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Quatrième séance du jeudi 1 juillet 2004

4e séance de la session extraordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

    1

SAISINE POUR AVIS D'UNE COMMISSION

M. le président. J'informe l'Assemblée que la commission de la défense nationale et des forces armées a décidé de se saisir pour avis du projet de loi, adopté par le Sénat, de modernisation de la sécurité civile (n° 1680).

    2

ASSURANCE MALADIE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie (nos 1675, 1703).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Cet après-midi, l'Assemblée a commencé l'examen des articles, s'arrêtant aux amendements identiques nos 6311 à 6325, portant article additionnel avant l'article 1er.

Je rappelle que sur cette série d'amendements se sont déjà exprimés M. Le Guen, M. Bapt et Mme Imbert.

D'autres orateurs souhaitent-ils intervenir ?...

La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Monsieur le président, monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, monsieur le secrétaire d'État à l'assurance maladie, ceux de nos collègues qui se sont déjà exprimés sur ces amendements ont comparé le système sanitaire français à ceux de l'Europe et d'autres pays du monde. En réalité on a surtout évoqué l'exemple de l'Allemagne depuis le début de la discussion de ce projet de loi - mais cela avait déjà été le cas à propos de la journée de solidarité ou des 35 heures. Je voudrais, pour ma part, évoquer d'autres exemples étrangers.

Je me suis en effet penchée sur une comparaison internationale que l'on doit à l'OCDE, organisme peu suspect d'hostilité à l'égard du Gouvernement. Cette étude de grande qualité est en effet très instructive. Elle prouve notamment, statistiques nombreuses à l'appui, qu'une meilleure prévention permet d'améliorer notablement la qualité des soins dispensés à la population et son état sanitaire général. Cette étude comparative, ce benchmarking, comme disent les Anglo-Saxons, nous rappelle opportunément que l'action publique peut remédier aux inégalités dans l'accès aux soins, sans dissimuler que cela peut avoir un coût important. Elle souligne également que le choix de la couverture maladie peut accroître la capacité de réponse du système de santé. Elle démontre a contrario et d'une manière irréfutable que la privatisation des systèmes de santé et la montée en puissance de l'assurance maladie privée, outre qu'elles n'ont pas provoqué de réduction notable des dépenses publiques de santé, se concilient difficilement avec l'objectif d'équité.

Tout cela démontre l'insuffisance de l'approche excessivement comptable qui est la vôtre, vous qui tentez de faire accroire que c'est en privatisant la sécurité sociale que l'on mettra fin au déficit de l'assurance maladie. Ce type d'étude comparative nous invite donc à repenser notre système de soin en l'inscrivant dans une perspective internationale, ce qui est fondamental.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Je rappelle que cette série d'amendements tend à préciser que notre système de santé doit s'intégrer dans une dimension européenne et internationale. Cela m'amène à aborder la question, je ne dirais pas de l'exemplarité, car cela pourrait sembler prétentieux, du moins de l'image de la France et de l'exigence qu'elle impose dans ce domaine. Je veux parler des conséquences actuelles de la réforme de l'aide médicale d'État, votée en décembre 2003, qui, loin d'être hors de notre sujet, est en son cœur même.

Les conséquences néfastes de cette réforme ont été soulignées ces derniers temps par des associations et des organismes que nous respectons tous ici, tels que Médecins sans frontières, le SAMU social de Paris, Médecins du monde ou encore le Comité médical pour les exilés, le COMEDE. À travers des documents et des rapports dont vous avez tous ici, je suppose, été destinataires, ces associations lancent un cri d'alarme. Les exemples qu'on y trouve nous permettent de mesurer comment, sous prétexte d'économies ou de lutte contre de prétendues dérives du système, on aboutit à de véritables drames humains, quand ce n'est pas à des résultats totalement opposés à l'objectif affiché. En effet, monsieur le ministre, ces associations humanitaires nous démontrent qu'interdire à des étrangers en situation irrégulière, au nom de ces exigences nouvelles, l'accès à l'aide médicale d'État revient dans les faits à leur interdire l'accès aux soins, jusqu'au moment où la gravité de leur maladie nécessite leur hospitalisation. Leur refuser l'accès aux soins, c'est implicitement n'accepter de prendre en compte leur état sanitaire qu'une fois que celui-ci aura atteint une particulière gravité. Les drames humains relatés par ces rapports sont particulièrement édifiants sur ce point. On ne peut nier la part de la responsabilité politique dans une telle situation, d'autant qu'on entend à ce sujet des discours largement contradictoires. Le Gouvernement pourrait saisir l'occasion de ce débat pour clarifier sa position sur ce sujet.

Je veux d'abord rappeler la position du rapporteur général sur cette question : « Quant aux dispositifs sociaux, dit-il, ils fonctionnent à guichets ouverts. Nous avons voté dès la fin de 2002, puis de nouveau en 2003, la réforme de l'aide médicale d'État, c'est-à-dire le bénéfice de la CMU pour les personnes en situation irrégulière. Est-il normal que les décrets d'application ne soient toujours pas sortis, alors que c'est là une des principales raisons pour lesquelles nous n'arrivons pas à maîtriser l'immigration clandestine ? » Vous avez bien entendu : on en est encore là.

Je connais, monsieur le ministre, votre position quant à cette question, et je vous donne acte que ces propos ne la reflètent pas du tout. Mais c'est précisément la raison pour laquelle il est temps aujourd'hui d'exposer vos orientations en la matière. D'autant, monsieur le président, que nous aurons à examiner une série d'amendements de M. Mariani, dont le contenu, présenté hier au cours de la discussion générale, s'inspire complètement de conceptions de ce genre. On s'étonne de trouver sur les bancs de l'UMP des députés pour tenir des discours de cette sorte, et je pense qu'il serait utile, monsieur le ministre, que vous répondiez aux interpellations unanimes des associations. Il s'agit d'être fidèle aux exigences que nous impose une certaine conception de la santé.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi sur l'assurance maladie, pour donner l'avis de la commission spéciale sur ces amendements.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi sur l'assurance maladie. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale, pour donner l'avis du Gouvernement sur ces amendements.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 6311 à 6325.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt et une heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Je suis saisi d'un amendement n° 7748.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le soutenir.


M. Jean-Marie Le Guen
. Cet amendement rappelle tout simplement que la sécurité sociale a vocation à mettre en œuvre des tarifs opposables. Le prix payé par le patient doit correspondre à la base de remboursement de la sécurité sociale. Avouez que ce n'est absolument pas d'actualité et que le problème ne se pose évidemment pas !

Pour être sérieux, cet amendement vise à préciser, à un moment crucial pour l'avenir de l'assurance maladie, que nous ne pouvons accepter un décrochage entre les dépenses de santé et les dépenses de l'assurance maladie, un décrochage entre le coût pour le patient et le remboursement par la sécurité sociale.

À la lecture de ce projet de loi, nous avons plus que des inquiétudes. En effet, lorsque nous en viendrons à l'examen de l'article 5, nous constaterons combien le Gouvernement laisse la porte ouverte à la systématisation de la « désopposabilité » : les patients ne seront plus remboursés sur le tarif opposable, notamment pour les consultations de spécialistes.

Cette tentation a également été présente avec la mise en œuvre par le ministre précédent des fameux TFR, les tarifs forfaitaires de responsabilité selon lesquels le patient n'est plus remboursé sur la base du prix payé pour les médicaments qui lui sont prescrits, mais sur le prix de la classe thérapeutique des médicaments.

Tout cela constitue des indices. C'est même une réalité qui se développe dans ce projet de loi.

Comme nous l'avons indiqué fortement cet après-midi, et nous voulons le réaffirmer ce soir, la perspective de la loi organique de financement de la sécurité sociale laisse augurer une maîtrise des dépenses d'assurance maladie, alors que le Gouvernement n'apporte pas la preuve, au travers de ce texte, d'une véritable volonté de maîtriser les prix des actes médicaux et des prescriptions.

C'est pourquoi cet amendement nous paraît emblématique si l'on veut éclairer ceux qui seront, plus tard, les véritables gestionnaires de l'assurance maladie. Je pense notamment à ce « super-directeur » de l'UNCAM, mais aussi à ces responsables de la Haute autorité de santé qui auront vocation à réguler le panier de soins, c'est-à-dire à donner au moins des conseils, voire plus que des conseils, des avis quasiment opposables à l'ensemble des pouvoirs publics : ils détermineront ce qui doit être remboursé ou pas, à quel taux, etc.

On le voit bien : une logique du déremboursement est à l'œuvre, déremboursement qui serait, selon vous, socialement amoindri ou, en quelque sorte, géré par le fait que les complémentaires viendraient - mais, à mon avis, d'une façon dangereuse pour elles-mêmes - se substituer à la protection sociale obligatoire.

Ce sera dangereux pour les complémentaires parce que cette dérive aura - et a d'ailleurs déjà - des conséquences majeures sur leurs coûts. Je pense particulièrement aux mutuelles, qui verront leurs comptes déstabilisés. En effet, elles fixent leurs tarifs annuellement et lorsqu'elles prendront en charge, mois après mois, les évolutions de déremboursements successifs, à chaque fois, leurs comptes seront bouleversés.

Apparemment, ce danger n'a pas été complètement mesuré par tous. Les compagnies d'assurances, elles, ont évidemment beaucoup plus de souplesse et de moyens financiers pour pouvoir investir ce marché.

Je crains donc qu'au-delà des phénomènes de déremboursement, nous n'assistions à un véritable envahissement marketing par les compagnies d'assurances dans une déréglementation tout à fait générale.

Sur cette affaire du déremboursement, le principe que nous voulons absolument inscrire avant l'article 1er, à savoir le tarif opposable de la sécurité sociale, doit être au cœur de nos préoccupations si nous voulons sauvegarder l'assurance maladie.

C'est pourquoi nous vous proposons de défendre ce principe en adoptant cet amendement, mais j'ai un peu peur qu'il soit contraire à l'orientation générale du texte et à la ligne du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La définition d'un acte médicalement justifié est difficile à donner ; elle varie surtout avec le temps. Cet amendement est une déclaration de principe qui n'a pas sa place dans la loi.

La commission a donc repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Avis identique.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7748.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7749.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le soutenir.

M. Jean-Marie Le Guen. Il s'agit tout simplement de la mise en œuvre du principe précédent. J'ai parlé des risques de déremboursement. Avec cet amendement, il ne s'agit pas simplement d'un risque, mais de la certitude que le Gouvernement a décidé d'augmenter régulièrement le forfait hospitalier.

Nous savons que le Gouvernement a aujourd'hui la possibilité d'agir, à sa discrétion, pour augmenter le forfait hospitalier. Il ne s'en est d'ailleurs pas privé puisque, l'année dernière, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, M. Mattei nous avait déjà proposé une augmentation très substantielle du forfait hospitalier.

L'annonce du Gouvernement à ce sujet semble, certes, encore anodine pour ceux répètent à l'envi que 1 euro, ce n'est pas grand-chose, mais, après la hausse précédente, nous atteindrons sur l'ensemble des années 2002 à 2007 plus de 40 % d'augmentation du coût du forfait hospitalier.

Je veux aussi attirer votre attention sur un certain nombre de secteurs, monsieur le ministre, car vous avez la possibilité d'intervenir de façon discrétionnaire. En effet, si par malheur cet amendement n'était pas adopté, vous auriez la possibilité d'agir à votre guise dans le cadre réglementaire.

Alors n'oubliez pas une chose : les forfaits hospitaliers concernent aussi les hôpitaux psychiatriques, où la durée moyenne d'hospitalisation est beaucoup plus longue.

On peut trouver qu'un, deux ou trois euros d'augmentation, c'est difficile, mais supportable pour une semaine ou quinze jours à l'hôpital, même si cela peut représenter, au total, des sommes non négligeables. Par contre, pour des personnes se trouvant dans des hôpitaux de long séjour et/ou dans des hôpitaux psychiatriques - personnes dont les revenus sont très souvent diminués faute d'activité professionnelle -, il y a un grand risque de rupture sociale qui peut compliquer encore des situations médicales déjà particulièrement délicates.

Par conséquent, monsieur le ministre, si je n'arrivais pas à vous convaincre, d'une part, d'inscrire dans la loi le tarif du forfait hospitalier, et, d'autre part, de renoncer à vos augmentations telles que vous les avez prévues, répondez-moi au moins sur la démarche de votre prédécesseur, M. Jean-François Mattei, qui, se targuant ici d'un sens important de la relativisation des situations sociales, nous avait expliqué que les hôpitaux de long séjour et les hôpitaux psychiatriques ne seraient pas touchés par l'augmentation du forfait hospitalier. Il envisageait même de le baisser.

