Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus intégraux (session extraordinaire 2001-2002)

 

ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU SAMEDI 3 AOÛT 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du vendredi 2 août 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN

1.  Justice. - Suite de la discussion d'un projet de loi d'orientation et de programmation adopté par le Sénat après déclaration d'urgence «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Article 23 «...»

M. Pierre Albertini.
Amendement de suppression n° 115 de M. Vallini : MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des lois ; Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. - Rejet.
Amendement n° 178 rectifié de la commission des lois : MM. le rapporteur, Xavier de Roux, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 278 de M. Warsmann : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 179 de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 180 de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article 23 modifié.

Article 24 «...»

MM. Claude Goasguen, Emile Blessig, le garde des sceaux, Jacques-Alain Bénisti, Xavier de Roux, Jean-Marie Le Guen, Pascal Clément, président de la commission des lois ; Christophe Caresche.
Amendement de suppression n° 116 de M. Vallini : MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.
Amendement n° 181 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, Alain Marsaud, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 182 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, Alain Marsaud, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 272 de M. Goasguen, retiré par son auteur et repris par M. Vallini. - Rejet.
Adoption de l'article 24 modifié.

Après l'article 24 «...»

Amendement n° 239 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.
Amendement n° 240 de M. Mariani : M. Thierry Mariani. - Retrait.

Article 25 «...»

Amendements de suppression n°s 53 de M. Vaxès et 122 de M. Vallini : MM. Michel Vaxès, Jean-Yves Le Bouillonnec, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.
Adoption de l'article 25.

Article 26 «...»

M. Emile Blessig.
Amendements de suppression n°s 10 de M. Albertini et 123 de M. Vallini : MM. Pierre Albertini, Jean-Yves Le Bouillonnec, Jean-Paul Garraud, le rapporteur, le garde des sceaux, Julien Dray, Jacques-Alain Bénisti. - Rejet.
Amendement n° 183 de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux, Jean-Yves Le Bouillonnec. - Adoption.
Adoption de l'article 26 modifié.

Après l'article 26 «...»

Amendements n°s 185 et 184 de la commission : MM. le rapporteur, Alain Marsaud, le garde des sceaux, Jean-Paul Garraud. - Retraits.
Amendement n° 186 deuxième rectification de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux, Xavier de Roux. - Adoption de l'amendement n° 186 troisième rectification.

Article 27 «...»

Amendement de suppression n° 117 de M. Vallini : MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.
Amendement n° 187 de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 188 de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article 27 modifié.

Article 28. - Adoption «...»
Après l'article 28 «...»

Amendements n°s 229 et 230 de Mme Joissains-Masini : MM. Richard Mallié, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejets.
Amendements n°s 219 et 220 de M. Clément : MM. Pierre-André Périssol, le rapporteur, le garde des sceaux, Jean-Marie Le Guen. - Adoptions.
Amendements n°s 3 et 2 de M. Rivière : MM. Richard Mallié, le rapporteur, le garde des sceaux, Jean-Marie Le Guen. - Rejets.
Amendement n° 190 de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 189 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, Alain Marsaud, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 35 de M. Teissier : MM. Richard Mallié, le rapporteur, le garde des sceaux. - Retrait.

Article 29 «...»

Amendement de suppression n° 288 de M. Albertini : MM. Jean Dionis du Séjour, le rapporteur, Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice ; Mme Marylise Lebranchu, MM. Pierre Albertini, Alain Marsaud. - Rejet.
Amendement n° 271 corrigé de M. Jean Besson et 191 de la commission : MM. le président de la commission, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet de l'amendement n° 271 corrigé ; adoption de l'amendement 191.
L'article 29 est ainsi rédigé.

Article 30 «...»

MM. Pierre Albertini, Jean-Marie Le Guen.
Amendements n°s 274 et 273 de M. Jean-Marie Le Guen : M. Jean-Marie Le Guen.
Amendement n° 275 de M. Jean-Marie Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet des amendements n°s 274, 273 et 275.
Amendement n° 276 de M. Jean-Marie Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 277 de M. Jean-Marie Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Adoption de l'article 30.

Article 31 «...»

Amendement n° 54 de M. Vaxès : MM. Michel Vaxès, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.
Amendement n° 120 de M. Vallini : Jean-Yves Le Bouillonnec, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.
Amendements identiques n°s 55 de M. Vaxès et 118 de M. Vallini : MM. Michel Vaxès, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jean-Yves Le Bouillonnec, le garde des sceaux. - Rejet.
Adoption de l'article 31.

Avant l'article 32 «...»

Amendement n° 56 de M. Vaxès : MM. Michel Vaxès, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.

Article 32 «...»

Mme Marylise Lebranchu.
Amendement de suppression n° 57 de M. Vaxès : MM. Michel Vaxès, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Mme Marylise Lebranchu. - Rejet.
Adoption de l'article 32.

Après l'article 32 «...»

Amendement n° 291 de M. Albertini : MM. Pierre Albertini, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Mme Marylise Lebranchu. - Rejet.

Article 32 bis «...»

Amendement de suppression n° 263 de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
L'article 32 bis est supprimé.

Après l'article 32 bis «...»

Amendement n° 289 de M. Albertini : M. Pierre Albertini. - Retrait.

Article 32 ter. - Adoption «...»
Après l'article 32 ter «...»

Amendements n°s 295 de M. Vaxès et 106 corrigé de M. Christophe Caresche : MM. Michel Vaxès, Christophe Caresche, le rapporteur, le garde des sceaux, Pierre Albertini. - Rejets.
Amendement n° 58 de M. Vaxès : MM. Michel Vaxès, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.

Article 33 A «...»

Amendement de suppression n° 103 de M. Vallini : MM. André Vallini, le rapporteur, le garde des sceaux, Claude Goasguen, Jacques Myard, Mme Marylise Lebranchu. - Rejet.
Adoption de l'article 33 A.

Après l'article 33 A «...»

Amendement n° 192 de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.

Article 33 B «...»

Amendement n° 193 de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article 33 B modifié.

Articles 33 à 38 et 38 bis. - Adoptions «...»
Article 39 «...»

M. Pierre Albertini.
Amendement n° 293 de M. Morin : MM. Pierre Albertini, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.
Amendement n° 290 de M. Albertini : MM. Pierre Albertini, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.
Amendement n° 194 de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article 39 modifié.

Articles 39 bis et 40. - Adoptions «...»
Après l'article 40 «...»

Amendements n°s 266 et 265 de M. Garrigue : MM. Daniel Garrigue, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejets.

Article 41. - Adoption «...»
Après l'article 41 «...»

Amendements n°s 228 et 227 de Mme Joissains-Masini : MM. Jacques Myard, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejets.

Article 42 «...»

Amendement n° 196 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
L'amendement n° 39 de M. Kamardine n'a plus d'objet.
Adoption de l'article 42 modifié.

Article 43 «...»

Amendement n° 264 de la commission : MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article 43 modifié.

Article 44. - Adoption «...»
EXPLICATIONS DE VOTE «...»

MM.
Claude Goasguen,
Michel Vaxès,
Pierre Albertini,
André Vallini.

VOTE SUR L'ENSEMBLE «...»

Adoption de l'ensemble du projet de loi.
M. le garde des sceaux.
2.  Justice. - Communication relative à la désignation d'une commission mixte paritaire «...».
3.  Modification de l'ordre du jour «...».
M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement.
4.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

JUSTICE

Suite de la discussion d'un projet
de loi d'orientation et de programmation
adopté par le Sénat après déclaration d'urgence

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence (n°s 154, 157).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'article 23.

Article 23

    M. le président. Je donne lecture de l'article 23 :

Paragraphe 2
Dispositions relatives aux demandes de mise en liberté
et instituant la procédure de référé-détention

    « Art. 23. - I. - Après l'article 148 du code de procédure pénale, il est inséré un article 148-1-1 ainsi rédigé :
    « Art. 148-1-1. - Lorsqu'une ordonnance de mise en liberté d'une personne placée en détention provisoire est rendue par le juge des libertés et de la détention ou le juge d'instruction contrairement aux réquisitions du procureur de la République, cette ordonnance est immédiatement notifiée à ce magistrat. Pendant un délai de quatre heures à compter de la notification de l'ordonnance du procureur de la République, et sous réseve de l'application des dispositions du troisième alinéa du présent article, la personne mise en examen ne peut être remise en liberté et cette décision ne peut être adressée pour exécution au chef de l'établissement pénitentiaire.
    « Le procureur de la République peut interjeter appel de l'ordonnance devant le greffier du juge des libertés et de la détention ou du juge d'instruction, en saisissant dans le même temps le premier président de la cour d'appel d'un référé-détention, conformément aux dispositions de l'article 187-3 ; l'appel et le référé-détention sont mentionnés sur l'ordonnance. La personne mise en examen et son avocat en sont avisés en même temps que leur est notifiée l'ordonnance, qui ne peut être mise à exécution, la personne restant détenue tant que n'est pas intervenue la décision du premier président de la cour d'appel et, le cas échéant, celle de la chambre de l'instruction. La personne mise en examen et son avocat sont également avisés de leur droit de faire des observations écrites devant le premier président de la cour d'appel. Faute pour le procureur de la République d'avoir formé un référé-détention, dans un délai de quatre heures à compter de la notification de l'ordonnance de mise en liberté, celle-ci, revêtue d'une mention du greffier indiquant l'absence de référé-détention, est adressée au chef d'établissement pénitentiaire et la personne est mise en liberté sauf si elle est détenue pour une autre cause.
    « Si le procureur de la République estime ne pas avoir à s'opposer à la mise en liberté immédiate de la personne, et sans préjudice de son droit de former ultérieurement appel dans le délai prévu par l'article 185, il retourne l'ordonnance au magistrat qui l'a rendue en mentionnant sur celle-ci qu'il ne s'oppose pas à sa mise à exécution. La personne est alors mise en liberté, si elle n'est pas détenue pour une autre cause. »
    II. - Après l'article 187-2 du même code, il est inséré un article 187-3 ainsi rédigé :
    « Art. 187-3. - Dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article 148-1-1, le procureur de la République qui interjette appel d'une ordonnance de mise en liberté contraire à ses réquisitions dans un délai de quatre heures à compter de sa notification doit, à peine d'irrecevabilité, saisir dans le même temps le premier président de la cour d'appel ou, en cas d'empêchement, le magistrat qui le remplace d'un référé-détention afin de déclarer cet appel suspensif. Le procureur de la République joint à sa demande les observations écrites justifiant le maintien en détention de la personne. La personne mise en examen et son avocat peuvent également présenter les observations écrites qu'ils jugent utiles.
    « Le premier président de la cour d'appel ou le magistrat qui le remplace statue au plus tard le deuxième jour ouvrable suivant la demande. Pendant cette durée, les effets de l'ordonnance de mise en liberté sont suspendus et la personne reste détenue. A défaut pour le premier président de la cour d'appel ou le magistrat qui le remplace de statuer dans ce délai, la personne est remise en liberté sauf si elle est détenue pour une autre cause.
    « Le premier président de la cour d'appel ou le magistrat qui le remplace statue au vu des éléments du dossier de la procédure, par une ordonnance motivée qui n'est pas susceptible de recours. A sa demande, l'avocat de la personne mise en examen peut présenter des observations orales devant ce magistrat, lors d'une audience de cabinet dont le ministère public est avisé pour qu'il y prenne, le cas échéant, ses réquisitions.
    « Si le premier président de la cour d'appel ou le magistrat qui le remplace estime que le maintien en détention de la personne est manifestement nécessaire au vu d'au moins deux des critères prévus par les dispositions de l'article 144 jusqu'à ce que la chambre de l'instruction statue sur l'appel du ministère public, il ordonne la suspension des effets de l'ordonnance de mise en liberté jusqu'à cette date. La personne mise en examen ne peut alors être mise en liberté jusqu'à l'audience de la chambre de l'instruction qui doit se tenir selon les modalités et dans les délais prévus par les articles 194 et 199.
    « Dans le cas contraire, le premier président de la cour d'appel ou le magistrat qui le remplace ordonne que la personne soit mise en liberté si elle n'est pas détenue pour une autre cause.
    « A peine de nullité, le magistrat ayant statué sur la demande de référé-détention ne peut faire partie de la composition de la chambre de l'instruction qui statuera sur l'appel du ministère public.
    « La transmission du dossier de la procédure au premier président de la cour d'appel ou au magistrat qui le remplace peut être effectuée par télécopie. »
    « II bis. - Les dispositions des I et II entreront en vigueur le 1er novembre 2002.
    « III. - Le deuxième alinéa de l'article 148-2 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
    « Lorsque la personne détenue n'a pas encore été jugée en premier ressort, la juridiction saisie statue dans les dix jours ou les vingt jours de la demande, selon qu'elle est du premier ou du second degré. Lorsque la personne a déjà été jugée en premier ressort et qu'elle est en instance d'appel, la juridiction saisie statue dans les deux mois de la demande. Lorsque la personne a déjà été jugée en second ressort et qu'elle a formé un pourvoi en cassation, la juridiction saisie statue dans les quatre mois de la demande.
    « Toutefois, lorsqu'au jour de la réception de la demande il n'a pas encore été statué soit sur une précédente demande de mise en liberté ou de mainlevée de contrôle judiciaire, soit sur l'appel d'une précédente décision de refus de mise en liberté ou de mainlevée du contrôle judiciaire, les délais prévus ci-dessus ne commencent à courir qu'à compter de la décision rendue par la juridiction compétente. Faute de décision à l'expiration des délais, il est mis fin au contrôle judiciaire ou à la détention provisoire, le prévenu, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, étant d'office remis en liberté. »
    « IV. - Au début du deuxième alinéa de l'article 183 du même code, la référence : "145, premier alinéa est remplacée par la référence : "137-3, deuxième alinéa.
    « V. - Le cinquième alinéa de l'article 199 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée : "Si la personne a déjà comparu devant la chambre de l'instruction moins de quatre mois auparavant, le président de cette juridiction peut, en cas d'appel d'une ordonnance rejetant une demande de mise en liberté, refuser la comparution personnelle de l'intéressé par une décision motivée qui n'est susceptible d'aucun recours. »
    La parole est à M. Pierre Albertini, inscrit sur l'article 23.
    M. Pierre Albertini. Nous abordons, avec l'article 23, la petite usine à gaz du référé-détention. La longueur de la description faite par le Sénat pour rendre compte de cette procédure témoigne, d'ailleurs, d'un certain embarras.
    De quoi est-il question ? De l'éventuelle mise en liberté d'une personne placée en détention provisoire. J'ai déjà dit ce que je pensais de la détention provisoire et combien il était nécessaire de la réduire, tant elle représente une solution de facilité, en raison notamment de la surcharge de travail des magistrats.
    Nous nous situons dans le cas d'une demande de mise en liberté faisant l'objet d'une appréciation divergente de la part du procureur de la République qui, par ses réquisitions, conclurait à la nécessité du maintien en détention et de la part du juge d'instruction ou du juge des libertés et de la détention qui ordonnerait la mise en liberté. Cette situation est prévisible puisqu'il s'agit d'une personne déjà placée en détention. C'est là que le Sénat a développé ses talents d'écriture puisque sa rédaction aboutit à toute une série de scénarios.
    Le premier, c'est le gel de l'application de l'ordonnance de mise en liberté. Jusqu'ici, c'est acceptable. Ce gel de quatre heures permet au procureur de la République d'apprécier si, après ses réquisitions, et de manière motivée, la détention doit être poursuivie. On sort alors totalement du cadre, puisqu'on abandonne toute idée de saisir le président de la chambre de l'instruction. C'est le premier président de la cour d'appel ou, concrètement, le magistrat qu'il déléguera, qui jugera si la mise en liberté est possible et fondée au regard des nécessités tenant à l'instruction ou à l'ordre public.
    Je considère ce dispositif comme extrêmement complexe. Il montre une fois de plus que les lois que nous faisons exagèrent les aspects procéduriers et formels.
    Certes, les dysfonctionnements sont notoires. Mais si chaque fois qu'un dysfonctionnement intervient le Parlement est tenté de légiférer, mes chers collègues, tous les ans nous serons obligés de remettre l'ouvrage sur le métier. Cet effort sera sans fin. Voilà qui illustre ma conviction que, en matière de procédure pénale, il est bon de revenir à des principes simples.
    Le premier de ces principes est la séparation de l'investigation et du jugement. Le second est d'en tirer la conséquence. Il existe un parquet, défenseur de la société, qui juge de l'opportunité des poursuites. Il existe, par ailleurs, des magistrats du siège qui jugent en conscience et en toute indépendance. Il faudra bien pratiquer la séparation entre eux, réclamée désormais avec de plus en plus d'insistance, y compris par les premiers présidents des cours d'appel. Faute de quoi, nous naviguerons dans un système ambigu dont les imperfections ne nous permettront jamais d'obtenir la cohérence que nous recherchons.
    Le référé-détention, venant se joindre au référé-liberté qui existe déjà, ajoutera de la complexité à la complexité et les magistrats consacreront plus d'énergie à veiller au respect des formes, des délais et des procédures qu'à l'investigation et à la recherche de la vérité, ce qui est désolant vu l'état de langueur dans lequel se trouve la justice.
    M. André Vallini. Et vous allez le voter ?
    M. Pierre Albertini. Non !
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 115 et 256.
    L'amendement n° 115 est présenté par M. Vallini et les membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 256 est présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 23. »
    La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l'amendement n° 115.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Sous couvert d'une modification technique dont la complexité vient d'être soulignée, il nous est proposé, en fait, de revenir sur un principe fondamental du droit...
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Mais non !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. ... qui semblait pourtant acquis définitivement depuis 1984 dans notre pays et qui se trouve, par ailleurs, conforté par une disposition de la Convention européenne des droits de l'homme. Ce principe c'est que le placement ou le maintien en détention est du ressort exclusif d'un juge du siège,...
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. C'est bien le cas !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. ... juge de l'instruction, éventuellement juge des libertés. Il ne saurait être ordonné par quelque autre juridiction ou intervenant dans le processus judiciaire.
    Le référé-détention, car il faut l'appeler ainsi, donne, en définitive, au procureur de la République la possibilité de relever appel...
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. C'est normal !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. ... - et on le comprend, cela figurait d'ailleurs dans la loi - de l'ordonnance de liberté que prononce le juge d'instruction ou le juge des libertés. Mais il lui ouvre la faculté de saisir le premier président de la cour d'appel pour suspendre l'exécution de cette ordonnance.
    On ne peut pas nier que le fait générateur du maintien en détention soit, effectivement, la volonté du procureur de la République. C'est en cela que le reproche fait à notre critique selon laquelle l'appel est transformé en une véritable décision de maintien, ne tient pas. Le fait générateur du maintien en détention, je le répète, c'est l'avis du procureur de la République dans ce dispositif, avis qui a, c'est là le plus surprenant, la primauté sur l'avis du juge. Ce n'est pas acceptable. Cela a d'ailleurs été critiqué par le Comité consultatif des droits de l'homme, qui considère qu'il y aurait, pour ce qui est du maintien en détention, transfert de l'autorité du juge à celle du procureur.
    Que le procureur puisse relever appel de l'ordonnance, personne ne le conteste. Mais, sous couvert de la transmission du dossier au premier président pour geler la décision, on donne bien au procureur la possibilité de maintenir en détention et, surtout, on donne à son avis la primauté sur la décision du juge. Cela constitue un changement fondamental avec ce qui, au fil de notre construction législative et jurisprudentielle, avait abouti à la séparation, rappelée très justement voici quelques instants par M. Albertini, entre l'autorité qui instruit, qui initie l'action publique et l'autorité qui juge. Le maintien en détention ne relève que de la compétence du juge.
    Outre cette entorse aux principes, cette usine à gaz complique encore le problème, car la transmission par télécopie dans les quatre heures, quand on connaît les conditions de fonctionnement présentes de la justice, relève de l'utopie !
    Par ailleurs, le texte prévoit que le maintien en détention est effectif, le premier président devant statuer dans les deux jours ouvrables qui suivent, ce qui signifie trois jours de détention.
    L'adoption d'un tel texte marquerait un recul. Il faut donc renoncer à un dispositif dont on ne comprend pas bien par ailleurs la justification. Voilà pourquoi nous demandons la suppression de ces dispositions.
    M. le président. L'amendement n° 256 n'est pas défendu.
    La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 115.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Avis défavorable.
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Avis défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 115.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, M. Bignon et M. de Roux ont présenté un amendement, n° 178 rectifié, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le début du dernier alinéa du texte proposé pour l'article 148-1-1 du code de procédure pénale :
    « Si le procureur de la République, ayant pris des réquisitions de maintien en détention, estime néanmoins ne pas avoir... (Le reste sans changement.) »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Je laisse le soin à M. de Roux de défendre cet amendement.
    M. Xavier de Roux. Il s'agit d'un amendement de précision, ce texte n'ayant pas vocation à s'appliquer si le procureur de la République a pris des réquisitions de mise en liberté.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 178 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Warsmann a présenté un amendement, n° 278, ainsi libellé :
    « Après le mot : "instruction, rédiger ainsi la fin de la dernière phrase du quatrième alinéa du texte proposé pour l'article 187-3 du code de procédure pénale : "devant laquelle sa comparution personnelle est de droit ; la chambre de l'instruction doit se prononcer dans les plus brefs délais et au plus tard dans les dix jours de l'appel, faute de quoi la personne est mise d'office en liberté si elle n'est pas détenue pour une autre cause. »
    La parole est à M. Jean-Luc Warsmann.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Il s'agit encore d'un amendement de précision.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 278.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 179, ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du deuxième alinéa du III de l'article 23, supprimer le mot : "détenue. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Nouvel amendement de précision.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 179.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 180, ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du deuxième alinéa du III de l'article 23, après les mots : "vingt jours de la, insérer les mots : "réception de la. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Toujours un amendement de précision.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 180.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 257 n'est pas défendu.
    Je mets aux voix l'article 23, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 23, ainsi modifié, est adopté.)

Article 24

    M. le président. Je donne lecture de l'article 24 :

Section 2
Dispositions relatives à l'instruction

    « Art. 24. - I. - Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
    « 1° Au premier alinéa de l'article 80-2, les mots : "un mois sont remplacés par les mots : "deux mois ;
    « 2° Supprimé ;
    « 3° L'article 86 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Lorsque le juge d'instruction rend une ordonnance de refus d'informer, il peut faire application des dispositions des articles 177-2 et 177-3 » ;
    « 4° Après l'article 177-2, il est inséré un article 177-3 ainsi rédigé :
    « Art. 177-3. - Lorsque la partie civile est une personne morale, l'amende civile prévue par l'article 177-2 peut être prononcée contre son représentant légal, si la mauvaise foi de ce dernier est établie. » ;
    « 5° Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 706-58, les mots : "cinq ans sont remplacés par les mots : "trois ans.
    « II. - A l'article 434-15-1 du code pénal, après les mots : "devant le juge d'instruction, sont insérés les mots : "ou devant un officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire. »
    La parole est à M. Claude Goasguen, inscrit sur l'article 24.
    M. Claude Goasguen. Cet article comporte diverses dispositions de procédure pénale. Sans parler des problèmes de l'instruction, j'évoquerai devant vous une affaire qui a donné lieu à un long débat en commission des lois. J'ai déposé un amendement de suppression concernant l'article 706-58 du code de procédure pénale, amendement que je suis prêt à retirer si nous obtenons du garde des sceaux des explications précises sur une procédure regrettable, le fameux « témoignage sous X. »
    Cette procédure inaccoutumée dans notre droit a été votée à la sauvette par la majorité précédente, qui ne savait plus quoi faire pour faire croire qu'elle s'occupait de la délinquance. En effet, ces prétendus défenseurs des droits de l'homme, qui nous donnent des leçons, ont voté, dans la plus grande précipitation, la loi du 15 novembre 2001, véritable atteinte à la procédure pénale puisque, à l'encontre de tous nos principes - depuis 1789, même les régimes les plus autoritaires n'avaient pas osé le faire - pour la première fois, le témoignage peut se faire sans procédure contradictoire, devant l'instance pénale.
    Cette disposition traduisait le désarroi d'une majorité qui allait être sanctionnée quelques semaines plus tard par les Français.
    Sans doute correspondait-elle à une nécessité pour la police - encore fallait-il la préciser. Mais confondre si facilement informateur et témoin me dérange un peu et me conduit à poser quelques questions.
    Dans le code de procédure pénale, cette procédure s'étendait à toute condamnation de cinq ans, donc pour des délits très lourds. Aujourd'hui, on nous propose de l'étendre à des infractions punies de trois ans d'emprisonnement, c'est-à-dire à la grande majorité des infractions pénales. En pratique, nous sommes en train, tout doucement, d'institutionnaliser le témoin sous X dans l'ensemble de notre procédure pénale délictuelle. Soit !
    J'en admets, je l'ai dit, la nécessité. D'ailleurs, la plupart des pays démocratiques, confrontés à l'explosion de la délinquance, ont mis en place des procédures de ce type,...
    M. Jacques Myard. C'est vrai !
    M. Claude Goasguen. ... à regret car ce sont des procédures exceptionnelles. Mais ils l'ont fait avec beaucoup plus de nuance et de prudence que nous. C'est le cas de la procédure américaine, et de la procédure canadienne dont nous parlons depuis quelques jours dans cet hémicycle avec beaucoup de respect. La législation canadienne est, en effet, très en avance sur la nôtre.
    M. Jacques Myard. Vive le Canada libre ! (Sourires.)
    M. Claude Goasguen. Si nous voulons véritablement contrer, par des mesures exceptionnelles, une délinquance qui devient de plus en plus difficile à saisir, mettons en place - je n'y suis pas hostile - un système provisoire, qui reste exceptionnel. Mais il faut s'assurer d'une certaine protection juridique, car une telle procédure est susceptible d'abus graves qui doivent être endigués. Toute personne à qui l'on reconnaît un pouvoir léonin a tendance à en abuser, Tocqueville n'est pas le premier à avoir découvert cette réalité.
    Nous devons imaginer - je ne l'exige pas dans l'instant, monsieur le garde des sceaux, mais je vous demande d'y réfléchir - une protection juridique suffisamment forte pour que les magistrats ne puissent pas abuser de ce pouvoir.
    Loin de moi l'idée qu'il puisse y avoir des fuites ! Tout ce qui s'est passé ces dernières années montre bien que le secret de l'instruction est fermement préservé dans notre pays !
    M. Jacques Myard. C'est le paradoxe !
    M. Claude Goasguen. Cela ne saurait concerner un témoin sous X : j'ai une confiance absolue dans le caractère hermétique des tribunaux, comme vous tous mes chers collègues ! Car nous ne lisons pas les journaux...
    M. Jacques Myard. ... ni n'écoutons la radio !
    M. Claude Goasguen. Admettons que la question ne se pose pas !
    En tout cas, la procédure n'est pas seulement inquiétante, elle est aussi très difficile à appliquer. Tant qu'à créer une procédure exceptionnelle, autant faire en sorte qu'elle puisse être utilisée !
    J'en résume les modalités. Une fois saisi, le procureur doit saisir à son tour le juge des libertés, qui doit rendre un avis motivé établi en deux exemplaires - c'est indispensable ! Evidemment, le président de la chambre de l'instruction sera consulté par la défense, qui ne manquera pas de s'inquiéter qu'un témoin anonyme apparaisse à ce stade de la procédure. Et le président de la chambre de l'instruction dispose de diverses modalités pour entendre le témoin anonyme, y compris le brouillage du téléphone car la loi, de ce point de vue, est allée assez loin.
    Un des procureurs présent lors de nos auditions nous a fait observer que la loi était tellement « belle » qu'il était évident qu'elle ne serait pas appliquée et qu'on lui préférerait d'autres procédures.
    En réalité, on a voulu inscrire dans la procédure pénale française quelque chose qui, faute d'être nuancé, relève plutôt de la procédure policière que d'une véritable procédure pénale.
    Monsieur le ministre, je n'exige pas de vous toutes les réponses aujourd'hui, mais je vous exhorte à être vigilant quand vous proposez d'étendre la mesure aux délits relevant d'une peine de trois ans. Sur de nombreux bancs du Sénat, on s'est d'ailleurs interrogé à ce propos.
    M. le président. Veuillez vous approcher de votre conclusion, s'il vous plaît, monsieur Goasguen.
    M. Claude Goasguen. Je présente en même temps mon amendement, monsieur le président.
    M. Jacques Myard. C'est un cumulard !
    M. Claude Goasguen. Bien entendu, monsieur le garde des sceaux, je retirerai mon amendement car une telle procédure est hélas ! indispensable dans la situation où nous sommes, mais je vous demande de nous apporter les apaisements nécessaires. Je souhaite que le Parlement soit associé de plus près à la mise en place de cette procédure qui, je l'espère, sera exceptionnelle et momentanée. C'est le cas aux Etats-Unis, c'est le cas au Canada. Il n'est pas pensable que nous introduisions au sein des principes généraux de notre droit une telle atteinte sans qu'elle soit motivée par une situation exceptionnelle et sans le secours du Parlement.
    M. le président. Je rappelle, pour la bonne tenue de nos débats, que les interventions sur un article ne doivent pas dépasser cinq minutes.
    M. Claude Goasguen. Sur un amendement également !
    M. le président. Le parole est à M. Emile Blessig.
    M. Emile Blessig. La procédure du témoin sous X était une procédure d'exception réservée aux infractions les plus graves. Aujourd'hui, on nous propose de l'étendre.
    Il me paraît extrêmement important qu'à ce moment de la discussion nous ayons une réflexion sur l'utilisation de cette procédure, car, à partir du moment où l'on introduit une exception, la tendance, nous en avons l'illustration, est de l'étendre. Nous passons de cinq ans à trois ans, ce qui est en quelque sorte la porte d'entrée du droit pénal.
    Cela dit, et le rapporteur dans son rapport l'a précisé, nous sommes confrontés à une situation extrêmement difficile, la situation de non-droit qui existe dans un certain nombre de quartiers et à laquelle nous devons d'urgence apporter une réponse. C'est la raison pour laquelle la procédure d'exception est étendue et, de ce point de vue, nous sommes tous d'accord.
    Ce que nous aimerions avoir comme certitude, c'est que l'on évitera les dérives d'une procédure relativement complexe à mettre en oeuvre. Il ne faudrait pas qu'elle soit utilisée de façon abusive. Nous nous plaindrions ensuite d'un gouvernement des juges, ou des détournements de cette procédure.
    Petit à petit, comme l'a souligné M. Albertini, nous touchons à différents aspects de la procédure pénale, et je voudrais faire une réflexion globale sur la preuve testimoniale.
    L'ensemble de notre justice repose sur le témoignage, en droit pénal, bien sûr, mais aussi en droit civil, en droit commercial ou en droit du travail. Petit à petit, les modes d'élaboration de cette preuve testimoniale ont évolué et la manière dont elle est utilisée laisse quelquefois planer un doute sur certains témoignages. Prenons donc date à l'occasion de ce débat. Puisque nous parlons souvent de simplification et de clarification, il serait bon d'avoir une réflexion plus approfondie sur la manière dont, dans notre droit, on utilise le témoignage.
    Il y a bien sûr le problème de la protection du témoin, il y a aussi celui du témoignage de complaisance, ou quelquefois des témoignages qui sont à la limite de la déclaration, avec la possibilité de les soumettre au principe du contradictoire.
    Bref, je voulais insister sur le caractère d'exception de ce dispositif, sur le fait qu'il est voté aujourd'hui dans l'urgence pour faire face à une situation particulièrement grave, mais que nous ne devons pas le considérer comme une novation en matière pénale, ni nous dispenser d'une réflexion globale sur la preuve dans notre droit.
    M. Claude Goasguen. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. C'est un point important du projet de loi et, d'abord, je ne voudrais pas que le vocabulaire nous induise en erreur. Anonyme ne veut pas dire inconnu. Vous le savez bien. Le juge connaît l'identité du témoin, c'est le délinquant qui ne la connaît pas.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Tout à fait !
    M. le garde des sceaux. Si je fais une telle proposition, après y avoir beaucoup réfléchi, c'est parce que je pense aux femmes et aux hommes, aux jeunes qui se font tabasser pour avoir témoigné. Il est inacceptable de tolérer ce type de situation comme on vient encore d'en connaître en région parisienne il y a quelques jours, et il faut savoir ce que nous voulons.
    M. Bernard Accoyer. Bien sûr !
    M. le garde des sceaux. Cette procédure est aux mains de juges, de magistrats qui assument leurs responsabilités et qui auront la charge de la mettre en oeuvre dans le respect des libertés individuelles.
    M. Richard Mallié. Très bien !
    M. le garde des sceaux. Nous ne pouvons pas continuer à tolérer que, dans un certain nombre de quartiers de France, les gens n'osent plus dire ce qui se passe sur leur palier, dans leur escalier ou au bas de leur immeuble. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Je m'engage solennellement à ce que, dans un délai maximal d'un an, nous fassions le point sur l'utilisation de cette procédure. Si un tel dispositif est nécessaire, nous le comprenons, je pense, très bien les uns et les autres, c'est en raison de l'évolution de la délinquance qui est devenue malheureusement une délinquance de proximité, avec les conséquences que cela peut avoir pour l'environnement immédiat des délinquants. Nous ferons ensemble le point et nous verrons, je pense, comment les magistrats l'ont utilisé à bon escient. J'en prends l'engagement devant vous, mais je vous demande vraiment d'adopter ce dispositif en pensant à celles et ceux qui ont peur de témoigner. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jacques-Alain Bénisti.
    M. Jacques-Alain Bénisti. Monsieur le ministre, je vais aller dans votre sens puisque je suis à l'origine de cette proposition.
    Il faut voir ce qui se passe réellement sur le terrain aujourd'hui et je vais vous citer trois faits qui se sont déroulés dans les deux derniers mois.
    Le 23 mai dernier, nous avons tous lu avec émotion dans les journaux ce fait extrêmement grave, le viol répétitif pendant trois mois d'une enfant de onze ans, au vu et à la connaissance de ses voisins de palier. Les témoins déclarent : « On était au courant, mais on avait peur des représailles, et on avait donc peur de témoigner. »
    Le 14 mai, un jeune de quinze ans est découvert sans vie, mort d'une overdose d'héroïne chez lui. Les témoins déclarent aux parents : « On était au courant, mais on avait peur des représailles. »
    Le 30 mai, on découvre chez un délinquant quarante-trois porte-monnaie dérobés après agression et violence, trois personnes âgées étant décédées de leurs blessures. Les voisins déclarent : « On était au courant, mais on avait peur des représailles, etc. »
    La liste serait longue. Si un tel texte avait été voté avant, les auteurs de délits auraient été arrêtés,...
    M. Jean-Marie Le Guen. D'où viennent vos informations ?
    M. Jacques-Alain Bénisti. ... leurs actes déplorables n'auraient pas été commis et ils auraient été mis hors de nuire dès le début de leurs séries de méfaits. Les Français - et je m'adresse aux maires de communes avec des quartiers sensibles, où les familles souffrent d'une telle situation - nous demandent, nous supplient de les protéger, qu'il s'agisse de victimes ou de témoins. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Xavier de Roux.
    M. Xavier de Roux. Monsieur le ministre, une justice d'exception n'est jamais une bonne justice. Monsieur Bénisti, vous n'avez cité que des crimes et il existe déjà les dispositions nécessaires dans le code pénal. Ce que l'on propose aujourd'hui, ce n'est pas d'avoir des témoins sous X simplement pour les crimes, mais également pour tous les délits commis sur ce territoire pratiquement, puisque nous rabaissons le seuil à trois ans. Cela signifie qu'une des dispositions essentielles du droit de notre République sera que l'on peut être accusé sur la base de témoignages anonymes non pas pour des crimes graves, commis dans des circonstances exceptionnelles, mais pour tous les délits que l'on peut commettre sur ce territoire.
    Réfléchissez un peu ! Réfléchissez à l'immensité de cette exception que vous souhaitez introduire dans notre droit alors qu'une telle procédure ne peut être exceptionnelle. Je parle solennellement. Nous remettons la loi que nous votons entre les mains des juges. C'est à eux ensuite de l'appliquer. Nous avons entendu trop souvent ici ou là dire que tel ou tel juge avait excédé ce que l'on considérait être ses pouvoirs. Que personne sur nos bancs ne vienne ensuite accuser ceux qu'on appelle les petits juges. Il faut arrêter de faire des lois extravagantes, de prévoir des sanctions extraordinaires alors que nous vivons tout de même dans une société de droit ordinaire. Ce qui est admissible pour des crimes considérables ne l'est pas pour la loi de tous les jours.
    Je prends un exemple qui date d'hier. Un fournisseur de grande surface m'a expliqué qu'il avait beaucoup de mal à porter plainte contre une centrale d'achats pour cartel d'achats par peur d'être déréférencé et que cette nouvelle procédure était formidable pour lui car elle allait lui permettre d'intervenir enfin.
    Nous parlons tous d'une violence de banlieue, mais attention à ce que tous les délits quotidiens n'entrent pas sous cette incrimination. Réfléchissez ! Nous ne pouvons pas nous engager dans cette voie. Ce serait exagéré. C'est prévu exceptionnellement pour les crimes. N'allons pas jusqu'au délit, nous le regretterions.
    M. Jacques-Alain Bénisti. L'usage de drogue n'est pas un crime !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Il est des moments où nous devons réfléchir au-delà des polémiques, d'autant que la gauche n'est pas totalement innocente dans cette affaire, dans la mesure où nous avons introduit une telle procédure, avec les garanties qu'a rappelées M. de Roux.
    Les principes du droit ont été rappelés à plusieurs reprises, je n'y reviens pas, mais imaginez-vous une seconde que les personnes auxquelles vous semblez penser ont un degré de rationalité suffisant pour avoir besoin de connaître le nom d'une personne pour exercer des actions de représailles et d'intimidation ? Nous sommes nombreux à savoir comment cela se passe quand il y a un climat de violence à l'intérieur d'une cité. Pensez-vous une seconde que l'anonymat va protéger les témoins ? Dans la très grande majorité des cas, je ne crois pas.
    Nous savons aussi, parce qu'ils nous l'ont dit à plusieurs reprises, que nos concitoyens refusent de témoigner, mouvement qui nous dépasse mais qui traduit aussi une certaine forme de déresponsabilisation de chacun d'entre nous. Avec le témoignage sous X, nous allons dans le sens d'une déresponsabilisation générale de la société par rapport à ces problèmes.
    Or ce que nous devons demander à nos concitoyens, en leur donnant évidemment le plus possible de garanties, en ne les laissant pas seuls face à ce phénomène, c'est de prendre conscience de notre responsabilité collective. Aucun d'entre nous ne pourra combattre profondément le climat qui peut exister dans telle ou telle cité, s'il n'y a pas, au-delà des textes de justice, au-delà des forces données à la police, une prise de conscience collective de la société.
    En allant dans le sens de l'anonymat, vous irez dans le sens de la déresponsabilisation générale,...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Non !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... et non dans celui que vous souhaitez.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelle, de la législation et de l'administration générale de la République. Quand on entend M. Le Guen, on se demande s'il n'a pas passé cinq ans hors de l'Assemblée nationale...
    J'aimerais que l'on revienne au fond du débat.
    D'abord, il y a un problème de terminologie et tout le débat vient du fait que nous n'employons pas le bon mot. Il ne s'agit pas de témoins anonymes, de témoins sous X, il s'agit de témoins protégés, à identité protégée. Cela change tout.
    Deuxième point, monsieur Le Guen, une telle procédure n'existe dans le droit français que depuis que le gouvernement que vous souteniez il y deux ans...
    M. Jean-Marie Le Guen et M. Christophe Caresche. On l'a dit !
    M. Jean-Marie Le Guen. Ce n'est pas le débat !
    M. Christophe Caresche. Pas de procès d'intention !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Ce n'est pas un procès d'intention, c'est la réalité. C'est un gouvernement socialiste qui a jugé nécessaire de protéger un certain nombre de témoins.
    Quelle est la différence entre ce que vous avez fait et ce que propose le Gouvernement aujourd'hui ? Nous faisons passer le seuil de la peine encourue de cinq ans à trois ans.
    M. Jean-Marie Le Guen. Il ne s'agit plus seulement des crimes, mais aussi des délits !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Prenons l'exemple qu'a donné le garde des sceaux. Si quelqu'un se fait agresser, tabasser, cela ne justifie-t-il pas pour vous que l'on punisse l'auteur de ce délit, s'agissant de quelqu'un qui peut terroriser tout un quartier, toute une cité ?
    Il ne s'agit ni de près ni de loin de délation, contrairement au procès que nous ont fait en particulier un certain nombre d'avocats ; il ne s'agit que de protéger un témoin. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    A partir du moment où l'on comprend cela, on ne peut en aucun cas s'opposer à une méthode que l'opposition avait suggérée et que nous prolongeons s'agissant de la protection des braves gens.
    On ne peut pas continuer à mettre en péril l'équilibre de notre société sous prétexte que les délinquants terrorisent les braves gens et que nous, les parlementaires, serions terrorisés par des principes qui n'ont plus cours aujourd'hui.
    Voilà le débat. Il n'y a pas de témoin anonyme, il y a un témoin protégé. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen.
    M. Claude Goasguen. Après avoir écouté le président de la commission des lois, j'aurais tendance à maintenir mon amendement, tant la confusion est grave entre la notion de témoin protégé et celle de témoin sous X. Mais il est probable que cette erreur provient d'une confusion de terminologie ayant pour origine le droit canadien.
    M. Jacques Myard. Vive le Canada libre ! (Sourires.)
    M. Claude Goasguen. En tout cas, en droit français, un témoin protégé ne correspondant pas à un témoin sous X, nous en reparlerons ultérieurement.
    Cela étant, mes chers collègues, je crois que nous ne devons pas tomber dans le travers de nos prédécesseurs qui, s'agitant dans tous les sens,...
    M. Jacques Myard. Là encore, c'est un pléonasme !
    M. Claude Goasguen. ... ont, au nom des droits de l'homme, attenté très gravement à la philosophie de notre procédure pénale.
    Moi, je considère, parce que je suis juriste, qu'il est nécessaire d'accepter des situations exceptionnelles, car elles font partie du droit.

    M. Jacques Myard. Absolument, nécessité fait loi !
    M. Claude Goasguen. Encore faut-il garder toute sa sérénité. Certains des arguments invoqués peuvent, dans un certain nombre de cas, faire craindre le pire et susciter des frayeurs. Par nature, un témoignage au pénal comporte toujours un risque ; c'est vrai aujourd'hui, c'était vrai hier et cela a été vrai de tout temps. En effet, lorsque l'affaire est grave, le témoin doit exciper de sa responsabilité pour témoigner ; parfois, c'est sa vie même qui est en danger. D'où la protection du témoin, qui n'a rien à voir avec l'anonymat et qui est un système bien connu dans notre droit pénal.
    Cela dit, comme le garde des sceaux s'est engagé devant l'Assemblée à nous présenter dans un délai d'un an un rapport sur l'application de cette procédure, je retire mon amendement n° 272. Toutefois, je tiens à souligner que je voterai la proposition du Gouvernement avec beaucoup...
    M. Pierre Albertini. De réserves !
    M. Claude Goasguen. ... de réserves. Certes, je considère qu'à une situation exceptionnelle dans nos quartiers difficiles doit correspondre une situation exceptionnelle dans notre droit ; je n'admettrai jamais que le témoin sous X constitue une procédure naturelle de notre droit pénal.
    En résumé, je retire mon amendement n° 272...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Nous le reprenons !
    M. Claude Goasguen. ... et je voterai, avec toutes les réserves possibles, la proposition du garde des sceaux.
    M. le président. M. Vallini et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 116 ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 24. »
    La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Cet amendement vise à supprimer trois dispositions de l'article 24.
    La première est la prolongation à deux mois du délai de convocation à la comparution préalable - il s'agit du texte proposé pour l'article 80-2 du code de procédure pénale.
    J'appelle l'attention de la représentation nationale sur le fait qu'en accordant au juge la faculté de porter de dix jours à deux mois ce délai, on prolonge du même coup la situation d'incertitude et de méconnaissance dans laquelle se trouverait éventuellement la personne convoquée pour des faits, des éléments et des imputations qui justifient cette convocation.
    L'allongement de ce délai de convocation est d'autant plus inconsidéré que, depuis l'ouverture du débat, nous avons tous reconnu que l'un des objectifs que nous devions poursuivre était l'accélération de la procédure, à commencer par celle d'instruction.
    La deuxième disposition que nous souhaitons supprimer est celle prévue par le texte proposé pour l'article 82-2 du code de procédure pénale. En effet, cette disposition abroge la possibilité donnée à la personne mise en examen ou à la partie civile de solliciter du juge d'instruction un certain nombre de mesures d'instruction, assorties éventuellement d'un transport sur les lieux.
    Tous ceux qui ont fréquenté la faculté de droit se souviennent que le juge d'instruction instruit à charge et à décharge, qu'il conduit l'instruction et qu'il peut recevoir de la part du parquet, au nom de l'action publique - ce qui est très légitime - des éléments d'information et des demandes. Ils se souviennent aussi que la personne mise en examen ou la partie civile peuvent demander certaines investigations ; or, ce droit va leur être retiré, ce qui, je l'indique, est contesté par la Commission consultative des droits de l'homme.
    Enfin, la troisième disposition dont nous souhaitons la suppression est celle qui prévoit la création d'un article 177-3 dans le code de procédure pénale. Ce nouvel article permettra au juge d'instruction, lorsque la partie civile est une personne morale, de prononcer une amende civile contre le représentant légal de cette personne morale. Par conséquent, le président d'une personne morale pourra donc faire l'objet d'une condamnation personnelle au cas où le juge d'instruction aura estimé que l'action engagée par cette personne morale constituait une procédure abusive.
    Nous devons tous mesurer les conséquences d'une telle disposition : le président d'une personne morale pourra être condamné à titre personnel à une amende civile en raison d'une action intentée le plus souvent sur instruction de son conseil d'administration. J'appelle l'attention de la représentation nationale sur les conséquences qui ne manqueraient pas de découler de la mise en cause personnelle d'un président d'association, car, je le précise, toutes les associations relevant de la loi de 1901 sont concernées par ce texte.
    M. Jacques Myard. Et alors ?
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. Elle souhaite que toutes les dispositions de l'article 24 soient maintenues.
    J'en profite pour m'exprimer sur une disposition de cet article qui a été longuement évoquée. Je voudrais porter à la connaissance de l'Assemblée deux éléments qui permettront de l'éclairer.
    J'indique d'abord que toutes les dispositions concernant les témoins sont regroupées dans le titre XXI du code de procédure pénale, intitulé : « De la protection des témoins ». Ce titre comporte de nombreuses garanties.
    Ainsi « lorsque l'audition d'une personne ... est susceptible de mettre gravement en danger la vie ou l'intégrité physique de cette personne, des membres de sa famille ou de ses proches », les déclarations de cette personne peuvent être recueillies sans que son identité apparaisse dans le dossier. Telles sont les conditions qui doivent être remplies pour qu'un témoin soit protégé. Par conséquent, ceux de nos collègues qui craignaient que des dispositions de ce titre puissent être invoquées pour des conflits d'ordre privé n'ont pas de souci à se faire.
    Ensuite, je rappelle que l'article 706-62 dispose qu'aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement de déclarations recueillies dans les conditions prévues par le présent titre. Une telle disposition signifie que si le seul élément retenu dans une instruction était ce type de témoignage, ce ne serait pas suffisant pour condamner une personne.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour une raison très simple : l'allongement à deux mois du délai donné au juge pour convoquer une personne constitue une garantie supplémentaire accordée à la défense. Donc, je ne vois vraiment pas l'intérêt de cet amendement.
    Pour revenir sur le débat qui nous a occupés il y a quelques minutes, j'ai le sentiment qu'un certain nombre d'entre nous n'ont pas encore compris la gravité de la situation de notre pays en matière de sécurité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Je le dis avec gravité parce que je suis ministre de la justice, parce que la sécurité relève aussi de mes responsabilités et parce que je suis inquiet.
    Et si ce n'est pas nous qui rétablissons la sécurité, le pire peut arriver. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
    Soyons courageux. Ramenons le calme dans l'ensemble de nos villes et de nos campagnes, c'est indispensable. Il y va de l'équilibre même de notre société, il y va de la solidité de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. A la suite de l'intervention de M. le garde des sceaux, je tiens à souligner deux points qui me paraissent essentiels.
    Je ne vois pas le lien qu'il y a entre l'exigence de sécurité, à laquelle tout le monde reconnaît qu'il faut répondre, et la mise en cause personnelle du président d'une association qui s'est portée partie civile. Si quelqu'un peut me démontrer qu'il y a un lien, je suis prêt à l'admettre. Mais, pour ma part, je n'en vois pas.
    M. le garde des sceaux. Il ne s'agit pas de cela, vous le savez très bien !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Par ailleurs, l'exigence de la population en matière de sécurité, de justice de proximité et de protection des mineurs ne justifie pas que ce projet de loi traite de tout et de n'importe quoi sous couvert de celle-ci. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Voilà trois jours que nous posons des questions de fond, et nous n'obtenons pas de réponses claires et précises. Le problème, c'est que nous sommes face à une confusion totale que vous faites un amalgame, et que c'est d'autant plus facile qu'on est le 2 août. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Christophe Caresche. Excellent !
    M. Jean-Marie Le Guen. Tout cela est voté à la va-vite !
    M. Richard Mallié. Pure invention !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. La constitution de partie civile est un droit qui existe dans notre système juridique. Toutefois, aujourd'hui, nous nous trouvons en présence d'un certain nombre de situations que l'on peut qualifier de quasi-dilatoires, notamment en matière de conflits du travail. Ainsi, lorsqu'un salarié licencié saisit les prud'hommes pour demander des dommages et intérêts, il arrive de plus en plus souvent que la société dans laquelle ce salarié travaillait dépose une plainte au pénal avec constitution de partie civile, plainte qui repose sur pas grand-chose mais qui a pour effet de bloquer les procédures. Le Gouvernement a fait le raisonnement suivant : si c'est la caisse de la société qui doit payer l'éventuel coût de la plainte avec constitution de partie civile, il peut être très amusant d'utiliser cette ressource du droit pour bloquer tout le fonctionnement de la justice prud'homale, mais si c'est le responsable de la société qui peut être appelé à payer ce coût sur ses deniers personnels, cela incitera chacun à faire preuve de responsabilité et à ne pas utiliser une telle procédure comme moyen de bloquer un droit d'une des parties dans un conflit privé. Voilà ce qui donne tout son sens à la disposition que propose le Gouvernement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Toutes les associations seront concernées !
    M. le président. L'Assemblée étant suffisamment informée des positions de uns et des autres, je mets aux voix l'amendement n° 116.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, et M. Marsaud ont présenté un amendement, n° 181 rectifié, ainsi libellé :
    « Après le 4° du I de l'article 24, insérer l'alinéa suivant :
    « 4° bis Le dernier alinéa de l'article 186 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée : "Il en est de même lorsqu'il est fait appel, après expiration du délai prévu au quatrième alinéa du présent article, de toute ordonnance du juge d'instruction ou lorsque l'appel est devenu sans objet. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Je laisse à M. Marsaud le soin de soutenir cet amendement.
    M. le président. Monsieur Marsaud, vous avez la parole.
    M. Alain Marsaud. L'amendement n° 181 rectifié concerne l'appel des ordonnances du juge d'instruction et du juge de la liberté et de la détention. Nous savons tous combien il arrive parfois que ce type d'appel soit un peu abusif, notamment lorsqu'il est sans objet ou lorsqu'il est formé hors délai. Or il se trouve que, devant l'ancienne chambre d'accusation, on est obligé de réunir un procureur, un greffier, trois magistrats professionnels. En cas d'appel formé hors délai ou devenu sans objet, une telle procédure fait perdre beaucoup de temps. C'est la raison pour laquelle je propose que le président de la chambre d'instruction puisse déclarer irrecevable ce type d'appel.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Favorable. La commission a adopté cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 181 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, et M. Marsaud ont présenté un amendement, n° 182 rectifié, ainsi rédigé :
    « Après le 4° du I de l'article 24, insérer l'alinéa suivant :
    « 4° ter Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 197 du même code, après les mots : "par lettre recommandée sont insérés les mots : "ou par télécopie. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Là encore, je laisse à M. Marsaud le soin de défendre cet amendement.
    M. le président. C'est une partie de ping-pong. (Sourires.)
    Monsieur Marsaud, vous avez la parole.
    M. Alain Marsaud. Cet amendement tend à modifier l'article 197 du code de procédure pénale afin de permettre la convocation des avocats devant la chambre de l'instruction par télécopie, comme peut déjà le faire le juge d'instruction. Il s'agit, là aussi, de gagner du temps.
    M. Jacques Myard. On n'a plus confiance en La Poste !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. La commission a adopté l'amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Sagesse.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 182 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Nous en arrivons à l'amendement n° 272 de M. Goasguen, qui a été retiré par son auteur mais repris par M. Vallini et les membres du groupe socialistes. Cet amendement est libellé comme suit :
    « Rédiger ainsi le 5° du I de l'article 24 :
    « 5° L'article 706-58 du code de procédure pénale est supprimé. »
    Cet amendement, retiré par M. Goasguen, a été repris par M. Vallini et le groupe socialiste.
    Je mets aux voix l'amendement n° 272.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 24, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 24, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 24

    M. le président. M. Mariani a présenté un amendement, n° 239, ainsi libellé :
    « Après l'article 24, insérer l'article suivant :
    « Après le premier alinéa de l'article 138 du code de procédure pénale est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Lorsque la personne nécessite un accompagnement personnalisé, le juge ordonne un contrôle judiciaire socio-éducatif. »
    La parole est à M. Thierry Mariani.
    M. Thierry Mariani. Plus de trente ans après sa création, aucun texte de loi n'affirme le caractère socio-éducatif du contrôle judiciaire. Certes, la loi du 15 juin 2000 a ajouté à l'article 138 du code de procédure pénale un 6° qui prévoit que la personne à l'encontre de laquelle a été ordonnée une mesure de contrôle judiciaire peut être soumise « aux mesures socio-éducatives destinées à favoriser son insertion sociale et à prévenir la récidive ». Toutefois, la liste des intervenants pouvant être habilités n'ayant pas été revue depuis 1983, cela démontre l'absence de choix clairs quant à l'application de ces mesures.
    En conséquence, je propose que le texte de loi reconnaisse le contrôle judiciaire socio-éducatif, tant pour les mineurs que pour les majeurs, et le distingue du contrôle judiciaire simple, à savoir le pointage.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais un amendement similaire, déposé par Mme Comparini, avait recueilli un avis défavorable de la commission, car il était déjà satisfait par les textes en vigueur.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Effectivement, c'est déjà dans les textes, comme vous l'avez d'ailleurs dit vous-même, monsieur Mariani.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 239.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Mariani a présenté un amendement, n° 240, ainsi rédigé :
    « Après l'article 24, insérer l'article suivant :
    « I. - Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article 394 du code de procédure pénale, les mots "le président du tribunal ou juge délégué par lui sont remplacés par les mots "le juge des libertés et de la détention.
    « II. - La première phrase du premier alinéa de l'article 397-3 du code de procédure pénale est ainsi rédigée :
    « Dans tous les cas prévus par les paragraphes 2 et 3 de la présente section, le tribunal ou le juge des libertés et de la détention peuvent, conformément aux dispositions de l'article 141-1, placer ou maintenir le prévenu, non détenu pour autre cause, sous contrôle judiciaire socio-éducatif. »
    La parole est à M. Thierry Mariani.
    M. Thierry Mariani. Je retire l'amendement.
    M. le président. L'amendement n° 240 est retiré.

Article 25

    M. le président. Je donne lecture de l'article 25 :

Chapitre III
Dispositions relatives au jugement des délits

Section 1
Dispositions relatives à la procédure
de comparution immédiate

    « Art. 25. - Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
    « I. - L'article 395 est ainsi modifié :
    « 1° Au premier alinéa, les mots : "sans excéder sept ans sont supprimés ;
    « 2° Au deuxième alinéa, les mots : "au moins égal à un an sans excéder sept ans sont remplacés par les mots : "au moins égal à six mois. »
    « II. - Au troisième alinéa de l'article 396, les mots : "par les articles 135 et 145-1, quatrième alinéa sont remplacés par les mots : "par l'article 137-3, premier alinéa. »
    « III. - L'article 397-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Lorsque la peine encourue est supérieure à sept ans d'emprisonnement, le prévenu, informé de l'étendue de ses droits, peut demander que l'affaire soit renvoyée à une audience qui devra avoir lieu dans un délai qui ne peut être inférieur à deux mois, sans être supérieur à quatre mois. »
    « IV. - L'article 397-3 est ainsi modifié :
    « 1° Au deuxième alinéa, les références : "145, alinéa premier, 145-1, quatrième alinéa sont remplacées par la référence : "137-3, premier alinéa ;
    « 2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
    « Lorsque le prévenu est en détention provisoire, le jugement au fond doit être rendu dans les deux mois qui suivent le jour de sa première comparution devant le tribunal. Faute de décision au fond à l'expiration de ce délai, il est mis fin à la détention provisoire. Le prévenu, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, est mis d'office en liberté. »
    « 3° L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Lorsqu'il a été fait application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 397-1, le délai prévu à l'alinéa précédent est porté à quatre mois. »
    « V. - Le deuxième alinéa de l'article 397-4 est ainsi rédigé :
    « La cour statue dans les quatre mois de l'appel du jugement rendu sur le fond interjeté par le prévenu détenu, faute de quoi celui-ci, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, est mis d'office en liberté. »
    Je suis saisi de trois amendements identiques, n°s 53, 122 et 258.
    L'amendement n° 53 est présenté par M. Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 122 est présenté par M. Vallini et les membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 258 est présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 25. »
    La parole est à M. Michel Vaxès, pour soutenir l'amendement n° 53.
    M. Michel Vaxès. La comparution immédiate, qui permet qu'une personne soit jugée dès la fin de sa garde à vue, est aujourd'hui limitée aux délits pour lesquels la peine minimale encourue est au moins égale à un an et au maximum à sept ans.
    L'article 25 prévoit d'étendre cette possibilité à tous les délits dès lors qu'une peine d'emprisonnement d'au moins six mois est prévue dans le texte d'incrimination. Pourront donc être jugés en comparution immédiate les outrages simples ou bien encore les voyages réitérés sans titre de transport, par exemple, qui sont susceptibles d'une peine d'emprisonnement de six mois.
    Outre l'absence de délai pour préparer la défense, la procédure de comparution immédiate permettra désormais d'incarcérer sur-le-champ une personne pour des infractions de faible importance, malgré le droit d'appel. Une telle situation est paradoxale, car, dans le cadre de la procédure ordinaire, le mandat de dépôt à l'audience, qui correspond à une incarcération sur-le-champ, n'est possible que si la peine prononcée est supérieure à un an. Les infractions punies d'une peine d'emprisonnement de six mois maximum ne peuvent donc jamais aboutir à une incarcération. Ainsi, lorsque le tribunal prononce une peine inférieure à un an d'emprisonnement dans le cadre de la procédure ordinaire, si la personne comparaît libre, elle ne peut effectuer cette peine qu'après avoir été convoquée par le juge d'application des peines, qui étudie les possibilités d'une alternative à l'incarcération de nature à éviter la désocialisation ou à favoriser la réinsertion.
    Avec l'extension des comparutions immédiates pour les majeurs et le délai rapproché pour les mineurs, on mesure combien juger dans la précipitation et incarcérer vite est l'obsession des auteurs du projet de loi. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de l'article 25.
    M. Jacques Myard. Il n'a rien compris !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l'amendement n° 122.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. La procédure de comparution immédiate a été créée pour accélérer le processus de jugement lorsque les faits se trouvaient suffisamment élucidés par l'enquête préliminaire pour pouvoir donner lieu à jugement. Les sanctions encourues - jusqu'à sept années d'emprisonnement - permettaient une telle comparution.
    Par ailleurs, d'une manière un peu contradictoire, mais justifiée en matière de flagrance, les condamnations encourues de moins de six mois permettaient d'échapper à la procédure de comparution immédiate.
    Le dispositif proposé étend le champ d'application de la comparution immédiate aux délits punis de dix ans d'emprisonnement, c'est-à-dire qu'il permet de sanctionner des faits d'une plus grande gravité.
    Je souhaiterais appeler l'attention sur les conditions dans lesquelles se déroule l'audience de comparution immédiate. Sa tenue est très souvent improvisée et l'exercice des droits de la défense relève aussi de l'improvisation, et, du même coup, cela rend extrêmement difficile celui de l'ensemble de leurs pouvoirs par les juges.
    Ces procédures conduisent très souvent à des renvois pour complément d'éléments, sur l'identité, sur les capacités des détenus, éléments nécessaires au juge pour statuer.
    La comparution immédiate, dont l'intérêt n'est pas contestable, ne peut pas devenir malgré tout, au fil du temps, le droit commun du jugement. Si nous privons les juridictions du temps nécessaire pour statuer, si les audiences, comme c'est le cas la plupart du temps en comparution immédiate, cumulent des procédures et des dossiers de renvoi anciens avec des dossiers immédiats, les jugements risquent d'être prononcés sans un examen sérieux. Nous demandons donc qu'on en revienne aux conditions initiales prévues pour la comparution immédiate, soit à cause de la peine encourue, soit dans le cas de la flagrance.
    M. le président. L'amendement n° 258 n'est pas défendu.
    Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 53 et 112 ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Avis défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 53 et 122.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. L'amendement n° 38 n'est pas défendu.
    Je mets aux voix l'article 25.
    (L'article 25 est adopté.)

Article 26

    M. le président. Je donne lecture de l'article 26 :

Section 2
Dispositions étendant la compétence du juge unique
en matière correctionnelle

    « Art. 26. - L'article 398-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
    « 1° Au 5°, après la référence : "433-5, est insérée la référence : "433-6 à 433-8, premier alinéa, 433-10 ;
    « 2° Après le 7°, il est inséré un 8° ainsi rédigé :
    « 8° Les délits pour lesquels une peine d'emprisonnement n'est pas encourue, à l'exception des délits de presse. »
    La parole est à M. Emile Blessig, inscrit sur l'article 26.
    M. Emile Blessig. Deux observations.
    La première concerne le recours au juge unique. Dans notre système juridique, la collégialité a de tout temps été considérée comme une garantie pour le justiciable et le principe d'une meilleure justice. Malheureusement, nous avons eu de plus en plus régulièrement recours au juge unique. Depuis le début des débats sur ce texte, nous sommes constamment en présence de deux discours : un sur l'augmentation des moyens pour améliorer le service rendu par la justice, un autre sur la réforme pour parfaire le fonctionnement de l'ensemble du système. Nous avons également beaucoup parlé de justice de proximité.
    Un système permet de respecter la collégialité sans nécessairement avoir besoin de multiplier le nombre de juges, que nous n'avons pas, nous le savons bien ; c'est celui de l'échevinage. On a beaucoup parlé, ce matin, des juges non professionnels qui exercent dans les juridictions prud'homales, notamment en matière de droit du travail, mais également dans les juridictions commerciales. Dans ma région, l'Alsace-Moselle, il existe des chambres commerciales qui sont présidées par un magistrat professionnel assisté de deux citoyens, elles fonctionnent parfaitement bien. Je suis convaincu que le rapprochement de ces auxiliaires « juges-citoyens » avec des juges professionnels rendrait notre justice plus efficace, offrirait plus de garanties et, finalement, assurerait un meilleur fonctionnement.
    M. Alain Marsaud. Bravo !
    M. Emile Blessig. Ce pourrait même servir à rapprocher la justice des citoyens.
    Ma seconde observation est d'ordre plus technique. Je suis tout à fait favorable à l'extension du système de l'ordonnance pénale concernant les délits en matière routière. Toutefois, je ne comprends pas très bien pourquoi l'ordonnance pénale aurait un délai de contestation d'un mois en matière contraventionnelle et de quarante-cinq jours en matière délictuelle. Ne pourrait-on pas, dans un souci de simplification, n'instituer qu'un seul délai de quarante-cinq jours ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, n°s 10, 123 et 259.
    L'amendement n° 10 est présenté par M. Albertini ; l'amendement n° 123 est présenté par M. Vallini et les membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 259 est présenté par Mme Billard, M. Cochet et M. Mamère.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 26. »
    La parole est à M. Pierre Albertini, pour soutenir l'amendement n° 10.
    M. Pierre Albertini. Je souscris aux propos de notre collègue Emile Blessig.
    Depuis un certain temps, on sent la tentation quasi-irrépressible, lorsqu'on n'arrive pas à résoudre des problèmes de fond, d'avoir recours à la facilité, donc à la modification législative. Il en va ainsi de l'utilisation du témoignage, dont on a parlé tout à l'heure, ou de l'extension de la compétence du juge unique. Il existe, de part et d'autre, une volonté de modifier les règles, de déplacer les curseurs alors que les problèmes de fond subsistent.
    La collégialité reste un principe fondamental de la justice, et spécialement de la justice pénale. On nous rétorquera que ce n'est jamais qu'un 8° ajouté à une liste et que le juge unique en matière correctionnelle n'aura à connaître que des délits qui ne comportent pas de peine d'emprisonnement. Mais, mes chers collègues, on peut détruire l'honneur, la réputation d'une personne, même si elle n'encourt pas une peine d'emprisonnement. Or, avec le juge unique, le rique d'erreur est nécessairement multiplié.
    Je demeure convaincu, en ce qui me concerne, que la collégialité reste la meilleure garantie de bonne justice, et je crois que tout le monde partage cet avis. S'il y est porté atteinte, c'est essentiellement pour des raisons de moyens. C'est parce qu'on ne parvient pas, dans l'institution telle qu'elle existe, à assurer la collégialité. Mais prenons garde ! En grignotant ainsi, de proche en proche, tous les éléments qui fondaient autrefois les garanties fondamentales de la procédure pénale, nous sommes en train de construire un édifice extrêmement chaotique, qui risque à son tour d'engendrer des effets néfastes ou pervers que nous ne mesurons pas aujourd'hui.
    Avec cette extension du juge unique, nous nous engageons dans un processus à sens unique et le principe même de la collégialité des juges deviendra lettre morte dans notre institution juridique.
    Certes, on peut tabler sur les qualités des magistrats, sur les qualités des hommes, sur l'excellence de la formation de l'Ecole nationale de la magistrature, comme d'autres grandes écoles. Il n'empêche que tout système a ses limites. D'ailleurs, le recrutement presque exclusif qui est fait à la même source produit des dysfonctionnements. Sachons conserver une justice sereine, une justice égale, une justice équitable dont la collégialité reste un pilier. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. André Vallini. Très bien !
    M. Julien Dray. Il n'y a rien à ajouter.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l'amendement n° 123.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mes deux collègues qui viennent d'intervenir ont parlé d'or sur les grands enjeux de la justice pénale. Ce texte étend la compétence du juge unique en matière correctionnelle aux jugements pour les délits de rébellion, punis de six mois de prisons ; de rébellion armée, trois ans de prison ; de provocation à la rébellion, punis d'une petite amende. Je ne dis pas que ce ne sont pas des faits graves qui ne justifient pas des sanctions. Je considère simplement que de tels faits nécessitent une appréciation posée, retenue.
    Le juge unique a bien entendu d'énormes compétences. Celles-ci ont été étendues au fil du temps. Le problème de fond, c'est qu'il faut réduire les risques d'erreur d'appréciation, augmenter, intensifier le partage de l'intelligence, de la compétence dans le prononcé des décisions qui ont des conséquences graves pour les justiciables.
    C'est tout l'intérêt de la collégialité, qui doit rester le principe, même si les conditions de l'organisation juridictionnelle ou le fonctionnement de la justice rendent nécessaire qu'elle soit assouplie pour des faits modestes ou pour des sanctions peu graves. C'est pourquoi il ne faut pas accepter que, loi après loi, on entame ce principe au point qu'un jour il ne sera plus appliqué.
    De la même manière qu'on a souligné l'intérêt pour le juge d'instance de bénéficier du concours de citoyens dans le cadre de l'assessorat, on ne peut pas ne pas réfléchir à l'hypothèse que demain des citoyens soient associés au juge correctionnel. Cette piste, qui repose toujours sur le principe de la collégialité, garantie du respect des droits des justiciables, n'est pas négligeable.
    M. le président. L'amendement n° 259 n'est pas défendu.
    La parole est à M. Jean-Paul Garraud.
    M. Jean-Paul Garraud. Je m'étonne des critiques qui sont émises contre l'extension des compétences du juge unique en matière correctionnelle. Je rappelle à mes collègues la mise en place, à laquelle ils ont beaucoup contribué, du juge des libertés et de la détention. Or le juge des libertés et de la détention, c'est bien un juge unique, qui, en plus, met en prison et en détention provisoire. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)     M. Hervé Morin. Cela n'a rien à voir !
    M. Jean-Paul Garraud. Pourquoi vous opposez-vous à l'extension de compétences du juge unique en matière correctionnelle alors que vous ne vous êtes pas opposés à la création d'un juge des libertés et de la détention, qui est saisi de la mise en détention provisoire avant tout jugement, avant même que l'affaire n'ait connu une suite ? Une telle attitude me semble assez incohérente. Soit il faut une collégialité dans les formations, soit on ne peut qu'être d'accord avec ce qui est proposé.
    M. Alain Marsaud. Touché-coulé !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 10 et 163 ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Avis défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Julien Dray.
    M. Julien Dray. Notre collègue Garraud aurait dû faire référence à l'ensemble des documents parlementaires. En effet, que disait le rapport de Mme Lazerges sur l'évaluation de la loi sur la présomption d'innocence ? Il recommandait la collégialité pour le juge des libertés, pour donner encore plus d'autorité à cette délibération. Le problème, ce sont les moyens pour la mettre en place. Le juge des libertés représentait quand même une garantie de liberté supplémentaire dans la procédure par rapport à une décision importante, la mise en détention. Pour lui donner encore plus d'autorité, nous pensions qu'il fallait parvenir à une formation collégiale, ce que nous avions proposé. Nous sommes aujourd'hui dans la même logique car nous considérons, les intervenants qui m'ont précédé l'ont souligné, que l'autorité d'une décision n'est forte que lorsqu'elle est collégiale et qu'un débat contradictoire a pu se dérouler. C'est cela qui fait sa force et qui peut empêcher tous les dénis de justice, qui peuvent être contestés et provoquer toutes les procédures que nous connaissons par la suite.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tout à fait !
    M. Hervé Morin. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Jacques-Alain Bénisti.
    M. Jacques-Alain Bénisti. Monsieur Dray, quel est le problème aujourd'hui de notre justice ? C'est la lenteur incontestable des procédures, notamment dans les actes et les réponses des magistrats. Il faut donc essayer de raccourcir les procédures. La collégialité serait sans doute préférable, on est tous d'accord, mais, aujourd'hui, elle n'est pas applicable dans les faits, et notamment dans les procédures actuelles.
    Le rapporteur a auditionné un certain nombre de magistrats. Ceux-ci sont demandeurs d'une diminution des procédures, non pas pour eux, mais pour offrir un meilleur service aux justiciables.
    M. Julien Dray. Ce n'est pas vrai ! Donnez-nous les noms des magistrats.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 10 et 123.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 183, ainsi rédigé :
    « Compléter le 1° de l'article 26 par les mots : ", premier alinéa. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. L'amendement n° 183 propose d'exclure de la compétence du juge unique la provocation à la rébellion commise par voie de presse, les délits de presse étant traditionnellement exclus de cette procédure.
    M. Hervé Morin. En vertu de quoi ?
    M. Pierre Albertini. De la tradition ?
    M. le président. Le Gouvernement est favorable ?
    M. le garde des sceaux. Oui.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Voilà l'exemple même du problème que pose l'utilisation du juge unique. Je n'ai même pas à commenter. On sait très bien que les délits de presse sont compliqués et, en conséquence, on retire les délits les concernant de la compétence du juge unique. La complexité de la cause rend nécessaire la confrontation de la réflexion et des compétences entre plusieurs magistrats. C'est bien la preuve que le juge unique ne doit pas être la référence.
    En outre, je répondrai à l'orateur précédent que la justice rapide n'est pas forcément une bonne justice. C'est l'équilibre entre l'exigence de rapidité et la pertinence de la décision judiciaire qu'il faut toujours rechercher. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 183.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme Marylise Lebranchu. Nous n'avons pas obtenu de réponse !
    M. Hervé Morin. En effet.
    M. le président. Je mets aux voix l'article 26, modifié par l'amendement n° 183.
    (L'article 26, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 26

    M. le président. Je suis saisi par M. Warsmann, rapporteur, et M. Marsaud de deux amendements, n°s 185 et 184.
    Ces amendements peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
    L'amendement n° 185 est ainsi rédigé :
    « Après l'article 26, insérer la division et l'intitulé suivants : "Section 3. - Disposition relative à la fixation des audiences correctionnelles. »
    L'amendement n° 184 est ainsi rédigé :
    « Après l'article 26, insérer l'article suivant :
    « L'article 399 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
    « Art. 399. - Le nombre et le jour des audiences correctionnelles sont fixés à la fin de chaque année judiciaire pour l'année judiciaire suivante par une décision conjointe du président du tribunal de grande instance et du procureur de la République prise après avis de l'assemblée générale du tribunal.
    « En cas de nécessité, cette décision peut être modifiée dans les mêmes conditions en cours d'année. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Je laisse à M. Marsaud le soin de défendre l'amendement n° 185.
    M. Alain Marsaud. C'est un amendement de coordination, monsieur le président.
    M. le président. Pouvez-vous défendre également l'amendement n° 184, monsieur Marsaud ?
    M. Alain Marsaud. Bien sûr.
    Chaque année, le président du tribunal de grande instance fixe, après avis de l'assemblée générale du tribunal, le nombre des audiences correctionnelles qui doivent se tenir. Cela est un acte particulièrement important. Dans la loi du 15 juin 2000, il a été décidé d'associer enfin le juge du siège, à savoir le président, avec le procureur de la République dans le but de prévoir l'audiencement des affaires. Cette association est une bonne chose, car le tribunal correctionnel doit fonctionner sur deux jambes.
    C'est la raison pour laquelle je propose que la fixation des audiences correctionnelles sur toute l'année - et Dieu sait que ce n'est pas un acte neutre dans le fonctionnement d'une juridiction, car pour qu'une juridiction fonctionne correctement, il faut que l'activité de poursuite et de jugement marchent de concert - se fasse en concertation avec le procureur de la République. Cela est bien la moindre des choses. Ce sont les deux parties principalement représentées dans une juridiction, et il est souhaitable qu'elles se parlent sur ce plan-là.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. On entre là dans le fonctionnement même des juridictions. Je trouve personnellement un peu dommage que cet amendement soit apparu hier, avant même que nous n'ayons pu en discuter avec les représentants des responsables des juridictions.
    M. Hervé Morin. Oh ! Il n'a pas été soumis au Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Vous permettez que je puisse parler, monsieur Morin ? Merci. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)
    La commission a adopté cet amendement, j'en prends acte, mais je pense que, vis-à-vis des responsables de juridiction, c'est un amendement maladroit. (« Oh ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Hervé Morin. Ah !
    M. Xavier de Roux. C'est un amendement de procureur !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Garraud.
    M. Jean-Paul Garraud. Je comprends très bien la volonté de mon collègue ancien procureur. Simplement dans un tribunal de grande instance, il n'y a pas que les audiences correctionnelles, il y a beaucoup d'autres audiences, civiles et dans d'autres matières. Le président du tribunal de grande instance établit donc, au début de chaque année judiciaire, ce qu'on appelle une ordonnance de roulement. Il organise ainsi le roulement des audiences, pas uniquement des audiences pénales.
    Et je crains, si le procureur s'entretient avec le président des audiences correctionnelles, et uniquement d'elles, que le roulement de ces autres audiences soit désorganisé.
    La mesure proposée peut être la source d'une désorganisation qui risque d'être très gênante dans la dyarchie de chaque tribunal de grande instance.
    M. Xavier de Roux. Corporatisme !
    M. Jean-Marie Le Guen. Ils sont bien fragiles, ces magistrats !
    M. Jean-Paul Garraud. Il n'est pas rare qu'un président et un procureur ne soient pas d'accord.
    M. Xavier de Roux. Retirez l'amendement, monsieur Marsaud !
    M. Hervé Morin. Ecoutez M. de Roux, cher collègue !
    M. le président. La parole est à M. Alain Marsaud.
    M. Alain Marsaud. Puisque l'amendement n° 184 a été considéré comme « maladroit » par le Gouvernement, je ne saurais le maintenir.
    Je suis tout à fait favorable à la concertation et à la souplesse dans l'organisation des juridictions. Mais le problème se posera à l'avenir et il faudra bien que nous envisagions de le traiter.
    M. le président. Si je comprends bien, les deux amendements n°s 185 et 184 sont retirés...
    M. Alain Marsaud. Oui, monsieur le président. (« Ah ! » sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste. - M. Xavier de Roux applaudit.)
    Je fais ainsi plaisir à M. de Roux et à M. Michel Voisin, qui s'était associé à l'un des amendements mais qui n'ose pas le dire. (Rires sur divers bancs.)
    M. le président. Cette précision sera consignée au Journal officiel, monsieur Marsaud ! (Sourires.)
    Les amendements n°s 185 et 184 sont donc retirés.
    M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 186 deuxième rectification, ainsi libellé :
    « Après l'article 26, insérer les dispositions suivantes :
    « Section 4. - Dispositions relatives à la procédure simplifiée en matière de délit
    « Article 26 bis. - Après l'article 494-1 du même code, il est inséré une section ainsi rédigée :
    « Section 7. - De la procédure simplifiée
    « Art. 495. - Peuvent être soumis à la procédure simplifiée prévue à la présente section les délits prévus par le code de la route.
    « Cette procédure n'est pas applicable :
    « 1° Si le prévenu était âgé de moins de dix-huit ans au jour de l'infraction ;
    « 2° Si la victime a formulé, au cours de l'enquête, une demande de dommages et intérêts ou de restitution, ou a fait directement citer le prévenu avant qu'ait été rendue l'ordonnance prévue à l'article 495-1 ;
    « 3° Si le délit prévu par le code de la route a été commis en même temps qu'une contravention ou qu'un délit d'homicide involontaire ou d'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne.
    « Le ministère public ne peut recourir à la procédure simplifiée que lorsqu'il résulte de l'enquête de police judiciaire que les faits reprochés au prévenu sont établis, et que les renseignements concernant la personnalité de celui-ci, et notamment ses charges et ses ressources, sont suffisants pour permettre la détermination de la peine.
    « Art. 495-1.- Le ministère public qui choisit la procédure simplifiée communique au président du tribunal le dossier de la poursuite et ses réquisitions.
    « Le président statue sans débat préalable par une ordonnance pénale portant relaxe ou condamnation à une amende ainsi que, le cas échéant, à une ou plusieurs des peines complémentaires encourues, ces peines pouvant être prononcées à titre de peine principale.
    « S'il estime qu'un débat contradictoire est utile ou qu'une peine d'emprisonnement devrait être prononcée, le juge renvoie le dossier au ministère public.
    « Art. 495-2.- L'ordonnance mentionne les nom, prénoms, date et lieu de naissance et domicile du prévenu, la qualification légale, la date et le lieu du fait imputé, la mention des textes applicables et, en cas de condamnation, la ou les peines prononcées.
    « L'ordonnance pénale doit êre motivée, au regard notamment des dispositions du dernier alinéa de l'article 495.
    « Art. 495-3. - Dès qu'elle est rendue, l'ordonnance pénale est transmise au ministère public qui, dans les dix jours, peut soit former opposition par déclaration au greffe du tribunal, soit en poursuivre l'exécution.
    « Cette ordonnance est portée à la connaissance du prévenu soit par signification, soit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, soit par notification par l'intermédiaire d'un délégué du procureur de la République.
    « Le prévenu est informé qu'il dispose d'un délai de quarante-cinq jours à compter de cette notification pour former opposition à l'ordonnance, et que cette opposition permettra que l'affaire fasse l'objet d'un débat contradictoire et public devant le tribunal correctionnel, au cours duquel il pourra être assisté par un avocat, dont il pourra demander la commission d'office. Le prévenu est également informé que le tribunal correctionnel, s'il l'estime coupable des faits qui lui sont reprochés, aura la possibilité de prononcer contre lui une peine d'emprisonnement si celle-ci est encourue pour le délit ayant fait l'objet de l'ordonnance.
    « En l'absence d'opposition, l'ordonnance est exécutée suivant les règles prévues par le présent code pour l'exécution des jugements correctionnels.
    « Toutefois, s'il ne résulte pas des pièces du dossier que le prévenu a eu connaissance de l'ordonnance pénale, l'opposition reste recevable jusqu'à l'expiration d'un délai de trente jours qui court de la date à laquelle l'intéressé a eu connaissance, d'une part, de la condamnation, soit par un acte d'exécution soit par tout autre moyen, d'autre part, du délai et des formes de l'opposition qui lui sont ouvertes.
    « Le comptable du Trésor arrête le recouvrement dès réception de l'avis d'opposition à l'ordonnance pénale établi par le greffe.
    « Art. 495-4. - En cas d'opposition formée par le ministère public ou par le prévenu, l'affaire est portée à l'audience du tribunal correctionnel. Le jugement rendu par défaut, sur l'opposition du prévenu, n'est pas susceptible d'opposition.
    « Jusqu'à l'ouverture des débats, le prévenu peut renoncer expressément à son opposition. L'ordonnance pénale reprend alors sa force exécutoire et une nouvelle opposition n'est pas recevable.
    « Art. 495-5. - L'ordonnance pénale à laquelle il n'a pas été formé opposition ou qui n'a pas été portée par le ministère public à l'audience du tribunal correctionnel a les effets d'un jugement passé en force de chose jugée concernant l'action publique.
    « Art. 495-6. - Les dispositions de la présente section ne font pas échec aux droits de la partie lésée de citer l'auteur des faits devant le tribunnal correctionnel.
    « Le tribunal statue uniquement sur les intérêts civils si l'ordonnance pénale a acquis la force de chose jugée. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Cet amendement vise à étendre la procédure simplifiée de l'ordonnance pénale aux délits prévus par le code de la route, avec certaines restrictions : cette procédure simplifiée ne sera pas applicable si le prévenu est âgé de moins de dix-huit ans, si la victime a formulé une demande de dommages et intérêts ou si le délit prévu par le code de la route a été commis en même temps qu'une contravention ou un délit d'homicide involontaire ou une atteinte involontaire à l'intégrité de la personne.
    Dans le cas où le juge considère qu'une ordonnance doit être rendue, la personne concernée dispose d'un délai de quarante-cinq jours pour accepter celle-ci ou former opposition. Si elle décide de former opposition, cette personne se retrouve devant le tribunal. Si elle accepte l'ordonnance, l'affaire en reste là.
    Le texte a été assorti d'un grand nombre de garanties, tant pour la personne qui est reconnue coupable de l'infraction, qui peut contester, dans un délai très large, l'ordonnance pénale et se retrouver alors devant le tribunal comme si la procédure n'avait pas été utilisée, que pour la victime, qui ne voit en aucun cas ses droits atteints.
    A ce propos, je rectifie - une troisième fois - l'amendement pour que soit rédigé ainsi l'article 495-5 :
    « L'ordonnance pénale à laquelle il n'a pas été formé opposition ou qui n'a pas été portée par le ministère public à l'audience du tribunal correctionnel a les effets d'un jugement passé en force de chose jugée.
    « Cependant, elle n'a pas l'autorité de la chose jugée à l'égard de l'action civile en réparation des dommages causés par l'infraction. »
    Avec cette nouvelle rédaction, il sera encore plus clair que la victime ne pourra en aucun cas voir ses droits atteints par la procédure de l'ordonnance pénale.
    La procédure simplifiée doit être motivée par le juge et, je le répète, apporte toutes les garanties pour ce qui concerne tant la personne poursuivie que l'éventuelle victime. Elle présente un grand intérêt pour le fonctionnement des juridictions.
    Il s'agit là d'une disposition qui est très attendue, notamment par celles et par ceux d'entre vous qui ont assisté aux auditions de notre commission. Nous avons beaucoup travaillé pour faire en sorte qu'elle soit assortie de toutes les protections nécessaires, et c'est pourquoi la commission vous demande, mes chers collègues, d'adopter l'amendement tel que je viens de le rectifier.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 186 troisième rectification ?
    M. le garde des sceaux. Mesdames, messieurs, je voudrais sincèrement remercier la commission des lois et en particulier son rapporteur pour la qualité du travail accompli et la proposition qui vient d'être faite.
    En effet, si vous adoptez cet amendement, vous concourrez à un meilleur traitement des infractions au code de la route dans d'excellentes conditions d'efficacité sur le plan pénal.
    Je suis très favorable à cet amendement. Sa rédaction très précise et les précautions, notamment en matière de constitutionnalité, qui ont été prises, sont l'illustration de la qualité du travail qui a été effectué par votre commission.
    M. le président. La parole est à M. Xavier de Roux.
    M. Xavier de Roux. La procédure proposée est en effet bienvenue. Je voudrais cependant revenir sur un point qu'a évoqué notre rapporteur et selon lequel l'ordonnance n'aurait pas l'autorité de la chose jugée vis-à-vis des victimes.
    La tâche des victimes va se trouver bien compliquée...
    M. Richard Cazenave. C'est vrai !
    M. Xavier de Roux. ... puisque, dès lors que l'ordonnance précisera la responsabilité et prévoira une condamnation, celles-ci devront pouvoir se fonder sur elle pour demander réparation.
    Comme n'importe quelle décision de justice, l'ordonnance doit avoir l'autorité de la chose jugée pour fonder l'action en réparation de la victime.
    Je suis tout à fait partisan de la procédure, mais l'ordonnance doit avoir un effet vis-à-vis de la victime puisqu'elle « constitue », si je puis dire, la faute. Sinon, la procédure sera entièrement civile, et si complexe que l'on ne saura plus où est la responsabilité.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. La disposition proposée a fait l'objet d'une expertise.
    Monsieur de Roux, l'hypothèse d'une ordonnance de relaxe doit aussi être prise en compte. C'est dans le but de protéger le droit des victimes que j'ai invité l'Assemblée à adopter le dispositif que j'ai décrit.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 186 troisième rectification.
    (L'amendement est adopté.)

Article 27

    M. le président. Je donne lecture de l'article 27 :

Chapitre IV
Dispositions relatives à la procédure criminelle
et à la cour d'assises

    « Art. 27. - Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
    « I. - L'article 215 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « L'arrêt de mise en accusation est notifié à l'accusé conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 183 et il lui en est laissé copie. »
    « II. - A l'article 215-2, les mots : "à compter de la date à laquelle la décision de mise en accusation est définitive sont remplacés par les mots "à compter soit de la date à laquelle la décision de mise en accusation est définitive s'il était alors déjà détenu, soit de la date à laquelle il a été ultérieurement placé en détention provisoire.
    « III. - L'article 268 est abrogé.
    « IV. - Le deuxième alinéa de l'article 367 est ainsi modifié :
    « 1° La première phrase est complétée par les mots : ", sans préjudice pour l'accusé de son droit à demander sa mise en liberté conformément aux dispositions des articles 148-1 et 148-2.
    « 2° Les trois dernières phrases sont supprimées. »
    M. Vallini et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 117, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 27. »
    La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. L'article 27 apporte diverses modifications aux dispositions relatives à la procédure criminelle, la plus grave que l'on connaisse.
    La substitution de la notification par huissier de la signification de l'acte d'accusation par une simple notification ne nous paraît pas souhaitable. On peut considérer qu'il s'agit d'un allégement des formalités, dont le sens ne pose pas de problème. Mais j'attire l'attention de la représentation nationale sur le fait que l'acte considéré génère un certain nombre de droits et qu'il fait notamment courir le délai de jugement devant la cour d'assises, au terme duquel la personne détenue doit être immédiatement libérée. Cet acte fixe par ailleurs les modalités selon lesquelles la cour d'assises statuera.
    Nous pensons que la forme de la notification doit rester solennelle. On s'exposerait sinon à une multiplication des recours en contestation de la validité de la procédure. Au-delà, c'est la formalité même du renvoi devant la cour d'assises qui risque d'être compromise.
    Nous proposons en conséquence de supprimer l'article 27.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 117.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 187, ainsi rédigé :
    « A la fin du dernier alinéa du I de l'article 27, supprimer les mots : "et il lui en est laissé copie. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer une disposition inutile.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 187.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 188, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le début du II de l'article 27 :
    « II. - A l'article 215-2, les mots : "à compter de la date à laquelle la décision de mise en accusation est devenue définitive sont remplacés par les mots : "à compter soit de la date à laquelle la décision de mise en accusation est devenue définitive s'il était alors.... » (Le reste sans changement).
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Cet amendement tend à corriger une erreur matérielle.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 188.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 27, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 27, ainsi modifié, est adopté.)

Article 28

    M. le président. Je donne lecture de l'article 28 :

Chapitre V
Disposition relative à l'application des peines

    « Art. 28. - Après le sixième alinéa de l'article 722 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Le juge de l'application des peines peut, avec l'accord du procureur de la République et celui du condamné ou de son avocat, octroyer une des mesures mentionnées à l'alinéa précédent sans procéder à un débat contradictoire. »
    Je mets aux voix l'article 28.
    (L'article 28 est adopté.)

Après l'article 28

    M. le président. Je suis saisi par Mme Joissains-Masini de deux amendements, n°s 229 et 230.
    Ces amendements peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
    L'amendement n° 229 est ainsi rédigé :
    « Après l'article 28, insérer la division et l'intitulé suivants :
    « Chapitre V bis. - Dispositions relatives aux pourvois réservés devant la chambre criminelle de la Cour de cassation. »
    L'amendement n° 230 est ainsi libellé :
    « Après l'article 28, insérer l'article suivant :
    « L'article 571 du code de procédure pénale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
    « En cas de pourvoi en cassation réservé, il appartient au greffe de la chambre criminelle, au moment de l'examen du pourvoi au fond, de faire revenir également le ou les pourvois réservés inscrits et enregistrés auprès de son greffe et de solliciter les avocats aux conseils ayant inscrit les pourvois devenus réservés aux fins d'établissement d'un mémoire ampliatif permettant l'examen complet contradictoire des moyens de droits réservés, en même temps que l'examen du pourvoi au fond.
    « Ces dispositions s'appliqueront aux pourvois réservés inscrits devant la chambre criminelle et non examinés par elle à ce jour. »
    Ces amendements sont-ils défendus ?
    M. Richard Mallié. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. L'avis du Gouvernement est également défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 229.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 230.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Clément et M. Périssol ont déposé deux amendements, n°s 219 et 220.
    Ces amendements peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
    L'amendement n° 219 est ainsi rédigé :
    « Après l'article 28, insérer la division et l'intitulé suivants :
    « Chapitre VI. - Dispositions relatives à certaines atteintes à l'autorité de l'Etat. »
    L'amendement n° 220 est ainsi libellé :
    « Après l'article 28, insérer l'article suivant :
    « Avant le dernier alinéa de l'article 433-5 du code pénal, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Lorsqu'il est adressé à une personne chargée d'une mission de service public et que les faits ont été commis à l'intérieur d'un établissement scolaire ou éducatif, ou, à l'occasion des entrées ou sorties des élèves, aux abords d'un tel établissement, l'outrage est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. »
    La parole est à M. Pierre-André Périssol, pour défendre ces deux amendements.
    M. Pierre-André Périssol. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, l'école souffre. Doit-on rappeler qu'un acte de violence y est commis toutes les huit secondes ?
    Les enseignants, comme l'ensemble des personnels éducatifs, sont particulièrement visés. Il est indispensable de leur adresser un message leur montrant que nous sommes déterminés à les défendre et à les protéger.
    Les personnels éducatifs sont investis de l'autorité devant leurs classes et à l'intérieur de leurs établissements. C'est pourquoi nous souhaitons que les outrages dont ils sont victimes soient punis compte tenu du fait que ces personnels sont effectivement investis de l'autorité.
    M. Clément et moi-même proposons en conséquence d'aggraver les sanctions punissant ces actes, qu'ils soient commis dans les classes, dans les établissements ou à leurs abords en référence à qui se passe lorsque d'autres personnes investies de l'autorité sont concernées.
    M. Jacques Myard. Très bien !
    M. Pierre-André Périssol. Nous voulons envoyer un double message : nous souhaitons exprimer une volonté de protection et, ce faisant, remédier à un certain nombre de problèmes dans les établissements scolaires et à leurs abords.
    Je soutiens cet amendement avec M. Clément, cosignataire, mais aussi avec M. Bertrand, M. Grand et M. Geoffroy. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Ces amendements n'ont pas été soumis à la commission. Je ne peux donc donner qu'un avis personnel.
    Dans notre pays, nous sommes confrontés à un problème très grave, celui des violences commises contre les enseignants. Cette violence est, hélas, très souvent le fait de parents ou de grands frères d'élèves scolarisés, qui viennent à proximité des établissements ou parfois pénètrent dans leur enceinte pour commettre leurs agressions.
    La solution juridique que propose M. Périssol consiste à créer une infraction d'outrage aggravé à l'encontre des enseignants, les peines étant identiques à celles prévues lorsque la victime de l'outrage est une personne dépositaire de l'autorité publique.
    A titre personnel, je suis tout à fait favorable à ce dispositif.
    M. Julien Dray. Quel réactionnaire !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. Julien Dray. Ils sont réactionnaires jusqu'au bout des ongles !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement traduit une hyper-réaction face à une situation qui est indiscutablement problématique.
    Vous avez visiblement la prétention de rétablir un ordre, si tant est que cet ordre ait jamais existé, par la simple évocation, voire par l'application d'un certain nombre de sanctions qui sont complètement disproportionnées par rapport au vécu de nombreux jeunes. (« C'est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Pierre-André Périssol. Allez le dire aux enseignants !
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous adoptez une attitude de « surréaction » et je me demande pourquoi vous vous arrêtez là. Ajoutez-y six mois d'emprisonnement, pendant que vous y êtes !
    Votre hyper-réaction n'a absolument aucun sens par rapport au vécu des jeunes...
    M. Thierry Mariani. On le dira à vos électeurs socialistes !
    M. Pierre-André Périssol. Oui, et merci pour eux ! Nous leur dirons !
    M. Jean-Marie Le Guen. Qu'est-ce que cela veut dire, monsieur Périssol ?
    Lorsque vous veniez rue de Solférino pour obtenir l'investiture du parti socialiste, c'était autre chose ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Monsieur Le Guen, je vous en prie !
    L'Assemblée étant suffisamment informée, nous allons passer aux votes.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 219.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 220.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Les amendements n°s 5 et 4 ne sont pas défendus.
    Je suis saisi par M. Rivière de deux amendements, n°s 3 et 2.
    Ces amendements peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
    L'amendement n° 3 est ainsi rédigé :
    « Après l'article 28, insérer la division et l'intitulé suivants :
    « Chapitre VI. - Dispositions relatives aux chiens dangereux. »
    L'amendement n° 2 est ainsi libellé :
    « Après l'article 28, insérer l'article suivant :
    « L'article L. 215-4 du code rural est ainsi rédigé :
    « Art. L. 215-4. - Sont punies d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende les infractions aux dispositions des articles L. 211-14 et L. 211-16 du présent titre. »
    Ces amendements sont-ils défendus ?
    M. Richard Mallié. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. L'amendement n° 3 est la conséquence de l'amendement n° 2, qui prévoit d'inclure dans le code rural une disposition faisant de l'infraction de non-vaccination ou d'errance d'un chien dangereux, actuellement contravention de troisième ou de deuxième classe, un délit.
    L'amendement n° 2 a été présenté à la commission, qui a émis un avis favorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Sincèrement, ces amendements ne me paraissent pas tout à fait justifiés. Je ne crois pas qu'il soit opportun de transformer en délits les contraventions de deuxième, troisième et quatrième classe qui qualifient les infractions administratives existant en la matière.
    Les mesures proposées sont disproportionnées par rapport à l'enjeu. Avis défavorable, donc.
    M. Julien Dray. On veut créer un délit pour les chiens !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je suis, à titre personnel, favorable aux amendements car je pense que l'on est plus en droit de durcir la répression contre les chiens que contre les enfants. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Plusieurs députés de l'Union pour la majorité présidentielle. Démago !
    M. Jacques Myard. M. Le Guen a une dent contre les chiens ! (Sourires.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, et M. Marsaud ont présenté un amendement, n° 190, ainsi rédigé :
    « Après l'article 28, insérer la division et l'intitulé suivants :
    « Chapitre VI. - Dispositions diverses. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 190.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, et M. Marsaud ont présenté un amendement, n° 189 rectifié, ainsi rédigé :
    « Après l'article 28, insérer l'article suivant :
    « I. - Dans le premier alinéa de l'article 421-4 du code pénal, les mots "quinze ans de réclusion criminelle et 225 000 euros d'amende sont remplacés par les mots "vingt ans de réclusion criminelle et 350 000 euros d'amende.
    « II. - Il est ajouté, après l'article 706-24-2 du code de procédure pénale, un article 706-24-3 ainsi rédigé :
    « Art. 706-24-3. - Pour l'instruction du délit d'association de malfaiteurs prévu par l'article 421-5 du code pénal, la durée totale de la détention provisoire prévue par le deuxième alinéa de l'article 145-1 est portée à trois ans. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Je laisse le soin à M. Marsaud de défendre cet amendement.
    M. le président. Monsieur le rapporteur, vous vous livrez avec M. Marsaud à un véritable duo de claquettes. (Sourires.)
    Vous avez la parole, monsieur Marsaud.
    M. Alain Marsaud. M. le rapporteur et moi-même jouons effectivement les duettistes. Autant terminer cette journée dans la bonne humeur et mettre un peu de sel sans ce débat qui en a bien besoin !
    Nous proposons, par l'amendement n° 189 rectifié, de modifier à la marge - je dis bien : à la marge - la législation de lutte contre le terrorisme qui a connu, depuis 1986, et pas toujours d'une manière très coordonnée, diverses modifications.
    L'article 421-4 du code pénal vise les attentats terroristes biologiques. Chacun se souvient des alertes à l'anthrax qu'ont subies les Etats-Unis. Pour ces infractions, nous proposons de porter de quinze à vingt ans la peine de réclusion criminelle.
    L'amendement crée surtout une infraction d'association de malfaiteurs terroristes. Il s'agit certainement du délit auquel sont le plus fréquemment confrontés les magistrats instructeurs dans la répression des actes terroristes, et notamment dans les affaires de démantèlement de réseaux.
    Pour différentes raisons, qui tiennent pour une part aux différentes modifications législatives, la durée maximale de la détention provisoire est de deux ans. Or il est absolument impossible, eu égard à l'organisation actuelle des systèmes de police et à l'usage des commissions rogatoires internationales, de mener à bien une enquête dans ce délai. Ainsi, la mise en liberté d'un certain nombre d'individus considérés, c'est le moins que l'on puisse dire, comme dangereux est rendue obligatoire au bout de deux ans alors que l'enquête n'est pas close.
    C'est la raison pour laquelle nous vous proposons de porter la durée de la détention provisoire à trois ans, ce qui constituerait effectivement une mesure exceptionnelle, dans le cadre des enquêtes relatives à la lutte antiterroriste.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 189 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Teissier et M. Mallié ont présenté un amendement, n° 35, ainsi libellé :
    « Après l'article 28, insérer l'article suivant :
    « L'article 722-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
    « I. - Le quatrième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
    « Elle entend également les observations de la partie civile et, le cas échéant, celles de son avocat, dès lors que la partie civile, préalablement informée de la demande du condamné ou de la réquisition du procureur, en a manifesté le souhait. »
    « II. - Dans la première phrase du cinquième alinéa, les mots : « par le condamné ou par le ministère public », sont remplacés par les mots : « par le condamné, par le ministère public ou par la partie civile. »
    « III. - A la fin de la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa, les mots : « après que l'avocat du condamné a été entendu en ses observations », sont remplacés par les mots : « après que l'avocat du condamné et, le cas échéant, celui de la partie civile, ont été entendus en leurs observations. »
    La parole est à M. Richard Mallié.
    M. Richard Mallié. Depuis la loi sur la présomption d'innocence du 15 juin 2000, la décision en matière de libération conditionnelle a été transférée à une juridiction régionale créée dans le ressort de chaque cour d'appel. Trois magistrats y siègent et à aucun moment la partie civile n'est appelée à donner son point de vue. Cette non-représentation de la partie « victime » est inéquitable et porte atteinte à la vertu transcendante de justice. Cela dit, si j'obtiens des éclaircissements du Gouvernement, je suis prêt à retirer cet amendement.
    M. le président. Quelle est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Permettre à la partie civile d'intervenir dans la procédure de libération conditionnelle est contraire aux principes actuellement en vigueur dans notre pays, puisque la partie civile ne peut pas faire appel de la peine. Elle intervient sur les intérêts civils. Par ailleurs, les parlementaires ayant fait partie de la commission d'enquête s'en souviennent sans doute, Jacques Floch, qui avait travaillé sur la question, n'estimait pas souhaitable d'aller dans cette direction. Enfin, outre qu'il pose beaucoup de problèmes de principe, un tel système nous semble lourd. Telles sont les raisons pour lesquelles la commission est défavorable à cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Je comprends très bien l'idée qui a motivé la rédaction de l'amendement. Comme je l'ai dit dans mon propos introductif à nos débats, je souhaite que, au cours des cinq prochaine années, nous puissions progressivement élaborer un vrai droit de la victime, mais cet amendement me paraît prématuré. Je souhaite en effet que nous progressions dans la concertation avec les associations de victimes, comme l'a d'ailleurs suggéré M. Warsmann, et que nous revoyions la question dans le cadre de la mise en place du plan en faveur des victimes. Je crains que, en agissant de façon précipitée, nous ne fassions quelque chose qui ne serait ni souhaité ni souhaitable. Je vous rappelle en effet que certaines associations de victimes ne sont pas favorables à un tel dispositif. Compte tenu de cette incertitude, de ces interrogations, il me semblerait plus prudent de retirer cet amendement, sachant que je prends l'engagement d'en reparler lorsque nous aurons suffisamment réfléchi et suffisamment écouté les parties prenantes.
    M. le président. Monsieur Mallié, retirez-vous cet amendement ?
    M. Richard Mallié. Oui, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 35 est retiré.

Article 29

    M. le président. Je donne lecture de l'article 29 :

TITRE V

DISPOSITIONS RELATIVES À L'AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT ET DE LA SÉCURITÉ DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES

Chapitre Ier
Disposition relative
aux communications téléphoniques

    « Art. 29. - Après le 6° de l'article L. 33-3 du code des postes et télécommunications, il est inséré un 7° ainsi rédigé :
    « 7° Les installations radioélectriques permettant de rendre inopérants dans l'enceinte des établissements pénitentiaires, tant pour l'émission que pour la réception, les appareils de télécommunication mobiles de tous types. »
    MM. Albertini, Morin et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 288, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 29. »
    La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.
    M. Jean Dionis du Séjour. Nous souhaitons la suppression de cet article pour pouvoir poursuivre l'évaluation de la mise en oeuvre d'une telle mesure. Le brouillage des mobiles ne faisant pas partie du corpus doctrinal de l'UDF, nous sommes arrivés sans a priori sur ce texte. Nous en avons discuté, notamment avec les fonctionnaires de l'Ecole nationale d'administration pénitentiaire à Agen et avec des ingénieurs des télécoms, et leur réaction a été très mitigée.
    L'objectif d'une telle mesure est d'éviter les communications par téléphone mobile avec l'extérieur, supposées favoriser l'évasion des détenus de nos établissements pénitentiaires. Elle est d'ailleurs en partie justifiée, mais reconnaissons que si l'évasion existe, ce n'est pas un problème prioritaire. Oui, nos prisons sont archi-pleines. Oui, elles sont vétustes. Mais, pour l'essentiel, elles sont sûres. En revanche, cette mesure coûtera très cher. Les premiers chiffrages font état de 53 millions d'euros, ce qui est considérable. Cette somme serait sans doute très utile ailleurs, notamment pour la création des centres éducatifs fermés.
    Ensuite, une telle mesure sera difficile à mettre en oeuvre. Il est en effet techniquement très difficile de confiner un brouillage à une zone géographique limitée. Cela posera des problèmes avec le voisinage et avec la police, les pompiers et les médecins qui peuvent recevoir des messages électroniques d'urgence. La mise en oeuvre de dispositifs efficaces par rapport à la technologie des mobiles, qui est en permanente évolution, sera très coûteuse, alors que les portables et parfois les écoutes peuvent être utiles pour agir à l'extérieur - ce sont les fonctionnaires de l'administration pénitentiaire qui nous l'ont dit.
    Au-delà de ces remarques importantes sur le mauvais rapport coût-efficacité de cette mesure, c'est le problème de l'isolement qui est posé. A Agen, par exemple, pour faire passer des messages, des personnes dans la rue appellent celles qui sont dans les cellules. Donc veillons à ne pas focaliser sur les mobiles et prenons garde à ne pas sombrer dans une logique d'isolement complet par rapport à l'extérieur !
    Si nous interdisons les portables en prison, qu'allons-nous faire pour le Web, la messagerie électronique ? Allons-nous aussi interdire l'accès au Web pour réduire le risque d'évasion, certes réel mais réduit, alors que c'est certainement l'un des outils de réinsertion les plus efficaces, notamment pour les délinquants mineurs ? Interdire complètement l'accès au Web en prison serait fermer une voie très efficace pour la réinsertion et souhaitable pour les détenus. En revanche, si vous l'autorisez, alors l'interdiction des portables n'aura pas beaucoup de sens puisque des messages pourront être échangés avec l'extérieur et qu'il sera même possible de téléphoner sur le Web. Bref, cette mesure devrait faire l'objet d'une réflexion approfondie avant d'être mise en oeuvre. Voilà qui explique notre amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. Nous avons néanmoins eu un débat sur ce sujet et nous sommes très sensibles à l'aspect extrêmement dangereux pour les personnels de la présence des portables dans les établissements pénitentiaires. En cas d'incident, ce sont des vies qui peuvent être menacées. Lorsque nous avons évoqué cette question à l'occasion de l'amendement n° 191 qui sera présenté tout à l'heure, tout le monde, y compris les députés de l'opposition, avait été très sensibles, au danger qu'il y aurait à laisser proliférer les portables.
    M. Jean Dionis du Séjour. Vous ne parviendrez pas à vos fins !
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 288.
    M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Alors qu'une trentaine de portables avaient été saisis il y a deux ans, 300 l'ont été en 2001. De surcroît, la preuve est désormais faite que ces portables ont servi à l'organisation d'évasions. Je vous signale en outre que les nouveaux portables de ce type ne sonnent plus sous les portiques. La représentation parlementaire doit être bien consciente qu'il est de notre devoir d'empêcher tout système favorisant les évasions. Sinon, le débat n'aurait pas lieu d'être. Cela dit, c'est très compliqué et nous en sommes bien conscients.
    J'ai lu par ailleurs, dans l'exposé sommaire de l'amendement, que les ondes radioélectriques émises par l'installation permettant de rendre inopérants les appareils de télécommunication pourraient être dangereuses pour la santé des prisonniers et du personnel pénitentiaire.
    M. Jean Dionis du Séjour. Nous n'en avons pas parlé !
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Je vous fais une réponse globale ! A partir de là, d'ailleurs, en tant qu'élus locaux, nous devrions tous, empêcher l'utilisation des portables dans les communes dont nous avons la charge ! Soyons sérieux ! La technologie nous permettra d'organiser le brouillage, mais naturellement celui-ci ne doit pas gêner les personnes qui sont hors des murs d'enceinte lorsque les établissements sont en ville. Il faut donc investir l'argent nécessaire pour que les choses soient faites finement et que les systèmes mis en place ne soient pas technologiquement trop vite dépassés. Nous avons l'impérieuse nécessité de faire cela vite, avec le soutien de la représentation nationale, parce que c'est le bon sens.
    Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements n°s 288 et 271 corrigé et favorable à l'amendement n° 191 de la commission.
    M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.
    Mme Marylise Lebranchu. Je ne suis pas technicienne des télécommunications, mais la mesure prévue par l'article 29 est préconisée par le groupe de travail présidé par M. Jean-Marce Chauvet, qui avait réuni des responsables de la police et du ministère de la défense après une prise d'otages particulièrement dramatique. M. le secrétaire d'Etat a raison, les portables sont maintenant extrêmement difficiles à détecter car ils entrent sous la forme de cartes à puce qui sont ensuite branchées sur des postes de radio. Je vous passe les détails. C'est un vrai souci pour l'administration pénitentiaire.
    Cela dit, on se heurte à une vraie difficulté technique, car il ne faut pas brouiller les communications des surveillants entre eux - ils ont des systèmes de communication à ondes courtes. Je me souviens de débats extrêmement longs à ce sujet et nous n'avions pas trouvé la solution technique. En revanche, il faudrait s'intéresser à la détection. En effet, selon le ministère de la défense, il existe un moyen de repérer les communications en cours. Faisons donc confiance à la technologie ! La rédaction du texte devrait être suffisamment large pour permettre à l'administration pénitentiaire d'appliquer toute technique évitant les communications téléphoniques à partir des portables prohibés, sans parler explicitement de brouillage. C'est aux techniciens de travailler et non aux parlementaires de devenir des techniciens des télécoms.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Albertini.
    M. Pierre Albertini. Cette question concerne le rapport coût/avantages. Le dispositif de brouillage qui nous est proposé est à la fois coûteux et surtout techniquement extrêmement aléatoire. En effet, malgré les millions engloutis, nous serons toujours en retard d'un progrès technologique.
    En outre, vous prenez le risque de brouiller les communications à l'extérieur de la prison aussi. Les usagers seront alors les premiers à protester, car ils y verront une atteinte à leur liberté de communication. Je m'interroge sur l'intérêt d'introduire dans la loi un dispositif de ce genre. Il est vrai que la loi a bon dos, mais à force de charger la barque on l'alourdit. Il serait intéressant d'expérimenter un tel système, mais vous en prévoyez la généralisation instantanée alors que nous ne cessons de vous dire qu'il est techniquement aléatoire et qu'il produira probablement des effets inverses à ceux recherchés. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)
    M. Julien Dray. C'est plein de bon sens !
    M. le président. La parole est à M. Alain Marsaud.
    M. Alain Marsaud. Dites-moi que je rêve ! A vous entendre, vous êtes tous ingénieurs en communication. Mais êtes-vous vraiment sûrs que nous sommes dans le domaine législatif ? Il s'agit là d'une mesure d'ordre intérieur que n'importe quel directeur de prison peut prendre si bon lui semble. On nous dit que c'est une atteinte aux libertés et qu'il faut légiférer. Mais vous imaginez le détenu que l'on aura privé de communication par téléphone mobile dans sa cellule intenter une action en justice au motif que l'on aurait porté atteinte à sa liberté de communication !
    M. Claude Goasguen. Très bien !
    M. Alain Marsaud. Nous sommes véritablement dans le domaine réglementaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Monsieur Marsaud, l'Autorité de régulation des télécommunications - ART - nous a très clairement fait obligation d'inscrire dans la loi la dérogation permettant de brouiller les communications par téléphone cellulaire dans l'enceinte des établissements pénitentiaires.
    Je veux maintenant dire à la représentation nationale que, si cet article n'était pas adopté, il serait possible de brouiller les communications téléphoniques dans les salles de cinéma, mais pas dans les prisons, et nous permettrions l'organisation des évasions. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Alors, de grâce, un peu de bon sens !
    M. Hervé Morin. Cela représente 350 millions de francs !
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Sans cet article de loi nous serions dans une situation très difficile.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'et une argumentation bien légère !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Je rappelle que le code des postes et télécommunications prévoit, dans son article L. 66, l'interdiction de principe de toute installation de brouillage. Il faut une dérogation pour en installer une. Par ailleurs, un texte de juillet 2001 a posé le principe d'une dérogation pour les salles de spectacle. Aujourd'hui, si nous voulons résoudre ce problème, je suis désolé, mais il faut une disposition législative. Il n'y a pas d'autre solution ! C'est la raison pour laquelle nous sommes obligés de voter l'article 29.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 288.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 271 corrigé et 191, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 271 corrigé, présenté par M. Jean Besson, est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 29 :
    « I. - Le 6° de l'article L. 33-3 du code des postes et télécommunications est abrogé.
    « II. - Il est inséré après l'article L. 33-2 du même code un article L. 33-2-1 ainsi rédigé :
    « Art. L. 33-2-I. - Par dérogation aux dispositions de l'article L. 66 du présent code, la mise en place d'installations radioélectriques permettant de rendre inopérants les téléphones mobiles de tous types, tant pour l'émission que pour la réception dans l'enceinte des établissements pénitentiaires est libre. D'autre part, lorsque des motifs impérieux tirés de la nécessité de prévenir ou de faire cesser une atteinte à l'ordre public l'exigent, ces installations peuvent être autorisées dans des salles de spectacle, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat ; les prescriptions techniques nécessaires au respect des exigences essentielles qu'appelle la mise en oeuvre de telles installations sont précisées en tant que de besoin dans les conditions prévues à l'article L. 36-6. »
    « III. - A la fin du 4° de l'article L. 36-6 du même code, les mots : "à l'article L. 33-3 sont remplacés par les mots : "aux articles L. 33-2-1 et L. 33-3. »
    L'amendement n° 191, présenté par M. Warsmann, rapporteur, est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 29 :
    « I. - Avant le dernier alinéa de l'article L. 33-3 du code des postes et télécommunications, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « 7° Les installations radioélectriques permettant de rendre inopérants dans l'enceinte des établissements pénitentiaires, tant pour l'émission que pour la réception, les appareils de télécommunication mobiles de tous types. »
    « II. - Dans le dernier alinéa du même article, après les mots : "mentionnées ci-dessus sont insérés les mots : ", à l'exception de celles prévues au 7°. »
    La parole est à M. le président de la commission pour soutenir l'amendement n° 271 corrigé.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Il est défendu.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 191 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 271 corrigé.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. L'amendement n° 271 corrigé, qui n'a pas été examiné par la commission, tend à revenir sur le problème du brouillage des communications dans les salles de spectacle à l'occasion de l'examen d'une disposition destinée à s'appliquer dans les établissements pénitentiaires. C'est un tout autre problème. Une loi a été votée et des négociations sont en cours concernant ses modalités d'application. A titre personnel, je suis donc totalement hostile à l'amendement n° 271 corrigé, qui n'a aucun rapport avec ce projet de loi sur la justice.
    En revanche, l'amendement n° 191 vise à rendre immédiatement applicable le dispositif proposé, sans décision préalable de l'ART. Je comprends tout à fait la nécessité de l'intervention de l'Autorité pour les salles de spectacles, car c'est le confort des spectateurs qui est en jeu, mais dans les établissements pénitentiaires, cela n'a rien à voir ! Il y va de la sécurité de l'établissement et de la protection des surveillants de l'administration pénitentiaire. Voilà pourquoi je souhaite que la disposition du Gouvernement soit d'application immédiate et ne soit conditionnée par aucune autorisation.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 271 corrigé.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 191.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, l'article 29 est ainsi rédigé.

Article 30

    M. le président. Je donne lecture de l'article 30 :

Chapitre II
Dispositions relatives à l'hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux

    « Art. 30. - I. - Le code de la santé publique est ainsi modifié :
    « 1° Au titre Ier du livre II de la troisième partie, il est créé un chapitre IV intitulé : "Hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux ;
    « 2° Le chapitre IV devient le chapitre V et les articles L. 3214-1 à L. 3214-4 deviennent les articles L. 3215-1 à 3215-4 ;
    « 3° Dans le nouveau chapitre IV, sont créés les articles L. 3214-1 à L. 3214-5 ainsi rédigés :
    « Art. L. 3214-1. - L'hospitalisation, avec ou sans son consentement, d'une personne détenue atteinte de troubles mentaux est réalisée dans un établissement de santé, au sein d'une unité spécialement aménagée.
    « Art. L. 3214-2. - Sous réserve des restrictions rendues nécessaires par leur qualité de détenu ou, s'agissant des personnes hospitalisées sans leur consentement, par leur état de santé, les articles L. 3211-3, L. 3211-4, L. 3211-6, L. 3211-8, L. 3211-9 et L. 3211-12 sont applicables aux détenus hospitalisés en raison de leurs troubles mentaux.
    « Lorsque le juge des libertés et de la détention ordonne, en application de l'article L. 3211-12, une sortie immédiate d'une personne détenue hospitalisée sans son consentement, cette sortie est notifiée sans délai à l'établissement pénitentiaire par le procureur de la République. Le retour en détention est organisé dans les conditions prévues par le décret en Conseil d'Etat visé à l'article L. 3214-5.
    « Art. L. 3214-3. - Lorsqu'une personne détenue nécessite des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier, en raison de troubles mentaux rendant impossible son consentement et constituant un danger pour elle-même ou pour autrui, le préfet de police à Paris ou le représentant de l'Etat du département dans lequel se trouve l'établissement pénitentiaire d'affectation du détenu prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, son hospitalisation dans une unité spécialement aménagée d'un établissement de santé visée à l'article L. 3214-1.
    « Le certificat médical ne peut émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil.
    « Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'hospitalisation nécessaire.
    « Dans les vingt-quatre heures suivant l'admission, le directeur de l'établissement d'accueil transmet au représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, au préfet de police, ainsi qu'à la commission mentionnée à l'article L. 3222-5, un certificat médical établi par un psychiatre de l'établissement.
    « Ces arrêtés sont inscrits sur le registre prévu au dernier alinéa de l'article L. 3213-1.
    « Art. L. 3214-4. - La prolongation de l'hospitalisation sans son consentement d'une personne détenue atteinte de troubles mentaux est réalisée dans les conditions prévues aux articles L. 3213-3, L. 3213-4 et L. 3213-5.
    « Art. L. 3214-5. - Les modalités de garde, d'escorte et de transport des détenus hospitalisés en raison de leurs troubles mentaux sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
    « II. - Dans l'attente de la prise en charge par les unités hospitalières spécialement aménagées mentionnées à l'article L. 3214-1 du code de la santé publique, l'hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux continue d'être assurée par un service médico-psychologique régional ou un établissement de santé habilité dans les conditions prévues par les dispositions réglementaires prises sur le fondement des articles L. 6112-1 et L. 6112-9 du même code. »
    La parole est à M. Pierre Albertini, inscrit sur l'article 30.
    M. Pierre Albertini. L'inspiration des mesures prévues à l'article 30 est tout à fait louable, mais leur examen me donne l'occasion de souligner que le secteur psychiatrique rencontre dans nombre de nos régions de grandes difficultés. Modifier le code de la santé publique pour améliorer la situation psychiatrique des détenus est donc une initiative très intéressante, mais encore faudrait-il que nous ayons les moyens matériels de le faire. Or, dans cette spécialité, le secteur libéral est en voie de totale déshérence et le secteur public vaut à peine mieux. Je crains donc que nous ne soyons pas en mesure de donner aux détenus les soins qu'ils sont en droit d'attendre. On estime que 10 à 20 % des détenus sont dans une situation psychiatrique délicate, ce qui montre bien que le problème n'est ni théorique ni marginal. C'est un grave sujet de préoccupation.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Une fois que j'aurai dit combien je regrette que nous allions aussi vite sur des dispositions législatives d'une telle importance et combien je regrette que la commission des affaires sociales ne se soit pas penchée sur le sujet, c'est dans un esprit très ouvert, en ne faisant aucun procès d'intention ni au Gouvernement ni à ceux qui soutiennent son texte, que je voudrais aborder l'article 30.
    Cet article a donné lieu, c'est un euphémisme, à peu de commentaires, que ce soit dans cette assemblée ou dans l'opinion publique. Pourtant, comme le soulignait M. Albertini, ce problème n'a rien de marginal ; il est essentiel du point de vue aussi bien quantitatif que qualitatif.
    Sur le plan qualitatif, d'abord, parce que, pour le coup, il n'est pas simplement la conséquence des difficultés sociales dans nos villes, mais traduit une réalité humaine douloureuse. La très grande souffrance des individus concernés provient du double enfermement dont ils sont le plus souvent victimes : enfermement carcéral, enfermement dans la maladie. Ils sont ainsi, plus que tout autre, dans l'incapacité de se défendre, de se faire entendre, de se faire comprendre.
    Nous savons, par ailleurs, toute la valeur symbolique de l'enfermement dans nos sociétés. Nous savons, depuis les écrits de Michel Foucault, que nos sociétés peuvent se lire aussi dans la manière dont elles excluent, dont elles traitent, dans les prisons mais aussi les asiles, ceux dont elles souhaitent se protéger. Il y a donc là, au plan symbolique aussi, une problématique assez forte.
    Sur le plan quantitatif, la question n'est pas non plus marginale. Notre rapporteur estime que 30 à 40 % de la population carcérale consomme des psychotropes. On ne peut pas faire, bien sûr, l'assimilation complète avec la maladie mentale, sinon il faudrait s'interroger sérieusement, au-delà des prisons, sur l'état psychiatrique de la population française. Néanmoins, chacun comprend que la maladie mentale tient une place considérable dans les établissements pénitentiaires.
    D'abord, beaucoup de malades mentaux sont conduits par leur pathologie à des comportements qui dérivent vers la délinquance, justifient des sanctions pénales et les amènent ainsi à l'enfermement carcéral.
    Ensuite, il faut bien reconnaître, sans faire de misérabilisme mais simplement en regardant les faits avec lucidité, que les conditions de vie à l'intérieur des prisons, la promiscuité, l'isolement, constituent des facteurs très aggravants des troubles psychologiques.
    Enfin, troisième élément qui constitue, je le sais, un difficile sujet de réflexion, il existe entre la volonté de protestation du détenu et la maladie mentale une sorte de zone ambiguë. La maladie mentale ou sa simulation - mais qu'est-ce qui l'en distingue en l'occurrence ? - devient pour la personne un moyen de protester contre la situation qui lui est faite ou le cours de son jugement. Si vous deviez visiter les services psychiatriques ou même simplement médicaux des prisons, vous seriez effarés de la nature des pathologies auxquelles ils sont confrontés. Les mutilations diverses qu'on y observe sont des symptômes de la rencontre entre la protestation - légitime ou non, là n'est pas la question - et la maladie mentale. Quelle est la part de l'une et de l'autre ? Difficile d'en juger.
    Nous assistons par ailleurs, et le texte est issu visiblement de cette démarche, à une évolution des pratiques.
    D'abord, comme le soulignent les deux rapporteurs, le nôtre et celui du Sénat, la psychiatrie moderne - et je ne porte aucun jugement de valeur - a plutôt tendance à vider les hôpitaux psychiatriques, les asiles, pour privilégier les traitements ambulatoires. Elle le fait sans doute pour de bonnes raisons, mais parfois aussi, soyons honnêtes avec nous-mêmes, pour de mauvaises, puisque, derrière cette nouvelle tendance, on trouve évidemment la volonté de fermer les grands centres d'enfermement psychiatriques qui, a priori, coûtent plus cher à la société que les soins ambulatoires.
    M. le président. Il faudrait vous approcher de votre conclusion, monsieur Le Guen.
    M. Julien Dray. C'est très intéressant, monsieur le président.
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, j'ai déposé plusieurs amendements que je défendrai ensuite très brièvement, mon souhait étant que le Gouvernement nous donne le plus d'informations possible.
    M. le président. Vos collègues vous auront bien entendu.
    M. Jean-Marie Le Guen. Autre évolution : tandis que la psychiatrie hospitalière a plutôt tendance aujourd'hui à libérer les patients des asiles et à les remettre dans la rue, les juges, de leur côté, ont plutôt tendance à valoriser la responsabilité individuelle et donc à pénaliser de plus en plus des personnes qui, à une autre époque, auraient été considérées plutôt comme des malades irresponsables que comme des délinquants.
    Et nous voici au troisième temps de cette évolution où l'on se repasse en quelque sorte la responsabilité : on vient maintenant demander à l'administration pénitentiaire, confrontée évidemment à de grandes difficultés de gestion du fait de la présence d'une population à forte implication psychiatrique, d'être à l'origine de l'hospitalisation d'office - on l'appellera autrement - des détenus atteints de troubles mentaux.
    Quelles que soient les précautions que nous prendrons, il est évident que cette hospitalisation présentera des risques importants. Ces personnes se trouvant au croisement de l'aliénation hospitalière et de l'aliénation carcérale, nous aurons du mal à faire défendre tantôt les droits du malade, tantôt les droits de la personne. La contrainte du détenu viendra infirmer les droits du malade et, réciproquement, même s'il y a là un paradoxe, certains droits du malade viendront entraver le plein exercice des droits du détenu.
    Evidemment, je n'ai pas de solution toute prête pour remédier à ces contradictions. Et mes amendements, en tout cas les trois premiers, ont plutôt vocation à poser un certain nombre de questions au Gouvernement, qui aura la responsabilité, dans l'application de la loi, de gérer ce nouveau système.
    Qu'en sera-t-il exactement des unités médicales pour détenus ? Si les détenus peuvent désormais - ce qui n'était pas possible jusqu'à présent - être hospitalisés à l'intérieur des hôpitaux psychiatriques mais dans des structures adaptées, seront-ils tous placés dans les mêmes structures ? Au nom de la contrainte qu'on veut leur appliquer en tant que détenus, va-t-on imposer, par exemple, à des dépressifs profonds la promiscuité avec des malades extrêmement dangereux vivant dans un monde d'agression et la rigueur des conditions de vie que ces derniers justifient ?
    Puisque nous allons rassembler dans un service spécialisé des établissements psychiatriques les détenus malades qui ressortissent à l'hospitalisation d'office avec ceux qui ressortissent à l'hospitalisation à la demande d'un tiers, seront-ils séparés ou ne le seront-ils pas ? Pour être clair, je n'hésite pas à donner dans la caricature en prenant cet exemple : va-t-on imposer à un grand dépressif la promiscuité avec un psychopathe comme celui du Silence des agneaux ? Il est clair qu'on ne doit pas, au nom de la contrainte, mettre ensemble des détenus dont les pathologies sont totalement différentes. Aurons-nous cette garantie ?
    Il est vrai que j'ai été un peu long (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) et vous voudrez bien m'en excuser...
    M. le président. Monsieur Le Guen, vous avez pris un engagement vis-à-vis de vos collègues : ces dix minutes d'intervention sur l'article impliquent une présentation extrêmement succincte de vos cinq amendements à venir.
    M. Jean-Marie Le Guen. Absolument.
    Voilà, monsieur le président, les quelques questions que je voulais poser au Gouvernement devant les risques de confusion qui peuvent exister entre la situation de malade et celle de détenu, mais face aussi aux risques de dérives, car l'administration pénitentiaire pourrait être tentée de vider les prisons dans les asiles psychiatriques. Ce sont là des impasses qu'il nous faut éviter tant du point de vue des droits de l'homme et du malade que dans la perspective de la réinsertion.
    M. le président. Je suis saisi, par M. Jean-Marie Le Guen, de deux amendements, n°s 274 et 273.
    Ces amendements peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
    L'amendement n° 274 est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article L. 3214-1 du code de la santé publique est :
    « Art. L. 3214-1. - Les personnes détenues, lorsqu'elles sont atteintes de troubles mentaux rendant impossible leur consentement et constituant un danger pour elle-même et pour autrui, sont hospitalisées dans des établissements de santé au sein d'unités spécialement aménagées. »
    L'amendement n° 273 est ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article L. 3214-1 du code de la santé publique par l'alinéa suivant :
    « Les personnes détenues atteintes de troubles mentaux, qui ne constituent pas un danger pour elles-mêmes et pour autrui font l'objet d'une hospitalisation psychiatrique. »
    Un mot, monsieur Le Guen, pour compléter l'information de l'Assemblée.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je souhaiterais, monsieur le président, joindre à ces deux amendements mon amendement n° 275, qui procède de la même idée.
    M. le président. L'amendement n° 275 est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 3214-3 du code de la santé publique :
    « Lorsqu'une personne détenue répond aux critères mentionnés à l'article L. 3214-1, le préfet de police à Paris ou le représentant de l'Etat du département siège de l'établissement pénitentiaire dans lequel est affecté le détenu prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, son hospitalisation dans une unité spécialement aménagée d'établissement de santé visée à l'article L. 3214-1 du présent code. »
    Je vous en prie, monsieur Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Ces trois amendements, qui reviennent à l'hospitalisation d'office par rapport à l'hospitalisation à la demande d'un tiers, sont des interpellations au Gouvernement. J'attends donc ses réponses.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 274, 273 et 275 ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. La commission n'a pas été saisie de ces amendements. Je crois donc que nous allons écouter l'avis du Gouvernement.
    M. le président. Que vous allez certainement nous donner, monsieur le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Monsieur le député, vous posez de vraies questions et nous partageons votre préoccupation. Il est vrai que l'on trouve aujourd'hui dans les établissements pénitentiaires des personnes qui devraient être soignées ailleurs : outre qu'elles en perturbent gravement le fonctionnement, elles-mêmes ne sont pas soignées comme elles le devraient, parce que l'établissement pénitentiaire n'est pas la bonne réponse à leur pathologie.
    Nous sommes parfaitement conscients qu'il est nécessaire d'apporter des solutions à ce problème et que cela va coûter de l'argent - un constat trivial qu'il faut avoir la brutalité de faire - mais c'est un engagement que nous prenons.
    Nous sommes donc d'accord sur le fond, monsieur Le Guen, mais je vais pourtant émettre des avis défavorables sur vos amendements. Pourquoi ?
    En premier lieu, l'amendement n° 274 vise une disposition déjà retravaillée par le Sénat, dont la version nous semble mieux répondre à la préoccupation que nous partageons. Autrement dit, pour atteindre l'objectif qui nous est commun, nous préférons l'amendement sénatorial au vôtre.
    L'amendement n° 273, qui vise à ce que les détenus atteints de troubles mentaux soient systématiquement hospitalisés, nous pose un problème, dans la mesure où les détenus souffrant de troubles mentaux ne justifient pas tous une hospitalisation. Ce qui m'amène à dire très clairement que nous souhaitons séparer ces populations. Pour reprendre votre distinction entre le simple dépressif et le psychopathe du Silence des Agneaux, il est évident qu'on ne les mettra pas ensemble. Mais il ne faut pas non plus que le dépressif profond se retrouve à l'hôpital avec des détenus dont l'état psychiatrique est plutôt bon.
    Autrement dit, nous ne souhaitons regrouper à l'hôpital que ceux qui souffrent effectivement de troubles mentaux, mais il conviendra, à l'intérieur de ce regroupement, de faire des distinctions plus fines.
    Enfin, l'amendement n° 275 donnerait, s'il était adopté, compétence au représentant de l'Etat dans le département pour décider des hospitalisations d'office lorsque le détenu est consentant aux soins. A notre sens, une telle mesure serait en contradiction avec l'objectif affiché de ce dispositif : prévenir les décisions d'internement arbitraire. En effet, alors même que la personne est consentante aux soins, une autorité administrative pourrait décider une hospitalisation d'office, c'est-à-dire imposer un régime de contrainte aux soins. Par respect du principe de liberté, nous ne souhaitons donc pas retenir cet amendement.
    Voilà pourquoi, monsieur Le Guen, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces trois amendements, pour des raisons de forme plus que de fond, sachant que notre préoccupation est commune.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 274.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 273.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 275.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Jean-Marie Le Guen a présenté un amendement, n° 276, ainsi rédigé :
    « Après le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 3214-3 du code de la santé publique, insérer l'alinéa suivant :
    « Le psychiatre peut refuser en conscience de délivrer le certificat médical au vu duquel sera prononcé par arrêté une hospitalisation dans une unité spécialement aménagée d'établissement de santé visée à l'article L. 3214-1 du présent code. »
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Avec le refus des trois amendements précédents, nous venons d'élargir la possibilité, sous contrôle médical mais avec un primum movens qui est forcément l'administration, d'interner en hôpital psychiatrique, dans des structures que nous espérons adaptées, des détenus auparavant incarcérés.
    Cette décision n'est pas neutre et l'on peut se demander, par exemple, si le droit que nous reconnaissons à n'importe quel individu de refuser le traitement qu'on veut lui appliquer pourra également être exercé par ces personnes. Je n'ai pas besoin d'insister pour vous faire comprendre que nous touchons là à des questions fondamentales.
    L'amendement n° 276 est en quelque sorte un amendement de précaution. J'y rappelle que le médecin psychiatre a la possibilité de refuser de délivrer le certificat d'internement demandé par l'administration.
    Pourquoi le préciser ? Vous me direz sans doute que cela va de soi. Aujourd'hui, cette possibilité n'est donnée que dans le code de déontologie, qui n'a pas de valeur législative. En l'introduisant dans la loi, nous lui donnons une force et une valeur symbolique beaucoup plus grande et nous accordons donc une plus grande liberté aux praticiens pour ne pas suivre le primum movens de l'administration qui souhaite procéder à un internement. Je redoute en effet que celui-ci ne soit par trop systématique.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Cet amendement est en fait un amendement de conséquence des précédents. M. Le Guen nous propose d'inscrire dans la loi que le médecin psychiatre peut refuser en conscience de délivrer le certificat médical au vu duquel l'hospitalisation peut être ordonnée.
    M. Jean-Marie Le Guen. Conformément au code de déontologie.
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Cette disposition n'apporte rien de plus au système existant puisque le projet de loi prévoit que le représentant de l'Etat dans le département ne peut ordonner une hospitalisation d'office qu'au vu d'un certificat médical circonstancié.
    M. Jacques Myard. C'est le droit commun.
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. C'est bien le même principe qui est énoncé là.
    Aussi, de deux choses l'une : soit le médecin psychiatre estime en conscience que la situation sanitaire d'une personne nécessite son hospitalisation d'office et délivre à cet effet un certificat médical, soit il estime le contraire et le représentant de l'Etat ne peut décider de l'hospitalisation.
    C'est pourquoi nous vous proposons de rejeter cet amendement qui, même si encore une fois, nous comprenons l'intention de son auteur, n'apporte rien de plus à ce qui existe déjà.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Nous savons tous qu'une pression considérable s'exercera sur les praticiens. Sans faire de procès d'intention à l'administration pénitentiaire, il y aura une tendance systématique à demander l'hospitalisation psychiatrique d'un certain nombre de gens, ne serait-ce que parce qu'elle sera considérée comme une solution de facilité.
    Dans le code de déontologie, il est affirmé que le médecin est libre de sa décision. Mais, comme je l'ai dit, ce code n'a pas de valeur légale. Parce que nous sommes dans une situation particulière, nous voulions élever la liberté de conscience du praticien du niveau déontologique au niveau de la loi.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 276.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Jean-Marie Le Guen a présenté un amendement, n° 277, ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article L. 3214-3 du code de la santé publique par l'alinéa suivant :
    « Une commission des hospitalisations psychiatriques des détenus est créée afin d'examiner la situation des personnes hospitalisées dans une unité spécialement aménagée d'établissement de santé visée à l'article L. 3214-1 au regard du respect des libertés individuelles et de la dignité des personnes. »
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Nous avons jusqu'à présent élargi les éléments d'indication et facilité l'hospitalisation psychiatrique des personnes détenues. Nous avons en quelque sorte mélangé ce que l'on appelle, hors détention, les hospitalisations d'office et les hospitalisation à la demande de tiers. Il existe, au niveau départemental, pour les personnes non détenues une commission qui, chaque année, vérifie la situation des personnes hospitalisées au regard du respect des libertés individuelles et de la dignité des personnes.
    Sur le même modèle, je souhaiterais que soit créée une commission qui vérifie annuellement et cas par cas la situation des détenus hospitalisés. Cela revient à demander qu'il existe, dans le monde carcéral, les mêmes garanties de contrôle que hors détention afin d'éviter toute dérive, qu'il s'agisse d'hospitalisation massive ou d'enfermement définitif dans la maladie et dans la peine.
    M. Jacques Myard. Nous ne sommes pas en Russie !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. L'amendement n° 277 n'a pas non plus été examiné par la commission. A titre personnel, je suis très réservé étant donné que la commission départementale des hospitalisations psychiatriques est également compétente pour les détenus hospitalisés.
    Je profite de l'occasion pour saluer l'énorme avancée que représentent les dispositions proposées dans cet article. Tous les parlementaires qui ont fait partie de la commission d'enquête savent que les détenus souffrant de maladies psychiatriques sont confrontés à des problèmes très importants dans les établissement pénitentiaires. C'est la première fois que nous proposons une avancée aussi importante, et je tenais à le souligner.
    M. Jean-Marc Nudant. Très juste !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Comme vient de le dire le rapporteur, une commission des hospitalisations psychiatriques existe dans chaque département. Adopter l'amendement de M. Le Guen reviendrait à créer une espèce de sous-commission. Un contrôle supplémentaire est inutile.
    Je voudrais rassurer le docteur Le Guen. Les médecins, prononçant le serment d'Hippocrate, sont moralement armés pour résister à quelque pression que ce soit. Et, pour connaître l'administration pénitentiaire, je peux l'assurer que, si elle ne prononce pas le serment d'Hippocrate, sa haute conscience républicaine lui interdit de pratiquer quelque pression que ce soit.
    Je voudrais ensuiter illustrer la situation par quelques chiffres.
    Le nombre actuel d'hospitalisations d'office dans les hôpitaux psychiatriques est de 1 000 par an. Les médecins psychiatres estiment qu'environ 30 % de la population carcérale souffre de troubles psychologiques. Cela donne une idée de l'ampleur du problème.
    Le nombre des suicides en prison, même s'il diminue, a encore dépassé, l'année dernière, la centaine. Il y a de nombreuse agressions de personnels pour des raisons incompréhensibles, liées non pas à une volonté de s'échapper mais plutôt à des troubles psychologiques : elles ont été dénombrées à 413 en 2001.
    Pour ramener les choses à leur juste proportion, je précise qu'est prévue la création de 244 lits, répartis dans onze unités fermées. Je ne peux pas croire, monsieur Le Guen, pour continuer dans les références cinématographiques, que nous soyons en train de recréer Vol au dessus d'un nid de coucous. Je vous rassure donc. Bien que nous ayons émis des avis défavorables sur vos amendements, notre préoccupation est commune. Vous n'avez pas lieu d'être inquiet.
    M. le président. La parole est M. Jean-Marie Le Guen, pour répondre au Gouvernement.
    M. Jean-Marie Le Guen. Les malades qui accomplissent des actes de violence pourraient d'ores et déjà « bénéficier » d'une hospitalisation d'office, y compris en milieu carcéral. Les dispositions du projet de loi ne concernent pas les malades qui sont simplement agressifs vis-à-vis de leur environnement ou vis-à-vis d'eux-mêmes mais ceux pour qui on pense que des soins psychiatriques en hospitalisation s'imposent.
    Nous sommes collectivement reponsables de la situation actuelle, bien que ne je sois pas sûr que ce soient les politiques qui en portent la plus grande responsabilité.
    Je ferai un bref rappel historique. Après la guerre, les médecins, notamment ceux qui sortaient des camps de concentration, ont créé une psychiatrie pénitentiaire qui était très en avance. Mais notre société, au sens large, n'a pas été capable de maintenir le niveau de présence psychiatrique qu'ils avaient su implanter. Des hospitalisations étaient possibles à l'intérieur même des prisons.
    Lors de la discussion de la loi de 1985, nous avons constaté - et nous le constatons encore plus aujourd'hui qu'hier - que nous n'étions plus capables d'avoir le même investissement à l'intérieur des établissements pénitentiaires où l'hospitalisation psychiatrique n'était plus possible, ce qui nous a amenés - et c'est la résultante des errements dont j'ai parlé tout à l'heure et du fait que chacun se renvoie la balle - à créer des unités spécifiques.
    Si j'ai bien compris, monsieur le secrétaire d'Etat, il n'y aura pas d'autres hospitalisations possibles en dehors des quelque 250 places dont vous avez parlé ?
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Non !
    M. Jean-Marie Le Guen. Par ailleurs vous nous avez indiqué que les commissions départementales des hospitalisations psychiatriques ont vocation à traiter de tous les malades hospitalisés, même dans un cadre carcéral. Pouvez-vous nous le confirmer ?
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Bien sûr !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 277.
    (L'amandement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 30.
    (L'article 30 est adopté.)

Article 31

    M. le président. Je donne lecture de l'article 31 :

Chapitre III
Dispositions relatives au placement
sous surveillance électronique

    « Art. 31. - Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
    « I. - L'article 138 est ainsi modifié :
    « 1° Après le 16°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « L'obligation prévue au 2° peut être exécutée, avec l'accord de l'intéressé recueilli en présence de son avocat, sous le régime du placement sous surveillance électronique, à l'aide du procédé prévu par l'article 723-8. Les articles 723-9 et 723-12 sont applicables, le juge d'instruction exerçant les compétences attribuées au juge de l'application des peines. »
    « 2° Dans le dernier alinéa, après le mot : "judiciaire, sont insérés les mots : "et au placement sous surveillance électronique ».
    « II. - L'article 144-2 est abrogé.
    « III. - Le dernier alinéa de l'article 723-7 est complété par une phrase ainsi rédigée :
    « Le placement sous suveillance électronique emporte également pour le condamné l'obligation de répondre aux convocations de toute autorité publique désignée par le juge de l'application des peines. »
    « IV. - L'article 723-9 est ainsi modifié :
    « 1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « La mise en oeuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance peut être confiée à une personne de droit privé habilitée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. »
    « 2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
    « Dans la limite des périodes fixées dans la décision de placement sous surveillance électronique, les agents de l'administration pénitentiaire chargés du contrôle peuvent se rendre sur le lieu de l'assignation pour demander à rencontrer le condamné. Ils ne peuvent toutefois pénétrer au domicile de la personne chez qui le contrôle est pratiqué sans l'accord de celle-ci. Ces agents font aussitôt rapport au juge de l'application des peines de leurs diligences. »
    « V. - Au premier alinéa de l'article 723-13, les mots : "d'inobservation des conditions d'exécution constatée au cours d'un contrôle au lieu d'assignation sont remplacés par les mots : "d'inobservation des interdictions ou obligations prévues au dernier alinéa de l'article 723-7, d'inconduite notoire,. »
    M. Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 54, ainsi rédigé :
    « Supprimer le I de l'article 31. »
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Cet amendement a pour objet de supprimer la possibilité de recourir au bracelet électronique dans le cadre d'un contrôle judiciaire.
    Le bracelet électronique est une modalité d'exécution de l'emprisonnement. L'article 137 du code de procédure pénale prévoit que la personne mise en examen, présumée innocente, reste libre. Toutefois, en raison des nécessités de l'instruction ou à titre de mesure de sûreté, elle peut être astreinte à une ou plusieurs obligations du contrôle judiciaire. Pour la liste de ces obligations, je vous renvoie à l'article 138.
    L'article 144 du code de procédure pénale précise, quant à lui, que le juge a recours à la détention en fonction des peines encourues et si - et seulement si - les obligations de contrôle judiciaire ne sont pas suffisantes au regard de l'article 137.
    Il n'y a donc aucun doute possible : une modalité d'exécution de la détention ne peut être utilisée dans le cadre du contrôle judiciaire lui-même. Il s'agit donc d'une confusion grave qui remet en cause les principes établis, motivés par la défense de la présomption d'innocence. C'est purement et simplement un dévoiement de la procédure. De plus, il a des conséquences graves, qui bouleversent toute la logique de la procédure pénale.
    En outre, le recours au bracelet électronique dans le cadre du contrôle judiciaire aura pour effet de donner la priorité à la surveillance plutôt qu'au suivi social.
    Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de supprimer le paragraphe I de l'article 31.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 54.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 260 et 120, pouvant faire l'objet d'une discussion commune.
    L'amendement n° 260, présenté par Mme Billard, M. Cochet et M. Mamère, est ainsi rédigé :
    « Après le mot : "distance, rédiger ainsi la fin du dernier alinéa du 1° du IV de l'article 31 : "est confié aux agents de l'administration pénitentiaire. »
    L'amendement n° 120, présenté par M. Vallini et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Compléter le dernier alinéa du 1° du IV de l'article 31 par les mots : " ; toutefois le contrôle des personnes placées sous surveillance électronique est effectué exclusivement par des personnels de l'administration pénitentiaire. »
    (L'amendement n° 260 n'est pas soutenu.)
    La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec pour soutenir l'amendement n° 120.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il est précisé à l'article 31 que « la mise en oeuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance peut être confiée à une personne de droit privé habilitée dans des conditions fixées par le décret en Conseil d'Etat ». Nous souhaitons qu'il soit ajouté que le contrôle des personnes placées sous surveillance électronique est effectué exclusivement par des personnels de l'administration pénitentiaire. Nous jugeons cette précision utile.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 120 ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 120.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président,...
    M. le président. Je suis désolé, monsieur Le Bouillonnec, la mise aux voix est commencée. Vous vous exprimez sur d'autres amendements. Je ne peux pas vous redonner la parole.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 55 et 118.
    L'amendement n° 55 est présenté par M. Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 118 est présenté par M. Vallini et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Dans le V de l'article 31, supprimer les mots : "d'inconduite notoire. »
    La parole est à M. Michel Vaxès, pour soutenir l'amendement n° 55.
    M. Michel Vaxès. L'alinéa qui, à l'article 31, complète l'article 723-13 du code de procédure pénale prévoit que le bracelet électronique peut être retiré en cas « d'inconduite notoire », notion floue qui n'offre aucune garantie, mais ouvre la voie à toutes les interprétations possibles.
    L'ancien article 340 du code civil empêchait le recours en reconnaissance de paternité en cas d'inconduite notoire. On devinait alors aisément ce que le législateur avait voulu mettre derrière cette expression pleine de pudeur.
    Nous devons avouer que son utilisation dans cet article laisse très perplexe et il serait nécessaire que le législateur précise son intention dans le souci d'aider le magistrat à déchiffrer ce qui se cache derrière cette expression.
    En l'absence de précisions - et les sénateurs n'en ont pas obtenues bien qu'ils aient eux aussi posé la question - nous demandons la suppression de cette notion. Mais peut-être M. le secrétaire d'Etat va-t-il nous apporter des éclaircissements.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. L'avis de la commission est défavorable pour deux raisons.
    Premièrement, la notion d'inconduite notoire existe déjà dans les possibilités de révocation pour la libération conditionnelle et elle ne pose pas de problème particulier d'application.
    Deuxièmement, la décision de révocation, donc de fin d'utilisation pour une personne du bracelet électronique, ne se fait qu'après audition de la personne en présence de son avocat à l'issue d'un débat contradictoire.
    Nous estimons donc que toutes les garanties sont réunies.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Le Gouvernement partage totalement l'avis du rapporteur.
    Je précise néanmoins que l'expression « inconduite notoire » qui figure dans le code de procédure signifie, puisque vous en voulez une traduction, « mauvaise conduite incompatible avec la poursuite du placement ».
    Par ailleurs, comme le bracelet électronique est retiré en présence de l'avocat de la personne, comme l'a rappelé le rapporteur, toutes les garanties sont apportées. Nous sommes donc défavorable à l'amendement.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l'amendement n° 118.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président, quand vous m'avez empêché de parler, sur l'amendement précédent,...
    M. le président. Vous aviez raté vous-même l'occasion !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je n'avais pas compris, monsieur le président, que le fait d'avoir été élu m'obligeait à participer à des courses de vitesse. Prendre le temps de poser des questions et de comprendre les réponses qui sont faites appartient aussi au processus normal du débat.
    M. le président. La liberté est la règle, monsieur Le Bouillonnec, mais il n'y a pas de liberté sans règle et à l'Assemblée s'applique celle des temps de parole.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je voulais faire remarquer qu'il navait pas été répondu à ma question et que je regrettais le silence du Gouvernement concernant la précision que je demandais. Après le corpus doctrinal, dont il était question tout à l'heure, il semblerait que nous nous heurtions à un corpus doctrinaire !
    J'en viens à l'amendement n° 118. On sait en quoi consiste l'inconduite notoire. Elle a été appréciée, y compris par la jurisprudence. Mais nous ne comprenons pas pourquoi elle a été introduite dans cet article alors que l'ancien article 722-13 indiquait d'une manière claire, précise, et sans ambiguïté d'interprétation, de quelle manière un détenu placé dans le cadre du contrôle de surveillance électronique pouvait enfreindre la règle qui avait fondé ce placement et comment le juge pouvait l'en retirer.
    Il nous paraît donc surabondant de faire ici allusion à une inconduite notoire et nous demandons sa suppression.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. L'avis de la commission est évidemment le même que pour l'autre amendement.
    Je répondrai à M. Le Bouillonnec que le débat sur le rôle de l'administration pénitentiaire a été tranché par la loi de 1987 qui prévoit que l'administration pénitentiaire est compétente dès qu'il y a des tâches de coercition, des tâches de discipline ou des tâches pouvant entraîner l'usage des armes. De surcroît, des jurisprudences du Conseil d'Etat sont depuis venues préciser ces notions. Donc, pour nous, les choses sont tout à fait claires.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix...
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président, je demande la parole !
    M. le président. Je vais vous la donner, puisque vous avez l'élégance de me la demander gentiment... Cela dit, suivez la règle : une fois que l'on a délibéré et que chacun s'est exprimé, l'Assemblée étant parfaitement informée, ne demandez pas la parole : prenez-la à l'occasion d'un nouvel article ou d'un amendement.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président, j'ai levé la main pour demander à répondre à une observation. N'en ai-je pas le droit ?
    M. le président. Mais vous avez la parole.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. J'ai levé la main pour vous demander de prendre la parole après le Gouvernement : j'en avais le droit, donc je l'ai fait.
    M. le président. C'est une faculté, non un droit.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. J'ai cette faculté, monsieur le président. Et votre courtoisie fait que vous n'auriez pas manqué de me donner la parole. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean Marsaudon. Quelle arrogance !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Le problème est le suivant : la responsabilité de l'administration pénitentiaire, son exclusive responsabilité, n'a jamais été précisée par la loi depuis la mise en oeuvre du contrôle électronique. Du coup, la loi introduisant l'intervention d'une entreprise privée, ce que tout le monde comprend, qui assure le contrôle ? Nous croyons nécessaire de préciser que c'est bien l'administration pénitentiaire. Cette précision n'a rien de superflu. Ou alors, je veux connaître la prochaine étape de ce dispositif.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le garde des sceaux. Monsieur le député, si vous avez parfaitement le droit d'avoir un avis, nous avons le droit d'en avoir un autre. Le rapporteur vous a très précisément défini la règle et la jurisprudence qui l'accompagne. Les choses sont claires, il n'y a pas besoin d'en rajouter.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 55 et 118.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 31.
    (L'article 31 est adopté.)

Avant l'article 32

    M. le président. Je donne lecture de l'intitulé du chapitre IV :

Chapitre IV
Disposition relative à la répartition des détenus


    M. Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains on présenté un amendement, n° 56, ainsi rédigé :
    « Supprimer la division et l'intitulé suivants :
    « Chapitre IV, disposition relative à la répartition des détenus. »
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Cet amendement est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 32

    M. le président. « Art. 32. - Les deux premiers alinéas de l'article 717 du code de procédure pénale sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les condamnés purgent leur peine dans un établissement pour peines. »
    La parole est à Mme Marylise Lebranchu, inscrite sur l'article 32.
    Mme Marylise Lebranchu. Nos interventions ne sont pas des tentatives d'obstruction : nous nous bornons à poser des questions qui méritent à nos yeux des réponses figurant au Journal officiel. Or, depuis un moment, nous n'avons pas de réponse du tout. « Défavorable » ou « favorable », ce n'est pas forcément une réponse, monsieur le président, vous le savez mieux que moi. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Je me souviens avoir reçu quelques remarques pour n'avoir pas donné d'arguments... La question que je vais poser mérite vraiment une réponse.
    M. Claude Goasguen. Mme Guigou, quand on lui posait des questions, lisait des romans !
    M. Jean Marsaudon. Exact !
    M. Christophe Caresche. Qu'en savez-vous ? Vous n'étiez pas là !
    M. le président. Vous souvenez-vous des titres ? (Rires.)
    Mme Marylise Lebranchu. Ce n'est peut-être pas la meilleure attitude. Pour ma part, en tout cas, je n'ai malheureusement pas pu lire beaucoup de romans ces derniers temps...
    Revenons à l'article 32. Je me souviens des débats auxquels avaient donné lieu les centres de détention et le problème de l'affectation des détenus au sein de la commission d'enquête parlementaire et lorsque j'avais moi-même reçu les parlementaires. L'affectation des détenus est un sujet qui a beaucoup préoccupé tous les députés et sénateurs, qu'ils fussent dans l'ancienne opposition ou dans l'ancienne majorité.
    Elle pose problème à l'administration pénitentiaire, un problème très lourd ; en effet, et je l'avais dit au comité d'orientation stratégique qui y a travaillé pendant un an, la carte pénitentiaire n'est plus du tout adaptée à la réalité.
    Je veux seulement savoir si l'on s'arrêtera à cette première réforme, car c'en est bien une, qui consiste à abandonner la règle du quantum pour l'affectation d'un détenu dans tel ou tel établissement. Cette règle pose effectivement des problèmes : chacun se souvient de cet établissement du sud de la France qui accueillait des détenus dits de petite peine - même si deux ou trois ans, ce n'est pas une si petite peine pour celui qui la subit - dont le comportement était particulièrement difficile, voire dangereux, pour les autres détenus comme pour les personnels, alors que d'autres établissements abritaient des condamnés à des peines lourdes sans pour autant connaître de difficultés de ce genre, tout simplement parce qu'on avait à faire, on me pardonnera ce raccourci très hasardeux, à d'autres « types » de détenus. Il faut donc permettre à l'administration pénitentiaire de décider des placements en prenant mieux en compte le comportement des détenus afin de réduire le risque de violences, à tout le moins de tensions.
    Lors des débats du comité d'orientation stratégique, tous les magistrats, quelles que soient leurs fonctions, tous les avocats, les associations s'occupant des détenus, mais aussi les associations de victimes, bref, tout le monde était tombé d'accord pour rappeler combien il était essentiel que l'affectation dans tel ou tel établissement se fasse dans les meilleures conditions possibles, en termes de prévenance à l'égard du détenu, de prise en compte des problèmes qu'elle pose à sa famille, en termes d'explications afin de ne pas créer, d'un côté, des ghettos de dangereux et, de l'autre, des ghettos de pas dangereux.
    En résumant ainsi en une ou deux minutes ce qui avait pris des heures de débat, j'ai bien conscience d'effleurer seulement le sujet. Je veux seulement savoir si cet assouplissement de la règle visant à une meilleure gestion de l'administration pénitentiaire sera suivi d'un texte qui permettra de revoir la carte pénitentiaire, et surtout les critères sur lesquels on se fonde pour dire que tel détenu est dangereux et tel autre ne l'est pas. Qui en décide ? Est-ce le directeur de l'administration pénitentiaire, la fameuse « gare de tri », comme l'appellent les surveillants, et qui ne marche pas bien, puisqu'il faut parfois attendre un an avant d'avoir son affectation, d'où une lourdeur extrême pour le système ? Est-ce une commission d'experts ? En fait, qui décide que telle personne doit être affectée dans tel type d'établissement au motif qu'elle est dangereuse ou qu'elle ne l'est pas ?
    M. le président. M. Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 57, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 32. »
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. La rédaction de l'article 32, très brève, revient à prévoir que les condamnés seront affectés dans les établissements pour peines en fonction de leur dangerosité et de leur personnalité et non plus en fonction de la peine à effectuer. De surcroît, cette disposition a en pratique pour effet de supprimer une catégorie d'établissements : les centres de détention régionaux dans lesquels étaient jusqu'à présent affectés les condamnés à une peine de prison égale ou inférieure à cinq ans, ou dont le reliquat est inférieur à cinq ans.
    Rappelons que ces centres de détention régionaux sont tournés vers la réinsertion... Mais la réinsertion des détenus ne semble à l'évidence pas être l'objectif de la politique pénalisante défendue dans ce projet de loi.
    M. Jacques Myard. Mais non !
    M. Michel Vaxès. C'est la réalité !
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Non, une affirmation !
    M. Michel Vaxès. C'est une conviction. Elle n'est pas partagée, mais c'est la règle du jeu.
    Ces nouvelles dispositions seront précisées par décret simple. De votre réforme découleront deux conséquences : pour commencer, elle fait disparaître l'obligation légale de réserver un type spécifique d'établissement aux détenus dont la réinsertion dans la société atteint un stade relativement avancé. La deuxième conséquence, c'est que les décisions d'affectation des détenus ne se feront sur aucun critère objectif, mais seulement sur celui de la dangerosité - notion subjective par excellence... D'où ma première inquiétude. Le critère de « profil » me paraissait plus juste. Les mots ont leur importance et je vous garantis qu'ils n'ont pas la même portée.
    Ma seconde inquiétude porte sur le devenir de la réinsertion. Si le quantum n'est plus le critère, qu'adviendra-t-il alors de la préparation à la sortie ? Les régimes de détention ne peuvent ignorer la proximité du retour à la collectivité.
    Pour ces différentes raisons, je vous demande d'adopter mon amendement de suppression. Mais permettez-moi d'ores et déjà de vous faire part de ma très grande déception. Alors que l'unanimité s'était faite sur la nécessité d'une indispensable réforme en profondeur du système pénitentiaire, le Gouvernement refuse de faire face au problème posé par ses prisons. Pas une seule mesure pour pallier l'engorgement des maisons d'arrêt, rien sur la question des places dans les maisons pour peines, pas davantage sur les conditions de détention des détenus, pas un geste pour améliorer les conditions de travail des personnels pénitentiaires ni enfin pour prendre en main le problème des détenus délinquants sexuels.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable à cet amendement pour deux raisons.
    La première, c'est que l'ancien système, où l'affectation du détenu dépendait du seul quantum de la peine, c'est-à-dire de la durée restant à effectuer, apparaissait à l'évidence totalement insatisfaisant en ce qu'il ne prenait pas directement en compte ni la personnalité ni la dangerosité de l'intéressé.
    La seconde, c'est que la suppression de la différence entre les centres de détention régionaux et nationaux permettra précisément de fluidifier l'affectation des détenus. J'appelle à ce propos votre attention, mes ches collègues, sur le fait que l'affectation de détenus dans les établissements pour peines peut prendre jusqu'à près de dix-huit mois. La fluidification du système apparaît à l'évidence conforme à l'intérêt général. Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 57.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Il va de soi que la proposition du Gouvernement vise d'abord à assurer une meilleure répartition sur l'ensemble du territoire et donc à répondre au problème de la surpopulation pénale. J'en profite pour faire remarquer à l'Assemblée que l'augmentation de 13 % depuis le début de l'année de la population pénale n'est pas liée à la loi que nous sommes en train de débattre - ce qui devrait nous dispenser de toute polémique futile. Ce que nous nous efforçons de faire, c'est de répondre le plus rapidement possible à cette question. Comme l'a excellemment dit le rapporteur, nous souhaitons améliorer la répartition des détenus en nous fondant non sur des critères rigides, mais sur leur dangerosité, analysée par l'administration pénale. De grâce, faisons-lui confiance !
    Vous vous êtes posé la question de savoir, madame Lebranchu, si nous voulions faire des « ghettos » pour gens peu dangereux et des ghettos pour gens dangereux. Retirons, si vous le voulez bien, ce terme qui a une connotation un peu particulière.
    Mme Marylise Lebranchu. Je vous l'accorde !
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Il faut bien comprendre, que chaque fois que l'on veut mettre un détenu très dangereux avec un détenu qui n'est pas dangereux, on aligne les conditions de sécurité de l'établissement pénitentiaire sur le plus dangereux, ce qui joue en défaveur du détenu peu dangereux.
    Nous avons évoqué dans cette enceinte même la nécessité d'une loi pénitentiaire. Il sera donc nécessaire de réfléchir tous ensemble à la meilleure façon de procéder, sachant que l'on ne traite pas tout le monde de la même façon, et d'essayer de parvenir à une approche plus fine dans une société aussi complexe que la nôtre. On l'a évoqué pour la protection judiciaire de la jeunesse ; il en va de même pour l'incarcération. Nous avons besoin de réponses plus fines. C'est l'objet de cet article. Et c'est pourquoi nous émettons un avis défavorable à l'amendement n° 57.
    M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.
    Mme Marylise Lebranchu. Je comprends bien, pour l'avoir un peu vécu après avoir visité je ne sais plus combien d'établissements, le souci de ne pas imposer des règles extrêmement dures à tous les détenus au motif qu'un tel est dangereux ou que tel autre participe régulièrement à des tentatives d'évasion. J'ai connu cela pour avoir eu l'occasion d'en discuter longuement. Je partage donc votre sentiment sur ce point, mais ce n'était pas l'objet de ma question.
    Ma question était la suivante : si l'on peut admettre un classement en fonction du comportement, donc de la personnalité, qui en décidera ? Est-ce l'administration pénitentiaire seule ? Un avis sera-t-il demandé ? A qui ? Un texte était prêt, issu d'ailleurs des travaux du comité d'orientation stratégique. Il est à votre disposition et vous l'avez sûrement lu. Mais votre article 32, tel qu'il est rédigé, ne fait aucunement référence à ce qu'avaient demandé tout à la fois les magistrats, les avocats, les associations, c'est-à-dire une expertise qui permette à tout détenu, y compris celui qui a été placé dans un établissement dit pour personnalités dangereuses, de pouvoir au bout d'un certain temps être rapproché de sa famille, changer d'établissement parce que les choses vont mieux, pour éventuellement être soigné, etc. Bref, tout un système qui permettrait d'éviter ce que l'on a parfois connu, c'est-à-dire une gestion « comme on peut ».
    Vous êtes revenu sur le problème de la surpopulation, monsieur le secrétaire d'Etat. Mais, aujourd'hui, le plus gros problème que doit gérer l'administration pénitentiaire, par conséquent le garde des sceaux et vous-même, tient au fait que si les maisons d'arrêt sont surpeuplées, les centres de détention ont parfois de la place. Or le drame de notre pays, c'est la détention provisoire. En attendant d'être placés dans un centre de détention, les prévenus se retrouvent en maison d'arrêt à subir des conditions extrêmement dures qui peuvent du reste freiner toute tentative de réinsertion. Non seulement il faut attendre parfois un an et demi à deux ans avant d'avoir une place, mais on n'arrangera pas la situation des maisons d'arrêt en aggravant la détention provisoire comme on l'a fait aujourd'hui.
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Je demande à la représentation nationale de m'excuser car je n'ai manifestement pas été assez clair dans ma première réponse.
    Premièrement, madame la députée, il va de soi que c'est l'administration pénitentiaire, après avoir naturellement recueilli tous les avis nécessaires, qui prendra la décision : il me paraît difficile de réunir à chaque fois des commissions ad hoc. Nous avons une administration pénitentiaire de grande qualité ; sachons lui faire confiance.
    Deuxièmement, vous avez indiqué que le problème se situait au niveau des maisons d'arrêt, ce dont nous sommes tout à fait d'accord, et qu'il ne se posait pas du tout dans les centres de détention. Pardonnez-moi de vous annoncer que, à l'heure où je parle, le taux d'occupation des centres nationaux de détention y atteint 98,8 %. Autrement dit, nous allons au problème. Voilà pourquoi nous avons besoin de cette souplesse d'usage. J'espère avoir répondu à toutes vos questions, même si mes réponses ne vous ont pas satisfaite.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 32.
    (L'article 32 est adopté.)

Après l'article 32

    M. le président. M. Albertini, M. Morin et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 291, ainsi rédigé :
    « Après l'article 32, insérer l'article suivant :
    « Dans les cinq ans, l'encellulement individuel sera possible dans tous les centres de détention. »
    La parole est à M. Pierre Albertini.
    M. Pierre Albertini. Cet amendement a simplement pour but de rappeler un objectif à terme, lié à la rénovation des prisons : faire en sorte que les conditions de détention y deviennent décentes. Aussi proposons-nous d'inscrire qu'un encellulement individuel sera possible d'ici à cinq ans. C'est loin d'être le cas aujourd'hui dans certains centres de détention et à plus forte raison dans les maisons d'arrêt. L'isolement de nuit lui-même n'est pas toujours pratiqué alors que le code de procédure pénale l'impose. Ce n'est certes qu'un objectif d'affichage, si j'ose dire, mais il a le mérite de rappeler à quel point la rénovation des prisons est essentielle dans une perspective de réinsertion des détenus.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. L'amendement n° 291 n'a pas été examiné par la commission, mais je voudrais rassurer notre collègue : ce n'est pas un objectif d'affichage dans la mesure où il est d'ores et déjà atteint. En effet, votre amendement vise les centres de détention où le principe de l'encellulement individuel est d'ores et déjà appliqué.
    M. Pierre Albertini. Non, ce n'est pas vrai !
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. C'est la raison pour laquelle, j'émets, à titre personnel, un avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Si, monsieur le député, c'est vrai. Cela dit, je vous l'accorde, le centre de détention n'est pas la maison d'arrêt. Mais pour ce qui concerne les centres de détention, nous fixer comme objectif l'encellulement individuel d'ici à cinq ans serait une mauvaise chose dans la mesure où il est d'ores et déjà atteint.
    J'en viens aux maisons d'arrêt. Je crois savoir que, nonobstant les nombreuses réserves que vous avez émises sur ce texte, vous vous êtes déclaré disposé à le voter. Et vous avez raison, puisque l'article 2 prévoit les moyens nécessaires pour construire suffisamment de places pour pouvoir envisager cet objectif. Nous comptons bien le faire dans les cinq ans qui viennent, c'est-à-dire dans la durée de la législature : c'est d'ailleurs ce qui me vaut le plaisir d'être parmi vous aujourd'hui.
    M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.
    Mme Marylise Lebranchu. Je crois avoir visité des centres de détention où l'encellulement individuel n'est souvent pas la règle, monsieur le secrétaire d'Etat. Nous nous étions faits une obligation d'y parvenir, et si un arbitrage a eu lieu en 2002 sur le programme de 10 milliards de francs annoncé à l'époque, c'était pour réaliser d'ici au 1er janvier 2006 l'encellulement individuel, preuve qu'il n'est pas encore de règle partout.
    M. Claude Goasguen. Nemo auditur...
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 291.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 32 bis

    M. le président. Je donne lecture de l'article 32 bis :

Chapitre V
De la réinsertion professionnelle des détenus

    « Art. 32 bis. - I. - L'article 720 du code de procédure pénale est complété par une phrase et un alinéa ainsi rédigés :
    « Le produit du travail des détenus ne peut faire l'objet d'aucun prélèvement pour frais d'entretien en établissement pénitentiaire.
    « Les dispositions du présent article prennent effet au 1er janvier 2003. »
    « II. - Les pertes de recettes dues au I sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 263, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 32 bis. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Amendement de coordination avec l'amendement présenté en début de débat au rapport annexé, que l'Assemblée a adopté.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 263.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, l'article 32 bis est supprimé.

Après l'article 32 bis

    M. le président. M. Albertini, M. Morin et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 289, ainsi libellé :
    « Après l'article 32 bis, inscrire l'article suivant :
    « Au-delà de la sanction, la réinsertion des détenus est une mission prioritaire des établissements pénitentiaires.
    « Les établissements pénitentiaires doivent avoir les moyens de redonner des repères, un cadre et des valeurs aux détenus et leur permettre d'accéder à une formation ou un travail.
    « Une réinsertion réussie s'appuie sur un projet personnel identifié et sur la maîtrise d'un certain nombre de compétences pour le réaliser. Le rôle de la prison est de favoriser l'acquisition de ces moyens nécessaires, notamment par la mise en place de véritables formations. »
    La parole est à M. Pierre Albertini.
    M. Pierre Albertini. En rédigeant cet amendement, je voulais insister sur la nécessité de redéfinir, dans une loi d'orientation pénitentiaire, les missions, les objectifs et les modalités de la prison. J'ai cru comprendre dans les propos de M. le garde des sceaux que cet objectif n'était pas abandonné et que le travail commencé serait remis sur le métier. Par conséquent, je retire mon amendement.
    M. le président. L'amendement n° 289 est retiré.

Article 32 ter

    M. le président. « Art. 32 ter. - Après l'article 720 du code de procédure pénale, il est inséré un article 720-1 AA ainsi rédigé :
    « Art. 720-1 AA. - Les personnes détenues peuvent travailler pour leur propre compte avec l'autorisation du chef d'établissement. »
    Je mets aux voix l'article 32 ter.
    (L'article 32 ter est adopté.)

Après l'article 32 ter

    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 295 et 106 corrigé, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 295, présenté par M. Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains, est ainsi libellé :
    « Après l'article 32 ter, insérer la division, l'intitulé et l'article suivants :
    « « Titre VI. - Dispositions relatives aux peines d'interdiction du territoire.
    « Art. 32 quater. - I. - Les sept derniers alinéas de l'article 131-30 du code pénal sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :
    « Le tribunal ne peut prononcer que par une décision spécialement motivée au regard de l'infraction et de la situation personnelle et familiale de l'étranger condamné l'interdiction du territoire français.
    « Le tribunal ne peut prononcer une interdiction du territoire français à l'encontre des personnes visées à l'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945.
    « II. - En conséquence, le dernier alinéa de l'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France du 2 novembre 1945 est abrogé. »
    L'amendement n° 106 corrigé, présenté par M. Caresche et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
    « Après l'article 38 bis, insérer la division et l'article suivants :
    « Titre VII. - Portant dispositions relatives aux peines d'interdiction du territoire.
    « Art. 38 ter. - L'article 131-30 du code pénal est ainsi modifié :
    « I. - Cet article est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
    « « Le tribunal ne peut prononcer l'interdiction du territoire français à l'encontre :
    « 1° D'un condamné étranger ayant vécu et ayant été scolarisé en France depuis au moins l'âge de six ans et y résidant habituellement depuis lors » ;
    « 2° D'un condamné étranger père ou mère d'un enfant français résidant en France, à condition qu'il exerce, même partiellement, l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. »
    « II. - En conséquence, le cinquième alinéa est supprimé. »
    La parole est à M. Michel Vaxès, pour défendre l'amendement n° 295.
    M. Michel Vaxès. Les députés communistes s'opposent depuis fort longtemps à la double peine. C'est aussi l'objet de cet amendement présenté par le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    En effet, notre législation prévoit qu'un étranger résidant régulièrement en France qui commet un délit peut se voir condamner outre la peine prévue pour ce délit, à une peine d'interdiction du territoire.
    Cette mesure non seulement est injuste, mais elle bafoue le principe de l'égalité devant la loi. En fait la double condamnation constitue une franche discrimination, hélas ! inscrite dans la loi. Elle traduit une préférence nationale nette.
    Derrière cette inégalité de traitement se cachent des situations absurdes et inhumaines. Afin d'y mettre un terme, nous vous proposons de modifier l'article 131-30 du code pénal, afin que toute condamnation à une interdiction du territoire français ne puisse être prononcée que par une décision spécialement motivée au regard de l'infraction et de la situation personnelle et familiale de l'étranger. En outre, nous proposons que les étrangers qui sont aujourd'hui protégés de l'expulsion du territoire par les attaches qu'ils ont en France soient également protégés des interdictions judiciaires du territoire et que les tribunaux ne puissent prononcer de telles peines à leur égard.
    M. le président. La parole est à Christophe Caresche, pour soutenir l'amendement n° 106 corrigé
    M. Christophe Caresche. Nous nous élevons également contre la double peine mais notre amendement n'a pas la même portée que celui présenté par M. Vaxès. Nous le présentons alors que, il y a peu, une affaire défrayait la chronique, à Lyon.
    Récemment, en effet, un Algérien, marié à une Française, père de six enfants français, vivant dans notre pays depuis l'âge de onze ans et condamné à de courtes peines de prison, a fait l'objet d'une mesure d'expulsion vers l'Algérie. Cette décision est apparue à beaucoup comme inique et absurde. Voilà un homme ayant des attaches fortes et incontestables avec notre pays que l'on décide de renvoyer, après avoir purgé sa peine, dans un pays dont il est, certes, originaire mais qu'il a quitté depuis longtemps et qui lui est, à bien des égards, étranger.
    Certains élus de notre assemblée, toutes tendances politiques confondues, se sont élevés contre cette mesure d'expulsion, en particulier Jack Lang, qui combat depuis longtemps la double peine (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) mais aussi - et je pense que les noms que je vais citer vous iront droit au coeur -, François Bayrou et Etienne Pinte, député des Yvelines, membre de l'UMP, qui ont joint leur voix à la sienne.
    C'est dire si l'affaire a choqué...
    M. Claude Goasguen. Mais pas suffisamment le gouvernement précédent !
    M. Christophe Caresche. ... au-delà des rangs traditionnellement hostiles à la double peine, puisque des députés de la majorité se sont associés à ces protestations.
Elles ont été entendues par l'actuel gouvernement, ainsi que par le Président de la République, saisi, lui aussi, et la mesure d'expulsion a été annulée.
    Voilà pourquoi je me dis qu'il est peut-être temps, sinon de mettre fin à la double peine - que je ne remets pas en cause dans son principe - du moins d'en limiter la portée, notamment pour des situations particulières et choquantes telles que celle que j'ai relatée, lorsque la mesure d'expulsion concerne des étrangers établis depuis très longtemps dans notre pays et qui n'ont plus de lien avec leur pays d'origine.
    L'amendement que je propose vise donc à restreindre le champ d'application de la peine d'interdiction du territoire français qui s'ajoute à la peine déjà prononcée.
    Il s'agit d'exclure de la peine d'interdiction du territoire français les étrangers ayant des attaches particulièrement profondes avec la France et qui doivent, en conséquence, être traités, sur le plan judiciaire, comme des Français.

    Seraient concernés par cette limitation les étrangers ayant vécu et ayant été scolarisés en France depuis au moins l'âge de six ans et y résidant habituellement depuis lors. A l'évidence, il s'agit là d'une catégorie de personnes qui a un lien extrêmement profond avec notre pays puisqu'elles y ont fait leurs études. Je m'inspire d'ailleurs, à cet égard, du rapport Chanet qui avait été demandé par le précédent gouvernement. La deuxième catégorie concernée serait celle des étrangers, père ou mère d'un enfant français résidant en France.
    Ces étrangers ne pourraient plus, si l'amendement était voté, faire l'objet d'une mesure d'interdiction du territoire. Pour eux, la double peine s'apparente à un véritable bannissement. Ils ont, en effet, une histoire personnelle indissociable de la France, leurs attaches sont désormais françaises et ils ont perdu tout lien avec leur pays d'origine. A ce titre, ils doivent être considérés comme des Français, même s'ils ne le sont pas juridiquement. Tel est d'ailleurs le sens de la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'homme, qui, à plusieurs reprises, sur cette question, a sanctionné notre pays, et c'est aussi le sens de la jurisprudence du Conseil d'Etat.
    En votant cet amendement, notre assemblée mettrait fin à ce qui constitue pour beaucoup d'entre nous une injustice ou, en tous les cas, une mesure contraire à l'humanisme, dont le Premier ministre aime tant se prévaloir.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. La double peine est une question dont on pourrait débattre fort longtemps. Alors, j'avoue ne pas très bien comprendre comment des parlementaires qui ont fait partie d'une majorité qui, il y a quelques mois encore, était au pouvoir...
    M. Claude Goasguen. Eh oui ! Il fallait le faire avant !
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. ... peuvent prétendre, aujourd'hui, qu'il faille changer les textes en urgence ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Avis défavorable aux amendements présentés sur ce point.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Il ne faut pas tout mélanger. Oui, il y a des cas particuliers. Vous avez fait allusion à l'un d'entre eux.
    Cela dit, pour ce qui concerne M. Pinte, je sais ce qu'il en est : il n'a pas déclaré qu'il était hostile à la double peine ; il n'est intervenu que sur un cas particulier. Il se trouve qu'il m'a écrit, qu'il m'en a parlé, que nous nous en sommes entretenus avec M. Nicolas Sarkozy, et que nous avons participé, l'un et l'autre, à la solution de ce problème ponctuel.
    Ne faites pas dire à des gens qui sont absents ce qu'ils n'ont pas dit !
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Très bien !
    M. le garde des sceaux. Au reste, avant de modifier la loi, il faut réfléchir. Effectivement, dans certains cas, l'application de la loi est critiquable. Cela dit, une circulaire a été envoyée par le précédent gouvernement aux parquets pour que, dans leurs réquisitions, ils fassent preuve de nuance.
    Nous n'en devons pas moins nous interroger sur ce que signifie la notion même de « nationalité ». Vous dites que certaines personnes ne doivent pas être expulsées parce qu'elles n'ont plus aucun lien avec leur pays d'origine... sauf qu'elles en ont gardé la nationalité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

    Je ne prétends pas, mesdames et messieurs les députés, régler ainsi la question : je ne suis pas sommaire, ni dans un sens ni dans l'autre. Mais tout de même ! On ne peut pas indéfiniment osciller d'une position à la position opposée.
    Il faut que nous ayons un débat serein sur cette affaire et il faudra sans doute y revenir, mais je ne souhaite pas que cela soit fait sans qu'une réflexion d'ensemble ait été menée.
    C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à ces deux amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Albertini.
    M. Pierre Albertini. Puisqu'on a évoqué la prise de position de François Bayrou, je voudrais faire une mise au point.
    Il ne s'agit pas de remettre en question la double peine dans son principe. En revanche, il convient peut-être de s'interroger, dans certains cas, sur sa portée et sur son automaticité. Mais faut-il le faire à l'occasion d'un échange de vues rapide, à la suite d'un examen rapide lui aussi au sein de la commission des lois ? Je ne le crois pas, parce que cela touche à des questions symboliques, en particulier à celle de la nationalité. Au demeurant, cette mesure touche des étrangers qui, même s'ils voulaient acquérir la nationalité française par la voie de la naturalisation, en seraient probablement empêchés, ayant été déjà condamnés. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Le débat est donc ouvert. Réfléchissons-y sereinement. Il y a la loi et son principe. Quant à son application, vous êtes les premiers à y déroger et à trouver des solutions individuelles, ce qui montre bien que la rigidité peut poser, ponctuellement, exceptionnellement, des problèmes.
    En tout cas, ce n'est pas aujourd'hui, vendredi après-midi, l'occasion d'ouvrir un débat sur ces questions. Laissons-nous un peu de temps.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Monsieur Warsmann, le Gouvernement précédent n'était pas resté sans agir. Il avait adressé une circulaire aux parquets, précisément après la publication du rapport Chanet. Quant au réaménagement de la double peine, il faisait partie de nos engagements électoraux. Nous l'aurions mis en oeuvre si nous avions été majoritaires. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Ne vous étonnez donc pas de nous voir défendre des positions sur lesquelles nous avons été élus.
    Monsieur le garde des sceaux, je crois pourtant me souvenir que M. Pinte comme M. Bayrou ont parlé de modification de la législation. Mais on se reportera à leurs déclarations. Nombre de nos collègues souhaitent un débat, le moment venu, sur cette question difficile. Je maintiens mon amendement, en souhaitant cette discussion, sachant que, de toute façon, même si nous n'en reparlions pas ici, la réalité vous contraindrait à traiter le problème.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 295.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 106 corrigé.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 58, ainsi libellé :
    « Après l'article 32 ter, insérer l'article suivant :
    « L'article 132-25 du code pénal est ainsi rédigé :
    « Lorsque la juridiction de jugement prononce une peine égale ou inférieure à un an, la peine d'emprisonnement sera exécutée sous le régime de la semi-liberté. Le juge de l'application des peines veillera à la mise en place de mesures d'accompagnement tendant à permettre au condamné de poursuivre l'exercice d'une activité professionnelle ou de suivre un enseignement ou une formation professionnelle ou encore un stage ou un emploi temporaire en vue de son insertion sociale.
    « Le juge de l'application des peines devra spécialement motiver l'impossibilité du recours au régime de la semi-liberté ».
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Je défends cet amendement avec conviction mais sans illusion, compte tenu du souffle « carcéral » dans lequel baigne le présent projet de loi. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Il propose le régime de semi-liberté pour les peines inférieures à un an. Je garde la conviction qu'il serait beaucoup plus efficace que le régime carcéral sur la conduite des délinquants concernés.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Avis défavorable, d'autant plus que nous avons voté, dans le rapport annexé, un nouveau paragraphe ajouté au projet, par lequel nous indiquons notre souhait de voir des modalités comme la semi-liberté se développer dans les années à venir.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Avis défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 58.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 33 A

    M. le président. Je donne lecture de l'article 33 A :

TITRE VI
DISPOSITIONS RELATIVES
À LA JUSTICE ADMINISTRATIVE

    « Art. 33 A. - L'article L. 222-5 du code de justice administrative est abrogé. »
    M. Vallini et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 103, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 33 A. »
    La parole est à M. André Vallini.
    M. André Vallini. Le sujet est beaucoup moins grave que celui de la double peine abordé précédemment. Il s'agit des cours administratives d'appel. Il semble que, sur ce point aussi, votre projet, monsieur le ministre, ait péché par manque de concertation et par précipitation.
    J'ai reçu beaucoup de courrier d'organisations syndicales...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. De gauche !
    M. André Vallini. ... représentatives des magistrats de l'ordre administratif, qui se plaignent de ce manque de concertation et qui regrettent vivement que vous supprimiez le critère d'ancienneté pour être nommé dans les cours administratives d'appel.
    Je sais que les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel sont engorgés. Mais je pense que la sagesse voudrait qu'on supprime cette disposition du projet de loi le temps nécessaire pour vous d'organiser une vraie concertation avec les magistrats de l'ordre administratif.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.
    Effectivement, une condition d'ancienneté avait été posée, notamment pour légitimer les cours administratives d'appel qui ont maintenant une quinzaine d'années d'existence, et dont personne ne conteste plus la légitimité.
    Le présent article faciliterait la gestion du corps, ce qui n'est pas sans importance lorsqu'on connaît le retard qu'ont pris ces juridictions. A l'heure actuelle, les cours administratives d'appel n'arrivent à traiter que 80 % du contentieux qui leur est soumis. Elles vont d'ailleurs faire l'objet d'un plan de renforcement et de recrutement considérable.
    Enfin, dans les cours d'appel de l'ordre judiciaire, nous avons déjà organisé des modalités d'intégration directe de conseillers de cours d'appel. Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à l'amendement n° 103.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Je partage en tous points l'avis du rapporteur.
    Par ailleurs, il n'est pas mauvais que se côtoient dans ces cours administratives d'appel à la fois des gens d'une certaine ancienneté et des jeunes. Cela devrait permettre de réduire les délais d'appel qui bloquent le dispositif de la justice administrative.
    M. René Dosière. Pourquoi ? Les jeunes iraient-ils plus vite ?
    M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen.
    M. Claude Goasguen. Le moins qu'on puisse dire, c'est que les juges administratifs ne font pas beaucoup d'effort pour accélérer la procédure administrative. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Le judiciaire est le mal loti de la procédure et les magistrats peuvent se plaindre d'un certain stakhanovisme. En revanche, la procédure adoptée devant les cours administratives est pour beaucoup dans la lenteur du procès.
    Il ne faudrait donc pas tomber dans le travers qui consisterait à fournir des postes pour une procédure qui se refuse à évoluer. Un jour ou l'autre, il faudra bien qu'on nous propose une réforme de la procédure administrative devant le contentieux administratif.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Très bien !
    M. Claude Goasguen. Sinon, on ne s'en sortira jamais ! Je trouve qu'il y a inégalité dans l'attribution de moyens entre le judiciaire et l'administratif, ce dernier étant largement favorisé.
    M. le président. La parole est à M. Jacques Myard.
    M. Jacques Myard. Pour une fois, je serai en désaccord avec Claude Goasguen. Je ne suis pas du tout certain que la procédure administrative soit si longue qu'on le prétend. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Le problème, c'est qu'il y a une multitude de recours pour trois francs six sous ! Il faudrait sanctionner les gens qui, faisant des recours pour pas grand-chose, encombrent les tribunaux administratifs. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

    Deuxièmement, elle est très moderne, la procédure administrative devant les tribunaux administratifs. Très souvent, on se passe d'avocats, il n'y a pas de plaidoiries orales, alors qu'il y en a dans les procédures judiciaires, ce qui prend du temps et de l'argent. La procédure par écrit peut être beaucoup plus expéditive.
    Il faut certainement regarder les deux procédures mais la procédure administrative ne peut pas être ainsi jetée aux orties.
    M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen.
    M. Claude Goasguen. Dans la procédure administrative, monsieur Myard, on n'est pas dispensé de prendre un avocat, et les avocats sont beaucoup plus chers que devant le tribunal judiciaire puisque ce sont des avocats auprès du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation. Je vous suggère de regarder les notes d'honoraires des uns et des autres...
    M. Jacques Myard. Moi je n'ai pas besoin d'avocats.
    M. Claude Goasguen. ... et vous verrez la différence !
    M. le président. On a compris qu'il y avait un désaccord Goasguen-Myard qui se réglera un peu plus tard. (Sourires.)
    La parole est à Mme Marylise Lebranchu.
    Mme Marylise Lebranchu. Monsieur Goasguen, je pense que vous n'avez pas bien suivi ce qui s'est passé au cours des cinq dernières années. Je vais, moi aussi, défendre la justice administrative.
    M. Jacques Myard. Non !
    M. Claude Goasguen. Ça ne m'étonne pas !
    Mme Marylise Lebranchu. Le vice-président du Conseil d'Etat a défendu avec ferveur, en particulier au cours de ces deux dernières années, la nécessité d'avoir des postes. Il faudra lui donner votre intervention. Il en sera surpris.
    La loi du 22 juin 2000 relative au référé administratif devant les juridictions administratives...
    M. Claude Goasguen. Cela n'a rien accéléré du tout !
    Mme Marylise Lebranchu. ... était excellente.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Sans les moyens suffisants !
    Mme Marylise Lebranchu. Et le bilan - mais vous n'êtes pas venus à la réunion - a montré que beaucoup en étaient satisfaits.
    Pour le fonctionnement des cours d'appel, d'autres solutions ont été proposées et le problème des barrières à l'entrée - car il faut appeler un chat un chat - a été mis sur la table, l'objectif étant d'éviter l'engorgement. C'est extrêmement difficile d'interdire un appel. De même, vous le savez, un certain nombre d'associations se sont opposées violemment au fait qu'on ne puisse plus ester devant un tribunal administratif sans être sûr d'être défendu. Il y a eu des débats sans fin pendant une année.
    La justice administrative est effectivement en difficulté, mais je suis étonnée que vous choisissiez de nommer des débutants dans les cours d'appel. Dans la grande majorité des cas, les dossiers qui arrivent sont les plus complexes, et il est extrêmement difficile pour quelqu'un qui vient d'arriver de dire à celui qui exerce depuis quelques années au tribunal administratif qu'il a eu tort sur tel ou tel point. Vous le savez parfaitement, d'autant que vous avez refusé un tel raisonnement pour l'institution judiciaire.
    Il faut être prudent car, comme l'a rappelé André Vallini, la très forte montée au créneau de toutes les organisations professionnelles représentant la justice administrative montre que c'est une mesure qui est très mal vécue.
    Monsieur le président, permettez-moi de faire une remarque qui n'a rien à voir avec ce sujet.
    Quand on a parlé de la double peine, il y a eu des éclats de rire et des mots très durs. Effectivement nous n'avons pas gagné les élections mais je crois qu'on ne gagne rien dans une démocratie à se moquer de l'opposition et à utiliser des mots tels que ceux que j'ai entendus tout à l'heure. Je suis rarement agressive, à moins d'y être contraints par un type de comportement, et je pense que l'Assemblée nationale mérite de la sérénité.
    On nous a expliqué tout à l'heure que l'on ne pouvait pas discuter en une demi-journée et une seule séance en commission d'un dossier aussi important que la double peine. On a discuté en une seule demi-journée et en une seule séance de travail en commission de tout le dossier de la délinquance des mineurs. On ne peut pas utiliser un argument dans un cas et le réfuter dans d'autres. On a travaillé très vite sur un dossier très important et nous n'avons sûrement pas été d'une très grande performance tout le temps. Nous avons eu le texte seulement lundi et c'est dur d'en faire le tour de façon détaillée.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Je suis tout à fait d'accord avec vous, madame Lebranchu, sur le ton qui convient dans l'hémicycle. Cela dit, il n'y a pas eu une séance de commission mais trois. Nous avons procédé à plus de quarante auditions et passé des heures à travailler sur cette loi.
    Concernant l'intégration directe en cour administrative d'appel, on peut échanger les arguments et les retourner dans tous les sens.
    Vous expliquez que ce sont les dossiers les plus difficiles qui arrivent en appel. On peut aussi considérer que ces dossiers ont déjà été analysés par la juridiction de premier degré.
    Il y a d'autres arguments. Une partie du corps vient directement de l'ENA. Les lauréats de l'ENA, vous les retrouvez au Conseil d'Etat. Il n'est donc pas anormal d'en intégrer aussi dans les cours administratives d'appel.
    Je maintiens mon accord sur le texte tel qu'il nous vient du Sénat.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 103.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 33 A.
    (L'article 33 A est adopté.)

Après l'article 33 A

    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 192, ainsi rédigé :
    « Après l'article 33 A, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article L. 232-2 du code de justice administrative est ainsi modifié :
    « 1. La première phrase du sixième alinéa de cet article est complétée par les mots : "et des agents détachés depuis plus de deux ans dans ledit corps.
    « 2. Le dernier alinéa du même article est complété par une phrase ainsi rédigée :
    « Toutefois, les agents détachés élus au Conseil supérieur démissionnent d'office de leur mandat dès que leur détachement prend fin. »
    « II. - Les dispositions du I entreront en vigueur à compter du 1er janvier 2003. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Il s'agit de réparer une anomalie. Un quart des membres du corps des tribunaux administratifs et cours d'appel sont des fonctionnaires détachés qui ne votent pas aux élections internes. Nous souhaitons leur permettre de voter. Pour éviter toute polémique, ces dispositions entreront en vigueur à compter du 1er janvier 2003, c'est-à-dire après les prochaines élections, en réalité dans quatre ans.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 192.
    (L'amendement est adopté.)

Article 33 B

    M. le président. « Art. 33 B. - A la section 3 du chapitre 2 du tire III du livre II du code de justice administrative, il est inséré un article L. 232-4-1 ainsi rédigé :
    « Art. L. 232-4-1. - Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel siège toujours dans la même composition, quel que soit le niveau hiérarchique des magistrats dont le cas est examiné. »
    M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 193, ainsi rédigé :
    « Dans le texte proposé pour l'article L. 232-4-1 du code de justice administrative, après le mot : "et supprimer le mot "des. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 193.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 33 B, modifié par l'amendement n° 193.
    (L'article 33 B, ainsi modifié, est adopté.)

Articles 33, 34, 35, 36, 37, 38

    M. le président. « Art. 33. - L'article L. 233-6 du code de justice administrative est ainsi rédigé :
    « Art. L. 233-6. - Jusqu'au 31 décembre 2007, il peut être procédé au recrutement complémentaire de conseillers par voie de concours.
    « Le nombre de postes pourvus au titre de recrutement complémentaire ne peut excéder trois fois le nombre de postes offerts chaque année dans le corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel aux élèves sortant de l'Ecole nationale d'administration et aux candidats au tour extérieur.
    « Le concours est ouvert :
    « 1° Aux fonctionnaires et autres agents publics civils ou militaires appartenant à un corps de la catégorie A ou assimilé et justifiant au 31 décembre de l'année du concours de sept ans de services publics effectifs dont trois ans effectifs dans la catégorie A ;
    « 2° Aux magistrats de l'ordre judiciaire ;
    « 3° Aux titulaires de l'un des diplômes exigés pour se présenter au premier concours d'entrée à l'Ecole nationale d'administration, »
    Je mets aux voix l'article 33.
    (L'article 33 est adopté.)
    « Art. 34. - A l'article L. 233-7 du code de justice adminsitrative, les mots : "A titre exceptionnel et jusqu'au 31 décembre 2004 sont supprimés. » - (Adopté.)
    « Art. 35. - Après la section 5 du chapitre III du titre III du livre II du code de justice administrative, il est inséré une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« Fin de fonctions

    « Art. L. 233-9. - Les membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont maintenus en fonctions, sauf demande contraire, jusqu'au 30 juin ou au 31 décembre de l'année en cours selon qu'ils ont atteint la limite d'âge au cours du premier ou du second semestre. » - (Adopté.)
    « Art. 36. - Les articles 1er, 2 et 5 de la loi n° 80-511 du 7 juillet 1980 relative au recrutement des membres des tribunaux administratifs sont abrogés. ». - (Adopté.)
    « Art. 37. - Après la section 3 du chapitre II du du titre II du livre Ier du code de justice adminstrative, il est inséré une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4

« Les assistants de justice

    « Art. L. 122-2. - Peuvent être nommées au Conseil d'Etat, en qualité d'assistants de justice, les personnes répondant aux conditions prévues à l'article L. 227-1.
    « Ces assistants sont nommés pour une durée de deux ans renouvelable deux fois. Ils sont tenus au secret professionnel sous les peines prévues à l'article 226-13 du code pénal.
    « Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent article. » - (Adopté.)
    « Art. 38. - Après le chapitre VI du titre II du livre II du code de justice administrative, il est inséré un chapitre VII ainsi rédigé :

« Chapitre VII

« Les assistants de justice

    « Art. L. 227-1. - Peuvent être nommées, en qualité d'assistants de justice auprès des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, les personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation juridique d'une durée au moins égale à quatre années d'études supérieures après le baccalauréat et que leur compétence qualifie particulièrement pour exercer ces fonctions.
    « Ces assistants sont nommés pour une durée de deux ans renouvelable deux fois. Ils sont tenus au secret professionnel sous les peines prévues à l'article 226-13 du code pénal.
    « Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent article. » - (Adopté.)

Article 38 bis

    M. le président. Je donne lecture de l'article 38 bis :

TITRE VI BIS
DISPOSITION RELATIVE AUX ASSISTANTS
DE JUSTICE DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES

    « Art. 38 bis. - A la fin de la première phrase du deuxième alinéa de l'article 20 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative, les mots : "une fois sont remplacés par les mots : "deux fois.
    Je mets aux voix l'article 38 bis.
    (L'article 38 bis est adopté.)

Article 39

    M. le président. Je donne lecture de l'article 39 :

TITRE VII
DISPOSITIONS RELATIVES
À L'AIDE AUX VICTIMES

    « Art. 39. - L'article 53-1 et le troisième alinéa de l'article 75 du code de procédure pénale sont remplacés par six alinéas ainsi rédigés :
    « Les officiers et les agents de police judiciaire informent par tout moyen les victimes de leur droit :
    « 1° D'obtenir réparation du préjudice subi ;
    « 2° De se constituer partie civile si l'action publique est mise en mouvement par le parquet ou en citant directement l'auteur des faits devant la juridiction compétente ou en portant plainte devant le juge d'instruction ;
    « 3° D'être, si elles souhaitent se constituer partie civile, assistées d'un avocat qu'elles pourront choisir ou qui, à leur demande, sera désigné [] par le bâtonnier de l'ordre des avocats près la juridiction compétente, les frais étant à la charge des victimes sauf si elles remplissent les conditions d'accès à l'aide juridictionnelle ou si elles bénéficient d'une assurance de protection juridique ;
    « 4° D'être aidées par un service relevant d'une ou de plusieurs collectivités publiques ou par une association conventionnée d'aide aux victimes ;
    « 5° De la possibilité de saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infraction, lorsqu'il s'agit d'une infraction mentionnée aux articles 706-3 et 706-14. »
    La parole est à M. Pierre Albertini, inscrit sur l'article.
    M. Pierre Albertini. Un mot sur les articles 39 et 40.
    Les dispositions d'aide aux victimes qui figurent dans le projet de loi sont extrêmement bienvenues, je l'ai dit dans la discussion générale, mais nous ne ferons pas l'économie d'une véritable réforme de l'aide juridictionnelle. On peut évidemment ajouter bout à bout, pièce par pièce, des éléments pour mieux prendre en compte le statut, la condition des victimes, mais il faudra bien savoir qui paie cet effort.
    Nous touchons des questions fondamentales, qui sont celles de l'accès au droit, de l'assistance aux victimes sur le plan psychologique, sur le plan juridique, quelquefois sur le plan médical. Nous aurons à revenir très certainement sur le sujet général de l'aide juridictionnelle.
    M. le président. M. Morin a présenté un amendement, n° 293, ainsi rédigé :
    « Compléter le 2° de l'article 39 par les deux alinéas suivants :
    « L'enregistrement de toutes les plaintes selon une procédure simplifiée est obligatoire.
    « Le procureur accuse réception de la plainte et informe le plaignant dans un délai de 6 mois des suites qui lui seront données. »
    Cet amendement est-il défendu ?
    M. Pierre Albertini. Il est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. La commission ne l'a pas examiné. J'y suis défavorable à titre personnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux, ministre de la justice. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 293.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Albertini, M. Morin et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 290, ainsi rédigé :
    « Après le 2° de l'article 39, insérer l'alinéa suivant :
    « 2° bis - D'être, pour les délits ou les crimes, assistées lors du dépôt de plainte d'un médecin et d'un traducteur. »
    La parole est à M. Pierre Albertini.
    M. Pierre Albertini. L'amendement est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. La commission ne l'a pas examiné. J'y suis défavorable à titre personnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 290.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

    M. le président. M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 194, ainsi rédigé :
    « Au début du dernier alinéa (5°) de l'article 39, substituer aux mots : "De la possibilité de saisir, les mots : "De saisir, le cas échéant,. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 194.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 39, modifié par l'amendement n° 194.
    (L'article 39, ainsi modifié, est adopté.)

Article 39 bis et 40

    M. le président. « Art. 39 bis. - Après l'article 40 du code du procédure pénale, il est inséré un article 40-1 ainsi rédigé :
    « Art. 40-1. - Lorsque la victime souhaite se constituer partie civile et demande la désignation d'un avocat après avoir été informée de ce droit en application du 3° des articles 53-1 et 75, le procureur de la République, avisé par l'officier ou l'agent de police judiciaire, s'il décide de mettre l'action publique en mouvement, en informe sans délai le bâtonnier de l'ordre des avocats.
    « Dans le cas contraire, il indique à la victime, en l'avisant du classement de sa plainte, qu'elle peut directement adresser sa demande de désignation auprès du bâtonnier si elle maintient son intention d'obtenir la réparation de son préjudice. »
    Je mets aux voix l'article 39 bis.
    (L'article 39
bis est adopté.)
    « Art. 40. - Après l'article 9-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, il est inséré un article 9-2 ainsi rédigé :
    « Art. 9-2. - La condition de ressources n'est pas exigée des victimes de crimes d'atteintes volontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne prévus et réprimés par les articles 221-1 à 221-5, 222-1 à 222-6, 222-8, 222-10, 222-14 (1° et 2°), 222-23 à 222-26, 421-1 (1°) et 421-3 (1° à 4°) du code pénal, ainsi que de leurs ayants droit pour bénéficier de l'aide juridictionnelle en vue d'exercer l'action civile en réparation des dommages résultant des atteintes à la personne. » - (Adopté.)

Après l'article 40

    M. le président. Monsieur Garrigue, vous avez déposé deux amendements, n°s 266 et 265. Seriez-vous d'accord pour les présenter ensemble ?
    M. Daniel Garrigue. Tout à fait, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 266 est ainsi libellé :
    « Après l'article 40, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 434-5 du code pénal, il est inséré un article 434-5-1 ainsi rédigé :
    « Art. 434-5-1. - Toute menace ou tout autre acte d'intimidation à l'égard de quiconque commis en vue de déterminer la victime d'une contravention à ne pas porter plainte ou à se rétracter, est puni selon la nature de la menace ou de l'acte d'intimidation d'un mois à trois ans d'emprisonnement et de 1 000 à 50 000 euros d'amende. »
    L'amendement n° 265 est ainsi libellé :
    « Après l'article 40, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 434-15 du code pénal, il est inséré un article 434-15-1 ainsi rédigé :
    « Art. 434-15-1. - Toute menace ou tout autre acte d'intimidation à l'égard de quiconque commis en vue de déterminer le témoin d'une contravention à s'abstenir de faire ou de délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation est puni, selon la nature de la menace ou de l'acte d'intimidation, d'un mois à trois ans de prison et de 1 000 à 50 000 euros d'amende. »
    Vous avez la parole, monsieur Garrigue.
    M. Daniel Garrigue. Nous avons évoqué à l'article 24 la protection des témoins. Il y a effectivement un problème concernant la protection des victimes et des témoins qui font l'objet de mesures d'intimidation.
    Pour les victimes existe l'article 434-5 du code pénal, mais le délit d'intimidation n'existe que dans la mesure où elles ont été victimes de crimes ou de délits. Les personnes qui ont été victimes d'actes constituant de simples contraventions ne sont pas visées.
    Quant aux témoins, l'article 434-15 vise plutôt la subornation de témoins que l'intimidation.
    Trop souvent, les victimes d'agissements répétés - injures, dégradations de véhicule, de leur immeuble, nuisances sonores, voire coups dans certains cas - hésitent à porter plainte, et les témoins hésitent également à se manifester par peur de représailles du même type, ce qui contribue à créer dans certains quartiers un climat très pénible. Une véritable loi du silence s'instaure et la justice et la police ne sont pas en mesure d'intervenir.
    Ces amendements proposent donc d'étendre le délit d'intimidation aux représailles qui sont exercées sur les victimes et sur les témoins de faits qui constituent de simples contraventions mais finissent par empoisonner la vie d'un grand nombre de nos compatriotes.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. L'amendement n° 266 n'a pas été examiné par la commission, mais j'y suis défavorable à titre personnel car il pose un problème manifeste d'échelle des peines. Les menaces ou autres actes d'intimidation concernant la victime d'un fait constituant une contravention seraient plus punis que les mêmes actes à l'égard de la victime d'un délit.
    Quant à l'amendement n° 265, il traite d'un problème réel, mais l'article 434-15 du nouveau code pénal punit de peines similaires à celles proposées, dont trois ans de prison, avec un champ beaucoup plus large puisqu'il vise le « fait d'user de promesses, offres, présents, pressions, menaces, voies de fait, manoeuvres ou artifices au cours d'une procédure ou en vue d'une demande ou défense en justice afin de déterminer autrui soit à faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation mensongère, soit à s'abstenir de faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation ». J'y suis donc défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Défavorable, pour les mêmes motifs.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 266.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 265.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 41

    M. le président. « Art. 41. - I. - Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
    « 1° Après l'article 74, il est inséré un article 74-1 ainsi rédigé :
    « Art. 74-1. - Lorsque la disparition d'un mineur ou d'un majeur protégé vient d'intervenir ou d'être constatée, les officiers de police judiciaire, assistés le cas échéant des agents de police judiciaire, peuvent, sur instructions du procureur de la République, procéder aux actes prévus par les articles 56 à 62, aux fins de découvrir la personne disparue. A l'issue d'un délai de huit jours à compter des instructions de ce magistrat, ces investigations peuvent se poursuivre dans les formes de l'enquête préliminaire.
    « Le procureur de la République peut également requérir l'ouverture d'une information pour recherche des causes de la disparition.
    « Les dispositions du présent article sont également applicables en cas de disparition d'un majeur présentant un caractère inquiétant ou suspect eu égard aux circonstances, à l'âge de l'intéressé ou à son état de santé. » ;
    « 2° Après l'article 80-3, il est inséré un article 80-4 ainsi rédigé :
    « Art. 80-4. - Pendant le déroulement de l'information pour recherche des causes de la mort ou des causes d'une disparition mentionnée aux articles 74 et 74-1, le juge d'instruction procède conformément aux dispositions du chapitre Ier du titre III du livre Ier. Les interceptions des correspondances émises par la voie des télécommunications sont effectuées sous son autorité et son contrôle dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 100 et aux articles 100-1 à 100-7. Les interceptions ne peuvent excéder une durée de deux mois renouvelable.
    « Les membres de la famille ou les proches de la personne décédée ou disparue peuvent se constituer partie civile à titre incident. Toutefois, en cas de découverte de la personne disparue, l'adresse de cette dernière et les pièces permettant d'avoir directement ou indirectement connaissance de cette adresse ne peuvent être communiquées à la partie civile qu'avec l'accord de l'intéressé s'il s'agit d'un majeur et qu'avec l'accord du juge d'instruction s'il s'agit d'un mineur ou d'un majeur protégé. »
    « II. - L'article 26 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité est ainsi modifié :
    « 1° Supprimé.
    « 2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
    « La disparition déclarée par le conjoint, le concubin, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité, un descendant, un ascendant, un frère, une soeur, un proche, le représentant légal ou l'employeur doit immédiatement faire l'objet d'une enquête par les services de police et de gendarmerie. » ;
    « 3° Le quatrième alinéa est supprimé ;
    « 4° Après le quatrième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
    « Les chefs de service de la police nationale ou des unités de la gendarmerie nationale font procéder à toutes recherches et auditions utiles à l'enquête, dont ils font dresser un rapport détaillé ou un procès-verbal si nécessaire.
    « Dans le cadre de cette enquête, les chefs de service de la police nationale ou des unités de la gendarmerie nationale peuvent directement requérir des organismes publics ou des établissements privés détenant des fichiers nominatifs, sans que puisse leur être opposée l'obligation au secret, que leur soit communiqué tout renseignement permettant de localiser la personne faisant l'objet des recherches.
    « Le procureur de la République est informé de la disparition de la personne, dès la découverte d'indices laissant présumer la commission d'une infraction ou lorsque les dispositions de l'article 74-1 du code de procédure pénale sont susceptibles de recevoir application. » ;
    « 5° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
    « Lorsque le procureur de la République fait application des dispositions de l'article 74-1 du code de procédure pénale, il est mis fin aux recherches administratives prévues par le présent article. »
    Je mets aux voix l'article 41.
    (L'article 41 est adopté.)

Après l'article 41

    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 228 et 227, déposés par Mme Joissains Masini, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
    L'amendement n° 228 est ainsi rédigé :
    « Après l'article 41, insérer la division et l'intitulé suivants : "Titre VII. - Dispositions relatives au Président de la République. »
    L'amendement n° 227 est ainsi rédigé :
    « Après l'article 41, insérer l'article suivant :
    « L'article 26 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi modifié :
    « a) A la fin du premier alinéa, la somme "45 000 euros est remplacée par les mots : "80 000 euros et d'un emprisonnement de deux ans. »
    « b) L'article 26 est remplacé par un alinéa ainsi rédigé :
    « Si les faits sont commis par un élu, il encourt une inéligibilité d'un an à compter de la date à laquelle le jugement devient définitif. »
    Les amendements sont-ils défendus ?
    M. Jacques Myard. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 228.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 227.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 42

    M. le président. Je donne lecture de l'article 42 :

TITRE VIII
DISPOSITIONS RELATIVES À L'APPLICATION
À L'OUTRE-MER

    « Art. 42. - L'article L. 142-5 du code de la route est ainsi rédigé :
    « Art. L. 142-5. - Outre les agents cités à l'article L. 130-4, les fonctionnaires de la police de Mayotte, dans les conditions prévues à l'article 879-1 du code de procédure pénale, ont compétence pour constater par procès-verbal les contraventions prévues par la partie réglementaire du présent code ou par d'autres dispositions réglementaires dans la mesure où elles se rattachent à la sécurité et à la circulation routières. La liste des contraventions que les fonctionnaires de police de Mayotte sont habilités à constater est fixée par décret en Conseil d'Etat. »
    M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 196 rectifié, ainsi libellé :
    « I. - Rédiger ainsi le début de la première phrase du texte proposé pour l'article L. 142-5 du code de la route :
    « Outre les agents cités à l'article L. 130-4, les agents de police de la collectivité départementale de Mayotte mis à la disposition de l'Etat, dans les conditions prévues... (Le reste sans changement). »
    « II. - En conséquence, dans la deuxième phrase de cet article, substituer aux mots : "les fonctionnaires de police de Mayotte les mots "ces agents. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 196 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, l'amendement n° 39 de M. Kamardine n'a plus d'objet.
    Je mets aux voix l'article 42, modifié par l'amendement n° 196 rectifié.
    (L'article 42, ainsi modifié, est adopté.)

Article 43

    M. le président. « Art. 43. - I. - Supprimé.
    « II. - Le Gouvernement est autorisé, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution et sous réserve de la compétence de la loi organique, à prendre par ordonnances les mesures de nature législative permettant de :
    « 1° Rendre applicable la présente loi, le cas échéant avec les adaptations nécessaires, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises et de rendre applicables à Mayotte les titres Ier et II, les chapitre II à IV du titre V, les articles 38, 39 et 40 et le III de l'article 41 de la présente loi ;
    « 2° Rendre applicables, dans les mêmes collectivités, avec les adaptations nécessaires, les dispositions des articles 20 à 26 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative ;
    « 3° Intégrer, dans la fonction publique de l'Etat, les agents du territoire de la Polynésie française et de la collectivité départementale de Mayotte affectés dans les services pénitentiaires ;
    « 4° Supprimer le conseil du contentieux administratif des îles Wallis et Futuna et rendre applicables, dans ce territoire, les dispositions législatives du code de justice administrative.
    « III. - Les projets d'ordonnance sont soumis pour avis :
    « 1° Lorsque leurs dispositions sont relatives à la Polynésie française, à la Nouvelle-Calédonie ou à Mayotte, aux institutions compétentes prévues respectivement par la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie et par l'article L. 3551-12 du code général des collectivités territoriales ;
    « 2° Lorsque leurs dispositions sont relatives aux îles Wallis et Futuna, à l'assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna. L'avis est alors émis dans le délai d'un mois ; ce délai expiré, l'avis est réputé avoit été donné.
    « Les projets d'ordonnance comportant des dispositions relatives à la Polynésie française sont en outre soumis à l'assemblée de ce territoire.
    « IV. - Les ordonnances seront prises, au plus tard, le dernier jour du douzième mois suivant la promulgation de la présente loi. Le projet de loi portant ratification de ces ordonnances sera déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du quinzième mois suivant la promulgation de la présente loi. »
    M. Warsmann, rapporteur, a présenté un amendement, n° 264, ainsi rédigé :
    « A la fin du 1° du II de l'article 43, substituer aux mots : "le III, les mots : "le II. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. C'est la correction d'une simple erreur matérielle.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 264.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 43, modifié par l'amendement n° 264.
    (L'article 43, ainsi modifié, est adopté.)

Article 44

    M. le président. « Art. 44. - L'article 140 du code minier est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Le procureur de la République peut ordonner la destruction des matériels ayant servi à commettre la ou les infractions constatées par procès-verbal lorsqu'il n'existe pas de mesures techniques raisonnablement envisageables pour empêcher définitivement le renouvellement de cette ou de ces infractions. »
    Je mets aux voix l'article 44.
    (L'article 44 est adopté.)

Explications de vote

    M. le président. Nous arrivons aux explications de vote sur l'ensemble du projet de loi.
    Je vous rappelle que chaque groupe disposera de cinq minutes.
    La parole est à M. Claude Goasguen, pour le groupe de l'UMP.
    M. Claude Goasguen. Cela ira beaucoup plus vite, monsieur le président, car nous aurons l'occasion de nous expliquer demain.
    C'est un bon texte, et le groupe le votera sans ambiguïté. Je vous remercie encore une fois, monsieur le garde des sceaux, pour la rapidité avec laquelle vous avez présenté ce projet qui répond aux attentes des Français tant sur la délinquance des mineurs que sur le juge de proximité ou les mesures de procédure pénale. Il faudra compléter ces dispositions bien entendu, mais elles permettront d'avoir une procédure pénale plus souple, plus légère, permettant à la justice de dégager des moyens supplémentaires.
    Nous nous expliquerons demain avec les sénateurs mais je souhaite que l'esprit et la lettre de ce texte soient conservés. C'est la raison pour laquelle nous le voterons sans ambiguïté en vous remerciant de votre célérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Michel Vaxès. Nous voilà arrivés rapidement, très rapidement, à l'évidence trop rapidement, au terme de l'examen de cette loi d'orientation et de programmation de la justice.
    Est donc soumis à notre vote un texte qui modifie profondément notre organisation judiciaire, notre procédure pénale, l'ordonnance de 1945 relative à l'enfance délinquante. Je ne reviens pas sur ce que j'ai dit durant ces deux jours ni sur les différentes propositions qui auraient permis de répondre aux exigences de la mise en place d'une justice de vraie proximité et d'une lutte efficace contre la délinquance juvénile.
    Un constat s'impose à l'issue de cette discussion. Vous persistez, monsieur le ministre, avec votre majorité, dans la voie du déni de la prévention et de l'éducation. Certes, vous en parlez, mais vous ne vous donnez pas des moyens à la hauteur des problèmes posés. C'est, je le crois profondément, une erreur. C'est la vie qui tranchera ce débat, et je crains que ce ne soit, hélas !, beaucoup plus tôt et beaucoup plus mal que vous ne le pensez.
    Le propre d'une justice des mineurs efficace est de s'interroger, tant sur le traitement de l'acte - nous l'avons fait abondamment -, que sur l'avant et sur l'après, et nous ne l'avons point fait.
    Punir est sûrement nécessaire. Mais après ? La question reste entière. En adoptant un tel texte, vous ne comprenez pas cette logique. Vous croyez que tout se réglera en répondant immédiatemment à un acte par une sanction, sans prendre le temps de comprendre, alors que tout professionnel de l'enfance et de l'adolescence sait que, avec les adolescents, le danger est de s'engager dans une escalade, de pratiquer un bras de fer dont je suis convaincu qu'il produira, hélas ! à terme, des résultats inverses de ceux attendus.
    Avec ce texte, l'équilibre de l'ordonnance de 1945, fondé sur le primat de l'éducatif, est profondément dénaturé. Cette primauté de l'éducatif n'exclut pourtant en rien la dimension de la sanction et de la contrainte. La capacité du mineur délinquant à se modifier n'est possible que par une pédagogie de la loi, qui articule le judiciaire et l'éducatif et qui donne un sens à l'acte qu'il commet. Je regrette que vous y ayez renoncé.
    Je le redis avec insistance : en refusant de vous attaquer aux véritables causes de la délinquance juvénile, vous n'infléchirez pas le processus observé depuis une à deux dizaines d'années. Pensez-vous vraiment qu'une justice pénale est possible sans justice sociale ? Vous devrez prendre vos responsabilités face aux effets extrêmement pervers de ce texte. Vous constaterez sur le moyen terme qu'en orientant ainsi votre politique judiciaire, vous vous êtes trompés de direction. Mais vous risquez aussi de tromper nos concitoyens, qui sont en attente de vraies réponses à leurs vrais problèmes.
    Après la discussion qui a eu lieu, le texte ressort de cette assemblée plus dangereux encore que quand il y est arrivé. L'adoption par la majorité d'amendements qui le durcissent encore ne constituent qu'une fuite en avant vers une politique plus répressive. Tout au long du débat, nous avons observé une modification de son orientation. Après avoir résisté aux propositions de l'opposition, il vous a fallu, monsieur le ministre, résister à celles de votre majorité. Vous risquez de finir par céder à cette pression, compte tenu des résultats qu'aura ce texte.
    Avant de conclure, je dirai quelques mots sur l'ambiance dans laquelle se sont tenus nos débats.
    La procédure d'urgence ayant été déclarée sur ce projet de loi, nous avons été contraints de prendre connaissance dans la précipitation d'un texte important, qui ne sera pas sans conséquences sur la vie de nos concitoyens.
    M. René Dosière. Tout à fait !
    M. Michel Vaxès. Si les débats s'étaient tenus dans le respect de tous, cela aurait été une bonne chose. Mais cela n'a pas été le cas. Faute de partager les propositions de l'opposition, vous auriez pu au moins les écouter et en débattre.
    M. Yves Fromion. Vous êtes le seul de votre groupe pour débattre !
    M. Michel Vaxès. Je crains beaucoup pour nos futures conditions de travail dans cet hémicycle. Les majorités absolues portent en elles, nous le savons, le danger de l'arrogance ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Yves Fromion. Vous parlez en connaissance de cause !
    M. le président. Poursuivez, monsieur Vaxès !
    M. Michel Vaxès. Il est vrai qu'elles présentent l'avantage - mais c'est une consolation qui ne me satisfait pas - de vous voir porter seuls la responsabilité de l'évolution de la situation.
    Pour conclure, je dirai quelques mots sur la situation dans ma commune. En 2001, j'ai eu la chance de pouvoir constater, selon les informations du ministère de l'intérieur, que la délinquance y avait baissé de 15 %.
    M. Yves Fromion. C'est l'exception qui confirme la règle !
    M. Michel Vaxès. Au premier trimestre 2002, cette baisse a été confirmée à hauteur de 8 %, ce qui laisse présager à nouveau une diminution de 15 % pour la fin de l'année. Or le texte que vous nous présentez, monsieur le ministre, n'existait pas. Ces résultats sont le fruit de l'activité d'accompagnement éducatif, de la prévention, de la mobilisation de l'ensemble des acteurs sociaux, des personnels de la justice et de ceux de la police. Je souhaite que cette évolution ne soit pas contrariée, que ces résultats soient confirmés au cours du second semestre et même qu'ils s'améliorent en 2003.
    M. le président. Monsieur Vaxès, il faut vous approcher de votre conclusion, vous avez dépassé votre temps de parole.
    M. Michel Vaxès. Je conclus, monsieur le président, et je vous remercie de votre mansuétude.
    Le groupe des député-e-s communistes et républicains votera évidemment contre ce projet de loi.
(Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Albertini, pour le groupe UDF.
    M. Pierre Albertini. Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, voici donc venu le moment des explications de vote.
    Pour nous, ce projet de loi comporte deux volets. Le premier, qui n'a fait l'objet d'aucune critique, est relatif à la programmation, c'est-à-dire à l'allocation de moyens supplémentaires pour toutes les composantes de la justice. Nous nous en félicitons, d'autant plus, monsieur le garde des sceaux, que, dans les arbitrages à venir, qui seront forcément difficiles - il ne faut pas être naïfs -, nous vous apporterons, sur ce plan-là, notre soutien sans réserves. Il faut que la justice devienne une véritable priorité de l'action publique dans notre pays, ce qu'elle n'a jamais été, hélas ! en dépit d'efforts récents, mais que j'ai qualifiés de tardifs. Car on ne rattrape pas en cinq ou dix ans un oubli de 150 ans ! (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Marie Geveaux. Ça laisse de la marge !
    M. Pierre Albertini. En effet, ça laisse un peu de marge !
    Le deuxième volet du texte concerne les orientations que vous avez voulu donner à l'institution judiciaire, en créant un juge de proximité, en modifiant le droit pénal applicable aux mineurs, en procédant à la « simplification » de la procédure pénale et de l'aide aux victimes.
    Vous nous concéderez que, soutenant ce texte, nous soyons autorisés à vous faire part de toutes les interrogations qu'il soulève et de toutes les réserves qu'il suscite de notre part.
    Nous souhaitons, je le dis très franchement, que l'application de ce texte soit une réussite. Toutefois, sur deux ou trois points, nous avons plus que des doutes sur l'ampleur des résultats qu'il donnera dans le court terme, c'est-à-dire dans les six mois ou dans les deux ou trois ans à venir.
    Le premier de ces doutes concerne la création du juge de proximité. Pour nous, cette fonction a été conçue de manière trop restrictive, et viendra rapidement le temps où il faudra remettre l'ouvrage sur le métier pour faire jouer à ce juge de proximité un véritable rôle, celui que nos concitoyens attendent qu'il joue. Les dispositions très timides relatives au juge de proximité qui figurent dans ce texte ne me semblent pas à la mesure des attentes des justiciables.
    Le deuxième de ces doutes - le plus important - concerne le droit pénal applicable aux mineurs. Il s'agit plus d'une question de pratique que de philosophie. Je l'ai souligné à plusieurs reprises, c'est non seulement une affaire de moyens, mais aussi une question de méthode.
    Il est indispensable de ne pas laisser la justice seule sur le front de la délinquance des mineurs, d'autres institutions ont aussi leur rôle à jouer : l'éducation nationale, les services sociaux, les collectivités locales. Donc, au-delà même de ce qui est du ressort de la justice proprement dite, il convient de mettre en place une stratégie d'ensemble, d'avoir une vision globale. Surtout, il ne faut pas stigmatiser la jeunesse d'une manière générale, car c'est une minorité de celle-ci qui pratique la délinquance que nous déplorons tous, et une infime minorité ne doit pas faire oublier les immenses qualités de la majorité de nos jeunes, qui sont, je vous le rappelle, l'avenir de notre pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Marylise Lebranchu. Très bien !
    M. Pierre Albertini. N'oublions pas que c'est sur la jeunesse que l'on construit et non sur les générations de personnes âgées, quels que soient par ailleurs leurs mérites. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    En cette matière, ainsi que je vous l'ai dit à plusieurs reprises, monsieur le garde des sceaux, nous sommes attachés à la nécessité absolue de privilégier les activités par rapport à l'isolement ou à l'enfermement, car c'est dans les activités que le jeune est capable de réaliser sa personnalité, de concevoir une action collective, de se rendre utile à la communauté dont il fait partie. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Le troisième doute est relatif à la procédure pénale, que vous prétendez simplifier. Cela me rappelle cette pensée de ce grand démographe, grand économiste et grand philosophe que fut Alfred Sauvy, qui, soulignant l'illusion de la simplification, disait : « Dans un monde complexe, en général lorsqu'on prétend simplifier, on ajoute plutôt de la complexité à la complexité. »
    Je ne suis pas sûr que la méthode consistant à retoucher, comme nous le faisons depuis vingt ans, la procédure pénale en prenant quelques libertés avec des principes fondamentaux, soit une bonne méthode. Je crois qu'elle est très largement chaotique. Nous aurons l'occasion d'y revenir lorsque vous nous soumettrez, monsieur le garde des sceaux, l'évaluation que vous nous avez promise ; et j'espère que ce sera l'occasion pour le Parlement d'être associé à l'analyse des résultats obtenus par le service public de la justice. Ce n'est d'ailleurs pas porter atteinte à l'autorité judiciaire que de demander des comptes sur ces résultats. La justice est, je le répète, un service public comme les autres, qui remplit une mission éminente et qui a une fonction irremplaçable de régulation sociale. Naturellement, les élus que nous sommes doivent participer à cette évaluation en toute objectivité.
    En conclusion, monsieur le garde des sceaux, je dirai que, dans le monde difficile dans lequel nous vivons, la situation de la France est probablement plus grave qu'on ne l'indique.
    A cet égard, il convient de se préoccuper de deux aspects fondamentaux. Le premier, c'est celui de la cohésion nationale, du sentiment d'appartenir à une communauté, qui non seulement partage un passé, mais est aussi fière d'un avenir commun.
    Le second aspect, c'est celui de la lutte contre les exclusions, de la lutte contre les inégalités. Cela concerne ce que j'appellerai la France des oubliés, c'est-à-dire ces trois, quatre ou cinq millions de personnes qui sont aujourd'hui hors du chemin. Il est essentiel de leur donner des signes et de penser à eux en priorité.
    Vous avez dit, monsieur le garde des sceaux, que nous partagions la même conception philosophique, celle fondée sur l'humanisme. Il est vrai que je crois profondément à la qualité de la personne humaine ; je crois à la personne et non à l'individu. Une telle conception implique d'admettre deux principes simples : celui de la liberté et celui de la responsabilité. On ne peut pas exercer sa liberté si on n'assume pas en même temps sa responsabilité. C'est ainsi que l'on forme des citoyens actifs, c'est-à-dire des citoyens qui font partie d'une communauté vivante, chaleureuse et solidaire.
    Monsieur le garde des sceaux, nous ne vous priverons pas du « petit plaisir », pour reprendre une expression connue, de voter le texte, en dépit de déclarations que j'ai lues dans la presse et selon lesquelles nous chercherions à tout prix à affirmer notre spécificité. Certes, nous jouons « notre petite musique », et nous le faisons sans complexe parce que nous estimons que chaque député est comptable des engagements qu'il a pris devant ses électeurs, doit se considérer comme une partie de la nation tout entière et doit se déterminer en conscience, mais c'est tout.
    Le groupe UDF approuvera ce texte, tout en exprimant des réserves fortes sur quelques points que j'ai soulignés. Il souhaite naturellement que la commission mixte paritaire parvienne rapidement à un accord. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. André Vallini, pour le groupe socialiste.
    M. André Vallini. Si je voulais faire une explication de vote, très brève, je me contenterais simplement de dire que, pour toutes les bonnes raisons que vient d'exposer M. Albertini, le groupe socialiste votera contre ce texte. Toutefois, j'aurai deux ou trois choses à ajouter à ses propos.
    D'abord, je dirai encore une fois à M. le rapporteur qu'il est faux de prétendre que nous avons eu le temps de travailler à fond sur ce projet de loi de programmation et d'orientation pour la justice. Pourtant, c'était une exigence pour un texte si important. Je rappellerai aussi que l'Assemblée a travaillé durant quatorze mois sur le texte relatif à la présomption d'innocence. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Patrick Labaune. On voit le résultat !
    M. André Vallini. Toutes les grandes lois touchant à la justice que nous avons examinées lors de la précédente législature ont fait l'objet de semaines et de mois de travail. Ce n'est pas avec trois réunions de commission en plein mois de juillet (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), une table ronde de dix heures à midi et quelques auditions menées à la va-vite qu'on peut estimer avoir fait un bon travail d'approfondissement sur un texte aussi essentiel.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Quelle honte de dire cela !
    M. André Vallini. En ce qui concerne les moyens budgétaires, il est vrai que les chiffres annoncés sont assez élevés, mais je tiens à rappeler deux choses à ce sujet.
    D'abord, il s'agit d'une loi de programmation, et nous verrons bien, dans les prochaines années, si les lois de finances annuelles viennent confirmer les intentions, d'autant que les annonces « austères » de M. Raffarin cette semaine en matière budgétaire ne laissent rien présager de bon pour le budget 2003.
    Ensuite, je veux rappeler - et je remercie M. Albertini de l'avoir dit avant moi - que, sous la législature précédente, le budget de la justice a augmenté de près de 30 %. En préparant mon intervention, j'avais écrit à ce propos : « soit plus que dans les cinquante années précédentes ». M. Albertini, lui, a parlé de 150 ans.
    M. Léonce Deprez. Il est remonté trop loin !
    M. André Vallini. En tout cas, Mme Guigou puis Mme Lebranchu ont obtenu une augmentation sans précédent sans les budgets de la justice de 1997 à 2002. Ce qui signifie, monsieur le garde des sceaux, que vous ne partez pas de rien en matière de moyens.
    M. Jean Tiberi. Ce qui compte, ce sont les résultats !
    M. André Vallini. En ce qui concerne le volet « justice de proximité », je pourrais expliquer notre vote négatif en reprenant, là encore, les critiques, les craintes et les interrogations formulées par M. Albertini, mais aussi par M. Goasguen, M. Marsaud, M. de Roux qui n'ont pas manqué de souligner « les insuffisances », « les dangers », « les complications » qu'allait créer la nouvelle juridiction que va être mise en place.
    Il aurait suffi, pour développer la justice de proximité que nous souhaitons tous, de donner les moyens nécessaires à celle qui existe déjà, de la renforcer. Je veux parler de la conciliation, de la médiation, des délégués du procureur, des maisons de la justice et du droit, que nous avons multipliées, et surtout, bien sûr, des juges d'instance, qui vont demeurer, quelle que soit la réforme à laquelle vous procédez, monsieur le garde des sceaux, les vrais juges professionnels de proximité.
    S'agissant du volet de la délinquance des mineurs, là encore je pourrais rappeler les interventions de plusieurs de nos collègues de l'UDF, qui se rendent compte comme nous que votre texte ne résoudra rien, trop marqué qu'il est par une logique répressive et carcérale, à l'opposé de ce que recommandent tous les spécialistes de ce problème compliqué, à l'opposé de ce qu'imposent non seulement le respect des principes, mais aussi le souci de l'efficacité. Je dis bien le souci de l'efficacité, car, comme nous vous l'avons dit, nous voulons autant que vous, monsieur le garde des sceaux, mesdames, messieurs de la majorité, lutter contre ce problème de société, contre cette violence des mineurs, contre cette délinquance qui ne fait que s'accroître. Mais nous voulons le faire sans tomber pour autant dans le simplisme des solutions démagogiques, spectaculaires, populaires sans doute - au moins à court terme -, mais qui se révéleront inefficaces et dangereuses. Inefficaces car elles ne traitent que les symptômes du mal sans s'attaquer à ses racines. Dangereuses car elles peuvent aboutir à une surviolence due à une surpénalisation.
    Enfin, sur la procédure pénale, je veux vous faire part d'un regret et même d'une vraie tristesse.
    Comment se fait-il que deux ans à peine après avoir oeuvré ensemble jour et nuit, majorité et opposition, droite et gauche, ici comme au Sénat, à l'élaboration de cette grande loi sur la présomption d'innocence, notamment aux dispositions concernant la détention provisoire, comment se fait-il que deux ans à peine après avoir oeuvré ensemble au sein de la commission d'enquête sur les prisons, comment se fait-il donc que cet « état de grâce » démocratique, ce souffle humaniste inspiré par les grands principes de notre République ait pu disparaître à ce point pour céder la place aujourd'hui à un projet aussi réactionnaire au sens littéral du terme ? (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Patrick Labaune. Ringard !
    M. Yves Fromion. Ce n'est pas le sentiment des Français, monsieur Vallini !
    M. André Vallini. Que s'est-il donc passé entre 2000 et 2002 ? Quelques campagnes électorales, sans doute ! En tout cas, cela me conduit à poser de nouveau la question que j'ai posée en défendant l'exception d'irrecevabilité et qui nous concerne tous, nous les 577 députés dépositaires de la souveraineté nationale, comme l'a rappelé M. Albertini : le Parlement est-il là pour faire la loi qu'attend le plus grand nombre ou pour faire la loi qui sera utile au plus grand nombre ?
    Le Parlement doit-il se contenter de reproduire, comme vous l'avez fait pendant trois jours, les craintes et les exaspérations légitimes de la société ou se doit-il de leur apporter des apaisements utiles, réfléchis et efficaces ?
    La grandeur de la politique, la noblesse de notre mission, mes chers collègues, consiste-t-elle à suivre une opinion parfois trompée par les discours démagogiques (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) ou à expliquer courageusement à cette dernière la complexité des problèmes de notre société, notamment s'agissant de la violence, pour mieux lui proposer les solutions courageuses, coûteuses et de longue haleine qu'ils appellent ?
    M. Richard Cazenave. Quel complexe de supériorité !
    M. Xavier de Roux. Le peuple est impatient, monsieur Vallini !
    M. André Vallini. Bien loin du « nouvel humanisme » dont se réclame M. Raffarin, votre loi va mettre à nouveau la France au ban des nations européennes (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) en faisant reculer la protection des droits de la défense, la protection de la présomption d'innocence et même la protection des enfants.
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. C'est une honte de tenir de tels propos !
    M. André Vallini. Deux ans après avoir avancé ensemble sur la voie de la démocratie, vous régressez aujourd'hui dans la voie de la démagogie. Nous ne vous suivrons pas et nous voterons contre votre texte, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Michel Vaxès. Très bien !
    M. Jacques Myard. Tout ce qui est excessif est insignifiant !

Vote sur l'ensemble

    M. le président. Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
    (L'ensemble du projet de loi est adopté.)
    (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je voudrais d'abord remercier vivement le président et le rapporteur, ainsi que tous les membres de la commission des lois et les administrateurs pour le travail très important qu'ils ont effectué pour préparer et suivre ce débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Je voudrais ensuite remercier très sincèrement la majorité de l'Assemblée nationale pour son engagement et le travail qu'elle a fourni pendant ces jours de juillet. Nous sommes, les uns et les autres, élus ou en charge de responsabilités pour travailler, y compris l'été, lorsque les problèmes de la France sont urgents.
    M. Claude Goasguen et M. Jacques Myard. Très bien !
    M. le garde des sceaux. Et je ne vois pas en quoi le fait de travailler en juillet et en août constituerait un scandale à l'égard de la démocratie et de ses exigences. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Monsieur Vallini, je ne pars pas de rien, c'est vrai, je pars avec tous les problèmes que j'ai trouvés, que nous avons trouvés en arrivant. (Sourires.)
    M. Jean Marsaudon. Ils sont nombreux !
    M. le garde des sceaux. Grâce à cette loi, mesdames, messieurs les députés, qui accorde des moyens à la justice, vous nous donnez la possibilité d'agir et de répondre à l'attente forte des Françaises et des Français.
    Car la période électorale n'est pas une parenthèse dans le vie démocratique. C'est un moment fort, un moment de débat qui permet d'expliciter les priorités. C'est aussi l'occasion de prendre des engagements qu'après les élections on tient ou on renie, mesdames et messieurs du parti socialiste.
    Avec cette loi, qui vient après celle qui a été présentée par mon collègue ministre de l'intérieur, nous nous donnons les moyens de tenir les engagements du Président de la République et de la majorité qui soutient l'action du Gouvernement. Je suis convaincu qu'au-delà de ces deux textes l'action que nous aurons à mener au fil de ces prochaines années devra conforter ces orientations afin de redonner aux Françaises et aux Français le goût de la démocratie et l'attachement à la République, donc la capacité de construire, tous ensemble, l'humanisme républicain qui a failli vaciller il y a quelques semaines, ne l'oublions jamais. Tel est le sens profond de l'action que nous menons les uns et les autres et pour laquelle je vous remercie. (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

2

JUSTICE

Communication relative à la désignation
d'une commission mixte paritaire

    M. le président. M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

« Paris, le 1er août 2002.    

            Monsieur le président,
    « Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur de vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice.
    « Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter l'Assemblée nationale à désigner ses représentants à cette commission.
    « J'adresse ce jour à M. le président du Sénat une demande tendant aux mêmes fins.
    « Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »
    Cette communication a été notifiée à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

3

MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR

    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement.
    M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, j'informe votre assemblée que le Gouvernement, en application des articles 29 et 48 de la Constitution, fixe comme suit l'ordre du jour du samedi 3 août :
    - à seize heures et, éventuellement, à vingt et une heures :
            - texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant amnistie ;
            - texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice ;
            - éventuellement, navettes diverses.
    M. le président. Acte est donné de cette communication.

4

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Samedi 3 août 2002, à seize heures, première séance publique :
    Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant amnistie :
    M. Michel Hunault, rapporteur (rapport n° 160) ;
    Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice :
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur ;
    Eventuellement, navettes diverses.
    Eventuellement, à vingt et une heures, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES

COMITÉ CONSULTATIF POUR LA GESTION DU FONDS NATIONAL POUR LE DÉVELOPPEMENT DES ADDUCTIONS D'EAU DANS LES COMMUNES RURALES

(2 postes à pourvoir)

    La commission des finances, de l'économie générale et du Plan a désigné le mardi 30 juillet 2002 M. Jean-Claude Mathis comme membre de ce comité.
    La commission de la production et des échanges a désigné le mardi 30 juillet 2002 M. Jean-Claude Flory comme membre de ce comité.

CONSEIL SUPÉRIEUR
DE L'ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE
(3 postes à pourvoir)

    La commission des finances, de l'économie générale et du Plan a désigné le mardi 30 juillet 2002 M. Pierre Albertini comme membre de ce conseil.
    La commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République a désigné le mercredi 24 juillet 2002 MM. Michel Hunault et Etienne Blanc comme membres de ce conseil.

CONSEIL D'ADMINISTRATION DU CENTRE NATIONAL
D'OPHTALMOLOGIE DES QUINZE-VINGTS
(1 poste à pourvoir)

    La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a désigné le mercredi 31 juillet 2002 M. Patrick Bloche comme membre de ce conseil.

CONSEIL D'ADMINISTRATION
DE L'HÔPITAL NATIONAL DE SAINT-MAURICE
(1 poste à pourvoir)

    La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a désigné le mercredi 31 juillet 2002 M. Patrick Beaudoin comme membre de ce conseil.

COMITÉ CENTRAL D'ENQUÊTE SUR LE COÛT
ET LE RENDEMENT DES SERVICES PUBLICS
(4 postes à pourvoir : 2 titulaires et 2 suppléants)

    La commission des finances, de l'économie générale et du Plan a désigné le mardi 30 juillet 2002 MM. Georges Tron et Michel Diefenbacher comme membres titulaires et Mmes Marie-Anne Montchamp et Martine Lignières-Cassou comme membres suppléants de ce comité.

CONSEIL D'ADMINISTRATION DE L'AGENCE NATIONALE
POUR L'AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL
(1 poste à pourvoir)

    La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a désigné le mercredi 31 juillet 2002 Mme Muguette Jacquaint comme membre de ce conseil.

COMITÉ DE GESTION DU FONDS DE SOUTIEN
AUX HYDROCARBURES OU ASSIMILÉS D'ORIGINE NATIONALE
(2 postes à pourvoir)

    La commission des finances, de l'économie générale et du Plan a désigné le mardi 30 juillet 2002 M. Hervé Novelli comme membre de ce comité.
    La commission de la production et des échanges a désigné le mardi 30 juillet 2002 M. Jean-Charles Taugourdeau comme membre de ce comité.

COMMISSION SUPÉRIEURE DE CODIFICATION
(2 postes à pourvoir : 1 titulaire et 1 suppléant)

    La commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République a désigné le mercredi 24 juillet 2002 Mme Maryse Joissains-Masini comme membre titulaire et M. Pierre Morel-A-L'Huissier comme membre suppléant de cette commission.

COMITÉ NATIONAL
DE L'ORGANISATION SANITAIRE ET SOCIALE
(2 postes à pourvoir : 1 titulaire et 1 suppléant)

    La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a désigné le mercredi 31 juillet 2002 Mme Chantal Bourragué comme membre titulaire et Mme Hélène Mignon comme membre suppléant de ce comité.

COMMISSION D'EXAMEN DES PRATIQUES COMMERCIALES
(1 poste à pourvoir)

    La commission de la production et des échanges a désigné le mardi 30 juillet 2002 M. Jean-Paul Charié comme membre de cette commission.
    Les nominations sont publiées au Journal officiel du samedi 3 août 2002.

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
Transmissions

    M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale les textes suivants :

Communication du 1er août 2002

N° E 2066. - Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2505/96 portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires communautaires autonomes pour certains produits agricoles et industriels.
N° E 2067. - Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil fixant les règles spécifiques d'organisation des contrôles officiels concernant les produits d'origine animale destinés à la consommation humaine (COM [2002] 377 final).
N° E 2068. - Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil interdisant les composés organostanniques sur les navires (COM 396 final).
N° E 2069. - Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux arômes de fumée utilisés ou destinés à être utilisés dans ou sur les denrées alimentaires (COM 400 final).
N° E 2070. - Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la surveillance des forêts et des interactions environnementales dans la Communauté (Forest Focus) (COM [2002] 404 final).