre l'assistance éducative et le pénal, qui constitue le fondement même de l'ordonnance de 1945, est remise en cause. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 29 août 2002, a reconnu le principe du primat de l'éducatif sur le répressif et de l'atténuation de la responsabilité pénale des mineurs en fonction de l'âge. En systématisant les sanctions et les mesures privatives de liberté à l’encontre des mineurs, vous méconnaissez ces principes.

S’agissant du principe de proportionnalité des délits et des peines, vous vous trouvez à la limite de l'erreur manifeste d'appréciation, en aggravant toutes les peines et les sanctions encourues.

En outre, ce texte recèle un nombre inquiétant d'atteintes aux libertés fondamentales : l'article 12 ter relatif aux gens du voyage est contraire à la Constitution, car il supprime l'intervention préalable de l'autorité judiciaire, garante du respect des libertés individuelles en vertu de l'article 66 de la Constitution, et constitue une atteinte flagrante au principe d'inviolabilité du domicile.

La multiplication des fichiers informatiques – mesure d’affichage qui a bien peu à voir avec une politique de prévention de la délinquance – est une autre source d'inconstitutionnalité, et non des moindres. Nous nourrissons en effet des inquiétudes sur la destination, le croisement et la diffusion de ces fichiers, que le Sénat n’a pas levées.

La CNIL, saisie du projet initial en juin 2006, avait noté que le maire « ne devrait pas être rendu systématiquement destinataire des informations que les professionnels de l'action sociale sont conduits à recueillir auprès des personnes et des familles en difficulté ». Elle avait également estimé, s’agissant du conseil pour les droits et devoirs des familles, que « dans la mesure où des informations individuelles sensibles, relevant de l'intimité de la vie privée des familles, seraient ainsi recueillies, traitées et conservées, il appartient au législateur, pour assurer le respect du principe de proportionnalité, de définir précisément les garanties qui devraient être apportées afin qu'un tel dispositif d'accompagnement soit mis en place dans le respect des droits des personnes et, en particulier, de leur droit au respect de leur vie privée ». Où sont ces garanties, Monsieur le ministre ?

Le maire recevra des informations jusqu'alors protégées par le secret professionnel sur les administrés qui bénéficient de l'aide d'un éducateur ou d'une assistante sociale. Il pourra être autorisé à constituer un fichier afin d’améliorer le suivi de l’assiduité scolaire, contenant des informations transmises par les organismes chargés du versement des prestations familiales, par l'inspecteur d'académie ou par le directeur de l’établissement. Cet article organise donc, sans encadrement, le croisement des fichiers.

Pour la commission nationale consultative des droits de l'homme, interrogée en 2002 sur le projet de loi relatif à la sécurité intérieure, « l'inflation des règles encadrant l'exercice des libertés publiques, et parfois même la vie privée des individus, suscite l'inquiétude de notre société démocratique ». Le présent projet de loi ne fait qu'accentuer cette tendance car les atteintes à la vie privée y sont trop nombreuses et la diffusion d'informations à caractère confidentiel est facilitée.

Ces questions me paraissent de nature à justifier l'irrecevabilité d'une partie au moins de ce texte. Ce projet de loi ne vise pas à prévenir la violence en agissant sur ses effets et sur ses causes mais à condamner, sans éduquer. Cela ne manquera pas d’aggraver l’insécurité et la violence. Vous avez refusé en première lecture les alternatives que nous proposions et vous maintenez des dispositions inconstitutionnelles. Nous nous opposerons donc à ce texte inutile et dangereux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Patrick Roy – L’éducation n’est pas le fort de ce gouvernement !

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire - Vous n’avez fait que répéter ce que vous aviez dit en première lecture…

M. Jean-Marie Le Guen – Ce n’est pas votre cas, puisque vous avez retiré six articles du projet de loi ! Félicitations !

M. le Ministre délégué – Vous nous faites une grande litanie sur la police de proximité, mais alors que vous lui aviez donné l’instruction d’abandonner les quartiers les plus en difficulté…

Mme Patricia Adam - Balayez devant votre porte !

M. le Ministre délégué – …vous voudriez maintenant la remettre à l’ordre du jour. Votre proposition est de faire remonter le nombre de victimes à 4 millions, quand nous sommes retombés à 3 millions…

M. Jean-Pierre Blazy - 3,7 millions, vous ne connaissez pas les chiffres !

M. le Ministre délégué – Les Français ne veulent pas revenir à vos pratiques, qui consistaient à laisser les quartiers livrés à eux-mêmes.

M. Lilian Zanchi – Les violences physiques remontent !

M. le Ministre délégué - L’électorat le plus populaire de France déclare faire confiance au ministre de l’intérieur. Lorsqu’on les interroge, les jeunes des quartiers, en grande majorité, se réjouissent de se sentir protégés, grâce aux politiques de sécurité, après avoir vécu pendant des années sous la menace de bandes et de réseaux mafieux.

Pour évoquer l’inconstitutionnalité supposée du projet, vous vous êtes référé à la justice des mineurs. Sur ce point, le projet n’introduit aucune mesure nouvelle privative de liberté. Mais pour lutter contre le sentiment d’impunité, une réponse rapide et adaptée s’impose.

À cet égard, il est curieux de constater à quelle vitesse vous avez changé d’avis sur l’encadrement militaire !

M. Jean-Pierre Blazy - Mais non !

M. le Ministre délégué – Imaginez un instant que nous ayons proposé pareille disposition au cours de la législature ! À coup sûr, vous nous auriez accusés de menées liberticides, attentatoires aux droits de l’homme. Mais il suffit que votre candidate à l’élection présidentielle, probablement emportée par son élan, se prononce en ce sens pour que vous lui emboîtiez le pas ! Plus fort encore, vous nous reprochez, parce que nous voulons une justice plus rapide, de souhaiter une justice expéditive, ce qui justifierait, selon vous, un recours devant le Conseil constitutionnel. Votre candidate ne s’embarrasse pas de tels scrupules quand elle fait, en Chine, l’éloge d’une justice plus efficace parce que plus expéditive… (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Patricia Adam - Sans doute préférez-vous la justice américaine ! Mais quel rapport avec le texte ?

M. le Ministre délégué - Pour toutes ces raisons, l’exception d’irrecevabilité doit être repoussée.

L'exception d’irrecevabilité, mise aux voix, n’est pas adoptée.

M. Gilles Artigues – Je le rappelle, le groupe UDF est très attaché à l'équilibre des politiques menées par les pouvoirs publics, en matière de prévention de la délinquance. Nous en avons assez du débat qui oppose, dans une réitération stérile des mêmes arguments, les partisans de la seule réprimande constamment répétée, et ceux pour lesquels la prison est l’unique réponse satisfaisante à la délinquance. Ce débat caricatural entre prévention et répression a paralysé la volonté politique, si bien qu’aucun gouvernement n'a jamais été à la hauteur des enjeux.

Une loi de prévention de la délinquance ne pourra être efficace si elle n’est pas assortie des moyens nécessaires à une politique globale. Il faut donc intensifier l'accompagnement socio-éducatif des jeunes délinquants et des familles en danger, l'action éducative individualisée à l’école, garantir le suivi effectif des mesures judiciaires et le soutien aux parents ou, tout simplement, la formation de ces parents à leurs responsabilités, sans oublier la prévention des addictions qui progressent, hélas, si fortement.

Je tiens à souligner le travail accompli par les associations qui œuvrent dans nos quartiers. Plusieurs fois, nous nous sommes élevés contre le désengagement de l'État en ce qui les concerne car les économies ainsi réalisées se traduisent par une facture sociale salée. Nous avons toujours en travers de la gorge l'annulation de crédits en octobre 2005, suivie, en novembre, du vote précipité d'une rallonge après la crise des banlieues. Ce n'est sûrement pas la bonne méthode. Mieux vaudrait conclure des contrats d'objectifs pluriannuels et, en tout cas, exprimer vite et autrement que par de beaux discours, notre reconnaissance et notre soutien à ces associations.

