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Deuxième séance du vendredi 2 juillet 2004

6e séance de la session extraordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

    1

ASSURANCE MALADIE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie (nos 1675, 1703).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée aux amendements identiques nos 6341 à 6355 à l'article 1er.

Rappel au règlement

M. Jean-Marie Le Guen. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État à l'assurance maladie, mes chers collègues, je me félicite que, ce matin, l'Assemblée ait adopté un amendement fort important du groupe socialiste, qui fait obligation à l'assurance maladie d'intervenir dans les zones de désertification médicale. Pour cela, elle aura différents outils à sa disposition et pourra notamment mettre en place des maisons médicalisées.

Cela répond à un besoin réel. Nous ne pouvons plus nous contenter de mesures incitatives, dont les premiers résultats ne se feront sentir que dans cinq ou dix ans. Nous connaissons déjà des situations d'urgence, qui vont se multiplier à l'avenir. Il faut donc que nos concitoyens sachent que quelqu'un veille à leur sécurité et leur garantit l'accès à des services sanitaires.

M. Richard Mallié. Ce n'est pas un rappel au règlement !

M. Jean-Marie Le Guen. D'autre part, grâce à cet amendement, nous allons pouvoir aborder les articles 2, 3, et surtout 4 et 5, avec un regard neuf. Pour la première fois, en effet, nous déclarons qu'il est nécessaire d'agir non seulement sur la demande et sur les comportements, mais sur l'offre médicale. Notre pays est confronté à des difficultés comme celles que connaissent les zones de désertification, et il est temps de restructurer l'offre médicale. C'est précisément ce que proposait cet amendement.

Je me félicite des progrès que nous avons accomplis ce matin dans la discussion. J'espère que d'autres suivront dans les prochains jours, lorsque nous parlerons de l'évolution de l'offre de santé.

M. le président. Je demande à mes collègues de ne pas trop perdre de vue l'article 58-1 lorsqu'ils font un rappel au règlement.

La parole est à M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale. Je voudrais à mon tour me féliciter de cette avancée, au nom de la commission spéciale, dont je suis le rapporteur, de son président, M. Yves Bur, et de tous les députés présents. Je voudrais en même temps remercier le Gouvernement d'avoir, par un sous-amendement, corrigé l'amendement du groupe socialiste qui affaiblissait le rôle des caisses d'assurance maladie. Nous avons adopté le sous-amendement du Gouvernement, puis l'amendement de M. Le Guen, car nous étions tous favorables à la possibilité de mettre en place des maisons médicales. Je me félicite de l'atmosphère conviviale et consensuelle qui, pour une fois, a régné sur nos travaux.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. L'après-midi s'annonce bien !

M. le président. Monsieur le secrétaire d'État à l'assurance maladie, êtes-vous également sensible à ce climat consensuel ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. Bien sûr, monsieur le président. L'amendement qui a été adopté en fin de matinée montre bien ce que nous pouvons faire, les uns et les autres, lorsque nous partons d'un constat partagé. Je voudrais rappeler aussi l'esprit dans lequel a travaillé la mission d'information présidée par Jean-Louis Debré. Si, de part et d'autre, nous en avons vraiment la volonté, nous pouvons avancer ensemble. Nous venons d'en avoir un exemple : je forme le vœu que ce ne soit pas le dernier. Nos débats peuvent être à la fois passionnés sur le fond et apaisés dans la forme, car nous sommes capables de nous comprendre et de nous entendre. Je tenais à le souligner en me réjouissant à nouveau que nous ayons pu trouver cette solution de consensus.

M. Richard Mallié. Très bien !

Article 1er (suite)

M. le président. Nous en venons aux quinze amendements identiques, nos 6341 à 6355.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. L'esprit de consensus qui règne aujourd'hui et la lecture du rapport du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie auraient pu laisser croire que cet amendement était inutile, que ce qu'il propose va de soi, puisqu'il s'agit simplement de rappeler que les associations d'usagers ont désormais un rôle majeur à jouer dans notre système de santé et qu'elles doivent être associées « à la réalisation des objectifs de qualité et d'égalité des soins et de leur financement ». Mais c'est là un des grands sujets d'interrogation que nous inspire votre projet de loi, monsieur le secrétaire d'État. Je m'adresse à vous, mais j'imagine que M. Douste-Blazy ne va pas tarder à nous rejoindre. Il paraît logique que, pour un texte d'une telle importance, le ministre de la santé et tous les ministres concernés assistent à nos débats.

M. Pierre-Louis Fagniez. Mais M. Bertrand est là !

M. Richard Mallié. Il est tout de même « secrétaire d'État à l'assurance maladie » !

M. le président. Il est de tradition, monsieur Le Guen, que le ministre et le secrétaire d'État alternent au banc du Gouvernement. Du reste, M. Xavier Bertrand n'est-il pas expressément chargé du dossier de l'assurance maladie ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Et c'est un homme d'une grande qualité !

M. Jean-Marie Le Guen. Là n'est pas la question. Nous avons à traiter d'une réforme essentielle. Je comprends que le ministre puisse être en retard, mais le groupe socialiste estime que, par respect pour l'Assemblée et eu égard à l'importance du texte, il doit être à nos côtés. Ce qui s'est passé ce matin me renforce dans cette idée : le ministre était présent en séance, il a écouté nos arguments et a pu accepter de faire un pas que la majorité n'était pas forcément prête à accomplir. Si le ministre ne peut être présent pour l'instant, nous sommes prêts à suspendre nos travaux et à attendre qu'il veuille bien nous rejoindre. S'il n'est pas là dans quelques minutes, nous demanderons donc une suspension de séance.

M. Pierre-Louis Fagniez. Nous faisons confiance à M. Bertrand !

M. Jean-Marie Le Guen. Vous peut-être, mais nous, nous aimons bien, aussi, parler avec M. Douste-Blazy.

M. le président. Peut-être pouvez-vous revenir, mon cher collègue, à la défense des amendements en discussion ?

M. Jean-Marie Le Guen. J'y reviens, monsieur le président.

Nous voulons donc que les associations d'assurés et de malades soient représentées au sein de notre système d'assurance maladie. Depuis plusieurs années, en effet, ces associations d'usagers ont pris, non seulement dans notre pays mais dans l'ensemble des pays développés, voire dans le monde entier, une importance considérable. Cela est dû, sans doute, à l'émergence de certaines épidémies, dont celle du sida qui a frappé des hommes et des femmes jeunes, très actifs, qui ont su créer, dans leur entourage, une dynamique associative.

D'autre part, de plus en plus souvent, les maladies évoluent vers des affections chroniques, et les patients ont envie et besoin de mieux maîtriser l'environnement de soins dans lequel ils se trouvent. Très logiquement, lorsqu'ils sont atteints d'une maladie chronique, et comme, grâce aux progrès de la médecine, ils vivent de plus en plus longtemps, ils veulent intervenir sur les processus de soins.

D'une façon plus générale, c'est toute une réflexion qui est menée sur le rôle des assurés dans la gestion du système de santé. Traditionnellement, depuis la Libération, les organisations syndicales représentaient les assurés, et avaient en quelque sorte la responsabilité de gérer leur salaire différé. Aujourd'hui, cette notion de salaire différé n'est plus la seule à prendre en considération. Si les assurés peuvent toujours être représentés par des syndicats − qui ont sans aucun doute la plus grande légitimité à le faire −, il est logique de permettre aux associations d'usagers d'intervenir dans l'architecture et dans la gestion, fort complexes, de notre système de soins. C'est pourquoi nous avons souhaité qu'elles soient représentées dans toutes les structures évoquées par ce texte, et mentionnées dès l'article 1er. Cela nous paraît une garantie du bon fonctionnement des institutions de santé.

M. Gérard Bapt. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a repoussé ces amendements. Elle ne sous-estime en aucune manière le rôle joué par les usagers actuellement. La place des usagers a d'ailleurs déjà été confortée par la loi de mars 2002 sur les droits des malades, grâce à la qualité de leur représentation et notamment de leur collectif. Vous avez travaillé, comme moi, monsieur Le Guen, au Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. Vous avez pu apprécier le rôle très positif qu'avaient tenu les deux représentants de ce collectif.

Tout en étant donc très favorables à la participation des usagers et même à la valorisation de leur rôle, les membres de la commission considèrent que leur place n'est pas à l'article 1er.

Sans compter que cet amendement est mal rédigé. On ne sait pas de quel financement il s'agit. Les usagers devraient-ils être associés au financement de la réalisation d'objectifs de qualité ? Ce n'est pas possible.

Cela dit, nous souhaitons que les usagers prennent toute leur place. Nous avons d'ailleurs déposé des amendements, qui ont même été votés par vous, si je me souviens bien, pour donner une place significative aux usagers au sein de la conférence nationale de santé et au sein de la conférence régionale de santé pour leur permettre de donner un avis sur ce qui se passe à la fois au sein de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et localement.

Nous proposons la même chose au niveau régional, au sein de la conférence régionale de santé, où un collège de professionnels de santé mais également un collège d'usagers bien individualisé doivent pouvoir jeter un regard et donner des avis à la fois au groupement régional de santé publique et à la coordination URCAM-ARH que nous souhaitons tous, dans le cadre de la mission régionale de santé que nous avons proposée.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable, pour les mêmes raisons, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. J'accepterais volontiers tous les rectifications qui pourraient être apportées à mon amendement si elles permettent d'inscrire dans l'article 1er, c'est-à-dire dès l'article fondateur, le droit des usagers à s'exprimer sur les questions qui les concernent. Par exemple, si c'est le financement qui vous gêne, je pourrais très bien admettre que l'on supprime les mots « et de leur financement » et que l'amendement soit rédigé de la manière suivante : « L'assurance maladie associe les professionnels de santé, les partenaires sociaux et les usagers à la réalisation des objectifs de qualité et d'égalité des soins. »

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 6341 à 6355.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié par l'amendement n° 26 rectifié.

(L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l'article 1er.

Après l'article 1er

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 316 à 327.

La parole est à M. Alain Bocquet.

M. Alain Bocquet. Ces amendements visent à simplifier la mise en œuvre au niveau régional des actions de santé publique définies au niveau national. Tous les observateurs pertinents ont noté la complexité du dispositif du projet de loi, surtout du fait du cloisonnement inquiétant qu'il introduit entre les décideurs et les financeurs. Nous proposons une architecture plus simple et plus cohérente, qui précise la place des différentes catégories de personnes concernées par ce texte important, en particulier celle des usagers.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Mon amendement, n° 317, n'est pas très différent de celui de M. Bocquet. (Sourires.)

M. le président. La différence est minime en effet : celui de M. Bocquet porte le numéro 318 tandis que le vôtre porte le numéro 317. (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Tout à fait.

Nous avons déjà débattu de cette question à l'occasion de la loi de santé publique et en commission, où M. Dubernard nous a présenté un grand tableau. Il aurait dû d'ailleurs le montrer ici, dans l'hémicycle, pour éclairer nos collègues. Ceux qui l'ont vu l'ont toujours en mémoire.

M. le président. Monsieur Gremetz, nous sommes dans un hémicycle, pas dans une salle de travaux pratiques. On ne peut pas accrocher des tableaux.

M. Maxime Gremetz. Mais il faut innover, monsieur le président.

L'architecture qui nous est proposée ne nous convient pas. Au lieu de poursuivre le mouvement de démocratisation amorcé par M. Dubernard, le projet de loi revient en arrière. Pourtant, ce qui existait n'était déjà pas satisfaisant. Nous avions proposé par exemple un comité régional pour ne pas laisser les ARH décider seules de tout. Nous avions réussi, après des jours et des nuits de lutte, à obtenir plus de crédits pour les hôpitaux publics. Or, à peine la loi votée, les ARH distribuent sans consulter personne, même pas les députés. Ainsi, par exemple, je suis obligé de demander combien le département de la Somme a reçu, comment sont répartis les crédits. Au bout de quinze jours, on me répond : « Tel hôpital a reçu telle somme, tel autre, tel montant... » Est-ce là une gestion démocratique des crédits qui sont votés par le Parlement ? Ce n'est pas admissible.

Dès la loi Juppé, nous avions dit que derrière l'ARH se cachait en fait le préfet, nous avions d'ailleurs voté contre car nous dénoncions cette forme d'étatisation. Nous proposions alors, et nous proposons toujours, la mise en place d'un comité régional qui associerait, dans la prise de décisions, des représentants de toutes les catégories concernées par la santé publique, les assurés sociaux, les organisations syndicales, etc.

M. Jean-Luc Préel. Je suis d'accord. C'est une très bonne idée.

M. Maxime Gremetz. En effet, mais vous savez bien qu'elle a été repoussée par la majorité.

M. Alain Bocquet. Eh oui !

M. Maxime Gremetz. J'ai même expliqué comment se déroulaient les conférences régionales. On arrive le matin pour le café, on assiste à plusieurs discours, on entend plusieurs rapports.

M. Jean-Luc Préel. C'est la grand-messe. Pour un communiste, c'est difficile !

M. Maxime Gremetz. Puis, à douze heures trente, on donne la parole à la salle, aux parlementaires, aux élus, aux usagers. Les syndicats, eux, n'ont pas le droit à la parole, ils ne sont même pas invités. Comment voulez-vous que ça marche ? Et après, vous dites vouloir responsabiliser les gens ? C'est l'inverse qui se produit.

M. Alain Bocquet. Il a raison.

M. Maxime Gremetz. Nous ne sommes pas d'accord. Nous proposons une architecture démocratique. Pour élaborer une politique de santé, il faut prendre en compte les besoins réels d'une région. Donc, il faut d'abord les regarder, les connaître.

M. Jean-Luc Préel. Bravo !

M. Maxime Gremetz. Ensuite, il faut élaborer des propositions conformes à ces besoins. Ceux-ci ne sont pas les mêmes partout, dans la Somme ou dans le Var.

J'ajoute un dernier mot, monsieur le président.

M. le président. Il faut conclure, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je conclus.

Je disais que M. Dubernard avait fait un petit pas dans le sens que nous souhaitions.

M. Alain Bocquet. C'est vrai.

M. Maxime Gremetz. Mais, là, c'est un tour de manivelle en arrière qu'on nous propose. Dans le conseil d'administration, il n'y a pas de représentants élus et les représentants des salariés et des employeurs n'ont plus aucun pouvoir. Et, pour diriger tout cela, le ministre désigne un haut directeur. Avouez que la démocratie, qui est un des piliers de nos propositions, n'en sort pas grandie. Au contraire, on étatise pour mieux privatiser.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement, non pas qu'elle soit insensible aux arguments de démocratie exposés par M. Gremetz, ...

M. Claude Goasguen. Au contraire !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. ...mais parce que ces dispositions figurent dans la loi de santé publique, loi qui a été votée par l'Assemblée il y a six mois, qui doit passer au Sénat, avant de faire l'objet d'une CMP, je pense, avant la fin de la session extraordinaire.

Vous avez fait allusion au grand tableau que je vous avais montré. En fait, je vous avais montré deux tableaux. Le premier concernait le projet de loi initial, que nous avons restructuré, réorganisé, simplifié et démocratisé en rétablissant les conférences nationales de santé au niveau national et les conférences régionales de santé au niveau régional qui avaient disparu du texte. Nous aussi, monsieur Gremetz, nous souhaitons installer la démocratie et nous la privilégions.

M. Claude Goasguen. Quel talent !

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale, pour donner l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 316 à 327.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Je ne suis pas insensible à l'argument de M. le rapporteur quand il rappelle la loi de santé publique mais j'aimerais qu'il s'engage à discuter l'amendement de M. Gremetz quand ce texte reviendra en séance.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Si vous suiviez les débats de notre assemblée, monsieur Bapt, vous sauriez que ce texte ne revient pas chez nous. Il faut venir plus souvent.

M. Gérard Bapt. Je suis par ailleurs un peu étonné que la discussion de cet amendement ait été acceptée alors que nos amendements concernant les agences régionales de santé sont tombés sous le coup de l'article 40 de la Constitution. En effet, ils procèdent de la même intention et proposent des dispositifs identiques.

M. Jean-Luc Préel. C'est un peu vrai !

M. Gérard Bapt. A l'échelon régional d'une part, parce que nous considérons, comme M. Gremetz, que l'échelon régional est le plus pertinent, et en ce qui concerne la prise en compte globale des problèmes de santé. Simplement, notre amendement concernant les agences régionales de santé allait un peu plus loin. Nous souhaitions, comme M. Gremetz, introduire davantage de démocratie, notamment vis-à-vis des collectivités locales, des syndicats, des partenaires sociaux, et des associations représentant des usagers.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Nous parlons non pas de santé publique mais d'assurance maladie.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Monsieur le président, c'est un autre débat ! M. Bapt fait de l'obstruction !

M. Gérard Bapt. Nous pensons que nous ne pouvons pas considérer les problèmes de santé publique dans leur globalité à l'échelon régional sans y intégrer le problème de l'hôpital.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Quand on ne sait pas quoi dire sur l'assurance maladie, on parle d'autre chose !

M. Gérard Bapt. On ne pourra sans doute pas établir de réelles liaisons entre la ville et l'hôpital, mais la démarche relevait du même esprit.

J'attends encore que M. le président de la commission nous explique pourquoi cet amendement de nos collègues communistes a été considéré comme recevable au titre de l'article 40, ce dont je me félicite, alors que les nôtres sur l'ARS ont été déclarés irrecevables.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Ça n'a rien à voir !

M. le président. Sur le vote des amendements nos 316 à 327, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je trouve que l'amendement proposé par nos collègues communistes va dans le sens d'un processus de démocratisation de l'ensemble du pilotage de notre système de santé et qu'il a bien sa place en tête du texte.

Vous ne pouvez pas imposer un système de santé qui serait piloté par une technocratie anonyme, sans contrôle, sans légitimité. Nous ne cesserons de le répéter : si les décisions sont prises par un homme seul, sans aucun contrôle, elles n'auront aucune effectivité et, pour notre part, nous le disons tout de suite, nous ne leur reconnaîtrons aucune légitimité. Il faut d'ailleurs que les personnes qui seraient éventuellement candidates à ce type de responsabilité le sachent : nous n'accepterons pas la légitimité de leur action. Nous les prendrons pour des sous-directeurs d'une responsabilité politique d'un ministre et pour rien d'autre. Nous refusons de voir se cacher derrière l'irresponsabilité ceux qui, en fait, auront en charge de faire baisser la protection sociale obligatoire de nos concitoyens.

Cela dit, je voudrais revenir sur la discussion que nous avons eue tout à l'heure sur l'article 1er. J'ai regretté l'absence du ministre de la santé, parce que, comme, ce matin, il s'était montré ouvert à nos propositions, je me demandais si sa présence n'aurait pas permis que l'on donne un droit de reconnaissance aux associations d'usagers dans cet article 1er.

Monsieur le ministre, vous n'avez pas été en mesure de les recevoir avant d'avoir déposé ce texte devant le Conseil d'État. Pourtant, vous connaissez l'importance de ces associations dans le domaine de la santé. J'espère donc que vous pourrez revenir assez rapidement sur cet état de fait et nous proposer, éventuellement dans un amendement gouvernemental, de réintroduire à l'article 1er, là où les principes sont énoncés, la présence des associations d'usagers dans la perspective du pilotage de notre système de santé.

M. le président. Monsieur Gremetz, le scrutin public que vous avez demandé a été annoncé dans le Palais. Je vous donne la parole en vous demandant d'être bref, pour que nous puissions y procéder rapidement.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, ne me bousculez pas à cette heure-là ! (Sourires.)

M. le président. Mais je ne vous bouscule jamais, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Je vous ai bien entendu, monsieur le rapporteur, mais il faut arrêter de jouer au ping-pong. Lorsque nous avons examiné la loi de santé publique, on nous a dit qu'une telle disposition n'y avait pas sa place et qu'il faudrait l'insérer dans le projet sur l'assurance maladie. Et l'on nous répond maintenant qu'elle aurait dû être intégrée dans la loi de santé publique !

Quand on engage une réforme d'une telle importance , dont les conséquences seront tragiques pour beaucoup de gens, il me semble que l'on doit en fixer les moyens. Or, ce projet de loi contredit complètement ce que vous avez adopté dans le cadre de la loi de santé publique. Vous avez fixé de grands principes - c'est merveilleux ! -, mais quand il s'agit de les appliquer , il ne se passe plus rien ! Le ping-pong, moi je préfère y jouer sur une table. Là, vous nous renvoyez d'un texte à l'autre et je vois les balles passer. Eh bien, je n'aime pas cela du tout, d'autant que je suis très mauvais perdant ! C'est de l'hypocrisie.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Monsieur Gremetz, ne nous accusez pas ainsi ! Moi qui tout à l'heure saluais votre sens de la démocratie, j'ai l'impression de voir King Kong réapparaître. (Sourires.)

M. Claude Goasguen. Bravo !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Lorsque l'on a rien ou pas grand-chose à dire sur l'assurance maladie , on parle de santé publique. La réponse à cet amendement figure noir sur blanc dans la loi qui sera votée après la CMP dans quelques semaines.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Très bien !

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, veillez à ce que le président de la commission spéciale soit neutre ! Je préférerais que ce soit le ministre qui parle un peu plus !

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les amendements identiques nos 316 à 327.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 34

              Nombre de suffrages exprimés 34

              Majorité absolue 18

        Pour l'adoption 9

        Contre 25

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 6519 à 6533.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Il faut mettre en œuvre une offre de soins ciblée là où les besoins ne sont pas suffisamment couverts. De ce point de vue, les actions engagées en matière de médecine scolaire, infantile de façon générale, sont tout à fait insuffisantes.

Nous avons un système de protection maternelle et infantile qui fonctionne bien pour les enfants jusqu'à l'âge de deux ans, mais, après, il baisse la garde, il est moins mobilisé, et nous constatons plus tardivement des problèmes de santé chez les adolescents.

Cet amendement vise donc à intégrer dans ce projet de loi sur l'assurance maladie la problématique de la médecine scolaire et à rappeler la nécessité de la prévention.

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Guigou.

Mme Élisabeth Guigou. Ces amendements sont extrêmement importants. En effet, si nous voulons réformer l'assurance maladie pour avoir des soins de qualité au moindre coût, la prévention doit jouer un rôle crucial. Nous ne pouvons pas nous contenter, comme nous l'avons sans doute tous fait dans le passé , de n'agir que sur le curatif et pas sur le préventif.

Il nous faut organiser une offre de soins plus rationnelle en améliorant la médecine de ville, qui doit être mieux articulée avec l'hôpital, et en mettant l'accent sur la prévention pour limiter par la suite le recours à l'assurance maladie, en termes de remboursement des soins. Ces amendements sont donc inspirés par un souci de qualité et d'économies futures pour notre système de soins.

La prévention, cela commence à l'école et cela se poursuit sur le lieu de travail - nous aurons l'occasion d'y revenir. Tout à l'heure , l'un d'entre nous a souligné le surcoût que représentait, pour la sécurité sociale, la multiplication des accidents du travail. La prévention en milieu scolaire et en milieu professionnel est donc extrêmement importante.

J'ajoute que nous avions initié des dispositifs en ce sens. Nous avions notamment accepté une revalorisation des honoraires des dentistes en contrepartie d'un effort de prévention de leur part et d'une visite systématique pour les enfants d'une classe d'âge scolaire. C'est un dispositif qui a été voté dans la loi de financement de la sécurité sociale de 2001.

Nous sommes inspirés là du même souci d'éducation à la santé pour les enfants, qu'il s'agisse de la prévention de l'obésité, de l'hygiène dentaire ou du contrôle de la vue, car ces problèmes peuvent dégénérer s'ils ne sont pas pris en charge. Inutile de dire que nous reviendrons souvent sur cette question de la prévention, car elle est au cœur des propositions des socialistes pour améliorer le système de soins tout en générant des économies pour la sécurité sociale.

M. le président. La parole est à M. Alain Claeys.

M. Alain Claeys. Il ne peut y avoir réorganisation de notre système de soins sans une politique volontariste en matière de prévention. J'ai eu l'occasion de le dire hier en défendant la motion de renvoi en commission. Cette politique de prévention dans les écoles, les collèges et les lycées est de la responsabilité exclusive de l'État.

Les collectivités locales sont néanmoins aujourd'hui concernées par les carences qui se manifestent en matière de santé scolaire, de prévention, et il ne faudrait pas que l'absence de l'État en la matière les oblige demain à intervenir, car cela ne ferait que renforcer les inégalités territoriales.

Cette politique de prévention peut prendre des aspects multiples, mais certains besoins ne sont pas satisfaits et, si elle n'était pas rapidement mise en place, c'est toute l'organisation des soins que nous appelons de nos vœux qui serait remise en cause. C'est donc un axe essentiel de la réforme de l'assurance maladie.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. La prévention est en effet un axe essentiel de la réforme de l'assurance maladie. C'est pourquoi il ne serait pas inutile d'inscrire dans le code de la santé publique une telle disposition, qui est très simple et paraît aller de soi, d'autant que les moyens consacrés à la médecine scolaire méritent de faire l'objet d'un rattrapage.

La médecine scolaire contribue à la réalisation de ces priorités que sont la prévention, l'éducation et le suivi des enfants. Au-delà, ce sont les équipes éducatives qui sont confrontées à ces problèmes de santé publique concernant les enfants, de même que les collectivités locales qui devront les prendre en charge, comme l'a dit M. Claeys.

Mme Guigou a parlé de l'obésité. Ma commune est l'une des dix qui viennent d'engager une étude expérimentale d'une durée de quatre ans sur le suivi de la prévalence à l'obésité chez les enfants de la dernière classe de maternelle à la dernière classe de primaire. C'est une question fondamentale, car, sur trois enfants en situation de surpoids - l'obésité se voit, mais pas le surpoids, qui a pourtant la même incidence -, deux seront demain obèses. Deux tiers de ces obèses développeront une maladie métabolique, une hypertension artérielle ou une affection cardiovasculaire. Il faut donc absolument que ce problème soit pris en charge dans le cadre de la politique de santé publique de l'État.

Le ministère de la santé est l'un des parrains de l'étude à laquelle j'ai fait allusion, monsieur le ministre, mais dix communes en France, c'est peu. Procéder à l'ajout au code de la santé publique que nous proposons donnerait plus de force à ces initiatives qui mobilisent beaucoup l'espace éducatif. Au-delà des progrès que nous avons pu faire en matière de qualité nutritionnelle dans nos restaurants scolaires, d'animation s'agissant de l'éducation sanitaire sur ces thèmes, de développement du goût chez l'enfant - c'est très important aussi -, c'est un véritable problème sociétal qu'il faut aujourd'hui prendre en charge.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission s'associe aux propos généraux tenus par M. Le Guen, Mme Guigou, M. Claeys et M. Bapt sur l'importance de la prévention, de l'éducation à la santé et de la prise en charge des enfants pendant leur scolarité, dont la médecine scolaire est en effet un élément essentiel.

Encore un mot, pour répondre à M. Claeys. En 1989, j'ai eu le privilège d'être en charge, à Lyon, du système scolaire et donc de la santé scolaire. J'avais pu constater que, à l'époque, il n'y avait que dix-sept communes en France qui s'occupaient directement de cette question, mais que la mobilisation du personnel médical, des enseignants et des enfants y était plus forte et les résultats meilleurs que dans les autres.

M. Alain Claeys. Seulement, cela coûte cher !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Bien sûr ! En 1989, notre budget représentait 22 millions de francs, ce qui est significatif, même pour une grande ville comme Lyon. Mais, dans le domaine de la prévention, plus on se rapproche du terrain, mieux on agit.

Pour le reste, je ferai la même réponse que sur l'amendement précédent. Les questions de santé publique figurent dans la loi de santé publique. Pourquoi, mes chers collègues, n'abordons-nous pas enfin la question de l'assurance maladie ?

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je souscris pleinement à ce qui vient d'être dit. L'éducation à la santé, la prévention et la médecine scolaire sont des sujets majeurs en matière de santé publique. Je ne peux donc que me féliciter de l'intérêt qu'on leur témoigne dans cet hémicycle.

Mais le rapporteur vient de le dire : puisque ces problèmes relèvent de la santé publique, nous les réglerons dans la loi qui traite de ce sujet.

M. Gérard Bapt. Si seulement !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Cette loi viendra en deuxième lecture au Sénat, le 9 juillet prochain. Je rappelle qu'elle est attendue depuis plus d'un siècle.

M. Maxime Gremetz. Il n'y a rien dedans !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Les priorités rappelées dans les amendements sont donc déjà prises en compte. Par ailleurs, les médecins de l'éducation nationale contribuent déjà à leur réalisation. C'est même l'essentiel des missions qui leur sont dévolues par la circulaire du ministère de l'éducation nationale du 12 janvier 2001.

Du reste, dans les semaines ou les mois à venir, je souhaite mettre en place avec le ministre de l'éducation nationale une contribution visant à mieux définir et à développer la médecine scolaire.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. La partie de ping-pong continue ! On nous renvoie la balle en nous objectant que nos amendements relèvent du domaine de la santé publique. Mais peut-être ne savez-vous pas, monsieur le ministre, car vous n'étiez pas précédemment à ce poste, que la loi à laquelle vous vous référez...

M. le président. Veuillez continuer, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Non seulement M. le ministre aime le ping-pong, mais maintenant il parle à ses voisins pendant que les députés s'adressent à lui. Quel manque de respect envers la représentation nationale !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La balle accrochait la raquette. (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Je ne plaisante pas, en l'occurrence.

J'espère que vous le savez, monsieur le ministre, mais je vous le rappelle tout de même : la loi de santé publique ne contient aucune mesure en matière de prévention. Tous nos amendements à ce sujet ont été repoussés.

Quand il nous annonçait une grande réforme de l'assurance maladie, le Gouvernement nous promettait de régler dans ce cadre le problème de la santé scolaire. Maintenant, il fait l'inverse : il nous dit d'attendre la deuxième lecture de la loi de santé publique pour traiter le sujet. Je ne suis pas d'accord avec ce procédé.

La question de la santé scolaire est un problème majeur, comme celui de la santé au travail, sur lequel je reviendrai. Nous en connaissons tous les conséquences. Chaque enfant a le droit à la santé et doit pouvoir, à mon sens, bénéficier régulièrement de visites médicales à l'école. Mais les moyens font défaut. On manque terriblement, tragiquement d'infirmières dans les écoles.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. C'est du Zola !

M. Maxime Gremetz. Ce n'est peut-être pas le cas à Paris ou dans certains départements de la région parisienne, mais, dans la Seine-Saint-Denis, les infirmières sont en nombre très insuffisant.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie ne me démentira pas si je dis que les écoles de Picardie manquent d'infirmières. Il sait bien que la situation y est dramatique.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ce qui est dramatique, c'est de peindre la France sous ce jour-là !

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, j'ai été interpellé par le président de la commission spéciale !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Non ! c'est à moi que parlait le président de la commission spéciale, qui était en train de lire un article dans un journal.

M. le président. Le président de la commission ne s'adressait pas à vous, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Bien sûr que si, monsieur le président ! Et, quand un orateur parle et que quelqu'un l'interrompt, vous devez le rappeler à l'ordre.

M. le président. Je demande donc à M. le président de la commission de cesser de lire et de vous écouter encore quelques secondes.

M. Maxime Gremetz. Quelques secondes ? Je dispose de cinq minutes pour répondre au ministre. Vous voulez que nous appliquions le règlement à la lettre, monsieur le président ? Dans ce cas, je parlerai cinq minutes pleines.

M. le président. Mon but est seulement de le faire respecter.

M. Maxime Gremetz. Alors, je prendrai cinq minutes, puisque le règlement le dispose.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie s'abstient de répondre car il sait, pour être originaire de la même région que moi, qu'il serait obligé de confirmer mes propos.

Or qu'arrive-t-il s'il n'y a pas de prévention à l'école ? Quand certains enfants qui entendent mal ne sont pas soignés, on parle d'échec scolaire. Quand certains enfants qui voient mal ne sont pas soignés, on invoque le retard en matière de lecture. Ce sont des conséquences que l'on ne peut pas ignorer.

Lorsque nous parlons de santé scolaire, on nous répond que, certes, c'est une grande cause nationale, mais on ne prend aucune mesure et on ne prévoit aucun moyen. C'est absurde !

À ce sujet, je voudrais vous lire un article qui va vous intéresser. Il s'intitule : « La prévention, ça paie » et rapporte les résultats d'une enquête réalisée aux États-Unis.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Encore un admirateur du modèle américain ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Vous savez bien que les États-Unis ne me fascinent pas. C'est plutôt vous, qui les portez aux nues ! Seulement, vous ne prenez que ce qui vous arrange et vous passez le reste sous silence.

M. Richard Mallié. N'est-ce pas ce que vous faites vous-même ?

M. Maxime Gremetz. Lisez si vous voulez : « Aux États-Unis, le cancer recule. »

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Grâce à la médecine scolaire ? (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Personnellement, je ne connais pas le sujet. C'est pourquoi je m'en remets aux spécialistes : « Les premiers chiffres de cette vaste enquête épidémiologique américaine dont l'équivalent n'existe pas en France ont ainsi montré une baisse de 0,5 % par an du nombre de nouveaux cas de cancer, après des efforts sans précédent en matière de prévention. »

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Le bénéfice en revient plutôt aux campagnes anti-tabac qu'à la médecine scolaire !

M. Maxime Gremetz. Il faut regarder les expériences qui ont été faites dans tous les pays, quand on parle de prévention. Moi, je n'ai aucun modèle à travers le monde. Je m'intéresse seulement à la santé des adultes et des enfants. Or la prévention est à la fois un investissement humain naturel et un investissement financier pour la sécurité sociale de demain.

M. le président. Vos cinq minutes sont écoulées, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. J'ai l'impression que vous êtes pressé de partir en week-end, monsieur le président, mais la séance n'est pas encore levée !

M. le président. Ne vous en prenez pas à la présidence, monsieur Gremetz ! Je vous ai seulement signalé que vous aviez utilisé les cinq minutes qui vous étaient imparties.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Moi, monsieur Gremetz, je n'aurais jamais osé vous interrompre. (Sourires.)

Mercredi prochain, à douze heures, au Sénat, l'office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, qui est présidé alternativement par les présidents de la commission des affaires sociales de l'Assemblée et du Sénat, se réunit pour présenter son premier rapport devant les journalistes. Il s'agit d'une synthèse des travaux effectués en France sur le cancer du sein. Certes, l'article que vous avez lu traitait plutôt du cancer du poumon. Mais, en France, les épidémiologistes et les médecins de santé publique travaillent sur tous les sujets.

Vous serez surpris par la qualité du rapport qui va nous être remis par notre collègue Marc Bernier. C'est une contribution passionnante et j'ai plaisir à vous inviter à cette réunion, au nom du président About, qui sera sûrement très heureux que vous y assistiez.

M. le président. L'Assemblée étant informée, je vais maintenant procéder au scrutin.

M. Maxime Gremetz. Je demande un scrutin public.

M. le président. Sur le vote des amendements n°s 6519 à 6533, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le rapporteur, je vous remercie des informations que vous me donnez. Mais, alors même que vous avez lu ce rapport qui contient sans doute des propositions, vous n'en retenez aucune pour que des moyens réels soient mis en œuvre en matière de prévention ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est que de telles mesures relèvent de la loi de santé publique.

M. Maxime Gremetz. Vous savez bien que cette loi ne prévoit rien ! Elle ne contient que de grandes déclarations de principe, sans aucune application concrète. La preuve, c'est que M. le ministre vient de nous dire que tout se jouerait pendant la seconde lecture. C'est bien ce que vous nous avez dit, monsieur le ministre ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Non.

M. Maxime Gremetz. Non seulement je vous entends trop rarement, mais je vous entends mal. Qu'avez-vous dit, alors ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. J'ai dit que cinquante-sept plans figuraient en annexe du projet de loi de santé publique et que, si l'on veut améliorer ce texte, il sera possible de le faire le 9 juillet, au Sénat.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. C'est bien ce que j'avais entendu ! Vous voulez bien qu'on améliore le texte, mais vous refuser de prévoir des moyens pour le mettre en œuvre. Or c'est tout le problème.

Quand vous déciderez-vous à agir ? Il est facile de parler. Les discours sur la prévention ne manquent pas. Tout le monde s'accorde à dire que c'est une grande cause nationale. Mais, tant qu'il n'y a pas de moyens, rien n'est fait.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je tiens à faire une remarque de fond, car je crois que nous voyons en ce moment les limites de notre débat.

Si nous ne sommes pas ici pour parler de la santé et si, pour le rapporteur et le ministre, les problèmes de l'assurance maladie se résument à la gouvernance et au financement, qu'ils nous le disent tout de suite. Qu'ils renoncent à l'article 1er et aux principes qu'il énonce, et nous ne traiterons plus que des questions de tuyauterie et d'argent.

Mais, dans ce cas, il ne fallait pas voter l'article 1er. Car désormais, dans tous les cas, et même si le ministre et le rapporteur ne sont pas d'accord avec nos amendements, ce qui est évidemment leur droit, ils ne peuvent plus arguer du fait que ceux-ci ne s'inscrivent pas dans le débat. C'est à mon sens un point important.

Mais il est une autre raison pour laquelle nous éprouvons en ce moment un sentiment de malaise. Nous travaillons, chacun avec nos convictions, à améliorer notre système de santé. Nous répétons que la santé de nos concitoyens est pour nous une chose primordiale. Mais, pendant ce temps, certains de nos collègues pétitionnent auprès du Premier ministre, qui leur prête une oreille plus ou moins attentive, pour relancer la consommation de vin et revenir sur la loi Évin. En somme, tandis que nous essayons d'améliorer la santé publique, ce qui représente beaucoup d'argent, et tandis que nous cherchons tous à changer d'attitude vis-à-vis de l'assurance maladie, le Gouvernement s'apprête, pour des raisons purement mercantiles, à relâcher la pression en matière de consommation d'alcool.

Ceux qui connaissent les problèmes de santé publique croient-ils que, si l'on évoque, comme l'a fait notre collègue M. Gremetz, la situation des enfants en Picardie, on puisse faire abstraction de l'alcoolisme qui sévit dans cette région ?

Alors que nous allons mettre en œuvre des sommes considérables et peut-être encore insuffisantes, une partie de la majorité défait le consensus national qui s'était construit autour des thématiques de santé publique. Le Gouvernement ferait mieux de réfléchir à ces questions, au lieu de nous renvoyer sans cesse à des textes qui ne contiennent rien !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je tiens à rappeler haut et fort que ce texte est la pièce maîtresse d'un ensemble composé du projet de loi relatif à la santé publique, du projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, qui comporte des mesures très importantes pour l'hôpital,...

M. Jean-Marie Le Guen. Répondez à ma question concernant la loi Évin !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. ...et des textes relatifs au handicap, notamment la loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. L'honneur du Gouvernement sera d'avoir donné un nouvel élan à la politique de santé publique,...

M. Jean-Marie Le Guen. Et le vin ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. ...qui s'est dégradée au cours des dernières années ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marie Le Guen. C'est la politique de la buvette !

M. Alain Gest. C'est insupportable !

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les amendements identiques n°s 6519 à 6533.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 37

              Nombre de suffrages exprimés 37

              Majorité absolue 19

        Pour l'adoption 9

        Contre 28

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je suis saisi de douze amendements identiques, n°s 328 à 339.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Comme j'ai beaucoup de choses à dire et que vous avez tendance à réduire le temps de parole, monsieur le président, je vais soutenir chacun de ces douze amendements.

M. le président. Monsieur Gremetz, selon la règle qui a été fixée par le président Jean-Louis Debré en accord avec les présidents de groupe, seuls les orateurs du groupe présents dans l'hémicycle peuvent soutenir leurs amendements. En l'espèce, j'accepte de vous accorder un peu plus de cinq minutes de temps de parole, mais vous ne pourrez pas intervenir cinq minutes sur chacun de ces douze amendements.

Vous avez la parole, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Ces amendements concernent également la santé scolaire. Celle-ci étant un élément fondamental de la santé publique, nous proposons que soit organisée une visite médicale annuelle obligatoire jusqu'à l'âge de seize ans. Il s'agit donc d'une mesure de prévention. Je veux d'ailleurs élever une protestation à ce sujet, car la plupart des amendements que nous avons déposés pour renforcer la politique de prévention, qui est essentielle, sont tombés sous le couperet de l'article 40 de la Constitution, ce qui signifie que vous ne voulez pas payer pour la prévention.

La Picardie, par exemple, accumule des retards en matière de santé, de pouvoir d'achat - les deux phénomènes sont d'ailleurs liés -, d'emploi, de salaire, d'éducation et de formation. Nous luttons pour que la situation de ces hommes, de ces femmes, de ces jeunes change. On va dépenser cinq milliards d'euros pour le plan Borloo, mais on peut douter de son utilité quand on constate que l'on va priver d'hôpital les 40 000 habitants de la zone d'Amiens-Nord, où le taux de chômage atteint 65 %, alors qu'ils n'ont pas les moyens de se faire soigner ailleurs qu'au service des urgences. Un projet vise en effet à regrouper l'hôpital d'Amiens-Nord et celui d'Amiens-Sud sur le site de ce dernier. J'ajoute que ce projet a été élaboré sans concertation par l'ARH et le conseil général. M. Gest sait de quoi il s'agit.

M. Alain Gest. Cela n'a aucun rapport avec le sujet !

M. Maxime Gremetz. Heureusement, ce n'est pas vous qui en jugez, monsieur Gest. Vous n'avez toujours pas compris le message des électeurs.

M. Alain Gest. Faites attention à ce que vous dites !

M. le président. Revenons aux amendements n°s 328 à 339, s'il vous plaît.

M. Maxime Gremetz. Encore une fois, je ne vois pas, dans le plan de M. Borloo, de mesures en faveur de la santé dans ces grands quartiers populaires, où le taux de chômage est important et les enfants pauvres nombreux.

Je vois des personnes qui rient. C'est insupportable !

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. De qui parlez-vous ?

M. Maxime Gremetz. Elles se reconnaîtront. Ces personnes n'imaginent même pas de quoi il s'agit, parce qu'elles ont une bonne situation.

M. Dominique Richard. C'est du populisme !

M. Maxime Gremetz. C'est un débat sérieux ! On ne peut pas rire de la misère des gens !

M. le président. Personne ne rit, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Si ! Il ne faut pas exagérer !

M. le président. Revenons aux amendements, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. À l'hôpital de Creil, où il manque déjà 120 personnels soignants, on va encore supprimer des postes parce que tous les moyens sont consacrés au projet d'Amiens.

Il faut faire de la prévention, notamment à l'école, car c'est là que tout se joue.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Monsieur Gremetz, votre demande est déjà prise en compte à l'article 6 A du projet de loi relatif à la santé publique, actuellement en discussion devant le Sénat, qui prévoit une visite médicale de prévention durant la scolarité. En outre, vos amendements disposent que la visite a lieu chaque année au cours de la scolarité obligatoire et qu'elle est proposée au-delà de cet âge limite. Dès lors, soit vous visez des étudiants perpétuels, soit vous considérez que l'on a droit à une visite médicale tout au long de la vie.

Par ailleurs, nous débattons ici de façon sérieuse de l'avenir de notre système de santé fondé sur la solidarité. Il est temps que nous nous concentrions sur les questions liées à ces enjeux, plutôt que de recommencer le débat que nous avons déjà eu lors de l'examen du projet de loi relatif à la santé publique. Nous avons bien compris, monsieur Gremetz, que votre circonscription connaît des problèmes spécifiques, mais, je vous en prie, ne donnez pas de leçons à des collègues qui peuvent sourire, non de vos affirmations, mais de la façon dont vous dirigez les débats.

Les travaux de la commission spéciale se sont déroulés dans un climat serein et je souhaiterais que nous continuions dans le même état d'esprit. Nous écouterons vos arguments, mais il faut que nous avancions dans l'examen de ce texte, car de nombreux points méritent une discussion approfondie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je vous remercie de vos propos apaisants, monsieur le président de la commission, mais je rappelle que M. Gremetz ne dirige pas les débats, même s'il les anime : c'est la présidence.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements en discussion ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il ne me paraît pas souhaitable d'instaurer une visite médicale systématique tous les ans. Mieux vaut cibler le contrôle et le dépistage sur certaines années de la vie, en particulier sur la sixième année, c'est-à-dire au cours de la dernière année de maternelle. Un bilan de santé peut également être proposé aux élèves de troisième.

En outre, l'une des mesures présentées dans le cadre de la conférence de la famille qui s'est tenue le 29 juin dernier prévoit le renforcement du suivi de la santé des adolescents, grâce à la généralisation d'entretiens de santé personnalisés aux âges-clef de l'adolescence, en classes de cinquième et de troisième.

Enfin, un bilan de santé a été instauré par la loi de modernisation sociale dans le cadre de la Journée d'appel de préparation à la défense.

M. Maxime Gremetz. Erreur !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Nous menons donc une action de prévention dans le cadre de la médecine scolaire. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, je conteste votre dernière affirmation. J'avais rédigé un amendement visant à faire procéder à un bilan de santé lors de la journée dite de la défense - qui, pour une fois, aurait servi à quelque chose -, amendement qui avait été voté à l'unanimité, avant d'être déclaré irrecevable sur le fondement de l'article 40 de la Constitution parce que, nous a-t-on dit, cela coûterait trop cher. Par ailleurs, notre amendement vise à organiser une visite médicale annuelle obligatoire jusqu'à l'âge seize ans, limite de la scolarité obligatoire. Il est donc faux d'affirmer que cette visite bénéficierait au-delà de cet âge aux « étudiants perpétuels ».

Deuxièmement, j'attire votre attention sur le sort des jeunes qui, après être sortis de l'école, n'ont pas trouvé de travail. Je connais de nombreux jeunes demandeurs d'emploi à qui il ne sera jamais proposé de passer un bilan de santé - un bilan nécessairement gratuit, si l'on entend lui faire jouer un rôle de prévention. Si vous avez des arguments à faire valoir, monsieur le rapporteur, je ne demande pas mieux que de les entendre. C'est ça, le débat démocratique : on s'écoute, et puis on se répond. En tout état de cause, il me semble qu'aucun bilan de santé n'est prévu, malheureusement, pour cette population dans la loi de modernisation sociale.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 328 à 339.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 424 à 435.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Cet amendement a trait à la prévention au travail, question importante s'il en est, et je ne comprends pas que l'on ne mette pas davantage l'accent sur cette question. Dans le domaine de la médecine du travail comme dans celui de la médecine scolaire, on a assisté à un recul ces dernières années.

Nous avions déposé toute une série d'amendements sur le thème de la santé au travail, qui sont tombés sous le coup de l'article 40. On ne pourra donc pas discuter de ce problème, ce qui est tout de même un comble dans le cadre d'une loi sur l'assurance maladie et le droit à la santé.

Comme vous le savez, le nombre de maladies professionnelles et d'accidents du travail ne cesse d'augmenter en France. Du point de vue de la prévention, on distingue deux catégories d'entreprises.

Dans les grandes entreprises, dotées d'un comité d'entreprise et d'un comité d'hygiène et sécurité, il existe une certaine prévention en matière de santé. Cependant, les comités d'hygiène et sécurité ont de moins en moins de moyens, et ne sont jamais associés aux politiques de prévention. En outre, ce sont les employeurs qui embauchent et rémunèrent les médecins. Comment, dans ces conditions, espérer que ceux-ci exercent leurs fonctions en toute indépendance ?

Dans les petites entreprises - de loin les plus nombreuses - qui ne sont dotées ni de comité d'entreprise, ni de délégués du personnel, rien n'est prévu. Beaucoup de ces entreprises n'adhèrent même pas aux associations chargées de la médecine du travail. De ce fait, des millions de salariés n'ont bénéficié d'aucun bilan de santé depuis des années.

C'est ce qui s'est passé avec l'amiante, qui a fait des ravages, et dont les victimes ont aujourd'hui le plus grand mal à obtenir réparation. Une liste des maladies dont le constat vaut justification de l'exposition à l'amiante a été établie à la suite de la création du FIVA, mais cette reconnaissance vient un peu tard. Alors même que la responsabilité des patrons, qui ont sciemment continué à utiliser l'amiante alors que sa dangerosité était connue, est établie, les victimes se voient contraintes de saisir la justice pour faire valoir leurs droits, ce qui peut prendre des années. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je parle en connaissance de cause, ayant moi-même été victime de l'amiante, comme mes anciens camarades de chez Valeo. Tout le monde connaissait les dangers de l'amiante et savait qu'il existait des produits de substitution. Mais sous la pression des lobbies, et comme les produits de substitution coûtaient plus cher, les entreprises ont continué d'utiliser l'amiante.

Dans la majorité des entreprises, aucune visite médicale n'est effectuée. C'est pourtant prévu par la loi, me direz-vous. D'accord, mais cela ne se fait pas.

Quant aux millions de jeunes qui sont au chômage, après avoir connu, bien souvent, les carences de la médecine scolaire, à quoi ont-ils droit en matière de prévention ? Depuis la fin du service militaire, qui était l'occasion d'un bilan de santé, ils ne bénéficient plus d'aucune visite médicale de prévention gratuite. Autant dire qu'ils ne peuvent bénéficier d'aucune mesure de prévention, leurs moyens ne leur permettant pas de faire établir un bilan de santé à leurs frais. Nous sommes en train de mettre en danger tout un potentiel humain, en prenant à la légère la santé de toute une population.

M. le président. Veuillez conclure, je vous prie.

M. Maxime Gremetz. Je terminerai en vous donnant un exemple. Peut-être connaissez-vous cette statistique, monsieur le ministre. Selon l'INRS, institut national de recherche et de sécurité, le stress, à lui seul - je ne parle ni de l'amiante, ni des accidents du travail -, a coûté en France en 2000 entre 963 millions et 1,6 milliard d'euros, soit de 10 à 20 % du budget de la branche accidents du travail de la sécurité sociale. Voilà le résultat d'une politique qui n'investit pas dans la prévention médicale, et plus généralement dans la santé.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Pour revenir à la sous-déclaration des accidents du travail, objet des amendements dont nous débattons, je voudrais rappeler à M. Gremetz qu'un reversement forfaitaire de la branche accidents du travail à la branche maladie vise déjà à compenser les effets financiers de la sous-déclaration. La commission a donc rejeté ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je tiens à affirmer que le Gouvernement entend mieux cerner les causes de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, et améliorer les conditions dans lesquelles les victimes peuvent faire valoir leurs droits. Le Gouvernement entend également améliorer l'appareil statistique de la branche des accidents du travail et maladies professionnelles. Mais l'outil de cette amélioration ne se trouve pas dans les dispositions que vous proposez. Cet outil, c'est la convention d'objectif et de gestion avec la branche accidents du travail et maladies professionnelles.

Cette convention sera signée prochainement. Elle prévoira une amélioration significative des applicatifs de gestion des prestations d'accidents du travail, pour mieux suivre la procédure de reconnaissance et mesurer notamment le taux de refus. La convention prévoira également plusieurs dispositions facilitant la reconnaissance des accidents du travail et maladies professionnelles, et améliorant la situation des bénéficiaires de prestations.

Sur le fondement de ces explications, le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. J'ai eu l'occasion de citer ce matin un éditorial des Échos signé Favilla. Celui-ci, qui ne saurait être suspecté d'hostilité à l'égard des entreprises, reprend les travaux de Philippe Askenazy, un économiste qui vient de publier une étude comparée sur ce qui s'est passé aux États-Unis ces dernières années et ce qui se passe en France actuellement en matière de maladies professionnelles.

En fait, nous sommes en train de changer de monde. Nous connaissions les accidents dans les entreprises du BTP ou de la sidérurgie, nous connaissions les maladies professionnelles dans l'industrie chimique ou dans l'industrie de la métallurgie, mais nous n'avons pas prêté attention aux mutations qui étaient en train de se produire dans le monde du travail, en particulier dans le secteur des services et du commerce. De ce fait, nous avons négligé certains troubles, notamment les troubles musculo-squelettiques, et les problèmes liés au stress et au harcèlement.

Aux États-Unis, les entreprises ont réagi dès qu'elles ont été confrontées au choc provoqué par la hausse vertigineuse des primes réclamées par les assurances, répercutant le coût des maladies et accidents du travail. Une réflexion s'est instaurée, relayée par les organisations syndicales américaines, qui ont pesé sur les processus de production de façon à réduire substantiellement les maladies professionnelles et les accidents du travail.

Ce dont nous parlons aujourd'hui, est-ce que cela relève du domaine de la finance, de la santé ou de la gestion ? Je n'en sais rien. Ce qui est certain, monsieur le ministre, c'est que vous avez utilisé largement les médias pour attirer l'attention des Français sur la question des abus, notamment au sujet des indemnités journalières. Vous avez même affiché les économies - d'ailleurs largement surestimées - que vous affirmez réaliser sur ce plan. Ainsi, vous prétendez gagner 1,5 milliard d'euros sur les indemnités journalières, alors que celles-ci représentent aujourd'hui 5,7 milliards d'euros. Vous supprimeriez donc près du tiers des remboursements d'indemnités journalières, ce qui n'est pas crédible financièrement.

Pour en rester au niveau financier, nous reprochons aux entreprises, qui ne prennent pas garde aux conditions de travail de leurs salariés, de faire finalement peser sur l'assurance maladie les coûts de la « réparation » de ces travailleurs. Les sommes en jeu sont considérables et les cotisations payées par ces entreprises ne compensent pas ces dépenses.

Je pense d'ailleurs que les chiffres sur les ATMP et les sous-déclarations sont nettement en dessous de la réalité car ils sont fondés sur le vieux modèle industriel. Par le passé, en effet, les accidents et maladies professionnels étaient dus essentiellement à l'industrie traditionnelle. Nous en sommes donc restés à ce schéma en sous-estimant très largement tout ce qui est lié à la production des services.

Aujourd'hui, il faut procéder à un changement de paradigme. Il faut revoir notre approche des questions de santé. C'est indispensable si l'on veut diminuer les remboursements liés à la branche ATMP et le coût réel pour la santé. Or la loi de santé publique n'a rien prévu en la matière. Et, dans ce texte sur l'assurance maladie, il n'est question que des indemnités journalières.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je serai amené, en tout état de cause, à revenir sur ce problème car il est déterminant. S'il existe un choix idéologique, c'est bien celui-là. On peut en effet préférer se tourner contre les assurés, quitte à défigurer la réalité. Et l'inégalité de traitement entre salariés et entreprises, que nous dénonçons, apparaît non seulement au niveau des prélèvements mais aussi des conséquences sur la manière dont on va faire la chasse au gaspi, comme vous dites. Alors que les assurés vont être déstabilisés dans la réparation de leur maladie, vous ne présentez aucun plan précis concernant les entreprises dont le comportement, pourtant, a des conséquences de plus en plus néfastes sur la santé de leurs employés et les comptes de l'assurance maladie.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. J'ai moi aussi pris connaissance de cet article du journal Les Échos auquel M. Le Guen vient de faire référence. Je signale à l'Assemblée qu'il existe également sur ce sujet un ouvrage très sérieux, publié au Seuil et intitulé Les désordres du travail. Il fait apparaître que, tous les jours, 2 000 salariés du privé sont victimes d'un accident entraînant un arrêt de travail. « Le coût des accidents et des maladies professionnelles atteindrait le chiffre colossal de 3 % du PIB français », indique l'auteur de l'ouvrage. Pourtant, ce sont les salariés qu'on prétend aller contrôler.

J'ajoute que, s'agissant des sous-déclarations, nous sommes encore en deçà de la réalité. Je le sais pour être confronté au problème toutes les semaines. Les salariés que je rencontre et qui travaillent chez Valeo, Carbonne Lorraine, Dunlop ou Goodyear, m'expliquent en effet que, alors qu'ils ont été blessés, ils retournent travailler parce que leur direction, qui ainsi n'aura pas à déclarer un accident du travail, l'exige. Voilà la réalité ! Ne faudrait-il pas sanctionner ces entreprises qui ne veulent pas payer ?

Nos amendements prévoient donc deux mesures simples. En premier lieu, la réflexion sur ces tricheries massives, en confiant explicitement une mission d'analyse à la commission prévue à l'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale. Les tricheurs ne sont pas du côté qu'on croit. Les salariés ne trichent pas : ils subissent. Il n'en est pas de même pour les grands groupes qui ne déclarent pas les accidents du travail pour ne pas avoir à payer.

En second lieu, nos amendements visent à donner à cette commission les outils nécessaires à l'analyse en axant sur la qualité des statistiques.

Les conclusions des économistes que nous venons de citer imposent au minimum, monsieur le ministre, de commander une véritable étude pour examiner le problème au fond. Mais, apparemment, tout cela ne vous préoccupe pas. Compte tenu de l'importance de ces amendements, nous demanderons, quant à nous, un scrutin public.

M. le président. Mes chers collègues, à ce stade du débat, je crois qu'il faut en revenir à un respect plus strict du règlement. Je vais donc donner la parole à Mme Billard, qui me l'avait déjà demandée. Mais, pour les amendements suivants, nous nous en tiendrons, outre l'intervention de celui qui défend l'amendement, à un orateur pour et un orateur contre.

Auparavant, j'indique à l'Assemblée que, sur le vote des amendements nos 424 à 435, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. M. le rapporteur prétend que nous parlons de santé publique parce que nous n'avons rien à dire sur l'assurance maladie. Pour notre part, nous considérons précisément - c'est une divergence fondamentale entre nous - qu'on ne peut pas maîtriser les dépenses de santé si on ne développe pas une prévention digne de ce nom, qui aura forcément pour conséquence la disparition de certaines causes de maladies.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je suis d'accord avec vous, madame Billard.

Mme Martine Billard. Oui, c'est vrai, le nombre des arrêts de travail et le montant des indemnités journalières augmentent. Un rapport a même mis en évidence que celles des salariés âgés de cinquante-cinq à cinquante-neuf ans augmentaient encore plus. Or ce n'est pas un hasard. Il n'est pas étonnant, en effet, que, compte tenu de l'intensité requise, certains postes de travail soient difficiles à tenir passé cinquante-cinq ans.

Prenons quelques exemples. Aujourd'hui, sur 170 000 opérations du canal carpien effectuées en France, 10 000 seulement sont prises en charge par la caisse relevant des accidents du travail alors que, on le sait, cette maladie est liée à la répétition des gestes dans un certain nombre de process de travail. C'est le cas par exemple dans l'agroalimentaire - découper du poulet à la chaîne n'est pas sans conséquence. C'est le cas de l'électronique. J'ai vu les dégâts qu'avait provoqués l'introduction de l'automatisation à la fin des années soixante-dix. Faire un circuit dans son ensemble ou répéter toujours le même geste ne se traduit pas de la même façon physiquement.

Or, comme l'a dit Jean-Marie Le Guen, ces aspects n'ont pas été pris en compte dans la redéfinition des maladies professionnelles. Aujourd'hui, des milliers de cancers professionnels sont contractés. Une étude de l'Institut de veille sanitaire fait cependant apparaître que 10 % à peine sont reconnus par la médecine du travail alors qu'un grand nombre d'entre eux sont liés à l'utilisation dans le travail de produits cancérigènes.

Nous savons encore que le nombre de maladies professionnelles a explosé de 1997 à 2001. On est ainsi passé de 15 554 à 34 517 cas - et je ne parle que des cas reconnus -, soit une croissance de 122 %, avec, parmi les maladies les plus importantes, les affections périarticulaires, qui ont doublé en quatre ans, les maladies dues à l'amiante et les lombalgies.

Ces chiffres ne doivent-ils pas nous conduire à mettre en œuvre une véritable politique de prévention ? Je vous rappelle que nous avons déjà eu ce débat à l'occasion de l'examen du texte relatif à la santé publique. Alors, vous nous dites, monsieur le ministre, que les outils statistiques vont être améliorés. Très bien, nous disposerons de chiffres plus justes. Mais quand va-t-on intervenir au niveau de la prévention ? C'est ainsi que nous parviendrons à réduire le nombre des arrêts de travail et à enrayer les problèmes de santé de certains de nos compatriotes. Pour ces derniers, c'est parfois des questions mesquines de coût qui ont entraîné leur dégradation physique. Un certain nombre d'entreprises pourrait en effet améliorer très nettement la santé de leurs salariés sans investissements lourds. Il est vrai qu'en période de chômage élevé, les travailleurs n'osent plus réclamer une déclaration d'accident du travail. Ils ont donc tendance à accepter les négociations que leur propose leur patron ou leur contremaître. Mais, au final, c'est la branche assurance maladie qui paie car la personne accidentée doit bien se faire soigner.

Alors, monsieur le ministre, allons-nous avoir un débat sur la santé au travail ? Pourrons-nous disposer d'un outil nous permettant d'intervenir sur la question de la prévention des maladies professionnelles et des accidents du travail, liés à l'aspect musculo-squelettique ou aux cancers.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les amendements identiques nos 424 à 435.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

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M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 31

              Nombre de suffrages exprimés 31

              Majorité absolue 16

        Pour l'adoption 6

        Contre 25

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je suis saisi d'un amendement n° 7544.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le défendre.

Mme Martine Billard. Monsieur le président, si vous en êtes d'accord, je défendrai en même temps les amendements nos 7548, 7547, 7545, 7549, 7550 et 7546.

M. le président. Je vous en prie.

Mme Martine Billard. Nous avons la volonté d'insérer véritablement un chapitre relatif à la prévention dans cette loi. Prenons cette fois-ci un exemple hors du milieu professionnel.

Le rapport de la caisse d'assurance maladie sur l'exécution de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie 2 003 est très clair. Il fait apparaître que des facteurs pour la croissance de l'ONDAM sont durablement installés. Parmi ceux-ci, trois sont importants : les progrès des sciences et techniques médicales, le vieillissement de la population - c'est une bonne chose, à condition de bien vieillir - et l'épidémiologie des affections de longue durée. Le rapport indique très précisément : « Quatre affections se partagent 84 % des entrées dans le dispositif de prise en charge : les maladies cardiovasculaires, les cancers, les troubles mentaux et le diabète. Ces affections, on le sait, sont plus fréquentes avec l'âge. Mais le risque intrinsèque de leurs survenue augmente également. »

Compte tenu du poids de ces quatre affections, on peut décider, comme vous l'avez fait dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, de moduler la prise en charge des ALD. Cela signifie qu'à terme, peut-être, et pour faire des économies, on prendra en charge ces affections à 80 % et non plus à 100 %.

Mais on peut aussi considérer qu'il n'y a pas de fatalité. Et il me semble qu'il est de notre responsabilité d'hommes et de femmes politiques de faire en sorte qu'il n'y ait pas de fatalité. Nous devons donc tout mettre en œuvre pour que les maladies cardiovasculaires, les cancers, les troubles mentaux et le diabète n'apparaissent pas chez des gens jeunes. Ce sera en outre la meilleure façon de faire des économies.

D'ailleurs, j'ai une question à poser au Gouvernement - M. le ministre vient de s'absenter, mais M. le secrétaire d'État pourra peut-être me répondre. En deuxième lecture du texte relatif à la santé publique, nous avons, contre la volonté du Gouvernement et sur un amendement de M. Bur, voté la suppression des distributeurs de sodas et de friandises dans les établissements scolaires. Quelle sera la position du Gouvernement au Sénat sur cette disposition ? Cette interdiction sera-t-elle maintenue ? Cela me semble s'imposer compte tenu de ce qu'on sait sur la prévalence de l'obésité chez les jeunes, qui débouchera, en outre, lorsqu'ils vieilliront sur des risques de maladies cardiovasculaires.

Sur le cancer, nous savons qu'une directive portant sur l'étude d'un certain nombre de molécules - et ce nombre est plutôt faible au regard de toutes les molécules qui pourraient être incriminées - est actuellement débattue au niveau européen. Or, jusqu'à présent, notre gouvernement est plutôt intervenu, sous pression de l'industrie chimique française, pour réduire la portée de cette directive. Alors, on nous parle de santé publique, on nous dit qu'il faut maîtriser les dépenses de santé. Mais, lorsque le lobby de l'industrie chimique s'en mêle, tous ces objectifs sont immédiatement oubliés. On cède et on ne développe pas de réelle politique de prévention.

Avec l'amendement n° 7544, nous proposons que les caisses primaires d'assurance maladie arrêtent chaque année un plan d'action dans le domaine de la prévention, associant la médecine libérale, la médecine du travail et la médecine scolaire. C'est une disposition importante si l'on veut coordonner nos politiques de prévention. On ne peut pas vouloir lutter contre le diabète et installer des distributeurs de sodas dans les collèges, comme on ne peut vouloir réduire le nombre des arrêts de travail et ne pas chercher à en supprimer les causes.

J'espère que cet amendement sera voté, même si je ne suis plus parmi vous - je suis en effet obligée de vous quitter très bientôt. Mais je tenais à insister sur l'intérêt fondamental d'une coordination entre les différents niveaux de notre politique de santé, et j'aimerais que cet amendement soit accepté par le Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission les a repoussés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le secrétaire d'État, il est inacceptable que vous ne répondiez pas aux questions qui vous sont posées. La moindre des politesses, entre citoyens, est de répondre lorsqu'une question est posée ! Vous avez certainement une réponse. Pourriez-vous nous la communiquer, au lieu de dire simplement que vous rejetez nos amendements ? Il ne faut pas se moquer du monde ! Nous n'avons pas l'habitude d'être traités ainsi !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Monsieur Gremetz, je vous rappelle, sans animosité aucune, l'intérêt que je porte au débat parlementaire. À la question qui nous est posée, qui porte sur la prévention, nous avons eu maintes fois l'occasion de répondre. Nous pouvons en débattre aussi souvent que vous voulez, mais je vous indique que le projet de loi relatif à la politique de santé publique sera examiné en deuxième lecture par le Sénat la semaine prochaine, ce qui donnera à M. Douste-Blazy l'occasion de s'exprimer sur ce sujet. À cette occasion, le Gouvernement aura la même position que celle qui était la sienne dans cet hémicycle.

En ce qui concerne nos débats, monsieur Gremetz, ma position est constante. Nous acceptons de débattre avec vous des amendements portant sur des questions de fond. Mais le sujet que vous abordez concerne la santé publique et c'est pour cette raison que j'ai émis un avis défavorable à ces amendements. Pour autant, je le répète, à chaque fois que vous souhaiterez un débat de fond, nous vous donnerons satisfaction.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour répondre au Gouvernement.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le secrétaire d'État, notre débat n'est pas sans rapport avec le projet de loi relatif à la politique de santé publique. Notre collègue vous a interrogé sur la présence de distributeurs de boissons sucrées dans les établissements scolaires. Pour ma part, je tente - sans trop insister - d'aborder avec vous la loi Évin. Je vous pose une question : l'absence de réponse du Gouvernement ne risque-t-elle pas de fragiliser notre dialogue ?

Souvent, vous nous indiquez que vous êtes d'accord avec nous sur le fond, que vous voulez améliorer la politique de santé publique et que vous êtes là pour répondre à nos questions, mais vous ne répondez pas à deux questions d'actualité. Ce sont des questions simples et qui ne nécessitent pas une élaboration politique très fine. Nous attendons que le Gouvernement s'engage sur deux dispositions symboliques en matière de santé publique.

Premièrement, la question des distributeurs de boissons sucrées dans les établissements scolaires va être posée dans les jours qui viennent : nous souhaitons que le Gouvernement nous éclaire sur ce que sera sa position.

Deuxièmement, un certain nombre de parlementaires se mobilisent contre la loi Évin : il serait intéressant que le ministre de la santé nous dise en face qu'il est dans le camp de ceux qui se battent pour la santé publique. Cela donnerait plus de crédibilité à ce projet de loi !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Concernant les distributeurs de boissons sucrées, je suis formel : je ne veux pas, en tant que ministre de la santé et de la protection sociale, de distributeurs de boissons sucrées dans les collèges. Leur incidence sur l'obésité des jeunes est absolument effrayante. Je vous invite, à ce propos, à aller voir au cinéma un film qui vient de paraître, et qui concerne les fast-foods, car ce qu'il nous révèle est inouï.

Mme Martine Billard. Je ne mange jamais au fast-food !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Lutter contre l'obésité est aujourd'hui une nécessité, et l'une des premières choses à faire est de ne pas proposer des boissons sucrées dans les collèges et les lycées. C'est la raison pour laquelle, monsieur Le Guen, je suis favorable à la loi Évin et j'entends la faire respecter.

M. Jean-Marie Le Guen. Votre réponse donne de la force à notre débat !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7544.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je demande une suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures.)

M. le président. La séance est reprise.

Je mets aux voix l'amendement n° 7548.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7547.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7545.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7549.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7550.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7546.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 352 à 363.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je vous rappelle, monsieur le ministre, qu'un décret promulgué par le gouvernement Jospin le 1er février 2001, confirmé par un arrêt du Conseil d'État, prévoit dans son article 12 qu'un travailleur ne peut être affecté à des travaux l'exposant à « des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction » que s'il a fait l'objet d'un examen préalable par le médecin du travail et si la fiche d'aptitude atteste qu'il ne présente pas de contre-indication médicale à ces travaux ou à l'exposition à ces risques. Faute de pouvoir abroger ce décret, cet amendement vise à instaurer un dispositif permettant d'évaluer le degré d'exposition aux risques que comporte un poste de travail pour le salarié, que ce soit dans l'industrie ou dans le secteur des services ou des nouvelles technologies.

Les menaces de sélection génétique qui pèsent sur le monde du travail sont peu connues du grand public. Elles sont pourtant bien réelles, et la revendication d'abolir l'obligation de se soumettre à des examens génétiques dans le but d'obtenir ou de conserver un emploi ne relève pas de la paranoïa. C'est dans cet esprit qu'un collectif de syndicats et d'associations de médecins du travail, ainsi que la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés, la FNATH, ont introduit devant le Conseil d'État un recours en annulation de cet article 12. Non content de rejeter leur requête par un arrêt rendu le 9 octobre 2002, le Conseil d'État précise que « les médecins du travail disposent de plusieurs éléments d'ordre génétique, comportemental ou historique pour apprécier les risques particuliers que courent individuellement les salariés à être exposés à des cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction ».

Les risques de discrimination, de sélection et d'exclusion contenus dans ces textes sont singulièrement inquiétants, outre qu'ils révèlent une constante dans la gestion de l'emploi par les entreprises : éliminer tous les individus, salariés actuels ou futurs, qui n'entrent pas dans les normes.

Alors que les tests génétiques sont interdits, pour le moment du moins, dans le domaine assurantiel, cet acquis s'arrête aux portes de l'entreprise. Il est pourtant inacceptable de se livrer à une sélection des personnes d'après des prédispositions supposées, surtout quand on sait que les tests prédictifs sont d'une valeur scientifique contestable. On pourra cependant utiliser la carte génétique des salariés pour écarter tous ceux qui ont des antécédents familiaux. Pire, ces antécédents pourraient fort bien être explicitement indiqués sur la carte à puce du dossier médical partagé !

Si on suit les prescriptions du Conseil d'État, le médecin du travail devrait donc, par exemple, écarter d'un emploi exposé aux radiations ionisantes toutes les femmes ayant des antécédents familiaux de cancers du sein. Sous prétexte de protéger les salariés contre tout risque CMR, ces textes promeuvent une logique de sélection, et introduisent dans le monde du travail des principes d'individualisation et de discrimination selon l'état de santé, tout en exonérant le patronat de tout souci de prévention et de sécurité collectives. Un système qui aboutit à rechercher et écarter les travailleurs qui présenteraient un surrisque médical traduit à mon sens une conception dévoyée de la santé au travail. Il est cependant conforme au droit français. Cette faculté ouverte aux médecins du travail d'établir une fiche d'aptitude des salariés est en effet une spécificité que la France partage avec la Belgique, et traduit de fait une logique de sélection. C'est la même logique qui a poussé en 1977 les pouvoirs publics à fixer par décret la limite d'exposition à l'amiante à deux fibres par cm3 et à demander aux médecins du travail de certifier que les salariés concernés ne présentent aucune contre-indication médicale à l'inhalation de poussières d'amiante ; or il était établi depuis 1973 qu'une telle norme est insuffisante pour protéger les salariés contre le cancer, et l'épidémiologiste Marcel Goldberg prévoit entre 50 000 et 100 000 morts dues à l'amiante dans les vingt prochaines années.

Les éthers de glycol, qui sont concernés au premier chef par le fameux décret, risquent de provoquer la même hécatombe. Je le répète solennellement, car ce n'est pas la première fois que je le dis : on peut s'attendre à un scandale de même ampleur à propos des éthers de glycol, dont on connaît parfaitement la nocivité. Le scandale sera d'autant plus grand que leur emploi est bien plus étendu que celui de l'amiante, puisqu'on en trouve dans des produits de consommation courante, tels les peintures ou les produits de beauté, et cela alors qu'il existe des produits de substitution.

Les pouvoirs publics persistent dans leur refus d'interdire en milieu industriel l'emploi des éthers incriminés, de série P, reconnus toxiques, alors même qu'ils viennent encore d'allonger la liste des dérivés proscrits pour la consommation. Ces molécules chimiques provoquent troubles sexuels, infertilité, cancers et graves malformations fœtales. L'Association des victimes des éthers de glycol, l'AVEG, qui réunit des malades et des parents d'enfants malformés, estime qu'un million de personnes ont été exposées aux éthers contenus dans les peintures, vernis, encres et produits de nettoyage.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Elle a rejeté ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 352 à 363.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. Maxime Gremetz. Il est honteux que le Gouvernement ne daigne pas répondre sur un sujet aussi grave !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je veux bien vous expliquer directement, monsieur Gremetz, pourquoi cette disposition est inutile à mes yeux. En effet, il appartient déjà au médecin du travail, dans le cadre des missions qui sont actuellement les siennes, de proposer à l'employeur des mesures préventives, qu'elles soient individuelles ou collectives, dans l'intérêt de la santé des salariés. Il peut en informer les représentants du personnel, à l'occasion en particulier des réunions des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail auxquels ils participent.

La réforme en cours de la médecine du travail permettra en outre aux médecins du travail de consacrer davantage de temps à leur activité en milieu de travail, et de contribuer plus efficacement à la prévention à la source des risques professionnels.

Il n'est, en revanche, absolument pas envisageable de faire trancher par l'inspecteur du travail les différends nés de l'application de mesures de prévention adaptées à telle ou telle situation particulière. La mission de celui-ci est en effet de contrôler le respect des dispositions réglementaires, et non de se substituer à l'employeur dans le choix des mesures préventives. Laissons aux acteurs de la prévention en entreprise le soin de définir eux-mêmes les mesures adaptées aux situations particulières dès lors qu'elles sont conformes à la réglementation applicable.

Je tiens également à vous dire, monsieur Gremetz, puisque vous avez parlé des éthers de glycol, que si l'emploi de certains produits s'avérait dangereux, le ministère de la santé serait le premier à rechercher toute la transparence en ce qui concerne ce risque.

Sachez enfin qu'en matière de médecine du travail, nous avons lancé avec M. Borloo un chantier de réflexion sur la santé au travail, qui pourra ouvrir sur une négociation.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Nos préoccupations, monsieur le ministre, prennent leur source dans les très nombreuses études, tant nationales qu'internationales, qui, depuis quelques années, font clairement état de la nocivité des éthers de glycol. Or on sait que ces produits continuent d'être abondamment utilisés, puisqu'ils entrent dans la composition de produits de grande consommation tels que la peinture - tout le monde utilise la peinture - ou les produits de beauté. On ne parle plus là de la santé en entreprise : on parle de risques auxquels est soumis l'ensemble de la population française.

Ce qui me met particulièrement en colère dans cette affaire, moi qui connais d'expérience les risques de l'amiante, c'est qu'on est en train de vivre le même phénomène : tout le monde sait, et personne ne veut le reconnaître. Là encore, on va laisser la situation s'aggraver, au point qu'on sera bien obligé de la prendre en compte, mais avec quinze ans de retard. Et tout ça parce que les industriels, qui pourraient utiliser des produits de substitution, comptent bien auparavant écouler leurs stocks, aussi longtemps qu'on ne leur demande pas un peu vigoureusement d'arrêter !

Si ce n'est pas là le moment de décider une mesure de santé publique profitable à toute la population, alors je ne comprends plus.

M. le président. L'amendement n° 7551 rectifié n'est pas défendu, non plus que l'amendement n° 7614.

Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 6534 à 6548.

La parole est à M. Alain Claeys.

M. Alain Claeys. Ces amendements concernent l'hôpital et, plus précisément, la tarification à l'activité.

Comme nous avons eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises, on ne peut pas sérieusement parler de la réorganisation des soins sur notre territoire sans inclure l'hôpital. Or, le Gouvernement a décidé de mettre en application le plan « Hôpital 2007 » préalablement à la discussion de ce projet de loi relatif à l'assurance maladie.

Je me focaliserai sur un seul sujet : la tarification à l'activité. Nous devons éviter tout non-dit ou toute incompréhension entre nous : nous sommes d'accord pour estimer que le budget global n'était plus opérationnel et qu'il ne devait pas perdurer.

En 1991, dans la loi hospitalière, et en 1999, dans la loi sur la CMU, nous avions introduit la mise en œuvre expérimentale de la tarification à la pathologie.

Il est aujourd'hui question de la tarification à l'activité, qui doit concerner la médecine, l'obstétrique et la chirurgie, le reste relevant des missions d'intérêt général de l'hôpital. Or, nous contestons sa mise en œuvre, pour deux raisons.

Première raison : elle se fera sur une enveloppe unique pour les cliniques privées et l'hôpital, ce qui pénalisera l'hôpital et créera un risque de sélection des malades.

Deuxième raison : nous craignons que les missions d'intérêt général restant à l'hôpital ne deviennent une variable d'ajustement et ne soient, en définitive, reniées.

Sans remettre en cause le principe même de la tarification à l'activité, nous contestons donc deux points : la mise en œuvre de cette tarification et, à travers elle, le risque d'une remise en cause des missions de service public de l'hôpital.

J'ajoute que la tarification à l'activité ne peut pas régler à elle seule, sur nos territoires, les problèmes des hôpitaux de proximité et des CHU-CHR, et elle risque d'aggraver les inégalités territoriales.

Monsieur le ministre, partagez-vous ces craintes ? Quelle garantie pouvez-vous nous apporter concernant les hôpitaux de proximité ? Les hôpitaux sont-ils techniquement en mesure de mettre en place la tarification à l'activité. Ont-ils tous une comptabilité analytique ?

Le groupe socialiste juge nécessaire de modifier les conditions d'application de la tarification à l'activité pour l'hôpital et de mettre en place une véritable négociation sur les conditions d'application de la T2A, dans la perspective d'une meilleure offre de soins sur l'ensemble du territoire. Tel est l'objet de nos amendements.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. J'irai dans le même sens que M. Claeys.

Il est clair que nous ne sommes pas opposés au principe même de la tarification à l'activité, mais, comme beaucoup d'autres instruments, celle-ci pourrait aboutir au résultat inverse de celui qui est recherché si elle était mise en œuvre sans tenir compte des conditions d'activité des personnels hospitaliers et de leurs souhaits, notamment des médecins.

La tarification à l'activité a déjà un défaut majeur, celui de s'exercer dans une enveloppe fongible. Nous sommes quant à nous partisans d'une distinction entre la tarification à l'activité dans les établissements publics et la T2A dans les établissements privés. Et même s'il est parfois nécessaire d'opérer un rééquilibrage, il doit se faire, selon nous, dans le cadre de l'ONDAM, mais pas dans une enveloppe fongible.

Par ailleurs, les missions d'intérêt général devraient représenter au moins 50 % des budgets hospitaliers. Sur cette approche, un consensus pourrait aujourd'hui, me semble-t-il, se dégager avec l'ensemble des praticiens hospitaliers.

En allant plus loin sur le principe même de la tarification à l'activité, il est néanmoins clair que le système pourra être utilisé par certains gestionnaires, une fois passés les problèmes de mise en application dont parlait à l'instant M. Claeys. Les médecins hospitaliers sont en effet surchargés par la mise en place des dossiers médicaux, qu'on veut mettre sur Intranet, et par des tâches administratives. Outre le surcroît de travail auquel va aboutir cette tarification à l'activité, il est clair que la nature même du travail hospitalier risque de changer.

En outre, on entend certain directeur général, ou directrice générale, dire à tel ou tel médecin dans tel service, déjà confronté à des difficultés dès la première année : « Votre budget ne correspond pas à l'activité passée, on va vous en rogner une petite partie » ! On connaît le problème : c'est arrivé aux consultations du CHU de Toulouse !

Par conséquent, si la T2A n'était pas largement négociée ni utilisée par les gestionnaires de l'hôpital comme un instrument d'efficience, mais comme un but en soi, à savoir l'augmentation de l'activité pour obtenir plus de moyens, le système risquerait de se retourner contre l'état d'esprit qui prévaut aujourd'hui parmi les médecins hospitaliers.

Bien rares sont les praticiens hospitaliers qui ne sont pas disponibles, qui ne travaillent pas beaucoup, qui ne sont pas à l'écoute de leurs malades ni enthousiastes sur l'idée qu'ils se font du service public hospitalier : l'excellence technique, mais aussi la prise en charge globale des malades.

Si c'est le mauvais côté du paiement à l'acte - à savoir la recherche de rentabilité, qui prévaut déjà chez certains médecins libéraux - qui est privilégié par certains gestionnaires, la réforme ira à l'encontre de l'état d'esprit qui prévaut actuellement dans l'hôpital public.

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, vous devriez prendre en considération la nécessité de négocier, pied à pied, en permanence, les conditions d'application de la T2A.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements, pour des raisons très simples.

Premier point : la négociation existe déjà. Le code de la sécurité sociale prévoit que les grandes décisions liées à la tarification à l'activité sont prises après consultation des fédérations. Je vous rappelle d'ailleurs que toutes les fédérations, publiques et privées, sont en faveur de la T2A. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Gérard Bapt. Pas toutes !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Deuxième point : s'agissant de la « mission d'accompagnement des établissements de santé pour la mise en place de cette réforme », demandée par vos amendements, une mission T2A existe déjà, puisque l'article 23 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 a créé cette mission permanente d'audit hospitalier.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Les mesures proposées par les amendements ont déjà été prises par voie réglementaire. En effet, soucieux de conduire cette réforme majeure pour la modernisation des établissements de santé dans la plus large concertation, le Gouvernement a, depuis l'origine, mis en place les instances permettant cette concertation.

C'est ainsi que l'arrêté du 20 novembre 2002, qui a créé la mission opérationnelle chargée d'élaborer la réforme, d'en conduire la mise en place dans les établissements, a créé en même temps un comité de suivi et de concertation réunissant les représentants de l'hospitalisation publique et privée, lequel a été consulté à toutes les étapes importantes de l'élaboration du projet.

Pour ma part, j'ai décidé de renforcer cette concertation et ces échanges avec les acteurs hospitaliers en modifiant, par un arrêté du 25 mai 2004, l'arrêté de 2002. Cette modification porte sur trois points très importants qui rejoignent les propositions des amendements et que le rapporteur a soulignés à l'instant.

D'abord, le comité de suivi et de concertation est dorénavant ouvert à l'ensemble des représentants syndicaux et institutionnels des établissements de santé. Au sein de cette instance, seront débattues et concertées toutes les modalités de mise en œuvre de la réforme.

Ensuite, une mission d'audit et d'accompagnement est créée pour aider les établissements qui en feraient la demande à s'adapter à la réforme. Cette mission se rendra sur place et pourra réaliser des audits permettant de repérer les points forts et les points faibles d'un établissement et d'élaborer des préconisations concrètes.

Enfin, est créé un comité d'évaluation, associant des experts et des acteurs hospitaliers, pour mesurer les effets de la réforme en tirant parti des expériences étrangères, en particulier allemandes, et proposer éventuellement des améliorations au dispositif.

Comme vous le voyez, le Gouvernement est tout à fait conscient des difficultés d'adaptation que rencontrent certains établissements pour appliquer la réforme, et se donne les moyens de prendre en compte et de traiter ces difficultés dans la concertation et l'échange permanent avec les acteurs hospitaliers.

Si cela est nécessaire, il apportera les adaptations et les correctifs qui s'imposeront, par exemple pour tenir compte des sujétions particulières du service public, du poids des charges de structure des établissements ayant réalisé des efforts d'investissement importants, de la nécessité de maintenir un service hospitalier de proximité, notamment dans les zones isolées, ou encore de la préservation d'une capacité d'innovation dans les établissements.

Monsieur Claeys, vous avez raison de dire que la tarification à l'activité ne permettra pas de régler toutes les difficultés de financement des établissements de proximité. Je pense, en particulier, aux urgences, aux soins de suite, aux soins de gériatrie, à la médecine interne, à la psychiatrie, autant de secteurs qui ne sont pas de la haute technologie, mais qui doivent être pris en compte dans les missions d'intérêt général.

Pour finir, monsieur Bapt, je suis tout à fait d'accord pour que soit fixé un ordre de grandeur de 50 % pour la tarification à l'activité. C'est d'ailleurs ce que les Allemands ont retenu. Mais ce sujet est d'ordre réglementaire et nous l'avons déjà pris en considération.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je constate un certain nombre d'inflexions de la part du ministre par rapport à son prédécesseur. Elles vont dans le bon sens, notamment en matière de réforme de l'hôpital, en ce qui concerne la gouvernance.

Il me semble que vous avez un jour déclaré, monsieur le ministre, que l'idée d'une enveloppe commune et de la convergence des tarifs pour le secteur privé et le secteur public de l'hospitalisation vous semblait dangereuse. Pouvez-vous nous le confirmer ?

Les salariés du public craignent que, dans un tel cadre, on n'aille vers une privatisation et que, pour des raisons qui ont déjà été exposées, la comparaison ne leur soit défavorable. Bien qu'insuffisantes, les comparaisons public-public sont intéressantes...

M. Pierre-Louis Fagniez. Tout à fait !

M. Jean-Marie Le Guen. ...mais tout ce qui pousse aux comparaisons public-privé nous fait retomber dans un débat idéologique et bloque toute perspective de réforme.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ne tombons pas, en effet, dans un débat idéologique.

Je ne crois pas avoir écrit cela, mais il n'est pas illégitime de comparer, pathologie par pathologie, un certain nombre de cas. Vous avez raison, on ne peut pas comparer le secteur public et le secteur privé, sauf sur quelques sujets précis, parce que l'hôpital public a des missions d'intérêt général que l'hôpital privé n'a pas.

Il me paraît très important d'aller vers la tarification à l'activité. Comme l'a dit M. Claeys, on ne veut pas revenir à la dotation globale, mais cela ne doit pas être l'alpha et l'oméga du financement d'un établissement public hospitalier.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Nous n'avons pas le même point de vue, non pour des raisons idéologiques mais parce que nous avons rencontré et écouté avec attention les personnels hospitaliers, toutes catégories confondues, médecins et chirurgiens compris.

La tarification à l'activité est une réforme indispensable et compliquée. Ils nous ont dit qu'ils n'accepteraient pas qu'un tel changement ne soit pas précédé d'un grand débat national.

Pour les malades et pour le personnel soignant, l'hôpital public est dans une situation explosive. Toutes les personnes auditionnées par la commission d'enquête et par la mission d'information sur la canicule ont rendu hommage aux personnels hospitaliers. Or ceux-ci veulent savoir ce que la réforme va changer pour les malades, pour eux et pour le service public hospitalier auquel ils sont très attachés. Ils considèrent que la tarification à l'activité en vertu de laquelle plus on fait d'actes, plus l'hôpital reçoit d'argent, va conduire les hôpitaux à adopter des critères de rentabilité du privé.

Encouragé par certaines campagnes, on veut comparer le coût de tel acte dans le privé et dans le public, sans tenir compte du fait que les cliniques privées, qui n'ont pas d'obligations de service public, peuvent choisir leurs pathologies et renvoient vers l'hôpital public les patients qu'elles ne peuvent plus traiter.

Cette proposition ouvre donc la voie à un système dans lequel, pour avoir les moyens de se développer et de soigner correctement, l'hôpital public devra adopter des critères de rentabilité.

Je le répète, ce n'est pas moi qui le dis, mais les professionnels que nous avons rencontrés. Ils réclament un grand débat national et la suspension de l'examen du projet. Certes, une réforme de l'hôpital est nécessaire, mais dans d'autres conditions. Nous n'approuvons pas votre démarche, tant du point de vue de la forme que de celui du fond.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Louis Fagniez.

M. Pierre-Louis Fagniez. J'ai été très sensible aux propos de MM. Claeys et Bapt sur le fait qu'il convient, en matière de tarification à l'activité, de distinguer secteur public et secteur privé. M. le ministre nous a rassurés en indiquant qu'il prenait en compte leurs spécificités.

Monsieur Gremetz, il se trouve que, moi aussi, je connais un peu le service public hospitalier. J'ai constaté que l'évocation d'une tarification à l'activité a entraîné immédiatement une mobilisation de tous les acteurs, en particulier des infirmières qui ont vu là une mesure d'efficacité dans la gestion de la prise en charge des malades. On se plaint en effet dans beaucoup d'hôpitaux publics, en tout cas dans ceux qui sont très actifs, de ne pas pouvoir répondre à la demande. À cet égard, le budget global avait un effet très pervers puisqu'on avait intérêt à garder un malade jusqu'au lundi plutôt que de le laisser sortir le samedi. Aujourd'hui, les infirmières nous disent qu'elles se sont, avec les médecins, réorganisées, non pas pour « faire de l'activité », mais pour répondre à la demande.

Soyez donc rassuré, monsieur Gremetz.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 6534 à 6548.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 6549 à 6563.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Ces amendements sont défendus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 6549 à 6563.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 6504 à 6518.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous avons débattu à plusieurs reprises de sujets dont on nous disait qu'ils relevaient tantôt de la loi de santé publique, tantôt de la loi sur l'assurance maladie.

Soyons clairs, certains sujets comme la sécurité sanitaire, l'environnement - l'eau et l'air -, le comportement alimentaire, le tabagisme et l'alcoolisme relèvent bel et bien de la santé publique. Mais dans le fameux projet relatif à la santé publique, on a aussi fixé des objectifs dits de santé publique qui relèvent plutôt de politiques publiques de santé, dans la mesure où elles ne sont pas à mener simplement avec les moyens de l'État - réglementation et information du public - mais en liaison avec l'ensemble des soignants, lesquels appliquent une politique coordonnée intégrant de la prévention.

On évoque les quarante-sept objectifs prioritaires de santé publique, mais on oublie de nous dire quel sera le lieu d'animation de ces politiques, sachant qu'elles ne peuvent relever uniquement de l'État, qui confie à l'assurance maladie la gestion du risque par pathologie. Or il y a un véritable fossé entre l'État, qui n'est pas suffisamment outillé pour piloter la médecine de ville ou la médecine hospitalière, et l'assurance maladie, qui n'est pas non plus parfaitement outillée pour mettre en place les différentes politiques de prévention ou de réglementation.

Je ne dis pas que les politiques de santé publique doivent être uniquement menées par pathologie, ce qui est un défaut de votre texte relatif à la santé publique. Elles doivent l'être aussi par niveau de population, c'est-à-dire par une « approche de santé communautaire ». En tout état de cause, s'agissant de grandes pathologies comme la maladie d'Alzheimer, le diabète, les accidents vasculaires cérébraux, que nous évoquerons à l'article 3, c'est-à-dire les maladies répertoriées au titre des affections de longue durée, nous proposons la tenue de conférences nationales pour examiner annuellement, sous l'autorité du ministre, les moyens consacrés par l'État, d'un côté, et l'assurance maladie, de l'autre, à telle ou telle pathologie, et cela sur la base d'un consensus scientifique.

Par exemple, qui va relever le défi posé par la maladie d'Alzheimer ? Le professeur Debré nous a rappelé que, d'ici à quelques années, plus d'un million de nos concitoyens seront touchés par cette dégénérescence. Comment lutter ? Allons-nous laisser l'assurance maladie ou la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie créer quelques centaines de milliers de places pour les personnes dépendantes ? Allons-nous mettre en place une politique de dépistage précoce et d'animation médico-sociale au plus près du terrain, dont on sait qu'elle est sans doute l'une des mesures les plus efficaces pour lutter contre l'évolution négative de la maladie et pour retarder au maximum cette évolution ? Qui arbitrera entre les sommes en jeu, entre les préconisations différentes et les différents acteurs qui auront des intérêts contradictoires ?

Il est donc nécessaire de disposer, pour ce type de pathologie, de lieux stratégiques où s'élaborent des stratégies coordonnées permettant de mettre en œuvre le médical, le médico-social, le soin, la prévention, la réglementation si nécessaire, de façon à donner l'impulsion qui soit la plus efficace possible.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Défavorable également...

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, le sujet mériterait tout de même un début de réponse de la part du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il suffit de le demander, monsieur Le Guen ! (Sourires.)

Je ne pense pas tout à fait comme vous dans la mesure où le Gouvernement a déjà engagé des actions visant à améliorer la prise en charge des personnes atteintes de pathologies lourdes, notamment des affections de longue durée.

Je rappelle que les personnes en ALD, qui sont des utilisateurs importants du système de soins, bénéficient pleinement, et à juste titre, de la solidarité nationale, et que 55 % des dépenses de l'assurance maladie concernent les personnes en ALD. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui a prévalu à la réforme de la prise en charge des patients atteints d'une ALD, amorcée lors de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, visant à améliorer la coordination des soins autour du patient, poursuivie et complétée par l'article 3 du présent projet de loi. Nous en reparlerons dans quelques jours.

Ainsi, afin d'améliorer la coordination des soins de ces patients et leur prise en charge, l'article 3 du projet de loi renforce le protocole de soins mis en place par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, de même que le périmètre adéquat de prise en charge des soins par l'assurance maladie.

Cet article donne également compétence à la Haute autorité pour déterminer des recommandations quant aux actes et prestations ouvrant droit à exonérations et quant à la durée du protocole.

Le Gouvernement s'est engagé dans une politique de développement des réseaux de santé, dont a parlé M. Claeys ce matin, dont l'intérêt majeur est d'assurer la coordination de la prise en charge des patients atteints de pathologies lourdes, et notamment chroniques, telles que le diabète.

Enfin, un plan national de prise en charge des maladies rares et des maladies chroniques est en cours d'élaboration par mes services. Dès lors, au regard des actions déjà engagées par le Gouvernement, il ne semble pas opportun de mettre en place des conférences nationales sur la politique de gestion des risques liés à des pathologies lourdes.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, le problème que je pose n'est pas celui de l'amélioration de la prise en charge sociale des pathologies - nous en reparlerons à l'article 3 - mais celui de l'argent public.

Dans dix ans, un million de personnes seront atteintes de la maladie d'Alzheimer. Trois stratégies sont possibles.

Imaginons que le département des Alpes-Maritimes se retrouve, demain, avec 5 000 cas de personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Il sera alors amené à créer 5 000 places en maisons de retraite pour personnes gravement dépendantes. Il consacrera donc tout l'argent de la CNSA à la création de ces 5 000 places.

Dans le même temps, ceux qui ont en charge la politique de santé publique pourront vouloir développer la politique du médicament, estimant que certains médicaments retarderont l'arrivée de la maladie d'Alzheimer.

D'autres encore voudront faciliter la prise en charge du diagnostic précoce et développer des processus d'accompagnement qui concernent le psychosensoriel, l'animation, la mémorisation, les exercices de mémoire, bref des choses qui ne sont pas du tout médicales mais qui nécessiteront l'embauche de plusieurs dizaines de personnes chargées de faire de l'animation et de l'éducation pour éviter que la personne concernée ne sombre petit à petit dans la maladie et dans la dépendance.

Qui arbitrera entre ces différentes préconisations ? Aurons-nous les moyens financiers de créer à la fois un million de places pour le million de personnes qui sera dépendante, de faire la politique de dépistage nécessaire et de prévoir les politiques de prévention, c'est-à-dire l'animation médico-sociale nécessaire et de mettre en place les politiques du médicament ? Je n'en sais rien. Ne peut-on pas mettre en place des structures qui feraient un arbitrage entre ces différentes politiques, qui les harmoniseraient ? Cela éviterait que tel département ne s'engage dans une voie tandis que tel autre partirait dans un autre sens.

M. Daniel Vaillant. Absolument !

M. Jean-Marie Le Guen. Pour le moment, il n'existe pas de lieu d'arbitrage entre ces politiques. Certes, la Haute autorité fera peut-être demain des recommandations d'ordre scientifique, mais il n'y a pas pour l'instant d'arbitrage médico-social. Il est nécessaire de réunir des gens d'horizons divers, des acteurs de la CNSA, de l'assurance maladie, de la MSA, de l'État, des départements, afin qu'ils puissent définir ensemble les axes et les stratégies d'une politique différente.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Monsieur Le Guen, je pensais que vous aviez compris ce que nous souhaitions faire.

Je ne pense pas que c'est en organisant plusieurs conférences nationales, par exemple une sur les accidents vasculaires cérébraux, une autre sur la maladie d'Alzheimer, ou encore une autre sur le cancer, qu'on fera une vraie politique de santé. Nous allons mettre en place une conférence nationale de santé réunissant tous les acteurs, les décideurs en particulier, les usagers, les professionnels, mais aussi des élus, et un Haut comité de santé publique regroupant des professionnels de santé publique. Avec ces deux instances, nous pourrons définir une politique de santé publique.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Le ministre a dit bien mieux que moi ce que je voulais dire.

M. Jean-Marie Le Guen. Quelle humilité !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Pour traiter des problèmes dont vous parlez, monsieur Le Guen, il importe particulièrement d'articuler politique de santé publique et assurance maladie. C'est ce que feront la conférence nationale de santé et la Haute autorité, sans qu'il soit besoin de créer une autre structure qui pourrait prêter à confusion.

M. le président. L'Assemblée me semble suffisamment informée...

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je demande la parole. Vous m'oubliez totalement, à ce que je vois.

M. le président. Monsieur Gremetz, vous ne vous faites jamais oublier !

Vous avez la parole.

M. Maxime Gremetz. Voilà une affaire bien compliquée.

Je rappelle que 52 % des dépenses de santé concernent l'hôpital public. Je regrette qu'à l'occasion de cette réforme on n'ait pas de grand débat sur l'hôpital public. Peu de dispositions en effet le concernent.

Par ailleurs, j'observe que la commission de la transparence issue de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé n'existera plus.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Elle a été réorganisée !

M. Maxime Gremetz. Pourtant, elle accomplit un travail efficace...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Naturellement !

M. Maxime Gremetz. ...et je vais vous le démontrer en prenant un exemple.

Cette commission vient de rendre son verdict sur une affaire concernant les laboratoires Pfizer et Merck. Ce verdict est sévère : l'amélioration du service médical rendu par ces anti-inflammatoires d'un genre nouveau est mineure, d'où la mauvaise note attribuée, soit 4 sur 5.

M. le président. Monsieur Gremetz, êtes-vous sûr que votre intervention concerne bien les amendements identiques nos 6504 à 6518 ?

M. Maxime Gremetz. Oui, monsieur le président.

Il ne faut pas supprimer des organismes qui nous permettent de déceler l'efficacité ou la non-efficacité d'un médicament.

Rappelons qu'en 2001 les anti-inflammatoires en question prescrits aux patients souffrant d'arthrose et présentés comme médicaments miracles - à la différence des anti-inflammatoires classiques, ils étaient censés éviter les effets secondaires digestifs - avaient déjà récolté une note moyenne de 3 sur 5. « Leur efficacité est comparable aux autres anti-inflammatoires et leur tolérance présente un mieux mais minime », résume le secrétaire général de la commission de la transparence, François Meyer.

En clair, les risques d'ulcères ou d'hémorragies sont moindres, mais pas éliminés pour autant.

Ces médicaments, qui ont généré un chiffre d'affaires de 223 millions d'euros en 2002, sont l'équivalent d'un anti-inflammatoire traditionnel.

Je précise que l'article que je viens de vous citer est issu du journal Le Parisien.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 6504 à 6518.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 340 à 351.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Ces amendements visent à renforcer l'information du consommateur sur la composition des produits agroalimentaires, pour responsabiliser davantage les industriels. En effet, la nutrition étant l'un des déterminants majeurs de la santé humaine, il faut que le principe de précaution s'applique, de même que le principe de sécurité.

Même si notre secteur agroalimentaire est tout à fait remarquable, les problèmes existent. C'est pourquoi nous proposons d'introduire les deux alinéas suivants :

« Les produits industriels d'origine industrielle devront afficher sur chaque emballage le nombre de calories, le contenu en graisses saturées et non saturées ainsi que la teneur en sodium de chaque ration alimentaire.

« Les conditions dans lesquelles devra être établie l'information sur le produit sont fixées par décret. »

Ces amendements sont dictés par l'expérience. L'industrie agroalimentaire en Picardie est très développée, c'est le moins que l'on puisse dire. Mon intention n'est pas de la critiquer mais nous devons faire un effort pour protéger les consommateurs.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Le sujet est important et mérite qu'on en parle, mais dans un autre cadre, en l'occurrence celui de la discussion de la loi relative à la politique de santé publique. Cela étant, je suis pour.

La quantité de graisses saturées et insaturées contenue dans les aliments doit être indiquée, vous avez tout à fait raison. Pour ce qui est de la teneur en sodium et des calories, c'est moins important.

Le Gouvernement est prêt à déposer un amendement sur le sujet le 9 juillet au Sénat.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Compte tenu de l'engagement de M. le ministre, je retire nos amendements.

M. le président. Les amendements nos 340 à 351 sont retirés.

Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 6579 à 6593.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Pour ne pas relancer la polémique, je n'ai pas répondu à M. le ministre qui me reprochait, à cause des groupes de pilotage par grande pathologie que j'ai proposés, de vouloir segmenter l'action des politiques de santé publique.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Encore une fois, cela relève de la santé publique !

M. Jean-Marie Le Guen. Il faudra pourtant bien les créer pour suivre un certain nombre de pathologies. En tout cas, pour les ALD, ils sont absolument nécessaires.

Ce qui nous différencie, monsieur le ministre, c'est, d'une part, que vous meniez une politique de « liquidation médicalisée » - c'est la jolie expression de la Caisse nationale d'assurance maladie - programmée dans les articles 10 à 15 de votre projet de loi ; d'autre part, que vous vouliez régler les problèmes de l'assurance maladie en agissant sur les comportements plutôt que sur les structures.

De toute façon, il faudra bien mener, à un niveau ou à un autre, une politique de gestion du risque, pathologie par pathologie, même si elle ne suffit pas. Il faudra aussi des structures qui ne sont plus seulement verticales mais horizontales, c'est-à-dire qu'elles auront vocation à s'occuper des populations à risque en faisant de la promotion de la santé. Telle était notre intention en déposant ces amendements.

Vous fustigez le nomadisme médical et la surconsommation contre lesquels il faudrait lutter - c'est un des fondements de votre projet de loi -, parce qu'ils seraient à l'origine de nos problèmes financiers, et même de santé publique. En réalité, on constate une sous-consommation, ou plus exactement une consommation tardive et inappropriée des soins, par une partie de la population, qui ne sait pas utiliser au mieux le système de soins. Nous proposons donc de mettre en place localement des centres de promotion de la santé pour apprendre à ceux qui ne savent pas à se servir à bon escient de l'offre de soins : identifier les types de visite annuelle en fonction des risques selon les antécédents familiaux, l'activité professionnelle exercée ou l'âge, les dépistages à effectuer, par exemple.

Si les services de PMI fonctionnent plutôt bien, il faudrait en outre une politique de santé en direction des jeunes enfants et des pré-adolescents, en particulier auprès des milieux populaires qui n'ont pas la même éducation à la santé que les milieux plus favorisés. Cela permettrait par exemple un dépistage précoce de l'obésité - au niveau individuel et non plus collectif - des affections dentaires, avec ce que cela implique en matière infectieuse.

Le fait est qu'aujourd'hui, l'état de santé de certains adolescents est très détérioré, à tel point que l'Académie de médecine s'est inquiétée que plusieurs pathologies assez graves ne soient plus dépistées, à cause de la suppression du service militaire et de la visite médicale qui était effectuée à cette occasion. Dans certains milieux, les soins primaires ne sont pas pratiqués. Le problème est culturel et pas seulement financier.

C'est pourquoi nous proposons de créer des structures de promotion de la santé.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Rejet.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, voudriez-vous bien expliquer en quelques mots les raisons pour lesquelles vous ne voulez pas de telles structures ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. La santé publique demande de la cohérence et de l'unité ; il ne faut pas tomber dans l'« hyperspécialité », sinon le corporatisme. Et la politique se traite en globalité, sans se perdre dans les détails.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 6579 à 6593.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quatorze amendements identiques, nos 6490 à 6503.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. En France, l'alcool tue plus de 60 000 personnes par an, pour se limiter à la mortalité. Il faudrait prendre également en compte la morbidité et les dégâts sociaux que cause l'alcool dans les couples, les familles, et la violence qu'il provoque. Nous sommes confrontés à un problème majeur de santé publique, dont vous ne pourrez pas nous dire, monsieur le ministre, qu'il est traité par la loi de santé publique car, justement, il ne l'est pas.

