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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 28 NOVEMBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du mercredi 27 novembre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Questions au Gouvernement «...».

DÉBAT SUR LA DÉCENTRALISATION «...»

Mme Ségolène Royal, M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.

INDUSTRIE TEXTILE «...»

M. Francis Vercamer, Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.

PRIME DE NOËL «...»

MM. Frédéric Dutoit, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

PRÉVENTION DES INONDATIONS «...»

M. Marc Laffineur, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.

VIOLENCE EN MILIEU SCOLAIRE «...»

MM. Lionnel Luca, Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire.

NOUVELLES MENACES TERRORISTES «...»

MM. Jacques Kossowski, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

SITUATION ÉCONOMIQUE DU PAYS «...»

MM. Gaëtan Gorce, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

CRÉDIT LYONNAIS «...»

MM. Yves Deniaud, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

OUVERTURE DES MARCHÉS DU GAZ
ET DE L'ÉLECTRICITÉ «...»

M. François-Michel Gonnot, Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.

LIBÉRALISATION
DU MARCHÉ DE L'ÉLECTRICITÉ «...»

M. Jean-Pierre Balligand, Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.

PROGRAMME DE CONSTRUCTION
D'ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES «...»

MM. Paul-Henri Cugnenc, Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice.

NAUFRAGE DU PÉTROLIER PRESTIGE «...»

M. Jean Grenet, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT

2.  Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. - Transmission et discussion du texte de la commission mixte paritaire «...».
M. Yves Bur, rapporteur de la commission mixte paritaire.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

EXCEPTION D'IRRECEVABILITÉ «...»

Exception d'irrecevabilité de M. Alain Bocquet : MM. Maxime Gremetz, le président. - Rejet.

QUESTION PRÉALABLE «...»

Question préalable de M. Jean-Marc Ayrault : M. Jean-Marie Le Guen. - Rejet.

DISCUSSION GÉNÉRALE «...»

M.
Bernard Accoyer,
Mme
Jacqueline Fraysse,
M.
Jean-Luc Préel,
Mme
Martine Billard.
Clôture de la discussion générale.
M. Jean-Michel Dubernard, vice-président de la commission mixte paritaire.

TEXTE DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE «...»
EXPLICATIONS DE VOTE «...»

MM.
Bernard Accoyer,
François Liberti,
Jean-Luc Préel,
Jean-Marie Le Guen.

VOTE SUR L'ENSEMBLE «...»

Adoption, par scrutin, de l'ensemble du projet de loi compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.

Suspension et reprise de la séance «...»

3.  Organisation décentralisée de la République. - Suite de la discussion d'un projet de loi constitutionnelle adopté par le Sénat «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Article 7 (suite) «...»

M. le président.

Rappel au règlement «...»

MM. René Dosière, le président.

Reprise de la discussion «...»

MM. André Thien Ah Koon, Gérard Grignon.
M. Pascal Clément, président de la commission des lois, rapporteur.
M. Jean-Jack Queyranne, Mme Christiane Taubira, M. André Chassaigne, Mme Béatrice Vernaudon, M. René Dosière.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
4.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Nous commençons par une question du groupe socialiste.

DÉBAT SUR LA DÉCENTRALISATION

    M. le président. La parole est à Mme Ségolène Royal.
    Mme Ségolène Royal. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, ma question s'inscrit dans la recherche d'un débat serein retrouvé dans cet hémicycle sur la décentralisation. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.).
    Nous nous sommes, vous le savez, engagés positivement dans cette nouvelle étape. (Mêmes mouvements.) Non seulement des élus socialistes ont participé aux assises territoriales sur l'ensemble du territoire mais nous avons même voté plusieurs des dispositions du texte que vous avez proposé, notamment l'inscription de la région dans la Constitution et l'article 5 sur la démocratie participative.
    Malheureusement, force est de constater aussi que ce débat est aujourd'hui un peu dans l'impasse. Vous-même, monsieur le Premier ministre, aviez déclaré, et à juste titre, lorsque vous étiez président de l'Association des régions de France, qu'un débat sur la décentralisation qui ne traiterait pas des règles du jeu financières restait un débat virtuel.
    M. Philippe Vuilque. Très bien !
    Mme Ségolène Royal. Aussi souhaitons-nous, et notre préoccupation est, vous le savez, partagée par de nombreux élus de toutes tendances politiques, que des règles du jeu claires soient établies dans les lois qui régiront les transferts de compétences, l'expérimentation ainsi que les transferts financiers.
    Or nous observons que tous nos amendements sont refusés, de même que bon nombre de ceux de votre propre majorité. Notre question est simple : monsieur le Premier ministre, accepteriez-vous de suspendre ce débat. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle),...
    M. Gérard Grignon. Certainement pas !
    M. Patrick Ollier. C'est incroyable de demander cela !
    Mme Ségolène Royal. ... le temps de nous communiquer les textes sur les transferts financiers et les grandes lignes des lois de transfert de compétences, afin que nous puissions discuter en toute connaissance de cause ?
    Par ailleurs, monsieur le Premier ministre, acceptez-vous de soumettre ce texte à référendum...
    M. Lucien Degauchy et M. Jean Marsaudon. Non !
    Mme Ségolène Royal. ... afin que le peuple français - car c'est pour lui que nous travaillons, pour la France, pour améliorer le service public et l'égalité devant le service public - ait son mot à dire sur cette importante démarche ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Lucien Degauchy. Baratin !
    M. le président. Monsieur Degauchy, cela ferait plaisir à tout le monde que vous fassiez un peu moins de bruit.
    La parole est à M. le Premier ministre.
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Madame la députée, j'apprécie le ton que vous employez désormais. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Je suis très heureux de voir que ces sujets peuvent être abordés calmement, sereinement, dans un esprit constructif et positif au sein de la représentation nationale.
    M. Michel Delebarre. Vous auriez dû venir hier !
    M. le Premier ministre. C'est d'ailleurs ainsi que se déroulent aujourd'hui les débats sur le terrain. Récemment encore, avec Mme Martine Aubry et M. Pierre Mauroy, nous avons eu des discussions empreintes d'un esprit républicain et marquées par le respect des convictions de chacun. C'est ce que nous souhaitons et je m'en félicite.
    Je voudrais maintenant vous répondre sur le fond. Sur ce sujet, vous le savez, notre conviction est profonde. La République fonctionne mal, les Français nous l'ont dit et le répètent.
    M. Bruno Le Roux. Répondez à la question !
    M. le Premier ministre. L'impuissance publique est trop répartie dans ce pays pour que nous ne soyons pas déterminés à engager les réformes. Nous avons donc souhaité engager les réformes nécessaires, en proposant une démarche en trois temps.
    D'abord, un débat ouvert sur les principes constitutionnels afin d'inscrire dans la Constitution les points clés qui nous manquent aujourd'hui pour les mener à bien : ...
    M. Bruno Le Roux. Ce n'est pas la question !
    M. Bernard Deflesselles. Attendez la suite !
    M. le Premier ministre. ... le droit à la proximité avec le principe de subsidiarité, en d'autres termes les principes financiers que tous les maires et tous les élus de France attendent (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française), la péréquation et l'autonomie financière, c'est-à-dire l'appel aux citoyens. Or si nous voulons débattre utilement de ces sujets essentiels,...
    M. Christian Bataille. Pour l'instant, c'est zéro !
    M. le Premier ministre. ... encore faut-il d'abord en ouvrir la possibilité. En effet, si la Constitution ne permet pas la péréquation, par exemple, ...
    M. Maxime Gremetz. Mais si, elle la permet !
    M. le Premier ministre. ... à quoi sert de parler de la péréquation ? Si la Constitution ne permet pas l'expérimentation, à quoi sert-il de parler de l'expérimentation ? Commençons donc par ouvrir, dans la Constitution, ces libertés nouvelles avec lesquelles nous pourrons construire ensemble, et dans le débat, l'acte II de la décentralisation.
    Vous le savez comme moi, le sujet est particulièrement difficile. Au demeurant, s'il avait été si facile, il aurait déjà été abordé dans le passé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Et c'est précisément parce qu'il est difficile qu'il faut du temps et qu'il faut en débattre. Vous qui connaissez bien les élections locales, madame la députée, qui avez été conseillère générale, qui avez été candidate aux municipales, candidate aux élections régionales, vous qui connaissez la pratique territoriale, vous devez savoir que c'est en discutant avec les uns et les autres que nous pourrons définir le mieux possible cet acte II de la décentralisatoin.
    M. Christian Bataille. C'est du blabla !
    M. le Premier ministre. Voilà pourquoi, loin de reporter ces travaux, je souhaite tout au contraire que l'Assemblée nationale et le Sénat votent rapidement le texte constitutionnel et que se développe dans le pays un large débat, afin que la représentation nationale puisse décider, dès le printemps prochain, des transferts de compétences à opérer, des grandes simplifications que le pays attend, et des expérimentations nécessaires. Il n'y a pas de temps à perdre.
    M. Michel Delebarre. Nous en perdons beaucoup !
    M. Christian Bataille. Raffarin, baratin !
    M. le Premier ministre. Quant à décider d'un référendum, madame la députée, je veille à toujours rester à ma place et,...
    M. Maxime Gremetz. Regardez le Président de la République !
    M. le Premier ministre. ... le moment venu, le Président de la République prendra les décisions qui s'imposent. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Monsieur Delebarre, je vous invite, comme je l'ai fait pour M. Degauchy, à vous montrer un peu plus calme.

INDUSTRIE TEXTILE

    M. le président. la parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Francis Vercamer. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Depuis maintenant plusieurs semaines, les entreprises de l'industrie textile, en particulier les producteurs de fil et les teintureries, encore très présents dans l'agglomération de Roubaix et de Tourcoing, se heurtent aux effets de plus en plus rudes de la concurrence internationale.
    Le coût de la main-d'oeuvre conjugué à la baisse des prix des produits finis place nos entreprises en position difficile sur le marché du standard industriel, qui exige une production de grande quantité avec des impératifs de qualité de plus en plus draconiens. Or, sur ce créneau se positionnent également des entreprises situées en Asie, mais également en Europe de l'Est, qui ne supportent pas les mêmes charges que les entreprises françaises. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.). Celles-ci n'y résistent pas, et les défaillances, accompagnées d'annonces de plans sociaux, se succèdent.
    Madame le ministre, quelles dispositions comptez-vous prendre afin de conforter nos entreprises textiles dans leurs activités et de les accompagner dans ce contexte risqué ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, les difficultés des industries textiles me sont bien connues. J'ai eu l'occasion d'affirmer au Sénat, en réponse à une question orale, ma confiance dans l'avenir de notre secteur du textile. Je crois sincèrement que cette industrie n'est pas en déclin, mais en mutation. (Exclamations sur les bancs du groupe des députées communistes et républicains.).
    M. Christian Bataille. Venez voir chez nous !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. La compétition internationale que vous avez évoquée est en effet très rude. Il nous est très difficile, disons les choses comme elles sont, de résister à la concurrence de continents et de pays où les coûts salariaux sont nettement moindres que les nôtres. Alors, que faire ?
    Il faut développer résolument d'autres secteurs de compétitivité. Le secteur textile peut et doit s'engager dans une stratégie de différenciation en s'appuyant sur nos points forts, notamment la qualité et l'innovation. J'ai déjà eu l'occasion, en répondant à une question la semaine dernière, de dévoiler quelques-uns des volets du plan de soutien à l'innovation industrielle que je vais très prochainement proposer.
    Parallèlement, nous entendons nous engager dans une lutte rigoureuse et résolue contre la contrefaçon.
    M. Maxime Gremetz. Ah !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. C'est dans cet esprit que j'ai demandé à François d'Aubert de présider le comité national anti-contrefaçon.
    Nous allons également initier un certain nombre d'actions visant à protéger la propriété industrielle.
    Enfin, avec mon collègue François Loos, nous envisageons, dans le cadre des négociations à l'OMC, la mise en place de ce que j'appellerai une certaine réciprocité dans les concessions.
    Pour terminer, monsieur le député,...
    M. le président. J'allais précisément vous inviter à conclure, madame la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. ... j'ai déjà eu l'occasion de me rendre sur le terrain dans une région qui se trouvait aux prises avec ces difficultés. Je suis à la disposition de toutes celles qui connaissent des situations analogues si ma présence peut y être utile. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

PRIME DE NOËL

    M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Frédéric Dutoit. Monsieur le Premier ministre, en cette période de fin d'année, à l'approche des festivités de Noël, une exigence légitime s'affirme de plus en plus dans notre pays : que chacun puisse passer ces fêtes dans la diginité. C'est pourquoi les chômeurs, les précaires et les exclus ont déposé plusieurs milliers de pétitions dans plusieurs préfectures, pour demander une prime de Noël de 500 euros, mais aussi le relèvement des minima sociaux.
    Cette demande, à laquelle le Gouvernement ne doit pas être sourd, sera de nouveau défendue le 3 décembre prochain, à la veille de la réunion du conseil d'administration de l'UNEDIC. Il s'agira aussi de dénoncer les menaces graves qui pèsent sur l'assurance-chômage. Le déficit prévisible du régime d'assurance-chômage est le résultat du recours de plus en plus intensif aux contrats à durée déterminée, aux missions d'interim et aux emplois saisonniers, qui permet au patronat de mettre du jour au lendemain les salariés au chômage.
    A cela s'ajoute l'accroissement des licenciements économiques dans tous les départements. Dans le même temps, le Gouvernement suspend les rares articles de la loi de modernisation sociale qui protégaient les salariés. Pourtant, la mission première de l'UNEDIC, doit-on le rappeler, consiste à indemniser tous les privés d'emploi. Malheureusement, c'est loin d'être le cas, puisque seuls quatre chômeurs sur dix sont indemnisés par les ASSEDIC au niveau moyen de 878 euros. Bon nombre de chômeurs n'ont donc droit à aucune indemnisation. Or ils ne sont en rien les responsables de la situation financière actuelle, mais bien les victimes.
    Monsieur le Premier ministre, allez-vous donner satisfaction aux demandes des chômeurs dont la légitimité semble évidente ? Irez-vous jusqu'à satisfaire aux exigences du MEDEF de revenir à la dégressivité des allocations chômage ou interviendrez-vous dans le débat pour améliorer la couverture-chômage, notamment par l'augmentation des indemnisations, tout en maintenant leur non-dégressivité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, le Gouvernement est naturellement très attentif aux négociations qui vont s'engager à l'UNEDIC. Je tiens à faire d'ores et déjà savoir qu'il fait pleinement confiance aux partenaires sociaux pour trouver des solutions aux difficultés que celle-ci rencontre. Comme il l'avait fait à l'occasion de l'accord conclu en juillet dernier, le Gouvernement respectera et soutiendra les décisions arrêtées par les partenaires sociaux.
    S'agissant maintenant de ce qu'il est convenu d'appeler la « prime de Noël », le Gouvernement comme sa majorité se mobilisent pour faire en sorte que la soli-darité s'exerce à l'égard des plus démunis tout au long de l'année.
    M. Maxime Gremetz. Mais pour Noël ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous rencontrons toutefois, mesdames et messieurs les députés, une difficulté particulière s'agissant de la prime de Noël, que je voudrais révéler à l'Assemblée nationale. La prime de Noël est déjà, d'une certaine manière, prévue dans le budget de 2002...
    M. Maxime Gremetz. Ah !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... puisque nous l'avons inscrite dans le collectif de 2002. Mais il s'agit de la prime de Noël 2001 que la précédente majorité avait accordée, mais sans la financer ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

PRÉVENTION DES INONDATIONS

    M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. Marc Laffineur. Madame la ministre de l'écologie et du développement durable, depuis plusieurs semaines déjà, des pluies diluviennes s'abattent sur notre pays. Comme par le passé, elles provoquent périodiquement des inondations dévastatrices et meurtrières. Les inondations dans les régions escarpées sont aussi soudaines que meurtrières et peuvent emporter les habitations ; les inondations de plaine, lentes et inexorables, engendrent des drames humains et économiques.
    Vous avez déjà annoncé, madame la ministre, que la prévention des inondations et l'aide aux victimes étaient une priorité de votre action. Nul ne peut évidemment garantir le risque zéro, mais les femmes, les hommes et les familles touchés ou menacés ne peuvent plus vivre dans la crainte de ce fléau climatique et l'accepter comme une fatalité.
    Ma question est triple. Tout d'abord, pouvez-vous faire le point sur le dispositif de prévention et d'information de la montée de crues ? Ensuite, de quelle façon allez-vous obliger les collectivités locales concernées à effectuer dans les plus brefs délais les travaux nécessaires à la prévention des inondations ? Enfin, vous avez également annoncé la sélection de quinze bassins versants sur lesquels porteront vos efforts. Quand et comment procéderez-vous à cette sélection ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur Laffineur, vous représentez une circonscription particulièrement menacée par les crues. Tout le monde, dans les régions de l'Ouest, connaît en particulier la rapidité et les effets dévastateurs des crues de l'Oudon.
    Comment allons-nous améliorer le système de prévention des crues ? J'ai décidé d'en renforcer les moyens humains et matériels tout en remaniant profondément la carte des centres de prévision afin de tirer les leçons des précédentes catastrophes. Dès 2003, nous allons installer le centre d'appui de Toulouse, particulièrement utile pour les crues cévenoles dont chacun ici a pu mesurer la gravité.
    Deuxième question : comment contraindre les collectivités territoriales ? Je ne peux les obliger. En aurais-je les moyens, je préférerais de beaucoup l'incitation.
    M. Jean-Pierre Soisson. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. C'est la raison pour laquelle je vais proposer, dans le titre II de la loi sur les risques dédié aux risques naturels la mise en place de puissants moyens d'incitation. Mais d'ores et déjà, j'ai présenté un plan de soutien aux initiatives des collectivités territoriales, qui mobilisera 130 millions d'euros, c'est-à-dire 50 % de ce qui était prévu au préalable.
    Quinze bassins versants seront choisis. Comment ? En fonction d'abord de la gravité des inondations que l'on y enregistre, mais je m'efforcerai de faire en sorte que tous les types de crues que vous avez énumérés y soient représentés : crues de plaine, crues torrentielles, crues en nappe. Je favoriserai ensuite une maîtrise d'ouvrage robuste, car ces travaux sont extrêmement difficiles à conduire, tout en mettant en avant la méthode douce, c'est-à-dire en privilégiant les ouvrages en tête de bassin.
    Quoi qu'il en soit, monsieur le député, vous avez raison : face aux inondations, il ne faut jamais céder au fatalisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

VIOLENCE EN MILIEU SCOLAIRE

    M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. Lionnel Luca. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.
    Cette semaine, un adolescent de seize ans a été victime d'un agresseur venu de l'extérieur dans un lycée de la région parisienne, que connaît bien mon collègue Richard Dell'Agnola, le lycée de Fresnes.
    Un député du groupe socialiste. C'est dû au manque de surveillants !
    M. Lionnel Luca. Pour la première fois un flash ball a été utilisé, blessant de jeune à l'oeil.
    Ces faits de violence dans un lycée pourtant sans histoire, bien encadré, sont révélateurs d'une situation de crise.
    Lors de la mise en place du logiciel Signa, votre prédécesseur, monsieur le ministre, avait bruyamment communiqué sur une baisse sensible des faits de violence. Il n'en a, bien sûr, rien été.
    Pour la première année de référence, 81 362 incidents graves dans 7 859 établissements du second degré ont été comptabilisés. Ce chiffre, pour important qu'il soit, est en deçà de la réalité, puisque le taux de réponse des établissements ne dépasse pas 75 %. Surtout, tous les autres incidents de la vie scolaire, commodément appelés « incivilités », ne sont pas pris en compte, ce qui donne une idée de l'ampleur du phénomène qui touche désormais presque tous les établissements, quels que soient les communes et les quartiers.
    Vous avez annoncé, il y a quelques semaines, des mesures de prévention de la violence qui visent à rétablir l'autorité, à tous les niveaux de l'encadrement scolaire, en lui donnant une nouvelle légitimité. Trop souvent, les interventions destinées à aider les victimes de ces faits de violences, qu'elles soient adultes ou mineures, sont très inégalement gérées, ce qui aggrave le traumatisme subi.
    Monsieur le ministre, quelles mesures concrètes comptez-vous prendre, tant au niveau du personnel des établissements scolaires que des enfants et des adolescents victimes de ces actes de délinquance, pour les soutenir dans cette épreuve, pour les aider dans les différentes démarches de réparation auxquelles elles ont droit et, surtout, pour leur redonner confiance dans l'institution scolaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.
    M. Michel Delebarre. Réponse « clefs en main » !
    M. le président. Monsieur Delebarre !
    M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le député, je vous remercie d'avoir rappelé la nécessité de rester très vigilant sur les problèmes de violence scolaire.
    M. Michel Delebarre. Oui, vigilant, très bien !
    M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Les faits que vous avez évoqués, à Fresnes, ne relèvent pas, à proprement parler de la violence scolaire, puisque les agresseurs sont venus de l'extérieur...
    M. Michel Delebarre. Sont-ce des agresseurs non violents ?
    M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. ... et ont pénétré armés dans l'établissement. Notre vigilance doit donc se porter sur ce qui se passe autour des établissements, dont il faudra sans doute renforcer la protection.
    M. Manuel Valls. Darcos, des grillages !
    M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Il ne s'agit pas, évidemment, d'installer partout des systèmes de protection renforcés à l'excès, mais à la demande des établissements et de leurs conseils d'administration, d'arriver à identifier ceux qui introduisent des armes ou des objets dangereux dans les établissements.
    M. Michel Delebarre. Sarkozy à l'éducation nationale !
    M. Christian Bataille. Des surveillants ! Des hommes, pas des grillages !
    M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Votre question porte sur le point plus précis de l'aide aux victimes. Vous soulignez à juste titre que le dispositif que nous avons présenté le 30 octobre se préoccupe des victimes, et notamment des personnels. Car on oublie trop souvent que nos personnels sont les premiers à affronter ces difficultés. Ils les règlent eux-mêmes, il doivent répondre eux-mêmes à des urgences, à des angoisses, à des questions, mais parfois, ils sont aussi victimes.
    Aussi avons-nous pris trois types de dispositions qui devraient permettre d'apporter un meilleur soutien à ces victimes.
    D'abord, nous avons créé dans chaque académie un numéro « SOS » qui permet à tous nos personnels d'être mis en relation très rapidement avec une personnalité référente, laquelle pourra répondre à leurs questions et leur exposer les divers dispositifs auxquels ils peuvent recourir : cela nous permettra d'être très opérationnels.
    M. Michel Delebarre. J'ai déjà entendu cela du temps de Bayrou !
    M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Deuxièmement, dans chaque établissement, un adulte référent accueillera toutes les personnes qui sont victimes ou qui ont à connaître de phénomènes de violence.
    Enfin, comme vous le savez, nous avons passé une convention avec l'INAVEM, l'Institut national d'aide aux victimes et de médiation, convention extrêmement efficace - je signale d'ailleurs que, l'an dernier, le gouvernement précédent avait diminué des deux tiers la subvention prévue pour cet organisme.
    D'une manière plus générale, ce n'est pas par des rodomontades qu'il faut faire face à ces questions, qui sont très complexes. Je voudrais rendre hommage à nos personnels, professeurs, chefs d'établissement, à tous ceux qui sont confrontés, tous les jours, à ces problèmes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Qu'ils sachent que la détermination du Gouvernement est absolue : nous sommes derrière les enseignants, derrière nos cadres, derrière tout le personnel de l'éducation nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Manuel Valls. Darcos, derrière les grillages !

NOUVELLES MENACES TERRORISTES

    M. le président. La parole est à M. Jacques Kossowski, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. Jacques Kossowski. Ma question s'adresse au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    Très récemment, le réseau Al Qaïda de Ben Laden a lancé de nouvelles menaces terroristes, en particulier à l'adresse des pays occidentaux. D'après certains spécialistes du terrorisme, la liberté de circulation et la proximité avec le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord font de l'Europe un carrefour stratégique pour ce réseau activiste islamiste.
    Dans ce contexte, la France doit, bien évidemment, faire preuve de vigilance, sans pour autant sombrer dans la psychose, dans une démesure susceptible de faire le jeu de nos adversaires.
    Monsieur le ministre, je connais bien et j'apprécie votre détermination. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - « Bravo ! » et rires sur les bancs du groupe socialiste) à restaurer la sécurité intérieure.
    La lutte contre le terrorisme fait partie intégrante de cet objectif.
    M. Michel Delebarre. Avec des grillages ?
    M. Jacques Kossowski. D'ailleurs, je tiens à féliciter vos services ainsi que vous-même (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) pour l'intervention qui a permis, le week-end dernier, d'interpeller cinq islamistes soupçonnés d'être en relation avec une filière terroriste.
    Aussi, à la veille des fêtes de Noël, je souhaiterais que vous puissiez rassurer nos compatriotes en leur rappelant que des mesures adaptées à la situation, tant en matière de protection, de renseignement que de lutte anti-terroriste, ont bien été prises par le Gouvernement (« Allô ! allô ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Les sites sensibles, tels que les lieux touristiques, les infrastructures de transport, les grands centres commerciaux et industriels, ou encore les lieux de culte vont-ils faire l'objet dans les prochains jours d'une protection accrue ? (« Allô ! allô ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. Monsieur Kossowski, posez votre question !
    M. Jacques Kossowski. Par ailleurs, jeudi dernier, vous avez annoncé aux préfets, réunis au ministère de l'intérieur, votre souhait d'engager rapidement une refonte du plan Vigipirate, afin de l'adapter aux nouvelles formes de menaces. Qu'en est-il exactement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, s'il est un sujet qui ne prête pas à la polémique c'est bien celui-ci. L'action des services de police et de renseignement doit être saluée sur tous les bancs de cette assemblée car, naturellement, cette action n'appartient à personne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Au cours de la dernière semaine, il a été procédé à dix-neuf arrestations. Le 22 novembre, un certain Redouane Daoud et quatre de ses complices ont été arrêtés. Redouane Daoud était porteur d'un certain nombre de documents, dont la photo d'identité d'un individu inculpé dans l'affaire de l'assassinat du commandant Massoud. Et il était en train de reconstituer un réseau terroriste. Il était recherché par nos amis hollandais, puisqu'il s'était évadé d'une prison de Rotterdam. C'est donc un succès pour la police française qui doit être retenu comme tel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Le 25 novembre, ce fut le tour de Slimane Khalfaoui et de cinq membres de son entourage. La DST les soupçonne d'être en liaison avec le groupe dit de Francfort, qui préparait l'attentat de Strasbourg. Il avait heureusement fait l'objet d'une arrestation avant de pouvoir le commettre. Et, surtout, on soupçonne Slimane Khalfaoui d'être en relation avec le dénommé Rezzam, qui avait été arrêté en 1999, à la frontière canado-américaine, alors qu'il s'apprêtait à commettre un attentat à l'aéroport de Los Angeles.
    Enfin, le 26 novembre, huit nouvelles personnes ont été interpellées, car elles sont susceptibles d'avoir apporté de l'aide à Richard Reid, terroriste actuellement détenu aux Etats-Unis.
    Mesdames, messieurs les députés, ces nouvelles sont à la fois très encourageantes, parce qu'elles montrent la vigilance des services de police, et naturellement inquiétantes, car elles prouvent qu'il y a sur le territoire national un certain nombre de cellules, dont le moins qu'on puisse dire c'est qu'elles sont liées à des ramifications internationales du mouvement terroriste.
    Quelles conclusions en tirons-nous ? D'abord, qu'il faut faire preuve d'une extrême vigilance, renforcée encore à l'approche des fêtes de Noël, et pas seulement dans les grandes villes. De plus, la représentation nationale sera attentive à ce qu'il n'y ait aucun amalgame avec la communauté musulmane de France, qui n'a rien à voir avec les agissements d'individus gravement irresponsables. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Nous devons tous nous retrouver pour adresser un message de soutien aux forces de l'ordre et aux services de renseignements. (Vifs applaudissements sur les mêmes bancs.)

SITUATION ÉCONOMIQUE DU PAYS

    M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour le groupe socialiste.
    M. Gaëtan Gorce. Monsieur le Premier ministre, à peine élu à la tête de l'UMP, un de vos prédécesseurs s'est précipité à Londres pour dénigrer avec une rare violence notre système économique et social.
    Un député du groupe socialiste. Scandaleux !
    M. Gaëtan Gorce. M. Juppé n'a, en effet, pas hésité à faire le procès d'une France paresseuse « minée par une culture du non-travail ». (« Et c'est vrai ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Merci d'exprimer une fois encore votre sentiment, les millions de salariés apprécieront !
    D'une France qui serait « un repoussoir pour les investisseurs ». (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. C'est à vous que nous le devons !
    M. Gaëtan Gorce. Ces déclarations font suite aux propos que vous avez vous-même tenus, monsieur le Premier ministre, mercredi dernier, dans cet hémicycle faisant allusion sans précaution à une étude du forum de Davos évoquant des pertes de compétitivité de notre pays. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Ces déclarations sont particulièrement choquantes et graves ! D'abord, parce qu'elles sont fausses et aussi parce quelles reposent sur des arguments erronés. Je n'en prendrai qu'un exemple : une étude de l'OCDE, publiée voici quelques jours, rappelle que la France avait recueilli, en 2001, 52,6 milliards de dollars d'investissements directs étrangers, soit 23 % de plus qu'en 2000, alors que dans l'ensemble de l'OCDE le total des investissements extérieurs a baissé de moitié. Et la Banque de France vient de nous indiquer que ces investissements auront augmenté de 16 % dans les neuf premiers mois de 2002, ce qui contredit l'ensemble des déclarations que vous faites sur ce sujet.
    Mme Françoise de Panafieu. N'importe quoi !
    M. Gaëtan Gorce. Ce qui est grave aussi, c'est qu'en dénigrant ce bilan, vous dénigrez le travail des salariés et des entreprises de France (« Zéro ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) qui, pendant les cinq dernières années, ont contribué à la création de plus de deux millions d'emplois, et vous sapez la confiance. (« Mais non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Plus grave et plus choquant encore, vos déclarations continues ont certainement pour but de fournir le prétexte à une remise en cause d'un certain nombre de lois sociales et d'avantages sociaux, comme vous avez d'ailleurs commencé à le faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. M. Gorce, posez votre question, s'il vous plaît.
    M. Gaëtan Gorce. Monsieur le président, vous aurez noté que j'ai été interrompu !
    M. le président. Monsieur Gorce, c'est moi qui dirige les débats ! Posez votre question, et tout se passera bien.
    M. Gaëtan Gorce. Mes questions sont simples. Quand sera-t-il possible d'avoir, dans cet hémicycle, un débat solide et sérieux, sans caricature, sur la situation de ce pays, un débat qui permette de travailler à préparer l'avenir plutôt que de polémiquer sur le passé ?
    M. le président. Merci, monsieur Gorce, vous avez épuisé votre temps de parole.
    M. Gaëtan Gorce. Aurez-vous, monsieur le Premier ministre, l'autorité politique pour demander au président...
    M. le président. Monsieur Gorce, vous n'avez plus la parole !
    La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains).
    Le règlement est le même pour tout le monde !
    Répondez, monsieur le ministre.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, je ne vois aucune objection à ce qu'un débat sur le sujet ait lieu dans cet hémicycle, le moment venu. (« Quand ? » sur les bancs du groupe socialiste.) Et je fais confiance au président de l'Assemblée pour l'organiser quand il le voudra. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est à vous de le faire !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je considère cependant que le problème est trop important pour n'être qu'un enjeu partisan. Il est clair que notre pays a des atouts incontestables. Je serai le dernier à prétendre le contraire.
    Mme Martine David. Dites-le à Juppé !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cependant, ces atouts font l'objet d'une compétition permanente avec ceux des autres pays : c'est la règle du jeu du monde économique actuel. Il est donc absolument nécessaire, dans l'intérêt de notre pays, de nos enfants, de nos entreprises et, bien sûr, de nos emplois, de faire tout ce que nous pouvons pour améliorer la compétitivité et l'attractivité du territoire.
    M. Michel Delebarre et M. Bernard Derosier. Dites-le à Juppé !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Vous ne comprenez pas - certains d'entre vous, au moins ! - l'importance de la perception. Dans le monde d'aujourd'hui, en matière économique en particulier, c'est la perception qui crée l'événement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Quand 5 000 chefs d'entreprise étrangers ont une perception négative de notre pays, c'est une mauvaise nouvelle. Et je puis vous l'assurer, le Gouvernement prendra les décisions - nous en discuterons au début de l'année prochaine - ...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Un débat !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... propres à modifier non seulement la réalité mais aussi la perception de cette réalité, ce qui est tout aussi important. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

CRÉDIT LYONNAIS

    M. le président. La parole est à M. Yves Deniaud, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. Yves Deniaud. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. (« Encore ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Oui, encore !
    La cession rapide, ouverte et transparente des 10,9 % de part du Crédit lyonnais que l'Etat détenait encore a été un gros succès. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Un député du groupe socialiste. Vous l'avez faite en cachette !
    M. Yves Deniaud. Un prix de l'action égal à une fois et demie celui du dernier cours et supérieur de 8 euros au plus haut niveau historique jamais atteint par cette valeur, c'est exceptionnel, surtout dans le climat actuel de la Bourse. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Et cela rend d'autant plus dérisoires les propos de votre prédécesseur qui nous avait pourtant habitué à plus de mesure. Et l'on pourrait utilement comparer ce résultat à ses propres performances.
    M. François Goulard. Oui !
    M. Yves Deniaud. C'est la première bonne nouvelle en dix ans du lamentable feuilleton de ce qui fut le plus gros désastre de la gestion socialiste des entreprises nationales, jusqu'à la révélation - récente - de celui de France Télécom. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - « Honteux ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Monsieur le ministre, ma question est double. D'abord, pouvez-vous nous indiquer l'ordre de grandeur de la facture du Crédit lyonnais pour le contribuable ?
    M. Patrick Labaune. Il faut le demander à Tapie !
    M. Yves Deniaud. Ensuite, quelles conclusions tirez-vous du succès de samedi pour les privatisations futures (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) et pouvez-vous préciser vos déclarations sur l'utilisation qui sera faite des 2,2 milliards d'euros ainsi obtenus fort opportunément ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, les éléments positifs de votre appréciation, nous devons d'abord les porter au crédit de la banque (Ah ! sur les divers bancs du groupe socialiste) car c'est le Crédit lyonnais qui, malgré ses malheurs passés, a su depuis plusieurs années remonter la pente et créer les conditions qui ont rendu possible la valorisation assez exceptionnelle de samedi soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Je tiens à le souligner, car une partie des 2,2 milliards d'euros sera destinée à diminuer l'endettement de l'établissement public de financement et de restructuration - EPFR - qui a pris en charge, à hauteur de 8,5 milliards de dettes, ce qui reste de l'histoire passée malheureuse du Crédit lyonnais.
    Quant au reste de cet argent, il servira à diminuer l'endettement d'autres entreprises publiques - à hauteur de 1,7 milliard, y compris l'EPFR. Et nous avons décidé que 500 millions pourraient être imputés au fonds de réserve des retraites, afin de contribuer à rétablir la crédibilité de notre système de retraite par répartition. Ce fonds ne dispose pour l'instant que de 8 milliards d'euros, mais nous espérons augmenter cette somme demain.
    Pour ce qui est de tirer des conséquences de cette affaire pour les autres mises sur le marché ou privatisation, je vous répondrai qu'à chaque cas correspondra un comportement particulier. Car nous devons être pragmatiques. La solution adoptée pour le Crédit lyonnais n'a pas vocation à être systématisée, ce qui ne veut pas dire que nous l'excluions pour d'autres cas. Mais nous les traiterons un par un, en toute responsabilité et en toute transparence, avec détermination, dans le cadre de la politique générale affichée par le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

OUVERTURE DES MARCHÉS DU GAZ ET DE L'ÉLECTRICITÉ

    M. le président. La parole est à M. François-Michel Gonnot, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. François-Michel Gonnot. Madame la ministre déléguée à l'industrie, vous avez signé lundi dernier un compromis avec vos collègues européens de l'énergie sur l'ouverture des marchés du gaz et de l'électricité, ouverture qui interviendra, donc, en 2004 pour les professionnels et le 1er juillet 2007 pour les ménages.
    M. Christian Bataille. Vous allez vendre EDF !
    M. François-Michel Gonnot. Enfin, dans ce dossier, la France a rompu avec son isolement.
    M. Christian Bataille. Vous bradez le service public !
    M. François-Michel Gonnot. Enfin, la France est sortie de son immobilisme. Enfin, la France n'est plus le grincheux de l'Europe. Elle a retrouvé sa place et son rôle moteur, avec l'Allemagne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Christian Bataille. Un rôle moteur dans la braderie du service public !
    M. François-Michel Gonnot. Le groupe UMP, madame la ministre, tient à vous rendre hommage et à vous féliciter (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) pour la façon dont ce compromis a été conclu. Il nous permettra de tirer les bénéfices de l'ouverture progressive et maîtrisée des marchés de l'énergie...
    M. Christian Bataille. C'est la porte ouverte à la privatisation !
    M. François-Michel Gonnot. ... tout en restant fidèles aux principes d'égalité et de solidarité qui sont les fondements mêmes du service public à la française auquel nous sommes attachés. (« Très bien ! Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Madame la ministre, nous allons enfin transposer, avant la fin de l'année, la première directive gaz, ce qui aurait dû être fait depuis quatre ans et demi,...
    M. André Gerin. Mensonge !
    M. François-Michel Gonnot. ... et nous nous en félicitons.
    M. Alain Néri. C'est la grande braderie !
    M. François-Michel Gonnot. Pourriez-vous nous préciser les nouvelles avancées obtenues à Bruxelles et leurs modalités d'application ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Christian Bataille. Allô !
    M. André Gerin. Ce sont des bradeurs !
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, je voudrais vous remercier très sincèrement de l'appréciation positive (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) que vous avez bien voulu porter sur les résultats du Conseil énergie de lundi dernier.
    M. François Brottes. C'était un renoncement !
    M. Christian Bataille. Vous avez cédé sur tout !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Les choses n'étaient pas faciles, c'est vrai. La présidence danoise était tout à fait déterminée à conclure, et la France était très isolée.
    M. Manuel Valls. Vous n'avez pas fait entendre la parole de la France !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Nos quatorze partenaires étaient tout à fait d'accord avec le texte proposé. Dans ce contexte, on ne peut que se réjouir que le compromis final ait intégré les exigences que nous avions formulées, notamment en matière de service public et de délais. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Christian Bataille. Vous avez tout lâché !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Sur le point le plus délicat, c'est-à-dire la séparation légale, j'ai infiniment apprécié la coopération franco-allemande. Cette solidarité nous a permis d'obtenir de bons résultats.
    Enfin, sur le calendrier, j'espère vivement que la directive sur le gaz pourra être transposée avant la fin de l'année, avec votre concours, monsieur le député, ainsi qu'avec celui de l'ensemble de votre assemblée. Et je peux vous dire qu'hier, à Malaga, le ministre de l'industrie espagnol m'a assuré qu'il allait dès maintenant donner des instructions très claires pour que, compte tenu de la bonne volonté de la France (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), Gaz de France puisse poursuivre le développement de ses activités en Espagne. Je crois que cela illustre d'une façon très éclairante les perspectives très positives qui s'offrent à nos entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jacques Desallangre. Ce sont des bradeurs !

LIBÉRALISATION DU MARCHÉ DE L'ÉLECTRICITÉ

    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand, pour le groupe socialiste.
    M. Jean-Pierre Balligand. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'industrie et porte également sur la libéralisation du marché de l'électricité.
    Il y a deux jours, à Bruxelles, les quinze pays de l'Union européenne ont décidé de libéraliser le marché du gaz, mais aussi celui de l'électricité à l'horizon de 2007. La France a donc accepté une ouverture de ces marchés, notamment pour les particuliers. En tant que ministre de l'industrie chargée de l'énergie, vous avez participé, madame la ministre, à la fixation de la date du 1er juillet 2007 pour la libéralisation totale de ces marchés. Les principes fondateurs du service public, l'universalité, la continuité du service et l'égalité des citoyens sont mis en danger, mis à mal par cette décision. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle).
    Un député du groupe socialiste. Bien sûr !
    M. François Goulard. Peut-on savoir en quoi ?
    M. Jean-Pierre Balligand. Avez-vous obtenu la directive des services d'intérêt général, dont le principe avait été admis au moment de l'accord de Barcelone ? Tous les citoyens pourront-ils toujours avoir accès, dans les mêmes conditions et au même prix, à l'électricité ?
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Non !
    M. Jean-Pierre Balligand. Et pour être encore plus précis, madame la ministre, l'élu rural que je suis vous demande tout simplement si les habitants des territoires ruraux vont devoir faire les frais de cette libéralisation...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Oui !
    M. Jean-Pierre Balligand. ... et de la rupture du principe d'égalité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, ne comptez pas sur moi...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. En effet, on ne compte pas sur vous !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. ... pour polémiquer sur un sujet aussi important. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Je me limiterai donc au fond du débat. Dans cette négociation, que voulait le Gouvernement ? Il voulait tout d'abord garantir le service universel de l'électricité.
    Mme Martine David. C'est raté !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Ce point est acquis : jamais aucun texte communautaire n'a été aussi loin s'agissant des missions de service public qui s'imposeront aux opérateurs.
    Je vous ai apporté, monsieur le député, le chapitre II, article 3, du document qui a été adopté. Il y a, en tout petits caractères, pas moins de six pages consacrées à la garantie du service public. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes.) Je vous invite à les lire très attentivement, ainsi que tous ceux de vos collègues qui seraient intéressés. Vous y trouverez la réponse à toutes les questions que vous m'avez posées. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Bruno Le Roux. Quel mépris ! C'est lamentable !
    M. Christian Bataille. On n'a jamais vu ça ! C'est scandaleux !

PROGRAMME DE CONSTRUCTION
D'ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES

    M. le président. La parole est à M. Paul-Henri Cugnenc, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. Paul-Henri Cugnenc. Monsieur le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice, vous avez présenté très récemment devant la presse un ambitieux programme de construction de 13 200 places en établissements pénitentiaires. Le Gouvernement tient les engagements pris devant notre assemblée lors de la discussion de la loi d'orientation et de programmation pour la justice que nous avons adoptée le 3 août dernier.
    Cette loi dote la justice des moyens budgétaires nécessaires qui ne lui avaient pas été attribués par le gouvernement précédent.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Bravo !
    M. Paul-Henri Cugnenc. Elle fixe les objectifs prioritaires qui répondent à la très forte attente de nos concitoyens, pour rétablir et assurer la sécurité ainsi que l'autorité de l'Etat dans notre pays.
    Dans ce cadre, le renforcement de notre capacité de mise à exécution des peines et l'amélioration tant des conditions de détention que des conditions de travail du personnel pénitentiaire témoignent de la volonté de mettre un terme à la surpopulation carcérale et d'engager une véritable rénovation de notre outil pénitentiaire.
    M. Michel Delebarre. La question !
    M. Paul-Henri Cugnenc. Nous nous félicitons et plus précisément, nous vous félicitons, monsieur le secrétaire d'Etat (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), de la création d'établissements pénitentiaires pour mineurs, nouvel échelon dans le traitement d'une délinquance inquiétante qui nécessite des solutions nouvelles. Le rapport de la commission d'enquête parlementaire rendu en 2000, mesdames et messieurs de l'opposition, marque la préoccupation constante de notre assemblée sur l'état matériel et le nombre des établissements pénitentiaires en France. Et la mission qui vous a été confiée, monsieur le secrétaire d'Etat, par le Président de la République et le Premier ministre sous l'autorité du garde des sceaux (« La question ! » sur les bancs du groupe socialiste), confirme la même détermination au plus haut niveau de l'Etat. On constate aujourd'hui ses premiers effets.
    Vous me permettrez néanmoins, monsieur le secrétaire d'Etat,...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. La question !
    M. le président. Monsieur Cugnenc, je vous permets de poser votre question !
    M. Paul-Henri Cugnenc. ... de vous faire part d'une certaine préoccupation relative aux délais de réalisation et de construction des établissements. Sur les six établissements prévus en 1975,...
    M. le président. Monsieur Cugnenc, je vous laisserai poursuivre si vous posez votre question. Sinon, je vous interromps, comme je l'ai fait tout à l'heure pour l'un de vos collègues.
    M. Paul-Henri Cugnenc. Oui, monsieur le président.
    Sur les six établissements prévus, donc, deux seront livrables au début de l'année 2003, et le chantier de deux autres débute à peine. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaiterais savoir (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) si, dans la réalisation de ce programme, vous avez l'intention d'être aussi ferme, aussi efficace et aussi rapide que dans sa conception...
    M. le président. Merci, monsieur Cugnenc.
    M. Paul-Henri Cugnenc. ... et je vous remercie de faire connaître à la représentation nationale...
    M. le président. Je vous remercie, monsieur Cugnenc. Nous avons compris le sens de votre question.
    La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice.
    M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Monsieur le député, en réponse à la question que vous avez posée concernant la rapidité d'exécution du programme que le garde des sceaux et moi-même avons présenté, je voudrais vous dire que dans la loi que vous avez votée, vous nous avez donné les moyens législatifs d'aller vite, grâce à des procédures nouvelles : la conception-réalisation, le crédit-bail et la location-vente. Le Premier ministre et le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire nous ont donné des moyens financiers considérables avec, dès cette année - M. le garde des sceaux vous le confirmera - le doublement des autorisations de programme. Nous sommes en train de nous donner les moyens humains qui nous permettront, en 2003 (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), après avis du CSM...
    M. François Hollande. D'acheter votre prison ! (Sourires.)
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. ... de réunir les jurys de concours et de lancer les appels d'offres sur tous les établissements. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) En 2004, nous pourrons notifier les marchés et déposer les permis de construire et, en 2005, commenceront les travaux qui permettront de livrer les premiers établissements en 2006. Tout cela étant cadencé jusqu'en 2008. Autrement dit, nous diviserons par deux le rythme auquel nos prédécesseurs nous avaient habitués. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Je tiens donc à dire à la représentation nationale ici réunie que non seulement c'est un souci de rapidité qui nous guide,...
    M. Maxime Gremetz. La réponse, monsieur le président !
    M. le secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. ... mais c'est aussi un souci d'humanité. Car nos établissements pénitentiaires sont dans un état lamentable, comme les rapports parlementaires l'ont déjà souligné ! Et je tiens à dire, monsieur le député, que vous avez ici un gouvernement qui a rompu avec la politique de l'incantation pour passer à la politique de l'action ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

NAUFRAGE DU PÉTROLIER PRESTIGE

    M. le président. La parole est à M. Jean Grenet, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. Jean Grenet. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Madame la ministre, il y a huit jours, le pétrolier libérien Prestige s'est brisé en deux. Il a sombré mercredi dernier à 250 kilomètres au large des côtes de la Galice et gît par plus de 3 000 mètres de fond, contenant dans ses soutes deux fois le tonnage de fioul de l'Erika. Construit en 1976, pétrolier à coque unique, il était un des plus vieux tankers encore en service. Par ailleurs, et comme de bien entendu, il naviguait sous pavillon de complaisance. Avant qu'il ne se brise en deux, ce sont près de 10 000 tonnes de fioul qui sont venues souiller plusieurs dizaines de kilomètres de côtes espagnoles. Un véritable désastre écologique touche aujourd'hui les côtes de la Galice. Demain, probablement, sous l'effet des courants ascendants, ce sera la côte basque et le littoral aquitain, où l'inquiétude est bien sûr très grande. Le Boehlen et l'Olympic Bravery en 1976 ; l'l'Amoco Cadiz en 1978 ; le Tanio en 1980 ; l'Erika fin 1999 - douloureux souvenir pour nos amis bretons ; le Prestige, aujourd'hui : quel sera le prochain, où et quand ?
    Madame la ministre, nos concitoyens sont exaspérés. Ils sont en colère. A juste raison, ils admettent mal qu'en vingt-cinq ans, des dispositions efficaces n'aient pu être mises en place pour éliminer ces catastrophes écologiques et économiques majeures.
    Vous le savez, nous le savons tous, il n'y a de vraie solution que dans la prévention. Dès lors, pouvez-vous, madame la ministre, nous fournir des informations précises tout d'abord sur les mesures que la France entend prendre pour que la côte basque et le littoral aquitain ne soient pas à leur tour touchés par cette catastrophe ?
    Ensuite, et si, par malheur, celle-ci ne pouvait être évitée, quel est le dispositif prévu pour en réparer les conséquences ?
    Et en dernier lieu, que compte faire la France pour qu'au niveau de l'Union européenne les dispositions prises soient enfin appliquées et que d'autres, plus contraignantes, soient décidées immédiatement sans attendre 2015 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député-maire de Bayonne, je comprends l'inquiétude des élus de toute la côte atlantique, et spécialement de la côte aquitaine. Je me suis rendue hier en Galice pour exprimer la solidarité de la France à l'Espagne et tout spécialement à la Galice, meurtrie par cette catastrophe écologique et économique. Cela a été aussi pour moi l'occasion de vérifier que la coopération entre la France et l'Espagne marchait bien. J'ai pu aller inspecter les nappes à bord d'un avion Polmar qui a des moyens embarqués extrêmement importants, et aller saluer les marins des bateaux dépollueurs de la Marine nationale, l'Ailette et l'Alcyon. Je crois que nous pouvons tous féliciter ces personnels français pour leur implication et leur compétence. Il y a également des personnels de la préfecture maritime au PC de crise de La Corogne, ainsi que les techniciens du CEDRE, le Centre de documentation, de recherche et d'expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux.
    Nous avons deux motifs d'inquiétude supplémentaires. En effet, il a été repéré une nappe d'hydrocarbures extrêmement importante au droit du cap Ortegal, c'est-à-dire sur la côte cantabrique. De plus, nous avions l'espoir qu'après le naufrage du Prestige, le pétrole se figerait par le fond : il n'en est rien, il y a encore des fuites de cargaison. D'ailleurs, l'IFREMER va envoyer son bathyscaphe Nautile. Il sera sur place dès dimanche prochain. Il procédera tous les jours à une plongée pour aller vérifier la coque et les fuites éventuelles de matériel de fuel.
    Qu'allons-nous faire grâce à tous ces moyens ? Nous surveillons la nappe de façon extrêmement précise et extrêmement continue. Mais nous ne pouvons prévoir les mouvements qu'à quarante-huit heures, à cause des problèmes de météorologie et de courantologie.
    Pour parer à toute éventualité, j'ai envoyé des instructions aux préfets de l'ensemble de la côte atlantique, ainsi qu'aux deux préfets de zones de défense, pour que les moyens de protection soient mis en oeuvre sur les sites protégeables, pour qu'un état écologique de référence soit fait afin de permettre aux procédures d'indemnisation d'aboutir au plus vite. Il faut mobiliser tous les experts autour des DIREN, les directions régionales de l'environnement, et en particulier le monde associatif. Il faut aussi, bien sûr, assurer la gestion des déchets et la mobilisation des bénévoles.
    Tout cela vient en écho au sommet franco-espagnol de Malaga auquel participait le Président de la République, avec Jose Maria Aznar, avec le Premier ministre et de nombreux autres ministres. Il a été préparé un paquet franco-espagnol de mesures extrêmement substantielles que nous allons proposer à nos collègues, d'abord au Conseil des ministres des transports, les 5 et 6 décembre, auquel participera Gilles de Robien. Moi-même, je défendrai le volet environnemental au Conseil des ministres de l'environnement, les 10 et 11 décembre. Et, bien sûr, le Président de la République, au sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de Copenhague, défendra ce paquet franco-espagnol auprès de nos collègues de l'Union européenne.
    Nous voulons, monsieur le député Jean Grenet, que tout cela cesse. Je partage avec vous votre rage et votre colère. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Eric Raoult.)

PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,
vice-président

    M. le président. La séance est reprise.

2

LOI DE FINANCEMENT
DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2003

Transmission et discussion du texte
de la commission mixte paritaire

    M. le président. M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

Paris, le 26 novembre 2002    

            « Monsieur le président,
    « Conformément aux dispositions de l'article 45, alinéa 3, de la Constitution, je vous demande de soumettre à l'Assemblée nationale, pour approbation, le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.
    « Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »
    En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire (n° 394).
    Je rappelle qu'à l'issue de cette discussion, le vote aura lieu par scrutin public, conformément à la décision prise par la conférence des présidents en application de l'article 65-1 du règlement.
    La parole est à M. le rapporteur de la commission mixte paritaire.
    M. Yves Bur, rapporteur de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd'hui pour adopter le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. En effet, celle-ci est parvenue, au cours de sa réunion d'hier matin, à l'adoption d'un texte commun à l'Assemblée nationale et au Sénat.
    En première lecture, du 28 au 30 octobre dernier, l'Assemblée nationale avait adopté treize articles additionnels et supprimé deux articles du projet de loi. Quant au Sénat, il a voté conformes quarante et un des soixante et un articles dont il était saisi, en a supprimé quatre et en a adopté onze nouveaux.
    La commission mixte paritaire a donc examiné hier les trente-trois articles restant en discussion. Sans surprise, elle est parvenue à un accord, qui est aujourd'hui soumis à l'approbation de l'Assemblée et qui le sera demain à celle du Sénat, afin de respecter les délais constitutionnels.
    Les deux assemblées sont tombées d'accord pour créer l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, l'OPEPS, promu par le président Jean-Michel Dubernard.
    M. Bernard Accoyer. Bravo ! Un grand président !
    M. Yves Bur, rapporteur. Afin de rassurer le Sénat, qui craignait que l'office n'empiète sur les compétences de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, lesquelles appartiennent aux commissions des affaires sociales de chaque assemblée, il a été prévu de centrer les missions de l'office sur la santé publique, ce qui permettra notamment de le faire participer à la prochaine définition du panier de soins et de le faire présider alternativement chaque année par le président d'une des deux commissions citées précédemment.
    En ce qui concerne le contrôle et l'évaluation de la gestion des hôpitaux publics par la Cour des comptes, l'initiative de l'Assemblée nationale a été préservée. Nous devons pouvoir disposer d'évaluations synthétiques et comparatives des centres hospitaliers régionaux, afin de mieux suivre l'ONDAM. Nous n'avons jamais voulu remettre en cause les compétences des chambres régionales des comptes, ce que confirme la rédaction que nous avons adoptée en commun avec le Sénat.
    Plusieurs demandes visant à la production de rapports, formulées par le Sénat, mais qui correspondent à des souhaits - parfois non exprimés - de l'Assemblée nationale, ont été retenues. Ces rapports concernent notamment le suivi des recommandations de la Cour des comptes et l'évaluation de la réduction de l'assiette des cotisations sociales, ce qui satisfera particulièrement M. Maxime Gremetz.
    Je regrette pour ma part que la commission mixte paritaire n'ait pas retenu le texte de l'Assemblée nationale visant à porter à 108 euros le minimum de perception sur les cigarettes. Se contenter d'une augmentation de 106 euros risque fort de ne pas permettre d'atteindre l'objectif de santé publique poursuivi par le Gouvernement et par nous tous et qui est de réduire la consommation de tabac par une forte croissance des prix de celui-ci. Je crains que l'augmentation des prix du tabac de 15 %, qui a été annoncée, ne soit in fine pas réalisée, ce qui sera dommageable non seulement pour les recettes de la sécurité sociale, mais surtout pour la santé de nos concitoyens. Je vous donne rendez-vous au printemps, monsieur le ministre, lors de l'examen du collectif « sanitaire et social » : vous pourrez alors constater, hélas, que j'avais raison et que nous devions nous montrer plus durs avec les fabricants de tabac, qui cherchent toujours et encore, en dépit de la croissance très importante de leurs profits, à augmenter leurs marges sur le dos de la santé des fumeurs.
    Autre sujet de préoccupation de santé publique : les bières fortes qui incitent à la soûlerie et qui sont à l'origine des troubles à l'ordre public. Elles seront soumises à une nouvelle taxe spécifique, destinée à tuer ce marché. La commission mixte paritaire a fixé à 8,5 % le seuil de taxation de ces bières, afin de respecter le droit communataire, tout en préservant certaines bières artisanales qui respectent le code éthique des brasseurs.
    L'Assemblée et le Sénat sont tombés d'accord pour donner, à l'article 6, une définition précise de la presse médicale exonérée de la taxe sur la promotion, en prévoyant que l'exonération serait accordée non seulement aux publications bénéficiant d'un numéro de commission paritaire mais aussi à celles faisant l'objet d'un agrément ministériel défini dans des conditions fixées par décret. Tout risque de dérive sera ainsi évité.
    Nous avons surtout décidé de supprimer la taxe sur les ventes directes, ce qui permettra de rendre plus dynamique et plus concurrentiel le circuit de la distribution du médicament.
    Voilà pour ce qui concerne les recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale. S'agissant des autres dispositions du texte, elles comportaient moins de « points durs » nécessitant un arbitrage avec le Sénat.
    Pour ce qui est de la branche maladie, nous avons considéré, comme le Sénat, que le Gouvernement était seul responsable de l'exécution de l'ONDAM. L'article 16 prévoit donc que le Gouvernement devra rendre compte directement au Parlement quand il approuvera des conventions tarifaires avec les professionnels de santé.
    Nous nous sommes félicités que l'article 23 bis affirme le principe de la permanence des soins, en raison de l'intérêt général de la santé. Toutefois, je m'interroge sur la nécessité d'appliquer également ce principe à toutes les professions de santé et pas seulement aux médecins et aux ambulanciers - je pense notamment aux chirurgiens-dentistes et aux infirmières.
    Nous avons fait preuve de sagesse et de réalisme en maintenant à la fin de l'année 2005 la date limite de signature des conventions tripartites pour les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes. Le choix du 31 décembre de 2004 n'aurait pas été raisonnable, car cette date n'aurait pas pu être respectée.
    La commission mixte paritaire a suivi le Sénat en ce qui concerne les génériques, le tarif forfaitaire de remboursement, les remises accordées aux pharmaciens et la date de cessation du MICA - mécanisme d'incitation à la cessation anticipée d'activité.
    Enfin, s'agissant de la branche famille, le Sénat a accepté, à ma demande, de revenir sur la disposition qu'il avait adoptée à l'initiative de M. Alain Vasselle et qui tendait à créer un fonds de réserve pour les excédents de la branche. En effet, l'institution d'un fonds de réserve propre à la branche famille n'est pas opportune en raison de l'existence d'un fonds de roulement. Pour autant, il est essentiel, monsieur le ministre, que le Gouvernement s'engage résolument en faveur d'une politique ambitieuse et de la clarification du financement de la sécurité sociale.
    Je souhaite vraiment, en accord avec le Sénat, que les parlementaires soient pleinement associés au groupe de travail qui sera mis en place par le Gouvernement pour remettre à plat les relations entre l'Etat et la sécurité sociale, pour supprimer le FOREC et pour instituer une nouvelle gouvernance de la sécurité sociale. J'attends de vous, nous attendons de vous, monsieur le ministre, des engagements fermes en la matière, car il n'est plus possible de continuer dans la confusion des responsabilités et des comptes entretenue par la précédente majorité.
    Mes chers collègues, je vous demande donc d'adopter ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 dans le texte de la commission mixte paritaire. Il s'agit d'un bon compromis avec le Sénat. Il s'agit surtout d'une première étape, transitoire, dans la voie de la clarification des finances sociales et de la responsabilisation de l'ensemble des acteurs de la sécurité sociale et de l'assurance maladie. Nous traçons aujourd'hui le chemin sur lequel nous allons, au cours de la législature prometteuse que nous entamons, nous engager afin de remettre en ordre notre sécurité sociale, pour le bénéfice de tous nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, dans quelques instants aura lieu le vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. Il marquera la fin de l'examen par l'Assemblée nationale du premier projet de loi de financement de la sécurité sociale de ce gouvernement.
    Comme je vous l'ai dit au début de l'examen de ce texte, la sécurité sociale est au coeur de la vie des Français. Je crois que vous en êtes tous convaincus, comme la majorité de nos concitoyens. Or notre système traverse actuellement une crise majeure : financière évidemment, mais en fait bien plus profonde, comme le montre la situation des conseils d'administration des diverses caisses. De nombreux acteurs sont démotivés et s'interrogent sur leur rôle, tandis que les Français s'inquiètent de l'avenir de la protection sociale. Nous souhaitons tous surmonter ces difficultés. Le Gouvernement s'est engagé dans la voie de la réforme : le présent projet de loi en est en quelque sorte le point de départ.
    Je retiens des débats qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale et au Sénat - dont je souligne la qualité du travail - qu'ils ont permis d'esquisser les voies de réforme possibles. Cette confrontation des idées, ainsi que celle des différents partenaires, permet de tracer des pistes d'évolution de notre système de sécurité sociale. A cet égard, je me félicite du ferme soutien de la majorité gouvernementale au principe d'action retenu par le Gouvernement.
    Il faut d'abord clarifier les compétences des uns et des autres : la réforme de la gouvernance que nous mènerons ensemble doit le permettre.
    Il convient aussi d'apporter plus de transparence au financement. Je sais que certains membres de l'Assemblée et du Sénat auraient souhaité que le Gouvernement aille plus vite. Toutefois, vous avez tous compris les contraintes auxquelles est soumis le Gouvernement. Cela dit, je souhaite donc renouveler mon engagement de travailler le plus rapidement possible sur ce sujet avec le Parlement, via un groupe de travail ad hoc. Ce dernier devra notamment examiner le financement de la branche famille, conformément au souhait de M. Bur.
    M. Yves Bur, rapporteur. Merci !
    M. Bernard Accoyer. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il faut responsabiliser tous les acteurs, et j'ai noté que c'était l'un des points qui nous séparaient de l'opposition. Je le répète, c'est grâce à la responsabilisation de l'ensemble des acteurs, de l'Etat, des gestionnaires - assurances de base et assurances complémentaires - des offreurs de soins et des patients, que nous réussirons la réforme. Nous nous devons d'adopter une telle politique équilibrée pour ne pas échouer.
    Des discussions que nous avons eues, je retiens ensuite avec plaisir l'impression qu'un consensus se dessine autour des idées que j'ai développées. Vous êtes tous conscients des difficultés de notre système et vous voulez l'améliorer. Vous avez remarqué que, même si de bonnes mesures ont été prises par les différents gouvernements qui se sont succédé depuis vingt ans, ceux-ci n'ont pas réussi à mener à bout cette réforme.
    Vous avez accepté la suppression de mécanismes comptables peu opérants, mis en place par les uns et par les autres. Vous avez aussi reconnu ma volonté de remettre au premier plan la politique de santé publique. A cet égard, je m'engage à vous présenter dans les prochains mois la loi quinquennale de santé publique.
    Enfin, je ne peux que me satisfaire du texte tel qu'il a été enrichi par le travail de votre Assemblée et du Sénat et dont le rapporteur de la commission mixte paritaire, M. Bur, vient de faire la présentation.
    J'aimerais d'ailleurs insister sur quelques amendements que je trouve particulièrement dignes d'intérêt. La création de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé témoigne de votre intérêt pour la politique de santé publique et le rôle que doit jouer le Parlement en la matière. De même, les différents amendements adoptés sur les articles relatifs aux médicaments contribueront à accroître l'efficacité de la politique menée par le Gouvernement et à la clarifier. Enfin, l'amendement relatif à l'organisation de la permanence des soins permettra aux acteurs d'assurer ensemble une véritable continuité des soins.
    Pour conclure, j'aimerais revenir sur la qualité des débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle. Ayant moi-même participé comme député aux débats parlementaires pendant de nombreuses années,...
    M. Bernard Accoyer. Et avec quel brio !
    M. François Goulard. Nous nous en souvenons, tous !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... vous connaissez mon attachement à un tel climat. La qualité de ces débats est à mettre d'abord au compte du président et des vice-présidents,...
    M. Bernard Accoyer. C'est vrai !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... qui ont conduit ces débats avec souplesse et, en tant que de besoin, avec fermeté. Je les en remercie.
    Je voudrais aussi remercier le président de la commission des affaires sociales, M. Dubernard...
    M. Bernard Accoyer. Il a été excellent !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ...et les rapporteurs : Mme Clergeau, MM. Bardet, Bur et Jacquat, ainsi que le rapporteur pour avis de la commission des finances, M. Goulard. Leurs travaux, réalisés dans des conditions pourtant très contraignantes, sont remarquables et ont réellement permis d'approfondir notre réflexion.
    M. Jean-Marie Le Guen. Et M. Barrot, vous ne le remerciez pas ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. J'aimerais enfin remercier votre assemblée et le Sénat. Ils ont montré leur attachement pour la sécurité sociale et leur intérêt pour la politique que je mène. Le Gouvernement se félicite du soutien de sa majorité, qui l'oblige. Soyez assurés, mesdames et messieurs, de notre détermination à réformer notre sécurité sociale.
    J'aimerais aussi saluer l'opposition. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Ses remarques...
    M. Maxime Gremetz. Pertinentes !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... non dénuées de pertinence ont permis au Gouvernement de mieux expliquer sa politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme Jacqueline Fraysse. Nous avons apporté beaucoup d'idées !
    M. Maxime Gremetz. Et ce n'est pas fini !

Exception d'irrecevabilité

    M. le président. J'ai reçu de M. Alain Bocquet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains une exception d'irrecevabilité, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.
    La parole est à M. Maxime Gremetz, pour une durée ne pouvant excéder trente minutes.
    M. Jean-Marie Le Guen. Peut-être ! On verra...
    M. Bernard Accoyer. C'est court, pour lui !
    M. Maxime Gremetz. Je vais faire très court. Et si vous insistez, je ferai très, très court. (« Nous insistons ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

    D'abord, je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir dit que nous avions des idées pertinentes. Le problème, c'est que vous n'en tenez pas compte (Sourires sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains) et c'est bien dommage.
    Nous examinons en deuxième lecture, sous une forme particulière, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.
    Le passage de ce texte devant le Sénat n'a fait que confirmer les craintes que nous avions sur les intentions du Gouvernement et sur sa volonté de « ne pas faire », pour, ensuite, mieux s'emparer des grands problèmes qui se posent afin de porter un coup fatal aux principes qui président au fonctionnement de notre sécurité sociale.
    Vous nous présentez un texte qui a été modifié à la marge par la Haute assemblée et tel qu'il a été adopté à l'issue d'une CMP sans surprise. En conséquence, demeurent les effets d'annonce, l'absence coupable de réponses concrètes aux problèmes posés et l'ignorance persistante d'autres solutions que celle, fatale, que vous voulez nous imposer. Pis, ont été confortés les dangers pour l'avenir de notre système.
    Pour l'essentiel, votre projet, monsieur le ministre, ne comporte rien qui puisse améliorer la protection sociale de nos concitoyens.
    M. Jean-Marie Le Guen. Tout au contraire !
    M. Maxime Gremetz. Dès lors, il est autant irrecevable pour ce qu'il ne contient pas que pour ce qu'il contient.
    Néanmoins, une chose est claire de notre point de vue : vous placez les pions sur l'échiquier de la remise en cause prochaine de la sécurité sociale, pour une privatisation rampante de notre système de santé.
    M. Jean-Marie Le Guen. Dévalante, plutôt !
    M. Bernard Accoyer. Fantasme !
    M. Maxime Gremetz. Loin de moi l'idée de vous faire un procès d'intention : ce n'est pas mon genre, vous le savez bien, monsieur le ministre. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. François Goulard. Jamais ! Je suis un témoin de moralité de M. Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Simplement, nous tenons à vous aider à vous libérer, à vous démasquer, afin que vous puissiez mieux assumer vos choix.
    Je l'ai dit, des menaces graves pèsent sur notre système de protection sociale, laissant poindre les signes annonciateurs d'une déréglementation féroce et d'une remise en cause de ce qui fait le succès de notre système de sécurité sociale, que pourtant beaucoup de pays nous envient.
    Tout d'abord - et là, il s'agit de faits -, ces menaces apparaissent dans votre politique du médicament. Nous ne pouvons pas concevoir que le médicament devienne la variable d'ajustement du financement de la sécurité sociale. Or l'une des mesures phares de votre projet vise à réduire le déficit de la sécurité sociale sur le dos du médicament.
    Premièrement, en trois ans, vous comptez supprimer le remboursement de 835 médicaments, auxquels une étiquette a été préalablement accolée : leur « service médical rendu » serait insuffisant.
    Ces mesures s'inscrivent malheureusement dans le droit fil de précédents déremboursements de produits affublés de la fameuse « vignette bleue » au motif qu'ils n'apporteraient que du « confort » alors qu'ils continuent pourtant d'apparaître sur les ordonnances.
    Les médecins le savent en effet mieux que personne : s'il est destiné avant tout à « guérir », un médicament présente aussi bien souvent l'avantage de « soulager ». Les pouvoirs publics l'admettent d'ailleurs implicitement puisqu'ils n'ont pas choisi de remettre en cause l'autorisation de mise sur le marché des produits ciblés. Or, si telle ou telle molécule ne justifie plus son efficacité thérapeutique, pourquoi la maintenir en vente sous le label « médicament » ? Pourquoi laisser les « labos » continuer de les commercialiser à grand renfort de publicité ?
    Monsieur le ministre, soit un médicament est efficace et il est obligatoirement remboursé, soit son effet thérapeutique est insuffisant ou nul et il est retiré du circuit. Vous avez vous-même reconnu le problème, mais vous n'y avez pas, hélas, remédié.
    Ces décisions auront pour effet de faire peser tout le poids des économies sur les assurés car les médicaments visés ne sont pas retirés du circuit et il est plus que probable que nombre de médecins continueront, de leur propre chef ou à la demande du patient, de les prescrire.
    Résultat prévisible : une aggravation des inégalités devant l'accès aux soins qui, qu'on le veuille ou non, passe encore largement par l'accès aux médicaments.
    Deuxièmement, vous ne mettez pas un terme, comme nous vous le proposons, aux dérives des prix qui sont constatées. En effet, certains médicaments considérés comme très utiles, par exemple un médicament amaigrissant destiné aux personnes obèses, n'ont pas été ou ne sont actuellement pas remboursés car soit la demande n'en est pas faite, soit le Gouvernement ne les inscrit pas sur la liste des médicaments remboursables. Dès lors, certains laboratoires ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché ne déposent pas de demande en vue du remboursement par les régimes d'assurance maladie. Cette démarche permet que des médicaments à service médical rendu important soient en dehors des procédures visant à autoriser le remboursement et à fixer le prix de ces médicaments.
    Dans ce cas de figure, le prix est donc libre. Il est même souvent trop élevé pour les personnes en difficulté ou disposant de faibles revenus. C'est ici que commence la médecine à deux vitesses, évolution néfaste de notre système de santé et que nous condamnons.
    Pourquoi certains auraient-ils, en raison de leurs revenus, accès à des soins privilégiés ? Nous le répétons, l'accès aux soins ne doit souffrir d'aucune condition sociale ou de revenu. Il doit être un droit pour tous, comme le veut la Constitution.
    Vous allez même plus loin en donnant aux laboratoires pharmaceutiques la liberté de fixer librement le prix des médicaments les plus innovants. Que répondrez-vous à celles et à ceux pour qui ces médicaments seront inaccessibles du fait de leur prix ? Leur direz-vous : « Vous n'avez qu'à avoir de l'argent » ?
    Comment pouvez-vous justifier une telle décision alors que les marges de profit des laboratoires pharmaceutiques sont les plus importantes dans notre pays ? Vous encouragez ainsi ces derniers à accroître leur recherche de rentabilité financière et de profit. Certes, ils travaillent et ils font de la recherche, mais cela n'empêche pas que leurs marges sont les plus élevées. Et cette situation sera amplifiée avec l' « accord », entre guillemets, trouvé en CMP.
    En effet, la liberté des prix sera plus large que prévu car les industriels seront désormais autorisés à fixer un prix qui deviendra définitif si le Comité économique des produits de santé n'oppose pas son veto dans les semaines qui suivent la mise sur le marché. Voilà ce que vous avez trouvé avec le Sénat.
    De plus, les modalités du dispositif ne seront plus définies par décret mais par un accord, c'est-à-dire dans l'opacité qui caractérise l'activité de ce secteur. La démonstration est faite qu'il est utile d'agiter le spectre de la menace qui pèse sur la recherche pour obtenir ce que l'on veut !
    Monsieur le ministre, vous aviez tenté de tempérer nos inquiétudes en précisant que le dispositif initial ne concernerait que trois ou quatre molécules par an. Mais tout confirme que cela concernera en réalité près d'une trentaine de molécules. On est donc loin de la poignée de médicaments envisagée au départ pour banaliser le compromis avec les laboratoires !
    En fait, vous donnez aux laboratoires, sans aucune concession en échange, toute latitude pour augmenter encore plus leurs marges de profit, réalisées sur le dos des malades et des assurés sociaux qui voient s'éloigner encore plus l'accès aux médicaments innovants. C'est un vrai problème éthique qui se pose ici.
    A tout cela s'ajoute la politique du générique, que vous dénaturez. En effet, le remboursement des médicaments « de marque » pour lesquels existe un équivalent générique ne sera plus effectué que sur la base du prix générique. Il faut mettre fin à l'hypocrisie sur ce point ! La seule manière de ne pas pénaliser les assurés serait d'aligner le prix des princeps sur celui des génériques.
    Oui à un meilleur développement du générique, oui au générique, oui à la recherche et à l'innovation médicamenteuse générale, à condition que tous les malades puissent en bénéficier ! Non au médicament comme support de correction du budget de la sécurité sociale et de recherche de profit sans aucune déontologie !
    Pour faire « passer la pilule », vous parlez de « responsabilisation » des assurés sociaux. Mais ne nous y trompons pas car, dans votre bouche, cela signifie les faire payer davantage.
    Cette politique du médicament n'est-elle pas le signe annonciateur d'une médecine à deux vitesses ?
    J'en veux pour preuve - mais ne faisons pas de procès d'intention ! (Sourires) - les dipositions que vous avez prises concernant le remboursement des visites à domicile. Vous instituez une véritable discrimination dans l'accès aux soins.
    M. Bernard Accoyer. Pas du tout !
    M. Maxime Gremetz. Le patient paiera 30 euros mais ne sera remboursé que sur 20 si la visite à domicile est considérée comme injustifiée,...
    M. Bernard Accoyer. C'est le « juste soin » !
    M. Yves Bur, rapporteur. C'est normal ! Cela s'appelle responsabiliser les gens !
    M. Maxime Gremetz. ... l'objectif étant naturellement qu'elle soit de plus en plus injustifiée.
    Le risque est donc présent que les familles modestes, par crainte d'être moins remboursées, ne fassent plus appel à ces visites malgré une réelle nécessité. En revanche, celles qui auront les moyens continueront à bénéficier de cette possibilité. Dans ce pays, on ne prête qu'aux riches. L'année prochaine, faudra-t-il parler de confort pour ces visites afin d'institutionnaliser le déremboursement ? Nous en prenons tout droit le chemin. (« Procès d'intention ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mais ce n'est pas grave, me direz-vous. En ouvrant le champ de la santé à la privatisation et aux assurances, celles-ci prendront en charge les visites à domicile. Oui, mais pour qui ? Encore une fois pour ceux qui auront les moyens de cotiser pour une assurance complémentaire ! Voilà votre schéma !
    M. André Gerin. Eh oui !
    M. Maxime Gremetz. En conséquence, aux privilégiés, un accès aux soins de qualité. Quant aux plus démunis, tant pis, ils n'auront que ce qu'ils pourront avoir en fonction de leurs moyens.
    M. Yves Bur, rapporteur. Caricature !
    M. Maxime Gremetz. C'est vers ces situations que vous vous orientez avec votre projet.
    Les bases sont donc posées et nos craintes confirmées. Elles le sont d'ailleurs d'autant plus que les déclarations qui ont suivi le débat nous éclairent parfaitement sur la vision du Gouvernement concernant la santé.
    S'agissant de l'assurance maladie, les déclarations de M. Barrot - je ne le vois pas ici aujourd'hui et c'est bien dommage car il ne manque jamais un débat de cette nature, mais je n'en tire pas de conclusion - qui ont fait suite à celles du Premier ministre, confirmées depuis par M. Fillon, relatives aux champs de compétences de l'assurance de base et de l'assurance complémentaire, ne sont pas innocentes. D'ailleurs, la presse en parle encore aujourd'hui : « on tâte le pouls de l'opinion publique ». Vous auriez dû vous rendre à la manifestation d'hier, et vous l'auriez sans doute mieux tâté. (Sourires.)
    M. Bernard Accoyer. Vous vous êtes fatigué pour rien !
    M. Maxime Gremetz. Ce sont autant de ballons d'essai lancés pour conditionner l'opinion publique, pour lever certains tabous afin que demain, à l'occasion de la loi de programmation sur la santé ou de celle portant sur la nouvelle gouvernance de l'assurance maladie, vous puissiez faire accepter la mise en concurrence des assurances dans le domaine de la santé.
    L'idée n'est pas nouvelle mais, bien qu'elle ne soit pas très novatrice, elle est régulièrement avancée comme étant la solution pour maîtriser les dépenses de santé. Le MEDEF présentant, en novembre 2001, sa vision de l'architecture de l'assurance maladie, n'a-t-il pas proposé d'introduire une dose de concurrence dans notre système de santé ? Ce n'est pas un hasard : c'est l'expression d'une même et unique volonté.
    Panier de soins remboursables à 100 % approuvé par le Parlement, garanti par l'assurance maladie obligatoire, couplé à une assurance facultative pour les autres soins, ou concentration de la solidarité nationale sur les maladies les plus graves, laissant les autres risques, ce que M. Barrot nomme « le maintien en santé », aux assurances complémentaires : le but est le même. Il s'agit de réduire le champ des risques couverts solidairement par notre système de protection sociale pour, comme beaucoup l'ont déclaré, « céder une partie de la santé au système marchand ».
    Avec plus de 2 000 milliards - vous vous rendez compte ? - le marché de la santé représente plus que le budget de la nation. Depuis des années, les assurances privées le lorgnent, et vous leur préparez le terrain.
    M. André Gerin. C'est vrai !
    M. Maxime Gremetz. Cette vision de notre système de santé et de protection sociale pose un véritable problème de constitutionnalité, sur lequel je reviendrai.
    En attendant, vous réunissez méticuleusement tous les ingrédients pour justifier dans un avenir proche la voie vers la privatisation : entretien du déficit, baisse des remboursements, restriction du périmètre de la protection sociale, pénurie de personnel et asphyxie de l'hôpital.
    Concernant l'hôpital, il faut, là encore, mettre un terme à l'hypocrisie. Tout le monde peut s'émouvoir de la situation de l'hôpital et de ses personnels, et vous le faites très bien, monsieur le ministre. Mais on ne peut pas se satisfaire, comme vous, chers collègues de la majorité, de mesurettes. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. René Couanau. Quelle majorité ?
    M. Maxime Gremetz. Il faut prendre sérieusement en compte les attentes qui s'expriment dans le milieu hospitalier, qu'il s'agisse des conditions de travail ou du manque de moyens humains et matériels. Le fait que les autres ne l'aient pas fait n'est pas une raison. Vous, vous aviez promis de le faire. Alors faites-le ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Le plan « Hôpital 2007 » présenté la semaine dernière ne nous satisfait pas. « Vous allez voir ce que vous allez voir », nous avait-on promis sur les bancs de la majorité. Eh bien ! On a vu et on est déçus. Mais est-ce une surprise ? Non. Sans s'atteler à une réforme profonde du financement, on ne pouvait pas s'attendre à des miracles. Je vous l'avais dit, et c'est confirmé.
    Il y a beaucoup d'effets d'annonce, mais qu'en est-il concrètement ? Ce plan ne comporte aucune mesure permettant à l'hôpital de sortir de la situation pénible et grave dans laquelle il se trouve. L'apport financier ne sera que de 300 millions l'an prochain, autant dire une goutte d'eau dans l'océan des besoins, d'autant que vous aviez parlé d'un milliard !
    Vous proposez d'ouvrir la possibilité du recours à l'emprunt. D'accord, mais cet emprunt, il faudra bien le rembourser, et avec quels moyens ?
    Vous n'hésitez pas à créer les conditions du démantèlement de l'hôpital comme du service public hospitalier. Vous fondez en un l'hospitalisation publique et privée.
    En d'autres termes, vous proposez que l'hôpital public soit financé par le privé et réciproquement. Vous ouvrez la possibilité à des capitaux privés de venir subventionner l'hôpital public, comme pour les prisons. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Evidemment, les collectivités locales pourront elles aussi mettre la main à la poche.
    M. Jean Besson. A la poche de qui ?
    M. Maxime Gremetz. Nous savons ce que cela veut dire : les inégalités géographiques, régionales et départementales se creuseront considérablement.
    D'abord, les investisseurs privés n'interviendront que là où l'« affaire », entre guillemets, sera rentable et les collectivités qui auront les moyens viendront aider. Les autres non. Que dire à nos concitoyens ? On leur répondra encore une fois : « Désolé, mais vous habitez dans une zone pauvre, pas solvable », comme la mienne, « et vous n'aurez donc pas d'hôpital. »
    Vous portez un coup manifeste à l'égal accès de tous les citoyens aux structures hospitalières.
    En fait - dites-le, monsieur le ministre, ce sera plus simple -, ce que vous dessinez, ce sont les contours d'une privatisation rampante du système de protection sociale. Naturellement, dans ce schéma, les assurances qui, depuis des années, se disent : « Ah ! si l'on pouvait ! » ont toute leur place.
    Pensez donc ! Il s'agit d'un marché juteux que vous leur offrez : le budget à se partager est plus important que celui de la nation.
    Il est évident qu'il y a des enjeux de classes bien que, paraît-il, la lutte des classes soit terminée. Il est tout aussi évident que vous préparez le terrain à une remise en cause fondamentale des principes qui forment le socle de notre sécurité sociale alors que rien ne le justifie : la solidarité, le droit pour tous à la santé, un système de garanties collectives et individuelles.
    Quand vous parlez des retraites, c'est le même discours. Il faudrait, selon vous, allonger la durée de cotisation, ne pas augmenter les pensions et revoir l'existence des régimes spéciaux. Vous sous-entendez évidemment que, pour échapper à tout cela, il faudra instaurer les fonds de pension. Nous avons ici même abrogé la loi Thomas sur les fonds de pension, mais vous revenez à la charge. C'est toujours la même philosophie, la même idéologie, celle de l'argent, y compris dans le domaine de la santé.
    M. André Gerin. C'est la vérité !
    M. Maxime Gremetz. Ainsi, on décline à l'envi cet individualisme consistant à imposer dans notre pays l'idée que, si l'on veut bénéficier d'une couverture sociale quelle qu'elle soit - retraite, santé, famille, accidents -, on doit se la constituer soi-même. Finie la solidarité ! Ou alors, une solidarité a minima.
    Votre projet de société est lourd de conséquences et est source d'inégalités sociales importantes et de reculs sociaux graves.
    En réalité, monsieur le ministre, vous détournez le débat en faisant croire qu'il n'y a pas d'autres issues possibles. Nous contestons ce point de vue. Nous vous avons fait la démonstration du contraire et nous sommes prêts à recommencer autant de fois qu'il le faudra. Il est donc dommage que mon temps de parole soit limité à une demi-heure. (Sourires.)
    L'enjeu est celui du financement. L'accroissement des ressources de la sécurité sociale en développant une autre politique que celle des exonérations de cotisations patronales doit être engagé dès maintenant. On en est à plus de 20 milliards d'exonérations de cotisations patronales et on nous dit qu'on ne peut pas rembourser, qu'il faut cotiser davantage et souscrire des assurances complémentaires. Tout cela est lié, c'est évident. Plus vous retirez d'argent de la sécurité sociale et plus les gens doivent mettre la main à la poche pour se soigner. C'est ainsi.
    Car c'est bien la nécessité d'un financement nouveau qui est posée. Comme je vous l'avais dit lors de votre première audition en commission, monsieur le ministre, le diagnostic que vous faites est parfait, mais vous ne vous donnez pas les moyens d'agir. Quand je vous ai interrogé sur le financement, vous m'avez répondu : « Ce n'est pas mon affaire ! » Mais aujourd'hui, c'est votre affaire.
    M. André Gerin. Il ne faut pas mêler capital et travail !
    M. Maxime Gremetz. Nous ne nous contenterons pas d'acter un déficit et de tout faire pour le stabiliser. En dénaturant les ressources, on fait évoluer le financement à contresens, ce qui conduit à l'insuffisance. Notre position, c'est que les recettes doivent augmenter et venir de là où les richesses sont créées : l'entreprise et, donc, les cotisations.
    Vous pourrez nous dire qu'il est ringard de le rappeler, mais il demeure que personne au monde n'a fait un meilleur système de sécurité sociale que la France, avec ses quatre branches et la cinquième qu'elle aurait dû avoir, comme cela était prévu, car vous la demandiez avec nous, mesdames, messieurs de la droite, qui étiez minoritaires à l'époque. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

    Comment pouvez-vous dire maintenant le contraire ? Vous avez déposé un amendement et nous avons été ensemble à faire valoir que la charge devait être supportée par la sécurité sociale, avec les cotisations patronales. Au moins les entreprises auraient un peu cotisé pour l'APA !
    Aujourd'hui, vous nous dites que le déficit est tellement important, succès de l'APA oblige, qu'il faut augmenter l'apport des familles, y compris celui des plus défavorisées. Cela se traduit chez moi, à Amiens, par 1 000 francs d'augmentation par mois pour toutes les familles, quelles que soient leurs ressources, pour les richards comme pour les smicards. Et on parle d'égalité ! (M. le ministre fait un geste de dénégation.)
    Vous me dites que ce n'est pas vrai, monsieur le ministre ?
    M. le président. Monsieur Gremetz, le ministre ne vous a rien dit.
    M. Maxime Gremetz. Osez soutenir que ce n'est pas vrai !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je vous répondrai plus tard.
    M. Maxime Gremetz. J'ai sous les yeux la décision du conseil municipal.
    M. André Gerin. M. Gremetz a raison !
    M. Maxime Gremetz. Moi, je ne dis pas n'importe quoi ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Bernard Accoyer. Reviens à ton texte, Maxime !
    M. Maxime Gremetz. Le ministre me dit « non ». Quand on me dit « non », j'écoute. Je ne fais pas comme si je n'avais pas entendu. Je demande alors que l'on me prouve que ce que je dis n'est pas vrai. C'est cela, un débat, où je n'y comprends plus rien.
    Monsieur le ministre, je vous transmettrai la délibération du conseil municipal...
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Ce n'est pas celle de l'Assemblée !
    M. Maxime Gremetz. Certes, mais les décisions prises à l'Assemblée s'appliquent dans les communes, dans les maisons de retraite, dans les hôpitaux. Ou alors je ne sais pas ce que la décentralisation veut dire.
    Les ARH décident et vous leur donnez même encore plus de pouvoirs aujourd'hui.
    Alors, concernant le financement, que constate-t-on ? Les ressources, en 1990, provenaient à 70,8 % des cotisations et à 2,8 % des impôts et taxes. En 2001, la tendance est nettement différente. Les cotisations représentent 56,7 % des ressources...
    M. Bernard Accoyer. Un peu plus !
    M. Maxime Gremetz. ... et les impôts et taxes 16,7 %, soit une progression de 14 points. J'ai les chiffres ici, vous pouvez les vérifier...
    M. Bernard Accoyer. Il en manque !
    M. Maxime Gremetz. Je n'avance jamais de chiffres sans avoir les documents.
    M. Bernard Accoyer. Quand vous faites le total, vous avez toujours du mal à tomber juste, vous le savez bien !
    M. Maxime Gremetz. Le manque de ressources a correspondu à une augmentation des besoins de dépenses, d'où la nécessité évidente de prévoir plus de recettes et non pas moins de dépenses. C'est sur cette logique que nous nous opposons. Il faut chercher de nouveaux financements, mieux adaptés aux réalités. Mais nous ne pouvons pas accepter, car c'est profondément injuste, que la part de la protection sociale financée par les impôts et taxes soit aussi importante.
    Ainsi, depuis 1995, les cotisations ont vu leur part relative diminuer de plus de 8 points au profit des impôts. En 1990, les cotisations représentaient 79,5 % des ressources hors transferts, contre 66,5 % aujourd'hui, et la part des impôts et taxes, sur la même période, est passée de 3,1 % à 19,6 %. L'une des conséquences de cette évolution, c'est que l'Etat, en contrepartie de l'affectation de nouveaux impôts, a réduit d'autant ses contributions aux régimes de sécurité sociale.
    D'autre part, vous le savez bien, l'évolution des cotisations et de leur place dans le financement de la protection sociale est fortement dépendante de l'évolution de la masse salariale. Au cours des dix dernières années, elle a également reflété la volonté de réduire le coût du travail pour certaines catégories d'emplois, avec notamment les exonérations de charges sur les bas salaires.
    Le déficit de la sécurité sociale s'est également aggravé à cause de la course effrénée aux exonérations de charges. Rien qu'en 2000, la part des cotisations employeurs s'est réduite de 0,4 point, en raison de la très forte progression des exonérations de charges, compensées et non compensées, qui dépassent 5,3 milliards d'euros. Rien qu'en 2000, 5,3 milliards d'euros ! Aussi, sur l'ensemble de la période 1995-2000, le montant des exonérations compensées a été multiplié par 2,7, atteignant 13 milliards d'euros en fin de période.
    A cette logique d'allégements de charges patronales - elle n'a pas porté ses fruits sur l'emploi, c'est le moins qu'on puisse dire -, qui constituent de vrais cadeaux au patronat, sans contrepartie, et mettent en péril l'équilibre du financement de la sécurité sociale comme la satisfaction des besoins et le fonctionnement de nos hôpitaux, nous opposons une autre logique : la bonification de crédits et la modulation des cotisations, le tout associé à une taxation des revenus financiers.
    Notre première proposition vise un double objectif : l'extinction progressive des dispositifs d'allégements de cotisations sociales employeurs sur les bas salaires, engagés par la loi quinquennale d'Edouard Balladur, puis poursuivis avec la « ristourne Juppé » et, enfin - c'est la même logique, elle a fait faillite, il faut donc en changer -, les 35 heures relevant de la loi dite « Aubry 2 » ; la promotion d'un nouveau dispositif d'incitation par l'allégement des charges financières, en contrepartie de créations effectives d'emplois et de placements en formation pour que les salariés accèdent à de nouveaux emplois plus qualifiés.
    Au-delà de son efficacité pour l'emploi et pour les fonds publics, ce dispositif favoriserait la relance de la croissance et économiserait des fonds publics. Contrairement aux dispositifs d'exonération dégressive de charges sociales patronales - qui poussent à la généralisation des bas salaires, à la baisse des cotisations sociales patronales, et dont on a pu mesurer l'inefficacité pour l'emploi, la formation et les effets contre-productifs sur les salaires et les comptes de la sécurité sociale -, il n'inciterait pas à la déflation salariale et favoriserait une relance de la demande des ménages, un des piliers de la croissance.
    En effet, 1 % d'augmentation des salaires - ce n'est pas du luxe, vous en conviendrez - équivaut à 9 milliards d'euros pour la sécurité sociale. Et 1 million d'emplois créés équivaut à 7 milliards d'euros supplémentaires. Les chiffres sont clairs, incontestables : une politique salariale ambitieuse et une création massive d'emplois amorcerait un début de soulagement pour les finances de la sécurité sociale.
    Or vous engagez une politique totalement opposée. Je m'interroge donc avec insistance sur vos intentions : voulez-vous réellement régler le problème du financement de la sécurité sociale ou bien laisser s'enliser la situation ?
    En ce qui concerne la modulation des cotisations, une refonte du financement, en prise sur le développement de l'emploi, de la croissance, des ressources humaines - formation, salaires, promotion des salariés -, est indispensable pour garantir de nouvelles ressources pérennes à la protection sociale.
    Il s'agit de remettre en cause la fuite en avant dans les exonérations de cotisations patronales, couplée avec les prélèvements sur les ménages, dont je viens de parler dans le détail. Les exonérations de cotisations patronales - je ne parle pas des petites et moyennes entreprises, puisque nous sommes favorables à la modulation, mais des grands groupes industriels, qui multiplient les licenciements et les délocalisations - tendent à tirer vers le bas l'ensemble des salaires et à déresponsabiliser les entreprises en privant la sécurité sociale de moyens de financement importants : 19,5 milliards d'euros cette année.
    Enfin, monsieur le président,...
    M. le président. Enfin !
    M. Maxime Gremetz. ... enfin, nous proposons de taxer les revenus financiers des grandes entreprises, qui échappent aujourd'hui à toute contribution sociale. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. André Gerin. Très bien !
    M. Dominique Tian et M. Bernard Accoyer. C'est nouveau !
    M. Maxime Gremetz. Si les revenus des particuliers sont bien mis à contribution, ceux des grandes entreprises restent tabous. Cela doit cesser, surtout si l'on considère les richesses qui se brûlent les ailes selon les aléas de la Bourse. Et qui en fait encore les frais ? Les salariés qu'on licencie, les chômeurs et les précaires, à qui on n'offre aucun espoir de retrouver un travail correctement rémunéré et stable, et à qui on demande toujours plus d'efforts contributifs.
    Nous voulons inverser la tendance et remettre chacun devant ses responsabilités. Le prélèvement que nous proposons, je le repète, ne frapperait pas toutes les entreprises, mais seulement celles qui préfèrent les placements financiers aux investissements productifs.
    Cette proposition est donc à double détente : elle rapporterait beaucoup d'argent à la sécurité sociale - près de 4 milliards d'euros - tout en soutenant l'investissement et l'emploi, ce qui procurerait sans aucun doute une bouffée d'oxygène à nos hôpitaux, par exemple.
    Comprenez bien, monsieur le ministre, que l'absence de mesures nouvelles en matière de recettes conduira implacablement à une nouvelle restriction des dépenses, inconsidérée au regard de la réalité. Prenez bien la mesure de la situation de notre système de santé. A défaut, vous continuerez à jouer sur des variables d'ajustement, ce qui n'est pas raisonnable.
    En conséquence, votre projet de loi crée les bases d'un système de santé et de protection sociale à deux vitesses, augurant d'une privatisation certaine, complètement contraire à notre Constitution.
    M. Jean-Marie Le Guen. Il parle depuis trois quarts d'heure !
    M. Maxime Gremetz. Plusieurs articles, s'ils étaient maintenus, ne passeraient pas la censure du Conseil constitutionnel. Je veux citer, ici, un extrait du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. Heureusement, le président de l'Assemblée nationale se réfère toujours à la Constitution - il est le fils du « père de la Constitution » et il sait par conséquent de quoi il parle, n'est-ce pas ? Il considère, par exemple, qu'il n'est pas utile de la réviser pour décentraliser.
    M. Jean-Marie Le Guen. Trois quarts d'heure !
    M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
    M. Lucien Guichon. C'est la chute !
    M. Maxime Gremetz. Je veux donc citer un extrait du préambule de la Constitution :...
    M. Bernard Accoyer. A l'époque, les communistes approuvaient-ils la nouvelle Constitution ?
    M. Maxime Gremetz. ... la nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé ». L'ensemble de la population est en droit d'attendre de la représentation nationale qu'elle lui garantisse un égal accès aux soins de qualité.
    M. Bernard Accoyer. Belle conclusion, monsieur le président !
    M. Maxime Gremetz. Le préambule de 1946...
    M. Bernard Accoyer. Il recommence au début, monsieur le président !
    M. Maxime Gremetz. ... affirme aussi le principe d'universalité de la protection sociale. A plusieurs reprises, le Conseil constitutionnel s'est appuyé sur cet alinéa...
    M. Jean-Marie Le Guen. Quarante-cinq minutes, monsieur le président !
    M. Jean Bardet. Laissez-le parler !
    M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues !
    M. Maxime Gremetz. ... pour confirmer des dispositions relatives à la définition du caractère des missions de la sécurité sociale, mais aussi aux politiques menées pour garantir l'accès aux soins.
    M. le président. Veuillez conclure, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Je termine, monsieur le président ; c'est ma dernière phrase. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe socialiste.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous êtes à la tribune depuis quarante-cinq minutes !
    M. Pierre Hellier. Il n'en finit pas de conclure !
    M. Maxime Gremetz. Je suis très respectueux du temps ! (Rires.)
    M. Jean Bardet. Comme du reste !
    M. Maxime Gremetz. Force est de constater que ce projet de loi de financement ne garantit pas les principes de solidarité nationale affirmés dans nos textes fondamentaux.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'était long !
    M. Maxime Gremetz. C'est pourquoi je vous demande, chers collègues, de bien vouloir voter l'exception d'irrecevabilité que j'ai défendue en trente minutes, comme prévu ; trente minutes garanties.
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous avez parlé quarante-cinq minutes, monsieur Gremetz !
    M. le président. Je signale à M. Le Guen, qui fait mine de regarder sa montre, que M. Gremetz a parlé trente-quatre minutes !
    M. Jean-Marie Le Guen. Non ! Et vous allez aussi me donner quarante-cinq minutes de temps de parole !
    M. François Liberti. Monsieur Le Guen, pas vous !
    M. le président. Puisque vous demandez que le temps de parole soit scrupuleusement respecté, nous vous l'appliquerons cet après-midi et aussi en séance de nuit.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je veux le même temps de parole que M. Gremetz !
    M. François Liberti. C'est minable !
    M. Jean-Marie Le Guen. Le règlement de l'Assemblée nationale s'applique pour tout le monde !
    M. François Liberti. Dites-le au président !
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est ce que je fais !
    M. Jean Bardet. L'opposition est plurielle !
    M. Charles Cova. Enfilez les gants !
    M. Jean-Marie Le Guen. Quarante-cinq minutes !
    M. le président. Je vous en prie, monsieur Le Guen !
    M. Jean-Marie Le Guen. Mais vous m'interpellez, monsieur le président !
    M. le président. Monsieur Le Guen, restez courtois.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je reste très courtois, monsieur le président !
    M. le président. N'élevez pas le ton ainsi.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je parle comme je veux, monsieur le président !
    M. le président. Nous ne débattons pas de la décentralisation, mais du financement de la sécurité sociale.
    M. Jean-Marie Le Guen. Les amitiés particulières du 93, on connaît ! (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains.)
    M. le président. Monsieur Le Guen, mon département est aussi honorable que votre arrondissement !
    M. Jean-Marie Le Guen. J'entends bien, monsieur le président !
    M. le président. Pourquoi faut-il que vous provoquiez un incident de séance chaque fois que vous êtes présent dans cet hémicycle ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Faites un rappel au règlement, monsieur le président ! Je vous en prie !
    Mme Jacqueline Fraysse. Arrêtez ! Nous ne sommes pas à la maternelle !
    M. le président. La commission et le Gouvernement ne souhaitent pas s'exprimer.
    Je mets aux voix l'exception d'irrecevabilité.
    (L'exception d'irrecevabilité n'est pas adoptée.)

Question préalable

    M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une question préalable, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, qui va s'exprimer avec sa courtoisie habituelle.
    Mme Marie-Françoise Clergeau. Arrêtez, monsieur le président !
    M. Jean-Marie Le Guen. Merci, monsieur le président. Mais vous oubliez de préciser pour combien de temps... (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Louis Guédon. Goujat !
    M. le président. Je ne répondrai pas à vos provocations, monsieur Le Guen !
    M. André Gerin. Ce sont des gamineries !
    M. Jean-Marie Le Guen. Je ne vois pas en quoi l'interprétation très stricte du règlement...
    M. le président. Votre temps de parole est de trente minutes, monsieur Le Guen !
    M. Jean-Marie Le Guen. Si vous voulez bien ne pas m'interrompre, monsieur le président... (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Louis Guédon et M. Charles Cova. Parlez du sujet qui nous intéresse !
    M. Jean-Marie Le Guen. N'ayez crainte je vais y venir !
    M. Louis Guédon. Montrez-nous un peu si vous êtes compétent !
    M. Jean-Marie Le Guen. Je ne voudrais pas que certaines pratiques contestables s'installent dans notre assemblée. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle...)
    M. Dominique Tian. Des pratiques comme celles auxquelles vous vous livrez depuis le début de l'examen du texte sur la décentralisation ?
    M. Jean-Marie Le Guen. ... et je vous remercie de votre vigilance en la matière, monsieur le président. Voilà tout.
    M. Louis Guédon. Rentrez dans le rang !
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, le texte issu de la CMP que nous étudions aujourd'hui correspond pour l'essentiel - et c'est bien normal - au projet de loi de financement de la sécurité sociale initial présenté par le Gouvernement. Cependant, la discussion en première lecture n'a fait que nous renforcer dans l'idée qu'il n'était ni juste ni sincère.
    Tout d'abord, et vous le savez, les chiffres avancés ne tiennent pas. Si l'on en croit les prévisions particulièrement optimistes du Gouvernement, le besoin de financement, fin 2003, s'élèverait à 7,1 milliards d'euros seulement, si j'ose dire. Pourtant, le contexte économique est marqué par un retournement conjoncturel - ce fameux effect ciseau de baisse des recettes et de croissance continue des dépenses - qui devrait accentuer, en 2002, le retour à une situation de déficit pour le régime général de sécurité sociale. Ainsi, pour 2002, le déficit, toutes branches confondues, est aujourd'hui estimé à 3,3 milliards d'euros. Il devrait s'élever à 6 milliards en 2003.
    Les hypothèses du Gouvernement reviennent à prévoir, pour les recettes, une croissance annuelle des effectifs salariés de 1,1 % et une croissance annuelle du salaire moyen de 2,9 %, soit 1,4 % de pouvoir d'achat supplémentaire. Ces chiffres, objectivement, témoignent de la faible crédibilité de votre politique de financement de la sécurité sociale.
    Quant à la croissance des dépenses de santé, la fixation de l'ONDAM à 5,3 %, selon vos propres prévisions, devrait conduire, en 2003, toutes choses égales par ailleurs, à un déficit du régime général de 4,6 milliards d'euros.
    L'ONDAM est certes en augmentation par rapport aux prévisions de 2002 et aux années précédentes. Son évaluation nous semble néanmoins encore très volontariste, et en rien médicale, comme vous l'avez reconnu vous-même, monsieur le ministre, lors des débats. L'ONDAM réalisé en 2002 s'élève, on le sait maintenant, à 7,2 %, et, en réalité la pente qu'il suit devrait lui faire atteindre, en 2003, 6,5 ou 7 %. Dans le cas où il s'élèverait à 7,2 %, ce qui constitue une prévision réaliste, le déficit du régime général s'élèverait à 6 milliards d'euros.
    Ainsi, cette loi de financement de la sécurité sociale a pour effet d'élever dès 2003 le besoin de financement au-dessus de 10 milliards d'euros, en raison de l'affaiblissement des recettes et faute de volonté de maîtriser les dépenses de santé. L'autorisation de trésorerie de 11,4 milliards d'euros demandée par le Gouvernement ne confirme-t-elle pas, d'ailleurs, le bien-fondé de cette prévision ?
    Confronté à cette situation extrêmement préoccupante pour l'avenir de notre sécurité sociale, vous semblez, monsieur le ministre, camper sur une attitude de placidité confinant à l'irresponsabilité. En ne proposant aucune perspective de retour à l'équilibre, vous donnez l'impression d'une certaine indifférence quant à l'avenir du financement de la sécurité sociale, alors qu'une telle charge, projetée sur l'année budgétaire 2003, représentera incontestablement un très lourd fardeau pour l'ensemble de la société française dans les années à venir.
    Toutefois, je ne vous ferai pas le reproche de l'irresponsabilité car, si vous ne vous attachez pas à respecter les règles du financement de la sécurité sociale, c'est tout bonnement parce que votre gouvernement veut les changer !
    D'abord, pour solder ce que vous appelez une « laborieuse période de transition », vous avez, me semble-t-il, la tentation de prolonger à l'infini le CRDS - il ne vous reste, à dire vrai, qu'à pérenniser ce que M. Juppé avait créé dans les mêmes circonstances !
    Mais, derrière l'inconséquence de vos prévisions et votre absence de volonté de maîtrise, c'est à une politique de déremboursement massif que vous essayez de préparer les Français. Si vous ne l'affirmez pas encore dans ce texte, votre intention, partagée par votre majorité, s'est clairement révélée au cours de la discussion du projet de loi de financement. Vos interventions, ici même et dans la presse, monsieur le ministre, tout comme celles, très éclairantes aussi, de M. Barrot, président du groupe UMP, majoritaire, donnent, en tendance, la vraie lecture de ce texte et éclairent sur la logique de votre politique.
    Ainsi, au manque de justesse du projet de loi quant à l'identification des besoins de financement, s'ajoute un manque de sincérité quant aux objectifs réellement poursuivis : l'objectif de la politique mise en oeuvre par ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est en fait le décrochage assumé des dépenses de l'assurance maladie par rapport aux dépenses de santé.
    Les prémices de ce retournement politique sont déjà présentes dans votre texte. C'est à l'occasion du plan médicament que vous avez décidé de tester, en quelque sorte, les premiers déremboursements, en transférant la responsabilité financière du médecin vers le patient. Vous n'hésitez pas, à cette occasion, à faire volte-face sur la promotion du générique. En effet, plutôt que d'épouser le développement actuel du marché des génériques - en forte croissance depuis juin, grâce, précisément, à la convention signée entre les médecins généralistes et la Caisse nationale d'assurance maladie -, vous changez d'approche en décidant d'appliquer un tarif forfaitaire de remboursement et vous annulez ainsi purement et simplement l'engagement conventionnel qui imposait aux médecins de prescrire un quart de médicaments génériques. Ces mesures antipédagogiques consacrent une rupture de l'accord entre la CNAM et les médecins généralistes et remettent directement en cause le projet de maîtrise médicalisée des dépenses de santé.
    La promotion des génériques, par ailleurs, que vous prétendez défendre, est gravement mise en danger par certaines dispositions du projet de loi de financement, qui risquent paradoxalement de tuer dans l'oeuf cette industrie naissante dans notre pays, dotée de moyens insuffisants pour lui permettre de résister aux grands groupes pharmaceutiques.
    C'est le danger avec ce remboursement forfaitaire qui annulera le différentiel de prix favorable au générique. C'est aussi le résultat de la baisse de rémunération des pharmaciens dispensant un générique par la remise égale pour tous, générique ou princeps, telle que vous l'avez proposée au Sénat. Il faudra bien aussi appeler déremboursement le retrait de certains médicaments à SMR insuffisant, qui demeurent pourtant dans certains cas nécessaires aux patients.
    A ce stade, nous conviendrons pourtant avec vous que ce texte ne fait qu'assurer une transition. Indiscutablement, le plus radical est à venir, même si vos propos et ceux de M. Barrot éclairent singulièrement l'avenir ! Vous vous êtes pour l'instant limités à préparer les esprits à la rupture avec ce prétendu « tout-gratuit » dont vous voulez nous faire sortir pour mieux préparer la médecine à deux vitesse du « toujours payant » !
    Qu'entend-on ici même dans cette assemblée ? La notion de petit risque, de gros risque, le discours sur l'obligatoire et le complémentaire. On voit se dessiner la perspective. Les semaines à venir seront de ce point de vue déterminantes. En réalité, ce PLFSS ne traite que d'une petite partie des décisions que vous vous apprêtez à prendre en matière d'assurance maladie ; le sujet de la gouvernance, d'abord, qui consacrera et justifiera, je le crains, la fin du paritarisme, et videra de son sens l'architecture actuelle de l'assurance maladie, le panier de soins, ensuite, qui tentera de légitimer les transferts des dépenses aujourd'hui prises en charge par la solidarité sur les ménages, ouvrant ainsi un nouveau marché aux assurances. Ce sujet marquera la rupture avec notre politique d'assurance maladie et de sécurité sociale. Quant au fameux « espace de liberté conventionnelle » que vous avez appelé de vos voeux, monsieur le ministre, devant les syndicalistes médicaux, il s'apparente pour l'essentiel à la généralisation du secteur II, c'est-à-dire tout simplement à la fin de l'opposabilité des honoraires.
    Face à cette perspective, monsieur le ministre, vous ne pouvez pas espérer compter sur la tiédeur de l'opposition. Quand bien même cette idée de libre fixation des honoraires séduirait certains praticiens qui ne mesurent pas les dangers qu'ils font courir à leur exercice, à son financement, à leur crédibilité professionnelle et demain, j'en suis sûr, à leur indépendance, quand bien même le décrochage des tarifs de responsabilité devrait être amorti et même sollicité par des structures complémentaires intéressées ou oublieuses de leurs valeurs, nous n'accepterons pas cette remise en cause très grave de l'égalité d'accès aux soins et des principes fondamentaux de notre politique de santé.
    En outre, dans vos nombreuses interventions, vous vous attachez à remettre en cause la CMU. Vous dénoncez un problème de seuil, mais ce n'est qu'un prétexte fallacieux pour entamer l'effort de solidarité, puisque, vous le savez bien, monsieur le ministre, des mesures avaient déjà été prises par l'ancien gouvernement. En réalité, vous avez l'intention de démanteler la CMU au profit d'une assurance individuelle. Cette vision libérale de la lutte contre l'exclusion remettra nécessairement en cause l'accès aux soins des grands exclus. Ainsi, le choix inique de l'objectif de déremboursement se confirme et annonce une politique de régression sociale.
    Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est donc bien éloigné des besoins concrets de nos citoyens dans bien des domaines.
    Quant à votre politique familiale, elle semble introuvable et la seule mesure proposée, l'allocation pour les familles perdant une partie de leurs allocations familiales pour des raisons liées à l'âge des enfants, reste assez floue dans son contenu et rappelle le projet illusoire de Mme Codaccioni en 1995, finalement balayé par le plan Juppé de 1996.
    Ainsi, le volet famille du PLFSS ne contient rien qui puisse être comparé à la création du congé de paternité, de l'allocation de présence parentale lorsqu'un enfant est hospitalisé, à la mise en place d'un fonds pour la petite enfance ou au quadruplement de l'allocation de rentrée scolaire, toutes mesures décidées par la gauche.
    Vous poursuivez bien mollement l'amélioration des allocations logement, indispensables aux familles modestes, mise en oeuvre par le gouvernement précédent, par une revalorisation différée sur une base de 1,2 %, bien inférieure à l'évolution des loyers et des charges. En théorie, votre politique se veut tournée vers les attentes de la France d'en bas, mais en fait elle aboutit à une augmentation du budget logement pour les familles défavorisées. Ce désintérêt patent pour la politique familiale ne pourra être comblé par une mesure isolée d'aide aux familles d'au moins trois enfants dont l'aîné atteint l'âge de vingt ans, aussi nécessaire soit-elle.
    S'agissant de la branche vieillesse, les mesures que nous avions adoptées consistant à étendre l'allocation spécifique de solidarité, à augmenter l'allocation des chômeurs en fin de droits et à prendre en compte les périodes de service national, ne sont suivies d'aucune politique consistante pour l'année prochaine. Il est vrai que le caractère irréaliste de votre prévision de croissance pour 2003 doit vous inciter à faire preuve de modération dans vos arbitrages !
    Le désengagement opéré par le gouvernement actuel se traduit enfin, en ce qui concerne les accidents du travail et les maladies professionnelles, par votre refus d'avancer vers la réparation intégrale en faveur des victimes de l'amiante.
    M. François Goulard. Ce n'est pas vrai !
    M. Jean-Marie Le Guen. Ce texte ne contient aucune mesure concrète en la matière, cher collègue, reconnaissez-le !
    M. Bernard Accoyer. Des mesures ont été prises ! Vous n'avez pas suivi la CMP ! Tout fout le camp au PS ! Ils ne sont même plus informés !
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est un oubli cruel !
    Mes chers collègues, ce projet de loi ne garantit pas les principes de solidarité nationale affirmés dans nos textes fondamentaux. Il marque indiscutablement une parenthèse. Ce qui nous est annoncé pour les semaines et les mois qui viennent montre que vous êtes en train de mettre en place une autre politique. C'est d'ailleurs votre droit le plus strict du point de vue démocratique, mais nous ne pouvons que la redouter, notamment en matière de santé. En effet, sans le socle d'une assurance maladie vraiment solidaire, il n'y aura pas de politique de santé publique dans ce pays.
    Il est illusoire de croire que l'on peut se passer d'une couverture obligatoire de haut niveau. C'est sur cette base que s'est construite notre politique de santé. Tous nos efforts doivent donc aller vers une véritable maîtrise médicalisée de nos dépenses. Il faut assurer courageusement le financement des dépenses d'assurance maladie, qui ont vocation à augmenter dans les années qui viennent - sur ce point nous vous rejoignons - pour des raisons structurelles fondamentales. Cela dit, je ne vois aucune raison de redouter l'accroissement de ces dépenses si nos concitoyens décident de consacrer une part plus importante du produit intérieur brut, de leur activité, de la valeur ajoutée que crée ce pays, à la valorisation de la santé. Le groupe socialiste a quant à lui un objectif : faire face à la croissance de ces dépenses de façon solidaire.
    Mme Marie-Françoise Clergeau. Très bien !
    M. le président. Je mets aux voix la question préalable.
    (La question préalable n'est pas adoptée.)

Discussion générale

    M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Bernard Accoyer.
    M. Bernard Accoyer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, arrivés au terme de la discussion de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, nous voyons que le nouveau gouvernement, dont l'action est marquée par le réalisme et une volonté de retour à la confiance, ne poursuit qu'un but : sauver l'assurance maladie gravement mise en danger par les errances des cinq dernières années, pendant lesquelles aucune réflexion d'ensemble, aucune réforme de structure n'a été engagée.
    M. André Schneider. C'est bien vrai !
    M. Bernard Accoyer. Monsieur le ministre, nous vous remercions d'avoir enfin pris la mesure non seulement de l'ampleur de la crise qui touche notre système de santé et de l'inquiétude des Français s'agissant de la prise en charge de leurs dépenses de soins, mais également de la crise morale sans précédent que connaissent les professionnels de santé, du privé comme du public. Nous devons aujourd'hui relever l'un des défis sociaux les plus graves que nous ayons connu depuis plus de cinquante ans que la sécurité sociale assure la solidarité entre les Français. Aussi votre tâche n'a-t-elle pas été facile, monsieur le ministre. J'évoquerai brièvement les points essentiels de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
    Je commencerai par le contexte. La situation des comptes s'est dégradée et les fruits de la croissance ont été tristement gaspillés pendant les cinq dernières années. Les comptes de la branche maladie n'ont jamais atteint l'équilibre et, pour les derniers exercices, la réalité de la situation financière de celle-ci a été cachée par les excédents des branches famille et vieillesse.
    M. André Schneider. Eh oui !
    M. Bernard Accoyer. D'ailleurs, si la réforme des retraites du régime général des travailleurs salariés n'avait pas été courageusement conduite en 1993, les déficits de cette branche auraient été constants ces dernières années et le gouvernement Jospin n'aurait pu cacher le déséquilibre. Le gouvernement précédent a fait preuve d'un immobilisme coupable, d'un total conservatisme, que les électeurs ont d'ailleurs sanctionné le 21 avril dernier. Ils ont exprimé leur inquiétude dans les urnes. Ils ont compris qu'ils ne pouvaient plus faire confiance à ceux qui discourent en prétendant garantir l'avenir des Français, mais qui en réalité ne font rien ni pour leur vie quotidienne ni pour leur système de protection sociale.
    M. André Schneider. C'est en effet scandaleux !
    M. Bernard Accoyer. Monsieur le ministre, avec un objectif national de dépenses d'assurance maladie de 136 milliards d'euros pour 2003, vous exprimez un réalisme et une volonté de sincérité que nous saluons. Jamais la hausse de l'ONDAM n'aura été aussi importante d'une année sur l'autre ! Nos collègues de l'opposition, qui nous ont déjà quittés d'ailleurs, ...
    Plusieurs députés du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. Et nous ?
    M. Bernard Accoyer. Je parle des orateurs !
    M. François Liberti. Les députés de la majorité ne sont pas très nombreux !
    M. Bernard Accoyer. Les orateurs de l'opposition, donc, ont eu le culot de douter du réalisme de cette augmentation de 5,3 % de l'ONDAM, alors que celle-ci est au contraire tout à fait réaliste en raison du retour de la confiance, de la fin de la maîtrise comptable qui a fait tant de mal à notre système de soins et des mesures considérables qui sont prises pour maîtriser les dépenses de médicament.
    D'ailleurs, les professionnels de santé ne s'y sont pas trompés. Ils ont pris acte de votre décision, monsieur le ministre, de mettre fin au système des lettres clés flottantes, système aussi pervers qu'inefficace instauré par Mme Aubry, ce qui est un signe très fort de retour à la confiance. Ils vous ont d'ores et déjà donné leur quitus en acceptant de signer l'accord de juin 2002 sur le tarif des visites et en opérant une augmentation sans précédent de leurs prescriptions de génériques, donnant ainsi un coup de frein important aux dépenses de médicaments. Dans la fonction qui vous a été confiée par le Président de la République, la confiance paye, monsieur le ministre, vous en faites la preuve. Nous vous remercions d'avoir choisi cette voie et nous vous encourageons à poursuivre.
    Les établissements de soins traversent eux aussi une crise en raison notamment de l'application des 35 heures à l'hôpital que la précédente majorité a voulu imposer. Il est en effet complètement utopique de penser que l'hôpital public pourra fonctionner si le temps de travail y est réduit de plus de 11 % alors que l'on ne trouve même pas sur le marché du travail les professionnels - médecins, infirmières et autres - susceptibles de compenser cette « restriction », au sens propre du terme, de soins.
    L'opposition ne cesse de prétendre que le Gouvernement veut faire régresser notre système de soins, mais c'est bien à cause de l'application des 35 heures à l'hôpital qu'il y a eu un rationnement des soins, une diminution de l'offre de soins en France. S'il y a eu une dégradation de la qualité des soins, c'est aussi parce que moins de temps est désormais consacré aux malades. (« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Les 35 heures obligatoires ont été financées par la sécurité sociale ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Guy Geoffroy. C'est l'un des plus grands scandales !
    M. Bernard Accoyer. Lorsque le précédent gouvernement a choisi de financer cette mesure qu'il pensait être favorable à l'emploi - on sait ce qu'il en est advenu -, plutôt que d'améliorer les remboursements, il a, là encore, imposé une régression sociale unique. Les électeurs en ont tenu compte (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), mais c'est à vous maintenant, monsieur le ministre, à nous, mes chers collègues de la majorité, qu'il revient...
    Mme Jacqueline Fraysse. D'améliorer les remboursements !
    M. Bernard Accoyer. ... d'assurer l'avenir de notre système de soins.
    M. Jean Delobel. On verra !
    M. Bernard Accoyer. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale y contribue. Il indique la voie à suivre pour maîtriser les dépenses de santé. On y reconnaît l'importance de l'effort que la nation doit concéder en direction de la prise en charge des soins, au-delà même de l'évolution du produit intérieur brut. Il eût été désolant de ne pas tirer les conséquences du dérapage constant des cinq derniers ONDAM votés par le précédent gouvernement, dérapage qui atteignait en moyenne 50 à 75 %. Certes, il est difficile de compter avec exactitude lorsque l'on est sur les bancs de la gauche. Mais à ce point là ! C'est l'illustration d'un refus de considérer la situation telle qu'elle est.
    M. André Schneider. Politique de Gribouille !
    M. Bernard Accoyer. En cette dernière lecture, je voudrais rappeler que les dispositions prises par la CMP apportent une conclusion particulièrement heureuse aux travaux du Parlement, qui aura contribué très largement, monsieur le ministre, à conforter la voie que vous avez choisie : celle du réalisme, de l'honnêteté et du dialogue (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Vous avez voulu répondre aux besoins de soins et à l'inquiétude des Français, rattraper par le plan « Hôpital 2007 » le terrible retard que nous avons maintenant dans les hôpitaux publics. L'équipement technique lourd, notamment, avait été abandonné par le précédent gouvernement qui a placé la France dans une position peu flatteuse par rapport aux grands pays développés auxquels nous pouvons être comparés. Vous avez pris des dispositions d'investissement et d'aménagement tarifaire pour rendre plus efficace le système hospitalier et plus juste le système de rétribution de ceux qui le font fonctionner. Vous avez mis en place une réforme indispensable et qui, nous en sommes certains, sera couronnée de succès.
    Vous portez attention au service public de l'hospitalisation : non seulement l'hôpital public, avec sa merveilleuse capacité de soin, de formation, de permanence des soins, sa capacité sociale, mais aussi l'hospitalisation privée, avec ses innombrables établissements où s'accomplissent chaque jour plus de la moitié des actes de chirurgie. Ces deux systèmes doivent fonctionner en symbiose. Vous en avez la volonté, et nous sommes persuadés que vous vous allez y parvenir.
    Notre assemblée a apporté des améliorations au système de maîtrise des dépenses de médicaments en instaurant le forfait de remboursement. C'est une disposition originale qui permettra d'obtenir des résultats particulièrement heureux et de conserver un très bon niveau d'accès aux médicaments et à l'innovation thérapeutique. Dans le même temps, un certain nombre de mesures ont été prises pour sauvegarder l'architecture du service de distribution du médicament.
    La taxation des tabacs et des bières fortes, améliorée dans son efficience et sa pertinence par les travaux des deux assemblées et en CMP illustre votre politique volontariste en matière de santé publique.
    La création d'un office de suivi des politiques de santé, souhaitée par la commission des affaires sociales et son président, s'inscrit dans la logique qui est la vôtre, et qui vise à répondre vraiment aux vrais besoins.
    Je terminerai, monsieur le ministre, mes chers collègues, en insistant sur un certain nombre de mesures, peut-être moins importantes, mais attendues par tous les Français. D'abord, vous consentez une marge de manoeuvre aux établissements pour personnes âgées dépendantes, ce qui permettra à ces derniers de se conformer aux dispositions de la réforme tarifaire. Ensuite, vous assouplissez le mécanisme de cessation anticipée pour les professions de santé, en particulier les médecins, ce dont nous vous en remercions. Enfin, vous intervenez à propos de l'affiliation des travailleurs frontaliers au régime général de l'assurance maladie, que la précédente majorité avait délibérément refusé d'examiner et de mettre en application.
    Monsieur le ministre, mes chers collègues, ce PLFSS est en rupture avec les précédents. Pour la première fois, il utilise tout l'apport positif des ordonnances de 1995 en évitant ce qu'elles avaient d'inadapté. Nous vous remercions de l'avoir préparé et d'avoir accepté qu'il soit enrichi par les travaux de nos deux assemblées.
    Monsieur le ministre, vous pouvez compter sur le groupe UMP qui votera avec enthousiasme ce PLFSS. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

    Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le ministre, je vous prie par avance de m'excuser : je ne vais pas vous faire autant de compliments que mon collègue Accoyer ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Denis Jacquat. Il faut dire la vérité, mais avec gentillesse !
    Mme Jacqueline Fraysse. Je dirai ce que je pense de ce texte, mais je le ferai gentiment. (« Ah ! » sur les mêmes bancs.)
    Le texte de la commission mixte paritaire ne diffère guère du texte initial. Toutes les préoccupations que nous avons exprimées en première lecture demeurent, à commencer par celles qui sont liées à votre refus de rechercher de nouveaux financements pour la protection sociale, alors même que vous déclarez, monsieur le ministre, qu'il y a bien un problème de ressources. Nous partageons cette analyse.
    Ce texte n'apporte rien de nouveau, rien de significatif pour commencer au moins à répondre à cette question. Pourtant, comment croire que l'on va répondre aux défis de la protection sociale sans accroître ses ressources ? Comment pourriez-vous le croire vous-même, alors que vous reconnaissez que vous n'êtes pas en mesure d'assurer le retour à l'équilibre financier ?
    Si l'enveloppe ne suffit pas, soit vous imposerez de nouvelles restrictions de l'offre de soins, soit vous prendrez appui sur un nouveau déficit pour enclencher des réformes structurelles de la protection sociale, en rupture avec les principes de solidarité et d'unicité qui ont présidé à sa création.
    Chacun peut le constater : ce qui se prépare, c'est la mise en concurrence des caisses de sécurité sociale et des compagnies d'assurances. « Procès d'intention ! », ne cessez-vous de répéter à ceux qui ne sont pas d'accord avec vous. C'est trop facile. Dès le lendemain du débat à l'Assemblée nationale, M. Jacques Barrot apportait un éclairage singulièrement précis en déclarant : « Il faudra mieux préciser les contours du panier de soins, chantier qui a été confié à M. Chadelat. » De votre côté, monsieur le ministre, vous vous dites, dans une interview, opposé à l'idée d'un « panier de soins » remboursé par la sécurité sociale. Mais vous confirmez la mission confiée à M. Chadelat sur le partage entre l'assurance maladie et les régimes complémentaires. Et vous ajoutez que ces régimes, c'est-à-dire mutuelles et assurances, doivent être pleinement associés à la gestion du système, en précisant même : « Elles ne peuvent plus se contenter d'un strapontin à l'assurance maladie. » Voilà qui commence à devenir plus clair.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapés. C'est parfaitement normal !
    Mme Jacqueline Fraysse. Il ne faut pas esquiver le vrai débat. Contrairement à ce que vous avez dit en début de séance, monsieur le ministre, nous ne sommes pas contre la responsabilisation des acteurs, qu'il s'agisse des « offreurs » de soins ou des patients. Au contraire. Le débat n'est pas là et vous le savez. Mais vous préférez disserter à ce propos plutôt que de travailler avec nous tous sur des mesures concrètes pour que toutes les richesses produites participent à la protection sociale et permettent l'augmentation de l'enveloppe, indispensable pour maintenir une bonne protection sociale pour tous. La responsabilisation, c'est bien, mais cela ne suffit pas.
    Vous ajoutez qu'« il faut sortir du tout gratuit ». Mais ces propos nous choquent. Ils sont inacceptables et particulièrement irrespectueux envers les assurés sociaux - vous continuez d'ailleurs de refuser l'élection de leurs représentants au conseil d'administration des caisses - et envers les mutualistes. Car il n'y a rien de gratuit : les assurés sociaux, les mutualistes, paient des cotisations, messieurs. (« Nous aussi ! » - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Et vous aussi, bien sûr...
    Ce n'est donc pas la gratuité mais une « caisse commune » fondée sur un système solidaire, qui devrait permettre à chacun, quels que soient ses moyens, de se soigner lorsque c'est nécessaire et d'avoir accès à la même qualité de soins. Et si, la main sur le coeur, vous proclamez votre attachement à la sécurité sociale, comme vous ne manquez jamais de le faire, c'est que l'expérience vous a fait mesurer l'attachement réel de nos concitoyens à ce système et que la prudence vous incite à ne pas les prendre de front.
    Répondre aux besoins des malades lorsque la médecine progresse et que l'espérance de vie s'accroît, développer une politique familiale ambitieuse, garantir des retraites décentes sans allonger la durée du travail, exiger des employeurs une prévention de la santé au travail digne de ce nom, et une réparation intégrale pour les victimes d'accidents du travail et maladies professionnelles, cela demande de l'argent, bien sûr.
    Si l'on a conscience que les ressources sont insuffisantes en l'état actuel ou bien on déclare froidement que l'on restreint le niveau de la protection sociale, ou bien on envisage d'autres sources de financement. C'est ce que nous n'avons cessé de proposer. C'est le débat que, aujourd'hui encore, vous ne cessez d'esquiver.
    Au Sénat, vous avez demandé à ma collègue, Mme Beaudeau, quel était son modèle. Curieux propos, a fortiori, pour un chercheur scientifique. Si l'humanité s'est autant transformée au cours des siècles, c'est que l'homme est capable d'inventer et de créer sans modèle préexistant. Heureusement que les hommes ont osé mettre en place la sécurité sociale en 1945, sans se soucier de copier un modèle... Mais puisqu'il vous semble indispensable d'en avoir un, je vous répondrai que nous n'avons pas de doute sur le vôtre : nous reconnaissons parfaitement celui du MEDEF (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Yves Bur, rapporteur. Non, madame Fraysse, ce n'est pas possible !
    Mme Jacqueline Fraysse. Relisez-le et vous verrez ! C'est très superposable, sur des aspects essentiels.
    A nos propositions de réforme de l'assiette des cotisations patronales, vous avancez qu'il s'agit d'utopie et qu'il n'est nul besoin de répondre. Mais il n'y a rien d'utopique à envisager que les ressources provenant des placements financiers des entreprises fassent l'objet de cotisations autant que les revenus du travail. D'ailleurs, cela encouragerait à investir dans l'emploi plutôt que dans la Bourse. Au vu de la situation actuelle, ce serait, sans aucun doute, rendre service aux entreprises et au pays tout entier. Il n'y a rien d'utopique non plus à proposer que le calcul de la cotisation patronale prenne en compte le rapport entre la masse salariale et la valeur ajoutée. Au point d'ailleurs que cette piste avait été évoquée dans le rapport de M. Chadelat, commandé par Alain Juppé à l'époque où il était Premier ministre.
    Les vraies raisons sont ailleurs. Ni utopie, ni modèle. Vous esquivez le débat parce que vous refusez d'envisager que les richesses créées contribuent davantage à assurer une protection sociale de qualité à toute la population. Le résultat est dans ce texte et transparaît dans vos projets.
    En ce qui concerne l'hôpital, nous avons à déplorer une évolution de l'ONDAM insuffisante et qui préoccupe les personnels, un plan « Hôpital 2007 » qui ne comporte aucune mesure de formation accrue de personnels soignants, ainsi qu'un numerus clausus bien au-dessous hélas ! des besoins en médecins. Vous avez repoussé nos propositions concernant la formation des infirmières au motif que, de toute manière, les instituts de formation ne faisaient pas le plein. Puisque cette difficulté est surmontée, rien ne s'oppose donc au réexamen de notre proposition. Mais vous n'y procédez pas, malgré une très grave pénurie.
    D'une manière plus générale, le plan « Hôpital 2007 » semble bien timide au regard des annonces auxquelles il avait donné lieu. L'aide importante dont vous parliez se résumera en réalité à 300 millions d'euros l'an prochain et à la possibilité de recourir à l'emprunt, qu'il faudra, bien évidemment, rembourser. Pour les personnels, vous ne faites rien d'autre que l'éloge de leurs qualités professionnelles. C'est bien, mais comme pour la responsabilisation, cela ne suffira pas.
    Vous annoncez un renforcement du schéma régional d'organisation sanitaire et sociale sans prévoir aucune mesure pour le démocratiser ; les principaux concernés y sont sous-représentés. Vous allez laisser les hôpitaux s'enfoncer davantage au plan financier, ce qui les contraindra à envisager les restructurations nécessaires, non pas en fonction des besoins, mais sous le seul angle comptable - bien que vous nous disiez le contraire.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Vous les y avez bien aidés !
    Mme Jacqueline Fraysse. S'agissant des médicaments, vous rompez le lien entre leur prix réel et leur base de remboursement. Les médicaments princeps pourront toujours être prescrits mais vous ne prenez aucune mesure pour en faire baisser le prix. A l'inverse, vous autorisez la liberté des prix des médicaments innovants, ce qui pèsera lourd sur les budgets des hôpitaux, au-delà de l'enveloppe que vous proposez pour y faire face.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Et les 35 heures ?
    Mme Jacqueline Fraysse. Par ailleurs, les revalorisations des pensions de retraites, des allocations familiales, des allocations logement seront inférieures à l'inflation prévue, sans parler du retard pris cette année.
    Enfin, s'agissant des accidents du travail et maladies professionnelles vous bloquez les cotisations, alors que des accidents progressent et que l'indemnisation des victimes de l'amiante appelle la mise en oeuvre de moyens importants. Quant à la réparation intégrale, elle est renvoyée aux calendes grecques.
    Monsieur le ministre, non seulement cette loi de financement ne permet pas de répondre aux besoins d'aujourd'hui, mais elle prépare le terrain à de graves remises en cause. C'est pourquoi le groupe des député-e-s communistes et républicains votera contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur le président, monsieur le ministre, ches collègues, nous nous retrouvons donc après l'accord de la CMP pour voter définitivement le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 qui, comme nous l'avions indiqué, est un texte de transition. L'UDF a la volonté d'aider le Gouvernement à réussir cet exercice difficile en tenant un langage de vérité, à respecter ses promesses, à regagner la confiance des professionnels et à préparer l'avenir. D'autant que le contexte est aujourd'hui délicat, en raison du ralentissement économique et d'un héritage particulièrement lourd. Le « papy-boom » est à nos portes et la réforme de nos régimes de retraite n'a pas été engagée. La politique familiale s'est transformée au fil du temps en politique sociale. Les excédents de la branche ont été ponctionnés. Tous les secteurs de la santé connaissent une crise profonde.
    Le Gouvernement mise sur des recettes de 327 milliards d'euros grâce à une croissance de 2,5 % et à une augmentation de la masse salariale de 4,1 %. Ces recettes paraissent optimistes aujourd'hui, mais l'UDF souhaite avec vous tous qu'elles se réalisent, car ce serait bon pour le pays.
    Vous avez maintenu le FOREC tout en promettant sa réforme. Vous avez persuadé le Sénat de renoncer à un début de simplification. Pour avoir dénoncé avec virulence cette usine à gaz montée pour financer les 35 heures, j'aurais, avec l'UDF, souhaité sa dispatition afin de pouvoir affecter à la prévention et aux soins la totalité des taxes prélevées sur l'acool et le tabac.
    L'UDF est très attachée à la retraite par répartition. Mais tout le monde sait que le « papy boom », à partir de 2005, va poser des problèmes considérables, notamment aux régimes spéciaux.
    Le gouvernement socialiste, hélas, n'a pas profité du départ à la retraite des classes creuses et de la croissance pour poursuivre la réforme entamée en 1994.
    Nous sommes aujourd'hui au pied du mur.
    La loi prévoit une revalorisation de 1,5 % correspondant au maintien strict du pouvoir d'achat, mais il prévoit aussi un prélèvement de 830 millions d'euros sur le budget de la CNAVTS au titre de la compensation démographique. L'UDF ne juge pas ce prélèvement très opportun !
    Le Gouvernement s'est engagé à proposer une réforme de nos régimes de retraite au printemps 2003 après une large concertation. A ce titre, l'UDF souhaite rappeler que nous sommes très attachés à conforter le principe de la répartition. Selon nous, il faut pour cela aller vers une plus grande responsabilisation des partenaires sociaux et vers une réelle équité. Il faut aussi donner une réelle autonomie à la CNAVTS en autorisant les partenaires sociaux à définir les prestations en fonction des cotisations ou vice versa. Il faut encore créer une caisse de retraite des fonctionnaires gérée paritairement.
    Mais nous souhaitons également permettre à tous les salariés de compléter leur retraite en leur donnant accès, par exemple, à la PREFON. De même, nous souhaitons enfin les autoriser à bénéficier d'une retraite à la carte.
    S'agissant de la famille, nous avons compris que les mesures de simplification des prestations, la garde unique seront proposées après la réunion de la Conférence de la famille en 2003.
    En revanche, nous saluons d'ores et déjà la mesure nouvelle concernant l'aîné des familles de trois enfants qui atteint vingt ans.
    L'année dernière, je m'étais opposé vigoureusement, au nom de l'UDF, au « hold-up » effectué sur l'excédent de la branche famille pour financer la majoration pour enfant de la pension de retraite. Notre groupe ne peut que dénoncer le maintien en 2003 de ce prélèvement dont le taux est aggravé à 60 %. Ce qui était néfaste en 2002 l'est toujours en 2003.
    Le Sénat a proposé la création d'un fonds de réserve pour les excédents de la branche famille. Mais vous avez persuadé les sénateurs d'y renoncer. C'est bien dommage ! Nous demandons, quant à nous, l'autonomie de la branche famille et espérons que 2003 permettra de mettre en place une réelle politique familiale indispensable pour préparer l'avenir du pays.
    La santé correspond à un « bien supérieur » et ses dépenses sont appelées à augmenter. Vous avez hérité, monsieur le ministre, d'une situation très difficile. Avec l'UDF, je regrette que nous n'ayez pas demandé un audit pour faire un bilan exact puis prévoir le coût des mesures nécessaires pour répartir sur des bases saines. Les choses auraient été plus claires.
    En tout état de cause, je veux saluer les dispositions prises depuis votre arrivée et celles contenues dans cette loi. Il en est ainsi de la revalorisation de la consultation et de la visite pour les généralistes, de la suppression des lettres clés flottantes, des CMR, d'un ONDAM plus réaliste, d'un plan d'investissement hospitalier, des engagements pour une loi de santé publique, d'une loi de financement rectificative, de la mise en oeuvre d'une tarification à l'activité. Ce n'est pas rien ! Mais le chemin est encore long, car tous les secteurs sont en crise. Les mentalités ont changé, force est d'en tenir compte.
    L'hôpital est confronté à deux problèmes majeurs. Il y a d'abord un manque de moyens pour assurer le fonctionnement. Beaucoup d'établissements sont obligés de recourir à des reports de charge. Le taux de 5 % permettra-t-il de résoudre ces problèmes, notamment l'augmentation du prix des médicaments ? Pourquoi maintenir la taxe sur les salaires ?
    Il y a ensuite les retards dans l'investissement en raison, notamment, des insuffisances budgétaires. Vous proposez 300 milliards d'euros qui pourraient conduire à 1 milliard de travaux. Quelle est la capacité d'autofinancement des établissements ? Comment feront-ils face aux annuités d'emprunts ? L'Etat récupère toujours la TVA. C'est dire que, sur 1 milliard de travaux, il récupèrera 200 millions d'euros ! L'effort final de l'Etat est donc modeste.
    D'autres problèmes se posent également aux hôpitaux : j'évoquerai par exemple l'accueil des urgences avec un afflux toujours plus important ou la démographie médicale avec des spécialités sinistrées. En outre, l'application inconsidérée des 35 heures, le principe du repos compensateur et l'intégration de la garde dans le temps de travail ont encore aggravé les choses. Comment, dès lors, assurer la continuité des soins ?
    Dans le secteur ambulatoire, la crise est, là aussi, très profonde. Les praticiens sont désabusés, lassés, ils n'acceptent plus d'être désignés comme des boucs émissaires. Vous avez heureusement renoué le dialogue pour rétablir la confiance. Aucune réforme ne se fera en effet sans et a fortiori contre les professionnels. Vous avez entendu les généralistes. Qu'allez-vous proposer aux spécialistes dont les rémunérations sont bloquées depuis sept ans, mais aussi aux infirmières, notamment pour l'acte de soins infirmiers et les frais de déplacement ?
    Vous nous proposez un ONDAM plus réaliste - plus 5,3 % -, mais celui-ci n'est pas encore médicalisé.
    Le projet prévoit un déficit de 6 milliards d'euros en 2002 pour l'assurance maladie et 8 milliards d'euros en 2003, qui pourrait être supérieur si la croissance est moins forte que prévue et si les dépenses, notamment de médicaments, sont supérieures. Comment sera financé ce déficit ? C'est là un vrai problème.
    Comment aboutir à une maîtrise des dépenses permettant d'assurer la qualité des soins ? Je ne pense pas qu'une nouvelle définition du panier de soins permette de régler le problème parce que le panier de soins existe déjà et que personne n'envisage sérieusement de revenir sur la CMU, les prises en charge par le régime général de l'hospitalisation et des affections de longue durée qui représentent 85 % des dépenses de soins. Et puisque les Français paient la CSG ou la cotisation de leur mutuelle, où est la différence pour leur porte-monnaie ? C'est surtout le risque d'une médecine à deux vitesses qui peut se faire jour.
    Pour nous, à UDF, l'optimisation des dépenses peut être obtenue de deux manières. Cela passera d'abord par la mise en oeuvre d'une réelle maîtrise médicalisée des dépenses à condition de mobiliser tout le monde sur cet objectif et de se donner les moyens de le faire. Il faut définir les bonnes pratiques médicales, le bon usage du médicament, le codage des actes et des pathologies.
    Cela passera aussi par la nouvelle gouvernance. Certes, il est nécessaire de renforcer le dialogue social et le paritarisme dans son domaine de compétence, c'est-à-dire ce qui est lié au travail et financé par des cotisations salariales et patronales : chômage, accidents du travail, maladies et retraite. Mais pour la santé ? Celle-ci commence à la naissance, voire avant, va jusqu'à la mort et n'a donc aucun lien avec le travail. Il n'y a plus de cotisation salariale ; il y a la CSG sur l'ensemble des revenus.
    La nouvelle gouvernance, c'est-à-dire une réelle régionalisation de la santé, permettra de prendre en compte les besoins, mais surtout de rendre chacun acteur et responsable. Le paritarisme n'a plus de légitimité pour gérer la santé ; notre système est quasi étatisé, sans contrôle démocratique. Mais nous comptons vous apporter notre contribution pour le sauver et garantir demain l'accès de tous à des soins de qualité.
    Monsieur le ministre, vous pouvez compter sur l'UDF pour vous aider dans votre tâche difficile. La loi de financement pour 2003 est une loi de transition : 2003 verra aboutir les réformes de la famille, de la retraite et de la santé. Bon courage, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je vous remercie.
    M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai suivi avec un certain amusement les atermoiements des députés et des sénateurs de la majorité pour définir le niveau des taxes sur le tabac et introduire une taxe sur les bières fortes en canette à l'exclusion des bières de terroir, censée venir étoffer les recettes du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale. Certes, les réflexions divergentes des deux chambres quant au choix de la juridiction de contrôle de la gestion des CHR et à l'exonération des taxes directes des laboratoires fournissant les officines pharmaceutiques, sans passer par les grossistes répartisseurs, ont été plus intéressantes, mais visiblement les enjeux sont ailleurs.
    Je m'expliquerai donc sur le fond, sur l'opposition des Verts à ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. Bien sûr, le texte contient quelques dispositifs louables visant à limiter les dépenses de santé : forfait remboursement des médicaments sur la base des génériques et abandon du remboursement des médicaments à faible efficacité. Voilà deux mesures qui vont à l'encontre du protectionnisme déguisé et traditionnel à l'égard des laboratoires français. Toutefois, elles soulèvent une interrogation quant à leur mise en place et au paiement du différentiel en cas de fourniture de médicaments autres que génériques. En effet, qui va payer cette différence ? Les patients ou les mutuelles ? Ce dispositif ne peut remplir son objectif que si l'ensemble des pharmacies jouent le jeu en s'approvisionnant en générique, ce qui est encore loin d'être le cas.
    L'expérimentation du financement des établissements de santé par la tarification à l'activité est également une bonne mesure pour limiter les dépenses.
    Les maigres aspects positifs s'arrêtent là. En gonflant subitement l'ONDAM sans même l'asseoir sur des objectifs de santé. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne fait qu'enregistrer la dérive des dépenses. Le Gouvernement a choisi de conduire dans l'impasse toute la politique de l'assurance maladie fondée sur une approche curative comptable d'accès et de remboursement des soins, afin de mettre en oeuvre les recettes libérales simplistes qui lui sont proposées.
    Les récentes déclarations de M. Barrot sur la séparation entre le panier de soins à gros risques remboursés et les autres, les petits risques, et les déclarations de M. le ministre Mattei sur la fin du tout gratuit nous montrent que la majorité est engagée sur la voie d'une privatisation partielle de la sécurité sociale. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Guy Geoffroy. Caricature !
    Mme Martine Billard. La majorité suit en cela à la lettre les préceptes du patronat et de l'Institut Montaigne de Claude Bébéar et Alain Mérieux qui diffuse à tous les parlementaires son « prêt-à-penser » néo-libéral.
    La majorité et le Gouvernement oublient cependant un élément fondamental en termes de financement de la santé publique. Les petits risques d'aujourd'hui, non traités pour cause d'économie, produiront les gros risques de demain qui grèveront toujours autant les comptes sociaux pour une prise en charge moindre des patients.
    M. Bernard Accoyer. C'est votre discours qui est à grands risques !
    M. le président. Monsieur Accoyer !
    Mme Martine Billard. Mais la logique curative sur laquelle s'appuient tous les professionnels de santé a atteint ses limites. Sur ce point, nous devrions tous être d'accord. Une politique de prévention d'envergure, quitte à en mettre le prix, constituerait le meilleur garde-fou contre la dérive des comptes ou participerait du mieux-être de tous. A quand une politique préventive de santé environnementale pour venir à bout de la croissance des pathologies chroniques et notamment des cas de cancer ?
    M. Guy Geoffroy. Qu'on soignerait avec des herbes ?
    Mme Martine Billard. Tabac et alcool n'expliquent pas tout. La croissance de l'asthme ne trouvera pas de solution uniquement thérapeutique. Il faut aussi une politique de santé environnementale. Le scandale de l'amiante, pour lequel vous commencez tout juste à vouloir budgéter la prise en charge des victimes, aurait, certes, pu être évité si nous disposions dans ce pays d'une médecine du travail digne de ce nom, émancipée des employeurs. Or, dans ce projet de loi de finances de la sécurité sociale, je ne vois aucune disposition allant dans le sens d'une revalorisation substantielle de la médecine du travail, qui serait doublement bénéfique, tant sur le plan humain que sur le simple plan comptable. La santé au travail doit entrer pleinement dans le programme de santé publique. Peut-être permettrait-elle de répondre enfin à cette inégalité sanitaire flagrante qui fait qu'un ouvrier a trois fois plus de risques qu'un cadre d'avoir un cancer.
    Parmi les nombreuses causes de la crise du système hospitalier, l'une est liée à la hausse de fréquentation des services d'urgence des hôpitaux.
    M. Bernard Accoyer. Il y a surtout les 35 heures !
    Mme Martine Billard. Il y a aussi d'autres raisons, comme l'appauvrissement de la population.
    M. Bernard Accoyer. Les 35 heures restent la raison principale !
    M. le président. Monsieur Accoyer, n'interrompez pas Mme Billard, ou je vais être obligé de lui donner trois minutes supplémentaires. (« Ah, non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme Martine Billard. Merci, monsieur le président.
    M. Bernard Accoyer. Pitié ! Pas ça, monsieur le président ! (Sourires.)
    M. le président. Continuez, madame Billard.
    Mme Martine Billard. Une fraction de notre population n'a plus, aujourd'hui, d'autre option que de se faire soigner dans les services d'urgences des hôpitaux, quand il est, hélas, déjà très tard pour consulter. Pour enrayer cette tendance, il est donc nécessaire de mettre en place, au plus près des populations en difficulté, un suivi médical qui passe par la mise en place de réseaux de santé associant l'ensemble des professions médicales et paramédicales d'un secteur, afin d'intervenir par une prise en charge préventive globale sans plus attendre que la situation se dégrade.
    Or, je ne vois rien de tout cela dans votre projet. Le déficit de la sécurité sociale continuera donc à se creuser. En refusant de tracer des perspectives de maîtrise des dépenses et d'augmentation des recettes, et d'ouvrir des programmes préventifs, vous pratiquez la politique du laissez-faire.
    J'espère que la loi quinquennale qui doit être discutée au printemps 2003 prendra en compte cette dimension de prévention, et ne se résumera pas à une grande braderie de l'assurance maladie, ou à une transposition dans le réel des situations décrites par Robin Cook, dont je vous conseille de lire les excellents romans policiers pour savoir ce qui pourrait se produire si, comme cela semble s'annoncer aujourd'hui, les recommandations du rapport de l'Institut Montaigne sont mises en oeuvre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La discussion générale est close.
    La parole est à M. Jean-Michel Dubernard, vice-président de la commission mixte paritaire.
    M. Jean-Michel Dubernard, vice-président de la commission mixte paritaire. Au terme de cette discussion, je voudrais saluer et remercier mes collègues de la commission mixte - et pas seulement ceux de la majorité - pour la qualité du débat. Je voudrais aussi remercier mes collègues - et pas seulement ceux de la majorité - qui, au cours des séances dans cet hémicycle nous ont permis d'avoir un débat extrêmement intéressant. Et si ce débat, aussi bien en commission qu'en séance publique a été intéressant, c'est parce que le projet de loi de financement de la sécurité sociale que vous nous avez présenté, monsieur le ministre, était un texte bien équilibré et facile à analyser, comme nous avons pu en détailler tous les aspects au cours des différentes discussions. C'est aussi grâce aux propos toujours justes et mesurés que vous avez tenus, aussi bien lorsque vous avez présenté le projet devant la commission que lors de vos interventions dans l'hémicycle.
    L'opposition vous a souvent reproché le terme de « transition ». Or il s'agit bien d'un budget de transition, et il ne peut pas en être autrement !
    Mme Hélène Mignon. Et pourquoi ?
    M. Jean-Michel Dubernard, vice-président de la commission. Et là encore, vous avez analysé de façon extrêmement honnête, j'insiste sur ce point, la situation dans laquelle vous avez trouvé notre système de sécurité sociale...
    M. Pierre Hellier. Une situation très grave !
    M. Jean-Michel Dubernard, vice-président de la commission. ... et le déficit dont vous avez hérité.
    M. Pierre Hellier. L'héritage !
    M. Jean-Michel Dubernard, vice-président de la commission. Il vous a bien fallu faire avec et je sais que ce n'est pas facile. L'année dernière déjà ça ne l'était pas, et ce ne le sera pas davantage l'an prochain. Mais il est sûr en tout cas que vous avez pris la mesure de cette complexité. A cet égard, je suis très satisfait de votre intention de créer un groupe de travail associant députés, sénateurs et membres de votre cabinet qui s'attaquera à toutes les causes, notamment structurelles, de ces difficultés budgétaires.
    En matière de santé publique, on ne peut que se réjouir de votre décision de présenter une grande loi de programmation. Mais il ne faut pas oublier que l'article 1er du projet de loi prévoit déjà des mesures concrètes. Vous avez fait allusion, monsieur Le Guen, aux bonnes intentions du prédécesseur de M. Mattei, mais lui ne bénéficiait pas des moyens dont dispose le ministre aujourd'hui.
    M. François Goulard. Qui lui est un bon ministre !
    M. Jean-Michel Dubernard, vice-président de la commission. M. Mattei a ainsi la chance de pouvoir mettre en pratique ses conceptions en matière de santé publique. Comptez, monsieur le ministre, sur l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, dont la création, je le sais, vous tenait à coeur, pour se mettre au travail dès qu'il sera installé, c'est-à-dire pour vous aider à préparer dans les meilleures conditions le grand débat de santé publique prévu pour le printemps prochain.
    Dans le domaine de la médecine de ville, je n'entrerai pas dans les détails, mes collègues, et notamment Bernard Accoyer, l'ayant déjà fait. Je veux simplement me féliciter du retour de la confiance et du dialogue. Et quand le dialogue s'instaure dans la confiance, le résultat ne peut être que positif. C'est pourquoi je salue les efforts qui vous ont permis de renouer en moins de six mois un dialogue qui avait complètement disparu depuis des années.
    Pour l'hôpital, c'est l'espoir qui renaît, avec l'annonce du plan « Hôpital 2007 » auquel vous êtes très attaché. Et ce dernier n'est pas que symbolique pour tous ceux qui à l'hôpital côtoient le patient dans des conditions de plus en plus difficiles, dans un système qui était en train de s'effondrer. Je n'entrerai pas ici dans le débat avec mes collègues de l'opposition, qui n'ont fait que tenir leur rôle, sinon pour dire que les procès d'intention étaient nombreux. Ainsi, M. Gremetz parlait de médecine à deux vitesses : n'est-ce pas déjà le cas ?
    Mme Jacqueline Fraysse. Ce n'est pas un argument !
    M. Jean-Michel Dubernard, vice-président de la commission. Et ne faut-il pas tout faire au contraire pour la contrer ? Laissez la situation en l'état reviendrait à l'aggraver en réalité.
    M. Bernard Accoyer. Mais oui ! Bien sûr !
    M. Jean-Michel Dubernard, vice-président de la commission. Autre procès d'intention, le MEDEF.
    M. André Gerin. Ah non !
    M. Jean-Michel Dubernard, vice-président de la commission. Vous ne pouvez pas dire, madame Fraysse, que le projet de loi est inspiré par le MEDEF ! (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Mme Jacqueline Fraysse. Il y a au moins une forte influence !
    M. Jean-Michel Dubernard, vice-président de la commission. Ce n'est pas possible !
    Quant à M. Le Guen, comment peut-il accuser le ministre de manquer de sincérité ? Non, non et non, tel n'est pas le cas ! Mais je n'irai pas plus loin car je ne veux pas entrer dans un débat stérile.
    En réalité, les faits sont là. Nous sommes tous d'accord pour considérer que notre système de santé va mal. Oublions d'en chercher les causes. Il nous faut à présent tout mettre en oeuvre pour l'améliorer, que ce soit en ville ou à l'hôpital ; et Bernard Accoyer a très bien fait d'évoquer l'hôpital privé qui est confronté, lui aussi, à de grandes difficultés et dont nul ne méconnaît les grands, grands services qu'il rend à la population.
    Je terminerai en revenant sur la fameuse transition. C'est grâce à ce budget de transition que nous pourrons, dès l'an prochain, entrer dans la phase de mutation, indispensable pour redonner à notre système de sécurité sociale son rôle fondamental. Ce rôle voulu par le général de Gaulle quand il l'a créé, voilà plus de cinquante ans : permettre l'accès de tous à des soins d'égale qualité. C'est seulement en adaptant notre système de santé, en entrant dans cette phase de mutation que nous y parviendrons. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

Texte de la commission mixte paritaire

    M. le président. Je donne lecture du texte de la commission mixte paritaire :

« PROJET DE LOI DE FINANCEMENT
DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2003

« TITRE Ier

« ORIENTATIONS ET OBJECTIFS
DE LA POLITIQUE DE SANTÉ
ET DE SÉCURITÉ SOCIALE

« TITRE Ier BIS

« CONTRÔLE DE L'APPLICATION DES LOIS
DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

    « Art. 1er bis. - Après l'article 6 septies de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 6 octies ainsi rédigé :
    « Art. 6 octies. - I. - Afin de contribuer au suivi des lois de financement de la sécurité sociale, la délégation parlementaire dénommée Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé a pour mission d'informer le Parlement des conséquences des choix de santé publique, afin d'éclairer ses décisions, A cet effet, elle recueille des informations, met en oeuvre des programmes d'études et procède à des évaluations.
    « II. - La délégation est composée :
    « - des présidents des commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des affaires sociales ainsi que des rapporteurs de ces commissions en charge de l'assurance maladie dans le cadre des lois de financement de la sécurité sociale ;
    « - de dix députés et dix sénateurs désignés de façon à assurer, au sein de chaque assemblée, une représentation proportionnelle des groupes politiques, en tenant compte des membres de droit, chaque groupe ayant au moins un représentant. Les députés sont désignés au début de chaque législature pour la durée de celle-ci. Les sénateurs sont désignés après chaque renouvellement partiel du Sénat.
    « L'office est présidé alternativement pour un an par le président de la commission chargé des affaires sociales de l'Assemblée nationale et par le président de la commission chargée des affaires sociales du Sénat.
    « III. - La délégation est assistée d'un conseil d'experts composé de six personnalités choisies en raison de leurs compétences dans le domaine de la santé publique.
    « Les membres du conseil d'experts sont désignés pour trois ans dans les conditions prévues par le règlement intérieur de la délégation.
    « Le conseil d'experts est saisi dans les conditions prévues par le règlement intérieur de la délégation, chaque fois que celle-ci l'estime nécessaire.
    « IV. - La délégation peut recueillir l'avis des professionnels de santé, ainsi que des organisations syndicales et professionnelles et des associations intervenant dans le domaine de la santé.
    « V. - La délégation est saisie par :
    « 1° Le bureau de l'une ou l'autre assemblée, soit à son initiative, soit à la demande d'un président de groupe, soit à la demande de soixante députés ou de quarante sénateurs ;
    « 2° Une commission spéciale ou permanente.
    « VI. - La délégation dispose des pouvoirs définis par le IV de l'article 164 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 portant loi de finances pour 1959.
    « En cas de difficultés dans l'exercice de sa mission, la délégation peut demander, pour une durée n'excédant pas six mois, à l'assemblée d'où émane la saisine de lui conférer les prérogatives attribuées par l'article 6 aux commissions parlementaires d'enquête, à leurs présidents et à leurs rapporteurs. Lorsque la délégation bénéficie de ces prérogatives, les dispositions relatives au secret des travaux des commissions d'enquête sont applicables.
    « VII. - Les travaux de la délégation sont confidentiels, sauf décision contraire de sa part.
    « Les résultats des travaux exécutés et les observations de la délégation sont communiqués à l'auteur de la saisine.
    « Après avoir recueilli l'avis de l'auteur de la saisine, la délégation peut les rendre publics.
    « Toutefois, lorsque la délégation a obtenu le bénéfice des dispositions de l'article 6, la décision de publication ne peut être prise que par l'assemblée intéressée, dans les conditions fixées par son règlement pour la publication des rapports des commissions d'enquête.
    « VIII. - La délégation établit son règlement intérieur ; celui-ci est soumis à l'approbation des bureaux des deux assemblées.
    « IX. - Les dépenses afférentes au fonctionnement de la délégation sont financées et exécutées comme dépenses des deux assemblées parlementaires dans les conditions fixées par l'article 7. »
    « Art. 1er ter. - Dans le code des juridictions financières, après l'article L. 132-3-1, il est inséré un article L. 132-3-2 ainsi rédigé :
    « Art. L. 132-3-2. - Dans le cadre de sa mission de contrôle de l'application des lois de financement de la sécurité sociale, la Cour des comptes, sans préjudice des dispositions des articles L. 211-1 et L. 211-8 du présent code, est habilitée à recueillir, en liaison avec les chambres régionales des comptes, des informations auprès des établissements mentionnés à l'article L. 6141-2 du code de la santé publique. »
    « Art. 1er quater A. - Chaque année avant le 15 juillet, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport qui présente les suites données à chacune des recommandations formulées par la Cour des comptes dans son rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, établi conformément à l'article L.O. 132-3 du code des juridictions financières. »
    « Art. 1er quater. - I. - L'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « La commission établit chaque année un rapport d'activité qui est remis au Parlement. »
    « II. - L'article L. 5123-3 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « La commission établit chaque année un rapport d'activité qui est remis au Parlement. »
    « Art. 2 ter. - Tous les cinq ans, avant le 15 octobre, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport présentant un état et une évaluation financière des dispositifs affectant l'assiette des cotisations sociales, dans le but de chiffrer les pertes de recettes pour l'Etat et la sécurité sociale résultant de ces dispositifs. »

« TITRE II

« DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

    « Art. 4. - I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
    « A. - A l'article 572, le deuxième alinéa est supprimé.
    « B. - A l'article 572 bis, les mots : "pour les produits d'une marque reprise sont remplacés par le mot : "repris. »
    « C. - L'article 575 est ainsi modifié :
    « 1° Au premier alinéa, après les mots : "de la France continentale sont insérés les mots : "et les tabacs qui y sont importés ;
    « 2° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
    « Le montant du droit de consommation applicable à ces cigarettes ne peut être inférieur à 60 EUR par 1 000 unités, et, à compter du 1er juillet 2006, à 64 EUR par 1 000 unités. » ;
    « 3° Au sixième alinéa, après les mots : "du droit de consommation, sont insérés les mots : "applicable aux cigarettes mentionnées au précédent alinéa. »
    « D. - L'article 575 A est ainsi modifié :
    « 1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
    « Le minimum de perception mentionné à l'article 575 est fixé à 106 EUR pour les cigarettes. » ;
    « 2° Au troisième alinéa, la somme : "45 EUR est remplacée par la somme : "56 EUR » ;
    « 2° bis Au même alinéa, les mots : "et les autres tabacs à fumer sont remplacés par les mots : ", à 45 EUR pour les autres tabacs à fumer ;
    « 3° Le quatrième alinéa est supprimé.
    « E. - L'article 575 C est ainsi modifié :
    « 1. Le premier alinéa est complété par les mots : "ou lors de l'importation ;
    « 2. Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :
    « A l'importation, le droit est dû par l'importateur ; il est recouvré comme en matière de douane. »
    « II. - A. - L'article L. 3511-1 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Est considéré comme ingrédient toute substance ou tout composant autre que les feuilles et autres parties naturelles ou non transformées de la plante du tabac, utilisés dans la fabrication ou la préparation d'un produit du tabac et encore présents dans le produit fini, même sous une forme modifiée, y compris le papier, le filtre, les encres et les colles. »
    « B. - 1. Le premier alinéa de l'article 3511-6 du même code est ainsi rédigé :
    « Les teneurs maximales en goudron, en nicotine et en monoxyde de carbone des cigarettes sont fixées par un arrêté du ministre chargé de la santé. »
    « 2. Le deuxième alinéa du même article est supprimé.
    « 3. Dans le cinquième alinéa du même article, les mots : "et en nicotine sont remplacés par les mots : ", en nicotine et en monoxyde de carbone. »
    « 4. Dans l'avant-dernier alinéa du même article, les mots : "en nicotine et sont supprimés et, après les mots : "en goudron, et sont insérés les mots : ", en nicotine et en monoxyde de carbone. »
    « 5. Dans le dernier alinéa du même article, après le mot : "message, sont insérés les mots : "général et un message. »
    « C. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « A compter du 30 septembre 2003, il est interdit d'utiliser, sur l'emballage des produits du tabac, des textes, dénominations, marques et signes figuratifs ou autres indiquant qu'un produit du tabac particulier est moins nocif que les autres. »
    « III. - Les dispositions du I entrent en vigueur à compter du 6 janvier 2003. »
    « Art. 4 bis A. - A compter du 1er janvier 2003, la fraction visée au 5° bis de l'article L. 143-10 du code de la sécurité sociale est fixée à 44,07 %. »
    « Art. 4 bis. - I. - Après l'article L. 245-12 du code de la sécurité sociale, il est inséré une section 3 bis intitulée : "Cotisation sur les bières fortes, comprenant les articles L. 245-13 à L. 245-13-6 ainsi rédigés :
    « Art. L. 245-13. - Il est institué, au profit de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, une cotisation perçue sur les bières fortes, en raison des risques que comporte l'usage immodéré de ces produits pour la santé.
    « Art. L. 245-13-1. - Pour l'application de l'article L. 245-13, sont considérés comme bières les produits soumis au droit spécifique visé au a du I de l'article 520 A du code général des impôts.
    « Art. L. 245-13-2. - La cotisation est due à raison de la livraison aux consommateurs de bières d'une teneur en alcool supérieure à 8,5 % vol.
    « La cotisation est acquitée pour le compte des consommateurs par les entrepositaires agréés, les opérateurs enregistrés, les opérateurs non enregistrés et les représentants fiscaux des entrepositaires agréés et des opérateurs établis dans un autre Etat membre de la Communauté européenne, respectivement mentionnés aux articles 302 G, 302 H, 302 I et 302 V du code général des impôts, qui livrent directement ces bières aux détaillants ou aux consommateurs. Sont également redevables de la cotisation les personnes mentionnées aux 2° et 4° du I de l'article 302 D dudit code.
    « Art. L. 245-13-3. - Le montant de la cotisation est fixé à 200 euros par hectolitre.
    « Art. L. 245-13-4. - La cotisation est recouvrée et contrôlée sous les mêmes règles, conditions, garanties et sanctions qu'en matière de contributions indirectes.
    « Art. L. 245-13-5. - La cotisation n'est pas déductible pour l'établissement de l'impôt sur le revenu ou, le cas échéant, de l'impôt sur les sociétés dû par le consommateur.
    « Art. L. 245-13-6. - Un décret fixe les conditions d'application de la présente section. »
    « II. - Les dispositions du I entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2003. »
    « Art. 6. - I. - L'article L. 245-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
    « Art. L. 245-2. - I. - La contribution est assise sur les charges comptabilisées au cours du dernier exercice clos au titre :
    « 1° Des rémunérations de toutes natures, y compris l'épargne salariale ainsi que les charges sociales et fiscales y afférentes, des personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 5122-11 du code de la santé publique, qu'elles soient ou non salariées de l'entreprise et qu'elles interviennent en France métropolitaine ou dans les départements d'outre-mer auprès des professionnels de santé régis par les dispositions du titre Ier du livre Ier de la quatrième partie du code de la santé publique ou auprès des établissements de santé. Seules sont prises en compte les rémunérations afférentes à l'exploitation des spécialités pharmaceutiques inscrites sur la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 162-17 du présent code ou sur la liste mentionnée à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique ;
    « 2° Des remboursements de frais de transport, à l'exclusion des charges afférentes à des véhicules mis à disposition, des frais de repas et des frais d'héberement des personnes mentionnées au 1° ;
    « 3° Des frais de publication et des achats d'espaces publicitaires, à l'exception de la presse médicale bénéficiant d'un numéro de commission paritaire ou d'un agrément défini dans des conditions fixées par décret, dès lors qu'une spécialité pharmaceutique inscrite sur la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 162-17 du présent code ou sur la liste mentionnée à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique y est mentionnée.
    « II. - Il est procédé sur l'assiette définie au I :
    « 1° A un abattement forfaitaire égal à 500 000 EUR et à un abattement de 3 % des dépenses mentionnées au 1° du I ;
    « 2° A un abattement d'un montant égal à 30 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer au titre des spécialités génériques définies à l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et des spécialités remboursées sur la base d'un tarif arrêté en application de l'article L. 162-16 du présent code, bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché et inscrites sur la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 162-17 du présent code ou sur la liste mentionnée à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique;
    3° A un abattement d'un montant égal à 30 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer au titre des médicaments orphelins désignés comme tels en application des dispositions du règlement (CE) n° 141/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 1999, concernant les médicaments orphelins, bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché et inscrits sur la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 162-17 du présent code ou sur la liste mentionnée à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique.
    « III. - Le taux de la contribution due par chaque entreprise est calculé selon un barème comprenant quatre tranches qui sont fonction du rapport, au titre du dernier exercice clos, entre, d'une part, l'assiette définie au I et tenant compte, le cas échéant, des abattements prévus au II et, d'autre part, le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer, au titre des médicaments bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché et inscrits sur la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 162-17 du présent code ou sur la liste mentionnée à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique.
    « Pour chaque part de l'assiette correspondant à l'une des quatre tranches définies ci-après, le taux applicable est fixé comme suit :

PART DE L'ASSIETTE
correspondant au rapport « R »
entre l'assiette définie aux 1° à 3° du I
après déduction, le cas échéant,
des abattements et le chiffre d'affaires hors taxes
TAUX DE
la contribution
par tranche
(en pourcentage)
R < 10 % 13
10 % R < 12 % 19
12 % R < 14 % 27
R 14 % 32

    « II. - L'article L. 245-4 du même code est ainsi rédigé :
    « Art. L. 245-4. - Sont exonérées de cette contribution les entreprises dont le chiffre d'affaires hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos est inférieur à 15 millions d'euros, sauf lorsqu'elles sont filiales à 50 % au moins d'une entreprise ou d'un groupe dont le chiffre d'affaires consolidé, réalisé en France métropolitaine ou dans les départements d'outre-mer, dépasse cette limite ou lorqu'elles possèdent au moins 50 % du capital d'une ou plusieurs entreprises dont le chiffre d'affaires consolidé avec leur propre chiffre d'affaires dépasse cette limite. Le seuil mentionné ci-dessus est revalorisé en fonction des conditions économiques par arrêté ministériel. »
    « II bis. - Le c de l'article L. 138.11 du même code est ainsi rédigé :
    « c) A concurrence de 30 % sur les charges mentionnées au I de l'article L. 245-2, après déduction, le cas échéant, des abattements prévus au II du même article, exposées par l'ensemble des entreprises redevables. »
    « III. - Les dispositions du présent article s'appliquent pour la première fois à la détermination des contributions dues au plus tard le 1er décembre 2003. »
    « Art. 6 bis. - I. - La section 2 du chapitre V du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est abrogée.
    « II. - Les dispositions du I entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2003. »
    « Art. 7 ter. - I. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
    « 1° Au premier alinéa de l'article L. 161-1, après les mots : "qui en font préalablement la demande, sont insérés les mots : "et bénéficient de l'aide à la création ou reprise d'entreprise insituée par ledit article.
    « 2° Au premier alinéa de l'article L. 161-1-1, après les mots : « du code du travail », sont insérés les mots : « qui bénéficient de l'aide à la création ou reprise d'entreprise instituée par ledit article ».
    « II. - Sous réserve des décisions juridictionnelles passées en force de chose jugée, les dispositions du présent article sont applicables au 1er janvier 2002. »
    « Art. 8. - Pour 2003, les prévisions de recettes, par catégorie, de l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour concourir à leur financement sont fixées aux montants suivants:
    (En milliards d'euros.)
    « Cotisations effectives

181,87   

    « Cotisations fictives

32,48   

    « Cotisations prises en charge par l'Etat

2,33   

    « Contributions publiques

11,40   

    « Impôts et taxes affectés

94,11   

    « Transferts reçus

0,21   

    « Revenus des capitaux

1,04   

    « Autres ressources

4,07   

    « Total des recettes

327,51. »

« TITRE III

« DISPOSITIONS
RELATIVES À L'ASSURANCE MALADIE

    « Art 11. - I. - Le III de l'article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000) est complété par un membre de phrase et par deux phrases ainsi rédigés : "ainsi qu'une mission d'expertise et d'audit hospitaliers placée auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, chargée de procéder ou de faire procéder à des audits de la gestion et de l'organisation de l'ensemble des activités des établissements de santé et de diffuser auprès de ces établissements les références et recommandations de gestion hospitalière qu'elle élabore à partir des résultats des audits. Ces références et recommandations de gestion hospitalière sont communiquées aux agences régionales de l'hospitalisation mentionnées à l'article L. 6115-1 du code de la santé publique en vue de leur prise en compte dans l'élaboration des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens prévus à l'article L. 6114-1 du même code. Le Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés prend en outre en charge les frais de fonctionnement d'une mission chargée de conduire les expérimentations visées à l'article L. 6122-19 du code de la santé publique et d'une mission nationale d'appui à l'investissement, placées auprès du ministre chargé de la santé, ainsi que les frais de fonctionnement des missions régionales ou interrégionales d'appui à l'investissement placées auprès du ou des directeurs d'agence régionale de l'hospitalisation concernés.
    « II. - La fin du dernier alinéa de l'article 1er de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, après les mots : "Médiateur de la République, est ainsi rédigée : ", les documents préalables à l'élaboration du rapport d'accréditation des établissements de santé prévu à l'article L. 6113-6 du code de la santé publique et les rapports d'audit des établissements de santé mentionnés à l'article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000). »
    « Art. 13. - I. - Les obligations et créances du Fonds pour la modernisation des cliniques privées créé par l'article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (n° 99-1140 du 29 décembre 1999) sont transférées à compter du 1er janvier 2003 au Fonds pour la modernisation des établissements de santé créé par l'article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000).
    « II. - Le solde disponible au 31 décembre 2002 du Fonds pour la modernisation des cliniques privées est versé au Fonds pour la modernisation des établissements de santé. Le montant du solde est constaté par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget.
    « II bis. - Le montant des subventions du Fonds pour la modernisation des cliniques privées allouées aux établissements de santé privés mentionnés à l'article L. 6114-3 du code de la santé publique pour financer des actions en matière sociale et salariale est pris en compte pour la détermination et le suivi de l'objectif quantifié national mentionné à l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale pour l'année 2003.
    « Les tarifs des prestations des établissements bénéficiaires de ces subventions sont revalorisés, au 1er janvier 2003, dans la limite des sommes allouées.
    « III. - A compter du 1er janvier 2003, le VIII de l'article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 précitée est abrogé et, dans le I de l'article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 précitée, après les mots : "fonds pour la modernisation des établissements de santé, sont insérés les mots : "publics et privés.
    IV. - A l'article L. 6161-9 du code de la santé publique, les mots : "fonds pour la modernisation des cliniques privées sont remplacés par les mots : "Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés.
    « V. - Le montant de la participation des régimes obligatoires d'assurance maladie au financement du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés est fixé, pour l'année 2003, à 450 millions d'euros.
    « VI. - L'article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000) est complété par un VIII ainsi rédigé :
    « VIII. - Un rapport annuel retraçant l'activité du fonds est établi par la Caisse des dépôts et consignations et adressé aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Ce rapport dresse notamment un bilan des dotations allouées en fonction du statut et de la taille des établissements bénéficiaires. »
    « Art. 15 bis. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
    « 1° Au deuxième alinéa de l'article L. 162-5-11 et au premier alinéa de l'article L. 162-12-18, les mots : "contrat de bonne pratique sont remplacés par les mots : "contrat de pratique professionnelle ;
    « 2° Dans l'article L. 162-12-19 et au troisième alinéa (2°) de l'article L. 162-14-1, les mots : "contrats de bonne pratique sont remplacés par les mots : "contrats de pratique professionnelle ;
    « 3° L'intitulé de la section 2.2 du chapitre II du titre VI du livre Ier est ainsi rédigé : "Accords de bon usage des soins et contrats de pratique professionnelle. »
    « Art. 16. - Lorsqu'il agrée ou approuve les accords, conventions, annexes et avenants mentionnés aux articles L. 162-1-13, L. 162-14-1 et L. 162-14-2 du code de la sécurité sociale, le ministre chargé de la sécurité sociale adresse aux commissions compétentes du Parlement un rapport sur la cohérence de ces accords, conventions, annexes et avenants avec l'objectif prévu au 4° du I de l'article L.O. 111-3 dudit code.
    « Copie de ce rapport est adressée au conseil de surveillance de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés. »
    « Art. 19 ter. - I. - Dans le III de l'article 36 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 (n° 2001-1246 du 21 décembre 2001), les mots : "pour la durée fixée par l'agrément sont remplacés par les mots : "jusqu'au 31 décembre 2004. »
    « II. - Les dispositions des conventions de financement conclues entre les réseaux agréés en application de l'article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de l'article 6 de l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins et les organismes d'assurance maladie peuvent être, par avenant, prolongées jusqu'au 31 décembre 2004. »
    « Art. 23 bis. - I. - Le titre II du livre III de la sixième partie du code de la santé publique est complété par un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« Permanence des soins

    « Art. L. 6325-1. - Sous réserve des missions dévolues aux établissements de santé, les médecins mentionnés à l'article L. 162-5, dans le cadre de leur activité libérale, et à l'article L. 162-32-1 du code de la sécurité sociale participent, dans un but d'intérêt général, à la permanence des soins dans des conditions et selon des modalités d'organisation définies par un décret en Conseil d'Etat. »
    « II. - L'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale est complété par un 16° ainsi rédigé :
    « 16° Les modes de rémunération par l'assurance maladie, le cas échéant autres que les paiement à l'acte, de la participation des médecins au dispositif de permanence des soins en application des dispositions prévues à l'article L. 6325-1 du code de la santé publique. »
    « Art. 25. - I. - Au I de l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles, la date : "31 décembre 2003 est remplacée par les mots : "31 décembre 2005, ou avant le 31 décembre 2006 pour les établissements mentionnés à l'article L. 633-1 du code de la construction et de l'habitation. »
    « II. - Au premier alinéa de l'article 5 de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie, les mots : "au plus tard jusqu'au 31 décembre 2003 sont remplacés par les mots : "au plus tard jusqu'à la date mentionnée au I de l'article L. 313-12 du même code. »
    « Art. 27. - I A. - Après les mots : "code de la santé publique, la fin du deuxième alinéa de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée : "la délivrance de cette spécialité ne doit pas entraîner une dépense supplémentaire pour l'assurance maladie supérieure à la dépense qu'aurait entraînée la délivrance de la spécialité générique la plus chère du même groupe. »
    « I B. - Après les mots : "supérieure à, la fin du troisième alinéa de l'article L. 162-16 du même code est ainsi rédigée : "la dépense qu'aurait entraînée la délivrance de la spécialité générique la plus chère du même groupe. »
    « I. - A l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale, après le premier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
    « Pour les médicaments figurant dans un groupe générique prévu au 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, la base de remboursement des frais exposés par les assurés peut être limitée à un tarif forfaitaire de responsabilité arrêté par les ministres de la santé et de la sécurité sociale après avis du Comité économique des produits de santé institué par l'article L. 162-17-3 du présent code.
    « Lorsque le tarif forfaitaire s'applique, le plafond mentionné à l'article L. 138-9 est fixé à 2,5 % du prix des médicaments.
    « Les dispositions du cinquième alinéa du présent article ne s'appliquent pas aux médicaments remboursés sur la base d'un tarif forfaitaire. »
    « I bis. - Le quatrième alinéa du même article est ainsi rédigé :
    « En cas d'inobservation des dispositions des cinquième et sixième alinéas du présent article, le pharmacien verse à l'organisme de prise en charge, après qu'il a été mis en mesure de présenter ses observations écrites, et si, après réception de celles-ci, l'organisme maintient la demande, une somme correspondant à la dépense supplémentaire mentionnée aux cinquième et sixième alinéas du présent article, qui ne peut toutefois être inférieure à un montant forfaitaire déterminé par la convention prévue à l'article L. 162-16-1. A défaut, ce montant est arrêté par les ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé, de l'économie et du budget. »
    « II. - 1. Avant la dernière phrase du sixième alinéa (5°) de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
    « En l'absence de spécialité de référence, un groupe générique peut être constitué de spécialités ayant la même composition qualitative et quantitative en principe actif, la même forme pharmaceutique et dont le profil de sécurité et d'efficacité est équivalent. »
    « 2. Le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 5121-20 du même code est complété par les mots : "et les modalités de création de groupes génériques en l'absence de spécialité de référence, ces groupes étant définis au 5° de l'article L. 5121-1. »
    « Art. 27 bis. - Lorsque le tarif forfaitaire s'applique, et par dérogation au troisième alinéa de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale, le plafond des remises prévu au premier alinéa de l'article L. 138-9 dudit code des fixé à 6 % du prix de vente pour toutes les spécialités soumises à forfait de remboursement. Cette disposition s'applique jusqu'au 30 juin 2004. »
    « Art. 28. - L'article 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988 relative à la sécurité sociale est ainsi modifié :
    « 1° Au premier alinéa du I, la date : "31 décembre 2004 est remplacée par les mots : "1er octobre 2003, sauf exceptions définies par décret ;
    « 2° Le cinquième alinéa du I est supprimé ;
    « 3° Au troisième alinéa du I, les mots : "par la convention ou le décret mentionnés sont remplacés par les mots : "par le décret mentionné ;
    « 3° bis Le huitième alinéa du I est ainsi rédigé :
    « L'allocation ne peut être cumulée avec les revenus d'une activité médicale salariée que dans la limite d'un plafond fixé par le décret mentionné au III. » ;
    « Le solde, constaté au 31 décembre de chaque année, des cotisations encaissées et des prestations servies au cours de l'exercice est affecté au financement des prestations complémentaires de veillesse servies aux médecins en application de l'article L. 645-1 du code de la sécurité sociale. » ;
    « 5° Le III est ainsi rédigé :
    « III. - Le montant de l'allocation, le montant de la cotisation ainsi que la répartition de celle-ci entre les médecins et les régimes d'assurance maladie et les cas d'exonération sont fixés par décret. Le décret fixe également les cas et les conditions dans lesquels, à titre exceptionnel, la date mentionnée au premier alinéa du I peut être fixée après le 1er octobre 2003 pour les personnes ayant organisé avant le 1er octobre 2002 leur cessation d'activité. »
    « Art. 31.- I. - Le II de l'article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998) est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Le fonds participe au financement des actions d'évaluation des pratiques professionnelles des médecins libéraux organisées par les unions régionales des médecins exerçants à titre libéral mentionnées à l'article L. 4134-1 du code de la santé publique et des actions d'évaluation des pratiques professionnelles des médecins exerçant au sein des structures visées à l'article L. 6323-1 du code de la santé publique organisées par les unions régionales des caisses d'assurance maladie mentionnées à l'article L. 183-1 du code de la sécurité sociale. »
    « II. - Pour 2003, le montant maximal des dépenses du fonds institué à l'article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 précitée est fixé à 106 millions d'euros.
    « Ce fonds est doté de 20 millions d'euros au titre de l'exercice 2003. »
    « Art. 33. - Pour 2003, l'objectif de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès de l'ensemble des régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres est fixé à 136,35 milliards d'euros. »

« TITRE IV

« DISPOSITIONS RELATIVES
AUX AUTRES BRANCHES
DE LA SECURITE SOCIALE

« Section 1

« Branche accidents du travail
et maladies professionnelles

    « Art. 35. - I. - Au 2° de l'article 43 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 (n° 2001-1246 du 21 décembre 2001), la somme : "76,22 millions d'euros est remplacée par la somme : "180 millions d'euros. »
    « Le montant de la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, mentionnée au VII de l'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000), est fixé à 190 millions d'euros au titre de l'année 2003.
    « II. - Le VII de l'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 précitée est complété par les mots : chaque année avant le 1er juillet. »
    « Art. 36. - I. - Au II de l'article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 précitée, la somme : "200 millions d'euros est remplacée par la somme : "300 millions d'euros. »
    « Le montant de la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, mentionnée au III de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998), est fixé à 450 millions d'euros pour l'année 2003.
    « II. - Dans la dernière phrase du dernier alinéa du III de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 précitée, après le mot : "Gouvernement, sont insérés les mots : "avant le 15 juillet. »
    « Art. 36 bis. - L'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998) ainsi modifié :
    «1° Le huitième alinéa du I est ainsi rédigé :
    « Ont également droit, dès l'âge de cinquante ans, à l'allocation de cessation anticipée d'activité les personnes reconnues atteintes, au titre du régime général ou du régime d'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des salariés agricoles, d'une maladie professionnelle provoquée par l'amiante et figurant sur une liste établie par arrêtés des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et de l'agriculture. »
    « 2° Le deuxième alinéa du II est complété par une phrase ainsi rédigée :
    « Pour les personnes reconnues atteintes, au titre du régime d'assurance contre les accidents du travail et maladies professionnelles des salariés agricoles, d'une maladie professionnelle, l'allocation est attribuée et servie par les caisses de mutualité sociale agricole. »
    « 3° Le III est ainsi modifié :
    « a) Après les mots : code général des impôts, la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : "d'une contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale dont le montant est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale et d'une contribution de la branche accident du travail et maladies professionnelles du régime des salariés agricoles dont le montant est fixé chaque année par arrêtés des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;
    « b) Dans la première phrase du second alinéa, après les mots : "à l'article L. 221-4 du code de la sécurité sociale, sont insérés les mots : "des représentants du conseil central d'administration de la mutualité sociale agricole mentionné à l'article L. 723-32 du code rural ;
    « 4° Dans le deuxième alinéa du IV, les mots : « du régime général » sont remplacés par les mots : "du régime dont elles relevaient avant la cessation d'activité.
    « Art. 37. - I. - Le montant du versement mentionné à l'article L. 176-1 du code de la sécurité sociale est fixé, pour l'année 2003, à 330 millions d'euros.
    « II. - Le dernier alinéa de l'article L. 176-6 du même code des complété par les mots : "avant le 1er juillet de l'année considérée ».
    « Art. 38. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
    « I. - Au second alinéa de l'article L. 221-4, après les mots : le "fonctionnement du conseil d'administration de la Caisse nationale de l'assurance maladie, sont insérés les mots : " et les modalités de désignation et d'exercice du mandat de ses membres .
    « II. - L'article L. 221-5 est ainsi rédigé :
    « Art. L. 221-5. - La commission des accidents du travail et des maladies professionnelles comprend :
    « 1° Cinq représentants des sociaux désignés par les organisations syndicales de salariés interprofessionnelles représentatives au plan national ;
    2° Cinq représentants des employeurs désignés par les organisations professionnelles nationales d'employeurs représentatives. »
    « III. - A l'article L. 231-5-1, après la référence : " L. 221-3 , il est inséré la référence : " L. 221-5 . »
    « IV. - Au deuxième alinéa du I de l'article L. 227-1, les mots : "visées aux 1°, 3° et 4° sont remplacés par les mots : " mentionnées aux 1°, 2°, 3° et 4° . »
    « V. - L'article L. 227-2 est complété par les mots : " et, en ce qui concerne la convention d'objectifs et de gestion relative à la branche accidents du travail et maladies professionnelles, par le président de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles et par le directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés . »
    « VI. - La deuxième phrase de l'article L. 227-3 est ainsi rédigé :
    « Ces contrats pluriannuels de gestion sont signés, pour le compte de chaque organisme national, par le président du conseil d'administration ou, selon le cas, par le président de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles et par le directeur et, pour le compte de l'organisme régional ou local, par le président du conseil d'administration et le directeur de l'organisme concerné. »
    « VII. - L'article L. 228-1 est ainsi modifié :
    « 1° Dans la première phrase du premier alinéa, après les mots : " Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés , sont insérés les mots : " d'une part pour la branche maladie, maternité, invalidité et décès, d'autre part pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles ;
    « 2° Dans la deuxième phrase du premier alinéa, les mots : "Le conseil de surveillance institué sont remplacés par les mots : "Les conseils de surveillance institués, et les mots : "est en outre composé sont remplacés par les mots : "sont en outre composés ;
    « 3° Au troisième alinéa, après les mots : "Le président de chaque caisse nationale et de l'agence centrale, sont insérés les mots : "et le président de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles. »

« Section 2

« Branche famille
« Section 3

« Branche vieillesse

    « Art. 43 bis. - Dans le premier alinéa du II de l'article 27 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000), après les mots : "Les organismes cités à l'article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale, sont insérés les mots : "et l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage. »

« TITRE IV BIS
« OBJECTIFS DE DÉPENSES RÉVISÉS POUR 2002
« TITRE V

« MESURES DIVERSES ET DISPOSITIONS
RELATIVES À LA TRÉSORERIE

    « Art. 47. - (Pour coordination) I. - Il est inséré, au titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale, un chapitre VIII bis intitulé : "Dispositions communes aux contributions recouvrées directement par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale et comprenant quatre articles L. 138-20 à L. 138-23 ainsi rédigés :
    « Art. L. 138-20. - Les contributions instituées aux articles L. 137-6, L. 138-1, L. 138-10 et L. 245-1 sont recouvrées et contrôlées dans les conditions prévues à la présente section par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale. L'agence centrale peut requérir l'assistance des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales et des caisses générales de sécurité sociale des départements d'outre-mer, notamment par la mise à disposition d'agents de ces organismes, en particulier d'inspecteurs du recouvrement, pour assurer les actions de contrôle. Les agents habilités peuvent recueillir auprès des assujettis aux contributions tous renseignements de nature à permettre le contrôle de l'assiette et du champ d'application des contributions.
    « Art. L. 138-21. - L'Agence centrale des organismes de sécurité sociale assure les opérations de recouvrement dans les conditions prévues au 3° de l'article L. 225-1-1. Préalablement à toute action contentieuse, toute réclamation doit donner lieu à un recours gracieux auprès de l'agence centrale.
    « L'agence centrale peut accorder, le cas échéant, la remise des majorations et pénalités appliquées ainsi que de la taxation provisionnelle appliquée en cas de défaut de déclaration. La demande gracieuse de remise des pénalités et des majorations n'est recevable qu'après le règlement de la totalité des contributions dues. La remise gracieuse est conditionnée à la bonne foi du redevable, dûment prouvée par ses soins.
    « Les litiges sont portés devant une juridiction de l'ordre judiciaire.
    « Art. L. 138-22. - Les entreprises ou les groupes non établis en France désignent un représentant résidant en France personnellement responsable des opérations déclaratives et du versement des sommes dues.
    « Art. L. 138-23. - Un décret en Conseil d'Etat fixe, en tant que de besoin, les modalités d'application des dispositions du présent chapitre. »
    « II. - Le quatrième alinéa de l'article L. 137-7, les articles L. 137-8, L. 138-3 et L. 138-14, les deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article L. 245-6 du même code sont abrogés.
    « III. - Les dispositions du présent article entrent en vigueur le 1er janvier 2003. »
    « Art. 47 bis. - L'article L. 144-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
    « 1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
    « A l'exclusion des rémunérations des présidents des juridictions et de celles de leurs secrétaires ainsi que de celles du secrétaire général et des secrétaires généraux adjoints de la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, les dépenses de toute nature résultant de l'application des chapitres II et III du présent titre sont :
    « 2° Dans les deuxième et troisième alinéas, les mots : "les caisses centrales compétentes de mutualité sociale agricole sont remplacés par les mots : "la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole ;
    « 2° bis Après le troisième alinéa (2°), il est inséré un 3° ainsi rédigé :
    « Ou bien remboursées par la caisse nationale compétente du régime général au budget de l'Etat » ;
    « 3° Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : "à l'alinéa précédent sont remplacés par les mots : "aux 1°, 2° et 3° ;
    « 4° Dans le dernier alinéa, les mots : "le fonds national de solidarité prévu au livre VIII du présent code sont remplacés par les mots : "le Fonds spécial d'invalidité mentionné par l'article L. 815-3-1 et le Fonds de solidarité vieillesse institué par l'article L. 135-1. »
    « Art. 47 ter. - Supprimé par la commission mixte paritaire. »
    « Art. 47 quater. - Les prévisions, en recettes comme en dépenses, du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale sont arrêtées à la somme de 16 560 millions d'euros pour 2003, conformément à l'annexe f de la présente loi. »
    Mes chers collègues, je vous rappelle que, conformément à la décision prise par la conférence des présidents, le vote sur l'ensemble de ce texte aura lieu par scrutin public.

Explications de vote

    M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Bernard Accoyer pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. Bernard Accoyer. Monsieur le président, il va sans dire que le groupe UMP votera ce PLFSS avec la conviction qu'il marque une avancée considérable, pour des raisons déjà maintes fois répétées sur ces bancs. Je les résumerai : sincérité des comptes, retour du dialogue entre les pouvoirs publics, l'assurance maladie et les professionnels de santé, qu'ils soient en ville, à l'hôpital public ou dans l'hospitalisation privée.
    Ce Gouvernement est animé d'une volonté forte de sauver l'assurance maladie, que le précédent gouvernement avait laissée dans une situation des plus difficiles. Aussi porterons-nous toute notre attention et notre soutien aux mesures d'accompagnement qui vont suivre l'adoption, dont nous ne doutons pas, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Avant de donner la parole aux autres orateurs inscrits dans les explications de vote, je vais d'ores et déjà faire annoncer le scrutin, de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. François Liberti.
    M. François Liberti. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons longuement exposé nos préoccupations sur l'avenir de notre système de santé et de la sécurité sociale. La discussion a eu le mérite d'éclairer votre posture et particulièrement votre préoccupation essentielle : asséner un coup fatal aux principes qui guident les missions et par le fait la raison d'être de la sécurité sociale.
    Si notre sécurité sociale a été édifiée dans un contexte historique, économique et social particulier, sa philosophie n'en demeure pas moins fondamentale à nos yeux. Le choix de la solidarité rejoint celui de la modernité dans notre société, tout en accompagnant les réformes dont a besoin notre système de santé. Nous n'accepterons aucune remise en cause et saurons riposter comme il se doit aux attaques que vous orchestrez.
    A l'inverse de ce que vous proposez, nous mettons en avant l'impérieuse nécessité de réformer en profondeur les règles de financement de la sécurité sociale en réformant l'assiette des cotisations, en mettant à contribution les revenus des placements financiers des grands groupes et en arrêtant la marche en avant des exonérations de cotisations patronales.
    Vous n'avez eu de cesse, tout au long de ces débats, de refuser d'entendre ces préoccupations, pourtant au coeur du problème. Ce faisant, jamais vous ne pourrez répondre aux difficultés de l'hôpital et de ses personnels. C'est d'ailleurs ce que nous avons également reproché dans le passé et ce qui nous a conduit à ne pas voter les précédents projets de loi de financement de la sécurité sociale. Vous n'améliorerez jamais le taux de remboursement des soins pourtant nécessaire en entretenant le terreau des véritables inégalités en matière d'accès aux soins. Vous ne pourrez jamais proposer une augmentation des allocations familiales, ni leur instauration dès le premier enfant. Vous poursuivez la logique du plan Juppé, après avoir été contraints de reconnaître l'échec de la logique de sanctions et de la maîtrise comptable qui l'animait.
    Vous créez les conditions pour mieux remettre en cause, d'ici à quelques années, au prétexte d'un enlisement auquel vous aurez contribué, les principes d'universalité et de solidarité de la sécurité sociale ou pour ouvrir davantage le champ d'intervention des assurances dans le domaine de la protection sociale.
    Pour toutes ces raisons, pour les dangers qui guettent plus ou moins manifestement les assurés sociaux et leur droit à une couverture sociale pleine et entière, égale pour tous, nous voterons de nouveau contre votre projet en tirant la sonnette d'alarme.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Ah !
    M. François Sauvadet. Ce n'est pas surprenant !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le groupe UDF.
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur le président, nous voici au moment où nous allons voter pour donner au pays les moyens de financer sa protection sociale, c'est-à-dire la politique familiale, les retraites et les soins.
    Nous avons bien compris à l'UDF qu'il s'agissait d'une loi de transition et que les réformes indispensables seront entreprises en 2003.
    Celles-ci sont nécessaires pour la branche famille. Depuis des années, nous avons vu cette branche s'orienter vers des mesures sociales, certes souhaitables, mais en tournant le dos à une réelle politique familiale pourtant indispensable pour préparer l'avenir du pays.
    Nous saluons la mesure nouvelle concernant l'aîné des familles de trois enfants atteignant vingt ans.
    En revanche, l'UDF a vigoureusement dénoncé, en raison de notre attachement au principe de la séparation des branches, le prélèvement de 1,8 milliard d'euros pour financer un avantage retraite lié à la majoration pour enfant.
    M. François Sauvadet. Très bien !
    M. Jean-Luc Préel. Nous attendons donc avec intérêt les propositions du Gouvernement qui viendront après la conférence de la famille 2003.
    Pour les retraites, la réforme, là encore, sera engagée au cours de l'année 2003. Il est hélas plus que temps. L'UDF souhaite que la retraite par répartition soit confortée en allant vers une responsabilisation des partenaires sociaux et une réelle équité entre tous les Français.
    M. François Sauvadet. Eh oui !
    M. Jean-Luc Préel. C'est pourquoi nous demandons que soit accordée une réelle autonomie à la CNAVTS, que soit créée une caisse de retraite des fonctionnaires gérée paritairement, que tous les Français puissent compléter leur retraite en ayant accès à un système du type Préfon et que chacun puisse bénéficier d'une retraite à la carte.
    M. Bernard Accoyer. Il a raison !
    M. Jean-Luc Préel. La réforme est indispensable. Il sera nécessaire de faire preuve d'écoute, de dialogue, mais aussi de volontarisme.
    Monsieur le ministre, l'UDF sera à vos côtés.
    M. François Sauvadet. Très bien !
    M. Jean-Luc Préel. Dans le domaine de la santé, à l'arrivée de M. Jean-François Mattei, tous les secteurs étaient en crise. Nous devons donc saluer les mesures prises au cours de l'été, comme celles que contient cette loi de financement : elles ont permis de désamorcer les situations les plus critiques et de renouer des relations de confiance. Il n'en demeure pas moins que le chemin est encore long.
    L'hôpital est confronté à de grandes difficultés, qu'il s'agisse des reports de charges, du retard dans l'investissement, de la démographie médicale - plusieurs spécialités sont en effet sinistrées - où le problème est aggravé par l'application inconsidérée des 35 heures, le repos compensateur et l'inclusion du temps de garde dans le temps de travail.
    En ville, les professionnels sont désabusés, lassés d'être désignés comme boucs émissaires. Les mentalités ont changé. Les problèmes démographiques sont là aussi très aïgus, et la désertification pose des problèmes redoutables pour la permanence des soins.
    Le Gouvernement a entendu les généralistes, mais les spécialistes et les infirmières, dont les demandes sont justifiées, sont encore dans l'attente.
    Si vous avez proposé cette année un ONDAM plus réaliste, il convient toutefois de le médicaliser pour prendre en compte les besoins estimés au niveau régional. Le déficit sera probablement en 2003 autour de 8 milliards d'euros. Comment sera-t-il financé ? Il s'agit là d'une question d'importance !
    Il est nécessaire d'aboutir à une optimisation des dépenses de santé. Une redéfinition du panier de soins peut faire bouger le curseur, mais elle ne résoudra rien. Aussi devons-nous nous engager de manière volontariste dans une maîtrise médicalisée en mobilisant tous les acteurs, en nous en donnant les moyens par la définition des bonnes pratiques médicales, par le bon usage du médicament et par le codage des actes et des pathologies.
    Il est tout aussi indispensable de revoir la gouvernance, en reconnaissant que le paritarisme n'a plus de légitimité pour gérer l'assurance maladie et que notre système est actuellement quasi étatisé et échappe au contrôle démocratique.
    C'est pourquoi nous devons nous engager clairement vers une réelle régionalisation permettant de prendre en compte les besoins, de rendre chacun acteur et responsable et de contrôler les ARH et les futures ARS.
    M. François Sauvadet. Très bien !
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur le ministre, si vous vous engagez clairement dans ces réformes nécessaires mais difficiles, vous trouverez l'UDF à vos côtés.
    Etant bien entendu qu'il s'agit d'une loi de transition, nous voterons la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le groupe socialiste.
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, lorsque nous avons examiné ce projet de loi de financement en première lecture, nous avons mesuré la faiblesse de son contenu - au bénéfice certes de ce que vous appelez « la transition ».
    En matière de financement, et contrairement à ce qu'affirmaient aujourd'hui encore certains intervenants, force est de constater que vous vous retrouverez dès 2003 devant des besoins de financement considérables pour notre protection sociale, que l'on peut vraisemblablement estimer à plus de 10 milliards d'euros. Une somme aussi considérable ne pourra que remettre en cause l'avenir même du système.

    Très peu de chose aussi pour ce qui touche à la maîtrise médicalisée, sinon un plan « médicament » où les effets d'annonce l'emportent sur l'efficacité... Rien de très concret en tout cas, c'est le moins qu'on puisse dire.
    Du côté des autres branches que l'assurance maladie, pas davantage, qu'il s'agisse de la famille ou des retraites, en tout cas rien de nature à satisfaire les demandes sociales de nos concitoyens.
    Nous aurions donc pu nous borner à considérer avec ce projet de loi de financement une certaine distance. Mais nous avons bien compris, au fil des débats au sein de cette assemblée, et abondamment nourris par force déclarations dans les médias - à commencer par les vôtres, monsieur le ministre sur la nécessité de sortir du « tout gratuit » ou à celle du président Barrot qui, fort de ses responsabilités présentes et passées, parlait de la nécessité de distinguer le « petit risque » du « gros risque ». Or il sait ce que pareils mots veulent dire en matière d'assurance maladie...
    Nous avons compris, monsieur le ministre, que, au-delà du projet que vous soumettez à notre vote, vous essayez de dessiner une véritable politique dont je dois reconnaître qu'elle affirme les valeurs que défend votre camp : une politique libérale qui aboutira - je le regrette et le redoute évidemment - à une remise en cause de la solidarité nationale et à l'installation d'une médecine à deux vitesses. Et j'en veux pour preuve votre série d'annonces sur les tables rondes de gouvernance ou encore sur la nécessité de définir un « panier de services » - en fait, derrière ce vocabulaire « moderne », il s'agit de déterminer ce qu'il sera loisible de dérembourser demain - ou encore sur le nouveau rôle que vous voulez donner aux couvertures complémentaires, offrant l'opportunité aux assurances privées de prendre davantage de place en matière de protection sociale dans ce pays.
    M. Bernard Accoyer. Allons !
    M. Jean-Marie Le Guen. Pourquoi le nier, mes chers collègues ? Les principaux responsables de votre majorité l'affirment. Pouvez-vous leur reprocher de se battre sur des valeurs que vous-même défendez ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Je dois vous rendre cet hommage, monsieur le ministre : votre politique a le mérite de s'affirmer très clairement. Elle n'en représente pas moins, estimons-nous, un danger important pour notre pays. Au-delà de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale qui déjà méritait nos critiques, c'est toute une orientation générale que vous essayez de mettre en oeuvre. Et pour ce qui est du volet santé publique, au demeurant intéressant et qui méritait que nous en soutenions une grande partie des intentions, nous avons vraiment l'impression que tout ce que vous ferez en matière d'assurance-maladie risque d'être parfaitement contradictoire avec une politique de santé publique digne de ce nom.
    Voilà pourquoi, monsieur le ministre, nous voterons contre votre projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Vote sur l'ensemble

    Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   366
Nombre de suffrages exprimés   365
Majorité absolue   183
Pour l'adoption   277
Contre   88

    L'Assemblée nationale a adopté.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante.)
    M. le président. La séance est reprise.

3

ORGANISATION DÉCENTRALISÉE
DE LA RÉPUBLIQUE

Suite de la discussion d'un projet
de loi constitutionnelle adopté par le Sénat

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi constitutionnelle, adopté par le Sénat, relatif à l'organisation décentralisée de la République (n°s 369, 376).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Hier soir, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits sur l'article 7.

Article 7 (suite)

    M. le président. Je rappelle les termes de l'article 7 :
    « Art. 7. - Après l'article 72 de la Constitution, sont insérés deux articles 72-3 et 72-4 ainsi rédigés :
    « Art. 72-3. - La Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, les îles Wallis et Futuna et la Polynésie française sont régis par l'article 73 pour les départements et les régions d'outre-mer, et pour les collectivités territoriales créées en application du dernier alinéa de l'article 73, et par l'article 74 pour les autres collectivités.
    « Le statut de la Nouvelle-Calédonie est régi par le titre XIII.
    « La loi détermine le régime législatif et l'organisation particulière des terres australes et antarctiques françaises.
    « Art. 72-4. - Aucun changement, pour tout ou partie de l'une des collectivités mentionnées au premier alinéa de l'article 72-3, de l'un vers l'autre des régimes prévus par les articles 73 et 74, ne peut intervenir sans que le consentement des électeurs de la collectivité ou de la partie de collectivité intéressée ait été préalablement recueilli sans les conditions prévues à l'alinéa suivant. Ce changement de régime est décidé par une loi organique.
    « Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux assemblées, publiées auJournal officiel, peut décider de consulter les électeurs d'une collectivité territoriale située outre-mer sur une question relative à son organisation ou à son régime législatif. Lorsque la consultation porte sur un changement prévu à l'alinéa précédent et est organisée sur proposition du Gouvernement, celui-ci fait, devant chaque assemblée, une déclaration qui est suivie d'un débat. »
    Plusieurs orateurs sont encore inscrits sur l'article, dont M. André Thien Ah Koon, qui va intervenir en premier grâce à l'obligeance de Mme Taubira. De même, je crois savoir que M. Queyranne et M. Dosière intervertiront leur ordre de passage.

Rappel au règlement

    M. René Dosière. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. La parole est à M. René Dosière, pour un rappel au règlement.
    M. René Dosière. Mon rappel au règlement est fondé sur l'article 58, alinéa 1, monsieur le président.
    Nous avons terminé la dernière séance à deux heures ce matin, dans une ambiance un peu houleuse. Le président de l'Assemblée nationale, qui présidait, et les responsables de groupe étaient parvenus à un accord afin qu'un orateur de la majorité et un orateur de l'opposition puissent s'exprimer sur l'article 7 avant que la séance ne soit levée.
    Mais à l'issue de ces deux interventions, le président de la commission des lois a pris la parole à son tour, déclarant en particulier qu'il allait retirer un amendement adopté par la commission des lois à l'article 8.
    Certes, le président de la commission a le droit de retirer des amendements. J'observe simplement qu'en prenant la parole sur l'article 8, alors que nous en étions à l'article 7, M. Clément n'a pas respecté l'accord auquel nous étions parvenus.
    Si nous devions fonctionner de cette manière, la séance de ce soir risquerait d'être particulièrement agitée !
    M. Jean Besson. C'est un avertissement ?
    M. Gérard Grignon. Une menace ?
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, je demande la parole, pour un rappel au règlement.
    M. le président. Comme nous n'en sommes qu'à l'article 7, je vous propose de continuer d'entendre les inscrits sur l'article car certains de nos collègues sont venus de très loin exprès, et je suis persuadé que le député de l'Ariège Augustin Bonrepaux sera sensible à cet argument.
    M. Augustin Bonrepaux. Mais c'est pour un rappel au règlement que je vous demandais la parole !
    M. le président. J'ai bien compris, monsieur Bonrepaux. Mais M. André Thien Ah Koon a insisté pour pouvoir intervenir rapidement.
    M. Augustin Bonrepaux. Soit ! Je ferai mon rappel au règlement après les interventions sur l'article.

Reprise de la discussion

    M. le président. La parole est à M. André Thien Ah Koon, inscrit sur l'article 7.
    M. André Thien Ah Koon. Monsieur le président, madame la ministre de l'outre-mer, mes chers collègues, le projet de loi constitutionnelle en cours de discussion est un texte important pour la Réunion. Il fixe, en effet, le cadre institutionnel de notre île pour les générations à venir. Et je me suis engagé à transmettre ici, à l'Assemblée nationale, la volonté des Réunionnais, plus attachés que jamais à faire partie du système départemental de 1946 et à être reconnus comme des Français à part entière.
    M. René Dosière. Il n'y a pas de mandat impératif, monsieur Thien Ah Koon !
    M. André Thien Ah Koon. C'est mon engagement de toujours, et celui de tous mes collègues élus de la Réunion, dont dix-sept maires sur vingt-quatre, qui m'a conduit à défendre devant vous des amendements au projet de loi constitutionnelle.
    En dépit du travail accompli auprès du Gouvernement, de la commission des lois et de la majorité à laquelle j'appartiens, je n'ai pas réussi à faire partager totalement notre vision, pour empêcher dans l'avenir toute possibilité d'évolution statutaire. Je suis en mesure de préciser, néanmoins, à l'Assemblée que ce combat n'aura pas été totalement vain, puisque des garanties supplémentaires m'ont été personnellement, et solennellement, apportées, à la fois par le Président de la République, Jacques Chirac, et notre Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, qui m'ont précisé, au travers de deux courriers officiels, que « ce texte exclut la Réunion de toute autonomie législative, que la volonté des Réunionnais de garder le statut départemental actuel sera pleinement respectée, que la Réunion se développera comme tous les autres départements au sein de la République ».
    Je vous donne donc partiellement lecture du courrier que M. le Président de la République m'a adressé : « Le projet apporte des garanties et des souplesses nouvelles. Il mentionne expressément que la Réunion est un département d'outre-mer. Il encadre de façon très précise les éventuelles évolutions statutaires en posant, en particulier, comme préalable le consentement explicite de la population. Ces conditions n'existent pas aujourd'hui dans notre droit constitutionnel. [...] Les assemblées locales pourront ainsi prendre l'initiative de fixer localement des réglementations, dans des domaines où les spécificités ultramarines doivent être prises en compte. La Réunion ne souhaite pas aller aussi loin dans cette voie. Ce choix a été respecté par le Sénat. Il est soutenu par le Gouvernement et devrait être confirmé par l'Assemblée nationale » - c'est ce qui a été fait ce matin.
    « De plus, le Gouvernement vient d'accepter un amendement que vous avez signé avec d'autres élus » - René-Paul Victoria, Bertho Audifax - « qui reconnaît solennellement au sein du peuple français les populations d'outre-mer dont la Réunion fait naturellement partie. C'est une garantie constitutionnelle supplémentaire. Je suis certain que la Réunion dont je connais l'attachement à la République et pour laquelle, vous le savez, j'ai une grande affection, saura tirer le meilleur parti de cette réforme pour conforter son développement. »
    Je remercie le Président de la République pour l'attention qu'il nous a toujours accordée ainsi, du reste, qu'à la population de tout l'outre-mer.

    J'espère que notre assemblée saura reconnaître et soutenir la volonté de la population réunionnaise, comme l'ont fait le chef de l'Etat et le Premier ministre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Gérard Grignon.
    M. Gérard Grignon. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais simplement faire quelques remarques et interroger le Gouvernement sur les conséquences de ce texte sur le statut de Saint-Pierre-et-Miquelon.
    Certains ont semblé étonné hier qu'on inscrive nominativement dans la Constitution les départements et les collectivités d'outre-mer. Il peut, en effet, paraître curieux de ne pas mentionner, par exemple, la Corrèze mais d'y faire figurer Mayotte, Wallis-et-Futuna et Saint-Pierre-et-Miquelon.
    Je ne sais pas comment cela se passe ailleurs mais, lorsque je parle de Saint-Pierre-et-Miquelon, certains me demandent parfois : « Est-ce français ? Etes-vous français ? » Là, au moins, ce sera clair puisque ce sera dans la Constitution. Nous serons considérés comme français. A la question « où est Saint-Pierre-et-Miquelon ? », je pourrais au moins répondre que cela se trouve dans la Constitution ! (Sourires.)
    En 1976, Saint-Pierre-et-Miquelon qui était un territoire d'outre-mer s'est vu imposer la départementalisation contre la volonté de sa population et de ses élus. En 1985, Saint-Pierre-et-Miquelon changeait à nouveau de statut pour devenir une collectivité territoriale à statut spécifique, sans que le Gouvernement ne consulte davantage sa population.
    Le texte qui nous est proposé met fin à ce type de dérive, d'abus du pouvoir central, puisque les populations concernées seront obligatoirement consultées et devront être consentantes pour tout changement relatif aux institutions qui les administrent. C'est tout simplement de plus de respect qu'il s'agit, de plus de considération à l'égard des populations d'outre-mer. Cela relève de la démocratie la plus élémentaire.
    Plus de démocratie donc, mais aussi davantage de pouvoirs conférés à la collectivité par des transferts de compétences nouvelles.
    Evidemment, le transfert de toute compétence doit s'accompagner des moyens budgétaires, techniques et humains correspondants. Nous en avons déjà très largement discuté depuis deux jours, et encore hier soir, fort tard.
    Sous cette réserve, comment y être opposé ? Comment pourrait-on sans cesse dénigrer le pouvoir de Paris, dénoncer le fait que tout s'y décide, mettre en avant sans cesse nos spécificités et, dans le même temps, refuser les responsabilités lorsqu'elles nous sont offertes, rejeter la possibilité de décider nous-mêmes ? On ne peut à la fois dénoncer une certaine condescendance de l'opinion publique de la France hexagonale, s'offusquer d'être considérés comme des assistés et fuir l'exercice des responsabilités. J'adhère donc pleinement à ces dispositions, mais je saisis l'occasion pour faire une observation relative au statut propre à Saint-Pierre-et-Miquelon.
    L'assemblée locale est déjà dotée de pouvoirs importants : la maîtrise de la fiscalité directe et indirecte, la maîtrise de l'urbanisme et du logement. Transférer de nouvelles compétences, c'est accroître ses pouvoirs. Cela est positif, mais cela peut aussi conduire à une dérive et à des abus de pouvoir si un minimum de garde-fous ne sont pas prévus. Le meilleur garde-fou, me semble-t-il, contre les dérives de tout pouvoir, c'est le peuple. Or, à Saint-Pierre-et-Miquelon, l'assemblée locale est élue d'un bloc, tous les six ans.
    C'est pourquoi je considère, madame la ministre, que la loi organique qui va suivre doit mettre en place ces garde-fous, et doit être l'occasion de moderniser et de démocratiser notre statut, en changeant, par exemple, le mode d'élection et le mode de fonctionnement de ce conseil général, en réduisant la durée du mandat à cinq ans ou en instaurant l'élection par moitié, comme en France métropolitaine, tous les trois ans, ou bien encore en imposant la représentation des représentants des oppositions dans le bureau, ce qui n'est pas le cas. Ainsi, moi qui suis chef d'une opposition, je ne fais pas partie du bureau du conseil général, pas plus que le premier de liste à Miquelon. On pourrait également revoir les pouvoirs des communes, ou leur attribuer des pouvoirs accrus en matière d'urbanisme et de logement.
    Tout cela est à étudier, mais, je le répète, la loi organique qui va suivre doit être une occasion de moderniser et de démocratiser le statut de Saint-Pierre-et-Miquelon, pour apporter un garde-fou aux abus et aux dérives du pouvoir auxquels un surcroît de pouvoir peut conduire là-bas.
    Par ailleurs, madame la ministre, je voudrais vous interroger sur les conséquences de ce texte sur le statut de Saint-Pierre-et-Miquelon, car des voix s'élèvent pour exprimer des inquiétudes sur ce point. La collectivité territoriale est régie essentiellement par le principe de l'assimilation législative. Chez nous, la loi est applicable de plein droit, sauf pour ce qui touche, je l'ai dit tout à l'heure, à la fiscalité, à l'urbanisme et au logement.
    M. Christian Paul. Ce ne sera plus le cas !
    Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. Mais si ! Nous y reviendrons tout à l'heure.
    M. Gérard Grignon. Or, ne pouvant pas être intégrés à l'article 73 de la Constitution - on ne peut pas nous considérer comme département d'outre-mer, on le fit autrefois, avant de s'apercevoir que c'était impossible -, nous sommes intégrés à l'article 74 aux côtés des collectivités territoriales, gérées par le principe de la spécialité législative...
    M. Christian Paul. Et voilà, la rupture !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Mais non !
    M. Gérard Grignon. ... là où la loi n'est applicable que sur mention expresse. Je souhaiterais, madame la ministre, que vous me confirmiez que cette expression de la loi de plein droit à Saint-Pierre-et-Miquelon, dans l'attente de la loi organique, et a fortiori dans la loi organique, demeurera la règle. Je souhaiterais que vous me confirmiez que cette extension systématique de la loi, sauf dans les domaines cités à l'article 21 de notre statut de 1985, ne sera pas remise périodiquement en cause, au gré de décisions fantaisistes des administrations centrales, et au prétexte que ces dernières estimeraient que les collectivités territoriales intégrées à l'article 74 sont exclusivement régies par le principe de la spécialité législative, et non de l'assimilation législative.
    M. Victorin Lurel. C'est un vrai sujet !
    M. Christian Paul. C'est bien que la question se pose !
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. J'avoue que j'ai été surpris du rappel au règlement de M. Dosière. Si, hier, effectivement, j'ai répondu à une question que M. René-Paul Victoria m'a posée dans le débat, c'est parce qu'on m'avait fait savoir que les élus de la Réunion prenaient leur avion ce soir.
    M. René Dosière. Bel argument.
    M. Pascal Clément, président de la commission, rapporteur. J'ai donc estimé, moi qui habite à 500 kilomètres d'ici, qu'il convenait de faire preuve de délicatesse et de respect vis-à-vis de nos collègues qui vivent à 20 000 kilomètres.
    J'ai pensé qu'il valait mieux qu'ils entendent la réponse de ma bouche plutôt que de la lire dans le Journal officiel. C'est ce qui a motivé le fait que j'ai effectivement retiré mon amendement à cet instant.
    M. René Dosière. Vous l'aviez fait savoir au conseil général de la Réunion !
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois, rapporteur. Et puisque nous en sommes à faire l'examen de conscience d'autrui, sachez que, pour ma part, j'ai été choqué - et j'ai de la peine pour les élus d'outre-mer - par toutes vos manoeuvres pour retarder les débats.
    M. Alain Néri. Ça ne va pas recommencer !
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois, rapporteur. Elles ont abouti à ce que ce débat sur l'outre-mer, précisément, ne commence qu'à une heure moins le quart la nuit dernière !
    M. Christian Paul. C'est ça qui est scandaleux : qu'il ait eu lieu à cette heure-là !
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois, rapporteur. Ce soir, je compte combien il y a d'élus d'outre-mer dans l'hémicycle : sept sur vingt-deux ! Qui est responsable de leur absence...
    M. Alain Néri. C'est vous, qui n'avez pas su prévoir une bonne organisation des débats !
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois, rapporteur. ... alors que c'est leur débat et que c'est pour eux une avancée formidable d'entrer dans la Constitution ? Qui porte cette responsabilité ? En tout cas, pas le président de la commission des lois ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Alain Néri. C'est un peu cavalier !
    M. Christian Paul. Vous êtes un provocateur monsieur Clément !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Jack Queyranne.
    M. Jean-Jack Queyranne. Monsieur Clément, le Gouvernement, qui n'a réservé que trois jours pour la discussion de ce projet de loi de révision constitutionnelle, aurait été bien inspiré de regarder ce qui s'est passé au Sénat où six jours ont été nécessaires ; l'organisation des travaux aurait pu être meilleure. On ne révise pas la Constitution tous les jours !
    J'en viens à l'article 7. Nous avons jusqu'à présent contesté l'utilité d'une révision constitutionnelle pour une nouvelle étape de la décentralisation. Mais je dois reconnaître qu'on peut s'accorder sur l'intérêt de réformer la Constitution qui se révèle aujourd'hui trop rigide et, pour partie, inadaptée aux évolutions de l'outre-mer. Je ne rappellerai que les décisions du Conseil constitutionnel, notamment celle de 1982, qui a donné une interprétation stricte de l'article 73 en matière d'adaptation de l'organisation administrative, puisqu'elle n'a pas permis à l'époque d'instituer l'assemblée unique, bien que région et département soient superposés sur le même territoire. Le Conseil constitutionnel a confirmé cette jurisprudence dans sa décision sur la loi d'orientation.
    Si cette révision constitutionnelle a un intérêt, c'est donc bien pour l'outre-mer. Et je dois constater, madame la ministre, que vous vous situez dans le cadre des orientations fixées par le gouvernement précédent de 1997 à 2002 (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), des orientations qui ont permis de mettre en mouvement l'outre-mer.
    Je dois dire, madame la ministre, sans esprit de polémique, que j'ai découvert dans votre interview publiée par le journal Valeurs actuelles des propos qui me paraissent totalement infondés et ne pas correspondre à la volonté que nous devons avoir de faire évoluer l'outre-mer.
    Vous dites que le gouvernement précédent - j'étais ministre de l'outre-mer, Christian Paul m'a succédé - a ruiné la relation de confiance qui existait entre la France métropolitaine et la France d'outre-mer.
    M. Christian Paul. Ce n'est pas très élégant !
    M. Jean-Jack Queyranne. Mais rappellez-vous la mise en oeuvre de l'accord de Nouméa qui a permis de sortir la Nouvelle-Calédonie d'une situation impossible quand j'en ai hérité en 1997, celle de l'accord de Mayotte, après vingt-cinq ans d'attente, la loi d'orientation sur l'outre-mer, la Polynésie ! On aurait pu - mais ce sont d'autres raisons qui, à cette époque, ont motivé la décision - voter le statut de la Polynésie si le Congrès avait été réuni à Versailles en janvier 2000.
    Je crois donc qu'il vaut mieux en venir à l'article 7, et le faire dans un esprit constructif. C'est en tout cas le sens de mon intervention.
    L'article 7, madame la ministre, a un triple objet.
    D'abord, il énumère l'ensemble des collectivités qui sont situées outre-mer. On ne peut être que favorable à cet énoncé, qui est une belle manière de mettre en valeur la place de ces collectivités dans la République française. Mais je voudrais vous mettre en garde sur les conséquences d'un amendement qui a été adopté par le Sénat, et qui tend à consulter une partie des collectivités situées outre-mer pour une évolution statutaire éventuelle. Derrière cet amendement, il y a la question du statut de Saint-Barthélemy. On sait très bien que nos compatriotes de Saint-Barthélemy souhaitent, pour des raisons historiques et géographiques, une évolution statutaire qui les distingue de la Guadeloupe. Avec l'énumération limitative à laquelle vous procédez, madame la ministre, c'est-à-dire l'énumération de toutes les collectivités d'outre-mer, si Saint-Barthélemy veut accéder à un statut nouveau, il faudra réviser la Constitution.
    Mme la ministre de l'outre-mer. Mais non !
    M. Jean-Jack Queyranne. Si ! L'article 7 comporte une énumération complète et limitative de l'ensemble des collectivités d'outre-mer. Par conséquent, si vous en créez une nouvelle, cela devra passer par une révision de la Constitution.
    Le deuxième objet de votre révision, madame la ministre, concerne le régime juridique des collectivités d'outre-mer. Vous en restez à la summa divisio entre, d'une part, le principe de l'assimilation législative, qui veut que la loi s'applique automatiquement, sauf dispositons contraires - c'est le cas actuellement pour les départements, et ce sera le cas demain pour les départements et les régions d'outre-mer - et, d'autre part, le principe de spécialité législative, selon lequel les lois, sauf les lois de souveraineté, ne s'appliquent que sur mention expresse.
    Cette situation - et cette remarque me conduit à l'analyse du texte proposé pour les articles 73 et 74 - pose deux problèmes.
    Le premier, déjà évoqué par M. Grignon, est celui de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui est actuellement, en vertu du statut de 1985, sous un régime d'assimilation législative, sauf pour certaines matières, celles qui touchent à la fiscalité, à l'urbanisme et au logement. En faisant de Saint-Pierre-et-Miquelon une collectivité d'outre-mer régie par l'article 74, vous devrez lui appliquer le principe de spécialité législative. Il faut mesurer les conséquences de cette décision.
    Le second problème est celui de Mayotte. Le principe de spécialité législative s'applique à Mayotte, mais avec certaines dispositions qui, déjà, relèvent de l'assimilation législative. En effet, les lois que nous votons, mes chers collègues, s'appliquent automatiquement à Mayotte dans un certain nombre de domaines. Et l'on progressera dans ce sens jusqu'en 2010.
    La rigidité du cadre que vous définissez, madame la ministre, représente donc un risque en ce qui concerne ces deux collectivités.
    Je voudrais aussi vous poser la question de la Nouvelle-Calédonie. Le Sénat a introduit la Nouvelle-Calédonie dans le titre XII, en faisant référence, bien sûr, à son statut particulier, qui figure au titre XIII de la Constitution. Il reste qu'elle est mentionnée au titre XII. Par conséquent, la question se pose de savoir si les dispositions que le Gouvernement nous propose d'adopter dans le titre XII s'appliqueront à la Nouvelle-Calédonie. Je pense notamment au droit à l'expérimentation, ainsi qu'au référendum. Sur ce point, madame la ministre, des réponses me paraissent indispensables.
    Le troisième point concerne la méthode que vous proposez pour consulter les populations. Le principe de la consultation a été admis par le Conseil constitutionnel concernant l'outre-mer. Il figure dans la loi d'orientation. Mais à travers cette révision constitutionnelle, il devient trop restrictif, et ce sur deux points.
    En ce qui concerne la démarche, d'abord. Nous avons mis en oeuvre dans la loi d'orientation la procédure de consultation du congrès des assemblées locales - et donc du conseil général et du conseil régional, puisque ceux-ci étaient réunis dans le cadre du congrès. Cette procédure était transparente et démocratique, c'est-à-dire - et c'était là une première, s'agissant de l'outre-mer - qu'elle partait des collectivités, des élus des collectivités. Avec votre texte, c'est le contraire qui va se passer, sauf si vous nous dites que vous tenez compte maintenant des travaux qui ont été menés dans les trois congrès qui se sont réunis outre-mer, ...
    M. le président. Veuillez conclure, monsieur Queyranne.
    M. Jean-Jack Queyranne. ... en Guyane, en Martinique et en Guadeloupe. En effet, la rédaction que vous proposez signifie que l'on part d'en haut, c'est-à-dire d'un statut octroyé par le Gouvernement, par le Président de la République. Notre démarche était complètement différente, qui consistait à partir des volontés exprimées et interprétées outre-mer.
    M. le président. Il faudrait conclure, monsieur Queyranne.
    M. Jean-Jack Queyranne. Enfin, vous limitez - je termine sur ce point, monsieur le président - le contenu de la consultation aux questions relatives à l'organisation ou au régime législatif des collectivités d'outre-mer. C'est plus restrictif que ce qu'a permis la loi d'orientation. Je vous rappelle que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 7 décembre 2000, indiquait que dans la mise en oeuvre du deuxième alinéa du préambule de la Constitution de 1958, les autorités compétentes de la République « sont libres de définir l'objet » de la consultation. Autrement dit, l'objet de la consultation peut être beaucoup plus large que les questions relatives à l'organisation ou au régime législatif. Par conséquent, vous enfermez la consultation dans un cadre que vous définissez d'en haut, ce qui me paraît une erreur politique par rapport aux évolutions de l'outre-mer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à Mme Christiane Taubira.
    Mme Christiane Taubira. Monsieur le président, je voudrais tout de même rappeler une règle de bon sens : le système décimal veut que l'article 7 arrive après l'article 6. Si les débats sur l'article 6 avaient été un peu plus ouverts, les débats sur l'article 7 auraient certainement pu commencer bien plus tôt.
    M. Pascal Clément, président de la commission, rapporteur. Tout à fait ! Mais c'est aux députés de l'opposition qu'il faut dire cela !
    Mme Christiane Taubira. Cette recherche de bouc émissaire me paraît donc tout à fait chimérique.
    Je voudrais aussi, quand même, relever l'absence de M. le garde des sceaux. Nous l'avions remarquée hier, vers une heure du matin, mais sans la relever, parce que nous avions déjà suffisamment de motifs de protestation.
    M. Christian Paul. Et de colère !
    Mme Christiane Taubira. Et de colère, bien sûr. De plus, nous n'avons aucune raison, et surtout aucune envie, d'être désagréables à l'égard de Mme la ministre de l'outre-mer. Il n'empêche que nous avons ressenti une impression désagréable, comme si le garde des sceaux considérait qu'au moment d'aborder les articles concernant l'outre-mer, les choses vraiment sérieuses avaient déjà été réglées, et qu'il pouvait par conséquent, s'agissant de choses périphériques, nous laisser entre écorchés vifs et râleurs impénitents, une ministre de l'outre-mer suffisant bien à l'affaire. Nous avons connu M. le garde des sceaux, en d'autres temps, un peu plus prévenant à l'égard de l'outre-mer.
    D'autres auront observé, vous tous sans doute, que de nombreux députés d'outre-mer se sont mobilisés sur l'ensemble du projet, parce que chaque ligne de ce texte nous préoccupe, étant donné qu'il déterminera notre avenir autant que celui de chaque région française. Cela, évidemment, dément, de fait, les propos que nous avons entendus sur les bancs de la majorité, des propos probablement bien intentionnés d'ailleurs, qui faisaient part d'une compassion pour ces pauvres députés d'outre-mer, avec leur décalage horaire, ces députés qu'il fallait faire intervenir à une heure du matin pour leur permettre de rejoindre leurs contrées lointaines. Il est exact que, lorsque nous siégeons ici, nous avons notre décalage horaire, nous avons même, en plus du choc thermique, le limbé, cette nostalgie langoureuse, le mal du pays, qui est comme la saudade des Brésiliens. Nous siégeons malgré tout cela, et nous sommes présents sur tous les textes qui nous intéressent, et pas seulement ceux qui concernent l'outre-mer - sur l'éducation, sur la sécurité intérieure, sur la justice, sur les retraites. Nous n'exerçons pas nos responsabilités comme si nous étions dans une enclave exotique.
    M. René Dosière et M. Alain Néri. Très bien !
    Mme Christiane Taubira. C'est pour cela que nous sommes totalement indifférents à la compassion : nous exigeons simplement du respect. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Je voudrais rappeler que cette révision constitutionnelle ne survient ni à un moment indifférent, ni ex nihilo. Elle survient alors qu'est enclenché depuis plusieurs années un processus de remise en cause générale de lois et de règlements manifestement inadaptés aux réalités sociologiques, physiques, économiques, et même géopolitiques de l'outre-mer, en tout cas de l'outre-mer américain, de l'outre-mer caribéen. L'une des conséquences lourdes de cette inadaptation est de surexposer les artisans, les PME, les TPE à une concurrence démesurée, en leur imposant des contraintes asphyxiantes, en fragilisant, voire en détruisant les tissus économiques locaux. Une de ses autres conséquences lourdes est de neutraliser la capacité de maîtrise des territoires, particulièrement en Guyane, et de créer un climat lancinant de morosité, à force de buter sur des dispositions qui stérilisent l'initiative.
    Cette réforme intervient également alors que le volet institutionnel de la loi d'orientation pour l'outre-mer avait consacré un certain nombre d'aménagements démocratiques, et par conséquent validé un processus, ce processus de consultation en cours.
    Enfin, cette révision intervient dans une ambiance peu réceptive - et c'est un euphémisme. La discussion sur les langues régionales en a été une réelle caricature.
    Cette réforme répond donc à ce processus de façon délibérée ou fortuite, plutôt fortuite et inopinée d'ailleurs, tant elle s'est interdit de s'inspirer du chemin parcouru. Pourtant, lorsque le Président de la République s'est exprimé à Madiana, en Martinique, en mars 2000, on a cru qu'il avait renoué avec l'esprit du général de Gaulle qui, en 1962, avait reconnu à l'outre-mer des situations particulières justifiant l'inscription dans la Constitution du principe même de l'adaptation. Nous savons à quel point le Conseil constitutionnel a donné depuis une interprétation rabougrie de cette reconnaissance des situations particulières et de l'adaptation nécessaire.
    Mais le Président de la République actuel s'est tellement réclamé des statuts à la carte, y compris à Champ-Fleuri, à la Réunion, qu'on aurait pu s'attendre à un peu plus d'audace, à beaucoup d'écoute et surtout à une rupture avec les ruses un peu pompeuses.
    Or, le général de Gaulle, en 1962, ne faisait qu'entendre et respecter des revendications qui émanaient de l'outre-mer et qui étaient exprimées par nos élites et dans les manifestations populaires.
    M. Jean Besson. Mme Taubira devient gaulliste !
    Mme Christiane Taubira. Quarante ans après, force est de constater que le respect dû aux identités, aux cultures, aux langues, aux histoires, aux peuples et à leurs élus, est en grande régression. Alors, on est dans l'implicite, dans la tacite reconduction d'un pacte républicain qui, s'il fut parfois esquissé, ne fut jamais spécifiquement formulé, comme si une espèce de méfiance atavique empêchait de formuler les termes des engagements réciproques.
    Dans cet article 7, on a deux dispositions majeures. D'abord, la citation nominative de tous les départements et régions d'outre-mer, pour signaler qu'ils sont régis par l'article 73, de sorte qu'on se demande, d'une part, ce qu'ils font dans cet article et, d'autre part, pourquoi ils n'en dépendent pas puisqu'ils relèvent de l'identité législative.
    La deuxième disposition, c'est effectivement cette possibilité de consulter les populations sur deux thèmes, l'organisation et le régime législatif, c'est-à-dire sur une éventuelle substitution des assemblées actuellement existantes, ou encore sur le passage du régime prévu à l'article 73 à celui prévu à l'article 74.
    Je reviendrai, lors de la discussion sur l'article 8, sur cette course d'obstacles qui a été imposée à la capacité d'adaptation et à l'habilitation législative.
    Je reviendrai également sur la question essentielle des ressources, et ce sera l'occasion pour vous, madame la ministre, de nous expliquer pourquoi 38 millions d'euros ont disparu, ou en tout cas sont annulés, dans le collectif budgétaire, sur le fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer.
    Mais vous nous combleriez déjà en nous faisant une grande confidence : quel est l'esprit qui a présidé à la rédaction de cet article 7 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est M. André Chassaigne.
    M. André Chassaigne. Ce projet de loi constitutionnelle consacre, dans ses articles 7 à 10, une place importe à l'outre-mer, en rapport avec la demande d'une évolution institutionnelle qui s'exprime avec force aux Antilles et en Guyane.
    En effet, la départementalisation de ces territoires, intervenue en 1946, et dont les effets bénéfiques dans les domaines économique, social, sanitaire ou éducatif sont incontestables, a désormais atteint ses limites. Le Président de la République l'a d'ailleurs reconnu en déclarant, dans le discours qu'il a prononcé le 11 mars 2000 à Madiana, en Martinique, que « l'institution départementale, fondée sur l'assimilation, et qui a longtemps été synonyme de progrès et de dignité, a probablement atteint ses limites ».
    La loi d'orientation pour l'outre-mer - votée, je le rappelle, en novembre 2000, alors que notre collègue Christian Paul était secrétaire d'Etat à l'outre-mer - a ouvert le chantier institutionnel, après une longue concertation avec les élus locaux, en prévoyant dans son article 62 une procédure d'évolution institutionnelle qui consacrait le pouvoir d'initiative locale confié aux élus départementaux et régionaux réunis en congrès. Elle prévoyait aussi la consultation des populations sur d'éventuels projets d'évolution statutaire proposés par le congrès. Les élus des trois départements français d'Amérique ont réclamé, très majoritairement, la création de collectivités à statut particulier.
    Votre projet inscrit effectivement dans la Constitution la possibilité d'un passage de ces régions monodépartementales vers une Assemblée unique ou vers une collectivité unique, après consultation des électeurs concernés  - consultation qui sera également requise pour un passage vers le statut de territoire d'outre-mer. Nous nous félicitons évidemment de ce préalable retenu, car le consentement des citoyens pour tout changement de statut est la base même de la démocratie.
    M. Gérard Grignon. Ça, c'est très bien !
    M. André Chassaigne. Permettez-moi cependant de relever que le texte déposé au Sénat a soulevé une grande inquiétude, liée à la formulation ambiguë de l'article 72-3, qui répartit les collectivités situées outre-mer en deux catégories juridiques régies par les articles 73 et 74 de la Constitution. Il précisait en effet que les départements et les régions d'outre-mer, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la Réunion sont régis par l'article 73, alors que les autres collectivités le sont par l'article 74. Cette rédaction laissait penser que toute évolution des départements d'outre-mer vers une collectivité unique, actuellement demandée par les congrès des départements français d'Amérique, les placera dans la catégorie des territoires d'outre-mer, ce qu'aucun département d'outre-mer ne veut !
    Cela revenait, en somme, à laisser le choix entre le statut actuel et le passage au statut de territoire d'outre-mer ! Heureusement, un amendement adopté au Sénat a permis, semble-t-il, de lever cette ambiguïté. Cet amendement illustre bien, toutefois, l'imprécision de votre texte, déjà constatée dans d'autres articles.
    D'autres questions demeurent et nécessitent des réponses. Ainsi, madame la ministre, la consultation des populations pourra-t-elle se faire sur le projet global proposé par le congrès, c'est-à-dire pas seulement sur l'institution d'une assemblée unique ou d'une collectivité unique, mais aussi sur la définition et l'étendue de ses pouvoirs et compétences ?
    Autre question, que devient le pouvoir d'initiative que la loi a attribué aux élus des assemblées locales dans le cadre des congrès ? Tiendra-t-on compte des travaux de ces derniers ? Leurs représentants seront-ils les interlocuteurs privilégiés du Gouvernement dans la phase de concertation préalable à la consultation des populations, comme le demandent les conseils généraux de la Guadeloupe et de la Martinique ? Au cas où serait créée une collectivité se substituant au département et à la région, pourra-t-elle disposer de compétences allant au-delà de la somme des compétences de la région et du département, ainsi que d'une organisation institutionnelle particulière ?
    Il ne faudrait pas que la révision constitutionnelle envisagée aboutisse dans les faits à limiter les possibilités de choix des domiens et à brider l'initiative locale. Elle équivaudrait alors à une occasion manquée de répondre aux aspirations des populations des DOM à mieux maîtriser leur propre avenir, dans le cadre de la République et de l'Union européenne.
    C'est la raison pour laquelle nous trouvons surprenant l'amendement adopté par le Sénat, il est vrai sur l'article 8, mais je voulais en dire deux mots tout de suite, puisque les choses sont liées. Cet amendement, monsieur le rapporteur, prive la Réunion de la possibilité de fixer elle-même, à sa demande, les règles applicables sur son territoire, y compris dans certaines matières relevant du domaine de la loi. Cette compétence étendue à toutes les collectivités soumises au régime de l'assimilation législative prévu par l'article 73 de la Constitution permet pourtant de répondre à leur situation spécifique et aux réalités locales marquées par des contraintes et des difficultés structurelles. Nous nous opposons à ce que le peuple réunionnais en soit privé. C'est pourquoi nous nous étions félicités qu'un amendement de la commission des lois rétablisse cette disposition pour la Réunion. Nous ne saurions approuver la moindre atteinte au principe de la libre détermination des peuples de l'outre-mer, inscrit à l'alinéa 2 du préambule de la Constitution. Nous regrettons très vivement que notre rapporteur ait décidé hier au soir de retirer cet amendement. Son exposé sommaire, que j'ai sous les yeux, et qu'on pourrait relire éventuellement dans la soirée, était pourtant parfaitement fondé, monsieur le rapporteur, et avait emporté l'adhésion de la commission.
    M. Jean Michel et M. Christian Paul. Très bien !
    M. le président. La parole est à Mme Béatrice Vernaudon.
    Mme Béatrice Vernaudon. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j'ai personnellement choisi d'intervenir avant l'article 9 du projet de loi, puisque le texte qu'il propose pour l'article 74 de la Constitution concerne particulièrement la Polynésie française. Aussi, si je prends la parole maintenant, c'est parce que M. Mansour Kamardine, député de Mayotte, m'a priée d'intervenir en ses lieu et place sur l'article 7 de ce projet de loi constitutionnelle qu'il estime historique.
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois, rapporteur. Très bien !
    Mme Béatrice Vernaudon. Je vous serai donc reconnaissante de penser à Mayotte et à M. Kamardine en écoutant la lecture que je vais vous faire de l'intervention de ce dernier :
    « Je suis heureux de constater que Mayotte figure enfin à la place qui devrait être la sienne depuis toujours.
    « Désormais, nous sommes bien loin du temps où certains, au nom de je ne sais quel principe, militaient en faveur d'un retour de Mayotte aux Comores, au mépris de notre principe fondamental du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.
    « Française depuis 1841, Mayotte ne quittera plus jamais la République sans le consentement de sa population et au prix d'une révision préalable de la Constitution. Voilà qui rassure !
    « Le texte tel que rédigé opère une répartition claire des compétences et des tâches.
    « Il organise un dialogue fructueux entre les différentes parties en présence : aux partis politiques locaux de saisir le Gouvernement de toute évolution institutionnelle, au Gouvernement ou au Parlement de saisir le Président de la République, à charge pour celui-ci de consulter les populations intéressées et au corps électoral, disposant d'un droit de veto qui lui est reconnu pour la première fois, de donner son consentement.
    « Ce droit de veto est important car il permet d'éviter toute dérive ou aventure constitutionnelles non souhaitées.
    « C'est donc, et comme toujours depuis 1958, au chef de l'Etat d'arbitrer. Placé au-dessus des partis, c'est à lui que revient l'arbitrage, au-dessus des contingences politiques dans les moments de grave confusion, en invitant le pays souverain - disait le général de Gaulle - à exprimer par le suffrage universel sa souveraineté.
    « Le texte permet surtout à Mayotte, par la mise en oeuvre du processus susdécrit, de rejoindre, à brève échéance, le concert des départements d'outre-mer, revendication qu'elle exprime depuis voici plus de cinquante ans.
    « Mieux encore, aucun changement institutionnel pour tout ou partie de l'une de ces collectivités ne peut intervenir sans que le consentemment des électeurs de la collectivité, ou d'une partie de celle-ci, n'ait été recueilli.
    « Ancrage dans la République, clarification et répartition des compétences, citoyenneté française de nos compatriotes mieux affirmée : tels sont les maîtres mots des articles 72 et suivants en cours d'examen.
    « Je veux aussi saluer les dispositions de l'article 74-1 qui autorisent, et de manière permanente, le Gouvernement, dans les matières qui demeurent de la compétence de l'Etat, à étendre par voie d'ordonnance, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de nature législative en vigueur en métropole.
    « Il s'agit là aussi d'une mesure heureuse puisqu'elle offre, au moins en théorie, une souplesse d'action au Gouvernement pour mettre nos collectivités au niveau juridique.
    « Il nous faut très vite adopter ce texte. Pour ma part, je pense déjà à la suite et à la prochaine étape qui devrait conduire Mayotte à quitter l'article 74 pour intégrer le giron des départements et régions d'outre-mer.
    « Vous avez souhaité, madame la ministre, à travers ce texte, redonner confiance à l'outre-mer. Je puis vous dire que le projet du Gouvernement a largement atteint cet objectif. »
    Au nom de M. Mansour Kamardine, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vous remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. René Dosière, dernier orateur inscrit.
    M. René Dosière. Au moment où nous abordons la volet outre-mer de ce projet constitutionnel, je voudrais souligner les conditions toujours un peu particulières dans lesquelles l'Assemblée nationale évoque les questions de l'outre-mer.
    Ayant siégé dans cet hémicycle pendant deux législatures - seulement ou déjà -, je constate que les députés d'outre-mer se préoccupent pour l'essentiel, et pour certains exclusivement, des questions qui concernent leur département d'élection. Inversement, les députés métropolitains hésitent à se préoccuper des questions qui concernent l'outre-mer, considérant peut-être qu'il s'agit d'une chasse gardée de chaque territoire.
    M. Alain Cousin. Procès d'intention !
    M. René Dosière. La caricature d'une telle attitude a été donnée par ceux de nos collègues qui, durant tout ce débat sur la décentralisation, sont souvent restés muets et n'ont accepté de prendre la parole que cette nuit avant de repartir dans leur circonscription. Mais l'essentiel, il est vrai, était de parler à l'issue de la séance devant les caméras de RFO ! (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean Besson. Pitoyable ! Ridicule !
    M. Augustin Bonrepaux. Beaucoup de ceux qui protestent à droite n'étaient même pas là la nuit dernière !
    M. le président. Mes chers collègues, M. René Dosière a la liberté de parole,...
    M. René Dosière. Tout à fait !
    M. le président. ... même si ses propos sont maladroits. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean Besson. Les propos de M. Dosière ne sont pas maladroits, mais insultants !
    M. Alain Néri. La parole est libre !
    M. le président. Poursuivez, monsieur Dosière.
    M. René Dosière. Or, dans un cas comme dans l'autre, nous sommes tous détenteurs de la souveraineté populaire, député de la nation et non député de tel ou tel espace géographique. Donc, mon souhait est qu'à l'avenir, nous puissions rencontrer davantage d'élus domiens soucieux de s'intéresser aux institutions de la France, à l'instar de Christiane Taubira et de Victorin Lurel, dont j'apprécie personnellement la qualité des interventions.
    M. Jean Roatta. Sectaire !
    M. René Dosière. Il est également souhaitable que les députés métropolitains soient plus nombreux à se préoccuper des questions de l'outre-mer, qui fait partie intégrante de la République française et qui est bénéficiaire d'une fraction non négligeable - pour ne pas dire plus - des fonds publics.
    M. Jean-Louis Léonard. Merci pour la leçon !
    M. Gérard Grignon. Ce n'est pas brillant, monsieur Dosière !
    M. René Dosière. Nous devons d'ailleurs y être d'autant plus attentifs que cette séparation entre les problèmes de l'outre-mer et ceux de la métropole aboutit souvent à ce que décident seuls les députés domiens pour eux-mêmes, situation que traduit bien la formule malheureuse utilisée hier soir par le président de la commission des lois : « Je ne veux pas être plus réunionnais que les Réunionnais et donc je m'incline devant la volonté des Réunionnais ».
    Vouloir que chaque département légifère avec ses seuls élus, c'est risquer de méconnaître l'article 3 de la Constitution qui précise :
    « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum.
    « Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice. »
    J'avoue d'ailleurs que l'introduction dans le dispositif d'un article prévoyant de requérir le consentement des populations concernées peut poser un problème. En effet, jusqu'à présent, le Conseil constitutionnel considérait que, si la consultation était possible, elle ne constituait qu'un avis. L'évolution envisagée est pour le moins significative, et, par conséquent, nous ne pouvons pas rester tout à fait silencieux à ce sujet.

    Je réclame, par respect envers les élus d'outre-mer, que les questions qui les concernent soient traitées avec toute la considération qu'elles méritent.
    M. le président. Mme la ministre de l'outre-mer répondra aux orateurs au début de la prochaine séance. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
    M. Augustin Bonrepaux. Et mon rappel au règlement ? Ce n'est pas très correct !

4

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de la discussion du projet de loi constitutionnelle, adopté par le Sénat, n° 369, relatif à l'organisation décentralisée de la République :
    M. Pascal Clément, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 376) ;
    M. Pierre Méhaignerie, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis n° 377).
    Discussion du projet de loi, n° 187, relatif à la programmation militaire pour les années 2002 à 2008 :
    M. Guy Teissier, rapporteur au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (rapport n° 383) ;
    M. Pierre Lellouche, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires étrangères (avis n° 384) ;
    M. François d'Aubert, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis n° 385).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures trente.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexe au procès-verbal
de la 1re séance
du mercredi 27 novembre 2002
SCRUTIN (n° 81)


sur l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 (texte de la commission mixte paritaire).

Nombre de votants

366


Nombre de suffrages exprimés

365


Majorité absolue

183


Pour l'adoption

277


Contre

88

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (363) :     Pour : 261. - MM. Jean-Claude Abrioux, Bernard Accoyer, Alfred Almont, Philippe Auberger, François d' Aubert, Jean Auclair, Bertho Audifax, Mme Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Jean Bardet, Mme Brigitte Bareges, MM. François Baroin, Jacques Barrot, Mme Sylvia Bassot, MM. Patrick Beaudouin, Joël Beaugendre, Jean-Claude Beaulieu, Jacques Bénisti, Jean-Louis Bernard, Marc Bernier, André Berthol, Xavier Bertrand, Jean-Michel Bertrand, Jean Besson, Jean-Marie Binetruy, Étienne Blanc, Emile Blessig, Roland Blum, Jacques Bobe, Yves Boisseau, René Bouin, Roger Boullonnois, Bruno Bourg-Broc, Mme Chantal Bourragué, MM. Loïc Bouvard, Michel Bouvard, Ghislain Bray, Victor Brial, Philippe Briand, Jacques Briat, Mme Maryvonne Briot, MM. Bernard Brochand, Michel Buillard, Dominique Caillaud, François Calvet, Antoine Carré, Gilles Carrez, Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud, MM. Jean-Yves Chamard, Hervé de Charette, Jean-Paul Charié, Roland Chassain, Jean-Marc Chavanne, Gérard Cherpion, Jean-François Chossy, Jean-Louis Christ, Dino Cinieri, Philippe Cochet, Georges Colombier, Mme Geneviève Colot, MM. Louis Cosyns, Édouard Courtial, Yves Coussain, Jean-Michel Couve, Charles Cova, Paul-Henri Cugnenc, Olivier Dassault, Jean-Pierre Decool, Francis Delattre, Richard Dell'Agnola, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Yves Deniaud, Bernard Depierre, Léonce Deprez, Jean-Jacques Descamps, Éric Diard, Jean Diébold, Michel Diefenbacher, Jacques Domergue, Renaud Donnedieu de Vabres, Jean-Pierre Door, Dominique Dord, Philippe Douste-Blazy, Guy Drut, Jean-Michel Dubernard, Philippe Dubourg, Gérard Dubrac, Jean-Pierre Dupont, Christian Estrosi, Pierre-Louis Fagniez, Yannick Favennec, Georges Fenech, Alain Ferry, Daniel Fidelin, André Flajolet, Jean-Claude Flory, Nicolas Forissier, Jean-Michel Fourgous, Mme Arlette Franco, MM. Pierre Frogier, Yves Fromion, Claude Gaillard, Mme Cécile Gallez, MM. René Galy-Dejean, Daniel Gard, Jean-Paul Garraud, Jean de Gaulle, Jean-Jacques Gaultier, Guy Geoffroy, Alain Gest, Franck Gilard, Georges Ginesta, Jean-Pierre Giran, Claude Girard, Maurice Giro, Jacques Godfrain, François-Michel Gonnot, Jean-Pierre Gorges, François Goulard, Jean-Pierre Grand, Mme Claude Greff, MM. Jean Grenet, Gérard Grignon, François Grosdidier, Serge Grouard, Louis Guédon, Lucien Guichon, François Guillaume, Jean-Jacques Guillet, Gérard Hamel, Emmanuel Hamelin, Joël Hart, Pierre Hellier, Michel Herbillon, Pierre Hériaud, Patrick Hoguet, Philippe Houillon, Jean-Yves Hugon, Michel Hunault, Denis Jacquat, Christian Jeanjean, Yves Jego, Mme Maryse Joissains-Masini, MM. Marc Joulaud, Alain Joyandet, Dominique Juillot, Didier Julia, Alain Juppé, Mansour Kamardine, Christian Kert, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, MM. Jacques Kossowski, Yvan Lachaud, Marc Laffineur, Mme Marguerite Lamour, MM. Robert Lamy, Edouard Landrain, Pierre Lang, Pierre Lasbordes, Mme Brigitte Le Brethon, MM. Robert Lecou, Marc Le Fur, Jean Lemiere, Jean-Claude Lemoine, Gérard Léonard, Jean-Louis Léonard, Jean-Antoine Leonetti, Arnaud Lepercq, Pierre Lequiller, Jean-Pierre Le Ridant, Édouard Leveau, Gérard Lorgeoux, Mme Gabrielle Louis-Carabin, MM. Daniel Mach, Richard Mallié, Jean-François Mancel, Hervé Mariton, Mme Muriel Marland-Militello, M. Alain Marleix, Mme Henriette Martinez, MM. Patrice Martin-Lalande, Alain Marty, Jacques Masdeu-Arus, Jean Claude Mathis, Pierre Méhaignerie, Christian Ménard, Alain Merly, Damien Meslot, Gilbert Meyer, Pierre Micaux, Pierre Morange, Mme Nadine Morano, MM. Pierre Morel-A-L'Huissier, Jean-Marie Morisset, Étienne Mourrut, Alain Moyne-Bressand, Jean-Marc Nesme, Hervé Novelli, Jean-Marc Nudant, Dominique Paillé, Mme Béatrice Pavy, MM. Jacques Pélissard, Pierre-André Périssol, Bernard Perrut, Michel Piron, Serge Poignant, Axel Poniatowski, Mme Josette Pons, MM. Daniel Poulou, Christophe Priou, Jean Proriol, Didier Quentin, Michel Raison, Mme Marcelle Ramonet, MM. Jacques Remiller, Dominique Richard, Mme Juliana Rimane, M. Camille de Rocca Serra, Mme Marie-Josée Roig, MM. Vincent Rolland, Jean-Marie Rolland, Serge Roques, Philippe Rouault, Jean-Marc Roubaud, Michel Roumegoux, Max Roustan, Francis Saint-Léger, Frédéric de Saint-Sernin, André Samitier, François Scellier, André Schneider, Bernard Schreiner, Jean-Marie Sermier, Georges Siffredi, Yves Simon, Jean-Pierre Soisson, Michel Sordi, Frédéric Soulier, Mmes Michèle Tabarot, Hélène Tanguy, MM. Jean-Charles Taugourdeau, Guy Teissier, Michel Terrot, Mme Irène Tharin, MM. Jean-Claude Thomas, Dominique Tian, Jean Ueberschlag, Léon Vachet, Christian Vanneste, François Vannson, Mme Catherine Vautrin, MM. Alain Venot, René-Paul Victoria, Philippe Vitel, Gérard Voisin, Michel Voisin, Jean-Luc Warsmann, Gérard Weber, Éric Woerth et Mme Marie-Jo Zimmermann
    Abstention : 1. - M. Etienne Pinte.
    Non-votants : 2. - MM. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale) et Eric Raoult (président de séance)
Groupe socialiste (147) :
    Pour : 4. - MM. Michel Françaix, Jean Gaubert, Mme Nathalie Gautier et M. Alain Gouriou.
    Contre : 65. - Mme Patricia Adam, MM. Damien Alary, Jean-Marc Ayrault, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Christian Bataille, Eric Besson, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Patrick Bloche, Jean-Claude Bois, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Pierre Bourguignon, Mmes Danielle Bousquet, Martine Carrillon-Couvreur, M. Jean-Paul Chanteguet, Mmes Marie-Françoise Clergeau, Claude Darciaux, M. Michel Dasseux, Mme Martine David, MM. Jean Delobel, Michel Destot, Marc Dolez, René Dosière, Jean-Louis Dumont, Laurent Fabius, Mmes Paulette Guinchard-Kunstler, Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mmes Françoise Imbert, Conchita Lacuey, M. Jérôme Lambert, Mme Marylise Lebranchu, MM. Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Jean-Yves Le Drian, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Guy Lengagne, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. Bernard Madrelle, Louis-Joseph Manscour, Christophe Masse, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Henri Nayrou, Alain Néri, Michel Pajon, Christian Paul, Germinal Peiro, Mme Geneviève Perrin-Gaillard, M. Jean-Jack Queyranne, Mme Chantal Robin-Rodrigo, MM. Alain Rodet, Bernard Roman, Michel Sainte-Marie, Roger-Gérard Schwartzenberg, Mme Christiane Taubira et M. Michel Vergnier.
Groupe Union pour la démocratie française (28) :
    Pour : 12. - M. Bernard Bosson, Mme Anne-Marie Comparini, MM. Charles de Courson, Stéphane Demilly, Jean Dionis du Séjour, Philippe Folliot, Gilbert Gantier, Francis Hillmeyer, Jean-Luc Préel, Rudy Salles, André Santini et François Sauvadet
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 19. - MM. François Asensi, Gilbert Biessy, Alain Bocquet, Jacques Brunhes, Mme Marie-George Buffet, MM. André Chassaigne, Jacques Desallangre, Frédéric Dutoit, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Pierre Goldberg, Maxime Gremetz, Georges Hage, Mme Muguette Jacquaint, MM. Jean-Claude Lefort, François Liberti, Daniel Paul, Jean-Claude Sandrier et Michel Vaxès.
Non-inscrits (13) :
    Contre : 4. - Mme Martine Billard, MM. Gérard Charasse, Noël Mamère et Emile Zuccarelli.

Mises au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    MM. Michel Françaix, Jean Gaubert, Mme Nathalie Gautier et Alain Gouriou, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « contre ».