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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 3 JUILLET 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mercredi 2 juillet 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Motion de censure. - Discussion et vote «...».
MM.
François Hollande,
François Bayrou,
Alain Bocquet,
Jacques Barrot,
Noël Mamère.
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.
Clôture de la discussion.
Vote par scrutin public dans les salles voisines de la salle des séances.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN

Proclamation du résultat du scrutin.
La motion de censure n'est pas adoptée.

Suspension et reprise de la séance «...»

2.  Réforme des retraites. - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Rappel au règlement «...»

MM. Pascal Terrasse, le président.

Article 78 (suite) «...»

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
Amendements de suppression n° 89 de Mme Billard, n°s 2457 à 2605 de Mme Adam et des membres du groupe socialiste et apparentés et n°s 9944 à 9950 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : Mme Martine Billard, MM.Pascal Terrasse, Alain Néri, Daniel Paul, Bernard Accoyer, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; le ministre, Maxime Gremetz. - Rejet.
Amendements identiques n°s 9951 à 9957 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains et amendement n° 90 de Mme Billard : M. Gilbert Biessy, Mme Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejets.
Adoption de l'article 78.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
3.  Modification de l'ordre du jour prioritaire «...».
4.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

MOTION DE CENSURE

Discussion et vote

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion et le vote sur la motion de censure déposée, en application de l'article 49, alinéa 2, de la Constitution, par MM. Jean-Marc Ayrault, François Hollande et 113 membres de l'Assemblée nationaleLa présente motion de censure est appuyée par les 115 signatures suivantes : MM. Jean-Marc Ayrault, François Hollande, Mmes Patricia Adam, Sylvie Andrieux-Bacquet, MM. Jean-Marie Aubron, Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Eric Besson, Jean-Louis Bianco, Serge Blisko, Patrick Bloche, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Christophe Caresche, Mme Martine Carillon-Couvreur, MM. Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Alain Claeys, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mme Claude-Anne Darciaux, M. Michel Dasseux, Mme Martine David, MM. Marcel Dehoux, Michel Delebarre, Jean Delobel, Bernard Derosier, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Julien Dray, Jean-Pierre Dufau, Yves Durand, Henri Emmanuelli, Claude Evin, Laurent Fabius, Jacques Floch, Pierre Forgues, Michel Françaix, Mmes Nathalie Gautier, Catherine Génisson, MM. Jean Glavany, Gaétan Gorce, Alain Gouriou, Mmes Elisabeth Guigou, Paulette Guinchard-Kunstler, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Serge Janquin, Armand Jung, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Jean-Yves Le Drian, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Bruno Le Roux, Mme Marylise Lebranchu, M. Patrick Lemasle, Mmes Annick Lepetit, Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Philippe Martin, Christophe Masse, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Arnaud Montebourg, Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget, MM. Michel Pajon, Germinal Peiro, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Jean-Jack Queyranne, Paul Quilès, Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Mmes Ségolène Royal, Odile Saugues, MM. Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Daniel Vaillant, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vergnier, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet, Philippe Vuilque, Jean-Pierre Defontaine, Paul Giacobbi, Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Roger-Gérard Schwartzenberg.
.
    La parole est à M. François Hollande.
    M. François Hollande. Monsieur le Premier ministre, il y a un an presque jour pour jour, lors de votre discours de politique générale, vous demandiez à être jugé chaque année par le Parlement sur votre action. Cette motion de censure déposée par le groupe socialiste fournit à l'Assemblée nationale l'occasion de vous faire respecter cet engagement. Nul ne s'en plaindra ici. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Richard Mallié. On ne vous a pas attendus pour ça ! Quel culot !
    M. François Hollande. Néanmoins, notre débat intervient dans un contexte troublé par vos déclarations, que vos regrets n'ont pu complètement effacer. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je veux utiliser ce moment pour...
    M. François d'Aubert. Aller à confesse !
    M. François Hollande. ... fixer, de notre point de vue, le cadre dans lequel nous pourrions organiser nos propres relations. Ce cadre pourrait reposer sur trois principes simples. Nous avons entre nous, majorité et opposition, gauche et droite, des divergences profondes sur la conception de la solidarité, le rôle de l'Etat, la stratégie économique.
    M. Richard Cazenave. Savez-vous où vous en êtes ?
    M. François Hollande. Cette confrontation, loin d'être un risque, est une chance pour la démocratie, car c'est l'indifférenciation politique qui fait l'indifférence civique. Acceptons donc sereinement le débat !
    Le deuxième principe, c'est le respect des idées qui est au coeur du pacte républicain.
    M. Richard Cazenave. Il ne sait pas où il en est !
    M. François Hollande. En tant que socialistes, nous sommes attachés, et c'est bien normal, à nos convictions,...
    M. Richard Cazenave. Lesquelles ?
    M. François Hollande. ... mais pas au point d'imaginer que nos adversaires dans la République seraient des ennemis de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous savons faire le choix de l'intérêt national et nous vous demandons le respect.
    M. Dominique Dord. Dreyfus !
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Il faut le mériter !
    M. François Hollande. Le respect, parce que vous êtes, monsieur le Premier ministre, le chef de la majorité, parce que vous êtes le Premier ministre, parce que vous incarnez la France, surtout lorsque vous vous exprimez, comme hier, devant un parterre de responsables européens.
    M. Jean Ueberschlag. Le respect que M. Jospin n'a jamais eu !
    M. François Hollande. Le troisième principe, c'est de considérer que chacun sert, à sa place, la République : ceux qui gouvernent aujourd'hui et qui connaissent - je suppose - la précarité de l'exercice ; ceux qui s'opposent et qui savent aussi qu'ils auront un jour à répondre de leurs promesses et à subir, à leur tour, la critique.
    M. Jean-Michel Fourgous. Des promesses comme : travailler moins et gagner plus ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Monsieur Fourgous, vous n'avez pas la parole !
    M. François Hollande. Depuis le 21 avril, et je demande que chacun en prenne la mesure, nous avons tous un devoir supérieur qui est d'éviter l'extrémisme. Voilà pourquoi nous devons, les uns et les autres, être exemplaires. Voilà pourquoi ce débat de censure est utile. Il peut être mené sans concession aucune sur le fond, mais dans la dignité sur la forme. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Un an après votre déclaration de politique générale, il est légitime de revenir sur vos résultats, sur vos réformes et sur votre méthode. Commençons par les résultats.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ils sont excellents !
    M. François Hollande. Il y a un an, vous prétendiez créer les conditions d'une croissance durable et forte. Vous faisiez le pari d'une croissance de 2,5 %. Un an après, où en sommes-nous ?
    M. Richard Mallié. Qu'est-ce que vous avez fait en 2002 ?
    M. François Hollande. La croissance ne dépassera pas, au mieux, 0,8 %. Trois fois moins qu'annoncé ! C'est la pire erreur de diagnostic depuis dix ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Vos baisses d'impôt, dont les plus favorisés ont été les principaux bénéficiaires, se sont traduites non pas par un gonflement de la consommation, mais par une hausse du taux d'épargne des ménages, et notamment du taux d'épargne financier. Vos résultats ne sont pas davantage favorables aux entreprises. L'investissement des entreprises a décru en 2002. Il s'est effondré également en 2003. Vous avez démontré que l'on ne peut pas redresser le moral des entreprises si l'on atteint parallèlement le moral des ménages et qu'il ne peut pas y avoir une politique d'offre s'il n'y a pas aussi une stimulation de la demande. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Sur l'emploi, votre pari a été perdu, et nous le regrettons. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il y a un an, monsieur le Premier ministre, vous nous disiez que la baisse des charges, ce n'était pas de l'idéologie, que cela marchait, que cela créait de l'emploi. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Pierre Lequiller. C'est vrai !
    M. Alain Marsaud. Pas comme les 35 heures !
    M. François Hollande. Vous avez donc consenti 18 milliards d'euros d'allégements de charges et nous constatons, expérience faite, que, loin d'avoir les effets escomptés, l'économie française, pour la première fois depuis 1993, a détruit davantage d'emplois qu'elle n'en a créés. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous avez, de ce point de vue, commis l'erreur de supprimer tous les dispositifs volontaristes d'emploi : suppression des emplois-jeunes, suspension de la loi de modernisation sociale, ...
    M. Guy Geoffroy. Bravo !
    M. François Hollande. ... réduction du nombre de contrats aidés. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Dès lors, 130 000 chômeurs de plus depuis huit mois : tel est le résultat de votre politique.
    M. Richard Cazenave. C'est scandaleux de dire cela !
    M. François Hollande. Votre première erreur a été de faire le choix de la baisse d'impôt, de la baisse de charges.
    M. Pierre Lequiller. Il a bien fait !
    M. François Hollande. La baisse d'impôt n'a pas créé la croissance et la baisse des charges n'a pas créé l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean Ueberschlag. Et les 35 heures, elles ont créé de l'emploi ?
    M. François Hollande. Sur le plan économique, vous annoncez régulièrement une reprise qui ne vient pas. Vous espérez même - je vous ai entendu il y a peu - dans les soldes et leur éventuel succès un rebond pour l'activité. On a connu meilleur stratège !
    M. Jean Ueberschlag. Monsieur Hollande, combien d'emplois ont été créés avec les 35 heures ?
    M. François Hollande. Et sur le front du chômage, vous en êtes à espérer une moindre progression de la population en âge de travailler. Vous avez abandonné toute politique. Vous avez démantelé votre CIVIS et l'avez reporté de mois en mois. Le revenu minimum d'activité est un nouveau cadeau sans aucune contrepartie aux entreprises.
    M. Jean-Michel Fourgous. Vous êtes archaïque !
    M. François Hollande. Et qu'est devenue votre cellule sur les restructurations industrielles supposée faire front aux plans sociaux ? Elle a aussi sombré. Quant à l'assurance emploi, qui était la grande annonce de votre déclaration de politique générale l'année dernière, vous attendez un improbable accord avec le MEDEF et les partenaires sociaux...
    M. Jean Ueberschlag. Vous, c'est le vaisseau fantôme !
    M. François Hollande. ... pour aller vers plus de formation professionnelle, par ailleurs nécessaire, alors même que le MEDEF voudrait que le temps de la formation ne soit plus compté dans le temps de travail ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Erreur sur l'emploi ! Erreur sur la croissance ! Echec sur les finances publiques ! Il y a un an jour pour jour, vous annonciez la réduction des déficits.
    M. Richard Mallié. Mais pour qui vous prenez-vous ?
    M. François Hollande. Or, vos baisses d'impôts et de charges, conjuguées avec vos prévisions irréalistes de croissance, ont abouti à une dérive sans précédent - je dis bien : sans précédent - des déficits publics.
    M. Pierre Lellouche. Pour les déficits publics, bravo les socialistes !
    M. François Hollande. Le déficit de l'Etat, que les auteurs de l'audit que vous aviez commandé avaient fixé à 45 milliards en 2002, le considérant comme le point haut de l'héritage de la politique Jospin, aura été de 49 milliards d'euros en 2002 et de 50 milliards en 2003. Voilà le résultat de votre politique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Augustin Bonrepaux. C'est scandaleux !
    M. François Hollande. Les gels de crédit ont fait place à des annulations et ce sont les dépenses d'avenir qui sont aujourd'hui sacrifiées. Dans l'éducation nationale, 10 000 emplois d'encadrement seront supprimés. S'agissant de recherche publique, jamais l'effort n'aura été aussi entamé.
    Mme Martine David. C'est vrai !
    M. François Hollande. « C'est une année noire, une année terrible », disent les chercheurs, « jamais nous n'avions connu une telle amputation de crédits ! »
    M. Pierre Cohen. Eh oui !
    M. François Hollande. Votre objectif de consacrer 3 % de richesse nationale à la recherche en fin de décennie est d'ores et déjà abandonné. Quant à la culture, autre dépense d'avenir, elle est sacrifiée budgétairement et socialement, comme le montre le conflit des intermittents du spectacle. (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Michel Herbillon. C'est une honte !
    M. François Hollande. Mais le déficit, c'est aussi celui de la sécurité sociale, de l'assurance maladie - ce à quoi les Français sont le plus attachés ! -, de la protection par rapport aux aléas de la vie. Le déficit de l'assurance maladie aura atteint le record historique de 16 milliards d'euros à la fin de l'année 2003 !
    M. Dominique Dord. Grâce à qui ?
    M. François Hollande. C'est la conséquence de vos choix. Vous avez augmenté sans contrepartie la rémunération des professions de santé. Vous avez abandonné toute maîtrise médicalisée de la dépense. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous avez été amenés à consentir une crise financière dans les dépenses d'assurance maladie qui vous amène aujourd'hui à dérembourser des médicaments et à augmenter dangereusement la dette sociale, qu'il faudra bien compenser d'une manière ou d'une autre, soit par une hausse des prélèvements, soit par des déremboursements. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations et huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Richard Cazenave. Et les 35 heures, ça a coûté combien ?
    M. Yves Bur. Quelle mauvaise foi !
    M. Jean Glavany. C'est scandaleux ! On ne le laisse pas parler !
    M. François Hollande. Monsieur le Premier ministre, vous avez été loin d'atteindre vos objectifs en matière d'emploi et de croissance. Vous avez alourdi les déficits budgétaires et aggravé les comptes de la sécurité sociale. Tel est votre bilan depuis un an.
    M. Pierre Lellouche. Rendez-nous Fabius !
    M. Michel Herbillon. Ce n'est pas un discours, c'est une caricature !
    M. François Hollande. Mais je veux aussi ici juger vos réformes. Nous avons, depuis trois semaines, démontré que votre réforme des retraites était d'abord injuste, qu'elle ne faisait porter l'effort que sur les salariés, qu'elle n'utilisait qu'un seul paramètre : celui de l'allongement de la durée des cotisations (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...
    M. Dominique Dord. C'est faux !
    M. François Hollande. ... qu'elle faisait peser sur les retraites de demain la menace d'une amputation de pouvoir d'achat, notamment pour celles et ceux qui n'auront pas les durées de cotisation nécessaires. Vous avez également exonéré le MEDEF de toute contribution.
    M. Richard Mallié. Et vous, qu'est-ce que vous avez fait ?
    M. François Hollande. Vous avez préservé un minimum contributif, alors que vous auriez dû porter toute retraite à 100 % du SMIC, dès lors que c'était la justice qui le réclamait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

    Vous avez ouvert les portes aux fonds de pension à travers l'épargne retraite et vous avez, en plus, encouragé fiscalement celles et ceux qui auront les moyens d'y souscrire. Cette réforme est donc injuste. Elle est en outre incohérente économiquement, parce que, chacun le sait ici, l'hypothèse de chômage qui fonde votre réforme - 4,5 % de la population active dans cinq ans - est irréaliste. Chacun sait ici qu'il ne pourra pas y avoir de redéploiement des cotisations chômage pour financer la retraite de demain. Chacun sait ici que votre réforme n'est pas financée. Chacun sait ici qu'il faudra prévoir de nouvelles ressources ou faire baisser le niveau des pensions. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Vous, vous n'avez rien fait !
    M. François Hollande. Votre réforme est imposée. Vous n'avez pas véritablement négocié. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous avez hâté son élaboration pour la présenter devant l'Assemblée nationale et finalement n'accepter aucun amendement, je dis bien aucun amendement de l'opposition, en trois semaines de débats ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Henri Emmanuelli. Monsieur le président, enfin !
    M Jean Glavany. Que fait le président !
    M. François Hollande. Et vous avez utilisé la même méthode sur la décentralisation. Hier symbole de proximité, de liberté locale, de clarté, la décentralisation est devenue un sujet de doute et d'inquiétude pour nos concitoyens.
    M. Richard Cazenave. C'est faux !
    M. François Hollande. Il est vrai que vous avez tout fait pour les inquiéter. Les élus ont vu, dans l'annonce des transferts de compétences, l'occasion, pour l'Etat, de se défausser, l'occasion aussi de transférer aux contribuables locaux ce qui revenait jusque-là aux contribuables nationaux. Les agents de l'Etat ont appris fortuitement qu'ils pourraient être transférés dans la fonction publique territoriale sans en avoir été prévenus et protégés. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Les citoyens voient dans l'expérimentation une remise en cause de l'unité territoriale. Plusieurs droits, plusieurs systèmes administratifs peuvent désormais coexister, hélas ! dans la République.
    M. François Goulard. Et alors ?
    M. François Hollande. Il y a là un risque sérieux. Ce que vous avez fait est le contraire de ce que nous avions nous-mêmes engagé en 1982. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Christian Cabal. Heureusement !
    M. François Hollande. La clarté entre les compétences était notre projet, notre loi ; vous avez préféré la confusion. Nous voulions l'égalité entre les territoires ; vous avez accentué les disparités. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous voulions la responsabilité ; vous avez tout fait pour l'opacité.
    M. Claude Goasguen. C'est caricatural !
    M. François Hollande. Vos résultats, monsieur le Premier ministre, sont bien loin de vos promesses sur la croissance, sur l'emploi, sur les inégalités. Vos réformes sont bien loin de la cohésion sociale que vous appelez de vos voeux. Mais votre méthode de gouvernement est, elle aussi, bien loin de vos proclamations républicaines.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Quelle tristesse pour le socialisme !
    M. François Hollande. Il y a un an, vous affirmiez souhaiter « ne pas faire de la division un principe gouvernemental et ne pas opposer les Français entre eux ».
    M. Patrick Balkany. C'est vrai !
    M. François Hollande. Et pourtant, vous n'avez cessé, sur chaque sujet, de prendre l'exact contre-pied de cet engagement. Vous avez d'abord divisé les organisations syndicales entre elles (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), privilégiant l'accord avec les uns, refusant la négociation avec les autres.
    M. Edouard Landrain. C'est nul !
    M. François Hollande. Vous avez espéré tirer les bénéfices de cet éclatement du jeu social en refusant de changer les règles de la démocratie sociale, qui voudraient que ce soient des accords majoritaires qui puissent engager les partenaires sociaux pour modifier les règles pour les retraites ou pour les intermittents du spectacle. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais, par votre refus de la négociation, vous avez aussi attisé les conflits et opposé les Français entre eux, les parents contre les enseignants, le privé contre le public, les usagers contre les fonctionnaires, les salariés contre les inactifs, et, encore récemment, les festivaliers contre les intermittents du spectacle. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

    Pour vous, chaque grève est une prise d'otages, chaque revendication d'une catégorie sociale est une mise en cause de la liberté d'une autre ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Vous ne recherchez pas l'intérêt général, vous démultipliez les intérêts particuliers ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Dominique Dord. Tout ce qui est excessif est insignifiant !
    M. François Hollande. Vous voulez les mettre en contradiction les uns avec les autres et de ce point de vue, vous ne servez pas la cohésion nationale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Enfin, vous n'avez pas hésité, dans de nombreux domaines, à provoquer l'épreuve de force.
    Sur l'éducation, vous avez attendu des semaines de grèves, de manifestations...
    M. Hervé Novelli. Vous n'avez rien fait, avant !
    M. François Hollande. ... jusqu'au point de menacer la tenue même des examens (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) pour convoquer en urgence votre ministre de l'intérieur (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Debout ! Debout !
    M. François Hollande. ... pour régler une question qui aurait pu l'être avant même la tenue des manifestations et des grèves ! Que de temps perdu ! Que d'énergie gaspillée ! Que de tensions inutiles ! Et pour quels résultats ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Sur les retraites, vous avez laissé un mouvement social puissant et digne suspendre sa mobilisation dans la frustration, dans la rancune, dans la colère (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), faute d'avoir ouvert votre porte et prolongé une discussion trop rapidement interrompue !
    Vous pensez en avoir fini par un vote au Parlement. Le débat, je vous le dis, reviendra sur l'ensemble de la protection sociale car c'est une conception de la société qui est en cause, et elle dépasse largement la seule question de la durée des cotisations ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Enfin, sur cette question des intermittents du spectacle, vous avez pris la responsabilité d'agréer - vous l'avez confirmé - un accord minoritaire, alors qu'une profession s'estime légitimement en danger, ...
    M. Edouard Landrain. Qu'avez-vous fait ?
    M. François Hollande. ... demande à améliorer son statut et veut que soit mis fin à des abus des employeurs privés, mais aussi des employeurs de l'audiovisuel public ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Michel Gonnot. Vingt minutes !
    M. François Hollande. Vous avez, là encore, préféré l'épreuve de force ! Les conditions d'arrestation de José Bové en témoignent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Noël Mamère. En effet !
    M. François Hollande. Quelle image pour notre pays, que de voir un syndicaliste croupir ainsi en prison ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Ecoutez tranquillement, chacun va s'exprimer !
    M. Henri Emmanuelli. Un peu tard !
    M. François Hollande. Il y a un an, monsieur le Premier ministre, vous souhaitiez - et je pense que vous étiez de bonne foi - que nous progressions ensemble dans la pratique des relations républicaines avec l'opposition. Le rappel de ces propos paraîtra cruel aujourd'hui. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Depuis un an, vous ne vous êtes adressé qu'à votre camp, qu'à votre majorité (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste), ...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est faux !
    M. François Hollande. ... qu'à votre parti ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous avez même bâti un mode de scrutin à cette seule fin, et il a fallu l'intervention du Conseil constitutionnel pour vous arrêter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Vous avez, depuis un an, et vous en faites encore ici la démonstration, ignoré nos interpellations, répondu occasionnellement à nos questions. Vous avez, par un usage mal contrôlé de la polémique blessé non pas les personnes mais les idées.
    M. Pierre Lellouche. C'est un expert qui parle !
    M. François Hollande. Vous avez même considéré hier le socialisme comme un péché suffisamment grave pour priver notre pays de l'accès au paradis (Vives exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Cette diabolisation de l'adversaire est suffisamment grave parce qu'elle révèle une conception qui n'est pas la nôtre. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Monsieur le Premier ministre, je respecte votre philosophie. Je combats le libéralisme, mais je respecte cette doctrine. Je considère qu'il y a là un mouvement de pensée respectable, honorable et qui contribue à l'équilibre de notre démocratie.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Vous n'avez pas toujours dit cela !
    M. François Hollande. Voilà pourquoi, monsieur le Premier ministre, vos méthodes, qui consistent à s'adresser uniquement à votre camp, et à ignorer le rôle que peut jouer l'opposition, méritent à elles seules d'êtres censurées. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Vos méthodes, qui consistent à créer l'épreuve de force, à diviser les Français, à mettre les syndicats les uns contre les autres (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), à créer l'opposition, à faire éclater la cohésion nationale, suffisent à elles seules à justifier cette censure (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Il y a un an, vous prétendiez...
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Il ne croit même pas ce qu'il dit !
    M. François Hollande. ... « vouloir gouverner pour tous et agir au nom du principe d'humanité ». Il pouvait y avoir de la sincérité...
    M. Michel Herbillon. Il y en a !
    M. François Hollande. Il y avait surtout, nous le savons aujourd'hui, de la communication. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) En fait, vous menez non pas une politique ferme, mais dure. Dure dans ses choix, dure dans ses méthodes, brutale dans vos discours. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'en est fini de la candeur, de la bonhomie, du bon sens. Vous n'offrez, monsieur le Premier ministre, aujourd'hui que des aspérités. Vous vouliez une France confiante, elle est aujourd'hui, nous le savons tous, inquiète pour son avenir,...
    M. Jacques Myard. Ça manque de souffle !
    M. François Hollande. ... troublée, divisée, privée de toute vision d'avenir.
    M. Jean-Michel Fourgous. Grâce à vous !
    M. François Hollande. Les socialistes, ici, ne s'en réjouissent pas.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Les socialistes ? Lesquels ?
    M. François Hollande. Ils savent les dangers qui pèsent sur notre démocratie, ils n'ont rien oublié des scrutins d'hier. (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ils ne feront pas de vos échecs leurs succès, mais ils ont le devoir de préparer l'alternative. Ils ont le devoir de donner du souffle à la démocratie, ils ont le devoir de donner de l'espoir aux Français. En demandant la censure de votre politique, ils prennent acte pour les échéances futures ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Monsieur le Premier ministre, c'est notre façon, et elle est respectable, de servir à notre place la démocratie, la France et la République. (Mmes et MM. les députés du groupe socialiste se lèvent et applaudissent longuement. - Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, où certains députés brandissent un carton rouge.)

    M. le président. La parole est à M. François Bayrou.
    M. François Bayrou. Monsieur le Premier ministre, la situation de la France, aujourd'hui, c'est une violente opposition. Mais pas une violente opposition comme celle qui semble s'exprimer. Pas la violente opposition classique entre majorité et opposition, droite et gauche. Non, il y a une opposition plus violente encore, entre ce que la France devrait être et ce qu'elle est en réalité.
    M. Jean-Christophe Cambadélis. Qui est responsable ?
    M. François Bayrou. La France est un pays qui devrait aller bien et qui va mal.
    M. Henri Emmanuelli. C'est vrai, elle va mal !
    M. François Bayrou. C'est un pays formé, c'est une capacité culturelle et de recherche à peu près sans pareille, ce sont des jeunes diplômés demandés par toutes les grandes entreprises du monde, c'est une intelligence devant le travail qui provoque la satisfaction de toutes les entreprises, y compris celles qui s'installent chez nous de l'autre bout du monde,...
    M. Henri Emmanuelli. C'est l'enseignement public...
    M. François Bayrou. ... ce sont des paysages,...
    M. Christian Paul. De carte postale !
    M. François Bayrou. ... une façon de vivre, une attention reconnue à la cohésion sociale.
    M. Jean-Pierre Brard. La santé publique !
    M. François Bayrou. Tout cela fait de la France un pays reconnu et souvent envié.
    Et en même temps, c'est un chômage profondément destructeur,...
    M. Henri Emmanuelli. Ça, c'est Raffarin !
    M. François Bayrou. ... installé dans la société, ce sont des banlieues déchirées, des zones rurales qui se sentent abandonnées...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est vrai !
    M. François Bayrou. ... et reniées quelles que soient les déclarations vertueuses des gouvernements,...
    Un député du groupe socialiste. « Du Gouvernement » !
    M. François Bayrou. ... une démocratie fragile en état de crise, des comptes publics et sociaux dans un état calamiteux,...
    M. Henri Emmanuelli. Catastrophique !
    M. Jean-Pierre Blazy. Bravo Raffarin !
    M. François Bayrou. ... au point que la France pourrait se trouver au dernier rang de l'Union européenne.
    Mme Martine David. Quel tableau !
    M. Jean Glavany. On a donc raison de censurer !
    M. François Bayrou. Pour nous, c'est le choc entre ce que la France devrait être et ce qu'elle est réellement qui explique, en réalité, l'implosion du 21 avril.
    M. Jean Glavany. Vous allez finir par passer à l'acte et voter la censure !
    M. François Bayrou. A cette époque-là, la majorité c'était vous, mesdames, messieurs de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Et à cette époque-là, les responsables, c'était vous !
    M. Patrick Ollier. Très bien !
    M. François Bayrou. Les accusations perpétuelles d'un camp contre l'autre, nous devrions donc essayer de les modérer. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Le Président de la République...
    M. Daniel Vaillant. Chirac, le président de la dissolution !
    M. François Bayrou. ... ayant été élu par 82,5 % des Français,...
    M. Henri Emmanuelli. C'est ça le vrai purgatoire !
    M. François Bayrou. ... vous avez été investi, monsieur le Premier ministre, de la lourde mission de redresser la France. Pour se faire, vous bénéficiez de tous les centres de pouvoir et de toutes les majorités, ce qui ne s'était jamais vu dans l'histoire de la République.
    Cette situation exceptionnelle vous assigne, nous assigne des devoirs exceptionnels.
    M. Patrick Lemasle. Il ne sait pas ce que c'est !
    M. François Bayrou. Vous n'êtes pas seulement l'élu d'une majorité classique, camp contre camp, droite contre gauche. Vous êtes investi par une attente de la France qui a dépassé les clivages entre les camps pour exprimer l'urgence et la gravité de la situation du pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

    M. Jean-Pierre Blazy. On en est loin !
    M. François Bayrou. C'est pourquoi, monsieur le Premier ministre, au moment de dresser le bilan de votre première année de gouvernement, ...
    M. Christian Paul. Désastreux !
    M. François Bayrou. ... je vous redis ce que je vous disais il y a un an : vous devez répondre aux deux besoins de notre pays : réformer et rassembler.
    Réformer, d'abord. Bien entendu, cette motion de censure montre qu'une partie de l'opposition - le parti socialiste - croit se refaire une santé et prospérer sur le refus de la réforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Henri Emmanuelli. Conservateur !
    M. François Bayrou. Cette raison suffit, à elle seule, à expliquer qu'au-delà de notre groupe, la majorité de l'Assemblée et le pays la rejettent.
    M. Henri Emmanuelli. Faites un référendum !
    M. François Bayrou. Sur la réforme des retraites, comme l'ont rappelé tour à tour Jacques Delors, Michel Rocard et Jacques Attali (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains), on pouvait discuter tel ou tel aspect de la réforme ; je l'ai fait moi-même. Mais en arriver au refus, c'était se trouver en contradiction avec l'intérêt supérieur du pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement poplulaire.)

    Le dossier des retraites était si lourd de conséquences pour l'avenir qu'il obligeait à l'action, et je suis certain qu'il y a des millions de femmes et d'hommes - y compris de gauche - qui veulent que leur pays assume, les yeux ouverts, les changements nécessaires. Ma conviction est que tous les courants politiques sont coresponsables de l'avenir, et que l'opposition ne peut pas se réduire à dire aveuglément « non » quand la majorité est obligée de dire aveuglément « oui ». (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Henri Emmanuelli. Il a à moitié raison !
    M. François Bayrou. En particulier, il y a des millions de femmes et d'hommes qui pensent que le parti socialiste ne peut pas s'exonérer de la responsabilité qui est la sienne, lui qui a détenu le pouvoir en France pendant au moins quinze ans sur les vingt-cinq dernières années. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), en prenant à l'aveugle des décisions, comme celle des trente-cinq heures, qui ont si profondément déstabilisé le pays (Applaudissements sur les mêmes bancs),...
    M. Eric Besson. Vous ne les avez pas supprimées !
    M. François Bayrou. ... et en ne profitant pas des années de croissance pour faire les réformes nécessaires.
    Voilà pourquoi nous avons soutenu la réforme des retraites. Celle-ci n'est pas exactement celle que nous souhaitons. Nous l'aurions voulue universelle, c'est-à-dire englobant aussi les régimes qu'on appelle spéciaux. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Nous l'aurions aimée plus souple, ouvrant la voie à une retraite à la carte, par points, créant de vrais droits, prenant en compte la pénibilité et permettant le rachat d'années sans décote, ou leur abondement par l'Etat, et gérée en pleine responsabilité par les partenaires sociaux. Nous pensions que la France était prête à accepter cette grande réforme, y compris par référendum,...
    M. Henri Emmanuelli. Voilà !
    M. François Bayrou. ... puisque la justice en aurait été la clé de voûte. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Henri Emmanuelli. Alors ?
    M. François Bayrou. Peut-être un jour, plus tôt qu'on ne le pense, serons-nous obligés de reprendre ce chantier, dont le financement repose sur l'hypothèse audacieuse de la disparition du chômage à moyen terme. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Mais, telle quelle, c'est une réforme qui s'efforce de faire face aux graves menaces si longtemps éludées. C'est pourquoi nous avons décidé de la soutenir, telle qu'elle a été menée, avec brio et constance, par le ministre des affaires sociales. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Une raison encore nous a guidés : à l'occasion de cette réforme, des syndicats se sont engagés courageusement en donnant leur accord à une démarche risquée pour eux, mais nécessaire au bien public.
    M. Jean-Pierre Abelin. Très bien !
    M. François Bayrou. Cela est précieux, car l'exercice de la coresponsabilité entre pouvoirs publics et partenaires sociaux est un des piliers de la démocratie dans laquelle nous voulons vivre.
    Dans quelques heures, cette réforme sera votée.
    M. Maxime Gremetz. Oh non ...
    M. Henri Emmanuelli. Et le référendum, alors ?
    M. François Bayrou. Je me réjouis que le président de l'Assemblée nationale ait que le débat se déroule jusqu'à son terme en respectant tous les droits de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est ainsi qu'une démocratie avance, et c'est ainsi qu'une démocratie mûrit.
    M. Jean-Pierre Brard. Le président boit du petit-lait !
    M. François Bayrou. Au-delà des petites phrases, je suis sûr que nous pouvons convenir ensemble que le pluralisme, ce n'est pas un paradis, Dieu sait ! Ce n'est pas un enfer, et même pas un purgatoire : c'est la clé même de la démocratie, qui est notre bien commun. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Les réformes que nous devrons faire, nous les réussirons si tous les Français au fond d'eux-mêmes les reconnaissent comme nécessaires et justes. Cela obligera à des efforts, peut-être même à des changements de méthode ou de notre manière habituelle de penser, de la part de tous, et peut-être aussi du Gouvernement.
    Je voudrais prendre dans l'actualité trois exemples de ce changement de méthode nécessaire : le budget, d'abord ; les intermittents du spectacle, ensuite ; l'éducation nationale, enfin.
    La France se trouve dans une situation budgétaire noire.
    M. Henri Emmanuelli. « Noirissime ! »
    M. François Bayrou. Le rapporteur général du budget au Sénat, M. Marini, annonce un déficit de 4 %. Et 3 %, 4 % pour nos concitoyens, au fond, cela paraît peu de chose. C'est une manière bienveillante de traiter de ce mal chronique. Mais il faut dire et rappeler que ces 3 ou 4 % de la totalité de la production nationale représentent, en réalité, un déficit de près de 20 % de nos budgets publics. Cela veut dire que nous dépensons tous les mois, tous les ans, quelque 20 % de plus que ce qui est prélevé sur nos compatriotes. Or, il n'est pas de famille, il n'est pas d'entreprise qui puisse durablement et sur le long terme envisager un tel déséquilibre. Il est irresponsable de reporter sur nos enfants la charge des dépenses que nous faisons, tant qu'elles sont des dépenses de train de vie. Que l'on partage l'investissement avec les générations futures, c'est bien et c'est normal. Mais que, par exemple, nous reportions d'un coeur léger les dépenses de santé de nos générations sur les cotisations futures, ce n'est pas responsable !
    M. Henri Emmanuelli. Il a raison !
    M. François Bayrou. La situation de nos dépenses publiques exige une politique de vérité.
    Monsieur le Premier ministre, l'année dernière, vous nous avez annoncé 2,5 % de croissance. L'UDF vous a dit que ce n'était pas réaliste.
    M. Henri Emmanuelli. Il est comme ça, Raffarin !
    M. François Bayrou. Votre réponse a été de dire qu'il s'agissait d'un choix volontariste pour entraîner la croissance. Le résultat est là : nous l'avons sous les yeux, et il doit conduire à des remises en cause.
    Nous vous le redisons, monsieur le Premier ministre, présentez plusieurs hypothèses de croissance !
    M. Nicolas Perruchot. Absolument !
    M. François Bayrou. N'hésitez pas à regarder en face la situation qui peut être la nôtre.
    M. Maxime Gremetz. Il la regarde de travers !
    M. François Bayrou. Un peuple choisit mieux son chemin s'il a les yeux ouverts. Choisissons nos priorités.
    Dans la situation catastrophique de nos finances publiques, on ne peut pas tailler dans les budgets essentiels et continuer à parler de baisse d'impôt comme si nous étions en excédent ou proches de l'équilibre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.) D'abord parce que ce n'est pas réaliste et que cette promesse ne sera pas respectée. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Ensuite, lorsqu'on demande des sacrifices à tout le monde, la justice doit prévaloir. Ceux qui ont une situation plus aisée ne doivent pas apparaître comme plus favorisés. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Pierre Brard. Quel gauchiste !
    M. Henri Emmanuelli. Proche du purgatoire !
    M. François Bayrou. Sans compter, pour entrer un instant dans la discussion purement économique, que, dans un pays qui a un taux d'épargne aussi élevé que la France, il est douteux que les baisses d'impôt supplémentaires en période d'incertitude favorisent directement la consommation. C'est le sentiment de sécurité et le taux du crédit qui joueront ce rôle.
    Sentiment de justice aussi à propos des intermittents du spectacle. Il n'est pas douteux qu'il fallait une réforme mais tous ceux qui se sont intéressés à cette question savent que le déséquilibre de ce régime ne provient pas seulement, ni même principalement, de la précarité et du nombre des comédiens, musiciens, techniciens du spectacle. Leur précarité est pour ainsi dire naturelle, consubstantielle à l'activité de création. On ne peut pas jouer tous les jours surtout quand on est un débutant, surtout quand on innove.
    M. Henri Emmanuelli. Raffarin est un débutant !
    M. François Bayrou. Une grande partie du déséquilibre provient des abus dont de grandes entreprises ont fait leur pratique habituelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) De grandes entreprises de télévision ou de production, et même des entreprises publiques (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste), ont pris l'habitude depuis des décennies de payer comme intermittents des techniciens, des présentateurs, des réalisateurs qui sont en réalité employés à temps plein ou sur le long terme.
    M. Maurice Leroy. Tout à fait !
    M. François Bayrou. Simplement, elles trouvent plus avantageux de faire payer par la collectivité les jours de repos ou les congés qui sont assumés dans le contrat de travail par tous les autres employeurs de France. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Asensi. C'est honteux !
    M. Jean-Christophe Lagarde. C'est malheureux !
    M. François Bayrou. Eh bien, il n'est pas juste de faire supporter par les plus précaires ou les plus fragiles de ceux qui participent à la culture du spectacle les abus tolérés depuis trop longtemps de la part de sociétés qui devraient donner l'exemple.
    M. Maurice Leroy. Absolument !
    M. François Bayrou. Le régime des intermittents, c'est probablement l'aide la plus efficace que l'on puisse apporter au monde de la culture. Ce régime doit être assaini, c'est vrai, mais il doit l'être en traitant également les abus de toute nature, les abus des plus gros étant plus choquants que ceux des plus faibles. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Réformer et rassembler, rassembler pour réformer, respecter les différences de sensibilité,...
    M. Pascal Terrasse. Sans sectarisme !
    M. François Bayrou. ... c'est vital pour l'éducation nationale. Nous avons connu une crise inattendue à l'éducation nationale. Certains ont cru que cette crise était accidentelle, qu'elle venait seulement de la concomitance de calendriers inopportuns. Je n'en crois rien. Je pense au contraire que c'est une crise profonde.
    M. Alain Néri. Dites-le à M. Ferry !
    M. François Bayrou. Il y a certes des racines conjoncturelles immédiates à cet épisode (« Ferry ! » sur les bancs du groupe socialiste), la première étant le choix que le Gouvernement a fait de ne pas inclure d'emblée l'éducation et la recherche au nombre de ses priorités. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    M. Patrick Lemasle. Bien sûr !
    M. François Bayrou. Je vois bien pourquoi : l'éducation nationale représente la moitié de la fonction publique et le premier budget de l'Etat, et naturellement, chaque fois qu'on veut faire des économies, c'est à elle qu'on songe. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Goulard. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre !
    M. François Bayrou. D'ailleurs, les mises en cause ne manquent pas, provenant d'un bord comme de l'autre, y compris dans la bouche des hommes politiques. Ainsi les uns parlent-ils de « mammouth », les autres d'« armée rouge »... (« L'armée rouge, c'est fini ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Parmi nos concitoyens, beaucoup s'exaspèrent aussi de ses échecs ou de ses grèves.
    Mais je crois que chaque fois qu'un gouvernement omet de classer l'éducation et la recherche au nombre de ses priorités, il commet une erreur.
    M. Pascal Terrasse. Eh oui ! Voilà la vérité !
    M. François Bayrou. Tout commence dans l'éducation et dans la recherche, aussi bien la compétitivité de la nation que la sécurité de nos cités. Si les collèges, ou même les cours de récréation des écoles primaires, sont déstabilisés, si la violence y règne, qui peut croire que les cités seront sécurisées, même si le ministre de l'intérieur recrutait des milliers de policiers supplémentaires ? (« Il n'est pas là ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Henri Emmanuelli. Il est à Avignon !
    M. François Bayrou. Plus encore, c'est la France et c'est la République qui commencent à l'école. Il y a un pacte séculaire entre la République et son école. Nous sommes, et c'est ainsi, le seul pays qui ait conçu le projet de former une nation de citoyens, une nation unique et homogène, à partir de la diversité très grande de nos origines et de nos situations sociales. Cela, l'école le fait. Elle le fait imparfaitement, elle le fait difficilement, mais elle le fait. Pour nous qui affichons la devise « Liberté, égalité, fraternité » au fronton de nos monuments publics, s'il y a une image de ce que veulent dire les mots « liberté » - liberté de l'esprit -, « égalité » - égalité des chances -, « fraternité », c'est bien à l'école qu'elle se réalise.
    M. Patrick Lemasle. Ecoutez donc, monsieur Raffarin !
    M. François Bayrou. C'est pourquoi la question de la décentralisation ne peut pas être, dans l'éducation nationale, une question anodine : c'est le principe même de l'école républicaine, de l'école de la nation, qui se trouve interrogé, et pour certains heurté, par la crainte des inégalités qui ne manqueraient pas de naître, en termes de moyens, entre les plus riches et les plus pauvres. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Enfin, au-delà de ces deux questions, la priorité est le caractère national de l'éducation. Les valeurs que l'on demande à l'école de transmettre, beaucoup d'enseignants, en particulier parmi les plus jeunes, ont l'impression que ce ne sont plus les valeurs de la société et du monde qui entourent l'école.
    L'école, c'est ou ce devrait être la loi du plus juste, ou du plus vrai. L'école, c'est ou ce devrait être l'émancipation par le savoir.
    Un député du groupe socialiste. Il fallait le faire !
    M. François Bayrou. Le monde comme il va, c'est la loi du plus fort, et le plus fort, c'est souvent aussi le plus riche. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Comment ne pas être saisi quand on lit, presque chaque jour, les dizaines de millions de francs, les dizaines de millions d'euros qui sanctionnent tel transfert, telle influence, ou même, s'agissant de dirigeants de grandes entreprises, tel échec retentissant suivi d'un départ.
    Mme Sylvia Bassot. Démago !
    M. François Bayrou. Ce n'est pas une question pour les gauchistes, comme on dit en voyant fleurir les pancartes d'ATTAC ou de tel autre mouvement contestataire dans les manifestations. C'est une question pour chacun d'entre nous ! C'est donc forcément une question pour chacun des enseignants français que cette question des valeurs.
    Et donc, je ne suis pas favorable à ce que l'on méprise ou que l'on stigmatise les questions posées par beaucoup d'enseignants autour de l'éducation nationale.
    M. Jean Lassalle. Très bien !
    M. François Bayrou. En revanche, cela ne doit pas nous détourner de poser avec constance, avec courage, toutes les questions liées à la manière dont l'école sert réellement l'égalité des chances, la lecture, la violence, la langue, la transmission du savoir, ce bagage qui n'alourdit pas mais qui libère, au contraire. Et si l'on quitte les a priori - ce que le Gouvernement fera, j'espère -, alors on verra quelle capacité d'énergie positive recèle l'éducation nationale de la France.
    Monsieur le Premier ministre, la question, c'est la réforme et le projet. Bien sûr, il ne s'agit pas de vous arrêter sur le chemin de la réforme. La France n'a pas besoin de moins de réformes, elle a besoin de plus de réformes.
    M. Alain Néri. De mieux de réforme !
    M. François Bayrou. Mais la condition de la réforme, c'est qu'on dise la vérité et qu'on garantisse la justice. Si c'est la vérité qui s'exprime, la vérité brute de décoffrage, sans trop de précautions et sans trop de formules, si c'est la justice qui dirige nos choix, sans crainte et sans privilèges, et si le respect préside à notre manière d'être, alors nous montrerons que la France, comme un grand pays, les yeux ouverts, peut se rassembler pour assumer les choix de son avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet. (De nombreux députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et quittent l'hémicycle. - Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    Chers collègues, si vous n'avez pas la patience d'écouter (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste), ayez au moins la courtoisie de partir discrètement.
    Monsieur Bocquet, vous avez la parole.
    M. Alain Bocquet. Monsieur le Premier ministre, depuis un an la droite que vous dirigez tient seule les rênes du pouvoir. Et on peut dire que vous avez mis le turbo pour accélérer la déstructuration en profondeur de la société française, afin de la mettre au service des exigences du capital financier. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Pierre Lellouche. N'oubliez pas M. Seillière !
    M. Michel Herbillon. Ni Mme Bettencourt !
    M. Alain Bocquet. Je tiens à préciser à chacun d'entre vous que cela ne sera pas un discours sur la méthode, mais un discours de fond. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Ecoutez-moi, s'il vous plaît ! vous répliquerez tout à l'heure. C'est le débat démocratique.
    Le projet de réforme des retraites témoigne parfaitement de cette volonté. Annoncée par le candidat Chirac, elle fait partie du contrat de refondation sociale que vous avez conclu avec le MEDEF (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) : allongement de la durée du travail, augmentation des cotisations pour les seuls salariés, diminution du montant des retraites et introduction de la capitalisation. Evidemment, pas question pour vous de toucher aux revenus financiers.
    Cet objectif est conforme à la décision des Quinze, libéralisant dans toute l'Europe les fonds de pension privés. Au passage, il n'est pas acceptable de se faire dicter de l'étranger la politique sociale qu'entend mener notre pays.
    M. Robert Lamy. C'est vous qui dites ça !
    M. Alain Bocquet. Mais les retraites ne sont que le premier volet du bouleversement complet de la protection sociale souhaitée par votre gouvernement. La réforme en préparation de l'assurance maladie a pour but, quant à elle, de casser la solidarité de tous en matière de santé et de transférer les énormes masses financières de la sécurité sociale vers les compagnies d'assurance qui guettent depuis si longtemps et avec avidité cette manne considérable.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est une obsession !
    M. Alain Bocquet. Malgré une débauche de propagande mensongère de votre part, à grands coups d'encarts publicitaires dans les journaux, de lettres et dépliants que vous adressez à chaque famille française et d'une utilisation abusive des moyens de l'Etat - y compris les hauts fonctionnaires -, votre réforme est rejetée majoritairement par les Françaises et les Français.
    M. Maxime Gremetz. C'est vrai !
    M. Alain Bocquet. En témoignent les actions revendicatives, les grandes mobilisations populaires, les enquêtes d'opinion, qui indiquent que 61 % des salariés du privé et 76 % du public ne veulent pas de votre réforme.
    M. Maxime Gremetz. Eh oui !
    M. Alain Bocquet. A l'évidence, votre politique ne passe pas et notre peuple manifeste une forte résistance à endosser le costume ultra-libéral que vous voulez lui imposer. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Pierre Lellouche. N'exagérons rien !
    M. Alain Bocquet. Ne vous y trompez pas, monsieur le Premier ministre, votre majorité UMP, ici, est un trompe-l'oeil. Vous avez trop tendance à confondre les 82 % de voix obtenues par Jacques Chirac au second tour de l'élection présidentielle, et les 19 % du premier tour, qui, je le rappelle, représentaient 13 % des inscrits. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Martine David. Très juste !
    M. Robert Lamy. Et les législatives ?
    M. Alain Bocquet. Serait-ce parce que vous êtes minoritaires dans le pays sur votre projet de retraites que vous vous êtes rangés sans véritables négociations derrière un accord avec une partie minoritaire des partenaires sociaux ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cela semble être un penchant naturel chez vous car vous avez réédité la même démarche avec les intermittents du spectacle. Je tiens d'ailleurs à saluer leur combat légitime et les assurer du soutien du groupe communiste et républicain. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Démago !
    M. Alain Bocquet. Soyez persuadés que la lutte va se poursuivre pour exiger que cette mauvaise réforme, dont vos majorités, celle de l'Assemblée nationale, particulièrement silencieuse, et celle du Sénat, devront assumer la paternité à vos côtés, n'entre pas en application. Les députés communistes et républicains, qui ont fait la démonstration que d'autres solutions existent pour les retraites (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), continueront d'apporter leur soutien au mouvement social. Les mobilisations des derniers mois attestent d'abord de difficultés aggravées pour des millions de Françaises et de Français et de leur très forte inquiétude pour l'avenir que vous leur préparez. La mal-vie, le mal-être et l'angoisse du lendemain suintent de tous les pores de notre société.
    Mais de telles mobilisations révèlent aussi le rejet profond de vos méthodes et de vos objectifs. Il faut dire que les raisons ne manquent pas. C'est vrai de l'emploi, de la remise en cause des 35 heures et de l'annulation des dispositions légales contre les licenciements boursiers. C'est vrai de la reprise du chômage et de l'extension de la précarité. L'annonce de plans sociaux défraie systématiquement la chronique. La presse économique a indiqué ce matin que, jamais en dix ans, les Français n'ont été aussi pessimistes sur la situation de l'emploi. Les petites entreprises et l'artisanat ne sont pas les derniers à souffrir des effets d'une économie en recul. Vos révisions successives à la baisse du taux de croissance, passé de 2,5 % voilà quelques mois à 1,3 % en mars dernier puis à 0,8 % aujourd'hui, ne sont pas de nature à rassurer. L'atonie de la croissance se traduira au bas mot par une perte de plus de 5 milliards d'euros de recettes fiscales.
    Qu'attendez-vous, monsieur le Premier ministre, pour donner au pays les moyens d'une relance de la consommation des ménages, moteur essentiel de la dynamisation de l'économie et de l'activité des entreprises ? Qu'attendez-vous pour favoriser l'augmentation du pouvoir d'achat des familles, par la revalorisation des salaires, des pensions de retraites et des minima sociaux ? Vous refusez ce choix. Au contraire, encouragée et étendue par vos soins, la poursuite des politiques d'exonération des charges et des cotisations patronales ne fait que grossir la spéculation financière. Elle accroît dans les bilans des sociétés la part des bénéfices boursiers au détriment de la production de biens et de services et affaiblit encore l'économie française, désormais constamment au bord de la récession.
    Alors que l'emploi et la formation des jeunes représentent un enjeu d'avenir, vous limitez l'intervention de l'Etat à l'invention de contrats jeunes en entreprise ou à la création très contestée d'un RMA - un revenu minimum d'activité -, offrant ainsi une main-d'oeuvre quasi gratuite au patronat.
    Et ce n'est pas en accélérant le démantèlement du secteur public que vous répondrez aux attentes et ferez face aux enjeux d'aujourd'hui. Certes, vous recherchez de l'argent frais. Mais la fuite en avant dans la privatisation d'entreprises comme EDF-GDF, les réorientations de l'activité et de la présence de La Poste, en disent long sur le monde dans lequel vous vous apprêtez à faire basculer la société française, ses salariés du public et du privé, et toute sa population.
    Pour notre part, nous continuerons à défendre le secteur public et à vouloir étendre sa responsabilité à de nouveaux domaines comme l'eau, l'environnement ou le crédit. De votre côté, vous liquidez le rôle et les missions de la Banque de France au mépris de la lutte de milliers de salariés et des protestations des élus locaux, préférant préserver les prérogatives et les décisions sans appel de la Banque centrale européenne.
    La motion de censure qui vous est opposée conduit à l'examen du bilan global de l'action du Gouvernement, auquel les politiques sociales mises en oeuvre ne sauraient échapper. Au regard des millions de nos concitoyens vivant en dessous du seuil de pauvreté et de tous ceux qui subissent l'insuffisance de leur pouvoir d'achat, les exonérations supplémentaires octroyées aux redevables de l'impôt sur la fortune, à hauteur de 500 millions d'euros, ou le montant moyen de rémunération des grands patrons français, qui avec 1,85 million d'euros par an, sont les mieux payés d'Europe, constituent une insulte pour le monde du travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Le désengagement de l'Etat dans le financement de l'allocation personnalisée d'autonomie va entraîner des augmentations considérables de l'imposition locale. Les atteintes à la couverture médicale universelle ou à l'aide médicale de l'Etat, le déremboursement de plus de 600 médicaments, l'enfoncement du secteur public hospitalier conduisent de nombreux établissements à une situation de pénurie et même, en cette période estivale, aux limites de la rupture. A tout cela vient s'ajouter le blocage, faute de crédits d'Etat, d'outils décisifs pour l'insertion sociale et la lutte contre l'exclusion. Et cette liste est loin d'être exhaustive. L'ensemble de vos décisions ou projets aggraveront, que vous le vouliez ou non, la fracture sociale dénoncée hier par le Président de la République le temps d'une élection.
    Du régime des retraites à la réforme de la protection sociale, de la dérive de la santé publique au déficit des politiques sectorielles touchant les personnes âgées ou handicapées, la petite enfance ou la famille, rien n'échappe au désengagement financier de l'Etat UMP. Entamé dans la loi de finances pour 2003, contre laquelle nous avons voté, il s'est poursuivi ces derniers mois avec des coupes budgétaires et le gel de crédits ministériels. Je le rappelle pour mémoire que, après avoir reporté sept milliards d'euros de crédits d'Etat en 2002, vous avez gelé, en 2003, pour quatre milliards de dépenses, dont au moins 1,4 milliard ont été purement et simplement annulés. C'est du jamais vu !
    Vous voulez réduire encore les moyens de l'éducation et de la santé : votre politique menace de se traduire directement par moins de personnels soignants et paramédicaux, moins d'intervenants au service de la réussite des élèves et de la lutte contre les inégalités scolaires. On pourrait, malheureusement, multiplier presque à l'infini ces exemples et ces interrogations.
    En soumettant les choix de la nation aux impératifs de la Commission de Bruxelles et de la Banque centrale européenne, vous accentuez la crise de la société française et continuez d'ajouter aux difficultés qui frappent nos concitoyens. C'est pourquoi, d'ores et déjà, et alors que les éléments connus des conditions d'élaboration de la loi de finances pour 2004 font redouter un tour de vis supplémentaire et une austérité aggravée pour notre peuple, nous vous appelons solennellement à mettre fin à cette spirale de déclin et à redéfinir les priorités dans les politiques à mettre en oeuvre.
    Ces coupes budgétaires ne traduisent pas la volonté de la France. Elles ne sont que l'expression de la volonté d'une France libérale, et même ultra-libérale, celle que représente et défend le baron Ernest-Antoine Seillière (« Oui, parfaitement ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains - « Enfin, le voilà ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), qui après avoir félicité le Gouvernement pour avoir sifflé la fin de la récréation, vous pressait hier encore, dans un journal du soir, d'aller au plus vite et de frapper plus fort. De même, il ne manquera pas, demain, de vous féliciter de vouloir alléger encore l'impôt sur les grandes fortunes ou de préserver le patrimoine financier de l'entreprise en aménageant l'impôt sur les plus-values et la taxe professionnelle, sans que l'utilité sociale de ces largesses soit publiquement contrôlée.
    M. Pierre Cardo. C'est bien connu, l'entreprise ne sert à rien !
    M. Alain Bocquet. Vous prétendez vouloir baisser les impôts. C'est une vaste supercherie qui ne bénéficiera qu'aux riches. Avec le transfert de charges sur les collectivités, les ménages paieront 1,5 milliard d'euros de plus pour la taxe d'habitation. Après l'augmentation de 2,1 % en 2002, 2003 verra les taux de la fiscalité locale augmenter encore de 2,2 %. Du jamais vu depuis 1995 !
    M. Maxime Gremetz. Scandaleux !
    M. Alain Bocquet. Les vrais coûts à la charge de la société, ce ne sont pas les dépenses sociales, mais les coûts financiers. Dans un pays où la croissance risque d'être nulle, où la paupérisation s'étend et où vous demandez au monde du travail de se serrer encore plus la ceinture, comment accepter que les actionnaires exigent encore 15 % de rentabilité ?
    Le partage de la valeur ajoutée a été profondément modifié ces dernières années dans notre pays. En 1982, 69 % des richesses produites étaient consacrés aux salaires, pensions et cotisations, contre 31 % aux profits. En 2002, le rapport est passé à 58 % contre 42 %.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Et les investissements ?
    M. Alain Bocquet. La première conséquence est l'amputation des ressources du financement des retraites, à hauteur de 150 milliards par an, preuve supplémentaire de la nécessité de taxer les revenus financiers.
    M. Maxime Gremetz. Tout à fait !
    M. Alain Bocquet. Quelques députés audacieux de votre majorité l'ont d'ailleurs confirmé en avançant l'idée d'augmenter l'impôt sur les sociétés de 1 % pour financer les retraites. Ils ont vite été rappelés à l'ordre.
    Baisser les dividendes excessifs et donc la charge financière des entreprises,...
    M. Lucien Degauchy. Trouvez autre chose !
    M. Alain Bocquet. ... réorienter la fiscalité française ; augmenter significativement l'impôt sur la fortune ; voilà, parmi d'autres, quelques-unes des pistes de travail qu'une politique nationale tournée vers les besoins des Françaises et des Français aurait à coeur d'explorer et de traduire en actes, une politique en résonance profonde avec les revendications majeures portées par le mouvement altermondialiste, présent à Evian voilà un mois pour contester les orientations du sommet du G 8. Le constat établi alors d'une France rentrée dans le rang dispense de tout long commentaire.
    Nous avons salué en son temps la position courageuse et autonome de la France en faveur de la paix en Irak. Malheureusement, nous constatons aujourd'hui que le contrôle de l'économie et de l'avenir de ce pays a bel et bien été remis entre les mains des forces d'occupation. Cela en dit long sur la réalité de l'ordre mondial - auquel au fond vous souscrivez - et sur l'attachement de votre Gouvernement au développement de rapports Nord-Sud équitables, à la construction de coopérations mutuellement avantageuses entre les nations et à l'émancipation des peuples.
    Les mêmes orientations qui vous conduisent à un alignement sans avenir se retrouvent dans l'impulsion donnée à la construction de l'Europe et à son élargissement. On le voit avec votre soutien au démantèlement de la politique agricole commune, qui aura des conséquences dramatiques pour l'agriculture française,...
    M. André Chassaigne. Tout à fait !
    M. Alain Bocquet. ... ou avec l'essentiel des principes inscrits au coeur du projet de constitution européenne. Accouché par un cénacle de technocrates et tout entier assujetti aux choix d'une union ultralibérale, ce projet qui bénéficie de l'aval de votre gouvernement limite considérablement les choix démocratiques sur des enjeux essentiels. C'est pourquoi nous soutiendrons, là encore, le principe d'une irruption citoyenne, indispensable pour rompre avec l'orientation actuelle donnée à ce texte. Et c'est précisément par là que je conclurai cette intervention. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Je le ferai d'abord en référence à la décentralisation. Si celle-ci peut constituer un moyen irremplaçable de rapprochement du citoyen et des pouvoirs de décision, la définition que vous en donnez ne vise au contraire qu'à installer la concurrence entre les régions, renvoyer les coûts du social sur les collectivités locales et soumettre le développement économique au bon vouloir de la Commission de Bruxelles. En outre, elle porte atteinte à la citoyenneté, à travers une réforme du mode de scrutin qui conduit tout droit à la bipolarisation. Ainsi les alternances de pouvoir se succéderont sans que jamais les choix du capitalisme en crise ne soient remis en cause. Cette décentralisation viciée ne fait pas de l'Etat le garant de l'unité nationale, mais bien l'auxiliaire d'une Europe au service du libéralisme sans rivage.
    L'irruption citoyenne constitue donc bien la clé de la situation actuelle et le fait dominant de ces derniers mois. Force est de constater d'ailleurs que cette éclosion, rendue indispensable par l'accentuation des aspects les plus dangereux de vos politiques, s'accompagne d'un renforcement de l'autoritarisme et de la répression. Je ne reviendrai pas sur quelques-unes des lois votées dans l'urgence depuis un an pour accentuer votre démarche sécuritaire, et dont les effets sont notamment stigmatisés par le rapport 2003 d'Amnesty international, par le Syndicat de la magistrature...
    M. Arnaud Lepercq. Ce sont vos références !
    M. Alain Bocquet. ... ou par la Commission nationale consultative des droits de l'homme, à propos du droit d'asile.
    En dénonçant voici quelques mois votre déclaration de guerre aux pauvres (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), le tissu associatif avait déjà éclairé d'un jour cru vos intentions et vos méthodes.
    Mais les syndicalistes et les grévistes sanctionnés lors de ces dernières semaines ou les manifestants matraqués et condamnés donnent légitimement à penser que, faute de convaincre, le Gouvernement ne redoute pas de devoir frapper ! De José Bové, l'embastillé de Villeneuve-lès-Maguelonne (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), à Alain Hébert, le condamné de Cherbourg, malgré l'absence de preuve, en passant par les quatre travailleurs de l'imprimerie d'Armentières, arrêtés ces derniers jours et menottés devant leurs enfants, le tour de France des libertés bafouées prend une tournure qui ne peut rester ignorée, d'autant qu'il s'accompagne du limogeage d'un préfet en Haute-Corse.
    M. Maxime Gremetz. Oui !
    M. Robert Lamy. C'est vous qui dites ça !
    M. Alain Bocquet. Votre volonté de remettre en cause le droit de grève, au prétexte fallacieux d'un service minimum, s'inscrit dans la même veine.
    Les propos inacceptables que vous avez eus hier à Strasbourg, monsieur le Premier ministre, révèlent, quant au fond, cet autoritarisme qui s'installe peu à peu insidieusement sous votre férule. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. Jean-Yves Chamard. N'importe quoi !
    M. Alain Bocquet. Voilà qui ne laisse pas de nous inquiéter et nous renvoie à des jours sombres que l'on croyait révolus. Vous ne supportez aucune contestation de votre politique néfaste et rétrograde.
    M. Arnaud Lepercq. Qu'est-ce qu'on fait, en ce moment ?
    M. Alain Bocquet. Le masque s'est vite déchiré : le Raffarin câlin et patelin a vite laissé place au Raffarin autoritaire et méprisant. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est une injure ! Des excuses ! Des excuses !
    M. le président. S'il vous plaît !
    Continuez, monsieur Bocquet !
    M. Alain Bocquet. Parce que « câlin », c'est injurieux ?
    Le peuple de France, héritier du siècle des Lumières, de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et des luttes pour les libertés ne se laissera pas impressionner. Il ne laissera pas porter atteinte aux valeurs démocratiques de notre pays.
    M. André Gerin. Exactement !
    M. Pierre Cardo. Vous ne savez pas de quoi vous parlez !
    M. Alain Bocquet. Vous comprendrez, monsieur le Premier ministre, que censurer votre politique constituera, pour les députés communistes et républicains, un moyen immédiat de partager la constestation forte qui monte dans le pays contre vos choix de récession et de contribuer au rassemblement de notre peuple pour ouvrir une tout autre perspective vers une France moderne, plus prospère, plus généreuse et plus fraternelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. Jean Marsaudon. C'est un communiste qui dit cela !
    M. Lucien Degauchy. Charlatan !
    M. le président. La parole est à M. Jacques Barrot. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jacques Barrot. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, le groupe socialiste nous donne paradoxalement l'heureuse occasion d'exprimer notre approbation à l'ensemble de l'action que vous avez entreprise depuis quatorze mois. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « Amen ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Je suis heureux, au nom du groupe UMP tout entier, de vous dire d'emblée que cette confiance nous entendons vous l'accorder sans réserve...
    Un député du groupe socialiste. Godillots !
    M. Jacques Barrot. ... pour la poursuite d'une action que beaucoup de Français approuvent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Pierre Brard. Ce n'est plus de l'amour, mais de l'aveuglement !
    M. Jacques Barrot. Ils ont bien compris,...
    M. Maxime Gremetz. Non !
    M. Jacques Barrot. ... au cours de ce difficile débat sur la sauvegarde de nos régimes de retraite, où était le courage, où était le souci d'épargner des efforts excessifs à la jeune génération, où était la recherche d'une plus grande justice entre tous les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Monsieur le président en sait quelque chose : nous en arrivons, monsieur le Premier ministre, au terme d'un long débat ...
    M. Maxime Gremetz. Pas si long que ça !
    M. Jacques Barrot. ... où l'UMP s'est efforcée de dépasser un climat d'affrontement pour coopérer efficacement à la réforme. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Richard Mallié. Exactement !
    M. Maxime Gremetz. Et quelle réforme !
    M. Jacques Barrot. Nous avons coopéré à cette réforme, appréciant au passage l'investissement personnel de vos ministres François Fillon et Jean-Paul Delevoye. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Maxime Gremetz. Il faut leur accorder la médaille du mérite silencieux !
    M. Jacques Barrot. Et nous sommes fiers d'avoir franchi avec vous cette première étape dans l'adaptation de la France, pour la rendre à la fois plus prospère et plus juste.
    M. Maxime Gremetz. Attendez ! Ce n'est pas fini, monsieur Barrot ! Vous auriez pu le lui dire, monsieur le président !
    M. Jacques Barrot. Mais, avant de revenir sur les résultats de l'action gouvernementale, je voudrais m'interroger sur la crédibilité du parti socialiste...
    M. Jean-Marc Ayrault. Oh !
    M. Jacques Barrot. ... qui tente de vous censurer pour, selon certains de ses alliés communistes, je cite, « tenter de se rattraper ». (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    La longueur que vous avez imposée aux débats ne suffit en effet pas pour faire illusion. (« Eh non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Vous n'étiez même pas là !
    M. Jacques Barrot. A aucun moment, vous n'avez esquissé une véritable alternative au projet gouvernemental.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est faux !
    M. Jacques Barrot. Il est vrai que cinq années de la gauche plurielle n'ont pas permis à la France de prendre les mesures dont beaucoup avaient démontré la nécessité. (« Il a raison ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Pourquoi le parti socialiste français n'a-t-il pas pris exemple sur les autres partis sociaux démocrates d'Europe (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), qui, face à ce défi démographique, économique et social, ont choisi le courage de rallier le camp de la réforme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Au lieu de cela, prétextant des difficultés rencontrées en 1995, référence beaucoup trop répétée pour ne pas devenir un alibi (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), le gouvernement précédent est resté cinq ans l'arme au pied.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Mensonges !
    M. Jacques Barrot. Et pourtant, les avertissements n'avaient pas manqué - le Livre blanc, le rapport Charpin, les travaux du COR -, et Lionel Jospin lui-même n'avait-il pas proposé le plan d'une réforme où l'on retrouvait déjà un certain nombre de préconisations aujourd'hui mises en oeuvre ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. François Hollande. C'est faux !
    M. Jacques Barrot. Tout dernièrement encore, les conseils n'ont pas manqué, et certains proches du parti socialiste s'interrogeaient.
    Tout à l'heure, en écoutant François Hollande faire un amalgame étonnant de tous les mécontentements dans un bric-à-brac d'une agressivité incroyable (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste), je pensais à ces lignes qui ont été écrites par des sympathisants de la gauche : l'unité retrouvée du parti se serait-elle faite aux frais du bon sens et du rapport adulte à la réalité que l'on attend d'un parti de gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Patrick Lemasle. Baratineur !
    M. Jacques Barrot. Il est vrai qu'en matière de crédibilité il faut aussi pouvoir faire mention d'une action efficace ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Vous avez donc connu quatre années de croissance inégalée depuis vingt ans en Europe, mais qu'en avez-vous fait ? (« Rien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Hervé Novelli. Zéro !
    M. Jacques Barrot. Pouvez-vous nier que la France aurait été aujourd'hui mieux armée si des efforts avaient été consentis au moment où la croissance facilitait ces efforts ?
    M. Pascal Clément. Evidemment !
    M. Jacques Barrot. Que la traversée des périodes difficiles que connaît aujourd'hui l'Europe serait plus facile si le déficit de 2002 ne s'était pas avéré supérieur à celui de 1997 (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), si la dette publique n'avait pas, entre-temps, augmenté de 150 milliards (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), si, modernisant son Etat à l'image de ses partenaires européens, la France n'avait pas misé sur une augmentation systématique des postes de la fonction publique, là où il fallait réformer l'Etat et optimiser le travail de nos fonctionnaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Tout au long de l'année écoulée, nous avons aussi découvert le caractère contestable et coûteux de mesures phares qui ont surtout servi d'affichage.
    M. Gérard Charasse. Les « raffarinades » !
    M. Jacques Barrot. Tel a été le cas des 35 heures dans le secteur privé qui ont souvent signifié la stagnation du pouvoir d'achat et la détérioration des conditions de travail. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Dans le secteur public, notamment dans le secteur hospitalier, que de désorganisations et que de désarroi professionnel ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Nous mesurons mieux aussi le coût des emplois-jeunes, qui auraient été plus justifiés s'ils avaient été accompagnés d'un effort de formation. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Ridicule !
    M. Jacques Barrot. Il faudrait aussi évoquer le coût des mesures sociales, généreusement annoncées sans que les financements en soient assurés. (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Pascal Clément. Eh oui !
    M. Jacques Barrot. J'avais moi-même évoqué, en son temps, l'APA comme une prestation certes intéressante mais financée sur le sable. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    C'est ce qu'on appelle « faire du social à crédit ». (Nouvelles protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Claude Perez. N'importe quoi !
    M. Jacques Barrot. Comment ne pas évoquer le bilan très lourd de nos entreprises publiques ?
    M. Christian Bataille. Défendez plutôt la politique du Gouvernement ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jacques Barrot. La commission d'enquête sur les entreprises publiques doit permettre de préciser les carences de la stratégie industrielle suivie par l'Etat durant la précédente législature ! Certaines décisions concernant la stratégie de développement de ces entreprises publiques n'ont-elles pas été prises sous la presssion politique, sans prendre le temps d'analyser la portée des choix ? La commission nous le montrera. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    J'ai dressé l'inventaire de ces errements pour mieux souligner la faiblesse d'un parti socialiste...
    Mme Marylise Lebranchu. Il n'est pas question de nous, mais du Premier ministre !
    M. Jacques Barrot. ... qui, au lieu de s'interroger sur le désaveu des électeurs, sur les causes de son échec préfère encore, dans une fuite en avant, se réfugier dans une opposition systématique. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mieux vaudrait vous interroger sur les occasions manquées de la dernière législature. Pourquoi la réforme des retraites fut-elle repoussée ? Pourquoi la réforme de l'Etat fut-elle négligée ? Pourquoi la réforme du ministère des finances fut-elle ajournée ? Pourquoi la réforme de l'assurance maladie fut-elle abandonnée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Cela étant, monsieur le Premier ministre, nous sommes là aussi pour saluer les changements de cap bénéfiques que vous avez fait connaître à notre pays.
    M. Jean-Claude Perez. Ce n'est pas brillant !
    M. Jacques Barrot. La France a retrouvé les chemins de la sécurité et de la paix civile.
    M. Jean-Claude Perez. Vous allez dans le mur !
    M. Jacques Barrot. Le sentiment d'insécurité et celui d'impunité qui suscitait il y a plus d'un an l'exaspération des Français a été largement dissipé.
    M. Patrick Lemasle. Dans le mur !
    M. Jacques Barrot. Les comparaisons entre mai 2002 et mai 2003 parlent d'elles-mêmes. Les chiffres attestent de la baisse de la délinquance et de la criminalité, même si la vigilance doit demeurer.
    M. Alain Néri. Et l'augmentation du chômage ?
    M. Jacques Barrot. Monsieur le Premier ministre, nous avons tenu à donner à votre Gouvernement, à M. le ministre de l'intérieur et à M. le ministre de la justice les moyens nécessaires à la police, à la justice et aussi...
    M. Bernard Roman. A l'école !
    M. Jacques Barrot. ... à la modernisation du système pénitentiaire. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Cette politique ferme a su éviter les excès du sécuritaire en faisant preuve d'humanité : ...
    M. Christian Bataille. C'est un problème de foi !
    M. Jacques Barrot. ... assouplissement de la double peine que nous allons examiner, centres éducatifs fermés, pour éviter aux jeunes délinquants le drame de la prison (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), réflexion de l'un des nôtres sur les peines alternatives à la prison. La France est en train de sortir des impasses d'un Etat hypercentralisé et surréglementé...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Dans le mur !
    M. Jacques Barrot. La loi constitutionnelle garantit désormais l'autonomie financière des collectivités locales afin de rendre impossible une recentralisation larvée à partir de finances locales qui devenaient de plus en plus dépendantes des dotations de compensation incertaines attribuées par l'Etat.
    M. Pascal Clément. Très bien !
    M. Jacques Barrot. La décentralisation est inséparable de la réforme de l'Etat. Les ordonnances de simplification sont une première qu'il faudra poursuivre avec détermination.
    Monsieur le Premier ministre, il faut diffuser une culture d'évaluation et de résultat. Il faut introduire une vraie gestion des ressources humaines dans notre fonction publique.
    Enfin, tournant le dos à l'hyperréglementation, la France renoue avec le dialogue social. (Rires et vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mais oui ! Ainsi, nous n'avons pas cherché à remplacer la loi de modernisation sociale par une autre loi.
    M. André Gerin. N'importe quoi !
    M. Jacques Barrot. Nous avons demandé aux partenaires sociaux d'imaginer un vrai système de prévention des licenciements...
    M. André Gerin. Démagogie !
    M. Jacques Barrot. ... et de prévoir davantage d'équité pour les salariés des PME qui sont aujourd'hui défavorisés dans ce domaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Sur la formation tout au long de la vie, ce sont nos organisations syndicales qui travaillent, riches de toute leur connaissance du terrain. Voilà le dialogue social ! Il est en marche ; merci, monsieur le Premier ministre. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. André Gerin. N'importe quoi !
    M. André Chassaigne. Il a attaqué la descente aux enfers !
    M. Jacques Barrot. Je veux enfin, monsieur le Premier ministre, vous dire combien nous souhaitons vous accompagner dans les perspectives d'avenir. La France ne peut pas se contenter de vivre de ses acquis ; elle doit retrouver son dynamisme et il faut que notre économie retrouve toute la réactivité nécessaire. Cela passe par l'investissement et par l'augmentation du taux d'activité.
    M. Jean-Pierre Brard. Il sera damné. (Sourires.)
    M. Jacques Barrot. Sur l'investissement, je tiens à faire justice d'une critique souvent caricaturale : la baisse des impôts ne s'est pas inscrite dans une idéologie ou dans un calcul électoraliste. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. André Gerin. Tu parles !
    M. Jacques Barrot. Il était nécessaire de donner un signal à ceux qui investissent (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains),...
    M. Gérard Bapt. Où sont-ils passés ?
    M. Jacques Barrot. ... à ceux qui créent, à ceux qui travaillent. D'ailleurs, et il faut le souligner, la baisse des prélèvements a porté principalement sur la baisse des charges sociales, reconnue, par les économistes de tous bords, comme le premier levier pour une politique de l'emploi. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Bernard Roman. C'est faux !
    M. Jacques Barrot. Si nous voulons placer notre pays en tête des économies dynamiques, il faut investir. Là aussi, des besoins urgents attendaient.
    M. François Hollande. Où est l'investissement ?
    M. Bernard Roman. On n'a jamais aussi peu investi !
    M. Jacques Barrot. Nos hôpitaux, où 80 % des équipements ont plus de vingt ans vont bénéficier du programme Hôpital 2007. Monsieur le Premier ministre, vous avez mis sur la table le dossier des infrastructures de transports : route et rail. Vous préparez la relance d'une recherche française. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) C'est la grande priorité !
    Tel est aussi le sens de la maîtrise des dépenses de fonctionnement de l'Etat.
    Le groupe UMP vous soutiendra pleinement dans cette action de remise en ordre d'une dépense publique qui doit être beaucoup plus orientée vers la préparation de l'avenir.
    M. Pascal Clément. Très bien !
    M. Jacques Barrot. Il y a donc l'investissement, mais il y a aussi le travail des Français.
    M. Patrick Lemasle. Il a du mal à convaincre !
    M. Jacques Barrot. Confrontée au chômage, la France s'est laissé entraîner, dans une vision très malthusienne, à imaginer le partage du travail comme la première, voire la seule réponse au chômage.
    M. Pascal Clément. Eh oui !
    M. Pierre Cohen. Deux millions de chômeurs !
    M. Jacques Barrot. L'heure est venue, là aussi, de changer d'approche. Nous sommes en effet à la veille d'un retournement démographique qui va voir la population active baisser. C'est pourquoi il nous faut ressusciter chez les Français (« Amen ! » sur les bancs du groupe socialiste.) un nouvel intérêt au travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Plusieurs députés du groupe socialiste entonnent un cantique.) Cela exige une revalorisation du travail dans toutes ses dimensions.
    C'est d'abord une affaire de rémunération, et même la chorale qui tente de m'empêcher de parler ne peut nier que l'unification des SMIC multiples hérités des législations sur les trente-cinq heures se fait par le haut. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Cela permettra une augmentation des rémunérations directes, sans porter préjudice à l'emploi, grâce à un vigoureux effort de baisse des charges. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    C'est aussi affaire de formation ; nous l'avons dit, je ne le répète pas.
    C'est enfin, vous me permettrez de le souligner, une affaire de conditions de travail. On a, jusqu'ici, mis l'accent exclusivement sur le temps de travail, en oubliant, d'ailleurs, que ce dernier doit être défini de manière beaucoup plus contractuelle : à la loi de fixer les temps de repos, aux contrats et à la négociation collective d'organiser le temps de travail.
    Grâce à ce dynamisme français renouvelé, nous pourrons, monsieur le Premier ministre, consolider le modèle social à la française. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Je n'énumérerai pas tous les chantiers, mais nous serons présents pour chacun de ces rendez-vous difficiles.
    M. Jérôme Lambert. Vous ne serez pas là très longtemps !
    M. Jacques Barrot. Il y aura d'abord celui de l'assurance maladie, domaine dans lequel il faudra que chacun fasse preuve de plus de responsabilité, les soignés comme les soignants. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) La solidarité devra être plus grande.
    Je pense ensuite au chantier de l'intégration : intégration par le savoir, intégration par l'activité - le RMI devenant RMA -, intégration par le logement, car nous voyons naître une politique de la ville ambitieuse (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), avec la réhabilitation des quartiers et, progressivement, le cap sur l'accession sociale à la propriété. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Cela vous gêne, sans doute, mais il a fallu attendre le retour de cette majorité pour que le grand plan d'insertion des handicapés voie le jour. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Pierre Brard. Vous n'aurez pas l'absolution. D'abord à confesse !
    M. Jacques Barrot. Monsieur le Premier ministre, notre confiance vous est acquise, parce que nous partageons, au fond de notre coeur, la vision d'une France plus solide, plus forte, plus généreuse, ouverte, écoutée dans le monde. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Nous ne pouvons pas oublier les paroles du Président de la République. Dans les moments difficiles où la communauté internationale s'est trouvée placée devant des dilemmes très difficiles, Jacques Chirac a pris des décisions courageuses et conformes à l'idée que nous nous faisons tous de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Nous avons aussi éprouvé beaucoup de fierté à voir la France, sous l'égide du président Giscard d'Estaing, dessiner, pour l'Europe, une nouvelle organisation, plus efficace et plus claire pour les citoyens européens.
    Ainsi, mes chers collègues, la France retrouve son rang sur la scène internationale. Cependant, pour continuer à jouer tout son rôle, la France doit poursuivre dans la voie...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Du Seigneur !
    M. Jacques Barrot. ... des réformes intérieures. Nous devons construire cette société de confiance, et il y faut beaucoup de persévérance et de ténacité. De ces deux qualités, vous ne manquez pas, monsieur le Premier ministre, et c'est pourquoi nous sommes à vos côtés, avec confiance. (Mmes et MM. les députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et applaudissent longuement. - Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, il y a un peu plus d'un an, le 5 mai 2002, 82,5 % de Français ont voté Jacques Chirac au deuxième tour de l'élection présidentielle pour dire « non » à l'extrême droite. Leur abstention massive du premier tour, qui a suscité le séisme politique que l'on sait, exprimait une souffrance sociale réelle et un désaveu de l'ensemble du personnel politique français. Ils voulaient croire en une politique impartiale qui renforcerait la démocratie.
    C'est à ce moment-là, monsieur le Premier ministre, que vous en avez appelé à la France d'en bas, dans une de ces formules que vous affectionnez. Sauf que l'on ne gouverne pas avec des formules et que les formules peuvent mener à des dérapages inadmissibles, révélateurs de votre cynisme et de votre mépris pour tous ceux qui ne partagent pas vos idées. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Des dérapages répétés, cela s'appelle de la récidive. De ce point de vue, vous êtes devenu un dangereux récidiviste. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Rires et applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    Votre vérité est donc bien loin du pacificateur que vous prétendez incarner. Sous des dehors faussement patelins, vous êtes en train de mener une véritable guerre à la France d'en bas, celle qui souffre et que vous exaspérez à force de mépris et de brutalité. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cette France-là manifeste quotidiennement sa colère contre l'insécurité sociale que vous avez installée en imposant, à la hussarde, des réformes qui ressemblent plus à une entreprise de démolition des acquis sociaux...
    M. Jean-Marc Nudant. C'est faux !
    M. Noël Mamère. ... qu'à une modernisation de la France. Pour vous, être moderne, c'est être à la botte du MEDEF (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), dont votre gouvernement reste le docile exécutant. Et puisque vous aimez les formules, on pourrait appliquer à votre gouvernement celle d'une fameuse entreprise d'électronique en disant : « Seillière l'a rêvé, Raffarin l'a fait. »
    Vous avez engagé le pays, monsieur le Premier ministre, dans une véritable contre-réforme. Vous voulez le soumettre aux lois injustes du libéralisme dans sa version la plus brutale et la plus destructrice. Or vous n'avez pas été élu pour faire voter des lois antisociales que vous imposez au pays par effraction, des lois qui engendrent l'appauvrissement programmé des retraités, une baisse de l'activité économique et un accroissement du chômage.
    Vous n'avez pas été élu, monsieur le Premier ministre, pour vous attaquer aux crédits de la recherche, de la culture, de l'éducation, pour supprimer les aides éducateurs, les emplois-jeunes, les aides aux associations d'éducation populaire et de lutte contre l'exclusion, pour mettre fin à l'exception culturelle française en vous attaquant brutalement et de front aux intermittents, tout en baissant systématiquement les impôts pour les plus favorisés. Ainsi, vous réduisez l'aide personnalisée à l'autonomie et les aides aux chômeurs.
    Ce n'est pas en cassant systématiquement ce qui contribue au savoir, à la formation, au lien social que vous comblerez le déficit de citoyenneté qui ronge notre pays.
    Dans le domaine de l'écologie, malgré les discours du Président de la République, décidément devenu le champion du double langage (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), jamais, je dis bien jamais, un gouvernement n'aura liquidé aussi rapidement les outils de la protection de l'environnement : réduction drastique des crédits consacrés aux grandes associations environnementales, dont la survie est aujourd'hui menacée ; réduction de 100 % des crédits alloués à l'expertise naturaliste ; réduction de 50 % des crédits affectés à la gestion des zones Natura 2000 et globalement de tout le budget de fonctionnement du ministère de l'écologie et du développement durable.
    Vous n'avez pas été élu, monsieur le Premier ministre, pour liquider la loi chasse, pour liquider la loi sur l'eau...
    Mme Martine David. Il n'a pas été élu du tout !
    M. Noël Mamère. ... en instituant une nouvelle formule qui pourrait s'intituler le « pollueur payé » (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), pour renforcer la politique du nucléaire, en organisant des débats bidon alors que vous avez déjà fait le choix du réacteur à eau pressurisée. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Vous n'avez pris aucune mesure contre les pollutions maritimes ou les OGM.
    Votre politique, c'est deux poids, deux mesures. Vous ne faites strictement rien contre la délinquance écologique, mais, plutôt que de sanctionner ceux qui polluent notre air et nos sols, ceux qui introduisent les OGM, se fichant par ailleurs comme d'une guigne de ce que vous êtes en train d'introduire dans la Constitution, c'est-à-dire le principe de précaution, vous jetez en prison José Bové ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) A travers lui, non seulement vous criminalisez l'action syndicale, en faisant de la récidive, qui est le principe de l'action syndicale, un crime, mais vous envoyez un signe détestable à tous ceux qui se battent en France et à travers le monde pour dire qu'ils veulent d'un autre monde que le vôtre et que cet autre monde est possible.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Votre temps de parole est épuisé !
    M. Noël Mamère. Vous avez été élu, monsieur le Premier ministre, pour renforcer nos libertés et non pas pour les restreindre.
    M. Nicolas Sarkozy, le corégent de votre équipe, a imposé une loi qui s'attaque aux plus faibles de nos concitoyens, mais qui ne touche pas à la grande criminalité des cols blancs. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vos cibles préférées : les pauvres, les SDF, les prostituées, les jeunes, les gens du voyage, les sans-papiers, les étrangers.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Et alors ?
    M. Noël Mamère. Vous avez, si je puis dire, « remis le couvert » avec la loi Perben, qui institue une justice à l'américaine et soumise aux ordres de la police. Puis, vous vous êtes attaqué au droit d'asile, procédant à un scandaleux recul en faisant de chaque étranger entrant dans notre pays un suspect, et vous vous apprêtez à replacer l'immigration au coeur du débat politique en criminalisant ceux qui hébergent des immigrants chez eux (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), faisant de l'hospitalité, tradition de notre pays, un véritable délit. (Protestations sur les mêmes bancs.)
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Terminé !
    M. Noël Mamère. Oui, monsieur le Premier ministre, vous faites du Le Pen sans le dire (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française), mais les électeurs du Front national préfèrent toujours l'original à la copie et ils ne vous en sauront pas gré pour autant ! (Claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Scandaleux !
    M. Noël Mamère. Il vous faudra décompter les arrêts de jeu, monsieur le président !
    Enfin, monsieur le Premier ministre, vous n'avez pas été élu pour bâtir un Etat UMP mais pour mettre en place l'Etat impartial ! Or aujourd'hui, à l'instar de l'Italie « berlusconisée », vous nous annoncez une loi instaurant l'immunité pour le chef de l'Etat. Eh oui ! il faut protéger Chirac de ses turpides passées. (Vives protestations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Plus que jamais, nous vivons sous la loi des copains et des coquins. (Mêmes mouvements.) Vous n'avez pas été élu pour ça ! Voilà pourquoi nous voterons la motion de censure présentée par le parti socialiste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Il y a des moments où l'on éprouve du plaisir à être conspué ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. - « Voyou ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Mmes et MM. les députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et applaudissent, ainsi que quelques députés du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je suis heureux de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui d'expliquer la politique du Gouvernement.
    M. Jean-Marc Ayrault, M. François Hollande et plusieurs députés du groupe socialiste. De vous excuser, d'abord !
    M. le Premier ministre. L'Assemblée nationale est, en effet, le lieu du débat et les Français ont le droit de savoir ce qui rassemble, mais aussi ce qui distingue les principales forces politiques de notre pays.
    Les élections législatives du printemps dernier ont été l'occasion pour les Français de faire un choix,...
    M. Henri Emmanuelli. Mais non !
    M. le Premier ministre. ... un choix clair, un choix légitime, le choix de l'alternance. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il est important de constater que les Français ont fait ce choix majoritaire pour l'alternance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme Martine David. Où était le choix le 5 mai ?
    M. Henri Emmanuelli. Ils n'étaient que 19 % !
    M. le Premier ministre. C'est dans ce contexte que la majorité a reçu un mandat des électeurs de notre pays. Nous avons le devoir d'agir pour respecter le contrat passé avec les Français, le contrat de majorité.
    Voilà quatre cents jours que M. le Président de la République m'a confié la responsabilité de déterminer et conduire la politique de la nation. (« Quelle erreur ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Richard Mallié. Quel bonheur !
    M. Christian Paul. C'est réussi !
    M. le Premier ministre. Je souhaite faire devant vous le point de notre action.
    M. Christian Paul. Il était temps !
    M. le Premier ministre. J'ai souhaité mobiliser la nation pour moderniser la France et donner à notre pacte social un avenir que l'immobilisme menaçait.
    M. Christian Paul. Pour la modestie, vous ne craignez personne !
    M. le Premier ministre. L'action du Gouvernement au cours des douze derniers mois doit être appréciée au regard de la situation que nous avons trouvée en mai 2002. (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

    La sécurité est la première des libertés. Elle n'était plus au coeur des priorités de l'action publique. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Nous avons entendu l'appel des Français pour la justice et le respect des lois et pour la sûreté contre l'insécurité.
    M. Henri Emmanuelli. Et pour l'emploi ?
    M. le Premier ministre. Nous avons voulu rétablir l'autorité républicaine.
    Outre l'insécurité, nous avons été confrontés à une perte de confiance dans notre économie. A notre arrivée, nous avons trouvé des déficits qui explosaient...
    M. Henri Emmanuelli. C'est vous qui les avez creusés !
    M. le Premier ministre. ... une conjoncture internationale déprimée, un chômage qui depuis plus d'un an augmentait (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste), des entreprises publiques démesurément endettées et sans véritable projet industriel, ...
    M. Bernard Roman. Ça ne s'est pas amélioré !
    M. le Premier ministre. ... des engagements pris, ici et là, et très rarement financés, ...
    M. François Goulard. Eh oui !
    M. le Premier ministre. ... et des réformes nécessaires qui n'avaient pas été engagées, alors que la croissance aurait permis de le faire.
    M. François Goulard. C'est vrai !
    M. le Premier ministre. Le Gouvernement a ainsi dû faire face à l'inquiétude montante des Français face à une forme d'insécurité, l'insécurité économique et sociale.
    M. François Lamy. C'est vous qui l'avez aggravée !
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Mais taisez-vous donc !
    M. le Premier ministre. L'absence de réforme des retraites, le besoin d'une assurance emploi pour se prémunir du chômage et les inquiétudes face à l'avenir du système de santé ont créé un climat d'incertitude pour l'avenir.
    Mme Martine David. Climat que vous avez encore dégradé !
    M. le Premier ministre. Notre priorité a donc été de réaffirmer les principes de notre « Constitution sociale », à laquelle nous sommes très attachés. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Nous ne voulions pas donner aux Français l'immobilisme et l'insécurité comme seules perspectives. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
    L'économie doit être au service de la cohésion nationale. (Mêmes mouvements.) Face à cette situation, le Gouvernement a choisi une direction, celle de la croissance durable. Elle est évidemment difficile à prendre.
    Devant la situation que nous avons trouvée en mai 2002, la politique du Gouvernement en matière de finances publiques a dû être claire : maîtriser la dépense, d'une part, favoriser le travail et l'initiative par la baisse des prélèvements, d'autre part.
    M. Bernard Roman. Des cadeaux aux riches !
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Idéologie !
    M. le Premier ministre. Aujourd'hui, à court terme, le Gouvernement a pris ses responsabilités avec des mises en réserve budgétaire, dès le premier trimestre.
    M. Henri Emmanuelli. 58 milliards !
    M. le Premier ministre. C'est une responsabilité que l'on assume quand on a la charge des finances publiques de la France ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Nous avons aussi mis fin à la dérive des reports annuels. Voilà pourquoi j'ai fixé à chacun des ministres un cadre financier responsable pour 2004.
    M. Arnaud Montebourg. Quelle autosatisfaction !
    M. le Premier ministre. A moyen terme, la maîtrise de la dépense publique se nourrit de la réforme de l'Etat, et si nous avons connu tant de dérives des finances publiques, c'est parce qu'elle a trop tardé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    C'est le sens des conférences sur la réforme de l'Etat que j'ai tenues avec chacun des ministres depuis le début de l'année.
    M. Henri Emmanuelli. Ce n'est pas ce que dit la Cour des comptes !
    M. le Premier ministre. La réforme de l'Etat, mesdames et messieurs les députés, est engagée. Elle sera déterminante dans l'avenir des finances publiques de la France. Sur le plan fiscal, il n'y aura pas d'augmentation des impôts (« C'est faux ! »sur les bancs du groupe socialiste) car ce serait tuer la croissance. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
    Il y aura même, pour dynamiser l'économie et revaloriser le travail, une baisse significative de l'impôt sur le revenu en 2004. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. André Santini. Très bien !
    M. Bernard Roman. Et les impôts locaux ?
    M. le Premier ministre. Je note d'ailleurs que le Chancelier Schroder nous a rejoint sur cette politique et qu'il a avancé son programme de 2005 à 2004...
    M. Bernard Roman. Mensonge !
    M. le Premier ministre. ... pour ne pas étouffer la croissance et pour faire en sorte que l'économie européenne en bénéficie, grâce aux allégements d'impôts et à la dynamique des forces vives.
    M. Bernard Roman. Et les impôts locaux !
    M. le Premier ministre. Nous nous battrons également pour des déductions nouvelles - je pense à l'épargne retraite - et nous poursuivrons notre action auprès de nos partenaires européens en faveur des taux réduits de TVA,...
    M. Bernard Roman. Pour la restauration !
    M. le Premier ministre. ... notamment dans les secteurs de la restauration et du bâtiment, parce que ce sont des secteurs créateurs d'emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Marcel Dehoux. A la Saint-Glinglin !
    M. le Premier ministre. Les récentes baisses des taux d'intérêt de la BCE sont un signe encourageant pour notre économie.
    Mme Martine David. Et l'emploi ?
    M. le Premier ministre. Je souhaite qu'elles puissent être poursuivies.
    Pour construire la croissance durable à laquelle nous aspirons, nous avons besoin de cette bonne gestion du bien public. Nous avons aussi besoin d'investir dans tous les talents de notre société.
    M. Henri Emmanuelli. Vous aspirez plus que vous n'êtes inspiré !
    M. le Premier ministre. La formation offre au salarié une ouverture sur le monde et lui permet de s'adapter aux nouvelles réalités qui l'entourent. Les partenaires sociaux, que comme les partis politiques nous respectons,...
    M. François Lamy. Ce n'est pas vrai !
    M. Arnaud Montebourg. Vous êtes sectaire !
    M. François Hollande. Montrez-nous du respect !
    M. le Premier ministre. ... ont entamé des négociations sur ce grand chantier, conformément à notre conception du dialogue social. C'est pour nous une priorité.
    M. Bernard Roman. Où est le respect ?
    M. le Premier ministre. Mesdames et messieurs les députés, il est très important de défendre cette idée du dialogue social. Il ne s'agit pas d'opposer les syndicats les uns aux autres,...
    Mme Martine David. C'est pourtant ce que vous faites !
    M. le Premier ministre. ... mais de faire en sorte que chacun, en toute liberté, puisse choisir ses convictions et prendre ses responsabilités. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Yves Chamard. Très bien !
    M. Bernard Roman. Comme vous à Asnières !
    M. le Premier ministre. Le Gouvernement tirera les conséquences, à l'automne, de la négociation sociale sur la formation. C'est très important et j'espère que cette négociation aboutira.
    Mme Martine David. Avec des syndicats minoritaires !
    M. le Premier ministre. Mais nous souhaitons dire clairement que nous prendrons toutes les initiatives législatives nécessaires pour que l'engagement qui a été pris par le chef de l'Etat sur la formation tout au long de la vie, et sur l'assurance formation emploi, puisse être tenu. C'est un objectif essentiel de notre politique sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    La croissance durable, enfin...
    M. François Hollande. Où est-elle donc ?
    M. le Premier ministre. ... suppose un investissement plus important en faveur de la recherche, de la valeur ajoutée et de l'intelligence. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous encouragerons les activités de recherche et de développement, notamment en entreprise.
    M. Arnaud Montebourg. C'est un mensonge !
    M. Bernard Roman. Vous mentez ! C'est incroyable !
    M. Jean-Christophe Cambadélis. Indigne !
    M. le Premier ministre. C'est pour cela, mesdames et messieurs les députés, au-delà des invectives...
    M. Arnaud Montebourg. Et des boutades, monsieur Raffarin ?
    M. le Premier ministre. ... qu'il est très important de s'engager dans une politique de long terme. Ainsi un statut des investisseurs spécifiques, providentiels...
    M. François Hollande. Qu'est-ce que cela veut dire, « providentiels » ?
    M. le Premier ministre. ... sera mis en place et « la jeune entreprise innovante » bénéficiera aussi d'un statut spécifique pour permettre le développement de l'innovation.
    M. Jean-Christophe Cambadélis. Regardez les membres de votre majorité : ils sont consternés !
    M. le Premier ministre. Car le principal problème de la France, c'est son retard en matière de recherche privée. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Daniel Vaillant. Et vous l'aggravez encore !
    M. le président. Monsieur Vaillant !
    M. le Premier ministre. Bien sûr, nous ferons des efforts en faveur de la recherche publique. Mais il faut pouvoir libérer la recherche et l'innovation dans le secteur privé, celui des entreprises. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Christian Bataille. Des mots !
    M. le Premier ministre. Notre dispositif public de recherche, pour être efficace, doit être mieux organisé. Nous souhaitons donner la priorité aux projets sur les structures.
    M. Pierre Cohen. C'est faux. C'est un scandale !
    M. le Premier ministre. On a trop tendance, en matière de recherche, à soutenir les structures aux dépens des projets. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous souhaitons soutenir les projets de recherche essentiels pour notre économie et pour répondre à l'attente des Français (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Nous souhaitons engager une telle politique parce qu'elle est au service de l'intelligence.
    M. Bernard Roman. C'est du spectacle !
    M. Arnaud Montebourg. C'est un discours de conseiller général !
    M. le président. Je vous en prie, laissez le Premier ministre s'exprimer.
    M. le Premier ministre. C'est vrai qu'il nous a fallu, l'an passé, procéder à divers ajustements afin de faire face à tous les déficits et, notamment, à tous les reports qui avaient été mal gérés. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Mais le prochain budget traduira notre orientation en faveur de l'intelligence, de l'avenir, du talent ajouté et de la capacité de création de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme Martine David. Blablabla !
    M. Arnaud Montebourg. Bonimenteur !
    M. le Premier ministre. Le projet de loi de modernisation des universités, enfin, fera l'objet d'une concertation approfondie avec la communauté universitaire.
    M. Philippe Vuilque. Comme les autres !
    M. le Premier ministre. Nos universités doivent être encore plus fortes non seulement sur le plan local, mais également sur le plan international, afin d'attirer à nouveau les élites étrangères qui venaient encore il y a une dizaine d'années dans notre pays se former et irriguer ainsi le monde entier de la pensée, de la culture et de la technologie françaises. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    La cohésion nationale se nourrit du travail mais aussi de l'emploi. Parce que le travail permet l'accomplissement individuel, nous croyons en sa valeur.
    M. Henri Emmanuelli. Salarié !
    M. Augustin Bonrepaux. Nous, nous ne vous croyons pas !
    M. le Premier ministre. Le travail est aussi, évidemment, un facteur essentiel de la création de richesses.
    M. Philippe Vuilque. Arrêtez d'enfoncer des portes ouvertes !
    M. le Premier ministre. Comment penser que l'on pourra financer l'un des meilleurs systèmes sociaux du monde, tout en décourageant les travailleurs et en faisant du travail une valeur subalterne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Maxime Gremetz. Avec trois millions de chômeurs ?
    M. le président. Laissez parler le Premier ministre. Il ne sert à rien de l'interrompre.
    M. le Premier ministre. C'est pourquoi nous avons engagé des réformes qui tendent à redonner au travail la place centrale qui lui revient dans notre société. Nous avons ainsi réformé les 35 heures et réunifié les SMIC qui avaient été éclatés et dispersés. Nous allons également transformer progressivement le RMI en RMA (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) afin de faciliter la capacité d'intégration dans l'économie. Voilà, je pense, une mesure importante favorisant l'insertion professionnelle.
    Mesdames et messieurs les députés, depuis hier, plus d'un million de personnes ont vu le minimum salarial augmenter de 5,3 %, la plus forte hausse depuis vingt ans. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie fançaise.)
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler et M. Bernard Roman. C'est faux !
    M. le Premier ministre. Depuis hier, les salariés les plus faibles, ceux qui souffrent le plus, ont bénéficié de l'augmentation salariale la plus forte. C'est bon pour l'emploi, c'est bon pour les salariés, et c'est bon pour la consommation, donc pour la croissance. (« Menteurs ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Depuis hier également, un allégement des charges est entré en vigueur pour les entreprises.
    M. Henri Emmanuelli. Ah !
    M. le Premier ministre. Il représente près de deux milliards en année pleine, soit six milliards sur trois ans. Ça aussi, c'est bon pour l'emploi, pour l'insertion professionnelle et pour la croissance.
    Parallèlement, nous avons favorisé l'insertion dans l'emploi des publics les plus exposés au ralentissement de l'activité.
    A cet effet, 80 000 contrats jeunes en entreprise ont été signés. Ce sont de vrais emplois, pas des « emplois-parking », des contrats à durée indéterminée (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française), dans de grandes ou petites entreprises. Pour les jeunes, ce n'est pas une illusion, ce n'est pas une promesse électorale, c'est une vraie insertion professionnelle.
    M. Henri Emmanuelli. Et le chômage des jeunes ?
    M. le Premier ministre. Nous irons au-delà. Un nouveau contrat pour les jeunes qui ont un projet sera mis en place prochainement...
    M. François Hollande. Quand ?
    M. le Premier ministre. ... avec le CIVIS, 100 000 jeunes en bénéficieront en 2004.
    Faire du travail un facteur de cohésion, c'est aussi améliorer l'emploi des seniors.
    M. Henri Emmanuelli. Parlons-en !
    M. le Premier ministre. Nous relançons, dans cet objectif, le dispositif des contrats initiative emploi.
    M. Henri Emmanuelli. Ils se font virer, les seniors !
    M. le Premier ministre. Nous savons que l'emploi des plus de cinquante ans doit, après notre réforme des retraites, devenir une priorité nationale. Nous sommes conscients que notre réforme des retraites imposera d'autres réformes, d'autres attitudes, d'autres comportements aux pouvoirs publics...
    M. Bernard Roman. D'autres majorités !
    M. Philippe Vuilque. D'autres Premiers ministres !
    M. le Premier ministre. ... mais aussi aux entreprises pour l'emploi des salariés de plus de cinquante ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Le Gouvernement réunira à l'automne prochain la première table ronde tripartite entre l'Etat, les partenaires sociaux et les régions, pour mobiliser l'ensemble des acteurs en faveur de l'emploi des seniors.
    Enfin, pour que le travail soit accessible à tous, il faut des entreprises, et notamment des entreprises publiques, bien gérées.
    M. Jean-Claude Lefort. Par Jean-Marie Messier ?
    M. le Premier ministre. Nous avons dû rattraper les années perdues pour faire évoluer nos grandes entreprises publiques dans un contexte européen et mondial où les atouts des hommes et des femmes nécessitent aujourd'hui de nouvelles alliances pour être mieux valorisés.
    C'est ainsi que nous avons donné à DCN de nouveaux moyens de développement. C'est ainsi que la crédibilité de France Télécom a pu être rapidement restaurée, en dépit de mauvaises, de très mauvaises opérations à l'étranger, grâce à un management dynamique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Ce travail se poursuivra dans les autres entreprises qui connaissent des difficultés. Je pense à La Poste, qui doit se moderniser, restaurer la qualité du service public, être compétitive tout en étant ancrée sur l'ensemble du territoire national.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Assez !
    M. Arnaud Montebourg. Sait-il faire autre chose que lire un papier ?
    M. le Premier ministre. Vous souhaitez connaître l'action du Gouvernement, le Gouvernement vous la présente. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    EDF et GDF sont des champions mondiaux. Nous voulons qu'ils le demeurent. J'attends d'eux qu'ils définissent des projets industriels permettant leur développement. Leur statut sera prochainement adapté dans cet objectif (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), ce qui permettra d'ouvrir leur capital. La première richesse de ces entreprises, ce sont les femmes et les hommes qui y travaillent. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Ils seront naturellement associés à cette évolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Henri Emmanuelli. On vend les meubles !
    M. le Premier ministre. Nous sommes attachés à ce pacte social, ce pacte républicain. L'adversaire principal, c'est l'immobilisme. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est pourquoi nous avons engagé une réforme des retraites en profondeur pour sauver le système par répartition, qui était, vous le savez, très menacé. Ce système peut être sauvé grâce à la solidarité entre les générations.
    La réforme proposée, c'est...
    M. Maxime Gremetz. Un enterrement de première classe !
    M. le Premier ministre. ... plus de justice, plus de liberté et plus de progrès social.
    Les Français peuvent désormais être rassurés sur l'avenir de leurs retraites. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs des groupes des députés-e-s communistes et républicains.)
    Mme Martine David. Cela manque de souffle !
    M. le Premier ministre. Les décisions sont en place. Les mécanismes de révision sont connus. L'ensemble du processus jusqu'à 2020 et au-delà est ainsi défini.
    M. Maxime Gremetz. Mais pas financé !
    M. le Premier ministre. C'est cela apporter de la lisibilité, de la sécurité. C'est cela avoir le courage de réformer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme Martine David. Elle n'est pas financée, votre réforme !
    M. le Premier ministre. Nous avons aussi une politique de la famille ambitieuse. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous l'avons relancée en investissant un milliard d'euros pour privilégier l'accueil du jeune enfant. Les problèmes de la société française sont d'abord des problèmes de démographie. L'accueil du jeune enfant est un problème important. C'est pour cela que nous l'avons placé au coeur même de notre politique familiale.
    L'année prochaine, la Conférence de la famille sera centrée sur les problèmes des adolescents. Cela nous paraît être important pour la cohésion sociale de notre société. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Martine David. C'est consternant !
    M. le Premier ministre. Enfin, notre pacte social repose sur une politique de santé rénovée. Notre système de santé et d'assurance maladie, chacun le reconnaît, est l'un des meilleurs du monde. Pour le conserver, il faut évidemment le protéger, car lui aussi est menacé pour des raisons démographiques.
    Nous avons commencé par restaurer la confiance avec le monde médical. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Henri Emmanuelli. C'est ça !
    M. le Premier ministre. Puis, nous avons engagé une véritable politique de santé publique, fondée sur des programmes d'action d'ampleur,...
    M. Henri Emmanuelli. Onze milliards d'euros de déficit !
    M. le Premier ministre. ...dont le plan de lutte contre le cancer est l'un des nombreux exemples.
    M. Maxime Gremetz. Et la hausse du prix du tabac !
    M. le Premier ministre. Mais le ralentissement des recettes des cotisations engendre évidemment des déficits importants.
    Mme Jacqueline Fraysse. Et les exonérations patronales !
    M. Henri Emmanuelli. Les cadeaux !
    M. le Premier ministre. C'est pourquoi nous avons entrepris de faire évoluer notre système de santé et d'assurance maladie avec le lancement du plan « Hôpital 2007 » et une nouvelle politique du médicament.
    Cette démarche se poursuivra dans l'année à venir. Notre intention est de garantir le meilleur de la santé pour tous, en maintenant l'originalité de notre système, qui sait concilier, il l'a montré, la liberté et la solidarité. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 sera un moment important de cette évolution. Entre le PLFSS pour 2004 et le PLFSS pour 2005, nous mènerons toutes les négociations nécessaires avec l'ensemble des partenaires de la santé pour que notre pacte social sorte renforcé de cette modernisation collective.
    C'est une réforme importante que nous allons mener avec le sens de la négociation (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste), avec tous les partenaires sociaux, sans exclusive, et nous conclurons, comme d'habitude, avec ceux qui veulent bien conclure avec le Gouvernement pour assumer ensemble le progrès social de la nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Nous voulons aussi une France forte dans une Europe puissante.
    M. Christian Bataille. Original !
    M. le Premier ministre. Pour renforcer la cohésion nationale, nous avons entrepris de restaurer la confiance dans la République et dans l'Etat.
    Dès notre arrivée aux responsabilités, nous avons entrepris de redonner confiance en la République, en insistant fortement sur ce qui fait son coeur : la sécurité, le droit pour tous à la sûreté qui nous vient du fond des âges. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Arnaud Montebourg. Quel comédien !
    M. le président. S'il vous plaît, mes chers collègues !
    M. le Premier ministre. La sécurité, c'est en effet la première condition du vivre ensemble.
    M. Arnaud Montebourg. C'est une série B !
    M. le Premier ministre. La sécurité, c'est aussi la première des libertés, et ceux qui l'ont oublié ont bien eu à s'en plaindre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous la devons tous à nos concitoyens.
    En un an, nous avons inversé pour la première fois la courbe de la délinquance. (« Très bien ! » et vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.) La délinquance sur la voie publique a baissé de près de 9 % sur l'ensemble de la France, et même de 15 % à Paris.
    Nous allons continuer sur cette voie en développant la politique de prévention et en poursuivant notre action pour une justice plus proche, plus efficace, avec des moyens accrus, au niveau national comme au niveau international.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !
    M. le Premier ministre. Vous débattrez prochainement de nombreux textes importants, notamment de textes faisant l'objet de débats essentiels qui ont été mésestimés dans le passé, je pense à l'immigration et au droit d'asile pour lequel il nous faut une autre réglementation et sur lequel la représentation nationale doit s'exprimer. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Sous l'impulsion du chef de l'Etat (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste), nous avons enfin conforté la défense de la France, qui n'était plus à la hauteur (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française) d'un membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU. Nous avons inversé une tendance dangereuse, et les efforts engagés en 2003 seront poursuivis en 2004.
    Ce renforcement de l'Etat régalien, de la nation dans ses responsabilités, doit aller de pair avec la décentralisation de notre République.
    M. Bernard Roman. Drôle de discours !
    M. Philippe Vuilque. C'est très ennuyeux ! Rendez-nous Bayrou !
    M. le Premier ministre. Nous avons besoin de proximité, de capacité à agir au plus près du terrain. Avant la fin de l'année, plusieurs textes sur la décentralisation vous seront soumis. J'ai la conviction que la proximité régule mieux que la norme. Vous pourrez achever d'ici à la fin de l'année la grande oeuvre qu'est la deuxième étape de la décentralisation, avec l'examen de cinq textes qui permettront à notre architecture publique de concilier cohérence républicaine et proximité locale. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Dans ce contexte, j'espère de tout mon coeur (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste)...
    M. Arnaud Montebourg. Triste coeur que voilà !
    M. le Premier ministre. ... que la Corse souhaitera prendre toute sa place dans la nouvelle organisation décentralisée de la République française. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Henri Emmanuelli. C'est un discours de politique locale !
    M. le Premier ministre. Il s'agit de la République et il s'agit de la Corse, de la Corse dans la République et de la République en Corse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Pour garantir l'égalité, nous avons souhaité une péréquation financière que nous avons inscrite dans la Constitution, afin de protéger les territoires les plus fragiles. C'est pour nous une ardente obligation.
    M. Arnaud Montebourg. Qui paiera pour tout cela ?
    M. le Premier ministre. Le service public doit lui aussi évoluer, parce qu'il est le garant de la cohésion. Nous croyons au service public, à un service public qui s'adapte aux besoins des Français, et je sais que, dans votre assemblée, ces valeurs et la volonté de réforme sont partagées.
    Dès l'automne, j'ai souhaité que les ministres viennent présenter au Parlement les évolutions des missions et de l'organisation de leurs services.
    Nous continuerons également à simplifier les procédures.
    M. Arnaud Montebourg. Surtout en ce qui concerne les marchés publics ! L'UMP a besoin d'argent !
    M. le Premier ministre. Une vingtaine d'ordonnances, plus de cent mesures de simplification sont en cours...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Et pour les marchés publics ?
    M. le Premier ministre. ... et un nouveau projet de loi d'habilitation à simplifier est en préparation pour la fin de l'année 2003.
    M. Arnaud Montebourg. Vous allez vous faire de l'argent de poche !
    M. le Premier ministre. Les Français veulent qu'on leur simplifie la vie. Ils ne se sentent pas à l'aise dans un Etat bureaucratique, technocratique et paperassier. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Je souhaite proposer un nouveau pacte entre la nation et ses services publics.
    M. Jean-Pierre Blazy. Un pacte avec le diable ?
    M. Maxime Gremetz. Un pacte civil !
    M. le Premier ministre. Laissez-moi maintenant vous parler de l'école. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Nous avons commencé à travailler aux racines du mal, l'illettrisme, la violence, l'échec scolaire, et nous avons engagé une action résolue pour revaloriser l'enseignement professionnel. Nous voulons lutter contre la fracture scolaire.
    Nous avons entendu les enseignants. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Mme Martine David. La preuve !
    M. le Premier ministre. Nous avons entendu leur mal-être.
    Mme Martine David. Pas du tout !
    M. le Premier ministre. Nous avons entendu leur malaise.
    M. Bernard Roman. Payez-les !
    M. le Premier ministre. Nous comprenons leur grave inquiétude.
    M. Jérôme Lambert. C'est votre politique qui est grave !
    M. le Premier ministre. La nation tout entière a besoin d'être rassurée sur l'avenir de l'école. L'école n'appartient à aucun parti politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Bernard Roman. Heureusement !
    M. le Premier ministre. L'école n'est pas à la disposition des uns ou des autres. Elle est à la nation, à la République, au coeur de notre pacte social, de notre pacte républicain. Elle concerne chacun d'entre nous. (Exclamations sur les bancs du groupe social et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Il est vrai que l'école et les professeurs sont en première ligne...
    M. François Lamy. Oui ! Dans la rue !
    M. le Premier ministre. ... face aux évolutions de la société, évolutions qui se traduisent souvent par des problèmes qui dépassent et de loin la mission des enseignants.
    Dans cette situation, il faut poser les vrais problèmes. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Si, dans le passé, des solutions avaient été dégagées pour l'avenir, nous les aurions utilisées sans hésitation et sans esprit partisan ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Mais le mal est plus profond et nous devons engager un grand débat national,...
    M. Bernard Roman. Il est temps !
    M. le Premier ministre. ... animé par tous les acteurs de l'éducation, avec les organisations syndicales et avec tous les partenaires de l'école, les parents, les enfants,...
    M. Albert Facon. Avec Sarkozy !
    M. le Premier ministre. ... pour définir le champ de la réflexion, aborder les grandes questions qui se posent et faire en sorte que l'on puisse aboutir à un diagnostic partagé. Quelle peut être la chance d'une nouvelle loi d'orientation rénovant celle de 1989 si nous ne partons pas d'un diagnostic partagé par tous ?
    Mme Martine David. Bla-bla !
    M. le Premier ministre. Il y a le meilleur dans notre école : ce dévouement extrême, cette capacité du don de soi, cette somme de savoirs (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), mais les difficultés concentrées de la société viennent également s'y exprimer. Le problème n'est pas simple. Il ne se règle pas par des slogans. Il ne peut se règler que par un débat national, ouvert et pluraliste, à partir d'un diagnostic partagé.
    M. Arnaud Montebourg. Cessez de pleurnicher !
    M. le Premier ministre. La représentation nationale pourra, au printemps prochain, engager la rénovation de la loi d'orientation de 1989, définir les moyens nécessaires et bâtir ce que la nation attend : l'école du xxie siècle dont la France a besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    A plus court terme, je réunirai prochainement un comité interministériel consacré à l'éducation nationale (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) pour préparer spécifiquement la rentrée de 2003, veiller à ce que tous les engagements pris soient tenus et assurer cette rentrée dans les meilleures conditions.
    M. Arnaud Montebourg. Ben voyons ! Un comité interministériel, et après, une circulaire !
    M. le Premier ministre. Le respect de la cohésion nationale, c'est aussi le progrès que nous devons réaliser tous ensemble dans la politique de l'intégration pour que la société française ne laisse pas sur le bord de la route tous ces jeunes Français qui se sentent propriétaires de notre identité nationale mais qui voient se fermer devant eux les chemins de la réussite. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Je souhaite une politique de l'intégration active. Je souhaite aussi le respect de la laïcité. Le débat est lancé. Je souhaite que nous allions au bout pour que la laïcité, valeur commune de notre République, soit respectée par toutes et par tous dans l'école et dans la société ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Martine David. Et la tolérance !
    M. le Premier ministre. La laïcité, c'est le respect des uns et des autres (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française),...
    Mme Martine David. Ce n'est pas ce que vous faites !
    M. le Premier ministre. ... la tolérance, l'attention aux autres (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste),...
    M. Henri Emmanuelli. Justement !
    M. le Premier ministre. ... ce dont cette assemblée a fait preuve pendant toutes ces semaines ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Richard Mallié. Exactement !
    M. Henri Emmanuelli. C'est le respect, oui !
    M. le Premier ministre. C'est la capacité de pouvoir s'exprimer et se respecter. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Henri Emmanuelli. Vous ne l'avez pas fait !
    M. le Premier ministre. Quelles que soient nos religions (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), quels que soient nos modes de pensée, la laïcité doit être au centre de notre pacte républicain ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Le Président de la République installera demain la commission dont il a confié la présidence à M. Stasi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Cette commission donnera les grandes orientations sur ce sujet important.
    M. Bernard Roman. On l'a lu dans la presse !
    M. le Premier ministre. Je crois que la laïcité est un élément important du débat qui est aujourd'hui ouvert sur l'avenir de notre société. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous devons faire tous les efforts possibles pour que la société française vive à l'aise dans ce xxie siècle avec ses valeurs traditionnelles comme la laïcité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et avec des valeurs nouvelles comme le développement durable et l'environnement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Je pense à notre Constitution, c'est-à-dire notre loi commune, que nous allons réformer pour inscrire au coeur même de celle-ci le principe de précaution,...
    M. Arnaud Montebourg. Défendu par José Bové !
    M. Renaud Donnedieu de Vabres. Ça suffit, monsieur Montebourg !
    M. le Premier ministre. ... qui est la base de notre action. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il fait partie de cette cohésion sociale à laquelle nous sommes attachés. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Nous voulons favoriser la cohésion sociale. C'est pourquoi nous avons lancé le plus ambitieux programme de rénovation de nos quartiers depuis la guerre.
    M. Bernard Roman. C'est faux !
    Mme Martine David. Avec quel argent ?
    M. Albert Facon. Il n'y a pas un sou !
    M. le Premier ministre. C'est pourquoi nous avons également étendu, parce que cela a marché, le principe des zones franches. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    C'est pourquoi nous donnons à tous les « accidentés de la vie » - et c'est pour moi une grande fierté -,...
    M. Alain Néri. Vous êtes le premier d'entre eux !
    M. le Premier ministre. ... une nouvelle chance, en créant la procédure du rétablissement personnel, en tendant la main à tous ceux que la société a laissés de côté (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et qui, dans le passé, ne se sont pas sentis intégrés à la préoccupation sociale de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Albert Facon. Les applaudissements sont seulement de courtoisie !
    M. le Premier ministre. Nous voulons lutter contre la fracture sociale, c'est-à-dire aussi contre la fracture territoriale. C'est pourquoi nous tiendrons à la rentrée deux comités interministériels d'aménagement du territoire. L'un de ces CIADT sera dédié au monde rural et accompagnera un projet de loi sur le développement de ce monde rural, texte destiné à réduire la fracture territoriale. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous avons aussi besoin de tendre la main à tous ces territoires ruraux qui, aujourd'hui, se sentent souvent abandonnés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Ce texte dont ils ont besoin leur apportera les moyens de l'Etat, pour maintenir sur place les services publics, mais aussi pour favoriser la renaissance rurale dont le pays a besoin ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    L'autre CIADT sera consacré aux grands projets. Notre pays a perdu le goût de l'investissement,...
    Mme Martine David. Cette intervention est consternante !
    M. le Premier ministre. ... tant il a été dévoré par le fonctionnement. Je crois que nous devons investir sur de grands projets interrégionaux, des projets qui aident la France à se brancher sur l'Europe, des projets qui s'intègrent à l'initiative de croissance que prépare l'Union européenne, des projets qui enclenchent une dynamique des territoires.
    Je crois qu'il est très important d'arrêter avant la fin de l'année ces grands projets interrégionaux qui mobiliseront nos territoires et qui donneront à l'investissement de notre pays un nouveau souffle. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Nous le ferons dans le cadre de la dynamique européenne, laquelle prend un nouveau souffle avec l'élargissement, cet élargissement que nous assumons et qui est une chance pour la France.
    M. Bernard Schreiner. Très bien !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. La majorité semble accablée !
    M. le Premier ministre. Tout cela est dû en grande partie au travail accompli par le couple franco-allemand dont l'amitié a permis à l'Europe de surmonter de nombreuses difficultés. Je pense notamment au compromis de Bruxelles,...
    M. Christian Bataille. C'est un enterrement !
    M. le Premier ministre. ... au compromis sur la politique agricole commune.
    Grâce à l'accord obtenu, l'Europe peut aujourd'hui avancer.
    Mme Martine David. On ne comprend rien à ce que vous dites !
    M. le Premier ministre. Grâce à cet accord, l'Europe à vingt-cinq peut trouver sa cohérence géographique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    J'ajoute que, grâce à la Convention, l'Europe trouve aussi sa cohérence politique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Arnaud Montebourg. Cet homme est un assommoir !
    M. le Premier ministre. Je salue, à mon tour, l'action de Valéry Giscard d'Estaing (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française) et de tous les conventionnels, qu'ils soient de droite ou de gauche, qui ont su montrer leurs capacités à dépasser leurs clivages et à se rassembler unanimement autour d'un projet de Constitution pour l'avenir du continent européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Durant cette année, la France a aussi été de retour grâce à sa diplomatie, grâce à l'action personnelle du chef de l'Etat sur la scène internationale.
    Mme Martine David. C'est très décousu !
    M. le Premier ministre. Que ce soit sur le dossier difficile de la guerre en Irak, ou sur ceux de la lutte contre le sida, du développement en Afrique grâce au NEPAD ou de l'aide au développement - domaine dans lequel la participation française a augmenté -, la France est de retour ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Je suis fier de l'action du Président de la République (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste)...
    M. Arnaud Montebourg. On va lui apporter des oranges !
    M. le Premier ministre. ... qui, maintenant que les ambiguïtés de la cohabitation sont levées, permet au message de la France d'être entendu avec clarté et puissance.
    Nous conjuguerons tous ces efforts avec une politique de l'attractivité...
    Mme Martine David. En tout cas, vous, vous n'êtes pas attractif !
    M. le Premier ministre. ... pour que viennent sur notre territoire tous ceux qui veulent participer à cette dynamique de l'avenir, participer à l'avenir de la France.
    L'an dernier, les Français ont voté pour un changement politique. (« Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il faut l'admettre.
    M. Richard Mallié. Les Français en avaient assez du socialisme !
    M. le Premier ministre. Au cours de cette année, nous avons tenu les engagements pris devant eux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Et tenir ses engagements, c'est aussi une façon de réhabiliter la politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Le Président de la République m'a demandé de conduire un gouvernement de mission. Ce Gouvernement, avec ses femmes et avec ses hommes, mène un travail d'équipe,...
    Mme Martine David. Pas grâce à vous !
    M. le Premier ministre. ... une équipe unie avec une majorité rassemblée à qui je veux rendre hommage.
    M. Bernard Roman. Ce sont des godillots !
    M. le Premier ministre. Ce Gouvernement a mené sa mission, avec le sens du dévouement, au service des Françaises et des Français.
    M. Léonce Deprez. Très bien !
    M. le Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je vous...
    M. Philippe Vuilque. Présentez des excuses !
    M. le Premier ministre. ... remercie de votre travail, du travail de l'Assemblée nationale (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) au service de la France, des Françaises et des Français.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Et les excuses !
    M. le Premier ministre. Ce travail, notre travail, ne mérite pas la censure.
    Au contraire, pour l'avenir, je vous propose un projet d'ouverture. (Mmes et MM. les députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et applaudissent longuement. - Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Huées sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La discussion est close.
    Chers collègues, je vais maintenant mettre aux voix la motion de censure.
    Le scrutin est donc annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Seuls les députés favorables à la motion de censure participent au scrutin.
    La conférence des présidents a décidé que le vote se déroulerait dans les salles voisines de l'hémicycle.
    Je précise que les délégations de vote doivent avoir été enregistrées avant l'annonce du scrutin.
    Le scrutin va être ouvert pour quarante-cinq minutes : il sera donc clos à dix-huit heures quinze.
    Je vais maintenant suspendre la séance. Elle sera reprise, pour la proclamation du résultat, vers dix-huit heures trente.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-huit heures trente, sous la présidence de M. François Baroin.)

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN,
vice-président

    M. le président. La séance est reprise.
    Voici le résultat du scrutin :
Majorité requise pour l'adoption de la motion de censure

289
Pour l'adoption   176

    La majorité requise n'étant pas atteinte, la motion de censure n'est pas adoptée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Je vais maintenant suspendre la séance, qui sera reprise vers dix-neuf heures.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq.)
    M. le président. La séance est reprise.

2

RÉFORME DES RETRAITES

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence,
d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi portant réforme des retraites (n°s 885, 898).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée après avoir entendu les orateurs inscrits à l'article 78.

Rappel au règlement

    M. Pascal Terrasse. Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse, pour un rappel au règlement.
    M. Pascal Terrasse. Dans son intervention, M. le Premier ministre nous a indiqué que les ménages profiteraient à nouveau, en 2004, d'une baisse significative de l'impôt sur le revenu...
    M. Jean Marsaudon et M. Jean-Claude Abrioux. Cela n'a rien à voir avec un rappel au règlement !
    M. Pascal Terrasse. ... notamment via des déductions nouvelles liées à l'épargne-retraite. Or, nous allons justement parler de celle-ci, puisque le titre V est relatif à ce dispositif.
    Nous disons, depuis maintenant quatre semaines, que ce système d'épargne-retraite ou de fonds de capitalisation est injuste, parce qu'il ne profitera qu'aux seuls salariés qui auront les moyens de souscrire à ce type d'épargne. On nous dit que tous les Français pourront en profiter. Monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, je vous pose solennellement la question suivante : comment les 50 % de ménages qui ne paient pas l'impôt sur le revenu bénéficieront-ils du cadeau fiscal dont parle M. Raffarin ? Vous allez certainement me répondre : « Par un crédit d'impôt. » Dans ce cas, quel sera le montant de ce crédit d'impôt, compte tenu de la situation budgétaire de la France et de son déficit, que de nombreux orateurs ont rappelé cet après-midi ? Sur quelles recettes allez-vous le gager ? Votre projet de loi ne dit rien d'un tel crédit d'impôt. Il ne dit rien des modalités de déductions nouvelles au titre de l'impôt sur le revenu. Sans doute me répondrez-vous que cela figurera dans les prochaines lois de finances, mais il n'est pas très sérieux de renvoyer à plus tard ce qui pourrait être fait tout de suite. Nous souhaiterions vous entendre sur ce point, monsieur le ministre, car nous considérons que l'épargne-retraite sous forme de fonds de capitalisation à la française ne profitera en réalité qu'aux seuls ménages les plus aisés.
    M. le président. Monsieur Terrasse, je ne suis pas sûr que c'était un rappel au règlement concernant le déroulement de la séance. Je tenais à le souligner.

Article 78 (suite)

    M. le président. Je rappelle les termes de l'article 78 :

TITRE V
DISPOSITIONS RELATIVES
À L'ÉPARGNE RETRAITE

    « Art. 78. - Toute personne a accès, à titre privé ou dans le cadre de son activité professionnelle, à un ou plusieurs produits d'épargne réservés à la retraite, dans des conditions de sécurité financière et d'égalité devant l'impôt. »
    La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le rappel au règlement de M. Terrasse me donne l'occasion de répondre à l'ensemble des questions qui ont été évoquées lors de la discussion de l'article 78. L'objectif du titre V, qui doit être mis en relation avec l'affirmation dès l'article 1er de notre attachement au régime de retraite par répartition est de permettre à tous de se constituer une épargne en vue de la retraite, dans des conditions de sécurité satisfaisantes et dans le respect du principe d'égalité devant l'impôt.
    Cet article vise donc à étendre - et c'est une première réponse à M. Terrasse - ce qui était jusqu'à présent réservé aux seuls fonctionnaires et agents publics et, depuis la loi relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle du 11 février 1994, la loi Madelin, aux travailleurs indépendants. Nous voulons étendre ces avantages à l'ensemble des salariés et, plus généralement, à l'ensemble des résidents sur le territoire national.
    L'article 79 crée ainsi le plan d'épargne individuel pour la retraite. Ces modalités sont précisées par un amendement du Gouvernement, qui a été déposé hier en début d'après-midi.
    M. Pascal Terrasse. On ne le connaît pas !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Pourquoi un amendement aussi substantiel à ce stade de la procédure ? Parce que le projet initial du Gouvernement se bornait à énoncer un principe. Il renvoyait à une loi ultérieure la détermination des règles sur ce nouveau produit d'épargne pour la retraite. Et vous aviez été nombreux, sur tous les bancs, à reprocher au Gouvernement un tel renvoi, qui laissait dans l'incertitude des choix importants.
    De nombreux amendements avaient d'ailleurs été déposés sur l'article 79. Ils montraient, par leur diversité même, combien il devenait nécessaire de préciser dès maintenant les choix du Gouvernement. Les travaux de plusieurs députés illustraient la richesse des réflexions sur ce sujet : le rapport d'Eric Woerth, les travaux de M. Novelli et de M. Fourgous et ceux qui ont été conduits par le rapporteur de la commission des finances, M. Bertrand. A la lumière de ces travaux et des échanges que nous avons eus avec les rapporteurs, le Gouvernement a estimé nécessaire de clarifier dès maintenant sa position. Nous n'entendons pas ouvrir l'espace aux fonds de pension. Nous souhaitons seulement que les Français puissent accéder librement à un dispositif d'épargne, en vue de la retraite, dans des conditions strictement égalitaires.
    M. Pascal Terrasse. Mais c'est la définition même des fonds de pension !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous souhaitons aussi que les règles prudentielles soient fixées dès à présent pour rassurer tout un chacun. C'est ainsi que l'amendement du Gouvernement précise les points suivants : le dispositif que nous proposons est un contrat d'assurance ; les dispositions du code des assurances garantissent des provisions et des règles de placement, et impliquent un suivi et un contrôle par la commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance, dont le rôle et les moyens sont renforcés par la loi sur la sécurité financière ; à la fin de cet amendement qui réécrit l'article 79, un principe de cautionnement des actifs garantissant les droits des adhérents au PEIR est posé pour prémunir les cotisants contre toute défaillance du gestionnaire ; enfin, le comité de surveillance créé par ce même amendement aura tout pouvoir pour vérifier la qualité et la sécurité des placements. Ce comité est composé, pour plus de la moitié, de représentants des adhérents, indépendants des gestionnaires.
    L'épargne salariale demeure, quant à elle, globalement inchangée - c'est l'article 81. Mais l'épargne collectée sur les PPESV sera orientée vers la retraite complémentaire. Cela se traduit, notamment, par un allongement de la durée de ce plan jusqu'à l'âge de la retraite et par un renforcement des règles prudentielles et de placement qui s'appliqueront aux nouveaux PPESVR.
    Cette évolution me permet de répondre à une critique formulée tout à l'heure sur les bancs du groupe socialiste, car elle atteste l'idée qu'il ne s'agit pas d'augmenter le taux d'épargne des ménages, qui est déjà, comme je l'ai dit dans mon propos introductif, très élevé, mais de faciliter son orientation vers la retraite. De fait, le dispositif aura pour effet d'orienter l'épargne vers l'épargne longue, ce qui sera favorable à l'économie.
    Une incitation fiscale est prévue à l'article 81. Son montant sera fixé par la prochaine loi de finances.
    Dans les mécanismes collectifs, l'amendement proposé après l'article 81, qui modifie les conditions dans lesquelles les contributions des employeurs aux régimes de retraite complémentaire et de prévoyance sont assujettis aux cotisations sociales, recueille l'assentiment du Gouvernement, dans la mesure où il rationalise les règles actuellement en vigueur, lesquelles ne permettent pas de distinguer les régimes complémentaires légalement obligatoires - ARCCO, AGIRC, AGFF notamment - des régimes supplémentaires mis en place dans le cadre de l'entreprise ou de la branche au titre de la retraite ou de la prévoyance. Il a aussi pour effet de poser le principe de l'exonération totale des cotisations versées aux régimes légalement obligatoires, y compris à l'AGFF, qui finance notamment la retraite à soixante ans, à l'ARCCO et à l'AGIRC.
    Ces régimes constituent, en effet, une partie intégrante de notre assurance vieillesse. Ils ont aussi pour effet de dégager une marge clairement identifiable pour les cotisations versées au régime supplémentaire, véritablement collectif.
    A cet égard, je veux rappeler que cet amendement permet d'éviter ce qui avait suscité, tant dans l'actuelle opposition qu'au sein de la majorité, des critiques sur le plan d'épargne retraite de la loi Thomas, à savoir qu'il avait pour effet d'entraîner une perte de recettes importantes pour la sécurité sociale, en contraignant, sans aucune possibilité d'y échapper, l'employeur à compléter l'épargne du salarié en vue de la retraite.
    De la même manière, il n'est pas envisageable que des dispositions tendant à permettre à tous d'épargner dans de bonnes conditions en vue de la retraite ne soient pas incluses dans le PLR. Sinon, il s'ensuivrait de fortes inégalités entre les citoyens, certains bénéficiant d'avantages fiscaux et sociaux importants en raison de leur statut ou en raison du dynamisme du dialogue social, au sein de leur entreprise ou de leur branche, tandis que d'autres seraient rejetés dans des produits d'épargne peu solidaires et parfois peu sûrs.
    Voilà, mesdames et messieurs les députés, l'esprit dans lequel le Gouvernement présente ce titre V et la raison qui l'a conduit à préciser l'article 79 dans un amendement. Quant à la question du crédit d'impôt, j'imagine que nous y reviendrons à l'occasion des amendements. C'est une question qui, comme le taux d'exonération fiscale, n'a pas vocation, du point de vue du Gouvernement, à être fixée dans le cadre de ce débat, mais dans celui de la loi de finances.
    M. le président. Je suis saisi des amendements identiques de suppression n° 89, n°s 2457 à 2605 et n°s 9944 à 9950.
    L'amendement n° 89 est présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère. Les amendements n°s 2457 à 2605 sont présentés par Mme Adam et les membres du groupe socialiste et apparentés. L'amendement n° 9944 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 9945 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 9946 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 9947 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 9948 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 9949 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 9950 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 78. »
    La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. L'intervention de M. le ministre modifie un peu la donne du débat sur le titre V.
    L'amendement que je défends vise à supprimer l'article 78. L'article 1er du projet de loi réaffirme solennellement le choix de la répartition au coeur du pacte social. Il nous semble contradictoire, dans le titre V, de mettre en place ce que nous nous obstinons à nommer des « fonds de pension ». Cela revient à introduire le ver dans le fruit, en fragilisant, à terme, le système par répartition.
    Pour ce qui est de la sécurité financière, vous appliquez la méthode Coué. Du fait des évolutions de la Bourse, ces derniers temps, la sécurité financière relève davantage de la croyance que des réalités. On va sans doute me répondre que sur la longue durée, finalement, ces évolutions ne sont pas si désastreuses que cela. Mais si les gros épargnants peuvent se permettre de perdre à certaines périodes, en espérant sur le long terme reconstituer leur capital, c'est moins vrai pour les épargnants plus modestes.
    Pour ce qui est de l'égalité devant l'impôt, des précisions s'imposent. En effet, si l'on peut parler d'égalité pour ceux qui paient l'impôt, pour les autres il en va autrement.
    Visiblement, le nouvel article 79 ne vise plus que les plans individuels. Mais s'il n'y a plus de plan collectif dans les entreprises, les salariés touchant les plus faibles salaires ne cotiseront pas. Le choix qui leur sera laissé sera donc de survivre avec une retraite de misère.
    Dans les entreprises où des plans collectifs seront mis en place, le niveau des salaires baissera, et cela aura des conséquences sur les petits salaires. Il faut rappeler qu'en 2003 l'abondement des entreprises sur les fonds d'épargne salariale est en recul, que 31 % des plans ne sont pas abondés par les entreprises, que 38 % ne sont abondés qu'entre 150 et 750 euros et que seulement 25 % des fonds le sont entre 750 à 1 500 euros. Il semble d'ailleurs que le président du MEDEF ait déjà annoncé que, de toute façon, il n'était pas question que les entreprises abondent ces nouveaux fonds d'épargne retraite.
    Une inégalité criante est en train de se créer : ceux qui auront des hauts salaires et de hauts revenus pourront souscrire à ces nouveaux fonds d'épargne retraite, ou y transférer leur épargne. Quant aux autres, ils devront se contenter des 85 % du SMIC - et encore, ce n'est pas sûr car il leur faudra pour cela justifier d'un certain nombre d'années cotisées et pas seulement de la durée totale d'assurance requise.
    Cette réforme, qui renforce, paraît-il, l'équité et la solidarité, crée en fait de nouvelles inégalités. Avec les autres articles, c'était déjà le cas - notamment pour les femmes. Elle en crée de nouvelles avec ce titre V.
    M. le président. La parole est à M. Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Je répondrai en même temps à l'intervention de M. le ministre.
    Il nous a dit qu'il renverrait l'essentiel de la discussion autour des exonérations sur le revenu à la loi de finances. On veut l'entendre, mais il faudrait d'ores et déjà qu'il nous donne quelques éléments sur ce plan. On nous parle de la mise en place d'un crédit d'impôt. Je souhaiterais savoir concrètement ce que cela va coûter aux finances publiques, dont la situation est catastrophique. Vous allez créer une dépense supplémentaire. Sur quelles recettes allez-vous la gager ?
    Monsieur le ministre, sur le titre V, nous devons avoir un débat sérieux. Personne, dans cette enceinte, n'est idéologiquement contre toute forme d'épargne. L'épargne existe en France, au point que nous sommes les champions du monde en la matière ! Le problème, c'est que cette épargne ne contribue pas à la croissance. Et même la baisse d'impôt que vous avez accordée aux plus riches ne lui a pas profité, car l'économie réalisée ainsi a été placée. D'ailleurs, la courbe de l'épargne progresse constamment dans notre pays.
    La question qu'il s'agit donc de se poser est celle de l'orientation, ou plutôt de la réorientation de cette épargne. Mais laquelle ? me demanderez-vous, monsieur le ministre. L'épargne de précaution, rapidement utilisable, du livret A, le livret de base doit être maintenue. Les plans d'épargne logement ou les comptes épargne logement jouent également un rôle très important en faveur de l'activité économique en permettant l'accession au logement. Il ne convient pas non plus de toucher à ce dispositif. Reste un dispositif qui pèse massivement sur l'épargne : l'assurance vie. Vous devrez expliquer, monsieur le ministre, que vous êtes prêt à réorienter les masses financières contenues dans les véhicules d'épargne de type assurance vie au profit du système prévu par le projet de loi. Car les assureurs seront très attentifs à vos réponses.
    Je reviendrai sur le rapport d'Eric Woerth qui affirme, à juste titre, qu'il faudra « compenser la dégradation du taux de remplacement lors du départ à la retraite, cette compensation dépendant de l'ampleur de la réforme des régimes de base ». Il fait preuve de courage en reconnaissant que le dispositif que vous avez mis en place dégradera progressivement le niveau des pensions et devra s'appuyer sur un système d'épargne retraite à la française ou fonds de capitalisation - n'ayons pas peur des mots.
    Il est clair que vous mettez en place un système hybride. D'ailleurs, sur les plans intellectuel et idéologique, vos réflexions ont une forme hybride, parce que vous n'allez pas au bout de votre logique. On pourrait vous le reprocher.
    Je suis d'autant plus à l'aise pour en parler que j'ai été rapporteur du texte de loi sur l'épargne salariale. Celle-ci fonctionne très bien. Mais il fallait y mettre davantage de transparence et il convenait d'en faire profiter les petites et moyennes entreprises - d'où la création du PPESV, que vous avez évoquée.
    L'épargne salariale ne doit pas être trop longue pour ne pas faire peur ; les salariés eux-mêmes et les organismes gestionnaires le reconnaissent. En outre, il fallait aménager des possibilités de sortie dans des cas très précis. Nous l'avons mis en évidence dans le cadre de la loi.
    Votre projet de loi instaure, lui, une épargne de très longue durée qui permettra une sortie en rentes. Nous avons estimé que cette sortie en rentes n'était pas nécessaire, tant il est vrai qu'on peut, aujourd'hui, à l'issue d'un PPESV traditionnel, passer d'un organisme à un autre, pour transformer le véhicule en sortie en rentes.
    M. le président. Monsieur Terrasse, je vous prie de conclure.
    M. Pascal Terrasse. Cela depend de l'appréciation individuelle de chacun.
    Monsieur le ministre, vous êtes aujourd'hui au milieu du gué, sans savoir ce qu'il convient de faire.
    M. le président. Concluez, je vous prie !
    M. Pascal Terrasse. Je termine, monsieur le président, mais j'aurai l'occasion de revenir sur le sujet.
    Si nous relisons les interventions de M. Goulard ou de M. Accoyer faites il y a maintenant quelques années,...
    M. le président. Cela n'est pas possible !
    M. Pascal Terrasse. Je ne les lirai pas, monsieur le président !
    M. Bernard Roman. Nous le regrettons...
    M. Pascal Terrasse. ...nous apprenons qu'ils souhaitaient la mise en place d'un système par capitalisation.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Pur délire !
    M. Pascal Terrasse. Si aujourd'hui les valeurs boursières et les parts sociales détenues par les petits porteurs étaient au même niveau qu'il y a trois ans, évidemment...
    M. le président. Monsieur Terrasse, concluez, cette fois !
    M. Pascal Terrasse. Bref, monsieur le ministre, vous faites fausse route, et sur le plan social et sur le plan économique.
    M. le président. La parole est à M. Alain Néri.
    M. Alain Néri. Monsieur le président, monsieur le ministre, Pascal Terrasse a expliqué les raisons pour lesquelles nous proposons la suppression de cet article qui pose plus de questions qu'il n'apporte de réponses, et soulève même de grandes inquiétudes.
    Cet article, dites-vous, permet à chaque citoyen d'accéder à l'épargne-retraite pour compléter sa pension de vieillesse. Mais, monsieur le ministre, comment voulez-vous que les plus modestes, alors qu'ils ont les plus grandes difficultés à trouver à la fin du mois un peu d'argent pour faire vivre leur famille, puissent accéder à cette épargne retraite ? Et puis, il s'agit là d'une épargne complètement sclérosée, qui ne participe pas au développement économique.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est faux !
    M. Alain Néri. Enfin, devant les fluctuations boursières d'aujourd'hui, comment voulez-vous que les plus modestes, qui ont fort peu de ressources à consacrer à cette épargne retraite, acceptent de prendre le risque de voir détruit le peu d'argent qu'ils ont pu mettre de côté ?
    Autant dire que cette épargne-retraite ne s'adresse qu'aux plus aisés. Vous le reconnaissez vous-même : votre dispositif ouvre droit à des déductions fiscales. Par définition, celles-ci ne peuvent intéresser que des ménages imposables. Or plus de 50 % des Français aujourd'hui ne paient pas d'impôt sur ce revenu. Vous créez donc en fait une possibilité d'épargne pour ceux qui en ont les moyens, et vous pénalisez ceux qui ne les ont pas. C'est là une véritable mesure discriminatoire prise à l'encontre des plus modestes.
    Surtout, vous nous dites, monsieur le ministre, que vous avez les plus grandes difficultés à équilibrer le financement de ces retraites. Or, vous allez vous priver de ressources importantes. Nous souhaiterions donc savoir comment le Gouvernement va pouvoir financer cette proposition, alors que, dans ce domaine, tous les chiffres nous annoncent des catastrophes. Certes, vous nous renvoyez à la loi de finances. Mais autant nous dire : demain, on rase gratis. Nous aimerions avoir aujourd'hui quelques précisions, car nous n'avons pas l'intention d'acheter un âne dans un sac. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à  M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Paul Valéry le disait en son temps, parlant de la poésie : « Au fur et à mesure que passe le temps, la réalité apparaît de plus en plus nettement. » Il vous aura fallu 77 articles pour arriver à l'essentiel de votre réforme ou plutôt à son coeur, pour reprendre un mot qui vous est cher.
    Mme Martine David. C'est un mot cher à Raffarin !
    M. Daniel Paul. Ces 77 articles organisent les conditions optimales d'une mise en oeuvre du titre V de votre réforme, par lequel commence cet article 78, qui inaugure son contenu : la généralisation de la capitalisation pour la retraite.
    Bien sûr, cette tentative de capitalisation n'est pas nouvelle. Nous avons eu les lois Thomas en 1996, et l'épargne salariale en 2001. Mais jamais la chose n'avait été si clairement exprimée.
    M. Richard Mallié. 2001, c'est vous ! C'est Fabius !
    M. Daniel Paul. Au moins ce texte a-t-il le mérite de clarifier les choses ! Toujours est-il que, contrairement à ce que vous avez défendu avec constance, les dispositions que vous mettez en place en autorisant l'accès à chacun à un ou plusieurs produits d'épargne retraite ne sont rien d'autre que la capitalisation de la retraite.
    Or, qu'est-ce que la mise en place de cette capitalisation généralisée ? Les retraites par capitalisation, c'est un système où une fraction de l'épargne est soustraite des revenus d'activité pour être placée et procurer des rendements financiers au moment de la retraite. Il y a un lien direct entre l'épargne de chaque personne pendant sa période d'activité et la rente-pension qu'elle perçoit pendant sa retraite. Mais ce lien est singulièrement fragile.
    En effet, une personne qui épargne dès 2003 pour sa retraite ne fait qu'accumuler des potentialités de rente pour sa retraite lorsqu'elle la prendra en 2020 ou 2040, selon l'échéance. Pourquoi des potentialités, et non des garanties ? Parce que la retraite qui lui sera versée sous forme de rente en 2020 ou 2040 dépendra uniquement de la rentabilité de l'épargne-capital mesurée en 2020 ou 2040. Cette remarque illustre le principe selon lequel la rentabilité d'une épargne n'est pas transposable dans le temps. La valeur, comme la monnaie qui l'exprime, ne peut se mettre en conserve.
    Il en résulte donc que la rente, qui doit faire office de pension de retraite, n'est absolument pas assurée dans la durée par les marchés financiers. Il est bon de rappeler, à ce moment de l'exposé des motifs de cet amendement, que cette garantie est donnée en revanche par le système par répartition. Mais revenons à la capitalisation.
    Si à l'échéance - 2020 ou 2040 en l'occurrence - les marchés financiers ne permettent pas de fournir une rente suffisante parce qu'ils sont en phase de dépression - comme c'est le cas aujourd'hui -, le niveau de la rente ne permettra pas d'obtenir un montant de pension conséquent. Sans aller jusqu'aux Etats-Unis, c'est par exemple le cas de la Grande-Bretagne, où la valeur des investissements dans les fonds de pension de certaines entreprises s'est effondrée à la suite de la baisse des cours boursiers. Les salariés de ces entreprises ont été contraints, pour ceux qui le pouvaient, à reculer la date de leur départ en retraite en attendant le retour de la hausse des cours, pour espérer liquider leurs investissements de retraite au niveau escompté initialement, et pour les autres à prendre leur retraite avec un niveau de pension inférieur à celui qui leur était dû. Joyeuse perspective !
    Il apparaît donc clairement que confier sa retraite, à savoir les moyens de vivre dignement ses vieux jours, à la bourse, constitue un risque particulièrement important de ne pas être rétribué de son épargne. Les petis porteurs ont d'ailleurs pu se rendre compte de la situation qui leur a été réservée lors de la privatisation de certains fleurons de notre économie. Dans nos têtes résonne encore la voix sensuelle de notre grande actrice Catherine Deneuve, intervenant pour une publicité célèbre. C'est une interpellation que l'on peut encore faire à nos collègues de l'hémicycle, de quelque bord qu'ils soient. Réfléchissez ! Oui, réfléchissez avant d'accepter de voter le contenu d'un article qui voudrait nous imposer la création d'une épargne salariale à destination exclusive de la retraite. Il s'agit non pas de votre retraite, mais de celle de vos enfants. Nous demandons la suppression de l'article 18.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. La commission n'a pas accepté ces amendements de suppression. Je vais développer en quelques instants les raisons qui ont conduit la majorité de la commission, très largement représentée ici, à adopter cette position, ce qui m'évitera d'intervenir longuement par la suite.
    L'article 78, qui définit les objectifs du titre V visant à apporter un complément de retraite, ne vient, en aucune façon, atténuer l'objectif majeur de ce projet de loi qui sauve, nous l'avons vu, le régime de retraite par répartition auquel nous sommes tous très attachés en allongeant les cotisations. Au-delà, ce texte apporte des avancées sociales majeures, en particulier pour les petites retraites, pour les très longues carrières, pour les familles, pour les handicapés, pour les conjoints survivants.
    M. Pascal Terrasse. Venons-en au sujet ! Parlez de l'article 78 ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Paul Garraud. Laissez donc le rapporteur s'exprimer !
    M. Pascal Terrasse. Il doit répondre sur l'amendement ! Monsieur le président, expliquez au rapporteur qu'il y a un règlement !
    M. le président. Monsieur Terrasse, vous vous êtes longuement exprimé. Vous avez même dépassé votre temps de parole. Laissez à présent le rapporteur répondre.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Par ailleurs, le titre V développe deux dispositifs qui permettront aux retraités d'avoir accès à l'épargne retraite. Il reprend notamment, en apportant plus de sécurité, le dispositif qui avait été pris pas la gauche.
    M. Pascal Terrasse. Nous en sommes fiers !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Je veux parler du PPESV, qui a été institué par une loi de 2001, et que nous avons transformé en PPESVR,...
    M. Pascal Terrasse. Vous confondez épargne retraite et épargne salariale !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... à la suite d'adaptations somme toute limitées. Le titre V reprend également le dispositif des plans d'épargne retraite qui ont été mis en place en 1967 et qui sont gérés par les partenaires sociaux salariaux.
    Enfin, pour avoir demandé en vain depuis 1998, à l'occasion de l'examen de chaque PLFSS, au gouvernement de l'époque de bien vouloir faire bénéficier l'ensemble des salariés des avantages dont jouissaient ceux qui pouvaient cotiser à la PREFON...
    M. Pascal Terrasse. Il n'y a pas que la PREFON, il y a trois autres organismes de ce type !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... je ne peux que me féliciter que ce soit aujourd'hui chose faite.
    M. Jean-Luc Warsmann. C'est vrai !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est là une nouvelle mesure d'équité.
    Voilà les raisons pour lesquelles les amendements de suppression ont été rejetés par la commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Cet article vise à donner à tous les Français un accès égal à l'épargne retraite.
    M. Yves Bur. Enfin !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Vouloir le supprimer signifie soit que l'on est hostile à toute forme d'épargne retraite, principe que certains d'entre vous défendent,...
    M. Daniel Paul. Oui !
    M. Maxime Gremetz. C'est clair !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... soit que l'on s'oppose à cette mesure parce qu'elle est proposée par ce gouvernement et cette majorité.
    M. Daniel Paul. C'est également vrai !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Mais l'opposition doit alors être crédible sur cette question de l'épargne retraite. Des voix très diverses, voire illustres, se sont fait entendre en effet ces dernières années pour défendre l'idée d'un complément de retraite par épargne - j'ai même cru en l'écoutant à l'instant que M. Terrasse n'était pas fondamentalement hostile à cette idée.
    M. Pascal Terrasse. Absolument !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Et pendant nos débats, il m'est arrivé de lire dans un grand journal du soir qu'un éminent représentant socialiste souhaitait même qu'on aille plus loin que ce que nous proposons, c'est-à-dire vers des fonds de pensions obligatoires.
    M. Pascal Terrasse. On va en parler !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Mais pour être crédible, il aurait fallu que ceux qui défendent le principe de l'épargne retraite aient le courage de supprimer tous les instruments d'épargne retraite qui existaient dans notre pays. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Seulement voilà, certains de ces instruments étaient réservés à certaines catégories de Français. (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.) Et ils n'ont pas voulu y toucher, pas plus qu'ils n'ont modifié la durée de cotisation dans la fonction publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Il est donc tout à fait légitime qu'aujourd'hui nous élargissions les possibilités qui étaient offertes aux fonctionnaires à l'ensemble des Français. C'est une question d'équité. Dans cet esprit, j'invite l'Assemblée à repousser ces amendements de suppression de l'article.
    M. le président. La parole est à  M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, je comprends mieux cette explication que la précédente. Elle me paraît plus concrète, en effet. Nous sommes pour une épargne salariale et non pour une épargne retraite. Cette dernière est exclue pour nous. Nous en avions d'ailleurs beaucoup discuté quand nous étions dans la majorité plurielle...
    M. Pierre-Louis Fagniez. Souvenir ! Souvenir !
    M. Maxime Gremetz. Nous n'acceptons que le système de retraite par répartition, solidaire, intergénérationnel et basé sur les richesses produites.
    Nous considérons également qu'il faut élargir l'assiette des cotisations en tenant compte notamment de l'évolution des technologies et de l'histoire de l'industrie, des services et des nouvelles activités. Telle est la démarche qui a toujours été la nôtre.
    S'agissant de l'épargne salariale, nous avions posé nos conditions. Nous avions dit que nous voulions qu'elle soit volontaire, ouverte à tous les salariés et abondée aussi par les employeurs. Nous avions également tranché la question de la sortie, rente ou capital. C'est après avoir pris toutes ces précautions et consulté les organisations syndicales que nous avons donné notre accord en précisant qu'il était exclu, au moment où nous obtenions l'abrogation de la loi Thomas sur les fonds de pension, qu'on fasse rentrer par la fenêtre ce que nous avions réussi à faire sortir par la porte.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est exactement ce que certains voulaient faire !
    M. Maxime Gremetz. Voilà comment les choses se sont passées.
    En outre, Pascal Terrasse et moi-même devions faire un rapport sur ces mesures nouvelles. Nous l'avions obtenu de M. Fabius. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Marie Geveaux. Un rapport de plus !
    M. Maxime Gremetz. Non ! Il s'agissait de voir quels moyens démocratiques pouvaient être mis en oeuvre.
    M. Denis Jacquat. En tout état de cause, ce rapport n'a jamais vu le jour !
    M. Maxime Gremetz. Il fallait faire gérer ces épargnes salariales, notamment par des banques. Mais malgré nos multiples demandes, nous n'avons pas pu faire ce rapport. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'était l'Ancien régime ! (Sourires.)
    M. Maxime Gremetz. Et quand des engagements ne sont pas tenus, il peut y avoir anguille sous roche. Nous avons donc été très attentifs. A partir de là, nous avons toujours dit notamment que nous refusions qu'un troisième étage soit ajouté à la fusée. Si vous vous reportez au Journal officiel, vous pourrez constater que certains étaient favorables à l'épargne retraite et non aux fonds de pension, tandis que d'autres ne voulaient ni l'une ni l'autre mais souhaitaient quand même un troisième étage à la fusée pour les retraites. Nous n'étions pas d'accord, quant à nous.
    M. le président. Concluez, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, je le précise une fois encore : nous sommes contre toute forme d'épargne retraite et contre toute forme de fonds de pension. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Pierre Hellier. Même la PREFON ?
    M. le président. Ne relancez pas le débat !
    M. Maxime Gremetz. Cela concerne 150 000 personnes ! Là, il est question de 12 millions de salariés !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La CGT est pour la PREFON !
    M. Maxime Gremetz. Non ! C'est un accord minoritaire ! J'en ai la preuve. Et je peux vous la fournir. J'ai ici la publicité de la PREFON !
    Voilà les raisons pour lesquelles nos amendements visent à supprimer l'article 78. Accepter les fonds de pension à la française ou l'épargne retraite - peu importe le nom qu'on donne à ce dispositif - revient à miner de l'intérieur notre système par répartition !
    M. le président. La parole est M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Si le seul objectif du titre V est la transposition dans le secteur privé du système en vigueur pour les fonctionnaires - à savoir la PREFON -, je trouve qu'il s'agit d'une ambition bien limitée.
    M. Patrice Martin-Lalande. C'est déjà pas mal !
    M. Pascal Terrasse. Regardez combien de fonctionnaires sont aujourd'hui intéressés par la PREFON !
    M. Yves Bur. De plus en plus !
    M. Pascal Terrasse. Oh non, pas de plus en plus, en dépit de la pression exercée par les médias sur ce fonds à propos duquel je ne porte quant à moi aucun jugement négatif.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Alors, pourquoi critiquez-vous l'article ?
    M. Pascal Terrasse. Par ailleurs, il existe déjà, non seulement pour les fonctionnaires, mais aussi pour les autres salariés, des systèmes de déduction fiscale pour les cotisations afférentes aux régimes de retraite complémentaire. Je pense notamment aux dispositions des articles 83 ou 88 du code général des impôts. Les mécanismes existant en matière d'épargne retraite sont ouverts aussi bien aux commerçants et aux artisans qu'aux salariés.
    En réalité, je crains qu'il ne s'agisse d'un système hybride. Je lis comme vous, je l'imagine, les courriers qui nous sont envoyés par les grandes associations. Ainsi, selon la FONDACT, une association pour la gestion participative, le dispositif que vous allez mettre en place risque de capter une partie de l'épargne salariale au profit de l'épargne retraite. Or la différence qui sépare ces deux types d'épargne est fondamentale. L'épargne salariale permet de faire profiter les salariés de la richesse de l'entreprise. J'y suis, quant à moi, absolument favorable, car elle permet aux salariés de bénéficier d'une partie de la richesse qu'ils produisent.
    Les dispositifs d'épargne salariale, gérés par les partenaires sociaux, ont été améliorés. Le rapporteur l'a d'ailleurs rappelé à juste titre : depuis les débuts de la participation et de l'intéressement, de nombreuses mesures ont été prises. Aujourd'hui, cela fonctionne très bien. Un peu plus de transparence serait sans doute fort sympathique, de même qu'il serait bon d'améliorer l'accès des petites entreprises à cette forme d'épargne. Mais personne ne veut la remettre en question.
    Avec ce titre V, nous nous trouvons dans une logique différente. Et même totalement différente : il ne s'agit plus de l'intéressement ou de la participation, mais d'un véhicule d'épargne destiné à renforcer les pensions de retraite. La durée sera donc beaucoup plus longue.
    Vous devez donc nous expliquer votre logique. Soit vous voulez augmenter le volume de l'épargne des Français, ce qui se révèlera néfaste pour l'économie, soit les fonds placés en assurance-vie seront peu à peu siphonnés. Osez le dire ! Allez jusqu'au bout des choses !
    Voulez-vous transformer l'épargne de ce pays en épargne retraite ? J'aimerais le savoir, comme toutes celles et ceux qui détiennent un livret d'assurance-vie et en sont a priori très contents.
    J'en prends conscience en lisant les amendements de M. Novelli : vous avez voulu faire plaisir à l'aile la plus libérale de votre majorité. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Yves Bur. Oh là là !
    M. Daniel Paul. Mais bien sûr !
    M. Pascal Terrasse. Certains, dans vos rangs, ont le courage d'aller jusqu'au bout de leur logique.
    M. Jean-Paul Garraud. Nous avons du courage, en effet !
    M. Pascal Terrasse. Mais d'autres préfèrent la cacher, ce qui n'est pas acceptable. La plupart d'entre vous n'ont plus d'idéologie. Non que vous ayez peur d'affronter les Français - vous en êtes parfaitement capables -, mais parce que vous avez vu s'effondrer la valeur des parts sociales détenues par les particuliers, et parce que vous comprenez que l'on ne peut pas jouer les futures retraites à la Bourse.
    Les mécanismes que vous mettez en place dans ce titre V ne correspondent donc à rien et ne profiteront à personne. Ils ne serviront qu'à masquer le fait que vous aurez affaibli considérablement le système de retraite par répartition. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques n° 89, n°s 2457 à 2605 et n°s 9944 à 9950.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de huit amendements, n°s 9951 à 9957 et n° 90, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements n°s 9951 à 9957 sont identiques.
    L'amendement n° 9951 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 9952 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 9953 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 9954 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 9955 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 9956 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 9957 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Dans l'article 78, les mots : "à titre privé ou dans le cadre de son activité professionnelle, à un ou plusieurs produits d'épargne réservés à la retraite, sont remplacés par : "à titre privé, à un ou plusieurs produits d'épargne salariale,. »
    L'amendement n° 90, présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère, est ainsi rédigé :
    « Dans l'article 78, supprimer les mots ; "ou dans le cadre de son activité professionnelle. »
    La parole est à M. Gilbert Biessy.
    M. Gilbert Biessy. Ces amendements visent à supprimer la dimension collective et obligatoire de l'épargne retraite. Nous nous opposons au développement des fonds de pension aux dépens d'un système basé prioritairement sur la répartition.
    Le projet de loi prévoit la mise en oeuvre d'un plan d'épargne pour la retraite par accord collectif de branche ou d'entreprise. Un tel plan s'imposera alors au salarié. On voit mal, en effet, comment celui-ci pourrait, au moment de l'embauche, contester le principe même de l'adhésion au plan, sauf à renoncer à l'emploi qu'il vise. Compte tenu de l'effet obligatoire des accords collectifs, la cotisation s'imposera aux salariés si l'accord d'entreprise le prévoit.
    Or la baisse programmée et annoncée du niveau des pensions ne pourra qu'inciter à la conclusion d'accords d'entreprise mettant en place des fonds de pension. Cet encouragement à la capitalisation accentuera le désastre social, dans la mesure où l'effort de cotisation ne sera accessible qu'aux rémunérations élevées, ce que confirme la pratique d'un tel système dans tous les pays où il a été introduit. A l'inverse, le secteur privé obtiendra, avec l'aide du Gouvernement, l'accès à un marché juteux qu'il se désespérait de voir lui échapper.
    Organisant la régression sociale, le dispositif présenté est de surcroît incohérent sur le plan économique. La capitalisation, critiquable sur le plan social, l'est aussi du point de vue de l'efficience économique.
    Après Enron, après WorldCom,...
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Ca y est !
    M. Gilbert Biessy. ... après les lourdes pertes subies par les fonds de pension anglo-saxons, quelle catastrophe financière faudra-t-il encore pour que l'on renonce enfin à jouer la retraite des Français à la roulette ?
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. ... russe !
    M. Gilbert Biessy. On nous affirme que la capitalisation ne viendra qu'en complément du système de répartition, et on prétend ainsi combiner les avantages des deux systèmes. En réalité, ils travaillent l'un contre l'autre. La capitalisation exige des revenus du capital élevés, ce qui implique un tassement de la masse salariale, socle du régime par répartition.
    Les avantages fiscaux accordés par le Gouvernement, sans lesquels aucun régime d'épargne retraite ne pourrait se développer, seront autant de ressources en moins pour la répartition, qui sera peu à peu cannibalisée.
    M. François Asensi et M. Maxime Gremetz. Très bien !
    M. André Chassaigne. Voilà de l'argumentation !
    M. le président. La parole est à  Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 90.
    Mme Martine Billard. Je voudrais revenir sur les propos de Pascal Terrasse. Il y a en effet une vraie différence entre l'épargne salariale et l'épargne retraite. L'épargne salariale, c'est la participation des salariés aux bénéfices de leur entreprise. De par sa nature même, elle peut être fluctuante. En fonction des bénéfices de l'entreprise, certaines années le compte sera abondé, d'autres années il ne le sera pas.
    S'agissant de l'épargne retraite, si le système par répartition permet que les retraites soient d'un niveau suffisant, alors il n'y a aucune raison d'obliger les salariés à souscrire à un système d'épargne qui ne peut être débloqué qu'au moment de la retraite et sous forme de rente.
    M. Jean-Paul Garraud. Vous n'avez rien compris !
    M. Eric Woerth. Personne n'est obligé !
    M. Jean-Paul Garraud. Ils ont le choix !
    Mme Martine Billard. Il est vrai que le Gouvernement propose maintenant un système individuel, l'idée de système collectif ayant suscité les protestations du MEDEF. Son amendement, qui réécrit l'article 79, ne fait que confirmer l'inégalité entre ceux qui pourront épargner et ceux qui ne le pourront pas.
    L'épargne salariale peut être débloquée au bout d'un certain temps et utilisée par le salarié, tandis que l'épargne retraite sera bloquée jusqu'à la retraite. Le choix de ce dispositif montre donc bien que le système par répartition sera devenu insuffisant à vos yeux.
    Quant à l'élargissement de la PREFON à l'ensemble des salariés,...
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est une bonne mesure !
    Mme Martine Billard. ... il ne s'agit, en pratique, que d'étendre aux cadres du secteur privé un système qui ne bénéficiait qu'aux cadres A de la fonction publique. Ne pourront donc bénéficier de cette mesure que les Français qui touchent des salaires suffisants pour leur permettre d'en consacrer une part importante à une épargne totalement bloquée jusqu'à la retraite. Avouez que ce n'est le cas que d'une très petite fraction des salariés.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
    Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques n°s 9951 à 9957.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 90.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 78.
    (L'article 78 est adopté.)
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3

MODIFICATION
DE L'ORDRE DU JOUR PRIORITAIRE

    M. le président. M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement la lettre suivante :

    « Paris, le 2 juillet 2003    

            « Monsieur le président,
            « J'ai l'honneur de vous informer qu'en application des articles 29, 30 et 48 de la Constitution, le Gouvernement demande de retirer de l'ordre du jour du mercredi 2 juillet et du jeudi 3 juillet le matin le projet de loi organique relatif au référendum local, adopté par le Sénat, et le projet de loi organique relatif à l'expérimentation par les collectivités locales.
            « Je vous prie d'agréer, monsieur le président, l'expression de mes sentiments les meilleurs. »
    L'ordre du jour prioritaire est ainsi modifié.

4

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :
    Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 885, portant réforme des retraites :
    M. Bernard Accoyer, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport n° 898) ;
    M. François Calvet, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (avis n° 895) ;
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis n° 899) ;
    Mme Claude Greff, rapporteure au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (rapport d'information n° 892).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexe au procès-verbal
de la 2e séance
du mercredi 2 juillet 2003
SCRUTIN PUBLIC
DANS LES SALLES VOISINES
DE LA SALLE DES SÉANCES (n° 305)


sur la motion de censure déposée par MM. Ayrault, Hollande et 113 de leurs collègues en application de l'article 49, alinéa 2, de la Constitution.

Majorité requise

289


Pour

176

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe socialiste (149) :     Pour : 149. - Mme Patricia Adam, M. Damien Alary, Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, MM. Jean-Marie Aubron, Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Eric Besson, Jean-Louis Bianco, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Patrick Bloche, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Marcel Cabiddu, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Michel Charzat, Alain Claeys, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mme Claude Darciaux, M. Michel Dasseux, Mme Martine David, MM. Jean-Pierre Defontaine, Marcel Dehoux, Michel Delebarre, Jean Delobel, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Julien Dray, Tony Dreyfus, Pierre Ducout, Jean-Pierre Dufau, Jean-Louis Dumont, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Henri Emmanuelli, Claude Evin, Laurent Fabius, Albert Facon, Jacques Floch, Pierre Forgues, Michel Françaix, Jean Gaubert, Mmes Nathalie Gautier, Catherine Génisson, MM. Paul Giacobbi, Joël Giraud, Jean Glavany, Gaëtan Gorce, Alain Gouriou, Mmes Elisabeth Guigou, Paulette Guinchard-Kunstler, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, François Huwart, Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Serge Janquin, Armand Jung, Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Jean-Yves Le Drian, Michel Lefait, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Patrick Lemasle, Guy Lengagne, Mme Annick Lepetit, MM. Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Bernard Madrelle, Louis-Joseph Manscour, Philippe Martin (32), Christophe Masse, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Arnaud Montebourg, Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget, MM. Michel Pajon, Christian Paul, Christophe Payet, Germinal Peiro, Jean-Claude Perez, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Jean-Jack Queyranne, Paul Quilès, Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, MM. Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Mme Ségolène Royal, M. Michel Sainte-Marie, Mme Odile Saugues, MM. Roger-Gérard Schwartzenberg, Henri Sicre, Dominique Strauss-Kahn, Mme Christiane Taubira, MM. Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Daniel Vaillant, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vergnier, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 22. - MM. François Asensi, Gilbert Biessy, Alain Bocquet, Patrick Braouezec, Jean-Pierre Brard, Jacques Brunhes, Mme Marie-George Buffet, MM. André Chassaigne, Jacques Desallangre, Frédéric Dutoit, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Pierre Goldberg, Maxime Gremetz, Georges Hage, Mmes Muguette Jacquaint, Janine Jambu, MM. Jean-Claude Lefort, François Liberti, Daniel Paul, Jean-Claude Sandrier et Michel Vaxès.
Non-inscrits (12) :
    Pour : 5. - Mmes Huguette Bello, Martine Billard, MM. Gérard Charasse, Noël Mamère et Emile Zuccarelli.