C'est pourquoi nous devons prendre l'initiative. Notre pays est particulièrement marqué par cette pathologie lourde et il nous faut sortir de notre torpeur puisque, depuis le début des années quatre-vingt-dix et la loi Évin, il n'y a pas eu de forte mobilisation. Des actions ont été menées, notamment dans le cadre de la loi relative aux droits des malades qui a mis en place des centres d'addictologie. Ceux-ci ont permis de donner une certaine dynamique à la recherche et à l'approche médicale de ces pathologies. Mais, depuis deux ans, les moyens qui leur sont consacrés sont très faibles. Au-delà du volet budgétaire qui sera abordé au moment du projet de loi relatif au financement de la sécurité sociale, il y a les politiques structurelles à mener. Étant donné l'enracinement profond de l'alcoolisme, il serait bon d'apporter une réponse à la hauteur du défi et de mettre en mouvement non seulement les professionnels de santé et les associations, mais aussi la puissance publique et tous ceux qui veulent que la santé publique s'améliore. Nous proposons donc de tenir des états généraux de lutte contre l'alcoolisme.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je m'étonne des propos de M. Le Guen puisqu'un amendement rigoureusement identique a été discuté en deuxième lecture du projet de loi relatif à la politique de santé publique. Il a même fait l'objet d'une modification en séance qui a été approuvée par M. Le Guen. Cet amendement - c'est l'article 16 ter - a été adopté : « Le Gouvernement remet au Parlement un rapport avant le 30 juin 2005 sur les conditions de la création d'états généraux de la lutte contre l'alcoolisme. »

Vous venez pourtant de dire, monsieur le député, que le sujet n'est pas traité par le projet de loi de santé publique ! Vous comprendrez donc que je sois défavorable à vos amendements, non pour des raisons de fond, mais parce qu'ils sont déjà satisfaits.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Monsieur le ministre, le groupe socialiste entretient la confusion pour éviter d'aborder l'assurance maladie, sur laquelle il n'a rien à dire !

M. le président. Compte tenu des précisions de M. le ministre, retirez-vous vos amendements, monsieur Le Guen ?

M. Jean-Marie Le Guen. Non, monsieur le président.

Le président de notre commission des affaires sociales et rapporteur, d'habitude si prompt à réagir quand il s'agit de rapports, se tait. Proposer un rapport, comme le font nos amendements, permet de lancer le débat.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Choisissez mieux vos mots, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je les choisis à dessein, monsieur le rapporteur.

Alors que le Gouvernement a la possibilité de ne pas se contenter d'un rapport, mais d'aller plus loin et de passer à l'action, il préfère en rester à une attitude superficielle et refuse de reconnaître la nécessité de tels états généraux.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 6490 à 6503.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quatorze amendements identiques, nos 6476 à 6489.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Ces amendements visent à mettre en œuvre les prémices d'une autre politique de santé au travail.

Le secteur de la médecine du travail ne donne pas satisfaction.

Nous avons évoqué les ATMP et les pathologies liées au travail, qui ne cessent de se développer. Nous avons la conviction que notre pays doit se doter aujourd'hui d'une agence nationale de la santé au travail, afin de ne pas en rester à une gestion éclatée qui n'a, malheureusement, de paritaire que le nom, en raison de la situation sociale de notre pays.

M. Maxime Gremetz. Paritaire, c'est le patron et le patron !

M. Jean-Marie Le Guen. Je ne sais si l'on peut aller aussi loin mais, en tout état de cause, la gestion paritaire n'offre pas les conditions de la dynamique non seulement sociale, mais aussi médicale et sanitaire, que nous serions en droit d'espérer.

M. Ernest-Antoine Seillière est venu à l'Assemblée nationale - nous l'en remercions - devant la mission d'information relative à la problématique de l'assurance maladie qu'avait mise en place le président Debré. Le président du MEDEF a été très clair. Selon lui, les entreprises n'ont plus rien à voir avec les problèmes de santé ! Ces derniers dépendent entièrement de l'État, ce qui, monsieur le ministre, est une réponse à votre discours sur le paritarisme rénové. M. Seillière, avec constance, depuis deux ou trois ans, et non sans une certaine force, ne cesse de répéter que la santé relève de la seule responsabilité de l'État et que les entreprises n'en ont, quant à elles, aucune en la matière. Les employeurs ne souhaitent évidemment être présents que dans la gestion des ATMP, la branche de l'assurance maladie relative aux accidents du travail. La dégradation des conditions de santé au travail et la médecine du travail ne les concernent en aucune façon.

Les conséquences financières - le déport des maladies professionnelles et des accidents du travail sur le compte de l'assurance maladie - ont été précédemment évoquées. Mais il vaudrait mieux intervenir en amont, non seulement au travers de taxes qui seraient imposées aux entreprises particulièrement déviantes en matière de maladies professionnelles, mais également en agissant sur les conditions de travail et sur l'environnement au travail. Il est capital de mettre en place une médecine du travail digne du XXIe.

Nous avons fait l'expérience paternaliste de la médecine du travail. Les médecins concernés, par déontologie, essaient de résister aux pressions patronales, mais ils supportent difficilement le système. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que soit mise en place une agence nationale permettant la création d'un système de santé au travail.

Monsieur le ministre, vous entendre sur le sujet nous intéresserait. J'imagine - je ne l'ai pas vérifié - que vous avez repris les décrets d'application de votre prédécesseur et que la même ambiguïté préside au partage de la santé au travail entre le ministère de la santé et celui du travail. La direction de la santé au travail ne bénéficie pas d'une véritable autonomie. Elle n'est pas placée sous la tutelle du ministère de la santé mais reste toujours sous la domination du ministère du travail, qui a plutôt tendance à favoriser l'accalmie dans les relations sociales qu'à se pencher sur les problèmes de santé et à privilégier l'impératif de santé publique.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

Il existe déjà au sein de l'INVS un département de la santé au travail. Il existe également l'agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail.

M. Jean-Marie Le Guen. Il existe aussi un café au coin de la rue !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. J'aurais pu vous demander pourquoi l'agence que vous proposez, monsieur Le Guen, n'a pas été créée entre 1997 et 2002. Je ne l'ai pas fait.

Le ministre a évoqué la nécessité de rapprocher les différents ministères. Il s'agit là d'une piste intéressante, comme en témoignent tous les entretiens que l'on peut avoir sur le sujet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. La création d'une force d'expertise solide et indépendante dans le domaine de la santé au travail, sur le modèle de celle développée par les agences de sécurité sanitaire, est, il est vrai, nécessaire.

Le Gouvernement y réfléchit à la lumière du rapport d'évaluation de la loi de 1998, que je viens de recevoir. Pour autant, il ne peut pas être question de créer une agence ex nihilo puisque plusieurs organismes - M. le rapporteur l'a rappelé - effectuent déjà une mission d'expertise en santé du travail : l'INVS qui, certes, ne suffit pas, mais qui possède un département de la santé au travail, l'INRS, l'INERIS et l'agence française de sécurité sanitaire environnementale. Ces moyens exigeraient d'être articulés, voire regroupés.

La création d'une agence spécifique au milieu du travail mérite une réflexion approfondie car l'expertise en milieu de travail recoupe en grande partie et complète l'expertise environnementale, qui est appelée à se développer au sein de l'agence française de sécurité sanitaire environnementale, notamment en ce qui concerne les produits chimiques - le glycol a été évoqué, mais il n'est pas le seul produit concerné.

Les rapports américains auxquels vous avez fait allusion ce matin prouvent que nous avons tout intérêt à monter une agence comme celle que vous suggérez.

Votre proposition est bonne mais prématurée. Je n'ai reçu le rapport d'évaluation que depuis quelques jours seulement. De plus, la mission de l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques n'a pas encore rendu ses conclusions. Si je suis, pour ces raisons, défavorable à cet amendement, je n'en reconnais pas moins que l'idée est bonne.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je suis sensible, pour ma part, à cette proposition. La création d'une telle agence est nécessaire.

Toute une série d'instituts existent déjà, qui travaillent bien et qui étudient toutes ces questions. Je vous ai cité plusieurs rapports. Mais une telle agence aurait pour fonction de rassembler toutes les données et de présenter des propositions d'actions.

M. Jean-Marie Le Guen. Elle exercerait également un contrôle !

M. Maxime Gremetz. Action et contrôle : vous avez raison, monsieur Le Guen.

J'ai été moi-même membre du comité d'hygiène et de sécurité d'une entreprise. Je persiste à penser qu'il faut résoudre la question du statut des médecins du travail dans les entreprises. Tant qu'ils ne bénéficieront pas d'un statut garantissant leur indépendance, ils ne pourront pas, malgré leur bonne volonté, faire leur travail librement. J'en ai rencontré. Ils me disent combien ils sont en butte à de terribles pressions. Leur indépendance doit être reconnue.

Il faut aussi en former davantage - me semble-t-il. La médecine du travail, c'est une spécialité.

Enfin, il faut leur donner plus de pouvoirs et des moyens réels pour intervenir au sein des comités d'hygiène et de sécurité. Aujourd'hui, leurs membres sont élus, mais ils n'ont aucun moyen d'intervention et d'investigation et sont complètement dépendants du temps que l'employeur veut bien leur laisser pour aller inspecter, sur les chaînes, par exemple, les conditions de travail. Le rôle des comités d'hygiène et de sécurité est très limité. Il faudrait le reconsidérer car ils ont une mission importante à remplir au sein des grandes entreprises.

Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur un autre point : dans l'immense majorité des entreprises, notamment dans toutes les petites entreprises, où les organisations syndicales sont inexistantes parce qu'elles ne sont pas prévues par la loi, il n'y a pas de correspondant « santé ». Nous avions proposé - ce qui n'aurait pas coûté un sou à l'État - qu'un correspondant soit élu au sein de l'entreprise, ayant pour seule mission celle de se pencher sur les conditions de travail.

M. le président. Veuillez conclure, je vous prie.

M. Maxime Gremetz. Je n'ai pas dépassé mon temps de parole, monsieur le président.

M. le président. Vous n'en êtes pas loin.

M. Maxime Gremetz. Je vais aller chercher le règlement, monsieur le président.

M. le président. Ce n'est pas la peine, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je regarde ma montre, monsieur le président, et je sais que je n'ai pas dépassé mon temps de parole. Je poursuis donc.

De plus, de quels moyens dispose la médecine du travail pour remplir sa mission ? Qui connaît ici le délai d'attente, pour un salarié qui demande à rencontrer un médecin du travail ? Il est de plusieurs mois, voire d'un an ou plus ! J'attire votre attention sur ce point, monsieur le ministre. Si la médecine du travail ne dispose pas des moyens élémentaires, elle ne pourra pas garantir la santé au travail.

C'est pourquoi je soutiens ces amendements. Ils ont le mérite de susciter une réflexion commune sur un sujet dispersé. Certains salariés n'ont pas besoin de la médecine du travail, d'autres si. Or les médecins n'ont pas les moyens d'accueillir ces derniers.

M. le président. Sur les amendements nos 6476 à 6489...

M. Maxime Gremetz. Je demande un scrutin public, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Gremetz, j'avais annoncé le vote...

M. Maxime Gremetz. Non, monsieur le président, j'ai demandé le scrutin public.

M. le président. Monsieur Gremetz...

M. Maxime Gremetz. Non, monsieur le président. Vous avez dit un mot et j'ai demandé le scrutin public. Ne jouez pas avec le scrutin public, monsieur le président.

M. Guy Drut. Il a répondu que vous jouiez, monsieur le président !

M. le président. Je ne joue pas, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. À vouloir gagner du temps, vous allez en perdre, monsieur le président.

M. le président. Sur le vote des amendements identiques nos 6476 à 6489, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

M. Jean-Marie Le Guen. Je propose, monsieur le président, dans l'attente du scrutin public, de passer à la discussion des amendements suivants.

M. le président. Vous avez raison, monsieur Le Guen.

M. Maxime Gremetz. Vous pourrez noter, monsieur le président, que j'accepte la proposition de M. Le Guen, alors que je pourrais la refuser, puisqu'elle n'est pas prévue par le règlement. (Sourires.)

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 6446 à 6460.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. La disposition prévue par ces amendements vise à attirer l'attention sur un des problèmes majeurs de notre système de santé : nous ne possédons pas de véritables indicateurs de qualité ou de non-qualité. Si l'on voulait faire une comparaison avec d'autres systèmes de production - et il n'y a aucune raison de ne pas le faire -, on pourrait dire que nous savons à peu près ce que l'ensemble de l'usine nous coûte, et même à quelle partie de l'usine correspond telle ou telle dépense, mais que nous ignorons combien coûte la création d'un produit déterminé. Nous ne pouvons même pas établir s'il est de bonne ou de mauvaise qualité ! L'économie de la santé et, plus précisément, la production de soins n'utilisent presque pas d'indicateurs de qualité.

Il en résulte des lacunes inquiétantes sur les questions liées à la iatrogénie ou aux maladies nosocomiales.

Vous avez annoncé, monsieur le ministre, que les intoxications médicamenteuses causent la mort de 8 000 personnes par an. Mais ce chiffre, propre à frapper l'esprit des Français, est en fait une approximation tirée d'enquêtes rétrospectives. Nous n'avons pas véritablement les moyens pour effectuer un chiffrage précis. De même, l'opinion publique est fréquemment alertée sur les risques liés aux infections contractées à l'hôpital, mais on est bien incapable de déterminer ce qu'il en est vraiment hôpital par hôpital et service par service.

Vous avez proposé il y a quelque temps la mise en place d'un tableau de bord consultable par le public. C'est une heureuse initiative mais, d'une façon plus générale, il est fondamental pour l'évolution de notre système de santé que nous puissions produire des indicateurs de qualité, dont ceux qui permettraient d'évaluer la iatrogénie et les infections nosocomiales.

De plus, ces instruments constitueraient un facteur d'égalité dans l'accès aux soins. Très souvent, nos concitoyens, à moins de compter parmi leurs proches des gens capables de les conseiller, n'ont pas les moyens de savoir quelle structure est bonne et quelle structure l'est moins.

Au demeurant, les structures qui dispensent des soins de moins bonne qualité n'en sont pas forcément conscientes et ne peuvent être mises devant leurs responsabilités pour, le cas échéant, évoluer. L'objectif du « zéro défaut », qui existe dans d'autres secteurs de la production, ne devrait pas être perçu comme dissuasif en matière de santé.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. C'est une question qui relève de la santé publique !

M. Jean-Marie Le Guen. Pas exclusivement, mon cher collègue. Ces indicateurs permettent d'évaluer la production de soins : nous sommes donc au cœur de la problématique du pilotage du système de santé. L'assurance maladie ne devrait pas avoir à rembourser les dépenses occasionnées par les défaillances de tel ou tel secteur et il conviendrait, comme nous l'avons demandé lors de la discussion sur l'article 1er, que l'État ait un pouvoir d'intervention sur les secteurs de non-qualité.

C'est bien pourquoi nous proposons par nos amendements d'établir et de publier des indices de qualité.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur les amendements identiques nos 6476 à 6489, qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 22

              Nombre de suffrages exprimés 22

              Majorité absolue 12

        Pour l'adoption 5

        Contre 17

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Nous en revenons aux amendements identiques nos 6446 à 6460, qui viennent d'être défendus par M. Le Guen.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. L'idée de ces amendements est intéressante. M. Le Guen a raison d'insister sur la nécessité de mieux connaître les infections nosocomiales et les complications iatrogènes de toute une série de médicaments et de certains traitements chirurgicaux ou médicaux qui souvent interfèrent quand ils sont associés. Mais faut-il, pour cela, créer une structure supplémentaire ?

M. Alain Gest. Non !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. N'en existe-t-il pas déjà suffisamment dans ce domaine ? Ne pourrait-on charger l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé d'une telle recherche, monsieur Le Guen ? Le recadrage qui aura lieu après la promulgation de la nouvelle loi relative à la politique de santé publique devrait permettre de le faire.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ces amendements prévoient la rédaction d'un rapport sur les conditions de création d'un observatoire de la iatrogénie et des infections nosocomiales. Une réflexion sur la création d'un observatoire des risques médicaux, chargé d'analyser les informations provenant des différentes sources disponibles sur les événements indésirables affectant les personnes hospitalisées, est en cours. Des propositions seront débattues au Sénat. Je m'en remets donc à la sagesse de l'Assemblée.

Il est sûr qu'on ne peut continuer à supporter sans rien faire les infections nosocomiales et les hospitalisations consécutives à des problèmes iatrogéniques, dont le nombre s'élève, sauf erreur de ma part, à 120 000 par an. Il faudra trouver une réponse dans les mois qui viennent.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Pour moi, la réponse de M. le ministre est plutôt positive. Nous ne faisons que demander un rapport, c'est-à-dire l'assurance que le Gouvernement reviendra devant l'Assemblée pour traiter ces questions dont tout le monde, y compris notre rapporteur, a reconnu qu'elles étaient d'importance.

Il ne suffit pas de dire qu'une idée est bonne, juste et nécessaire. Notez qu'au États-Unis, pays qui ne passe pas pour être particulièrement amoureux de la bureaucratie, il existe une agence spécialement consacrée à la qualité. On peut, comme vous le suggérez, monsieur le rapporteur, regrouper sur des plateaux logistiques ce qui peut faire l'objet d'un traitement commun, mais l'édiction et la vérification des normes de qualité ne sont pas assurées par ceux qui procèdent à l'évaluation et l'accréditation : ce sont deux activités différentes. Il est d'ailleurs regrettable que l'accréditation se fasse encore sur la base des procédures de l'ensemble de l'hôpital plutôt que sur les procédures médicales de chacun des services.

La production de normes nous est demandée par les malades et les associations qui les représentent, mais c'est aussi un élément majeur pour faire évoluer notre système. On utilise sans cesse les mêmes arguments financiers, et pas toujours à bon escient, alors que les problèmes de qualité sont beaucoup plus susceptibles de pousser les acteurs du système de soins à s'interroger.

Sur ce point, monsieur le ministre, j'ai cru comprendre que nos avis sont convergents. La sagesse de l'Assemblée, à laquelle vous faites appel, consisterait en l'occurrence à adopter nos amendements.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 6446 à 6460.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 6461 à 6475.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Par ces amendements, nous souhaitons attirer l'attention du Gouvernement et de l'Assemblée sur l'évolution des pathologies. Les populations changent, tout comme les malades, et le savoir médical évolue. Il convient donc que l'appareil de soins évolue également.

Le vieillissement de la population est une dimension essentielle de ce changement. Or nous ne disposons pas d'une véritable vision panoramique de ses conséquences sur la santé publique. Elle serait pourtant nécessaire, sur un plan stratégique et prospectif. Je crains en effet que nous ne soyons plus en mesure de gérer la somme de problèmes que va induire le basculement de la population dans le vieillissement. Je le faisais déjà remarquer à propos de la maladie d'Alzheimer : les politiques liées au vieillissement font défaut à notre pays. Il nous faut donc nous mobiliser pour définir des actions en matière de prévention, de soins, de réadaptation et d'éducation.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Elle a rejeté ces amendements. Le débat est là encore intéressant, mais de nombreuses structures, tel l'INSERM, étudient déjà le vieillissement. D'autre part, le projet de loi relatif à la politique de santé publique prévoit que l'école des hautes études en santé publique sera chargée de coordonner la recherche dans ce domaine. Plutôt que de créer un institut spécifique, il est préférable d'organiser une coordination efficace.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Un institut de la longévité a été créé en mai 2002. Il avait pour mission première de dresser le bilan des recherches dans ce domaine, tant en biologie qu'en médecine, en thérapeutique et en sciences humaines, de dégager les grandes orientations de la recherche et d'être un lieu de confrontation des idées sur les questions de santé et de société liées au vieillissement. Cette mission a été élargie en ménageant une place importante aux sciences humaines et aux sciences sociales et en ouvrant l'institut aux milieux professionnels, aux associations et aux collectivités territoriales. Il s'appelle désormais « Institut de la longévité et du vieillissement ».

La structure existe déjà. Avis défavorable donc.

M. Alain Gest. Peut-on savoir quel est le bilan de cet institut ?

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 6461 à 6475.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels avant l'article 2.

Avant l'article 2

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 532 à 543.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Ces amendements sont pour nous l'occasion d'aborder la question de l'hôpital, grand absent des thématiques abordées par la réforme de l'assurance maladie, alors que celui-ci représente plus de la moitié des dépenses de la branche.

Je reprends ce que j'ai déjà dit : attaqué dans son activité même par la poursuite de la politique de fermeture de lits - par exemple, 120 à l'hôpital de Creil, alors même que la Picardie est une des régions les moins bien loties du point de vue de la santé -, asphyxié financièrement par la maîtrise comptable qui lui est imposée et par le plan Hôpital 2007 qui jette les établissements de santé dans les rets de la sphère marchande, avec toutes les conséquences qui s'ensuivent pour les assurés sociaux en matière d'offre de soins et la couverture des besoins sur l'ensemble du territoire national, l'hôpital subit de plein fouet les effets de la politique de santé du Gouvernement.

L'hôpital n'a plus les moyens aujourd'hui d'exercer ses missions. Et pour cause : dans le cadre de l'OMC, l'accord général sur le commerce et les services exige que la santé devienne une marchandise.

Sous la pression du MEDEF, le Gouvernement met en œuvre avec un grand zèle ces exigences, apparemment contradictoires, de privatisation de l'hôpital public et d'étatisation - en prenant le pouvoir d'en haut pour créer les conditions de cette privatisation rampante.

Vous ouvrez les portes de la protection sociale aux assurances privées et vous détruisez le socle solidaire de notre société : après le service public et les retraites, vous vous attaquez à la protection sociale

Vous prétendez vouloir construire une société où chacun devra trouver des solutions en fonction de ses revenus, dans la jungle des marchés financiers. Les parlementaires communistes et républicains refusent cette perspective inhumaine.

Nous ne sommes pas les seuls. Tout au long de cette année, s'est manifestée, dans la rue et dans les urnes, une opposition à vos projets de régression. Au sein même de l'hôpital, cette opposition s'est traduite par des mouvements de grève répétés.

Monsieur le ministre, demandez à votre gouvernement d'écouter et d'entendre. Ne prenez pas vos désirs pour des réalités. Nous risquons de le payer durement et c'est fort dangereux pour notre pays.

Il est grand temps de travailler avec l'ensemble des personnels hospitaliers et des usagers et avec les organisations syndicales afin de construire une véritable politique publique de santé fondée sur une protection effectivement solidaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté les amendements. Mais je comprends très bien ce que veut M. Gremetz : que le directeur de l'ARH se subordonne, pour toute une série de décisions, à l'avis de la commission exécutive.

M. Maxime Gremetz. En effet.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je le dis à l'adresse de nos collègues, qui ne connaissent pas tous par cœur le code de la santé publique.

Il est intéressant de noter que la commission exécutive est composée pour une moitié de représentants de l'État et pour l'autre de représentants de l'assurance maladie.

M. Gremetz souhaite un rapprochement et une meilleure coordination entre les représentants de l'État et les représentants de l'assurance maladie, entre l'ARH et l'assurance maladie au niveau régional.

Cela est précisé dans le présent texte de loi. Nous le verrons plus loin.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Au sein de l'ARH a été institué, à dessein, un juste équilibre entre les pouvoirs dévolus au directeur en tant que représentant de l'État et les attributions exercées la commission exécutive.

Lier toutes les décisions du directeur de l'ARH à l'avis conforme de la commission exécutive aurait pour effet de rompre cet équilibre institutionnel voulu par le législateur. Cette commission exécutive dispose déjà de compétences étendues et ses avis sont systématiquement recueillis sur le champ des compétences confiées au directeur de l'ARH.

En conséquence, je propose à l'Assemblée de rejeter les amendements identiques.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Nous observons que les conseils d'administration ont été privés de pouvoirs réels, et ce au profit des ARH, que nous proposons par ailleurs de supprimer.

Nous ne souhaitons pas, en effet, donner davantage de pouvoirs à l'ARH. Nous n'avons pas besoin d'un préfet sanitaire doté de tous les pouvoirs. Il y a un représentant de l'État, et nous considérons que cela suffit.

Dans le dispositif que nous envisageons, les conseils d'administration pourraient décider réellement de l'avenir de l'hôpital. Y siégeraient les représentants du personnel, des élus locaux, des associations de malades, des représentants des assurés sociaux.

La présidence par le maire ou par un élu de la collectivité correspondant au territoire de l'hôpital retrouverait son sens si le conseil d'administration jouait un rôle réel d'orientation politique de l'hôpital.

Les médecins, mais aussi l'ensemble du personnel, doivent être reconnus, chacun à sa place, comme participant en tant que tels à la gestion hospitalière, à tous les niveaux.

Voilà comment nous envisageons les choses. Mais vous n'avez pas vu que nous proposons de supprimer les ARH. Nous souhaitons également donner plus de pouvoirs aux conseils d'administration, où prendraient part tous les représentants que nous avons évoqués. Car en matière de gestion des hôpitaux, nous avons une conception plus démocratique.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je respecte le raisonnement qui consiste à dire : il y a un préfet. Pourquoi faudrait-il aussi un directeur d'ARH ? Autant revenir à ce qui se passait auparavant.

Pourtant, si le malade est unique, le financeur l'est également : il s'agit de l'assurance maladie, dont l'hôpital représente environ la moitié des dépenses. Alors, tant qu'à faire, autant donner du pouvoir au directeur de l'ARH plutôt qu'au préfet.

Monsieur Gremetz, vous me dites que le conseil d'administration devrait avoir beaucoup de pouvoirs. Mais ce n'est pas un maire ou le conseil d'administration d'un établissement donné qui peut avoir une vue globale de la question.

Demain, le problème qui se posera dans une région sera de savoir si on a besoin d'un « petscan » ou de deux, de quatre scanners ou de huit. Or un conseil d'administration ne saurait avoir qu'une vision intra-établissements et non une vision d'ensemble.

Aujourd'hui, étant donné le réseau de soins, le réseau des urgences et la complémentarité existant entre les établissements, il me paraît important d'avoir une vision globale. Peut-être considérez-vous que le préfet peut avoir cette vision. Pourquoi pas ? Mais le conseil d'administration, à lui seul, ne le peut pas.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, vous avez raison de dire qu'il faut avoir une vue globale. Et s'agissant de l'hôpital, il me semble que c'est la région qui constitue le niveau pertinent.

Loin de moi l'idée que le préfet doive décider seul. Je dis simplement qu'un représentant de l'État doit avoir autour de lui un comité régional de santé, dont la mission est de mettre en œuvre la politique nationale en l'adaptant à la spécificité de chaque région.

On ne peut se lancer dans des projets coûteux, alors que tant de retards se sont accumulés dans le domaine de l'hospitalisation publique et, plus généralement, dans le domaine de la santé. Pourquoi dépenser beaucoup d'argent pour un plateau hospitalier dont ne bénéficieront que quelques habitants de Picardie, simplement pour des questions d'image ? Dans ce qui est la première région industrielle de France et la plus jeune, autant investir dans la prévention. Notre secrétaire d'État connaît bien la population de Saint-Quentin ou d'Amiens. Consacrer trop de moyens à des réalisations majestueuses, c'est montrer beaucoup de mépris envers toutes les personnes qui, aujourd'hui, ont bien du mal à se faire soigner.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 532 à 543.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 520 à 531.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Ces amendements procèdent du même esprit que les précédents. Il s'agit de corriger le fait que l'hôpital n'a pas été pris en compte dans cette réforme.

Je vous le répète, monsieur le ministre : la situation actuelle des hôpitaux est catastrophique. Nous sommes au bord de l'explosion. Les personnels soignants n'en peuvent plus et la sécurité des patients est mise en péril.

Asphyxié par les restrictions budgétaires, privé des personnels suffisants et soumis à une privatisation rampante, l'hôpital public doit pourtant faire face aux besoins croissants de la population la plus défavorisée, celle qui ne peut compter que sur lui pour se faire soigner.

Or l'hôpital public est l'un des éléments-clés de toute politique de santé. Bien qu'il n'apparaisse pas dans votre réforme, il a un rôle manifeste à jouer, en tant que maillon privilégié de l'offre de soins combinant médecine de ville et établissements de santé.

Or ce n'est pas votre choix. Fidèle à vos prédécesseurs, vous préférez laisser l'hôpital s'embourber dans une politique de rationnement des soins publics, appliquée sur l'ensemble du territoire et mise en œuvre par les agences régionales de l'hospitalisation. Ces dernières, sous la férule de leurs directeurs respectifs, ont d'ailleurs absorbé toutes les prérogatives en matière de décision et de gestion de l'offre de soins des établissements. Elles ont privé les conseils d'administration de tout pouvoir réel sur le devenir de l'hôpital et dépossédé les élus locaux de toute maîtrise de la politique hospitalière locale.

Monsieur le ministre, une telle situation ne saurait perdurer. Vous verrez que cela finira par bouger.

Les conseils d'administration, composés des élus locaux, des représentants du personnel hospitalier, des associations de malades et des assurés sociaux, doivent retrouver un rôle prépondérant dans les décisions portant sur l'avenir et l'orientation politique de l'hôpital. Les médecins et l'ensemble du personnel doivent être reconnus, chacun à sa place, comme participant à la gestion hospitalière, à tous les niveaux de décision. C'est le sens de nos amendements.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements qui, comme les précédents, traitent de l'organisation et du pilotage de l'hôpital public.

Je vous rappelle, monsieur Gremetz, qu'une mission de la commission des affaires sociales, présidée par notre collègue René Couanau, a effectué, sur l'organisation interne et le pilotage de l'hôpital public, un excellent travail, cité chaque fois que le sujet est évoqué. Mme Fraysse faisait partie de cette mission d'information. Je vous conseille de vous reporter à ses conclusions unanimes, qui ne vont pas tout à fait dans le sens que vous souhaitez.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Monsieur Gremetz, il y a, dans l'article 50 du projet de loi d'habilitation pour simplifier le droit, un dispositif qui a fait l'objet d'une concertation avec les acteurs hospitaliers et qui est de nature à satisfaire certaines de vos revendications. Il serait gênant d'aller au-delà dans ce texte relatif à l'assurance maladie. Le régime des crédits évaluatifs notamment permettra une plus grande souplesse et une plus grande liberté de gestion des établissements puisque le budget et les décisions modificatives ne seront plus soumis à l'approbation expresse du directeur de l'ARH.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement exprime un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je remercie M. le secrétaire d'État pour ces précisions. Quant à M. le rapporteur, le tirant d'une lecture sans doute très intéressante...

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je me concentre pour mieux vous écouter ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. ...je lui demanderai, l'ayant, moi, écouté, quelle était la mission à laquelle Mme Fraysse a participé.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'était la mission d'information sur l'organisation interne et le pilotage de l'hôpital public, lancée après notre première table ronde sur l'hôpital en septembre 2002. Mais je ne souhaitais pas ouvrir un débat sur les conclusions qu'elle a rendues.

M. Maxime Gremetz. Sachez que tous les amendements qui vous sont proposés ont été élaborés avec Mme Fraysse.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Que je respecte particulièrement !

M. Maxime Gremetz. Ne vous contentez pas de la respecter, votez aussi ses amendements ! (Sourires.) Cela servirait mieux l'intérêt du pays !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Plus que du respect, j'ai de l'admiration pour elle et pour son comportement à Nanterre !

M. Maxime Gremetz. Ne me faites pas une déclaration à moi. Vous le lui direz ce soir, car vous allez passer la nuit avec elle... une nuit longue et riche en discussions. (Sourires.)

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Ah, la nuit à la chambre des députés !

M. Maxime Gremetz. Tous nos amendements ont été travaillés collectivement. Si Mme Fraysse était présente, c'est elle qui les défendrait. Elle vous expliquerait qu'après avoir auditionné beaucoup de monde, notamment toutes les catégories de personnels hospitaliers, nous avons mûri notre réflexion. On peut avoir une position un jour et l'infléchir par la suite. Sans préjugé idéologique, nous avons consulté, écouté. Puis, une fois notre conviction forgée, nous avons rédigé des propositions. C'est à l'issue de cette démarche démocratique que nous avons été conduits à revenir sur des opinions précédemment exprimées. Mme Fraysse vous le confirmera ce soir, personnellement et publiquement.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 520 à 531.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, n°s 7639 à 7653.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Ce sont des amendements très importants, qui mettent en évidence la nécessité de construire, d'une façon quasi systématique, des réseaux de soins dans notre pays.

De tels réseaux existent depuis déjà plusieurs années. Mis en œuvre de façon artisanale au début des années quatre-vingt-dix, ils avaient trouvé une nouvelle dynamique avec la réforme Juppé et la commission Soubie, qui devait les mettre en place par dérogation aux normes de fonctionnement de l'ONDAM. Mais force est de constater que les choses n'ont que peu avancé.

La loi de janvier 2002 relative à la modernisation de notre système de santé a créé, dans le cadre de l'ONDAM, une enveloppe particulière pour le développement national des réseaux, dite enveloppe DNDR. Son rôle s'est accru en 2003 et 2004, mais les sommes qui y sont consacrées sont encore marginales alors même que les évaluations des réseaux qui ont été publiées sont tout à fait positives. Ainsi, le réseau mis en place par la MSA en matière de gérontologie donne des résultats remarquables. Sans doute faudrait-il procéder à des évaluations complémentaires, mais tous les indices que nous avons expriment la satisfaction des praticiens, des malades et des organismes d'assurance maladie, qui ont vu les dépenses par pathologie réduites de 20 %. D'autres réseaux, comme celui de Groupama, plutôt orienté sur des groupes de qualité de praticiens, fonctionnent de manière satisfaisante. Il semble, bien que nous ne disposions pas d'étude comparative, qu'un réseau comme celui du diabète soit moins performant, peut-être du fait de son activité encore très peu intense, notamment en matière de promotion de la santé.

Dans notre pays, comme dans tous les autres, la notion de réseau renvoie à celle de prise en charge globale du malade, avec une offre de soins mais aussi de prévention. Pour les populations les moins favorisées, je pense aux populations rurales très âgées, qui ne sont sûrement pas les plus au fait des évolutions récentes de la médecine, ces réseaux sont particulièrement adaptés car ils agissent de façon proactive, allant au-devant des besoins sanitaires des personnes.

Sur le plan régional, l'idéal serait d'avoir un système à trois niveaux : un premier niveau constitué de cabinets regroupés ; un deuxième niveau, où interviendrait le réseau de soins, seul à même de permettre le décloisonnement entre la ville et l'hôpital et le suivi du patient grâce au dossier médical personnel, qui trouvera là toute son utilité et se révélera un instrument de pédagogie pour la population ; un troisième niveau, où l'agence régionale de santé organiserait plus largement le tissu sur le plan régional.

Après avoir plaidé pour une réforme de l'offre de santé s'appuyant sur les propositions du rapport Durieux de regrouper les professionnels de santé dans des cabinets, nous passons au deuxième étage de la fusée de la réforme de l'offre de soins constitué par les réseaux. Il s'agit d'impulser une volonté politique qui ne se limite pas à créer une enveloppe encore insuffisante financièrement, mais qui développe de façon globale une offre de santé coordonnée. La réponse au cloisonnement des soins se trouvera dans la mise en place d'une structure établissant un pont entre la ville et l'hôpital. C'est l'une des propositions fortes du groupe socialiste que ces trois niveaux d'offre de soins.

À plusieurs reprises, le Gouvernement a souhaité connaître les propositions du groupe socialiste. Sur les seuls articles 1er et 3, nous en avons émis trois : favoriser la médecine de groupe, mettre en œuvre les réseaux et l'ARS. Nous parlerons ensuite du médicament, de l'hôpital, de la gouvernance, des aspects financiers. Nous avons parlé ce matin des zones de désertification et je me félicite de l'accord du Gouvernement sur la mise en place par l'assurance maladie de maisons médicalisées.

Voilà quelques-unes des dix principales propositions que nous avons à formuler. Sur celle que je viens de présenter, j'attends avec intérêt la réponse du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. En commission, M. Le Guen avait retiré son amendement. Il l'a fait, me semble-t-il, pour deux raisons : d'abord, je lui avais fait remarquer que la notion de réseau figurait déjà à l'article 162-5 du code de la sécurité sociale et, ensuite, l'article 6 du projet aborde cette question et répond partiellement à sa demande. En particulier, le quatrième alinéa de son amendement, qui, j'en conviens, est intéressant, est en partie satisfait par le code de la santé publique.

La logique serait de retirer ces amendements, quitte à en rediscuter lorsque nous débattrons de l'article 6.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Nous croyons aux réseaux de soins. L'effort budgétaire qui leur est consenti en témoigne : la dotation est passée de 23 millions en 2002 à 125 millions en 2004. Le fait qu'elle ait été multipliée par un peu plus de cinq est bien la preuve qu'ils présentent un véritable intérêt.

Là où nous divergeons, c'est que vous prônez l'obligation alors que nous préférons l'incitation. Les remontées que nous avons du terrain montrent que c'est le volontariat des professionnels qui assure la réussite des réseaux de soins et nous avons le sentiment que le dossier médical personnel, dont nous débattrons en tout début de semaine prochaine, nous permettra de mettre encore plus en avant la qualité des soins et cette nécessaire coordination.

C'est pourquoi le Gouvernement a émis un avis défavorable sur ces amendements. Mais ce sont davantage les moyens que les fins qui nous séparent.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. La possibilité de créer des réseaux existe mais vous ne favorisez pas leur constitution. Nous ne souhaitons pas obliger mais nous voulons que se manifeste une volonté politique. La réunion, il y a quinze jours, du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, qui nous a permis d'auditionner les responsables de la Caisse nationale et ceux du ministère, a été l'occasion de constater qu'elle n'existait pas. Les personnes que nous avons entendues s'interrogent encore et ne parlent que d'évaluation.

Depuis la commission Soubie de 1996 - il y a maintenant huit ans - seulement quelques dizaines de réseaux ont été constitués, dont la plupart ces deux ou trois dernières années. Alors que nous remontent du terrain des signaux positifs qui montrent qu'il y a une adhésion au projet, les responsables de l'administration en sont encore au stade de l'évaluation.

La réalité est que, depuis des années, nous gaspillons la volonté et la mobilisation d'un certain nombre d'acteurs, qui doivent se débrouiller seuls sur le terrain. Un praticien qui, après avoir lu dans un journal médical, ce qu'était un réseau, veut en constituer un, doit, après avoir rendu visite à cinq ou six médecins de son voisinage et au service hospitalier de son ressort, se rendre à la DDASS et à la CNAM pour les formalités administratives. Et bien sûr, un médecin généraliste ne travaillant que soixante heures par semaine a tout loisir, le soir, quand il est chez lui, de remplir les dossiers nécessaires : un dossier, deux, puis trois.

Tant que l'on procédera de cette façon, cela ne marchera pas.

Nous proposons, nous, que, dans chaque caisse primaire d'assurance maladie, deux ou trois personnes soient là pour rendre visite aux médecins susceptibles d'être intéressés, les renseigner à l'aide d'un petit livret explicatif et - pourquoi pas ? - d'un film, les mettre en relation avec des confrères qu'ils ne connaissent pas forcément mais qui seraient, eux aussi, intéressés par la création d'un réseau, aller voir pour eux le responsable de l'hôpital local en Mayenne, par exemple, le chef de service de gériatrie ou de médecine interne du CHU voisin et, surtout, remplir leurs dossiers .

M. le président. Il faudrait conclure, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. C'est un sujet vraiment très important, monsieur le président. Je vous demande donc de bien vouloir me laisser m'exprimer plus longuement d'autant que, M. le ministre n'étant pas là, j'aimerais que mes paroles lui soient rapportées.

Ce que nous voulons, c'est que l'assurance maladie soit active dans le processus de création de réseaux. Ne laissons pas la réforme à la seule bonne volonté des professionnels de santé. Donnons-lui une impulsion politique. Comme dans le cas de la lutte contre la désertification médicale, il faut que des responsables de l'assurance maladie fassent du porte-à-porte, du prosélytisme. N'attendons pas une mobilisation spontanée de la base. C'est ce qui est proposé dans ces amendements et c'est pourquoi ils sont en rupture avec les pratiques en vigueur jusqu'à présent, y compris, je le reconnais, celles de l'ancienne législature.

Il n'est pas question d'obliger, mais tout le monde a intérêt à cette réforme : elle offre confort aux médecins en améliorant leurs conditions de travail et sécurité aux patients en facilitant leurs relations avec les praticiens de la santé.

Si ces amendements étaient adoptés, ils transformeraient radicalement notre offre de soins. Les jeunes générations, tout comme, j'en suis sûr, les plus anciennes y sont prêtes, à condition qu'on leur tende la main.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je partage l'enthousiasme de M. Le Guen pour les réseaux mais je pense qu'un temps de latence et de réflexion doit précéder leur mise en place. Je connais bien le réseau cancer ONCORA, en Rhône-Alpes, qui marche très bien. C'est l'un des deux réseaux « cancer » qui fonctionnent le mieux en France. Il a démarré très lentement, sur la base de l'adhésion spontanée.

Personnellement, je ne reproche rien au précédent gouvernement, si ce n'est de n'avoir pas mis suffisamment de moyens à la disposition de ceux qui souhaitent créer un réseau.

On ne peut pas imposer. Informer, pourquoi pas ? Mais nous aurons l'occasion d'en reparler plus loin.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. La volonté politique existe. Ce qui nous différencie, je l'ai déjà dit, c'est la voie choisie et les moyens proposés. Comme l'a indiqué le rapporteur, le volontariat nous paraît être la meilleure garantie de succès. Cela n'empêche pas, bien évidemment, d'être incitatifs vis-à-vis de l'assurance maladie.

Le fait est qu'aujourd'hui des réseaux fonctionnent très bien avec la MSA. Peut-être est-ce grâce à un maillage territorial et à un partenariat plus élaborés. Je pense au partenariat avec Groupama en particulier. Nous aurons l'occasion d'en reparler.

C'est vraiment la voie du volontariat - associé à une volonté politique accompagnée d'une traduction financière - qui peut nous permettre d'obtenir des résultats en la matière et, je le répète, la volonté politique est présente.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 7639 à 7653.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8185.

Je vous propose, monsieur Le Guen, de reporter son examen à lundi, lorsque nous aborderons le dossier médical personnel.

M. Jean-Marie Le Guen. Je suis d'accord, monsieur le président.

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 6967 à 6981.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous sommes confrontés à de très sérieux problèmes de démographie des professions de santé.

Nous pourrions nous en renvoyer les uns, les autres la responsabilité. Je pense qu'aucun d'entre nous n'a su, le moment opportun, se saisir du problème avec suffisamment de vigueur.

Une polémique continue de courir sur le nombre des médecins en France. Il est jugé trop faible alors qu'il est supérieur à celui de nombreux pays européens. À cela, on répond que c'est plus un problème de répartition sur le territoire, par âge et par catégorie qui se pose.

Nous avons parlé tout à l'heure des moyens mis en place pour lutter contre la maladie d'Alzheimer, ainsi que de l'évolution de la population. Tout cela montre qu'il nous faut faire un gigantesque effort pour mener une politique globale de promotion de l'ensemble des professionnels et des professions de santé.