D’évidence, la solution aux problèmes auxquels nous sommes confrontés ne relève pas seulement de la loi mais aussi des moyens mis à la disposition des actions de prévention. La politique globale que nous appelons de nos vœux repose sur trois piliers, dont le premier est l'urbanisme. Comment concevoir une action de prévention efficace quand les difficultés sociales sont concentrées dans quelques villes et quelques quartiers fermés sur eux-mêmes, à l'urbanisme raté, et qui cumulent les problèmes et les handicaps ? Nous payons en fait les conséquences d'un modèle social fondé sur le « vivre entre soi », les riches avec les riches, les classes moyennes regroupées et les pauvres relégués dans quelques quartiers. Nous espérons que l’expression de « mixité sociale », si souvent employée, devienne réalité. Par ailleurs, nous attendons de l'État qu'il revienne là où il n’est plus, c'est-à-dire là où les choses vont mal.

Le deuxième pilier d'une politique globale, c'est l'éducation, qui ne se résume plus à l'école. Cela fragilise certes notre modèle éducatif puisque l'enseignant n'est plus le prescripteur unique. Dans ce contexte nouveau l'école doit être recentrée autour d'objectifs clairs : construire des citoyens, donner les moyens de l'échange avec les autres, notamment grâce au langage, et ouvrir les voies évolutives de l’insertion professionnelle.

Le troisième pilier est la justice, dont les missions et la manière dont elle s’exerce doivent faire l’objet d’une réflexion globale. Sur ce sujet, les promesses n'ont pas été tenues par les gouvernements successifs. Ainsi, cent places seulement ont été créées, pour toute la France, en internats pour les mineurs délinquants. Or, la détention des mineurs n'est pas une solution, nous le savons, car dans notre pays, la prison est un pourrissoir moral (Approbation sur les bancs du groupe socialiste). En réalité, la question de fond est celle de l'exécution des peines et non de leur sévérité. Tous les degrés de sanctions doivent être utilisés, pour punir certes mais surtout pour « transformer » le jeune délinquant, par des mesures de réparation systématiques, immédiates, qui mettent en contact le mineur et la victime. Il faut, en particulier, imposer de vrais travaux d'intérêt général, par exemple pour effacer les tags.

Le tandem « police et justice » ne peut suffire à lutter contre l'augmentation régulière de la délinquance ou du niveau de la violence. Mais, en attendant que les efforts nécessaires en matière d'urbanisation et d'éducation aient porté leurs fruits, nous avons besoin d'une police efficace et d'une justice réactive

J'en viens à l'analyse du texte proprement dit, dont nous reconnaissons les points positifs et spécialement l'affirmation, désormais claire, du rôle central du maire dans la conduite de la prévention de la délinquance. La navette parlementaire a en outre permis d'améliorer sensiblement leur information sur les actes de délinquance et sur les suites judiciaires qui leur sont données, ce qui est pure logique. Nous nous félicitons donc que le Sénat ait défini ce qu’il faut entendre par « suites judiciaires », précision qui était fortement attendue.

Nous apprécions également les progrès relatifs à l’accompagnement parental, nous approuvons le durcissement de la législation contre les chiens dangereux, les actions menées dans les centres commerciaux abandonnés ou celles qui visent à lutter contre la délinquance et la violence sur l’Internet. Nous considérons comme bonnes toutes les initiatives destinées à favoriser des mesures alternatives à l’emprisonnement, ainsi que les stages de responsabilité parentale.

Dans le même temps, nous dénonçons le caractère « fourre-tout » du texte, dont le volume a considérablement augmenté au cours de la navette parlementaire par l’adjonction de mesures disparates, ce qui n’en améliore pas la lisibilité.

Nous regrettons, par ailleurs, que les articles relatifs à l'hospitalisation d'office aient été maintenus… (Le ministre délégué fait un signe de dénégation)

M. Gérard Bapt - Non, non, c’en est fait, le candidat a corrigé le ministre…

M. Gilles Artigues - …en dépit de la forte opposition des professionnels et des associations de malades, qui ne souhaitent pas que ces changements interviennent dans un texte traitant de la prévention de la délinquance. La tentative de réforme, dans le cadre de l'ordonnance relative à l'organisation de certaines professions de santé, suivie de la censure du Conseil constitutionnel, a donné à ces praticiens la désagréable impression d'un manque de transparence et d'une grande précipitation. La question de l'hospitalisation d'office doit s'inscrire dans une réforme de fond des soins psychiatriques. Nous soutiendrons donc les amendements de suppression éventuels des articles qui traitent de ces questions.

En conclusion, et pour reprendre l’expression de notre collègue Jean-Christophe Lagarde, nous considérons ce texte comme une « boite à outils », dont nous reconnaissons l'utilité de certains instruments, mais nous sommes déçus qu'il ne porte pas un projet global. De plus, nous regrettons que les débats entre la droite et la gauche, au Sénat et à l'Assemblée, se soient résumés à un nouvel affrontement stérile entre prévention et répression, même si le ministre d'État a dit vouloir éviter cet écueil. Sur le terrain, les élus de tous bords sont, eux, d’accord pour rechercher, dans le consensus, un nécessaire équilibre. À n'en point douter, comme l'ont fait les Allemands, les Français imposeront à leurs dirigeants la nécessité de dépasser les clivages pour trouver, dans l'intérêt général, les solutions à la hauteur des enjeux ; la prévention de la délinquance est un de ces thèmes fédérateurs. En attendant, parce que le procédé consistant à faire croire, à trois mois d'échéances importantes, qu'une simple loi permettra de régler le problème, n'est pas acceptable, le groupe UDF, comme en première lecture, s'abstiendra lors du vote.

M. Patrick Braouezec - Tout au long des débats, ce projet dit de prévention de la délinquance a été constamment aggravé. Son esprit initial, celui du « tout répressif », sans réel contenu en matière de prévention, est toujours de rigueur, et l’on continue de stigmatiser les populations les plus en difficulté. L'accumulation de nouvelles incriminations pénales et l'aggravation de peines existantes traduisent la volonté du Gouvernement et de certains parlementaires de faire de ce projet l'instrument privilégié d'une politique sécuritaire déjà à l'œuvre depuis plusieurs années, et dont on connaît les résultats – mauvais, comme le montre l’augmentation des violences commises contre les personnes. Cette nouvelle poussée sécuritaire confirme que le Gouvernement et sa majorité ont peur des jeunes. Devons-nous accepter de vivre dans une société malade qui, au lieu de favoriser l'épanouissement des jeunes, les considère comme de simples objets de mesures de socialisation et de contrôle ? Je m’y refuse, tout comme je refuse la vision pessimiste des familles et des jeunes que vous voulez imposer. Mais force est de constater que le Gouvernement, par une série de sept lois votées dans la hâte, fait la guerre aux jeunes, aux familles, aux habitants des quartiers populaires et aux sans papiers. (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Il se réclame pourtant des valeurs de la démocratie. Mais où est la démocratie dans le modèle que vous nous proposez, fondé sur l'exclusion, la criminalisation, la discrimination ? Où est la démocratie lorsque des amendements visant à mieux prévenir et sanctionner les infractions économiques et financières sont repoussés sans le moindre débat ? Oui, ce gouvernement fait la guerre aux gens du peuple ! Ce texte étend les sanctions et le contrôle social, au prétexte que plus une sanction est lourde, plus elle est dissuasive, donc préventive. Je respecte la sanction. Encore faut-il qu’elle ait du sens et s'inscrive dans un processus de prévention et de réinsertion. Or, il est impossible de voir de la prévention dans ce texte, tant ses dispositions qui modifient le code pénal, le code de procédure pénale et le code de la santé publique sont répressives.

Dès treize ans, extension de la composition pénale et de la comparution immédiate et possibilité de placer un mineur sous contrôle judiciaire; dès dix ans, instauration de nouvelles sanctions éducatives et allongement de la durée maximale des mesures de composition pénale, portée de six mois à un an ; pour les mineurs de plus de treize ans, modulation de la durée du placement prévu à l'article 39; pour les récidivistes de plus de seize ans, possibilité de déroger au principe de l'atténuation de la responsabilité pénale – tout cela avec l'objectif avoué d'aligner le droit pénal des mineurs sur celui des majeurs.

Le Gouvernement reste sourd aux appels à la raison des professionnels, des associations, des parents, des médecins et des élus, mais aussi à ceux de nombreux maires, qui refusent le rôle qui leur est assigné. En leur conférant des pouvoirs quasi judiciaires, ce texte porte en effet atteinte au principe de séparation des pouvoirs. Le maire devient un acteur central du « contrôle » de la délinquance ; il va recevoir des informations, jusqu'ici protégées par le secret professionnel, concernant ses administrés qui bénéficient de l'aide d'un éducateur ou d'une assistante sociale. Il pourra constituer un fichier des élèves ayant fait l'objet d'un avertissement pour absentéisme. Il sera même informé par la police ou la gendarmerie et la justice des infractions à l'ordre public et de leurs suites judiciaires.

Pour renforcer son pouvoir répressif, ce texte assimile les maires à de véritables délégués du procureur, avec par exemple le rappel à l'ordre prévu à l'article 8. Le maire se trouve ainsi doté de prérogatives qui traduisent une défiance à l’encontre des travailleurs sociaux et de la justice. Deviendra-t-il pour autant le garant de la sécurité ? J'en doute, mais je crains que l'extension de ses pouvoirs ne débouche sur une dilution de la politique nationale et sur une remise en cause de l'égalité de traitement entre les citoyens. Ce n'est plus d'un maire qu’il s'agit, mais d'un shérif à la mode américaine.

M. Claude Goasguen - Mais non !

M. Patrick Braouezec - Ce texte porte aussi des atteintes aux libertés fondamentales, que j'avais dénoncées dès la première lecture. Les atteintes à la vie privée sont multiples. Des informations confidentielles pourront être échangées au sein des groupes de travail des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, sous réserve de ne pas être communiquées à des tiers. La commission des lois du Sénat propose même d'étendre cette faculté au conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance. En autorisant le partage d'informations jusqu'ici protégées, l’article 5 remet en cause le secret professionnel. Je regrette vivement que le Sénat ait supprimé la disposition imposant l'information des personnes concernées par ce partage d'informations. Cette disposition introduite en première lecture à l'Assemblée nationale était en effet un moindre mal. Lorsqu'une famille verra ses difficultés s’aggraver, les travailleurs sociaux devront désormais en informer le maire et le président du conseil général, ce qui pourra conduire à réunir le conseil pour les droits et devoirs des familles. Ajoutons à cela l'autorisation donnée aux travailleurs sociaux de communiquer au maire des informations confidentielles sur les usagers des services sociaux, les dispositions facilitant l'hospitalisation d'office en psychiatrie et la création d'un fichier des personnes ayant subi une telle hospitalisation, ou encore les dispositions renforçant la sévérité de la justice pénale des mineurs au mépris de ses principes fondateurs. D'autres dispositions attentatoires aux droits des personnes ont été introduites, afin par exemple d'expulser plus facilement les gens du voyage, ce qui pose un problème de constitutionnalité.

S’agissant de l'hospitalisation d'office, le problème reste entier après l'annulation par le Conseil constitutionnel de l'habilitation donnée au Gouvernement de réformer par ordonnance les régimes d'hospitalisation sous contrainte.

Nous aurions pu déposer une fois encore des amendements, mais le sort qui leur a été réservé en première lecture et la philosophie même de ce texte nous conduisent à le juger inamendable.

Ce texte était dangereux. Il l'est plus encore aujourd'hui, ce qui prouve qu'il n'est qu'un produit idéologique fondé sur une conception libérale de la société, où la sécurité prime sur l’accompagnement des familles et où la sanction remplace l'éducation. Il eût mieux valu faire de l'école un véritable acteur de la lutte contre toutes les violences. Mais non : le Gouvernement préfère la répression à la prévention.

Ce texte constitue une menace pour la prévention, l'éducation, les jeunes et leurs familles, et surtout les libertés individuelles. Nous espérons rassembler de nombreux députés pour saisir le Conseil Constitutionnel.

Je terminerai par ces quelques mots, dont je vous laisse le soin de retrouver l’auteur :

Étant les ignorants, ils sont les incléments

Hélas combien de temps faudra t-il vous redire

À vous tous que c'est à vous de les conduire

Qu'il fallait leur donner leur part de la cité

Que votre aveuglement produit leur cécité

D'une tutelle avare, on recueille les suites

Et le mal qu'ils vous font, c'est vous qui le leur fîtes.

Vous ne les avez pas guidés, pris par la main

Et renseignés sur l'ombre et sur le vrai chemin,

Vous les avez laissés en proie au labyrinthe

Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte

C'est qu'ils n'ont pas senti votre fraternité.

Comment peut-il penser, celui qui ne peut vivre ?

Quoi! Pour que les griefs, pour que les catastrophes,

les problèmes, les angoisses, et les convulsions

s'en aillent, suffit-il que nous les expulsions ? »

Nous voterons bien sûr contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Claude Goasguen - Tout a été dit – et fort bien dit – en première lecture et au Sénat. Ce texte arrive à un moment de la législature où l’on peut dresser un certain nombre de bilans. M. Braouezec ne s’en est pas privé. Je comprends d’ailleurs qu’il se tourne vers le passé : il n’a pas compris les évolutions du présent et les perspectives qui se dessinent pour l’avenir.

Mme Patricia Adam - Victor Hugo appartient-il au passé ? Ce n’est pas sûr !

M. Claude Goasguen – Ignoriez-vous qu’il était mort ? Mais il est vrai que je préfère entendre M. Braouezec citer Victor Hugo plutôt que Staline. (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste) Vous avez tout de même appartenu au même parti !

M. Jean-Pierre Blazy - Et ceux qui ont appartenu à Occident, en parle-t-on ?

M. Claude Goasguen - Je n’ai jamais appartenu au mouvement dont vous parlez, Monsieur Blazy. Vous feriez mieux de surveiller vos propos ! Vous n’avez peut-être pas grand-chose à dire, mais essayez quand même d’être raisonnable ! Parlons donc du passé, puisque vous voulez en parler. Dois-je rappeler qu’il y a encore cinq ans, M. Jospin était tellement conscient des problèmes de sécurité qu’il avait qualifié - à la télévision - l’attaque d’un autobus d’acte d’incivilité ? Rappelez-vous la polémique qu’avait soulevée dans vos rangs M. Chevènement lorsqu’il osa parler de « sauvageons » ! Il était presque un barbare !

M. Jean-Pierre Blazy – Vous êtes dans le 16e arrondissement !

M. Claude Goasguen - Assumez-le : vous n’avez rien vu, rien compris, vous restez sur des schémas du passé ! Je poursuis donc, à moins que vous n’ayez autre chose à nous dire que votre rengaine habituelle – à savoir que la sécurité consiste moins à s’occuper des victimes qu’à trouver des excuses aux délinquants !

M. Jean-Pierre Blazy - C’est ridicule !

M. Claude Goasguen – Je veux bien vous écouter vociférer, mais je ne tolère pas qu’on profère des insultes ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) Vous ai-je dit que vous étiez ridicule ? Si vous ne savez pas vous tenir dans l’hémicycle, allez donc à la buvette ! (Mêmes mouvements)

M. le Président – Revenez donc à votre intervention.

M. Claude Goasguen – Alors demandez à M. Blazy de respecter l’orateur !

M. le Président – Je lui demande en effet de rester mesuré dans ses propos, afin que notre débat garde la tenue qui sied.

M. Claude Goasguen - Ma patience a des limites.

Mme Patricia Adam - La nôtre aussi !

M. Claude Goasguen - Personne ne vous retient !

M. le Président – Poursuivez, Monsieur Goasguen.

M. Claude Goasguen – Ce texte nous permet de dresser un bilan. Or en matière de sécurité - comme dans bien d’autres domaines – celui du Gouvernement est exemplaire.

M. Jacques-Alain Bénisti - Très bien.

M. Claude Goasguen - Il tranche avec la prise de conscience tardive de la législature précédente – qui avait valu à la majorité d’alors l’échec que l’on sait. C’est parce que la politique de sécurité n’avait pas été suffisamment prise au sérieux que le gouvernement de Lionel Jospin a été sanctionné dans les urnes. Et c’est parce que nous avons compris que ce problème devenait un véritable problème d’opinion dans un pays profondément perturbé par la crainte de l’insécurité que le dispositif législatif que nous avons mis en place restera un modèle, mais aussi le gage d’une évolution positive.

Ce texte porte en effet quelques idées force. Nous avons donné au maire la place qui lui revenait en lui conférant un rôle essentiel dans la prévention de la délinquance…

M. Éric Raoult – C’est vrai.

M. Claude Goasguen - …de la même manière que les lois précédentes l’avaient associé en tant qu’officier de police judiciaire et en tant que responsable du maintien de l’ordre public. Toutes les précautions ont été prises pour qu’il n’empiète pas sur les activités de la police ou de la justice. Il y aura au contraire une véritable complémentarité – et cela préfigure une nouvelle dimension de la prévention de la délinquance.

Si le taux de délinquance diminue, nous assistons depuis quelques années à une transformation de la délinquance – en témoigne la multiplication des actes de barbarie. Cette nouvelle délinquance emploie des moyens que la loi ne nous permettait pas de combattre. Nous avons essayé d’y remédier.

Je ne pense pas que quiconque ici puisse accepter que des actes graves continuent de ne pas être sanctionnés. Quand les sénateurs ont décidé de sanctionner le happy slapping, ils ont en réalité sanctionné l’une des atteintes les plus graves que l’on peut porter à un être humain, puisque ceux qui s’y adonnent non seulement commettent un acte de violence mais en outre filment celui-ci pour mieux s’en vanter devant leur petit groupe !

Un sujet reste en débat : l’ordonnance de 1945. Maintes fois modifiée, elle mériterait un débat serein et j’espère que celui-ci pourra, un jour, être mené à son terme. Pour l’heure, il n’y a dans la présente loi aucune aggravation de peine à l’égard des mineurs…

M. Éric Raoult – Dommage.

M. Claude Goasguen - …mais simplement des dispositifs destinés à prévenir la délinquance des mineurs, ce qui n’est pas la même chose.

J’insiste aussi sur le fait que nous sommes à la veille d’une révolution juridique dans le domaine de la responsabilité du magistrat, en particulier lorsqu’il s’agit de délinquance des mineurs. L’opinion ne comprend pas que des mineurs puissent jouer de certaines dispositions pour se vanter de l’impunité que leur laisse la République. Je souhaite que l’opinion soit informée des responsabilités des uns et des autres. Les victimes ont le droit de savoir pourquoi leur agresseur peut, quelques heures après avoir commis un acte de violence, revenir sur les lieux mêmes où il l’a commis ! Dire les choses et faire en sorte que chacun assume ses responsabilités constituera un changement fondamental dans notre droit. Je souhaite donc que, dans un avenir proche, des peines planchers soient instituées. Cela n’exclurait pas que l’on prenne en compte des circonstances atténuantes, mais ainsi, chacun pourrait savoir pourquoi et comment la peine a été appliquée.

Un mot sur les hooligans pour souligner que la sanction de trois mois me paraît insuffisante. Moi qui suis l’élu d’une circonscription qui a connu les événements les plus graves, je n’ai aucune envie de voir revenir au Parc des Princes des individus ayant commis des délits racistes et des agressions et je voudrais que l’on puisse les interdire de stade pendant une saison. Je défendrai à nouveau un amendement en ce sens.

M. Éric Raoult - Très bien.

M. Claude Goasguen - Il me semble d’autre part que l’on a fait un amalgame, en commission des lois, entre les délits pornographiques sur internet – qui appellent une vigilance constante – et ce que l’on appelle les jeux en ligne. S’agissant de ces derniers, je crois que nous sommes en contradiction avec la directive européenne de 1998. Ceux qui contreviendront à la loi française – si celle-ci est adoptée telle quelle - pourront donc faire appel devant les instances européennes et obtiendront probablement gain de cause.

J’ajoute qu’il me paraît contestable de laisser les activités de jeu à deux sociétés d’État : le PMU et la Française des Jeux. L’État a-t-il donc des compétences particulières pour gérer des activités qui n’ont rien de régalien ? Je sais bien qu’il s’occupe aussi de cigarettes, mais enfin, que des inspecteurs des finances contrôlent des activités avec lesquelles Bercy a peu à voir me paraît une extension contestable de l’activité de l’État ! Je défendrai des amendements sur le sujet.

Pour conclure, je félicite le Gouvernement d’avoir su prendre la mesure des problèmes de sécurité dans toutes leurs dimensions – judiciaire, préventive et autres – afin de recréer un climat de sécurité. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Je remercie le ministre de l’intérieur de situer son action aux antipodes de celle menée par Lionel Jospin et ses suppôts, qui vocifèrent dans la salle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Lilian Zanchi – Selon Le Monde du jour, il parait que le candidat Nicolas Sarkozy « cherche la bonne formule pour son retour sur la dalle d'Argenteuil ». Je lui suggère donc d'aller présenter le texte de loi du ministre de l'intérieur Nicolas Sarkozy sur la « prévention de la délinquance », avec comme sous-titre ce qu’il a dit à Toulouse en février 2003 : « La meilleure des préventions, c'est la sanction » ! De fait, cette formule résume bien son projet, mais je comprends que le candidat cherche à faire oublier les propos du ministre de l'intérieur.

Un autre sous-titre du projet pourrait être : « Ficher, contrôler et punir ces jeunes et ces populations défavorisées que je ne saurais voir ». Car telle est bien la philosophie politique de ce texte.

Le Gouvernement propose à l’article 9 que les 36 000 maires de France créent un fichier recensant les enfants en âge d'être scolarisés, en y ajoutant les données à caractère personnel que détiennent les caisses d'allocations familiales et celles détenues par l'éducation nationale en matière d'absentéisme scolaire ou de sanctions disciplinaires – avertissement, exclusion temporaire ou définitive.

Ce ficher est dangereux pour les libertés et pour le respect de la vie privée, principes qui doivent être en toutes circonstances garantis, comme l’a rappelé la CNIL, qui juge « disproportionnées » les dispositions du projet – à l'article 5 comme à l'article 9 – autorisant le maire à obtenir communication de l'ensemble des données relatives aux difficultés sociales de ses administrés.

Nous voyons la nécessité pour les élus locaux de lutter contre l'absentéisme scolaire et de suivre les enfants déscolarisés grâce à des groupes de travail réunissant notamment les personnels de l'éducation nationale et ceux de la protection de l'enfance. Mais nous ne pouvons que condamner le fait de rassembler systématiquement dans un fichier toutes les données individuelles et familiales de tous les enfants scolarisés dans une commune. Ce fichage automatique de tous les élèves est inutile et contre-productif, sauf à les considérer tous comme des primo-délinquants en devenir.

Le Gouvernement crée par ailleurs un « conseil pour les droits et devoirs des familles » qui pourra décider d'un accompagnement parental par le maire, la caisse d'allocations familiales ou le président du conseil général. Pour ce faire, des informations à caractère individuel sur les familles seront recueillies, traitées, échangées et conservées. C’est sur cette base que seront déclenchés des dispositifs de signalement des mineurs et des familles à problèmes.

Permettez-nous de nous interroger là encore sur les garanties assurant le respect des droits et de la vie privée des personnes. En effet, l'alinéa 7 de l'article 6 dit que le président du conseil pour les droits et devoirs des familles, c'est-à-dire le maire, peut informer les « tiers intéressés » des mesures d'aides arrêtées avec la famille, des recommandations du conseil à celle-ci et des engagements pris par elle. Comme le souligne la CNIL, ces « tiers intéressés » ne sont pas définis. Nous savons seulement qu'il ne s'agit pas des professionnels de l'action sociale. Alors qui sont-ils ? En cette période où des enquêtes sur des personnes sont ordonnées, nous sommes en droit de vous demander, monsieur le ministre, de préciser les intentions du Gouvernement et de dissiper ce flou.

Le Gouvernement voulait créer encore un autre fichier, destiné, celui-là, à améliorer le suivi et l'instruction des mesures d'hospitalisation d'office. Ses données devaient être conservées pendant cinq ans…

M. Jacques-Alain Bénisti - Ces dispositions ont été retirées.

M. Lilian Zanchi – Oui, mais le ministre de l’intérieur a dit que le débat devait se poursuivre. Alors poursuivons-le !

Si nous pouvons comprendre la volonté du Gouvernement de contrôler au mieux les conditions psychiatriques des détenteurs d'armes, actuels ou futurs, ce fichage automatique ne nous en paraît pas moins dangereux, car il assimile toute personne ayant un trouble passager du comportement à un délinquant potentiel.

Il serait d’autant plus dangereux d’automatiser le fichage de toute personne ayant été hospitalisée d'office que vous voulez faciliter cette hospitalisation en la rendant possible par arrêté du maire après un simple avis médical, alors que le certificat médical est jusqu’ici obligatoire. Vous voulez aussi que le maire soit systématiquement informé de la sortie des patients. Mais que fera le maire de cette information ? Demandera-t-il à sa police municipale ou à ses agents assermentés de contrôler le comportement de ces personnes ? Sera-t-il responsable pénalement de ne pas avoir suivi cette personne s'il elle venait à commettre un acte de délinquance ? Le certificat médical est un document écrit. En est-il de même de l'avis médical ? Il serait risqué pour un maire, en matière de responsabilité pénale, de prendre un arrêté sur simple avis médical oral. Qu’en est-il du principe selon lequel une personne hospitalisée pour troubles mentaux conserve la totalité de ses droits et ne peut se voir opposer ses antécédents psychiatriques ? Ces personnes pourront-elles, par exemple, pendant les cinq ans de fichage, accéder aux concours de la police nationale, dont une condition est de n’être « atteint d'aucune séquelle psychiatrique », alors que le présent texte autorise le préfet et toute personne habilitée par lui à accéder à ce fichier, donc à contrôler les antécédents psychiatriques des candidats au concours ?

Si les troubles du comportement pour raisons de santé mentale, qui se traduisent souvent par des troubles de voisinage ou à l'ordre public, concernent le maire, des solutions alternatives au fichage existent, comme les commissions de régulation pour la santé mentale que nous avons mises en place à Villeurbanne avec la police nationale, la direction municipale de l'hygiène et de la santé publique, mais surtout avec les professionnels et les CMP.

M. Jacques-Alain Bénisti - Dans les grandes communes !

M. Lilian Zanchi – Nous nous félicitons évidemment du retrait des articles 18 à 24 annoncé tout à l’heure par le ministre, ou par le candidat : on ne sait plus, puisque M. Bas a d’abord répondu à M. Blisko que le Gouvernement maintiendrait, avant d’être contredit par le ministre de l’intérieur.

M. Jean-Pierre Blazy - C’est le candidat qui gouverne !

M. Lilian Zanchi – Il conviendrait d’éclairer la représentation nationale sur les intentions du Gouvernement pour la suite, notamment au sujet de l’ouverture d’un chantier sur l’hospitalisation d’office, comme nous le proposons.

Après les jeunes, ce sont les personnes malades que vous stigmatisez. On pourrait donc proposer au ministre de l'intérieur une autre formule pour présenter son texte : « ficher, contrôler, punir les malades que je ne saurais voir ».

Le groupe socialiste a formulé, et continuera de le faire, par des amendements, des propositions en faveur d’une véritable politique de prévention, d’éducation, d’insertion sociale et professionnelle, au service de tous, sans exclusion.

M. Éric Raoult - Avec des militaires !

M. Jean-Pierre Blazy - Si besoin !

M. Éric Raoult - Vous n’avez pas honte ? Même Bigeard ne l’avait pas fait !

M. Lilian Zanchi – La sanction ne saurait suffire quand l’enjeu est d’aider chaque jeune à construire son projet de vie personnel.

Vous êtes restés quasi sourds à nos propositions redonnant pourtant sa force et sa vigueur à votre texte, qui n'a de préventif que le noM. Et vous avez menti sur les chiffres, car le nombre de faits de délinquance en 2006 n’est pas de trois millions, mais de 3 725 588, d’après le ministère de l’intérieur.

M. Éric Raoult - On dirait que ça vous fait plaisir !

M. Jacques-Alain Bénisti - Raison de plus de voter ce texte !

M. Lilian Zanchi – Je préfère que nous parlions de la réalité des choses.

En cinq ans, vous ne serez parvenu qu'à rendre coupables les Français : de la mauvaise éducation de leurs enfants, de leur santé mentale, de vivre seuls, d'être sans emploi, de vivre dans des quartiers surpeuplés, d'être défavorisés.

M. Jacques-Alain Bénisti - Démagogie !

M. Lilian Zanchi – Vous avez répondu à leurs difficultés par la sanction, le fichage, le contrôle, la punition, l'enferment. Or, les coupables, c’est vous ! Vous vous êtes trompés de politique, vous avez échoué : les atteintes physiques aux personnes et le sentiment d'insécurité n'ont cessé d'augmenter, comme le révèlent les enquêtes de victimisation ??? de l’Office nationale de la délinquance.

M. Serge Blisko - C’est un échec absolu !

M. Lilian Zanchi – Le ministre de l’intérieur avait proposé un contrat aux Français en 2002. Votre contrat d'apprentissage est un échec. Alors, conformément à l’article 6, alinéa 15, de votre projet de loi, et au terme de votre contrat, nous vous délivrons une attestation de l’échec de votre politique à tenir vos engagements (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jacques-Alain Bénisti – Ce texte est bien le fruit de cinq années de travail concerté entre les acteurs de terrain, notre ministre de l’intérieur et les parlementaires de la commission du même nom, dont M. Blazy.

M. Éric Raoult - C’était un sosie !

M. Jacques-Alain Bénisti - Je tiens à exprimer ma satisfaction au ministre, qui a su écouter les élus et ceux qui agissent au quotidien dans les quartiers sensibles.

Ce texte fait enfin du maire le pivot de la politique de prévention de la délinquance. C’est le seul élu local qui soit capable de coordonner l’ensemble des acteurs et d’aider les familles. Le débat aujourd’hui a changé : de plus en plus d’actes violents sont commis, par des gens de plus en plus jeunes. L’objectif n’est pas de condamner davantage, mais d’aider ces jeunes en mal d’existence, ainsi que leurs familles.

Nous sommes un certain nombre à penser qu’une réforme plus globale de l’ordonnance de 1945 est nécessaire ; j’espère que la prochaine législature nous en donnera l’occasion. De même, je regrette que le formalisme de certaines procédures ait été supprimé par le Sénat, comme la communication d’éléments aux personnes concernées par le partage d’informations à caractère confidentiel : il me semble que la transparence est préférable à un mur de silence. En outre, le rééquilibrage des responsabilités au profit du président de conseil général me paraît dommageable, car je crains que, notamment en cas de clivages politiques entre celui-ci et le maire, des blocages n’en résultent et fragilisent les actions menées.

M. Éric Raoult - Tout à fait !

M. Jacques-Alain Bénisti - Enfin, le choix des sénateurs de confier à la ville la plus peuplée d’un EPCI un pouvoir de définition de la politique de prévention de la délinquance me paraît une fausse bonne idée, car elle risque de complexifier les procédures et d’empiler les niveaux de responsabilité, alors que le problème tient surtout au manque de coordination et de gouvernance. Souhaitant donc que nous revenions à la rédaction adoptée en première lecture par notre assemblée, je soutiendrai l’amendement présenté par le rapporteur.

Je soutiens également le souhait de la commission de punir plus sévèrement les pratiques d’happy slapping, c’est-à-dire la diffusion d’images d’agressions contre des personnes. Je souhaite que les tribunaux lancent ainsi un message fort.

Je terminerai en évoquant un fait réel qui s’est produit dans ma ville il y a quelques mois. Un homme, sortant du centre psychiatrique local, rend visite à sa mère, alors qu’il est sous l’emprise du cannabis. Après une altercation avec celle-ci, il jette son chien par la fenêtre, au second étage, affirmant que l’animal était envoûté. Il suit ensuite sa mère chez le vétérinaire et poignarde ce dernier à neuf reprises. Ce père de famille de trois enfants a succombé des suites de ses blessures. L’individu a été interpellé, le rapport psychiatrique indiquant que « M. S. a commis ce crime sous l’effet d’une pulsion maniaco-dépressive accentuée par l’absorption de cannabis ». Il se trouve actuellement en centre fermé. Je continue de citer le rapport…

M. Serge Blisko - Et le secret médical ?

M. Jacques-Alain Bénisti – « Si son état se stabilise, il pourra quitter ce centre et suivre une thérapie en hôpital de jour. Mais s’il réitérait des actes violents, serait alors envisagé son placement en centre psychiatrique fermé pour une période plus longue. »

Ce cas concret est pour le moins effarant ; nous en rencontrons pourtant quasiment tous les jours dans nos communes. Si ce M. S. n’est pas un délinquant, il est néanmoins dangereux ; il n’est pas inadmissible d’attendre un second drame pour prendre les mesures qui s’imposent. Si le présent projet avait été voté il y a un an, ce vétérinaire père de famille serait toujours en vie. Je remercie le ministre de l’intérieur pour son courage et sa ténacité, qui lui ont valu une avalanche de critiques diffamatoires (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Serge Blisko - Suite à l’annonce du retrait des articles 18 à 24 concernant la santé mentale, nous ne pouvons que nous féliciter de ce que la mobilisation de la communauté psychiatrique et des familles ait été couronnée de succès, s’agissant de dispositions liberticides.

M. Éric Raoult - Les familles de victimes ne vont pas se réjouir !

M. Serge Blisko – Avant que le ministre de l’intérieur annonce ce retrait, M. Bas, répondant à une question que je lui avais posée, avait répondu n’importe quoi, confondant l’hospitalisation d’office et l’hospitalisation à domicile, ce qui restera dans l’anthologie parlementaire comme la réponse la moins appropriée.

Je reviens maintenant sur d’autres dispositions problématiques. M. le ministre a évoqué la création d’ « hôpitaux prisons ». Mais ces UHSA sont une hérésie juridique, où cohabiteraient des malades difficiles et des personnes qui, à l’issue de leur peine de prison, seraient maintenues, de manière inappropriée, en détention administrative. Ce serait très grave eu égard aux libertés publiques et je ne doute pas que la cour européenne de justice condamnerait rapidement ces établissements, qui seraient d’ailleurs significatifs d’un terrible retour au XVIIIe siècle, au temps où l’on enfermait ensemble malades mentaux, criminels et miséreux. Cela en dit long sur vos errements psychologiques et politiques !

M. Jacques-Alain Bénisti - Amalgame !

M. Serge Blisko – Certes, les victimes d’un acte épouvantable, en particulier lorsqu’il a été commis par un malade mental, doivent être accompagnées et soutenues, mais il ne faut en aucun cas opposer les victimes aux malades victimes. Ce « conflit de victimes » n’est qu’un argument politique, qui ne m’étonne d’ailleurs pas de la part du ministre candidat.

Enfin, s’il fallait une seule raison pour s’opposer au partage du secret médical, M. Bénisti vient de la donner, sous couvert de l’immunité parlementaire, en révélant les informations contenues dans un dossier médical.

M. Jacques-Alain Bénisti - J’assume mes responsabilités.

M. Serge Blisko - Comment un élu peut-il lire, à la tribune, un dossier médical ?

M. Éric Raoult - Mais devant un tel cas ! Parlez-en à la veuve de la victime ! (M. Jean-Marie Le Guen éclate de rire) Vous êtes de drôles de types !

M. Serge Blisko – Vous êtes en train de piétiner le code de déontologie et le code civil ! En tout autre lieu, cet acte serait passible de poursuites.

M. Éric Raoult - Vous n’avez plus les pieds sur terre !

Mme Nadine Morano - M. Blisko se livre à une accusation gratuite ! Aucun nom n’a été prononcé !

M. Serge Blisko – C’est une mauvaise action dont je ne vous félicite pas, Monsieur Bénisti ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Thierry Mariani – La fin de cette mandature doit être l’occasion d’un bilan. Les engagements pris en matière de sécurité ont été tenus et on peut se féliciter des résultats obtenus. En 2001, on dénombrait plus de quatre millions de crimes et de délits. Ce chiffre a été ramené à 3,775 millions et ce sont plus d’un million de victimes qui ont été épargnées depuis 2002. En outre, 80 % des usagers des services de police et de gendarmerie sont satisfaits de l'accueil et de l'écoute des agents. Les Français se sentent plus en sécurité. Ce projet s'inscrit dans la continuité de nos objectifs et répond aux attentes des Français, lassés du laxisme de la gauche. Entre mai 2002 et avril 2006, la délinquance a reculé de 8,8 % alors qu’elle avait augmenté de 14,5 % entre 1998 et 2002 !

Aujourd’hui, M. le ministre d’État nous demande d’aller encore plus loin. La LOPSI est dans sa cinquième et dernière année d'application. Pour la première fois, une loi de programmation a été entièrement respectée. Après nous avoir donné les moyens de mieux sanctionner, nous avons les moyens de mieux prévenir la délinquance : trouble de voisinage, femmes battues, mineurs récidivistes, celle-ci est combattue sous toutes ses formes. Nous démontrons ainsi aux socialistes que la sécurité des Français ne se résout pas en tournant le dos aux problèmes.

Premier point fort du texte : le rôle des maires, enfin chargés de l'animation et de la coordination de la politique de prévention. Ils pourront saisir le juge des enfants en matière de tutelle des prestations familiales. Nous nous félicitons en outre que ce projet mette le travail d'équipe à l'honneur, les différents acteurs politiques et sociaux pouvant enfin travailler main dans la main. Ainsi, ils détecteront mieux les situations difficiles pour aider les personnes en difficulté et les empêcher de rentrer dans le cercle vicieux de la délinquance dont nous ne pensons pas, contrairement à la gauche, qu’elle soit une fatalité.

J’ajoute, Monsieur Blisko, que M. Bénisti n’a cité aucun nom. Qu’en est-il si, dans cet hémicycle, il n’est plus possible d’évoquer des faits concrets ?

M. Serge Blisko - Qui a transmis le dossier médical ?

M. Thierry Mariani - En l’occurrence, il y a eu mort d’homme. M. Bénisti a respecté le droit.

M. Jean-Marie Le Guen - Vous ne comprenez rien à l'Assemblée nationale.

M. Thierry Mariani - Dernier point : l’adaptation de la sanction à la gravité de l'acte. La délinquance des mineurs étant plus grave, le projet modifie le fonctionnement de l'excuse de minorité. En décidant que celle-ci n'a pas à être appliquée, les juges pourront punir plus sévèrement les mineurs récidivistes de plus de 16 ans ayant commis un crime ou un délit grave. Le projet propose également un dispositif plus ferme à l'égard des délinquants multirécidivistes et les juges qui les condamneront devront quant à eux motiver spécialement leurs choix concernant la nature de la peine, sa durée ou son régime.

Jusqu'en 2002, la gauche a voulu faire la politique de l'autruche sur les réalités de la délinquance. Nous, nous avons sorti la tête du sable pour voir les problèmes en face et les résoudre ! Les résultats, en matière de sécurité, sont plus rassurants que les belles paroles : au moment où mes chers collègues socialistes proposent aux Français de remettre en place l’inefficace police de proximité, nous proposons, nous, de leur garantir une sécurité de proximité ! Pour toutes ces raisons, je voterai ce projet. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – La discussion générale est close.

M. le Ministre délégué – M. Artigues a souligné que la politique de prévention devait être abordée de façon globale et c’est précisément pourquoi M. le ministre d’État a présenté un texte transversal, même si les problèmes liés à l’urbanisme, par exemple, auraient pu y être inclus : c’est en effet par une véritable mixité sociale que nous règlerons un certain nombre de difficultés (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Ce texte a d’ores et déjà le mérite de répondre à de nombreuse situations. Je remercie en outre M. Artigues pour avoir souligné combien il importe de lier l’action de la police à une politique globale de la chaîne pénale. M. Artigues a également affirmé que la détention des mineurs n’était pas une réponse appropriée en toute circonstance. Depuis 2002, 24 centres d’éducations fermés ont ouvert leurs portes, 12 seront ouverts à la fin de 2007 et compte tenu de ceux qui seront opératoires en 2008, ce sont en tout 46 centres qui auront été ouverts…

M. Jacques-Alain Bénisti - Voilà du concret !

M. le Ministre délégué - …ce qui correspond à la création de 500 places. J’ajoute que nous disposons actuellement de six établissements de détention spécifiquement dédiés aux mineurs où ceux-ci ne peuvent donc en aucun cas être confrontés à des adultes. Avec l’ouverture d’un autre centre en 2008, ce sont 420 places qui auront été créées. M. Artigues a rappelé combien l’UDF est favorable au nouveau rôle des maires s’agissant notamment des informations dont ils pourront disposer, ce dont je le remercie. Nombre d’amendements ont d’ailleurs été inspirés par l’association des maires de France.

Contrairement à ce que pense M. Braouezec, ce texte ne stigmatise personne : il s’agit simplement de mieux coordonner les interventions des travailleurs sociaux.

M. Jean-Marie Le Guen - On a fait allusion à Staline tout à l’heure : en matière d’ordre, à côté, M. Sarkozy, c’est petit !

M. Claude Goasguen - Vous auriez sans doute préféré que j’évoque Trotski !

M. Éric Raoult - Le piolet !

M. le Ministre délégué – Quand il s’agit de proposer à des mineurs des sanctions éducatives et de généraliser l’injonction thérapeutique pour les toxicomanes, y a-t-il stigmatisation ou simple justice ? Ce projet ne fait pas du maire un délégué du procureur et il n’empiète sur aucune institution : il permet simplement aux maires de passer le relais, quand il le faut, aux conseils généraux, aux directeurs des CAF, aux autorités judiciaires. Grâce aux conseils des droits et des devoirs des familles, le maire pourra par exemple proposer un accompagnement parental.

Concernant les fichiers relatifs à l’absentéisme scolaire il s’agit simplement, Monsieur Zanchi, de permettre aux maires d’exercer efficacement une responsabilité qui leur incombe déjà s’agissant du respect de l’assiduité scolaire. L’absentéisme est d’ailleurs souvent le premier signe de la dérive d’un enfant. La proportion d’élèves absents non régularisés varie de 2 % à 5 % des effectifs. En novembre 2005, elle dépassait 13 % dans un établissement sur dix. Ne faut-il donc rien faire ?

M. Lilian Zanchi – Pas besoin d’un fichier !

M. le Ministre délégué – Le projet complète les données dont le maire disposera pour repérer les situations les plus délicates. M. Zanchi estime, de plus, que cela est dangereux pour les libertés. Manquer les cours devrait donc être tenu pour une liberté ?

M. Jean-Pierre Blazy - Caricature !

M. le Ministre délégué – Nous considérons que la lutte contre l’absentéisme est essentielle.

Je me demande par ailleurs s’il est encore utile de répondre aux procès d’intention de MM. Blisko et Zanchi concernant les hospitalisations d’office si nous pouvons, comme nous le souhaitons, présenter une réforme d’ensemble au début de la prochaine législature. Nous en rediscuterons à ce moment. Enfin, s’agissant des détenus en situation de souffrance psychologique, les unités hospitalières de soins adaptés, qui répondent à une nécessité, offriront 705 places en 2007.

Pour le reste, je veux remercier MM. Goasguen, Bénisti et Mariani pour leur soutien. À propos de l’amendement par lequel le Sénat a introduit la sanction du happy slapping, je ne peux que regretter, tout en saluant le travail exceptionnel de votre commission des lois, qu’elle n’ait pas trouvé depuis une traduction plus opportune. Il est encore temps d’y réfléchir. Je remercie aussi M. Goasguen d’avoir rappelé la nécessité de lutter contre la violence dans les stades. Une proposition parlementaire est en vigueur depuis décembre, qui permet notamment de dissoudre les associations de supporters aux comportements racistes, antisémites ou violents, d’en retenir dans les commissariats ou les gendarmeries pendant les matchs ou d’interdire certaines tribunes. Sans doute faut-il aller encore plus loin : le Gouvernement y sera ouvert.

Enfin, contrairement à ce qu’ont laissé entendre certains orateurs socialistes, il n’y aucune aggravation des peines des mineurs, mais seulement des mesures d’accélération. En fin de législature, il était souhaitable de s’en tenir à cela. À titre personnel, mais aussi au nom du ministre d’État, je dois dire que nous souhaitons aller plus loin lors de la prochaine législature. Une proposition a déjà été déposée par des députés de la majorité, proposant des peines plancher.

M. Thierry Mariani - Très bien !

M. le Ministre délégué - Je suis convaincu que nous y parviendrons, avec la confiance des Français. Il est important de sortir du contexte dans lequel nous nous sommes laissé enfermer, qui résulte de l’ordonnance de 1945 : un délinquant de 2007 n’a rien à voir avec un délinquant de 1945. Il serait temps que chaque victime ait l’assurance qu’un délit, fût-il commis par un mineur, recevra une sanction en toute circonstance (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Éric Raoult - Ça, c’est un ministre !

M. le Rapporteur - Je remercie le ministre des aimables et justifiés propos qu’il a tenus à l’égard de la commission des lois, et je veux le rassurer : naturellement, le terme de happy slapping ne figure nulle part dans notre amendement, ni ailleurs dans le texte.

M. Éric Raoult - La baffe joyeuse !

M. le Rapporteur – Ou vidéolynchage ?

MOTION DE RENVOI EN COMMISSION

M. le Président - J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une motion de renvoi en commission déposée en application de l’article 91, alinéa 7, du Règlement.

La parole est à Jean-Marie Le Guen.

MM. Guy Geoffroy et Éric Raoult – Ah ! On va entendre parler de l’encadrement militaire !

M. Jean-Marie Le Guen - Je voudrais d’abord faire part au président de la commission de toute ma compassion : il n’est en effet pas très agréable d’être rapporteur d’un texte qui a justifié une réunion de la commission en article 88 il y à peine quelques heures, d’avoir fourni un travail incessant pour prouver que les articles 18 à 24 devaient absolument figurer dans ce texte, qu’ils étaient excellents, opportuns, élaborés dans la concertation et qu’ils répondaient à une urgence avérée – l’ensemble de mon temps de parole ne suffirait pas à rappeler tous vos arguments – pour soudain se voir signifier à la tribune, après que nous nous sommes fait entendre et surtout après que l’ensemble des organisations de malades et de professionnels de la psychiatrie se sont élevés contre ce projet, qu’il fallait les retirer. Votre ministre candidat est en effet obligé de constater que des dizaines de milliers de personnes sont inquiètes pour les libertés publiques et s’opposent à la déontologie professionnelle que vous vouliez imposer, qui fait des malades des délinquants et des soignants des auxiliaires de l’ordre public. Je sais bien que vous voulez multiplier les suppressions de postes dans la fonction publique, mais il faut vous y faire : on ne peut pas transformer tous les médecins en policiers !

Vous êtes donc confrontés à la réalité : ces articles n’avaient rien à faire dans ce texte, et vont exactement à l’opposé de ce que souhaite, de façon éminemment consensuelle, l’ensemble des professionnels.

M. Jacques-Alain Bénisti - Mais pas les victimes !

M. Jean-Marie Le Guen - C’est un sujet important : il se trouve que les malades mentaux sont des concitoyens qui ont droit à des soins et à notre aide. Ce ne sont pas des étrangers, ou de mauvais Français !

M. Jacques-Alain Bénisti - Quel dommage, de la démagogie sur un sujet pareil !

M. Jean-Marie Le Guen – Dix pour cent des Français iront, à un moment de leur vie, à une consultation de psychiatrie. Plus de 3 % ont été hospitalisés d’office ou sur la demande de tiers. Ces Français-là sont dans nos familles, ce ne sont pas des adversaires, ni des coupables ! Ce sont des malades, pas des délinquants ! Il ne sont pas plus dangereux que les autres, il n’y a pas plus de délinquants et d’agressifs chez les malades que chez les citoyens ordinaires.

M. Claude Goasguen - Mais quand il y a des victimes ?

M. Jean-Marie Le Guen - La psychiatrie ne peut pas être au service de votre politique d’ordre public. Il n’existe pas de test qui permette prévoir que demain, dans des circonstances extraordinaires, une personne craquera et commettra un acte de violence. N’essayez pas de les dépister, de les ficher et de les enfermer, car ce sont des concitoyens qui ont droit à leurs libertés individuelles – il faut vous le rappeler, à vous, les libéraux – et à des soins lorsqu’ils sont malades.

Vous avez donc enfin compris qu’il fallait reculer, et le Sarkozy candidat est venu à cette tribune désavouer le Sarkozy ministre. Mais ce texte contient bien d’autres éléments qui relèvent de la même philosophie. C’est le cas des problèmes liés à la toxicomanie. Les usagers de drogues sont encore plus stigmatisés dans notre société que les malades mentaux, et la mobilisation en leur faveur a été moins forte. À leur égard, vous proposez la même démarche scientiste, comme s’il était possible, par une piqûre, de faire en sorte qu’un toxicomane ne le soit plus. Et bien non. Il faut un consentement aux soins. Nous savons, comme élus, comme responsables, comme parents ou comme amis, que la médecine est loin d’être toute puissante. C’est ce qui fonde la nécessité de la prévention – un grand manque de ce gouvernement qui, s’il aime bien châtier et dénoncer, a beaucoup de mal à parler avec réalisme de ces questions !

M. Jacques-Alain Bénisti - Vous aviez trouvé une solution ?

M. Jean-Marie Le Guen - Il ne suffit pas d’exclure ou de dénoncer pour répondre à ces problèmes. On ne peut pas dénoncer les 50 % de jeunes qui ont fumé au moins une fois du cannabis ! Le discours que vous tenez est complètement déconnecté de la réalité.

Plusieurs députés UMP - C’est faux !

M. Jean-Marie Le Guen – Pour faire de la prévention, les moulinets ne suffisent pas. Il s’agit d’un phénomène de masse, qui parfois, heureusement assez rarement, dérive vers des cas pathologiques lourds.

M. Guy Geoffroy - Il faut donc laisser faire !

M. Jean-Marie Le Guen – Il faut donc mener une prévention intelligente.

M. Guy Geoffroy - Vous n’en avez jamais fait !

M. Jean-Marie Le Guen – Vous avez détruit ce qui avait été fait par Mme Maestracci ! Vous avez préféré promettre des réformes de la loi de 1970 que vous n’avez jamais faites. Vous avez recentré toute cette politique sur le ministère de l’intérieur et retiré la charge de ces questions à la MILDT et à la santé. En les traitant essentiellement à travers le prisme de la police et de la justice, vous passerez complètement à côté d’un problème majeur de santé publique qui touche notre jeunesse.

M. Jacques-Alain Bénisti – Que vous n’avez jamais traité !

Plusieurs députés UMP – Bon, alors, et les militaires ?

M. Jean-Pierre Blazy - On n’est pas à un meeting, ici !

M. Jean-Marie Le Guen – Je vois que les propositions de la candidate du parti socialiste touchent à des réalités qui vous dérangent. Mais qu’il faille un plus grand investissement de la société pour aider les jeunes à sortir de la délinquance est une réalité !

Plusieurs députés UMP - Très bien !

M. Jean-Marie Le Guen – Qu’il faille une mobilisation totale pour y arriver, c’est certain !

Plusieurs députés UMP - Très bien !

M. Jacques-Alain Bénisti - Qu’auriez-vous dit, si nous tenions ce discours !

M. Jean-Marie Le Guen – Mais cela ne se fait pas seulement par recours à la répression ! Or, en ce qui concerne la prévention, et dans l’ensemble du texte, vous êtes largement absents. Ce que vous appelez prévention, ce n’est qu’une coordination renforcée de la répression.

Beaucoup a été dit. Le ministre de l’intérieur s’est lancé dans de grandes rodomontades sur la réforme de l’ordonnance de 1945, comme si – ministre en responsabilité – il n’avait pas eu la possibilité de la mener, comme si les parlementaires – auxquels le Premier ministre n’était pas en mesure de s’opposer – n’avaient pu la voter (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Ayez le courage de vos opinions et ne reculez pas devant M. de Villepin, chers collègues !

M. Jacques-Alain Bénisti - Nous le ferons !

M. Jean-Marie Le Guen - Bien sûr, comme vous avez retiré les articles 18 à 24 ! Vous voulez séduire une partie de l’opinion publique, mais au moment de passer à l’acte, vous êtes bien obligés de reconnaître que l’autre partie de la société française redoute votre politique qui leur crie que « l’enfer, c’est les autres ». L’Autre ! Le malade, le délinquant, l’étranger, le jeune, le fainéant, l’assisté social ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Vous dénoncez les Français, catégorie par catégorie, pour exacerber les égoïsmes !

M. Éric Raoult - Caricature !

M. Jean-Marie Le Guen - Ce n’est pas ainsi que nous construirons une politique de solidarité et que nous donnerons à la société la capacité de remporter les défis qui s’imposent à elle. Je vous invite à examiner de nouveau ce texte en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Éric Raoult – Commis d’office !

M. le Ministre délégué – Durant ce feu d’artifice…

M. Guy Geoffroy - Un pétard mouillé, oui !

M. le Ministre délégué - …M. le Guen a beaucoup évoqué les mauvais Français, parlé des soi-disant libertés individuelles, mais n’a jamais prononcé le mot « victime » !

M. Éric Raoult - Ça ne l’intéresse pas !

M. le Ministre délégué - Notre préoccupation à nous, c’est de répondre à ces millions de Français qui, tous les matins, redoutent que leurs enfants se voient proposer de la drogue, se fassent racketter ou menacer d’un viol collectif…

M. Jean-Marie Le Guen - Cela fait cinq ans que vous êtes au gouvernement !

M. le Ministre délégué - …qui, tous les soirs, en rentrant chez eux après une dure journée de labeur, baissent le regard devant une bande et craignent de voir mis un terme à leur vie familiale tranquille…

Mme Patricia Adam et M. Lilian Zanchi - Qu’avez-vous fait en cinq ans ?

M. le Ministre délégué - …qui, tous les jours, se demandent si leurs parents âgés ne se feront pas bousculer et arracher leur sac ou se feront attaquer physiquement. Nous voulons répondre à ces millions de Français, qui vivent sous la menace de bandes organisées et de réseaux mafieux, qui espèrent être protégés par l’État et qui veulent voir leur libertés individuelles garanties au bout de la rue !

M. Jean-Marie Le Guen - Quel bilan !

M. le Ministre délégué – Et vous, que proposez-vous ? Vous ne savez que vous opposer. Vous vous opposez à ce que nous puissions mettre un terme aux violences conjugales, à ce que nous puissions mettre en place une école de la deuxième chance, à ce que nous protégions les mineurs contre la consommation de stupéfiants, la pédo-pornographie, le caïdat, vous vous opposez à la coordination des travailleurs sociaux. Monsieur le Guen, personne ne peut entendre ce discours ! Oui, nous voulons défendre la première liberté des Français, leur sécurité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) !

La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures 30.
La séance est levée à 18 heures 50.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.
Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.
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