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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 4 JUIN 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mardi 3 juin 21003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Questions au Gouvernement «...».

REPORT DU VOLET ÉDUCATIF DE L'AVANT-PROJET
DE LOI DE DÉCENTRALISATION «...»

MM. Christophe Masse, Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

SORT D'AMINA LAWAL «...»

MM. Rodolphe Thomas, Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

RÉFORME DES RETRAITES «...»

MM. Maxime Gremetz, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.

DÉCENTRALISATION «...»

MM. Robert Lecou, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

SITUATION DES HÔPITAUX LOCAUX «...»

MM. Serge Roques, Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

ÉLARGISSEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE «...»

M. Etienne Mourrut, Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes.

SITUATION SOCIALE «...»

MM. Victorin Lurel, Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.

EXPORTATIONS DES PETITES
ET MOYENNES ENTREPRISES «...»

MM. Jean-Luc Warsmann, François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.

TVA À TAUX RÉDUIT
DANS LE SECTEUR DU BÂTIMENT «...»

MM. Yannick Favennec, Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.

SITUATION DES FINANCES PUBLIQUES «...»

MM. Didier Migaud, Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.

LUTTE CONTRE LE SIDA «...»

Mme Maryvonne Briot, M. Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

CONVENTION SUR L'AVENIR DE L'EUROPE «...»

Mmes Arlette Franco, Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE

2.  Simplification du droit. - Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi «...».
M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat.
M. Etienne Blanc, rapporteur de la commission des lois.

EXCEPTION D'IRRECEVABILITÉ «...»

Exception d'irrecevabilité de M. Jean-Marc Ayrault : MM. Jérôme Lambert, le rapporteur de la commisssion des lois, le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat, Jérôme Lambert, Xavier de Roux. - Rejet.

DISCUSSION GÉNÉRALE «...»

MM.
Rodolphe Thomas,
Patrick Braouezec,
Jean Leonetti,
Augustin Bonrepaux,
Xavier de Roux,
Lionnel Luca.
Clôture de la discussion générale.

DISCUSSION DES ARTICLES «...»
Articles 1er A, 1er, 1er bis et 3. - Adoptions «...»
Article 4 «...»

Amendement de suppression n° 9 de M. Lambert : MM. Jérôme Lambert, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Augustin Bonrepaux. - Rejet.
Amendements identiques n°s 2 de M. Sauvadet, 6 de M. Philippe Armand Martin et 10 de M. Merville : MM. Rodolphe Thomas, Philippe Armand Martin, Denis Merville, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jérôme Lambert. - Retrait de l'amendement n° 10.
M. Philippe Armand Martin. - Retrait de l'amendement n° 6 ; rejet de l'amendement n° 2.
Adoption de l'article 4.

Article 5 «...»

Amendement n° 3 de M. Luca : MM. Lionnel Luca, le rapporteur, Pascal Clément, président de la commission des lois ; le secrétaire d'Etat, Jérôme Lambert, Hervé Novelli, Gilles Carrez. - Rejet.
Adoption de l'article 5.

Articles 6 bis, 6 ter, 8, 11 et 12. - Adoptions «...»
Après l'article 12 «...»

Amendement n° 1 de M. Lagarde : M. Rodolphe Thomas. - Retrait.

Articles 12 bis et 14. - Adoptions «...»
Article 16 «...»

Amendement n° 11 de M. Evin : MM. Claude Evin, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet de l'amendement n° 11 rectifié.
Amendement n° 12 de M. Evin : MM. Claude Evin, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Adoption de l'article 16.

Articles 17 et 18. - Adoptions «...»
Article 19 «...»

MM. Hervé Novelli, Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
Amendement n° 13 de Mme Vautrin : Mme Catherine Vautrin, MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises. - Retrait.
Adoption de l'article 19.

Articles 20, 21, 22, 22 bis et 22 ter. - Adoptions «...»
Article 24 «...»

Amendement n° 4 de la commission des lois : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. - Adoption.
Amendement n° 8 de M. Philippe Armand Martin : MM. Philippe Armand Martin, le rapporteur, le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. - Retrait.
Adoption de l'article 24 modifié.

Articles 25 et 27. - Adoptions «...»
Article 28 (coordination) «...»

Amendement n° 5 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article 28 modifié.

Article 29. - Adoption «...»
VOTE SUR L'ENSEMBLE «...»

Adoption de l'ensemble du projet de loi.
M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat.

Suspension et reprise de la séance «...»

3.  Initiative économique. - Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi «...».
M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
Mme Catherine Vautrin, rapporteure de la commission spéciale pour les articles non fiscaux.
M. Gilles Carrez, rapporteur de la commission spéciale pour les articles fiscaux.
M. Hervé Novelli, président de la commission spéciale.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
4.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Nous commençons par une question du groupe socialiste.

REPORT DU VOLET ÉDUCATIF
DE L'AVANT-PROJET DE LOI DE DÉCENTRALISATION

    M. le président. La parole est à M. Christophe Masse.
    M. Christophe Masse. Monsieur le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, on a donc enfin annoncé hier la proposition de reporter le volet « éducation » du projet de loi de décentralisation. Ouf, aurais-je envie de dire. Malheureusement, votre prise de position tardive n'aura pas permis d'éviter le trouble dans le milieu des enseignants et des personnels techniques.
    M. François Goulard. A qui la faute ?
    M. Christophe Masse. Elle aurait pu avoir, notamment sur la tenue des examens, des conséquences encore plus graves, que vous auriez dû assumer seul, monsieur le ministre, sans pouvoir recourir à un odieux chantage sur les enseignants.
    M. François Goulard. Lamentable !
    M. Christophe Masse. Cette prise de position le confirme : vous devriez peut-être écouter davantage l'opposition parlementaire (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et le mouvement syndical, car il y a déjà longtemps que, pour notre part, nous demandions ce report ou, plutôt, ce retrait. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Goulard. Est-ce une profession d'irresponsabilité ?
    M. Christophe Masse. En effet, monsieur le ministre, la méthode qui consiste à mettre la charrue avant les boeufs n'a jamais fait avancer le labour. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il nous paraît pourtant essentiel et prioritaire de créer les conditions de ce véritable débat sur les missions de l'école, que vous ne cessez de repousser après l'avoir annoncé.
    M. Lucien Degauchy. Démago !
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
    M. Christophe Masse. Vous avez donc reculé (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et c'est le signe que la pression populaire, que vous méprisez souvent, a encore un sens (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), c'est le signe que l'opposition parlementaire n'a pas tort lorsque, sans relâche, à l'occasion des questions au Gouvernement, ses députés relayent les préoccupations des Françaises et des Français. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cela devrait peut-être vous donner à réfléchir sur ce que votre gouvernement va faire avec le projet concernant les retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean Marsaudon. Donneur de leçons !
    M. Christophe Masse. Aujourd'hui, le retour à la sérénité dans l'éducation nationale ne sera effectif que si de vraies négociations s'engagent. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous devez ouvrir rapidement les négociations avec les organisations syndicales...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
    M. Christophe Masse. ... puis le débat parlementaire, comme nous le demandons depuis longtemps dans cet hémicycle et comme l'a encore réclamé récemment notre collègue Yves Durand.
    Il ne suffira pas d'annoncer le report de la discussion sur les questions qui vous posent des problèmes (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), il faut, dès maintenant, traiter le fond, négocier et se concerter. (Mêmes mouvements.)
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
    M. le président. N'interrompez pas M. Masse ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Monsieur Masse, veuillez conclure.
    M. Christophe Masse. Monsieur le ministre, sous la pression, vous reportez votre réforme. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Sous la pression, vous promettez d'engager un dialogue avec les syndicats. Sous la pression, enfin, vous allez sans aucun doute surseoir à toute décision concernant les personnels de l'éducation nationale (Exclamations sur les mêmes bancs) avant la tenue d'un grand débat dans notre assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Debout ! Debout !
    M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le député, la délectation que vous inspire l'hypothèse d'un retour à l'immobilisme me paraît en elle-même très inquiétante. (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Vous êtes un parlementaire averti, mais il est curieux de vous entendre parler de retrait d'un projet de loi : il ne s'agit en fait que d'un avant-projet (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), il n'est nullement retiré et nous avons simplement décidé d'ouvrir la concertation avec les partenaires sociaux sur trois sujets fondamentaux (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) qui ont été annoncés par le comité interministériel du 27 mai présidé par le Premier ministre. (« Quel aveu ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Christian Bataille. Tartuffe !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Le premier sujet concerne la décentralisation et mon collègue Nicolas Sarkozy. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Vous ne l'ignorez sans doute pas : c'est lui qui est chargé de ce dossier et qui défendra le projet de loi devant vous. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Apparemment, vous apprenez la nouvelle, mais je crois bien que ce n'est une surprise que pour vous. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Henri Emmanuelli. Merci ! Merci !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Le deuxième sujet concerne les métiers de l'enseignement et la gestion des fins de carrière. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Marcel Dehoux. Vous verrez les problèmes en septembre !
    Mme Martine David. Pour l'instant, les enseignants sont dans la rue !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Le troisième sujet concerne le grand débat sur l'éducation nationale et sur l'avenir de l'école que vous appelez de vos voeux. ll n'y a aucun recul du Gouvernement sur cette question. Ce débat aura lieu, comme prévu, devant le Parlement, (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)...
    M. Marcel Dehoux. Vous ne serez plus là !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. ... probablement en septembre, ou, en tout cas, au printemps 2004. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Martine David. Vous ne serez plus ministre !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Il donnera lieu à une révision de la loi d'orientation de 1989, la fameuse loi Jospin, qui n'est pas bonne. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    On peut choisir de ne pas négocier, mais ce serait une erreur. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Si l'on ouvre la concertation, il faut se donner un peu de temps, d'une part parce que les réformes passent d'autant mieux qu'elles sont comprises et expliquées (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains), d'autre part parce qu'il ne faut pas exclure la possibilité - bien que cela vous arrive rarement - que nous ayons à prendre en compte des idées nouvelles et intéressantes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Voilà ce que nous allons faire. Désolé de vous décevoir : notre volonté de réforme est intacte et elle n'est nullement remise en cause. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

SORT D'AMINA LAWAL

    M. le président. La parole est à M. Rodolphe Thomas, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Rodolphe Thomas. Ma question, qui s'adresse au ministre des affaires étrangères, concerne un drame qui, j'en suis convaincu, émeut l'ensemble de l'Assemblée.
    Aujourd'hui devait avoir lieu le procès en appel d'Amina Lawal, cette jeune Nigériane de trente ans condamnée à la mort par lapidation pour avoir eu un enfant hors mariage. Je vous rappelle l'horreur absolue de cette mise à mort où l'on enterre d'abord la condamnée jusqu'au tronc pour éviter qu'elle ne s'échappe.
    En novembre dernier, François Bayrou avait interpellé le Premier ministre sur ce drame : le Gouvernement lui avait donné l'assurance qu'il allait tout mettre en oeuvre pour sauver la jeune femme. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire quelle a été, depuis six mois, l'action de la France pour sauver Amina Lawal ?
    Naturellement, cette condamnation a révulsé l'opinion publique et nombreux sont nos concitoyens qui se sont mobilisés. Ainsi, dans ma ville d'Hérouville-Saint-Clair, nous avons, cette année, dédié la fête des communautés au combat d'Amina.
    Mais, au-delà de ces soutiens, fussent-ils symboliques, il faut agir. Aussi, quelle action mène aujourd'hui le Gouvernement pour sauver Amina Lawal et, plus largement, pour faire prévaloir une certaine idée de la femme et des droits de l'être humain ? (Applaudissements sur tous les bancs.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.
    M. Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le député, je rappelle avant tout que, pour la France, attachée au respect des droits de la personne humaine, toutes les législations et toutes les pratiques discriminatoires à l'égard des femmes sont inacceptables. Cela vaut dans tous les cas, et en particulier dans celui d'Amina Lawal, qui est poursuivie pour adultère dans un des Etats de la fédération du Nigeria.
    Vous le savez, nous avons déjà lancé officiellement et publiquement un appel à la clémence aux autorités du Nigeria, et nous l'avons renouvelé. Nous avons demandé que cette affaire connaisse le même dénouement positif que celui qui avait été obtenu, il y a quelques mois, dans le cas de Mme Husseini Tungar, qui avait été précédemment condamnée dans les mêmes conditions et pour le même motif.
    Le ministre des affaires étrangères a personnellement parlé de cette question avec M. Obasanjo, président fédéral du Nigeria, et, vous l'avez certainement remarqué, celui-ci s'est publiquement prononcé contre l'application de peines inhumaines comme la lapidation.
    Dans le cas d'Amina Lawal, nous en sommes à une étape de la procédure judiciaire. La jeune femme comparaît devant la cour fédérale de l'Etat de Katsina. Si sa condamnation était confirmée, elle pourrait faire appel devant la cour d'appel fédérale d'Abuja, puis éventuellement se pourvoir en cassation devant la Cour suprême fédérale. Mais nous espérons que nous n'en arriverons pas là.
    En toute hypothèse, le gouvernement français renouvellera avec insistance ses démarches auprès du président nigérian, appuyé dans cette action par tous nos partenaires de l'Union européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

RÉFORME DES RETRAITES

    M. le président. Pour le même temps que ses collègues, la parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Maxime Gremetz. Bien sûr, monsieur le président !
    Monsieur le Premier ministre, les salariés du public et du privé sont sous vos fenêtres. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Allez-vous enfin entendre leurs revendications légitimes en faveur d'une réforme des retraites, puisqu'ils refusent la vôtre, dont seuls vos amis du MEDEF sont satisfaits ?
    Face à l'action déterminée du personnel de l'éducation nationale, vous avez été contraint de lâcher du lest sur la décentralisation et l'autonomie des universités. Qu'attendez-vous pour ouvrir de vraies négociations sur les retraites avec les syndicats ? Une vraie réforme est nécessaire, mais elle ne doit se faire ni dans la précipitation, ni au mépris des partenaires sociaux, ni en dénigrant toute proposition alternative.
    Votre réforme est une véritable régression sociale. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Nous voulons, nous, le progrès humain. C'est ce qu'exigent aujourd'hui des centaines de milliers de manifestants et de grévistes, du privé comme du public, et 63 % des citoyens qui soutiennent leur action. Les uns et les autres savent que, contrairement à ce que vous dites, l'effort n'est pas partagé. Vous faites payer 91 % de votre réforme par les salariés, alors que vous accordez 16,6 milliards d'euros d'exonérations de cotisations patronales aux entreprises, sans contrepartie en termes d'emploi. Vous allégez l'ISF alors que, en 2003, les trente-neuf principaux patrons cumulent une rémunération de 7,4 millions d'euros, soit 554 fois le SMIC. Vous refusez de modifier l'assiette des cotisations sociales, alors que la part des retraites dans la richesse nationale a diminué de 10 %. Vous refusez de taxer les revenus financiers - ce qui rapporterait 20 milliards d'euros pour les retraites -, alors que la part des revenus du capital a progressé de 10 % en vingt ans. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Charles Cova. N'importe quoi !
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le Premier ministre, ce sont toujours les mêmes qui paient la note !
    M. le président. Monsieur  Gremetz, vous avez épuisé votre temps de parole : veuillez poser votre question.
    M. Maxime Gremetz. Faites preuve de bon sens, monsieur le Premier ministre. Ne prenez pas la France en otage ! (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Retirez votre projet et ouvrez des négociations. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Charles Cova. Vous êtes gonflé !
    M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur Gremetz, vous venez de caricaturer une réforme. Or une démocratie, une République comme la France ne peut pas être fière de voir caricaturer de la sorte un débat important pour son avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) La République, à laquelle, sur ces bancs, tout le monde se dit attaché, a besoin de réformes. Son adversaire, c'est l'immobilisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. François Hollande. Qu'avez-vous fait pour la décentralisation ?
    M. le Premier ministre. Je le sais, on trouve toujours de bonnes raisons pour reporter les réformes, année après année. C'est pour ça que, pendant cinq ans, on n'a pas pu faire la réforme des retraites que le pays attend.(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Hollande. Où est-elle, votre réforme à vous ?
    M. le Premier ministre. La réforme des retraites, comme celle de la décentralisation, est articulée autour de trois principes : dialogue social (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), débat parlementaire et détermination du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Parlons d'abord du dialogue social. Vous dites que cette réforme n'a pas été négociée. Or le texte relatif à la réforme des retraites que nous avons eu l'honneur de présenter au conseil des ministres n'est pas le texte initial du Gouvernement : il a été enrichi par plusieurs des partenaires sociaux, que vous avez tort de mésestimer.
    Un député du groupe socialiste. Jésuite !
    M. le Premier ministre. Cette amélioration prouve que le dialogue social est constructif.
    M. André Chassaigne. Oh là là !
    M. le Premier ministre. C'est pour cela que, aujourd'hui, je suis fier de présenter à l'Assemblée nationale un texte enrichi par le dialogue social.
    M. Augustin Bonrepaux. Le dialogue social ? Il est dans la rue, aujourd'hui !
    M. Christian Bataille. Vous pouvez répéter cela en nous regardant dans les yeux, monsieur le Premier ministre ?
    M. le Premier ministre. Le temps de la négociation sociale a maintenant laissé place au temps de la démocratie parlementaire représentative. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Ce sont les représentants de la nation qui doivent débattre de ce texte : je compte sur eux pour faire en sorte que des réponses soient apportées aux questions fondamentales que les Français se posent sur l'avenir des retraites.
    M. Pascal Terrasse. Amen !
    M. le Premier ministre. Sur la décentralisation, nous procédons de la même manière.
    Mme Martine David. C'est un tort !
    M. François Hollande. Au bout de combien de temps ?
    M. le Premier ministre. Nous entamons la discussion et nous avons pris l'engagement, avec le ministre de l'éducation nationale et avec le ministre de l'intérieur, de discuter...
    M. François Hollande. Il était temps !
    M. le Premier ministre. ... jusqu'à la conclusion d'un accord et à l'élaboration d'un texte que l'on puisse soumettre au Conseil d'Etat. J'ai pris cet engagement et je le tiendrai. La réforme de la décentralisation, nécessaire à notre pays, sera votée avant la fin de l'année 2003, en tout cas au 1er janvier 2004. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.) C'est donc en septembre au plus tard que nous soumettrons au Conseil d'Etat le texte qui sera le fruit de ces séances de travail, de la concertation, du débat parlementaire, de la démocratie, mais aussi de notre détermination.
    M. Jean-Claude Lefort. Regardez-nous en face !
    M. le Premier ministre. Je crois vraiment, monsieur Gremetz, que la force d'un gouvernement ne s'exprime ni par le chahut ni par le vacarme, mais par...
    M. Alain Néri. La durée !
    M. le Premier ministre. ... l'action et la détermination.
    Vous pouvez compter sur la détermination du Gouvernement pour réformer la République : il y va de la survie de celle-ci. (Mmes et MM. les députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et applaudissent longuement. - Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

    M. Jean-Claude Lefort. On se croirait au Soviet suprême ! (Sourires.)
    M. le président. Pas du tout monsieur Lefort, taisez-vous !

DÉCENTRALISATION

    M. le président. La parole est à M. Robert Lecou, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Robert Lecou. Monsieur le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, votre ministère est au coeur du projet de décentralisation destiné à favoriser une meilleure efficacité de l'action publique en rapprochant la prise de décision du citoyen.
    Ces dernières semaines, la décentralisation, voulue par le Gouvernement et la majorité parlementaire, a été présentée par ses détracteurs de telle façon que ce que tout le monde s'accordait à reconnaître comme une réussite - par exemple le transfert de la construction et de l'entretien des collèges et des lycées aux départements et aux régions - a pu être contesté.
    Un député du groupe socialiste. Parlons-en !
    M. Robert Lecou. Pourtant, dans ce domaine, départements et régions ont mieux fait que l'Etat et ont bien assumé le transfert des compétences des lois de décentralisation de 1982.
    Le parc immobilier s'est largement rénové et s'est même étendu grâce à des constructions nouvelles. Les élèves ont incontestablement bénéficié de ces progrès. On ne peut donc pas laisser un tel sentiment d'inquiétude à propos des futures lois de décentralisation gagner l'opinion publique, les parents d'élèves et les enseignants, qui invoquent notamment le risque que les collectivités territoriales manquent de moyens...
    M. André Chassaigne. Ils ont raison !
    M. Robert Lecou. ... et la disparité entre les collectivités territoriales. Il est donc indispensable de réaffirmer que, en transférant de nouvelles compétences, l'Etat transférera les moyens...
    M. Augustin Bonrepaux. Lesquels ?
    M. Robert Lecou. ... et évitera, grâce à une péréquation adaptée, une éducation à plusieurs vitesses selon les départements et les régions.
    Dans ce contexte, alors que l'on a entendu tout et n'importe quoi, et au moment où le Gouvernement a décidé de retravailler le sujet avec ses différents partenaires, je souhaiterais que vous nous informiez sur le calendrier des projets de loi de décentralisation et que vous réaffirmiez que ces projets de loi ne déboucheront pas sur la disparité et l'inégalité des départements et des régions de France, mais qu'ils garantiront au contraire une meilleure efficacité, une meilleure proximité, et qu'ils représenteront donc un progrès pour l'éducation nationale...
    M. le président. Monsieur Lecou auriez-vous l'obligeance de poser votre question ?
    M. Robert Lecou. ... mais aussi pour l'ensemble des domaines de l'action publique concernés par la décentralisation...
    M. le président. Vous n'avez pas plus de temps que M. Gremetz : posez votre question.
    M. Robert Lecou. ... que souhaite le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le Premier ministre vient (M. Jean Lassalle se lève et entonne un chant pyrénéen)...
    M. le président. S'il vous plaît, monsieur Lassalle ! Pouvez-vous vous asseoir et ne pas chanter dans cet hémicycle ! Asseyez-vous ! (M. Jean Lassalle continue de chanter.) Asseyez-vous ! (Exclamations sur divers bancs. - M. Jean Lassalle poursuit.) Monsieur Lassalle, asseyez-vous ! Je vais être obligé de faire intervenir les huissiers. Pouvez-vous vous rasseoir, s'il vous plaît ? (M. Jean Lassalle se rassied.) Ah, merci ! Il y a tout de même des choses qui ne se font pas dans cet hémicycle !
    Poursuivez, monsieur le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, la seule bonne nouvelle, c'est qu'on en apprend tous les jours !
    Le Premier ministre vient de le dire avec beaucoup d'autorité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), il y aura donc un texte sur la décentralisation. Il sera présenté au Parlement à la mi-septembre et sera adopté avant la fin de l'année.
    Pourquoi ce texte est-il une priorité ? Parce que, sur tous les bancs de cette assemblée, nous sommes convaincus...
    M. Bernard Derosier. Zéro !
    M. le président. Monsieur Derosier !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... que la décentralisation est absolument nécessaire. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et si on en doutait, il suffirait de relire les conclusions du rapport de Pierre Mauroy. Il est d'ailleurs curieux que le groupe socialiste, mais c'est l'incohérence dont il est coutumier (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), conteste aujourd'hui ce que Pierre Mauroy lui demandait de faire hier ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Augustin Bonrepaux. Quels moyens financiers avez-vous ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Deuxièmement, il semble que le groupe socialiste ait du mal à comprendre les règles du dialogue social. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Rien de plus normal : ne l'ayant pas pratiqué hier, il ne peut l'imaginer aujourd'hui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Et d'ailleurs, si le Gouvernement avait besoin de leçons de dialogue social, il n'irait pas les prendre chez ceux qui ont réussi l'exploit, il y a quelques années, de faire descendre dans la rue, ce qui ne s'était jamais vu, les gendarmes et les magistrats. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Vous l'aviez oublié, pas nous !
    Le dialogue social demande du temps. Nous nous y consacrerons tout l'été.
    Le dialogue social demande une discussion sans tabou. C'est pourquoi nous l'avons engagée avec des partenaires syndicaux à qui, avec Luc Ferry, je veux rendre hommage pour leur sens des responsabilités. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Le malaise enseignant est réel et personne ne gagnera rien à vouloir l'exploiter. (Exclamations sur les mêmes bancs.) D'ailleurs, si le malaise enseignant était si facile à apaiser, je suppose, mesdames et messieurs de l'opposition, que vous qui avez été au pouvoir pendant tant d'années, vous ne vous seriez pas gênés pour le faire.
    M. Jean-Marc Ayrault. Zéro !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Enfin, le dialogue social nécessite, pour être crédible, que le Gouvernement apporte des réponses précises et rapides.
    M. le président. Monsieur le ministre...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est ce que nous ferons dès mardi prochain.
    M. Christian Bataille. N'importe quoi !
    M. le président. Monsieur Bataille ! On n'entend que vous ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous le voyez,...
    M. le président. Merci, monsieur le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... le dialogue social sera poursuivi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

SITUATION DES HÔPITAUX LOCAUX

    M. le président. La parole est à M. Serge Roques, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Serge Roques. Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    Les hôpitaux locaux sont au nombre de 355 sur le territoire et ils représentent près d'un tiers de notre parc hospitalier. Ces hôpitaux sont un très bon exemple de la coopération, et même de l'entente, entre le secteur hospitalier et le secteur libéral. En effet, près de 95 % du personnel de ces établissements sont des médecins libéraux, qui trouvent dans les hôpitaux locaux le bon moyen de pouvoir servir l'intérêt général tout en gardant une marge de liberté dans leur pratique quotidienne.
    De plus, ces hôpitaux assurent une indispensable complémentarité avec l'hospitalisation publique, en offrant une grande capacité d'accueil pour les soins de longue durée, et plus de 14 % des lits de soins de suite et de réadaptation. (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Pourriez-vous écouter votre collègue, s'il vous plaît ? Ou, si vous ne voulez pas l'écouter, allez ailleurs ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Poursuivez, monsieur Roques.
    M. Serge Roques. Pourtant, depuis plus de quinze ans, la place de l'hôpital local dans le paysage sanitaire et social français n'est pas particulièrement visible. Il souffre en effet d'un manque de clarté quant à la définition de son rôle et de ses missions.
    M. le président. Mon cher collègue, quelle est votre question ?
    M. Serge Roques. J'y arrive, monsieur le président.
    M. le président. Vous allez peut-être y arriver, mais moi, je vais vous interrompre. Posez votre question !
    M. Serge Roques. Monsieur le ministre, lors des assises nationales des hôpitaux locaux, vous leur avez annoncé ce que vous comptiez faire. Ces hôpitaux attendent beaucoup de vous, pour qu'ils soient enfin reconnus comme un maillon important dans notre système de prise en charge sanitaire. Pouvez-vous nous préciser votre politique en la matière ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le député, vous avez raison de souligner le rôle essentiel des hôpitaux locaux dans notre système de soins. Car à côté des centres hospitalo-universitaires et des centres hospitaliers, qui semblent accaparer trop souvent l'attention et tendent à être mis en vedette, il y a, comme vous l'avez rappelé, plus de 350 hôpitaux locaux, qui assurent les soins de proximité et rassurent les populations.
    C'est bien parce qu'ils sont indispensables, de par leur originalité et de par leur fonctionnement, que je viens de signer une circulaire qui précise un certain nombre de leurs missions. Je vous confirme, premièrement, que les hôpitaux locaux sont bien le premier échelon dans la prise en charge sanitaire, deuxièmement, qu'ils ont besoin de moyens diversifiés, et, enfin, qu'ils doivent être au coeur de l'organisation des réseaux de soins de proximité.
    Naturellement, comme vous l'avez également dit, les médecins libéraux y jouent un rôle capital. Il faut donc en assouplir les règles de fonctionnement. C'est la raison pour laquelle, après la circulaire, un décret sera pris avant la fin de l'année.
    Mesdames, messieurs les députés, au moment où l'on parle, ici de fermeture d'une structure, là de fermeture d'un service, je souhaite développer les hôpitaux locaux et même en créer de nouveaux, éventuellement intercommunaux.
    M. Edouard Landrain. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est cela, la médecine de proximité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

ÉLARGISSEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE

    M. le président. La parole est à M. Etienne Mourrut, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Etienne Mourrut. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.
    La volonté d'adhésion à l'Union européenne des pays de l'Est candidats s'est manifestée jusqu'à ce jour de façon positive au travers des résultats des référendums qui ont été organisés. Toutefois, il ne faut pas sous-estimer les interrogations exprimées par nos compatriotes, et même par les citoyens des autres pays membres, sur l'entrée de ces pays au sein de l'Union en mai 2004, suite à la ratification du traité signé à Athènes le 16 avril dernier.
    En effet, les dernières prises de position de certains d'entre eux, notamment sur l'acquisition de matériels militaires américains, ont révélé des divergences. Et le conflit irakien n'a fait qu'accentuer cette appréhension.
    Dès lors, il y a tout lieu de s'interroger sur les motivations réelles de ces pays à solliciter leur entrée au sein de l'Union. On peut légitimement se demander si ces Etats ne recherchent pas surtout, et avant tout, un soutien économique de la part de l'Europe, en faisant fi, semble-t-il, de la cohésion, pourtant souhaitable, entre Etats membres.
    Aussi, madame la ministre, je souhaite que vous nous fassiez part de votre sentiment à l'égard de l'attitude de ces pays candidats, dont la philosophie est somme toute différente de la nôtre eu égard à leur histoire récente. Pensez-vous qu'ils soient réellement prêts pour entrer au sein de l'Union européenne en l'état actuel des choses, surtout si l'on considère les disparités sociales et fiscales qui existent encore entre eux et nous ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.
    M. Bernard Derosier. Renégate !
    M. le président. Monsieur Derosier !
    Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le député, vous faites référence aux réelles appréhensions de nos concitoyens face à un élargissement qui, il faut le dire, est maintenant imminent puisqu'il aura lieu, comme vous le savez, le 1er mai 2004. C'est vrai que cet élargissement est différent des précédents. D'abord parce que ces pays n'ont pas le même vécu que les Quinze : ils ont été mis à l'écart de la démocratie et de l'économie de marché pendant des décennies, et nous leur demandons des efforts considérables. C'est peut-être une des raisons pour lesquelles des divergences fortes se sont fait jour. Et nous avons déploré - nous l'avons d'ailleurs dit publiquement - certains choix de matériels militaires qui ne nous paraissent pas conformes à l'intérêt général de l'Europe.
    Mais ces pays, je puis vous l'assurer, sont tout à fait favorables à l'Europe. Ils savent que c'est là leur place et leur destin. Je veux être claire : l'élargissement n'est pas seulement bénéfique à l'Europe et à ces pays, il l'est aussi à la France. Des démocraties stables en Europe centrale et orientale, c'est un acquis considérable. Ces pays connaissent une croissance de 4 % qui permet à la France de déployer ses investissements : nous sommes les premiers investisseurs en Pologne, en Roumanie et en Hongrie. Dans l'automobile, par exemple, nous avons conquis plus du quart des parts de marché dans tous ces pays, ce qui n'est pas du tout préjudiciable à l'emploi, je puis vous l'assurer.
    Cela étant, il faut faire un effort d'explication. C'est cet effort que conduit le Premier ministre et que nous poursuivons sans relâche, avec, comme je l'espère et comme je vous y invite, la participation de l'ensemble des élus de la nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

SITUATION SOCIALE

    M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour le groupe socialiste.
    M. Victorin Lurel. Monsieur le président, avant de poser ma question, qui s'adresse à M. le Premier ministre, je tiens à élever une vigoureuse protestation contre la réponse qu'a faite tout à l'heure M. le ministre de l'intérieur. On lui a posé une question, c'est à celle-là qu'il devait répondre, et non à une question qui ne lui a pas été posée. Et il n'avait pas à le faire en agressant le groupe socialiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Ma question concerne les retraites et le dialogue social, encore et toujours. Il y a tout juste un an, monsieur le Premier ministre, dans votre déclaration de politique générale, vous vous faisiez le héraut du dialogue social et, croyions-nous, d'un nouvel humanisme. Vous évoquez souvent « l'esprit de mai », qui ressemble plutôt, hélas, de plus en plus à l'esprit de décembre 1995 (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), fait de raideur gouvernementale cadavérique.
    La France, toutes catégories confondues, secteur public et secteur privé, ici, dans l'Hexagone, comme dans l'outre-mer, tout particulièrement à l'île de la Réunion et en Guadeloupe, est une fois de plus dans la rue pour protester contre votre aveuglement idéologique (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et votre crispation sectaire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste), qui vous conduisent à refuser tout dialogue approfondi sur le dossier des retraites.
    Des propositions alternatives existent (« Lesquelles ? » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), et des sources diversifiées de financement ne reposant pas sur les seuls salaires peuvent être sollicitées.
    Vous vous obstinez à ne point entendre, à imposer autoritairement et, disons-le, pour le moins maladroitement, comme frappé par un autisme persistant et assourdissant,...
    M. Guy Teissier. La question !
    M. Victorin Lurel. ... une réforme concoctée par la France d'en haut, porteuse de régression sociale, que la France d'en bas rejette massivement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Merci, monsieur Lurel.
    M. Victorin Lurel. La rue, qui ne gouverne pas, bien entendu, vient de vous imposer un report sine die de l'autonomie des universités (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et des mesures de décentralisation forcée de certains personnels de l'éducation nationale vers les collectivités territoriales.
    M. le président. Monsieur Lurel...
    M. Victorin Lurel. Personne n'est dupe : ces mesures ne seront pas applicables en pleine rentrée scolaire et universitaire, à la veille d'une échéance électorale importante.
    M. le président. Voulez-vous poser votre question, s'il vous plaît !
    M. Victorin Lurel. C'est la sagesse même, monsieur le Premier ministre,...
    M. le président. Monsieur Lurel !
    M. Victorin Lurel. ... tombez vos oeillères et sortez la France de l'impasse dans laquelle vous l'avez plongée ! Le groupe socialiste vous demande de reprendre un dialogue approfondi et une négociation sérieuse avec les partenaires sociaux.
    M. le président. Voilà. Merci, monsieur Lurel.
    M. Victorin Lurel. Redonnez de la force à l'espérance ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, je vous sais trop républicain et trop démocrate pour ne pas vous interroger avec nous sur la capacité de notre pays à se réformer dans le cadre des institutions démocratiques. Il n'y a pas d'un côté les bons Français qui pensent comme vous, et de l'autre les mauvais Français qui ne pensent pas comme vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Il n'y a pas d'un côté les bons syndicats qui pensent comme vous, et de l'autre les mauvais syndicats qui pensent comme nous.
    Vous avez, dans un élan républicain que je salue, soutenu l'action du Président de la République pour faire en sorte que, sur la scène internationale, la violence ne l'emporte pas sur le droit, et vous refusez ici la légitimité démocratique qu'a le Parlement pour décider de l'avenir du pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Marc Ayrault et M. François Hollande. Nous ne refusons rien !
    M. le président. Monsieur Bataille, asseyez-vous !
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Le ministre fait de la provocation !
    M. Julien Dray. C'est tout simplement scandaleux !

EXPORTATIONS DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES

    M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Jean-Luc Warsmann. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué au commerce extérieur ; elle concerne beaucoup de nos compatriotes.
    Monsieur le ministre, depuis une vingtaine d'années, ce sont les petites et moyennes entreprises de notre pays qui, pour l'essentiel, ont été le moteur de la croissance et de la création d'emplois. L'aide aux petites et moyennes entreprises doit donc être notre objectif premier. Or il est un domaine où il reste beaucoup à faire, je veux parler du développement des exportations. Il faut aider les petites et moyennes entreprises de notre pays à développer leurs ventes de biens et de services à l'étranger. En effet, 1 milliard d'euros supplémentaires d'exportations signifient la création de 15 000 emplois.
    Ma question est très concrète, monsieur le ministre : quelles mesures comptez-vous prendre pour que, dans chacune des régions de notre pays, se développe l'incitation des petites et moyennes entreprises à exporter, et donc pour que le nombre d'emplois créés augmente ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au commerce extérieur. J'espère, monsieur Loos, que tout le monde va vous écouter calmement.
    M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le député, je vous remercie de cette question (« Allô ? » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), car il est en effet indispensable d'exporter davantage, non seulement pour la croissance, mais aussi pour l'emploi et même, souvent, pour la stratégie industrielle de chaque entreprise considérée isolément.
    Exporter davantage, c'est possible. Beaucoup de pays, dont certains sont immenses, ont actuellement une croissance comprise entre 5 % et 10 % : la Chine a ainsi un taux de croissance de 9 %. Par contre, en France, les PME ne réalisent que 32 % du commerce extérieur, alors qu'elles sont 120 000 à exporter.
    Il existe un dispositif public, auquel on doit redonner du tonus. En premier lieu, il convient de réunir en une seule agence l'ensemble des dispositifs nationaux existants. Une telle agence est prévue dans la loi Dutreil, qui reviendra prochainement en deuxième lecture à l'Assemblée. Cela permettra de redonner du tonus à notre dispositif.
    Des priorités devront également être définies. Car il ne sert à rien de chercher tout partout. Il faut multiplier nos salons à l'étranger. Par rapport aux autres pays européens, nous sommes la lanterne rouge. Les Portugais font plus de salons à l'étranger que la France. Nous devons besoin de multiplier par deux, par trois - et dès l'année prochaine, ce sera fait -, le nombre de ces salons.
    Nous devons aussi répondre à l'attente des 40 000 jeunes qui sont prêts à partir en coopération dans une entreprise à l'étranger pendant un an ou deux.
    Enfin, il faut mobiliser les entreprises grâce au système consulaire et aux collectivités locales, auprès desquelles seront décentralisés les services du commerce extérieur. L'économie est une compétition pour les entreprises. En France, elles sont bien entraînées : elles sont toutes qualifiées pour l'exportation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

TVA À TAUX RÉDUIT DANS LE SECTEUR DU BÂTIMENT

    M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec, pour le groupe de l'UMP.
    M. Yannick Favennec. Monsieur le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation,...
    M. Renaud Donnedieu de Vabres. Très bien !
    M. Yannick Favennec. ... la Commission européenne a adopté hier un rapport sur l'expérience de réduction de TVA dans certains services à forte intensité de main-d'oeuvre, et en particulier, pour la France, en ce qui concerne les travaux sur les bâtiments, notamment les travaux d'entretien et d'amélioration des logements.
    Selon ce rapport, il ne serait pas possible d'identifier de façon suffisamment étayée l'effet favorable sur l'emploi et sur la lutte contre l'économie souterraine de la réduction de TVA expérimentée depuis 1999 dans plusieurs Etats de l'Union. Il souligne par ailleurs que la répercussion de la baisse du taux de TVA pour les prix à la consommation est partielle, voire inexistante.
    Les prévisions d'activité des entreprises artisanales s'annoncent plus pessimistes qu'à la fin 2002. Dans ce contexte, une remise en cause de la TVA à taux réduit pour les travaux sur les bâtiments aurait des conséquences dramatiques sur l'activité et l'emploi.
    Ainsi, dans mon département de la Mayenne, et plus particulièrement dans le nord de la Mayenne, que je représente, des dizaines, voire des centaines d'emplois seraient concernés ; sur l'ensemble de notre territoire, on évalue à 70 000 les pertes d'emplois qui en résulteraient pour le secteur.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous faire savoir quelles sont vos intentions quant à l'application de la TVA à taux réduit aux travaux sur les bâtiments, compte tenu des conclusions très négatives de ce rapport ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
    M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le député, il est exact que la Commission a rendu public hier un rapport négatif sur l'expérimentation menée depuis 1999 sur la baisse du taux de TVA dans un certain nombre de secteurs dits à haute intensité de main-d'oeuvre.
    Chacun ici mesure les conséquences dramatiques que pourrait avoir la remontée du taux de TVA dans le secteur du bâtiment le Premier ministre lui-même en a parlé au président de la Commission lorsqu'il l'a rencontré le 29 avril dernier.
    M. Jean-Marc Ayrault. Et la baisse du taux de TVA pour la restauration ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Dès hier soir, sitôt le rapport rendu public, j'ai rencontré M. Bolkestein à Bruxelles. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Renaud Donnedieu de Vabres. Oh, ça va !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Je lui ai fait valoir que la France avait démontré l'efficacité de la baisse de la TVA dans le secteur du bâtiment,...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Décidée par qui ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. ... qui a créé 40 000 emplois (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste), entraîné un surcroît d'activité représentant plus d'un milliard d'euros par an,...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Grâce à qui ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. ... permis de lutter contre le travail dissimulé et bénéficié aux consommateurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Chacun conviendra que revenir en arrière causerait à notre économie un très grave dommage. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
    Le commissaire Bolkestein, conscient de la totale détermination du gouvernement français sur ce dossier, m'a très clairement indiqué hier soir qu'il proposerait à la Commission d'inscrire le secteur du bâtiment dans l'annexe H, c'est-à-dire parmi les secteurs pouvant bénéficier de façon permanente d'un taux réduit de TVA. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française ainsi que sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    Il m'a également indiqué - et je sais l'attachement des députés de la majorité à ce dossier (« Et des autres ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste) - qu'il ferait la même proposition pour la restauration. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Cela dit, mesdames, messieurs les députés, il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Il nous reste deux étapes à franchir : la première, c'est que la Commission suive la proposition du commissaire ; la deuxième, vous le savez, c'est que la proposition de la Commission soit adoptée à l'unanimité des Etats membres.
    Plusieurs députés du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. Ah !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Vous semblez ignorer les procédures européennes, mesdames, messieurs de l'opposition. Un peu de pédagogie serait nécessaire de ce côté de l'hémicycle ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Monsieur le secrétaire d'Etat, pourriez-vous terminer votre réponse, s'il vous plaît ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Quoi qu'il en soit, monsieur le député, l'annonce de M. Solkestein est déjà une bonne nouvelle, car cette étape était un préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Christian Bataille. On est sauvés !
    M. le président. Monsieur Bataille, évitez de m'interrompre au moment où je veux donner la parole à M. Migaud.

SITUATION DES FINANCES PUBLIQUES

    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste.
    M. Didier Migaud. Monsieur le Premier ministre, le Conseil des ministres de l'Union européenne a adopté aujourd'hui des recommandations très exigeantes à l'égard de la France, compte tenu de la dégradation de nos finances publiques. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Georges Tron. La faute à qui ?
    M. Philippe Briand. Il faut vous en remercier, monsieur Migaud !
    M. Didier Migaud. Quoi qu'on pense du pacte de stabilité et de ses modalités d'application, la France est le seul pays de l'Union européenne à être si sévèrement mis en cause et à se trouver en situation d'être sanctionné financièrement.
    M. Guy Teissier. Cela a l'air de vous faire plaisir !
    M. Didier Migaud. Il apparaît de plus en plus clairement que ce sont vos propres décisions qui ont placé la France dans cette situation. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) La Commission de Bruxelles l'affirme explicitement en relevant que la très forte dégradation de nos finances publiques n'est pas, selon son expression, indépendante de la volonté des autorités françaises,...
    M. Hervé Novelli. C'est le pyromane qui crie au feu !
    M. Didier Migaud. ... ni liée au ralentissement conjoncturel, mais qu'elle est le résultat des décisions politiques prises par l'actuel gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. François d'Aubert. Non, par le précédent gouvernement !
    M. Didier Migaud. La Cour des comptes, dans son rapport préliminaire, ne dit pas autre chose. Elle établit que vous avez délibérément noirci l'héritage de vos prédécesseurs (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française) et dégradé les comptes publics depuis juin 2002. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
    Vos largesses fiscales ciblées, à travers l'impôt de solidarité sur la fortune ou l'impôt sur le revenu, sur un petit nombre de foyers aisés ont creusé le déficit budgétaire, sans effet sur la croissance, et cela alors même que vous avez augmenté les prélèvements indirects, qui pèsent sur le plus grand nombre sur leur pouvoir d'achat et donc sur la croissance. (Mêmes mouvements.)
    La conséquence, ce sont des destructions massives d'emplois, sans précédent depuis 1993,...
    M. Philippe Briand. Tout cela à cause de votre politique ! C'est une honte !
    M. Lucien Degauchy. Et les 35 heures !
    M. Georges Tron, M. Jean-Claude Abrioux et M. Jean Marsaudon. Vous avez ruiné la France !
    M. Didier Migaud. ... un chômage en augmentation, plusieurs plans de rigueur budgétaire qui ont abouti au gel et à l'annulation de plus de dix milliards d'euros de crédits en 2003.
    Et contrairement à vos affirmations, monsieur le Premier ministre, ce sont bien les Français qui subissent cette rigueur, puisqu'elle remet en cause des pans entiers des politiques publiques, au premier rang desquels figurent l'éducation, l'emploi, la recherche et le logement.
    M. Guy Teissier. C'est honteux !
    M. Philippe Briand. N'importe quoi !
    M. le président. Monsieur Briand, laissez M. Migaud terminer sa question.
    M. Didier Migaud. Merci, monsieur le président. Je vois que mes questions gênent.
    M. le président. N'en rajoutez pas, monsieur Migaud : posez votre question.
    M. Didier Migaud. Ce que je souhaiterais, c'est que le Premier ministre y réponde.
    Ma question est double, monsieur le Premier ministre : quand allez-vous enfin déposer devant le Parlement un projet de loi de finances rectificative pour tirer les conséquences de l'échec de votre politique économique ? Si vous vous y refusez, quand allez-vous au moins dire la vérité aux Français sur la réalité des efforts qui s'imposent ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Le commissaire européen Pedro Solbes a parlé des efforts titanesques que vous allez devoir leur imposer comme prix à payer pour l'injustice et l'inefficacité économique et sociale de vos décisions ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Philippe Briand. La vérité, c'est que vous avez ruiné la France !
    M. le président. Monsieur Briand, pourriez-vous au moins vous taire cinq minutes ?
    M. Jean-Christophe Cambadélis. Dix, ce serait mieux !
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
    M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur Migaud, que n'avez-vous laissé les comptes publics de la France en équilibre à la fin de vos fonctions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et groupe des député-e-s communistes et républicains.) Le présent gouvernement s'en serait réjoui ! (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Augustin Bonrepaux. Le Gouvernement, c'est vous !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Qu'a-t-il trouvé ? Un déficit en dérapage de 50 %. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Didier Migaud. Les comptes se sont dégradés depuis !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Comment pouvez-vous penser, vous qui êtes un bon spécialiste des finances publiques,...
    M. Hervé Novelli. Un spécialiste du déficit, oui !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... qu'il soit possible de réduire une telle dérive en quelques mois ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Le Gouvernement s'est appliqué au contraire à reprendre la maîtrise des finances publiques, que vous aviez perdue. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Augustin Bonrepaux. Répondez à la question !
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, je vous en prie !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je le fais autant que je peux, monsieur Bonrepaux. Laissez-moi finir !
    Le Gouvernement s'est attaché à contenir la dépense, ce que vous n'aviez pas fait. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) C'est d'ailleurs bien ce que rappelle la Commission européenne dans la recommandation dont M. Migaud a fait état.
    M. Guy Teissier. Les socialistes n'ont aucune mémoire !
    M. François Hollande. C'est vous qui êtes au Gouvernement !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. C'est précisément dans ce souci de maîtrise des dépenses que le Gouvernement a pris des mesures de précaution, décidé des mesures de gel, notamment sur les 12 milliards de reports que vous avez accumulés au fil de la législature précédente et qui menacent l'équilibre budgétaire aujourd'hui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Quant au collectif budgétaire que vous appelez de vos voeux, à quoi pourrait-il servir ? A relever les impôts ? Ce n'est pas la volonté du Gouvernement ! A augmenter les dépenses ? C'est précisément ce qu'il se refuse de faire, puisqu'il les contrôle !
    M. Augustin Bonrepaux. C'est pourtant bien ce que vous faites !
    M. François Hollande. Que faites-vous alors ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Vous aurez, monsieur Migaud, puisque vous nous ferez l'honneur de participer au débat d'orientation budgétaire, la possibilité de faire vos propositions. Nous les attendons depuis un an. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Et je vous rappelle que les Français n'ont pas retenu celles que vous avez faites l'année dernière ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

LUTTE CONTRE LE SIDA

    M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Briot, pour le groupe de l'UMP.
    Mme Maryvonne Briot. Nous continuons à vivre une épouvantable tragédie qui touche directement l'entourage de près de 42 millions de victimes du sida.
    En effet, malgré les efforts consentis, la pandémie continue d'évoluer de façon particulièrement inquiétante, notamment en Afrique, où près de 30 millions de personnes sont aujourd'hui touchées. Si la communauté internationale ne réagit pas très rapidement, nous allons au-devant d'une catastrophe sans précédent.
    Conscient de cette situation, le Président de la République a annoncé dimanche, lors du sommet du G 8 à Evian, que la France avait triplé sa contribution au fonds mondial de lutte contre le sida, la portant de 50 à 150 millions d'euros par an. Dans le même sens, il a encouragé l'Europe à relever le défi. Il est en effet essentiel, aujourd'hui, de déclarer une véritable guerre contre le sida.
    Comment la France prendra-t-elle ses responsabilités dans la lutte contre ce fléau ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.
    M. Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Madame la députée, vous avez raison d'appeler l'attention de tous sur ce défi colossal qu'il convient de relever de toute urgence : la lutte contre le sida, notamment en Afrique. La situation y est d'ailleurs malheureusement aggravée par d'autres pandémies comme la tuberculose et le paludisme. C'est pourquoi la France souhaite être en première ligne dans cette bataille.
    Ainsi que vous le savez, le principal instrument international pour la lutte contre le sida est le fonds mondial créé en janvier 2002. La France a très activement participé à la création de ce fonds, et elle a déjà versé, en deux fois, 100 millions d'euros. De son côté, le fonds a été en mesure d'approuver - ce qui témoigne de son bon fonctionnement - l'ensemble des projets qui lui ont été présentés par son comité scientifique, soit plus de 160 projets dans quatre-vingt pays, dont 60 % ont concerné l'Afrique et 65 % la lutte contre le sida.
    Cependant, pour que le fonds soit en mesure de répondre aux urgences, il faut consentir un nouvel accroissement de ses ressources. C'est pourquoi le Président de la République, M. Jacques Chirac, à l'occasion du G 8, a appelé les autres pays, notamment ceux appartenant à l'Union européenne, à apporter une contribution financière égale à celle des Etats-Unis, c'est-à-dire un milliard de dollars par an pendant cinq ans.
    Il s'agit d'un tournant majeur, sur lequel j'appelle votre attention, dans la mobilisation des pays développés en faveur de la lutte contre le sida et les grandes pandémies.
    D'ores et déjà, pour anticiper sur cette proposition qu'a lancée le Président de la République, la France a décidé de tripler sa contribution financière en la portant à 450 millions d'euros sur trois ans, ce qui la placera en deuxième position parmi les donateurs. Nous avons bon espoir que l'Union européenne arrive à mobiliser le milliard nécessaire.
    C'est pour atteindre cet objectif de renforcement des moyens du fonds que la France organisera, le 16 juillet prochain à Paris, une conférence internationale des donateurs pour vaincre la maladie dans les pays pauvres, et en particulier le sida. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

CONVENTION SUR L'AVENIR DE L'EUROPE

    M. le président. La parole est à Mme Arlette Franco, pour le groupe de l'UMP.
    Mme Arlette Franco. Madame la ministre déléguée aux affaires européennes, depuis plusieurs mois, la Convention sur l'avenir de l'Europe travaille activement à la rédaction d'un projet de traité constitutionnel. Cet ambitieux travail a donné lieu à de très nombreux échanges, débats et consultations entre la Convention et l'ensemble des Etats de l'Union, afin d'avancer dans la construction européenne. Le chantier est immense : il porte tant sur la définition des principes que sur l'amélioration des institutions de l'Europe.
    Un texte complet du projet de Constitution a été présenté la semaine dernière à Bruxelles. Cette semaine et la semaine prochaine, la Convention va recueillir l'analyse des différents pays de l'Union afin de rédiger un projet définitif. Nous sommes en effet dans la phase finale, puisque la Convention devra présenter ce texte au Conseil européen de Thessalonique, les 20 et 21 juin prochains.
    Madame la ministre, pouvez-vous nous y dresser un bilan des travaux de la Convention et, surtout, nous indiquer ce que la France attend d'elle lors du prochain Conseil européen ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.
    Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Madame la députée, vous avez eu raison de souligner que l'Europe vivait un tournant historique, au moment où la Convention, présidée par le président Giscard d'Estaing, va achever ses travaux, le 20 juin prochain. C'est en effet à cette date que M. Giscard d'Estaing présentera devant le Conseil européen, à Thessalonique, son projet final de Constitution.
    A propos de ces travaux, il faut d'abord souligner que la procédure d'élaboration d'un projet de Constitution européenne a été totalement démocratique et transparente. Il s'agit d'une expérience unique en Europe et dans le monde.
    M. René André. C'est vrai !
    Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. Il est vrai que les débats auront été âpres et, aujourd'hui encore, certaines positions nationales s'expriment fortement sur des points essentiels.
    Il convient néanmoins de souligner que la Convention a accompli un travail considérable. Elle a notamment résolu certaines difficultés, ce qui a permis d'obtenir un consensus sur de nombreux sujets, comme l'intégration à cette Constitution de la charte des droits fondamentaux, qui traite des droits économiques et sociaux, des droits civils et politiques. Un consensus très fort a également été réalisé autour de l'idée d'une gouvernance économique et sociale renforcée pour assurer davantage de justice sociale et organiser une économie de marché plus efficace.
    Il est vrai que certaines questions demeurent en discussion, notamment celle de la présidence du Conseil européen et celle de la politique étrangère et de défense. Pourtant, chacun reconnaît que cette dernière doit être renforcée si nous voulons que l'Europe joue un rôle déterminant dans le monde.
    A ce stade, je puis vous indiquer que nous souhaitons que ce travail de qualité aboutisse, si possible, à un texte unique. En tout état de cause, nous faisons confiance au président Giscard d'Estaing, au presidium de la Convention et à tous les Etats parties. Le travail accompli est majeur et nous estimons qu'il aura permis de dégager, pour la future conférence intergouvernementale, ce qui doit être le cadre de vie de tous les Européens, y compris donc des Français, pour les années à venir. Il s'agit d'un excellent travail dont nous aurons suivi l'évolution avec beaucoup d'attention. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Marc-Philippe Daubresse.)

PRÉSIDENCE
DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE,
vice-président

    M. le président. La séance est reprise.

2

SIMPLICATION DU DROIT

Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit (n°s 831, 871).
    La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat.
    M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, j'ai le plaisir et l'honneur de soumettre à votre examen en deuxième lecture le texte du projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, dans la rédaction issue des travaux du Sénat.
    Que ce soit dans votre assemblée ou au Sénat, le débat en première lecture a été aussi passionné que passionnant. De très nombreux amendements - et je m'en réjouis - sont venus enrichir le texte et clarifier la portée de la loi d'habilitation en précisant ses termes. Je mentionnerai quatre chiffres qui témoignent de l'apport considérable des deux assemblées à la définition des termes de l'habilitation : sur 136 amendements déposés à l'Assemblée, 55 ont été adoptés, et sur 156 amendements déposés au Sénat, 79 ont été adoptés. C'est la meilleure des réponses à ceux qui s'inquiétaient, sur les bancs de l'opposition notamment, d'un risque de dessaisissement du Parlement. La très large ouverture faite aux amendements des députés et des sénateurs atteste, s'il en était besoin, de la vitalité et de la nécessité de la procédure parlementaire.
    Je salue au passage la présence de M. le président de la commission des lois ainsi que le travail du rapporteur et de la commission des lois, dont l'exceptionnel qualité a permis d'enrichir et de clarifier le texte.
    Je rappellerai les principales modifications adoptées au Sénat.
    D'abord en ce qui concerne le Conseil d'orientation de la simplification administrative, dont la création est une initiative de votre assemblée. Pour la première fois, une instance à majorité parlementaire aura un rôle permanent de propositions pour simplifier la loi et le règlement. Le Sénat a légèrement modifié sa composition tout en veillant à ce que la majorité des sièges revienne toujours aux élus, puisque y siègeront six parlementaires et trois élus locaux.
    A l'article 1er, le Sénat a souhaité limiter la portée de la disposition prévoyant une réduction des commissions. Tout en estimant l'objectif louable, le Sénat a tenu à ce qu'il soit précisé que les commissions qui jouent un rôle consultatif essentiel, notamment en matière sociale, ne soient pas concernées. Cette précision me semble utile.
    Sur la proposition d'un élu socialiste, M. Jean-Pierre Sueur, le droit de timbre exigé pour tout recours devant une juridiction administrative a été supprimé. C'est l'objet de l'article 1er bis. Le Gouvernement adhère pleinement à cette heureuse initiative, qui permet d'envoyer un signal clair à tous ceux d'entre vous qui souhaitent que soient aussi allégées les procédures fiscales.
    L'article 3 permet de compléter par ordonnance les mesures de simplification du code des marchés publics. Le Sénat a souhaité préciser que ces simplifications porteraient aussi sur le code général des collectivités relatives à la passation des marchés publics. Ce complément est en effet très opportun.
    L'article 4 permet, en s'inspirant du dispositif voté lors de l'examen des lois d'orientation sur la police et sur la justice, de modifier les règles relatives à la maîtrise d'ouvrage public et à la commande publique tout en veillant à la transparence et à la mise en place des garde-fous indispensables. Le Sénat a ajouté un principe d'équité, pour veiller notamment à l'égalité d'accès des petites et moyennes entreprises et des professions libérales à ce nouveau dispositif.
    A l'article 5 sont détaillées les dispositions techniques pour simplifier le code général des impôts et le livre des procédures fiscales. Le Gouvernement n'a pas souhaité qu'y figurent des dispositions qui pourraient modifier l'équilibre général des finances publiques. Toutefois, des signaux clairs sont adressés à ceux des parlementaires, nombreux sur les rangs de la majorité, qui souhaitent aller plus loin dans la simplification de notre système fiscal.
    Concernant les simplifications du code électoral, dont je rappelle qu'elles ont une portée essentielle pour le vote par procuration, le ministère de l'intérieur et le ministère délégué aux libertés locales ont confirmé aux parlementaires qu'elles s'appliqueraient dès les prochaines élections.
    Le Sénat a assoupli les critères d'inscription des Français résidant à l'étranger sur les listes électorales et a opportunément pris acte de l'élargissement de l'Union européenne dans la perspective des prochaines élections de juin 2004.
    L'article 16, qui a, vous le savez, une portée considérable pour permettre la mise en oeuvre du plan Hôpital 2007, a fait l'objet au Sénat de quelques ajustements techniques. Les gestionnaires des HLM sont autorisés à porter des projets immobiliers sanitaires tandis que la participation des établissements publics de santé au capital des sociétés d'économie mixte a été rejetée. Ce sujet doit en effet faire l'objet d'une expertise approfondie conjointe des ministres de la santé et de l'intérieur. De même, les dispositions relatives à Mayotte ont été disjointes et renvoyées à un texte propre à l'outre-mer.
    L'article 19 simplifie dans des domaines très importants le droit du travail. Il ne s'agit en aucun cas, et je réponds ainsi aux inquiétudes exposées durant le débat par les parlementaires de l'opposition, de diminuer les garanties offertes aux salariés par le code du travail. L'objectif est de clarifier un système juridique dont la complexité et l'opacité, que chacun reconnaît, fragilisent d'abord les salariés les plus modestes, sans parler des exclus.
    La mise en oeuvre du guichet unique a donné lieu à des débats très nourris. Le Sénat a maintenu la rédaction adoptée par votre assemblée, qui prévoit, à l'initiative de François Sauvadet, de laisser le libre choix aux artisans et aux commerçants. L'équilibre trouvé permettra à l'ensemble des personnels des caisses d'adhérer à la réforme et d'aller progressivement vers un rapprochement structurel entre les caisses des salariés non agricoles auquel travaillent François Fillon et Renaud Dutreil.
    De même, les mesures de simplification de la fiche de paie vivement, attendues par des parlementaires de tous les groupes, pourront être décidées par ordonnances. Il s'agit d'épargner aux employeurs les formalités les plus fastidieuses et les plus inutiles.
    Enfin, je me réjouis, au nom du Gouvernement, que le vaste programme de codification à droit constant et à droit non constant ait été très favorablement accueilli par les deux assemblées.
    En conclusion, je soulignerai trois points.
    D'abord, la qualité du débat prouve que le recours aux ordonnances, en vertu de l'article 38 de la Constitution, n'affaiblit en rien les droits du Parlement. D'ailleurs le concours du Parlement, indispensable pour simplifier les textes et les lois, a permis d'enrichir notablement le texte.
    Ensuite, le débat a montré que ce texte répondait aux attentes des Français qui veulent une administration de services plus accessible et plus proche, appliquant des règles simples, et une administration de terrain. Tous les amendements que j'ai évoqués, loin de réduire la portée de la loi d'habilitation, ont au contraire pour effet de l'élargir. Les parlementaires ont très largement manifesté leur souci que ce projet de loi ne soit qu'une première étape. A ce sujet, je puis vous confirmer que, dès la prochaine session parlementaire, le Gouvernement vous présentera une deuxième loi pour simplifier le droit par ordonnances notamment dans les domaines de l'urbanisme, de l'agriculture et de la vie des familles. Nous savons que nous pourrons compter sur l'appui et la dynamique du Conseil d'orientation de la simplification administrative, dont le Gouvernement attend beaucoup.
    Enfin, pour répondre aux préoccupations évoquées notamment par votre commission des lois, nous travaillons en relation avec le cabinet du Premier ministre et le secrétariat général du Gouvernement, à finaliser une circulaire destinée à améliorer, en amont, la rédaction des projets de loi qui vous sont soumis, afin d'attaquer à la racine ce mal français qu'est devenue la prolifération réglementaire et législative.
    Au cours des débats, vous avez souvent exprimé votre souci de simplifier le droit communautaire. J'aurai prochainement l'occasion d'agir en ce sens et de réaffirmer - car c'est l'un des enjeux des travaux de la Convention présidée par Valéry Giscard d'Estaing - la nécessité de revenir à l'esprit originel des directives, conçues initialement comme des lois-cadres qui devaient laisser aux Etats-nations une très grande latitude dans le choix des modalités de leur mise en oeuvre.
    Je suis donc convaincu - et je remercie encore la majorité de son adhésion à ce projet - que nous allons franchir, avec cette rédaction équilibrée, un pas important dans le sens de la simplification de la vie de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
    M. Etienne Blanc, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, le Sénat a enrichi le texte voté par notre assemblée sur un certain nombre de points dont je soulignerai quelques-uns.
    Tout d'abord, le Sénat a voulu modifier la composition du Conseil d'orientation de la simplification administrative. L'esprit de cette structure, dont nous devons la création à l'adoption d'un amendement déposé par notre collègue Alain Madelin avant l'article 1er, était d'instaurer en France, à l'instar de ce qui se passe en Italie et dans d'autres pays d'Europe qui ont simplifié leur système juridique, une commission composée exclusivement d'élus.
    Le Sénat a modifié en ce sens la composition de cette commission, en prévoyant que soient désignées six personnalités qualifiées, et en supprimant la représentation du Conseil économique et social, tous les autres représentants étant des élus.
    Ensuite, le Sénat a créé un article 1er bis qui instaure la gratuité de la justice administrative. Ce point mérite d'être souligné car il répond à une demande très forte exprimée tant par les magistrats que par les justiciables. La justice administrative est une des dernières justices soumises au droit de timbre : cette anomalie va prendre fin.
    La troisième modification est un rappel : les simplifications que nous apportons au code des marchés publics et à la procédure de la commande publique ayant suscité une certaine émotion dans l'opinion publique, le Sénat a souhaité rappeler que nous n'avons pas touché au système juridique qui assure la transparence des marchés publics et la libre concurrence en réponse à la commande publique. Nous avons certes modifié la loi sur la maîtrise d'ouvrage public mais nous n'avons pas touché à la loi Sapin.
    Sur un deuxième point, lui aussi très significatif, le Sénat a rappelé que les ordonnances devaient prévoir des conditions d'accès équitables pour les PME et les artisans au partenariat public-privé. Nous savons tous que le monde de l'entreprise, et notamment les PME, redoutait que partenariat public-privé ne soit monopolisé par les grands groupes. Le Sénat a manifesté une certaine réserve.
    M. Jérôme Lambert. Justifiée !
    M. Etienne Blanc, rapporteur. C'est ainsi que les ordonnances devront garantir le libre accès à la commande publique pour les petites et les moyennes entreprises.
    Le Sénat a en outre supprimé le sixième alinéa de l'article 5 qui instaurait le principe de la présomption d'innocence en matière fiscale. Un amendement a été déposé et nous en débattrons tout à l'heure. Le Sénat n'a fait que reprendre de manière explicite un principe qui figure actuellement dans le droit fiscal. La « présomption d'innocence », expression plus adaptée au droit pénal, existe déjà, elle figure en toutes lettres dans le code de procédure fiscale. En effet, c'est bien à l'administration fiscale de rapporter la preuve de sa créance et non pas au contribuable de rapporter la preuve de sa bonne foi. Nous en reparlerons, je le répète, puisqu'un amendement a été déposé à ce sujet.
    L'article 12 bis nouveau propose de favoriser le vote des ressortissants des pays adhérant à l'Union européenne, surtout pour les élections européennes de l'année prochaine. Sans cette adjonction, les ressortissants des pays qui adhéreront à l'Union européenne à partir de 2004 n'auraient pas pu participer aux élections européennes, ce qui constituait une incongruité.
    Enfin, le Sénat a supprimé le 7° de l'article 16, qui permettait la participation des établissements publics de santé au capital des sociétés d'économie mixte. Les sociétés d'économie mixte ont parfois plusieurs activités. Le Sénat a estimé, après discussion, qu'en permettant à un établissement public hospitalier de participer au capital d'une société d'économie mixte, on risquait de fragiliser l'hôpital si certaines branches de l'activité de cette société d'économie mixte étaient en difficulté. On pourrait rétorquer que ces sociétés d'économie mixte s'apparentent à des sociétés anonymes et que le risque est limité. Le Sénat a persisté dans sa crainte et nous nous sommes rangés à son avis.
    Restent deux questions de forme.
    La première porte sur l'article 28.
    Deux amendements, l'un de l'Assemblée et l'autre du Sénat, ont ajouté respectivement un article 22 bis et un article 22 ter, élargissant le champ de l'habilitation. Mais le 2° de l'article 28 fixant le délai d'habilitation à douze mois pour les dispositions des articles 1er à 22, la commission a déposé un amendement de coordination à l'article 28.
    La seconde question concerne une difficulté de codification. Le Sénat a souhaité étendre le champ de l'habilitation à la législation relative aux éoliennes. Mais quelques heures après avoir adopté ce texte, le Sénat a modifié cette législation. Il faut donc clarifier les choses. C'est la raison pour laquelle sera proposé à l'Assemblée un amendement qui tend à supprimer purement et simplement le paragraphe 13 bis du III de l'article 24.
    Telles sont, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les quelques observations que je voulais présenter sur ce texte qui me semble aujourd'hui bien cadré et qui permettra au Gouvernement de prendre des ordonnances efficaces pour simplifier la vie quotidienne des Françaises et des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Exception d'irrecevabilité

    M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une exception d'irrecevabilité, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.
    La parole est à M. Jérôme Lambert.
    M. Jérôme Lambert. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le texte qui nous revient du Sénat et que nous avons examiné en commission des lois suscite de ma part peu de commentaires supplémentaires par rapport à ce que j'ai pu en dire lors de l'examen en première lecture, notamment en défendant une première exception d'irrecevabilité.
    Le Sénat n'a rien bouleversé de l'économie générale du projet et nos critiques, aussi bien sur le fond que sur la forme, demeurent pour l'essentiel valables quand elles ne se trouvent pas renforcées par le développement du débat.
    Je tiens à redire, en premier lieu, combien je trouve navrant que dans les interventions du Gouvernement et des parlementaires de droite, la « Loi », avec un grand L, n'ait pratiquement jamais été évoquée comme un facteur de protection des citoyens. Toujours, ou presque, elle a été évoquée comme une contrainte, parfois inutile, n'est-ce pas, monsieur le rapporteur ? -, ou comme un carcan.
    Je ne partage pas cette critique idéologique que les libéraux font généralement de la loi et qui est ici largement exprimée ici.
    « Trop de lois ! », « Trop de règlements ! », « Faisons confiance à nos concitoyens ! » : jamais, dans ce débat, on n'a exprimé la préoccupation de protéger le faible du puissant, le petit du grand.
    Le projet de loi s'inscrit au contraire dans la volonté d'organiser la vie économique et sociale selon une conception très libérale qui est pourtant de plus en plus préoccupante pour les hommes et les femmes qui en subissent les conséquences humaines et économiques. Car ne nous y trompons pas : sous couvert de simplifier le droit, le Gouvernement entend faire passer certaines réformes importantes à la sauvette, par le biais d'une procédure d'habilitation à légiférer par ordonnances qui spolie les droits du Parlement dans des matières où ni l'urgence ni les circonstances ne justifient politiquement cette méthode particulière.
    Mais ce qui demeure anticonstitutionnel, ce n'est pas l'usage des ordonnances dans l'urgence, ni la spoliation des droits du Parlement, largement prévue, malheureusement, dans la Constitution de la Ve République. Non, ce qui est une violation de la Constitution, c'est l'usage abusif que fait le Gouvernement de l'article 38 de la Constitution. Le Conseil constitutionnel indique pourtant à propos de cette article : « Ce texte doit être entendu comme faisant obligation au Gouvernement d'indiquer avec précision au Parlement quelle est la finalité des mesures qu'il se propose de prendre et leurs domaines d'interventions. »
    Doit-on considérer que le simple fait de « simplifier le droit » est en soi la finalité des mesures que le Gouvernement entend prendre ?
    Dans bien des domaines, les intentions du Gouvernement sont imprécises, voire inexprimées. Le simple fait de simplifier ne permet pas de savoir quelle sera en définitive la voie qu'il choisira. S'agit-il de faire du progrès social dans le domaine du droit du travail, par exemple ? Ou s'agit-il de « simplifier à reculons » ? Ce sont là des questions fondamentales sur lesquelles le Parlement devrait indiquer précisément au Gouvernement la finalité de l'habilitation qu'il lui donne.
    Le projet de loi tel que nous l'avons voté à l'issue de la première lecture, ou tel qu'il nous revient du Sénat, ne précise rien. La simple simplification, si je puis dire, n'est pas une indication précise de ce que le Gouvernement entend faire de l'habilitation qu'il nous demande de lui donner pour légiférer en lieu et place du Parlement.
    Je veux aussi réfuter un argument largement invoqué au cours des précédents débats, lequel consiste, pour le Gouvernement, à dire que le Parlement sera associé à la réflexion et à la rédaction des ordonnances, comme si cela suffisait à corriger la faute originelle d'un texte qui ne précise pas, dans de nombreux domaines, quelles sont ses réelles intentions. Cela revient à dire : « Donnez-nous l'habilitation et, ensuite, vous serez associés à la réflexion sur nos intentions ! » Mais ce n'est pas ainsi que l'usage de l'article 38 doit s'entendre.
    Tout le projet de loi est donc, par sa nature même, explicitée par le flou de son titre - « simplifier le droit » -, en dehors du champ constitutionnel de l'application de l'article 38.
    J'ajoute que l'annonce de l'examen a posteriori d'une loi de ratification des ordonnances n'est pas véritablement de nature à nous rassurer. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez une certaine expérience et vous devez donc savoir que, ainsi que M. Clément nous l'a rappelé en commission des lois il y a quelques semaines, très peu de ministres ont présenté de projets de loi de ratification et que, lorsqu'ils l'ont fait, c'était pour des questions très précises qui imposaient un examen législatif.
    M. Jean Leonetti. Justement : les choses changent !
    M. Jérôme Lambert. Dans ces conditions, comment vous faire confiance puisque, vous nous promettez les mêmes choses que d'autres avant vous ?
    Nous avons au Parlement une certaine expérience de lois de ratification qui sont déposées...
    M. Jean Leonetti. Surtout le groupe socialiste !
    M. Jérôme Lambert ... parce que la loi y contraint le Gouvernement, et cela dans un certain délai. Mais rien ne nous contraint à les voter !
    En prime à cette critique générale et justifiée sur le fond même de l'usage de l'article 38 de la Constitution, je rappelle qu'il existe dans ce projet de loi des articles qui peuvent être un peu plus précis dans leur rédaction mais qui poent de vraies questions quant à leur constitutionnalité.
    Il en est ainsi de la réforme des marchés publics autorisé par les articles 3 et 4 du projet de loi.
    Sous couvert de simplification du droit, le Gouvernement propose tout simplement d'abroger les lois qui ont permis, ces dernières annés, de donner un caractère transparent à toute opération de financement des marchés publics. Ce dessaisissement du Parlement permettra au Gouvernement, dans la tranquillité des discussions des cabinets ministériels, d'organiser le retour à des pratiques antérieures, douteuses en matière de passation des marché publics.
    C'est le retour annoncé à de nombreux risques, de la conception à la réalisation des marchés publics, qui fait déjà s'élever de nombreuses voix hors de cet hémicycle, celles en particulier des professionnels. Mais il s'agit aussi de l'exclusion de ces marchés des petites et moyennes entreprises de nos régions et de l'occasion ainsi offert à quelques grands groupes financiers aux intérêts croisés de faire main basse sur ces marchés et de dicter la loi de la concurrence à tous les sous-traitants que deviendront, par la force de la logique libérale, les architectes et les PME-PMI du secteur du bâtiment et des travaux publics, car ils seront sous la coupe de ces grands groupes.
    Ce ne sont pas les quelques amendements adoptés par le Sénat, pavés de bonnes intentions, qui permettront de contrecarrer la philosophie générale de ces articles car ils trouveront aucun usage pratique et ne supprimeront ni les excès ni les dangers de ce texte.
    Ces dispositions bafouent les règles de la transparence et de la concurrence des marchés publics. Elles sont de ce fait anticonstitutionnelles car nous devons répondre dans nos lois des engagements de la France vis-à-vis des règles européennes qui instituent des principes clairs en ces domaines.
    Dans ce projet de loi fourre-tout qui spolie les droits du Parlement, c'est une vision libérale, avec tous ses excès, qui veut faire son chemin.
    Concernant de nombreux sujets comme le droit social, le droit du travail, la fiscalité, le droit électoral, qui sont traités par le projet de loi, le Parlement va se dessaisir, alors même que le Gouvernement nous avait, dans certains discours, assurés qu'il tenait le Parlement en haute estime. Réhabiliter le travail du Parlement faisait même partie de ses promesses. Or le texte de loi que nous examinons fait tout le contraire : loin de répondre à un engagement politique, l'un des arguments que vous avez mis en avant pour justifier l'usage de l'article 38, il en bafoue un autre de taille.
    Même si certains sujets abordés dans le projet auraient pu être entre nous l'objet de points de consensus, votre projet de loi, les arbres masquent la forêt, est dangereux pour l'équilibre de certaines règles et pratiques en cours dans notre société.
    Dans certains domaines, que j'ai évoqués brièvement, la simplification du droit annoncée ne vise qu'à revenir en arrière, qu'à simplifier le droit pour que celui-ci, dans sa fonction protectrice du faible contre le fort, ne soit plus un frein dans l'avancée à grandes foulées vers la refonte libérale de notre société. Le groupe socialiste ne s'y est pas trompé et il ne peut bien entendu partager cette volonté politique qui remplace toujours le droit protecteur pour imposer plutôt la force des règles du marché.
    Vous ne pourrez nous convaincre de vos bonnes intentions en mettant simplement en avant quelques réformes traitant de paperasserie alors que, dans le même temps, vous démolissez le droit des travailleurs, le droit à la protection, que vous revenez sur les acquis sociaux et que votre projet de loi, dans certains domaines, vous permettra lui aussi de faire reculer la protection dont nos citoyens ont besoin.
    Dessaisir le Parlement par le recours à l'article 49-3 de la Constitution, comme vous l'avez déjà fait, ne vous avait pas porté chance. Vouloir aujourd'hui que nous acceptions de nous dessaisir en usant de l'article 38 de la Constitution fait courir un risque supplémentaire à votre majorité, celui de creuser le fossé qui commence déjà d'exister entre vous et les Français, au fil des décisions que vous voulez leur imposer et qu'ils ne partagent pas.
    M. Jean Leonetti. Commencez par combler celui qui les sépare de vous !
    M. Jérôme Lambert. Nous préférons donner du temps à la réflexion et à la discussion afin d'essayer d'aboutir à des réformes consensuelles. Mais, en l'occurrence comme en général, ce n'est pas votre façon d'agir, même si les événements vous obligent parfois à reculer.
    Ces nombreuses raisons, de fond et de forme, ont donc convaincu le groupe socialiste de s'opposer à la vision libérale de l'organisation de notre société qui apparaît dans le projet de loi. Et ce texte, nous le rejetons aussi parce que vous usez d'un procédé contraire à l'usage constitutionnel, qui garantit le droit du Parlement à contrôler effectivement le sens des habilitations qu'il vous donne.
    Le groupe socialiste vous propose donc, mes chers collègues, d'adopter notre exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Etienne Blanc, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'exception d'irrecevabilité défendue par M. Lambert s'appuie en fait sur l'idée suivante : le texte qui est aujourd'hui soumis en deuxième lecture à l'Assemblée serait inconstitutionnel car ses finalités ne seraient pas avouées. Pour illustrer cette argumentation, il a choisi deux thèmes : le social et les marchés publics.
    Je crois utile de rappeler que la partie du projet qui concerne le domaine social prévoit des simplifications de cohérence. A cet égard, je citerai l'exemple déjà invoqué à de multiples reprises : les seuils dans les entreprises.
    M. Jérôme Lambert. Lesquels, justement ?
    M. Etienne Blanc, rapporteur. Les textes sont extrêmement imprécis sur ce sujet. Alors que de ces seuils dépendent les procédures de licenciement et le montant des indemnités allouées aux salariés lorsque les procédures n'ont pas été respectées, ils entretiennent une véritable confusion.
    En ce domaine, la clarté sera beaucoup plus protectrice pour les salariés que pour l'employeur, tel est l'esprit du texte.
    Lorsque, par une législation confuse, on régit le droit du licenciement selon que les entreprises comptent dix salariés, moins de dix salariés ou neuf salariés, on suscite confusion et incertitude. Dans son esprit, la future loi d'habilitation veut apporter une clarté protectrice au salarié, lequel connaîtra alors ses droits avec précision.
    J'en viens aux marchés publics. On pratique là la vieille technique de l'épouvantail. Que nous dit-on ? Que nous allons réserver un certain nombre de marchés publics aux grands groupes, que nous chasserons les petites et moyennes entreprises ainsi que les artisans, qui n'y auront pas accès, que nous provoquons des peurs chez les architectes, les artisans et au sein des PME, que nos intentions sont inavouables et que l'on verra resurgir ce que l'on a connu avec les METP, ces grandes affaires de corruption dont on a si souvent parlé dans la presse.
    Revenons-en au projet de loi d'habilitation lui-même.
    Ce texte permettra une simplification des règles des marchés publics. Je ne connais pas une seule assemblée générale de maires d'un département qui n'ait pas voté un voeu en faveur de la simplification du code des marchés publics, lequel est d'une complexité inouïe et, surtout, donne lieu à un contentieux administratif exorbitant dans tous les tribunaux de France ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Il faut donc simplifier le système et le rationaliser.
    Affirmer que les partenariats public-privé ne seront pas ouverts aux PME et aux artisans, c'est proférer une contrevérité. En effet, qui est en ma matière le maître d'ouvrage ? Qui décide ? La collectivité, la puissance publique. Si, le moment venu, la puissance publique décide de réserver dans les partenariats public-privé une place prépondérante aux PME et aux artisans, ou même aux cabinets d'architecture locaux pour qu'ils continuent de travailler dans de bonnes conditions, ce sera possible, le dernier mot revenant au maître d'ouvrage, c'est-à-dire aux élus locaux.
    On voit donc que les arguments qui fondent l'exception d'irrecevabilité et qui tentent à prouver que le texte serait inconstitutionnel ne tiennent pas. C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas cette notion de procédure.
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, nous avons déjà eu ce débat en première lecture. D'ailleurs, M. Lambert, dont j'apprécie beaucoup la passion parlementaire, a reconnu lui-même qu'il avait alors développé à peu près les mêmes arguments.
    Je voudrais simplement réaffirmer que le texte qui vous est soumis est parfaitement conforme à la lettre et à l'esprit de la Constitution, qui prévoit que le Parlement, et donc votre assemblée, peut habiliter le Gouvernement, pour l'exécution de son programme, à légiférer par ordonnances, tout en précisant la nature de l'habilitation.
    La richesse et l'abondance du débat en première lecture ont témoigné, s'il en était besoin, du fait que le Parlement a pu pleinement faire valoir ses droits.
    Vous prétendez, monsieur Lambert, que le projet du Gouvernement témoigne du mépris qu'il aurait pour la loi. C'est exactement l'inverse. Il s'agit à mes yeux, et aux yeux du Premier ministre, de restaurer l'autorité de la loi et de la règle de droit, car la prolifération des règles normatives affaiblit considérablement le respect de nos concitoyens pour une loi qu'ils ne connaissent plus et ne comprennent plus. A commencer par les plus faibles d'entre eux, en matière de droit social : plus la loi est complexe, plus elle se retourne contre ceux qu'elle prétend protéger. C'est donc au nom de l'égalité d'accès au droit et au nom de l'intelligibilité de la règle de droit, qui fait pleinement partie des fondements de la République, que nous entreprenons cette oeuvre ambitieuse de simplification.
    Enfin, vous permettrez au secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat de dire que cette loi non seulement ne se veut pas un démantèlement du service public - c'est évident - mais qu'elle vise au contraire à en améliorer le fonctionnement. Si vous rencontriez comme moi - je l'ai fait hier encore dans les Deux-Sèvres - les fonctionnaires de terrain, vous mesureriez la force de l'aspiration qui est la leur et à laquelle ces mesures répondent, car ils sont les premiers otages de la complexité des textes qu'ils se doivent d'appliquer. Cette loi est une loi de libération des énergies pour nos concitoyens, mais aussi et peut-être d'abord pour les fonctionnaires, qui souhaitent qu'on leur permette de respirer en étant moins nourris de circulaires - plusieurs milliers par an - et de faire preuve d'initiative, ce qui est la vocation même du service public.
    Pour toutes ces raisons, le Gouvernement invite l'Assemblée à rejeter l'exception d'irrecevabilité. (Applaudissement sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Jérôme Lambert, pour le groupe socialiste.
    M. Jérôme Lambert. M. le rapporteur, dans la réponse qu'il m'a faite, a indiqué qu'en matière de droit social, les ordonnances permettraient de fixer clairement les seuils d'effectifs applicables dans des domaines ultra-sensibles, chacun peut en convenir, qu'il s'agisse des licenciements ou de l'ouverture de certains droits sociaux. C'est essentiel, on le sait bien. A un salarié près, la modification du seuil peut changer des tas de choses dans des milliers d'entreprises.
    Qu'il y ait des ambiguïtés, même limitées, à ce sujet, et qu'il faille les corriger, je vous l'accorde bien volontiers, monsieur le secrétaire d'Etat. Mais pourquoi, dans la loi que vous nous présentez, ne nous dites-vous pas clairement ce que vous voulez faire ? Nous vous habiliterions volontiers à faire progresser le droit social en précisant, par exemple, que là où c'est plus de dix, ce n'est pas moins de onze ! Mais il se peut aussi que l'ambiguïté soit corrigée au détriment des travailleurs. C'est une crainte que nous pouvons éprouver puisque nous ne connaissons pas vos intentions. Il y a là une imprécision grave, au sens où l'entend le Conseil constitutionnel. Il faut que le Gouvernement dise au Parlement dans quel sens il entend légiférer : pour le progrès ou pour la régression ?
    Quant aux maires, il est vrai qu'ils ont parfois des difficultés. Mais ce que j'entends souvent aussi, quand je discute avec les élus locaux, c'est qu'ils attendent de la loi, notamment pour les marchés publics, une certaine protection. Les règles qui leur sont imposées sont certes contraignantes, mais elles leur permettent d'éviter de commettre des erreurs ou des fautes qui pourraient leur être reprochées. Plus la latitude est grande, plus sévère peut être ensuite la contestation. C'est en ce sens que je dis : « Oui, la loi est parfois protectrice. »
    Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, je n'ai pas parlé, ni en ce qui vous concerne ni à propos de la majorité, d'un mépris de la loi. J'ai simplement dit que, parfois, vous voulez faire en sorte que les mécanismes économiques et sociaux s'embarrassent moins de contraintes. Nous pensons que la loi doit être protectrice. Je ne crois pas dénaturer votre pensée en disant que votre volonté politique libérale vous conduit, sans mépriser la loi, à opposer moins de contraintes au jeu des mécanismes du marché. C'est une vision qui nous oppose. Nous avons, nous, une autre idée de l'économie et de son fonctionnement.
    Voilà pourquoi je confirme que le groupe socialiste votera l'exception d'irrecevabilité.
    M. le président. La parole est à M. Xavier de Roux, pour le groupe UMP.
    M. Xavier de Roux. Le groupe UMP votera ce projet sans réserves. Je vous répondrai simplement, monsieur Lambert, que nous ne faisons pas du tout une critique idéologique de la loi et que le dogmatisme est plutôt de votre côté. Nous souhaitons simplement une République où personne ne puisse ignorer la loi. Or il existe aujourd'hui une telle accumulation de textes que les meilleurs juristes, et même les meilleurs magistrats, sont bien incapables, non seulement d'interpréter, mais tout simplement de connaître cette loi que vous voulez protectrice.
    J'ai bien vu pendant le débat qu'à chaque fois que l'on parlait de supprimer une formalité, on avait l'impression de vous arracher le coeur. Vous voulez une société de formalités, une société ultraréglementée pour, soi-disant, protéger le faible. Mais c'est toujours la même chose : vous visez le puissant et c'est le faible qui trinque, parce qu'il ignore la loi. On ne peut pas vivre dans un monde où l'on méconnaît désespérément une règle dite protectrice qui devient généralement une règle accusatrice.
    Le meilleur exemple en est donné par cet amendement, que je dirais volontiers redondant, sur la présomption d'innocence fiscale. Bien entendu, chacun est réputé innocent devant le fisc. Il n'en reste pas moins que le sentiment général est que l'on est d'emblée coupable.
    En matière de droit du travail, vous affirmez que le Gouvernement veut obtenir un blanc-seing. Ce n'est pas vrai. Relisez l'article 20 et vous constaterez - j'aborde ainsi l'aspect constitutionnel - que le Parlement, en cette matière, donne une véritable « feuille de route » au Gouvernement, lequel, dans ses ordonnances, doit suivre pas à pas, sans jamais s'en écarter, ce qui a été décidé et détaillé par le législateur. Le Parlement donne un mandat à l'exécutif, qui doit lui en rendre compte.
    Pourquoi ce mandat ? Parce que c'est un texte transversal qui a l'ambition, nécessaire, de nettoyer notre droit et nos codes de dispositions qui ne sont pas claires et ouvrent la porte à toutes les interpétations. Il suffit pour s'en convaincre de voir l'importance de la jurisprudence interprétative sur de très nombreux aspects. Il s'agit donc d'un texte de clarté que le Parlement tout seul, sur des points très souvent quasiment réglementaires, ne pourrait pas - bien que vous adoriez - cela n'aurait pas le temps de concevoir.
    Je pense donc que ce projet d'habilitation est parfaitement constitutionnel et respecte pleinement l'article 38 de la Constitution. C'est pourquoi le groupe UMP le votera, après avoir repoussé l'exception d'irrecevabilité.
    M. le président. Personne ne demande plus la parole dans les explications de vote ?...
    Je mets aux voix l'exception d'irrecevabilité.
    (L'exception d'irrecevabilité n'est pas adoptée.)

Discussion générale

    M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Rodolphe Thomas.
    M. Rodolphe Thomas. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat, mes chers collègues, au moment d'aborder la deuxième lecture du projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, je tiens, au nom du groupe UDF, à le féliciter une fois de plus de s'être engagé dans cette ligne réformatrice de simplification et de facilitation des démarches administratives.
    Je ne reviendrai pas sur les détails ou les évaluations chiffrées, mais nous sommes d'accord pour constater que l'inflation législative nuit à la qualité de notre droit et à la pertinence des textes. Combien de lois ou de décrets ne sont jamais appliqués ? Il faudra un jour s'atteler à un grand nettoyage des codes. Et comme l'a noté notre collègue François Sauvadet, il serait bon également de réaliser une véritable étude d'impact des textes avant de les soumettre à la représentation nationale.
    Quant au projet lui-même, nous nous félicitons que le Sénat ait apporté sa pierre à l'édifice en s'associant à cette oeuvre simplificatrice que les Français réclament.
    En première lecture, notre groupe a participé activement à cette entreprise et s'est réjoui de voir adopter des amendements portant sur des sujets aussi importants que la simplification du bulletin de paie ou le libre choix du guichet unique pour les travailleurs non salariés non agricoles. J'y reviendrai au cours du débat.
    J'aborderai pour l'instant deux points majeurs, à savoir l'article 4 relatif à la création d'une nouvelle forme de contrat de partenariat public-privé et l'article 19 consacré au guichet unique.
    Je ne reviendrai pas sur les détails techniques de la loi relative à la maîtrise d'ouvrage publique, dite loi MOP, ni sur les débats qui ont animé nos bancs. François Sauvadet ici même et Michel Mercier au Sénat se sont longuement exprimés sur ces sujets. Je ferai néanmoins quelques observations.
    S'agissant d'abord de la forme, il ne nous semble pas opportun de prendre par voie d'ordonnance des dispositions qui vont bouleverser le paysage architectural français. C'est pourquoi l'UDF avait demandé, en première lecture, la suppression de l'article 4, qui lui semblait présenter des risques réels.
    La pérennisation et la systématisation de procédures expéditives, rendues désormais possibles et maîtrisées par les seuls grands maîtres d'oeuvre, font peser un danger aussi bien sur la qualité architecturale que sur la structuration du tissu social de notre pays. Le risque de monopolisation économique pourrait entraîner à terme une régression architecturale et aboutir à l'émergence de produits banalisés, comme on l'a déjà vu lors de la reconstruction après guerre ou de la réalisation des collèges de type Pailleron.
    Il est inconcevable que l'on puisse se passer des jeunes talents que compte la profession d'architecte dans notre pays. Mais ils ne pourront plus avoir accès à la commande publique, alors même que leurs compétences s'exportent si bien à l'étranger. La construction de l'Opéra de Pékin n'a-t-elle pas été confiée à un Français ?
    La nécessité de remédier rapidement au déficit en équipements publics ne justifie pas le recours à des procédures trop simplifiées. On ne peut faire l'économie d'un dispositif dans lequel soient associés les collectivités maîtres d'ouvrage et les professionnels : architectes et corps de métier. Nous avons su tirer les leçons de la défiguration du pays après la guerre : ne revenons pas sur ces pratiques.
    Une autre conséquence économique nous semble évidente : les mesures prises dans le cadre de l'habilitation vont inévitablement écarter les entreprises moyennes des marchés et par conséquent pénaliser l'économie locale. Nombre de PME se retrouveront hors circuit.
    Vous me rétorquerez, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'une précision garantissant un accès équitable aux marchés des architectes, des concepteurs des PME et des artisans a été introduite dans le texte. Je ne pense pas que cela soit suffisant et c'est pourquoi le groupe UDF a souhaité déposer un amendement visant non plus à supprimer l'article, mais à encadrer plus restrictivement cette pratique en prévoyant que le recours aux nouvelles formes de contrat soit limité aux marchés d'un montant supérieur à 50 millions d'euros.
    Nombre de nos collègues, sur tous les bancs de l'hémicycle, sont favorables à une telle disposition qui permettrait à la fois d'accélérer les constructions, selon le souhait du Gouvernement, d'aider toutes les PME à continuer de participer activement à la commande publique et de ne pas mettre en péril le tissu économique et social de nos régions.
    Je voudrais maintenant aborder l'article 19 pour me réjouir, en premier lieu, que le Sénat ait confirmé le nouvel alinéa 2 bis, qui vise à créer un dispositif simplifié pour les bulletins de paie, mesure que le groupe UDF avait proposée.
    Cette initiative, saluée par les députés et les sénateurs, permettra d'engager la France dans un processus d'harmonisation avec ses voisins européens et surtout de répondre à l'impatience légitime des petits employeurs, à qui l'on fait subir, entre autres maux, les affres de la complexité administrative, ce qui contraint les plus modestes d'entre eux à payer comme ils disent, pour remplir les papiers !
    Mais je souhaite insister sur le quatrième alinéa de l'article 19 pour préciser la position que l'UDF a défendue ici même et au Sénat par la voix de nos collègues du groupe Union centriste.
    En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté, sur proposition de François Sauvadet, un sous-amendement permettant aux travailleurs non salariés non agricoles de choisir librement l'interlocuteur unique auprès de qui ils s'acquitteront de leurs cotisations et contributions sociales. Je rappelle que nous avons été soutenus dans cette démarche par le Gouvernement et la majorité des députés.
    Au Sénat, le Gouvernement a réaffirmé son soutien à cette disposition en demandant le retrait d'un amendement du rapporteur de la commission des affaires sociales, M. Dériot, qui proposait de supprimer cette possibilité. Il a alors déclaré que « la solution pluraliste, avec la formule de leur choix, issue d'un amendement UDF à l'Assemblée nationale, répond bien à la volonté de n'écarter aucun organisme existant, ce qui devrait rassurer ceux qui craignent qu'une ou plusieurs caisses soient privilégiées ». Le groupe UDF partage totalement cette analyse.
    Nous avons personnellement rencontré les acteurs concernés par cette réforme. Ils nous ont fait part de leurs inquiétudes à la suite de l'adoption de ce sous-amendement qui permet le libre choix. Dans notre esprit, il s'agit simplement de donner à chaque organisme la possibilité de s'organiser pour aboutir à la mise en oeuvre du guichet social unique. Cette mesure, nous le répétons, est absolument nécessaire, voire vitale, pour tous les commerçants et artisans, qui sont accablés par la paperasserie et passent trop de temps à remplir des formulaires et à envoyer des pièces justificatives parfois identiques à plusieurs organismes !
    Chacun le sait, nous sommes dans le cadre d'une procédure législative particulière qui consiste à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances. Il reviendra ainsi aux ministres et à leurs services d'assurer les arbitrages parfois délicats, surtout en matière de simplification. C'est pourquoi nous pensons nécessaire d'engager les principaux partenaires à s'impliquer dans la préparation de la formule équilibrée du guichet unique que nous appelons de nos voeux.
    De ce point de vue, nous considérons que la rédaction de l'Assemblée, complétée par celle du Sénat qui a introduit la possibilité de bénéficier de services communs à plusieurs régimes, peut aider les principaux acteurs de cette réforme, partenaires sociaux, organismes labélisés et Gouvernement, à trouver un terrain d'entente et à proposer une solution qui aboutisse à une véritable réforme au profit des cotisants et non à un compromis a minima entre les différents corporatismes. Car, dans cette affaire qui touche à ce qu'il y a de plus précieux pour les fragiles professions indépendantes comme pour le reste de la société, à savoir la santé, la vieillesse et le financement de la solidarité sociale, il faut privilégier la concertation.
    Pour nous, les deux principaux ingrédients de la réussite du guichet social unique sont la proximité avec les cotisants et la rigueur dans la gestion, notamment des impayés.
    Ainsi, par ce sous-amendement, nous avons voulu participer à l'écriture d'un scénario qui laisse toute sa place au jeu des acteurs. J'observe que ce signal a été entendu par les protagonistes de ce dossier - les caisses de retraite des artisans et des commerçants, CANCAVA et ORGANIC, et de leur caisse d'assurance maladie, la CANAM -, le ministre a eu l'occasion de le souligner au Sénat.
    Je tiens également à saluer le travail de rapprochement qui a été réalisé depuis l'examen passage de ce texte en première lecture. En effet, au cours des dernières semaines, les conseils d'administration de la CANAM, de la CANCAVA et de l'ORGANIC se sont prononcés à l'unanimité en faveur du rapprochement des trois institutions. L'objectif de ce rapprochement est d'offrir une réelle simplification aux artisans et aux commerçants, qui auront un seul interlocuteur pour l'assurance maladie et pour l'assurance vieillesse, conformément aux objectifs de notre texte. Dans cette perspective, les trois régimes ont d'ailleurs demandé à l'Etat qu'il leur apporte des garanties sur le maintien du périmètre actuel de leurs activités liées au contact avec les assurés : recouvrement des cotisations et paiement des droits.
    Après tant d'années de cloisonnement, les trois régimes des non salariés non agricoles ont enfin engagé une première phase de leur mutation : ils vont mettre en place des services communs et font en sorte de proposer, dans les dix-huit mois qui viennent, un interlocuteur unique aux artisans et aux commerçants. C'est cette dynamique constructive que nous avons voulu enclencher en suscitant en amont une « émulation positive », selon vos propres termes, monsieur le secrétaire d'Etat, pour améliorer les services aux cotisants en aval.
    Nous souhaiterions que le Gouvernement nous indique où il en est dans ses négociations et dans la rédaction de l'ordonnance.
    Par ailleurs, on peut s'interroger sur la traduction législative du 4° de l'article 19, auquel le Sénat a ajouté une disposition nouvelle visant à faire bénéficier les travailleurs indépendants de services communs à plusieurs régimes, alors qu'il prévoit la mise en oeuvre d'un interlocuteur unique.
    En tout cas, nous nous réjouissons que le dossier du guichet social unique avance et que cette réforme si attendue prenne peu à peu forme, même si ses contours sont encore imprécis.
    Enfin, permettez-moi d'apporter un petit bémol à propos de la méthode employée, à savoir l'habilitation du Gouvernement à prendre des ordonnances. Notre groupe reste très attaché au rôle et au travail du Parlement, et nous aurions aimé que, sur certains points, notamment l'article 4, il ne soit pas fait recours à l'article 38,...
    L'UDF votera ce texte et soutient énergiquement les dispositions tendant à simplifier la vie de nos concitoyens. Nous vous remercions, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre esprit d'ouverture et de votre sens du dialogue.
    M. Jean Leonetti et M. Xavier de Roux. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.
    M. Patrick Braouezec. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je commencerai là où a terminé M. Thomas, c'est-à-dire non par les questions de fond que pose le projet de loi - j'y reviendrai -, mais par la question de la méthode.
    Le Gouvernement traite de plus en plus notre assemblée en simple chambre d'enregistrement. Encore avons-nous aujourd'hui la chance d'examiner ce texte en deuxième lecture, ce qui n'arrive plus très souvent depuis le début de la législature. En effet, article 49-3, urgence, votes conformes, ordre du jour surchargé et recours à l'article 38.
    M. Jean Leonetti. Ça vous rappelle quelque chose, l'article 38 !
    M. Patrick Braouezec. ... tel est le rythme que nous impose le Gouvernement. Je parle bien d'un rythme imposé, car le Gouvernement est maître de notre ordre du jour. Quelle a été notre stupéfaction lorsque l'on nous a annoncé qu'en raison de l'encombrement, il était impératif pour lui de recourir à l'article 38 pour simplifier le droit !
    Nous sommes donc réunis, mes chers collègues parce que le Gouvernement nous demande de nous dessaisir de notre pouvoir législatif, de notre compétence à élaborer la loi. Et ce n'est qu'un début, un autre projet de loi d'habilitation est prévu pour l'automne. Chaque année, vont ainsi se succéder de nouvelles demandes d'habilitation... Nous nous dirigeons vers une banalisation périlleuse du recours aux ordonnances dont il ne peut résulter qu'un véritable escamotage du débat démocratique. Ce sont, monsieur le secrétaire d'Etat, les droits du Parlement qui sont en cause et la majorité d'aujourd'hui - qui, dans l'opposition, s'offusquait hier du recours à l'article 38 - et contre lequel, en ce qui nous concerne, nous nous sommes toujours élevés - accepte cette attaque contre l'institution parlementaire.
    Pour justifier une telle confiscation de pouvoir, on argue que les mesures concernées seraient purement techniques et qu'il serait inutile de les soumettre à notre examen. J'en viens au fond du projet de loi.
    Il est intéressant de dresser à nouveau - je m'y suis déjà essayé lors de la première lecture - la liste de ces mesures dites « techniques », censées simplifier le droit : mesures relatives aux marchés publics, au droit fiscal, au droit électoral, mais également au droit social et au droit du travail, sans parler des mesures de codification et de la création de quatre nouveaux codes. Une question se pose : y a-t-il un domaine de notre droit qui ne soit pas concerné par ce projet de loi d'habilitation ? Il ne s'agit pas, contrairement à ce que vous prétendez, de questions techniques. Elles concernent tous nos concitoyens, dans leur vie quotidienne, et ils seraient certainement étonnés d'apprendre que les règles régissant leur droit de vote ou le droit du travail sont uniquement techniques. Elles sont au contraire fondamentales. Nos compatriotes ont donc le droit d'être informés des modifications qui vont les toucher directement, et nous, parlementaires, avons le droit et le devoir de rendre publics nos réflexions et nos travaux.
    Ces mesures auraient nécessité une discussion approfondie, un vrai débat parlementaire. Aujourd'hui, l'enjeu du débat est seulement de savoir si le Parlement vous autorisera ou non, monsieur le secrétaire d'Etat, à prendre des ordonnances dans des domaines très divers, sans autre précision. Le projet de loi se contente de définir le domaine d'intervention du Gouvernement ; il n'expose absolument pas le contenu juridique de dispositions qui seront opposables aux administrés. Et c'est là qu'est le budget. Il n'y a pas de débat juridique de fond. Les ordonnances seront prises en catimini, durant les vacances peut-être - ou encore pendant un week-end prolongé, comme ce fut le cas à Pâques pour supprimer le remboursement d'un grand nombre de médicaments - et elles n'arriveront sans doute jamais en séance publique, puisque la seule obligation du Gouvernement est l'inscription des ordonnances sur le bureau d'une des deux assemblées. Comme ces bureaux sont déjà sacrément encombrés, on peut effectivement envisager le pire !
    Nous ne pouvons qu'être surpris de la défiance exprimée à l'égard du Parlement, d'autant que le champ de cette prétendue simplification touche des domaines fondamentaux de notre droit.
    Si simplification il y a, elle concerne la procédure parlementaire et, partant, la vie du Gouvernement. En fait, votre texte complique souvent les choses sous couvert de les simplifier. Pour ne prendre qu'un seul exemple de l'incohérence du texte, l'article 1er A, introduit lors de la première lecture du texte dans notre assemblée, crée un « conseil d'orientation de la simplification administrative » qui sera chargé de formuler toute proposition pour simplifier la législation. Vous nous avez pourtant répété maintes et maintes fois que la complexité des règles de droit provenait souvent de la juxtaposition des textes mais aussi des instances de consultation, et des commissions administratives. Et voilà que le premier article du projet de loi crée une nouvelle commission ! Ce conseil sera composé, entre autres, de trois députés et trois sénateurs. Le Gouvernement confisque le pouvoir législatif des parlementaires en les faisant siéger de façon restreinte dans de nouvelles commissions, au détriment des maigres droits de l'opposition.
    Par ailleurs, plusieurs mesures soulèvent des objections de fond, notamment les dispositions relatives aux marchés publics, et un orateur l'a déjà souligné. Lors de la première lecture, nous nous étions attachés à dénoncer le fait que, non contents de modifier par ordonnances les règles relatives aux marchés publics, vous vouliez aussi en bouleverser profondément l'équilibre.
    Le passage au Sénat n'a d'ailleurs pas apporté plus de garanties, bien au contraire, puisque le Gouvernement sera habilité à prendre « les mesures permettant d'alléger les procédures de passation des marchés publics pour les collectivités territoriales ». Comment les règles de mise en concurrence et de publicité seront-elles respectées ? Comment comptez-vous prévenir les risques de corruption dans la passation de ces marchés ?
    Nous émettions déjà de telles critiques à propos de l'article 4 du projet de loi. En effet, il prévoit de rétablir des contrats globaux, que pourraient conclure des personnes publiques ou des personnes privées chargées d'une mission de service public. Ces contrats, parce qu'ils comprennent « la conception, la réalisation, la transformation, l'exploitation et le financement d'équipements publics, ou la gestion et le financement de services », se rapprochent dangereusement des marchés d'entreprise de travaux publics, avec, comme on peut l'imaginer, les risques de corruption et ceux que le monopole d'une grande entreprise de travaux publics fait peser sur d'autres, plus modestes. Malgré les affaires dont la classe politique n'est certainement pas sortie grandie, vous revenez en arrière et permettez la conclusion de ce genre de marchés.
    Vous nous opposerez que le Sénat, dans sa grande sagesse, a ajouté une disposition visant à ne pas exclure les PME de ce type de contrat. En effet, la dernière phrase de l'article 4 indique que les dispositions prises par le Gouvernement « prévoient les conditions d'un accès équitable des architectes, des concepteurs, des petites et moyennes entreprises et des artisans aux contrats prévus au présent article ». Très bien ! Mais cette précaution n'est pas synonyme d'une participation effective des PME à la réalisation d'un marché public.
    Voilà un exemple parmi d'autres des imperfections de ce texte flou, qui aurait bien mérité de faire l'objet d'un débat au cours duquel nous aurions pu soulever les diverses difficultés d'application des règles en matière de marchés publics, et décider de les encadrer strictement, étant donné la sensibilité du sujet. Hélas ! il n'en est rien !
    Il n'y aura pas de débat, non plus, sur le droit du travail. Le calcul des seuils d'effectifs ou les procédures de licenciement sont-ils trop techniques ? Bien sûr que non ! Mais il est plus simple de les modifier sans contrôle parlementaire.
    Là encore, le Sénat a élargi le champ de l'habilitation. Nous étions déjà fortement opposés au fait que le Gouvernement puisse modifier les règles de calculs des seuils d'effectifs ainsi que les règles relatives aux procédures de licenciement individuel et à la protection contre le licenciement des salariés représentants du personnel. Mais ce n'était pas suffisant. Désormais, il pourra également harmoniser et simplifier les procédures de licenciement applicables aux salariés mis à la disposition d'une filiale étrangère, adapter le régime juridique applicable au travail en temps partagé ou encore permettre aux entreprises organisées sur une durée collective hebdomadaire supérieure à trente-cinq heures de mensualiser la rémunération des heures supplémentaires de leurs salariés. Vous avez encore trouvé un moyen discret de détourner la loi sur la réduction du temps de travail !
    Une conclusion s'impose : le texte ne vise pas tant à simplifier la vie et les démarches de nos concitoyens qu'à faciliter l'application par le Gouvernement de sa politique libérale.
    Nous rejetons votre projet avec force, comme nous l'avions fait en première lecture. Le groupe des député-e-s communistes et républicains ne peut consentir à vous autoriser à prendre des ordonnances dans des domaines fondamentaux sans un minimum de débat démocratique et respectueux des droits du Parlement. C'est pourquoi il votera contre ce texte.
    M. le président. La parole est à M. Jean Leonetti.
    M. Jean Leonetti. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit revient aujourd'hui à l'Assemblée nationale en deuxième lecture, après avoir été enrichi par la Haute Assemblée.
    Il nous paraît utile de réaffirmer que le but de ce texte correspond aux engagements de M. le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, simplifier la vie des Français et, en même temps, réformer l'Etat, qui en a bien besoin. Il s'agit en effet de créer une administration de proximité au service des usagers, de faciliter la vie des entreprises, d'accélérer et de moderniser nos équipements publics.
    La philosophie qui est la nôtre, empreinte de liberté et de responsabilité, anime le texte. Il faut gagner du temps pour libérer les énergies des entreprises, des usagers, des fonctionnaires qui ont mieux à faire que de se perdre dans les dédales de l'administration. Gagner du temps, c'est aussi indubitablement gagner de l'argent et mieux orienter les moyens financiers pour améliorer le service public, qui doit prouver sa capacité à évoluer et à s'adapter à un monde plus rapide et plus complexe. Enfin, et surtout, ce texte renoue avec la confiance - j'ai été frappé, en écoutant l'opposition, du caractère presque systématiquement soupçonneux de ses propos - à travers deux dispositions assez fortes : le contrôle a posteriori des déclarations fiscales et la suppression de l'obligation, quelquefois humiliante, faite à nos compatriotes nés à l'étranger de prouver à chaque démarche leur nationalité française.
    Dans les débats en commission, à l'Assemblée nationale et au Sénat, à quelques exceptions près, personne n'a contesté la nécessité de simplifier un droit bavard, complexe, inutile parce que incompréhensible même par les spécialistes. « Nul n'est censé ignorer la loi », mais nul n'est capable de la comprendre et c'est toujours le plus faible qui se trouve démuni lorsqu'il est confronté aux règles.
    Le débat porte donc essentiellement non sur l'objectif, qui me semble commun, ou en passe de l'être, à l'ensemble des bancs des deux assemblées, mais sur la méthode et sur son champ d'application.
    L'habilitation, prévue par notre Constitution, qui donne au Gouvernement le pouvoir de légiférer par ordonnances, s'inscrit dans un cadre très strict, vous le savez tous. D'ailleurs, depuis que la Constitution est en vigueur, nul n'a jamais envisagé, au fil des alternances, de supprimer cet article au motif qu'il serait attentatoire à la liberté et aux droits du Parlement. L'habilitation n'est pas l'abandon, et l'ordonnance n'est pas le renoncement du législateur à son droit de proposition, de décision et d'évaluation. Saluons au passage la démarche du Gouvernement et les initiatives qu'il a prises ou acceptées, monsieur le secrétaire d'Etat, pour associer avant, pendant et après le débat parlementaire la représentation nationale à ce processus.
    Le suivi parlementaire s'effectuera au sein d'un conseil d'orientation, et une mission d'information sur les ordonnances sera mise en place. Est-il utile de rappeler que tous les gouvernements ont un jour recouru à cette procédure, y compris, bien sûr, - mes chers collègues, vous le saviez mais vous l'avez probablement oublié - la majorité précédente, qui a par exemple habilité le gouvernement de Lionel Jospin à transposer ainsi cinquante-quatre directives européennes.
    N'en déplaise à monsieur Braouezec, ce texte est technique. Il ne s'agit pas de remettre en cause les modes de scrutin ni d'instaurer des candidatures uniques mais, sur un plan technique, de réfléchir à la façon de lutter contre l'absentéisme et d'assurer une meilleure participation des citoyens aux élections.
    La technicité de ce texte, ainsi que la diversité de son champ d'action - trente articles, concernant cinq ministères et huit ministres - ne nous laisse pas d'autre choix si nous voulons agir rapidement.
    De même que les fonctionnaires doivent et peuvent mieux utiliser leur temps en se consacrant à leurs tâches et à leurs missions de service public, les parlementaires ont mieux à faire que d'accumuler des textes tatillons et de voter des lois d'affichage au détriment de l'efficacité de l'action publique.
    Rappelons enfin, pour clore ce débat, que la loi d'habilitation fixe des axes et définit les limites dans lesquelles le Gouvernement peut agir.
    Mes chers collègues de l'opposition, nous ne serions pas si pressés si quelques réformes avaient été réalisées dans les cinq ans qui viennent de s'écouler.
    L'autre débat sujet à controverse, sinon à polémique, touche à la simplification des marchés publics et à la mise en place d'un partenariat entre le public et le privé. On sent bien, à gauche de l'hémicycle, une certaine nostalgie des nationalisations, et une suspicion permanente à l'égard de tout ce qui peut relever du privé.
    M. Jérôme Lambert. Cela n'a rien à voir !
    M. Jean Leonetti. En l'état actuel de notre législation, l'extrême complexité initiale, aggravée par la révision du code des marchés publics, aboutit, de l'avis unanime des décideurs, à un allongement des délais incompatible avec la volonté d'efficacité dans la réalisation d'ouvrages publics indispensables.
    La réduction des délais constitue un objectif essentiel et prioritaire en particulier à cause du programme Hôpital 2007, et compte tenu de la vétusté de certains de nos équipements hospitaliers ainsi que du délai d'environ dix ans nécessaire pour construire un hôpital.
    Mes chers collègues de gauche, si les équipements publics hospitaliers avaient été rénovés plus rapidement pendant les cinq dernières années, nous ne serions pas obligés, aujourd'hui, d'essayer d'accélérer la machine pour hisser le parc hospitalier de notre vieille démocratie à un niveau digne du xxie siècle.
    C'est à juste titre que le Sénat a apporté des précisions pour faire en sorte que les petites et moyennes entreprises, les professionnels du bâtiment et les architectes soient protégés de la globalisation des marchés, qui porteront de la conception à la maintenance. En prévoyant que les personnes publiques pourront attribuer des contrats à différents cocontractants, il permet d'éviter une subordination possible du maître d'oeuvre au réalisateur. Ainsi, les préoccupations légitimes exprimées par certaines professions de se voir concurrencées, voire dominées, par les grandes entreprises devraient être apaisées.
    Enfin, dans le cadre des contrats public-privé, certains évoquent le risque de corruption. La corruption, mes chers collègues, n'est pas dans les textes, mais dans l'esprit malhonnête de certains. Toute procédure, si complexe soit-elle, peut être détournée, et l'opacité qui engendre la complexité aggrave le risque. On n'empêchera jamais le tricheur de tricher. Même pas la merveilleuse loi Sapin, aussi rigoureuse qu'on l'ait voulue, dont je vous rappelle qu'elle prévoit, une fois la procédure d'offres achevée, que le maire négocie seul avec son partenaire le montant des marchés !
    Le fait que la mise en place des contrats de partenariat public-privé passera par une modification de la loi relative à la maîtrise d'ouvrage public et à ses rapports avec la maîtrise privée, et non par la loi relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques qui régit la délégation de service public, représente une précision qui nous paraît indispensable et que nos collègues sénateurs ont apportée.
    C'est donc, monsieur le secrétaire d'Etat, un texte enrichi, apaisé, mais qui n'a rien perdu de son ambition de réforme qui nous est aujourd'hui présenté.
    Le groupe UMP, qui y trouve l'audace nécessaire pour une réforme efficace et la sagesse indispensable aux règles du jeu démocratique, approuvera ce projet, cela n'étonnera personne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce projet de loi me donne l'occasion de vous part de mes interrogations et de mes craintes concernant la politique conduite depuis un an par le Gouvernement.
    Mes craintes sont à l'aune des diverses décisions, lois ou décrets dont le Gouvernement a pris l'initiative, tous dictés par une idéologie libérale excessive.
    Il y a d'abord la baisse inconsidérée des impôts et la multiplication des cadeaux fiscaux dont bénéficient surtout les privilégiés. Je parle de la baisse de l'impôt sur le revenu, qui représente en 2002, à elle seule, un coût de 2,55 milliards d'euros. Pour financer cette mesure, le Gouvernement a dû procéder à des annulations de crédits dans le collectif d'automne.
    Il a poursuivi dans cette voie en 2003, malgré des résultats déplorables, en multipliant les mesures d'allégement fiscal qui, si elles ne concernent qu'un nombre restreint de ménages aisés - 70 000 familles seulement seront ainsi concernées par la hausse du plafond de prise en compte des dépensesau titre de l'emploi d'un salarié à domicile -, n'en représentent pas moins un coût budgétaire important.
    Depuis, se sont ajoutés plus de 500 millions d'euros au titre de la réforme de l'ISF et des diverses mesures de déduction fiscale au profit des investisseurs, dans le cadre de la loi sur l'initiative économique, et plus de 100 millions d'euros d'avantages fiscaux en faveur des fondations et du mécénat.
    Mais ne nous y trompons pas dans la situation économique actuelle, ces baisses des prélèvements ne sont finalement que des cadeaux. Elles n'ont eu aucun effet sur la consommation et donc sur la croissance. Et, dans le même temps où l'on faisait ces cadeaux aux plus aisés, la rigueur s'abattait sur les autres, je vais y revenir.
    Ces chemins, pour moi, sont ceux qui conduisent une société à perdre son âme. Je ne souhaite pas que notre pays les emprunte.
    En outre, une grande partie de votre action est beaucoup plus insidieuse - celle-là, vous évitez de l'annoncer - et moins assumée, et je m'interroge à son propos sur votre légitimité démocratique.
    Citons votre politique de réforme de l'Etat. Vous utilisez le mot réforme et vous voudriez nous faire croire que c'est le progrès. Mais le mot réforme sous-entend l'amélioration d'une situation. Or, votre politique ne fait qu'organiser le démantèlement sournois de l'Etat, son désengagement et finalement son dépérissement ; les collectivités les mieux pourvues le seront encore plus et les autres, essentiellement les collectivités rurales, ne cesseront de décliner.
    Je donnerai quelques exemples.
    Après avoir réduit les recettes par des allégements fiscaux inconsidérés, il vous faut bien sûr réduire les dépenses. Qui en supportera les conséquences ? Les communes rurales et l'aménagement rural, avec la réduction drastique des crédits du fonds national de développement des adductions d'eau : 60 %, et même 75 % dans le département de l'Ariège ! Et avec la diminution de 25 % du fonds social du logement, ce sont les exclus qui vont être frappés car il n'y a aucune raison que les départements - qui n'en ont pas les moyens - compensent cette réduction ! Quant à la réduction du fonds national d'aménagement du territoire, elle va mettre en difficulté tous les projets des zones rurales.
    Si c'est cela, votre politique de réforme de l'Etat, c'est une politique d'inégalité qui va accroître la fracture sociale ! Et je ne pense pas que ce soit pour mener une telle politique que les Français vous ont fait confiance l'année dernière. Car le progrès est un partage entre tous, sinon ce n'est pas le progrès.
    Citons également votre politique budgétaire, malheureusement objet des condamnations sévères de la Commission européenne, laquelle dénonce les déficits excessifs de la France. Mais ceux-ci ont été aggravés l'année dernière par la réduction des recettes et par l'augmentation des dépenses militaires. Pourquoi vous en étonner ? Vous prétendez avoir hérité de cette situation. Mais vous aviez fait un audit ! Vous avez débordé les comptes de cet audit !
    A présent effectivement, les déficits de la France deviennent si excessifs que nous sommes en situation de subir la tutelle de la Commission européenne.
    Sans doute allez-vous accuser l'Europe et direz-vous : l'Europe nous empêche de mener la politique que nous jugeons efficace pour la France ; la Commission européenne nous oblige à prendre des mesures difficiles qui demanderont des efforts en termes de fonctionnement et d'investissement.
    Il est vrai que le jugement de M. Solves a été particulièrement sévère et qu'il affirmait qu'il faudrait que le Gouvernement fasse faire des efforts considérables aux Français.
    Cette politique se traduit par un désengagement accru de l'Etat, accroissant la charge des collectivités locales, par une réduction des services offerts à la population et, finalement, par la déliquescence de l'Etat. Mais c'est ce que vous voulez : un Etat squelettique, lequel ne peut assurer la solidarité. A l'heure de la mondialisation, nous devrions pourtant saisir l'occasion de réfléchir à la place que doit prendre l'Etat dans nos sociétés modernes et ce que deviendront ses missions.
    Cette stratégie engendre le rejet de la construction européenne par les citoyens. C'est injuste, irritant et dangereux pour l'avenir.
    C'est aussi, et surtout, sur le décret portant réforme du code des marchés publics que se cristallisent nos divergences, je tiens à le manifester avec vigueur.
    Que dire de ce code des marchés publics ? Sous prétexte de simplification administrative, - vous avez toujours de bonnes raisons de faire de la simplification administrative, mais ce sont aussi de bonnes raisons de faciliter certains errements - vous allez soumettre les crédits publics au clientélisme et favoriser la corruption. Je vous renvoie à ce propos à l'excellent article paru dans Le Monde daté d'aujourd'hui.
    En quoi consiste cette réforme ?
    D'abord, la simplification du code va mettre à mal ces principes essentiels de la commande publique que sont la transparence, l'antériorité, l'égal accès et le choix de l'offre la plus économique.
    En outre, l'extension très large de la procédure des marchés d'entreprises de travaux publics, puisque ce seront des marchés fourre-tout, pour lesquels on devra choisir en même temps l'architecte, le banquier, l'entrepreneur, l'entreprise de maintenance et celle chargé de l'entretien, constituera le contexte idéal pour les grands groupes de BTP, avec la mise à l'écart des PME, ainsi qu'un manque de rigueur et de transparence qui vont mettre en danger les finances des collectivités publiques.
    Nous avons tous eu connaissance des dérapages survenus dans le cadre de ces marchés en Ile-de-France.
    Un bon exemple dont vous auriez pu vous inspirer : vous qui vous inspirez toujours de la Grande-Bretagne, la cour des comptes britannique a dernièrement fustigé le gaspillage de l'argent public qu'elle avait pu constater dans ce pays où le financement privé des équipements publics est très largement généralisé.
    Quant à l'augmentation des seuils en dessous desquels aucune formalité préalable n'est requise pour la passation des marché, elle rendra beaucoup plus difficile la qualification du délit de favoritisme, et donc aidera quelques amis en difficulté... Ne jouez pas les offusqués : les termes du dispositif sont là pour en témoigner. Le relèvement du seuil à 6 millions d'euros - vous savez ce que cela représente - constitue un appel fort pour la corruption !
    Quelle sécurité pour les acteurs publics quand une collectivité pourra passer un marché sans aucune formalité préalable jusqu'à 6 millions d'euros d'autant plus que l'article 11 de la loi MURCEF soustrait tout marché passé par une collectivité locale sans formalité préalable à l'obligation de transmission au représentant de l'Etat. Ainsi, le contrôle de légalité est aligné sur les seuils des marchés.
    Ce contrôle ne s'exercera plus sur la plupart des actes de la plupart des collectivités locales. Est-ce là l'ordre que vous voulez et que vous avez si fièrement annoncé ? Est-ce là votre souci de la rigueur, de la transparence et du contrôle de l'utilisation des crédits publics ?
    Le plus terrifiant, c'est que, grâce à cette réforme, le blanchiment de plusieurs élus sera favorisé. Ce n'est pas ce que vous voulez ?
    Je m'explique. Le délit de favoritisme ne peut être retenu que si l'élément légal de ce délit est constitué, à savoir la violation de dispositions législatives ou réglementaires. Dans le cas de marchés passés sans formalité préalable, les dispositions spécifiques n'existent pas, par définition, et donc le délit ne peut être retenu que par rapport à une violation manifeste des principes. Autant dire qu'il sera difficilement qualifiable.
    Je garde le meilleur pour la fin : étant donné que la loi pénale la plus douce s'applique aux affaires en cours, à l'heure actuelle, un certain nombre de personnes, à Marseille ou ailleurs, doivent être bien soulagées, à condition bien sûr que le montant des marchés objets de leurs agissements frauduleux, ne dépasse pas 6 millions d'euros, ce qui ne fait qu'un peu plus de 36 millions de francs. Ce ne sera pas suffisant pour certains !
    Nous n'avons décidément pas la même conception de l'impunité, de la transparence, de la clarté. Cette réforme est scandaleuse, d'autant plus qu'elle n'est pas assumée. Mon rôle de parlementaire est de la dénoncer ici, et d'en informer les Français qui ne vous ont certainement pas élus pour conduire une politique clientéliste protégeant et régalant les plus puissants en leur permettant de renouveler des abus que nous avions combattus.
    Et c'est à juste titre que notre collègue sénateur Jean-Pierre Sueur, dans Le Monde daté d'aujourd'hui, affirme : « La machine à corruption est en marche ». Je partage son avis et je m'inquiète, mais je vous laisse toute la responsabilité du retour de la corruption. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Xavier de Roux.
    M. Xavier de Roux. Monsieur le secrétaire d'Etat, la balle est dans votre camp. Le Parlement vous habilite à intervenir dans de nombreux secteurs pour simplifier notre droit et le fonctionnement de notre République. Le message, c'est la simplification. Alors, après que les textes seront passés dans les bureaux, faites qu'ils ne reviennent pas obscurs. Vous êtes saisi d'une très lourde tâche : apporter davantage de clarté.
    Monsieur Bonrepaux, je suis bien obligé de vous répondre. Voilà des années que nous subissons votre idéologie, l'idéologie socialiste, en dépit des conséquences qu'elle a eue sur le tissu de notre société et sur les affaires économiques de la France. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Claude Evin. Elles ne se sont pas si mal portées !
    M. Jérôme Lambert. Deux millions d'emplois créés !
    M. Xavier de Roux. Voilà des années que nous supportons votre irritante logomachie : vous rêvez d'une machine à répartir, d'un Gosplan où l'on taxerait les uns pour subventionner les autres.
    M. Claude Evin. N'importe quoi !
    M. Xavier de Roux. La moindre idée de liberté d'entreprendre, de créer ou d'imaginer vous est absolument insupportable. Tout doit passer sous la toise de je ne sais quelle égalité. Mais, vous le savez très bien, le résultat est toujours le même : vous visez le riche et c'est le pauvre qui trinque !
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Très bien !
    M. Augustin Bonrepaux. Les pauvres commencent à s'en rendre compte, mais à votre égard !
    M. Xavier de Roux. Cela se passe comme ça depuis des années. Je crois qu'il faut abandonner ce discours...
    M. Augustin Bonrepaux. Ainsi les riches pourront s'enrichir à nouveau !
    M. Xavier de Roux. ... et revenir à une société où l'on puisse enfin respirer et surtout, monsieur Bonrepaux, créer librement des richesses, parce que si vous voulez avoir quelque chose à répartir, encore faut-il que des richesses soient créées, et donc qu'il existe encore des entrepreneurs dans notre pays !
    Monsieur le secrétaire d'Etat, je développerai rapidement trois points.
    Premièrement, l'article 4 est extrêmement important. Le Parlement - aussi bien l'Assemblée que le Sénat - vous a indiqué ce qu'il souhaitait. Il est clair que la place de l'architecture dans la construction doit être respectée. Actuellement, depuis la loi Giscard d'Estaing, nous vivons dans un système où les architectes disposent d'un monopole, en tant que maîtres d'oeuvre, pour participer, au côté du maître d'ouvrage, à la conception des réalisations architecturales. Nous avons besoin de maintenir cela, pour que la France continue d'être la France et que ce que nous construisons soit à la hauteur de nos ambitions.
    Deuxièmement, en ce qui concerne le recouvrement des cotisations sociales des travailleurs indépendants, les trois caisses vont être fusionnées. Si nous demandions cette fusion, ce n'était pas tant pour le guichet unique que pour que les travailleurs indépendants trouvent dans les caisses des interlocuteurs qui les connaissent bien. Vous connaissez les difficultés que suscite le recouvrement des cotisations auprès des artisans et des commerçants. Bien entendu, les caisses doivent opérer ces recouvrements, mais sans mettre en péril le tissu des petits commerçants et des artisans.
    Troisième point, et j'en aurai terminé : la présomption d'innocence fiscale. L'amendement que nous avons déposé sur ce point est motivé par l'irritation et l'agacement. Bien entendu, la présomption d'innocence fiscale existe dans notre droit et il ne sert à rien d'être redondant. Mais je crois qu'il était important de rappeler ce principe à l'occasion de ce débat, car la façon dont l'administration fiscale traite le citoyen mérite un petit rappel à l'ordre. Tel est le but de cet amendement. Je comprendrais toutefois très bien que nous nous en tenions à l'application normale du droit existant.
    Je suis persuadé que, lorsque vous aurez accompli cette importante feuille de route et que vous reviendrez devant nous, vous aurez mérité l'habilitation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca.
    M. Lionnel Luca. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mesdames, messieurs les députés, le texte sur la simplification administrative dont nous débattons en deuxième lecture est réclamé par nos concitoyens. Il est la condition de l'efficacité de l'action administrative. C'est un vrai défi que relève le Gouvernement en présentant à notre assemblée un projet de loi de vingt-neuf articles qui lui donnera les moyens de prendre par ordonnances des mesures de simplification administrative.
    Parmi les sept chapitres, je m'attarderai sur le premier, et plus particulièrement sur l'article 5, qui se propose de simplifier la vie des usagers et d'améliorer leurs relations avec l'administration fiscale. Il contient d'excellentes mesures, monsieur le secrétaire d'Etat, - et il faut vous en féliciter -, parmi lesquelles la suppression des dispositifs ou procédures fiscales sans objet, l'adaptation de celles qui sont devenues obsolètes ou la clarification de la formulation de certains actes administratifs relatifs à l'assiette ou au recouvrement de l'impôt. De même, il est louable de vouloir rendre les différents services de l'administration fiscale plus facilement identifiables et d'améliorer la compréhension des procédures par les citoyens.
    Pour renforcer ce dispositif, il m'a semblé utile de rappeler, après notre collègue Xavier de Roux, un principe qui fonde notre droit depuis 1789 : la présomption d'innocence. Auparavant, le principe de culpabilité obligeait l'accusé à faire la preuve de son innocence. La déclaration des droits de l'homme et du citoyen a inversé la charge de la preuve, et ainsi le sujet est devenu citoyen.
    Dans l'administration fiscale, il aura fallu attendre la loi du 8 juillet 1987, présentée par Edouard Balladur, ministre de l'économie et des finances, soit deux siècles, pour que les droits des contribuables soient améliorés, avec une inversion de la charge de la preuve, nonobstant une restriction, trop interprétative à mon goût, qui permet toujours à l'administration fiscale d'être juge et partie.
    Quelles que soient la qualité des personnels et la rigueur manifestée dans leurs fonctions, il faut bien admettre qu'un certain arbitraire et l'opacité des procédures sont loin d'avoir disparu. Le contrôle fiscal reste encore, en dépit de progrès notables, caractérisé par un niveau d'abus qui n'est pas acceptable dans une démocratie. Cela provoque des drames personnels et collectifs : vies ravagées, dépressions, suicides, entreprises en difficulté, faillites, licenciements. Nous avons tous rencontré dans nos circonscriptions des petits commerçants, des professions libérales, des chefs d'entreprise ou de simples citoyens qui, même une fois leur honnêteté reconnue, sont restés marqués psychologiquement et socialement par l'épreuve qu'a constituée le contrôle fiscal, surtout lorsqu'il s'accompagne de méthodes inquisitoriales abusives.
    La loi du 30 mai 2000 a renforcé les droits des citoyens face au risque de l'abus judiciaire, toujours possible, car l'erreur reste humaine. Cette loi dite de présomption d'innocence, a, en dépit de vifs débats, été reconnue par l'ensemble de notre assemblée dans ses grands principes, et la nouvelle majorité, en la précisant, ne l'a pas remise en cause.
    Voilà pourquoi il m'a semblé opportun, monsieur le secrétaire d'Etat, de marquer solennellement et symboliquement dans ce texte, qui est excellent, l'attachement du Parlement à la reconnaissance du principe de présomption d'innocence fiscale, en reprenant un amendement qui avait été adopté en première lecture grâce à notre collègue Hervé Novelli, qui l'a brillamment défendu. Le Sénat a supprimé cette disposition, estimant que ce principe existe déjà et n'a donc pas besoin d'être rappelé. Il n'y a aucune raison majeure de refuser de le faire figurer dans ce texte puisque, comme le remarquait Talleyrand, ce qui va sans dire va encore mieux en le disant. Cela confirmerait notre attachement à une meilleure relation entre l'administration, notamment fiscale, et le citoyen.
    Ce texte représente déjà un énorme progrès puisqu'on ne parle plus d'administré mais d'usager, pas encore du citoyen car, pour l'administration fiscale, nous sommes toujours des assujettis, ce qui est intéressant si l'on se souvent de l'Ancien Régime. L'amendement que je défendrai tout à l'heure tend à défendre ce principe de présomption d'innocence fiscale, auquel nous sommes tous attachés. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La discussion générale est close.

Discussion des articles

    M. le président. J'appelle dans le texte du Sénat les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Articles 1er A, 1er, 1er bis et 3

    M. le président. Sur les articles 1er A, 1er, 1er bis et 3, je ne suis saisi d'aucun amendement, je vais donc les mettre aux voix successivement.
    « Art. 1er A. - Un Conseil d'orientation de la simplification administrative formule toute proposition pour simplifier la législation et la réglementation ainsi que les procédures, les structures et le langage administratif.
    « Il est composé de trois députés, de trois sénateurs, d'un conseiller régional, d'un conseiller général, d'un maire ainsi que de six personnalités qualifiées. »
    Je mets aux voix l'article 1er A.
    (L'article 1er A est adopté.)
    « Art. 1er. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes dispositions modifiant les règles des procédures administratives non contentieuses, aux fins de :
    « 1° Simplifier les démarches des usagers auprès des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics qui en relèvent, des organismes de sécurité sociale et des autres organismes chargés d'une mission de service public :
    « a) En réduisant le nombre de pièces ou démarches demandées aux usagers, ainsi que la fréquence selon laquelle celles-ci sont exigées ;
    « b) En modifiant les conditions d'élaboration, de révision et d'évaluation des formulaires administratifs ;
    « c) En substituant des déclarations sur l'honneur à la production de pièces justificatives et en précisant corrélativement les conséquences qui s'attachent à l'éventuelle inexactitude de ces déclarations ;
    « c bis) Supprimé ;
    « d) En organisant, dans le respect des règles de protection de la liberté individuelle et de la vie privée établies par la législation relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, la transmission de documents entre les autorités administratives et services publics visés au deuxième alinéa du présent article ainsi que les organismes de protection sociale et les caisses professionnelles de congés payés ;
    « 2° Réduire les délais d'instruction des demandes et accélérer la prise de décision, en déterminant les procédures pour lesquelles les autorités administratives et services publics mentionnés au deuxième alinéa du présent article indiquent aux usagers le délai dans lequel est instruite leur demande ;
    « 3° Simplifier la composition et le fonctionnement des commissions administratives et réduire le nombre des commissions à caractère consultatif. Lorsque l'exercice d'une liberté publique ou le principe de libre administration des collectivités territoriales est en cause, une consultation doit être maintenue. » - (Adopté.)
    « Art. 1er bis. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes dispositions de nature à organiser la gratuité de l'accès des justiciables à la justice administrative. » - (Adopté.)
    « Art. 3. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans le respect de la transparence et de la bonne information du public :
    « 1° Les mesures nécessaires pour rendre compatibles avec le droit communautaire les dispositions législatives relatives à la passation des marchés publics ;
    « 2° Les mesures permettant de clarifier les règles applicables aux marchés passés par certains organismes non soumis au code des marchés publics ;
    « 3° Les mesures permettant d'alléger les procédures de passation des marchés publics pour les collectivités territoriales. » - (Adopté.)

Article 4

    M. le président. « Art. 4. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance les dispositions nécessaires pour modifier la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée et créer de nouvelles formes de contrats conclus par des personnes publiques ou des personnes privées chargées d'une mission de service public pour la conception, la réalisation, la transformation, l'exploitation et le financement d'équipements publics, ou la gestion et le financement de services, ou une combinaison de ces différentes missions. Ces dispositions déterminent les règles de publicité et de mise en concurrence relatives au choix du ou des cocontractants, ainsi que les règles de transparence et de contrôle relatives au mode de rémunération du ou des cocontractants, à la qualité des prestations et au respect des exigences du service public. Elles peuvent étendre et adapter les dispositions prévues au I de l'article 3 de la loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, aux articles L. 34-3-1 et L. 34-7-1 du code du domaine de l'Etat et aux articles L. 1311-2 et L. 1311-4-1 du code général des collectivités territoriales à d'autres besoins ainsi qu'à d'autres personnes publiques. Elles prévoient les conditions d'un accès équitable des architectes, des concepteurs, des petites et moyennes entreprises et des artisans aux contrats prévus au présent article. »
    M. Lambert et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 9, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 4. »
    La parole est à M. Jérôme Lambert.
    M. Jérôme Lambert. Si je voulais me faciliter la tâche, je pourrais lire l'exposé sommaire de l'amendement de M. Sauvadet et de M. Salles qui va venir en discussion juste après le nôtre.
    L'article 4 donne la possibilité au Gouvernement de créer de nouveaux contrats pour la passation des marchés publics. M. Bonrepaux a largement et clairement expliqué pourquoi, en première lecture dans cette enceinte, au Sénat, et aujourd'hui encore, nous attirons votre attention sur les dangers que recèle ce projet de loi : exclusion des marchés de nombreux artisans et architectes, corruption, coût des constructions, le contrôle n'ayant alors plus grand sens.
    Pour toutes ces raisons, et pour que les choses soient claires, nous proposons purement et simplement la suppression de l'article 4 du projet de loi.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois consititionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement.
    M. Etienne Blanc, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. La commission a donné un avis négatif en rappelant que l'article 4 est l'un des éléments essentiels de la loi d'habilitation.
    Un amendement semblable avait déjà été déposé en première lecture et avait été écarté pour des motifs que je reprendrai brièvement.
    L'objectif de l'article 4 est de relancer l'investissement dans notre pays, dans des domaines aussi divers que la sécurité, le secteur hospitalier ou les grandes infrastructures, notamment de transport. Aujourd'hui, on vient nous expliquer qu'il ferait courir un véritable risque de corruption et de dérapages financiers, et surtout qu'il écarterait de l'accès à la commande publique les PME, les artisans ou un certain nombre de corporations comme les architectes.
    Je rappelle que l'article 4 modifie la loi sur la maîtrise d'ouvrage public mais qu'en aucun cas il ne remet en cause les principes posés par la loi sur la transparence des marchés publics, dite loi Sapin. Il y aura bien une concurrence et une procédure qui permettra d'ouvrir les plis, dans le strict respect de la confidentialité. Il y aura bien évidemment obligation pour la puissance publique qui fera un choix de justifier les raisons pour lesquelles elle le fait, dans la transparence la plus parfaite. Il n'y a donc pas d'inquiétude particulière à avoir en ce domaine. Observez d'ailleurs ce qui se passe sur l'ensemble du territoire européen. En Grande-Bretagne, en Espagne ou en Italie, ce sont des procédures utilisées...
    M. Jérôme Lambert. Lisez donc la presse !
    M. Etienne Blanc, rapporteur. ... dans la plus grande transparence. Enfin, le dernier mot revient au maître d'ouvrage. Si le maître d'ouvrage souhaite allotir, il le fera. S'il préfère s'en tenir aux procédures actuellement disponibles, qu'il s'agisse des marchés publics ou de la délégation de service public, et persévérer dans cette dichotomie, il pourra le faire.
    Il s'agit de créer une nouvelle procédure, qui est une possibilité supplémentaire, mais il n'y aura aucune obligation pour la maîtrise d'ouvrage d'utiliser le partenariat public-privé.
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
    M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Il me semble que la commission ou le Gouvernement devraient donner un peu plus d'explications.
    La commission nous explique que l'objectif est de simplifier l'investissement. Pour simplifier l'investissement, il faudrait éviter de réduire les contrats de plan, de diminuer les crédits du logement ou des routes, car ce n'est pas uniquement en facilitant les marchés publics qu'on va améliorer l'investissement. Il faudrait tout de même que les crédits suivent et, pour l'instant, il sont en réduction. Donc, cette objection tombe.
    On parle ensuite de transparence, mais j'ai cru comprendre qu'on relevait le seuil des marchés à 6 millions d'euros. En dessous, qu'est-ce qui se passe ? Où est la transparence, où est la concurrence ? L'Association des maires demande d'ailleurs qu'il y ait des règles, pour qu'il y ait une réelle concurrence, et de la tranparence, pour que les marchés ne soient pas attribués par clientélisme. Peut-on avoir des explications sur ce point ?
    Si le décret annoncé par le ministre des finances est une réalité, le seuil de 6 millions d'euros ne peut que susciter de nombreuses craintes.
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Monsieur Bonrepaux, vous faites mine d'ignorer le contenu du texte dont nous discutons ; vos observations n'ont rigoureusement rien à voir avec l'article 4.
    D'abord, en ce qui concerne le montant des investissements publics, tous les parlementaires ici présents savent que cette discussion viendra en son temps lors de l'examen du budget et que cela n'a rien à voir avec un texte sur la simplification.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous, en tout cas, vous n'ignorez pas ce contenu ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Pascal Clément, président de la commission. Vous n'êtes pas dans l'Ariège, monsieur Bonrepaux !
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Si vous vous inquiétez sincèrement du niveau limité des investissements publics, je ne comprends pas comment vous pouvez vous opposer à cet article...
    M. Etienne Blanc, rapporteur. Exactement !
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. ... qui va permettre de libérer des apports ô combien précieux pour réaliser les infrastructures dont notre pays a besoin en mobilisant aussi les capitaux et l'ingénierie privés. Il y a là une contradiction dont vous devrez rendre compte devant les électeurs auxquels vous racontez que nous sommes dans l'incapacité de financer les équipements publics.
    Quant au relèvement du seuil pour les marchés publics, cela n'a rien à voir avec l'article dont nous discutons. Il s'agit d'un décret du ministre des finances, fort opportun d'ailleurs, car il consiste simplement à éliminer une complexité supplémentaire par rapport au droit européen, qui comporte déjà toutes les garanties nécessaires en matière de concurrence.
    Enfin, vous faites comme si l'adoption de cet article revenait à supprimer le contrôle de légalité. Evidemment, il n'en est rien. D'ailleurs, je tiens à vous lire la phrase qui s'y rapporte dans le projet de loi : « Ces dispositions déterminent les règles de publicité et de mise en concurrence relatives au choix du ou des cocontractants, ainsi que les règles de transparence et de contrôle relatives au mode de rémunération du ou des cocontractants, à la qualité des prestations et au respect des exigences du service public ». Vous voyez que les termes de l'habilitation qui vous est soumise sont suffisamment précis pour répondre à vos inquiétudes si vous êtes de bonne foi.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques n°s 2, 6 et 10.
    L'amendement n° 2 est présenté par M. Sauvadet et M. Salles ; l'amendement n° 6 est présenté par M. Philippe Armand Martin ; l'amendement n° 10 est présenté par M. Merville.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Compléter l'article 4 par l'alinéa suivant :
    « Le recours à ces nouvelles formes de contrats est limité aux marchés d'un montant supérieur à 50 millions d'euros H.T. ou pour lesquels les caractéristiques intrinsèques, par leurs dimensions exceptionnelles ou leurs difficultés techniques particulières, ne permettent pas au maître d'ouvrage public d'indiquer, dans le cadre d'un concours ou d'un avis de marché, par quels moyens techniques ou autres ses exigences peuvent être remplies. »
    La parole est à M. Rodolphe Thomas, pour défendre l'amendement n° 2.
    M. Rodolphe Thomas. Il apparaît légitime de vouloir simplifier le travail des administrations et des collectivités locales en matière de passation des marchés publics. Cependant, cet objectif ne saurait remettre en cause les principes fondamentaux de mise en concurrence et de libre accès de la commande publique à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille.
    Or, dans la rédaction actuelle de l'article 4, les contrats visés ne seront accessibles qu'aux entreprises générales et aux grands groupes du BTP. Si la construction est plus encore l'entretien et la maintenance des équipements publics sont réalisés par ce type de contrat, aucune entreprise artisanale ne pourra accéder directement aux marchés publics.
    Le risque est donc de rendre précaires la situation économique des entreprises artisanales et celle de leurs salariés alors qu'elles sont les seules à permettre le maintien de l'emploi et à assurer un service de proximité sur l'ensemble du territoire, notamment dans les zones les plus rurales et les plus fragilisées.
    C'est pourquoi il apparaît utile de limiter ces nouvelles formes de contrat à des opérations exceptionnelles par leur montant ou leur complexité.
    M. le président. La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour soutenir l'amendement n° 6.
    M. Philippe Armand Martin. Cet amendement vise à limiter les nouvelles formes de contrat à des opérations exceptionnelles par leur montant ou leur complexité.
    M. le président. La parole est à M. Denis Merville, pour soutenir l'amendement n° 10.
    M. Denis Merville. Monsieur le secrétaire d'Etat, je tiens d'abord à vous dire combien le texte que vous nous présentez va dans le bon sens. Vos propositions sont nombreuses et aptes à simplifier la vie des Français et à rendre notre vie collective plus efficace.
    S'agissant des marchés publics, il est intéressant de les simplifier et de mobiliser des cofinancements privés pour certaines opérations importantes. Néanmoins, toutes les entreprises doivent pouvoir y accéder. Or je crains que le texte que vous nous proposez ne soit un peu défavorable aux entreprises artisanales et moyennes, qui sont pourtant à même aujourd'hui de créer des emplois et donc de participer à l'aménagement du territoire. C'est pourquoi il me semble que nous pourrions réserver ces nouvelles formes de cofinancement à des marchés importants.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?
    M. Etienne Blanc, rapporteur. La commission a émis un avis négatif et propose le rejet de ces trois amendements.
    D'abord, le Sénat a bien pris en compte la préoccupation exposée dans les amendements en indiquant que les ordonnances prévoient les conditions d'un accès équitable des architectes, des concepteurs, des petites et moyennes entreprises et des artisans aux contrats prévus au présent article.
    M. Jérôme Lambert. Ce sont des mots !
    M. François Brottes. Ça ne suffit pas !
    M. Etienne Blanc, rapporteur. Cet accès équitable est donc bien au coeur de nos préoccupations.
    Par ailleurs, les amendements tels qu'ils ont été rédigés posent un certain nombre de problèmes techniques. Comment, en effet, déterminer de manière précise par voie d'ordonnance ce qui sera un marché public complexe ou d'une technicité particulière ? Il est des marchés publics d'un montant supérieur à 50 millions d'euros qui ne sont pas d'une technicité particulière et d'autres d'un montant inférieur qui relèvent d'une technicité particulière. Ainsi, il sera extrêmement difficile de régler cette question sous l'angle juridique.
    C'est la raison pour laquelle il faut laisser au maître d'ouvrage, qui aura le soin de définir la conception de l'ouvrage public. Il n'est pas utile d'encadrer de manière aussi précise et aussi rigide la possibilité pour le maître d'ouvrage public, notamment l'élu local, de faire un choix autre que celui du partenariat public-privé.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Le Gouvernement a entendu l'inquiétude légitime d'un certain nombre d'élus concernant l'accès des petites et moyennes entreprises et le rôle des architectes en matière de commande publique ainsi que de réalisation des ouvrages publics. Cette disposition a donné lieu à des débats très longs et, je le crois, de qualité au Sénat, qui a enrichi le texte sur ce point en ajoutant deux éléments très importants.
    Le premier, particulièrement novateur, c'est l'introduction de la cocontractance, à laquelle il faudra donner un contenu, mais qui répond au souci des artisans, des petites entreprises et de la maîtrise d'oeuvre de ne pas être des sous-traitants totalement dans la main des grands groupes. Ce point est fondamental et répond d'ailleurs à une très ancienne revendication.
    Par ailleurs, comme l'a rappelé excellement le rapporteur à l'instant, le Sénat a précisé qu'il faudrait prévoir les conditions d'un accès équitable des architectes, des concepteurs, des petites et moyennes entreprises et des artisans, aux contrats prévus au présent article. Je crois que sa rédaction est équilibrée et présente toutes les garanties nécessaires.
    J'ajoute que le partenariat public-privé peut également offrir des possibilités très intéressantes aux PME qui, actuellement, n'ont pas accès aux ouvrages complexes demandant une approche globale fondée sur un lien direct entre la conception et la maintenance, il serait donc contraire à l'objectif visé et à l'intérêt des petites et moyennes entreprises d'introduire un seuil minimal, car vous réserveriez alors le partenariat public-privé aux très gros projets que seuls les grands groupes peuvent concevoir. Je citerai ainsi, mais il y a bien d'autres exemples, un récent contrat en partenariat public-privé pour la construction d'un commissariat dans le Sud-Ouest, qui a été attribué à une PME novatrice et était d'un montant global inférieur au seuil que vous proposez. Je crois que la rédaction actuelle est équilibrée et préserve les intérêts des petites et moyennes entreprises.
    Enfin, un mot sur la qualité de la conception des bâtiments publics, à laquelle, naturellement, le Gouvernement est très attaché.
    Ce texte ne remet nullement en cause les dispositions de la loi architecture. Il permet simplement un marché global, de la conception à la maintenance. En cette « semaine du développement durable », nous mettons en oeuvre notre stratégie nationale dans ce domaine. Toutes les associations qui s'intéressent au sujet ont souligné que, actuellement, en raison de la dictature du moins-disant à laquelle la plupart du temps se soumettent les collectivités publiques lorsqu'elles ont à choisir le cocontractant, il est malheureusement impossible de prendre en compte des critères de durabilité exigeants en termes de qualité du bâti, d'économies d'énergie et d'isolation thermique. On voit les effets pervers liés à la séparation entre conception et maintenance. Dans la mesure où il s'agit d'équipements publics, il paraît tout à fait opportun dans bien des cas, tant pour le développement durable que pour d'autres objectifs, d'intégrer dès la conception les demandes des destinataires de l'équipement et de prendre en compte les impératifs de maintenance.
    Pour toutes ces raisons, le Gouvernement ne souhaite pas voir modifier un texte qui paraît équilibré, étant bien entendu que nous avons compris les légitimes préoccupations exprimées quant à l'accès équitable à ces marchés des architectes, des artisans et des petites et moyennes entreprises. Nous sommes donc défavorables à ces amendements.
    M. le président. La parole est à M. Jérôme Lambert.
    M. Jérôme Lambert. Monsieur le président, c'est sans plaisir que le groupe socialiste votera ces amendements.
    M. Lionnel Luca. Quelle souffrance !
    M. Hervé Novelli. Là où il y a de la gêne, il n'y a pas de plaisir !
    M. Jérôme Lambert. En effet, ils n'ont pour effet que de limiter aux plus grosses réalisations la prévention des risques soulignés dans les exposés sommaires. Nous sommes ici pour simplifier le droit : or il nous a été dit que, finalement, l'article 4 était une proposition nouvelle venant s'ajouter aux autres.
    Il semble ainsi que, loin de simplifier, on ne soit en train d'ajouter un texte supplémentaire au code des marchés publics.
    M. Jean Leonetti. On ne pourra donc jamais rien ajouter ?
    M. le président. La parole est à M. Denis Merville.
    M. Denis Merville. Monsieur le secrétaire d'Etat, nous vous avons entendu. Je ne peux pas suivre M. Lambert quand il nous dit que ce texte vient compliquer les choix, alors que votre souci permanent est de le simplifier. Vous avez pris en compte notre demande de voir ces marchés librement accessibles à toutes les entreprises, en particulier aux entreprises artisanales.
    Ayant toutes les raisons de vous faire confiance, je suis prêt pour ma part à retirer mon amendement, sachant que, si nous n'étions pas entendus, nous pourrions toujours déposer une proposition de loi.
    M. le président. L'amendement n° 10 est retiré.
    La parole est à M. Philippe Armand Martin.
    M. Philippe Armand Martin. M. le secrétaire d'Etat nous a en partie donné satisfaction. Il nous a fait comprendre qu'il fallait préserver les petites entreprises et les artisans qui se trouveraient dans une situation classique de dépendance et de sous-traitance. Je préfère retirer mon amendement. Nous verrons en effet, dans un avenir proche, s'il est utile de rédiger une proposition de loi.
    M. le président. L'amendement n° 6 est retiré.
    Je mets aux voix l'amendement n° 2.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 4.
    (L'article 4 est adopté.)

Article 5

    M. le président. « Art. 5 - I. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures modifiant le code général des impôts et le livre des procédures fiscales pour :
    « 1° Abroger les dispositions fiscales devenues sans objet et adapter celles qui sont obsolètes ;
    « 2° Elargir les possibilités et assouplir les modalités d'option pour des régimes fiscaux spécifiques ;
    « 3° Simplifier les démarches des usagers en allégeant ou supprimant des formalités de déclaration ou de paiement de certains impôts et simplifier les modalités de recouvrement de l'impôt par l'administration fiscale ;
    « 4° Supprimé ;
    « 5° Clarifier la formulation d'actes administratifs résultant de dispositions de forme législative et relative à l'assiette ou au recouvrement de l'impôt ;
    « 6° Supprimé.
    « II. - Les ordonnances prises dans le cadre du présent article ne pourront donner lieu à des dépenses fiscales nouvelles. »
    MM. Luca, Gorges, Novelli et Fourgous ont présenté un amendement, n° 3, ainsi rédigé :
    « Rétablir le 6° du I de l'article 5 dans la rédaction suivante :
    « 6° Respecter le principe de la présomption d'innocence en matière fiscale. »
    La parole est à M. Lionnel Luca.
    M. Lionnel Luca. Puisqu'il est question de simplifier la vie des usagers et d'améliorer leurs relations avec l'administration fiscale, il me semble important de rappeler dans l'article 5 un principe de base que l'on est parfois tenté d'oublier et qui figure dans l'exposé des motifs de la loi sur la présomption d'innocence, au sene pénal du terme. C'est parce que la personne poursuivie est présumée innocente qu'elle doit bénéficier des droits de la défense et du principe du contradictoire qui lui garantissent un procès équitable. C'est également en raison de la présomption d'innocence que les mesures de contrainte dont elle peut faire l'objet, comme la garde à vue ou la détention provisoire, doivent être proportionnées à la gravité de l'accusation, limitées aux strictes nécessités de la procédure et contrôlées ou autorisées par l'autorité judiciaire, gardienne des libertés individuelles.
    Or, bien souvent, le citoyen peut avoir le sentiment que, dès lors qu'il est contribuable, il est plus mal traité par l'administration fiscale qu'un délinquant, voire un criminel, et que ceux-ci bénéficient de davantage, sinon de considération, du moins de respect, respect que l'on doit d'ailleurs à tout citoyen tant qu'on n'a pas démontré et prouvé sa culpabilité. Chacun a entendu de ces histoires qui, trop souvent, se terminent mal. Qui ne connaît le cas d'un petit commerçant qui s'est suicidé ? Qui n'a entendu des citoyens parler des abus d'autorité ou de pouvoir dont ils avaient été victimes ? Certes, la situation s'est bien améliorée, et la loi du 8 juillet 1987 allait dans le bon sens, mais il me semblerait naturel que le principe de la présomption d'innocence soit réaffirmé dans ce texte sur la simplification et l'amélioration des relations de l'administration avec l'usager. A vrai dire, au terme d'« usager » - qui, c'est vrai, est déjà un progrès par rapport à celui d'« administré » - , je préfère celui de « citoyen », où la notion d'individu est plus présente : l'usager n'est qu'un consommateur, il n'est pas considéré en tant qu'être humain. Si l'on considère donc que le contribuable est un citoyen responsable, il doit être sanctionné lorsqu'il commet une faute, mais le simple fait qu'il soit détenteur d'une certaine masse fiscale ne doit pas préjuger automatiquement le résultat. Il importe de rétablir l'équilibre. Dans peu de temps, d'ailleurs, se tiendra dans nos murs un colloque intitulé « Rétablir l'équilibre entre l'administration fiscale et le citoyen », auquel participeront tant des universitaires que des parlementaires. C'est bien la preuve que cette précision s'impose. On peut considérer qu'elle est inutile, car redondante avec ce qui existe déjà : dans ce cas, il n'y aurait pas grand dommage à l'inscrire dans la loi. Chacun serait satisfait et les citoyens verraient que nous nous sommes préoccupés de leur situation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Etienne Blanc, rapporteur. La commission a donné un avis favorable à cet amendement, malgré l'avis négatif du rapporteur. En quelques mots, je voudrais rappeler les raisons pour lesquelles je m'étais prononcé ainsi.
    On peut en effet considérer que satisfaction a d'ores et déjà été donnée à ceux qui souhaitent que soit instaurée une présomption d'innocence. La loi de juillet 1987 a modifié de manière extrêmement significative les droits du contribuable lorsqu'il subit une vérification fiscale et un redressement. Je rappelle que ce texte a inversé la charge de la preuve. Aujourd'hui, c'est bien à l'administration fiscale qu'incombe d'apporter la preuve de la réalité de la créance fiscale. Dès lors, on peut penser que le principe même de l'amendement est satisfait.
    En outre, l'article L. 10 du livre des procédures fiscales impose, dans le cadre du redressement, la remise d'une charte expliquant très clairement les droits de la personne qui subit le contrôle et est éventuellement débitrice, ses droits à recours, les mesures et les procédures qui garantissent ces droits, le caractère contradictoire de la procédure de redressement fiscal. Dans ces conditions, j'estime que cet amendement est satisfait et superfétatoire.
    Enfin, je ferai une observation d'ordre juridique. A mes yeux, le terme de « présomption d'innocence » relève du droit pénal et non du droit fiscal.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Il n'est pas adapté !
    M. Etienne Blanc, rapporteur. L'article 9 du code civil fait référence à la « présomption d'innocence », ce que les rédacteurs de l'amendement n'ont d'ailleurs pas manqué de mentionner. Il s'agit de permettre à une personne réputée innocente de ne pas voir sa culpabilité annoncée dans la presse par anticipation. Toutefois, l'expression relève du code civil, non des procédures fiscales. C'est pourquoi je considère à titre personnel que cet amendement doit être rejeté.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Les auteurs de l'amendement considèrent sans doute que le petit chef d'entreprise...
    M. Jérôme Lambert. Le pauvre chef d'entreprise !
    M. Pascal Clément, président de la commission. ... l'artisan, le commerçant qui pourrait faire l'objet d'une vérification approfondie a le sentiment d'avoir le dessous. C'est pourquoi ils proposent, pour des raisons tout a fait dignes d'éloges sur le plan psychologique, de corriger ce qui est ressenti comme une inégalité.
    M. Hervé Novelli. Tout à fait ! Vous avez bien compris !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Je partage ce souci et le trouve admirable.
    Toutefois, vous admettrez que la commission des lois fait d'abord du droit et accessoirement de la psychologie. L'expression « présomption d'innocence » évoque une situation où c'est le juge d'instruction qui intervient, et non l'administration fiscale. L'expression « présomption de bonne foi » aurait été mieux adaptée à la situation fiscale.
    Je ne nie pas qu'une déclaration volontairement falsifiée représente un délit. Néanmoins, elle n'est pas concernée par la notion juridique de présomption d'innocence, et l'expression, vraiment mal choisie, paraît blessante pour l'administration fiscale. Loin d'aider, comme vous le souhaitez, à rétablir l'équilibre psychologique en faveur du contribuable, qui devient tout à coup le « bénéficiaire » d'une vérification, vous risquez de montrer du doigt le fonctionnaire. Vous iriez ainsi à l'inverse du but visé.
    C'est pourquoi, mes chers collègues, après le rapporteur, je souhaite que l'Assemblée ne suive pas la commission des lois et repousse cet amendement qui n'est pas rédigé comme il se doit sur le plan juridique, et qui, même s'il correspond à un souci commun à toute l'Assemblée, pourrait aller, je le répète, à l'encontre du but visé.
    M. Etienne Blanc, rapporteur. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Pour les raisons excellemment exposées par le rapporteur et le président de la commission des lois, le Gouvernement ne souhaite pas que votre assemblée adopte cet amendement. Mais, en tant que secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat, et devant mon collègue Renaud Dutreil, dont la présence atteste l'importance que revêt pour lui ce projet, et qui est, en raison de ses fonctions au sein du Gouvernement, particulièrement attaché à l'équité fiscale et à l'égalité dans le dialogue entre le contribuable et l'administration, je voudrais remercier les auteurs de cet amendement d'avoir rappelé la détresse de beaucoup de contribuables, broyés par un système administratif qu'ils ne comprennent pas et qui peut, il est vrai, provoquer de graves injustices.
    Comme vous l'avez dit vous-même, d'ailleurs, monsieur Luca, cet amendement a une force symbolique, et cette réaffirmation de la présomption d'innocence en matière fiscale ne prétendait pas être d'une parfaite exactitude juridique. Vous me permettrez donc de l'interpréter comme une invitation faite au Gouvernement à agir pour améliorer le dialogue entre le contribuable et l'administration fiscale et à simplifier encore notre code des impôts ainsi que le livre des procédures fiscales. Il va de soi que le Gouvernement partage ce voeu.
    J'ajouterai qu'il serait à mon sens contradictoire de voter une disposition qui est en partie un texte d'affichage alors que l'exposé des motifs de la loi invite à clarifier la rédaction des textes et à ne plus voter que les lois indispensables, afin de favoriser leur intelligibilité et de renforcer leur autorité. Pour toutes ces raisons, le Gouvernement demande à l'Assemblée de rejeter cet amendement, même s'il en partage l'inspiration.
    M. le président. La parole est à M. Jérôme Lambert.
    M. Jérôme Lambert. Le groupe socialiste tient à remercier les auteurs de cet amendement de l'hommage qu'ils ont rendu au principe de la présomption d'innocence. Nous avions d'ailleurs été très nombreux, je tiens à vous le rappeler, mes chers collègues, à adopter ce principe lors de la première lecture du texte,...
    M. Jean Leonetti. Une mauvaise loi !
    M. Jérôme Lambert. ... et seuls quelques-uns d'entre vous s'étaient abstenus.
    M. Jean Leonetti. Intelligemment !
    M. Jérôme Lambert. Mais il est toutefois un point qui m'inquiète et qui nous empêche de voter cet amendement. En effet, on lit dans l'exposé sommaire - trop sommaire, peut-être, mais néanmoins assez clair - la phrase suivante : « Dans le code des impôts, article ( ), l'administration fiscale utilise tout moyen légal pour contrôler la fiscalité (saisies, perquisitions,...) laissant supposer que le contribuable est coupable, ce qui est contraire à la présomption d'innocence. »
    Est-ce à dire que, si cet amendement est adopté dans la rédaction qui nous est proposée, compte tenu de ce qui figure clairement dans l'exposé sommaire qui lui est joint, vous supprimerez à l'administration fiscale toute possibilité effective de contrôle ? Si c'est le cas, mes chers collègues, bien que nous soyons les premiers à respecter la présomption d'innocence, il est clair que nous ne pouvons vous suivre.
    M. le président. La parole est à M. Hervé Novelli.
    M. Hervé Novelli. Je souhaite tout d'abord rendre hommage au courage et à l'abnégation du rapporteur et du président de la commission des lois qui, bien qu'ayant été mis en minorité au sein de leur commission, ont malgré tout tenu à défendre leur position. Ce n'est pas si fréquent et je tenais à ce que ce soit relevé. (Sourires.)
    M. Jérôme Lambert. Ils sont en service commandé !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Quatre contre trois, c'est vrai, c'est courageux !
    M. Hervé Novelli. Pour M. le rapporteur, ce que nous proposons figure déjà dans notre droit, et notre amendement est superflu ! De plus, comme l'a indiqué Pascal Clément, l'expression employée est impropre. Mais ce qui va sans dire va encore mieux en le disant. Notre collègue Luca a donc proposé cet amendement, considérant utile de rappeler certaines évidences. De nombreux députés ont dit que le contribuable se sentait parfois coupable. Ce n'est ni une notion ni un argument juridiques. Nous tenons néanmoins à réaffirmer un principe qui doit être au centre des préoccupations de l'administration fiscale comme de celles de toutes les administrations. Cet amendement doit être adopté pour ce caractère symbolique, au-delà d'une rédaction peut-être impropre, des querelles ou des arguties juridique, il faut envoyer un signal.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous avez indiqué que vous souhaitiez prendre ce signal en compte ; je préfère qu'il soit intégré dans la loi. Ce n'est pas que je ne vous fasse pas confiance, mais puisque nous cherchons à améliorer les relations entre le contribuable et l'administration, ne craignons pas de faire figurer cette notion dans la loi : nous ne nous en sentirons que mieux et les contribuables seront sans doute rassurés.
    M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez.
    M. Gilles Carrez. Malgré la sincérité et la puissance de conviction de notre collègue Novelli, je partage totalement l'excellente analyse juridique qui a été faite par le rapporteur et par le président de la commission des lois.
    Mais je voudrais ajouter un point et vous donner quelques informations tendant à montrer que la protection du contribuable par rapport à l'administration fiscale et à l'Etat est pour nous un impératif.
    La commission des finances a confié à notre collègue Jean-Yves Cousin une mission, à laquelle il travaille d'arrache-pied, qui a pour objet de remettre en cause la relation profondément inégale et dissymétrique entre le contribuable et l'administration fiscale, dans les cas, par exemple, où il y a des intérêts de retard. Lorsque ceux-ci sont en faveur de l'Etat, ils sont de 0,75 % par mois. Par contre, si l'Etat doit de l'argent au contribuable, c'est l'intérêt du marché qui est pris en compte. Il faut également mieux protéger le contribuable du point de vue des pénalités fiscales. Celles-ci sont multiples, aléatoires, parfois discrétionnaires, et doivent faire l'objet d'un double travail, de simplification, d'une part, mais aussi et surtout, de protection.
    Tout cela est en cours, et sur ce point très important, sur lequel il est réellement nécessaire de rééquilibrer le rapport entre le contribuable et l'administration, je souhaiterais que M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat, nous confirme que ce travail de notre collègue Jean-Yves Cousin sera bien pris en compte dans l'ordonnance, autrement dit que notre collègue sera associé au travail de préparation de l'ordonnance de simplification fiscale.
    Si j'en ai l'assurance, je suis tout à fait prêt à suivre le raisonnement du président de la commission des lois et du rapporteur.
    M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca.
    M. Lionnel Luca. Je voudrais d'abord dire à nos collègues socialistes que je n'approuve pas forcément l'exposé sommaire tel qu'il a été rédigé, un peu à la hâte. Je ne voudrais pas qu'ils le prennent pour argent comptant et qu'ils oublient tout ce qui a été dit ici, en séance publique, par les collègues présents. Je veux donc les rassurer. Qu'ils ne se servent pas de cet exposé sommaire pour déployer une argutie un peu commode.
    M. Jérôme Lambert. Moi, je lis ce qui est écrit !
    M. Lionnel Luca. Ce qui m'engage ici, c'est ce que j'ai dit, et qui figurera au compte rendu, et non pas un argumentaire rapide.
    Deuxièmement, monsieur le secrétaire d'Etat, nous sommes là pour vous aider et non pas pour vous incommoder. Je suis bien conscient que des pressions diverses et variées agitent certains temples bien connus qui se sentent inquiets, mais je rappelle que ce texte a pour objet d'habiliter le Gouvernement à simplifier et codifier le droit par ordonnances. A partir de là, ce que nous vous proposons d'ajouter, c'est juste une phrase : « Respecter le principe de la présomption d'innocence en matière fiscale. » Après, il vous appartiendra, par ordonnance, justement de confirmer, de nuancer, de relativiser. C'est la raison pour laquelle je ne comprends pas que cette petite phrase, qui, pour M. le rapporteur, ne fait que rappeler une évidence, susciter un débat aussi fondamental.
    A ce propos, je voudrais évoquer l'article 7, qui simplifie les démarches des Français nés hors de France. Ils ont beaucoup de difficultés avec l'administration : quand ceux qui sont nés à Alger, Oran ou Tunis se présentent à un service de l'état civil, on leur demande de démontrer qu'ils sont bien français, et ce alors même qu'ils ont déjà une carte d'identité française. Eh bien, j'ai le plaisir de vous montrer deux lettres, l'une du cabinet de M. Vaillant, datée du 29 novembre 2001, l'autre du cabinet de M. Sarkozy, datée du 21 novembre 2002 : elles disent exactement ce que dit votre texte, monsieur le secrétaire d'Etat, à l'article 7, lequel reprend une circulaire de janvier 2000, qui malheureusement n'est jamais appliquée par les services préfectoraux - ou en tout cas très mal - ni par certains services de l'état civil.
    Je pense donc qu'il est nécessaire que même ce qui va sans dire soit dit. Et puisqu'il s'agit d'une affaire de principe, et comme il vous appartiendra ensuite de codifier la disposition que nous vous proposons, je ne vois vraiment pas ce qui permettrait de refuser ce que nos concitoyens attendent de manière très précise. Ils ne manqueront pas de regarder attentivement qui est pour et qui est contre une proposition qui montre qu'on les respecte en tant que contribuables et citoyens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Monsieur Luca, monsieur Novelli, le Gouvernement, je le répète, partage votre objectif d'aboutir à des relations plus équitables et plus équilibrées entre les contribuables et l'administration.
    M. Jean-Michel Fourgous. Merci !
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Mais les termes de l'amendement que vous proposez sont très généraux et très imprécis. Ils aboutissent à une extension de la loi d'habilitation telle qu'elle modifierait l'équilibre du texte et que celui-ci encourrait sans doute un risque d'inconstitutionnalité.
    M. Jérôme Lambert. Merci de le rappeller !
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Mais ce que je voudrais rappeler à la majorité, c'est que le Gouvernement est engagé dans une entreprise de simplification qui ne s'arrête pas au présent texte. La volonté du Premier ministre et de l'ensemble du Gouvernement est de proposer régulièrement au Parlement l'adoption d'ordonnances pour simplifier la vie des Français.
    Je veux aussi répondre à la demande très précise de Gilles Carrez concernant les conclusions de la mission confiée à M. Jean-Yves Cousin, qui abordera de façon très concrète, par exemple, le problème des intérêts de retard et celui des pénalités. Il va faire des propositions tendant à rééquilibrer les relations entre les contribuables et l'administration pour aller dans le sens de la présomption d'innocence, comme vous l'entendez. Les propositions du rapport Cousin seront prises en compte - j'en prends l'engagement - dans le cadre du prochain train d'ordonnances pour lesquelles nous vous demanderons une habilitation, très probablement dès la prochaine session, puisqu'il y aura une deuxième loi d'habilitation visant à simplifier la vie des Français et à améliorer les relations entre l'administration et nos concitoyens. Car vous avez raison, monsieur Luca, de préférer le mot de citoyen à celui d'administré ou d'usager.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 5.
    (L'article 5 est adopté.)

Articles 6 bis, 6 ter, 8, 11 et 12

    M. le président. « Art. 6 bis. - Le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance des mesures de simplification des procédures de concertation administratives relatives aux travaux d'aménagement de l'Etat, des collectivités territoriales ou des établissements publics, pour favoriser la déconcentration des décisions et abréger les délais d'instruction. »
    Je mets aux voix l'article 6 bis.
    (L'article 6 bis est adopté.)
    « Art. 6 ter. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures visant à préciser la situation des délégués du Médiateur de la République en complétant l'article 6-1 de la loi n° 73-6 du 3 janvier 1973 instituant un Médiateur de la République. » - (Adopté.)
    « Art. 8. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes dispositions concourant à l'actualisation, à la clarification et à la simplification des modalités de création, de fonctionnement et de dissolution ainsi que des règles budgétaires, comptables et financières applicables aux associations syndicales de propriétaires régies en tout ou partie par la loi du 21 juin 1865 sur les associations syndicales et à leurs unions ainsi qu'à l'association départementale régie par la loi du 27 juillet 1930 sur l'aménagement du système d'endiguement et d'assainissement des plaines de l'Isère, du Drac et de la Romanche. » - (Adopté.)
    « Art. 11. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution et afin d'alléger les procédures ainsi que les formalités qui doivent être accomplies par les usagers bénéficiaires de prestations sociales, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures pour :
    « 1° Permettre le choix de la caisse d'assurance maladie versant les prestations en nature pour les assurés sociaux exerçant à la fois une activité salariée et une activitée non salariée ;
    « 2° Assouplir les conditions de rachat des rentes d'accident du travail ;
    « 3° Simplifier le mode de calcul des indemnités journalières versées au titre des accidents du travail et maladies professionnelles ;
    « 4° Supprimer la procédure d'enquête mentionnée à l'article L. 442-1 du code de la sécurité sociale ;
    « 4° bis Etendre le système de transmission électronique en vigueur pour la branche maladie aux prestations de la branche accidents du travail et maladies professionnelles ;
    « 5° Simplifier la réglementation des prestations constitutives du minimum vieillesse ;
    « 6° Modifier la procédure permettant aux organismes d'assurance maladie d'être les garants des intérêts financiers des assurés sociaux dans le cadre de la réglementation des prix des produits inscrits sur la liste prévue par l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale ;
    « 7° Simplifier et harmoniser les conditions d'indemnisation d'une perte de revenus d'activité ou des frais de remplacement du conjoint collaborateur dans le cas d'une interruption de l'activité ou de la collaboration due à la maladie, à la maternité ou au décès ;
    « 8° Simplifier et harmoniser les règles de prise en charge des soins, frais médicaux, pharmaceutiques, d'appareils et d'hospitalisation dispensés à la mère, au père ou à l'enfant, relatifs à l'examen prénatal, à la grossesse, à l'accouchement et à ses suites, ainsi qu'à la naissance ;
    « 9° Faciliter l'accès des assurés sociaux et de leurs ayants droit aux prestations de santé délivrées dans les autres Etats membres de l'Union européenne. » - (Adopté.)
    « Art. 12. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution et afin de favoriser la participation des électeurs aux opérations électorales, le Gouvernement est autorisé à modifier par ordonnance les dispositions législatives applicables en matière électorale pour assouplir les conditions d'exercice du vote par procuration ainsi que les critères d'inscription des Français et des Françaises établis hors de France sur la liste électorale d'une commune afin que tout Français établi hors de France puisse exercer ses droits de citoyen. » - (Adopté.)

Après l'article 12

    M. le président. M. Lagarde a présenté un amendement, n° 1, ainsi rédigé :
    « Après l'article 12, insérer l'article suivant :
    « Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures nécessaires pour que soient inscrites d'office sur la liste électorale de la commune de leur domicile réel les personnes qui remplissent la condition d'âge ou la rempliront avant la prochaine clôture définitive des listes électorales, sous réserve qu'elles répondent aux autres conditions prescrites par la loi. »
    La parole est à M. Rodolphe Thomas, pour soutenir cet amendement.
    M. Rodolphe Thomas. Je le retire.
    M. le président. L'amendement n° 1 est retiré.

Articles 12 bis et 14

    M. le président. « Art. 12 bis - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution et afin de favoriser la participation de tous les citoyens de l'Union européenne aux élections de 2004 au Parlement européen dans l'Europe élargie, le Gouvernement est autorisé à modifier par ordonnance les dispositions législatives applicables en matière électorale pour permettre aux ressortissants des Etats candidats à l'adhésion à l'Union européenne de participer aux élections de 2004 des membres du Parlement européen. »
    Je mets aux voix l'article 12 bis.
    (L'article 12 
bis est adopté.)
    « Art. 14. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures pour :
    « 1° Simplifier et harmoniser les modalités d'organisation et de contrôle, ainsi que la procédure contentieuse, applicables aux élections aux chambres de commerce et d'industrie, aux tribunaux de commerce et aux tribunaux paritaires des baux ruraux, aux élections prud'homales et aux élections à la mutualité sociale agricole ;
    « 2° Alléger les formalités nécessaires à l'établissement des fichiers électoraux et permettre, dans le respect des règles de protection de la liberté individuelle et de la vie privée établies par la législation relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, la mise en oeuvre du vote électronique pour les élections aux chambres de commerce et d'industrie, aux chambres de métiers, aux chambres d'agriculture, aux tribunaux paritaires des baux ruraux et pour les élections prud'homales ;
    « 3° Adapter le mode de scrutin et la durée des mandats afin d'alléger les opérations électorales pour la désignation des membres des chambres de commerce et d'industrie, des délégués consulaires et des juges des tribunaux de commerce et des tribunaux paritaires des baux ruraux ;
    « 4° Modifier la composition du corps électoral pour les élections aux chambres de commerce et d'industrie et aux tribunaux de commerce, ainsi que les conditions d'éligibilité ;
    « 5° Simplifier la composition des chambres de commerce et d'industrie.
    « Il est autorisé, dans les mêmes conditions :
    « a) A proroger, au plus tard jusqu'au 31 décembre 2004, le mandat des délégués consulaires, des membres des chambres de commerce et d'industrie et des tribunaux de commerce ;
    « b) A proroger, au plus tard jusqu'au 31 décembre 2008, le mandat des conseillers prud'hommes. » - (Adopté.)

Article 16

    M. le président. « Art. 16. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, et afin de simplifier l'organisation et le fonctionnement du système de santé, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures pour :
    « 1° Simplifier la répartition des compétences relatives aux établissements de santé et organismes exerçant les missions des établissements de santé par le transfert de compétences détenues par le ministre ou le préfet au directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation ;
    « 2° Réorganiser la planification sanitaire régionale et prolonger dans la limite de deux années maximum les schémas d'organisation sanitaire qui doivent être révisés ;
    « 3° Simplifier le régime des autorisations des activités de soins et équipements matériels lourds, aligner la durée des autorisations sur celle du schéma régional d'organisation sanitaire, réviser les autorisations devenues, de ce fait, incompatibles avec ce schéma et supprimer l'autorisation exigée pour les lits et places d'hospitalisation ainsi que les doubles régimes d'autorisation applicables aux maisons d'enfants à caractère sanitaire et aux établissements recevant des femmes enceintes ;
    « 4° Réduire le nombre des formules de coopération sanitaire et les simplifier, modifier le régime juridique du groupement de coopération sanitaire et faciliter les alternatives à l'hospitalisation ;
    « 5° Harmoniser les informations transmises à l'autorité de tarification relatives aux comptes des établissements de santé, afin de faciliter l'évaluation des besoins en matière d'investissement ;
    « 6° Permettre l'intervention des sociétés d'économie mixte locales, des sociétés anonymes et des offices publics des habitations à loyer modéré et des offices publics d'aménagement et de construction dans la conception, la réalisation, l'entretien et la maintenance d'équipements hospitaliers ou médico-sociaux ainsi que, le cas échéant, leur financement par des sociétés d'économie mixte locales, pour les besoins des établissements publics de santé ;
    « 6° bis Simplifier les modalités de versement des honoraires de l'activité libérale à l'hôpital des praticiens hospitaliers ;
    « 7° Supprimé ;
    « 8° Simplifier les procédures d'enregistrement des professionnels de santé et des vétérinaires ;
    « 9° et 10° Supprimés ;
    « 11° Simplifier l'organisation de la permanence des soins et de l'aide médicale urgente en élargissant à la permanence des soins le rôle du comité départemental de l'aide médicale urgente et des transports sanitaires. »
    M. Evin et M. Jean-Marie Le Guen ont présenté un amendement, n° 11, ainsi rédigé :
    « Compléter le 6° de l'article 16 par les mots : ", des établissements médico-sociaux et des groupements de coopération sanitaire. »
    La parole est à M. Claude Evin.
    M. Claude Evin. Le 6° de l'article 16 tend à autoriser les établissements publics de santé à recourir éventuellement, pour la conception, la réalisation, l'entretien ou la maintenance d'équipements hospitaliers, à une société d'économie mixte. Or il me semble qu'au moins trois cas de figure ne sont pas envisagés, qui nécessiteraient aussi que ces établissements puissent avoir recours aux sociétés d'économie mixte, avec les mêmes objectifs.
    Notamment, monsieur le secrétaire d'Etat, il est indiqué que ces établissements peuvent avoir recours à des sociétés d'économie mixte pour des « équipements hospitaliers ou médico-sociaux ». Cette formulation implique que nous offrions aux établissements médico-sociaux la possibilité d'avoir recours aux sociétés d'économie mixte.
    Par ailleurs, dans le 4° du même article, la rédaction permet d'étendre les formules de regroupement d'établissements de santé, publics et privés. Il s'agit en fait d'étendre la notion de groupement de coopération sanitaire en en faisant un outil unique, ce qui s'avère en effet très utile pour permettre une telle coopération. Il faut donc prévoir que le groupement de coopération sanitaire puisse éventuellement avoir recours aux sociétés d'économie mixte. Je pense pour ma part que la notion de GCS est tout à fait utile. Je vous avais d'ailleurs interpellé pour vous demander justement de reconnaître le GCS comme établissement public. Dans les ordonnances en cours d'élaboration, je crois savoir que cela n'est pas prévu, et je le regrette. Mais je crains que l'on pousse à la création de groupements de coopération sanitaire regroupant des établissements publics et privés, participant au service public ou non, alors que ceux-ci ne pourront pas avoir recours à des sociétés d'économie mixte. Cela me semble être une carence, à laquelle il faudrait remédier.
    Enfin, je voudrais attirer l'attention de la présidence sur le fait que la rédaction de l'amendement que j'avais déposé était autre que celle que j'ai sous les yeux dans l'amendement n° 11 qui a été distribué. Je proposais en effet, de remplacer les mots « des établissements publics de santé » par les mots « des établissements de santé, des établissements médico-sociaux et des groupements de coopération sanitaire ». Par inadvertance sans doute, les mots « des établissements publics de santé » ont été conservés dans l'amendement distribué en séance. La cohérence de l'amendement que je propose nécessite qu'on supprime la notion d'établissement public. Gardons seulement la notion d'établissement de santé, permettant ainsi aux établissements, qu'ils soient publics ou privés, d'avoir recours aux sociétés d'économie mixte.
    Je voudrais donc, monsieur le président, rectifier l'amendement n° 11, qui doit se lire ainsi :
    « A la fin du 6° de l'article 16, substituer aux mots : "des établissements publics de santé, les mots : "des établissements de santé, des établissements médico-sociaux et des groupements de coopération sanitaire ».
    Cet amendement, mes chers collègues, a pour but de répondre à des projets qui existent déjà au sein de nos communes et de nos agglomérations, projets visant à faciliter le recours à l'investissement hospitalier. Par ailleurs, cet amendement a emporté l'adhésion de la Fédération hospitalière de France, qui est attachée au développement de cet investissement. Il me semblerait donc tout à faire utile qu'il soit adopté par notre assemblée.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Etienne Blanc, rapporteur. La commission a donné un avis négatif sur cet amendement, ainsi que sur l'amendement n° 12.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Je voudrais dire à M. Evin, dont l'expertise en ce domaine est bien connue, que ses amendements rejoignent en partie la rédaction initiale du texte. Mais le Sénat, inquiet de la fragilité de la situation financière de certaines sociétés d'économie mixte, a souhaité limiter les possibilités ouvertes aux groupements de coopération sanitaire et aux établissements de santé. C'est pourquoi le Gouvernement préfère en rester à la rédaction actuelle, sachant, monsieur Evin, qu'une expertise conjointe du ministère de l'intérieur et du ministère de la santé va approfondir ces points avant qu'une décision définitive soit prise.
    M. le président. La parole est à M. Claude Evin.
    M. Claude Evin. Tout d'abord, je suis absolument navré de la réponse lapidaire du rapporteur. Soit le problème que je pose est un vrai problème, auquel cas il faut en débattre, soit il n'en est pas un, et alors il faut argumenter. Je le répète, dans plusieurs communes, quelle que soit leur couleur politique, des projets ne pourront pas être réalisés, faute de cet outil.
    Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, l'amendement que je présente n'est pas celui sur lequel vous venez de répondre. L'amendement n° 12 tend à rétablir une disposition supprimée par le Sénat. L'amendement n° 11 est différent : il complète le dispositif proposé au départ par le Gouvernement, et qui a d'ailleurs fait l'objet d'une amélioration par le Sénat, sans entrer en contradiction ni avec le texte initial ni avec celui adopté par le Sénat. Il s'agit d'autoriser le recours aux sociétés d'économie mixte locales, non seulement pour les hôpitaux publics, mais aussi pour les groupements de coopération sanitaire et les établissements privés de santé, notamment dans le cadre d'actions de coopération qui pourraient être menées par des établissements ne décidant pas de se regrouper dans un groupement de coopération sanitaire. Je maintiens que le fait de ne pas inscrire cette possibilité dans la la loi d'habilitation vous posera un problème lors de la rédaction des ordonnances.
    Le 4° de l'article 16 permet d'étendre - et c'est une bonne chose, je le répète - le champ du groupement de coopération sanitaire, mais vous ne lui donnez pas, au 6°, l'autorisation de recourir à des sociétés d'économie mixte. J'insiste là sur une contradiction. Libre à vous de ne pas en tenir compte. J'aurai posé le problème. Si cela permet au Sénat de le résoudre, après tout, pourquoi pas ? Mais je regrette profondément que l'on ne puisse pas avancer sur cette question.
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Ma réponse, monsieur Evin, valait pour les deux amendements n°s 11 et 12. Le Gouvernement s'interroge sur ces points, qui vont faire l'objet d'une expertise, mais préfère en rester à l'état actuel de la rédaction.
    M. le président. Pour que les choses soient claires, je rappelle que l'amendement n° 11 de M. Evin est devenu l'amendement n° 11 rectifié.
    Il est ainsi rédigé :
    « A la fin du 6° de l'article 16, substituer aux mots : "des établissements publics de santé, les mots : "des établissements de santé, des établissements médico-sociaux et des groupements de coopération sanitaire. »
    Je mets aux voix l'amendement n° 11 rectifié.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Evin et M. Jean-Marie Le Guen ont présenté un amendement, n° 12, ainsi rédigé :
    « Rétablir le 7° de l'article 16 dans le texte suivant :
    « 7° Permettre la participation des établissements publics de santé, des établissements médico-sociaux au capital de sociétés d'économie mixte locales ayant pour objet exclusif la conception, la réalisation, l'entretien et la maintenance, ainsi que, le cas échéant, le financement d'équipements pour leurs besoins. »
    La parole est à M. Claude Evin.
    M. Claude Evin. M. le secrétaire d'Etat a déjà exprimé un avis négatif sur cet amendement. Il est différent de l'amendement précédent puisqu'il a pour objectif, en revenant au texte initial du Gouverment - à quelques exceptions près, le texte que je vous propose étant plus précis -, de permettre aux établissements publics de santé d'entrer dans le capital de sociétés d'économie mixte. Cette disposition avait été adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale. Le Sénat l'a supprimée, estimant qu'elle pouvait fragiliser les établissements publics de santé. Je crois qu'il faut effectivement être très clair de ce point de vue. L'amendement que je vous propose tend à bien préciser que la participation d'un établissement public de santé au capital d'une société d'économie mixte ne peut se réaliser que si cette société a pour objet exclusif la conception, la réalisation, l'entretien et la maintenance d'équipements. Naturellement, il ne serait pas possible de laisser un établissement public de santé s'engager dans des opérations qui n'auraient strictement rien à voir avec sa mission.
    L'amendement que je vous propose prend donc en compte les raisons de la position adoptée par le Sénat, tout en offrant aux établissements en question une possibilité qui est très attendue.
    D'autre part, à la différence de l'article qui avait été adopté par l'Assemblée en première lecture, la cohérence m'a conduit à donner la même possibilité aux établissements médico-sociaux. Mais il est bien évident qu'une telle possibilité devra se réaliser dans le cadre de leur mission exclusive.
    Pourquoi est-il nécessaire d'ouvrir cette possibilité ? Ce n'est certes pas la seule solution à proposer pour atteindre des objectifs d'investissement. Mais vous permettez au 6° de l'article 16 que des établissements puissent faire appel à des sociétés d'économie mixte totalement extérieures à l'établissement ; dans ce cas, l'établissement public de santé délègue à une société d'économie mixte et n'a plus la possibilité d'intervenir sur un certain nombre de décisions prises par cette dernière, par exemple pour la fixation des loyers, et il devient quasiment le « client » de la société d'économie mixte. Lui permettre de participer au capital de la société d'économie mixte, à condition qu'il s'agisse d'une société d'économie mixte dédiée, donnera au contraire à l'établissement de santé un pouvoir réel de partenariat à l'intérieur de la société d'économie mixte. Cette possibilité répondrait à la préoccupation d'un certain nombre d'établissements. Je connais personnellement des dossiers qui sont en attente et qui ne peuvent avancer, faute de cet outil.
    J'ai cru comprendre, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous souhaitiez un vote conforme, ce qui vous éviterait d'avoir à traiter les problèmes au fond. Je le regrette profondément, parce que ces sujets techniques ne donnent lieu à aucun débat droite-gauche. Vous allez empêcher un certain nombre de projets hospitaliers attendus de se réaliser.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Etienne Blanc, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 12. Elle préfère s'en tenir à la rédaction adoptée par le Sénat, lequel a supprimé le 7° de l'article 16 en considérant qu'une prise de participation par un établissement hospitalier dans une société d'économie mixte pouvait le cas échéant fragiliser celui-ci. C'est d'ailleurs au nom de la même logique que la commission a repoussé l'amendement n° 11.
    Compte tenu de la situation que connaissent un certain nombre de sociétés d'économie mixte, la commission n'a pas souhaité élargir leur champ d'activité tant que n'aura pas été réalisée une expertise précise des conséquences de cet élargissement. Il est vrai qu'on peut le regretter sous certains aspects, mais il n'en demeure pas moins que, d'un point de vue strictement financier, l'attitude du Sénat est parfaitement fondée.
    M. Claude Evin. Alors, il ne faut pas adopter le 6° de l'article !
    M. le président. Je rappelle que le Gouvernement a déjà donné un avis défavorable sur l'amendement n° 12.
    Je mets aux voix cet amendement.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 16.
    (L'article 16 est adopté.)

Articles 17 et 18

    M. le président. « Art. 17. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures nécessaires pour substituer des régimes déclaratifs à certains régimes d'autorisation administrative préalable auxquels sont soumises les entreprises et pour définir les possibilités d'opposition de l'administration, les modalités du contrôle a posteriori et les sanctions éventuelles. »
    Je mets aux voix l'article 17.
    (L'article 17 est adopté.)
    « Art. 18. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, et afin de réduire le nombre des enquêtes statistiques d'intérêt général obligatoires auxquelles les personnes morales de droit public et de droit privé, les entrepreneurs individuels et les personnes exerçant une profession libérale sont astreints, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures permettant :
    « 1° De déterminer les enquêtes statistiques qui doivent revêtir un caractère obligatoire ;
    « 2° Dans le respect de la législation relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :
    « a) D'organiser la cession aux services statistiques des données recueillies, dans le cadre de leurs missions, par les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics et les personnes morales de droit privé chargées d'une mission de service public ;
    « b) De définir les conditions d'exploitation de ces données à des fins de recherche scientifique. » - (Adopté.)

Article 19

    M.  le président. « Art. 19. - Dans les conditions prévues par l'article  38 de la Constitution, et afin d'alléger les formalités résultant de la législation sociale et fiscale, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures pour :
    « 1° Harmoniser les dispositions législatives relatives aux différents dispositifs d'allégement de cotisations sociales et réduire le nombre de ces dispositifs ;
    « 2° Créer un dispositif simplifié pour les déclarations d'embauche ainsi que pour les déclarations relatives au paiement des cotisations et contributions sociales des personnes salariées ;
    « 2° bis Créer un dispositif simplifié pour les bulletins de paie ;
    « 3° Réduire le nombre des déclarations sociales et fiscales ainsi que leur périodicité et simplifier leur contenu, par la mise en oeuvre de déclarations communes à plusieurs administrations ou services publics et accroître l'aide fournie par les organismes de protection sociale aux petites entreprises et aux associations pour l'accomplissement de leurs obligations déclaratives ;
    « 4° Permettre aux travailleurs non salariés non agricoles de bénéficier de services communs à plusieurs régimes et de s'adresser à un interlocuteur unique de leur choix pour l'ensemble des formalités et des paiements de cotisations et contributions sociales dont ils sont redevables à titre personnel ;
    « 5° Simplifier le mode de calcul des cotisations et contributions sociales des travailleurs non salariés non agricoles ainsi que réduire le nombre des versements ;
    « 6° Supprimé ;
    « 7° Permettre l'intervention mutualisée des fonds d'actions sociale pour le traitement des dossiers des travailleurs indépendants en difficulté et créer le cas échéant un fonds d'action sociale pour les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales ;
    « 8° Réformer le guichet unique pour le spectacle occasionnel institué par la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier et améliorer les informations transmises aux institutions visées à l'article L. 351-21 du code du travail, relatives à la vérification des obligations qui pèsent sur les employeurs des professions de la production cinématographique, de l'audiovisuel ou du spectacle, et à la vérification des droits des salariés relevant de ces professions au revenu de remplacement prévu à l'article L. 351-2 du même code ;
    « 9° Simplifier les modalités de remboursement par l'Etat des cotisations dues au titre de la protection sociale des volontaires prévu par l'article L. 122-14 du code du service national dans le cadre des conventions mentionnées à l'article L. 122-7 du même code. »
    La parole est à M. Hervé Novelli, inscrit sur l'article.
    M. Hervé Novelli. Je souhaite en effet intervenir sur l'article 19, dont le 4° vise à créer un guichet social unique.
    Je rappelle que cette création était prévue par un article de la « loi Dutreil » - et je salue d'ailleurs la présence au banc du Gouvernement de M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises. Cette disposition avait été introduite à l'initiative de Catherine Vautrin, rapporteure sur les aspects économiques du texte, et il s'agissait d'une innovation réclamée depuis très longtemps. Toutefois, le Sénat avait supprimé cette disposition au motif qu'elle figurerait dans le projet de loi d'habilitation. Soit ! Acceptons qu'il en soit ainsi, même si une ordonnance n'est pas une loi, mais ce n'est pas un débat que je veux rouvrir.
    En revanche, je tiens à souligner combien les parlementaires ont besoin d'être associés à la rédaction des ordonnances, afin que ne soit pas dénaturé ou rendu inapplicable ce que nous souhaitons.
    La création du guichet social unique soulève de telles difficultés qu'il a fallu réunir une mission d'expertise rassemblant trois corps d'inspection afin de remettre un rapport sur la faisabilité d'un tel organisme.
    Finalement, dans le projet de loi d'habilitation tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, puis amendé par le Sénat, il est prévu de permettre aux travailleurs non salariés non agricoles de bénéficier de services communs à plusieurs régimes et « de s'adresser à un interlocuteur unique de leur choix pour l'ensemble des formalités et des paiements de cotisations et de contributions sociales dont ils sont redevables à titre personnel ».
    Le débat se focalise sur le libre choix de cet interlocuteur. Aussi, je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous puissiez clairement expliquer ce que vous entendez voir figurer dans la future ordonnance. En effet, nous avons le sentiment qu'il y a un certain flottement en la matière - et vos mouvements de tête montrent que vous vous associez à mes propos -, lequel est sans doute dû à des réflexes corporatistes, à l'attitude de lobbies qui craignent que la création du guichet social unique ne soit contraire à leurs intérêts. Bref, y aura-t-il vraiment libre choix ?
    Aujourd'hui, plusieurs caisses semblent s'engager dans une démarche de rapprochement, et je m'en réjouis. J'y vois le signe que la volonté des parlementaires fait parfois avancer les choses un peu plus rapidement que l'administration ne le souhaite.
    Je rappelle tout de même que la loi sur l'initiative économique de 1994 avait fixé un délai de deux ans pour créer le guichet social unique. Nous sommes en 2003 ; les deux ans ont été quelque peu élastiques. Et encore a-t-il fallu que les parlementaires exercent une pression pour que l'on assiste à ces rapprochements.
    Comme plusieurs de nos collègues, j'aimerais donc que le Gouvernement s'explique. Il ne doit pas donner le sentiment de plier devant tel ou tel organisme collecteur, qui organiserait mieux son lobbying, et pas forcément pour le bien-être de ceux qui en dépendent - et vous voyez très bien à quoi je fais allusion.
    M. le président. Monsieur Novelli, vous avez remarqué que M. Dutreil a pris la peine de participer à ce débat. Je donne donc la parole à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, pour qu'il vous réponde.
    M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Mesdames, messieurs les députés, je tiens à rappeler que cette réforme est importante et que l'Assemblée nationale en a la paternité - la maternité, devrais-je dire, puisque c'est Catherine Vautrin qui, par le biais d'un amendement, en a eu l'initiative.
    Il s'agit d'un débat qui n'est pas nouveau, puisque plusieurs gouvernements ont essayé, en vain, de simplifier la vie des travailleurs indépendants. En fait, l'objectif à atteindre a une dimension économique évidente, puisque le guichet social unique vise à alléger le coût de fonctionnement des micro-entreprises. Le guichet unique a aussi une vocation sociale, car le plus pénalisé devant la complexité administrative n'est pas celui qui est assisté par un expert-comptable ou un avocat, mais celui qui est démuni sur les plans administratif, culturel ou financier. Il s'agit donc d'une mesure à caractère extrêmement social, qui s'adresse en particulier aux plus petites unités économiques de notre pays.
    L'amendement de Catherine Vautrin a suscité beaucoup d'émotion, car cette simplification induit une suppression d'emplois. Et supprimer des emplois, cela suscite immédiatement des réactions. Toutefois, il faut toujours se demander si, en supprimant des emplois à tel endroit, on n'en crée pas ailleurs.
    M. Hervé Novelli. C'est une loi économique !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Compte tenu de la vivacité des réactions après le vote de cet amendement - les URSSAF se sont mises en grève -, le Gouvernement a souhaité examiner le dossier de façon plus technique. A cette fin, il a confié une mission à plusieurs corps d'inspection.
    Cette mission a fait des propositions, en particulier celle du libre choix par le travailleur indépendant d'un organisme de recouvrement unique parmi plusieurs organismes agréés par l'Etat et offrant tous la même prestation. Cette collecte unique suppose une réforme très importante du fonctionnement de ces organismes, puisqu'elle implique une interconnexion des systèmes de collecte afin que celui qui entre par une porte puisse également être pris en compte par les autres organismes.
    Si nous renoncions au principe du libre choix, que se passerait-il ? C'est la question qu'Hervé Novelli pose, et il a raison de le faire. Dans un tel cas, le Gouvernement serait obligé de choisir lui-même un interlocuteur unique pour l'ensemble du territoire. Et l'on sait très bien qu'un tel système profiterait à ceux qui apparaissent comme les mieux outillés pour assurer ce travail de collecte : j'ai nommé les URSSAF. Est-ce là la volonté des députés qui sont à l'origine de l'amendement ?
    Mme Catherine Vautrin. Non !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennnes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. En effet, je n'en suis pas convaincu.
    Ce principe du libre choix est par essence libéral, puisque le choix revient au travailleur indépendant. Acquis aux principes de liberté, nous ne pouvons qu'y être favorables. Il est également utile, puisque l'ensemble des acteurs convergeront vers une solution d'intérêt général. Un tel principe est donc une condition clef de la réforme.
    J'ajoute - et c'est très important - que, grâce à l'Assemblée nationale, des acteurs qui jusqu'à présent étaient peu favorables à la réforme ont commencé à modifier leur position. Je veux ici les saluer, en particulier les présidents de la CANCAVA, de l'ORGANIC, de la CANAM, qui ont pris l'initiative de propositions extrêmement novatrices.
    Nous voici donc saisis d'une proposition totalement inédite depuis la création de la sécurité sociale, c'est-à-dire depuis plus d'un demi-siècle, qui consiste à créer un système de recouvrement propre aux travailleurs indépendants, baptisé régime social des indépendants, le RSI, lequel aboutirait à la fusion des trois grands organismes que sont la CANCAVA, l'ORGANIC et la CANAM.
    Ce serait là une véritable simplification administrative. D'abord, les indépendants verront leur régime consolidé, et nous considérons qu'ils ont droit à un régime de sécurité sociale distinct du régime général des salariés. Ensuite, un nouveau pôle va émerger, un pôle beaucoup plus intégré, beaucoup plus efficace en termes de performances administratives.
    La réforme que nous vous proposons aujourd'hui va donc presque au-delà de ce que nous avions imaginé à l'origine, puisqu'elle aboutira à une révolution dans l'organisation de la sécurité sociale pour les travailleurs indépendants.
    Pour que cette réforme réussisse, je souhaite qu'il y ait concomitance entre la possibilité pour le travailleur indépendant de choisir son interlocuteur unique et la mise en place du régime social des indépendants, parce que, à ce moment-là, le travailleur indépendant bénéficiera d'une véritable liberté de choix entre deux régimes efficaces : l'un probablement dirigé par le système que nous connaissions bien, celui des URSSAF ; l'autre qui sera le régime social des indépendants. Et peut-être même qu'un troisième choix s'offrira à lui.
    En tout cas, il aura une véritable liberté de choix entre deux systèmes compétitifs correspondant à la préoccupation qui nous anime, celle de la simplicité, mais également à la culture et à la philosophie des travailleurs indépendants, qui, vous le savez, sont attachés à la spécificité de leur système.
    Non seulement l'Assemblée nationale a fait un grand pas en avant, mais les acteurs concernés ont prouvé leur capacité à se réformer eux-mêmes. Il n'est pas si fréquent dans notre pays de voir des élus issus des secteurs de l'artisanat et du commerce, qui bien souvent sont individualistes, attachés à leurs prérogatives, proposer d'eux-mêmes une réforme allant au-delà de ce que souhaitaient le Parlement et le Gouvernement ; je tiens à saluer leur effort.
    Je sais que le chemin à parcourir sera long tant sur le plan technique que sur le plan politique, mais nous avons là une vraie réforme qui mérite d'être saluée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. L'amendement n° 7 n'est pas défendu.
    Mme Vautrin a présenté un amendement, n° 13, ainsi rédigé :
    « Compléter le 4° de l'article 19 par les mots : ", toutefois, pendant les trois premières années suivant la création de l'entreprise, ces formalités et paiements sont effectués auprès de l'organisme de retraite. »
    La parole est à Mme Catherine Vautrin.
    Mme Catherine Vautrin. Hervé Novelli a rappelé le contexte dans lequel nous avions été conduits à proposer la création du guichet social unique et souligné combien nous étions attachés à une telle réforme. J'ajoute que je partage l'analyse de M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises sur le sujet.
    L'amendement que je propose, qui s'inscrit dans la logique du texte relatif à l'initiative économique, vise à accompagner la démarche du travailleur indépendant lorsqu'il crée son entreprise, c'est-à-dire pendant la période où sa situation est la plus fragile, car, accaparé par cette création, il ne s'intéresse guère aux problèmes de retraite ou de cotisations diverses et variées.
    C'est la raison pour laquelle je propose, tout en respectant le principe du libre choix, que, durant, cette période de création, l'interlocuteur unique soit l'organisme chargé du régime de retraite.
    Nous le voyons bien actuellement, le problème des retraites est difficile à traiter. C'est notamment le cas des retraites des travailleurs indépendants. Par conséquent, en établissant ce lien automatique, nous faciliterions l'information et ferions, si j'ose dire, d'une pierre deux coups.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Etienne Blanc, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Le Gouvernement est opposé à cet amendement pour trois raisons.
    La première, c'est que le temps que nous mettions en oeuvre la disposition proposée - ce qui suppose l'installation d'un mécanisme compliqué -, nous aurons probablement déjà mis en place le système simplifié pour tous.
    La deuxième raison, c'est que les cinq premières années, et non les trois premières, sont celles d'une très grande mutabilité dans la vie des entreprises. Autrement dit, si un certain nombre d'entreprises passent le cap des trois ans, elles ne passent pas forcément le cap des cinq ans. Si le dispositif que vous proposez, madame Vautrin, était mis en place, on imagine aisément la complexité à laquelle seraient confrontées les entreprises qui désireraient changer de statut durant ces cinq années très mouvementées.
    Pour simplifier, il faut mettre en place des systèmes universels. Nous avons cependant tous la tentation de créer des niches juridiques, des systèmes adaptés à telle ou telle situation particulière, mais qui, en réalité, créent un paysage administratif compliqué.
    Imaginez le problème auquel pourrait se trouver confronté celui qui a créé son entreprise depuis trois ans moins deux mois ou trois ans moins quinze jours. A qui devrait-il s'adresser ? Comment transférerait-il son dossier ? Les pièces arriveraient-elles à temps ? Et si, à ce moment-là, il est pris en charge par une caisse d'assurance maladie ou s'il doit partir en retraite, que se passerait-il ?
    Nous voyons bien les difficultés que pourrait créer un tel amendement. Sous couvert de simplification, il risquerait de susciter davantage d'incertitudes dans une période où l'entrepreneur doit bénéficier de la plus grande lisibilité possible.
    La troisième raison, enfin, c'est que nous souhaitons respecter l'espèce de contrat moral que nous avons passé avec l'ensemble des organismes et qui consiste à les faire évoluer ensemble vers la réforme du régime social des indépendants.
    Cela dit, je tiens à saluer l'initiative de Catherine Vautrin, qui sous-entend que les organismes de retraite des indépendants sont parfaitement capables de gérer la collecte des indépendants, alors que certaines analyses ont pu laisser croire que tel n'était pas le cas. Ces organismes non seulement sont capables de se réformer - on le voit avec la proposition qu'ils font aujourd'hui de créer un régime social des indépendants -, mais ils sont également efficaces dans la gestion des comptes.
    Cet amendement est certes important dans la mesure où il reconnaît l'efficacité des organismes de retraite - et je pense que ceux-ci seront sensibles à une telle appréciation -, mais je souhaite qu'il soit retiré.
    M. le président. La parole est à Catherine Vautrin.
    Mme Catherine Vautrin. Je ne suis pas, bien sûr, particulièrement attachée aux trois ans, monsieur le secrétaire d'Etat, et j'étais évidemment prête à en discuter. Néanmoins, après les assurances que vous venez de nous donner sur le rôle des organismes de retraite et sur la nécessaire concomitance, je retire mon amendement.
    M. le président. L'amendement n° 13 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 19.
    (L'article 19 est adopté.)
    M. le président. Je ne suis saisi d'aucun amendement sur les articles 20, 21, 22, 22 bis et 22 ter ; je les mets donc aux voix successivement.

Articles 20, 21, 22, 22 bis et 22 ter

    M. le président. « Art. 20. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, et afin d'alléger les formalités résultant de la législation relative au travail et à la formation professionnelle, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures pour :
    « 1° Harmoniser les seuils d'effectifs qui déterminent l'application de certaines dispositions de la législation relative au travail et à la formation professionnelle, ainsi que le mode de calcul des effectifs ;
    « 2° Harmoniser les délais applicables aux procédures de licenciement visés aux articles L. 122-14 et L. 122-14-1 du code du travail ;
    « 2° bis Harmoniser et simplifier les procédures de licenciement applicable aux salariés mis à la disposition d'une filiale étrangère ;
    « 3° Harmoniser les durées de la période de protection contre le licenciement des candidats aux élections professionnelles et des anciens représentants du personnel ;
    « 3° bis Harmoniser les conditions dans lesquelles le chef d'entreprise peut se faire assister lors des réunions des comités d'entreprise ;
    4° Harmoniser les procédures relatives aux congés dont peuvent bénéficier les salariés pour des motifs personnels ou familiaux ;
    « 5° Supprimé ;
    « 6° Alléger les contraintes de tenue de registres pesant sur les employeurs, notamment par un regroupement et une harmonisation ;
    « 6° bis Permettre de remplacer le chef d'entreprise ou son conjoint non salarié ou son collaborateur ou associé non salarié en cas d'indisponibilité par un salarié sous contrat à durée déterminée ou par un salarié sous contrat de travail temporaire ;
    « 7° Adapter les obligations d'élaboration du document d'évaluation des risques à la taille et à la nature de l'activité des entreprises concernées ;
    « 8° Réformer le régime des fonds d'assurance formation de l'artisanat, afin d'améliorer l'utilisation des ressources consacrées à la formation professionnelle des artisans ;
    « 9° Autoriser les prestataires de formation à justifier leurs dépenses par le rattachement de ces dépenses à leur activité et non plus à une convention ou à un contrat de formation professionnelle ;
    « 10° Moderniser la procédure de déclaration fiscale relative au paiement des cotisations de formation professionnelle pour les exploitants agricoles employant moins de dix salariés, notamment en permettant la transmission par des mandataires ;
    « 10° bis Harmoniser les modes d'exercice de l'activité des associations et des entreprises privées de service aux personnes physiques à leur domicile, mentionnées à l'article L. 129-1 du code du travail ;
    « 11° Abroger diverses dispositions du code du travail devenues obsolètes ou sans objet relatives aux conventions de conversion, à l'emploi des pères de famille nombreuse et des veuves ayant au moins deux enfants à charge, à l'attribution de boissons alcoolisées comme avantages en nature, aux conditions de l'enseignement manuel et professionnel dans les orphelinats et institutions de bienfaisance assurant un enseignement primaire, aux moyens de constater les conventions relatives aux salaires dans certains domaines de l'industrie textile, à la définition du temps partiel et au décompte des travailleurs temporaires dans les effectifs de l'entreprise de travail temporaire, à la fondation nationale pour l'enseignement de la gestion des entreprises, à la réalisation d'actions de formation liées au service national, au contrôle des organismes de formation qui accueillent des jeunes titulaires de contrats en alternance visé à l'article L. 981-11 du code du travail ou à l'agrément visé au treizième alinéa de l'article L. 951-1 du code du travail et destiné à satisfaire l'obligation de participation au financement de la formation professionnelle ;
    « 11° bis Etendre et simplifier le recours au titre emploi service ;
    « 12° Supprimé ;
    « 13° Adapter le régime juridique applicable au travail en temps partagé ;
    « 14° Permettre aux entreprises organisées sur une durée collective hebdomadaire supérieure à 35 heures de mensualiser la rémunération des heures supplémentaires de leurs salariés. »
    Je mets aux voix l'article 20.
    (L'article 20 est adopté.)
    « Art. 21. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé, dans le domaine du droit du commerce, à prendre par ordonnance toutes mesures afin de :
    « 1° Simplifier les règles applicables au nantissement du fonds de commerce et du fonds artisanal ;
    « 2° Simplifier et unifier le régime applicable à la location-gérance du fonds de commerce et du fonds artisanal en vue de faciliter leur transmission ;
    « 3° Elargir les possibilités d'adhésion aux coopératives de commerçants détaillants et aux coopératives d'artisans et assouplir leurs conditions de fonctionnement ;
    « 4° Simplifier et unifier le régime applicable aux valeurs mobilières des sociétés commerciales ;
    « 5° Assouplir le régime applicable à la société à responsabilité limitée en permettant à cette société d'émettre des obligations sans appel public à l'épargne, d'augmenter le nombre de ses associés, d'alléger les formalités de cession des parts sociales et de faciliter les modes d'organisation de sa gérance ;
    « 6° Modifier les articles L. 242-7, L. 242-12, L. 242-13, L. 242-15 et L. 245-13 du code de commerce en vue de substituer aux incriminations pénales des sanctions civiles et abroger le 2° de l'article L. 245-9 du code de commerce ;
    « 7° Substituer au régime d'autorisation administrative, auquel sont soumises les ventes en liquidation, un régime de déclaration préalable ;
    « 8° Substituer au régime d'autorisation administrative, auquel sont soumis les foires et salons, un régime de déclaration préalable ;
    « 9° Assouplir les règles relatives aux marchés d'intérêt national et ouvrir à de nouvelles catégories de personnes la gestion de ces marchés ;
    « 10° Instituer une procédure accélérée pour l'examen, par le Conseil de la concurrence, des affaires inférieures à un seuil déterminé et relever le seuil du chiffre d'affaires des entreprises soumises au contrôle des opérations de concentration. » - (Adopté.)

    « Art. 22. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures pour :
    « 1° Simplifier la législation applicable à l'entremise et à la gestion des immeubles et fonds de commerce ;
    « 2° Simplifier et adapter aux exigences de la profession les conditions d'établissement et d'exercice des professions d'agent de voyage, d'expert-comptable, de coiffeur, de courtier de marchandises assermenté, d'exploitant forestier et de voyageur, représentant ou placier ;
    « 3° Simplifier les conditions d'établissement des commerçants étrangers et l'exercice de leur activité. » - (Adopté.)
    « Art. 22 bis. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures nécessaires pour développer l'utilisation des technologies de l'information afin de simplifier :
    « 1° Les conditions de fonctionnement des collectivités territoriales et des autorités administratives ;
    « 2° Les procédures de transmission des actes des collectivités territoriales et des autorités administratives soumis au contrôle du représentant de l'Etat dans le département. » - (Adopté.)
    « Art. 22 ter. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures pour simplifier et alléger le régime d'entrée en vigueur, de transmission et de contrôle des actes des autorités des établissements publics locaux d'enseignement. ». - (Adopté.)

Article 24

    M. le président. « Art. 24. - I. - Non modifié.
    « II. - Le code rural est ainsi modifié :
    « 1° Après l'article L. 231-2, il est inséré un article L. 231-2-1 ainsi rédigé :
    « Art. L. 231-2-1. - I. - Pour l'exercice de leur mission, les agents mentionnés à l'article L. 231-2 :
    « Ont accès entre 8 et 20 heures ou en dehors de ces heures lorsqu'une activité est en cours aux abattoirs et à leurs annexes, marchés d'animaux vivants compris, et à tous les lieux où des denrées alimentaires animales ou d'origine animale destinées à la consommation humaine ou animale sont travaillées, transformées ou manipulées ;
    « Ont accès entre 8 et 20 heures aux locaux professionnels où ces denrées sont entreposées, stockées ou offertes à la vente par les personnes qui en font le commerce ou en assurent le transport, et en général par toute personne assujettie aux inspections et surveillances prévues par l'article L. 231-2 ;
    « Peuvent procéder, de jour et de nuit, au contrôle du chargement à l'intérieur des véhicules à usage professionnel transportant des animaux vivants ou des denrées animales ou d'origine animale destinées à être livrées au public en vue de la consommation humaine ou animale.
    « II. - Dans le cadre de la recherche des infractions aux dispositions du chapitre VI du titre II et des chapitres Ier à V du présent titre et des textes pris pour leur application, le procureur de la République est préalablement informé des opérations envisagées et peut s'y opposer.
    « III. - Les infractions sont constatées par des procès-verbaux qui font foi jusqu'à preuve contraire. Les procès-verbaux doivent, sous peine de nullité, être adressés dans les cinq jours qui suivent leur clôture au procureur de la République. Une copie en est également transmise, dans le même délai, à l'intéressé. » ;
    « 2° A l'article L. 236-9, les mots : "aux conditions fixées en application de l'article L. 236-5 sont remplacés par les mots : "aux conditions fixées en application de l'article L. 236-1 ;
    « 3° L'article L. 640-3 issu de l'article 9 de l'ordonnance n° 2000-550 du 15 juin 2000 précitée devient l'article L. 640-5 ;
    « 4° Les dispositions introduites à l'article L. 654-31 par les articles 19 et 20 de la loi n° 2001-6 du 4 janvier 2001 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire en matière de santé des animaux et de qualité sanitaire des denrées d'origine animale et modifiant le code rural sont transférées, respectivement, après le d et à la fin du deuxième alinéa du II de l'article L. 654-32 ;
    « 5° Supprimé ;
    « 6° Aux troisième et septième alinéas de l'article L. 723-15, les mots : "les chefs d'exploitation ou d'entreprise mentionnés sont remplacés par les mots : "les chefs d'exploitations ou d'entreprises mentionnés ;
    « 7° Au dernier alinéa de l'article L. 731-14 et au deuxième alinéa de l'article L. 731-15, les mots : "deuxième alinéa sont remplacés par les mots : "cinquième alinéa.
    « III. - Le code de l'environnement est ainsi modifié :
    « 1° Au premier alinéa de l'article L. 131-2, les mots : "Il peut être institué sont remplacés par les mots : "Il est institué ;
    « 2° Dans le troisième alinéa de l'article L. 132-1, les mots : "les parcs naturels nationaux sont remplacés par les mots : "les parcs naturels régionaux ;
    « 3° Au premier alinéa du I de l'article L. 216-3 et au premier alinéa de l'article L. 216-5, les mots : "et L. 214-12 sont remplacés par les mots : "à L. 214-13, L. 216-6 à L. 216-8 et L. 216-10 à L. 216-12 ;
    « 4° Au 8° du I de l'article L. 218-26, au 6° du I de l'article L. 218-36 et au 3° du I de l'article L. 218-53, les mots : "au service des mines des circonscriptions minéralogiques intéressées, "au service des mines des circonscriptions minéralogiques compétentes et "au service des mines des arrondissements minéralogiques intéressés sont remplacés par les mots : "à la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement intéressée ;
    « 4° bis Au premier alinéa de l'article L. 218-72, la référence : "la convention de Bruxelles du 27 novembre 1969 est remplacée par la référence : "la convention de Bruxelles du 29 novembre 1969 ;
    « 5° A l'article L. 222-8, les mots : "aux articles 28 à 28-3 sont remplacés par les mots : "au chapitre II du titre II ;
    « 5° bis Le titre II du livre II est complété par un chapitre IX intitulé "Effet de serre et comprenant quatre articles L. 229-1 à L. 229-4 ainsi rédigés :
    « Art. L. 229-1. - La lutte contre l'intensification de l'effet de serre et la prévention des risques liés au réchauffement climatique sont reconnues priorités nationales.
    « Art. L. 229-2. - Il est institué un Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique en France métropolitaine et dans les départements et territoires d'outre-mer.
    « L'Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique est chargé de collecter et de diffuser les informations, études et recherches sur les risques liés au réchauffement climatique et aux phénomènes climatiques extrêmes en France métropolitaine et dans les départements et territoires d'outre-mer, en liaison avec des établissements et instituts de recherche concernés et le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat. Il peut mener dans son domaine de compétence toute action d'information auprès du public et des collectivités territoriales.
    « Art. L. 229-3. - L'Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique élabore chaque année, à l'intention du Premier ministre et du Parlement, un rapport d'information. Ce rapport peut comporter des recommandations sur les mesures de prévention et d'adaptation susceptibles de limiter les risques liés au réchauffement climatique. Il est rendu public.
    « Art. L. 229-4. - Le siège, la composition, les modes de désignation des membres et les règles de fonctionnement de l'observatoire sont fixés par décret. » ;
    « 6° Au troisième alinéa de l'article L. 322-10-1, les mots : "article L. 322-20 sont remplacés par les mots : "article L. 332-20 ;
    « 7° La première phrase du troisième alinéa de l'article L. 333-1 est ainsi rédigée :
    « La charte constitutive est élaborée par la région avec l'accord de l'ensemble des collectivités territoriales concernées, en concertation avec les partenaires intéressés, avant d'être soumise à l'enquête publique. » ;
    « 7° bis Au premier alinéa du III de l'article L. 341-19, les mots : "dispositions visées au précédent alinéa sont remplacés par les mots : "dispositions visées au II ;
    « 7° ter Le titre V du livre III est complété par un article L. 350-2 ainsi rédigé :
    « Art. L. 350-2. - Les dispositions relatives aux zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager sont énoncées à l'article 70 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat, ci-après reproduit :
    « "Art. 70. - Sur proposition ou après accord du conseil municipal des communes intéressées, des zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager peuvent être instituées autour des monuments historiques et dans les quartiers, sites et espaces à protéger ou à mettre en valeur pour des motifs d'ordre esthétique, historique ou culturel.
    « "Des prescriptions particulières en matière d'architecture et de paysage sont instituées à l'intérieur de ces zones ou parties de zones pour les travaux mentionnés à l'article 71.
    « "Après enquête publique, avis de la commission régionale du patrimoine et des sites mise en place par la loi n° 97-179 du 28 février 1997 et accord du conseil municipal de la commune intéressée, la zone de protection est créée par arrêté du représentant de l'Etat dans la région.
    « "Le ministre compétent peut évoquer tout projet de zone de protection.
    « "Les dispositions de la zone de protection sont annexées au plan d'occupation des sols, dans les conditions prévues à l'article  L. 126-1 du code de l'urbanisme. » ;
    « 7° quater L'article L. 341-16 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « En Corse, les attributions dévolues à la commission des sites, perspectives et paysages sont exercées par le conseil des sites de Corse prévu à l'article L. 4421-4 du code général des collectivités territoriales. » ;
    « 8° Le 1° de l'article L. 415-3 est ainsi rédigé :
    « Le fait, en violation des interdictions prévues par les dispositions de l'article L. 411-1 et par les règlements pris en application de l'article L. 411-2 :
    « a) De porter atteinte à la conservation d'espèces animales non domestiques, à l'exception des perturbations intentionnelles ;
    « b) De porter atteinte à la conservation d'espèces végétales non cultivées ;
    « c) De détruire des sites contenant des fossiles permettant d'étudier l'histoire du monde vivant ainsi que les premières activités humaines, de détruire ou d'enlever des fossiles présents sur ces sites. » ;
    « 9° Le premier alinéa de l'article L. 428-29 est ainsi rédigé :
    « Hors de leur domicile, les chasseurs et les personnes les accompagnant sont tenus d'ouvrir leur carniers, sacs ou poches à gibier à toute réquisition des agents ci-après : officiers de police judiciaire, fonctionnaires de police et militaires de la gendarmerie non officiers de police judiciaire, agents mentionnés aux 1° et 3° du I de l'article L. 428-20, ainsi que les gardes des fédérations départementales des chasseurs, mentionnés au troisième alinéa de l'article L. 428-21 dans les conditions prévues à cet article. » ;
    « 10° Dans le premier alinéa du II de l'article L. 514-6, les mots : "Les dispositions du I sont remplacés par les mots : "Les dispositions du 2° du I ;
    « 10° bis L'article L. 515-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « La durée nécessaire à la réalisation des diagnostics et des opérations de fouille d'archéologie préventive interrompt la durée de l'autorisation administrative d'exploitation de carrière. » ;
    « 11° Au premier alinéa du II de l'article L. 515-13, les sommes : "1 524,49 euros et "304,90 euros sont remplacées respectivement par les sommes : "1 525 euros et "305 euros ;
    « 12° Dans le premier alinéa des articles L. 531-1, L. 531-2 et L. 536-1, la référence : "L. 124-3 est remplacée par la référence : "L. 125-3 ;
    « 13° Dans le premier alinéa du I de l'article L. 541-1 et au I de l'article L. 651-4 la référence : "L. 124-1 est remplacée par la référence : "L. 125-1 ;
    « 13° bis Le titre V du livre V du code de l'environnement est complété par un chapitre III intitulé "Eoliennes et comprenant quatre articles, L. 553-1 à L. 553-4, ainsi rédigés :
    « Art. L. 553-1. - Ainsi qu'il est dit au deuxième alinéa de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme ci-après reproduit :
    « L'implantation d'une installation produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent d'une hauteur supérieure ou égale à 12 mètres est subordonnée à l'obtention d'un permis de construire. »
    « Art. L. 553-2. - I. - L'implantation d'une ou plusieurs installations produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent dont la puissance installée totale sur un même site de production, au sens du troisième alinéa (2°) de l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, excède 2,5 mégawatts, est subordonnée à la réalisation préalable de l'étude d'impact, définie au chapitre II du titre II du livre Ier du présent code.
    « II. - Les projets d'implantation qui ne sont pas subordonnés à la réalisation préalable d'une étude d'impact doivent faire l'objet d'une notice d'impact.
    « III. - L'implantation d'une installation produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent, d'une hauteur supérieure ou égale à 25 mètres, est précédée d'une enquête publique soumise aux prescriptions du chapitre III du titre II du livre Ier du présent code.
    « Art. L. 553-3. - L'exploitant d'une installation produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent est responsable de son démantèlement et de la remise en état du site à la fin de l'exploitation. Au cours de celle-ci, il constitue les garanties financières nécessaires dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat.
    « Art. L. 553-4. - I. - Afin de promouvoir un développement harmonieux de l'énergie éolienne, les régions peuvent mettre en place un schéma régional éolien, après avis des départements et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre concernés. Ce schéma indique les secteurs géographiques qui paraissent les mieux adaptés à l'implantation d'installations produisant de l'électricité en utilisant l'énergie mécanique du vent.
    « II. - Les services de l'Etat peuvent concourir à l'élaboration de ce schéma à la demande du conseil régional. » ;
    « 14° Le deuxième alinéa de l'article L. 581-31 est ainsi rédigé :
    « Les frais de l'exécution d'office sont supportés par la personne à qui a été notifié l'arrêté, sauf si l'exécution des dispositions de cet arrêté relatives à l'astreinte a été suspendue par le juge administratif des référés. » ;
    « 15° A la fin de l'article L. 581-37, les mots : "au cinquième alinéa de l'article L. 581-30 sont remplacés par les mots : "au troisième alinéa de l'article L. 581-30 ;
    « 16° Au 2° du I de l'article L. 581-34, les mots : "prévues aux sections 1 et 2 du présent chapitre sont remplacés par les mots : "prévues aux sections 2 et 3 du présent chapitre ;
    « 16° bis Le titre Ier du livre VI est complété par un chapitre IV intitulé : "Autres dispositions et comprenant un article L. 614-1 ainsi rédigé :
    « Art. L. 614-1. - Sont applicables à la Nouvelle-Calédonie les articles L. 229-1 à L. 229-4. » ;
    « 16° ter Le titre II du livre VI est complété par un chapitre IV intitulé : "Autres dispositions et comprenant un article L. 624-1 ainsi rédigé :
    « Art. L. 624-1. - Sont applicables à la Polynésie française les articles L. 229-1 à L. 229-4. » ;
    « 16° quater Le titre III du livre VI est complété par un chapitre V intitulé "Autres dispositions et comprenant un article L. 635-1 ainsi rédigé :
    « Art. L. 635-1. - Sont applicables à Wallis-et-Futuna les articles L. 229-1 à L. 229-4. » ;
    « 16° quinquies A l'article L. 640-1, après la référence : "L. 218-72, sont insérées les références : "L. 229-1 à L. 229-4, ;
    « 16° sexies A l'article L. 652-1, après la référence : "L. 223-2 sont insérées les références : "L. 229-1 à L. 229-4 ;
    « 16° septies Au I de l'article L. 655-1, après la référence : "L. 551-1, sont insérées les références : "L. 553-1 à L. 553-4,.
    « III bis. - Après le premier alinéa de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « L'implantation d'une installation produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent d'une hauteur supérieure ou égale à 12 mètres est subordonnée à l'obtention d'un permis de construire. »
    « IV. - Non modifié.
    « V. - L'article 6 de la loi n° 2001-44 du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie préventive, l'article 59 de la loi n° 2003-8 du 8 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie et la loi n° 2001-153 du 19 février 2001 tendant à conférer à la lutte contre l'effet de serre et à la prévention des risques liés au réchauffement climatique la qualité de priorité nationale et portant création d'un Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique en France métropolitaine et dans les départements et territoires d'outre-mer sont abrogés. »
    M. Etienne Blanc, rapporteur, a présenté un amendement, n° 4, ainsi rédigé :
    « I. - Supprimer le 13° bis du III de l'article 24.
    « II. - En conséquence, supprimer le III bis de cet article.
    « III. - En conséquence, dans le V de cet article, supprimer les mots : ", l'article 59 de la loi n° 2003-8 du 8 janvier 2003 relative au marché du gaz et de l'électricité et aux services publics de l'énergie. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Etienne Blanc, rapporteur. L'article 24 codifie les dispositions relatives à l'environnement. Le Sénat a souhaité ajouter une précision sur les éoliennes. Or la loi SRU a modifié le régime applicable à l'implantation des éoliennes. Nous proposons donc que soit purement et simplement supprimée la codification concernant les éoliennes.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Même conclusion.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Philippe Armand Martin a présenté un amendement, n° 8, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 24 par le paragraphe suivant :
    « VI. - Dans le dernier alinéa de l'article L. 122-3-20 du code du travail, la référence : "L. 122-13-15 est remplacée par la référence : "L. 122-3-15. »
    La parole est à M. Philippe Armand Martin.
    M. Philippe Armand Martin. Cet amendement a pour but de corriger une erreur de retranscription lors de la publication au Journal officiel. L'article L. 122-13-15 du code du travail n'existe pas. La loi visait l'article L. 122-3-15.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Etienne Blanc, rapporteur. L'amendement n'est pas utile, un erratum au Journal officiel paraissant suffisant. Je propose donc à M. Martin de retirer son amendement.
    M. Philippe Armand Martin. Je le retire.
    M. le président. L'amendement n° 8 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 24, modifié par l'amendement n° 4.
    (L'article 24, ainsi modifié, est adopté.)

Articles 25 et 27

    M. le président. « Art. 25. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, afin d'inclure les dispositions de nature législative qui n'ont pas été codifiées et pour remédier aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification, le Gouvernement est autorisé à modifier par ordonnance les parties législatives :
    « 1° Du code rural ;
    « 2° Du code général des collectivités territoriales ;
    « 3° Supprimé.
    « Les dispositions codifiées sont celles en vigueur au moment de la publication des ordonnances, sous la seule réserve des modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés et harmoniser l'état du droit. »
    Je mets aux voix l'article 25.
    (L'article 25 est adopté.)
    « Art. 27. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance les mesures législatives nécessaires pour modifier et compléter :
    « 1° Les dispositions régissant l'organisation du secteur des métiers et de l'artisanat, celles qui ont trait au statut des entreprises relevant de ce secteur, au régime de la propriété artisanale, à la formation et à la qualification professionnelle, ainsi qu'à la qualité des produits et services, afin de les simplifier, d'adapter leurs procédures à l'évolution des métiers et, avec les dispositions qui sont particulières à ce même secteur dans les domaines de la fiscalité, du crédit, des aides aux entreprises, du droit du travail et de la protection sociale, de les regrouper et de les organiser en un code des métiers et de l'artisanat ;
    « 2° Les dispositions relatives à la définition, à l'administration, à la protection et au contentieux du domaine public et du domaine privé, mobilier comme immobilier, de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics, à l'authentification des actes passés par ces personnes publiques, au régime des redevances et des produits domaniaux, tant en ce qui concerne leur institution que leur recouvrement, ainsi que celles relatives à la réalisation et au contrôle des opérations immobilières poursuivies par ces collectivités, afin de les simplifier, de les préciser, de les harmoniser, d'améliorer la gestion domaniale et de les codifier ;
    « 3° Les dispositions relatives au champ d'application de la loi du 11 juillet 1938 sur l'organisation générale de la nation pour le temps de guerre ainsi que celles ayant le même objet de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 instituant un état d'urgence afin d'harmoniser ces textes avec l'ordonnance n° 59-147 du 7 janvier 1959 portant organisation générale de la défense, d'abroger les dispositions, notamment celles relatives aux réquisitions et au domaine militaires, entrées en vigueur antérieurement au 1er janvier 1945 et manifestement tombées en désuétude et de les codifier avec l'ensemble des dispositions qui régissent la défense et ses personnels ;
    « 4° Le code monétaire et financier afin d'y inclure les dispositions de nature législative qui n'ont pas été codifiées, remédier aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification et y intégrer les dispositions relatives aux interdictions d'exercice des activités bancaires et financières. Les dispositions codifiées sont celles en vigueur sous réserve des modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes, harmoniser l'état du droit et s'agissant des dispositions relatives aux interdictions d'exercice des activités bancaires et financières sous réserve des modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la nécessité et de la proportionnalité des peines et de celles permettant d'assurer l'égalité de traitement entre les différentes professions bancaires et financières. Une table de concordance entre les articles de loi abrogés et les articles du code sera en outre publiée au Journal officiel. » - (Adopté.)
    M. le président. Je vais maintenant appeler l'article 28 du projet, qui a été adopté par les deux assemblées dans un texte identique mais sur lequel la commission des lois a déposé un amendement pour coordination.

Article 28
(pour coordination)

    M. le président. « Art. 28. - Les ordonnances doivent être prises dans les délais suivants :
    « 1° Dans les six mois suivant la publication de la présente loi pour celles qui sont prises en application de l'article 25 ;
    « 2° Dans les douze mois suivant la publication de la présente loi pour celles qui sont prises en application des articles 1er à 22 et des 1° et 2° de l'article 26 ;
    « 3° Dans les dix-huit mois suivant la publication de la présente loi pour celles qui sont prises en application des 3° et 4° de l'article 26 et de l'article 27.
    « Pour chaque ordonnance, un projet de loi de ratification doit être déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de sa publication. »
    M. Etienne Blanc, rapporteur, a présenté un amendement, n° 5, ainsi rédigé :
    « Dans le 2° de l'article 28, substituer à la référence : "22 la référence : "22 ter. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Etienne Blanc, rapporteur. Cet amendement vise à mettre l'article 28 en cohérence avec les articles 22 bis et 22 ter. Il a un caractère rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 28, modifié par l'amendement n° 5.
    (L'article 28, ainsi modifié, est adopté.)

Article 29

    M. le président. « Art. 29. - I. - Des ordonnances prises en application de la présente loi peuvent prévoir, en tant que de besoin, les adaptations nécessitées par les caractéristiques et contraintes particulières des départements et régions d'outre-mer et par la prise en compte des intérêts propres, au sein de la République, de Mayotte, de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française, de Saint-Pierre-et-Miquelon, des Terres australes et antarctiques françaises et des îles Wallis et Futuna.
    « II à IV. - Non modifiés. »
    Je mets aux voix l'article 29.
    (L'article 29 est adopté.)

Vote sur l'ensemble

    M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
    Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
    (L'ensemble du projet de loi est adopté.)
    (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Je me réjouis de ce vote par lequel la majorité exprime sa confiance au Gouvernement et qui, en conservant la rédaction issue du Sénat en première lecture, va permettre de traduire dans les délais les plus brefs, l'aspiration de nos concitoyens à une simplification du droit.
    Mais, au-delà des clivages partisans, je voudrais remercier tous les orateurs qui ont assisté de bout en bout à ce débat. Celui-ci constitue une avancée importante de la réforme de l'Etat et de la simplification du droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à dix-neuf heures trente.)
    M. le président. La séance est reprise.

3

INITIATIVE ÉCONOMIQUE

Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi pour l'initiative économique (n°s 760, 882).
    La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
    M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le président, madame, messieurs les rapporteurs de la commission spéciale, mesdames, messieurs les députés, nous voici arrivés à la deuxième lecture du projet de loi sur l'initiative économique. Ce texte comprend désormais cinquante-cinq articles touchant à de nombreux thèmes : la création, le développement et la transmission des entreprises. Nous simplifions les formalités de la création d'entreprise. Nous permettons à des salariés de se lancer dans l'entreprenariat. Nous améliorons les financements de la petite entreprise. Nous permettons l'accompagnement du créateur, grâce au contrat d'appui au projet d'entreprise. Nous allégeons, enfin, considérablement la transmission des entreprises.
    Ce débat a été consensuel pour une large part, puisque les deux assemblées ont su travailler dans la même direction. L'idée que le développement de l'entreprise rejoint l'intérêt général semble faire son chemin en France. Dix-sept articles ont été votés conformes par le Sénat et je ne doute pas que l'Assemblée nationale saura continuer à travailler dans le même sens.
    Les créateurs d'entreprise attendent aujourd'hui avec impatience la sortie de ce texte qui crée des facilités, offre des solutions de financement, apporte des avantages et propose des simplifications. Un grand nombre d'acteurs économiques de notre pays ont suspendu leurs décisions dans l'attente de sa publication et je dois dire d'ailleurs que l'on m'interroge souvent sur la longueur du processus d'élaboration de nos textes, que nos concitoyens ne comprennent pas toujours.
    Nous avons tous, je crois, le souci que cette loi soit rapidement publiée. Pour ma part, je veillerai à ce que les décrets d'application paraissent le plus rapidement possible.
    Ce texte est novateur, de véritables avancées ont été proposées par votre assemblée puis par le Sénat. Je ne reviens pas sur tous les éléments nouveaux, vous les connaissez. Je voudrais simplement insister sur un phénomène assez frappant pour être signalé.
    Depuis que le Gouvernement et la majorité parlent de création d'entreprises dans notre pays, discours relativement neuf qui tranche avec celui des années passées, nos compatriotes s'intéressent à la création d'entreprise ; il suffit de regarder le nombre de consultations des sites spécialisés, de lire la presse spécialisée ou d'interroger tous les accompagnateurs que sont les avocats, les experts comptables, les chambres de commerce, les chambres de métiers, les notaires : tous nous disent qu'aujourd'hui de très nombreuses demandes leur parviennent sur le thème de la création d'entreprise.
    Nous assistons même à un phénomène étonnant : le nombre de créations d'entreprises, qui était étale en France depuis plus de dix ans, est en train de monter. En novembre 2002, il fallait remonter jusqu'à août 2000 pour trouver un nombre d'entreprises nouvelles plus élevé. En décembre 2002, nous avons fait tomber le record d'août 2000, et il fallait remonter jusqu'à janvier 1996 pour avoir un nombre plus élevé. En février 2003, le record de janvier 1996 tombait, et les mois de mars et d'avril 2003 confirment cette tendance puisqu'il faut désormais remonter jusqu'à 1994 pour avoir un nombre de créations d'entreprises plus élevé.
    M. Jean-Louis Dumont. C'est le différentiel qui est intéressant !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Au premier trimestre 2003, le nombre de créations d'entreprises marque une augmentation par rapport au 1er trimestre 2002 - cette période vous rappelle sans doute quelques souvenirs -, de 6,3 %. Cela fait très longtemps qu'une telle chose n'était pas arrivée, et le bâtiment ou le commerce connaissent une augmentation du nombre des créations d'entreprises de plus de 7 %, voire de 8 %.
    M. Gérard Bapt. C'est l'héritage !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Ce n'est pas un phénomène que l'on peut analyser sur le plan rationnel. C'est un phénomène culturel, je dirai politique. C'est parce que les entrepreneurs se sentent soutenus par le Gouvernement, parce qu'ils savent que leur environnement juridique va être amélioré, que des possibilités supplémentaires leur seront proposées, qu'aujourd'hui un certain nombre de nos concitoyens, notamment parmi les plus démunis - ceux que l'on voit frapper à la porte des CFE ne sont en effet pas les plus favorisés - ...
    M. Gérard Bapt. Vous leur supprimez la prime, alors ils se dépêchent !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. ... considèrent que la voie de la création d'entreprise est une voie professionnelle aussi respectable que celle du salariat.
    Il est vrai que, sous le gouvernement précédent, l'environnement politique était un obstacle supplémentaire sur la voie de la création d'entreprise, et que la disparition démocratique de cet obstacle a permis à un plus grand nombre de nos concitoyens de se lancer.
    M. Gérard Bapt. C'est une argument spécieux !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. C'est un acquis de l'alternance, du changement de majorité, dont je me réjouis.
    M. Gérard Bapt. Vous n'avez pas de meilleurs arguments ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Nous allons maintenant poursuivre ce débat. Le texte a été très largement modifié et amélioré, et je souhaite vous en remercier, sur tous les bancs de cette assemblée. Aussi bien ici qu'au Sénat le débat a été courtois et constructif, et je pense qu'il en ira de même au cours de cette deuxième lecture. (Applaudissement sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme la rapporteure de la commission spéciale pour les articles non fiscaux.
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure de la commission spéciale, pour les articles non fiscaux. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, chers collègues, c'est un texte enrichi qui nous revient du Sénat.
    M. Gérard Bapt. Très enrichi par le Sénat !
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure. Les apports de nos collègues sénateurs ne remettent cependant pas en cause les éléments essentiels du projet et que le texte habilitant le Gouvernement à simplifier le droit par voie d'ordonnance comprend quelques-uns des éléments que nous avions introduits en première lecture. Il s'agit bel et bien d'inciter et d'encourager l'esprit d'entreprise et, ainsi, de contribuer directement à la création d'emplois.
    Ce texte propose de nouveaux outils destinés à encourager les entrepreneurs à mener à bien leur projet. La loi ne créera pas d'entreprises, mais elle participera à leur naissance en répondant concrètement aux problèmes rencontrés.
    Les problèmes commençaient au moment de l'acte de création lui-même. Au cours de la première lecture, nous avons ouvert aux centres de formation des entreprises, les CFE, la possibilité de délivrer le récépissé de création d'entreprise, le RCE. Sensibles à l'argumentation, juridiquement très étayée, de M. le secrétaire d'Etat, nos collègues sénateurs ont estimé que cet ajout risquait de créer des difficultés au lieu d'offrir une réelle simplification.
    M. Gérard Bapt. Nous l'avions dit également !
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure. Néanmoins, il paraît indispensable de laisser au premier organisme qui reçoit le dossier la possibilité de délivrer le RCE. Nous parlons d'entreprises. Les chambres de commerce, de métiers, voire d'agriculture, ne sont-elles pas, souvent, le premier interlocuteur des entreprises ? Cette disposition, en quelque sorte, consacre le rôle des chambres dans leur mission d'assistance à la création d'entreprise.
    Par ailleurs, la délivrance du RCE par les CFE ne remet aucunement en cause les compétences reconnues aux greffes, qui continueront donc à exercer dans les mêmes conditions qu'actuellement les contrôles qui leur incombent.
    Par conséquent, si notre commission spéciale considère que cette délivrance par les CFE ne présente pas d'inconvénients, elle estime en revanche que la délivrance par le seul greffe serait de nature à limiter l'intérêt de la création du récépissé.
    Enfin, l'importance du risque juridique qui résulterait de la délivrance d'un récépissé et d'une absence d'immatriculation ultérieure de la société doit être relativisée. Notamment au regard de l'usage qui serait fait de ce récépissé. Il faut rappeler que le code de commerce et la jurisprudence n'admettent, avant même l'immatriculation de la société, que des actes limités permettant d'amorcer l'activité des entreprises ; il ne s'agit en aucun cas du début de l'exploitation elle-même, mais du début de l'activité sociale.
    L'amendement adopté par le Sénat pour inscrire la mention « en attente d'immatriculation » contribue à sécuriser le dispositif du RCE tout en répondant à un souci de meilleure information des tiers. Il est en effet de nature à informer les éventuels partenaires de la société de son exacte situation juridique et à leur permettre ainsi d'agir en toute connaissance de cause.
    La déclaration d'insaisissabilité du domicile est une autre mesure importante. Comme nous, le Sénat a rejeté l'idée, intéressante mais difficile à appliquer, d'un patrimoine d'affectation. Nous nous réjouissons cependant qu'il ait précisé les conditions de validité de la protection en cas de cession de la résidence faisant l'objet de la déclaration.
    Ces modifications permettent d'éviter une rupture dans la protection de la résidence principale, tout en éliminant les risques de manoeuvres frauduleuses.
    Sécuriser la situation de l'entrepreneur et de ses proches participe d'une bonne gestion du risque, qui fait actuellement défaut.
    Quant aux mesures de simplification, trois étaient essentielles à nos yeux : la création d'un guichet unique pour le recouvrement des charges sociales afférentes à l'emploi de salariés ; le chèque-emploi entreprises ; la détermination d'un organisme unique chargé de recouvrer les cotisations sociales des professions artisanales, industrielles et commerciales.
    Les ordonnances vont prendre le relais de la procédure législative classique. Ces mesures ont été intégrées dans le texte qui a été voté tout à l'heure.
    Le volet social du projet de loi joue également un rôle primordial car il crée un climat plus serein et donc plus favorable à la création d'entreprise. Nous avons, lors de la première lecture, étendu de façon significative cette partie du texte.
    Nous voulions, entre autres, aider clairement le salarié à devenir entrepreneur, sans créer pour autant une situation de contentieux avec son employeur, à travers une adaptation du contrat de travail, ou encore en offrant au jeune créateur une meilleure qualité d'accompagnement, laquelle est indirectement une garantie supplémentaire pour la pérennité des entreprises.
    Nous soutenons donc le Sénat qui, aux articles 10 et 11, a apporté des précisions indispensables concernant les modalités d'application de ces dispositions.
    Dans le cas des contrats d'accompagnement, il était par exemple nécessaire de supprimer le caractère systématique de la coresponsabilité après l'immatriculation de l'entreprise.
    Par ailleurs, la présomption de non-salariat au profit des travailleurs indépendants, qui avait été introduite par l'Assemblée nationale en première lecture, constitue également une avancée significative.
    Nous partageons les nouveaux principes qu'a posés le Sénat concernant l'homogénéisation, dans la forme et dans le fond, des dispositions applicables aux personnes physiques et aux personnes morales : en rétablissant un climat de confiance, cette disposition aura un réel effet de levier sur la création d'entreprise, notamment par le biais de l'externalisation.
    Pour clore cette présentation de l'état actuel des débats, j'évoquerai les nouvelles dispositions adoptées par le Sénat après l'article 27 A.
    Pour répondre aux crises conjoncturelles que connaît le monde agricole, certains articles du code rural devaient être modifiés, afin d'étendre le dispositif destiné à faire face à ces crises.
    Tout comme le Sénat, nous sommes favorables à l'adoption de l'article additionnel 27 B, qui formalise les engagements pris par le Gouvernement en novembre dernier pour résoudre la crise entre les agriculteurs et la grande distribution, laquelle s'était traduite par le blocage temporaire de certaines centrales d'achat.
    Si ces questions peuvent paraître à première vue éloignées du coeur de notre sujet, il nous semble cependant opportun de protéger l'entreprise agricole et son développement dans le cadre de l'initiative économique.
    Le facteur temps est également un enjeu majeur de la protection des entreprises. Nous approuvons la démarche de nos collègues sénateurs, qui ont supprimé la consultation de la commission d'examen des pratiques commerciales, celle-ci, quelquefois, ne rendait pas son avis, ou le rendait très tardivement. Les mesures nécessaires pourront désormais être prises plus rapidement et les délais de consultation seront ainsi raccourcis.
    Dans le même esprit, un nouveau dispositif instaurant une procédure civile de réparation vise à lutter contre les pratiques tarifaires dites prédatrices, qui mettent en péril l'activité des exploitations agricoles en période de crise conjoncturelle. Cette mesure a un double objectif : éviter que des opérateurs ne profitent d'une période de crise pour pratiquer des prix qui élimineraient des concurrents compétitifs ; lutter contre certaines pratiques des acheteurs, qui exploitent la fragilité d'exploitations agricoles en période de crise pour obtenir d'elles des prix très bas.
    Enfin, dans le même souci de limiter le déséquilibre dans les relations entre les entreprises, le Sénat a adopté un nouvel article qui instaure la possibilité de sanctions pénales en cas de manquements des constructeurs de maisons individuelles à leurs obligations à l'égard de leurs sous-traitants. Si la démarche du Sénat nous paraît opportune, l'extension de l'incrimination à laquelle il a procédé nous a, en revanche, semblé trop large. C'est pourquoi notre commission spéciale a limité l'extension du champ de la sanction pénale à la seule absence, dans le contrat de sous-traitance, de la justification de l'existence de garanties de paiement.
    Notre objectif n'est nullement de remettre en cause la dépénalisation du droit économique, mais de proposer des solutions efficaces, le manquement à certaines obligations ayant des conséquences négatives définitives.
    Parallèlement à ces mesures, le Sénat a voulu reconnaître les organisations interprofessionnelles à compétence régionale dans le secteur viticole pour les vins d'appellation d'origine contrôlée et les vins de pays. Les organisations pourront de cette façon mettre en place des outils leur permettant de mieux organiser leur profession tant entre leurs membres qu'en termes de production et de gestion des marchés.
    Pour conclure, je rappellerai toute l'importance de ce projet de loi.
    La démarche entrepreneuriale est le fondement de la création de richesses, la base de la création d'emplois et un véritable ascenseur social.
    La stimuler est devenu un devoir...
    M. Jean-Louis Dumont. Dans la globalité des statuts !
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure. ... d'autant plus important que nous sommes actuellement dans un contexte économique de faible croissance.
    L'esprit d'entreprise et d'initiative doit retrouver une place de choix au sein des valeurs de notre société. Ce texte y contribuera.
    La meilleure protection de l'emploi est le dynamisme de nos entreprises et votre projet de loi, monsieur le secrétaire d'Etat, associant des dispositions financières à un volet économique conséquent, permettra de redonner confiance aux entrepreneurs de France, et à notre pays de retrouver son rang dans l'économie mondiale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission spéciale pour les articles fiscaux.
    M. Gilles Carrez, rapporteur de la commission spéciale, pour les articles fiscaux. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les décisions du Sénat sur les mesures financières et fiscales contenues dans le projet de loi montrent qu'il partage notre analyse des freins au développement de l'activité et à la création d'emplois, ainsi que du rôle irremplaçable des petites et moyennes entreprises dans la création et le développement de l'activité et de l'emploi.
    Dans cet esprit, le Sénat a adopté, dans les mêmes termes que notre assemblée, les dispositions visant soit à mieux inciter les épargnants à investir dans les fonds propres des PME, soit à faciliter la transmission d'entreprise.
    Il faut également saluer l'amélioration apportée par le Sénat au mécanisme d'exonération partielle de l'imposition des plus-values réalisées par les entreprises individuelles soumises à l'impôt sur le revenu. Grâce au dispositif proposé par nos collègues sénateurs, le taux de l'exonération pourra décroître progressivement en fonction du montant de recettes dépassant 250 000 euros ou 90 000 euros, selon la nature de l'activité exercée.
    Les effets de seuil, qui nous avaient beaucoup préoccupés lors de l'examen du texte en première lecture, sont donc supprimés par le dispositif proposé par le Sénat. La commission vous propose en conséquence d'adopter l'article 22 tel qu'il ressort de la délibération de mes collègues sénateurs.
    En ce qui concerne l'ISF, le Sénat a également fait sienne notre démarche.
    M. Gérard Bapt. Il l'a même dépassée !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Il s'agit d'une démarche pragmatique et réaliste.
    En effet, la vente d'un certain nombre d'entreprises familiales à des actionnaires étrangers se traduit tôt ou tard, hélas, par un transfert à l'étranger des centres de décision, puis des centres de recherche et d'innovation et, enfin, inéluctablement, des emplois de production. (« Très juste ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvemement populaire.)
    Certains aspects de l'ISF - il ne s'agit pas de tout l'ISF - qui portent sur l'entreprise ont incontestablement une part de responsabilité dans cette hémorragie d'emplois. En particulier, ils obligent l'entreprise à distribuer un dividende majoré pour tenir compte de l'imposition des actionnaires ne bénéficiant pas de l'exonération au titre des biens professionnels, mais dont la stabilité est pourtant nécessaire à la pérennité de l'entreprise et au maintien de ses centres de décision sur le territoire national.
    Les modifications techniques apportées par le Sénat aux dispositions visant à alléger l'ISF dû soit à raison de l'investissement en fonds propres dans les PME, soit à raison de l'engagement de maintenir dans la durée l'actionnariat stratégique de ces entreprises, sont satisfaisantes. Il convient néanmoins de garantir l'efficacité de l'incitation fiscale au regard de l'objectif de développement des fonds propres des PME et du maintien de l'activité. C'est le sens des amendements que vous proposera la commission spéciale aux articles 26 bis et 26 ter.
    Le Sénat a pour l'essentiel adopté les modalités de création et de fonctionnement des FIP, les fonds d'investissement de proximité. La commission vous proposera plusieurs amendements, inspirés par le souci de garantir la proximité des entreprises éligibles avec l'économie régionale et la fluidité de gestion indispensable à l'attractivité des FIP pour l'épargnant.
    La commission vous propose donc, mes chers collègues, d'adopter les dispositions financières et fiscales telles qu'elles ressortent du débat au Sénat, sous réserve de quelques corrections dont l'enjeu est essentiellement technique.
    Sur le fond, l'accord entre les deux assemblées est, sur cet excellent texte, manifeste. Il faut s'en réjouir pour l'activité économique et pour l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Louis Dumont. Le projet mérite pourtant d'être amendé !
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.
    M. Hervé Novelli, président de la commission spéciale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de loi, tel qu'il ressort de nos travaux en première lecture et compte tenu des modifications apportées par le Sénat ainsi que des propositions ultimes de notre commission spéciale, est un texte remarquable. Remarquable d'abord parce qu'il produit des effets avant même d'avoir été voté. (sourires.)
    M. Gérard Bapt. Ça alors !
    M. Hervé Novelli, président de la commission spéciale. Le fait est assez rare pour être remarqué.
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure. Tout à fait !
    M. Hervé Novelli, président de la commission spéciale. Vous avez, monsieur le secrétaire d'Etat, dressé avec raison le bilan statistique de la création d'entreprises. Vous avez insisté sur le véritable bond auquel nous assistons actuellement.
    M. Jean-Louis Dumont. Il faut calculer la différence entre créations et disparitions !
    M. Hervé Novelli, président de la commission spéciale. Ce faisant, vous avez mis, d'une certaine manière, l'accent sur l'importance de la psychologie dans l'acte économique, dans l'acte d'entreprendre.
    M. Jean-Louis Dumont. C'est ce que disait Chavanne quand il était ministre !
    M. Hervé Novelli, président de la commission spéciale. Je vous demande de prêter attention à ce que je dis, car vous devez comprendre ce qu'est l'économie, l'acte d'entreprendre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    L'acte d'entreprendre revêt un caractère psychologique très important.
    M. Léonce Deprez. Eh oui !
    M. Hervé Novelli, président de la commission spéciale. C'est parce que les entrepreneurs, les créateurs écoutent ce gouvernement et qu'ils sont confiants dans sa démarche qu'aujourd'hui l'on assiste au ressaut statistique dont vous avez parlé, monsieur le secrétaire d'Etat. Ce ressaut est simplement la conséquence psychologique des projets du Gouvernement.
    M. Gérard Bapt. M. Raffarin n'avait rien fait lorsqu'il était ministre !
    M. Hervé Novelli, président de la commission spéciale. Je suis persuadé que, lorsque ce texte sera voté, nous constaterons encore des améliorations et que les statistiques continueront d'être éloquentes.
    M. Léonce Deprez. Assurément ! Il y a un changement de climat !
    M. Hervé Novelli, président de la commission spéciale. Les deux rapporteurs ont décrit le stade auquel nous sommes parvenus aujourd'hui. Je ne souhaite pas m'y étendre, sauf pour dire que le Sénat a très largement confirmé, tant sur le plan économique que sur les plans financier et fiscal, ce que l'Assemblée avait cru devoir modifier dans le projet de loi qui lui était proposé.
    Créer une entreprise, sécuriser le patrimoine de l'entrepreneur individuel, faciliter le passage du statut de salarié à celui d'entrepreneur, promouvoir le financement et les facilités de financement des entreprises par le biais de la création d'outils nouveaux, autant de sujets qui ont été largement traités par les rapporteurs : aussi n'y reviendrai-je pas.
    Je me bornerai à relever qu'il y a une grande cohérence dans l'action du Gouvernement. Aujourd'hui, nous discutons de la création d'entreprise. Or le Gouvernement réintroduit les notions d'activité, de création, de production, bref de travail, au coeur de son action politique et économique.
    Les remous sociaux que connaît notre pays aujourd'hui sont l'occasion de parler de la réintroduction des notions de travail et d'activité, tant pour résoudre tel ou tel problème de financement des retraites que pour régler le problème de l'activité économique et de la création d'entreprise dans notre pays.
    C'est cette cohérence qui renforce l'action du Gouvernement. C'est cette cohérence que je veux saluer après que les deux rapporteurs ont présenté les amendements que la commission spéciale a cru devoir adopter à l'occasion de cette deuxième lecture. Celle-ci n'a pas marchandé son soutien à ce texte car il traduit bien la nouvelle philosophie qui est à l'oeuvre au Gouvernement. Et cette philosophie, nous la soutenons, autant que les mesures techniques qui la sous-tendent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :
    Suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, n° 760, pour l'initiative économique :
    Mme Catherine Vautrin et M. Gilles Carrez, rapporteurs au nom de la commission spéciale (rapport n° 882).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT