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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU SAMEDI 9 NOVEMBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du vendredi 8 novembre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT

1.  Loi de finances pour 2003 (deuxième partie).  - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

M. Laurent Hénart, rapporteur spécial de la commission des finances.
M. Paul-Henri Cugnenc, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
MM.
Alain Claeys,
Olivier Jardé,
Frédéric Dutoit,
Yvan Lachaud,
Pierre-André Périssol,
René-Paul Victoria.
M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.
Réponses de M. le ministre aux questions de : MM. Jean-Pierre Brard, Frédéric Dutoit, Yvan Lachaud, René-Paul Victoria.

JEUNESSE, ÉDUCATION NATIONALE ET RECHERCHE
II. - Enseignement supérieur «...»
ÉTAT B «...»
Titres III et IV. - Adoptions «...»
ÉTAT C «...»
Titres V et VI. - Adoptions «...»
Suspension et reprise de la séance «...»
PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES,
COMMERCE ET ARTISANAT, PROFESSIONS LIBÉRALES
ET CONSOMMATION

M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial de la commission des finances.
M. Serge Poignant, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
MM.
Jean-Paul Charié,
Michel Vergnier,
Olivier Jardé,
Mme
Arlette Grosskost,
MM.
Michel Herbillon,
Nicolas Forissier,
André Thien Ah Koon.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
2.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à neuf heures.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2003

DEUXIÈME PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003 (n°s 230, 256).

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

    M. le président. Nous abordons l'examen des crédits du ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, concernant l'enseignement supérieur.
    La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Laurent Hénart, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, mes chers collègues, le budget de l'enseignement supérieur s'élève à 8 827,5 millions d'euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 1,05 % par rapport au budget voté pour 2002. Avant d'expliquer pourquoi il répond au contexte actuel de l'enseignement, je ferai une comparaison internationale. La France consacre un peu plus de un point de son PIB à l'enseignement supérieur, pour une moyenne de 1,3 point pour l'OCDE. Elle est dans la moyenne de ses voisins, mais nettement derrière les pays d'Amérique du Nord. Cela dit, il faut prendre avec précaution ce type de comparaison : d'une part, les crédits de la recherche ne sont pas comptabilisés de la même manière d'un pays à l'autre ; d'autre part, la durée des études influe beaucoup sur l'investissement des collectivités publiques. Le plus important à retenir, c'est que la moitié de l'effort de la collectivité nationale pour l'enseignement supérieur est supportée par ce budget. Je voudrais par ailleurs souligner, au nom de la commission, le fait que 95 % des réponses au questionnaire budgétaire nous étaient parvenus avant la date butoir du 9 octobre, ce qui est une bonne performance par rapport à d'autres ministères.
    Aujourd'hui, l'enseignement supérieur est confronté à trois défis auxquels ce budget entend répondre par la mobilisation des moyens.
    Le premier défi, c'est le passage d'une logique quantitative à une logique qualitative. Depuis 1996, le nombre des étudiants marque le pas et à la rentrée 2002, il aura été légèrement en baisse, comme en 2001. Ce sont 2 155 000 étudiants qui sont attendus à la rentrée 2002, avec des évolutions contrastées selon les établissements concernés. Le nombre d'étudiants diminue à l'Université, à l'exception des filières de sciences économiques et des troisièmes cycles où il progresse sensiblement, mais augmente en IUFM, en écoles de commerce et en classes préparatoires. En clair, après avoir dû répondre à une montée régulière des effectifs par une logique quantitative en déployant des enseignants, des personnels IATOSS et en prévoyant plus de locaux, l'enseignement supérieur peut maintenant mieux accompagner l'étudiant sur un plan individuel et lui donner plus de chances de réussir ses études.
    Comment apporter une aide plus importante à l'étudiant pour sa réussite universitaire ? Deux moyens prévalent : d'abord, les aides à la personne ; ensuite, le soutien aux oeuvres universitaires.
    S'agissant des aides directes à l'étudiant, l'enveloppe consacrée aux bourses attribuées sur critères sociaux et universitaires est stable. La commission a souligné une mesure nouvelle d'un peu plus de 6 millions d'euros pour permettre aux étudiants en DEA de bénéficier de bourses universitaires et une mesure nouvelle de près d'un demi-million d'euros pour permettre le paiement du quatrième terme des bourses pour les territoires d'outre-mer.
    Le phénomène marquant, c'est la maturité des bourses de mobilité puisque les crédits qui y sont consacrés augmentent d'un peu plus de 40 %. Cela traduit une volonté d'accompagner la mobilité européenne internationale de nos étudiants. C'est important : 3 700 étudiants bénéficieront de cette bourse. L'année dernière près de 17 000 étudiants se sont inscrits dans des programmes européens d'échange, ce qui montre le développement de la mobilité à l'échelle européenne et internationale.
    Je voudrais aussi souligner l'attention apportée à la médecine et à la prévention, avec 2 % de moyens en personnel et en vacations supplémentaires, et surtout le geste fort fait pour la prise en charge des frais de transport des étudiants handicapés, puisque l'enveloppe qui y est consacrée augmente de 22 %. Les moyens sont stables, mais les crédits sont mieux répartis. C'est dans cette logique que la commission des finances souhaite que le Gouvernement travaille. Cela méritait d'être souligné.
    S'agissant des oeuvres universitaires et scolaires qui accompagnent l'étudiant dans son logement et sa restauration, le projet de budget pour 2003 traduit deux efforts importants : d'une part, les moyens en personnel augmentent de près de 5 %, ce qui fait passer les lignes de personnel au-dessus du seuil des 100 millions d'euros ; d'autre part, un effort d'investissement est fait pour la rénovation des cités. Aujourd'hui, seulement 20 % du parc, soit 20 000 chambres sur 100 000, sont rénovés. Ce parc est ancien : il date des années 60. La volonté du Gouvernement, affichée dans ces lignes budgétaires, est de presque tripler le rythme de rénovation. En effet, sur les trois derniers exercices, 2 240 chambres en moyenne étaient rénovées chaque année et l'objectif est d'arriver à 7 000 chambres rénovées par an. Cela implique, pour cette année, l'inscription au budget de 8 millions d'euros de mesures nouvelles. Cette politique de rénovation universitaire est un préalable à de nouvelles constructions. Le ministère évaluait le besoin à 20 000 logements supplémentaires en vingt ans, en incluant l'accueil des étudiants étrangers. Les moyens affectés aux étudiants sont donc nettement réorientés sur des options plus qualitatives qui accompagnent une stabilité des effectifs. On peut même parler d'une légère décrue de ces effectifs qui se confirmera dans la décennie qui commence si l'on en croit les projections de la direction de la programmation.
    Le deuxième défi auquel doit répondre ce budget est celui de la modernisation de notre enseignement supérieur et de l'amélioration de la qualité du service public. Je tiens, à cet égard, à évoquer l'importance de l'harmonisation européenne dans le domaine de l'enseignement supérieur. On a beaucoup parlé du développement des parcours en 3-5-8 auquel nous essayons de faire face en développant les mastères et en mettant en place des filières à « bac + trois », notamment les licences professionnelles. Il faut aussi rappeler la priorité accordée par les ministres européens au système européen de crédits qui doit être mis en oeuvre en France, comme dans les autres Etats de l'Union. Je voudrais évoquer aussi la question, plus française celle-là, du renouvellement des emplois et rappeler que, dans la décennie qui s'ouvre, donc d'ici à 2012, les départs à la retraite seront nombreux dans les personnels de l'enseignement supérieur. Un personnel maître de conférence sur quatre, un personnel IATOSS sur trois et un professeur sur deux partiront à la retraite. Nous devons donc anticiper ce mouvement et permettre le renouvellement de notre personnel de l'enseignement supérieur. Cela m'amène à évoquer les mesures prises en matière de personnel.
    Pour les enseignants d'abord, on note 500 créations de postes d'enseignant-chercheur et d'enseignant, rapportés à 80 000 postes aujourd'hui inscrits dans les tableaux d'effectifs. Cela permettra, pour l'essentiel, d'assurer le développement des filières nouvelles et de la culture générale dans l'enseignement supérieur, conformément à la volonté du ministre saluée par la commission. La création de 1 000 postes de moniteur allocataire s'inscrit dans cette démarche de préparation du renouvellement des effectifs. En effet, avant d'avoir des professeurs ou des maîtres de conférences, il faut avoir des moniteurs allocataires. Quelques lapalissades ne font pas de mal, surtout quand la politique publique est construite.
    Je voudrais souligner que 1,9 million d'euros sont consacrés à l'amélioration des perspectives de carrière, ce qui vise à conserver le personnel enseignant dans les filières et à lui permettre une évolution attractive.
    Je porte une attention particulière aux mesures prises pour les personnels IATOSS, parce que les syndicats auditionnés par votre rapporteur ont beaucoup insisté sur les mesures nécessaires pour cette catégorie de personnels, à la fois pour rendre le statut attractif et pour veiller aussi à ce que l'emploi précaire soit résorbé dans ces filières. Au manque de personnel de catégorie A, qui est statistiquement évident, répondent 1 450 créations d'emplois : 700 emplois sur le budget de votre ministère, pour un peu plus de 11,5 millions d'euros, et 750 emplois sur les crédits des universités, afin de résorber les emplois précaires. Ce sont principalement des emplois de catégorie A qui sont créés, ce qui assurera un apport de compétences dans les établissements universitaires et d'enseignement supérieur qui pourront ainsi mieux assumer leur autonomie et les éventuelles nouvelles délégations d'initiatives qui pourraient leur être faites. L'évolution des statuts des agents ITARF - ingénieurs et personnels techniques et administratifs de recherche et de formation -, ATOSS et de bibliothèque se poursuit. Quant au montant des sommes consacrées au repyramidage, aux transformations d'emploi et aux indemnités diverses, il s'élève à un peu plus de 7 millions d'euros, ce qui prouve une prise en compte complète du personnel IATOSS, tant par le nombre d'emplois nécessaires que par l'attractivité des emplois créés. En effet, il ne suffit pas de créer des emplois, il faut qu'ils soient pourvus, donc qu'ils soient attractifs.
    Cela dit, tout ne se résume pas au personnel dans l'enseignement supérieur. En 2000, dans son rapport, la mission d'évaluation et de contrôle a insisté sur le développement de l'autonomie, de la contractualisation et de l'initiative au sein des établissements. Je souligne à cet égard que 201 établissements d'enseignement supérieur sont aujourd'hui dans cette logique de contractualisation. Ils accueillent un peu plus de 1,5 million d'étudiants. Les subventions accordées aux établissements universitaires pour cette politique contractuelle augmentent de 3,8 %. La mission d'évaluation et de contrôle souhaitait un meilleur contrôle des rectorats sur les finances des universités et que le Parlement soit précisément informé de l'avancée de la mise en oeuvre des contrats de plan. Ces préconisations n'ont pu être mises en oeuvre par le Gouvernement, mais je pense que l'on y reviendra. En revanche, je veux saluer le travail réalisé par le ministère pour mieux analyser les réserves - la Cour des comptes s'en était émue dans son rapport sur l'exécution du budget 2000 - et celui qu'il accomplit, en concertation avec les universités, pour savoir quelle part de ces réserves peut être à nouveau mobilisée dans les nouveaux projets.
    Par ailleurs, les sommes allouées aux bibliothèques augmentent de 6 % et l'enseignement supérieur privé, suivi de particulièrement près par la commission, bénéficie de 2 millions d'euros de mesures nouvelles. La commission des finances espère d'ailleurs que cet effort sera poursuivi sur les exercices suivants.
    L'exécution des investissements était ce qui laissait le plus à désirer pour les budgets précédents. Je rappellerai à cet égard l'exercice 2001 et la réalisation du titre V à hauteur de 31 % seulement. Ce budget répond aux attentes de la commission des finances sur ce point en rétablissant la vérité des chiffres. Vous procédez à un ajustement des crédits de paiement, monsieur le ministre, pour vous rapprocher des rythmes réels de consommation avec une baisse de 58 % pour les maîtrises d'ouvrage d'Etat et de 10 % pour les subventions. Cela ne compromet pas la mise en oeuvre des engagements de l'Etat puisque les autorisations de programme restent supérieures au septième des contrats de plan.
    La commission s'est réjouie de l'augmentation sensible des crédits de maintenance - 12 % pour les autorisations de programme, 14 % pour les crédits de paiement -, car il ne suffit pas d'investir, il faut aussi entretenir le parc.
    En matière d'investissement, je veux souligner l'effort particulier réalisé pour la recherche universitaire à laquelle beaucoup de commissaires ont accordé leur attention et rappeler les axes forts des contrats de plan 2000-2006 en cours d'exécution avec, avant tout, la constitution de pôles de compétences - génopoles, maisons des sciences de l'homme, plates-formes technologiques - pour mieux travailler avec le milieu entreprenarial et industriel. Pour mettre en oeuvre ces contrats de plan, ce budget prévoit une augmentation de 5,37 % des autorisations de programme et de 5,8 % des crédits de paiement, ce qui montre un réel souci pour la recherche universitaire et son développement.
    Je voudrais insister sur l'innovation que constitue, pour les jeunes chercheurs, le dispositif mis en place pour les post-doctorants et sur les 400 postes ouverts sur des contrats attractifs, ce qui permettra à nos universités et à leurs laboratoires de garder la matière grise. En outre, pour la première fois depuis 1991, les allocations de recherche font l'objet d'une réelle revalorisation : plus de 5 points.
    En conclusion, monsieur le ministre, ce budget présente deux caractéristiques principales. D'abord, il nourrit l'autonomie des universités : requalification des personnels IATOSS en catégorie A, meilleur suivi de la contractualisation, développement des moyens consacrés à celle-ci. Ensuite, ce projet prépare l'avenir par le bon rythme des investissements, le développement de la recherche et le souci apporté au renouvellement des effectifs des enseignants et des chercheurs. Assurément, c'est un socle solide pour discuter de la décentralisation qui sera, à n'en pas douter, dans ce domaine de l'enseignement supérieur comme dans les autres domaines de la politique publique de l'Etat, le sujet majeur de l'année à venir. La commission a rappelé son souhait que, dans cette démarche de décentralisation, l'Etat reste le garant de l'équité entre les territoires et de la qualité de l'enseignement et de la recherche, engagement que vous avez d'ailleurs pris à plusieurs reprises, monsieur le ministre, et encore dans votre conférence de presse consacrée à la présentation du budget. Forte de ces constats particuliers et de cette analyse d'ensemble, la commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption de ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Paul-Henri Cugnenc, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le ministre, avec un budget en progression malgré le tassement du nombre des étudiants, vous avez manifesté votre efficacité et l'intérêt qui est le vôtre pour l'enseignement supérieur. Une politique volontariste, une politique d'adaptation doit en effet permettre de répondre aux nouveaux enjeux. Pour cela, tout l'effort doit porter sur une meilleure adaptation des moyens mis en oeuvre aux résultats que nous souhaitons atteindre. C'est le sens de votre budget ; c'est le contenu de mon intervention ; c'est la raison du soutien que vous apportera la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    Les défis de notre temps sont multiples : il faut gérer le nombre d'étudiants, leur orientation et leur formation ; il faut répondre à leurs attentes, mais aussi aux besoins de la professionnalisation ; il faut également améliorer la culture générale ; il convient encore d'aller dans le sens de la déconcentration, et aujourd'hui de la décentralisation, et de favoriser l'ouverture vers l'international ; il faut enfin se préoccuper du développement de l'action sociale. Sur tous ces points, votre budget nous donne précisément des raisons d'espérer. Pour conclure mon intervention, je passerai, si j'ose dire, aux travaux pratiques sur un sujet que je connais bien, celui de la formation des professions de santé.
    Dans le cadre général du budget de l'enseignement supérieur, vous avez démontré l'efficacité d'une politique volontaire et adaptée aux nouveaux enjeux. Avec 8,8 milliards d'euros, soit une progression de 1,5 % par rapport à l'exercice antérieur et une augmentation de 4,5 % des crédits de fonctionnement alors que les effectifs d'étudiants sont plutôt en légère décrue, vous nous donnez d'abord les moyens d'une politique en volume efficace. Le rapporteur précédent a insisté sur les créations d'emplois d'enseignants supplémentaires : la commission des affaires sociales salue, en effet, l'effort que vous avez consenti pour recruter 500 enseignants-chercheurs supplémentaires, 210 professeurs des universités, 210 maîtres de conférences, 80 professeurs agrégés, qui seront à la disposition de l'université, 700 emplois de personnel IATOSS qui s'accompagnent de 750 titularisations. Dans le même esprit, vous avez prévu une requalification sans précédent d'emplois de personnels administratifs et techniques de catégorie C en emplois de catégories A et B. Grâce à ces créations, le taux d'encadrement progressera au total de plus de 2 %.
    S'agissant des orientations - point ô combien important -, alors que le défi quantitatif est aujourd'hui en bonne voie d'être relevé, la nouvelle urgence porte sur l'amélioration de la qualité des formations. Au cours des auditions auxquelles j'ai procédé, nombre d'enseignants et de partenaires de l'université m'ont sollicité à ce sujet. Une meilleure réflexion au niveau des lycées semble tout d'abord indispensable. Ne faudrait-il pas permettre à chaque lycéen qui le souhaite de faire une sorte de bilan de ses compétences avant de s'engager dans un parcours universitaire ? De l'avis général, mieux appréhender ce problème avant le baccalauréat réduirait le taux d'échec en premier cycle.
    De fait, la meilleure connaissance par les étudiants de leurs capacités personnelles, l'explication des débouchés, la mise en valeur des professions, anciennes ou nouvelles, l'identification des filières doivent faire l'objet d'un effort particulier. Rappelons-le : sur 225 800 entrants, plus de 55 000 étudiants vont quitter l'Université au bout d'un an, près de 20 000 n'en tireront pratiquement aucun bénéfice et certains considéreront même cette expérience comme un échec et ne se réinscriront nulle part. Or cela coûte très cher au budget de l'Etat. Outre la dimension humaine de ce problème, on peut, en effet, estimer entre 10 000 à 20 000 euros par an le coût d'un étudiant, ce qui nous donne une dépense totale comprise entre 200 et 400 millions d'euros, soit entre 1,5 et 3 milliards de francs. Il y a là un véritable gâchis. Monsieur le ministre, vous ciblez votre action sur l'amélioration de cette situation : il est effectivement indispensable d'agir en ce sens compte tenu du retentissement qu'elle a sur le budget de l'Etat.
    Au chapitre social, pour renforcer les chances de votre politique d'ouverture, vous avez également pris une série de mesures importantes. En matière d'allocation de bourses, par exemple, l'institution de bourses de mérite permettra à plus de mille bacheliers mention « très bien », éligibles aux critères sociaux, de bénéficier d'une bourse d'un montant de six mille euros. La commission insiste sur le bien-fondé de cette disposition. Par ailleurs, vous avez augmenté de 7 400 le nombre de bourses de DEA à caractère social et de 25 % celui des bourses de mobilité pour le porter à 45 000 en 2003. En outre, elles ont été nettement revalorisées.
    Vous envisagez également de réhabiliter 7 000 chambres de cité universitaire en moyenne par an, contre 2 200 les années précédentes. Votre budget prévoit encore la revalorisation des allocations de recherche de 5,5 %. L'augmentation des moyens pédagogiques, comme l'accès aux bibliothèques ou la mise à disposition d'ordinateurs, sont également à souligner. Vous avez pour objectif d'avoir, en 2004, 13 étudiants au maximum par poste d'ordinateur, contre 27 ou 28 en 2000, dans certains secteurs universitaires.
    Sur le plan des programmes, l'un des fers de lance de votre projet est le renouveau des enseignements de culture générale : c'était en effet indispensable. Votre volonté affirmée d'organiser les enseignements en semestre permettra une plus grande souplesse dans la formation. Elle contribuera à une meilleure adaptabilité et à une personnalisation des parcours.
    De même, le mouvement en faveur d'une revalorisation de la professionnalisation se poursuit et va s'amplifier. Cette politique d'ouverture se traduira évidemment par une internationalisation accrue des études supérieures. C'est une absolue nécessité, tant pour la qualité des formations et l'ouverture des esprits, que pour l'adéquation au marché du travail. Certains établissements nous ont montré l'efficacité de la dynamique impulsée dans l'esprit que vous proposez. Le quart des effectifs de l'Institut d'études politiques de Paris est aujourd'hui composé d'étudiants étrangers. Tous les élèves passent obligatoirement une troisième année à l'étranger, et Sciences po est partenaire de 240 universités dans le monde.
    Cela m'amène à évoquer l'harmonisation des diplômes, autre point important de votre programme que le rapporteur précédent a souligné. Adaptabilité, personnalisation, ouverture des parcours, telles sont les pistes que vous nous invitez à emprunter. L'effort à accomplir dans le domaine de l'internationalisation des universités est encore important, puisque celles-ci sont en retard sur ce point par rapport aux grandes écoles. Ainsi, Erasmus ne concerne que 1 % du nombre total d'étudiants à l'université. Je sais que la mobilité des étudiants français, la réalisation d'un grand espace universitaire européen et l'harmonisation des divers mastères figurent parmi vos objectifs.
    Soulignons encore que vous n'avez pas oublié la recherche universitaire, dont vous avez accru les moyens de 4,5 %.
    L'intervention des collectivités locales est également l'une des pistes de développement de l'enseignement supérieur de notre pays. A ce niveau, en effet, besoins et attentes des étudiants et des entreprises sont certainement mieux quantifiables. Ainsi, le mouvement d'internationalisation des universités s'accompagne naturellement de celui de la décentralisation déjà très poussée. Il est prévu de conforter encore cette évolution en accentuant l'implication des collectivités dans la politique contractuelle menée par l'Etat et les établissements d'enseignement supérieur. Cet enseignement de l'espace demeure également l'un des enjeux de la formation aux professions de santé.
    De la même manière que l'université française a, depuis quelques décennies, associé les travaux pratiques aux cours magistraux, j'ai tenté devant la commission des affaires culturelles d'étudier ce que donnerait l'application de votre programme à un secteur très sensible pour les Français, celui de la formation des professions de santé, qui présente quelques caractéristiques positives ou plus inquiétantes. Ce secteur de la formation des professions de santé est considéré à juste titre par les Français comme de haut niveau. Mais il fait l'objet d'une évolution démographique qu'on peut juger préoccupante. Ce domaine de l'enseignement est un de ceux dont le diplôme délivre la possibilité d'exercer des professions, ce qui constitue une particularité. En outre, ces professions de santé sont soumises à un numerus clausus, ce qui pouvait laisser espérer une politique prévisionnelle cohérente. Malheureusement, la clairvoyance n'a pas présidé aux choix effectués pendant les vingt dernières années. Enfin, cet ensemble de formation des professions de santé conduit à un point de convergence : tous les diplômés doivent se retrouver autour du lit du malade. Or cet élément n'apparaît jamais comme prioritaire au cours des études.
    Aujourd'hui, les constatations sont inquiétantes. Mais la dynamique que vous introduisez dans ce budget permettra vraisemblablement de corriger la plus grande partie des anomalies. En dépit du numerus clausus, nous pouvons qualifier la politique prévisionnelle des dernières années de totalement indigente. S'agissant par exemple des infirmiers et des infirmières, dont le nombre s'élève à 300 000 en France aujourd'hui, le quota national annuel, qui était de 20 000, a été réduit à deux reprises de 2 000. Nous sommes ainsi passés à 18 000 en 1990, puis à 16 000. En 2000, le gouvernement précédent a décidé de passer brutalement de 16 000 à 26 000, ce qui n'était pas nécessairement cohérent en matière de prévision.
    Le numerus clausus avait pour objet de former le nombre de médecins qui était nécessaire à notre pays et dont la grande qualité a toujours été soulignée par les Français, Or nous nous retrouvons à présent avec plus de 10 000 postes vacants dans les hôpitaux français, ce qui nous oblige à employer 8 000 praticiens formés à l'étranger. Ces derniers nous apportent heureusement leurs compétences, leur savoir, leur disponibilité, mais nous n'avons jamais contrôlé leur formation. La politique du numerus clausus devait-elle avoir pour conséquence qu'une partie importante de ceux qui exercent la médecine aujourd'hui chez nous n'aient pas été soumis aux contrôles prévus par cette formation ?
    Je veux également insister sur le gâchis particulièrement caricatural de la fin de la première année d'études de médecine. Vous insistez, monsieur le ministre, sur la nécessité de corriger l'échec constaté à ce niveau, et c'est bien. Les facultés de médecine, où nous accueillons après le bac des étudiants qui sont sûrement parmi les plus motivés, sont, de fait, le lieu du plus grand gâchis puisque plus de 80 % des étudiants vont échouer à la fin de la première année. Si je pouvais introduire une note d'humour dans un dossier qui ne le nécessite pas, je dirai qu'en médecine, la France s'offre le luxe de recommencer une seconde fois. En effet, tous ceux qui ont échoué à la fin de la première année vont redoubler pour un résultat pratiquement identique - le taux d'échec est quasiment équivalent - et quitteront cette filière sans avoir réellement tiré un bénéfice de ce cursus.
    Monsieur le ministre, pour atteindre les objectifs que vous avez fixés en matière de formation des professions médicales, il semble nécessaire de prévoir un tronc commun pour toutes les professions de santé au cours de la première année et de faire en sorte que cette sélection en deux concours se fasse par semestre et non par année, de manière à gagner un an. Tous ceux qui se retrouveront autour du malade doivent avoir reçu une formation en partie commune. Il est certain en effet que les difficultés que nous observons aujourd'hui à l'hôpital public résultent du manque de compréhension entre les différents acteurs tous pour la plupart, de haut niveau, qu'ils exercent dans le domaine de soins - infirmières, médecins, et autres professions médicales ou paramédicales - ou dans celui de la gestion. L'expérience montre qu'ils ne se comprennent pas, qu'ils ne communiquent pas, qu'ils ne convergent pas. Prévoir une formation en partie commune contribuerait à améliorer les choses et l'efficacité du système. L'orientation nouvelle que vous avez prise, limitera certainement l'épouvantable gâchis de la fin de la première année des études de médecine.
    Enfin, la politique de cohérence et de bon sens que vous voulez introduire dans l'Université permettra sûrement, à terme, de regrouper de manière pragmatique les UFR médicales, voire d'imaginer des instituts de santé où toutes les formations se retrouveront au moins au début. Une réflexion sur la formation est désormais autorisée dans le cadre de vos propositions.
    Pour conclure, j'insisterai sur le fait que cette législature offre une possibilité unique de donner un nouvel élan à la réflexion sur notre système d'enseignement supérieur. Alors que les problèmes hérités du passé sont nombreux, les attentes en matière de réforme sont bien réelles. Parmi les améliorations possibles du système d'enseignement supérieur, peu nombreuses sont celles qui auraient un impact macro-économique aussi puissant que l'amélioration de la formation des professions de santé.
    Grâce à votre projet d'ouverture, des perspectives sont offertes, des espoirs suscités et les ferments du progrès sont déjà à l'oeuvre. C'est pourquoi, monsieur le ministre, avec intérêt et attention, mais surtout conviction, nous ne pouvons qu'inviter nos collègues à soutenir et à voter votre budget pour l'enseignement supérieur. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Alain Claeys, premier orateur inscrit.
    M. Alain Claeys. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nos universités ont à faire face aujourd'hui à un grand nombre de défis : l'accueil des étudiants, l'amélioration de la situation des personnels, la rénovation de leur patrimoine dans le cadre du plan « Université du troisième millénaire », la valorisation de leur recherche, les transferts de technologie, leur présence au niveau internationale et l'harmonisation européenne des cursus.
    Si la loi du 12 novembre 1968 affirme le principe de l'autonomie des universités, et si la loi du 26 janvier 1994, dans son titre Ier, consacre le « service public de l'enseignement supérieur », nous savons bien aujourd'hui que la mission qui s'impose à nous consiste tout à la fois à conforter cette autonomie et à garantir le service public de l'enseignement supérieur.
    A un moment, où le Premier ministre ouvre le débat sur la décentralisation, il n'est pas inutile de rappeler, dans le cadre de cette discussion budgétaire, le rôle essentiel de l'Etat dans l'enseignement supérieur.
    Un de vos prédécesseurs insistait sur ce « rôle essentiel de l'Etat, garant de l'égalité des chances, de la justice, de l'égalité entre les régions, un Etat débureaucratisé, certes, un Etat qui laisse aux universités une large liberté d'initiative et d'innovation, qui fasse confiance et responsabilise les acteurs du système d'enseignement supérieur, qui associe les régions à l'élaboration de la politique universitaire, mais un Etat qui n'abdique pas ».
    Oui, mes chers collègues, il importe que l'autonomie des universités s'inscrive dans le cadre d'une citoyenneté réaffirmée afin de garantir une égalité de traitement des universités sur l'ensemble du territoire. Dans cet esprit, je ne peux qu'approuver les présidents d'université qui se sont opposés à la création d'universités régionales et qui entendent que les établissements d'enseignement supérieur restent sous tutelle de l'Etat dans le cadre du mouvement de décentralisation.
    Il faut éviter à tout prix, monsieur le ministre, la régionalisation de nos universités. C'est pourquoi nous sommes hostiles à « l'expérimentation à la carte » voulue par le Gouvernement qui, appliquée à l'enseignement, conduirait à remettre en cause la notion même de service public et battrait en brèche l'autonomie de nos universités. Certes il peut y avoir des expérimentations, mais sûrement pas des expérimentations à la carte au niveau de l'enseignement supérieur.
    Garantir un service public d'enseignement supérieur de qualité, conforter l'autonomie des universités nécessite, bien évidemment, des moyens. Aussi, j'en viens naturellement à votre budget.
    Votre projet de budget pour 2003 est en rupture avec les budgets précédents. Dans un contexte de stabilité des effectifs étudiants, le budget 2000 avait augmenté de 2,6 %, le budget 2001 de 2,7 % et le budget 2002 de 2,23 %. Ces budgets avaient permis à la fois d'achever le plan social étudiant, d'améliorer la situation des personnels et de rénover le patrimoine universitaire dans le cadre du plan U3M.
    Les crédits inscrits au projet de loi de finances pour 2003 au titre de l'enseignement supérieur s'élèvent à 8,827 milliards d'euros, ce qui représente une augmentation de 1,05 % seulement en valeur, soit une diminution de 0,4 % en volume, compte tenu de l'inflation. C'est la première fois depuis cinq ans qu'on observe une diminution de ce budget. Celui-ci est en rupture totale avec la politique volontariste qu'avait engagée le précédent gouvernement pour l'enseignement supérieur.
    Vous justifiez la baisse des crédits de personnel par une légère baisse démographique des étudiants de 5 000. Or, dans le même temps, vous souhaitez renforcer l'encadrement des établissements d'enseignement supérieur afin de lutter contre l'échec en premier cycle universitaire.
    Vous ne prévoyez aucun plan pluriannuel de gestion du personnel, alors que, dans quelques années, comme vous le savez, nous assisterons à des départs massifs à la retraite qui sont tout à fait prévisibles. Une gestion prévisionnelle et pluriannuelle des emplois des personnels de l'enseignement supérieur est essentielle pour anticiper ces évolutions démographiques et adapter les effectifs.
    Ainsi sont inscrits, pour l'exercice 2003, 420 postes d'enseignant-chercheur, contre 600 en 2002 et 80 postes de professeur agrégé - les PRAG - contre 100 en 2002. S'agissant des emplois de personnels IATOSS, le projet de budget prévoit la création de 700 postes, contre 1000 en 2002, qui se répartissent en 625 postes de catégorie A et 75 de catégorie B. Outre la diminution du nombre de postes de non-enseignants, ce repyramidage, même s'il répond à un réel besoin, risque de créer un système inégalitaire entre les universités, les plus importantes d'entre elles voyant leur encadrement renforcé, et les plus petites souffrant du manque de personnel technique. De plus, et j'y insiste, nous pouvons également nous interroger sur les délais de mise en application de cette nouvelle architecture et sur les difficultés de sa mise en oeuvre.
    La résorption de l'emploi précaire, dans le cadre de l'application de la loi du 3 janvier 2001, n'apparaît plus comme une préoccupation majeure de ce projet de budget, où elle ne concerne que 750 emplois. Dois-je rappeler que ces agents sont rémunérés sur les ressources propres des établissements ?
    Monsieur le ministre, nous ne pouvons pas aborder le budget de l'enseignement supérieur sans évoquer celui de la recherche, examiné le 5 novembre dernier. Il s'agit d'un mauvais budget, qui a des conséquences concrètes sur les universités. La recherche universitaire, comme le prévoit le chapitre 66-71, verra ses moyens progresser de 5,4 % en autorisations de programme, les crédits de paiement n'augmentant que de 2,6 %.
    La politique de la recherche, nous le savons, nécessite d'être réalisée dans la durée ; il est donc souhaitable d'engager un plan pluriannuel. Dans son avis du 17 octobre dernier, adopté à l'unanimité moins trois abstentions, le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie s'interroge sur la réalité de l'intérêt porté par la nation à la science. Il s'inquiète des choix qui sont faits et manifeste sa perplexité sur les hypothèses qui les fondent. Il conclut ainsi : « Les crises budgétaires passées concernant le financement de la recherche en France indiquent clairement qu'un retard n'est jamais rattrapé. » Ce retard aura des conséquences évidentes sur le fonctionnement de nos universités.
    Le plan d'aide sociale qui avait été lancé par Claude Allègre est aujourd'hui pleinement achevé. La France est certainement le seul pays d'Europe à avoir mis en place un enseignement supérieur de masse, à compter 30 % de boursiers et le seul pays au monde à donner à tous les étudiants le droit à une allocation de logement.
    Pour 2002, Jack Lang avait introduit deux mesures importantes. D'abord, la création de 12 000 bourses de trois mois destinées à encourager le séjour des étudiants dans une université étrangère. Cette mesure s'inscrivait dans la logique de la nouvelle organisation des études sur le plan européen et de l'intérêt à organiser des échanges. Et je me félicite que ce budget permette la poursuite du cursus européen tel qu'il avait été engagé voilà maintenant quelques années, malgré, comme j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire, monsieur le ministre, quelques difficultés en ce qui concerne les IUT qu'il faudrait examiner de près afin de trouver une certaine harmonisation.
    Par ailleurs, 18,6 millions d'euros ont été consacrés à la création de bourses, délivrées selon des critères sociaux aux étudiants en troisième cycle, en DESS.
    En 2003, 7 400 étudiants en DEA bénéficieront de bourses d'études, pour un montant de 6,18 millions d'euros. Cependant, il y a bien une suppression effective de 8 millions d'euros par rapport au budget 2002. Cette diminution de crédits est justifiée par le fait qu'« elle correspond à un ajustement à la consommation réelle des crédits destinés aux bourses ». Or, il est évident que des mesures de cet ordre mettent un certain temps à prendre leur rythme de croisière et que ce n'est qu'après une année pleine que l'on peut en mesurer la portée. Les mesures inscrites dans le budget 2002 ne peuvent pas encore, à l'évidence, avoir atteint cette maturité, et l'argument utilisé n'est donc bel et bien qu'un prétexte pour défaire ce qui venait d'être mis en place.
    La dotation globale de fonctionnement aux universités inscrite dans le budget pour 2003 est en augmentation de 3,6 %. Sur ce point, monsieur le ministre, je souhaite que l'écart entre les universités puisse être réduit, afin que chacune s'approche de la dotation théorique telle qu'elle est calculée par vos services. Et je serai heureux d'avoir connaissance de l'état des dotations de fonctionnement, université par université.
    En ce qui concerne les opérations immobilières dont la maîtrise d'ouvrage est assurée par l'Etat, les autorisations de programme passent de 199,1 millions d'euros pour 2002 à 183,8 millions d'euros pour 2003, soit une diminution de plus de 7 %. Les crédits de paiement subissent également une baisse importante, passant de 73,7 millions d'euros pour 2002 à 30,8 millions d'euros.
    S'agissant de la maintenance des bâtiments, l'effort tout particulier réalisé l'an dernier est abandonné. Les crédits de paiement sont en diminution, passant de 231,4 millions d'euros en 2002 à 227,7 millions d'euros en 2003.
    La suppression des crédits de paiement des titres V et VI risque d'entraîner, dans les prochains exercices budgétaires, des retards, voire des suppressions de travaux de maintenance indispensables, futurs ou actuellement engagés.
    Permettez-moi, monsieur le ministre, de dire un mot sur les contrats de plan. L'engagement, depuis maintenant plusieurs années, des collectivités locales à côté de l'Etat a permis une amélioration considérable de notre patrimoine universitaire. Mais aujourd'hui, j'ai des inquiétudes.
    La première est relative au gel d'un certain nombre de crédits d'équipements, mesure prise dans le budget 2002. Comme vous le savez, lorsque des crédits sont gelés à cette époque de l'année, on est tenté de dire, sans vouloir forcer le trait, qu'il s'agit plutôt d'abandons. Je souhaiterais que vous me rassuriez quant à l'exécution du contrat de plan, région par région, et que la représentation nationale bénéficie d'un document montrant la réalisation de ces contrats de plan région par région et sache si les engagements de l'Etat sont tenus.
    Ma deuxième inquiétude porte sur la maîtrise d'ouvrage. Certains retards ne sont pas uniquement liés aux crédits mais dus également à la mise en place de ces contrats. Car il y a aujourd'hui - et c'est bien compréhensible - une concurrence entre l'Etat et les collectivités locales quant à la maîtrise d'ouvrage. Et, il faut bien le reconnaître - vous êtes confronté au même problème que vos prédécesseurs -, les collectivités ont tendance à prendre les maîtrises d'ouvrage les plus valorisantes.
    Il faudra engager une réflexion à ce sujet pour éviter non seulement de prendre du retard mais encore de placer les universités hors jeu après la signature du contrat de plan et de ne laisser en présence que les financeurs.
    De même, la modernisation et le patrimoine des universités devront faire l'objet d'une véritable réflexion quant à la maîtrise d'ouvrage. Nous devrons peut-être nous interroger pour savoir comment ce patrimoine pourra être dévolu aux universités, car ce sujet soulève de nombreuses difficultés.
    Un dossier me tient à coeur, celui de Jussieu. Pouvez-vous, monsieur le ministre, faire le point sur le désamiantage du campus de Jussieu et, parallèlement, sur l'avancement du dossier de Tolbiac, car nous savons tous que le succès de Jussieu passe par cette opération « tiroirs » de Tolbiac ?
    Ma troisième inquiétude porte sur l'accueil des étudiants.
    Votre prédécesseur souhaitait que l'accueil des étudiants représente 33 % des contrats de plan signés entre l'Etat et les collectivités locales. Or, nous en sommes à 25 % environ, les collectivités locales n'ayant pas montré un très grand empressement en la matière. C'est à mon sens une priorité pour les années à venir.
    S'agissant de l'accueil des étudiants étrangers, on constate des améliorations notables. Je souhaite que l'on se penche sur les relations entre les CROUS et les universités et que vous précisiez clairement les missions d'EDUFRANCE. Cette agence ne doit pas être un nouvel opérateur, mais un assembleur au service des universités pour pouvoir répondre à des demandes, des appels d'offres de l'étranger.
    Dans un contexte international en évolution rapide, l'enseignement supérieur est confronté à des problématiques nouvelles. L'enjeu est majeur ; je regrette qu'il ne soit pas reconnu comme tel par le Gouvernement.
    Fixer comme objectif de participer au marché mondial de la formation et de développer la mobilité des étudiants nécessite, en effet, que les capacités d'accueil en France soient adaptées, non seulement à des flux croissants mais aussi à des exigences de qualité renforcées.
    Historiquement, la France se caractérise par une longue tradition d'accueil. Il serait extrêmement regrettable que cet héritage ne lui soit pas plus profitable aujourd'hui. Car il s'inscrit dans une perspective culturelle essentielle : il s'agit de l'affirmation d'une « Europe de la connaissance ».
    C'est pourquoi je suis convaincu que c'est par la mise en place d'un modèle éducatif européen que le système français de l'enseignement supérieur pourra participer au marché de la formation, sans renoncer à ses principes fondateurs, en particulier à l'égalité d'accès.
    Or, ce modèle est à portée de main. En effet, comme le déclaraient, en 1998, les quatre ministres en charge de l'enseignement supérieur en Allemagne, en France, en Italie et au Royaume-Uni : « L'Europe que nous bâtissons n'est pas seulement celle de l'euro, des banques et de l'économie ; elle doit être une Europe du savoir. Nous devons renforcer et utiliser dans notre construction les dimensions intellectuelles, culturelles, sociales et techniques de notre continent ».
    Pour cela, il est impératif d'inscrire l'enseignement supérieur et la recherche comme priorités nationales. Ce n'est malheureusement pas le cas dans ce budget pour 2003.
    Comment adapter et moderniser le système d'enseignement supérieur français à un moment charnière où l'afflux d'étudiants auquel il est confronté depuis une dizaine d'années décline ? Cette interrogation n'est pas sans incidence sur le fonctionnement des universités, en particulier, sur l'application du principe d'autonomie de l'institution et ses implications. Votre budget, monsieur le ministre, n'apporte pas de réponses concrètes à ce défi essentiel. C'est pourquoi nous voterons contre.
    M. le président. La parole est à M. Olivier Jardé.
    M. Olivier Jardé. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'enseignement supérieur est l'un des éléments essentiels de notre République. L'université française est mondialement reconnue, à tel point que l'on rencontre toujours dans les laboratoires étrangers des chercheurs qui ont été formés en France.
    Monsieur le ministre, l'UDF approuve totalement votre projet de budget et vos priorités sont également les nôtres.
    En effet, remettre à niveau le budget de fonctionnement de certaines universités est une priorité. De même, il est important d'augmenter le nombre d'encadrants et de faciliter l'accessibilité des handicapés aux universités.
    Pour avoir vécu en résidence universitaire, je suis bien placé pour dire qu'il faut absolument les remettre à niveau. Et, comme il s'agit de logements sociaux, je n'ai jamais bien compris pourquoi elles relevaient exclusivement de la compétence de l'Etat.
    Je me réjouis des avancées importantes que constituent les bourses sociales pour les étudiants en DEA, la création de 500 postes d'enseignants et de 1 000 monitorats. Mais si l'Etat fait un effort, il convient que les enseignants en fassent de même en matière de pédagogie, de cohérence et de motivation des étudiants. L'université française doit relever les défis de la multiplicité des connaissances, des différentes trajectoires professionnelles, de la mondialisation, de la formation continue, des nouvelles technologies de l'information et de la communication et de la baisse progressive du nombre de nos étudiants.
    Je fais partie des universitaires qui considèrent que l'université doit apporter du savoir. Mais peut-être ai-je tort, car si nos étudiants nous demandent du savoir, ils souhaitent également une trajectoire professionnelle.
    Comme mes prédécesseurs, je veux déplorer le gâchis humain du premier cycle. Sans doute faudrait-il mieux orienter les jeunes étudiants dès le départ. Pour moi, l'autonomie serait une solution car elle permettrait d'améliorer l'orientation : autonomie au niveau des cursus universitaires et des diplômes, mais aussi de gestion et d'affectation des locaux, car il y a parfois des problèmes dans ce domaine.
    Monsieur le ministre, il faudrait aussi mieux soutenir la recherche locale et régionale. Certes, nous ne pouvons pas tous prétendre à un prix Nobel, mais, en région, nous avons la possibilité d'avancer sur des sujets particuliers. Or, lorsque j'ai voulu étudier un coefficient de friction pour une métatarsophalangienne, j'ai malheureusement été obligé d'avoir recours à un financement italien et, pour modifier une pince chirurgicale, ce sont les Suisses qui m'ont aidé. En matière d'autonomie, il est indispensable de corréler l'action des élus locaux, des présidents d'université et des directeurs de grandes écoles afin d'assurer une bonne adaptation locale. Une difficulté subsiste aussi au plan médical. Elle a été évoquée par notre collègue, le professeur Cugnenc : cela fait cinq ans qu'est posé le problème du recrutement et de la formation des personnels de santé ; cela fait cinq ans que l'on n'a absolument rien fait.
    Au-delà de cette question de formation, est posé le problème de la répartition sur le territoire national. En effet, les médecins sont trop nombreux en Ile-de-France et dans la région PACA, alors qu'il n'y en pas assez dans les régions Picardie et Champagne-Ardenne. Les élus locaux, les conseils régionaux ne pourraient-ils pas intervenir, en octroyant des primes à l'installation dans ces zones moins recherchées ?
    Comme vous avez pu le constater, monsieur le ministre, nous approuvons votre projet de budget. Comme vous, nous pensons, à l'UDF, qu'il n'est de richesse que d'hommes. L'université française est un formidable ascenseur social. Elle repose sur trois piliers importants : la contractualisation, l'autonomie et la décentralisation, la démocratisation.
    Pour toutes ces raisons, le groupe UDF soutiendra et votera votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit.
    M. Frédéric Dutoit. Monsieur le ministre, le gel partiel du plan pluriannuel de recrutement de personnels enseignants et non-enseignants donne un goût pour le moins amer au budget de l'enseignement supérieur pour 2003. Il est révélateur, me semble-t-il, de l'état d'esprit du Gouvernement qui fait peser de lourdes menaces sur l'avenir scientifique de notre pays.
    Comment peut-on se satisfaire d'un taux d'accroissement du budget de l'enseignement supérieur inférieur à celui de l'inflation prévu pour 2003 ? De plus, il s'agit d'une hausse en trompe l'oeil puisqu'elle est essentiellement due à l'effet mécanique des rémunérations des emplois créés en 2002. Il n'aura en effet échappé à personne que la hausse des crédits budgétaires est liée à celle des dépenses de personnel, celles-ci atteignant 151 millions d'euros, alors que les dépenses au titre de l'aide sociale aux étudiants sont réduites de 6 millions d'euros. Quant aux dépenses d'équipement, elles s'élèvent à un peu plus de 53 millions. Ainsi, les crédits destinés à la réhabilitation des cités universitaires sont très inférieurs aux besoins alors qu'ils sont essentiels à la préservation de la qualité de la vie des étudiants.
    En ce qui concerne les dépenses d'équipement, les crédits de paiement sont en réduction sensible et l'on peut craindre que les autorisations de programme ne subissent, dans le cadre de l'exécution budgétaire, des mesures de régulation.
    Monsieur le ministre, si je me félicite de la mise en place d'un système de bourses sur critères sociaux en faveur des étudiants en DEA, permettez-moi de dénoncer la stagnation des crédits d'aide sociale. Ce choix budgétaire est d'autant plus incompréhensible qu'il est contraire à toute politique motivée par la justice sociale. En effet, si l'accès au service public de l'éducation nationale s'est considérablement démocratisé, les chances de réussite dans l'enseignement supérieur n'en demeurent pas moins marquées par une inégalité sociale des plus criantes.
    A la relative ouverture sociale des universités s'oppose le maintien des frontières sociales dans les grandes écoles où les inégalités sociales dans le recrutement des étudiants restent en effet importantes. Or ce sont celles qui mènent aux postes décisionnels dans les entreprises ou les administrations. Ainsi, les enfants d'ouvriers ont encore près de sept fois moins de chances d'accéder à l'université que les enfants de cadres, neuf fois moins de chances de faire des études de droit, et vingt fois moins de chances d'opter pour des études supérieures dans le secteur de la santé.
    La part des étudiants d'origine modeste diminue quand on passe du premier au troisième cycle universitaire. Les enfants des cadres supérieurs et des professions libérales représentent, vous le savez, la moitié des étudiants de troisième cycle.
    Loin de diminuer, l'inégalité des chances ne cesse de croître. Depuis les années 90, dans les écoles d'ingénieurs et les écoles d'architecture, l'écart entre les chances d'accès des enfants d'ouvriers et de cadres est de un à vingt-cinq. Il est même de un à cinquante pour les écoles normales supérieures et de un à soixante-treize pour les écoles de commerce.
    La proportion des jeunes d'origine populaire dans les grandes écoles comme Polytechnique, l'Ecole normale supérieure et l'ENA a beaucoup diminué depuis quarante ans : si 30 % des élèves étaient d'origine populaire dans la première moitié des années 50, ils ne sont plus que 9 %. Aujourd'hui, plus que jamais malheureusement, l'élite scolaire est le produit d'une élite sociale.
    L'expérience, pour le moins intéressante menée par l'Institut d'études politiques de Paris, a été soutenue par votre prédécesseur, monsieur le ministre. A cet égard, il est regrettable que le Gouvernement ne semble pas disposé à suivre une démarche ambitieuse, susceptible de soutenir les initiatives audacieuses prises par certaines grandes écoles. Cette réalité se traduit notamment par le pourcentage important d'échecs constatés dans le premier cycle universitaire.
    Favoriser la réussite de tous et lutter contre l'échec en premier cycle doit nous conduire à oeuvrer de manière continue pour un meilleur taux d'encadrement des étudiants, tout particulièrement dans le premier cycle. C'est cela qui fonde la nécessité d'un service public de l'enseignement supérieur, pivot d'une politique de l'éducation recevant les moyens à la hauteur des enjeux de l'ambition affichée.
    La diffusion du savoir et des connaissances afin de permettre l'accès à l'enseignement supérieur et à l'excellence des connaissances au plus grand nombre, quelle que soit l'origine sociale, reste un enjeu majeur d'une société moderne. C'est la raison pour laquelle l'enseignement supérieur doit être conçu comme un investissement pour le bien commun de notre société, mais aussi pour l'avenir de la jeunesse.
    Oui, il faut investir dans le recrutement de milliers d'enseignants, d'enseignants-chercheurs, de personnels IATOSS chaque année pour que les jeunes accèdent plus rapidement à une formation supérieure.
    Aujourd'hui, monsieur le ministre, votre budget n'est pas du tout à la hauteur de cette ambition. Les enseignants et les étudiants vous l'ont déjà dit ; ils vous le rediront. Les députés communistes et républicains, qui les soutiennent activement vous le savez, ne peuvent que voter contre ce budget qui tourne le dos à l'avenir.
    M. le président. La parole est à M. Yvan Lachaud.
    M. Yvan Lachaud. Le budget de l'enseignement supérieur que vous nous proposez d'examiner aujourd'hui, monsieur le ministre, est en tous points remarquable, essentiellement pour deux raisons.
    La première est qu'il augmente de façon sensible les moyens accordés aux étudiants et aux personnels universitaires dans un contexte budgétaire particulièrement difficile. La manoeuvre était périlleuse : elle est brillamment réussie.
    La deuxième est qu'il dégage trois priorités jusqu'alors mésestimées dans leur importance et dans leur impact par les précédents gouvernements : l'amélioration de la situation sociale et des conditions de travail des étudiants, la lutte contre l'échec en premier cycle universitaire, la validation d'un nouveau cadre décentralisateur sur le plan fonctionnel et territorial.
    Alors que nous enregistrons cette année une nouvelle réduction des effectifs étudiants, en baisse de 0,2 % par rapport à 2001 où l'effectif avait déjà diminué de 0,4 %, le projet de budget qui nous est soumis s'élève à 8 827 millions d'euros en dépenses ordinaires et crédits de paiement et affiche une progression nette de 1,04 %. Les dépenses ordinaires enregistrent une augmentation de 1,81 % et les crédits d'investissement progressent en autorisations de programme de 1,28 %.
    Ce projet de budget confirme donc bien les ambitions fortes que nourrit le Gouvernement pour l'enseignement supérieur.
    Pour le comprendre, il suffit de regarder de plus près l'amélioration engagée des conditions de travail des étudiants. Alors que le taux d'encadrement connaissait depuis plusieurs années un fléchissement sensible, le Gouvernement a choisi d'augmenter les crédits consacrés à l'amélioration des perspectives de carrière et des régimes indemnitaires des personnels enseignants et IATOSS à hauteur de 30 %.
    Ainsi, 500 emplois d'enseignant sont créés : 210 pour les professeurs d'université, 210 pour les maîtres de conférences et 80 pour les professeurs agrégés en poste dans les facultés.
    Parallèlement, 1 000 postes de moniteur-allocataire de recherche sont ouverts à la demande des enseignants et 1 450 emplois IATOSS sont créés pour répondre à la nécessité d'améliorer dans les établissements et les bibliothèques les conditions d'accueil et d'encadrement des étudiants : 700 de catégorie A et 750 au titre de la résorption de l'emploi précaire.
    Au total, ces créations d'emplois permettront de faire passer le taux d'encadrement de 18,4 étudiants pour un enseignant l'an passé à 18,2 et de 27,4 étudiants pour un personnel IATOSS en 2002 à 27 pour 2003.
    Ces mesures apporteront donc, à n'en pas douter, une première réponse aux besoins formulés par les syndicats de personnels enseignants et IATOSS. Il est bien sûr souhaitable que les décisions prises en faveur de la requalification de ces emplois permettent de répondre aux nouveaux besoins en personnels de gestion qualifiés engendrés par la mise en place de la loi organique relative aux lois de finances et la décentralisation du 1er août 2001.
    Le budget 2003 se caractérise également par une très forte augmentation des aides sociales pour les étudiants. Si le principe d'un « salaire jeunes », proposé lors de la campagne présidentielle par l'ancienne majorité, ne pouvait qu'être rejeté en ce qu'il était porteur d'injustice pour les autres membres d'une même classe d'âge, l'aide aux étudiants devait impérativement être revalorisée.
    Plusieurs mesures figurent en ce sens dans le projet de budget : extension aux étudiants en DEA des bourses à caractère social pour un montant de 6 millions d'euros, soit 7 400 bourses ; augmentation du nombre d'allocations d'études qui passe de 7 000 à 11 000, contrairement à ce que nous avons entendu tout à l'heure ; accroissement de 9 000 mois des « bourses de mobilité » en vue de favoriser les échanges ; mesure nouvelle équivalant à 300 000 euros pour l'augmentation des crédits de prise en charge du quatrième terme de bourse bénéficiant aux étudiants des départements d'outre-mer ; mise en place de 150 « bourses au mérite » d'un montant de 6 000 euros chacune ; et enfin, accroissement de 0,3 million d'euros des crédits prévus pour le remboursement des frais de déplacement des étudiants handicapés de leur domicile à leur lieu d'études.
    Sur ce sujet qui, comme vous le savez, me tient à coeur, je veux souligner ici l'engagement des établissements d'enseignement supérieur en faveur de nouvelles actions d'accompagnement des jeunes handicapés.
    Cet engagement s'est aussitôt traduit par une augmentation sensible du nombre des étudiants pouvant suivre des études puisque environ 7 000 étudiants handicapés ont été recensés au cours de l'année universitaire 2001-2002. Ce chiffre reste cependant probablement sous-estimé, un certain nombre d'entre eux ne souhaitant pas se faire connaître. Je tiens à rappeler ici que cet accueil se traduit financièrement dans la politique contractuelle de l'Etat et des universités.
    L'effort réalisé dans ce cadre est donc très important, et je vous en félicite, monsieur le ministre, puisqu'il représente dans le budget 2003 une hausse de 22 % avec un total de 1,6 million d'euros.
    S'agissant toujours de l'amélioration de la situation sociale des étudiants, il faut souligner les mesures exceptionnelles prises dans ce budget en faveur de la rénovation du logement étudiant, plus particulièrement du parc immobilier des CROUS. Seules 20 000 des 100 000 chambres existantes, construites pour la plupart dans les années 60, ont été à ce jour réhabilitées. L'objectif que vous vous êtes fixé, monsieur le ministre, est tout à fait remarquable puisqu'il ne vise pas moins que la rénovation de 7 000 chambres par an contre 2 200 au cours des trois dernières années : 8 millions d'euros ont été inscrits dans ce but au budget 2003.
    Nous pouvons également souligner l'effort très substantiel que vous proposez dans le domaine de l'équipement informatique universitaire, l'objectif étant de porter le nombre d'étudiants par ordinateur de 28 à 13. Cette action bénéficiera de 55 % de dotation supplémentaire.
    Les crédits de fonctionnement connaissent donc une hausse très importante, de l'ordre de 51,5 millions d'euros, soit 4,4 %, pour les établissements d'enseignement supérieur et de 12,7 millions d'euros pour le réseau des oeuvres universitaires et scolaires. L'objectif affiché était, d'une part, d'assurer le rattrapage des crédits de fonctionnement pour les établissements d'enseignement supérieur sous-dotés, ainsi que la diversification de leurs filières et de leurs missions et, d'autre part, d'accélérer le rythme de réhabilitation des résidences universitaires.
    L'augmentation de 5 % des moyens des établissements d'enseignement supérieur privés, 2 millions d'euros, permettra d'étendre à un plus grand nombre d'établissements la politique contractuelle et de réduire certaines disparités de subventions entre les différents établissements d'enseignement supérieur. Cette mesure est importante en ce qu'elle engage enfin la politique de rattrapage des moyens accordés à l'enseignement supérieur privé et nous ne pouvons que nous en féliciter. En effet, ces établissements remplissent une mission de service public et la baisse de 13 % de leurs subventions votée en 1998 par l'ancienne majorité a causé à ces universités de très sérieuses difficultés.
    L'objectif de votre ministère étant de généraliser prochainement la politique de contractualisation à travers la mise en place de critères d'objectifs et de résultats, il sera certainement souhaitable d'aller encore plus loin afin d'harmoniser progressivement ces financements. Concernant les crédits d'investissement, le projet de loi de finances pour 2003 prévoit un effort spécifique en faveur des contrats de plan Etat-région, notamment pour la région parisienne.
    La hausse de la subvention d'équipement allouée à la recherche universitaire est également remarquable puisqu'elle passe de 330 millions d'euros à 348 millions d'euros en autorisations de programme, et de 303 millions d'euros à 321 millions d'euros en crédits de paiement. Cette progression est significative.
    Enfin, ce budget valorise la mise en place d'un nouveau système d'accueil de post-doctorants en université avec comme objectif le recrutement de 400 jeunes chercheurs. Le maintien d'un flux de 4 000 allocations de recherche et la revalorisation de 5,5 % de leur montant - resté au même niveau depuis 1991 - témoignent également, si besoin était, de l'intérêt que porte le Gouvernement à la recherche.
    Pourtant, après avoir connu une augmentation constante des effectifs étudiants durant les dix dernières années, l'enseignement supérieur doit aujourd'hui faire face à un effet de recul démographique sensible. Il faut donc privilégier la qualité de ses formations et lutter contre l'échec en premier cycle universitaire. C'est une priorité absolue.
    L'orientation des bacheliers pose un problème plus complexe qu'il n'y paraît. Ainsi que cela a été évoqué lors de l'examen du projet de budget de l'enseignement scolaire, c'est beaucoup plus en amont qu'il convient de rechercher les raisons de l'échec, certainement au niveau de la formation scolaire. Il convient tout de même de relever que 80 % des bacheliers généraux réussissent actuellement à obtenir un DEUG en trois ans, contre seulement 37 % pour les bacheliers issus des filières techniques.
    De fait, ce sont plus de 295 000 étudiants qui entrent chaque année à l'université, mais environ 55 000 abandonnent avant la fin de la première année et, pour un tiers d'entre eux, il s'agit d'un abandon définitif. Vous nous l'avez cependant démontré en commission, monsieur le ministre : la question de l'orientation « par défaut » est à regarder de très près.
    En outre, il conviendra de ne pas saupoudrer benoîtement un peu de culture générale dans tous les programmes. Non, il faut privilégier l'introduction d'une culture générale en rapport avec la discipline enseignée et demander aux équipes pédagogiques de formuler peu à peu leurs besoins. Nous devons vous féliciter, monsieur le ministre, car vous avez réussi, dans le cadre de ce projet de budget pour 2003, à mettre à disposition, dès cette année, un corps de deux cents professeurs agrégés.
    Pour terminer cet exposé, je veux simplement aborder le cadre décentralisateur du budget que nous examinons aujourd'hui. Il paraît en effet évident que celui-ci comporte un volet essentiel se rapportant au chantier ouvert par le Premier ministre. Nous y trouvons son application universitaire.
    Enfin, monsieur le ministre, votre projet de budget démontrer de façon exemplaire que l'Etat n'entend en aucune manière renier ses propres responsabilités en la matière, comme en témoigne l'accroissement très important du nombre de logements étudiants.
    L'éducation nationale étant prête à expérimenter la décentralisation sous sa forme territoriale aussi bien que fonctionnelle, trois types d'actions resteront alors à mener : associer les régions au schéma des formations professionnelles jusqu'au niveau minimum de la licence ; envisager de nouvelles coopérations avec les collectivités territoriales et impliquer au juste échelon les collectivités jusque dans la politique contractuelle menée entre l'Etat et les établissements d'enseignement supérieur.
    Au moment de conclure cette intervention, permettez-moi de vous répéter, monsieur le ministre, combien les parlementaires UMP de la majorité peuvent être fiers de voter aujourd'hui ce budget en hausse, qui réussit à faire de l'enseignement supérieur une priorité de l'action gouvernementale dans un contexte budgétaire difficile. C'est l'illustration de votre courage politique, et nous vous en remercions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre-André Périssol.
    M. Pierre-André Périssol. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nos universités font beaucoup d'efforts mais le taux d'échec en premier cycle est encore trop élevé. On vient de le rappeler : 30 % des étudiants n'obtiennent pas leur DEUG après trois ans et les inégalités socioculturelles restent beaucoup trop fortes. Le succès à l'Université se construit bien en amont, à l'école, par la maîtrise des fondamentaux, par l'acquisition de compétences, notamment en matière d'organisation de son temps et de son travail, par l'acquisition d'une solide culture de base, indispensable quelle que soit la spécialité, quelle que soit la voie choisie.
    Le succès de l'Université suppose également, c'est la deuxième condition, une bonne orientation. Vous avez raison, monsieur le ministre, de dénoncer l'orientation par défaut des bacheliers technologiques et professionnels. Tout bachelier technologique ou professionnel ayant exprimé un premier voeu en faveur d'une formation technologique courte, particulièrement en BTS, doit, vous avez raison, bénéficier d'un droit de priorité.
    Cela étant, même si des progrès considérables restent à faire en termes d'orientation, bon nombre d'étudiants se retrouveront toujours dans une voie qui n'est pas la leur, ne serait-ce que parce que leur motivation, y compris celle qui les pousse à entreprendre des études universitaires, n'est pas toujours bien constituée à la sortie du lycée. Il faut donc s'atteler à faciliter les réorientations, au sein même de l'université, où l'on doit pouvoir changer de filière tout en conservant un maximum de ce qui aura été acquis - d'où le développement de passerelles entre les disciplines -, mais également hors de l'université, vers d'autres formations supérieures. L'université elle-même pourrait aider les étudiants à se reconvertir en validant leurs acquis en termes d'autonomie et de méthode, cette reconnaissance leur servant de caution qui leur faciliterait l'accès à d'autres formations extérieures. Nous pourrons ainsi réduire le taux d'échec en fin de premier cycle, mais également éviter que les erreurs de parcours ne débouchent sur un échec tout court.
    Si l'on veut faire réussir nos étudiants, mais aussi faire réussir nos universités, encore faut-il que celles-ci tiennent leur rang dans une compétition internationale de plus en plus sévère et qu'elles en aient les moyens : moyens élargis, mais également assouplis dans leur gestion, moyens pour former, pour définir l'offre de formation, organiser les passerelles, prendre toutes initiatives propres à accroître la réussite, notamment en premier cycle. Il faut aller vers une plus grande autonomie des universités dans le cadre de contrats passés avec l'Etat.
    Enfin se pose le problème de la vie étudiante. Vous comprendrez que je sois particulièrement sensible aux conditions de logement des étudiants. Or, celles-ci ne sont pas bonnes, ni qualitativement ni quantitativement. Je salue, monsieur le ministre, l'effort de réhabilitation des cités universitaires et le triplement auquel vous vous engagez. C'était plus que nécessaire. Reste que l'on compte seulement 150 000 lits dans les cités universitaires pour plus de deux millions d'étudiants. C'est insuffisant. Pour ne prendre qu'un exemple, celui de l'académie de Créteil, il n'y a que 3 600 lits universitaires pour 105 000 étudiants ! Cela n'est pas acceptable.
    Il faut certes améliorer les conditions d'hébergement dans les cités universitaires, mais aussi, en parallèle, l'offre de logement en faveur des étudiants. L'Etat ne peut tout faire. Il est donc essentiel de favoriser l'investissement privé. C'est cette motivation qui nous a poussés à créer en 1996 l'amortissement pour inciter à investir dans les logements en vue de la location et à en ouvrir le bénéfice à ceux qui entendaient les louer à des étudiants, y compris à des descendants.
    Grâce à ce dispositif, une bonne part des 140 000 logements ainsi construits en deux ans ont été mis à disposition des étudiants. Nous avons ainsi accru l'offre de logements étudiants, surtout dans les zones « tendues », c'est-à-dire celles qui connaissaient les plus gros déficits en ce domaine. Hélas, le dispositif a été supprimé par nos successeurs qui, pour des raisons idéologiques, en ont coupé le bénéfice à ceux qui louaient à des descendants. Fort heureusement, un amendement de notre rapporteur général, Gilles Carrez, vient de rétablir cette possibilité.
    Monsieur le ministre, faire réussir nos étudiants, faire réussir nos universités, améliorer les conditions de vie étudiante : trois exigences auxquelles votre budget montre que vous vous engagez à répondre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. René-Paul Victoria.
    M. René-Paul Victoria. « Notre pays a besoin d'un enseignement supérieur ouvert, efficace et de qualité, attentif aux besoins de qualification, nourri, irrigué par la recherche, capable d'agir avec d'autres partenaires français ou étrangers, au niveau européen comme au niveau régional, avec les organismes de recherche comme avec les entreprises. »
    C'est par cette affirmation que vous avez, monsieur le ministre, rendu compte de la rentrée universitaire 2002. Je souscris pleinement à ce propos et le budget que vous présentez, répond bien aux principaux défis à relever dans ce domaine.
    Contrairement aux départements de métropole, où les effectifs sont en diminution depuis 1995, la Réunion est confrontée à une croissance massive de ses effectifs étudiants : près de 9 % par an.
    En revanche, à l'instar de la métropole, nous assistons à une profonde mutation : l'Université doit aborder des objets, des questions et des méthodes que la société et l'économie réclament. Ses missions lui confèrent des responsabilités qui prennent aujourd'hui un relief particulier.
    A l'ambition de se situer toujours à la pointe de la connaissance et de la recherche, aux impératifs de qualité scientifique, à l'adaptation permanente de son organisation et de ses partenariats, s'ajoute l'affirmation de choix stratégiques plus délicats à opérer qu'hier. Par ailleurs, les enseignants-chercheurs et les chercheurs doivent établir un dialogue direct, non seulement avec leurs partenaires, mais également avec bien d'autres acteurs sociaux ; dialogue indispensable pour redéfinir la place de la formation et de la recherche dans un environnement géopolitique singulier en perpétuel mouvement.
    Se trouver projetée au coeur de ce débat de société peut inquiéter, voire déstabiliser l'université de la Réunion. Mais c'est en réalité le signe de sa vitalité et le prix de sa légitimité : elle occupe une place grandissante, tant dans l'évolution de la transmission des savoirs et des sciences que dans celle de notre vie quotidienne.
    Il convient de rechercher les voies et moyens pour bâtir, de manière pérenne et harmonieuse, un appareil de formation supérieure et de recherche efficace, véritable force motrice au service du développement économique local, adapté aux contraintes démographiques réelles de l'île.
    Dans cette perspective, l'université française de l'océan Indien doit être soutenue politiquement et financièrement pour conforter son positionnement et sa stratégie de développement à long terme : il s'agit là d'un enjeu formidable pour la France et pour l'Europe.
    Comment pourrions-nous orienter cette grande mission universitaire, en particulier pour la Réunion ?
    Premièrement, par le renforcement de la dimension internationale et plus particulièrement de son potentiel « recherche ». Désormais, toute politique d'enseignement supérieur doit se concevoir dans un cadre européen, voire mondial. La compétitivité d'un pays dépend de plus en plus de la qualité de son système d'enseignement supérieur et de recherche, de la reconnaissance à l'étranger de cette qualité et de l'attractivité corrélative qu'il exerce sur les étudiants et les scientifiques du monde entier. L'intégration d'une dimension internationale dans l'enseignement supérieur devient dès lors une urgence aussi bien dans le cadre européen que dans le concert mondial pour assurer la défense de l'identité européenne.
    Il s'agit donc, tout d'abord, de faciliter une véritable implantation des grands organismes de recherches nationaux - CNRS, INSERM, INRIA, CNES -, composantes essentielles d'une stratégie de développement dont les relais demeurent trop souvent confidentiels, voire absents. Actuellement, pour l'ensemble de ces organismes, il n'y a qu'une seule personne du CNRS en poste à la Réunion.
    Et pourtant, l'université de la Réunion a autant d'atouts que n'importe quelle autre université métropolitaine, européenne ou étrangère, notamment sur des segments porteurs en termes de valorisation tels que la bio-informatique, la génomique ou encore la modélisation.
    Par ailleurs, la recherche à l'université ne doit pas se positionner seulement sur des spécificités réunionnaises ou des applications locales immédiates.
    L'université doit être dotée, dans ce domaine prioritaire pour la France et pour l'Europe, de moyens appropriés dans des secteurs à forte valeur ajoutée. Elle a déjà su démontrer sa capacité à se hisser dans le peloton de tête et prendre une place de leader dans des domaines comme celui de la transmission d'énergie sans fil. Ainsi, grâce à la Réunion, la France et l'Europe se positionnent dans ce secteur au tout premier plan international face au Japon.
    Mais l'université de la Réunion ne peut assumer seule cette forte attente de chercheurs ; actuellement, nous avons 350 postes de chercheurs à l'université. Or, devant la croissance importante des effectifs, dont je parlais précédemment, ce sont 1 200 postes au moins dont nous aurons besoin d'ici à 2020.
    Enfin, la mise en place du passeport mobilité, que votre collègue, Mme Girardin, a initié dès le mois de septembre dernier, devrait permettre à nos jeunes de s'ouvrir sur le monde extérieur et de leur offrir un choix plus important de formations.
    Deuxièmement, cette mission universitaire peut être orientée par la diversification de l'offre de formation à tous les niveaux universitaires.
    En effet, comme vous le savez, monsieur le ministre, la diversification des formations peut permettre une meilleure orientation de nos jeunes qui entrent à l'université et contribuer à la lutte contre les échecs trop fréquents en premier cycle.
    Il faut donc favoriser le concept du « cursus intégré » dans le cycle conduisant à la licence ou au mastère, en privilégiant notamment la possibilité de suivre des études pluridisciplinaires, d'acquérir une réelle compétence en langues vivantes et d'utiliser les nouvelles technologies de l'information.
    Mais il est également capital de diversifier l'offre de formation de haut niveau, notamment pour les formations médicales, avec deux objectifs prioritaires : l'augmentation du quota de places réservées à l'université dans le numerus clausus et l'émergence d'un CHU, en complément du renforcement du dispositif « 3-5-8 » licence, master, doctorat.
    Des avancées significatives ont déjà été obtenues dans ce domaine : la création à court ou moyen terme d'une école de commerce, d'une école d'ingénieurs, d'un institut régional d'administration, voire d'un institut d'administration publique. Ces créations constituent déjà une première réponse adaptée à la tertiarisation de la population active de l'île, aux obstacles structurels à l'emploi dans ce département et au sous-encadrement qui caractérise le secteur privé et public.
    L'éducation et la formation tout au long de la vie deviennent une évidente obligation. Nous devons à nos étudiants un système d'enseignement supérieur qui offre les meilleures chances de trouver leur propre domaine d'excellence.
    Troisièmement, enfin, l'émergence de pôles d'excellence axés sur les hautes technologies, l'ingénierie et les services.
    Cela passera notamment par le développement de stratégie de « recherche-innovation » avec l'appui des grands organismes de recherche et par le développement de politiques technologiques régionales.
    Mais il sera indispensable d'avoir un appui de l'Observatoire des sciences et techniques pour mesurer le retour sur investissement du développement de la recherche à la Réunion, et l'appui de l'Agence pour le développement de l'information technologique pour le renforcement des activités de veille, nécessaires à l'exploration de nouvelles pistes de développement économique.
    En conclusion, pour que la formation et la recherche à la Réunion soient demain l'authentique Alma Mater et un atout majeur pour son développement économique, social et culturel, il est urgent de construire cette université de demain, que nous transmettrons avec fierté aux générations futures. Je sais que je peux compter sur vous, monsieur le ministre. C'est donc avec confiance que je voterai ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.
    M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les dépués, je tiens d'abord à adresser mes remerciements les plus chaleureux au rapporteur spécial, M. Laurent Hénart, au rapporteur pour avis, M. Paul-Henri Cugnenc, qui ont su présenter, avec une finesse d'analyse remarquable, les lignes de force de notre budget.
    Je remercie également les autres intervenants pour la qualité du débat qu'ils nous permettent d'avoir aujourd'hui sur des questions qui nous tiennent à coeur.
    J'ai également senti que vous m'adressiez une série de conseils auxquels je suis sensible. Je tiens d'entrée de jeu à rassurer M. Cugnenc à propos des études médicales. Pour la première fois depuis plus de dix ans, nous créons des emplois : dix emplois de professeur et trente-deux de maître de conférences, pour améliorer l'encadrement des étudiants en médecine aujourd'hui plus nombreux.
    En liaison avec mon collègue Jean-François Mattei, nous avons augmenté le numerus clausus, mais surtout entamé une réflexion sur le gâchis dans les premiers cycles universitaires de médecine que vous soulignez à juste titre. Notre souci est, en effet, de parvenir à une formation commune, et, compte tenu du taux d'échec particulier aux filières médicales, de faire en sorte que les étudiants n'y perdent pas leur temps et puissent reconvertir les « crédits » qu'ils ont obtenus. Nous avons demandé à la commission en charge de cette question de présenter des propositions pour la réforme des premiers cycles universitaires de médecine et de nous rendre très rapidement ses conclusions pour que nous puissions mettre en place les mesures nécessaires.
    Si je comprends l'exercice inévitable de tableau noir auquel M. Claeys s'est livré - je ne puis évidemment lui en tenir rigueur -, si je partage son analyse, sur la question d'Edufrance, si je tiens à sa disposition le phasage de l'opération Jussieu dont j'hérite mais sur lequel je n'ai rien de particulier à ajouter, je ne puis être en accord avec lui sur la question des gels de crédits.
    Ces gels de crédits, monsieur Claeys, qui s'élèvent, pour le budget de l'enseignement supérieur, à 80 millions d'euros, ne concernent en rien le fonctionnement. En outre, comme vous le savez certainement puisque vous suivez ces questions depuis longtemps et les connaissez parfaitement, sont inférieurs à ce qu'ils étaient l'année dernière, y compris sur les contrats de plan Etat-régions. Vos remarques à cet égard sont donc un peu hors sujet.
    L'augmentation de 1,05 % de ce budget, que vous avez tous notée, est remarquable au regard tant de la baisse des effectifs étudiants que, surtout, des difficultés budgétaires que connaît aujourd'hui la France et dont nous héritons. Le ministère de la jeunesse de l'éducation nationale et de la recherche doit y prendre sa part.
    Avant d'évoquer rapidement les chantiers prioritaires qui sont les miens, je rappelerai brièvement les principales mesures nouvelles dont les rapporteurs ont du reste parfaitement rendu compte.
    Il y aura, en 2003, 1 200 emplois supplémentaires, 1 000 postes de moniteurs, ce à quoi s'ajouteront 200 professeurs du second degré mis à disposition des universités, pour y développer les cours de culture générale.
    Les emplois de personnel administratif et technique bénéficieront d'une mesure de requalification sans précédent, très importante pour répondre au besoin de renforcement de l'encadrement qui se manifeste dans le contexte de l'autonomie des universités.
    Surtout, j'ai tenu tout particulièrement et personnellement à ce que les crédits consacrés aux mesures en faveur des personnels enseignants et IATOSS soient accrus de 30 % par rapport à la loi de finances 2002. Ces mesures incluront le repyramidage des corps d'enseignants-chercheurs, permettant ainsi une amélioration des carrières qui avait été négligée au cours des dernières années, ce qui était particulièrement décourageant pour les enseignants.
    Les crédits de fonctionnement augmenteront de 64 millions d'euros, le soutien de base aux laboratoires de recherche universitaire progressera de 5,4 % et l'aide sociale aux étudiants fera l'objet d'efforts très importants sur lesquels je reviendrai tout à l'heure.
    Pour en venir aux chantiers prioritaires, je commencerai par évoquer la recherche universitaire et la question de l'harmonisation des diplômes européens. On ne peut, en effet, parler du budget de la recherche sans évoquer le budget de la recherche universitaire. Au sein de l'Université, la recherche est essentielle, puisque l'Université est, finalement, le seul lieu dans notre système éducatif où les enseignants sont à la fois ceux qui transmettent le savoir et ceux qui le produisent. C'est un cas tout à fait particulier qui justifie que l'on soit extrêmement attentif aux conditions de développement de la recherche universitaire. Dans la loi de finances de 2003, ses moyens croissent considérablement, de 5,4 % en autorisations de programmes et de 4,5 % en crédits de paiement, augmentations qui permettront de dégager notamment 8 millions d'euros supplémentaires pour la prochaine vague de contrats quadriennaux.
    Je ne reviens pas sur le repyramidage des personnels IATOSS, mais il est évidemment très important dans le contexte d'une aide à la recherche, pas plus que sur la revalorisation du montant des allocations de recherche - de 5,5 % - ni sur la création des postes de moniteur et des 400 bourses d'allocation de recherche, puisque cela a été évoqué par les rapporteurs.
    En revanche, je dirai quelques mots du fameux « 3-5-8 », ou « LMD » - licence, mastère, doctorat - peu importe comment on l'appelle ! Les organisations étudiantes ont craint ou plutôt feint de craindre, que les diplômes nationaux ne soient remis en question. Mais les grandes écoles de gestion ou d'ingénieurs, elles aussi, se sont préoccupées de la question à un double titre : d'abord, parce qu'elles n'auraient plus le droit de délivrer les mastères à partir de la rentrée 2003 ; ensuite, parce que les procédures d'habilitation n'étant pas les mêmes dans les écoles d'ingénieurs et dans les écoles de gestion, un différend était né entre elles sur la façon de concevoir l'habilitation des mastères.
    Je puis affirmer que, aujourd'hui, ces deux questions sont réglées. On a dégagé un principe commun qui a réconcilié toutes les parties en présence que nous avions réunies au ministère afin de faire avancer le dossier. Ce principe est très simple : à diplôme national, il faut une évaluation nationale, selon une procédure unique et commune. Ladite procédure d'évaluation sera confiée à la mission scientifique universitaire, rebaptisée, d'ailleurs, pour l'occasion, mission scientifique, technique et pédagogique. Il faudra l'élargir à la dimension interministérielle qui convient, et la recentrer sur cette mission d'évaluation, pour que nous puissions maintenir cet idéal légitime d'une habilitation commune et nationale des diplômes nationaux. C'est là une avancée considérable qui résout un problème laissé en suspens par mon prédécesseur, et devrait à la fois apaiser l'inquiétude manifestée par certaines organisations étudiantes quant au maintien du caractère national des diplômes, notamment du mastère, et réconcilier, si je puis dire, les grandes écoles entre elles et les grandes écoles avec les universités, puisque les commissions d'habilitation, commission des titres d'ingénieurs d'un côté, commission Helfer de l'autre, continueront de préparer le travail, lequel sera transmis ensuite à la mission scientifique, technique et pédagogique, puis, dans un dernier temps, à la direction de l'enseignement supérieur, avant d'arriver sur le bureau du ministre.
    L'enjeu est d'importance : il s'agit des conditions de mobilité de nos étudiants en Europe ! Nous consentons déjà un gros effort en matière de bourses de mobilité, puisque 9 000 bourses nouvelles seront créées pour la rentrée 2003.
    Outre la recherche et l'harmonisation des diplômes européens, le dossier de la lutte contre l'échec scolaire dans les premiers cycles universitaires constitue, lui aussi, un de nos grands chantiers. Le règlement de ce dossier difficile impose, selon moi, deux types de mesures, portant, d'une part, sur l'orientation, d'autre part, sur la culture générale.
    M. Lachaud et M. Périssol ont insisté, à juste titre, sur l'importance de l'orientation, et les chiffres sont à cet égard très éloquents. Nous savons, en effet, que 80 % des titulaires d'un bac général obtiennent leur DEUG en trois ans, alors que seulement 38 % des bacheliers issus des filières technologiques parviennent à l'obtenir, et ce quel que soit le nombre d'années qu'ils consacrent à cette tâche. En outre - et ce troisième chiffre éclaire l'ensemble du problème et son enjeu - 50 % de ces bacheliers issus des filières technologiques qui, donc, échouent massivement à obtenir leur DEUG, avaient préalablement demandé leur affectation dans les filières technologiques courtes, la plupart du temps en STS, le cas échéant en IUT. J'ai donc demandé aux recteurs, de la façon la plus claire, de leur donner la priorité pour une affectation en STS ou en IUT. Cela se fera, bien entendu, progressivement mais j'aimerais que, dès la rentrée prochaine, le pourcentage de ces bacheliers autorisés à entrer notamment en BTS soit considérablement augmenté. Leur situation est d'autant plus paradoxale, voire scandaleuse, qu'après la rentrée, de nombreuses places dans ces filières restent vacantes ! Il conviendra également de réfléchir à ces questions d'orientation davantage qu'auparavant, notamment par le biais, dans le cadre de la décentralisation, du schéma prévisionnel de formation. Cela vaut non pas seulement pour l'enseignement scolaire mais pour l'enseignement supérieur - M. Périssol y a fait allusion dans son intervention, trop courte, malheureusement, pour qu'on puisse l'entendre sur un sujet qu'il connaît admirablement. Il faut que les recteurs, les présidents d'université, mais aussi les élus travaillent ensemble à établir des schémas prévisionnels de formation qui permettent de penser l'orientation en des termes plus intelligents et plus efficaces qu'aujourd'hui.
    Mais, je le disais, pour lutter contre l'échec scolaire dans les premiers cycles universitaires, il faut s'attaquer outre aux questions d'orientation, au problème de la culture générale.
    Je vous fais observer, mesdames et messieurs les députés, que, paradoxalement, dans les filières d'excellence que sont les classes préparatoires aux grandes écoles, on accorde toujours une place très importante à la culture générale. A Sciences-Po comme à HEC, dans les classes de khâgne ou dans toutes les autres filières d'excellence, presque toujours on dispense aux étudiants de grands cours de culture générale, en histoire, en littérature, même en philosophie, ou dans d'autres domaines. Dans les premiers cycles universitaires, la spécialisation est précoce et immédiate et elle répond davantage à une volonté des enseignants qu'à l'intérêt des étudiants. De ce fait, nos étudiants arrivent aux concours dans une situation d'infériorité par rapport aux élèves issus des grands écoles, ou même par rapport à ceux qui n'ont pas intégré les grandes écoles mais ont bénéficié de l'enseignement des classes préparatoires. C'est pourquoi j'ai eu l'idée de proposer aux universités non pas de mettre en place un « supplément d'âme » de culture générale, mais de réfléchir, au sein de chaque équipe pédagogique, de chaque filière de formation, à ce dont les étudiants ont besoin en matière de culture générale « spécifique », si je puis dire, à chaque voie de formation.
    Il est déraisonnable que des étudiants en droit n'aient aucune notion de sociologie, des étudiants en philosopie aucune notion en biologie, des étudiants en médecine aucune notion de bioéthique. Et je pourrais multiplier les exemples. Il faut donc que chaque voie de formation définisse ses besoins en matière de culture générale spécifique pour faciliter la réussite de leurs étudiants. Pour créditer cette demande que j'adresse aux universités et amorcer le processus de mise en place de cours de culture générale, je leur propose de mettre à leur disposition 200 professeurs agrégés.
    La troisième orientation fondamentale que je vous propose, en tant que ministre de l'éducation mais aussi en tant que ministre de la jeunesse, porte sur la vie étudiante et l'aide sociale aux étudiants. Je n'ai pas choisi - mes prédécesseurs non plus - d'instituer un salaire étudiant. Ce serait une injustice à l'égard des autres jeunes de la même classe d'âge. Et si l'on veut aider les étudiants sans être injuste, il faut faire un très gros effort en faveur de l'aide sociale.
    C'est ainsi que 1 000 postes de moniteur seront accordés aux plus talentueux d'entre eux, à ceux qui veulent se diriger vers la recherche et l'enseignement supérieur. Les allocations du plan social étudiant sont passées depuis 1999 de 7 000 à 11 000. Pour la première fois, 7 400 bourses de DEA sur critères sociaux sont créées. Le nombre des bourses de mobilité augmentera de 25 %. Quant à la rénovation des cités universitaires, qui me semble un dossier extrêmement important, je n'y insiste pas puisque plusieurs d'entre vous l'ont fait, mais j'ai plaisir à répéter après eux que nous passerons de la réhabilitation de 2 200 logements étudiants en moyenne par an dans les cinq dernières années à 7 000 dans les années qui viennent.
    Sur la question des bourses, je ne partage pas le point de vue de M. Dutoit - mais peut-être aurons-nous l'occasion d'y revenir tout à l'heure dans les questions - qui est fondé sur l'idée, au fond très américaine, qu'il faut aller toujours dans le sens de la discrimination positive. Je préfère, pour ma part, les bourses au mérite, dont M. Lachaud a parlé avec talent et dont M. Cugnenc a évoqué la réalité. Ces bourses au mérite sont attribuées à des bacheliers qui, bien que venant de milieux très défavorisés sur le plan financier, ont obtenu une mention très bien au baccalauréat et qui ne pourraient pas, sans aide, poursuivre leurs études supérieures dans des conditions satisfaisantes. Je pense que c'est le modèle à suivre : offrir une aide aux excellents, quand ils sont en situation extrêmement défavorisée.
    Vous disiez, monsieur Dutoit, que le recrutement des étudiants reste encore très fortement lié à l'appartenance à une classe sociale. C'est très juste. Mais vous admettrez que je ne suis que l'« héritier » de cette situation, pour faire allusion à des travaux que vous connaissez.
    M. Jean-Pierre Brard. Vous pouvez changer de famille, monsieur le ministre !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Sûrement pas, j'aime beaucoup la mienne !
    J'ajoute, même si vous ne m'avez pas posé la question, parce que les étudiants eux se la posent, qu'il n'est pas question, dans le dispositif des assistants d'éducation que nous allons mettre en place, non pas pour le substituer à celui des maîtres d'internat et surveillants d'externat mais pour le compléter, de ne pas accorder une priorité absolue aux étudiants.
    M. Guy Geoffroy. Très bien !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Ces missions de surveillance ont clairement une fonction d'aide sociale, que nous entendons évidemment préserver à cent pour cent dans le nouveau dispositif. Nous souhaitons néanmoins le rendre plus efficace pour les établissements et pour les étudiants eux-mêmes. Pour cela, nous aurons à envisager, mieux que cela n'a été fait jusqu'à présent - ce n'est pas difficile puisque rien n'a été fait, en l'occurrence ! - la validation des acquis de l'expérience des étudiants dans l'obtention de leurs examens, en particulier du DEUG. Nous nous efforcerons de trouver, sur ces questions, un accord avec les présidents d'université.
    Avant de conclure, j'évoquerai la décentralisation, qui comporte en quelques sorte deux volets, et d'abord celui que l'on désigne, dans le jargon administratif, par décentralisation « fonctionnelle ». Il s'agit, en vérité, d'augmenter un peu l'autonomie des universités. Nous proposerons très prochainement, sur ce point, un texte législatif comportant probablement une dizaine de mesures essentiellement techniques, telles que les quorum dans les conseils d'administration, les délégations de signature, ou la création des SAIC, services d'activités industrielles et commerciales. Je ne veux pas entrer dans les détails. Ce sont néanmoins des mesures extrêmement importantes car elles permettront aux universités d'aborder précisément le deuxième volet, à savoir, la décentralisation territoriale, dans les meilleures conditions.
    Je n'ai pas à préjuger de ce que proposeront les régions en la matière. En tout état de cause, il ne s'agira pas d'une décentralisation à la carte : les principes régaliens qui régissent le service public et les missions de l'Etat restent évidemment hors du champ de l'expérimentation. Et je suis prêt, monsieur Claeys, sur la question de la péréquation entre les différentes universités, à vous fournir toutes les informations dont dispose le ministère, région par région.
    Toutefois, il est de ma responsabilité, en tant que ministre, d'indiquer quelles sont les voies qui me paraissent les plus fécondes, précisément parce que ce qui relève des fonctions régaliennes de l'Etat est hors champ de l'expérimentation. Deux sujets me paraissent particulièrement relever de la décentralisation territoriale : les CROUS et la vie étudiante, qui peuvent intéresser beaucoup les régions ; ensuite - ce que j'évoquais tout à l'heure -, les schémas prévisionnels de formation élaborés en coopération par les élus, recteurs et présidents d'université.
    Vous me pardonnerez de revenir en arrière un instant, pour préciser que, s'agissant de la place des IUT dans le système LMD ou 3-5-8, après mûre réflexion, et après avoir pesé les arguments pour et contre, j'ai choisi, et je m'y tiendrai, de ne pas aller dans la voie des LUT, licences universitaires de technologie, c'est-à-dire une filière qui alignerait ces formations sur les niveaux « bac + 3 », d'abord parce que cela induirait un décrochage avec les BTS qui serait fâcheux et, ensuite, parce qu'il me paraît préférable d'augmenter le nombre des licences professionnelles pour offrir aux étudiants des IUT la possibilité d'aller plus loin et de poursuivre jusqu'à bac + 3.
    Je terminerai sur une brève évocation de la question des IUFM qui touche davantage l'enseignement supérieur que l'enseignement scolaire - débat au cours duquel j'y avais fait allusion. Nous proposerons, au mois de janvier, une réforme modérée mais, j'espère, très efficace des IUFM qui ira dans deux directions.
    D'abord, je souhaiterais que les IUFM dispensent à leurs étudiants une formation plus « professionnalisante » que ce n'est le cas aujourd'hui. J'estime que les recteurs et le ministère doivent reprendre un peu la main sur ces questions et réaffirmer les missions qui sont celles des IUFM.
    Ensuite, nous nous interrogerons - et nous avancerons sur ce sujet au mois de janvier - sur la place de la recherche dans les IUFM. Je pense que ce n'est pas la vocation première des IUFM. Il n'en est pas moins souhaitable qu'il y ait place pour la recherche dans les IUFM, mais il faudrait qu'elle soit recentrée sur des questions en rapport avec leurs missions professionnalisantes. Ainsi, la plupart des jeunes professeurs ignorent tout ou presque tout de l'histoire de leur propre discipline. Or, la plupart des grandes questions dont nous débattons, notamment en matière de programmes scolaires, ne sont compréhensibles que si on les replace dans la perspective d'une histoire des disciplines. On ne comprend rien au débat sur la dissertation française ou sur les programmes de philosophie, peut-être moins encore sur les programmes d'EPS ou de technologie, si on ne connaît pas l'histoire de ces disciplines. Je pense qu'il serait excellent que les jeunes professeurs soient davantage formés dans ces domaines, afin qu'ils soient un peu moins « innocents » lorsqu'ils participent aux débats publics sur ces questions. Recentrer les missions de recherche des IUFM pourrait être une bonne occasion de leur proposer d'approfondir des questions de ce type. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous en arrivons aux questions.
    Nous commençons par le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le ministre, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention. Vous avez parlé des classes « prépa » d'une façon qui m'a semblé favorable. Ce n'est pas l'objet de ma question mais j'en profite pour évoquer ce sujet, puisque vous m'avez tendu la perche, d'une certaine manière. La ville de Montreuil a signé avec votre ministère au mois de mai dernier un accord important pour la ville, qui prévoit la création de classes « prépa ». Or, il semblerait que vous remettiez en cause l'engagement de votre ministère.
    Mais j'en viens à ma question. Monsieur le ministre, l'institut universitaire de technologie installé à Montreuil et relevant de l'université Paris-VIII connaît depuis plusieurs années déjà un succès grandissant. La qualité des enseignements qui y sont dispensés, l'engagement de la direction et des enseignants - qui constituent, je tiens à le souligner, une équipe tout à fait remarquable de par le choix de leurs options - concourent à cette réussite.
    Cet IUT, doté de deux départements, informatique, d'une part, et organisation et gestion de la production, d'autre part, accueille dans des locaux adaptés près de 200 étudiants titulaires, à parité - ce qui vaut d'être souligné -, de baccalauréats technologiques et de baccalauréats généraux, et avec un taux de réussite à la sortie tout à fait exceptionnel. A ce propos, si vous le souhaitez, c'est avec beaucoup de plaisir que je vous accueillerais à Montreuil pour visiter cet IUT, afin que vous puissiez voir par vous-même comment il fonctionne et discuter avec l'équipe de direction et les enseignants.
    Nous avons travaillé sur les perspectives d'avenir avec le nouveau président de Paris-VIII, M. Lunel, avec la direction de l'IUT, ainsi qu'avec l'ensemble des élus des dix-sept communes du sud de la Seine-Saint-Denis et du nord du Val-de-Marne réunies au sein de l'Association des collectivités territoriales de l'Est parisien, dont la formation est l'un des cinq thèmes prioritaires.
    Nous pensons que l'IUT peut et doit se développer conformément au contrat quadriennal de l'université Paris-VIII, et notamment en s'enrichissant de départements nouveaux, tels que « services et réseaux de communication », ou « gestion de PMI-PME », ce dernier présentant un intérêt particulier du fait de la présence d'un énorme réservoir de PMI-PME dans cette partie d'Ile-de-France que connaît bien celui qui préside ce matin notre séance, n'est-ce pas, monsieur le président ? Notre bassin d'emploi a besoin de ce type de formations. Notre ville comme les villes voisines de notre département et du Val-de-Marne sont en attente d'équipements et de formations de qualité contribuant au développement économique de cette partie de la banlieue. L'IUT a un stock, tenez-vous bien, de 2 000 dossiers de candidature dans les diverses spécialités. La ville de Montreuil met à disposition les terrains nécessaires à l'extension de l'IUT à proximité immédiate de l'actuelle implantation, extension dont nous souhaitons qu'elle soit actée lors de l'examen à mi-parcours du contrat de plan.
    Je souhaiterais, monsieur le ministre, connaître précisément votre position concernant les possibilités concrètes de développement de notre IUT pour les années à venir, avec peut-être la promesse de votre visite.
    Peut-être pourriez-vous aussi me répondre sur la question des classes préparatoires que vous avez vous-même évoquée tout à l'heure. Votre prédécesseur a signé un engagement au mois de mai : nous espérons, en vertu du principe de continuité de l'Etat, que cet engagement sera tenu.
    M. le président. La parole est à M. le ministre, pour répondre à la question de M. Brard, et peut-être à son invitation à venir dans le département de la Seine-Saint-Denis...
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. D'abord, monsieur le député, j'accepte avec beaucoup d'enthousiasme votre invitation.
    Pour ce qui est des engagements signés au mois de mai, il y en a eu beaucoup, et je vous avoue que j'ai parfois quelque difficulté s'agissant des conditions dans lesquelles ces engagements ont été pris.
    M. Jean-Pierre Brard. Nous avons négocié pendant un an et demi !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Je n'en doute pas une seconde, monsieur le député, et je ne reviens en rien, ni sur ces négociations ni sur ces engagements, même datant du mois de mai. Le problème est ailleurs.
    Comme vous l'avez rappelé, lorsque l'IUT de Montreuil a été construit, en 1997, il a été doté de deux départements, un département informatique et un département organisation et gestion de la production. A l'époque, on prévoyait une extension à deux nouveaux départements, ainsi d'ailleurs que la création d'un restaurant universitaire.
    Le directeur de l'IUT défend, évidemment, cette extension et il a probablement d'excellents arguments en sa faveur, arguments que vous avez du reste rappelés, notamment celui du nombre de candidatures concernant les nouveaux départements. Mais il se trouve, et je n'y puis rien, c'est ainsi, que le président de l'université semble être défavorable à cette option, qu'il n'a pas défendue - pas davantage que le recteur - lors de la négociation du contrat de plan Etat-région. En tout cas, vérification faite auprès des services, l'IUT de Montreuil n'a pas déposé de dossier d'ouverture de départements pour la rentrée 2003. Il est hors de question que je puisse répondre, ni de façon favorable ni de façon défavorable, à une demande qui n'a pas été faite.
    Ce que je puis vous dire, c'est que si le président de l'université, le recteur et le directeur de l'IUT se mettent d'accord, j'examinerai le dossier avec beaucoup de bienveillance. Encore faudrait-il qu'il parvienne jusqu'à mon bureau.
    M. Jean-Pierre Brard. Dieu merci, le président de l'université a changé !
    M. le président. Vous avez bien dit : « Dieu merci ! », monsieur Brard ? (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Oui, Dieu merci, et à chacun le sien !
    M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit.
    M. Frédéric Dutoit. Monsieur le ministre, à l'instar de la plupart des secteurs de la fonction publique, l'enseignement supérieur sera confronté jusqu'en 2010 à un phénomène démographique qui devrait aboutir à un mouvement massif de départs en retraite chez les enseignants-chercheurs. Ce phénomène touche près de la moitié des professeurs d'université et plus d'un quart des maîtres de conférences, soit 16 000 enseignants-chercheurs. Si c'est dans le domaine des sciences que les besoins sont les plus importants, l'urgence risque de se faire aussi sentir en lettres, en médecine et en droit.
    Nous avons là une occasion historique d'effectuer un recrutement d'enseignants-chercheurs qui soit à la mesure des besoins de formation de notre jeunesse et à la hauteur des prétentions de notre pays en matière de recherche. N'est-ce pas également l'occasion, monsieur le ministre, de réévaluer à la hausse les salaires d'une profession qui nécessite près de dix années d'études supérieures ? Avec un salaire brut de 1933 euros pour un maître de conférences et de 2 800 euros pour un professeur d'université, il n'est pas étonnant de voir notre matière grise fuir à l'étranger.
    Par ailleurs, plus de la moitié des étudiants n'obtiennent par leur DEUG en deux ans. La nécessité de lutter contre l'échec en premier cycle universitaire résulte, dans un très grand nombre de cas, d'un déficit d'information en amont et du manque d'encadrement en aval.
    A cet égard, vous avez parlé tout à l'heure de l'aide au mérite, que vous disiez préférer à la discrimination positive. Je reprends la balle au bond. Peut-être vous étonnerai-je, monsieur le ministre, en vous disant que je ne suis pas opposé à l'aide au mérite. Je ne vois pas les choses en blanc et noir. Mais il reste que nous devons bien prendre en compte les difficultés matérielles vécues par les étudiants. Et le député des quartiers nord de Marseille que je suis n'en a que trop conscience, quand il voit les jeunes de ces quartiers essayer de s'en sortir comme ils peuvent au prix de beaucoup d'efforts. Croyez-moi, pour parvenir à l'université, ils ont beaucoup de mérite à travailler et ils ont aussi beaucoup de besoins. Au-delà de la philosophie, c'est un débat très intéressant qui nous oppose et qui d'ailleurs explique peut-être nos divergences politiques.
    Encore une fois, vous ne pourrez lutter efficacement contre ce véritable fléau qu'est l'échec en premier cycle si vous faites l'économie d'une véritable politique de recrutement d'enseignant-chercheur. C'est pourquoi nous avons été stupéfaits devant l'annonce de seulement 500 créations de postes d'enseignants-chercheurs, alors que le plan pluriannuel pour l'emploi scientifique adopté par votre prédécesseur en avait prévu 1 000.
    Face à l'abandon d'un tel objectif, pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, si vous comptez mener une politique de sous-effectif dans l'enseignement supérieur ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le député, la réponse à votre question est non. Vous savez, c'est toujours le problème du verre à moitié vide ou à moitié plein. Moi, je me réjouis plutôt - et je puis vous assurer qu'il y a de quoi - que nous soyons en mesure de créer 500 postes d'enseignant dans l'enseignement supérieur, de créer 1 000 postes de moniteur, de créer des allocations de recherche, de mettre à la disposition des universités 200 PRAG. Nous allons donc tout à fait dans le sens inverse de celui que vous craignez, dans le sens inverse du sous-encadrement.
    Les mesures en faveur des enseignants sont extrêmement importantes, et bien ciblées, me semble-t-il, dans le budget 2003. Les crédits augmentent de plus de 30 %, ce qui est quand même considérable. Et je redis, parce que cela me paraît très important, que cet effort inclut les mesures de repyramidage du corps enseignant, qui permettent de réintroduire de la mobilité - et je dirai, de l'espoir - dans les carrières des enseignants.
    Quant au plan étudiant, il est évidemment très important. Quand même, 7 400 bourses de DEA sur des critères sociaux, on ne peut pas dire que ce soit rien. Les allocations de recherche sont revalorisées à hauteur de 5,5 %. Je rappelle aussi ces bourses de mobilité et toutes les autres mesures que j'ai annoncées tout à l'heure, notamment celles concernant le logement étudiant, qui me paraissent témoigner d'un effort considérable en la matière.
    Cela étant dit, sur la question des départs en retraite et des besoins de recrutement qui se manifesteront dans les années qui viennent, de même que j'ai confié, pour l'enseignement scolaire, une mission d'audit à l'inspection générale et à un inspecteur des finances, de même, nous avons confié à l'inspection générale de l'administration une mission d'évaluation des besoins des universités, pour que nous puissions procéder à un ajustement en tenant compte du nombre des départs, des besoins de recrutement, mais aussi de la démographie scolaire ou étudiante. Tout cela avec un souci majeur, sur lequel j'aimerais attirer votre attention - et c'est le même souci qui domine à presque tous les niveaux de notre enseignement, sauf celui du premier degré -, je veux parler du vivier de recrutement. C'est bien joli de dire : il faut recruter, il faut recruter, il faut recruter. Et, dans un certaine mesure, nous sommes d'accord avec vous pour dire cela. Mais le problème, c'est celui du vivier, et par conséquent, celui de la qualité de notre enseignement. Et vous savez bien, monsieur le député, que ce problème est tout à fait réel et que, pour l'instant, il n'est pas véritablement résolu.
    M. le président. Nous en venons aux questions du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    La parole est à M. Yvan Lachaud.
    M. Yvan Lachaud. Monsieur le président, je ne poserai pas pas tout à l'heure ma deuxième question, puisqu'elle concernait l'échec en premier cycle universitaire des bacheliers professionnels et technologiques, et M. le Premier ministre... pardon, M. le ministre y a répondu.
    M. Jean-Pierre Brard. M. Ferry n'est encore que ministre, mais cela viendra ! (Sourires.)
    M. Yvan Lachaud. Si c'est votre souhait, monsieur Brard, qu'il soit exaucé, puisque vous nous parliez de Dieu tout à l'heure. (Rires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Mais attention : il ne sera exaucé qu'après la confession !
    M. Yvan Lachaud. Ma question porte sur la baisse des vocations scientifiques. Celle-ci, monsieur le ministre, est particulièrement préoccupante dans le premier cycle universitaire. Elle ne cesse de s'accentuer depuis dix ans, et ce phénomène, commun à l'ensemble des pays européens, revêt une forme particulièrement aiguë en France : on note actuellement une baisse de 20 % à 25 % des effectifs.
    La lutte contre la désaffection qui touche ces filières scientifiques fait partie, je le sais, de vos priorités mais demeure bien difficile à mettre en oeuvre, notamment dans le domaine pédagogique. Comment comptez-vous, monsieur le ministre, enrayer cette chute sensible des vocations, qui demain posera problème pour notre pays ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur Lachaud, ce problème est en effet réel, et très préoccupant, d'autant plus que la baisse des effectifs d'étudiants dans les filières scientifiques des DEUG n'est pas compensée par l'augmentation du nombre des étudiants en IUT, dans des filières technologiques supérieures ou même en classe préparatoire.
    Quand on regarde les choses de plus près, on s'aperçoit que ce problème touche tous les pays occidentaux et que, contrairement à ce qu'on pourrait imaginer, il n'est pas directement lié à la question de l'attractivité, notamment financière, des carrières scientifiques. En Allemagne et au Canada, où, disons-le franchement, les carrières scientifiques, notamment celles de chercheur, s'effectuent dans des conditions financières et matérielles plus agréables et plus valorisantes qu'en France, la baisse des vocations scientifiques est paradoxalement plus forte que chez nous. C'est dans ces deux pays qu'elle est la plus importante.
    Ce phénomène me semble en grande partie lié à des causes qui sont d'ailleurs un peu les mêmes que celles de l'illettrisme, à savoir la dégradation des notions d'effort et de travail qui caractérise globalement notre enseignement depuis une trentaine d'années. De plus, l'enseignement scientifique a ceci de particulier que non seulement son assimilation demande un gros effort de travail, mais en outre il ne relève pas de l'expression de soi, ne laisse pas place à la spontanéité, à la créativité : durant toute une période d'apprentissage, il est plutôt question d'absorption, de compréhension, d'effort que de discussion ou d'expression de soi.
    A cela s'ajoute probablement l'image négative de la science dans la cité puisque, contrairement au xviiie siècle, elle est aujourd'hui davantage associée à la notion de risque qu'à celle de progrès.
    Pour remédier à cette situation, des mesures très énergiques sont nécessaires, auxquelles nous travaillons actuellement, et que nous commençons déjà à mettre en oeuvre. A l'école primaire, des démarches comme celle de « La main à la pâte » sont particulièrement intéressantes. Mais nous allons aussi, dans les lycées, offrir aux élèves et aux professeurs la possibilité, par exemple, de visiter les laboratoires scientifiques. Et dans les premiers cycles universitaires, je compte bien, dans les fameux cours de culture générale que j'évoquais tout à l'heure, faire une part très importante à l'histoire des sciences, notamment à l'histoire moderne des sciences, ce qui permettrait de donner de la science dans la cité une autre image que celle d'une discipline associée à la notion de risque.
    M. le président. La parole est à M. René-Paul Victoria.
    M. René-Paul Victoria. Monsieur le ministre, dans le prolongement de mon intervention, permettez-moi d'appeler votre attention sur la délicate question de l'avenir du personnel enseignant-chercheur et du personnel non enseignant de l'université de la Réunion. Un constat alarmant dans ce domaine a été dressé par le Comité national d'évaluation, qui était à la Réunion en mars dernier. Ainsi, nous avons un déficit de 182 postes d'enseignant-chercheur avec 355 titulaires, c'est-à-dire que nous atteignons à peine 70 % de la moyenne nationale. Par ailleurs, pour les personnels IATOSS, le déficit en postes est de 60, pour 245 titulaires, soit un taux de couverture qui atteint à peine 80 % de la moyenne nationale.
    C'est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaiterais savoir quelles mesures vous entendez mettre en oeuvre pour éviter une dégradation des conditions d'encadrement des étudiants, et si vous envisagez la mise en place d'un plan de rattrapage pluriannuel afin de combler l'écart qui nous sépare des universités métropolitaines.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur Victoria, vous avez malheureusement raison. Le constat que vous faites ne peut être contesté, s'agissant d'une situation que j'hérite et que je n'ai pas créée. La Réunion connaît en effet un déficit par rapport à la moyenne nationale. Cela étant dit, je voudrais quand même vous rappeler que ce déficit de 182 postes d'enseignant-chercheur ne signifie pas que les enseignements ne sont pas assurés. Ils le sont de façon contractuelle au lieu de l'être par des titulaires. D'autre part, des mesures importantes de réévaluation ont été prises ces dernières années - et c'est d'ailleurs un mérite qui, lui non plus, ne peut pas m'être attribué. C'est ainsi qu'a été décidée une augmentation de plus de 20 % de la dotation de fonctionnement en 2002, ainsi que la création de près de 100 emplois d'enseignants et de personnels IATOSS au cours des quatre dernières années.
    Mais c'est encore insuffisant, j'en conviens avec vous. C'est pourquoi, sur l'exercice 2003, nous proposons de monter le ratio à 0,8, ce qui est considéré comme un minimum permettant de fonctionner convenablement. On entre ainsi dans une zone de chiffres qui commence à être convenable même si c'est encore insuffisant.
    Par ailleurs, je vous propose, monsieur le député, que nous nous rencontrions, si vous le voulez bien, pour que nous voyions ensemble comment nous pouvons, dans les années qui viennent, et si possible dans les mois qui viennent, améliorer encore ce chiffre qui est déjà en progression par rapport à l'année dernière, mais dont je conviens, encore une fois, qu'il n'est toujours pas suffisant. Nous pourrons ainsi envisager ensemble les mesures de rattrapage qui sont en effet nécessaires pour les années qui viennent.
    M. le président. Nous en avons terminé avec les questions.

JEUNESSE, ÉDUCATION NATIONALE
ET RECHERCHE
II. - Enseignement supérieur

    M. le président. J'appelle les crédits inscrits à la ligne « Jeunesse, éducation nationale et recherche » : « II. - Enseignement supérieur ».

ÉTAT B
Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires
des services civils (mesures nouvelles)

    « Titre III : 79 812 601 euros ;
    « Titre IV : moins 5 542 653 euros. »

ÉTAT C

Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE V. - INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programmes : 183 878 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 18 139 000 euros. »

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT
ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programme : 732 157 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 411 491 000 euros. »
    M. le président. Les amendements n°s 143 et 142 de M. Goulard ne sont pas défendus.
    Je mets aux voix le titre III.
    (Le titre III est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix la réduction de crédits du titre IV.
    (La réduction de crédits est adoptée.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)
    M. le président. Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, concernant l'enseignement supérieur.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à onze heures vingt, est reprise à onze heures trente-cinq.)
    M. le président. La séance est reprise.

PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES,
COMMERCE ET ARTISANAT,
PROFESSIONS LIBÉRALES ET CONSOMMATION

    M. le président. Nous abordons l'examen des crédits du secrétariat d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
    La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, mes chers collègues, la modestie du budget du commerce et de l'artisanat tranche avec l'importance économique des petites et moyennes entreprises. Celles-ci, rappelons-le, représentent 99,8 % des entreprises françaises, emploient 65 % des actifs et réalisent 53 % de la valeur ajoutée de l'ensemble des entreprises non agricoles.
    Ce contraste explique que l'activité ou la santé de ces entreprises dépendent davantage de la conjoncture économique générale et de la politique du Gouvernement en matière fiscale ou sociale que des actions menées par le secrétariat d'Etat, quel que soit leur intérêt par ailleurs.
    Avant d'aborder les crédits demandés pour 2003, il n'est pas inutile de s'attarder sur la structure et la présentation du budget lui-même.
    Le budget pour 2003 marque une modification majeure, avec la budgétisation d'un certain nombre de dépenses financées auparavant de manière extra-budgétaire par prélèvement sur les excédents de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, la TACA. Cette budgétisation concerne le FISAC, le Fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce, le Comité professionnel de la distribution des carburants ainsi que l'aide au départ des commerçants et artisans.
    La commission des finances serait malvenue de contester la budgétisation de telles dépenses, surtout quand leur montant dépassait, les années précédentes, sensiblement celui du budget lui-même.
    La budgétisation du FISAC était réclamée depuis longtemps par la Cour des comptes mais la budgétisation au travers d'un compte d'affectation spéciale qu'elle proposait n'est plus aujourd'hui conforme à la logique de la nouvelle loi organique, qui entend limiter le nombre de ces comptes. Dès lors, l'inscription dans le budget général des crédits relatifs aux actions antérieurement financées par une partie du produit de la TACA apparaît légitime. Elle est de nature à renforcer l'information du Parlement, donc son pouvoir de contrôle. En effet, le prélèvement opéré au profit du FISAC intervenait par arrêté pris après la discussion de la loi de finances et son montant n'était pas toujours communiqué au moment de celle-ci.
    Dans la mesure où ces dépenses sont désormais inscrites au budget général, il est inévitable que le produit de la taxe qui servait à les financer le soit également. C'est l'objet de l'article 15 du projet de loi de finances.
    Cependant, la comparaison entre le produit de la taxe - 223 millions d'euros attendus en 2003 - et le montant des nouveaux crédits inscrits - 126 millions d'euros - a suscité des mouvements divers. Des voix se sont fait entendre pour estimer que cette taxe, comme l'indique son intitulé depuis 1994, était destinée à aider le commerce et l'artisanat et que son produit « appartenait », en quelque sorte, à ces secteurs.
    La commission des finances ne partage pas cette appréciation. En effet, historiquement, la taxe a été créée par la loi Royer de 1972 pour financer l'indemnité de départ des commerçants et artisans. C'était donc une recette affectée. C'est le contraste entre une recette très dynamique - le produit de la TACA a augmenté de 142 % entre 1991 et 2001 - et un montant d'aides en recul constant depuis de nombreuses années - moins 39 % entre 1991 et 2001 - qui explique que de multiples prélèvements, certains récurrents, d'autres exceptionnels, ont été effectués au fil des années sur l'excédent de recettes de la TACA. D'ailleurs, la persistance d'un important solde positif à la fin de 2002, alors que la loi de finances de 2002 avait déjà opéré un prélèvement au profit de l'Etat de 105 millions d'euros, montre qu'il n'y a jamais eu de lien direct entre le rendement de la taxe et le montant des dépenses concernant le commerce et l'artisanat financées par elle.
    Si donc certains acteurs de ce secteur professionnel auraient souhaité une augmentation des crédits affectés, je ne suis pas convaincu qu'il existe suffisamment de projets ou d'actions réellement utiles et efficaces concernant le commerce et l'artisanat, qui ne trouvent pas aujourd'hui de financements et qui justifieraient l'inscription de ces crédits budgétaires supplémentaires. Cependant, je comprends les craintes, pour l'avenir, suscitées par cette budgétisation. Le Premier ministre s'est engagé à veiller à ce que les crédits destinés au FISAC connaissent une évolution favorable au cours des prochaines années. La commission des finances et - j'en suis sûr - l'ensemble de notre assemblée seront particulièrement attentifs au respect de cet engagement.
    Je voudrais dire quelques mots rapides de la présentation du budget et de son agrégat 25. Cette présentation n'apparaît pas très satisfaisante et ne permet pas d'avoir une vision exhaustive des moyens consacrés aux PME. D'une part, l'agrégat ne rassemble pas l'ensemble des fonds de garantie gérés par la SOFARIS, dont la mission est pourtant de faciliter l'accès des PME au financement bien que certains de ces fonds de garantie soient fondus en gestion. D'autre part, la logique de la loi organique du 1er août 2001 condamne l'existence d'un programme uniquement consacré à l'administration centrale du ministère. Dès lors, les crédits relatifs à la DECAS et aux délégués régionaux au commmerce et à l'artisanat devraient logiquement être intégrés à l'agrégat 25. La question peut également être posée pour d'autres structures administratives mises à la disposition du secrétaire d'Etat, même si certaines d'entre elles relèvent aussi des attributions d'autres ministres comme celui de l'industrie.
    Par ailleurs, dans la perspective de la mise en oeuvre de la nouvelle loi organique, il faudra que les outils d'évaluation figurant dans les documents budgétaires soient améliorés. Les cinq indicateurs présentés actuellement sont plus des indicateurs mesurant l'activité de vos services et de leurs partenaires qu'une véritable évaluation des résultats des politiques menées. Or, en l'absence d'une telle évaluation, on peut craindre que ces politiques ne soient, dans une trop large mesure, que la reconduite pure et simple d'actions, du fait du poids des habitudes ou du souci de pérenniser les structures en place. Mais cela fera, je l'espère, l'objet d'une analyse plus approfondie en 2003 afin de préparer le projet de budget pour 2004 dans le cadre de la réforme souhaitable de l'Etat. J'y reviendrai à la fin de mon rapport.
    Venons-en maintenant aux crédits pour 2003. Ils s'élèveront à 183,9 millions d'euros, au lieu de 61 millions d'euros environ en 2002. Ce triplement n'est pour l'essentiel qu'apparent. Il résulte, en effet, des conséquences de la budgétisation de la TACA. Si l'on reconstruit le budget de 2002 dans les nouvelles structures de 2003, les crédits disponibles passent de 181,1 millions d'euros à 183,9 millions d'euros, soit une augmentation de 1,6 %. Ces crédits financent quatre grandes catégories d'actions : les aides à la formation - 8 % du budget -, les actions économiques et l'amélioration de la compétitivité des PME - 56 % -, l'accès au crédit - 12 % - et le versement de l'aide au départ - 24 %.
    En ce qui concerne l'aide à la formation, les crédits diminueront de 1 million d'euros, pour s'établir à 14,3 millions d'euros. Cette réduction ne devrait compromettre aucune action essentielle dans la mesure où vos services ont su mobiliser des financements complémentaires à ceux de l'Etat. Je voudrais particulièrement insister sur la nécessité de valoriser et de développer l'apprentissage. Ce n'est pas seulement une question de crédits. Il convient, en effet, de mener une politique spécifique auprès de tous ceux qui jouent un rôle dans l'orientation des jeunes : leurs parents, les enseignants ou les éducateurs sociaux. Je souhaiterais donc que toutes les actions de sensibilisation, notamment celles menées en milieu scolaire, ne pâtissent pas de la rigeur budgétaire.
    Les actions économiques et l'amélioration de la compétitivité des PME bénéficieront de 102,5 millions d'euros de crédits en 2003. Le projet de budget pour 2003 prévoit des réductions de crédits, notamment en ce qui concerne les conventions de développement économique conclues avec les chambres de métiers ou les organisations professionnelles et les pôles d'innovations technologiques. Cependant, les crédits budgétaires continueront à être abondés en gestion par des transferts en provenance du FISAC, qui bénéficie, pour sa part, d'une mesure nouvelle de 3,9 millions d'euros, conformément à ce qu'avait annoncé M. le Premier ministre au congrès de l'UPA.
    A ce propos, je comprends le souci qui a conduit le Gouvernement à choisir une présentation qui a le mérite d'être plus lisible et de contribuer à rassurer ceux qui auraient pu craindre que la budgétisation du FISAC ne s'accompagne d'une réduction des crédits. Néanmoins, il nous semble opportun que la présentation des crédits soit clarifiée dès la prochaine loi de finances, afin que les dotations soient inscrites aux articles sur lesquels elles seront effectivement consommées.
    Les crédits consacrés aux contrats de plan Etat-régions inscrits au titre IV connaissent une augmentation sensible. Il s'agit d'un rattrapage indispensable, trop modeste cependant pour combler le retard pris dans le rythme de budgétisation des engagements de l'Etat qui s'élèvent à 94,5 millions d'euros sur sept ans. La mise en oeuvre des contrats de plan est, en outre, rendue également difficile par les mesures de régulation budgétaire imposées par la direction du budget. Les engagements de l'Etat doivent être tenus, c'est la moindre des choses, et cette obligation exigera, dans les prochains budgets, un effort particulier. Cependant, sans doute faudra-t-il, à l'avenir, se demander si la procédure du contrat de plan est bien adaptée et conserve une réelle signification pour des actions de cette nature.
    Je ne m'appesantirai pas sur les crédits consacrés au Comité professionnel de la distribution de carburants, dont le montant est identique à celui de 2002, ou sur ceux consacrés à l'aide au départ, fixés à un niveau légèrement supérieur à la dépense constatée en 2001 et attendue pour 2002.
    Enfin, la politique substituant à la bonification d'intérêt des mécanismes de garantie des emprunts des très petites entreprises est poursuivie. Cette approche, qui est bonne, est aussi budgétairement neutre, puisque les crédits « libérés » par l'abandon de la politique de bonification sont intégralement recyclés au profit du nouveau mécanisme de garantie. Ainsi, les crédits globaux consacrés à la politique d'accès au crédit sont maintenus à 22,1 millions d'euros.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, nous sommes tout à fait conscients que la préparation de cette loi de finances est arrivée trop tôt pour que le nouveau gouvernement puisse réellement mettre en mouvement les réformes nécessaires dans ce secteur et les faire apparaître déjà dans le budget. Plusieurs chantiers vont être ouverts en 2003 et vous avez d'ailleurs annoncé plusieurs projets de loi, dont celui, très important, qui porte déjà votre nom.
    Le premier de ces chantiers est la clarification indispensable du paysage institutionnel, dans l'esprit de la simplification souhaitable de l'ensemble de notre administration publique. Je suis particulièrement frappé du foisonnement des structures qui interviennent, à un titre ou à un autre, au profit du commerce et de l'artisanat, et plus généralement des très petites, des petites ou des moyennes entreprises. Elles sont plusieurs centaines intervenant côte à côte, multipliant les financements croisés à l'infini, alourdissant le travail des administrations nationales ou locales et celui des entreprises. Il y a là un énorme gisement d'économies et de simplification potentielles.
    Cette clarification est d'abord nécessaire pour les structures ministérielles. Une réorganisation ou une rectification de frontières entre certaines des directions du ministère de l'éconmie, des finances et de l'industrie, touchant au développement des PME ou à la défense des consommateurs, pourrait utilement être entreprise. De même, le secrétariat d'Etat pourrait voir ses compétences renforcées et devenir, de la sorte, un ministère à part entière, compte tenu de son importance dans l'économie.
    M. Michel Herbillon. Voilà !
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. La politique en faveur du secteur du tourisme, après qu'une large partie a été décentralisée, pourrait ainsi lui être rattachée tant les caractéristiques des entreprises de ce secteur, que je connais bien, et les problèmes auxquels elles sont confrontées - je pense à la TVA sur la restauration, dont j'espère que le taux pourra prochainement être réduit - sont analogues à ceux des entreprises commerciales ou artisanales.
    Il convient, par ailleurs, de s'attacher à approfondir la déconcentration et la décentralisation. L'exemple du FISAC est, à cet égard, éloquent. Il apparaît pour le moins surprenant que le moindre dossier d'une modeste opération dans une petite commune rurale soit obligatoirement traité au niveau de l'administration centrale de votre secrétariat d'Etat. La régionalisation du FISAC doit donc être mise à l'étude, tout en veillant à ce que la nécessaire clé de répartition des dotations régionales ne soit pas sophistiquée à l'excès. Dans le même esprit, les délégués régionaux du commerce, de l'artisanat et, compte tenu de ce que je viens de dire, peut-être aussi du tourisme, pourraient être mis à la disposition des régions. J'espère que l'année 2003 permettra de procéder aux audits nécessaires à ces réorganisations. La commission des finances sera particulièrement vigilante quant aux économies qui en résulteront dans les prochaines lois de finances.
    De même, la tutelle de l'Etat sur les chambres consulaires devra être revue. Depuis de nombreuses années, la nécessité d'une réforme des chambres de commerce et d'industrie, pour laquelle vous avez à juste titre ajusté les modes de financement, est évoquée et reconnue. Le Conseil économique et social a adopté un avis sur ce dossier et les chambres elles-mêmes ont présenté des propositions cohérentes qui méritent d'être étudiées. La clarification des missions respectives de l'Etat et des chambres consulaires, qui sont pour le moment des établissements publics sous tutelle de l'Etat, mais qui ont des fonctions locales souvent similaires à celles des collectivités locales justifiant ainsi un contrôle a posteriori plutôt qu'a priori, serait la bienvenue. De même, des mesures fiscales destinées à favoriser la réorganisation territoriale des chambres sont nécessaires.
    Toujours au chapitre institutionnel, je suis convaincu que l'on ne pourra éviter de revoir le dispositif des commissions départementales et de la commission nationale d'équipement commercial, car leur fonctionnement actuel relève plus du théâtre d'ombres et du jeu de rôles que d'une véritable réflexion prospective. Là encore, une décentralisation des décisions, qui devraient être plus cohérentes avec la réflexion menée au plan local sur le développement territorial, rendrait probablement inutile l'existence de la commission nationale.
    S'agissant des politiques menées, la commission des finances est convaincue que l'incitation fiscale est beaucoup plus efficace que la subvention budgétaire classique. Cette conviction doit, à l'avenir, guider tous les aspects de la politique menée à l'égard des petites et moyennes entreprises, et notamment des plus petites d'entre elles. A ce sujet, les orientations du futur projet de loi sur l'initiative économique ouvrent des pistes de réflexion intéressantes.
    Il est clair que l'encouragement à la création d'entreprise passe par des solutions au problème majeur du financement. Le soutien budgétaire à des mécanismes publics ou para-publics de garantie obtient des résultats non négligeables. Cependant, dans le prolongement des lois Madelin, les incitations fiscales annoncées en faveur de la mobilisation de l'épargne de proximité et celles visant à faciliter les transmissions d'entreprises sont plus riches de promesses encore. De même, l'encouragement et la facilitation de la transmission et de la reprise d'entreprise ont été largement laissés en jachère ces dernières années, alors que les reprises en particulier se révèlent souvent plus onéreuses et que, dans le cas particulier des salariés auxquels l'employeur propose de prendre la suite, elles sont le fait de personnes qui sont souvent le moins préparées financièrement.
    On le voit, les dossiers à ouvrir sont vastes et les pistes de réforme nombreuses. Mais les solutions qui seront apportées, après naturellement toute la réflexion et la concertation nécessaires, auront un « rendement », en matière de croissance et d'aménagement du territoire, sans commune mesure avec les ajustements qui pourraient être apportés au budget particulièrement modeste cette année de votre secrétariat d'Etat. Cette modestie n'a pas empêché la commission des finances d'adopter les crédits du secrétariat d'Etat aux petites et moyennes entreprises au commerce et à l'artisanat pour 2003. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
    M. Serge Poignant, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, tout d'abord, je voudrais dire combien je suis ravi d'être le rapporteur pour avis du premier budget des PME, du commerce et de l'artisanat de cette nouvelle législature.
    Les PME, l'artisanat et le petit commerce constituent les sources essentielles de l'emploi et de la création de richesses dans notre économie. Leur santé est le meilleur gage d'un bon aménagement de notre territoire. Il faut le dire et le répéter. Le seul secteur de l'artisanat, que le Premier ministre qualifie de première entreprise de France, emploie 2,3 millions de personnes tandis que les PME de moins de vingt salariés représentent 97 % des entreprises métropolitaines, contribuent pour 27 % à la valeur ajoutée et regroupent 37 % de l'emploi salarié. En outre, alors que les grandes entreprises ont réduit leurs effectifs de 2 % entre 1993 et 1999, l'emploi dans les PME a progressé de 9 %. Le soutien aux PME, aux artisans et aux commerçants est donc un enjeu essentiel. La vitalité des PME est indispensable à la vitalité économique globale de notre pays et je me félicite que le gouvernement actuel ait annoncé clairement son intention d'apporter tout son soutien à cette économie, qualifiée à juste titre d'« humaniste » par le Premier ministre, que représentent les petites entreprises.
    Votre projet de budget, monsieur le secrétaire d'Etat, est à replacer dans le contexte général du budget de l'Etat et dans celui des textes de loi qui ont déjà été adoptés. Je pense bien évidemment à l'assouplissement des 35 heures, indispensable pour nos petites entreprises, et aux mesures fiscales qui auront un effet direct sur l'emploi : diminution des charges des entreprises dans le cadre de l'unification progressive du SMIC, exonération des charges sur les bas salaires, exonération des charges des contrats-jeunes en entreprise, suppression de la part salariale dans le calcul de la taxe professionnelle, aménagement de la prime pour l'emploi pour les travailleurs à temps partiel, relèvement du plafond de la réduction d'impôt pour les emplois à domicile. Dans le contexte actuel, il est bon de rappeler ces mesures.
    D'autres dispositions ont une incidence sur la consommation et sur l'activité : poursuite et consolidation de la baisse de l'impôt sur le revenu, allégement de la taxe professionnelle pour les professions libérales, qui a toujours été refusé au cours des cinq dernières années par le précédent gouvernement, et prorogation du taux réduit de TVA pour le bâtiment, le Gouvernement s'efforçant d'aboutir en 2003 sur la question de la TVA à 5,5 % pour la restauration et j'espère qu'il y parviendra.
    Nous le voyons, mes chers collègues, la volonté du Gouvernement est clairement définie : créer les conditions d'une croissance forte et durable afin de développer l'emploi et d'encourager l'initiative économique.
    Malgré la conjoncture difficile, vos propres crédits, monsieur le secrétaire d'Etat, s'inscrivent dans ce contexte volontariste et de confiance retrouvée, même s'ils sont limités en volume. Certes, à périmètre constant je ne puis que constater une baisse de 5,1 % du budget de votre secrétariat d'Etat, s'élevant à 57,87 millions d'euros en dépenses ordinaires et crédits de paiement. Mais cette baisse s'explique en partie par l'arrêt de certaines actions comme l'aide au passage à l'euro ou à l'établissement de l'ARTT.
    Une analyse fine des lignes budgétaires permet de constater que, si certains postes sont en baisse, d'autres sont globalement stables ou en augmentation comme les contrats de plan Etat-régions, qui bénéficient d'une enveloppe accrue de plus de 23 %, soit 8,5 millions d'euros. La nouvelle génération de contrats de plan intègre l'ensemble des actions qui concourent au développement des entreprises, à savoir la formation, l'accès au financement, le conseil et le soutien à l'investissement.
    Pour ce qui est de la budgétisation de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat - TACA -, les organisations professionnelles ont manifesté leur inquiétude quant à la bonne ou complète utilisation de cette taxe. Lors de votre audition devant la commission des affaires économiques, la semaine passée, vous nous avez indiqué que les obligations de la loi organique sur les lois de finances, c'est-à-dire la suppression des taxes parafiscales à la suite du rapport de la Cour des comptes, avaient entraîné la budgétisation du produit de la TACA et auraient pour conséquence d'intégrer le FISAC - ce fonds d'indemnisation pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce, qui jusqu'alors était un outil extrabudgétaire du secrétariat d'Etat - dans les crédits du ministère des finances.
    Sur les 223 millions d'euros de recettes de cette TACA, 126 millions d'euros sont prévus pour financer le FISAC, le Comité professionnel de la distribution du carburant et les aides au départ. Je ne vous étonnerai pas, monsieur le secrétaire d'Etat, en vous disant que, si besoin était, il vous faudrait pouvoir compter sur tout ou partie de la différence, et je m'adresse en cela au ministère de l'économie et des finances.
    Les crédits du FISAC sont en augmentation de 5,8 % par rapport à l'année passée, passant de 67 millions d'euros à 71 millions d'euros, et je m'en réjouis. M. le Premier ministre s'est engagé à veiller à la meilleure et complète utilisation de ces crédits du FISAC lors du congrès de l'UPA, et je voudrais que vous puissiez à nouveau rassurer la représentation nationale sur ce point.
    Votre annonce en commission, monsieur le secrétaire d'Etat, d'actions nouvelles telles que le relèvement du seuil de subvention de ce fonds à 30 % pour les communes rurales, ou les programmes d'aide à la sécurisation des commerces ou de soutien aux commerces de bouche en voie de disparition dans de nombreuses communes, a été accueillie très favorablement. Ces commerces sont la base de la vie de nos territoires.
    Votre annonce d'un projet de circulaire sur la loi Galland et les relations entre producteurs et distributeurs a également été appréciée, car une telle circulaire est nécessaire. Votre décision de revalorisation du droit fixe de la taxe pour frais de chambres de métiers et de l'IATP, imposition additionnelle, permettra aux organisations consulaires de soutenir davantage leurs adhérents.
    Monsieur le ministre, vous allez prendre toute votre part dans la réflexion et l'expérimentation des lois de décentralisation. La décentralisation ne peut être que l'affaire de l'Etat et des élus locaux, la société civile doit y prendre toute sa part et le monde de l'entreprise, de l'artisanat et du commerce aussi car il participe au tissu local et au développement de nos territoires.
    Vous avez déjà donné des orientations. Vous avez envisagé l'expérimentation de la décentralisation des fonds du FISAC, par exemple, ou tout au moins d'une partie de ces fonds près des régions, avec participation de ces dernières. Cette proposition me paraît tout à fait répondre aux objectifs d'efficacité qu'il nous faut atteindre.
    Monsieur le ministre, l'année 2003 sera une année importante pour le soutien aux entreprises puisque vous avez annoncé trois textes de loi. En janvier prochain, il y aura le projet de loi intitulé « Agir pour l'initiative économique » qui traitera de la création, du développement et de la transmission de l'entreprise. Un projet d'ordonnance de simplification administrative est également en préparation. Enfin, un projet de loi sur le statut de l'entrepreneur, dont nous avons déjà discuté à maintes reprises l'année passée mais qui n'a pas abouti pour les raisons que nous connaissons, interviendra fin 2003.
    Outre ces textes fondamentaux et très attendus, permettez moi d'insister, monsieur le ministre, sur le fait qu'il convient de prévoir le renforcement très substanciel du dispositif de formation. A partir de 2005, en effet, le phénomène du « papy boom » provoquera un véritable séisme dans notre pays.
    C'est ainsi que, chaque année, 850 000 personnes qualifiées partiront à la retraite alors qu'à peine 650 000 jeunes peu formés entreront sur le marché du travail. La pénurie de main-d'oeuvre se fait déjà sentir pour des métiers qualifiés dans l'artisanat parce que l'apprentissage ne jouit plus de l'attractivité qui a pu être la sienne dans le passé. Les professionnels ressentent fortement le manque d'attractivité de leurs métiers auprès des jeunes et s'en inquiètent fort justement.
    Il faut donc bâtir un dispositif renforcé pour permettre la formation des jeunes mais aussi la formation tout au long de la vie, car les salariés des PME n'ont pas le même accès à la formation que ceux des grandes entreprises.
    Certes, le Gouvernement s'est engagé à augmenter les contrats de formation en alternance, à développer l'apprentissage et les contrats de qualification mais ce n'est pas suffisant et beaucoup reste à faire. C'est un des défis majeurs qu'il nous faut relever.
    En conclusion, je veux souligner que la mobilisation du Gouvernement est fortement ressentie par les professionnels. Tous les éléments présentés par vous, monsieur le secrétaire d'Etat, par M. le ministre de l'emploi et par M. le Premier ministre, répondent aux attentes du monde de l'entreprise. Au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire et dans ce contexte de mesures votées et de projet, je vous propose, mes chers collègues, d'adopter les crédits pour 2003 du secrétariat d'Etat aux PME, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Pour connaître votre détermination, je ne doute pas, monsieur le secrétaire d'Etat que vous saurez les utiliser avec efficacité et pertinence. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Charié, premier orateur inscrit.
    M. Jean-Paul Charié. Compte tenu de la qualité des interventions des deux rapporteurs et dans l'attente des informations que vous allez sans doute nous communiquer sur les projets de loi à venir, je concentrerai mon propos, monsieur le secrétaire d'Etat, sur un sujet que je connais particulièrement bien, comme vous le savez : le droit de la concurrence. En préalable, je tiens à remercier le rapporteur de la commission des affaires économiques d'avoir su si bien reprendre la place que j'ai occupée pendant longtemps.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, le groupe UMP votera ce budget parce qu'il est honnête et loyal, et parce que, comme je le répète depuis une quinzaine d'années, et comme vous le dites vous-même, on mesure la qualité d'une politique gouvernementale en faveur des PME et du commerce non pas à l'aune du budget de ce ministère, mais à la qualité de son ministre, de son administration et de ses projets. Je ferai toutefois observer que nous ne sommes pas forcément d'accord sur l'interprétation de M. le rapporteur de la commission des finances s'agissant de la TACA. M. le Premier ministre a très clairement déclaré lors de l'assemblée générale de l'UPA que la totalité du produit de cette taxe devait être afffectée au commerce et à l'artisanat si cela s'avérerait nécessaire.
    M. Jean-Marc Nudant. C'est vrai !
    M. Jean-Paul Charié. En tout état de cause, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'elle que soit la qualité de l'action du Gouvernement en faveur des PME, les résultats risquent d'être vains si ces dernières continuent d'être les otages financiers et humains des grandes surfaces et des grandes entreprises. Vous voulez favoriser la création d'entreprises et assurer leur pérennité. Pour cela, vous allez alléger les charges sociales et fiscales et créer un environnement administratif particulièrement favorable. Mais si nous continuons à accepter un système qui fait que, lorsque le fournisseur facture 100, il est obligé de redonner jusqu'à 55 à son client, nous continuerons à assister à des dépôts de bilan et à des licenciements, et à voir des entreprises, reconnues pourtant dans le monde entier pour leur compétence et leur savoir-faire, disparaître. Votre politique sera donc vaine. Ce sont les pratiques commerciales qu'il faut changer.
    En effet, il faut savoir qu'aujourd'hui, on est obligé de payer quand on est fournisseur. Il faut payer pour être référencé, pour être dans les rayons, pour que son produit soit revendu. On est même obligé, nous l'avons prouvé au cours de la précédente législature, de payer pour être payé ! Une note de la DGCCRF, que je tiens à saluer et dont je ne suis pas sûr qu'il faille diminuer le nombre de fonctionnaires au moment où il faut faire appliquer la loi, montre très bien comment on ponctionne les fournisseurs par absence de contrat, que les factures sont de fausses factures parce qu'il n'y a pas de dénomination. On facture ainsi des millions d'euros pour des têtes de gondole sans dire quel sera le produit concerné ni la date à laquelle aura lieu l'événement. Bien qu'elle soit désormais interdite, des distributeurs sollicitent toujours la prime de référencement.
    Autrement dit, avant même d'avoir obtenu la première commande, on est obligé de payer les grandes surfaces. Les fournisseurs vivent sous la menace de rupture. Des prestations fictives sont toujours perçues. Le client en vient à facturer au fournisseur deux prestations complètement opposées. Comment qualifier ces pratiques, monsieur le secrétaire d'Etat ? Pour moi, ces fausses factures, cette fausse coopération commerciale, c'est de l'arnaque. Une économie d'esclavage en somme ! Jusqu'en 1986, l'économie était administrée par les pouvoirs politiques avec le contrôle des prix. Nous avons voulu la libérer, mais force est de constater que notre économie est aujourd'hui administrée par les puissances financières et que ce n'est pas mieux.
    Chacun doit savoir que les marges arrière peuvent représenter jusqu'à 55 %. Quand, le premier, je les avais dénoncées, on m'avait expliqué que ce n'était pas vrai. A présent, les distributeurs eux-mêmes reconnaissent leur existence et admettent de surcroît qu'elles peuvent atteindre jusqu'à 55 % ! - 55 % - quand les marges d'exploitation des petites entreprises sont parfois de 1 ou 2 % ! Il ne faut donc pas s'étonner que les prix aient augmenté et que des économies aient été faites sur la qualité sanitaire et la sécurité de certains produits.
    Outre les marges arrière, il existe des clauses scandaleuses dans les conditions générales d'achat. Ainsi, si pour une raison ou une autre, votre camion arrive avec cinq minutes de retard, vous risquez, tenez-vous bien, une pénalité de 32 % maximum. C'est le tarif pour le retard de livraison. Ceux qui refusent aux politiques le droit de les sanctionner ne se privent pas pour sanctionner leurs partenaires !
    De la même façon, il existe des sanctions pour annulation de livraison. Si, pour une raison ou une autre, votre propre fournisseur a rencontré un problème dans sa chaîne de fabrication, la centrale d'achat peut vous imposer une pénalité de 60 % !
    Je pourrais citer encore d'autres exemples. Nous avons d'ailleurs rendu quantité de rapports sur ce thème, et vos services sont tout à fait compétents pour prouver, sous votre impulsion peut-être, que ces méthodes que nous dénonçons depuis des années sont tout ce qu'il y a de plus vrai et s'amplifient même de manière particulièrement alarmante. Elles sont ainsi en vigueur dans les rapports fournisseurs-grande distribution, mais nous les retrouvons aussi, malheureusement, dans le secteur du bâtiment et des travaux publics et dans le secteur bancaire. En fait, une véritable culture de cette pratique est en train de se développer en France, et uniquement - et c'est le comble ! - entre entreprises françaises. En effet, on ne traite pas ses fournisseurs étrangers de la même façon.
    Les agriculteurs, dont les exploitations constituent aussi des petites et moyennes entreprises, sont également concernés par ces pratiques commerciales. Prenons un exemple : un producteur de porc vend, en moyenne, le kilo de longe à 7,54 francs, soit moins que le prix de revient ; l'abattoir livre empaqueté et étiqueté ce produit à 11,35 francs à la grande surface, qui le facturera 30,04 francs aux consommateurs. Il y a là un très grand déséquilibre. La marge d'exploitation, même en marge avant, réalisée par la grande distribution, se fait aux dépens du producteur agricole, obligé de vendre en dessous de ses coûts de revient parce qu'il n'y a plus que cinq centrales d'achat en France qui, à elles seules, couvrent 97 % du marché, et qu'il n'est pas possible de leur résister.
    Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, il faut commencer par faire respecter la loi. Ayant rappelé ces faits, je tiens aussi à repréciser les choses. S'agissant tout d'abord de la concurrence, nous ne pouvons pas être pour la libre concurrence et en même temps contre une certaine forme de concurrence. Par conséquent, je redis ici au nom de toute l'UMP que nous ne sommes pas contre les grandes surfaces. On peut même considérer que le libre-service a apporté une vraie valeur ajoutée. A une époque, les grandes surfaces - soyons fiers d'être l'un des rares pays au monde à avoir su créer cette forme de commerce - ont su animer la concurrence et faire baisser les prix ; elles ont ainsi contribué, ce qui est un des effets positifs de la libre concurrence, à faire progreser notre société.
    Par ailleurs, il va falloir que nous ayons un vrai débat sur la fameuse loi Royer. Depuis 1973, on ne se bat que contre la taille des surfaces de vente. Or le vrai problème, mes chers collègues, ce sont les pratiques commerciales. A partir du moment où un des distributeurs s'est permis de vendre la baguette à 15 centimes, tout le monde a été obligé de la proposer au même prix et les boulangers ont commencé à ne plus être compétitifs et, pire encore, à être considérés comme des voleurs par leurs clients, alors que les voleurs, c'étaient ces grandes surfaces qui attiraient les acheteurs avec ce prix d'appel tout en revendant les 140 000 autres références beaucoup plus cher que chez les petits commerçants.
    Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, il faut faire appliquer la loi. Tout est dans la loi ! Il n'y a pas lieu de changer les textes, pas même la loi Galland. Il faut simplement - et vous aurez toute l'UMP avec vous si vous vous y décidez - mettre en avant l'autorité politique et faire appliquer la législation. Devenez, monsieur le secrétaire d'Etat, le Sarkozy de l'économie de marché ! (Sourires.)
    M. André Thien Ah Koon. Très bien !
    M. Jean-Paul Charié. Surtout, ne commencez pas, par voie de circulaire, à dire que les conditions générales de vente peuvent être négociables ! Si tel était le cas, Leclerc, par exemple, se dira que, si Carrefour peut négocier les conditions générales de vente, lui aussi peut le faire. Et Leclerc dira : « Tu dois me faire 10 %, 15 %, 20 % ou 30 % de remise de plus parce que je sais que, si Carrefour te le demande, tu les lui accorderas. »
    Monsieur le secrétaire d'Etat, votre analyse semble comporter quelques erreurs. Tirez profit de nore expérience pour les corriger. Sinon, tous vos efforts resteront vains et des entreprises continueront à se casser la figure à cause des pratiques commerciales actuelles. J'espère que nous pourrons retravailler ensemble sur cette analyse erronée. L'heure est grave et il y a urgence.
    Pour conclure, je rappellerai que le soir du premier tour des élections présidentielles, 27 % des Français ont voté pour des extrêmes, de gauche ou de droite. Les Français sont légitimement exaspérés par certaines pratiques dont ils sont victimes, et pas seulement celles qui ont cours en politique : il y a aussi les pratiques de leurs partenaires. Alors que le partenariat entre fournisseurs et distributeurs devrait prévaloir, nous sommes aujourd'hui dans une société d'esclavage. Si vous ne montrez pas rapidement que l'autorité politique a l'intention de faire appliquer la loi, c'est dans la rue que cela se passera.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, tout ce que je vous ai dit en si peu de temps vous montre d'abord que l'UMP est derrière vous et ensuite qu'elle veut, avec vous, servir la France dont l'avenir passe par les petites et moyennes entreprises dans une libre et loyale concurrence à dimension humaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. J'invite tous les orateurs à respecter du mieux possible leur temps de parole.
    La parole est à M. Michel Vergnier, pour quinze minutes environ. (Sourires.)

    M. Michel Vergnier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous discutons aujourd'hui du projet de budget pour 2003 du secrétariat d'Etat aux PME, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Je crois qu'il convient de ne pas s'en tenir aux seuls crédits de ce département et d'élargir la réflexion à l'ensemble des actions ayant des conséquences sur les activités de ce secteur.
    Une analyse globale des actions menées en faveur des PME, du commerce et de l'artisanat montre que nous avons affaire à une politique qui dit vouloir libérer mais qui est avant tout libérale,...
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. C'est logique !
    M. Michel Vergnier. ... très favorable à certains entrepreneurs à qui des financements et de nouvelles libertés sont accordés, ce qui ne pose problème que dans la mesure où aucune contrepartie ne leur est demandée et alors que nous ne voyons pas très bien ce qui est fait pour soutenir les chefs d'entreprise qui rencontrent des difficultés.
    Vous avez expliqué, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il s'agissait moins, pour votre administration, de dépenser que d'animer, tant et si bien que votre budget, qui est déjà un petit budget, voit ses crédits diminuer encore. En effet, ils passent de 60,98 millions d'euros à 57,87 millions d'euros, soit une réduction de 5,1 % à périmètre constant, sans prendre en compte, bien entendu, la budgétisation de la TACA. Cette réduction de crédits est-elle compatible avec la volonté de votre gouvernement de mettre l'entreprise au coeur de la République, d'affirmer le rôle essentiel des PME-PMI, de l'artisanat et du commerce dans notre pays ?
    Vous avez expliqué que la réduction des crédits s'expliquait par la disparition de certaines actions, parmi lesquelles les aides consacrées à la réduction du temps de travail.
    M. Jean-Marc Nudant. Et allez donc !
    M. Michel Vergnier. Pouvez-vous nous dire par quoi seront remplacées les aides aux PME qui sont déjà passées aux 35 heures ?
    Concernant les 35 heures, j'ai pu constater que mes collègues de la majorité se félicitent tous d'un assouplissement de leur mise en place. Mais cet assouplissement était déjà réalisé !
    M. Nicolas Forissier. Il était temporaire !
    M. Michel Vergnier. Faut-il vous rappeler que le gouvernement précédent avait prévu que le passage aux 35 heures n'interviendrait, pour les très petites entreprises, qu'entre 2002 et 2004, que les heures supplémentaires ne s'appliqueraient, la première année, qu'à partir de la trente-huitième heure, qu'il n'y avait pas d'obligation de création d'emplois pour les petites entreprises de moins de onze salariés...
    M. Guy Geoffroy. C'est la moindre des choses !
    M. Michel Vergnier. ... et que des négociations directes entre les partenaires étaient prévues en cas d'absence d'accords de branche ?
    Ainsi, de nombreuses très petites entreprises ne sont pas encore passées aux 35 heures, ces 35 heures tellement dénigrées avant même d'avoir pu être appliquées.
    D'assouplissement en assouplissement, la volonté me semble claire : exclure du bénéfice des 35 heures les salariés des PME du commerce et de l'artisanat.
    M. Guy Geoffroy. C'est incroyable de dire cela !
    M. Michel Vergnier. Ces secteurs vont en pâtir du point de vue économique car ils vont perdre leur attractivité, ce qui accentuera encore la pénurie de main-d'oeuvre dont souffrent nombre de secteurs comme le BTP - cela a été dit - et le commerce de bouche. D'ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est à croire que vous ne souhaitez pas vraiment la combattre. En effet, les crédits consacrés aux aides à la formation diminuent de 6,4 % dans votre budget. Vous justifiez cette baisse par l'augmentation des financements complémentaires à ceux de l'Etat. Ah, voilà la décentralisation ! Ce serait sans doute la panacée, un cheval de bataille dont je ne vois ni le cheval ni la bataille. (Sourires.)
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. Vive Defferre !
    M. Michel Vergnier. Je trouve inquiétant que vous ne preniez pas plus au sérieux les enjeux de long terme que représentent la formation initiale et la formation continue et que vous diminuiez les moyens de ce poste de dépenses si important dans un secteur où l'élévation du niveau de compétence est un facteur d'amélioration de sa compétitivité économique.
    Et que dire de l'économie solidaire sacrifiée ? Cela ne relève pas de votre budget, nous dites-vous. Nous n'acceptons pas cette réponse facile qui écarte un secteur important à nos yeux.
    Je n'ai cependant pas que des reproches à formuler sur votre budget, monsieur le secrétaire d'Etat.
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. Ah !
    M. Michel Herbillon. Nous avons bien fait de rester !
    M. Michel Vergnier. Je me réjouis de constater que vous avez les mêmes objectifs que vos prédécesseurs...
    M. Michel Herbillon. Il y a tout de même quelques différences !
    M. Nicolas Forissier. Il y a ceux qui ont des objectifs et ceux qui agissent !
    M. Michel Vergnier. ... et que, sur un certain nombre de points, vous poursuivez la politique engagée depuis 1997 en faveur du développement du secteur des PME et qui consistait à : encourager la création d'entreprises - grâce au fonds de garantie SOFARIS, au financement des encours de prêts bonifiés, aux prêts à la création d'emplois - ; favoriser le développement économique des territoires et améliorer l'environnement fiscal et juridique des PME, toutes choses qui, il faut le dire, se poursuivent et vont dans le bon sens. Je vous encourage, nous vous encourageons à continuer.
    M. Michel Herbillon. C'est bien !
    M. Michel Vergnier. Nous avions voté, dans les précédentes lois de finances, de nombreuses dispositions visant à favoriser l'emploi, parmi lesquelles la réforme de la taxe professionnelle qui a conduit à une baisse de 40 % en moyenne des contributions des professionnels concernés. Chaque fois que l'occasion m'en est donnée, je ne peux m'empêcher de rappeler que la création de cette taxe, dont vous connaissez sans doute l'origine, a vraiment constitué une grande injustice pour le monde de l'entreprise.
    Nous avions voté également la suppression de la contribution additionnelle de 10 % à l'impôt sur les sociétés, l'institution d'un taux réduit d'impôt sur les sociétés de 15 % pour les petites et moyennes entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 7,63 millions d'euros, la réduction d'impôt pour souscription au capital des sociétés non cotées et la baisse des taux de l'impôt sur le revenu pour toutes les petites entreprises non assujetties à l'impôt sur les sociétés.
    Les mesures budgétaires prévues pour 2002 portaient sur le développement des systèmes de garanties, le financement des qualifications, l'aide aux stages favorisant la transmission ou encore l'appui aux organismes professionnels et aux chambres consulaires. Ce projet de budget s'inscrit donc dans la droite ligne de ces mesures.
    Concernant le FISAC, il y a une budgétisation des crédits de ce fonds et un projet de décentralisation de ses actions. Quels critères seront retenus pour décentraliser ? Nous ne voudrions pas qu'une nouvelle fois on ne prête qu'aux riches ! Je rappelle que le projet visant à déconcentrer le traitement des petits dossiers au plus près du terrain avait déjà été mis en place.
    Nous sommes donc favorables à tout ce qui peut permettre la simplification des critères d'éligibilité aux aides et la mise en place de procédures de paiement immédiat - rapide plutôt - des subventions.
    Et en tant qu'élu rural, j'approuve, monsieur le secrétaire d'Etat, votre projet relever le plafond de subvention de 20 à 30 % dans les zones rurales.
    M. Pierre-Louis Fagniez. C'est formidable !
    M. Michel Vergnier. Quand une mesure va dans le bon sens, il faut s'en réjouir. D'ailleurs un autre élu rural, qui aurait aimé être là ce matin - je me serais senti moins seul...
    M. Guy Geoffroy. Il fallait venir avec lui, on l'aurait accepté !
    M. Michel Vergnier. ... mon ami Daniel Boisserie, député de la Haute-Vienne, retenu, hélas ! dans sa circonscription au dernier moment...
    M. Michel Herbillon. Ça arrive quelquefois le vendredi !
    M. Michel Vergnier. ... m'a demandé de m'exprimer également en son nom pour souligner la nécessité de diversifier l'utilisation des crédits du FISAC, qui pourraient, par exemple, aider à financer l'acquisition de fonds de commerce ou les mises aux normes. Je vous demande donc de prendre en compte ce souhait, monsieur le secrétaire d'Etat.
    Je constate que le Gouvernement poursuit la politique antérieure et qu'il continue à augmenter les crédits consacrés au FISAC. C'est bien.
    En 1997, le FISAC bénéficiait de 45,73 millions. En cinq ans, sous le Gouvernement précédent, les crédits ont progressé de 46,7 %. Je n'entends personne dire : « C'est bien ». C'est dommage !... Je pense donc que cette augmentation s'inscrit dans le prolongement logique de ce qui a été entrepris.
    Lors de votre audition en commission, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous avais demandé quelles garanties pourrait nous donner le Gouvernement quant à l'utilisation de la TACA. Les organisations professionnelles que nous avons auditionnées, parce que nous travaillons...
    M. Jean-Paul Charié. Il serait temps !
    M. Michel Vergnier. ... nous ont également fait cette remarque, et je pense qu'elles vous l'ont aussi adressée.
    Mais nous ne nous contenterons pas de promesses et nous attendons des actions. En effet, nous suivons de très près ce qui se passera en matière de baisse de la TVA, notamment dans la restauration. Je rappelle que cette promesse qui n'était pas la nôtre, comportait comme échéance le 1er janvier 2003. Il me semble bien qu'elle ne pourra pas être tenue.
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. Vous, vous n'avez rien fait !
    M. Michel Vergnier. Vous avez fait une promesse avec une date très précise. Nous serons bientôt à cette date. Qu'en sera-t-il ?
    Vous avez promis également de baisser la TVA sur les disques. Quelle en sera l'échéance ? Toutes ces promesses seront-elles tenues ?
    M. Guy Geoffroy. Oui !
    M. Michel Vergnier. Votre projet de budget vise donc des objectifs que nous approuvons souvent, mais auxquels vous ne donnez pas suffisamment de moyens ou plutôt pour lesquels le Gouvernement, le Premier ministre ne vous donne pas suffisamment de moyens. C'est pourquoi le groupe socialiste ne votera pas les crédits du secrétariat d'Etat aux PME, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
    M. Michel Herbillon. Vous commettez une erreur de plus !
    M. Michel Vergnier. Peut-être serez-vous plus ambitieux au début de l'année 2003 lorsque vous nous présenterez votre projet de loi dit « Agir pour l'initiative économique ». Y ferez-vous preuve d'imagination, d'originalité ? Ou reprendrez-vous le projet de loi que François Patriat avait proposé l'année dernière...
    M. Nicolas Forissier. Il n'y avait rien dedans !
    M. Michel Vergnier. ... à la fin de la onzième législature...
    M. Nicolas Forissier. Dans les toutes dernières heures de la dernière législature ! Nous, nous agissons dès les premières heures de l'actuelle législature. Voilà toute la différence !
    M. Michel Vergnier. ... et que vous n'avez pas cru devoir inscrire à l'ordre du jour du Sénat ? Je ne me plaindrais pas que ce projet, qui avait fait l'objet d'une longue négociation avec la profession - certains ici peuvent en témoigner - soit repris dans son intégralité.
    M. Michel Herbillon. Il vous a fallu cinq ans pour y arriver !
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. Pour ne pas y arriver, plutôt !
    M. Michel Vergnier. Il y a quelque temps, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez déclaré que les entreprises ont plus besoin d'air que d'aides.
    Dans le département que je représente, celui de la Creuse, l'air, nous le respirons chaque jour à pleins poumons, mesurant notre chance.
    M. Michel Herbillon. La Creuse est un si bel endroit !
    M. Nicolas Forissier. C'est vrai !
    M. Michel Vergnier. Mais nous savons aussi ce que nous devons à nos commerçants et artisans qui sont les poumons économiques de notre département.
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. Absolument !
    M. Michel Vergnier. Il est un slogan qui n'a rien perdu de sa pertinence : vivre et travailler au pays. C'est cela que nous voulons pour nos enfants et pour nos petits-enfants. Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, l'air n'y suffira pas. Il faut aussi penser à aider ce secteur dont vous avez la responsabilité. Nous soutiendrons ce qui va dans le bon sens et nous dénoncerons ce qui semble contraire à l'intérêt d'un secteur qui constitue un tissu indispensable au développement d'un département comme le mien.
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. Il n'y a pas grand monde pour applaudir votre intervention, monsieur Vergnier !
    M. Guy Geoffroy et M. Michel Herbillon. Ce sujet ne mobilise pas la gauche !
    M. le président. La parole est à M. Olivier Jardé.
    M. Olivier Jardé. Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis chargé par le groupe UDF de vous présenter sa position sur le budget des PME, du commerce et de l'artisanat. J'ai préparé mon intervention en étroite collaboration avec François Sauvadet qui, comme vous le savez, s'est beaucoup investi sur ces sujets.
    Vous concevez votre ministère plus comme un ministère de mission que comme un ministère de gestion. Les missions, nous en connaissons tous les objectifs : développer l'emploi dans le secteur des PME et des très petites entreprises qui représentent, souvenons-nous en, 99 % des entreprises françaises et 8 millions de salariés.
    Nous devons garder ces chiffres présents à l'esprit car ils témoignent de la vivacité d'un secteur longtemps oublié qui, sous d'autres gouvernements et encore récemment, a fait l'objet de tous les soupçons et de toutes les critiques.
    Un pays digne de ce nom honore ceux qui prennent des risques et on ne dira jamais assez que ces petites entreprises ont des capacités d'embauche importantes et souvent bien supérieures à celles des grands secteurs industriels qui sont, eux, soumis à de nombreux plans sociaux, à des délocalisations dont les conséquences sont désastreuses au niveau social et humain.
    Mais ces missions doivent s'accompagner d'une bonne gestion, d'une bonne gouvernance, comme dirait notre Premier ministre. Une bonne gestion de l'Etat, cela signifie à la fois de bons investissements et une libération des énergies et des marges de manoeuvre des entrepreneurs.
    De ce point de vue, je me permettrai de formuler un commentaire sur le budget que le groupe UDF approuve et votera.
    M. Michel Herbillon. Très bien !
    M. Olivier Jardé. La budgétisation du FISAC me paraît en contradiction avec ses ambitions. Je tiens à me faire l'écho des inquiétudes des organisations professionnelles qui redoutent que le fruit de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat devienne une variable d'ajustement du budget de l'Etat. Il faudra, sur ce sujet, lever toutes les ambiguïtés et donner des gages de bonne gouvernance en ce qui concerne l'utilisation des fonds du FISAC. Il faudra également que la bonne gouvernance de l'Etat se traduise par une réduction des délais dans l'échelonnement du versement des aides.
    Je voudrais évoquer maintenant, au nom du groupe UDF, notre conception des rôles de l'Etat dans le monde économique. Ils sont au nombre de trois : la clarification, la formation et la facilitation.
    Premier rôle, la clarification. Trop de procédures, trop de formulaires, trop de démarches administratives accaparent nos entrepreneurs, nos commerçants, nos agriculteurs. C'est une demande unanime que le Parlement doit porter sans cesse avec foi à l'attention des gouvernements. Car il est une maladie contre laquelle il faut se prémunir à chaque fois que nous légiférons, c'est le prurit réglementaire. C'est pourquoi chaque nouveau dispositif que nous adoptons, s'il est vraiment nécessaire, devrait annuler le précédent.
    Permettez-moi de formuler un voeu qui, je l'espère, inspirera votre action : l'administration doit enfin se mettre à la disposition de l'entreprise.
    Dans cette logique, il faut inverser la pratique actuelle. Lors de la création d'une entreprise, par exemple, c'est à l'administration de remplir les formalités, et c'est aux chefs d'entreprise de les valider. Ils pourront ainsi consacrer toute leur énergie, tout leur dynamisme à leur activité et à leur métier d'origine.
    Ainsi, il ne suffit pas d'accélérer les procédures, encore faut-il aller beaucoup plus loin en clarifiant les rapports entre l'administration et les entrepreneurs.
    Deuxième rôle de l'Etat, la formation.
    L'apprentissage est une affaire qui marche. D'abord parce que c'est un système fortement territorialisé, un système qui a réussi dans sa décentralisation. Il faut saluer ici le rôle déterminant des élus dans cette réussite. Ensuite parce que c'est un système qui responsabilise les jeunes, dans la construction et le parcours professionnel.
    Mais avant de créer, il faut certainement améliorer l'existant. Or aujourd'hui les modalités de financement ont atteint leurs limites et je regrette que les crédits consacrés à la formation aient diminué. Mais je veux surtout alerter l'opinion publique et le Gouvernement de l'imminence d'une crise majeure dans le financement de l'apprentissage. Il faut donc réfléchir très rapidement à la manière de dégager des moyens supplémentaires pour aider les régions à faire face au développement nécessaire à ce dispositif.
    Dans cette logique, il faudra enfin que l'on arrive à redonner aux métiers de l'entreprise, en particulier aux métiers de l'artisanat, le rôle noble qu'ils méritent.
    M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. C'est vrai !
    M. Olivier Jardé. Troisième rôle, la facilitation. Attention, facilitation ne signifie pas fragilisation. Prenons garde, dans notre enthousiasme, à ne pas déstructurer les équilibres précaires. Je veux parler bien sûr des entreprises à un euro. La mesure est séduisante, nous en comprenons l'esprit et la finalité, mais je vous mets en garde. Certes, il faut lever tous les barrages qui freinent la création d'entreprise, mais au-delà, il faut qu'elles soient pérennes. Les entreprises doivent dépasser le cap des trois ans, très souvent fatal à la majorité d'entre elles.
    La vraie urgence en matière de facilitation de la création, mais aussi de la transmission et de la reprise, se situe au niveau des conditions d'emprunt. C'est là qu'il faut agir en priorité. Les leviers sont simples. Il faut instaurer une politique de l'emprunt garanti. Les banques prêteront-elles à des entreprises qui ne disposent au départ que de sommes très modestes ? Nous savons bien que non. Aujourd'hui, moins d'un entrepreneur sur quatre obtient un prêt bancaire.
    Concrètement le groupe UDF souhaite que les garanties SOFARIS soient portées à 80 % des prêts bancaires, comme cela est généralement le cas dans les autres pays de l'Union. Pour atteindre cet objectif, l'Etat doit abonder davantage les fonds de garantie d'emprunts accordés aux PME.
    En ce qui concerne la transmission des entreprises, il faut aller progressivement vers la suppression des droits de mutation sur les transmissions à titre gratuit à condition que les petites et moyennes structures soient conservées et dirigées par les donataires pendant une durée de dix ans.
    Je pose également le problème de la petite hôtellerie dans laquelle les difficultés de reprise sont sans doute plus fortes qu'ailleurs, notamment en milieu rural ; nous demandons le découplage de la transmission entre les murs et le fonds.
    Enfin, en matière de TVA, nous saluons les efforts du Gouvernement pour l'abaisser à 5,5 % dans la restauration. Le groupe UDF a largement défendu cette cause, mais il ne faut pas oublier d'autres secteurs comme celui des chocolatiers.
    Avant de conclure je veux évoquer un sujet, celui des marges arrières qui doit retenir toute notre attention, car il touche aux droits des consommateurs cher à François Sauvadet. Ministre de la consommation également, vous en avez parlé lors de votre audition par la commission des finances. Il s'agit en effet d'y voir plus clair dans la politique des prix pratiqués par la grande distribution. J'approuve à cet égard les propositions formulées par Jean-Paul Charié.
    M. Jean-Paul Charié. Merci.
    M. Olivier Jardé. Le constat est simple : la baisse des prix à la production, qui pénalise durement certaines filières agricoles, comme la viande, ne se traduit pas par une baisse des prix à la consommation.
    C'est pourquoi, il faut réactiver l'observatoire des prix et des marges. Je suis convaincu qu'un tel dispositif, réunissant régulièrement les producteurs, les transformateurs, les consommateurs et la grande distribution, permettrait de travailler sur des bases de relations contractuelles saines.
    Si le libéralisme est un moteur de nos économies de marché, c'est l'intérêt général qui doit tenir le volant et conduire. Je souhaite donc que l'on relance avec conviction la politique des zones de revitalisation rurale, comme sera poursuivi le dispositif des zones franches. Il s'agit certe, moins de dépenser que d'animer, mais il ne faut pas oublier que l'Etat n'a pas de devoir qu'envers la fonction publique : il doit encourager toutes les forces vives par des investissements judicieux.
    Je tiens également à souligner l'importance du tourisme, qui rapporte 15 milliards d'euros d'excédents chaque année, du petit commerce, qui joue un rôle essentiel dans la vie sociale des quartiers et des campagnes, et de l'artisanat, où les savoir-faire sont également des savoir-vivre. Si l'Etat a parfois échoué dans sa gestion des grandes entreprises, il doit absolument réussir à restituer la confiance dans le monde de PME.
    Nous sommes tous, sur ces bancs, très impatients de pouvoir discuter de votre projet de loi d'initiative économique, et j'espère, au nom de François Sauvadet, vice-président de la commission des affaires économiques, que cette dernière sera saisie au fond pour l'examiner.
    M. Jean-Paul Charié. Très bien !
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. Oh !
    M. Olivier Jardé. La commission des affaires économiques est, en effet à la croisée des chemins de l'agriculture, de la politique de la ville, du commerce intérieur et extérieur, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de l'industrie. Cette polyvalence me semble légitimer l'intervention de cette commission, qui aura toutes les compétences pour défendre une approche non pas seulement sectorielle, mais aussi humaine et humaniste de l'initiative économique, à laquelle le groupe UDF est très attaché.
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. Ce n'est pas très gentil pour la commission des finances !
    Nous voterons, sans aucun état d'âme, votre budget, monsieur le secrétaire d'Etat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle).
    La parole est à Mme Arlette Grosskost.
    Mme Arlette Grosskost. Je tiens à répéter que le Gouvernement fait aujourd'hui des petites entreprises un axe très privilégié du développement économique et de l'emploi. L'artisanat, le petit commerce et les professions libérales, sont, il est vrai, de grands pourvoyeurs d'emplois.
    Dans un marché du travail qui est à nouveau peu encourageant, mener une politique offensive au profit de la petite entreprise, plus particulièrement lors de sa création ou de sa transmission, comme vous le proposez, monsieur le ministre, doit être salué, comme l'a d'ailleurs fait le monde économique lorsque vous étiez en Alsace, à Strasbourg et à Mulhouse.
    Le budget présenté s'inscrit, certes quelque peu modestement, mais de la façon néanmoins intéressante, dans la bonne direction. Les dirigeants des PME ont avant tout besoin qu'on les libère du carcan administratif, qu'on leur évite les situations kafkaïennes auxquelles ils sont trop souvent confrontés. Ils ne revendiquent pas l'assistance, mais la liberté d'entreprendre. Il en est ainsi des créateurs d'entreprises, mais force est de constater que, trop souvent encore, ils se voient freinés dans leur élan par un manque d'accompagnement financier dû à la frilosité, voire à la réticence des organismes bancaires, qui réclament toujours et encore des garanties excessives, et ce nonobstant l'accompagnement des organismes de caution, tels que la SOFARIS, dont l'engagement pourrait d'ailleurs être augmenté.
    En revanche, il faut saluer positivement l'intervention en amont des organismes consulaires, tels que les chambres de commerce et d'industrie et les chambres de métiers, qui accompagnent le créateur d'entreprise dans une meilleure définition économique de son projet, et lui assurent ainsi une plus grande viabilité. Malheureusement, ces organismes souffrent de moyens encore trop limités dans leur action d'animation économique. Dynamiser leur financement pour renforcer leur présence territoriale est aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, un facteur de développement économique et d'aménagement du territoire.
    Le développement de la qualification des créateurs avant leur installation reste aussi un enjeur important. Au niveau national, un stage court et obligatoire de huit jours est prévu. Il faudrait peut-être renforcer l'efficacité en instaurant un véritable contrôle de l'acquisition des connaissances. Je rappelle que la chambre de métiers d'Alsace a instauré un second stage, facultatif celui-ci, comprenant 105 heures de formation et de pédagogie participative réparties sur une durée de trois semaines. Le succès de cette formation complémentaire réside dans le fait que 85 % des créateurs installés sont encore en place cinq ans après leur création, alors que la moyenne nationale est de 50 %.
    Cette initiative locale mériterait d'être transposée au niveau national. De plus, pour améliorer son attractivité, le stage pourrait être gratuit, voire, comme cela est déjà le cas dans certains pays, rémunéré.
    Toutefois, permettez-moi de vous rappeler les freins qui existent encore et toujours au droit d'entreprendre.
    Je citerai d'abord le problème de la cession des fonds de commerce, des fonds artisanaux ainsi que des clientèles. En effet, ces cessions sont constatées par un acte enregistré au taux de 4,80 %, intégralement acquitté dans le mois de l'entrée en jouissance. La transmission pourrait être facilitée si on trouvait une possibilité de « moratorier » ou de fractionner ces droits.
    Dans le même esprit, le taux des droits d'enregistrement auxquels sont soumises les cessions de parts sociales pénalise les SARL, forme sous laquelle sont généralement constituées les petites sociétés d'artisans ou de commerçants, par rapport aux sociétés par actions. Ne conviendrait-il pas de mettre fin à une telle situation, complexe et discriminatoire, en alignant le régime, fixé à l'heure actuelle à 4,80 %, sur celui qui profite aux cessions d'actions, à savoir 1 %, dans la limite de 33 079 euros par cession ?
    Une autre préoccupation concerne le remboursement des crédits de TVA aux entreprises qui l'ont facturée au taux de 5,5 %. En effet, depuis que ce taux réduit a été instauré sur les travaux d'amélioration, de transformation et d'entretien des locaux à usage d'habitation, les entrepreneurs continuent de s'acquitter de la TVA au taux de 19,6 % auprès de leurs fournisseurs. En conséquence, le montant de TVA déductible est désormais beaucoup plus important que celui de la TVA collectée. Ces entrepreneurs disposent donc d'un important crédit de TVA dont ils ne peuvent demander le remboursement que trimestriellement ou annuellement. Ne serait-il pas possible qu'ils puissent en obtenir le remboursement mensuellement sur simple déclaration et hors d'un contrôle systématique du fisc ?
    Permettez-moi, enfin, une dernière remarque touchant au statut de l'entrepreneur.
    Au regard des possibilités juridiques actuelles, les chefs de PME, surtout dans l'artisanat, continuent à privilégier le statut salarial pour bénéficier de la protection sociale générale des salariés, voire du régime des ASSEDIC. Pour ce faire, ils prennent le risque de la création d'une SARL fictive, souvent doublée d'un lien de subordination, également fictif, pour bénéficier, en cas de besoin, de l'indemnisation chômage. Il va sans dire que ce genre de pratique comporte des risques évidents et fragilise l'outil de travail. Aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, est-il urgent de reconsidérer le statut juridique du chef d'entreprise et celui de l'épouse exerçant au sein de l'entreprise, afin d'éviter des pratiques pour le moins incertaines.
    Je vous remercie de votre écoute et il va sans dire que vous pouvez, à l'instar de mes collègues de l'UMP, compter sur mon soutien qui ira, bien sûr, au-delà de ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Michel Herbillon.
    M. Michel Herbillon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le niveau élevé du chômage d'un pays est une conséquence directe du retard structurel de la France en matière de création d'entreprise. Cela semble une évidence. Pourtant, pendant les cinq années écoulées, le gouvernement précédent n'a eu de cesse de surajouter de nouvelles contraintes dans la vie des entrepreneurs, des commerçants et des artisans, qui n'étaient déjà pas en reste en matière de difficultés. Je pense en particulier à la loi sur les 35 heures et à celle dite de « modernisation sociale », curieuse sémantique en vérité pour une loi qui n'était ni moderne ni sociale.
    Ces deux textes ont constitué la forme la plus caricaturale d'une conception archaïque et dogmatique des rapports économiques et sociaux, qui considère naïvement que l'emploi peut se décréter.
    Il y avait donc une réelle urgence à rompre avec cette logique pernicieuse, qui bride l'activité économique et l'emploi, surtout dans les petites entreprises, chez les artisans et les commerçants, alors qu'ils sont le premier employeur de France et qu'ils représentent plus du tiers du nombre total des entreprises de notre pays.
    La rupture avec la logique précédente était l'un des engagements forts pris au printemps dernier par le Président de la République et par le Premier ministre, dont la volonté commune est d'instaurer les conditions permettant de créer un million d'entreprises nouvelles en cinq ans. Au regard de l'ampleur des mesures déjà engagées ou annoncées, nul ne peut contester aujourd'hui votre volonté personnelle, monsieur le secrétaire d'Etat, et celle du Gouvernement de tenir ces engagements, c'est-à-dire de créer enfin un environnement favorable pour la petite entreprise.
    La baisse des charges patronales et l'assouplissement de la loi sur les 35 heures, en particulier, ont été des signaux forts adressés aux PME, aux commerçants et aux artisans pour leur montrer que leurs préoccupations étaient désormais entendues.
    Votre projet de loi « Agir pour l'initiative économique », que vous avez dévoilé, monsieur le secrétaire d'Etat, le mois dernier, marquera une seconde étape importante dans le vaste mouvement de mobilisation engagé en faveur des entreprises, des commerçants et des artisans. Je tiens à saluer le pragmatisme des mesures annoncées pour faciliter la création d'entreprise en la rendant moins coûteuse, plus rapide, plus simple et pour permettre aux plus jeunes d'entre elles de survivre, grâce au report de charges sociales et grâce à un accès plus simple au financement.
    Enfin, les mesures que vous préconisez pour faciliter la transmission d'entreprise, au travers du relèvement du seuil d'exonération des plus-values, devraient contribuer à réduire la surmortalité des entreprises françaises.
    Un autre mesure qui nous satisfait pleinement, monsieur le secrétaire d'Etat, est votre décision d'assouplir, par voie de circulaire, la loi Galland, dès le début de 2003, afin de réduire ces fameuses marges arrières, déjà évoquées, notamment par Jean-Paul Charié. Il est temps de mettre un frein à ce système opaque de refacturation par le distributeur, insupportable tant pour les producteurs qui en font les frais que pour les consommateurs qui en supportent le coût. On ne peut donc que soutenir et encourager votre démarche, qui devrait contribuer à rééquilibrer les relations entre la grande distribution et les PME.

    Enfin, l'annonce récente par le Premier ministre de mesures radicales de simplification administrative pour les entreprises a soulevé un vrai espoir compte tenu de la lourdeur de la paperasserie, très souvent inutile ou redondante, qui mobilise chaque jour davantage, de façon totalement stérile, l'énergie des commerçants, des artisans et des petits entrepreneurs.
    Toutefois cet espoir s'accompagne d'un certain scepticisme, assez légitime il faut bien le dire, au regard des promesses prodiguées au cours des années antérieures sur ce sujet et qui se sont toujours soldées par des résultats assez minces. C'est pourquoi je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous profitiez de ce débat pour nous informer précisément de l'ampleur des mesures que vous entendez mettre en oeuvre et du calendrier effectif d'application.
    Naturellement, le projet de budget pour 2003 des PME, du commerce et de l'artisanat ne résume pas, loin s'en faut, l'action du Gouvernement dans ce domaine. Cependant il s'inscrit parfaitement dans le cadre de la politique volontariste engagée par le Gouvernement en faveur de ceux qui entreprennent, au travers, en particulier, d'une augmentation des crédits du fonds d'investissement et de soutien à l'artisanat et au commerce.
    Toutefois, en ce qui concerne ce FISAC, je tiens à souligner, monsieur le secrétaire d'Etat, que la budgétisation des crédits, rendue nécessaire par la réforme de l'ordonnance de 1959, suscite une certaine inquiétude chez les artisans, mes collègues rapporteurs l'ont souligné. Ils craignent que la budgétisation de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, qui alimente le FISAC, aboutisse à ce que les ressources ne soient plus attribuées au soutien à l'artisanat. Dans ces circonstances, je crois qu'il serait utile que vous puissiez donner, devant la représentation nationale, des assurances en la matière.
    Je souhaite par ailleurs, parmi les nombreux sujets qui préoccupent les petits entrepreneurs, les commerçants et les artisans, appeler votre attention sur l'attitude trop souvent rigide dont font preuve les URSSAF à leur égard lorsqu'ils sont en difficulté. Alors qu'ils parviennent souvent à trouver des solutions avec l'administration fiscale, tous nous dirent ne pas rencontrer le même degré de compréhension de la part de l'URSSAF.
    M. Michel Vergnier. Exact !
    M. Michel Herbillon. Il s'agit d'une réelle difficulté qui mérite un examen particulier, notamment de la part des partenaires sociaux concernés, car nombre de dépôts de bilan pourraient être évités si une plus grande souplesse était mise en oeuvre.
    M. Nicolas Forissier. C'est vrai !
    M. Michel Herbillon. Pour conclure, je tiens à vous assurer, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous pourrez compter sur l'appui total des députés de l'UMP, pour soutenir avec détermination la politique ambitieuse que vous et le Gouvernement avez engagée en faveur de ceux qui entreprennent dans notre pays.
    Les entrepreneurs, les commerçants et les artisans n'attendent pas de nouvelles subventions ou des prêts bonifiés supplémentaires ; ils demandent qu'on leur crée un environnement fiscal, juridique, social, administratif favorable ; ils réclament avant tout qu'on les laisse travailler, et que l'Etat ne vienne pas, en permanence, étouffer les capacités d'initiative.
    Le Gouvernement, en faisant le choix de réduire la fiscalité et les charges qui pèsent sur eux, et en s'engageant dans une vraie démarche de simplification juridique et administrative, a montré qu'il avait compris le message. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Forissier.
    M. Nicolas Forissier. J'ai attentivement écouté mon collègue Michel Vergnier. Il sait toute l'amitié que je lui porte et le respect que je dois à un voisin de la Creuse, juste à côté du Berry, où l'air est, là aussi, très pur. (Sourires.) J'ai bien entendu son message sur la nécessité d'agir. Mais je me souviens avoir passé à cette tribune une heure et demie à défendre une question préalable, dans les dernières heures de la précédente législature.
    M. Michel Herbillon et M. Louis Giscard d'Estaing. Eh oui !
    M. Nicolas Forissier. Jean-Paul Charié s'en souvient. Autrement dit, le projet sur la petite entreprise que vous allez mettre en oeuvre dès le début de cette législature, monsieur le secrétaire d'Etat, votre prédécesseur avait attendu la fin de la précédente législature pour le présenter. Cela montre bien l'intérêt très relatif que la majorité précédente pouvait porter à ces questions.
    M. Michel Vergnier. Trop facile !
    M. Nicolas Forissier. Cela explique aussi des lois comme les 35 heures ou la loi de modernisation sociale, qui aujourd'hui aggravent considérablement la difficulté conjoncturelle que nous rencontrons sur le plan économique et financier. Et cela se traduit par une augmentation très inquiétante des défaillances d'entreprises : plus de 5 % en neuf mois.
    Il vous faudra donc, monsieur le secrétaire d'Etat, rester extrêmement vigilant sur le très court terme - je reviendrai ensuite sur les projets de moyen terme. En m'adressant à votre collègue Mme Fontaine, il y a quelques jours, j'ai insisté sur la nécessité, particulièrement pour les petites et moyennes entreprises du secteur manufacturier, de mettre en place une sorte de task force, pour reprendre l'expression anglo-saxonne, au besoin en partenariat entre votre ministère et celui de Mme Fontaine.
    Je suis partisan du moins d'impôt, moins d'aide ; mais, il y a urgence, quand des pans entiers de l'industrie qui sont menacés de disparaître, qu'il s'agisse de la chaussure, du textile, de la confection ou de bien d'autres activités industrielles, il faut que l'Etat soit au rendez-vous.
    M. Jean-Paul Charié. Très bien !
    M. Nicolas Forissier. Je vois trop souvent des chefs d'entreprise confrontés à d'énormes difficultés, parfois obligés de déposer le bilan alors qu'ils se sont battus pendant des années pour ne pas délocaliser et pour garder leurs emplois sur place. Je vois trop souvent ces chefs d'entreprise se plaindre de ne pas avoir été écoutés, de ne jamais avoir senti que l'Etat était disposé à les aider. Il y a là, monsieur le secrétaire d'Etat, une réflexion à engager au plus vite.
    Cela dit, j'ai bien compris que vous vous situiez également dans une perspective de plus long terme. Après avoir calé votre budget, vous allez engager dans les mois qui viennent plusieurs réformes sur la création et la transmission d'entreprises et sur la simplification. Vous me permettrez quelques remarques sur ce sujet, qui ne sont du reste pas sans rapport avec certains éléments de votre budget ou les propos de mes collègues.
    La TACA a été budgétisée. Encore faut-il, et je vous le demande moi aussi avec insistance, que le monde artisanal soit totalement assuré que ces recettes, issue de nos territoires, retourneront bel et bien à nos territoires...
    M. Michel Vergnier. Très bien !
    M. Nicolas Forissier. Autrement dit, pour dire les choses clairement, que le budget n'aille pas subtiliser une partie de cet argent.
    M. Jean-Paul Charié. Très bien !
    M. Michel Vergnier. Je suis d'accord !
    M. Michel Herbillon. Nous sommes nombreux à le demander !
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. En effet !
    M. Nicolas Forissier. Je suis tout à fait d'accord avec la proposition du rapporteur spécial de la commission des finances, Jean-Jacques Descamps : il faut accompagner la budgétisation de la TACA - assortie de la garantie d'un retour aux territoires - d'une décentralisation du FISAC. Celui-ci est aujourd'hui géré par trois ou quatre hauts fonctionnaires à Paris. Quelle que soit la qualité des hommes, le système est mauvais. Il faut le ramener au terrain. Je crois savoir que vous y êtes favorable. Cela étant, il ne serait pas inutile de conserver une petite enveloppe nationale pour des actions d'urgence ou ponctuelles.
    Une autre idée me paraît très importante. Le remembrement est chose connue dans l'agriculture depuis des années. Or de nombreux maires - et je peux rapporter le cas de celui d'une petite ville, que je connais bien, du centre de la France - peuvent faire état des difficultés qu'éprouvent les commerçants de centres-villes du fait de l'exiguïté de leurs murs, à résister au développement très rapide des grandes surfaces, pour la plupart implantées dans les villes centres. Or le client va là où il y a l'offre, là où les rayons sont séduisants. Résultat : les petites villes perdent leurs commerces de centre-ville. Là encore, une réflexion s'impose sur la question du remembrement commercial des centres-villes. Je ne dis pas que l'Etat ou l'aide publique doivent s'en charger, mais il doit certainement être possible de trouver des leviers tant à la fois juridiques et financiers, peut-être même dans le cadre du FISAC.
    Je voudrais également vous lancer un appel, monsieur le secrétaire d'Etat : montrez que l'Etat accorde une grande importance à la spécificité de l'artisanat. Vous savez que ce qu'attend en fait le monde de l'artisanat, le monde des métiers, c'est une vraie loi d'orientation qui souligne cette spécificité, à l'image de celle que nous avons adoptée pour les agriculteurs. En tant que président du groupe d'étude sur les métiers d'art et sur l'artisanat, je trouve cette demande parfaitement légitime. C'est là une réelle nécessité et je veux en particulier appeler votre attention sur la vigilance dont vous devrez faire preuve au moment de la discussion du futur projet de loi sur les affaires rurales. Il serait utile que l'artisanat y soit traité d'une façon au moins aussi attentive que le monde agricole - auquel Dieu sait à quel point, en tant que fils d'agriculteur, je suis attentif. Mais il est essentiel pour nos artisans de s'y voir reconnus.
    De même, nous examinerons bientôt un projet de loi relatif à la transmission des entreprises. Or il se pose un problème très important, et particulier d'interprétation, ou plutôt d'application, de l'article 44 sexies, du code général des impôts. L'article 44 septies autorise, vous le savez, une exonération d'impôt sur les bénéfices pendant cinq ans - deux années pleines et puis trois années dégressives - en cas de création d'entreprise. L'article 44 sexies l'autorise également pour la transmission d'entreprises, mais uniquement pour les entreprises industrielles et pendant deux ans seulement. La reprise d'une entreprise en difficulté s'apparente en réalité à une vraie création ; elle présente le même risque pour l'entrepreneur. Or bien souvent l'administration, et je sais de quoi je parle, entretient le doute au départ ; je peux même vous montrer des lettres de préfets assurant au repreneur d'une entreprise en difficulté qu'il a bien droit à une exonération pendant cinq ans. Et à la troisième année, l'administration fiscale revient sur cette position, vient contrôler cette entreprise en difficulté, reprise par un entrepreneur courageux, et le réajuste alors qu'on lui avait promis cette exonération. Cela pose d'énormes problèmes. Bon nombre d'entreprises chutent à la troisième ou à la quatrième année à cause de cet article 44 sexies. Une simplification s'impose, qui consisterait tout simplement à faire bénéficier les reprises d'entreprises en difficulté des mêmes dispositions que les créations d'entreprises. Je pourrai vous communiquer tous les éléments nécessaires sur ce sujet.
    Ces trois exemples donnent une idée, monsieur le secrétaire d'Etat, de l'ampleur de la tâche. Je pourrais également citer juste entre parenthèses, le cas des conjoints d'artisans. Il faut relever le plafond de déductions fiscales, mais vous connaissez le problème. Mais il ne suffit pas de parler de tous ces sujets - je pourrais y rester une heure et demie - (Sourires), il faut réellement mettre des solutions en oeuvre. Attachons-nous à y travailler ensemble, monsieur le secrétaire d'Etat, avec toutes celles et tous ceux qui le souhaitent dans cet hémicycle, y compris nos amis de l'opposition ; c'est ce que nous attendions, en vain, du précédent gouvernement. Ne faisons pas la même chose.
    Appliquons-nous, année après année, dans les cinq années qui viennent, à réviser, réformer, en travaillant dans la dentelle, les conditions d'existence, de création, de reprise des petites et moyennes entreprises, qui sont le vrai réservoir de la création d'emplois et de la dynamique dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Monsieur Forissier, en raison de la qualité de cette intervention, le président ne l'a pas interrompue ; mais vous avez largement dépassé les cinq minutes imparties.
    M. Nicolas Forissier. Pardonnez-moi, monsieur le président... C'est la passion !
    M. le président. La parole est à M. André Thien Ah Koon.
    M. André Thien Ah Koon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il est temps de remettre la France sur le chemin du développement, de la croissance et de concrétiser les engagements pris par le Président de la République.
    Notre économie est sinistrée, la France elle-même est sinistrée. Il faut sortir des dérives totalitaires d'une administration tatillonne et persécutrice...
    M. Michel Vergnier. Oh là là ! Haro sur l'administration !
    M. André Thien Ah Koon. ... qui pénalise l'activité, surtout les activités économiques, et qui fait fuir nos chefs d'entreprise à l'étranger.
    Cette situation, ce n'est pas notre majorité qui l'a créée. C'est le précédent gouvernement qui a mis en place les conditions d'une sorte de faillite généralisée de nos PME.
    M. Michel Vergnier. Allons bon ! Ce n'est tout de même pas nous qui avons inventé l'administration !
    M. André Thien Ah Koon. Les pesanteurs administratives, le climat de suspicion permanente à l'égard des acteurs économiques doivent disparaître au profit d'uneplus grande liberté et du goût d'entreprendre.
    M. Michel Vergnier. Il ne faut pas exagérer !
    M. André Thien Ah Koon. A la Réunion comme en métropole, les PME, les PMI, les artisans ne savent plus à quel saint se vouer. En fait, ils n'ont jamais été défendus ni protégés ; bien au contraire, il ont très souvent été roulés. Il faut le dire. Nos artisans sont totalement démotivés.
    Dans notre île, les gouvernements précédents ont davantage écouté les anciens préfets. Pourquoi vous dis-je cela ? Parce que la Réunion a une caractéristique ; nos anciens préfets se reconvertissent dans le lobbying à Paris. Ils se mettent à la solde des grands groupes industriels et commerciaux d'outre-mer et tentent en permanence de séduire les cadres de la haute administration pour favoriser leurs affaires. Ces trafics d'influence ont d'ailleurs conduit...
    M. Michel Vergnier. Hors sujet !
    M. André Thien Ah Koon. Cela a été organisé par la gauche, monsieur ! A-t-on jamais vu un pays abandonner une parcelle de son territoire en cédant au lobbying et aux agissements de préfets qui viennent constamment peser sur la haute administration pour développer leurs affaires ? Ce n'est un secret pour personne à la Réunion où un directeur de la concurrence et des prix sous le régime du précédent gouvernement s'est suicidé. Il avait confié à son fils le soin d'instruire les dossiers de la commission départementale d'équipement commercial, laquelle a accordé des dérogations permettant à un seul groupe de détenir aujourd'hui plus de 50 % du marché des produits alimentaires !
    C'est à cause de cette politique que les bourgs et les quartiers se désertent. C'est à cause de cette politique que nos petites entreprises sont écrasées. Les commerçants et les artisans ne se reconnaissent plus dans cette société où règne la loi du plus fort. Aucun ministre n'a jusqu'ici levé le petit doigt pour les aider et les défendre.
    La gauche s'est arrogé le monopole, le privilège en quelque sorte de défendre les petits ; mais elle ne les a pas défendus, car sa loi pour l'outre-mer est restée une loi vide. On avait promis sept années d'étalement des dettes fiscales et sociales. On avait promis des exonérations. Il n'en a rien été : Bercy est passé par-derrière, avec sa gomme et a tout effacé.
    M. Michel Vergnier. Du calme !
    M. André Thien Ah Koon. Monsieur le secrétaire d'Etat, si vous voulez faire changer les choses, nous sommes venus vous encourager. Concrétisez cette volonté pour faire refleurir l'espoir parmi les PME, les PMI et les artisans de notre pays. Ce sont vos administrés et vous vous êtes engagé à les défendre.
    Permettez-moi simplement de vous poser trois questions.
    Premièrement, pensez-vous que les artisans de notre pays ont le droit d'exister, de travailler pour leurs communes et leurs quartiers en bénéficiant des commandes de la puissance publique, dont ils sont aujourd'hui pratiquement exclus ? Si vous répondez oui, alors luttez pour moderniser le code des marchés publics afin que les notions de ligne budgétaire et d'unité d'opération soient désormais correctement identifiées.
    M. Jean-Paul Charié. Très bien !
    M. André Thien Ah Koon. Cette réforme permettra aux collectivités locales, aux établissements hospitaliers publics, d'enseignement supérieur, lycées et autres, de mieux travailler, dans leur environnement naturel,...
    M. Jean-Paul Charié. Très juste !
    M. André Thien Ah Koon. ... avec de vrais acteurs économiques, ces petits artisans, ces petits producteurs qui font partie de la France d'en bas, de la France profonde.
    Deuxièmement, monsieur le secrétaire d'Etat, entendez-vous maintenir l'équilibre et une saine concurrence dans le commerce ? Si vous répondez oui, vous devez protéger le pouvoir d'achat des consommateurs et laisser une place au commerce traditionnel et aux commerçants indépendants. Pour cela, il devient urgent de limiter les parts de marché des grands groupes et de mettre un terme à l'entreprise de désertification de nos quartiers, de nos campagnes et de nos centres-villes.
    M. Jean-Paul Charié. Très bien !
    M. André Thien Ah Koon. Aucune dérogation à l'obtention d'une autorisation d'exploitation commerciale ne doit être accordée dès lors que le projet dépasse le seuil de 25 % du chiffre d'affaires annuel hors taxe d'un secteur donné ou dans un périmètre donné - ce peut être l'agglomération, le département, la région. Il faut arriver à partager en quelque sorte le marché afin de permettre une saine concurrence. Cette proposition est juste et même fondamentale dans le contexte insulaire de la Réunion. Une grève chez un seul distributeur en situation de monopole pourrait provoquer la rupture de l'approvisionnement et une réaction en chaîne allant des émeutes à la prise en otage de la population et de l'Etat. Un renforcement de la réglementation est de ce fait incontournable. Tout doit être mis en oeuvre pour échapper à la mise sous tutelle de l'économie française d'outre-mer au profit de quelques personnes.
    Troisièmement, monsieur le secrétaire d'Etat, savez-vous que la chambre de commerce et d'industrie de la Réunion remplit bien curieusement sa mission ? Bien entendu, elle est plus au service des gros que des petits. Elle ne défend pas la France d'en bas. Il est de notoriété publique qu'elle privilégie surtout les grands groupes et les investissements davantage dans le Nord que dans le Sud. Or, elle est financée par l'ensemble des commerçants et industriels réunionnais.
    Cette semaine encore, pour favoriser le projet d'un grand groupe, la chambre de commerce a tenté de modifier la procédure qui l'autorise à donner son avis à la commission départementale d'équipement commercial. Cette manoeuvre grossière a été dénoncée par les organisations de PME, victimes désignées à l'avance.
    Plus grave encore, la chambre s'oppose à tout projet de développement dans le Sud. Ainsi, elle met tout en oeuvre pour limiter la fréquentation de notre petit aéroport - car nous en avons un dans le Sud, mais c'est la France profonde, la Réunion profonde : 70 000 passagers par an contre 1,4 million pour la grande plate-forme du Nord. Le Nord a déjà deux ports ; on veut en créer un troisième alors que la première commune de ma circonscription, Saint-Louis, souffre d'un taux de chômage de 56 % ! Voilà qui explique pourquoi le rééquilibrage entre le Nord et le Sud, maintes fois promis, est toujours en panne.
    C'est dans ce contexte, monsieur le secrétaire d'Etat, que la création d'une chambre consulaire dans l'île de la Réunion s'impose. Je suis venu demander votre appui. Il faut innover en la matière : n'oublions pas que, chez nous, pour parcourir quatre-vingts kilomètres, il faut compter deux heures de voiture. Il est donc temps de décentraliser.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes animé de la volonté de donner à la France d'en bas un nouvel horizon ; je compte sur vous. Votre combat pour nos petites entreprises et nos artisans ne fait que commencer et vous avez notre soutien. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003, n° 230 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 256).
    Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat ; articles 64 et 65 (suite) :
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 17 du rapport n° 256) ;
    M. Serge Poignant, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome VII de l'avis n° 258).
    Outre-mer.
    Départements d'outre-mer :
    M. Alain Rodet, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 34 du rapport n° 256) ;
    Territoires d'outre-mer et Nouvelle-Calédonie :
    M. Victor Brial, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 35 du rapport n° 256) ;
    Outre-mer :
    M. Joël Beaugendre, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome XVI de l'avis n° 258) ;
    M. Didier Quentin, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (tome VII de l'avis n° 261).
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à treize heures vingt.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT