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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 7 NOVEMBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
3e séance du mercredi 6 novembre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC

1.  Loi de finances pour 2003 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

JUSTICE (suite)

Réponses (suite) de M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, et de M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice, aux questions de : MM. Rudy Salles, François Rochebloine, Yves Bur, Pierre Cardo, Mme Geneviève Levy, MM. Victorin Lurel, Julien Dray, Tony Dreyfus, Thierry Mariani, Jacques Pélissard.

ÉTAT B
Titre III «...»

Amendement n° 95 de M. Clément : MM. Pascal Clément, président de la commission des lois ; Pierre Albertini, rapporteur spécial de la commission des finances ; le garde des sceaux. - Retrait.
Adoption du titre III.

Titre IV. - Adoption «...»
ÉTAT C
Titres V et VI. - Adoptions «...»
Après l'article 72 «...»

Amendement n° 92 de la commission des finances : MM. le rapporteur spécial, le garde des sceaux. - Adoption.

Suspension et reprise de la séance «...»
TOURISME

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial de la commission des finances.
M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
MM.
Léonce Deprez,
Jean Launay,
Jean Lassalle,
Michel Vaxès,
Jean-Jacques Descamps,
Jean-Pierre Dufau,
Edouard Landrain,
Victorin Lurel,
Michel Bouvard.
M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme.
Réponses de M. le secrétaire d'Etat aux questions de : Mme Arlette Franco, MM. Edouard Landrain, André Chassaigne, Michel Vaxès.
Les crédits du tourisme seront mis aux voix à la suite de l'examen des crédits du logement.
Renvoi de la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances à la prochaine séance.
2.  Dépôt de projets de loi «...».
3.  Dépôt d'une proposition de résolution «...».
4.  Dépôt d'un rapport d'information «...».
5.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2003
DEUXIÈME PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003 (n°s 230, 256).

JUSTICE (suite)

    M. le président. Nous poursuivons l'examen des crédits du ministère de la justice, en reprenant le cours des questions.
    Nous prendrons les questions de chaque groupe par trois. Je rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes pour exposer sa question. Et je prie MM. les ministres d'apporter des réponses les plus rapides possibles.
    Nous commençons par les questions du groupe UDF.
    La parole est à M. Rudy Salles.
    M. Rudy Salles. Monsieur le garde des sceaux, monsieur le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice, ma première question comporte deux volets.
    D'une part, je voudrais vous interroger sur le projet de création d'une cour d'appel dans les Alpes-Maritimes. Vous le savez, la cour d'appel d'Aix-en-Provence est l'une des plus surchargées de France après Paris. Or près de 40 % des affaires traitées dans cette cour d'appel proviennent du département des Alpes-maritimes. La création d'une cour d'appel dans ce département semble donc tout à fait justifiée. Je voudrais connaître vos intentions, votre approche de ce problème étant entendu que les élus de ce département sont unanimes pour soutenir ce projet.
    D'autre part, je voudrais revenir sur la construction d'une nouvelle maison d'arrêt à Nice. Il s'agit d'un vieux projet qui, malheureusement, a pris beaucoup de retard sous vos prédécesseurs. Je souhaiterais savoir si cette maison d'arrêt sera rapidement réalisée et s'il s'agira d'une maison d'arrêt ou d'un centre de détention.
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Je répondrai sur la cour d'appel, puis Pierre Bédier évoquera la question de la maison d'arrêt.
    Comme vous le savez, monsieur le député, puisque j'ai eu l'occasion lors d'un déplacement récent dans les Alpes-Maritimes de m'exprimer sur ce dossier, j'ai indiqué à différents élus qui m'avaient interrogé que je m'engageais à étudier de la manière la plus objective possible cette question, qui est effectivement posée depuis très longtemps, qui revient - ne voyez aucune connotation péjorative dans mon propos - comme un refrain. Je me suis engagé auprès de mes interlocuteurs, comme je le fais auprès de vous ce soir, à restituer les éléments de cette étude et de cette réflexion avant de prendre quelque décision que ce soit.
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice.
    M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Monsieur le président, selon vos recommandations, je serai très bref.
    Nous n'ignorons pas, monsieur le député, le problème de la surpopulation de la maison d'arrêt de Nice puisqu'à l'instant où je parle celle-ci accueille 550 détenus pour une capacité de 330 places. C'est une situation inconvenable, qui nous préoccupe. A tel point, d'ailleurs, que le directeur de l'agence de maîtrise d'ouvrage du ministère était aujourd'hui à Nice. Nous travaillons et, dans les semaines qui viennent, je pense que nous pourrons apporter aux Niçois la réponse qu'ils attendent.
    M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.
    M. François Rochebloine. Monsieur le garde des sceaux, à quelques semaines des élections prud'homales, je souhaiterais attirer votre attention sur le conseil de prud'hommes de Saint-Chamond, dans la Loire. A vrai dire, ce n'est pas la première fois que j'interviens dans cet hémicycle pour signaler une situation pour le moins incohérente.
    Incohérente car nous venons d'assister, au terme d'une procédure dite de consultation, et sur des bases relativement contestables, à une réduction du nombre de conseillers pour cette juridiction. Le décret du 2 mai 2002, signé par votre prédécesseur en application de l'article L. 512-14 du code du travail, a, en effet, ramené l'effectif de la section industrie de trente-six à trente-deux membres, prenant ainsi la responsabilité de réduire la qualité des jugements du conseil de prud'hommes de Saint-Chamond et d'allonger de fait les délais de prononcé de ces mêmes jugements.
    Incohérente, si l'on observe, en second lieu, la carte prud'homale de l'agglomération stéphanoise. Le découpage géographique actuel est proprement aberrant, le mot n'est pas trop fort, d'ailleurs tous les acteurs sociaux le reconnaissent de manière unanime. Je vous invite à prendre connaissance d'une carte de la région, elle permet de comprendre.
    Si l'on veut une justice qui ne devienne pas totalement inaccessible, notamment aux personnes qui connaissent le plus de difficultés, si l'on veut développer une justice de proximité qui soit rendue dans des délais raisonnables, il est clair que ce n'est pas en procédant à des regroupements forcés que l'on y parviendra.
    Nos concitoyens, les justiciables, les élus locaux souhaitent le développement de services publics de proximité. On a parlé des maisons de justice. Qui prendra la responsabilité de supprimer des juridictions qui apportent satisfaction aux usagers ? Il s'agit, là aussi, d'un enjeu d'aménagement du territoire.
    Je vous demande donc, monsieur le garde des sceaux, de bien vouloir accorder une attention particulière à ce dossier dont je vous ai déjà saisi par courrier, plusieurs arguments plaidant, je le répète, pour le renforcement du conseil de Saint-Chamond, le rattachement du canton de la Grand-Croix s'imposant comme une solution à la fois cohérente et tout simplement de bon sens. Je sais que l'on peut compter sur vous.
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Monsieur le député, votre question est concrète, précise, elle expose un certain nombre d'éléments factuels qui sont en cours de vérification. Je m'engage à étudier les choses de très près et à vous tenir au courant le plus rapidement possible.
    Je crois qu'il est en effet très important que ce type de juridiction puisse fonctionner dans de bonnes conditions. Il faut que notre organisation tienne compte de l'évolution des bassins d'emplois, c'est une évidence. Je m'engage à vous donner la priorité de la réponse à mes investigations.
    M. François Rochebloine. Je vous remercie, monsieur le garde des sceaux
    M. le président. La parole est à M. Rudy Salles, pour poser une seconde question.
    M. Rudy Salles. Monsieur le garde des sceaux, je l'ai évoqué tout à l'heure à la tribune de l'Assemblée nationale, je voudrais vous interroger sur le taux de TVA applicable aux honoraires des avocats.
    Il ne s'agit pas de faire preuve d'un quelconque corporatisme. Il s'agit d'essayer de régler une question qui me paraît essentielle pour assurer l'égalité des justiciables devant la justice. En effet, alors qu'une personne morale va récupérer la TVA, une personne privée ne le pourra pas. Or la personne privée qui va voir un avocat, elle ne le fait pas par plaisir, c'est qu'elle en a besoin.
    L'abaissement du taux de TVA à 5,5 % me paraît tout à fait justifié, comme il l'est dans d'autres domaines pour lesquels nous nous battons - je pense à la restauration.
    M. François Rochebloine. Tout à fait !
    M. Rudy Salles. Sur un plan éthique, l'argument me paraît même encore beaucoup plus fort.
    J'aimerais connaître votre avis sur cette très vieille revendication des barreaux français et savoir si nous pouvons envisager de travailler ensemble, le Parlement et le Gouvernement, pour la faire aboutir.
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Ce dossier est difficile car il se heurte à la réglementation européenne. La législation communautaire fixe une liste exhaustive des produits et des services susceptibles de bénéficier du taux réduit. Or les prestations des avocats ne figurent pas aujourd'hui sur cette liste.
    Cette question n'est pas nouvelle, vous venez de le rappeler. Nous connaissons les positions des différents partenaires de l'Union européenne et j'avoue que je ne suis guère optimiste quant à la possibilité d'obtenir une position commune de l'ensemble des Etats de l'Union européenne sur cette affaire.
    Cela étant, comme j'ai eu l'occasion de le dire aux avocats que j'ai rencontrés il y a quelques semaines, je me suis engagé à reprendre les discussions au niveau de l'Union européenne pour essayer d'avancer sur ce dossier.
    Je rappelle quand même que dans les conseils des prud'hommes que j'évoquais tout à l'heure, il y a aussi une inégalité en quelque sorte du fait de la fiscalité lorsqu'il y a d'un côté une personne morale, de l'autre un salarié. Pour les avocats, je voudrais souligner que les prestations relevant de l'aide juridictionnelle sont soumises au taux réduit de TVA. C'est important car cela concerne quand même une part significative des prestations. Par ailleurs, je voudrais rappeler, même si cet élément n'est pas directement lié, que les avocats qui font un chiffre d'affaires inférieur à 37 400 euros « bénéficient » d'une franchise totale de TVA.
    J'apporte ces précisions pour montrer à la représentation nationale que la problématique du taux ne couvre pas l'ensemble des prestations, car ces deux éléments limitent quand même le champ de l'assujettissement au taux normal.
    M. le président. Nous en venons aux questions du groupe UMP.
    La parole est à M. Yves Bur.
    M. Yves Bur. Monsieur le ministre, je voudrais d'abord vous dire que nous partageons pleinement vos objectifs qui répondent tant à une attente forte des Français qu'à de vrais besoins.
    Le projet de contrat d'objectifs et de moyens pour 2003 concernant les services de la direction départementale de la protection judiciaire de la jeunesse, la PJJ, du Bas-Rhin recouvre plusieurs volets dont les actions se complètent pour constituer un ensemble homogène et efficace pour le secteur public.
    L'orientation prise par l'unité d'hébergement diversifié concerne l'accueil de mineurs difficiles, avec comme finalité première de permettre la poursuite du parcours du jeune confié au centre de placement immédiat, en renforçant les moyens humains.
    L'action en milieu ouvert passe par la création d'une seconde unité ou par le renforcement de l'unité existante. Parallèlement, le projet départemental prévoit la création d'un dispositif d'insertion sociale et professionnelle, en partenariat avec l'extérieur, articulé entre les moyens du secteur public de la PJJ et une association, l'Atelier, dont la compétence est reconnue dans une action intitulée « l'école de la seconde chance », qui concernera 120 mineurs sous main de justice ou relevant de l'action sociale à l'enfance.
    Enfin, pour le secteur associatif habilité, il faut développer les possibilités offertes aux mineurs délinquants et intensifier les hébergements par la création notamment d'un centre éducatif renforcé pour l'accueil de jeunes filles, devenu hélas ! nécessaire.
    Cette politique volontaire et réaliste suppose que treize postes vacants soient pourvus, que quinze postes soient créés et que deux postes budgétaires d'éducateur vacants soient redéployés. De plus, il serait nécessaire de débloquer un peu plus de 500 000 euros pour le centre éducatif renforcé.
    Quelles assurances, monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner pour que cette politique réponde aux objectifs fixés ?
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Monsieur le député, l'exemple concret que vous venez de décrire illustre les difficultés que j'évoquais tout à l'heure dans mon intervention. Il ne suffit pas de créer des effectifs budgétaires supplémentaires pour régler les problèmes, encore faut-il que ces postes budgétaires soient pourvus et que les personnels qui y sont affectés ensuite restent dans le département où ils sont affectés.
    Or, pour des raisons qui, à l'évidence, ne tiennent pas à la qualité de vie en Alsace...
    M. Yves Bur. Je l'espère !
    M. le garde des sceaux. ... un mouvement important d'arrivées mais aussi de départs s'opère sur les postes en question. C'est l'une des raisons pour lesquelles un grand nombre de postes sont aujourd'hui découverts malgré les augmentations en termes de postes budgétaires qui ont été réalisées depuis trois ans, en particulier dans votre département.
    Nous essaierons de tout faire pour que les postes budgétaires soient pourvus. Nous avons quelques espérances, en particulier s'agissant du responsable du centre d'hébergement dont vous parliez.
    Par ailleurs, votre département étant classé comme sensible, il sera considéré, dans la répartition des postes que j'évoquais tout à l'heure, comme prioritaire.
    M. Yves Bur. Merci.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Monsieur le garde des sceaux, dans le cadre de la lutte contre l'insécurité, la coordination des acteurs est un élément essentiel de la réussite. Si les contrats locaux de sécurité, puis les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, les CLSPD, tentent de faire avancer la cohérence des interventions des différents acteurs, pour autant cette cohérence nécessite de la part de chacun des procédures claires et surtout adaptées aux différents territoires et populations.
    Dans chaque département doit exister une procédure pénale en direction des mineurs. Celle-ci est de la compétence des parquets. Force est de constater qu'elle n'existe pas partout ou qu'elle est, dans bien des cas, peu lisible. Le partenariat que souhaite le Gouvernement dans ce domaine comme dans bien d'autres ne vous paraît-il pas exiger qu'il existe partout une procédure pénale transparente en direction des mineurs, que cette procédure soit discutée puis adaptée pour être efficace avec les partenaires locaux représentés par les maires maintenant présidents des nouveaux CLSPD ?
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. S'agissant des orientations en matière de politique pénale, j'adresserai dans les prochains jours aux procureurs de la République une circulaire qui portera en particulier sur les questions de délinquance des mineurs.
    Dans ce texte, j'ai l'intention de définir deux priorités : lutter contre les violences contre les personnes et les faits commis en récidive et apporter une réponse systématique aux actes de délinquance. Cela me paraît très important.
    Ensuite, il faut que les procureurs généraux, les procureurs de la République adaptent ces directives au terrain - c'est leur rôle ainsi que je le leur ai dit lors d'une réunion que j'ai tenue avec eux il y a quelques jours - au niveau des parquets généraux, puis au niveau des parquets. Les dispositifs ont été rénovés par le décret de juin dernier et cette adaptation doit se faire en étroite collaboration, en partenariat avec l'ensemble des acteurs de terrain dans leur ressort et en particulier les services sociaux et les élus locaux qui exercent des responsabilités sur le terrain.
    M. le président. La parole est à Mme Geneviève Levy.
    Mme Geneviève Levy. Ma question porte sur les effectifs du tribunal de grande instance de Toulon.
    Les chiffres le démontrent, ce tribunal est largement défavorisé par rapport aux juridictions de même importance. En effet, si, en 2001, l'effectif budgétaire théorique du TGI de Toulon était de quarante-cinq magistrats contre cinquante-quatre à Grenoble et cinquante-cinq à Grasse, le nombre de magistrats effectivement en poste à Toulon est en réalité de quarante et un, trente et un pour le siège et dix pour le parquet.
    Dans ce contexte de sous-effectif, le nombre d'affaires nouvelles ne cesse de progresser, notamment du fait de l'activité touristique dans le Var, de l'augmentation considérable de la population en période estivale et d'un niveau de délinquance important impliquant une réaction de l'institution judiciaire. Cette situation, très préoccupante, était déjà dénoncée en 1999 et une mission d'inspection avait préconisé un renforcement des effectifs, mais celui-ci n'a pas eu lieu.
    La création de quatre nouveaux postes de magistrat du siège est indispensable pour faire face à ces contraintes et réduire les délais de jugement, qui atteignent, pour certaines formations, deux ans.
    Au niveau du greffe, les besoins en personnel sont tout aussi impératifs. Pour donner un élément de comparaison, le TGI de Grasse, d'importance égale, emploie cent quatre-vingt-treize personnes, contre cent soixante-sept à Toulon. Afin de rétablir le bon fonctionnement du TGI de Toulon, seize nouveaux postes de fonctionnaires de justice sont nécessaires.
    Dans quelle mesure et à quelle date comptez-vous, monsieur le ministre, renforcer le nombre des magistrats et des greffiers afin de garantir une justice de qualité ?
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Madame la députée, je voudrais d'abord rappeler la méthode que je souhaite employer s'agissant de l'affectation des moyens. Chaque juridiction est prioritaire, en particulier celle dans le ressort de laquelle on vit. Il est donc très difficile de gérer toutes ces priorités, qui ont la même importance, au moins psychologiquement, si l'on ne suit pas une méthode.
    C'est la raison pour laquelle j'ai évoqué tout à l'heure les contrats d'objectif, qui ont pour mission de permettre de dresser un constat en termes de moyens et de qualité de la justice - je mets cette expression entre guillemets, car les critères quantitatifs, bien sûr, ne sont pas les seuls à prendre en compte quand on évoque la qualité. Néanmoins, il est important de faire le point sur les délais d'audiencement ou la durée des procédures, par exemple. A partir de ce constat, je serai amené à attribuer des moyens supplémentaires, dans la mesure des possibilités de la Chancellerie, et nous nous mettrons d'accord avec les responsables de la juridiction sur les améliorations qu'on est susceptible d'attendre de ces moyens supplémentaires. Un an ou deux ans après, on fera le point. Et si, par malheur, aucune amélioration n'était intervenue, nous aurions une discussion un peu plus approfondie avec les responsables de ces juridictions.
    Telle est la méthode que je veux mettre en place, et qui me paraît correspondre à ce que le Parlement est en droit d'attendre des membres du Gouvernement en ce qui concerne l'utilisation des fonds publics.
    S'agissant maintenant du tribunal de grande instance de Toulon, il est exact qu'il faut renforcer les effectifs. Pour ce qui est des magistrats, la localisation de deux nouveaux postes, l'un de vice-procureur, l'autre de vice-président est prévue. Quant au greffe, des augmentations d'effectifs sont également prévues aux différents niveaux hiérarchiques, en particulier un poste de greffier au titre de l'assistance éducative pour l'année 2003.
    Je tiens à vous dire que non seulement nous allons veiller à la résorption des emplois vacants - car il en existe malheureusement un certain nombre, en particulier dans les services de greffe - mais aussi au renforcement de l'effectif budgétaire, comme je viens de vous l'indiquer.
    M. le président. Nous passons aux questions du groupe socialiste.
    La parole est à M. Victorin Lurel.
    M. Victorin Lurel. J'aimerais vous interroger, monsieur le ministre, sur trois sujets : la situation de la maison d'arrêt à Basse-Terre, en Guadeloupe, la situation globale à Saint-Martin et de manière plus générale les conditions de travail des surveillants.
    Vous le savez, le 12 octobre dernier, un surveillant du centre pénitentiaire de Baie-Mahaut mourait après avoir été blessé par un détenu. Ses collègues avaient vivement réagi, en métropole comme outre-mer, pour honorer sa mémoire et dénoncer de manière plus générale leurs conditions de travail.
    Je voudrais donc ici relayer les inquiétudes des surveillants qui ont à faire face, régulièrement, à des agressions. Ils exercent leur métier dans des conditions difficiles et de nombreuses maisons d'arrêt, ici comme en outre-mer, fonctionnent dans des conditions lamentables. Je pense particulièrement à celle de Basse-Terre en Guadeloupe.
    Monsieur le ministre, j'aimerais que vous confirmiez dans la mesure du possible, l'engagement qui avait été pris de rénover le plus rapidement possible cette maison d'arrêt. Il y a une véritable urgence à reconstruire cette prison, qui est certainement la plus délabrée de France et qui, à ce titre, constitue l'une « des pires hontes de la République », pour reprendre les termes employés par mes collègues de la précédente législature.
    S'agissant de Saint-Martin, commune de 35 000 habitants qui connaît une très forte immigration non contrôlée et qui n'a ni maison d'arrêt, ni parquet, ni commissariat de police, le représentant de l'Etat sur place a pris l'engagement, lors d'une rencontre avec le lieutenant gouverneur de la partie hollandaise de l'île, de reconstruire et de moderniser la maison d'arrêt de Philisburg. J'aimerais que vous confirmiez que la partie française de l'île n'aura pas à souffrir de manques et qu'elle bénéficiera, autant que possible, d'une sollicitude renouvelée et renforcée.
    Enfin, dans les prisons françaises, la situation est proprement explosive. L'absence de perspectives de réinsertion, d'accès aux soins médicaux, tout particulièrement psychiatriques, la loi, si j'ose dire, du pullulement, non seulement conduisent à un taux de récidive de l'ordre de 80 % mais sont également une source d'agressivité supplémentaire à l'encontre des surveillants.
    Compte tenu du manque d'effectifs, ceux-ci ne peuvent mener à bien leurs missions difficiles. D'ailleurs, le président de la commission des lois, M. Clément, s'inquiétait lui-même, je le cite, « des conditions de l'adoption de nouvelles sanctions prévues dans le cadre du projet de loi sur la sécurité et des effets de surpopulation carcérale qu'elles risquent d'engendrer ». Mme Pecresse, notre rapporteure, exprimait les mêmes inquiétudes.
    Or, l'augmentation du nombre de places de prison - 7 000 en cinq ans apparemment - dans le cadre de règles, je le rappelle, quelque peu dérogatoires au droit commun des marchés publics, ne s'accompagne pas, en termes d'effectifs de surveillants, de moyens suffisants pour que ceux-ci exercent leurs fonctions de façon efficace et en toute sécurité. En effet, avec 7 000 places supplémentaires en cinq ans et 613 nouveaux postes de surveillants seulement, la situation ne pourra, à notre sens, qu'empirer.
    M. le président. Veuillez conclure, je vous prie.
    M. Victorin Lurel. Monsieur le ministre, de janvier à octobre 2002, 106 détenus se sont suicidés en prison. Il faut, bien entendu, rénover les maisons d'arrêt et les doter de moyens humains supplémentaires, mais n'est-il pas aussi grand temps, monsieur le ministre, de mettre en oeuvre les réformes préconisées, de façon unanime, par les parlementaires de la précédente législature dans le cadre de leur mission d'information ?
    Il faut doter la France de lieux de peines et d'enfermement humains, compatibles avec la réinsertion des condamnés et, par là même, réformer les missions et revaloriser les carrières des surveillants.
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Je voudrais d'abord, si vous le permettez, monsieur le député, corriger une erreur factuelle et certainement involontaire car elle pourrait être lourde de conséquences psychologiques. Le gardien dont vous avez rappelé le décès n'est pas mort des suites des blessures qu'il avait subies au moment de cette agression. Je ne peux pas citer le compte rendu de l'autopsie, le secret médical m'en empêche, mais je puis dire avec certitude et solennité à l'Assemblée nationale qu'il n'est pas mort des suites de la blessure qui lui a été causée au mois d'août.
    M. Victorin Lurel. La famille le conteste.
    M. le garde des sceaux. C'est important de le dire. Il ne faut pas prétendre le contraire. Je tiens à votre disposition, si vous le souhaitez, et sous le sceau du secret, le rapport d'autopsie. Du reste, je pense que ceux qui le connaissaient savent que la probabilité qu'il soit mort des suites de cette agression est assez faible. Je n'en dis pas davantage.
    S'agissant de Saint-Martin, je souhaite que la coopération avec les autorités néerlandaises ne consiste pas uniquement dans la comparaison des conditions de détention sur l'île, car nous devons aussi progresser en ce qui concerne les conditions de sécurité. Je souhaiterais, par exemple, que les accords que j'avais signés il y a quelques années avec les Pays-Bas puissent être effectivement appliqués, ce qui n'est toujours pas le cas depuis bientôt sept ans et demi. Et ce n'est pas dû à la mauvaise volonté des autorités françaises. Ce n'est évidemment pas à vous, monsieur le député, que je m'adresse mais j'espère que le message transmis depuis l'Assemblée sera entendu.
    S'agissant maintenant de la situation générale des personnels de surveillance, je voudrais dire ici que je partage votre inquiétude, votre souci. Je suis bien conscient de l'évolution des conditions dans lesquelles fonctionnent nos établissements pénitentiaires. Et je ne doute pas que vous voterez le projet de budget 2003, puisqu'il répond notamment à la préoccupation que vous venez d'exprimer : 7 000 places de prison seront construites et 4 000 rénovées. Par ailleurs, dans le cadre des négociations syndicales que nous avons entamées avec Pierre Bédier et le directeur de l'administration pénitentiaire, nous ferons en sorte de répondre dans de meilleures conditions au souci des personnels, qui exercent un métier très difficile. Il l'est, du reste, de plus en plus, compte tenu des caractéristiques de la population carcérale, en particulier, comme vous l'avez souligné à très juste titre, de problèmes sanitaires et psychiatriques qui sont relativement nouveaux et de plus en plus préoccupants. C'est la raison pour laquelle nous avions prévu, dans la loi d'orientation, un dispositif d'évolution et de coopération avec le ministère de la santé, afin que les malades ayant des difficultés de type psychiatrique soient pris en charge ailleurs que dans nos établissements pénitentiaires.
    Enfin, les négociations que j'évoquais à l'instant devraient nous permettre d'améliorer les conditions de travail et de rémunération de ces personnels.
    M. le président. La parole est à M. Julien Dray.
    M. Julien Dray. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, je vais d'abord commencer par évoquer ce qui, désormais, fait chaque année l'objet d'un débat : la situation de la prison de Fleury-Mérogis. Vous allez créer des postes supplémentaires, rénover et créer des places de prison supplémentaires, mais, pour l'instant, la prison de Fleury-Mérogis est toujours dans une situation très difficile, notamment liée à la surpopulation, puisqu'elle accueille 3 500 détenus pour 3 100 places. Cela crée donc des difficultés, qui donnent évidemment lieu à des déplacements de populations pénales. Ainsi, on a rapatrié au centre des jeunes détenus les personnes âgées de dix-huit à vingt et un ans, ce qui a donné lieu à des situations conflictuelles pénibles.
    La question qui se pose est donc la suivante. Dans le cadre du vaste plan qui a été décidé et, plus précisément, des mesures qui relèvent de la responsabilité ministérielle qui a été confiée à M. Bédier - dont je ne doute pas qu'il exerce pleinement ses compétences - quelle part sera réservée à la prison de Fleury-Mérogis en ce qui concerne non seulement les rénovations, mais aussi, et surtout, les effectifs ? Car le problème essentiel de la prison de Fleury-Mérogis, ce sont les sous-effectifs, qu'il s'agisse des surveillants ou des personnels d'accompagnement social.
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Monsieur le député, la prison de Fleury-Mérogis est effectivement dans un état assez « délicat », dirons-nous, dû sans doute à l'outrage du temps. Elle a, en d'autres termes, mal vieilli. Mais elle n'est pas la seule en région parisienne et sur le territoire national. C'est pourquoi est engagé un programme de rénovation des cinq principaux établissements pénitentiaires : Fresnes, les Baumettes, la Santé, Loos, ainsi que Fleury-Mérogis où j'aurai l'occasion de me rendre prochainement. Puisque cet établissement est dans votre circonscription, j'aurai grand plaisir à ce que vous m'y accompagniez afin d'apprécier vous-même, de visu, la situation. Nous avons aussi l'intention de réaliser un important investissement à Fleury-Mérogis en y implantant la cuisine centrale dont a besoin la région parisienne. Cet établissement n'est donc pas oublié.
    En matière d'effectifs, monsieur le député, sachez que cet établissement connaît des problèmes analogues à ceux qui se posent partout. Si le garde des sceaux a souhaité que soit lancée une grande campagne de recrutement de surveillants, c'est bien parce que nous étions conscients de ces problèmes d'effectifs qui sont, encore une fois, généraux. Nous y apporterons donc des réponses, au fil du temps, en fonction des promotions qui sortiront de l'ENAP, et de la capacité de doublement de ces promotions qu'a évoquée le garde des sceaux tout à l'heure. Il est vrai que, actuellement, nous connaissons des difficultés sur l'ensemble du territoire national.
    M. le président. La parole est à M. Tony Dreyfus.
    M. Tony Dreyfus. Dérogeant à la tradition parlementaire, je ne vous ai pas communiqué, monsieur le garde des sceaux, ma question. Pour autant, elle n'a pas pour objet de vous mettre en cause ou en difficulté.
    Mon propos est le suivant. On a constaté une diminution de la progression du nombre de magistrats. Vous y êtes contraint, je ne reviens pas sur ce problème. Néanmoins, le nombre des magistrats du parquet n'a pas été augmenté alors que celui des OPJ a été considérablement accru. Or cela pose un problème aux maires, dont je suis, et aux professionnels de la défense, dont je fais également partie. En effet, nous pouvons être inquiets si le nombre des OPJ augmente sans qu'il y ait un accroissement parallèle, je ne dis pas proportionnel, de celui des représentants du parquet, qui sont chargés d'exercer sur eux une tutelle.
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Tout est prioritaire, mais il me semble qu'il convient d'accorder une importance particulière à la nécessité du bon fonctionnement des parquets. A l'occasion des déplacements que j'effectue dans les juridictions, je suis parfois un peu étonné de constater à quel point les conditions dans lesquelles le parquet fonctionne sont difficiles, en particulier dans les services qui accueillent l'ensemble des informations en provenance de la police et de la gendarmerie, pour ensuite « dispatcher » - pardonnez-moi l'expression, elle est épouvantable, mais fidèle à la réalité - les affaires entre les différentes procédures possibles.
    Sur l'ensemble des cinq années qui viennent, il y aura, je le rappelle, création de 950 postes de magistrats. J'ai expliqué pourquoi nous avions opté pour ce rythme, qui me paraît raisonnable, étant précisé que, compte tenu des systèmes de formation, des départs à la retraite, des concours exceptionnels, ce qui est important, ce n'est pas uniquement la création en termes d'effectifs budgétaires, mais c'est le solde net dans les juridictions. L'année prochaine, ce solde sera de 290, ce qui est un chiffre significatif. Et nous devrions maintenir un rythme à peu près équivalent au cours des prochaines années, compte tenu des mouvements globaux de recrutement et de départs de magistrats.
    Sur les années 2003-2004, notre intention est de donner la priorité aux parquets et aux dispositifs concernant les mineurs, dans la mesure où nous souhaitons faire un effort tout particulier, je crois que plusieurs orateurs en ont parlé, sur l'exécution des peines, pas seulement les peines de prison, mais aussi les amendes, par exemple, qui sont très mal recouvrées. Concernant l'exécution des peines, il est clair que seul le parquet assure le pilotage global de réduction des délais, et donc l'efficacité de la décision de justice. Donc, je crois que nos intentions vont dans le sens que vous souhaitez, monsieur le député.
    M. le président. La parole est à M. Julien Dray, qui posera la dernière question pour le groupe socialiste.
    M. Julien Dray. Ma question a trait aux centres éducatifs fermés. Nous avons déjà débattu à plusieurs reprises de la manière dont les centres vont fonctionner. Pour l'instant, il reste encore beaucoup d'incertitudes sur ce point, notamment en termes de personnel d'encadrement. Or, compte tenu notamment des missions que vous souhaitez lui confier et de l'augmentation du nombre de places dans les prisons pour mineurs, la protection judiciaire de la jeunesse va se trouver confrontée à de nouvelles demandes. Ma question est donc très simple : le personnel affecté aux centres éducatifs fermés sera-t-il celui de la protection judiciaire de la jeunesse, ou s'agira-t-il d'un personnel issu du secteur associatif ? Va-t-on se décharger sur le secteur associatif et lui confier cette mission totalement nouvelle ?
    M. Pierre Cardo. La PJJ travaille déjà avec le secteur associatif !
    M. Julien Dray. Beaucoup d'organisations syndicales de la protection judiciaire de la jeunesse sont inquiètes de la manière dont les choses vont se passer au regard des annonces qui ont été faites s'agissant des créations de postes et des structures que vous voulez mettre en place. Pouvez-vous donc me dire, monsieur le ministre, si la protection judiciaire de la jeunesse est concernée par les centres éducatifs fermés ?
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Monsieur le député, la protection judiciaire de la jeunesse est évidemment concernée par les centres éducatifs fermés. Mais en ce domaine, nous suivrons ce qui a pu être fait précédemment pour d'autres structures. Il y a diversité de moyens. Outre la PJJ, il y a le secteur associatif habilité. Nous sommes d'ailleurs en train de travailler avec certaines directions régionales de la PJJ et certaines associations pour mettre en place des systèmes expérimentaux de centres éducatifs fermés et en définir le contenu pédagogique et éducatif. Et c'est justement cette diversité dans les prises en charge qui est intéressante.
    M. le président. Nous passons aux questions du groupe UMP.
    La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Monsieur le ministre, vous connaissez bien les problèmes que posent les conflits entre parents de couples binationaux qui se traduisent parfois par l'enlèvement d'un ou plusieurs de ses enfants par l'un des parents qui les emmène dans dans son pays d'origine. Les enlèvements internationaux d'enfants génèrent souvent des litiges particulièrement douloureux et les solutions judiciaires trouvées à l'aide des instruments existants sont parfois inopérantes et rarement satisfaisantes, car elles donnent lieu à des différends, souvent au détriment des enfants.
    La médiation familiale permet dans de nombreux cas, avec le rétablissement du dialogue entre les parents, de trouver des solutions plus acceptables dans l'intérêt des enfants et c'est un bien. La spécificité de cette médiation va au-delà du simple conflit entre parents. Elle intègre une dimension de médiation entre nations, cultures et systèmes judiciaires très différents. Pour répondre à cette exigence nouvelle, la France s'est dotée depuis avril 2001 d'une mission d'aide à la médiation internationale pour les familles - MAMIF -, qui est venue compléter le travail de la commission parlementaire franco-allemande que vous avez bien voulu reconduire. Cette mission a donné des résultats intéressants, notamment dans des pays non liés par des conventions internationales, comme la Jordanie, le Liban, le Pakistan, entre autres.
    Ma question est donc la suivante, monsieur le ministre : entendez-vous dégager des moyens suffisants pour recruter un médiateur familial professionnel compétent pour l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne et, de manière ponctuelle, pour des dossiers intéressant d'autres pays ? Par ailleurs, ces conflits vont au-delà du seul cadre judiciaire et peuvent engendrer des différends internationaux qui dépassent le simple problème du couple. Serait-il possible de regrouper, dans une structure interministérielle, la MAMIF, qui relève de votre ministère, et l'audience internationale de la sous-direction de la coopération familiale internationale du ministère des affaires étrangères ?
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Je tiens avant tout à vous dire, monsieur le député, que je considère personnellement le dossier des enfants de couples en difficulté originaires de différents pays comme prioritaire et que j'ai eu l'occasion de l'évoquer à plusieurs reprises avec mes collègues de l'Union européenne. Dès ma première rencontre, qui est prévue dans quelques jours, avec la nouvelle ministre allemande de la justice, j'ai d'ailleurs bien l'intention de parler de cette question puisque, comme vous le savez mieux que personne, c'est avec ce pays en particulier que nous rencontrons des difficultés. En revanche, je puis vous indiquer que nos voisins européens partagent des points de vue assez analogues aux nôtres sur l'évolution souhaitable de la législation en la matière.
    Vous m'avez posé deux questions très précises et un peu techniques. Pour répondre à la première, je vais voir ce qu'il est possible de faire en termes de moyens. Quant à la création d'une nouvelle structure interministérielle, je ne peux vous répondre à chaud, ce serait prématuré.
    M. Pierre Cardo. J'entends bien !
    M. le garde des sceaux. Je vais néanmoins me rapprocher de M. de Villepin pour voir ce qu'il est possible de faire pour harmoniser nos interventions respectives.
    M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani, pour poser une première question.
    M. Thierry Mariani. Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur un problème concernant la délinquance des mineurs. Je prendrai pour exemple un fait qui s'est produit dans ma commune, mais que l'on doit malheureusement constater dans de nombreux autres endroits.
    En octobre 2000, un jeune garçon de seize ans a volontairement incendié des tables de ping-pong dans un quartier et une partie des clôtures d'un centre municipal de Valréas. Cet incendie était de nature à créer un danger pour de nombreuses personnes. Les faits peuvent faire sourire. Ils sont effectivement courants, mais sachez que ce n'était pas la première fois que ce jeune homme était mis en cause. En effet, pour utiliser une expression bien connue, il était « très défavorablement connu des services de police », pour vols de scooters, de voitures et détérioration de biens publics ou privés. Bref, il fallait une réponse judiciaire rapide, afin qu'il arrête son escalade dans la pyramide criminelle et qu'il retourne dans le droit chemin. Il a donc été jugé pour ces faits le 11 octobre 2002, soit deux ans après. Deux ans, c'est la durée moyenne de jugement des mineurs. Dans l'intervalle, son sentiment d'impunité n'a fait que croître, l'entraînant dans un engrenage qui ne s'est pas terminé avec sa majorité, loin de là. Malheureusement, monsieur le ministre, la longueur de cette procédure, je le disais, n'a rien d'exceptionnel. Le tribunal pour enfants compétent dans le Vaucluse est celui d'Avignon. Il est composé d'un seul substitut et d'un poste et demi de juge pour enfants, dans une zone de compétence de 500 000 habitants, qui inclut le ressort du tribunal de grande instance de Carpentras, soit 215 000 habitants.
    Afin de réduire les délais de jugement, trop longs non seulement pour les délinquants, mais aussi pour les justiciables, il est impératif de créer un tribunal pour enfants à Carpentras. Votre prédécesseur l'a fait - je le dis avec un certain humour - par un décret du 23 avril 2002. Chacun appréciera la date, à quelques semaines des échéances que nous connaissons. Il a fait de même dans treize autres villes. De telles créations sont purement virtuelles puisque aucun poste et aucun moyen n'ont été affectés à ces structures, mais, bien sûr, monsieur le ministre, vous n'êtes pas responsable de cette situation. Je vous signale que, l'année dernière, le parquet de Carpentras a traité plus de 20 000 procédures avec seulement trois magistrats, les effectifs n'ayant pas augmenté depuis plus de dix ans.
    Monsieur le garde des sceaux, avez-vous l'intention d'assurer réellement le fonctionnement du tribunal pour enfants de Carpentras ? Quand celui-ci disposera-t-il des moyens humains et des locaux nécessaires ? C'est indispensable pour que la délinquance des mineurs puisse réellement régresser, notamment dans le Vaucluse. Par ailleurs, comptez-vous renforcer les moyens humains du parquet de Carpentras, qui sont notoirement insuffisants depuis de nombreuses années ?
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. S'agissant de la création de tribunaux pour enfants, monsieur le député, vous avez rappelé dans quelles conditions ont été prises des décisions virtuelles. Des lettres sympathiques ont en effet été envoyées à certains élus et je me suis trouvé confronté à une absence totale de moyens tant en personnels qu'en crédits de fonctionnement. C'est une situation qui n'est pas forcément dramatique, à condition que l'on s'explique. C'est ce que j'ai essayé de faire.
    S'agissant plus particulièrement du tribunal pour enfants de Carpentras, je vous confirme, monsieur le député, que sa création sera effective à la rentrée de septembre 2003, ce qui nous laisse le temps à la fois de mettre en place les moyens financiers et de recruter les personnes nécessaires, les magistrats notamment. Un juge des enfants et un greffier y seront affectés. S'agissant des locaux, le déménagement du tribunal d'instance, prévu pour la fin de l'année 2002, permettra de loger utilement le tribunal pour enfants. Enfin, s'agissant du parquet, un poste de substitut est prévu. Voilà, très précisément, les réponses à vos questions.
    M. le président. La parole est à M. Jacques Pélissard.
    M. Jacques Pélissard. Monsieur le garde des sceaux, ma question porte sur le tribunal de grande instance de Lons-le-Saunier et l'ensemble des juridictions hébergées par l'actuel palais de justice de cette ville. C'est un vieux dossier puisque j'avais déjà alerté Jacques Toubon en 1996. Des décisions devaient être prises, mais pendant plusieurs années, ce fut le silence complet. La situation est difficile dans la mesure où les locaux manquent. Pour loger le deuxième juge pour enfants, il a fallu déménager une partie de la PJJ et il n'y a pas assez de salles d'attente. Bref, la nécessité d'une extension des locaux est incontestable.
    L'ancienne gendarmerie, propriété du ministère de la défense, est mitoyenne avec ce tènement et il existe un projet consistant à en acquérir une partie pour y loger certaines juridictions comme le conseil des prud'hommes, qui se trouve actuellement dans une situation quasiment foraine - locataire du secteur privé, il se déplace en effet de locaux en locaux -, ou le tribunal paritaire des baux ruraux. Monsieur le garde des sceaux, où en est le processus d'acquisition, d'études et de travaux ? Pouvez-vous communiquer aux justiciables et aux fonctionnaires un échéancier précis des travaux ?
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Monsieur Pélissard, je vous confirme l'acquisition de cette ancienne caserne de gendarmerie. Les actes sont en cours de formalisation. Les choses devraient donc aller très vite. Etant entendu qu'il s'agit probablement d'accueillir dans ces locaux, une fois réhabilités, le tribunal d'instance, le tribunal de commerce, le conseil des prud'hommes et peut-être le service d'insertion et de probation, il est prévu que, dans le cadre de la cour d'appel de Besançon, les études soient engagées à partir de la fin de l'année et poursuivies jusque dans la deuxième partie de l'année 2003, de façon à préciser le programme des travaux. Nous nous fixons pour objectifs un achèvement de ces travaux en 2006. C'est d'ailleurs un délai relativement serré pour réaliser une telle opération. Pour autant, cela ne signifie pas que rien ne sera fait pour l'actuel palais de justice. Les crédits nécessaires au gros entretien et à la sécurité incendie, qui sont l'une des préoccupations des magistrats du TGI, seront ainsi engagés dès l'année prochaine.
    M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani, pour poser une dernière question.
    M. Thierry Mariani. Monsieur le ministre, je voudrais une nouvelle fois attirer votre attention sur l'article 769-2 du code de procédure pénal relatif au casier judiciaire des mineurs.
    En application de cet article, presque toutes les fiches relatives aux procédures judiciaires contre un mineur sont désormais retirées de son casier judiciaire lorsqu'il atteint sa majorité. En effet, le 1° de cet article 769-2 retire les fiches relatives aux mesures prononcées, par application des articles 8, 15, 15-1, 16, 16 bis et 28 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, c'est-à-dire les mesures plus couramment appelées d'assistance éducative. Le 2° du même article retire les fiches relatives à des condamnations à des peines d'amende, ainsi qu'à des peines d'emprisonnement n'excédant pas deux mois. Enfin, le 3° retire les fiches relatives aux autres condamnations pénales prononcées par les tribunaux pour enfants, assorties du bénéfice du sursis avec ou sans mise à l'épreuve ou assorties du bénéfice du sursis avec l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général, à l'expiration du délai d'épreuve.
    Bref, à dix-huit ans et un jour, il ne reste, dans le casier judiciaire d'un ancien mineur délinquant, que les fiches relatives aux condamnations ayant donné lieu à des peines d'emprisonnement de plus de deux mois. Dans ma commune, par exemple, certains mineurs ayant à leur actif plus de vingt procédures se retrouvent avec un casier judiciaire complètement vierge le jour de leur dix-huitième anniversaire. Cette aberration date de la loi d'amnistie du 4 août 1981 qui a suivi l'élection de M. Mitterrand. La loi d'amnistie du 20 juillet 1988, qui a suivi sa réélection, hélas ! a donné à cette mesure un caractère permanent en la transposant dans le code de procédure pénale. Cet été, j'avais déposé un amendement visant à abroger purement et simplement cet article, mais il n'a été retenu ni par l'Assemblée nationale ni par la commission mixte paritaire.
    Cette aberration n'est pas sans conséquence. En effet, puisqu'il s'agit d'une amnistie, l'article 133-11 du code pénal s'applique. Il est donc interdit à toute personne ayant eu connaissance d'une infraction amnistiée d'en faire état. En pratique, les magistrats et les policiers qui connaissent le mineur depuis plusieurs années ne peuvent pas faire état de ses antécédents. Le mineur multirécidiviste est donc considéré à dix-huit ans et un jour comme un primo-délinquant. Cette mesure porte tous les jours un grave préjudice aux différents services appelés à lutter contre la délinquance. En effet, effacer un casier, c'est en quelque sorte nier le travail de services particulièrement efficaces au vue des très faibles moyens dont ils disposent. Comment pouvons-nous justifier l'oubli obligatoire des quelques faits qui ont reçu une réponse pénale, démontrant l'efficacité des services concernés ? De plus, cet article n'entraîne pas seulement la frustration bien légitime des différents services ayant collaboré au cours de l'adolescence du délinquant. Il a aussi développé un sentiment d'impunité chez certains délinquants. Pourquoi s'inquiéter ? A dix-huit ans, un délinquant quasi professionnel...
    M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
    M. Thierry Mariani ... ne sera condamné à de la prison ferme qu'à la suite de plusieurs jugements. La justice utilisera d'abord les peines alternatives, n'ayant pas le droit de savoir qu'elles ont été sans effet dans le passé.
    Monsieur le garde des sceaux, ma question est simple. Comptez-vous, oui ou non, revenir sur cette question ? Vous m'aviez répondu, lors du débat sur la justice, qu'il ne convenait pas de revenir à une situation lointaine. Je me permets de vous faire remarquer que ce que je demande,...
    M. le président. Je crois que M. le garde des sceaux a bien compris la question !
    M. Thierry Mariani. ... c'est simplement le retour à la situation antérieure au 10 mai 1981.
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. J'ai effectivement bien compris votre question, monsieur Mariani. Il se trouve que j'ai un peu de mémoire et que je me souviens avoir eu, avec vous-même et avec M. Mallié, un échange approfondi en la matière lors du débat sur la loi d'orientation. A l'époque, très honnêtement, à mes yeux, cette question n'était pas tout à fait mûre. C'était la raison pour laquelle je m'étais opposé à l'amendement que vous aviez déposé avec M. Mallié notamment.
    Ce que vous venez de dire, monsieur Mariani, est exact. Nous sommes confrontés à deux exigences contradictoires. La première résulte de la conception que nous nous faisons dans notre société de l'enfance et du mineur que nous considérons comme un jeune en devenir. L'idée est de faire en sorte qu'un jeune qui commence dans la vie ne porte pas indéfiniment le poids de ses erreurs passées. Notre vision est optimiste. Mais, en même temps, et cela est techniquement contradictoire, ce n'est pas forcément l'intérêt du jeune que d'oublier son passé, son histoire, y compris en termes de prévention, comme vous l'avez très justement dit, monsieur le député. Ce n'est pas nécessairement non plus l'intérêt de ceux qui devront le juger, le suivre ou travailler pour sa réinsertion.
    C'est donc une question difficile, je l'avoue très sincèrement. Je n'ai pas la prétention de pouvoir tout trancher en quelques minutes. D'ailleurs, je m'interroge beaucoup et je n'exclus pas d'en reparler lors de l'examen de la réforme de la procédure pénale, qui devrait avoir lieu au printemps prochain. Je souhaite que nous puissions en rediscuter avec les magistrats, les éducateurs, ainsi que les représentants des forces de police et de gendarmerie, pour clarifier ce sujet complexe. Cela dit, je comprends que ce problème ait pris aujourd'hui une autre dimension en raison de l'évolution de la délinquance, de son « rajeunissement ». Je m'engage donc à reprendre ce débat avec vous et à vous proposer une solution au printemps prochain.
    M. le président. Nous en avons terminé avec les questions.
    Je vous remercie, messieurs les ministres, d'avoir joué le jeu en répondant de façon rapide et précise.
    J'appelle les crédits inscrits à la ligne « Justice ».

ÉTAT B
Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

    « Titre III : 196 933 090 euros ;
    « Titre IV : 18 418 371 euros. »

ÉTAT C
Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)
TITRE V. - INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programme : 688 000 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 60 570 000 euros. »

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT
ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programme : 18 000 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 800 000 euros. »
    M. Clément a présenté un amendement, n° 95, ainsi rédigé :
    « Sur le titre III de l'état B, réduire les crédits de 959 223 euros. »
    La parole est à M. Pascal Clément.
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Monsieur le ministre, cet amendement est particulier, je ne vous le cache pas. Il est plutôt inhabituel. Il est motivé par le fait que la commission des lois a souhaité mettre un terme à une injustice. En effet, la nouvelle bonification indiciaire - la NBI - touche les magistrats de l'ordre administratif, mais malheureusement pas ceux de l'ordre judiciaire. Entraînée par son bon coeur, la commission a donc voté unanimement un amendement pour étendre cette mesure à ces derniers, mais je ne vous surprendrai pas en vous disant que l'article 40 est venu contrarier cette belle intention.
    Etant extrêmement sensibles au principe d'égalité, comme le Conseil constitutionnel, nous avons néanmoins voulu que l'ordre administratif et l'ordre judiciaire soient logés à la même enseigne. Cet amendement vise donc à supprimer les crédits prévus pour financer la NBI pour les magistrats de l'ordre administratif, car je ne vois pas comment nous pourrions admettre que certains magistrats aient une prime et pas les autres. Je ne mets pas en doute le travail que font ceux de l'ordre administratif, mais j'affirme que ceux de l'ordre judiciaire sont réellement surchargés. Je ne comprendrais donc pas qu'il y ait une aussi grande différence de traitement entre les deux ordres.
    J'espère, monsieur le ministre, que soit vous nous laisserez voter cette réduction de crédits, soit vous vous engagerez à faire bénéficier les magistrats de l'ordre judiciaire de la NBI dès que vous le pourrez, c'est-à-dire le plus vite possible.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Albertini, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 95.
    M. Pierre Albertini, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. La commission n'a pas débattu de cet amendement, parce qu'il ne lui a pas été soumis. Je ne peux donc m'exprimer qu'à titre strictement personnel.
    Il part d'une excellente intention, qui est de mettre à égalité les avantages consentis aux magistrats de l'ordre administratif et aux magistrats de l'ordre judiciaire.
    L'évolution de ces dix dernières années est un peu préoccupante. Alors qu'on se trouvait quasiment à égalité s'agissant de l'ensemble du régime indemnitaire des magistrats des deux ordres de juridiction, cette égalité s'est rompue assez largement au bénéfice de ceux de l'ordre administratif. L'écart s'est aujourd'hui stabilisé à un niveau relativement élevé.
    Je ne veux pas entrer dans l'examen des mérites respectifs et des surcharges de travail des uns et des autres, mais je crois que la solution convenable consisterait, d'une manière plus positive que celle qui nous est proposée, à entreprendre un effort de rattrapage au profit des magistrats de l'ordre judiciaire. Revenir en arrière pour ceux de l'ordre administratif serait à la fois peu pertinent et difficilement compréhensible par les intéressés, auxquels une telle mesure s'appliquerait avec une brutalité qu'ils ne méritent pas.
    Avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Je remercie le président Clément pour avoir posé une très juste question, à laquelle je vais essayer de répondre le plus complètement possible ; je remercie également M. Albertini de ses observations.
    Une inégalité s'est créée progressivement, depuis quelques années, entre les deux ordres de juridiction s'agissant de leur régime indemnitaire. Mais il n'y a pas que la NBI qui soit en cause, monsieur le président : il y a aussi l'indemnité de fonction classique. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité, au-delà de la discussion budgétaire et après les premiers arbitrages budgétaires, revenir auprès de mon collègue Lambert pour obtenir qu'au cours de l'année 2003 l'indemnité de fonction des magistrats judiciaires soit augmentée de quatre points et passe de 37 à 41 %. Mais même à 41 %, il y aura encore un écart entre les judiciaires et les administratifs, qui sont à 45 %.
    Notre objectif commun est d'atteindre est 47,5 %, pourcentage comparable à celui des administrateurs civils, si ma mémoire d'ancien ministre de la fonction publique est fidèle.
    Il faut que les magistrats du judiciaire obtiennent la NBI. Mais je ne pense pas que ce soit encore possible, au moment où nous en sommes des discussions budgétaires. Je vous propose donc que nous considérions comme un objectif commun d'y parvenir en 2004.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Clément.
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois. J'attendais précisément ces explications, qui sont très intéressantes. Je me réjouis de voir qu'on pourrait arriver à la parité.
    Permettez-moi de vous faire part d'un souvenir d'ancien combattant : j'ai été pendant des années rapporteur des collectivités locales et, accessoirement, rapporteur des tribunaux administratifs, qui dépendaient alors du ministère de l'intérieur. Les primes accordées aux magistrats de l'ordre administratif étaient infiniment supérieures à celles accordées par le ministère de la justice. Rapport après rapport, j'ai obtenu au bout de cinq ans que les tribunaux administratifs relèvent de la justice, et donc quittent l'intérieur. Mais cet avantage différentiel de prime a été conservé. Je constate qu'il perdure - si, même, il n'a pas progressé.
    Je souhaite donc, monsieur le ministre, qu'avec l'aide du Parlement vous obteniez de Bercy, pour l'année prochaine, l'égalité de traitement entre les deux ordres.
    Monsieur le président, vous l'aviez compris, je retire mon amendement.
    M. le président. L'amendement n° 95 est retiré.
    Je mets aux voix le titre III.
    (Le titre III est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix le titre IV.
    (Le titre IV est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)
    M. le président. En accord avec la commission des finances, j'appelle maintenant un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 72.

Après l'article 72

    M. le président. M. Albertini, rapporteur spécial, et M. Méhaignerie ont présenté un amendement, n° 92, ainsi libellé :
    « Après l'article 72, insérer l'intitulé et l'article suivants :

    « Justice

    « Il est inséré après l'article 5 de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, un article 6 ainsi rédigé :
    « Art. 6.- A compter de 2004, le Gouvernement déposera chaque année sur le bureau de l'Assemblée nationale et sur celui du Sénat, à l'ouverture de la session ordinaire, un rapport ayant pour objet, d'une part, de retracer l'exécution de la présente loi et, d'autre part, d'évaluer les résultats obtenus au regard des objectifs fixés dans son rapport annexé et des moyens affectés à la réalisation de ces objectifs. Ce rapport sera préparé par une instance extérieure aux services concernés.
    « Cette évaluation portera notamment sur :
    « - l'instauration de la juridiction de proximité ;
    « - la réduction des délais de traitement et la résorption du stock des affaires civiles et pénales, des affaires relevant du contentieux prud'homal, du contentieux administratif et du contentieux général de la sécurité sociale ;
    « - les conséquences sur les services de justice de l'évolution de l'activité des forces de sécurité intérieure ;
    « - l'efficacité de la réponse pénale à la délinquance et en particulier celle des mineurs ;
    « - l'effectivité de la mise à exécution des décisions de justice ;
    « - le développement de l'aide aux victimes ;
    « - l'amélioration du fonctionnent et de la sécurité des établissements pénitentiaires. »
    La parole est à M. le rapporteur spécial.
    M. Pierre Albertini, rapporteur spécial. Cet amendement reprend mot pour mot le dispositif qui avait été intégré à la loi d'orientation et de programmation que nous avions votée au début du mois d'août, qui est devenue dans l'intervalle la loi du 9 septembre 2002, après avoir été amputée de certains éléments.
    Par un raisonnement qui ne m'a pas entièrement convaincu, ce qui est une manière de dire qu'il ne m'a pas convaincu du tout (Sourires), le Conseil constitutionnel a considéré que le dispositif d'évaluation ne pouvait figurer que dans une loi de finances. Compte tenu de l'autorité qui s'attache aux décisions du Conseil constitutionnel, la loi a été promulguée sans la disposition en question. Nous nous proposons donc de la reprendre dans la loi de finances pour 2003.
    Sur plusieurs bancs de cette assemblée, cette évaluation est considérée comme un élément très important de l'amélioration de l'efficacité du fonctionnement de la justice. Elle est d'ailleurs dans le droit-fil des contrats d'objectifs dont le garde des sceaux nous a parlé.
    Je vous propose donc mes chers collègues de reprendre purement et simplement le dispositif d'évaluation que nous avions déjà voté. Vous le voyez, je vous demande un effort symbolique. J'invoquerai simplement le parallélisme de vos votes, pour vous inviter à la cohérence.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à l'adoption de cet amendement, qui s'inscrit tout à fait dans la logique de la loi d'orientation et dans la logique des nouvelles modalités de gestion et de contrats par objectifs au niveau de chaque juridiction et de chaque service déconcentré de l'administration. Pour ma part, je ne vois que des avantages à l'adoption de cet amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 92.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de la justice.
    Nous allons suspendre la séance cinq minutes.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à vingt-deux heures dix, est reprise à vingt-deux heures quinze.)
    M. le président. La séance est reprise.

TOURISME

    M. le président. Nous abordons l'examen des crédits du secrétariat d'Etat au tourisme.
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie et du Plan. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat au tourisme, mes chers collègues, un peu plus d'un an après les effroyables attentats perpétrés à New York et Washington et à l'occasion de la première discussion budgétaire de la législature, l'heure est aux interrogations.
    Interrogation tout d'abord sur l'avenir des échanges touristiques internationaux et sur la pérennité des revenus qu'ils procurent à notre pays.
    Interrogation également sur la politique touristique qui devra nous permettre, à la fois, de conserver notre position dans la compétition internationale et d'offrir la possibilité de partir en vacances à ceux que les vicissitudes de la vie privent de ce bonheur dont jouit la majorité de nos compatriotes.
    Interrogation enfin sur le niveau des moyens qui vous seront assurés, monsieur le secrétaire d'Etat, pour mener à bien vos projets et poursuivre les avancées significatives réalisées par vos prédécesseurs.
    Sur le premier point, les prévisions les plus pessimistes ne se sont heureusement pas réalisées et notre pays, selon les premiers bilans, a plutôt bien résisté, notamment grâce aux mesures de soutien aux entreprises adoptées par le précédent gouvernement, ainsi qu'à l'effort de promotion exceptionnel réalisé en février dernier. Le nombre de visiteurs étrangers devrait se situer cette année, comme en 2001, aux alentours de 76,5 millions.
    Malgré le ralentissement du rythme d'accroissement de ces arrivées depuis l'an dernier, le montant de l'excédent provenant du tourisme, qui s'est élevé à 15,107 milliards d'euros en 2001, représente, depuis plusieurs années, la plus grande partie du solde positif de notre balance des paiements.
    Cependant, l'observation des chiffres sur plusieurs années montre, d'une part, que l'ampleur de notre excédent tient, en grande partie, au fait que les Français voyagent très peu hors de leurs frontières, et, d'autre part, que nos recettes ne sont pas aussi dynamiques que celles de nos voisins. Les recettes du tourisme français sont, en effet, passées du deuxième rang mondial en 1990, au troisième rang, derrière l'Espagne, depuis 1999.
    Comme vous l'avez récemment souligné, monsieur le secrétaire d'Etat, ces résultats sont fragiles. Le secteur du tourisme doit, lui aussi être soutenu. Les enjeux économiques sont en effet considérables. Avec plus de 200 000 entreprises employant plus de 900 000 personnes, les activités du tourisme ont à elles seules dégagé en 2001 un chiffre d'affaires de 54 millions d'euros. Entre 1999 et 2001, plus de 52 000 emplois ont été créés dans ce secteur. Le montant global des recettes touristiques s'élève à 97,1 milliards d'euros.
    Sur le plan intérieur, malgré les dispositifs mis en place ces dernières années, 16 % des Français, parmi lesquels de très nombreux jeunes, ne partent jamais en vacances. Dans l'immense majorité des cas, c'est le manque de moyens qui contraint ces personnes à rester chez elles. Les dispositifs en faveur des plus pauvres n'ont pu bénéficier, pour l'instant, qu'à un petit nombre, alors que les publics concernés se chiffrent en millions. Pour l'année 2002, 30 000 personnes auront pu bénéficier des séjours de la bourse solidarité vacances et 20 000 de ceux que finance l'Agence nationale pour le chèque vacances.
    Un élément essentiel du problème réside, par ailleurs, dans les possibilités de départ des familles au revenus moyens. Les aides à la pierre ont permis au secteur du tourisme social et associatif de maintenir une offre attractive à des tarifs raisonnables, mais les aides à la personne n'ont pas pu bénéficier du développement attendu de la loi de 1999 sur le chèque vacances. A cet égard, la commission des finances, sur ma proposition et celle de mon collègue Michel Bouvard, avait adopté un amendement modifiant l'ordonnance de 1982. Dans la continuité des dispositions adoptées l'an dernier, il visait à relever le montant du revenu fiscal de référence pour l'obtention des chèques vacances. Un autre amendement prévoyait un dispositif facilitant l'attribution des chèques-vacances aux salariés de petites entreprises, mais il n'avait pas été accepté parce qu'on n'y faisait pas référence aux revenus. J'espère que lors de la discussion, le 15 novembre prochain, nous aurons trouvé une solution et que cet amendement pourra être accepté. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, d'intervenir auprès de votre collègue des finances pour obtenir l'accord du Gouvernement.
    Pour faire face à ce besoin légitime d'épanouissement des individus et de cohésion sociale, pour renforcer l'attractivité de notre offre touristique, en améliorer la qualité, la commercialisation et la promotion, vous ne disposez, monsieur le ministre, que d'un très petit budget. Il est très petit par rapport au budget de l'Etat, dont il ne représente que 0,03 %, mais surtout par rapport à l'importance économique du secteur, qu'il devrait davantage soutenir. Cette modestie subsiste malgré la croissance régulière qu'il a connue pendant les cinq dernières années...
    M. Michel Bouvard. Les quatre dernières années !
    M. Augustin Bonrepaux. ... et dont le rythme n'est malheureusement pas conservé dans ce projet de budget.
    Les crédits du tourisme, fixés par le projet de loi de finances à 75,05 millions d'euros en moyens de paiement, enregistrent, cette année, une hausse de seulement 1,6 %. Cette progression bénéficie aux dépenses de fonctionnement, en particulier celles que l'administration centrale consacre à la réalisation des études dont elle a la charge, et surtout aux crédits d'investissement destinés à financer les contrats de plan Etat-régions et le nouveau programme de consolidation des hébergements du tourisme social. En revanche, les crédits d'intervention subissent une réduction de 4,5 %.
    Fixés à 22,45 millions d'euros, les dépenses de fonctionnement restent stables, à l'exception des dépenses de personnel, réduites de 2,5 %, et des dépenses de fonctionnement de l'administration centrale, dont la progression bénéficie principalement aux crédits d'études, en hausse de 28 %. Cet effort est destiné à financer l'amélioration des outils statistiques, notamment par la rénovation de l'enquête aux frontières, et à approfondir la connaissance des besoins et des attentes de la clientèle étrangère. Les autres dépenses de fonctionnement restent au niveau fixé l'an dernier, ce qui semble un peu insuffisant, notamment pour les délégations régionales dont un certain nombre devront faire face à un déménagement dans de nouveaux locaux.
    Les crédits d'investissement enregistrent, quant à eux, une forte évolution en crédits de paiement - 59 % -, beaucoup plus modérée en autorisations de programme avec une hausse de 2,4 %.
    Portée à 10,67 millions d'euros en autorisations de programme et à 7,39 millions d'euros en crédits de paiements, la dotation de l'article 10, relative aux contrats de plan Etat-régions, progresse de 53,7 %, ce qui, venant en complément des reports prévisibles des crédits non engagés lors des derniers exercices, devrait permettre, après une période de finalisation des projets, une réalisation des engagements pris par l'Etat envers les régions.
    Le secteur du tourisme bénéficie en effet, pour la génération 2000-2006 des contrats de plan, d'une enveloppe globale, avenants compris, de 203,82 millions d'euros.
    Ces contrats de plan doivent répondre aux priorités fixées par le secrétariat d'Etat, soit : la réhabilitation de l'immobilier de loisir, notamment par le dispositif des villages résidentiels de tourisme, l'organisation et la mise en oeuvre d'un dispositif de mesures stratégiques pour l'économie touristique, l'adaptation des entreprises de tourisme aux évolutions du marché, la concrétisation du droit aux vacances pour tous, le renforcement de l'attractivité des territoires fondée sur le développement durable.
    Les dotations de l'article 30, destinées à réaliser le nouveau programme de consolidation de l'hébergement de tourisme social, sont établies à 3,7 millions d'euros en autorisations de programme, en baisse de 10 %, et à 3,72 millions d'euros en crédits de paiement, ce qui représente une progression de 73 %. Ce dispositif, qui vise la rénovation de 350 établissements entre 2002 et 2006, n'a pas pu démarrer cette année, du fait de difficultés administratives. Vous avez, monsieur le secrétaire d'Etat, donné l'assurance aux associations concernées que ce retard serait rattrapé et que les crédits prévus cette année ne seront pas perdus. On ne peut qu'en être satisfait.
    En revanche, la baisse que subissent les crédits d'intervention, fixés à 41,47 millions d'euros contre 44,51 millions d'euros l'an dernier, ne laisse pas de susciter des interrogations et des inquiétudes. En effet, devant l'obligation où vous vous trouvez de gérer une certaine pénurie dans ce qui constitue la partie la plus importante, par son montant, de votre budget, il vous a fallu établir des priorités et répartir les sacrifices.
    Ainsi avez-vous accordé, comme vos prédécesseurs, la priorité des priorités à la promotion de la destination France. Constituant près de 68 % de l'ensemble des crédits du titre IV, la dotation consacrée à la promotion du tourisme français est, en effet, fixée à 28,1 millions d'euros, soit en hausse de 2,4 %. Outre la participation au fonctionnement de Maison de la France, ces crédits devront financer les actions de promotion menées en partenariat avec le secrétariat d'Etat. Vous avez exprimé votre souhait de dynamiser la représentation du tourisme français à l'étranger. Ne pensez-vous pas qu'il conviendrait d'assurer à Maison de la France un budget spécifique lui permettant d'assurer, sur la durée, une campagne d'image comparable à celles que mènent les pays concurrents ?
    Maison de la France a, en ce domaine, fait la preuve de son dynamisme. En 2002, grâce à un apport de l'Etat de 4 millions d'euros, n'a-t-elle pas réussi à mobiliser 9 millions d'euros auprès de ses partenaires pour financer un plan de communication générique, déclinée de façon spécifique sur les principaux marchés concernés ?
    Au titre des autres interventions, les crédits de l'article 10 constituant la dotation de l'Observatoire national du tourisme sont ramenés à 0,35 million d'euros contre 0,38 million d'euros en 2002. Les crédits de l'article 21, destinés aux interventions stratégiques, subissent, eux, une réduction de 23 %. J'aimerais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous apportiez à la représentation nationale un certain nombre de précisions sur la façon dont vous envisagez d'assurer avec ces crédits les objectifs que vous vous êtes fixés en matière de valorisation de l'offre touristique, de soutien aux fédérations et associations de tourisme et d'accès aux vacances des personnes en difficulté.
    En particulier, l'Agence française de l'ingénierie touristique, pour laquelle vous avez manifesté votre intérêt, et dont la compétence n'est plus à démontrer dans le domaine de l'aménagement touristique et de l'exportation des savoir-faire, pourra-t-elle compter sur un appui suffisant de l'Etat ? Comment, après les coupes opérées cette année par la régulation budgétaire, envisagez-vous de soutenir les actions des associations ? L'apport financier indispensable du secrétariat d'Etat à la bourse solidarité vacances sera-t-il pérennisé ?
    Enfin, pour 2003, le projet de loi de finances propose de consacrer, sur le titre IV, 7,25 millions d'euros au financement des contrats de plan.
    Par ailleurs, lors d'un récent déplacement dans le Gard, M. de Robien a annoncé la mobilisation d'une aide de 4 à 6 millions d'euros en faveur des installations touristiques sinistrées par les inondations de septembre dernier, ce dont je me félicite car le département a été durement éprouvé et le tourisme y joue un rôle économique de premier plan. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous apporter quelques précisions sur le financement de cette aide ? En particulier, la contribution qui serait demandée à l'Agence nationale pour le chèque-vacances ne conduit-elle pas à assigner à cet organisme des missions qui sont du ressort de l'Etat et à le détourner de sa vocation première : apporter un soutien au départ en vacances des plus démunis ?
    En conclusion, on peut regretter que la progression des crédits ne soit pas à la hauteur de ce qu'on pourrait espérer dans un secteur d'une si grande importance économique.
    Les crédits restent insuffisants au regard des efforts à accomplir pour poursuivre l'amélioration de l'offre touristique de notre pays et moderniser les outils d'intervention de l'Etat et des collectivités locales en faveur de ce secteur primordial de l'économie française. Toutes ces raisons m'avaient conduit à exprimer des réserves à leur égard, mais la commission des finances a cependant adopté les crédits du tourisme.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
    M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais tout d'abord vous féliciter pour votre nomination et vous adresser mes voeux chaleureux de succès dans votre mission. Elle sera, à n'en pas douter, passionnante. Le tourisme constitue non seulement la première économie de notre pays, mais aussi un moteur irremplaçable d'échanges, de communication, de culture et de bien-être pour nos concitoyens.
    Il intéresse - de façon, certes, encore trop inégale - la quasi-totalité du territoire national métropolitain comme l'outre-mer. De fait, peu ou pas de territoires en sont vraiement privés.
    C'est dire à quel point il est créateur et répartiteur de richesses et peut concourir à un aménagement harmonieux et solidaire de notre territoire. Et pourtant, aussi passionnante soit-elle, votre mission, vous le savez, sera difficile.
    D'abord, les budgets alloués à ce ministère ont de tout temps été trop modestes. Nous l'avons encore constaté pendant cinq ans, et ce malgré la croissance exceptionnelle que nous avons connue. Aujourd'hui, alors que celle-ci est ralentie et que les recettes de l'Etat se sont taries, nous pouvions craindre une baisse de vos crédits pour 2003. Ce ne sera pourtant pas le cas, puisque les moyens de paiement sont en augmentation de 1,95 % par rapport à la loi de finances pour 2002. Je tiens à vous en féliciter.
    Depuis 1999, le monde du tourisme a été bouleversé par une série d'événements internationaux tragiques, de catastrophes climatiques et écologiques et de circonstances nouvelles auxquelles nos professionnels ont été confrontés et ont dû s'adapter. La sinistre pollution de l'Erika a entraîné des dégâts considérables sur les côtes atlantiques, et il aura fallu le courage et la détermination exemplaires de nos concitoyens de Bretagne et des Pays de la Loire pour restaurer l'intégrité de leurs côtes.
    Le premier grand assaut mené par le terrorisme international aux Etats-Unis a profondément modifié les échanges mondiaux. Depuis, les vagues qui se succèdent, de Djerba à Bali, entretiennent un sentiment d'insécurité et d'incertitude pour l'avenir qui ne peut être sans conséquences, à terme, pour notre industrie touristique. Il convient d'ailleurs de noter qu'en 2001, pour la première fois depuis de nombreuses années, le nombre de visiteurs et les recettes générées par le tourisme international en Europe étaient en diminution.
    Quant au tourisme « franco-français », auquel nos agents de voyages portent une attention toute particulière depuis quelques années, on lui promettait, grâce à l'application des 35 heures, une forte croissance. En fait, sa bonne tenue est surtout la conséquence d'un moindre départ des Français à l'étranger.
    La mise en place de l'euro constitue un véritable révélateur de la pertinence des prix pratiqués. Désormais, les consommateurs peuvent aisément les comparer d'un pays européen à l'autre. Or cette situation ne peut que défavoriser nos professionnels, dont les charges sont en général plus lourdes que dans les pays concurrents, ce qui entraîne le risque d'afficher des prix plus élevés.
    Par ailleurs, la diminution de l'enneigement dans la moyenne montagne et le vieillissement de l'habitat dans l'ensemble des stations de sports d'hiver ont été les thèmes du dernier congrès de l'Association nationale des élus de la montagne, dont les élus réclament, à juste titre, plus d'aides de l'Etat.
    Les années 2003 et 2004 vont être déterminantes pour le secteur dont vous avez la charge. En effet, la réforme de la loi SRU, les textes consacrés à l'aménagement du territoire, à l'intercommunalité ou à la décentralisation vont constituer un véritable carrefour des enjeux pour l'avenir du tourisme.
    C'est dire l'ampleur de la charge qui vous incombe et l'intérêt que nous prendrons à vous accompagner dans votre démarche. A cet égard, les orientations et les propositions que vous avez déjà exposées dans le cadre de ce projet de budget pour 2003 sont de bon augure pour l'avenir.
    Au titre III, si les dépenses de personnel baissent de 2,5 % du fait d'un réajustement des rémunérations, les crédits alloués aux études bénéficient d'une augmentation favorable de 28 %.
    Le maintien du budget du service d'études et d'aménagement de la montagne lui permettra de poursuivre les travaux consacrés aux stations de sports d'hiver, qui subissent les effets conjugués des variations climatiques, d'un vieillissement des hébergements et sans doute aussi d'une politique d'extension excessive des domaines skiables durant les dernières décennies.
    Quant aux délégations régionales au tourisme, dont nous sommes nombreux à regretter les trop faibles moyens, leur avenir, vous nous l'avez dit, est lié aux conséquences, sur l'organisation déconcentrée de votre secrétariat d'Etat, de la future réforme de la décentralisation. Pour l'instant, leurs crédits ne sont que maintenus.
    Au titre IV, la baisse de 30 000 euros de la dotation à l'Observatoire national du tourisme ne l'empêchera pas de poursuivre sa mission de diffusion des données, d'animation des réseaux et de suivi de la conjoncture. Mais les moyens sont insuffisants pour qu'il renforce ses actions et revoie ses références méthodologiques, devenues inadaptées avec la disparition des frontières intracommunautaires et l'émergence de l'euro.
    Il faudra bien que la direction du tourisme engage une réforme à ce sujet, et c'est avec plaisir que j'ai appris que vous comptiez donner à l'inspection générale une mission sur ce thème. C'est aussi la raison pour laquelle j'ai demandé au président de notre commission que soit créée une mission d'information parlementaire sur les comptes du tourisme, comme je l'avais déjà demandé en 1993.
    A l'article 21, malgré la baisse des crédits, les moyens alloués à l'AFIT et à la bourse solidarité-vacances seront maintenus. Il en va de même pour les crédits destinés aux équipements et aux personnes handicapées, qui doivent pouvoir en bénéficier, et pour les crédits favorisant l'accès des jeunes aux vacances.
    En revanche, et c'est légitime, l'octroi de subventions aux 250 associations de tourisme sera revu après réexamen par la coordination nationale du tourisme social de leurs activités, dont certaines ne relèvent pas forcément d'un objet social.
    Le GIE « Maison de la France » se voit doté d'un budget de 28,1 millions d'euros, en augmentation de 2,68 %. La participation de l'Etat dépasse donc maintenant celles des partenaires, mais l'ensemble demeure globalement inférieur à l'engagement de pays concurrents, en particulier l'Espagne, qui y consacre le triple. A ce sujet, il serait souhaitable de définir contractuellement et pluriannuellement avec le GIE les politiques de promotion de la France.
    Je tiens à saluer votre initiative visant à mobiliser les ambassades françaises sur ce thème. Celles-ci peuvent, en effet, très largement démultiplier et qualifier les actions de promotion à l'étranger.
    Les crédits prévus pour les contrats de plan Etat-région diminuent au titre IV de 1,9 million d'euros du fait de la révision à mi-parcours des contrats de plan 2000-2006 qui permettra de réévaluer les besoins réels de crédits. Il est toutefois à noter que la somme de 1,5 million d'euros prévue pour 2002 a été reportée et viendra donc abonder les moyens mis à disposition en 2003. En revanche, au titre VI, ils bénéficient, en autorisations de programme, d'une augmentation de 7,6 % et en crédits de paiement, d'une forte croissance à 53,6 %. De nombreux projets finalisés pourront ainsi être mis en oeuvre dès 2003.
    Au total, vous avez donc fait le choix de privilégier l'investissement, et nous ne pouvons que nous en féliciter, tout comme nous saluons le programme de rénovation des hébergements touristiques à caractère social. Une demande forte des responsables des centres associatifs sera ainsi satisfaite. L'augmentation de leurs crédits de paiement est très substantielle, à 73 %. En autorisations de programme, la baisse de 10,2 % n'est que le résultat d'un retard pris en 2002 dans la mise en oeuvre du programme de consolidation des hébergements du fait de difficultés administratives.
    Mais au-delà de cette analyse budgétaire, je voudrais mettre l'accent sur un certain nombre de sujets qui posent des problèmes particuliers et sur la perspective de réformes qui engageront fortement l'avenir de notre tourisme national.
    Au plan social, les dispositions applicables aux chèques-vacances depuis le texte de loi dit « d'extension » de juillet 1999 sont, comme nous l'avions maintes fois souligné, peu conformes à leur objet social. L'excessive limitation du plafond des revenus fiscaux de référence et la complexité des procédures imposées aux PMI-PME de moins de vingt salariés ont constitué un frein à leur accès au dispositif. Pire, 70 000 fonctionnaires et près de 20 % des salariés des grandes entreprises qui en profitaient auparavant en ont été exclus. Il sera indispensable, pour rétablir équité et justice sociale, de réformer largement ce texte pour étendre son bénéfice aux fonctionnaires et à l'ensemble des salariés, mais, aussi, en ouvrir l'accès aux non-salariés et aux retraités.
    S'agissant des entreprises touristiques, qui sont soumises à la fois aux aléas de la conjoncture, à l'excès des charges et aux difficultés de mise en oeuvre des 35 heures, nous ne pouvons que nous réjouir des nouvelles dispositions que compte engager le Gouvernement : assouplissement du régime des heures supplémentaires, simplification des démarches administratives, exonération de charges sociales pour les jeunes en entreprise, aide à la création et à la transmission d'entreprises.
    Il en va de même pour l'engagement pris par le Premier ministre de défendre à Bruxelles le dossier de la baisse de la TVA sur la restauration classique. Le règlement de ce dossier sera d'autant plus important qu'il s'agit d'un secteur d'activité potentiellement créateur d'emplois. Ces emplois restant peu attractifs du fait de salaires insuffisants, la baisse de TVA pourrait permettre d'en améliorer le niveau, tout en corrigeant les effets de distorsion de prix par rapport aux pays concurrents appliquant des taux moins élevés.
    Quant aux emplois saisonniers, je tiens à rappeler encore une fois que le meilleur moyen d'en réduire le nombre, à terme, serait encore de tout mettre en oeuvre pour « désaisonnaliser » les activités touristiques.
    Il s'agit là cependant d'une politique au long cours qui nécessite un engagement continu des territoires, inspiré par le concept de création de nouvelle saison, à l'instar de ce que nous avons réalisé, à partir de 1997, dans le département du Var, avec déjà, je dois le dire, un réel succès.
    En attendant, une des solutions au problème de logement de ces saisonniers pourrait résider dans la création de villages de résidences saisonnières. Encore faudrait-il que les textes régissant le droit des sols permettent d'implanter à cet effet dans certaines zones des groupements d'habitations légères.
    Notre tourisme rural, qui constitue la spécificité de 80 % du territoire national, dispose d'un fort potentiel de développement. Mais il est aujourd'hui freiné par des normes mal adaptées aux besoins en hébergement.
    La pluriactivité, source de revitalisation de ces territoires, se heurte à une insécurité statutaire et juridique.
    M. Jean Launay. Encore l'insécurité ! Vous la mettez vraiment à toutes les sauces !
    M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. C'est une réalité.
    De plus, les règles sociales et fiscales qui lui sont appliquées sont peu propices à son développement. Un exemple en est le non-assujettissement à la TVA, que dénoncent beaucoup d'hébergeurs ruraux et qui n'est d'ailleurs pas conforme à la 6e directive européenne. Il faut également souligner l'inadaptation des dispositions du code rural imposant aux salariés deux dimanches de congé par mois, ce qui contrarie notablement la possibilité d'ouvrir le week-end.
    Sans conséquence notable sur les dépenses de l'Etat, une simple révision de ces textes permettrait de soutenir la pluriactivité et de satisfaire les besoins en nouveaux hébergements de l'espace rural. A défaut, et en raison de l'insuffisance d'hébergements marchands, nos campagnes continueront d'accueillir essentiellement des visiteurs à la journée ou résidant chez des parents ou des amis. Et on sait à quel point les retombées sont inférieures dans ces cas.
    En ce qui concerne le tourisme littoral, les démarches de « désaisonnalisation » sont lourdement remises en cause par l'application drastique par les services de l'Etat des dispositions régissant l'occupation du domaine public maritime. L'obligation de démontage des installations de plage en fin de saison estivale ne favorise ni la qualité de ces équipements ni le respect des normes d'hygiène et de sécurité.
    M. Roland Chassain. C'est vrai !
    M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. De plus, la disparition ou la fermeture systématique de ces établissements de la fin septembre au mois de mai ou juin, en supprimant des lieux d'accueil et de restauration très prisés par la clientèle hivernale, appauvrit une économie qu'il faudrait, au contraire, soutenir. Voilà un sujet que les élus littoraux mettront certainement à l'ordre du jour l'an prochain dans le cadre de l'ANEL.
    L'Association des maires des communes touristiques et des stations classées se préoccupe, à juste titre, du devenir de la dotation touristique et de la réforme des classements, maintes fois annoncée. Sur ce deuxième point, vous nous avez indiqué que les textes et leur application seraient revus dans le cadre de la réforme de la décentralisation. Nous espérons que les dossiers actuellement en cours et qui sont pratiquement achevés pourront faire l'objet d'une décision sans attendre ce terme.
    Quant à la dotation des communes touristiques, toujours identifiée dans sa « cristallisation », elle devra mieux prendre en compte les engagements financiers importants que réalisent ces communes pour demeurer les moteurs essentiels de l'attractivité touristique.
    C'est avec plaisir que nous avons appris que vous alliez confier à l'un de nos collègues parlementaires une mission sur les formations aux métiers du tourisme. Vous serez ainsi le premier secrétaire d'Etat au tourisme à prendre réellement en considération cette demande, maintes fois réitérée, d'inventaire et de participation à la restructuration de ces formations post-baccalauréat, très disparates, trop inégales, et la plupart du temps mal adaptées aux besoins car insuffisamment orientées vers les domaines spécifiques au tourisme.
    M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, il faut conclure.
    M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. Je conclus, monsieur le président, sur les perspectives qui s'ouvrent dans le cadre de la prochaine réforme dite de décentralisation.
    Les nouvelles compétences qui seront transférées aux régions ne pourront que fertiliser le territoire et valoriser les actions de développement touristique. Toutefois, pour que la destination France ne perde pas de sa lisibilité à l'étranger, il y faudra du « mieux d'Etat ». Une déconcentration de ses services tourisme, au plus près du terrain, pourrait permettre une meilleure efficience dans la conception, la coordination et la mise en oeuvre des politiques touristiques régionales, ainsi qu'une meilleure utilisation des crédits alloués non seulement au titre du tourisme mais encore de la culture, des transports, de l'environnement et de bien d'autres secteurs d'activité, qui peuvent concourir à la croissance et la durabilité de ce tourisme.
    En effet, si nombre d'équipements et d'aménagements dépendent de crédits autres que ceux du tourisme, seuls les spécialistes en ce domaine sont à même de prendre en charge, en connaissance de cause, leur valorisation touristique.
    C'est la raison pour laquelle j'ai espoir que cette prochaine décentralisation s'accompagne d'un substantiel renforcement des statuts et des moyens des délégations régionales au tourisme qui pourront seules jouer ce rôle de partenaires à la fois des élus régionaux et des acteurs de terrain.
    Je sais, parce que vous vous êtes déjà exprimé sur ce sujet, que nous ne sommes pas loin de partager ce point de vue. La concrétisation d'un tel projet poserait, j'en suis certain, les bases d'une industrie touristique plus performante, d'une organisation territoriale mieux équilibrée et d'un développement réellement durable.
    Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, notre commission a bien voulu suivre mon avis et a adopté le projet de budget que vous nous présentez. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est M. Léonce Deprez, premier orateur inscrit.
    M. Léonce Deprez. Monsieur le président, monsieur le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, monsieur le secrétaire d'Etat, alors que la mondialisation est devenue la donnée dominante de la vie économique et sociale, l'ambition du Gouvernement doit être de rendre la France gagnante dans la compétition mondiale de l'économie touristique. Pour y parvenir, l'économie touristique doit devenir l'un des objectifs essentiels de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire, ce qu'elle n'a pas été suffisamment jusqu'à cette année 2002. C'est pourquoi je veux ici, dans le cadre du débat budgétaire pour 2003 relatif à la politique nationale du tourisme, souligner ce qui me paraît essentiel après avoir vécu, comme député depuis 1986, l'insuffisance de la prise de conscience politique de la place croissante que l'économie touristique doit tenir dans la politique nationale et dans la vie de la nation.
    Il faut commencer par rappeler ce qu'est en réalité l'économie touristique. L'économie touristique, c'est le fruit d'un mariage entre la mise en valeur d'un territoire de vie et la mise en valeur d'un temps de vie. La politique nationale doit donc tendre, pour développer les activités, l'emploi et les ressources générées par la vie touristique, à mettre en valeur ces deux matières premières précieuses de l'économie touristique que sont le territoire et le temps. Or, d'une part, la France est le pays au monde qui, à l'aube de ce nouveau siècle, est le mieux à même de mettre à profit les atouts diversifiés que représente son territoire national. D'autre part, les temps libres des citoyens de France, d'Europe et du monde sont de plus en plus importants au cours d'une année et ne requièrent pas une loi pour les imposer. Il s'agit, dans une politique intelligente d'économie touristique, de faire de ces temps libres de millions de Français des temps de travail pour d'autres millions de Français. Pour que l'économie touristique puisse devenir source de développement durable, il faut d'abord qu'elle se prolonge pendant l'année, plus que le temps d'une saison, c'est-à-dire plus que deux mois à trois mois par an.
    Si nous voulons que l'économie touristique devienne source de travail respectable par ailleurs, c'est-à-dire source de travail non précaire, il faut que la politique gouvernementale se donne comme objectif d'en faire une économie touristique plurisaisonnière, source d'emplois durables.
    Autre idée-force que je veux exprimer au nom du groupe UMP : pour parvenir à traduire l'ambition du développement durable dans la réalité de la vie touristique, il faut faire de la politique du ministère du tourisme une politique qui colle à la peau du territoire français.
    Le territoire français est, en effet, par son histoire, sa géographie et les efforts de collectivités locales, doté - ce qui n'a été écrit nulle part depuis dix ans - de 2 198 communes à capacité d'accueil touristique. Ces 2 198 communes, qui ont mérité, durant le dernier demi-siècle, la reconnaissance par l'Etat de leur capacité d'accueil et d'attrait touristique, ont, au-delà des péripéties de changements de majorité et de textes législatifs et réglementaires, continué jusqu'à ce jour à bénéficier d'une dotation supplémentaire touristique insérée, depuis la loi du 31 décembre 1993, dans la dotation globale de fonctionnement assurée par l'Etat aux communes de France.
    Au nom des députés du groupe UMP avec lesquels je travaille depuis de nombreuses années, et en accord avec bien d'autres députés de différents groupes, puisque nous sommes nombreux à nous accorder sur la nécessité de cette réforme, je propose de mettre au grand jour, donc dans la transparence dont on parle tant aujourd'hui, la fonction économique et sociale des communes bénéficiant de la dotation touristique supplémentaire.
    Les communes bénéficiant de cette dotation représentent sur la carte de France - DOM-TOM compris - autant de pôles territoriaux d'économie touristique à partir desquels se sont déployés depuis cinquante ans des investissements professionnels privés, hôteliers, commerciaux, artisanaux, entraînés, stimulés par les investissements publics. Pour développer l'économie touristique en France durant les douze mois de l'année, il faut commencer par labelliser, sous le nom de « station touristique », ces 2 198 pôles territoriaux générateurs de vie touristique, donc d'investissements et d'emplois pour les habitants de ces communes et des communes voisines dans chaque département de France.
    En affichant clairement son effort financier en direction de ces 2 198 communes, effort financier qui représente 1,18 milliard de francs en 2002, soit 180 millions d'euros, l'Etat ne laisserait pas croire que le budget du tourisme se limite aux malheureux 75 millions d'euros annoncés pour le budget 2003. Nous cesserions de cautionner et de prolonger chaque année une inadmissible erreur économique s'il était décidé de faire renaître la labellisation de ces communes touristiques sous le nom de « station touristique ».
    En effet, l'attractivité tant souhaitée du territoire français passe, pour une part, par les efforts d'investissements publics et privés réalisés au sein de ces collectivités à vocation touristique. Pour répondre aux critères de capacité d'accueil et d'attractivité qui conditionnent la dotation supplémentaire de l'Etat, d'autres communes ou groupements de communes à vocation touristique doivent pouvoir ambitionner de se donner une vie touristique et de participer ainsi au développement de l'attractivité du site France. Pour mieux assurer l'amortissement des investissements, les responsables publics et professionnels qui les réaliseraient seraient amenés à rendre espaces et équipements attractifs et créateurs d'emplois, accueillants et vivants tout au long de l'année. Ce qui se fait, ce qui se vit dans le Pas-de-Calais, messieurs les ministres, peut et doit se faire dans l'ensemble des régions de France.
    Autre avantage de cette organisation territoriale transparente de l'économie touristique : en partant de ces 2 198 communes labellisées « stations touristiques » en quatre catégories correspondant aux atouts du territoire français, stations thermales, stations de montagne, stations littorales, stations villes d'art et d'histoire, la législation des stations classées, qui remonte au 24 septembre 1919, complétée par celle du 3 avril 1942, pourrait être ainsi facilement adaptée à notre époque.
    Deviendraient très simplement et très logiquement « stations classées » les stations touristiques méritant le classement à partir de critères très objectifs et très rigoureux toujours en application aujourd'hui. Ces stations classées, qui sont près de 500 en France et représentent des pôles d'excellence du tourisme français, pourraient ainsi connaître la pérennité de leur labellisation. Parmi ces 500 stations classées, les plus rayonnantes d'entre elles qui ont mérité l'installation d'un casino ouvert aux jeux, par dérogation au droit commun, pourraient continuer à renforcer leur pouvoir d'attraction et d'activité touristique quatre saisons en bénéficiant de la ressource financière résultant du prélèvement des jeux dans le strict respect de la législation actuelle relative aux casinos.
    A la labellisation par l'Etat de ces pôles territoriaux que seraient à deux niveaux les stations touristiques et les stations touristiques classées, une politique gouvernementale nouvelle et dynamique devrait ajouter la labellisation, c'est-à-dire la reconnaissance de la fonction économique et sociale de ces autres pôles d'économie touristique très rayonnants que sont à l'année les cinquante à quatre-vingt villes de congrès de France. Villes de congrès et de tourisme d'affaires dont les métropoles régionales sont, par nature, une des composantes principales et dont le chiffre d'affaires par visiteur génère trois fois plus de revenus que le tourisme de loisirs. Ces villes de congrès déjà regroupées par la voie associative depuis trente ans sont facilement susceptibles d'être labellisées et reconnues comme des pôles d'économie touristique sur la carte de France, tant leurs équipements publics en centres de congrès et leurs équipements professionnels privés en capacités hôtelières sont très concrètement cernables et tant le partenariat entre efforts publics et efforts privés est indispensable pour attirer les clientèles très ciblées que sont celles de congrès, de salons professionnels, de colloques et de conventions de caractère national et international.
    Enfin, se dessinent progressivement sur la carte d'une France riche de ses espaces ruraux les espaces de solidarité économique et sociale appelés pays depuis la loi Pasqua qui les a conçus en espaces de projets et de développement durable. Ces espaces constituent une importante nouvelle base d'une vie touristique potentielle à l'année pour ce nouveau demi-siècle. Les communautés de communes associées pour concevoir et porter les projets de développement de ces pays doivent être incitées par une labellisation par l'Etat à se doter d'un office du tourisme intercommunal à l'échelle des territoires qu'ils représentent.
    En intégrant les attraits des hébergements et des espaces ruraux dans les atouts du tourisme français reconnus par l'Etat, le Gouvernement entraînerait les régions à favoriser l'insertion des projets touristiques des pays dans le cadre à pérenniser, des contrats de plan Etat-région.
    Dernière idée force, cette politique de mise en valeur et de valorisation de notre territoire que nous proposons impose de toute évidence un esprit nouveau, un esprit partenarial et une action partenariale étroite entre le pouvoir public local et les entreprises privées.
    L'esprit partenarial et l'action partenariale doivent trouver leur traduction progressivement (et de plus en plus) dans ces organismes d'économie partenariale que sont les offices de tourisme et les établissements publics industriels et commerciaux créées par la loi de 1964 et dont la loi de 1992 doit stimuler la création.
    Si nous voulons privilégier la croissance des marges plutôt que celle des volumes, en relevant le niveau de l'offre pour favoriser les séjours touristiques et ne pas être, au plan international, qu'une terre de tourisme de passage, l'économie touristique ne peut être qu'une économie partenariale.
    Dans le domaine de la vie touristique, ce sont en effet les investissements publics en matière d'aménagement d'espaces et d'équipements publics générateurs d'activités sportives, culturelles, de congrès ou de mise en forme physique qui entraînent et stimulent les investissements privés, en matière d'hôtellerie et d'équipements ouverts à des activités commerciales et artisanales. Et ce sont ces investissements qui permettent de motiver des séjours au fil des quatre saisons de par l'attrait de l'environnement et des événements que ces équipements permettent.
    Cette économie touristique partenariale, basée sur le territoire et sur les quatre saisons de l'année est d'autant plus digne d'un soutien de l'Etat et des régions dans le cadre des contrats de plan Etat-région qu'elle est générée par un fourmillement de PME attachées aux pôles et aux espaces touristiques. Il faut savoir, en effet, que les grandes entreprises ne représentent que 20 % environ du chiffre d'affaires du tourisme.
    Dans un souci de respecter mon temps de parole, monsieur le président, je conclurai en rappelant les voies que je propose pour aboutir à ces objectifs, après un nombre d'années d'expériences vécues sur le terrain et en cette assemblée. Je suis heureux que M. de Robien soit à votre côté, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est le signe que la politique d'économie touristique doit être de plus en plus interministérielle. Votre vocation, monsieur le secrétaire d'Etat, même avec l'accord de M. de Robien, qui, j'en suis sûr, a l'intelligence du problème, est que le ministre du tourisme de demain - peut-être vous - devienne délégué auprès du Premier ministre chargé de l'économie touristique...
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Et moi alors ? (Sourires.)

