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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 12 FÉVRIER 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mardi 11 février 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Questions au Gouvernement «...».

SUCCURSALES DE LA BANQUE DE FRANCE «...»

MM. Daniel Paul, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

AIR LIB «...»

MM. Richard Dell'Agnola, Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

POLITIQUE EN FAVEUR DES DÉFAVORISÉS «...»

MM. Roger-Gérard Schwartzenberg, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.

RÉFORME DE LA BANQUE DE FRANCE «...»

MM. Philippe Folliot, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

AIDE AU DÉVELOPPEMENT DES PAYS DU SUD «...»

MM. Jacques Godfrain, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

RÉORGANISATION DU RÉSEAU
DE LA BANQUE DE FRANCE «...»

MM. Bruno Bourg-Bruno, Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.

MULTIPLICATION DES PLANS SOCIAUX «...»

Mme Odile Saugues, M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

BILAN DE L'ACTION
DES GROUPES D'INTERVENTION RÉGIONAUX «...»

MM. Jean-François Mancel, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

ACTIONS EN FAVEUR DU MONDE DE LA CHASSE «...»

M. Jean-Louis Léonard, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.

POLLUTION DU LITTORAL ATLANTIQUE «...»

M. Jean-Pierre Dufau, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.

SOUTIEN À LA DYNAMIQUE DES ENTREPRISES «...»

MM. Jean-Yves Cousin, Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.

PRÉSERVATION DE LA DIVERSITÉ CULTURELLE «...»

MM. Bernard Depierre, Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE
DE Mme PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER

2.  Initiative économique. - Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi «...».
M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
M. Hervé Novelli, président de la commission spéciale.

EXPLICATIONS DE VOTE «...»

MM.
Michel Vergnier,
Charles de Courson,
Daniel Paul,
Mme
Chantal Brunel.

VOTE SUR L'ENSEMBLE «...»

Adoption, par scrutin, de l'ensemble du projet de loi.

Suspension et reprise de la séance «...»

3.  Opposition à une demande de discussion selon la procédure d'examen simplifiée «...».
4.  Elections régionales et européennes. - Discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi «...».

Rappels au règlement «...»

MM. Jacques Brunhes, Pascal Clément, président de la commission des lois ; François Bayrou.

Suspension et reprise de la séance «...»
Rappel au règlement «...»

M. Jean-Marc Ayrault.

Suspension et reprise de la séance «...»
Rappels au règlement «...»

MM. Maurice Leroy, le président de la commision, Jean-Marc Ayrault.

Suspension et reprise de la séance «...»
Rappel au règlement «...»

M. Alain Bocquet, Mme la présidente.

Suspension et reprise de la séance «...»
Rappels au règlement «...»

M. René Dosière, Mme la présidente, M. Jean-Marc Ayrault.

Ouverture de la discussion «...»

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
5.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement. Nous commençons par une question du groupe des député-e-s communistes et républicains.

SUCCURSALES DE LA BANQUE DE FRANCE

    M. le président. La parole est à Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Ma question s'adresse à monsieur le Premier ministre.
    Le 7 février dernier, le rapport qui préconise la fermeture des trois quarts des 211 succursales de la Banque de France a déclenché un tir de barrage des salariés concernés, mais aussi des associations d'élus locaux qui s'oppose à ce véritable projet de déménagement du territoire.
    M. Robert Lamy. Ces succursales ne servent à rien !
    M. Daniel Paul. Le réseau de la Banque de France constitue pourtant un atout au regard des cinq missions essentielles de service public de la Banque de France. Ses succursales assurent en effet la gestion et la sécurité de la circulation de la monnaie. Elles contribuent à la surveillance bancaire et à l'élaboration de la politique monétaire. Elles relèvent des informations économiques et financières sur les entreprises. Enfin, et c'est essentiel, elles instruisent des milliers de dossiers de surendettement. A qui vous apprêtez-vous à transférer cette mission qui concerne tant de situations personnelles difficiles et souvent dramatiques ?
    Dans tout le pays, ces annonces de fermeture accompagnent celles de bureaux de poste, de maternités, de gares ou d'agences de l'URSSAF et du Trésor public, comme à Dieppe, dans mon département. Dans les faits, la régionalisation considérée par vous-même comme prioritaire, à défaut de servir la cause de la proximité, démembre les résaux de services publics qui sont au plus près de nos concitoyens.
    L'exemple de ma ville illustre le caractère néfaste d'une telle réforme. Au Havre, comme partout ailleurs, les soixante-cinq agents de la succursale seront en grève jeudi. Je rappelle que 1 850 dossiers de surendettement sont instruits dans cette région frappée par des plans sociaux à répétition. Port 2000 devrait contribuer à redynamiser le tissu économique d'un des plus grands ports d'Europe. Mais priver les particuliers et l'ensemble des acteurs économiques et sociaux du point d'appui - en termes d'analyses et de prospectives économiques - que constituent les professionnels de la Banque de France est une véritable aberration.
    Monsieur le Premier ministre, si ce nouveau projet de casse du service public (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), qui va entraîner 3 200 suppressions d'emplois, devait être confirmé, vous porteriez une lourde responsabilité. Allez-vous exiger du gouverneur de la Banque de France qu'il renonce à un projet libéral qui vise à briser les équilibres du territoire national ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, il s'agit non pas de casser le service public...
    Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Si !
    M. Albert Facon. Vous l'enterrez même !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... mais de continuer, dans un monde qui change, à apporter des services de missions publiques aux Français et aux entreprises françaises en utilisant les technologies de demain et non pas celles d'hier. Le contexte général dans lequel nous nous trouvons nous conduit à faire preuve, dans ce domaine, du même souci de performance, d'efficacité et de qualité de service que dans le reste de l'activité économique. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    Toutes les évolutions à venir se feront dans le cadre des relations établies, en coordination avec le territoire. (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.) Il est clair que, s'agissant du projet proposé au gouverneur de la Banque de France - ce n'est pas le sien -, les mesures qui seront progressivement à prendre seront élaborées en étroite concertation avec tous ceux qui ont à en connaître, y compris le territoire. C'est dans ce contexte qu'ensemble nous saurons faire évoluer les services publics (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste) pour améliorer leur performance et celle de la collectivité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. François Liberti. Que faites-vous du dialogue social ?

AIR LIB

    M. le président. La parole est à M. Richard Dell'Agnola, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. Richard Dell'Agnola. Monsieur le président, ma question, à laquelle j'associe mes collègues UMP du Val-de-Marne, s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    Monsieur le ministre, les avions d'Air Lib sont bloqués au sol. Les salariés sont inquiets pour leur avenir et le manifestent.
    M. Jacques Desallangre. Eh oui !
    M. Richard Dell'Agnola. La plate-forme d'Orly risque de perdre des milliers d'emplois directs et indirects...
    M. Jacques Desallangre. C'est au baron Seillière qu'il fallait le dire !
    M. Richard Dell'Agnola. ... et son activité va souffrir si les 44 000 créneaux horaires, jusqu'à présent occupés par Air Lib, disparaissent du jour au lendemain.
    Certes, nous savions depuis des mois que la situation de cette compagnie aérienne était fragile. L'Etat s'était déjà porté à son secours. Puis nous avons mis nos espoirs dans la négociation menée avec un repreneur qui, après avoir soufflé le chaud et le froid, vient de renoncer. Mais aujourd'hui, la situation semble de plus en plus compromise.
    Monsieur le ministre, quelles sont, au moment où nous parlons, les suites prévisibles pour Air Lib ? Pouvez-vous apporter des précisions sur les procédures en cours ? Quelles propositions le Gouvernement entend-il faire pour favoriser le reclassement des salariés de cette compagnie aérienne ? Enfin, quelles initiatives prendra-t-il pour faire en sorte que le transport aérien français soit organisé de telle façon qu'à côté de la compagnie nationale, des solutions durables et financièrement viables soient mises sur pied pour assurer la couverture du ciel sur les lignes intérieures et celles de l'outre-mer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, je vais revenir sur les trois aspects de votre question : les procédures judiciaires, le reclassement du personnel et les dessertes.
    Sur le plan judiciaire, le conciliateur nommé par le tribunal du commerce de Créteil doit rendre son rapport, qui, en l'état de mes connaissances, sera probablement négatif...
    M. Jean-Claude Lefort. Comment pouvez-vous le savoir ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. ... d'ici au vendredi 14 février. A cette date, ou bien il y aura un repreneur de dernière minute, auquel cas la poursuite de l'entreprise sera évidemment prononcée, ou bien il n'y en aura pas et il appartiendra alors au chef d'entreprise de déposer son bilan car Air Lib est aujourd'hui virtuellement en cessation de paiement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jacques Desallangre. Merci à M. Bussereau !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. S'agissant du personnel, avec Dominique Bussereau et selon le principe de précaution, nous avons déjà reçu samedi après-midi quatre grandes entreprises de transport de personnes : la SNCF, la RATP, ADP et Air France, pour leur demander quelles étaient, en termes de flux, leurs possibilités d'embauche dans les mois et les années à venir. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Cet après-midi, nous allons également recevoir les professionnels du tourisme, les exploitants d'aéroports et des représentants du monde du tourisme en général. Puis, dans les jours prochains, nous rencontrerons les entreprises de transport aérien exerçant en France. Monsieur le député, même si les choses sont difficiles et longues, les motifs d'espérer sont cependant bien réels. Compte tenu des flux d'embauche dans les mois et les années à venir, les espérances en termes d'embauche sont en effet supérieures à ce qu'elles étaient dans le passé pour Air Lib dans des situations équivalentes. (Protestations sur les mêmes bancs.)
    S'agissant enfin des dessertes, rappelons tout d'abord que le transport aérien est un secteur de liberté. Deux procédures existent néanmoins : celle de l'appel d'offres avec l'intervention du FIATA pour subventionner, en termes d'aménagement du territoire, certaines lignes et celle des subventions au billet, pour des lignes nécessaires à l'aménagement du territoire.
    Pour conclure, je rappelle que le Gouvernement assure le retour des voyageurs jusqu'à la fin du mois de février (Exclamations sur les mêmes bancs) et qu'Air France comme Corsaire mettent des moyens exceptionnels pour prendre la suite. Tout cela vous montre, monsieur le député, que, pour que le cas où si Air Lib ne pourrait pas continuer son exploitation, tout serait mis en oeuvre pour assurer, les dessertes et reclasser le personnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jacques Desallangre. Tout va bien alors !

POLITIQUE EN FAVEUR DES DÉFAVORISÉS

    M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour le groupe socialiste.
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Monsieur le Premier ministre, Pierre Mendès France, qui comptait votre père parmi ses ministres, disait souvent : « Gouverner c'est choisir. » Il faut vous rendre cette justice, vous appliquez cette maxime, vous faites effectivement des choix. Hélas ! ils sont constamment défavorables aux catégories modestes et systématiquement favorables aux classes sociales d'en haut.
    M. François Goulard. Qui sauve les retraites ?
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Vous êtes à Matignon depuis maintenant neuf mois. Or, au terme de cette gestation, votre politique pourrait se résumer par ces quelques mots : toujours moins pour les défavorisés, toujours plus pour les privilégiés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Démago !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Pour les Français les plus modestes, vous multipliez, en effet, les mesures d'austérité : refus d'un coup de pouce au SMIC en juillet, suppression des emplois-jeunes en août, suspension des dispositions antilicenciements de la loi de modernisation sociale en novembre et, enfin, voilà quelques jours, début février, réduction de 100 millions d'euros des crédits destinés aux personnes âgées dépendantes souhaitant rester à leur domicile. (« C'est honteux ! », sur les bancs du groupe communiste.)
    M. François Goulard. C'est faux ! Le précédent gouvernement n'avait pas assuré le financement de cette prestation !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. A l'inverse, vous multipliez les faveurs pour les privilégiés : allégement de l'impôt de solidarité sur la fortune de 100 à 500 millions d'euros pour les chefs d'entreprise, baisse uniforme de 5 % de l'impôt sur le revenu, ce qui a rapporté beaucoup aux gros contribuables, très peu aux autres et rien du tout aux 50 % de Français les moins aisés qui ne sont pas assujettis à cet impôt.
    Vous êtes, monsieur le Premier ministre, le spécialiste zélé du « deux poids, deux mesures ».
    M. Bernard Deflesselles. Baratin !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Avec vous, c'est toujours la France populaire qui subit et la France privilégiée qui s'enrichit. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Bernard Deflesselles. Démago !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Naguère, M. Chirac, encore fidèle à la tradition gaulliste, avait publié un programme intitulé « La France pour tous ».
    M. Richard Mallié. Posez donc votre question !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Il y parlait de gouverner pour tous les Français, c'est-à-dire pas seulement pour les habitants de Neuilly ou les entrepreneurs du MEDEF. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Monsieur Schwartzenberg, posez votre question !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Allez-vous donc renoncer à ce qu'il faut bien appeler une politique de classe pour mener enfin une politique de justice sociale ? Allez-vous agir désormais pour cette France d'en bas, si présente dans votre rhétorique et si absente dans votre politique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, j'ai pour Pierre Mendès France beaucoup de respect...
    M. Didier Migaud. On ne le dirait pas !
    M. le Premier ministre. ... à cause d'un aspect de sa personnalité, que vous n'illustrez pas aujourd'hui, monsieur le député : le goût de la vérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Didier Migaud. Ce n'est pas la question !
    M. le Premier ministre. Pierre Mendès France qui comptait, en effet, dans son gouvernement de multiples personnalités, comme Jacques Chaban-Delmas, pour ne citer que lui, se battait pour la vérité.
    M. Bernard Roman. Qu'est-ce qui est faux dans ce qu'a dit M. Schwartzenberg ?
    M. le Premier ministre. Ce que vous avez dit était en bien des points inexact, monsieur le député. Si, aujourd'hui, un gouvernement est sensible à toutes les difficultés de la situation, c'est bien le nôtre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Qui s'est occupé, dans les cinq dernières années, de sauver la sécurité sociale ? (Mêmes mouvements.) Qui s'est occupé, dans les cinq dernières années, de sauver les retraites et notamment les petites retraites, les toutes petites retraites des artisans et des agriculteurs, catégories auxquelles vous vous êtes peu intéressés, que vous avez toujours mésestimées ? (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.)
    M. Bernard Roman. Et les emplois-jeunes ?
    M. le Premier ministre. Votre propos est enfin inexact sur le SMIC, car c'est vous qui, en l'éclatant en cinq SMIC, l'avez fragilisé. (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.) C'est nous qui avons réussi, grâce à une réforme sur laquelle d'ailleurs vous avez proposé très peu d'amendements - vous ne vous êtes pas montré très créatifs sur ce sujet - à harmoniser ces différents SMIC par le haut, ce qui signifie une augmentation de 11 % du SMIC sur trois ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Voilà ce que nous faisons !
    Nous nous préoccupons également des personnes âgées car vous n'aviez pas prévu de financement pour l'APA. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Enfin, nous nous occupons aussi des jeunes.
    M. Bernard Roman. C'est honteux que vous affirmiez cela !
    M. le Premier ministre. Aujourd'hui, 50 000 jeunes bénéficient de contrats, sans charges, dans de vraies entreprises. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Voilà quelques-unes de nos initiatives.
    Monsieur le député, je vous invite donc à méditer sur l'action de Pierre Mendès France, qui mettait toujours la vérité au coeur de son message ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean-Claude Lefort. Le Premier ministre a été mauvais !
    M. le président. Un peu de tenue, mes chers collègues !

RÉFORME DE LA BANQUE DE FRANCE

    M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Philippe Folliot. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, vendredi dernier le secrétaire général de la Banque de France a rendu son rapport. Bien sûr, nul ne conteste la nécessité pour l'Etat de se réformer, et pour un établissement public tel que la Banque de France de s'adapter. La France a trop longtemps souffert du principe de centralité au niveau national pour ne pas forcément reconduire ce schéma au niveau régional. Pourquoi toujours et systématiquement reproduire sur les périphériques les besoins de réforme qui se font surtout sentir au niveau national ?
    Le modèle dit « modulaire à mailles régionales », qui aurait les faveurs, prévoit une grille de décision privilégiant des critères tels que le niveau d'activité, la situation géographique, le degré d'isolement, l'importance des bassins d'emploi et des centres économiques, pour assurer le maintien des établissements. A titre d'exemple : deuxième des onze succursales de Midi-Pyrénées, soixante-deuxième au niveau national, la succursale de Castres-Mazamet, récemment rénovée à grands frais, dispose de tous les critères pour justifier de son maintien.
    Monsieur le ministre, comptez-vous intervenir pour que le concept d'aménagement du territoire soit pris en compte dans cette réforme ? Quels moyens entendez-vous vous donner pour faire en sorte que la Banque de France mette en adéquation les critères qu'elle s'est fixés elle-même avec la cartographie du maillage territorial proposé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, il est clair que l'aménagement progressif du réseau de distribution de la Banque de France se fera en toute transparence et en concertation avec les élus. (« Parlez-nous d'Arcelor ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Il est clair également que nous devons concilier l'intérêt de la Banque de France, à travers les économies qui peuvent découler d'une réorganisation, à qualité de mission inchangée, avec ceux du territoire.
    M. François Goulard. Très bien !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il est non moins clair que, par rapport à une approche qui pourrait être considérée comme purement technocratique - et c'est moi qui parle -, nous saurons trouver sur le terrain, en relation directe et étroite avec vous, avec le Gouverneur de la Banque de France et, plus généralement, tous les services qui ont à en connaître, les meilleures ou les moins mauvaises solutions (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste), y compris en essayant d'établir un équilibre entre les grandes, les moyennes et les petites agglomérations. Cela peut faire partie d'une politique intelligente d'aménagement du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT
DES PAYS DU SUD

    M. le président. La parole est à M. Jacques Godfrain, pour le groupe UMP.
    M. Jacques Godfrain. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La lutte contre la pauvreté des pays du Sud est une des grandes causes du xxie siècle. Depuis de longues années, le Président de la République est un militant actif de cette cause, au point que la France est aujourd'hui le pays au monde qui y consacre le plus d'argent par tête d'habitant.
    Cette année, notre budget de l'aide publique au développement repart à la hausse grâce aux propositions du Gouvernement. C'est à la fois un devoir moral et une nécessité, car la pauvreté suscite des mouvements migratoires aux conséquences incontrôlées vers les pays les plus riches, dont nous sommes.
    Dans ce contexte, monsieur le ministre de l'intérieur, quelles actions comptez-vous initier ou amplifier dans les pays comme le Mali, d'où vous revenez ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, vous connaissez parfaitement l'Afrique, eu égard notamment aux responsabilités importantes que vous avez exercées. Il ne peut pas y avoir de régulation des flux migratoires sans un partenariat et un accord entre les pays d'émigration et les pays d'immigration. La communauté malienne en France est très importante puisqu'on compte dans notre pays quarante mille Maliens en situation régulière. Nous avons d'ailleurs été heureux de les faire venir et nous avons compté sur eux pour le fonctionnement de l'économie française au début des années soixante-dix. Il conviendrait de ne pas oublier cette réalité.
    M. Jean Leonetti et M. Edouard Landrain. Absolument.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le problème est qu'il existe deux à trois fois plus de Maliens en situation irrégulière, ou qui sont exploités et vivent dans des conditions indignes.
    Comment résoudre ce problème ? La question du développement et du codéveloppement pour organiser le maximum de retours volontaires - et vous avez vous-même des idées innovantes en la matière, monsieur le député - est une question cardinale. C'est pourquoi nous avons décidé rien moins que de doubler les aides individuelles au retour volontaire de Maliens qui souhaiteraient rentrer dans leur pays, et spécialement dans la région de Kayes, pour y développer un projet économique individuel : nous avons porté l'aide à 7 000 euros par personne. Nous sommes donc bien loin de la caricature qui a parfois été faite !
    Dernier élément : vous avez parlé de l'action de la France. Vous avez eu raison car elle n'a pas à rougir. La comparaison avec les autres pays n'est pas à son désavantage.
    M. Jacques Myard. Très bien.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je ferai cependant remarquer que, pendant les cinq années du gouvernement précédent, ça n'a pas été à son honneur...
    M. Jacques Godfrain. Tout à fait.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... notre pays a divisé quasiment par deux l'aide au développement de l'Afrique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jacques Myard. C'était scandaleux !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. L'Afrique est de nouveau une priorité. C'est le choix du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

RÉORGANISATION DU RÉSEAU
DE LA BANQUE DE FRANCE

    M. le président. La parole est à Bruno Bourg-Broc, pour le groupe UMP.
    M. Bruno Bourg-Broc. Ma question concerne aussi la réorganisation du réseau de la Banque de France, mais c'est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire que je souhaite la poser.
    M. Jean-Claude Lefort. Oui, parce que M. Mer ne répond pas !
    M. Bruno Bourg-Broc. Dans le rapport auquel il a été fait allusion, et qui a été rendu public vendredi dernier, il est proposé au gouverneur de la Banque de France, selon quatre scénarios possibles pour effectuer à moyen terme une restructuration du réseau au niveau de nos régions. Selon les hypothèses avancées, entre 2 600 et 3 200 emplois publics seraient directement en cause.
    M. Maxime Gremetz. Oui !
    M. Bruno Bourg-Broc. Le réseau actuel comprend 211 succursales. Dans une des quatre hypothèses, 189 succursales seraient supprimées et, dans la plus favorable, 105.
    Certes, quand il faut réformer, il faut réformer et rien n'est immuable. Mais il y a aussi une logique territoriale. Or la réduction sensible du nombre de succursales et surtout le regroupement de celles-ci dans les grandes agglomérations sont contraires à l'esprit même de la décentralisation et d'un aménagement du territoire harmonieux et équilibré. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    Ce projet dépasse par son ampleur et ses conséquences l'organisation interne de la Banque de France. C'est pourquoi, monsieur le ministre de la réforme de l'Etat, mais aussi de l'aménagement du territoire, je souhaiterais connaître vos intentions à ce sujet. De manière plus générale, quelles mesures concrètes sont envisagées par le Gouvernement pour garantir aux citoyens l'accès à un service de proximité ? En l'occurrence, s'agissant de la Banque de France, c'est la gestion des dossiers de surendettement dans les villes petites et moyennes qui est en cause. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, j'ai indiqué hier que, si je comprenais l'évolution de la Banque de France à la suite du passage à l'euro, je n'appréciais pas la brutalité de l'annonce qui semblait mettre les élus devant le fait accompli. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean-Claude Lefort. Que dit M. Mer ?
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. J'ai eu ce matin le gouverneur de la Banque de France au téléphone.
    Premièrement, aucune décision n'est prise. Deuxièmement, aucun licenciement ne sera prononcé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Je veillerai personnellement à ce que le nécessaire redéploiement de la Banque de France s'inscrive dans une logique d'égal accès aux service publics.
    Avec Francis Mer, nous allons travailler en vue de mettre en place le contrat de service public, lequel intégrera non seulement les critères, mais aussi les exigences d'aménagement du territoire. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Pierre Ducout. Pour l'instant, c'est le déménagement.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Cela doit se faire en respectant le cadre juridique et en concertation avec les élus locaux.
    M. Michel Vergnier. Très bien.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. La défense du service public n'est pas l'immobilisme. L'éthique du service public n'est pas l'abandon des territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Quelle leçon, monsieur Mer !

MULTIPLICATION DES PLANS SOCIAUX

    M. le président. La parole est à Mme Odile Saugues, pour le groupe socialiste.
    Mme Odile Saugues. Monsieur le Premier ministre, Daewoo, Metaleurop, Pechiney, Atofina, Arcelor, Danone... Face à l'avalanche des plans sociaux, vous avez assuré les salariés, la main sur le coeur, de toute la compassion du Gouvernement. Mais, dans le même temps, vous allez vous faire acclamer par le MEDEF et répondez à toutes ses exigences en suspendant la loi de modernisation sociale qui encadrait les plans sociaux et en supprimant la loi qui contrôlait l'utilisation des fonds publics distribués aux entreprises.
    Un député du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Ce n'est pas sérieux, madame !
    Mme Odile Saugues. Vous ouvrez des brèches et feignez de condamner ceux qui s'y engouffrent. Votre responsabilité est d'autant plus évidente que l'Etat et les entreprises publiques participent activement à ces suppressions massives d'emplois, avec la fin des emplois-jeunes, l'annulation des embauches prévues par la SNCF, ou encore la restructuration drastique de la Banque de France. Oui, aujourd'hui, le plus grand plan social dans notre pays, c'est votre gouvernement qui le met en oeuvre ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    Mais il y a plus grave encore : la violence qui accompagne la présentation des plans sociaux et la fermeture d'entreprises semble être encouragée par le Gouvernement lui-même (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle)...
    M. Richard Mallié. Ce n'est pas possible d'entendre ça !
    Mme Odile Saugues. ... comme en témoignent votre gestion du dossier Air Lib et la partie de poker menteur dont vous avez été les partenaires.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Eh oui !
    Mme Odile Saugues. Parlons donc de ces trois mille deux cents salariés qui, durant des mois, ont été considérés comme des balles de ping-pong et qui, au petit matin du 6 février dernier, ont appris par la radio ou sur leur lieu de travail que le Gouvernement n'avait pas prolongé la licence d'exploitation de la deuxième compagnie aérienne française !
    M. Richard Mallié. Et combien ça coûte aux contribuables ?
    Mme Odile Saugues. Parlons donc de ces centaines de passagers mis devant le fait accompli, alors que certains avaient acheté leur billet le jour même. Parlons donc, monsieur le Premier ministre, de ces entreprises publiques que vous convoquez à la hussarde pour limiter une casse que vous aviez prévue depuis longtemps. Quel cynisme que d'organiser une telle haie d'honneur alors que, dans le même temps, vous privatisez Air France !
    Monsieur le Premier ministre, mes questions sont graves : pourquoi le Gouvernement a-t-il fait le choix d'encourager les plans sociaux ? Pourquoi se fait-il le complice de la violence qui frappe si brutalement les salariés ? (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Que répondez-vous à l'ensemble des organisations syndicales d'Air Lib qui estiment que le Gouvernement a, dans cette affaire, employé des méthodes de voyou et déverse sur les salariés de cette compagnie des larmes de crocodiles et des gaz lacrymogènes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Patrick Lemasle. Nous voulons Raffarin !
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Madame Saugues, taxer le Gouvernement d'indifférence (« C'est la vérité ! » sur les bancs du groupe socialiste) devant les multiples plans sociaux qui se profilent à l'horizon est de votre part indécent et peu honnête. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Richard Mallié. C'est un scandale !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je sens de votre part, madame, alors que ce n'est pas votre nature, une sorte de jubilation devant le malheur des autres ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Huées et claquements de pupitre sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Bernard Roman. C'est honteux !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je voudrais rappeler à Mme Saugues l'ensemble des chances que nous avons données à Air Lib depuis le début. (Mêmes mouvements.)
    M. le président. Mes chers collègues, calmez-vous, s'il vous plaît !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. La première chance, nous l'avons donnée juste après l'alternance, en prorogeant le prêt qui a été accordé par mon prédécesseur. Celui-ci pouvait être interrompu le 9 juillet, mais il a été prolongé, parce que le Gouvernement l'a voulu et parce que le Premier ministre l'a autorisé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    La deuxième chance, c'était en novembre avec l'arrivée d'IMCA. (Mêmes mouvements.)
    M. le président. Laissez M. le ministre s'exprimer !
    M. Bernard Roman. C'est honteux !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Nous avons de nouveau prolongé les prêts jusqu'au 9 janvier 2003.
    La troisième chance, nous l'avons donnée avec le remboursement du passif des charges, qui a été reporté. La quatrième chance a été accordée grâce au prolongement de la licence. La cinquième chance a été donnée par les efforts considérables déployés par les pouvoirs publics pour arriver à un rapport de conciliation dans le cadre du CIRI, grâce à un GIE fiscal et l'étalement des dettes pour le remboursement.
    Quant à la sixième chance, elle a consisté en un nouveau report jusqu'au 5 février pour permettre à IMCA de négocier avec les salariés et avec Airbus.
    Mme Martine David. C'est normal !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Malheureusement, le 6 février, à 4 heures du matin, nous avons appris qu'IMCA, malgré ses dires, refusait de signer.
    Oui, madame Saugues, nous avons vraiment fait tout ce qui était en notre pouvoir pour sauver Air Lib,...
    Mme Martine David. Ce n'est pas vrai !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. ... entreprise atteinte d'une gangrène déficitaire généralisée. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Au nom de la continuité de l'Etat, nous voulons bien assumer votre héritage, mais pas nous faire insulter. Madame Saugues, cherchez l'erreur. (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

BILAN DE L'ACTION
DES GROUPES D'INTERVENTION RÉGIONAUX

    M. le président. La parole est à M. Jean-François Mancel, pour le groupe UMP.
    M. Jean-François Mancel. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité et des libertés locales.
    Les chiffres de la délinquance qui viennent d'être publiés et qui concernent le mois de janvier montrent une diminution significative des crimes et des délits. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) C'est la preuve que la politique très volontariste engagée par le Gouvernement et l'efficacité de l'action du ministre de l'intérieur portent leurs fruits. Monsieur le ministre, soyez-en remercié et félicité par la représentation nationale et par nos compatriotes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    C'est également le fruit d'une mobilisation remarquable des services de police et de gendarmerie pour restaurer la paix publique. C'est le fruit enfin d'une collaboration, d'une coopération nouvelle qui a été mise en place avec d'autres services de l'Etat.
    A ce titre, monsieur le ministre, vous avez, le 22 mai dernier, mis en place ce qu'on appelle les groupes d'intervention régionaux, qui réunissent policiers, gendarmes, magistrats, agents des impôts, agents des douanes, afin de pouvoir lutter plus efficacement contre la délinquance organisée et contre l'économie souterraine. Neuf mois après leur mise en place, êtes-vous en mesure de donner à la représentation nationale un bilan de leur action et les leçons que l'on peut tirer de la mise en oeuvre de ce nouveau type d'action ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, les GIR sont une nouvelle façon d'engager la police et la gendarmerie dans la lutte contre le crime. C'est une façon de combattre un travers, qui ne touche pas seulement le ministère de l'intérieur, mais est, hélas, bien français, celui du cloisonnement de nos administrations, afin de les obliger à travailler ensemble et à être plus efficaces. Désormais police, gendarmerie, douanes, fisc, direction du travail et direction de la répression et des fraudes oeuvrent ensemble.
    M. Richard Mallié. Enfin !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Alors que nous disposons aujourd'hui de vingt-huit GIR, en permanence de deux cent soixante fonctionnaires et militaires, de 1 400 personnes mobilisables, les résultats sont spectaculaires : sur six mois d'activité, il a été procédé à 1 500 gardes à vue et cinq cents mises sous écrou. Des réseaux de drogue ont été démantelés. Deux cent cinquante voitures volées ont été récupérées...
    Mme Martine Billard. Elles ont donc été volées !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Partout, dans les quartiers, l'économie souterraine est combattue. Il ne s'agit que d'un premier bilan. Nous allons donner aux GIR d'autres moyens. C'est l'objet de la loi sur la sécurité intérieure qui sera votée définitivement dans quelques jours (« Ce n'est pas sûr ! sur les bancs du groupe socialiste)... et qui permettra la levée du secret fiscal entre les fonctionnaires du fisc et les agents ou les militaires de la gendarmerie, et l'élargissement des compétences des gendarmes et des policiers, afin qu'ils ne soient plus en butte à des obstacles administratifs. L'expérience des GIR sera donc poursuivie car elle est un succès. Leur action compte, monsieur le député, pour beaucoup dans les résultats assez spectaculaires de la diminution de la délinquance en janvier. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

ACTIONS EN FAVEUR
DU MONDE DE LA CHASSE

    M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Léonard, pour le groupe UMP.
    M. Jean-Louis Léonard. Madame la ministre de l'écologie et du développement durable, vous avez participé ce matin à un débat sur la chasse, exercice difficile qui l'a été encore plus à cause de votre extinction de voix. Nous vous remercions.
    Mais un débat ne satisfait pas le monde de la chasse. Ce monde, indissociable du monde rural, attend beaucoup plus et notamment des décisions cohérentes entre elles, respectueuses des traditions, durables et qui, pour certaines d'entre elles, ne pourront être remises à l'année prochaine.
    C'est au monde de la chasse, madame la ministre, vous le savez bien, que l'on doit aujourd'hui une grande partie de l'entretien des zones humides et des réserves naturelles propices à la nidification. Il a également largement participé à la fois à l'entretien et à la restauration de nos forêts après la tempête de 1999. C'est à lui encore que l'on doit la régulation des nuisibles et des espèces à fort développement, comme le sanglier, qui, sans les chasseurs, causeraient d'énormes dégâts à l'agriculture et coûteraient très cher à l'Etat.
    Or, madame la ministre, ce monde n'en peut plus de se voir montré du doigt,...
    M. Jean Glavany. C'est du populisme !
    M. Jean-Louis Léonard. ... et d'être l'objet de décisions incohérentes de la part des préfets ou du Conseil d'Etat, sous la pression d'associations dont, tout le monde le sait, la seule action en faveur de la nature tient dans un discours irresponsable. Les récents arrêtés du Conseil d'Etat concernant les oies et la bécasse en sont un exemple consternant : ils ne profitent finalement qu'au braconnage.
    Les responsables des fédérations eux-mêmes ont subi des mesures vexatoires et des contrôles tatillons, les présentant souvent aux yeux des Français, chasseurs ou non, comme des gens potentiellement malhonnêtes, alors qu'il s'agit en fait de bénévoles souvent très compétents.
    Le monde de la chasse français, madame la ministre, n'en peut plus de se voir traité de manière discriminatoire par rapport aux Belges, aux Anglais, aux Espagnols ou aux Italiens au nom d'une même directive européenne et du fait de l'interprétation d'un seul conseiller d'Etat.
    M. le président. Pourriez-vous poser votre question, monsieur Léonard ?
    M. Jean-Louis Léonard. Mais le pire, madame la ministre, c'est que ces décisions du Conseil d'Etat vous sont imputées par une population qui a élu des députés, mais pas des juges, pour mener une politique différente de celle qu'elle a rejetée l'année dernière.
    Madame la ministre, forte de ce débat et de vos convictions, pourriez-vous nous donner les grandes lignes de votre action pour redonner espoir à ceux qui maintiennent la tradition la plus ancienne de notre pays et qui sont, rappelons-le, plus de 1 500 000 dans notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député, le débat sur la chasse ce matin, voulu par le groupe de l'UMP et son président Jacques Barrot, a été très fructueux. Il m'aura permis de présenter devant la représentation nationale le calendrier et le contenu des mesures que j'ai préparées.
    Un travail législatif extrêmement important nous attend : d'abord plusieurs mesures d'urgence portées par la loi d'habilitation et qui concerneront le statut des fédérations, le jour de non-chasse, le guichet unique, le fichier national des permis, la définition des heures légales de chasse, l'adaptation du statut des associations communales de chasse agréées.
    M. Philippe Briand. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Viendra ensuite le projet de loi sur les affaires rurales, qui nous permettra d'organiser les pratiques de chasse, et enfin le projet de loi sur le patrimoine naturel.
    Toutes ces mesures législatives seront accompagnées de mesures réglementaires fortes qui porteront sur la pratique de la chasse, la gestion des populations et l'organisation de la police de la chasse, en particulier la modernisation de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage.
    Je vais mettre en place, dans les jours à venir, l'Observatoire de la faune sauvage et de ses habitats. Nous entamons le travail sur l'Office national de la chasse. Je suis en contact constant avec les autorités européennes pour nous sortir de l'imbroglio juridique que nous vivons tous les jours.
    Oui, mesdames, messieurs les députés, grâce au travail que nous allons faire ensemble, nous allons établir une chasse vivante, démocratique, populaire et durable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

POLLUTION DU LITTORAL ATLANTIQUE

    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau, pour le groupe socialiste.
    M. Jean-Pierre Dufau. Monsieur le Premier ministre, la pollution de notre littoral atlantique s'avère un désastre écologique et une catastrophe économique dont le Gouvernement n'a pas pris la pleine mesure. (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Face à une pollution massive, la montée en charge du plan POLMAR a été trop lente, hésitante. Même aujourd'hui, elle n'atteint pas encore l'efficacité escomptée bien que les acteurs de terrain s'investissent au maximum.
    M. Richard Mallié. Après l'Erika, vous osez venir nous donner des leçons ! C'est la meilleure !
    M. Jean-Pierre Dufau. Les dernières informations du CEDRE sont inquiétantes. Avec l'approche des marées de fort coefficient, de nouveaux déferlements de pollution sont à craindre.
    Le temps n'est plus à la communication ou aux coups de pied rageurs dans une boulette de mazout. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Le temps est à l'action, le temps est à la dépollution massive du littoral, à l'indemnisation des victimes, à la restauration de l'image touristique de la région. Monsieur le Premier ministre, nous attendons de votre gouvernement des moyens humains et matériels de dépollution qui soient à la hauteur du drame vécu sur le terrain.
    M. Philippe Briand. Et que faisait donc Voynet ?
    M. Jean-Pierre Dufau. Nous attendons des aides substantielles de l'Etat pour équiper en matériels mécaniques les communes qui auront à nettoyer quotidiennement leurs plages pendant de longs mois et au-delà du plan POLMAR.
    M. Philippe Briand. Mais où est Voynet ?
    M. Jean-Pierre Dufau. Nous réclamons une campagne nationale de grande ampleur afin de restaurer l'image touristique de l'Aquitaine auprès de la clientèle étrangère comme de nos compatriotes.
    M. Philippe Briand. Rendez-nous Voynet !
    M. le président. Monsieur Briand, je vous en prie !
    M. Jean-Pierre Dufau. L'enjeu est de sauver la prochaine saison touristique. Nous serons également vigilants quant à l'indemnisation des professionnels de la mer et du tourisme ainsi que des collectivités locales.
    Or le refus de votre majorité, tant à Bruxelles qu'à Paris, de permettre à une commission d'enquête d'interroger l'Etat espagnol sur sa gestion désastreuse du naufrage du Prestige nous laisse pour le moins perplexes.
    Ma question est double : votre Gouvernement s'engage-t-il à mobiliser les crédits et les moyens dont le littoral atlantique a dans l'immédiat cruellement besoin ? Votre Gouvernement s'engage-t-il à indemniser dans les meilleurs délais tous ceux, collectivités et particuliers, qui n'auront pas été pris en charge par le FIPOL ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député, le Gouvernement s'est entièrement mobilisé face à ce que vous avez raison d'appeler une catastrophe écologique. Sur les 50 millions d'euros prévus par M. le Premier ministre, 27 millions d'euros ont d'ores et déjà été mis à disposition pour faire face aux dépenses. Un décret d'avance pour dépenses accidentelles portant sur 13 millions de crédits a été signé hier même par M. le ministre délégué au budget.
    Bien entendu, il y a de quoi être pessimiste. Mais nous avons aussi des raisons d'être optimistes.
    D'abord, parce que l'épave du Prestige a pu être colmatée grâce au savoir-faire technologique d'une entreprise française, l'IFREMER. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Dès lors, nous pouvons attendre tranquillement l'ouverture de l'appel d'offres des sociétés off-shore pour le colmatage définitif.
    Ensuite, parce que 40 000 tonnes de fioul ont pu être récupérées dans le golfe de Gascogne grâce à la solidarité entre les marins espagnols et les marins français. Des centaines de bateaux pilotés par la frégate Germinal poursuivent le ramassage pour empêcher le fioul d'arriver sur nos côtes.
    Enfin, parce que les moyens humains et matériels sont en place : 955 personnes encore hier soir, dont 355 sur les côtes de votre département des Landes. On compte une machine opérationnelle tous les deux kilomètres sur les plages des Landes.
    M. Jean-Pierre Dufau et M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas vrai !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Tout cela montre, monsieur le député, et vous le savez, que nous avons mis en place suffisamment de moyens. Reste maintenant à réhabiliter l'image de notre littoral. Or ce n'est pas avec la méthode que vous employez ni avec des questions de ce style que vous y parviendrez. C'est bien par l'action que nous menons au Gouvernement, tous ensemble, avec les élus. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Henri Emmanuelli. Il n'y a vraiment pas de quoi nous tranquilliser !

SOUTIEN À LA DYNAMIQUE DES ENTREPRISES

    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Cousin, pour le groupe UMP.
    M. Jean-Yves Cousin. Ma question s'adresse à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    Notre pays est traversé par une série de plans sociaux douloureux. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Ils rient et ils applaudissent en même temps !
    M. Jean-Yves Cousin. Oui, il n'y a vraiment pas de quoi se réjouir...
    Depuis déjà un certain temps, nous assistons, c'est vrai, à des restructurations de certaines entreprises. La ville de Vire, dont je suis l'élu, a connu il y a dix-huit mois la fermeture de Valeo. Le groupe Guy Degrenne a dû se séparer de quelques personnels. Un événement de ce genre est toujours douloureux. Ce groupe n'en mène pas moins une politique offensive...
    M. Maxime Gremetz. Et de profits !
    M. Jean-Yves Cousin. ... en vue de consolider ses positions sur le terrain. C'est précisément sur ce sujet que je voudrais revenir.
    Cette volonté offensive m'amène, monsieur le ministre, à évoquer les nombreuses entreprises qui, en France, se créent, se développent et attendent des pouvoirs publics des aides pour mener à bien leurs projets de développement. Ces entrepreneurs attendent des réponses. Notre responsabilité est grande. L'implication de l'Etat, sans être totale, doit être forte et volontariste.
    Dans ces conditions, monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour accompagner au mieux nos entreprises et les aider à créer de l'emploi, et pour conforter l'attractivité de nos territoires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, vous avez raison d'indiquer que nos territoires vivent au même rythme que les entreprises, avec des épisodes douloureux lorsque survient une disparition et des moments plus favorables lorsqu'elles se développent.
    Je puis vous assurer que nous nous battons pour soutenir la dynamique des entrepreneurs. Pas plus tard que la semaine dernière, nous avons attribué une prime d'aménagement du territoire à vingt-sept entreprises qui se sont engagées à créer 2 388 emplois et à réaliser 1,2 milliard d'euros d'investissements. Pour toute l'année 2002, le bilan s'établit à 12 500 emplois et 1,5 milliard d'euros d'investissements.
    Pour ce qui concerne plus particulièrement votre ville de Vire, nous avons accordé à la société Tekal une prime qui lui permettra d'embaucher 100 salariés. Toute notre énergie est consacrée à développer l'attractivité des territoires et à soutenir celles et ceux qui contribuent à leur développement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

PRÉSERVATION DE LA DIVERSITÉ CULTURELLE

    M. le président. La parole est à M. Bernard Depierre, pour le groupe UMP.
    M. Bernard Depierre. Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et de la communication.
    Alors que va s'ouvrir prochainement une négociation particulièrement importante sur la libéralisation des services dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce, nous devons faire preuve de la plus grande vigilance pour garantir le principe de diversité culturelle. Pascal Lamy, commissaire européen chargé de la politique commerciale de la Communauté européenne, s'est du reste vu confier par les Quinze un mandat clair de négociation à l'OMC, qui précise que l'Union entend garantir la possibilité, pour la Communauté et ses Etats membres, de maintenir et développer leur politique pour la préservation de leur diversité culturelle.
    Récemment, à l'occasion des deuxièmes rencontres internationales des professionnels de la culture, le Président de la République a rappelé la nécessité d'une mondialisation maîtrisée dans le domaine de la culture et de la création, activités irréductibles aux lois du marché. Ainsi Jacques Chirac a proposé que la communauté internationale adopte avant 2005 une convention mondiale sur la diversité culturelle, préparée par l'UNESCO. Le chef de l'Etat a également appelé de ses voeux une Europe de la culture. Alors que se déroule la convention sur l'avenir de l'Europe, il devient d'autant plus nécessaire de réfléchir, au sein même de l'Union européenne, au renforcement de ce principe de diversité culturelle. C'est dans ce cadre que la France vient de déposer une contribution sur la place de la culture dans le futur traité.
    Monsieur le ministre, pourriez-vous indiquer à la représentation nationale les grandes lignes de cette contribution française et, de façon plus générale, apaiser nos inquiétudes quant à la pérennité de la diversité culturelle ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.
    M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, la France est, vous le savez, vigilante et active, tant au sein de l'Union européenne qu'au sein de l'organisation mondiale du commerce. Les dernières semaines en ont donné des marques éclatantes.
    Chacun aura en effet noté la fermeté du propos que le Président de la République a tenus devant les professionnels réunis au Palais de l'Elysée à l'occasion des rencontres internationales. Chacun aura également remarqué la fermeté de l'interprétation donnée par la commissaire Lamy du mandat de négociation qui lui a été confié dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce. Chacun aura enfin relevé la fermeté du communiqué que le ministre des affaires étrangères, le ministre du commerce extérieur et le ministre de la culture et de la communication ont consacré hier à la place de la culture dans le futur traité de l'Union.
    De mon côté, j'ai pris, vous le savez, plusieurs initiatives importantes. La semaine dernière, j'ai réuni à Paris une quinzaine de ministres dans le cadre du réseau international pour les politiques culturelles. Hier encore, à Berlin, j'ai rencontré mon homologue, la ministre de la culture allemande, Mme Weiss. A l'issue de notre entretien, nous avons diffusé un communiqué qui marquait une totale convergente de points de vue entre l'Allemagne et la France sur les questions de la diversité culturelle.
    Que voulons-nous ? Premièrement, comme le demande notre contribution aux travaux de la convention sur l'avenir de l'Europe, que la diversité culturelle soit inscrite parmi les objectifs de l'Union. Deuxièmement, que la spécificité culturelle soit prise en compte dans les politiques voisines, notamment les politiques commerciales et fiscales, et que, sur ces questions notamment, la règle de la majorité qualifiée soit refusée pour toutes les décisions relatives au commerce international. C'est la seule façon de protéger nos indutries culturelles. Troisièmement, l'ensemble des ministres réunis au sein du réseau international des politiques culturelles ont fait une démarche conjointe auprès du directeur général de l'UNESCO pour lui demander que son organisation prenne en charge l'élaboration d'un instrument contraignant, lequel sera présenté au mois d'avril prochain au conseil exécutif de l'UNESCO et soumis au mois d'octobre à la délibération de la conférence générale.
    Nous espérons ainsi marquer de façon éclatante la place que la France entend prendre dans le combat pour la diversité culturelle.
    M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de Mme Paulette Guinchard-Kunstler.)

PRÉSIDENCE
DE Mme PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER,
vice-présidente

    Mme la présidente. La séance est reprise.

2

INITIATIVE ÉCONOMIQUE

Explications de vote et vote
sur l'ensemble d'un projet de loi

    Mme la présidente. L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi pour l'initiative économique.
    La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
    M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, le texte que nous avons examiné, article par article, la semaine dernière est un texte d'action résolue en faveur de l'emploi. A l'heure où nos concitoyens s'inquiètent des plans sociaux, à l'heure où la mondialisation et les très grandes entreprises montrent l'organisation économique du monde sous un jour parfois sombre, il est essentiel de rappeler que notre économie est avant tout une économie de petites et moyennes entreprises, d'artisans, de commerçants, qui, à eux tous, représentent plus de la moitié des salariés français, plus de 90 % des entreprises françaises. C'est pour ces entreprises enracinées dans les territoires, enracinées dans notre économie, entreprises à taille humaine où les relations sociales sont avant tout des relations de proximité, que ce texte a été bâti.
    Je voudrais remercier tout particulièrement la commission spéciale, son président, Hervé Novelli, les rapporteurs, Catherine Vautrin et Gilles Carrez, ainsi que les députés de tous les groupes, bien entendu les députés du groupe UMP qui, par leur très fort investissement sur ce texte, par les nombreux amendements qu'ils ont présentés, ont enrichi le projet, mais également les députés du groupe UDF, qui n'ont pas manqué d'initiatives pour l'améliorer encore, et les députés de l'opposition, qui, patiemment, pendant l'examen de tout le texte, ont manifesté à la fois leur conviction et leurs propositions. Je crois que le débat a été constructif.
    Ce projet de loi vise à créer davantage d'entreprises, à en développer davantage, à en permettre la transmission dans de bonnes conditions. Il a été sensiblement amélioré et il est arrivé aujourd'hui à un stade de maturité. Il répond, je crois, aux exigences de nos concitoyens.
    C'est un texte pour l'emploi, un texte qui répond aux besoins de la France de créer davantage de croissance. Nous pouvons avoir un point de croissance supplémentaire. Nous pouvons être la locomotive de l'Europe. Il est évident que les solutions du passé ne seront pas celles de demain. Des emplois publics financés par l'impôt, un rationnement de l'offre, comme cela a été le cas avec la loi sur les 35 heures, de telles solutions ne sont plus faites pour la France. Il faut aujourd'hui créer de la richesse. C'est l'objectif du texte. Je vous remercie de l'intérêt que vous lui avez apporté, des amendements très nombreux qui l'ont complété, sans dénaturer son équilibre, sans modifier l'essentiel de ses dispositions. L'Assemblée nationale peut aujourd'hui se prononcer sur un texte complet, audacieux,...
    M. Jean Glavany. Audacieux vraiment ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. ... ambitieux, fait pour créer de l'emploi, de la richesse et de la croissance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission spéciale.
    M. Hervé Novelli, présidente de la commission spéciale. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, dans quelques instants, nous allons voter sur le projet de loi sur l'initiative économique. Nous allons émettre ce vote au terme d'un débat important, d'abord en commission spéciale, que j'ai eu l'honneur de présider, puis en séance publique.
    J'avais, lors de la discussion générale, indiqué combien ce texte semblait opportun, en effet, à un moment où la croissance économique internationale devient plus qu'incertaine. Il faut nous doter en France d'un accélérateur de croissance interne, l'entrepreneur et le créateur d'entreprise.
    Ce texte est un bon texte car il répond à nombre de problèmes posés à la petite et moyenne entreprise ou à l'entreprise individuelle.
    Simplifier la création d'entreprise, protéger le patrimoine de l'entrepreneur, faciliter le passage entre le statut de salarié et celui d'entrepreneur, financer l'entreprise, améliorer la transmission, tels sont les objectifs poursuivis.
    Je voudrais, pour ma part, tirer les conclusions de nos discussions à l'Assemblée nationale en me livrant à quelques constats.
    Le premier constat, c'est l'intérêt montré par l'Assemblée à l'entrepreneur et à l'entreprise, comme en témoignent les 240 amendements déposés en commission spéciale et le nombre d'interventions en séance publique.
    Le deuxième constat, c'est l'ouverture du Gouvernement et je vous en remercie personnellement, monsieur le secrétaire d'Etat. Par votre ouverture d'esprit, par votre sens de la conciliation, vous avez, je crois, donné à l'Assemblée nationale l'opportunité de jouer tout son rôle pour amender et ainsi tenter d'améliorer votre projet. Près de quatre-vingts amendements adoptés tant en commission spéciale qu'en séance : c'est un record depuis le début de cette législature, et c'est grâce à vous. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Je voudrais maintenant me tourner vers les deux rapporteurs, Catherine Vautrin et Gilles Carrez, pour souligner combien leur action, suivie par la majorité de cette assemblée, a été positive pour l'ensemble de ce texte et c'est mon troisième constat.
    Sur la partie économique et sociale, Catherine Vautrin a fait adopter par notre assemblée une série de mesures de simplification très importantes pour l'avenir. Il s'agit de l'institution du guichet social unique, du chèque emploi-salarié et de la forfaitisation des charges sociales pour les micro-entreprises dans un premier temps. Ces ajouts démontrent la volonté de la majorité de cette assemblée d'aller à l'essentiel de ce qui constitue l'une des difficultés majeures des chefs d'entreprise.
    Gilles Carrez a fait, quant à lui, adopter des amendements qui n'ont d'autre objet que de développer la petite entreprise et donc l'emploi en luttant contre certains effets pervers liés à la fiscalité du patrimoine et à l'ISF. Drainer les flux d'épargne ou divers autres flux financiers vers l'entreprise en création ou en développement, telle a été la ligne de conduite, tant du Gouvernement que de la majorité, UMP bien sûr, mais aussi UDF de cette assemblée, et je tiens à remercier nos collègues de l'UDF pour leur réflexion et leur apport constructif.
    Pour conclure, ce texte contient un ensemble de dispositions qui vont, nous en sommes convaincus, développer la création d'entreprises et la croissance des PME, donc l'emploi dans tous nos territoires, mais il est à l'évidence beaucoup plus que cela.
    M. Michel Vergnier. Oh oui !
    M. Hervé Novelli, président de la commission spéciale. C'est un acte de foi dans l'entrepreneur et c'est une réponse claire aux difficultés économiques que connaît notre pays. C'est la raison pour laquelle je souhaite bien évidemment, avec mes collègues rapporteurs et la majorité de la commission spéciale, qu'il soit adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

Explications de vote

    Mme la présidente. Dans les explications de vote, la parole est à M. Michel Vergnier, pour le groupe socialiste.
    M. Michel Vergnier. Monsieur le secrétaire d'Etat, où est la grande loi d'orientation pour l'artisanat et les petites entreprises réclamée à cor et à cri par l'opposition de l'ancienne législature ?
    Votre projet de loi « Agir pour l'initiative économique » est décevant et indécent. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Votre texte est décevant ! Il est fortement en retrait par rapport au projet de loi relatif au développement des petites entreprises et de l'artisanat proposé il y a un an par François Patriat au nom du gouvernement de Lionel Jospin, texte que vous auriez pu reprendre et éventuellement améliorer.
    Nous pensions que telle était votre intention mais, au lieu de poursuivre l'examen de ce texte, vous avez préféré, c'est votre droit, présenter le vôtre. En en découvrant le contenu, nous avons vite compris qu'il n'y avait aucune comparaison possible entre nos deux démarches, nos deux politiques. (« Ça, c'est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Au contraire, les artisans et les très petites entreprises sont les grands oubliés de votre texte ! (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) D'ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, pour vous en convaincre, regardez le communiqué de ce matin de l'UPA, qui se déclare déçue par un projet de loi qui masque les complexités administratives sans les résoudre, et ne facilite pas l'accès au crédit pour les petites entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Il a raison !
    M. Jean Glavany. Tout pour les gros !
    M. Michel Vergnier. Alors que le texte de François Patriat se caractérisait par la prise en compte des besoins respectifs des PME et des artisans, votre projet de loi ne traite que de la liberté d'entreprendre, et repose sur une conception de l'attractivité réduite à la seule question fiscale. (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Les moyens d'assurer la pérennité et le développement réel des entreprises sont totalement ignorés par ce texte : formation, soutien aux entrepreneurs et aux salariés, statut respectif, aménagement du territoire, économie sociale et solidaire. Tout au long des débats, nous avons appelé votre attention sur ces sujets et vous êtes restés sourds !
    M. Jean Glavany. Il a raison !
    M. Michel Vergnier. Décevant, incomplet, ce projet de loi est devenu indécent !
    Il multiplie les mesures d'exonération dont la justification économique est parfaitement contestable. La majorité applique notamment l'un de ses principes favoris : mutualisation des pertes, privatisation des profits.
    Alors que les licenciements se multiplient, la majorité prétend favoriser l'emploi par la remise en cause de l'impôt de solidarité sur la fortune.
    M. Jean Glavany. Toujours plus pour les plus riches !
    M. Michel Vergnier. Ce texte, d'essence libérale, est uniquement constitué de cadeaux fiscaux, dont le financement n'est pas assuré,...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Comme pour l'APA !
    M. Michel Vergnier. ... et sert de prétexte à une réforme inadmissible de l'ISF.
    Réforme non assumée dans un premier temps, puisque le Gouvernement a manoeuvré dans l'ombre, préférant laisser ses parlementaires poser les premières balises de cette réforme dans le projet de loi par voie d'amendements.
    M. Jean-Claude Lefort. Des balises de détresse !
    M. Michel Vergnier. S'il s'agit réellement d'une mesure en faveur de l'emploi, on comprend mal la discrétion du Gouvernement à ce sujet !
    Réforme finalement revendiquée par ce même gouvernement, sorti du bois en présentant lui-même, à la dernière minute et à la surprise générale, un amendement assouplissant encore plus les conditions d'exonération d'ISF, à la surprise générale, puisque le rapporteur du projet de loi a lui-même indiqué que le projet du Gouvernement allait encore plus loin que celui de la commission qui souhaitait une maîtrise de la dépense fiscale.
    La majorité s'est manifestement laissé déborder, de façon plus ou moins complaisante, par sa branche la plus libérale. Ce mouvement est allé si loin que, même dans vos propres rangs, des protestations, ou plutôt des velléités de protestations se sont fait entendre ! Et pour cause ! Il y a aujourd'hui une forme de cynisme à proposer de telles exonérations !
    Le Gouvernement dit vouloir combattre l'argent qui dort et favoriser l'argent qui travaille. Si tel était le cas, il aurait cherché à réorienter effectivement l'épargne des Français vers des emplois productifs. Au contraire, il a refusé tous les amendements du groupe socialiste et de la gauche visant à favoriser l'utilisation de l'épargne populaire pour l'investissement. Pour vous, il vaut mieux être gros et riche que petit et peu fortuné. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Non seulement cette réforme de l'ISF est loin d'être favorable à l'emploi, contrairement à ce que vous ne cessez de prétendre pour faire passer la pilule, mais elle n'est sans doute que la partie émergée de l'iceberg. Elle est un premier pas vers la remise en cause, voire la suppression totale d'un impôt pourtant indispensable à la justice fiscale.
    Nous ne pouvons que craindre les nouveaux amendements sur l'ISF que le Sénat ne manquera sans doute pas de proposer...
    Mme la présidente. Veuillez conclure, s'il vous plaît !
    M. Michel Vergnier. ... sans même attendre les prochaines lois de finances auxquelles les rapporteurs du projet de loi ont tout renvoyé.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, nous combattrons ces décisions inacceptables avec acharnement. C'est pourquoi le groupe socialiste votera contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe UDF.
    M. Charles de Courson. Dans la discussion générale, le groupe UDF avait porté sur votre projet de loi, monsieur le secrétaire d'Etat, l'appréciation suivante : bien, mais peut mieux faire. A l'issue de la discussion très ouverte au sein de la commission spéciale puis dans notre hémicycle, nous considérons, avec François Sauvadet et Rodolphe Thomas, que le texte est bien amélioré et le groupe UDF votera pour. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Notre groupe tient à vous remercier, ainsi que le président de la commission spéciale et nos deux rapporteurs, pour votre ouverture et votre sens du dialogue. C'est tout simplement respecter les droits du Parlement, mais c'est suffisamment rare pour être aujourd'hui souligné.
    Encourager, simplifier la création et la transmission d'entreprises, les accompagner, tout cela correspond à de véritables attentes et nous nous réjouissons que ce texte y réponde.
    Le salarié pourra désormais bénéficier durant un an d'un temps partiel pour lui permettre de créer son entreprise. Le groupe UDF a soutenu cette initiative, mais avec un petit bémol. Nous avions déposé un amendement étendant l'application de cette mesure aux fonctionnaires et agents publics, et nous déplorons qu'il n'ait pas été adopté en séance alors qu'il avait été voté à l'unanimité en commission, car il s'agit d'une mesure qui va dans le sens de l'équité entre le secteur privé et le secteur public.
    Les fonds d'investissement de proximité permettront de financer des projets économiques locaux. C'est une mesure importante. Le groupe UDF avait insisté pour prendre en compte le financement des entreprises individuelles. Nous regrettons que le FIP ne leur soit pas ouvert, comme nous l'avions proposé, et qu'il n'y ait pas eu d'avancées pour faciliter les prêts aux entreprises individuelles. Mais nous vous faisons confiance, monsieur le secrétaire d'Etat. Vous vous êtes engagé devant la représentation nationale à améliorer les PCE avant la présentation du texte au Sénat pour ne pas oublier les entreprises individuelles. En effet, rendre éligibles les FIP au fonds de garantie est une amélioration mais pas suffisante.
    Le texte simplifie les démarches administratives pour la création d'entreprises et apporte de véritables avancées en matière de protection de l'entrepreneur, qui voit sa résidence principale insaisissable. Sur ce sujet, nous avions émis l'idée, comme d'ailleurs M. Raffarin, dans une excellente proposition de loi, à l'époque où il était sénateur, de créer un patrimoine d'affectation, ce qui allait plus loin pour sécuriser ceux qui veulent créer leurs entreprises individuelles.
    Vous avez également appuyé l'amendement du groupe UDF sur la protection du conjoint de l'entrepreneur pour limiter les conséquences sur le couple marié sous le régime de la communauté en cas d'échec de la création d'entreprise.
    Nous avons eu de longues, très longues discussions sur l'ISF et nous avons soutenu les trois aménagements qui favorisent l'emploi. Nous prenons acte de l'engagement des représentants de l'UMP de voter avec le groupe UDF la suppression du déplafonnement de l'ISF voté en 1996 et le retour au plafonnement Bérégovoy-Rocard, dans la prochaine loi de finances. Nous regrettons que les députés du groupe socialiste aient voté une nouvelle fois jeudi soir contre l'amendement du groupe UDF qui prévoyait le retour au texte qu'ils avaient voté sous deux gouvernements socialistes (Exclamations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), ce qui montre la montée du niveau de démagogie qui, au parti socialiste, il est vrai, augmente d'autant plus qu'on se rapproche du congrès ! (Applaudissements sur les mêmes bancs).

    Ce texte pour l'initiative économique répond, comme son nom l'indique, à un véritable besoin de relancer la création d'entreprises et la création d'emplois.
    Le groupe UDF vous a soutenu, monsieur le secrétaire d'Etat, et a amendé ce texte. Il le votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. Avant de donner la parole aux deux derniers orateurs inscrits pour les explications de vote, je vais, d'ores et déjà, faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Daniel Paul, pour le groupe des député-e-s communistes et apparentés.
    M. Daniel Paul. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les députés communistes et républicains ont démontré, tout au long de l'examen de ce projet de loi sur l'initiative économique, que leur position n'était pas dogmatique. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Charles Cova. C'était pour rire ?
    M. Daniel Paul. Nous sommes convaincus qu'il convient de renforcer le dispositif en faveur des PME et de l'artisanat, sources d'emplois et créateurs de lien social, car l'espérance de vie de ces structures est souvent très faible. Mais nous avons rapidement pris la mesure que là n'était pas votre souci principal à travers ce texte.
    En fait, derrières vos déclarations d'intention généreuses relevant du simple bon sens - qui ne souscrirait à l'objectif de favoriser le développement de la petite entreprise, de faciliter les transmissions d'entreprises, d'améliorer leur environnement, de simplifier leur création et de simplifier également la transition entre le statut de salarié et celui d'entrepreneur ? -, ce texte, « enrichi » par les députés les plus libéraux de la majorité, n'a été qu'un prétexte pour prendre des dispositions dangereuses touchant au droit du travail, à la financiarisation de ce secteur et amorçant le début de la fin de l'ISF. On a déjà assisté sur ces sujets à des surenchères au sein de la majorité, et tout fait craindre qu'on n'en soit qu'au début !
    Vous avez refusé tout débat et même tout examen de nos amendements, qui visaient à écarter les risques d'essaimage organisé pour contourner le code du travail, ou à différencier l'activité des PME indépendantes des grands groupes. Vous avez refusé également nos propositions qui tendaient à favoriser l'implication des banques dans l'acte de création.
    Vous voulez, dites-vous, libérer les initiatives, mais, de fait, vous livrez les TPE, les commerçants, les artisans, les PME, les PMI au jeu dangereux et souvent mortel de la finance. Même si vous refusez cette réalité, la frilosité du réseau bancaire oblige les créateurs d'entreprise à assumer seuls leur prise de risque. Les banquiers restent réticents et difficiles à convaincre quand il s'agit de soutenir les initiatives économiques de leurs clients. Cette attitude freine considérablement l'émergence de projets économiques, d'où nos propositions. Mais vous les avez écartées du revers de main.
    Au point que l'on se demande si le seul objet de ce texte n'est pas d'adresser un signe - un de plus - aux grandes fortunes, à vos amis du MEDEF (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle, et du groupe Union pour la démocratie française) qui co-gouvernent aujourd'hui notre pays avec vous. Je pense, bien évidemment, aux amendements que vous avez fait adopter pour alléger l'impôt de solidarité sur la fortune, au moment où notre pays croule sous une avalanche de plans sociaux.
    M. Alain Néri. C'est une loi scélérate !
    M. Daniel Paul. A travers ce texte, vos talents de communication ont du mal à convaincre. Vous éprouvez de la compassion pour les salariés licenciés, mais vous réservez votre générosité aux plus riches ! (« Très juste ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    Au reste, votre argumentaire n'est pas sans contradictions. Vous prétextez que la réduction de l'ISF favorise l'emploi dans la mesure où il allège l'environnement fiscal des entreprises. Or l'amendement qui exonère de l'ISF la participation au capital de sociétés implantées dans l'Union européenne aboutira dans les faits à favoriser les investissements hors du cadre national.
    En fait, le projet libéral du Gouvernement repose sur un calendrier minutieusement préparé et idéologiquement réfléchi.
    M. Lucien Degauchy. Vous êtes un archaïque !
    M. Daniel Paul. Vous poursuivez, texte après texte, votre objectif de formatage et de remodelage de notre société aux besoins des banques, du MEDEF et de la frange la plus aisée de notre pays.
    Ce texte est, de ce point de vue, en cohérence avec d'autres mesures que vous avez déjà prises ou que vous comptez prendre. Je pense à la réduction d'impôt sur le revenu, à la mise à mal des éléments structurants de la loi de modernisation sociale ou encore à vos objectifs de démantèlement progressif des services publics nationaux et à votre volonté d'étendre la mainmise des capitaux privés sur nos entreprises publiques. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. Ecoutez l'orateur ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

    M. Daniel Paul. Notre groupe s'oppose donc radicalement à ce projet libéral et votera contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Brunel, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    Mme Chantal Brunel. Madame le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le groupe de l'UMP votera avec conviction le texte sur l'initiative économique pour deux raisons : d'une part, c'est un texte social (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) et, d'autre part, c'est un texte en faveur de l'emploi.
    M. Daniel Paul. C'est un texte pour les patrons !
    Mme Chantal Brunel. Il s'agit d'un texte social, car il permettra à certains de créer leur propre emploi et à d'autres de créer leur entreprise, tout en restant salariés pendant un an, ce qui limitera les risques et multipliera les chances de succès.
    M. Alain Néri. Ça sonne faux !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous manquez de conviction !
    Mme la présidente. Mes chers collègues, cessez ce brouhaha, c'est très désagréable.
    Poursuivez, madame Brunel.
    Mme Chantal Brunel. L'ensemble des mesures de simplification administrative facilitera la création des entreprises et permettra à celui qui crée son entreprise de se consacrer à sa propre activité.
    Par ailleurs, nous saluons la décision de créer un guichet social unique et un chèque emploi-salarié, conformément au voeu de la commission spéciale et en particulier de ses rapporteurs, Mme Vautrin et M. Carrez.
    M. Augustin Bonrepaux. Parlez-nous de la suppression de l'ISF, des emplois supprimés !
    Mme la présidente. Monsieur Bonrepaux, calmez-vous.
    Mme Chantal Brunel. L'ensemble des aides financières accordées aux salariés créateurs d'entreprise est positif. Ces aides ont pour but de favoriser l'essaimage ou l'externalisation de certaines activités. Cela répond au souhait de beaucoup de travailler en réseau, à la prise de conscience que les clients des entreprises ont aujourd'hui besoin d'une écoute de plus en plus grande.
    M. Alain Néri. Parlez-nous des salariés ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. Monsieur Néri ! Continuez, madame Brunel !
    Mme Chantal Brunel. Je vais vous en parler, monsieur Néri ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Philippe Briand. Il n'a rien compris !
    Mme Chantal Brunel. Dans certains secteurs, les clients ont besoin de produits spécifiques ; or ces besoins ne peuvent être satisfaits que par des petites entreprises adossées à des plus grandes seules à même de faire du sur-mesure et être réactives.
    Oui, il s'agit d'un texte de promotion sociale. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Comment mieux répondre à l'évidente nécessité de brassage social que de dire à ceux qui ont du courage, des idées et de la volonté : « Vous n'avez pas besoin de diplôme ni de fortune personnelle ni de relations pour réaliser votre rêve, c'est-à-dire être votre propre patron et développer sans limite votre entreprise » ? (Exclamations sur les mêmes bancs.)
    La plupart des créateurs d'entreprise du siècle dernier sont partis de rien ou presque (« Non ! » sur les mêmes bancs), mais ils avaient une idée novatrice.
    M. Albert Facon. Seillière, il est parti de rien ?
    M. Daniel Paul. Il est parti avec papa !
    M. Jean-Claude Lefort. Non, avec Air Lib ! (Sourires.)
    Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous demande d'écouter Mme Brunel en silence ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Poursuivez, madame Brunel.
    Mme Chantal Brunel. Oui, je le répète, la plupart des grands créateurs d'entreprise du siècle dernier sont partis de rien ou presque, mais ils avaient une idée novatrice, de l'intuition, la rage au ventre, du charisme et ils ont bénéficié d'un peu de chance. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Elles sont nombreuses les grandes entreprises d'aujourd'hui à avoir été toutes petites il y a quelques années ! (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.) Nous voulons que les créateurs de demain, les petites entreprises d'aujourd'hui deviennent les grandes entreprises du xxie siècle ! (Mêmes mouvements.)
    M. Albert Facon. Elle est pire que Francis Mer !
    Mme Chantal Brunel. Ils sont nombreux les patrons sans diplôme. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Ils sont nombreux les blessés de la vie qui ont trouvé dans la création, le développement et la prospérité de leur entreprise la revanche sur un début de vie qui les a malmenés ! (Exclamations sur les mêmes bancs.)
    Ils sont nombreux les jeunes issus de l'immigration qui ont créé avec succès une entreprise. (Mêmes mouvements.)
    Oui, monsieur le secrétaire d'Etat, nous sommes heureux que ce texte favorise la promotion sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Par ailleurs, nous estimons extrêmement positives les mesures fiscales en faveur du financement des entreprises et de leur transmission.
    M. Jacques Desallangre. Ça, c'est sûr !
    Mme Chantal Brunel. Trop de nos entreprises sont parties à l'étranger, trop d'entreprises françaises appartiennent désormais à des retraités américains ou à des retraités suisses ou d'autres pays. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Albert Facon. Quelle découverte !
    Mme Chantal Brunel. Il est urgent de se les réapproprier en incitant fiscalement l'épargne des Français à s'investir dans les entreprises. Oui, nous devons nous réapproprier nos entreprises !
    M. Alain Néri. C'est la voix du baron Seillière !
    M. Albert Facon. La voix de son maître !
    Mme Chantal Brunel. Toutefois, monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi de formuler une demande. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Mme la présidente. Ecoutez en silence, mes chers collègues.
    Mme Chantal Brunel. Il faut enfin regrouper, simplifier et élaguer les différentes aides aux entreprises. Le sujet est tellement complexe que des cabinets spécialisés existent pour défricher ce maquis. Plus l'entreprise est petite et moins le chef d'entreprise a les moyens de se consacrer à de telles tâches. Le système est injuste et coûte très cher aux finances publiques. De surcroît, chacun connaît ici de nombreux cas douloureux où des entreprises qui avaient promis des créations d'emplois pour toucher des aides n'ont finalement pas respecté leurs engagements sociaux et laissé froidement tomber les salariés. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Des dispositifs de contrôle efficaces et des sanctions doivent donc être mis en place. Plus les dispositifs seront clairs et cohérents, et moins le contrôle sera complexe et coûteux.
    Vous trouverez, monsieur le secrétaire d'Etat, les parlementaires de l'UMP toujours actifs aux côtés du Gouvernement...
    M. Alain Néri. Et du MEDEF ! (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Mme Chantal Brunel. ... lorsqu'il s'agira en particulier d'aider les petites entreprises, qui sont les principales sources de création d'emplois.
    Je souhaite terminer (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) en m'adressant aux futurs créateurs d'entreprise, qui, j'en suis sûre, grâce à ce texte, seront plus nombreux demain. A une journaliste qui demandait à un grand champion américain de hockey ce qui faisait sa force, celui-ci a répondu :...
    M. Albert Facon. Le palet !
    Mme Chantal Brunel. ... « C'est parce que je vais là où le palet va être et non pas là où il est. » C'est ce que je conseille aux futurs créateurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Vote sur l'ensemble

    Mme la présidente. Je vais mettre aux voix l'ensemble du projet de loi.
    Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    Mme la présidente. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   544
Nombre de suffrages exprimés   538
Majorité absolue   270
Pour l'adoption   371
Contre   167

    L'Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements sur les bancs des groupes de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures quinze.)
    Mme la présidente. La séance est reprise.

3

OPPOSITION À UNE DEMANDE
DE DISCUSSION
SELON LA PROCÉDURE D'EXAMEN SIMPLIFIÉE

    Mme la présidente. J'informe l'Assemblée que M. le président du groupe des député-e-s communistes et républicains a fait opposition à la discussion selon la procédure d'examen simplifiée :
    - du projet, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention entre la République française, le Royaume d'Espagne et la Principauté d'Andorre relative à l'entrée, à la circulation, au séjour et à l'établissement de leurs ressortissants (n° 268) ;
    - du projet, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention entre la République française, le Royaume d'Espagne et la Principauté d'Andorre relative à la circulation et au séjour en Principauté d'Andorre des ressortissants des Etats tiers (n° 267) ;
    - et du projet, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention de la sécurité sociale entre la République française et la Principauté d'Andorre, signée à Andorre-la-Vieille le 12 décembre 2000 (n° 270).
    En conséquence, l'examen de ces projets de loi, inscrits à l'ordre du jour du jeudi 13 février 2003, ne donnera pas lieu à l'application de cette procédure.

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ÉLECTIONS RÉGIONALES ET EUROPÉENNES

Discussion, après déclaration d'urgence,
d'un projet de loi

    Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques (n°s 574, 605).

Rappels au règlement

    Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Brunhes, pour un rappel au règlement.
    M. Jacques Brunhes. Mon rappel au règlement, madame la présidente, s'appuie sur l'article 48 de notre règlement.
    Le texte qui nous est soumis est, chacun l'a constaté, une des textes les plus importants de la Ve République en matière de réforme électorale. C'est si vrai que le Premier ministre et le ministre de l'intérieur ont consulté, chacun de son côté, l'ensemble des formations politiques - j'ai ainsi eu l'honneur d'être reçu par M. le ministre de l'intérieur avec Mme Buffet, M. Hue, avec Mme Borvo, présidente du groupe communiste au Sénat. En réalité, je devrais plutôt parler de « pseudo-consultation » parce que, monsieur le ministre, vous avez voulu endormir l'opinion avec une consultation à peu près aussi authentique que les « villages Potemkine » (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), vous savez, ces villages que Potemkine créait de toutes pièces pour donner à voir à Catherine II une Russie développée alors que régnait une grande misère.
    M. Richard Cazenave. C'est un spécialiste du stalinisme qui parle !
    M. Jacques Brunhes. Après cette consultation destinée à vous donner un vernis démocratique, donc vous pratiquez une guerre éclair, un Blitzkrieg législative.
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Pas de langue étrangère, s'il vous plaît !
    M. Jacques Brunhes. L'examen en commission a été bâclé et hâtif.
    Par ailleurs, monsieur le ministre, je veux souligner, après l'avoir indiqué en commission à notre président, qu'il est assez rare que, sur un texte de cette importance, il n'y ait aucune audition de ministre. Quand les textes sont très importants, il arrive même que le Premier ministre se déplace en commission. En tout état de cause, il est d'usage que le ministre concerné vienne défendre son texte. Or vous n'êtes pas venu.
    M. Christian Estrosi et M. Richard Cazenave. Ce n'est pas un texte important.
    M. Jacques Brunhes. Ces conditions de travail sont, madame la présidente, tout à fait inacceptables pour l'Assemblée, je dirai même indignes. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Bruno Le Roux. Il a raison !
    M. Jacques Brunhes. Un homme politique célèbre qui siégeait ici avait l'habitude de dire : « n'humiliez pas le Parlement ».
    M. Pierre Lequiller. On n'est pas prêt de vous citer, vous !
    M. Jacques Brunhes. Nous devons réfléchir à la manière de réagir à ces atteintes pernicieuses au travail parlementaire. C'est la raison pour laquelle je demande, madame la présidente, une suspension de séance. Et comme une délégation de notre groupe est en ce moment reçue à l'ambassade des Etats-Unis sur les problèmes de l'Irak, je demande une suspension de séance d'une heure et demie. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Charles Cova. Rigolo !
    Mme la présidente. Monsieur Brunhes, avant de vous accorder une suspension de séance de quinze minutes, je vais donner la parole à M. le président de la commission des lois, de la législation et de l'administration générale de la République.
    Vous avez la parole, monsieur le président de la commission.
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Madame la présidente, je vous promets quant à moi de ne pas parler pendant une heure et demie.
    Je voudrais répondre à M. Brunhes car, en l'occurrence, la commission des lois a vraiment tenu à faire les choses le plus sérieusement du monde...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Oh ! la la !
    M. Pascal Clément, président de la commission. ... et je voudrais en donner quelques exemples.
    Monsieur Brunhes, vous vous référez à l'article 40 de notre règlement, qui dispose que chaque commission est maîtresse de son organisation. Mais alors, votre argument tombe puisque chaque commission fait ce qu'elle veut. Votre rappel à la règle est annulé par le règlement même sur lequel vous vous appuyez.
    J'en viens au fond. Sur un certain nombre de projets de loi, le ministre concerné peut être invité par le président de la commission saisie. J'avoue que l'idée ne m'en est même pas venue pour la bonne raison que, pour le projet précédent, présenté par la précédente majorité, le ministre de l'intérieur n'était pas venu devant la commission et que, la fois d'avant, il n'était pas venu non plus. Bref, il n'y avait pas de précédent à invoquer pour faire venir le ministre. C'est pourquoi, je le répète, l'idée ne m'en est pas venue...
    M. Michel Françaix. Nous le regrettons !
    M. Pascal Clément, président de la commission. En second lieu, la commission a examiné les amendements qui étaient alors déposés : il y en avait soixante-trois et nous en avons retenu trente-deux. Le travail a donc été fait. Mais je le constate, entre le moment où la commission s'est réunie et maintenant, le nombre des amendements est passé de soixante-trois à un peu plus de 12 000, soit un écart très important !
    M. Bernard Derosier. Vous comptez bien !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Ce matin, nous nous sommes réunis en commission dans le cadre de l'article 88 du règlement. Nous avions le choix entre deux manières de procéder. La première aurait consisté à traiter globalement les 12 000 amendements que nous devions examiner et qui représentaient tout de même sept ou huit paquets d'une épaisseur manifeste. Nous aurions ainsi pu faire un sort commun à tous ces amendements et tendre un piège à l'opposition.
    M. Bernard Derosier. Chiche !
    M. Bruno Le Roux. Mais ce n'est pas votre genre !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Je m'explique : si nous ne les avions pas examinés sous le prétexte, qui était fondé, que c'était matériellement impossible, le Gouvernement aurait alors pu, se fondant sur l'article 44, alinéa 2, de la Constitution, faire valoir que, ces amendements n'ayant pas été examinés par la commission, ils ne seraient pas examinés en séance publique. D'un seul coup, ces 12 000 amendements auraient été « annulés ».
    Je n'ai pas choisi cette technique. Grâce au travail de nos administrateurs,...
    M. Bernard Derosier. Et de nos administratrices !
    M. Pascal Clément, président de la commission. ... que je voudrais saluer, nous avons, avec le rapporteur, classé l'ensemble des amendements par groupes politiques, d'une part, et par thèmes, d'autre part. Le classement thématique me permettra de donner un certain nombre d'exemples à l'Assemblée, afin de l'informer sur ce qui l'attend.
    Prenons les amendements n°s 2072 à 2215, soit un amendement par membre du groupe socialiste.
    M. Bernard Roman. Nous pouvons nous expliquer !
    M. Pascal Clément, président de la commission. L'un de ces amendements prévoit que « les bulletins de vote sont établis en anglais », un autre qu'ils « sont établis en danois ». (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mesdames, messieurs, vous ne pouvez vous plaindre d'entendre parler de vos propres amendements ! Ne me faites pas penser un quart de seconde que vous pourriez en avoir honte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Je poursuis ma lecture : « Les bulletins de vote sont établis en italien. »
    M. Bernard Roman. Nous allons en parler !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Viennent ensuite quelque cent cinquante amendements qui prévoient que ces bulletins sont établis en espagnol, en bulgare, en grec, en polonais, en estonien, en néerlandais, en hongrois, en portugais et en finnois.
    M. Yves Fromion. Quelle image de la démocratie !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Une autre centaine d'amendements concerne la fête de la laïcité, d'autres l'apprentissage des langues européennes, et ainsi de suite ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    La commission n'a pas porté le moindre jugement sur le caractère soit d'obstruction, soit carrément étonnant des sujets abordés par ces amendements.
    M. Michel Françaix. Cela aurait été inélégant !
    M. Charles Cova. Ces amendements sont ridicules !
    M. Richard Mallié. Et grotesques !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Mais, à la demande de l'un d'entre vous, M. Le Roux, le rapporteur a expliqué, pour chaque paquet de plusieurs centaines d'amendements, quelle en était la thématique.
    M. Bruno Le Roux. C'est un très bon rapporteur !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Nous avons fait voter la commission sur les paquets d'amendements, ce qui a permis au groupe socialiste d'émettre un vote favorable à l'ensemble de ses 8 500 amendements - excusez du peu !
    M. Bernard Derosier. Vous ne perdez jamais une occasion de dévaloriser notre travail !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Oui, c'est vrai, j'ai toujours tendance à minorer votre mérite.
    Ensuite, nous avons isolé les amendements du groupe UDF. Ceux qui ont voulu les voter les ont votés, mais ils ont été en fin de compte rejetés.
    Enfin, s'agissant du groupe communiste, le président de la commission des lois s'est fait son porte-parole. On ne peut pas faire mieux ! J'ai en effet moi-même défendu par principe les amendements déposés par ce groupe.
    M. Maurice Leroy. Bravo !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Ces amendements ont ensuite été repoussés par la commission. J'aurais pu ne pas le faire mais, en l'absence de tout membre du groupe communiste, j'ai tenu à agir ainsi.
    On peut dire tout ce qu'on veut, mais affirmer que la commission n'a pas fait preuve d'une grande précision ni d'un grand dévouement à la cause législative est tout à fait exagéré. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Madame la présidente, je vous laisse juge, après ce récit circonstancié, de ce qui s'est passé en commission : devons-nous suspendre nos travaux ou faut-il rendre hommage à la commission des lois et à son rapporteur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. La suspension est de droit.
    Je suis saisie de deux demandes de rappel au règlement par M. Bayrou et M. Dosière, concernant les travaux en commission. Je propose à M. Brunhes que nous écoutions nos collègues avant que la séance ne soit suspendue. (M. Jacques Brunhes fait un signe d'assentiment.)
    La parole est à M. François Bayrou.
    M. François Bayrou. Madame la présidente, en réalité, je voudrais répondre à la commission.
    M. Bernard Accoyer. Sur quel article du règlement vous fondez-vous ?
    M. Francis Vercamer. Sur l'article 48 !
    M. François Bayrou. Nous allons vivre des jours...
    M. Bernard Accoyer. Ce n'est pas un rappel au règlement !
    Mme la présidente. Est-ce un rappel au règlement, monsieur Bayrou ?
    M. François Bayrou. Je me fonde sur l'article quarante-huit !
    M. Augustin Bonrepaux. C'est évident !
    Mme la présidente. Le propos concerne donc les travaux des commissions.
    Veuillez poursuivre, cher collègue.
    M. François Bayrou. Nous allons vivre des jours de débat, disons « chaud », et des heures qui ne seront agréables pour aucun d'entre nous.
    Je voudrais, madame la présidente, attirer votre attention et celle des membres de cette assemblée sur l'indécence qu'il y a à présenter au Parlement, sous le signe de l'urgence, un texte de modification et de tripatouillage des lois électorales. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), alors que notre pays et la planète tout entière sont en train de vivre des événements d'une gravité telle qu'elle devrait au moins faire taire tous ces bancs. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Richard Mallié. C'est nul !
    M. Philippe de Villiers. M. Bayrou a raison !
    M. François Bayrou. Car il s'agit de la paix et de la guerre, de l'effondrement de l'Europe, des décisions extrêmement lourdes que doit prendre le Président de la République ainsi que, pour nombre de nos compatriotes, des plans sociaux, des retraites et d'une crise économique dont chacun mesure la portée. (« Très juste ! » sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Bernard Roman. Que le Gouvernement retire son texte !
    M. François Bayrou. Le parti gouvernemental a décidé qu'on se servirait de cette actualité si grave et si blessante pour faire passer en catimini une réforme dont les Français ne veulent pas.
    M. Bernard Accoyer. Où est le rappel au règlement ?
    M. Bernard Roman. Il arrive !
    M. Bernard Derosier. Ils veulent museler même l'UDF !
    M. François Bayrou. Ses membres espèrent en effet que, préoccupés par cette actualité si grave qu'ils ont à affronter, les Français ne s'apercevront pas du tort qu'on est en train de faire à chacun d'eux comme citoyen en leur ôtant le droit d'être représentés même de manière minoritaire dans les assemblées régionales.
    M. Bruno Le Roux. Très juste !
    M. François Bayrou. Telle est la réalité du débat que nous allons avoir !
    M. Jean-Jacques Descamps. Ce n'est pas un rappel au règlement !
    M. François Bayrou. Et, en effet, le rôle que nous avons l'intention d'assumer consiste à donner aux Français le temps nécessaire pour qu'ils se rendent compte du tort que, individuellement, citoyen par citoyen, on est en train de leur faire.
    M. Patrick Ollier. Cela n'a rien à voir avec un rappel au règlement !
    M. Richard Mallié. Mais de quoi parle-t-il ?
    M. François Bayrou. Voilà ce que nous allons vivre pendant les jours qui viennent.
    M'adressant à M. le ministre de l'intérieur,...
    M. Richard Mallié. Un rappel au règlement ne peut être adressé au ministre !
    M. François Bayrou. ... je dirai qu'il y aurait un moyen très simple de trouver un accord dans la minute pour que cette affaire des élections régionales soit réglée...
    M. Bernard Roman. En retirant le texte !
    M. François Bayrou. Il suffirait de déposer sur le bureau de l'Assemblée le texte que le ministre de l'intérieur a rédigé lui-même et qu'il a discuté avec chacun des représentants de chacun des partis politiques présents dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    M. Philippe de Villiers. Très bien !
    M. François Bayrou. Ce texte a été présenté au Conseil d'Etat pour que celui-ci puisse donner son avis.
    M. Maurice Leroy. C'est vrai !
    M. François Bayrou. Il n'y a pas d'exemple que le Gouvernement ait réécrit un texte entre le moment où le Conseil d'Etat donne son avis et sa présentation au conseil des ministres sans demande expresse du Conseil.
    M. Maurice Leroy. C'est vrai !
    M. François Bayrou. Une telle situation est sans précédent ! Pourquoi ce texte a-t-il été réécrit ?
    Mme Chantal Brunel. Ce n'est pas un rappel au règlement !
    M. François Bayrou. Il a été réécrit parce que les dirigeants du parti majoritaire ont claqué des doigts en imposant un oukase au Premier ministre pour qu'il veuille bien se plier à leurs impératifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Philippe de Villiers. M. Bayrou a raison !
    M. Bernard Roman. Il n'y a rien à ajouter !
    M. Christian Paul. Telle est la vérité !
    M. François Bayrou. Voilà la raison pour laquelle nous sommes là ! Voilà la raison pour laquelle des amendements ont été présentés à la commission.
    En réponse à M. Clément, je dirai qu'il a été fort bien inspiré de ne pas écarter par un artifice de procédure les amendements de l'opposition parce que le droit d'amendement est un droit constitutionnel...
    M. Maurice Leroy. Eh oui !
    M. François Bayrou. ... et que le Conseil constitutionnel n'aurait pas manqué de censurer une telle attitude. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    Mme la présidente. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. J'y renonce, madame la présidente.
    Mme la présidente. Je vais donc suspendre la séance pour une quinzaine de minutes.

Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq.)
    Mme la présidente. La séance est reprise.

Rappel au règlement

    M. Jean-Marc Ayrault. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour un rappel au règlement.
    M. Jean-Marc Ayrault. Madame la présidente, j'ai été choqué (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle)...
    M. Yves Fromion. Ce n'est pas possible !
    M. Jean-Marc Ayrault. ... par certaines déclarations faites dans la journée par les porte-parole de l'UMP,...
    M. Guy Geoffroy. En quoi est-ce un rappel au règlement ?
    M. Jean-Marc Ayrault. ... selon lesquels le travail parlementaire accompli par les membres de mon groupe, les autres députés de l'opposition et même le groupe UDF, n'était rien d'autre que de l'obstruction. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Non !
    M. Guy Geoffroy. Ça l'est !
    M. Charles Cova. ... Ou ça y ressemble !
    M. Richard Mallié. C'est grotesque !
    M. Jean-Marc Ayrault. Je trouve cette déclaration inacceptable et je tiens à la dénoncer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Il est en revanche profondément choquant que le Gouvernement et l'UMP, au moment où les Français - il en a encore été question au cours des questions au Gouvernement - sont particulièrement préoccupés par la remontée du chômage, la multiplication des plans sociaux...
    M. Richard Mallié. Vous nous faites perdre notre temps !
    M. Jean-Marc Ayrault. ... et la gravité de la situation internationale, n'aient rien trouvé d'autre à faire...
    M. Alain Gest. Que de lire 12 000 amendements !
    M. Jean-Marc Ayrault. ... que d'organiser ce matin un débat sans vote sur la chasse.
    M. Yves Fromion. Vous n'aimez pas la chasse ?
    M. Jean-Marc Ayrault. Non contents de cette matinée entière consacrée à la chasse, ils ont demandé à la conférence des présidents que le débat soit prolongé cette semaine, diminuant d'autant le temps consacré à l'examen du projet de loi sur les élections, et voilà qu'ils se plaignent de l'obstruction que nous organiserions !
    C'est profondément choquant et scandaleux ; cela pose des questions de fond et de principe.
    M. René Dosière. Tout à fait !
    M. Guy Geoffroy. Il n'y croit pas lui-même !
    M. Jean-Marc Ayrault. Au nom de mon groupe, j'ai demandé au président de l'Assemblée nationale de réunir à nouveau la conférence des présidents pour que l'Assemblée nationale ne se réunisse pas samedi. Pourquoi ? Pour permettre à tous les députés qui le souhaitent - je sais qu'ils sont nombreux, sur les bancs de la gauche, et heureusement au-delà - d'aller manifester contre la guerre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Bernard Roman. Cela nous éloignera des magouilles de la majorité !
    M. Jean-Marc Ayrault. L'opération de camouflage que vous essayez d'entreprendre est malvenue. Vous voulez imposer aux institutions nationales et locales un modèle unique pour faire passer toute la politique antisociale que vous avez commencé à mener.
    Mme Nadine Morano. Oh ! Quel scandale !
    M. Jean-Marc Ayrault. L'opinion ne doit pas être trompée. Si nous avons déposé autant d'amendements, ce n'est pas pour faire de l'obstruction systématique (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) mais pour attirer l'attention de l'opinion publique sur la gravité de vos intentions politiques.
    Je demande donc une suspension de séance afin de réunir mon groupe, madame la présidente. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Richard Mallié. C'est grotesque !
    Mme la présidente. Combien de temps voulez-vous réunir votre groupe, monsieur Ayrault ?
    M. Jean-Marc Ayrault. Je demande une demi-heure de suspension de séance.
    Mme la présidente. Je vous accorde dix minutes.

Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-huit heures, est reprise à dix-huit heures dix.)
    Mme la présidente. La séance est reprise.

Rappels au règlement

    M. Maurice Leroy. Madame la présidente, je demande la parole pour un rappel au règlement.
    Mme la présidente. Fondé sur quel article, monsieur Leroy ?
    M. Maurice Leroy. Sur l'article 58 de notre règlement, madame la présidente !
    Mme la présidente. Vous avez la parole ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Patrick Ollier. Ce n'est pas sérieux !
    M. Maurice Leroy. Je voudrais dire tout d'abord que, sur chacun des trente-quatre articles du projet de loi qui nous est soumis, le groupe Union pour la démocratie française a déposé une trentaine d'amendements seulement, ce qui est courant. S'agissant d'un texte aussi important, qui touche à la démocratie et à l'expression du pluralisme, nous n'avons donc pas abusé du droit d'amendement.
    Je voudrais aussi rappeler ici un principe constitutionnel de fond figurant à l'article 4 de notre Constitution : « Les partis et groupements politiques concourent à l'expression du suffrage. »
    M. Patrick Ollier. Il ne s'agit pas du règlement !
    M. Maurice Leroy. Les groupes parlementaires ne sont pas les seuls concernés. Il est en effet des sensibilités politiques, des courants de pensée qui ont obtenu des suffrages aux élections présidentielle, régionales et législatives, et qui ne sont pas dans notre hémicycle.
    Mme la présidente. Venez-en au règlement, s'il vous plaît, monsieur Leroy !
    M. Maurice Leroy. J'y viens immédiatement ! Vous allez voir pourquoi, madame la présidente, mais j'attends que M. le président de la commission des lois rejoigne son banc, car ma question s'adresse à lui.
    Mme la présidente. Monsieur Leroy, c'est un rappel au règlement et je vous demande de vous y tenir ! Vous ne pouvez pas interroger le président de la commission des lois dans le cadre d'un rappel au règlement ! (Protestations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Maurice Leroy. Madame la présidente, je vous assure que si vous me laissiez prononcer deux phrases d'affilée vous verriez qu'il s'agit bien d'un rappel au règlement. Merci de votre compréhension !
    Monsieur le président de la commission des lois, s'agissant d'une réforme aussi importante, je souhaiterais savoir, au nom du groupe Union pour la démocratie française, si la commission des lois a eu connaissance de l'avis du Conseil d'Etat sur ce texte, bien que cela ne soit pas obligatoire. Je souhaite que tous les groupes politiques puissent avoir connaissance de cet avis...
    M. Bernard Roman. C'est essentiel !
    M. Maurice Leroy. ... qui est d'autant plus important que le Conseil d'Etat l'a rendu sur un texte qui n'est pas celui dont nous allons discuter, ce qui est absolument extravagant ! C'est du jamais vu dans cet hémicycle depuis 1958 !
    M. Manuel Valls. Tout à fait !
    M. Maurice Leroy. Je souhaite que le président de la commission des lois réponde à cette question importante avant de commencer notre discussion. Si tel n'était pas le cas, je demanderais, au nom de mon groupe, une suspension de séance d'une demi-heure...
    M. Patrick Ollier. Ce n'est pas sérieux !
    M. Maurice Leroy. ... - je dis bien d'une demi-heure, car moins ce ne serait pas sérieux ! - pour que les commissaires puissent être informés de cet avis. Ce serait la moindre des choses que nous disposions de ce texte si important ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française, du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jacques-Alain Bénisti. On se moque de notre assemblée !
    Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Je voudrais, avec votre permission, madame la présidente, répondre à Maurice Leroy en commençant par déplorer le fait qu'il n'ait pas la joie, l'honneur et l'avantage de faire partie de la commission des lois.
    M. Maurice Leroy. Je suis à la commission des finances !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Nul n'est parfait !
    M. Maurice Leroy. Je reconnais mes imperfections !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Vous avez raison ! Moi, je les reconnais concernant les finances ! Si vous étiez à la commission des lois, vous sauriez que l'avis du Conseil d'Etat, prévu par la Constitution lorsque le Gouvernement dépose un projet, est donné au seul Gouvernement.
    M. Bernard Roman. Malheureusement !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Il peut arriver que le Gouvernement le transmette à l'Assemblée, mais, pour répondre à votre première question, non, le Gouvernement n'a pas transmis l'avis auquel vous faites allusion à la commission des lois. (« Oh ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Alain Néri. C'est scandaleux !
    M. Pascal Clément, président de la commission. L'ai-je demandé ? La réponse est encore non ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Alain Néri. Nul n'est parfait !
    M. Pascal Clément, président de la commission. J'ai en effet considéré que l'avis de la commission des lois valait bien celui du Conseil d'Etat ! Que l'on nous pardonne de donner notre avis ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Je vois que le président Ayrault se met en colère de façon théâtrale, mais l'avis du Conseil d'Etat n'est pas obligatoire. Cela dit, je salue au passage son talent d'acteur ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    La seconde question posée par M. Leroy mérite d'être traitée.
    M. Maurice Leroy. Merci !
    M. Pascal Clément, président de la commission. C'est la question de la constitutionnalité d'un projet qui ne serait pas examiné par le Conseil d'Etat. Je vais lui répondre. Le projet a-t-il été, oui ou non, soumis au Conseil d'Etat ? La réponse est oui.
    M. Bernard Roman. Eh oui !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Le Conseil d'Etat se prononce sur l'ensemble d'un texte,...
    M. Maurice Leroy. Ce n'était pas le bon !
    M. Pascal Clément, président de la commission. ... mais il n'est pas interdit au Gouvernement, à la suite de l'avis rendu, de changer à l'intérieur du projet ce qui lui semble devoir l'être ou ce qui lui semble conforme à son projet politique, et c'est précisément ce qui s'est passé.
    M. Patrick Lemasle et M. Alain Néri. Vous ne le savez pas !
    M. Pascal Clément, président de la commission. On fera de la politique plus tard ! Pour l'instant, nous faisons du droit !
    M. Maurice Leroy. Merci de le reconnaître !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Je rends hommage à l'acuité de la seconde question de Maurice Leroy. En l'espèce, après avoir changé tel ou tel seuil, puisque c'est de cela qu'il s'agit, le Gouvernement n'était pas tenu d'interroger encore une fois le Conseil d'Etat. Il n'y a donc là rien d'inconstitutionnel ! Cela arrive extrêmement fréquemment. Le Conseil d'Etat a été consulté. Le Gouvernement a pris les décisions qu'il lui appartenait de prendre et la commission des lois a travaillé à partir de ce texte. Voilà la réponse !
    M. Alain Néri. Non, vous n'avez pas répondu !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Il n'y a donc pas lieu de réunir la commission pour examiner l'avis du Conseil d'Etat puisque, je le répète, il n'est pas de droit que nous en soyons destinataires et puisque rien ne s'oppose à ce que nous commencions nos travaux, même si nous n'en avons pas eu connaissance. Voilà la réponse technique que je souhaitais faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. Monsieur Leroy, je vous propose que nous abordions maintenant le fond du débat en écoutant M. le ministre de l'intérieur. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Union pour la démocratie française et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Maurice Leroy. Non !
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Pas question !
    M. Jean-Marc Ayrault. Madame la présidente, rappel au règlement !
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour un rappel au règlement. (« Scandaleux ! » et vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Marc Ayrault. Je ne veux pas empêcher mon collègue Leroy d'obtenir sa suspension de séance - il ne doit pas y avoir de malentendu -,...
    M. Patrick Ollier. C'est scandaleux !
    Mme la présidente. C'est moi qui préside, monsieur Ollier ! C'est assez compliqué d'ailleurs !
    M. Patrick Ollier. C'est incroyable de laisser faire cela !
    M. Jean-Marc Ayrault. ... mais je souhaiterais compléter sa question. En effet, M. Clément a parlé au nom de la commission des lois. Il ne pouvait le faire au nom du Gouvernement.
    M. Patrick Ollier. C'est incroyable cette présidence !
    Mme la présidente. Monsieur Ollier, s'il vous plaît !
    M. Patrick Ollier. Nous voulons une présidence impartiale !
    M. Jean-Marc Ayrault. Je demande donc à M. le ministre de l'intérieur de nous communiquer l'avis du Conseil d'Etat, comme il en a le pouvoir, pour éclairer le débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Maurice Leroy. (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Patrick Ollier. C'est un véritable détournement de procédure ! On n'a jamais vu ça !
    Mme la présidente. Monsieur Ollier, s'il vous plaît ! C'est moi qui préside !
    M. Maurice Leroy. Madame la présidente, j'ai demandé une suspension de séance au nom du groupe UDF et, à moins que le règlement de l'Assemblée nationale ait été modifié au cours des cinq dernières minutes,...
    M. Guy Geoffroy. Vous ne respectez pas le règlement !
    Plusieurs députés du groupe socialiste. La suspension est de droit !
    M. Maurice Leroy. ... cette suspension est de droit. Va-t-on enfin respecter le règlement dans cet hémicycle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. Je vais suspendre la séance pour cinq minutes. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-huit heures vingt, est reprise à dix-huit heures vingt-cinq.)
    Mme la présidente. La séance est reprise.

Rappel au règlement

    M. Alain Bocquet. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Alain Bocquet, pour un rappel au règlement.
    M. Alain Bocquet. Le texte qui nous est soumis aura des conséquences suffisamment graves pour la démocratie et le pluralisme pour que nous l'abordions avec sérieux. La représentation nationale doit être complètement informée. C'est la raison pour laquelle je partage le sentiment de mes collègues : nous devons impérativement disposer de l'avis émis par le Conseil d'Etat sur le premier texte que le Gouvernement lui a soumis mais qui a été subrepticement remplacé par le présent projet. Or ce dernier a été élaboré par le chef d'un parti politique qui veut s'ériger en parti unique.
    M. Bruno Le Roux. Il n'est pas là, d'ailleurs !
    M. Alain Bocquet. Il faut également que nous puissions avoir connaissance du premier texte. Le sujet est très sérieux : c'est l'avenir de la démocratie et de la représentation issue du suffrage universel qui est en jeu. C'est la raison pour laquelle je demande une suspension de séance pour permettre au Gouvernement de nous fournir les éléments que nous réclamons. (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Patrick Ollier. Ce n'est pas sérieux !
    Mme la présidente. La suspension de séance est de droit. Vous devez le savoir, monsieur Ollier, puisque, à une époque, vous avez vous aussi présidé cette assemblée.
    La séance est suspendue pour cinq minutes.
    M. Alain Bocquet. Cinq minutes, c'est insuffisant pour aller jusqu'à la place Beauveau et en revenir. Je demande une demi-heure, madame la présidente. (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.)
    Mme la présidente. Une suspension de séance de cinq minutes me paraît plus correcte dans la mesure où c'est la deuxième que demande le groupe communiste.

Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à dix-huit heures trente-cinq.)
    Mme la présidente. La séance est reprise.

Rappel au règlement

    M. René Dosière. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    Mme la présidente. La parole est à M. René Dosière, pour un rappel au règlement.
    M. René Dosière. Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 91, alinéa 2.
    J'appelle l'attention de l'Assemblée sur le rapport de M. Bignon et plus particulièrement sur son annexe 7 qui constitue l'application à une circonscription, pour les élections européennes, du nouveau mode de scrutin prévu par le projet de loi. Je salue d'ailleurs la commission d'avoir donné un exemple de la nouvelle répartition des sièges.
    Le problème...
    M. Bernard Roman. Et il est grave !
    M. René Dosière. ... c'est que cette illustration concerne la première version de l'article 14 dans le texte tel qu'il a été soumis au conseil des ministres.
    M. Maurice Leroy. Eh oui !
    M. René Dosière. Or le rapporteur a fait adopter en commission un nouvel article 14 qui modifie, et de manière substantielle, la répartition des sièges.
    M. Bernard Roman. Eh oui !
    M. René Dosière. Et, répondant à la question d'un commissaire, il a expliqué que ce texte avait été négocié avec le ministère de l'intérieur. Bref, c'est le ministère de l'intérieur qui a rédigé cette deuxième version, que le rapporteur a bien voulu présenter.
    M. Patrick Olier. Ce n'est pas un rappel au règlement !
    M. René Dosière. Nous ne disposons cependant d'aucune simulation sur les conséquences de cette seconde version.
    M. Patrick Ollier. Entrons dans le débat et vous les connaîtrez !
    M. René Dosière. Madame la présidente, cette façon de travailler est détestable. Du fait de la précipitation, l'Assemblée nationale se trouve faussement informée...
    M. Bernard Roman. C'est grave !
    M. René Dosière. ... sur un sujet pourtant compliqué. Or le Conseil constitutionnel considère que la loi doit être intelligible et claire, a fortiori pour ceux qui la fabriquent.
    M. Bernard Roman. Eh oui !
    M. René Dosière. Madame la présidente, je vous demande donc un délai pour permettre à la commission des lois de pouvoir se réunir.
    M. Patrick Ollier. Présentez une motion de renvoi en commission !
    M. René Dosière. Le rapporteur pourra ainsi nous fournir une simulation...
    M. Bernard Roman. Exacte...
    M. René Dosière. ... des conséquences de l'amendement qu'il a fait voter par la commission d'autant qu'il nous a indiqué que ces simulations existaient au ministère de l'intérieur. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Ce serait également l'occasion de demander l'avis du Conseil d'Etat qui n'a pas été sollicité.
    M. Jacques-Alain Bénisti. Ce n'est pas un rappel au règlement !
    M. René Dosière. Une suspension de séance permettrait à la commission des lois de se réunir et au ministre de l'intérieur de lui fournir les simulations qui montreront de façon claire et intelligible quelle est la signification de ce texte.
    M. Patrick Ollier. Tout cela commence à bien faire, madame la présidente !
    M. René Dosière. Madame la présidente, je demande donc une suspension de séance...
    Plusieurs députés socialistes. D'une heure !
    M. Bernard Roman. Madame la présidente, il faut nous laisser le temps de travailler en commission !
    M. René Dosière. Je vous laisse le soin d'en fixer la durée, mais il faut que la commission ait le temps de travailler et le ministre de l'intérieur celui de nous communiquer ses simulations. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. Monsieur le député, je n'ai pas le pouvoir de réunir la commission et vous n'avez pas celui de demander une suspension de séance.
    M. Jean-Marc Ayrault. Mais si !
    Mme la présidente. J'ai fait vérifier, monsieur Ayrault : M. Dosière ne dispose pas d'une délégation. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Patrick Ollier. Madame la présidente, passons à la discussion du texte !
    Mme la présidente. Monsieur Ollier, c'est moi qui préside !
    M. Patrick Ollier. Je ne peux pas supporter ce qui se passe !
    Mme la présidente. Le plus simple est de donner rapidement la parole à M. Ayrault. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) M. le ministre interviendra ensuite. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.
    M. Jean-Marc Ayrault. Madame la présidente, aux termes de l'article 58, alinéa 3, du règlement, le président d'un groupe ou le député qui a reçu délégation de sa part peuvent demander une suspension de séance.
    Mme la présidente. Je n'ai pas reçu de délégation.
    M. Jean-Marc Ayrault. Puisque ce document ne vous a pas été transmis, je vous demande cette suspension de séance, en ma qualité de président de groupe, pour les mêmes raisons que M. Dosière. Deux questions sont notamment posées au président de la commission des lois, qui est une fois de plus absent. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Où est le président de la commission ?
    M. Jean-Marc Ayrault. Cela ne l'empêchera pas pour autant de donner des leçons à tous ceux qui ne sont pas membres de sa « noble » commission, celle qu'il préside avec tant d'élégance.
    Madame la présidente, je souhaiterais que cette suspension de séance soit suffisamment longue pour permettre à la commission de se réunir et au Gouvernement d'apporter les informations que nous avons réclamées sur la simulation dont dispose le ministre de l'intérieur et sur l'avis du Conseil d'Etat. Je demande donc une suspension de séance d'une heure au minimum.
    Mme la présidente. Monsieur Ayrault, en tant que président de groupe, vous pouvez demander une suspension de séance pour réunir votre groupe, mais pas pour réunir la commission. Je ne peux donc accéder à votre demande.
    Chacun des groupes ayant déjà obtenu une suspension de séance, je crois beaucoup plus sage de passer à l'intervention de M. le ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe socialiste.)

Ouverture de la discussion

    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Protestations et claquements de pupitre sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, le projet de loi qui vous est présenté aujourd'hui (Exclamations et claquements de pupitre sur les bancs du groupe socialiste)...
    Si vous voyiez le spectacle que vous donnez... Il ne fait pas honneur à la démocratie, croyez-moi ! Vous vouliez des explications de ma part ? Vous allez les recevoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations et claquements de pupitre sur les bancs du groupe socialiste.)
    Je crois le temps venu pour le Gouvernement de s'exprimer et je vous remercie, madame la présidente, de m'avoir donné la parole. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. Mes chers collègues, écoutez M. le ministre qui a seul la parole. (Claquements de pupitre sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Bruno Le Roux. C'est scandaleux !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mesdames, messieurs les députés, le projet de loi qui vous est présenté (M. Alain Néri fait claquer son pupitre)... Monsieur le député, si vous voyiez votre attitude ! Vraiment, je n'aimerais pas être à votre place ! (Protestations et claquements de pupitre sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Le projet de loi qui vous est présenté a pour ambition de tirer en tout premier lieu les conséquences des adaptations institutionnelles qu'est en train de vivre notre pays.
    M. Jean-Marc Ayrault et M. Patrick Lemasle. Suspension de séance !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il ne serait en effet ni cohérent ni responsable (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) d'engager une nouvelle étape de la décentralisation, de promouvoir la région au sein de notre Constitution...
    M. Jean-Marc Ayrault. J'ai demandé une suspension de séance, madame la présidente !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... de lui donner plus de compétences,...
    M. Bruno Le Roux. La suspension est de droit, c'est le président de notre groupe qui l'a demandée !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... donc plus de poids, sans avoir réfléchi auparavant au mode de désignation de ses élus. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Huées et claquements de pupitre sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Une suspension de séance a été demandée !
    M. Bernard Roman. Appliquez le règlement, madame la présidente.
    M. Richard Mallié. Ça suffit maintenant.
    M. Jean-Marc Ayrault. C'est scandaleux, madame la présidente.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. D'ailleurs vous l'avez compris, il serait tout aussi incohérent de croire en l'élargissement de l'Union européenne et d'accepter le rôle accru qui est dévolu au Parlement de Strasbourg (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) depuis les traités de Maastricht, d'Amsterdam et de Nice sans réfléchir, là aussi, au mode de scrutin pour les élections européennes. (Presque tous les députés du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains se lèvent et se dirigent vers la sortie de l'hémicycle.) Voilà donc le groupe qui me sommait de donner des explications qui s'en va au moment où je les donne ! (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Croyez bien, mesdames, messieurs du groupe socialiste, que votre attitude ne va pas gagner en cohérence ni vous le respect des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Didier Mathus et M. Patrick Lemasle. Vous n'avez pas de leçons à donner !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Avoir déposé cinq demandes de suspension de séance et partir au moment où le Gouvernement fournit des explications, voilà qui montre la profondeur de vos convictions ! (Mêmes mouvements.)
    M. Augustin Bonrepaux. Vous n'êtes pas un démocrate ! (La majorité des députés du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains quittent l'hémicycle.)
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Au moins cela nous permettra, je l'espère de tout coeur, d'avoir un débat utile au sein de la majorité, en tout cas avec tous ceux qui veulent construire et non détruire. J'ajoute que le Gouvernement n'a pas de leçons à recevoir de ceux qui ont joué pendant tant d'années avec le Front national (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et qui ont proposé un mode de scrutin qui a fait entrer ses députés à l'Assemblée nationale. Il y a des limites à tout. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Les quatre députés du groupe socialiste restés à leur siège quittent l'hémicycle à leur tour.)

    Monsieur le président du groupe UDF, je ne fais pas d'amalgame entre une attitude d'obstruction systématique et d'autres prises de position que je peux, par ailleurs, respecter. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mesdames, messieurs les députés, de nouveaux pouvoirs pour le Parlement européen, une nouvelle importance pour la région, un nouveau décor, en quelque sorte, voilà ce que je vous propose d'examiner.
    Mais il y a une autre réalité qu'il nous faut prendre en compte, quelles que soient par ailleurs nos convictions personnelles : ce n'est pas un hasard si les deux scrutins dont nous allons discuter, le scrutin régional et le scrutin européen, sont aujourd'hui mal connus et mal compris des Français.
    M. Maurice Leroy. Ils ne vont pas l'être mieux !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est un autre débat, monsieur Leroy et nous l'aurons.
    Ce n'est pas un hasard si ces deux scrutins alimentent sinon la défiance du moins le désintérêt de nos concitoyens. D'ailleurs, il est significatif que ce soit lors de ces deux scrutins que les records d'abstention soient battus.
    M. Maurice Leroy. Et ce n'est pas fini !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il y a eu 42 % d'abstentions lors des dernières élections régionales et 52,3 % d'abstentions lors des dernières élections européennes.
    M. Maurice Leroy. Ça va être pire !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il ne me paraît donc pas excessif de dire que nos concitoyens ne sont pas attachés aux modes de scrutin que nous connaissons à l'heure actuelle.
    M. Edouard Landrain. Hélas !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. D'ailleurs, toutes les majorités qui se sont succédé au gouvernement au cours de ces dix dernières années ont clairement envisagé une modification de ces scrutins. Toutes, sans exception, j'insiste pour qu'il n'y ait pas de réflexe partisan. Cela ne veut pas dire que nous soyons d'accord sur les conditions du changement mais, au moins, nous le sommes sur le diagnostic. Le problème est tel que toutes les majorités, de gauche comme de droite, ont envisagé le changement.
    Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin vous le propose. Le temps presse car les prochaines élections régionales et cantonales auront lieu dans moins de quatorze mois. Il existe une règle républicaine - et je crois qu'elle est nécessaire - selon laquelle un mode de scrutin ne peut être modifié dans l'année qui précède une élection.
    M. Maurice Leroy. Il y a une autre règle, c'est le consensus !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Qui peut oublier le triste spectacle offert après 1998 par l'absence de majorité stable dans les conseils régionaux, les discussions de couloir, les recherches d'alliances improbables et les accords contre nature auxquels cela a donné lieu ? Dans tout ce chaos, je ne pense pas que la démocratie ait beaucoup gagné ni que les électeurs aient acquis une juste opinion du rôle et des responsabilités de l'institution régionale.
    Dans toutes les grandes formations républicaines, le jugement fut à l'époque unanime : chacun - et ce fut à l'honneur de tous - eut à coeur de stigmatiser des comportements qualifiés à l'époque d'indignes. Je ne porte pas de jugement. Je relate des faits. Nous étions alors tous convaincus de la nécessité du « plus jamais cela ».
    S'agissant des députés européens, le problème, je le reconnais bien volontiers, est de nature différente, mais il ne se pose pas moins clairement. Qui peut nier que les citoyens qui ont élu les députés européens ne les identifient pas, la plupart du temps, puisque les listes sont composées au plan national selon des critères très éloignés du souci de la représentation géographique ?
    M. Maurice Leroy. Oui.
    M. Philippe de Villiers. Ce sera pareil !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Aucune forme de responsabilité, monsieur de Villiers, n'est organisée.
    M. Philippe de Villiers. Il faudra un ULM !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je pense que chaque avis est respectable, pour peu qu'on prenne le temps de s'écouter, monsieur de Villiers.
    M. Maurice Leroy. C'est bien ! C'est un débat entre nous, en famille !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ne pratiquez pas, les uns et les autres, ce que vous ne souhaitez pas que l'on vous fasse. N'adoptez pas le comportement que vous combattez. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Maurice Leroy. C'est pour Alain Juppé, ça ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur de Villiers, souffrez que je parle quelques instants. Votre intelligence n'en souffrira pas et peut-être même votre esprit pourra-t-il s'ouvrir sur quelques mesures.
    M. Maurice Leroy. Ça, c'est plus difficile !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'ai dit « peut-être » ! Aucune forme de responsabilité n'est organisée après l'élection au Parlement européen vis-à-vis des citoyens. Rien n'oblige un député européen à rendre compte de quoi que ce soit de son activité. D'ailleurs, auprès de qui pourrait-il le faire ?
    M. Yves Fromion. Bien sûr !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Les députés européens eux-mêmes le reconnaissent, l'affirment et aspirent à plus de proximité, à plus de reconnaissance et, donc, à plus de légitimité.
    M. Yves Fromion. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. D'ailleurs, mesdames, messieurs les députés, nous le disons tous au moment de l'élection et nous nous empressons de l'oublier au lendemain de celle-ci. Le Gouvernement vous propose de rompre avec ces habitudes pour nous engager dans le sens de l'action. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Je sais bien qu'il est commode de disserter sur le fossé qui se serait creusé, aux dires de certains, entre les politiques et les citoyens. De cela, toutes sortes d'exemples peuvent être donnés. A cela, toutes sortes de bonnes raisons peuvent être trouvées. J'ai d'ailleurs observé que les procureurs les plus sévères envers les élus étaient souvent ceux-là mêmes qui n'avaient jamais été élus, soit qu'ils aient été battus, soit qu'ils n'aient jamais eu le courage de se présenter à des élections. J'ai lu quantité d'articles dus à des observateurs très savants, sur la façon dont il conviendrait de rebâtir notre démocratie. Mais je n'ai pas vu leurs auteurs dans les préaux d'écoles, au contact des électeurs, à se faire élire ou réélire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Maurice Leroy. Très juste !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je reconnais à tout parlementaire, quelle que soit son origine politique et quels que soient ses engagements, davantage de mérite qu'à celui qui commente les élections. Ce dernier ne sait pas ce que c'est qu'être élu et, pire, de devoir être réélu. Il est donc parfaitement normal que, nous autres, qui avons été au feu des élections, nous ayons à débattre du mode d'élection. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Il n'en reste pas moins que notre responsabilité est de réduire ce fossé, car aucune démocratie ne peut s'accommoder d'un désintérêt ou d'une défiance. Et la France a eu le premier, avec l'abstention et le second, avec le vote extrême. Raison de plus pour agir.
    Encore faut-il reconnaître - et c'est là peut-être qu'il y a matière à débat - que tout scrutin a deux fonctions complémentaires indissociables et, de mon point de vue, d'égale importance : la représentation démocratique qu'il permet aux électeurs et la capacité qu'il donne aux élus d'exercer leur responsabilité de façon cohérente, transparente et efficace.
    M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. On représente d'un côté ; on donne les moyens de gouverner de l'autre.
    M. Maurice Leroy. D'accord.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La représentation des électeurs doit, me semble-t-il, se concevoir comme la création d'un véritable lien avec l'élu. Celui-ci n'est pas un numéro sur une liste, mais une femme ou un homme qui, quel que soit son mandat, représente des mandants et leur rend des comptes sur son action.
    C'est d'autant plus vrai aujourd'hui où nous engageons un vaste mouvement de décentralisation. Nous avons en effet choisi de faire de la région un partenaire à part entière de l'Etat, de lui donner des compétences, des moyens nouveaux et la possibilité de s'organiser de façon plus autonome. Il est donc pertinent de modifier le cadre de l'élection régionale.

    Il faut améliorer à la fois l'ancrage territorial des élus et la représentation des territoires de la région. Notre ambition est d'arriver à ce que la région ne soit pas une abstraction pour les citoyens, mais une réalité concrète, préhensible, proche. Les électeurs doivent pouvoir choisir, pour les représenter, des élus qu'ils identifient parfaitement. C'est pourquoi il est proposé que les listes régionales soient présentées par sections départementales, qui garantiront un nombre de représentants conforme à la population de chaque département. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Ces sections apparaîtront sur les bulletins de vote et, j'y insiste, protégeront ainsi les territoires et notamment les plus petits, les moins peuplés, les plus déshérités. Du Cantal à l'Ardèche, de la Lozère à la Creuse, chacun sera représenté. Il n'y aura pas de territoire laissé-pour-compte de l'élection régionale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Sans départementalisation des candidats, le risque existait que les plus gros départements, les plus peuplés et les plus riches trustent toute la représentation.
    M. Maurice Leroy. Jusqu'ici, tout va bien.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais, dans le même temps, il faut maintenir la cohérence du système, de façon que la circonscription régionale existe, qu'elle soit assurée, renforcée et désormais bien ancrée.
    M. Maurice Leroy. C'est là où ça se corse !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cette proposition a été acceptée, dans son principe, par les responsables des douze formations politiques que j'ai reçus. D'ailleurs, le projet du Gouvernement de ce point de vue s'inspire dans ses grandes lignes de celui qui avait été présenté par nos prédécesseurs socialistes. (« Bien sûr ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Frédéric de Saint-Sernin. Ils l'ont oublié !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. S'ils avaient été là, ils auraient pu soutenir, au moins sur ce plan, une idée que je n'ai fait que reprendre à M. Jospin. Je considère, en effet, que ce n'est pas parce que d'autres l'avaient proposée que nous devions nous abstenir de reprendre une idée qui me semble pertinente. (Applaudissements sur les bancs de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Maurice Leroy. Jospin y avait pensé, Juppé l'a fait !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je précise, pour être complet, que la réforme du scrutin régional ne concerne pas la Corse, là encore pour des raisons de cohérence avec la décentralisation. Une réforme ne pourra intervenir, le cas échéant, en Corse, qu'à l'issue des réflexions engagées sur l'évolution statutaire institutionnelle de la Corse. Cette question sera tranchée au printemps prochain.
    La même logique préside à la réforme du cadre de l'élection des députés européens.
    La désignation des représentants français au Parlement européen est désormais bien ancrée dans la vie politique française sans, pour autant, que l'impact de ces élections n'ait été encore complétement intégré dans notre pays, à la différence de ce qui se passe chez nos voisins.
    L'Europe change de façon trop rapide pour les uns, pas assez pour les autres, mais nous pouvons tous convenir que les traités successifs intervenus depuis l'élection de la première assemblée en 1979 ont considérablement accru le poids et le rôle du Parlement de Strasbourg.
    Nous n'avons pas suffisamment pris la mesure de l'augmentation des pouvoirs du Parlement dans l'équilibre institutionnel européen, notamment par rapport à la Commission. Le processus, d'ailleurs, est loin d'être arrivé à son terme puisque la réforme des institutions européennes, dans la perspective de l'élargissement, conduira non seulement à une nouvelle donne entre le Conseil, la Commission et le Parlement, mais impliquera une réduction du nombre des représentants actuels des Etats membres. La France verra, à terme, diminuer le nombre de ses représentants de quatre-vingt-sept à soixante-douze, même si l'adhésion tardive de la Bulgarie et de la Roumanie nous permet de compter sur soixante-dix-huit parlementaires pour les élections de 2004.
    Au-delà de ces évolutions, il nous faut reconnaître que, depuis de nombreuses années, le mode de scrutin pour les élections européennes fait l'objet de critiques unanimes.
    Lors de mes entretiens avec les responsables des forces politiques, la plupart m'ont indiqué que le mode de scrutin actuel n'était ni satisfaisant pour la démocratie ni efficace pour la représentation de notre pays et, donc, la défense de nos intérêts.
    Comment concilier représentation équitable des familles politiques et renforcement indispensable du lien avec le citoyen ?
    M. Jean Dionis du Séjour. C'est raté !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Nous vous proposons de créer des circonscriptions afin que les députés aient l'ancrage territorial qui leur manque.
    M. Maurice Leroy. Jospin, c'était l'annuaire téléphonique !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Sept circonscriptions seront créées en métropole, regroupant chacune, dans un souci de cohérence, plusieurs régions administratives, et une circonscription sera créée pour l'outre-mer. Ce découpage, mesdames, messieurs les députés, correspond très exactement à ce qui avait été proposé par Lionel Jospin comme par Michel Barnier et ne saurait donc être l'objet de discussions partisanes. Je dois à la vérité de dire que ce n'est pas le monopole de l'ancien RPR ou de l'actuel parti socialiste puisque j'ai retrouvé une proposition de loi de l'ancienne UDF sur la nécessité de régionaliser.(Exclamations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Maurice Leroy. Non !
    M. Hervé Morin. Elle était de Charles Millon. Ce n'est pas tout à fait pareil ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Morin ! Pas de polémique ! J'ai dit « de l'ancienne UDF ». (Exclamations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Je veux, par là, faire oeuvre de modestie. Cette idée n'est donc pas le monopole du Gouvernement. Elle était partagée par tous.
    Mais, plus intéressant que nos débats nationaux, j'indique que, sur les cinq grands pays d'Europe, quatre sont déjà organisés en circonscriptions régionales. C'est déjà le cas de l'Italie, de l'Allemagne et de la Grande-Bretagne. Ce sera le cas de la France. A l'exception de l'Espagne, tous les grands pays européens ont organisé l'élection au Parlement européen en circonscriptions régionales. Ainsi, par la taille de ces circonscriptions, par le nombre de sièges qui leur sera attribué, chaque électeur, quelle que soit sa sensibilité ou son engagement partisan, pourra par son vote espérer être représenté à Strasbourg par un élu défendant ses convictions et issu de son territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    J'ajoute pour être très clair que, lorsque j'ai reçu les formations politiques, je leur avais indiqué que j'étais à titre personnel plus sensible à la thèse des « petites régions ».
    M. Jean Dionis du Séjour et M. Maurice Leroy. Ah !
    M. Frédéric de Saint-Sernin. Moi aussi !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je considérais, en effet, comme d'autres, qu'elle allait au bout de la logique de l'enracinement.
    M. Maurice Leroy. Très bien.
    M. Frédéric de Saint-Sernin. Exact.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Les dirigeants de l'UDF m'ont fait valoir - et c'était parfaitement leur droit - qu'ils étaient attachés d'abord au scrutin national, mais que, dans la hiérarchie, ils préféraient ensuite les « grandes régions ».
    M. Maurice Leroy. Oui, c'est logique.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je ne pense nuire à personne en disant cela.
    M. Maurice Leroy. C'est vrai, c'est public.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cela a également été le choix du parti socialiste qui considérait que les petites régions posaient un problème : comme certaines n'auraient eu qu'un député, certains candidats auraient été élus au scrutin proportionnel et d'autres au scrutin majoritaire. Ce n'est offenser personne que de dire cela. C'est rappeler une réalité.
    Au sein de l'UMP, les avis étaient partagés.
    Finalement le Gouvernement vous propose le dispositif des « grandes régions », c'est-à-dire, comme chez nos partenaires, la création de huit grandes régions. Cela permettra d'avoir un député européen mieux connu, mieux identifié...
    M. Maurice Leroy. On en reparlera.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... mieux responsabilisé et, disons-le clairement, plus accessible et donc plus facilement interpellé par les électeurs...
    M. Maurice Leroy. Pas plus qu'avant !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... pour lesquels l'Europe demeure, hélas trop souvent, un objectif très éloigné.
    J'affirme donc que le mode d'élection que le Gouvernement vous propose pour le Parlement européen est un moyen de mieux faire vivre l'idée européenne. Mais ne confondons pas les choses, il est relativement consensuel et devrait donc rencontrer des avis favorables au-delà des clivages partisans. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Maurice Leroy. Pas sous sa forme actuelle !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'ajoute que l'ancrage territorial des élus européens doit nous conduire à supprimer une bizarrerie. En effet, les règles du cumul de mandats ne sont pas les mêmes selon qu'il s'agisse d'un parlementaire national ou d'un parlementaire européen. Qui pourrait justifier cela ?
    Qui pourrait justifier cela ? J'ajoute que c'était bien le sens de la demande de l'actuel président de l'UDF,...
    M. Maurice Leroy. C'est juste, nous sommes d'accord.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... lequel considérait, et il avait, de mon point de vue, parfaitement raison, que l'on ne pouvait, sans créer d'inégalité, considérer le mandat de député national différemment de celui de député européen au regard des règles du cumul.
    M. Maurice Leroy. C'est vrai.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Quant à prétendre que des règles différenciées se justifieraient par l'éloignement de Bruxelles et de Strasbourg, pardonnez-moi, mais l'argument ne tient pas.
    M. Maurice Leroy. En effet, c'est idiot !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ou alors, serait-ce à dire que le député élu d'une province éloignée de la capitale devrait subir des règles de cumul plus sévères qu'un élu de Paris ? Personne ne pourrait l'accepter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    De deux choses l'une, mesdames, messieurs les députés : ou bien nous sommes tous soumis aux mêmes règles du cumul, ou bien nous n'y sommes pas.
    M. Jean-Marie Geveaux. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. On ne peut donc laisser dire que les parlementaires européens devraient être soumis à des règles différentes de celles qui s'appliquent à un parlementaire national.
    Un deuxième impératif s'impose à nous : celui de donner aux électeurs les moyens de désigner une majorité. Car un vote n'est pas simplement l'expression d'une simple préférence, ce n'est pas simplement l'affirmation d'une sensibilité ; c'est aussi un choix. D'où notre souci d'assurer l'existence de majorités de gouvernement pour gérer les régions.
    M. Claude Gaillard. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Comment pourrait-on se satisfaire de la situation actuelle, où l'on voit des exécutifs impuissants réduits à quémander des voix pour faire passer des délibérations parfois aussi importantes que celles qui arrêtent le budget ?
    M. Yves Fromion. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La région sera prochainement une collectivité à valeur constitutionnelle, tout comme le département et la commune qui d'ores et déjà bénéficient de modes de scrutin leur garantissant des majorités de gestion stables. Il est donc essentiel que le scrutin à la proportionnelle - lequel, par essence, permet une représentation des différents courants politiques - soit tempéré par l'existence d'une prime majoritaire. Celle-ci demeurera fixée à 25 % des sièges pour la liste qui, ou bien a obtenu la majorité absolue au premier tour, ou bien est arrivée en tête au second.
    Mais cette mesure nécessite d'être complétée. Les élections récentes nous enseignent que les Français, tout en étant attachés à la représentation des différents courants de pensée, souhaitent donner aux élus qu'ils ont portés en tête les moyens de gérer, dans la clarté et dans l'efficacité, les collectivités publiques dont ils leur ont confié la gestion. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Hervé Morin. Nous sommes entièrement d'accord !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Dès lors se pose la question - car je n'entends évacuer aucun problème - du seuil d'accès au second tour.
    M. Maurice Leroy. Eh oui ! C'est là où ça va faire mal !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Nous avions deux références : la première, c'est celle des élections cantonales où la règle pour se présenter au deuxième tour veut que l'on atteigne 10 % des inscrits.
    M. Hervé Morin. Mais c'est un scrutin uninominal !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je ne porte aucun jugement, je dis que c'est la règle. La seconde, c'est celle des élections municipales où il ne s'agit plus de 10 % des inscrits, mais de 10 % des suffrages exprimés.
    Nous avons débattu de cette question, les avis étaient très tranchés, d'un côté comme de l'autre.
    M. Maurice Leroy. Y compris la vôtre ! (Sourires.)
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il ne m'est pas interdit d'avoir une opinion. Et vous savez tous ici que, lorsque j'ai une opinion,...
    M. Maurice Leroy. On est bien d'accord !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... j'essaie toujours de la défendre,...
    M. François Rochebloine. Et c'est très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... parce que j'estime qu'un responsable politique n'a aucunement à s'excuser d'en avoir.
    Plusieurs députés du groupe Union pour la démocratie française. Bravo ! Continuez !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Nous avons donc essayé de trouver une solution raisonnable et j'aimerais l'expliquer. Car j'ai entendu beaucoup de choses sur le premier aspect - ce seuil des 10 % des inscrits - et pas assez sur le deuxième : je veux parler des 5 % des suffrages exprimés pour être autorisé à fusionner.
    M. Alain Gest. Exactement !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. D'autres reconnaîtront bien volontiers avec moi que cette exigence d'atteindre 10 % des inscrits pour accéder au second tour favorise l'efficacité et oblige à la constitution de majorités. C'est un fait dont on ne doit ni s'excuser ni s'étonner.
    M. Maurice Leroy. Pourquoi pas 25 % !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Or il me semble que ce critère de 10 % des inscrits pour composer des majorités pour être au deuxième tour est utilement complété par celui de 5 % des exprimés - ce qui est peu - pour fusionner. Car cela obligera ces majorités stables à s'ouvrir et à accepter la diversité nécessaire à mes yeux pour la composition des majorités. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Maurice Leroy. Mais non ! L'argument est peu convaincant ! C'est une faute !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Autrement dit, cette affaire des 10 % des inscrits nous oppose à tort : car c'est oublier l'existence du critère de 5 % des suffrages exprimés, score au demeurant très faible, pour obliger à l'ouverture des majorités.
    M. Maurice Leroy. Cela ne tient pas la route !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il me semble donc que ce schéma est raisonnable.
    M. Edouard Landrain. Il a raison !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ajoutons qu'il obligera à la clarté avant l'élection...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Eh oui !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... dans la mesure où ces accords de fusion, incontestablement encouragés, sinon obligés par le mode de scrutin,...
    M. François Sauvadet. Et voilà ! « Obligés » !
    M. Maurice Leroy. Le mot est lâché !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... se noueront inévitablement devant l'électeur, avant l'élection et non après. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Dès lors, nous pouvons poursuivre ce débat, mais en aucun cas le caricaturer. J'ai beaucoup insisté sur cette règle des 5 % des suffrages exprimés pour la fusion : elle est de mon point de vue plus importante qu'on ne l'imagine...
    M. Richard Cazenave. Absolument !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Du reste, plusieurs amendements ont été déposés sur cette question, à mes yeux intéressants,...
    M. Maurice Leroy. Ah !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... ce qui prouve que cette piste des 5 % des exprimés pour la fusion est beaucoup plus importante qu'on ne l'a parfois dit.
    M. Jean Leonetti. Bravo !
    M. Richard Cazenave. Elle est capitale !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je n'en fais d'ailleurs le reproche à personne : ce sont des sujets complexes, qui méritent d'être réfléchis.
    M. Maurice Leroy. Monsieur notre maître est trop bon !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Quoi qu'il en soit, ce sont les deux critères qu'il faut retenir : 10 % des inscrits pour participer au deuxième tour ; 5 % des exprimés pour fusionner.
    Troisième impératif : la parité.
    M. Maurice Leroy. La parité, il n'y en a plus ! Elle explose en plein vol !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Sur la parité, le Gouvernement prend ses responsabilités : le principe de la parité est puissamment réaffirmé dans son projet et de la façon la plus étendue possible.
    M. Hervé Morin. La parité, c'est terminé !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La création de sections départementales pour les élections régionales a nécessité de redéfinir les modalités d'application de la parité pour les améliorer. La loi de 1998 prévoyait de l'appliquer par groupes de six candidats. Le Gouvernement vous propose de la mettre en oeuvre au sein de chaque section selon le dispositif dit « un homme, une femme », qui conduit à l'alternance de candidats de chaque sexe.
    Ce même choix préside aux réformes prévues pour les élections européennes.
    M. Claude Goasguen. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La parité sera garantie par l'alternance homme-femme : tout autre choix - la parité par groupe, par exemple - serait plus restrictif. Je le dis à la majorité : ce serait une grave erreur que de laisser le monopole de la parité à une opposition qui a beaucoup parlé, mais fort peu agi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    En retenant une règle de la parité par alternance - et je parle sous le contrôle de ma collègue, Nicole Ameline - nous renforcerons ce qui, à nos yeux, est indispensable : la représentation féminine au sein des conseils régionaux et au sein du Parlement européen.
    La parité nous a déjà valu de grands débats. Mais, pour moi, une seule question compte : combien de temps ? Pour débloquer une situation qui n'était pas à l'honneur de la France et rééquilibrer l'inégalité dont souffrait la représentation féminine au sein de nos assemblées politiques, il n'y a pas d'autre solution que la parité obligatoire. Mais là où le débat devient intéressant, c'est lorsqu'il s'agit de savoir ce que l'on fera, d'ici à quelques années, une fois la représentation rééquilibrée.
    M. Claude Goasguen. Tout à fait !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. De mon point de vue, la discussion de principe n'a pas lieu d'être : la population est répartie de façon équitable, il faut qu'elle se retrouve et qu'elle se reconnaisse dans les institutions politiques. Une fois ce rééquilibrage obtenu se posera alors, et alors seulement, le débat sur la pérennisation de règles dont je reconnais bien volontiers qu'elles ont d'abord comme vocation de débloquer une situation qui ne l'aurait jamais été autrement. Il me paraissait utile de porter ce témoignage. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Quatrième impératif : la cohérence de la durée des mandats locaux. Le mandat de conseiller régional est aujourd'hui de six ans. Si nous laissions les choses en l'état, il serait porté à cinq ans puisque tel était le projet de réforme de nos prédécesseurs. Le Gouvernement vous propose de le laisser à six ans, non pour faire plaisir aux élus régionaux, mais parce qu'il ne nous a pas semblé absurde de faire en sorte que tous les mandats locaux aient la même durée. Les conseils municipaux sont élus pour six ans, les conseils généraux aussi. Comment expliquer que les conseils régionaux le soient pour cinq ans ? D'autant plus, mesdames et messieurs les députés, que les prochaines élections régionales et cantonales auront lieu en même temps. Comment expliquer à nos électeurs qu'ils voteront le même jour pour une assemblée à six ans et pour une autre à cinq ans - alors que c'était préalablement six ans ? D'où notre proposition : six ans pour tout le monde.
    M. François Rochebloine. Mais pas les mêmes modes de calcul électoral !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'entends bien, ici ou là, des remarques sur la complexité de ces propositions. J'ai même pris grand intérêt à lire certains textes constitutionnels. Mais à supposer que je maintienne le mode de scrutin actuel, combien de Français connaissent exactement le mécanisme des élections européennes ou régionales ? Oserais-je même vous demander de m'expliquer précisément son fonctionnement, de me dire quels sont les seuils, le type de répartition, au plus fort reste ou à la plus forte moyenne ? Que l'on me fasse le procès de la complexité, je l'admets. Mais m'accuser de compliquer, ce serait laisser entendre que c'est simple. Or, aujourd'hui la complexité du système actuel, personne n'en parle !
    M. Maurice Leroy. Finalement, c'est au projet Raffarin-Sarkozy qu'il faut revenir !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Et si vraiment c'est la simplicité que vous voulez, monsieur Leroy, il suffit de retenir le scrutin majoritaire à un tour, qui broie les minorités et étouffe les courants d'opinion !
    M. Maurice Leroy. Chiche !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ce serait incontestablement la simplicité, et cela couperait court aux reproches qui me sont lancés matin, midi et soir ! Mais est-ce un mode de scrutin équitable ? Pour ma part, je suis contre.
    Concilier respect des minorités, constitution de pôles de stabilité, existence de majorités de gouvernement et identification des territoires n'est pas simple. Pour répondre à tous ces impératifs, il faut, je l'affirme, mieux, je le revendique, proposer des systèmes sophistiqués...
    M. Maurice Leroy. C'est courageux !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... qui ont d'ailleurs fait leur preuve, par exemple en Allemagne, dont le mode de scrutin est présenté comme un modèle de respect démocratique...
    M. Hervé Morin. En effet.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... alors qu'il est difficile d'imaginer plus complexe, voire plus inintelligible !
    M. Claude Goasguen. Très juste !
    M. Maurice Leroy. La CDU est dans l'opposition...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je mets au défi qui que ce soit de m'expliquer dans le détail le fonctionnement du mode de scrutin en Allemagne...
    M. Maurice Leroy. Nous en sommes bien d'accord.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... que d'innombrables observateurs présentent pourtant comme la quintessence de l'expression de la meilleure démocratie avec des électeurs qui disposent de deux voix, réparties selon des modes différents, où de surcroît le chancelier est élu au niveau national sans jamais avoir été élu dans sa circonscription !
    M. Claude Goasguen et M. Alain Gest. Exact !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Autrement dit, la simplicité, ce n'est pas la bonne idée. La simplicité broie les minorités. Nous ne voulons pas broyer les minorités.
    M. Maurice Leroy. Vous, non ! Mais il y a des absents de cet hémicycle... Et Juppé, où est-il ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La sophistication permet de remplir des objectifs différenciés. (Applaudissements sur les bancs de groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Je veux enfin ajouter quelques mots sur les autres dispositions que contient ce projet de loi. Je vous ferai du reste remarquer que l'on n'en parle pas du tout, alors qu'elles sont importantes. M. de Villiers se reconnaîtra certainement dans la première, puisque c'est lui qui a appelé l'attention du Gouvernement sur le sujet lorsque je l'ai reçu.
    M. Maurice Leroy. Il est vrai qu'elles ne sont pas sans intérêt.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je veux parler du passage du seuil de 5 à 3 % des suffrages exprimés...
    M. Maurice Leroy. Passage à tabac !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... pour le remboursement des frais de propagande électorale lors des élections régionales.
    M. Alain Gest. Très bien !
    M. Claude Gaillard. Absolument !
    M. Jean-Marie Geveaux. Sacré cadeau !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est là un élément important qui permettra de favoriser la constitution de listes...
    M. Maurice Leroy. Allons ! Pas de questions d'argent entre nous... (Sourires.)
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... dans la mesure où il suffira de rassembler un nombre de voix plus modeste pour avoir l'assurance d'être remboursé. Le Gouvernement a considéré qu'il fallait renforcer la possibilité pour chacun de s'exprimer.
    M. Maurice Leroy. C'était une demande du Conseil constitutionnel !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Pour les élections européennes, et je crois savoir que c'était également là un point qui comptait aux yeux de l'UDF, l'accès à la campagne audiovisuelle sera ouvert non seulement aux partis et groupements politiques représentés,...
    M. Maurice Leroy. Vous êtes trop bon !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... mais à tous ceux qui auront présenté quatre listes dans quatre circonscriptions. Ajoutons que nous allons allonger la durée des émissions ouvertes à toutes les listes candidates.
    M. Frédéric de Saint-Sernin. C'est un beau cadeau ! Une concession !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. On ne peut pas, d'un côté, dire que l'Europe est une affaire importante, et ne pas veiller de l'autre à ce que tout un chacun puisse s'exprimer afin que la campagne ait un sens.
    M. Maurice Leroy. Bien ! Demandons une suspension de séance pour fêter cela à la buvette !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Et que dire de la modification des règles de financement des partis politiques ? Ce faisant, le Gouvernement a entendu tirer les enseignements de l'organisation des dernières élections législatives. En ouvrant le droit à l'aide publique aux partis ayant présenté en métropole au moins cinquante candidats, la loi a favorisé, reconnaissons-le ensemble, l'inflation des candidatures.
    Plusieurs députés du groupe Union pour la démocratie française. C'est vrai.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Les chiffres sont incontestables : 2 828 candidats au premier tour en 1988,...
    M. Maurice Leroy. Que l'on n'a jamais vus d'ailleurs !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... puis 5 290 en 1993, 6 360 en 1997 et - tenez-vous bien - 8 444 en 2002 ! Les groupements les plus divers se sont mis à présenter des candidats aux élections législatives dans le but non de concourir à l'expression du suffrage, mais de bénéficier d'un financement public.
    Mme Nadine Morano. Exactement !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cela n'est ni plus ni moins qu'un détournement de l'esprit des lois caricatural et choquant ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Il faut limiter le versement de l'aide publique aux partis et groupements politiques qui concourent effectivement à l'expression du suffrage universel.
    M. Maurice Leroy. Finalement, il n'y a aucun point de désaccord entre nous... Hormis le seuil, tout va bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Voilà pourquoi le Gouvernement vous propose d'exiger des partis souhaitant bénéficier de l'aide publique qu'ils aient présenté au moins cinquante candidats, comme auparavant, mais en y ajoutant une condition supplémentaire : que ces candidats aient obtenu chacun au moins 1 % des suffrages exprimés.
    M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'ajoute, à l'adresse notamment des formations les plus minoritaires - n'y voyez aucun jugement de valeur -, que j'ai bien présente à l'esprit la jurisprudence du Conseil constitutionnel et ses fameux 5 % et 3 %.
    M. Jean-Christophe Lagarde, M. François Sauvadet et M. Maurice Leroy. Oui, voilà !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'ai même considéré que 3 %, c'était beaucoup trop. Un seuil de seulement 1 % des exprimés recueillis par chacun des 50 candidats me paraît suffisant pour éliminer les candidatures farfelues ou « alimentaires », sans porter si peu que ce soit atteinte au principe de la représentation des minorités.
    Ce sujet, souvenez-vous en, avait provoqué force polémiques et représentait un enjeu très important. Le Gouvernement a pris la responsabilité d'y apporter les corrections nécessaires, de façon ouverte et transparente, en allant de surcroît dans votre direction. Est-ce une raison pour considérer que cet élément déterminant du débat démocratique a perdu toute importance ? Le texte que je vous présente peut susciter le débat, mais ne mérite pas la caricature. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Maurice Leroy. Finalement, il n'y a que les seuils qui nous séparent ! Allons, faites un pas ! Il n'y a qu'un chiffre à changer !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Telles sont, mesdames et messieurs les députés, les dispositions que je voulais vous proposer. Une d'entre elles a suscité quelque passion. Mais finalement une seule... Je persiste à croire que ce texte, dans son ensemble, peut recueillir le consensus.
    Le débat est par nature légitime. Le Gouvernement ne prétend pas détenir la vérité. Qu'il me soit cependant permis de rappeler que nous travaillons sous le regard des Français. Or ceux-ci admettent de moins en moins les excès et les outrances auxquels nous avons assisté. Chaque position mérite d'être considérée, pour peu qu'elle s'exprime sans esprit de caricature.
    M. Maurice Leroy. Nous sommes d'accord !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je dirai donc à une partie de l'opposition que quelques centaines de ces amendements, tels ceux qui prévoient de modifier le titre du projet de loi en le baptisant « projet de loi tendant à favoriser le parti unique », ou bien ceux qui prévoient de rédiger le bulletin de vote aux élections européennes en grec ou en bulgare, ne sont pas à l'honneur du débat parlementaire. Non seulement, ils ne le crédibilisent pas, mais ils n'aboutiront, quelle que soit la justesse des thèses défendues, qu'à éloigner un peu plus nos concitoyens de ces joutes incompréhensibles entre spécialistes totalement déconnectés du terrain.
    L'action d'obstruction ne suscite jamais l'adhésion dans une démocratie...
    Mme Claude Greff. Tout à fait !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... surtout lorsqu'elle vient de ceux qui, pendant des années, se sont pourléchés de l'existence entretenue d'un Front national...
    M. Maurice Leroy. Ça c'est vrai !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... dont ils ont favorisé l'expression législative en le faisant entrer à l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur de nombreux bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Je ne nie pas que d'autres thèses que la nôtre puissent avoir toute leur place dans cette assemblée mais, franchement, quand j'entends M. Ayrault, sur ce sujet comme sur d'autres - c'est un récidiviste -, donner des leçons, je me dis vraiment qu'il faut que j'essaie à tout prix de ne pas m'inspirer de ce qu'il fait. J'ai déjà eu l'occasion de lui dire ce que je pensais en sa présence, je n'hésiterai pas à profiter d'une prochaine occasion.
    Je veux dire à une partie de la majorité que je peux comprendre et, en tout état de cause, que je dois respecter ses réserves, mais qu'à mon avis elles ne doivent pas conduire à la création d'un fossé entre nous, fossé dont nous aurions chacun à gérer les conséquences douloureuses...
    Plusieurs députés du groupe Union pour la démocratie française. Nous sommes d'accord !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... et qui rendra malheureux à la fois nos élus et nos électeurs, qui sont les mêmes et qui nous demandent de nous additionner.
    M. Maurice Leroy. Il y a deux mots à changer dans le projet de loi !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'enregistre notre désaccord et j'essaierai tout au long de ce débat qu'il ne crée pas un fossé dont nous aurions chacun à nous expliquer, dans des conditions détestables, devant des électeurs qui ne veulent pas en entendre parler. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française, et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Plusieurs députés du groupe Union pour la démocratie française. Vous pourriez applaudir un peu plus !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Quant à la majorité, je lui demande son soutien, un soutien éclairé et ouvert.
    Mesdames, messieurs les députés, à nous de montrer maintenant aux Français que le débat sur la loi électorale peut être autre chose qu'une lutte caricaturale et excessive pour demeurer sur le chemin de la raison et, par dessus tout, dans l'esprit de la démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle, et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

5

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique :
    Discussion du projet de loi, n° 574, relatif à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques :
    M. Jérôme Bignon, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, rapport n° 605 ;
    M. Pierre Lequiller, rapporteur au nom de la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, rapport d'information n° 597 ;
    Mme Marie-Jo Zimmermann, rapporteure au nom de la délégation de l'Assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, rapport d'information n° 604.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures vingt-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexe au procès-verbal
de la 2e séance
du mardi 11 février 2003
SCRUTIN (n° 123)


sur l'ensemble du projet de loi pour l'initiative économique.

Nombre de votants

544


Nombre de suffrages exprimés

538


Majorité absolue

270


Pour l'adoption

371


Contre

167

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (362) :     Pour : 345. - MM. Jean-Claude Abrioux, Bernard Accoyer, Manuel Aeschlimann, Alfred Almont, Jean-Paul Anciaux, René André, Philippe Auberger, François d' Aubert, Jean Auclair, Bertho Audifax, Mme Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Jean Bardet, Mme Brigitte Bareges, MM. François Baroin, Jacques Barrot, Mme Sylvia Bassot, MM. Patrick Beaudouin, Joël Beaugendre, Jean-Claude Beaulieu, Jacques Bénisti, Jean-Louis Bernard, Marc Bernier, André Berthol, Jean-Michel Bertrand, Xavier Bertrand, Jean-Yves Besselat, Jean Besson, Gabriel Biancheri, Jérôme Bignon, Jean-Marie Binetruy, Claude Birraux, Étienne Blanc, Emile Blessig, Roland Blum, Jacques Bobe, Yves Boisseau, Marcel Bonnot, René Bouin, Roger Boullonnois, Gilles Bourdouleix, Bruno Bourg-Broc, Mmes Chantal Bourragué, Christine Boutin, MM. Loïc Bouvard, Michel Bouvard, Ghislain Bray, Philippe Briand, Jacques Briat, Mme Maryvonne Briot, M. Bernard Brochand, Mme Chantal Brunel, MM. Michel Buillard, Yves Bur, Christian Cabal, François Calvet, Bernard Carayon, Pierre Cardo, Antoine Carré, Gilles Carrez, Richard Cazenave, Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud, MM. Yves Censi, Jean-Yves Chamard, Hervé de Charette, Jean-Paul Charié, Jean Charroppin, Jérôme Chartier, Roland Chassain, Luc-Marie Chatel, Jean-Marc Chavanne, Gérard Cherpion, Jean-François Chossy, Jean-Louis Christ, Dino Cinieri, Pascal Clément, Philippe Cochet, Georges Colombier, Mme Geneviève Colot, MM. Louis Cosyns, René Couanau, Édouard Courtial, Jean-Yves Cousin, Alain Cousin, Yves Coussain, Jean-Michel Couve, Charles Cova, Paul-Henri Cugnenc, Henri Cuq, Olivier Dassault, Marc-Philippe Daubresse, Christian Decocq, Jean-Pierre Decool, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Richard Dell'Agnola, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Yves Deniaud, Bernard Depierre, Léonce Deprez, Jean-Jacques Descamps, Éric Diard, Jean Diébold, Michel Diefenbacher, Jacques Domergue, Renaud Donnedieu de Vabres, Jean-Pierre Door, Dominique Dord, Philippe Douste-Blazy, Guy Drut, Jean-Michel Dubernard, Philippe Dubourg, Gérard Dubrac, Jean-Pierre Dupont, Nicolas Dupont-Aignan, Mme Marie-Hélène des Esgaulx, MM. Christian Estrosi, Pierre-Louis Fagniez, Francis Falala, Yannick Favennec, Georges Fenech, Jean-Michel Ferrand, Alain Ferry, Daniel Fidelin, André Flajolet, Jean-Claude Flory, Jean-Michel Fourgous, Mme Arlette Franco, MM. Pierre Frogier, Yves Fromion, Claude Gaillard, Mme Cécile Gallez, MM. René Galy-Dejean, Daniel Gard, Jean-Paul Garraud, Daniel Garrigue, Jean de Gaulle, Jean-Jacques Gaultier, Guy Geoffroy, Alain Gest, Jean-Marie Geveaux, Franck Gilard, Bruno Gilles, Georges Ginesta, Jean-Pierre Giran, Claude Girard, Maurice Giro, Louis Giscard d'Estaing, Claude Goasguen, François-Michel Gonnot, Jean-Pierre Gorges, François Goulard, Jean-Pierre Grand, Mme Claude Greff, MM. Jean Grenet, Gérard Grignon, Mme Arlette Grosskost, MM. Serge Grouard, Louis Guédon, Jean-Claude Guibal, Lucien Guichon, François Guillaume, Jean-Jacques Guillet, Gérard Hamel, Emmanuel Hamelin, Joël Hart, Michel Heinrich, Pierre Hellier, Laurent Hénart, Michel Herbillon, Pierre Hériaud, Patrick Herr, Antoine Herth, Philippe Houillon, Jean-Yves Hugon, Michel Hunault, Sébastien Huyghe, Denis Jacquat, Édouard Jacque, Christian Jeanjean, Yves Jego, Mme Maryse Joissains-Masini, MM. Marc Joulaud, Alain Joyandet, Dominique Juillot, Didier Julia, Alain Juppé, Mansour Kamardine, Aimé Kergueris, Christian Kert, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, MM. Jacques Kossowski, Patrick Labaune, Marc Laffineur, Jacques Lafleur, Mme Marguerite Lamour, MM. Robert Lamy, Edouard Landrain, Pierre Lang, Pierre Lasbordes, Mme Brigitte Le Brethon, MM. Robert Lecou, Jean-Marc Lefranc, Marc Le Fur, Jacques Le Guen, Michel Lejeune, Pierre Lellouche, Dominique Le Mèner, Jean Lemiere, Jean-Claude Lemoine, Jacques Le Nay, Gérard Léonard, Jean-Louis Léonard, Jean-Antoine Leonetti, Arnaud Lepercq, Pierre Lequiller, Jean-Pierre Le Ridant, Céleste Lett, Édouard Leveau, Mme Geneviève Levy, M. Gérard Lorgeoux, Mme Gabrielle Louis-Carabin, MM. Lionnel Luca, Daniel Mach, Alain Madelin, Richard Mallié, Jean-François Mancel, Thierry Mariani, Hervé Mariton, Mme Muriel Marland-Militello, MM. Alain Marleix, Jean Marsaudon, Mme Henriette Martinez, MM. Patrice Martin-Lalande, Philippe Martin (51), Alain Marty, Jacques Masdeu-Arus, Jean Claude Mathis, Pierre Méhaignerie, Christian Ménard, Alain Merly, Denis Merville, Damien Meslot, Gilbert Meyer, Pierre Micaux, Jean-Claude Mignon, Mme Marie-Anne Montchamp, M. Pierre Morange, Mme Nadine Morano, MM. Pierre Morel-A-L'Huissier, Jean-Marie Morisset, Étienne Mourrut, Alain Moyne-Bressand, Jacques Myard, Jean-Marc Nesme, Jean-Pierre Nicolas, Yves Nicolin, Hervé Novelli, Jean-Marc Nudant, Patrick Ollier, Dominique Paillé, Mme Françoise de Panafieu, M. Robert Pandraud, Mmes Béatrice Pavy, Valérie Pecresse, MM. Jacques Pélissard, Philippe Pemezec, Pierre-André Périssol, Bernard Perrut, Christian Philip, Etienne Pinte, Michel Piron, Serge Poignant, Mme Bérengère Poletti, M. Axel Poniatowski, Mme Josette Pons, MM. Daniel Poulou, Daniel Prévost, Christophe Priou, Jean Proriol, Didier Quentin, Michel Raison, Mme Marcelle Ramonet, MM. Jean-François Régère, Frédéric Reiss, Jean-Luc Reitzer, Jacques Remiller, Marc Reymann, Dominique Richard, Mme Juliana Rimane, MM. Jérôme Rivière, Jean Roatta, Camille de Rocca Serra, Mme Marie-Josée Roig, MM. Jean-Marie Rolland, Vincent Rolland, Serge Roques, Philippe Rouault, Jean-Marc Roubaud, Michel Roumegoux, Max Roustan, Xavier de Roux, Martial Saddier, Francis Saint-Léger, Frédéric de Saint-Sernin, André Samitier, François Scellier, André Schneider, Bernard Schreiner, Jean-Marie Sermier, Georges Siffredi, Yves Simon, Jean-Pierre Soisson, Michel Sordi, Frédéric Soulier, Daniel Spagnou, Alain Suguenot, Mmes Michèle Tabarot, Hélène Tanguy, MM. Jean-Charles Taugourdeau, Guy Teissier, Michel Terrot, Mme Irène Tharin, MM. André Thien Ah Koon, Jean-Claude Thomas, Dominique Tian, Jean Tiberi, Alfred Trassy-Paillogues, Georges Tron, Jean Ueberschlag, Léon Vachet, Christian Vanneste, François Vannson, Mme Catherine Vautrin, M. Alain Venot, Mme Béatrice Vernaudon, MM. Jean-Sébastien Vialatte, René-Paul Victoria, Philippe Vitel, Gérard Voisin, Michel Voisin, Gérard Weber, Éric Woerth et Michel Zumkeller.
    Abstention : 1. - M. François Cornut-Gentille.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (148) :     Contre : 143. - Mme Patricia Adam, M. Damien Alary, Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, MM. Jean-Marie Aubron, Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Eric Besson, Jean-Louis Bianco, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Patrick Bloche, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Marcel Cabiddu, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Michel Charzat, Alain Claeys, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mme Claude Darciaux, M. Michel Dasseux, Mme Martine David, MM. Jean-Pierre Defontaine, Marcel Dehoux, Michel Delebarre, Jean Delobel, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Julien Dray, Tony Dreyfus, Pierre Ducout, Jean-Pierre Dufau, Jean-Louis Dumont, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Henri Emmanuelli, Claude Evin, Laurent Fabius, Albert Facon, Jacques Floch, Pierre Forgues, Michel Françaix, Jean Gaubert, Mmes Nathalie Gautier, Catherine Génisson, MM. Paul Giacobbi, Joël Giraud, Jean Glavany, Gaétan Gorce, Alain Gouriou, Mmes Elisabeth Guigou, Paulette Guinchard-Kunstler, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Serge Janquin, Armand Jung, Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Jean-Yves Le Drian, Michel Lefait, Patrick Lemasle, Guy Lengagne, Mme Annick Lepetit, MM. Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Bernard Madrelle, Louis-Joseph Manscour, Philippe Martin (32), Christophe Masse, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Arnaud Montebourg, Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget, MM. Michel Pajon, Christophe Payet, Germinal Peiro, Jean-Claude Perez, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Jean-Jack Queyranne, Paul Quilès, Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, MM. Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Mme Ségolène Royal, M. Michel Sainte-Marie, Mme Odile Saugues, MM. Roger-Gérard Schwartzenberg, Henri Sicre, Dominique Strauss-Kahn, Mme Christiane Taubira, MM. Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Daniel Vaillant, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vergnier, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 24. - MM. Jean-Pierre Abelin, Pierre Albertini, Gilles Artigues, Pierre-Christophe Baguet, Bernard Bosson, Mme Anne-Marie Comparini, MM. Charles de Courson, Jean Dionis du Séjour, Philippe Folliot, Gilbert Gantier, Francis Hillmeyer, Olivier Jardé, Yvan Lachaud, Claude Leteurtre, Hervé Morin, Nicolas Perruchot, Jean-Luc Préel, François Rochebloine, Rudy Salles, André Santini, François Sauvadet, Rodolphe Thomas, Francis Vercamer et Gérard Vignoble.
    Contre : 1. - M. Jean-Christophe Lagarde.
    Abstention : 1. - M. Stéphane Demilly.
Groupe communistes et républicains (21) :
    Contre : 19. - MM. François Asensi, Gilbert Biessy, Alain Bocquet, Patrick Braouezec, Jacques Brunhes, Mme Marie-George Buffet, MM. André Chassaigne, Jacques Desallangre, Frédéric Dutoit, Mme Jacqueline Fraysse, MM. Pierre Goldberg, Georges Hage, Mmes Muguette Jacquaint, Janine Jambu, MM. Jean-Claude Lefort, François Liberti, Daniel Paul, Jean-Claude Sandrier et Michel Vaxès.
Non-inscrits (13) :
    Pour : 2. - MM. Patrick Balkany et Philippe de Villiers.
    Contre : 4. - Mmes Huguette Bello, Martine Billard, MM. Noël Mamère et Pierre-Jean Samot.
    Abstentions : 4. - MM. Gérard Charasse, Alfred Marie-Jeanne, François-Xavier Villain et Emile Zuccarelli.