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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 14 MAI 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mardi 13 mai 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Questions au Gouvernement «...».

RÉFORME DES RETRAITES «...»

MM. Alain Bocquet, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

RÉFORME DES RETRAITES «...»

MM. Mansour Kamardine, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

RÉFORME DES RETRAITES «...»

MM. Jean-Marc Ayrault, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

RÉFORME DES RETRAITES «...»

MM. Maurice Leroy, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

JOURNÉES DE LA DÉFENSE NATIONALE «...»

M. Camille de Rocca Serra, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense.

INSUFFISANCE DES INDEMNITÉS VERSÉES PAR LE FIPOL «...»

M. Daniel Poulou, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.

RÉFORME DES RETRAITES «...»

Mme Paulette Guinchard-Kunsler, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE ROUTIÈRE «...»

MM. Daniel Fidelin, Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice.

LUTTE CONTRE L'INSÉCURITÉ ROUTIÈRE «...»

MM. André Samitier, Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

RÉFORME DES RETRAITES «...»

MM. Jean Le Garrec, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

AVENIR DE L'ÉCOLE NATIONALE DE LA SANTÉ PUBLIQUE
DE RENNES «...»

MM. Philippe Rouault, Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

APPRENTISSAGE DE LA LECTURE AU CP «...»

Mme Cécile Gallez, M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

Suspension et reprise de la séance «...»

2.  Chasse. - Discussion d'un projet de loi «...».
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.
M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur de la commission des affaires économiques.
M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques.

PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC
Rappel au règlement «...»

MM. Maxime Gremetz, le président.

EXCEPTION D'IRRECEVABILITÉ «...»

Exception d'irrecevabilité de M. Alain Bocquet : M. Maxime Gremetz, Mme la ministre, MM. François Liberti, Christian Estrosi, Charles de Courson, Jean-Paul Chanteguet. - Rejet par scrutin.

QUESTION PRÉALABLE «...»

Question préalable de M. Jean-Marc Ayrault : M. Jean-Paul Chantgeguet, Mme la ministre, MM. Charles de Courson, Jean-Pierre Decool. - Rejet.

DISCUSSION GÉNÉRALE «...»

MM. Charles de Courson, François Liberti, Alain Gest, Pierre Ducout.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
3.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Nous commençons par une question du groupe des député-e-s communistes et républicains.

RÉFORME DES RETRAITES

    M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet.
    M. Alain Bocquet. Monsieur le Premier ministre, « ce n'est pas la rue qui gouverne », préveniez-vous la semaine dernière à la télévision.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Eh oui ! C'est vrai !
    M. le président. Laissez M. Bocquet terminer !
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Il a fini ! (Sourires.)
    M. Alain Bocquet. Certes, mais on a déjà vu la rue contester si fort les choix de certains gouvernements qu'elle les a fait chuter.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ça vous ferait plaisir, n'est-ce pas ?
    M. Richard Cazenave. On peut rêver !
    M. Alain Bocquet. Aujourd'hui, dans toute la France, le rejet de votre projet de réforme des retraites est massif, puissant et déterminé.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Mais non !
    M. Alain Bocquet. La grève est largement suivie, autant dans le secteur public que dans le privé.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Pas tant que ça !
    M. Alain Bocquet. On annonce plus de un million et demi de personnes...
    M. Jean-Claude Abrioux. ... selon les organisateurs !
    M. Alain Bocquet. ... dans les manifestations qui se déroulent dans plus d'une centaine de villes du pays. Depuis décembre 1995 - cela vous rappelle sans doute quelque chose -, on n'a jamais connu une telle mobilisation du monde du travail, des retraités et des jeunes, face à votre obstination rétrograde : d'après un sondage, 64 % des Françaises et des Français approuvent cette journée d'action.
    M. Richard Cazenave. Si c'est un sondage !
    M. Alain Bocquet. Les députés communistes et républicains sont naturellement aux côtés de ceux qui refusent le recul social,...
    M. Yves Nicolin. Baratin !
    M. Alain Bocquet. ... pire, le recul de civilisationqu'initie votre projet. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Les salariés n'acceptent pas de travailler plus longtemps aujourd'hui...
    M. Edouard Landrain. Et les jeunes ? Et vos enfants ?
    M. Alain Bocquet. ... pour gagner moins demain en retraite, tout en étant les cibles privilégiées des licenciements, alors que leurs enfants ou petits-enfants resteront au chômage.
    M. Yves Nicolin. Démago !
    M. Alain Bocquet. Ils savent que les bénéfices financiers et boursiers des grandes sociétés (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), que l'accumulation des richesses et la spéculation pour les seuls privilégiés de la finance permettent d'envisager une autre réforme des retraites, avec une meilleure répartition et une solidarité plus large si d'autres choix économiques sont faits.
    M. Edouard Landrain. Il fallait le faire !
    M. Alain Bocquet. Ils veulent leur part du progrès, de l'accroissement de la productivité et des richesses auxquelles ils contribuent. La grande journée de grève et de manifestations de ce mardi n'est qu'un début.
    M. le président. Monsieur Bocquet, veuillez poser votre question, M. Nicolin s'impatiente. (Sourires.)
    M. Alain Bocquet. J'ai été constamment interrompu, monsieur le président, ce n'est pas acceptable.
    M. le président. Vous avez cherché quelques interruptions.
    M. Alain Bocquet. Non.
    M. le président. Poursuivez, monsieur Bocquet.
    M. Alain Bocquet. Monsieur le Premier ministre, retirez donc purement et simplement ce projet dicté par le MEDEF (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française), acceptez d'ouvrir le chantier d'une autre réforme plus moderne, plus équitable, plus progressiste, élaborée en accord avec les représentants du monde du travail. Ce n'est pas l'argent qui manque dans notre pays pour sauver les retraites d'aujourd'hui et de demain. Encore faut-il avoir le courage de le prélever là ou il est. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. Alain Bocquet. Pas au Premier ministre ?
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président Bocquet, je suis d'accord avec vous sur un point : il y a un mouvement social important autour des retraites.
    Mme Martine David. Vous pouvez le dire !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement le respecte et l'écoute. Mais ma première pensée ira, cet après-midi, à tous ceux qui en ont été les victimes (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), qui n'ont pas pu rejoindre leur travail ce matin, faire garder leurs enfants, faire fonctionner leurs entreprises.
    M. Alain Bocquet. Démago !
    Mme Martine David. C'est facile !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Bien souvent, ceux-là sont les salariés des petites entreprises qui seraient les premières victimes si jamais nous ne faisions pas de réforme des retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Nous allons continuer à discuter avec les organisations syndicales, comme nous le faisons depuis plus de trois mois. Nous écoutons les Français qui manifestent, nous écoutons aussi ceux qui ne manifestent pas, qui ne sont pas moins nombreux, et qui expriment néanmoins leur inquiétude sur l'avenir des retraites et souhaitent un effort partagé pour sauver nos régimes de retraite...
    M. Pierre Hellier. Absolument, et ils sont nombreux !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... qui sont aujourd'hui menacés, d'abord, par les évolutions démographiques, mais aussi, il faut bien le dire, par l'immobilisme de ces dernières années.
    M. Edouard Landrain. Eh oui !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Les Français souhaitent plus de justice sociale.
    Mme Martine David. Pas la vôtre !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Qui peut encore, aujourd'hui, accepter qu'il y ait, face à la retraite, deux catégories de Français : ceux qui cotisent trente-sept ans et demi et ceux qui cotisent quarante ans ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Si nous sommes ouverts à la discussion sur beaucoup de sujets, il y a un point, monsieur le président, sur lequel nous n'entendons pas revenir, c'est l'harmonisation de la durée de cotisation entre le secteur public et le secteur privé à l'horizon 2008. Cette mesure de justice sociale permettra aux fonctionnaires de conserver intégralement le niveau de leur retraite d'aujourd'hui, à condition de travailler deux ans et demi de plus, soit aussi longtemps que tous les autres Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Edouard Landrain. Très bien !
    Mme Martine David. C'est faux ! Mensonges !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il est un autre sujet sur lequel le Gouvernement est décidé à ne pas revenir : c'est celui des régimes spéciaux, dont j'ai vu qu'il suscite de nombreuses manifestations. En effet, ni aujourd'hui ni demain, ceux qui manifestent ne seront concernés par la réforme que nous proposons. Vous conviendrez avec moi que c'est une bonne raison pour ne pas ouvrir ce débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Edouard Landrain. Bien sûr !

RÉFORME DES RETRAITES

    M. le président. La parole est à M. Mansour Kamardine, pour le groupe Union pour un mouvement populaire.
    M. Mansour Kamardine. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    Monsieur le ministre, plusieurs syndicats appellent aujourd'hui à la mobilisation contre la réforme des retraites. Il est normal que les Français s'expriment sur cet important sujet de société. D'ailleurs, vous n'avez jamais cessé de prôner le dialogue, vous venez de le rappeler.
    Le mode d'expression des syndicats, qui ont choisi de descendre dans la rue, peut certes être compris, même si la forte mobilisation, notamment dans les transports, de personnels non concernés par les réformes du régime général peut nous conduire à nous interroger. Néanmoins, les études, rapports et raisonnements divers le montrent tous : notre système de retraite par répartition est menacé. Il n'y a donc qu'une seule possibilité si on veut le maintenir : il faut le réformer !
    Quant à vous, monsieur le ministre, vous avez une alternative. Soit vous cédez à la pression de la rue, ce que voudrait l'opposition, soit vous menez à bien cette réforme des régimes de retraite. Sachez que, en ce qui nous concerne, au sein du groupe de l'UMP, nous sommes décidés à vous soutenir dans cette rude tâche.
    Toutefois, face à la forte demande de dialogue qui s'exprime, nous aimerions savoir quelle sera, demain, votre attitude envers les syndicats. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, le Gouvernement a un devoir qui transcende les divisions partisanes et le clivage entre les générations : il doit sauver les retraites. Et je puis vous assurer qu'il ne s'arrêtera pas en chemin.
    M. Maxime Gremetz. Oh là, attention ! « Droit dans ses bottes » !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il vous présentera avant l'été une réforme de nos régimes de retraite. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Aujourd'hui, comme vous l'avez rappelé, beaucoup de Français manifestent. Mais il y en a aussi beaucoup qui ne le font pas. C'est la diversité de notre pays. Et le rôle du Gouvernement est de définir l'intérêt général pour l'ensemble des catégories qui expriment leurs revendications. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Aujourd'hui, j'ai entendu deux messages dans les rues de nos villes. Le premier émane de ceux qui ne veulent pas que la réforme des retraites aille à son terme. Autant le dire tout de suite : nous ne sommes pas prêts à l'entendre. Mais j'en ai entendu un autre, qui émane de tous ceux qui veulent améliorer le projet du Gouvernement et, à ceux-là, je le dis, nous sommes prêts à discuter.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. D'ailleurs, vous le savez, Jean-Paul Delevoye et moi, nous recevrons demain, à dix-huit heures, l'ensemble des confédérations pour poursuivre le dialogue. Nous sommes prêts à discuter de l'amélioration du projet sur la question des petites retraites, sur le minimum contributif, sur le cas des salariés qui ont commencé à travailler très jeunes et ont eu de très longues carrières (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française), sur la question de la prise, en compte, d'une manière ou d'une autre, des primes des fonctionnaires dans le calcul de la pension, avec la mise en place d'un régime supplémentaire, comme le suggère Jean-Paul Delevoye. (Mêmes mouvements.)
    M. Hervé de Charette. Très bien ! C'est important !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous sommes prêts à discuter de la question du rachat des années d'études, pour ceux qui commencent leur vie professionnelle tardivement (Mêmes mouvements) et, enfin, de la question essentielle de la progressivité de la réforme, notamment pour la fonction publique. Cette réforme doit en effet s'appliquer de telle manière que ceux qui sont proches de la retraite, qui ont déjà la retraite en ligne de mire, ne soient pas bousculés par les mesures que nous allons proposer.
    Mais je veux aussi vous dire, monsieur le député, que les Français doivent savoir que nous ne pourrons pas accepter que l'addition des propositions qui nous sont faites conduisent à des déséquilibres financiers plus graves que ceux que nous connaissons aujourd'hui.
    M. Richard Mallié. C'est l'évidence !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Notre objectif, c'est de faire une vraie réforme des retraites, qui sécurise pour l'avenir nos régimes par répartition.
    Je crois, monsieur le député, que le Gouvernement et la majorité pourront être fiers d'avoir enfin assumé la responsabilité de notre génération vis-à-vis des générations qui vont nous suivre. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

RÉFORME DES RETRAITES

    M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste.
    M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, la France est aujourd'hui paralysée et vous en êtes... (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Richard Mallié. Démago !
    M. Yves Nicolin. On croit rêver !
    M. le président. Je vous en prie, laissez M. Ayrault s'exprimer !
    M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, vous en êtes le seul responsable. (Mêmes mouvements.)
    M. Yves Nicolin. La faute à qui !
    M. le président. Continuez, monsieur Ayrault ! M. Nicolin va se taire !
    M. Jean-Marc Ayrault. Les millions de Français qui se lèvent ne sont pas contre la réforme, mais contre votre réforme. Ils ne défendent pas des privilèges, comme vous le faites en épargnant la rente, le patrimoine, le portefeuille boursier. Ils veulent préserver leur niveau de pension et la retraite à soixante ans.
    M. Yves Nicolin. Qu'avez-vous fait ?
    M. Jean-Marc Ayrault. Ils n'opposent pas le public et le privé, comme vous le faites. Ils veulent que chacun puisse cesser son activité dans des conditions décentes.
    M. Yves Nicolin. Que proposez-vous ?
    M. Jean-Marc Ayrault. Mais ce qu'ils ne supportent plus, c'est que vous les preniez pour des naïfs, en faisant croire que travailler plus longtemps pour gagner une retraite inférieure est un progrès social. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Yves Nicolin. Mensonge !
    M. Jean-Marc Ayrault. Ils ne supportent plus de constater que les sacrifices que vous exigez pèsent toujours sur les mêmes, les salariés, les retraités, les fonctionnaires, puisque vous refusez de rechercher d'autres financements. Ils ne supportent plus de voir que vous ignorez les métiers pénibles, la précarité, le chômage qui jalonnent une carrière. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Guy Teissier. Arrêtez !
    M. Richard Mallié. C'est lamentable !
    M. Jean-Marc Ayrault. Ils ne supportent plus que vous demandiez aux jeunes de porter une double charge...
    M. Yves Nicolin. C'est nul !
    M. Jean-Marc Ayrault. ... celle de financer la retraite de leurs aînés et celle de voir la leur diminuer.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Démago !
    M. Jean-Marc Ayrault. Ils ne supportent plus de savoir que vous ne les écoutez pas et que vous ne les comprenez pas.
    M. Guy Teissier. Nanti ! Faux cul ! Vous n'êtes pas leur porte-parole !
    M. Jean-Marc Ayrault. Cet après-midi, une fois de plus, vous en faites la démonstration. Quand on sait que l'Assemblée nationale, tout à l'heure, par la volonté du Gouvernement et de l'UMP, va débattre non pas des retraites mais de la chasse, il y a de quoi se poser des questions. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Démago !
    M. Richard Mallié. La chasse, c'est très important !
    M. le président. Calmez-vous ! Laissez M. Ayrault terminer !
    M. Jean-Marc Ayrault. Ce n'est pas facile, monsieur le président.
    Monsieur le Premier ministre, ce qui s'exprime aujourd'hui, ce n'est pas « la rue », comme vous le dites avec mépris, c'est le peuple de France. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Robert Lecou. Démago !
    M. Jean-Marc Ayrault. Oui, le peuple de France refuse que votre réforme brise une certaine idée de la solidarité et du pacte entre les générations. Comme en 1995, monsieur le Premier ministre, il n'y aura pas de consensus sur le recul social comme vous le proposez.
    M. Yves Nicolin. Jospin, au secours !
    M. Thierry Mariani. Qu'est-ce que vous avez fait, pendant cinq ans ? Rien !
    M. le président. Monsieur Mariani !
    M. Jean-Marc Ayrault. Vous pouvez, comme Alain Juppé, dire que ceux qui sont en grève ont tort et que les victimes sont les salariés usagers des services publics. Vous pouvez, monsieur le Premier ministre, passer en force en vous faisant applaudir, comme M. Juppé en 1995, par une écrasante majorité...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ayrault, zéro !
    M. Jean-Marc Ayrault. Je me souviens de cette majorité, debout dans l'hémicycle, acclamant M. Juppé. Si vous tombez dans ce piège, votre propre piège, vous aggraverez la fracture, car les Français ne demandent pas un petit marchandage, une concession ou un ajout : ils veulent une autre réforme, une vraie réforme. Etes-vous prêts à les écouter ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

    M. le président. Nous allons écouter dans le calme, chers collègues, la réponse de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    Mme Martine David. Il fallait demander le silence avant !
    M. le président. Vous avez la parole, monsieur le ministre.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, comme je viens de l'indiquer à deux reprises, le Gouvernement est ouvert à la discussion, avec les partenaires sociaux comme avec vous-mêmes.
    M. Maxime Gremetz. On le voit !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Mais, contrairement à ce que vous venez de dire, monsieur Ayrault, il n'y a pas d'alternative à la réforme que nous proposons.
    M. François Liberti et M. Pascal Terrasse. Si !
    M. Richard Mallié. Alors pourquoi ne l'avez-vous pas fait ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il n'y a pas d'autre solution qu'un effort partagé et équitable, réparti entre tous les Français, pour se préparer de manière responsable au retournement démographique qui pèse sur le financement des retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme Martine David. Vous appliquez la réforme du MEDEF !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Et vous le savez bien, monsieur Ayrault, car, avant 2002, M. Jospin, M. Hollande, M. Fabius, Mme Guigou, M. Rocard...
    Mme Martine David. Et M. Juppé ? Et M. Balladur ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... ont défendu tour à tour - je tiens les documents à votre disposition - l'allongement de la durée de cotisation pour financer les régimes des retraites,...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. Eh oui !
    M. Jacques Myard. Ils ont capitulé !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... ainsi que l'harmonisation entre le public et le privé.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. Eh oui !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. La majorité que vous représentiez alors a mis en application, pendant cinq ans, la réforme d'Edouard Balladur, tandis qu'elle avait abrogé la loi Thomas sur les pensions. Vous avez donc assumé la responsabilité qui avait été prise par le gouvernement précédent et qui a effectivement conduit à une baisse du taux de remplacement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Pierre Hellier. Absolument !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Cette même majorité a créé le Conseil d'orientation des retraites - excellente initiative, d'ailleurs, dont je vous félicite -, dont les conclusions sont exactement celles dont s'inspire aujourd'hui le Gouvernement pour proposer sa réforme des retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Monsieur Ayrault, à l'époque, vous aviez raison,...
    M. Maxime Gremetz. Non, ils avaient tort !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... car il n'y a pas d'alternative à cette réforme.
    D'ailleurs, quelles sont les propositions qui sont faites ?
    M. Pascal Terrasse. Nous vous les présenterons !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il y avait, d'abord, l'alternative de la capitalisation, qui n'est pas le choix que nous avons fait...
    Mme Martine David. Mais si, bien sûr que si !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... et qui, aujourd'hui, est impraticable, car il faudrait sacrifier deux générations pour faire monter en pression un tel système.
    Il y a ensuite la proposition de la retraite par points, moyen habile de dissimuler en réalité un système permettant de baisser de manière drastique le niveau des pensions,...
    M. Bernard Accoyer. Tout à fait !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... en fixant chaque année la valeur du point, comme le font d'ailleurs les partenaires sociaux dans la gestion des régimes complémentaires.
    Il y a enfin la fameuse solution de l'élargissement de l'assiette des cotisations (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), et ceux qui veulent taxer les bénéfices non-réinvestis des entreprises. (« Oui ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Monsieur Ayrault, outre le fait que ce serait irresponsable par rapport à la situation de l'économie et de l'emploi de notre pays, quelle serait la sécurité d'un système de retraite qui serait fondé sur des recettes aussi fluctuantes et aussi mobiles que les bénéfices des entreprises ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Monsieur Ayrault, je crois que, pour le parti socialiste, il n'est pas trop tard, pour revenir à un peu plus de cohérence sur cette question des retraites, voire à un peu plus de décence. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Richard Cazenave. Ayrault, zéro !

RÉFORME DES RETRAITES

    M. le président. La parole est à M. Maurice Leroy, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Maurice Leroy. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, tout le monde voit bien que la réforme des retraites est un rendez-vous crucial pour la France. Et, je le dis après avoir entendu les orateurs qui m'ont précédé, je pense que ce rendez-vous mérite mieux que des invectives ou des jugements polémiques. Aucun d'entre nous ne devrait oublier le 21 avril. Il faut que cette réforme réussisse.
    Pour l'UDF, la réforme réussira si les Françaises et les Français ont la certitude qu'elle est juste. Pour l'UDF, la justice, c'est d'abord le principe de l'égalité des Françaises et des Français devant la retraite. Nos concitoyens doivent avoir les mêmes obligations et les mêmes droits, quel que soit leur régime de retraite. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    La justice, c'est ensuite l'équité, c'est-à-dire la prise en compte des situations exceptionnelles. Pour l'UDF - et je suis heureux, monsieur le ministre des affaires sociales, que vous ayez avancé des propositions constructives, auxquelles nous sommes favorables -, les métiers pénibles et usants doivent pouvoir bénéficier d'un départ à la retraite anticipé, et les salariés qui ont travaillé très tôt doivent pouvoir partir avec une retraite à taux plein au bout de leurs quarante années de cotisation. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
    La justice, c'est enfin que la retraite minimale permette une vie décente. C'est pourquoi nous défendons le principe d'une retraite minimale à 90 % du SMIC. Monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre des affaires sociales, êtes-vous prêts à intégrer ces propositions de justice et d'équité dans votre projet de loi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Leroy, je voudrais d'abord vous remercier du soutien que vous apportez à la réforme (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) que le Gouvernement est en train de construire pas à pas avec les partenaires sociaux, puis, lorsque nous allons entrer dans le débat parlementaire, avec chacun d'entre vous.
    Je vous remercie de soutenir l'architecture de cette réforme, et en particulier l'idée d'un effort partagé, équitable pour tous les Français, qui portera à la fois sur l'allongement de la durée de cotisation...
    M. Maxime Gremetz. Et sur la baisse des pensions !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... solution choisie dans tous les pays européens sans aucune exception, et sur une augmentation des cotisations qui viendra en son temps, lorsque, du fait du retournement démographique, nous pourrons enregistrer une baisse des cotisations chômage.
    Vous soulevez d'abord la question de la pénibilité. Il faut - et l'ensemble des partenaires sociaux acceptent cette solution - que cette question soit traitée par les partenaires sociaux eux-mêmes, dans chaque branche. Et d'une certaine manière, comme c'est le cas dans le domaine de l'environnement, où le pollueur doit payer,...
    M. Michel Lefait. Comme le FIPOL ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... il faudra que dans les branches, ceux qui font travailler des salariés dans des conditions difficiles soient amenés, d'une manière qui sera mutualisée, à financer le surcoût occasionné par le départ anticipé à la retraite de ceux qui ont un métier pénible.
    M. Richard Cazenave. Très bien !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Votre deuxième question porte sur les petites pensions et sur leur montant minimum.
    Je vous ai dit tout à l'heure que le Gouvernement s'était engagé sur un taux de 75 % du SMIC. Naturellement, nous sommes ouverts à la discussion sur ce sujet, pour peu qu'on trouve des solutions financières qui n'aggravent pas le déficit de l'assurance vieillesse. Pourquoi 75 % ? Parce que c'est un plancher qui avait déjà été retenu à plusieurs reprises, et en particulier pour les retraites agricoles, et, si vous me le permettez, monsieur Leroy, parce que c'était un chiffre qui avait été retenu par François Bayrou dans la campagne présidentielle (Exclamations sur divers bancs.) Mais nous sommes prêts à le faire évoluer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

JOURNÉES NATION-DÉFENSE

    M. le président. La parole est à M. Camille de Rocca Serra, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Camille de Rocca Serra. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la défense.
    Madame la ministre, la semaine dernière se sont déroulées, dans une centaine de villes de France, les premières Journées nation-défense. Sur de nombreux sites, les Français ont pu participer à des démonstrations et visites d'équipements militaires, et rencontrer les professionnels sur lesquels repose aujourd'hui la défense de notre pays. L'objectif de ces Journées organisées à votre initiative, était de mieux faire connaître l'armée au public et d'établir un dialogue entre les Français et les militaires. Il apparaît en effet essentiel de contribuer ainsi à une plus grande cohésion entre tous les citoyens et ceux d'entre eux qui sont appelés à les défendre.
    Madame la ministre, pouvez-vous nous présenter un bilan de ces Journées et nous faire part des initiatives que vous entendez développer à l'avenir pour renforcer encore le lien entre la nation et son armée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvenemt populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de la défense.
    Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur le député, effectivement, ces premières Journées ont été, je crois, un grand succès. Dans cent villes, les Français ont pu découvrir les matériels, les savoir-faire qui sont mis à disposition de nos militaires. Ils ont surtout pu engager le dialogue avec ces hommes et ces femmes qui, de l'Afghanistan à la Côte d'Ivoire ne passant par les Balkans, défendent nos valeurs et sont prêts à subir des contraintes, voire à sacrifier leur vie pour défendre nos concitoyens.
    Ainsi, 500 000 Français sont venus à la rencontre des militaires. Dans le même temps, 1,2 million d'entre eux se sont renseignés sur internet sur ce qui était proposé. C'est là la démonstration de l'intérêt et de l'attachement que les Français portent à leur armée.
    Dans le même temps, d'ailleurs, a eu lieu une initiative qui est peut-être passée plus inaperçue mais qui est très importante, je veux parler de la création des « réservistes jeunes », destinés à mener des actions, notamment en direction des quartiers difficiles, mais plus généralement en direction de toute la jeunesse, pour rapprocher les jeunes et l'armée. Là aussi, c'est une opération qui a été extrêmement valorisante et importante.
    Quelle sera la suite ? Pour renforcer ce lien entre la nation et les armées, il faut développer les réserves : la réserve opérationnelle, mais également la réserve citoyenne et ces réserves-jeunes. Il faut également faire de la JAPD, la Journée d'appel et de préparation à la défense, quelque chose de plus vivant, de plus complet et de plus moderne.
    Je crois que c'est ainsi, et au quotidien, que l'on renforcera les liens entre l'ensemble des Français et leurs armées, pour la plus grande satisfaction des uns et des autres. Et bien entendu, monsieur le député, il faudra aussi renouveler cette rencontre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

INSUFFISANCE DES INDEMNITÉS VERSÉES PAR LE FIPOL

    M. le président. La parole est à M. Daniel Poulou, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Daniel Poulou. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Grande est l'indignation de l'ensemble des élus de la côte atlantique et de tous les professionnels touchés par le naufrage du Prestige depuis l'annonce du montant de l'indemnisation proposée par le FIPOL.
    M. Patrick Ollier. Ils ont raison d'être indignés !
    M. Daniel Poulou. Seuls 15 % des dommages seront indemnisés. Le montant des indemnités demandées par la France, l'Espagne et le Portugal ainsi que les personnes privées touchées par le désastre s'élève à plus d'un milliard d'euros, alors que la somme disponible au FIPOL n'est que de 184 millions d'euros. Le FIPOL a donc seulement décidé de partager les fonds disponibles.
    Devant cet état de fait, vous avez demandé, madame la ministre, que la France ne sollicite pas d'indemnités tant que les personnes privées ne seront pas indemnisées. Ce geste est noble, mais le taux d'indemnisation reste faible eu égard aux dommages subis.
    Madame la ministre, qu'en est-il aujourd'hui de l'indemnisation des sinistrés ? Que compte faire le Gouvernement pour indemniser la totalité du préjudice causé par la catastrophe du Prestige ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député Daniel Poulou, le FIPOL est un fonds d'assurance alimenté par les contributions des pétroliers sur la base des importations par chaque pays, et le plafond d'indemnisations qu'il verse aux victimes des marées noires est d'environ 175 millions d'euros.
    En ce qui concerne la catastrophe du Prestige, nous avons une certitude, c'est que ce fonds ne sera pas suffisant pour couvrir les préjudices des victimes. Et nous avons une incertitude, c'est que nous ne connaissons pas le montant exact des factures. Les évaluations de l'Espagne fluctuent, selon les jours, entre un milliard et 300 millions d'euros. Et pour notre part, nous devrons attendre la fin de la saison touristique pour évaluer le dommage exact subi par les professionnels du tourisme et les industries dérivées.
    Que fait le Gouvernement ?
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Rien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Premièrement, les dispositions que nous avons prises nous ont permis de nettoyer les plages dès l'arrivée de la marée noire. Et je veux dire aux Français qui nous écoutent que nos plages atlantiques sont propres, aussi bien en Aquitaine qu'en Bretagne. Vous pouvez aller en vacances sur les plages d'Aquitaine et de Bretagne. C'est le point le plus important. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Goulard. Très bien !
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Et sur celles des Pays de la Loire !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Et également sur celles des Pays de la Loire, m'indique le ministre des affaires sociales.
    M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Et sur celles de Poitou-Charentes !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Et sur celles de Poitou-Charentes, me dit Dominique Bussereau.
    M. le président. Bon, passons sur la géographie !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Deuxièmement, nous renforçons, avec Gilles de Robien et Dominique Bussereau, le dispositif de sécurité maritime. Aujourd'hui, 25 % des bâtiments dangereux sont effectivement inspectés. Nous avons éloigné de nos côtes plus de cinquante bateaux « voyous » qui risquaient de les polluer.
    Et bien sûr, nous poursuivons la négociation avec le FIPOL. Celui-ci est aujourd'hui même réuni à Londres dans le cadre d'une conférence diplomatique que je suis très attentivement, pour relever le plafond d'indemnisation, comme l'a demandé la France, et à sa suite l'Union européenne, et le porter de 175 millions à 275 millions au 1er novembre 2003, puis, comme nous l'exigeons, à un milliard d'euros. De plus, ainsi que vous l'avez indiqué, monsieur Daniel Poulou, l'Etat s'effacera devant les créanciers individuels pour hâter le processus d'indemnisation. Car vous avez raison : le seul taux d'indemnisation convenable, c'est 100 %. Le taux de 15 % est absolument honteux et inacceptable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

RÉFORME DES RETRAITES

    M. le président. La parole est à Mme PauletteGuinchard-Kunstler, pour le groupe socialiste.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Monsieur le Premier ministre, progressivement, les masques tombent. Les Français s'aperçoivent que votre politique économique et sociale n'est pas celle qu'ils espéraient. Qu'il s'agisse de l'emploi, de l'éducation ou des retraites, les Français portent un jugement très négatif sur votre action.
    M. Charles Cova. Vous n'avez pas de leçons à nous donner !
    M. Richard Cazenave. Les Français, ils se prononcent lors des élections !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Petit à petit, vous remettez en cause des éléments fondamentaux du pacte social. L'avenir des retraites n'est ni de droite, ni de gauche, dites-vous (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Le gouvernement de gauche n'a rien fait !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ... mais votre réforme, elle, est clairement contre les revenus modestes. Vous ne proposez aux Français qu'une seule chose : travailler plus longtemps. Vous vous gardez bien de leur dire - à part pour les toutes petites pensions, et encore, de manière scandaleusement insuffisante - quel sera le montant de leur pension lorsqu'ils seront en retraite.
    M. Bernard Accoyer. Et vous, qu'avez-vous fait ?
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. En refusant cet engagement sur le niveau des retraites, de toutes les retraites, vous rompez le pacte social entre les générations et entre les Français, vous fragilisez l'activité économique, ce que vous savez fort bien, et surtout, vous préparez un bien mauvais vieillissement à une grande majorité de Français. En réalité, votre objectif est clair : vous réduisez les pensions à la portion congrue pour mieux ouvrir la porte au financement individuel et privé, donc à la capitalisation.
    M. Lucien Degauchy. Mais non ! C'est tout le contraire !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Il y a d'autres solutions : un financement plus juste, un effort particulier pour ceux qui exercent des métiers pénibles, une prise en compte des inégalités d'espérance de vie.
    La question principale que se posent les Français est celle du montant de leur retraite. Ils attendent une réponse précise, monsieur le Premier ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Edouard Landrain. Il fallait la leur donner quand vous étiez au pouvoir !
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Cette réponse, madame la députée, vous allez me permettre de la leur donner, puisque la réforme que nous proposons, et qu'apparemment vous n'avez pas lue,...
    Mme Martine David. Soyez modeste !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... permet, en allongeant la durée de cotisation de manière très progressive - moins que dans les autres pays européens d'ailleurs -, et pour tenir compte de l'allongement de la durée de la vie, de maintenir le niveau des pensions, ce que ne permet pas la situation actuelle. La vérité c'est que si nous ne faisons pas de réforme, le niveau des pensions des Français va chuter de près de 50 % en 2020.
    M. Jean-Claude Lenoir. Eh oui ! Il faut le dire !
    M. Richard Mallié. Mais les socialistes le savent depuis longtemps !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Avec la réforme que nous proposons, le niveau des pensions des Français sera maintenu. Aujourd'hui, le revenu moyen des retraités est égal au revenu moyen des actifs. (« C'est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Eh bien, dans les vingt ans qui viennent, le revenu moyen des retraités va continuer d'augmenter,...
    Mme Martine David. Mensonge !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... de l'ordre du montant du coût de la vie, ce qui permet d'assurer un haut niveau de retraite, alors qu'aujourd'hui, finalement, la catégorie de Français qui est la plus fragilisée du point de vue des revenus, c'est la catégorie des jeunes, sur qui justement nous ne voulons pas faire peser des cotisations supplémentaires qui viendraient encore aggraver leur situation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Vous oubliez, madame la députée, dans votre réquisitoire, que le Gouvernement, au 1er juillet, va proposer une augmentation du salaire minimum qui...
    Mme Martine David. Il y est obligé !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Oui, il y est obligé par les inconséquences de la loi sur les 35 heures. Ça c'est vrai ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Cette augmentation, disais-je, sera la plus importante qu'on ait connue depuis des années et des années. Contrairement à ce que j'entends dire régulièrement sur vos bancs, et qui sera démenti de la manière la plus absolue par les faits, la très grande majorité des personnes qui sont aujourd'hui au SMIC vont connaître une augmentation du salaire minimum entre 5 % et 6 % au 1er juillet prochain. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Quant à l'idée, enfin, selon laquelle notre réforme ouvrirait la porte à des systèmes de financement individuels, que vous combattez, il faut savoir, madame - et là je reprends les propos de Michel Rocard -, que la France est aujourd'hui le pays où il y a le plus d'épargne retraite : 700 milliards d'euros d'assurance vie qui sont souscrits par les Français, dans des conditions qui ne sont absolument pas transparentes et absolument pas sécurisées. Nous voulons, nous, les sécuriser,...
    Mme Martine David. Avec la Bourse ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... en allant d'ailleurs dans le sens qu'avait choisi la majorité précédente - et en particulier M. Fabius -, qui avait mis en place les plans d'épargne salarié. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Christian Bataille. Vous n'avez pas répondu !

LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE ROUTIÈRE

    M. le président. La parole est à M. Daniel Fidelin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Daniel Fidelin. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
    Monsieur le ministre, la lutte contre la délinquance routière, qui constitue l'une des priorités du Gouvernement, paraît encore se heurter à certains obstacles. Je veux parler de ceux liés à l'espace judiciaire européen. Bien souvent, en effet, des sanctions prononcées dans un Etat membre de l'Union européenne et qui doivent être exécutées dans un autre Etat membre s'avèrent difficilement applicables, voire inappliquées, faute d'harmonisation et d'accords entre Etats.
    Il en va ainsi tout particulièrement du recouvrement des amendes. La semaine dernière, avec vos homologues de l'Union européenne, vous avez dégagé un accord sur le principe d'une reconnaissance mutuelle des amendes concernant une trentaine d'infractions, dont les délits routiers.
    M. Maxime Gremetz. Bridons les voitures ! Assez d'hypocrisie !
    M. le président. Monsieur Gremetz !
    M. Daniel Fidelin. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser la portée de cet accord et les dispositions que vous entendez faire adopter pour apporter une solution à ces difficultés et assurer une plus grande efficacité aux sanctions prononcées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Monsieur Gremetz, je vous demande de laisser les autres parler !
    M. Guy Teissier. Nous ne sommes pas au Soviet suprême, ici !
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, effectivement, le 8 mai dernier, avec mes collègues ministres de la justice européens, nous sommes parvenus à un accord politique sur le système des sanctions financières entre Etats membres de l'Union, ce qui va permettre, en clair, une chose très simple : il existe enfin un espace judiciaire unique européen pour les sanctions à caractère financier.
    Comment les choses vont-elles fonctionner ? Lorsque, par exemple, un ressortissant d'un pays étranger commettra une infraction routière sur une route ou une autoroute française, s'il est sanctionné par une amende supérieure à soixante-dix euros, la justice française enverra cette décision dans le pays de ce ressortissant, et l'exécution sera automatique. Il ne sera pas nécessaire de procéder à une nouvelle décision à caractère judiciaire dans le pays considéré.
    Cela veut dire qu'enfin le traitement de toute une série de délits et de contraventions sera le même pour tous les citoyens européens. Cela me paraît extrêmement positif pour la construction de l'Europe, et nous ne pouvons que nous réjouir de cet accord politique qui sera validé dans quelques semaines ou quelques mois, pour être ensuite intégré dans les législations nationales. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

LUTTE CONTRE L'INSÉCURITÉ ROUTIÈRE

    M. le président. La parole est à M. André Samitier, pour le groupe de l'UMP.
    M. André Samitier. Monsieur le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, sous l'impulsion du Président de la République, le Gouvernement s'est attaqué énergiquement au problème de la lutte contre l'insécurité routière en en faisant l'un des trois grands chantiers de son quinquennat.
    Dès son arrivée, il a pris de nombreuses mesures en termes de prévention, de contrôle et de sanctions pour faire face aux dangers de la route et le Parlement examine actuellement le projet de loi relatif à la lutte contre la violence routière. Depuis quatre mois, les chiffres ont révélé une forte baisse du nombre de tués sur la route. Cette tendance semble s'être poursuivie au cours du mois d'avril, le week-end pascal notamment a été le moins meurtrier depuis quarante ans.
    Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer cette tendance et nous détailler les résultats ?
    M. Maxime Gremetz. Oui, il peut le faire !
    M. André Samitier. Par ailleurs, pouvez-vous nous dire quelle analyse vous tirez de l'étude de ces chiffres ?
    M. Maxime Gremetz. Il peut le dire !
    M. André Samitier. Révèlent-ils un changement de comportement des conducteurs ?
    Pour que ces résultats s'inscrivent dans la durée, il paraît nécessaire de ne pas ralentir les efforts. Avez-vous des perspectives d'action, notamment dans le domaine de la prévention et plus particulièrement envers la jeunesse ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur Samitier, vous avez raison, les résultats du mois d'avril 2003 confirment la tendance qui s'esquissait depuis l'été 2002, puisque, au cours de ce mois, si 405 personnes ont trouvé la mort sur la route, il y a eu quand même 175 vies sauvées par rapport au mois d'août 2002. Le nombre d'accidents a baissé, de même que celui des victimes corporelles, ce qui a permis d'éviter 2 641 hospitalisations. Malgré tout, plus de 10 000 personnes ont encore été blessées sur les routes durant ce même mois. Il n'est donc pas question de relâcher nos efforts.
    Le Gouvernement a d'ailleurs commandé une campagne de communication intitulée « On n'a aucune bonne raison d'aller vite ». Ce spot, que vous avez sans doute déjà vu, s'adresse bien sûr aux contrevenants et autres délinquants de la route qui subsistent.
    Par ailleurs, pour célébrer ses vingt ans d'existence, la Ligue contre la violence routière organise jeudi et vendredi prochains l'opération « 24 heures pour sauver 24 vies ». En nous associant à cette action, et notamment à la minute de silence qui sera suivie dans les écoles en souvenir des victimes de la violence routière, je pense que nous ferions, mesdames, messieurs les parlementaires, une bonne action. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Enfin, l'application du projet de loi que j'ai défendu avec Dominique Perben devant l'Assemblée nationale et le Sénat devrait nous permettre d'enregistrer d'autres résultats. Ce projet organise davantage de coercition, mais il prévoit aussi la mise en place d'un permis probatoire.
    Nous attendons de toutes ces mesures une amélioration de la sécurité routière pour rendre la route plus sûre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

RÉFORME DES RETRAITES

    M. le président. La parole est à M. Jean Le Garrec, pour le groupe socialiste.
    M. Jean Le Garrec. Monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, je souhaite à mon tour vous interroger, avec beaucoup de gravité et de calme - comme celui dont font preuve les millions de citoyennes et de citoyens qui manifestent aujourd'hui - sur le problème extrêmement grave des retraites.
    Dans une proportion de 71 %, les salariés sont hostiles à votre projet. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

    M. Charles Cova. Ils sont manipulés !
    M. Thierry Mariani. Qu'avez-vous fait ?
    M. Jean Le Garrec. Je vous demande, monsieur le ministre, d'éviter d'utiliser certains mots.
    Vous parlez de la « cohérence » ? Nous vous ferons part, le moment venu, de nos propositions alternatives. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous contestons par ailleurs vos chiffres.
    M. Jean-Paul Anciaux. Ils sont responsables !
    M. Jean Le Garrec. Et nous vous prouverons leur inexactitude.
    Monsieur le ministre, n'utilisez pas des mots comme « indécence » : c'est insultant et déplacé. Le projet mérite d'autres vocables et d'autres arguments.
    Il est injuste. En outre - et c'est assez étonnant -, il n'est même pas équilibré pour 2008. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous comptez le financer par un transfert des cotisations chômage vers les retraites. C'est un pari plus que risqué.
    Mme Martine David. C'est sûr !
    M. Jean Le Garrec. Les résultats de votre politique de l'emploi le confirment aujourd'hui.
    Vous refusez d'alimenter le fonds de réserve de façon durable et pérenne, ce qui permetrait de gommer une grande partie des difficultés.
    M. Richard Mallié. Vous ne l'avez pas fait pendant ces cinq ans !
    M. Jean Le Garrec. Vous proposez un redéploiement des prélèvements obligatoires, sans donner aucun élément chiffré. En définitive, monsieur le ministre, et c'est là tout le débat, vous faites peser l'essentiel de l'effort sur les salariés du privé et du public. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Richard Mallié. Parce qu'il y en a d'autres ?
    M. Jean Le Garrec. Cette absence de « cohérence » - je vous renvoie le mot - dans le financement montre que vous avez bien d'autres idées en tête, vous voulez faire entrer par la fenêtre les fonds de pensions auxquels nous avions fermé la porte, lesquels renforceront encore les inégalités. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Quelle véritable garantie apportez-vous ? Injustice aujourd'hui, non-maîtrise de l'ensemble de votre projet pour l'avenir, voilà ce que les citoyennes et les citoyens refusent, et ce que nous combattrons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Bernard Accoyer. Quel culot !
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Le Garrec, je veux vous dire, avec la même gravité et avec le même calme, que nous serions très curieux de connaître le projet alternatif du parti socialiste. (« Absolument ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Si vous voulez que nous puissions le prendre en compte dans la construction de la réforme, il ne faudrait pas tarder car nous avons l'intention de déposer le projet de loi au conseil des ministres dans quinze jours. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    En ce qui concerne la cohérence des positions du Parti socialiste sur les retraites, je ne souhaite pas, monsieur Le Garrec, que vous m'obligiez à lire devant vous (« Si » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) les déclarations de Lionel Jospin, le 21 mars 2000 : « Il pourrait être envisagé de prendre en compte, et en contrepartie de l'allongement de la durée de cotisation, une partie des primes des fonctionnaires dans le calcul. » (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Martine David. Et alors ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ou celles de François Hollande, en avril 2002 : « Il faut discuter de l'allongement de la durée de cotisation. »
    Mme Martine David. Ce n'est pas la question.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ou celles, toujours, de François Hollande, à RTL, en 2000 : « La formule qui nous paraît la mieux à même de maintenir le niveau des salaires d'aujourd'hui et des retraites de demain, c'est effectivement un allongement progressif de la durée de cotisation. » (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Ou encore celles de Laurent Fabius, le 20 mars 2000 : « Je crois que l'on doit aller vers une certaine harmonisation entre les différents régimes, régime général et régime fonctionnaire. » (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Michel Herbillon. Encore !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, vous affirmez que nous n'allons pas abonder le fonds de réserve. C'est faux. Nous allons l'abonder. Nous l'avons déjà fait, d'ailleurs, quasiment à la même hauteur que vous et nous allons continuer à le faire.
    M. Bernard Accoyer. Très bien !
    M. Jean Le Garrec. C'est là-dessus que doit porter le débat.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le fonds s'élève à 13 milliards d'euros aujourd'hui, et le projet de loi prévoira son abondement.
    L'Assemblée doit cependant savoir que le fonds de réserve n'a d'utilité qu'entre 2020 et 2040 tandis que la réforme que nous proposons doit permettre d'aller jusqu'en 2020. Le fonds de réserve ne sera utile, le cas échéant, pour lisser les retraites, qu'après cette date.
    M. Bernard Accoyer. Très bien !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Quant la critique que vous nous faites de trop miser sur la baisse du chômage, on ne peut pas, monsieur le député, demander aux Français un effort supplémentaire parce qu'il va y avoir un retournement démograpique et en même temps refuser qu'ils puissent bénéficier des avantages de ce retournement démographique. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean Le Garrec. Ce n'est pas ce que j'ai dit.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Quand 300 000 personnes supplémentaires partiront à la retraite à partir de 2006, alors même que les classes d'âge qui arriveront en activité seront des classes d'âge numériquement faibles, il y aura un effet mécanique.
    M. Maxime Gremetz. Ne vous avancez pas trop vite.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il ne sera peut-être pas aussi important que le Conseil d'orientation des retraites l'a imaginé. En tout cas, avec un taux de chômage moyen entre cinq et six points, on peut augmenter les cotisations retraites de l'ordre de deux à trois points.
    Mme Martine David. Vous ne comprenez rien.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Si l'on n'y parvient pas, nous serons, en effet, madame, dans une situation extraordinairement difficile et la seule solution sera de baisser le niveau des pensions. C'est ce que nous voulons éviter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Mme Martine David. Bien sûr !

AVENIR DE L'ÉCOLE NATIONALE
DE LA SANTÉ PUBLIQUE DE RENNES

    M. le président. La parole est à M. Philippe Rouault, pour le groupe UMP.
    M. Philippe Rouault. Monsieur le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, certaines informations laissent entendre que, dans le cadre du projet de loi relatif à la politique de santé publique, l'Ecole nationale de la santé publique basée à Rennes serait appelée à disparaître, au profit de la création d'une école de hautes études en santé publique. Celle-ci résulterait alors d'une fusion de l'ENSP et de l'Institut universitaire francilien de formation et de recherche en santé publique.
    Une telle hypothèse suscite inquiétude et émotion, tant à Rennes que dans l'ensemble de la Bretagne. L'ENSP est en effet emblématique d'une décentralisation réussie, puisqu'elle fait partie des grandes écoles qui ont été délocalisées dans un souci d'aménagement du territoire.
    Certes, je suis convaincu par votre volonté de définir une politique nationale de santé publique ambitieuse, rigoureuse et visible afin de protéger et de promouvoir l'état de santé de l'ensemble de la population et je ne doute pas que votre politique de formation et de recherche s'inscrit dans une telle perspective. Néanmoins, vous serait-il possible, monsieur le ministre, de nous rassurer quant au devenir de l'Ecole nationale de la santé publique et de nous préciser vos intentions en ce qui concerne le futur dispositif que pourrait représenter l'Ecole des hautes études en santé publique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le député, je suis en mesure de vous rassurer totalement. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Non seulement le Gouvernement n'a pas l'intention de supprimer l'Ecole nationale de santé publique de Rennes, mais il veut, au contraire, la renforcer et lui donner les capacités diplômantes qui lui font aujourd'hui défaut.
    M. Maxime Gremetz. Bravo !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Alors que nos besoins en termes de santé publique se sont accrus ces dernières années, qu'il s'agisse de la prévention, de la sécurité sanitaire, de la gestion du risque, ou enfin de la lutte contre les épidémies, notre pays n'a pas une capacité de formation suffisante pour répondre à ces exigences. Il nous faut mettre sur pied un centre équivalent à celui de Harvard aux Etats-Unis ou de la London School en Grande-Bretagne. Or c'est justement autour de l'Ecole nationale de santé publique que nous voulons créer, avec Luc Ferry, un réseau de formation en santé publique. Je puis donc vous l'assurer, l'ENSP de Rennes n'est menacée ni dans sa localisation ni dans sa vocation pédagogique à former des administrateurs et des gestionnaires d'établissement, des inspecteurs et des spécialistes en santé environnementale. Elle a au contraire tout à gagner à mener cette réforme avec nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

APPRENTISSAGE DE LA LECTURE EN CP

    M. le président. La parole est à Mme Cécile Gallez, pour le groupe UMP.
    Mme Cécile Gallez. Monsieur le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, 20 % à 25 % des élèves qui entrent en classe de sixième ne comprennent pas ce qu'ils lisent et, parmi ceux-ci, 10 % ne savent pas lire du tout. De l'avis de tous, cette situation est inacceptable et incompatible avec la poursuite d'une scolarité normale, dont les premières années sont décisives.
    Vous avez toujours déclaré vouloir faire de l'illettrisme une de vos priorités. J'ai deux questions à vous poser.
    A la rentrée scolaire de 2002, vous avez dédoublé cent classes de cours préparatoire. Pouvez-vous d'ores et déjà nous apporter des précisions sur l'impact de cette mesure ?
    M. Bernard Accoyer. Très bien !
    Mme Cécile Gallez. Par ailleurs, vous avez récemment manifesté votre volonté d'élargir dès la prochaine rentrée scolaire cette expérimentation pour les élèves en difficulté. Pouvez-vous nous préciser la manière dont vous comptez procéder ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.
    M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Madame la députée, permettez-moi de rappeler d'abord un chiffre terrible : 80 % des enfants qui n'apprennent pas à lire au cours préparatoire n'apprennent pas véritablement à bien lire et à écrire. Nous savons, même si la maternelle et le cours élémentaire sont importants, que c'est au cours préparatoire que tout se joue ou presque. Voilà la raison pour laquelle, dès septembre dernier, j'ai décidé de procéder à une expérimentation sur cent cours préparatoires, avec deux protocoles différents : un dédoublement de classe à temps complet et un dédoublement à temps partiel, c'est-à-dire pendant le temps d'apprentissage de la lecture.
    Les échos que j'ai recueillis sont si favorables que j'ai décidé de ne pas attendre 2004 pour mettre en oeuvre un dédoublement massif. Aussi, dès la rentrée 2003, 2 000 cours préparatoires seront-ils dédoublés, et 20 000 élèves apprendront-ils à lire et à écrire dans des groupes de dix élèves. Il y aura 500 cours préparatoires dédoublés à temps plein et 1 500 cours préparatoires dédoublés pendant le temps d'apprentissage de la lecture.
    M. Bernard Accoyer. Très bien !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Pour ce faire, je mobiliserai 750 enseignants grâce aux crédits inscrits avec le Premier ministre dans la loi de finances pour 2003, qui permettent la création de 1 000 postes d'enseignant dans le premier degré, au lieu des 800 qui étaient prévus par mon prédécesseur.
    J'ajouterai une dernière mesure, parce que je crois qu'il faut vraiment, comme on dit, « mettre le paquet ». Grâce à 500 assistants d'éducation, je proposerai également, sur le modèle des ATSEM - agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles -, de dédoubler aussi les cours préparatoires pendant le temps d'apprentissage de la lecture.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Que représentent 500 assistants ?
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Un effectif de 500 correspond à 1 500 cours dédoublés puisque l'apprentissage de la lecture occupe un tiers du temps au cours préparatoire. Ainsi, à la rentrée prochaine, 35 000 enfants pourront apprendre à lire et à écrire dans des groupes de dix élèves.
    Je conclurai en soulignant que, dès le mois de mai 1996, la direction de l'évaluation et de la prospective, c'est-à-dire le ministère lui-même, annonçait - et Le Monde a repris l'information - que 26 % des écoliers ne savaient pas lire à l'entrée en sixième. Autrement dit, dès 1996, on connaissait les chiffres. Pourtant, depuis lors, et je le dis sans vouloir vexer personne, si on a beaucoup parlé de l'illettrisme, on n'a pratiquement rien fait. Je crois que la mesure que je viens de vous présenter sera, elle, vraiment efficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze.)
    M. le président. La séance est reprise.

2

CHASSE

Discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la chasse (n°s 758, 821).
    La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, au moment où notre pays est confronté à des tensions internationales, et alors que les Français sont préoccupés par l'instauration de nouvelles solidarités visant à conforter l'avenir du système des retraites, on pourrait s'étonner que le Gouvernement présente un texte de loi sur la chasse.
    M. Yves Cochet. Oui, on s'en étonne, d'ailleurs !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. De même, face aux menaces qui pèsent sur notre planète, face aux immenses défis que nous avons à relever dans le domaine environnemental, comme la limitation des émissions de gaz carbonique dans le cadre du protocole de Kyoto, la prévention des risques naturels ou la préservation de la ressource en eau, pour lesquels l'élaboration de la charte de l'environnement, les projets de loi sur les risques, sur l'eau, mobilisent l'ensemble de mon département ministériel, il peut paraître futile de s'intéresser à un loisir.
    En réalité, la chasse n'est pas seulement un loisir et, au-delà du projet de loi qui vous est présenté aujourd'hui, c'est à la fois de la ruralité, de la gestion des territoires, de la préservation des habitats et de la biodiversité qu'il sera question. Dans un vaste pays comme la France, envié pour la richesse et la diversité de ses milieux naturels, il n'y a pratiquement plus de territoire qui n'ait été façonné par l'homme, à l'image de ces grands massifs forestiers créés, aménagés pour la pratique de la vénerie et préservés au fil des siècles malgré les vicissitudes de l'histoire. La chasse et les chasseurs occupent une place essentielle et ont une responsabilité, qu'on ne saurait minimiser, aux côtés des propriétaires et gestionnaires de ces territoires.
    Cette réflexion sur la chasse, nous l'avons eue le 11 février dernier. Je remercie le groupe UMP de m'avoir donné l'occasion de vous présenter ma vision de la chasse, de tracer des perspectives et de vous proposer un calendrier de travail. La concertation a été élargie depuis à d'autres interlocuteurs et enrichie grâce à ces derniers et à vous-mêmes. Elle a permis d'avancer dans la voie des réformes annoncées, conformément aux principes qui guident mon action et au calendrier que je vous avais présenté, dont je vais rappeler les principales étapes.
    Depuis le 11 février, l'Observatoire national de la faune sauvage et de ses habitats a été installé. Son organisation et sa composition ont été précisées par mon arrêté publié le 15 février. Son conseil scientifique, composé de onze membres reconnus, proposés par les principaux partenaires de l'Observatoire que sont les chasseurs, les institutions scientifiques et naturalistes, et désignés par moi-même, a commencé à travailler. Son programme a été décidé, qui porte notamment sur la connaissance des populations d'oiseaux migrateurs et de leurs habitats.
    J'attends de cet observatoire qu'il me fournisse des données validées, issues des observations de terrain, afin de fixer, dès cette année, des périodes de chasse scientifiquement incontestables.
    M. Jérôme Bignon. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je lui ai demandé de travailler à une régionalisation des données, compte tenu de la diversité des situations observées sur le terrain. C'est la raison pour laquelle je ne vous propose pas de fixer les dates de chasse dans la loi. (Exclamations sur plusieurs bancs.)
    Nos lois, comme les directives européennes, doivent établir les fondements et les principes, mais il ne leur appartient pas de fixer des dates qui répondent davantage aux lois de la nature, aux fluctuations de la météo et à la dynamique propre des populations d'oiseaux. En outre, il nous faut sortir de la logique exclusive de gestion des populations par les périodes de chasse, pour revenir à une véritable logique de gestion intégrée des territoires et des populations. Celle-ci passe par une connaissance des populations au minimum à l'échelle européenne, mais plus judicieusement à l'échelle de ce que les spécialistes appellent la zone du paléarctique occidental, correspondant à l'ensemble de l'aire colonisée par les espèces migratrices concernées.
    Par ses travaux, l'Observatoire contribuera à donner à notre action et à nos décisions une assise scientifique incontestable, ce qui est le premier principe que j'avais énoncé le 11 février.
    Le deuxième principe consiste à responsabiliser les acteurs et de donner plus de proximité à nos décisions et à notre action. Le projet de loi que vous avez à débattre aujourd'hui y contribue pleinement. J'y reviendrai lors de la présentation du texte lui-même.
    Le troisième principe guidant mon action à la tête de ce ministère consiste à simplifier et à clarifier la réglementation.
    M. Yves Nicolin. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je vous avais annoncé la constitution d'un groupe de travail associant des spécialistes ayant à rédiger ou à appliquer les textes sur la chasse. L'un d'entre vous, Antoine Carré, y participe activement et je voudrais l'en remercier. Ce groupe s'est attaché à proposer des simplifications concernant la pratique quotidienne de la chasse. Un premier rapport d'étape vient de m'être remis, dont les propositions seront intégrées au prochain projet de loi sur la ruralité ou, plus directement, traduites en textes réglementaires.
    Le quatrième et dernier principe consiste à restaurer la confiance entre les chasseurs et les pouvoirs publics. Après s'être détournés de leur ministère de tutelle, les représentants des chasseurs ont repris leur place parmi ceux des associations et institutions reçues avenue de Ségur.
    M. Yves Cochet. Nous les avions reçues aussi !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Des rencontres régulières, les nombreuses réunions de travail nécessaires à l'élaboration de cette loi témoignent de la normalisation de la situation.
    M. Jérôme Bignon. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je suis d'ailleurs étonnée du fort décalage entre le discours critique que certains s'emploient à maintenir au plan national et la qualité de l'accueil, la cordialité que je constate lors de mes rencontres avec les chasseurs ou leurs représentants. J'ai déjà dénoncé ceux qui ont intérêt à exacerber les crispations et à attiser les conflits. Il convient de ne pas entrer dans leur jeu.
    S'agissant du conflit qui a opposé l'Office national de la chasse et de la faune sauvage et les fédérations, un médiateur a été désigné pour régler à l'amiable la situation complexe née de contentieux croisés, concernant les frais de garderie et les excédents des réserves des fédérations. Mais, au-delà, un travail en profondeur doit être conduit pour tracer de vraies perspectives pour l'ONCFS et rétablir la confiance indispensable avec les fédérations.
    Le projet de loi que je vous propose s'inscrit donc dans le prolongement du débat du 11 février et constitue l'une des étapes législatives qui permettront de traiter les questions relatives à la chasse.
    La première étape a été la loi d'habilitation que vous avez déjà examinée en première lecture. Son article 9 autorise le Gouvernement à mettre en place par ordonnance un guichet unique pour la validation annuelle du permis de chasser. Cette mesure de simplification administrative pourra être mise en oeuvre dès cette année par les fédérations qui le souhaitent. Elle allégera sensiblement les démarches des chasseurs.
    La prochaine étape sera la loi sur la ruralité, qui comportera un chapitre sur la chasse et traitera des thèmes suivants : la protection des territoires et des habitats - zones humides, haies ; les plans de gestion cynégétique et, notamment, les schémas départementaux de gestion cynégétique ; l'équilibre agro-sylvo-cynégétique et, plus particulièrement, le système d'indemnisation des dégâts de grand gibier aux cultures, auquel nous travaillons en liaison avec les services du ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ; la pratique de la chasse avec, notamment, les propositions du groupe d'étude que je viens d'évoquer.
    Enfin, en 2004, dans le cadre d'une loi sur le patrimoine naturel, pourront figurer d'autres mesures intéressant la pratique de la chasse et la gestion des espèces et de leurs habitats. Je pense à la réflexion que nous avons engagée sur le statut des espèces : notion de bête fauve, de nuisible, etc.
    Vous le voyez, la tâche est ambitieuse. Le calendrier législatif nous donne les moyens de l'inscrire dans la durée et nous permet d'aborder les questions relatives à la chasse de façon échelonnée, en traitant les sujets selon de grandes thématiques, au fur et à mesure de l'avancement des travaux et des consultations. Il suppose, en contrepartie, qu'on ne cherche pas à traiter toutes les questions simultanément.
    Par ailleurs, le travail sur les textes réglementaires se poursuit, tant pour préparer les textes d'application de la loi que nous examinons aujourd'hui - qui vous ont été communiqués dans un souci de transparence - que pour adopter d'autres dispositions qui ne sont pas d'ordre législatif.
    J'en viens maintenant au projet de loi lui-même, dont je voudrais vous présenter l'économie générale.
    S'il ne comporte que dix-sept articles, il a nécessité un long travail préparatoire, tant avec les représentants des chasseurs, en premier lieu la Fédération nationale des chasseurs, qu'avec les parlementaires, en particulier ceux qui, membres du groupe d'étude sur la chasse, ont été très présents tout au long de sa rédaction. Je les en remercie, en particulier Jean-Claude Lemoine, président du groupe d'étude chasse et rapporteur de la loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Le projet a également été présenté aux différentes instances de conseil de mon ministère et aux associations de protection de la nature.
    Deux principaux thèmes sont abordés ici : la pratique de la chasse, - avec l'abrogation du mercredi sans chasse -, et la réforme des statuts des fédérations des chasseurs.
    Cette réforme, qui ne concerne pas la pratique quotidienne de la chasse, n'est sans doute pas la plus attendue par les chasseurs. C'est pourtant celle par laquelle il m'a semblé judicieux de commencer, car les fédérations ont une responsabilité importante et il convenait de restaurer la confiance en supprimant un ensemble de dispositions contraignantes considérées comme vexatoires, issues de la loi « chasse » du 26 juillet 2000.
    Les articles 1er à 13 concernent le statut des fédérations. Les mesures proposées rappellent le statut associatif des fédérations, précisent les différentes catégories d'adhérents et adaptent le mode de scrutin. Sans remettre en question la participation de tous les chasseurs adhérents aux fédérations, j'ai souhaité rendre une place aux associations intermédiaires qui organisent la chasse au plus près du terrain et participent à la gestion des territoires.
    Les conditions de représentation sont assouplies afin de faciliter l'organisation des assemblées générales : les statuts types feront passer de dix à cinquante le nombre de pouvoirs pouvant être confiés à un adhérent.
    Le projet allège sensiblement les contrôles, parfois redondants, et rend aux assemblées générales la pleine responsabilité de fixer le niveau des cotisations, en fonction des projets et des missions des fédérations.
    Il est institué un contrôle a priori limité à deux missions d'intérêt général identifiées : l'indemnisation des dégâts de gibier et la formation à l'examen du permis de chasser.
    Enfin, le projet de loi soumet chaque fédération au contrôle d'un commissaire aux comptes qu'elle choisit parmi ceux qui sont agréés.
    Les réformes que nous vous proposons rétablissent un juste équilibre entre, d'une part, l'indispensable confiance qu'il convient d'accorder à des associations dont les instances délibératives doivent pleinement jouer leur rôle et, d'autre part, les contrôles nécessaires permettant à l'Etat de s'assurer que les missions d'intérêt général confiées aux fédérations ont été correctement remplies.
    L'article 14 du projet de loi concerne le statut des ACCA, associations communales de chasse agréées. Celles-ci doivent intégrer à leurs statuts des clauses obligatoires prévues par le décret en Conseil d'Etat. Or ces dispositions réglementaires, - article R. 222-63 du code rural -, n'a pas de fondement légal. Tel est l'objet de cet article.
    L'article 15 concerne le fichier national des permis de chasser. Ce fichier a été créé par la loi du 26 juillet 2000. Géré par l'ONCFS, il sera actualisé, chaque année, en fonction des validations annuelles. Cette mesure accompagnera la mise en place du guichet unique et permettra aux fédérations de s'assurer que le chasseur qui demande la validation de son permis n'est pas frappé d'une mesure de suspension dans un autre département.
    M. Roland Chassain. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. L'article 16 concerne l'abrogation du mercredi sans chasse. Un observateur extérieur pourrait avoir le sentiment que le débat sur la chasse, en France, se résume à ce sujet. La question est certes devenue un symbole, car on n'a pas su ou on n'a pas voulu la traiter comme il se devait. Elle est en tout cas emblématique de l'extrême complexité juridique du dossier. La mesure d'interdiction générale de la chasse le mercredi est issue de la loi du 26 juillet 2000. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Yves Cochet. Non ! C'est votre recours devant le Conseil constitutionnel qui en est à l'origine !
    M. Pierre Ducout. C'était une mesure de la droite !
    M. Jean-Claude Perez. Assumez, madame la ministre !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Elle ne correspond d'ailleurs pas au projet initial débattu au Parlement, qui prévoyait la possibilité de fixer ce jour, au plan local, au regard des circonstances, à défaut du mercredi.
    L'interdiction du mercredi, vous le savez, repose sur un malentendu : le partage de l'espace comme moyen de régler les questions relatives à la sécurité de la chasse. Elle laisse penser que la chasse est une activité dangereuse pour les non-chasseurs...
    M. Yves Cochet. C'est le cas !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... ce qui est très exagéré, voire faux si on la compare à d'autres activités sportives pouvant impliquer des personnes extérieures. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) L'amélioration constante de la sécurité des chasseurs comme des non-chasseurs, depuis des décennies, tient davantage à l'instauration d'un examen pour le permis de chasser, lequel sera assorti, à partir de cette année, d'une épreuve pratique sur la sécurité, aux consignes données par les responsables de la chasse - je veillerai d'ailleurs, dans ce cadre, à ce que des dispositions concernent les personnes handicapées - et à l'information apportée sur le terrain, lors des chasses, qu'à une interdiction de la chasse tel ou tel jour de la semaine.
    Les dispositions de la loi du 26 juillet 2000 n'ont d'ailleurs eu aucun effet sur les statistiques d'accidents de chasse mettant en cause des non-chasseurs.
    M. Christian Estrosi. Evidemment !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. En revanche, cette mesure rigide s'est traduite par un recul : avant son adoption, les préfets avaient instauré, dans une majorité de départements, et à la demande de la fédération départementale des chasseurs, un à plusieurs jours sans chasse. Imposer le mercredi a incité les fédérations à ne pas demander d'autres jours, si bien que, dans bon nombre de départements, on est passé de deux voire quatre jours sans chasse à la seule journée du mercredi. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Le porte-parole de l'une des principales fédérations régionales de protection de la nature n'avait-il pas lui-même qualifié cette interdiction du mercredi de « petite supercherie, car déjà dans la plupart des départements il existe un jour sans chasse ? »
    M. Christian Estrosi et M. Charles de Courson. En effet !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Rendons à chaque territoire sa vocation première sans porter atteinte au droit de propriété, tout en respectant le principe d'ouverture et d'accueil propre à notre pays. Il n'est pas de territoire façonné et entretenu par l'homme qui n'appartienne à quelqu'un. Pour autant, et dans le respect de la propriété, des récoltes et des usages locaux, ces territoires sont généralement ouverts à tous. D'ailleurs, dans les forêts publiques ou territoires à vocation d'accueil du public, l'usage est que l'on ne chasse pas les jours de forte fréquentation. C'est ainsi que, dans ses forêts domaniales, l'Etat fixe non pas les jours sans chasse, mais au contraire le ou les jours hebdomadaires des chasses, lesquels font l'objet d'une publicité.
    Dans le cahier des clauses générales pour la location de la chasse, l'Office national des forêts précise à l'article 27 que, dans les forêts domaniales très fréquentées, certains jours de la semaine et, notamment, les samedis et dimanches et jours fériés, la chasse à tir est interdite. C'est pourquoi, dans le respect du droit de propriété, je souhaite rendre l'initiative aux acteurs de terrain, afin qu'ils parviennent à des solutions concertées et adaptées aux situations locales, aux vocations des territoires concernés et aux pratiques de nature.
    Je vous sais partagés sur ce sujet. Certains d'entre vous souhaitent l'abrogation pure et simple de cette mesure. D'autres, conscients des difficultés, préconisent le statu quo.
    Le projet de loi proposé par le Gouvernement est clair : il abroge, dès cette saison de chasse, l'interdiction nationale du mercredi et conforte, par voie législative, le dispositif antérieur à la loi de 2000 en rendant l'initiative aux fédérations pour proposer aux préfets un jour sans chasse à tir. Ce choix pourra être modulé en fonction des modes de chasse et des types de territoire. Certains d'entre vous ont d'autres préconisations. Nous pourrons en discuter lors de l'examen des amendements et je serai, bien entendu, très attentive aux arguments des uns et des autres.
    Enfin, l'article 17 concerne le déplacement des hutteaux. Cette mesure de simplification permet de prendre en compte le caractère particulier de ces postes fixes qui ne sont installés que pendant l'action de chasse.
    Ce projet, mesdames et messieurs les députés, n'a pas la prétention de régler tous les problèmes de la chasse. Beaucoup sont d'ordre réglementaire ou relèvent de l'initiative des chasseurs eux-mêmes. Il favorise cette initiative, il est un signe de confiance envers les chasseurs qui doivent pouvoir s'affirmer pleinement comme acteurs de l'espace rural et apporter une contribution significative à la connaissance et au maintien de la biodiversité. C'est ainsi que la chasse et les chasseurs doivent être perçus par la société.
    Ce projet répond à ma double préoccupation de maintenir dans notre pays une chasse vivante, démocratique et durable et d'assurer la préservation et la gestion d'une faune sauvage et des habitats menacés par l'urbanisation, la pollution et certaines pratiques agricoles. Cette nouvelle vision de la chasse que nous vous proposons s'appuie sur ce qui fonde l'action de notre gouvernement : responsabilité, décentralisation et développement durable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française).
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
    M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Il y a presque un an, madame la ministre, vous avez fait un très bel héritage. Au fond de la corbeille de votre ministère, vous avez découvert un dossier ô combien passionnant : celui de la chasse, qui nous réunit aujourd'hui.
    La chasse qui a joué un rôle si important dans l'histoire de l'humanité, la chasse qui a acquis une dimension sociale et culturelle, la chasse considérée par certains comme une tradition populaire, par d'autres comme une activité sportive, de détente,...
    M. Yves Cochet. C'est le cas de le dire !
    M. Maxime Gremetz. C'est le mot juste ! (Sourires.)
    M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. ... de loisir, de plaisir, mais par tous, et à juste titre, comme une activité étroitement liée à la vie de nos campagnes et à l'art de vivre de beaucoup de nos concitoyens.
    La chasse, son histoire vraie et légendaire, a inspiré nombre d'écrivains. Nous lui devons de merveilleux textes, d'Alphonse de Chateaubriant à Dominique Venner qui a écrit cette si belle phrase : « Avec la chasse, le mot à retenir est "amoureux. »
    C'est imprégné de cette phrase que nous abordons ce sujet passionnant - qui doit être dépassionné -, d'autant plus passionnant qu'avec l'évolution de notre société, qu'après des décennies créatrices de contestations, d'attaques, de contentieux, de jurisprudence, tout est à rebâtir.
    La chasse française est à reconstruire.
    C'est un défi d'autant plus stimulant, madame la ministre, d'autant plus enthousiasmant que notre pays, la France, dispose du plus bel espace naturel d'Europe, qu'elle a exporté moult traditions de chasse et qu'elle est loin de tirer de son territoire les satisfactions que les chasseurs sont en droit d'espérer et les revenus que les agriculteurs et les propriétaires sont en droit d'attendre.
    Avec vous, madame la ministre, nous savons que cette reconstruction est en route. Avec vous, nous voulons mettre en place une chasse durable, respectueuse des espèces et de la liberté de tous, donc adaptée à l'évolution de la société dans un environnement favorable.
    C'est pour cela que nous souhaitions avec impatience cette loi qui répond à des attentes fortes, qui ne traite -  vous l'avez dit - qu'une infime partie des problèmes, qui en laisse bon nombre en suspens, mais qui nous arrive après de larges concertations, où je vois une garantie de qualité, et après beaucoup de mesures réglementaires indispensables.
    Lors du débat organisé ici même il y a quelques semaines, vous nous avez rappelé l'important travail déjà accompli. Vous avez listé les diverses actions engagées, dont certaines sont déjà lisibles, par exemple la simplification de la validation du permis de chasser, et d'autres ne sont encore que source de beaucoup d'espoir, telles les conclusions de l'Observatoire de la faune sauvage.
    Vous nous avez également entretenus des nombreux problèmes qui restent à résoudre et que ce texte n'aborde pas : ceux relatifs, par exemple, à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, à la garderie, aux dégâts de gibier, à l'entretien et à la valorisation cynégétique des territoires, ainsi que l'épineux problème des dates d'ouverture et de fermeture. Nous savons que nous étudierons tous ces sujets dans les mois à venir et nous approuvons pleinement votre décision d'en repousser l'examen afin de pouvoir encore mener de multiples concertations, ici et ailleurs, et aboutir ainsi aux solutions les meilleures.
    Nous approuvons tellement votre décision, madame la ministre, que nous avons repoussé en commission tous les amendements, ou presque,...
    M. Maxime Gremetz. Eh oui !
    M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. ... pourtant compréhensibles et pertinents relatifs à ces sujets, souhaitant les traiter ultérieurement dans leur ensemble. Nous avons voulu nous concentrer sur ce texte, sur cette deuxième étape succédant au débat, étape importante et décisive, car c'est grâce à cette loi que nous allons réconcilier, j'en suis sûr, ville et campagne, urbains et ruraux, restaurer un climat serein et dissiper tous les conflits.
    Le texte qui nous est soumis a pour ambition - vous nous l'avez confirmé à plusieurs reprises et vous venez de le rappeler :
    Premièrement, de responsabiliser les associations et les fédérations de chasseurs, de les laisser adapter leurs pratiques aux attentes de la société d'aujourd'hui en leur donnant plus de liberté et en les délivrant de nombre de contraintes et de contrôles humiliants et inutiles ;
    Deuxièmement, de déconcentrer nombre de décisions au motif réaliste que chaque région, chaque département, chaque territoire présente des spécificités à respecter et que chaque mode de chasse a des traditions à conserver.
    Mme Sylvia Bassot. Tout à fait !
    M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. Ces objectifs s'inscrivent dans la droite ligne de la politique de notre gouvernement et permettront - c'est l'avis de votre rapporteur - d'adapter les pratiques cynégétiques au plus près de la réalité et, surtout, de restaurer la confiance.
    Redonner confiance à tous les acteurs grâce à une meilleure lisibilité de la réglementation et en faisant appel à leur réalisme et à leur capacité d'auto-adaptation, c'est la première étape à franchir, indispensable, pour reconstruire durablement la chasse.
    Lorsque vous nous avez présenté votre loi, madame la ministre, vous nous avez déclaré : « Rien n'est figé. » Répondant à votre invitation, les membres de la commission et de nombreux collègues ont proposé quelques modifications sous forme d'amendements. Ceux retenus ont tous été adoptés à une large majorité. Tous sont de précision : il s'agit de simplifications issues des connaissances précises des uns et des autres dans ce domaine. Et tous - je dis bien tous, même celui qui réécrit partiellement l'article 16 - s'inscrivent dans le droit fil de l'esprit, de la philosophie de votre texte, avec la volonté de responsabiliser entièrement les acteurs en leur accordant une totale confiance et avec le désir de déconcentrer au maximum les décisions à prendre pour une meilleure adaptation à la réalité.
    C'est ainsi que nous avons calé la procédure de contrôle du budget des fédérations sur celle appliquée aux collectivités locales, qui a prouvé son efficacité en conciliant autonomie de gestion et contrôle de l'exercice de leur mission de service public. C'est ainsi que nous avons légalisé la chasse de nuit dans des départements exclus sans justification valable de la loi de 2000 et que nous avons légalisé également la chasse de nuit du sanglier dans les départements d'Alsace et de Moselle, afin de rétablir une tradition ancestrale et de permettre une meilleure régulation de cette espèce.
    M. Bernard Schreiner et M. André Schneider. Très bien !
    M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. Vous nous proposez là, madame la ministre, un très bon texte. Votre rapporteur, mes chers collègues, vous demande de l'adopter avec les quelques modifications apportées par la commission. Cette loi, une fois votée, permettra de traiter tous les autres problèmes sereinement, dans un climat apaisé, pour construire ou réinventer une nouvelle chasse, celle du xxie siècle, à la satisfaction de tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Maxime Gremetz. Ce qu'il ne faut pas entendre !
    M. le président. N'anticipez, monsieur Gremetz : vous aurez une heure et demie pour vous exprimer !
    La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, s'il est un sujet qui laisse libre cours à toutes les passions, c'est bien celui de la chasse.
    Passion de la part des chasseurs, pour qui cette activité ancestrale, inscrite dans nos traditions les plus chères, celles de chacun de nos territoires, est une pratique qui allie le sport, la détente, le plaisir et la convivialité. Beaucoup d'entre nous y voient même, vous l'avez dit, madame la ministre, un art de vivre...
    M. Yves Cochet. Oh là là ! Je crains le pire !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. ... assurant l'osmose entre l'homme, la faune et la nature, dans le respect des équilibres naturels. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Passion aussi de la part de certains protecteurs de la nature, qui ne veulent pas voir dans la chasse le rôle écologique qu'elle joue pour la régulation et le développement des espèces.
    M. Yves Cochet. C'est bien à cause de son impact écologique que nous ne sommes pas d'accord !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Passions hélas exacerbées, ces dernières années, par les maladresses du gouvernement de l'époque, dont l'action était dictée par l'idéologie,...
    M. Hervé de Charette. Hélas !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. ... l'idéologie des Verts, membres de la majorité d'alors. (Applaudissements plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Sylvia Bassot. Ce n'est que trop vrai !
    M. Yves Cochet. Dictée surtout par une directive européenne !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. En effet, comme l'a clairement rappelé notre excellent rapporteur au nom de la commission des affaires économiques, la précédente majorité nous a laissé une loi, celle du 26 juillet 2000, dont l'application n'est pas, loin s'en faut, parvenue à apaiser les conflits entre les chasseurs et les opposants à la chasse. Elle les a au contraire exacerbés !
    Mme Sylvia Bassot. Exactement !
    M. Yves Cochet. C'est la transposition d'une directive !
    M. Pierre Ducout. Et c'est vous qui les avez exacerbés !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Le Président-candidat Jacques Chirac s'était fort opportunément engagé à revenir sur cette loi provocatrice. Le Gouvernement, sous votre tutelle, madame la ministre, et avec l'aide de certains d'entre nous, que je salue, a oeuvré pour faire évoluer une situation devenue à la fois juridiquement instable et politiquement intenable.
    M. Hervé de Charette. Très bien !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. La loi de 2000 - vous l'avez dit et notre rapporteur l'a confirmé - ne satisfait personne et va souvent à l'encontre des effets escomptés par ses inspirateurs. De l'aveu même de certains porte-parole d'associations nationales de défense de la nature, c'est une supercherie.
    M. Yves Cochet. Non !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Il existait en effet dans la plupart de nos départements - ceux qui, comme nous, sont membres d'une association départementale de chasseurs le savent - une pratique qui aboutissait à plusieurs jours de non-chasse.
    M. Antoine Carré. Mais oui !
    M. Hervé de Charette. Bien entendu !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. En imposant un jour de non-chasse par l'obligation, c'est-à-dire la contrainte plutôt que la confiance, le seul résultat que vous avez obtenu, c'est la suppression des jours de non-chasse qui existaient dans certains départements. Voilà la vérité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Devant cette situation, madame la ministre, vous avez fort opportunément décidé d'organiser, le 11 février dernier, un débat qui a permis d'ouvrir la concertation. Merci pour cette initiative qui a permis, sur tous les bancs de cette assemblée, et d'abord, pardonnez-moi de le reconnaître, dans notre majorité, de définir un certain nombre d'objectifs à atteindre. Vous avez ensuite, avec le Gouvernement et avec votre équipe, à laquelle je tiens à rendre hommage, mis au point un texte qui tient compte de ces objectifs et qui donne les moyens de les atteindre. Ce texte est aussi le fruit d'un dialogue renoué dès mai 2002 avec la Fédération nationale des chasseurs, d'une réflexion approfondie au sein du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage et d'une concertation soutenue avec le groupe d'études parlementaire sur la chasse piloté par Jean-Claude Lemoine, que je tiens à remercier, ainsi que tous les membres du groupe, pour leur travail exemplaire.
    Pour la plupart des problèmes qui se posent, votre loi, madame la ministre, apportera les solutions attendues...
    M. Yves Cochet. Non !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. ... et mettra un terme aux dysfonctionnements provoqués par le texte de Mme Voynet.
    Je tiens d'autant plus à vous en rendre hommage qu'il vous était particulièrement difficile, en tant que ministre de l'écologie, de vous engager avec autant de force et autant d'objectivité dans ce débat.
    Grâce à la concertation que vous avez imposée et en donnant la primauté à la pédagogie, à la confiance, au respect,...
    M. Jean-Claude Perez. Ben voyons !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. ... notions fondamentales, vous avez su trouver les voies d'un consensus qui va, tout à l'heure, fédérer notre majorité. Ce consensus s'inscrit dans le prolongement des avancées déjà obtenues, comme le report des élections au sein des fédérations départementales ou le récent renouvellement du conseil d'administration de l'ONC.
    Ce texte va responsabiliser les acteurs de la chasse et leur redonner confiance. Car nous misons sur la confiance. Nous voulons tous, dans cet hémicycle, faire confiance aux chasseurs dans le cadre de leurs fédérations départementales. Cette loi doit être le témoignage de la confiance que la société veut accorder aux chasseurs en reconnaissant le rôle qu'ils jouent dans nos territoires. En ces temps où tout le monde souhaite la décentralisation, les chasseurs ne comprendraient pas que la gestion de la chasse demeure concentrée entre les mains de l'administration centrale.
    Les schémas départementaux de gestion cynégétique que vous proposez dans votre texte...
    M. Pierre Ducout. C'est nous qui les avons institués !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. ... devraient permettre de renouer avec cette proximité attendue, rétablir le lien indispensable entre le terrain et l'acte de chasse.
    Redonner confiance, responsabiliser, implique également d'alléger les contrôles instaurés par la loi de Mme Voynet.
    Il faut surtout supprimer le contrôle a priori des budgets des fédérations départementales. Quel élu local accepterait cette mise sous tutelle de sa politique budgétaire ? Aucun, bien entendu ! Alors pourquoi avoir imposé cela aux chasseurs ? Vous résolvez ce problème, madame la ministre, et nous vous en sommes reconnaissants.
    Cette confiance retrouvée devrait permettre de revenir sur la mesure de Mme Voynet la plus contestée : le jour de non-chasse. La rigidité de ce dispositif législatif le condamnait à court terme, car il s'accommodait mal des pratiques locales et mettait en contradiction les contraintes et les pratiques de chacun de nos territoires.
    Sur ce point particulier, chacun d'entre nous connaît les fortes attentes de certains de nos concitoyens, soucieux de voir maintenir un jour hebdomadaire de non-chasse.
    M. Yves Cochet. 98 % !
    M. Patrick Ollier, président de la commision. On peut les comprendre, et je les comprends. Mais une large majorité, au sein de notre commission, a voulu suivre le rapporteur et revenir à la situation juridique antérieure à la loi de 2000, en supprimant toute référence au jour de non-chasse.
    M. Roland Chassain. Très bien !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Je souscris à cette position et je souhaite que l'Assemblée fasse de même.
    Les fédérations départementales ont la volonté - la lettre que le rapporteur a reçu du président de la Fédération nationale des chasseurs le confirme - de renouer avec la pratique ancienne en fixant librement des jours de non-chasse, sans la contrainte de la loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.) J'appelle les chasseurs à consentir cet effort, mais je sais qu'ils n'ont pas besoin de cet appel et qu'ils le feront d'eux-mêmes, tout naturellement.
    Nous reparlerons d'ailleurs de la lettre du président de Ponchalon, qui présente un grand intérêt pour ce débat.
    Enfin, en ce qui concerne un autre point sensible, les dates de la chasse aux migrateurs, je voudrais que l'Assemblée souscrive également à la position de notre commission. Nous avons souhaité faire la distinction entre ce qui est du domaine de la loi et ce qui relève du règlement, à travers la réglementation européenne. Il est bien évident que toute adoption de mesures à ce sujet serait contraire aux décisions du Conseil d'Etat et non conforme à la directive « oiseaux » de 1979.
    M. Jean-Claude Perez. C'était déjà la droite !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. La commission, à ma demande, a donc rejeté les amendements relatifs à ces dates...
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas bien !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. ... et je souhaite que, après un débat en séance où nous leur fournirons toutes les explications qu'ils souhaitent, leurs auteurs veuillent bien les retirer, de telle sorte que nous puissions avancer et décider en fonction des compétences de l'Assemblée et non pas des voeux de tel ou tel.
    Le Gouvernement s'est engagé dans une démarche constructive sous la responsabilité de M. Dutruc-Rosset et la mise en place de l'observatoire devrait permettre, madame la ministre, de disposer de nouvelles expertises scientifiques que nous attendons tous, afin que vous puissiez renégocier à Bruxelles certaines dates pour certaines espèces. Pour cela, nous vous faisons pleinement confiance.
    M. Yves Cochet. Bon courage !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Par ailleurs, le texte de M. Gaymard, prévu pour le mois de juin, contiendra aussi un certain nombre de dispositions à ce sujet, que vous aurez à défendre le moment venu.
    M. Maxime Gremetz. C'est l'Arlésienne !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. La commission souhaite également que les amendements touchant par anticipation à ces mesures puissent être retirés, de telle sorte que le débat soit serein, que les responsabilités soient clairement établies et que nous puissions voter aujourd'hui un texte qui donne satisfaction aux chasseurs en répondant à l'urgence du moment. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Maxime Gremetz. Vous avez faibli !
    M. Jean-Claude Perez. Demain, on rase gratis !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Pour conclure, j'espère que ce projet de loi permettra de mieux faire comprendre la chasse par notre société, que cette première étape contribuera à la reconnaissance d'une tradition ancestrale et de ceux qui la pratiquent.
    M. Jean-Claude Perez. Alors ça !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Réduisons la fracture entre chasseurs et non-chasseurs en restant ouverts les uns aux autres.
    M. François Liberti. Bla-bla !
    M. Jean-Claude Perez. Ronron !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Monsieur Chanteguet,...
    M. Jean-Claude Perez. Non, c'est moi !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Alors, qu'il veuille bien m'excuser. Je lui rappelle en tout cas qu'il a approuvé ce matin certains de nos amendements comme nous avons approuvé certains des siens. Merci de le reconnaître.
    M. Jean-Claude Perez. C'est vrai, mais vous n'avez pas tenu vos promesses.
    M. Patrick Ollier, président de la commision. Ce projet de loi permet donc de supprimer ce qui était ressenti comme une profonde injustice par les chasseurs.
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas un produit attrayant, vous n'arrivez pas à le vendre !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Que nos traditions puissent vivre sur tout notre territoire, telle est, madame la ministre, notre ambition. Que la pratique de ces traditions soit compatible avec le respect des équilibres naturels est aussi notre volonté. Ce texte le confirme. Nous en félicitons le Gouvernement et nous vous remercions pour votre objectivité et votre esprit de concertation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    (M. Jean Le Garrec remplace M. Jean-Louis Debré au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,
vice-président

    M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, nous allons passer à l'exception d'irrecevabilité, présentée par le groupe communiste et républicain.
    M. Maxime Gremetz. Je demande la parole.
    M. le président. J'allais vous la donner, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Je sais bien, monsieur le président, mais je souhaite au préalable faire un rappel au règlement.

Rappel au règlement

    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour un rappel au règlement.
    Sur l'organisation de nos débats ?...
    M. Maxime Gremetz. Oui, monsieur le président. Au nom du groupe des député-e-s communistes et républicains, je voudrais dire qu'il est très surprenant et même un peu surnaturel...
    Mme Sylvia Bassot. Dites plutôt surréaliste !
    M. Hervé de Charette. Oui, je crains que le surnaturel ne le dépasse !
    M. Maxime Gremetz. ... que nous soyons ici à débattre, même sur un sujet aussi éminent, au moment où la France est paralysée et où il y a des millions de gens dehors ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Je vous signale, mes chers collègues de la Somme, que 15 000 personnes défilent à Amiens. Voilà qui vous donne une petite indication sur l'ampleur du mouvement.
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Cela n'a rien à voir avec un rappel au règlement, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Je tenais à le dire parce que je me sens très gêné d'être là aujourd'hui, alors que tout le monde manifeste dans la rue. Mais moi, je l'ai fait ce matin.
    Mme Sylvia Bassot. Grotesque !
    M. le président. Monsieur Gremetz, votre intervention n'avait rien à voir avec l'organisation de nos travaux, mais elle a eu le mérite d'être courte, et nous allons maintenant poursuivre le débat.

Exception d'irrecevabilité

    M. le président. J'ai reçu de M. Alain Bocquet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains une exception d'irrecevabilité, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.
    Vous avez la parole, monsieur Gremetz pour une durée qui ne pourra excéder... je ne veux même pas le dire ! (Sourires.)
    M. Maxime Gremetz. Si, si ! Dites-moi à combien j'ai droit !
    M. le président. Une heure trente.
    M. Jean-Louis Bernard. Mais il fera beaucoup plus court, pour pouvoir retourner manifester ! (Sourires.)
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Il faut retourner à Amiens, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Oh non, ils n'ont pas besoin de moi !
    M. le président. Mes chers collègues, n'interpellez surtout pas M. Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Oh si, je trouve qu'ils ont raison ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mes chers collègues, je suis venu avec des outils : les déclarations de certains d'entre vous. N'est-ce pas, monsieur Lemoine ? N'est-ce pas, monsieur de Courson ?
    M. Charles de Courson. Absolument !
    M. Maxime Gremetz. J'ai apporté tout ce que vous avez déclaré, tout ce que vous avez défendu.
    Mme Sylvie Bassot. Et qui sera retenu contre vous !
    M. Maxime Gremetz. Vous ne pourrez pas me dire que ce n'est pas vrai puisque cela figure au Journal officiel. Je vous le dis d'emblée très clairement pour éviter les faux débats. Ce n'est pas la peine de perdre son temps.
    M. le président. Voilà un point sur lequel nous sommes tous d'accord ! (Sourires.)
    M. Maxime Gremetz. Et je vous citerai, mes chers collègues.
    Mme Sylvia Bassot. Pas de chantage !
    M. Maxime Gremetz. Comme l'indique le règlement de notre illustre assemblée, cette exception d'irrecevabilité me permet de parler une heure et demie. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Alain Gest. Voilà qui me paraît bien ! (Sourires.)
    M. Paul-Henri Cugnenc. On peut toujours faire mieux !
    M. le président. C'est un maximum.
    M. Maxime Gremetz. Je ne suis pas l'auteur du règlement.
    J'ai donc tout mon temps pour faire le tour de la question.
    M. Christian Estrosi. C'est une provocation à l'égard de la France qui est dans la rue !
    M. Maxime Gremetz. Justement, je vais commencer par vous parler de la France qui est dans la rue. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Mes chers collègues, soyez raisonnables ! N'interpellez pas M. Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Contrairement à ce que vous pouvez penser, la France qui est dans la rue ne manifeste pas en faveur du projet dont nous discutons aujourd'hui. Elle défend le système de retraite par répartition, avec des propositions qui sont conformes à l'idée de faire payer ceux qui en ont les moyens, et pas les autres.
    M. Jean-Claude Perez. Exactement !
    M. Maxime Gremetz. Si je défends aujourd'hui devant vous cette exception d'irrecevabilité, c'est précisément parce que je suis favorable à une loi sur la chasse, mais une vraie, qui tienne compte de toutes les préoccupations quotidiennes des chasseurs. Au lieu de cela, il faut bien le constater, le Gouvernement a décidé, pour des raisons politiciennes, de fractionner les réformes indispensables en trois projets de loi, comme s'il avait peur ou honte de parler de chasse de façon claire et transparente.
    M. Jean-Claude Perez. Eh oui !
    M. Maxime Gremetz. Le projet de loi présenté aujourd'hui par Mme la ministre de l'écologie ne contient qu'un seul article qui concerne directement le quotidien des chasseurs de France.
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Rien ne presse !
    M. Maxime Gremetz. Peut-être n'êtes-vous pas pressés, mais les chasseurs le sont, depuis que vous leur avez promis pendant toute la campagne électorale que vous alliez tout régler en quelques instants. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Claude Perez. Il y en a eu des promesses !
    M. Philippe Cochet. C'est la commedia dell'arte !
    M. le président. Laissez M. Gremetz continuer, s'il vous plaît.
    M. Alain Gest. Laissez-le parler, il ne demande que ça !
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas moi qui ai dit durant toute la campagne électorale que si nous n'avions pas réglé le problème de la chasse, c'est parce que nous n'avions pas de volonté politique. Ce n'est pas moi qui ai dit aux chasseurs que nous réglerions tous leurs problèmes,...
    M. Jean-Claude Perez. Ils devaient s'occuper du reste.
    M. Maxime Gremetz. ... les dates d'ouverture et de fermeture, le mercredi jour de non-chasse.
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. C'est ce que nous faisons dans le texte !
    M. Maxime Gremetz. Oh, ne vous avancez pas trop ! Nous en reparlerons plus en détail tout à l'heure, cette motion ayant le mérite de me fournir un très long temps de parole, histoire de vous faire part de réflexions...
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Merci.
    M. Maxime Gremetz. ... afin de rendre la chasse plus démocratique et d'expliquer ce qu'il faudrait faire, à notre sens, pour dépolitiser enfin le dossier chasse, que vous avez particulièrement politisé pendant les dernières campagnes électorales. Et c'est bien dommage pour la chasse et pour les chasseurs.
    Déjà, il y a trois mois, le 11 février très précisément, l'UMP nous a fait le coup du débat sans vote à l'Assemblée nationale. Je dois reconnaître que c'était la première fois - pourtant, je suis maintenant un ancien parlementaire - que je voyais une telle procédure (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) surtout pour une niche parlementaire. On n'a vraiment pas grand-chose à proposer ni à faire voter !
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Le débat était intéressant !
    M. Maxime Gremetz. Vous étiez aux affaires depuis neuf mois, mais vous ne saviez toujours pas ce qui, dans la loi Voynet, devait être réformé.
    M. Yves Cochet. Elle était excellente.
    M. Maxime Gremetz. Imaginer un débat sans vote, c'est-à-dire un débat pour rien, alors que les chasseurs attendent des changements rapides et concrets, voilà un geste fort de la part de l'UMP pour dire aux chasseurs que la majorité a cinq longues années devant elle et que les réformes courageuses attendront.
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. On a vu ce que vous avez fait quand vous étiez au pouvoir !
    M. Maxime Gremetz. Il est d'ailleurs possible que certains des honorables parlementaires de l'UMP et de l'UDF qui siègent aujourd'hui dans cet hémicycle soient plutôt d'accord pour que les débats traînent le plus longtemps possible et que le texte soit voté quelques semaines seulement avant les élections régionales et cantonales de mars 2004 (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Yves Cochet. Voilà bien un calcul communiste !
    M. Maxime Gremetz. Comme je sais votre attachement et le caractère politicien qui est souvent le vôtre dans ce domaine - la fin justifiant les moyens -, il ne serait pas étonnant que se prépare dans le dos des chasseurs une nouvelle tentative de tromperie électorale, comme celle que le Premier ministre a réalisée entre les deux tours des élections législatives de 2002.
    Cela étant, votre ministère de l'écologie, madame la ministre, travaille avec une telle lenteur que je commence à comprendre pourquoi vous multipliez les déclarations de bonnes intentions. Tout cela est, hélas ! bien normal, car le cabinet ministériel est enfermé, me semble-t-il, et je vous le dis en toute sincérité, dans une tour d'ivoire et pratique la culture du secret en lieu et place de la concertation.
    Bien sûr, j'ai lu et écouté avec intérêt les belles déclarations d'amour à l'égard des chasseurs. J'ai une certaine expérience, bien que non-chasseur, du monde de la chasse, notamment dans mon département de la Somme.
    M. Jean-Paul Anciaux. Avec un lance-pierre !
    M. Maxime Gremetz. Et je peux vous dire qu'ils sont comme saint Thomas, ils ne croient que ce qu'ils voient. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La preuve : ils ont cru ce qu'ils voyaient, et ils m'ont brillamment réélu, malgré tout ce que vous avez pu dire.
    Madame la ministre, il faut arrêter de promettre car nous ne sommes plus en campagne électorale. Il faut que vous fassiez enfin travailler vos services.
    Soyons clairs : vous êtes la ministre de la chasse depuis un an, et vous savez, comme moi, que la grande majorité des réformes demandées par le monde de la chasse est toujours à l'étude, ce qui est pour le moins choquant. Auriez-vous oublié que nombre des modifications souhaitées par les chasseurs sont de nature réglementaire, c'est-à-dire de votre seule responsabilité ? Quelques semaines seulement après votre arrivée dans ce ministère, vous auriez pu pratiquer le toilettage réglementaire demandé par les fédérations départementales, pour simplifier la vie des chasseurs, au niveau des prélèvements maximum autorisés, du plomb, des agents de développement fédéraux, des appeaux, etc.
    M. Roland Chassain. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait ?
    M. Maxime Gremetz. Au lieu de vous mettre immédiatement au travail sur le dossier chasse, vous avez perdu plusieurs mois en refusant de recruter un véritable « monsieur Chasse » dans votre cabinet. Même nos amis Voynet et Cochet, qui ne portaient pas un grand intérêt au sujet,...
    M. Yves Cochet. Si ! Mais il est modéré !
    M. Maxime Gremetz. ... n'ont pas commis ce genre de bévue, et ont recruté immédiatement un expert sur ce dossier politiquement sensible (Exclamations sur plusieurs bancs de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Yves Cochet. Merci !
    M. Maxime Gremetz. Il faut toujours dire la vérité, monsieur Cochet !
    M. Roland Chassain. Qu'est-ce que ça aurait été s'ils n'avaient pas recruté un expert ! (Rires sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Maxime Gremetz. Il vous a fallu cinq mois pour en trouver un, madame la ministre, vous êtes allée le chercher dans les chasses présidentielles de Chambord. Ce n'est peut-être pas le meilleur symbole de défense de la chasse populaire.
    M. Jean-Paul Anciaux. Grossouvre ! Paix à son âme !
    M. Maxime Gremetz. D'ailleurs, j'ai l'impression que le Premier ministre a été plus rapide que vous, puisqu'il a nommé à Matignon, dès juin 2002, un « monsieur Chasse », sans même vous demander votre avis, me semble-t-il.
    M. Pascal Terrasse. Mme la ministre a oublié son nom !
    M. Maxime Gremetz. Cinq mois pour trouver un modeste collaborateur, voilà déjà un mauvais signe, à moins que cela ne signifie plus simplement que personne, à l'UMP, ne connaît vraiment le dossier chasse. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mais, à ce stade de la réflexion, auriez-vous aujourd'hui un « monsieur Chasse » dans votre cabinet si la Fédération nationale des chasseurs n'avait pas tapé du poing sur la table - comme quoi il faut savoir taper du poing de temps en temps - à grands renforts de médias et d'interpellations parlementaires ?
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Il n'a vraiment rien à dire sur le projet de loi !
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas moi qui le dit, mais la Fédération elle-même.
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Vous parlez de tout, sauf du projet !
    M. Maxime Gremetz. Que la FNC dénonce avec une certaine virulence, en octobre 2002, votre immobilisme sur le dossier chasse est inquiétant car vous savez mieux que moi que les dirigeants de l'organisation représentative des 1 400 000 chasseurs n'avaient pas vraiment caché leur sympathie pour la nouvelle équipe gouvernementale. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire). Comme sur de nombreux autres dossiers où les réformes se font attendre, vous pratiquez la seule méthode que vous connaissez fort bien : communiquer au lieu de décider.
    De qui se moque-t-on en repoussant les réformes sur le devenir de l'ONCFS, sur la police rurale, sur les dégâts du gibier, c'est-à-dire en clair sur l'argent des chasseurs, à l'examen du projet de loi sur les affaires rurales qui sera peut-être programmé à l'automne, ce qui au mieux impliquerait un vote à la veille des élections régionales.
    M. Robert Lamy. C'est une obsession !
    M. Maxime Gremetz. Si ce n'est pas vrai, dites-le moi !
    Et je sais que vous allez refuser de parler des dates de chasse qu'il faut pourtant impérativement mettre dans la loi, comme le demandaient fort justement, et si vigoureusement notre ami Lemoine...
    M. Pascal Terrasse. Il a changé depuis !
    M. Maxime Gremetz. ... notre ami de Courson et notre ami Carré, n'est-ce pas ?
    M. Pascal Terrasse. Promesses électorales !
    M. Maxime Gremetz. Ils déclaraient à l'époque : « une loi sur la chasse sans dates d'ouverture ni de fermeture de la chasse...
    M. Jean-Claude Perez. Encore des promesses !
    M. Maxime Gremetz. ... se foutre de nous, c'est se foutre des chasseurs ». Dois-je répéter ? Va-t-on continuer à se foutre de nous et des chasseurs ?
    M. Paul-Henri Cugnenc. Quelle subtilité dans la dialectique !
    M. Maxime Gremetz. Nous verrons bien puisque nous avons déposé un amendement sur lequel nous ne manquerons pas de demander un scrutin public ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Robert Lamy. Très important !
    M. Maxime Gremetz. Chacun aura alors le loisir de prendre ses responsabilités.
    M. Philippe Folliot. Mais nous avons le courage de donner notre opinion !
    M. Maxime Gremetz. Où est le beau programme de l'UMP sur la chasse, que le Premier ministre a si bien su agiter au nez des électeurs de CPNT entre le premier et le deuxième tour des élections législatives ?
    M. Jean-Claude Perez. Eh oui !
    M. Pascal Terrasse. Il y a du cocu dans l'air !
    M. Maxime Gremetz. La quasi-totalité des réformes réglementaires et législatives sur la chasse pouvait être mise en oeuvre dans les six mois qui ont suivi votre arrivée au pouvoir. Hélas ! les chasseurs vont devoir attendre deux ans en se contentant d'une réformette par-ci et d'une déclaration d'amour par-là !
    M. Jean-Claude Perez. Très bien !
    M. Maxime Gremetz. Avec la rigueur économique qui frappe les salariés de notre pays et les mesures anti-classes populaires que vous concoctez, il y a de nombreux sujets prioritaires qui concernent tous les Français et qui ne feront l'objet d'aucun débat au Parlement parce qu'il n'y a plus de place dans l'ordre du jour. Par contre, nous aurons le droit, et même le grand plaisir de parler trois fois de chasse. Un seul débat aurait pourtant largement suffi, vous en conviendrez.
    M. Jean-Paul Anciaux. Il ne tient qu'à vous de le raccourcir, ce débat !
    M. Maxime Gremetz. Chacun a parfaitement compris quelle était votre stratégie politique sur ce dossier.
    Votre priorité numéro un consiste à parler plusieurs fois du sujet, comme s'il suffisait de parler pour régler le problème. Cependant, vous ne touchez pas aux vrais enjeux, qui nécessiteraient des choix politiques, que vous aviez affirmés très clairement lors des campagnes électorales. Les engagements du Président de la République et du Premier ministre ne sont toujours pas tenus. On nous promet toujours pour demain ; en fait, vous avez repris cette vieille antienne de l'Internationale, « des lendemains qui chantent ».
    Vous communiquez votre ligne politique, car cela donne l'impression que vous agissez, et vous, madame la ministre, vous êtes là pour agiter ce leurre, destiné à attirer l'électorat chasseur, que vous allez priver de représentants grâce à votre dernière manipulation des modes de scrutin des élections régionales et européennes.
    Pour éclairer mes collègues sur cette méthode de gouvernement, je prendrai trois exemples. Le premier concernera l'Observatoire national de la faune sauvage. Le deuxième s'attachera à l'absence de négociations permanentes avec Bruxelles. Le troisième consistera à faire l'inventaire des décrets et arrêtés que vous auriez dû modifier, et qui sont toujours conservés en l'état, malgré les demandes répétées des chasseurs.
    M. Philippe Folliot. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait quand vous étiez au gouvernement ?
    M. le président. Evitez d'interpeller M. Gremetz ! Laissez-le poursuivre son intervention.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, laissez-leur un peu de liberté ! (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. Folliot a raison de me poser cette question.
    M. le président. Evidemment, monsieur Gremetz. (Sourires.)
    M. Maxime Gremetz. Pourquoi ne l'ai-je pas fait, me demandez-vous ? Parce que je n'étais pas ministre de la chasse. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Paul Anciaux. Parce que vous étiez minoritaires !
    M. Maxime Gremetz. Nous l'avons proposé, mais d'autres l'ont refusé. Je suis cohérent, et aujourd'hui je défends toujours la même position, alors que vous, vous êtes complètement inconséquents.
    M. Jean-Claude Perez. Ils n'assument pas !
    M. Maxime Gremetz. Vos dires, vos déclarations, vos propositions s'accumulent, mais vous rechignez à les appliquer. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Claude Perez. Ils ont oublié !
    M. Maxime Gremetz. Il faut savoir écouter. D'ailleurs, si le Premier ministre savait mieux écouter la rue, je crois qu'il retirerait rapidement son projet, et il reprendrait sa copie.
    M. Pascal Terrasse. C'est un contractuel, il ne sait pas !
    M. Maxime Gremetz. Moi j'écoute, et j'essaie de répondre aux interrogations légitimes de collègues qui n'ont pas passé des jours et des nuits dans cet hémicycle. Au moment des votes décisifs lors de la loi chasse, je le rappelle, et cela figure au Journal officiel, il ne restait ici que trois députés de droite.
    M. Paul-Henri Cugnenc. Et il n'y a que deux députés communistes en ce moment !
    M. Maxime Gremetz. Mais tout est relatif. Regardez combien vous êtes !
    M. Pascal Terrasse. Ils sont amnésiques !
    M. Maxime Gremetz. Ils étaient tous là au début de la discussion, mais au moment des votes décisifs, à quatre heures du matin, il n'y avait plus personne. Il ne restait que trois malheureux députés. Le Journal officiel en fait foi, ce ne sont pas des affirmations en l'air.
    M. François Liberti. Eh oui !
    M. Maxime Gremetz. Alors, suivez mon conseil mes chers collègues : si vous ne tenez pas la nuit, allez vous reposer. Mais n'oubliez pas de revenir au moment des votes ! (Rires.)
    M. Roland Chassain. C'est vraiment une caricature de l'Assemblée !
    M. le président. Mes chers collègues, je vous demande de ne pas interpeller M. Gremetz.
    Veuillez poursuivre monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Je suis un homme tolérant, je me laisse toujours interpeller. (Rires.)
    M. le président. Oh oui !
    M. Maxime Gremetz. Mais le président ne veut pas ! (Sourires et exclamations sur tous les bancs.)
    M. Philippe Cochet. Vous voulez tenir une heure et demie, monsieur Gremetz. Nous vous rendons service !
    M. Maxime Gremetz. Mais ne parlez pas tous en même temps, sinon je ne vous entends pas.
    M. le président. Que cela ne vous trouble pas, monsieur Gremetz. Poursuivez.
    M. Maxime Gremetz. Ce qui me trouble, monsieur le président, c'est que j'ai l'impression que mes collègues ont perdu la mémoire historique. Cela, c'est embêtant !
    M. Jean-Claude Perez. J'ai la même impression !
    M. Christian Estrosi. Nous allons rafraîchir la vôtre, de mémoire, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. J'espère bien, monsieur Estrosi, mais vous n'étiez guère présent lors du précédent débat sur la chasse.
    M. Christian Estrosi. J'y étais, monsieur Gremetz, et je vais vous le rappeler tout à l'heure.
    M. Jean-Paul Chanteguet. Donnez des noms !
    M. Maxime Gremetz. Vous avez fait des progrès depuis la dernière fois.
    M. le président. L'interpellation de député à député est interdite par le règlement, je vous demande donc de cesser !
    Soyez raisonnables, M. Gremetz se réjouit de tout cela !
    M. Roland Chassain. Il boit du petit lait !
    M. Maxime Gremetz. Je ne me réjouis pas, j'écoute.
    M. Jean-Paul Anciaux. Ça y est, le temps est écoulé !
    M. Maxime Gremetz. L'Observatoire national de la faune sauvage est la plus belle illustration de votre hypocrisie et de votre culture du double langage,...
    M. Jean-Claude Perez. Tout à fait !
    M. Maxime Gremetz. ... et les chasseurs de migrateurs ne vous le pardonneront sans doute jamais, surtout parce qu'ils y ont cru.
    M. Pascal Terrasse. Notamment en Ardèche !
    M. Maxime Gremetz. Quoi de plus naturel que de vouloir bénéficier des données scientifiques les plus récentes pour négocier avec la Commission européenne afin de modifier les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs, en prenant en compte l'état réel des populations ? D'ailleurs, vous aviez fait de l'observatoire une vitrine de votre engagement politique à l'égard des chasseurs de migrateurs pendant la campagne électorale. C'était même l'un des rares engagements du Président de la République à l'égard des chasseurs.
    M. Jean-Claude Perez. Eh voilà !
    M. Maxime Gremetz. Ce n'était pas, madame la ministre, votre engagement personnel, mais ça l'est devenu depuis un an puisque vous vous êtes battue pour conserver la chasse dans ce ministère, ce qui me paraît être une autre erreur dont nous reparlerons. Je ne vous mets pas en cause, madame la ministre, je parle du ministère.
    Le Premier ministre a, dès le mois de juin 2002, pris acte de l'urgence qu'il y avait à mettre en place cet observatoire, affirmant que les marges de manoeuvre pour l'ouverture 2002 de la chasse aux oiseaux d'eau étaient réduites à cause de l'héritage Voynet-Cochet. Mais le chef du Gouvernement et vous-même, madame la ministre, vous êtes empressés d'ajouter que les premiers résultats des travaux de l'observatoire permettraient d'avoir des dates d'ouverture et de fermeture très différentes dès août 2003. Matignon s'est donc dépêché de rédiger un décret, qui a été signé dans la foulée, le 17 juillet 2002, annonçant la création de cette instance miraculeuse, promise par la droite lors de la campagne électorale et devenue l'arme fatale du Gouvernement pour élargir durablement les périodes de chasse.
    Comme les chasseurs ont pu tristement le constater, l'ouverture de la chasse au gibier d'eau en 2002 a été la plus courte qu'ils aient connue, pire que pendant les cinq dernières années avec des ministres verts à l'environnement ! Ce n'est pas moi qui le dis. Ce sont les chasseurs eux-mêmes.
    M. Jean-Claude Perez. C'est la réalité !
    M. Maxime Gremetz. Mais, avec la volonté affichée de la nouvelle équipe gouvernementale, on allait voir ce qu'on allait voir pour l'ouverture de la chasse 2003, forts des premiers résultats de l'Observatoire et des douze mois de négociation permanente avec la Commission européenne.
    Sans vouloir jouer les Cassandre ou les oiseaux de mauvais augure...
    M. Pascal Terrasse. C'est une raffarinade ! (Sourires.)
    M. Maxime Gremetz. ...je crains que l'ouverture de la chasse au gibier d'eau n'ait lieu au mieux que du 1er au 15 septembre, comme l'année dernière ! Il n'y aura que pour les limicoles que la chasse pourra sans doute ouvrir le 3 août.
    Bien sûr, le Gouvernement ne manquera pas de faire porter la faute au Conseil d'Etat qui vient de juger, le 5 mai, les arrêtés de l'an dernier avec une approche encore plus restrictive, pour ne pas dire caricaturale. Mais le Gouvernement ne nous dit pas tout. Entre la signature du décret et la publication de l'arrêté portant sur la composition des membres de l'Observatoire, il a fallu attendre sept longs mois - alors que quelques semaines suffisaient - pour définir quelles organisations devaient désigner des scientifiques. Pendant presque trente semaines, le cabinet a multiplié les projets visant à faire de cet observatoire une véritable usine à gaz : trente organisations devaient y être représentées, et il devait compter pas moins de quatre collèges et, - pour simplifier ou compliquer le tout, comme on voudra - deux secrétariats. Si l'on avait voulu que l'Observatoire échoue, on n'aurait pas fait autrement. Heureusement, quelqu'un a relu le décret que vous aviez signé et a découvert que tout était bien spécifié. Grâce à cette bonne âme, l'arrêté a été signé début février. Avec un observatoire composé de dix membres et comportant un seul secrétariat, on commence à y voir clair.
    Lors du débat - pour rien - du 11 février, vous avez fièrement annoncé à la tribune de l'Assemblée que l'Observatoire était sur les rails. Il n'y a pas de trains aujourd'hui sur les rails, vous le savez ! Mais, au moins, l'Observatoire, lui l'est.
    M. Roland Chassain. C'est le trans-sibérien !
    M. Maxime Gremetz. Encore un vrai et beau mensonge, car un observatoire sans programme est comme un marais sans canard et sans chasseur. (Sourires.)
    M. Pascal Terrasse. M. Gremetz est un grand poète !
    M. Maxime Gremetz. Pour connaître les priorités du ministère de l'écologie pour l'Observatoire, il a fallu encore attendre plus de deux mois, si bien que la première réunion de travail n'a eu lieu qu'à la mi-avril. Et encore les dates de chasse aux oiseaux migrateurs figurent-elles dans le catalogue des travaux urgents dressé par votre remarquable directeur de cabinet, madame la ministre, que très loin derrière le loup, l'ours et le sanglier.
    M. Roland Chassain. Ne pas oublier les moustiques en Camargue !
    M. Maxime Gremetz. Les scientifiques présents ont été atterré, non par le loup, mais par les déclarations qui ont été faites, et par un tel manque de réalisme face aux urgences.
    L'Observatoire a été créé pour s'occuper en priorité des études scientifiques sur les oiseaux migrateurs dont les dates d'ouverture de chasse posent un véritable problème. A chacune de vos interventions publiques sur la chasse, vous avez présenté cet organisme comme la clé de voûte de votre politique en faveur des chasseurs d'oiseaux migrateurs. La prochaine réunion des scientifiques est annoncée pour le 28 mai, ce qui représente donc un petit mois de travail pour des experts qui sont des bénévoles. Il vous aura fallu presque un an pour mettre onze scientifiques autour d'une table, alors que quelques semaines étaient largement suffisantes.
    M. Roland Chassain. Vous vous répétez !
    M. Maxime Gremetz. Le premier programme d'étude aurait pu être lancé en septembre 2002. Nous aurions aujourd'hui des arguments scientifiques solides pour défendre les dates devant le Conseil d'Etat et la Commission européenne. Début mai, le Conseil d'Etat, jugeant sans aucune donnée nouvelle, a cassé les arrêtés en ajoutant des motifs catastrophiques, comme la confusion avec les espèces non chassables. Qui va me faire croire que tout cela n'est pas intentionnel ? Comment peut-on mentir aux chasseurs à ce point, semaine après semaine, depuis douze mois ? Et vous, mes amis de l'UMP, on ne vous a pas beaucoup entendus crier au loup devant une telle lenteur ! (« Nous ne chassons pas ! », sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Il est interdit de chasser le loup !
    M. Maxime Gremetz. C'est bien normal, puisque d'ordinaire vous ne chassez « l'électeur chasseur » qu'en période de campagne électorale ! Ensuite, vous faites de votre mieux pour l'ignorer, voire le mépriser, jusqu'à la prochaine ouverture électorale. Pardonnez-moi d'être aussi réaliste, mais vous savez que je refuse ce genre de double language politicien.
    M. Jérôme Bignon. Ça vous va bien de dire ça !
    M. Maxime Gremetz. Un tel comportement désespère bon nombre d'électeurs, notamment ruraux, qui se tournenont vers un vote protestataire de plus en plus extrème.
    J'irais plus rapidement pour le second exemple, car il illustre la même méthode. Depuis un an le Gouvernement, par votre bouche, madame la ministre, ne cesse de reprocher aux ministres verts qui vous ont précédée de ne pas avoir engagé une négociation permanente avec les services de la Commission européenne et d'avoir ainsi bloqué toute évolution. Mais selon les dires de nombreux députés de l'UMP au sein du groupe chasse et à l'extérieur, le même grief vous est adressé ainsi qu'à vos services.
    M. Jean-Claude Perez. Eh oui
    M. Maxime Gremetz. A part quelques petits allers et retours à Bruxelles pour faire connaissance, (Sourires) vous n'avez mis en oeuvre aucune stratégie au niveau européen, d'après ce que les services de la Commission laissent entendre. J'ai même cru comprendre que Georges Dutruc-Rosset, le Monsieur Chasse du Premier ministre, avait été mis sur la touche à la demande de votre cabinet, parce qu'il faisait de l'ombre à vos services à Bruxelles. (Sourires.)
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Oh !
    M. Jean-Claude Perez. C'est vrai
    M. Pierre Ducout. Il nous l'a dit
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas moi qui le dis !
    Cela ne paraît pas très sérieux de la part d'un gouvernement dirigé par un Premier ministre qui, pour avoir été député européen, sait toute l'importance d'une négociation permanente avec de vrais professionnels, fins connaisseurs des arcanes de l'Europe. Il faut mettre un terme à l'amateurisme qui semble caractériser toutes les initiatives cynégétiques de ce Gouvernement.
    De deux choses l'une : ou bien vous avez la volonté politique d'aboutir à des solutions acceptables pour la majorité des chasseurs et vous mobilisez votre énergie et vos forces vives jusqu'au résultat ; ou bien vous cherchez à gagner du temps, dans l'attente d'un autre portefeuille ministériel, ce qui serait grave.
    Les deux exemples que j'ai cités, parmi des dizaines d'autres, montrent qu'il est grand temps de régler l'ensemble du dossier chasse sans a priori et surtout sans démagogie politicienne.
    M. Alain Gest Vous êtes spécialiste en la matière.
    M. Roland Chassain. Qu'a-t'il fait pendant cinq ans ?
    M. Maxime Gremetz. Les chasseurs sont, dans leur immnense majorité, des femmes et des hommes passionnés qui défendent la nature au quotidien et ils sont les premiers à s'investir sans compter pour la gérer au mieux.
    M. Pierre Ducout. C'est vrai.
    M. Maxime Gremetz. Nous avons souvent le bonheur aujourd'hui d'observer des chevreuils ou des cerfs lors de balades en forêt, alors que de telles occasions étaient très rares, il y a encore quelques années.
    Le temps est loin où les chasseurs se contentaient de « cueillir » le gibier. La gestion est devenue le quotidien des 1,4 million de chasseurs - mis à part quelques-uns, coupables de débordements qu'il faut évidemment toujours combattre - ...
    M. Pascal Terrasse. Dans la Somme !
    M. Maxime Gremetz. ... sans que cela coûte un centime d'euro au contribuable. Cette forte contribution au patrimoine commun que constitue la faune sauvage mérite le respect et doit obliger les responsables politiques que nous sommes à la prendre en compte.
    Personne, je suppose, n'a oublié que la chasse est un acquis de la Révolution française et que le France est l'un des derniers Etats où la pratique de celle-ci est encore démocratique et populaire.
    A ce propos, je constate qu'on respecte enfin le modèle associatif fédéral, exemple assez réussi, comme je le dis souvent, d'un certain système autogestionnaire, auto-réglementé, autorégulé, auto-administré. Cela étant, vous allez y toucher de façon regrettable en remettant en cause le système de vote sur la base d'un « homme, une voix. » Nous nous étions battus, lors de l'examen de la précédente loi, pour instaurer ce principe de démocratie élémentaire « un homme, une voix ». On revient maintenant à un principe censitaire,...
    M. Pascal Terrasse. Presque stalinien.
    M. Maxime Gremetz. ... le nombre de voix dépendant de la propriété que l'on possède. Je n'aime pas du tout cela, je vous le dis. Cela ressemble presque à l'élection des sénateurs...Vous ne le leur répéterez pas, d'accord ? (Sourires.) En tout cas, nous déposerons un amendement sur le sujet. Les chasseurs sont des citoyens comme les autres. Membres d'association, ils n'ont pas besoin d'aller à la chasse aux timbres pour tenir leurs assemblées générales. Un journal de chez moi a expliqué en long et en large la procédure à suivre. Cela ne donne pas une bonne image de la vie associative dont je me réjouis souvent par ailleurs.
    M. François Calvet. Il ne serait pas possible de résumer ?
    M. Maxime Gremetz. Nous avons déposé un amendement pour revenir sur cette question, qui, pour nous, est essentielle. Certains ne peuvent s'empêcher de tripatouiller les modes de scrutin. (Sourires sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste.) En ce qui concerne les chasseurs, ils le font sous le prétexte très original de vouloir faire voter les territoires autant que les chasseurs.
    Je suis d'ailleurs surpris, je dois le dire en toute franchise, de l'assourdissant silence de CPNT, qui s'était fait le chantre du principe « un homme, une voix », que vous allez bafouer.
    Nous ne sommes plus les seuls à tenir à ce principe. Comme quoi, les temps changent et les principes aussi. Mais c'est mauvais signe.
    Faut-il, en effet y voir le début des grandes manoeuvres en prévision du grand débauchage par l'UMP des sortants de CPNT dans de nombreuses régions, notamment celle du Premier ministre ? Je n'ose y croire, mais cette pensée m'a effleuré.
    Mais revenons à nos canards et autres espèces de gibiers (Sourires) qui sont menacés, non pas par les chasseurs, mais par les excès de la technocratie bruxelloise et par l'ignorance manifeste du Conseil d'Etat.
    En décembre 2002, j'ai, avec les membres du groupe communiste, notamment mon ami François Liberti, formulé six propositions destinées à simplifier la vie du chasseur et à provoquer un réel changement dans la gouvernance de la chasse démocratique et populaire, telle qu'elle nous est enviée partout en Europe. Nous avons voulu apporter une contribution positive, quel que soit le Gouvernement en place, afin que l'on sorte enfin de vingt ans de contentieux.
    Je rappelle d'ailleurs que j'ai été le premier à prendre l'initiative d'une proposition de loi cosignée par François Liberti et soutenue par l'ensemble de mon groupe. Cela a donné des idées à d'autres puisque de nombreuses propositions ont été formulées depuis, ce dont je me réjouis, émanant notamment des rangs de la droite parlementaire, jusque là un peu timorée. Comme quoi, il faut toujours être là pour les encourager !
    Ma première proposition consistait - et elle consiste toujours - à demander la suppression du jour de non-chasse, car cette mesure est vécue comme une atteinte à la liberté et une véritable discrimination tout à fait injustifiée. Je constate, madame la ministre, que vous avez formulé, à ce sujet, une proposition très timide tendant à supprimer le mercredi sans chasse tout en maintenant l'obligation d'un autre jour de non-chasse.
    M. Pascal Terrasse. C'est la sagesse !
    M. Maxime Gremetz. Je crois avoir correctement résumé votre démarche.
    Pour avoir signé une formulation aussi ambiguë, vous avez sans doute peur de ce que vont dire les journalistes au « 20 heures » de TF1 ou de France 2. Rassurez-vous, ils sont sûrement plus intéressés par les millions de salariés qui sont descendus dans la rue pour défendre les retraites que par la suppression du jour de non-chasse. Nous savons que les fédérations prendront leurs dispositions pour mettre en place des jours avec et des jours sans chasse, comme avant la loi de juillet 2000.
    M. François Vannson. Loi scélérate !
    M. Maxime Gremetz. C'est simple et précis.
    Prévoir que le mercredi est un jour de non-chasse donne à penser à des millions de gens, qui n'ont pas connaissance de la chasse, que dans tous les départements les chasseurs chassent six jours sur sept.
    M. François Vannson. Cela privait les instituteurs !
    M. Maxime Gremetz. Toutefois, je constate avec satisfaction qu'un amendement a été retenu par la commission présidée par notre collègue Ollier, qui, après l'ouverture proposée par Mme la ministre, demande la suppression du concept même de jour de non-chasse.
    En tous cas, si vous vous amusiez à retirer votre amendement, qui a été adopté en commission, rappelez-vous que j'en ai déposé un : vous aurez donc tout loisir de le voter ! Ce n'est pas une position nouvelle pour le groupe communiste qui s'était déjà prononcé, lors de la loi de juillet 2000, contre ce principe. Nous pouvons relire tous nos travaux, puisque nous ne sommes plus en période électorale !
    Ma deuxième proposition est toujours d'une actualité brûlante avec la menace que fait peser l'article 9 sur les dérogations qui pourraient ne plus s'appliquer, et la menace qui pèse sur les dates de chasse à la suite du jugement du 5 mai du Conseil d'Etat, lequel cassera les arrêtés d'ouvertures. Il ne faut pas sous-estimer la gravité de ces décisions du Conseil d'Etat et surtout les attendus.
    Il n'existe, à ma connaissance - c'est ce que vous disiez, monsieur Lemoine, monsieur de Courson, et c'est ce que disait M. Jacob - qu'une solution transitoire, aujourd'hui comme hier, mais ô combien urgente. Elle consiste, si l'on veut vraiment régler le problème, à inscrire les dates dans la loi.
    Je ne répéterai pas cela pendant une heure, même si vous, vous en avez parlé pendant des heures ! Ils sont amnésiques ! Cela dit, mieux vaut se répéter que se contredire !
    Ne venez pas m'expliquer que ce n'est pas la bonne façon de faire alors que vous disiez le contraire hier !
    M. Jean-Claude Perez. C'est de l'amnésie !
    M. Maxime Gremetz. Le problème est le même, mais aggravé par cette décision du Conseil d'Etat qui ne se contente pas de juger sur la forme mais, le faisant sur le fond, incite à des mesures restrictives en fonction d'une autre directive.
    Nous présenterons un amendement visant, comme notre proposition de loi, à fixer les dates dans la loi.
    Alors que nous sommes au mois de mai, les chasseurs, en particulier les chasseurs de gibier d'eau, s'interrogent encore : quand auront lieu l'ouverture et la fermeture ?
    M. Jean-Claude Perez. C'est très grave !
    M. Pierre Ducout. Voilà la réalité !
    M. Maxime Gremetz. Et la loi, telle qu'elle est, ne répondra pas à la question.
    M. Jean-Paul Chanteguet. Pas du tout !
    M. Maxime Gremetz. Vous aurez beau leur présenter tous les arguments imaginables, si nous sortons de ce débat sans avoir décidé des dates, les chasseurs diront : encore un débat pour rien !
    M. Jean-Claude Perez. C'est à craindre !
    M. Maxime Gremetz. Puisque les anti-chasse ont décidé de combattre toutes les propositions de dates, quelles qu'elles soient, alors il faut contourner l'obstacle. Je déposerai donc avec le groupe communiste et François Liberti des amendements en ce sens et je voterai sans état d'âme ceux d'autres groupes politiques si cela est nécessaire.
    M. Jérôme Bignon. Très bien !
    M. Maxime Gremetz. Je rappelle, surtout pour les nouveaux, que nous nous déterminons toujours en fonction du contenu d'un amendement et non pas de son auteur. Si nous pensons qu'un amendement est bon, qu'il vienne de la droite ou de la gauche, nous le votons.
    M. Jérôme Bignon. Pour la loi Voynet, vous auriez dû voter les amendements qui étaient bons !
    M. Maxime Gremetz. Ah ! voilà au moins un homme de la Somme qui se manifeste ! J'observe que les autres sont absents.
    M. Pascal Terrasse. M. Bignon est un contractuel ! (Sourires.)
    M. Maxime Gremetz. Je le salue vivement !
    M. le président. Poursuivez, monsieur Gremetz !
    M. Bernard Poignant. Les communistes ont soutenu la loi Voynet. L'erreur est humaine !
    M. Maxime Gremetz. La troisième proposition est justifiée par les deux exemples que j'ai formulés en préambule. Pour gérer avec efficacité le dossier de la chasse qui est interministériel, il me paraît indispensable de créer un véritable secrétariat d'Etat à la chasse rattaché directement au Premier ministre.
    M. François Vannson. Et un à la pêche !
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas contre vous, madame la ministre, que nous formulons, comme d'autres, cette proposition, que nous avions déjà formulée avant que vous ne soyez ministre de l'environnement. Sans quoi je dirais simplement que vous ne faites pas votre travail !
    Le problème est d'une telle complexité, exige tant de débats, de discussions et de négociations avec Bruxelles qu'un secrétaire d'Etat est nécessaire. Cette idée du CPNT, Chasse, pêche, nature et tradition, nous a paru bonne et c'est pourquoi nous l'avons reprise. Un secrétariat d'Etat, sous la responsabilité du Premier ministre, pourrait examiner toutes ces questions. D'autant que vous avez déjà beaucoup à faire avec les marées noires et les inondations, par exemple. On ne peut pas avancer résolument dans ce domaine sans disposer du temps nécessaire. C'est une proposition pertinente pour qui recherche l'efficacité.
    On voit bien que la situation actuelle est inextricable et que chaque ministre cherche à conserver sa « chasse gardée », si j'ose dire.
    Entre la ministre des espèces qu'est Mme Bachelot et le ministre des espaces qu'est M. Gaymard (Sourires), je vois se profiler quelques conflits de voisinage lorsqu'on abordera le volet chasse de la loi relative aux affaires rurales. Pourquoi faut-il un volet chasse dans une loi sur les affaires rurales ? Je ne comprends pas !
    M. François Vannson. C'est sûr !
    M. Maxime Gremetz. Cela me paraît inimaginable. En tout cas, jamais je n'ai vu légiférer ainsi !
    M. Pascal Terrasse. Ils jouent la montre !
    M. Maxime Gremetz. Le primaire que je suis n'arrive pas à comprendre que, pour discuter de la chasse, il faille trois volets différents dans trois lois différentes. Vraiment, pourquoi faire simple quand on peu faire compliqué ?
    Il faut mettre fin à ces incohérences. Il est indispensable de prendre part aux négociations européennes, ce qui montre bien que la création d'un secrétariat d'Etat est la bonne solution.
    Ma quatrième proposition est de prolonger l'observatoire de la faune sauvage...
    M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. Encore ! Vous en avez déjà parlé !
    M. Maxime Gremetz. ... pour qu'il s'agisse d'un instrument tactique plutôt qu'une vague promesse électorale. Il s'agit de transformer l'ONCFS en un vaste organisme d'étude et de recherche sur la faune sauvage, en regroupant au sein d'un même établissement tous les services dispersés entre l'INRA, le CEMAGREF et le CNRS entre autres, pour consolider le pôle d'expertise scientifique qui nous fait défaut sur le plan national et européen.
    Cette grande réforme passe d'abord par l'application de ma cinquième proposition, qui consiste à placer la garderie nationale de la chasse et de la faune sauvage sous la tutelle de la gendarmerie nationale dans les départements. Cette innovation, qui représente la mise à disposition de quelque 1 400 gardes, doit s'inscrire dans la perspective de la refonte et de la réorganisation de la police rurale lancée par Nicolas Sarkozy. Les campagnes ont droit à la sécurité au même titre que les centres urbains, et il devient indispensable de pratiquer des économies d'échelle en remettant en cause les polices spécialisées, notamment environnementale, dont l'efficacité laisse vraiment à désirer.
    Ma sixième proposition consiste à lever l'ambiguïté qui pèse sur la période de cinq ans concernant la chasse de nuit au gibier d'eau.
    M. Pierre Ducout. Eh oui ! Le rapport !
    M. Maxime Gremetz. Le rapport, qui devait être présenté au bout de cinq ans, soit d'ici un an et demi, avait été conçu pour être une véritable épée de Damoclès au-dessus de la tête des chasseurs de gibier d'eau.
    M. Pierre Ducout. Pas par nous !
    M. Maxime Gremetz. Je rappelle à ce propos qu'avant la loi de 2000, il n'y avait jamais eu, depuis la Révolution française, de légalisation de la chasse de nuit.
    M. Jean-Paul Chanteguet. C'est nous qui l'avons légalisée !
    M. Maxime Gremetz. C'était une tolérance, je le rappelle pour mémoire. Jamais n'avait été inscrit dans la loi française le droit de chasse de nuit.
    M. Jean-Claude Perez. C'est vrai ! Nous l'avons fait !
    M. Maxime Gremetz. C'est un acquis et non des moindres de la loi de 2000. Mais celle-ci l'a légalisée pour cinq ans. (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    M. Pierre Ducout. Nous avons exigé un rapport, ce n'est pas pareil.
    M. François Vannson. Querelle de voisinage !
    M. le président. Le débat permettra d'éclairer ce point ! (Sourires.)
    Continuez monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Avec un tel document, rédigé par de beaux esprit anti-chasse, demain la chasse de nuit pourra être remise en cause. Et là nous aurons à débattre, mes chers collègues.
    Selon l'analyse qui est faite de cette loi de 2000 par des spécialistes, il s'agit bien d'une légalisation pour une période de cinq ans !
    M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. Mais non ! Cela n'à rien à voir !
    M. Maxime Gremetz. Pour ma part, je fais davantage confiance aux gens avec lesquels je travaille, en particulier de hauts responsables de la chasse, qu'à vous !
    La mémoire peut avoir des failles, mais la mienne est très bonne !
    M. le président. Ce point sera éclairci, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Certes, et d'autant plus que nous avons déposé un amendement qui propose de légaliser définitivement la chasse de nuit.
    Voilà ce que j'aurais aimé trouver, au moins en partie, dans ce projet de loi, madame la ministre. Au lieu de ce programme commun pour la chasse (Rires), on nous offre un mauvais feuilleton à épisodes avec, comme mise en bouche, un débat pour rien le 11 février, puis, la semaine dernière, un vote en catimini des ordonnances de simplification avec trois mesurettes, bien cachées dans une avalanche de mesures. Aujourd'hui, on nous propose une « petite loi chasse », pour parler des fédérations et du jour de non-chasse. A l'automne, on nous promet un « grand volet chasse » dans la loi « affaires rurales » et, pour clôturer le tout, - c'est l'apothéose ! - une loi sur le patrimoine naturel au lendemain des élections régionales. Quel pathos !
    Un seul vrai débat aurait permis de tout mettre à plat...
    M. Jean-Claude Perez. Exactement !
    M. Maxime Gremetz. ... alors que je crains qu'en l'état les promesses n'engagent que ceux qui les reçoivent. Nous pourrons le constater par nous-mêmes, tout à l'heure, et ce sera l'heure de vérité : celle du vote des amendements, d'autant que nous ne manquerons pas de demander un scrutin public. Après, on ne pourra pas aller raconter des histoires aux chasseurs !
    M. Pascal Terrasse. Nous noterons les noms !
    M. Maxime Gremetz. Les prises de positions seront claires et précises.
    Alors, chers collègues, préparez-vous. Il vous faudra assumer pleinement vos positions ! Et inutile de s'éclipser au moment du scrutin public, je le dis aux nouveaux...
    M. le président. Qui écoutent attentivement vos recommandations !
    M. Maxime Gremetz. ... car nous noterons ceux qui disparaîtront (Sourires.) !
    Et que Mme la ministre ne nous réponde pas à chaque amendement : « C'est un excellent amendement... mais il sera examiné prochainement... » Car si le débat s'engageait ainsi, il pourrait bien durer très longtemps, et l'on n'avancerait pas beaucoup.
    Vous comprenez pourquoi j'insiste. Comme vous avez écouté, mes chers collègues, avec beaucoup d'attention, je ne vais pas en rajouter. Voyez : on est toujours récompensé de ses efforts !
    M. Charles de Courson. Si seulement !
    M. Maxime Gremetz. Je me contenterai de rappeler que, par cette exception d'irrecevabilité, nous ne voulions pas démontrer qu'il ne fallait pas faire une loi, mais que nous considérons que celle-ci contient si peu qu'elle ne mérite pas d'être examinée. Nous voudrions qu'elle comporte les dispositions essentielles qu'attendent les chasseurs et tous ceux qui sont attachés à la nature : les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse mais là-dessus vous vous êtes exprimée lors d'un précédent débat et nous sommes tout à fait d'accord la légalisation de la chasse de nuit, son extension à d'autres départements pour passer de 21 à 28. Nous avons déposé une série d'amendements allant dans ce sens.
    Nous aborderons, grâce à un amendement, la question essentielle de la renégociation de la directive 79/409. Cette directive, qui nous empêche de dormir et qui surtout empêche les chasseurs de dormir, a été adoptée sur une proposition française...
    M. Jean-Claude Perez. Sous un gouvernement de droite !
    M. Maxime Gremetz. ...formulée sous le règne de M. Giscard d'Estaing. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Pascal Terrasse. Un grand chasseur !
    M. Maxime Gremetz. Malheureusement, j'étais un des rares députés européens, le seul Français, à voter contre cette directive, qui nous paraissait de nature à mettre en cause la chasse, en particulier la chasse populaire et démocratique telle que nous la pratiquons en France.
    Mes chers collègues, pour toutes ces raisons, je vous invite à adopter cette exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, je ne sais si ce débat est « surnaturel », mais il est en tout cas totalement surréaliste. M. Gremetz a commencé par un rappel au règlement dans lequel il s'insurgeait contre le fait que ce débat sur la chasse ait lieu alors qu'un certain nombre de Français sont dans la rue...
    M. Pierre Ducout. Beaucoup de Français !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ...mais il conclut en proposant la création d'un secrétariat d'Etat à la chasse. Mazette ! Pour un sujet qui n'a pas d'importance, monsieur Gremetz, vous n'y allez pas avec le dos de la cuillère !
    Vous défendez ensuite une exception d'irrecevabilité. Je ne veux pas croire qu'un député aussi chevronné que vous, qu'un parlementaire aussi expérimenté ignore la signification de l'article 91, alinéa 4, du règlement de l'Assemblée. L'exception d'irrecevabilité a pour objet « de faire reconnaître que le texte proposé est contraire à une ou plusieurs dispositions constitutionnelles ». Or pas un mot, pas une allusion, pas un lien, pas un élément dans votre discours...
    M. Charles de Courson. Rien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ...ne permet d'aboutir à une telle conclusion. Monsieur Gremetz, vous vous moquez du Parlement en demandant une heure et demie pour plaider une exception d'irrecevabilité de cette nature.
    M. Pierre Ducout. En d'autres circonstances, nos collègues de l'actuelle majorité ont fait de même !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Vous avez pourtant des choses intéressantes à dire. Mais vous mêlez ces considérations à des ragots de couloirs, à des attaques personnelles contre des fonctionnaires intègres et compétents. Monsieur Gremetz, c'est indigne de vous. Vous m'avez beaucoup déçue. (Sourires.)
    M. Maxime Gremetz. Il y a des hauts et des bas !
    M. Charles de Courson. Vous faites pleurer Roselyne ! (Sourires.)
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Ce qui était peut-être le plus surnaturel dans ce débat, monsieur le député, c'était de voir que les attaques sans pitié que vous avez lancées contre le texte de Mme Voynet se sont déroulées sous les applaudissements masochistes des députés socialistes qui avaient eux-mêmes voté ce texte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Pierre Ducout. En aucun cas !
    M. Maxime Gremetz. Vous voyez que j'ai de la cohérence !
    M. Pierre Ducout. Nous n'avons pas voté le texte de Mme Voynet. On a voté un texte.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député, non seulement vous n'avez pas donné à cette exception d'irrecevabilité la dignité à laquelle vous nous avez habitués, non seulement vous n'avez pas respecté ses fondements juridiques, mais vous avez prouvé que vous êtes doté de ce que Supervielle appelait une « oublieuse mémoire ». Quand je constate que vous avez oublié que vous n'aviez même pas eu le courage de voter contre ce texte et que vous vous étiez simplement abstenu (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.), ce n'est plus de la déception que j'éprouve à votre égard, monsieur Gremetz, c'est une profonde tristesse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Madame la ministre, vous avez beaucoup peiné M. Gremetz. Regardez-le ! (Sourires.)
    Nous en venons aux explications de vote sur l'exception d'irrecevabilité.
    La parole est à M. François Liberti, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. François Liberti. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme l'a fort justement expliqué mon collègue Maxime Gremetz, au nom du groupe des député-e-s communistes et républicains, l'exception d'irrecevabilité se justifie par le fait que le Gouvernement présente un projet de loi qui élude l'essentiel des problèmes de la chasse, et tout particulièremement ce qui touche aux dates d'ouverture et de fermeture, et par le double language qui caractérise ce texte.
    Pour les parlementaires communistes et républicains, en effet, il n'est pas acceptable qu'un projet de loi sur la chasse ne traite pas des questions de fond qui sont en débat.
    M. Pascal Terrasse. C'est un vrai problème !
    M. François Liberti. La suppression du jour de non-chasse et le traitement positif de cette question sur les jours de chasse (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste), la détermination du calendrier des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs dans le cadre législatif, la création d'un secrétariat d'Etat à la chasse auprès du Premier ministre, la police de la chasse placée sous l'autorité de la gendarmerie nationale, le respect du principe démocratique « un homme, une voix », ainsi que la pérennité de la chasse de nuit au gibier d'eau et son extension aux départements dont c'est l'usage, tels sont quelques-uns des points essentiels que nous défendons et au sujet desquels nous avons déposé des amendements. Hélas, ils ne sont pas abordés dans le projet de loi. Ce n'est pas la pirouette avec laquelle vous venez de traiter la position qu'avait adoptée notre groupe lors de l'examen des précédents textes qui peut justifier cette absence. Notre collègue Maxime Gremetz a fort justement rappelé dans son intervention que tous les contentieux que nous connaissons sur ce dossier depuis vingt ans ont pour origine la directive « oiseau » qui a été votée au Parlement européen en 1979.
    M. Pascal Terrasse. Par la droite !
    M. Christophe Masse. C'était sous Giscard !
    M. François Liberti. Nous avons la fierté d'être le seul groupe parlementaire à avoir eu sur ce texte une position cohérente : la proposition présentée par la droite française...
    M. Pascal Terrasse. Raymond Barre était Premier ministre !
    M. François Liberti. ... sous un Premier ministre qui s'appelait M. Barre a été votée à l'unanimité des autres groupes parlementaires, ...
    M. Charles de Courson. Devinez comment les communistes ont voté !
    M. François Liberti. ... seul le groupe communiste s'y étant opposé. La constance de la position défendue dès l'origine par les élus communistes et républicains sur ce dossier de la chasse nous permet de poursuivre aujourd'hui notre action, avec ténacité et détermination, dans le cadre de cette exception d'irrecevabilité et - si elle n'est pas adoptée - en défendant les amendements que nous avons proposés.
    Telle est la raison pour laquelle je vous invite, mes chers collègues à voter l'exception d'irrecevabilité.
    M. Maxime Gremetz. Très bien !
    M. le président. Sur le vote de l'exception d'irrecevabilité, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Christian Estrosi, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Christian Estrosi. Notre cher Maxime Gremetz, pour lequel nous sommes plusieurs à éprouver une certaine sympathie, a un exceptionnel don du reniement de soi.
    M. Maxime Gremetz. Oh ! Oh !
    M. Christian Estrosi. Après que Mme la ministre lui a quelque peu rafraîchi la mémoire, je voudrais apporter ma contribution à l'élaboration du bêtisier de M. Gremetz. Ainsi, je citerai les propos qu'il a tenus lors de la séance du 28 juin 2000 : « Ce projet de loi n'est qu'une étape dans l'élaboration d'une vraie réforme de la chasse française, qui donnera enfin toute sa place à la chasse populaire. »
    M. Pierre Ducout. C'est vrai !
    M. François Vannson. C'est radical !
    M. Christian Estrosi. Et il a plaidé pour le principe « un homme, une voix », en même temps qu'il a déclaré avoir « toujours défendu l'originalité du système associatif avec les 50 000 associations locales de chasse et des fédérations départementales chargées des missions de service public »...
    M. Maxime Gremetz. C'est quelle page ?
    M. Christian Estrosi. ... et a reconnu que le projet d'alors avait « introduit des contrôles inutiles sur les fédérations départementales et la fédération nationale ». Ce n'est là qu'une partie du bêtisier de M. Gremetz pour cette époque.
    M. Pascal Terrasse. Il n'a pas changé ! C'est ce qu'il vient de dire ! Vous n'avez pas écouté !
    M. Christian Estrosi. D'autre part, M. Gremetz a déclaré que nombre d'entre nous disparaissaient au moment des scrutins.
    M. Maxime Gremetz. M. de Courson était là ! Il n'ose pas confirmer !
    M. Christian Estrosi. Moi aussi, j'étais là jour et nuit, monsieur Gremetz ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains).
    M. Maxime Gremetz. Non, vous, vous n'étiez pas là !
    M. Christian Estrosi. Je me suis même exprimé, à cette tribune, au nom du groupe RPR, dans des explications de vote. (Mêmes mouvements.) J'ai déposé et défendu plusieurs amendements auxquels vous vous êtes opposé, monsieur Gremetz.
    M. Pascal Terrasse. Quelle mauvaise foi !
    M. Christian Estrosi. Mais puisque vous prétendez que nous étions nombreux à nous éclipser au moment des scrutins, je voudrais rappeler les votes de l'époque. Groupe RPR : 137 membres ; contre : 137. Groupe socialiste : 254 membres ; pour : 241.
    M. Maxime Gremetz. C'était quand, ça ?
    M. Christian Estrosi. Groupe UDF : 69 membres ; contre : 63. Groupe Démocratie libérale et indépendants : 44 membres ; contre : 44. Groupe communiste : (« Ah ! Ah ! Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) pour : 2 - M. Brard et M. Moutoussamy ; contre : 2 - et je salue leur courage - M. Carvalho et M. Hage.
    M. Charles de Courson. Les traîtres ! (Sourires.)
    M. Christian Estrosi. Où était donc M. Gremetz, si ce n'est parmi les vingt-sept abstentionnistes ? (Exclamations et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Monsieur Gremetz, ne nous donnez donc pas de leçons de morale. Le texte d'aujourd'hui, voulu par le Gouvernement et sa majorité, est d'abord animé par le souci d'apaiser un conflit artificiel, ouvert entre les pouvoirs publics et les chasseurs. Il n'est jamais sain, dans une démocratie, de désigner une catégorie de citoyens comme cible privilégiée.
    M. Jean-Claude Perez. Pas vous ! Pas ça !
    M. Christian Estrosi. Or, pendant cinq ans, les chasseurs ont été les victimes des négociations d'arrière-cour de votre gauche plurielle,...
    M. Pierre Ducout. C'est faux ! C'est faux !
    M. Christian Estrosi. ... devenue hétéroclite au fil des années. Ils ont constitué le ciment permanent servant à recoller les morceaux brisés de la défunte majorité.
    Pour les chasseurs, ce furent des années noires,...
    M. Pierre Ducout. Ça commence avec vous, cette année !
    M. Christian Estrosi. ... une période de troubles, de dénigrement permanent de la part des écologistes mondains. La chasse s'est transformée en objet de marchandages de couloir, de basses manoeuvres au service du maintien d'une cohésion politique, bien loin des considérations d'intérêt général qui auraient dû présider à un débat serein sur la place et le rôle de la chasse dans notre société moderne.
    M. Christian Estrosi. Et, à propos de marchandages, monsieur Gremetz, je veux rappeler celui auquel donnèrent lieu la loi chasse de Mme Voynet, que vous lui avez concédée, et le troisième aéroport en Ile-de-France, qu'elle vous a concédé. La voilà, la réalité de l'époque ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Henri Nayrou. Quel pouvoir, Maxime ! (Sourires sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Christian Estrosi. Grâce au Gouvernement, et notamment au courage de Roselyne Bachelot, ces temps sont révolus. Face à une situation politiquement intenable et juridiquement instable,...
    M. Pierre Ducout. Tenez vos promesses !
    M. Christian Estrosi. ... toute l'action du Gouvernement a visé à retisser le lien entre l'Etat et le monde de la chasse. Dès les premières semaines, la majorité a souhaité renouer le dialogue avec les représentants des chasseurs...
    M. Pierre Ducout. On verra comment vous tenez vos promesses !
    M. Christian Estrosi. ... et rétablir les contacts avec la Commission européenne, alors que, pendant cinq ans, vous vous êtes coupés de tout dialogue avec elle pour négocier les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse.
    M. Pierre Ducout. C'est faux !
    M. Christian Estrosi. Des avancées significatives sur divers dossiers ont été obtenues :...
    M. Jérôme Lambert. Avec quel résultat ?
    M. Christian Estrosi. ... fermeture retardée pour les bécasses et les tourterelles, suppression du timbre « gibier d'eau », report des élections des fédérations départementales de chasseurs, réintroduction de trois espèces de mustélidés sur la liste des espèces nuisibles.
    M. Jérôme Lambert. Il ne sait pas de quoi il parle !
    M. Christian Estrosi. Au-delà des mesures d'urgence visant à effacer les dispositions les plus néfastes de la politique écolo-socialo-communiste, le Gouvernement et sa majorité ont souhaité mettre en place un véritable projet pour la chasse. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Maxime Gremetz. On va vous voir à l'oeuvre !
    M. Christian Estrosi. Ce texte d'équilibre et d'apaisement revient sur les dispositions les plus controversées de la loi du 26 juillet 2000.
    M. François Liberti. Il n'y a rien dans ce texte ! C'est du bla-bla !
    M. le président. Monsieur Estrosi,...
    M. Christian Estrosi. J'ai terminé, monsieur le président.
    M. François Liberti. Les questions essentielles ne sont pas traitées ! C'est de la démagogie !
    M. Christian Estrosi. Ainsi, en ce qui concerne le statut des fédérations, il supprime le contrôle a priori du représentant de l'Etat. Il abroge l'interdiction de chasser le mercredi,...
    M. Pierre Ducout. C'est faux !
    M. le président. Monsieur Estrosi, il faut conclure.
    M. Christian Estrosi. ... qui s'appliquait uniformément sur l'ensemble du territoire, au profit d'un dispositif qui déconcentre le choix du jour de non-chasse.
    C'est la raison pour laquelle je ne peux que demander le rejet de votre exception d'irrecevabilité, d'un point de vue juridique, d'abord, puisque rien n'est inconstitutionnel,...
    M. le président. Monsieur Estrosi, cet argument a déjà été développé.
    M. Christian Estrosi. ... d'un point de vue politique, ensuite, puisque ce texte entend, avec justesse et équilibre, permettre aux chasseurs d'exercer leur passion dans les meilleures conditions possibles, comme ils l'ont toujours fait. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Charles de Courson. Comme Mme la ministre, je croyais que défendre l'exception d'irrecevabilité c'était faire quelques efforts pour tenter de trouver dans un texte des motifs d'anticonstitutionnalité. Or, rien !
    M. Maxime Gremetz. On ne va pas faire semblant !
    M. Charles de Courson. Ce n'était donc pas une exception d'irrecevabilité mais un discours, une piècette, une saynète. (Sourires.) Mais comme toutes les saynètes, celle-ci avait ses limites. J'ai participé à toutes les séances de commission, à toutes les séances publiques, de jour comme de nuit.
    M. Pierre Ducout. C'est vrai !
    M. Charles de Courson. Mes chers collègues, je rappellerai, pour ceux qui n'étaient pas députés à l'époque, que la loi Patriat n'a été votée qu'avec quatorze voix de majorité relative et que, à quatre exceptions près, les députés communistes se sont courageusement abstenus. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Christian Estrosi l'a rappelé, ils furent vingt-deux à le faire. S'il y a une loi Patriat, c'est donc bien grâce au parti communiste.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Merci, Maxime !
    M. Charles de Courson. Merci, Maxime Gremetz. (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Maxime Gremetz était l'un d'eux. Je le revois, dans le salon où nous attendions d'aller voter. Il avait sa fameuse pipe à la main. Je lui ai dit : « Vas-tu manger ta pipe ? » Il l'a mangée en s'abstenant. (Rires.)
    M. Christophe Masse. On va vous voir à l'oeuvre !
    M. Maxime Gremetz. Combien de pipes allez-vous avaler, Charles de Courson ?
    M. Charles de Courson. Aujourd'hui, Maxime Gremetz vient nous expliquer qu'il faut voter l'exception d'irrecevabilité contre le texte qui est la première de deux étapes. Mes chers collègues, soyons sérieux. Le groupe UDF votera contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet, pour le groupe socialiste.
    M. Jean-Paul Chanteguet. Monsieur le président, madame la ministre, dans l'exception d'irrecevabilité défendue par notre collègue Maxime Gremetz, je retiendrai quelques arguments. Tout d'abord, il l'a dit avec une grande justesse, le Gouvernement n'a pas tenu les engagements qui avaient été pris lors de la campagne des élections législatives.
    Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. C'est vrai !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Le président de l'association des chasseurs de gibier d'eau a indiqué que la saison de chasse qui vient de se terminer fut la plus courte de toutes celles qu'ont connues les chasseurs. En effet, les engagements n'ont pas été tenus. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Charles de Courson. Merci, Voynet !
    M. Jean-Claude Perez. Assumez, assumez !
    M. Jean-Paul Chanteguet. D'autre part, nous constatons la disparition du principe « un chasseur, une voix », auquel nous sommes particulièrement attachés et qui visait à démocratiser les instances de la chasse. La rédaction proposée par Mme la ministre conduit à donner des voix aux titulaires de droits de chasse, ce qui va déséquilibrer les modalités de répartition des voix au sein des assemblées générales.
    M. Pierre Ducout. C'est l'Ancien régime !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Enfin, la présentation saucissonnée de différentes dispositions sur la chasse, - d'abord cette loi-ci, puis des dispositions dans le cadre de la loi sur les affaires rurales, et enfin un texte concernant le patrimoine naturel - ne fait pas très sérieux. Nous pensons qu'il aurait mieux valu présenter une loi globale, comme nous l'avions fait en 2000.
    Pour ces raisons, le groupe socialiste votera l'exception d'irrecevabilité.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et le cas échéant pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'exception d'irrecevabilité.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   115
Nombre de suffrages exprimés   115
Majorité absolue   58
Pour l'adoption   21
Contre   94

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Question préalable

    M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une question préalable, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.
    La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet.
    M. Jean-Paul Chanteguet. Madame la ministre, après avoir accepté de participer, à la demande du groupe parlementaire de l'UMP, à un débat sur la chasse, le 11 février dernier, pendant près de quatre heures, vous nous soumettez un projet de loi sur la chasse. Le groupe socialiste, qui s'est beaucoup investi dans ce dossier il y a plusieurs années, se doit de s'exprimer afin de présenter l'action qu'il conduisit dans un contexte difficile, marqué par des tensions externes et la volonté des uns et des autres d'en découdre. Car si nous ne le faisions pas, qui le ferait à notre place, puisque la loi Patriat, sur laquelle je reviendrai dans quelques instants, ne fut votée, le 28 février 2000, que par les socialistes ?
    Je dois rappeler dès maintenant que nous ne nous sommes jamais situés dans le camp des « anti-chasse » ou dans celui de « l'extrême chasse », mais plutôt dans le camp des progressistes pragmatiques, qui considèrent que nous ne pouvons pas aborder ce dossier de la chasse en faisant abstraction des évolutions de notre société et du contexte européen. Je dois aussi rappeler qu'il n'y a pas, d'un côté, ceux qui ne font pas confiance et qui légifèrent encore et toujours, et, d'un autre côté, ceux qui font confiance et ne légifèrent pas. Le groupe socialiste a choisi de s'exprimer en particulier au travers de cette question préalable, qui doit me conduire à expliquer, aux termes de l'article 91 de notre règlement, pourquoi il n'y a pas lieu à délibérer.
    J'évoquerai deux raisons principales.
    La première tient au fait que, il y a moins de trois ans maintenant, l'Assemblée nationale vota, dans la plus grande clarté, et à la suite d'un grand débat, un texte global sur la chasse, dont l'ambition était bien le développement d'une chasse durable.
    La deuxième raison, c'est qu'en délibérant à nouveau, vous prenez le risque d'être confrontée à des propositions extrêmes sur un sujet aussi sensible que celui de la chasse. D'ailleurs, le débat qui a eu lieu en commission fut, malheureusement, particulièrement instructif sur la ligne qui se dessine et qui ne manquera pas, si elle est suivie, de détruire le savant équilibre déjà construit.
    J'en viens à ma première raison et, comme je l'ai fait le 11 février, je m'attacherai à préciser, à propos de cette loi chasse, la méthode d'élaboration qui fut mise en oeuvre et les nombreuses avancées qu'elle contient.
    Fin 1999, le dossier de la chasse était dans l'impasse. Les responsables politiques d'alors ont jugé opportun, dans un premier temps, de confier à François Patriat la rédaction d'un rapport, qui devait précéder le dépôt d'un projet de loi. Dans la lettre de mission qu'il reçut le 26 juillet 1999, le Premier ministre demandait à François Patriat de présenter des propositions pour rénover le droit applicable aux activités cynégétiques et établir les conditions d'un consensus durable entre les chasseurs et les autres utilisateurs des milieux naturels.
    François Patriat, au cours de sa mission, ne négligea aucun des acteurs de ce dossier : bien sûr, les chasseurs, au travers de leurs différentes organisations - soixante présidents de fédérations départementales ont été entendus, comme la Fédération nationale -, mais aussi des élus locaux, des parlementaires, les organisations regroupant les autres utilisateurs de la nature, les représentants des divers services de l'Etat et de ses établissements publics - le Conseil d'Etat, la DNP, les DIREN, les DDAF, l'Office national de la chasse, l'Office national des forêts -, ainsi que les représentants des organismes scientifiques et techniques.
    Comme il le montra fort bien, il était urgent et nécessaire de légiférer, parce que, d'une part, le droit de la chasse était un droit ancien et que, d'autre part, les chasseurs, dont le nombre était en régression régulière, puisqu'il était passé de 2,5 millions dans les années 1980 à seulement 1,4 million en 1999, se sentaient menacés et étaient préoccupés par leur avenir.
    Un droit ancien, puisque, comme vous le savez, ce fut la loi du 3 mai 1844 qui institua le permis de chasse, interdit la chasse sur le terrain d'autrui et la chasse de nuit, n'autorisa la chasse que pendant les périodes où elle est ouverte, définit les modes de chasse autorisés par le permis, interdit également la commercialisation et le transport de gibier pendant les temps de chasse prohibée.
    Ensuite, quelques réformes, en 1941, 1964 et 1975, furent adoptées. Elles eurent pour objet : la mise en place d'une organisation structurée de la chasse sur le territoire - les fédérations départementales des chasseurs et l'Office national de la chasse - ; la création d'outils de gestion de la ressource cynégétique - les plans de chasse - et le renforcement du contrôle sur l'activité de chasse, notamment au travers de l'examen préalable au permis de chasser ; et enfin, la modernisaton de la garderie et l'adaptation de la police de la chasse.
    Le projet de loi sur la chasse présenté le 16 février 2000 reprenait de nombreuses propositions faites dans le rapport Patriat. Il visait à relégitimer la chasse au travers d'une modernisation de ses institutions et d'une adaptation des règles de la chasse au droit européen et à l'évolution de notre société. Le projet fut largement discuté et amendé par l'Assemblée nationale. D'ailleurs, le texte voté définitivement le 28 juin 2000 marquait bien la volonté du groupe socialiste d'aller vers une chasse apaisée, moderne, respectueuse de notre patrimoine commun et de nos valeurs.
    J'en veux pour preuve les dispositions qui ne figuraient pas dans le projet de loi et qui ont été proposées et adoptées par les députés. C'est, par exemple, la définition de l'acte de chasse ; c'est la mise en place d'un permis de chasse accompagnée pour les jeunes ; c'est le principe « un chasseur, une voix » pour les assemblées générales des fédérations départementales des chasseurs ; c'est la mise en place d'un fonds de péréquation géré par la Fédération nationale des chasseurs en vue d'assurer la solidarité entre les différentes fédérations départementales ; c'est la clarification de l'indemnisation des dégâts de gibier, qui incombe désormais aux fédérations départementales ; c'est la formation des candidats au permis de chasser, qui doit clairement relever des fédérations départementales ; c'est l'examen du permis de chasser, qui doit être organisé par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage et comporter des épreuves pratiques et théoriques ; c'est aussi la légalisation - alors que la proposition du Gouvernement consistait seulement à la dépénaliser pendant une période de cinq ans - de la chasse de nuit au gibier d'eau dans vingt et un départements et dans les cantons où cette chasse est traditionnelle.
    A ces importantes avancées initiées par l'Assemblée, il faut ajouter : la légalisation de la chasse à la passée, à partir de deux heures avant le lever du soleil et jusqu'à deux heures après son coucher ; la reconnaissance du droit de non-chasse ; l'élargissement des missions de l'Office national de la chasse et des fédérations départementales des chasseurs ; et l'instauration d'un jour de non-chasse, afin de protéger le gibier et de permettre la conciliation des différents usages de la nature, sachant que les députés ont fait inscrire dans la loi deux exceptions à cette interdiction. L'une concerne la chasse aux colombidés à partir de postes fixes, du 1er octobre au 15 novembre, et l'autre la chasse de nuit au gibier d'eau.
    Il me paraît aussi utile de souligner, puisque cela est rarement rappelé et que l'oubli est chose fréquente, que plus de soixante députés - dont vous n'étiez pas, madame la ministre -, de l'opposition d'alors ont procédé à la saisine du Conseil constitutionnel, afin de contester la conformité à la Constitution de douze articles.
    Ce rappel est d'autant plus utile que la plupart des dispositions furent validées et déclarées conformes à la Constitution, ce qui donne à cette loi toute sa force, et que les arguments invoqués par le Conseil constitutionnel, sur lesquels je tiens à revenir, démontrent bien que les critiques faites à l'occasion des débats au Sénat et à l'Assemblée n'étaient pas fondées juridiquement, mais qu'elles étaient l'expression d'un courant de pensée sur la chasse particulièrement conservateur.
    La requête déposée invoquait quatre séries de griefs. Les premiers portaient sur la procédure législative, les deuxièmes sur les atteintes au droit de propriété et à la liberté individuelle, les troisièmes sur la liberté d'association, et le dernier grief était tiré d'une atteinte au principe d'égalité.
    Selon ces députés, la loi déférée violait à plusieurs titres le droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. En effet, il faut préciser que le « droit de chasse » est indissociable du droit de propriété, puisqu'il se rattache à l'usus d'un bien foncier.
    Ces députés faisaient valoir tout d'abord que la disposition figurant à l'article 2, selon laquelle « la chasse s'exerce dans des conditions compatibles avec les usages non appropriatifs de la nature, dans le respect du droit de propriété », est contraire à l'essence du droit de propriété.
    Le Conseil constitutionnel a considéré qu'elle constituait un énoncé général sur la nécessité de concilier les diverses exigences constitutionnelles et les divers intérêts légitimes en conflit potentiel dans la pratique de la chasse, et que cet énoncé mettait d'ailleurs en avant le respect du droit de propriété. Cette disposition ne portait donc pas atteinte, par elle-même, à ce droit.
    En deuxième lieu, étaient aussi contestées les dispositions de l'article 14, relatives au « droit d'opposition » désormais reconnu aux propriétaires de terrains compris dans le périmètre d'une association communale ou intercommunale de chasse agréée, qui, « au-delà des convictions personnelles opposées à la pratique de la chasse sur leurs biens », entendent y interdire l'exercice de la chasse. Pour ces mêmes députés, la loi, en subordonnant le droit d'opposition du propriétaire à la condition que l'intéressé le revendique sur la totalité des biens dont il dispose sur l'ensemble du territoire national, portait atteinte au droit de propriété.
    Le Conseil constitutionnel a précisé que la disposition contestée n'avait pas la portée que lui prêtait la saisine. En effet, la condition à laquelle est subordonné l'exercice du droit d'opposition ne saurait concerner que les terrains dont l'opposant est propriétaire sur le territoire de l'association communale ou intercommunale de chasse concernée.
    En troisième lieu, ces députés considéraient que l'instauration d'un jour de non-chasse par l'article 24 de la loi revenait à priver le propriétaire de son droit de faire un libre usage de ses biens, sans aucune nécessité publique évidente.
    Le Conseil constitutionnel a indiqué que cette interdiction porterait atteinte au droit de propriété soit si, par sa gravité, elle dénaturait ce droit, soit si elle ne trouvait de fondement dans aucun motif d'intérêt général. Il a considéré que cette interdiction de chasse un jour par semaine ne porte pas au droit de propriété une atteinte d'une gravité telle que le sens et la portée de ce droit s'en trouveraient dénaturés. Elle doit cependant être justifiée par un motif d'intérêt général, que constitue la nécessité d'assurer la sécurité des enfants et de leurs accompagnateurs le mercredi. Par contre, la faculté ouverte à l'autorité administrative de choisir une autre période hebdomadaire de vingt-quatre heures « au regard des circonstances locales », sans que ni les termes de la disposition critiquée ni les débats parlementaires ne précisent les motifs d'intérêt général justifiant une telle prohibition, est de nature à porter au droit de propriété une atteinte contraire à la Constitution. C'est pourquoi cette faculté a été supprimée.
    Ces députés ont aussi soutenu que les modalités de constitution et de fonctionnement des fédérations des chasseurs, ainsi que les contrôles administratifs et financiers des fédérations prévus par les articles 5 et 7 de la loi déférée, sont « manifestement contraires » au principe constitutionnel de la liberté d'association.
    Le Conseil constitutionnel, après avoir précisé que la liberté d'association figure au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, solennellement réaffirmés par le préambule de la Constitution, a indiqué que cette liberté ne s'oppose pas à ce que des catégories particulières d'association fassent l'objet de mesures spécifiques de contrôle de la part de l'Etat, en raison, notamment : des missions de service public auxquelles elles participent ; de la nature et de l'importance des ressources qu'elles perçoivent ; et des dépenses obligatoires qui leur incombent.
    Le Conseil constitutionnel, tout en considérant que les fédérations des chasseurs sont des organismes de droit privé, a reconnu qu'elles sont régies par un statut législatif particulier et sont investies de missions de service public ; qu'ainsi les fédérations départementales des chasseurs participent, en vertu de l'article L. 221-2 du code rural, dans sa rédaction issue de l'article 7 de la loi déférée, « à la mise en valeur du patrimoine cynégétique départemental et à la protection de la faune sauvage et de ses habitats » ; qu'elles concourent à la répression du braconnage, « conduisent des actions d'information, d'éducation et d'appui technique à l'intention des gestionnaires des territoires et des chasseurs » et « coordonnent les actions des associations communales et intercommunales de chasse agréées » ; qu'elles « conduisent des actions de prévention des dégâts de gibiers et assurent l'indemnisation de ceux-ci » ; qu'elles élaborent les schémas départementaux de gestion cynégétique et peuvent, pour exercer l'ensemble de ces missions, recruter des agents de développement mandatés à cet effet ; qu'elles perçoivent des ressources importantes provenant des cotisations obligatoires versées par les chasseurs, ainsi que les taxes instituées dans le cadre des plans de chasse ; qu'elles peuvent également recevoir des subventions des collectivités publiques, en particulier pour mener des actions de conservation de la faune sauvage ou des actions éducatives ; qu'au nombre de leurs dépenses obligatoires figure désormais l'indemnisation des dégâts causés par le gibier ; qu'ainsi, la nécessité pour l'Etat de contrôler la bonne exécution par les fédérations des chasseurs des différentes missions de service public auxquelles elles participent, ainsi que l'emploi des ressources qu'elles perçoivent à cet effet sont de nature à justifier l'instauration d'un régime spécifique de contrôle.
    C'est pourquoi le Conseil constitutionnel a considéré que ne sont contraires à la liberté s'association ni l'obligation pour les fédérations de se conformer à des modèles de statuts élaborés par le ministre de la chasse, ni les modalités de délégation de vote au sein des assemblées générales des fédérations départementales, fixées par l'article 5 de la loi, ni les règles d'organisation interne fixées par le même article ; que ne méconnaît pas non plus la liberté d'association la règle selon laquelle les budgets des fédérations départementales et régionales des chasseurs sont, avant d'être exécutés, soumis à l'approbation du représentant de l'Etat dans le département et le budget de la Fédération nationale des chasseurs à celle du ministre chargé de la chasse ; que n'est pas davantage contraire à la liberté d'association la règle édictée par l'article L. 321-7 du code rural, dans sa rédaction issue du V de l'article 7 de la loi déférée, selon laquelle les fédérations départementales des chasseurs sont soumises au contrôle économique et financier de l'Etat, ainsi qu'au contrôle de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes. Enfin, il note qu'il appartiendra au pouvoir réglementaire de fixer les modalités de mise en oeuvre de ces contrôles.
    Le dernier grief fait par les députés ayant déposé ce recours était tiré d'une atteinte au principe d'égalité causée par l'article 28 de la loi qui autorise la chasse au gibier d'eau, la nuit, à partir de postes fixes, dans les départements où cette pratique est traditionnelle. Cette disposition introduisait selon eux, une inégalité de traitement injustifiée entre les départements où elle est autorisée et les départements limitrophes où elle est interdite, alors que les mêmes usages traditionnels y existent.
    Un tel grief fut repoussé par le Conseil constitutionnel, puisque la disposition critiquée prévoit que la chasse de nuit au gibier d'eau est également autorisée dans les mêmes conditions dans des cantons des départements où elle est traditionnelle et confie à un décret en Conseil d'Etat la fixation de la liste des cantons concernés.
    J'en viens maintenant à la deuxième raison qui doit, selon moi, nous conduire à ne pas délibérer. Si nous voulons que se développe dans ce pays une chasse durable, il convient de ne pas examiner ce texte, afin d'empêcher que ne soit mise en oeuvre la technique de débordement à laquelle nous avons assisté en commission des affaires économiques et qui ne peut que déboucher sur un texte de repli, d'isolement dont la marque de fabrique sera bien connue.
    Pour étayer cette affirmation, il suffit de se reporter aux amendements votés par la majorité UMP et UDF.
    Tout d'abord, la suppression de la dernière phrase de l'article L. 420-1, qui prévoit que « La chasse s'exerce dans des conditions compatibles avec les usages non appropriatifs de la nature, dans le respect du droit de propriété », ne peut que nous inquiéter, car il est acquis aujourd'hui par tous, que chasseurs, randonneurs, touristes, cueilleurs, observateurs et chercheurs doivent pouvoir exercer leurs activités sans empêcher les autres usagers de la nature de pratiquer les leurs, seuls, quelques députés pensent que cela nous engage dans une dangereuse logique de socialisation de la nature.
    Je ne peux à ce sujet renoncer au plaisir que j'ai à vous indiquer que le 23 mai à Amiens un colloque intitulé « Vivre ensemble la nature » sera organisé par la fédération régionale des chasseurs de Picardie, qui justifie ainsi le thème retenu : « 1,4 million de chasseurs en France, en diminution de 2 % par an, 15 millions d'usagers ludiques de la nature, en progression de 10 % par an : l'équation est simple et pèsera lourd dans les débats qui animeront les commissions départementales des espaces, sites et itinéraires relatifs aux sports de nature ». La fédération ajoute : « Le développement des usages non appropriatifs de la nature, concept que le législateur a récemment introduit dans le code de l'environnement, s'impose comme un véritable phénomène de société que les chasseurs seraient imprudents d'ignorer. »
    Une telle analyse, vous en conviendrez, se passe de tout commentaire.
    Autre signe inquiétant, de nombreux députés de la majorité actuelle souhaitent le transfert du dossier de la chasse du ministère de l'environnement au ministère de l'agriculture et de la forêt, comme le montre l'adoption d'un amendement plaçant l'Office national de la chasse et de la faune sauvage sous la double tutelle des ministres chargés de la chasse, de l'agriculture et de la forêt.
    A cela s'ajoutent les nouvelles modalités du contrôle des fédérations départementales des chasseurs par le préfet.
    Il convient tout d'abord de rappeler qu'avant le vote de la loi Patriat, qui a confié le contrôle économique et financier a priori des fédérations départementales au préfet, les fédérations étaient soumises à un contrôle financier institué par le décret du 25 octobre 1935, lequel avait été estimé inexistant en pratique par la Cour des comptes qui, dans son rapport, ne manqua pas de dénoncer aussi certaines dérives. Aujourd'hui, le budget de la fédération, avant d'être exécuté, est soumis à l'approbation du préfet. Demain, si les dispositions adoptées par la commission des affaires économiques sont votées, le budget sera exécutoire de plein droit dès qu'il aura été transmis au préfet, lequel disposera de deux mois pour le déférer au tribunal administratif, s'il estime que celui-ci ne permet pas à la fédération d'assurer ses missions d'indemnisation des dégâts de grand gibier et d'organisation de la formation préparatoire à l'examen du permis de chasser.
    Ce qui nous inquiète, c'est bien sûr de passer d'un contrôle a priori à un contrôle a postieriori mais c'est, surtout, de ne pas donner au préfet les moyens suffisants pour saisir le juge. En effet, même si l'on maintient que le préfet « contrôle l'exécution des missions de service public auxquelles participe la fédération départementale des chasseurs », celui-ci ne pourra plus contrôler, lorsqu'il examinera le budget, que l'exécution des deux missions précisées dans cet article alors que les missions des fédérations départementales des chasseurs sont nombreuses, comme le rappelle le Conseil constitutionnel, qui, dans sa décision du 20 juillet 2000, en donne une liste relativement exhaustive. Il cite par exemple : la mise en valeur du patrimoine cynergétique départemental, la protection de la faune et de ses habitats, la prévention du braconnage, la conduite d'actions d'information, d'éducation et d'appui technique, la coordination des associations communales de chasse agréées, les actions de prévention et d'indemnisation des dégâts de gibier, et l'élaboration des schémas départementaux de gestion cynégétique.
    Ainsi, le préfet ne contrôlera plus rien. Il n'aura même plus la possibilité, s'il constate que le budget ne permet pas à la fédération d'assurer certaines missions, d'inscrire d'office des recettes et des dépenses nécessaires. Le préfet sera même aux ordres du président de la fédération départementale des chasseurs puisqu'il est précisé dans l'article 6 que « sur demande du président de la fédération, le préfet l'informe de son intention de ne pas déférer au tribunal administratif le budget de la fédération ».
    Pour clore le chapitre « laissons aller, laissons faire », je me dois de rappeler l'acceptation par votre majorité UMP-UDF de deux amendements qui précisent que la fédération nationale des chasseurs comme les fédérations départementales des chasseurs « ont la libre utilisation de leurs réserves ».
    M. Pierre Lang. Heureusement !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Doit-on en conclure que, si elles le souhaitent, ces fédérations pourront les utiliser pour financer des projets ou actions ne relevant pas de leur objet social ou de leurs missions ?
    M. Pierre Lang. Pas du tout.
    M. Jean-Paul Chanteguet. La suppression du dernier alinéa de l'article L. 424-2 du code de l'environnement par les députés de l'UMP, suppression qui abroge purement et simplement le jour de non-chasse, nous inquiète également. Pour la justifier, le rapporteur nous indique que cette disposition est l'une des plus contestées de la loi Patriat de juin 2000, ce que je ne crois pas, qu'elle n'a pas permis d'apaiser les relations entre chasseurs et non-chasseurs, ce qui reste à démontrer, et puis, avec beaucoup d'assurance, le rapporteur précise que son amendement ne supprime pas le jour de non-chasse, mais déconcentre la fixation des jours de non-chasse en confiant au préfet la possibilité de « limiter le nombre de jours de chasse » à des fins de protection et de conservation du gibier, comme le prévoit l'article R. 224-7 du code rural. Ce que le rapporteur oublie de nous dire, c'est que dans quarante-neuf départements sur cent il n'y a aucun jour de non-chasse, ce qui veut dire que l'on peut y chasser sept jours sur sept.
    Une telle situation ne peut que nous conduire à demander le maintien d'un jour de non-chasse, dont la fixation serait confiée à l'autorité administrative après avis du conseil départemental de la chasse et de la faune sauvage, disposition qui serait aujourd'hui en vigueur si la majorité actuelle n'avait pas jugé opportun de saisir de Conseil constitutionnel.
    Madame la ministre, je constate que votre majorité n'a pas le même souci que, vous, vous aviez de favoriser la conciliation des différents usages de la nature, comme le montre la rédaction que vous aviez retenue pour l'article 16.
    Cette volonté d'ouverture en direction des autres utilisateurs de la nature disparaît. C'est un recul qui ne manquera pas d'être analysé négativement par l'opinion publique, en fait assez largement indifférente à la question de la chasse et qui avait interprété la mise en place d'un jour de non-chasse comme un geste fort de la communauté cynégétique.
    Madame la ministre, en déposant ce projet de loi, vous pensiez satisfaire certaines des demandes des fédérations de chasseurs qui vous semblaient légitimes et fondées. Vous espériez peut-être aussi, comme vous l'avez fait à l'occasion du débat du 11 février, profiter de ce moment pour montrer à nouveau tout l'intérêt que vous portez à la chasse et aux chasseurs. Mais vous ne vous attendiez sûrement pas à ce que votre propre majorité parlementaire pratique une politique de débordement que vous ne pourrez pas contrer si vous n'affirmez pas une ligne politique claire sur ce dossier, si vous n'acceptez pas de vous opposer à ces députés envoyés en service commandé par ceux qui représentent l'extrême chasse et qui sont incapables de tenir compte des évolutions de notre société.
    Madame la ministre, la grande machine qui réunit tous les groupes de pression liés à la chasse est en marche. Elle est en train de vous happer. Aujourd'hui, vous allez y laisser la main, demain le bras, car, après avoir cédé aux fédérations de chasseurs, vous serez obligée de céder aux chasseurs de gibier d'eau et d'oiseaux migrateurs et d'accepter d'inscrire dans la loi les dates d'ouverture et de fermeture de cette chasse.
    M. Roland Chassain. Et alors ?
    M. Jean-Paul Chanteguet. Madame la ministre, sur ce dossier de la chasse, les socialistes avaient fait l'essentiel du travail, et je ne crois pas que la politique de votre majorité parlementaire, qui consiste à défaire ce que nous avons fait, soit de nature à instaurer dans nos pays une chasse apaisée, durable et équilibrée.
    C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à voter la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je voudrais d'abord remercier Jean-Paul Chanteguet pour le ton empreint de courtoisie et de dignité qu'il a adopté pour défendre la question préalable.
    M. Jean Launay. C'est vrai.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. A l'évidence, M. Chanteguet connaît très bien son sujet.
    Pour autant, je ne le rejoins pas dans l'analyse qu'il fait des motifs qui pourraient vous amener à adopter sa proposition. Bien entendu, il a déployé longuement un plaidoyer pro domo de la loi chasse de 2000, au motif qu'elle aurait en définitive réglé tous les problèmes afférents à la chasse. Mais, pour les vivre sur le terrain, comme nombre d'entre vous ici, je crois, au contraire, que beaucoup de ces problèmes n'ont pas été réglés. Plusieurs de vos collègues qui ne sont plus là aujourd'hui, monsieur Chanteguet, - hélas pour vous ! - pourraient en parler plus savamment que vous.
    Certes, toute la loi de 2000 n'était pas à jeter. Nous sommes les premiers à reconnaître qu'il y avait de bons éléments, même si je veux signaler au passage que la constitutionalité d'une disposition ne préjuge en rien de son opportunité. Mais certains aspects, nous le savons bien aussi, ont suscité la colère, l'incompréhension. Vous avez parlé du mercredi obligatoire de non-chasse, facteur de discorde important.
    M. Pierre Ducout. C'est vous, ça !
    La ministre de l'écologie et du développement durable. Vous avez également évoqué le statut des fédérations, qu'il fallait revoir.
    D'autres dispositions étaient incomplètes. Ainsi, les dispositions concernant les associations communales de chasse agréées ou le fichier des permis de chasser demandaient à être complétées.
    Vous aviez en outre eu la maladresse d'introduire une disposition anticonstitutionnelle, même si ce n'était pas la cause du recours. Le Conseil constitutionnel a justement jugé en effet que le droit de chasser était tout à fait inhérent au droit de propriété. Vous ne l'aviez pas vu. Tant pis pour vous !
    Monsieur Chanteguet, la loi de 2000 était insuffisante, incomplète, elle a été mal comprise, elle a soulevé des difficultés considérables dans le monde de la chasse. Je comprends que vous la trouviez merveilleuse, extraordinaire, que vous la considériez comme un petit bijou législatif. Mais, aujourd'hui, ces insuffisances nous amènent à vous proposer les corrections nécessaires.
    Le deuxième élément qui justifierait, selon vous, l'adoption par les parlementaires de la question préalable serait qu'il faudrait empêcher tout risque de débordement. Quelle drôle de conception de la démocratie ! La question préalable devrait permettre d'empêcher une majorité de parlementaires de faire avancer les propositions sur lesquelles elle a été précisément élue.
    M. Jean-Paul Chanteguet. Nous entendions manifester ainsi notre affection à votre égard, madame la ministre.
    M. Pierre Ducout. Tout à fait.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. En tout cas, je ne vous suis pas du tout dans cette voie, monsieur Chanteguet, votre démonstration m'apparaît constituer un détournement caractérisé de la procédure parlementaire et de la démocratie qui y est attachée. Pour notre part, nous allons nous efforcer de tenir les engagements qui ont été pris par le Président de la République, par le Premier ministre, par cette majorité, devant les électeurs et les Français et résoudre les difficultés.
    M. Pierre Ducout. Les chasseurs apprécieront.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. C'est pour cela que la majorité a été élue (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe UDF.
    M. Charles de Courson. Je suis étonné que nos collègues du parti socialiste aient déposé une question préalable. Ils connaissent en effet l'extrême difficulté qu'une partie d'entre eux ont eu à voter la loi Patriat. Quelques uns ont voté contre, des courageux que j'ai d'ailleurs féliciter publiquement, quelques-uns ont eu l'audace de s'abstenir, malgré les menaces de suspension - ils s'en sont sortis grandis d'ailleurs parce qu'ils ont été réintégrés, comme toujours, quelques semaines plus tard.
    M. Jean-Paul Chanteguet. Et ceux qui ont voté pour ?
    M. Charles de Courson. Même en votre sein, mes chers collègues, la loi Patriat ne faisait pas l'unanimité.
    S'agissant plus particulièrement du problème qui avait cristallisé de nombreuses oppositions, le fameux jour de non-chasse, cessez, je vous en supplie, de faire croire que l'opposition de l'époque a censuré la disposition. Nous ne sommes pas le Conseil constitutionnel ! Vous non plus !
    M. Pierre Ducout. Mais vous l'avez saisi !
    M. Charles de Courson. Mais j'ai déjà saisi le Conseil constitutionnel en étant dans la majorité.
    M. Jean-Claude Perez. Il ne fallait pas le saisir sur ce texte.
    M. Charles de Courson. Vous déniez à l'opposition le droit de saisir le Conseil constitutionnel ? C'est complètement surréaliste !
    M. Pierre Ducout. C'est vous qui êtes irresponsables !
    M. Charles de Courson. Heureusement que l'opposition a cette faculté, tout comme les membres de la majorité. Moi même, en tant que membre de la majorité, j'ai déjà saisi le Conseil constitutionnel sur certains points sur lesquels il me parraissait intéressant que le Conseil constitutionnel tranche. C'est un pouvoir de la majorité comme de l'opposition, même si en général celui-ci est plutôt exercé par l'opposition. Mais, je vous prie, cessez de vouloir faire croire à des esprits non avertis que c'est l'opposition qui a annulé la deuxième partie de votre dispositif.
    M. Pierre Ducout. C'est la réalité !
    M. Charles de Courson. D'ailleurs Mme la ministre n'est pas allée au bout de sa démonstration. Pourquoi le Conseil constitutionnel a-t-il annulé la disposition en question ? Tout simplement, parce que vous aviez oublié, avouez que c'est quand même un peu léger de légiférer ainsi, de définir le motif pour lequel on pouvait décaler le jour de non-chasse du mercredi à un autre jour de la semaine.
    Quand le rapporteur de l'époque, que vous avez « récompensé » en le faisant nommer au poste de secrétaire d'Etat puis de ministre de l'agriculture, ce qui l'a anéanti d'ailleurs et lui a coûté son élection aux législatives, prétendait que la chasse était apaisée, c'était de l'utopie. Souvenez-vous, mes chers collègues, de mes propos lors de la dernière lecture du texte à l'Assemblée nationale, je vous avais dit, au nom de l'UDF, que vous organisiez le « grand merdier juridique », au sens étymologique du terme !
    M. Pierre Ducout. Le problème datait de 1994, cher collègue !
    M. Jean-Claude Perez. Ne soyez pas grossier, monsieur de Courson, s'il vous plaît !
    M. Charles de Courson. Ces termes renvoient à une situation juridique inextricable.
    M. Jean-Claude Perez. Peut-être, mais c'est grossier !
    M. Charles de Courson. Pas du tout, c'est du parfait français !
    Mme la ministre l'a souligné, cette loi censée apporter l'apaisement a-t-elle abouti à l'arrêt de tout recours ? Non, elle n'a fait que multiplier les recours. Vous l'avez quand même votée, malgré mes avertissements.
    M. Pierre Ducout. Vos décisions n'ont elles jamais eu à subir des recours ?
    M. Yves Cochet. C'est faux !
    M. Charles de Courson. Monsieur Cochet, comment pouvez-vous dire cela, vous les alimentez vous-même.
    M. Yves Cochet. C'est faux !
    M. Charles de Courson. Mme Voynet avait d'ailleurs atteint un niveau de perversité rare chez les ministres de la République. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Monsieur de Courson !
    M. Jean-Claude Perez. C'est grossier !
    M. Charles de Courson. Mais non, attendez mes explications.
    M. Pierre Ducout. Retirez vos propos !
    M. Jean-Claude Perez. Il déraille !
    M. Charles de Courson. Mme Voynet acceptait le vote de textes dont elle déclarait qu'ils n'étaient pas constitutionnels, ou qu'ils étaient anticommunautaires. Cela ne la choquait pas du tout. Elle organisait elle-même l'alimentation des contentieux. Quant aux affaires européennes, elle ne défendait même pas les positions françaises, elle ne transmettait pas les données scientifiques concernant par exemple la nidification. Comme nous ne faisions pas les choses comme il fallait, nous nous faisions condamner. Après, elle avait beau jeu de dire devant nous, « on est condamné, donc on est obligé » de faire ceci ou cela. Elle ne se battait pas. En fait, Mme Voynet a eu, à de multiples reprises, une attitude totalement ambivalente. («C'est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Parfois ici même, publiquement.
    M. Jean-Paul Chanteguet. C'est faux !
    M. Jean-Claude Perez. Mais non, pas ici !
    M. Charles de Courson. Vous avez voté des dispositions dont elle vous avait dit elle-même qu'elles n'étaient pas bonnes.
    M. Jean-Claude Perez. Parlez-nous plutôt du texte d'aujourd'hui !
    M. Charles de Courson. Franchement, je ne comprends pas que vous défendiez une question préalable. A votre place, je m'en serais abstenu. En tout cas, le groupe UDF votera contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour le groupe de l'UMP.
    M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la chasse fait partie des traditions ancrées dans le milieu rural et, je veux le préciser, le domaine maritime est partie intégrante du milieu rural. La chasse participe à l'entretien des espaces, à la gestion du patrimoine faunistique et doit être considérée comme un art de vivre.
    La loi du 26 juillet 2000, dite loi Voynet, a injustement stigmatisé l'image du chasseur. On a trop souvent entendu parler de chasseurs guerriers ou de chasseurs tueurs.
    M. Pierre Ducout. Ce n'est pas dans la loi, cela !
    M. Jean-Pierre Decool. Aujourd'hui, il s'agit de revenir sur ces dispositions en réconciliant chasseurs et non-chasseurs, en redonnant à la chasse le rôle et la place qui lui reviennent dans une société moderne à la recherche de son authenticité.
    Entre autres avancées très significatives, ce projet de loi modifie positivement le statut des fédérations et l'examen qui va s'engager nous permettra de débattre sur l'abrogation pure et simple du jour de non-chasse. Responsabiliser et reconnaître les chasseurs en tant qu'acteurs et utilisateurs du territoire, mettre en place une chasse de proximité afin de restaurer la confiance entre les chasseurs et la société, tels sont les objectifs sur lesquels nous allons pouvoir échanger. Le groupe UMP votera donc contre la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Je mets aux voix la question préalable.
    (La question préalable n'est pas adoptée.)
    M. le président. Nous allons ouvrir la discussion générale. Il serait souhaitable que les premiers orateurs des quatre groupes puissent intervenir avant que la séance soit levée. Je demanderai donc à chacun de respecter son temps de parole pour qu'il y ait un équilibre entre les groupes.

Discussion générale

    M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Charles de Courson, qui va donner l'exemple.
    M. Charles de Courson. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, remporter une bataille, ce n'est pas gagner la guerre. Et la bataille législative que le précédent gouvernement a cru remporter contre les chasseurs et le monde rural en faisant voter au forceps - à quatorze voix près ! - le projet de loi chasse de Mme Voynet le 28 juin 2000 dans cette assemblée a été l'une des causes de la déroute que les candidats de la gauche plurielle ont connu lors des éléctions législatives de l'année dernière, notamment dans le monde rural. En effet, si la gauche a perdu la confiance de ces électeurs des campagnes et des villes, la faute en revient en grande partie au bilan catastrophique de Mme Voynet dans sa gestion du dossier de la chasse.
    M. Philippe Cochet. Un commentaire quelque peu extrême !
    M. Charles de Courson. Ces Français d'en bas, chasseurs ou simples acteurs du monde rural, ont été blessés par l'attitude et l'idéologie de Mme Voynet et de ses amis Verts, qui n'ont jamais mis les pieds dans une société de chasse. (M. Yves Cochet s'esclaffe.), lieu dans lequel l'éloge de la nature et de la faune le dispute à la pratique d'un véritable savoir-vivre que Maupassant a si bien décrit dans ses Contes de la Bécasse.
    Il a pourtant suffi d'une poignée d'ultras pour que cette chasse populaire héritée de la Révolution française ne soit montrée du doigt comme une activité d'un autre âge, pratiquée par de dangereux meurtriers que l'Etat doit surveiller de très près. Quel contresens !
    Je puis témoigner avec beaucoup d'autres sur ces bancs que, dans nos campagnes, l'apprentissage de la chasse est aussi un apprentissage de la vie et de la nature. Et il n'en est pas de plus solennel et de plus rigoureux car il y va de la vie et de la mort des gibiers. C'est pourquoi si la chasse reste une communion avec la nature dans notre monde déshumanisé et mécanisé, elle est avant tout, fondamentalement, une exhortation à la responsabilité et à la maîtrise de soi. Ce sont d'ailleurs les chasseurs qui, les premiers, excluent de leurs sociétés ceux qui ne respectent pas les règles de l'art et les devoirs qui décident du droit de chasser.
    Fort de ces enseignements politiques et fidèle aux positions qu'il a défendues en 2000, le groupe UDF ne peut se satisfaire des seules propositions contenues dans votre projet de loi, madame la ministre. Certes, nous pensons avec nos collègues du groupe UMP que ce texte va dans la bonne direction, et nous le jugeons plein de bonne volonté et de signes d'ouverture à l'égard des attentes du terrain. Vous abordez courageusement les principaux points qui, depuis la loi Voynet du 26 juillet 2000, posent problème dans la législation et que de nombreux orateurs de la majorité ont soulevés lors du débat sur la chasse du 11 février de cette année. Je veux parler notamment du statut des fédérations et du jour de non-chasse.

    Cependant, il nous a paru nécessaire dans un premier temps de revenir, au-delà du projet de loi que vous nous soumettez, sur des dispositions de la loi Voynet que nous avions fermement combattues et que nous jugeons inacceptables. Permettez-moi de vous en rappeler brièvement les principales : la transformation de l'ONC en ONCFS, organisme déséquilibré dans sa composition et dans son mode de financement, le renforcement du contrôle de l'Etat sur les fédérations départementales et leurs actes budgétaires, les restrictions de l'autorisation de la chasse de nuit à vingt et un départements alors qu'elle était pratiquée traditionnellement dans vingt-huit départements et enfin l'interdiction de chasser du mercredi six heures au jeudi six heures.
    C'est pourquoi nous avons déposé un certain nombre d'amendements, en tous points identiques à ceux que nous avions défendus lorsque nous étions dans l'opposition à l'occasion du débat du projet de loi Voynet aux côtés de l'actuel rapporteur, Jean-Claude Lemoine, qui, en toute logique, a d'ailleurs accepté un bon nombre d'entre eux en commission. Qu'il en soit remercié, ainsi que tous les collègues qui les ont soutenus.
    Je voudrais insister en particulier sur deux sujets : l'ONCFS et la demande de rapport sur les initiatives européennes du Gouvernement.
    La commission des affaires économiques nous a suivis sur la mise en place d'une double tutelle pour l'ONCFS, qui relèverait du ministère de l'agriculture et du ministère de l'écologie. Je vous demande, madame la ministre, d'appuyer cet amendement car, en l'adoptant, nous adresserons un signal fort aux chasseurs qui ne comprennent pas pourquoi l'agriculture n'a pas son mot à dire dans cette instance, alors que ce sont les directions départementales de l'agriculture qui, localement, interviennent le plus souvent sur les questions de la chasse. Quant aux amendements portant sur les ressources et la composition du conseil d'administration de l'ONCFS, nous attendons des réponses précises de la part du Gouvernement avant même la discussion du projet de loi sur les affaires rurales, puisque c'est probablement dans ce texte que ces amendements trouveront leur place.
    S'agissant du volet européen, beaucoup d'orateurs sont intervenus lors de notre débat du 11 février pour dénoncer les interminables contentieux sur l'ouverture et la fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs. Le groupe UDF a donc trouvé légitime de redéposer l'amendement que j'avais soutenu avec le président Giscard d'Estaing...
    M. Christophe Masse. Garde à vous !
    M. Charles de Courson. ... qui permettra à l'actuel gouvernement, contrairement au précédent, de valoriser ses démarches auprès de la Commission européenne pour mettre un terme à ces contentieux et appliquer strictement le principe de subsidiarité.
    M. Louis Giscard d'Estaing. Absolument !
    M. Charles de Courson. Nous avons également pris l'initiative de demander par voie d'amendement la ratification de l'accord AEWA qui donne une interprétation plus fidèle de l'esprit de la directive « oiseaux » 79/409 que ne l'a fait l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 19 janvier 1994, qui énonce le funeste principe de protection complète.
    En ce qui concerne les contrôles sur les fédérations départementales, le texte ne va pas assez loin. Nous sommes d'accord pour limiter ce contrôle sur les deux seules missions de service public que sont l'indemnisation des dégâts de gibier et la formation au permis de chasser. Mais le groupe UDF ne peut accepter que la même procédure vexatoire et autoritaire de contrôle soit maintenue sur ces aspects du budget voté par l'assemblée générale des chasseurs. Le maintien de cette procédure instituée par Vichy va à l'encontre de l'objectif de responsabilisation et du message de confiance que le Gouvernement souhaite adresser au monde de la chasse. Les chasseurs qui respectent la nature et contribuent à ses équilibres devraient-ils être plus surveillés que certains délinquants ?
    Mes chers collègues, il est plus que temps d'en finir avec ces humiliations et ces régimes d'exception qui frappent des honnêtes citoyens dont beaucoup d'entre eux chassent de père en fils depuis que la Révolution française leur en a donné le droit, des chasseurs qui ont le plus grand respect de la nature et de sa faune, qui s'interdisent eux-mêmes de prélever quand les espèces sont fragilisées et quand la sécurité de tous n'est pas assurée.
    Pour mettre un terme à ces procédures d'un autre âge, celui de l'avant-décentralisation, nous vous proposons, avec l'appui de la commission, madame la ministre, une procédure simple qui a fait ses preuves puisqu'elle est inspirée du code général des collectivités territoriales et régit le contrôle par l'Etat des actes et des budgets des collectivités locales et territoriales. Désormais le budget de la fédération départementale voté par son assemblée générale sera exécutoire de plein droit, et le préfet ne pourra s'y opposer qu'après avoir saisi dans un délai limité le juge administratif qui l'aura autorisé à intervenir.
    Ce dispositif garantit les droits de la défense, alors que dans la rédaction que vous nous proposez, vous donnez au préfet tout pouvoir, au terme d'un vague échange avec le président de la fédération, pour inscrire des dépenses d'office au budget des fédérations. Il en va de même pour la procédure de gestion d'office qui, là aussi, peut intervenir sans qu'une autorité judiciaire ait pu en contrôler la légitimité. Sans remettre en cause le nécessaire contrôle de l'Etat, nous vous proposons simplement d'appliquer un principe fondamental de notre démocratie qui est la séparation des pouvoirs exécutif et judiciaire. Le préfet ne saurait être juge et partie dans un Etat de droit pluriséculaire. Sur ces points, je sais, madame la ministre, que vous êtes ouverte aux solutions proposées par la commission.
    Cela vaut aussi pour la question des réserves budgétaires des fédérations. Si vous reconnaissez le statut associatif des fédérations départementales des chasseurs, il est somme toute logique de leur donner les mêmes droits qu'aux autres. De telles dispositions seraient de nature à clarifier le droit et à mettre un terme à tous les contentieux qui pèsent sur plusieurs fédérations.
    Quelques mots sur l'article 16, qui a fait couler beaucoup d'encre, avant que mon collègue Stéphane Demilly n'y consacre l'essentiel de son intervention. Nous partageons les critiques de nos collègues de l'UMP sur le projet de loi et nous avons cosigné avec eux l'amendement du rapporteur visant à supprimer du code de l'environnement l'obligation du mercredi sans chasse. Mais il me semble personnellement, comme à mon collègue Philippe Folliot d'ailleurs, que nous gagnerions tous à régler définitivement cette question en inscrivant et en décrivant dans la loi la procédure qui permet au préfet de limiter les périodes de chasse dans le temps et dans l'espace.
    Je vous proposerai donc un amendement de réflexion, qui permettrait aux fédérations départementales de motiver et d'encadrer la décision du préfet concernant ces périodes, car je suis convaincu que les chasseurs sont les mieux à même de réguler, quand cela est nécessaire, leurs pratiques cynégétiques. Sans ces nouveaux garde-fous législatifs, je crains que cette victoire à court terme ne nous permette pas de pacifier durablement l'exercice de la chasse car nous ne serions pas à l'abri, en cas d'alternance politique, de circulaires malveillantes auxquelles nous ne pourrions pas opposer la loi.
    Une autre solution serait possible, madame la ministre. Elle consisterait à transférer, purement et simplement, le pouvoir de fixer les périodes de non-chasse - ou de chasse, comme vous voudrez - aux assemblées des fédérations départementales de chasseurs, afin de protéger le gibier. Cette solution serait probablement la meilleure, et il semble bien qu'elle soit compatible avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel, puisque la décision des assemblées serait encadrée par un objectif : la protection du gibier. Le groupe UDF aimerait connaître l'état de vos réflexions sur cette question.
    En conclusion, le groupe UDF votera ce projet de loi à condition que les amendements que nous avons déposés, et que la commission a adoptés pour beaucoup d'entre eux, puissent figurer dans la loi que le Parlement votera avant la prochaine saison de chasse comme nous l'espérons tous. Je reste néanmoins persuadé que l'esprit d'ouverture et de dialogue dont vous avez fait preuve depuis votre arrivée à la tête du ministère de l'écologie transformera ce qu'on a présenté comme la « petite loi chasse » en texte de référence pour tous ceux qui aiment la chasse et respectent la nature. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Merci, monsieur de Courson, d'avoir si bien respecté votre temps de parole.
    La parole est à M. François Liberti, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. François Liberti. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, le texte que nous devons examiner aujourd'hui a déjà fait l'objet d'arbitrages interministériels sans que nous ayons été véritablement consultés sur les points essentiels qui posent problèmes aux chasseurs.
    Si plusieurs articles vont contribuer à améliorer le fonctionnement des fédérations départementales d'autres ne correspondent absolument pas aux attentes du monde de la chasse. En ce sens, la simple réécriture de la loi dite « Voynet » sous une forme différente apparaît à ce jour inacceptable. Il est donc impératif de simplifier, de clarifier, de poser les véritables fondements de la chasse, pilier de la ruralité.
    La France rurale et les 1 400 000 chasseurs sont aujourd'hui dans l'attente. La chasse génère une activité économique chiffrée à 2 milliards d'euros et occupe 23 000 salariés. Elle est avant tout un instrument de régulation de la faune sauvage dans le monde agricole et forestier. C'est une pratique sportive, un mode de vie qui a toute sa place dans la maîtrise écologique, sociale et économique du territoire. Elle répond aux objectifs de développement durable.
    Les modes et les périodes de chasse traditionnelle ont été fortement remis en cause ces dernières années, sous la contrainte de la directive européenne 79/409, d'ailleurs non conforme au traité de la CEE, que nous dénonçons avec de nombreuses associations de chasseurs d'oiseaux migrateurs. N'oublions pas, à cet égard qu'avant la loi Voynet, les lois de 1994 et de 1998 ont été supprimées.
    Depuis l'adoption de la directive, qui a été approuvée sous le gouvernement de M. Barre par tous les députés français au Parlement européen, toutes tendances politiques confondues, à l'exception des députés communistes, chacun sait que des menaces pèsent sur les périodes de chasse et, en définitive, sur la chasse populaire.
    Or, au lieu d'apaiser les tensions et de supprimer les difficultés rencontrées par ceux qui pratiquent cette activité ancestrales, la loi du 26 juillet 2000 n'a fait qu'aggraver les contentieux. Le débat sur la chasse que l'on voulait modéré s'est, quant à lui, de plus en plus durci, il a été instrumentalisé en servant à de basses manoeuvres politiciennes, sources aujourd'hui de grandes désillusions.
    Certes quelques acquis ont été obtenus. Et les parlementaires communistes et républicains, qui se sont abstenus, y sont pour quelque chose, je pense notamment à la préservation de la chasse de nuit dans certains départements où sa pratique est traditionnelle. Mais cette loi a fait preuve de son inadaptation et de son inefficacité. Il est donc grand temps, dans un climat dépassionné, de tirer les conclusions qui s'imposent et de proposer un texte qui réforme profondément le droit de chasse et qui le simplifie conformément aux intérêts de tous.
    Partant de ce constat et s'appuyant sur une action en faveur de la chasse populaire qui n'a jamais failli depuis des décennies, le groupe des député-e-s communistes et républicains a déposé le 3 février 2003 une proposition de loi dans ce but.
    J'en rappelle quelques unes des dispositions : la suppression du mercredi sans chasse, la détermination du calendrier des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs dans un cadre législatif, la création d'un secrétariat d'Etat à la chasse auprès du Premier ministre, le regroupement en un seul organisme de tous les services qui travaillent en ordre dispersé sur la chasse, la faune sauvage, le gibier et l'habitat naturel, une police de la chasse placée sous l'autorité de la gendarmerie nationale, enfin, la pérennisation de la chasse de nuit au gibier d'eau.
    Sans doute cette initiative forte n'est-elle pas étrangère à la présention de ce projet de loi, qui arrive bien tardivement pour répondre aux interrogations et aux inquiétudes exprimées par les chasseurs sur les dates d'ouverture de la chasse de la saison 2003. Malheureusement, comme l'a indiqué le rapporteur de la commission des affaires économiques, ce texte n'a pas pour ambition de traiter l'ensemble des problèmes. Et je serai plus précis encore, madame le ministre : vous avez déclaré à la commission que vous feriez obstacle au règlement immédiat de ces problèmes et que vous opposeriez un avis défavorable aux amendements proposant des dispositions concernant la chasse mais relevant du futur projet de loi relatif aux affaires rurales, renvoyé aux mois d'octobre et novembre, à ceux visant à fixer dans la loi les dates de chasse tout comme à ceux proposant des mesures de nature réglementaire.
    Pourtant, chacun le sait, la question des dates d'ouverture et de fermeture est au coeur des débats et des conflits. Nous avons tous ici souvenance de la virulence des propos tenus par vos amis lors du débat parlementaire du printemps 2000 sur ces questions et du vote négatif des groupes RPR et UDF, motivé par le fait que ces dates ne figuraient pas dans la loi. Force est de constater aujourd'hui que votre majorité disposant de tous les leviers - majorité absolue au Sénat et à l'Assemblée nationale, présidence de la République, majorité au Parlement européen - ne défend plus ce qui, hier, avait justifié son vote.
    Il en va de même pour le jour de non-chasse. Sur cette question, la clarté n'est la première qualité de votre projet de loi, mais j'espère que les débats permettront de mieux cerner les choses. Rien de précis non plus sur la correction nécessaire à apporter aux dispositions concernant la chasse de nuit au gibier d'eau malgré les acquis non négligeables obtenus dans la loi du 26 juillet 2000.
    Votre projet de loi est en demi-teinte : il ne traite pas des sujets les plus aigus, n'abordant les problèmes qu'à la marge. En l'état, il ne répond pas aux inquiétudes et aux attentes des chasseurs et de toutes celles et tous ceux qui souhaitent un règlement apaisé de ce dossier.
    Notre ambition est donc d'obtenir une profonde modification de votre texte afin qu'il apporte des réponses claires et précises sur plusieurs questions majeures. Tel est le sens des amendements que notre groupe a déposés.
    Parmi les propositions que nous avons émises, figure la suppression du mercredi sans chasse. La disposition actuelle est vécue par les chasseurs comme inutile, inefficace, discriminatoire et totalement injustifiée car elle ne prend pas en compte la diversité des pratiques de chasse, ni la formation des jeunes chasseurs. Nous proposons donc d'inverser la logique pour fixer des jours de chasse autorisés. Ainsi, les préfets, de chaque département, sur proposition des fédérations départementales de chasse et des groupements cynégétiques, qui ont prouvé par le passé leur sens des responsabilités, fixeront les jours de chasse autorisés dans le cadre du schéma départemental de gestion cynégétique et de conciliation des différents usagers de la nature. Parlons de jours de chasse, et non pas de jours de non-chasse cela permettra de sortir de la confusion introduite par la loi du 26 juillet 2000, qui laisse croire que la chasse se pratique partout, sept jours sur sept, alors que ce n'est pas le cas.
    L'importance de l'article 16, de ce point de vue, n'a échappé à personne, en particulier le fait qu'il ne traite pas des dates d'ouverture et de fermeture. Ces insuffisances conduisent à réduire la portée et l'intérêt de ce projet de loi car, s'agissant des périodes de chasse, il est vital de déterminer un calendrier des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse de tous les migrateurs et gibiers d'eau dans le cadre de la loi. C'est la seule issue pour mettre un terme définitif aux contentieux. Ce calendrier devra prendre en compte les données juridiques et scientiques mises en lumière dans le rapport du comité ORNIS, comité scientifique de la Commission européenne, dont les éléments ne peuvent être contestés, et permettre ainsi une chasse sélective dès la mi-juillet jusqu'au dernier jour de février.
    Dans le même temps, il est urgent et nécessaire d'ouvrir immédiatement les négociations avec la Commission européenne pour qu'au vu des éléments techniques internationaux existants, la loi dispose d'une base de légitimité incontournable au regard des objectifs fixés par la directive européenne - elle-même d'ailleurs contestable, et contestée devant les juridictions de la Cour de justice européenne. En attendant, il faudra être très attentif et vigilant afin d'obtenir un guide interprétatif clair des articles 7 et 9 de la directive. Dans ces circonstances, la France devra appliquer impérativement le principe de subsidiarité.
    Pris en étau entre les atteintes à la souveraineté nationale découlant de la directive communautaire et l'excès de réglementation et de technocratie, la chasse populaire attend du gouvernement français une initiative forte et, dans ce projet de loi, des mesures concrètes permettant de desserrer l'étau.
    Nous proposons à cet effet deux amendements importants.
    Tout d'abord, le dépôt, par le Gouvernement, avant la fin de l'année, d'un rapport sur le principe de subsidiarité, réservant à la loi nationale la fixation de l'ensemble des règles et obligations qui s'appliquent à la chasse des mammifères et des oiseaux non migrateurs sur le territoire national, et réservant au droit communautaire la fixation des principes que doit respecter la loi nationale en matière de fixation des règles et obligations qui s'appliquent à la chasse aux oiseaux migrateurs. Je rappelle qu'un amendement, rédigé à l'identique, a été adopté à l'unanimité dans la loi « chasse » du 26 juillet 2000, sans être suivi d'effet. Nous vous demandons, par cet amendement, d'agir rapidement auprès de la Commission européenne.
    Ensuite, la ratification de l'accord AEWA signé par la France en 1998. Les interdits de la période de dépendance et du trajet de retour des espèces d'avifaune permettraient, par la ratification de cet accord, déjà entré en vigueur dans dix-neuf pays eurasiens et seize pays africains, une application plus souple de la directive « oiseaux ».
    Nous avons également déposé un amendement visant à la création d'un secrétariat d'Etat à la chasse auprès du Premier ministre. L'institution d'un secrétaire d'Etat s'impose, si l'on veut gérer avec rapidité et efficacité les négociations européennes sur la chasse et aborder la question au niveau interministériel.
    Il convient par ailleurs de rétablir les fédérations de chasseurs dans leurs droits associatifs de la loi de 1901 et de les réinvestir des missions et prérogatives de service public - répression du braconnage, gestion du permis de chasser, promotion et défense des intérêts des chasseurs, y compris devant les juridictions - tout en maintenant, pour les élections des représentants de chasseurs, le principe démocratique du vote : un chasseur, une voix.
    Or le mode de scrutin proposé dans votre projet de loi réintroduit une double inégalité : inégalité entre les chasseurs non propriétaires et ceux disposant du droit de chasse qui seraient titulaires de deux voix au moins, et inégalité entre les titulaires du droit de chasse en conditionnant le nombre de suffrages à la surface de leur territoire. Le rétablissement du suffrage censitaire est discriminatoire, car basé sur la richesse et contraire à l'esprit démocratique de la chasse.
    D'autres aspects méritent d'être examinés, comme la question de la cotisation fédérale due par les chasseurs, celle de la suppression des contrôles a priori, y compris le contrôle économique et financier sur les budgets des fédérations. Seul le contrôle a posteriori devrait rester en vigueur. Il importe aussi de regrouper en un seul organisme tous les services qui travaillent en ordre dispersé sur la chasse, la faune sauvage, le gibier et les habitants naturels. A cette fin, l'Office national de la chasse et de la faune sauvage doit être transformé pour intégrer les compétences de l'INRA, du CEMAGREF, du Museum et du CNRS dans leurs missions scientifiques et techniques.
    Il en est de même des questions de l'emploi et du financement de la Garderie nationale, qui devront être réglées dans la loi et sous l'autorité de la gendarmerie nationale.
    Il convient enfin de se préoccuper des questions portant sur : la simplification du permis de chasse ; l'arrêté visant le saturnisme ; le transport du gibier ; le carnet de prélèvement ; l'indemnisation des dégâts, le statut des bénéficiaires devant être défini dans la loi ; le rééquilibrage de la représentation des chasseurs dans toutes les instances nationales et départementales ayant trait à la chasse.
    Autre exigence à prendre en considération : la chasse de nuit au gibier d'eau. Cette chasse doit être légalisée et élargie aux vingt-huit départements où elle est traditionnellement pratiquée à partir de postes fixes, et sa pérennisation doit être inscrite dans la loi. Il convient d'abroger les dispositions provisoires de la réforme opérée par la loi du 26 juillet 2000. Le délai de cinq ans est à supprimer purement et simplement. Ce projet de loi doit rectifier l'usage de la chasse en faveur des sept départements oubliés lors du vote de la loi 2000 et supprimer ainsi une inégalité de traitement entre les territoires ayant les mêmes usages.
    Bien d'autres questions demeurent en suspens, qu'il nous faudra aborder au cours des débats : dispositions relatives à l'usage des appeaux et des appelants ; la mise au point d'un système pratique de PMA ; suppression du plafond du timbre fédéral dû par chaque chasseur à sa fédération ; mise en place d'une police de proximité, financée par les redevances cynégétiques.
    Comme vous pouvez le constater, c'est un travail en profondeur qu'il nous faut effectuer, et ce dans un délai extrêmement court : nous sommes à trois mois de la date de l'ouverture de la chasse aux oiseaux migrateurs. Il y a urgence à légiférer. Le dossier conflictuel de la chasse n'a que trop duré et nous sommes toujours dans une grande incertitude.
    En l'état actuel, le texte qui nous est soumis ne répond pas aux exigences d'une législation claire et simplifiée que chasseurs et non-chasseurs sont en droit d'attendre. Votre projet doit donc être réformé et fortement amendé, afin qu'il apporte des avancées significatives et que la chasse soit enfin reconnue comme une activité incontournable de gestion de l'espace rural et de préservation du patrimoine naturel. Nos amendements vont dans ce sens. J'ai essayé très rapidement d'en expliciter le contenu. Ils permettent de rétablir des liens sérieux avec des personnes passionnées qui n'ont qu'un seul désir : pratiquer une chasse populaire conforme à leurs coutumes, dans le respect d'une gestion équitable des plans de chasse et des espaces naturels, dans l'intérêt de tous, chasseurs et non-chasseurs.
    Le sort qui sera réservé à nos amendements déterminera la position et le vote du groupe communiste et républicain sur ce texte.
    M. le président. La parole est à M. Alain Gest.
    M. Alain Gest. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce projet de loi s'inscrit dans la démarche engagée par le Gouvernement lors du débat du 11 février dernier. Le groupe UMP souhaite qu'il soit un premier pas vers la dépolitisation du dossier chasse et vers la responsabilisation de tous ses acteurs.
    A l'heure où des sujets d'une importance considérable pour l'avenir de notre pays sont au coeur des préoccupations de nos concitoyens, il convient de s'interroger en premier lieu sur les raisons qui nous conduisent à nous intéresser de nouveau au problème posé par la pratique de cette activité populaire traditionnelle.
    Disons-le clairement, madame la ministre : tout est lié à l'état dans lequel vous avez trouvé le dossier « chasse » il y a un an.
    La loi du 26 juillet 2000, qui était censée apaiser les esprits, n'avait en fait satisfait personne. Le dialogue avait été rompu entre les chasseurs et un ministre qui avait clairement fait son choix en faveur de thèses extrêmes, hostiles à la chasse. La réduction progressive des périodes de chasse, ajoutée à des mesures au caractère symbolique, avait contribué à rendre la situation invivable dans bon nombre de nos départements. Pire : le fossé s'était creusé entre les chasseurs et le reste de la société. Ceux-ci, excédés, ne supportaient plus d'avoir été pris en otages par une majorité plurielle enfermée par son accord avec sa partie la plus minoritaire et à qui il fallait bien donner de modestes gages...
    Bref, c'est un triste héritage dont vous avez bénéficié, madame la ministre, au printemps 2002. Je me réjouis que nos collègues Estrosi et de Courson aient tout à l'heure rafraîchi les mémoires. Le numéro - habituel - de funambule de Maxime Gremetz n'a d'ailleurs pas permis d'oublier où étaient les responsabilités et comment les choses s'étaient réellement passées.
    Devant cette situation, vous avez engagé une démarche visant à renouer les fils du dialogue. Vos premières décisions y ont contribué. Je veux citer la fermeture retardée pour les bécasses et les tourterelles, la suppression du timbre gibier d'eau, le renouvellement du conseil d'administration de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage. Mais je pense aussi à l'excellent rapport de M. Dutruc-Rosset, destiné à étayer les éléments scientifiques susceptibles de reprendre les contacts indispensables avec la Commission européenne. A ce sujet, bon nombre de mes collègues UMP souhaitent qu'à l'avenir le caractère scientifique des données ne soit plus lié - dans l'esprit de certains de nos interlocuteurs - à l'origine ou à l'auteur des rapports, comme nous en avons parfois le sentiment.
    S'agissant du problème des dates d'ouverture et de fermeture, vous nous avez proposé une méthode reposant, notamment, sur l'utilisation des conclusions des travaux de l'Observatoire de la faune sauvage et de ses habitats.
    Nous partageons votre approche. Nous sommes en effet convaincus que pour permettre au Conseil d'Etat d'appréhender des sujets relatifs à la chasse avec tous les éléments nécessaires, il faut favoriser la réactualisation des données scientifiques sur lesquelles il appuie invariablement sa jurisprudence -, chacun a à l'esprit la nécessité de prendre en compte le caractère sédentaire du canard colvert. Mais nous sommes tout aussi convaincus qu'il convient de faire avancer les problèmes d'ouverture et de fermeture de la chasse. Au point d'ailleurs que certains de nos collègues auraient souhaité que cette loi traite directement des périodes de chasse. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. François Liberti. C'est ce que vous avez défendu, en juillet 2000 !
    M. Jean-Claude Perez. Il a oublié !
    M. Alain Gest. Certains de nos collègues sont convaincus, comme moi, que l'ouverture aux alentours du 15 août serait pleinement justifiée pour les limicoles, les bécasses, les colverts, les sarcelles, les souchets sur le domaine public maritime, et pour quelques espèces plus limitées, dans les marais intérieurs.
    Néanmoins, le groupe UMP considère que l'inscription des dates dans la loi aboutirait sans doute à l'inverse de l'effet recherché. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. François Liberti. Et voilà ! Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre ! C'est ce que vous avez défendu en juillet 2000 !
    M. Alain Gest. Je n'étais pas là en février 2000 ! Vous pouvez tout me reprocher, mais certainement pas cela.
    M. le président. Monsieur Gest, ne vous laissez pas interrompre ! M. Liberti ne doit pas vous interpeller.
    M. Alain Gest. J'en accepte l'augure, monsieur le président...
    Nous préférons donc souscrire à votre méthode, madame la ministre, parce que nous recherchons une évolution durable de ce dossier et non une décision ponctuelle, qui serait inévitablement remise en cause et qui pourrait, par exemple, développer encore l'hostilité de certains au principe même de la chasse au gibier d'eau.
    Cela étant, et en toute amitié, cette position de sagesse ne doit pas vous laisser croire que nous n'attendons pas une accélération des initiatives prises pour faire évoluer le sujet des dates de chasse.
    Cette accélération est d'autant plus attendue que la mise en place de l'Observatoire est apparue, aux yeux de beaucoup, comme longue et laborieuse. Votre décision de le créer remonte au mois de juillet dernier ! Nous vous demandons donc avec insistance, madame la ministre, de veiller à ce que l'Observatoire programme un nombre suffisant de réunions, d'ici à l'été prochain, pour que de premiers résultats tangibles vous permettent de déterminer de meilleures dates de chasse que l'an passé.
    Dans le même ordre d'idées, nous sommes à votre disposition pour vous aider dans vos démarches auprès des instances européennes pour faire évoluer la directive tant décriée. Nous reconnaissons volontiers la difficulté de votre tâche et c'est la raison pour laquelle nous sommes prêts à nous investir pour aller convaincre ceux que vous jugeriez utile que nous recontrions, à vos côtés ou individuellement. C'est bien sûr l'intérêt de la chasse. Mais c'est aussi l'intérêt pur et simple de l'Europe, si celle-ci veut regagner la confiance qu'elle a quelquefois un peu perdue en milieu rural.
    En attendant, le projet de loi que vous nous présentez aujourd'hui va indéniablement dans le bon sens. Il repose sur des principes auxquels l'UMP est attachée et que vous avez rappelés : la responsabilité, la proximité, la simplification et la confiance. Notre groupe se félicite, notamment, des mesures concernant les fédérations qui vont vers plus d'autonomie de gestion. Nos collègues souligneront sûrement leur accord sur la suppression du contrôle a priori des budgets, ou bien encore sur la simplification des modes de scrutin. Certains amendements, déjà acceptés par la commission des affaires économiques, viendront compléter utilement votre texte.
    L'article 16 de votre projet a bien entendu particulièrement retenu notre attention parce qu'il consiste à traiter de la mesure la plus contestée de la loi Voynet, à savoir le jour de non-chasse. Vous nous proposez un système permettant de déconcentrer vers les préfets le jour de non-chasse. Vous le savez, un très grand nombre de députés de l'UMP ont préféré supporter l'amendement que notre excellent rapporteur Jean-Claude Lemoine a défendu en commission. J'y vois au moins cinq motifs.
    Le premier, et il est d'importance, tient à l'engagement pris lors de la campagne des élections législatives. Le Gouvernement auquel vous appartenez applique sur tous les sujets la politique qu'il a présentée aux Français en juin 2002. La chasse ne doit pas faire exception ; l'engagement doit être tenu.
    Le second argument est que cet amendement a l'immense mérite d'envoyer un message clair et sans ambiguïté pour remettre en cause une mesure qui n'avait rien réglé et avait abouti, vous l'avez rappelé, à l'inverse de l'effet recherché, à savoir la diminution du nombre de jours non chassés. (« N'importe quoi ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    Troisième motif : notre amendement permet de revenir au texte antérieur, en particulier à la réglementation du code rural qui prévoit, lorsque la protection du gibier le nécessite, que les préfets puissent intervenir par arrêtés ; ils l'ont d'ailleurs fait cet hiver dans certains départements.
    Quatrième motif : à l'heure où nous préparons une nouvelle et grande étape de décentralisation, que vous avez d'ailleurs appelée de vos voeux, confier le soin aux préfets de décider des dates de chasse ne nous semble pas opportun.
    Enfin, vous l'avez souligné, nous soutenons le principe de responsabilité. En effet, les députés du groupe UMP sont de ceux qui font confiance au sens de la responsabilité des chasseurs et de leurs fédérations, que certaines ont déjà démontré en décidant librement des jours de non-chasse. A l'instar de notre collègue Patrick Ollier, nous leur disons : une fois l'amendement voté, nous ne doutons pas que vous saurez justifier la confiance qui vous est faite.
    Voilà pourquoi, madame la ministre, nous sommes convaincus que vous partagerez ce souci de confiance et de responsabilité en acceptant l'amendement que nous vous proposons.
    Madame la ministre, mes chers collègues, ce texte constitue la première étape d'un ensemble de mesures législatives qui doivent résoudre les problèmes liés à la chasse. Les deux lois à venir - l'une sur les affaires rurales, l'autre sur le patrimoine naturel - vous fourniront l'occasion de compléter les dispositions contenues dans le texte que nous étudions aujourd'hui. Nous vous faisons confiance pour poursuivre la pacification de ce dossier.
    Le groupe UMP souhaite également que ce projet de loi soit l'occasion d'engager une réflexion plus large sur le rôle et la place de la chasse dans la société contemporaine, parfois mal compris. Les 80 % de nos compatriotes qui habitent en milieu urbain ne perçoivent pas toujours qu'elle fait partie des traditions profondes du monde rural, qu'elle constitue une activité économique non négligeable et qu'elle est avant tout, pour nombre de chasseurs, une véritable raison de vivre.
    Nous avons le devoir d'éviter que ne se produise une fracture entre les citadins et les ruraux. C'est pourquoi, il nous faut le rappeler, comme le faisait le Conseil économique et social dans un rapport récent : « la chasse est légitimée et elle est nécessaire, une chasse renouvelée sera possible si chasseurs, opposants à la chasse et protecteurs de la nature acceptent de confronter leur point de vue dans la sérénité ».
    Permettez-moi de conclure, madame la ministre, en vous précisant que dans mon département, la Somme, nous faisons quotidiennement la démonstration de cette responsabilisation par la signature de conventions conclues entre la fédération de la chasse, les collectivités territoriales et le conservatoire du littoral. Ce qui est possible dans un territoire réunissant 30 000 chasseurs, dont la moitié est passionnée par la chasse au gibier d'eau, doit l'être sur l'ensemble du territoire français.
    Madame la ministre, nous sommes à vos côtés pour relever ce vrai défi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Ducout, qui sera le dernier orateur à s'exprimer lors de cette séance.
    M. Pierre Ducout. Madame la ministre, vous nous présentez aujourd'hui un projet de loi relatif à la chasse dont les médias ne retiennent que « la fin du jour de non-chasse », titre qui recèle une certaine charge polémique.
    Je voudrais axer mon intervention sur ce sujet, ainsi que sur la préoccupation légitime des chasseurs, qui s'inquiètent, en ce mois de mai, des possibilités qu'ils auront de chasser, lors de la saison 2003-2004, en août et en février. En effet, je le rappelle, dans son rapport remis au Premier ministre d'alors, François Patriat concluait à l'ouverture de la chasse du 10 août à fin février.
    Commençons par le jour de non-chasse. La droite en faisant aujourd'hui une présentation mensongère, il faut rappeler ce que la gauche avait voté sous la précédente législature, à savoir un jour de non-chasse fixé par le préfet après avis des fédérations, ce jour de non-chasse ne s'appliquant pas aux chasses spécifiques : colombidés à partir de postes fixes du 1er octobre au 15 novembre et chasse de nuit au gibier d'eau, cette dernière mesure ayant été votée dans le cadre de la loi « forêt ».
    La fixation systématique du mercredi est le fait des parlementaires de droite qui, en déférant la loi devant le Conseil constitutionnel, ont provoqué cette mesure (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...
    M. Roland Chassain. C'est un peu facile !
    M. Alain Gest. Cet argument est un artifice !
    M. Jean-Claude Perez. Cela vous gêne, mais c'est la vérité !
    M. Pierre Ducout. ... préjudiciable aux chasseurs alors que, dans la plupart des fédérations, un ou plusieurs jours de non-chasse sont décidés par les associations ou les fédérations de chasse.
    Le dispositif proposé dans le projet de loi correspond de fait à ce que nous avions voté, mais la décision du Conseil constitutionnel que vous avez provoquée est susceptible de déclencher des contentieux sans fin dans tous les départements.
    M. Charles de Courson. C'est que votre texte n'était pas bon !
    M. Pierre Ducout. Il faut, de fait, trouver la moins mauvaise solution, la suppression pure et simple dans la loi, proposée par le rapporteur, pouvant donner une image médiatique très préjudiciable du monde de la chasse.
    Il faut ensuite rappeler à nos concitoyens que l'espace rural n'est que pour une faible part un espace public, que c'est la tolérance des propriétaires qui permet la promenade. Les chartes de territoire que nous avons instituées dans la loi forêt, en prévoyant des conventions avec les propriétaires privés et en mettant tous les utilisateurs autour de la table, doivent, au plus près de la réalité locale, déboucher sur un partage de l'espace, sur sa protection et sa mise en valeur auxquelles les chasseurs participent pour beaucoup.
    Pour votre parfaite information, madame la ministre, dans nos régions, les panneaux : « Attention, sifflez, palombières » correspondent à un respect de pratiques ancestrales sans interdiction systématique du passage pour les promeneurs. De même, dans nos forêts communales, les pratiques simultanées de la promenade et de la chasse à la bécasse ne sont pas incompatibles : en entendant le grelot du griffon, le promeneur peut s'écarter du chasseur.
    Rappelons ici les positions responsables des fédérations, qui ont naturellement limité les périodes ou les prélèvements de la chasse à la bécasse en fonction de l'état de conservation fragile de l'espèce.
    En quelques décennies de responsabilité, j'ai vu les chasseurs évoluer dans un sens positif. Il est toujours inacceptable d'entendre des plombs tomber sur sa toiture, que l'on soit chasseur ou non-chasseur. La prolifération du gros gibier - chevreuils, sangliers, cerfs ou renards - comme les nombreux accidents de la route qu'il provoque justifient les battues aux yeux des non-chasseurs. Nous avons fait des progrés en matière de sécurité même si l'information n'est pas toujours facile à diffuser. En ce sens, l'apaisement autour de la pratique de la chasse, objet de la mission qu'avait fort bien menée François Patriat, a notablement progressé en deux ans.
    Que notre rapporteur me permette de le lui dire, en tant que membre depuis quatre mandats du groupe de travail sur la chasse qu'il préside actuellement, autant j'avais apprécié son sérieux et sa pondération, autant je regrette ses attaques sans nuance contre la méthode de la précédente majorité qui, selon lui, n'aurait pas mené de concertation.
    M. Charles de Courson. Critiques bien méritées !
    M. Pierre Ducout. En ce qui concerne la gestion des fédérations de chasse, certaines dérives qui ont pu exceptionnellement se produire entre une formation politique et des fédérations ne sont plus à l'ordre du jour, et il n'est pas anormal d'alléger la tutelle des fédérations.
    M. Charles de Courson. Que ne l'avez-vous fait !
    M. Pierre Ducout. Par contre, le système d'attribution des voix que vous proposez nous semble accorder une représentation très excessive aux porteurs de droits de chasse, si l'on veut respecter cette importante conquête démocratique de la Révolution qu'est le droit de chasse.
    Il faut aussi rappeler que c'est la gauche qui a légalisé, dans la loi de 2000, la chasse de nuit au gibier d'eau, qui avait été historiquement interdite, bien que tolérée, pour des raisons de sécurité intérieure. Le curseur que nous avions fixé - vingt et un départements et certains cantons de sept autres départements - tenait compte de la réalité des installations existantes et de la pratique traditionnelle de ces chasses. Etendre l'autorisation, là où nous l'avions limitée à certains cantons, à l'ensemble du territoire départemental même s'il n'y a pas d'installations, n'aura qu'un effet d'annonce médiatique qui me paraît préjudiciable à l'intérêt réel des chasseurs.
    M. Gremetz a rappelé que le projet de loi de 2000, dans le texte présenté par le gouvernement de l'époque, limitait à cinq ans la légalisation de la chasse de nuit.
    M. Charles de Courson. Nous avons imposé la suppression du délai à Mme Voynet !
    M. Pierre Ducout. Mais cette limitation n'a pas été reprise dans la loi que la majorité parlementaire de gauche a votée.
    M. Charles de Courson. Contre l'avis du Gouvernement !
    M. Pierre Ducout. Un rapport avait certes été prévu comme dans beaucoup de projets. C'est un bon moyen pour suivre l'application des lois.
    Le déplacement possible des hutteaux sans autorisation préfectorale va dans le bon sens.
    M. Charles de Courson. Dont acte !
    M. Pierre Ducout. Il n'est pas juste et rien ne justifie d'interdire systématiquement la pratique de certaines chasses traditionnelles et populaires pendant les mois d'août et de février, lorsqu'elle s'effectue dans des conditions de gestion responsable et de connaissance du bon état des espèces, avec un plafond de prélèvement.
    La droite est responsable d'avoir fait adopter la directive européenne de 1979, dont les objectifs sont louables, sans précautions suffisantes quant à son application.
    M. François Liberti. La droite est à l'origine de tous les maux !
    M. Pierre Ducout. Pour la saison 2002-2003, l'Association des chasseurs au gibier d'eau constate avec pertinence que c'est « la plus courte saison de chasse qu'aient jamais connue les chasseurs de gibier d'eau français dans toute leur histoire, pourtant déjà bien longue ». Ceci est d'autant plus paradoxal que de nombreuses promesses d'amélioration de leur situation, chers collègues de la majorité, avaient été faites au printemps 2002.
    Les prises de position récentes du Conseil d'Etat ou de l'avocat général de la Cour européenne de justice sur les dérogations sont très préoccupantes.
    M. Roland Chassain. A cause de qui ?
    M. Pierre Ducout. Dans le respect de ses partenaires, en sachant au niveau national marginaliser les extrêmes, ...
    M. Pierre Lang. C'est qui, les extrêmes ?
    M. Pierre Ducout. ... en poursuivant le travail de négociation entrepris par le gouvernement de Lionel Jospin avec la Commission européenne, en tirant parti des opportunités offertes par l'ouverture de l'Union européenne à de nouveaux pays, la France doit pouvoir trouver des solutions - peut-être faut-il compléter la directive européenne de 1979, à côté du guide interprétatif - pour permettre aux chasseurs de poursuivre leur loisir dans des conditions respectueuses de la nature et des espèces, en août et en février.
    En conclusion, des solutions satisfaisantes pour l'ensemble des chasseurs responsables et comprises par les non-chasseurs qui ne sont pas opposés à la chasse ne pourront être trouvées durablement que dans la mesure où nous légiférerons sans forfanterie et sans visées électoralistes exclusives. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il ne me semble pas que ce soit le cas de votre loi, madame la ministre. (Protestations sur les mêmes bancs.)
    La majorité de nos concitoyens ne connaissent pas ou n'apprécient pas les corridas.
    M. Charles de Courson. Ça dépend !
    M. Pierre Ducout. Pourtant, les médias ont donné à cette pratique porteuse d'une certaine culture et d'une certaine éthique ses lettres de noblesse, si bien qu'elle est tolérée et que les quelques opposant systématiques à la corrida ne bénéficient pas de la surmédiatisation qu'on accorde aux opposants à la chasse.
    Vous espérez, monsieur le rapporteur, que ce texte permettra de retrouver une pratique sereine de la chasse, dans un contexte apaisé. Nous le souhaitons tous,...
    M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. Alors, nous sommes d'accord !
    M. Alain Gest. Mais il aurait fallu le démontrer !
    M. Pierre Ducout. ... mais force est de constater que la directive européenne de 1979 et son application à travers les contentieux, en particulier depuis les décisions de la Cour européenne de 1994, ont interdit cette sérénité, ...
    M. Jean Lassalle. Il faut abroger cette directive !
    M. Pierre Ducout. ... tout comme certaines pratiques - au demeurant de plus en plus rares - de chasseurs irresponsables.
    Il faut que nous agissions tous dans un cadre de revalorisation culturelle, en mettant l'accent, à côté de la convivialité traditionnelle de la chasse, sur les valeurs de connaissance, de découverte, de mise en valeur de la nature dont elle est porteuse, afin qu'elle redevienne attractive pour nos enfants, que l'espèce réellement en voie de disparition ne soit pas celle des chasseurs et que nos pratiques traditionnelles et populaires demeurent, y compris en août et en février, une richesse pour notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3

ORDRE DU JOUR DE LA
PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :
    Suite de la discussion du projet de loi (n° 758) relatif à la chasse :
    M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (rapport n° 821).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexe au procès-verbal
de la 2e séance
du mardi 13 mai 2003
SCRUTIN (n° 143)


sur l'exception d'irrecevabilité opposée par M. Bocquet au projet de loi relatif à la chasse.

Nombre de votants

115


Nombre de suffrages exprimés

115


Majorité absolue

58


Pour l'adoption

21


Contre

94

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Contre : 90 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 16 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Contre : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (11) :
    Pour : 1. - M. Yves Cochet.