    M. Léonce Deprez. ... afin d'en faire l'une des forces d'avenir de l'économie nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Monsieur Deprez, n'ouvrons pas une discussion sur l'organisation du Gouvernement ! (Sourires.)
    La parole est à M. Jean Launay.
    M. Jean Launay. Monsieur le secrétaire d'Etat, en affichant dans le cadre de la présentation du budget 2003 de votre département ministériel vos priorités : développer la promotion de la France à l'étranger, aménager les structures touristiques en partenariat avec les régions et favoriser l'accès aux vacances, vous avez fait le choix d'un ripolinage de façade qui masque mal les orientations libérales qui guident le Gouvernement auquel vous appartenez.
    Certes, et nous nous en sommes réjouis lors de l'examen du budget en commission, la mobilisation plus grande des crédits de paiement dans la phase active des contrats de plan Etat-région est une chose positive.
    Certes, le maintien du plan « patrimoine » confirme le respect de la parole de l'Etat dans ce domaine.
    Certes, la dotation de Maison de la France, chargée de la promotion de l'image touristique de notre pays, est en augmentation de 734 000 euros.
    Mais nos interrogations et nos inquiétudes sont grandes dans de nombreux domaines.
    D'abord, la stabilité globale de votre budget. Elle constitue - M. Bonrepaux l'a dit - une rupture avec la précédente législature, qui avait enregistré une progression de 52,18 % des moyens d'engagement entre 1998 et 2002 et de 43,41 % des moyens de paiement dans la même période.
    Ensuite, les actions en faveur de l'aide au départ et en particulier la mobilisation des moyens d'accueil et de transport à destination des populations défavorisées, dans le cadre de la lutte contre l'exclusion, ne sont lisibles ni dans le dossier budgétaire, ni dans le bleu. Et le toilettage, annoncé en commission, des subventions accordées aux associations en charge du tourisme social nous laisse perplexes et soucieux de voir à qui elles vont s'appliquer.
    Comment prétendre poursuivre une politique en faveur du tourisme pour tous, alors que 37 % de la population française ne part pas en vacances ?
    M. Michel Bouvard. Cela a empiré lorsque vous étiez au pouvoir !
    M. Jean Launay. Comment prétendre financer le plan Qualité France ? Où est passée la priorité du développement et de l'aménagement touristique du territoire quand on observe le recul des crédits inscrits au titre IV des interventions publiques, et en particulier la baisse de 30 %, à 5,6 millions d'euros, des interventions stratégiques ?
    Concernant les moyens des services, l'abondement des crédits d'études permettra-t-il de faire une recherche réelle sur les comportements, la démographie et la sociologie touristique, pour établir une véritable prospective afin de localiser les projets à soutenir ? Parallèlement, la baisse des moyens en personnel contraint dès aujourd'hui vos budgets à venir.
    Enfin, le dogmatisme du Gouvernement auquel vous appartenez, contre les emplois-jeunes, nous conduit à nous interroger sur la poursuite des opérations et projets lancés au niveau des collectivités et du secteur associatif et sur l'avenir des 8 000 jeunes entrés dans ce dispositif dans le secteur du tourisme.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, l'examen du budget est aussi l'occasion de nouer le dialogue sur quelques questions de fond. A ce titre, le débat sur la décentralisation en fait pleinement partie.
    J'ai rendu, au mois d'octobre 2001 à votre prédécesseur, Jacques Brunhes, un rapport demandé par Michelle Demessine sur le rôle de l'Etat et des collectivités territoriales dans l'organisation du tourisme en France. Ce rapport a également fait l'objet d'une communication au Conseil national du tourisme en novembre 2001. Je me réjouis de la position que vous avez exprimée, dans Les Echos du 19 septembre 2002, s'agissant de la nécessaire impulsion étatique pour contenir la dynamique qui concentre 80 % des flux touristiques sur 20 % du territoire. Car j'ai la conviction que, face aux dérives d'une mondialisation mal maîtrisée, le tourisme peut contribuer à promouvoir le respect de l'environnement, le rapprochement des peuples, la valorisation des cultures et du patrimoine, toutes choses que l'on trouve sur nos territoires ruraux et compagnards.
    Mais si, dans le cadre de la redéfinition des compétences de chacun, vous considérez normal que l'Etat conserve certaines de ses fonctions régaliennes, quelle sera la réalité de celles-ci si, au sein même du Gouvernement, des ministres - et même le premier d'entre eux - ne rêvent que de « faire la peau » à votre ministère ? S'exprimant sur les ondes d'une radio périphérique - c'était en janvier, il n'était pas encore Premier ministre -, Jean-Pierre Raffarin a parlé du tourisme comme d'un ministère inutile. Il ne citait d'ailleurs que le vôtre, monsieur le secrétaire d'Etat, s'apercevant vite du caractère risqué de sa communication... Alors, monsieur le ministre, méfiez-vous !
    Le débat sur la décentralisation de votre ministère est un « bazar », pour reprendre une expression chère au président de notre assemblée, et il l'est encore plus si on le mêle - ce qui est largement le cas aujourd'hui - à ceux sur la déconcentration et sur la réforme de l'Etat.
    Dans le secteur du tourisme, l'activité est essentiellement d'initiative privée et les compétences sont largement décentralisées au niveau des différents échelons territoriaux.
    Attachez-vous, monsieur le ministre - et nous vous y aiderons - à préciser les missions que l'Etat doit absolument garder pour garantir la cohérence et l'égalité des chances dans différents domaines, comme celui de l'analyse économique et statistique : nous avons besoin de statistiques nationales et l'Etat doit être le fédérateur des chiffres et des données en étant le garant de la méthode.
    Il doit également s'attacher à la définition des normes : celles-ci doivent être lisibles pour tous nos visiteurs et simplifiées par rapport à la qualité des prestations.
    Il doit encore s'attacher à l'établissement des classements, qui doivent conserver une harmonie sur le territoire national. Plus généralement, la régulation des professions et des activités doit rester de la compétence de l'Etat : je pense, en particulier, aux licences des agences de voyages.
    Il doit aussi s'attacher à la promotion de l'image de la France car, pour éviter le risque d'avoir un tourisme à deux vitesses, il faut que l'Etat ait un discours neutre et s'attache à mettre en conformité l'amélioration de la qualité et le coût demandé.
    Il doit s'attacher de plus à la bonne répartition de la croissance et de l'emploi sur l'ensemble du territoire. Le tourisme est créateur d'emplois. L'Etat doit garder le moyen, par le biais des CPER - les contrats de plan Etat-régions -, de requalifier les grands espaces touristiques et nourrir le tissu des arrière-pays, souvent ruraux et de montagne.
    Il doit s'attacher enfin à l'amélioration des conditions d'emploi et de travail. Celle-ci est indispensable pour les 800 000 salariés directement employés dans le secteur, en particulier pour les saisonniers.
    Je conclus, monsieur le président, monsieur le ministre, en souhaitant l'établissement d'un schéma national d'aménagement touristique à même de nous donner les moyens d'un véritable rééquilibrage territorial de la fréquentation touristique, en vous rappelant qu'au-delà de sa dimension économique - 7 % du produit national brut - le tourisme est un facteur de progrès social, et en regrettant que le budget pour 2003 s'y rattachant ne conforte pas les fonctions d'impulsion et de régulation que l'Etat se doit d'assurer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.
    M. Jean Lassalle. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes les ministres de l'amour de la France, à la fois de l'amour des Français pour leur patrimoine culturel hors du commun, pour la qualité de leurs paysages, pour leur gastronomie, pour leurs sites et pour l'idée qu'ils se font eux-mêmes de leur pays, et aussi de l'amour que portent à la France les pays du monde entier, qu'il s'agisse de la France métropolitaine ou de la France au-delà des mers.
    La France est la première destination touristique du monde avec un peu plus de 76 millions de touristes reçus chaque année, mais elle n'est qu'à la troisième place pour les recettes, avec 25 milliards d'euros, ce qui n'est déjà pas si mal pour notre balance des paiements. Cela montre - et cela a déjà été dit - que nous servons peut-être moins bien nos visiteurs que dans d'autres pays touristiques, tels que les Etats-Unis ou l'Espagne, par exemple.
    Le budget du tourisme, monsieur le ministre, représente, si je ne me trompe, 0,03 % du budget de l'Etat et 0,2 % de votre grand budget de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Vous souhaiteriez naturellement davantage. Nous aussi. Et vous ferez de votre mieux, nous n'en doutons pas un seul instant, pour y parvenir car il y a beaucoup à faire. J'ai dit, en commençant, que le tourisme était le ministère de l'amour. Or l'amour, vous le savez, flétrit vite si on le délaisse ! (Sourires.)

    M. le président. Ah !
    M. Jean Lassalle. Il ne faudrait pas, monsieur le président, que cela arrive. (Sourires.)
    C'est la raison pour laquelle je me permettrai de vous suggérer deux directions à suivre.
    La première est, bien entendu, d'assurer la promotion du tourisme en France. L'effort que vous avez fait, s'ajoutant à celui qui a été fait par votre prédécesseur, va tout à fait dans le bon sens.
    M. Jean Launay. Il est pourtant moindre que par le passé !
    M. Jean Lassalle. L'augmentation de 2,8 % du budget de Maison de la France indique bien la voie que vous tracez. Mais je pense qu'il faut aller au-delà. Il faut que notre pays investisse davantage dans un secteur qui constitue une des sources sûres de rentrées de devises.
    Ma seconde suggestion est de simplifier encore les procédures. La loi - réussie - de 1992 a bien positionné les centres d'intervention - Etat, région, département, commune, communauté de communes - en laissant une large part d'initiative aux collectivités territoriales. Mais notre système reste quand même très compliqué. Les financements sont souvent très longs et très difficiles à mettre en oeuvre et ils découragent parfois les maîtres d'ouvrage qui ont un peu l'impression d'y perdre leur latin. Une simplification de tout cela s'impose d'autant que les financements communautaires arrivent parfois tard et ne sont pas si faciles à négocier que cela.
    Votre désir de clarifier le label France me paraît tout à fait légitime. Trop de labels, en effet, nuisent au label. Il faut un label France de qualité qui puisse se décliner de manière différente suivant les activités de tourisme que notre si beau pays est capable de proposer. Mais, là encore, il faut veiller à ce que tout soit bien organisé.
    Pour le reste, il faut s'appuyer sur nos valeurs sûres et, en premier lieu, sur le tourisme de patrimoine. Dans ce domaine, nous ne sommes pas mauvais.
    Il faut également travailler, cela a été dit, notre tourisme rural. Cette idée est très chère à mon coeur. La plupart des pays font actuellement des efforts remarquables pour promouvoir ce que l'on appelle un éco-tourisme et je fais partie de ceux qui pensent que le tourisme pourrait constituer une source de revenus très intéressante pour les agriculteurs, les artisans et les commerçants et tous ceux dont je parlais hier soir, qui se sentent un peu rejetés et abandonnés.
    De plus, cela donnerait du travail aux femmes. Vous savez, être l'épouse d'un paysan dans un petit village, de plaine ou de montagne, est parfois un peu ennuyeux. Il en est de même, d'ailleurs, quand ont est l'épouse d'un commerçant ou d'un artisan.
    M. le président. Ou d'un député, parfois...(Sourires.)
    M. Jean Lassalle. Oui, parfois, monsieur le président.
    Le fait de lui proposer une activité qui permette des échanges l'oblige à s'ouvrir ainsi que sa famille sur l'extérieur et puisse aboutir à la création de liens d'amitié durables pourrait être une chance pour nos territoires.
    Mais tout cela s'organise...
    Je commence par l'hôtellerie. Ce secteur, vous le savez, messieurs les ministres, attend avec impatience l'abaissement de la TVA de 19,6 % à 5,5 %. Si vous y parvenez, vous ferez un tabac, je peux vous l'assurer ! Cette mesure est très attendue et elle est vraiment nécessaire.
    La petite hôtellerie se languit. Elle n'arrive pas à rémunérer décemment la main-d'oeuvre dont elle dispose, les emplois étant le plus souvent saisonniers, et non pas pérennes. Elle connaît également des difficultés de transmission parce que les charges sont trop lourdes et les démarches trop compliquées. Au fond, les gens n'y croient plus. Elle a besoin d'un nouveau souffle.
    Il en est de même pour les gîtes ruraux et l'accueil à la ferme, où il faudrait injecter à la fois un peu plus de matière grise et de savoir-faire, pour aider à la conceptualisation des projets, et, bien sûr, un peu plus d'argent. Les communautés de communes rurales ont souvent des projets en matière d'aménagement touristique mais elles ne peuvent pas les mener à bien, ou même les concevoir clairement, parce qu'elles n'ont pas les deux ou trois personnes qu'il faudrait pour cela. Je vous assure que ce serait un investissement très rentable que de leur donner les moyen de mettre en oeuvre leurs projets.
    Je n'oublie bien évidemment pas le tourisme de montagne.
    M. Martial Saddier. Oui !
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. Jean Lassalle. Beaucoup de stations de ski souffrent du fait que, depuis quelque temps, il neige un peu moins. Mais ça ne va durer. Il va bientôt neiger de nouveau, peut-être même cette année... (Sourires.) C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, il faut les aider à s'équiper. La neige sera de nouveau au rendez-vous et nos stations ont vieilli...
    Que dire de notre tourisme social, qui a été, pendant un certain moment, le fleuron de la France ? Ses structures ont considérablement vieilli, et nous n'avons pas les moyens de les remettre en état : cela coûte une fortune et on n'a jamais le bon financement au bon moment. C'est vraiment dommage, parce qu'il y a beaucoup à faire dans ce domaine. Tout le monde a droit à des vacances. Ce serait pour nous une source d'animation et de revenus.
    Voilà quelques éléments que je me permets de suggérer au nom de mon groupe, qui, bien entendu, votera votre budget.
    Et puisque vous êtes les ministres de l'amour de la France, aimez-la beaucoup, aimez son tourisme, aidez-le à se développer. Si le tourisme va, la France ira ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Merci, monsieur Lassalle. La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'Encyclopædia Universalis définit le tourisme comme l'expression d'une mobilité humaine et sociale fondée sur un excédent budgétaire susceptible d'être consacré au temps libre passé à l'extérieur de la résidence principale.
    Force est de constater, malheureusement, que bon nombre de personnes ne disposent pas aujourd'hui de cet « excédent budgétaire » et que, bien que l'instauration des congés payés et les premiers départs - spectaculaires - en vacances des travailleurs aient eu lieu en 1936, il y a - hélas ! - encore 35 % de la population qui ne part en vacances en 2002 !
    Prenant conscience de cette injustice, le gouvernement précédent s'était attaché à poser les premiers jalons d'un développement du tourisme social, d'un tourisme pour tous, avec la création de « la bourse solidarité vacances » et l'extension du champ d'application des « chèques vacances ». Les effets de ces mesures ont été significatifs et ont permis une augmentation non négligeable des départs en vacances.
    Si ces résultats sont à saluer, les efforts conduits pour un droit aux vacances pour tous doivent impérativement être poursuivis et renforcés, car l'objectif est encore loin d'être atteint. Pour s'en approcher, il convient de conduire une politique sans faille, sans relâche et de longue haleine.
    Votre budget pour 2003, monsieur le ministre, en rupture avec les orientations de vos prédécesseurs, n'est pas à la hauteur de cette ambition, même si d'astucieux artifices budgétaires tendent à masquer sa baisse réelle.
    Les dépenses ordinaires diminuent d'un peu plus de deux millions d'euros, et le total des moyens d'engagement est ramené de 80,6 à 78,3 millions d'euros.
    Le titre IV consacré aux interventions publiques est en baisse de plus de 3,5 millions d'euros. Cette baisse affectera gravement les dispositions visant les politiques d'un tourisme pour tous. Les annulations de crédits que votre gouvernement a décidées pour 2002 ont d'ores et déjà pénalisé les associations de tourisme social. Hélas ! je crains que vous ne continuiez dans cette voie.
    Nous constatons que 9 % du budget total est consacré au tourisme social et 45 % à la promotion de la France ! Ainsi donc, sans ambiguïté, votre gouvernement relâche les efforts en faveur d'un « droit aux vacances pour tous ». Il ne faut donc pas vous étonner que, sans ambiguïté, nous nous inscrivions contre ces orientations.
    Permettez que je rappelle, à ce propos, notre attachement au caractère public de l'Agence nationale des chèques vacances. Je le fais avec conviction car une rumeur de privatisation court. Comme il n'y a pas de fumée sans feu et que nous connaissons les appétits de la chaîne Accor, nous avons quelques craintes à ce sujet. Il vous plaira sans doute de nous rassurer.
    Les crédits du titre IV consacrés aux contrats de plan Etat-régions sont également en baisse de plus de 20 %. Cette baisse est une remise en cause de la parole de l'Etat. Elle est alarmante pour le devenir du tourisme dans nos régions. Les inégalités entre celles-ci étant flagrantes, vous comprendrez que nous désapprouvions cette décision.
    J'ajoute que le projet de loi du Gouvernement sur la décentralisation nous fait craindre, non par supposition mais par anticipation, une nouvelle aggravation des inégalités entre les régions et l'abandon par l'Etat d'une politique sociale permettant l'accès aux vacances pour tous. En effet, ce projet de loi actuellement discuté au Sénat nous conduit à nous interroger sur l'avenir de la politique touristique et sur l'existence même du secrétariat d'Etat au tourisme.
    L'article 4 du projet de loi constitutionnelle sur l'organisation décentralisée de la République prévoit que les régions et d'autres collectivités locales pourront se voir confier de nouvelles compétences jusque-là exercées par l'Etat. Le tourisme est, dans ce nouveau cadre, en première ligne.
    Vous avez affirmé, monsieur le ministre, lors de votre audition, le 16 octobre dernier, devant la commission des affaires économiques, qu'en ce qui concerne la décentralisation, le principe de subsidiarité prévaudra et conduira l'Etat à conserver plusieurs missions essentielles telles que la promotion de la France à l'étranger ou le lancement d'opérations de coopération. L'Etat conservera également la responsabilité de la définition des normes de qualité et de celle des statistiques touristiques, et il assurera l'harmonisation de l'aménagement du territoire.
    Mais qu'adviendra-t-il de la politique sociale qui a pour vocation de concrétiser le droit aux vacances pour tous les Français ? Qu'adviendra-t-il du soutien au développement de l'emploi et de l'industrie touristique ? De quels moyens le secrétariat d'Etat au tourisme disposera-t-il pour gommer les grandes disparités entre les régions ?
    Ces interrogations essentielles mériteraient des réponses sans aucune ambiguïté. Je ne suis pas sûr que Bercy vous en donne les moyens.
    M. Michel Bouvard. Vous savez ce que c'est...
    M. Michel Vaxès. Nous redoutons, dès aujourd'hui, le moment où le Gouvernement remettra en cause la légitimité et l'efficacité d'un ministère dédié au tourisme pour, au final, nous annoncer que le tourisme n'a pas besoin de ministère... D'ailleurs, le Premier ministre a déjà dévoilé ses intentions dans sa « nouvelle gouvernance ».
    Vous comprendrez que, dans ces conditions, le groupe des député-e-s communistes et républicains ne puisse approuver votre budget.
    M. Edouard Landrain. Tiens, tiens !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Descamps.
    M. Jean-Jacques Descamps. Je vous remercie, monsieur le ministre de l'équipement, pour votre présence. Elle témoigne de votre intérêt pour un secteur souvent considéré comme secondaire dans un portefeuille aussi important que le vôtre.
    Je vous félicite, monsieur le secrétaire d'Etat, pour le dynamisme dont vous avez fait preuve dès votre prise de fonctions. Pourtant la situation n'était pas facile compte tenu que vous arriviez en pleine saison touristique, sous un temps médiocre et, surtout, dans un contexte marqué par les dramatiques événements que nous avions connus et en pleines turbulences internationales, notamment en Asie du Sud-Est.
    Ayant eu la chance et l'honneur d'exercer vos fonctions, je sais combien le montant du budget de votre secrétariat d'Etat est frustrant, puisqu'il ne représente qu'une très modeste part de votre action pour sensibiliser aussi bien les acteurs du tourisme que le reste de la population à l'importance que représente cette activité dans l'économie nationale mais aussi, et peut-être surtout, dans l'évolution de notre société, au plan social et culturel en particulier.
    Dans le peu de temps qui m'est imparti, je ne m'attarderai pas sur les chiffres, mais permettez-moi d'insister sur quelques points de la politique que vous avez à mener au plan national, sachant que l'essentiel de la politique du tourisme se fait sur le terrain. J'ai eu l'occasion de m'en apercevoir, ayant fait le parcours un peu à l'envers : après avoir été à la tête, j'ai vu combien c'était difficile d'être sur le terrain.
    Nous avons besoin de votre appui.
    D'abord, vous devez contribuer à améliorer l'offre touristique dans notre pays. Elle est évidemment importante et explique que nous soyons déjà le premier pays réceptif du monde, mais elle peut s'améliorer fortement. Nous avons de nombreux efforts à faire en matière d'accueil. L'incidence regrettable de la réduction du temps de travail ne favorise pas la souplesse d'ouverture de nos restaurants, de nos monuments historiques. Essayons au moins de faire en sorte que, lorsqu'ils sont ouverts, l'accueil soit souriant. Les campagnes de sensibilisation sur ce point, l'opération « bonjour » en particulier, doivent être accentuées.
    La compétitivité des prix est une autre préoccupation, et j'espère que nous arriverons enfin à baisser la TVA sur la restauration, mesure essentielle pour permettre un meilleur rapport qualité-prix.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. Jean-Jacques Descamps. Enfin, notre offre touristique est trop concentrée sur les bords de mer, les grands sites touristiques et la montagne. Or la France profonde, faite de nombreuses communes moyennes qui ne sont pas des stations classées, des communes touristiques, etc., représente néanmoins une importance considérable en matière de trésors patrimoniaux, culturels, historiques, gastronomiques. Il faut donc développer la capacité de réception dans la France de l'intérieur, ce que j'avais appelé il y a quelques années, dans un rapport rédigé à la demande de Bernard Bosson, le tourisme de pays. C'était l'une des premières concrétisations de la notion de pays.
    Nos visiteurs, comme d'ailleurs une large partie de notre population, doivent s'habituer à faire les détours qui s'imposent pour allonger leur séjour de façon utile et agréable et contribuer ainsi au développement de notre ruralité, les plus beaux détours de France, y compris d'ailleurs à Saint-Laurent-du-Maroni. (Sourires.)
    Le deuxième point sur lequel je voudrais insister, c'est la promotion à l'étranger.
    Ayant été à l'origine de la création de la Maison de la France, vous comprendrez que je me préoccupe non seulement de sa bonne santé mais aussi de son efficacité. Celle-ci passe par un professionnalisme toujours renouvelé de ses agents en matière de marketing et par une très active collaboration de l'Etat, des collectivités locales et surtout des industriels et commerçants du tourisme, pour dégager ensemble les sommes nécessaires à cette promotion. Elle devrait d'ailleurs pouvoir être améliorée dans une coopération renforcée avec les autres structures qui contribuent à la promotion de notre pays, je pense en particulier à la SOPEXA. Enfin, le développement des nouvelles technologies d'information et de communication devrait permettre de multiplier l'effet boule de neige des actions de promotion et de publicité qu'il faut absolument protéger de façon à mieux fidéliser encore notre clientèle.
    Tout cela passe par une très grande souplesse du fonctionnement de la Maison de la France, dont il faut développer l'implantation à l'étranger, ce qui suppose une très grande autonomie par rapport à l'administration. Cette autonomie est nécessaire pour la mettre à l'abri des contraintes administratives. Il est vrai que ce n'est pas toujours facile face aux tentations traditionnelles du ministère de reprendre régulièrement le pouvoir de cette structure, qui doit rester régie par la dynamique d'une entreprise privée.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, compte tenu de vos anciennes responsabilités de maire d'une des plus belles communes de France, dans une région superbe de notre territoire national, je suis sûr que vous serez un ardent défenseur de cette activité essentielle qu'est le tourisme pour notre économie, pour le développement de la convivialité entre nos concitoyens et, surtout, pour l'échange des cultures entre les peuples du monde entier. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.
    M. Jean-Pierre Dufau. Votre premier budget du tourisme, monsieur le secrétaire d'Etat, m'inquiète moins par les chiffres apparents que par leur évolution et les orientations qu'ils laissent percevoir. Ainsi, les moyens de paiement paraissent stables, 75 millions d'euros contre 74,7 en 2001, mais cela cache une rupture avec la précédente législature, les moyens d'engagement ayant progressé de plus de 52 % entre 1998 et 2002 et les moyens de paiement de 43,1 %. Il y avait une volonté politique qui semble avoir aujourd'hui disparu.
    Plus inquiétante encore est la baisse sensible, de 4,3 %, des moyens d'engagements, qui passent de 80,9 millions d'euros à 78,3 millions en 2003. C'est le signe d'un désengagement de l'Etat. Jusqu'où irez-vous ?
    M. Michel Bouvard. Oh !
    M. Jean-Pierre Dufau. Alors que se dessine une relance de la décentralisation, quelle sera la place du tourisme ? Que fera l'Etat, que compte-t-il transférer aux régions ? Quels moyens donnera-t-il à ses services déconcentrés ? J'aimerais partager l'optimisme de M. Couve, qui voulait associer dans les régions le tourisme, la culture, etc., ce qui partait d'un bon sentiment, que je partage. Je crains que les faits n'apportent la désillusion. Rendez-vous dans un an pour évaluer les crédits que la DRAC aura dépensés dans les régions, et, notamment, comparer d'une année sur l'autre les soutiens aux différents festivals culturels dans les régions.
    Parlons des contrats de plan Etat-région. Leur rôle dans la diversification et l'adaptation de l'offre touristique est déterminant. Si les crédits de paiement consacrés à ces contrats au titre des subventions d'investissement subissent une augmentation louable et reconnue dans la continuité du budget de 2002, et que les autorisations de programme sont quasi stables, il n'en va pas de même pour les interventions publiques de l'Etat dont les crédits baissent de manière importante, de l'ordre de 20 %.
    La baisse est d'ailleurs encore plus forte pour les interventions stratégiques : 30 %. C'est la confirmation de mes craintes et la preuve du début de désengagement de l'Etat. On sent que, dans le tourisme comme ailleurs, l'Etat commence à faire peser les charges sur la fiscalité locale, dont chacun sait qu'elle est la plus injuste. Triste perspective à terme !
    C'est inquiétant, même si la France occupe toujours la première place parmi les destinations touristiques mondiales. Ce qu'il faut conforter, c'est le séjour des touristes et leurs dépenses dans notre pays, qui reste une destination de passage. Pour reprendre l'image de Jean Lassalle, qui faisait cette ode à l'amour touristique, que je partage, la France est par trop un tourisme de passage et ses amours ne sont que trop éphémères.
    M. Jean-Jacques Descamps. Ce n'est pas vrai du tout !
    M. Augustin Bonrepaux. Mais si !
    M. Jean-Pierre Dufau. Par rapport aux autres pays, c'est hélas ! vrai, et je le déplore comme vous.
    Je pensais qu'il y avait place pour une politique plus ambitieuse dans ce domaine. Vos crédits pour la promotion de l'image de France n'augmentent que de 2,4 %. Ils avaient augmenté de 45 % de 1988 à 2002. Sans commentaires !
    On a peine à trouver des axes prioritaires qui sous-tendent votre politique. Alors que 40 % de nos compatriotes ne partent pas en vacances, où est la politique sociale du droit aux vacances pour tous, qui doit être notre loi commune ? Pourquoi réduire de 10 %, en les ramenant à 3,7 millions d'euros, les autorisations de programme pour les hébergements de tourisme social ? Quand on sait à quel point il est nécessaire de rénover ces structures, on comprend mal !
    Les chèques-vacances, élargis aux salariés des PME-PMI, ont démontré leur pertinence, et chacun reconnaît ici leur succès. Il faut maintenant les populariser par davantage de publicité car ils ne sont pas arrivés à leur pleine efficience. Enfin, il faut leur donner la dimension européenne que nous avions souhaitée puisque certains pays européens commencent à s'intéresser à cette forme de tourisme.
    Dans le cadre du programme « nouveaux services, nouveaux emplois », 8 000 emplois-jeunes avaient été créés. On connaît l'attitude du Gouvernement par rapport à ces emplois-jeunes. Je crois que c'est une faute. Croyez-vous que les contrats-jeunes de M. Fillon proposés à des jeunes non qualifiés vont tirer vers le haut l'activité touristique ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Le tourisme est un secteur où la concurrence internationale règne. La formation, la qualification des personnels sera un facteur décisif. On ne peut pas dire tout et son contraire. Il faut choisir.
    Quant à la baisse de la TVA sur l'hôtellerie et la restauration, où en est le Gouvernement ? M. Raffarin a expliqué à l'Assemblée que le dossier était complexe. C'était pendant la campagne électorale qu'il fallait le dire, pas maintenant. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Jacques Descamps. Qu'est-ce que vous avez fait ?
    M. Michel Bouvard. Un peu de pudeur tout de même !
    M. Jean-Pierre Dufau. Supposons cependant le problème réglé et la TVA passant de 19,6 % à 5,5 %.
    M. Jean-Jacques Descamps. Grâce à nous !
    M. Jean-Pierre Dufau. Qui va bénéficier des 11 % de remise ? Le client, l'entreprise - et je partage les propos de Jean Lassalle sur la petite restauration et hôtellerie rurale qui a besoin de facilités -, les salariés ? Il y a là matière à débat et j'espère que nous l'aurons lorsque ce sera fait.
    M. Jean-Jacques Descamps. Ce n'est pas vous qui allez décider !
    M. Jean-Pierre Dufau. C'est une occasion pour relancer l'embauche, renégocier la convention collective des métiers du tourisme. J'espère que cela fait partie de vos projets.
    Comme vous le voyez, monsieur le secrétaire d'Etat, votre projet de budget pour 2003 ne nous convient pas. Votre bonne volonté n'est certainement pas en cause. Ce sont les intentions du Gouvernement d'une façon plus générale qui nous inquiètent. L'abandon relatif du tourisme social, le transfert des charges vers la région en l'absence de politique forte au niveau national décevront les professionnels, les salariés et l'ensemble des Français. La précédente législature avait réalisé des avancées unanimement reconnues. Il restait à faire. Il semble que la démarche soit interrompue. Le groupe socialiste votera contre votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Jacques Descamps. Les professionnels du tourisme ont voté !
    M. le président. La parole est à M. Edouard Landrain.
    M. Edouard Landrain. Messieurs les ministres, un budget de 75 millions d'euros, 0,02 % du budget général, qui rapporte 15 milliards d'euros : le plus beau placement en France ! Pas cher pour l'Etat et ça rapporte gros. Bien entendu, nous l'adopterons, car il faut être de très mauvaise foi pour penser un seul instant que ce budget que tout le monde se complaît à trouver bon puisse être rejeté par une partie de cette assemblée.
    Pourtant, comme Jean Lassalle, j'ai quelques interrogations sur les chiffres donnés.
    J'aimerais comprendre comment la France, première destination touristique mondiale avec 75,5 millions de touristes étrangers, 11 % de la part mondiale, se trouve bizarrement en troisième position au titre des recettes touristiques, derrière les Etats-Unis et l'Espagne, qui reçoivent respectivement 6,6 % et 7,1 % des visiteurs étrangers. Pourquoi un écart aussi important ? Y a-t-il une façon de compter différente selon les différents Etats ?
    M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. Oui !
    M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial. Bonne question !
    M. Edouard Landrain. Cela peut être une explication. Les prix français sont-ils trop bas ? Les établissements de haut de gamme, générateurs de devises, sont-ils en nombre insuffisant en France ? La TVA à 19,6 % est-elle dissuasive ?
    M. Michel Bouvard. Oh oui !
    M. Edouard Landrain. L'organisation productive est-elle insuffisante ? En fin de compte, on fait du chiffre, et cela rapporte moins que cela ne devrait. J'aimerais que vous puissiez m'expliquer pourquoi.
    Pourtant, le tourisme représente 7 % du PIB, 752 000 salariés et plus de 200 000 entreprises qui participent toutes à l'augmentation du nombre de touristes en France, en dépit des 35 heures. Le tourisme est certainement un gisement d'emplois pour les années qui viennent, mais il faut écouter, pendant la saison touristique, les travailleurs du tourisme nous dire leurs difficultés, dans les restaurants ou les hôtels, pour respecter les règles sociales tout en accueillant correctement et décemment les touristes à tout moment de la journée, de la semaine ou du mois. C'est un vrai problème qu'il nous faudra résoudre.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, vous devriez simplifier le tourisme en France. En dehors du ministère, interviennent des délégations régionales, des CRT, des CDT, des OTSI, des UDOTSI, des conseils généraux, des conseils régionaux, des communes, des EPCI, des pays, sans compter l'AFIT, l'ONT et les organisations professionnelles. Cela fait beaucoup de monde pour s'occuper du tourisme, pas toujours de façon coordonnée, ce qui conduit parfois à des discordances. Ce n'est pas la bonne volonté qui manque, mais il faudrait simplifier. Cela sera peut-être le cas avec la régionalisation. Peut-être faudra-t-il faire disparaître un certain nombre de structures qui n'ont plus véritablement de raison d'être. J'espère que nous irons dans cette voie de bon sens. Nous en parlerons lors du débat sur la décentralisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel.
    M. Victorin Lurel. Mesdames, messieurs je vais vous parler des DFA, les départements français d'Amérique, que vous connaissez fort bien, monsieur le secrétaire d'Etat. Les situations concrètes sont parfois différentes à la Guadeloupe, à la Martinique et en Guyane, mais la problématique est commune aux trois collectivités et justifie une vision et un traitement global et conjoint sur certains segments. M. Manscour, qui a dû partir, s'associe à moi pour appeler votre attention sur la situation du secteur touristique, fondamental pour nos économies.
    On compte en Guadeloupe, pour 175 hôtels, près de 8 500 chambres, sans compter les gîtes, les résidences, les meublés, les VVF, qui portent le parc à 12 000 chambres. C'est plus de 650 000 passagers hors DFA qui débarquent, dont 210 000 à Saint-Martin. Cela représente plus de 4 000 emplois directs dans le seul sous-secteur de l'hôtellerie et de la restauration. La Guadeloupe se classe sixième région de la Caraïbe pour sa capacité hôtelière rapportée au nombre d'habitants, avec environ vingt chambres pour mille habitants.
    En Martinique, c'est plus de 120 établissements, 5 500 chambres en hôtellerie, plus de 8 500 toutes catégories confondues, 520 000 clients, 2 000 emplois directs et indirects dans les hôtels et restaurants.
    Enfin, pour la Guyane, la tourisme est tout aussi important, vous êtes bien placé pour le savoir : vingt-huit établissements, regroupant 1 300 chambres recevant en moyenne chaque année 120 000 personnes et occupant environ 500 salariés dans le seul sous-secteur de l'hôtellerie et de la restauration.
    Donc, quand ce secteur éternue dans nos régions, c'est toute l'économie qui finit par s'époumoner. On s'inquiète donc légitimement du peu de moyens qui vous sont donnés, donc qui nous sont donnés, pour soutenir cette activité essentielle pour tout le pays de France, mais notamment pour nos régions de l'outre-mer, qui en ont bien besoin. Votre budget, en effet, ne progresse pas et stagne à 75 millions d'euros. On aurait pu espérer mieux compte tenu du poids du secteur et de la nécessaire relance qu'il convient d'y impulser. Dans l'outre-mer français, c'est une question vitale. Je rappelle qu'entre 1998 et 2002, tous mes collègues l'ont rappelé, le budget du tourisme avait connu une augmentation de 52 % de ses moyens d'engagement et de 43 % des moyens de paiement.
    Par ailleurs, nous enregistrons la stagnation des crédits destinés au programme « bourses solidarité-vacances » permettant l'accès aux vacances des plus défavorisés.
    Comment pourrait-on se réjouir, voire s'enorgueillir, monsieur le secrétaire d'Etat, d'être la première destination touristique du monde quand on sait que 40 % des Français ne peuvent pas partir en vacances et qu'aucune grande ambition, disons-le, aucun grand dessein ne se profile en leur faveur dans votre budget ?
    Monsieur le ministre, je m'inquiète donc des conséquences de la suppression annoncée et programmée des emplois-jeunes, particulièrement importants dans ce secteur, tout spécialement dans l'outre-mer, vous ne l'ignorez pas. Couplées avec une diminution de 24 % des crédits des contrats de plan Etat-région, elles risquent d'être calamiteuses pour nos économies.
    J'aimerais consacrer la dernière partie de mon intervention à deux sujets. Le premier est la desserte aérienne de nos régions. La Guadeloupe et la Martinique ne sont desservies que par quatre compagnies aériennes, toutes françaises : Air Caraïbes, Air France, Air Lib - peut-être plus pour très longtemps - et Corsair, épisodiquement. Les seules destinations desservies par des vols quotidiens sont la France métropolitaine, la Guadeloupe ou la Martinique, Miami, Saint-Martin, Sainte-Lucie et la République dominicaine.
    Le « yield management » - comme on dit en bon franglais - pratiqué par ces compagnies et qui consiste en une rentabilisation maximale de chaque vol, s'exerce indépendamment des objectifs touristiques de nos destinations. On ne peut que constater une importante augmentation des tarifs, au moment même où la relance de l'activité touristique s'impose.
    Le second sujet que je souhaitais aborder est la problématique des aéroports parisiens : Orly convient à une grande partie de la clientèle métropolitaine, mais le départ de Roissy, qui est un hub - c'est le mot consacré - incontournable, tant sur le plan aérien que ferroviaire, permet de capter la clientèle de province et, surtout, européenne. En effet, la diversification des clientèles, voulue par les milieux du tourisme, n'est envisageable que si les connexions sont possibles à partir de Roissy. Les voyageurs veulent des vols directs, et non plus des navettes entre Orly et Roissy, d'autant plus que, vous le savez, des vols directs sont organisés au départ des capitales européennes vers Saint-Domingue, Miami ou Cuba, à des tarifs inférieurs aux nôtres. Il convient donc d'aboutir à une desserte quotidienne à partir de Roissy-Charles-de-Gaulle. La desserte du continent nord-américain laisse à désirer, vous le savez : il y a des avions en partance des Etats-Unis, mais depuis le 11 septembre, il n'y a plus de clients ; à l'inverse, il y a des clients à partir de l'Europe, mais il n'y a plus d'avions. Telle est l'aporie à laquelle est confrontée l'économie touristique.
    Enfin, vous me permettrez d'évoquer un dernier point qui me tient particulièrement à coeur, le problème spécifique de Saint-Martin. L'île représente 40 % du parc hôtelier de la Guadeloupe. Depuis 1995, 1 200 chambres ont disparu. Sur les 3 200 qui restent, 800 sont pratiquement en voie de disparition. Nombre d'hôtels sont en état virtuel de cessation de paiement, les professionnels pourront vous le confirmer. Il faut absolument un plan d'urgence de sauvetage de l'économie touristique de Saint-Martin, qui est une mono-industrie. Des questions spécifiques se posent, notamment celle des surcoûts pour les assurances, qui constituent 35 % du chiffre d'affaires d'un hôtel moyen à Saint-Martin. Il faut classer Saint-Martin, comme le prévoit la loi de l'orientation pour l'outre-mer de vos prédécesseurs, en zone 3 au titre des assurances catastrophes naturelles. Bref, un plan d'urgence pourrait sauver cette île d'un capotage certain.
    Vous voyez donc, monsieur le ministre, que votre budget nous inquiète. S'il vous plaît, rassurez l'outre-mer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

    M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, qui sera le dernier intervenant.
    M. Edouard Landrain. C'est la surprise !
    M. le président. Le groupe UMP n'avait pas utilisé tout son temps de parole.
    M. Jean Launay. C'est un privilège ! M. Bouvard n'était pas inscrit !
    M. Michel Bouvard. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, après avoir été chargé durant cinq ans du budget du tourisme au sein de la commission des finances, je tenais à exprimer ce soir mon sentiment à la fois sur le budget et sur les actions qu'il convient d'entreprendre ou de poursuivre pour permettre au tourisme de mieux remplir sa fonction économique et sociale.
    Dans un contexte difficile dû au ralentissement économique et aux moindres recettes fiscales, nous ne pouvons que vous féliciter, monsieur le ministre, des arbitrages que vous avez su obtenir et qui maintiennent ce budget, certes à un niveau globalement toujours trop réduit par rapport à l'importance et aux enjeux du tourisme, mais permettant néanmoins de remplir les missions essentielles de ce département. Je me réjouis donc et considère qu'il est positif que soit ainsi conforté un ministère qui a progressé en 2002 dans la gestion de ses crédits et dans leur consommation. Mais j'avoue à mes collègues de l'opposition que je les trouve un peu sévères, car je me souviens d'avoir été rapporteur du premier budget de Michelle Demessine en 1998, et que les crédits plongeaient alors par rapport à ceux de l'année précédente dont le niveau n'était déjà pas très élevé. Je le dis amicalement et sans polémique.
    M. Jean Launay. Vous n'avez pas manqué d'être sévère !
    M. Michel Bouvard. Justement pas !
    Pour en revenir au budget pour 2003, je souhaite souligner l'effort supplémentaire consenti en faveur des délégations régionales au tourisme, pour leur permettre de remplir leur mission, et la progression des moyens de Maison de la France, les moyens de promotion à l'étranger s'accroissant de 2,4 % par rapport à 2002. Cet effort ne doit pas être relâché, car notre pays, situé encore au dix-huitième rang pour la promotion touristique de ses structures nationales à l'étranger, doit conserver des parts de marché, mais aussi mieux valoriser ses produits et obtenir une progression des dépenses effectuées par les touristes sur le territoire national. A cet effet, un effort sur les campagnes de promotion serait le bienvenu.
    Je regrette que n'aient pu être trouvées, au cours des cinq dernières années, de solutions aux problèmes de logement du ministère, dont les loyers absorbent plus de 55 % des crédits de fonctionnement courant. De même, je vous demande instamment, monsieur le ministre, de régler la question des locaux du service d'études et d'aménagement touristique de la montagne : c'est un dossier qui n'a que trop traîné.
    Je voudrais surtout donner trois coups de projecteur rapides sur des thèmes qui, à mon sens, doivent nous mobiliser pour la promotion du tourisme en France considéré sous son aspect économique et social.
    Le taux de départs en vacances des Français est passé de 69,6 % à 64,7 % au cours des cinq dernières années, 16 % de nos concitoyens ne partant jamais. A l'évidence, cette situation ne peut nous satisfaire : les vacances contribuent en effet à l'équilibre de l'être humain et des familles. Cette préoccupation m'a incité, comme plusieurs collègues d'ailleurs, à déposer différents amendements, dans la seconde partie du projet de loi de finances, sur les articles non rattachés. Ils visent à améliorer l'accès aux chèques vacances qui constituent sans doute l'un des outils les plus utiles et les mieux adaptés pour favoriser le départ en vacances des familles françaises. Nous nous contentons d'ailleurs de reprendre ce que nous avions dit, Jean-Michel Couve et moi-même, à l'occasion de la présentation de notre première proposition de loi sur l'extension du chèque vacances aux PME et PMI, puis au moment de l'adoption du projet de loi de Michèle Demessine - nous avions alors mis l'accent sur certaines faiblesses du texte.
    Au moment où l'agence fête ses vingt ans, il faut reconnaître le succès de cette création et sa pertinence au niveau social, économique - son apport à l'économie touristique n'est pas négligeable - et budgétaire, par sa contribution à la rénovation des hébergements touristiques. Il faut aussi saluer les innovations dont l'agence est capable. Je veux parler de l'expérience actuellement menée avec la CAF de Haute-Loire pour mieux mobiliser les ressources des bons vacances des CAF, système relativement archaïque, et permettre aux jeunes de partir en vacances.
    Mon deuxième coup de projecteur est tourné vers l'avenir de la destination montagne. Si la montagne reste la première destination en hiver, si, durant cette saison, la montagne française est toujours très compétitive au niveau européen et mondial, il faut souligner l'insuffisance du départ à la montagne l'été, alors même que la conjugaison de ces deux saisons permettrait de sédentariser les emplois touristiques et de développer la pluriactivité.
    Nos collègues du Sénat, dans un excellent rapport dont je recommande la lecture à tous, insistent sur ce problème de l'essoufflement de la fréquentation touristique en montagne, notamment en période estivale. Nous devons nous en préoccuper. En 1994, la montagne était la deuxième destination touristique d'été. Elle n'est plus que la quatrième, derrière la campagne et la ville. C'est elle, surtout, qui enregistre une baisse du taux de départ en vacances des Français, passant de 40,7 % à 36,7 %.
    Cette situation pose plusieurs problèmes : celui de la fréquentation dans les stations moyennes, les plus fragiles, ou celui du renouvellement des clientèles. Les vacances à la neige sont coûteuses. Une expérience est actuellement menée dans les deux départements savoyards - M. Saddier peut en témoigner - afin de recenser des hébergements pour les vacances des jeunes : anciens centres de vacances des communes ou des comités d'entreprise dont beaucoup ne sont plus utilisés. Un touriste adulte qui vient à la neige, c'est quelqu'un qui a appris à skier dans sa jeunesse : nous devons engager une réflexion sur ce sujet.
    M. Martial Saddier. Très bien !
    M. Michel Bouvard. Il faut cependant se réjouir de quelques points positifs, comme le succès des mesures en faveur des résidences de tourisme dans les zones de revitalisation rurale, que nous avons portées en leur temps avec Augustin Bonrepaux, et qui permettent d'équilibrer le parc touristique dans des secteurs qui n'étaient pas naturellement les plus développés de ce point de vue.
    M. Jean-Jacques Descamps. Très bien !
    M. Michel Bouvard. Enfin, je voudrais savoir quelle suite sera donnée au dossier des pôles économiques touristiques de montagne, mis à l'honneur au moment du conseil national de la montagne de Clermont-Ferrand et un peu oubliés depuis presque deux ans. Il faudrait, je crois, se préoccuper de cette structuration du tourisme, notamment dans les secteurs de moyenne montagne.
    Le troisième coup de projecteur concerne la réforme de la taxe de séjour. Je vais user de mon droit de suite : il y a un an, à l'occasion du débat sur les lois de finances, le Parlement a adopté à l'unanimité une réforme de la taxe de séjour, par le biais d'amendements que j'avais défendus, en tant que rapporteur de la commission des finances.
    Aujourd'hui, je lis le constat suivant dans l'excellent rapport d'Augustin Bonrepaux : « L'application des nouveaux tarifs, qui devrait intervenir à compter du 1er janvier 2003, est subordonnée à la publication d'un décret préparé en concertation avec les élus et les professionnels concernés. Bien que soumis le 9 juillet 2002 au comité des finances locales, ce décret n'est toujours pas publié. Il sera, par ailleurs, accompagné d'un décret portant sur la codification des mesures réglementaires découlant des mesures adoptées. Ce retard dans la publication des textes d'application est d'autant plus regrettable que la mise en place de nouveaux tarifs dans une commune exige le respect de délais nécessaires à la publication de ces tarifs et à leur répercussion dans les documents commerciaux des professionnels. »
    La situation est urgente, et je souhaite que le travail parlementaire puisse connaître une suite. Je sais que le blocage ne vient pas de vos ministères, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, et qu'il faut que nous ayons une action forte auprès du ministre de l'intérieur pour faire évoluer la situation. Nous sommes à quelques mois de la publication des documents d'été qui sont présentés dans les différents salons professionnels, et le temps presse.
    Bien évidemment, je voterai ce budget qui consolide les actions entreprises en faveur du tourisme et qui est en même temps porteur d'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au tourisme.
    M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, je tiens tout d'abord à souligner la qualité du travail effectué par M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, et par M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. J'ai apprécié la précision, très souvent la pertinence des observations et l'exhaustivité remarquable des documents présentés. Pour ma première présentation du budget du tourisme, vos rapports constituent une aide précieuse.
    En écoutant les orateurs, j'ai également perçu le très grand intérêt que votre assemblée porte à la première industrie nationale.
    Pour ma part, je souhaite d'abord mettre en perspective les priorités sur lesquelles est construit notre budget pour 2003.
    Le contexte international, comme vous l'avez souligné dans vos différents rapports, est très difficile. Il convient de rappeler que les événements dramatiques du 11 septembre 2001, et plus récemment ceux de Bali, ont profondément affecté le tourisme mondial. Alors que les déplacements touristiques internationaux connaissaient une croissance de 5 % par an jusqu'en 2001, le bilan de cette année affichait une baisse de 1,3 % dans le monde.
    Dans ce contexte difficile, la France est restée très attractive en accueillant en 2001 plus de 76,5 millions de touristes étrangers qui ont apporté 33,9 milliards d'euros, générant ainsi un solde positif de 15 milliards au poste voyages des échanges extérieurs. Il faut, à ce propos, souligner que ce résultat met le tourisme au premier rang des secteurs économiques de notre pays. Cela ne doit pas faire oublier qu'il s'agit d'un secteur fragile, sensible aux événements et soumis à une concurrence mondiale offensive qui interdit de relâcher nos efforts.
    Mesdames et messieurs les députés, dans le contexte actuel de maîtrise des dépenses publiques, l'ensemble des moyens de paiement du tourisme, 75 millions d'euros, croît légèrement alors que celui des moyens d'engagement reste pratiquement stable.
    De plus, le soutien budgétaire à la politique du tourisme ne se limite pas à la seule section « tourisme ». D'autres crédits mis en oeuvre par plusieurs départements ministériels, notamment ceux de la culture et de la communication, des affaires sociales, du travail et de la solidarité, de l'écologie et du développement durable, de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, concourent également à l'exercice de cette politique publique. J'y reviendrai ultérieurement.
    Toutes les actions dans ce secteur doivent se traduire concrètement, à moyen terme, par des échanges économiques encore plus favorables à notre balance commerciale, un réel impact sur l'emploi dans toute la chaîne professionnelle, directe et indirecte, et une satisfaction plus large des besoins « vacances » des Français, des ressortissants de la communauté européenne et des étrangers.
    L'enveloppe budgétaire attribuée au secrétariat d'Etat au tourisme est significative. Il s'agit, avant tout, de mieux utiliser les crédits mis à notre disposition, avec un souci d'efficacité, de transparence et une exigence de vérité.
    L'une des grandes priorités du secrétariat d'Etat au tourisme est de contribuer au développement de l'action internationale par une vigoureuse promotion de la France à l'étranger et le renforcement de l'attractivité du territoire « France ». Le but recherché est d'inciter les touristes étrangers à choisir la destination France et à prolonger leurs séjours.
    Comme vous le savez, le tourisme est le premier poste excédentaire de la balance des paiements - 15,2 milliards d'euros - et représente 7 % du PIB. Mais, si la France est la première destination touristique du monde, elle ne détient que le troisième rang au niveau des recettes. Le potentiel économique existe donc et doit être mieux exploité.
    Portée à 28,1 millions d'euros, soit une augmentation de 2,6 %, la contribution de l'Etat en 2003 aux actions de promotion de la France à l'étranger est en progression et marque clairement la volonté de rendre l'intervention de l'Etat plus efficace hors de nos frontières.
    La subvention de l'Etat au groupement d'intérêt économique Maison de la France assure pratiquement la moitié de son budget, financé parallèlement par les professionnels membres du GIE. Maison de la France est notamment chargée de la gestion de la campagne « Bonjour » et des campagnes visant à conforter l'image touristique de la destination France, notamment avec la campagne « J'aime la France ». L'augmentation de la subvention en 2003 doit permettre de dynamiser la représentation à l'étranger et d'intensifier les campagnes de promotion de notre pays dans le contexte délicat de l'après-11 septembre.
    Actuellement, nous initions également une campagne de promotion de la région Languedoc-Roussillon et,plus spécifiquement, des départements du Gard et del'Hérault, afin de maintenir l'image touristique des zones inondées. Cette campagne, menée en coordination avec les collectivités territoriales, sera conduite par Maison de la France.
    Pour répondre à Jean-Michel Couve, soucieux d'assurer une vision pluriannuelle à Maison de la France, je confirme ma volonté de pérenniser au moins le montant de la subvention que l'Etat assure à ce GIE dans les prochaines années.
    La recherche de l'augmentaton des flux du tourisme international doit être nécessairement précédée d'études d'impact indispensables à la définition des cibles, études qui devront être affinées en complément de celles déjà réalisées.
    En augmentation de 28 % par rapport à l'année dernière, la dotation pour les études atteindra 2,6 millions d'euros en 2003. Elle permettra de poursuivre la rénovation de l'enquête aux frontières. Cette enquête fournit une grande part des données transmises à Eurostat dans le cadre de la directive européenne sur les statistiques du tourisme.
    Un dispositif permanent d'observation des flux de touristes non-résidents, outil indispensable pour le calcul du poste « voyages » de la balance des paiements et pour la réalisation de travaux statistiques futurs sur le tourisme, sera ainsi mis en place à terme.
    De nouvelles études à but prospectif seront initiées en 2003 pour mieux connaître les besoins et les attentes des touristes étrangers.
    J'ai par ailleurs bien noté l'intention de la commission des affaires économiques de créer en son sein une mission d'information sur les comptes du tourisme, et je m'en réjouis.
    Corrélativement, le soutien à l'innovation technologique dans le secteur touristique doit être soutenu et accompagné par l'Etat pour rendre cohérente et homogène l'offre des acteurs nationaux. Ceux-ci pourront proposer des services et des produits touristiques en ligne. Je vais soutenir fortement le développement de l'outil de mise en ligne sur Internet de l'offre touristique française, dont une déclinaison au niveau européen est en cours de mise en oeuvre - je pense bien entendu à Résinfrance et à Franceguide.com.
    La valorisation du produit touristique constitue, au même titre que la promotion à l'étranger, un enjeu majeur de la politique du tourisme. Sa mise en oeuvre est confiée à l'Agence française d'ingénierie touristique. Les moyens de l'agence sont globalement maintenus à un bon niveau pour lui permettre de développer son savoir-faire. L'un des objectifs qui lui seront fixés sera de développer de nouveaux partenariats et de rechercher ainsi de nouveaux financements lui permettant, comme l'a souligné M. Jean-Michel Couve, de jouer un rôle croissant dans son domaine.
    Les moyens de l'association Observatoire national du tourisme sont également globalement maintenus.
    Vous savez l'importance que j'attache au développement de l'outil statistique et c'est pourquoi je vous informe que j'ai l'intention de lancer une mission générale d'étude sur l'observation statistique en France, qui aura pour but de proposer une rationalisation des structures existantes.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Voilà, mesdames et messieurs les députés, la présentation générale que je voulais vous livrer. Mais pour ne pas, à cette heure tardive, vous accabler par une litanie de chiffres, je répondrai maintenant à vos interventions.
    Monsieur le rapporteur spécial Augustin Bonrepaux, vous avez évoqué les financements prévus pour l'Agence française pour l'ingénierie touristique, l'AFIT, notamment dans le cadre du groupement d'intérêt public « Bourse solidarité vacances », et vous vous êtes demandé si nous pourrions maintenir les missions de ces structures à un bon niveau.
    Même si on peut constater une baisse, notamment dans le titre consacré aux interventions stratégiques, il n'en demeure pas moins que je m'engage à maintenir les niveaux de financement prévus pour ces deux organismes, d'autant plus que nous connaissons bien le rôle important que joue l'AFIT, dont vous étiez d'ailleurs, monsieur Bonrepaux, le président. L'AFIT est en effet un organisme extraordinaire, surtout dans le cadre de la transmission de savoir-faire, et, si nous voulons encore amplifier la promotion de l'image de la France à l'extérieur, nous avons tout à fait intérêt à maintenir un bon niveau de fonctionnement à cet organisme.
    Vous vous êtes également interrogé sur les annonces qu'a faites M. Gilles de Robien lorsqu'il s'est rendu dans le Gard apporter son soutien aux personnes qui ont été frappées par les désastres que nous savons. Vous vous êtes demandé s'il était tout à fait normal que l'Agence nationale pour les chèques-vacances, l'ANCV, finance de telles opérations.
    M. Michel Bouvard. Bien sûr ! Elle est faite pour ça !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. L'ANCV, qui a pour vocation d'aider les familles à partir en vacances, dégage heureusement des excédents depuis de nombreuses années.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Et ces excédents sont justement destinés à la rénovation du patrimoine du tourisme, à la rénovation du patrimoine touristique social et associatif ainsi qu'à la sauvegarde de la petite hôtellerie. L'annonce de M. de Robien correspond donc bien à la mission de l'agence.
    Le plan de financement prévoit l'intervention d'une série de partenaires pour financer la remise à niveau de certains équipements : le contrat de plan Etat-région, avec 0,6 million d'euros en autorisations de programme, le Fonds européen du développement régional, avec un fléchage de crédits non encore définis mais qui existent, et l'ANCV, pour 1,5 million d'euros, en complément des annonces qui ont été faites. L'ANCV reste donc bien dans son rôle.
    Je rejoins entièrement le rapporteur pour avis Jean-Michel Couve lorsqu'il affirme que les moyens du secrétariat d'Etat paraissent insuffisants au regard des missions qu'il doit mener. Je pense que bon nombre de personnes sur les bancs de cette assemblée partagent cette préoccupation. Il nous appartient de poursuivre le combat pour qu'un jour, peut-être, ce secrétariat d'Etat devienne un ministère rattaché au Premier ministre.
    M. Victorin Lurel. On peut toujours rêver !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Lequel pourrait être Gilles de Robien ! (Sourires.)
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Ne dites pas cela ! Cela va figurer au Journal officiel !
    M. le président. Félicitations, monsieur de Robien ! (Rires.)
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Quoi qu'il en soit, il nous appartient de persévérer pour redonner à ce secteur sa véritable place dans l'économie française.
    Vous avez également, monsieur le rapporteur, évoqué des problèmes que nous connaissons bien : la TVA, les saisonniers, le développement rural... Autant de combats que nous menons, de chantiers que nous avons ouverts. Des groupes de travail travaillent en ce moment sur ces dossiers.
    S'agissant du taux de TVA, même si nous ne sommes pas sûrs d'obtenir avant la fin de l'année les résultats qu'attendent avec impatience les hôteliers et plus encore les restaurateurs, il n'en est pas moins clair que nous sommes maintenant dans une phase très concrète, puisque nous avons obtenu des accords de principe, dont celui de Romano Prodi. Je pense que nous devrions obtenir gain de cause avant la fin de l'année 2004.
    M. Jean Launay. C'est un recul !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Pas du tout, c'est une avancée.
    M. Jean Launay. Pour la date, c'est un recul.
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. M. Léonce Deprez nous a fait part de son expérience, que je salue. Je crois que nous gagnerons à nous inspirer des travaux que vous avez effectués, monsieur le député, des opérations que vous avez menées dans votre région, notamment sur la transparence des labellisations des communes. Je profiterai, dans la réflexion que nous allons mener dans les mois qui viennent, de cet apport important que vous voulez bien nous faire partager.
    Je reprends volontiers votre image du tourisme, mariage entre le territoire et le temps. C'est en effet une belle façon de définir le tourisme pour l'apprécier à sa juste valeur.
    M. Jean Lassalle nous a fait une démonstration extraordinaire. Je crois, monsieur le député, que votre conception du tourisme va tout à fait dans la bonne direction, en tout cas c'est celle que je suis. Vous avez raison, « l'amour flétrit vite si on le délaisse ». Je voudrais que chacun ici en soit convaincu, parce que, même si ce secteur est transversal, du côté des départements techniques, même s'il suscite encore des oppositions, je crois, comme l'a dit il y a quelques instants Michel Bouvard, que nous aurions tous intérêt, quels que soient les bancs sur lesquels nous sommes assis, à nous associer pour demander qu'on donne à ce secteur la place qu'il mérite.
    Vous avez raison d'évoquer à la fois le tourisme rural, le tourisme de ferme, la montagne, le tourisme culturel. Les produits touristiques que nous pouvons offrir sont en effet très divers, et c'est ce qui fait l'attrait de la France. En tout cas, c'est dans cette direction que nous voulons aller dans les années qui viennent.
    Monsieur Landrain, il est tout a fait normal de se poser la question du retour sur investissement quand on voit la modestie des crédits que représente le budget du tourisme. Avec 0,03 % du budget de la nation, notre balance présente un solde des paiements positif de 15,2 milliards d'euros. C'est plus que le loto gagnant. (Sourires.)
    Cela montre bien qu'il faut que nous fassions des efforts pour permettre une meilleure reconnaissance de ce secteur.
    Vous avez évoqué les problèmes que posait l'application des 35 heures. Je travaille actuellement avec mon collègue François Fillon à la prise en compte des particularités des métiers de l'hôtellerie et de la restauration, qui ne peuvent être assimilées à d'autres secteurs d'activités. Je pense que nous allons aboutir. La solution réside peut-être dans un assouplissement beaucoup plus important des 35 heures, afin que la durée du travail corresponde plus aux réalités des métiers du tourisme.
    Enfin, vous avez souligné la multiplicité des organismes qui, aujourd'hui, assurent des compétences en matière de tourisme. Quand on regarde tous les échelons, on constate que chacun joue un rôle, mais peut-être existe-t-il des redondances ? Nous avons lancé le débat sur la décentralisation. Ces points seront évoqués et chacun fera des propositions. Si nous constatons qu'il faut réduire les niveaux de responsabilité, nous agirons dans ce sens.
    Monsieur Jean-Jacques Descamps, vous avez raison, compte tenu du poids que représente ce secteur dans l'économie française, on peut dire que, à la limite, ce budget est frustrant. Vous le savez d'autant mieux que vous avez été à la tête de ce département ministériel. Je partage entièrement vos préoccupations, notamment à l'égard des secteurs pour lesquels nous devons encore nous battre : la TVA, l'accueil. Maison de la France a lancé, voici neuf ans, une grande campagne : « Bonjour », mais nous pouvons certainement accomplir des progrès extraordinaires en matière d'accueil.
    Vous avez insisté sur le tourisme de pays. Si nous voulons que les 80 % de visiteurs qui, actuellement, se concentrent sur 20 % seulement du territoire se dispersent sur l'ensemble du territoire national, c'est-à-dire aussi bien en métropole qu'outre-mer, nous avons en effet intérêt à mettre ce tourisme de pays en avant. Il se décline par une variété de produits : l'authenticité, le terroir, la gastronomie, le fluvial, le culturel, etc. C'est toute cette palette qui fait la force de la France et sa qualité, et nous comptons bien la préserver et même l'enrichir.
    J'ai bien noté votre interrogation sur les relations qui pourraient exister entre Maison de la France et la Sopexa. Nous verrons comment arriver à concrétiser ce potentiel.
    MM. Michel Vaxès, Jean Launay, Victorin Lurel, Jean-Pierre Dufau ont opposé ce budget à celui des années précédentes. Je leur rappellerai que, dans le contexte particulièrement difficile que nous connaissons, l'augmentation des moyens de paiement constitue un effort certain. Je ne parle pas des moyens d'engagement, qui ne sont qu'un affichage.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Ce qui compte, c'est plutôt l'exécution du budget, en toute transparence. L'augmentation obtenue correspond bien à une volonté de ce gouvernement de mobiliser des moyens importants.
    M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. Bien sûr !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Je vous confirme aussi que l'aspect social, que chacun d'entre vous a évoqué, sera maintenu. Je salue le travail déjà engagé par mes prédécesseurs dans ce domaine, avec bourse solidarité vacances ou l'aide aux associations de tourisme social. Beaucoup d'associations que j'ai déjà eu l'occasion de recevoir depuis que je suis à ce poste ont reçu l'assurance que non seulement je continuerai dans la même direction, mais que nous allons tout faire pour amplifier l'aide dont elles bénéficient. J'en profite d'ailleurs pour dire que toutes les actions qui avaient été lancées pour l'année 2002 ont été normalement financées, afin de permettre aux associations de fonctionner cette année. L'année prochaine, même si un gel devait être décidé, nous ferons tout notre possible pour leur permettre de travailler dans de bonnes conditions.
    M. Jean Launay. Voilà un engagement !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Nous savons bien qu'en matière de tourisme, il faut s'appuyer sur des organismes très souples et les associations, de ce point de vue, sont les premiers partenaires.
    M. Michel Vaxès s'est aussi préoccupé de l'avenir de l'ANCV. Je ne vois, dans ce budget, aucun signe annonciateur de sa privatisation.
    M. Michel Vaxès. Pas dans « ce budget » !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. En tout cas, ce n'est pas du tout notre dessein.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Cette machine fonctionne très bien. Je ne vois pas pourquoi on la changerait. Elle dégage des excédents qui ont permis de financer, par exemple, des équipements dans le Gard. C'est donc tout naturellement que je vous réponds que vous n'avez aucun souci à vous faire à ce sujet.
    M. Lurel a parlé plus particulièrement de l'outre-mer, mais, finalement, mes réponses seront assez générales puisque j'aborde le budget dans sa globalité.
    Vous avez parlé des problèmes de transport. Je partage entièrement votre point de vue s'agissant du rôle que doit jouer l'aéroport de Roissy dans le développement du tourisme. En tant que hub il reçoit tous les vols européens, qui peuvent dès lors facilement arriver chez nous aux Antilles. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de rencontrer le P-DG d'Air France pour évoquer ce problème. Nous avons conclu un accord de principe. Il faut patienter un peu mais nous devrions arriver à trouver une solution dans les mois qui viennent.
    S'agissant de Saint-Martin et, d'une façon plus générale, des Antilles françaises, un problème global se pose. Il suffit de constater la chute de la clientèle. Le malaise est tel que j'ai rencontré Brigitte Girardin. Nos cabinets travaillent ensemble depuis quelques mois et nous sommes en train de mettre en place un plan d'action, pour ne pas dire un plan Marshall, dont l'objectif sera de permettre que le tourisme, qui reste un pan très important de l'économie de nos régions, puisse repartir dans de bonnes conditions.
    M. Victorin Lurel. C'est urgent !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. En effet ! J'ai d'ailleurs l'intention de me rendre aux Antilles à partir du 18 décembre, à la Martinique, puis à la Guadeloupe et à Saint-Martin pour étudier ce problème de façon globale, non seulement avec les élus, mais aussi avec les syndicats et les professionnels. Je parle des syndicats parce qu'il existe certes des problèmes d'investissements, mais aussi des problèmes de dialogue social et d'accueil.
    M. Michel Bouvard. Très juste !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Nous devons donc tout mettre à plat. C'est ensemble que nous réussirons à sauver le tourisme de l'outre-mer, particulièrement celui des Antilles. Croyez-moi, je suis personnellement très sensible à ces problèmes.
    Nombre d'entre vous ont évoqué la question des emplois-jeunes. C'est effectivement une préoccupation. Ce que l'on peut dire, c'est que les contrats signés il y a quelque temps seront, bien entendu, maintenus jusqu'en 2007, conformément à l'engagement pris par M. François Fillon. Les emplois-jeunes jouent un rôle important dans les structures qui collent à la réalité du terrain. Quant aux contrats qui arrivent à terme ces jours-ci, ils feront l'objet de discussions au cas par cas de façon à pouvoir aider les personnes concernées. On envisage même, lorsqu'il s'agit d'associations, la prolongation du dispositif pendant trois ans, le temps que chacun puisse trouver les moyens d'en assurer la bonne fin. Nous sommes donc soucieux d'étudier les solutions possibles.
    Celle des contrats jeunes, que nous proposons désormais, nous paraît la meilleure.
    En effet, ces contrats font appel à la responsabilité. Ils permettent à nos jeunes non seulement d'être embauchés pendant quelques années, mais aussi d'être formés et surtout d'avoir des perspectives d'avenir. C'est ainsi qu'il faut agir si nous voulons notamment qu'ils soient un jour attirés par les métiers du tourisme.
    M. Jean-Pierre Dufau. Le problème, c'est que ce ne sont pas les mêmes contrats !
    M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. Mais ce sont de vrais contrats de travail !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Voilà, mesdames et messieurs, ce que je voulais vous dire. Je terminerai en évoquant le problème soulevé par M. Michel Bouvard il y a quelques instants. J'ai eu l'occasion de recevoir les élus montagnards plusieurs fois, dont vous, monsieur Bouvard, et j'ai constaté quelle détermination les anime.
    M. Michel Bouvard. C'est vrai !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Malheureusement, la destination montagne est, depuis quelques années, un peu délaissée. Il faut donc absolument donner un coup de fouet dans ce secteur. Je me suis engagé, d'ailleurs, à me rendre sur l'un des sites, je crois que c'est en Haute-Savoie, d'ici à quelques semaines, de façon à aller voir les problèmes sur place. Peut-être faut-il faire en sorte que, au sein de Maison de la France, une promotion particulière soit mise en place en faveur de la montagne, parce que c'est un secteur qui mérite d'être soutenu avec beaucoup de force. J'en prends en tout cas l'engagement ce soir, car il n'y a pas de raison que certains sites faisant partie du territoire national soient oubliés par rapport à d'autres.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Par ailleurs, vous avez évoqué les problèmes de la taxe de séjour, qui relèvent, me semble-t-il, du ministère de l'intérieur. Mais, si notre département ministériel est dépourvu de moyens, nous avons la volonté d'aiguillonner les autres quand c'est nécessaire. Je prends donc l'engagement ce soir d'aller là où il faut, de façon à nous faire écouter pour faire avancer le dossier de la taxe de séjour.
    Je vous avoue que je découvre le dossier relatif aux pôles économiques des montagnes, mais, croyez-moi, je ferai en sorte de l'ouvrir et d'étudier la manière dont nous pourrons avancer ensemble.
    Mesdames et messieurs, peut-être n'ai-je pas répondu à l'ensemble des questions que vous m'avez posées. En tout cas, je reste à votre disposition pour m'entretenir avec vous à tout moment - je crois que c'est important - quelles que soient les couleurs politiques, parce que, à mes yeux, si le tourisme est transversal techniquement, il doit l'être aussi politiquement. Je profite de cette occasion pour vous annoncer de façon un peu plus officielle que j'ai l'intention, dans quelques mois, d'associer bon nombre de partenaires à une véritable réflexion sur le thème : quel tourisme pour les dix, quinze, vingt ans à venir ? Je crois, en effet, qu'il faut définir une véritable stratégie.
    Vous savez que j'aime évoquer l'image de la fusée - je reviens de Guyane -, laquelle comprend souvent deux étages. Pour l'instant, il s'agit du premier étage de mon action qui consiste tout simplement à apporter des réponses rapides aux problèmes qui se présentent. Mais il est clair que l'on ne peut pas se contenter de gérer le quotidien et qu'il faudra prochainement passer à une deuxième phase, c'est-à-dire avoir une vision d'avenir, des perspectives, une stratégie. Bien entendu, j'ai l'intention de définir cette stratégie avec l'ensemble des partenaires, dont vous. Je compte donc énormément sur votre participation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous en venons aux questions.
    Je demande à chacun de respecter la règle du jeu : une question de deux minutes et une réponse brève du Gouvernement.
    Nous commençons par les questions du groupe UMP.
La parole est à Mme Arlette Franco.
    Mme Arlette Franco. Monsieur le secrétaire d'Etat, peut-être ne pourrez-vous pas répondre tout de suite à mes questions, mais je pense qu'au regard du débat qui va s'ouvrir sur la décentralisation, il est important de les poser ce soir.
    Le tourisme, en raison de son caractère transversal dans les domaines structurels, juridiques et économiques, n'avait pas été traité spécifiquement dans les lois de décentralisation de 1982 et 1983. Il a fait par la suite l'objet de deux lois successives et complémentaires : celle du 3 janvier 1987 relative à l'organisation régionale du tourisme et celle du 23 décembre 1992 concernant la répartition des compétences dans ce même domaine.
    La loi du 23 décembre 1992 prévoit dans son article 1er que l'Etat, les régions, les départements et les communes sont compétents dans le domaine du tourisme et exercent ces compétences en coopération et de façon subordonnée. A l'époque de l'élaboration de ce texte, il avait été considéré que le tourisme ne pouvait être conçu en termes de blocs de compétences pouvant être confiés tout entiers à un seul échelon de l'administration du territoire, en raison même des caractéristiques de l'activité : locale au plan de l'équipement, de l'accueil, de l'animation et de l'organisation ; départementale en termes d'appui ; régionale en matière de promotion.
    La loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse a marqué une étape nouvelle de la décentralisation du secteur touristique et la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a repris en partie la définition des compétences de la collectivité de Corse en matière de tourisme. La loi du 27 février 2002 confie notamment au conseil régional le soin de coordonner dans la région les initiatives publiques et privées dans les domaines du développement, de la promotion et de la formation.
    Je voudrais savoir en pratique comment s'harmonisent le rôle du préfet de région et la nouvelle mission confiée au conseil régional. Monsieur le secrétaire d'Etat, selon vous, dans quel domaine l'Etat doit-il demeurer compétent en matière touristique ?
    Comment envisagez-vous l'expérimentation éventuelle de nouveaux modes de répartition de compétences et d'organisation ? Quelles sont les pistes de réflexion que vous pouvez lancer avec les professionnels du tourisme ?
    Enfin, pouvez-vous envisager, comme l'a exprimé sur d'autres sujets M. le Premier ministre, la mise en place de projets pilotes sur deux ou trois régions, en métropole et en outre-mer ?
    M. le président. Voilà, en fait, trois questions, monsieur le secrétaire d'Etat. Il vous sera difficile de répondre à toutes.
    Vous avez la parole, monsieur le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Je tâcherai de le faire néanmoins.
     Madame la députée, vous m'avez interrogé sur l'évolution de l'organisation du tourisme dans le cadre du débat actuel sur la décentralisation. Comme vous l'avez rappelé, le secteur du tourisme a déjà fait l'objet d'une très large décentralisation depuis les lois de 1987 et 1992. A ce propos, je voudrais rappeler quelles sont les missions qu'il me semble nécessaire que l'Etat conserve. Cela me permettra de répondre en même temps aux interrogations de certains députés du parti socialiste concernant l'éventuelle disparition du ministère du tourisme.
    Le débat sur la décentralisation permettra de clarifier les règles du jeu entre l'ensemble des acteurs. Tout le monde fait beaucoup de choses, mais il faut qu'il y ait un maître à bord. Je pense donc que l'Etat doit conserver quelques prérogatives : la promotion de la France, la coopération avec les Etats étrangers, par exemple.
    La deuxième compétence tout à fait essentielle qui doit rester du ressort de l'Etat concerne l'harmonisation des équipements sur l'ensemble du territoire, car seul l'Etat peut jouer le rôle de régulateur, qui est nécessaire. Il s'agit aussi, bien entendu, de faire respecter la réglementation concernant la qualité, les labels, les certificats. Si nous voulons appliquer un plan « Qualité France », il faut absolument qu'il y ait des règles qui s'imposent à tous. Or, seul l'Etat peut mettre en place une liste de critères et les faire respecter.
    Il est également important que l'Etat demeure le maître des statistiques, pour éviter qu'il n'y ait trop d'indications, comme c'est le cas aujourd'hui, car elles finissent par se contredire.
    Enfin, vous avez posé la question du rôle du préfet, notamment en ce qui concerne l'application de la loi sur la démocratie de proximité. Le débat sur la décentralisation permettra de tout remettre à plat. Il vaut mieux attendre et profiter des ateliers organisés dans le cadre des assises qui feront remonter les propositions.
    M. le président. La parole est à M. Edouard Landrain.
    M. Edouard Landrain. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez l'intention de définir une stratégie pour le tourisme pour les dix à quinze ans qui viennent. Or, les dix à quinze ans qui viennent, c'est l'Europe. Pensez-vous que le tourisme de la « zone euro » puisse et doive être coordonné ? Les règles, les devoirs, les contraintes en ce qui concerne les taxes, les prix, la fiscalité, la législation sociale doivent-ils être les mêmes pour tous ? L'Europe est-elle prête à traiter conjointement l'industrie touristique ?
    M. le président. Je vous félicite pour votre briéveté, monsieur Landrain.
    La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le député, j'ai parlé il y a quelques instants de réglementation. Or, qui dit réglementation, dit qualité, et si nous voulons que le tourisme français se développe dans les meilleures conditions, il faut avoir des normes de comparaison aux niveaux national, international et, bien entendu, européen. Par conséquent, nous devons nous inscrire dans cette démarche. C'est la raison pour laquelle il faut absolument que l'on obtienne très rapidement la diminution de la TVA, au même titre que d'autres pays européens. A ce propos, je vous annonce que je me rendrai le 10 décembre prochain à Bruxelles, de façon à apporter aussi ma pierre à l'édifice. Je rencontrerai mes homologues, notamment, si possible, le ministre du tourisme allemand - car nous savons que les Allemands sont assez réservés sur la baisse de la TVA -, dans le cadre de l'harmonisation de ses taux. Notre stratégie devra donc, bien entendu, tenir compte des normes européennes.
    M. le président. Nous passons aux questions du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    La parole est à M. André Chassaigne, pour deux minutes.
    M. André Chassaigne. Monsieur le président, voulez-vous bien m'accorder quelques secondes avant que je ne pose ma question afin de remercier M. le secrétaire d'Etat pour la qualité de ses réponses,...
    M. le président. Si c'est pour le remercier, vous avez quelques secondes de plus ! (Sourires.)
    M. André Chassaigne. ... que ce soit sur la forme, que je trouve remarquable, ou sur le fond, car elles sont d'une grande précision. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. M. le secrétaire d'Etat sera certainement sensible à ces remerciemetns.
    M. André Chassaigne. En janvier 1999, M. Anicet Le Pors, conseiller d'Etat, a déposé un rapport auprès de Mme la ministre de l'économie et de la solidarité et de Mme la secrétaire d'Etat au tourisme, intitulé : « Propositions pour l'amélioration de la situation sociale et professionnelle des travailleurs saisonniers du tourisme. »
    De nature législative ou réglementaire, ces propositions concernaient, d'une part, l'amélioration des conditions de vie, notamment le logement, la prévention des atteintes à la santé et la protection sociale des saisonniers, et, d'autre part, le développement du professionnalisme avec la permanence des emplois, les itinéraires emploi-formation et la mobilité.
    Ce rapport comprend une première partie, intitulée : « Conjuguer progrès social et développement du secteur », subdivisée en quatre chapitres : « Améliorer la connaissance », « Développer l'emploi », « Assurer l'égalité de traitement », « S'inscrire dans une perspective européenne ». Chacun de ces chapitres analyse la situation, en tire des conséquences et formule des propositions.
    La deuxième partie du rapport, intitulée « Situer les améliorations proposées dans une démarche cohérente », est constituée d'un cinquième chapitre récapitulant chacune des trente et une propositions du rapport comportant des mesures nécessaires à leur mise en oeuvre.
    Enfin, un sixième chapitre, intitulé « Un statut pour les travailleurs saisonniers du tourisme », présente les grandes lignes de force de la politique proposée en leur faveur : appliquer effectivement le droit existant, réactiver les négociations collectives dans le secteur, élaborer un projet de loi relatif à leur situation sociale et professionnelle, prendre les mesures réglementaires, développer les partenariats entre l'Etat et l'ensemble des acteurs.
    Une première concrétisation a été engagée par le gouvernement précédent. Quelles suites envisagez-vous, monsieur le ministre, de donner aux propositions qui ont été formulées dans ce rapport ?
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Je serai très bref, monsieur le président. Il y a deux jours, j'ai présidé pour la première fois le Conseil national du tourisme. Cela a été pour moi l'occasion de rencontrer M. Anicet Le Pors, dont j'avais parcouru, peu de temps auparavant, le rapport. Celui-ci est intéressant, mais il me semble qu'il faudrait le compléter par une réflexion plus large autour de l'entreprise, afin que chacun puisse y trouver son compte.
    J'ai donc pris la décision de mettre en place un groupe de travail, auquel sera associé M. Anicet Le Pors, afin qu'ensemble nous poursuivions le travail qu'il a commencé.
    M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès, pour poser la dernière question.
    M. Michel Vaxès. Monsieur le secrétaire d'Etat, jusqu'à une date récente, seuls les communes et les conseils régionaux étaient compétents pour organiser le développement touristique. La loi du 23 décembre 1992, dite loi Mouly, portant répartition des compétences dans le domaine du tourisme a substantiellement modifié l'organisation touristique territoriale. En effet, cette loi définit un champ de compétences pour chaque niveau de collectivité.
    L'article 10, dans son paragraphe 5, prévoit ainsi que les organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale et des syndicats mixtes peuvent, dans la limite de leurs compétences, décider la création d'un office de tourisme intercommunal. La loi du 29 décembre 1992 prévoit, en outre, que les organes délibérants des EPCI déterminent librement la nature juridique de l'office intercommunal de tourisme, ainsi que les modalités de son organisation. Ces offices de tourisme intercommunaux peuvent donc prendre la forme juridique d'une association, d'une régie municipale, d'un syndicat d'économie mixte ou d'un établissement public industriel et commercial.
    Pourtant, il semblerait que les préfets ne s'accordent pas sur l'interprétation de ce texte, puisque certains ont créé par arrêtés des offices intercommunaux de tourisme sous la forme d'EPIC - c'est le cas pour l'office intercommunal de tourisme des Vosges et pour celui de la communauté de communes de Mimizan -, tandis que d'autres refusent qu'ils revêtent cette forme.
    Ma question est donc simple, monsieur le secrétaire d'Etat comptez-vous clarifier la loi du 23 décembre 1992 en faisant préciser explicitement dans le texte la possibilité de création, par arrêté préfectoral, d'un établissement public à caractère industriel et commercial pour les offices intercommunaux de tourisme ? Ou bien, plus simplement, puisque le texte de référence est clair, prendrez-vous les mesures nécessaires pour une unification des décisions préfectorales ?
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le député, j'avoue que je découvre ce problème en vous entendant. Je ne peux pas tout savoir ! Je vais donc m'y atteler avec mes services et voir s'il est possible de le clarifier. En tout cas, je m'engage à trouver une solution. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous en avons terminé avec les questions.
    Les crédits du tourisme seront mis aux voix à la suite de l'examen des crédits du logement.
    La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.

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DÉPÔT DE PROJETS DE LOI

    M. le président. J'ai reçu, le 6 novembre 2002, de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Espagne relatif à l'exploitation, à l'entretien, à la sécurité et, le cas échéant, à l'évolution du tunnel routier du Somport (ensemble un échange de lettres).
    Ce projet de loi, n° 342, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 6 novembre 2002, de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation de l'annexe V à la convention pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est sur la protection et la conservation des écosystèmes et de la diversité biologique de la zone maritime (ensemble un appendice 3 sur les critères de détermination des activités humaines aux fins de ladite annexe).
    Ce projet de loi, n° 343, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.

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DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION

    M. le président. J'ai reçu, le 6 novembre 2002, de M. Didier Quentin, rapporteur de la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, une proposition de résolution sur la réforme de la politique commune de la pêche (documents E 2039 à E 2041, E 2044 à E 2046 et E 2075), déposée en application de l'article 151-1 du règlement.
    Cette proposition de résolution, n° 345, est renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, en application de l'article 83 du règlement.

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DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

    M. le président. J'ai reçu, le 6 novembre 2002, de M. Didier Quentin un rapport d'information, n° 344, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur la réforme de la politique commune de la pêche.

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ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Aujourd'hui, à neuf heures, première séance publique :
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003 (n° 230) :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 256).
    Fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire : services du Premier ministre (I. - Services généraux, III. - Conseil économique et social, IV. - Plan, V. - Aménagement du territoire) ; budget annexe des Journaux officiels.
    - Fonction publique et réforme de l'Etat :
    M. Georges Tron, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 26 du rapport n° 256) ;
    - Fonction publique :
    M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (tome I de l'avis n° 261) ;
    - Aménagement du territoire :
    M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 25 du rapport n° 256) ;
    M. Jacques Le Nay, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome XIV de l'avis n° 258) ;
    - Services généraux, Conseil économique et social, Plan et Journaux officiels :
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 37 du rapport n° 256) ;
    - Plan :
    M. André Chassaigne, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome XVII de l'avis n° 258).
    A quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003 (n° 230) :
    Communication ; ligne 35 de l'état E ; article 52.
    - Communication :
    M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 12 du rapport n° 256) ;
    M. Didier Mathus, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome VII de l'avis n° 257).
    La séance est levée.
    (La séance est levée, le jeudi 7 novembre, à zéro heure quarante.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

    La décision nommant M. Gérard Léonard membre de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, publiée au Journal officiel du 5 septembre 2002, est rapportée.

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
Transmissions

    M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale les textes suivants :

Communication du 5 novembre 2002

N° E 2128. - Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion de l'accord de coopération scientifique et technologique entre la Communauté européenne et l'Ukraine (COM [2002] 550 final).
N° E 2129. - Proposition de règlement du Conseil relatif à l'harmonisation du revenu national brut aux prix du marché. - Règlement RNB (COM 558 final).