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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU SAMEDI 26 OCTOBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du vendredi 25 octobre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT

1.  Loi de finances pour 2003 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

ÉCOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial de la commission des finances.
M. Christophe Priou, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.
MM.
Francis Hillmeyer,
Patrick Braouezec,
Jean-Pierre Giran,
Mmes
Geneviève Perrin-Gaillard,
Nathalie Kosciusko-Morizet,
Nathalie Gautier,
MM.
Yves Cochet,
Jean-Yves Cousin,
Armand Jung,
Philippe Tourtelier.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.
Réponses de Mme la ministre aux questions de : M. Francis Hillmeyer, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, MM. Jean-Pierre Decool, Alain Cousin.

ÉTAT B
Titre III. - Adoption «...»
Titre IV «...»

Amendement n° 93 de la commission des finances : M. le rapporteur spécial, Mme la ministre, MM. Jean-Pierre Blazy, Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis ; Yves Cochet, Christophe Priou, rapporteur pour avis. - Rejet de l'amendement n° 93 rectifié.
Adoption du titre IV.

ÉTAT C
Titres V et VI. - Adoptions «...»
ÉTAT E
Ligne 33. - Adoption «...»

Renvoi de la suite de la discussion budgétaire à la prochaine séance.
2.  Dépôt d'un rapport en application d'une loi «...».
3.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2003
DEUXIÈME PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003 (n°s 230, 256).

ÉCOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

    M. le président. Nous abordons l'examen des crédits du ministère de l'écologie et du développement durable.
    La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, madame la ministre de l'écologie et du développement durable, mes chers collègues, j'ai l'honneur de vous présenter, en tant que rapporteur spécial, le budget de l'écologie et du développement durable. Ce budget est discuté deux mois après le grand sommet de la Terre de Johannesburg où la France a, par la voix de son Président de la République, témoigné fermement de son engagement sur le développement durable, notamment en soulignant et en démontrant que nos modèles actuels doivent être repensés et qu'il convient dès lors d'inventer des modèles nouveaux, plus économes en ressources naturelles, afin de respecter les équilibres écologiques.
    Je suis intimement convaincu que les Français prennent peu à peu conscience que l'environnement est devenu une préoccupation transversale de la société et qu'il existe une imbrication croissante des relations environnementales, sociales, économiques et culturelles qui détermine notre avenir commun.
    Désormais, il s'agit donc de placer l'écologie au coeur de toute politique, de promouvoir un développement harmonieux, de privilégier le qualitatif par rapport au quantitatif, bref, de faire du développement durable un impératif. Or, précisément, il apparaît clairement que le budget de l'écologie et de l'environnement durable s'inscrit dans cette logique.
    M. Yves Cochet. Nous en reparlerons !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Il s'agit, en effet, d'un budget réaliste qui maintient les capacités d'action des services de l'écologie et du développement durable et dont les principaux ordres de grandeur sont stables.
    La comparaison du montant des crédits de paiement que le Gouvernement propose d'inscrire au budget de l'écologie et du développement durable pour 2003 avec le montant des crédits de paiement inscrits pour 2002 pour ce qui était, jusqu'au terme de la précédente législature, le budget de l'environnement, n'a pu être réalisée qu'après une étude préalable des modifications du périmètre des crédits concernés. En effet, compte tenu des transferts de comptes entre le ministère de l'écologie et du développement durable et d'autres ministères, il a été possible de retracer exactement l'évolution du budget du ministère. Il est donc clairement établi que le montant des crédits de paiement proposés pour l'exercice 2003 connaît non pas une baisse de 0,16 % mais une augmentation de 1,11 %.
    M. Yves Cochet. Ah !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. On ne peut donc que se réjouir de cette augmentation, certes relative, puisqu'elle s'inscrit dans un contexte budgétaire difficile, caractérisé, nous le savons tous, par des marges de manoeuvre réduites.
    L'action du ministère de l'écologie et du développement durable ne se mesure pas seulement à son budget mais aussi à l'impulsion qu'il donne dans les politiques citées : protection de la nature, des sites et paysages, protection de l'eau et des milieux aquatiques, prévention des pollutions et des risques, et soutien aux politiques environnementales.
    L'action du ministère de l'écologie et du développement durable doit s'apprécier également à son pouvoir de contrôle. Le rôle du ministère de l'écologie et du développement durable est donc de fixer les grandes orientations, d'initier les politiques. Ce n'est en aucun cas un ministère de gestion et d'exécution.
    M. Yves Cochet. Ben voyons !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Je citerai quelques chiffres. Pour 2001, le budget global des six agences de l'eau représentait plus de 2,1 milliards d'euros, à comparer au budget consacré à la protection de l'eau par le ministère de l'écologie et du développement durable : 28 millions d'euros, sur un budget global de 768 millions d'euros. L'apport du ministère dans le financement de la politique de l'eau s'élève donc à quelques pourcentages. Ce n'est là qu'un exemple, mais ô combien révélateur.
    Si l'on procède à une analyse rapide des crédits de paiement par titre, il m'importe de souligner trois points. D'abord, pour ce qui est du titre III, « Moyens des services », les crédits de rémunération sont affectés par une mesure nouvelle négative d'un montant de 5,14 millions d'euros. Or, il ne s'agit nullement d'une véritable mesure de réduction des moyens en personnels et des services.
    M. Yves Cochet. Incroyable !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. En effet, le nombre d'emplois ne diminue pas et augmente même de deux unités.
    M. Yves Cochet. Formidable !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. En fait, l'objectif de ladite mesure est tout simplement de limiter la différence entre le montant des crédits inscrits et le montant des crédits qui vont être réellement dépensés.
    Ensuite, s'agissant toujours du titre III, on note effectivement une réduction des moyens de fonctionnement des services. Je tiens à souligner qu'il faut juger cette diminution de crédits à l'aune des besoins, que l'on ne peut mesurer et établir qu'à partir des crédits réellement consommés lors des exercices budgétaires précédents.
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Ah ! Il faut diminuer ?
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Cette démarche opportune, qui s'applique aux moyens de fonctionnement des services, doit être aussi celle qui guide la fixation des montants des subventions de fonctionnement versées par le ministère de l'écologie et du développement durable aux établissements publics placés sous sa tutelle. C'est ainsi que j'ai cosigné, avec mon collègue Hervé Novelli, un amendement présenté et adopté par la commission des finances...
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Quand ? Il a été repoussé ce matin !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. ... visant à ajuster le montant de la subvention de fonctionnement dont bénéficie l'Agence de l'environnement et de la maîtrise des énergies à ses besoins réels, qu'il est possible d'évaluer au bénéfice du constat selon lequel, en 2000 et en 2001, un montant de 4 millions d'euros était disponible à la fin de l'exercice budgétaire sur la ligne relative à cette subvention de fonctionnement.
    Cette mesure ne devrait en rien obérer les capacités de fonctionnement de cette agence. Cette logique marque, à tout le moins, une rupture avec les années précédentes, où la présentation du budget de l'environnement tendait à afficher, en loi de finances initiale, des montants de crédits de paiement que chacun savait ne pas pouvoir être consommés, mais qui permettaient de rendre crédible ce qui était censé constituer une priorité politique.
    M. Yves Cochet. A l'évidence, ce n'en est plus une !
    M. Philippe Renault, rapporteur principal. Enfin - et je terminerai par là cette analyse synthétique des crédits de paiement par titre -, s'agissant des titres V - « Investissements exécutés par l'Etat » - et VI - « Subventions d'investissement accordées par l'Etat » - on note une progression substantielle des montants des crédits de dépenses en capital. Cette tendance indique et affiche clairement la volonté politique du Gouvernement et de la majorité, non seulement de renforcer la partie relative aux investissements de l'action financière de l'Etat, mais aussi de modérer l'évolution des dépenses relatives aux moyens de fonctionnement.
    Les différentes actions qui permettront d'engager ces crédits marquent logiquement la volonté politique du Gouvernement et de la majorité de conforter les missions essentielles et spécifiques du ministère de l'écologie et du développement durable, d'assurer la continuité de l'action publique dans le domaine de l'environnement, de mener une politique de moyen, voire de long terme, cohérente et, ainsi, de tenir compte des nombreuses réformes à venir.
    En ce qui concerne la protection de la nature, des sites et des paysages, il est prévu de promouvoir la création d'un réseau d'espaces protégés et de contribuer à la conservation, à la gestion et au suivi de la diversité biologique et paysagère, pour un montant honorable de 120 millions d'euros.
    De même, puisque l'eau, source de vie, est aujourd'hui un enjeu vital, indispensable au développement de nombreuses activités économiques, 71 millions d'euros sont consacrés aux actions de protection de l'eau et des milieux aquatiques. Ces actions se distinguent selon qu'elles sont financées directement par les crédits gérés par les services du ministère de l'écologie et du développement durable ou par la section B, « Fonds national de solidarité pour l'eau » du compte d'affectation spéciale « Fonds national de l'eau ». Je tiens à rappeler que, lors des débats relatifs à la première partie du projet de loi de finances, le montant du prélèvement sur le produit des redevances des agences de l'eau dont bénéficie le Fonds national de solidarité pour l'eau a été fixé à 40 millions d'euros, et non plus à 81,6 millions d'euros, compte tenu des importants reports de crédits.
    On ne peut aussi que se féliciter de l'action du ministère de l'écologie et du développement durable en matière de prévention des inondations. Le budget dédié à cette fin s'élève en effet à 42 millions d'euros.
    M. Yves Cochet. C'est la même chose que l'an dernier !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. 32,4 millions d'euros seront attribués à l'amélioration de l'entretien des cours d'eau et au renforcement des ouvrages de protection des lieux habités ; 8 millions d'euros seront consacrés aux services d'annonces des crues.
    En ce qui concerne, toujours, les actions de protection de l'eau et des milieux aquatiques, on ne peut que regretter qu'aucune inscription budgétaire, tant en crédits de paiement qu'en autorisations de programme, n'apparaisse au titre des « Mesures de prévention ou de lutte contre les pollutions marines accidentelles prises dans le cadre du plan Polmar ».
    M. Yves Cochet. Il n'y a plus de plan Polmar ! Zéro euro !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Je souhaiterais, madame la ministre, comme d'ailleurs l'ensemble de mes collègues, avoir quelques explications sur cette absence.
    Je me permets, en outre, d'attirer toute votre attention sur l'urgence qu'il y a à mettre en oeuvre une politique globale des problèmes de l'eau. A mon sens, elle devra consister à prendre en compte la ressource sous ses différents aspects, les difficultés qu'elle présente et les solutions que l'on peut y apporter. Chacun le sait, les besoins en eau sont sans cesse croissants - usages domestiques, usages industriel et agricole, développement, depuis quelques années, de besoins nouveaux à caractère culturel et social.
    Quant à la prévention de la pollution et des risques, on ne peut que se réjouir du rôle majeur de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques - INERIS - et des opérations d'intervention de l'ADEME, en complément des actions mises en oeuvre par les services du ministère de l'écologie et du développement durable.
    M. Yves Cochet. Et les inspecteurs ?
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. On notera également avec une attention particulière que la subvention versée à l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire - IRSN - constitue un tiers des crédits de paiement dont dispose le ministère de l'écologie et du développement durable. On peut donc évaluer à 400 millions d'euros le coût des actions mises en oeuvre pour ces différents secteurs.
    Enfin, le soutien aux politiques environnementales n'est pas en reste, puisque les actions tendant à la mobilisation des moyens humains et de fonctionnement du ministère de l'écologie et du développement durable devraient représenter, en 2003, un coût de 218 millions d'euros.
    Le précédent gouvernement avait érigé le ministère de l'environnement en ministère de plein exercice, à travers l'augmentation de ses dotations budgétaires. Il est vrai que ces dernières ont fortement progressé, mais, loin de traduire une politique active et pédagogique de préservation de l'environnement, l'augmentation des dépenses était en fait artificiellement,...
    M. Yves Cochet et Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Allons donc !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. ... voire mensongèrement gonflée, tant par la budgétisation des dotations de l'ADEME en 1999 que par le transfert en 2001 du budget de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire...
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Ce n'est pas vrai !
    M. le président. Monsieur Cochet, madame Perrin-Gaillard, vous pourrez intervenir tout à l'heure !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Oh, j'interviendrai. On ne peut pas laisser dire n'importe quoi !
    M. le président. Vous aurez votre temps de parole, mais laissez parler le rapporteur.
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. ... que par le transfert du budget de l'office de protection contre les rayonnements ionisants.
    M. Yves Cochet. Il ne faut pas dire de mensonges !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Dans le même temps, on ne peut pas dire que l'ancienne majorité ait fait preuve de courage et de volonté sur les grands enjeux environnementaux.
    M. Yves Cochet. Nous avions tout de même fait un projet de loi ! Il paraît qu'il n'est pas bon !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Les différentes questions ayant trait à l'eau, à la gestion des déchets, à la transparence nucléaire ou aux risques industriels n'ont eu aucune traduction législative.
    M. Yves Cochet. Mais si !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Ainsi, aujourd'hui, ne peut-on que se réjouir des priorités et de la démarche budgétaire affichées par le ministère de l'écologie et du développement durable.
    M. Yves Cochet. Quelle hypocrisie !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Ce budget, fondé sur des principes en phase avec les préoccupations de nos concitoyens - l'efficacité, la sécurité et la transparence - ne peut qu'être approuvé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Je vous remercie !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
    M. Christophe Priou, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous savons que, aujourd'hui, les marges de manoeuvre budgétaires sont réduites. Compte tenu de ce contexte difficile, le projet de budget de l'écologie et du développement durable me semble satisfaisant à plusieurs égards.
    Je tiens tout d'abord à faire observer que nous avons à examiner un projet de budget de transition...
    M. Yves Cochet. Transition vers le déclin !
    M. Christophe Priou, rapporteur pour avis. ... qui réussit à concilier le respect des engagements pris antérieurement par l'Etat et la préparation de nécessaires réformes. Ainsi, l'équilibre est trouvé entre la mise en place effective de structures créées sous la précédente législature, comme l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale, et la réforme de certains dispositifs, par exemple en matière de prévention des inondations. Surtout, je me réjouis de la volonté de la ministre de mener des actions de moyen, voire de long terme, qui permettront d'assurer à l'action publique toute la continuité nécessaire.
    Sur un plan strictement budgétaire, le volume global des crédits affectés à l'écologie et au développement durable est stable par rapport à 2002, puisqu'il ne diminue que de 0,16 %.
    M. Yves Cochet. Tout à l'heure, il s'agissait d'une hausse ! Mettez-vous d'accord !
    M. Christophe Priou, rapporteur pour avis. Ce léger recul est loin de traduire un désengagement de l'Etat en matière d'environnement. C'est plutôt d'un redéploiement des crédits qu'il s'agit, et les missions essentielles du ministère de l'écologie et du développement durable sont confortées. Ainsi, les effectifs sont stables : il n'est donc pas question de revenir sur les capacités d'intervention du ministère.
    Je souhaiterais maintenant évoquer le projet de budget sur un plan plus sectoriel. S'agissant du budget consacré à la protection de la nature, je note avec satisfaction que les subventions d'investissement octroyées au Fonds de gestion des milieux naturels augmentent fortement, ce qui devrait lui permettre de poursuivre ses actions, notamment la constitution du réseau Natura 2000, pour lequel nous avons accumulé beaucoup de retard.
    M. Yves Cochet. C'est grâce à Juppé !
    M. Christophe Priou, rapporteur pour avis. Il nous faut pourtant respecter nos obligations communautaires.
    Le fait est que, ces dernières années, l'histoire de Natura 2000 s'est davantage apparentée à un feuilleton qu'à la mise en oeuvre d'une politique cohérente : on sait que les multiples recours intentés à l'encontre des désignations de sites Natura 2000 ont généralement abouti, en raison des insuffisances du ministère de l'environnement qui n'a pas pas su respecter les procédures établies par voie réglementaire.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Eh oui !
    M. Christophe Priou, rapporteur pour avis. Mais, au-delà de ces recours, c'est une véritable inquiétude qui s'exprime et que l'on doit prendre en compte : les usagers de la nature redoutent en effet qu'à terme aucune activité humaine ne soit possible dans les sites Natura 2000, en raison de la notion de « perturbation » évoquée à l'article 6 de la directive « Habitats ». Cette crainte semble pour partie fondée : je rappelle que le Conseil d'Etat a déjà eu l'occasion de suspendre, en juillet 2001, l'exécution d'un arrêté du ministère de l'agriculture qui délivrait des droits à planter de la vigne dans une zone AOC située à l'intérieur d'un site Natura 2000 proposé à la Commission européenne.
    Cette situation pour le moins paradoxale mérite qu'une réflexion soit engagée. La France doit bien évidemment respecter ses obligations ; toutefois, je souhaiterais savoir, madame la ministre, si vous envisagez d'apporter des précisions sur la notion de « perturbation » ou si une négociation sur ce point peut être engagée au niveau communautaire.
    Pour en terminer avec le budget consacré à la protection de la nature, je note avec satisfaction que les parcs naturels régionaux bénéficient de moyens de paiement renforcés. Je tiens néanmoins à souligner qu'un quart de leurs effectifs est composé d'emplois-jeunes, ce qui réserve à ces structures un avenir incertain. Je m'interroge en outre sur le sort qui sera réservé à ces parcs dans le cadre de la prochaine étape de la décentralisation. A cette occasion, il pourrait être envisagé de renforcer la concertation entre les parcs, la population et les acteurs économiques concernés.
    S'agissant maintenant du budget consacré à la protection de l'eau et des milieux aquatiques, il est caractérisé par la priorité qui a été donnée à la prévention contre les inondations. On ne peut que se féliciter des mesures annoncées après les dramatiques inondations survenues dans le sud-est, qu'il s'agisse de la réforme du service d'annonce des crues ou du renforcement des ouvrages existants pour protéger les lieux habités. Au-delà, je me réjouis de constater que le ministère souhaite engager une politique de long terme visant à multiplier les champs d'expansion des crues, dispositif indispensable pour mener une politique de prévention efficace. Je considère également que l'éventuel recours au « fonds Barnier » pour prendre en charge les dépenses de mise en sécurité des bâtiments construits dans le passé dans les zones inondables est une piste qui mérite d'être explorée. Il reste à espérer que le ministère de l'économie et des finances saura lui aussi en percevoir toute la pertinence.
    En revanche, je serai plus nuancé s'agissant de la lutte contre les pollutions marines. Les lignes budgétaires relatives au plan POLMAR n'ont pas été dotées dans le projet de budget. Vous nous avez expliqué, madame la ministre, que les crédits du fonds actuellement disponibles devraient être suffisants pour faire face à d'éventuelles catastrophes. J'en prends acte.
    Mais un autre point doit être éclairci : le Gouvernement entend-il se faire rembourser par le FIPOL les dépenses qu'il a engagées au titre du plan POLMAR ? Je rappelle que le gouvernement précédent s'était engagé à ne faire valoir cette facture qu'après que toutes les victimes aient déposé leurs demandes d'indemnisation et dans l'hypothèse où le plafond du FIPOL ne serait pas atteint, la date limite étant fixée au 12 décembre de cette année. Un choix s'offre donc à vous : soit présenter une demande d'indemnisation et par voie de conséquence réduire d'autant le taux d'indemnisation des autres victimes de ce naufrage ; soit ne pas produire la facture du plan POLMAR, et dans ce cas, faire appel à la solidarité nationale. Quelle décision le Gouvernement entend-il prendre ?
    Nous serons également vigilants sur les crédits du Conservatoire du littoral. Nous savons que l'intervention de cet organisme se fait souvent par opportunité, mais il faut des moyens d'intervention rapides pour l'acquisition de nouvelles propriétés.
    J'en viens maintenant aux crédits affectés à la prévention des pollutions et des risques. Ils sont quasiment stables. Je me réjouis de constater que les crédits consacrés aux études et aux travaux d'investissement augmentent très fortement, ce qui permettra de poursuivre la mise en oeuvre de la directive SEVESO 2 et du programme triennal d'actions de l'inspection des installations classées, ainsi que l'élaboration de plans de prévention des risques naturels.
    S'agissant de ces derniers, je tiens d'ailleurs à faire part de l'inquiétude de nombreux élus locaux concernant le financement des travaux et ouvrages rendus néessaires par de tels plans. Quels moyens leur seront-ils octroyés ?
    Je me félicite de constater que les établissements publics agissant dans le domaine des risques - INERIS, ADEME - voient également leurs dotations d'investissement confortées. S'agissant plus précisément de l'ADEME, je m'interroge néanmoins sur les perspectives d'intervention de cet établissement dans le domaine des déchets, compte tenu du dépassement de l'échéance du 1er juillet 2002. Madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer les intentions du Gouvernement sur cette question, sachant qu'en ce qui concerne la ligne de crédits ADEME, la commission approuve les moyens et les crédits de cette agence, ainsi que sa décentralisation.
    J'évoquerai maintenant le soutien aux politiques environnementales. La croissance des dotations prévues pour la formation des commissaires enquêteurs constitue un point positif. Elle permettra d'améliorer la procédure de l'enquête publique, conformément à ce qui avait été prévu dans la loi relative à la démocratie de proximité. Je tiens également à souligner l'effort manifeste qui a été consenti en faveur de la part environnement des contrats de plan Etat-régions, pour laquelle les subventions d'investissement augmentent de manière importante.
    Par contre, les crédits de fonctionnement de l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale ont été revus à la baisse. Mais, ainsi que l'a souligné Mme la ministre lors de son audition par la commission, la mise en place de cette structure avait pris un certain retard, et je me réjouis de constater que le Gouvernement s'emploie à le rattraper.
    Je salue enfin le soutien du partenariat qui s'établit entre le ministère et le monde associatif. Mais, sans vouloir polémiquer, je souligne que certaines de ces associations sont connues pour engager systématiquement des procédures contentieuses à l'encontre de leur principal bailleur de fonds, ce qui est pour le moins paradoxal. Il me semble donc qu'une évaluation rigoureuse de l'action de ces associations, par le biais des conventions pluriannuelles d'objectifs, s'impose.
    Vous aurez compris, madame la ministre, que le projet de budget soumis à notre examen nous paraît extrêmement satisfaisant.
    M. Yves Cochet. Il ne vous faut pas grand-chose pour être satisfait !
    M. Christophe Priou, rapporteur pour avis. Loin des effets d'annonce, il devrait permettre au ministère de l'écologie et du développement durable de mener des actions de fond tout en engageant les réformes annoncées par la ministre.
    J'appelle donc l'Assemblée à adopter les crédits de l'écologie et du développement durable, conformément à l'avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Madame la ministre, on ne peut pas pleinement apprécier les crédits de l'écologie et du développement durable si on ne les resitue pas dans un contexte plus large, en particulier international. C'est ce qui explique que la commission des affaires étrangères a examiné, pour la première fois cette année, les crédits de votre ministère, à un moment où la France, au premier chef par la voix du Président de la République, manifeste sa volonté, aux plans tant international que national, d'intégrer la préoccupation environnementale dans les politiques publiques et surtout de l'articuler avec les préoccupations sociales et économiques de façon à entrer dans la logique de ce que nous connaissons désormais sous le nom de développement durable : « Répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire leurs propres besoins », comme le disait Mme Brundtland en 1987.
    Nous vivons actuellement, en l'occurrence, une nouvelle donne, qui correspond probablement à une nouvelle approche du service public. Dans ce domaine on peut parler, dans une certaine mesure, de réhabilitation de l'obligation de moyens, alors que nous vivons bien souvent sous la seule contrainte de l'obligation de résultats.
    Cette volonté de la France est illustrée par le changement de dénomination du ministère,...
    M. Yves Cochet. Ce ne sont que des mots !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. ... qui a été voulue par le Président de la République, et par la création d'un secrétariat d'Etat consacré spécifiquement au développement durable. Elle l'est également par le fait que, dans une conjoncture que nous savons difficile, et ceux qui m'ont précédé à cette tribune viennent de le rappeler, vous nous présentez un budget stable, réaliste, sincère, marqué par des redéploiements internes qui permettent de donner une meilleure place aux efforts d'investissement. Je crois qu'on peut s'en réjouir.
    Je ne reviendrai pas sur les chiffres, après les excellents exposés du rapporteur spécial et du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Il s'agit en fait, chacun l'a bien compris, d'un budget de transition, qui n'est pas, à lui seul, significatif de l'effort de l'Etat en matière d'écologie, d'environnement et de développement durable,...
    M. Yves Cochet. Au contraire, il est très significatif !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. ... car le développement durable est par nature transversal, et la participation de la France aux différents instruments à vocation internationale est assumée, chacun le sait, par d'autres ministères.
    La volonté de la France ne peut être isolée. Son engagement international est fort, et se manifeste de sommet en sommet, comme ce fut le cas à Johannesburg au début du mois de septembre dernier. Cet engagement va de pair avec la prise de conscience grandissante dans l'opinion de la nécessité pour les Etats de résoudre le double problème de la préservation de nos ressources naturelles et de la santé de la planète, d'un côté, de la fracture croissante entre pays riches et pays pauvres, de l'autre. Le développement durable apparaît ainsi comme une réponse, même si, bien sûr, elle n'est pas la seule, aux effets pervers de la mondialisation des échanges, comme une régulation en faveur de laquelle la France se prononce, il faut le dire, de façon pilote.
    Cette régulation exige des instruments. Depuis la conférence de Stockholm, en 1972, la communauté internationale a fait des progrès importants, même si l'on peut évidemment regretter qu'ils soient lents. A Rio, il y a dix ans, le premier Sommet de la Terre débouchait sur l'adoption d'une déclaration sur l'environnement et le développement et d'une déclaration sur les forêts, qui constituent depuis lors une sorte de charte du développement durable puisqu'elles répertorient les principaux domaines d'action qui s'y rapportent : principe de précaution, reconnaissance de la protection de l'environnement comme partie intégrante du développement, responsabilité et solidarité internationales, principe du pollueur-payeur, promotion de la bonne gouvernance et de la participation des citoyens. Or c'est bien dans le cadre de ces principes que s'inscrit actuellement l'action de la France sur le plan international, mais également sur le plan national.
    L'action ou Agenda 21 déclinait un programme d'activités concrètes comportant notamment l'objectif pour les pays développés de consacrer 0,7 % de leur PIB à l'aide publique au développement, objectif qui a été rappelé par le Président de la République lors de la conférence de Monterey qui s'est tenue cette année.
    Enfin, l'adoption de conventions-cadres sur le changement climatique, la diversité biologique et la désertification devrait inciter les Etats à entreprendre des actions multilatérales dans ces domaines.
    M. Yves Cochet. Cela ne se fera pas sans moyens !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. Soyons lucides : les efforts accomplis par les Etats depuis 1992 ont été insuffisants. Mais ils ont été réels, malgré les difficultés nées d'intérêts divergents entre l'Europe, les Etats-Unis, les pays producteurs de pétrole et les pays en développement, comme on en a d'ailleurs eu la démonstration à Johannesburg. C'est un long chemin, madame la ministre, et vous avez pu en mesurer l'importance lors du sommet de Johannesburg, dont les résultats ont été, selon la formule pertinente que vous avez employée, « moins bons qu'espéré mais meilleurs qu'attendu ».
    M. Yves Cochet. Moins bons qu'espéré, c'est le moins que l'on puisse dire !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. Ce sommet a eu en réalité le grand mérite de démontrer l'existence d'un besoin de régulation de la mondialisation. Il est également parvenu à intéresser et à associer les opinions publiques. Enfin, il a réuni pour la première fois tous les acteurs : Etats, collectivités locales, entreprises, syndicats, organisations non gouvernementales, sans la participation desquels il serait vain de parler de développement durable.
    Autant la mobilisation des acteurs autour des projets concrets de développement durable est apparue forte, autant, hélas ! le résultat de la négociation onusienne intergouvernementale a pu, dans une certaine mesure, décevoir. Il est vrai qu'en passant du champ de la protection de l'environnement, tel qu'il avait été abordé à Rio, à celui de la lutte contre la pauvreté, les clivages entre les pays sont apparus de manière plus nette.
    Pour la plupart des pays en voie de développement, leur réticence s'explique par la crainte que de nouvelles contraintes environnementales ou sociales n'obèrent leurs possibilités de développement en diminuant les avantages comparatifs dont ils disposent sur le marché international. En clair ils redoutent que la protection de l'environnement, défendue par la majorité des pays développés, les écarte de la croissance économique, alors même qu'ils ne disposent pas des technologies et des connaissances nécessaires pour pouvoir produire en respectant les normes environnementales. On peut les comprendre.
    Les Etats-Unis, quant à eux, se sont opposés à tout engagement chiffré et assorti d'échéances précises, et ils ont à nouveau manifesté leur opposition à tout dispositif contraignant en matière de réduction de l'émission des gaz à effet de serre.
    M. Yves Cochet. Et leur refus de réduire leurs subventions agricoles ? Il faut en parler aussi. Parce que c'était aussi cela, Johannesburg.
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. Cette position s'explique largement par le refus des Etats-Unis de modifier le mode de vie de leurs ressortissants et leurs modes de production, largement fondés sur la consommation massive d'énergie, en grande partie d'origine fossile.
    Les pays du Sud ont aussi reproché aux pays de l'Union européenne et aux Etats-Unis d'empêcher le développement de leur agriculture en subventionnant largement leur secteur primaire et en protégeant leur marché des exportations agricoles. Cela rejoint pour nous la réflexion en cours sur la réforme de la PAC.
    Les prochaines conférences internationales consacrées au développement durable ne pourront faire l'économie d'un examen approfondi de l'articulation entre le droit international commercial et le droit international environnemental ou social. Force est en effet de constater que l'OMC dispose aujourd'hui d'un pouvoir de sanction qui fait défaut aux autres organismes, qu'il s'agisse par exemple du programme des Nations unies pour l'environnement, de l'Organisation internationale du travail, ou de l'Organisation mondiale de la santé. Au moment où les entreprises mettent en oeuvre des critères d'évaluation fondés sur l'éthique.
    M. Yves Cochet. Ah bon !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. Il semble urgent que l'OMC réoriente son action en redéfinissant le corpus de règles qu'elle applique, passant d'une logique strictement économique à une logique plus qualitative, prenant en compte de nouveaux paramètres davantage fondés sur l'intérêt général que sur une stricte logique de prix.
    La France s'est fortement impliquée dans la mise en oeuvre des engagements souscrits à Rio ainsi que dans la préparation du sommet de Johannesbourg.
    S'agissant des prolongements du Sommet de Rio, elle a ratifié la convention climat et elle a été la première au sein de l'Union européenne à préparer la ratification du protocole de Kyoto sur la réduction des gaz à effet de serre. Il faut d'ailleurs noter à ce propos, que grâce à notre production d'électricité nucléaire,...
    M. Yves Cochet. Ah ! Ça c'est de l'écologie ! Ça c'est du développement durable !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. ... nous sommes de ce côté-là, c'est un fait, monsieur Cochet, moins responsables d'émissions de gaz à effet de serre que d'autres pays de l'Union européenne.
    M. Yves Cochet. Combien de crédits pour le nucléaire ?
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. La convention sur la diversité biologique a, pour sa part, été ratifiée le 1er juillet 1992, et la France s'est engagée par plusieurs conventions ou engagements internationaux visant à garantir la préservation des ressources biologiques sur le long terme. La France s'est également engagée, depuis une dizaine d'années, en faveur du renforcement de l'action internationale en matière de conservation de la nature.
    L'intervention du chef de l'Etat, en séance plénière au sommet de Johannesbourg a marqué les esprits par son volontarisme et son engagement pour la modification du modèle actuel de développement économique. Partant du constat selon lequel « si l'humanité entière se comportait comme les pays du Nord, il faudrait deux planètes supplémentaires pour faire face aux besoins », le Président de la République a dressé la liste de cinq chantiers prioritaires : changement climatique, éradication de la pauvreté, diversité biologique et culturelle, changement des modes de production et de consommation, mise en place d'une gouvernance mondiale pour humaniser et maîtriser la mondialisation.
    Ce discours a montré la continuité dans les positions françaises au sein des différentes enceintes internationales et dans les différents sommets de la période récente : le thème de la diversité culturelle a ainsi fait l'objet de prises de position, tant dans le cadre de l'OMC à Doha avec la défense de l'exception culturelle, qu'au sommet de la francophonie à Beyrouth, il y a quelques jours, qui a proposé d'instituer une convention sur la diversité culturelle dans le cadre de l'UNESCO. Il trouvera également son illustration lors du prochain G 8 d'Evian.
    Enfin le Président de la République a réaffirmé la position française sur la création d'une Organisation mondiale de l'environnement qui ferait pendant à l'OMC, d'un conseil de sécurité économique et social doté de pouvoirs d'évaluation, c'est-à-dire, au fond, sur la bonne gouvernance mondiale, parallèle à l'impérative bonne gouvernante nationale.
    Je ne peux pas revenir sur tous les aspects intéressants de ce sommet de Johannesburg, qui a privilégié le thème de l'accès à l'eau et à l'énergie, avec tous les problèmes d'énergies renouvables, avec la nécessité du partenariat public-privé - qui a donné lieu à l'initiative franco-britannique annoncée par M. Chirac et M. Blair.
    M. Yves Cochet. Blair et Chirac, quelles références !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. Mais on peut se réjouir qu'à cette occasion, le Canada et la Russie aient annoncé leur volonté de ratifier le protocole de Kyoto sur la réduction des gaz à effet de serre. Cette ratification, dont vous aurez certainement des nouvelles à New Delhi dans quelques jours, lors de la conférence des parties, limite les conséquences de l'opposition américaine.
    L'engagement de la France est donc fort et l'on peut s'en réjouir. Mais il n'aurait pas de sens s'il ne trouvait dans notre pays même sa traduction.
    M. Yves Cochet. Exactement !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. Or vous avez, madame la ministre, un vaste chantier devant vous.
    M. Yves Cochet. Un vaste chantier, mais pas un vaste ministère !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. Dans quelques mois, le 4 juin 2003, à la veille de la prochaine Journée mondiale de l'environnement, le projet de charte de l'environnement doit être présenté au conseil des ministres.
    M. Yves Cochet. Ça, c'est vrai ! Ça ne coûte pas cher !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. Cela, qui ne coûte pas cher, a une valeur importante. Cette charte aura une valeur constitutionnelle, puisqu'elle sera placée aux côtés de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et du préambule de la Constitution de 1946. Elle sera donc partie intégrante du bloc de constitutionnalité qui est le fondement du contrôle opéré par le Conseil constitutionnel. Elle aura donc un pouvoir régulateur fort.
    C'est dire son importance, mais aussi la difficulté de son élaboration. La commission mise en place par vous-même le 26 juin sous la présidence de M. Yves Coppens, porte, semble-t-il, sa réflexion sur quatre principes : précaution, action préventive, pollueur-payeur, participation des citoyens à la décision. Cette réflexion se situe donc bien dans la continuité du sommet de Rio. Et c'est bien là aussi l'esprit dans lequel vous avez souhaité inscrire votre action, madame la ministre : sécurité, transparence, participation.
    De façon plus modeste mais tout aussi significative, le Premier ministre réunira le 14 novembre prochain, dans quelques jours, un séminaire gouvernemental réunissant tous les ministres pour faire l'inventaire des projets et coordonner les actions des différents ministères afin qu'ils intègrent désormais dans leur politique les préoccupations relatives au développement durable.
    Cette coordination est rendue encore plus nécessaire par la pluralité des acteurs, tant publics que privés. Parmi eux, citons les collectivités locales, de plus en plus engagées, en particulier par les agendas 21 locaux - vous en avez la démonstration dans votre département d'élection, madame la ministre -, mais aussi les ONG, qu'il convient d'associer, comme elles l'ont été avant et pendant Johannesburg, et les entreprises, qui sont devenues des acteurs majeurs et incontournables, à commencer par nos grandes sociétés d'eau et d'assainissement, qui sont l'illustration de ce que nous pouvons faire en matière de partenariat public et privé et de gestion déléguée.
    Enfin, l'engagement de la France se traduit par sa contribution volontaire à certains fonds et programmes, dont le Fonds pour l'environnement mondial et le programme des Nations unies pour l'environnement, et par l'action qu'elle mène grâce à l'Agence française du développement, qui assure la gestion du fonds français de l'environnement mondial, ainsi que dans le cadre de l'Union européenne, puisque celle-ci mène une stratégie concertée de développement durable et détient les compétences en matière commerciale et agricole. Et je ne reviens pas sur la directive Habitat et le réseau Natura 2000.
    Je veux également mentionner l'atout dont nous disposons grâce aux DOM-TOM, dont le développement harmonieux - ou du moins celui que nous voulons mettre en place - nous conduira à détenir une capacité d'expertise dans la mise en oeuvre des principes retenus lors des sommets mondiaux.
    En conclusion, je dirai que cela implique que le ministère de l'écologie et du développement durable se conduise désormais non en simple accompagnateur de projets, ce qu'il a été jusqu'à présent, mais en véritable pilote, ce que votre budget, madame la ministre, préfigure.
    Dans un tel contexte, le ministère de l'écologie et du développement durable doit avoir dans l'avenir un rôle central de coordination et d'impulsion. Cela implique qu'il dispose rapidement de son propre corps d'administrateurs civils - cette installation est en cours, mais elle n'est pas encore établie de façon définitive.
    S'agissant du projet de création d'une organisation mondiale de l'environnement, il convient, avant la poursuite des discussions, que la France augmente sa contribution volontaire au programme des Nations unies pour l'environnement afin de montrer sa détermination et la cohérence qui existe entre sa volonté et ses actes.
    Dans l'attente de l'éventuelle création de nouvelles instances de régulation à l'échelle mondiale, il est indispensable de rééquilibrer l'OMC en y intégrant les préoccupations sociales et environnementales, qui relèvent aujourd'hui d'organisations internationales dépourvues de tout pouvoir de sanction.
    Il convient également de se pencher sérieusement sur le financement du développement durable. Lors du sommet de Johannesburg, le Président de la République a, pour la première fois, évoqué, en plus de l'objectif d'une aide publique au développement égale à 0,7 % du PIB d'ici à dix ans, le principe d'un prélèvement de solidarité sur les richesses engendrées par la mondialisation. Diverses pistes sont envisageables : taxe Tobin sur les flux financiers à court terme, taxe sur les ventes d'armes, taxe sur les émissions de CO2.
    M. Yves Cochet. Très bien ! Il faut le faire !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. L'amélioration des procédures de décision au sein de l'Union européenne est également indispensable : la pratique en vigueur due aux institutions actuelles de l'Union européenne et à l'aspect très sectoriel des conseils des ministres de l'Union nuisent à la définition de politiques cohérentes et lisibles dans la durée.
    Au niveau national, la mise en oeuvre des principes arrêtés à Johannesburg exigera une bonne coordination entre les différentes administrations et agences concernées. Le séminaire gouvernemental du 14 novembre prochain devrait permettre de fixer une méthode de travail. Le rôle d'impulsion et de coordination du Premier ministre est, à cet égard, indispensable pour que le développement durable soit plus qu'un objet incantatoire. Toutefois, à terme, le renforcement des attributions et des moyens de votre ministère semble indispensable, afin qu'il soit à même de coordonner les actions les plus importantes relevant du développement durable : votre ministère devrait ainsi pouvoir passer d'une logique d'accompagnement à une véritable logique d'impulsion.
    Sur ce point, il apparaît indispensable de conforter rapidement son rôle en lui permettant de participer à l'élaboration de la position de la France au sein des institutions financières internationales comme la Banque mondiale ou le FMI - ce qui passe par la participation de votre ministère à la désignation de nos administrateurs -, et d'être représenté à la commission interministérielle des garanties, qui donne son avis sur les garanties publiques octroyées par la COFACE.
    Une meilleure coordination entre les pouvoirs publics et les collectivités locales est également nécessaire, afin de permettre les échanges d'expérience et un plus grand soutien dans les entreprises de coopération décentralisée.
    Le développement des partenariats public, privé pourrait être facilité par la simplification du paysage administratif. Ainsi, la création d'une plate-forme unique de soutien des projets de développement durable regroupant l'ensemble des acteurs publics - l'agence française de développement, l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, la direction générale de la coopération internationale et du développement, la direction des relations économiques extérieures, la COFACE et le fonds français pour l'environnement mondial - constituerait un progrès notable.
    Inutile de vous dire, madame la ministre, que le Parlement, qui apparaît, pour le moment, comme le parent pauvre des actions entreprises dans le domaine du développement durable, souhaite être associé comme observateur aux différents sommets internationaux...
    M. Yves Cochet. C'est difficile !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. ... et à la définition de la stratégie nationale du développement durable, afin qu'elle fasse l'objet d'un débat démocratique permettant à l'ensemble de nos concitoyens d'être sensibilisés aux enjeux que représente ce nouveau mode de développement.
    C'est dans cet espoir, madame la ministre, que la commission des affaires étrangères a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'écologie et du développement durable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. M. Guillet intervenant au nom de la commission des affaires étrangères et non en son nom propre, la présidence a fait preuve d'indulgence en ne faisant pas respecter strictement le temps de parole. (Exclamations sur les bancs du groupe socialistes.)
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Elle a eu raison !
    M. le président. Pour autant, je demande aux prochains intervenants de respecter du mieux qu'ils le peuvent leur temps de parole.
    La parole est à M. Francis Hillmeyer, pour à peu près dix minutes.
    M. Francis Hillmeyer. Madame la ministre, je tiens à saluer, au nom du groupe UDF, les principes d'action que vous vous êtes fixés pour conduire la politique du Gouvernement à la tête du ministère de l'écologie et du développement durable et qui sont, permettez-moi de les rappeler : la sécurité, la transparence et la participation.
    Vous avez pu entendre mes collègues du groupe UDF appartenant à la commission des affaires économiques approuver ces trois principes. En effet, ils nous semblent refléter avec exactitude ce que doivent être les missions d'un ministère de l'écologie, enfin débarrassé de l'idéologie de vos prédécesseurs. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) ...
    M. Yves Cochet. Oh ! là ! là ! le gros mot !
    M. Francis Hillmeyer. ... et recentré sur des objectifs partagés par toutes les populations de notre pays. Je vous le répète aujourd'hui, madame la ministre, vous pourrez compter sur le soutien du groupe UDF et de tous ses élus pour mettre en oeuvre un tel programme.
    Toutefois, après avoir lu attentivement votre projet de budget, le groupe UDF souhaite appeler votre attention sur un certain nombre de points qui lui paraissent en retrait ou en décalage par rapport aux priorités énoncées et aux attentes des Français. L'UDF se situe clairement dans la majorité, mais cela n'exclut pas une critique positive destinée à favoriser l'action du Gouvernement et, nous l'espérons, à contribuer à sa réussite.
    Je commencerai l'examen de votre budget par l'agrégat 23.
    En ce qui concerne la prévention et la gestion des risques météorologiques, le groupe UDF tient à saluer les initiatives prises collectivement par le Gouvernement après les catastrophes dramatiques que le Sud-Est a récemment connues : initiative dans le domaine de l'aide aux sinistrés avec le classement très rapide en zone de catastrophe naturelle et le relèvement du taux de subvention aux petites collectivités les plus sinistrées ; initiatives également dans le domaine de la prévision des catastrophes météorologiques avec la création d'un centre de veille opérationnelle des orages cévenols à Toulouse ; initiative encore dans le domaine de la gestion des crises avec la mise en oeuvre d'une politique d'information et d'éducation des populations locales faces aux risques d'inondations ; initiatives enfin dans le domaine de la prévention avec la réforme des plans de prévention des risques, qui prévoit une participation de l'Etat dans le financement des mesures d'aménagement du territoire et des habitations.
    Toutes ces initiatives vont dans le bon sens, et nous veillerons à ce que le projet de loi sur les risques qui doit les traduire soit clair, simple et efficace.
    Cependant, comme nombre de nos compatriotes, nous nous inquiétons de la faiblesse des moyens consacrés à la prévention des risques technologiques. La stagnation, et dans certains cas la baisse, des crédits pour ce secteur ne constitue pas une bonne nouvelle pour tous les riverains de sites industriels jugés à risques, qui gardent en mémoire les images de désolation du site AZF à Toulouse. Or 41 % de l'agrégat 23, consacré à la prévention des pollutions et des risques, sont absorbés par les subventions allouées à l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire. Nous voyons bien que, en dépit de l'augmentation de 6 % des crédits de l'INERIS, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques, le peu d'argent qui reste ne peut suffire à assurer le recrutement d'inspecteurs des sites industriels classés et à financer une politique de santé en intervenant sur l'environnement.
    Pourtant, l'avenir de l'industrie, c'est la sécurité. En effet, on a pu mesurer les dégâts d'une période où le developpement industriel était indifférent à la sécurité, notamment dans les anciens pays communistes dont le bilan écologique est tout simplement dramatique.
    Compte tenu de l'enjeu, mais aussi des contraintes budgétaires qui s'imposent, ne faudrait-il pas mettre en place un dispositif de contrôle sur d'autres bases ? Nous serions heureux qu'une initiative soit prise en ce sens, qui s'affranchirait des schémas traditionnels et ferait appel aux industriels, aux professionnels de la sécurité et aux collectivités.
    Ainsi, l'annonce de la création à Toulouse d'un centre européen de sécurité industrielle, doté de 15 millions d'euros, va dans le bon sens, à la condition qu'elle soit confirmée et que l'on sache capitaliser les acquis aujourd'hui dispersés. Peut-être faudrait-il étendre cette idée aux risques naturels, ressusciter le collège de la prévention des risques et créer des liens avec le comité de la précaution et de la prévention environnement-santé.
    A nos yeux, cette politique de sécurisation devrait constituer la priorité absolue du ministère, conformément aux attentes des Français. Car la sécurité environnementale, c'est aussi la qualité de notre santé. La lutte contre les pollutions atmosphériques et la lutte contre les nuisances sonores, ces domaines d'action qui conditionnent de manière si décisive le bien-être quotidien des Français, devraient bénéficier de moyens budgétaires supplémentaires.
    Je vous interrogerai tout à l'heure, madame la ministre, sur les graves carences de votre budget dans le domaine de la lutte contre le bruit, au moment même où un sondage nous révèle de manière incontestable que l'ennemi n° 1 des Français n'est pas l'insécurité mais le bruit.
    M. Yves Cochet. Exactement !
    M. Armand Jung. Très juste !
    M. Francis Hillmeyer. Ce sondage, qui ne surprendra aucun des élus de terrain que nous sommes, est un véritable cri d'alarme lancé par nos concitoyens. En tout cas, il apporte à ceux qui pouvaient encore en douter la preuve formelle que la santé physique ou psychique dépend étroitement de la qualité de l'environnement. C'est pourquoi votre ministère a le devoir de mettre de telles préoccupations au coeur de ses missions et de ses priorités budgétaires.
    J'en viens maintenant, madame la ministre, à l'agrégat 21, qui concerne la protection de la nature, des sites et des paysages.
    Les moyens que vous mettez à la disposition des parcs naturels augmentent de 7 %, et le groupe UDF s'en félicite. Les parcs nationaux, en particulier, vont bénéficier de la création de six emplois : cette mesure était attendue depuis longtemps par les professionnels et les amoureux de la montagne.
    Cependant, je tiens à exprimer solennellement l'inquiétude du groupe UDF au sujet du développement du réseau Natura 2000 sur le territoire français, qui reste, malgré l'alternance, une priorité budgétaire.
    J'appelle votre attention, madame la ministre, sur les conséquences dramatiques, parce qu'irréversibles, des dispositions de la directive « Habitats » de 1992. Vous prévoyez, pour 2003, le classement de 300 sites, poursuivant ainsi la politique volontariste engagée par vos prédécesseurs, dont nous avons combattu l'idéologie pendant cinq ans.
    M. Yves Cochet. Idéologie ? Quel mot !
    M. Francis Hillmeyer. Le langage utilisé est le même : on parle de « contrats de gestion », de « cohabitation entre les activités humaines et le maintien des espèces » sur les sites classés. Toutefois, l'expérience prouve, comme l'a montré le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, que le processus Natura 2000 finit toujours par déposséder les populations locales de la gestion de leur patrimoine naturel et culturel.
    M. Yves Cochet. Ne l'acceptez pas. Il n'y aura de toute façon personne pour gérer Natura 2000 !
    M. Francis Hillmeyer. La Commission peut sanctionner les pays membres qui n'ont pas respecté la directive en mettant les territoires concernés sous sa tutelle directe. La lecture de l'article 6 de la directive permet d'en juger. Je cite : « Tout plan ou projet non directement lié ou nécessaire à la gestion du site mais susceptible d'affecter ce site de manière significative » n'aura l'accord des « autorités nationales compétentes [...] qu'après s'être assuré qu'il ne portera pas atteinte à l'intégrité du site concerné ». La preuve est faite aujourd'hui que, s'agissant des sites Natura 2000, la Cour de justice européenne, sur simple plainte d'une association de protection de la nature, privilégiera toujours, conformément au texte de la directive, la protection de l'environnement au détriment de l'activité humaine.
    Ainsi en Alsace, dans le Bollenberg, des viticulteurs ne peuvent développer leurs activités à cause d'un classement en zone de protection spéciale.
    De même, dans le Haut-Rhin, des industriels ne peuvent accéder au grand canal d'Alsace, construit précisément pour développer leur activité économique, parce que certaines variétés d'oiseaux ont élu domicile sur la berge ouest, qui a été classée en zone de protection spéciale. Pourtant, apparemment, ces oiseaux ne sont absolument pas dérangés par le trafic sur ce grand canal !
    Dans les Pyrénées, notamment en Haut-Béarn dans la circonscription de Jean Lassalle, ce sont des milliers d'hectares qui seront entièrement dévolus à la protection de la nature, interdisant toute forme d'activité humaine, qu'elle soit agricole, touristique ou économique.
    M. Jean Dionis du Séjour. Très juste !
    M. Francis Hillmeyer. L'UDF est très attachée à la protection des paysages et à la préservation de la bio-diversité. Toutefois, il ne faut pas confondre la protection avec la sanctuarisation qui aura pour conséquence inévitable d'accroître la désertification des zones rurales.
    Cette politique, madame la ministre, risque de faire le jeu de tous les extrémistes et de tous les groupes de pression qui profitent du ressentiment des populations locales pour distiller et structurer un sentiment anti-européen. Vous le savez, l'UDF rassemble les promoteurs les plus motivés de la construction européenne ; l'histoire de notre famille politique suffit à le prouver. Toutefois, l'Europe dont nous rêvons n'est pas celle de ces règlements qui détournent nos concitoyens des objectifs vitaux : l'Europe de la défense, qui rassemble nos forces pour mieux nous protéger ; la politique étrangère européenne, qui rassemble nos voix pour peser davantage ; l'Europe démocratique, qui respecte les identités et les idéaux de l'ensemble de ses habitants.
    C'est pourquoi, madame la ministre, nous inscrivant dans votre logique de concertation, de dialogue et de transparence, nous vous demandons d'organiser un grand débat national où tous les acteurs concernés par l'application de la directive confronteraient leurs expériences et tireraient ensemble les conclusions des dysfonctionnements constatés aussi bien sur notre territoire que chez nos voisins européens. Ce débat me paraît d'autant plus souhaitable et pertinent qu'il pourra éclairer les choix du Gouvernement en matière de décentralisation. Il est possible sinon probable qu'il conduira à la révision des directives « Oiseaux » de 1979 et « Habitats » de 1992.
    M. Yves Cochet. On peut toujours rêver ! Allez-y à Bruxelles !
    M. Francis Hillmeyer. Chacun peut en effet rêver !
     Les populations locales ne comprendraient pas, à l'heure où les pouvoirs publics et les responsables politiques se rapprochent enfin de leurs préoccupations en vertu de l'application du principe de subsidiarité, que des pans entiers de leur patrimoine, auquel des siècles d'histoire les attachent, soient gérés à des milliers de kilomètres de chez eux, selon une logique purement naturaliste dont le bien-fondé est contestable.
    J'ajoute enfin qu'il n'est plus possible d'ignorer les centaines de communes qui se sont prononcées contre l'application de la directive Natura 2000 ou qui ont engagé des recours contre elle - Christophe Priou évoque cette question dans son rapport pour avis. Ainsi, soixante-douze communes du département des Pyrénées-Atlantiques et de la région Aquitaine ont intenté des recours.
    Notre crédibilité de démocrates est en jeu quand on sait que le gouvernement précédent a procédé à la transposition de la directive « Habitats » par ordonnance, privant ainsi le pays d'un débat indispensable devant les élus du peuple.
    Le Président de la République lui-même, évoquant comme vous, madame la ministre, une « écologie humaniste », place bien l'homme au centre des préoccupations de l'écologie. En s'appuyant sur les résultats de la concertation que nous vous demandons, la France pourrait tenter d'infléchir la position européenne. Laisser les choses suivre le cours actuel, c'est pousser à l'exaspération les populations directement concernées et les conduire à des extrémités regrettables.
    J'en viens au développement durable.
    L'UDF, avec François Bayrou, a fait des principes du développement durable un des axes majeurs de sa réflexion politique. Nous partageons donc votre volonté de traduire les objectifs du développement durable dans l'action des pouvoirs publics. Pourtant, plutôt que la création d'un secrétariat d'Etat au développement durable...
    M. Yves Cochet. C'est dommage !
    M. Francis Hillmeyer ... dépourvu si visiblement de toute ligne budgétaire, nous aurions préféré la création d'une véritable structure interministérielle rattachée aux services du Premier ministre, qui aurait pu peser sur les politiques des « grands » ministères techniques. En effet, toute la philosophie du développement durable consiste à créer une interface entre les différentes politiques.
    Il faut donc créer une nouvelle organisation qui permette aux grandes politiques sectorielles, avec leurs budgets distincts, d'inclure dans leurs projets une dose spécifique d'environnement. Une telle structure pourrait réunir le commissariat général du Plan, la DATAR et la Commission nationale de débat public, de façon à peser de manière significative sur les décisions gouvernementales.
    Le président de la République, par son discours historique prononcé au récent sommet du développement durable de Johannesburg et par l'initiative qu'il vient de prendre de réunir un séminaire ministériel consacré à ce sujet majeur, a montré non seulement son intérêt mais aussi sa conscience des enjeux. Nous apprécierions que le Gouvernement les traduise dans son action et dans l'organisation des services de l'Etat.
    L'UDF souhaite enfin que les principes du développement durable soient utilisés comme un levier pour la réforme de l'Etat.
    Nos interrogations portent également sur la préparation en cours d'une charte de l'environnement. Si l'on ne peut qu'être d'accord sur les principes qu'elle entend défendre, on peut cependant s'interroger sur son opportunité. Le corpus des lois françaises, des traités européens et des conventions internationales n'est-il pas suffisamment dense comme cela.
    Nous craignons, en outre, que le débat légitime et nécessaire que vous allez engager sur la place de l'environnement dans notre société et dans ses institutions ne soit détourné de son but par des arguties savantes sur la valeur juridique d'une charte « adossée » à la Constitution. Si le Gouvernement souhaite montrer son engagement, rien ne l'empêche de faire une déclaration solennelle ni, surtout, de prendre un train de mesures concrètes et efficaces.
    Avant de conclure, madame la ministre, je voudrais faire quelques suggestions concernant la mise en oeuvre d'initiatives autour du développement durable. Ces suggestions concrètes sont celles d'un élu de terrain qui constate de manière très pragmatique ce qui marche ou ce qui échoue.
    Premier point : le logement. Beaucoup reste à faire pour traduire dans les faits le label Haute qualité environnementale et les nouvelles normes ISO 14000.
    M. Yves Cochet. En effet !
    M. Francis Hillmeyer. Limitation des nuisances sonores, économies d'énergie, utilisation des énergies renouvelables, notamment dans l'alimentation des parties communes de l'habitat collectif, tri sélectif sont autant de mesures urgentes à appliquer dans le domaine du logement.
    J'insiste en particulier sur l'introduction des énergies renouvelables dans l'habitat collectif, qui pourrait se faire sans coûts excessifs. J'ai proposé l'année dernière une idée que je soumets aujourd'hui à votre jugement, puisque la majorité d'alors, qui aurait pu s'en saisir, n'était sans doute pas assez sensible aux questions de développement durable pour y prêter écoute.
    M. Yves Cochet. Oh !
    M. Francis Hillmeyer. Il s'agit de « récupérer » les pénalités financières résultant du non-respect de la disposition de la loi Besson, qui prévoit la construction de 20 % de logements sociaux par les communes, pour les affecter au financement de dispositifs d'économie d'énergie sur le territoire de la commune pénalisée.
    M. Yves Cochet. Bonne idée !
    M. Francis Hillmeyer. Des expériences de développement durable ont déjà eu lieu dans des cités françaises. Ainsi, à Surieux, dans la région grenobloise, un immeuble locatif est équipé de cellules photovoltaïques qui permettent d'alimenter en énergie électrique l'ensemble des parties communes du bâtiment et de capteurs solaires placés sur le toit, qui suffisent à satisfaire 25 % de ses besoins en eau chaude. D'autres constructions écologiques existent, et pas seulement dans les régions du sud de la France. C'est le cas par exemple chez nos voisins allemands, à Fribourg, qui est une cité modèle en matière d'énergie solaire.
    Il serait également souhaitable que les quelque 200 000 constructions nouvelles annoncées par le ministre délégué à la ville puissent bénéficier de ces technologies.
    Une autre possibilité consisterait à préfinancer ces investissements lourds par des emprunts qui seraient remboursés sur le long terme par les économies réalisées sur les charges locatives.
    M. Yves Cochet. Très bien !
    M. Francis Hillmeyer. Grâce à ces différents montages financiers, nous pourrions ainsi, sans accroître excessivement les coûts de construction, mettre en oeuvre concrètement les engagements de Kyoto, qui prévoient notamment d'augmenter de 14 à 22 % la part des énergies renouvelables dans la consommation d'électricité.
    M. Yves Cochet. Absolument !
    M. le président. Veuillez conclure, monsieur Hillmeyer.
    M. Francis Hillmeyer. C'est là un des thèmes que le Président de la République a fermement défendus lors de son intervention au sommet de Johannesburg. Il faut joindre dès aujourd'hui les actes à la parole donnée et agir sans plus tarder dans le souci des générations futures.
    Le rôle des pouvoirs publics consiste à identifier et à encourager ces pratiques. C'est pourquoi l'UDF défend une conception incitative de la fiscalité environnementale à l'opposé de la vision punitive de certains écologistes,...
    M. Yves Cochet. Ah ! Ah ! Ah !
    M. Francis Hillmeyer. ... vision qui peut mener à l'aberration que constituent les droits à polluer. De tels écologistes n'ont visiblement pas compris la philosophie du développement durable.
    M. le président. Veuillez conclure.
    M. Francis Hillmeyer. Je conclus, monsieur le président.
    Il s'agit donc, concrètement, d'encourager par des baisses d'impôts celui qui pollue le moins.
    Le deuxième point que je souhaite soumettre à votre réflexion, madame la ministre, concerne le développement des transports de marchandises non polluants. Faisons donc du ferroutage une priorité nationale.
    M. Yves Cochet. Très bien !
    M. Francis Hillmeyer. On n'y arrivera qu'à plusieurs conditions. La première, c'est le développement des réseaux. Commençons par ceux qui existent et qui ne sont plus en activité. Accélérons la réalisation de la ligne de TGV Rhin-Rhône, cela libérera une voie ferrée pour le transport de marchandises,...
    M. Yves Cochet. Oui !
    M. Francis Hillmeyer. ... laquelle est trans-européenne et relie la mer Méditerranée à la mer du Nord. Orientons de manière volontariste le fret vers les moyens de transport les moins polluants, donc vers les réseaux fluviaux et les réseaux ferrés. Ce qui me permet de souligner l'incohérence qu'a constitué l'abandon sans débat du canal Rhin-Rhône.
    M. Yves Cochet. Ah non, vous vous trompez, cher collègue !
    M. Francis Hillmeyer. Il n'est pas possible à la fois de plaider pour que le fret n'emprunte plus les routes et les tunnels routiers et de négliger les réseaux ferrés ou fluviaux, qui sont les seules alternatives à la circulation routière. Il faut retrouver une cohérence sur ce sujet essentiel pour l'avenir des transports en Europe.
    En conclusion, il apparaît que votre budget, madame la ministre, porte encore les stigmates du lourd bilan de vos prédécesseurs qui avaient voulu développer une administration verte au détriment d'une politique ciblée sur des objectifs environnementaux clairs. Il faudra du temps pour passer de cette logique de gestion à une véritable politique de protection de l'environnement qui réponde aux attentes très fortes des Français dont j'ai essayé de me faire l'écho devant vous. Votre mission est difficile mais le groupe UDF vous soutiendra et votera votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Merci.
    M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec, pour dix minutes.
    M. Patrick Braouezec. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si le budget de l'environnement est apparemment stable - il est en diminution si l'on tient compte de l'inflation - il est en rupture claire avec l'évolution dynamique qui a eu lieu entre 1997 et 2002 et qui s'était traduite par une multiplication par 2,7 en cinq ans de ses crédits.
    Des pans entiers de ce budget connaissent une forte diminution. Le recul s'élève à 10 % pour les crédits alloués à la lutte contre la pollution de l'air, à 52 % pour ceux dédiés à la lutte contre le bruit et à 20 % pour ceux de l'Institut français de l'environnement. De même, les crédits de l'ADEME, les moyens consacrés à la lutte contre la pollution des eaux et les dotations octroyées aux associations affichent une baisse.
    Après les déclarations intéressantes du Président de la République au sommet de Johannesburg, nous voilà redescendus dans les plaines des arbitrages budgétaires sans ambition.
    Nous sommes loin de l'appréciation de Jean-Pierre Raffarin à Rennes, lors de l'ouverture des journées nationales du développement durable, où il parlait de problème « le plus grave », « d'une vraie urgence » « dans un monde où la course à l'intérêt rend certains aveugles et dangereux ».
    Le Gouvernement sent le vent mais, plus girouette qu'éolienne, il s'investit bruyamment dans le « développement durable. com ».
    M. Yves Cochet. Pas mal !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Bravo !
    M. Patrick Braouezec. Pourtant, les chiffres sont têtus. L'environnement cesse d'être une priorité budgétaire, avec notamment l'emploi et l'éducation. Il cède la place, pour le nouveau gouvernement, à la police, aux prisons et aux armées.
    Vous nous rétorquerez, madame la ministre, que tout n'est pas qu'une question de moyens. Certes, mais c'est là précisément ce qui renforce l'appréciation négative sur ce budget.
    L'accent porté sur la prévention des risques est certes incontestable. Il s'efforce légitimement de répondre à des besoins indispensables après la catastrophe de Toulouse et les dramatiques inondations du Gard. Cet effort demande à être conforté par la loi en préparation sur la prévention des risques et par la progression des effectifs de l'inspection des installations classées.
    Les autres chapitres du budget apparaissent cependant beaucoup plus critiquables. Non seulement les crédits stagnent ou reculent, mais leur usage pose problème. Les orientations du Gouvernement en matière d'environnement ne sont pas lisibles. Au-delà des moyens, c'est l'élargissement des compétences du ministère et sa légitimation qui sont interrompus.
    Le rattachement de l'aménagement du territoire non plus au ministère de l'environnement mais au ministère de la réforme de l'Etat est à cet égard significatif.
    M. Yves Cochet. Tout à fait ! C'est dommage !
    M. Patrick Braouezec. Il se traduira inévitablement par un recul de la prise en compte des questions écologiques dans les choix d'aménagement. Il augure mal, notamment, du nécessaire développement du ferroutage, il suffit d'ailleurs de voir le budget des transports pour 2003, qui donne la priorité à la route.
    Notre pays revient de loin. Il faut se souvenir que dans les années quatre-vingt l'embryonnaire secrétariat d'Etat à l'environnement ne fut pas même convié à la discussion du schéma national des autoroutes. La disparition du modeste secrétariat d'Etat à l'économie solidaire est un autre mauvais coup.
    M. Yves Cochet. Oui !
    M. Patrick Braouezec. Elle handicape le développement du tiers secteur associatif et coopératif, particulièrement porté sur les activités respectueuses de l'environnement. Votre ministère est également gravement concerné par la fin annoncée du dispositif des emplois-jeunes.
    L'environnement n'est pas un supplément d'âme, une coquetterie marketing, c'est un gisement d'emplois et de métiers hautement qualifiés. Nos voisins allemands ou scandinaves ont su en faire un élément de leur compétitivité économique.
    Votre décision d'abandonner le projet de loi sur l'eau adopté en première lecture, qui visait notamment à instaurer le principe du pollueur-payeur, constitue un autre recul grave pour la protection et la responsabilisation vis-à-vis de ce bien commun.
    M. Yves Cochet. Eh oui !
    M. Patrick Braouezec. Les schémas d'aménagement et de gestion des eaux vont rester en panne faute de conférer aux commissions locales de l'eau un statut et des pouvoirs de maîtrise d'ouvrage sur les bassins versants, comme le prévoyait la loi. Il faut rappeler que ce projet de loi sur l'eau était le fruit de plus de trois ans de tractations et de concertations nécessairement rugueuses entre parties prenantes.
    M. Yves Cochet. Oui !
    M. Patrick Braouezec. Trois ans pour parvenir à un texte sans doute perfectible mais équilibré.
    Son abandon laisse redouter que les déclarations ministérielles en faveur du « dialogue » et de « l'écoute », ou sur la volonté de rompre avec la « tratégie du ghetto », ne dissimulent une sensibilité plus grande aux groupes de pressions et aux intérêts économiques et financiers à courte vue.
    Ces faiblesses traduisent une contradiction idéologique de fond. Elles dépassent de loi - je vous en rends justice, madame la ministre - votre responsabilité et votre détermination à défendre votre budget dans les arbitrages gouvernementaux.
    Plus largement, la politique libérale du Gouvernement est par nature incompatible avec une protection volontariste, efficace et démocratique de l'environnement.
    Il ne s'agit pas là d'un jugement de valeur mais du constat simple que le capitalisme, le marché, la confrontation des intérêts particuliers immédiats, la logique du profit, sont incapables de prévision et de précaution. Ce n'est tout simplement ni leur rôle ni leur fonction.
    Le naufrage de l'Erika, la crise de la vache folle ou la déforestation n'en sont que les témoignages les plus connus.
    A ce titre, les déclarations de Mme la secrétaire d'Etat au développement durable estimant que « Le tout libéral n'est sans doute pas la solution » resteront sans doute comme un sommet d'euphémisme en la matière.
    Le siècle passé et les crimes écologiques perpétués dans les pays socialistes ont dramatiquement illustré que l'économie planifiée était tout autant incapable que le capitalisme d'assurer un développement respectueux de l'environnement, de la santé et tout simplement de la vie des êtres humains.
    En ce début de siècle, le fait que les questions sociales et environnementales se rejoignent apparaît comme une évidence. La conviction que l'eau, l'énergie, l'éducation, les transports et les infractures ne doivent pas être traités comme de simples marchandises progressent dans les consciences. Partout dans le monde, les populations pauvres et modestes sont les premières victimes de la dégradation de l'environnement et de la dilapidation du patrimoine naturel commun.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. C'est vrai !
    M. Patrick Braouezec. C'est vrai dans la circonscription populaire et dans la ville de Saint-Denis que je représente. Le percement de l'autoroute A 1 a, pendant plus de trente ans, coupé une partie de la ville en deux. Sa couverture paysagée, revendiquée par la population et les élus depuis l'origine, et acquise dans le cadre des négociations sur l'implantation du stade de France, a tout simplement changé la vie quotidienne des habitants et des salariés.
    Il suffit de faire le tour du périphérique parisien pour constater que sa couverture et son isolement phonique varient en fonction du revenu des habitants qui le bordent.
    A Saint-Denis, il en va de même de la cessation de l'activité de l'usine de traitement des os et graisses d'animaux de boucherie Saria. Cette fermeture a été acquise de haute lutte par les riverains et les élus locaux des communes concernées.
    M. Yves Cochet. Ah oui ! On a mis beaucoup de temps !
    M. Patrick Braouezec. Les nuisances de cette usine étaient devenues pestilentielles avec l'augmentation du stockage et de la production suite à la crise des farines animales. Ce n'est pas faire preuve de préjugés de classes que de dire que pareille pollution n'aurait pas été tolérée une semaine par l'Etat et son administration, si elle s'était produite dans le 7e arrondissement.
    La solution à ce problème ne se limite pas à la délocalisation de l'activité. Il serait souhaitable que vous nous indiquiez, madame la ministre, vos orientations pour l'organisation de cette filière, son contrôle et sa maîtrise publics.
    Le traitement des déchets animaux et l'élimination des farines animales sont clairement des activités d'utilité publique.
    La discussion de ce budget a des effets directs sur les aides et les incitations aux collectivités locales à adopter un comportement écologiquement responsable. La charte intercommunale que nous avons signée avec Aubervilliers définit depuis plusieurs années des principes d'actions en matière d'air, de bruit, des sols et sous-sols ou d'architecture, au travers de l'habitat.
    Comme d'autres, la ville de Saint-Denis a décidé de mettre en place un système global de gestion des principes du développement durable. Dans ce cadre, elle souhaite adopter les principes du plan « environnement collectivités » de l'ADEME. Il importe donc que soit précisé l'impact de la réduction des moyens d'engagement de l'ADEME, qui diminuent de 250 millions d'euros à 210 millions, sur le financement de ces politiques d'amélioration continue de la responsabilité environnementale des collectivités locales.
    Ce qui vaut pour Saint-Denis et pour sa population modeste vaut pour la planète.
    La réponse aux défis environnementaux suppose aussi la réduction des inégalités sociales en Europe et du fossé Nord-Sud.
    Comme le Président de la République l'a dit avec force au sommet de Johannesburg, la Terre va mal, très mal.
    Au-delà des mots et des déclarations, l'engagement positif de porter l'aide publique au développement à 0,5 % du PIB français demande à être concrétisé.
    En 1992, au sommet de Rio, la sonnette d'alarme avait été tirée : le climat se réchauffe, l'eau douce se fait rare, les forêts disparaissent, des dizaines d'espèces vivantes sont en voie d'extinction, la pauvreté totale ravage plus d'un milliard d'êtres humains.
    Les dirigeants du monde avaient alors admis que « la cause principale de la dégradation continue de l'environnement mondial est un schéma de consommation et de production non viable, notamment dans les pays industrialisés, qui est extrêmement préoccupant dans la mesure où il aggrave la pauvreté et les déséquilibres ».
    Dix ans plus tard, dans de nombreux domaines, les choses sont loin de s'être améliorées. Au contraire. Avec l'accélération de la mondialisation libérale, le « schéma de consommation et de production non viable » s'est même renforcé. Les inégalités ont atteint des niveaux jamais connus et la part du monde riche dans les pollutions et la consommation d'énergies non renouvelables s'est accrue.
    Ces défis dépassent de beaucoup - j'en ai conscience - notre discussion budgétaire, qui ne saurait, pas plus que vous, madame la ministre, traiter tous les maux planétaires.
    Les crédits dont nous débattons traduisent cependant un manque évident d'ambition pour améliorer le comportement écologiquement responsable de notre pays, de ses acteurs et de son économie.
    Aussi le groupe communiste votera-t-il avec regret contre ce budget de stagnation, qui rompt avec la dynamique inachevée des cinq dernières années en matière de protection de l'environnement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Yves Cochet. Très bien !
    M. le président. Merci, monsieur Braouezec, à une seconde près, vous avez parlé dix minutes.
    La parole est à M. Jean-Pierre Giran, pour dix minutes également.
    M. Jean-Pierre Giran. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si les crédits de l'écologie et du développement durable sont marqués par la stabilité, les principes qui dictent désormais la politique de l'environnement sont, quant à eux, marqués par le changement.
    La stabilité du niveau des crédits ne peut être critiquée, me semble-t-il, à un moment où la maîtrise de dépenses publiques est à l'ordre du jour et ne doit épargner aucun ministère.
    M. Yves Cochet. Sauf celui de la défense.
    M. Jean-Pierre Giran. En revanche, ce qui est significatif, c'est le sens de l'évolution qui intervient entre les dépenses ordinaires et les dépenses en capital, en d'autres termes entre le train de vie du ministère, et son administration et l'action concrète. On observe en effet une évolution significative des moyens de paiement au profit des dépenses en capital, qui augmentent de 9 %, tandis que les dépenses ordinaires sont réduites de 2 %. L'heure n'est donc pas aux effets d'annonce, mais aux actions concrètes, programmées et effectives.
    En termes d'agrégats, l'augmentation des crédits affectés à la protection de la nature, des sites et des paysages vient confirmer le souci d'efficacité. Les 120 millions d'euros qui y sont consacrés traduisent notamment la volonté de renforcer les moyens attribués aux parcs naturels nationaux et régionaux.
    Certes, dans le cas de la protection de la nature, certains se sont émus de la baisse des subventions d'investissements attribuées au Conservatoire national de l'espace littoral. Mais les acquisitions du conservatoire ne peuvent en aucun cas être considérées comme linéaires dans le temps. Il s'agit de saisir les opportunités quand elles se présentent - et non pas de dépenser à tout prix chaque année la même somme, quelle que soit la qualité des territoires disponibles. En outre, on a pu constater, lorsque les besoins financiers liés à une acquisition dépassaient les crédits alloués, que l'Etat savait faire face à des mesures exceptionnelles. Je crois donc que, sur ce point, l'inquiétude est relativement infondée. Je souhaite simplement qu'à l'avenir, les prévisions d'achat du Conservatoire soient affinées et que, six mois avant le vote du budget, nous puissions définir un niveau de subventions plus opérationnel que répétitif et mécanique.
    On notera également qu'au-delà de la stabilité globale du budget consacré à la prévention des pollutions et des risques, la part qui est réservée aux dépenses en capital connaît une forte augmentation, de l'ordre de 9 %. Là encore, le souci du concret l'emporte sur la facilité.
    La lutte contre les inondations est largement renforcée, comme il se doit, qu'il s'agisse de créer des bassins de rétention - les seuls qui ont fait jusqu'ici la preuve de leur efficacité sur le terrain - ou de consolider des ouvrages existants. En outre, l'accent est mis sur le développement des plans de prévention des risques inondation, ce qui traduit la volonté de prévenir des drames tels que ceux qu'a connus le Sud-Est, sans attendre l'inévitable définition de plans d'urgence.
    Néanmoins, les PPRI ne devraient jamais négliger les préoccupations économiques de ceux - les horticulteurs et les agriculteurs notamment - dont l'activité est liée à la fertilité des terres qui bordent les fleuves. En d'autres termes, si la plus grande rigueur doit prévaloir en matière de construction de logements, la plus grande compréhension et la plus grande écoute doivent également s'imposer lorsque la survie d'un secteur tout entier est en jeu.
    Je souhaiterais faire une autre suggestion à propos des PPRI. Par souci de résultats administratifs, la définition de PPR porte parfois sur une portion seulement des bassins versants. Il faut faire vite. Il faut rendre sa copie, peu importe le territoire. Il me semble que l'aide de l'Etat pourrait être proportionnée à la cohérence du projet et qu'elle pourrait être majorée si la totalité du bassin versant concerné est prise en compte.
    Madame la ministre, si le niveau des crédits est marqué par la stabilité, les principes de votre politique, qui va bien au-delà du cadre budgétaire, sont quant à eux heureusement marqués par le changement. C'en est fini, je le crois, de l'écologie un peu naturaliste, militante, en un mot médiatique qui a souvent prévalu ces dernières années. Ce qui est affirmé aujourd'hui, et la dénomination nouvelle du ministère le prouve, c'est la volonté de réconcilier les citoyens avec leur environnement et, cela, dans une perspective de long terme, dans une stratégie de développement durable.
    A la différence des défenseurs d'une écologie fondamentaliste, qui confère à la nature un statut comparable à l'homme et en fait un sujet de droit, l'approche d'une écologie humaniste place l'homme au coeur et au-dessus de la nature. Hier, certains qui étaient allergiques à l'idée même de progrès technique voyaient dans l'homme un prédateur seulement capable d'épuiser la nature et ses ressources. Aujourd'hui, le sens de la politique mise en oeuvre est de faire confiance à la capacité d'innovation et au sens des responsabilités des individus.
    La vision que vous développez des parcs naturels en est l'illustration. Il faut en finir avec la vision d'un sanctuaire interdit à l'homme par des réglementations et par des directives. Votre volonté me semble claire : il faut protéger, bien entendu, mais il faut aussi partager. Il s'agit non plus d'exclure l'homme de ce qui serait trop beau pour lui, mais de faire confiance à son sens des responsabilités et de se rappeler d'ailleurs que c'est souvent lui, par son activité économique - il n'est que de voir la Camargue ou les Salins d'Hyères - qui a su façonner des paysages dont on voudrait paradoxalement l'exclure.
    Cette nouvelle politique implique la participation de tous les acteurs, des associations comme des élus locaux. A cet égard, la charte de l'environnement que le Gouvernement a décidé d'adosser à la Constitution marquera l'adhésion de la nation au principe de la protection de la nature, mais aussi au développement durable.
    Cette politique implique, enfin, l'amélioration des moyens d'expertise. Cette orientation apparaît indispensable si on veut que le nécessaire débat citoyen qui, dans chacune de nos communes, parfois dans chacun de nos quartiers, ne cesse de se développer, soit fondé sur des réalités et des faits incontestables davantage que sur des slogans et des psychoses. A ce titre, on ne peut que se réjouir de votre volonté de développer les observatoires opérationnels, de renforcer les missions de l'IFEN - l'Institut français de l'environnement - qui aura vocation à devenir une sorte de juge de paix des débats qu'engendre la passion de tous pour notre environnement.
    Madame la ministre, mes chers collègues, le budget qui nous est présenté ne pouvait pas être un budget de rupture, mais il marque une inflexion et une volonté significative de faire entrer la politique de l'environnement dans son âge adulte. Le temps vient où l'idéologie et l'impérialisme de la mode vont laisser heureusement la place à la conception d'une société responsable, qui respecte la nature, qui assure la sécurité de ses membres, qui cultive le beau, mais que ne répudie pas l'idée même du progrès.
    Voilà, madame la ministre, mes chers collègues, les principales raisons qui conduiront le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle à émettre un vote positif sur ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Je vous remercie, monsieur Giran, d'avoir respecté votre temps de parole.
    La parole est à Mme Geneviève Perrin-Gaillard, qui bénéficiera sûrement de la part de la présidence de l'indulgence qu'elle a réclamée pous ses autres collègues.
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Merci, monsieur le président.
    Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « la maison brûle et nous regardons ailleurs ». Cette appréciation, métaphore enflammée s'il en est, n'est pas de moi, vous le savez, elle débutait le discours prononcé par Jacques Chirac à Johannesburg.
    Cette locution, somme toute assez juste, était suivie d'une vaste leçon aux différents pays participants, leçon qui, je le pensais alors, avait aussi vocation à s'appliquer en France.
    Car, madame la ministre, oui, il y a encore le feu en matière de protection de l'environnement et de développement durable en dépit des efforts déployés lors de la législature précédente qui, quoi que vous en disiez, quoi que vous en pensiez, a non seulement donné une impulsion monumentale à votre ministère mais de surcroît lui a donné des moyens supplémentaires non négligeables pour mener à bien ses missions. Je vous rappelle que, de 1997 à 2002, le budget du ministère de l'environnement a vu ses moyens augmenter de 58 %.
    Ces efforts ont consacré l'existence d'un véritable service public de l'environnement au service de nos concitoyens. Aujourd'hui, face à un budget qui, pour la première fois depuis plusieurs années, est en diminution et eu égard aux incertitudes qui pèsent sur l'évolution de la fonction publique, aux interrogations concernant la décentralisation plus ou moins compatible avec les objectifs européens de la protection de l'environnement et, enfin, aux évolutions internationales concernant le commerce des services au sein de l'OMC, nous nous interrogeons sur la façon dont notre pays pourra continuer de répondre aux enjeux locaux et planétaires concernant l'écologie, la protection de l'environnement et la promotion du développement durable.
    Si je me remémore un certain nombre de mesures concernant la politique agricole de votre gouvernement et quelques propos que vous avez tenus au sujet de l'énergie nucléaire et de la loi sur l'eau à venir, si j'observe les pressions que l'on vous fait subir au sujet de la chasse en particulier et celles qui pèsent sur la consécration des organismes génétiquement modifiés, je ne peux que constater que les discours du gouvernement auquel vous appartenez et les propos du Président de la République à Johannesburg n'ont rien à voir avec ce qui se passe réellement sur le terrain.
    En effet, notre biodiversité ne cesse de s'appauvrir. Le livre rouge de la flore menacée en métropole recense 387 espèces en danger. La consommation d'énergie ne cesse d'augmenter sans que nous prévoyions pour autant des mesures de réduction à court, long et moyen terme. Malgré la légère diminution des gaz à effet de serre, la qualité de l'air se dégrade et, tous les étés, nos grandes villes se voient dans l'obligation de prendre des mesures de réduction de la circulation. Pourtant, le financement des plans de déplacements urbains, qui relève du ministère des transports, diminue de 27,9 % en crédits de paiement.
    En commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, nous n'avons même pas eu le privilège de la présence de Mme la ministre déléguée à l'industrie, qui aurait pu nous informer sur les perspectives liées à l'énergie nucléaire et à la place des énergies renouvelables. Dans ce dernier domaine, il est pourtant indispensable de positionner les initiatives dans la durée. Et ce n'est pas le budget amputé de l'ADEME, qui passe de 302 millions à 270 millions d'euros, qui permettra de maintenir des interventions sur des thèmes tels que le solaire, l'éolien et l'énergie bois.
    Quant à l'énergie nucléaire, quid du traitement des déchets radioactifs ? Quid de l'avenir de l'IRSN ? Les moyens mis en oeuvre seront-ils réellement à la hauteur des enjeux de transparence, de recherche et de sécurité qui préoccupent tous nos concitoyens ?
    En matière d'élimination des déchets, comment l'ADEME, dont le montant disponible à l'engagement subit une diminution de 60 %...
    M. Yves Cochet et M. Philippe Vuilque. Eh oui !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. ... va-t-elle pouvoir honorer ses contractualisations et permettre ainsi de répondre aux attentes de nos concitoyens et des collectivités ? Comment pourra-t-on préserver les capacités de développement des générations futures ? Comment la prévention de la production de déchets, la valorisation des matières organiques, la maîtrise des coûts et la réhabilitation des décharges brutes pourront-elles avancer dans ces conditions ?
    J'entends encore le Président de la République réclamer à Johannesburg une impulsion de l'Etat à la réforme de nos modes de production et de consommation pour assurer le développement durable.
    M. Yves Cochet. On en est loin !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Avec un tel budget, nous sommes loin d'une évolution significative.
    Il y a deux jours, l'INSEE a révélé que, pour 54 % des Français, le bruit constituait la principale nuisance environnementale. Madame le ministre, avez-vous l'impression, en présentant ce budget, d'être en phase avec les Français...
    M. Alain Cousin. Plus que vous ne l'êtes !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. ... alors que les crédits destinés à ce chapitre diminuent de moitié ?
    Vous nous avez récemment annoncé que serait élaborée une nouvelle loi sur l'eau. Ce texte, qui remettra en cause le principe « non-pollueur, non-payeur » que nous avions initié, sera-t-il en mesure de rassurer nos concitoyens sur les pollutions liées aux pesticides et aux nitrates ? Pas vraiment, si j'en crois vos propres annonces.
    Je note aussi que votre budget met en avant les crédits consacrés à Natura 2000. J'en suis ravie, mais je constate qu'ils sont équivalents à ceux de l'année dernière. Et quand on connaît les prises de position de nombre de parlementaires de votre majorité sur le dispositif Natura 2000, il y a de quoi sourire.
    M. Alain Cousin. Ce n'est pas le dispositif, c'est la méthode qui est en cause !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Autre surprise de votre budget : la diminution des aides aux associations.
    Les propos que vous avez tenus le 29 juin dernier et qu'ont tenus plusieurs députés aujourd'hui, la disparition programmée des emplois-jeunes et la volonté d'un certain nombre de patrons, que vous connaissez bien, de couper les vivres à l'économie sociale, nous font penser que beaucoup d'acteurs incontournables, car utiles à la protection de l'environnement et du développement durable, se retrouveront dans de grandes difficultés.
    Enfin, deux domaines sont présentés comme des mesures phares. Mais celles-ci ne sont-elles pas destinées qu'à éblouir les Français ? Il s'agit de la prévention des risques liés, d'une part, aux inondations et, d'autre part, aux risques technologiques. Les crédits proposés sont, à nos yeux, notoirement insuffisants pour le renforcement de la prévention. Il est à noter que les crédits affectés à la lutte contre les inondations ne sont qu'une reconduction à l'identique de ceux de la précédente la loi de finances.
    M. Philippe Vuilque. Ce n'est pas suffisant !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Nous nous interrogeons aussi sur les 150 postes d'inspecteur des installations classées, premier volet d'un plan plus large devant conduire au doublement du nombre de ces postes à l'horizon 2005. Nous devrons certainement attendre ce doublement très longtemps.
    Mais je ne continuerai pas à énumérer les distorsions qui existent entre les préoccupations des Français en matière d'écologie et de développement durable et votre budget. Hormis les deux nouveautés que sont l'élaboration d'une charte de l'environnement et le transfert de la commission nationale du débat public, dont le bénéfice et loin d'être acquis,...
    M. Philippe Vuilque. C'est un peu court !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. ... rien ne nous permet de penser aujourd'hui que votre gouvernement veut véritablement prendre ces problèmes à bras-le-corps.
    Les engagements que le Président de la république a pris devant les Français ne peuvent avoir d'efficacité que sur le long terme.
    M. Alain Cousin. Très juste !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Comment, si peu de temps après le sommet sur le développement durable et les propos qui y ont été tenus, peut-on présenter un aussi faible budget à la représentation nationale ?
    M. Philippe Cochet et M. Philippe Vuilque. Bonne question !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Quelle déconvenue pour toutes celles et tous ceux qui ont cru à la sincérité des dernières annonces lorsqu'ils ont découvert, madame la ministre, que votre budget est en baisse alors que les crédits accordés à l'armement lui sont 57 fois supérieurs !
    M. Yves Cochet et M. Philippe Vuilque. Eh oui !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Oui, madame la ministre, il y a le feu, mais...
    M. Yves Cochet et M. Philippe Vuilque. Il n'y a plus de pompiers !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. ... il n'y a aucune goutte d'eau dans votre budget pour éteindre l'incendie. (Applaudissement sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Yves Cochet. Très bien !
    M. le président. La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet.
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget qui nous est présenté a deux grands mérites : d'abord, on observe une stabilisation des dépenses alors même, et cela a été souligné par la plupart des intervenants, que les marges budgétaires sont extrêmement réduites ; ensuite, on doit se louer de la vérité des chiffres, de ce que dans une entreprise on appellerait la « sincérité des comptes ». La sincérité, dans le champ de l'écologie, voilà qui est assez nouveau : on nous avait habitués d'année en année à des budgets artificiellement gonflés (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste),...
    M. Yves Cochet. Même à périmètre constant ?
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Voilà que ça recommence !
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. ... avec l'intégration en 1999 des dotations de l'ADEME, avec le transfert en 2001 du budget de l'Institut de protection et de sûreté nucléaires et, en 2002, de l'Office de protection contre les rayonnements ionisants.
    On nous avait aussi habitués à des tours de prestidigitation avec les recettes.
    M. Philippe Vuilque. Sans blague !
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Le plus fameux a sans doute été celui concernant la taxe générale sur les activités polluantes, dont le produit s'est perdu dans le financement des 35 heures. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Yves Cochet. Pas du tout !
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. La sincérité, c'est donc vraiment nouveau. Bien sûr, c'est moins facile,...
    M. Jean-Yves Cousin. C'est courageux !
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. ... et la simple stabilisation qu'impose le contexte budgétaire ne peut satisfaire personne à l'heure où des urgences écologiques s'imposent à chacun.
    Bien sûr, on peut souhaiter davantage : s'agissant des risques industriels, des risques naturels, des parcs nationaux et des parcs naturels régionaux, l'effort devra être poursuivi.
    Bien sûr, concernant les politiques dont la refonte a été annoncée - je pense à la politique de l'eau, qui mérite mieux qu'une vingtaine de projets de textes de loi successifs, finalement jamais aboutis, et à celle des déchets qui, après l'échéance du 1er juillet 2002, doit être redéfinie -, le budget qui nous est soumis apparaît avant tout comme un budget de transition, ce qui est bien naturel.
    Je voudrais surtout dire quelques mots du développement durable et émettre un souhait, qui est l'expression d'une frustration à la lecture du fascicule budgétaire.
    M. Philippe Vuilque. L'UMP est frustrée !
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Alors que le président de la République, à Orléans, à Villepinte, à Avranches et, surtout, à Johannesburg, a placé le développement durable au coeur des politiques nationales...
    M. Philippe Vuilque. Ce n'est pas ce que l'on voit aujourd'hui !
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. ... et de notre engagement sur la scène internationale, alors qu'est créé, pour la première fois, un secrétariat d'Etat au développement durable,...
    M. Yves Cochet. Et que fait-il ?
    M. Philippe Vuilque. Il a du pain sur la planche !
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. ... alors que le Gouvernement s'apprête à se réunir en séminaire sur le développement durable pour travailler sur des actions concrètes, alors donc que la France se met progressivement sur la voie du développement durable, la technique budgétaire apparaît bien en retard par rapport à l'engagement du Gouvernement et il est difficile de retrouver entre les agrégats les différentes actions engagées en faveur du développement durable.
    M. Philippe Cochet. Exact !
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Plusieurs de vos projets, madame la ministre, et parmi les plus importants, ne peuvent pas appraître en tant que tels entre ces lignes budgétaires. C'est leur transversalité, c'est-à-dire précisément ce qui fait leur force et leur ambition...
    M. Jean-Yves Cousin. Très juste !
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. ... qui leur interdit ici une bonne visibilité.
    J'en donnerai deux exemples. L'éducation à l'environnement, d'abord. Le développement durable s'inscrit naturellement dans le champ de la responsabilité et dans le temps long. Pour cette double raison, la pédagogie est l'une des premières charges de l'Etat. Le Gouvernement a lancé sur ce thème une mission et des projets. La grille de lecture budgétaire n'en rend évidemment pas compte.
    Second exemple : le développement durable suppose une vision partagée de nos droits et de nos devoirs vis-à-vis de l'environnement. Le Gouvernement a engagé des travaux pour l'élaboration d'une charte de l'environnement de portée constitutionnelle. Là aussi, la ligne budgétaire de 1,6 million d'euros est un affichage dérisoire et ne rend pas compte de l'ampleur d'un projet qui doit porter le droit à l'environnement au même niveau que les droits sociaux.
    Le développement durable est un projet qui traverse toutes les politiques. Il s'accommode mal des grilles de lecture traditionnelles et constitue justement une invitation à les dépasser.
    Le problème n'est pas tout à fait nouveau. Devant la difficulté qu'il y avait, avec des indicateurs financiers classiques, à rendre compte de la complexité des questions écologiques, des travaux ont été engagés pour proposer une comptabilité environnementale qui refléterait plus étroitement la qualité de la vie.
    Madame la ministre, souhaitons que cet exemple nous inspire et que des grilles de lecture moins aveugles que les agrégats budgétaires anciens, et tout simplement les résultats de la politique engagée, nous rendent sensibles les efforts portés sur le développement durable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme Nathalie Gautier.
    Mme Nathalie Gautier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi de marquer mon étonnement face au projet de budget qui nous est présenté.
    Je consacrerai mon propos plus particulièrement à la politique de l'eau.
    Madame la ministre, vous envisagez d'améliorer l'entretien des cours d'eau et la connaissance de vos services sur les données relatives à l'eau. Je m'en félicite, mais je reste perplexe.
    Vous annoncez que la prévention des inondations d'origine fluviale est une priorité du ministère. Soit ! Mais, dans la réalité, vous vous contentez de reproduire les dotations votées pour 2002, prévues dans un budget que vous aviez rejeté. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    De même, en ce qui concerne la lutte contre les inondations, vous vous contentez d'appliquer la décision du comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire qui s'est tenu en 2001 et qui prévoyait la mise en place à Toulouse d'un centre technique national d'appui aux services d'annonce des crues.
    Pourquoi multiplier les effets d'annonce s'agissant d'un budget qui n'est pas à la hauteur des besoins de notre société ?
    Pourquoi nous affirmer que l'eau est notre enjeu vital, puisque vous diminuez globalement son budget de 5 % ?
    Vous avez fait le choix de porter un coup d'arrêt à l'évolution dynamique du budget de l'environnement actée ces dernières années. Dois-je vous rappeler qu'avant votre arrivée ce budget avait été multiplié par 2,7 en cinq ans ?
    Vous annoncez plus de sécurité. Soit ! Mais en réalité, vous réduisez d'un tiers les crédits de l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale.
    M. Philippe Vuilque. C'est le double discours !
    Mme Nathalie Gautier. Vous annoncez plus de transparence, mais vous remettez en cause le projet de loi sur l'eau voté pourtant, en première lecture, à l'Assemblée nationale en janvier dernier. Et ce texte avait été salué par tous les partenaires consultés.
    Toutes les études convergent : une large majorité des cours d'eau et des nappes souterraines est pollué. Selon l'Institut français de l'environnement, la proportion de la population nationale buvant régulièrement de l'eau du robinet est passée de 72 % en 1989 à 58 % en 2000. En dépit de ce constat accablant, le coût du traitement et des redevances « pollution » n'a cessé d'augmenter alors que le prix de l'eau s'est envolé.
    Si le projet a été furieusement attaqué par une partie de la classe politique, aux prises avec la pression des agriculteurs et des distributeurs d'eau, l'urgence commande d'améliorer la qualité de cette ressource de première nécessité et de moraliser les pratiques existantes.
    Pour les socialistes, la gestion de l'eau doit s'inspirer de quelques principes essentiels, dans la ligne du développement durable que nous préconisons : le droit à l'eau pour tous, à une eau de qualité suffisante et à des conditions de prix raisonnables ; la solidarité vis-à-vis des plus démunis ; la prévention, en privilégiant l'action à la source ; la gestion organisée de la ressource plutôt que la seule réparation des dommages ; la transparence et la démocratie pour éviter que ce secteur ne soit confisqué sans règle ni protection par de grands groupes tournés vers le profit à court terme plutôt que vers la satisfaction durable des besoins de la population ; l'application du principe polleur-payeur afin que le coût des mesures de prévention, de lutte contre la pollution et de gestion des prélèvements d'eau soit, pour l'essentiel, supporté par ceux qui sont à l'origine des perturbations du milieu.
    Pourquoi, madame la ministre, revenir de nouveau sur une démarche exemplaire, fruit d'une très longue concertation menée avec l'ensemble des acteurs concernés ?
    Je constate que vous n'êtes pas la seule dans votre équipe gouvernementale à agir ainsi : le ministre de l'agriculture a lui aussi sacrifié le dispositif des contrats territoriaux d'exploitation, pourtant soutenu par les agriculteurs et dont l'objet était d'accompagner des mesures orientées vers le développement durable.
    Pourquoi revenir sur les efforts réalisés pour trouver un juste équilibre entre les usagers de l'eau, l'industrie, l'agriculture et la protection de l'environnement ? A l'heure où le développement durable est une priorité partagée par tous, vous vous trompez de direction, madame la ministre.
    L'eau méritait plus que la part que vous lui réservez dans votre budget ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Yves Cochet. Très bien !
    M. le président. Je vous remercie, madame Gautier, pour votre concision.
    La parole est à M. Yves Cochet.
    M. Yves Cochet. « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer et nous refusons de l'admettre. Il est temps d'ouvrir les yeux. Les pays développés doivent engager la révolution écologique, la révolution de leurs modes de production et de consommation. » Mes chers collègues, ce discours enflammé, est-ce un extrémiste vert qui l'a prononcé ?
    M. Philippe Vuilque. C'est Chirac !
    M. Yves Cochet. Eh bien non, ce n'est pas un extrémiste, c'est, en effet, le Président de la République à Johannesbourg.
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. C'était un très bon discours !
    M. Yves Cochet. Après les discours d'Orléans et d'Avranches, je me disais qu'une telle déclaration ne pouvait qu'annoncer un formidable budget de l'écologie et du développement durable. Hélas ! trois fois hélas ! en voyant celui que vous nous présentez, je ne peux que vous demander, en termes polis, si vous vous moquez de nous.
    La droite est-elle donc hypocrite, incompétente ou indifférente en matière d'écologie et de développement durable ?
    M. Philippe Vuilque. C'est un peu tout ça !
    M. Yves Cochet. Vous avez raison, c'est peut-être les trois à la fois.
    Avec ce gouvernement, on a déjà eu droit à la régression sociale - suppression des emplois-jeunes, abolition des 35 heures, fin des CES - et aujourd'hui, voici la régression environnementale ! En fait, madame la ministre, vous renoncez à la poursuite de la construction d'un vrai ministère de l'écologie et du développement durable menant des politiques ambitieuses ou plus simplement efficaces.
    Les rapporteurs et Mme Nathalie Kosciusko-Morizet ont bien essayé de réinventer la fabuleuse histoire du ministère transversal qui a d'autant plus de pouvoirs, qu'il a moins de moyens, de services et de crédits. Mais nous ne sommes pas dupes : on nous a déjà fait le coup ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    En cinq ans, nous avons créé plus de 1 100 emplois.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. C'est faux !
    M. Yves Cochet. Mais enfin, chers collègues, on ne peut pas trafiquer les chiffres quand il s'agit d'emplois publics. Vérifiez donc dans le bleu de Bercy.
    En 2002, nous avons créé 400 emplois, dont 300 en région, dans les DIREN et dans les DRIRE. Vous, en 2003, vous voulez créer deux emplois !
    M. Philippe Vuilque. Bravo !
    M. Yves Cochet. J'imagine que vous en avez demandé quatre, que M. Lambert les a refusés et que M. Raffarin a voulu couper la poire en deux. Mais, mon Dieu, tout cela n'est pas sérieux !
    Passons aux crédits. Si l'on prend les dépenses ordinaires et les crédits de paiement, on observe une régression de 0,2 %, soit une quasi-stagnation. Mais le chiffre intéressant qui permet de juger des engagements d'avenir d'un ministère, ce sont les dépenses ordinaires et les autorisations de progression. Et là, la diminution est de 6 %. Voilà qui donne l'orientation de votre politique.
    La protection de la nature perd 16 millions d'euros en autorisations de programme au chapitre 67-20 et l'ADEME 32 millions d'euros. Pour l'AFSSE, les choses ne sont pas claires. Il est indiqué douze emplois sans crédits. Mais combien d'emplois exactement sont prévus en 2003 : douze, vingt-quatre, voire soixante-quatre ?
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Actuellement, il y en a un seul.
    M. Yves Cochet. C'est bien pour cela que je pose la question.
    Venons-en au nucléaire. Vous, vous l'aimez, moi, je le refuse. Mais j'observe un transfert de 6 millions d'euros vers le ministère des finances pour ce qui concerne la direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. En fait, je crois que vous abandonnez petit à petit votre compétence en matière nucléaire au profit de Bercy. En ce domaine, j'aimerais avoir des éclaircissements car j'entends des rumeurs.
    Le groupe AREVA, qui n'aime pas beaucoup l'énergie éolienne, surtout du côté d'Auckland, essaie d'obtenir, en faisant pression, une extension des capacités de traitement de certains nouveaux combustibles. Etes-vous prête à signer des décrets et arrêtés allant en ce sens ?
    Par ailleurs, êtes-vous partisane du « rejet zéro » ? Mais peut-être préférez-vous l'expression pudique de Mme Lauvergeon d'« impact zéro » ?
    Ensuite, comptez-vous autoriser la fabrication de Mox à Marcoule. Quand et dans quelles proportions ? Allez-vous signer décrets et arrêtés en ce sens ?
    Enfin, comptez-vous lancer une tête de série EPR pour une nouvelle génération de centrales nucléaires ? En Europe, nous serions les seuls à le faire, puisque parmi les quinze Etats membres, seulement trois continuent d'utiliser l'énergie nucléaire. Nos amis belges ou nos amis allemands ont confirmé qu'ils voulaient arrêter.
    Je terminerai par Natura 2000, dont la presse nationale a parlé ces derniers temps. M. Juppé et son gouvernement n'avaient pratiquement rien fait en la matière. Pour notre part, c'est vrai, nous avons mis beaucoup de temps à sortir de l'ornière. Toujours est-il que Natura 2000 entre pour les années 2003-2004 dans sa phase de maturité. Pour cela, il faut du personnel et des crédits. Votre budget ne prévoit aucun emploi et seulement 5 % de crédits. C'est vraiment se moquer du monde. Vous n'y parviendrez pas. Nous risquons même, votre ami le commissaire Barnier vous le dira, des suspensions de crédits structurels dans certaines régions, l'Aquitaine en particulier.
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. L'Aquitaine n'en veut pas !
    M. Yves Cochet. L'Aquitaine ne veut pas de sites à ours ? La commission de Bruxelles ne va pas être d'accord !
    M. le président, Veuillez conclure, monsieur Cochet.
    M. Yves Cochet. Nous, nous avons créé 400 emplois en 2002. En 2003, cela aurait dû être 150 emplois en DRIRE et 200 en DIREN, dont 100 pour Natura 2000. Votre budget laisse à penser que Natura 2000 ne fera l'objet d'aucune politique de suivi et d'aucun pilotage depuis Paris.
    Dans ces conditions, madame la ministre, je n'aimerais pas être à votre place...
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Vous plaisantez ? Vous en rêvez ! (Rires.)
    M. Yves Cochet. Pas dans ces conditions, madame la ministre. Je vous aimais bien quand vous étiez dans l'opposition, mais je ne vous aime plus dans la majorité...
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Eh oui, il y a eu des élections...
    M. Yves Cochet. Vous n'en serez pas surprise, madame la ministre. Je voterai contre votre budget. Hélas... (Sourires.)
    M. le président. J'informe l'Assemblée qu'à titre tout à fait exceptionnel et vu l'attention que les différents orateurs ont porté au respect de leur temps de parole, le groupe socialiste bénéficiera d'un orateur supplémentaire pour cinq minutes (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Merci, monsieur le président !
    M. le président. J'espère qu'il n'y aura plus de remarques sur l'absence de respect et de neutralité du président ? (Sourires.)
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Non, monsieur le président.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Cousin.
    M. Jean-Yves Cousin. Madame la ministre, je saisis l'occasion de ce débat budgétaire concernant votre département ministériel pour aborder un sujet dont l'importance ne doit pas être mesurée à l'aune des crédits qui lui sont directement consacrés, mais plutôt aux conséquences qu'il a sur la manière dont l'ensemble des autres crédits de l'Etat sont dépensés.
    M. Yves Cochet. Ah ! voilà la transversalité !
    M. Jean-Yves Cousin. Je veux parler bien sûr du développement durable, sujet pour lequel Jacques Chirac a fait connaître son intérêt très tôt au cours de la campagne, dès son discours d'Orléans, et sur lequel il est revenu à de nombreuses reprises jusqu'à son discours engagé de Johannesburg.
    Mettant en cohérence les discours avec les actes, le nom même de votre ministère et la création d'un secrétariat d'Etat uniquement consacré au développement durable sont des signes forts.
    M. Yves Cochet. D'ailleurs, nous ne voyons pas beaucoup Mme la secrétaire d'Etat.
    M. Jean-Yves Cousin. Ils traduisent cette conviction éminente qui nous engage à oublier nos égoïsmes quotidiens pour élargir le champ de nos préoccupations aux générations futures.
    La première définition du développement durable se trouve dans le rapport de la commission mondiale sur l'environnement et le développement de 1987 : « Un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire les leurs. »
    Mettre cet objectif généreux au coeur des politiques publiques ne constitue pas un gadget. C'est au contraire un enjeu qui nécessitera des efforts et un souci constant de réflexion sur les fondements et les effets des actions entreprises. En effet, cette volonté de solidarité avec les générations futures doit conduire à systématiquement s'interroger sur les conséquences de nos décisions sur trois plans : économique, social et environnemental.
    Au plan économique, l'objectif est celui de la croissance et de l'efficacité ; au plan social, il est de satisfaire les besoins humains et de répondre à des impératifs d'équité et de cohésion sociale ; au plan environnemental, il est de préserver, d'améliorer et de valoriser l'environnement et les ressources naturelles de manière à conserver un potentiel pour l'avenir.
    Ces trois piliers de la réflexion sont rarement associés dans nos politiques actuelles qui privilégient souvent l'une ou l'autre de ces dimensions, rendant fréquemment incohérente à moyen terme la combinaision des actions menées.
    Mais comment progresser dans ce domaine ?
    Comment faire en sorte que l'ensemble de ces trois préoccupations soient bien intégrées dans chacune de nos politiques publiques ?
    Comment éviter que les contraintes du court terme nous écartent de cet objectif de prise en compte de l'avenir ?
    Comment faire en sorte que ces objectifs de solidarité entre les générations, entre le Nord et le Sud, et au sein de notre société occidentale, deviennent le fil conducteur des actions de l'Etat ?
    Voilà, me semble-t-il, le défi que la ministre et la secrétaire d'Etat chargées du développement durable doivent nous aider à relever tous ensemble, dans une perspective humaniste qui replace l'homme au centre de ses activités économiques, au coeur de son environnement naturel et de ses responsabilités individuelles et communautaires.
    Comme je le disais en commençant mon intervention, ce défi ne se chiffre pas en millions ou en milliards d'euros. Il demande un effort beaucoup plus difficile car il suppose que toutes les politiques publiques soient progressivement recadrées et réorientées vers cet objectif.
    J'aimerais savoir, madame la ministre, comment vous envisagez de relever ce défi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Un député du groupe socialiste. Elle n'en sait rien !
    M. le président. La parole est à M. Armand Jung.
    M. Armand Jung. « La maison brûle » a-t-il été dit. Pour éviter d'incendier encore davantage notre bien commun, la planète, il nous faut la préserver avec de l'intelligence et des moyens. Or, madame la ministre, les moyens ne semblent pas être à la hauteur des espérances. En effet, les crédits de votre ministère sont, à structure constante, en légère baisse, passant de 769,43 à 768,16 millions d'euros, soit moins 0,2 %. Malheureusement, votre budget pour 2003 se caractérise par des diminutions de crédits et de véritables renoncements. On aurait pu attendre une hausse de votre budget étant donné que l'écologie est une priorité de votre gouvernement. Au contraire, vous mettez un coup d'arrêt à la politique ambitieuse de vos prédécesseurs.
    Je relèverai au moins deux grandes absences dans le budget qui nous est soumis.
    Tout d'abord, il est totalement silencieux sur le secrétariat d'Etat au développement durable. Cela ne fait qu'entretenir le doute sur l'objectif poursuivi par la scission de votre ministère.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Ce n'est pas une scission.
    M. Armand Jung. On peut pourtant l'interpréter ainsi. Par ailleurs, le secteur de l'environnement a été un grand pourvoyeur d'emplois-jeunes avec des métiers devenus indispensables à la réussite des projets environnementaux. La remise en cause de ceux-ci risque d'hypothéquer la poursuite de ces opérations et d'aggraver la crise de l'emploi dans notre pays.
    Ensuite, madame la ministre, je voudrais connaître vos explications quant à la diminution des crédits destinés à la politique de lutte contre le bruit.
    Cette politique vise à corriger en aval les impacts désastreux sur la santé des personnes des pollutions sonores. Elle constitue un devoir pour les pouvoirs publics. La lutte contre les nuisances sonores est de tous les instants, elle intéresse chacun d'entre nous, elle est la base d'une certaine politique de tranquillité publique qui semblait vous tenir à coeur. Pourtant, en la matière, votre budget est en véritable rupture avec l'action des précédents gouvernements. En 1997, votre prédécesseur avait lancé une action importante, partagée par nombre d'entre nous, de part et d'autre de l'hémicycle de résorption des points noirs du bruit. Mais avec une baisse de crédits supérieure à 52 %, on peut sérieusement s'interroger sur la pérennité de certaines aides financières.
    La construction des murs antibruit est-elle abandonnée ? La mesure du nombre de décibels produits par les boîtes de nuit en milieu urbain est-elle reléguée aux oubliettes ? La lutte contre les nuisances sonores des aéroports va-t-elle se poursuivre ? Je souhaiterais connaître vos réactions à ce sujet et vous invite à poursuivre, pour le bien de nos concitoyens, cette action contre le bruit.
    Quant aux crédits consacrés à la lutte contre la pollution de l'air, ils sont eux aussi en baisse, passant de 23,3 millions d'euros en 2002 à 21,7 millions d'euros pour 2003. Cette diminution touche principalement le fonctionnement des réseaux de surveillance de la qualité de l'air, mais aussi la recherche sur la réduction des émissions polluantes dans l'industrie, les transports et l'agriculture. Elle est d'autant plus regrettable que le Conseil national de l'air, dans son rapport d'évaluation du 31 janvier 2002 sur la mise en oeuvre de la loi sur l'air, préconisait, à l'inverse de la tendance que traduit votre budget, l'accélération des actions de réduction des émissions de polluants à la source.
    La reconquête de la qualité de l'air est un enjeu pour les générations futures ainsi que pour nos grands centres urbains. A ce sujet, la mise en oeuvre de certaines dispositions de la loi sur l'air ne doit pas faire oublier les actions engagées pour réduire les émissions polluantes des véhicules et celles, d'origine industrielle, de métaux lourds toxiques. Ces actions, je vous invite à les reprendre.
    Alors que nos concitoyens considèrent le bruit et la mauvaise qualité de l'air comme les principales nuisances, la lutte contre ces pollutions reste, semble-t-il, le parent pauvre de votre politique, au même rang que le soutien versé aux associations luttant pour la prévention des risques et contre les pollutions. Plus que jamais - et les récents événements du Gard nous le démontrent -, le service public de l'environnement devient indispensable. Il est alors regrettable que votre ministère apparaisse comme celui de l'impossible. De grâce, madame la ministre, n'en faites pas celui des renoncements durables. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Yves Cochet. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Philippe Tourtelier.
    M. Philippe Tourtelier. Madame la ministre, à lire les propos liminaires présentant votre projet de budget pour 2003, on ne trouve ni les mots « maîtrise de l'énergie », ni ceux d'« énergies renouvelables ». Aucune allusion non plus au réchauffement climatique. Etonnant, pour un ministère de l'écologie et du développement durable. Etonnant, car le chantier prioritaire du Président de la République à Johannesburg était précisément le réchauffement climatique et la référence au protocole de Kyoto, autrement dit, la réduction des gaz à effet de serre, qui passe par la maîtrise de l'énergie et par la promotion des sources d'énergies renouvelables, en conformité d'ailleurs avec l'engagement européen de la France de porter de 15 à 21 % la consommation d'électricité produite à partir de ce type d'énergies.
    Nous attendions que soit exprimée haut et fort cette politique volontariste et que les moyens qui lui sont consacrés depuis plusieurs années - en hausse régulière sous l'impulsion du précédent gouvernement - bénéficient réellement de ces belles intentions écologiques. Au contraire, votre budget est en régression. Surtout, vous avez tailllé dans le vif du budget de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie en lui supprimant des moyens d'engagement. Quant aux autorisations de programme consacrées à l'énergie et à la promotion des énergies renouvelables, elles fondent de 81 à 61 millions d'euros, et celles de la lutte contre la pollution atmosphérique de 19 à 14 millions d'euros.
    M. Yves Cochet. Eh oui !
    M. Philippe Tourtelier. Madame la ministre, vous affirmez vouloir préserver les ressources pour les générations futures. En amputant sérieusement les moyens de l'ADEME, vous faites le contraire et plutôt que des discours, nous aurions préféré des crédits, des options précises.
    L'action du Gouvernement en faveur du développement durable concerne tous les départements ministériels, dites-vous. Oui, mais l'industrie et surtout la recherche - principaux pourvoyeurs de moyens de paiement - voient leurs actions concourant à la maîtrise de l'énergie, au développement et à la diversification des productions et des consommations d'énergies renouvelables stagner ou régresser. C'est très inquiétant. Lorsque, par exemple, Mme la ministre déléguée à la recherche présente son budget, qui lui non plus ne tient pas les promesses du Président de la République, et que nous lui demandons précisément ses choix - je l'ai fait en commission - et la part effective réservée en matière de recherche et de développement aux énergies renouvelables, nous n'obtenons pas de réponse. Il y a de quoi rester dubitatif quant à l'objectif de 21 % de consommation d'électricité à partir d'énergies renouvelables.
    A ce sujet, j'insiste sur le fait que la question des énergies renouvelables ne se résume pas à la production d'électricité. Elle concerne en particulier la production de chaleur. M. Hillmeyer a évoqué tout à l'heure la proposition qu'il avait faite pour l'utilisation de l'énergie renouvelable dans l'habitat collectif. J'ai fait la même proposition en commission au ministre du logement pour l'habitat collectif social. Il s'agit bien là de développement durable dans ses aspects économique, social - baisse des loyers à terme pour ceux d'entre nous qui ont le plus de difficultés - et environnemental. Malheureusement, là non plus nous n'avons pas obtenu de réponse. La question des énergies renouvelables concerne aussi la production de combustibles pour les transports, si énergivores et toujours en expansion. Dans ces deux domaines, la recherche joue un rôle primordial et le véritable développement durable passe par ces investissements en amont ainsi que par des priorités clairement affichées.
    L'ADEME, selon le contrat de plan signé en juin 2001, doit allouer une partie de son budget au soutien d'actions de recherche et développement. Combien lui laissez-vous ? Et, plus globalement, plus transversalement devrais-je dire, combien de chercheurs seront-ils en mesure de poursuivre leurs travaux dans ces domaines, sachant que le CNRS et l'INRA vont perdre une centaine de postes ? Quel est le poids de votre ministère dans les choix qui seront faits ? Etes-vous réellement le pilote que notre collègue, au début de la séance, a appelé de ses voeux, et quelles sont vos priorités ? Allez-vous sacrifier ceux qui travaillent sur le photovoltaïque, la biomasse, la géothermie ?
    La recherche sur la pile à combustible, plutôt du ressort du Commissariat à l'énergie atomique, pourrait avoir d'importantes applications pour la motorisation des véhicules. Il y a quelques jours, au Salon mondial de l'auto, M. le Président de la République appelait d'ailleurs les constructeurs automobiles à développer des voitures propres ou hybrides. Partagez-vous cet avis, madame la ministre, et pouvez-vous nous préciser en quoi vous vous investissez dans cette direction, en particulier dans votre budget ?
    Je pourrais poser la même question pour les recherches sur les techniques de gazéification utilisant comme matières premières des déchets, des boues de station d'épuration, des produits d'origine agricole. Prononcez-vous et surtout engagez-vous clairement sur ces filières de méthanisation ! En Bretagne, par exemple, elles sont susceptibles de transformer en biogaz des milliers de tonnes de lisier et de corriger les effets d'une agriculture qui a montré ses limites.
    Pour rester dans ce domaine, en termes d'évolution de la politique agricole commune et d'aménagement du territoire, le monde rural a beaucoup à gagner du développement des cultures énergétiques. Plutôt que de s'enfermer dans une agriculture productiviste et de laisser des milliers d'hectares en jachère, les sources d'énergies renouvelables - biocarburants, bois-énergie, etc. - peuvent contribuer à élargir les fonctions de notre agriculture et à renouveler son image. Nous ne vous entendons pas beaucoup vous exprimer à ce sujet. Lorque vous parlez d'énergies renouvelables, c'est plutôt pour les dénigrer avec, par exemple, l'éolien, même si ce n'est évidemment pas la solution miracle. Nous avons même parfois l'impression que vous laissez se développer une campagne contre les éoliennes, sinon contre les énergies renouvelables.
    Chacun sait qu'à peine nommée à votre ministère, vous avez décrété que le nucléaire était l'industrie la moins polluante, en faisant peu de cas des énergies renouvelables. Si c'est une caricature, indiquez-nous clairement vos options personnelles, précisez vos priorités ! Je sais que beaucoup ont déjà les yeux tournés vers le débat sur la politique énergétique prévu pour le début de l'année prochaine. Votre budget préjuge-t-il de vos choix ? Pour ma part, j'espère que toutes les options possibles sur la diversification des sources d'énergie seront clairement exposées et que la transparence sur les enjeux sera totale. Mais ce débat n'aura de sens que si nous faisons tout pour maîtriser la consommation d'énergie. La lutte contre le gaspillage énergétique doit changer d'échelle et les moyens doivent suivre.
    Bien sûr, les questions sur l'électronucléaire, le traitement des déchets, l'avenir du parc de nos réacteurs feront l'objet de vifs débats, mais celles sur la maîtrise énergétique et la lutte contre le gaspillage doivent faire l'unanimité ! Or, même dans ces domaines, les moyens prévus sont insuffisants. Nous ne pouvons pas accepter un budget qui n'est pas à la hauteur des véritables enjeux d'un développement durable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, laussez-moi vous dire ma joie et mon émotion de présenter pour la première fois le budget du ministère de l'écologie et du développement durable.
    Je salue le travail remarquable effectué par nos rapporteurs, Christophe Priou pour la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, Philippe Rouault pour la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, et Jean-Jacques Guillet pour la commission des affaires étrangères. Je salue également la qualité des orateurs de tous les groupes politiques, qui ont tous fait des interventions empreintes de pertinence et de pugnacité et on posé beaucoup de questions. Je ne pourrai malheureusement pas répondre à toutes. Je me concentrerai sur les principales et j'espère que l'exercice des questions me permettra de compléter mon propos.
    Le 7 mai 2002, j'ai pris en charge une politique que le Président de la République avait désignée comme l'un des axes prioritaires de son quinquennat. Lors de la formation du Gouvernement, le Premier ministre a souhaité, quant à lui, inscrire la protection de l'environnement dans le cadre fécond du développement durable. Au sommet du développement durable à Johannesburg, le Président de la République, Jacques Chirac, dans une intervention remarquable - beaucoup d'orateurs l'ont citée - a donné à l'action du ministère de l'écologie et du développement durable sa dimension humaniste et internationale. A ceux qui se sont interrogés sur ce point, j'indique que Mme Tokia Saïfi assiste aujourd'hui au congrès des villes cyclables...
    M. Yves Cochet Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... et Dieu sait si c'est important ! C'est la raison pour laquelle elle ne m'accompagne pas sur ces bancs comme elle l'aurait souhaité. Nous avons voulu, Tokia Saïfi et moi-même, dès l'origine, fonder notre action en écho au message que les Français nous ont adressé lors des élections présidentielle et législatives. Trois principes m'inspirent : sécurité, transparence et participation.
    Sécurité, d'abord. Sécurité, surtout, car l'exigence forte exprimée par nos concitoyens sur ce thème doit retenir sur notre politique et elle touche particulièrement mes domaines de compétences. Une grande partie du budget lui est de fait consacrée : 260 millions d'euros d'autorisations de programme et 400 millions d'euros de dépenses ordinaires plus crédits de paiement, soit 61 % des autorisations de programme et 63 % des dépenses ordinaires plus crédits de paiement hors salaires ! Sécurité industrielle, sécurité nucléaire, sécurité sanitaire environnementale, prévention des risques naturels sont des domaines auxquels les Français et la représentation nationale sont à juste titre très attentifs.
    Transparence ensuite, dans le cadre de débats apaisés, fondés sur l'analyse scientifique et l'expertise. Ma formation personnelle, vous le savez, m'y porte la transparence est le moyen de créer et entretenir dans la population la « conscience » du risque et c'est le moyen le plus sûr de responsabiliser les décideurs et nos concitoyens.
    Participation enfin, car les Français ne s'intéressent à la politique que s'ils se sentent associés à la prise des décisions qui les concernent. Mais est-ce à vous, mesdames, messieurs les députés, que je dois le rappeler ?
    Le moment privilégié qu'est la présentation devant le Parlement du projet de budget m'inspire quelques remarques sur le ministère de l'écologie et du développement durable, notamment sur ce que l'on en dit, peut-être un peu rapidement d'ailleurs parlons franchement ! Comme l'a dit Nathalie Kosciusko-Morizet, la réputation de ce ministère est de ne savoir que faire des crédits qui lui sont octroyés ! La preuve en serait les reports importants, qui enlèveraient d'ailleurs de sa portée au vote du Parlement. La réalité est, comme souvent, beaucoup plus nuancée.
    Certes, des reports importants existent. Pour la fin 2002, ils seront de 368 millions d'euros environ en dépenses ordinaires plus crédits de paiement, dont 253 millions d'euros, soit près de 70 %, proviennent des reports de crédits de paiement de la seule ADEME, qui sont liés à l'attribution de crédits de paiement à la hauteur des autorisations de programme dès le démarrage des actions sur les déchets, sans qu'il ait été tenu compte du temps nécessaire pour mettre en place les actions, et donc engager les autorisations de programme. Il ne faudrait pas que cette technique d'alimentation en crédits de paiement soit à l'origine d'une confusion en accréditant l'image d'une mauvaise gestion.
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Bravo !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. A la fin de l'année prochaine, ces crédits de paiement devraient être entièrement consommés d'après l'ADEME, d'après mes services et ceux du ministère du budget. Ces trois sources concordantes me rassurent. J'ajoute que ces reports de crédits de paiement sont représentatifs de « dettes » exigibles à court terme par les collectivités locales. Les autres reports auraient dû être limités à 20 ou 30 millions d'euros, s'il n'y avait eu, en février, l'institution du gel républicain. Lorsque l'on demande aux services de ne pas dépasser la consommation de la moitié de leurs crédits jusqu'en août, il est ensuite difficile de leur demander de rattraper le rythme que commanderait une exécution optimale. Vous constaterez donc qu'une partie importante des reports est liée à des raisons contingentes, donc non reproductibles. A l'automne 2003, je m'engage à vous présenter des comptes plus nerveux.
    Au-delà de cet effort d'ascèse budgétaire, je veux, dans le cadre du travail de simplification et de décentralisation - déconcentration entrepris par le Gouvernement, réformer le ministère qui m'a été confié. Il me faudra du temps pour concevoir cette réforme et y faire participer les agents qui sont placés sous mon autorité, dont je constate chaque jour le dévouement et leur sens de l'intérêt général. Il me faudra des moyens aussi, même si beaucoup de choses peuvent être faites par redéploiements. Il me faudra votre aide, enfin. L'évolution du nom du ministère est l'un des premiers éléments de cette réforme (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Yves Cochet. C'est peu de chose !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Le passage de l'environnement à l'écologie et au développement durable n'est pas un jeu sur les mots. Il correspond à un changement d'attitude, d'habitude et de sens. Ma méthode consiste à privilégier une approche pragmatique et non dogmatique. Pour faciliter cette approche, il fallait d'abord sortir le ministère du ghetto - oui, du ghetto ! - où on avait enfermé. Je travaille donc en équipe avec les autres ministres, sous l'autorité de Jean-Pierre Raffarin : avec Hervé Gaymard sur les nitrates ou Natura 2000, avec Nicole Fontaine sur le protocole de Kyoto, avec Gilles de Robien sur les services de prévision des crues, avec Dominique de Villepin sur les sujets communautaires et internationaux, ou Nicolas Sarkozy sur la problématique des risques naturels. Cette démarche trouvera son point d'orgue lors du séminaire gouvernemental du 14 novembre au cours duquel chaque ministre proposera, en accord avec moi, une contribution de son département ministériel au développement durable.
    Je travaille bien entendu aussi très étroitement avec les élus locaux et les associations. Les enjeux mondiaux des politiques environnementales nécessitent une présence forte de la France dans les réunions internationales où notre pays a, par le passé, été trop souvent absent ou discret. J'ai donc pris la décision d'une présence très régulière aux conseils européens et aux conférences internationales, là où se prennent tant de décision qui engagent la vie quotidienne des Français. C'est ainsi, monsieur Tourtelier, que je passerai la semaine prochaine à Delhi, à la huitième conférence sur le changement climatique, pour apporter la contribution de la France en ce qui concerne tant la méthodologie que les apports financiers.
    Ma méthode s'appuie enfin sur deux exigences en apparence inconciliables : la fermeté et l'ouverture. Ma fermeté est totale quand il s'agit de sécurité et de santé, comme dans le dossier des incinérateurs hors normes. Mais c'est à l'ouverture, à l'écoute, à la concertation que revient la résolution de dossiers tels que ceux de la chasse, de l'application des directives européennes ou de la redéfinition d'une politique de l'eau, madame Gautier. L'ouverture, c'est aussi la confiance et donc la responsabilisation des acteurs de terrain, dans une démarche exigeante de délégation ou de conventionnement.
    Mesdames, messieurs les députés, le projet de budget du ministère de l'écologie et du développement durable est stable en moyens de paiement et en personnel. Cette stabilité correspond au souci de mieux dépenser. Dès mon arrivée, j'ai entamé un travail d'ascèse budgétaire,...
    M. Yves Cochet. Ascèse budgétaire ? C'est pas mal !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable... qui m'a rapidement administré la preuve que quelques-uns de mes prédécesseurs avaient usé et abusé des effets d'annonce. Il faut maintenant que j'en assume les conséquences, d'où un « grand écart » entre les moyens d'engagement et les moyens de paiement. J'ai lu, çà et là, que les moyens de travail du ministère de l'écologie et du développement durable étaient en diminution. Dans un sens, c'est vrai, mais j'ai noté la remarque de M. Rouault sur le fait que l'évolution du budget du ministère était non pas en légère baisse, mais en légère hausse de plus de 1,11 %
    M. Yves Cochet. C'est de la casuistique !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. J'apprécie cette remarque, monsieur le rapporteur spécial. je voulais toutefois insister sur le fait que le budget qui vous est proposé aujourd'hui n'a pas été construit pour faire l'objet d'un affichage et, en conséquence, je n'ai pas essayé de vous le présenter comme en augmentation, mais il est vrai qu'il ne diminue pas.
    Je voudrais maintenant répondre très précisément et très courtoisement à mon prédécesseur, M. Cochet. Les autorisations de paiement diminuent. Elles passent de 423 millions d'euros à 373 millions d'euros, mais elles n'étaient pas entièrement couvertes en crédits de paiement. Les maintenir aurait donc consisté à accepter de signer des chèques sans provision. Ce n'est pas ma méthode, Mme Kosciusko-Morizet l'a relevé avec talent. Les dépenses ordinaires diminuent aussi, de 631 millions d'euros à 617,5 millions d'euros. C'est aller dans le sens souhaité par le Gouvernement et le Parlement de mieux maîtriser l'évolution des crédits de fonctionnement de l'Etat. Je fais ici un effort de 13,5 millions d'euros, soit, rapporté aux dépenses ordinaires hors salaires, de près de 3 %.
    Dans un autre sens, les moyens de travail du ministère de l'écologie et du développement durable augmentent, car les crédits de paiement passent de 138,4 millions d'euros à 150,7 millions d'euros, soit plus 8,9 %. L'écart entre les autorisations de programme et les crédits de paiement, encore très grand, sera supporté en 2003 grâce aux reports, qui seront donc largement consommés. Le total, dépenses ordinaires plus crédits de paiement, reste constant : de 769,4 millions d'euros à 768,2 millions d'euros. L'écart de 1,2 million d'euros noté par M. Cochet, hier, dans un communiqué de presse, n'est dû, comme il le sait bien d'ailleurs, qu'à des ajustements rendus nécessaires par des transferts mineurs de compétences et de ressources entre ministères.
    Les emplois sont stables. L'augmentation de deux unités est peu significative. C'est le fruit d'échanges d'emplois avec d'autres ministères sur différentes missions : moins quatre pour la Commission nationale du débat public, qui passe dans les services du Premier ministre leur donnant une nouvelle ampleur, moins un pour l'autorité de contrôle des nuisances sonores des aéroports, plus sept pour le service documentaire qui m'est transféré depuis le ministère des finances. Tout cela n'est pas significatif.
    Ce qui bien sûr ne se voit pas, ce sont les redéploiements que j'ai prévu d'effectuer d'ici à la fin de l'année. Au premier chef, il y la création du centre hydro-météorologique de Toulouse, que le précédent gouvernement avait annoncé mais non préparé et auquel j'ai donné un contenu nouveau. Dix emplois de haut niveau sont ainsi prévus pour consolider les compétences nationales en matière de prévision des crues et pour faire fonctionner une unité de surveillance permanente des orages cévenols. Ensuite, j'ai décidé une déconcentration d'emplois depuis les administrations centrales vers les services régionaux. J'ai enfin prévu le renforcement des capacités d'animation et de gestion de Natura 2000.
    Mesdames, messieurs les députés, le projet de budget que je vous propose est réaliste. Il tient compte des engagements pris. Il permet de les tenir. Il permet de dégager des marges de manoeuvre pour les politiques pragmatiques que j'ai déjà eu l'occasion de présenter depuis presque six mois et que je vais à présent rappeler.
    Première exigence, la sécurité avec quatre chapitres : les risques technologiques, les risques naturels, les organismes génétiquement modifiés et l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale - AFSSE.
    S'agissant des risques technologiques, beaucoup de choses ont été faites dans le registre de risques industriels, mais il est clair qu'il faut continuer. Les événements se chargent tous les jours de nous le rappeler, et hier encore. Le projet de loi sur les risques industriels que j'ai trouvé en arrivant repose sur de bonnes idées et j'ai décidé de m'en servir comme base de travail. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Mais tout ne relève pas de la loi. Le travail de réduction des risques à la source, qui résulte d'itérations entre l'exploitant et l'inspection des installations classées, est la clé de la maîtrise des risques technologiques. A cet égard, je remercie M. Hillmeyer et M. Braouezec de leurs interventions. Dans ce registre, un travail méthodologique très ambitieux a été engagé, visant à harmoniser les calculs de distances de dangers et à introduire la notion de probabilité d'accident dans ces études de danger. Ces deux points constituent une étape majeure dans la maîtrise des risques en France.
    Je souhaite également vous signaler les commissions locales d'information, que j'ai fait installer sans attendre les évolutions législatives, pour que les riverains soient mieux informés et que les décisions qui les concernent soient prises avec eux.
    La loi qui devrait bientôt vous être présentée, outre le titre consacré à la prévention des risques naturels, comportera de nombreuses dispositions amendées et plusieurs qui ont été ajoutées. Ces dernières sont, pour une bonne part, issues du rapport Loos - Le Déaut. Elles visent avant tout à améliorer la conscience du risque autour des installations industrielles, à donner un contenu aux plans de prévention des risques technologiques, à aborder la question des indemnisation des victimes.
    La question des moyens humains, qu'un certain nombre d'orateurs ont évoqué, occulte généralement celle de l'organisation et des méthodes d'inspection. Beaucoup de choses sommaires, pour ne pas dire inexactes ou malveillantes, ayant été dites, il me paraît nécessaire de faire le point.
    La loi de finances initiale pour 2002 a prévu l'inscription de 100 inspecteurs supplémentaires dédiés aux risques en plus des 50 déjà prévus auparavant pour les autres contrôles des installations classés en DRIRE. Les 150 inspecteurs supplémentaires au titre de 2002 seront en poste courant 2003, pour tenir compte de la période de formation, contrairement aux rumeurs qui ont parlé d'annulation. Cent cinquante inspecteurs supplémentaires seront donc affectés dans les DRIRE en 2003, l'année même au cours de laquelle le Gouvernement proposera à la représentation nationale une loi portant notamment sur les risques technologiques, induisant de nouvelles méthodes et de nouvelles fonctions dans le registre déjà assez large de la maîtrise du risque technologique.
    Dans une perspective de croissance pluriannuelle régulière, après un inventaire tenant compte de ces nouvelles méthodes, pour accompagner la montée en puissance des services d'inspection, le Gouvernement a arrêté un plan pluriannuel de renforcement de 200 inspecteurs sur quatre ans. Cet effort sera complété par des redéploiements au sein de l'administration, qui permettront de dégager 200 autres emplois au cours des mêmes quatre prochaines années. Le Gouvernement sort donc d'une politique d'affichage post-accidentel au coup par coup, pour s'engager dans un renfort progressif et continu.
    En 2007, l'inspection devrait ainsi disposer de 1 420 agents. A très peu de choses près, il s'agit d'un doublement par rapport aux effectifs présents sur le terrain en septembre 2001. Si l'on s'intéresse aux effectifs spécifiquement dédiés aux risque, cela représente plus qu'un doublement.
    L'effort budgétaire est porté en loi de finances initiale pour 2003 sur l'expertise de l'INERIS, dont les crédits de paiement augmentent de 20 %, soit 2,6 millions d'euros. C'est à cet institut au rôle essentiel que j'ai notamment confié l'étude des projets industriels sur le lagon de Nouvelle-Calédonie et que j'ai immédiatement demandé une étude à la suite de la catastrophe survenue hier à Meaux.
    J'en viens, en matière de sécurité, à un deuxième grand thème que j'ai déjà un peu effleuré, celui des risques naturels et de la lutte contre les inondations.
    Les moyens financiers consacrés à l'élaboration des plans de prévention des risques, fixés à 3 millions d'euros à la naissance du dispositif, sont passés à 15,25 millions d'euros en 2002. Je maintiens cet effort en 2003. Au 1er septembre 2002, 3 400 communes sont dotées d'un PPR approuvé, hors plan de surfaces submersibles, et près de 5 250 PPR sont actuellement prescrits.
    Cet effort sera consolidé par une réforme majeure que je vous proposerai dans quelques semaines, consistant à faire intervenir le fonds Barnier pour donner un contenu aux mesures prescrites dans le cadre des plans de prévention des risques. J'y reviendrai.
    La démarche que j'entends conduire dans le registre des risques naturels me semble bien illustrée par les initiatives que j'ai prises pour ce qui concerne les inondations. Aucun dispositif ne supprimera le risque de crue. Il ne faut cependant pas céder au fatalisme. Des solutions permettant de réduire le danger existent et n'ont pas été suffisamment exploitées dans le passé. De même, nous devons renforcer les politiques de réduction de la vulnérabilité des populations.
    Il faut d'abord bien prévoir la catastrophe, comme cela a été fait dans le Gard. Je compte, à cet effet, réformer en profondeur la prévision des crues en France, et prioritairement pour ce qui concerne les territoires soumis au risque cévenol, le plus meurtrier des risques.
    Il faut ensuite réduire la vitesse de la crue en travaillant, en tête des bassins, à la détourner vers les champs d'expansion naturels.
    Il faut également faire en sorte que la population soit consciente du risque pour éviter les comportements à risque qui, hélas ! ont été souvent observés, notamment dans le Gard.
    Enfin, il faut mieux protéger les zones urbaines - Jean-Pierre Giran a fait une excellente intervention sur ce point - en accélérant la mise en oeuvre des plans de prévention des risques, en faisant en sorte que les particuliers puissent renforcer la résistance de leurs habitations au risque ou s'en soustraire pour l'avenir lorsque leur bien a été trop sérieusement endommagé, en leur donnant des moyens financiers complémentaires de ceux consentis par les assurances. C'est l'objet de la réforme du fonds Barnier que je vous proposerai bientôt.
    Le plan de lutte contre les inondations que j'ai présenté dans le Gard, et qui concernera tout le territoire national, mobilisera 130 millions d'euros de crédits sur quatre ans, pour la mise en place d'une stratégie globale de lutte contre les inondations sur quinze bassins versants considérés comme stratégiques. L'impact budgétaire s'en fera bien entendu ressentir, surtout au titre des lois de finances suivantes.
    L'essentiel du plan consistera à soutenir des initiatives des collectivités locales et sera financé à hauteur de 60 millions d'euros sur le budget général et 70 millions d'euros sur le FNSE répartis entre les actions suivantes :
    Premièrement, l'assistance à la maîtrise d'ouvrage des collectivités locales. Pour qu'elles puissent monter les programmes d'action, il sera nécessaire de les aider financièrement à mettre en place des équipes de projet et à lancer des études. Le besoin a été estimé à 10 millions d'euros sur quatre ans, financés par le FNSE.
    Deuxièmement, les travaux de sécurisation, d'aménagement et de protection. Ils seront financés différemment selon qu'ils concernent le domaine public fluvial ou les cours d'eau non domaniaux. Pour le domaine public fluvial, 15 millions d'euros sont inscrits au titre V ; pour les autres cours d'eau, 40 millions d'euros sont inscrits au titre VI.
    Troisièmement, les travaux de prévention. Ils concernent la possibilité de surinonder certaines zones ou de créer de nouvelles zones d'expansion des crues, l'aménagement « doux » des cours d'eau, la restauration de la mobilité de certains cours d'eau, etc. L'essentiel consistera en la construction de petits ouvrages de retenue temporaire. Le financement nécessaire, estimé à 50 millions d'euros, sera assuré, là encore, par le F.N.S.E.
    Quatrièmement, l'information et la sensibilisation des populations. Il s'agit d'aider les maîtres d'ouvrage à développer la conscience du risque au moyen de diverses actions d'information. Le financement a été chiffré à 10 millions d'euros, toujours imputés sur le FNSE.
    S'agissant, enfin, de la prévision des crues, outre les actions menées par l'Etat, financées hors le présent plan, les collectivités sont incitées à mettre en place dans certains secteurs des systèmes locaux de prévision. L'investissement sera partiellement subventionné, et le financement, de 5 millions d'euros, est prévu sur le titre VI.
    Une remarque en passant : vous noterez que le FNSE finance dans une forte proportion les mesures prévues, qui consistent à aider au montage de projets et qui permettent donc de garantir une consommation plus rapide des crédits. Vous comprendrez pourquoi je tiens à protéger ce fonds.
    Troisième volet concernant la sécurité : les OGM.
    Je voudrais, à ce sujet, rassurer Mme Geneviève Perrin-Gaillard. La discussion sur la transposition du protocole de Carthagène sur la biosécurité et sur les mouvements internationaux d'OGM a été pour moi l'occasion de rappeler la semaine dernière, à Luxembourg, que la France est attachée à ce que l'usage des biotechnologies soit encadré par une réglementation particulièrement rigoureuse.
    La France a en particulier milité pour que l'information sur les OGM présents dans les mélanges soit obligatoire, précise et sincère, et ne se résume pas à l'énumération approximative proposée dans le texte initial. Je dois dire, madame Perrin-Gaillard, que les opposants à cette vision rigoriste ne se trouvaient pas sur le banc du gouvernement français, mais bien plutôt sur ceux de la Commission et d'autres pays européens, dont certains, curieusement d'ailleurs, ont des ministres réputés écologistes...
    M. Yves Cochet. Des noms !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je ne vous ferai pas l'injure de penser que vous ne les connaissez pas, monsieur Cochet ! (Sourires.)

    J'ai insisté, avec le soutien de la grande majorité de mes collègues du Conseil européen, pour que les informations prévues en matière d'exportation soient aussi rigoureuses que celles prévues dans le projet de réglementation sur la traçabilité et l'étiquetage des OMG.
    A titre conservatoire, la France a proposé d'adopter le règlement d'application du protocole de Carthagène, dans l'attente de la réglementation sur la traçabilité et l'étiquetage. Ne pas adopter ce protocole aurait affaibli la position internationale de l'Union européenne et l'aurait privée d'un argument lors des négociations internationales de l'OMC.
    Nous pouvons donc nous féliciter d'avoir joué un rôle moteur dans l'adoption d'un régime rigoureux pour l'exportation des OGM, en phase avec nos exigences sur l'information du consommateur. Le réglement sur la traçabilité et l'étiquetage a fait l'objet d'un état de travaux au cours duquel j'ai pu faire part de mon souhait de disposer de règles claires, rigoureuses et fiables à l'attention de tous les consommateurs, utilisateurs et autorités de contrôles.
    J'ai aussi soutenu les propositions du Parlement européenn en faveur d'un seuil d'exemption de 0,5 % d'OMG autorisés, et non de 1 % comme le proposait la Commission, et j'ai maintenu la position selon laquelle l'adoption et la mise en application de ces règles sont une condtion nécessaire à l'ouverture d'une réflexion sur la délivrance de nouvelles autorisations de mise sur le marché d'OGM.
    Cette information me paraissait nécessaire pour montrer que la politique de prise en compte des risques est la plus complète possible.
    Enfin, quatrième sujet concernant la sécurité, l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale, évoquée par Mme Nathalie Gautier.
    Le gouvernement précédent, madame la députée, avait créé l'AFSSE le 9 mai 2001, mais ne s'était pas donné les moyens de la mettre en place : crédits gélés, arrêté budgétaire non signé, conseil d'administation non nommé. Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin attache donc une grande importance à ce projet, qui doit combler un vide dans l'analyse des liens entre l'environnement et la santé. Les derniers mois ont été mis à profit pour réunir les conditions d'un démarrage de l'agence et affiner le projet. Les montants proposés pour 2003 sont identiques à ceux de 2002 : 1,5 million d'euros en autorisations de programme et 1,1 million d'euros en crédits de paiement.
    Après la sécurité, le deuxième chapitre de cet exposé, consacré à la gestion des espaces et des espèces, est divisé en trois sous-chapitres : Natura 2000, la chasse et les espaces naturels protégés.
    De nombreux orateurs, comme Jean-Pierre Giran, sont intervenus à propos de Natura 2000, certains pour regretter cette procédure, d'autres pour souhaiter au contraire qu'elle s'accélère.
    Comme vous le savez, le processus d'identification des sites qui doivent constituer le réseau Natura 2000 a été long et difficile. Des retards se sont accumulés en France, comme d'ailleurs partout en Europe. Consciente de ce que la France ne pouvait pas se dérober sur ce dossier et ainsi risquer une seconde condamnation pouvant la conduire à payer des astreintes financières, j'ai envoyé aux préfets, dès le 29 mai, une première circulaire leur demandant de continuer la procédure de désignation des sites dans leur département. J'ai réaffirmé cette nécessité de compléter le réseau dans ma circulaire du 26 juillet.
    Si une partie importante de certains départements est susceptible de bénéficier de ce label, c'est que la richesse locale naturelle, combinée à des pratiques ancestrales qui ont été soigneusement développées et entretenues, le permettre. Car je veux le rappeler ici, et avec conviction, Natura 2000 n'est pas une punition, mais bel et bien un label.
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. C'est bien de le dire !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. L'ambition du Gouvernement est de considérer Natura 2000 comme une politique de développement durable des territoires garantissant la préservation de la faune, de la flore, et des habitats, tout en permettant l'exercice d'activités économiques particulièrement indispensables au maintien des zones rurales et au développement des territoires.
    Les conditions à fixer dans les contrats de gestion appartiennent aux acteurs locaux et à eux seuls, et sont à discuter localement dans les comités qui ont été constitués. L'enjeu est bien la place de l'homme dans ces régions qu'ils ont su eux-mêmes préserver.
    Je souhaite que les préfets signent dans les meilleurs délais des contrats de gestion avec des acteurs locaux, communes, chasseurs, agriculteurs, pêcheurs, forestiers, propriétaires. Il faut que la collectivité nationale soutienne la mise en oeuvre de ces contrats locaux.
    Le Fonds de gestion des milieux naturels, le FGMN, institué par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, a financé, de 1999 à 2002, la mise en place du réseau Natura 2000. Il a permis d'engager l'élaboration de quelque 500 documents d'objectifs, dont 200 sont achevés.
    Ainsi que plusieurs orateurs l'ont noté, y compris de l'opposition, les dotations prévues l'année prochaine pour Natura 2000 progressent de façon significative, plus 4,8 %, et s'élèvent à 20 millions d'euros pour le total des dépenses ordinaires et des crédits de paiement. Ces crédits permettront de poursuivre l'élaboration des documents d'objectifs et de mettre en place activement les premiers contrats avec les propriétaires et les gestionnaires sur les sites non agricoles.
    Les contrats Natura 2000 conclus par les exploitants agricoles sont financés par le ministère de l'agriculture et prennent la forme de mesures agro-environnementales dans ou hors les futurs CTE. J'ai d'ailleurs demandé à mon collgue Hervé Gaymard que les préoccupations environnementales soient au coeur de la poursuite du dispositif contractuel avec les agriculteurs. Je veux assurer M. Christophe Priou de mon implication à cet égard.
    M. Christophe Priou. rapporteur pour avis. Merci, madame la ministre !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je veux parler aussi de la chasse...
    M. Christophe Priou, rapporteur pour avis. Volontiers !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... car je sais qu'il est lui-même chasseur.
    J'ai voulu aborder ce dossier prioritaire avec une véritable volonté de réconciliation. La création de l'Observatoire de la faune sauvage permettra à tous de disposer de données vérifiables, communicables à la Commission européenne, et permettant de fonder des décisions indiscutables. Il fonctionnera dès l'année prochaine. Ce thème de la chasse n'a pas de grandes conséquences financières, mais je ne pouvais vous parler de mes actions sans l'aborder.
    S'agissant des parcs naturels régionaux, le patrimoine naturel est une amorce de réflexion sur la décentralisation, mais les débats sur ce sujet nous permettront certainement d'aller plus loin.
    Ceux qui me connaissent et qui se rappellent que je suis aussi élue locale, présidente d'une commission de l'environnement dans ma région, savent que les parcs naturels régionaux sont pour moi un sujet important. Dans les propositions relatives à la décentralisation que j'ai récemment faites au Premier ministre, les PNR et la gestion des espaces naturels en général ont tenu une grande place. Je vais consacrer une bonne part de l'année 2003 au travail de concertation et d'approfondissement qui me permettra de proposer les bases d'une nouvelle politique publique en faveur de la nature, de la biodiversité et des paysages. Elle pourrait se traduire, à partir de 2004, par des avancées réglementaires, voire législatives.
    En effet, la protection et la gestion de la nature est une politique complexe, à cause de l'étendue géographique couverte et de la multiplicité des enjeux. Elle intéresse nécessairement tous les niveaux d'administration territoriale et pose la question du bon niveau de gestion locale. En matière de biodiversité, comme d'ailleurs en matière d'eau, la réalité bio-géographique l'emporte souvent, en effet, sur l'organisation administrative.
    Des cadrages nationaux continueront probablement d'être nécessaires, notamment pour préciser les obligations communautaires et internationales, garantir une cohérence dans les inventaires et la réalisation d'observations, définir la stratégie nationale de la diversité biologique.
    Par ailleurs, si la pertinence de la région comme collectivité « chef de file » pour le patrimoine naturel semble réelle et ressort bien des récents débats sur la décentralisation, on ne pourra pas faire l'économie de la réflexion sur le rôle et la place des partenaires autres que l'Etat et les collectivités, c'est-à-dire les socio-professionnels, les usagers, les proprétaires, les associations, impliqués dans cette nouvelle politique concertée, en application des principes du développement durable.
    Les parcs sont, je le redis, un exemple réussi de décentralisation de la gestion du patrimoine naturel. Leur dynamisme appelle un soutien financier. Cet engagement de l'Etat sera maintenu en 2003 à la hauteur de 2002 en fonctionnement, avec 6,3 millions d'euros. Les autorisations de programme seront légèrement réduites, mais les crédits de paiement seront doublés, passant de 1 million d'euros en 2002 à 2 millions d'euros en 2003.
    Après la sécurité et les espaces naturels, j'en viens à la gestion des ressources et à l'eau évoquée par plusieurs intervenants, en particulier Mme Gautier qui a centré son intervention sur cet important sujet, je vais donc répondre de façon approfondie.
    J'ai demandé au Premier ministre de ne pas poursuivre l'examen du projet de loi sur l'eau...
    M. Yves Cochet. Quel dommage !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... voté en première lecture sous la législature précédente parce que, parmi les acteurs de la politique de l'eau, trop nombreux étaient ceux qui jugeaient le texte faible, notamment en raison d'une concertation insuffisante, et je partage leur avis.
    M Yves Cochet. Elle a pourtant duré trois ans et demi !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Il n'est pas question d'enterrer le principe d'une loi sur l'eau, - elle est indispensable - mais il faut repartir sur de nouvelles bases en menant une concertation approfondie avec tous les acteurs, à commencer bien évidemment par les élus locaux. Une telle démarche aura forcément des conséquences sur les délais. Je prolongerai d'ailleurs cette concertation en me rendant à la conférence des présidents des comités de bassin.
    Le projet d'une loi unique sur l'eau tel que l'entendait le précédent gouvernement est donc susceptible d'éclater en trois composantes. A ce propos, je réponds à Mme Gautier mais aussi à M. Patrick Braouezec - pardonnez-moi d'avoir omis votre nom, monsieur Braouezec - qui m'a aussi interpellé sur cette affaire. La première consistera à transposer la directive-cadre dans un texte qu'il faudra mettre au point sans tarder, dès cet automne, pour le soumettre au vote au premier semestre 2003. La deuxième sera une partie « eau » du projet de loi sur la décentralisation. Quant à la troisième, il s'agira d'un projet de loi « eau » proprement dit, qui devrait être présenté en conseil des ministres au deuxième trimestre 2003 pour un vote fin 2003 ou début 2004. Le contenu de la loi dépendra fortement de la concertation. Je suis prête à analyser toutes les propositions qui me seront faites.
    M. Yves Cochet. Même la redevance azote ?
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Pourquoi pas, monsieur Cochet ?
    Les crédits inscrits au budget de l'Etat évoluent différemment selon leur type : les dépenses ordinaires passeront de 22,1 millions d'euros à 21,5 millions d'euros, les autorisations de programme de 34,8 à 32,7 millions (soit - 6 %) et les crédits de paiement de 10,5 à 6,9 millions d'euros.
    Beaucoup m'ont interrogé sur les énergies renouvelables, et vous en particulier, monsieur Jung.
    La France s'est engagée dans cette voie pour à la fois diversifier et sécuriser son approvisionnement énergétique et réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Conformément à la directive européenne du 27 septembre 2001, relative à la promotion de l'électricité à partir de sources d'énergies renouvelables, elle s'est fixé comme objectif de faire passer de 15 % à 21 % la part des sources d'énergie renouvelables dans sa consommation d'électricité et j'y souscris sans réserve.
    Cette politique se traduit sur le plan budgétaire par des subventions distribuées par l'ADEME dont les crédits de paiement se monteront à 19,8 millions d'euros contre 14,7 millions en 2002 et les autorisations de programme baisseront de 80 à 61 milllions d'euros. En outre, les tarifs de rachat de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables constituent une autre incitation. Mais il nous faudra y réfléchir.
    Le débat sur l'énergie voulu par le Premier ministre et annoncé dans son discours-programme sera l'occasion pour les uns et les autres de débattre plus complètement sur tous ces sujets. Le temps qui m'est imparti ne me permet de les aborder que de façon elliptique.
    M. Yves Cochet. Vous avez tout votre temps, madame la ministre, celui du Gouvernement n'est pas limité !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Trente minutes, comme l'indique votre feuille jaune, monsieur Cochet !
    Je voudrais terminer en évoquant deux ambitions plus vastes.
    La première, c'est le développement durable et je remercie M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, d'avoir trouvé sur cette question le souffle qui convient. Comme nous nous y sommes engagés à Johannesburg, la France doit présenter sa stratégie nationale de développement durable au printemps prochain. Pour ce faire, le Premier ministre organisera un séminaire gouvernemental le 14 novembre prochain afin de lancer le processus interministériel. Nous y travaillons d'arrache-pied avec Mme Tokia Saïfi et tous mes collègues du Gouvernement. Je ne doute pas que le débat sera très riche.
    Autre ambition, la charte de l'environnement qui constitue un engagement fort du Président de la République. Il a annoncé le 3 mai 2001 à Orléans et confirmé le 18 mars 2002 à Avranches qu'il souhaitait proposer aux Français une charte de l'environnement. Adossée à la Constitution, elle devra, et Mme Nathalie Kosciusko-Morizet l'a rappelé, inscrire le droit à un environnement protégé au niveau constitutionnel des principes fondamentaux du droit. Plaçant l'homme face à ses responsabilités, la charte sera le fondement d'un nouvel équilibre entre progrès social, protection de l'environnement et développement économique. Elle devra également rechercher la justice et la solidarité entre les peuples et les générations.
    Une commission de dix-huit membres, présidée par le professeur Yves Coppens, regroupe des élus, des experts juridiques et scientifiques, des représentants des partenaires sociaux, des associations et des entreprises. Elle a pour mission d'éclairer les enjeux notamment juridiques, environnementaux, sociaux et scientifiques d'une telle charte. Elle pilote la concertation nationale et présentera ses conclusions accompagnées d'une proposition de texte, le 21 mars 2003.
    La consultation nationale comporte plusieurs modalités, dont la plus visible consiste en dix assises territoriales qui se tiendront en janvier et février 2003. Je vous invite tous à y participer. Le questionnaire sur la charte est également disponible sur le site Internet qui lui est consacré et vous pouvez tous autant que vous êtes vous saisir de ce débat qui transcende très largement les clivages politiques.
    Les élus seront associés à la démarche par le biais de contributions, d'auditions, d'interpellations directes, sur le site Internet du ministère ou à l'occasion des assises territoriales. J'ai prévu 1,6 million d'euros dans le budget 2003 pour mener cette consultation.
    Mesdames et messieurs les députés, que de projets, que de réalisations, et que de contributions au débat citoyen sur l'écologie et le développement durable !
    Mon ministère est sans doute le seul où chacun travaille sur ses dossiers sans jamais oublier qu'il lui faudra, pour réussir, travailler avec d'autres, agir pour les Français sans jamais oublier le reste du monde, et s'impliquer pour sa génération sans jamais oublier celles qui nous suivent. C'est sans doute cette dimension qui rend notre message difficile à transmettre, mais combien exaltant à mettre en oeuvre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous en arrivons aux questions. La parole est à M. Francis Hillmeyer, pour le groupe de l'Union pour la démocratie française.
    M. Francis Hillmeyer. Madame la ministre, vous avez sans doute pris connaissance des résultats de la récente enquête de l'INSEE sur les problèmes qui préoccupent le plus les Français dans leur quartier ou dans leur commune : 54 % des personnes interrogées ont mis le bruit au premier rang, devant l'insécurité. Or, les crédits de votre ministère affectés à la lutte contre cette nuisance ont été divisés par deux.
    Deux exemples vous indiqueront quelles réalités se cachent derrière ces chiffres. Les pollutions sonores de la gare du Nord, la plus grande gare de marchandises du Haut-Rhin, et peut-être l'une des plus grandes de France, atteignent fréquemment 88,3 décibels au petit matin, alors que le maximum autorisé est de 56 décibels. Est-il humain de vivre à proximité de ces lieux où le silence ne se fait jamais ? Il y a aussi les nuisances de l'autoroute A 36 qui, de l'île Napoléon jusqu'à Lutterbach, ne traverse que des agglomérations, a été élargie en partie à deux fois trois voies et supporte un trafic de plusieurs milliers de véhicules-jours : elle est toujours dépourvue d'un mur anti-bruit sur toute sa longueur. C'est véritablement scandaleux et, je crois, tout à fait unique pour une agglomération de cette taille : plus de 50 000 riverains subissent des préjudices qui, à la longue, deviennent tout simplement insupportables !
    J'ai bien conscience que la lutte contre les différentes sources de nuisances sonores ne peut être conduite qu'au niveau interministériel en associant, entre autres, le ministère de l'équipement, des transports et du logement, le ministre de la ville, le ministre de la santé... Mais les Français veulent un pilote et un responsable.
    Le Gouvernement a répondu à leurs attentes dans le domaine de l'insécurité en confiant au ministre de l'intérieur la mission de rétablir l'état de droit partout sur notre territoire. Eh bien, madame le ministre, il doit vous désigner aujourd'hui pour restaurer le calme, le silence auxquels aspirent nos concitoyens pour un meilleur équilibre physique et psychologique !
    Pour prendre ce problème à bras-le-corps, la première mesure à prendre consisterait à organiser un audit sur le bruit, si vous me passez l'expression. Il faut commencer, comme l'UDF l'avait suggéré pendant les campagnes précédentes, par dresser un constat fiable qui fera toute la lumière sur les conséquences néfastes en termes de santé publique et qui amènera toute la population à faire plus attention à la gêne causée à autrui. Les parlementaires ont aussi le devoir d'agir. C'est pourquoi je vous propose, mes chers collègues, la création d'une mission d'information sur le bruit.
    En conclusion, madame la ministre, quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour lutter contre ce fléau et instaurer les conditions d'une sorte de droit au silence et au calme ?
    M. le président. La parole est à Mme le ministre.
    Mme le ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le député, je partage bien entendu votre souci de renforcer les actions de lutte contre le bruit, notamment celui des routes et des voies ferrées anciennes qui n'ont pas été conçues avec les précautions nécessaires et dont les nuisances n'ont pas été prises en compte dans l'urbanisme.
    Je suis favorable à la poursuite des actions de résorption des points noirs du bruit engagée depuis deux ans, prises en charges à titre principal par le gestionnaires des infrastructures. Une aide à l'isolation acoustique des façades peut être accordée sur les crédits du budget de l'environnement lorsqu'une protection à la source, par exemple par un écran, n'est pas possible. Je ne manquerai pas d'appeler l'attention de M. Gilles de Robien sur les deux dossiers qui vous tiennent à coeur : la gare du Nord et l'autoroute A 36.
    Vous relevez la baisse des crédits affectés au bruit. Il s'agit en fait d'une mesure technique momentanée, tenant compte du rythme effectif de leur mise en place. Je suis soucieuse, comme vous, de disposer d'un constat actualisé sur l'exposition au bruit de nos concitoyens et de ses conséquences. Vous avez raison de souligner que c'est la pollution qu'ils supportent le moins bien et votre proposition de création d'une mission d'information sur le bruit recueille toute mon attention et mon soutien.
    M. le président. La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Madame la ministre, ma question porte, elle aussi, sur le bruit, mais uniquement sur celui des avions. Les prévisions de croissance du trafic aérien sont très impressionnnantes. En dépit du coup d'arrêt qui a été marqué l'an passé, les chiffres officiels nous promettent une véritable explosion du nombre de voyageurs. Dans le même temps, aucune rupture technologique n'est prévue rapidement pour insonoriser les moteurs d'avion. Ainsi, l'Airbus A 380, j'ai eu l'occasion d'évoquer le problème avec les ingénieurs qui le conçoivent, ne devrait être ni plus ni moins bruyant que les modèles précédents. Le ministre de l'équipement et des transports s'est engagé à ne pas remettre en cause le couvre-feu et le plafonnement du nombre de voyageurs à Orly, pour ne citer que lui. Il a par ailleurs relancé les débats sur l'opportunité un troisième aéroport. Les riverains des grands aéroports sont inquiets. Dans l'ouest du département de l'Essonne, la modification des couloirs n'a rien arrangé. Confrontés à des nuisances croissantes, parfois injustifiées lorsque les avions s'écartent régulièrement des couloirs aériens, les habitants craignent à terme une dégradation de leur environnement sonore. Constitués en associations, ils proposent certaines mesures simples qui permettraient une amélioration immédiate.
    Vous avez la charge, madame la ministre, de veiller à la réduction des nuisances sonores. Certaines lignes budgétaires relèvent directement de vous-même si d'autres dépendent de l'ADEME ou encore d'autres ministères. En ce qui vous concerne, madame la ministre, quelles mesures envisagez-vous pour intensifier la lutte contre les nuisances sonores aériennes ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Madame la députée, vous êtes l'élue d'un secteur particulièrement exposé aux nuisances sonores.
    La loi du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit a institué un dispositif d'aide géré par l'ADEME - vous l'avez dit - pour insonoriser les habitations riveraines des plus grands aérodromes nationaux - Roissy, Orly, Nice, Lyon, Toulouse, Marseille - auxquels sont venus s'ajouter Bordeaux, Mulhouse et Strasbourg en 1998, et Nantes en 2001.
    Le périmètre d'éligibilité à l'aide à l'insonorisation est défini par le plan de gênes sonores de l'aéroport concerné qui est régulièrement mis à jour. La dotation budgétaire réservée à l'aide aux riverains dont le montant est supérieur au produit de la taxe supportée par les compagnies aériennes s'élève à 17 millions d'euros en 2002 et relève du budget de l'ADEME. Celle-ci a repris la gestion du dispositif en Ile-de-France, qu'elle partageait jusqu'alors avec Aéroports de Paris. Un stock important de dossiers, reçus par ADP et non traités dans des délais propres à satisfaire les riverains, avait été transmis en 1999 à l'ADEME, ce qui a eu pour effet d'augmenter les délais d'instruction. Le stock a cependant été résorbé dès septembre 2001, notamment grâce au renforcement, opéré au cours de l'année 2000, des moyens humains affectés au dispositif. Désormais, les demandes sont traitées sans délai et le niveau d'affectation des aides croît.
    En avril 2002, un décret a prévu une révision des modalités d'établissement des plans de gênes sonores. Elle conduira d'ici à la fin de 2003 à élargir leur emprise et donc à augmenter le nombre des logements éligibles à cette aide.
    Enfin, dans le cadre des mesures pour un développement durable des aéroports parisiens annoncées le 25 juillet 2002, il a été décidé de taxer plus fortement les compagnies aériennes - par une augmentation des recettes du volet bruit de la TGAP - et d'améliorer le système d'aide en y intégrant les éléments de confort climatique que peut nécessiter, dans certains cas, une insonorisation.
    Ainsi, d'un côté seront augmentées les ressources dédiées à cette politique, et de l'autre élargis les critères d'éligibilité au dispositif d'aides.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
    M. Jean-Pierre Decool. Madame la ministre, ma question concerne le programme de protection de la biodiversité et des écosystèmes - Natura 2000 - qui touche deux sites du littoral du Nord : les dunes de la plaine maritime flamande et les dunes flandriennes décalcifiées de Ghyvelde. Cette délimitation concerne, au premier chef, les communes de Bray-Dunes, Zuydcoote, Ghyvelde et Les Moëres.
    Les objectifs de ce projet ont été acceptés par tous : sauvegarde du patrimoine, protection de la faune et de la flore. En revanche, sa mise en oeuvre soulève des problèmes tant financiers que décisionnels et juridiques. Dans certains cas, les acteurs locaux n'ont pas été concertés et se sont retrouvés à devoir appliquer une réglementation qu'ils n'ont pas pu discuter. Le mécontentement est d'autant plus fort qu'aucune mesure financière n'avait été prise pour aider les communes concernées. Pouvez-vous donc, madame la ministre, nous préciser quelles sont les mesures financières que le nouveau gouvernement envisage de prendre ?
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Je vous remercie, monsieur Decool, d'avoir aussi bien cerné les raisons pour lesquelles Natura 2000 a trop souvent échoué : absence d'une véritable concertation, ou plutôt pilotage autoritaire d'une concertation en trompe-l'oeil, et impossibilité de dégager des documents d'objectifs qui permettent de conclure un vrai contrat gagnant-gagnant.
    L'accompagnement financier des collectivités et des agriculteurs, afin de réduire les pollutions et de respecter nos engagements communautaires, est un objectif important du Gouvernement. Vous me demandiez quel était notre objectif, celui-là est tout à fait primordial. Nous souhaitons le mettre en oeuvre en concertation avec les différents partenaires, notamment dans le cadre des comités de bassin.
    Le fonds de gestion des milieux naturels, FGMN, défini par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, a financé de 1999 à 2002 la mise en place expérimentale du réseau Natura 2000. Il a ainsi permis aux préfets de départements d'engager l'élaboration de documents d'objectifs. Il a soutenu, parfois imparfaitement, mais il a soutenu la réalisation de cahiers d'habitat, d'un site Internet Natura 2000 et des expertises scientifiques complémentaires.
    Dans le projet de loi de finances pour 2003, j'ai choisi de porter à 20 millions d'euros - dépenses ordinaires et crédits de paiement, soit une hausse de 4,8 % - la dotation destinée à la mise en place du réseau Natura 2000. Cette dotation permettra de poursuivre l'élaboration du document d'objectifs qui est en cours sur plus de 500 sites et d'engager la phase d'expérimentation des premiers contrats Natura 2000 avec les propriétaires et les gestionnaires.
    Les contrats Natura 2000 conclus par les exploitants agricoles relèveront du ministère de l'agriculture et prendront la forme de mesures agroenvironnementales à la fois hors CTE et dans les CTE.
    La poursuite du dispositif CTE reformaté est en cours de définition par le ministère de l'agriculture en liaison avec le ministère de l'écologie et du développement durable. Il nous faut poursuivre la concertation et le dialogue au plan local. Je souhaite formaliser et faire vivre les premiers contrats de gestion. Si Natura 2000 est conçu comme une contrainte, rien ne peut fonctionner. C'est le sens de la circulaire que j'ai adressée aux préfets afin de réunir le comité départemental Natura 2000 pour que, sur ce plan, les différents acteurs puissent se rencontrer, développer des partenariats encore plus actifs avec les régions, en particulier pour les politiques d'évaluation de Natura 2000. J'ai également mené la concertation au plan national et désigné un chargé de mission qui oeuvrera avec toute l'équipe de la direction de la nature et des paysages à une action à laquelle je crois profondément. En effet, si l'on retrouve une véritable confiance avec les acteurs et que cela débouche sur une gestion contractualisée, on sera dans un rapport gagnant-gagnant.
    M. le président. La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet.
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Madame la ministre, vous avez trouvé, en arrivant au Gouvernement, une échéance majeure et rapprochée, celle du 1er juillet 2002 qui devait marquer l'arrêt de la mise en décharge des déchets non ultimes.
    La notion de déchet ultime est juridiquement floue, et peu opérationnelle. Par ailleurs, le gouvernement précédent a pris du retard, et les plans départementaux de gestion des déchets n'ont été approuvés que très tardivement. Finalement, le 1er juillet 2002, on était loin du but.
    Vous en avez pris acte et nous avez annoncé différentes mesures : redéfinition des aides de l'ADEME, différenciation des aides et de la fiscalité en fonction des efforts réalisés, entre autres. Ces positions trouvent leur reflet pour certaines, dans le budget qui nous est présenté. Vous avez aussi amorcé la fermeture des usines d'incinération qui n'étaient pas aux normes et qui étaient au nombre de trente-six en mai 2002.
    Ma question porte sur la nouvelle politique des déchets que vous avez annoncée pour l'après 2003. L'enjeu est considérable, puisque le volume des déchets par habitant continue à augmenter. Dans le même temps, les capacités de financement des communes, et singulièrement des petites communes, sont largement entamées, parfois au-delà du raisonnable, et de nombreux cas de mauvaise gestion sont même déplorés. Dans ce contexte complexe, madame la ministre, quelles orientations entendez-vous imprimer à la nouvelle politique des déchets ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Madame la députée, vous attirez notre attention sur un problème particulièrement important qu'a à traiter le ministère de l'écologie et du développement durable. Vous avez en effet évoqué certains aspects de la politique des déchets qui méritent qu'on les aborde sans attendre. Il m'a fallu commencer par remettre de l'ordre dans les usines d'incinération hors normes d'ordures ménagères. Je suis ce dossier de très près et peux vous dire que les trente-six incinérateurs en activité depuis trop longtemps seront réduits à zéro à la fin de l'année.
    Il fallait gérer l'échéance 2002. J'ai choisi de ne pas bloquer le système, mais de poser le principe d'une récompense pour ceux qui avaient rempli les objectifs de la loi. Mes services travaillent à la mise en oeuvre de cette orientation.
    Pour ce qui est du futur, je constate avec vous que nous ne sommes pas au bout du chemin, loin de là, et que des progrès restent à accomplir tant dans le domaine de la réduction du volume des déchets que dans celui de leur valorisation. Il nous faut donc définir des axes mobilisateurs, mais cela ne peut se faire qu'au terme de la plus large concertation. Sans esprit de polémique, il faut constater que ce travail de préparation de l'après 2002 avait été à peine engagé par le précédent gouvernement. Le Conseil national des déchets sera, entre autres, fortement mobilisé dans ce processus, dont je souhaite qu'il soit terminé à l'été prochain. Le Conseil national des déchets se réunira d'ailleurs d'ici à quelques semaines.
    Je peux d'ores et déjà vous donner quelques indications sur ce que pourraient être nos grands chantiers pour une gestion des déchets compatible avec le développement durable. Il s'agit de donner un contenu concret à la réduction à la source de la quantité de déchets. Notre production par habitant continue en effet de progresser inexorablement, malgré les bonnes intentions affichées par mes prédécesseurs. Je crois qu'il faut passer des incantations au stade du plan d'action concret impliquant le producteur, le distributeur et le consommateur de produits.
    Il convient ensuite de construire, sur des bases scientifiques, un système de gestion des déchets écologique mais non dogmatique...
    M. Yves Cochet. Ah !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... sans jeter l'anathème par principe sur tel ou tel mode de traitement, en intégrant le résultat des éco-bilans et en prenant en compte tous les paramètres, y compris - et j'allais dire surtout -, celui de l'émission de gaz à effet de serre.
    Enfin, et vous l'avez souligné, nous devons ouvrir le chantier de la maîtrise des coûts afin de stopper des dérives parfois injustifiées du point de vue de l'écologie et militer pour que le financement du traitement des déchets soit porté de manière transparente à la connaissance du contribuable et du consommateur, puisque c'est toujours l'un ou l'autre, et même l'un et l'autre, qui paient.
    M. le président. La parole est à M. Alain Cousin.
    M. Alain Cousin. Madame la ministre, je vais vous parler d'un sport régional, la pêche à pied, tradition séculaire et véritable passion qui a des milliers d'adeptes en Normandie. La plupart d'entre eux sont des personnes âgées et de situation modeste. En Manche, le marnage est très différent de ce qu'il est en Méditerranée : la mer se retire très loin, parfois à trois, quatre ou cinq kilomètres du rivage, et ces personnes âgées ont l'habitude de descendre en tracteur sur la plage. C'est autorisé en Ille-et-Vilaine, mais pas dans le département de la Manche. Alors, elles ne comprennent pas.
    J'avais interpellé votre prédécesseur à ce sujet, en février dernier, mais il n'avait, semble-t-il, rien trouvé à redire et rien n'a changé.
    La question présente une certaine difficulté, puisque le code de l'environnement et la loi littoral font apparaître diverses contradictions. J'ai eu l'occasion de saisir votre service pendant l'été. Plusieurs réunions de travail ont eu lieu, et je sais que vos services examinent ce dossier pour essayer de trouver une solution acceptable, car il ne s'agit évidemment pas de faire n'importe quoi. Tous les pratiquants de cette pêche tiennent à leur littoral, en sont amoureux et veillent particulièrement sur lui.
    Où en est ce dossier, madame la ministre ? Pourrions-nous, dans les semaines ou dans les mois qui viennent, trouver une solution qui satisfasse tout le monde ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    M. Patrick Braouezec. Pour rester écologique, madame la ministre, il faut préconiser les cyclo-rameurs !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je vous remercie de votre question, monsieur le député. La difficulté que vous soulevez n'est absolument pas anodine et ne mérite pas les ricanements.
    L'exemple des pêcheurs à pied dans la baie du Mont-Saint-Michel, chère à votre coeur, monsieur Cousin, est en effet digne d'intérêt. Je comprends très bien que l'éloignement des lieux de pêche à marée basse rende leur accès difficile, voire impossible pour les moins agiles ou les plus âgés. Ce ne sont d'ailleurs pas toujours les mêmes.
    Vous n'ignorez pas - vous l'avez d'ailleurs rappelé - que j'ai demandé à mes services de faire une étude approfondie des adaptations locales que le droit permet pour répondre aux attentes des pêcheurs à pied de la baie du Mont-Saint-Michel. Les résultats de cette étude seront bientôt disponibles et nous verrons, à ce moment, ce qu'il conviendra de faire pour ce cas particulier.
    Cependant, il me semble qu'il convient de reprendre cette question dans sa généralité. Ma mission est de faire en sorte que les activités humaines, quelles qu'elles soient, se développent dans le respect de l'environnement. Cela concerne tout particulièrement le littoral, dont la richesse écologique et paysagère est soumise à une forte pression anthropique.
    Pour autant, aucune mesure de bonne administration du territoire ne saurait faire fi des cultures et des coutumes. Et c'est bien à proximité du terrain, à proximité du littoral et de ses habitants, que l'on doit chercher le moyen de régler les activités coutumières et de trouver un modus operandi respectueux de l'environnement.
    C'est là un défi démocratique que nous devons relever. Soyez assuré, monsieur le député, que nous examinerons dans les prochains jours la question des pêcheurs à pied du Mont-Saint-Michel, pour concilier leur confort, le respect des coutumes et celui de l'environnement.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour sa seconde question.
    M. Jean-Pierre Decool. Madame la ministre, j'attire votre attention sur l'éventualité d'un classement de la région Nord-Pas-de-Calais en zone vulnérable, ce qui reviendrait à reconnaître que la région est polluée par les nitrates.
    Une fois de plus, alors que la responsabilité est partagée avec d'autres, les agriculteurs risquent d'être à tort la cible des critiques du grand public. Dans ces conditions, il convient de rechercher l'ensemble des causes de cette pollution. Ainsi, dans notre région, toutes les communes ne sont pas reliées à un réseau d'assainissement collectif. Et même, dans la région lilloise, seules 60 % des habitations sont reliées à un tel réseau, ce qui est peu, vu l'importance démographique de la métropole. Si ce projet de classification en zone vulnérable aboutit, les coûts de mise aux normes condamneraient irrémédiablement les petits élevages.
    Je vous demande en conséquence de prévoir une concertation large, lors des procédures de classification, et de prendre des mesures d'aide financière en faveur des agriculteurs qui risquent d'être touchés par ce projet.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le député Decool, vous avez attiré mon attention sur l'éventualité d'un classement de la région Nord-Pas-de-Calais en zone vulnérable, au titre de la directive « Nitrate ». Vous envisagez que ce zonage puisse être interprété comme une mise en cause des agriculteurs, alors que, vous avez raison, d'autres sources de pollution existent et vous soulevez le problème que poserait aux petits exploitants la nécessité d'une mise aux normes.
    La directive « Nitrate » prévoit une révision des zones vulnérables tous les quatre ans. C'est dans ce cadre qu'intervient le réexamen de la situation dans le Nord-Pas-de-Calais.
    Un jugement de la Cour de justice des communautés européennes a condamné la France, le 27 juin dernier, pour délimitation insuffisante des zones vulnérables, notamment dans le nord-ouest de la France. La cour estime en effet que cette zone contribue à l'alimentation en nitrates de la mer du Nord, qui connaît des problèmes d'eutrophisation.
    Cette délimitation se fera dans un esprit de transparence et de concertation avec le monde agricole. Les comités de bassin donneront leur avis sur le projet de zonage.
    Il ne s'agit en aucun cas, je le répète, de considérer que la pollution agricole est la seule responsable. Une large partie du bassin Artois-Picardie est d'ores et déjà classée au titre de la directive « Eau résiduelle urbaine » en zone sensible, ce qui oblige les collectivités les plus importantes à mettre en place des traitements réduisant les émissions de nutriment. Une révision de ce zonage va être engagée. Une procédure contentieuse européenne pour une délimitation insuffisante des zones sensibles est actuellement en cours.
    Les deux priorités que j'ai fixées aux agences de l'eau pour arrêter le programme pluriannuel sont la mise en oeuvre de la politique d'assainissement et le soutien au programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole. Ce programme permet de financer à 60 % les investissements nécessaires pour assurer le respect de la directive « Nitrate », en assurant un important effort de solidarité à l'égard du monde agricole. Il concernera prioritairement les zones vulnérables où la Commission nous impose de l'achever en 2006. Tout cela sera bien entendu mené en concertation avec la profession. Vous avez pu constater, monsieur le député, que, dans une zone particulièrement fragile, la Bretagne, où je me suis rendue en juillet avec mon collègue Hervé Gaymard, nous avons pu, dans cet esprit de concertation, travailler avec la profession agricole sur l'application de la directive « Nitrate ». Nous avons obtenu sa mobilisation ; je tiens à saluer l'effort considérable qu'elle effectue.
    M. le président. J'indique à nos collègues du groupe socialiste que leurs quatre orateurs désignés pour intervenir dans la discussion des crédits sont tous intervenus. Par ailleurs, leur groupe n'a pas proposé d'orateur pour poser une question. Par respect scrupuleux du règlement intérieur, il ne m'est donc pas possible de leur donner la parole à ce moment de la discussion.
    En revanche, monsieur Blazy, si vous me demandez la parole sur l'amendement n° 93, je vous la donnerai naturellement.
    Nous en avons terminé avec les questions.
    J'appelle les crédits inscrits à la ligne : « Ecologie et développement durable ».

ÉTAT B
Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires
des services civils (mesures nouvelles)

    « Titre III : moins 5 052 625 euros ;
    « Titre IV : moins 5 635 342 euros. »

ÉTAT C

Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE V. - INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programme : 45 790 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 8 565 000 euros. »

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT
ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programme : 327 011 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 55 674 000 euros. »
    Personne ne demande la parole ?...
    Je mets aux voix la réduction de crédits du titre III.
    (La réduction de crédits est adoptée.)
    Sur le titre IV de l'état B concernant l'écologie et le développement durable, M. Rouault, rapporteur spécial, et M. Novelli ont présenté un amendement, n° 93, ainsi rédigé :
    « Réduire les crédits de 2 000 000 euros. »
    La parole est à M. le rapporteur spécial.
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Cet amendement de réduction des crédits entend combattre le gaspillage. Outre le fait que les crédits de fonctionnement de l'ADEME sont sous-consommés chaque année à hauteur de 4 millions d'euros, un rapport d'audit de l'inspection générale des finances de mars 2000 fait ressortir le poids des travaux internes évalué à 50 % du temps de travail des agents de l'ADEME, part du temps beaucoup trop importante par rapport à celle d'animation de la demande et de mise en oeuvre des projets.
    Malgré ce rapport de l'inspection générale des finances, aucune diminution des crédits de fonctionnement n'a été constatée dans les budgets pour profiter de la réorganisation qui aurait dû s'ensuivre.
    L'amendement ne vise pas les crédits d'intervention, que le projet de loi de finances porte de 60 à 71 millions d'euros et qui bénéficieront, de surcroît, de montants substantiels de reports.
    Mes chers collègues, nous devons faire preuve de courage politique et, notamment, nous rappeler le discours de politique générale de notre Premier ministre auquel nous avons tous adhéré.
    M. Jean-Pierre Blazy. Pas tous !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. M. Jean-Pierre Raffarin, le 3 juillet dernier, soulignait combien il importait que l'administration mette en place des « indicateurs d'efficacité » permettant d'améliorer sa gestion dans l'objectif de « renforcer la capacité de réflexion et de prospective d'un Etat qui doit aussi être un Etat stratège à qui il incombe d'évaluer sur le long terme les défis de demain ». Ainsi, à quoi servent les rapports d'audit de l'inspection générale des finances, s'ils ne sont pas suivis d'effet ?
    L'avis de la commission des finances est favorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le rapporteur, je tiens à vous rappeler que les 29 millions d'euros de crédits de fonctionnement de l'ADEME comportent trois quarts de salaires. Oter 2 millions d'euros de ce total revient à diminuer du tiers les crédits de fonctionnement de cet établissement.
    Je partage le souci de maîtriser les dépenses de l'Etat. Mais je ne peux pas non plus ignorer les besoins de fonctionnement d'un établissement qui est actuellement éclaté sur plusieurs sites, cinq dans ma ville d'Angers, un à Paris, et qui attend depuis de trop nombreuses années que le siège qui lui a été promis soit enfin construit.
    Cette unité de bâtiment permettra d'ailleurs à l'ADEME de réaliser le type d'économies que vous souhaitez dans un souci que je partage. Mais ce n'est pas en 2003 que le bâtiment sera construit.
    L'ensemble de ces raisons, le taux trop important de réduction que vous proposez et l'indisponibilité de solutions immédiates de relogement, m'amènent à rejeter très fermement cet amendement.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. Madame la ministre, nous allons vous soutenir dans votre demande de rejet de cet amendement.
    D'abord, on observe que les crédits de l'ADEME diminuent déjà dans le projet de budget que vous avez présenté, et on ne voit pas comment une nouvelle réduction pourrait améliorer, comme le prétend l'auteur de l'amendement, M. Rouault, l'efficacité de la gestion de cette agence.
    L'ADEME, c'est évidemment les déchets, mais c'est aussi le bruit, pour une part moins importante il est vrai. Vous l'avez d'ailleurs rappelé, madame la ministre, en répondant tout à l'heure à des questions du groupe UMP concernant la politique publique du bruit. Si l'on réduisait encore les crédits de l'ADEME, je ne vois pas comment on pourrait satisfaire à la nouvelle demande qui va apparaître en ce qui concerne l'insonorisation des logements au voisinage des aéroports. Les PGS, les plans de gêne sonore autour des aéroports, vont être révisés, cette révision devant aboutir à la fin du premier semestre 2003. Cela va créer de nouveaux besoins, qu'il faudra bien financer. Une réduction drastique des crédits de l'ADEME se répercuterait sur la gestion de l'aide à l'insonorisation des logements des riverains.
    D'ailleurs, madame la ministre, je souhaiterais que vous puissiez nous rassurer. A l'ADEME, des bruits circulent - c'est le cas de le dire - concernant d'éventuelles réductions des financements disponibles pour la politique de lutte contre le bruit. Si tel était le cas, on ne pourrait pas faire face à la demande. Ce serait catastrophique, et ce serait contradictoire avec les déclarations de votre collègue de l'équipement et des transports.
    Le groupe socialiste, évidemment, votera contre cet amendement.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. Je voudrais rendre hommage à la volonté de la commission des finances de traquer les gaspillages et rechercher toutes les sources d'économie possibles. Cette bonne intention est incontestable, mais l'enfer est pavé de bonnes intentions.
    En l'occurrence, en ce qui concerne l'ADEME, nous savons, Mme la ministre nous l'a dit, à quel point les efforts accomplis depuis un certain nombre de mois sont importants. L'inspection générale des finances a remis un rapport en 2000 dont il a été tenu compte, et en particulier dans un contrat de plan pluriannuel en juin 2001. Il est incontestable que le budget qui nous est présenté aujourd'hui prend en compte les impératifs qui avaient été identifiés en 2000, comme d'ailleurs dans le rapport du sénateur Philippe Adnot. Je ne crois donc pas qu'il soit opportun de réduire d'un tiers les crédits de fonctionnement de l'ADEME.
    J'ajoute, en tant que rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, que l'ADEME a été particulièrement efficace lors de la préparation du sommet de Johannesbourg.
    M. Geneviève Perrin-Gaillard. Absolument !
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. Ce sommet n'avait pas été préparé, il faut bien le dire. Et c'est au dernier moment, lorsque le nouveau gouvernement est entré en fonction, qu'on a fait appel à l'ADEME pour mettre en place le pavillon français à Johannesbourg, pavillon qui a d'ailleurs parfaitement fait honneur à notre pays.
    Pour toutes ces raisons, je serai hostile à cet amendement.
    M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
    M. Yves Cochet. Je m'associe aux deux orateurs qui m'ont précédé, et même à Mme la ministre, pour demander que cet amendement soit retiré, ou alors rejeté.
    Les reproches faits à l'ADEME sont tout à fait injustes. Depuis que cette agence existe, depuis maintenant onze ans, elle a eu - et notamment depuis cinq ans - un effet de levier considérable sur l'emploi local. Les crédits qui sont proposés par l'ADEME, que ce soit pour l'insonorisation, la maîtrise de l'énergie, l'efficacité énergétique, les énergies renouvelables, ou encore les déchets, sont certes faibles au regard de l'immensité des besoins, mais permettent aux collectivités locales, aux PME, aux industriels, à tout le monde, de bénéficier d'un effet de levier. Ses interventions sont donc créatrices d'emplois.
    Bien sûr, il est possible qu'au début, l'ADEME ait eu plus d'argent qu'elle ne pouvait en dépenser. Il y avait énormément de demandes, qu'il s'agisse de maires, de personnes souhaitant installer des chauffe-eau solaires sur leur toit, ou autres. Mais les dossiers doivent être suivis. Par exemple, on a transféré la gestion de l'insonorisation des logements d'Aéroports de Paris à l'ADEME : il faut du personnel pour suivre tous les dossiers. Les dossiers à traiter ont été multipliés par six depuis cinq ans. Mais évidemment, si vous n'avez pas un budget de fonctionnement suffisant, on vous reproche ensuite de ne pas pouvoir dépenser les crédits de paiement que vous avez ! Je pense donc qu'il faut plutôt s'en sortir par le haut, c'est-à-dire augmenter les possibilités de fonctionnement de l'ADEME. C'est à la fois bon pour l'écologie et le développement durable, et bon pour nos entreprises et pour nos territoires, comme dirait M. Raffarin. Je suis donc tout à fait contre cet amendement.
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Bravo !
    M. le président. Monsieur Rouault, avec toutes ces précisions, l'avis du ministre, celui de la commission des affaires étrangères, souhaitez-vous maintenir cet amendement ou accepteriez-vous de le retirer ? Vous pouvez le faire même si M. Novelli n'est pas là. Vous en êtes le premier signataire.
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. J'ai pris bonne note des arguments de Mme la ministre, notamment sur le montant trop important de la réduction de crédits proposés dans cet amendement, et j'y suis sensible. C'est pourquoi je propose de rectifier mon amendement, en fixant très symboliquement le montant de la réduction à 0,5 million d'euros.
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. On n'est pas au marché ici !
    M. Yves Cochet. Qu'est-ce que ça veut dire ?
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est du jamais vu ! C'est ridicule !
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Il est important que notre assemblée donne un signal fort à l'ADEME et prenne en compte les rapports de l'Inspection des finances.
    M. Yves Cochet. C'est ridicule, la diminution de l'impôt pour les riches est plus de deux fois supérieure au budget du ministère, et voilà qu'on parle d'une réduction de 500 000 euros !
    M. le président. L'amendement n° 93 est donc rectifié. La somme : « 200 000 euros » est remplacée par la somme : 500 000 euros ».
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 93 rectifié ?
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le rapporteur spécial, pour les mêmes raisons que j'ai exposées à l'instant, je suis opposée à cet amendement, même rectifié.
    Je souhaite d'abord rassurer les opérateurs locaux qui nous ont présenté des projets de mise aux normes de déchetteries avant le 1er juillet 2002 : les crédits de paiement portés de 61 à 71 millions d'euros et les reports de crédits nous permettront de financer les investissements nécessaires. Comme je l'ai dit dans mon intervention liminaire, nous allons réfléchir, au cours du premier semestre 2003, à une nouvelle politique en matière de déchets, fondée notamment sur des incitations fiscales, que nous présenterons dans le cadre de la loi de finances  pour 2004.
    Pour ce qui concerne les autres politiques de l'ADEME - la lutte contre la pollution des sols,...
    M. Jean-Pierre Blazy. Le bruit !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... la lutte contre le bruit,...
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Les énergies renouvelables !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... les énergies renouvelables -, les crédits permettent de faire face à ses engagements sans aucune difficulté.
    S'agissant des crédits de fonctionnement, je répète que dans la situation actuelle, et compte tenu de la part des salaires dans ces crédits de fonctionnement, il ne me paraît pas raisonnable de soustraire à ce budget ne serait-ce que 0,5 million d'euros.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
    M. Christophe Priou, rapporteur pour avis. Il m'est déjà arrivé de procéder a des ventes aux enchères, mais c'était dans d'autres enceintes. (Sourires.)
    M. Yves Cochet et Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Absolument ! On est à l'Assemblée nationale, ici !
    M. Christophe Priou, rapporteur pour avis. Que cet amendement propose une réduction de deux millions ou de 500 000 euros, la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire n'y est pas favorable - et son président, Patrick Ollier, m'a d'ailleurs laissé une consigne en ce sens avant de nous quitter.
    M. Alain Cousin. Je confirme !
    M. Yves Cochet et Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Très bien !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 93, tel qu'il vient d'être rectifié.
    (L'amendement, ainsi modifié, n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix la réduction de crédits du titre IV.
    (La réduction de crédits est adoptée.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)
    M. le président. Je vais maintenant appeler la ligne 33 de l'état E.

ÉTAT E
Tableau des taxes parafiscales dont la perception
est autorisée en 2003
(Taxes soumises à la loi n° 53-633 du 25 juillet 1953)

LIGNES
2002 2003 DESCRIPTION PRODUIT
pour
l'année 2002
ou la campagne
2001-2002
ÉVALUATION
pour
l'année 2002
ou la campagne
2002-2003
36 33 Nature de la taxe : 10 500 000 10 600 000
    - Taxe par animal à tirer dans le cadre d'un plan de chasse.
Organismes bénéficiaires ou objet :
- Fédérations départementales de chasseurs.
Taux et assiette au 1er janvier 2002 :
- Cerf élaphe : 80 EUR.
- Daim : 37 EUR.
- Mouflon : 25 EUR.
- Chevreuil et cerf sika : 14 EUR.
- Sanglier : 5 EUR.
Textes :
- Décret n° 2001-551 du 27 juin 2001.
- Arrêté du 27 juin 2001.
    Je mets aux voix la ligne 33 de l'état E.

    (La ligne 33 de l'état E est adoptée.)
    M. le président. Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de l'écologie et du développement durable.
    La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à une prochaine séance.

2

DÉPÔT D'UN RAPPORT
EN APPLICATION D'UNE LOI

    M. le président. J'ai reçu, le 25 octobre 2002, de M. le Premier ministre, en application de l'article 45 de la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile, le rapport sur les titres de séjour des étrangers en France en 2001.

3

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Lundi 28 octobre 2002, à dix heures, première séance publique :
    Discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, n° 250 :
    MM. Yves Bur, Jean Bardet, Mme Marie-Françoise Clergeau et M. Denis Jacquat, rapporteurs, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tomes I à V du rapport n° 330),
    M. François Goulard, rapporteur pour avis, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis n° 327).
    A quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-huit heures trente.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
DÉCISIONS SUR DES REQUÊTES
EN CONTESTATION D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES
(Communication du Conseil constitutionnel
en application de l'article L.O. 185 du code électoral)
Décision n° 2002-2724 du 24 octobre 2002
(A.N., Aveyron, 3e circonscription)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu la requête présentée par M. Jean-Louis Carrière, demeurant à Millau (Aveyron), enregistrée à la préfecture de l'Aveyron le 27 juin 2002 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 16 juin 2002 dans la 3e circonscription du département de l'Aveyron pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu, enregistrée le 15 juillet, la lettre adressée au Conseil constitutionnel par M. Jacques Godfrain, député, en réponse à la communication de la requête ;
    Vu les observations du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales enregistrées comme ci-dessus le 25 juillet 2002 ;
    Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu ;
    1. Considérant qu'à l'appui de sa requête dirigée contre l'élection de M. Godfrain, M. Carrière se borne à critiquer les conditions dans lesquelles l'« Union pour la majorité présidentielle » a été créée et a accordé son investiture en vue des élections législatives ; qu'il soutient à cet effet que « la séparation entre l'Etat et les partis politiques n'a pas été respectée », que la transparence et l'équité de la compétition électorale n'ont pas été assurées et que la prohibition des mandats impératifs a été méconnue ;
    2. Considérant que les éléments ainsi invoqués n'établissent ni qu'il ait été porté atteinte à l'égalité entre les candidats dans la 3e circonscription de l'Aveyron, ni que la sincérité du scrutin dans cette circonscription ait été altérée ; qu'ainsi la requête ne peut qu'être rejetée,
                    Décide :
    Art. 1er. - La requête de M. Jean-Louis Carrière est rejetée.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 24 octobre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Certifié conforme :
Le Secrétaire général.
Le Président :
Yves Guéna.

Décision n° 2002-2662 du 24 octobre 2002
(A.N., Côte-d'Or, 5e circonscription)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu la requête présentée par M. Patrice Roux, demeurant à Ladoix-Serrigny (Côte-d'Or), enregistrée à la préfecture de la Côte-d'Or le 25 juin 2002 et tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Dijon en date du 22 mai 2002 refusant, à la demande du préfet de la Côte-d'Or, l'enregistrement de sa déclaration de candidature à l'élection d'un député à l'Assemblée nationale dans la cinquième circonscription du département de la Côte-d'Or, ainsi que, par voie de conséquence, l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans cette circonscription :
    Vu le jugement attaqué ;
    Vu le mémoire en défense présenté par M. Alain Suguenot, député, enregistré au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 15 juilet 2002 ;
    Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, enregistrées comme ci-dessus le 15 juillet 2002 ;
    Vu le mémoire en réplique présenté par M. Roux, enregistré comme ci-dessus le 29 juillet 2002 ;
    Vu le mémoire en duplique présenté par M. Suguenot, enregistré comme ci-dessus le 5 août 2002 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu l'article 59 de la Constitution ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu ;
            Sur la fin de non recevoir opposée par M. Suguenot :
    1. Considérant qu'aux termes de l'article L.O. 160 du code électoral : « Est interdit l'enregistrement de la candidature d'une personne inéligible. - S'il apparaît qu'une déclaration de candidature a été déposée par une personne inéligible, le préfet doit surseoir à l'enregistrement de la candidature et saisir, dans les vingt-quatre heures, le tribunal administratif qui statue dans les trois jours. La décision du tribunal ne peut être contestée que devant le Conseil constitutionnel saisi de l'élection... » ;
    2. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en application des dispositions précitées de l'article L.O. 160 du code électoral, le préfet de la Côte-d'Or a sursis à l'enregistrement de la candidature de M. Roux dans la cinquième circonscription du département de la Côte-d'Or et saisi le tribunal administratif de Dijon, lequel, par un jugement du 22 mai 2002, a refusé l'enregistrement de la déclaration de candidature ; que, comme le permettent les mêmes dispositions, M. Roux a saisi le Conseil constitutionnel d'une requête par laquelle il demande l'annulation du jugement du tribunal administratif, ainsi que l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans cette circonscription ; que M. Suguenot n'est dès lors pas fondé à soutenir que la requête ne serait pas recevable faute de contenir des conclusions tendant à l'annulation des opérations électorales ;
            Sur le jugement du tribunal administratif de Dijon et les opérations électorales :
    3. Considérant qu'aux termes de l'article L.O. 127 du code électoral : « Tout citoyen qui a vingt-trois ans révolus et la qualité d'électeur peut être élu à l'Assemblée nationale dans les conditions et sous les réserves énoncées aux articles suivants » ; qu'en vertu de l'article L. 155 du même code l'éligibilité du candidat est subordonnée à celle de son remplaçant ;
    4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, contrairement aux mentions de la déclaration de candidature, le remplaçant de M. Roux, M. Guignard, n'était pas inscrit sur la liste électorale de la commune de Fontaine-lès-Dijon, dont il avait été radié d'office le 15 novembre 2000, et qu'il n'était d'ailleurs inscrit sur aucune autre liste électorale ; que, si cette circonstance ne faisait pas, par elle-même, obstacle à l'enregistrement de la déclaration de candidature, il appartenait toutefois aux intéressés de justifier, au plus tard devant le tribunal administratif, de la qualité d'électeur de M. Guignard ; que ni M. Roux ni M. Guignard n'ont produit devant le tribunal administratif de pièces justifiant de la qualité d'électeur de M. Guignard ; que le requérant ne saurait utilement produire pour la première fois devant le Conseil constitutionnel des pièces visant à établir cette qualité ; que c'est dès lors à bon droit que le tribunal administratif, qui n'avait pas à vérifier la régularité de la radiation de l'intéressé de la liste électorale mais seulement sa qualité d'électeur, a refusé l'enregistrement de la candidature de M. Roux ;
    5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Roux n'est fondé à demander ni l'annulation du jugement du tribunal administratif de Dijon en date du 22 mai 2002 ni, par voie de conséquence, celle des opérations électorales des 9 et 16 juin 2002,
                    Décide :
    Art. 1er. - La requête de M. Patrice Roux est rejetée.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 24 octobre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Certifié conforme :
Le Secrétaire général.
Le Président :
Yves Guéna.

Décision n° 2002-2612 du 24 octobre 2002
(A.N., Loire-Atlantique, 3e circonscription)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu la requête présentée par M. Claude Moitry, demeurant à Nantes (Loire-Atlantique), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 12 juin 2002 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 9 juin 2002 dans la 3e circonscription du département de Loire-Atlantique pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu le mémoire en défense présenté par M. Jean-Marc Ayrault, député, enregistré comme ci-dessus le 11 juillet 2002 ;
    Vu le mémoire complémentaire présenté par M. Moitry, enregistré comme ci-dessus le 4 septembre 2002 ;
    Vu les observations du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales enregistrées comme ci-dessus le 10 juillet 2002 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu ;
    1. Considérant que M. Moitry fait grief à M. Ayrault d'avoir organisé une diffusion massive de divers tracts en méconnaissance des dispositions de l'article L. 165 du code électoral ; que, toutefois, il n'est pas allégué que ces documents aient contenu des propos excédant les limites de la polémique électorale, ni que les sommes engagées pour leur confection et leur diffusion aient dépassé le plafond des dépenses pour l'élection des députés fixé par l'article L. 52-11 du même code ;
    2. Considérant que, si le requérant reproche au candidat élu d'avoir fait apposer des affiches comportant une combinaison des couleurs bleu, blanc, rouge en violation de l'article R. 27 du code électoral, l'utilisation de ces couleurs parmi d'autres n'a pas conféré un caractère officiel à la candidature de l'intéressé ; que, dès lors, le grief manque en fait ;
    3. Considérant que M. Moitry, qui a obtenu 325 voix au premier tour de l'élection contestée, soutient n'avoir bénéficié pour sa campagne électorale, malgré ses demandes, d'aucune couverture de la part de la presse écrite et audiovisuelle, tandis que la campagne de M. Ayrault aurait été très largement relayée ;
    4. Considérant que la presse écrite a le droit de rendre compte librement d'une campagne électorale ; que doit être ainsi rejeté le grief tiré de ce que celle-ci aurait insuffisamment évoqué la campagne du requérant ;
    5. Considérant qu'à le supposer établi, le refus par les stations de radio et de télévision de rendre compte de sa candidature, n'a pu, au regard du très faible nombre de voix obtenues par M. Moitry, altérer la sincérité du scrutin ;
    6. Considérant, enfin, que le grief tiré d'irrégularités qui auraient été commises par les autorités municipales dans l'installation des panneaux d'affichage mis à la disposition des candidats n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier la portée ;
    7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. Moitry doit être rejetée,
                    Décide :
    Art. 1er. - La requête de M. Claude Moitry est rejetée.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 24 octobre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Certifié conforme :
Le Secrétaire général.
Le Président :
Yves Guéna.

Décision n° 2002-2731 du 24 octobre 2002
(A.N., Moselle, 8e circonscription)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu la requête présentée par M. Jean Kiffer, demeurant à Amneville (Moselle), enregistrée à la préfecture de la Moselle le 27 juin 2002 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 8e circonscription du département de la Moselle pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu le mémoire en défense présenté par M. Jean-Marie Aubron, député, enregistré comme ci-dessus le 17 juillet 2002 ;
    Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, enregistrées comme ci-dessus le 25 juillet 2002 ;
    Vu les mémoires en réplique présentés par M. Kiffer, enregistrés comme ci-dessus les 7 août et 6 septembre 2002 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu l'article 59 de la Constitution ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    Vu le code électoral ;
    Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication ;
    Vu la recommandation n° 2002-4 du 3 avril 2002 du Conseil supérieur de l'audiovisuel à l'ensemble des services de télévision et de radio en vue des élections législatives des 9 et 16 juin 2002 ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu ;
    1. Considérant que, à l'issue du premier tour de scrutin qui s'est déroulé le 9 juin 2002 dans la huitième circonscription de la Moselle, seuls deux candidats, M. Kiffer et M. Aubron, ont obtenu un nombre de suffrages leur permettant, en vertu des dispositions de l'article L. 162 du code électoral, d'être candidats au second tour ; que Mme Kolb, candidate du Front national au premier tour, a appelé les électeurs à faire obstacle à l'élection de M. Aubron ; que les dirigeants du Front national ont apporté leur soutien à M. Kiffer ; qu'un communiqué diffusé par M. Kiffer le 11 juin 2002 a été interprété comme une acceptation par le candidat du soutien du Front national ;
    2. Considérant que, si M. Kiffer conteste la façon dont la presse nationale et régionale a, dès le 11 juin 2002, relaté et analysé ces faits, les organes de la presse écrite sont libres de rendre compte d'une campagne électorale comme ils l'entendent ; que la circonstance que les services de télévision ont relaté ces faits ne révèle, par elle-même, ni une méconnaissance de la recommandation susvisée du Conseil supérieur de l'audiovisuel prise en application de l'article 16 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, ni un traitement discriminatoire à l'égard de M. Kiffer ; que la circonstance que l'Union pour la majorité présidentielle a annoncé, le 12 juin 2002, qu'elle retirait l'investiture qu'elle avait accordée à M. Kiffer lors du premier tour n'est pas constitutive d'une manoeuvre ; que, si de nouveaux bulletins de vote au nom de M. Kiffer ne faisant pas mention de cette investiture n'ont pu être imprimés en temps utile, il ne résulte pas de l'instruction que le maintien de cette mention sur ses bulletins de vote ait pu faire perdre au requérant un nombre de suffrages suffisant pour inverser le résultat de l'élection, ni même qu'il lui ait été préjudiciable ; que, si M. Kiffer conteste les affirmations relatives à son acceptation du soutien du Front national contenues dans un tract émanant de M. Aubron et diffusé à partir du 12 juin, ainsi que la teneur de petites affiches apposées sur ses affiches officielles, suggérant, par des termes injurieux, sa proximité avec ce parti, il était en mesure de répondre en temps utile à cette polémique ; qu'au demeurant, il a précisé sa position à l'égard du Front national par un tract distribué à partir du 13 juin ; que, dans ces conditions, pour blâmable que soit, dans les circonstances de l'espèce, la méconnaissance de l'article L. 51 du code électoral, les faits invoqués par le requérant n'ont pas été de nature à altérer la sincérité du scrutin ;
    3. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Kiffer n'est pas fondé à demander l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 8e circonscription de la Moselle,
                    Décide :
    Art. 1er. - La requête de M. Jean Kiffer est rejetée.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 24 octobre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Certifié conforme :
Le Secrétaire général.
Le Président :
Yves Guéna.

Décision n° 2002-2694 du 24 octobre 2002
(A.N., Seine-Maritime, 6e circonscription)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu la requête présentée par M. Paul Dhaille, demeurant au Havre (Seine-Maritime), enregistrée le 26 juin 2002 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 16 juin 2002 dans la 6e circonscription du département de la Seine-Maritime pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu le mémoire en défense présenté par M. Denis Merville, député, enregistré comme ci-dessus le 18 juillet 2002 ;
    Vu le mémoire complémentaire présenté par M. Dhaille, enregistré comme ci-dessus le 26 août 2002 ;
    Vu les nouveaux mémoires présentés par M. Merville, enregistrés comme ci-dessus les 9 septembre et 1er octobre 2002 ;
    Vu les observations du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales enregistrés comme ci-dessus le 10 juillet 2002 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu,
    1. Considérant, en premier lieu, qu'à l'appui de sa requête M. Dhaille allègue que, alors que le récépissé de sa déclaration de candidature en vue du second tour de scrutin indiquait qu'il conserverait le panneau d'affichage n° 5 qui lui avait été affecté avant le premier tour, les maires de plusieurs communes de la circonscription ont fait enlever, dans la journée du mercredi 12 juin, l'ensemble des panneaux utilisés avant le premier tour, à l'exception du panneau n° 1 affecté à M. Merville, candidat au second tour, et du panneau n° 2 précédemment affecté à M. Lefort, candidat éliminé à l'issue du premier tour ; que le requérant se serait ainsi trouvé privé d'affichage pendant le temps nécessaire à l'apposition par ses partisans de nouvelles affiches sur le panneau n° 2 ; qu'en outre, certains électeurs auraient pu être conduits à penser que M. Lefort était candidat au second tour ;
    2. Considérant qu'il n'est pas contesté que les circulaires des deux candidats présents au second tour ont été adressés aux électeurs dans les conditions prévues par le code électoral ; que les faits allégués ne présentent pas le caractère d'une manoeuvre ; que, dès lors, la sincérité du scrutin n'a pas été altérée ;
    3. Considérant, en second lieu, que le requérant fait valoir que, dans une déclaration reprise par plusieurs organes de presse dans leurs éditions du 14 juin 2002, M. Ondet, responsable local du mouvement Chasse, pêche, nature et tradition, a appelé à « faire battre M. Dhaille », alors que la candidate de ce mouvement dans la circonscription au premier tour de scrutin s'était abstenue, conformément aux directives de ses instances nationales, de donner des consignes de vote en vue du second tour ;
    4. Considérant que la déclaration de M. Ondet, dans laquelle celui-ci faisait état de la position officielle de son mouvement, tout en s'en dissociant, n'a pas présenté le caractère d'une manoeuvre et n'était pas de nature à induire en erreur les électeurs ;
    5. Considérant, enfin, que la circonstance que la proportion de bulletins blancs et nuls ait été plus élevée, au second tour de scrutin, que lors d'élections antérieures, n'est pas, à elle seule, de nature à établir que des erreurs ou des fraudes aient été commises lors du dépouillement ;
    6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête doit être rejetée,
                    Décide :
    Art. 1er. - La requête de M. Paul Dhaille est rejetée.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 24 octobre 2002, où siégeaient MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Certifié conforme :
Le Secrétaire général.
Le Président :
Yves Guéna.

Décisions n°s 2002-2634/2701 du 24 octobre 2002
(A.N., Var, 2e circonscription)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu 1° la requête n° 2634 présentée par M. Raymond Fallot, demeurant à Toulon (Var), enregistrée le 24 juin 2002 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 2e circonscription du département du Var pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu le mémoire en défense présenté par M. Philippe Vitel, député, enregistré comme ci-dessus le 12 juillet 2002 ;
    Vu les observations du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales enregistrées comme ci-dessus le 10 juillet 2002 ;
    Vu 2° la requête n° 2701 présentée par M. André Daspre, demeurant à Toulon (Var), enregistrée le 26 juin 2002 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 2e circonscription du département du Var pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment son article 38, alinéa 2 ;
Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu ;
    1. Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre la même élection ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
            Sur la requête de M. Fallot :
    2. Considérant que, pour contester les opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 juin 2002 dans la 2e circonscription du Var, M. Fallot soutient qu'en raison de la délivrance tardive du récépissé définitif de sa déclaration de candidature à cette élection, il n'aurait pas été en mesure de faire imprimer et distribuer son matériel de propagande ; qu'il résulte de l'instruction que le récépissé a été établi par le préfet le 21 mai 2002, soit dans le délai légal de quatre jours à compter de la déclaration de candidature prévu par l'article L. 161 du code électoral, et adressé à M. Fallot par voie postale ; que, si le récépissé n'est parvenu au requérant que le 30 mai, cette circonstance n'était pas de nature à empêcher l'intéressé de faire imprimer une circulaire et des bulletins de vote en temps utile pour que ces documents fussent distribués par la commission de propagande instituée par l'article L. 166 du même code ; qu'ainsi, les faits invoqués n'ont pu porter atteinte ni à l'égalité des candidats au regard des moyens de propagande, ni à la sincérité du scrutin ;
            Sur la requête de M. Daspre :
    3. Considérant que, pour demander l'annulation des mêmes opérations électorales, M. Daspre fait valoir que la répartition actuelle des sièges de députés entre les circonscriptions électorales du département du Var ne reposerait pas sur des « bases essentiellement démographiques », en violation du principe d'égalité devant le suffrage ;
    4. Considérant que s'il incombait au législateur, en vertu des dispositions combinées de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et des articles 3 et 24 de la Constitution, de modifier la délimitation des circonscriptions afin de tenir compte, chaque fois que c'était nécessaire, des évolutions de la population intervenues depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 86-1197 du 24 novembre 1986 relative à la délimitation des circonscriptions pour l'élection des députés, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel se prononçant, comme en l'espèce, en application de l'article 59 et non de l'article 61 de la Constitution, d'apprécier la constitutionnalité des dispositions législatives contenues dans le tableau n° 1 annexé au code électoral ;
    5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requêtes de MM. Fallot et Daspre doivent être rejetées,
                    Décide :
    Art. 1er. - Les requêtes de MM. Fallot et Daspre sont rejetées.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 24 octobre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Amelier, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Certifié conforme :
Le Secrétaire général.
Le Président :
Yves Guéna.

Décision n° 2002-2691 du 24 octobre 2002
(A.N., Seine-Saint-Denis, 2e circonscription)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu la requête présentée par M. Georges Sali, demeurant à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), enregistrée le 26 juin 2002 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 2e circonscription du département de la Seine-Saint-Denis pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu le mémoire en défense présenté par M. Patrick Braouezec, député, enregistré comme ci-dessus le 7 août 2002 ;
    Vu le mémoire complémentaire présenté par M. Georges Sali, enregistré comme ci-dessus le 11 septembre 2002 ;
    Vu les observations du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales enregistrées comme ci-dessus le 9 septembre 2002 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu ;
    1. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des constatations effectuées par la commission de contrôle des opérations électorales, que, lors du premier tour de scrutin, des personnes, dont certaines se présentaient comme des délégués de M. Braouezec, ont, dans la plupart des bureaux de vote de la commune de Pierrefitte-sur-Seine et pendant une partie au moins du scrutin, relevé et communiqué à des tiers des renseignements permettant d'identifier les électeurs qui n'avaient pas encore pris part au vote ; que, compte tenu de l'importance des écarts de voix, ces pratiques, pour regrettables qu'elles soient, ne peuvent être regardées comme ayant altéré en l'espèce la sincérité du scrutin ;
    2. Considérant que la circonstance, à la supposer établie, que les présidents de certains bureaux de vote se soient refusés à consigner au procès-verbal des opérations électorales des observations relatives aux faits mentionnés ci-dessus ne serait pas, par elle-même, de nature à justifier l'annulation du scrutin ;
    3. Considérant qu'il n'est pas établi qu'un bulletin ait été introduit frauduleusement dans l'urne du bureau de vote n° 16 ;
    4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de procéder à l'audition demandée, la requête de M. Sali doit être rejetée,
                    Décide :
    Art. 1er. - La requête de M. Georges Sali est rejetée.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 24 octobre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Certifié conforme :
Le Secrétaire général.
Le Président :
Yves Guéna.