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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU SAMEDI 19 OCTOBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du vendredi 18 octobre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE

1.  Loi de finances pour 2003 (première partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Après l'article 9 (suite) «...»

Amendement n° 312 de M. Vaxès : MM. Michel Vaxès, Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances ; Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. - Rejet.
Amendements n°s 72 de M. Vaxès et 272 de M. Merville : MM. Jean-Claude Sandrier, le rapporteur général, Michel Bouvard, le ministre. - Rejets.
Amendement n° 74 de M. Vaxès : MM. Michel Vaxès, le rapporteur général, le ministre rejet. - Rejet.
Amendements n°s 61 et 60 de M. Martin-Lalande : MM. Patrice Martin-Lalande, le rapporteur général, le ministre. - Rejets.
Amendement n° 53 de M. Marleix : MM. Philippe Auberger, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendements n°s 54 de M. Marleix et 128 corrigé de M. Alain Suguenot : MM. Philippe Auberger, Patrice Martin-Lalande, le rapporteur général, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 54.
M. Patrice Martin-Lalande. - Retrait de l'amendement n° 128 corrigé.
Amendement n° 271 de M. Marleix : M. Philipppe Auberger. - Retrait.
Amendements identiques n°s 36 de la commission des finances et 283 de M. Michel Bouvard : MM. le rapporteur général, Michel Bouvard, le ministre, Marc Laffineur. - Retraits.
Amendement n° 82 de M. Vaxès : MM. Jean-Claude Sandrier, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.

Article 10. - Adoption «...»
Article 11 «...»

M. Michel Vaxès.
Amendement n° 37 de la commission : MM. le rapporteur général, le ministre, Marc Laffineur. - Adoption de l'amendement n° 37 modifié.
Amendement n° 206 de M. Bonrepaux : MM. Didier Migaud, le rapporteur général, le ministre, Augustin Bonrepaux, Jean-Pierre Brard. - Rejet.
Amendement n° 309 rectifié de M. Bonrepaux : MM. Augustin Bonrepaux, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 11 modifié.

Article 12. - Adoption «...»
Article 13 «...»

Amendement n° 228 de M. Carrez : MM. le rapporteur général, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 77 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 11 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 293 de M. Bonrepaux et 229 de M. Carrez : MM. Augustin Bonrepaux, le rapporteur général, le ministre, Mme Christine Boutin. - Retrait de l'amendement n° 229 ; rejet de l'amendement n° 293.
Adoption de l'article 13 modifié.

Article 14 «...»

MM. Didier Migaud, Xavier Bertrand, Eric Woerth, Augustin Bonrepaux, Maurice Leroy, Marc Laffineur, Jean-Yves Chamard, Jean-Louis Dumont, Michel Bouvard, Jean-Claude Sandrier.
Amendements n°s 154 et 167 de M. Albertini, et 63 rectifié et 308 de M. Aeschlimann : MM. Maurice Leroy, Manuel Aeschlimann, Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances ; le ministre, le rapporteur général, Michel Vaxès, Mme Christine Boutin, MM. Alain Joyandet, Didier Migaud, Jean-Pierre Brard. - Retrait des amendements n°s 63 rectifié et 308 ; rejet, par scrutin, de l'amendement n° 154 ; rejet de l'amendement n° 167.
Amendement n° 157 de M. Albertini : MM. Maurice Leroy, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 199 de M. Vaxès : MM. Jean-Claude Sandrier, le rapporteur général, le ministre, Augustin Bonrepaux. - Rejet.
Amendement n° 12 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 176 de M. Vaxès : MM. Jean-Claude Sandrier, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 321 de M. Laffineur et 38 de la commission : MM. Marc Laffineur, le rapporteur général, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 38 ; adoption de l'amendement n° 321.
Amendement n° 231 rectifié de M. Carrez : M. le rapporteur général. - Retrait.
Amendement n° 81 de M. Vaxès : MM. Michel Vaxès, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 14 modifié.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
2.  Ordre du jour des prochaines séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE
DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à neuf heures.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2003

PREMIÈRE PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2003 (n°s 230, 256).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Hier soir, l'assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'amendement n° 312 de M. Michel Vaxès portant article additionnel après l'article 9.

Après l'article 9 (suite)

    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 312, ainsi libellé :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « I. - Après le a quinquies de l'article 279 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « b quinquies. Les locaux appartenant à des établissements publics de santé. »
    « II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Monsieur le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, mes chers collègues, cet amendement a trait à l'extension du dispositif de TVA réduite aux locaux appartenant à des établissements publics de santé.
    Nous connaissons tous les difficultés des hôpitaux publics. Cet amendement propose donc d'alléger les coûts de réalisation des équipements publics et des investissements qui sont indispensables dans ce secteur. Il est en effet temps de mettre en adéquation les paroles sur les priorités de la santé avec les actes. Ce serait, au-delà des annonces de plans de modernisation par le ministre de la santé, un moyen rapide et un signe fort pour que notre système de santé reste envié de par le monde, comme il l'est aujourd'hui.
    Les députés communistes et républicains sont persuadés qu'un tel choix est partagé non seulement par tous les acteurs de santé, mais qu'il serait apprécié par la majorité de nos concitoyens. J'ajoute que l'application du taux réduit aurait pour effet d'améliorer l'efficacité des ressources de l'hôpital public qui préviennent des pouvoirs publics et de la sécurité sociale.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie général et du Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, la commission a donné un avis défavorable dans la mesure où les travaux dans les hôpitaux proprement dits ne sont pas cités dans l'annexe H qui autorise la réduction du taux de TVA pour les seuls locaux d'habitation. Ainsi, les unités d'hébergement, annexes des hôpitaux sont éligibles au taux réduit, les hôpitaux psychiatriques et les maisons de retraite aussi, dès lors que l'hébergement constitue leur activité principale, mais pas les locaux hospitaliers stricto sensu.
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
    M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 312.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 72 et 272, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 72, présenté par MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains, est ainsi libellé :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « j. Les abonnements relatifs aux livraisons d'énergie calorique distribuées par réseaux publics, alimentés par la géothermie et la cogénération ».
    « II. - Le prélèvement libératoire prévu à l'article 200 a du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
    L'amendement n° 272, présenté par M. Merville et M. Pélissard, est ainsi libellé :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article 279-0 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « 4. La TVA est perçue au taux réduit de 5,5 % en ce qui concerne la partie relative à l'abonnement d'un usager d'un réseau de chaleur.
    « II. - Les pertes de recettes pour le budget de l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier pour soutenir l'amendement n° 72.
    M. Jean-Claude Sandrier. Notre amendement tend à abaisser le taux de TVA sur les abonnements aux réseaux de chaleur pour l'aligner sur celui applicable aux abonnements des particuliers aux services de gaz et d'électricité, c'est-à-dire 5,5 %.
    En effet, la géothermie et la cogénération sont victimes d'une discrimination illogique pour des raisons environnementales, d'abord, puisque la géothermie est l'une des énergies propres les plus prometteuses dans la mesure où elle ne produit pas de dioxyde de carbone, pour des raisons fiscales, ensuite, car de nombreux sites géothermiques sont menacés pour n'avoir pas le même régime fiscal que les autres sources d'énergie. Le Gouvernement précédent avait fait un pas en la matière. Ayant reconnu que la situation était anormale, il avait saisi la Commission européenne pour intégrer la fourniture d'énergie calorifique dans la liste communautaire des opérations soumises au taux réduit de TVA.
    Comme l'année passée, les groupes UDF, RPR, DL avaient soutenu cet amendement, j'espère que la fusion de l'UMP, réaction qui génère en principe de la chaleur, (sourires), n'aura pas fait fondre leurs bonnes intentions. En tout état de cause, les réseaux publics concernés servent bien souvent à alimenter des logements collectifs sociaux et leur utilité écologique et sociale n'est plus à démontrer. C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à adopter cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général, Notre collègue a raison de rappeler que nous soutenons cet amendement depuis des années et de façon unanime, mais sa proposition, elle non plus, n'est pas compatible avec la réglementation européenne.
    M. Jacques Myard. Il faut la faire évoluer.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je saisis l'occasion pour évoquer une autre baisse, celle survenue il y a quatre ans déjà sur les abonnements de fournitures de gaz et d'électricité. Il faut savoir qu'elle fait l'objet d'une procédure contentieuse devant la Cour de justice des Communautés européennes sur la base de la règle que défend la Commission selon laquelle à un produit correspond un taux et un seul. Vous le voyez, nous sommes sur un terrain dont la sécurité juridique n'est pas garantie. Le contentieux n'est pas jugé aujourd'hui mais la mesure que nous avons prise il y a quatre ans est elle-même contestée par la Commission auprès de la Cour de justice.
    Pour toutes ces raisons, la commission des finances a émis un avis défavorable.
    M. le président. Je suppose que l'amendement n° 272 est défendu ?
    M. Michel Bouvard. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, j'espère réconforter M. Sandrier et lui prodiguer un peu de chaleur (Sourires) en lui disant que, contrairement à ce qui se passe pour la matière fourniture d'électricité et de gaz, le droit communautaire ne permet pas actuellement l'application du taux réduit de la TVA aux abonnements relatifs aux livraisons d'énergie calorique, quelle que soit la source d'énergie utilisée. En tant qu'élu local, je connais le sujet à fond. En tout cas, je tiens à l'assurer que, sur ce sujet, le Gouvernement s'attache à favoriser une avancée au niveau communautaire et à aller vers plus de cohérence.
    Si vous voulez bien, sur ce point, nous faire confiance, je vous demande, monsieur Sandrier, de bien vouloir retirer votre amendement compte tenu de l'engagement que je prends de continuer à travailler auprès de nos partenaires européens. Le retrait de votre amendement me permettrait de ne pas émettre un avis de rejet.
    M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Sandrier ?
    M. Jean-Claude Sandrier. Je le maintiens pour manifester notre confiance.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 72.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 272.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 138 de M. Francis Hillmeyer n'est pas défendu.
    MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des députés communistes et républicains ont présenté un amendement n° 74, ainsi libellé :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « 1. L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « j. - les prestations de services funéraires.
    « 2. Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence.
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Aujourd'hui, à l'exception des transports, les frais d'obsèques sont soumis à la taxe sur la valeur ajoutée à hauteur de 19,6 %. La plupart des pays de la Communauté européenne ont opté pour un taux réduit pouvant aller jusqu'à zéro. Ils ont fait ce choix parce qu'une directive européenne les autorise à appliquer un taux réduit de TVA sur les services fournis par les entreprises de pompes funèbres. Le Gouvernement ne pourra ici nous opposer le caractère « euro-incompatible » d'une telle mesure.
    L'adoption de notre amendement permettrait de mettre fin à cet impôt sur la mort, ou plutôt sur les morts, que doivent acquitter toutes les familles, un jour ou l'autre. Les frais d'obsèques sont particulièrement élevés pour les plus modestes d'entre elles puisqu'ils représentent quelquefois l'équivalent d'un mois de salaire, voire davantage.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable, monsieur le président, un amendement équivalent a été repoussé hier soir.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 74.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 61 et 60, présentés par M. Patrice Martin-Lalande, pouvant faire l'objet d'une présentation commune.
    L'amendement n° 61 est ainsi libellé :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « I. - Après l'article 281 nonies du code général des impôts, il est inséré un article 281 decies ainsi rédigé :
    « Art. 281 decies. - Les taux réduits portant sur les livraisons de biens culturels sont applicables aux opérations réalisées sous forme électronique.
    « II. - Les pertes de recettes éventuelles sont compensées à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits de consommation sur les tabacs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    L'amendement n° 60 est ainsi libellé :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article 298 septies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Le premier alinéa est applicable indépendamment du support de diffusion des publications concernées. »
    « II. - Les pertes de recettes éventuelles sont compensées à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits de consommation sur les tabacs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.
    M. Patrice Martin-Lalande. Ces amendements visent à réduire le taux de TVA applicable aux biens culturels qui circulent sous forme électronique. En effet, pour l'instant par exemple, sous la forme papier, les livres et les journaux et périodiques supportent respectivement les taux réduits de 5,5 % et de 2,10 %, mais dès qu'ils sont diffusés par la voie numérique, c'est le taux normal de 19,6 % qui est applicable.
    Or, nous le constatons, le développement de l'Internet prend du retard en France. L'accès au contenu est probablement l'une des causes de ce phénomène - il y en a d'autres - et il serait donc tout à fait opportun, pour y remédier, de favoriser une diffusion plus large des biens culturels sur ce réseau.
    C'est la raison pour laquelle l'amendement n° 61 propose la réduction de la TVA sur l'ensemble des biens culturels diffusés par l'Internet et l'amendement n° 60, plus restrictif, sur la presse, cible plus stratégique encore. Il s'agit de garantir, par ce biais, une information pluraliste dont nous avons besoin qu'elle soit largement diffusée.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Hélas, la commission a été conduite à émettre un avis défavorable. Il se trouve que le sujet vient de faire l'objet d'une directive explicite de la part de l'Union européenne.
    M. Philippe Auberger. Et l'exception culturelle ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Après examen de ce service nouveau, le Conseil européen a décidé, à l'unanimité, de lui appliquer le taux normal, la directive date du 7 mai dernier. Bien sûr, cette décision est susceptible d'être revue au terme d'un délai minimum de quatre ans, soit le 30 juin 2006. En attendant, il faut s'y tenir.
    Avis défavorable, donc.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis.

    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 61.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 60.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Marleix, Auberger et Mariton ont présenté un amendement n° 53, ainsi libellé :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « I. - Le 4° du I de l'article 298 bis du code général des impôts est complété par des mots et une phrase ainsi rédigés :
    « "à l'exception du paragraphe III. Un décret en précisera les modalités d'application.
    « II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Philippe Auberger.
    M. Philippe Auberger. On a déjà parlé du régime simplifié agricole. Il s'agit par cet amendement d'harmoniser la durée de l'exercice retenu pour la TVA sur celui des bénéfices agricoles. En effet, actuellement, seul l'exercice calendaire civil est autorisé pour la TVA. L'activité agricole étant souvent cyclique, il serait souhaitable, dans un souci de simplification, de laisser la possibilité aux agriculteurs, lorsque les deux ne correspondent pas, d'ajuster leur exercice en matière de TVA sur l'exercice comptable et sur celui du régime simplifié.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable car l'amendement compliquerait de nouveau la situation. L'article 8 comporte une simplification considérable qui concernera environ trois quarts des agriculteurs. Ils n'auront plus à remplir, au titre de la TVA, outre la déclaration annuelle, les quatre déclarations d'acompte, soit au total cinq formulaires. Dès lors qu'ils acquittent une TVA de moins de 1 000 euros, ils procéderont à une déclaration et un paiement annuels. Il est exact que l'exercice comptable ne correspond à l'année civile que pour un peu moins de 60 % des agriculteurs, et, pour tous les autres, l'article 8 apporte en tout état de cause une simplification considérable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. L'article 8 va apporter en la matière des améliorations substantielles qui seront appréciées par les redevables. Je rappelle d'ailleurs à M. Philippe Auberger que les règles prévues en matière d'impôt sur le revenu et de TVA pour le rattachement de ces recettes à l'activité agricole sont harmonisées depuis 1998. Cette harmonisation a précisément consisté à retenir comme année de référence l'année civile.
    Dans ces conditions, la proposition présentée rendrait plus difficile le suivi des obligations déclaratives, tant d'ailleurs pour les redevables, qui devraient procéder à des calculs supplémentaires pour apprécier leur situation au regard de la TVA, que pour l'administration. Au demeurant, la demande de remboursement de crédit de TVA devrait, en tout état de cause, être déposée en même temps que la déclaration annuelle de TVA, et il faudrait que cette dernière soit établie par rapport à l'année civile et par rapport à l'exercice comptable.
    Enfin, je dois vous dire que si la mesure était appliquée comme elle est prévue, son coût serait de 53 millions d'euros, ce qui n'est pas négligeable.
    Toutes ces raisons me conduisent à demander à Philippe Auberger d'avoir l'obligeance de bien vouloir retirer son amendement, après que le Gouvernement a marqué tout l'intérêt qu'il porte à sa suggestion. Cela m'éviterait d'émettre un avis défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Philippe Auberger.
    M. Philippe Auberger. Monsieur le président, je vais accéder à la proposition du ministre parce que j'ai besoin d'un joker. J'espère qu'ainsi il accueillera de façon plus favorable l'amendement suivant. (Sourires.)
    M. le président. L'amendement n° 53 est retiré.
    Je suis saisi de trois amendements, n°s 54, 128 corrigé et 276, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 54, présenté par MM. Marleix, Auberger et Mariton est ainsi libellé :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « I. - Le I de l'article 298 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « 5° Les assujettis placés sous le régime d'acomptes peuvent demander un remboursement trimestriel du crédit constitué par la taxe déductible ayant grevé l'acquisition de biens constituant des immobilisations lorsque leur montant est au moins égal à 760 euros. Les remboursements sont effectués dans les conditions prévues par l'article 242 septies J à l'annexe II du code général des impôts. »
    « II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    Les amendements n°s 128 corrigé et 276 sont identiques.
    L'amendement n° 128 corrigé est présenté par MM. Suguenot, Martin (Marne), Mariani, Poignant, Mme Vautrin et M. Patrice Martin-Lalande ; l'amendement n° 276 est présenté par M. Christ.
    Ces amendements sont ainsi libellés :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « I. - Le I de l'article 298 bis du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
    « 5° Les assujettis placés sous le régime d'acomptes peuvent demander un remboursement trimestriel du crédit constitué par la taxe ayant grevé l'acquisition de biens constituant des immobilisations lorsque leur montant est au moins égal à 760 euros.
    « Les remboursements sont effectués dans les conditons prévues par l'article 242 septies J à l'annexe II. »
    « II. - Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Philippe Auberger, pour soutenir l'amendement n° 54.
    M. Philippe Auberger. Il s'agit de faciliter le remboursement de TVA pour les agriculteurs qui font des investissements relativement importants.
    Actuellement, compte tenu du système d'acomptes, ils ne peuvent être remboursés de leurs investissements qu'en fin d'année, au moment où ils opérent la régularisation annuelle en matière de TVA dont nous venons de parler. L'objet de cet amendement est donc de leur permettre, comme cela est déjà possible en matière de BIC, d'obtenir un remboursement dans le trimestre, à la suite d'une déclaration trimestrielle, en cas d'investissement relativement conséquent.
    S'il l'on veut que la fiscalité agricole rejoigne aussi largement que possible le fiscalité industrielle et commerciale, cet amendement va de soi.
    M. le président. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour soutenir l'amendement n° 128 corrigé.
    M. Patrice Martin-Lalande. Pour les raisons qu'a évoquées Philippe Auberger, nous souhaitons aussi que le Gouvernement puisse faire un geste pour simplifier et améliorer la gestion de nos exploitations agricoles.
    M. le président. L'amendement n° 276 n'est pas défendu.
    Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a donné un avis défavorable parce qu'elle n'a pas trouvé de solution correcte pour répondre au problème réel que viennent d'exposer nos collègues. C'est pourquoi je me tourne vers vous, monsieur le ministre.
    En effet, lorsqu'un agriculteur réalise un investissement lourd une année donnée, il conviendrait, même s'il fait une déclaration annuelle de TVA, qu'il puisse bénéficier d'un échéancier trimestriel de remboursement. Pour cela, il faudrait qu'il ait la possibilité d'exercer un droit d'option. Certes, il peut toujours opter pour la TVA sur une base trimestrielle, mais alors ce choix est irrévocable.
    La question, sur le plan technique, est celle de savoir comment concilier un remboursement de TVA exceptionnellement trimestriel avec une déclaration annuelle, c'est-à-dire sans imposer une déclaration spécifique. Ce problème ne peut-il pas être résolu par la voie réglementaire ? Ne peut-on pas imaginer un document simplifié qui permettrait de prendre en compte un phénomène exceptionnel sans, pour autant, obliger les agriculteurs à opter de façon irrévocable pour un autre régime de TVA plus compliqué d'autant que l'article 8 permettra aux trois quarts d'entre eux de bénéficier d'un système très simplifié avec une déclaration et un paiement annuel pour la TVA.
    Il s'agit vraiment d'une question technique et, comme nous n'avons pas trouvé de solution lors de nos réunions en commission, nous avons été contraints de donner un avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Le rapporteur général a des mots délicats quand il parle de question technique, car elle est aussi un peu financière (Sourires.)
    J'apprends beaucoup au contact de Philippe Auberger. En effet, il commence par présenter un amendement de repli qu'il retire avec beaucoup d'élégance puis il en vient à l'amendement lourd ! En effet, son coût serait de 812 millions d'euros, c'est-à-dire - pour ceux qui pensent encore en francs - 5 325 millions. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Ce problème dit technique a donc une dimension budgétaire qui n'est pas mince.
    Dans l'esprit qui préside à nos échanges depuis le début de cette discussion budgétaire, il est souvent des situations dans lesquelles je prends des engagements devant vous et je m'efforcerai de les tenir. En l'occurrence, il m'est très difficile d'agir ainsi en raison du coût du dispositif.
    Par ailleurs, on peut difficilement admettre qu'un redevable puisse librement modifier le calendrier de sa situation fiscale en optant chaque fois pour la formule qui lui est la plus favorable. Il faut tout de même privilégier une certaine stabilité des règles.
    En tout état de cause, nous mesurons tous, en cet instant, que cette affaire n'est pas mûre. Il serait donc une nouvelle fois sympathique, en tout cas à l'endroit du Gouvernement, monsieur Auberger, que vous vouliez bien retirer votre amendement. A défaut, je serais obligé de recommander à l'Assemblée de le rejeter car, sans doute comme vous, je ne veux pas aggraver le déficit budgétaire.
    M. le président. Monsieur Auberger, maintenez-vous cet amendement qui vaut des milliards ?
    M. Philippe Auberger. On peut évidemment discuter l'évaluation donnée. En tout état de cause, je tiens à souligner qu'il ne s'agit que de trésorerie. En effet, cet argent devra de toute façon être remboursé par l'Etat puisque la TVA supportée sur l'investissement sera forcément supérieure à celle due par l'agriculteur. C'est donc essentiellement un problème de trésorerie.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Pas la première année !
    M. Philippe Auberger. Si même la première année, car il n'y aura qu'une anticipation sur une dépense de remboursement qui est certaine.
    Ensuite, je ne comprends pas pourquoi cette question ne peut pas être réglée en ce qui concerne les bénéfices agricoles alors qu'elle l'a été pour les BIC. Pourtant chacun sait combien nos agriculteurs ont besoin de trésorerie pour investir. Je pense, par exemple, aux Bretons qui ont des problèmes très difficiles en ce qui concerne la qualité de l'eau et les installations d'élevage. Dans mon département, c'est pour le stockage des céréales qu'il faut envisager des investissements extrêmement lourds.
    Si nous voulons avoir une agriculture compétitive, il est indispensable de faciliter l'investissement. D'ailleurs, nous avons déjà eu l'occasion de souligner que le point le plus délicat des prévisions économiques du Gouvernement pour l'année 2003 était incontestablement celui de l'investissement.
    Enfin je ne vois aucune raison d'enfermer l'agriculteur dans un système draconien en ne lui permettant pas d'exercer, pour une année donnée, cette faculté d'option avec paiement trimestriel. On doit au contraire maintenir une certaine liberté dans le fonctionnement de l'agriculture en permettant ensuite à l'intéressé d'opérer une régularisation annuelle selon le droit commun.
    Certes, j'admets que la question mérite encore d'être travaillée sous beaucoup d'aspects, qu'il s'agisse de l'évaluation ou de la non-discrimination par rapport aux autres professions. Je propose donc, monsieur le ministre, que vos services prennent langue avec les représentants du monde agricole qui connaissent bien les problèmes de fiscalité pour que cette affaire avance car il est injuste de maintenir l'agriculture dans une situation discriminatoire par rapport aux autres professions.
    En attendant, je retire l'amendement.
    M. le président. L'amendement n° 54 est donc retiré.
    Faites-vous de même, monsieur Martin-Lalande ?
    M. Patrice Martin-Lalande. Je partage les observations présentées par Philippe Auberger.
    Les sommes annoncées par M. le ministre soulignent bien l'importance de cet amendement pour la gestion de l'agriculture. Cette masse de trésorerie peut jouer un rôle déterminant. L'adoption de cette mesure aurait des effets très bénéfiques pour toutes les exploitations dont certaines connaissent des situations difficiles.
    Je souhaite donc aussi que soit poursuivie l'étude de cette proposition en espérant que cela permettra d'apporter une réponse positive ultérieurement.
    Au nom des auteurs de l'amendement, je le retire donc, sous réserve de cet engagement du ministre.
    M. le président. L'amendement n° 128 corrigé, est également retiré.
    M. le président. MM. Marleix, Auberger et Mariton ont présenté un amendement, n° 271, ainsi rédigé :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « I. - Dans le deuxième alinéa du I de l'article 1693 bis du code général des impôts, les mots : "irrévocable de leur part sont supprimés.
    « II. - La perte de recettes est compensée, à due concurrence, par la création au profit de l'Etat d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Philippe Auberger.
    M. Philippe Auberger. Je le retire, c'est le même problème.
    M. le président. L'amendement n° 271 est retiré.
    Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 36 et 283.
    L'amendement n° 36 est présenté par M. Carrez, rapporteur général, et M. Michel Bouvard ; l'amendement n° 283 est présenté par M. Michel Bouvard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « I. - Sont éligibles au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, les dépenses correspondant à des travaux réalisés à compter du 1er janvier 2002 sur les monuments historiques inscrits ou classés appartenant à des collectivités territoriales quels que soient l'affectation finale et éventuellement le mode de location ou de mise à disposition de ces édifices.
    « II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'un droit additionnel aux droits mentionnés à l'article 402 bis a du code général des impôts pour les vins doux naturels visés à l'article 416 du même code. »
    La parole est à M. le rapporteur général pour soutenir l'amendement n° 36.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Les deux amendements étant identiques, je laisse le soin à M. Bouvard, l'auteur initial, de les défendre.
    M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. Cet amendement vise à encourager et à accélérer la restauration de nos monuments historiques.
    La Cour des comptes a mis en évidence la gravité de la situation, en soulignant que les crédits consacrés chaque année par l'Etat à leur entretien ne permettaient malheureusement pas d'éviter des pertes irrémédiables car l'état de dégradation de certains monuments est tel qu'on ne peut plus les sauver.
    Parmi les nombreuses difficultés auxquelles les collectivités sont souvent confrontées, le cas des monuments mis à disposition de tiers, souvent des associations, mais aussi parfois des particuliers, est particulièrement délicat. En effet, si le loyer ne représente pas un certain montant de l'investissement réalisé, la commune ne peut prétendre au FCTVA, ce qui constitue un frein sérieux aux initiatives de rénovation. Or on ne peut tout de même pas transformer tous les monuments historiques de ce pays en musées gérés par les collectivités locales.
    Cet amendement a donc pour but de rendre les collectivités locales éligibles au FCTVA puisque ce sont elles qui portent les travaux pour l'ensemble des opérations réalisées sur des monuments historiques, y compris lorsque ceux-ci sont mis à disposition de tiers moyennant un loyer. Cette éligibilité devrait être maintenue même si le loyer ne représente pas la part requise par rapport au montant des investissements. Chacun comprend bien en effet que si ces loyers étaient proportionnés au coût des investissements sur les monuments historiques, ils seraient totalement dissuasifs.
    M. François Goulard. Très bien !
    M. Patrice Martin-Lalande. Excellent amendement !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Le fait que la commission des finances ait retenu cet amendement rend ma tâche encore plus difficile. Je vais cependant essayer de vous expliquer les raisons pour lesquelles, bien que je comprenne le problème, j'ai des doutes sur la solution proposée pour le résoudre.
    Je ne reviens pas sur toutes les considérations qui traitent du FCTVA, car ce serait vous faire offense. Vous connaissez le sujet. Je tiens toutefois à souligner que cette proposition conduirait à dénaturer le FCTVA en ouvrant son éligibilité à des dépenses sur des biens mis à disposition de tiers, quand bien même ceux-ci ne seraient pas éligibles au fonds et pourraient développer des activités assujetties à la TVA. Pourrait ainsi exister, dans certains cas, le risque de cumuler à la fois des versements du FCTVA et un droit à récupération de la TVA.
    Par ailleurs, cette disposition étendrait le bénéfice du FCTVA, y compris en cas de cession, puisque l'amendement indique que l'éligibilité est possible « quelle que soit l'affectation finale » du bien. Cela dérogerait à la notion fondamentale de propriété qui détermine l'attribution du FCTVA, ainsi qu'aux modalités actuelles de reversement en cas de cession. Une telle dérogation entraînerait inévitablement des demandes reconventionnelles qui ne se limiteraient pas aux seuls monuments historiques, ce qui ferait peser de gros risques sur les dépenses du fonds.
    Enfin, je tiens à vous rappeler que les travaux réalisés sur des monuments historiques inscrits ou classés ouvrent droit à des subventions publiques (M. Bouvard rit) qui peuvent, dans certaines conditions, aller jusqu'à 40 % des dépenses engagées.
    Le rire de M. Bouvard me laisse à penser qu'il a vécu des expériences identiques à celles du président de la communauté urbaine d'Alençon.
    M. Michel Bouvard. Sans doute ! Et le surcoût ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. J'ajoute que je partage l'opinion du rapporteur général - je lis avec attention les travaux de la commission - qui a rappelé que l'éligibilité au FCTVA des travaux portant sur des monuments historiques avait déjà été élargie, et qu'un point d'équilibre satisfaisant - j'espère que l'ajout de cet adjectif ne le froissera pas - avait été atteint. Le président Méhaignerie a également formulé des observations intéressantes sur les causes des surcoûts de ces travaux.
    Bien que mes services ne m'invitent naturellement pas à développer les causes de ces surcoûts, je ne résiste pas à l'envie de vous dire que l'expérience acquise dans d'autres fonctions m'a convaincu que tous les acteurs de la chaîne de mise en oeuvre des travaux sur les monuments historiques et classés n'ont pas totalement optimisé leurs performances. (Sourires.) Chacun comprendra ce qu'il voudra de cette observation née de l'expérience du terrain.
    M. Michel Bouvard. C'est joliment dit !
    M. le ministre délégué au budget et la réforme budgétaire. Mesdames, messieurs les députés, j'ai évoqué cette question, à l'occasion des conférences budgétaires, avec mon collègue ministre de la culture.
    Il faut que nous sortions de cette situation, car, de deux choses l'une : soit le système en vigueur dans notre pays ne nous permet pas de mettre suffisamment en oeuvre des programmes de réhabilitation des monuments historiques ou des bâtiments classés, et il faut en tirer toutes les conséquences ; soit, au contraire, nous sommes en état de le faire, et ceux auxquels cette tâche a été confiée doivent l'assumer d'une manière performante.
    M. Patrice Martin-Lalande. Absolument !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je vous demande donc, mesdames, messieurs les députés, d'épouser cette conviction et cette détermination. Toutefois, pour avancer, il faut viser les bonnes cibles et non pas essayer de s'appuyer sur le système fiscal. Il convient de ne pas dénaturer le FCTVA. Il est préférable d'essayer de faire accéder à la performance, donc à la satisfaction des besoins, l'ensemble de la chaîne de la réhabilitation du patrimoine public, classé et inscrit, de notre pays.
    M. Patrice Martin-Lalande. Performer ou réformer !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur Bouvard, j'espère que vous avez entendu les échos de l'expérience. Sous le bénéfice de cette observation, je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, je serais vraiment obligé d'en demander le rejet.
    M. Le président. La parole est à M. Marc Laffineur.
    M. Marc Laffineur. Monsieur le ministre, vous avez eu de bons arguments pour faire valoir que cet amendement devrait être retravaillé, mais vous en avez aussi utilisé de moins bons. En effet, la restauration des monuments historiques est l'un des grands scandales français.
    M. François Goulard. Il y en a trop ! (Sourires.)
    M. Marc Laffineur. Certes, il y en a beaucoup d'autres, mais ce scandale-là est tout de même grave.
    Le coût de la réhabilitation des monuments historiques est très lourd pour les collectivités, d'autant que - vous avez fait preuve de beaucoup de diplomatie, monsieur le ministre, j'en ferai un peu moins preuve - les architectes des Bâtiments de France, que l'on a beaucoup de mal à rencontrer sur les chantiers, d'ailleurs, augmentent encore ces coûts de façon considérable.
    M. Maurice Leroy. C'est vrai !
    M. Marc Laffineur. Je citerai l'exemple d'une réhabilitation qui dure depuis vingt ans. Son coût est régulièrement révisé à la hausse...
    M. Maurice Leroy. Pour peu qu'il y ait, en plus, des fouilles archéologiques, le coût des travaux devient faramineux !
    M. Marc Laffineur. ... et il se monte à peu près au double de ce qu'il serait si l'on passait par d'autres personnes, d'autant que, sur vingt ans, j'ai dû voir seulement deux fois l'architecte des Bâtiments de France sur le chantier.
    Notre pays étant - heureusement - très riche en monuments historiques, la réhabilitation de ceux-ci représente une charge très importante pour les communes.
    Vous avez raison, monsieur le ministre, on ne peut jouer sur deux tableaux en même temps mais des mesures doivent être prises très rapidement pour éviter que les communes et les collectivités ne se retrouvent « étranglées » comme elles le sont actuellement par les coûts existants de la réhabilitation des monuments.
    M. Michel Bouvard et M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Chers collègues, je partage totalement les préoccupations que vous avez exprimées sur l'efficacité de la filière des travaux de restauration des monuments historiques. Et, si l'amendement de Michel Bouvard a recueilli spontanément une telle sympathie en commission, c'est parce qu'il évoquait cette question. J'ajoute - et ce point sera évoqué plus tard - qu'il faut y adjoindre les problèmes de financement des travaux d'archéologie et les questions de procédure, qui sont source de difficultés redoutables.
    Si j'ai émis quelques réserves en commission, réserves retranscrites au compte rendu que vous avez cité, monsieur le ministre, c'était sur le principe de l'éligibilité au FCTVA des biens mis à disposition. Cette question a fait l'objet de débats pendant de nombreuses années avant que nous ne trouvions ce que j'oserai appeler un point d'équilibre. Depuis quatre ou cinq ans, nous n'avons en effet plus de remontées de l'existence de divergences d'interprétation d'un département à l'autre. Il semble qu'une sorte de jurisprudence, assez favorable aux collectivités locales, se soit établie.
    Le bénéfice du FCTVA est soumis à deux conditions : la mise à disposition du bien appartenant à la collectivité locale dont il est demandé l'éligibilité au FCTVA ne doit être que partielle et elle ne doit pas faire obstacle au plus grand nombre d'usagers potentiels - administrés, enfants des écoles - dans des conditions d'égalité caractéristiques du service public : prix d'accès faible, voire gratuité. Ces critères, qui ne figurent pas dans la loi mais sont repris dans différentes circulaires et surtout ont fait l'objet d'une jurisprudence maintenant stabilisée, semblent donner satisfaction.
    Reste le problème particulier des monuments historiques. La rédaction de l'amendement de Michel Bouvard est très large et risque d'ouvrir une brèche ou de créer un déséquilibre dans un état qui, sans être parfait, a permis de parvenir à un certain consensus sur la question de l'éligibilité au FCTVA des biens mis à disposition, d'où la réserve que j'avais exprimée. Encore une fois, elle portait non pas sur les monuments historiques, mais sur le principe.
    M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. Monsieur le ministre, je suis conscient des faiblesses de l'amendement et des risques potentiels de son application.
    Cela étant, le problème est réel et il peut trouver une solution sans que le système du FCTVA s'en trouve déséquilibré. La restauration des monuments historiques est un secteur particulier qui bénéficie déjà, dans bien des domaines, d'une fiscalité dérogatoire et il serait justifié, dans les cas de mise à disposition de bâtiments restaurés par des collectivités, que l'on trouve les aménagements nécessaires permettant de faciliter des usages autres que muséographiques. On ne pourra pas, je le répète, transformer tous les monuments historiques de ce pays qui appartiennent à des communes ou à des départements en musées. Il faudra bien leur trouver d'autres affectations. On peut les mettre gratuitement à disposition d'associations, auquel cas nous n'avons pas de problème. Si l'on veut responsabiliser les gens qui les utilisent ou si on destine les bâtiments à des usages commerciaux, il faudra alors appeler un loyer. Le problème se pose actuellement en ces termes.
    Je suis disposé à retirer l'amendement, sous réserve que le Gouvernement s'engage à retravailler cette question, pour mieux la cerner et éviter les dérives que vous avez dénoncées, d'ici à l'examen du texte au Sénat, un certain nombre de collègues sénateurs s'intéressant également à ce problème.
    Le problème est réel. Il faut faire évoluer les textes. Peut-être, la solution se trouve-t-elle dans une juste proportion du loyer par rapport à l'investissement. En tout cas, on ne peut s'en tenir au statu quo car cela condamnerait à la ruine quantité d'édifices alors qu'existent des projets de restauration.
    Je vais retirer l'amendement n° 283, monsieur le président.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. J'ai entendu votre appel, monsieur Bouvard, et je vais y répondre très précisément. Je m'engage, mais pas dans le délai que vous m'avez imparti, car je ne serais pas en mesure de tenir mon engagement - ce que vous demandez n'est pas humain, vous devez vous en douter, puisque nous travaillons jour et nuit soit à l'Assemblée, soit au Sénat - d'examiner la question que vous avez soulevée.
    Je suis comme vous très sensible à la mise en valeur du patrimoine de notre pays, qui est une grande chance pour celui-ci. Mais ce n'est pas par la voie législative que je propose d'aborder et de traiter le problème. Nous essaierons de trouver des véhicules réglementaires souples et flexibles pour pouvoir répondre à vos préoccupations, sans trop bousculer les grands et sacrosaints principes du FCTVA.
    Me tournant vers le rapporteur général et les commissaires des finances, j'insisterai sur le fait que nous ne devons pas négliger les autres problèmes évoqués. C'est la performance de notre sphère publique au titre de la mise en valeur de notre patrimoine qui est en jeu. D'après les témoignages que j'ai entendus, la situation est la même dans toutes les régions de France. L'exécutif a besoin de l'aide du législateur - et je compte en particulier sur l'action des rapporteurs spéciaux - pour améliorer le fonctionnement de toute la chaîne de la réhabilitation du patrimoine publique. Trop de moyens sont aujourd'hui gaspillés parce que les crédits investis n'ont pu être utilisés dans des délais raisonnables et qu'entre temps, les procédures se rajoutant les unes aux autres - sans aucune efficacité pour l'action publique que nous voulons mener - le coût des opérations a considérablement augmenté.
    Il n'y a rien de pire pour dévaloriser l'action publique. Je pense que, quels que soient les bancs sur lesquels vous siégez dans cette maison, vous êtes tous attachés à l'efficacité de celle-ci. Il y a là un travail immense à réaliser et je compte sur le Parlement pour le faire.
    M. le président. M. Bouvard a retiré son amendement. En faites-vous de même, monsieur le rapporteur général ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général, Oui, monsieur le président.
    M. le président. Les amendements n°s 283 et 36 sont retirés.
    MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 82, ainsi rédigé :
    « Après l'article 9, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article 53 de la loi n° 93-1353 (loi de finances rectificative pour 1993 du 30 décembre 1993) est abrogé.
    « II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Les investissements réalisés par les collectivités locales sont appelées, dans les années à venir, et notamment dans le cadre de la décentralisation, à soutenir plus encore l'activité économique.
    L'investissement public étant l'un des facteurs essentiels de la croissance, il importe de lui donner tout le relief possible en vue de répondre aux besoins de la collectivité, tout en favorisant le développement de l'emploi. Or, depuis 1993 et le vote de la loi de finances pour 1994 dans un contexte de récession économique marqué, les collectivités territoriales ne peuvent plus récupérer en totalité la TVA pesant sur leurs dépenses d'équipement.
    Au moment où les perspectives les plus sombres pèsent sur l'activité économique, le maintien d'une disposition qui, d'abord circonstancielle, a fini par faire partie du paysage financier dans lequel se déroule l'action des collectivités locales ne se justifie pas. On connaît les conséquences de cette situation : ralentissement des investissements réels des collectivités, retard dans la réponse aux besoins collectifs, accroissement relatif de la pression fiscale.
    La proposition que nous faisons de revenir sur la situation issue de la loi de finances pour 1994 vise à soutenir l'investissement des collectivités locales. Elle le fera plus sûrement encore que les dotations d'équipement incluses dans l'enveloppe normée des concours budgétaires. D'un coût relativement modique, elle servira de levier à la relance de l'investissement public et permettra par là-même d'atteindre plus facilement les objectifs de croissance économique fixés par le projet de loi de finances.
    Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite à adopter cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le prélèvement opéré sur le budget général au profit du budget européen comporte une fraction dite recettes TVA. Il est tout à fait logique que le remboursement opéré aux collectivités locales au titre du FCTVA comporte une déduction à proportion de cette fraction TVA qui contribue à financer le budger de l'Union européenne. Or l'amendement de notre collègue tend à supprimer cette fraction. La commission a donc émis un avis défavorable d'autant que notre assemblée a adopté hier après-midi l'article 33 de ce projet de budget qui finance l'Union européenne.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 82.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 10

    M. le président. « Art. 10. - Au chapitre II bis du titre V de la deuxième partie du code général des impôts, il est ajouté une section V ainsi rédigée :
    Section V : Dégrèvement en faveur des amateurs.
    Art. 1647 C ter. - I. - A compter des impositions établies au titre de 2003, la cotisation de taxe professionnelle et des taxes annexes des entreprises d'armement au commerce mentionnées dans la loi n° 69-8 du 3 janvier 1969 relative à l'armement et aux ventes maritimes fait l'objet d'un dégrèvement pour la part de la cotisation relative à la valeur locative des navires de commerce et de leurs équipements embarqués.
    Pour les impositions établies au titre de 2003, ce dégrèvement est accordé sur réclamation. Pour les impositions établies au titre de 2004 et des années suivantes, il est accordé sur demande effectuée dans la déclaration prévue à l'article 1477. La réclamation ou la demande est déposée auprès du service des impôts dont relèvent le ou les établissements auxquels les navires sont rattachés.
    Ce dégrèvement est égal à la cotisation de taxe professionnelle multipliée par le rapport existant entre, d'une part, la valeur locative des navires de commerce et de leurs équipements embarqués et, d'autre part, les bases brutes totales retenues pour l'imposition.
    II. - Pour l'application du troisième alinéa du I, la cotisation s'entend de l'ensemble des sommes mises à la charge de l'entreprise figurant sur l'avis d'imposition, diminué le cas échéant de l'ensemble des réductions et autres dégrèvements dont cette cotisation peut faire l'objet, à l'exception du dégrèvement prévu au I de l'article 1647 C qui sera opéré, le cas échéant, après celui prévu au présent article ».
    Je mets aux voix l'article 10.
    (L'article 10 est adopté.)

Article 11

    M. le président. « Art. 11. - A. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
    « I. - Au 2° de l'article 1467, il est inséré un deuxième alinéa ainsi rédigé :
    « La fraction des recettes mentionnée au premier alinéa est fixée à 9 % au titre de 2003, 8 % au titre de 2004, 7 % au titre de 2005 et 6 % à compter de 2006. »
    « II. - Au deuxième alinéa de l'article 1647 bis, après les mots : "du 30 décembre 1998, sont ajoutés les mots : "et du deuxième alinéa du 2° de l'article 1467. »
    « III. - A l'article 1648 B, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
    « La diminution des bases résultant du deuxième alinéa du 2° de l'article 1467 n'est pas prise en compte pour l'application des 2° et 3° du II. »
    B. - I. - Il est institué un prélèvement sur les recettes de l'Etat destiné à compenser, à chaque collectivité locale et établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, la perte de recettes résultant de la réduction progressive prévue au A.
    « II. - A compter de 2003, la compensation prévue au I est égale, chaque année, au produit obtenu en multipliant la perte de base résultant, pour chaque collectivité locale et établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, de la réduction de la fraction imposable des recettes visée au 2° de l'article 1467 du code général des impôts, par le taux de taxe professionnelle de la collectivité et de l'établissement public de coopération intercommunale pour 2002.
    « La perte de base visée au premier alinéa est égale, pour chaque collectivité ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, à la différence entre les bases nettes imposables au titre de 2003 telles qu'elles auraient été fixées sans réduction de la fraction imposable des recettes prévue au 2° de l'article 1467 précité et les bases nettes imposables au titre de 2003 tenant compte de la fraction mentionnée au deuxième alinéa du 2° de l'article 1467 précité applicable à l'année concernée.
    « Pour l'application du deuxième alinéa, les bases nettes s'entendent après application de l'abattement prévu à l'article 1472 A bis du code général des impôts.
    « Pour les communes qui, en 2002, appartenaient à un établissement public de coopération intercommunale sans fiscalité propre, le taux voté par la commune est majoré du taux appliqué au profit de l'établissement public de coopération intercommunale pour 2002.
    « Pour les établissements publics de coopération intercommunale soumis pour la première fois à compter de 2003 aux dispositions de l'article 1609 nonies C ou à celles du II de l'article 1609 quinquies C du code général des impôts, la compensation est calculée en retenant le taux moyen pondéré des communes membres de l'établissement public de coopération intercommunale constaté pour 2002, éventuellement majoré dans les conditions prévues au quatrième alinéa.
    « Au titre des années 2004 et suivantes, la compensation est actualisée, chaque année, en fonction du taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement entre 2003 et l'année de versement.
    « III. - La compensation prévue au I fait l'objet de versements mensuels.
    « C. L'article 1636 B octies du code général des impôts est ainsi modifié :
    « 1. Le III est complété par les mots :
    « , et de la compensation prévue au B de l'article 11 de la loi de finances pour 2003 versée au titre de l'année précédente en contrepartie de la réduction de la fraction imposable des recettes visée au 2° de l'article 1467. »
    « 2. Le premier alinéa du IV bis est complété par les mots :
    « , ainsi que de la compensation prévue pour l'année d'imposition au B de l'article 11 de la loi de finances pour 2003 en contrepartie de la réduction de la fraction imposable des recettes visée au 2° de l'article 1467. »
    La parole est à M. Michel Vaxès, inscrit sur l'article.
    M. Michel Vaxès. Monsieur le ministre, mes chers collègues, si l'on en croit les termes de l'exposé des motifs, l'article 11 a pour objet de résoudre un problème d'équité fiscale en mettant en oeuvre une mini-réforme de la taxe professionnelle concentrée sur l'élément le plus marginal de l'assiette, la part taxable des recettes des titulaires de bénéfices non commerciaux et assimilés. Cette réforme nous est présentée comme le pendant naturel de celle ayant portée sur l'assiette « salaires ».
    Même si le coût global de la mesure semble marginal, ce qui nous pousse à nous interroger sur sa pertinence, c'est bien une étape supplémentaire dans la remise en question de la taxe professionnelle que nous invite à franchir le Gouvernement. On peut s'interroger sur l'étape suivante. Nous dirigeons-nous vers la suppression pure et simple de l'imposition locale des entreprises, comme le préconise naturellement et avec beaucoup de conviction le MEDEF ? Qu'en serait-il alors de l'autonomie financière des collectivités locales dont on s'apprête pourtant à graver le principe dans le marbre de la loi ?
    Mais les dispositions de l'article 11 appellent d'autres observations.
    La moindre n'est pas de constater que la situation des redevables concernés est fort variable. A la limite, plus le revenu professionnel est élevé, plus le rendement de la mesure sera important.
    Deuxième remarque : la situation n'est pas la même pour tous les titulaires de bénéfices non commerciaux. Certains jeunes praticiens ne dégagent que peu de revenus professionnels, se retrouvent aux portes de la contribution minimale de taxe professionnelle tandis que d'autres, en déficit, ne tireront aucun profit des dispositions de l'article 11.
    Enfin, troisième remarque, d'ailleurs soulignée par le rapport de la commission des finances : tout laisse penser que la compensation offerte aux collectivités locales de ce processus de détaxation progressive sera sans commune mesure avec ce qu'elles auraient pu continuer de percevoir du fait du maintien de l'imposition.
    Sans portée déterminante sur la situation des professionnels - le coût pour 2003 de la mesure rapportée à l'article fiscal se situe à 176 euros - sans garantie d'une compensation équilibrée aux collectivités locales, l'article 11 se présente donc plus comme un gadget destiné à une « clientèle » électorale bien ciblée que comme une mesure fiscale efficace et proportionnée.
    Compte tenu de ces observations, nous voulions proposer une imputation différente du dispositif préconisé, en mettant en oeuvre un système de dégrèvement partiel et progressif de la cotisation de taxe professionnelle due par les titulaires de bénéfices non commerciaux et les contribuables assimilés. Malheureusement, notre amendement a été déclaré irrecevable.
    Pourtant plusieurs raisons motivaient le choix de ce dispositif.
    D'une part, il recentrait le bénéfice de la mesure sur les assujettis des bénéfices non commerciaux disposant des revenus les plus faibles, ce qui permettrait de corriger certains des effets de la mesure, laquelle est d'autant plus profitable qu'elle porte sur un revenu professionnel élevé.
    D'autre part, il réglait le problème de la compensation aux collectivités locales de l'allégement de la cotisation de taxe professionnelle puisque, ainsi que nous l'avons indiqué et comme le rapport de la commission des finances le précise, cette compensation aura tôt fait de dériver de la matière fiscale échappant à l'imposition.
    Cette proposition alternative se rapprochait de ce qui est pratiqué en matière de taxe d'habitation où la réalité du revenu imposable au titre de l'impôt sur le revenu est prise en compte pour faire jouer les mécanismes d'allégement des cotisations.
    Dans les faits, quand la taxe professionnelle prend en compte pour l'essentiel un revenu d'activités, ce qui est le cas avec l'assiette « recettes », il n'y a rien d'anormal à ce que des dispositions analogues puissent être proposées.
    Nous regrettons que notre amendement ait été jugé irrecevable.
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 55 et 37, pouvant être soumis à une discusion commune.
    L'amendement n° 55 de M. Beaudouin n'est pas défendu.
    L'amendement n° 37, présenté par M. Carrez, rapporteur général, est ainsi libellé :
    « I. - Après les mots : "au titre de 2004, rédiger ainsi la fin du dernier alinéa du I du A de l'article 11 : "et 6 % à compter de 2005.
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « La perte de recettes est compensée, à due concurrence, par la création, au profit de l'Etat, d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Tout d'abord, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis que le projet de loi de finances comporte cette disposition. Cela fait plusieurs années qu'elle était demandée, dès lors que la part salariale de la taxe professionnelle était supprimée pour l'ensemble des entreprises.
    Les professions libérales assujetties aux bénéfices non commerciaux employant moins de cinq salariés ont un régime particulier qui date du passage de la patente à la taxe professionnelle. Je rappelle, car beaucoup de choses ont été dites sur le sujet qui ne sont pas toujours exactes, que, si le législateur a choisi en 1975 la base « recettes » de préférence à la base normale - salaires, investissements -, c'est parce qu'il a estimé que, comme ces professions emploient en général peu de salariés et n'ont que peu d'équipements, elles n'auraient pas été suffisamment imposées. C'est pour qu'elles contribuent davantage à la taxe professionnelle qu'a donc été choisie la base « recettes ».
    Au fil du temps, cette base, qui a d'ailleurs conduit à des impositions non négligeables, les a desservies. La suppression de la part salaires a encore accentué le déséquilibre en leur défaveur. Celle-ci s'est faite par étapes, mais dès la première année, en 1999, ce sont les petites et moyennes entreprises qui en ont bénéficié. Depuis quatre ans existe, sans aller jusqu'à parler d'injustice, une anomalie fiscale entre ces professions et les autres activités, qui crée des distorsions de concurrence au détriment des petites structures.
    Un cabinet d'expert-comptable avec plus de cinq salariés, qu'il soit sous le régime des sociétés ou sous celui des BNC, se retrouvait à payer une taxe professionnelle deux à trois fois inférieure, toutes choses égales par ailleurs, à ce qu'acquittait un cabinet de moins de cinq salariés aux BNC. Une telle situation ne pouvait durer. Je me réjouis vivement que le Gouvernement ait accepté d'engager à son tour une réforme pour alléger la taxe professionnelle des entreprises de moins de cinq salariés sous le régime des bénéfices non commerciaux.
    L'amendement de la commission vise à accélérer le calendrier. Pourquoi ? Tout simplement pour la raison que j'ai évoquée : les entreprises comparables pour lesquelles la part salaires a été supprimée ont bénéficié de la mesure dès l'année 1999, au plus tard en 2000. Ce retard, il convient de le combler le plus rapidement possible. Notre amendement consiste à achever le processus de réduction proposé, qui permettra de passer de 10 % à 6 % dès 2005 et non en 2006, autrement dit en trois ans au lieu de quatre. Le coût de cette mesure est, pour l'essentiel, reporté sur l'exercice 2005. J'espère que le Gouvernement acceptera cette proposition qui, je le répète, va réellement dans le sens de la justice fiscale.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il est souvent question de justice fiscale dans nos assemblées parlementaires... Cela dit, les professionnels libéraux employant moins de cinq salariés ont effectivement été oubliés au moment de l'allégement de la taxe professionnelle. Or ces secteurs sont, comme tous les autres, créateurs d'emplois. C'est pourquoi le souhait de votre assemblée, souhait fort et constant, souvent réitéré, doit être satisfait.
    Le Gouvernement avait initialement retenu un calendrier calqué sur celui de l'allégement de la taxe professionnelle pour les autres activités. Mais force est de reconnaître que ces professionnels libéraux ont fait preuve de beaucoup de patience, alors que les autres activités ont d'ores et déjà vu les bénéfices de cet allégement. Votre amendement vise à accélérer le mouvement afin que la suppression définitive de la part salaires intervienne à compter de 2003 et non en 2005. Compte tenu du rôle que jouent ces professions dans la vie économique de notre pays, compte tenu également de la patience qu'elles ont montrée - et ce n'est pas parce que les contribuables sont patients qu'il faut les oublier -, compte tenu enfin de la coopération que vous-mêmes avez bien voulu apporter au Gouvernement dans la recherche d'une solution équilibrée, celui-ci donne son accord à cet amendement et lève le gage. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur.
    M. Marc Laffineur. Merci pour elles, monsieur le ministre... Il est vrai que ces professions étaient les grandes oubliées de la réforme. Comme vient de le dire très justement le rapporteur général, la taxe était calculée sur 10 % des recettes, autrement dit du chiffre d'affaires,...
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. TTC !
    M. Marc Laffineur ... et non de leurs bénéfices, loin de là : celui-ci se situe dans la plupart des cas autour de 30 % du chiffre d'affaires. Ce qui en faisait un impôt extrêmement lourd, puisque ce taux de 10 % appliqué dans certaines communes ou communautés de communes équivalait en fait à une tranche d'impôt sur le revenu de près de 70 % pour peu qu'on y ajoute la CSG et autres.
    En acceptant d'accélérer quelque peu cette réforme, vous réparez un oubli. C'est là une excellente chose pour ces professions, d'autant qu'elles ont dû aussi s'adapter aux 35 heures, c'est-à-dire à une des contraintes les plus importantes qui soient, vous le savez aussi bien que moi. Je ne peux que vous remercier de ce geste salutaire. Vous avez fait oeuvre utile pour ce secteur d'activité.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37, compte tenu de la suppression du gage.
    (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
    M. le président. MM. Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart, Claeys, Bourguignon, Viollet, Bapt, Mme Lignières-Cassou et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 206, ainsi rédigé :
    « I. - Compléter le dernier alinéa du I du A de l'article 11 par les mots : "pour les redevables employant au moins un salarié au titre de l'année d'imposition.
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « La perte de recettes est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Je comprends que la majorité ait voulu montrer sa satisfaction et marquer son émotion : il faut dire que les occasions ont été rares...
    M. Jean-Pierre Brard. Très rares !
    M. Didier Migaud ... de voir le Gouvernement accepter un amendement de la commission des finances ou de sa majorité. En fait, depuis le début de la semaine, c'est retrait sur retrait !
    M. Marc Laffineur. La concertation fonctionne bien chez nous !
    M. Jean-Pierre Brard. De retrait en retrait, c'est la retraite !
    M. Didier Migaud. La majorité, on le voit bien, est particulièrement cadenassée par le Gouvernement. Nous aurons peut-être l'occasion de le répéter : jamais aussi peu d'amendements de la commission des finances et des députés de la majorité n'auront été acceptés.
    M. Marc Laffineur. Parce que jamais un texte n'a été aussi bon !
    M. Didier Migaud. A vous lire, mes chers collègues, nous n'en avons pas toujours l'impression : le nombre de vos amendements prouverait plutôt le contraire !
    M. Jean-Pierre Brard. Ils ont vu Bonaparte, et ils ont déjà écrit la seconde partie : la Berezina !
    M. Xavier Bertrand. Vous, c'est à Canossa que vous êtes souvent allés !
    M. Jean-Pierre Brard. Il vaut toujours mieux regarder devant que derrière ; derrière, c'est le passé !
    M. Xavier Bertrand. C'est parfois dangereux pour ceux qui suivent !
    M. Maurice Leroy. Aller à Moscou, oui, mais pas avec Brard !
    M. Didier Migaud. La suppression progressive de la part salaire de la taxe professionnelle n'avait effectivement pu, par construction, profiter aux titulaires de bénéfices non commerciaux et assimilés employant moins de cinq salariés, ceux-ci étant imposés sur une fraction de leurs recettes et non sur les salaires versés. Votre argumentation selon laquelle il s'agirait de favoriser l'emploi peut se comprendre : c'était du reste l'objectif de la réforme de la taxe professionnelle initiée par le gouvernement de Lionel Jospin. Que vous insistiez sur le fait que certaines catégories aient pu être oubliées, soit, mais reconnaissez que c'est lui qui a engagé cette réforme de la taxe professionnelle. Vous n'avez pas manqué d'en dénoncer, lorsque vous étiez au pouvoir, les excès, les insuffisances, les défauts, mais vous être restés de marbre dès lors qu'il s'est agi de proposer des modifications.
    Malheureusement, la disposition proposée par le Gouvernement ne nous semble pas tout à fait correspondre à l'objectif que vous affichez, favoriser l'emploi, dans la mesure où elle bénéficiera indifférement à tous les titulaires de bénéfices non commerciaux, qu'ils embauchent ou non des collaborateurs. Aussi notre amendement n° 206 propose-t-il de limiter le bénéfice de cet allégement aux redevables employant au moins un salarié, ce qui constituerait une mesure d'incitation en faveur de l'emploi de ce secteur. Vous ne pouvez rester indifférent à cette proposition, monsieur le ministre, dès lors qu'elle aura pour conséquence d'amplifier la volonté que vous venez d'exprimer.
    Mme Christine Boutin. Pas du tout !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement, au demeurant tout à fait paradoxal. Lors des discussions que nous avons eues pendant nombre d'années, la seule objection émise par le Gouvernement de l'époque comme par le rapporteur général, en particulier mon prédécesseur, consistait à dire que, compte tenu du coût de la suppression de la part salaire de la taxe professionnelle supportée par les entreprises, il n'était pas possible de prendre en compte, tout au moins dans un premier temps, les professions assujetties aux BNC employant moins de cinq salariés, bien qu'on ait toujours reconnu qu'elles représentaient un potentiel d'emplois important. Or l'on sait bien que, pour toutes ces professions, c'est dans l'embauche du premier salarié que se situe la plus grande part de ce gisement d'emplois.
    M. Didier Migaud et M. Augustin Bonrepaux. Justement !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il serait donc tout à fait inopportun de priver du bénéfice de la réforme les professions qui n'ont aucun salarié.
    M. Didier Migaud et M. Augustin Bonrepaux. Mais non, au contraire !
    Mme Christine Boutin. Si, pour leur permettre d'embaucher !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. C'est en effet cet allègement de la taxe professionnelle qui déclenchera probablement chez elles ce qui reste la décision la plus difficile pour toutes ces petites entreprises, toutes ces professions, qu'elles soient sous le régime des BIC ou des BNC, à savoir l'embauche du premier salarié.
    M. Augustin Bonrepaux. Mais elles n'y auront aucun intérêt si elles en bénéficient déjà !
    M. Marc Laffineur. La vérité, c'est que vous n'aimez pas les professions libérales !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ajoutons que la proposition du Gouvernement est totalement cohérente avec la réforme générale, laquelle a conduit en moyenne, le chiffre variant selon les entreprises, à la suppression de 35 % environ de la base salaires. En passant, pour ces professions libérales, de 10 % à 6 % de la recette, la diminution sera à terme de 40 %, autrement dit à un niveau très voisin. Nous aboutirons donc à une équité parfaite et il n'y a vraiment aucune logique, y compris par rapport à l'argumentation que vous-mêmes aviez développée ces dernières années, d'exclure une partie de ces professions du bénéfice de cette disposition.
    M. le président. Quel et l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Didier Migaud ne m'en voudra pas de lui parler aussi franchement que lui, lorsqu'il s'adresse à ses collègues et au Gouvernement : on ne saurait y voir une dégradation de nos relations personnelles.
    M. Jean-Pierre Brard. Au contraire, c'est une preuve d'affection !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Au demeurant, je ne prends généralement pas parti dans les débats entre majorité et opposition de cette assemblée. Mais sa dernière observation pourrait avoir une influence sur la relation qui unit ce gouvernement et la majorité qui le soutient.
    J'ai, pour ma part, trouvé les propositions de la commission des finances tout à fait excellentes,...
    M. Michel Bouvard. Bien sûr !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ...et nous nous sommes refusé à adopter la pratique, bien connue pour qui a siégé sur les bancs du Parlement, qui consiste à faire déposer par une majorité des amendements que le Gouvernement n'ose pas présenter lui-même.
    M. Michel Bouvard. Allons ! Cela ne s'est jamais vu !
    M. Maurice Leroy. Jamais M. Migaud n'a fait cela !
    M. Michel Bouvard. Non, jamais !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Cette pratique, monsieur Migaud, nous nous y refusons. Nous entendons rester dans une relation de très grande sincérité.
    Je voudrais également vous faire remarquer, mon cher Didier Migaud, mais à vous également, mesdames et messieurs les députés, que notre approche fiscale est radicalement différente. C'est un grand changement. Celle du précédent gouvernement, et, je suis désolé de le dire, de la majorité qui le soutenait, consistait à diviser. On divisait entre le public et le privé, le public étant jugé meilleur, le privé moins bien, l'emploi public meilleur, l'emploi privé moins bien.
    M. Didier Migaud. Non, monsieur le ministre ! Allons !
    M. Jean-Pierre Brard. Vous avez des talents de Daumier, monsieur le ministre !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Hier, monsieur Migaud, je n'ai pas voulu intervenir au risque de ralentir les débats, mais deux amendements m'ont surpris, non en ce qu'ils émanaient de votre groupe, mais en ce qu'il émanaient de vous en particulier. Vous y proposiez d'exclure des redevables des tranches supérieures. Comme s'il y avait différentes catégories de Français,...
    M. Jean-Pierre Brard. Ça oui ! il y en a qui ont des coffres et d'autres non !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... comme s'il y avait quelque chose de coupable à être parvenu, par exemple, à créer une entreprise, à y développer l'emploi, à y réussir au nom de son pays.
    Eh bien, cher Didier Migaud, le grand changement des élections qui viennent de se dérouler, c'est précisément cela. C'est que ce gouvernement et la majorité qui le soutient veulent rassembler les Français au service de la France et au service de l'emploi alors que vous les avez divisés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Pierre Brard. Les riches cheminant sur les dos des pauvres !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. J'en viens à l'amendement n° 206, monsieur Brard. Je vous sens impatient, car vous connaissez le sujet par coeur. Vous persistez, dans la même logique, à opposer ceux qui ont un salarié et ceux qui n'en ont aucun.
    M. Didier Migaud. Pour inciter les seconds à embaucher !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je vous le dis, mesdames, messieurs les députés : la manière de concevoir la législation fiscale que nous avons connue pendant cinq ans est périmée. Les Français l'ont du reste eux-mêmes souhaité.
    M. Didier Migaud. Ne leur faites pas dire ce qu'ils n'ont pas dit !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il est temps d'entrer dans une autre phase, celle où l'on rassemble les Français au service de leur pays, pour la réussite économique et pour l'emploi. Et cela nous donne une raison de rejeter l'amendement qui vient de vous être présenté.
    M. Jean-Pierre Brard. Dieu merci, il y a l'enchaînement des phases !
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, je répondrai au Gouvernement et à la commission. Il est vrai que si de nombreux amendements ont été déposés depuis le début de ce débat, bien peu ont été adoptés. Nous avons même, hier soir, atteint le comble de la caricature à propos de la TVA sur la restauration. La détermination des députés de la majorité à faire adopter leur amendement...
    M. Jean-Pierre Brard. La détermination a capitulé !
    M. Augustin Bonrepaux. ... n'a eu d'égale que la vitesse avec laquelle ils ont changé d'avis : après une suspension de séance, ils sont revenus pour voter contre !
    Mme Christine Boutin. Nous n'avons pas de leçons à recevoir de vous !
    M. Jean-Pierre Brard. Recevoir des leçons est une chose, les apprendre en est une autre, madame Boutin !
    M. Augustin Bonrepaux. Tout à l'heure encore, Michel Bouvard avait déposé un amendement plein de bon sens, qui touchait à la TVA sur les monuments historiques. S'il avait insisté, nous l'aurions voté. Mais, une fois de plus, l'amendement a été retiré. Parce que vous êtes aux ordres du Gouvernement !
    Mme Christine Boutin. Non ! Non !
    M. Augustin Bonrepaux. C'est ce que nous constatons depuis le début.
    M. Jean-Pierre Brard. Vous êtes ensorcelée par M. Lambert, madame Boutin ! (Rires.)
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. M. Lambert a du talent...
    M. Jean-Pierre Brard. Un pouvoir de suggestion, oui !
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le ministre, face aux cadeaux exorbitants que vous accordez aux privilégiés, notre souci est de limiter les abus. Il n'est qu'à voir la façon dont vous avez ciblé votre baisse de l'impôt sur le revenu. Il me semble me souvenir, mais il faudrait relire les débats à l'Assemblée nationale, que M. Méhaignerie lui-même était, à une certaine époque, favorable à un plafonnement de ces cadeaux.
    M. Jean-Pierre Brard. Ah ! La tradition démo-chrétienne de justice !
    M. Augustin Bonrepaux. Mais aujourd'hui, il ne propose rien dans ce sens.
    Nous étions tous d'accord pour estimer que les déductions devaient être plafonnées, limitées et ne devaient pas être excessives pour ceux qui ont le plus de moyens afin qu'ils contribuent au financement de la solidarité nationale. Visiblement, ce souci n'est pas le vôtre, monsieur le ministre, puisque vous avez refusé tous nos amendements. Et vous faites de même cette fois-ci. Quant à vous, monsieur le rapporteur général, n'allez pas nous faire croire que vous encouragez l'emploi alors que vous refusez notre amendement qui a précisément pour objet d'inciter à la création d'emplois.
    Il est tout de même indiqué, dans votre rapport, que plus de la moitié des titulaires de BNC appartenant à la catégorie des entreprises de moins de 100 salariés n'en emploient en fait aucun. Ils vont pourtant bénéficier, comme les autres, de la déduction. La réforme de la taxe professionnelle, elle, avait pour objectif d'encourager l'emploi en supprimant la base salaires, dissuasive, car on payait davantage à chaque embauche.
    Nous sommes d'accord pour que vous réduisiez la taxe professionnelle due par les entreprises employant au moins un salarié, mais pas pour que vous fassiez un nouveau cadeau fiscal, un cadeau gratuit, un cadeau sans contrepartie, à ceux qui n'emploient personne.
    M. Maurice Leroy. Vous, vous préférez les cadeaux payants !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous persévérez dans la voie que nous avons déjà dénoncée quand vous avez attribué ces cadeaux fiscaux pour les emplois à domicile. Vous étiez même prêts à accepter le projet du Gouvernement, mais vous avez finalement eu un peu de remords lorsque nous avons dénoncé l'aubaine fiscale que vous accordiez, avec la rétroactivité qui plus est... Notre amendement s'inscrit précisément dans le souci, que nous avons toujours eu, de créer des emplois. Mais ce n'est pas le vôtre. Votre souci à vous, c'est de faire un nouveau cadeau fiscal à une clientèle électorale.
    M. Jean-Louis Dumont. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Je vous rassure, monsieur le ministre, je ne veux pas m'immiscer dans les rapports entre le Gouvernement et sa majorité. Je ne faisais qu'un constat, même si - et Jean-Pierre Brard l'a souligné hier - nous sommes, d'une certaine façon, membres de la majorité présidentielle, puisque nous avons soutenu l'élection du Président de la République. (Sourires. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Pierre Brard. Absolument !
    M. Didier Migaud. Nous avons été surpris, hier, par le manque de confiance dont faisait preuve la majorité parlementaire à l'égard de la parole même du Président de la République. En effet, nous avons pu constater que, sur la question de la TVA sur la restauration, une simple intervention du ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire...
    M. Jean-Louis Dumont. Mais quel ministre !
    M. Didier Migaud. ... avait plus de valeur pour elle que l'engagement solennel du Président de la République. (Sourires.)
    M. Maurice Leroy. Nous sommes à l'Assemblée, ici !
    M. Didier Migaud. Une telle marque de défiance ne peut que nous surprendre de votre part.
    Pour en revenir à l'amendement,...
    M. Michel Bouvard. Oui, soyons sérieux !
    M. Didier Migaud. ... je voudrais vous dire, monsieur le ministre, que vous ne pouvez pas non plus caricaturer la position de l'opposition, car, comme vient de le rappeler Augustin Bonrepaux, c'est l'ancienne majorité, c'est-à-dire nous, qui a supprimé la part salaires de l'assiette de la taxe professionnelle...
    M. Jean-Louis Dumont. Très juste !
    M. Didier Migaud. ... et diminué la surtaxe Juppé sur l'impôt sur les sociétés - surtaxe que vous conservez d'ailleurs. Lorque vous prétendez que, sous la législature précédente, nous avons systématiquement négligé un certain nombre de mesures de nature à contribuer à la création d'emplois, votre raisonnement est caricatural, ce à quoi vous nous aviez peu habitués jusqu'à présent.
    Déclencher l'aide à partir de la création du premier emploi nous paraît une mesure pertinente et incitative. C'est pour cette raison que nous avons déposé cet amendement, qui est destiné à améliorer votre dispositif.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Les idéologues les plus dangereux sont ceux qui prétendent ne pas l'être.
    M. Maurice Leroy. C'est vrai !
    M. Jean-Pierre Brard. Et, monsieur le ministre, vous êtes un expert en la matière. Vous vous exprimez plein d'onction et de componction...
    M. Maurice Leroy. Vous allez demander l'absolution !
    M. Jean-Pierre Brard. C'est une chose que je ne recommanderai pas aux électeurs lors de la prochaine échéance électorale !
    M. Marc Laffineur. Eh bien, vous êtes parti pour rester encore longtemps dans l'opposition !
    M. Jean-Pierre Brard. Il faudra d'abord que M. Lambert et ses collègues se confessent et fassent oeuvre de contribution : après, on appréciera !
    Monsieur le ministre, selon vous, nous, nous opposons les Français les uns aux autres, alors que vous, vous traitez tout le monde de la même manière et aimez tout le monde indifféremment. Eh bien, nous, c'est vrai, nous sommes différents de vous parce que nous considérons que les « gros » et les « petits », ce n'est pas pareil et que ce n'est pas seulement un effet d'optique.
    Vous dites, par exemple, que vous ne faites pas de différence entre les entreprises qui ont des salariés et celles qui n'en ont pas. En vous entendant, je pensais à un boulanger de Montreuil qui fait l'un des meilleurs pains de la Seine-Saint-Denis, M. Legoupil, rue de l'Eglise (Sourires), et je me demandais quel intérêt commun il pouvait avoir avec le baron Ernest-Antoine Seillière de Laborde. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Evidemment, aucun ! Mais l'astuce - et c'est là que se cache l'idéologie - consiste à dire que vous traitez tout le monde de la même manière, ce qui vous permet de faire supporter par M. Legoupil les frasques de M. Seillière ! (Exclamations sur les mêmes bancs.) De la sorte, vous pouvez ainsi indûment privilégier M. Seillière et faire payer les plus modestes. Et, parmi ces derniers, je mets surtout les clients de M. Legoupil qui ne sont pas assujettis à l'impôt sur le revenu parce qu'ils ne gagnent pas suffisamment d'argent pour le payer.
    M. Maurice Leroy. J'espère que M. Legoupil lit le Journal officiel !
    M. Jean-Pierre Brard. Je le lui donnerai !
    Votre discours idéologique, monsieur le ministre, est empreint d'une perversion profonde (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) et il mérite d'être stigmatisé comme tel.
    M. Marc Laffineur. Ça suffit !
    M. Jean-Pierre Brard. Le fait que M. Laffineur tente de venir à votre rescousse, monsieur le ministre, confirme la justesse de mon point de vue. Mais je ne suis pas sûr que le fait qu'il se propose comme béquille du Gouvernement soit un service à vous rendre.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 206.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 309 rectifié, ainsi libellé :
    « I. - Après les mots : "chaque année, la fin du dernier alinéa du II du B de l'article 11 est ainsi rédigée : "en fonction de l'évolution des recettes constatées l'année précédant l'année de l'établissement.
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « La perte de recettes est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. L'article 11 a pour objet de réduire progressivement la fraction des recettes prises en compte dans les bases de la taxe professionnelle des BNC. Ce dispositif entraînant une perte de recettes pour les collectivités locales, il est prévu une compensation. Cet amendement vise à actualiser la base de cette compensation, qui est calquée sur celle relative à la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle alors que cela n'a rien à voir.
    En effet, dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle de 1998, la base a disparu. Et si on avait voulu établir une compensation calquée sur la base réelle, il aurait fallu reconstituer chaque année cette base, ce qui aurait compliqué le mécanisme de compensation. Dans le cas du dispositif prévu par l'article 11, la base est maintenue et on la connaît chaque année. C'est pourquoi nous proposons de calquer la compensation sur cette base et de prendre comme base de la taxe professionnelle les recettes constatées l'année précédant l'année d'établissement de l'impôt.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable, car il n'est absolument pas possible de suivre le raisonnement d'Augustin Bonrepaux.
    Je rappelle que, quand la suppression de la part salaires de TP a été engagée, il a été opéré une « photographie » de ce qu'était la base salaires dans les entreprises au 1er janvier 1999, ce qui signifie que, quand une entreprise embauchait après 1999, la base salaires prise en compte pour établir la compensation versée aux collectivtés locales était celle qui avait été définitivement figée au 1er janvier 1999. A l'inverse, si une entreprise réduisait les effectifs de son personnel après 1999, la compensation pour la collectivité locale se faisait sur une base salaires supérieure à l'évolution de la masse salariale de l'entreprise, puisque celle qui était retenue était celle du 1er janvier 1999.
    Le Gouvernement propose exactement le même raisonnement s'agissant de la base recettes. Celle-ci sera figée au niveau auquel elle aura été constatée en 2003, c'est-à-dire en fonction de la déclaration de 2002 - ou de 2001, compte tenu des décalages - et la compensation sera calculée sur les bases saisies à ce moment-là, multiplié par le taux tel qu'il était en 2002. Donc, on est exactement dans la même logique que celle qui a sous-tendu la réforme générale de suppression de la part salaires de la TP.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le rapporteur général, je ne fais que reprendre une proposition que vous faisiez en 1998. Mais, à l'époque, il n'était pas possible de l'appliquer, car la base salaires ayant disparu de l'assiette de la taxe professionnelle, on ne pouvait pas retenir celle-ci comme base de référence pour la compensation. En revanche, s'agissant de la réforme actuelle de la taxe professionnelle qui s'applique aux professions libérales, la base salaires ne disparaissant pas, la compensation - que vous jugiez à l'époque beaucoup plus juste - peut être réalisée.
    Je suis donc surpris que vous ne reteniez pas notre proposition, puisque c'est celle que vous faisiez en 1998, mais que nous n'avions pas retenue au motif qu'il fallait reconstituer les bases, c'est-à-dire, en fait, qu'il fallait prendre une disposition qui, finalement, coûtait cher à l'Etat.
    Dans le système qu'a retenu le Gouvernement, la compensation pour la commune ne changera pas, que les entreprises créent des emplois ou en suppriment, puisque la base salaires sera figée. Nous, nous vous proposons de mettre en place un dispositif permettant d'opérer une compensation beaucoup plus juste, qui corresponde réellement à la réalité, mais vous refusez cette proposition qui va pourtant dans le sens de la justice.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 309 rectifié.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 11, modifié par l'amendement n° 37.
    (L'article 11, ainsi modifié, est adopté.)

Article 12

    M. le président. « Art. 12. - I. - Le code général des impôts est modifié comme suit :
    « A. - Les articles 1568, 1569, 1569 bis, 1570, 1571 et 1572 sont abrogés.
    « B. - L'article 1699 est remplacé par les dispositions suivantes :
    « La taxe sur les spectacles est recouvrée et les infractions réprimées selon les modalités et sous le bénéfice des sûretés prévues pour les impôts visés au titre III de la première partie du livre Ier.
    « Cette taxe est obligatoirement perçue par les services de l'Etat. »
    « II. - Le 1° de l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « A compter de 2004, pour le calcul du montant de la dotation globale de fonctionnement, le montant de la dotation globale de fonctionnement de 2003 calculé dans les conditions prévues ci-dessus est majoré d'un montant de 23 millions d'euros. »
    « III. - En 2003, le solde de la dotation d'aménagement tel qu'il résulte de l'application des quatre premiers alinéas de l'article L. 2334-13 du code général des collectivités territoriales est majoré de 23 millions d'euros.
    « Cette majoration n'est pas prise en compte dans le montant de la dotation globale de fonctionnement pour l'application du I et du II de l'article 57 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998). »
    Je mets aux voix l'article 12.
    (L'article 12 est adopté.)

Article 13

    M. le président. « Art. 13. - I. - 1. A compter des impositions dues au titre de 2003, France Télécom est assujettie, dans les conditions de droit commun, aux impôts directs locaux et taxes additionnelles perçus au profit des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale ainsi que des autres établissements et organismes habilités à percevoir ces impôts et taxes.
    « Pour l'application du premier alinéa :
    « a) Les dispositions des articles 1465, 1465 A, 1466 B ainsi que des I et I ter de l'article 1466 A du code général des impôts sont applicables aux opérations qui peuvent être exonérées, pour la première année, à compter de 2004.
    « b) Par dérogation à l'article 1477 du code général des impôts, France Télécom déclare, avant le 1er décembre 2002, les éléments nécessaires à l'établissement des bases de taxe professionnelle à retenir pour l'imposition de 2003. Toutefois, les dispositions des articles 1725 à 1729 du code général des impôts ne s'appliquent que si la déclaration est postérieure au 15 janvier 2003.
    « 2. L'article 1635 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
    « a) Au I, les mots : "La Poste et France Télécom sont assujettis sont remplacés par les mots : "La Poste est assujettie et les mots : "au lieu de leur principal établissement sont remplacés par les mots : "au lieu de son principal établissement.
    « b) Dans la deuxième phrase du 5° du II, les mots : "et France Télécom sont supprimés et dans le troisième alinéa du 6° du II, les mots : "et de France Télécom sont supprimés.
    « II. - 1. Le montant de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) est diminué, en 2003, d'un montant égal, pour chaque collectivité territoriale, établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle, au produit obtenu en multipliant la base imposable de taxe professionnelle de France Télécom au titre de 2003 pour cette collectivité territoriale, cet établissement public de coopération intercommunale ou ce fonds, par le taux de taxe professionnelle, applicable en 2002, à la collectivité, à l'établissement public de coopération intercommunale ou au fonds. Pour la région Ile-de-France, ce montant est égal au produit obtenu en multipliant la base imposable de la taxe spéciale d'équipement additionnelle à la taxe professionnelle de France Télécom au titre de 2003 par le taux de cette taxe, applicable en 2002, à cette région.
    « Toutefois :
    « a) Pour les communes qui, en 2002, appartiennent à un établissement public de coopération intercommunale sans fiscalité propre, le taux voté par la commune est majoré du taux appliqué au profit du groupement en 2002 ;
    « b) Pour les établissements publics de coopération intercommunale soumis, en 2002, au régime fiscal de l'article 1609 nonies C ou du II de l'article 1609 quinquies C du code général des impôts et qui font application de la procédure de réduction des écarts de taux, le taux de taxe professionnelle à retenir est celui applicable, en 2002, dans chaque commune d'implantation d'un établissement de France Télécom imposé au profit du groupement ;
    « c) Pour les établissements publics de coopération intercommunale soumis, pour la première fois en 2003, au régime fiscal de l'article 1609 nonies C ou du II de l'article 1609 quinquies C du code général des impôts, le taux de taxe professionnelle à retenir est celui, en 2002, de chaque commune d'implantation d'un établissement de France Télécom imposé au profit du groupement majoré, le cas échéant, du taux de l'établissement public de coopération intercommunale auquel appartenait la commune en 2002 ;
    « d) Pour les communes qui font application en 2002 ou pour la première fois en 2003 des dispositions de l'article 1638 du code général des impôts, le taux de taxe professionnelle à retenir est celui applicable, en 2002, dans chaque commune d'implantation d'un établissement de France Télécom imposé au profit de la nouvelle commune ;
    « e) Pour les communes qui font application en 2002 ou pour la première fois en 2003 des dispositions de l'article 1638 quater du code général des impôts, le taux de taxe professionnelle à retenir est celui applicable, en 2002, dans chaque commune d'implantation d'un établissement de France Télécom imposé au profit du groupement.
    « Pour les années suivantes, le montant de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n°s 98-1266 du 30 décembre 1998) est calculé sur la base de celle attribuée en 2003 après déduction du montant de la diminution prévue au premier alinéa.
    « 2. Pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale, lorsque le montant de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) est, en 2003, inférieur au montant de la diminution à opérer en application du 1, le solde est prélevé, au profit du budget général de l'Etat, sur le produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, de la taxe d'habitation et de la taxe professionnelle perçu au profit de ces communes et établissements.
    « Pour les années suivantes, ce solde est actualisé chaque année du taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement.
    3. En cas d'impositions supplémentaires ou de dégrèvements consécutifs à une rectification des bases imposables de la taxe professionnelle ou de la taxe spéciale d'équipement additionnelle à la taxe professionnelle de France Télécom au titre de 2003, il est procédé à la régularisation du prélèvement opéré en application des 1 et 2.
    III. - Il est effectué en 2003 un prélèvement au profit de l'Etat sur le produit de la taxe additionnelle à la professionnelle prévue par l'article 1600 du code général des impôts. Ce prélèvement est égal, pour chaque chambre de commerce et d'industrie, au produit obtenu en multipliant la base imposable de France Télécom au titre de 2003 dans le ressort de chaque chambre de commerce et d'industrie par le taux de cette taxe applicable en 2002. Ce prélèvement est imputé sur les attributions mentionnées à l'article 139 modifié de la loi du 16 avril 1930.
    IV. - Le IV bis de l'article 1636 B octies du code des impôts est ainsi modifié :
    a) Au premier alinéa, après les mots : " dans la base d'imposition à la taxe professionnelle , sont ajoutés les mots : " et diminuées du prélèvement effectué en application du 1 du II de l'article 13 de la loi de finances pour 2003 (n°... du) ;
    b) Au deuxième alinéa, après les mots : " visée au premier alinéa , sont ajoutés les mots : " et majoré du prélèvement effectué en application du 1 du II de l'article 13 de la loi de finances pour 2003 (n°... du) .
    V. - 1. Le II de l'article 1648 A bis du code général des impôts est complété par un 6° ainsi rédigé : "6° Une dotation annuelle versée par l'Etat à raison de la réforme du régime d'assujettissement de France Télécom aux impôts directs locaux. Cette dotation est fixée à 271 millions d'euros pour 2003.
    2. Pour le calcul de la différence mentionnée au deuxième alinéa du 6° du II de l'article 1635 sexies du code général des impôts au titre des impositions 2002, le produit des impositions visées au I du même article ne prend en compte que les impositions au titre de La Poste.
    3. Par dérogation au 1° du II de l'article 1648 A bis du code général des impôts, le produit des rôles supplémentaires émis jusqu'au 31 décembre 2002 de la cotisation nationale de péréquation prévue à l'article 1648 D dudit code est versé au profit du budget général de l'Etat. »
    M. Carrez a présenté un amendement, n° 228, ainsi rédigé :
    « Après le I de l'article 13, insérer le paragraphe suivant :
    « I bis. - Dans le premier alinéa du 7° du I de l'article 21 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, les mots : "et à France Télécom sont supprimés. »
    La parole est à M. Gilles Carrez.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. L'amendement n° 228 est de coordination.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 228.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Sandrier et Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 77, ainsi rédigé :
    « 1. Supprimer les II et III de l'article 13.
    « 2. Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « La perte de recettes est compensée à due concurrence par le relèvement de la cotisation minimale de taxe professionnelle mentionnée au I de l'article 1647 E du code général des impôts. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. La question de la taxe professionnelle de France Télécom est un sujet récurrent de débat dans cet hémicycle, parce qu'il s'agit d'une anomalie persistante et d'une justice qui pénalise les collectivités locales qui ont sur leur territoire des implantations de France Télécom.
    Or, la solution qui nous est proposée avec cet article est, en réalité, un subterfuge qui me rappelle un jeu qui a cours dans les foyers de travailleurs maliens de Montreuil : vous devenez un spécialiste du bonneteau, monsieur le ministre. En effet, non seulement votre proposition ne répond pas aux revendications légitimes des élus locaux concernés, mais, de plus, nous considérons que le retour au droit commun pour l'imposition de France Télécom ne doit pas se traduire par une ponction sur le montant de la compensation de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle des collectivités et de leurs groupements. En fait, c'est l'illustration du vieil adage : « Donner et retenir ne vaut », puisque cette réforme est neutre pour l'Etat.
    On nous présente aujourd'hui, comme dirait notre collègue de Courson, une nouvelle usine à gaz fiscale, qui aura pour effet de ne rien rapporter aux collectivités dans leur ensemble. En fin de compte, vous inventez pour les collectivités une taxe professionnelle qui ne rapporte rien, c'est-à-dire une mesure qui n'est pas du tout dans l'esprit que les collectivités, qu'elles soient de gauche ou de droite, avaient essayé de faire prévaloir. Voilà pourquoi nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter notre amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable. Je reconnais, d'ailleurs, dans cet amendement l'astuce coutumière de notre collègue Brard, qui veut, en fait, le beurre, l'argent du beurre et même davantage.
    M. Claude Gatignol. Le sourire de la crémière !
    M. Michel Bouvard. A moins que ce ne soit le sourire de la boulangère ! (Sourires.)
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il serait tout de même inouï que les collectivités locales, qui vont bénéficier des nouvelles bases France Télécom restituées, donc d'une nouvelle assiette fiscale, avec la liberté de voter les taux qui s'y appliquent, profitent, de surcroît, du maintien d'une dotation égale de l'Etat. Cela reviendrait à toucher deux fois la même chose.
    M. Jean-Pierre Brard. Quel sophisme !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. On sait l'Etat généreux, mais il ne l'est probablement pas à ce point-là !
    Quant à la réforme, elle est bonne et répond à une demande formulée depuis des années. En effet, je rappelle que, quand France Télécom a été fiscalisée, cela s'est fait au bénéfice de l'Etat, et que les collectivités locales qui avaient sur leur territoire des établissements de France Télécom n'ont jamais bénéficié de cette assiette fiscale et donc n'ont jamais eu la liberté de lui appliquer un taux.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Dès l'année prochaine, France Télécom réintégrera le droit commun et j'espère que La Poste suivra bientôt le même chemin, puisque le problème se pose aussi pour elle.
    Le dispositif proposé consiste à permettre aux collectivités locales de bénéficier de cette assiette fiscale comme de celles de toutes les autres entreprises situées sur leurs territoires respectifs et d'y appliquer librement un taux qu'elles pourront augmenter ou diminuer. Le système est donc tout à fait équilibré.
    C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable à cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je vais apporter à M. Brard des informations qui, je le pense, sont de nature à le rassurer. En effet, la compensation des pertes de recettes pour l'Etat, opérée par un prélèvement sur la compensation de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle, ne lèse en rien, comme il le craint, les collectivités locales, dans la mesure où ce prélèvement correspond au surcroît de taxe professionnelle que les collectivités percevront grâce aux bases de France Télécom. Du reste, la réforme engendre même pour les collectivités locales un gain net de 16 millions d'euros, correspondant au produit de la taxe foncière acquittée par France Télécom.
    En outre, le prélèvement compensatoire au profit de l'Etat permet de financer le maintien des ressources du FNPTP - qui bénéficiait auparavant d'une partie de la fiscalité locale de France Télécom - grâce à une nouvelle dotation de l'Etat de 271 millions d'euros accordée au FNPTP, donc au bénéfice des collectivités locales.
    Votre proposition, monsieur Brard, conduirait à rompre la neutralité financière de la réforme de la fiscalité locale de France Télécom au détriment de l'Etat et, à terme, des collectivités locales.
    Sous le bénéfice de ces observations, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, je recommanderai à l'Assemblée de le rejeter.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je remarque, monsieur le ministre, que fort prudemment d'ailleurs, vous ne m'avez pas, comme le rapporteur général, reproché de vouloir à la fois le beurre, l'argent du beurre, et le sourire de la crémière, sans doute parce que vous savez que dans les chemins creux du bocage, cela ne se passe pas comme au Perreux. (Sourires.)
    En réalité, les collectivités n'avaient jusqu'à présent que le pain sec. Or, ce que nous souhaitions, c'était précisément que la tartine soit un peu beurrée, comme il sied à une politique de justice.
    Vous avez dit - et je pense que mes collègues vous auront écouté avec attention - que les collectivités ne seront pas lésées. C'est une façon de s'exprimer en creux, car si l'on parle en relief, cela signifie que vous ne donnerez pas un sou de plus aux collectivités hormis le produit de la taxe foncière acquittée par France Télécom, soit 16 millions d'euros pour tout le pays ; en un mot, une misère ! Or le magot, si j'ose dire, est du côté de la taxe professionnelle. Ce que vous vous donnez d'une main par le biais de la taxe professionnelle, vous le subtilisez de l'autre par le truchement des compensations de la taxe professionnelle au titre de la disparition de la base salaires de l'assiette. C'est donc une réforme blanche ou, comme vous le dites si joliment, une réforme neutre pour l'Etat. En fait, vous ne réparez pas le préjudice subi par les collectivités, vous ne leur consentez aucun avantage, hormis le produit de la taxe foncière acquittée par France Télécom - une misère, je le rappelle - et le fait qu'elles seront désormais libres de fixer les taux, ce qui n'aura certainement pas échappé à nos collègues de droite.
    Monsieur le ministre, si je décode correctement vos propos - et M. Martin-Lalande, a, semble-t-il, compris la même chose que moi, ...
    M. Patrice Martin-Lalande. Les grands cerveaux se rencontrent !
    M. Jean-Pierre Brard. ... vous incitez les collectivités à augmenter les taux afin que le transfert de la taxe professionnelle de France Télécom leur rapporte vraiment quelque chose. Mais je suppose que ce débat va rebondir tout à l'heure grâce à l'amendement de M. Aeschlimann, notre collègue d'Asnières.
    M le président. Je mets aux voix l'amendement n° 77.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Sandrier, Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 11, ainsi rédigé :
    « I. - Supprimer le II de l'article 13.
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « La perte de recette est compensée à due concurrence par le relèvement de la cotisation minimale de taxe professionnelle mentionnée au I de l'article 1647 E du code général des impôts. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. La pédagogie, c'est l'art de la répétition, encore faut-il que les personnes à qui elle s'adresse fassent un effort d'attention. Or, s'il m'écoute, je vois bien que le ministre n'est pas décidé à me comprendre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je prends des notes !
    M. Jean-Pierre Brard. Très bien. Le problème, c'est que, compte tenu des nouvelles règles, même en révisant d'ici à la deuxième lecture, je ne suis pas sûr que ce soit très productif.
    M. Didier Migaud. Il n'y aura pas deuxième lecture.
    M. Jean-Pierre Brard. L'amendement n° 11 est un amendement de repli, sur lequel je n'ai rien à ajouter, face au mutisme du rapporteur général et du ministre.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je romps le mutisme : la commission a donné un avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 293 et 229, pouvant être soumis à une discussion commune malgré leur place.
    L'amendement n° 293, présenté par MM. Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « I. - Compléter le 1 du II de l'article 13 par l'alinéa suivant :
    « Le montant de la compensation est indexé sur l'évolution de la dotation globale de fonctionnement de l'année pour laquelle la compensation est établie.
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « La perte de recettes est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    L'amendement n° 229, présenté par M. Carrez, est ainsi rédigé :
    « I. - Compléter le 1 du V de l'article 13 par la phrase suivante :
    « Au titre des années 2004 et suivantes, cette dotation est actualisée, chaque année, en fonction du taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement entre 2003 et l'année de versement.
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « La perte de recettes pour l'Etat est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour défendre l'amendement n° 293.
    M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement est extrêmement important. En effet, il propose, ce qui devrait apaiser les craintes de notre collègue Brard, d'assurer une indexation de la compensation de 271 millions d'euros sur l'évolution de la dotation globale de fonctionnement, comme c'est l'habitude lorsque l'Etat transfère des ressources.
    La réforme de la fiscalité locale de France Télécom était réclamée, c'est vrai, par les élus locaux, mais il est à craindre que la taxe professionnelle qui jusqu'à présent a été utilisée pour le fonds national de péréquation ne soit perçue que par les zones d'implantation des installations de France Télécom, aux dépens des autres collectivités et du fonds national de péréquation qui verrait ainsi sa dotation se déprécier.
    C'est pourquoi il paraît indispensable que cette compensation, qui doit bénéficier à toutes les communes pauvres et défavorisées de notre territoire, soit actualisée chaque année sur l'évolution de la dotation globale de fonctionnement.
    Cette proposition, qui n'est pas excessive, me paraît juste et conforme au principe de la péréquation.
    Et c'est à partir de l'attitude du Gouvernement sur les amendements que nous proposons pour améliorer cette péréquation, pour faire en sorte que toutes les collectivitées locales disposent des mêmes moyens, que nous pourrons juger si la volonté de décentralisation du Gouvernement est de donner réellement aux collectivités locales les moyens d'assumer leurs nouvelles compétences.
    M. le président. La parole est à M. Carrez, pour défendre l'amendement n° 229 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 293.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission des finances partage totalement l'analyse qui vient d'être faite par Augustin Bonrepaux. C'est une question de principe : toutes les compensations qui ont été opérées jusqu'à présent ont été indexées sur la DGF. Il doit en être de même pour celle-ci.
    J'ajouterai simplement que la dotation budgétaire de l'Etat au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle est déjà indexée sur les ressources fiscales nettes de l'Etat. L'évolution de cette indexation ces cinq dernières années est un peu plus favorable que celle de la DGF. Mais il nous est apparu plus logique au plan du principe d'indexer sur la DGF parce que, comme l'a dit notre collègue Bonrepaux, toutes les dotations de compensation sont indexées sur la DGF.
    Cela me conduit à soulever un problème de fond : il est possible que certaines recettes d'Etat soient transférées dans le cadre de la décentralisation et les indexations qui portent sur les recettes fiscales nettes de l'Etat risquent de se révéler défavorables, l'assiette des recettes d'Etat étant amputée par ces transferts. C'est une raison supplémentaire pour opter pour l'indexation sur la DGF. En tout état de cause, je souhaiterais connaître l'attitude du ministère sur ce qui subsistera de l'indexation sur les recettes fiscales nettes de l'Etat dès lors que celles-ci ont vocation à diminuer.
    Je termine en disant que notre proposition d'indexation a reçu un avis favorable unanime de la part de la commission.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Nous avons là la preuve que la commission des finances ne s'aligne pas systématiquement sur les points de vue du Gouvernement. En effet, si je vous ai écoutés avec attention, monsieur le rapporteur général et monsieur Augustin Bonrepaux, je ne partage pas votre avis.
    D'abord, je ne souscris pas à l'idée de compensation. Dans notre jargon, nous parlons de compensation lorsqu'il y a un transfert de charges. Or nous ne sommes pas du tout dans cette configuration. Le montant de la dotation de l'Etat au FNPTP, le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle, a été fixé de manière à garantir en 2003 la neutralité de la normalisation de la fiscalité locale de France Télécom sur les ressources de ce fonds. Au-delà de 2003, l'évolution des autres ressources du fonds ainsi que de ses charges seront totalement déconnectées de l'indice d'évolution de la DGF.
    Le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle dispose de plusieurs ressources, je le rappelle, non pas à vous, monsieur Carrez, qui êtes un des grands spécialistes de ces questions, mais à l'Assemblée.
    Or aucune de ces ressources n'est indexée sur la DGF. Par ailleurs, les charges de ce fonds, qui sont principalement la dotation de développement rural, la compensation qui est versée aux communes qui connaissent une perte importante de base d'imposition de TP, la compensation à certaines communes défavorisées des pertes de dotations de compensation de la taxe professionnelle enregistrées au titre de l'application du contrat de croissance et de solidarité, toutes ces charges ont également une évolution indépendante de celle de la DGF.
    Donc, une indexation a priori de la nouvelle dotation de l'Etat sur la DGF, comme sur tout autre indice, ne me paraît pas justifiée. Elle aurait des conséquences sans doute sous-estimées en cet instant. C'est ce qui me conduit, monsieur Bonrepaux, monsieur le rapporteur général, à vous inviter à retirer ces amendements.
    M. Augustin Bonrepaux. Les conséquences, ce serait 2 %.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. A défaut, le Gouvernement serait contraint à demander à l'Assemblée nationale leur rejet.
    M. Augustin Bonrepaux. Oh !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je ne partage pas l'analyse que vous faites, qui ne me paraît, ni en recettes ni en charges, conforme à la pratique actuelle du fonds national de péréquation de la taxe professionnelle.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Monsieur le ministre, la dotation du fonds national de péréquation fait partie de ce qu'on appelle l'enveloppe normée, qui est elle-même indexée sur les prix et le tiers de la croissance. Que vous répondiez, que dans la logique du contrat de croissance et de solidarité, il faudrait envisager une indexation sur les prix et le tiers de la croissance, comme pour le contrat, et non sur les prix et la moitié de la croissance, comme pour la DGF, nous pourrions, à la limite, l'admettre, même si cela reviendrait à déroger au principe d'indexation des dotations de l'Etat et que cela manquerait de cohérence puisqu'il y aurait deux apports au FNPTP : un apport de l'Etat constitué des subventions budgétaires, indexées sur les recettes fiscales nettes de l'Etat, et un autre apport - ces 271 millions d'euros - qui, lui, ne serait pas indexé du tout. Cela serait totalement illogique.
    Mais, de surcroît, comme le fonds fait partie de l'enveloppe normée, je ne vois pas vraiment de raison logique à la non-indexation de ce nouvel apport que va constituer la compensation par l'Etat, au titre du FNPTP, du retour au droit commun de France Télécom.
    M. Didier Migaud. Bonne intervention, monsieur le rapporteur général.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il n'y a pas d'opposition entre nous.
    Je veux simplement que les choses soient claires et qu'on ne reproche pas ultérieurement au Gouvernement les conséquences immaîtrisées de cette proposition.
    M. Augustin Bonrepaux. Oh !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Le sujet est très compliqué. Vous savez bien qu'à chaque fois que vous touchez à un dispositif de compensation, vous avez des effets secondaires qu'il est difficile de maîtriser par avance. Donc mettons-nous d'accord : le Gouvernement ne recommande pas l'adoption de ces amendements. S'ils étaient malgré tout adoptés, leurs auteurs doivent en accepter les conséquences et ne pas reprocher ultérieurement au Gouvernement les effets qui n'auraient pas été anticipés aujourd'hui.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le ministre, je ne vois pas quels pourraient être les effets d'une non-indexation de la compensation. Ces effets risquent d'être négatifs si elle n'est pas indexée. Ils ne peuvent être que positifs pour la péréquation si elle est indexée. Pourquoi ? Avec l'indexation, le fonds national évoluera et disposera, chaque année, de à 5 à 6 millions et plus d'euros supplémentaires. Ce sera autant de plus pour la péréquation, ce qui est positif. Dans le cas d'une non-indexation, le niveau de la péréquation sera gelé, avec toutes les conséquences négatives que cela aura, notamment pour les collectivités locales qui en bénéficient, c'est-à-dire celles qui disposent d'un potentiel fiscal inférieur à la moyenne et qui doivent consentir un effort fiscal supérieur à la moyenne. Cela intéresse toutes les collectivités locales défavorisées. Elles auront chaque année la même somme et finalement la compensation se dépréciera. Notre crainte, je le répète, c'est que le transfert de la ressource de France Télécom directement aux collectivités locales ne profite qu'aux zones où France Télécom est implantée, c'est-à-dire souvent des zones de concentration de population, toutes les autres zones, la plupart défavorisées, en faisant les frais et ne touchant rien.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. Augustin Bonrepaux. La seule façon de corriger cet effet est bien d'accepter notre suggestion. De plus, monsieur le ministre, ce serait un signe positif du Gouvernement que d'associer à la décentralisation l'idée de péréquation.
    M. Didier Migaud. Un petit signe !
    M. Augustin Bonrepaux. Je crois qu'il faut commencer par là.
    M. Didier Migaud. La péréquation est en recul !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. J'ai bien entendu M. le ministre qui nous dit que notre amendement peut poser quelques problèmes dans le futur, parce que la répartition des dotations de l'Etat aux collectivités locales ressemble un peu au système des vases communicants, avec une DGF qui est indexée sur les prix et la moitié de la croissance mais qui elle est également intégrée dans une enveloppe générale, elle-même indexée sur les prix et le tiers de la croissance. Au bout du compte, la variable d'ajustement qu'est la DCTP baisse chaque année. Mais, monsieur le ministre, la question que je souhaite vous poser, et à laquelle vous devez répondre, est une question de principe.
    Cette nouvelle dotation va participer à l'ensemble des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales. De surcroît, cette dotation rejoint un fonds essentiel, le fonds de péréquation de la taxe professionnelle. Le Premier ministre nous a expliqué il y a deux jours que le projet de loi constitutionnelle qui nous sera bientôt proposé, et qui posera le principe de l'autonomie fiscale des collectivités, reposerait sur cinq piliers, dont les piliers financiers seraient l'autonomie et la péréquation. Or la péréquation repose essentiellement sur le fonds national de péréquation. Il est donc vital que ce fonds, dont le niveau est actuellement très faible, puisse évoluer.
    M. Didier Migaud. Tout à fait !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il faut qu'il puisse augmenter dans l'avenir.
    Ma question est toute simple, monsieur le ministre : puisque le contrat avec France Télécom est reconduit pour la troisième année consécutive, êtes-vous bien acquis à l'idée que les dotations de l'Etat qui sont versées au fonds de péréquation font partie de l'ensemble des relations financières qui doivent être remises à plat et doivent bénéficier de l'évolution générale que connaîtront les dotations de l'Etat aux collectivités locales ?
    Le problème est donc double : un problème de principe général et cette question de l'alimentation de la péréquation sans laquelle on ne pourra pas relancer la décentralisation. Si vous levez ces réserves et que vous vous engagez à approfondir cette question avant l'examen de ce texte au Sénat ou son retour ici, je suis prêt à retirer mon amendement.
    M. Marc Laffineur. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Se nouent, entre le Gouvernement et la majorité qui le soutient, des relations de grande confiance. Je veux que ces relations s'établissent sur des bases claires et bien définies.
    Or, à l'heure où nous parlons, je ne puis vous garantir l'évolution que l'amendement est supposé atteindre.
    M. Didier Migaud. Mais la rédaction peut être améliorée d'ici au Sénat !
    M. Augustin Bonrepaux. Pourquoi ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur Bonrepaux, nous entretenons d'anciennes relations fondées sur la responsabilité.
    M. Augustin Bonrepaux. J'essaie de comprendre !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Si mon souci était de défendre aveuglément les intérêts de l'Etat, il m'arrangerait plutôt que l'amendement soit adopté. Mais ce qui ne me plaît pas, c'est de nouer des relations de ce type avec le Parlement. Je veux, au contraire, établir des relations de confiance. Ma recommandation est donc de retirer l'amendement pour nous donner le temps nécessaire à l'examen de la requête qui vient d'être présentée par le rapporteur général, et voir comment elle peut être traduite en toute sécurité financière. Cela étant, la représentation nationale est libre de faire ce qu'elle veut. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Didier Migaud. Merci ! (Sourires.)
    M. le président. La parole est à Mme Christine Boutin.
    Mme Christine Boutin. L'intervention de M. le ministre est très importante. Ce qui nous est proposé non seulement à l'occasion de cette discussion mais depuis le début de nos travaux, c'est tout simplement d'établir des relations de confiance entre l'Assemblée nationale et le Gouvernement. Et je crois que cette conception est un peu nouvelle.
    M. Didier Migaud. Oh !
    M. Marc Laffineur. En effet.
    M. Didier Migaud. Vous n'avez jamais pratiqué la confiance avec nous ?
    Mme Christine Boutin. Votre responsabilité morale est très importante, monsieur le ministre. Mon expérience déjà longue de parlementaire me conduit à juger indispensable le rétablissement de cette confiance.
    M. Didier Migaud. Vous avez tellement souffert sous Juppé et Balladur ? (Sourires.)
    Mme Christine Boutin. Nous sommes prêts à vous suivre, mais il faudra, aussi bien sur ce que nous avons décidé la nuit dernière à propos de la restauration que sur votre engagement d'avoir une discussion claire entre le Parlement et vous-même, que vos propos soient suivis d'effet, car c'est votre parole et celle du Gouvernement qui est en cause.
    M. Marc Laffineur. Très bien !
    M. le président. La parole est M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Je serais disposé à vous suivre, monsieur le ministre, si je comprenais. Mais je ne comprends pas.
    Je ne comprends pas en quoi voter une indexation qui représente de 5 à 6 millions chaque année - le taux d'évolution de la DGF est compris entre 2 et 3 % - pénalisera la péréquation. On peut bien parler d'enveloppe normée, mais si le fonds de péréquation n'augmente pas, je ne vois pas comment la péréquation pourrait augmenter.
    Notre premier souci doit être de donner plus aux collectivités locales défavorisées. J'avais souligné en son temps le danger qu'il y avait à transférer la taxe de France Télécom sur les collectivités car on risquait de mettre en cause la péréquation. Eh bien ! Nous y sommes.
    Nous demandons une actualisation de la dotation, et l'on nous rétorque que cela pose des problèmes. Lesquels ?
    Moi, j'aime bien comprendre les propositions qui sont faites. Hier, à propos d'un amendement concernant l'impôt sur le revenu, vous nous avez fait valoir qu'il fallait réfléchir. Nous vous avons répondu que nous étions d'accord, pour être constructifs. Mais là, je ne comprends pas pourquoi, en votant aujourd'hui une actualisation, une indexation, on mettrait en cause la péréquation elle-même.
    Hier encore, s'agissant de la Communauté européenne, nous vous avons suivi car nous voulons être constructifs. Mais en l'occurrence, si nous voulons être constructifs, nous voulons aussi un signe et ce signe pourrait consister à faire évoluer la dotation du fonds national.
    En quoi ce signe pourrait-il porter préjudice aux collectivités et au Gouvernement ? En quoi pourrait-il remettre en cause la confiance entre le Gouvernement et sa majorité ?
    Je maintiens donc l'amendement n° 293.
    M. le président. Compte tenu des précisions apportées par le Gouvernement, l'amendement n° 229 est-il maintenu ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Non, monsieur le président. Il est retiré.
    M. le président. L'amendement n° 229 est retiré.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 293.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 13, modifié par l'amendement n° 228.
    (L'article 13, ainsi modifié, est adopté.)

Article 14

    M. le président. « Art. 14. - I. - 1. Au I de l'article 1636 B sexies du code général des impôts, le 4 est remplacé par les dispositions suivantes :
    « 4. A compter de 2003 et par exception aux dispositions du b du I, les communes, les départements et les organismes de coopération internationale dotés d'une fiscalité propre peuvent augmenter leur taux de taxe professionnelle, par rapport à l'année précédente, dans la limite d'une fois et demie l'augmentation de leur taux de taxe d'habitation ou, si elle est moins élevée, de leur taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières.
    « Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables lorsqu'il est fait application des dispositions du quatrième alinéa du 2.
    « La majoration prévue au 3 n'est pas applicable s'il est fait application des dispositions du premier alinéa. »
    « 2. L'article 1636 B sexies A du code général des impôts est complété par un III ainsi rédigé :
    « III. - A compter de 2003 et par exception aux dispositions du I, les régions peuvent augmenter leur taux de taxe professionnelle, par rapport à l'année précédente, dans la limite d'une fois et demie l'augmentation de leur taux de taxe foncière sur les propriétés bâties.
    « Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables s'il est fait application des dispositions du deuxième alinéa du II. »
    « 3. L'article 1636 B decies du code général des impôts est modifié comme suit :
    « a. Aux premier et troisième alinéas du II, les mots : "ainsi qu'aux 2 et 3 du I sont remplacés par les mots : "ainsi qu'aux 2, 3 et 4 du I » ;
    « b. Il est ajouté au deuxième alinéa du II une phrase ainsi rédigée : "Dans ce cas, les dispositions du 4 du I de l'article 1636 B sexies ne sont pas applicables. »
    « II. - Un rapport établissant un bilan de l'évolution comparée des bases et des taux de la taxe professionnelle, d'une part, de la taxe d'habitation et des taxes foncières, d'autre part, sera adressé annuellement au Parlement. »
    Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.
    La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. L'article 14 est un article important car il concerne la liberté et la responsabilité des élus locaux. Cet article peut conduire à s'interroger sur les projets actuels du Gouvernement en matière de décentralisation.
    Pour nous, toute proposition qui consiste à amplifier, à conforter la liberté des collectivités locales et des élus locaux va dans le bon sens. Nous estimons que les élus locaux sont des personnes responsables, alors même que ce point de vue ne semble pas toujours partagé au niveau central. Ils sont tout à fait conscients des conséquences des dispositions qu'ils peuvent être amenés à voter.
    Le Gouvernement ne peut pas tenir un double discours !
    M. de Robien nous a expliqué mardi dernier, me semble-t-il, que la loi SRU portait en elle un doute quant à la responsabilité des élus à partir du moment où elle entraînait pour ces derniers quelques obligations, alors même qu'il convenait de leur accorder une confiance absolue. Mais du côté du ministère de l'économie, cette confiance est particulièrement mesurée.
    Le Premier ministre doit arbitrer et, s'il est logique avec lui-même, il doit le faire dans le sens de l'affirmation de la liberté et de la responsabilité des élus.
    Cela dit, nous voulons exprimer des craintes sur les conséquences que peuvent avoir les projets actuels du Gouvernement en matière de décentralisation. Bien sûr, nous sommes d'accord pour que la France soit davantage décentralisée, déconcentrée. Ainsi que le Premier ministre ne cesse de le répéter, si la France a connu un premier mouvement de décentralisation, c'était sous l'autorité de François Mitterrand avec les lois Mauroy-Defferre. Il est quelque peu émouvant de le voir battre sa coulpe, regrettant que la droite ait, à l'époque, voté contre ces lois de progrès.
    Aujourd'hui, le Premier ministre nous affirme que la décentralisation peut être le mouvement. Sûrement, à partir du moment où elle n'aurait pas pour conséquence d'aboutir à une République éclatée, source de disparités et d'inégalités fortes entre les territoires et entre les citoyens. Mais nous sommes très inquiets car le débat que nous venons d'avoir montre, mesdames, messieurs, que s'agissant de la péréquation, vous avez un blocage, dont je ne sais s'il est psychologique ou philosophique. En tout cas, tout ce qui peut toucher à la péréquation semble se heurter à une opposition de votre part.
    Alors que la péréquation, c'est-à-dire la redistribution, entre les territoires et entre les collectivités locales avaient plutôt progressé sous la législature précédente, vous portez un coup d'arrêt, par un certain nombre de mesures, à ce progrès.
    Quant à l'autonomie financière ou fiscale, que le Gouvernement et sa majorité mettent beaucoup en avant, elle est souvent plus forte en France que chez beaucoup de nos voisins européens. En effet, dans notre pays, la marge de manoeuvre fiscale porte sur la moitié des recettes alors qu'elle ne porte en moyenne que sur 29 % ou 30 % de celles-ci dans l'Union européenne. Pourtant, la capacité d'initiative des collectivités locales françaises et leur autonomie politique, si je peux utiliser cette expression, ne sont pas plus fortes que celles de leurs voisines allemandes ou espagnoles ; elles sont même beaucoup moins importantes. Comme quoi les deux éléments ne sont pas obligatoirement liés.
    L'autonomie fiscale n'est-elle que le cache-sexe d'une rente de situation qui permet, en son nom, de s'élever contre des réformes visant justement à renforcer la péréquation ou la redistribution entre les collectivités locales ou à lutter contre les injustices ? Le fondement même de notre politique d'aménagement du territoire et notre conception de l'égalité républicaine pourraient assurément être remis en cause si vous vous contentiez de cette définition.
    Nous sommes inquiets des conséquences que pourraient avoir les projets du Gouvernement qui tendent à transférer un certain nombre de charges en direction des collectivités locales. De telles dispositions pourraient contraindre les élus à user de la liberté qui leur serait donnée d'augmenter les impôts locaux pour faire face aux besoins, du fait des charges qui leur seraient transférées.
    Mes chers collègues, vous savez parfaitement que, lorsque l'on rapproche le lieu de décision du lieu d'expression des besoins, cela peut avoir des conséquences sur le coût supporté par les collectivités locales.
    M. le président. Monsieur Migaud, il va falloir conclure.
    M. Didier Migaud. Le débat est important, monsieur le président.
    M. le président. C'est pour cela que je vous ai laissé dépasser votre temps de parole. Mais il vous faut maintenant conclure.
    M. Didier Migaud. Lorsque le ministre de l'éducation nationale propose la suppression de surveillants ou d'aides-éducateurs, ajoutant qu'il fera de nouvelles propositions dans le courant de l'année prochaine en associant les collectivités locales, on ne peut qu'être inquiet quant à la conception que peut avoir le Gouvernement de la décentralisation et de l'autonomie fiscale. Et cette question a un lien direct avec l'article 14.
    Alors, oui à la liberté ! Oui à la responsabilité ! Mais attention au piège que peut nous tendre le Gouvernement ! Prenons garde à l'obligation qui pourrait en résulter pour les élus locaux de trop user de cette liberté !
    M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand.
    M. Xavier Bertrand. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons ce matin le projet de loi de finances pour 2003 et pas les textes sur la décentralisation. Chaque chose en son temps !
    La décentralisation est un sujet important, mais elle doit être abordée sans passion. J'en parlerai moi-même à la fois en tant que parlementaire - je suis député de l'Aisne -, en tant qu'élu local - je suis l'adjoint au maire d'une collectivité, Saint-Quentin, de 60 000 habitants - ainsi qu'en tant qu'élu intercommunal - je suis vice-président chargé de l'intercommunalité à la communauté d'agglomération de Saint-Quentin.
    D'abord, nous ne devons pas oublier le cadre dans lequel s'inscrit notre discussion. Le budget qui nous est soumis est bâti sur une double logique : d'une part, un besoin de baisse des prélèvements obligatoires et, d'autre part, l'exigence de favoriser la consommation et l'investissement en faisant renaître la confiance chez les différents acteurs économiques.
    Nous savons toutes et tous dans cette enceinte que nous ne pouvons pas, sur le plan local, faire le contraire de ce que nous décidons de faire sur le plan national. Car les logiques sont les mêmes. Mais il faut, plus que tout, que les acteurs économiques investissent grâce au retour de la confiance, et c'est cette confiance qui fondera notre redémarrage économique.
    Par ailleurs, l'article 14, dans sa rédaction et son esprit actuels, instaure un équilibre entre une forme de rigidité qui pouvait exister par le passé et une totale liberté. Il autorise plus de souplesse, ce qui va permettre de coller davantage à la diversité de nos collectivités locales, laquelle recouvre, nous le savons bien, des réalités bien différentes.
    Mais il faut faire attention : ne dénaturons pas l'article 14. Prenons garde d'en modifier l'esprit car, sinon, il y aura une rupture de l'équilibre qu'il vise à instaurer !
    Nous sommes d'accord : il n'y aura pas forcément d'augmentation de la fiscalité. Lors de nos travaux en commission, nous avons pu être convaincus de l'esprit de responsabilité qui anime les élus locaux. Cela dit, il y a quand même des risques, à cause du contexte. Je veux, bien sûr, parler du contexte économique, mais il y a aussi un élément nouveau. M. Migaud a parlé tout à l'heure de la liberté des collectivités locales et des élus locaux. Très bien ! Depuis quelques années cependant, et notamment depuis cinq ans, la liberté d'un certain nombre d'acteurs, comme les départements, n'a cessé de se réduire. Quand on remplace des recettes propres par des dotations d'Etat, peut-on toujours parler de liberté ?
    Avec la suppression partielle de la vignette, la suppression de l'aide médicale, la suppression des contingents communaux de l'aide sociale, la suppression de la part « salaires » de la taxe professionnelle et la réforme des droits de mutation, la fiscalité, qui représentait, pour les départements, 65,5 % des recettes réelles en 2000, n'en représente plus, en 2002, que 56,8 %. Quant aux dotations et aux compensations d'Etat, elles représentaient 22,1 % de ces recettes en 1999, pour en représenter 37,4 % aujourd'hui. Il faut garder ces chiffres à l'esprit.
    Pour les départements et les EPCI à taxe professionnelle unique, le risque est sans doute plus grand que pour les communes. En effet, on observe une montée en puissance des EPCI, avec l'intégration de compétences, notamment de compétences techniques, qui vont continuer de coûter cher, et même très cher. S'agissant des départements, je ne peux passer sous silence que n'est toujours pas absorbé le financement complet de mesures telles que l'APA, les SDIS ou les 35 heures dans la fonction publique territoriale.
    Ainsi donc, quel que soit le niveau de responsabilité des uns et des autres, il y a un risque qui concerne, entre autres, la taxe professionnelle. La taxe professionnelle va toucher directement l'investissement et, dans la mesure où nous avons un besoin vital de cet investissement, nous ne pouvons pas nous permettre de casser la confiance. Mais le foncier non bâti peut aussi être affecté - cela dépendra des réalités locales.
    Nos approches du rôle des différentes taxes sont parfois différentes selon les bancs où nous siégeons. A cet égard aussi il y a un risque.
    Je terminerai en parlant de la méthode retenue.
    La méthode qui a présidé à l'élaboration du projet de loi de finances peut se résumer, ainsi que le ministre délégué au budget nous l'a rappelé lors de la discussion générale, en trois mots : décision, expérimentation, évaluation. Oui, nous allons regarder si tout fonctionne et si les résultats sont à la hauteur des attentes. Ce n'est qu'à la lumière de cette évaluation que nous pourrons savoir à quel rythme et dans quelle direction il convient de prolonger notre action. C'est d'ailleurs dans cet esprit qu'un rapport devra être présenté au Parlement.
    Du point de vue de la méthode encore, une modification importante de l'esprit de l'article 14 me semble prématurée. Toute réforme doit suivre un rythme. Mercredi dernier, lors des questions d'actualité, le Premier ministre a confirmé que nous connaîtrions une vague réformatrice, que nous attendons toutes et tous. Mais le cadre constitutionnel, législatif et réglementaire n'est pas encore fixé. De nouvelles règles du jeu entre les collectivités locales et entre les collectivités locales et l'Etat doivent être définies. En ce domaine, nous avançons avec détermination, mais sans précipitation. C'est pourquoi il est important de préserver l'esprit de l'article 14.
    Certains voudraient aller plus vite. Mais je leur rappelle que nous sommes élus pour cinq ans et non pour cinq mois. Nous devons donc nous garder de toute précipitation.
    Voilà pourquoi je suis, en tant que parlementaire et en tant qu'élu local, attaché à la souplesse de l'esprit actuel de l'article 14. Celui-ci incarne, pour moi et pour beaucoup de mes collègues, un équilibre. Or nous savons bien que c'est à partir du moment où l'on a trouvé l'équilibre que l'on peut avancer. Nous souhaitons avancer dans la direction de l'article 14, mais au rythme qu'induisent sa rédaction et son esprit actuels. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Eric Woerth.
    M. Eric Woerth. L'opposition a fait part de son inquiétude. C'est assez normal : c'est pour ainsi dire inscrit dans ses gènes. Ce qui serait grave, c'est que la majorité soit inquiète, mais ce n'est pas le cas.
    Chacun est donc à sa place.
    Nous poursuivons cependant tous, peu ou prou, le même objectif. Nous sommes tous des élus locaux, nous avons tous envie d'autonomie, nous considérons tous que c'est un point important, et l'objectif, à gauche comme à droite ou au centre, est donc partagé.
    Le véritable enjeu est le mariage de la liberté et de la responsabilité, de la confiance et de la prudence. Pour ma part, je vois l'article 14 comme une première étape ; c'est un signe en direction de l'assouplissement du carcan pesant sur les collectivités territoriales avec la règle très stricte de la liaison entre les taux.
    Entre les deux écoles, celle de la confiance et celle de la prudence, quelquefois excessive, j'aurais plutôt tendance à adhérer à la première. Je considère en effet que les élus locaux, après toutes ces années de décentralisation et après tous les progrès que nous avons accomplis ensemble - je pense à la création des intercommunalités et à la multitude de services passés dans leurs compétences -, sont devenus parfaitement responsables.
    Je fais donc partie de l'école qui prône la confiance vis-à-vis des élus locaux qui, me semble-t-il, ne pourraient pas faire un mauvais usage de leurs nouvelles libertés. Il serait cependant risqué d'aller plus loin que les mesures proposées dans cet article. Il faut prendre le temps d'y réfléchir. Mais conservons cet état d'esprit et offrons des libertés supplémentaires aux collectivités territoriales.
    Un débat va s'ouvrir avec le projet de loi constitutionnelle et le projet de loi sur la décentralisation, annoncé par le Premier ministre. Faisons en sorte que les vraies questions soient posées : question des compétences, question du périmètre de responsabilité, question de relations entre les différents niveaux de collectivités territoriales, question du financement et en particulier question cent fois posée, mais jamais résolue des financements croisés qui ont tendance à étouffer les projets des collectivités et d'une certaine manière aussi de leurs citoyens. C'est donc à un débat plus global que nous allons nous livrer. De la liberté, de la responsabilité, de l'expérimentation que prôneront les textes, nous devrons tirer les conséquences sur le plan financier afin de sortir en douceur du système aujourd'hui très rigide et contraignant de liaison des taux et sans que cela nous conduise à une augmentation presque automatique de la fiscalité.
    La fiscalité locale augmentera de toute façon. Les collectivités locales auront de plus en plus de compétences qu'il faudra inévitablement financer. Et même s'il y a des dotations de l'Etat, on sait très bien que les élus locaux veulent toujours faire mieux en remplissant leur rôle d'élus de proximité. On l'a vu au niveau notamment des conseils régionaux et des conseils généraux. On le verra encore. Toutefois l'augmentation de la fiscalité locale n'est pas toujours due à une modification du périmètre de compétences. Elle est liée aussi à des systèmes de normalisation.
    C'est en fait un environnement général qui justifie que la fiscalité locale soit de plus en plus autonomisée sous un régime de liberté mais en même temps mise davantage sous surveillance. La responsabilité des élus locaux doit être en effet plus clairement engagée, ce qui n'est pas toujours le cas aujourd'hui. Compte tenu des financements croisés et des systèmes complexes, le contribuable a souvent tendance à globaliser. Il nous faudra veiller à réduire les dérapages car certains grands établissements industriels ou certaines grandes entreprises risquent d'être surtaxés au niveau local tout comme les agriculteurs au travers de la taxe foncière sur les propriétés non bâties.
    Bref, réfléchissons bien à tout cela pour aboutir, en 2004, à un assouplissement plus complet des règles qui nous sont proposées aujourd'hui dans cet article. Je suggère finalement de marier ou de pacser, comme dirait la gauche, la confiance et la prudence.
    M. le président. Merci, monsieur Woerth, d'avoir respecté votre temps de parole.
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Le débat sur la décentralisation et les libertés locales, dont vous parliez, monsieur le député, me rappelle étrangement le débat qui a eu lieu en 1994 sur l'aménagement du territoire. Souvenez-vous des grandes proclamations sur la péréquation : dans la loi Pasqua devait figurer un indice synthétique autour duquel ramener toutes les collectivités locales. Mais, de 1994 à 1997, rien ne s'est passé et la péréquation en est restée là où elle en était jusqu'à ce que nous portions celle de la dotation globale de fonctionnement de 8 % à 12 %. Il ne suffit pas de proclamer l'autonomie des libertés locales, encore faut-il s'en donner les moyens.
    Vous nous dites que vous allez organiser la décentralisation et que l'on verra après. C'est justement ce qui suscite notre inquiétude.
    Il est vrai que la déliaison des taux peut être une marque de confiance à l'égard des élus locaux et un gage de liberté, mais, alors, il faut aller jusqu'au bout de cette logique et supprimer le plafonnement des taux. Quand les collectivités disposent de bases importantes par rapport à la population, elles peuvent se contenter de taux modestes, mais quand les bases de la taxe professionnelle ou de l'impôt foncier sont réduites, elles sont obligées d'avoir des taux élevés. Elles se trouvent alors enserrées dans le carcan du plafonnement car elles doivent rentrer dans une moyenne nationale. Or la péréquation ne permet pas d'assurer les mêmes moyens à toutes les collectivités locales.
    S'il y a un pas à faire en direction de la déliaison des taux, faisons-le. Nous sommes prêts à engager une réflexion et une concertation. Mais alors avançons dans d'autres directions et faisons pleinement confiance aux élus locaux. Vous savez, je ne connais pas un seul élu local, de quelque bord qu'il soit, qui soit heureux d'augmenter les impôts. Chacun essaie de gérer de façon rigoureuse les finances locales. Il y a quelques exceptions, que la population sait sanctionner. On pourrait presque dire qu'il n'y a pas de bons gestionnaires, mais seulement des collectivités qui ont des moyens et d'autres qui en ont moins. C'est pourquoi, dans certaines zones, les impôts atteignent des niveaux insupportables.
    Cela dit, la déliaison des taux inspire aussi quelques inquiétudes car elle constitue une façon de favoriser l'augmentation des impôts. Mais vous les auriez apaisées, ces inquiétudes, monsieur le ministre, si vous aviez tout à l'heure donné satisfaction à nos amendements sur l'imposition de France Télécom et sur le fonds de péréquation. Pour aller vers la liberté des collectivités, il faut leur assurer des ressources identiques sur tout le territoire, or vous savez que ce n'est pas le cas.
    Quant à la dotation de compensation de la taxe professionnelle, je constate qu'elle diminue. Vous me direz : ce n'est pas nouveau. Certes, mais pour la première fois cette année, toutes les collectivités, qu'elles soient riches ou pauvres, sont touchées par cette diminution. A ma grande stupéfaction, j'ai même entendu M. Devedjian expliquer lors d'une réunion du comité des finances locales qu'il n'était pas normal que la dotation diminue autant pour les plus riches, comme si ça l'était pour les plus pauvres. Curieuse conception de la péréquation.
    Pour la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale, vous allez nous dire, monsieur le ministre, qu'elles progressent. Oui, mais grâce à ce que vous prenez aux collectivités locales sur l'année 2002. Je ne vois pas où est le progrès. Auparavant, ces dotations progressaient toujours par des moyens nouveaux. Ce n'est plus le cas. Il me semble donc que la péréquation en prend un coup. Et devant cette absence de souci de répartir les richesses de la meilleure façon à travers le territoire, on ne peut là encore qu'être inquiet.
    Par ailleurs, il est question de transférer la charge des ATOS aux collectivités locales - pour ceux des collèges aux départements, pour ceux des lycées aux régions - et de transférer la charge des routes nationales aux départements ou aux régions. A cela s'ajoutent des suppressions de crédits et d'emplois - plus d'un millier pour les ATOS, et sept cents dans l'équipement.
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, il va falloir conclure.
    M. Augustin Bonrepaux. Je termine. Il en est de même pour la culture et pour le tourisme. Et en même temps, M. le ministre nous explique que la décentralisation est quelque chose de juste, que l'on tranférera « les crédits inscrits actuellement ». Seulement, on ne sait pas à quelle année renvoie cet « actuellement ». S'il s'agit de l'année 2002, alors ce sont des crédits en diminution qui seront transférés. Cela entraînera des charges supplémentaires pour les collectivités locales et les impôts locaux, qui sont les plus injustes, seront augmentés tandis que l'Etat pourra se targuer de réduire l'impôt sur le revenu.
    Nous sommes inquiets et nous continuerons de l'être tant que le Gouvernement ne donnera pas les premiers moyens et les premiers signes d'une volonté d'équilibrage des ressources dans le pays.
    M. le président. La parole est à M. Maurice Leroy, qui va nous démontrer qu'on peut parler de fiscalité avec célérité.
    M. Maurice Leroy. Le groupe UDF soutient l'assouplissement du lien entre les taux des taxes directes locales, qui laisse une plus grande marge de manoeuvre aux collectivités locales et à leurs groupements dotés d'une fiscalité propre. Nous nous félicitons, en effet, que le Gouvernement propose d'assouplir, à compter de 2003, les modalités de fixation du taux de la taxe professionnelle tout comme nous approuvons le dispositif qui prévoit que le plafonnement des taux soit maintenu. Mais nous considérons que le Gouvernement et la majorité parlementaire pourraient et devraient aller plus loin dans le renforcement de la décentralisation.
    J'ai beaucoup apprécié la merveilleuse intervention, très centriste, de notre collègue Eric Woerth, entre prudence et souplesse qui aurait déclenché un tonnerre d'applaudissements dans un congrès UDF - je parle sous le contrôle de Pierre Méhaignerie. Vraiment, le positionnement sur ces bancs est parfois curieux !
    Je voudrais dire, plus sérieusement et amicalement, que je m'étonne que l'on s'arrête en si bon chemin. J'ai été, mes chers collègues, franchement surpris de constater çà et là dans les débats en commission, et ici même sur les bancs de la majorité, cette espèce de frilosité envers les élus locaux et de peur face à la liberté de fixation des taux.
    Je voudrais d'abord rappeler qu'il y a de plus en plus - et c'est bien - de communautés de communes dans le monde rural, et de communautés d'agglomération dans le monde urbain. Or, ne nous cachons pas derrière notre petit doigt, les communautés d'agglomération, qu'elles soient présidées à droite, à gauche ou au centre, sont toutes passées au taux unique de taxe professionnelle en vertu de grandes considérations morales, qui n'ont évidemment rien à voir avec les bonifications de dotation globale de fonctionnement... Il n'y a donc, monsieur le rapporteur général, aucune raison de craindre une augmentation du taux de TP puisque la plupart du temps la fixation de celui-ci a été transférée aux communautés de communes ou aux communautés d'agglomération.
    L'argument ne tient plus, et tiendra de moins en moins : la plupart des communes qui sont en intercommunalité n'ont maintenant plus à gérer la taxe professionnelle. S'il s'agit de rassurer le MEDEF, que celui-ci étudie attentivement, et il a suffisamment de conseillers pour cela, la carte de l'intercommunalité et il constatera que la taxe professionnelle échappe de plus en plus aux communes.
    Au moment où le Premier ministre, et nous nous en réjouissons, lance un grand débat sur la décentralisation et sur les libertés locales, il aurait été bon de donner à l'Assemblée nationale un signe fort marquant la confiance placée dans les maires et dans les conseils municipaux.
    Franchement, mes chers collègues, quel est le maire de France, depuis le plus petit village jusqu'à la plus grande ville, qui s'amuserait à proposer une inflation des taux ? Qui serait assez stupide pour étrangler fiscalement toute possibilité d'implantation locale ? Gilles Carrez, pourtant connaisseur de cette matière, - il l'a montré aussi bien au comité des finances locales qu'en commission, - m'a surpris en affirmant que libérer les taux serait aller à l'encontre de l'attractivité des territoires. J'ai siégé longtemps à la commission des communes rurales de l'Association des maires de France, et dans d'autres commissions de cette noble institution, et je peux lui dire que personne, ni à droite ni à gauche, n'augmenterait les taux pour le plaisir. Si d'aventure, cela arrivait, chers amis, pardon de le rappeler, mais il y a la sanction démocratique. En général, les mauvais gestionnaires sont renvoyés dans leurs foyers assez rapidement. C'est d'ailleurs bien pour cela qu'il y a des alternances, autrement plus difficiles qu'au plan national. A l'échelle locale, les gens élisent avant tout un maire, une équipe municipale, par-delà les questions d'étiquette. Des électeurs de droite peuvent voter pour un maire de gauche, et inversement. Cela fait d'ailleurs tout drôle à ceux qui, ayant gagné une circonscription aux législatives, se font blackouler aux municipales.
    Redonnons donc de la souplesse mais allons plus loin. C'est le sens des amendements que nous défendrons tout à l'heure. J'ai malheureusement conscience qu'une partie de la majorité sera sans doute contrainte de retirer ses amendements...
    M. Didier Migaud. Encore !
    M. Maurice Leroy. ... y compris l'amendement de notre collègue Aeschlimann que j'ai personnellement signé.
    M. le président. N'anticipez pas et venez à votre conclusion !
    M. Maurice Leroy. Monsieur le président, permettez que je développe ma pensée !
    M. le président. Oui, mais vous avez dépassé votre temps de parole !
    M. Maurice Leroy. Mais, monsieur le président, chacun reconnaîtra aisément que je n'en ai pas abusé et c'est un article important !
    J'indique d'emblée, monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre, pour faciliter les travaux à venir, que le groupe UDF, lui, maintiendra ses deux amendements.
    M. Jean-Louis Dumont. Voilà du courage !
    M. Maurice Leroy. Il n'est plus question ici d'eurocompatibilité ou de transferts de charges.
    S'il est un moment où la majorité parlementaire peut affirmer avec force sa volonté d'aller plus loin dans la décentralisation, à peu de frais pour le Gouvernement,...
    M. Didier Migaud. Il a raison !
    M. Maurice Leroy. ... mais avec beaucoup de considération pour les élus locaux, c'est bien celui-là ! Il faut tenir bon.
    M. Jean-Luc Préel. Très bien !
    M. Jean-Louis Dumont. C'est cela le courage !
    M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur.
    M. Marc Laffineur. C'est en effet un débat très important, qui mérite que l'on s'y arrête.
    Monsieur Leroy, je vous ai connu beaucoup plus brillant !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous dites cela parce qu'il n'a pas dit ce que vous vouliez entendre !
    M. Marc Laffineur. Vous nous avez en effet dit : « Ne vous inquiétez pas, car ce ne sont plus les maires qui décident de la TP ; ce sont les présidents de communautés d'agglomération ou de communautés de communes », mais vous avez déclaré ensuite : « Aucun maire ne serait assez fou pour augmenter la TP. »
    M. Maurice Leroy. Eh bien oui !
    M. Marc Laffineur. C'est contradictoire !
    M. Maurice Leroy. Non ! Les maires siègent dans les EPCI !
    M. Marc Laffineur. Justement, s'il y a danger, c'est parce que ce n'est plus le maire qui décide en la matière. C'est le président de la communauté d'agglomération ou de communes,...
    M. Didier Migaud. C'est un maire tout de même ! C'est un élu !
    M. Marc Laffineur. ... qui n'est pas en relation directe avec les concitoyens. Par ailleurs, j'ai perçu, chez nombre de nos collègues de l'opposition, beaucoup d'inquiétude à l'égard de la décentralisation et du risque qu'elle pourrait présenter pour les collectivités locales. Je comprends qu'ils aient peur de la décentralisation et des responsabilités qu'on pourrait leur donner, car le gouvernement qu'ils ont soutenu ces cinq dernières années n'a fait qu'augmenter les charges des collectivités locales sans accroître leur autonomie.
    Pour la première fois, on nous propose de leur donner un peu plus de souplesse, un peu plus de liberté. Nous sommes tous très attachés à cette liberté et cela fait cinq ans que nous déposons des amendements en ce sens, mais le Gouvernement précédent nous a toujours refusé la déliaison des taux par manque de confiance envers les élus locaux. C'est donc la première fois que le Gouvernement fait un effort. Certes, on pourrait souhaiter plus de liberté, mais c'est une question qui doit être traitée globalement à l'occasion du texte sur la décentralisation. Le Gouvernement fait un premier pas dans le bon sens et, bien entendu, nous allons le soutenir. Les députés du groupe UMP ne désirent pas aller plus loin dans cette déliaison. Ils souhaitent s'en tenir au texte du Gouvernement.
    M. le président. La parole est à Jean-Yves Chamard qui, lui aussi, va respecter son temps de parole, j'en suis sûr.
    M. Jean-Yves Chamard. Je voudrais d'abord m'adresser à notre collègue Migaud.
    M. Jean-Louis Dumont. Collègue expérimenté d'ailleurs !
    M. Jean-Yves Chamard. Tout à fait, et qui anime le débat avec toute la vigueur de son esprit !
    Monsieur Migaud, vous avez exprimé votre inquiétude pour l'avenir s'agissant de l'augmentation de la fiscalité locale qui pourrait résulter notamment de la future décentralisation. Pourtant, vous étiez député, il y a un an et demi, et vous avez voté l'APA. Je préside la commission des finances du conseil général de la Vienne depuis vingt ans et je vais vous faire part de mon expérience.
    Que la majorité ait été de droite ou de gauche, il est arrivé que des mesures votées à l'Assemblée nous aient imposé d'augmenter la fiscalité d'un ou deux points, voire de trois points. La départementalisation du SDIS, décidée alors que nos amis étaient au pouvoir - j'étais moi-même député -, a ainsi conduit les départements à augmenter leur fiscalité et la mesure votée lors de la dernière législature, qui s'appliquera pour la première fois l'année prochaine, les contraindra à une augmentation plus importante encore. Mais jamais, jamais nous n'avons connu le séisme financier que vivent actuellement les départements !
    M. Maurice Leroy et M. Alain Joyandet. C'est vrai !
    M. Jean-Yves Chamard. Demandez à vos collègues présidents de conseils généraux ou tout simplement conseillers généraux ! L'APA représente environ vingt points de fiscalité supplémentaires dans la mesure où les 35 heures et le SDIS mangent déjà la totalité des progrès de la fiscalité et de la richesse des départements.
    M. Maurice Leroy. C'est vrai !
    M. Jean-Yves Chamard. Cela se traduira par quinze points d'augmentation pour les départements les plus riches et vingt-cinq points d'augmentation pour les plus pauvres. Je m'explique. Plus la population d'un département est âgée, plus le poids de l'APA est important. Or, ce n'est pas dans les départements « âgés » que le potentiel économique est le plus important.
    Entre 1988 et 1993, j'ai participé, avec Jacques Barrot notamment, à une commission présidée par M. Boulard, votre ancien collègue, et, à l'époque, nous cherchions un financement - le gouvernement de Pierre Bérégovoy estimait que cela coûtait cher -, mais un financement national. Nous envisagions alors d'augmenter un peu la CSG ou le taux de cotisation de l'assurance maladie des retraités qui, à l'époque, était beaucoup plus faible que les autres, mais il ne nous serait jamais venu à l'idée de faire peser une telle charge sur les départements, notamment parce que c'est injuste pour les départements pauvres qui sont en même temps les départements où vivent le plus de personnes âgées. Alors bien sûr, vous avez raison, il faut se soucier de l'avenir, mais vous auriez mieux fait de vous en préoccuper aussi dans le passé !
    Je m'adresse maintenant à vous, monsieur le ministre. Il est urgentissime de revoir les règles d'attribution de l'APA. Il faut le faire dès le début de l'année prochaine.
    M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. Jean-Yves Chamard. En effet, M. Brard n'est pas là, mais vous savez que la baronne Seillière, à supposer qu'elle existe et qu'elle soit dépendante, pourrait bénéficier de cette allocation, tout comme Mme Bettencourt, si chère à cet hémicycle. (Sourires.) Ce n'est pas normal, bien sûr. Sans doute faudrait-il aussi revoir d'autres règles, y compris le dispositif de récupération sur succession, mais je sais que le Gouvernement y est défavorable.
    S'agissant plus particulièrement de l'article 14, j'ai bien entendu Maurice Leroy s'étonner qu'Eric Woerth tienne parfois des propos centristes. Je suis moi-même en plein centre. Vous savez que l'UMP, c'est la grande formation de la droite et du centre !
    M. Jean-Louis Dumont. Plus de la droite que du centre !
    M. Jean-Yves Chamard. Il n'est donc pas anormal que nous nous exprimions parfois de cette manière.
    M. Maurice Leroy. Je m'en réjouissais, au contraire !
    M. Jean-Yves Chamard. Pierre Méhaignerie est d'ailleurs là pour nous le rappeler le cas échéant. Comme parfois les centristes, je vais évoquer saint Thomas. Je suis tout à fait favorable à l'article que nous propose le Gouvernement, et je m'en explique. Peut-être avez-vous raison, auquel cas les élus, maires, présidents d'EPCI, qui atteindront le plafond de 1,5 % de progression seront très rares, mais vous pouvez aussi vous tromper. Je souhaite donc, monsieur le ministre, qu'après une année d'application du dispositif, c'est-à-dire en 2004, nous vérifions combien ont atteint le plafond d'une fois et demie.
    M. Didier Migaud. Vous n'avez pas confiance !
    M. Jean-Yves Chamard. Si le pourcentage est minime, nous ne couvrons pas de risque à délier complètement les taux. Si, au contraire, il y a une forte pression, il faudra que nous en débattions.
    Je terminerai en parlant de la décentralisation à venir. Bien sûr, monsieur le ministre, tous les élus locaux - nous le sommes presque tous - seront très vigilants et comprendront le dynamisme des recettes avec celui des dépenses. Je vous rappelle que, dans un passé récent, des dépenses dynamiques ont été compensées tout simplement par une majoration de la DGE. Mais je fais confiance à mon voisin Jean-Pierre Raffarin, puisque nous sommes poitevins tous les deux. Il a été président de région pendant de longues années et il est probable qu'il le redeviendra, car il est rare que l'on reste Premier ministre vingt-cinq ans. Cela dit, je lui souhaite que ce soit le plus tard possible. Je lui fais donc confiance, en tant qu'ancien et futur président de région, pour veiller au dynamisme des ressources qu'il pourra utiliser le moment venu.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.
    M. Jean-Louis Dumont. Ce débat montre, s'il en était besoin, à quel point il est indispensable de clarifier les compétences, les périmètres, les ressources. Il est vrai que, ces dernières années, des transferts ont été effectués vers les collectivités locales et territoriales, mais il y a aussi des transferts non dits. Des obligations sont aujourd'hui assumées par les collectivités, tout simplement parce qu'il y a des besoins et que l'Etat n'y répondait pas assez vite ou pas assez, et ce quels que soient les gouvernements. Je donnerai, une fois de plus, l'exemple du logement. Chacun le sait, pour avoir un logement de qualité et un loyer compatible avec les ressources des ménages, les collectivités interviennent à quelque niveau que ce soit, la commune, voire le département, et parfois même la région. Si vous n'obtenez pas au moins 30 000 euros par logement, vous n'y arrivez pas ! Nous avons donc manifestement besoin d'une étape supplémentaire dans une décentralisation dont Didier Migaud vient de nous rappeler l'histoire, les ambitions, et envers laquelle certains se sont montrés frileux.
    Frileux, c'est bien ainsi que l'on peut qualifier l'article 14. Le Gouvernement veut peut-être envoyer un signe à sa majorité, mais c'est un signe incomplet, car il n'a pas de lisibilité. Quelles seront les conditions de la décentralisation de demain ? C'est une question qui vient d'être posée. Nous n'en savons rien ! Avant même de lancer un grand débat sur les libertés locales, mais on bride ces libertés. Il est vrai que l'on peut concevoir moins de fiscalité pour les communes et plus de ressources propres pour l'intercommunalité, à condition que celle-ci réponde aux critères de la démocratie, c'est-à-dire que les responsables d'intercommunalité soient élus au suffrage universel direct.
    Mme Christine Boutin. Mais non ! Certainement pas ! Ce serait la fin des communes !
    M. Jean-Louis Dumont. Mais voilà, mes chers collègues, pourquoi vous êtes prêts à retirer votre amendement ! Vous ne voulez pas de cette démocratie locale complète, ouverte, transparente. Cela suscite chez vous des craintes pour l'avenir.
    Mme Christine Boutin et M. Alain Joyandet. C'est la disparition des communes !
    M. Jean-Louis Dumont. Pas du tout ! Mers chers collègues, je suis issu d'une commune rurale.
    Mme Christine Boutin. Moi aussi !
    M. Jean-Louis Dumont. J'ai assumé mon premier mandat électif, il y a déjà quelques années, dans une commune de 120 habitants et, à cette époque-là, j'ai défendu la liberté de ma commune, son autonomie.
    Mme Christine Boutin. Là, vous la tuez !
    M. Jean-Louis Dumont. J'ai refusé les fusions de communes. Aujourd'hui, j'essaie de défendre l'intercommunalité,...
    Mme Christine Boutin. Moi aussi ! Nous sommes d'accord !
    M. Jean-Louis Dumont. ... le regroupement des communes, tout en voulant conserver cette cellule de base de la démocratie qu'est la commune. Vous venez de parler des SDIS, monsieur Chamard, mais permettez-moi de dire à cet égard que l'on enlève de plus en plus de responsabilités aux maires, même lorsque la loi leur en donne toujours car c'est essentiel pour la gestion de leur commune et de sa police.
    Je reviens à l'intercommunalité. Le transfert de compétences à des structures intercommunales a-t-il toujours entraîné une diminution des impôts locaux à due concurrence ? Je n'en suis pas sûr. Le problème quand il n'y a pas d'élection directe, c'est que l'on peut toujours prétendre que c'est un autre, qui n'est pas de la commune et que l'on ne connaît pas forcément bien lorsque l'intercommunalité est grande, qui a pris la décision.
    Pour éclairer l'article 14 qui, je le répète, est trop frileux, qui ouvre une perspective mais en ferme bien d'autres, j'aurais souhaité que le Gouvernement dise exactement où il veut aller en matière de transfert de compétences, de capacités de ressources propres, car on a bien vu, au cours de ces dernières années, que, d'exonérations en dégrèvements, on allait vers des compensations.
    M. le président. Il faut conclure, monsieur Dumont !
    M. Jean-Louis Dumont. Sur le terrain, nous entendons dire à longueur de journée que les compensations n'atteignent jamais le montant des coûts transférés. Nous l'avons d'ailleurs entendu aussi dans cet hémicycle. Alors, de grâce, clarifions ! Il se trouve que la première clarification, c'est la responsabilité, l'autonomie, la déliaison complète !
    M. le président. Je vais donner la parole à M. Bouvard et à M. Sandrier, qui se sont inscrits en cours de débat, puis je vais clore celui-ci.
    La parole et à M. Michel Bouvard, auquel je demande d'être bref.
    M. Jean-Louis Dumont. Nous sommes tous trop brefs !
    M. Michel Bouvard. Cet article me paraît équilibré. C'est très bien, monsieur le ministre, d'assouplir les conditions de fixation des taux tout en conservant les garde-fous nécessaires, mais un problème reste entier : celui des moyens réels des collectivités, des rapports financiers entre ces collectivités et l'Etat. Je ne répéterai pas ce qu'a excellemment dit Jean-Yves Chamard tout à l'heure sur la fiscalité des conseils généraux et sur les transferts qui ont été opérés au cours des deux dernières années dans leur direction. Au coût des 35 heures s'ajoutent les charges très lourdes de l'allocation personnalisée d'autonomie et des SDIS.
    Je vais vous donner quelques chiffres pour illustrer mon propos. Nous pensions atteindre, en trois ans, le nombre de 4 500 dossiers d'APA dans un département comme la Savoie. Nous le savons aujourd'hui, nous en serons à 6 000 et nous avons d'ores et déjà passé le cap des 4 100 dossiers au cours de la première année, ce qui crée un appel financier dépassant toutes nos prévisions. J'ajoute à cela l'inéquité totale de la règle de compensation fixée par l'Etat, et reposant principalement sur le critère du potentiel fiscal par habitant qui fait que notre département, pour 18 millions d'euros de charges supplémentaires, reçoit une compensation de 3 millions d'euros seulement. Je veux poser le problème de la péréquation dans des termes justes. J'ai la chance d'être vice-président d'un conseil général qui est, au niveau des ressources, l'un des plus aisés de France, mais jamais, jamais les charges que nous devons supporter ne sont prises en compte !
    M. Maurice Leroy. Eh oui !
    M. Michel Bouvard. Les critères de charges qui sont retenus sont toujours les mêmes : il s'agit des critères sociaux. Or lorsque vous êtes élu d'un département de montagne, vous devez entretenir 2 800 kilomètres de routes départementales, dont 1 800 à plus de 1 000 mètres d'altitude, avec 800 ouvrages d'art. Et qui nous aide ? Qui prend en compte ces réalités dans l'estimation des charges ? Lorsque l'on modifie les règles sur la viabilité hivernale et qu'il faut assurer la liberté de communication et de circulation de la population, en respectant la directive européenne sur le temps de repos et les 35 heures, qui doit faire face au surcoût ? Lorsqu'il faut assurer l'entretien des bâtiments en altitude, avec des logements sociaux dont le coût de construction est majoré de 35 %, avec des foyers de saisonniers qu'aucune mécanique d'Etat ne finance dans des conditions raisonnables, qui doit en assumer la charge sinon le département ?
    Monsieur le ministre, je voudrais que l'on ait une approche complète de la péréquation tenant compte non seulement des ressources, mais aussi des charges, de toutes les charges. Nous attendons du Gouvernement des réponses sur la question des SDIS, car le débat en la matière n'a pas été achevé. Certains départements figurent en quatrième ou cinquième position sur l'échelle des risques. Ils doivent assumer une spécialisation toujours plus grande des corps de sapeurs-pompiers avec les efforts financiers que cela implique et on leur demande d'assurer l'entretien et la sécurité des tunnels internationaux. Tout cela doit être pris en compte. Il faut donc que les critères de charges, de dépenses, soient intégrés dans les rapports entre l'Etat et les collectivités et, en tout état de cause, qu'ils le soient dans le débat sur la péréquation. C'est le seul message que je voulais délivrer. Les ressources, c'est bien, mais il faut aussi prendre en compte les charges, toutes les charges !
    M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Monsieur le président, je serai bref, d'autant que nous avons déposé un certain nombre d'amendements allant dans le sens d'une déliaison totale des taux, laquelle était la règle à l'origine. Il suffit de revenir à la situation antérieure, ce qui paraît normal.
    Après ce que j'ai entendu et que je ne trouve pas très juste, je voudrais dire un mot sur l'APA.
    L'APA est effectivement universelle, elle s'adresse à tout le monde, mais elle est attribuée en fonction des ressourses, du moins c'est ce qui figure dans la loi. En ce qui concerne les récriminations sur le nombre de dossiers, la première à faire, c'est de se féliciter du succès de l'APA car il prouve que cette allocation répond à un véritable besoin.
    Quant aux charges supplémentaires qu'elle entraîne, il est inutile de le nier, elles existent. En ce qui concerne les dépenses des départements, il faut d'abord souligner que l'effort supplémentaire qui leur est demandé dépend de celui qu'ils consentaient précédemment pour la PSD et qui variait de un à trois. Il est clair que ceux qui faisaient peu d'effort au titre de la PSD ont un gros retard à rattraper, qui pèse lourdement sur leurs finances. Mais c'est aussi une question de choix politique.
    M. Maurice Leroy. Ce n'est pas vrai !
    M. Jean-Claude Sandrier. Par ailleurs, le Gouvernement a tout à fait les moyens d'atténuer, pour ne pas dire neutraliser, l'effort des conseils généraux : il lui suffit tout simplement - refaites le calcul, nous pouvons nous être trompés - de supprimer la baisse des taux des deux tranches supérieures de l'impôt sur le revenu qui représente un manque à gagner de 1,7 milliard d'euros et qui financerait largement le supplément de l'APA évalué, lui, à 1,2 milliard d'euros. Voilà une solution.
    M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, n°s 154, 167, 63 rectifié, et 308, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 154, présenté par MM. Albertini, de Courson, Maurice Leroy, Perruchot et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés, est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 14 :
    « A compter de l'exercice 2003, toutes les dispositions ayant établi un lien entre les taux de la taxe professionnelle, de la taxe d'habitation, de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, qui sont perçues par les collectivités locales, les régions et leurs établissements publics à fiscalité propre, sont abrogées. »
    L'amendement n° 167, présenté par M. Albertini, est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 14 :
    « I. - Le I de l'article 1636 B sexies du code général des impôts est ainsi rédigé :
    « I. - Sous réserve des dispositions des articles 1636 B septies et 1636 B decies, les conseils généraux, les conseils municipaux et les instances délibérantes des organismes de coopération intecommunale dotés d'une fiscalité propre votent chaque année les taux des taxes foncières, de la taxe d'habitation et de la taxe professionnelle. Ils peuvent :
    « a. Soit faire varier dans une même proportion les taux des quatre taxes appliqués l'année précédente ;
    « b. Soit faire varier librement entre eux les taux des quatre taxes. Dans ce cas, l'augmentation du taux de la taxe professionnelle ne peut excéder le taux de croissance du produit intérieur brut enregistré l'année précédente.
    « Jusqu'à la date de la prochaine révision, le taux de la taxe foncière sur les propriétés non bâties ne peut augmenter plus ou diminuer moins que le taux de la taxe d'habitation. »
    « II. - Le I de l'article 1636 B sexies A du code général des impôts est ainsi rédigé :
    « I. - Sous réserve des dispositions du VI de l'article 1636 B septies, les conseils régionaux autres que celui de la région d'Ile-de-France votent chaque année les taux des taxes foncières et de la taxe professionnelle. Ils peuvent :
    « a. Soit faire varier dans une même proportion les taux des trois taxes appliqués l'année précédente ;
    « b. Soit faire varier librement entre eux les taux des trois taxes. Dans ce cas, l'augmentation du taux de la taxe professionnelle ne peut excéder le taux de croissance du produit intérieur brut enregistré l'année précédente.
    « Jusqu'à la prochaine révision, le taux de la taxe foncière sur les propriétés non bâties ne peut augmenter plus ou diminuer moins que le taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties. »
    L'amendement n° 63, rectifié, présenté par M. Aeschlimann, Mme Bassot, MM. Carayon, Poignant, Hénart, Mme Martinez, MM. Abrioux, Albertini, André, Artigues, Auclair, Audifax, Baguet, Mme Bareges, MM. Bayrou, Beaudoin, Beaugendre, Benisti, Bernier, Jean-Michel Bertrand, Blanc, Blessig, Bobe, Bourdouleix-Rondaert, Bourg-Broc, Mme Boutin, MM. Briand, Brochand, Bur, Caillaud, Calvet, Carré, Ceccaldi-Raynaud, Charroppin, Chassain, Chavanne, Christ, Philippe Cochet, Mmes Colot, Comparini, MM. Cosyns, Jean-Yves Cousin, Cova, Cugnenc, d'Aubert, Dassault, Daubresse, Decool, Degauchy, Delattre, Delnatte, Deprez, Descamps, Door, Drut, Dubourg, Dubrac, Favennec, Flory, Mme Franco, MM. Fromion, Garrigue, Geoffroy, Gilard, Giro, Gorges, Goulard, Grand, Guibal, Guillet, Hamelin, Heinrich, Herth, Hugon, Hunault, Jardé, Jeanjean, Mme Joissains-Masini, MM. Kossowski, Lachaud, Lagarde, Landrain, Lassalle, Le Fur, Jacques Le Guen, Gérard Léonard, Maurice Leroy, Leteurtre, Lett, Leveau, Mme Louis-Carabin, MM. Mach, Mariani, Marsaud, Marsaudon, Martin (Marne), Ménard, Merville, Meyer, Morel-A-L'Huissier, Morin, Pandraud, Mme Pavy, MM. Pemezec, Perruchot, Pinte, Piron, Proriol, Raison, Raoult, Richard, Mme Rimane, MM. Rochebloine, Roustan, Santini, Sauvadet, Siffredi, Suguenot, Ueberschlag, Venot, Vercamer, Vignoble et Gérard Voisin, est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 14 :
    « I. - L'article 1636 B sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
    « 1. Le b du 1 du I est ainsi rédigé :
    « b. Soit faire varier librement entre eux les taux des quatre taxes. »
    « 2. Les 2, 3, 4 du I, le I bis et le II sont supprimés. »
    « II. - L'article 1636 B sexties A du code général des impôts est ainsi modifé :
    « 1. Le b du I est ainsi rédigé :
    « b. Soit faire varier librement entre eux le taux des trois taxes. »
    « 2. Le II est supprimé.
    « III. - L'article 1636 B decies du code général des impôts est ainsi modifié :
    « 1. Dans le premier alinéa du II, les mots : "au b du I, ainsi qu'aux 2° et 3° du I de l'article 1636 sexies et sont supprimés.
    « 2. En conséquence, les six derniers alinéas du II sont supprimés. »
    « IV. - Un rapport établissant un bilan de l'évolution comparée des bases et des taux de la taxe professionnelle, d'une part, de la taxe d'habitation et des taxes foncières, d'autre part, sera adressé annuellement au Parlement. »
    L'amendement n° 308, présenté par M. Aeschlimann, est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 14 :
    « I. - L'article 1636 B sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
    « 1. Le b du 1 du I est ainsi rédigé :
    « b. Soit faire varier librement entre eux les taux des quatres taxes. »
    « 2. Les 2, 3, 4 du I, le I bis sont supprimés. »
    « 3. Le II est ainsi rédigé :
    « II. L'augmentation prévue au b du I ne peut intervenir si un ou plusieurs des taux de la taxe d'habitation, de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe foncière sur les propriétés non bâties est inférieur au taux moyen national de la taxe constatée pour, selon les cas, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale ou les départements. »
    « II. - L'article 1636 B sexies A du code général des impôts est ainsi modifié :
    « 1. Le b du I est ainsi rédigé :
    « b. Soit faire varier librement entre eux les taux des trois taxes. »
    « 2. Le II est ainsi rédigé :
    « II. L'augmentation prévue au b du I ne peut intervenir si un ou plusieurs des taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe foncière sur les propriétés non bâties est inférieur au taux moyen national de la taxe constatée pour les régions. »
    « III. - L'article 1636 B decies du code général des impôts est ainsi modifié :
    « 1. Dans le premier alinéa du II, les mots : "au b du I, ainsi qu'aux 2° et 3° du I de l'article 1636 B sexies et sont supprimés.
    « 2. En conséquence, les six derniers alinéas du II sont supprimés. »
    « IV. - Un rapport établissant un bilan de l'évolution comparée des bases et des taux de la taxe professionnelle, d'une part, de la taxe d'habitation et des taxes foncières, d'autre part, sera adressé annuellement au Parlement. »
    La parole est à M. Maurice Leroy, pour soutenir l'amendement n° 154.
    Vous l'avez déjà défendu, monsieur Leroy.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Ah oui !
    M. Maurice Leroy. Je voudrais y revenir d'un mot, monsieur le président.
    Je voulais d'abord dire à notre collègue Sandrier qu'il ferait bien de prendre attache avec les conseillers généraux du Cher - y compris de son propre groupe. Il s'apercervrait que ce qu'il vient de dire sur l'allocation personnalisée d'autonomie est totalement inexact et ne correspond en tout cas pas du tout - je le dis vraiment sans esprit de polémique - à la réalité du terrain, nulle part ! Dans mon département, comme dans beaucoup d'autres, de gros efforts étaient déjà consentis pour la prestation spécifique dépendance,...
    M. le président. Monsieur Leroy, nous discutons de votre amendement, pas de l'APA !
    M. Maurice Leroy. Je voudrais simplement souligner à son intention ce qu'à très bien dit Jean-Yves Chamard : par la bêtise sans nom d'un dispositif, qu'il faudra effectivement réformer, monsieur le ministre, les bénéficiaires, y compris les plus modestes, se retrouvent parfois à devoir payer personnellement, alors qu'il n'acquittaient rien du temps de la prestation spécifique dépendance !
    M. Jacques Myard. C'est tout à fait vrai !
    M. Maurice Leroy. Quand on pense à l'objectif initial du projet !
    Je ferme la parenthèse, mais des choses ont été dites ici qui figureront au compte rendu des débats, on ne peut pas les laisser passer ! Mme Guigou nous avait présenté l'APA comme le nouveau sirop Typhon, la panacée universelle,...
    M. Jean-Pierre Brard. C'est un pléonasme !
    M. Maurice Leroy. ... géniale, magnifique. Mais sur le terrain, elle se révèle une vraie catastrophe !
    M. Marc Laffineur. Dieu sait qu'on l'a dit et répété !
    M. Maurice Leroy. Je reviens à mon amendement, monsieur le président. Je ne veux pas reprendre le débat, mais je voudrais simplement dire amicalement à Marc Laffineur que je comprends parfaitement tout ce qu'il a dit au nom de l'UMP. Nous partageons ses propos, ils sont justes, il faut se féliciter, c'est vrai, d'avoir défendu ensemble pendant cinq ans des amendements allant dans le sens de l'assouplissement de la déliaison des taux. Nous nous félicitons donc de l'article 14, de la loi de finances ; d'ailleurs, nous le voterons.
    Mais, encore une fois et au risque de me répéter, il n'y a rien à craindre des élus locaux d'autant moins d'ailleurs, mes chers collègues, que l'amendement n° 154 que je défends actuellement ne touche pas au plafonnement. Dès lors, les inquiétudes exprimées par notre collègue Woerth n'ont plus lieu d'être puisque, de toute façon, nous pouvons parfaitement accepter la déliaison totale des taux en maintenant le plafonnement. Ainsi, nous respectons le principe de prudence.
    Cet amendement devrait donc être voté sans aucune difficulté car toute mesure de responsabilisation et de liberté totale, pleine et entière des maires et de leurs conseils municipaux constituerait un bon signal sur la voie d'une vraie décentralisation et d'une politique d'aménagement du territoire qui serait aux mains des élus locaux.
    M. le président. On peut considérer que vous avez défendu l'amendement n° 167 de M. Albertini, qui est un amendement de repli ?
    M. Maurice Leroy. Oui, monsieur le président.
    M. le président. La parole est à M. Manuel Aeschlimann, pour soutenir l'amendement n° 63 rectifié.
    M. Manuel Aeschlimann. Monsieur le président, monsieur le ministre, cet amendement de déliaison a été signé par environ 140 de nos collègues UMP et UDF - la majorité d'entre eux est d'ailleurs présente - qui ne sont pas des jusqu'au-boutistes.
    M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. Manuel Aeschlimann. Ils n'ont pas l'intention de saigner à blanc les entreprises de leurs communes, départements ou régions.
    M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. Manuel Aeschlimann. Ils veulent simplement se faire entendre du Gouvernement et obtenir plus de responsabilité. Les élus locaux que nous sommes appartiennent, a priori, d'après ce que j'ai pu voir et entendre, à la catégorie des êtres responsables, voire compétents parfois...
    M. Marc Laffineur. Toujours !
    M. Manuel Aeschlimann. Lorsque nous avons compris, il y a quelques jours, que le Gouvernement ne souhaitait pas aller plus loin dans la déliaison, les cosignataires de l'amendement ont tenu un débat pour réfléchir justement aux perspectives qui s'offraient à eux.
    Plusieurs avis ont été émis en commission, puis aujourd'hui en séance publique. En commission, j'ai écouté ceux qui n'étaient pas favorables à l'amendement nous expliquer qu'il serait plus opportun d'attendre l'examen des lois de décentralisation pour aborder la question de l'extension des compétences des élus locaux.
    Toutefois, j'ai entendu avec inquiétude aujourd'hui même dans cet hémicycle, certains d'entre eux exprimer leur souhait d'attendre encore pour voir si l'expérimentation de déliaison partielle qui nous est proposée portait ou non ses fruits. Attendre, encore attendre ! Les nombreux élus qui ont cosigné cet amendement et les associations d'élus locaux non parlementaires qui les soutiennent attendent beaucoup du Gouvernement, notamment dans le contexte actuel où l'on parle de décentralisation accrue. Ne pas pousser plus loin la défense de cet amendement engendrera sans doute de l'amertume chez ces élus qui souhaitent pouvoir travailler, dans les semaines et les mois qui viennent, avec le Gouvernement s'il veut bien nous entendre et avec les organisations patronales. D'ailleurs, nous sommes inondés de méls divers et variés de la part du MEDEF qui n'a pas l'air particulièrement favorable à cette mesure.
    M. Jean-Pierre Brard. Ce sont des pressions inadmissibles sur la représentation nationale !
    M. Maurice Leroy. Ils n'y connaissent rien !
    M. Manuel Aeschlimann. Nous avons un message très simple à leur faire passer ; Maurice Leroy et d'autres de mes collègues s'en sont d'ailleurs chargés tout à l'heure. Les élus locaux ont plutôt tendance - parce qu'ils en ont besoin - à faire venir des entreprises sur leur territoire qu'à les acculer à la liquidation pure et simple avec des hausses irraisonnées des impôts locaux.
    M. Maurice Leroy. Bien sûr !
    M. Jean-Pierre Brard. Voilà un jeune maire qui a de l'avenir !
    M. Manuel Aeschlimann. Avant de poursuivre le débat et de me prononcer sur le maintien ou non de l'amende, j'aimerais entendre le ministre pour me faire une idée précise des intentions du Gouvernement en matière de décentralisation. Oui ou non, allons-nous dans les mois qui viennent vers plus de responsabilisation et vers une déliaison sinon totale, du moins un peu plus élaborée et marquée que ce qu'on nous propose aujourd'hui ? Ou bien la position du Gouvernement est-elle définitivement arrêtée et devons-nous attendre quelques années d'expérimentation avant de revoir notre copie ?
    M. le président. Monsieur Aeschlimann, vous avez défendu l'amendement n° 63 rectifié présenté par plusieurs députés UMP et UDF. Mais qu'en est-il de votre amendement ?
    M. Manuel Aeschlimann. J'attends que l'on me réponde avant de me prononcer sur son maintien ou non.
    M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. Jean-Pierre Brard. Il ne faut pas capituler avant d'avoir combattu !
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances de l'économie.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Avant de laisser la parole au rapporteur, je voudrais faire le point. Chers collègues, nous souhaitons tous que le débat se termine, si possible avant la fin de la soirée, vers vingt heures par exemple.
    M. Didier Migaud. On ne peut pas occulter le débat !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Mais cela exige des uns et des autres une certaine discipline. Il y a trois ou quatre articles, dont le n° 14, sur lesquels on peut tout à fait prendre le temps de s'expliquer - et vous m'accorderez que le président n'a pas fait oeuvre de bavardage. (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Non, mais on va voir s'il saura oralement faire oeuvre utile !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Sur cet article important, deux familles de pensée se dessinent au sein de l'Assemblée. Les uns optent pour une déliaison des taux prudente, en procédant par étapes et en tenant compte du contexte. C'est le cas de Xavier Bertrand, d'Eric Woerth...
    M. Jean-Pierre Brard. La démocratie chrétienne, en somme !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Les autres...
    M. Maurice Leroy. Maurice Leroy !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. ... préfèreraient aller plus loin, plus vite et faire confiance au sens des responsabilités des élus - c'est le cas de notre collègue socialiste et de Maurice Leroy. Personnellement, je choisis la prudence.
    M. Jean-Pierre Brard. Cela ne m'étonne pas, c'est comme cela qu'on va dans le fossé !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Je vais vous dire pourquoi. Personnellement, je souhaite, depuis toujours, proportionner la pression fiscale sur les entreprises à celle sur les ménages.
    M. Didier Migaud. Vous ne faites pas confiance aux élus locaux ?
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. La responsabilité à laquelle nous aspirons, il nous faut l'assumer aussi bien vis-à-vis des entreprises que vis-à-vis des particuliers.
    Un potentiel de hausse existe et la tentation sera grande dans les deux ou trois prochaines années d'en faire supporter la majeure partie, voire la quasi-totalité aux entreprises.
    M. Jean-Pierre Brard. Mais non ! C'est un discours de bolchevique !
    M. Didier Migaud. Vous prenez les élus locaux pour des irresponsables ?
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Certains l'ont déjà dit,...
    M. Didier Migaud. Parlez pour vous !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. ... alors permettez-moi de m'exprimer à mon tour.
    Les années 2003 et 2004 risquent d'être difficiles pour les entreprises et, pour l'emploi, nous avons besoin de leur confiance.
    M. Didier Migaud. Il ne faut pas partir de cet a priori pessimiste !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Troisièmement, que nous le voulions ou non, chers collègues, les entreprises, se fondant sur l'expérience passée, sont très préoccupées par la déliaison totale des taux.
    M. Jean-Pierre Brard. Vous pratiquez de l'auto intoxication !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Or, je le répète, dans la période actuelle, alors que tout doit vraiment être mis en oeuvre pour assurer le succès de la politique engagée en matière de décentralisation, nous avons besoin du soutien et de la confiance des entreprises.
    Bref, je souscris totalement à l'étape proposée par le Gouvernement, mais je ne suis pas d'accord pour aller au-delà.
    Par ailleurs, tout le monde, ici, est favorable à la péréquation mais toujours à condition de la faire supporter aux autres.
    M. Maurice Leroy. Absolument.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Or, la péréquation peut s'effectuer aussi entre les départements riches et les départements pauvres, entre les collectivités riches et les collectivités pauvres et pas systématiquement en demandant plus à l'Etat dans un contexte où nous appelons de nos voeux la maîtrise de la dépense publique. Aucun élu, bien sûr, comme l'a dit M. Bonrepaux, si je me souviens bien, n'est heureux d'augmenter les impôts... Mais beaucoup sont heureux d'accroître les équipements et les services collectifs apportés à la population,...
    M. Jean-Pierre Brard. Ils sont là pour ça !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. ... et je les comprends. Mais où se trouve l'équilibre ?
    M. Didier Migaud. L'équilibre ? Ils sont bien placés pour l'apprécier.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Quand je compare avec les autres pays européens, je suis persuadé que les équipements et les services apportés par les collectivités locales aux administrés ont été beaucoup améliorés ces dernières années, mais parfois au détriment du pouvoir d'achat des familles et des entreprises. A l'avenir, la maîtrise de la dépense publique devra s'imposer aussi aux collectivités locales, si l'on veut retrouver des emplois et redonner du pouvoir d'achat aux familles.
    Telles sont les raisons pour lesquelles je soutiens totalement la position du Gouvernement.
    M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 154, je suis saisi par le groupe UDF d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il me paraît utile, monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, dès lors que beaucoup d'intervenants ont choisi de s'exprimer sur un sujet qui va très au-delà de l'article en discussion, que le Gouvernement s'exprime avant que la commission ne donne son avis.
    La vie des projets de loi est beaucoup plus simple parfois qu'on ne l'imagine, elle est à l'image des femmes et des hommes. Aussi mesdames, messieurs les députés, l'article 1er est-il tout simplement le résultat des vingt années de responsabilités locales que j'ai exercées. Je comprends fort bien votre impatience, cela fait vingt-deux ans que cette liberté ne vous a pas été donnée,...
    Mme Christine Boutin. Exactement !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... cela fait vingt-deux ans que l'on vous répond, à chaque amendement, que l'idée est bonne, que l'on y réfléchit et que, sans doute, l'année prochaine, on l'acceptera. J'ai donc pris sur moi de demander au Premier ministre qu'au lendemain de la nomination de son gouvernement, cette liberté vous soit, enfin, restituée. Voilà la genèse de l'article 14 - je me tourne vers Didier Migaud et Augustin Bonrepaux pour leur demander instamment de me croire sur parole ; il ne fait pas partie des éléments d'un plan de décentralisation. Partant d'une intention pragmatique, il s'agissait uniquement de rendre aux élus locaux leur liberté de fixer les taux,...
    Mme Christine Boutin. Très bien !
    M. Didier Migaud. Il faut aller jusqu'au bout !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Et en aucun cas d'une étape dans le financement du transfert des compétences qui pourrait intervenir entre l'Etat et les collectivités territoriales,...
    M. Didier Migaud. Il faut voir à l'usage !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... je vous le déclare solennellement.
    Mesdames, messieurs les députés, vous avez, les uns et les autres, apporté une contribution très riche à ce débat sur la liberté qui vous est proposée. Des mots très forts ont été prononcés : liberté, confiance, prudence, responsabilité, pragmatisme. Cet article offre aux élus locaux l'occasion de démontrer que, cette liberté qui ne leur a pas été offerte plus tôt, ils l'ont méritée parce que, précisément, ils n'en auront pas abusé.
    Plusieurs d'entre vous regrettent que la liberté accordée ne soit pas totale dès la première année. Mais c'est pour éviter que certains, peu nombreux, j'en suis fermement convaincu, n'abusent de cette liberté toute neuve. Elle sera étendue et - pourquoi pas ? - totale dès l'année prochaine, dès que le Gouvernement aura mesuré qu'il n'y a pas de risque, pour l'Etat, à laisser aux élus locaux, directement responsables devant leurs concitoyens, la liberté de fixer leurs taux. Telle est l'histoire de cet article, mesdames et messieurs les députés. Il ne vise pas à réorganiser, ni à compléter la fresque longue et parfois compliquée, en tout cas complexe, des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales, je vous le jure. Ce qui est en question, c'est exclusivement la nécessité, à mes yeux, de rendre aux collectivités locales leur liberté. Je donnerai tout à l'heure l'avis du Gouvernement sur les amendements. Mais je voudrais franchement qu'il n'y ait aucun doute entre nous sur l'esprit qui a présidé à vous proposer l'article 14.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Comme vous vous en doutez, monsieur le président, la commission a consacré beaucoup d'heures à ce débat extrêmement riche, jalonné de nombreuses interventions toutes très intéressantes. Je serai bref en n'opposant qu'un seul argument : notre ministre du budget, M. Lambert, a obtenu ce que nous attendons depuis dix ou quinze ans.
    M. Marc Laffineur. C'est ce que j'ai dit !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il y a vingt-deux ans, la loi de janvier 1980 a introduit la liaison des taux...
    M. Didier Migaud. Sous Giscard !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... avec application à partir de 1981 ! (Sourires.)
    Ce point lancinant a figuré à l'ordre du jour de tous les conseils, généraux comme municipaux, de France et de Navarre. Et chacun a pu se rendre compte de l'hostilité farouche dont faisaient preuve l'ensemble des administrations centrales - non seulement celles de votre ministère, monsieur le ministre, mais aussi de l'équipement -, qui conjuguaient leurs efforts pour que la situation ne change pas.
    Nous ne pouvons que vous être reconnaissant d'avoir réussi là où vos prédécesseurs, quelle que soit d'ailleurs leur sensibilité politique, ont échoué.
    L'article 14 constitue une véritable rupture avec vingt-deux ans d'histoire de liaison des taux. Bien entendu, monsieur Leroy, nous souscrivons tous à l'objectif d'atteindre, le plus rapidement possible, la déliaison totale, car nous voyons bien à quel point les élus sont responsables. Quelle que soit leur sensibilité politique, de nombreuses municipalités ont baissé le taux de taxe professionnelle, parfois même en maintenant, voire en augmentant celui des taxes pesant sur les ménages. Ainsi, la commune du Val-de-Marne - ses élus vont être étonnés que je fasse sa publicité au Journal officiel - qui a le plus baissé le taux de la taxe professionnelle est...
    M. Jean-Pierre Brard. Champigny !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... non, Fontenay-sous-Bois, mais, monsieur Brard, je parlerai plus tard de Champigny.
    Si certaines n'ont pas réduit ces taux ou les ont augmentés, cela est lié au fait que leurs dépenses ont progressé, en fonction d'ailleurs de plusieurs éléments.
    Ainsi que cela a été évoqué à plusieurs reprises, notamment par Jean-Yves Chamard, les communes ont bien dû prendre en compte les conséquences de politiques votées ici, parfois sans qu'aient été mesurées leurs conséquences au plan local. Je peux citer l'allocation personnalisée d'autonomie, les 35 heures non compensées, ou encore, pour montrer que je suis totalement objectif, la loi de 1996 sur les SDIS. Des dépenses sont donc ainsi imposées aux décideurs locaux en vertu de décisions extérieures.
    Il ne faut pas oublier non plus la question lancinante des normes édictées à profusion non seulement à Paris mais aussi à Bruxelles.
    Enfin, il est une évidence qu'a soulignée Augustin Bonrepaux : il existe des communes pauvres qui ne peuvent malheureusement qu'augmenter les taux. Cela est particulièrement vrai en région parisienne, où les communes sont très proches les unes des autres.
    Ainsi, lorsque de nombreuses communes se sont dotées d'une police municipale, la pression des habitants de celle qui s'y refuse parce qu'elle n'en a pas les moyens est telle qu'elle finit par céder. Elle n'a d'autre choix que celui d'augmenter le taux de la taxe professionnelle. Champigny, qu'a évoqué Jean-Pierre Brard, est une de ces communes pauvres : elle est même au deuxième rang des communes de 50 000 à 100 000 habitants les plus pauvres. C'est pourquoi elle a un des taux de taxe professionnelle les plus élevés. Il y a une relation objective évidente entre la pauvreté et le taux de la taxe professionnelle.
    M. Didier Migaud. C'est pour cela qu'existent des péréquations.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Tous ces éléments doivent donc être pris en compte. Je me sens d'ailleurs proche, à cet égard, de nos collègues Xavier Bertrand et Eric Woerth. Je ne sais pas si je dois en conclure que je suis moi aussi centriste, comme l'a dit Maurice Leroy.
    M. Maurice Leroy. Bienvenue !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Toujours est-il que leurs interventions étaient équilibrées, balancées, bien qu'affirmant qu'il fallait atteindre l'objectif fixé le plus vite possible. Cela sera peut-être possible, monsieur Aeschlimann, avec les textes financiers et fiscaux qui vont organiser la décentralisation l'année prochaine, ou dès la publication du rapport d'évaluation évoqué dans l'article 14 et qui exposera comment les choses se seront passées en 2003. En tout état de cause, il s'agira de court terme.
    Néanmoins, la rupture sera telle qu'il faut prévoir une étape. En cela, mon opinion diffère de celle exprimée par Maurice Leroy. En effet, il subsiste encore un problème de confiance chez les chefs d'entreprise. Leur inquiétude est palpable et nous devons écouter leurs préoccupations même si elles ne sont pas fondées. Je suis même persuadé que nous allons démontrer en 2003 qu'elle n'est pas légitime, mais, en attendant, une certaine prudence s'impose. Nous devons avoir le souci d'écouter nos administrés locaux, en particulier les entreprises.
    Dans cette optique, puisqu'il faut une étape, mais de court terme, monsieur le ministre, la rédaction que vous proposez pour l'article 14 est parfaitement équilibrée. Elle instaure d'ores et déjà une déliaison assez forte, puisqu'elle permettra d'augmenter la taxe professionnelle de 50 % de plus que les taxes pesant sur les ménages.
    C'est la raison pour laquelle la commission a rejeté ces différents amendements.
    M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Vous comprendrez monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, que nous ne puissions pas résister au désir d'exprimer, à partir de l'amendement de M. Albertini, défendu par Maurice Leroy, notre satisfaction de voir reprendre une proposition que nous défendons depuis une vingtaine d'années : celle de la déliaison des taux.
    M. Maurice Leroy. Nous aussi !
    M. Jean-Pierre Brard. Quand on est opprimé, on aspire à la liberté !
    M. Michel Vaxès. Cela étant, j'ai quelques difficultés à comprendre l'argumentation de notre rapporteur général qui propose d'avancer à pas lents en insistant sur la nécessité d'une étape afin d'éviter une mise en oeuvre trop brutale. Je n'ai pas souvenir des débats qui ont eu lieu lorsqu'a été décidée la liaison des taux, mais je ne crois pas qu'ait été évoqué le besoin d'étapes.
    Tout au long de cette discussion, j'ai entendu flatter les élus locaux, leur esprit de responsabilité, et soutenir que l'autonomie fiscale des collectivités locales est nécessaire. Fort bien, mais il y a beaucoup d'ambiguïté dans les explications qui nous sont données pour refuser l'adoption de ces amendements. J'ai donc l'impression que les élus locaux ne sont pas pleinement libres mais qu'ils vivent en liberté surveillée, en liberté conditionnelle. En effet, si tout le monde leur accordait vraiment la confiance affichée, nous aurions recueilli sans problème un accord unanime puisque nous sommes tous convaincus de la nécessité d'une déliaison complète des taux.
    C'est pourquoi j'indique à Maurice Leroy que nous voterons son amendement, ainsi que les autres, en le remerciant en outre de nous avoir évité de demander un scrutin public puisqu'il l'a fait lui-même.
    M. Jean-Pierre Brard. Très bien !
    M. le président. La parole est à Mme Christine Boutin.
    Mme Christine Boutin. Je ne pensais pas intervenir dans ce débat important et intéressant, car je suis cosignataire de l'amendement présenté par M. Aeschlimann. J'ai cependant souhaité prendre la parole parce que j'ai ressenti comme un malaise. En effet, j'ai eu le sentiment que, au moment de décider de cette réforme capitale, la confiance en nos élus locaux n'était pas vraiment totale.
    M. Maurice Leroy. Exact !
    M. Michel Vaxès. Absolument !
    Mme Christine Boutin. Certes j'ai été ensuite rassurée par la déclaration de M. le ministre. Elle était indispensable sinon, à la lecture du Journal officiel, nos collègues élus locaux se seraient posé des questions quant au regard que nous portons sur leur capacité à être responsables.
    Je tenais à le souligner. La situation est maintenant rétablie et je souhaite que M. Aeschlimann retire l'amendement dont je suis cosignataire. A la différence de M. Vaxès, je regrette que M. Leroy ait demandé un scrutin public sur son amendement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean-Pierre Brard. Ah, c'est très intéressant ! Cachez ce sein que je ne saurais voir !
    M. Maurice Leroy. A chacun de prendre ses responsabilités !
    Mme Christine Boutin. En effet, cela ne constitue qu'une opération purement politicienne et démagogique !
    M. Jean-Pierre Brard. Oh ! de la part de l'UDF ? Ce n'est pas très confraternel !
    M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet.
    M. Alain Joyandet. Je veux m'associer aux propos du rapporteur général qui a replacé les choses dans leur contexte et saluer la démarche de notre ministre du budget : cette avancée est en effet à mettre à son crédit.
    Monsieur le ministre, j'ai bien compris que la rédaction proposée est le fruit de votre expérience personnelle d'élu local, d'une part, et d'ancien président de la commission des finances du Sénat, d'autre part. Néanmoins, il est un élément concret qui me gène sur le plan technique. Certes, nous n'allons pas le régler aujourd'hui, mais on pourrait profiter de la navette pour le faire.
    Quand la liaison entre les taux a été instaurée on a figé une situation issue d'une période au cours de laquelle chaque commune s'était comportée d'une certaine manière. On a fait une photographie qui n'a pas été retouchée depuis. La mesure que vous nous proposez aura donc le mérite de nous permettre de modifier plus facilement les rapport entre les taxes.
    Néanmoins il faut appeler un chat un chat ; les élus locaux souhaitent cette modification parce qu'ils ont l'intention de changer les choses, c'est-à-dire d'augmenter certains taux, notamment celui de la taxe professionnelle. L'instauration de la limite de 1,5 me paraît raisonnable, car elle permettra d'éviter que certains fassent n'importe quoi. J'approuve donc totalement la démarche du ministre.
    J'en viens au point technique que je voulais évoquer et qui concerne le cas où une commune ne voudra pas augmenter du tout les taux des taxes pesant sur les ménages, parce que l'évolution historique a été telle qu'ils sont déjà élevés. Elle ne pourra donc pas non plus augmenter celui de la taxe professionnelle. Je n'ai évidemment pas de solution que j'aurais pu traduire dans un amendement, mais je souhaiterais que, au cours de la navette, on recherche une formule permettant d'utiliser un autre plafonnement que le rapport 1,5 afin de permettre à une municipalité qui ne voudrait pas toucher du tout aux taxes pesant sur les ménages d'augmenter petit à petit, dans des proportions très raisonnables, celui de la taxe professionnelle.
    Enfin, je m'associe aux propos de Christine Boutin et je souhaite que nos amis retirent leurs amendements afin que nous soutenions sans réserve la démarche historique du ministre qui va dans le sens de ce que nous souhaitons tous.
    M. le président. Vous vous inscrivez au fur et à mesure, mes chers collègues, mais je voudrais clore le débat.
    M. Michel Vaxès. Il est important !
    M. le président. Certes, mais je suis déjà allé largement au-delà de ce que permet le règlement.
    Je vais donc encore donner la parole à M. Migaud, puis à M. Brard, très brièvement, et enfin aux auteurs des amendements.
    La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Je tiens d'abord à féliciter M. le ministre parce que, chaque fois qu'il s'exprime, ses paroles ont beaucoup d'effet...
    M. Marc Laffineur. Heureusement ! C'est qu'il est bon !
    M. Didier Migaud. ... notamment sur Mme Boutin qui a d'ailleurs éprouvé le besoin de le répéter à plusieurs reprises depuis hier. Du coup, des convictions fortement affirmées, en particulier au travers de la signature de quelques amendements, sont fortement ébranlées.
    Mme Christine Boutin. C'est pour lui rendre hommage !
    M. Alain Joyandet. C'est pour ça qu'il a été choisi !
    M. Michel Bouvard. Vous n'aviez pas été habitués à des ministres aussi convaincants ! (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. C'est son pouvoir de séduction ! (Sourires.)
    M. Didier Migaud. J'avoue que nous sommes impressionnés.
    Cela étant, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, on ne peut pas à la fois affirmer que les élus sont des gens responsables, des adultes ! - vous l'avez dit vous-même, madame Boutin, après avoir d'ailleurs exprimé votre préoccupation quant au manque de confiance que traduit cet encadrement de la liberté - et, de l'autre, vouloir les encadrer au prétexte qu'ils pourraient faire n'importe quoi et prendre des décisions dangereuses.
    M. Alain Joyandet. C'est vrai !
    M. Didier Migaud. Il y a tout de même une contradiction, un manque de confiance. Que des élus locaux puissent demander au ministre de les empêcher de faire des bêtises, c'est le comble de l'irresponsabilité !
    M. Jean-Louis Dumont. Tout à fait !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Pendant quatorze ans, vous n'avez pas fait cette déliaison des taux !
    M. Didier Migaud. J'admets honnêtement que nous n'avions pas réussi à convaincre nos ministres d'envisager cette liberté. En l'occurrence, ils étaient complètement prisonniers de leur administration centrale. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Le rapporteur général a indiqué que beaucoup de ministres ont essayé. Non : peu ont essayé !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Un seul a réussi : M. Lambert !
    M. Didier Migaud. Peut-être parce qu'il est le premier à vraiment essayer.
    Il est d'ailleurs regrettable que certains, dès qu'ils passent d'une fonction à une autre, aient une conception différente de la responsabilité des élus !
    Mme Christine Boutin. Mais non !
    M. Didier Migaud. Au travers de l'amendement de notre collègue Leroy, le Parlement a l'occasion d'affirmer que nous sommes aussi responsables que tel ou tel ministre dans un gouvernement, que tel ou tel directeur d'administration centrale.
    M. Maurice Leroy. Tout à fait !
    M. Didier Migaud. Partir de l'a priori que l'Etat est obligatoirement plus responsable, plus sérieux que les élus locaux, est complètement contraire à l'esprit de décentralisation.
    M. Jean-Louis Dumont. Très bien !
    M. Didier Migaud. Cela est complètement contraire aussi au discours du Premier ministre que, une fois de plus, nous prenons en flagrant délit de contradiction. Il faut être logique avec les convictions que l'on affiche.
    Soit on considère que les élus sont responsables et il faut leur laisser une liberté totale. Soit on estime qu'ils ne le sont pas et on les encadre. Le vote qui va intervenir sera une épreuve de vérité par rapport à la confiance que nous pouvons témoigner à l'ensemble des élus locaux de France. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le ministre, votre proposition est très importante pour les libertés locales qui, dans notre pays, plongent leurs racines dans les traditions d'émancipation des villes au Moyen Age. Il est vrai qu'il a été porté un grave coup à ces libertés lorsque les taux furent liés, sous la présidence de M. Giscard d'Estaing.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Et maintenus depuis par la gauche !
    M. Jean-Pierre Brard. Bien sûr, maintenus, mais il faut rendre à César ce qui est à César et à M. Lambert ce qui est à M. Lambert.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Lambert ne compte pas.
    M. Jean-Pierre Brard. Dans le cas particulier, c'est vous qui prenez l'initiative. Par conséquent, même si nous sommes en vis-à-vis sur le plan politique, ce n'est pas une raison pour ne pas reconnaître ce qui vous revient.
    Madame Boutin, je suis choqué que vous soyez choquée par la perspective d'un scrutin public, vous qui êtes une femme de foi. (Sourires.)
    Mme Christine Boutin. Qu'en savez-vous ?
    M. Jean-Pierre Brard. Je ne vous ai jamais confessée, c'est vrai.
    Mme Christine Boutin. Je ne dirai plus rien !
    M. Jean-Pierre Brard. Vous avez raison. L'introspection est souvent meilleure conseillère. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Monsieur Brard, allez plutôt vers votre conclusion !
    M. Jean-Pierre Brard. Soit, monsieur le président, mais avant de conclure, je voudrais quand même exprimer mon point de vue.
    Je suis choqué par la position de Mme Boutin et de quelques autres collègues qui ne veulent pas afficher publiquement leur position.
    Mme Christine Boutin. On va le faire !
    M. Jean-Pierre Brard. Nous sommes des élus de la nation française ! Il est légitime que chacun de nos concitoyens puisse savoir quelle est la position de ceux qu'ils ont envoyé dans cette maison !
    Je trouve également choquant de marteler des mots aussi importants, aussi forts, avez-vous dit, monsieur le ministre, que « liberté » et « responsabilité », et de ne pas les assumer complètement.
    On ne peut pas se défier des élus, alors qu'ils sont soumis régulièrement au suffrage universel. On ne peut pas non plus se cacher derrière l'administration centrale. Celle-ci, d'une part, est compétente et, d'autre part, se situe dans la tradition de la République, c'est-à-dire - et ce n'est pas du tout péjoratif dans mon esprit - qu'elle est obéissante, au sens où elle est soumise au pouvoir politique. Et les hommes politiques qui se cachent derrière elles sont ceux qui refusent d'assumer leurs responsabilités, tout comme les gouvernements qui se cachent derrière Bruxelles pour administrer leurs mauvais coups.
    Quant à vous, monsieur Aeschlimann, cher collègue de droite, j'imagine quel travail cela a dû représenter pour réunir autant de signatures. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Marc Laffineur. Il est temps de procéder au vote monsieur le président.
    M. Jean-Pierre Brard. Je vous en prie, monsieur le président, laissez-moi m'exprimer, je n'ai pas beaucoup parlé ce matin. (Sourires.)
    Vous ne pourrez pas m'empêcher de dire, monsieur Aeschlimann, que le fait que vous ayez capitulé après vous être donné autant de mal montre bien que vous êtes sous influence.
    Chacun d'entre nous a reçu beaucoup de courrier, des lettres identiques, derrières lesquelles nous décelons l'influence de M. Seillière ! Vous ne pouvez pas le contester, monsieur Aeschlimann. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Monsieur le ministre, vous nous rendez une part de notre liberté. Permettez-moi une image, en cette année du bicentenaire de la naissance de Victor Hugo. Imaginez Jean Valjean dans sa cellule. Vous lui annoncez que vous allez lui ouvrir la porte. Celui-ci bondit vers la sortie mais retombe lourdement retenu par la chaîne qui lui entrave le pied.
    D'une certaine manière, vous nous ouvrez la porte, monsieur le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Mais la porte se referme !
    M. Jean-Pierre Brard. Non ! La porte ne se referme pas mais vous nous empêchez de la franchir complètement...
    M. Michel Bouvard. Il faut fermer la discussion !
    M. Jean-Pierre Brard. ... pour que nous puissions respirer à l'air libre : celui de la responsabilité.
    M. le président. Monsieur Leroy, maintenez-vous votre amendement ?
    M. Maurice Leroy. Oui, monsieur le président.
    La référence de M. Brard à Victor Hugo m'inciterait à m'écrier : « S'il n'en reste qu'un, je serai celui-là ! » Mais je ne le ferai pas car j'espère bien ne pas être le seul à voter cet amendement.
    Je répondrai à Christine Boutin, simplement, élégamment, qu'il n'y a pas de politiciens dans cet hémicycle.
    Je ne fais aucun procès aux 140 signataires de l'amendement n° 63 rectifié.
    M. Michel Bouvard. Où sont-ils ?
    M. Maurice Leroy. Ils avaient le droit de le présenter et de le défendre. Je leur reconnais même le droit de le retirer.
    Je ne dirai pas que Mme Boutin ou que M. Aeschlimann sont politiciens parce qu'ils retirent l'amendement. D'ailleurs peut-être savaient-ils en le présentant qu'ils auraient à le retirer. Je les respecte. Et j'entends bien être respecté de la même manière. Je le répéterai haut et fort dans cet hémicycle chaque fois que cela sera nécessaire.
    M. Jean-Louis Dumont. Très bien !
    M. Maurice Leroy. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre mise au point. Elle s'imposait au moment - et c'est ce qui donne un aspect quelque peu surréaliste à notre débat - où le Gouvernement est réuni à Nantes pour la première des assises des libertés locales.
    M. Michel Bouvard. Quel rapport avec notre débat ?
    M. Maurice Leroy. Vous avez eu raison, monsieur le ministre, de rappeler qu'il ne faut pas mélanger les débats.
    M. Didier Migaud. C'est pourtant ce qu'on fait.
    M. Maurice Leroy. Ne perdons pas de vue l'objet de l'amendement, qui est de laisser les élus fixer librement les taux ! Tout le débat est là, mais rien que là !
    M. Didier Migaud. C'est ça la vraie décentralisation !
    M. Maurice Leroy. Pourquoi ai-je demandé un vote par scrutin public ? Tout simplement parce que, à un moment donné, il faut savoir prendre ses responsabilités.
    M. Didier Migaud. Nous devons prendre nos responsabilités contre les magouilles politiques.
    M. Maurice Leroy. La Constitution dispose qu'aucun mandat n'est impératif.
    Nous sommes chacune et chacun libre de notre vote.
    M. Michel Bouvard. Nous n'avons pas de leçons de constitutionnalité à recevoir de vous !
    M. Maurice Leroy. Je n'en reçois pas non plus de vous, monsieur Bouvard !
    M. Jean-Pierre Brard. Ce sont des leçons d'histoire. N'agressez pas M. Leroy, monsieur Bouvard. C'est un de vos amis ! (Sourires.)
    M. le président. Poursuivez monsieur Leroy !
    M. Maurice Leroy. Notre amendement n° 154 est parfaitement raisonnable puisqu'il ne modifie pas le plafond. Nous donnons totale liberté pour la déliaison des taux tout en maintenant le plafonnement. Aucune hausse inconsidérée n'est donc à craindre. La prudence à laquelle nous invitait le président de la commission des finances est respectée.
    M. Jean-Louis Dumont. Voilà !
    M. Didier Migaud. Bien sûr !
    M. Maurice Leroy. Enfin, et ce sera mon dernier point, quel est le maire de France qui ne se bat pas pour attirer des entreprises sur le territoire de sa commune et ne fait pas tout pour rendre celui-ci attractif ?
    M. Jean-Louis Dumont. Bien sûr !
    M. Didier Migaud. D'ailleurs, c'est le discours que vous tenez en présence des maires, messieurs les députés de l'UMP, mais, dans cet hémicycle, vous en tenez un autre !
    M. Maurice Leroy. Des fonds publics sont même utilisés pour favoriser l'implantation d'entreprises. Des collectivités, parfois de même couleur politique, se font la guerre pour cela. D'où l'intérêt de l'intercommunalité, et, en particulier des EPCI à taux unique qui évite tout dumping fiscal local avec la taxe professionnelle.
    M. Jean-Louis Dumont. Très bien ! Il est convaincant !
    M. le président. Monsieur Aeschlimann, maintenez-vous vos amendements ?
    M. Manuel Aeschlimann. Je vais retirer les amendements n°s 63 rectifié et 308, monsieur le président. J'ai bien entendu le président de la commission des finances dire que les entreprises sont inquiètes. Cela, je veux bien l'entendre. Et c'est à nous aussi de les rassurer. Ce n'est pas comme quand, tout au long de l'élaboration de cet amendement, on nous disait : « Le MEDEF n'en veut pas. » Le MEDEF a ses propres positions, nous avons les nôtres.
    M. Jean-Pierre Brard. Qui vous disait que le MEDEF n'en voulait pas ?
    M. Manuel Aeschlimann. Le MEDEF lui-même !
    M. Jean-Pierre Brard. Non, « On nous disait » que le MEDEF n'en voulait pas. Ce n'est pas la même chose.
    M. le président. Monsieur Brard, vous vous êtes déjà exprimé ! Laissez parler l'orateur.
    M. Didier Migaud. Il ne faut pas l'interrompre, il se laisse facilement influencer !
    M. Manuel Aeschlimann. Nous n'avons pas autant « ramé » que le dit M. Brard pour obtenir les 140 signatures. Les élus ont cosigné l'amendement n° 63 rectifié de façon très volontaire et très spontanée. C'est un sujet qui visiblement les intéressait, c'est naturel.
    M. Jean-Pierre Brard. Ne diminuez pas vos mérites !
    M. Manuel Aeschlimann. M. le ministre s'est déclaré favorable à la constitution d'un groupe de travail, associant parlementaires, chefs d'entreprise et représentants du Gouvernement, pour, non seulement, rassurer les entreprises, mais aussi avancer, pas à pas, vers la déliaison des taux, que nous appelons visiblement tous, par-delà les clivages politiques, de nos voeux.
    Lors de l'élaboration de l'amendement, nous avons eu l'impression d'être face à un mur car nous avions peu de retours du Gouvernement. Nous avons les premiers aujourd'hui, ce qui est un peu dommage. Je suis persuadé que les parlementaires, à commencer par ceux qui sont aussi des élus locaux, et M. le ministre Lambert seront favorables à ce que la réflexion sur le sujet soit poursuivie et qu'une période d'expérimentation soit engagée afin d'examiner ce qui se fait en la matière. Les élus locaux sont des gens responsables et ils sauront vous le prouver.
    M. le président. Les amendements n°s 63 rectifié et 308 sont retirés.
    Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'amendement n° 154.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   41
Nombre de suffrages exprimés   39
Majorité absolue   20
Pour l'adoption   14
Contre   25

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    L'amendement n° 167 a été défendu. Le Gouvernement et la commission se sont exprimés.
    Je le mets aux voix.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Albertini, de Courson, Maurice Leroy, Perruchot, et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 157, ainsi rédigé :
    « I. - Substituer au deuxième alinéa du 1. du I de l'article 14 les quatre alinéas suivants :
    « 4. A compter de 2003 et par exception aux dispositions du b du I, les communes, les départements et les organismes de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre peuvent augmenter leur taux de taxe professionnelle, par rapport à l'année précédente, dans les limites suivantes :
    « - d'une fois l'augmentation de leur taux de taxe d'habitation ou, si elle est moins élevée, de leur taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières, lorsque le taux de taxe professionnelle voté l'année précédente est plus d'une fois et demie supérieur au taux moyen national ;
    « - d'une fois et demie l'augmentation de leur taux de taxe d'habitation ou, si elle est moins élevée, de leur taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières, lorsque le taux de taxe professionnelle voté l'année précédente est compris entre 100 % et 150 % du taux moyen national ;
    « - de deux fois l'augmentation de leur taux de taxe d'habitation ou, si elle est moins élevée, de leur taux moyen pondéré de la taxe d'habitaiton et des taxes foncières, lorsque le taux de taxe professionnelle voté l'année précédente est inférieur au taux moyen national ; »
    « II. - En conséquence, substituer au deuxième alinéa du 2 du I de cet article les quatre alinéas suivants :
    « III. - A compter de 2003 et par exception aux dispostions du I, les régions peuvent augmenter leur taux de taxe professionnelle, par rapport à l'année précédente, dans les limites suivantes :
    « - d'une fois l'augmentation de leur taux de taxe d'habitation ou, si elle est moins élevée, de leur taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières, lorsque le taux de taxe professionnelle voté l'année précédente est plus d'une fois et demie supérieur au taux moyen national ;
    « - d'une fois et demie l'augmentation de leur taux de taxe d'habitation ou, si elle est moins élevée, de leur taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières, lorsque le taux de taxe professionnelle voté l'année précédente est compris entre 100 % et 150 % du taux moyen national ;
    « - de deux fois l'augmentation de leur taux de taxe d'habitation ou, si elle est moins élevée, de leur taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières, lorsque le taux de taxe professionnelle voté l'année précédente est inférieur au taux moyen national ».
    La parole est à M. Maurice Leroy.
    M. Maurice Leroy. L'amendement est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 157.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 199, ainsi rédigé :
    « Dans le deuxième alinéa du 1 du I de l'article 14, substituer aux mots : "d'une fois et demie les mots : "de trois fois. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. La hausse modulée des taux est depuis de longues années au coeur du débat parlementaire. On vient à nouveau de le voir. Les parlementaires communistes des deux assemblées le demandent depuis longtemps. Il faut dire que le système fiscal local a connu ces derniers temps maints bouleversements. L'exemple le plus significatif de ce point de vue est fourni par la taxe professionnelle, avec l'achèvement cette année du dispositif progressif de la suppression de la part taxable des salaires. On notera au passage que cela constitue encore aujourd'hui la principale source de réduction des impôts dans le projet de loi de finances dont nous débattons. On peut s'interroger au demeurant sur la portée réelle de celle-ci sur l'emploi.
    Cela dit, l'une des faiblesses de l'article 14 est de lier la hausse modulée de la taxe professionnelle à l'augmentation des autres impôts directs locaux. Cela conduit à demander un effort supplémentaire aux ménages. Il faut que la taxe professionnelle puisse augmenter indépendamment des autres taxes locales. Comme la TP pèse maintenant quasi exclusivement sur le capital - il est d'ailleurs regrettable, et nous y reviendrons, qu'il n'intègre pas le capital financier -, il nous est apparu logique de permettre aux collectivités locales, dans les limites de l'augmentation de l'investissement des entreprises prévue par la loi de finances, de faire varier leur taux d'imposition. Cela leur permettrait d'asseoir et de stabiliser leurs ressources. C'est d'autant plus important qu'elles sont appelées, dans le cadre de la décentralisation et des futurs transferts de compétences, à jouer un rôle plus important.
    Cela étant, nous ne sommes pas dupes : il ne faudrait pas que la liberté redonnée aux collectivités par le biais de la déliaison des taux soit seulement celle d'augmenter les impôts locaux pour assumer les charges de la décentralisation que vous préparez.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission.
    M. Augustin Bonrepaux. Je demande la parole, monsieur le président.
    M. le président. Je vous demanderai d'être bref, monsieur Bonrepaux, car un débat a déjà eu lieu sur la question.
    M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement est tout à fait justifié, car il tend à donner une liberté supplémentaire aux collectivités locales tout en préservant la sécurité souhaitable.
    M. le ministre nous a assuré, tout à l'heure, que la décentralisation ne se ferait pas sans un transfert de ressources. Nous en avons pris acte et nous y veillerons.
    Cela nous rassure un peu après le rejet de notre amendement concernant la péréquation.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 199.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Sandrier, Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 12, ainsi rédigé :
    « I. - Dans le deuxième alinéa du 1 du I de l'article 14, substituer aux mots : "d'une fois et demie l'augmentation de leur taux de taxe d'habitation ou, si elle est moins élevée,, les mots : "de deux fois l'augmentation de leur taux de taxe d'habitation ou.
    « II. - En conséquence, dans le deuxième alinéa du 2 du I de ce même article, substituer aux mots : "d'une fois et demie, les mots : "de deux fois. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard pour cet amendement de repli.
    M. Jean-Pierre Brard. Nous ne doutons pas de la pertinence de la démarche de M. Lambert puisqu'elle s'appuie sur son expérience. Pour avoir été longtemps maire d'Alençon et y exercer encore, je crois, quelque influence, il sait bien que les élus locaux ne font pas n'importe quoi.
    Le Gouvernement, pour ce qui le concerne, a fait récemment la démonstration que, quand il y avait une forte volonté politique, il ne se laissait arrêter par rien. Bien que ses positions sur la décentralisation aient été désavouées par le Conseil d'Etat, il a très clairement indiqué qu'il passerait outre.
    Puisque vous êtes favorable à la politique des petits pas, monsieur le ministre, même si le premier est substantiel, nous vous proposons avec cet amendement, qui, comme vous l'avez dit, monsieur le président, est un amendement de repli, d'allonger un peu la foulée et, en marchant d'un pas plus résolu, de donner encore plus d'autonomie aux communes.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Même avis que sur l'amendement précédent.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupes des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 176, ainsi rédigé :
    « Après le deuxième alinéa du 1 du I de l'article 14, insérer l'alinéa suivant :
    « En l'absence d'augmentation du taux de la taxe d'habitation ou du taux pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières, les communes, les départements et les organismes de coopération intercommunales dotés d'une fiscalité propre peuvent augmenter les taux de taxe professionnelle par rapport à l'année précédente dans la limite du taux de croissance de la formation brute de capital fixe des entreprises prises en compte dans le projet de loi de finances. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Cet amendement est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 176.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 321 et 38, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 321 présenté par M. Laffineur et M. Aeschlimann est ainsi rédigé :
    « I. - Dans le a du 3 du I de l'article 14, substituer aux mots : "ainsi qu'aux 2 et 3 du I, les mots : "et 3.
    « II. - En conséquence, dans le même alinéa, substituer aux mots : "ainsi qu'aux 2, 3 et 4 du I, les mots : ", 3 et premier alinéa du 4.
    « III. - En conséquence, rédiger ainsi le b du 3 du I de cet article :
    « b. La dernière phrase du deuxième alinéa du II est supprimée. »
    L'amendement n° 38, présenté par M. Carrez, rapporteur général, est ainsi rédigé :
    « I. - Dans le a du 3 du I de l'article 14, substituer aux mots : "ainsi qu'aux 2 et 3 du I, les mots : "et 3.
    « II. - En conséquence, dans le même alinéa, substituer aux mots : "ainsi qu'aux 2, 3 et 4 du I, les mots : ", 3 et 4. »
    La parole est à M. Marc Laffineur, pour soutenir l'amendement n° 321.
    M. Marc Laffineur. Il s'agit d'un amendement technique. Actuellement, les EPCI, qui sont soumis au régime de la TPU, ne sont pas tenus, s'ils baissent leur taxe d'habitation et le foncier bâti, de diminuer la taxe professionnelle. En revanche, s'ils décident d'augmenter la taxe d'habitation et le foncier bâti, ils ne peuvent plus augmenter la taxe professionnelle, ou dans des limites restreintes. Nous demandons, comme M. le ministre le propose, de réintégrer les EPCI dans le régime général.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Favorable. La loi Chevènement avait introduit un peu de liberté dans la mécanique de liaison. L'article 14 tel que le propose le Gouvernement rend inutile cette disposition. Donc, il vaut mieux la supprimer.
    M. le président. Pouvez-vous défendre l'amendement n° 38, monsieur le rapporteur général ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il est satisfait par l'amendement n° 321. Je le retire.
    M. le président. L'amendement n° 38 est retiré.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 321 ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 321.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Carrez a présenté un amendement, n° 231 rectifié, ainsi libellé :
    « Compléter le 3 du I de l'article 14 par les trois alinéas suivants :
    « c. Le 3 du II est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
    « Par exception au premier alinéa, la variation des taux définie aux 1 et 2 peut être celle au titre duquel l'établissement public de coopération intercommunale vote son taux de taxe professionnelle, lorsque l'ensemble des communes membres a délibéré conformément au I et notifié à l'établissement public de coopération intercommunale les délibérations fixant les taux de chacune des trois taxes directes locales imposables au bénéfice de la commune.
    « Après notification par les communes des délibérations, lesdites délibérations ne peuvent être modifiées. »
    La parole est à M. Gilles Carrez.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je retire cet amendement, parce que sa rédaction semble poser encore quelques petits problèmes.
    M. le président. L'amendement n° 231 rectifié est retiré.
    MM. Vaxès, Brard et Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 81, ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 14 par les mots : "au plus tard lors du dépôt de la loi de finances initiale de l'année suivante. »
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Il s'agit d'un amendement de précision. Il tend à permettre d'assurer l'information du Parlement sur les conséquences de la déliaison des taux avant le vote de la loi de finances.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais à titre personnel j'émettrai un avis défavorable, parce que le rapport est bien prévu à l'issue de l'année 2003. Toutes les garanties me semblent données.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission.
    Je mets aux voix l'amendement n° 81.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 14, modifié par l'amendement n° 321.
    (L'article 14, ainsi modifié, est adopté.)
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2003, n° 230 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 256).
    A quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à treize heures.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexe au procès-verbal
de la 1re séance
du vendredi 18 octobre 2002
SCRUTIN (n° 31)


sur l'amendement n° 154 de M. Albertini à l'article 14 du projet de loi de finances pour 2003 (abrogation de la liaison des taux des impôts locaux).

Nombre de votants

41


Nombre de suffrages exprimés

39


Majorité absolue

20


Pour l'adoption

14


Contre

25

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe de l'Union pour la majorité présidentielle (364) :
    Contre : 25 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Abstentions : 2. - MM. Jean-Marc Chavanne et Philippe Pemezec.
    Non-votants . - MM. Marc-Philippe Daubresse (président de séance) et Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (142) :
    Pour : 6 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (28) :
    Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 6 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (19).