C'est une question que je vous pose. Bien entendu, monsieur le ministre, vous me répondrez sur le principe du forfait hospitalier, sur celui de son inscription dans la loi et de son augmentation. Vous nous expliquerez en quoi ce forfait hospitalier serait de nature à responsabiliser le patient. C'est évident : les gens pratiquant le nomadisme médical ont vocation à aller se faire héberger à l'hôpital ! Et lorsqu'ils arrivent à l'hôpital, un nombre incroyable de médecins sont toujours présents pour solliciter leur hospitalisation et leur dire : « Je vous en prie, on n'attendait que vous ! On n'avait rien à faire, on sera heureux de vous recevoir » !

On le voit : ce forfait hospitalier a un rôle en matière de santé publique et de responsabilisation, puisque c'est ainsi que vous voulez vous en inspirer pour votre politique !

Si nous n'étions pas d'accord sur ces présupposés généraux, monsieur le ministre, il serait utile que vous nous répondiez d'une façon positive et précise sur le point particulier que je viens de soulever.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement.

La première partie de la phrase de l'amendement est satisfaite par l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale. Par ailleurs, je ne pense pas qu'il faille aller jusqu'à des détails aussi raffinés sur un texte de loi de cette importance.

M. Jean-Marie Le Guen et Mme Muguette Jacquaint. Raffinés ?

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Trois remarques.

Premièrement, le Gouvernement s'en tiendra à la répartition des compétences entre la loi et le règlement, définie à l'article 34 de notre constitution. Je n'y reviendrai pas.

Deuxièmement, je fais remarquer à M. Le Guen que, le 1er janvier 1991, le forfait hospitalier est passé de 31 à 33 francs. Le 1er juillet 1991, il est passé de 33 à 50 francs. Soit un total de 19 francs, c'est-à-dire 2,9 euros d'augmentation en une seule année !

Autrement dit, M. Évin a augmenté le forfait hospitalier de 2,9 euros en une seule année.

Mme Martine Billard. C'est pour ça que vous le copiez !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. De ce point de vue, nous n'avons donc pas de leçons à recevoir.

Par contre, nous reviendrons plus tard sur les hôpitaux psychiatriques : le Gouvernement a prévu de ne pas augmenter le forfait hospitalier dans ce secteur.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Monsieur le ministre, même si nous notons avec satisfaction que vous distinguez les établissements psychiatriques des autres s'agissant du forfait hospitalier, il aurait été souhaitable d'aller plus loin en proposant un amendement en ce sens.

Cela dit, force est de constater que, vu le niveau atteint par le forfait hospitalier, il ne s'agit absolument plus de responsabiliser les assurés et de changer les comportements, mais de trouver une nouvelle recette de poche.

Au départ, le forfait hospitalier était une participation du malade, demandée non pas dans un but de responsabilisation, mais pour compenser les dépenses de bouche et d'hôtellerie du malade hospitalisé équivalentes à celles qu'il aurait eu à supporter à son domicile.

Aujourd'hui, la logique est entièrement différente.

Répondant à une question d'actualité sur l'augmentation du forfait hospitalier, vous avez indiqué qu'elle devait suivre l'augmentation du coût des techniques médicales. Cela signifie qu'on change complètement la nature du forfait hospitalier : on sort de l'hôtellerie pour passer à la prise en charge de l'évolution du coût de la technologie médicale et du fonctionnement des hôpitaux.

En conclusion, sachant qu'il y a des établissements moins chers que d'autres, selon votre propre logique, vous devriez aller plus loin et moduler le forfait selon qu'il s'agit d'hôpitaux psychiatriques ou non. C'est indispensable tant sur le plan de la justice que pour l'égalité d'accès aux soins.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.

Mme Catherine Génisson. Monsieur le ministre, vous faites toujours référence au passé, mais j'ai envie de vous rappeler que le peuple français a jugé et sanctionné. Nous sommes ici pour parler de l'avenir.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est vrai !

Mme Catherine Génisson. Par ailleurs, M. Bapt a bien fait de rappeler qu'à l'origine le forfait hospitalier, avait pour objectif de couvrir partiellement les dépenses d'hébergement des malades.

Nous avons largement traité du problème de l'hospitalisation psychiatrique - votre prédécesseur s'était largement engagé sur ce sujet - mais il n'y a pas que ces maladies qui imposent des hospitalisations de longue durée qui seraient extrêmement pénalisantes pour le malade sans une prise en charge ou une exonération du forfait hospitalier. Cet amendement est donc important. Vous devriez l'accepter, monsieur le ministre.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7749.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7754.

La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal, pour le soutenir.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Je suis présente depuis hier dans cet hémicycle et, pourtant, monsieur le ministre, je n'ai pas bien compris ou pas entendu votre réponse à nos nombreuses questions relatives à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. En l'état, le texte soumis à notre examen ne comporte aucune disposition explicite quant à la répartition précise des financements et des emplois, qui doivent continuer d'émaner de l'assurance maladie et de la répartition de l'ONDAM pour les personnes âgées et les personnes en situation de handicap, et quant aux crédits apportés, en complément, par la CNSA au titre de l'aide à la vie quotidienne en cas de perte d'autonomie.

Nous souhaitons vivement que soient clairement distinguées les responsabilités respectives de l'assurance maladie et de la CNSA. Nous avons, par exemple, entendu récemment dire que le nursing  ne relèverait plus des soins et serait, donc de ce fait, à la charge de la CNSA, donc, des conseils généraux. Il est essentiel, pour leur dignité, que les personnes âgées et les personnes en situation de handicap soient considérées comme des assurés sociaux à part entière. Les conseils généraux doivent pouvoir exercer leurs compétences médico-sociales sans que soit remise en cause la participation de l'assurance maladie. Une telle clarification permettrait également, dans le cadre de la fongibilité des enveloppes au sein de l'ONDAM, de tirer les conséquences des évolutions démographiques et épidémiologiques - je pense entre autres à la maladie d'Alzheimer avec 110 000 nouveaux cas par an - et d'assurer une progression dynamique des ONDAM médico-sociaux des personnes âgées et de celles en situation de handicap, notamment en gérontologie, secteur le moins bien doté de l'action sanitaire et sociale. Cette dynamique pourrait être soutenue par les opportunités de redéploiements financiers au titre des dépenses de soins de ville, d'une part, et de la recomposition hospitalière, d'autre part. Nous ne connaissons pas les missions exactes de cette caisse. Nous avons, en conséquence, besoin d'une clarification, monsieur le ministre.

M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, vous vous targuez de la concertation, vous vous targuez de l'avis des partenaires sociaux... Il semblerait que le ministre ait un coup de fil à passer.

M. le président. Monsieur Le Guen, occupez-vous de moi ! (Sourires.)

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, j'ai beaucoup de respect et d'amitié pour vous, mais j'essaie de convaincre le ministre ! Je comprends très bien qu'il ait des choses à faire ! S'il doit téléphoner, on peut s'arrêter cinq minutes !

M. Claude Goasguen. Rappelez-vous, Mme Guigou lisait des romans en séance !

M. le président. Poursuivez, monsieur Le Guen !

M. Jean-Marie Le Guen. Les organisations syndicales, les associations concernées par les problèmes du troisième âge et l'ensemble des organismes sociaux concernés, notamment les caisses nationales d'assurance maladie telles que la MSA, se sont prononcés contre le projet de loi parce qu'ils considèrent que, parallèlement aux problèmes de financement qui se posent, la création d'une nouvelle caisse intervenant en matière d'assurance maladie accroît le risque de cloisonnement dans le domaine des soins. Nous aimerions obtenir, en la matière - et sans doute ne sommes-nous pas les seuls ici - une réponse précise du ministre. Nous avons, en effet, été nombreux à expliquer que ce cloisonnement posait des problèmes en matière de qualité et d'efficacité de notre système de soins. Notre amendement pose le principe que tout ce qui concerne les soins aux personnes âgées doit continuer à relever de l'ONDAM, ce qui, selon certains, pourrait ne plus être le cas demain. Le Gouvernement doit, en la matière, nous donner plus d'explications. Son silence signifierait que nos craintes sont légitimes et fondées.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je souhaite évidemment lever la crainte de M. Le Guen. Les prestations de soins restent prises en charge pour les personnes concernées dans les conditions de droit commun. En effet, les financements nouveaux découlant de la loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées ne remettent absolument pas en cause le mode de fonctionnement actuel des dépenses relatives aux professionnels de santé, aux auxiliaires médicaux, aux aides-soignants et aux aides médico-psychologiques.

C'est la raison pour laquelle, comme je le précisais, à l'instant, le Gouvernement propose le rejet de cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7754.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7753.

La parole est à M. Gérard Bapt, pour le soutenir.

M. Gérard Bapt. Cet amendement a pour objet de développer la télémédecine dans les hôpitaux de proximité en l'intégrant dans les SROS. Un de nos confrères de la région Midi-Pyrénées est, vous le savez monsieur le ministre, particulièrement attaché au développement de cette technique moderne qui a fait ses preuves. Ce dispositif pourrait être institutionnalisé grâce à un régulateur à l'échelon régional, permettant d'améliorer l'offre et la qualité des soins dans les hôpitaux de proximité. S'ils étaient systématiquement reliés à un réseau organisé de télémédecine, ces hôpitaux, qui doivent être en relation les uns avec les autres, pourraient offrir un service de qualité. Or, à l'heure actuelle, et bien qu'il s'agisse d'une technologie de pointe, ce système fonctionne de manière quelque peu artisanale. Si la télémédecine était généralisée, institutionnalisée et intégrée dans les SROS, les hôpitaux de proximité et les centres de consultation dans les maisons médicales pourraient offrir un diagnostic sûr, un confort et une sécurité, redonnant ainsi confiance aux patients.

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, cet amendement s'intègre parfaitement dans un tel projet de loi qui affiche pour ambition de moderniser et d'améliorer l'offre de soins.

M. Jean-Marie Le Guen. Excellent !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a accepté l'amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Le ministère de la santé est très favorable à la télémédecine. Avis favorable à l'amendement.

M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7753.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements nos 7004, 7638, 7003 et 7637, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Claude Goasguen, pour soutenir l'amendement n° 7004.

M. Claude Goasguen. Compte tenu de la façon dont se déroule le débat, la question extrêmement importante de l'AME ne pourra pas être débattue sereinement ce soir, dans cet hémicycle. Je ne veux pas donner prétexte à un allongement de la discussion. Nous reviendrons donc, avec mes collègues, sur cette question à l'occasion de l'examen de la loi de finances. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Je ne me lasse pas d'écouter M. Le Guen. Je lui laisse donc le micro et je retire ces quatre amendements.

M. le président. Les amendements nos 7004, 7638, 7003 et 7637 sont retirés.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7654.

La parole est à M. Alain Claeys, pour le soutenir.

M. Alain Claeys. La proposition du Gouvernement d'une aide à la mutualisation de 150 euros est totalement insuffisante. Elle ne parviendra pas à aider les ménages les plus modestes à faire face aux tarifs des mutuelles qui ont tendance à augmenter fortement. Les tarifs des complémentaires santé sont systématiquement à la hausse depuis plusieurs années. Celle-ci s'est accélérée en 2004, dépassant parfois 10 %. On observe d'ailleurs une pratique de plus en plus courante consistant à augmenter les tarifs deux fois dans l'année. Ces hausses sont souvent liées aux décisions prises par le Gouvernement. Ainsi, en 2004, l'accélération est certainement due aux transferts de charges opérés notamment avec les déremboursements de médicaments. Il en ira de même de la réforme en cours dont un organisme complémentaire a tenté d'évaluer l'impact. La charge serait de 366 millions d'euros en 2005 - hors remboursement du « 1 euro Raffarin » -, de 600 millions à 1,2 milliard en 2006 et de 1,1 à 1,7 milliard en 2007.

Concernant les retraités, la loi Evin leur permet de continuer à être couverts par l'assureur de leur ancien employeur à un tarif qui ne peut être supérieur à 150 % de l'ancien tarif. Les retraités subissent, en tout état de cause, la perte de la contribution employeur - 50 à 60 % en moyenne - et la hausse du tarif. Vous avez proposé, d'une manière qui a été jugée précipitée, un décret encadrant plus strictement le tarif pouvant être proposé aux retraités. Le risque, à vouloir trop le contenir, est de reporter la charge sur le tarif acquitté par les actifs et de détourner salariés et employeurs des contrats collectifs.

À propos de l'aide à l'accès aux mutuelles, plusieurs questions essentielles se posent, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État.

L'aide est-elle réservée à un certain type de contrats et, si oui, lesquels ? Quel panier de soins est prévu ? Des conditions particulières seront-elles imposées aux assurances complémentaires, comme la non-discrimination selon l'âge, la situation sociale ou les risques couverts ? Dans le cas contraire, l'aide sera symbolique et n'aura aucun impact réel, vu le coût croissant des contrats.

À qui est-elle destinée ? Des conditions de ressources ou d'activité seront-elles exigées ? Est-elle réservée aux seuls salariés ou bien s'adresse-t-elle aussi aux retraités - qui n'ont pas droit aux contrats de groupe - et aux étudiants ?

Enfin, la primauté des contrats de groupe sera-t-elle assurée ? Quel dispositif est prévu pour inciter les entreprises à signer des contrats collectifs, moins chers et plus favorables aux assurés ? Quel dispositif est prévu pour que les retraités ou les chômeurs puissent continuer à profiter de leur ancien contrat de groupe ?

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. On touche là un point essentiel. Le Président de la République a souhaité que les 8 % de Français qui ne peuvent se payer d'assurance complémentaire soient aidés, et les députés de la majorité comme de l'opposition ont voulu, peu ou prou, s'orienter dans cette direction. Mais comment faire ?

D'abord, s'agissant de la méthode, je suis un peu surpris que le groupe socialiste soutienne cet amendement avant l'article 1er...

M. Jean-Marie Le Guen. C'est la séance qui en a décidé ainsi, pas nous !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. En commission, c'était pareil.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous n'avions pas choisi non plus !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Sa place était plutôt après l'article 32, endroit du texte où j'ai moi-même déposé un amendement sur le sujet.

Ensuite, quelles étaient les formules possibles ? Au sein de notre groupe, c'est vrai, il y avait des partisans d'une aide personnalisée directe et des partisans d'un crédit d'impôt. Cette seconde solution paraît logique, dans un souci de simplification et pour éviter un décalage entre l'achat de l'assurance complémentaire et le versement de l'aide. Jusque-là, tout va bien, mais il reste à déterminer le montant du plafond et celui du crédit d'impôt, ce qui soulève effectivement toute une série de questions financières, monsieur Claeys. Puisque vous avez avancé des chiffres, laissez-moi vous dire que la proposition du Parti socialiste - aller jusqu'à 1,4 SMIC - coûterait 3,8 milliards d'euros. Soyons pragmatiques et réalistes : nous irons dans la bonne direction en vous soumettant un amendement après l'article 32, mais la commission a rejeté votre amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je ferai simplement remarquer que cet amendement coûterait 3,8 milliards d'euros, quand les dettes cumulées de l'assurance maladie atteignent déjà 32 milliards...

M. Jean-Marie Le Guen. Ce serait une dépense pour l'État, pas pour l'assurance maladie !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il faut être rigoureux jusqu'au bout, monsieur Le Guen, et chacun comprendra ce que représentent 3,8 milliards dans le contexte actuel.

M. Jean-Marie Le Guen. Il ne faut pas confondre ce qui sort de la poche de l'État et ce qui sort de la poche de l'assurance maladie ! Ce n'est pas pareil !

M. le président. Monsieur Le Guen !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Au demeurant, puisque l'idée est si bonne, pourquoi ne pas l'avoir mise en application pendant les cinq ans où vous étiez au pouvoir ?

Mme Martine Billard. Justement ! Ne faites pas la même erreur !

M. le président. Madame Billard, je vous en prie !

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Si nous ne l'avons pas fait, c'est peut-être par manque d'audace.

M. Philippe Cochet. Vous manquez de courage !

M. Jean-Marie Le Guen. Je reconnais que le Président de la République, lui, durant sa campagne électorale, a au moins eu cette audace. Notre proposition reste d'ailleurs extraordinairement timorée, bien en deçà de ce que proposait le Président de la République, car nous bornons l'aide fiscale, ce qu'il n'envisageait même pas : il proposait un crédit d'impôt pur et simple, de nombreux mutualistes l'ont relevé. Nous réagissons donc avec retard et modération.

Mais je constate que le passage aux actes vous trouble énormément, monsieur le ministre, au point que vous en venez à confondre, une fois de plus, le budget de l'État et le budget de la sécurité sociale. De la part du ministre responsable de la sécurité sociale, ce n'est pas de bonne politique. Lorsque vous rencontrez votre collègue de Bercy - mais j'oubliais que ce n'est pas si simple, même le week-end -, je vous invite à ne pas commencer par lui dire : « tout ce qui est à moi est à toi », sans quoi vous n'aurez guère de chance de faire entendre votre point de vue !

Au-delà des relations entre ministres, problème d'ordre tactique, si j'ose dire, c'est une question de principe : la sécurité sociale, y compris sa branche assurance maladie, arbitre entre dépenses sociales, tandis que l'État arbitre entre dépenses de différentes natures. Il n'est donc pas tout à fait anodin que les responsables de la sécurité sociale - notamment parmi les organisations syndicales - essaient non pas de sanctuariser leur budget, ce qui serait impossible, mais, en tout cas, d'identifier ce qui leur revient. C'est pourquoi, d'ailleurs, tous ou presque sont opposés à la maîtrise comptable des budgets sociaux et se déclarent plutôt partisans d'une logique assurancielle : ils préfèrent ouvrir des droits créances que la puissance publique a vocation à abonder.

Ce matin déjà, vous n'avez pas établi de distinction entre les budgets sociaux de l'État et le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il est vrai que vous avez l'intention de rompre avec cette tradition et de faire en sorte que le mécanisme de budgétisation et d'opposabilité budgétaire, à l'avenir, fonctionne de façon identique pour le budget de l'assurance maladie et le budget de l'État. C'est une preuve supplémentaire - la preuve suprême, dirai-je même - de l'étatisation de l'assurance maladie. En effet, s'il est important de savoir qui de l'État ou de l'assurance maladie régule le système, il est encore plus important de connaître son mode de financement. Or, dès lors que le mécanisme budgétaire devient parallèle à celui de l'État, comme vous le proposez dans votre projet de loi organique de financement de la sécurité sociale, on change de logique : cela revient à étatiser la sécurité sociale.

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 7654, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. L'argumentation de notre collègue Le Guen me surprend un peu car le mode de financement proposé le Gouvernement et la commission me semble au contraire préserver la cohérence interne du système de santé.

Je souhaite surtout clarifier les choses en confirmant que le groupe UMP est déterminé à installer un système d'aide à l'accès aux mutuelles. Nos collègues socialistes nous accusent de ne pas tenir bon parce que nous refusons de voter leur amendement. Qu'ils ne nous fassent pas ce coup, si vous me permettez l'expression ! Leur amendement n'est qu'une opération politicienne ! C'est leur droit - et, venant d'eux, j'y vois une certaine logique - mais nous ne sommes pas dupes et, comme l'a dit le rapporteur, notre résolution reste entière : oui à une aide à l'accès aux mutuelles ; nous respecterons notre engagement politique. Cette mesure a sa place à un endroit du texte précis et, surtout, elle doit être simple, efficace et cohérente. Or l'amendement qui nous sera présenté ultérieurement remplit bien mieux ces conditions que celui-ci.

M. le président. L'Assemblée étant suffisamment informée, nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 7654.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement n° 7654 :

              Nombre de votants 58

              Nombre de suffrages exprimés 58

              Majorité absolue 30

        Pour l'adoption 19

        Contre 39

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je suis saisi d'un amendement n° 7756.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le soutenir.

M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement a pour objet d'inciter le Gouvernement à agir sur l'offre de soins. Cela peut se faire par bien des moyens, notamment les mesures relatives à la pharmacie et à l'hôpital, dont nous avons déjà parlé et dont nous reparlerons immanquablement, mais un autre levier nous semble très important : celui du médecin de famille.

Nous sortons d'un monde où ce professionnel libéral, à l'évidence, concevait son exercice de façon isolée, souvent avec la seule aide de sa famille, sans vision globale de son insertion dans l'offre de soins, sans mise en réseau avec des confrères ou d'autres professionnels de santé, si ce n'est de façon confraternelle ou amicale, mais certainement pas organisée.

Nous savons pourtant bien que, pour faire face aux problèmes de démographie médicale, particulièrement sensibles dans les zones rurales désertifiées ou les zones urbaines difficiles, où les praticiens sont de plus en plus réticents à s'installer, il faut qu'ils se regroupent. Indépendamment de l'offre médicale, je pense aussi que le travail en équipe est de nature à améliorer la qualité de vie des médecins de famille, et cette dimension prend de l'importance alors que la profession se féminise à grands pas.

Il faudrait par conséquent faire preuve de volontarisme et d'imagination afin d'inventer de nouvelles formes de regroupements, en plus de la médecine de groupe classique. De ce point de vue, dans son rapport relatif aux innovations à mettre en place pour améliorer l'efficience de l'offre de soins, remis il y a près d'un an, l'inspecteur général des finances Bruno Durieux avançait une idée inspirée par des expériences étrangères : une rémunération sous forme de capitation pour les médecins travaillant en cabinet. Vous voyez donc, monsieur le ministre, qu'une personnalité qui n'est adversaire ni du libéralisme ni de la médecine libérale va beaucoup plus loin que nous, puisque nous nous contentons de proposer une rémunération partielle au forfait.

Selon lui, les politiques menées à l'étranger et qui visaient à restreindre le panier de soins pris en charge, n'ont obtenu à ce jour que des résultats fort limités.

Pour tout dire, ce rapport qui insiste sur la modification de l'offre de soins beaucoup plus que sur la restriction de la couverture sociale, ou même sur la pseudo-responsabilisation dont nous parlerons durant tout l'examen de ce texte, mettait en lumière le caractère stratégique - ce que j'ai tenté de montrer hier - de l'offre de soins.

Au premier niveau, il y aurait le regroupement des professionnels ; au deuxième, vraisemblablement, le regroupement de ces regroupements au sein de réseaux ; au troisième, la mise en place, à l'évidence, des agences régionales de santé, capables d'opérer le décloisonnement, cette fois-ci, entre la ville et l'hôpital. En effet, ce n'est pas un comité national Théodule qui pourra le faire, ni un rapprochement diplomatique entre l'ARH et l'URCAM. Ce sont bien ces agences régionales de santé qui seront le troisième niveau de fusionnement des enveloppes et de décloisonnement de l'offre de soins.

Tels sont les enjeux stratégiques d'une réforme du système de santé : regroupement de professionnels rémunérés en fonction de la qualité de leurs actes et non pas simplement de leur quantité ; intégration dans un réseau comportant plusieurs catégories de professionnels de santé et couvrant un bassin territorial ; installation d'agences régionales de santé organisant la fusion des enveloppes et des moyens, ce qui permettra de jeter des ponts entre la ville et l'hôpital.

Nous sommes au cœur de la problématique de la restructuration de l'offre de soins, qui nous semble, je le répète, le véritable enjeu d'une réforme du système de santé.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. J'ai deux remarques à formuler.

D'abord, cet amendement est le premier d'une longue série d'autres qui demanderont des rapports - encore et toujours des rapports !

M. Jean-Marie Le Guen. Ne soyez pas de mauvaise foi ! Vous savez bien que c'est l'article 40 qui nous y oblige !

M. Gérard Bapt. Impossible de le contourner d'une autre façon !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Ensuite, je suis un peu surpris, même s'il s'abrite derrière M. Durieux, que M. Le Guen fasse l'éloge de la capitation, c'est-à-dire, en réalité, de l'étatisation ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Après M. Claeys qui, ce matin, était près d'envisager la suppression du paiement à l'acte, on voit bien où le groupe socialiste veut nous emmener !

M. Alain Claeys. Mais non ! Ça suffit !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable sur cet amendement. Je présenterai, pour ma part, un amendement plus satisfaisant sur les cabinets de groupe.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Avis identique à celui de la commission.

M. le président. La parole est à M. Alain Claeys.

M. Alain Claeys. Après la mise au point que j'ai faite en réponse aux propos du ministre, je ne peux pas accepter ceux que le rapporteur vient de tenir. Je crois pourtant avoir été correct ce matin. Son attitude est malhonnête et risque de créer un climat qui n'est pas de mise ici.

Je vous rappelle ce que j'ai dit ce matin concernant la gestion de l'offre et l'amélioration de cette offre sur le territoire, et que j'ai repris tout à l'heure en interpellant M. le ministre.

Nos territoires souffrent aujourd'hui d'un problème de démographie médicale. Dans mon département, que je connais un peu moins mal que les autres, de nombreux médecins généralistes partent à la retraite, sans trouver de remplaçants.

Les raisons de ces difficultés sont multiples. Un médecin généraliste souhaite désormais, légitimement, de meilleures conditions de vie ainsi qu'un bon environnement médical. Le groupe socialiste n'a fait qu'exprimer une remarque de bon sens, à savoir que si, demain, nous souhaitons confier à ces généralistes des missions d'intérêt général, il faut qu'ils puissent les remplir dans de bonnes conditions. Pour cela, à côté de la rémunération à l'acte, qui reste leur rémunération fondamentale, il faut envisager d'autres formes de rémunération, négociées avec eux.

Monsieur le rapporteur, j'espère que c'est la dernière fois que vous utilisez pareille méthode, qui ne vous honore pas !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7756.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8370.

La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal, pour le soutenir.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. En 2001, le gouvernement de Lionel Jospin mettait en place la réforme de la tarification de nos établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, ainsi qu'un plan pluriannuel de financement de ces mêmes établissements, de 183 millions d'euros par an sur cinq ans.

Cette réforme se fondait sur une démarche de qualité, dont nous parlons souvent ici, obtenue d'abord par un renforcement des personnels soignants. En effet, ces établissements accueillent des personnes beaucoup plus dépendantes que naguère et l'entrée s'y fait à un âge bien plus avancé.

Par ailleurs, leur bâti avait besoin d'être rénové et humanisé. C'est dire combien cette réforme était indispensable.

En 2002, les crédits prévus n'ont pas été utilisés par le gouvernement Raffarin, et ce sont finalement environ 300 millions d'euros qui ont été supprimés, au lieu d'être reportés sur 2003.

Les questions d'actualité sont très souvent l'occasion de batailles de chiffres quant au nombre de conventions tripartites qui auraient été signées dans notre pays. Pour ma part, j'écouterais plus volontiers les établissements pour personnes âgées et leurs fédérations qui se plaignent que les conventions n'avancent pas et qu'elles ne sont toujours pas signées.

On nous dit, notamment dans le cadre du plan canicule, que des personnels supplémentaires seraient prévus pour cet été. Mais les établissements n'ont encore rien vu venir, alors que nous sommes déjà le 1er juillet.

Voilà pourquoi, monsieur Dubernard, sans être obsédés par les rapports, nous souhaitons des clarifications et, en l'occurrence, chaque année, un rapport au Parlement faisant le point exact de la réforme de la tarification. Cela nous permettrait de juger si des progrès ont été accomplis en matière de qualité.

Nous nous devons tous - il m'arrive d'être interpellé au conseil de Paris par d'autres de ses membres qui me diront peut-être le contraire ici ! - de sauvegarder la dignité de nos aînés. L'allongement de la durée de la vie nous impose d'adopter une démarche de qualité pour y parvenir.

Je le répète, un rapport annuel sur ce sujet nous satisferait pleinement.

M. le président. Je considère, ma chère collègue, que vous avez présenté également l'amendement n° 8369 qui est similaire.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Tout à fait !

M. le président. La commission est contre ces amendements, le Gouvernement aussi.

Je mets aux voix l'amendement n° 8370.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8369.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8371.

La parole est à M. Gérard Bapt, pour le soutenir. Mais ne peut-on considérer qu'il est soutenu ?

M. Gérard Bapt. Non, monsieur le président, il est très important !

M. le président. Je n'en doute pas une seconde mais ils sont tout aussi importants lorsqu'ils se justifient par leur texte même !

M. Gérard Bapt. Certes, mais je voudrais que M. le ministre comprenne bien le sens de notre amendement qui ne pèse pas sur les finances publiques mais n'en traite pas moins d'un problème très grave : l'évolution du patrimoine hospitalier et médico-social accueillant les assurés sociaux, ainsi que les programmes d'investissement soutenus par l'assurance maladie et l'assurance vieillesse par le biais de prêts sans intérêt.

Il s'agit d'éclairer l'Assemblée de manière périodique sur ce sujet. Je sais, monsieur le président, à quel point vous vous préoccupez qu'elle soit parfaitement informée afin qu'elle puisse assurer son devoir de contrôle.

En ma qualité de rapporteur spécial du budget de la santé et des personnes handicapées, je connais bien les difficultés que soulève le contrôle par notre assemblée des crédits destinés aux investissements des établissements sociaux et médico-sociaux.

Voilà pourquoi il serait très utile que nous obtenions cet éclairage global sur le patrimoine accueillant nos patients et nos personnes âgées.

M. le président. La commission est contre, le Gouvernement également, ils me le font savoir.

Je mets aux voix l'amendement n° 8371.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8394. Puis-je considérer qu'il est défendu ?

M. Jean-Marie Le Guen. Sûrement pas, monsieur le président ! Il est question de toxicomanie !

Voilà plus de deux ans que ce gouvernement et les parlementaires de la majorité ne cessent de nous dire qu'« il faut faire », qu'« ils vont faire », qu'il y a « urgence » en la matière !

Il est vrai que c'était davantage le précédent ministre de l'intérieur que le ministre de la santé qui s'exprimait sur le sujet !

Or, depuis deux ans, il ne se passe rien ! La loi de 1970 n'a toujours pas été modifiée. « Vous allez voir ce que vous allez voir ! », nous promet-on. Mais nous ne voyons rien venir !

Apparemment, tous les arbitrages n'ont pas été rendus et je ne crois pas - vous en savez plus que moi sur ce point, monsieur le président - que soit inscrit à notre ordre du jour un projet modifiant le cadrage juridique de 1970, dont nous sommes tous d'accord pour dire qu'il n'est pas le bon.

Quant au reste, qui devrait plus encore nous rassembler, à savoir les politiques de santé publique, et même si le ministre pense qu'il n'a pas à recevoir de leçons à cet égard, il suffit, pour en juger, de considérer le budget de la MILDT. Il faut savoir ce que deviennent les moyens qui sont accordés, année après année, à M. Didier Jayle. Aujourd'hui, pratiquement aucune des initiatives qui devaient être prises sur cette question, sur laquelle la majorité prétend avoir plus à dire que la précédente, ne l'a été.

Nous sommes pourtant là au cœur d'une politique de santé publique qui repose très largement aussi sur l'ONDAM, notamment les moyens mis à disposition des centres d'addictologie, prix de journée, accordés ou non, indépendamment des campagnes, elles-mêmes financées ou non, notamment auprès de l'INPES.

Et puisque, sur tous ces sujets, rien n'avance, notre amendement paraît très légitime pour vous interpeller, monsieur le ministre, d'une façon forte. Nous aimerions vous entendre accepter cet amendement et, en tout état de cause, nous dire où vous en êtes sur cette question importante de santé publique.

M. le président. La commission et le Gouvernement, interrogés, me font savoir qu'ils sont contre.

Je mets aux voix l'amendement n° 8394.

(L'amendement n'est pas adopté.)


M. le président.
Je suis saisi d'un amendement n° 7751.

La parole est à Mme Catherine Génisson, pour le soutenir.

Mme Catherine Génisson. Nous nous félicitons que M. le ministre ait accepté notre amendement visant à mettre en place et à généraliser la télémédecine. L'amendement n° 7751 a pour objet de demander au Gouvernement de transmettre au Parlement avant le 31 décembre 2004 un rapport sur les conditions de généralisation dans les trois ans de la télémédecine dans les hôpitaux.

M. Bapt a donné tout à l'heure une explication quelque peu théorique sur cette question. Mais, ayant effectué une garde cette nuit, je puis faire état de l'intérêt de la télémédecine. Un de nos patients présentait une douleur thoracique typique d'un infarctus du myocarde. Grâce à la télémédecine, c'est-à-dire la transmission de l'électrocardiogramme et la conférence organisée entre cardiologue, réanimateur et médecin de garde, nous avons pu prescrire un thrombolytique, médicament qui permet la lyse du thrombus à l'intérieur de l'artère, ce qui évite la nécrose du myocarde.

M. Gérard Bapt. Vous pouvez prendre des notes !

Mme Catherine Génisson. Outre une meilleure prise en charge du malade qui, aujourd'hui se porte bien, cette nouvelle technique permet d'améliorer la qualité de sa vie future.

À court terme, la télémédecine améliore la qualité des soins et, à moyen et long terme, elle est source d'économies en matière de prise en charge et d'offre de soins.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je suis très sensible aux arguments de Catherine Génisson, d'autant que la commission a adopté un amendement du groupe socialiste et deux ou trois amendements du groupe UMP allant en ce sens. L'amendement précédent ayant été validé par le ministre, je vous propose, madame Génisson, de retirer cet amendement, comme le suivant, qui perdent tout intérêt, puisque la télémédecine sera prise en compte dans les schémas régionaux d'organisation sanitaire.

M. le président. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. Jean-Marie Le Guen. Le Gouvernement doit agir et non se contenter de regarder passer les trains ! C'est ce que nous lui demandons par cet amendement !

M. le président. Madame Génisson, le retirez-vous ?

Mme Catherine Génisson. Non, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7751.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7752.

La parole est à M. Gérard Bapt, pour le soutenir.

M. Gérard Bapt. Cet amendement constitue la suite logique de l'amendement, accepté par la commission et le Gouvernement, et visant à introduire dans les SROS la généralisation des réseaux de télémédecine.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est le même amendement !

M. Gérard Bapt. Pas tout à fait, monsieur le rapporteur. Il s'agit d'institutionnaliser la régulation. Notre amendement a pour objet de demander au Gouvernement les conditions de création de comités de pilotage régionaux.

Certes, ces amendements auraient pu être regroupés avec celui de notre collègue du Lot-et-Garonne, M. Dionis du Séjour qui, pour sa part, souhaite confier la régulation à l'ARH.

Quoi qu'il en soit, monsieur le rapporteur, je pense qu'il nous faut adopter l'un ou l'autre de ces amendements et ne pas laisser de côté la notion de régulation des réseaux régionaux de télémédecine à laquelle notre ancien collègue, Louis Lareng, est très attaché.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. L'avis du Gouvernement est également défavorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 7752.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7755.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le soutenir.

M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement insiste sur la nécessité de doter la dynamique conventionnelle, notamment les trois étages prévus par la loi de 2002, d'un interlocuteur reconnu. Il s'agit de créer une union nationale des professions de santé qui deviendrait l'interlocuteur unique des professionnels lors des négociations conventionnelles.

Afin que M. Dubernard ne réagisse pas de manière excessive à nos demandes de rapports, je rappelle qu'il s'agit d'une pratique parlementaire ancienne qui nous permet d'éviter le raccourcissement indu des débats au nom de l'article 40.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Comme je l'ai déjà fait remarquer, votre obsession des rapports me choque. Cela étant, je m'interroge sur la stratégie du groupe socialiste qui sait parfaitement que cet amendement est satisfait à l'article 31, sur lequel j'ai déposé un amendement similaire qui a été adopté en commission.

Aussi, monsieur Le Guen, je vous demande de retirer cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je le retire.

M. le président. L'amendement n° 7755 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 7655.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le soutenir.

M. Jean-Marie Le Guen. Certaines populations, exclues de la CMU par l'effet de seuil, devraient bénéficier d'une action sociale forte.

Il y a quelques semaines, le Premier ministre a exprimé solennellement son intention de permettre à 300 000 familles supplémentaires d'accéder directement à la CMU, notamment celles qui avaient un enfant. L'opinion publique avait en effet été choquée par un rapport récent révélant qu'un million d'enfants vivaient en France dans la pauvreté. L'idée nous semble positive, bien que nous sachions la difficulté de financer un tel dispositif.

Je voudrais savoir, monsieur le ministre, si l'engagement du Premier ministre sera tenu.

La deuxième question que nous aurons à débattre sur l'extension de la CMU, est celle que vous avez appelée de façon inappropriée « crédit d'impôt » et qui figure après l'article 30, dans une espèce de « fourre-tout » où « Super Dubernard » a déposé divers amendements, plus ou moins bons.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement.

D'ailleurs, que ne l'avez-vous fait entre 1997 et 2002 ?

M. Gérard Bapt. Nous avons fait beaucoup pour la CMU !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je vous renvoie à mon amendement qui est excellent !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Avis défavorable, car cette disposition est d'ordre réglementaire et non législatif.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. J'espère, pour les Français, que les gouvernements futurs ne passeront pas leur temps à se dire : « Que ne l'avez-vous fait sous le gouvernement précédent ? » Cela devient lassant !

Si vos prédécesseurs ont fait des erreurs, vous n'êtes pas obligés de vous obstiner à faire les mêmes. Ce serait à votre honneur de faire mieux.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Nous agissons, madame Billard !

Mme Martine Billard. Pour l'instant, vous n'agissez pas sur la CMU. Je le dis d'autant plus paisiblement que le plafond de ressources fixé par le gouvernement socialiste était un point de divergence avec les Verts.

Nous souhaitions étendre la CMU complémentaire à l'ensemble des bénéficiaires des minima sociaux, afin qu'ils n'en soient pas exclus pour 56 francs de revenu mensuel au-dessus du seuil.

Puisque vous reprochez au gouvernement socialiste de ne pas l'avoir fait, agissez ! Vous en tirerez peut-être les bénéfices - ce n'est qu'une éventualité, le reste de votre politique étant désastreux.

Il est inacceptable que la pauvreté augmente dans notre pays, ainsi que le nombre d'allocataires du RMI et de personnes en difficulté. N'oublions pas les ouvriers et les employés de petites entreprises qui ont de faibles revenus et qui n'ont pas de couverture complémentaire. Agissez donc si vous voulez améliorer la santé de nos concitoyens !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. J'ai sans doute mal compris la réponse du Gouvernement. Mon souci n'était pas de savoir si mon amendement relevait du domaine réglementaire, mais si le présent projet confirmait la volonté politique affichée par le Premier ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. La réponse est « oui ».

M. Jean-Marie Le Guen. Quand cette mesure entrera-t-elle en vigueur, monsieur le ministre ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. En 2005.

M. Jean-Marie Le Guen. Au 1er janvier 2005 ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Oui.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7655.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7656.

La parole est à M. Gérard Bapt, pour le soutenir.

M. Gérard Bapt. Il s'agit de l'aide médicale d'État.

Je tiens à dire combien j'ai été choqué de voir M. Goasguen retirer tout à l'heure ses amendements ainsi que ceux de M. Mariani, au prétexte qu'ils auraient davantage leur place lors de la discussion de la loi de finances, comme si le problème des soins apportés aux étrangers résidant en France relevait d'une telle loi.

Je prie M. Dubernard de m'excuser, mais je vais encore une fois demander un rapport. Cela étant, je suis certain qu'il me comprendra.

L'aide médicale d'État n'est pas un problème comptable, relevant de la loi de finances. C'est un problème de santé pour les individus concernés, et de santé publique parce qu'il peut s'agir de pathologies contagieuses mettant en jeu la santé de personnes de nationalité française résidant sur notre territoire.

Malheureusement, M. Goasguen et M. Mariani ne sont pas les seuls à envisager la question de manière purement comptable. Jeudi dernier, à l'occasion du débat d'orientation budgétaire, M. le rapporteur général s'est plaint de la non-parution des décrets d'application de la loi de 2002 relatifs à l'aide médicale d'État. Mme Versini, à la demande des associations humanitaires dispensant des soins aux personnes en difficulté, avait à l'époque agi en ce sens.

Puis, en 2003, un nouveau dispositif a été voté et le rapporteur général du budget précise que la non-parution des décrets d'application est l'une des principales raisons qui empêchent de réguler l'immigration clandestine.

Autrement dit, on régulerait l'immigration clandestine en supprimant les soins aux étrangers malades sur notre territoire.

Je me félicite que, contrairement à son prédécesseur, M. le ministre de la santé ait adopté une position différente sur cette question. Vous avez récemment déclaré, monsieur le ministre, que ce n'était pas par la santé publique que l'on définissait la politique d'immigration et qu'il n'était pas possible qu'en France, on ne traite pas un malade, quel qu'il soit.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. En effet !

M. Gérard Bapt. Voilà une déclaration, monsieur le ministre, avec laquelle l'opposition se trouve en accord, mais qui contredit l'opinion de M. le rapporteur général, ainsi que celle de M. Goasguen, de M. Mariani et des autres signataires d'amendements indignes. C'est d'ailleurs probablement la honte qui les a conduits à les retirer.

M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !

M. Gérard Bapt. Vous nous avez annoncé, monsieur le ministre, une circulaire visant à régler le problème de l'accueil d'urgence. Je voudrais rappeler que contrairement à ce qui était affirmé dans les amendements, les personnes en cause ne sont pas nécessairement en situation irrégulière, mais peuvent être en attente d'une régularisation, notamment si elles ont demandé le statut de réfugié politique. À ma connaissance, le Gouvernement n'a pas encore déclaré que la France ne donnerait plus asile aux personnes menacées de mort pour des questions de liberté d'opinion.

Nous voulons ramener le débat sur le terrain de la santé publique, en proposant qu'un rapport sur les conséquences sanitaires et sociales des dispositions concernant l'AME soit transmis au Parlement. Nous disposons déjà d'informations en provenance d'associations - Médecins du monde, Médecins sans frontière, le SAMU social de Paris - ou de personnalités comme l'ancien ministre M. Xavier Emmanuelli.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Tout à fait !

M. Gérard Bapt. Tous nous ont décrit des cas précis. J'ai ainsi en mémoire celui d'une personne en situation encore irrégulière et qui a cherché pendant plusieurs semaines un accueil médical pour un problème de tuméfaction cervicale. Au bout du compte, il a été traité pour un tuberculome, une maladie contagieuse qu'il a donc portée pendant plusieurs semaines, alors qu'il était laissé, sans soin, au contact de la population.

C'est la raison pour laquelle je souhaite que soit adopté l'amendement n° 7656, si important pour la santé publique, et qui se penche sur un problème humanitaire réel que la politique de l'immigration ne saurait régler.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Le Gouvernement est du même avis.

M. Gérard Bapt. Voilà tout ce que l'on nous répond ! C'est indigne !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, vous l'avez remarqué : nous avançons, et nous traitons de questions de fond. Je pense très sincèrement qu'un tel sujet mérite une réponse de la part du Gouvernement. Je vais donc l'aider en lui posant quelques questions. (Sourires.)

Vous avez parlé, monsieur le ministre, d'urgence, et nous vous rejoignons sur ce point. Reste à préciser ce que vous entendez par là. Vous référez-vous aux urgences hospitalières, à l'urgence vitale - ce qui signifie que la vie de la personne est en jeu - ou, plus généralement, à des maladies qui, sans qu'un pronostic vital soit nécessairement en cause, posent des problèmes de santé qui méritent d'être traités immédiatement - je pense par exemple au cas que vient d'évoquer Gérard Bapt ?

Il y a donc trois façons d'aborder la question de l'urgence : le service hospitalier, l'urgence vitale et l'urgence sanitaire, qui concerne la santé publique. En précisant votre façon de voir, vous aurez l'occasion de répondre sur un sujet pour le moins intéressant.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je trouve assez grave qu'il soit nécessaire, entre médecins, de définir la notion d'urgence médicale, tant elle relève de l'évidence. Dès l'instant où quelqu'un développe une maladie, il faut le soigner.

J'estime en effet que la santé publique ne saurait se substituer à une politique d'immigration. Mais je reste opposé à l'amendement.

Pour en revenir à l'urgence, elle s'applique certainement quand le pronostic vital est en jeu, mais aussi, évidemment, au cas d'une maladie infectieuse.

M. Jean-Marie Le Guen. Mais cela relève-t-il aussi du service hospitalier des urgences ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Évidemment ! N'avez-vous jamais fait de gardes ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Il y a urgence à traiter la question ! En effet, les modifications introduites dans la loi de finances rectificative pour 2002 ont conduit à des situations abracadabrantes. L'urgence, cela peut aussi signifier qu'une maladie non traitée dégénère en deux mois. Prenons le cas de personnes ayant demandé l'asile, mais dont le dossier n'est pas traité depuis des mois - car telle est la réalité des délais d'attente en ce domaine. Normalement, ils relèvent de la CMU, mais de fait, on les dirige souvent vers l'AME, pour laquelle on exige désormais un délai de résidence continue et préalable de trois mois. Ils ont parfois les éléments nécessaires pour justifier leur présence six mois auparavant, mais peuvent très bien manquer d'un justificatif en ce qui concerne les trois derniers. Et dans ce cas, l'AME leur est refusée, y compris lorsqu'ils en bénéficient déjà et demandent un renouvellement.

Je voudrais vous interroger, monsieur le ministre, sur certains cas précis, à commencer par celui de ces demandeurs d'asile qui se voient redirigés vers l'AME alors qu'il devrait bénéficier de la CMU. Il semblerait également que certaines dépenses, par exemple liées aux interruptions de grossesse anonymes, soient payées sur la ligne de l'AME. De même, les personnalités étrangères accueillies par le corps diplomatique français pour être soignées en France en relèveraient également. L'AME sert-elle uniquement à la prise en charge des personnes qui en font la demande ou, par extension, y a-t-on recours dans d'autres situations ?

M. le président. Le Gouvernement a déjà répondu.

Je mets aux voix l'amendement n° 7656.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, j'ai indiqué au Gouvernement que j'avais décidé, pour une meilleure organisation de nos travaux, que nous examinerions lundi prochain l'article 2 ainsi que les amendements portant articles additionnels après l'article 2, qui traitent du dossier médical.

Avant que nous abordions l'article 1er, je vais suspendre la séance.


Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures cinq, est reprise à vingt-trois heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

Article 1er

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 1er.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Nous voici enfin à l'article 1er, qui rappelle de façon solennelle les principes fondateurs de l'assurance maladie. Cet article est naturellement le bienvenu car, si la réforme est nécessaire et urgente, ce dont tout le monde convient aujourd'hui, c'est bien pour sauvegarder notre système d'assurance maladie et permettre de garantir à l'ensemble de nos concitoyens un système obligatoire, universel, fondé sur la solidarité, pour que chacun puisse être soigné en fonction de ses besoins, en participant au financement en fonction de ses ressources.

Si rien n'était fait, le système connaîtrait un grave péril. Aujourd'hui, le régime obligatoire couvre 75 % des dépenses, les complémentaires 13 %, les ménages 12 %. Le basculement vers les complémentaires ou les ménages modifierait profondément la solidarité nationale. En effet, pour les complémentaires, en dépit d'un cahier des charges et du principe de la non sélection, les cotisations sont forfaitaires et le niveau de la prise en charge dépend des contrats.

Nous souhaitons bien entendu l'égal accès de tous à des soins de qualité. Or, si l'égal accès de tous aux soins va de soi, nous savons que, dans de nombreux pays, existent des files d'attente, heureusement exceptionnelles pour l'instant dans notre pays, pour les maladies graves et urgentes.

Nous souhaitons que tous nos concitoyens aient accès à des soins de qualité, mais nous savons que nous avons, dans ce domaine, de grands progrès à réaliser.

Il est indispensable de revoir la formation initiale et le mode de sélection des professionnels, trop fondée aujourd'hui sur des critères scientifiques et ne mettant pas suffisamment en valeur les qualités humaines d'écoute, d'analyse et de synthèse nécessaires au diagnostic et au traitement. Il faut mettre en place pour toutes les professions de santé une formation continue obligatoire, financée et évaluée, veiller en permanence à l'évaluation des professionnels et des pratiques pour aboutir à des soins de qualité, développer enfin la prévention et l'éducation à la santé, beaucoup trop négligées dans notre pays ; la loi de santé publique est bien loin de combler ce lourd handicap.

Nous voulons également l'égal accès de tous à des soins de qualité sur l'ensemble du territoire. Nous savons très bien que ce n'est déjà pas le cas aujourd'hui et nous avons des craintes pour demain. Se posent en effet le problème de la démographie des professionnels de santé ainsi que celui de la qualité des diverses structures. Des progrès peuvent être obtenus grâce à la définition et à la mise en œuvre de protocoles et grâce au développement de la télémédecine, mais il est essentiel de s'atteler de manière volontariste à la formation des professionnels en fonction des besoins et à une juste répartition sur l'ensemble du territoire.

L'UDF préconise justement un numerus clausus régional par spécialité fixé en fonction des besoins. Tout le monde n'a pas accès aujourd'hui et dans les mêmes délais aux meilleurs spécialistes, aux meilleures structures. Il suffit de comparer le temps que mettent les sportifs de haut niveau pour avoir un rendez-vous pour une IRM et celui que met un citoyen ordinaire. On voit bien que l'égalité dans l'accès aux soins n'est pas assurée actuellement.

Pour toutes ces raisons, et d'autres que je n'ai pas le temps de développer, il est nécessaire de rappeler dans l'article 1er les principes fondateurs de notre système d'assurance maladie et d'engager la réforme nécessaire et urgente pour la sauvegarder, ce dont nous avons bien besoin.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. L'article 1er introduit un chapitre définissant les principes de l'assurance maladie dans l'organisation de la sécurité sociale.

Le premier alinéa garantit une protection, mais il ne dit pas à quel niveau, ce qui est pourtant fondamental. Actuellement, la protection n'est pas totale. Certains de nos collègues nous expliquent que la santé est gratuite et qu'un grand nombre de nos concitoyens consomment de la santé sans réserve. Ils oublient simplement de dire qu'on paie des cotisations sociales et que, pour obtenir une couverture complémentaire, il faut aussi payer. L'un d'entre eux expliquait hier que le risque était que l'on entende les assurés dire : « J'ai cotisé, donc j'ai le droit ». Avec votre plan, monsieur le ministre, on risque d'entendre : « J'ai payé la prime d'une complémentaire, donc j'ai le droit ! » Cela ne changera rien sur le fond et sur le montant des dépenses globales ; cela ne changera que sur la partie prise en charge par les finances publiques. Ainsi que je l'ai déjà souligné, cela ne correspond pas à notre façon de voir.

Votre plan va réduire la prise en charge par l'assurance maladie obligatoire, donc faire basculer le financement des soins vers les complémentaires et, contrairement aux principes affirmés, introduire un peu plus d'inégalités entre nos concitoyens. Il y aura des diminutions de remboursement. On sait aussi que de plus en plus de médecins pratiquent des dépassements d'honoraires, quand ce ne sont pas carrément, dans certaines spécialités, des honoraires libres. C'est la sélection par l'argent.

Cet article dispose que la protection est indépendante de l'âge et de l'état de santé, mais il n'est dit à aucun moment qu'elle est indépendante des revenus. Nous en discuterons lors de l'examen des amendements. Cet oubli est-il volontaire ? Les oublis sont parfois aussi significatifs que ce qui est écrit ! On sait qu'un certain nombre de nos concitoyens sont obligés de renoncer à des soins d'optique ou à des prothèses dentaires parce qu'ils n'ont pas de couverture complémentaire ou n'ont qu'une couverture complémentaire minimale qui, si elle prend assez bien en charge le remboursement des visites et des médicaments, assure très mal le remboursement de l'optique et du dentaire.

C'est un leitmotiv que l'on entend depuis des décennies et il faut reconnaître que les gouvernements précédents, de droite comme de gauche, de gauche comme de droite, n'ont pas amélioré la situation, laissant cette responsabilité aux complémentaires. Contrairement aux principes affirmés dans cet article 1er, a été maintenue une inégalité entre ceux qui ont les moyens de se payer une complémentaire et ceux qui ne les ont pas.

Les principes que vous énoncez ne sont donc déjà respectés aujourd'hui que de façon très relative. Avec votre réforme, ils le seront encore moins.

Je terminerai en parlant de la nécessaire répartition sur tout le territoire national.

Il est bien d'en affirmer le principe mais, pour l'instant, le moins que l'on puisse dire c'est que, alors que nous sommes tous d'accord sur le principe, on n'avance pas beaucoup. Dans ma circonscription, nous ne rencontrons pas trop de problèmes, mais il n'y a pas de raison que, dans d'autres endroits de notre territoire, des malades aient des difficultés pour accéder aux soins.

Il y a des manques dans cet article, j'y reviendrai lors de la discussion des amendements. Il risque donc de rester très largement au niveau des principes, avec une concrétisation qui diminuera d'année en année.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il me paraît important, à l'occasion de cet article, de rappeler que c'est dans une France meurtrie et ruinée par quatre années d'occupation que, en octobre 1945, fut créée la sécurité sociale, mesure majeure du Conseil national de la Résistance.

Cet acte courageux et visionnaire devait contribuer à assurer à chacun une protection individuelle devant les risques sociaux de toute nature. Alimentée par une cotisation sociale assise sur les salaires distribués en contrepartie des richesses créées par les salariés, la sécurité sociale ancrait son financement dans l'entreprise tout en le faisant échapper aux règles du marché et de la concurrence, ainsi qu'à l'emprise de l'État. La gestion de ces fonds était alors assumée par les représentants des salariés selon les règles de la représentation démocratique.

Chacun contribuant selon ses moyens et recevant selon ses besoins, les fondateurs de la sécurité sociale affirmaient ainsi les principes de solidarité, d'universalité et de démocratie, au cœur d'un nouvel édifice social profitable au développement du pays. C'est pourquoi l'existence du système actuel de protection sociale représente pour la nation un acquis majeur du XXe siècle et une source capitale de son développement économique et social qu'il convient de préserver aujourd'hui pour nous et pour les générations futures.

Or votre proposition de réforme, monsieur le ministre, et en dépit des principes que vous prétendez affirmer, s'inscrit à l'encontre de ce progrès social.

Après avoir remis en cause le principe de la couverture socialisée du risque vieillesse, vous voulez à présent liquider le principe de la couverture socialisée, générale et intégrale du risque maladie. Vous choisissez d'opter pour une ouverture du système aux acteurs privés de l'assurance maladie quand il faudrait, au contraire, renforcer sa socialisation, au risque de voir s'amplifier les inégalités sociales et territoriales entre nos concitoyens devant la santé et la mort.

Vous savez tout aussi bien que moi que les besoins de santé sont plus vastes que jamais. D'ailleurs, personne ne s'y trompe. L'Organisation mondiale de la santé la définit comme un état de complet bien-être physique, mental et social et non plus seulement comme l'absence de maladie ou d'infirmité. Avec la lutte contre la maladie et les infirmités, il s'agit, pour notre système de santé, de faire face à l'engagement de toutes les capacités humaines.

Par ailleurs, les progrès de la médecine, des sciences et des techniques ouvrent des possibilités immenses pour que tous accèdent à des soins de haute qualité. De nombreux fléaux peuvent maintenant être éradiqués.

Ces besoins nouveaux qui témoignent des transformations du monde et obligent à une adaptation permanente sont en même temps des besoins pour l'efficacité même du développement de la société. Leur satisfaction est une ouverture sur un nouveau mode de développement de nos sociétés occidentales.

En effet, vivre en société, c'est offrir à chacun la possibilité d'utiliser pleinement son intelligence, son énergie, ses compétences au bénéfice de tous et de chacun. Pour cela, il faut pouvoir bénéficier de la garantie que, quoi qu'il arrive, les besoins de santé, de retraite, de consommation seront assurés.

Aujourd'hui, cette recherche d'efficacité s'accroît du fait de la crise des sociétés développées, mais aussi parce qu'elle constitue le moyen dynamique d'affronter la mondialisation. Être efficace, c'est avoir un peuple et des salariés en pleine possession de leurs moyens. Être efficace, c'est aussi lutter contre toutes les inégalités en ne laissant personne affronter seul ses besoins de protection sociale.

Cependant, de tels objectifs pour l'assurance maladie ne peuvent s'envisager sans de profondes réformes de son financement et de son fonctionnement. Déclarer des principes ne suffit pas.

Les logiques libérales des différents gouvernements ont facilité la réduction des dépenses publiques sociales, considérées comme un coût. Depuis plus de quarante ans, près de trente plans de sauvetage et de redressement, dont les effets ont été accentués par les lois de financement de la sécurité sociale successives, se sont traduits par une réduction des remboursements, par la création d'enveloppes budgétaires ayant pour objectif de chercher à réduire l'offre de soins.

Pour autant, et alors que nous nous y sommes toujours opposés, cette politique de restriction des dépenses de santé remboursables et de rationnement budgétaire est restée un échec. Elle n'a contribué qu'à l'approfondissement des inégalités sociales et géographiques de santé et à la réduction de notre taux de remboursement des soins pour en faire aujourd'hui l'un des plus faible d'Europe. Pire, elle n'a jamais résolu la question du déficit financier de la sécurité sociale. Celui-ci s'est d'ailleurs régulièrement creusé, au point de créer aujourd'hui une véritable crise du financement de l'assurance maladie.

Or, sur ce point, à part les parlementaires communistes et républicains, personne n'a eu l'audace de regarder sérieusement du côté du déficit des recettes. Pour, surtout, ne pas s'opposer à la logique libérale d'une politique salariale et de l'emploi dictée par les critères de rentabilité financière, les gouvernements successifs sont restés volontairement inactifs.

Pourtant, la montée du chômage au motif d'une recherche de flexibilité de l'emploi, la politique d'exonération des cotisations patronales, la pression sur les salaires et l'emploi au nom d'une réduction du coût du travail sont autant de raisons de cette crise de financement. Le mal profond de la sécurité sociale est bien là, dans l'insuffisance de ses recettes, source d'un déficit qui se creuse dramatiquement et devient le prétexte à la privatisation.

Si le déficit est important, il n'est pas pour autant insurmontable. Intervenir sur le levier des recettes permettrait d'enrayer cette spirale perverse et autoriserait le retour à l'excédent sans pour autant diminuer l'enveloppe des dépenses.

Un financement favorisant l'augmentation de la masse des richesses produites plutôt que l'accumulation considérable des profits financiers offrirait des moyens pour répondre aux besoins de santé de la population, mais cela implique un nouveau type de croissance et de gestion des entreprises ainsi qu'une autre répartition des richesses.

Ces objectifs sont indissociables de l'exigence d'une politique orientée, d'une part, vers la construction d'un nouveau système de sécurité d'emploi et de formation et, d'autre part, vers la progression du pouvoir d'achat des salaires, pensions, minima sociaux, nécessaire pour soutenir un nouveau type de croissance appuyé sur le développement des ressources humaines. Ce sera l'objet de nos propositions de modernisation de l'assurance maladie.

Nous voudrions que les principes énoncés ici, insuffisants, soient au moins appliqués dans le reste du texte, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. L'article 1er me permet de réaffirmer le rôle prépondérant de la sécurité sociale dans la couverture santé des salariés. Dans le prolongement de la mise en place d'un ordre public social, initié dès la fin du XIXe siècle, celle-ci a été instituée afin de résoudre les difficultés sociales, mais aussi économiques. La mise en place, en 1945, d'une couverture socialisée des risques afférents à la santé du travailleur s'inscrit dans cette logique.

Le Gouvernement prétend renforcer cette couverture mais c'est un leurre, car il ne peut y avoir de haut niveau de santé de la population sans une prise en charge intégrale des dépenses de santé par l'assurance maladie.

Nous avons déjà rappelé que les politiques de restriction des dépenses de santé, dont l'objectif déclaré était de réduire le déficit de l'assurance maladie, ont eu pour conséquence de diminuer, progressivement mais considérablement, la prise en charge collective des remboursements des dépenses de santé des assurés sociaux. En conséquence, les malades ont dû contribuer personnellement à la prise en charge financière supplémentaire de leurs frais d'assurance maladie. L'effet sur le niveau des déficits de l'assurance maladie a été nul et continue de l'être. Depuis 1967, les déficits se sont régulièrement creusés. Seuls les effets de la croissance économique sur l'emploi ont eu un impact positif sur le niveau des déficits : le seul facteur de réduction des déficits est la hausse du niveau d'emploi et de salaires.

L'inefficacité de ces mesures est pourtant simple à comprendre. Le rapport du haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie en a d'ailleurs souligné quelques éléments. Si le niveau de la prise en charge collective s'accroît, c'est tout bonnement la conséquence du développement des connaissances et des techniques médicales et de l'allongement de la durée de la vie. C'est le résultat du progrès dans les sociétés occidentales développées. Il est donc tout à fait légitime que chacun de nos concitoyens puisse en bénéficier, quelles que soient ses ressources et sa contribution. Aller contre ce mouvement historique de civilisation est une aberration.

Pourtant les mesures gouvernementales déjà prises dans le domaine du soin vont dans ce sens : instauration d'un droit au dépassement d'honoraires pour les visites, limitation des budgets hospitaliers publics, soutien à l'hospitalisation privée, champ libre à l'industrie pharmaceutique pour la fixation du prix des médicaments innovants, déremboursement des médicaments dont l'utilité est pourtant démontrée. Et l'actuelle assurance maladie obligatoire réduit de plus en plus son taux de prise en charge.

Outre cette réduction du périmètre des soins pris en charge, les mesures de gouvernance que vous proposez nous laissent craindre une dérive qui conduirait les régimes d'assurance maladie à servir les intérêts du secteur marchand, c'est-à-dire en clair les appétits financiers des assurances privées.

La Fédération française des sociétés d'assurance et la Mutualité française ont annoncé le relèvement de leurs tarifs dans les prochaines années, confirmant notre inquiétude de voir une part croissance des dépenses de santé assumée par les particuliers et une prise en charge extrêmement réduite par l'assurance maladie obligatoire, universelle et solidaire.

Ainsi la Mutualité française déclarait récemment : « Personne dans ce pays n'imagine que le taux de couverture de dépenses de santé par les régimes obligatoires va augmenter de façon considérable » alors que « la tendance à une part plus importante de la richesse nationale consacrée à l'assurance complémentaire est inéluctable ». Et, selon la FFSA, « il faut s'attendre à des hausses de tarifs » assez rapidement. Après les déremboursements partiels de certains médicaments et la hausse du forfait hospitalier, les complémentaires ont déjà annoncé une hausse de leurs tarifs de 5 % à 10 % en 2004.

Tout cela, monsieur le ministre, va aggraver encore les inégalités. C'est pourquoi nous proposerons à l'article 1er plusieurs amendements pour que le niveau de prise en charge de l'assurance maladie soit maximum et non minimum, comme vous le souhaitez.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Il n'est pas opportun qu'une loi comporte trop de principes déclaratifs, mais il est bon que l'article 1er, article d'ouverture, pose quelques grands principes. C'est au moment d'engager le texte que ceux-ci ont leur place. Cet article est l'occasion, pour le groupe UMP de rappeler que l'assurance maladie est universelle, qu'elle fait évidemment partie du socle républicain.

Dans cet esprit, l'assurance maladie doit s'adapter. C'est justement pour préserver son caractère universel et conserver la valeur qu'elle représente pour la communauté nationale que l'heure est à la réforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. La nation veut garantir l'existence de l'assurance maladie avec l'idée noble, mais insuffisante, d'assurer l'égalité devant la santé. Cette égalité est sans doute l'une des exigences fondamentales du pacte républicain, avec, je l'espère, l'égalité devant l'éducation. Néanmoins nous savons, alors que l'assurance maladie existe maintenant depuis plus de cinquante ans et que, même avant elle, l'accès aux soins était assez développé, que cette égalité n'existe pas. M. le ministre a rappelé ce matin que la différence d'espérance de vie entre un cadre supérieur et un ouvrier spécialisé était de plus cinq ans. J'ajoute qu'elle est encore supérieure quelques années plus tôt. Il en va de même de la morbidité et de tous les indices de la qualité de vie.

Ces inégalités sont d'abord liées à des problèmes de santé publique - conditions de travail, hygiène personnelle, environnement - sur lesquels nous essayons d'agir en luttant, par exemple, contre le tabagisme, l'alcoolisme, mais elles ne se limitent pas véritablement aux questions d'environnement et de milieux sociaux. Elles se retrouvent également dans l'accès aux soins, pour des raisons non seulement sociales, mais aussi financières.

La structure de la consommation des soins des Français, montre que la consommation d'un ouvrier spécialisé et d'un cadre est très différente. Sur une moyenne de 100, la consommation médicale d'un ouvrier spécialisé est de 113, contre 87 pour un cadre supérieur.

On peut se réjouir d'y voir la confirmation du caractère jusqu'à présent redistributif de l'assurance maladie puisque l'effort financier est proportionnellement plus important pour l'ouvrier spécialisé que pour le cadre. Toutefois qu'en est-il de la structure de cette consommation ? On pourrait dire que les ouvriers spécialisés sont plus malades que les cadres, ce qui constitueest sans doute une partie de la vérité, mais cela est insuffisant. La réalité est qu'ils ne consomment pas la même chose, ni de la même façon.

La consommation de l'ouvrier spécialisé est d'abord faite d'hôpital, très secondairement de médecins généralistes et plus rarement encore de médecins spécialistes. Le cadre, au contraire, consomme principalement de la médecine ambulatoire, notamment spécialisée et beaucoup moins d'hôpital. Le coût de l'hospitalisation dans l'assurance maladie permet de comprendre que, si l'ouvrier spécialisé consomme plus cher que le cadre, c'est qu'il consomme moins bien. Cette étude montre que l'accès aux soins n'est pas simplement lié à l'assurance maladie, même si nous ne négligeons pas le fait que l'absence de couverture complémentaire freine l'accès aux soins de l'ouvrier spécialisé.

Lorsqu'on abordera, avec un peu de légèreté me semble-t-il, la question du forfait d'un euro, lorsqu'on s'interrogera sur l'accessibilité à la complémentaire et que l'on analysera les différents types de contrats, on s'apercevra que les ouvriers spécialisés sont dans un environnement de travail précarisé et qu'ils sont ceux qui ont le moins accès à des garanties complémentaires de qualité. Ce frein à l'accès aux soins a des conséquences économiques - une dépense publique de 113 pour une moyenne de 100 - et sanitaires : un recours à l'hôpital plutôt qu'à la médecine de ville.

Nous ne pouvons donc pas nous satisfaire de la seule assurance maladie, même si elle permet déjà un bon accès aux soins. Il faut aussi développer une action de promotion de la santé : si les pauvres ont plus besoin de soins, le fait est qu'ils en demandent moins.

Aussi paradoxal que cela puisse vous sembler, le problème consiste plutôt à trouver un système de santé qui aille prendre par la main les personnes les plus défavorisées, qu'à mettre des obstacles à leur accès primaire aux soins.

Nous ne pouvons donc pas nous contenter d'une réforme de l'assurance maladie. Il faut une réforme de l'offre de soins qui aille chercher les gens pour les amener chez le docteur, afin qu'ils soient bien soignés et bénéficient d'une éducation pour la santé. Voilà la question qui nous est posée. L'assurance maladie ne doit pas être passive. Elle doit encore moins introduire de la défiance dans le recours primaire aux soins.

M. le président. La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Garantir un accès universel et solidaire à des soins de qualité est un droit fondamental, et sans aucun doute l'élément essentiel de notre pacte social. Toutes les Françaises et tous les Français expriment légitimement des aspirations fortes en matière de santé, fondées sur leur volonté de vivre mieux, de mieux comprendre et de mieux maîtriser leur état de santé.

Sans vouloir nier les réelles difficultés financières que connaît notre système d'assurance maladie, il nous est difficile d'accepter l'approche toujours plus culpabilisatrice dont témoigne ce texte : pour le Gouvernement, les vieux seraient responsables de l'explosion des dépenses de santé, les salariés prendraient trop d'arrêts maladie et la multiplication des fausses cartes vitales serait la cause du déficit de l'assurance maladie !

Il faut une approche globale, qui prenne en compte la question de la santé dans toutes ses dimensions, comme vient de le rappeler M. Le Guen. C'est de l'humain qu'il est ici question, et non pas seulement de montants financiers. On doit craindre, à cet égard, que le projet qui nous est présenté n'ait pas les effets financiers escomptés - la note de Bercy a été suffisament assez évoquée ! -, et qu'il ait, en outre, des effets désastreux sur la société, en brisant l'égalité d'accès aux soins. Les personnes les plus modestes, les milieux populaires, tous ceux qui n'auront pas les moyens de se payer une bonne couverture complémentaire en subiront les conséquences sur ce que chacun a de plus précieux : sa propre santé.

Une réforme équilibrée devrait revoir la structure de notre système de soins et investir dans la prévention, ce qui améliorerait le niveau global de santé et dégagerait, à terme, des économies importantes. Cependant pour n'affronter aucun lobby, le Gouvernement a fait reposer toute la réforme sur les assurés sociaux, en mettant en place les éléments qui permettront, à l'avenir, de réduire le périmètre des soins remboursés et les niveaux de prise en charge.

Quand on est, comme je le suis, élue de quartiers très populaires, on voit les ravages sur la santé publique du renoncement massif aux soins, conséquence de la prise en charge déficiente par l'assurance maladie. Continuer sur cette voie serait contre-productif et d'autant moins acceptable que, parallèlement, la majorité n'a cessé de diminuer la fiscalité pour les ménages les plus aisés. C'est le modèle social français qui est ainsi mis à mal, avec hypocrisie.

Ainsi que l'a très justement expliqué Jean-Marie Le Guen en défendant la question préalable, le projet de loi ne tient pas compte de l'inefficacité et de l'absence de qualité mises en lumière par le rapport du haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. En adoptant l'approche recommandée, il serait possible d'améliorer le niveau de santé sans générer des coûts supplémentaires inutiles. Or, pour ne déplaire à aucune corporation ni à aucun secteur économique, ce qui est prévu n'est pas une régulation médicalisée des dépenses de santé, mais une maîtrise comptable des dépenses de l'assurance maladie qui se fera exclusivement sur le dos des patients.

J'avais, lors des débats relatifs à l'autonomie des personnes âgées, défendu des idées comparables. Ce raisonnement financier, guidé par une forme de libéralisme plus que par l'intérêt général, engendre des inégalités sans résoudre aucun problème. En matière de santé - question essentielle -, il laissera de plus en plus de nos concitoyens sur le bord du chemin. Ce n'est pas étonnant : à l'occasion du débat consacré aux personnes âgées, j'avais déjà constaté que de nombreux parlementaires de la majorité émettaient le souhait de renvoyer de la même manière la prise en charge de la dépendance vers les assurances privées, au nom du principe de responsabilité individuelle !

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. De toute évidence, nous ne pouvons que souscrire aux principes posés par l'article 1er qu'il serait souhaitable de retrouver ensuite déclinés dans le dispositif de la loi. Cela suscite donc déjà de notre part certaines interrogations. On lit, en effet, dans le texte, que « les régimes d'assurance maladie favorisent un accès effectif de tous les assurés sociaux aux soins, notamment par une bonne répartition de l'offre sur le territoire national. «  Pourtant, dans un centre hospitalier moyen de province, un patient peut, lorsque son état de santé justifie un examen par IRM ou scanner, s'entendre répondre, dans le secteur libéral, que cela ne sera possible que dans deux mois. Bien qu'étant un des rares participants à ce débat à n'être pas médecin, je suppose que cela est surprenant.

La situation du chef-lieu du département des Landes, où le délai pour un examen par IRM est, à l'hôpital comme dans le secteur privé, de l'ordre d'un mois et demi à deux mois, n'est pas un cas isolé. Vous aurez beau dire aux Françaises et aux Français que votre texte assure l'égalité, on sait bien qu'il ne sera jamais appliqué.

Je pourrais donner d'autres exemples, mais le rédacteur du rapport lui-même, craignant sans doute qu'on puisse accorder quelque crédit au contenu de cet article, a précisé : « La portée normative de ces dispositions législatives est relative ; il semble peu probable qu'un juge apprécie comme fondé un recours contre un règlement ou arrêté s'appuyant sur ces déclarations de principes. » Tout est dit ! Si l'article est plein de bonnes intentions, le rapport de l'Assemblée nationale prend la précaution de signaler qu'il ne doit venir à l'idée de personne de fonder un recours sur ces principes. Dès lors qu'on précise que le texte de l'article n'a pas de portée normative, son sort et son intérêt sont clairs.

Pour finir, je tiens à souligner que Jean-Marie Le Guen vient d'évoquer un problème très important et une difficulté inhérente à la nature même du texte que nous examinons aujourd'hui : la distinction entre les questions qui relèvent de la sécurité sociale et celles qui concernent la santé publique. La situation qu'il a dénoncée à partir d'un constat objectif appellerait une réponse en termes de prévention - ou, pour reprendre ses mots, de promotion de la santé -, en incitant à recourir au médecin ceux qui ne le font pas assez tôt. Il s'agit d'un travail de santé publique qui permettrait, en outre, à la sécurité sociale de réaliser des économies. Sur cette question de fond, il importe que nous puissions connaître la position du Gouvernement.

M. le président. J'en viens aux amendements identiques nos 304 à 315.

La parole est à Mme Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 308.

Mme Muguette Jacquaint. Cet amendement vise à réaffirmer ce qui vient d'être exposé longuement par ma collègue Jacqueline Fraysse et par plusieurs collègues socialistes. Il propose donc d'insérer, au début du premier alinéa, les deux phrases suivantes : « La nation fait le choix social et politique d'assurer le plus haut niveau de santé que lui permet la technique médicale. Elle crée les conditions objectives pour assurer le financement intégral de la prise en charge des soins et elle se donne les moyens financiers d'atteindre cet objectif dans l'intérêt des assurés sociaux. »

Ces principes et cette politique se sont traduits, depuis de nombreuses années, par des avancées réalisées dans le domaine médical et dans la couverture de soins dont bénéficient l'ensemble des Françaises et des Français. Ainsi, malgré les atteintes dont a fait l'objet notre système de sécurité sociale depuis les ordonnances de 1967, des progrès ont tout de même été réalisés.

Dans son rapport 2001, l'OMS souligne que la France peut se prévaloir d'une mortalité infantile très faible et d'une espérance de vie parmi les plus élevées du monde, notamment pour les femmes et pour les adultes de plus de soixante ans. Notre classe d'âge la plus nombreuse, celle des quatorze à quarante-cinq ans, est celle qui jouit de la meilleure santé. Contrairement aux idées reçues, malgré le vieillissement, la tranche des quarante-cinq à soixante-quinze ans a vu baisser son taux de mortalité de plus de 15 % au cours des dix dernières années.

Ces éléments sont essentiels, mais il est également important de les protéger. Cette victoire française sur la maladie et la mort ne doit pas masquer les nombreuses insuffisances de notre système de santé, notamment celles de sa prise en charge socialisée. Au-delà de toute polémique, la catastrophe causée par la canicule de l'été dernier, qu'on peut bien qualifier de catastrophe humanitaire, montre qu'il reste beaucoup à faire.

M. Le Guen a évoqué les inégalités en matière de santé. Comment expliquer, par exemple, que ce soit dans les zones d'éducation prioritaire et dans les familles les plus modestes que l'on trouve le plus de problèmes bucco-dentaires ou d'enfants atteints d'obésité ? Comment admettre que 20 % des femmes, parmi lesquelles essentiellement les femmes âgées ou socialement défavorisées, ne voient pas de gynécologue et que, pour 14 % des 80 % restantes, le dernier examen gynécologique remonte à plus de deux ans ? Nous touchons là à une question de fond : celle de la prévention.

Dans ma ville, qui compte 35 000 habitants, et où l'on peut considérer que les femmes représentent la moitié de la population, il n'y a que deux gynécologues. Alors, quand j'entends M. le ministre dire que les Français se soignent trop et abusent des spécialistes, je puis l'assurer que, dans ma ville, ce n'est pas le cas.

Je tiens enfin à évoquer une autre catastrophe sanitaire : j'ai visité très récemment un camp de Roms. Il faut voir la situation sanitaire de ces hommes, ces femmes et ces enfants. Si l'on a un tant soit peu d'humanité, on ne peut laisser des êtres humains vivre dans un tel dénuement. Les dispositions que vous prenez contribueront à creuser les inégalités dans les mois à venir, et c'est très regrettable.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. L'article sur lequel Mme Jacquaint a déposé l'amendement qu'elle vient de défendre est fondamental, empli de phrases fort belles et très bien ciselées, inspirées de grands principes. Néanmoins, nous pensons que la réaffirmation, dans cet article, du droit à la santé comme un droit fondamental, eût été utile.

Il aurait fallu également citer non seulement les objectifs de l'assurance maladie, mais aussi, plus généralement, ceux de la puissance publique en matière de santé. En effet, la santé est prise en charge dans sa globalité non pas par l'assurance maladie, mais par l'État, par différents instruments de la puissance publique et par des dispositifs privés.

Il aurait aussi été judicieux de mentionner la prévention et les problèmes de santé sociale.

S'agissant de la dimension préventive de la question de la santé, M. Le Guen a cité des chiffres significatifs qui soulignent l'importance de l'éducation sanitaire, de la culture médicale et de la prévention. Ainsi, un cadre supérieur sera davantage sensible à la dimension de prévention, compte tenu de son éducation sanitaire, qu'un ouvrier spécialisé moins habitué à cette approche préventive. Ce dernier aura donc plus tardivement recours à des soins, notamment hospitaliers, lesquels seront, de ce fait, plus chers.

Il en est de même pour le dépistage : ce sont les catégories sinon les plus aisées, en tout cas disposant du bagage culturel le plus grand, qui profitent davantage du dépistage et de la prévention primaire. C'est pourquoi la dimension culturelle et sociale de la santé est importante.

Enfin, le problème de la santé de la société est encore plus large. Ainsi, j'ai cité tout à l'heure le cas de l'obésité. Depuis que des études plus fines ont été réalisées sur l'obésité juvénile, dont on sait qu'elle est en pleine explosion puisque son rythme d'augmentation double tous les quinze ans chez les moins de dix ans, il est tout à fait significatif d'étudier la carte de la prévalence à l'obésité. Il apparaît que c'est dans les milieux socio-culturels défavorisés, dans les cités scolaires en ZEP ou dans les régions en proie aux plus grandes difficultés économiques et sociales, que le nombre d'enfants en surpoids ou obèses est le plus élevé.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Gérard Bapt. Chacun sait quelles en sont les conséquences sur le plan métabolique et, surtout, sur le plan cardio-vasculaire, où réside le grand danger.

C'est pour ces raisons que nous insistons sur le caractère fondateur des principes que je viens de rappeler et que nous présenterons un certain nombre d'amendements visant à élargir le concept sur lequel repose cet article premier du projet de loi.

M. le président. Le Gouvernement et la commission sont contre les amendements nos 304 à 315.

Je les mets aux voix par un seul vote.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 280 à 291.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 280.

Mme Jacqueline Fraysse. L'article 1er affirme des principes qui, malheureusement, comme l'a fait remarquer Mme Billard, sont tous successivement battus en brèche dans les articles suivants. On ne peut évidemment qu'approuver cette belle déclaration de principes, mais nous regrettons qu'elle soit aussitôt contredite.

L'objet de cet amendement est de rappeler que la nation ne doit pas se contenter d'affirmer « son attachement à une assurance maladie obligatoire et universelle », mais aussi garantir une existence convenable à chacun. Néanmoins, il faut remarquer que plus vous affirmez de nobles principes, moins vous les mettez en application. Cet article apparaît ainsi comme sur une sorte de cerise sur le gâteau des régressions sociales.

En effet, sa particularité, sinon son paradoxe, est de se référer à un texte majeur dont il abaisse pourtant singulièrement la grandeur. Quand on pense que la sécurité sociale s'est forgée dans la clandestinité et dans la résistance à l'oppresseur nazi, dans le pluralisme de surcroît, cela suscite l'admiration.

C'est le 27 mai 1943 qu'a eu lieu une première réunion sous la présidence de Jean Moulin rue du Four, au cœur de Paris occupé. Assistaient notamment à cette réunion Robert Chambeiron et Pierre Meunier, ses deux collaborateurs, ainsi que des représentants des radicaux, des socialistes, des communistes, de la CGT, de la CFTC, mais aussi Georges Bidault, pour les démocrates chrétiens, Joseph Laniel, pour l'Alliance démocratique, Jacques Debû-Bridel, pour la Fédération républicaine. Toutes les grandes forces politiques de la nation s'étaient retrouvées et rassemblées pour mettre en place le Conseil national de la Résistance. Si, moins d'un an plus tard, Jean Moulin a été arrêté, torturé et assassiné, son œuvre s'est poursuivie.

M. Pierre Lellouche. Je ne vois pas le rapport avec le projet de M. Douste-Blazy !

Mme Jacqueline Fraysse. Vous ne voyez pas le rapport ? Je le regrette parce que je vous parle d'unité nationale et de pluralisme.

Face à des enjeux majeurs pour la nation, sur lesquels aujourd'hui vous vous asseyez,...

Mme Christine Boutin. Connaissez-vous Thomas Paine, madame Fraysse ?

M. le président. Madame Boutin !

Mme Jacqueline Fraysse. ...le 15 mars 1944, le Conseil national de la Résistance adoptait un programme qui devait faire date dans notre histoire contemporaine, marquer profondément notre société et lui faire faire un bond en avant sans précédent. Ce programme comportait deux chapitres portant, l'un, un plan d'action immédiate, l'autre les mesures à appliquer dès la libération du territoire. Tout y était dit. Je regrette que vous vous attachiez aujourd'hui à dilapider cet héritage.

C'est pourquoi cet amendement s'attache à rappeler les valeurs et les principes qui doivent guider toute réforme de la protection sociale. Ils ne devraient pas être abandonnés par quiconque, quel que soit son engagement politique.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 284.

Mme Muguette Jacquaint. Je vois bien que nous horripilons certains de nos collègues quand nous leur parlons du pluralisme de la Résistance. C'est bien regrettable parce qu'ils en sont tout de même les héritiers.

M. Pierre Lellouche. Merci !

Mme Muguette Jacquaint. Je n'ai pas de difficulté, s'agissant de la sécurité sociale et de la branche maladie, à reconnaître ce qu'a fait le général de Gaulle à cette époque.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Nous non plus !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Qui a cité Ambroise Croizat ? Moi, madame Jacquaint !

Mme Muguette Jacquaint. Si je comprends bien les réactions de la majorité, il n'y aurait qu'une proposition valable pour développer ou réformer la sécurité sociale. Pourtant nous en avons aussi présenté d'autres. C'est cela le pluralisme et le sens de l'intérêt général, que cela vous plaise ou non.

Cela dit, je veux revenir sur la définition formulée par l'Organisation mondiale de la santé, qui assimile la santé à un état complet de bien-être physique, mental et social. Cette définition met en évidence l'ampleur de l'enjeu.

Si, pour beaucoup, la France fait figure de modèle en ce domaine, je souligne qu'un travail récent de la promotion Léopold Sédar Senghor de l'ENA...

M. Pierre Lellouche. Vous vous intéressez à l'ENA ?

Mme Muguette Jacquaint. ...montre que ces bons résultats s'expliquent notamment par l'effort financier consenti par la nation.

Toutefois, ces résultats doivent être tempérés. Dans un rapport de l'INSERM sur les inégalités sociales, publié en 2000, Thierry Lang relève que la surmortalité sociale représente dix mille décès par an. En d'autres termes, si toutes les catégories sociales jouissaient d'un taux de mortalité équivalent à celui des cadres et des professions intellectuelles supérieures, dix mille vies seraient épargnées chaque année.

Ces inégalités sociales de santé constituent le principal défaut de notre système. Ce projet de loi permettra-t-il de s'attaquer à cette question majeure ? J'en doute ! C'est d'ailleurs ce que nous dénonçons depuis l'ouverture du débat. Nous pensons au contraire qu'il risque d'aggraver les choses.

Vous allez nous rétorquer que vous n'avez pas les moyens financiers qui vous permettraient d'éliminer les inégalités sociales de santé. Mais nous ne sommes pas d'accord. Si la cinquième puissance mondiale en termes de production de richesses ne peut pas avoir une politique de santé publique ambitieuse, alors qui le pourra ? Si ce n'est pas possible pour notre pays, ça ne l'est pour aucun État de la planète. C'est d'ailleurs ce que vous prétendez quand vous répétez qu'il faut à tout prix réduire les déficits et faire des économies. Cela manifeste de votre part une incapacité à mettre en œuvre une réforme de fond, susceptible de répondre aux besoins de la sécurité sociale.

Alain Minc disait récemment, dans une émission télévisée, que notre système est le meilleur en termes d'efficacité, mais qu'il produit inéluctablement des inégalités sociales. En ce cas, nous nous demandons où se situe l'efficacité en matière de protection sociale et de soins.

M. le président. Le Gouvernement et la commission sont défavorables aux amendements identiques nos 280 à 291.

Je les mets aux voix par un seul vote.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 256 à 267.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 256.

Mme Muguette Jacquaint. Nous avons rappelé, à plusieurs reprises, ce que nous entendions par un haut niveau de santé de la population et par une sécurité sociale pour chacun, indépendante des situations d'âge, de santé et de ressources. Cet amendement vise à le réaffirmer.

L'objectif de l'assurance maladie est de pallier la perte de revenus résultant de la réalisation du risque social maladie. Cette assurance prend la forme de prestations en nature ou en espèces. En instituant de la sorte une sécurité face aux aléas de la vie, les fondateurs de la sécurité sociale avaient pour ambition d'assurer un haut niveau de santé pour l'ensemble de la population et de garantir à chacun la possibilité d'une vie digne, quel que soit le niveau de ses ressources financières tirées du travail. Réaffirmer ces principes est utile quand nous parlons d'une réforme de l'assurance maladie, d'autant plus que vous prétendez vouloir rechercher une égalité d'accès aux soins, alors qu'il y a une différence entre vos paroles et vos actes.


M. le président.
La commission est bien défavorable à ces amendements ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Oui.

M. le président. Le Gouvernement l'est également ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Oui.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 256 à 267.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 148 à 159.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 148.

Mme Jacqueline Fraysse. Par cet amendement, nous voulons affirmer dans la loi une ambition nouvelle que doit se donner le législateur dans le cadre de cette réforme, celle qui correspond à notre attachement à la préservation d'un système de sécurité sociale universel, solidaire et égalitaire, garantissant à chacun, sans discrimination, un haut niveau de protection sociale. En effet, les progrès de la médecine, des sciences et des techniques ouvrent des possibilités immenses permettant que tous accèdent à des soins de haute qualité.

Par ailleurs, il s'agit, au-delà de la lutte contre la maladie et les infirmités, de faire en sorte que notre système soit en état de faire face au développement harmonieux de toutes les capacités humaines, celles que requièrent le travail, l'acquisition des connaissances, l'effort physique et intellectuel, mais aussi celles qu'appelle la capacité à une plus grande mobilité au travail, qu'il est nécessaire de sécuriser pour qu'elle ne soit plus synonyme de précarité.

C'est ce niveau de prise en charge que, dans une société développée, dans un système solidaire, nous devons atteindre. C'est donc ce niveau que nous devons ambitionner pour notre sécurité sociale.

Ces besoins humains, qui témoignent des transformations du monde, de ses avancées, obligent à une adaptation permanente. Ils sont en même temps nécessaires à l'efficacité même du développement de notre société. Aujourd'hui, ce besoin d'efficacité s'accroît, du fait de la crise, mais aussi parce qu'il constitue le moyen dynamique d'affronter la mondialisation. Être efficace, c'est avoir des citoyens en bonne santé, des salariés en pleine possession de leurs moyens. Être efficace, c'est aussi lutter contre les inégalités - nous en parlons d'autant plus qu'elles se creusent -, n'abandonner personne seul face aux aléas de la vie, face aux besoins de protection sociale.

Évidemment, de tels objectifs pour l'assurance maladie ne peuvent s'envisager sans une réforme assumée de son financement. Nous l'avons déjà souligné, mais je tiens à le répéter : ne pas regarder du côté du déficit des recettes pour ne pas s'opposer à la logique libérale d'une politique salariale et de l'emploi dictée par les critères de rentabilité financière, c'est renoncer à une protection sociale de haut niveau. La montée du chômage au motif d'une recherche de flexibilité de l'emploi, la politique d'exonération des cotisations patronales au nom de l'emploi, la pression sur les salaires, sont autant de raisons de cette crise de financement. Il est là, le malaise de la sécurité sociale. Contrairement à ce que vous voulez faire croire, elle ne souffre pas d'un excès de dépenses, mais d'une insuffisance de recettes.

Or, si le déficit est important, il n'est pas pour autant insurmontable. C'est pourquoi intervenir sur les recettes permettrait non seulement de surmonter cette situation, mais autoriserait le retour à l'excédent, sans réduire le niveau des remboursements et même en l'élargissant, comme nous y invitent les progrès scientifiques et médicaux, comme nous le réclament nos concitoyens, lesquels souhaitent légitimement que ces progrès de la connaissance soient mis à leur service, au service de tous.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Même avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Rejet !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 148 à 159.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    3

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président. Aujourd'hui, à neuf heures trente, première séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1675, relatif à l'assurance maladie :

Rapport, n° 1703, de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission spéciale.

À quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 2 juillet 2004, à zéro heure vingt.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot