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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU VENDREDI 8 NOVEMBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du jeudi 7 novembre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES

1.  Loi de finances pour 2003 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

FONCTION PUBLIQUE, RÉFORME DE L'ÉTAT
ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE,

SERVICES DU PREMIER MINISTRE «...»M. Georges Tron, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la fonction publique et la réforme de l'Etat.
M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis de la commission des lois, pour la fonction publique.
M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial de la commission des finances, pour l'aménagement du territoire.
M. Jacques Le Nay, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour l'aménagement du territoire.
M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les services généraux, le Conseil économique et social, le Plan et le budget annexe des Journaux officiels.
M. André Chassaigne, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour le Plan.
MM.
Patrick Braouezec,
Jacques-Alain Bénisti,
Jean-Pierre Dufau,
François Sauvadet,
Pierre Cohen,
Emile Blessig,
Jean Launay,
Nicolas Perruchot,
Jean-Pierre Balligand,
Denis Merville,
Mme
Marie-Renée Oget,
MM.
Jean Lassalle,
Yves Deniaud,
Nicolas Forissier,
Serge Poignant,
Jean-Claude Lenoir.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
2.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à neuf heures.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2003

DEUXIÈME PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003 (n°s 230, 256).

FONCTION PUBLIQUE, RÉFORME DE L'ÉTAT
ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
SERVICES DU PREMIER MINISTRE

    M. le président. Nous abordons l'examen des crédits du ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire ainsi que de ceux inscrits aux services du Premier ministre et au budget annexe des Journaux officiels.
    La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan pour la fonction publique et la réforme de l'Etat.
    M. Georges Tron, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan pour la fonction publique et la réforme de l'Etat. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, il est un peu difficile de présenter le budget de la fonction publique et de la réforme de l'Etat en dix minutes : soit deux minutes suffisent, si on se contente de présenter les crédits de l'agrégat « budget de la fonction publique », soit on parle pendant deux heures, s'il s'agit d'évoquer les problèmes attenant à la réforme de l'Etat et à la fonction publique.
    Je vais essayer de synthétiser les quelques idées générales du rapport que j'ai eu l'honneur de présenter au nom de la commission des finances. Je le ferai en reprenant trois thèmes : la présentation des crédits stricto sensu ; les grands axes qui me paraissent indispensables pour mettre en place une réforme de l'Etat digne de ce nom ; les retraites.
    Le budget de la fonction publique accuse globalement une légère diminution : il passe à 218 millions d'euros, ou 211 millions si l'on ne tient pas compte des rémunérations. Il est composé de trois lignes principales : l'action sociale interministérielle, à hauteur de 119 millions d'euros, les subventions aux écoles, à hauteur de 63 millions d'euros, les crédits du fonds pour la réforme de l'Etat, à hauteur de 14 millions d'euros, ces trois lignes constituant à elles seules à peu près 90 % de l'ensemble.
    On note d'abord une baisse des crédits d'investissements de l'action sociale, dont l'explication est toute rationnelle : elle résulte de reports de crédits suffisamment importants, à eux seuls, pour abonder pratiquement trois fois les lignes initiales - 41,6 millions d'euros pour une dotation initiale de 15 millions. Il n'y a pas matière à expliquer autrement la légère diminution de ce budget.
    On note ensuite la réaffirmation de certaines priorités.
    Sur la forme, la sincérité budgétaire. Je ne reviens pas sur ce que je viens d'indiquer, mais la volonté de se conformer à ce principe est tout à fait positif. Vous partez de l'idée selon laquelle il convient d'exécuter le budget à hauteur de ce qui a été voté. A la veille, ou en tout cas quelques années avant la mise en application de la LOLF, on ne peut que souscrire à ce principe et je voudrais, sur ce point, vous féliciter, monsieur le ministre.
    Sur le fonds, les crédits de fonctionnement, notamment pour les prestations sociales interministérielles, augmentent de 5 %, ce qui est très important. A ce propos, il conviendra de réfléchir au fait que la demande, dans le domaine des prestations sociales, s'individualise ; sans doute faudra-il en tenir compte dans les prochaines années.
    L'aide au logement constitue une autre priorité et on observe là aussi que la demande d'individualisation est plus forte qu'ailleurs ; autrement dit, les agents préfèrent qu'on les aide à payer la caution plutôt qu'à trouver une place dans un grand ensemble.
    Enfin, les crédits pour frais d'installation des fonctionnaires de l'Etat en Ile-de-France, mais également dans les zones difficiles, augmentent de 64 %.
    Pour en terminer avec la présentation de ces crédits stricto sensu, je vous poserai, monsieur le ministre, deux séries de questions.
    Premièrement, ne faut-il pas repenser le fonds pour les réimplantations d'administrations, celui qui gérait jusqu'à présent les délocalisations ? Les crédits de paiement disponibles suffisent à couvrir les dépenses. Mais surtout, au moment où la décentralisation se met en place, on peut s'interroger sur l'utilité d'un fonds de cette nature, dont les crédits sont sous-consommés. A-t-il toujours été à l'origine de décisions parfaitement justifiées ? Et je n'évoquerai pas plus longuement la question de la délocalisation de l'Ecole nationale d'administration...
    Deuxièmement, ne faut-il pas élargir, en contrepartie, la mission du fonds pour la réforme de l'Etat ? Celui-ci sera doté d'environ 20 millions d'euros - dont 4 de dotation et 5 de reports. Ne serait-ce pas le moment d'en faire l'outil d'évaluation des bonnes conditions de la décentralisation qui se met en place ? On ne doit pas retomber dans certaines des erreurs commises dans les années 80, 90 et 2000, tous gouvernements confondus, laissant le nombre de fonctionnaires de l'Etat augmenter en même temps que celui des collectivités territoriales.
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan pour les services généraux, le Conseil économique et social, le Plan et le budget annexe des Journaux officiels. Je suis d'accord !
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Merci infiniment.
    La réforme de l'Etat - deuxième thème de mon rapport - appelle plusieurs réflexions de ma part.
    D'abord, la France est extrêmement en retard en la matière. Peu importe ce qu'on entend par « réforme de l'Etat », mais il faut bien voir que le chantier de la décentralisation ne suffira pas à épuiser, à lui seul, la question. S'engager dans la décentralisation, et je n'ai rien contre, ne nous dispensera pas de mener une véritable réflexion sur les administrations centrales.
    Ensuite, il est nécessaire de placer l'usager au coeur même de la notion de service public et de faire en sorte que toutes les réformes que nous allons tenter de mettre en oeuvre se fassent avec les fonctionnaires - ni contre eux, ni sans eux. L'usager est au coeur du service public et les fonctionnaires, qui sont la cheville ouvrière de la fonction publique, doivent être associés à ces réformes.
    Je passe rapidement sur l'opportunité que présente la LOLF en souhaitant néanmoins qu'on puisse anticiper tous les moyens qu'elle permet de mettre en oeuvre.
    Je passe rapidement sur la nécessité de simplifier les structures administratives. Mettre la réforme de l'Etat en oeuvre sans simplifier corrélativement les structures administratives serait voué à l'échec. Je propose, dans mon rapport, d'utiliser dans ce but les programmes pluriannuels de modernisation directement issus du comité pour la réforme de l'Etat de 1998. J'insiste d'ailleurs sur le fait qu'une grande partie des outils mis en place ces dernières années - et je rends indirectement hommage à votre prédécesseur, monsieur le ministre - n'ont pas été suffisamment poussés, alors qu'ils seraient utiles pour mettre en oeuvre cette réforme de l'Etat. Michel Sapin m'avait entendu dire la même chose l'année dernière, je n'ai donc aucun scrupule à le répéter aujourd'hui.
    Enfin, la réforme de l'Etat devra être complétée par la mise en place de véritables outils d'évaluation, non seulement au niveau de l'Assemblée nationale, même si la LOLF va permettre de renforcer le rôle des rapporteurs que nous sommes, mais également au niveau de l'Etat. Le conseil d'analyse économique, le Plan, la direction de la prévision, l'INSEE travaillent dans le même domaine et pourraient être réorganisés de façon beaucoup plus intelligente. Ainsi pourrait-on disposer d'un véritable outil d'évaluation au niveau de l'Etat et d'un véritable outil d'évaluation au niveau du Parlement. Ce ne seraient pas nécessairement les mêmes, mais ils pourraient travailler dans la même direction.
    Le rapport aborde également la modernisation de la gestion des ressources humaines. Pour des raisons liées au temps de parole qui m'est imparti, je n'entrerai pas dans le détail. Sachez seulement qu'il s'agit pour nous tous d'un dossier fondamental, qui doit s'appuyer sur quelques principes de base.
    D'abord, il faut une démarche prévisionnelle de gestion des ressources humaines. Il est indispensable que l'Etat, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, soit en mesure de connaître le nombre exact de ses agents et leur répartition dans la fonction publique selon les priorités dégagées par le Gouvernement.
    Ensuite, il est tout aussi indispensable de remotiver les fonctionnaires, notamment en reconnaissant leurs qualités et leurs mérites. Sans dire que la rémunération au mérite soit la panacée, l'alpha et l'oméga d'une politique de gestion des ressources humaines, je suis absolument convaincu que la démotivation de fonctionnaires de plus en plus nombreux, à l'origine d'un manque d'attractivité de la fonction publique, est liée en grande partie à la difficulté, pour les meilleurs d'entre eux, de voir leurs efforts reconnus.
    Le troisième thème développé dans le rapport que j'ai présenté au nom de la commission des finances est celui des retraites. S'il peut être envisagé sous tous ses aspects, notamment financiers, il doit l'être surtout sous l'aspect de la perte d'attractivité de la fonction publique.
    Le chiffre de 800 000 départs de fonctionnaires est à prendre avec précaution. En temps normal, il y en aurait eu 600 000. Ce qui signifie qu'il n'y en aura que 200 000 de plus dans les dix années qui viennent. Mais ces départs de fonctionnaires posent la question de l'attractivité de la fonction publique. Luc Ferry évoquait d'ailleurs à cette tribune, il y a quelques jours, la difficulté qu'il y avait, notamment dans le second degré, à recruter des professeurs.
    C'est assez surprenant : les régimes de retraite de la fonction publique sont aussi avantageux que ceux du privé même si, comme je l'ai indiqué dans mon rapport, le secteur privé peut présenter certains avantages.
    Pourquoi donc, en dépit de salaires supérieurs, et d'un régime de retraites favorable, ce manque d'attractivité de la fonction publique ?
    Les idées sur lesquelles, dans mon rapport, j'ai articulé le passage sur les retraites, sont les suivantes : il faut agir, s'agissant du système de retraite de la fonction publique, pour des raisons budgétaires et pour des raisons d'équité. Je crois, monsieur le ministre, que vous en êtes convaincu. Il serait dangereux de donner le sentiment que nous avons du temps devant nous. Aujourd'hui, les fonctionnaires sont conscients de la nécessité de cette réforme. Demain, ils nous en voudraient si nous ne prenions pas ensemble les mesures courageuses qui s'imposent. Ne nous leurrons pas : si nous ne le faisons pas, les systèmes exploseront financièrement.
    Je citerai trois chiffres pour terminer. Aujourd'hui, l'ensemble des engagements en matière de retraite pour la fonction publique s'élèvent à 30 milliards d'euros ; dans vingt ans, ils atteindront 60 milliards dans trente ans, 90. Personne ne saurait prétendre que, dans le cadre du régime par répartition qui est le nôtre, nous n'avons pas à prendre aujourd'hui de mesures tenant compte de cette évolution.
    Voilà, succinctement présenté, le rapport de la commission des finances.
    Je tiens, pour finir, - mais je ne sais pas si c'est la tradition - à remercier l'ensemble des administrateurs de la commission des finances qui m'ont aidé pour essayer de synthétiser un sujet absolument fondamental. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour la fonction publique.
    M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour la fonction publique. Après la commission des finances, il appartenait à la commission des lois d'examiner le budget de la fonction publique ; c'est à ce titre que je m'exprime devant vous.
    Les enjeux de la réforme de l'Etat et de la fonction publique prennent aujourd'hui une ampleur significative, non seulement parce que le Gouvernement, si j'en crois ses effets d'annonce, s'est engagé dans un projet décentralisateur, mais aussi et surtout parce que, d'ici à 2009, près de 30 % des fonctionnaires des ministères civils en poste à la fin de l'année 2000 auront cessé leur activité. Plus de 460 000 fonctionnaires seront partis en retraite.
    L'importance de la réforme de l'Etat est donc considérablement accrue, et il est de la responsabilité de la représentation nationale et de celle du Gouvernement de veiller à la qualité du service public. Mais le projet de budget qui nous est présenté est un projet sans grande imagination, dans lequel innovation est synonyme de réduction budgétaire.
    En effet, alors que le rôle du ministère de la fonction publique et de la réforme de l'Etat est plus que jamais nécessaire, ce projet de budget est en diminution de près de 2 %. Le projet de budget de la fonction publique n'a certes pas pour vocation d'énumérer les postes budgétaires des différentes administrations de l'Etat, mais pour autant nous ne pouvons pas rester indifférents à la situation des effectifs, et en particulier à la suppression proposée de 1 089 postes budgétaires - et non réels. Sans tenir compte du risque de multiplication des vacances de postes, ce sont en réalité près de 92 000 emplois qui disparaîtront, notamment du fait de la fin du dispositif des emplois-jeunes, sans qu'aucune création d'emploi n'ait été prévue dans les administrations d'Etat pour y remédier.
    Vous admettez, monsieur le ministre, que la réduction des effectifs des fonctionnaires ne saurait être un objectif en soi, et je vous en donne acte. Mais les faits sont là. Cette situation est d'autant plus inquiétante qu'elle est, à mes yeux, incohérente. Abstraction faite des grands ministères régaliens, qui se voient largement dotés - la défense, avec 1 534 postes supplémentaires, l'intérieur, avec 1 864, la justice, avec 1 924 -, ce sont près de 10 % des fonctionnaires qui, à leur départ à la retraite, ne seront pas remplacés.
    Force est de constater que le Gouvernement n'a pas encore saisi l'opportunité d'un débat sur le problème des effectifs de la fonction publique et sur le rôle de la fonction publique en ce début de xxie siècle, dans le cadre de la réforme de l'Etat. La limitation - apparente - à 1 089 des suppressions d'emplois budgétaires ne doit pas escamoter le débat sur le fonctionnement de la fonction publique.
    Au mois d'août, monsieur le ministre, vous affichiez votre volonté de ne pas remplacer les fonctionnaires plutôt que de supprimer des emplois budgétaires. Là encore, dont acte. Vous avez souhaité organiser en amont de la procédure budgétaire un débat sur l'évolution ministérielle et interministérielle de l'emploi public sur les cinq à dix années à venir. J'espère que ce débat ne se limitera pas au débat budgétaire, et qu'il ne servira pas qu'à légitimer les coupes claires auquel l'actuel Gouvernement procède.
    Faute de débattre de la fonction publique et de son évolution financière, nous n'aurons pas l'occasion de nous prononcer clairement sur l'évolution des salaires pour 2003. Vous avez annoncé que de nouvelles négociations salariales auraient lieu début 2003. La représentation nationale aurait aimé savoir sur quelles bases celles-ci seront engagées.
    Les dotations ministérielles de la loi de finances initiale pour 2003 ont été construites sur le fondement de la progression salariale enregistrée en mars 2002. Vous vous êtes limité à augmenter la dotation des charges communes. Je vous rappelle cependant que l'article 32 de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances dispose que la sincérité des lois de finances « s'apprécie compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler », que les mesures envisagées soient positives ou négatives !
    Vous vous privez aussi de toute marge de manoeuvre lors des négociations salariales à venir, alors même que la question de l'attractivité de la fonction publique est plus que jamais cruciale. Les revalorisations pour l'année 2002 se limiteront à 1,2, voire 1,3 %, alors que l'inflation atteignait déjà 2,3 % en octobre selon l'INSEE. Vous en conviendrez, monsieur le ministre, le compte n'y est pas !
    A cet égard, je veux une fois de plus m'inscrire en faux contre l'idée largement relayée par des commentateurs « bien intentionnés », selon laquelle les fonctionnaires seraient de toute façon mieux payés que les salariés du privé. Cette comparaison est simpliste lorsque l'on sait que les agents de l'Etat ne représentent qu'une part réduite de la population active : 2,3 millions sur 26,4 millions de personnes. Elle est d'autant plus simpliste que le poids des cadres moyens et supérieurs est plus élevé dans la fonction publique.
    Par ailleurs, je m'inquiète de l'effectivité des crédits affectés à l'action sociale interministérielle, dont vous avez annoncé la hausse. En effet, ces crédits, qui sont destinés à financer des dépenses d'équipement, mais aussi des prestations et des versements facultatifs nous sont présentés de façon incohérente, et il semble que leur niveau de consommation soit très faible. Monsieur le ministre, dans l'intérêt du bon emploi des crédits de l'Etat, envisagez-vous de conduire une évaluation précise des actions sociales interministérielles ?
    Il faut néanmoins noter la hausse des dépenses en faveur du développement de l'emploi et de l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.
    Monsieur le ministre, s'il est un débat qu'il faut engager, c'est bien celui du recrutement et de la formation des fonctionnaires d'Etat. Il en va à la fois de la compensation de la massification des départs en retraite que nous aurons à subir dans les années à venir, et de la réforme de l'Etat.
    A ce point de mon propos, permettez-moi d'évoquer l'extravagante information qui circule depuis quelques jours - en tout cas ces dernières vingt-quatre heures - sur l'intention de supprimer l'ENA. Certains de nos collègues, voulant sans doute qu'on parle davantage d'eux qu'on ne le fait normalement, ont imaginé, en effet, par ce moyen, attirer l'attention plus sur leur personne que sur les problèmes de l'ENA.
    M. Pierre Cohen. Ça, c'est vrai !
    M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis. J'ai qualifié d'extravagante cette suggestion car s'il est nécessaire de continuer à démocratiser l'ENA, comme nous l'avions fait en instaurant le concours de la troisième voie au début des années 80, il faut néanmoins maintenir ce lieu de formation de la haute fonction publique, qu'elle soit d'Etat ou territoriale. Je profite de cette occasion, monsieur le ministre, pour vous dire ma préoccupation en ce domaine : il faut que l'ENA forme tout autant que les IRA « les futurs cadres de la fonction publique territoriale ».
    S'agissant du recrutement des fonctionnaires, il est fondamental pour assurer l'attractivité de la fonction publique et faire pièce à la concurrence du secteur privé, de revoir les modes de recrutement et d'envisager la notion de carrière de manière différente. Dans ce domaine, le gouvernement précédent n'était pas resté inactif. J'espère que le nouveau va continuer sur cette lancée.
    Je m'inquiète d'ailleurs des intentions gouvernementales à l'égard des mesures prises en faveur de la résorption de l'emploi précaire. Il en va du sort des agents publics participant efficacement au bon fonctionnement de l'Etat.
    Se pose aussi le problème des congés de fin d'activité. Vous nous aviez annoncé en commission des lois l'intention du Gouvernement de déposer un amendement visant à prévoir un nouveau dispositif mais au moment où le débat sur la retraite n'est pas encore engagé, il me semble prématuré d'annoncer des mesures touchant à ces congés de fin d'activité.
    Pour ce qui est de la formation, je vous donne volontiers acte de vos déclarations en faveur de la mobilité des fonctionnaires. Ainsi que je l'expose dans mon rapport, il est crucial de favoriser la mobilité au sein et entre les trois fonctions publiques de manière à promouvoir une véritable culture commune de l'intérêt général.
    J'en arrive à l'observatoire de l'emploi public. Ayant à plusieurs reprises attiré votre attention sur l'importance de cet outil mis en place par votre prédécesseur, je veux ce matin dénoncer le comportement de la majorité parlementaire du Sénat et de l'Assemblée nationale qui se sont attribué les deux postes auxquels pouvait prétendre le Parlement dans cette instance. Il eût pourtant été souhaitable que l'opposition y soit également représentée.
    Par ailleurs, les crédits destinés à la seule formation des fonctionnaires de l'Etat ne traduisent aucune véritable volonté spécifique d'amélioration. Ils se bornent à prendre en compte l'évolution des recrutements et la poursuite de mesures décidées sous le précédent ministère.
    Mon temps de parole étant limité, je vous renvoie, mes chers collègues, à mon rapport écrit pour l'essentiel des propositions que j'ai faites devant la commission des lois. J'y invite en conclusion l'Assemblée à repousser votre budget, monsieur le ministre, non pas tant parce qu'il est fondamentalement mauvais, mais parce qu'il est rempli d'incertitudes et que son rejet traduirait la volonté de la représentation nationale d'obtenir un véritable débat sur l'avenir de la fonction publique dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan pour l'aménagement du territoire.
    M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour l'aménagement du territoire. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, en vingt ans, la France est passée d'une gestion de son territoire par un Etat centralisé à une gestion de territoires, multiples et multiformes, relevant d'acteurs de plus en plus nombreux : communes, départements, régions, Communauté européenne.
    Néanmoins, je reste persuadé que l'Etat a un rôle essentiel à jouer pour répondre aux attentes du citoyen en matière d'aménagement du territoire : il doit assurer l'égalité des conditions d'accès à l'emploi, à la culture et à l'éducation, la préservation du maillage des services publics, des conditions équitables de dessertes ferroviaires, routières et aériennes, et d'accès aux nouvelles technologies.
    Cependant, ce rôle connaît aujourd'hui des mutations importantes. Hier, l'Etat tentait de remédier aux déséquilibres entre Paris et la province. Aujourd'hui il s'attache à améliorer la compétitivité des territoires. Demain, il devra accompagner la décentralisation en garantissant la cohérence territoriale.
    Ce projet de budget de l'aménagement du territoire représente donc un enjeu essentiel car il reflète ces évolutions. Le projet de loi de finances pour 2003 prévoit un budget de 268,5 millions d'euros pour l'aménagement du territoire, soit une baisse de 5,9 % par rapport à 2002.
    Cependant, si l'on prend en compte les reports de crédits qui devraient intervenir sur l'exercice 2003 et qui seront très substantiels, on constate que les moyens consacrés à l'aménagement du territoire sont globalement reconduits.
    De plus, je tiens à rappeler que le budget de l'aménagement du territoire ne retrace qu'une partie des crédits consacrés à cette politique, d'autres ministères, mais aussi des dispositifs d'incitation fiscale, ainsi que les fonds structurels européens concourent aussi financièrement à l'aménagement du territoire. En 2003, plus de 10 milliards d'euros seront donc consacrés au territoire français.
    Trois orientations structurent aujourd'hui la politique d'aménagement du territoire et le budget qui lui est consacré : premièrement, une volonté de maîtrise et d'optimisation de la dépense publique ; deuxièmement, l'amélioration de la compétitivité des territoires de la France ; troisièmement, enfin, la modernisation et la simplification de la politique d'aménagement du territoire.
    En effet, ce budget illustre une gestion pragmatique et réaliste de la dépense publique. Monsieur le ministre, permettez-moi au nom de la commission des finances de le saluer. A titre d'exemple, la DATAR voit son budget baisser de 4,3 % en raison d'une diminution des crédits d'études et d'informatique, grâce à une meilleure prise en compte des besoins réels de cet organisme.
    De même, les dépenses d'interventions du Fonds national pour l'aménagement et le développement du territoire - le FNADT - sont en baisse de 22 %. En réalité, cette diminution prend en compte les reports massifs qui interviendront sur l'exercice 2003. Est-il vraiment nécessaire d'afficher une hausse du budget quand on constate une augmentation des reports et une diminution corrélative des taux de consommation ?
    Je rappelle à cet effet que les reports de crédits intervenus de l'exercice 2001 à l'exercice 2002 ont représenté plus de 100 millions d'euros alors que le budget voté en loi de finances initiale s'élevait à 270 millions d'euros.
    M. Jean Launay. On en reparlera l'année prochaine !
    M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial. L'exécution des contrats de plan pose aussi le problème de l'efficacité de la dépense publique. Force est de constater, en effet, le retard pris pour la réalisation de leur engagement depuis leur signature par certains ministères. Leurs taux de consommation sont aujourd'hui compris entre 25 et 35 % alors qu'ils devraient atteindre 42 %. Les procédures administratives apparaissent parfois trop complexes pour les acteurs locaux et découragent l'initiative.
    M. Hervé Novelli. Très juste !
    M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial. La révision des contrats de plan, en 2003, sera, je le pense, l'occasion de faire un premier bilan, et je l'espère d'accélérer la réalisation de certains projets.
    Les moyens budgétaires consacrés cette année aux contrats de plan Etat-région dans le budget de l'aménagement du territoire sont importants : 20 millions d'euros sont prévus sur les dépenses d'interventions du FNADT et 129 millions d'euros sur les dépenses d'investissement. Ces crédits permettront notamment d'accompagner la signature des contrats de pays et d'agglomération.
    Je tiens aussi à saluer les premières réformes du Gouvernement et votre action personnelle, monsieur le ministre, visant à remédier au retard de la France dans la consommation des fonds structurels européens.
    M. Hervé Novelli. Tout à fait !
    M. Richard Mallié. Il était temps !
    M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial. En effet, le taux de programmation de la France est aujourd'hui de 15 % alors qu'il devrait être de 30 %.
    M. Richard Mallié. Absolument !
    M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial. Or, en vertu de la règle de « dégagement d'office », la France pourrait bien voir certains crédits européens annulés. Les fonds structurels, je le rappelle, représentent des montants importants : la France devrait percevoir 16 milliards d'euros sur la période 2000-2006, dont 3,3 milliards d'euros en 2003.
    Le commissaire européen chargé de la politique régionale, M. Michel Barnier, venu mardi dans le Cantal et dans le Puy-de-Dôme voir les réalisations ayant reçu le concours des fonds européens a ainsi confirmé le déblocage de 19 millions d'euros de fonds en faveur d'un projet d'infrastructure routière d'aménagement du territoire, le tunnel du Lioran, et je voudrais ici le saluer.
    Les premières réformes mises en oeuvre permettent un allégement important des procédures et un renforcement de l'appui aux projets. Surtout, l'expérimentation d'une gestion directe de ces fonds par le conseil régional d'Alsace me paraît une piste extrêmement positive.
    Deuxième axe de ce budget, l'amélioration de l'attractivité et de la compétitivité de nos territoires. Ainsi, des crédits sont consacrés à l'Agence française pour les investissements internationaux qui assure la prospection des investissements étrangers.
    De même, le budget prévoit de doter la prime d'aménagement du territoire de 67 millions d'euros en autorisations de programme et de 45 millions d'euros en crédits de paiement. Cet instrument favorise la création d'entreprises dans les zones d'aménagement du territoire et a accompagné la création de 30 000 emplois en 2001.
    Il faut noter également que les projets du Gouvernement en matière de téléphonie mobile devraient permettre de rattraper le retard de la France en matière de couverture du territoire, notamment dans nos massifs. En effet, 44 millions d'euros au sein du FNADT devraient être consacrés en 2003 à la construction de pylônes, ce qui permettra de réelles avancées. Cela marque une rupture avec l'immobilisme du précédent gouvernement qui a laissé sans suite le CNADT de Limoges de juin 2001.
    Troisième axe de ce budget, simplifier et moderniser la politique d'aménagement du territoire. Au moment même ou nous mettons en place une vaste réforme de la décentralisation, nous devons selon moi retrouver la vocation première de la politique d'aménagement du territoire : garantir un Etat proche du citoyen et un égal accès au service public.
    Cela signifie sans doute une simplification de nos procédures et de nos structures administratives. Les différentes réformes menées par le précédent gouvernement ont conduit à un enchevêtrement des projets : pays, agglomération, schéma de cohérence territoriale. Je pourrais citer beaucoup d'autres structures qui se superposent.
    Or les élus locaux ont toutes les difficultés à mettre en place ces dispositifs et le citoyen est dérouté par la complexité de l'action publique. Je tiens donc à saluer le projet du Gouvernement visant à remettre à plat l'ensemble du dispositif. Je pense que cette interrogation sur la pertinence des outils en matière d'aménagement du territoire constituera une obligation pour nous. C'est à ce prix que l'Etat pourra pleinement retrouver son efficacité, et c'est donc à ce prix que nous pourrons pleinement conduire la réforme de l'Etat en faveur du développement de l'ensemble de notre territoire. Pour toutes ces raisons, je vous invite, mes chers collègues, à voter le budget qui nous est proposé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour l'aménagement du territoire.
    M. Jacques Le Nay, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour l'aménagement du territoire. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la politique d'aménagement du territoire qui conditionne le développement équilibré de l'espace français connaîtra en 2003 des évolutions décisives pour l'avenir. Il nous reviendra tout d'abord de réfléchir aux mécanismes de péréquation financière qui permettront de préserver la solidarité entre les territoires les plus avantagés et les territoires les plus fragiles.
    Ces dispositifs viendront compléter les nouvelles lois de décentralisation qui nous seront soumises dans les prochaines semaines, et garantir la cohésion sociale et territoriale de notre pays, parallèlement à la libération des énergies locales. Il est en effet indispensable de ne pas laisser sur le bord du chemin les espaces défavorisés et enclavés.
    Dans cette optique, il me semble indispensable de veiller au maintien des services publics en milieu rural, et surtout de réfléchir à de nouveaux dispositifs de soutien à l'initiative privée, sous la forme d'allégements de charges. Au dispositif actuel, complexe et peu efficace, pourrait être substitué un système de zones franches rurales, inspiré des zones franches urbaines qui ont fait leur preuve depuis 1996.
    Par ailleurs, il sera nécessaire de simplifier le dispositif législatif qui encadre la naissance, aujourd'hui assez chaotique selon les régions, des pays et des agglomérations. Ainsi, la Bretagne a pris une avance sur ce point. Mais nous constatons sur un plan général que la multiplication de ces structures, dont l'élaboration et le fonctionnement reposent sur des procédures toujours plus lourdes, débouche sur un enchevêtrement de périmètres peu cohérents, sur des incertitudes juridiques et sur une complexité décourageante. C'est ce qui explique qu'à l'heure actuelle, seuls cinq contrats de pays et quatre contrats d'agglomération aient été signés, alors que le volet territorial des contrats de plan Etat-région leur apporte un soutien financier de 655 millions d'euros sur la période 2000-2006, ce qui est considérable.
    Enfin, il conviendra de veiller à une meilleure mise en oeuvre des crédits nationaux et communautaires prévus dans le cadre de la planification territoriale. Les premières mesures prises par le Gouvernement en la matière et sur lesquelles je reviendrai tout à l'heure devraient permettre d'atteindre cet objectif.
    Permettez-moi à présent d'aborder l'aspect le plus strictement budgétaire de cette politique pour l'an prochain. Le projet de budget pour 2003 est marqué par la volonté de préserver les moyens financiers destinés à la politique d'aménagement du territoire, dans un contexte budgétaire pourtant tendu. Les autorisations de programme, qui dessinent des perspectives d'investissements pluriannuels, restent stables à 270 millions d'euros. Certes, les crédits de paiement passent de 285,1 à 268,5 millions d'euros, en recul de 5,8 %. Mais cette évolution n'affectera pas la politique d'aménagement du territoire, étant donné l'importance des reports de crédits effectués d'une année sur l'autre.
    Avec un budget de 13,5 millions d'euros, les moyens des services de la DATAR sont réduits de 4,3 % du fait d'une diminution de 7,7 % des dépenses de matériel et de fonctionnement. Cette évolution, alliée à une consolidation des emplois stratégiques au sein de l'institution, va dans le sens d'une rationalisation des moyens de fonctionnement.
    Il faut également avoir à l'esprit que la baisse de 26,2 % des crédits de paiement affectés à la prime d'aménagement du territoire, la PAT, qui atteignent 45 millions d'euros en 2003, sera entièrement compensée par le report de 15 millions d'euros de crédits non consommés en 2002. De ce point de vue, l'évolution du budget de l'aménagement du territoire pour 2003 obéit à des règles de bonne gestion et à une logique pragmatique.
    Les crédits de paiement inscrits dans le projet de loi de finances pour 2003, au titre du FNADT sont globalement stables. Toutefois, ils augmentent de 12,6 % pour les subventions d'investissement, qui atteindront 150 millions d'euros en 2003. Surtout, une utilisation plus souple, et donc plus rapide, de ces crédits, sera favorisée par leur évolution interne au profit de la partie non contractualisée qui progresse de 63,6 %. Cette évolution judicieuse devra s'accompagner d'une amélioration des modalités de gestion de cet instrument car celle-ci reste lourde et complexe.
    D'une manière générale, l'engagement des crédits destinés à l'aménagement des territoires a été ralenti en 2002 par des lourdeurs procédurales trop importantes, dont le nouveau gouvernement ne peut être tenu pour responsable. Le taux de mise en oeuvre des crédits de l'Etat inscrits dans les contrats de plan Etat-région 2000-2006 passe de 24 % à 36,9 %, ce qui reste inférieur au taux de 42 % qui correspondrait à une exécution régulière des engagements pris. A cet égard, le retard pris sous la précédente législature, en matière ferroviaire et sanitaire notamment, où les taux d'exécution n'atteignent respectivement que 21,3 % et 26,4 %, est particulièrement regrettable.
    De même, le taux d'exécution des crédits programmés dans le cadre des DOCUP, les documents uniques de programmation, pour la plupart validés par la Commission européenne en mars 2001, reste inférieur de moitié à ce qu'il devrait être pour que les fonds structurés non consommés ne soient pas gelés. En effet, les crédits non consommés deux ans après leur programmation ne peuvent être reportés. Ils sont alors purement et simplement annulés. Cela peut être dramatique, si l'on songe que les crédits prévus chaque année, dans le cadre des politiques communautaires, sont plus de douze fois supérieurs à ceux du budget de la DATAR.
    Je veux enfin revenir sur les modifications du cadre réglementaire intervenues au cours de l'année écoulée.
    En premier lieu, l'Agence française pour les investissements internationaux a été effectivement mise en place par un décret du 21 novembre 2001. Cette agence regroupe des moyens qui étaient auparavant éclatés entre plusieurs ministères et associations, ce qui constitue une simplification louable de notre dispositif de prospection internationale des investissements. Toutefois, on peut s'interroger sur la pertinence des doublons formés avec les représentations de la DREE dans les pays où l'AFII est présente, et sur la nécessité d'employer quarante-six personnes au siège même de cet établissement public. L'avenir dira si cette nouvelle institution contribue effectivement au développement équilibré du territoire national.
    Ensuite, les schémas de services collectifs ont été officiellement publiés par un décret du 18 avril 2002. Or les objectifs fixés dans ces documents paraissent parfois manquer de réalisme, faute de crédits suffisants. Dès lors, on peut s'interroger sur la pertinence de ces instruments de planification à long terme qui se fixaient un horizon à vingt ans, durée bien présomptueuse pour un secteur tel que les télécommunications, compte tenu du caractère imprévisible des innovations technologiques. Les actuels contrats de plan Etat-région n'ont d'ailleurs pas été soumis à ces schémas, alors que ces derniers étaient censés les inspirer.
    Enfin et surtout, un décret du 26 avril 2002 prévoit une amélioration des procédures de contrôle de la gestion des fonds structurels. Ce texte a été complété par une circulaire du 15 juillet 2002 qui traite du dispositif de gestion, de suivi et de contrôle des programmes cofinancés par les fonds structurels. Votre excellente initiative, monsieur le ministre, permettra vraisemblablement une meilleure mobilisation des crédits communautaires si les collectivités locales s'engagent elles aussi sur des projets.
    En conséquence, la politique d'aménagement du territoire, dont le financement vous est soumis, repose sur des mécanismes en voie d'amélioration et devrait permettre d'assurer efficacement le développement solidaire de l'ensemble du territoire national. Sur le plan budgétaire, l'essentiel est que les moyens financiers disponibles sont maintenus et les règles de gestion améliorées.
    Je me réjouis donc que la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire ait rendu, comme je l'y avais invitée, un avis favorable à l'adoption de ces crédits pour 2003. C'est pourquoi je vous appelle résolument, mes chers collègues, à confirmer à présent ce soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les services généraux, le Conseil économique et social, le Plan et le budget annexe des Journaux officiels.
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les services généraux, le Conseil économique et social, le Plan et le budget annexe des Journaux officiels. Ainsi, monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous examinons aussi ce matin le budget des services du Premier ministre qui concerne cinq fascicules : le Conseil économique et social ; le budget annexe des Journaux officiels ; le Plan ; les comptes spéciaux du Trésor et les services généraux du Premier ministre.
    Nous suivrons cet ordre car je veux pouvoir développer plus précisément la partie consacrée aux fonds spéciaux qui se trouve dans le grand chapitre consacré aux services du Premier ministre.
    La totalité des crédits analysés dans ce rapport s'élève à 1,4 milliard d'euros, comme l'an passé, et les effectifs, 3 245 personnes, sont au même niveau qu'en 2002.
    Je rappelle qu'en vertu du titre XI de la Constitution le Conseil économique et social donne un avis sur les projets de loi, d'ordonnance ou de décret et sur les propositions de loi qui lui sont soumis, ainsi que sur tout problème de caractère économique et social, sur saisine du Gouvernement. Permettez-moi ici d'espérer que le nouveau gouvernement fera autant appel au Conseil que le précédent.
    Le CES a d'ailleurs lui-même présenté quelques réflexions intéressantes sur son rôle, sur sa représentativité et sur la notion de société civile. Représentant une part essentielle des organisations de la société civile, il constitue, en effet, et au-delà de l'expertise, un relais entre la puissance publique et les catégories qu'il représente.
    Les actions de communication sont désormais au coeur du programme de son président. Un service de communication et de la presse a été créé en 2001. On ne peut que s'en féliciter.
    En ce qui concerne ses activités internationales, il a renforcé ses liens avec une soixantaine de conseils économiques et sociaux dans le monde. Il a créé, à l'heure de la mondialisation, un service de relations internationales ainsi qu'une délégation pour l'Union européenne, reconnaissant ainsi l'importance de la construction communautaire.
    S'agissant du projet de budget annexe des Journaux officiels, le montant des recettes pour 2003 est estimé à 194,27 millions d'euros, soit une augmentation de 14,3 % par rapport à 2002. L'explication réside dans une hausse des recettes provenant des annonces légales, lesquelles représentent une bonne partie de ses recettes, même si une baisse des ventes au numéro est prévue.
    Dans tous les cas, la direction des Journaux officiels souhaite développer les nouveaux supports de diffusion et répondre aux nouvelles demandes de la clientèle, notamment par l'amélioration du service public de consultation des annonces légales.
    L'activité traditionnelle des Journaux officiels est évidemment bouleversée par l'édition électronique et Internet. Une bonne organisation des choses permettra le développement croissant de la diffusion gratuite de données juridiques sur le site Internet, qui remporte d'ores et déjà un vif succès. C'est l'aboutissement de la politique de démocratisation de l'accès au droit initiée par le gouvernement précédent. Il faut continuer.
    L'exercice devrait donc dégager, comme il est de tradition, un excédent d'exploitation plus élevé que par le passé, soit 26,92 millions d'euros au lieu de 12,97 millions, l'an dernier. Cet exercice devrait permettre de reverser au budget général un montant de 25,14 millions d'euros, ce qui n'est pas négligeable.
    A propos des budgets annexes, je dois rappeler que, si l'article 18 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2005, les a conservés, elle en a donné une définition plus resserrée. Au regard de cette loi, l'avenir de leur statut n'est toujours pas tracé. Or il n'est pas douteux que le futur des Journaux officiels dépendra de l'évolution du statut juridique de la société chargée de la fabrication des publications. Les débats sur ce sujet sont un peu difficiles.
    Dans ce contexte, monsieur le ministre, il faut que vous indiquiez clairement les perspectives que votre gouvernement fixe aux Journaux officiels et déterminiez les moyens qui devront être mis en oeuvre, car la négociation interne ne suffit plus.
    En ce qui concerne le Plan, les crédits demandés s'élèvent à 24,81 millions d'euros, en diminution sensible de 6,99 %. Cette baisse affecte principalement le Commissariat du plan et le Conseil national de l'évaluation.
    Sur l'ensemble des crédits de matériel et de fonctionnement, on observe cependant que le taux de consommation des crédits disponibles sur le chapitre 34-98 n'a été, en 2001, que de 44,47 %. Je laisse à votre appréciation les mesures à prendre.
    Le précédent gouvernement avait défini, pour le Commissariat du plan, un programme de travail, et tracé de nouveaux axes de réflexion. Ce programme de travail ambitieux avait fait l'objet d'un débat avec les acteurs économiques et sociaux. Un rapport sur les perspectives de la France avait même été élaboré, puis diffusé en juillet 2000 et présenté le 7 septembre 2000 au Conseil économique et social. Le Gouvernement avait alors souhaité renforcer la mission du Commissariat concernant l'évaluation des politiques publiques, notamment celles des procédures contractuelles.
    La période 2001-2002 a été une période de transition. Le Commissariat du Plan doit poursuivre son travail, mais, pour cela, monsieur le ministre, vous devez expliquer comment votre gouvernement entend travailler avec lui.
    Quant au budget des services généraux du Premier ministre, il représente à lui seul près de 90 % de l'ensemble des cinq fascicules budgétaires. Les crédits demandés pour 2003 s'élèvent à 1,14 milliard d'euros soit une diminution de 1,84 %.
    Si le périmètre de ce budget est particulièrement hétérogène, la Cour des comptes a cependant distingué trois catégories de dépenses relatives : aux cabinets ministériels, aux organismes administratifs permanents placés sous l'autorité du Premier ministre, et aux diverses missions, commissions et délégations qui lui sont rattachées. Cependant, cette répartition ne recoupe pas les agrégats présentés dans les projets de loi de finances.
    Cette année, quatre agrégats, restructurés il y a deux ans, sont à nouveau présentés ; ils concernent l'administration générale, la communication, la fonction publique et les autorités administratives indépendantes. Ces agrégats ne sauraient pourtant constituer une préfiguration des missions dans le sens retenu par la loi du 1er août 2001 relative aux lois de finances. Ils devraient donc, dans la perspective de l'entrée en vigueur de cette dernière, correspondre à des politiques publiques clairement définies. C'est pourquoi une profonde réforme du fascicule budgétaire doit être entamée. J'espère que le Premier ministre aura à coeur de soutenir et stimuler la mise en oeuvre de cette réforme dans ses propres services.
    Cependant la pauvreté des indicateurs proposés et les retards dans les réponses aux questionnaires budgétaires malheureusement traditionnels, mais encore plus anormaux cette année car ils ont été officiellement institués par la loi organique du 1er août 2001, ainsi que les réponses reçues des services du chef du Gouvernement qui devraient pourtant être exemplaires, laissent mal augurer de cette capacité d'adaptation, monsieur le ministre. Vous pouvez compter sur le rapporteur que je suis pour vous aider, opiniâtrement, sans cesse, à tenir les enjeux de cette réforme.
    Telles sont les principales remarques que je tenais à formuler sur les services du Premier ministre avant d'en venir à la question des fonds spéciaux.
    Dérogatoire aux règles de la comptabilité publique, l'utilisation opaque des fonds spéciaux était injustifiable, au regard des principes démocratiques. C'est à la suite des révélations judiciaires faisant état de voyages payés en liquide pour des sommes considérables au bénéfice de M. Jacques Chirac, de sa femme et de sa fille qu'une campagne insidieuse concernant l'utilisation des fonds spéciaux destinés à Matignon a conduit Lionel Jospin a annoncé une réforme de leur régime.
    Il a été tout d'abord décidé de créer une nouvelle commission de contrôle à dominante politique et parlementaire. Cette commission a été chargée de prendre connaissance de l'emploi des fonds et d'établir un rapport ainsi qu'un procès verbal constatant que les dépenses sont couvertes par des pièces justificatives pour un montant égal, destiné in fine à la Cour des comptes.
    Cette réforme a été complétée par une modification de la nomenclature budgétaire. Dans le régime antérieur, le chapitre servait à financer, d'une part, des opérations de direction générale de la sécurité extérieure, dont personne d'ailleurs ne conteste le caractère nécessairement secret et, d'autre part, des dépenses devant relever, à l'évidence, de chapitres budgétaires classiques parfaitement contrôlables, telles notamment les fameuses primes de cabinets ministériels.
    Les crédits, qui n'étaient pas liés à des actions de sécurité, ont donc été retirés du chapitre des fonds spéciaux du Gouvernement et, afin de continuer à financer les indemnités allouées aux collaborateurs des ministres et du Président de la République, des abondements de crédits ont été opérés dans les budgets des ministères qui bénéficiaient antérieurement des fonds spéciaux. Ces indemnités, réintégrées dans le droit commun, doivent désormais être versées par virement, donner lieu à une fiche de paie et être bien évidemment déclarées aux services fiscaux.
    Cet effort de transparence sans précédent avait débuté dès 1999 lorsque le gouvernement précédent avait décidé de publier en annexe au projet de loi de finances, la composition détaillée des cabinets ministériels et l'origine des collaborateurs. Ainsi, le 18 juillet 2001, Lionel Jospin a présenté la répartition réelle des crédits et s'est engagé à restituer le solde des comptes des fonds spéciaux, à l'époque 102 millions de francs, constaté à la fin de la législature. Il le fera alors qu'aucun de ses prédécesseurs ne l'avait fait avant lui.
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Il n'a restitué que 18 millions de francs.
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial. Cette politique de transparence a encore été complétée par une réforme des conditions d'abondements des crédits en cours de gestion. La loi du 1er août 2001 a prévu, à partir du 1er janvier 2005, la publication de tous les décrets et arrêtés de mise en oeuvre des lois des finances.
    M. Richard Mallié. On ne va pas refaire l'histoire ! Restons-en aux crédits !
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial. Restait encore à traiter la délicate question de la revalorisation des rémunérations des ministres, qui utilisaient, jusqu'à cette réforme, les fonds spéciaux pour compléter leur traitement. Elle a été réglée en août dernier par l'article 14 de la loi de finances rectificatives dont les conditions d'adoption sont apparues peu satisfaisantes puisque traitée au détour d'un amendement parlementaire, provenant de la commission de finances du Sénat.
    M. Richard Mallié. Charasse !
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial. Cette précipitation a donné un texte imparfait. En effet, s'il est prévu une imposition du traitement brut mensuel et de l'indemnité de résidence à l'impôt sur le revenu et leur soumission aux cotisations sociales, le texte ne soumet pas ces rémunérations à la contribution sociale généralisée et à la contribution pour le remboursement de la dette sociale.
    Par ailleurs, une part considérable de la rémunération échappe à tout prélèvement puisque l'indemnité de fonction n'est soumise ni à l'impôt ni aux cotisations sociales, alors que le train de vie de nos ministres est largement pris en charge par les dotations de fonctionnement des ministères. Je rappelle que l'indemnité de fonction des députés, si elle n'est pas imposable, est au moins soumise à cotisations sociales. Les ministres de la République, qui se sont vu octroyer une augmentation de 70 % de leur salaire avec effet rétroactif, eux, sont exemptés de l'effort de solidarité nationale !
    Il est regrettable aussi que le Premier ministre ait cru bon, lors de l'émission 100 minutes pour convaincre de France 2, du 26 septembre, d'ajouter qu'il était « le premier chef de gouvernement de la Ve République à avoir des ministres qui ne sont plus payés en liquide ». Comme je l'ai rappelé il y a un instant, depuis le 1er janvier 2002, alors que M. Lionel Jospin était encore Premier ministre, et à la suite de sa réforme, les ministres ne pouvaient déjà plus bénéficier d'indemnités en liquide.
    M. le président. Il faut conclure, monsieur le rapporteur.
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial. Je termine.
    L'esprit de cette réforme mériterait d'être poursuivi par l'alignement des prévisions de crédits effectivement consommés. En effet, les fonds spéciaux sont, chaque année, régulièrement abondés en cours de gestion par des décrets de répartition non publiés au Journal officiel. Même s'ils sont rétroactivement approuvés par le Parlement, une plus grande sincérité budgétaire serait très souhaitable.
    Compte tenu de la réforme opérée l'an passé sur leur contrôle, les fonds spéciaux sont désormais exclusivement consacrés à la sécurité extérieure et intérieure de l'Etat. Dans le projet de loi de finances pour 2003, ils s'élèvent aux mêmes montants qu'en 2002, soit 37,47 millions d'euros.
    Monsieur le ministre, mes chers collègues, je rappelle que votre commission des finances a adopté les crédits du Conseil économique et social, du Plan, des Journaux officiels et des services généraux du Premier ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour le Plan.
    M. André Chassaigne, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour le Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen des crédits du Plan pour 2003 appelle certes des commentaires quant à l'évolution des dotations budgétaires, mais il doit aussi permettre d'évoquer, plus largement, la nature de la planification que nous appelons de nos voeux. Cet examen peut également révéler une volonté de maintenir, voire de conforter, la cohésion nationale ou, au contraire, de l'affaiblir.
    Contrairement à certaines idées reçues, le concept même de planification est profondément moderne. En effet, le simple jeu des forces du marché n'est pas un gage de développement économique et d'épanouissement social durables, comme en témoignent la crise boursière actuelle et l'effondrement de ce qui avait été hâtivement qualifié de « nouvelle économie ».
    Face à ces incertitudes, la France a plus que jamais besoin d'une vision à long terme, d'une analyse sereine du potentiel économique de la nation : cette mission est naturellement celle du Plan. Or les faits montrent que le Plan, depuis sa création par un décret du 3 janvier 1946, a non seulement cessé d'être considéré comme une « ardente obligation », mais a aussi largement renoncé à proposer à la France une stratégie de développement. Il est d'ailleurs troublant de constater que le renoncement à une planification ambitieuse a globalement coïncidé avec la fin de la croissance des Trente glorieuses. Aujourd'hui, le Plan s'en tient essentiellement à la rédaction de prévisions et d'évaluations ciblées en matière économique et sociale.
    Mais l'impression de déclin du Plan est gravement accrue par l'usage bien modeste, et même en nette régression, que le Gouvernement semble vouloir en faire, du moins si l'on en juge par le budget qui nous est présenté.
    Ainsi, les crédits de paiement réservés au Plan dans le projet de loi de finances pour 2003 n'atteignent plus que 24,8 millions d'euros, alors qu'ils s'élevaient à 26,7 millions d'euros en 2002. Cela représente tout de même une diminution de 7 % du budget du Plan, ce qui est inquiétant. Cette baisse importante porte sur les interventions publiques, dont la dotation recule de 8,3 %, mais surtout sur les moyens des services, qui chutent de 7,3 % et sont ramenés à 5,12 millions d'euros. La réduction des moyens des services atteint même 16,4 % si l'on exclut les dépenses de personnel, dont la stabilité dissimule une précarisation des emplois par un recours accru aux contractuels.
    De telles diminutions des moyens budgétaires pouvant réellement être engagés au titre du Plan pendant l'année ne peuvent être effacées par l'annonce, que je qualifierai d'artificielle, d'une hausse de 18,6 % des autorisations de programme, qui atteindront 958 millions d'euros. De même, les probables reports de crédits de l'année 2002 sur 2003 ne peuvent pas davantage être considérés comme satisfaisants. En effet, une telle pratique ne peut être indéfiniment renouvelée pour compenser les restrictions budgétaires. Elle ressemble à un « airbag » qui ne fonctionne qu'une seule fois.
    Un autre élément risque, à terme, de remettre en cause la quantité et la qualité des études réalisées dans le cadre du Plan, voire leur pérennité : le Premier ministre n'a passé aucune commande d'étude depuis six mois, alors que les programmes de travail fixés sous l'ancienne législature seront bientôt achevés. Il est donc impossible de savoir sur quelles bases se poursuivra, au cours des prochaines années, la réflexion stratégique qui fondera le Plan.
    J'attire également votre attention sur la chute brutale de 32,6 % des crédits de recherche destinés à l'observatoire français des conjonctures économiques. Cet organisme, réputé pour la qualité de ses études, dépend largement des subventions d'Etat : une telle diminution du soutien financier qui lui est accordé est donc difficilement acceptable. De même, les subventions inscrites au titre des crédits de fonctionnement de l'Institut de recherche économique et sociale baissent de 12,1 % en 2003.
    Mais surtout, l'évaluation, dont le développement est souvent annoncé comme prioritaire, subit, elle aussi, de fortes restrictions budgétaires. En effet, les crédits qui lui sont consacrés baisseront de 20 à 25 % en 2003. Chacun s'accorde pourtant à voir dans l'évaluation une nécessité incontournable, notamment en matière de planification territoriale, où la mise en oeuvre des contrats de plan Etat-régions accuse déjà un retard considérable.
    Plus généralement, on ne peut que regretter le manque d'ambition de la politique de planification - sans doute considérée aujourd'hui, à tort, comme désuète -, à une époque où le libéralisme ne cesse d'étendre son emprise sur la vie économique et où la société s'organise autour du marché. Il y aurait pourtant bien des façons de mettre en valeur la grande capacité d'expertise du Commissariat général du Plan, et d'en tirer profit dans les choix gouvernementaux et dans le travail parlementaire.
    M. le président. Je vous demanderai de bien vouloir conclure, mon cher collègue.
    M. André Chassaigne, rapporteur pour avis. Ainsi, les travaux de cette institution devraient s'inscrire dans un cadre plus global. Cela supposerait notamment d'intégrer davantage les contraintes internationales, ainsi que les moyens d'y remédier, par exemple, dans le cadre des négociations au sein de l'OMC.
    Il pourrait aussi être utile de réunir plus souvent les études de prospective dans des ouvrages transversaux tels que le « Rapport sur les perspectives de la France », publié en juillet 2000.
    Par ailleurs, les évaluations effectuées ne sont pas suffisamment prises en compte, qu'il s'agisse de la politique énergétique ou de la gestion des risques naturels.
    Enfin, la planification territoriale, sur laquelle le Plan est chargé de veiller, souffre d'une organisation trop souvent inefficace, tant en ce qui concerne les conditions du débat parlementaire que le respect des objectifs énoncés. Les lois de décentralisation rendent plus nécessaire encore une planification moderne pour exprimer une volonté collective et rétablir une cohérence nationale. En effet, l'Etat doit veiller à ce que les déséquilibres entre les départements et les régions ne s'accentuent pas. Si la diversité des territoires et des cultures doit être reconnue, elle ne doit pas être porteuse d'une conception inégalitaire du développement et de l'accès aux services. En ce domaine, le Plan n'a-t-il pas une mission particulière à remplir ?
    Pour toutes ces raisons, qui portent à la fois sur le mode de fonctionnement du Plan et sur l'évolution négative de son budget, la représentation nationale pourrait à juste titre adresser un avertissement au Gouvernement.
    Néanmoins, la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, contrairement à mes conclusions (Rires), a émis un avis favorable sur l'adoption des crédits du Plan pour 2003. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. Richard Mallié. Le rapporteur est honnête !
    M. le président. Dans la discussion, la parole est à M. Patrick Braouezec.
    M. Patrick Braouezec. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits du ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, que nous examinons, sont en recul de près de 2 %.
    Cette baisse est à l'image de la conception libérale de la réforme de l'Etat, qui consiste en fait à réduire les missions et les moyens de celui-ci. La capacité d'intervention de votre ministère, qui a pourtant un rôle d'impulsion et de coordination, est donc réduite. Or l'examen de ses crédits recouvre des enjeux importants tels que le remplacement des nombreux fonctionnaires partant en retraite dans les prochaines années et les projets de décentralisation en cours.
    L'examen des effectifs de la fonction publique révèle la suppression nette de 1 089 emplois dans les ministères civils. Cette décision est politiquement grave. Elle survient alors que l'égalité d'accès aux services publics, notamment dans les quartiers populaires, est très loin d'être acquise et que les besoins sont énormes.
    Vous marquez ainsi une rupture claire avec les engagements pluriannuels du gouvernement précédent, dont certains avaient été obtenus de haute lutte : c'est le cas, par exemple, du mouvement pour l'école qui a mobilisé les parents d'élèves, les enseignants et les lycéens de la Seine-Saint-Denis.
    La tendance affichée est aggravée par le fait que tous les postes budgétaires ne sont pas occupés, beaucoup étant gelés ou mis en réserve. C'est pourquoi il nous faudra être particulièrement vigilants - et pour cela vous pouvez compter sur nous - quant à l'évolution des effectifs réels et notamment quant à l'occupation des postes libérés par les départs en retraite. On se souvient que l'actuelle ministre de la défense, alors présidente de feu le RPR, proposait de ne remplacer qu'un fonctionnaire sur trois partant à la retraite.
    D'ici à 2009, près de 30 % des fonctionnaires des ministères civils en poste à la fin de l'année 2000 seront partis en retraite. L'essentiel des départs jusqu'en 2005 concerne l'éducation nationale. Rien dans la loi de finances du Gouvernement ne prépare la fonction publique à affronter ce choc démographique dans de bonnes conditions.
    Il importe d'accroître l'attractivité de la fonction publique. Les carences sont patentes en la matière. Pour faire face aux départs, il est indispensable d'attirer un nombre plus important qu'aujourd'hui de candidats aux concours. Or, les discours dépréciatifs sur les services et la fonction publique de nombre d'élus de la majorité n'y participent pas. Il en va de même de l'évolution des salaires. Les négociations salariales qui pourraient s'ouvrir en 2003 ne bénéficient à ce jour d'aucune marge de manoeuvre budgétaire. Cette perspective défavorable s'ajoute à une année 2002 marquée par des mesures générales de revalorisation limitées à 1,2 point, alors que l'inflation devrait se situer autour de 2,3 % cette année.
    L'attractivité des missions de service public est également remise en cause par l'opposition entretenue entre les salariés du public et ceux du privé. Les discours sur les prétendus privilèges visent à dissimuler les réelles aggravations des inégalités sociales au bénéfice des catégories les plus favorisées qui ne sont pas constituées de fonctionnaires, mais bien de rentiers et de cadres dirigeants.
    On se souvient aussi que les mouvements de décembre 1995 avaient permis de faire reculer les libéraux et leur stratégie de division du monde du travail et des salariés.
    Cette stratégie est particulièrement à l'oeuvre sur la question de la réforme des retraites. Dans ce cadre, la décision de supprimer le congé de fin d'activité est inquiétante sur la forme et sur le fond. Tout emploi libéré par ce système de préretraite ouvert aux agents ayant cotisé trente-sept annuités et demie donne lieu à recrutement. Depuis 1997, ce dispositif a profité à plus de 52 000 fonctionnaires. Le Gouvernement a décidé d'y mettre fin de façon unilatérale et sans négocier. Pourtant l'ouverture des négociations sur les retraites dans la fonction publique est annoncée pour début 2003. Il aurait été logique, comme le proposait le rapporteur pour avis, de maintenir le congé de fin d'activité dans l'attente du résultat du dialogue social. En ne le faisant pas, le Gouvernement révèle ses méthodes : ses décisions sont arrêtées avant le début des négociations.
    Les déclarations du ministre du travail et des affaires sociales sont d'ailleurs particulièrement inquiétantes. Il juge en effet que les « préretraites sont une catastrophe pour l'économie nationale ». La véritable catastrophe, chacun le sait bien, ce ne sont pas les préretraites du public ou du privé, mais bien le chômage de masse et le sous-emploi qui ne font que s'aggraver depuis la mise en place du nouveau gouvernement.
    Nous sommes là au coeur du clivage qui nous sépare en matière de retraites des salariés du public comme du privé. Je rappelle que nous proposons le départ en retraite des salariés du privé ayant cotisé quarante annuités avant l'âge de soixante ans. Notre ambition est d'aligner les droits vers le haut, la vôtre est clairement de les tirer vers le bas.
    La résorption de l'emploi précaire est une autre préoccupation importante.
    La loi du 3 janvier 2001 rencontre des difficultés d'application. Elle apparaît d'ores et déjà insuffisante. Les travaux de l'observatoire de l'emploi public ont révélé que 60 % des emplois précaires ne seraient pas concernés par cette résorption.
    Les difficultés sont particulièrement grandes pour accéder à la fonction publique territoriale. Les élus locaux de tout bord ne peuvent que constater le retard pris. L'an passé, j'avais d'ailleurs saisi votre prédecesseur, ainsi que vous-même en votre qualité de président de l'association des maires de France, des lenteurs et des obstacles constatés.
    Cette loi devait permettre à des agents non titulaires d'ingégrer la fonction publique territoriale par un dispositif dérogatoire aux règles générales d'accès à la fonction publique : par intégration directe ou concours réservés. Le dispositif dérogatoire prévoit que les agents remplissent différentes conditions, parmi lesquelles, l'absence d'organisation de concours constitue un critère essentiel.
    Alors que la loi est parue depuis maintenant plus de vingt mois, les modalités et conditions d'application de celle-ci soulèvent de nombreuses questions et prêtent à différentes interprétations. Les critères avancés sont différents non seulement selon les acteurs concernés - ministère, centre de gestion, CNFPT - mais aussi selon les départements en matière de contrôle de légalité. Cette situation confuse conduit à un développement de situations contentieuses et à une inégalité de traitement des agents publics face à la loi.
    Si l'objectif de cette loi est bien la résorption de l'emploi précaire, les interprétations restrictives du ministère de l'intérieur mettent en cause cette orientation. De manière plus précise, les deux grands problèmes rencontrés sont les suivants. Le contrôle de légalité conteste la référence au concours d'attaché - option animation - pour l'intégration de certains cadres en donnant un sens restrictif à la fonction animation. De plus, la loi ne précise pas si la date de recrutement à prendre en compte est celle dans la collectivité actuelle d'emploi ou celle dans les collectivités précédentes. Il est urgent de mettre fin à ces interprétations restrictives et de réunir les commissions d'experts chargées d'examiner les dossiers d'intégration.
    J'en viens maintenant brièvement aux questions relatives à l'aménagement du territoire et à la réforme de l'Etat, en lien avec la décentralisation.
    Comme cela a été relevé à l'occasion de l'examen du budget du ministère de l'écologie, le rattachement de l'aménagement du territoire au ministère de la fonction publique et non plus au ministère de l'environnement laisse craindre un recul de la prise en compte des questions écologiques dans les choix d'aménagement.
    M. François Sauvadet. Mais non !
    M. Patrick Braouezec. Le fait que, dans les crédits du ministère des transports, une claire priorité soit donnée à la route et qu'aucun engagement ne soit pris en faveur du développement du ferroutage en est un premier témoignage.
    La décision d'associer aménagement du territoire et réforme de l'Etat trouve sa source dans les ambitions décentralisatrices de votre gouvernement.
    Les intentions du Gouvernement manquent de clarté. Le Premier ministre et vous-même savez sans doute où vous souhaitez conduire le pays. Mais le président de notre assemblée, M. Debré, a exprimé des craintes, et dans l'interprétation qu'il fait de votre projet, il évoque « un intégrisme décentralisateur » et redoute un démantèlement de l'Etat et de la République.
    Sans partager totalement ce point de vue, j'avoue que, pour nos concitoyens et pour moi-même, le projet apparaît très confus et technocratique.
    A ce titre, le refus du Gouvernement de soumettre une réforme qui bouleverse l'organisation politique et administrative de notre pays à l'approbation d'un référendum populaire est particulièrement critiquable. Le jargon publicitaire reposant sur le thème de la « proximité » incite lui aussi à la méfiance.
    En l'état, la réforme est porteuse d'inégalités à la fois sur le plan du développement du territoire et entre les villes et les régions, et, par conséquent, entre les habitants.
    Le budget de la nation pour 2003 augure mal de la volonté de mettre en place les outils de solidarité envers les territoires urbains et ruraux défavorisés. Pour ne prendre qu'un seul exemple, je note que la dotation de solidarité urbaine, qui est le principal levier de la redistribution en faveur de communes les plus pauvres et dont le montant est notoirement insuffisant, n'a pas été augmentée. Sans cette volonté, la nouvelle décentralisation se traduira par une aggravation des inégalités et des ségrégations.
    Or, il est clair que le désengagement de l'Etat de ses missions essentielles comme l'éducation, la santé, le logement ou la formation et le transfert de pans entiers de la politique nationale aux collectivités territoriales obligeront ces dernières à alourdir leur fiscalité dans des conditions très inégales.
    Aussi le groupe communiste votera-t-il contre ce budget, qui réduit votre capacité d'intervention, n'apporte aucune réponse au défi du remplacement des nombreux salariés de l'Etat qui partiront en retraite dans les années qui viennent, révèle un manque d'ambition pour conforter le sens et les missions du service public, et s'inscrit dans la perspective d'une décentralisation qui s'annonce très inégalitaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. André Chassaigne, rapporteur pour avis. Très bien.
    M. le président. La parole est à M. Jacques-Alain Bénisti.
    M. Jacques-Alain Bénisti. Le budget de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire qui nous est présenté aujourd'hui par Jean-Paul Delevoye et Henri Plagnol pour l'année 2003 revêt une importance particulière, car il est significatif du changement qu'attendent les Français. Je suis d'ailleurs d'accord avec M. Braouezec (« Ah ? » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) quand il dit qu'il faut rompre avec l'immobilisme de ces dernières années, et j'ajouterai : surtout des cinq dernières ! (« Ah ! Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Le Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin et le Parlement ont la lourde tâche de mettre en place de nouveaux mécanismes qui permettent de réformer en profondeur non seulement la politique de l'aménagement du territoire mais aussi, et surtout, la politique de gestion de la fonction publique.
    La nouvelle étape de la décentralisation et de la réforme de l'Etat que le Premier ministre a engagée avec la loi constitutionnelle est, à cet égard, essentielle, car il ne pourra pas y avoir de réforme de l'Etat sans réforme de la fonction publique. Celle-ci est non seulement nécessaire, mais surtout demandée par les acteurs concernés : les différentes institutions, les syndicats, les fonctionnaires eux-mêmes, et bon nombre d'élus de toutes tendances. Jean-Paul Delevoye et le Gouvernement ont la volonté et - enfin ! - le courage politique de la mener. Je tiens à saluer le souci de transparence et de sincérité qui a inspiré les ministres pour ce budget.
    J'ai écouté avec attention les propos tenus par M. Derosier. J'ai été surpris de l'entendre dire que le précédent gouvernement avait répondu de manière cohérente aux questions suscitées par les enjeux cruciaux de la fonction publique. Si tel était le cas, pourquoi mènerions-nous aujourd'hui cette nouvelle étape de la décentralisation et de la réforme de l'Etat ? Si la rénovation de la fonction publique avait effectivement été menée par le précédent gouvernement, comment expliquer que nous ayons aujourd'hui à faire face aux situations de blocage que nous connaissons, par exemple, dans la fonction publique hospitalière ou la fonction publique territoriale, dont a parlé tout à l'heure M. Braouezec ?
    Il serait trop long de répondre point par point au rapport de M. Derosier, mais je souhaite revenir sur quelques questions particulièrement importantes, et notamment sur la réduction des effectifs de la fonction publique.
    Vous reprochez au Gouvernement, monsieur Derosier, de ne supprimer que 1 089 postes net et, y voyez la preuve que le Gouvernement n'a d'autre intention que faire de l'affichage.
    M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis. Oui !
    M. Jacques-Alain Bénisti. Mais réduction des effectifs annoncée n'est pas une finalité en soi. Elle vise uniquement à diminuer le montant du budget : il s'agit de mettre en place une politique de gestion des ressources humaines en adéquation avec les compétences et les missions attribuées à chaque ministère.
    M. François Sauvadet. Très bien !
    M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis. On se croirait au conseil d'administration de Vivendi !
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Vous y allez souvent ?
    M. Jacques-Alain Bénisti. Il n'est pas question de priver le service public de moyens. Il s'agit simplement d'adosser des moyens humains et financiers à des projets préalablement définis par la voie de la concertation, et sur la base des analyses de l'Observatoire de l'emploi public en cours de réalisation. On appelle cela du bon sens. C'est aussi de la saine gestion, monsieur Derosier.
    M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis. Si c'est frappé au coin du bon sens, alors vous avez frappé très fort !
    M. Jacques-Alain Bénisti. J'ai également été étonné de vous entendre dire que le précédent gouvernement avait placé au coeur de ses priorités la gestion prévisionnelle des emplois, alors que rien n'a été fait pour anticiper les départs massifs à la retraite que nous allons connaître dans les prochaines années.
    M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis. Vous n'étiez pas parlementaire ! Comment pouvez-vous parler de ce que vous ne connaissez pas ? (Sourires.)
    M. Jacques-Alain Bénisti. De même, je n'ai pas vu d'amélioration durant les cinq dernières années en ce qui concerne l'intégration des personnes handicapées. Je souligne que, dans le budget, les crédits consacrés aux personnes handicapées sont en augmentation de 50 % par rapport au budget 2002, ce qui vous honore, messieurs les ministres, et devrait permettre de répondre à bon nombre de demandes.
    Pour ce qui concerne les acquis sociaux et les conditions de travail des fonctionnaires, tout le monde s'accorde à dire que l'application des 35 heures dans la fonction publique a été un échec, qui a eu pour conséquence de créer des blocages supplémentaires.
    M. François Sauvadet. C'est vrai !
    M. Jacques-Alain Bénisti. Regardez ce qui se passe dans la fonction publique hospitalière !
    Il me paraît incongru de parler d'amélioration des conditions de travail des fonctionnaires quand l'application des 35 heures dans le service public a eu pour conséquence de bloquer des services entiers par manque d'effectifs, car aucune gestion des ressources humaines n'est venue compenser cette réduction imposée du temps de travail.
    Je m'interroge également, monsieur le rapporteur, sur ce que vous considérez comme des avancées sociales majeures dans la fonction publique. A ce titre, je voudrais m'arrêter un instant sur les crédits d'action sociale interministérielle qui figurent dans le projet de budget pour 2003. Les chiffres sont, il est vrai, un peu trompeurs et tendraient à faire croire que les crédits mis à la disposition du ministère pour engager des actions en faveur des fonctionnaires diminuent.
    Les crédits d'action sociale interministérielle se répartissent en deux chapitres : les prestations d'action sociale, telles que le financement des crèches, des aides ménagères à domicile, ou encore le financement des chèques vacances ; et les crédits d'investissement sociaux qui servent à financer la construction d'équipements tels que des restaurants administratifs. Je m'étonne que vous fassiez l'amalgame entre un budget de fonctionnement et un budget d'investissement.
    Sur ces chapitres, la position adoptée par le Gouvernement a été de sortir de la traditionnelle logique d'affichage d'une augmentation des moyens, pour adopter une attitude plus sincère d'utilisation des reports existants et des crédits non consommés, ce que nous faisons nous-mêmes dans nos mairies, j'en prends à témoin les députés-maires ici présents.
    En effet, les crédits d'investissement ayant été largement sous-consommés durant ces quatre dernières années, le ministre a pris la bonne décision de les utiliser et de ne pas demander de crédits supplémentaires pour l'année 2002. A l'inverse, vous noterez que les crédits consacrés à l'action sociale augmenteront nettement, de 4,81 %. Voilà donc la démonstration, si elle était nécessaire, de la sincérité, de la transparence et du volontarisme dont fait preuve le Gouvernement dans ce projet, qui marque une nette rupture avec les lois de finances antérieures.
    Je citerai un dernier exemple relatif au dialogue social. Je m'étonne, monsieur Derosier, que vous parliez de revivification du dialogue social.
    M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis. C'est au Gouvernement qu'il faut dire cela !
    M. Jacques-Alain Bénisti. Je suis le premier président de centre de gestion de France à avoir signé, très récemment, à l'unanimité, un protocole d'accord avec les six syndicats de fonctionnaires représentés, sur l'exercice du droit syndical. Rien n'existait auparavant ! Où sont donc, mon cher collègue, les « nombreuses incertitudes » dont vous parlez à propos du projet de budget du ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire ? Ne sont-elles pas le fruit de plusieurs années d'attentisme et de manque de volonté politique plutôt que de l'action des six premiers mois du nouveau gouvernement ?
    Force est de constater que, dans ce domaine comme dans d'autres, beaucoup reste à faire. Aussi, face à l'ampleur des tâches qui vous sont attribuées, permettez-moi, monsieur le ministre, de vous souhaiter bon courage, car, du courage, il va vous en falloir pour mener les réformes qui n'ont pas été engagées par vos prédécesseurs. Les chantiers à ouvrir sont nombreux, les réformes sont urgentes. Il faut stopper les missions de réflexion et la production de multitudes de rapports. Nous devons maintenant entrer dans une phase d'action qui permette d'adapter les structures administratives territoriales aux évolutions économiques et aux attentes de la société, pour atteindre les objectifs ambitieux que vous vous êtes fixés : amélioration de la qualité du service public, satisfaction des usagers et épanouissement des agents de la fonction publique.
    Néanmoins, ces objectifs sont réalistes. Le défi doit être relevé car l'enjeu est de taille et les attentes sont grandes.
    Je tiens à saluer la méthode préconisée par le Premier ministre et utilisée par Jean-Paul Delevoye : la concertation avec les acteurs concernés nous permettra d'atteindre ces objectifs, j'en suis convaincu, dans les meilleures conditions. En effet, comme l'a dit très justement notre ministre dans son discours au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale : « il n'y aura pas de décentralisation qui ne soit pas consentie par l'Etat, acceptée par les usagers, assumée et partagée par les agents ».
    A peine six mois après leur prise de fonctions, Jean-Paul Delevoye et Henri Plagnol ont déjà mis en route plusieurs chantiers de réformes.
    Pour ce qui est de la simplification des procédures administratives et réglementaires, la réforme va plus loin que tout ce qui avait été fait auparavant.
    M. Jérôme Lambert. Rien n'est fait pour l'instant !
    M. Jacques-Alain Bénisti. Il s'agira surtout de clarifier les normes, que ce soit pour les administrés ou pour les administrations entre elles.
    Rendre attractive la fonction publique est un défi majeur, car il faudra beaucoup recruter pour compenser les départs massifs en retraite dans les trois fonctions publiques. Il faut aussi améliorer la motivation des fonctionnaires tout au long de leur carrière, et pour cela engager une réforme de la formation, avec validation des acquis professionnels, afin de rendre possible une évolution de carrière.
    Pour terminer, je veux surtout souligner un aspect fondamental, à savoir une réelle volonté de dialogue, - c'est nouveau - volonté d'avancer avec les femmes et les hommes et non contre eux, comme précédemment.
    M. Jérôme Lambert. Caricature !
    M. Jacques-Alain Bénisti. J'en suis le témoin, car moi-même, saisissant cette opportunité d'écoute et de discussion qui nous est offerte, j'ai présenté au ministre, en tant que président du plus grand centre de gestion de la fonction publique gérant les carrières de plus de 100 000 fonctionnaires,...
    M. le président. Je vous prie de conclure mon cher collègue.
    M. Jacques-Alain Bénisti ... dix propositions visant à simplifier et assouplir certaines règles de la fonction publique territoriale. Elles ont manifestement été entendues et même reprises. J'ai bon espoir de les voir se réaliser, dans l'intérêt de la fonction publique et des fonctionnaires.
    Le Gouvernement a déjà, à plusieurs reprises, prouvé que ses intentions n'étaient pas des chimères. Le projet de budget qui nous est présenté aujourd'hui, mes chers collègues, est particulièrement novateur et honnête. C'est pourquoi je vous invite à soutenir l'action du Gouvernement et à voter un budget qui donnera au ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire des moyens à la hauteur de ses ambitions, et rendra plus efficace et plus concrète l'action publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.
    M. Jean-Pierre Dufau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je traiterai du budget du ministère de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, laissant à mes collègues socialistes le soin de s'occuper de l'aménagement du territoire.
    Les dotations de ces ministères sont peu représentatives du poids réel de la fonction publique dans le budget de l'Etat, puisque chaque ministère assure la gestion de ses agents. Cependant, les fonds destinés à l'action sociale interministérielle et à la réforme de l'Etat sont plein d'enseignements.
    Pour l'action sociale interministérielle, les crédits sont en augmentation passant de 114 millions d'euros à 119 millions d'euros. Ils représentent, à eux seuls, 60 % du budget du ministère. On note avec satisfaction la progression des crédits alloués aux prestations de service crèches, chèques-vacances. Dont acte. En revanche, la dotation destinée aux aides au logement baisse de 3,4 millions d'euros, ce qui se comprend mal puisque cette prestation a été étendue, à compter du 1er septembre 2001, aux agents de l'Etat exerçant la majeure partie de leurs fonctions dans les zones urbaines sensibles. Le nombre de bénéficiaires devrait donc progresser sensiblement.
    Les crédits permettant de financer les actions de formation, de perfectionnement, d'insertion et de modernisation de la fonction publique sont en net recul cette année : 7,92 millions d'euros contre 9,95 - soit 18,2 % de baisse. Cela montre le désengagement de l'Etat et n'augure rien de bon quant à l'efficacité et à la modernisation de la fonction publique.
    Pour l'année européenne des handicapés, il était logique d'augmenter les crédits d'équipement du fonds interministériel pour l'insertion de ces personnes, et vous l'avez fait. Ils passent ainsi de 610 000 euros à 1 million d'euros. Cet effort, largement amorcé par le précédent budget, en application du protocole d'accord signé entre Michel Sapin et Ségolène Royal et cinq organisations syndicales représentatives, est donc poursuivi.
    En revanche, vous ne dites rien de l'application de la convention conclue à l'initiative de Ségolène Royal, qui prévoyait le gel des créations d'emploi dans les ministères qui n'auraient pas recruté le nombre de personnes handicapées prévu par la loi. Interrogé en commission sur ce point, vous avez répondu que des sanctions ne devraient être envisagées qu'après la mise en place de mesures d'incitation, que vous n'avez pas précisées. Pouvez-vous nous en dire davantage ?
    Le fonds pour la réforme de l'Etat, créé en 1996, constitue un outil essentiel pour promouvoir et accompagner les initiatives en matière de modernisation du service public et d'amélioration du service rendu aux usagers. En 2003, les crédits pour dépenses ordinaires seront augmentés de 1 million d'euros et atteindront 14,27 millions d'euros.
    Monsieur le ministre, en commission des lois vous vous êtes targué de vouloir un budget marqué par la recherche de la vérité comptable. Pourtant, l'augmentation annoncée paraît n'être qu'un acte d'affichage, car une masse importante de crédits non consommés subsistera à la fin de l'année.
    Lors de la précédente législature, on n'a jamais fait autant de réformes de l'Etat sans réellement en parler. A l'inverse, le gouvernement actuel parle beaucoup de réforme de l'Etat, mais nous le jugerons sur ses actes.
    Lors de votre intervention devant le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, vous avez annoncé un renforcement des outils mis en place par votre prédécesseur. C'est une bonne chose, et nous le disons, mais nous nous opposons à la politique gouvernementale de démantèlement de l'emploi public.
    En effet, le projet de loi de finances pour 2003, dans sa globalité, prévoit une baisse sensible des effectifs, M. Derosier l'a abondamment expliqué. Après les déclarations intempestives de la droite lors de la dernière campagne électorale, la baisse des emplois publics affichée dans ce budget paraît limitée : 1 089 suppressions d'emplois net. Cependant, ce budget porte en germe la régression programmée du service public.
    Une analyse portant sur le seul niveau des postes budgétaires n'est pas pertinente. En effet, tous les postes budgétaires ne sont pas occupés, des vacances peuvent intervenir et des mesures de gel ou de mise en réserve d'emplois peuvent être décidées par le ministère chargé du budget. Il convient plutôt d'être attentif à l'évolution des effectifs réels. En premier lieu, il est à craindre que le départ à la retraite de nombreux fonctionnaires dans les prochaines années occasionne des vacances d'emploi, moyen discret de faire baisser le nombre de fonctionnaires. En second lieu, vous mettez fin au dispositif emplois-jeunes, dont le bilan était pourtant très positif. Monsieur Bénisti, ces emplois-jeunes ont démontré leur intérêt dans la fonction publique d'Etat - éducation nationale et police entre autres - et ils ont fait émerger de nouveaux besoins, à l'origine de projets que vous devriez soutenir, si vous voulez être cohérent avec ce que vous avez expliqué tout à l'heure.
    Fin avril 2001, 272 000 emplois-jeunes ont été créés, qui ont donné lieu à plus de 312 000 embauches. Les principaux employeurs de ce type de contrat dans la sphère publique - éducation nationale, ministères de l'intérieur et de la justice, collectivités territoriales - s'inquiètent : qui va remplacer ces jeunes et, surtout, que vont-ils devenir ?
    Ainsi, la réduction de la masse d'agents publics sera plus importante que ne l'annonce le budget. Même en ce qui concerne ses domaines phares, à savoir la police et la justice, le Gouvernement ne se donne pas les moyens de la politique qu'il affiche : les créations de postes annoncées au ministère de l'intérieur ne compenseront pas la disparition des postes d'adjoint de sécurité. La même question se pose au ministère de la justice. Prenons date.
    Avec en outre, 6 089 postes budgétaires supprimés, ce sont donc près de 92 000 emplois qui disparaîtront. On peut rêver d'un autre plan social !
    Parlons maintenant du pouvoir d'achat des fonctionnaires. Sur l'ensemble de la précédente législature, il a été maintenu. De plus, les basses rémunérations ont été revalorisées de 12,5 %. Aujourd'hui, je suis inquiet, car les mesures de revalorisation n'atteignent que 1,2 % - 0,5 en mars et 0,7 en décembre - alors que l'INSEE, dans ses dernières prévisions d'octobre, prévoit une inflation de 2,3 % pour cette année : le compte n'y sera pas. Sans parler de progression, le pouvoir d'achat des fonctionnaires ne sera même pas maintenu. Les organisations syndicales sauront le rappeler.
    Votre attitude sur le congé de fin d'activité est révélatrice, j'y reviendrai. Bernard Derosier et le groupe socialiste ont déposé un amendement visant à reconduire ce dispositif pour 2003. Ce congé, mis en place par la loi du 16 décembre 1996, a été régulièrement reconduit depuis. Il importe de le maintenir, dans l'attente de l'ouverture du débat sur la réforme du système de retraite. Sans quoi, la négociation serait pipée avant même de commencer. Vous avez annoncé une extinction progressive de ces congés sur trois ans. L'amendement du Gouvernement est prêt, la décision paraît donc prise. Nous lui préférons notre amendement dans l'attente d'une véritable négociation avec les partenaires sociaux.
    Enfin, monsieur le ministre, je souhaiterais aborder la question de l'égalité entre les hommes et les femmes au sein de la fonction publique. La France a été récemment condamnée par la juridiction européenne pour discrimination quant au calcul des droits complémentaires liés aux enfants et au bénéfice de la retraite anticipée pour cause de maladie du conjoint. Ces droits ne bénéficient, en effet, qu'aux femmes fonctionnaires. Vous ne pouvez, monsieur le ministre, vous contenter de répondre à cette question en nous demandant de ne pas préjuger des orientations susceptibles d'être dégagées par le Conseil d'orientation des retraites ou en nous renvoyant à des mesures que votre gouvernement pourrait éventuellement prendre. La question est urgente et la réponse à y apporter simple. Je vous demande de mettre en oeuvre effectivement l'égalité entre hommes et femmes. C'est une question de justice.
    Au total, monsieur le ministre, ce budget pourrait être qualifié de budget de transition : les suppressions directes ou indirectes d'emplois publics programmées et les atteintes aux droits acquis marquent déjà les orientations du Gouvernement à l'égard de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Les socialistes, pour leur part, sont favorables à une décentralisation claire et progressiste, assurant l'égalité des citoyens sur l'ensemble du territoire. Ils n'en sont pas moins farouchement attachés à l'Etat républicain, dont la fonction publique, dans notre pays, a toujours été le socle.
    Le groupe socialiste votera contre votre budget. (Applaudissement sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis. Bravo !
    M. le président. La parole est à M. François Sauvadet.
    M. François Sauvadet. Je me réjouis de voir un bon connaisseur des collectivités locales en charge du ministère de l'aménagement du territoire. Rien que ça, monsieur Derosier, ça nous change !
    M. André Chassaigne, rapporteur pour avis. Ça commence très fort !
    M. François Sauvadet. L'aménagement du territoire est une question essentielle, même si les crédits qui lui sont consacrés ne le montrent pas assez.
    J'ai été très frappé par le sentiment de désespérance éprouvé par tant de nos compatriotes, notamment dans les campagnes. Les ingrédients qui ont conduit au vote extrême du 21 avril, vote d'exaspération aussi, sont toujours là. Notre ambition commune doit être d'essayer d'y remédier. Le débat d'aujourd'hui dépasse donc le cadre strictement budgétaire et même celui de votre ministère. Il faut lui accorder une grande importance.
    Si la politique de la ville a gagné en lisibilité, depuis bien des années d'ailleurs, nous devons désormais engager une véritable politique des campagnes pour répondre précisément à la désespérance dont je parlais.
    Cette année fut aussi une année de changement. La nouvelle majorité a défini un nouveau périmètre. Nous avons à notre charge ce grand chantier, la réforme de l'Etat, sujet rémanent dont nous devons vraiment nous préoccuper. Cela répond à une attente et à l'exigence de nos compatriotes, qui veulent que l'argent public soit géré de façon plus efficace. La fonction publique a besoin de signes forts pour comprendre que la réforme n'est pas une menace mais une nouvelle espérance pour l'avenir, lui permettant d'assurer la noble mission de servir l'Etat et les collectivités territoriales.
    Je voudrais insister sur un point dont on n'a pas encore parlé à cette tribune, l'intégration des handicapés dans la fonction publique. C'est un signe fort pour tous ceux qui se sentent parfois injustement exclus de notre société et qui peuvent prendre toute leur place. C'est une ambition collective que nous devons partager.
    Sur l'action sociale, j'ai noté une légère baisse. Les moyens sont-ils suffisants ? Peut-être nous apporterez-vous des éclaircissements.
    La réforme de l'Etat est, je le répète, indissociable de la décentralisation, thème que nous aborderons prochainement dans notre assemblée. Il faut aborder cette question avec courage, sans préjugés ni timidité, pour faire de la France une véritable république décentralisée, comme c'est le cas dans toutes les démocraties modernes.
    M. André Chassaigne, rapporteur pour avis. Ce sont des clichés !
    M. François Sauvadet. A l'UDF, nous sommes naturellement convaincus qu'une organisation décentralisée garantira la démocratie et simplifiera la vie de nos compatriotes.
    Pour être effective, la décentralisation doit éviter les empilements et mettre un terme à la complexité qui s'est accrue ces dernières années - je le dis sans esprit polémique. Faites un sondage dans l'opinion... Les élus ne s'y retrouvent plus ! Il faudra simplifier et simplifier encore, mais je sais que c'est une préoccupation constante que vous avez mise au fronton de votre ministère.
    M. Jérôme Lambert. C'est votre discours qui est simpliste !
    M. François Sauvadet. Si s'occuper de l'avenir de notre pays, c'est être simpliste, mon cher collègue, je vous invite à la simplicité !
    En tout cas, pour être efficace, il faudra éviter l'empilement. Est aussi posée la question des moyens financiers. Seul un transfert de moyens financiers adéquats permettra aux collectivités territoriales d'assurer au mieux leurs missions.
    Sans doute, monsieur le ministre, aurait-il été souhaitable, de façon à accompagner au mieux les projets de décentralisation, que les crédits attribués au fonds pour la réforme de l'Etat soient plus substantiellement augmentés et ses attributions élargies. Le fonds, c'est incontestable, aura plus de moyens grâce aux crédits de report de l'année précédente, environ 6 millions d'euros, mais ce constat ne doit pas masquer que la dotation annuelle reste assez faible alors qu'il pourrait être un instrument décisif dans le grand chantier de la réforme.
    Nous aurons surtout besoin de souplesse. Nous examinerons tout à l'heure un amendement tendant à supprimer l'ENA. Si on commence à rentrer dans des considérations de ce type, pourquoi alors ne pas supprimer toutes les grandes écoles de ce pays ? Il faut ouvrir la haute fonction publique à d'autres expériences. C'est sur ce point que doit porter le débat, pas sur l'existence de grandes écoles qui ont contribué aussi au destin du pays.
    La gauche avait elle-même affiché l'ambition d'ouvrir la haute fonction publique...
    M. Jérôme Lambert. La troisième voie de l'ENA !
    M. François Sauvadet. ... par la troisième voie. Ne me reprochez donc pas aujourd'hui ce que je dis à cette tribune, mes chers collègues !
    M. Pierre Cohen. On vous soutient !
    M. Jean-Pierre Dufau. Qui parle de supprimer l'ENA ?
    M. François Sauvadet. Je vous demande un peu de cohérence, simplement.
    Sur le plan de la méthode, point évoqué par M. Derosier et certains collègues de gauche, je suis convaincu qu'on ne réussira pas la réforme de l'Etat sans y associer les agents eux-mêmes, et ils doivent avoir conscience qu'on ne la fera pas sans eux. Cela a toujours été une rude tâche de faire souffler le vent de la réforme. Nous vous soutiendrons, monsieur le ministre, car, pour avancer, il faut une volonté partagée. En dehors de cela, il n'y aura que des chemins de traverse.
    De même, en matière d'aménagement du territoire, la France a besoin d'une véritable politique et d'une véritable direction. J'ai été frappé par le sentiment d'abandon dans les campagnes - on parle beaucoup des quartiers fragiles, on parle moins des campagnes. Nous avons le devoir d'y répondre. Ce ne sera pas seulement, comme le prétendait l'ancienne majorité, une question d'organisation territoriale, dont on voit bien les limites. Ce doit être l'occasion de mettre en oeuvre une véritable solidarité nationale...
    M. Jean-Pierre Balligand. Ce n'est pas contradictoire avec le libéralisme ambiant ?
    M. François Sauvadet. ... qui doit jouer dans deux domaines.
    D'une part, les services de proximité au public, dont certains relèvent directement de la responsabilité de l'Etat. Il faudrait moderniser nos pratiques. Il n'y a rien de pire que l'instabilité dans des périodes et sur des territoires eux-mêmes frappés d'instabilité. Il nous faut des pôles stables, dans l'éducation par exemple.
    D'autre part, le nécessaire soutien à l'activité dans les secteurs fragiles. On a beaucoup parlé, dans la politique de la ville, des zones franches. D'ailleurs j'ai entendu le ministre de la ville en proposer de nouvelles. Il s'agit d'inciter des entreprises à s'installer dans des secteurs où elles ne s'installeraient pas spontanément, par des allégements fiscaux. Je connais vos réserves concernant la mise en oeuvre de mesures nouvelles pour les zones de revitalisation rurale. Le débat s'est ouvert en tout cas en commission avec vous. Je suis persuadé qu'il faut une nouvelle politique attractive pour les entreprises sur le territoire et qu'il faut travailler à nouveau sur l'outil fiscal. Je crois d'ailleurs que Jacques Le Nay en a parlé. Je souhaite vraiment que l'on reprenne ce chantier, car, sans activité économique, il n'y a pas d'avenir pour les territoires.
    S'agissant des services au public dont on parlait à l'instant, je souhaiterais aussi que l'on réfléchisse à une meilleure organisation territoriale. Quand des postes sont ouverts dans les territoires mais qu'aucun agent ne veut venir au motif qu'il ne se voit pas d'avenir dans un tel territoire, c'est la négation même de la notion de service au public et de présence territoriale. Je souhaite que ceux qui s'engagent dans la fonction publique d'Etat aient conscience qu'ils ont une mission d'Etat, qu'on ne va pas seulement là où ça fait plaisir mais aussi là où c'est utile pour le pays. Je souhaite que ce débat soit ouvert clairement, que les postes ouverts ne restent pas vacants.
    Enfin, comme je vous l'ai expliqué en commission des affaires économiques, j'ai beaucoup d'affection pour la DATAR mais je la voudrais parfois plus proche de nos territoires et de nos projets. N'y voyez pas une critique, monsieur le ministre, mais une forme d'invitation. La mise en oeuvre d'instruments budgétaires est certes importante mais l'essentiel est de donner des impulsions à l'ensemble de l'appareil administratif en vue de promouvoir une démarche plus adaptée aux réalités territoriales.
    Fidèles à nos convictions, nous plaidons, à l'UDF, pour une approche nouvelle, qui pourrait d'ailleurs faire l'objet d'un prochain CIADT. Sur ce point, il faudra aussi avoir une vision un peu plus claire.
    Permettez à l'élu de 344 communes rurales de la dire, lors du CIADT de Limoges en 2001, le Gouvernement avait annoncé un grand plan pour la téléphonie mobile, contre la fracture du haut débit et, deux ans plus tard, rien ne s'est produit et les collectivités territoriales sont toujours dans l'attente de l'Etat pour conduire ce projet. Je sais que vous êtes sensible à cette question. De grâce, attaquez-vous au problème des délais. Lorsqu'on annonce une grande ambition, qu'elle trouve son prolongement territorial. C'est seulement ainsi que nous retrouverons de la crédibilité ! Nous avons un ministère de la ville, je suis partisan qu'il y ait un jour un ministère de la campagne pour rétablir les équilibres territoriaux en France. Je ne plaide pas pour moi, cela n'aurait aucun sens.
    M. Jean-Pierre Balligand. Quoique... (Sourires.)
    M. François Sauvadet. Pour terminer, nous prenons acte à l'UDF de votre volonté et nous connaissons votre expérience. Nous serons à vos côtés pour réformer, être à l'écoute de nos territoires. Nous devons être extrêmement ambitieux dans cette démarche, car l'enjeu, au-delà des polémiques politiciennes parfois, c'est de répondre à l'attente de nos compatriotes, et tous ceux qui sont ici doivent avoir conscience de la responsabilité qui leur incombe. Il y a des gens exaspérés, qui attendent de nous simplement des réponses. C'est l'ambition que l'on doit se fixer à travers une politique audacieuse de l'aménagement et du développement de nos territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cohen.
    M. Pierre Cohen. C'est un budget en baisse de 17 millions d'euros que vous présentez, monsieur le ministre. Je le regrette car, au-delà de l'aspect quantitatif qui s'impose, force est de constater qu'il ne permettra pas de faire face à la situation de crise qui se profile, avec son lot de licenciements, confortant ainsi des distorsions économiques entre les territoires. Par ailleurs, à l'heure où le Gouvernement annonce sa volonté de poursuivre la politique en faveur de la décentralisation, il y a lieu de s'interroger sur les moyens dont vous disposerez pour mettre en oeuvre la réforme de l'Etat.
    En ne faisant pas du budget de l'aménagement du territoire une priorité, le Gouvernement prend le risque de ne pas répondre aux enjeux qui se posent à nous.
    Il se contente ainsi de reconduire sans souffle et sans priorité les outils déjà existants dans ce domaine.
    Cette frilosité masque-t-elle peut-être l'absence de volonté ou d'ambition politique pour moderniser les territoires, accompagner leur mutation, donner des impulsions nouvelles à l'ensemble de l'appareil administratif, mener des politiques différenciées avec un accompagnement fort de l'Etat ?
    Vous critiquez tout ce qui a été fait, mais, à y regarder de plus près, vous ne proposez que des modifications à la marge.
    Toute polique de cohésion sociale et territoriale, vous le savez, est synonyme de dépense publique, et je serai à peine caricatural en disant que l'attractivité des territoires relève d'une mission régalienne de l'Etat qui appelle une politique volontariste.
    Ainsi, l'analyse des crédits consacrés à l'aménagement du territoire dans le budget 2003 soulève un certain nombre de questions, au-delà de l'aspect strictement financier, même si la politique d'aménagement du territoire dépasse largement le cadre de ce budget.
    Voyons tout d'abord les trois sources de financement en matière d'aménagement du territoire.
    Le FNADT est considéré comme un outil souple et essentiel pour le soutien aux restructurations industrielles et à la conversion d'activité, avec des dispositifs intéressants comme les plates-formes d'initiatives locales, systèmes productifs locaux. Malgré cela, vous le savez, des autorisations de programme dormant ne sont jamais consommées. Le FNADT est donc sous-utilisé. Comment peut-on le mobiliser de façon optimale pour accompagner la relance d'une entreprise ? N'y a-t-il pas d'autres mesures à envisager pour faire face aux dépôts de bilan ou soutenir l'emploi de proximité avec des aides à l'économie sociale et solidaire ? Que compte faire le Gouvernement pour remédier à cette situation ?
    La PAT, la prime à l'aménagement du territoire, est une aide à l'installation d'entreprises dans les zones défavorisées du territoire, que la Commission européenne cherche à réduire. On compte en 2001 près de 30 000 emplois aidés par ce dispositif. La DATAR prévoit de lui réserver seulement 67 millions d'euros, ce qui correspond à la reconduction des crédits de 2002. Dans ce contexte, quels moyens le Gouvernement se donne-t-il pour que la PAT reste suffisamment adaptable à toute nouvelle situation qui menace l'activité économique ?
    Enfin, le plus important, les contrats de plan Etat-région, financés en partie par le FNADT, sont prolongés d'une année du fait du retard pris dans la programmation et l'application du volet territorial. La raison essentielle est que nous venons de passer deux années ponctuées d'échéances électorales. Les vingt-six contrats de plan doivent mobiliser plus de 655 millions d'euros pour le développement des territoires à travers la signature des contrats de pays et des contrats d'agglomération. Les contrats territoriaux pourront être signés jusqu'à la fin de 2003, et déjà plus de 320 pays et 140 agglomérations sont répertoriés pour prétendre à un tel contrat. Ne parlez donc pas de projets en panne ou d'interrogations, monsieur Sauvadet !
    Comment comptez-vous, monsieur le ministre, accompagner la mise en place de ces nouveaux territoires que sont les agglomérations et les pays et comment mobiliserez-vous les préfets de région sur l'utilisation du FNADT dans le volet territorial des CPER ?
    Si je vous ai bien entendu, vous souhaitez toiletter ces contrats sous couvert qu'ils risquent de ne pas être réalisés dans les temps, d'autant que les sommes à engager dépassent les capacités financières possibles. Qui n'est pas capable de suivre, l'Etat ou les régions ? Je pense que c'est plutôt l'Etat. Quels projets seront donc remis en question ? Sur quels critères ? Quelles seront les priorités ? Vous engagerez-vous sur des réponses précises au prochain CIADT de décembre ?
    Avec la loi Voynet, c'est toute l'armature du territoire national qui est revue. En déclinant l'articulation villes/campagne en agglomérations et en pays, la LOADDT a préparé une organisation spatiale cohérente avec les enjeux qui se posent aujourd'hui. Elle a ouvert une voie originale pour organiser ces territoires et les dynamiser en favorisant les initiatives de développement local, en les chargeant de mener des négociations avec l'Etat pour l'élaboration de leurs projets tout en conférant des compétences spécifiques aux structures intercommunales pour leur mise en oeuvre.
    L'intercommunalité constitue une avancée notoire pour notre maillage administratif. Toute cette construction se met progressivement en place et trouve beaucoup d'écho sur l'ensemble du territoire national. Faisons en sorte d'être au rendez-vous en donnant à toutes ces initiatives les moyens de recomposer les territoires dans un espace de partenariat. Comment comptez-vous accompagner la montée en puissance des territoires de projet ? Je vous mets en garde sur le fait que les quelques critiques parfois justifiées sur la lourdeur de leur mise en place ne doivent pas être un prétexte pour remettre en cause une grande avancée territoriale, de solidarité et de démocratie.
    La DATAR, instance déterminante pour la prospective et le soutien aux politiques de solidarité territoriale, voit son budget de fonctionnement réduit de 0,602 millions d'euros alors que vous comptez renforcer ses fonctions de conception, d'impulsion, de coordination et d'expertise. Une partie des crédits que vous supprimez sont des crédits d'études. Dans un contexte économique en voie de dégradation qui nécessitera des investigations nouvelles en terme d'études, comment peut-on faire l'impasse sur cette enveloppe ?
    Avez-vous décidé de changer la logique de cette loi qui offre une réelle visibilité du territoire avec les agglomérations et les pays, et qui repose sur des outils de développement contractuels, ou avez-vous l'intention de modifier quelques détails même si votre objectif, comme celui de tout le Gouvernement, est d'effacer tout ce qui a été réalisé par le gouvernement Jospin ?
    M. Jean Launay. C'est exact.
    M. Pierre Cohen. Vous êtes en charge de la réforme de l'Etat. Nous savons tous que vous aurez à faire face à une énorme contradiction : vous devez répondre aux besoins des zones rurales avec le maintien vital des services publics et accompagner la forte demande pour ces mêmes services publics dans les quartiers en difficulté comme dans les zones périurbaines en plein développement, et, en même temps, vous devez maintenir le cap pour réduire les dépenses publiques, axe fort de votre gouvernement.
    Comment pouvez-vous concilier une bonne réforme de l'Etat avec des budgets en baisse dans la plupart des secteurs ?
    M. Jacques-Alain Bénisti. Vous n'avez pas compris !
    M. Pierre Cohen. Le chantier sur la décentralisation lancé par M. le Premier ministre pourrait être une réponse au désengagement de l'Etat. L'exemple des surveillants des collèges en est un premier aperçu.
    Sans nous dévoiler de secrets, car ce projet de loi est dans le vague le plus complet, comment entendez-vous mener ce vaste chantier vu la quadrature du cercle ? Vous engagerez-vous sur la péréquation ? Mettrez-vous les moyens nécessaires pour réussir ces deux chantiers ? Avez-vous l'intention de mener un débat avec les élus, les salariés, les usagers ? Si oui, comment ? Avez-vous un projet ? Une méthode ? La méthode utilisée par le ministre de l'intérieur sur le redéploiement des forces de police et de gendarmerie n'est pas de nature à me rassurer.
    Des outils très utiles pouvaient vous aider à mettre en oeuvre cette volonté. Je prendrai deux exemples : les contrats territoriaux d'exploitation pour les zones rurales ou de montagne, offraient la possibilité de faire vivre ces espaces qu'aucune collectivité et encore moins l'Etat n'étaient en capacité d'entretenir, ils sont suspendus ; les maisons de services publics qui permettraient de développer des services complémentaires et de proximité ne sont jamais évoquées.
    Face à la volonté affichée de remettre en cause les grandes décisions des différents contrats de plan Etat-région et des derniers CIADT, je souhaite vous interroger plus précisément sur les retombées du CIADT de Limoges, qui avait mis l'accent sur la couverture territoriale de téléphonie mobile et le soutien à l'investissement des collectivités locales en matière de haut débit.
    Le précédent gouvernement avait affiché un projet louable, financé par les opérateurs : faire faire des économies à l'Etat en demandant aux opérateurs d'investir dans ce développement. Cela ne me semble pas condamnable ! Il n'a pas pu prévoir la grave crise internationale des télécommunications, mais je crois qu'il n'a pas été le seul !
    Alors, monsieur le ministre, si des objectifs clairement identifiés sont nécessaires pour affronter ce xxie siècle sans inégalités de territoire, qu'avez-vous prévu dans votre budget pour que ce soit réalisé dans les délais ?
    Je souhaiterais conclure sur l'autre volet de la LOADT, dite loi Voynet. La droite unanime, pendant le débat parlementaire et encore dernièrement, en commission des affaires économiques, de l'environnement, et du territoire, a condamné les schémas de services collectifs pour vanter les mérites du schéma national unique. Je ne vous étonnerai pas en les défendant à mon tour. Tout d'abord, ce chantier a été un vaste travail collectif et démocratique. Même les acteurs des régions ont dû donner leur avis. Faire des choix de services, neuf en l'occurrence, et prévoir leurs évolutions pour les quinze prochaines années me semble être un bon exercice de clarté politique, plus efficace et engageant pour l'avenir qu'une grande usine à laquelle on ne croit plus et qui n'intéresse plus personne.
    Avez-vous l'intention d'abandonner aussi cette démarche ? Proposerez-vous le retour à un schéma national unique ? Avez-vous prévu un nouveau débat pour modifier le contenu des schémas, ou, comme tout libéral qui se respecte, ne les remplacerez-vous par rien ?
    Pour toute ces raisons, monsieur le ministre, vous l'avez bien compris, le groupe socialiste ne votera pas votre budget de l'aménagement du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole et à M. Emile Blessig.
    M. Emile Blessig. Je salue d'emblée, monsieur le ministre, votre effort pour nous soumettre aujourd'hui un projet de budget pour 2003 caractérisé par la volonté d'agir et par la sincérité. L'exercice est d'autant plus difficile qu'ils s'agit du premier budget du nouveau gouvernement et que, compte tenu de la rigidité de la dépense publique et du nécessaire principe de continuité de l'Etat, votre budget présente forcément quelques ressemblances avec celui de votre prédécesseur.
    M. Patrick Martin-Lalande. C'est pour cela que les socialistes vont le voter !
    M. Emile Blessig. Les rapporteurs de la commission des finances et de la commission des affaires économiques en ont décrit les grandes lignes à notre assemblée. Je n'y reviendrai pas, sinon pour rappeler que, par nature, l'aménagement du territoire relève de l'ensemble du Gouvernement.
    Les crédits d'investissement en faveur des transports terrestres, les dotations pour la décentralisation culturelle, les fonds structuels européens jouent autant pour l'aménagement du territoire que vos propres crédits.
    Ces questions impliquent par conséquent une approche transversable et interministérielle. De là découle un risque : celui de la dispersion et du saupoudrage des crédits. De là peut aussi émerger une chance : celle d'une action politique cohérente dans le cadre de laquelle l'ensemble des ministères se préoccupent d'une desserte équilibrée du territoire. Et je crois comprendre que le Gouvernement souhaite saisir cette chance.
    La politique de décentralisation, conduite sous l'autorité du Premier ministre, offre, en effet, une superbe opportunité de réfléchir aux compétences respectives de l'Etat et des collectivités locales, ainsi qu'aux instruments juridiques et financiers d'une politique d'aménagement du territoire. Pour l'heure, le Premier ministre a clairement affirmé à plusieurs reprises le volontarisme du Gouvernement en la matière. Vous-même, monsieur le ministre, avez déployé de grands efforts pour que ce débat occupe le devant de la scène politique, et plusieurs projets de réforme sont à l'étude. Le Gouvernement est au travail et il peut compter, sur toutes ces questions, sur la contribution et l'appui du groupe de l'UMP.
    Le budget est avant tout un document de nature politique, qui traduit en milliards d'euros sonnants et trébuchants les priorités du Gouvernement. Toutefois, comme je l'ai dit au début de mon intervention compte tenu de la continuité de l'Etat, il ne vous était pas possible, monsieur le ministre, de nous présenter un budget de rupture. Du reste, personne ne vous le demandait. Nous sommes là pour donner une inflexion nouvelle à la politique de notre pays et non pour régler des comptes avec l'ancienne majorité.
    M. Patrice Martin-Lalande. Cela change de 1997 !
    M. Emile Blessig. Dans une matière aussi complexe et sensible que l'aménagement du territoire, il faut d'abord réfléchir à ce que nous voulons. La lecture des rapports budgétaires de nos collègues Giscard d'Estaing et Le Nay m'a conforté dans cette analyse. Nos deux rapporteurs ont parfaitement décrit ce qu'est actuellement l'aménagement du territoire et, donc, en quoi consiste son budget, c'est-à-dire une collection d'actions, pour la plupart justifiées, mais avec une ligne directrice de plus en plus floue. L'aménagement répond à plusieurs intérêts généraux et apporte sa contribution à plusieurs politiques publiques, par le biais de la DATAR, du fonds national d'aménagement et de développement du territoire, de la prime d'aménagement du territoire, des contrats de plan, de fonds plus ou moins utiles, d'instituts, de politiques en faveur des zones en difficulté et de schémas de services collectifs préparés à Paris sans véritable connexion avec le terrain et sa réalité.
    M. Patrice Martin-Lalande. Sans débat organisé ! Le Parlement est court-circuité !
    M. Emile Blessig. Tout cela s'additionne, mais, en réalité, nous ne savons plus exactement en vertu de quelles priorités la nation dépense chaque année plus de 10 milliards d'euros. Voilà, à mon sens, le fond de la discussion s'agissant de ce budget.
    M. Robert Pandraud. Très bien !
    M. Emile Blessig. Les études et les analyses d'opinion montrent que notre population est de plus en plus attachée à la notion de qualité de vie et qu'elle rejette les concentrations excessives. Elle souhaite une vie plus équilibrée dans des territoires capables de répondre aux mutations de la nouvelle société.
    Dès lors, l'aménagement du territoire consiste, d'une part, à optimiser, en milieu rural comme en milieu urbain, l'accès aux équipements et aux services et, d'autre part, à soutenir ceux de nos territoires qui constituent de véritables pôles d'excellence et qui sont soumis à une concurrence européenne et mondiale de plus en plus forte. L'aménagement du territoire, c'est finalement le développement de l'attractivité de notre pays, dans toute sa diversité. Nous sommes donc tous conscients qu'il faut réformer la politique d'aménagement du territoire pour lui redonner un sens qui soit perceptible par l'Etat et les collectivités locales dans l'exercice de leurs compétences respectives.
    M. Jean Launay. C'est vrai !
    M. Emile Blessig. La politique d'aménagement du territoire est aussi porteuse des valeurs de solidarité nationale.
    Or que constatons-nous actuellement ? Un chevauchement de compétences et de structures, souligné par nos rapporteurs. Qui, dans cette assemblée, peut se targuer d'avoir une vision claire de l'interaction des rôles de l'Etat, des régions, des départements, des communes, des communautés de communes, des communautés d'agglomération, des pays, des schémas de cohérence territoriale ?
    M. François Sauvadet. M. Balligand ! (Sourires.)
    M. Emile Blessig. Où est la logique ? Qui régit l'organisation des territoires ?
    Plusieurs députés du groupe socialiste. La loi !
    M. Emile Blessig. Où est la légitimité politique ? Est-elle chez les élus, dépositaires de la légitimité que confère le suffrage universel ou est-elle dans ces formes de démocratie participative qui tentent ici et là d'émerger ? C'est une question de fond.
    M. Patrick Martin-Lalande. Le vrai débat est là !
    M. Emile Blessig. Vous tentez, monsieur le ministre, d'y répondre. C'est ainsi que vous avez récemment saisi la délégation que j'ai l'honneur de présider d'une demande de réflexion à la matière, et je sais que vous avez formulé la même demande à la DATAR. Nul doute que les remarques de nombreux élus locaux commencent à trouver un écho auprès du Gouvernement.
    La loi Voynet relative à l'aménagement du territoire, la loi sur l'intercommunalité, la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain ont chacune leur cohérence, fruit d'une politique de l'ancienne majorité, mais leur articulation se révèle effroyablement complexe.
    Je ne puis préjuger les conclusions que présentera notre délégation, qui commence juste ses travaux sur la question, mais je puis affirmer qu'elle travaillera en ayant pour souci de donner de la cohérence et de la lisibilité à l'action de l'Etat et des collectivités locales dans le cadre de la décentralisation.
    Si la décentralisation n'est pas l'anarchie, elle ne doit pas être davantage le prétexte pour l'Etat de se débarrasser de compétences encombrantes. C'est encore moins, soit dit en passant, l'affirmation que l'une des deux assemblées du Parlement aurait, en raison de son mode d'élection, une supériorité pour traiter de ces questions.
    M. Robert Pandraud. Très juste !
    M. Emile Blessig. Il y a, faut-il le rappeler, autant d'élus locaux à l'Assemblée nationale qu'au Sénat ! (Applaudissements.)
    La décentralisation n'est pas seulement une nouvelle manière d'organiser les rapports entre l'Etat et les collectivités locales, elles constitue également en elle-même un nouveau mode d'organisation de l'Etat, qui aura des conséquences sur l'aménagement du territoire. Cessons d'opposer Etat et collectivités locales : les deux participent à l'exercice de notre démocratie, les deux contribuent, par leurs initiatives et leurs financements, à l'aménagement du territoire.
    M. Jean-Pierre Balligand. Il faut vous dépêcher de corriger le projet du Gouvernement !
    M. Emile Blessig. La décentralisation modifiera le point de départ des politiques d'aménagement du territoire en donnant à l'échelon local et à l'échelon régional davantage de liberté et davantage de pouvoir d'initiative.
    De plus, le développement et l'élargissement de l'Union européenne auront également une incidence sur l'aménagement du territoire.
    Par conséquent, compte tenu des nouveaux contextes national et européen, il nous faut absolument clarifier le sens, les instruments et les financements de la politique d'aménagement du territoire.
    Nous attendons, monsieur le ministre, que la réflexion que nous conduirons ensemble débouche sur cette réforme.
    Si le Premier ministre, soutenu par sa majorité, conduit à bien la décentralisation, il paraît évident que votre prochain budget ne ressemblera pas, dans sa présentation, à celui d'aujourd'hui. La question du rôle et des missions de la DATAR et du Commissariat général au Plan se poseront, sachant qu'il est nécessaire de disposer d'organes capables de développer une réflexion globale et prospective sur l'aménagement du territoire, mais aussi de diffuser, parmi des intervenants de plus en plus nombreux, la culture et la connaissance de l'aménagement du territoire, indispensables à la préparation d'une bonne politique et au développement équilibré de notre pays.
    De même, il serait utile de mettre fin à l'empilement des primes et des zones alors qu'une fiscalité adaptée peut remplir avec plus d'efficacité les mêmes objectifs.
    J'arrête là cette énumération, qui n'avait pour but que de mettre l'accent sur la contradiction entre les instruments et les financements actuels de notre politique, alors que l'organisation de notre territoire obéira d'ici à deux ans à une logique totalement différente : celle de la décentralisation.
    Je ne veux pas, monsieur le ministre, terminer cette intervention sans saluer le travail que vous avez mené depuis votre istallation, notamment pour la réforme de l'attribution des fonds structurels européens. Ceux-ci, d'un montant largement supérieur aux crédits dont vous disposez, sont pour notre pays un élément essentiel de revitalisation de l'espace rural et de l'activité dans les départements d'outre-mer.
    Je ne reviendrai pas sur les retards que nous connaissons en la matière, et me contenterai de vous féliciter sur l'énergie que vous avez déployée pour régler un problème franco-français de rivalité et de sclérose au sein de l'administration d'Etat.
    M. Patrice Martin-Lalande. Tout à fait exact !
    M. Emile Blessig. Votre action prouve que le volontarisme politique a encore une signification.
    De même, vous êtes en passe de régler, d'ici à deux ans, le problème de la couverture de notre territoire par le téléphone mobile, et je ne peux que vous remercier de la contribution que vous avez apportée au travail de notre délégation sur cette question, ainsi que sur celle de l'Internet à haut débit. Ce thème montre bien, toutefois, les limites de la politique actuelle d'aménagement du territoire, dans la mesure où l'Etat semble compter sur l'initiative des collectivités locales - ce qui lui permet également de substantielles économies budgétaires.
    De ce fait, nous nous éloignons un peu d'un aménagement du territoire conçu comme l'expression de la solidarité nationale. Il est donc nécessaire de réfléchir à la mise en place d'un système de péréquation indispensable à une bonne politique d'aménagement du territoire. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Monsieur le ministre, le groupe de l'UMP votera sans réserve vos crédits,...
    M. Patrice Martin-Lalande. Et avec enthousiasme !
    M. Emile Blessig. ... et cela ne vous étonnera pas. Votre budget est, en effet, un bon budget. Cependant, un autre débat est encore à venir. Nous attendons du Gouvernement qu'il travaille, avec le Parlement, à une réforme globale du fonctionnement de l'Etat, et la politique d'aménagement du territoire devra trouver sa place dans cette nouvelle organisation des pouvoirs publics. Le Premier ministre a déjà indiqué le calendrier de la décentralisation. Nous l'accompagnerons dans cette démarche. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Pierre Balligand. Dommage, monsieur Blessig, que vous ayez fait cette conclusion. Il y avait 95 % de vrai dans votre intervention !
    M. Emile Blessig. L'aménagement du territoire n'est pas une question de personnes. C'est une obligation pour tous !
    M. Jean-Pierre Balligand. Je répondrai à cela tout à l'heure.
    M. le président. La parole est à M. Jean Launay.
    M. Jean Launay. Dans le cadre de l'examen de votre budget, je voudrais, monsieur le ministre, aborder trois points particuliers. Deux concernent ce que M. le Premier ministre appelle les « nouvelles problématiques de l'aménagement du territoire » : les services publics dans les quartiers sensibles et un meilleur accès aux nouvelles technologies. Le troisième point concernera le discret amendement relatif à l'Institut des hautes études de développement et d'aménagement du territoire, qui pose la question de l'avenir de la DATAR et des nouvelles missions confiées à son nouveau délégué.
    J'en viens à mon premier point : les services publics.
    Si, comme vous avez dû le faire vous-même, monsieur le délégué,...
    M. Robert Pandraud. C'est au ministère que l'on s'adresse !
    M. Jean Launay. ... en recevant votre lettre de mission, je me risque à faire l'exégèse de la pensée du Premier ministre, je ne veux pas croire que l'expression de « quartiers sensibles » n'intègre pas la ruralité, d'autant moins que le paragraphe suivant de cette lettre de mission prône de « mieux prendre en compte les problèmes de la ruralité pour le maintien des prestations de services essentielles et le développement de la pluriactivité ».
    Voilà où les choses se compliquent. Nous n'avons pas le temps d'ouvrir le débat sur « service public et services au public », ni celui qui concerne les différents niveaux de décision dans l'exercice des missions de service public, mais il faudra bien réussir un jour à définir collectivement ce qu'est une présence suffisante du service public. De même, il faudra voir comment maintenir, dans le nécessaire soutien au développement des zones rurales préconisé par le rapporteur Jacques Le Nay, une offre de service public suffisante, alors que tout concourt, dans la pensée libérale ambiante et dominante, à couper, tailler, rationaliser, économiser (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), secteur par secteur et sans vue d'ensemble, en oubliant souvent les volontés et les actions locales, qu'elles proviennent de secteur privé, du secteur associatif et même du secteur public.
    M. Jacques-Alain Bénisti. Vous ne savez pas lire un budget !
    M. Jean Launay. L'opinion publique, les « gens d'en bas », le terrain - et je ne ferai volontairement pas de distinction entre le rural et l'urbain, car, à la différence de M. Sauvadet, je n'ai pas la campagne pleureuse, misérabiliste -,...
    M. François Sauvadet. Quoi ? C'est incroyable !
    M. Patrice Martin-Lalande. M. Sauvadet a beaucoup pleuré ces cinq dernières années !
    M. Jean Launay. ... l'opinion publique, disais-je, nous demande, j'en suis persuadé, même si ce n'est pas clairement explicité, de redéfinir les missions de l'administration. Ce travail est nécessaire, mais est devenu aussi plus complexe, du fait des débats largement ouverts sur l'Europe et sur la décentralisation.
    Le deuxième point que je souhaite traiter concerne les nouvelles technologies.
    Il faut d'abord souligner l'amélioration constante de l'efficacité quotidienne de l'administration si l'on en juge à l'aune des délais moyens de traitement d'un dossier, d'obtention d'un document, d'attente aux guichets. Dans ce domaine, les techniques d'information et de communication ont joué un grand rôle, qu'il s'agisse d'innovations locales ou d'expérimentations nationales. Cela marche, et cela va nous aider à rapprocher l'Etat du citoyen, par ailleurs contribuable et consommateur, et à transformer l'Etat lui-même en donnant plus de transversalité à sa présence et à ses actions.
    M. Patrice Martin-Lalande. Il y a du travail à faire !
    M. Jean Launay. Missionné par le Premier ministre au cours de la précédente législature auprès du ministre de l'économie et des finances, j'ai travaillé sur les Maisons de services publics économiques et financiers, devenues MINEFI Service Contact, et j'ai ainsi pu faire le lien entre la proximité souhaitable, la nécessaire transversalité des services de l'Etat et le recours appuyé aux nouvelles technologies.
    M. Jean-Pierre Balligand. Un travail remarquable !
    M. Jean Launay. Encore ne s'agissait-il là que d'interdirectionnalité dans le seul grand ministère des finances. Mais je suis convaincu qu'on peut et qu'on doit aller plus loin, y compris dans d'autres secteurs de l'Etat, et y compris en matière d'interministérialité.
    Par exemple, quel pourrait être le lien entre l'Etat et des pays, constitués ou en cours de constitution, pour coller aux projets des territoires ? A moins que l'interrogation du Premier ministre, le 31 octobre dernier, se demandant « pourquoi vouloir quadriller systématiquement toute la France en 400 pays » ne vienne dogmatiquement tout casser dans ce qui se construit progressivement par la volonté de acteurs locaux, grâce à la mise en oeuvre de la loi de la République, c'est-à-dire la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, la LOADDT, au prétexte que celle-ci a été initiée par la gauche et, plus encore, portée par Dominique Voynet ! (« Très juste ! » sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Je dirai encore quelques mots sur la couverture du territoire par la téléphonie mobile et l'Internet haut débit. La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire travaille sur ce sujet en ce moment - Emile Blessig, son président, l'a indiqué et a évoqué la péréquation. Pour ma part, j'ai la conviction que le moment est venu d'avoir un service public de réseaux. Le maillage existant du territoire est correct, il doit être rendu disponible. Dans cette affaire, l'Etat doit pleinement jouer son rôle de chef d'orchestre, impulser la méthode pour mettre en place un schéma plus interactif avec les régions et, finalement, appliquer les décisions politiques du CIADT de Limoges.
    J'en viens au troisième et dernier point que je veux évoquer : il concerne l'avenir de la DATAR.
    On ne peut répéter à l'envi qu'on a besoin de matière grise pour alimenter la mise en place de projets de territoire, qu'il y a un déficit d'ingénierie sur les territoires, notamment dans le montage de dossiers mobilisant les fonds européens, et en même temps rayer d'un trait de plume l'Institut des hautes études d'aménagement et de développement du territoire, l'IHEDAT, sans se soucier plus avant des raisons qui avaient conduit à sa création. Il s'agissait de favoriser l'apparition d'un état d'esprit susceptible de créer de la transversalité dans les modes de pensée et d'action des décideurs publics - administrations de mission - et des décideurs privés : investisseurs.
    M. le président. Veuillez conclure.
    M. Jean Launay. Je conclus, monsieur le président.
    Je note au passage que personne n'a proposé la suppression de l'Institut des hautes études de défense nationale, l'IHEDN, lors de l'examen du budget de la défense nationale.
    D'ailleurs, pourquoi s'arrêter à l'IHEDAT et ne pas se poser carrément, dans le cadre de la réflexion libérale qui anime ce gouvernement, la question de l'existence même de la DATAR. La nécessaire réforme qui vous est demandée ira-t-elle jusqu'au suicide ?
    Je suis intrigué par la cotutelle du ministère de l'agriculture sur la DATAR, comme je le suis d'ailleurs par l'ajout de la mention « affaires rurales » au titre du ministre de l'agriculture. Tout cela est un affichage réducteur par rapport à la mission qu'exige de mener l'aménagement du territoire.
    Au-delà de la réflexion sur l'avenir de la DATAR - et l'on pourrait aussi, André Chassaigne l'a fait, évoquer celui du Commissariat général au Plan -, c'est bien la question du poids de votre ministère et de ses outils qui est posée, monsieur le ministre, et donc de l'expression d'une volonté politique. L'affichage est impressionnant : vous êtes le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Mais au-delà, convenons ensemble, compte tenu du débat en cours sur la décentralisation, que nous avons beaucoup d'incertitudes sur un meilleur aménagement du territoire, à travers les territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. François Sauvadet. On vous a connu meilleur !
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, j'aimerais évoquer devant vous une question que le groupe UDF estime primordiale : la réforme des retraites.
    La discussion que nous avons aujourd'hui sur le budget de la fonction publique est pour moi l'occasion de revenir sur l'absence très regrettable de réforme de la gestion des retraites des agents publics depuis dix ans, dans le but d'inciter le Gouvernement à engager une réforme ambitieuse en ce domaine.
    Les Français attendent une réforme transparente et équitable des retraites, qui a été repoussée d'année en année depuis cinq ans. Or, au cours des dernières semaines, il me semble que nous avons pris un chemin diamétralement opposé.
    M. Jean-Pierre Balligand. Eh oui ! Ecoutez-le bien, messieurs !
    M. Nicolas Perruchot. La semaine dernière, cette assemblée a rejeté un amendement de l'UDF au projet de loi de financement de la sécurité sociale, lequel visait à empêcher un financement supplémentaire des retraites des fonctionnaires par les retraites des salariés du privé Certains auraient même parlé de « hold-up ». Cela ne fait que renforcer l'inégalité des Français devant la retraite.
    Par ailleurs, nous avons appris par la presse que les dirigeants des entreprises qui seront prochainement privatisées négocient avec les syndicats l'avenir des retraites des statuts spéciaux. Cette question relève pourtant du politique et elle doit être, en outre, examinée dans le cadre d'une réforme globale des retraites, et non de manière cloisonnée et opaque.
    Depuis dix ans, l'inégalité entre les membres du secteur public et les salariés du privé, et même au sein du secteur public, n'a cessé de se creuser.
    Selon une étude de l'INSEE de juillet 2002, les salariés du secteur privé touchent en moyenne une pension de 1 713 euros pour les hommes et de 1 072 pour les femmes, contre respectivement 2 202 et 1 842 dans le secteur public, soit 30 % d'écart pour les hommes et 70 % d'écart pour les femmes.
    Cette inégalité a au moins quatre origines.
    Premièrement, le fonctionnaire touche une pension égale à 75 % de son traitement mensuel calculé sur ses six derniers mois d'activité. Dans le privé, la pension de base vaut 50 % du salaire annuel moyen. Jusqu'à la réforme de 1993, il était calculé sur les dix meilleurs années ; depuis lors, il est fonction des vingt-cinq meilleures années. Six mois d'un côté, vingt-cinq années de l'autre : où est l'égalité ?
    Deuxièmement, la pension des fonctionnaires est indexée sur les salaires et non sur les prix, comme dans le privé.
    Troisièmement, en dépit d'une durée de cotisation plus longue, les salariés du secteur privé bénéficient de prestations moins importantes car elles subissent un abattement en fonction de la durée d'assurance, contrairement à celles des fonctionnaires.
    Quatrièmement, le taux de cotisation salariale des fonctionnaires est inchangé à 7,85 % depuis 1991, contre 10,35 % pour un salarié non cadre du privé et, si l'on tient compte des primes, le taux tombe même à 6,28 %.
    Mais il y a plus grave encore : pour l'essentiel, ce sont les contribuables qui financent ces retraites généreuses. En effet, alors que la cotisation employeur est de 15,46 % dans le privé, elle est de 51,9 % dans le public. La retraite d'un fonctionnaire coûte donc plus du double d'une retraite d'un salarié du secteur privé.
    Qui plus est, si l'Etat devait provisionner les charges de retraite, comme une entreprise privée, il devrait prévoir plus de 600 milliards d'euros, soit le tiers du PIB français.
    Je ne pense pas que nous ayons aujourd'hui les moyens de sortir de ce guêpier. En effet, nous nous trouvons dans une situation absurde où, au nom de l'universalité budgétaire, l'Etat ne peut affecter les cotisations salariales et patronales à une caisse de retraite des fonctionnaires d'Etat. La nouvelle loi organique du 1er août 2001 ne prévoit qu'une unification comptable des entrées et des sorties à partir de 2006, mais elle ne peut pas contraindre l'Etat à prendre ses responsabilités, c'est-à-dire à fixer explicitement un taux de cotisation patronale pluriannuel et à augmenter les cotisations salariales pour équilibrer le régime.
    Cette situation est d'autant plus invraisemblable que les fonctionnaires des collectivités locales et des établissements de santé, ainsi que les agents non titulaires, cotisent à des caisses autonomes. En conséquence, le financement de leurs retraites est bien plus réaliste, en dépit des critiques que l'on a pu adresser à la gestion de la CNRACL, par exemple. En dix ans, les dépenses de pensions de l'Etat ont augmenté de 2,9 % par an, dont 50 % seulement du fait de l'augmentation du nombre des retraités. Le reste est imputable à la bonification du montant des pensions. En revanche, si ces dépenses ont augmenté plus rapidement pour la CNRACL, seuls 90 % de la hausse sont imputables à l'augmentation du nombre des pensionnés.
    Or rien ne change cette année : les dépenses de pensions de l'Etat augmentent de 4,2 %, alors que les cotisations salariales n'augmentent que de 1,6 %. Dans le même temps, les dépenses de pensions de la CNRACL s'accroissent de 5,6 % et les cotisations salariés et employeurs de 4,2 %.
    J'en tire la conclusion suivante : depuis dix ans, les agents publics bénéficient de retraites généreuses, financées par des contribuables moins bien lotis. Au sein même de l'emploi public, existent d'importantes inégalités entre les fonctionnaires d'Etat et les autres agents publics, et la tendance ne fait que s'accentuer.
    Au terme de ce rapide survol, je pense que nous mesurons tous l'ampleur de la tâche à accomplir.
    Le groupe UDF souhaite que la réforme des retraites menée en 2003 conduise enfin à un système égalitaire. C'est le seul moyen pour que la décision politique soit enfin l'expression de la volonté générale et qu'elle aille dans le sens de l'intérêt collectif.
    Nous attendons donc, monsieur le ministre, votre engagement en faveur du rétablissement de l'équité. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.
    M. Jean-Pierre Balligand. Monsieur le ministre, on est un peu surpris.
    Voilà quelques années que j'interviens sur l'aménagement du territoire, et j'ai pris l'habitude, avec un certain nombre de collègues, toutes tendances politiques confondues, de me fâcher, y compris avec mes amis politiques, lorsque les budgets de l'aménagement du territoire baissent. Ce fut en particulier le cas lorsque Jacques Chirac était ministre de l'aménagement du territoire...
    M. François Sauvadet. Ce ne fut pas le seul !
    M. Jean-Pierre Balligand. Certes, mais nous avons dénoncé la baisse à ce moment-là.
    Quand vous êtes devenu ministre de la fonction publique et de l'aménagement du territoire, j'avais un préjugé favorable. Vous voyez qu'après avoir été député pendant vingt et un ans, on peut être encore naïf. J'avais en effet lu certaines choses à propos de Jean-Paul Delevoye dans de très intéressants rapports émanant du commissariat au Plan. Je le connaissais aussi en tant que président de l'AMF, l'Association des maires de France.
    Ma première question sera la suivante : où est passé le ministère de l'aménagement du territoire ? A-t-il fondu dans un grand ministère de la fonction publique, ce qui est possible ? Ou bien préparez-vous des politiques nouvelles ?
    Vous avez fait des efforts concernant les fonds structurels, et cela est important. Combattre l'administration dans ses propres réflexes est une bonne chose. Mais il faut que vous soyez audible, il faut que l'on vous entende.
    On le sait, le budget de l'aménagement du territoire est modeste, mais il a des effets levier importants car il faut compter avec les contrats de plan. On ne doit donc pas considérer la masse d'argent, infime, que représente le seul budget de l'aménagement du territoire en tant que tel : il convient de rapporter celui-ci au budget du Plan, en particulier aux contrats de plan, qui mobilisent de manière transversale les crédits des différents ministères.
    Il importe, surtout en début de législature, que vous éclairiez votre action, que vous définissiez les axes de votre politique d'aménagement du territoire, d'autant plus que, comme toujours, les dynamiques territoriales révèlent de fortes différenciations.
    Je suis très satisfait des lois de juillet 1999 créant les communautés d'agglomération, mais nous savons tous que les choses sont plus difficiles pour le milieu rural, qui a ses communautés de communes. Même si l'on fédérait ces dernières dans un pays pour arriver à une « masse critique » permettant une programmation et une contractualisation avec l'Etat, la région et le département, on aurait toujours un dispositif à deux vitesses. Cette réalité est d'autant plus aigue quand il s'agit de mobiliser des moyens économiques.
    M. François Sauvadet. C'est vrai !
    M. Jean-Pierre Balligand. Le dépassement des entités communales, nous l'avons engagé dès 1992 avec la loi Joxe, et nous l'avons réalisé, à gauche comme à droite, même si nous avions été les seuls dans cette assemblée à voter cette loi. Dès 1993 se sont mises immédiatement en place les communautés de communes et, à cette occasion, les élus de toutes sensibilités politiques, en particulier dans le milieu rural, se sont mobilisés.
    Que vous reveniez sur les communautés de communes ce n'est pas grave, mais alors, il faut le dire.
    M. Nicolas Perruchot. Si, c'est grave !
    M. Jean-Pierre Balligand. Pour nous, c'est grave. Mais cela fait partie du débat public. Je suis démocrate et j'admets très bien que vous ayez d'autres orientations que les miennes. Simplement, il faut que vous vous exprimiez.
    Dans le projet de loi constitutionnelle, il n'y a strictement rien sur les communautés de communes.
    Je peux comprendre que l'on me dise que l'on ne veut pas qu'elles deviennent des collectivités territoriales puisqu'il s'agit d'établissements publics de coopération, et donc que l'on n'a pas à les mentionner dans le texte. Mais le fait qu'il n'y ait rien à ce sujet commence à m'inquiéter. Ceux qui se promènent un peu partout dans les pays disent que l'on pourrait revenir sur le dispositif. Le bruit court dans pas mal de ministères, mais j'aimerais que le ministre de l'aménagement du territoire s'exprime d'une voix forte sur la question.
    Quant au budget lui-même, il n'est pas bon. Louis Giscard d'Estaing, dans le rapport qu'il a rédigé au nom de la commission des finances, montre bien qu'il est en baisse de 5,91 %. Je conçois qu'il y ait un décalage important entre ce qu'il a écrit dans son rapport et ce qu'il a déclaré à la tribune : cela fait partie des lois de la majorité. Il demeure que le budget est en baisse.
    Le Fonds national d'aménagement et de développement du territoire voit ses crédits de 110 millions d'euros reconduits. Mais au-delà de cette reconduction, vous devez dire ce que vous avez envie de faire.
    Moi, j'ai des propositions à faire.
    Prenez garde à ne pas offrir à manger des merles, faute de grives !
    Comme vous ne pouvez pas vous « payer » les grandes administrations - votre rêve, monsieur Plagnol ! - que faites-vous ? Vous touchez à l'Institut d'aménagement du territoire et vous ne reconduisez pas le pauvre budget de l'aménagement du territoire. On commence aussi à voir tomber des amendements qui tendent à supprimer le Commissariat au Plan, qui, entre nous, n'est pas budgétivore.
    Vous offrez donc des merles faute de grives car il vous faut bien donner des cautions libérales. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Je peux admettre que M. Plagnol ait cette attitude. Mais je ne pense pas qu'elle soit forcément conforme à votre philosophie, monsieur Delevoye, ni à celle d'un certain nombre de mes collègues.
    Il faut, c'est indispensable, travailler sur le milieu rural, non sans faire preuve de sens critique. Pour ce qui concerne les agglomérations, les choses marchent bien, elles avancent même car nous avons fait oeuvre utile depuis 1999. Mais sur le milieu rural, nous patinons.
    M. Launay a dit quelque chose d'assez fondamental concernant le service public. Mais il vaudrait la peine que vous travailliez sur la question des zones franches en milieu rural, quitte à faire de l'expérimentation sur des lieux choisis. En ce domaine, nous devons ensemble, les collectivités territoriales et, bien entendu, l'Etat, tester. Sinon, nous serons confrontés à des catastrophes relativement graves.
    Vous devez également travailler sur l'articulation pays-développement économique. En effet, nos communautés de communes en milieu rural sont relativement petites et, en comparaison des communautés d'agglomération et des communautés urbaines, elles sont sur le « petit pignon », si j'ose cette métaphore. Or il existe encore un maillage industriel dans notre pays et, du point de vue des prix de revient, le milieu rural peut avoir une compétitivité intéressante. Mais nous avons besoin d'une véritable dynamisation territoriale.
    Monsieur le ministre, j'aimerais que vous fassiez votre travail, c'est-à-dire que le ministère de l'aménagement du territoire se fasse entendre sur toutes ces questions car nous en avons besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Denis Merville.
    M. Denis Merville. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à l'occasion de l'examen du budget, je voudrais appeler votre attention sur quelques points.
    L'aménagement du territoire, d'abord.
    Notre pays a la chance de couvrir un vaste territoire. Hélas ! aujourd'hui, 80 % de la population vit sur 20 % de celui-ci, ce qui signifie, à l'inverse, que sur 80 % du territoire vivent seulement 20 % de la population.
    De ce déséquilibre, de cette inégale compétitivité de nos territoires, on parle depuis des années. Il est vrai que les solutions sont complexes et que des crédits importants, que ce budget ne traduit que partiellement, sont nécessaires.
    A la lecture du budget de l'aménagement du territoire, j'ai pu constater combien les acteurs étaient nombreux.
    Je n'ai pas le sentiment que la Délégation à l'aménagement du territoire, dont l'aménagement du territoire est la mission première, ait été ces dernières années très efficace ni très proche du terrain.
    Je compte sur le nouveau délégué pour qu'il en soit différemment dans les années qui viennent.
    L'Agence française pour les investissements internationaux est aussi concernée, tout comme l'Institut des hautes études de développement et d'aménagement du territoire. Je fais partie de ceux qui se sont interrogés sur cet institut, où interviennent sans doute des conférenciers de qualité, mais dont le coût de fonctionnement paraît particulièrement élevé. Si l'on ne le supprime pas, au moins faut-il apporter des améliorations.
    Différents outils sont à notre disposition : le Fonds national pour l'aménagement du territoire, les primes d'aménagement, sans parler des divers fonds d'intervention.
    Ne serait-il pas possible, dans un souci de simplification, de regrouper un certain nombre d'organismes, en unifiant les moyens à leur disposition et leurs outils d'intervention ? Les retards importants de consommation des crédits sont certainement une illustration de la complexité des procédures.
    Il y a également les fonds européens. Ils sont importants et eux aussi connaissent des retards dans leur consommation. Les chiffres ont été donnés, aussi n'y reviendrai-je pas.
    Monsieur le ministre, par de récentes circulaires, vous avez voulu alléger les procédures et je vous en félicite. Mais je ne suis pas certain que ces circulaires soient effectivement appliquées sur le terrain.
    M. Yves Deniaud. Très bonne remarque !
    M. Denis Merville. C'est pourquoi il conviendrait, me semble-t-il, de soutenir davantage le projet, voire d'aller encore beaucoup plus loin dans la réforme. Ne pourrions-nous pas, par exemple, confier la gestion des crédits aux conseils généraux ou aux conseils généraux, comme vous l'avez fait récemment en Alsace ?
    J'en viens au budget de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
    Le Gouvernement s'est engagé dans une nouvelle étape de la décentralisation, et il a parfaitement raison. En effet, s'il veut être efficace dans l'exercice de ses missions régaliennes, l'Etat ne peut s'occuper de tout.
    Cette réforme doit aboutir à la République des proximités voulue par notre Premier ministre. Selon moi, la décentralisation doit offrir un meilleur service à nos concitoyens. En effet, ce sont eux qui sont au centre de l'action publique, nous ne devons jamais le perdre de vue. Aussi faudra-t-il affirmer le principe de proximité, comme nos concitoyens en ont exprimé le souhait lors des élections municipales, cantonales, et encore tout récemment.
    Il faut également clarifier les compétences. Ces dernières années, nous avons vu les textes législatifs et réglementaires se multiplier, se contredire parfois, et nos concitoyens ne savent plus qui est responsable ni qui fait quoi, car aux collectivités qu'ils connaissent bien - commune, département, région - se sont ajoutés les communautés de communes, les agglomérations, les pays, ce qui s'est parfois traduit par les chevauchements des périmètres, des partages de compétences, des coûts de gestion supplémentaires, voire de nouveaux échelons administratifs. Il faudra donc simplifier.
    Les procédures se sont souvent excessivement multipliées et alourdies. Récemment, j'ai présidé un groupe de travail à l'agence de l'eau : il aura fallu neuf ans d'études avant que des travaux soient engagés ! Comment l'expliquer à nos administrés lorsqu'ils souffrent, par exemple, d'inondations ?
    Il faudra également avoir le souci d'une gestion économe de l'argent public. C'est en effet l'argent des contribuables, il nous faut donc le dépenser à bon escient.
    M. François Sauvadet. Eh oui !
    M. Denis Merville. Cette décentralisation, nous savons qu'elle prendra du temps. C'est pourquoi je souhaiterais, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, que le moratoire dont vous nous avez déjà entretenu et qui vise à simplifier et à alléger un certain nombre de textes législatifs et réglementaires soit mis en place rapidement.
    S'agissant de l'intercommunalité, je n'entrerai pas dans le détail : elle connaît un réel succès mais son financement ne sera pas sans poser de problèmes dans les années qui viennent.
    S'agissant des pays, les procédures nécessaires à la définition de ces territoires pertinents sont longues. Il est vrai qu'il s'agit de régler des problèmes aussi divers que l'habitat, les transports, la qualité de l'air ou la qualité de l'eau. Nous participons, les uns et les autres, à de multiples réunions - je pense aux CRAT, commissions régionales d'aménagement du territoire, par exemple - où, sous couvert de transparence, on nous remet des dossiers si épais que nous ne pouvons en prendre connaissance que partiellement.
    Pour toutes ces raisons, il est important, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, que très vite, car c'est attendu sur le terrain, ces réglementations soient simplifiées.
    Par ailleurs, la réforme de l'Etat ne pourra se faire sans transferts de services. A défaut, elle se traduirait par des services et des charges supplémentaires. Elle devra donc être réalisée avec les agents de la fonction publique. La France a la chance de disposer de fonctionnaires dont la très large majorité est compétente et dévouée et ne demande qu'à s'épanouir et à s'investir dans son travail. Il nous faudra aussi engager des réformes dans la fonction publique territoriale. Trop souvent, celle-ci a été moins bien traitée que la fonction publique d'Etat et nous devrons travailler sur la formation, la notation, les passerelles, afin qu'elle ne soit pas une sous-fonction publique. Là aussi, j'aimerais avoir des informations sur vos intentions.
    Enfin, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, il ne suffit pas de voter des lois, encore faut-il qu'elles soient appliquées. Lorsque j'interrogeais vos prédécesseurs sur le nombre de handicapés dans la fonction publique territoriale ou la fonction publique d'Etat, ils me répondaient que l'Etat n'était pas exemplaire. Je me réjouis donc de voir que des efforts sont faits dans le cadre de ce budget et je souhaiterais, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, que cela continue, car les handicapés doivent pouvoir trouver dans notre société la place qui leur revient. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. François Sauvadet. Voilà une bonne intervention !
    M. le président. La parole est à Mme Marie-Renée Oget.
    Mme Marie-Renée Oget. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de budget que vous présentez cette année suscite chez les élus et la population des zones rurales plusieurs interrogations. Je pense notamment à l'avenir des pays, à l'annonce du report de la mise en oeuvre des contrats de plan, ainsi que d'une réduction de 30 % du budget des infrastructures.
    En milieu rural, la création des pays constitue une des innovations majeures de la politique d'aménagement du territoire de la dernière décennie.
    M. Jean-Pierre Dufau. Très bien !
    Mme Marie-Renée Oget. Espace de projets, le pays est un lieu de concertation adapté non seulement pour les élus locaux, mais aussi pour la société civile qui est associée à la réflexion et à l'initiative.
    La loi Voynet du 25 juin 1999 incite les élus à travailler avec les acteurs économiques et sociaux. Elle pose également l'exigence d'une cohérence territoriale et prévoit, à ce titre, une appréciation en amont des chartes de pays qui, pour être validées, doivent recevoir l'aval du préfet. Or, si j'en crois plusieurs de vos déclarations, monsieur le ministre, la suppression de cette procédure serait envisagée sous prétexte de supprimer une lourdeur administrative. Pourtant, dans les faits, l'expérience démontre que cette procédure a précisément permis aux communes d'entrer dans des logiques de projet.
    M. Jean-Pierre Dufau. Tout à fait !
    Mme Marie-Renée Oget. Les pays ont permis aux petites communes de mieux reprendre l'initiative en matière d'aménagement de leur territoire, avec les acteurs socio-économiques, dans l'ensemble des domaines qui concernent leur développement. Pourquoi limiter au seul domaine économique cette part d'initiative confiée aux pays, comme cela a pu être évoqué ?
    M. Jean-Pierre Dufau. Très bien !
    Mme Marie-Renée Oget. Certes, le développement économique des zones rurales demeure un enjeu essentiel, mais les pays ont aussi prouvé leur capacité à se saisir d'autres questions qui les concernent, et rien ne justifie que cette faculté leur soit retirée.
    M. Jean-Pierre Dufau. Excellent !
    Mme Marie-Renée Oget. En Bretagne, vingt-six projets de pays recensés à ce jour ont donné des résultats concluants. La plupart du temps, cet espace d'initiative n'est ni un lieu de conflit de pouvoir, ni la cause de lenteurs ou de blocages dans l'élaboration des projets locaux. Dès lors, n'est-il pas paradoxal qu'à l'heure où le Gouvernement présente un projet de loi de décentralisation visant à développer l'initiative des collectivités, vous choisissiez de retirer aux pays leur capacité d'initiative ?
    M. Jean-Pierre Dufau. Très bien !
    M. François Sauvadet. Oh là, là !
    Mme Marie-Renée Oget. Enfin, monsieur le ministre, une étude fort intéressante portant sur le fonctionnement du pays et disponible sur le site internet de la DATAR, démontre clairement que la satisfaction l'emporte chez une grande majorité de nos concitoyens, les taux de satisfaction étant d'autant plus élevés que les projets de pays ont pris de l'avance et ont abouti à des résultats concrets, comme c'est le cas chez moi
    M. Jean-Pierre Dufau. Voilà un bon exemple !
    Mme Marie-Renée Oget. Alors, pourquoi changer une loi qui a fait ses preuves auprès des élus et de la population ?
    De toute évidence, la création des pays est une chance pour le développement des zones rurales grâce à l'impulsion d'une dynamique de projet qui permet aux élus de discuter, d'impliquer la population et de négocier avec l'Etat et les collectivités. Pour reprendre l'exemple concret de la Bretagne, de nombreuses chartes de pays ont, à ce jour, fait l'objet de la signature du volet territorial des contrats de plan Etat-région, mais la réalisation de plusieurs projets, en attente de finalisation, dépend encore de leur contractualisation.
    Dans ces conditions, monsieur le ministre, - et peut-être avez-vous perçu ce sentiment - je me dois d'exprimer l'inquiétude d'un grand nombre d'élus face à l'annonce du report d'un an de la mise en oeuvre du volet territorial des contrats de plan.
    Enfin, comment concevoir, à l'heure où, malgré certaines différences d'approche, l'idée d'élargir le droit à l'expérimentation semble faire son chemin, que des collectivités faisant preuve d'un réel volontarisme soient ainsi stoppées dans leur élan ?
    En ces temps de restrictions budgétaires, qui annoncent peut-être une politique de rigueur, et non plus seulement une politique « rigoureuse », pour rappeler les termes de M. Mer, le monde rural s'inquiète à juste titre de la réduction de près de 30 % des crédits des infrastructures, annoncée dans votre projet de budget, alors même que d'autres questions essentielles restent sans réponse. Je pense, par exemple, en ce qui concerne la région Bretagne, aux conclusions de l'audit consacré à l'extension du TGV Ouest...
    M. Yves Deniaud. Il aurait fallu que ce soit financé !
    Mme Marie-Renée Oget. ... ou à la programmation des travaux de l'axe routier central de la RN 164, véritable Arlésiennes depuis leur annonce par le général de Gaulle en 1969 !
    Des éléments de réponse, apportés dans le cadre de ce budget, seraient donc les bienvenus.
    Plus généralement, doit-on voir dans ces réductions de crédits une anticipation des projets de décentralisation du Gouvernement ? Si tel est le cas, nos concitoyens sont en droit de le savoir !
    Ainsi, quelles garanties pouvez-vous donner aujourd'hui aux populations des zones rurales et à leurs élus, pour ce qui est de la présence des infrastructures et des services publics essentiels ?
    Vous comprendrez, monsieur le ministre, que certaines préoccupations se soient exprimées, compte tenu de la baisse sensible du budget des infrastructures et en l'absence de réponse claire concernant les engagements, ou le désengagement, de l'Etat pour l'année 2003.
    Si cette importante réduction de crédits n'est pas due à vos futurs projets de décentralisation, annonce-t-elle une rigueur budgétaire encore plus marquée ? La population de notre pays attend légitimement une réponse sur ce point.
    Oui, ces questions méritent des réponses de la part du Gouvernement. Oui, le budget de l'aménagement du territoire fait craindre une régression des garanties publiques apportées aux entités rurales. Oui, le flou qui demeure sur les intentions du Gouvernement en matière de décentralisation suscite des inquiétudes légitimes,...
    M. Yves Deniaud. Elles seront vite dissipées !
    Mme Marie-Renée Oget. ... voire quelques désaccords au sein de votre propre majorité. Il est donc urgent de répondre aux interrogations de nos concitoyens et des élus, qui sont nombreuses, légitimes et justifiées ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.
    M. Jean Lassalle. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, François Sauvadet et Nicolas Perruchot ont présenté les grandes lignes de notre position. Je rappellerai donc simplement quelques idées brèves, - des « brèves », en quelque sorte - qui me tiennent beaucoup à coeur.
    Tout d'abord, je voudrais vous féliciter, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, pour votre courage, car pour s'attaquer au dossier auquel vous vous attaquez, il en faut. Ne vous laissez pas distraire par le gros temps que vous aurez sans doute à affronter.
    Pour réussir un vrai processus de décentralisation, vous devez concilier la nécessaire notion de cohésion nationale et l'adaptation des services publics. Gaston Defferre a lancé une première phase de décentralisation en 1981 et, si mes souvenirs sont bons, cela avait été très difficile.
    Vous devez, quant à vous, réorganiser un pays qui manque de souffle et qui ne sait plus où il va. C'est la raison pour laquelle vous aurez à faire face à des incompréhensions multiples et diverses, à la peur de disparaître des grandes administrations centrales, voire des administrations tout court, des conseils régionaux, des conseils généraux, des communes et des structures intercommunales. Pourtant, il faut faire bouger tout cela !
    Si je me permettais une suggestion, je dirais : n'allons pas trop vite ! Après ce qui s'est passé le 21 avril dernier, notre pays a besoin de transformations, mais ce n'est pas parce que le temps presse qu'il faut forcément se précipiter. A l'évidence, nos concitoyens s'enflamment pour ce débat qui les passionne. Or, on leur annonce pratiquement que les projets de loi sont prêts avant qu'ils aient pu s'exprimer. Si la France avait fait appel, comme elle a su le faire dans le passé, à l'intelligence des coeurs et au désir de s'impliquer à nouveau de l'ensemble des acteurs, nous nous serions donné plus de chances encore de réussir cette réforme très difficile.
    Cependant, je sais que si l'on n'agit pas vite, on n'arrive à rien. Je vous fais d'autant plus confiance, monsieur le ministre, que vous êtes un vrai spécialiste de la question. Bon courage !
    Je citerai deux exemples pour illustrer mon propos sur les services publics.
    La Poste : 300 000 salariés, 17 000 guichets. Comment se passera l'ouverture du secteur courrier, qui représente 62 % des revenus de l'entreprise ? Je me suis laissé dire que l'on pourrait perdre la moitié des centres de tri. Attention, la cohésion du pays est un élément important ! L'été dernier, l'un des maires de mon canton distribuait le courrier deux fois par semaine parce qu'il n'y avait plus de facteur. Cela inquiète terriblement nos concitoyens, qui ont vraiment le sentiment, dans un pays qui n'a jamais été aussi moderne, d'être complètement abandonnés, François Sauvadet le disait remarquablement tout à l'heure.
    La DATAR ! c'est une vieille histoire. Moi, des fois je l'aime, des fois je l'aime un peu moins... Cela dépend des moments. (Rires.) Mais je trouve qu'elle est irremplaçable quand elle fait son travail de tête chercheuse, quand elle se tient aux côtés de tous ceux qui ont envie d'aller de l'avant. Comme pour la politique des massifs, son action doit être renforcée.
    Une autre brève : les voies de communication. Je pense que vous en parlerez. Pour ma part, j'estime que, dans dix ans, quand nos enfants circuleront en voiture, ils ne voudront plus croiser de camions. On aura peur. Cela va aller très vite. On pensait qu'il serait impossible d'interdire aux passagers de fumer dans les avions ; or en dix ans, c'est rentré dans les moeurs. Vous avez raison de penser que tout cela est lié et qu'il faut privilégier les communications par voie ferrée. Mais tout cela ne s'invente pas du jour au lendemain !
    Enfin, faites remonter en haut lieu cet exemple précis : M. le Président de la République française et le roi d'Espagne s'apprêtent à inaugurer le tunnel du Somport. Or, absolument rien n'est prêt du côté français. Pour les Espagnols, c'est une fête, ils sont prêts depuis dix ans. Aussi, je me demande s'il ne vaudrait pas mieux faire appel au sous-préfet d'Oloron-Sainte-Marie pour l'inauguration, car, vraiment nous n'avons rien fait. (Rires.)
    Messieurs, bon courage, ne vous laissez pas arrêter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. François Sauvadet. Il est excellent !
    M. André Chassaigne, rapporteur pour avis. Vraiment excellent !
    M. le président. La parole est à M. Yves Deniaud.
    M. Yves Deniaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget 2003 de l'aménagement du territoire est nécessairement un budget de transition. Cette formule courante est, en l'occurrence, parfaitement adaptée, car l'approfondissement de la décentralisation va changer complètement le paysage et ce département ministériel en a, à coup sûr, encore plus besoin que d'autres.
    En effet, malgré le coup d'éclat de la loi Pasqua, l'aménagement du territoire connaît une lente et longue agonie, en raison de la fossilisation, entamée depuis longtemps, des structures et des méthodes et d'un désintérêt politique complet depuis cinq ans. Le rideau de fumée d'une frénésie textuelle aussi vaine qu'inefficace s'est dissipé dans le ridicule, puisque le bilan de la dernière législature se résume à l'annonce, lors du dernier Conseil des ministres qui a précédé le premier tour de l'élection présidentielle, de la publication au Journal officiel, du décret relatif aux schémas de services collectifs, véritable logorrhée de 1 600 pages, qui aurait dû servir de matrice aux contrats de plan 2000-2006, conclus depuis deux ans et demi !
    On s'aperçoit, hélas, que ce n'est même plus le montant des budgets qui importe, puisque la machine est incapable de dépenser les quelques 270 ou 280 millions d'euros obtenus bon an mal an et nous prive même d'une bonne part des 3,3 milliards d'euros de crédits européens. Comment justifierons-nous leur maintien, pour notre pays, après l'échéance de 2006 et l'élargissement ? A quoi servira-t-il de réclamer, comme Mme Thatcher à Bruxelles, « I want my money back », si l'on est capable de laisser l'argent repartir sans se révolter ?
    Il y aurait de quoi être passablement désabusé, comme le disait Jean-Pierre Balligand tout à l'heure. Mais nous croyons fermement, de ce côté-ci de l'hémicycle, à la nécessité vitale pour la France de maintenir un équilibre entre une urbanisation maîtrisée et les territoires ruraux les plus vastes et les plus variés d'Europe.
    M. Jean Launay. Mais nous aussi !
    M. Yves Deniaud. Car ceux-ci sont une chance exceptionnelle pour notre pays et sa qualité de vie. Cela nécessite un effort particulier en matière d'infrastructures et de diffusion des services, qu'ils soient publics ou marchands.
    Monsieur le ministre, nous croyons à votre volonté de changer le destin. Il faudra pour cela revoir complètement les structures, à l'échelon central comme dans les services extérieurs, ne serait-ce que pour tenir compte des réalités.
    Nous avons toujours un commissariat général au plan. Nous allons en voter les crédits, alors qu'il n'y a plus de Plan. Qui ne voit qu'entre lui et la DATAR un regroupement s'impose sur la prospective et les études, en en détachant sans doute la distribution de la prime d'aménagement du territoire et du FNADT ! D'ailleurs, l'ensemble du mécanisme de distribution est totalement à revoir. Les retards inadmissibles dans la consommation des crédits sont dus à la lourdeur de nos procédures - ne nous cachons pas derrière l'Europe - et, plus encore, à leur application tatillonne, pesante, décourageante par les équipes qui en ont la charge à l'échelon central et, plus encore, dans les préfectures de région.
    Je souhaite donc que, dans sa fonction d'évaluation et de contrôle des dépenses publiques, notre assemblée analyse avec soin cette source de gaspillage et puisse faire des propositions de réforme en profondeur pouvant aboutir, par exemple, à un transfert aux régions du FNADT et des fonds structurels, comme le propose le conseil régional de Bretagne. Après tout, les conseils régionaux sont déjà, en vertu des lois de décentralisation existantes, les collectivités d'attribution de l'aménagement du territoire. Et l'organisation de l'Etat n'en a jamais été modifiée pour autant.
    Comme les orateurs qui m'ont précédé, je plaiderai ardemment pour une clarification et une simplification des règles.
    Par exemple, entre les lois Voynet, Chevènement et la loi SRU, la définition des agglomérations n'est pas la même, il y en a une par loi. Or il ne doit y en avoir qu'une : celle du périmètre librement choisi par les collectivités qui se sont associées.
    Quant à la notion de « pays », il faut revenir, comme vous l'avez clairement exprimé, monsieur le ministre, à l'esprit de la loi Pasqua. Le pays doit être une structure souple, réduite, qui harmonise les projets et assure une aide au montage des dossiers, qu'il s'agisse de fonds structurels, de fonds d'Etat ou de contrats. Pour cela, il faut faire cesser immédiatement les invraisemblables tracasseries de l'administration, qui font perdre du temps et de l'argent et qui découragent. A ce niveau le bicaméralisme est tout bonnement ridicule. Il faut également lutter contre l'inflation des coûs administratifs, qui nuisent aux actions et aux investissements. Je trouve scandaleux, par exemple, que dans la mise en place d'un contrat « leader plus » permettant d'obtenir un million d'euros de subventions, l'administration d'Etat exige d'un pays l'embauche de deux agents pour en assurer la gestion, alors que la raison d'être des collaborateurs est de travailler à l'obtention, puis à l'application de tels contrats.
    Messieurs les ministres, la volonté de simplication, de clarification et de libération des énergies qui vous anime permettra de dégager de grosses économies, que l'Etat pourra redéployer sur l'équipement et l'aménagement des territoires.
    Sachez que nous ferons tout pour que le Parlement éclaire et dégage votre chemin. Et je suis sûr que, dès l'application du budget pour 2003, nous en constaterons les heureux effets. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Forissier.
    M. Nicolas Forissier. C'est à mon tour de présenter, monsieur le ministre, des observations sur ce budget de l'aménagement du territoire que vous engagez pour la première fois devant notre assemblée. Le jugement qu'on peut porter sur ces dernières années, même si tout n'est pas noir, est assez sévère : réduction du montant des crédits consacrés à la PAT, réduction des zonages, lourdeur de la mise en oeuvre des contrats de plan Etat-régions, très mauvaise consommation des fonds structurels européens. Il y a là nombre de sujets sur lesquels s'interroger. Je tiens à saluer votre volonté de recadrer et de repartir sur une démarche stratégique beaucoup plus claire.
    Un très gros effort est à faire s'agissant des fonds européens et de la gestion des fonds structurels. Vous avez engagé une réforme importante mais s'il est bien d'engager une réforme des procédures, d'alléger et de simplifier, il faut aussi tenir compte de deux impératifs.
    D'abord, il est nécessaire de mieux aider les collectivités locales - notamment celles des zones rurales - à monter leurs projets. Les collectivités locales, les pays, les mairies, les petites villes, les syndicats intercommunaux ont besoin d'être davantage cadrés et de bénéficier davantage d'ingénierie. En l'occurrence, l'Etat peut jouer un rôle important.
    Ensuite, il importe que les retards de paiement des fonds européens soient définitivement corrigés. Cela représente, pour les collectivités, un coût de portage financier totalement contre-productif.
    Vous avez évoqué, dans votre recadrage - et cette idée de recadrage me paraît préférable à celle d'un budget de transition - un deuxième objectif qui vous est très cher : l'attractivité et la compétitivité de notre territoire.
    Certes, il s'agit bien là d'un objectif essentiel, certes il y a urgence, mais il faut aussi prendre garde aux mesures trop directes ou trop dures. L'idée, qui circule en ce moment, de réduire les crédits de l'Agence française pour les investissements internationaux ne me paraît pas opportune. Il faut maintenir ces crédits, tout en veillant à ce que l'AFII ne devienne pas un « machin » qui consomme ses budgets à l'écart des autres acteurs. Il faut donc veiller - et c'est ce que nous attendons de vous, monsieur le ministre, dans l'année qui vient - à ce que des synergies soient réellement mises en oeuvre entre l'AFFI et l'ensemble des autres acteurs qui concourent à renforcer l'image de la France, pour soutenir les exportations - c'est le rapporteur du budget du commerce extérieur qui parle - et l'attractivité de nos territoires.
    Je voudrais, pour conclure, insister sur un point qui me paraît essentiel pour la politique d'aménagement du territoire que nous devons conduire : la réduction de ce que l'on appelle la « fracture numérique », à laquelle travaille la délégation à l'aménagement du territoire.
    Les résultats obtenus ces dernières années en matière de couverture du territoire par la téléphonie mobile font apparaître un échec patent. Le CIADT de Limoges, qui a été bruyamment mis en scène et annonçait l'achèvement de cette couverture, n'a, en réalité, au bout de deux ans, rien mis en place, sinon un seul pylône, qui, d'ailleurs existait déjà, en Ardèche !
    M. François Sauvadet. C'est vrai !
    M. Nicolas Forissier. Vous avez, personnellement, je tiens à le dire ici, débloqué la situation. L'accord du 23 septembre entre les trois opérateurs, qui permet de rétablir la légalité de la démarche de l'Etat français, notamment au regard du droit européen de la concurrence, et, surtout, de définir une stratégie claire et rapide pour la couverture du territoire par la téléphonie mobile, est très important.
    Cela dit, monsieur le ministre, dans ce domaine, il faut être prudent. J'ai attiré votre attention sur ce que pouvaient avoir de superficiel ou d'irréaliste les évaluations de cette couverture pour 1 480 communes de France. L'ART, qui doutait, à juste titre, de ce chiffrage, l'a réévalué et la réalité serait plutôt que 5 000 à 6 000 communes ne sont pas, ou très mal, couvertes sur notre territoire. Et si l'on pousse à son terme la logique qui consiste à vouloir offrir à tous nos concitoyens la même possibilité d'accès aux trois opérateurs, c'est-à-dire de bonnes conditions de concurrence et une bonne qualité de couverture sur tout le territoire ; ce sont plutôt 15 000 à 16 000 communes de ce pays qui ne sont pas, ou mal, couvertes par la téléphonie mobile.
    Il s'agit là d'un élément très important, car les technologies évoluent très vite et, si nous ne sommes pas capables, monsieur le ministre, de rattraper très rapidement ces retards, le fossé numérique continuera à se creuser, avec des conséquences très graves sur l'économie, l'emploi et la qualité de la vie. Nous vivons aujourd'hui une évolution qui est peut-être la plus rapide que notre territoire ait connue, et nous devons y être extrêmement attentifs.
    Je ferai deux remarques.
    D'abord, il nous faut autre chose qu'un schéma de services collectifs. Raisonner à un horizon de vingt ans est totalement illusoire, puisqu'on ne sait pas comment les technologies auront évolué d'ici un an.
    M. François Sauvadet. En effet !
    M. Nicolas Forissier. Il est nécessaire de mettre très rapidement en oeuvre une sorte de comité stratégique, d'observatoire permanent. Il ne s'agit pas de créer une nouvelle structure, mais d'assurer une synergie entre les différents intervenants, de façon à pouvoir être réactif ; je vous l'avais d'ailleurs déjà demandé, monsieur le ministre.
    Ensuite, il faut rester très attentif en matière de téléphone mobile. Le rôle de l'Etat est à redéfinir. L'accord de Limoges, qui est finalement entré dans la loi et dans les faits, conduit l'Etat à demander aux collectivités locales les plus fragiles, et qui par définition sont celles qui ont le moins de couverture, de payer pour rattraper leur retard. Il y a un problème de fond, monsieur le ministre. A ce propos, je suis désolé de vous dire que vous ne m'avez pas totalement répondu l'autre jour. Certes, nous pouvons mobiliser les fonds européens, mais ce n'est qu'une demi-réponse. Est-ce que l'Etat va s'engager plus loin ? Je ne vous demande pas de répondre aujourd'hui, mais je voudrais au moins qu'une réflexion soit rapidement conduite.
    Enfin, on ne peut pas parler de nouvelles technologies en n'évoquant que la téléphonie mobile : la question de l'Internet se pose. Ce dossier est beaucoup plus complexe. Comme M. Blessig l'a rappelé, la délégation remettra ses conclusions dans quelques semaines. Mais je tiens, monsieur le ministre, à appeler votre attention sur deux points essentiels qui concourent à la solution de ces questions d'aménagement du territoire.
    Premièrement, il va falloir clarifier enfin la position de France Télécom.
    M. Emile Blessig. Absolument !
    M. Nicolas Forissier. Nous sommes fiers de notre opérateur historique. Mais nous déplorons un certain manque de transparence. Notamment, il est essentiel, pour favoriser le développement d'Internet, que vous exigiez une plus grande transparence des coûts et donc des prix proposés par France Télécom aux opérateurs alternatifs ou aux fournisseurs d'accès.
    Deuxièmement, il est absolument nécessaire de favoriser la concurrence entre les opérateurs en matière de haut débit ; mais aussi, et c'est plus urgent que tout, de revoir le mode de calcul du service universel sur le bas débit. En effet, 90 % des utilisateurs de l'Internet sont concernés. Voilà bien une question d'aménagement du territoire : si nous n'étudions pas rapidement la question du coût du service universel qui pénalise le bas débit, les principaux fournisseurs d'accès, qui perdent énormément d'argent en ce domaine, vont retirer leurs propositions, et de vastes zones rurales n'auront même plus accès à l'Internet à bas débit. Merci, monsieur le ministre, de bien vouloir y veiller (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présientielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Serge Poignant.
    M. Serge Poignant. Monsieur le ministre, vous avez rappelé à plusieurs reprises de trois de vos objectifs principaux, que je partage pleinement : une plus grande attractivité du « site France », une véritable anticipation des mutations à venir, une réelle solidarité entre les territoires.
    Il faut bien que notre pays s'adapte au contexte de la mondialisation. Il faut qu'il anticipe l'élargissement de l'Union européenne, comme il doit se préparer aux incidences de la réforme de la PAC sur le développement des territoires ruraux.
    L'année 2003 sera d'autant plus décisive qu'elle verra la concrétisation de ce que nous appellerons la seconde étape de la décentralisation.
    En tant que ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, vous allez prendre toute votre part dans cette réforme. Je voudrais insister sur quelques points d'importance pour les élus locaux.
    Vous avez clairement indiqué votre volonté d'accompagner cette nouvelle étape pour accroître la compétitivité de la France ainsi que l'attractivité de nos territoires, et pour moderniser la politique d'aménagement de l'ensemble du territoire. Un nouvel élan est en effet nécessaire pour adapter la France à son temps et à l'évolution de l'Europe. Permettez-moi néanmoins de vous assurer de ma conviction, largement partagée, que la commune est et doit rester le socle et le fondement de notre démocratie. Je ne refuse pas l'intercommunalité. Mais les maires ont de plus en plus de mal à se situer et disposent de moins en moins de moyens pour exercer leurs fonctions, surtout en milieu rural. Président d'une association départementale de maires, je sais que je m'adresse à l'ancien président de l'association des maires de France.
    Il y a trente ans, la France a préféré aux fusions de communes l'intercommunalité librement consentie. La coopération intercommunale doit, à mon sens, continuer à relever de la liberté des élus de s'organiser sur des territoires pertinents, autour de projets d'aménagement et de développement, tout en définissant le meilleur partage des responsabilités entre la structure intercommunale et les communes.
    L'empilement de textes des dernières lois Voynet, Chevènement et Gayssot ont multiplié les structures, les documents contractuels et les « réunionites ». Certaines intercommunalités à fiscalité propre sont même devenues de nouvelles et lourdes machines technocratiques - je veux parler des communautés urbaines. (« En effet ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Les pays, je le rappelle à certains de nos collègues socialistes, n'ont pas attendu la loi Voynet pour se constituer.
    M. Yves Deniaud. Eh Oui.
    M. Serge Poignant. Vous connaissez mon attachement à ces espaces de projets et non d'exécution, fédérateurs d'un territoire, d'un bassin de vie et réunissant à la fois monde rural, monde urbain ou péri-urbain. Président d'un pays créé il y a plus de vingt ans, je voudrais que vous puissiez rassurer ceux qui peinent aujourd'hui en mettant en place un pays. Car c'est bien la loi Voynet, n'en déplaise à Mme Oget, notre collègue socialiste, qui a compliqué les procédures : conseil de développement, commission consultative, passage en CRAUT, etc. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Et je ne parle pas des SCOT de la loi SRU. (« Tout à fait ! » sur les mêmes bancs.)
    En matière de fiscalité locale, l'Etat intervient de plus en plus au lieu de se recentrer sur ses compétences premières, privant ainsi les collectivités de leur capacité d'initiative. Ce phénomène s'est accompagné, ces dernières années, d'une recentralisation financière en contradiction avec la logique de décentralisation. Le remplacement de nombreuses recettes fiscales par des dotations de l'Etat ont en effet largement affaibli l'autonomie financière des collectivités. La compensation n'étant pas totale, les collectivités ont été parallèlement contraintes d'augmenter leur fiscalité. Je ne citerai qu'un seul chiffre : les compensations versées aux collectivités par l'Etat ont été multipliées par treize depuis 1983 ! Une modernisation du système de prélèvement des impôts locaux s'impose, si on veut qu'il soit plus équitable et plus lisible pour le contribuable. De même, monsieur le ministre, ne pensez-vous pas qu'il faut engager une réflexion sur la structure et l'évolution de la DGF, qui n'est plus en mesure d'assurer le financement de la coopération intercommunale, de la péréquation entre les communes et d'accompagner la croissance incompressible des budgets communaux ?
    Qui dit aménagement du territoire dit équité territoriale. Monsieur le ministre, votre rôle pour cette année 2003 sera d'engager une meilleure péréquation sur notre territoire. On craint souvent qu'une plus grande décentralisation ne creuse inévitablement le fossé entre les régions. Je rappelle à certains de nos collègues que la loi d'aménagement du territoire du 5 février 1995 avait fixé des règles précises pour diminuer en quinze ans les inégalités entre collectivités territoriales ; ces dispositions n'ont pas été abrogées lors de la discussion de la loi Voynet, mais sont malheureusement restées dans les cartons.
    Monsieur le ministre, allez-vous relancer rapidement ce grand chantier ? Il est urgent de mettre en place une réelle solidarité nationale entre les territoires et d'assurer un bon équilibre entre les territoires ruraux et les villes.
    Une délégation à l'aménagement du territoire a été instaurée par l'ancien gouvernement. Elle a essentiellement été chargée de donner son avis sur les divers schémas de services collectifs ; mais sans schéma national clairement défini, l'Etat n'a pas joué le rôle qui lui revenait.
    Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, qu'il faille replacer l'Etat dans son rôle régalien essentiel et laisser plus de liberté aux collectivités territoriales, avec un contrôle a posteriori des utilisations de crédits ? Ne pensez-vous pas que de nombreux fonds, qu'ils soient nationaux ou européens, sont mal ou insuffisamment utilisés par la faute de modalités trop lourdes et trop complexes ?
    Monsieur le ministre, je suis de ceux qui pensent qu'une bonne décentralisation devra être accompagnée d'une bonne déconcentration, d'une nécessaire réforme de l'Etat et d'une nécessaire réforme de la fonction publique. Vaste chantier !
    Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, nous connaissons votre compétence et votre détermination. Nous comptons sur vous pour mener ce chantier à bien avec le Gouvernement, particulièrement en 2003. (Applaudissement sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.
    M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vois sur vos visages un sourire de contentement. Sans doute est-ce dû au fait que je suis le dernier à m'exprimer. Peut-être attendiez-vous aussi avec intérêt et impatience mon intervention. (Sourires.) En tout cas, elle sera très brève.
    Je suis venu vous parler de mon pays. Mais avant d'aborder ce sujet, je voudrais adresser un compliment à l'administration qui est largement représentée ici : celle de la délégation à l'aménagement du territoire. Je le fais régulièrement de cette tribune, même s'il n'est pas l'usage d'entendre les parlementaires exprimer autant de compliments à l'égard d'une administration et en toute impartialité. Cette délégation, monsieur le ministre, est composée de personnels particulièrement disponibles, actifs, et qui apportent un concours fort apprécié.
    M. Hervé Novelli. Très bien !
    M. François Sauvadet. C'est dans quel pays ? (Sourires.)
    M. Jean-Claude Lenoir. Je voudrais donc vous parler de mon pays qui a été constitué à partir des lois Pasqua et Voynet. Et entendant régulièrement des propos inquiétants selon lesquels on pourrait remettre en cause l'articulation définie par ces lois, voire l'existence des pays, je commencerai mon propos en vous disant, monsieur le ministre : « Laissez-les vivre ! » (Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) L'erreur du gouvernement précédent a été de vouloir systématiser l'implantation des pays.
    M. Jean-Pierre Dufau. Mais non !
    M. Jean-Claude Lenoir. Il est des territoires pour lesquels le pays est légitime, où il a sa place et son utilité. Il en est d'autres où il ne s'impose pas. Je représente, quant à moi, un territoire où le pays a sa place et son utilité, il y est même nécessaire car il s'agit d'un territoire rural, composé d'un nombre important de petites communes. Or le pays est d'abord la fédération des communes et surtout des communautés de communes. En effet, nous n'avons pas les moyens dans nos communautés, souvent trop petites - il faudra y réfléchir -, de mener à bien un certain nombre de projets nationaux ou européens, de créer des services et de répondre à l'attente des populations. En revanche, en fédérant toutes les énergies représentées par les élus de ces communes et de ces communautés au sein d'un pays, nous pouvons oeuvrer utilement au développement d'un territoire.
    Cela implique, monsieur le ministre, que vous nous donniez des moyens. Nous sommes prêts à décupler nos énergies et à engager nos populations derrière nous, si nous disposons de moyens. Or le monde rural est défavorisé.
    M. Hervé Novelli. C'est vrai !
    M. François Sauvadet. Tout à fait !
    M. Jean-Claude Lenoir. La loi Voynet a, malheureusement, accru l'écart qui existe entre le monde rural et le monde urbain.
    M. Pierre Cohen. C'est du sectarisme !
    M. François Sauvadet. Non, c'est la réalité !
    M. Jean-Claude Lenoir. Cette loi visait essentiellement à satisfaire les élus de la précédente majorité plurielle qui défendaient l'idée que les agglomérations devaient prendre le pas sur le monde rural (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), lequel a bel et bien été défavorisé au cours des dernières années.
    M. Hervé Novelli. Absolument !
    M. François Sauvadet. Eh oui !
    M. Jean-Jacques Descamps. Bravo !
    M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le ministre, aujourd'hui, nous attendons de ce gouvernement qu'il nous donne les moyens d'exister et de fonctionner. (Applaudissement sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) La ruralité est une idée moderne.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Absolument !
    M. Jean-Claude Lenoir. Le monde rural répond à l'attente des Français. Regardons-les vivre ! Ils souhaitent pour la plupart revenir dans leur pays et s'immerger à nouveau dans le monde rural, à condition toutefois qu'ils y trouvent tous les équipements publics et les services offerts par les nouvelles technologies. Or, comme cela a été souligné par plusieurs orateurs et comme les différents rapports le font apparaître, l'iniquité prévaut en ces domaines. Ainsi, la téléphonie mobile et le haut débit d'internet ne sont pas accessibles sur tout le territoire.
    Le monde rural, aujourd'hui, est défavorisé et je l'ai vérifié. J'ai constaté, en effet, lors de la dernière campagne électorale...
    M. Hervé Novelli. Victorieuse !
    M. Jean-Claude Lenoir. ... que sur les 205 communes de ma circonscription - j'ai tenu une réunion par commune -, 150 n'étaient pas couvertes par un réseau de téléphonie mobile.
    M. Jean-Pierre Balligand. Il faut changer de député ! (Sourires.)
    M. Jean-Claude Lenoir. Ces dégâts sont le résultat des orientations du précédent gouvernement, qui a tout misé sur le développement des zones urbaines au détriment du monde rural.
    M. Hervé Novelli. Tout à fait !
    M. Jean-Claude Lenoir. Il en va de même pour l'ADSL. Or les entreprises et notamment les petites entreprises, dont on pourrait favoriser le développement en milieu rural, ont besoin d'être raccordées à ce réseau.
    M. Jean-Pierre Balligand. Chez moi, toutes les communes de 3 000 habitants ont l'ADSL !
    M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le ministre, il faut rapidement proposer des solutions alternatives pour répondre aux attentes du monde rural et satisfaire les petites entreprises.
    En tout cas, j'espère vous recevoir prochainement dans mon pays, puisque le Perche, que chacun avait reconnu derrière mes propos, aura l'honneur d'accueillir le premier congrès des pays qui ont été retenus au titre de la procédure européenne Leader Plus. Des manifestations sont prévues à ce titre, auxquelles devraient participer un grand nombre d'élus et je crois savoir, monsieur le ministre, que vous-même ferez le déplacement.
    M. Hervé Novelli. J'y serai, moi aussi !
    M. Jean-Jacques Descamps. Ça ne sert à rien !
    M. Jean-Claude Lenoir. Ce ne sera pas le premier que vous ferez dans ce département, que vous connaissez bien et que vous avez eu l'occasion de visiter alors que vous occupiez d'autres fonctions. J'aurai le plaisir de vous dire à quel point les réponses que vous nous apportez au titre de l'aide de l'Etat, de la solidarité nationale et des procédures européennes, sont attendues. N'en doutez pas, elles vont décupler les énergies du monde rural.
    M. le président. Il faut conclure, monsieur Lenoir !
    M. Jean-Pierre Balligand. C'est impossible pour M. Lenoir ! (Sourires.)
    M. Jean-Claude Lenoir. Je sais que le Gouvernement va tout faire pour permettre au monde rural de vivre et de se développer, et pour apporter une réponse généreuse à l'attente des Français. Je vous accorde donc toute ma confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003, n° 230 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 256).
    Fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire : services du Premier ministre (I. - Services généraux, III. - Conseil économique et social, IV. - Plan, V. - Aménagement du territoire) ; budget annexe des Journaux officiels (suite).
    Fonction publique et réforme de l'Etat :
    M. Georges Tron, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (Annexe n° 26 du rapport n° 256).
    Fonction publique :
    M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (tome I de l'avis n° 261).
    Aménagement du territoire :
    M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 25 du rapport n° 256).
    M. Jacques Le Nay, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome XIV de l'avis n° 258).
    Services généraux, Conseil économique et social, Plan et Journaux officiels :
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 37 du rapport n° 256).
    Plan :
    M. André Chassaigne, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome XVII de l'avis n° 258).
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003, n° 230.
    Communication ; ligne 35 de l'état E ; article 52.
    Communication :
    M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 12 du rapport n° 256) ;
    M. Didier Mathus, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome VII de l'avis n° 257).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à douze heures vingt-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT