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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 31 OCTOBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du mercredi 30 octobre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Questions au Gouvernement «...».

DÉFICIT DE L'ASSURANCE MALADIE «...»

MM. Claude Evin, Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

ÉGALITÉ D'ACCÈS AUX SOINS «...»

MM. Philippe Folliot, Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

LOI DE 1948 SUR LE LOGEMENT «...»

MM. Jean-Pierre Brard, Gilles de Robien,ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

RÉNOVATION URBAINE «...»

MM. François Cornut-Gentille, Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine.

TOURISME FRANÇAIS «...»

MM. Frédéric de Saint-Sernin, Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme.

POLITIQUE DE LA MONTAGNE «...»

MM. Louis Giscard d'Estaing, Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.

CONTRATS DE PLAN ÉTAT-RÉGIONS «...»

MM. François Brottes, Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.

POLITIQUE DE L'IMMIGRATION «...»

MM. Étienne Mourrut, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

DIFFICULTÉS
DE CERTAINES SPÉCIALITÉS MÉDICALES «...»

MM. Jacques Domergue, Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

SAUVEGARDE DE L'ÉDITION FRANÇAISE «...»

MM. Michel Françaix, Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication.

PÉNURIE DE MAIN-D'OEUVRE
DANS LE SECTEUR ARTISANAL «...»

MM. Lucien Degauchy, Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.

GRÈVE DES INSPECTEURS DU PERMIS DE CONDUIRE «...»

MM. Emmanuel Hamelin, Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE
DE Mme PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER

2.  Loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Après l'article 20 «...»

Amendement n° 195 de M. Préel : MM. Jean-Luc Préel, Jean Bardet, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour l'assurance maladie et les accidents du travail.
Amendements n°s 67 de la commission des affaires culturelles et 194 de M. Préel : MM. Jean Bardet, rapporteur ; Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées ; Jean-Luc Préel. - Retrait des amendements n°s 195, 67 et 194.

Article 21 «...»

MM. Jean-Marie Le Guen, Pascal Terrasse.
Amendement n° 68 de la commission : MM. Jean Bardet, rapporteur ; le ministre. - Adoption.
Amendement n° 69 de la commission : MM. Jean Bardet, rapporteur ; le ministre. - Adoption.
Amendement n° 70 de la commission : MM. Jean Bardet, rapporteur ; le ministre. - Adoption.
Amendement n° 196 de M. Préel : M. Jean-Luc Préel. - Retrait.
Adoption de l'article 21 modifié.

Article 22 «...»

M. Jean-Marie Le Guen, Mme Jacqueline Fraysse.
Amendement n° 282 du Gouvernement, avec le sous-amendement n° 286 de M. Bardet : MM. le ministre, Jean Bardet, rapporteur ; Jean-Marie Le Guen, Mme Jacqueline Fraysse, M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. - Adoption du sous-amendement n° 286 et de l'amendement n° 282 modifié.
L'article 22 est ainsi rédigé.

Article 23 «...»

M. Richard Mallié, Mme Muguette Jacquaint, MM. Jean-Marie Le Guen, le ministre.
Adoption de l'article 23.

Article 24 «...»

Amendement n° 272 de la commission : MM. Jean Bardet, rapporteur ; le ministre, Claude Evin, Maxime Gremetz. - Adoption.
Adoption de l'article 24 modifié.

Article 25 «...»

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées.
MM. Jean-Luc Préel, Pascal Terrasse, Maxime Gremetz, Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour les recettes et l'équilibre général : Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour l'assurance vieillesse ; le secrétaire d'Etat.
Amendement n° 197 de M. Préel : MM. Jean-Luc Préel, Jean Bardet, rapporteur ; le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 154 de M. Terrasse, 72 de la commission et 198 de M. Préel : MM. Pascal Terrasse, Jean Bardet, rapporteur ; Jean-Luc Préel, le ministre. - Rejet de l'amendement n° 154 ; adoption de l'amendement n° 72 ; l'amendement n° 198 n'a plus d'objet.
Amendement n° 73 de la commission : MM. Jean Bardet, rapporteur ; le ministre. - Adoption.
Amendements n°s 238 et 239 de M. Préel : MM. Jean-Luc Préel, Jean Bardet, rapporteur ; le ministre. - Rejets.
Adoption de l'article 25 modifié.

Article 26 «...»

MM. Jean-Luc Préel, Pascal Terrasse, Denis Jacquat, rapporteur.
Amendements de suppression n°s 74 de la commission, 155 de M. Terrasse et 241 de M. Heinrich : MM. Jean Bardet, rapporteur ; Pascal Terrasse, Michel Heinrich, le ministre, Bruno Gilles, Yves Bur, rapporteur. - Adoption.
L'article 26 est supprimé.

Après l'article 26 «...»

Amendements identiques n°s 75 de la commission et 244 de M. Heinrich : MM. Michel Heinrich, Jean Bardet, rapporteur ; le ministre. - Retraits.

Article 27 «...»

M. Jean-Luc Préel, Mme Jacqueline Fraysse, MM. Jean-Marie Le Guen, Pascal Terrasse, Jacques Barrot, Jean Dionis du Séjour, le ministre.
Amendement de suppression n° 156 de M. Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, Jean Bardet, rapporteur ; le ministre. - Rejet.
Amendement n° 76 de la commission : MM. Jean Bardet, rapporteur ; le ministre, Jean-Marie Le Guen. - Adoption.
Amendement n° 77 de la commission : MM. Jean Bardet, rapporteur ; le ministre, Jean-Marie Le Guen, Jacques Barrot, Maxime Gremetz. - Retrait.
Amendement n° 77 repris par M. Le Guen. - Rejet.
Amendement n° 245 de M. Morange : MM. Michel Heinrich, Jean Bardet, rapporteur ; le ministre, Jean-Marie Le Guen. - Retrait.
Amendement n° 245 repris par M. Terrasse : MM. Pascal Terrasse, Jacques Barrot, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 78 de la commission : MM. Jean Bardet, rapporteur ; le ministre. - Adoption.
Amendement n° 79 de la commission : MM. Jean Bardet, rapporteur ; le ministre. - Adoption.
Amendement n° 80 de la commission, avec le sous-amendement n° 288 du Gouvernement, et amendement n° 253 de M. Dionis du Séjour : MM. Jean Bardet, rapporteur ; le ministre. - Adoption du sous-amendement n° 288 et de l'amendement n° 80 modifié ; l'amendement n° 253 n'a plus d'objet.
Adoption de l'article 27 modifié.

Article 17 (précédemment réservé) «...»

MM. Jean-Luc Préel, Jean-Marie Le Guen.
Amendements de suppression n°s 55 de la commission et 152 de M. Le Guen : MM. Jean Bardet, rapporteur ; Jean-Marie Le Guen, le ministre. - Adoption.
L'article 17 est supprimé.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
3.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Nous commençons par une question du groupe socialiste.

Déficit de l'assurance maladie

    M. le président. La parole est à M. Claude Evin.
    M. Claude Evin. Monsieur le Premier ministre, lundi soir, interrogé sur une chaîne d'informations, et évoquant l'avenir de notre système de sécurité sociale, vous avez déclaré qu'à défaut de maîtriser l'évolution des dépenses d'assurance maladie, vous souhaitiez étendre le champ des assurances complémentaires de santé.
    Cela veut dire que vous voulez réduire la prise en charge des soins par la sécurité sociale obligatoire de base, (« Mais non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française) que vous voulez augmenter la part des dépenses supportées par les ménages (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) et que vous remettez en cause la sécurité sociale fondée sur la solidarité nationale. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Bien entendu, vous allez vous défendre de vouloir privatiser la sécurité sociale ! Jamais vous n'avouerez explicitement une telle intention, tant vous êtes conscient de l'attachement de nos concitoyens à la solidarité nationale.
    Mais il y a une manière insidieuse de procéder, qui conduit inéluctablement à une privatisation de l'assurance maladie. Elle consiste à laisser déraper les dépenses pour, ensuite annoncer aux Français que la solidarité coûte trop cher, qu'on ne peut pas tout se payer et pour en appeler à la responsabilisation des malades en leur demandant, afin de financer leurs soins, de souscrire des assurances selon leur niveau de revenus. C'est la situation que vous êtes en train de créer.
    De l'aveu même de M. le ministre de la santé, le déficit de l'assurance maladie sera, fin 2003, de l'ordre de 7 à 10 milliards d'euros. A ce moment, vous ne pourrez plus invoquer l'héritage. Face à l'ampleur d'un tel déficit, nous ne voyons se dessiner aucune mesure de nature à réduire cette progression vertigineuse. En matière de sécurité sociale en 2003, monsieur le Premier ministre, la pente sera forte et je crains que la route ne soit pas droite...
    Que comptez-vous donc faire pour ne pas atteindre un tel déficit ? A défaut de réponse précise et concrète à cette interrogation, toutes vos dénégations concernant une privatisation de la sécurité sociale... (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Monsieur Evin, posez votre question !
    M. Claude Evin. ... seront futiles et mensongères. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le député, comme je me réjouis de votre inquiétude nouvelle pour la sécurité sociale ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Et vous avec raison d'être inquiet vu ce que vous nous laissez ! Aucune réforme de fond engagée en cinq ans, les excédents conjoncturels confisqués, les recettes de la sécurité sociale détournées pour financer les 35 heures. (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Et, en prime, vous avez conduit à la rupture du paritarisme qui fondait notre sécurité sociale de toujours ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Monsieur Evin, vous ne nous ferez pas aller plus vite que la concertation ne l'exige, et je vous conseille (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) de ne pas préjuger des conclusions auxquelles elle pourrait aboutir.
    Lorsque le précédent gouvernement a créé la couverture maladie universelle, il a reconnu l'impuissance du régime de base à couvrir tous les besoins, puisqu'il a été nécessaire de la créer pour assurer 6 % de nos concitoyens. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Et vous avez même créé un seuil de pauvreté tel que même la CNAM, de sa propre initiative, a jugé bon de gommer les injustices, ce qui a conduit d'ailleurs le Président de la République dans sa campagne...
    Mme Martine David. Caricature !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... à dire qu'il allait inciter à la couverture complémentaire pour chacun.
    M. François Hollande. Parlez-nous des déficits !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. A vous entendre, on pourrait croire que le régime complémentaire, autrement dit, les dizaines de millions de mutualistes, les institutions de prévoyance comme l'ARGIC, ou comme l'ARRCO, c'est le diable !
    Monsieur Evin, cherchez le diable où vous voulez ! En tout cas, il n'est pas dans le régime complémentaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

ÉGALITÉ D'ACCÈS AUX SOINS

    M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Philippe Folliot. Ma question s'adresse à M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    Anglès, Murat-sur-Vèbre et bientôt Teillet dans la montagne tarnaise, le Massif central en général, comme les Vosges, le Jura, certaines vallées alpines ou pyrénéennes ne sont pas plus épargnées que nombre de nos campagnes. Un peu partout sur le territoire national, combien de nos villages, bourgs-centres ou chefs-lieux de canton n'ont plus de médecin généraliste ? Ce phénomène ne concerne pas encore les villes, petites ou moyennes, mais semble aussi toucher, peut-être pour d'autres raisons, certains quartiers dits sensibles de nos agglomérations et concerner également beaucoup d'autres professionnels de la santé : infirmières libérales, dentistes, kinés. Trouver un remplaçant temporaire est bien souvent pour eux un véritable casse-tête. Pour le départ à la retraite, c'est mission quasi impossible ! Dans de nombreuses zones rurales telles que les monts de Lacaune, la quasi-totalité des généralistes plus de cinquante ans. Quelle sera la situation dans dix ans ?
    Après l'Afrique subsaharienne, les rives du Mékong et autres points chauds de notre planète, doit-on se résoudre à voir un jour nos médecins humanitaires revenir en France pour s'occuper de nos campagnes ? (Murmures sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Monsieur le ministre, le fossé de l'inégalité se creuse ; on assiste à ce qu'il convient d'appeler une désertification médicale de nos campagnes. Cette inégalité de la démographie médicale, incontestable, entre les régions atteint des sommets au niveau infrarégional. Elle appelle d'autres mesures que celles prises précédemment qui n'ont à ce jour malheureusement prouvé que leur inefficacité. (« La question ! » sur les mêmes bancs.)
    M. le président. Quelle est votre question, mon cher collègue ?
    M. Philippe Folliot. Relèvement du numerus clausus, création d'un observatoire de la démographie médicale, instauration d'un système d'aide à l'installation sont restés lettre morte faute de décrets d'application.
    Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour rétablir l'égalité d'accès aux premiers soins pour nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le député, vous avez raison, les conditions d'exercice de la médecine en milieu rural sont particulièrement difficiles. Vous conviendrez avec moi qu'il n'est pas facile d'être médecin de campagne à Saint-Pierre-de-Trivisy dont vous avez été le maire pendant de nombreuses années. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Cette pénurie a deux causes principales, parfaitement identifiées : un numerus clausus fixé de manière aveugle pendant de trop nombreuses années, (« C'est le plan Juppé ! » sur les bancs du groupe socialiste) à droite comme à gauche ; des conditions d'exercice devenues insupportables et incompatibles avec l'idée que les médecins se font de leur propre métier.
    Alors, quelles mesures le Gouvernement a-t-il prises, ou prend-il ? Le numerus clausus a été relevé cette année de 400 et continuera de l'être autant qu'il sera besoin. Le décret pour faciliter l'installation des médecins en zones rurales et en zones désertifiées sera signé et paraîtra avant la fin de l'année. Dans le courant de la discussion sur le PLFSS, j'ai proposé, au nom du Gouvernement, un amendement qui, d'ailleurs, a été voté par l'ensemble des présents, tendant à la création de cabinets secondaires, comme on en connaissait autrefois. Il est temps, en effet, que les médecins de ville, qui ne veulent pas nécessairement vivre à la campagne avec leur famille, assurent une présence médicale continuelle dans nos villages et dans nos bourgades.
    J'ai également prévu, dans le PLFSS, des facilités pour que les médecins récemment retraités puissent assurer des remplacements de confrères qui sont dans la difficulté.
    M. François Goulard. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Enfin, le financement des réseaux de soins a été signé. Nous souhaitons les développer et j'attends les résultats du groupe animé par Charles Descous sur la permanence des soins pour savoir la rémunération juste de ce qui constitue un service public : assurer une présence médicale à tout moment dans les milieux qui en ont besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française).

LOI DE 1948 SUR LE LOGEMENT

    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le Premier ministre, vous donnez l'image d'un groupement hyperactif, d'un gouvernement vibrionnant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Il me fait penser à la fable de La Fontaine : « Le coche et la mouche ».
    Vous avez déjà remis en cause la loi sur les 35 heures. («Oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Vous vous préparez à remettre en cause la loi contre les licenciements boursiers. (« Oui ! » sur les mêmes bancs.) Vous avez supprimé les emplois jeunes. Vous réduisez, entre autres, le budget de la culture. Vous supprimez des postes d'agents à l'éducation nationale.
    Aujourd'hui, une seule catégorie de Français peut vous dire merci : les plus riches, puisque pour eux, vous avez baissé les impôts. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Le 19 janvier 1995, le Conseil consitutionnel a reconnu comme principe constitutionnel le droit à un logement décent. Or il semble que vous ouvriez la chasse aux quelques avantages de nos concitoyens les plus modestes. Je pense à la loi de 1948 (« Très bien ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste)... dont bénéficient environ 300 000 ménages parmi les plus pauvres de notre pays. Vous voulez libérer les loyers.
    Au moment où les loyers augmentent, où l'accession à la propriété sociale est insuffisante, allez-vous livrer les plus modestes de nos compatriotes au secteur spéculatif ? (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Monsieur Brard, posez votre question, je vous prie.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur de Robien, vous qui êtes chargé du logement, alors que nous allons célébrer le bicentenaire de la naissance de Victor Hugo, notre grand écrivain, grand poète national, héros de toutes les grandes luttes contre les injustices, les descendants de Cosette (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française) vont-ils devoir subir l'âpreté des Thénardier, parce que vous leur laissez la bride sur le cou, livrant les plus modestes à la cupidité de quelques-uns ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, la caractéristique principale des logements soumis à la loi de 1948, c'est qu'ils sont dégradés. La majorité actuelle et le Gouvernement ne se satisferont jamais de réserver des logements dégradés à des personnes fragiles, âgées ou modestes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    C'est pourquoi nous inciterons les propriétaires à faire des travaux - en maintenant la loi de 1948 pour les personnes âgées ou modestes - avec notamment des crédits de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.
    Il faut que chacun sorte gagnant de l'affaire : que les locataires bénéficient de logements rénovés, car ceux-ci sont actuellement dans une situation vraiment indécente, que les propriétaires aient les moyens de rénover les logements, et enfin que la collectivité publique puisse réduire le stock de logements dégradés. Voilà pourquoi nous allons, progressivement, avec les locataires et les propriétaires, conjuguer la rénovation et la libération des loyers.
    Monsieur le député, si pendant cinq ans vous avez légiféré, beaucoup ...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Beaucoup trop !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ... réglementé, beaucoup trop, normalisé, encore trop, nous, comme vous l'avez très bien dit, nous sommes hyperactifs quand il s'agit d'améliorer la vie quotidienne des Français. C'est notre conception de la politique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

RÉNOVATION URBAINE

    M. le président. La parole est à M. François Cornut-Gentille, pour le groupe UMP.
    M. François Cornut-Gentille. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine.
    Répondant, il y a quelques jours à une question de notre collègue Cardo, monsieur le ministre, vous déclariez vouloir engager un véritable plan de bataille en matière de logement. Ce matin, vous avez communiqué au conseil des ministres les principaux axes de ce programme de rénovation urbaine. De part et d'autre de cet hémicycle, chacun s'accorde, sans ignorer ce qui a été réalisé par le passé, sur l'urgence d'engager rapidement une action extrêmement forte dans les quartiers laissés pour compte. Il y va, en effet, de notre cohésion nationale.
    Je voudrais vous interroger, certes, au nom du groupe UMP, mais aussi et surtout, au nom de tous ces maires, de droite et de gauche, qui s'efforcent de rétablir l'espoir dans ces quartiers.
    D'abord, pourquoi privilégier la rénovation urbaine et le logement par rapport aux autres aspects de la politique de la ville ?
    Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Les démolitions !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Etes-vous assuré de disposer, sur la durée, des financements nécessaires à la rénovation de ces quartiers ?
    Enfin, vous savez à quel point les procédures - complexes - ralentissent l'action de rénovation de l'habitat. Comment allez-vous nous aider à lever ces obstacles ?
    Vous nous proposez aujourd'hui un ambitieux plan de bataille, mais pouvez-vous assurer les maires qu'ils auront effectivement les moyens de livrer et de gagner cette bataille sur le terrain ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine.
    M. Jean-Pierre Brard. Borloo dans le rôle de Jean Valjean !
    M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine. Monsieur le maire de Saint-Dizier, votre question en comprenait en fait trois. Pourquoi privilégier l'habitat ?
    D'abord parce qu'il est inacceptable de trouver encore un habitat indigne dans ces quartiers. Nous avons aujourd'hui en France, et c'est un constat qui est partagé par l'union des HLM, par les maires et par les partenaires du 1 %, 200 000 logements en situation irrémédiablement dégradée, qui nécessitent une réhabilitation lourde, voire une résidentialisation, à peu près autant qui méritent une remise à niveau d'entretien, 100 000 copropriétés privées scandaleusement dégradées, où règnent les marchands de sommeil, et enfin 200 000 logements insalubres en centre-ville, dont 100 000 doivent être réhabilités dans les cinq ans qui viennent.
    La deuxième raison, c'est par l'habitat que s'est opérée la ségrégation territoriale. C'est dans ces logements indignes que se sont retrouvés nos compatriotes les plus fragilisés - par la langue, par la santé, la précarité et le manque d'emplois. Il faut donc remettre tout le parc français à niveau afin d'assurer la fluidité de la proposition d'habitat. Oui, nous commençons par l'habitat car c'est par lui que les mamans vont reconquérir nos quartiers, parce que c'est là que nos enfants seront élevés.
    Quant à la fiabilité des engagements, c'est une dimension indispensable pour ces opérations urgentes, dont la mise en oeuvre se fera sur trois ou quatre ans et l'amortissement sur vingt ans.
    M. Arnaud Montebourg. Où est donc le budget pour tout cela ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine. Il convient donc que le Gouvernement et ses partenaires s'engagent dans la durée.
    Mme Martine David. Bla-bla !
    M. le ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine. C'est pour cette raison qu'est prévue, pour la première fois, une loi de programmation pour les cités et les banlieues, où l'Etat s'engage pour cinq ans, avec la mise en place d'un guichet unique regroupant tous les partenaires et des procédures simplifiées. Globalement, les engagements de tous les partenaires s'élèvent à environ cinq milliards d'euros. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

TOURISME FRANÇAIS

    M. le président. La parole est à M. Frédéric de Saint-Sernin, pour le groupe UMP.
    M. Frédéric de Saint-Sernin. Monsieur le secrétaire d'Etat au tourisme, il est encore trop tôt pour mesurer les conséquences de l'attentat de Bali sur l'économie mondiale. Cependant, en France, on peut d'ores et déjà le constater, de nombreuses agences de voyage ont dû annuler des vols et rembourser plus d'un millier de vacanciers, qui souhaitaient partir en vacances en Indonésie. Contrairement à ce qui a pu se passer aux Etats-Unis, le 11 septembre, ce sont les touristes qui, cette fois, ont été la cible de cet attentat abject, montrant que le terrorisme frappe désormais n'importe où.
    Le terrorisme est un facteur de plus en plus influent dans le paysage économique international, pesant de plus en plus sur les décisions, qu'il s'agisse des marchés, des investisseurs ou des autorités. La menace d'une intervention armée en Irak, qui plane toujours, produit déjà des effets négatifs sur les flux touristiques. L'attentat survenu à Bali ne fait que renforcer cette tendance. Toutes les destinations sont concernées, en particulier la France.
    Or, le tourisme demeure le premier produit excédentaire de notre balance des paiements, représentant 7 % du PIB de notre pays. J'aimerais connaître votre réaction au sujet de l'inquiétude qui frappe beaucoup de nos compatriotes et de l'incertitude qui pèse sur le secteur. J'aimerais aussi connaître les moyens que vous souhaitez mettre en oeuvre pour rassurer les professionnels du tourisme ainsi que les touristes étrangers désireux de visiter la France. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au tourisme.
    M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme. Je m'associe, une fois de plus, à la douleur des familles frappées dans leur coeur par l'attentat odieux et lâche du 12 octobre à Bali. Vous l'avez rappelé, l'attentat du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, l'attaque du pétrolier français au Yémen et la menace d'une intervention militaire américaine en Irak sont autant de chocs qui ébranlent l'économie mondiale. Et le tourisme, bien entendu, est le premier secteur touché.
    Je vous remercie, monsieur le député, d'avoir rappelé la place du tourisme en France. Avant tout, il ne faut pas céder à la psychose pour ne pas faire le jeu des terroristes.
    Je suis en train de mettre en place, en relation avec les professionnels et les réseaux diplomatiques, une cellule de veille chargée d'apporter des informations fiables et réactives. Je m'attache, en outre, à promouvoir la France comme une destination sûre. A cet égard, je fais appel à l'ensemble de la représentation nationale, car chacune et chacun, dans vos régions, vous êtes de formidables relais pour vendre le tourisme, tant sur le littoral qu'à l'intérieur du pays. D'avance, je vous remercie pour votre participation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

POLITIQUE DE LA MONTAGNE

    M. le président. La parole est à M. Louis Giscard d'Estaing, pour le groupe UMP.
    M. Louis Giscard d'Estaing. Ma question s'adresse à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le ministre, vendredi dernier, vous assistiez à Gap, en compagnie du Premier ministre, à la conclusion des travaux du congrès de l'ANEM, l'Association nationale des élus de la montagne.
    M. Patrick Ollier. Très bien !
    M. Louis Giscard d'Estaing. Par ailleurs, le Sénat a rendu public, le mercredi 16 octobre, un rapport sur l'avenir de la montagne, réalisé sous l'égide de la mission commune d'information sur la montagne, qui formule de nombreuses propositions, invitant le Gouvernement à prendre en compte la spécificité de nos massifs et à relancer la politique de la montagne.
    Les montagnes de France couvrent 28 % du territoire national, 13,5 % de nos concitoyens y vivent. Quelles que soient leur diversité et la nature de leurs atouts, nos montagnes souffrent de handicaps communs que le Massif central, comme les autres massifs, doit surmonter. Parmi ces handicaps, la couverture en téléphonie mobile. Le CIADT de Limoges, qui s'était tenu le 9 juillet 2001, sous la présidence du Premier ministre Lionel Jospin et en présence du ministre alors en charge de l'aménagement du territoire, Mme Voynet, prévoyait des avancées dans ce domaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Plus d'un an après, force est de constater que rien de concret ne s'est produit sur le terrain. (Exclamations et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Dans ce domaine comme malheureusement dans bien d'autres, ni les mesures, ni les financements n'ont suivi les effets d'annonce. C'est ainsi que la sous-budgétisation de l'indemnité compensatoire de handicap naturel nous a amenés à voter, dès cet été, dans le collectif budgétaire, le supplément de dotation que nous a proposé le ministre de l'agriculture.
    Monsieur le ministre, vous êtes chargé de la politique de la montagne. Comptez-vous engager une réforme de la loi du 9 janvier 1985 ? Pouvez-vous nous indiquer quelle sera la méthode du Gouvernement pour que soit prise en compte la particularité des zones de montagne dans la relance de la politique d'aménagement du territoire, bien nécessaire à l'issue des cinq dernières années que nous venons de connaître ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Claude Lefort. Pourtant, que la montagne est belle ! (Sourires.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, la montagne est un atout non seulement pour la France mais pour l'Europe.
    M. Patrick Ollier. C'est vrai !
    M. François Hollande. Pour la plaine aussi !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. A l'occasion du mémorandum sur la politique de cohésion régionale que la France doit rendre avant la fin 2002, le Premier ministre m'a demandé de tout mettre en oeuvre pour intégrer la logique des massifs dans la politique européenne. Pour la première fois de son histoire, le Premier ministre s'est rendu au congrès national des élus de la montagne. Cette présence a une grande force symbolique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Le 13 novembre sera installé le Conseil national de la montagne, chargé d'émettre des avis et des propositions, notamment sur l'excellent rapport élaboré par le Sénat. Sur le plan législatif, mon collègue Hervé Gaymard prépare une loi sur le développement rural qui contiendra un volet montagne et apportera une modification à la loi du 9 janvier 1985. Enfin, sur le plan réglementaire, nous prévoyons d'assouplir les procédures UTN et de clarifier le rôle des commissariats de massif, qui ont une vocation de coordinateur de projets.
    En ce qui concerne la téléphonie mobile, vous avez évoqué le CIADT du 9 juillet 2001. Quel en est le résultat ? (« Rien ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jacques Barrot. Zéro, zéro !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Un seul poteau ! Pourquoi ? Parce que la solution proposée n'était ni sécurisée sur le plan juridique ni fiable sur le plan technique. Nous avons remis le dossier à plat. (« Tout est à plat ! » et rires sur plusieurs bancs du groupe socialiste) et obtenu l'accord des trois opérateurs, que nous recevrons le 4 novembre. Le CIADT de fin d'année fixera très clairement les objectifs gouvernementaux afin d'aborder avec détermination, pragmatisme, bon sens et partenariat avec les collectivités locales le dossier de la téléphonie mobile et de couvrir les zones blanches. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

CONTRATS DE PLAN ÉTAT-RÉGIONS

    M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour le groupe socialiste.
    M. François Brottes. Monsieur le Premier ministre, le ton est donné, le rythme soutenu. Vous arpentez le territoire, vous parcourez le pays de long en large et, bien sûr, de haut en bas. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Ce n'est évidemment pas un reproche, simplement le constat que vous rivalisez d'énergie avec votre ministre de l'intérieur pour que votre Gouvernement soit celui de l'ubiquité, ce qui ne vous empêche nullement d'être aussi le gouvernement de l'ambiguïté. (« Ça alors ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Car pendant que chacun participe religieusement à vos assises de la décentralisation, vous détricotez les contrats de plan signés entre l'Etat et les régions !
    M. Arnaud Montebourg. Et ça, c'est grave !
    M. François Brottes. En effet, d'une part votre ministre de l'aménagement du territoire juge que ces contrats s'exécutent mal - et avouez que ce n'est pas les suppressions de postes d'ingénieurs dans les DDE qui vont améliorer les choses -, d'autre part vous avez vous-même envisagé de réduire leur durée à trois ans. Il s'agit de deux alertes suffisamment fortes pour aviver dans tout le pays l'inquiétude quant au respect des engagements de l'Etat. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Ces contrats, qui concernent tout le monde, peuvent porter sur l'amélioration des transports en commun, les aides aux PME, le soutien à l'agriculture ou la réalisation d'infrastructures routières ou d'équipements publics très attendus.
    Monsieur le Premier ministre, allez-vous trahir la parole de l'Etat en étirant la durée d'exécution des contrats de plan, comme l'avait fait l'un de vos illustres prédécesseurs, M. Alain Juppé ? Allez-vous raccourcir leur durée à trois ans, sans préciser les échéances, pour mieux justifier les gels ou les annulations de crédits qui s'annoncent ? Si je vous pose cette double question, c'est parce que nous sentons l'inquiétude monter dans les régions...
    M. Christian Bataille. Oui, c'est vrai !
    M. François Brottes. ... mais aussi en pensant au proverbe chinois que le ministre chargé de l'aménagement du territoire citait récemment : « Ce n'est pas parce que l'on a neuf femmes que l'on peut faire un enfant en un mois. » Observation assez pertinente ! (Sourires.) Mais je crains que les tours de passe-passe qui s'annoncent ne vous conduisent à tenter de contredire cette sentence. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, je ne peux que rendre hommage à votre référence puisque nous sommes, avec les contrats de plan, dans un souci de fertilisation permanente des territoires. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Vous avez parlé de la crédibilité de la parole de l'Etat.
    M. François Brottes. En effet !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Il faut renoncer à la politique d'affichage (« Très bien ! » Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) en faveur d'une politique de résultats. Car monsieur le député, lorsque vous inscrivez, dans un contrat de plan, des projets dont on sait à l'avance que le taux de réalisation sera de 0 %, ce n'est que de l'affichage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) S'agissant du volet territorial, il est évident que des dossiers ne seront pas réalisés. C'est pourquoi nous envisageons un délai supplémentaire d'un an.
    Nous allons proposer une mesure, souhaitée par le Premier ministre, une révolution dans la pratique administrative (Rires sur les bancs du groupe socialiste) : la fongibilité des crédits consacrés à certains domaines. Nous allons faire en sorte que les contrats aient effectivement une durée plus courte, mais une efficacité bien plus grande, afin que la parole publique soit respectée et que les concitoyens en voient la concrétisation sur le terrain, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
    M. Richard Mallié. Exactement !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Nous avons le souci d'un partenariat équilibré. Les contrats de plan viseront des objectifs stratégiques et non des objectifs à caractère électoraliste. (Applaudissements sur les bancs de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

POLITIQUE DE L'IMMIGRATION

    M. le président. La parole est à M. Etienne Mourrut, pour le groupe UMP.
    M. Etienne Mourrut. Monsieur le président, mes chers collègues, c'est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales que ma question s'adresse. Les Français vous sont reconnaissants, monsieur le ministre, d'avoir pris à bras-le-corps et avec l'efficacité qui vous caractérise la résolution des drames humains et sociaux que représente, tant pour les pays d'accueil que pour les pays d'origine, l'immigration clandestine. Pour autant, il est indéniable que l'immigration légale aboutit aussi, en son flux continu, à créer ou à renforcer de véritable ghettos dans certaines communes ou dans certains quartiers. L'héritage de la gauche, avec l'abrogation, en 1998, de certaines dispositions des lois Pasqua-Debré sur l'entrée et le séjour des étrangers en France a des conséquences néfastes sur la cohésion sociale dans de nombreuses communes et quartiers, particulièrement dans le Midi méditerranéen. Le Général de Gaulle lui-même, il y a plus de quarante ans, ne manquait pas d'insister sur la forme que devait revêtir l'immigration en France. « L'immigration doit rester, disait-il, une force d'appoint et ne jamais devenir une force de subdivision ». Tout dans sa vision et dans son discours servait les intérêts de la France et par là même la cohésion sociale.
    Aujourd'hui, peut-on accepter que des regroupements familiaux se fassent dans des quartiers déjà considérés commes des ghettos ? Peut-on accepter que les attestations d'accueil, dont la procédure a été ramenée au rang de simple formalité par la gauche en 1998, aboutissent, dans une proportion non négligeable, à une immigration clandestine au terme du séjour ?
    M. Jean-Claude Lefort. Et votre question ?
    M. Etienne Mourrut. Les Français sont et restent un peuple généreux et hospitalier. ( «Pas vous ! » sur quelques bancs du groupe socialiste.) Pourtant, le 21 avril dernier, ils nous ont lancé un cri d'alarme.
    M. le président. Monsieur Mourrut, pourriez-vous avoir l'amabilité de poser votre question ?
    M. Etienne Mourrut. Nos concitoyens peuvent-ils compter, monsieur le ministre, sur un vrai débat sur l'émigration, sans tabou ni terrorisme intellectuel, en vue d'établir une rédaction adaptée de l'ordonnance du 2 novembre 1945, qui complèterait votre engagement fort contre l'immigration clandestine ? Et enfin, pour avoir une approche concrète...
    M. le président. Cher collègue, M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a entendu votre question, et je lui donne la parole.
    M. François Hollande. Ah, laissez-lui poser sa question !
    M. Jean-Pierre Brard. Il n'y a qu'à deviner le reste !...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, vous avez raison, la politique de l'immigration est un grand défi pour la France, et il faut que nous l'abordions dans toutes ses composantes.
    D'abord, pour parvenir à une véritable intégration, il faut - enfin ! - engager une lutte efficace contre l'immigration clandestine, dont les premières victimes sont les étrangers en situation régulière. C'est pourquoi nous voulons nous réjouir de l'action des services de police, qui, dans la nuit du 23 octobre, ont démantelé, à Sangatte, le dernier réseau de trafiquants qui aidait des étrangers à s'introduire illégalement sur le territoire.
    M. Dominique Paillé. Bravo !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Quarante Kurdes d'origine irakienne ont été mis sous les verrous, ce qui est une bonne nouvelle. Il n'y a aucune indulgence à avoir envers des comportements de ce type. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Ensuite, la première frontière de la France est incontestablement Roissy.
    M. Jacques Desallangre. C'est l'océan !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est pourquoi je proposerai au Premier ministre, avant la fin de l'année, une réforme profonde de l'organisation des services de sécurité de l'aéroport. Si nous voulons être efficaces, il faut agir en amont, dans les pays source en y plaçant, avec leur accord, des forces de police qui empêcheront que d'éventuels clandestins ne montent dans l'avion, plutôt que d'attendre, en France, qu'ils en descendent.
    M. Richard Mallié. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est ce que nous avons fait en Roumanie où sept fonctionnaires de police sont démormais en poste.
    Il faut également être plus accueillant et poser les véritables questions. Dans les Bouches-du-Rhône, un étranger a dû attendre plus de six ans pour obtenir une réponse à une demande de droit d'asile, alors que le délai officiel de rétention administrative est de douze jours.
    M. Yves Bur. Scandaleux !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cela n'a aucune signification, ni dans un sens ni dans un autre.
    Enfin, il faudra avoir le courage - et cela ne me gêne pas de le dire devant la majorité -...
    M. Bernard Roman. Nous, nous ne comptons pas ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... d'aller jusqu'au bout de certains débats qui n'ont pas été purgés par la gauche. Celle-ci aime parler de générosité, mais elle déteste la mettre en oeuvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et je ne crains pas de dire devant la représentation nationale que ce n'est pas satisfaisant.
    M. François Hollande. Nous ne pouvons pas accepter d'être traités ainsi !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il en est ainsi de la pratique de la double peine, qui conduit à renvoyer dans leur pays d'origine - par exemple en Algérie - des gens qui en sont venus à l'âge de huit mois et qui vivent en France depuis trente ans.
    Il faudra avoir le courage de changer cette pratique. (« Faites-le ! » sur quelques bancs du groupe socialiste.) La majorité, comme le pays, souhaite une politique d'immigration ferme, certes, mais également généreuse. Elle sera d'autant plus ferme, mesdames, messieurs les députés, que nous ne craindrons pas de la voir généreuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jacques Desallangre. Régularisez ! Régularisez !

DIFFICULTÉS DE CERTAINES SPÉCIALITÉS MÉDICALES

    M. le président. La parole est à M. Jacques Domergue, pour le groupe UMP.
    M. Jacques Domergue. Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le ministre, la coordination des médecins spécialistes ainsi que certains syndicats médicaux ont déposé un préavis de grève illimitée pour le 4 novembre.
    Cette grève menace le fonctionnement, voire l'équilibre de certains établissements privés. Elle traduit les difficultés rencontrées par certaines spécialités médicales et l'angoisse qu'elles ressentent.
    Trois spécialités sont au coeur de la tourmente : la chirurgie, l'anesthésiologie, l'obstétrique. Aujourd'hui, monsieur le ministre, quand un chirurgien se lève la nuit pour opérer un malade en urgence... (« Il va nous faire pleurer ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

    M. Jacques Domergue. Mes chers collègues, veuillez m'écouter, car la question nous concerne tous ! Aujourd'hui, quand un chirurgien se lève la nuit pour opérer un malade en urgence, la rémunération de son acte est inférieure aux frais engendrés par l'acte !
    Les spécialités dont je parle ont en commun la pénibilité, la responsabilité et la faible rémunération.
    Monsieur le ministre, vous avez déjà pris des mesures en faveur des médecins généralistes ou des pédiatres : quelles sont celles que vous pouvez prendre aujourd'hui de manière ponctuelle, urgente, pour venir en aide à ces spécialités en grande difficulté ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le député, en répondant à une question de votre collègue Philippe Vitel, il y a quelques jours, j'étais convenu, comme vous venez de le souligner à nouveau, que les spécialistes étaient désemparés et exaspérés. On sait les raisons de cette situation : les honoraires n'ont pas augmenté depuis huit ans et les conditions d'exercice sont difficiles.
    Les spécialistes m'ont fait part de trois revendications : d'une part, ils souhaitent que leurs compétences et leur travail soient mieux reconnus ; d'autre part, ils ont le souci de l'équité entre le secteur public et le secteur privé enfin, il posent la question de leur assurance médicale.
    Le premier point relève d'abord et avant tout de la négociation conventionnelle. Elle est désormais entrée dans le vif du sujet et je n'ai pas l'intention de m'immiscer dans ce dialogue entre partenaires sociaux.
    M. Bernard Accoyer. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je dois vous dire que néanmoins, depuis le mois de juin, nous avons augmenté le numerus clausus, rétabli les avantages sociaux des spécialistes qui en étaient privés depuis quatre ans et supprimé les lettres clés flottantes dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
    Pour ce qui est du deuxième point, la politique du Gouvernement est de favoriser la complémentarité entre le public et le privé. Je me suis engagé à ce qu'il y ait une parfaite équité dans la répartition des équipements entre les deux secteurs, qui sont parfaitement équivalents. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Enfin, sur le troisième point, je suis en mesure de vous dire que, le 12 novembre, le Sénat discutera d'une proposition de loi tendant à régler enfin le problème de la responsabilité civile médicale.
    M. Arnaud Montebourg. Encore le Sénat, cette chambre indigne !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le 1er janvier, comme je m'y suis engagé, les responsables des établissements hospitaliers publics ou privés et les professionnels seront assurés et pourront travailler tranquillement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

SAUVEGARDE DE L'ÉDITION FRANÇAISE

    M. le président. La parole est à M. Michel Françaix, pour le groupe socialiste.
    M. Michel Françaix. Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et de la communication.
    En écoutant, cet été, vos déclarations étincelantes (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) - « Je défendrai l'audiovisuel public en lui donnant les moyens de son financement », « Je rattacherai la redevance audiovisuelle à la taxe d'habitation pour en réduire considérablement les coûts de perception », « Je respecterai l'engagement du Président de la République de sanctuariser le budget de la culture », « Je suis un partisan déterminé du numérique terrestre » -...
    Mme Martine David. Beaucoup de paroles !
    M. Bernard Roman. Et peu d'actes !
    M. Michel Françaix. ... je me disais : voilà un ministre qui se battra pour ses dossiers et n'acceptera pas d'être la bonne conscience du Gouvernement. Et, dois-je vous l'avouer ?, je m'en félicitais.
    Mme Martine David. C'est raté !
    M. Jérôme Lambert. Loupé !
    M. Michel Françaix. Hélas, il a fallu déchanter. Nous avons vu, tour à tour, le service public de l'audiovisuel privé de moyens, le numérique terrestre reporté aux calendes grecques, les télévisions locales ramenées à la portion congrue,...
    M. Michel Herbillon. A cause de vous !
    M. Michel Françaix. ... la baisse notable du budget de la culture - et ce n'est pas votre technique comptable pour cacher la réalité qui rassurera les professionnels -, le statut des intermittents du spectacle remis en cause, l'avenir du cinéma français devenu incertain en raison des fragilités de Canal plus et, aujourd'hui, Lagardère s'appropriant le pôle édition français de Vivendi.
    M. Michel Herbillon. Quelle mauvaise foi !
    M. Michel Françaix. Monsieur le ministre, le monde du livre est inquiet, car l'édition française se trouve dans une situation unique au monde : 60 % du livre de poche, 80 % du livre scolaire et, plus grave encore, 70 % de la distribution sont contrôlés par un seul groupe.
    M. Guy Teissier. Et le monopole de la CGT ?
    M. Richard Mallié. Le monopole du syndicat du livre !
    M. Michel Françaix. Il n'y a pas lieu, me semble-t-il, de s'enorgueillir comme vous le faites de cette solution franco-française. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Vous ne pouvez pas accepter d'être le ministre de la culture qui, pour sauver la téléphonie, sacrifie l'édition française. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Un député du groupe socialiste. Fossoyeur !
    M. Michel Françaix. Que comptez-vous faire pour que cet effet de concertation ne mette pas en péril les réseaux des librairies indépendantes, seules garantes du pluralisme et de la création française ?
    M. François Goulard. C'est du mauvais théâtre !
    M. Michel Françaix. Comment faire en sorte que l'engagement personnel de Lagardère pour la défense du pluralisme...
    M. le président. Monsieur Françaix, pouvez-vous poser votre question ?
    M. Michel Françaix. Je la pose, monsieur le président, et même, comme je vois que vous me suivez avec intérêt, je la repose. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Comment faire en sorte que l'engagement personnel de Lagardère pour la défense du pluralisme se transforme, pour Hachette, en obligation durable de ne pas abuser de sa position dominante ?
    Et, puisqu'il me reste trente secondes...
    M. le président. Non !
    M. Michel Françaix. Si, monsieur le président ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Richard Mallié. Ça suffit ! Il parle depuis trois minutes !
    M. Michel Françaix. Pensez-vous comme moi, monsieur le ministre, que faire de la recherche, de l'audiovisuel et de la culture les ministères les plus touchés par les économies budgétaires, alors qu'ils représentent des confettis en termes financiers, n'a pas de sens d'un point de vue économique ? C'est une hypothèque lourde sur l'avenir et sur l'intelligence. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.
    M. Bernard Roman. Il va devoir ramer ! (Sourires.)
    M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, je ne pourrai répondre à toutes vos questions si diverses, mais m'attacherai à celle qui concerne les conditions de la cession par VU de sa branche édition. Dès que nous avons su - ce qui était patent - que Vivendi Universal souhaitait vendre sa branche édition, le Gouvernement a marqué sa préoccupation quant au sort des maisons françaises qui la constituaient. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Bernard Roman. Nous n'avons rien entendu !
    M. Richard Mallié. Débouchez-vous les oreilles !
    M. le président. Monsieur Roman, écoutez !
    M. le ministre de la culture et de la communication. Nous avons dit que la solution, qui a été prise en pleine responsabilité par Vivendi Universal, devait faire en sorte que ces maisons d'édition restent dans le patrimoine industriel et culturel français.
    M. Arnaud Montebourg. Comment allez-vous faire ? (Vives protestations et huées sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

    M. le président. Mes chers collègues, ne cédez pas à la provocation de M. Montebourg !
    M. le ministre de la culture et de la communication. D'autre part, nous avons également marqué notre souci que la solution associe la compétence industrielle et la compétence financière.
    VU a pris sa décision en pleine responsabilité ; nous en avons pris acte. Nous sommes néanmoins très attentifs aux conditions nouvelles que cette situation créerait dans l'édition et, surtout, dans la distribution.
    C'est la raison pour laquelle j'ai pris l'initiative d'une table ronde réunissant... (« Ah ! Enfin une table ronde ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Arnaud Montebourg. Ça, c'est une bonne nouvelle !
    M. le ministre de la culture et de la communication. ... l'ensemble des professionnels...
    M. Arnaud Montebourg. Oh là, formidable !
    M. le ministre de la culture et de la communication. ... des éditeurs, des distributeurs...
    M. Arnaud Montebourg. Félicitations !
    M. le ministre de la culture et de la communication. ... et des librairies.
    M. Arnaud Montebourg. Il fallait y penser !
    M. le ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, les professionnels du secteur...
    M. Arnaud Montebourg. Vive les tables rondes !
    M. le ministre de la culture et de la communication. ... ont accueilli cette initiative avec plus d'intérêt que vous. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Enfin, je tiens à vous rappeler que, à la fin de 2001, Vivendi Universal a mis en vente son pôle de presse professionnelle, qui comprenait notamment des maisons aussi importantes que Le Moniteur ou Masson, première maison d'édition médicale française. La majorité de l'époque a-t-elle réagi ? Non ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Le Gouvernement de l'époque a-t-il agit. Non ! (Mêmes mouvements.) Nous, nous réagissons et nous agissons ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Huées sur les bancs du groupe socialiste.)

PÉNURIE DE MAIN-D'OEUVRE
DANS LE SECTEUR ARTISANAL

    M. le président. La parole est à M. Lucien Degauchy, pour le groupe Union pour la majorité présidentielle.
    M. Lucien Degauchy. Monsieur le président, mes chers collègues,... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Laissez parler M. Degauchy , pour une fois que c'est moi qui lui donner la parole ! (Sourires.)
    M. Lucien Degauchy. ... monsieur le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation,...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Raffarin !
    M. Lucien Degauchy. ... La précédente majorité avait créé le RMI, qui n'a pas été synonyme d'insertion, malgré sa lettre « I ». Elle avait aussi mis en place les fameux emplois-jeunes. (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Cela partait certes d'un bon sentiment, mais sans réelle volonté de pérennité, ni de formation. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Ces mesures furent plus démagogiques qu'efficaces. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Elles ont conduit à une très grande démobilisation et découragé nombre de travailleurs qui se rendent compte, aujourd'hui, du peu de différence de revenus entre le travail et l'assistanat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - « La question ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Aujourd'hui, notre pays se retrouve avec, d'une part, des chômeurs dont la plupart sont sans qualification et, d'autre part, des artisans qui recherchent désespérement de la main-d'oeuvre qualifiée. (« Merci la gauche ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Triste paradoxe.
    M. Bernard Roman. Quelle est la question ?
    M. Lucien Degauchy. D'ici à 2004 ou 2005, chaque année, 850 000 personnes qualifiées partiront à la retraite, et seuls 650 000 jeunes peu qualifiés entreront sur le marché du travail.
    M. Jean-Claude Perez. C'est laborieux !
    M. Arnaud Montebourg. Que dit-il ? On ne comprend rien !
    M. le président. Monsieur Degauchy, nous n'avons pas encore entendu votre question.
    M. Lucien Degauchy. Elle arrive, monsieur le président.
    Au cours du congrès annuel de l'Union professionnelle artisanale, M. le Premier ministre a proposé aux artisans de bâtir un contrat d'objectifs...
    M. le président. Monsieur Degauchy, ne m'obligez pas à vous couper la parole !
    M. Lucien Degauchy. ... portant sur la création de 500 000 emplois d'ici à 2007.
    Aussi Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous dire quelles modalités, quel calendrier, quels dispositifs de formation seront mis en place pour éviter la dramatique pénurie de main-d'oeuvre dans le secteur de l'artisanat ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Raffarin ! Raffarin !
    M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le député, en passant ce contrat d'objectifs avec les artisans, le Premier ministre a d'abord fait un choix de confiance dans les 800 000 artisans, dans les 1 500 000 salariés qui travaillent dans l'artisanat, et dans la première entreprise de France, solidement implantée dans tous les territoires.
    Mais c'est surtout le choix de l'action qui a été fait : action en faveur de la formation en alternance, avec le développement de classes en alternance qui permettront aux jeunes, dès quatorze ans, de découvrir des métiers, puis avec la création de lycées des métiers et de facultés des métiers qui définiront de vrais parcours vers les métiers et vers l'emploi,... (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Où cela ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. ... action en faveur de la création d'entreprise, du développement des entreprises et de leur transmission - car vous savez que 500 000 chefs d'entreprise partiront à la retraite dans les dix années qui viennent et qu'il faut songer à la relève - action pour alléger le fardeau bureaucratique qui pèse sur les plus petites entreprises et particulièrement sur les artisans - ce sera l'ordonnance de simplification administrative que nous préparons - ; et action pour définir le statut de l'entrepreneur et de son conjoint qui sera également présenté au Parlement en 2003.
    M. Bernard Roman. Avec quel budget ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le député, il y a deux politiques de l'emploi : celle qui sème les illusions et qui récolte les déceptions. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Cette politique a été rejetée par les électeurs.
    Nous en préférons une autre : la politique de croissance, la politique de confiance et surtout la politique de bon sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

GRÈVE DES INSPECTEURS DU PERMIS DE CONDUIRE

    M. le président. La parole est M. Emmanuel Hamelin, pour le groupe Union pour la majorité présidentielle.
    M. Emmanuel Hamelin. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    Monsieur le ministre, depuis le 21 octobre dernier, les inspecteurs du permis de conduire ont initié un mouvement revendicatif...
    M. Maxime Gremetz. Tout à fait !
    M. Emmanuel Hamelin. ... qui perturbe le bon fonctionnement du dispositif de formation des jeunes conducteurs et limite la délivrance des permis.
    Leurs revendications concernent tout d'abord un projet de déconcentration de la gestion de ce service public auquel ils sont opposés, mais également l'impact de la réduction et de l'aménagement du temps de travail (Protestations sur quelques bancs du groupe socialiste) et, enfin, leurs conditions de sécurité.
    Nous connaissons, monsieur le ministre, votre volonté de lutter contre l'insécurité routière et votre investissement prioritaire dans ce domaine. Pourriez-vous nous préciser l'action que vous entendez mener...
    M. Maxime Gremetz. Vous faites un service minimum !
    M. Emmanuel Hamelin. ... et nous informer également des négociations que vous avez déjà engagées pour mettre un terme à cette grève, dans l'intérêt des agents, des usagers et du service public ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, pour la sécurité routière qui est, comme vous le savez, l'un des grands chantiers du quinquennat, voulu par le Président de la République, la qualité de l'examen du permis de conduire est essentielle. C'est pourquoi nous avons besoin des agents qui, en général, et malgré les mouvements actuels, sont de très grande qualité, ont le sens du service public et exercent leur métier dans des conditions souvent difficiles. Aussi, j'ai engagé le dialogue avec eux et leur ai proposé plusieurs mesures qui vont dans le sens souhaité : une revalorisation de régime indemnitaire...
    M. Jean-Claude Lefort. Ça n'est pas pris en compte pour la retraite !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. ... la création de soixante-douze emplois d'inspecteur du permis de conduire au cours de l'année 2003 : l'allongement du délai d'obtention du permis de conduire, avec une pédagogie mieux ciblée, de sorte que l'examen ait une réelle valeur du point de vue de la sécurité routière.
    Je souhaite également, dans le même souci d'efficacité du service public, rapprocher les inspecteurs du permis de conduire des directions départementales de l'équipement.
    Enfin, dans certains endroits, il est envisagé d'envoyer les résultats de l'examen au domicile du candidat, afin d'éviter les attitudes agressives ou violentes que l'on doit parfois déplorer.
    Telles sont les mesures que nous proposons. Dans l'esprit de dialogue qui caractérise le Gouvernement, j'ai accentué la concertation ces derniers jours. Je peux affirmer, monsieur le député, que nous sommes sur le point d'aboutir pour le plus grand bénéfice des candidats au permis de conduire, de leurs formateurs et des agents chargés de l'examen.
    M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de Mme Paulette Guinchard-Kunstler.)

PRÉSIDENCE
DE MME PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER,
vice-présidente

    Mme la présidente. La séance est reprise.

2

LOI DE FINANCEMENT
DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2003

Suite de la discussion d'un projet de loi

    Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 (n°s 250, 330).

Discussion des articles (suite)

    Mme la présidente. Hier soir, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles et s'est arrêtée à l'amendement n° 195 après l'article 20.

Après l'article 20

    Mme la présidente. MM. Préel, Leteurtre, Jardé, Artigues et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 195, ainsi libellé :
    « Après l'article 20, insérer l'article suivant :
    « Après l'article L. 165-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 165-4-1 ainsi rédigé :
    « Art. L. 165-4-1. - Les fabricants et distributeurs exploitant un produit de santé tel que prévu à l'article L. 165-1 du présent code de la sécurité sociale peuvent solliciter, selon une procédure accélérée, son inscription sur la liste prévue audit article de même que la fixation d'un tarif de responsabilité et d'un prix.
    « Un décret en Conseil d'Etat précise notamment les conditions requises pour bénéficier de cette procédure, ses modalités de mise en oeuvre et la nature des engagements que doit prendre l'entreprise. »
    La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Madame la présidente, monsieur le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, mes chers collègues, après l'adoption de l'article permettant le dépôt de prix pour les molécules innovantes, je propose que soient également pris en compte les dispositifs médicaux innovants. Car ceux-ci rencontrent eux aussi des difficultés. Ceux qui sont considérés comme réellement innovants devraient pouvoir bénéficier d'une procédure d'inscription accélérée sur la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale.
    A l'instar des médicaments innovants, les services médicaux innovants devraient pouvoir, sauf opposition du ministre dans un délai déterminé, par exemple de 15 jours, appliquer des prix fixés par l'entreprise.
    Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance maladie et les accidents du travail, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 195.
    M. Jean Bardet, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. Madame la présidente, si vous m'y autorisez, je souhaiterais défendre en même temps l'amendement n° 67, qui relève du même esprit que l'amendement n° 195 de M. Préel.
    Mme la présidente. Soit, monsieur le rapporteur, mais votre amendement n° 67 sera en discussion commune avec l'amendement n° 194 de M. Préel.
    Je vais donner lecture de ces deux amendements.
    L'amendement n° 67, présenté par M. Bardet, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance maladie et les accidents du travail, MM. Préel, Leteurtre, Jardé, Artigues et les commissaires membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés, est ainsi libellé :
    « Après l'article 20, insérer l'article suivant :
    « Après l'article L. 165-7 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 165-8 ainsi rédigé :
    « Art. L. 165-8. - En cas de non-respect du délai prévu au premier alinéa de l'article R. 165-8 concernant les décisions relatives d'une part à l'inscription ou à la modification de l'inscription d'un produit ou d'une prestation sur la liste prévue à l'article L. 165-1, et, d'autre part, à la fixation de son tarif et le cas échéant de son prix, la demande de l'entreprise exploitant le dispositif médical est réputée acceptée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ou les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. »
    L'amendement n° 194, présenté par MM. Préel, Leteurtre, Jardé, Artigues et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés est ainsi libellé :
    « Après l'article 20, insérer l'article suivant :
    « Après l'article L. 165-7 du présent code, il est inséré un article L. 165-8 ainsi rédigé :
    « Art. L. 165-8. - En cas de non-respect du délai de 180 jours prévu à l'article R. 165-8 du présent code concernant les décisions relatives, d'une part, à l'inscription ou à la modification de l'inscription d'un produit ou d'une prestation sur la liste prévue à l'article L. 165-1 et, d'autre part, à la fixation de son tarif, et le cas échéant, de son prix, la demande du fabricant ou du distributeur est réputée tacitement acceptée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ou les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. »
    Poursuivez, monsieur le rapporteur.
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. Il existe un problème spécifique aux dispositifs médicaux. Comme vous le savez, mes chers collègues, ces dispositifs sont constitués de l'ensemble du matériel non médicamenteux utilisé en médecine pour soigner les malades : certains de ces matériels sont implantés, d'autres sont à usage le plus souvent unique, donc jetés lorsqu'ils ont servi. Leur durée de vie est extrêmement courte en raison de la rapidité des progrès techniques dans ce domaine. Ainsi - et je prends un sujet que je connais bien -, un pacemaker, un stimulateur cardiaque devient obsolète trois ou quatre ans après avoir été mis sur le marché car, entre-temps, de nouveaux types de pacemakers ont été mis au point par les ingénieurs et expérimentés par les médecins.
    Avant qu'un dispositif médical puisse être commercialisé, il est prévu un délai de 180 jours pour notifier à l'exploitant l'autorisation de mise sur le marché et le prix fixé. Or ce délai de six mois n'est jamais repecté par les autorités administatives car celles-ci ne disposent pas des moyens matériels qui leur permettraient d'instruire dans les délais les différents dossiers qui leur sont soumis. Donc, loin de moi l'idée de critiquer ces autorités. Enfin, la loi prévoit qu'au-delà de 180 jours, la demande doit être considérée comme rejetée en l'absence de réponse.
    En pratique, les choses ne se passent pas ainsi, car, à expiration du délai, le processus suit son cours jusqu'à ce que la décision finale - d'accord ou de rejet - soit prise. Si bien que l'accord peut n'être obtenu qu'au bout de deux ans. Cela entraîne un retard important de mise sur le marché, qui fait que les malades ne peuvent profiter de certains produits que deux ans après leur découverte. Et comme un matériel devient obsolète au bout de cinq ans, les malades ne peuvent donc en profiter que trois. Et je ne parle pas des problèmes d'amortissement.
    L'amendement que j'ai déposé vise à faire en sorte que l'absence de réponse de l'administration à l'expiration du délai de 180 jours vaille décision implicite d'acceptation de l'inscription et de la tarification sollicitées.
    Je sais, monsieur le ministre, qu'il s'agit d'un problème extrêmement complexe et dont la réponse n'est pas simple : un « oui » ou un « non » ne peuvent suffire.
    S'agissant de l'amendement n° 195, la commission a donné un avis défavorable.
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, pour donner l'avis du Gouvernement sur ces amendements.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Madame la présidente, si vous m'y autorisez, je souhaiterais donner mon avis amendement par amendement.
    Mme la présidente. C'est nettement mieux !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. S'agissant de l'amendement n° 195, je comprends parfaitement la démonstration de M. Bardet qui sait, comme il l'a dit, de quoi il parle.
    Il est vrai que nous aurions tendance à rapprocher médicaments et dispositifs médicaux. Or, en matière de dispositifs médicaux, seuls les tarifs sont systématiquement fixés, les prix n'étant pas nécessairement administrés. En cette matière, une procédure de dépôt de prix ne se conçoit donc pas du tout de la même façon que pour un médicament. Voilà pour mon premier argument.
    Par ailleurs - et c'est mon deuxième argument -, la procédure d'inscription des dispositifs médicaux est aujourd'hui dans une phase de montée en charge, et les critères d'évaluation du service médical rendu ne sont pas encore stabilisés.
    C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable à l'adoption de cet amendement, tout en soulignant que je vais donner des instructions très fermes au comité économique des produits de santé et à mes services pour que nous puissions avancer sur cette question, qui a été très justement soulevée.
    Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. Madame la présidente, à la suite des explications qui viennent d'être données par M. le ministre, je retire l'amendement n° 67 de la commission, si M. Préel, qui en est signataire, est d'accord.
    Mme la présidente. Monsieur Préel, maintenez-vous votre amendement n° 195 ?
    M. Jean-Luc Préel. L'amendement n° 195 n'est pas identique à l'amendement n° 67, puisqu'il vise à aligner la procédure pour les dispositifs médicaux sur celle des médicaments innovants. J'ai bien entendu ce que M. le ministre compte faire pour améliorer la situation. Il faut savoir que actuellement, le comité économique des produits de santé, qui a remplacé le comité économique du médicament, s'occupe des médicaments et des produits de santé innovants. Pour ma part, je souhaite que l'innovation puisse être mieux prise en compte.
    J'en profite pour aborder la question du TIPS, le tarif interministériel des prestations sanitaires. Je crois qu'il serait bon de revoir les barèmes du TIPS pour qu'un produit indispensable à certaines personnes, comme les poches d'iléostomie, soit remboursé à 100 %, l'alignement sur un prix de base étant difficilement acceptable pour certains malades.
    Cela dit, compte tenu des observations de M. le ministre, je suis prêt à retirer mon amendement n° 195, mais aussi mon amendement n° 194, si bien que, après le retrait de l'amendement n° 67 de la commission, il n'y aura plus d'amendements après l'article 20.
    Mme la présidente. L'amendement n° 195 est retiré, de même que les amendements n°s 67 et 194.

Article 21

    Mme la présidente. « Art. 21. - I. - Les huitième et neuvième alinéas de l'article L. 162-17-4 sont remplacés par les dispositions suivantes :
    « Lorsqu'une mesure d'interdiction de publicité a été prononcée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé dans les conditions prévues à l'article L. 5122-9 du code de la santé publique, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale peuvent prononcer, après avis du comité économique des produits de santé et après que l'entreprise a été mise en mesure de présenter ses observations, une pénalité financière à l'encontre de ladite entreprise.
    « Cette pénalité ne peut être supérieure à 10 % du chiffre d'affaires hors taxe réalisé en France par l'entreprise au titre des spécialités ayant fait l'objet de la publicité interdite durant les six mois précédant et les six mois suivant la date d'interdiction.
    « Son montant est fixé en fonction de la gravité de l'infraction sanctionnée par la mesure d'interdiction et de l'évolution des ventes des spécialités concernées durant la période définie à l'alinéa précédent.
    « La pénalité est recouvrée par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Son produit est affecté aux régimes d'assurance maladie selon les règles prévues à l'article L. 138-8 du présent code.
    « Le recours présenté contre la décision prononçant cette pénalité est un recours de pleine juridiction. »
    « II. - Après l'article L. 162-17-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-17-9 ainsi rédigé :
    « Art. L. 162-17-9. - S'il s'avère, postérieurement à l'inscription d'un médicament sur la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 162-17, que l'entreprise qui exploite le médicament n'a pas fourni, en en signalant la portée, des informations connues d'elle avant ou après l'inscription et que ces informations conduisent à modifier les appréciations portées par la commission mentionnée à l'article L. 5123-3 du code de la santé publique notamment pour ce qui concerne le service médical rendu ou l'amélioration du service médical rendu par ce médicament, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale peuvent prononcer, après avis du comité économique des produits de santé et après que l'entreprise a été mise en mesure de présenter ses observations, une pénalité financière à l'encontre de la dite entreprise.
    « Le montant de la pénalité ne peut être supérieur à 5 % du chiffre d'affaires total hors taxes réalisé en France par l'entreprise au cours du dernier exercice clos.
    « Les modalités d'application du présent article, notamment la nature des informations concernées, les règles et délais de procédure, ainsi que les modes de calcul de la pénalité financière et la répartition de son produit entre les organismes de sécurité sociale, sont déterminées par décret en Conseil d'Etat.
    « La pénalité est recouvrée par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Son produit est affecté aux régimes d'assurance maladie selon les règles prévues à l'article L. 138-8 du présent code.
    « Le recours présenté contre la décision prononçant cette pénalité est un recours de pleine juridiction. »
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, premier orateur inscrit sur l'article.
    M. Jean-Marie Le Guen. L'article 21 est relatif aux pénalités financières applicables aux laboratoires qui ne se conformeraient pas à la réglementation, en particulier en matière de publicité ou d'information. Nous comprenons qu'il faille responsabiliser - et éventuellement pénaliser - les laboratoires, mais les sanctions financières proposées nous semblent à ce point disproportionnées qu'elles risquent de ne jamais être appliquées. Il y a là matière à réflexion pour le Gouvernement, s'il veut vraiment se doter d'un arsenal répressif crédible.
    Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. L'Etat dispose déjà, que ce soit par le biais de conventions ou de façon unilatérale, de tout un arsenal de mesures permettant de sanctionner les entreprises pharmaceutiques ne se conformant pas à la règlementation. Ainsi, en cas d'absence de transmission d'informations lors de l'inscription d'un médicament, le code de la sécurité sociale prévoit des pénalités qui peuvent aller jusqu'à la radiation de certaines spécialités. En outre, le code de la sécurité sociale permet déjà, comme l'a rappelé Jean-Marie Le Guen, parallèlement à l'interdiction de publicité, des baisses de prix. Enfin, la mesure proposée est d'autant plus inacceptable qu'elle va à l'encontre d'une jurisprudence du conseil d'Etat.
    Les deux pénalités envisagées dans le projet de loi ne se justifient en aucune manière, d'autant qu'elles accordent un pouvoir discrétionnaire et quasi léonin à la puissance publique.
    Pour les autorités publiques comme pour l'ensemble des laboratoires, faire du médicament un axe stratégique représente un véritable atout pour les patients et pour la santé publique. Ce projet de loi est donc l'occasion de mettre en oeuvre cette politique. Nous espérons que le Gouvernement saura ne pas manquer ce rendez-vous.
    Mme la présidente. M. Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail, a présenté un amendement, n° 68, ainsi rédigé :
    « Dans le premier alinéa du I de l'article 21, après la référence : "L. 162-17-4, insérer les mots : "du code de la sécurité sociale. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. Cet amendement est de précision.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 68.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. M. Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail, a présenté un amendement, n° 69, ainsi rédigé :
    « I. - Dans le premier alinéa du II de l'article 21, substituer aux mots : "L. 162-17-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-17-9 les mots : "L, 162-17-7 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-17-8.
    « II. - En conséquence, rédiger ainsi le début du deuxième alinéa du II de cet article : "Art. L. 162-17-8. - S'il s'avère... (le reste sans changement). »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. Cet amendement vise à corriger une erreur de numérotation.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 69.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. M. Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail, a présenté un amendement, n° 70, ainsi rédigé :
    « Dans le quatrième alinéa du II de l'article 21, supprimer les mots : "ainsi que. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. Il s'agit d'un amendement de rédaction.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 70.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. MM. Préel, Leteurtre, Jardé, Artigues et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 196, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 21 par le paragraphe suivant :
    « III. - Dans le premier alinéa de l'article L. 5123-3 du code de la santé publique, après les mots : "dont la composition sont insérés les mots : "incluant notamment la présence de représentants des organismes de protection sociale complémentaire. »
    La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. François Goulard, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Amendement remarquable.
    M. Jean-Luc Préel. Comme le dit mon ami Goulard, amendement remarquable : je m'étonne simplement que lui-même n'en ait pas déposé un identique, après ce qu'il nous a expliqué hier sur l'importance des assurances complémentaires. (Sourires.)
    Je serai bref, car j'ai déjà défendu hier des amendements de ce type. Nous souhaitons que, à l'avenir, les assurances complémentaires soient associées aux décisions concernant la santé, notamment en étant présentes au sein de la commission de transparence.
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Il faut retirer cet amendement, monsieur Préel.
    Mme la présidente. Monsieur Préel, suivez-vous le conseil de M. Goulard ?
    M. Jean-Luc Préel. Je le retire, pour être agréable à M. Goulard. (Sourires.)
    Mme la présidente. L'amendement n° 196 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 21, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 21, ainsi modifié, est adopté.)

Article 22

    Mme la présidente. « Art. 22. - I. - Après le cinquième alinéa de l'article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Les dépenses médico-sociales des centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie mentionnés au 9° du I de l'article L. 312-1 relatives aux activités énumérées à l'article L. 3311-2 du code de la santé publique et aux activités visées au titre Ier du livre IV de la troisième partie du même code sont prises en charge par l'assurance maladie sans préjudice d'autres participations, notamment des collectivités locales, et sans qu'il soit fait application des dispositions du code de la sécurité sociale et du code rural relatives à l'ouverture du droit aux prestations couvertes par les régimes de base, au remboursement de la part garantie par l'assurance maladie, à la participation de l'assuré aux tarifs servant de base aux remboursements, ainsi qu'au forfait mentionné à l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale. »
    « II. - Le premier alinéa de l'article L. 3411-2 du code de la santé publique est complété par les mots suivants : "à l'exclusion des dépenses médico-sociales des centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie mentionnées au 9° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles.
    « III. - A l'article L. 3311-2 du code de la santé publique, les mots : "Les centres de cure ambulatoire mentionnés au 9° de l'article 3 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales sont remplacés par les mots : "Les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie mentionnés au 9° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles.
    « IV. - A la section 3 du chapitre IV du titre VII du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est ajouté un article L. 174-9-1 ainsi rédigé :
    « Art. L. 174-9-1. - Les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie mentionnés au 9° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles sont financés sous la forme d'une dotation globale annuelle.
    « La répartition des sommes versées à ces centres au titre de l'alinéa précédent entre les régimes d'assurance maladie est effectuée chaque année suivant la répartition des charges des dotations globales hospitalières pour l'année considérée, telle qu'elle résulte de l'application de l'article L. 174-2. »
    « V. - Les organismes qui assurent les missions relevant de l'application du titre Ier du livre IV de la troisième partie du code de la santé publique ayant passé convention avec le préfet du département où ils sont implantés à la date de publication de la présente loi disposent, à compter de cette même date, d'un délai d'un an pour solliciter l'autorisation mentionnée à l'article L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles et selon la procédure fixée par l'article L. 313-2 dudit code. La convention devient caduque si cette autorisation n'a pas été sollicitée à l'expiration de ce délai.
    « VI. - Dans l'attente de l'arrêté fixant la dotation globale pour l'année 2003, les caisses d'assurance maladie versent à chaque organisme cité au V ci-dessus antérieurement financé par l'Etat, des acomptes mensuels sur la dotation globale de financement, égaux au douzième de la participation de l'Etat allouée à chaque centre au titre de ses activités médico-sociales en 2002, déduction faite, le cas échéant, des financements des collectivités locales. Tout refus d'autorisation d'un centre met fin à son financement par l'assurance maladie. »
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, premier orateur inscrit sur l'article.
    M. Jean-Marie Le Guen. L'article 22 opère le transfert à l'assurance maladie du financement des centres spécialisés dans la prise en charge des toxicomanes Sur le principe, ce transfert nous paraît normal, même si nous devons prendre en considération les répartitions traditionnelles entre l'Etat et l'assurance maladie en distingant ce qui relève de la politique de prévention, d'information et d'éducation en matière de santé de ce qui ressortit au domaine des soins.
    Je ferai deux remarques, l'une d'ordre technique, l'autre plus générale.
    De nombreux centres, notamment celui de Marmottan, nous ont fait part des difficultés financières considérables auxquelles ils étaient confrontés, notamment cette année, en raison de l'attitude des DDASS. Je ne rentrerai pas dans le détail de ces problématiques techniques dues à la composition des budgets, mais toujours est-il qu'il y a un véritable assèchement financier. Or les centres redoutent que le transfert du financement de leurs dépenses de l'Etat à l'assurance maladie n'entaîne une forte baisse de leur budget, ce qui aura des conséquences très directes en matière d'emploi et d'activité. Je ne vous fais pas un procès d'intention, monsieur le ministre, mais j'imagine que vous aurez à coeur de nous rassurer sur ce point.
    Pour autant, sur un plan plus général, nous sommes extrêmement dubitatifs sur la politique de lutte contre la toxicomanie. A cet égard les premières actes du Gouvernement en ce domaine parlent d'eux-mêmes, puisque le budget de la MILDT, la mission interministérielle de lutte contre la drogue et les toxicomanies, a diminué considérablement.
    Au moment où le Gouvernement affiche une volonté affirmée de lutter contre l'insécurité, d'organiser une répression beaucoup plus forte, il nous semble totalement incohérent, spécialement dangereux et particulièrement préoccupant que la politique de prévention de la toxicomanie ne soit pas prise en compte comme elle devrait l'être, dans la mesure où la toxicomanie peut être source d'insécurité.
    Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
    Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le ministre, je ne vous cache pas notre perplexité face au revirement brutal du Gouvernement sur un problème aussi sérieux que celui de la prévention et des soins relatifs à des fléaux comme l'alcoolisme ou les drogues.
    La loi sur l'action sociale et médico-sociale du 2 janvier 2002 a créé les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie, chargés de prendre en charge l'ensemble des problèmes de dépendance. L'article 22 du PLFSS s'appuyant sur les « données des sciences fondamentales et les travaux épidémiologiques récents » en tirait les conséquences en transférant de l'Etat à l'assurance maladie le financement des dépenses des centres spécialisés de soins aux toxicomanes, les CSST.
    Ce transfert de l'Etat à la sécurité sociale du financement de la lutte contre la toxicomanie nous posait un problème, dans la mesure où, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, la santé publique relève de l'Etat. Toutefois, les professionnels et les associations semblaient espérer de ce transfert une amélioration de ce financement.
    Brusquement, tout est remis en cause : le Gouvernement nous soumet un amendement qui réécrit entièrement l'article et il nous dit ne plus savoir s'il veut réellement créer des centres spécialisés en addictologie, alors qu'il nous expliquait, il y a quinze jours, que de tels centres se justifiaient par l'état des connaissances scientifiques. Nous ne savons pas comment interpréter ce renversement aussi brutal que soudain.
    On a beaucoup dit dans la presse que la politique de la MILDT ne vous convenait plus. Vous avez du reste changé son directeur. Quoi qu'il en soit, il ne faudrait pas qu'une population qui est en très grande détresse, qui est particulièrement fragile, fasse les frais d'enjeux qui la dépassent.
    Pour ma part, je ne me sens ni le droit ni la capacité de trancher des questions aussi importantes en un quart d'heure, au détour d'un amendement qui n'a été distribué qu'hier, en fin d'après-midi. Le groupe des député-e-s communistes et républicains ne veut pas prendre une telle décision sans avoir eu le temps de prendre le recul nécessaire qu'impose cette question.
    C'est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, de nous donner un calendrier précis. Peut-être pourrions-nous débattre de cette question au printemps, à l'occasion de l'examen de la loi quinquennale sur la santé que vous nous annoncez.
    Mme la présidente. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 282, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 22 :
    « I. - Après le cinquième alinéa de l'article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Les dépenses médico-sociales des centres de soins spécialisés aux toxicomanes relevant des catégories d'établissements mentionnées au 9° du I de l'article L. 312-1 sont prises en charge par l'assurance maladie sans préjudice d'autres participations, notamment des collectivités locales, et sans qu'il soit fait application des dispositions du code de la sécurité sociale et du code rural relatives à l'ouverture du droit aux prestations couvertes par les régimes de base, au remboursement de la part garantie par l'assurance maladie, à la participation de l'assuré aux tarifs servant de base aux remboursements, ainsi qu'au forfait mentionné à l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale.
    « II. - Le premier alinéa de l'article L. 3411-2 du code de la santé publique est complété par les mots : ", à l'exclusion des dépenses mentionnées au sixième alinéa de l'article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles.
    « III. - A la section 3 du chapitre IV du titre VII du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est ajouté un article L. 174-9-1 ainsi rédigé :
    « Art. L. 174-9-1. - Les centres de soins spécialisés aux toxicomanes mentionnés à l'article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles sont financés sous la forme d'une dotation globale annuelle.
    « La répartition des sommes versées à ces centres au titre de l'alinéa précédent entre les régimes d'assurance maladie est effectuée chaque année suivant la répartition des charges des dotations globales hospitalières pour l'année considérée, telle qu'elle résulte de l'application de l'article L. 174-2.
    « IV. - La première phrase du quatrième alinéa de l'article L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigée : "Sauf pour les établissements et services mentionnés au 4° du I de l'article L. 312-1, ainsi que pour les centres de soins spécialisés aux toxicomanes mentionnés au sixième alinéa de l'article L. 314-8 du même code qui sont autorisés pour trois ans, l'autorisation est accordée pour une durée de quinze ans.
    « V. - Les organismes gestionnaires des centres de soins spécialisés aux toxicomanes ayant passé convention avec le préfet du département où ils sont implantés à la date de publication de la présente loi disposent, à compter de cette même date, d'un délai d'un an pour solliciter l'autorisation mentionnée à l'article L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles et selon la procédure fixée par l'article L. 313-2 dudit code. La convention devient caduque si cette autorisation n'a pas été sollicitée à l'expiration de ce délai.
    « VI. - Dans l'attente de l'arrêté fixant la dotation globale pour l'année 2003, les caisses d'assurance maladie versent à chaque centre de soins spécialisés aux toxicomanes antérieurement financé par l'Etat des acomptes mensuels sur la dotation globale de financement, égaux au douzième de la participation de l'Etat allouée à chaque centre au titre de ses activités médico-sociales en 2002, déduction faite, le cas échéant, des financements des collectivités locales. Tout refus d'autorisation d'un centre met fin à son financement par l'assurance maladie. »
    Sur cet amendement, M. Bardet a présenté un sous-amendement, n° 286, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le IV de l'amendement n° 282 :
    « Après le quatrième alinéa de l'article L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « A titre transitoire, la première autorisation délivrée aux centres de soins spécialisés aux toxicomanes conformément aux dispositions du présent article a une durée de trois ans. »
    La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 282.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. La présentation de cet amendement me permettra de répondre aux interrogations de M. Le Guen et de Mme Fraysse.
    Jusqu'à présent régnait la plus grande des confusions entre la prévention et le soin. Je le répète, le soin relève de l'assurance maladie et la prévention relève de l'Etat - nous en rediscuterons donc lors de l'examen du budget de la santé. Aujourd'hui, je me limiterai à trois considérations.
    D'abord, les soins aux toxicomanes comportent des actes médicaux, des analyses biologiques et des prescriptions médicamenteuses, tous actes qui relèvent de l'assurance maladie.
    Ensuite, l'Etat garde toute sa place dans le dispositif de prévention, qui est le premier objectif de l'action en la matière. Je voudrais rassurer M. Le Guen qui s'inquiète de la baisse apparente des crédits de la MILDT - ils passent de 45,6 à 40 millions d'euros -, et je le renvoie à l'étude détaillée du budget de la MILDT et plus particulièrement de sa ligne budgétaire sur la communication ainsi qu'au budget d'un organisme créé par le gouvernement précédent mais que nous utiliserons bien volontiers, je veux parler de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé - l'INPES. Cet institut de communication a naturellement vocation à assurer la communication et la prévention dans le domaine de la toxicomanie. Pour quelles raisons paierions-nous deux fois ? Il n'y a donc pas diminution des crédits, simplement un transfert du budget de la communication de la MILDT au budget de l'INPES.
    Enfin, je voudrais expliquer pourquoi je vous demande de surseoir à la fusion des centres d'alcoologie et de toxicologie, puisque tel est l'objet de l'amendement n° 282.
    Avant tout, je ne voudrais pas laisser penser un seul instant que le changement de président auquel nous venons de procéder constitue un désaveu du précédent président ou plutôt de la précédente présidente. Celle-ci a remarquablement fait son travail. Elle a été, à un moment donné, inspirée, il est vrai, par les travaux du rapport Roques, lesquels semblaient démontrer, ce qui a d'ailleurs été vérifié, que les mécanismes du système nerveux mis en cause chez les consommateurs d'alcool, de tabac, de drogues douces, de psychotropes ou d'héroïne étaient les mêmes, à savoir les récepteurs des cellules nerveuses.
    Et c'est ainsi qu'est né le concept intéressant de dépendance. Mais à y regarder de plus près, on constate que les toxicomanes ne sont pas forcément des alcooliques et réciproquement, même s'il peut y avoir ici ou là cumul. Et une personne qui a un problème d'alcool s'adressera plus volontiers à un centre spécialisé dans la prise en charge de l'alcoolisme qu'à un centre de prise en charge de la toxicomanie. Cela ne signifie pas qu'ils doivent être séparés géographiquement - il sera certainement préférable même qu'ils soient situés l'un à côté de l'autre, mais c'est au nouveau président de la MILDT, le docteur Jayle, qu'il reviendra de le préciser au terme de la mission que je viens lui confier en toute urgence. Il devra nous dire comment il entend assumer la prise en charge des alcooliques et des toxicomanes. S'il souhaite les rassembler, je n'aurai aucun scrupule à revenir sur le projet initial. Pour le moment, il me demande légitimement le temps de la réflexion. C'est la raison pour laquelle je sursois à ma décision jusqu'au printemps et vous propose cet amendement.
    Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir le sous-amendement n° 286 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 282.
    M. Jean Bardet, rapporteur. L'amendement n'a pas été examiné par la commission. Cependant, à titre personnel, j'y suis favorable, sous réserve de l'adoption d'un sous-amendement de clarification.
    Je souhaite en effet préciser, parce que le texte du Gouvernement peut prêter à confusion, que la première autorisation délivrée aux centres de soins spécialisés aux toxicomanes a une durée de trois ans.
    La dérogation à la règle des quinze ans ne peut être que transitoire. En effet, les règles applicables aux établissements médico-sociaux ne peuvent fonctionner de façon durable dans le cadre d'une autorisation de trois ans.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement est favorable au sous-amendement de M. Bardet. J'en profite pour apporter une dernière précision : les budgets des DDASS, c'est le budget de l'Etat, et plus précisément le budget de la santé, ce n'est pas l'assurance maladie. Donc, ce n'est pas parce que l'on transfère à l'assurance maladie la prise en charge des toxicomanes que la prévention qui relève de l'Etat ne sera pas assurée au niveau du budget des DDASS.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je ne veux pas polémiquer, je tiens quand même à dire que je n'apprécie pas de découvrir des amendements aussi importants à la dernière minute. Mme Fraysse disait qu'elle en avait eu connaissance cette nuit, pour ma part je viens juste de le lire. Ce n'est pas une bonne façon de travailler. Ces amendements exigent une réflexion plus approfondie.
    Par ailleurs, le secteur sur lequel on nous demande de légiférer connaît à l'heure actuelle un assez grand tumulte.
    D'abord, pour des raisons budgétaires. Vous nous avez certes parlé de la MILDT, mais je n'ai pas compris si l'argent qui était retiré à la MILDT était mis en supplément sur l'INPES ou si la communication toxicomanie se fondait dans la communication sanitaire globale, ce qui ne me semblerait guère opportun. Nous aurions aimé en discuter plus longuement, nos réticences auraient pu être dissipées.
    Ensuite, l'envoi est provoqué par le contexte de confusion qui règne actuellement. Il est quand même un peu bizarre de changer le responsable d'un organisme, tout en encensant sa politique.
    Des personnels ont manifesté leur inquiétude quant à la situation budgétaire et quant aux rapports qu'ils ont aujourd'hui avec leur tutelle. Très honnêtement, je crois que si l'on veut avancer, il ne faut pas précipiter les choses et surtout ne pas opérer de revirements successifs.
    Bref, même si l'idée d'une responsabilité plus grande de l'assurance maladie dans le financement nous paraît juste, même s'il y a beaucoup de propositions acceptables, les imprécisions actuelles de la politique du Gouvernement ne nous permettent pas de voter ce texte en l'état.
    Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
    Mme Jacqueline Fraysse. J'entends bien les arguments des uns et des autres mais je ne me sens pas suffisamment compétente pour trancher si rapidement, ces questions sont trop délicates. Je comprends que la réflexion doive être approfondie et que des travaux complémentaires soient utiles et puisque vous vous engagez, monsieur le ministre, à nous reparler de ces questions dans six mois...
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est en effet ce que j'ai dit.
    Mme Jacqueline Fraysse ... nous acceptons l'idée d'attendre six mois, à condition que les centres actuels aient les moyens de travailler et que les patients ne souffrent pas de cette situation.
    M. Richard Mallié. Très bien !
    Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Après M. Le Guen, je regrette que de nombreux amendements nous soient parvenus trop tard pour être examinés en commission. Cela pose un problème, tant sur le plan de la méthodologie que sur celui de la qualité du travail.
    M. Pascal Terrasse. Quel talent !
    Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 286.
    (Le sous-amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 283 modifié par le sous-amendement n° 286.
    (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
    Mme la présidente. En conséquence, l'article 22 est ainsi rédigé.

Article 23

    Mme la présidente. « Art. 23. - Le chapitre II du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est modifié comme suit :
    « I. - L'intitulé du chapitre est remplacé par l'intitulé suivant : "Prise en charge par l'assurance maladie des dépenses afférentes aux interruptions volontaires de grossesse mentionnées au troisième alinéa de l'article L. 2212-7 du code de la santé publique.
    « II. - Le premier alinéa de l'article L. 132-1 est abrogé.
    « III. - A l'article L. 132-1, les mots : "l'Etatsont remplacés par les mots : "les organismes d'assurance maladie. »
    Plusieurs orateurs sont inscrits sur cet article.
    La parole est à M. Richard Mallié.
    M. Richard Mallié. Monsieur le ministre, vous avez récemment annoncé que la prise en charge de l'avortement allait être transférée du budget de l'Etat à celui de l'assurance maladie. Ce transfert, présenté comme une simple clarification comptable, nous semble grave dans ses conséquences. En effet, faire rembourser l'interruption de grossesse par l'assurance maladie revient à considérer ladite grossesse comme une maladie.
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Mais non !
    M. Richard Mallié. Les fonds de la caisse d'assurance maladie sont en effet prévus pour le remboursement de soins prodigués en vue de la guérison des personnes.
    Cette mesure, outre qu'elle renforce la banalisation de l'avortement, va à l'encontre de la philosophie originelle de l'assurance maladie. Vous pourriez me dire que, depuis un demi-siècle, celle-ci a évolué, ce dont je conviens volontiers. Au départ, il s'agissait de guérir les travailleurs salariés pour leur permettre de reprendre leur travail, par la suite, l'extension aux autres catégories de travailleurs et la CMU ont bouleversé cette idée.
    Comme vous, je considère qu'il faut désormais définir de façon plus transparente les dépenses de la sécurité sociale, comme vous, je crois que la prévention est très importante en matière de santé et qu'il faut, en l'occurrence, renforcer la contraception et l'information auprès des jeunes. Mais ne pensez-vous pas que cette prise en charge soit plutôt du ressort de la solidarité nationale, tout comme la prévention ?
    Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Depuis les lois Neuwirth et Veil, la société a beaucoup évolué, et la législation a suivi. Ainsi, la maternité choisie est entrée dans les faits. C'est un progrès incontestable.
    L'aspiration à choisir librement de donner la vie est toujours aussi forte. Elle traduit le véritable respect de la vie.
    Mais pour garantir ce respect, il importe de développer l'éducation sexuelle à l'école dès le plus jeune âge, de faciliter l'accès à la contraception et d'appliquer la loi sur l'interruption volontaire de grossesse, qui ne doit être que l'ultime recours. Il faut mettre en oeuvre une politique sociale et familiale ambitieuse, à la hauteur des attentes.
    Les campagnes d'information sur la contraception participent à cette politique, elles doivent devenir plus régulières. Il faut rester vigilant et se garder de tout satisfecit car nous devons poursuivre les efforts sur ces questions.
    En effet, si le nombre des interruptions volontaires de grossesse reste stable, il est en légère augmentation chez les femmes de moins de vingt-cinq ans. La conjonction entre la diffusion de la contraception et la stabilité des IVG depuis 1975 soulève toujours des questions quant à l'accessibilité et à l'acceptabilité de la contraception.
    L'allongement des délais légaux d'IVG de dix à douze semaines devait permettre à environ six mille femmes de subir cette intervention en France plutôt que d'être contraintes à partir à l'étranger parce que hors délais. Si la plupart des femmes qui ont une grossesse imprévue décident très rapidement son interruption ou sa poursuite, les quelques milliers de femmes actuellement hors délais sont souvent issues des milieux les plus défavorisés. Aux difficultés psychologiques que cause une grossesse non prévue, s'ajoutent pour elles les difficultés financières, et souvent une instabilité affective. Il faut, là aussi, progresser.
    Les décisions en matière d'IVG doivent se prendre en toute connaissance de cause. Souvent, l'accompagnement psychologique est nécessaire avant, pendant et après l'IVG. Il importe d'informer les femmes sur les différentes méthodes d'IVG existantes, et de rendre plus accessibles les méthodes médicamenteuses, je pense là tout particulièrement à la pilule RU 486.
    Si l'objectif reste bien de diminuer le nombre d'interruptions volontaires de grossesse, il faut également agir sur le fonctionnement même des services gynécologiques. Il reste à convaincre les responsables de service car le refus de pratiquer l'IVG au nom de la clause de conscience perdure. Comment garantir la pratique dans les meilleures conditions au sein de ces services ? A cela s'ajoute le manque de personnels, qui ne peut que rendre encore plus difficile la tâche du chirurgien qui pratique les interruptions volontaires de grossesse.
    Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, nous devons réfléchir aux moyens de répondre au mieux à ces difficultés.
    Cela demande en amont une large information sur la contraception et une éducation sexuelle dès le plus jeune âge à l'école, je l'ai dit.
    Mais il nous faut aussi progresser sur le remboursement des moyens de contraception pour permettre à chaque femme de bénéficier sans contraintes, en particulier financières, des moyens les plus adaptés à son organisme et à sa santé et non à ses ressources ou à son niveau social.
    Aussi, monsieur le ministre, plusieurs questions se posent : où en est notre pays en matière de libre accès à l'interruption volontaire de grossesse ? Combien dénombrons-nous encore de refus ? Combien de femmes continuent-elles de trouver une solution à l'étranger ? Quelles dispositions comptez-vous prendre pour que la loi soit appliquée ? Enfin, quelle sera votre politique en matière de prise en charge des moyens de contraception, de tous les moyens de contraception, notamment la pilule de troisième génération ? En particulier la première d'entre elles, dont le brevet arrive à expiration, sera-t-elle « génériquée » ?
    Cet article régularise une situation financière. Néanmoins, l'Etat envisage-t-il toujours de débloquer les moyens correspondant à l'interruption volontaire de grossesse pour l'assurance maladie, puisque la législation actuelle prévoit que l'Etat rembourse cet acte à la sécurité sociale ?
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Si nous sommes d'accord sur le principe du transfert de l'Etat à l'assurance maladie des frais afférents aux interruptions volontaires de grossesse, - même si cela revient, en pure théorie, à passer d'un droit de créance à un droit de liberté - nous devons malgré tout rester extrêmement vigilants sur le fait que l'assurance maladie obligatoire restera le moyen de financer les dépenses consécutives à une interruption volontaire de grossesse.
    Au moment où se préparent un certain nombre de transferts de la couverture maladie obligatoire vers des couvertures maladie complémentaires, nous souhaitons dire ici que nous prenons ce texte comme un engagement que ce droit à l'IVG, qui a été conquis dans les circonstances que l'on connaît, et qui a l'importance sociale que l'on sait, restera assuré dans le cadre de la couverture maladie obligatoire.
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Dans leurs interventions, M. Mallié, Mme Jacquaint et M. Le Guen ont, c'était inévitable, élargi le sujet à la politique de santé publique en matière de sexualité, laquelle concerne l'éducation, la prévention et la réduction des risques, tout cela tournant autour d'un maître mot : responsabilité - responsabilité des parents, responsabilité des éducateurs, responsabilité des professionnels de santé et, naturellement, responsabilité des personnes elles-mêmes, qu'elles soient adolescentes ou adultes.
    Nous aurons l'occasion, lors de la discussion de la loi de programmation sur la santé publique, d'évoquer les actions en matière de sexualité en direction des adolescents car le problème est encore plus aigu que ne l'ont dit les intervenants, qui ont limité leur propos au risque de grossesse. Mais au-delà, c'est aussi le risque de contracter une maladie sexuellement transmissible et possiblement le sida qu'il faut prendre en considération. Il s'agit donc d'un véritable problème de santé publique, dont l'interruption de grossesse n'est finalement qu'un des aspects.
    Monsieur Mallié, après avoir, définitivement j'espère, levé, comme je l'ai fait pour la toxicomanie, l'ambiguïté pouvant exister entre la prévention et le soin, je voudrais vous rappeler que le principe du remboursement de l'IVG est acquis depuis plus de vingt ans. Le transfert que nous proposons aujourd'hui vers l'assurance maladie ne repose évidemment sur aucune idéologie. Cette proposition est inspirée par un souci de clarification car l'IVG, c'est aussi des actes médicaux, des analyses biologiques et des prescriptions médicamenteuses.
    Pour que l'assurance maladie prenne un financement en charge, il n'est pas nécessaire qu'il y ait une maladie ou une pathologie. D'ailleurs, la contraception est déjà prise en charge par l'assurance maladie...
    Mme Muguette Jacquaint. Pas suffisamment !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est la raison pour laquelle je vous ai parlé hier, pour ce qui concerne les hôpitaux, de tarification non à la pathologie, mais à l'activité.
    Tout ce que nous sommes en train de faire procède d'une grande logique et d'une grande cohérence.
    Vous pourriez vous reporter au discours que j'avais prononcé lorsque la précédente majorité avait soutenu l'allongement du délai dans lequel une IVG peut être pratiquée. J'avais élevé une mise en garde, dont j'assumerai aujourd'hui toute la responsabilité, en faisant valoir qu'en augmentant le délai de quinze jours on ne réglait pas, loin de là, tous les problèmes. Car l'on sait bien qu'à une certaine période de la vie l'exposition à des risques fait bien souvent partie du comportement de ceux qui veulent démontrer qu'ils sont plus forts que les autres.
    Nous devons reconnaître avec humilité que nous avons des difficultés à faire passer certains messages dans les centres de planning familial et lors des consultations de contraception et de sexualité. Nous avons également beaucoup de difficultés à faire un sorte que, dans un contexte de pénurie de médecins, notamment d'obstétriciens, toutes ces tâches soient correctement assumées. Je rappelle cependant que, dès mon arrivée au Gouvernement, j'ai oeuvré pour faire reconnaître la spécialité de gynécologie médicale. Nous avons là une des solutions au problème. Vous aviez, mesdames, messieurs de l'opposition, évoqué le sujet mais vous n'aviez jamais franchi le pas...
    Mme Marie-Françoise Clergeau. Mais si !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Cette fois, ça y est ! Il existe désormais une spécialité de gynécologie médicale qui, je l'espère, prendra toute sa place dans l'approche des problèmes de la sexualité, qu'il s'agisse de la contraception, de la mise en garde contre les contaminations possibles ou des interruptions volontaires de grossesse.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Nous voterons l'article 23.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Cet article seulement ? Dommage ! (Sourires.)
    M. Richard Mallié. Lancez-vous, monsieur Le Guen.
    Mme la présidente. Poursuivez, monsieur Le Guen !
    M. Jean-Marie Le Guen. Votre intervention n'a pourtant pas levé mes interrogations, monsieur le ministre.
    Je partage avec vous l'idée que l'IVG n'est pas un moyen contraceptif et que, à chaque fois qu'elle est pratiquée et a fortiori si elle est pratiquée plusieurs fois, elle sanctionne un échec de notre politique de prévention et d'éducation sanitaire, voire de notre société dans son ensemble. Nous n'avons aucune raison de penser que l'IVG soit un moyen de contraception tout à fait normal qui nous ferait nous satisfaire de la situation...
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est ce que j'ai dit !
    M. Jean-Marie Le Guen. Nous n'avons jamais prétendu que l'allongement du délai qui a été voté réglerait le problème ou atténuerait les conséquences négatives de certaines situations.
    Cela dit, je pense qu'il serait totalement inadmissible que, au nom de la prévention, à un moment ou à un autre, une sanction économique, c'est-à-dire la prise en charge par les personnes concernées, s'applique sous le prétexte que celles-ci n'auraient pas eu une attitude de prévention ou qu'elles ne se seraient pas conformées à des attitudes dites de responsabilité. J'aimerais que vous nous disiez précisément que vous n'envisagez en aucune façon que l'échec d'une politique de prévention puisse être sanctionné, sur le plan économique et financier, au détriment de personnes qui n'auraient malheureusement pas adopté une politique de contraception adaptée.
    M. Richard Mallié. Vous préconisez l'assistanat à outrance !
    M. Jean-Marie Le Guen. D'autre part, vous avez particulièrement insisté sur la question des soins, dont nous avions commencé de parler à propos de l'article 22, qui concerne la toxicomanie.
    Nous aurions tort de procéder à une « remédicalisation » de la prévention et de l'éducation sanitaire.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. J'ai dit que nous devions faire le contraire !
    M. Richard Mallié. Il ne vous a pas écouté !
    M. Jean-Marie Le Guen. Sans doute, pour des raisons politiciennes, avez-vous ramené les choses aux gynécologues médicaux, qui seraient la pierre de touche d'une politique d'éducation et de prévention en matière de contraception. Certes, les gynécologues médicaux ont leur rôle à jouer, mais ce n'est ni sur leur nombre ni sur l'accessibilité des jeunes filles de tous les milieux sociaux à des consultations en gynécologie que nous ferons reposer la politique d'éducation sanitaire en matière de contraception et de prévention de l'IVG.
    En tout cas, j'aimerais que vous nous affirmiez d'une manière très claire que vous ne recourrerez jamais à la sanction économique dans le cadre d'une politique de prévention en matière de contraception comme en matière de lutte contre l'IVG.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 23.
    (L'article 23 est adopté.)

Article 24

    Mme la présidente. « Art. 24. - I. - L'article L. 6312-5 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « - les conditions dans lesquelles le représentant de l'Etat dans le département organise, après avis du comité mentionné à l'article L. 6313-1, la garde départementale assurant la permanence des soins. »
    « II. - L'article L. 322-5-2 du code de la sécurité sociale est complété par un 6° ainsi rédigé :
    « Les conditions de rémunération des entreprises de transports sanitaires pour leur participation à des dispositifs de permanence des soins dans les conditions prévues à l'article L. 6312-5 du code de la santé publique. »
    « III. - La première phrase de l'article L. 161-34 du code de la sécurité sociale est remplacée par les dispositions suivantes :
    « Pour les professions concernées par les dispositions des chapitres II et V du présent titre et par les dispositions des articles L. 322-5 à L. 322-5-5, les conventions nationales, accords nationaux et contrats ou les dispositions applicables en l'absence de convention, de contrat ou d'accord, précisent, pour chaque profession ou établissement concerné et en complément des dispositions de l'article L. 161-33, les modalités de transmission par voie électronique des documents nécessaires au remboursement ou à la prise en charge et les sanctions en cas de non-respect de ces modalités. »
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, inscrit sur l'article.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je renonce à m'exprimer, madame la présidente.
    Mme la présidente. M. Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, a présenté un amendement, n° 272, ainsi rédigé :
    « I. - A la fin du dernier alinéa du I de l'article 24, substituer aux mots : "des soins les mots : "du transport sanitaire.
    « II. - En conséquence, dans le dernier alinéa du II de cet article, subtituer aux mots : "des dispositifs de permanence des soins dans les conditions prévues à les mots : "la garde départementale organisée dans les conditions prévues au dernier alinéa de. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean Bardet, rapporteur. Cet amendement est de précision. La garde organisée par l'article 24 ne concerne que le transport sanitaire et non la permanence des soins dans son ensemble. D'où l'intérêt de l'amendement.
    Je saisis l'occasion pour poser une question au ministre.
    Une disposition de l'article prévoit d'élargir le champ d'application du dispositif SESAM-Vitale : les entreprises de transport sanitaire pourront transmettre par voie électronique les documents nécessaires au remboursement et à la prise en charge à compter du 1er janvier 2003. Or le 31 octobre de la même année, le contrat de concession de service public du réseau de santé sociale liant l'Etat et Cegetel arrivera à échéance. La pérennité du dispositif SESAM-Vitale, dont le bilan et désormais largement positif, dépendant de la continuité de son support technique de transmission de flux électroniques, il convient de connaître dès maintenant les intentions du Gouvernement à ce sujet.
    Souhaitez-vous proroger la concession actuelle, décision qui doit être connue par le cocontractant avant le 1er novembre 2002, ou bien envisagez-vous une autre solution ? Si oui, quelle serait-elle, étant entendu qu'un autre support devra présenter au moins les mêmes garanties de sécurisation que l'actuel réseau ?
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement est favorable à l'amendement.
    Vous avez, monsieur le rapporteur, posé une question importante. L'Etat a signé avec Cegetel en mars 1998 un contrat de concession de service public pour la mise en place de l'exploitation du réseau de santé sociale, lequel arrive normalement à échéance le 30 octobre 2003. Conformément aux termes de ce contrat, l'Etat doit avertir le concessionnaire de ses intentions douze mois au moins avant l'échéance, c'est-à-dire avant le 30 octobre 2002. L'Etat doit préciser s'il entend ou non maintenir tout ou partie des services sous le régime de la concession.
    Aujourd'hui, l'usage des technologies de l'information et de la communication, et notamment des outils de communication fondés sur les protocoles Internet, s'est banalisé. L'insuffisance du marché, qui avait justifié l'appel à un régime de concession, ne peut plus être invoquée. Si le développement d'échanges dématérialisés reste un enjeu important pour la modernisation du secteur de la santé, on peut considérer que l'offre de service a désormais atteint une maturité suffisante. Le régime de concession de service public n'est donc plus nécessaire, ce dont conviennent tous les acteurs du réseau de santé sociale.
    De ce fait, j'ai, ces derniers jours, informé par courrier le président de Cegetel que j'envisageais de mettre un terme au régime de la concession à son échéance. Cependant, je me réserve la possibilité, conformément à l'article 40 de la loi Sapin du 29 janvier 1993, de signer avec Cegetel un avenant de prolongation d'une durée d'un an. Il importe de souligner qu'à cet égard la date du 31 octobre 2002 ne constitue pas une date limite.
    L'analyse est en cours et les échanges avec Cegetel se poursuivent.
    Telle est, monsieur le rapporteur, la réponse très précise que je voulais vous apporter.
    Mme la présidente. La parole est à M. Claude Evin.
    M. Claude Evin. Monsieur le ministre, vous avez la maîtrise directe du dossier et je vous laisse libre de votre appréciation. Mais il est un élément qu'il est nécessaire de prendre en considération : la sécurisation de la transmission des données. Je n'attends cependant pas de votre part de réponse immédiate à mes interrogations.
    J'avais cru comprendre que l'un des éléments techniques sur lesquels l'opérateur avait pu buter était justement la sécurisation. Aujourd'hui, l'opérateur actuel, Cegetel, maîtrise apparemment le problème.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est vrai !
    M. Claude Evin. Sortir de la concession de service public et envisager de remettre en concurrence les opérateurs ne risque-t-il pas de nuire à la sécurisation de la transmission des données ?
    Il est nécessaire que vous puissiez apporter un certain nombre de réponses, même si ce n'est pas dans l'immédiat, je le répète. En effet, la sécurisation de la transmission des données renvoie non seulement à des questions éthiques, mais aussi à des questions de santé publique.
    Il me semblerait opportun que vous puissiez, sous la forme que vous jugerez la plus appropriée, informer la représentation nationale, au-delà de l'aspect purement technique.
    Le choix que vous serez amené à faire quant à la poursuite éventuelle du travail avec l'opérateur Cegetel exige que l'ensemble de ces éléments soit pris en compte.
    Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, c'est avec stupéfaction que je lis, dans l'exposé des motifs de l'article 24, qu'« en application des textes sur la réduction du temps de travail, les entreprises de transport ambulancier doivent rémunérer les personnels d'astreinte ». Le problème, c'est que ce n'est plus vrai...
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Pourquoi ?
    M. Maxime Gremetz. Je vois que vous n'êtes pas bien informé, monsieur le ministre. (Sourires.) Lors de la discussion de son projet « assouplissant », entre guillemets, les 35 heures,...
    M. Jean-Luc Préel. Ce n'est qu'un projet !
    M. Maxime Gremetz. ... M. Fillon a fait adopter un amendement par lequel, contrairement au code du travail en vigueur, la période d'astreinte, qui n'était considérée ni comme temps de travail ni comme temps de repos, est considérée comme un temps de repos. Vous ne pouvez donc pas nous demander, à l'article 24, de l'argent pour payer les astreintes puisqu'elles seront gratuites !
    Tout cela est bien surprenant et j'attends vos explications. Les ministres marchent à plusieurs vitesses : l'un fait voter un texte et l'autre continue à raisonner sur l'ancienne loi.
    Je conçois que le point que je viens de soulever soit pour vous un véritable casse-tête...
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Pas du tout !
    M. Richard Mallié. Nous, nous avons tout compris !
    M. Maxime Gremetz. Il faudra donc, c'est clair, annuler la disposition adoptée dans la loi de M. Fillon.
    Mme Jacqueline Fraysse. C'est très clair !
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur Gremetz, je salue votre attention et votre vigilance en séance, car vous semblez découvrir le texte. (Sourires.)
    M. Maxime Gremetz. Mais non !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Comment le vieux parlementaire que vous êtes - dans mon esprit, ces mots ne sont nullement péjoratifs -...
    M. Yves Bur. Voilà qui va mettre M. Gremetz de bonne humeur !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... peut-il penser que nous puissions méconnaître ce qui est dans un texte et ce qui figure dans un autre.
    Au moment où nous discutons, le texte de M. Fillon n'est pas promulgué. Lorsqu'il le sera, la disposition que vous avez rappelée n'aura le cas échéant plus lieu d'être. En l'état actuel des choses, je m'en tiens, dirai-je, au principe de précaution.
    M. Maxime Gremetz. Puis-je répondre au ministre, madame la présidente ?
    Mme la présidente. Soit ! Mais soyez très bref.
    M. Maxime Gremetz. je n'ai pas encore commencé et on me demande déjà de faire court ! (Rires.) La présidente m'en veut, ce n'est pas possible ! (Rires.)
    Mme la présidente. Allez-y, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Vous êtes formidable : quand les toubibs discutent entre eux, tout va pour le mieux, mais dès qu'un ouvrier s'en mêle, rien ne va plus ! Arrêtez, c'est insupportable.
    Mme la présidente. Monsieur Gremetz, venez-en au fait, je vous prie !
    M. Maxime Gremetz. Tout à l'heure, je n'ai pas épuisé les cinq minutes qui m'étaient imparties !
    Mme la présidente. Monsieur Gremetz, s'il vous plaît !
    M. Maxime Gremetz. Moi, je voterai l'article (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), que j'opposerai par la suite à M. Fillon. Je lui rappellerai que son gouvernement nous a fait voter un texte qui reconnaît que les astreintes doivent être rémunérées. Voilà un texte progressiste ! (Sourires.) Quand son projet de loi nous reviendra en deuxième lecture, je dirai à M. Fillon que ce qu'il nous propose est une régression sociale sans pareille.
    Quant au texte que vous nous invitez à voter, monsieur le ministre, c'est un bon texte. Je voulais simplement attirer votre attention sur le point que j'ai évoqué pour que vous n'ayez d'ennui ni avec M. Fillon ni avec Bercy ! (« Merci ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 272.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 24, modifié par l'amendement n° 272.
    (L'article 24, ainsi modifié, est adopté.)

Article 25

    Mme la présidente. « Art. 25. - I. - Au I de l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles, les mots : "31 décembre 2003 sont remplacés par les mots : "31 décembre 2006.
    « II. - Au premier alinéa de l'article 5 de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie, les mots : "au plus tard jusqu'au 31 décembre 2003 sont remplacés par les mots : "au plus tard à la date mentionnée au I de l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles. »
    La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées.
    M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je souhaite m'exprimer devant votre assemblée à l'occasion de l'examen de l'article 25 pour rappeler la priorité du Gouvernement à l'égard des personnes âgées dépendantes prises en charge en institution.
    Certains ont vu dans la proposition de report de l'échéance de signature des conventions tripartites le signe d'un renoncement à l'égard d'un chantier difficile, mais nécessaire, engagé en 2001.
    Nécessaire, pourquoi ?
    Tout simplement parce que les objectifs de la réforme sont bons : promouvoir une qualité de prise en charge des personnes âgées en établissement par l'engagement d'une démarche qualité. Chacun sait ici le chemin qui reste à parcourir dans ce sens : réduire les inégalités tarifaires et rendre plus équitable l'allocation de ressources. Les retards de traitement sont aujourd'hui importants ; clarifier les coûts : hébergement, soins, dépendance, incombant à chaque financeur. Les enjeux financiers sont lourds pour l'assurance maladie et les départements.
    Difficile, pourquoi ? Parce qu'il s'agit d'une réglementation complexe et évolutive et parce que les intervenants ont été très mobilisés par la mise en oeuvre de l'APA, les 35 heures, les nouvelles règles comptables.
    Ce report de date traduit notre souci de réalisme que notre plan conjugue avec volontarisme.
    Réalisme d'abord. L'objectif initialement fixé de signer avant le 31 décembre 2003 près de 8 000 conventions tripartites était impossible à atteindre. D'ailleurs, lorsque j'ai pris mes fonctions au mois de juin dernier, à peine 800 conventions étaient signées. Chacun s'accorde à le reconnaître puisque, pour l'exercice 2001-2002 seulement, 1 400 conventions auront été signées.
    Le maintien de l'échéance initiale était donc de nature à démobiliser les acteurs et à entraîner la signature d'accords dans la précipitation au détriment de la qualité. Pour parvenir à atteindre l'objectif fixé de 8 000 signatures en 2003, nous aurions agi dans la précipitation.
    Réalisme, mais aussi cohérence puisqu'il s'agit pour nous de faire coïncider le programme pluriannuel de médicalisation qui prend fin en 2005 avec l'échéance des conventions. D'ailleurs, l'annexe du plan de financement le précise bien.
    L'objectif est de signer l'ensemble des conventions à l'horizon 2005. Les cas les plus difficiles et les procédures ultimes interviendraient en 2006.
    Volontarisme, ensuite. Nous sommes attachés à poursuivre avec détermination la mise en oeuvre de la réforme de la tarification, le chiffre en atteste, puisque j'annonce 1 800 conventions tripartites. Cet objectif quantitatif figure d'ailleurs dans la loi. Il sera donc opposable à tous, responsables d'établissements, conseils généraux, services déconcentrés, mais aussi financeurs. L'incidence de la montée en charge des conventions sera naturellement imputée sur l'enveloppe médico-sociale en faveur des personnes âgées. Son ajustement sera envisagé, si nécessaire, en fonction du rythme de signature de ces 1 800 conventions.
    Volontarisme aussi à l'égard du respect des engagements pris dans le cadre des programmes pluriannuels. Leur mise en oeuvre doit se traduire, en 2003, par la création de 4 000 places de SSIAD complémentaires - je suis certain que Denis Jacquat y sera attentif -, de 1 750 places d'accueil de jour pour les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, et de 750 places d'accueil temporaire pour cette même pathologie.
    Tels sont, mesdames, messieurs les députés, les commentaires que je souhaitais apporter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 25.
    La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie pour vos précisions.
    L'article 25 vise à prolonger de trois ans le délai pour la signature des conventions tripartites concernant les établissements d'accueil pour les personnes âgées. Toutefois, cette prolongation de trois ans me paraît excessive. Les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées ont connu de grandes difficultés avec la mise en oeuvre concomitante de la réforme de la tarification, de l'APA, et des 35 heures.
    La réforme de la tarification devait permettre de diminuer le prix de l'hébergement, cette diminution compensant la mise en place du forfait dépendance. Or, en raison de l'application concomitante des 35 heures, le forfait hébergement n'a pas diminué, parfois il a même augmenté, sans pour autant que soit amélioré le service rendu, puisque l'application des 35 heures n'a pas eu pour effet une embauche systématique de personnel. Beaucoup d'établissements attendent une amélioration de la médicalisation, grâce à la réforme de la tarification et à la signature de conventions, puisque les deux sont en principe liés. Mais, ainsi que vous venez de le dire, la préparation des conventions est complexe, avec notamment la visite de l'équipe technique, et les négociations sont souvent longues et difficiles, ce qui explique le retard. Malgré tout, de très nombreux établissement sont engagés dans la préparation de la convention, avec une réelle volonté d'aboutir rapidement. Reporter le délai de trois ans risque donc de démobiliser certaines équipes.
    De plus, la médicalisation des établissements est liée à la signature des conventions. Il ne faudrait donc pas que le report de la date butoir conduise à étaler l'effort indispensable de médicalisation. C'est pourquoi, j'ai déposé, au nom de l'UDF, un amendement qui précise que les dossiers seront déposés au cours de l'année 2003, de manière à motiver les responsables, obtenir qu'ils fassent le nécessaire, et pour que les signatures interviennent au cours de l'année 2004.
    Nous sommes parvenus à un accord en commission pour porter la date limite à 2005. Je pense, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous y serez favorable.
    Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Le groupe socialiste a examiné avec beaucoup d'attention les propositions contenues à l'article 25 qu'il a entendu améliorer par voie d'amendement, notamment en ce qui concerne la durée d'application. Jean-Luc Préel a bien expliqué pourquoi on ne pouvait en aucune manière revenir sur le dispositif de la réforme de la tarification. Pour autant, je partage en grande partie l'avis de M. le secrétaire d'Etat quand il insiste sur l'utilité de cette réforme de la tarification, car elle devrait permettre d'améliorer la démarche qualité dans les établissements d'hébergement. Et cette démarche qualité recouvre à la fois l'amélioration du système de fonctionnement, le recours à quelques investissements mais surtout la nécessité de combler le manque criant de personnels soignants.
    Pourquoi la réforme de la tarification n'est-elle pas allée aussi rapidement qu'on l'aurait souhaité ? Pour plusieurs raisons. Certes cette réforme était contenue dans la loi du 24 janvier 1997 instituant la prestation spécifique dépendance mais pour que cette loi puisse être mise en place, encore fallait-il disposer du système ternaire sur lequel repose cette tarification avec les parties dépendance, santé et hébergement. Ce n'est qu'après la loi du 20 janvier 2001 créant l'APA que la réforme de la tarification pouvait être mise en place. Sinon, elle n'aurait pas eu de sens. C'est vrai, les choses ont tardé.
    Que constate-t-on depuis le début de l'année ? D'abord, le nombre d'établissements s'étant engagés dans cette réforme est important. M. le secrétaire d'Etat vient de rappeler qu'il y en aura vraisemblablement 1 200 à la fin de l'année, sans compter que les directeurs qui se sont engagés dans cette démarche qualité en attendent énormément.
    M. Falco nous propose 1 800 signatures pour 2003. On sait aujourd'hui, d'après les données qui sont connues et présentées par la Fédération hospitalière de France, que la moyenne financière d'une convention tripartite est de 180 000 euros environ. Si l'on multiplie par 1 800 dossiers signés pour 2003, on est loin du compte.
    Nous sommes, en effet, en dehors du plan prévu par le précédent gouvernement, soit 5 milliards de francs sur cinq ans. C'est dommageable.
    Nous comprenons bien, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il est impossible que 10 000 établissements entrent dans la réforme de la tarification d'ici à la fin de 2003. Un tiers, sinon plus, de ces 10 000 établissements sont des foyers-logements, et certains de ces foyers-logements ne sont pas médicalisés et ne tiennent pas à l'être ; d'autres ne sont pas opérationnels en matière de médicalisation tant il est vrai que ces services sont dégradés.
    Mais, ce qui importe aujourd'hui, c'est que les établissements hospitaliers publics puissent entrer au plus vite dans la réforme de la tarification. Nous pensons donc qu'il n'est pas opportun de l'étaler jusqu'en 2006. Aussi avons-nous proposé, dans un amendement de sagesse, me semble-t-il, de porter à 2004 le délai laissé aux établissements pour signer les conventions. Les établissements connus comme des foyers-logements pourraient attendre quant à eux jusqu'en 2005-2006. Il faut avoir l'ambition, et l'insuffler à vos services, à la DAS et aux services déconcentrés, de pousser cette réforme de la tarification, sinon les moyens vont encore manquer dans les établissements.
    Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Je voudrais parler de la grande avancée sociale qu'est l'APA, notamment parce qu'elle concerne 850 000 personnes âgées au lieu de 130 000 pour la PSD et parce qu'elle renonce au recours sur succession. Je trouve que l'actuelle majorité a la mémoire courte. Lorsque nous avions discuté de l'APA, j'avais insisté sur le fait qu'une telle mesure allait coûter très cher aux départements. Nous nous étions battus alors pour que la dépendance soit un cinquième risque assumé par la sécurité sociale.
    Cela présentait l'avantage de ne pas tout mettre à la charge des contribuables par le truchement des départements. Comme la sécurité sociale est financée par des cotisations à la fois salariales et patronales, les entreprises auraient participé un peu à la solidarité nationale. Mais le Gouvernement, têtu, ne nous a pas écoutés. C'est ainsi. J'ai entendu ici vingt discours sur ce thème de la part de ceux qui, en face, sont aujourd'hui majoritaires - n'est-ce pas, monsieur Jacquat, n'est-ce pas, monsieur Goulard ? Tout le monde était d'accord là-dessus. Aujourd'hui, vous n'en parlez plus, vous avez oublié.
    M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse. Non, nous n'avons pas oublié.
    M. Maxime Gremetz. Une fois de plus, parce que nous n'avons pas fait le choix de la prise en compte par la sécurité sociale, véritable choix de société et considéré comme tel, comme un grand risque, ou plutôt, comme une grande avancée, on nous présente des amendements, proposant des dates différentes.
    J'ajoute que, pour les établissements de ma ville d'Amiens, par exemple, on a décidé une augmentation de 1 000 francs par mois et par famille, quelle que soit sa situation, alors que l'on doit tenir compte des ressources et des conditions réelles. Croyez-vous que cela puisse me laisser insensible ?
    Aujourd'hui, des gens qui sont dans des maisons de retraite ne peuvent plus y rester. Or, au nom de la justice, qu'on soit milliardaire, smicard ou d'une famille modeste, on décide une augmentation de 1 000 francs par mois. Je reste convaincu que ce risque-là relève de la solidarité nationale et pas seulement des conseils généraux, c'est-à-dire en fait des gens qui paient des impôts, puisque c'est de cela qu'il s'agit. Dans mon département, on a été obligé d'augmenter les impôts locaux de 9 % puisque l'APA coûte très cher.
    Voilà les remarques que je voulais faire. Pour ma part, mes convictions n'ont pas changé, ce qui n'est pas votre cas. Mais c'est votre choix.
    Mme la présidente. La parole est à M. Yves Bur.
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous devons examiner la situation avec attention afin d'essayer de comprendre pourquoi la contractualisation n'a pas connu plus de succès.
    La principale raison tient aux nombreuses incertitudes qui pèsent ou ont pesé sur le secteur, parfois depuis bien longtemps. A cet égard je me souviens du débat que nous avons eu ici en 1997 pour déjà reporter la date butoir au 31 décembre 1999. Aujourd'hui, en 2002, nous n'avons visiblement guère avancé.
    En effet les établissements ont été confrontés à bien d'autres problèmes que la contractualisation. Avant de penser à contractualiser, ils ont dû d'abord essayer de surmonter les difficultés nées de l'obligation d'appliquer la RTT. Cela n'a pas été très simple dans les établissements. Il faut donc les comprendre.
    Ensuite la mise en oeuvre de l'APA a encore posé des problèmes aux établissements.
    Aujourd'hui, nous sortons de cette période d'incertitude, mais la question de la date butoir reste posée. N'oublions pas, en préalable, que les établissements concernés ne pourront bénéficier de la médicalisation qu'après avoir contracté : ils sont donc les premiers intéressés à ce que l'on progresse sur ce sujet. A cet égard, monsieur le ministre, vous devez nous rassurer et les rassurer, en assurant que vos services - la même démarche devrait d'ailleurs concerner les administrations des conseils généraux - ne font rien pour ralentir le processus. Nous attendons en effet que les DDASS s'engagent vraiment aux côtés des établissements afin que la contractualisation progresse.
    C'est peut-être pourquoi nous voulons raccourcir le délai pour mettre la pression. Si nous avons des engagements clairs, tous les établissements pourront avoir contractualisé avant le 31 décembre 2005. Ils auront même tout intérêt à le faire bien avant.
    Je profite de cette intervention pour souligner que le médecin coordonnateur aura clairement sa place dans la contractualisation. Il subsiste en effet encore quelques incertitudes par rapport au niveau de rémunération, il conviendra d'en traiter dans la contractualisation.
    Je souhaite donc que l'on apporte aux différents services les précisions nécessaires pour que tout se passe le plus rapidement et le mieux possible.
    Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour l'assurance vieillesse.
    M. Maxime Gremetz. Ah ! M. Jacquat est un homme de parole ! Il va confirmer qu'il est toujours pour la création du cinquième risque.
    M. Denis Jacquat, rapporteur. Madame la présidente, puisque je suis interpellé par M. Gremetz, je tiens à dire qu'il est des causes que l'on défend même lorsque l'on passe de l'opposition à la majorité ! Les ministres, Jean-François Mattei et Hubert Falco, le démontrent encore aujourd'hui. Ce n'est pas parce qu'on est dans la majorité que l'on doit renier ce que l'on a défendu auparavant.
    M. Maxime Gremetz. Tout à fait !
    Mme Jacqueline Fraysse. On peut même le mettre en oeuvre !
    M. Denis Jacquat, rapporteur. En ce qui concerne le cinquième risque, je me suis exprimé à la tribune. Vous pouvez reprendre le Journal officiel.
    Pour en revenir à l'article 25, je veux souligner que le but des conventions est de permettre aux établissements d'améliorer leurs moyens. Nous avons tous souhaité en son temps, cette réforme de la tarification et les établissements l'attendent. Malheureusement le processus de signature de conventions a pris du retard pour les raisons qu'Yves Bur vient d'exposer. En effet, au-delà des discussions sur le sujet et des négociations, sont intervenues, notamment, la réforme de l'APA et les 35 heures, bref un ensemble de facteurs qui n'ont pas amélioré une situation extrêmement difficile que vous avez d'ailleurs parfaitement connue, madame la présidente, puisque vous étiez secrétaire d'Etat chargée des personnes âgées. Les établissements étaient donc bien d'accord pour signer des conventions, mais, en raison de la complexité de la situation et du manque de lisibilité général, on n'a pas été aussi vite que nous l'aurions voulu.
    Actuellement, les responsables d'établissements ou les dirigeants des associations qui s'occupent des établissements nous harcèlent en demandant que ces conventions soient signées le plus rapidement possible. Ils craignent qu'avec le report de la date limite au 31 décembre 2006 des conventions ne soient en fait signées qu'en 2007 ou 2008. Ils préféreraient que l'on retienne le 31 décembre 2004. Pour eux ce serait une manière de nous booster.
    N'oublions pas non plus que ces établissements reçoivent des personnes âgées qui sont des cas de plus en plus lourds et qui nécessitent un taux d'encadrement beaucoup plus élevé.
    Lors des discussions en commission, nous avons estimé que l'année 2006 était trop loin, et 2004 trop près. Nous avons donc choisi, à une large majorité, une solution de sagesse, en proposant le 31 décembre 2005, sauf pour les foyers logements pour lesquels nous souhaitons conserver le 31 décembre 2006. Cette dissociation a d'ailleurs été reprise dans les amendements de l'opposition.
    Telles sont les observations que je tenais à formuler en ma qualité de rapporteur de l'assurance vieillesse, mais, monsieur Gremetz, croyez bien que ce n'est pas parce que je suis passé de l'opposition dans la majorité, par la grâce des électeurs, que je changerai d'avis en matière de défense des personnes âgées et retraitées.
    M. Maxime Gremetz. Vous êtes donc toujours favorable au cinquième risque !
    Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées.
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Mesdames, messieurs, j'ai écouté avec beaucoup d'attention tous les députés, de droite et de gauche, qui sont intervenus sur ce sujet, la principale divergence tenant à la date butoir.
    Notre souci est que les conventions tripartites soient signées dans les meilleurs délais. Ainsi que cela a déjà été souligné, elles constituent le moyen d'obtenir une amélioration qualitative de nos établissements. Or, vous le savez très bien, puisque vous avez sans doute tous travaillé au niveau des établissements qui accueillent des personnes âgées, dans les quelque 10 000 établissements recensés, maisons de retraite publiques et privées confondues, 200 000 des 600 000 lits existants sont totalement inadaptés.
    Nous sommes tous d'accord pour développer la médicalisation, pour accroître les soins dans ces établissements. Tel doit être l'objet des conventions tripartites. J'aimerais bien que leur nombre croisse rapidement, mais nous devons être réalistes, monsieur le député. En effet, lorque j'ai pris mes fonctions au mois de juin, en tout et pour tout 700 conventions seulement étaient signées.
    M. Pascal Terrasse. Plutôt 800 !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Soit, 800, et il y en aura, au mieux, 1 200 à la fin de l'année.
    Je peux donc vous assurer, pour répondre à votre préoccupation, que nos services ne sont pas là pour freiner les signatures. Bien au contraire, ils essaient de les accélérer. Nous avons même tenu des réunions avec les responsables d'établissement pour les inciter. Nous sommes en effet tout disposés à apporter les nécessaires améliorations dont profiteront les 300 000 personnes qui encadrent les 600 000 lits, qui travaillent souvent dans des conditions très difficiles, qui sont mal reconnus et qui ont un besoin de formation que la convention tripartite va leur apporter.
    En ce qui concerne l'APA, monsieur Gremetz, j'ai écouté votre intervention avec beaucoup d'attention. Nous serions bien heureux aujourd'hui et nous aurions bien d'autres choses à faire dans le domaine des personnes âgées, si vous aviez résolu le problème financier dès que vous aviez mis en place cette mesure dont vous avez si largement fait la publicité. Tel n'a malheureusement pas été le cas et il nous appartient désormais de faire ce que vous n'avez pas ou mal réussi, c'est-à-dire trouver les financements nécessaires pour que cette mesure s'applique, car, je le répète, nous voulons qu'elle s'applique. Je salue d'ailleurs l'initiative qu'a prise votre département d'apporter 1 000 francs supplémentaires. En effet, l'APA est aussi un moyen d'apporter davantage de soins, davantage de services, davantage de médicalisation aux personnes âgées. Ainsi que je l'ai déjà souligné dans cet hémicycle, je répète qu'il s'agit d'une bonne mesure. Encore fallait-il la financer.
    La création du cinquième risque a effectivement été envisagée. Il me semble même que, au moment où cette disposition a été adoptée, vous aviez préconisé cette solution lorsque vous étiez majoritaires sur les bancs de cette assemblée. Mais, il y a eu débat entre vous et aucun accord n'est intervenu sur le financement. La mesure a donc été instaurée sans les financements. Le plus difficile reste à faire.
    Mme la présidente. MM. Préel, Leteurtre, Jardé, Artigues et les membres du groupe Union pour la démocratie française ont présenté un amendement, n° 197, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le I de l'article 25 :
    « I. - Après les mots : "que s'ils ont passé avant le, la fin du I de l'article L. 313-12 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée : "31 décembre 2004 une convention pluriannuelle avec le président du conseil général et l'autorité compétente de l'Etat, qui respecte le cahier des charges établi par arrêté ministériel, après avis des organismes nationaux d'assurance maladie et de représentants des présidents des conseils généraux. La date limite de délai de dépôt des dossiers est fixée par décret. »
    La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Le débat sur ce sujet vient d'avoir lieu puisque le but de cet amendement est de limiter le plus possible le report de la date butoir. Il s'agit de ne pas démobiliser les établissements qui se sont engagés de manière volontariste dans la signature des conventions et d'éviter que la médicalisation ne suive pas aussi vite que prévu, puisqu'elle est liée à la signature des conventions. C'est pourquoi il nous paraît opportun que les dossiers soient déposés avant la fin de 2003, la date butoir pour les signatures pouvant être prévue une année plus tard.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail. Avis défavorable. Je développerai mes arguments en présentant l'amendement n° 72 qui a été adopté par la commission.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Même avis.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 197.
        (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 154 présenté par M. Terrasse, Mme Guinchard-Kunstler, MM. Evin, Jean-Marie Le Guen, Mmes Clergeau, Hélène Mignon, Génisson, M. Masse et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « A la fin du I de l'article 25, substituer à l'année : "2006 les mots : "2004, et au 31 décembre 2006 pour les établissements mentionnés à l'article L. 633-1 du code de la construction et de l'habitation. »
    L'amendement n° 72, présenté par M. Bardet, rapporteur pour l'asurance maladie et les accidents du travail, MM. Préel, Leteurtre, Jardé, Artigues et les commissaires membre du groupe Union pour la démocratie française et apparentés, est ainsi rédigé :
    « A la fin du I de l'article 25, substituer à l'année : "2006 les mots : "2005, ou avant le 31 décembre 2006 pour les établissements mentionnés à l'article L. 633-1 du code de la construction et de l'habitation. »
    L'amendement n° 198, présenté par MM. Préel, Leteurtre, Jardé, Artigues et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés, est aindi rédigé :
    « Dans le I de l'article 25, substituer : "à l'année 2006 les mots : "2005 et au 31 décembre 2006 pour les établissements mentionnés à l'article L. 633-1 du code de la construction et de l'habitation. »
    La parole est à M. Pascal Terrasse, pour soutenir l'amendement n° 154.
    M. Pascal Terrasse. Un article, qui m'a été remis par l'agence fédérale d'information mutualiste, portait le titre suivant : « Les maisons de retraite sont menacées d'asphyxie financière ». Titre évocateur pour plusieurs raisons.
    D'abord les personnels soignants sont de moins en moins nombreux à s'engager dans les métiers liés au vieillissement de la population. Je l'ai constaté personnellement lorsque j'ai, occasionnellement, donné des cours au sein d'instituts de formation pour infirmières. En effet, quand on interroge les intéressées à la fin de la troisième année pour connaître leurs intentions, beaucoup parlent de l'humanitaire, du travail en clinique ou en hôpital, mais peu souhaitent s'investir dans le secteur de la gérontologie. Cela est peut-être regrettable, c'est un constat.
    Il est donc indispensable de valoriser ces fonctions afin d'inciter ces personnels à intégrer le beau métier qui consiste à soigner les personnes âgées.
    Nous proposons cet amendement parce que nous pensons que l'amélioration de la qualité dans les établissements doit primer sur toute autre considération. Il faut d'ailleurs que les établissements qui se sont engagés dans des procédures visant à mettre en place la réforme de la tarification obtiennent rapidement l'agrément.
    Cela étant, M. le secrétaire d'Etat m'a presque convaincu.
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. C'est bien !
    M. Pascal Terrasse. Toutefois je jugerai sur pièce et je devrai peut-être l'interpeller de nouveau dans quelques mois, sous d'autres formes sans doute.
    Aujourd'hui, les établissements attendent. De nombreux dossiers sont quasiment prêts. Il faudrait donc qu'ils soient rapidement agréés par les services déconcentrés de l'Etat. Je maintiens également notre demande que l'administration « booste » les établissements,...
    M. Denis Jacquat. rapporteur. Il reprend mes mots !
    M. Pascal Terrasse. ... c'est-à-dire qu'elle soit réellement active en matière de réforme de la tarification.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, vous savez aussi bien que moi que cette réforme de la tarification n'est pas l'apanage de vos services. Certes l'Etat fera sans doute son travail mais parce que vous avez présidé un conseil général, vous savez qu'il faut aussi inciter les conseils généraux à signer ces conventions tripartites car, si l'un des trois opérateurs ne s'engage pas le système ne fonctionnera pas. Cette réforme de la tarification nécessite un engagement fort tant de l'Etat que des conseils généraux.
    Notre amendement tend simplement à fixer la date butoir au 31 décembre 2004 pour les EHPAD, les établissements de long séjour, et au 31 décembre 2006 pour les établissements mentionnés à l'article L. 633-1, c'est-à-dire les foyers-logements.
    Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail pour soutenir l'amendement n° 72.
    M. Jean Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 a fixé au 31 décembre 2003 la date limite à laquelle les conventions tripartites devraient être signées entre les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées, l'autorité de tarification et le président du conseil général. Or, à la date du 30 juin 2002, 763 conventions seulement sur 8 000 attendues avaient été signées. Même si, depuis, il semble que soit intervenue une montée en charge - M. le secrétaire d'Etat l'a souligné en partant de 1 200 signatures d'ici à la fin de l'année - il est totalement irréaliste de penser qu'elles pourront toutes avoir été signées à la fin de l'année prochaine. C'est pourquoi le projet de loi propose de repousser la date limite au 31 décembre 2006.
    De nombeux commissaires de la majorité comme de l'opposition viennent de s'exprimer, dont certains ont trouvé ce délai trop long, comme en témoignent les amendements présentés. Il leur a semblé qu'un report si lointain risquerait de démobiliser les établissements et de remettre en cause la médicalisation prévue.
    Néanmoins, pour contracter il faut être au moins deux, et, comme l'ont rappelé plusieurs orateurs, les services des conseils généraux et ceux de l'Etat doivent se mobiliser sur ce projet.
    Finalement la commission a adopté un amendement, qui tend à ramener la date limite au 31 décembre 2005, pour les établissements de personnes âgées, et le maintien au 31 décembre 2006 prévu par le texte, pour les foyers-logements, comme le propose aussi M. Terrasse.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour défendre l'amendement n° 198.
    M. Jean-Luc Préel. C'est un amendement de repli, qui correspond à celui de la commission.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 154 ?
    M. Jean Bardet, rapporteur. Défavorable.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Défavorable à l'amendement n° 154, sagesse de l'Assemblée sur le n° 72.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 154.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 72.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 198 tombe.
    M. Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, a présenté un amendement, n° 73, ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 25, substituer aux mots : "au plus tard à les mots : "au plus tard jusqu'à. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail. C'est un amendement de précision.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 73.
    (L'amendement est adopté.).
    Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements pouvant faire l'objet d'une présentation commune.
    Ces amendements sont présentés par MM. Préel, M. Leteurtre, Jardé, Artigues, Vercamer et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés.
    L'amendement n° 238 est ainsi libellé :
    « I. - Compléter l'article 25 par le paragraphe suivant :
    « III. - Le 1° de l'article 5 de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie est ainsi rédigé :
    « 1° Un forfait global de soins fixé par l'autorité compétente de l'Etat, qui augmente dans des conditions fixées par décret. »
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    L'amendement n° 239 est ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 25 par le paragraphe suivant :
    « III. - Après les mots : "Etat, la fin du 1° de l'article 5 de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation d'autonomie est supprimée. »
    La parole est à M. Jean-Luc Préel pour les défendre.
    M. Jean-Luc Préel. La loi du 20 juillet 2001 instituant l'APA a prononcé le gel du forfait global de soins pour les établissements. Puis la loi de financement de la sécurité sociale du 26 décembre 2001 a prévu que ce forfait pourrait être revalorisé par un arrêté ministériel. Or il semble que l'arrêté pour 2002 n'ait pas été pris, ce qui fragilise les établissements. C'est pourquoi ces deux amendements proposent des dispositions de nature à permettre à l'Etat de prononcer par décret la médicalisation des établissements, dans le but d'éviter tout report, car la médicalisation est indispensable si l'on veut améliorer la qualité des soins dispensés aux personnes âgées hébergées dans ces établissements.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail. Avis défavorable : le mode de calcul du forfait de soins des établissements médico-sociaux a pour objectif d'initier la signature de conventions tripartites, comme nous venons de le voir, ce qui est bien conforme à l'intérêt des établissements. Il ne faut pas donc changer le régime transitoire.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Même avis.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur le ministre l'arrêté pour 2002 a-t-il été pris, conformément à la loi de financement de l'année dernière ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Pas encore !
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 238.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 239.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 25, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 25, ainsi modifié, est adopté.)

Article 26

    Mme la présidente. « Art. 26. - Le dernier alinéa de l'article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles est abrogé. »
    La parole est à M. Jean-Luc Préel, premier orateur inscrit sur l'article.
    M. Jean-Luc Préel. L'article 26, qui tend à la réintégration des médicaments remboursables dans les tarifs de soins des établissements assurant l'hébergement des personnes âgées et ne disposant pas de pharmacie à usage intérieur répond à une certaine logique mais il annule une disposition de la loi du 4 mars 2002 qui répondait à une nécessité, ce qui soulève plusieurs problèmes.
    Il faudrait, d'abord, que nous ayons la certitude que les forfaits de soin prendront bien en compte chaque année l'augmentation du prix des médicaments. Au vu de ce qui se passe à l'hôpital, nous pouvons craindre, hélas, qu'il n'en soit rien. Cette mesure serait donc très dangereuse pour l'équilibre des budgets des établissements.
    Par voie de conséquence, on peut redouter que certains établissements ne « sélectionnent » les personnes âgées. Un directeur accueillera-t-il volontiers une personne consommatrice de médicaments ou bien, lorsqu'elle sera déjà hébergée, n'aura-t-il pas tendance à la renvoyer chez elle ou à l'hôpital ?
    Par ailleurs, le rôle du médecin coordonnateur n'est pas clair, en particulier vis-à-vis du médecin traitant habitant la même commune.
    Ne sous-estimons pas non plus l'impact - non négligeable - de cette disposition sur les pharmacies rurales.
    Pour toutes ces raisons, l'UDF souhaite le rejet de cet article.
    Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. L'article 26 pose plus de questions qu'il ne donne de réponses.
    Puisqu'on parle de maîtrise médicalisée des dépenses de santé, il me semble que la réforme de la tarification était un bon outil, qui permettait aux établissements de maîtriser leurs dépenses pharmaceutiques, soit en passant par des grossistes répartiteurs, soit en faisant appel directement aux laboratoires. Pour un établissement, c'était plutôt intéressant sur le plan financier, et donc ça l'était aussi pour l'assurance maladie.
    Cependant, les incidences sur les pharmacies locales peuvent se révéler dramatiques, car, surtout en milieu rural, les établissements étaient nombreux à y recourir. Avec le dispositif proposé, demain, ce sera terminé. Or, on le sait, les maisons de retraites sont grosses consommatrices de médicaments. On imagine donc les conséquences sur les officines.
    Par ailleurs, créer dans ces petits établissements des pharmacies à usage interne soulèverait d'insurmontables difficultés. La loi exige le recrutement de pharmaciens. Et comment l'envisager ici pour un emploi à quart de temps, là à huitième de temps, donc à temps très partiel ? Le système, à mon avis, ne peut pas fonctionner.
    Quant on fait le bilan - partiel - de la réforme de la tarification, et en écoutant ce qu'en disent les établissements, il apparaît que les dérapages sont essentiellement le fait des médicaments et notamment des molécules les plus coûteuses.
    Tout cela met en difficulté nombre d'établissements. Aussi, après avoir réfléchi aux deux dispositifs, qui ont tous les deux du bon, j'estime préférable de supprimer l'article.
    Je profite de l'occasion pour souligner le rôle primordial des médecins coordonnateurs dans ces établissements. Malheureusement, ils ne peuvent pas actuellement prescrire de médicaments. A mes yeux, c'est un leurre. Il faudrait de toute façon y regarder de plus près.
    En outre, ces médecins coordonnateurs sont rémunérés au quatrième échelon du grade de praticien hospitalier. Je doute que cela corresponde vraiment à la réalité de leur travail, et il faudrait envisager de les rémunérer mieux.
    Dans certains établissements, on a tenté l'expérience de faire appel non plus à un seul médecin mais à deux, pour éviter que leur charge de travail ne pèse trop lourdementsur leur activité en ville.
    Il conviendrait donc de trouver des mécanismes pour améliorer la réforme de la tarification. Puis-je suggérer, monsieur le ministre, que la commission, ou un député, ou un expert établisse au début de l'année prochaine un premier bilan de la réforme de la tarification ? Il y a de très bonnes choses. Mais il faut avancer !
    La mission Marthe, qui devait aménager le système semble plutôt en panne. Mon idée de diagnostic pourrait être utile.
    Mme la présidente. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat, rapporteur. En tant que rapporteur pour l'assurance vieillesse, j'ai attiré l'attention de mes collègues sur cet article en commission, en indiquant qu'il s'agissait de savoir s'il fallait intégrer ou non les médicaments dans les prestations assurées par les établissements.
    S'ils étaient intégrés, il s'ensuivrait un problème de coût, en particulier pour les plus chers. Devrait-on, dès lors, ne prendre en charge que certains des médicaments ?
    Dans ce cas, les personnes présentant des pathologies lourdes, requérant des médicaments coûteux, pourraient être exclues, ou ne pas recevoir les médicaments adéquats. Pour être sûr qu'il n'y ait pas de discrimination entre les malades traités dans ces établissements et ceux restés à domicile, il ne fallait donc pas intégrer les médicaments dans les prestations qu'ils assurent.
    Il nous est apparu que, pour le moment, la meilleure solution serait la suppression de cet article, ce que proposera un amendement.
    Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
    L'amendement n° 74 est présenté par M. Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, MM. Heinrich, Gilles, Cherpion, Morange, Terrasse, Evin, Jean-Marie Le Guen, Mmes Clergeau, Mignon et Génisson ; l'amendement n° 155 par MM. Terrasse, Evin, Jean-Marie Le Guen, Mmes Clergeau, Hélène Mignon, Génisson, et les membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 241 par MM. Heinriche, Gilles, Cherpion, Morange, Vialatte, Roubaud, Dubrac et Bernier.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 26. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 74.
    M. Jean Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail. Cet amendement tend à supprimer l'article 26 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, lequel vise lui-même à abroger l'article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles, introduit dans la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. Nous en resterions donc à la situation actuelle.
    L'amendement de suppression a transcendé les clivages partisans puisqu'il a été déposé en commission tant par des membres de la majorité que de l'opposition et que, aujourd'hui, il est signé par des députés de droite et de gauche - « transcendance partisane » qui prévalait déjà l'année dernière sur le sujet, puisque l'article L. 314-8 est la conséquence d'un amendement présenté au Sénat par deux sénateurs de droite et voté, contre l'avis du gouvernement - de gauche - de l'époque ! L'amendement ayant été maintenu en commission mixte paritaire, il avait été retenu.
    De quoi s'agit-il exactement ?
    La loi du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, a exclu les médicaments et les dispositifs médicaux remboursables des prestations de soins servies par des établissements ou services hébergeant des personnes âgées dépendantes.
    La réintégration de ces produits dans les prestations assurées par ces établissements présenteraient de nombreux risques pour la qualité de la prise en charge des personnes hébergées et conduirait à instaurer une différence de traitement de ces personnes selon qu'elles sont accueillies en établissement ou maintenues à domicile. Dans ce dernier cas, elles ont accès, sur simple prescription, à l'ensemble des médicaments remboursables par l'assurance maladie, dans les conditions actuelles de maîtrise médicalisée des dépenses de santé. De plus, le pharmacien de proximité assure le service de garde et répond aux urgences.
    L'intégration de l'ensemble des médicaments dans les tarifs de prestations pratiquées par les établissements concernés conduira à une discrimination, lors de leur admission, à l'encontre des personnes accueillies, en fonction de la gravité et du coût des pathologies qui les affectent.
    Enfin, il est difficile de se livrer à un quelconque exercice de prévision budgétaire en matière de médicaments, tant celle-ci est soumise à de multiples aléas au sein d'une population dépendante, sensible aux épidémies et sujette aux pathologies lourdes. Le médecin coordonnateur ne pourra jouer pleinement son rôle qu'en relation avec le pharmacien d'officine appelé à dispenser des produits remboursables aux personnes hébergées.
    On peut développer l'argumentation inverse : l'article L. 314-8 remet en cause la tarification forfaitaire, puisque celle-ci ne porterait plus, si l'amendement est adopté, que sur les soins infirmiers, les médicaments en étant exclus. De même, il y aurait discrimination entre les personnes hospitalisées dans les établissements ayant une pharmacie interne et dans ceux qui n'en ont pas.
    La majorité de la commission a voté cet amendement mais, à titre personnel, j'ai voté contre.
    Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Terrasse pour soutenir l'amendement n° 155.
    M. Pascal Terrasse. Je ne serai pas long car tout ou presque a été dit, mais je voudrais poser une question à M. le ministre. Je ne sais pas quel sera l'avis du Gouvernement sur la suppression de l'article. Néanmoins, dans un colloque auquel je participais ce matin, le secrétaire d'Etat aux personnes âgées nous a laissé entendre que, a priori, le Gouvernement s'en remettrait à la sagesse de l'assemblée. Je regrette qu'il ne soit plus là pour le confirmer.
    En tout état de cause, certains établissements qui ont passé des conventions tripartites bénéficient donc d'un forfait qui prend en compte le médicament. Si le système venait à changer - une circulaire de la DGAS parle de « cristallisation » des décisions - en aucun cas, on ne pourrait revenir sur les conventions signées et pendant cinq ans le coût du médicament serait intégré dans le forfait.
    Monsieur le ministre, si l'article 26 est supprimé, il faudra faire preuve de souplesse envers les établissements qui ont déjà signé la réforme de la tarification. Ils ont été de bons élèves, il ne faudrait pas qu'ils soient punis. Il conviendrait de leur laisser le choix au moment du renouvellement annuel, puisque, vous le savez, les budgets sont examinés tous les ans par les services de contrôle, à savoir les conseils généraux et les DDASS.
    Monsieur le ministre, si nous supprimions l'article 26, « décristalliserait »-on les décisions antérieures pour les établissements ayant signé la convention tripartite ?
    Mme la présidente. La parole est à M. Michel Heinrich pour soutenir l'amendement n° 241.
    Michel Heinrich. Je suis moi aussi très préoccupé par le risque de discrimination entre les gens hébergés en établissements et les personnes maintenues à domicile.
    Par ailleurs, je précise que si l'Assemblée vote la suppression, nous proposerons ensuite un article additionnel qui aura pour objectif de veiller au bon usage du médicament et à la maîtrise médicalisée des coûts.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Madame la présidente, devant cette rare unanimité (Sourires), le Gouvernement va s'en remettre à la sagesse de l'Assemblée.
    Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Gilles.
    M. Bruno Gilles. Je tiens à souligner, moi aussi, combien est important le rôle que jouent le pharmacien de proximité, en particulier en milieu rural, et le médecin coordonnateur, qui travaillent en collaboration.
    Le ministre le rappelle souvent, il faut remettre le patient au centre du système de santé, en évitant toute inégalité entre ceux qui sont soignés dans un établissement pour personnes âgées et ceux qui restent à domicile et toute discrimination dans l'accueil des personnes en fonction du coût de leur traitement : il ne faudrait pas que l'entrée dans ces établissements fût refusée à certains patients. Songeons aussi à l'avenir de ceux dont la maladie va évoluer et le traitement devenir plus coûteux.
    Pour toutes ces raisons déjà exposées par mes collègues, je pense que c'est un excellent amendement.
    Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. Je comprends l'argumentation mais je m'interroge tout de même. Que reste-t-il de la réforme de la tarification et de la maîtrise médicalisée ? Quelle attitude adopterons-nous l'année prochaine si les infirmières nous demandent de sortir du forfait de soins ? Ne faudra-t-il pas revoir complètement la réforme de la tarification parce qu'elle aura petit à petit été grignotée ?
    Je soumets ces questions à votre réflexion.
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur Terrasse, je demanderai à M. Falco de vous répondre lui-même.
    Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 74, 155 et 241.
    (Les amendements sont adoptés.)
    Mme la présidente. En conséquence, l'article 26 est supprimé.
    Pour respecter le devoir de neutralité de la présidence que j'assure, je n'ai pas voulu intervenir avant le vote. Je tiens cependant, mes chers collègues, à vous mettre en garde : ne soumettons pas les établissements à un dispositif yo-yo, où les règles changeraient trop souvent.

Après l'article 26

    Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques. L'amendement n° 75 est présenté par M. Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail, MM. Heinrich, Gilles, Cherpion et Morange ; l'amendement n° 244 par MM. Heinrich, Gilles, Cherpion, Morange, Vialatte, Roubaud, Dubrac et Bernier.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Après l'article 26, insérer l'article suivant :
    « Le quatrième alinéa (2°) de l'article L. 162-16-1 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : ", notamment dans les établissements et services visés au 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, lorsque ceux-ci ne disposent pas de pharmacie à usage intérieur. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 75.
    M. Jean Bardet, rapporteur. Madame la présidente, je laisse le soin à M. Heinrich de défendre ces amendements identiques.
    Mme la présidente. La parole est à M. Michel Heinrich.
    M. Michel Heinrich. Cet amendement fait du pharmacien un véritable acteur de la démarche de maîtrise médicalisée des coûts, dans l'intérêt des personnes hébergées. Le pharmacien travaillera donc en étroite collaboration avec le médecin coordonnateur, qu'on a évoqué ici à plusieurs reprises, afin d'assurer un véritable contrôle de la qualité, en matière de cumul thérapeutique, d'effets indésirables, de contre-indications ou d'interactions.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je suis un peu ennuyé et j'espère que M. Heinrich sera sensible à mes arguments. J'ai compris l'objectif recherché mais l'amendement n'est pas nécessaire pour l'atteindre. Et même, il restreindrait les obligations des pharmaciens titulaires d'officine.
    L'article L. 51-26-6 du code de la santé publique prévoit que, dans les établissements qui ne disposent pas de pharmacie à usage intérieur, des médicaments peuvent être détenus et dispensés sous la responsabilité d'un pharmacien titulaire d'officine avec lequel l'établissement a passé une convention à cet effet. Cette convention n'a pas le caractère d'un contrat de travail, mais d'une prestation de service.
    En d'autres termes, les pharmaciens cosignataires interviennent dans le cadre de leur activité officinale. Ils sont donc nécessairement tenus par l'ensemble des stipulations de la convention nationale prévues à l'article L. 162-16-1 du code de la sécurité sociale pour définir les rapports entre les organismes de la sécurité sociale et les pharmaciens titulaires d'officine.
    Dans ces conditions, l'amendement proposé restreindrait les obligations des pharmaciens considérés aux seules mesures mentionnées au 2° de l'article L. 162-16-1. Je n'ai pas d'opposition à ce que vous mainteniez votre amendement, ni qu'il soit voté. Je vous mets simplement en garde contre l'effet pervers qui pourrait en résulter, aboutissant au résultat contraire de celui que vous recherchez.
    Mme la présidente. La parole est à M. Michel Heinrich.
    M. Michel Heinrich. Monsieur le ministre, je vous ai bien entendu, et je retirerai donc l'amendement. Si je l'ai déposé, c'était justement pour insister sur le fait que les pharmaciens et le médecin-coordonnateur ne travaillaient pas suffisamment ensemble.
    M. Jacques Barrot. Très bien !
    Mme la présidente. La commission maintient-elle son amendement ?
    M. Jean Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail. Cet amendement est également retiré, madame la présidente.
    Mme la présidente. Les amendements n°s 75 et 244 sont retirés.

Article 27

    Mme la présidente, « Art. 27. - I. - A l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale, après le premier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
    « Pour les médicaments figurant dans un groupe générique prévu au 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique ou dans un groupe d'équivalence prévu par l'article L. 162-17-6 du présent code, la base de remboursement des frais exposés par les assurés peut être limitée à un tarif forfaitaire de responsabilité arrêté par les ministres de la santé et de la sécurité sociale après avis du comité économique des produits de santé institué par l'article L. 162-17-3 du présent code.
    « Lorsque le tarif forfaitaire s'applique aux médicaments figurant dans un groupe générique, le plafond mentionné à l'article L. 138-9 est fixé à 2,5 % du prix des médicaments.
    « Les dispositions du cinquième alinéa du présent article ne s'appliquent pas aux médicaments remboursés sur la base d'un tarif forfaitaire. »
    « II. - Après l'article L. 162-17-5 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-17-6 ainsi rédigé :
    « Art. L. 162-17-6. - Pour l'application des dispositions prévues à l'article L. 162-16, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent, après avis de la commission mentionnée à l'article L. 5123-3 du code de la santé publique, la composition des groupes d'équivalence. Les groupes sont constitués par des médicaments inscrits sur l'une ou l'autre listes mentionnées aux deux premiers alinéas de l'article L. 162-17 lorsqu'ils appartiennent à une même classe pharmacologique, ont la même visée thérapeutique et rendent un service médical de même niveau. »
    Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.
    La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. L'article 27 institue un tarif forfaitaire de remboursement pour les médicaments. Le médicament n'est évidemment pas un produit comme les autres : il a pour but de soigner et si possible de guérir, ou encore de prévenir les maladies. A ce titre, il conduit à réaliser des économies qui ne sont pourtant jamais prises en compte, car on ne considère généralement que le coût de son remboursement. A cet égard, votre projet de loi propose trois mesures qui sont bien comprises et semblent cohérentes, même si elles n'entraîneront peut-être pas d'économies importantes.
    La première consiste à ne plus rembourser les médicaments à service médical rendu insuffisant, voire nuisibles. S'agissant de ces derniers, on a déjà eu l'occasion de remarquer que leur caractère nuisible devrait conduire à les retirer rapidement du marché. C'est une évidence. En ce qui concerne les autres, tenant compte du fait que beaucoup de petits laboratoires sont français, et que des effets de report vers des molécules plus onéreuses peuvent être envisagés, vous avez prévu à juste titre d'étaler la mesure sur trois ans. D'une manière générale, le principe consistant à évaluer régulièrement le service médical rendu et de calculer sur cette base le taux de remboursement est un principe juste.
    La deuxième mesure, consistant à libérer les prix des molécules innovantes, et à permettre leur inscription accélérée sur la liste des médicaments remboursables, est également une bonne mesure. Reste la question de la négociation du prix au niveau du Comité économique des produits de santé. Au bout de quel délai, monsieur le ministre, - je vous avais posé la question hier, mais vous n'avez pas répondu - cette négociation sera-t-elle entreprise pour les molécules innovantes ? Comment diminuer le prix, qui sera sans doute proche de celui pratiqué à l'échelle européenne ? Enfin, et surtout, y aura-t-il proportionnalité entre le surcoût et le gain en matière de service médical rendu ?
    La troisième mesure est donc la création d'un forfait de remboursement, et apparaît également juste. Pourquoi, en effet, la collectivité ou l'assurance maladie devrait-elle payer plus cher pour des molécules identiques ou au service équivalent ? Cependant, cette disposition conduit à poser plusieurs questions. D'abord, est-elle compatible avec l'accord passé en juin avec les médecins et qui prévoit une prescription en dénomination commune internationale ?
    Mme Catherine Génisson. Bonne question !
    M. Jean-Luc Préel. Cet accord a conduit à un développement du générique. Une nouvelle disposition était-elle donc nécessaire ?
    Ensuite, il ne faut pas oublier que si certains « génériqueurs » dépendent de grands laboratoires, d'autres, spécialisés, sont encore très fragiles. Que se passera-t-il pour ces derniers si le laboratoire fabriquant le princeps diminue son prix au niveau de celui du générique ? Tous les laboratoires ne le feront pas, certes, mais cela pourrait conduire à tuer les génériqueurs spécialisés.
    Enfin, les complémentaires rembourseront-elles la différence ? Certes, M. Davant, président de la Mutualité française, a indiqué qu'il ne le souhaitait pas. Mais souvenons-nous de ce qui s'est passé pour le forfait quotidien hospitalier : à l'origine, il ne devait pas être remboursé et aujourd'hui, il est pris en charge par toutes les assurances complémentaires.
    Quant au II de l'article, il ne paraît pas acceptable. Si on permet l'extension du forfait à la classe thérapeutique, ne risque-t-on pas, demain, de l'étendre à toute la pathologie ?
    M. Pascal Terrasse. Absolument.
    M. Jean-Luc Préel. Or, il n'y a pas d'équivalences s'agissant d'efficacité ou de complication. Il ne peut y avoir pour un même groupe la même progression et le même prix. Pensons aux statines - sans rappeler l'affaire de la statine Bayer. Il en va de même pour une pathologie donnée. En matière d'hypertension artérielle, qui y a-t-il de commun entre les diurétiques et les béta-bloquants ? Si j'osais terminer par une pointe d'humour, je vous demanderais, monsieur le ministre, pourquoi ne pas rembourser au prix du régime ? Un régime sans sel coûte beaucoup moins cher qu'un béta-bloquant, n'est-ce-pas ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
    Mme Jacqueline Fraysse. S'agissant des médicaments aux effets nuisibles, je partage tout à fait l'avis de M. Préel : il serait souhaitable de les retirer du marché. Je m'étonne que cela n'apparaisse pas pour tous comme une évidence.
    Concernant les médicaments dont le service médical rendu est insuffisant, je suis dubitative. J'ai écouté ce qu'en a dit le ministre, et je dois dire que je me méfie beaucoup de l'automédication. Certes, il s'agit d'un marché pour les laboratoires, mais je ne suis pas sûre qu'elle soit positive pour la santé publique.
    Je m'attarderai ici plus particulièrement sur les mesures concernant le remboursement des génériques si elles sont adoptées. Elle reviendraient à pénaliser financièrement le malade utilisant un médicament plutôt qu'un autre, alors que ce n'est pas lui lui qui l'a choisi. Ainsi, non seulement est mis en cause le choix du médecin, qui peut prescrire autre chose qu'un générique pour des raisons qui lui appartiennent, mais en plus on pénalise financièrement le malade, qui n'y est pour rien. Ce n'est donc pas une bonne mesure. La responsabilisation est invoquée pour la justifier mais je pense qu'il ne faut pas abuser de cet argument. Je suis personnellement très sensible à la responsabilisation des personnes, quel que soit le sujet, et donc, bien sûr, dans ce domaine également. Mais ici, elle n'est pas en jeu.
    L'inacceptable réside dans le fait qu'un laboratoire puisse être autorisé à vendre 10 euros un médicament qu'un autre vend 7, voire 5 euros. Et que l'on ne me réponde pas qu'il faut payer les frais de la recherche. Nous parlons ici de médicaments « généricables », c'est-à-dire dont le brevet a expiré.
    L'Etat doit continuer, comme il le fait aujourd'hui, de négocier avec les laboratoires un prix de médicament prenant en compte les frais de recherche pendant la période couverte par le brevet. Mais, à l'expiration de celui-ci, il doit systématiquement négocier un nouveau prix, valable pour toutes les versions d'une même molécule. Cette façon de procéder permettrait tout à la fois de répondre aux besoins des malades et de respecter la liberté de prescription des médecins, à laquelle ils sont très attachés. Elle procurerait, de surcroît, un bénéfice indiscutable pour la sécurité sociale.
    Cette proposition, vous le voyez, est très simple, au point qu'il n'est même pas besoin de changer la réglementation. Il suffit de l'appliquer puisque, en théorie, l'AMM n'est délivrée que pour une période donnée.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Indiscutablement, nous abordons l'un des articles les plus importants du projet de loi de financement de la sécurité sociale, de ceux qui sont porteurs de la politique gouvernementale, en tout cas en matière d'affichage. A propos de la maîtrise des dépenses, on parle de ce projet de loi comme du « plan médicament ». Il traite en effet du SMR, mais aussi, à travers l'article 27, du remboursement forfaitaire d'un certain nombre de médicaments génériques.
    Nous pensons, comme je l'ai dit dans la discussion générale, qu'il y a loin des mesures annoncées à la réalité qui sera de mise en tout cas en termes économiques. Nous faisons, certes, le même constat que vous : notre pays souffre d'une surconsommation des médicaments aussi bien en volume qu'en masse financière. En outre, la structure de cette consommation est sans doute à revoir : d'une part la classe des génériques est indiscutablement sous-consommée, et d'autre part, dans la batterie de médicaments qui sont à notre disposition et qui sont remboursés, certains n'ont pas véritablement leur place.
    Concernant la valorisation de la politique des génériques, le gouvernement précédent avait développé en direction des patients et des malades une campagne d'explication qui a mis un certain temps à produire des effets sur la consommation. Entre la négociation conventionnelle qui s'est tenue au mois de juin entre les caisses et les organisations syndicales de médecins et l'action en faveur de la substitution réalisée auprès des pharmaciens, un environnement favorable a été créé, produisant un certain nombre de résultats, dont une croissance très importante de la consommation de génériques dans notre pays. En quelque sorte, nous avions décollé, alors que nous étions vraiment très en retard au plan européen, voire mondial.
    C'est pourquoi nous avons été particulièrement surpris, après tant d'années d'effort, de voir la mise en place brutale, parachutée en quelque sorte, de nouveaux dispositifs visant théoriquement à favoriser la consommation de génériques. La méthode, qui relève d'une conception technocratique consistant à imposer les choses par le haut est choquante. Ce sont d'ailleurs les assurés, plus que les médecins, qui auront à supporter les conséquences de ces nouvelles mesures. Mais j'y reviendrai.
    Le corps médical, quant à lui, a bien compris que cette politique, présentée comme complémentaire, est en réalité un revirement. Selon une enquête publiée par Impact médecine, 61 % d'entre eux jugent qu'il n'y a pas un intérêt majeur à prescrire un médicament générique plutôt qu'un princeps, l'élément fondamental à leurs yeux étant la perspective du remboursement forfaitaire. On le voit, la démarche de promotion des génériques est ainsi fragilisée.
    Mais il y a plus grave. Au-delà même du problème des génériques, nous nous trouvions jusqu'ici dans un contexte favorable, fondé sur une coopération positive susceptible de déboucher sur une véritable maîtrise des dépenses de santé : le patient était responsabilisé par son dialogue avec le médecin, et ce dernier était responsabilisé dans sa prescription. Bref, nous étions dans un cercle vertueux, peut-être même plus vertueux que je ne l'aurais espéré au mois de juin. Aujourd'hui, ce climat de confiance est brisé, et la profession médicale démobilisée, ce qui peut avoir les conséquences les plus lourdes.
    Mme la présidente. Monsieur Le Guen, vous avez atteint la limite de votre temps de parole.
    M. Jean-Marie Le Guen. Dans ce cas, étant inscrit dans la discussion sur un autre article, j'aurai l'occasion, madame la présidente, de revenir sur les points qu'il me restait à développer : je rappellerai d'abord que les industriels considèrent qu'un coup bas est porté à l'industrie du générique. Ensuite, j'évoquerai l'innovation particulièrement dangereuse - à laquelle nous souhaitons nous opposer avec force - que constituent les groupes d'équivalences de classe thérapeutique, avec toutes les dérives en matière de santé publique que cette proposition peut provoquer.
    Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. J'aurais pu laisser mes cinq minutes à mon collègue Le Guen...
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Ce n'est pas prévu par le règlement !
    M. Pascal Terrasse. ... tant son argumentation me paraît juste.
    L'article 27 met en place un tarif forfaitaire de responsabilité -, qui a pour objectif de servir de base au remboursement des assurés pour les médicaments génériques et leur princeps.
    Mais il étend aussi ce principe aux équivalents thérapeutiques, c'est-à-dire à tous les médicaments de la même classe traitant la même maladie, protégés ou non, d'ailleurs, par un brevet. Le groupe socialiste est totalement opposé à ce dernier point. En effet, ce système induit un risque majeur pour le patient, car il réduit les opportunités thérapeutiques et accroît le risque médical.
    Il ne permet pas non plus aux professionnels de santé de jouer sur la pluralité des effets spécifiques que les différents médicaments d'un même champ thérapeutique peuvent produire pour chaque patient. Indications, formulation, métabolisme, mode d'action, efficacité, tolérance, etc. : s'il veut avoir accès à la pluralité thérapeutique, le patient devra la prendre en charge lui-même. Tout cela a été dit très justement par notre collègue Le Guen.
    Enfin, l'extension aux équivalents thérapeutiques pénalise gravement les médicaments sous brevet et prive les entreprises d'une partie du retour sur investissements indispensable au financement d'une recherche de plus en plus coûteuse et complexe. Une telle mesure comporte le risque de cantonner la recherche dans les seuls domaines où il n'existe pas à ce jour d'alternative thérapeutique, alors même que les efforts de recherche importants restent naturellement nécessaires pour mieux prendre en charge et soigner les pathologies courantes. C'est pourquoi, en ce qui nous concerne, nous demanderons la suppression pure et simple de cet article.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Barrot.
    M. Jacques Barrot. Monsieur le ministre, avant que vous ne répondiez aux questions qui vous ont été posées, je voudrais vous remercier d'engager une politique du médicament lisible, visible par les assurés sociaux et par les entreprises - elles vous sont indispensables par l'effort de recherche qu'elles consentent. Cette politique des génériques peut en effet permettre de solvabiliser la recherche.
    Pour appuyer votre démarche, je voudrais vous demander d'être attentif aux amendements que notre rapporteur a présentés et qui visent à échapper à une conception trop extensive de la notion d'équivalent thérapeutique qui viendrait affaiblir la politique des génériques.
    Pour que tous les assurés sociaux, guidés par le médecin et par le pharmacien, aient confiance dans le générique, il faut éviter de les faire douter en élargissant par trop la notion de générique allant jusqu'à la rapprocher de celle d'équivalent, et d'affaiblir ainsi les laboratoires qui se sont lancés dans les politiques du générique. Mais je crois que vous nous avez déjà entendus et nous serons très attentifs à votre réponse.
    Je voudrais aussi répondre à nos collègues socialistes : si nous voulons soigner les pathologies lourdes, il faudra bien, à un moment donné, revenir à l'esprit de la sécurité sociale dont les fondateurs - si M. Laroque était encore de ce monde, il ne me démentirait pas - ont toujours distingué le petit risque et le risque lourd. Si l'on ne responsabilise pas un peu les Français vis-à-vis du petit risque, on ne pourra jamais couvrir le risque lourd de manière significative pour tous et de la même manière. Dans ce domaine, c'est en accroissant les responsabilités personnelles que l'on consolidera et pérennisera le système de solidarité. Car, au fond, quel est l'essentiel de notre patrimoine social ? C'est l'égalité de tous devant le grand risque, celui qui entraîne un danger de mort. En responsabilisant un peu les assurés sociaux vis-à-vis du petit risque, nous pourrons continuer à mener une politique audacieuse permettant, en cas de maladie grave, aux plus modestes d'être traités strictement de la même manière qu'une personne qui a tous les moyens de se faire soigner. (« Tout à fait ! », sur les bancs de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Monsieur le ministre, nous écouterons avec attention vos déclarations sur la prise en charge des génériques. Sans doute voudrez-vous, de votre côté, tenir compte des observations de notre rapporteur, notamment dans son amendement n° 80, qui montre qu'une autre solution est envisageable pour certains médicaments qui n'entrent pas dans le cadre d'une politique du générique.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.
    M. Jean Dionis du Séjour. L'article 27 est central, en ce qu'il concerne la réussite du plan médicament. Celui-ci vise deux objectifs. Il faut d'abord que les Français soient mieux soignés qu'avant, ou, à défaut, aussi bien. Il faut ensuite que la nation française dans son ensemble fasse des économies. J'ai bien dit la nation, car il ne servirait à rien d'économiser sur telle molécule pour augmenter les dépenses sur telle autre, ou d'économiser sur le régime d'assurance maladie pour augmenter les dépenses sur le régime ASSEDIC ou sur les charges des collectivités locales.
    Le plan médicament repose sur deux principes simples : on ne rembourse pas les médicaments au service médical rendu insuffisant, et on propose un forfait de remboursement identique pour tous les médicaments au service médical rendu identique. Ce plan est courageux, adapté à la situation difficile du régime d'assurance maladie qui terminera l'année avec un déficit de 7 milliards d'euros, et il aura notre soutien. Mais, pour réussir, pour atteindre les deux objectifs rappelés plus haut, il est fondam ental qu'il anticipe les répercussions qu'il va avoir sur notre industrie pharmaceutique, sur la vie des personnes qu'elle emploie et sur l'activité économique qu'elle engendre.
    Il est donc capital que le dispositif législatif et réglementaire présente un bon équilibre entre la volonté de réduire les dépenses du régime maladie grâce à la diffusion des génériques et le développement de notre industrie pharmaceutique et des territoires dont elle est le moteur. Pour parvenir à ce compromis, M. Barrot l'a dit, il faut à la fois refuser de vider de son contenu le plan initial et ne pas confondre des médicaments ayant pour seul point commun la même molécule active. Il faut aussi s'entendre sur la définition du groupe de médicaments offrant un service médical identique.
    Dans la rédaction aujourd'hui proposée, et qui a évolué dans le bon sens, l'article 27 retient comme critère de constitution du groupe l'appartenance des médicaments qui le composent à la même classe pharmacologique et leur visée thérapeutique identique pour un service médical de même niveau. C'est une avancée importante et je salue le travail accompli en commun par le ministère et la commission. Pour une même molécule active, il pourra donc y avoir plusieurs groupes d'équivalence fondés sur d'importantes différences, notamment en matière de biodisponibilité - je pense ici à l'effervescence - ou sur des galéniques pédiatriques plus spécialement adaptés aux enfants.
    Cet article gagnerait toutefois à préciser davantage la notion de groupe d'équivalence en reprenant sa rédaction à partir des critères énumérés à l'article R. 5143-9 du code de la santé publique, qui définit la bioéquivalence comme l'équivalence des biodisponibilités, c'est-à-dire « la vitesse et l'intensité de l'absorption dans l'organisme ». C'est d'ailleurs l'objet de notre amendement n° 253.
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Mesdames, messieurs les députés, j'ai écouté avec une grande attention ce débat important, qui va bien au-delà de l'article qui en est le prétexte. En effet, les mesures sur l'amélioration du service médical rendu que vous avez évoquées et qui relèvent de dispositions réglementaires ne figurent pas dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Simplement, le Gouvernement a cru honnête d'annoncer le plan médicament dans son ensemble, fût-ce en abordant des sujets qui n'ont pas à y être traités.
    Vous avez parlé de la notion de forfait de remboursement pour les génériques. Permettez-moi de rappeler que, pour une même molécule et une même efficacité, le princeps a un coût beaucoup plus élevé que le générique. Or nous sommes comptables de l'argent public. La logique de ma responsabilité et celle de la bonne gestion veulent qu'on paye le moins cher possible pour une efficacité identique. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai été sensible aux amendements dont nous allons parler au sujet des groupes d'équivalence. On peut discuter pour savoir s'il est justifié d'étendre le forfait générique au groupe d'équivalence. Je suis prêt à entendre vos arguments et, le cas échéant, à m'y ranger, sous réserve que l'on se débrouille pour ne pas faire tomber dans ce cadre des molécules qui n'ont pas de princeps - je pense à l'aspirine ou au paracétamol qui, n'ayant pas de princeps, n'ont pas non plus le statut de générique, mais qu'il faut bien, pour éviter les abus, considérer comme tels. Nous en discuterons le moment venu.
    Je veux dire aux députés de l'opposition que, si je comprends leurs arguments, je ne souhaite pas pour autant qu'on en fasse une question idéologique, et je ne crois d'ailleurs pas que telle soit leur intention. J'observe en effet que de récentes élections ont porté, dans des pays qui nous entourent, tantôt la gauche, tantôt la droite aux responsabilités. Or, après la reconduction du chancelier Schröder en Allemagne, une politique de génériques, très exactement calquée sur celle que nous vous proposons, est actuellement développée. C'est à peu près la même chose au Danemark. Quant à la Suède...
    M. Jean-Marie Le Guen. Et au Brésil ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Pour le Brésil, nous verrons si le nouveau président suit lui aussi...
    M. Richard Mallié. Ça va venir ! Il vient juste d'être élu !
    M. Jean-Marie Le Guen. Je parlais très sérieusement, car le Brésil a une politique du médicament très particulière.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Ne me lancez pas sur le sujet de l'international. Nous l'avons évoqué hier, à propos de Doha, et de la nécessité d'offrir un accès aux soins au moindre coût pour les gens qui en ont besoin.
    M. Maxime Gremetz. On y reviendra !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. En Suède, on développe exactement le même système, et, aux Etats-Unis, lors des élections intermédiaires, le plan générique est également adopté. C'est donc une logique qui fait son chemin.
    On m'oppose la prétendue contradiction entre l'accord du 5 juin et le forfait de remboursement du générique. Monsieur Le Guen, vous êtes un homme honnête et, lorsque vous me dites que vous vous étiez trompés au mois de juin, j'en prends acte.
    M. Jean-Marie Le Guen. Là, c'est vous qui n'êtes plus très honnête !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Nous avons signé un accord donnant-donnant avec les médecins, qui ont démontré qu'ils étaient capables de s'engager avec une efficacité certaine. Vous avez pu constater que, après cet accord, les prescriptions de génériques ont décollé. Mais lisez bien le texte, il n'impose pas le forfait, il prévoit simplement que « la base de remboursement des frais exposés par les assurés peut être limitée à un tarif forfaitaire », car je ne veux pas faire obstacle à une dynamique qui s'imposerait d'elle-même. Les médecins ont accepté de faire un effort, mais la prescription en dénomination commune internationale n'est pas très simple, d'autant moins que, chaque année, de nouveaux médicaments tombent dans le cadre des génériques. Il est plus facile de prescrire du Bactrim que de la triméthoprime-sulfaméthoxazole.
    J'ai tendance à vouloir faciliter les choses parce que les médecins se sont engagés dans des accords de bons usages sur des tests de diagnostic rapide pour les angines, le streptotest, sur les visites médicales ou sur l'indemnité journalière qui est à l'étude, parce qu'on ne peut pas accepter ces dérives.
    M. Jean-Marie Le Guen. Là, c'est autre chose !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Croyez-moi, les médecins seront suffisamment mis à contribution. Mais pourquoi refuser de faciliter leur tâche de prescripteur ? Vous qui êtes un prescripteur, docteur Le Guen, vous savez comme moi qu'il est plus simple de marquer sur une ordonnance une dénomination commerciale, dont le choix a été fait pour faciliter la mémorisation, que le nom de la molécule - ayons l'honnêteté de le reconnaître.
    Selon un autre argument, le forfait générique risque de tuer les « génériqueurs » - pardonnez ce néologisme - sous le prétexte que les prix des médicaments princeps allaient s'aligner. A l'occasion des travaux préparatoires à l'examen du PLFSS, la commission a dû auditionner des représentants de l'industrie pharmaceutique : ils vous ont sans doute dit, comme ils me l'ont dit, qu'ils maintiendront le prix des princeps à son niveau normal, parce qu'ils sont ouverts à l'exportation, au marché international...
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. La France est un îlot dans l'environnement international !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... et que le princeps qui s'alignerait sur le prix le plus bas perdrait sa valeur commerciale au plan international.
    Nous verrons donc, comme il est normal, des industries qui se spécialiseront dans le générique, d'autres dans le princeps, et quelques-unes qui produiront les deux à la fois, la molécule princeps qu'elles distribueront à un prix commercial, et la molécule générique. Je m'arrête car nous n'avons pas, ici, à entrer dans le détail.
    Monsieur Barrot, vous avez eu raison d'aborder le problème de la recherche, capital pour l'industrie pharmaceutique. Vous le savez comme moi, et d'ailleurs vous êtes allé dans un sens que nous assumerons, le régime des brevets s'applique à la recherche pharmaceutique : au terme d'un certain nombre d'années, le médicament tombe dans le domaine public.
    Le problème est de savoir quelle est la taille critique qu'un laboratoire doit atteindre pour être capable d'une recherche performante. Je crois que cette question se présente sous un jour nouveau. On avait eu tendance à penser, en effet, que seuls les très grands laboratoires pouvaient mener une recherche efficace. C'est vrai dans une certaine mesure. Si les laboratoires de taille moyenne continuent de vouloir entretenir une recherche sans la réorienter, leur recherche ne tiendra pas le choc.
    On s'aperçoit d'ailleurs que 50 % des nouveaux médicaments résultent de recherches menées hors de ces laboratoires, dans les start-up, ces petites entreprises qui se spécialisent dans un domaine de pointe. Je veux encourager ce type d'innovation. Ces petites entreprises n'ont pas toujours les moyens de développer leurs découvertes, de les commercialiser. Il faut donc que les entreprises pharmaceutiques conduisent une réflexion et réorientent soit leurs recherches, soit la recherche de nouvelles molécules, par le biais de ces start-up.
    Personnellement, je suis convaincu que cette nouvelle politique les y aidera, à condition qu'on ne change pas de cap tous les ans et qu'on donne de la visibilité à l'industrie pharmaceutique. Pour ma part, je m'y engage. Aujourd'hui, le discours est clair, monsieur Barrot : nous souhaitons faciliter l'innovation, et permettre que de nouveaux médicaments arrivent plus rapidement sur le marché, pour traiter des maladies qui, aujourd'hui, ne peuvent pas être soignées.
    En contrepartie, on le comprendra, nous nous acheminons vers le forfait générique et vers l'automédication, déjà expérimentée dans de très nombreux pays, vous le savez. Plusieurs laboratoires français se sont déjà lancés avec bonheur dans ce domaine de l'automédication. Certaines molécules, par le jeu normal des choses, ont été déremboursées. Je ne vais pas en dresser la liste, mais qu'on pense au Rhinathiol ou au Maalox. Le cas de l'aspirine-vitamine C est différent. Le laboratoire qui l'avait lui-même déremboursée et mise en automédication affiche une augmentation importante de son chiffre d'affaires pour ce médicament qui n'est plus, comme disent les Anglo-Saxons, derrière le comptoir, mais devant. Nous devons désormais responsabiliser ceux qui décident de prendre des médicaments dont le service médical rendu est suffisamment intéressant pour qu'ils le prennent mais pas suffisamment pour que la solidarité nationale s'exerce.
    M. Jacques Barrot. Très bien ! Tout à fait !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. En fait, c'est l'une des facettes de cette logique que nous vous présentons aujourd'hui. Comme je l'ai dit, et le confirme, je suis tout à fait disposé à examiner vos amendements pour tenter d'améliorer encore le texte que vous a soumis le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

    Mme la présidente. MM. Jean-Marie Le Guen, Terrasse, Evin, Mmes Clergeau, Hélène Mignon, Génisson, M. Fabius et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 156, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 27. »
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Si j'ai bien compris, monsieur le ministre, vous allez examiner attentivement cet amendement de suppression de l'article.
    Notre débat est particulièrement intéressant, parce que nous avons considérablement avancé dans l'explicitation de nos politiques respectives. Ainsi, sur la question précise de l'article 27, je note que M. le ministre a évolué. De même, M. Barrot, qui est le président du groupe le plus important de cette Assemblée...
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. Ce n'est pas un groupe générique !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... - et dont la personnalité est une référence, au moins dans les rangs de la majorité et sans doute au-delà,...
    M. Manuel Valls. Tout à fait !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... nous a parlé du petit risque et du gros risque, et de la responsabilisation du patient sur cette question. C'est, à l'évidence, une information majeure sur l'orientation politique du Gouvernement, j'aurai l'occasion d'y revenir.
    M. Jacques Barrot. Ne caricaturez pas !
    M. Jean-Marie Le Guen. Je ne caricature rien.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Mais non, il n'a jamais caricaturé !
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous avez dit très clairement, monsieur Barrot, qu'il fallait distinguer le petit risque du gros risque, je ne crois rien caricaturer. Vous avez déclaré aussi - le compte rendu en fait foi - qu'il faudra responsabiliser le patient sur le petit risque. Je ne dis rien de plus, rien de moins. Ces débats politiques sont très importants et il vous faut enfin assumer l'orientation réelle de la politique du Gouvernement.
    Mais je n'ai pas l'intention de ralentir les débats et je me contenterai, à propos de l'article 27, de reprendre rapidement deux arguments qui ont d'ailleurs déjà été évoqués.
    Le premier des arguments a trait à la question industrielle, que mon collègue Pascal Terrasse avait soulevée. Sur ce point, monsieur le ministre, nous avons des informations parfaitement divergentes. Moi, je me rapporte toujours à ce numéro d'Impact Médecin où a été publié le sondage dont j'ai parlé. Je me réfère aussi à deux déclarations, l'une qui a été faite par un des responsables du regroupement des « génériqueurs » - je reprends ce néologisme - et l'autre émanant du syndicat qui rassemble les groupes les plus importants, pour ne pas les qualifier autrement. Le syndicat des génériqueurs, aussi bizarre que cela puisse vous paraître, monsieur le ministre, s'exprime très clairement pour dire son inquiétude devant les propositions qui sont faites, et le syndicat qui défend les grandes marques, lui, dit son acquiescement à la politique menée. En somme, ceux qui ont l'habitude de faire du générique sont plutôt contre, et ceux qui ont l'habitude d'être concurrencés par les génériques sont plutôt pour.
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. C'est tactique.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je n'en tire pas de conclusion immédiate, mais avouez que ces prises de position donnent à réfléchir. Il faut être à l'écoute des entreprises, n'est-ce pas, mes chers collègues de l'opposition ? Or, si elles connaissent un peu leur marché, il semblerait que leurs positions soient plutôt de nature à nous inquiéter.
    Deuxièmement, je réponds à votre argument concernant la question de l'export. Il faudra bien un jour, d'ailleurs, même si les problèmes se posent plutôt au niveau européen qu'au niveau de la réglementation française, que nous ayons un débat sur ces transferts de pays à pays d'un certain nombre de produits médicaux qui sont joués à l'exportation. Il se trouve que, pour des raisons diverses sur lesquelles on ne va s'étendre maintenant, la France est plutôt exportatrice qu'importatrice - une des raisons étant d'ailleurs que les prix de ses médicaments sont plutôt bas par rapport à d'autres pays.
    Mais il est clair que l'exportation concerne avant tout les médicaments les plus innovants, ceux qui sont dans le haut de gamme, là où il y a des prix très élevés, y compris dans d'autres pays que le nôtre. Par contre, les phénomènes de régulation par l'import-export au sein de l'Union européenne jouent très peu sur les produits génériques, ou en tout cas beaucoup moins. Le prix de ceux-ci est relativement bas. Ils sont, par conséquent, homogénéisés. Tout cela pour dire que je ne crois pas du tout à cet argument selon lequel le prix des princeps ne pourrait pas descendre. A partir du moment où on est sorti du brevet, de toute façon, les prix ont vocation à descendre, mais je pense que c'est le princeps qui va l'emporter sur le générique.
    Mais l'argument qui me semble le plus important, je le répète, c'est celui qui tient aux relations que nous avons avec les professions de santé. Monsieur le ministre, vous nous dites : « Je l'appliquerai peut-être. » J'en prends acte. J'en conclus d'abord que, au moment où vous l'annonciez de manière un peu brutale, les économies à attendre de ce plan médicaments ne sont peut-être pas celles que vous pouviez espérer. Ensuite, ce « peut-être » ne change rien à la communication forte qui a été la vôtre sur le plan médicaments. Or nos confrères médecins ne sont pas tous ici, autour de nous, ils ne sont pas forcément en train de suivre l'ensemble de nos débats. Ce qu'ils entendent, ce sont les messages qui leur sont adressés. Or le message qu'ils ont entendu est très clair, c'est qu'on va rembourser, dorénavant, sur une base forfaitaire. Bien sûr, vous essayez de rattraper les choses : mais non, attendez ; finalement, on ne sait pas très bien si on va le faire ; on va le faire pour certains médicaments et pas pour d'autres ; en attendant, continuez à prescrire des génériques, faites l'effort que l'on vous demande.
    Entendons-nous bien : c'est à juste titre qu'on leur demande cet effort, et il faut d'ailleurs féliciter les professionnels de santé de le faire, ce qui n'est pas facile, ne serait-ce que parce que le patient est plutôt attaché au princeps. Mais quand on dit aux professionnels de santé que de toute façon on instaurera un remboursement forfaitaire, les choses deviennent quand même un peu difficiles ! D'abord, il faudrait qu'ils comprennent bien l'information que vous faites passer avec votre « peut-être ». Et puis, c'est vraiment leur demander un effort tout particulier alors même qu'on prétend leur proposer une politique qui réactive une idée reçue assez répandue dans les professions de santé, qui pourrait s'exprimer ainsi : « Mais enfin, vous avez le pouvoir, c'est vous qui fixez le prix des médicaments ; pourquoi venez-vous nous embêter ? » Répondre à une telle question n'est pas si simple que cela, pour ce gouvernement comme pour le précédent. Les médecins ont plutôt tendance à penser qu'à partir du moment où le prix du médicament est réglementé, on n'a pas à leur demander de prescrire ceci plutôt que cela. Leur réaction spontanée consiste à nous dire : « Mais attendez, c'est votre problème à vous, les politiques, c'est vous qui fixez le prix des médicaments. Alors, ne nous demandez pas à nous d'accepter des contraintes qui compliquent nos prescriptions. »
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. Ne prêtez pas aux médecins toutes ces pensées !
    M. Jean-Marie Le Guen. Ce réflexe, quoi qu'on dise, est présent chez les professionnels de santé. Et dire que l'on va rembourser de façon forfaitaire, c'est en quelque sorte aller dans le sens de ce réflexe.
    Tout cela pour dire que c'est une erreur psychologique importante - pour ne pas employer un autre mot - du point de vue des relations conventionnelles. Cela justifie pleinement que nous nous opposions avec détermination à cet article en vous demandant de bien vouloir voter sa suppression. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail. La commission a rejeté cet amendement. L'article 27 est un élément central de la politique du Gouvernement.
    Concernant la délivrance de médicaments génériques, il faut responsabiliser les patients, après avoir responsabilisé les médecins prescripteurs et les pharmaciens, ce qu'ont commencé à faire les lois de financement de la sécurité sociale précédentes en ce qui concerne la promotion de la prescription en DCI.
    A ce propos, monsieur le ministre, je me demande s'il ne serait pas nécessaire d'aider les industriels qui sont en train de faire des logiciels pour transposer en DCI les médicaments princeps - ou d'ailleurs les médicaments génériques - ainsi que les médecins qui voudraient acquérir ces logiciels. Car, comme vous l'avez souligné tout à l'heure, les médecins, surtout les plus anciens, ne connaissent pas toujours le nom que portent les médicaments en DCI.
    Quoi qu'il en soit, les lois précédentes ont été relayées par l'accord de juin dernier entre les caisses et les médecins généralistes.
    Certains évoquent le risque de tuer les génériques. Mais le forfait, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, ne sera pas d'application immédiate ou généralisée. De plus, l'exemple de l'Allemagne - et d'autres pays européens - montre que l'on peut conjuguer tarifs forfaitaires et développement des médicaments génériques. Il s'agit, en quelque sorte, d'une mesure de sauvegarde qui sera utilisée en dernier recours, au cas où la prescription en DCI, suivant l'accord du 5 juin 2002, n'atteindrait pas les résultats espérés.
    Personnellement, j'ai déposé des amendements, qui ont été adoptés en commission, tendant à préciser les conditions d'application de cet article. Et peut être pourrez-vous, monsieur le ministre, nous donner des détails à ce sujet, notamment sur la façon dont vous comptez fixer ce tarif de responsabilité forfaitaire.
    Avis défavorable, donc, à cet amendement de suppression.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Même avis.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Attendez : si vous voulez, je peux demander une suspension de séance. Personne n'est fatigué, j'espère ?
    M. Pascal Terrasse. M. Le Guen a le droit de parler. C'est le règlement !
    M. Jean-Marie Le Guen. Non parce que si vous êtes fatigués, ...
    M. Dominique Tian. Personne n'est fatigué, ici !
    M. Richard Mallié. Nous sommes en pleine forme !
    M. Jean-Marie Le Guen. Très bien ! L'article 27 pose problème sur un autre sujet très important que je n'ai pas encore eu l'occasion d'aborder - mais il l'a été par plusieurs collègues, notamment par Pascal Terrasse -, je veux parler des classes thérapeutiques.
    Sur les dispositions que j'évoquais à l'instant, notre désaccord concernait leur opportunité, les conditions de leur réception, mais là, je vous le dis franchement, notre désaccord est absolument total. C'est une question de principe, ce n'est plus un désaccord de circonstance.
    M. Jean Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail. On va y venir !
    M. Jean-Marie Le Guen. Permettez que je défende cet amendement de suppression.
    J'ai expliqué pourquoi la première partie de l'article 27 était tout à fait contraire au but qu'il prétendait poursuivre, à savoir le développement du générique. Je reviens maintenant sur la deuxième partie de l'article, qui me semble tout à fait dangereuse pour la santé publique, car vous allez beaucoup plus loin que tout ce qui était envisagé jusqu'à présent, vous créez la notion de classe thérapeutique, de groupe d'équivalence, qui est extrêmement dangereuse. Déjà, elle n'est pas opportune d'un point de vue économique, car le but est de faire peser sur l'assuré l'essentiel des politiques de déremboursement que vous êtes en train de mettre en oeuvre. Mais, en plus, vous prenez des risques considérables, car on ne peut prétendre qu'une classe thérapeutique regroupe des produits identiques. Des produits sont identiques quand ils ont la même composition qualitative et quantitative, le même principe actif et la même forme thérapeutique, avec un usage médical bien établi et un niveau d'efficacité reconnu. Nous avons donc, sous cet aspect également, toutes les raisons de refuser cet article, dont je vous invite à voter la suppression.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 156.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, M. Perrut et M. Barrot ont présenté un amendement, n° 76, ainsi rédigé :
    « Dans le deuxième alinéa du I de l'article 27, supprimer les mots : "ou dans un groupe d'équivalence prévu par l'article L. 162-17-6 du présent code. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. La finalité de l'article 27 est d'appuyer l'accord du 5 juin 2002, dans lequel les médecins s'engageaient à prescrire 30 % de médicaments génériques, en précisant que le remboursement de médicaments figurant dans un groupe générique ou dans un groupe d'équivalence peut être limité à un tarif forfaitaire de responsabilité.
    Le terme « groupe d'équivalence » a soulevé quelque émoi chez les professionnels de santé, car il est source de confusion, aussi bien pour les professionnels que pour les patients. Pour la bonne compréhension de tous, avant d'entrer dans le détail de l'amendement, je crois bon de rappeler quelques définitions que tout le monde n'a peut-être pas à l'esprit.
    Un médicament princeps est une molécule originale qui a fait l'objet de recherches scientifiques et qui a une propriété industrielle. Il a reçu une AMM - une autorisation de mise sur le marché -, pour une ou des indications précises qui peuvent d'ailleurs avoir des extensions ultérieures.
    Un générique est une copie de la molécule princeps lorsque celle-ci est tombée dans le domaine public. Il a la même composition qualitative et quantitative en principe actif, la même pharmacologie. Son profil de sécurité et d'efficacité est équivalent. N'ayant pas donné lieu à des recherches coûteuses, il est vendu moins cher.
    Une « classe thérapeutique » est composée de médicaments différents, mais ayant une même molécule de base, plus ou moins modifiée, ayant chacune leur AMM propre pour une grande indication principale, mais parfois des indications secondaires différentes. Leur biodisponibilité, leur mode d'élimination, leurs métabolites, donc leurs effets secondaires, sont différents.
    La difficulté tient au fait qu'un certain nombre de médicaments, en nombre limité mais extrêmement prescrits, tel le paracétamol, ne sont pas « génériquables » au sens du code de la santé publique, car la molécule originale n'a pas de propriété industrielle connue.
    C'est pour remédier à cette difficulté que le texte de loi initial utilise des termes comme « groupe d'équivalence », « groupe générique », « groupe non générique ». Mais ces termes peuvent prêter à confusion avec celui de « classe thérapeutique », ce qui n'est pas l'intention de cet article 27.
    L'objet de l'amendement est de supprimer les termes pouvant prêter à confusion et de permettre de créer des groupes génériques pour des molécules dont le princeps n'existe pas.
    L'article 27 prévoit l'application de forfaits de remboursement à des groupes de médicaments qui sont soit des médicaments « génériques », soit des médicaments « équivalents ». La coexistence de deux types de groupes, comme je viens de le dire, peut être source de confusion pour les professionnels et pour les patients. Il faut donc supprimer la notion de « groupe d'équivalence » et ne conserver que celle de « groupe générique ».
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement est favorable à cet amendement. Evidemment, il souhaite que l'autre amendement apportant une précision sur les génériques qui n'auraient pas de molécule princeps soit également adopté.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je crois que nous ne pouvons que nous féliciter de cet amendement, qui manifeste un début de prise de conscience. Mais il est largement insuffisant par rapport aux risques qui existent.
    Supprimer la notion de « groupe d'équivalence » est un premier pas, mais nous sommes encore très loin des mesures qu'il faudrait prendre pour éviter les risques que nous fait courir cet article.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 76.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. M. Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, a présenté un amendement, n° 77, ainsi rédigé :
    « Compléter le deuxième alinéa du I de l'article 27 par la phrase suivante : "Les conditions d'application du présent alinéa seront définies par l'accord-cadre visé au premier alinéa de l'article L. 162-17-4 ou, à défaut, par décret. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. Dans la mesure où un prix forfaitaire sera fixé pour le remboursement de certains médicaments, il faut en préciser les conditions d'application, en laissant d'abord intervenir la négociation conventionnelle entre le comité économique des produits de santé et les laboratoires. Ce ne serait que dans le cas où cette négociation échouerait que des décisions seraient alors prises par voie réglementaire.
    Cet amendement a été adopté par la commission lors de la réunion qu'elle a tenue au titre de l'article 88 de notre règlement.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
    Monsieur le rapporteur, vous savez mon désir de faire participer les acteurs du monde de la santé aux réformes engagées. Mais nous ne sommes pas, en matière de forfait de remboursement, dans le domaine de la détermination des prix, qui résulte effectivement et logiquement d'une convention entre le comité économique des produits de santé et les industriels. L'établissement des forfaits est une responsabilité propre, et non partageable, des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, car il y va uniquement des conditions de remboursement par l'assurance maladie et des cotisants.
    Bien sûr, nous aurons à discuter avec l'industrie de certains points pratiques. Il va de soi que nous ne soumettrons pas un groupe de médicaments au forfait de remboursement sans en avoir avisé préalablement les laboratoires concernés, mais je pense qu'il faut éviter d'entretenir, par une mention inutile dans la loi, toute confusion sur la portée exacte de la mesure.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. J'allais intervenir dans le même sens que le Gouvernement. Je crois que nos collègues de la majorité, emportés par le vent libéral qui souffle sur ce texte (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), ...
    M. Pierre Morange. Quel souffle dans le propos !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... sont conduits à faire en sorte que l'Etat renonce à l'ensemble de ses prérogatives. Comme l'a dit M. le ministre, la politique de remboursement dans ce pays ne dépend pas d'abord d'un accord conventionnel. Elle dépend d'abord de la volonté de l'Etat, qui ensuite organise une politique conventionnelle.
    Comme vous l'avez fait avec d'autres articles, vous voulez faire en sorte, chers collègues de la majorité, que l'Etat n'ait plus aucun moyen d'organiser la régulation de notre système de santé. Ce sont là des tentations déraisonnables, surtout quand elles s'inscrivent dans la volonté absolue de « responsabiliser » les assurés, c'est-à-dire en fait de les pénaliser.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Barrot.
    M. Jacques Barrot. Tout d'abord, il est vrai, monsieur le ministre, que la fixation des tarifs de remboursement est une prérogative de l'Etat. Cela étant, cet amendement part d'une bonne intention, qui est de pratiquer une politique qui soit visible également pour les entreprises, afin que tout le monde tire dans le même sens. M. le rapporteur va peut-être essayer d'apprécier l'exacte volonté de la commission, pour savoir s'il peut retirer l'amendement, mais sur ce point le Gouvernement a raison.
    Je voudrais répondre à M. Le Guen. Un petit peu de modestie, cher collègue !
    M. Jean-Marie Le Guen. Beaucoup de modestie !
    M. Claude Evin. Tout le monde doit être modeste, monsieur Barrot !
    M. Jacques Barrot. Vous relancez un débat très idéologique. Or il me semble que ce n'est pas nous qui avons listé des quantités de produits à dérembourser, semant ainsi le doute chez les assurés sociaux quant à l'efficacité thérapeutique de ces médicaments, plaçant les entreprises dans des situations extrêmement difficiles - car elles ne savaient pas à quel saint se vouer -...
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Ils ne décidaient rien !
    M. Jacques Barrot. ... et en reculant, au dernier moment, devant toute décision courageuse qui aurait été susceptible de limiter les dépenses. Alors, un peu de modestie, ne nous replongez pas dans des débats idéologiques, à coup de caricatures, monsieur Le Guen. Ce n'est pas digne du bon débat que nous avons eu jusqu'à présent. Il faut ramener les choses à leur juste mesure.
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. Très bien !
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Quelques brefs rappels contribueront peut-être à éclairer l'ensemble de l'Assemblée. Entre 1995 et 1997, M. Barrot était sans doute trop occupé à mettre en place les ordonnances Juppé pour s'occuper des médicaments à SMR insuffisant.
    M. Jacques Barrot. La politique des génériques, on ne vous a pas attendus pour la mener !
    Un député du groupe socialiste. Ne vous énervez pas, monsieur Barrot !
    M. Jean-Marie Le Guen. Allons, monsieur le président Barrot ! Dès qu'on parle de Juppé ici, rien ne va plus. Mais cela ne me regarde peut-être pas, après tout : je ne suis pas membre de l'UMP.
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. Vous vous êtes bien accommodés du plan Juppé ! Vous avez surfé sur le plan Juppé pour ne rien faire d'autre !
    Un député du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Et si on parlait de Jospin ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Oh, vous pouvez parler de Jospin, il n'y a pas de problème.
    Mme la présidente. Poursuivez, monsieur Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je parlais donc des médicaments à SMR insuffisant, dont je n'ai pas encore eu l'occasion de parler puisqu'ils ne figurent pas dans les articles du PLFSS. Après avoir fait des annonces extrêmement fortes, M. le ministre nous a, à plusieurs reprises - et après des interpellations émanant de tous les bancs -, expliqué qu'il fallait prendre tout son temps, qu'il fallait examiner les choses de plus près. Il y a bien eu une liste qui a été avancée, une méthode qui a été définie, et quelques mesures de bon sens, que nous avons d'ailleurs soutenues, notamment, sur ces fameuses classes thérapeutiques qui font l'objet d'un article dangereux. Mais pour le reste, j'ai cru comprendre qu'il fallait y regarder à deux fois et se garder de toute précipitation en ce qui concerne les médicaments à SMR insuffisant.
    Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Nous suivons cette discussion avec beaucoup d'attention. Vous vous renvoyez la balle et, nous, nous comptons les points.
    Evidemment, il y a eu les ordonnances Juppé.
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. Mais enfin, vous aussi, vous avez soutenu Juppé !
    M. Maxime Gremetz. Nous, nous avons toujours proposé de les modifier ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. Vous n'avez rien fait !
    M. Maxime Gremetz. Nous n'avons pas été entendus. Et maintenant vous discutez pour savoir quel est le meilleur moyen pour mettre en oeuvre ces ordonnances.
    M. Richard Mallié. A Moscou, il y a moins de problèmes : il n'y a pas de médicaments !
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. Tel Ponce Pilate, vous n'avez rien fait !
    M. Maxime Gremetz. Nous, nous nous retirons de ce débat.
    Je me souviens, pour être intervenu à l'occasion du débat sur les ordonnances Juppé, que vous étiez tous debout à acclamer Juppé. Après, ce fut dans la rue que les gens furent debout. Ça, ce fut un changement qualitatif !
    M. Claude Evin. Quantitatif aussi !
    M. Maxime Gremetz. Je me souviens, nous étions quelques-uns sur les bancs de la gauche, écrasés par le nombre, et vous, vous étiez tous là à acclamer Juppé après son grand discours. Il ne faut pas avoir la mémoire courte !
    Vous vous étiez trompés. Et après le grand mouvement qui s'en est suivi, il a fallu modifier les choses. Puis, vous avez été battus. Nous avons alors proposé de rompre radicalement avec cette politique de santé publique qui ne correspond pas aux besoins. Toutefois, la « maîtrise médicalisée » des dépenses de santé n'est jamais rien d'autre qu'une maîtrise comptable, on le sait bien. Le financement de la protection sociale n'a pas été modifié. Rien n'a été modifié !
    M. Yves Bur, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. Eh oui !
    Mme Catherine Génisson. Et la CSG, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. En ce qui nous concerne, nous sommes très à l'aise : nous n'avons jamais voté une loi de financement de la sécurité sociale, ...
    M. Richard Mallié. C'est pourquoi les électeurs ne votent plus pour vous !
    M. Maxime Gremetz. ... même lorsque nous étions au Gouvernement, parce qu'on ne rompait pas avec ces ordonnances. Je fais ce rappel afin que, quand vous vous adressez à l'opposition, mesdames et messieurs de la majorité, vous n'oubliiez pas qu'elle est plurielle, très plurielle même ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Richard Mallié. Qu'elle le reste !
    Mme la présidente. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 77...
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour les recettes et l'équilibre général. Je le retire, madame la présidente.
    Mme la présidente. L'amendement n° 77 est retiré.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je le reprends, puisque j'étais intervenu en faveur de son adoption.
    M. Jacques Barrot. Non, vous étiez contre !
    Mme la présidente. L'amendement n° 77 est repris par M. Le Guen.
    M. Jacques Barrot. Monsieur Le Guen, comment pouvez-vous reprendre un amendement que vous avez combattu ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Non, je ne l'ai pas combattu. J'ai même dit que c'était un progrès !
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 77.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Je viens de m'apercevoir que je me suis trompé. En fait, j'avais défendu l'amendement n° 76 ! (Rires.)
    M. Jacques Barrot. Cela figurera au Journal officiel !
    M. Jean-Marie Le Guen. J'ai plus de facilité à reconnaître mes erreurs que M. Barrot à reconnaître les siennes sur les ordonnances Juppé !
    Mme la présidente. M. Morange, M. Accoyer et M. Heinrich ont présenté un amendement, n° 245, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'avant-dernier alinéa du I de l'article 27. »
    La parole est à M. Michel Heinrich.
    M. Michel Heinrich. J'observe qu'il est assez fréquent dans cette assemblée que l'on oublie, comme M. Le Guen, le rôle que peut jouer le pharmacien dans la politique du générique et dans le développement de celui-ci.
    M. Maxime Gremetz. Ah !
    M. Michel Heinrich. Je rappelle, car cela n'a pas été dit, que le pharmacien a un droit de substitution.
    M. Maxime Gremetz. C'est un pouvoir personnel !
    M. Michel Heinrich. Et, durant deux ans, le pharmacien a été le seul à se battre pour assurer le développement du générique.
    M. Claude Evin. Absolument !
    M. Michel Heinrich. Cela dit, je tiens à souligner les difficultés auxquelles sont confrontés les pharmaciens pour la dispensation du générique. La semaine dernière, à peu près à cette heure-ci, une radio d'information du service public a consacré aux génériques une émission d'environ une demi-heure - certains d'entre vous l'ont peut-être entendue. Et la conclusion de cette émission a été la suivante : surtout ne consommez pas de génériques, ce sont des produits qui n'ont pas les mêmes qualités et qui ne sont pas aussi fiables que les princeps. Imaginez l'effet dans le public et dans les officines ! Imaginez le temps que les pharmaciens ont dû consacrer le lendemain pour convaincre les patients qu'un générique est exactement la même chose qu'un princeps - et c'est bien le cas.
    M. Claude Evin, M. Pascal Terrasse et M. Jean-Marie Le Guen. Très juste !
    Mme Muguette Jacquaint. C'est vrai !
    M. Michel Heinrich. J'y insiste, les pharmaciens rencontrent beaucoup de difficultés pour substituer des génériques au princeps. Pour autant, ils ont permis le développement du générique, puisque, avant l'augmentation des honoraires des médecins, le générique représentait 4,25 % du marché global du médicament, alors qu'il en représente maintenant un peu plus de 6 %. Actuellement, le générique bénéficie d'une bonne dynamique, que ne pourront qu'amplifier certaines dispositions de l'article 27, puisqu'elles contribueront à son développement.
    Autre difficulté : la gestion des génériques par les pharmaciens. Celle-ci est complexe et difficile, car il faut les stocker sur une période longue d'au moins un mois ou deux, dans la mesure où l'approvisionnement se fait non chez un grossiste, mais directement chez un génériqueur. Tout cela entraîne des coûts de gestion, des coûts de stockage, et nécessite de l'espace, ce qui implique un investissement relativement important.
    C'est pourquoi je propose la suppression de l'avant-dernier alinéa du I de l'article 27 qui propose l'application d'un tarif forfaitaire de responsabilité pour l'ensemble des médicaments figurant dans un même groupe générique, car cela aura pour conséquence une baisse de la marge du pharmacien, donc une démobilisation de celui-ci quant à la dispensation du générique. Si bien que chaque fois le princeps sera prescrit, le pharmacien sera peu motivé - ou moins motivé - pour dispenser le générique.
    En pénalisant le pharmacien, je crains que l'on nuise au développement du générique en général. Ce serait regrettable.
    M. Jean-Marie Le Guen. Il a raison !
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 245 ?
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. La commission a donné un avis favorable à cet amendement.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement.
    J'ai bien écouté vos arguments, monsieur Heinrich, et j'y souscris au moins sur un point : le pharmacien est un personnage clé dans le réseau de soins, y compris en termes de santé publique.
    Je voudrais rappeler à l'Assemblée la situation actuelle. Lorsque le générique a été lancé - et alors que rien n'obligeait à le faire -, une négociation avec les pharmaciens a conduit à augmenter leurs marges sur les spécialités génériques pour les intéresser à leur dispensation préférentielle.
    Si l'article 27 est voté, deux situations seront possibles : soit le générique ne fera pas l'objet d'un forfait de remboursement, et la marge du pharmacien restera la même, c'est-à-dire à 10,75 % contre 2,54 % pour le princeps ; soit le générique fera l'objet d'un forfait de remboursement, mais cela ne créera pour le pharmacien aucune surcharge de travail, et, par conséquent, l'amendement 245 n'est pas fondé.
    Au reste, il serait inéquitable que la marge commerciale soit différente selon qu'on dispense un princeps ou un générique, dans la mesure où cela pourrait influencer un choix.
    Je le répète bien volontiers : les pharmaciens jouent un rôle fondamental dans notre réseau de soins et ont joué un rôle essentiel dans la diffusion des génériques. Le contexte particulier justifiait qu'ils bénéficient d'une remise supplémentaire. Aujourd'hui, l'environnement a changé et il faut en tenir compte.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. L'argumentation de M. le ministre a l'inconvénient d'envoyer aux professionnels de santé le message de la banalisation du générique et du « désintérêt » pour le générique. C'est un petit calcul, pour une mauvaise stratégie. Or nous devons continuer à expliquer aux médecins, aux pharmaciens et, bien entendu, aux assurés sociaux tout l'intérêt de la prescription de génériques. Pour un bénéfice minime - j'allais même employer un autre terme -, l'effet d'une telle mesure sera très négatif. En l'occurrence, l'argument selon lequel il doit y avoir une certaine équité entre le générique et le princeps ne me paraît pas opportun en termes de communication et est de nature à favoriser la prise en compte globale des génériques par l'ensemble des professionnels de santé.
    Mme la présidente. La parole est à Michel Heinrich.
    M. Michel Heinrich. Je vous ai entendu, monsieur le ministre, je vais retirer mon amendement (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s- communistes et républicains),...
    M. Jean-Marie Le Guen. Ce sont des adeptes de la méthode Ogino !
    M. Michel Heinrich. ... bien que je ne sois pas complétement convaincu.
    Mais pourriez-vous me dire quelle est, pour vous, la place du pharmacien dans ce système ?
    On peut très bien imaginer qu'un jour certains génériqueurs de grande taille pratiquent des prix inférieurs aux prix de référence.
    Mme la présidente. L'amendement n° 245 est retiré.
    M. Pascal Terrasse. Je le reprends !
    Mme la présidente. L'amendement n° 245 est repris par M. Pascal Terrasse.
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je vous remercie, monsieur Heinrich, d'avoir accepté de retirer votre amendement, et je vous réponds : le rôle des pharmaciens est capital. Le forfait de remboursement ne sera pas systématique : chaque fois que le générique ne fera pas l'objet d'un forfait de remboursement, la marge restera ce qu'elle est aujourd'hui. Ce n'est que lorsqu'un générique ne sera pas suffisamment utilisé et que l'on sera obligé de le forfaitiser, que la marge sera ramenée au niveau de celle applicable au médicament princeps.
    De surcroît, votre amendement pourrait avoir des effets pervers. Je pense à certains médicaments utilisant le paracétamol et le générique du paracétamol.
    J'ajoute, mais nous aurons l'occasion d'en reparler, que les pharmaciens vont jouer une rôle majeur dans les domaines de l'automédication, du conseil, de l'explication sur les ASMR insuffisants qui seront déremboursés. Là, il y aura un investissement de la part des pharmaciens qu'il faudra bien prendre en compte.
    Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Terrasse pour une brève intervention, car le débat sur ce sujet a déjà eu lieu.
    M. Pascal Terrasse. Certes, le débat a déjà eu lieu mais je tiens à apporter quelques éléments de réflexion complémentaires.
    Ainsi que cela a été rappelé par certains, c'est tout de même les pharmaciens qui, depuis maintenant deux ans, jouent le jeu du générique. C'est pourquoi le projet de loi de financement de la sécurité sociale d'il y a deux ans avait prévu de les rémunérer pour le service qu'ils rendent en faveur de la maîtrise des dépenses de santé.
    Or, aujourd'hui, que nous propose-t-on ? De les rémunérer, non plus à 10,74 %, mais à 2,5 % !
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est mesquin !
    M. Pascal Terrasse. Je ne pense pas que cela constitue, comme il a été dit, un signe fort adressé aux pharmaciens. Ils sauront certainement s'en souvenir.
    J'ajoute que cet amendement, que j'ai repris, a le mérite d'avoir été présenté par M. Heinrich, c'est-à-dire par quelqu'un qui connaît bien les pharmacies.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Barrot.
    M. Jacques Barrot. Monsieur le ministre, les arguments de Michel Heinrich sont à prendre en compte. Il est vrai que, dans une certaine mesure, la forfaitisation simplifie la tâche du pharmacien. Mais, comme vous l'a dit M. Heinrich, la gestion des génériques entraîne pour lui des exigences non négligeables. Et de toute façon, dans cette période transitoire, il faudra continuer à conseiller, à rassurer, s'agissant de l'usage du générique.
    M. Pascal Terrasse. Absolument !
    M. Jacques Barrot. Je vous suggère donc de mettre au point d'ici à la deuxième lecture un système qui permette de prolonger, sous une forme ou sous une autre, l'encouragement dont bénéficient les pharmaciens d'officine.
    M. Jean-Marie Le Guen. Votez l'amendement, et après on verra !
    M. Jacques Barrot. Au bénéfice de cet engagement, nous ne voterons pas cet amendement.
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je remercie Jacques Barrot de sa sagesse et je m'engage à trouver entre les deux lectures une rédaction qui aménage une période de transition.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est grâce à M. Terrasse que nous avançons.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 245, repris par M. Pascal Terrasse.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. Jean-Marie Le Guen. La tradition parlementaire imposait de le voter, mesdames et messieurs de la majoritée !
    Mme la présidente. M. Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail, a présenté un amendement, n° 78, ainsi rédigé :
    « Dans l'avant-dernier alinéa du I de l'article 27, supprimer les mots : "aux médicaments figurant dans un groupe générique. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. L'argumentation que j'ai développée sur l'amendement n° 76 vaut pour celui-ci, puisqu'il relève du même esprit.
    L'article 27 prévoit l'application de forfaits de remboursement à des groupes de médicaments qui sont soit des médicaments génériques, soit des médicaments « équivalents ». J'ai déjà indiqué toute l'ambiguïté qu'il y avait dans le terme « équivalent ». C'est pourquoi l'amendement n° 78 propose de supprimer dans l'article 27 la notion de groupe d'équivalence.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 78.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. M. Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, a présenté un amendement, n° 79, ainsi rédigé :
    « Après le I de l'article 27, insérer le paragraphe suivant :
    « I bis. - Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale, le mot : "deuxième est remplacé par le mot : "cinquième et le mot : "troisième par le mot : "sixième. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. L'amendement 79 est de coordination.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 79.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, n°s 80 et 253, pouvant être soumis à une discussion commune.
    M. Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail, M. Bur et M. Roubaud ont présenté un amendement, n° 80, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le II de l'article 27 :
    « II. - A. - Avant la dernière phrase du sixième alinéa (5°) de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, il est inséré une phrase ainsi rédigée : "En l'absence de spécialité de référence, un groupe générique peut être constitué de spécialités ayant la même composition qualitative et quantitative en principe actif, la même forme pharmaceutique et dont le profil de sécurité et d'efficacité est équivalent.
    « B. - Le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 5121-20 est complété par les mots : "et les modalités de création de groupes génériques en l'absence de spécialité de référence, ces modalités étant également définies au 5° de l'article L. 5121-1. »
    Sur cet amendement, le Gouvernement a présenté un sous-amendement, n° 288, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa du B de l'amendement n° 80, substituer aux mots : "modalités étant également les mots : "groupe étant. »
    L'amendement n° 253, présenté par M. Dionis du Séjour, M. Préel et M. Diefenbacher est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le II de l'article 27 :
    « II. - Avant la dernière phrase du 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « En l'absence de spécialité de référence, un groupe générique peut être constitué de spécialités qui ont la même composition qualitative et quantitative en principe actif, qui ont la même forme pharmaceutique et dont la bioéquivalence entre ces spécialités est démontrée par des études de pharmacocinétique appropriées. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 80.
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accident du travail. Certains médicaments ne sont pas « généricables », car il n'y pas de molécule princeps. L'amendement n° 80 a pour but de rendre possible la création de groupes génériques, même en l'absence de médicaments princeps.
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 80 et pour présenter le sous-amendement n° 288.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable à l'amendement, sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 288, qui n'apporte qu'une petite modification rédactionnelle.
    Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 288.
    (Le sous-amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 80, modifié par le sous-amendement n° 288.
    (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
    Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 253 de M. Dionis du Séjour n'a plus d'objet.
    Je mets aux voix l'article 27, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 27, ainsi modifié, est adopté.)
    Mme la présidente. Nous en revenons à l'article 17 précédemment réservé.

Article 17
(précédemment réservé)

    Mme la présidente. « Art. 17. - Au deuxième alinéa de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale, les mots : "en application du deuxième alinéa de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique, l'écart de prix entre la spécialité délivrée et la spécialité la moins chère du même groupe générique sont remplacés par les mots : "l'écart de prix entre la spécialité délivrée et la spécialité la moins chère conforme à la prescription, qu'elle appartienne à un groupe générique ou non,. »
    La parole est à M. Jean-Luc Préel, inscrit sur l'article.
    M. Jean-Luc Préel. Après les modifications intervenues sur l'article 27, je ne peux que me rallier à la position raisonnable de la commission, qui propose de supprimer l'article 17.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Les substitutions en DCI ne me posent pas de problème en tant que telles, mais, encore une fois, je regrette la très grande complexification du travail des différents professionnels de santé. Les glissements de termes successifs risquent de déboucher, demain, sur des pratiques tout à fait condamnables. Nous sommes donc très réservés.
    Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
    L'amendement n° 55 est présenté par M. Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail ; l'amendement n° 152 par M. Jean-Marie Le Guen, Mme Clergeau, M. Terrasse, Mme Guinchar-Kunstler, Hélène Mignon, Génisson, M. Fabius et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 17. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 55.
    M. Jean Bardet, rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. L'article 17 et l'article 27 traitent de problèmes comparables. C'est pourquoi la réserve de l'article 17 a été demandée. Maintenant que l'article 27 a été amendé et voté, l'article 17 n'a plus de raison d'être. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement de suppression.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour soutenir l'amendement n° 152.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je partage l'avis du rapporteur.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 55 et 152.
    (Ces amendements sont adoptés.)
    Mme la présidente. En conséquence, l'article 17 est supprimé.
    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

    Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heures quinze, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, n° 250 :
    MM. Yves Bur, Jean Bardet, Mme Marie-Françoise Clergeau et M. Denis Jacquat, rapporteurs, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tomes I à V du rapport n° 330) ;
    M. François Goulard, rapporteur pour avis, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis n° 327).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures quarante.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT