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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du mardi 20 février 2007

Séance de 9 heures 30
63ème jour de séance, 143ème séance

Présidence de Mme Hélène Mignon
Vice-Présidente

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

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QUESTIONS ORALES SANS DéBAT

L'ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

accueil en milieu professionnel d’élèves de moins de seize ans

M. Michel Zumkeller - La circulaire du 8 septembre 2003, relative aux modalités de l’accueil en milieu professionnel des élèves de moins de seize ans, précise que les élèves restent sous l’autorité des établissements d’enseignement. Si la responsabilité des enseignants peut être exonérée, il n’en va pas de même pour celle des directeurs d’établissement, et la situation reste floue concernant les directeurs d’école. Ceci n’est pas fait pour encourager l’accueil en milieu professionnel. Quelles mesures envisage-t-on pour que chacun puisse exercer ses responsabilités dans la sérénité ?

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche – Deux circulaires de 2003 apportent des précisions sur la responsabilité des chefs d’établissement dans le cadre de l’accueil d’élèves en milieu professionnel. Elles déterminent le régime de responsabilité applicable dans toutes les circonstances et indiquent les conventions types à utiliser, y compris à l’étranger. J’ai décidé que l’option de découverte professionnelle serait généralisée en classe de troisième : des consignes ont été adressées aux chefs d’établissement le 6 juillet 2006, concernant le suivi et l’encadrement des élèves de troisième appelés à effectuer la séquence d’observation en milieu professionnel désormais obligatoire.

La présence de jeunes en entreprise nécessite une attention particulière, et c’est le sens des travaux menés conjointement par le ministère de la cohésion sociale et le mien en vue d’adapter notre réglementation à la directive européenne du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes au travail.

Dans une affaire récente, la responsabilité pénale d’un enseignant et d’un chef d’établissement a été mise en cause, ceux-ci se voyant reprocher d’avoir manqué aux obligations de sécurité prévues par le code rural. La Cour d’appel a toutefois considéré que ces dispositions n’étaient pas applicables aux stages de quatrième technologique.

M. Michel Zumkeller – C’est une précision importante. Les gens sur le terrain auront ainsi une garantie, ce qui encouragera l’accueil des jeunes en milieu professionnel.

scolarisation des enfants de deux ans

M. Gilles Artigues – Dans mon département, pourtant pilote en la matière, les difficultés de la scolarisation des enfants de moins de trois ans sont importantes, tant dans les établissements publics que privés. Depuis quelques années, ces enfants, qui peuvent être inscrits dans la limite des places disponibles, ne sont plus comptabilisés pour les ouvertures de classes, comme pour les fermetures. Les familles sont inquiètes ; beaucoup de parents aux revenus modestes n’ont pas les moyens de placer leurs enfants en crèche ou en garderie. Il semblerait que l’État veuille se décharger sur les collectivités locales. Monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre afin de maintenir la carte scolaire pour les enfants de deux ans ?

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche – Je rappelle que la scolarité n’est obligatoire que pour les enfants de six à seize ans. Cela n’empêche pas que nous soyons le pays qui scolarise le plus grand nombre d’enfants de trois ans et moins. Quant au pourcentage de fréquentation pour les enfants de deux ans, il était en 2004 de 26,7 %, public et privé confondus. Dans votre département de la Loire, Monsieur le député, le taux atteignait même 44,6 %.

Les enfants de deux ans peuvent être admis dans la limite des places disponibles, ceux de trois ans étant naturellement prioritaires. La loi d’orientation de 2005 dispose que l’accueil des enfants de deux ans sera assuré en priorité pour les zones défavorisées, comme les ZEP, les territoires ruraux ou de montagne. Toutefois, la scolarisation des enfants de deux ans ne saurait être considérée comme une obligation pour le système éducatif. En outre, tous les enfants de cet âge ne sont pas prêts à profiter d’une scolarisation précoce, et les écoles ne sont pas toutes à même de les recevoir dans de bonnes conditions. Du reste, les études disponibles, en particulier le rapport présenté en 2003 par la Défenseure des enfants, font apparaître que la scolarisation précoce ne constitue pas un avantage notoire par rapport à d’autres modes d’accueil. Celle-ci n’est donc pas une panacée.

Enfin, les modalités de décompte des effectifs scolaires sont définies localement dans le cadre de l’élaboration de la carte scolaire du premier degré. Dans les départements, elles sont établies en concertation au sein des conseils départementaux de l’éducation nationale.

M. Gilles Artigues – Cette réponse ne me satisfait pas au vu des problèmes de terrain. Je regrette que le Gouvernement cherche à faire des économies sur l’école, en obéissant à une logique comptable.

M. le Ministre – Je ne peux pas vous laisser dire cela. Si un budget a bien augmenté, c’est celui de l’école, qui est déjà le plus important dans le monde par enfant, selon l’OCDE. Dire que l’université manque de moyens, d’accord ; mais l’enseignement scolaire, non !

rentrée scolaire dans les hautes-pyrenées

Mme Chantal Robin-Rodrigo – La rentrée scolaire 2007 s'annonce catastrophique dans les Hautes-Pyrénées, par suite de la politique du Gouvernement qui supprime 5000 postes d'enseignants au niveau national. La carte scolaire doit être appréhendée de façon différente selon les territoires. En montagne, les conditions climatiques, la vie des villages appellent une solidarité territoriale plus forte, et une classe unique de quinze enfants y est parfaitement justifiée. Les enseignants, les parents d’élèves, les élus des Hautes-Pyrénées refusent que trois postes d'enseignants soient supprimés dans le premier degré, alors que le nombre d’élèves ne diminue pas.

À force de supprimer des postes, on aboutit à des impasses de gestion. Sur la période 2002-2007, le Lot a perdu cinq postes, tout en accueillant 536 élèves de plus ; l'Ariège en a perdu quatre, pour 549 élèves supplémentaires ; et les Hautes-Pyrénées en ont perdu 35, pour 361 élèves de plus. Cherchez l’erreur !

Dans le secondaire, la situation n'est guère plus brillante. La dotation globale du lycée Marie Curie de Tarbes diminue de 207 heures, et la suppression de onze postes est annoncée, pour deux créations, alors que les effectifs d'élèves sont stables. Les étudiants de BTS informatique de gestion ne pourront plus bénéficier de l'heure supplémentaire de mathématiques, pourtant nécessaire pour intégrer une licence professionnelle. Les élèves de STSS ne bénéficieront plus de la deuxième langue en seconde. Enfin, il n'y aura plus de rattrapage en sciences économiques et sociales en première pour les élèves qui, en seconde, souhaitent intégrer cette filière. En cinq ans, le lycée Marie Curie aura perdu 43 postes, soit près d'un quart de ses postes de professeurs titulaires.

Cette politique contredit votre ambition proclamée quant à l'égalité des chances. Monsieur le ministre, quelles réponses apporterez-vous à l’inquiétude des parents d'élèves, des enseignants et des élus des Hautes-Pyrénées ?

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche – Madame la députée, vous avez commencé par deux erreurs. Entre 2002 et 2007, le nombre des adultes qui travaillent dans les établissements scolaires s’est accru de 11257 : il n’y a pas eu déperdition. Ensuite, le budget de 2007 ne supprime pas de postes ; vous oubliez ceux qui sont créés !

Sur les 77 milliards alloués à l’éducation nationale, à l’enseignement supérieur et à la recherche, 59 milliards sont destinés à l’enseignement scolaire et distribués aux académies selon une logique qualitative, plutôt que quantitative. Des centaines et des centaines de professeurs n’enseignent pas aujourd’hui – en allemand par exemple : qualifieriez-vous cela de bonne gestion ?

Dans le premier degré, nous avons fait le choix d’un nombre mesuré de créations d’emplois, 500 en tout, qui prennent en compte l’évolution du nombre d’élèves. Cet effort permettra de maintenir le taux d’encadrement en dessous du seuil de 19 élèves par professeur dans l’enseignement primaire, bien supérieur à ce que l’on constate dans les pays « modernes ». La répartition inter-académique des moyens obéit à des principes objectifs et équitables, comme les variations démographiques, les indicateurs territorial et social, les contraintes structurelles. Ainsi, dans l’académie de Toulouse, on dénombre 5,44 postes pour 100 élèves, alors que la moyenne nationale est de 5,33, et l’on prévoit, pour la rentrée 2007, une dotation supplémentaire de 44 postes.

Pour faire face à la hausse du nombre d’élèves dans les départements de la Haute-Garonne, du Tarn et du Tarn-et-Garonne, le recteur a choisi de rééquilibrer les dotations départementales. Le département des Hautes-Pyrénées perdra ainsi 3 postes. Du fait de la baisse du nombre d’élèves, cela n’aura pas de conséquences sur l’encadrement : le nombre d’élèves par classe – 20,97 – restera inférieur à la moyenne nationale, qui est de 23,45. Les caractéristiques rurales et montagneuses de ce département ont bien été prises en compte dans le calcul de la dotation.

Mme Chantal Robin-Rodrigo – Je ne vous parle pas de chiffres, mais de ce que vivent les gens, sur le terrain. La réalité, c’est qu’il y aura 35 postes en moins, pour 361 élèves supplémentaires. La réalité, c’est qu’à Gavarnie une classe unique de 15 élèves sera fermée !

M. le Ministre – La réalité du terrain, personne n’en a le monopole ! On m’avait prédit, avec les mêmes accents, une rentrée 2006 catastrophique. Or, elle a été très belle. Je suis persuadé que la rentrée 2007 sera aussi belle !

application des règles concernant les départs en retraite d’enseignants

M. Jean-Louis Dumont – Je souhaite appeler votre attention, Monsieur le ministre, sur l’application du code des pensions civiles et militaires de retraite par l’inspection académique de la Meuse. Un enseignant, âgé de 55 ans, a souhaité faire valoir ses droits à la retraite en octobre 2005. Cette personne, qui a bénéficié d’une promotion comme professeur des écoles, ne présente qu’un défaut, celui d’exercer sa compétence au centre permanent d’initiative pour l’environnement Woëvre-Côtes de Meuse. De ce fait, on a considéré qu’elle n’avait pas exécuté ses quinze ans de service actif, alors que son poste, apparu au mouvement, était référencé au Registre national des établissements scolaires.

Vous considérant comme au-dessus de la mêlée, je fais appel à vous comme recours hiérarchique. Beaucoup s’interrogent sur la signification de ce refus : il ne peut s’agir d’une discrimination à l’égard d’une personne qui a connu de nombreuses promotions ; il ne peut s’agir non plus d’une critique du CPIE, qui vient de fêter son trentième anniversaire et a fait preuve de ses capacités à accueillir les élèves et à les initier à l’environnement ; enfin, on ne saurait considérer que le président du CPIE – qui vous parle en ce moment même – est visé.

Cette mesure est mesquine et discriminatoire, alors que la démarche administrative prouve que la nature du travail de cet enseignant correspond bien aux textes en vigueur. Je souhaiterais que vous entendiez cette question et que vous nous rassuriez sur l’application des droits à la retraite dans l’académie de Nancy-Metz.

M. le Ministre – Vous êtes un grand avocat, mais je dois rappeler les règles. Les fonctionnaires peuvent bénéficier d'une pension de retraite dès l'âge de 55 ans, à condition d'avoir occupé un emploi classé en catégorie active pendant au moins quinze ans. Cela concerne des emplois présentant des risques particuliers et des fatigues exceptionnelles. À l'éducation nationale, seuls sont concernés les instituteurs dans le cadre normal de leurs fonctions statutaires. C'est d'ailleurs la position constante rappelée par le service des pensions du ministère des finances.

L'intéressé, responsable pédagogique au CPIE Woëvre-Côtes de Meuse depuis 1979, ne peut bénéficier du classement en catégorie active, et ne rassemble donc pas les conditions pour bénéficier d'un départ à la retraite à 55 ans. Il ne s’agit pas là d’une mesure discriminatoire. Je peux tenter de me hisser au-dessus de la mêlée, Monsieur le député, mais je ne peux me mettre au-dessus des textes !

M. Jean-Louis Dumont – Nous nous orientons vers un contentieux. J’ose espérer que la justice administrative sera libre de dérouler – sans interférences – son analyse ! La situation de cet instituteur me paraît entrer dans le cadre des normes que vous avez rappelées. Les articles 8 et 11 du décret 85 936 du 16 septembre 1985 n’ayant pas été appliqués, l’instituteur peut être considéré comme en service actif. Il a travaillé sur le site des Éparges et a toutes les raisons de bénéficier du classement en catégorie active !

Peut-être l’auteur de votre réponse est-il celui-là même qui a refusé d’autoriser cette personne à faire valoir ses droits de départ à la retraite ? Tentons de prendre de la hauteur face à ces textes !

M. le Ministre – Dois-je comprendre que le président du CPIE a fait courir des risques particuliers à cet enseignant et lui a occasionné des fatigues exceptionnelles ? Je ne vois aucun inconvénient à ce que vous fassiez dire le droit, Monsieur le député. C’est tout à fait normal dès lors que vous pensez qu’il y a doute.

M. Jean-Louis Dumont - Merci, Monsieur le ministre !

Régime successoral des frères et sœurs

M. Yannick Favennec – Les frères et sœurs qui héritent bénéficient d'un abattement de 57 000 euros sur des droits de succession dans le cas où, célibataires, veufs, divorcés ou handicapés et âgés de plus de 50 ans, ils ont vécu avec le défunt pendant cinq ans au moins. Mais je souhaite vous citer le cas d'un frère et d'une sœur qui, ne s'étant pas mariés, vivent ensemble dans la maison familiale depuis plus de vingt ans : le survivant sera dans l'obligation de se séparer de ce bien familial, fruit du travail de leurs parents, mais également du leur, au décès de l'autre, pour payer les droits de succession. Comment justifier cette différence de traitement entre contribuables, selon le lien qui les unit, lorsqu'ils ont vécu toute leur vie ensemble ? Est-il envisageable d’appliquer aux frères et sœurs qui vivent ensemble le même régime qu’aux personnes mariées ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État Vous m’avez alerté à de nombreuses reprises sur cette situation, et je suis bien conscient de la difficulté, comme dans le cas particulier très touchant que vous évoquez.

Vous l’avez rappelé, il est effectué un abattement de 57 000 euros des droits de mutation sur la part de chaque frère ou sœur, célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps, à condition, d'une part, que le frère ou la sœur du défunt soit, au moment de l'ouverture de la succession, âgé de plus de 50 ans ou atteint d'une infirmité le mettant dans l'impossibilité de subvenir par son travail aux nécessités de l'existence ; et d'autre part, qu'il ait été constamment domicilié avec le défunt pendant les cinq années ayant précédé le décès. Cette mesure favorise la solidarité familiale en faveur des collatéraux les plus dépendants en raison de l'âge, de la maladie ou de la modicité de leurs ressources.

En outre, j’ai fait adopter par le Parlement, dans la loi de finances pour 2006, un abattement spécifique de 5000 euros applicable à toutes les mutations à titre gratuit réalisées entre frères ou sœurs. J’ai conscience que cela ne suffit pas toujours. Mais, pour l’instant, il n’est pas envisagé d'étendre le bénéfice de l’abattement applicable aux personnes mariées, aux successions entre frères et sœurs, car les deux situations juridiques sont trop différentes.

Il n’est pas facile de trouver une solution pleinement satisfaisante sur le plan moral et du point de vue de l’intérêt général. En cas de difficulté, un contribuable peut légalement demander un paiement fractionné des droits sur cinq années. J’ai donné pour instruction aux services de toujours examiner ces cas avec la plus grande bienveillance. L’étalement du paiement devrait, dans l'exemple que vous citez, permettre aux héritiers de ne pas avoir à céder les biens familiaux pour payer les droits.

Une réflexion globale sur les droits de succession est au cœur du programme législatif de notre formation politique, et vous y participez. Sachez que je suis à votre entière disposition pour aborder de nouveau le sujet au ministère lorsque vous le souhaiterez.

M. Yannick Favennec – Je sais que vous êtes bien conscient du problème, prêt à y travailler et à examiner le cas concret que j’ai évoqué. Je vous en remercie et je saisirai vos services sur ce cas. Il reste qu’une évolution globale s’impose, et nous y travaillons.

itinérance entre les réseaux de téléphonie mobile

M. Stéphane Demilly - L'absence de possibilité d'itinérance entre les réseaux des différents opérateurs de téléphonie mobile pose un problème, notamment en milieu rural. En effet, chaque opérateur installe des antennes relais qui ne fonctionnent que pour ses propres abonnés, à la seule exception des appels d'urgence. Ainsi, dans ma circonscription, il faudrait avoir trois abonnements – Orange, SFR et Bouygues – pour être sûr d’avoir une liaison... ce qui est évidemment absurde ! En milieu rural, sans même parler des zones blanches qui ne sont encore desservies par aucun réseau, de nombreuses zones ne sont couvertes, totalement ou partiellement, que par un seul opérateur téléphonique. Il ne se passe pas une semaine sans que des élus ou des habitants de ma circonscription, qui compte 195 communes, ne m'alertent sur ce problème.

Une solution serait d'imposer l'itinérance, c'est-à-dire la mutualisation des relais, permettant à chaque abonné, quel que soit son opérateur, d'émettre et de recevoir des appels dans une zone couverte par au moins une antenne.

Je ne méconnais pas la nécessité d'une saine concurrence entre opérateurs. Mais l'itinérance est déjà la règle pour les appels d'urgence, et elle existe aussi lorsque l'on voyage en Grande-Bretagne ou en Suisse. Dès lors, pourquoi ne serait-elle pas possible en France ? Quelle est la position du Gouvernement sur cette question de simple bon sens ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État Effectivement, c’est une question de bon sens que se pose toute personne qui traverse la France. Reconnaissons du moins que le fait même d’avoir un débat sur les zones grises prouve à quel point notre pays s’est modernisé. Elles concernent 4 % de la population métropolitaine, répartis sur environ 15 % du territoire. C’est encore trop, et cependant quel progrès ! Les habitants des zones concernées, sachant quel opérateur les couvre, ont pris un abonnement auprès de lui. Mais le problème demeure, en particulier pour les non-résidents.

Pour l'instant, la priorité pour les opérateurs est de résorber les zones blanches, où aucune couverture mobile n'existe. Il leur a été demandé de faire un effort supplémentaire pour la couverture des axes de transport prioritaires, ce qui fera prochainement l'objet d'une convention avec les pouvoirs publics.

La résorption des zones grises devrait intervenir dans un second temps. L'entrée en vigueur du décret du 7 mars 2006 relatif aux conditions d'établissement et d'exploitation des réseaux et à la fourniture de services de radiocommunications mobiles, incite les opérateurs à conclure des accords de mutualisation pour les infrastructures passives, les pylônes, afin de réduire leurs coûts dans les zones grises peu rentables.

Mais cela ne doit pas se faire au détriment d'une concurrence saine. Imposer, dès maintenant, des accords d'itinérance risquerait de décourager les efforts des opérateurs pour améliorer la qualité de leur réseau sur les zones grises. Grâce à la concurrence et à la politique menée pour la réduction des zones blanches, les opérateurs continuent, au contraire, à investir dans leurs infrastructures pour couvrir à ce jour plus de 98 % de la population.

Par ailleurs, le plan national de couverture des zones blanches constitue une incitation pour les opérateurs à investir dans les zones grises afin d'assurer la continuité de leur service sur le territoire en évitant une couverture dispersée.

Enfin, les nouvelles obligations de couverture négociées par les pouvoirs publics dans le cadre du renouvellement des licences d’Orange et SFR diminueront de fait l'ensemble des zones grises.

Il n’y a donc pas lieu d’envisager une obligation d'itinérance dans les zones grises tant que les opérateurs continuent à étendre la couverture de leur réseau, donc en tout état de cause pas avant 2008. Un bilan de la couverture mobile pourra être utilement réalisé à la fin de 2007.

M. Stéphane Demilly – Les opérateurs ont récemment été condamnés pour entente illicite. Il serait bon, dans le cadre du renouvellement des licences, que le Gouvernement les incite à signer une entente licite, sur l’itinérance. Le monde rural l’attend.

M. le Ministre délégué – C’est le cas.

numéros d’appel surtaxés des services publics

Mme Huguette Bello – Les numéros d’appel surtaxés se sont multipliés, et les services publics, même à vocation sociale, les ont adoptés. C’est le cas de la SNCF, de certains hôpitaux mais aussi des ANPE, des ASSEDIC, de la sécurité sociale, comme des opérateurs téléphoniques, des fournisseurs d'accès à Internet, des banques, assurances et d’un nombre croissant de services après-vente. Les usagers payent le surcoût, ce qui pénalise en particulier les plus modestes. Outre-mer, les abonnés sont encore plus pénalisés car ils n’ont pas accès aux numéros en 08 « à revenu partagé ». Les plaintes sont donc nombreuses.

Or, le projet de loi qui devait notamment instaurer l'obligation de gratuité du temps d'attente sur les services téléphoniques d'assistance des opérateurs téléphoniques, a été retiré. Cependant, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes vient de terminer ses consultations visant à améliorer, au bénéfice du consommateur, le fonctionnement des services en ligne téléphoniques. Dans ces conditions, le Gouvernement a-t-il l'intention de prendre des mesures, ce qui ne requiert pas forcément une nouvelle loi ?

L'article 55 de la loi du 22 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique prévoit d’attribuer des numéros gratuits aux services sociaux, et ceux commençant par 08 088 ont été réservés à cet usage. Mais le décret déterminant la liste des services sociaux concernés n'a jamais été publié. Va-t-il l’être prochainement ?

Ensuite, le Gouvernement suivra-t-il les préconisations de l'ARCEP qui, dans un avis de novembre 2006, propose de permettre l’utilisation par des services d'assistance technique des numéros commençant par 0800, 0805 et 0809, qui sont gratuits ?

Enfin, que comptez-vous faire pour inverser la tendance à exclure les départements d'outre-mer du développement des communications électroniques ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État J’admire votre talent : vous avez réussi à poser trois questions pour le prix d’une. On me pardonnera donc une réponse un peu longue.

En matière de numéros spéciaux, la règle veut que le prix facturé au consommateur comprenne un coût de communication et parfois un coût supplémentaire qui rémunère le fournisseur de service. Néanmoins, s’agissant de l’accès téléphonique aux services publics, seul le coût de la communication est facturé à l’usager, au tarif minimal de 0,12 euros par minute, la prestation de service étant intégralement prise en charge par la collectivité.

Pour les services sociaux, il convient de distinguer d’une part les numéros d’urgence – 15, 17, 18, 112, 115 et 119 – qui sont entièrement gratuits et non facturés, d’autre part les numéros commençant par 080, gratuits depuis un téléphone fixe, généralement compris dans les forfaits mobiles mais payants pour le destinataire, et enfin les numéros commençant par 08088, gratuits depuis les réseaux fixes et mobiles mais payants pour le service social qui devra rembourser aux opérateurs le coût de la communication, soit 0,46 euros par minute depuis un mobile. La majorité des autres télé-services sociaux relève de la compétence des collectivités locales, d’organismes paritaires agréés, d’établissements publics ou d’associations agréées, qui disposent pour la plupart d’un numéro d’appel géographique classique. Les communications sont alors facturées au coût d’un appel local.

Au terme de la consultation sur les services à valeur ajoutée conduite par l’ARCEP, j’ai lancé un audit de modernisation sur l’accès téléphonique aux services publics, en fonction duquel le Gouvernement proposera une tarification plus lisible et une liste des services tenus d’assurer la gratuité de l’accès téléphonique.

Deuxièmement, s’agissant des temps d’attente, M. Loos a chargé les opérateurs d’appliquer la gratuité des temps d’attente pour les demandes d’assistance technique avant la fin 2006. Le Conseil général des technologies de l’information devrait bientôt dresser un bilan permettant d’en envisager la généralisation.

D’autre part, les tables rondes sur le développement des communications électroniques outre-mer, réunissant opérateurs et organisations de consommateurs à l’initiative du Gouvernement, ont permis d’introduire la portabilité des numéros mobiles en dix jours dès le 1er avril 2006 dans les Antilles et en Guyane, avant même la métropole. Cette mesure s’appliquera à la Réunion dès le 1er juillet 2007. Par ailleurs, le Gouvernement entend compléter la connexion des DOM et de Mayotte au réseau mondial de câbles sous-marins de haut débit et assurer leur accès à l’internet rapide dans des conditions de tarif et de débit comparables à celles de la métropole. J’ajoute que nous soutenons le prolongement du câble Guadeloupe numérique vers la Martinique et la Guyane. À la Réunion, une baisse rapide des prix d’accès est envisagée, notamment grâce à la réduction du surcoût dû à l’éloignement.

L’État s’engage fortement auprès des collectivités dans le cadre du plan de couverture en haut débit pour les zones rurales : le taux de soutien dans les communes ultramarines peut atteindre 80 %. En matière de téléphonie mobile enfin, M. Loos travaille au dégagement des fréquences nécessaires au lancement de l’UMTS dans les DOM avec le ministère de la défense et l’ARCEP, qui devrait bientôt lancer une consultation publique sur les modalités d’attribution des autorisations.

Vous le voyez, les résultats sont à la hauteur des attentes de nos concitoyens, y compris outre-mer. Tout n’est certes pas parfait, mais nous avons accompli de grands progrès qui nous donnent une avance sur nos voisins européens. Les Français ont parfois tendance à trop regarder la moitié vide du verre ; voici une réponse qui montre combien nous vivons dans un grand et beau pays qui ne cesse de se moderniser !

Mme Huguette Bello – Je vous remercie. Je serai, comme toujours, attentive à ce que les actes suivent les paroles.

M. le Ministre délégué – C’est fait !

insertion professionnelles des personnes handicapées

M. Philippe-Armand Martin – Près d’un Français sur dix est en situation de handicap. S’y ajoutent les personnes à mobilité réduite, dont le nombre ne cesse de croître à mesure que la longévité augmente. Le chef de l’État a fait du handicap une priorité nationale. Ainsi, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances portait plusieurs mesures facilitant la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Néanmoins, leur insertion reste insuffisante. L’intégration professionnelle pose encore problème, dans le public comme dans le privé : on est trop souvent en deçà du seuil de 6 % de personnes handicapées prévu par la loi. De même, les avis des personnes handicapées ou à mobilité réduite en matière d’accessibilité aux lieux recevant du public ne sont pas suffisamment pris en compte – je pense en particulier aux sous-commissions départementales d’accessibilité, dont l’avis n’est que consultatif, et non conforme.

Comment le Gouvernement entend-il favoriser l’insertion professionnelle des personnes handicapées et à mobilité réduite ? Prendra-t-on leur avis conforme en matière d’accessibilité ?

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la familleJe sais combien cette cause vous tient à cœur. À preuve, votre engagement personnel dans l’élaboration de la grande loi du 11 février 2005, voulue par le président de la République et votée au terme d’un débat approfondi et d’une large concertation. La loi, pourtant, ne peut pas tout : elle doit être accompagnée d’une démarche volontariste qui garantit sa pleine mise en œuvre. Il faut même parfois aller au-delà, afin que la différence des uns ne se heurte plus à l’indifférence des autres.

En matière d’emploi, toute entreprise et toute administration de plus de vingt personnes est tenue d’employer au moins 6 % de personnes handicapées. Vingt ans après la mise en œuvre de cette mesure, nous n’avons progressé que de 2 % à 4 % : c’est un demi-succès, qui reste insuffisant. C’est pourquoi nous avons présenté, avec M. Larcher et les représentants associatifs, un plan pour l’emploi des personnes handicapées. Il ne suffit pas d’ouvrir des droits ; il faut aussi accompagner les uns et les autres, employés comme employeurs. Ainsi, l’État s’engage à ce qu’un chemin d’insertion soit proposé à toute personne handicapée dans les six mois suivant sa demande de prestation auprès d’une maison départementale. L’insertion professionnelle sera donc envisagée dès l’examen du projet de vie de la personne : une évaluation de ses capacités et des débouchés possibles en matière de formation ou d’emploi sera disponible d’emblée. Voilà une obligation prometteuse qui complète utilement un droit inscrit dans la loi.

S’agissant de l’accessibilité, il faut la généraliser à toutes les personnes à mobilité réduite ou atteintes d’un handicap sensoriel. Tous les lieux recevant du public doivent être mis en conformité d’ici huit ans. Une tournée automnale auprès de l’ensemble des acteurs locaux m’a convaincu que nos progrès sont encore trop lents. J’ai donc envoyé il y a quinze jours une circulaire volontariste à chaque préfet de France, afin qu’il mette en place sans délai toutes les commissions d’accessibilité qui manquent, et de veiller notamment à l’accès des préfectures et des universités. Tous les propriétaires d’établissements recevant du public seront informés de leurs obligations et tenus de présenter un calendrier précis des travaux nécessaires. Mettons les huit années que la loi nous laisse pour accomplir l’effort nécessaire à la mise en conformité de ces bâtiments, d’autant plus que d’autres travaux suivront. Il est essentiel que l’État, au motif que les maisons départementales peuvent s’en charger, ne se désengage pas en matière d’accessibilité – non plus d’ailleurs qu’en matière d’inscription à l’école publique ou d’accompagnement scolaire des enfants handicapés.

M. Philippe-Armand Martin – Je vous remercie d’avoir précisé cet engagement de l’État à remettre les personnes handicapées sur le chemin de l’intégration, et j’espère que les recommandations de ces personnes en matière d’accessibilité ne resteront plus vaines.

mise en place de la carte vitale 2 à mayotte

M. Mansour Kamardine – La douzième législature, qui touche à sa fin, permet enfin l’extension à Mayotte de la sécurité sociale, cette conquête essentielle de la Libération. Après le temps de l’élaboration des textes s’ouvre celui de leur application. Je souhaite donc appeler l’attention du ministre de la santé sur le retard apporté au déploiement de la carte Vitale 2 à Mayotte et, en conséquence, sur les difficultés que rencontrent les assurés sociaux mahorais pour bénéficier des prestations et des remboursements de la sécurité sociale. La nouvelle carte est pourtant plus efficace et, la photo de l'assuré y étant apposée, mieux sécurisée, ce qui n'est pas négligeable à Mayotte compte tenu des risques de fraude. Quelles mesures prendra-t-on pour accélérer sa diffusion à Mayotte, sachant que la situation actuelle n’est pas sans conséquences dommageables pour les assurés sociaux mahorais ? En l’état, ceux qui souhaitent faire valoir leurs droits en métropole se voient la plupart du temps opposer un refus. L'attestation d'affiliation à la caisse de sécurité sociale de Mayotte est accueillie par les professionnels de santé métropolitains avec scepticisme au mieux, et au pire par un rejet. Inversement, les personnes titulaires de la carte Vitale qui se rendent à Mayotte se voient nier la prise en compte de leur couverture dans les cabinets médicaux et dans les pharmacies. Tout laisse donc à penser que le décret du 26 août 2005 est soit méconnu par les praticiens de santé de métropole et de Mayotte, soit inapplicable. Pour veiller au respect du principe de la « continuité sociale » entre Mayotte et la métropole, pouvez-vous, Monsieur le ministre, préciser les mesures que vous entendez prendre pour que, dans l'attente de l'attribution de la carte Vitale 2 à tous les Mahorais, les attestations d'affiliation au régime émises par la caisse de sécurité sociale de Mayotte soient acceptées sur tout le territoire national et non plus à Mayotte seulement, et pour que la réciproque vaille pour tous les assurés sociaux qui se rendent à Mayotte ?

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la familleLe Gouvernement est à votre écoute, Monsieur Kamardine. La situation qui prévaut est en effet insatisfaisante mais l’ampleur de l’immigration à Mayotte, outre qu’elle rend les fichiers de la Caisse d’assurance maladie difficiles à tenir, impose la vérification de la validité des droits attribués. Conscient de la nécessité d’améliorer les choses, M. Bertrand a par deux fois appelé l'attention du directeur général de la CNAMTS à ce sujet, en avril puis à l’automne. La carte Vitale 2 doit être diffusée à Mayotte le plus rapidement possible, mais cela ne peut se faire sans que l’on ait contrôlé les droits de tous les attributaires – sans quoi l’apposition de la photo ne servirait à rien. Le déploiement de la carte Vitale 2 aura lieu à Mayotte avant même qu’il soit achevé en métropole mais, pour nous permettre d’y voir plus clair, une mission spécifique sera dépêchée sur place, et vous pourrez la rencontrer.

S'agissant de la prise en charge des frais de santé des Mahorais se rendant en métropole et de celle des Métropolitains se rendant à Mayotte, je rappelle que les remboursements sont opérés par la caisse d'assurance-maladie de rattachement. En outre, les métropolitains, comme les Mahorais, peuvent bénéficier de l'avance de frais dans les hôpitaux. Enfin, dès le mois prochain, une instruction explicitant le décret du 26 août 2005 portant coordination des régimes métropolitains et mahorais facilitera la reconnaissance des assurés sociaux de Mayotte par tous les professionnels et tous les établissements de santé métropolitains. Je ne doute pas qu’elle permettra de dénouer une situation à l’évidence insatisfaisante.

M. Mansour Kamardine – Je vous remercie, Monsieur le ministre, et j’attends beaucoup de la circulaire que vous nous avez annoncée pour le mois prochain. Sur le fond, je tiens à mettre en garde contre toute tentation qui consisterait à arguer de l’évolution de l’immigration – réelle, et que j’ai dénoncée avec suffisamment de vigueur, car j’estime qu’elle obère le développement de notre île – pour ne pas diffuser la carte Vitale 2 à Mayotte, alors même que ce nouvel outil permettrait de lutter contre la fraude.

Frais de transport des représentants des usagers du système de santé

M. Jean-Yves Cousin – J’appelle l'attention de M. le ministre de la santé sur les frais de déplacement engagés par les représentants des usagers des conférences sanitaires de territoires pour se rendre aux réunions amenant à la définition des projets médicaux de territoires. Les représentants des usagers étant bénévoles, ils aimeraient savoir si ces dépenses, dans certains cas importantes, ne pourraient être prises en charge par les agences régionales de l'hospitalisation. S’il en allait autrement, certains représentants des usagers, dont les moyens sont souvent limités, ne pourraient plus assurer leur mission entièrement et en toute indépendance. Cela vaut, en particulier pour un territoire de Basse-Normandie que vous connaissez bien, Monsieur le ministre, puisqu’il s’étend d’Avranches-Granville à La Ferté-Macé. Je tiens à rendre hommage à la grande implication des représentants des usagers dans la réflexion sur l’amélioration de l’offre de soins, à la qualité de leur travail et à leur disponibilité, particulièrement précieuses pour un territoire rural où l’accès aux soins, exigence de sécurité, doit être assurée comme en ville. Les défrayer relève, selon moi, de l’équité élémentaire.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la familleJe connais effectivement bien cette région, et je sais votre implication dans la conférence sanitaire que vous présidez. C’est en effet la moindre des choses que de défrayer les bénévoles qui s’attachent à contribuer à l’amélioration de l’offre de soins – que ce soit aux conseils d'administration des établissements de santé, au comité régional d'organisation sanitaire ou aux conférences sanitaires de territoire. J’ai donné pour instruction à l’ARH de Basse-Normandie de prendre en charge les frais de déplacement engagés par les usagers, comme le prévoit d’ailleurs le code de la santé publique. Je vous remercie d’avoir porté à ma connaissance les lenteurs qui se sont produites. Nous y avons immédiatement porté remède, si bien que les usagers de la conférence sanitaire du territoire pour lesquels vous intervenez ont bien été indemnisés.

M. Jean-Yves Cousin – Je vous remercie, Monsieur le ministre, de votre implication personnelle dans ce dossier. Je m’en félicite au nom de tous les médecins et de tous les directeurs de centres hospitaliers et de cliniques relevant de la conférence sanitaire, et je ne manquerai pas de faire part de votre réponse aux représentants des usagers.

ouverture d’un service de neurochirurgie au ch de valenciennes

Mme Cécile Gallez – Peuplée de 4 millions d'habitants, la région Nord ne dispose que d’un seul centre de neurochirurgie, au CHRU de Lille. Il en résulte un gros problème de saturation dans cette discipline, comme l’a du reste déjà relevé le schéma régional d’organisation des soins pour la période 1999-2004. La neurochirurgie est une activité qui relève désormais d'un niveau de planification interrégional, regroupant le Nord Pas-de-Calais, la Picardie et les deux Normandie. Or, le CH de Valenciennes, hôpital de référence pour le bassin de santé du Hainaut, et établissement de recours en amont du CHRU de Lille, semble particulièrement bien placé pour accueillir un service de neurochirurgie, tant au plan géographique que technique.

Cela permettrait d'améliorer l'accès à des soins neurochirurgicaux de qualité pour la population du sud-est du département du Nord et du nord de la Picardie, soit environ 800 000 habitants. Actuellement, les patients du bassin du Hainaut représentent 15 à 20 % des séjours en neurochirurgie du CHRU de Lille. Ces chiffres permettent d’estimer la clientèle potentielle du centre de Valenciennes à environ 600 patients, dont au moins 200 – et peut-être 300 – interventions crâniennes, ce qui est supérieur aux critères d'activité fixés pour la création d'un plateau technique. En outre, le CH de Valenciennes possède déjà un service de neurologie de très grande qualité – qui assure la prise en charge neuro-vasculaire – ainsi qu’un service d'explorations fonctionnelles neurologiques et un centre d'activité clinique de neuroradiologie doté d’un plateau complet d'imagerie médicale. Un secteur de surveillance en unité neuro-vasculaire est en cours de reconnaissance, avec pour objectif la prise en charge d’au moins 1 000 accidents vasculaires cérébraux pour l’ensemble du bassin du Hainaut. L'apparition d'un service chirurgical viendrait donc compléter l’offre existante.

Le centre hospitalier de Valenciennes a déjà identifié des locaux au sein de son bâtiment de haute technologie médicale, lequel ouvrira fin 2008. Un service de vingt lits d'hospitalisation et six places de réanimation neurochirurgicale a été intégré au plan directeur de l'établissement ; les moyens pour le diagnostic – IRM, scanners, TEP – sont en place, de même que les moyens humains nécessaires.

Toutefois, il est à craindre que le CH de Valenciennes ne soit même pas autorisé à déposer un dossier dans le cadre du schéma interrégional, au motif que ces schémas ne concernent que les implantations nouvelles. Or, en l’espèce, il ne s'agit pas d'une implantation nouvelle. Dans ces conditions, est-il envisageable que le centre hospitalier soit autorisé à ouvrir un service de neurochirurgie complet, dans le cadre de l’achèvement de son projet « Hôpital 2007 » ?

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la familleVous me posez une question très difficile dans la mesure où je suis tenu par les procédures que j’aie moi-même instituées. À ce titre, il est prévu que l’ouverture d’un nouveau service de neurochirurgie soit intégrée dans une démarche régionale, pour des raisons que chacun comprend. Il faut en effet veiller à la bonne articulation de l’offre de soins, vérifier la réalité des besoins, etc. Ce processus a été engagé et il doit aboutir à l’automne prochain. Je ne suis donc pas en mesure de vous apporter dès aujourd’hui une réponse définitive, la phase de concertation n’étant pas achevée.

Néanmoins, j’ai bon espoir. D’abord parce que l’hôpital du Hainaut est l’établissement de référence ; ensuite, vous soulignez à juste titre que le CHRU de Lille comporte une activité neurochirurgicale qui tourne à plein régime. Au moment où s’engage la réflexion concertée, il y a place pour l’examen de cette possibilité d’ouvrir un service de neurochirurgie dans l’établissement de référence du Hainaut. Il s’agit d’un bassin de population de 800 000 habitants, ce qui est considérable. Le CH de Valenciennes a vocation dans l’avenir à jouer un rôle majeur.

Nous devons cependant veiller à ce que cet établissement garantisse l’équilibre économique et financier de ses activités actuelles, et c’est dans ce cadre qu’une démarche de projet pour Valenciennes doit conforter sa place d’établissement de référence pour le Hainaut. Si aucune décision ne peut être prise à ce jour, je tenais, Madame la députée, à vous faire une réponse d’ouverture.

Mme Cécile Gallez – Je vous en remercie. Je me permets d’ajouter qu’il conviendra de tenir compte, au moment où seront prises les décisions, du fait que les trois arrondissements du Hainaut sont frappés de longue date par un chômage massif. Les gens n’ont pas beaucoup d’argent et la contrainte de se déplacer à Lille reste très lourde : il n’y a que 100 kilomètres à faire, mais les autoroutes sont souvent saturées, et tout le monde n’a pas les moyens de prendre une chambre d’hôtel pour rendre les choses plus commodes. L’ouverture du service soulagerait donc beaucoup de familles. Il me semble envisageable de créer un véritable partenariat avec le CHRU de Lille. Cela donnerait un nouvel élan à notre secteur, qui a été défavorisé pendant trop longtemps.

situation financière du groupe hospitalier du havre

M. Daniel Paul – Fin 2006, le groupe hospitalier du Havre présentait un déficit de 14 millions. Plus grand hôpital général de France, au cœur d'une région qui cumule pathologies et morbidité lourdes, le GHH est sous-doté en moyens humains et financiers. Il manque en effet 103 praticiens pour atteindre la moyenne nationale, et le service d’ophtalmologie fonctionne avec un mi-temps d’ophtalmologiste ! Radiologie et psychiatrie sont sinistrées. Dans la gestion des personnels, les situations précaires se multiplient. Comme la tarification à l’activité dépend du nombre d'actes – directement lié à celui des médecins en exercice, la dotation budgétaire est insuffisante. S’agissant des soins de suite, dont la Cour des comptes a pointé l’insuffisance, il manque 128 lits et, pour 10 lits de médecine et de chirurgie, Le Havre détient 1,82 lit de SSR et la Haute-Normandie 3,57, alors que la moyenne nationale est de 4,02.

La politique de l'ARH ignore les spécificités havraises et, loin de corriger les carences de la T2A, son action aggrave les difficultés et accentue les disparités. Alertés depuis plusieurs années, le ministère et l’ARH ignorent les interventions. Le président du conseil d’administration a lui-même indiqué que les autorités de tutelle ne donnaient pas suite à ses courriers. Ma dernière lettre, relative aux difficultés de la psychiatrie et aux menaces que fait peser la concurrence du privé, n’a pas reçu d’autre réponse qu’un accusé de réception ! Quant au directeur de l’ARH, il a osé répondre aux syndicats qu’il ignorait la dégradation de la situation de la psychiatrie… Face au scandale, on peut craindre que l’ARH ne veuille imposer une nouvelle réduction de l’offre de soins, dont la presse havraise de ce matin fait du reste déjà état. Il en résulterait une nouvelle baisse de l’activité, et, partant, des moyens alloués. La difficulté d’attirer et de retenir des médecins s’en trouverait renforcée, au point que l’on peut se demander si l’objectif n’est pas de favoriser le secteur privé au détriment de l’hôpital. Alors que les responsables du GHH n’ont fait qu’appliquer votre politique, l’établissement se trouve aujourd’hui en grande difficulté, comme l’attestent plusieurs procès-verbaux du conseil d’administration. C’est d’une autre politique dont il a aujourd’hui besoin, assortie de nouveaux moyens pour surmonter les difficultés actuelles.

Monsieur le ministre, au lieu d’opérer une nouvelle saignée sur les moyens de l’hôpital, allez-vous enfin prendre en compte la réalité havraise, en allouant au GHH une dotation exceptionnelle et en demandant à l’ARH de mieux prendre en compte nos spécificités ?

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la familleAvec tous les crédits mobilisés au fil des années – récemment encore – en faveur du GHH, je suis stupéfait que vous parliez de « saignée » ! En réalité, c’est d’une véritable transfusion de moyens que votre hôpital a bénéficié ! Le maire du Havre, en sa qualité de président du conseil d’administration, nous a effectivement alertés sur la situation de l’établissement et nous avons, bien entendu, répondu à ses demandes.

La situation financière du GHH, vous la connaissez : dans un passé récent, le groupe a connu des difficultés financières importantes et un plan de redressement a été mis en œuvre, dans le cadre d’un protocole signé en juillet 2002 pour les trois années suivantes. À ce titre, l’hôpital du Havre a reçu une dotation exceptionnelle de 15 millions…

M. Daniel Paul – Nous allons parler des chiffres !

M. le Ministre délégué – Fin 2005, grâce à la mise en œuvre de ce plan, l’établissement présentait une situation financière quasiment équilibrée. Las, pour 2006, un déficit de 11,3 millions a été inscrit au budget prévisionnel. Cette situation a fait l’objet, comme il est normal, d’une lettre d’observations de l’ARH en date du 5 juillet 2006, soit quatre ans après le lancement du plan de redressement. Ce document mettait en garde la direction du GHH sur le risque de dégradation d’une situation déjà fragile, notamment pour ce qui concerne l’objectif d’activité retenu et l’évolution des dépenses de personnel. Malheureusement, le suivi de l’exécution budgétaire de l’exercice 2006 a montré une dégradation rapide et importante, par rapport, même, à ces hypothèses de départ insatisfaisantes.

La situation imposait deux types d’actions. D’abord, accompagner l’établissement dans le cadre de la clôture de l’exercice 2006. Nous l’avons fait et le président du CA en a été informé. C’est en effet à ce titre que l’ARH a accordé 7,6 millions de crédits non reconductibles, encore complétés d’une dotation exceptionnelle d’1,8 million de provisions pour les investissements en cours. Le GHH est donc fortement soutenu, au point que beaucoup d’établissements français rêveraient d’un tel accompagnement, alors même que leur gestion aurait été moins critiquable…

Il convient ensuite d’identifier, en collaboration avec les gestionnaires de l’établissement, les causes du dérapage de 2006, en évaluant celles qui relèvent de la conjoncture et celles qui sont véritablement structurelles. Cette phase de diagnostic est indispensable pour dresser un état réaliste des dépenses et recettes pour 2007, dans le cadre de la montée en charge de la T2A. Elle sera le support de l’élaboration à court terme d’un plan d’action, en vue de consolider la situation du groupe. Nous n’avons pas d’autre objectif que de permettre à cet établissement de fonctionner…

M. Daniel Paul – On peut pourtant se le demander !

M. le Ministre délégué – Ne faites pas de procès d’intention à un Gouvernement qui mobilise autant de moyens ! Une réunion très récente entre l’ARH et la nouvelle équipe de direction médicale et administrative de l’établissement a du reste permis de tracer les grandes lignes du plan d’action et de fixer son calendrier. Enfin, j’ai décidé d’affecter un conseiller général des établissements de santé au suivi de ce plan. Il interviendra dans les prochaines semaines, en appui de la nouvelle direction et en lien étroit avec l’ARH.

Il faut bien sûr tenir compte des spécificités havraises. Le SROS pour 2006-2011 a prévu un développement important de l’activité de soins de suite et de réadaptation sur le territoire de santé du Havre – une croissance de 50 % par rapport à 2004, soit la plus forte augmentation de toute la région – et en hospitalisation à domicile. Pour les soins de suite et de réadaptation, un partenariat avec un site privé…

M. Daniel Paul – Nous y voilà !

M. le Ministre délégué – …permettrait de répondre rapidement aux besoins.

Dans le domaine de la psychiatrie, trois priorités ont été définies, en faveur d’une unité enfant-adolescent sur le site du Havre, d’une maison d’accueil spécialisée pour personnes handicapées et d’une nouvelle structure d’hospitalisation complète permettant de diversifier les modalités de réponse aux pathologies mentales. S’agissant de ce dernier point, un établissement privé a déposé une demande d’autorisation pour l’implantation d’un nouvel établissement. Cette demande est en cours d’instruction.

L’ARH discute actuellement avec le centre hospitalier les grandes lignes du futur contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens, qui s’attachera à consolider son offre de soins en confortant ses activités de base, parfois fragiles – radiologie, anesthésie, médecine –, mais aussi ses spécialités – cancérologie, filière neuro-vasculaire, pneumologie...

J’espère vous avoir convaincu que la situation du centre hospitalier du Havre fait l’objet d’une attention constante de l’ARH et de mes services. L’objectif est d’établir à très court terme un diagnostic partagé et de bonne foi, afin de mettre en œuvre un plan d’action concerté. Moins de cris et d’annonces à tout va : je souhaite pour le moment de la méthode, de la concertation et de l’objectivité. C’est le meilleur moyen pour le centre hospitalier de renouer avec une situation financière saine, gage de sa pérennité et de son développement au service de la population.

M. Daniel Paul – Votre réponse ne me surprend pas. Permettez-moi cependant de vous rappeler que le président du conseil d’administration du groupe hospitalier, votre ami M. Rufenacht, a lui-même estimé en octobre dernier « que la surdité de l’ARH à l’égard des préoccupations du groupe hospitalier du Havre » était « absolument intolérable », message qui s’adressait également au Gouvernement, et qu’il était « inacceptable de se réfugier dans une tour d’ivoire plutôt que de se réunir pour analyser les difficultés. » Je pourrais vous lire les dix pages du procès-verbal de ce conseil d’administration, qui infirment totalement ce que vous venez de nous dire. Vous avez fait le choix d’ignorer les spécificités de la région havraise ou, à tout le moins, de ne pas les prendre en compte. Il manque 103 postes de praticien dans cet établissement. Comment voulez-vous que la dotation budgétaire – dont le calcul dépend du nombre d’actes – soit suffisante ? En fait, vous réduisez les moyens de l’hôpital public pour mieux faire le lit du privé. C’est à cela que vous avez fait allusion avec ce fameux projet de partenariat : il s’agit tout simplement de faire un cadeau à la Générale de santé…

M. Albert Facon – Très bien !

M. Daniel Paul – …en lui permettant de s’emparer en catimini d’un certain nombre de secteurs. C’est pour cela que vous mettez le groupe hospitalier du Havre en difficulté !

M. Albert Facon – Très bien !

M. le Ministre délégué – La réponse que je viens d’entendre attente à l’honneur du Gouvernement.

MM. Daniel Paul et Albert Facon – C’est la vérité !

M. le Ministre délégué – Il existe depuis toujours dans notre pays une hospitalisation publique, une hospitalisation privée à but non lucratif et une hospitalisation privée. C’était déjà le cas sous la gauche ! (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste) Il ne s’agit pas de les opposer les unes aux autres, mais de favoriser au contraire coordination et convergence.

M. Daniel Paul – Les vases communicants !

M. le Ministre délégué – Le Gouvernement n’a rien d’autre en vue que l’intérêt général et la santé de nos compatriotes !

M. Axel Poniatowski – Très bien !

perspectives des services médicaux d’urgence dans l’aude

M. Jean-Paul Dupré – Comme vous le savez, les contraintes et les besoins des zones rurales en matière de santé sont bien différents de ceux des milieux urbains. Au sein même des territoires ruraux, on observe de grandes disparités, voire des inégalités. Certaines régions comptent en effet un plus grand nombre de zones défavorisées en la matière. Manque de médecins et difficultés d’accès aux structures de soins sont le lot commun de ces zones, parmi lesquelles la haute vallée de l’Aude, plus particulièrement ses hauts cantons – ceux d’Axat, de Belcaire et de Quillan. Les années à venir verront un vieillissement de la population, mais aussi le départ à la retraite de nombreux praticiens. Le nombre de médecins en activité en France passera en effet de quelque 205 000 actuellement à 186 000 en 2015. Cette diminution touchera particulièrement les territoires ruraux, qui ont donc besoin de mesures spécifiques. Au moment où l’on met au point la prochaine génération de SROS, il importe de confirmer la présence sur le secteur du SMUR de Quillan.

Il est en outre souhaitable de permettre aux médecins urgentistes de prodiguer dans les locaux qui les hébergent, entre deux interventions extérieures, des soins dits de « bobologie » – ce que la loi ne leur permet pas aujourd’hui. Cela aurait le triple avantage de soulager les médecins de garde, de désengorger les urgences des hôpitaux et des CHU et de permettre des économies d’échelle. Que compte faire le Gouvernement sur ces deux points ?

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la familleLe schéma régional d’organisation des services mobiles d’urgence et de réanimation – SMUR – de la région Languedoc-Roussillon a prévu le maintien de l’antenne de SMUR de Quillan, compte tenu de l’éloignement de la zone concernée. De ce fait, l’Aude dispose d’une excellente couverture de SMUR, avec quatre points de départ – Carcassonne, Narbonne, Castelnaudary et Quillan. C’est même le département qui offre la couverture territoriale la plus dense de la région. La faible activité de cette antenne de Quillan autorisait pourtant à s’interroger sur son maintien, mais la question ne se pose plus.

Pour ce qui concerne la possibilité pour les médecins urgentistes de l’antenne de pratiquer des actes ne relevant pas de la médecine d’urgence, la réponse est plus complexe. Les exigences réglementaires sont en effet strictes : il faut éviter qu’un médecin urgentiste soit empêché d’accomplir sa mission parce qu’il serait occupé à des soins « ordinaires ». Je suis cependant prêt à envisager certaines souplesses.

On peut par ailleurs concevoir une organisation de la médecine libérale qui garantisse la permanence des soins, dans un lieu qui pourrait être l’hôpital local. Et pour maintenir en la matière une offre suffisante alors que ce secteur se trouve éloigné des grands centres, un classement en zone déficitaire pourrait être décidé lors de la prochaine révision du zonage, qui interviendra sous peu. Si tel était le cas, les médecins auraient droit à des majorations conventionnelles, afin de favoriser leur maintien sur place, voire d’attirer de jeunes confrères.

M. Jean-Paul Dupré – Permettez-moi d’insister sur la nécessité d’assurer l’accès aux soins en milieu rural, et plus particulièrement dans haute vallée de l’Aude. Dans l’attente d’un classement en zone déficitaire – qui serait une excellente chose –, il serait vraiment souhaitable que les médecins urgentistes puissent prodiguer des soins à Quillan même, afin d’éviter des allées et venues vers les urgences de Carcassonne, qui sont débordées.

dysfonctionnements de la ligne A du RER

M. Axel Poniatowski – Les nombreux dysfonctionnements qui affectent la desserte par le RER A à partir de Cergy-Pontoise créent des nuisances permanentes et répétées pour les usagers de cette ligne.

Ces désagréments sont devenus quasi quotidiens. Depuis six mois, je me rends régulièrement sur place et j’ai pu moi-même les constater et recueillir les plaintes des habitants de Cergy et des alentours, légitimement exaspérés par les retards de trains ou les annulations de rames, dus à des défaillances techniques ; à l’absence ponctuelle de personnel ou à des actes de malveillance. Car vous imaginez les conséquences, pour nos compatriotes dépendant de ces transports, dans lesquels ils passent déjà deux à trois heures par jour lorsque le service fonctionne normalement ! Peut-on même encore parler de pérennité du service public ? Certains usagers se sont remis à utiliser leur véhicule personnel, contribuant à engorger davantage les autoroutes A15 et A86…

Face à cette situation, la région et l’État se renvoient la balle, la première estimant ne pas disposer de moyens suffisants, le second privilégiant depuis vingt ans le TGV, au détriment des trains de banlieue. Même si quelques améliorations ont été apportées sur le RER A en direction de Cergy – à savoir, quelques rames supplémentaires à deux niveaux ainsi qu’une fréquence accrue les week-ends –, elles restent insuffisantes. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre afin de remédier à ces dysfonctionnements ?

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer  Le trafic de la ligne A du RER a augmenté de plus de 15 % entre 2003 et 2006. Alors que cette ligne transporte désormais plus d’un million de passagers par jour, la ponctualité des trains s’est détériorée depuis 2006, du fait de retards en cascade difficiles à résorber en raison du niveau de fréquentation de la ligne.

La RATP a décidé de renouveler la voie aux points les plus sensibles, à partir de cette année et d’expérimenter un nouveau système d’alimentation en énergie électrique en vue de rendre plus fiable le fonctionnement de la ligne. En outre, elle a acquis en 2004 et 2005 quatorze rames supplémentaires à deux niveaux, pour 150 millions, et elle poursuivra l’effort en y consacrant 72 millions de fonds propres, de manière à rénover les trains les plus anciens, avec mise en service dès 2008.

L’organisation et le financement des transports de voyageurs en Île-de-France relèvent de la compétence du syndicat des transports d’Île-de-France, que préside, depuis 2005, le président de la région. Il appartient désormais aux collectivités membres du STIF de définir les priorités et de financer les améliorations de la desserte de la ligne A. Cela étant, les engagements de l’État sont maintenus, puisque celui-ci verse chaque année 547 millions aux collectivités membres du STIF, somme à laquelle s’ajoute une subvention de 400 millions pour la rénovation du matériel roulant ferroviaire de la SNCF. Ces montants traduisent la volonté de l’État d’accompagner les efforts du STIF.

M. Axel Poniatowski – La ville nouvelle de Cergy-Pontoise est en pleine explosion démographique, et j’espère que les moyens seront à la hauteur. Les usagers acceptent d’autant moins les dysfonctionnements qu’ils subissent que les lignes de Poissy et de Saint-Germain-en-Laye fonctionnent, quant à elle, normalement.

desserte ferroviaire de melun et réorganisation de la ligne d du rer

M. Jean-Claude Mignon – Monsieur le ministre, je souhaite une nouvelle fois appeler votre attention sur l’amélioration de la desserte ferroviaire de l’agglomération melunaise, ainsi que sur la réorganisation de la ligne D du RER.

S’agissant du premier dossier, vieux de plus de dix ans, des mesures concernant les transports ferroviaires doivent compléter le projet de contournement routier de l’agglomération. C’est pourquoi j’ai évoqué à plusieurs reprises ici-même la réalisation de la tangentielle ouest-sud, le transport en commun en site propre entre Melun et Sénart, le contrat de pôle et la nouvelle gare de Dammarie-Lès-Lys, l’arrêt supplémentaire de trains grandes lignes à la gare de Livry-sur-Seine, l’exécution du schéma directeur des liaisons douces, ainsi que l’arrêt de trains directs à la gare du Mée-sur-Seine.

La réalisation de ce dernier projet devient de plus en plus urgente. Chaque jour, l’afflux d’usagers en gare de Melun cause des difficultés de circulation et de stationnement. Les ponts de la Seine constituent un « goulot d’étranglement » pour les usagers venant du nord de l’agglomération, à quoi s’ajoute la difficulté de stationner aux abords de la gare, alors que, dans le même temps, la gare du Mée-sur-Seine, peu fréquentée, est d’accès aisé et offre plus de 300 places de parking gratuites. Le bon sens voudrait donc que les deux gares bénéficient alternativement de l’arrêt des trains grandes lignes directs jusqu’à Paris. Cette solution, soutenue par l’ensemble des élus de l’agglomération, n’occasionnerait pas de perte de temps pour les usagers en provenance ou à destination de la région Bourgogne. Je vous demanderai donc de bien vouloir intervenir auprès du STIF, de la SNCF et de RFF, afin que les études soient enfin lancées.

En second lieu, le plan d’urgence 2006 pour la ligne D du RER ne répond que partiellement à l’attente des usagers. Les solutions proposées par le STIF, la SNCF et RFF condamnent la ligne « Melun Vallée », ce qui augmentera le trafic sur la rive droite de la Seine, déjà saturée. Quant aux améliorations, elles ne sont envisagées que pour 2012 ; d’ici là, les usagers seront contraints de prendre les « petits gris », ces rames d’un autre âge qui circulent encore. Enfin, la réorganisation de la ligne doit tenir compte de la sécurité des voyageurs ; pour l’emprunter moi-même parfois tard dans la nuit, je vous assure que le sentiment d’insécurité des usagers est pleinement justifié. Quelles sont les mesures prises pour que la réorganisation de la ligne D réponde à ces attentes ?

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer  La ligne D du RER souffre de plusieurs difficultés, dont la plus importante réside dans le fait qu’elle s’étend sur 160 kilomètres, avec 57 gares, ce qui rend la régularité du service plus problématique. En tant qu’autorité organisatrice, le STIF est responsable de la définition du niveau de service sur les lignes, notamment concernant la desserte de la gare du Mée ; je me suis fait, sur le sujet, l’écho de votre proposition intéressante auprès du STIF et de la SNCF.

Afin d’améliorer la régularité des trains, le STIF a approuvé, à la fin de 2006, un schéma directeur pour le RER D, qui propose trois scénarios de renforcement de la desserte du plateau de Sénart à l’horizon 2015. Ces scénarios feront l’objet d’une concertation publique cette année. Pour soutenir cette démarche, l’amélioration de la desserte sur la ligne D pourrait faire partie des projets retenus dans le cadre du prochain contrat de projets État-région Île-de-France, en cours de négociation.

Les rames dites « petit gris » ont déjà été retirées, en juin 2005, de l’itinéraire passant par Combs-la-Ville, aux heures de pointe. Au départ de Melun, il ne subsiste plus que quelques trains de ce type. Ces rames ne disparaîtront complètement qu’après la livraison de la nouvelle automotrice Transilien, dont le marché a été conclu en novembre 2006 par la SNCF et qui commencera à être livrée dès 2009. Sur la ligne D, le remplacement se fera par des rames à deux niveaux Z2N existantes.

Simultanément, ces rames Z2N sont en cours de rénovation. La première rame ainsi rénovée circule sur la ligne D depuis le 12 janvier. La rénovation de dix-sept autres rames est prévue en 2007. Le programme, prévu sur cinq ans, concernera au total 137 rames et sera financé à parts égales par la SNCF et le STIF.

L’État s’est engagé à verser au STIF une aide de 400 millions pour le financement du matériel roulant ferroviaire, aide qui servira aussi bien à l’acquisition des nouvelles automotrices qu’à la rénovation des Z2N.

M. Jean-Claude Mignon – Il est en outre absolument nécessaire de réaliser la tangentielle ouest-sud. Ma proposition présente l’intérêt de ne rien coûter : il suffirait que le STIF accepte qu’un train direct sur deux soit à destination de la gare de Melun-Val-de-Seine Nord, située sur la commune du Mée-sur-Seine.

conséquences des plans de prévention des risques sur la valeur des terrains

M. Lionnel Luca – Les plans de prévention des risques – plus particulièrement des incendies – concernent un grand nombre de communes dans mon département et dans celui du Var. Or l’élaboration de ces PPRI se fait sans concertation suffisante avec les maires et la définition de « zones rouges » a particulièrement lésé les propriétaires : qand leurs immeubles ont été détruits, ils ne peuvent reconstruire, et même s’ils n’ont jamais connu de sinistre, ces terrains ne peuvent qu’être bradés. Cette question commence à prendre de l’ampleur : des propriétaires se sentant spoliés se constituent en associations, nombre d’entre eux considérant que l’octroi d’un permis de construire dans ces zones devrait valoir droit à indemnisation.

Je n’ignore pas la jurisprudence du Conseil d’État en la matière et je sais que vous en ferez état. Mais je souhaiterais que les PPRI puissent être rediscutés avec les maires, qui connaissent la réalité du terrain et la nature des spoliations. En outre, si le droit français ne reconnaît pas ces spoliations, peut-être la Cour de justice européenne le fera-t-elle.

M. Thierry Mariani – Très bien ! Il s’agit là d’un vrai problème !

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer Vous avez vous-même évoqué la jurisprudence constante : les plans de prévention, annexés au POS et au PLU, sont opposables aux demandeurs d'autorisations de construire et ne peuvent donner lieu à indemnisation. Par ailleurs, il faut garder à l’esprit qu’un PPRI traduit une réalité concrète et un risque réel, lequel affecte bien la nature de la propriété.

L’État doit, il est vrai, définir les périmètres en concertation avec les élus afin que les risques soient pris en compte de la manière la plus réaliste possible. Je rappellerai aux directeurs départementaux de l’équipement et aux préfets cette nécessité, afin que l’État assure au mieux la sécurité des citoyens.

M. Lionnel Luca – Merci de bien vouloir rappeler à l’administration l’intérêt d’une telle concertation. Reste le problème des propriétaires qui ont acquis leur terrain en toute légalité il y a vingt ou trente ans, et qui subissent du jour au lendemain un lourd préjudice. Cette question devra être tranchée, si ce n’est au niveau national, par une instance européenne.

limitation des nuisances sonores du trafic aérien à orly

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet – Une nouvelle fois, je souhaite appeler votre attention sur le projet d’élévation du niveau d’interception de l’axe ILS par les avions qui approchent Orly par vent d’est. Les habitants de ma circonscription subissent de fortes nuisances dues au trafic aérien intense, notamment ceux du centre-ouest de l’Essonne pour qui la modification des couloirs aériens, en mars 2002, a eu un impact très négatif. Sur cette zone, les avions en provenance du sud-est interceptent l’axe ILS à 3 000 pieds et provoquent, en virant, de très importantes nuisances sonores. C’est la raison pour laquelle je sollicite depuis plusieurs années votre ministère afin que, comme sur l’est d’Orly, les avions puissent intercepter l’axe ILS à 4 000 pieds.

Vous avez confié une première étude d’impact à l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires en février 2006. L’autorité a demandé l’étude d’une solution alternative, avec un déplacement du point d’entrée sud-est, le « Molek ». Pourriez-vous nous communiquer l’état d’avancement de ces études, nous dire quand les résultats seront disponibles et quand l’enquête publique – préalable nécessaire à la modification de l’altitude des avions – pourra être lancée ?

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer  Cette question, sensible, est aussi très complexe. Nous devons à la fois réduire les nuisances sonores et assurer la sécurité des appareils en phase d’atterrissage.

J'ai demandé à la direction générale de l'aviation civile d’organiser une concertation de proximité – à laquelle vous avez participé activement et je vous en remercie – afin d'adapter l'actuel dispositif de circulation aérienne. Cette concertation a permis de déboucher sur de vraies solutions, étant entendu que ces changements peuvent prendre du temps, du fait de la complexité du trafic aérien.

Au cours de récentes réunions tenues dans votre circonscription, les services de la sécurité aérienne ont présenté le résultat des nouvelles procédures adoptées à l'arrivée sur Orly pour les atterrissages par configuration de vent d'est. Le relèvement des interceptions de l'ILS pour les arrivées en provenance du sud-ouest a permis de diminuer d'environ 3 décibels le bruit reçu au sol sous les trajectoires des avions les plus courants, soit une réduction de moitié de la pollution sonore.

Pour les vols en provenance du sud-est, la situation est plus complexe car un relèvement similaire impliquerait d'infléchir les trajectoires actuelles, afin d'éviter tout risque de face à face entre les vols arrivant du sud-ouest et les vols arrivant du sud-est. J’ai saisi l'an dernier l'ACNUSA d’un premier projet de la DGAC, afin que l'autorité puisse se prononcer sur une méthode d'évaluation de l'impact sonore des modifications envisagées. La présidente de l'ACNUSA a souhaité que ce dossier soit complété avec des hypothèses alternatives, analysées tant du point de vue de la sécurité que de leur impact pour les populations.

L’une des hypothèses examinées consisterait à déplacer vers le sud la route suivie pour rejoindre le point d'entrée « Molek », depuis le point final d'interception de l'ILS, tout en relevant au maximum cette trajectoire – au-dessus des 1 800 mètres actuels. La DGAC présentera à l'ACNUSA les études techniques et environnementales relatives à cette hypothèse d'ici à fin juin. La phase de consultation des élus et des associations de riverains débutera alors et je veillerai personnellement à ce que l’enquête publique soit terminée au début de l’année 2008.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet – Je vous remercie de ces précisions importantes, notamment sur le calendrier. Vous avez déjà fait relever le niveau d’interception de l’axe ILS concernant les avions en provenance du sud-ouest, qui n’ont pas à faire de virage. Il faudrait le faire pour ceux qui viennent du sud-est et qui, en virant, ouvrent leurs volets, ce qui est le plus bruyant.

Aménagement de la déviation de Chepy dans la marne

M. Bruno Bourg-Broc – La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a transféré plus de 17 000 kilomètres de routes nationales aux départements. Le financement des opérations inscrites dans les contrats de plan État-Région sera assuré conformément aux engagements pris. Mais pour la suite, le principe retenu est de mettre fin aux financements croisés, État et départements assumant chacun leurs responsabilités pour la construction de nouvelles routes.

L’État va donc concentrer son action sur le réseau qui accueille les trafics de longue distance et assure la desserte des grandes agglomérations et des pôles économiques importants. Les contrats de projets 2007-2013, en cours de négociation, ne comportent plus de volet routier et l’État a décidé d’établir une liste prioritaire d’infrastructures routières à réaliser sur l’ensemble du territoire.

La mise à deux fois deux voies de la RN 44 au sud de Châlons-en-Champagne, ou déviation de Chepy, est un projet en attente de financement depuis plus de vingt ans. Pourtant, cet axe supporte près de 25 000 véhicules par jour en période de pointe et les accidents y sont nombreux, souvent tragiques.

Une déclaration d’utilité publique prise en Conseil d’Etat en 1995 a cessé d’être valide en 2005, faute d’engagement des travaux dans le délai réglementaire. Une autre a été prise par le préfet le 16 mars 2006. Tout cela coûte cher, et on se demanderait presque si c’est vraiment utile, quand on constate que le dossier n’avance pas, à la grande déception des élus et des associations de riverains et d’usagers.

Il faut maintenant réaliser cette déviation. Il y a quelques mois, en réponse à la consultation lancée par votre ministère, le préfet de la Marne en a fait la première priorité pour notre département. Il s’agit de relier deux sections à deux fois deux voies distantes d’environ sept kilomètres, entre Châlons-en-Champagne et Pogny. Cette déviation rendrait la tranquillité à quatre 4 communes, Sarry, Moncetz-Longevas, Chepy et Saint-Germain-Ia-Ville où le trafic poids lourds est très élevé et qui sont traversées par un véhicule en moyenne toutes les 4,5 secondes. C’est aussi un maillon essentiel dans nos liaisons, insuffisantes, avec les pays d’Europe du Nord.

Assurer la sécurité des usagers, la qualité de vie des riverains, la continuité des grands axes sont des priorités pour nous comme pour le Gouvernement. Cet aménagement y concourt et, à ce titre, a vocation à figurer dans le programme d’investissement routier de l’État. Avez-vous l’intention de l’y inscrire ?

M. Patrice Martin-Lalande – Très bien.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer  Je tiens tout d’abord à rappeler que, bien que cette opération ne figure pas à l’actuel contrat de plan, les études de déviation et une étude de diagnostic sécurité ont été menées sur cette section de la RN 44 qui est encore à deux voies, entre Châlons-en-Champagne et Saint-Germain-la-Ville. Elles ont permis d’identifier des opérations à réaliser par priorité pour renforcer la sécurité et améliorer la qualité de vie des habitants.

Dans le cadre des programmes régionaux d’aménagement et de sécurité, des accès agricoles ont été aménagés ou supprimés en 2002 et un certain nombre d’améliorations techniques ont permis de ramener le nombre d’usagers roulant au-dessus de la vitesse réglementaire à 8,6 % en 2005 contre 12,5 % en 2004. Un giratoire sur la RN44 pour améliorer l’accès à Saint-Germain-la-Ville a été achevé à la fin de l’an dernier dans le cadre du contrat État-région, et la signalisation a été améliorée.

Néanmoins, compte tenu de l’importance du trafic, notamment de poids lourds, la déviation de Chepy, déclarée d’utilité publique en mars 2006, fera partie des opérations que je soumettrai prochainement à la concertation locale des élus, dans le cadre de l’élaboration des programmes de développement et de modernisation des itinéraires qui succéderont au volet routier des contrats de plan. Pour l’État, elle mérite de figurer parmi les opérations à réaliser à court terme.

M. Bruno Bourg-Broc – Je vous remercie. L’État partage donc notre point de vue sur la nécessité de réaliser rapidement cette opération. Je prends bonne note de votre intention de l’inscrire en priorité au programme de développement des itinéraires et nous attendons la confirmation au plus vite (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Devenir de la proposition de loi visant à sanctionner
la négation du génocide arménien

M. René Rouquet – Alors que se perpétuent des manifestations visant à nier le génocide arménien de 1915, il est nécessaire de poursuivre, au Sénat, le processus entamé à l’Assemblée nationale pour sanctionner le négationnisme. En effet, grâce aux efforts conjoints des élus de la République et des associations de la diaspora arménienne, le 12 octobre, avait été votée la proposition de loi socialiste, sanctionnant la négation du génocide de 1915, ce malgré les réticences du Gouvernement, et les pressions, inadmissibles, exercées par la Turquie. Ce texte complétait le processus engagé depuis 1998, et qui a abouti à la promulgation, le 29 janvier 2001, de la loi par laquelle la France reconnaît publiquement ce génocide.

Mais il est toujours impossible de tirer les conséquences pénales de cette loi pour sanctionner les négationnistes. Nous sommes donc nombreux à demander, pour que la parole donnée soit respectée, que soit examinée par le Sénat la proposition de loi contre le négationnisme, parce que celui-ci est, « au sens strict, le stade suprême du génocide » selon le mot de Bernard-Henri Lévy. Quand le Gouvernement entend-il inscrire ce texte à l’ordre du jour du Sénat ?

Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes M. Douste-Blazy vous prie d’excuser son absence et m’a chargée de vous répondre.

Notre position sur la proposition de loi visant à pénaliser la négation du génocide arménien est inchangée. Le ministre des affaires étrangères le 18 mai et moi-même le 12 octobre l’avons rappelée ici-même. Le Président de la République ainsi que plusieurs autres membres du gouvernement se sont également exprimés sur ce sujet. Je vous renvoie à tous ces propos, que nous maintenons.

Le président arménien, Monsieur Kotcharian, est actuellement en visite en France. Le mois dernier, les obsèques du journaliste turc d’origine arménienne, Hrant Dink, victime d’un assassinat lâche et ignoble, ont été l’occasion de nouveaux contacts entre les autorités arméniennes et les autorités turques. Celles-ci ont bien compris la nécessité de progresser dans le travail de mémoire et d’approfondir entre elles un dialogue que nous soutenons.

C’est ainsi que la cause que nous défendons tous pourra enfin trouver son aboutissement et sa reconnaissance.

M. René Rouquet – J’attendais un engagement d’inscrire l’examen de cette proposition à l’ordre du jour du Sénat le plus rapidement possible. Pendant la campagne électorale, ceux qui ont porté ce texte ne manqueront pas de s’étonner qu’après le vote par l’Assemblée, on n’ait pas encore fait ce geste. Hier encore, le président Kotcharian soulignait l’importance de la reconnaissance internationale du génocide, sur le plan moral, mais aussi pour la paix et la sécurité de son pays. Je sais que vos propos sont sincères, mais j’attendais ce geste du Gouvernement.

dépollution du site de l’ancienne école marie curie à nogent-sur-marne

Mme Marie-Anne Montchamp – L’ancienne école primaire Marie Curie de Nogent-sur-Marne, construite en 1969 sur le site d’une usine où les époux Curie manipulaient du radium et de l’uranium, a été provisoirement fermée au début de 1996, après toute une série de mesures d’irradiation et de travaux d’isolation. Rouverte en mai 1996, elle fut définitivement fermée en juin 1998 – le dossier n’ayant pas été entièrement éclairci aux yeux des riverains, la ministre responsable, Mme Royal, appliquait ainsi le principe de précaution. Pourtant, en octobre dernier, une modification du plan d’occupation des sols a autorisé un promoteur immobilier privé à construire une centaine de logements sur ce terrain, à charge d’en assurer la dépollution, alors même qu’un responsable de l’Autorité de sûreté nucléaire ait récemment affirmé que l’on ne pouvait garantir le nettoyage complet d’un tel site. Aujourd’hui, les riverains et les associations environnementales s’inquiètent de l’efficacité d’une dépollution effectuée par un opérateur privé. Dans quelles conditions cette opération lui sera-t-elle confiée, et quel sera le cahier des charges de la commune ? Comment peut-on, d’autre part, garantir une information de qualité aux riverains sur le nettoyage, l’acheminement et le stockage des déchets extraits ?

Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes Je vous prie d’excuser l’absence de Mme Olin, retenue à Bruxelles, dont je vous transmets la réponse. La fermeture de l’école Marie Curie, construite sur un terrain pollué, permet de garantir la sûreté environnementale du site. Pourtant, la mairie de Nogent-sur-Seine souhaite réhabiliter ce terrain pour y construire des logements. Naturellement, une dépollution préalable est nécessaire, et c’est au promoteur de la prendre en charge. Afin d’en préciser la faisabilité, la mairie de Nogent a d’ores et déjà commandité des mesures de radioactivité et des forages auprès de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire. Par ailleurs, l’Agence nationale de gestion des déchets radioactifs, l’ANDRA, a fixé un niveau de dépollution nécessaire à la réhabilitation des sols. S’il n’est pas atteint, le permis de construire sera refusé à l’opérateur.

J’ajoute que Mme Olin a transmis, le 8 février dernier, une circulaire à tous les préfets afin d’améliorer l’action de l’État et l’information des acteurs en matière de sols pollués. En vertu du principe de précaution, une attention particulière doit notamment être portée aux établissements accueillant des enfants, afin que la situation de l’école Marie Curie ne se reproduise plus.

Mme Marie-Anne Montchamp – Je vous remercie. J’insiste en effet sur l’importance de garantir une information de qualité aux riverains car, sur des questions si complexes, la rumeur et l’incompréhension brouillent souvent le débat.

regroupement des juridictions de saint-dié-des-vosges

M. Gérard Cherpion – Comme je l’ai déjà fait le 4 avril dernier, je souhaite interroger M. le Garde des Sceaux sur le regroupement des juridictions de l’arrondissement de Saint-Dié. Le tribunal d’instance et le conseil des prud’hommes, actuellement installés dans une maison d’habitation dont l’état est déplorable, doivent être relogés – votre ministère en étudie d’ailleurs la possibilité. Le déménagement de la chambre de commerce et d’industrie libèrera justement des locaux en centre-ville, de même que la construction d’un nouveau commissariat de police. Ainsi, dès l’an prochain, l’ensemble des juridictions pourront se regrouper au sein d’une cité judiciaire. Où en est ce projet ?

Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes Je vous prie d’excuser M. Clément qui m’a chargé de vous répondre à sa place. Le palais de justice de Saint-Dié-des-Vosges a trois ailes : l’une héberge le tribunal de grande instance et le tribunal de commerce, l’autre est libre depuis le départ de la chambre de commerce et d’industrie, et la troisième sera libérée en 2008 après le déménagement du commissariat de police dans ses nouveaux locaux. D’ores et déjà, des études de faisabilité du regroupement des quatre juridictions de premier degré sur ce site ont été effectuées. Les besoins immobiliers du tribunal de grande instance, du tribunal d’instance, du conseil des prud’hommes et du tribunal de commerce sont d’ailleurs susceptibles d’être satisfaits par la seule extension à l’aile auparavant occupée par la chambre de commerce et d’industrie. C’est sur cette base que le programme technique a été engagé. Les conditions juridiques d’occupation de ces locaux seront précisées dans les prochaines semaines. Néanmoins, ce projet ne pourra être financé en 2007, mais le sera plus vraisemblablement en 2008.

M. Gérard Cherpion – Je vous remercie de cette réponse : le calendrier envisagé répond à nos attentes.

stationnement des gens du voyage

M. Gilbert Meyer – Ma question, à laquelle j’associe mon collègue Martin-Lalande, s’adresse au ministre d’État, ministre de l’intérieur. La loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure prévoit de sanctionner le stationnement sauvage des gens du voyage quand les communes se sont dotées d’un schéma départemental d’accueil. Or, bien souvent, les places de stationnement créées restent vacantes, car les gens du voyage préfèrent s’installer ailleurs, gênant ainsi l’utilisation d’espaces publics – voire privés. La sanction est impossible si la commune n’a pas satisfait aux obligations du schéma départemental, car la justice ne reçoit alors aucun recours, mais comment encourager les communes à investir pour satisfaire à ce schéma si les places existantes, créées à grands frais pour accueillir les nomades, restent inoccupées ? Dès lors, il convient de contraindre les gens du voyage à occuper les places disponibles, et de sanctionner tout manquement à cette obligation dès lors que des places restent vacantes. Il faut, pour cela, modifier la procédure en référé.

J’ajoute que le train de vie des gens du voyage est souvent sans rapport avec les revenus qu’ils déclarent : nombre d’entre eux touchent le RMI alors qu’ils roulent en voiture de luxe… Il est indispensable d’accroître la transparence des déclarations. Que fera le Gouvernement pour lutter contre ces abus ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire  L’article 9 de la loi du 6 juillet 2000 relatif à l’évacuation forcée en cas de violation des règles de stationnement des gens du voyage est largement modifié par le projet de loi de prévention de la délinquance que le Parlement adoptera ce jeudi. Le préfet pourra désormais procéder d’office, sur demande du maire et sans autorisation préalable du juge judiciaire, à l’évacuation forcée de terrains situés sur le territoire d’une commune satisfaisant à ses obligations en matière d’accueil des gens du voyage.

La mise en demeure du préfet ne pourra toutefois intervenir que si le stationnement porte atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques. Les droits des gens du voyage ne sont pas méconnus pour autant, puisqu’ils peuvent introduire un recours suspensif devant le tribunal administratif, celui-ci ayant alors l’obligation de statuer dans un délai de 72 heures.

Le projet vise également à faire bénéficier de cette procédure d’évacuation administrative les communes qui n’ont pas encore satisfait à leurs obligations légales mais qui remplissent les conditions permettant d’obtenir la prorogation de deux ans prévue par la loi du 13 août 2004, ainsi que celles qui disposent d’un emplacement provisoire agréé par le préfet.

Ces nouvelles dispositions donneront aux communes les moyens de réagir plus rapidement et plus efficacement aux stationnements «sauvages» des gens du voyage, tout en accélérant la réalisation des aires d’accueil prévues par le schéma départemental.

Vous évoquez également les dispositifs permettant d’enquêter sur les éléments du train de vie des gens du voyage. Je tiens à préciser qu’il ne s’agit pas de stigmatiser une catégorie particulière de citoyens…

M. Gilbert Meyer – Aucunement.

M. le ministre délégué  …mais de faire que les abus de certains soient sanctionnés comme toute autre forme de délinquance. En ce domaine, les services plus spécialement chargés de mener ce type d’investigations sont, outre les unités de police judiciaire de la police et la gendarmerie nationale, les groupements d’intervention régionaux. Depuis 2002, vingt-neuf GIR ont été installés : un dans chaque région et, pour l’Île-de-France, un dans chaque département. Ils ont pour mission de lutter contre tous les trafics alimentant l’économie souterraine, contre des actions violentes concertées et toutes les formes de délinquance endémique. Ce sont des unités pluridisciplinaires qui associent aux services de police et de gendarmerie différentes administrations – services fiscaux, douanes, concurrence, consommation et répression des fraudes, travail et emploi – impliquées dans la lutte contre la délinquance organisée. Outre les GIR, agit aussi l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante, qui dispose de groupes d’enquête à compétence nationale et qui est chargé, d’initiative ou sur saisine des magistrats, de démanteler les réseaux de criminels et délinquants itinérants en coordonnant l’action des unités de gendarmerie et des services de police.

Vous le constatez, depuis 2002, nous avons pris toute la mesure des problèmes que posent la délinquance itinérante et une partie infime des gens du voyage, ceux qui se permettent d’occuper sans droit ni titres des propriétés publiques ou privées. Jusqu’à présent, les possibilités d’intervention administrative faisaient défaut. Après que le projet de loi sur la prévention de la délinquance aura été adopté, cette semaine, les communes ne devront plus attendre une décision judiciaire pour pouvoir agir. Comme vous, je comprends que nos concitoyens s’interrogent lorsqu’ils voient certains individus rouler dans de grosses berlines qu’eux-mêmes ne pourront jamais s’offrir, même au terme d’une vie de labeur. La synergie que nous avons organisée entre les services, parce qu’elle contribue à éclairer la provenance des ressources qui ont permis de telles acquisitions…

M. Patrice Martin-Lalande – Ce qui accroît la transparence.

M. le Ministre délégué – …permettra que l’on retrouve des repères et aidera les maires excédés de voir occupées sans droit ni titres propriétés publiques et parfois privées.

M. Gilbert Meyer – Cette question aura donc permis d’aborder un sujet de pleine actualité, puisque les solutions aux difficultés évoquées se trouvent dans le projet que notre Assemblée est appelée à adopter cette semaine. Je salue les progrès accomplis depuis 2002 et je vous remercie de vos réponses très claires, qui montrent que le sujet vous tient à cœur. Je souhaite toutefois que les préfets, lorsqu’ils sont saisis par un maire, reçoivent consigne de répondre à leur requête lorsque subsistent des places vacantes sur des terrains nouvellement aménagés. De même, s’agissant de la détermination de la provenance des ressources, il est bon d’entendre rappeler quelles structures ont été créées et chargées d’agir pour que tous soient, sur notre territoire, logés à la même enseigne, mais encore faut-il s’assurer que les infractions repérées soient rapidement sanctionnées, afin que leurs auteurs cessent d’afficher un train de vie qui alimente l’exaspération de nos concitoyens.

Situation de l’industrie graphique en Île-de-France

Mme Marie-George Buffet – Comment imaginer qu’une entreprise dotée d’installations efficaces, d’un personnel qualifié et motivé et de vrais débouchés soit menacée de fermeture ? C’est pourtant le cas de l’imprimerie JDC de Torcy, actuellement en redressement judiciaire et où, comme le sait Mme Brunel, plus de 200 emplois sont menacés. En cédant cette filiale à son directeur, la multinationale Quebecor avait pris l’engagement commercial d’assurer pendant cinq ans à la société un chiffre d’affaires lui permettant de poursuivre son activité. Cet engagement n’étant pas respecté, l’entreprise se trouve dans une situation d’urgence, le tribunal de commerce de Meaux lui ayant donné jusqu’au 5 mars pour présenter un projet garantissant la poursuite de l’activité. Un tel projet existe, qui permettrait de préserver les emplois et de relancer l’activité du site. Les solutions envisagées consistent à favoriser toutes les solutions industrielles et financières permettant d’imprimer le quotidien gratuit « 20 minutes  » à Torcy et à renforcer la charge de travail dans le respect de l’accord conclu entre Quebecor et son ancienne filiale, tout en stimulant la politique commerciale de l’entreprise. Le maintien des emplois et le développement de ce site doivent s’inscrire dans une réflexion globale sur le poids que doit avoir l’industrie graphique en Île-de-France, sur le lieu des sièges éditoriaux et sur les attentes de la population francilienne en matière de communication. À cette fin, il est urgent de réunir une table ronde associant représentants de l’État, fédération patronale, organisations syndicales et élus. Le défi est d’importance car, au-delà de la sauvegarde des emplois à l’imprimerie JDC se pose la question de la pérennité du site de Torcy et du devenir de l’industrie graphique en Île-de-France. Le ministre est-il prêt à assumer toutes ses responsabilités en favorisant la tenue de cette table ronde régionale qui implique l’engagement des pouvoirs publics ?

Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire – Il s’agit là d’un dossier sur lequel votre collègue Chantal Brunel a également appelé l’attention du ministre d’État, après avoir reçu les syndicats et la direction de l’entreprise et assisté à une réunion organisée par le préfet.

L’imprimerie JDC, ancienne filiale du groupe canadien Quebecor, a été cédée en avril 2005 à un repreneur, son directeur, cependant que Quebecor s’engageait à lui assurer un plan de charge de cinq ans. Mais le secteur des industries graphiques s’est largement internationalisé et il connaît une rapide évolution technologique qui rend la concurrence européenne particulièrement vive. Cette situation a conduit le groupe Quebecor à se restructurer, notamment en France, au cours des deux dernières années. C’est dans ce contexte qu’en juillet dernier, l’imprimerie JDC a été placée en redressement judiciaire, le tribunal de commerce de Meaux fixant une période d’observation s’achevant le 5 mars 2007.

Comme vous le savez, les services du ministre délégué à l’emploi se sont mobilisés à plusieurs reprises pour soutenir l’entreprise et ses salariés. Des rencontres ont eu lieu avec les représentants du personnel de JDC puis avec la direction de Quebecor, en octobre 2006, pour obtenir du groupe le respect de ses engagements. Compte tenu des difficultés rencontrées par l’entreprise et le bassin d’emploi, il a été décidé de faire bénéficier les soixante-treize salariés licenciés de JDC de mesures d’accompagnement social renforcées, financées par l’État et, pour partie, par le conseil régional d’Île-de-France. Ces mesures nécessaires visent à assurer le maintien d’un maximum d’emplois sur ce site de Seine-et-Marne car la défense de l’emploi, partout en France, est une priorité de notre action – même si, en l’espèce, l’impact territorial des difficultés de cette entreprise demeure faible. Elle est, en effet, située dans une zone d’emploi qui rencontre d’importantes difficultés alors que la zone voisine de Coulommiers est, elle, en plein essor, l’emploi salarié y ayant augmenté de 12% entre 2000 et 2004.

Ces mesures témoignent de l’intérêt très fort que le Gouvernement porte au maintien en Île-de-France d’une industrie graphique dynamique et diversifiée, créatrice d’emplois et facteur de dynamisme culturel. C’est pour cela que la DRIRE d’Île-de-France a visité JDC le 23 octobre 2006, afin de l’aider à investir dans de nouveaux équipements pour la rendre plus compétitive. En outre, le directeur départemental du travail a élaboré, en liaison avec le conseil régional, un protocole d’accord entre les pouvoirs publics, la direction et les syndicats de JDC et la direction de Quebecor, pour résoudre de façon amiable les contentieux pendants et offrir de nouvelles perspectives économiques à JDC.

À ce jour, ce protocole n’a pas encore été signé, car l’une des mesures importantes qu’il prévoit – l’impression du journal « 20 minutes » sur le site de Torcy – est toujours en discussion. La CGT Labeur, qui revendique l’utilisation des rotatives de « 20 minutes » en journée, et la CGT Presse, qui souhaite conserver le monopole avec des rotativistes « presse », n’auraient pas réussi à s’entendre pour l’instant. Vous appelez à une large concertation : elle est déjà bien engagée et nous ne demandons qu’à contribuer à sa réussite ! Nous sommes, Madame, aussi demandeurs que vous l’êtes vous-même. Dès que les négociations auront abouti, le directeur départemental du travail poursuivra sa médiation et se rapprochera des différentes parties pour qu’elles valident le protocole précité.

J’ai souvent eu des débats avec des représentants de votre groupe sur la compétitivité des territoires ou celle de nos entreprises, et l’on m’a souvent reproché de vouloir mettre en concurrence les uns et les autres ! En l’espèce, nous sommes prêts à investir pour aider JDC à se moderniser et nous voulons favoriser la concertation.

Mme Marie-George Buffet – Les difficultés de l’entreprise sont d’abord de la responsabilité du donneur d’ordres, la multinationale Quebecor, qui n’a pas respecté l’accord commercial qu’elle avait passé avec JDC…

Mme Chantal Brunel – C’est vrai.

Mme Marie-George Buffet – De tels écarts justifient pleinement la proposition de loi que nous avions présentée il y a trois semaines pour responsabiliser les donneurs d’ordres, et dont la majorité n’a même pas accepté que nous en discutions les articles, alors qu’elle aurait donné des outils pour empêcher les donneurs d’ordres de sacrifier les PME qu’ils filialisent. En outre, vous ne m’avez pas répondu quant à la table ronde sur l’industrie graphique dont j’avais sollicité la tenue. Je regrette que les pouvoirs publics n’en prennent pas l’initiative, alors que tous les acteurs locaux sont prêts à se mobiliser.

RECLASSEMENT DES SALARIés de sublistatic

M. Albert Facon – Je comprends que M. Larcher ne soit pas là et je constate que M. Estrosi est déjà parti. J’espère que la réponse de M. Cuq pourra me donner satisfaction…

Ma question porte sur le reclassement de certains salariés de l’entreprise Sublistatic d’Hénin-Beaumont. Grâce à l’aide financière de la région Nord-Pas de Calais et – je le reconnais pour avoir rencontré plusieurs fois M. Larcher – de l’État, un protocole d’accord sur le reclassement des salariés a été signé le 27 janvier dernier, par les représentants du personnel mandatés à cet effet. Cet accord prévoit notamment un dispositif d’aide au reclassement, en complément des indemnités légales et conventionnelles et réservé aux salariés ayant choisi d’adhérer à la convention de reclassement personnalisée – la CRP – avant le 12 février 2007. Cette faculté d’adhérer à la convention est ouverte aux seuls salariés physiquement aptes au travail. Dans les faits, une telle restriction revient à écarter du dispositif tous les salariés en situation d’incapacité temporaire de travail à la date du 12 février. Si cette disposition peut s’expliquer dans le cadre d’une CRP classique, elle revêt un caractère insupportable dans le cas présent, où 223 salariés ont été traumatisés par un licenciement brutal. Elle priverait les salariés inaptes de l’indemnité de 10 000 euros qui leur revient. Il convient de prendre en compte les difficultés de ceux qui sont en congé pour accident du travail ou pour maladie.

Monsieur le ministre, ces 223 salariés ont été jetés à la rue par des « patrons voyous » partis à l’étranger. L’aide exceptionnelle de 10 000 euros est bien faible, au regard du préjudice subi. Je vous demande de tout mettre en œuvre pour éviter une nouvelle injustice.

Mme Marie-George Buffet – Très bien !

M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement  Je vous prie d’excuser l’absence de Gérard Larcher. Vous avez appelé son attention sur les aides financières qu’il serait possible d’allouer aux salariés déclarés inaptes au travail de l’entreprise Sublistatic d’Hénin-Beaumont. Cette entreprise a été placée en liquidation judiciaire le 24 novembre 2006, ce qui a entraîné le licenciement de ses 230 salariés. Les conditions de la liquidation judiciaire et les difficultés en matière d’emploi dans le bassin d’Hénin-Beaumont ont conduit à une mobilisation exceptionnelle des pouvoirs publics.

M. Albert Facon - En particulier de la région !

M. le Ministre délégué - Ainsi, un protocole d’accord portant sur le reclassement des salariés a été signé le 27 janvier entre l’État, les représentants du personnel et les collectivités locales. Cet accord prévoit d’attribuer une aide complémentaire au reclassement, de 10 000 euros en effet : 3 000 au titre de la convention de reclassement personnalisé, le reste au titre du reclassement en emploi.

Il est exact que les personnes inaptes au travail ne remplissent pas les conditions pour adhérer à la CRP, puisqu’elles ne peuvent malheureusement pas se placer dans une dynamique de recherche d’emploi. Il n’est, hélas, pas possible de déroger à cette règle. Compte tenu de la situation sociale particulière de ces salariés, les collectivités locales peuvent examiner quel appui leur apporter, mais l’application de la convention d’assurance chômage du 18 janvier 2006 sur la CRP, ainsi que du protocole du 27 janvier 2007, m’empêche de vous répondre favorablement.

En revanche, vous connaissez l’attention que Gérard Larcher porte au bassin d’emploi d’Hénin-Beaumont.

M. Albert Facon - Absolument.

M. le Ministre délégué – Mon collègue est intervenu en janvier pour aider les salariés de Sublistatic, avec les résultats que vous avez mentionnés. De même, la situation des salariés d’Energy Plast est suivie avec la plus vive attention. Enfin, le Gouvernement examine en ce moment même vos propositions pour redynamiser le bassin d’emploi d’Hénin-Beaumont. Soyez sûr qu’il est totalement mobilisé pour aider les hommes et les femmes de ce bassin.

M. Albert Facon – Je reconnais que M. Larcher suit très attentivement ces dossiers et qu’il les connaît très bien. Un jugement sera rendu le 13 mars prochain par le TGI de Paris. Nous l’attendons de pied ferme. Dans le cas exceptionnel de Sublistatic, le Gouvernement doit faire en sorte que l’injustice qui se prépare n’ait pas lieu. Monsieur le ministre, vous êtes aussi un élu, et je sais que vous ne pouvez être insensible à la situation des accidentés du travail, qui ont tout donné pour l’entreprise et qui se trouveraient écartés du dispositif d’aide. Les fins de mois sont difficiles et des familles entières sont concernées. Les collectivités ont fait des avances pour faire face à l’urgence. Mais il y aurait une très grande injustice à ne pas déroger aux règles communes dans des circonstances aussi dramatiques. Un élu ne peut pas accepter une telle injustice.

nuisances liées à la société compost val d’europe

Mme Chantal Brunel - J’appelle l’attention du Gouvernement sur les graves nuisances générées par la société Compost Val d’Europe, entreprise de compostage installée à cheval sur les communes de Coupvray et Chalifert, et qui fabrique des engrais et des supports de culture à partir de matières organiques. II est regrettable que cette société poursuive une activité dite de développement durable au mépris de la réglementation applicable au titre des installations classées pour la protection de l’environnement. En effet, depuis dix ans, les services d’inspection de la DRIRE ont relevé une grande variété d’infractions, allant de la pollution de l’eau aux nuisances olfactives graves, en passant par l’admission de déchets non autorisés. Ces infractions ont donné lieu à des procès-verbaux transmis au procureur de la République. Enfin, il est avéré que la production de l’entreprise excède désormais le tonnage quotidien autorisé par l’arrêté du 7 janvier 2002 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées soumises à déclaration sous la rubrique n° 2170 – dont relève cette activité.

Les riverains et les élus locaux sont à juste titre exaspérés par le comportement de cet exploitant, qui porte atteinte à la qualité de vie des populations environnantes. Les nuisances olfactives sont telles qu’en été, il est impossible d’ouvrir ses fenêtres ou de se tenir dans son jardin. Je vous demande donc de bien vouloir examiner ce dossier difficile. D’autre part, ne conviendrait-il pas de convaincre la Chancellerie de la nécessité de poursuites systématiques en cas de délits contre l’environnement ?

M. Guy Geoffroy – Très bien !

M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement – Je vous prie d’excuser l’absence de Mme Olin, qui se trouve aujourd’hui à Bruxelles pour le Conseil des ministres de l’environnement.

La société Compost Val d’Europe fait preuve d’un manque de volonté manifeste de respecter la réglementation, et cela malgré de nombreuses interventions des services de l’État. L’installation est ainsi à l’origine de nuisances importantes et répétées, qui suscitent des plaintes de la mairie et des riverains depuis sa création il y a dix ans.

Elle fonctionne actuellement sous le régime de la déclaration, qui correspond à un plafond de production quotidienne de 10 tonnes de compost. Après avoir constaté que les tonnages de déchets traités excédaient ce plafond, le préfet a mis l’exploitant en demeure de régulariser sa situation en déposant un dossier de demande d’autorisation d’exploiter. Il a également, fin septembre 2006, pris un arrêté de suspension des activités, dont l’exécution a cependant été suspendue par le tribunal administratif de Melun.

De telles pratiques jettent le discrédit sur le compostage, dont le Gouvernement souhaite pourtant encourager le développement. Ce traitement est en effet bien adapté aux déchets fermentescibles, puisqu’il permet un retour de la matière organique sur les sols agricoles tout en réduisant les quantités de déchets incinérés ou enfouis en décharge.

Vous proposez également que les procureurs donnent systématiquement suite aux procès-verbaux relatifs à des délits environnementaux. Toute affaire demande un examen au cas par cas, et les poursuites ne sont engagées qu’à l’issue d’une enquête qui permet de déterminer si toutes les conditions qui permettent de qualifier un fait d’infraction sont réunies – ce n’est pas à M. Geoffroy, dont on connaît les compétences en la matière, que je l’apprendrai. Sachez en tout cas que la Chancellerie et le ministère de l’écologie travaillent ensemble à une meilleure application des lois environnementales, et qu’ils poursuivront leur collaboration en ce sens.

financement d’un plan de lutte contre les crues
dans les pyrénées-orientales

M. Albert Facon, suppléant M. Henri Sicre – Mon collègue Henri Sicre, en déplacement pour l’Assemblée nationale, attire à nouveau l’attention de Mme Olin, suite à la question orale qu’il avait posée le 27 juin 2006, sur les retards pris par son ministère dans le versement des subventions accordées au titre de la prévention et de la protection contre les inondations et crues torrentielles. En effet, les éléments de réponse que lui avait transmis M. Bas ne répondaient pas à la question posée.

Le département des Pyrénées-Orientales étant l’un des plus exposés de l’Hexagone, les élus de la circonscription de M. Sicre se sont engagés dans un plan d’actions de prévention des inondations – dit Plan Bachelot. Nul ne remet par ailleurs en cause l’efficacité des services d’annonces des crues ou des financements prévus dans la loi sur l’eau. Mais M. Bas s’était engagé au nom de Mme Olin à fournir des éléments de réponse précis concernant le paiement des subventions dues et la garantie de leur versement pour les projets en cours et à venir. Nous sommes en février 2007, et ces éléments ne sont toujours pas parvenus à mon collègue. Il réitère donc sa question. L’État oblige les collectivités à s’engager dans des démarches de protection, sans se préoccuper de leur accompagnement ni des retards dans le versement des subventions. Or ceux-ci mettent les maîtres d’ouvrage en difficulté financière : les coûts des plans de lutte contre les crues peuvent absorber jusqu’à dix années de la capacité d’investissement des collectivités, et faire des avances de trésorerie contraindrait celles-ci à s’endetter dangereusement.

Que compte faire le Gouvernement pour honorer rapidement ses engagements et donner aux maîtres d’ouvrage des garanties quant au délai de versement des subventions pour les réalisations en cours et les investissements futurs ?

M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement  L’accompagnement des actions de prévention des inondations conduites par les collectivités est une priorité pour le Gouvernement. Le ministère de l’écologie et du développement durable, qui y consacrait 25 millions d’euros d’engagements en 2001, y a consacré le double en 2004 ; plus de 7  millions sont prévus pour cette année.

Cette augmentation des moyens consacrés à la prévention des inondations correspond à une augmentation tout aussi forte du nombre des territoires bénéficiant de programmes d’action. Quatre plans « grands fleuves » – qui concernent le Rhône, la Seine, la Garonne et la Meuse – s’ajoutent ainsi au plan Loire, tandis que quinze nouveaux plans d’action et de prévention des inondations ont été signés ou sont en passe de l’être.

Cette politique a besoin de moyens. L’article 32 de la loi du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques prévoit donc d’abonder les moyens disponibles par l’utilisation du fonds de prévention des risques naturels – fonds Barnier – à hauteur de 40 millions d’euros pour financer les opérations engagées avant le 1er janvier 2007, et de 55 millions par an de 2007 à 2012.

Pour revenir à la situation des Pyrénées-Orientales, le montant des factures reçues par les services de l’Etat et en attente de mandatement s’élève à environ 700 000 euros. Il est intégralement couvert par les crédits de paiement transmis aux services. Mme Olin suivra attentivement l’évolution des crédits disponibles dans chaque service, partout en France, et les factures à acquitter par l’Etat.

M. Albert Facon – Je laisse M. Sicre juger de cette réponse. J’observe simplement qu’il a mis sept mois à l’obtenir. Or les communes concernées sont de petites communes à très faible potentiel fiscal, qui sont incapables de faire des avances pour plusieurs mois. Le taux de subvention étant assez important, les projets sont compromis lorsque l’argent n’arrive pas. C’est tout de même dommage. Qui sera responsable des inondations si de nouvelles crues surviennent ?

Mme la Présidente – Nous en avons terminé avec les questions orales sans débat.

Prochaine séance, cet après-midi, à 15 heures.
La séance est levée à 13 heures.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.
Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.
www.assemblee-nationale.fr

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