L'État a un rôle prépondérant à jouer en la matière du fait de la politique hospitalière, du monopole ou du quasi-monopole qu'il a sur la formation médicale et du rôle de pilotage qu'il va avoir sur l'assurance maladie et le domaine médico-social.

Le rapport Berland, commandé par le gouvernement précédent, a montré qu'il fallait opérer une requalification de l'ensemble des actes et une redistribution entre médecins et personnels paramédicaux. Les grilles remontent à des temps anciens. Aujourd'hui, une sage-femme est à bac + 5, une infirmière à bac + 4, beaucoup d'aides-soignants sont à bac + 2. Telle est la réalité du recrutement des personnels hospitaliers, personnels que l'on retrouve en ville et dans les cliniques privées. Il y a là une ressource humaine colossale qui mérite d'être prise en compte dans une politique globale et de faire l'objet d'une véritable planification.

C'est l'objet des amendements que je défends maintenant. Nous proposons une véritable planification des recrutements, des qualifications et des formations, de nature à apporter des garanties aux professionnels de santé qui, quoi qu'on en dise, connaîtront des restructurations à l'intérieur de leur profession. Il faudra, par exemple, que, dans telle ou telle petite ville, on puisse passer d'un service spécialisé n'ayant plus les moyens d'assurer sa spécialisation vers un service de suite. Cela supposera des évolutions dans les qualifications et les formations.

Nous avons les moyens nécessaires pour rassurer les personnels présents dans ces petits hôpitaux ou dans les services qui peuvent être amenés à se restructurer. Nous avons besoin d'eux.

Je prends l'exemple des infirmières. En France, le taux d'évaporation des professions est considérable. De mémoire, dix ans après avoir obtenu leur diplôme, plus de 40 % des infirmières ont renoncé à leur métier.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est plutôt sept ans !

M. Jean-Marie Le Guen. Cela doit être mis en rapport avec la dureté, mais aussi avec une certaine forme de rigidité de l'exercice de la profession.

Ne pourrait-on imaginer des évolutions des qualifications pour les infirmières ? Certaines d'entre elles, après un certain nombre d'années passées dans des services de pointe, où elles vivent dans un état de stress permanent, abandonnent ce métier difficile pour des raisons personnelles ou familiales. Ces personnes seraient particulièrement utiles dans ces maisons médicalisées.

Nous aimerions aussi qu'il y ait suffisamment de médecins pour les visites médicales scolaires. Mais, compte tenu de la démographie médicale, nous n'y parviendrions pas.

Nous proposons une véritable mobilisation des ressources humaines sur l'ensemble de ce secteur, en prévoyant de traiter de façon globale et coordonnée les problèmes de qualification, de formation et d'évolution des carrières. Cela répondrait à une très forte demande du milieu hospitalier et pourrait irradier bien au-delà.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements.

Elle s'est interrogée sur la durée de vie de la « Conférence nationale sur la profession médicale avec les acteurs concernés chargée de mettre en place un plan global de formation, de revalorisation, de qualification et d'emplois ». Elle devrait se tenir avant le 31 décembre 2004. Il faudrait la réunir très vite, immédiatement après la promulgation de la loi.

M. Jean-Marie Le Guen. J'accepte un sous-amendement sur la date, monsieur le rapporteur !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Deuxièmement, le mot « planification » est revenu à plusieurs reprises dans votre argumentation et cela m'a choqué. Il ne faut pas prendre les choses de cette façon, mais comme le Gouvernement qui, lui, agit.

Je ferai une brève allusion au projet de loi relatif à la politique de santé publique, dans lequel on a prévu la formation médicale continue.

Il me semble que dans le projet de loi que nous examinons aujourd'hui, on trouve de nombreuses solutions aux questions très justes que vous avez soulevées : la coordination des soins, la mise en place de réseaux, les protocoles de soins, tous ces points que nous allons discuter, si nous arrivons enfin au vif du sujet.

M. Jean-Marie Le Guen. Parce qu'on n'est pas dans le vif du sujet ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il ne faut pas oublier non plus la contribution de la commission. Celle-ci a voté un amendement créant une union nationale des professions de santé, ainsi qu'une union régionale des professions de santé à côté des URML. Les professionnels de santé, aux niveaux local, régional, national, mettent en place spontanément une organisation en matière de formation continue ou de transferts de compétences.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Monsieur Le Guen, une conférence nationale avant le 31 décembre vous semble-t-elle la meilleure solution pour résoudre les questions que vous avez évoquées ? Sincèrement, je ne le crois pas, et de nombreux parlementaires partagent cette opinion.

Je crois davantage à une concertation permanente. Je vais prendre un exemple. Dans la genèse de ce projet de loi portant modernisation de l'assurance maladie, nous avons joué la carte de la concertation. Philippe Douste-Blazy et moi-même avons passé des centaines d'heures pour forger notre conviction et voir comment avancer.

Lors de cette concertation à laquelle nous avons procédé, un syndicat de médecins nous a cité un exemple concret : dans le Calvados, 10 % des infirmières n'exerceront jamais et 30 % refusent de s'installer. Ces chiffres sont en constante évolution compte tenu de la féminisation de la profession. Une conférence, qui a forcément un caractère figé, nous permettra-t-elle au fur et à mesure - et pas seulement pour 2004 - de tenir compte de ces évolutions ? Non ! Nous préférons jouer la carte de la concertation.

De nouveaux outils sont mis en place dans le texte - M. le rapporteur l'a rappelé -, comme l'Union nationale des professions de santé. Ces outils nous permettront en permanence de réfléchir sur les évolutions et les adaptations nécessaires.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Ne jouez pas trop avec la procédure. L'article 40 nous contraint à proposer une « conférence » et une date en 2004. Soyez de bonne foi !

L'État mettra-t-il en place un plan d'action globale et coordonnée ? Ne nous dites pas que l'UNPS peut répondre à ces questions - c'est-à-dire le recollement des professions existantes -, alors que pratiquement tout dépend de l'État.

L'État fixe les numerus clausus, les qualifications, les emplois, qui, pour l'essentiel dépendent de l'hôpital public, les normes s'appliquant aux hôpitaux et cliniques privés, aux laboratoires, entre autres.

L'État doit agir et ne pas attendre que le syndicat des infirmières du Calvados lui soumette des problèmes spécifiques.

La planification est nécessaire. Sinon, pour former un étudiant en médecine sur douze ou treize ans, on est mal parti ! C'est sans doute parce que l'on n'a pas été capable de planifier que l'on se retrouve face à cet invraisemblable désordre de la démographie médicale.

Il ne s'agit évidemment pas de proposer une « conférence » à une quelconque date mais d'obtenir une gestion globale des ressources pour requalifier l'ensemble des formations et des personnels dans le domaine de la santé, de façon à créer une ambition.

Je suis allé récemment à l'hôpital de La Pitié-Salpêtrière, dans le service de suite. J'y ai vu des malades en « long séjour ». C'est la même chose à l'hôpital Broca. Des personnels dévoués, d'une grande abnégation, seront, pendant des années, au service de personnes très âgées dans un état sanitaire épouvantable. Ne doit-on pas s'occuper de la gestion de ces personnels ? L'État les envoie au feu, mais chacun doit se débrouiller dans son coin. Vous êtes aide-soignant et vous devez vous occuper de vingt-cinq lits d'Alzheimer. Personne ne vous dit que ce métier vous demandera pendant quatre ans des efforts considérables et qu'ensuite vous pourrez bénéficier de six mois de formation. Vous pourrez aller en réanimation, en chirurgie, en pédiatrie ou dans d'autres secteurs où la vie est un peu moins difficile.

Pourquoi les personnels de santé ressentent-ils un tel malaise ? Il n'y a aucune gestion des ressources humaines. On ne trouve - si j'ose dire - que des gestions notariales, de contrat de travail, d'heures, de financement. Le secteur public n'est pas capable de promouvoir l'individu, de le valoriser, de lui proposer un parcours.

Vous avez l'occasion de faire en sorte que ce soit le cas car vous êtes confronté à une crise démographique des professions de santé et à une évolution des qualifications. Vous devez mettre en œuvre un plan global de formation, de revalorisation, de qualification et d'emplois.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La mission Couanau, dont vous faisiez partie, monsieur Le Guen, diagnostiquait ce désenchantement. C'est aux structures administratives de changer leur mode de gestion. J'attends beaucoup de la réforme du pilotage, qui peut aussi concerner les carrières, plus que d'une conférence qui se tiendrait trois jours avant la fin de l'année 2004.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. M. Le Guen propose de fixer un cadre. D'accord ! Mais quels partenaires s'inscriront dans ce cadre ? Un véritable volontarisme politique est nécessaire. Nous n'en sommes pas dénués. Bien au contraire !

Mais l'État n'est pas seul. Nous sommes dans une logique partenariale avec l'ensemble des professionnels de santé, et pas seulement avec les médecins. Et un certain nombre d'amendements nous semblent aller dans le bon sens.

On ne peut pas dire que les professionnels de santé sont abandonnés compte tenu du travail accompli notamment pour la validation des acquis de l'expérience. Voilà un exemple de promotion professionnelle.

M. Maxime Gremetz. Oh !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. C'est une solution d'avenir pour les professionnels de santé.

Vous savez à quel moment ce mouvement a été initié - je ne m'en gargarise pas - mais je veux simplement indiquer que des outils ont été mis en place. Il convient maintenant de les faire monter en puissance.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je souhaiterais réagir aux propos de M. le secrétaire d'État sur la validation des acquis.

Je suis à l'origine de la réflexion sur la validation des acquis. J'avais rencontré des infirmières qui travaillaient depuis quinze ans au bloc opératoire dans une clinique privée. Brutalement, elles n'avaient plus le droit d'y entrer, faute de diplômes. Elles m'ont fait part de leurs difficultés et je me suis entretenu avec Nicole Péry de cette question. La validation des acquis est partie de là.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il s'agissait des aides opératoires. Ce n'est pas pareil !

M. Maxime Gremetz. Pourquoi n'est-ce pas pareil ? Il s'agit de la situation de gens qui ont travaillé pendant des années et qui n'ont pas de diplômes.

Quoi qu'il en soit, c'est nous qui avons généralisé la reconnaissance des acquis professionnels et de l'expérience, avec passage devant une commission de validation, et cela commence à s'appliquer concrètement.

Mais, au-delà des conditions de travail auxquelles est soumis le personnel médical, des astreintes, des jours que l'on ne compte pas, relisez ce que nous ont dit tous les hauts responsables de la santé, les grands professeurs, et que vous retrouverez, par exemple, dans les comptes rendus de la mission parlementaire sur la canicule : tous font l'éloge de ces personnels totalement épuisés, mais toujours disponibles, sans que l'on ait jamais besoin de les appeler, toujours prêts à s'organiser, à prendre l'initiative. Il faut bien se rendre compte que cela ne peut pas durer, qu'il faut faire quelque chose.

N'oubliez pas enfin que l'application de l'article 40 pose un sérieux problème - vous-mêmes vous en êtes souvent plaints : l'article 40 nous interdit de présenter des propositions sérieuses et nous oblige à des subterfuges, faute de quoi le couperet s'abat. Il ne faut donc pas prendre nos amendements au pied de la lettre : nous sommes bien obligés d'agir ainsi, de trouver des trucs si nous voulons que nos propositions viennent en débat. Une conférence nationale ou un rapport, cela a l'avantage de ne pas coûter de sous, et donc de ne pas se voir opposer l'article 40. Ce n'est pas à de vieux parlementaires comme vous que je vais l'apprendre !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 6967 à 6981.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 580 à 591.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Les gouvernements successifs ont tous déploré que la prévention et l'éducation à la santé restent les parents pauvres des politiques de santé. Le précédent ministre, M. Mattei, avait à juste titre dénoncé la faiblesse de la part financière qui lui est réservée : l'État ne consacre aux programmes de prévention que 3,6 milliards d'euros par an, et seulement 4 milliards aux actions de soins et de prise en charge liées à la prévention, à rapporter à un total de dépenses de santé de 145 milliards d'euros ! Nous sommes tous d'accord pour reconnaître que c'est totalement insuffisant.

Pourtant, tous ces gouvernements ont contribué comme un seul homme au désengagement de l'État du secteur de la médecine préventive. La médecine scolaire a été littéralement abandonnée, au point que les obligations légales de suivi des enfants scolarisés sur l'ensemble du territoire ne sont plus respectées. Les conditions de travail sont laissées au bon vouloir du patronat alors que tous les indicateurs révèlent une détérioration de la santé au travail et une sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, particulièrement coûteuse pour l'assurance maladie et surtout pour le salarié lui-même. Quant à la lutte contre les risques environnementaux et alimentaires, elle est carrément au point mort, malgré les désastres de la vache folle et de la légionellose.

La discussion récente sur la loi dite de santé publique, à laquelle vous nous renvoyez souvent, n'a fait que confirmer ce triste constat. Remarquons au passage qu'elle va nous revenir, comme un fait exprès, au beau milieu de la session extraordinaire alors que son examen a été entamé il y a presque un an ! Loin de répondre aux enjeux sanitaires, ce texte, couplé à la loi de décentralisation - appelée elle aussi à être rediscutée pendant la session extraordinaire : bel esprit démocratique ! - entérine dans les faits le principe d'un désengagement financier de l'État central dans la conduite de la prévention et le transfert des charges correspondantes sur les régions.

Cette loi de santé publique est venue confirmer que votre gouvernement n'entendait pas faire de la santé de nos concitoyens une réelle priorité, pas plus qu'il n'était disposé à aborder la politique de la prévention dans sa globalité en agissant positivement sur l'environnement économique et social des individus.

Et pourtant, les professionnels, les usagers et tous les acteurs de la santé ont montré la nécessité de travailler dans le sens d'une revalorisation de la santé en France. Les chercheurs eux-mêmes, après avoir rappelé l'État et votre gouvernement à leurs obligations dans le domaine de la recherche, où il y va de l'avenir de la nation, vous ont demandé d'engager un plan pluriannuel dans lequel la recherche en matière de santé et de prévention occuperait une place fondamentale. J'espère que votre projet pour la recherche tiendra compte des remarques et des exigences de la profession.

Soyez attentifs, messieurs, car je vous reposerai mes questions et vous allez devoir y répondre ! Moi, je vous écoute quand vous vous exprimez !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Mais nous vous écoutons !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Nous vous entendons, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. S'il est impératif de réaffirmer le rôle de l'État dans la définition des objectifs de santé publique et de prévention, il est tout aussi impératif de réengager l'ensemble des structures publiques nationales et régionales dans leur financement. Il est également impérieux d'enclencher une nouvelle dynamique par des actes concrets afin de faire de la prévention une réelle priorité.

Voilà pourquoi nous défendons ces amendements qui visent à mettre en place un plan pluriannuel de soutien au financement de la recherche en matière de santé et de prévention.

À cette question claire, j'attends une réponse claire !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements pour les raisons indiquées par M. Gremetz lui-même dans son argumentation : la loi de santé publique, avec la création d'un institut national du cancer et de l'école des hautes études en santé publique, ainsi que le plan cancer et le plan santé-environnement, répondent à l'objectif visé.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Ainsi que vient de le rappeler le rapporteur, nous disposons déjà d'un certain nombre d'outils. Qui plus est, une négociation est prévue dans le cadre du plan national de cohésion sociale, sur le thème « santé et travail ». La loi de santé publique, enfin, prévoit que des efforts seront conduits dans le domaine de la prévention, qui vont dans le sens souhaité par M. Gremetz. D'où l'avis défavorable du Gouvernement à ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 580 à 591.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 544 à 555.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Ces amendements abordent un thème dont nous avons déjà eu l'occasion de discuter : je veux parler des personnes âgées.

Nous persistons à croire que l'on ne peut parler santé sans penser au maintien à domicile des personnes âgées. Aussi proposons-nous la création d'un service public pour le maintien à domicile des personnes âgées. À cet effet, le Gouvernement pourrait conduire, dans l'année qui suivra l'adoption du présent projet, une étude sur l'opportunité de cette création. Un rapport serait remis au Parlement sur cette question, afin que s'engage un véritable débat national. En fonction de ses conclusions, ce rapport pourrait donner lieu au dépôt d'un projet de loi.

Si la nation doit se donner les moyens d'hospitaliser les personnes âgées et de les héberger dans des conditions appropriées, elle doit également pouvoir répondre à l'aspiration très forte de ces personnes à rester dans leur environnement familier. Près de 90 % des plus de soixante-quinze ans vivent chez eux. Bien que les apports de notre système de santé aient permis de faire significativement reculer le taux de morbidité, plus d'un million et demi de personnes ont recours à une aide à la mobilité pour remédier aux difficultés que l'on rencontre, passé un certain âge, en restant à son domicile.

Parallèlement, on constate, en dépit de leur réel investissement, que l'intervention des services de soins et d'aide à domicile reste très limitée. Le rapport de nos collègues Claude Évin et François d'Aubert sur le drame de la canicule dénombrait, au 31 décembre 2003, à peine 1 700 services de soins à domicile, dont seulement 522 dans le secteur public, soit l'équivalent de 77 642 places, soit un ratio de 17,53 pour mille personnes de plus de soixante-quinze ans.

De la même façon, malgré les efforts des collectivités locales, les services d'aide à domicile sont en nombre insuffisant au regard des besoins : on n'en compte que 7 100 pour 1,2 million de personnes de soixante ans et plus. Ainsi, en région parisienne, une demande seulement sur trois peut être satisfaite.

Les besoins sont criants, notamment en matière de soins infirmiers. Or, vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, la France aura dans le prochain quart de siècle une proportion de personnes âgées largement supérieure à celle que nous connaissons aujourd'hui. Dans son rapport, le conseil d'orientation des retraites prévoit qu'elle approchera les 33 % de la population en 2040.

Une réponse devra être impérativement trouvée, qui ne passe pas par une rationalisation des dépenses au titre de l'offre sanitaire ; faute de quoi, il y a fort à parier que les conséquences humaines catastrophiques de l'été dernier se renouvelleront dans d'autres circonstances.

Or les aides dans ce domaine sont très inégales, dans la mesure où elles dépendent des moyens mis en œuvre par les collectivités locales ou de la bonne volonté des associations. Toutes les personnes âgées ne peuvent bénéficier d'une offre réellement adaptée à leurs besoins et également répartie sur tout le territoire national. Si, sur le plan géographique, le maillage territorial est assuré, le nombre de places offertes reste dérisoire au regard des besoins, provoquant un effet de files d'attente très important.

La question des moyens d'action est donc fondamentale, et à cet égard le rapport n° 1091 de notre collègue Denis Jacquat est très instructif : limités dans leurs moyens, ces services sont obligés de « faire des choix lors des périodes de tension » - comme celle de l'été dernier. Soumis à des impératifs de restrictions budgétaires, ils sont plongés dans la précarité et le bénévolat, qui ne permet pas d'assurer un suivi efficient des besoins.

En effet, ces nouveaux services sont confrontés à la pénurie de personnels formés et désireux de travailler auprès des personnes âgées. Rendre une réelle attractivité à ces métiers passe, à nos yeux, certes par la reconnaissance sociale, mais aussi et surtout, par leur reconnaissance institutionnelle et leur inscription dans le cadre de la prise en charge publique de l'offre de soins.

L'enjeu est donc double : il s'agit à la fois de répondre de façon universelle et solidaire à un besoin de santé et d'assurer les moyens pour y répondre. C'est pourquoi nous proposons de créer un service public du maintien à domicile des personnes âgées.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements. Nous considérons que la loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et handicapées répond déjà à ce souci.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis que la commission. Je voudrais rappeler à M. Gremetz que le secteur associatif joue un grand rôle en matière de maintien à domicile des personnes âgées, représentant 68 % des places en SSIAD et 84 % en SAAD.

En l'occurrence, mettre en place un tel service public remettrait en cause l'existence du secteur associatif. Qu'adviendrait-il si nous suivions la proposition de M. Gremetz ?

M. le président. Je mets aux voix...

M. Maxime Gremetz. Permettez-moi de répondre à M. le secrétaire d'État. Il m'a posé une question !

M. le président. Nous avons décidé de lever la séance vers vingt heures, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je souhaite répondre.

M. le président. Un accord est un accord, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Puisqu'on m'interroge, je veux répondre.

M. le président. Mais M. le secrétaire d'Etat ne vous a pas posé de question...

M. Maxime Gremetz. Si, monsieur le président.

Ces associations, qui rencontrent beaucoup de difficultés, pourraient être associées à un grand service public.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 544 à 555.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 568 à 579.

Puis-je considérer, monsieur Gremetz, que vous les avez défendus ?

M. Maxime Gremetz. Pas du tout. (Sourires.)

M. le président. Nous étions convenus de lever la séance à vingt heures, alors soyez bref...

M. Maxime Gremetz. N'insistez pas, monsieur le président. Vous m'incitez à prendre tout mon temps !

M. le président. Alors, je retire ce que j'ai dit ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Vous savez bien qu'il suffit de me dire une chose pour que je fasse le contraire. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous nous en étions aperçus !

M. Maxime Gremetz. Puisque vous insistez et que je suis un démocrate... (Sourires .)

M. le président. Je vous en prie, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. C'est beau la dialectique, n'est-ce pas ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. La didactique, c'est mieux !

M. Maxime Gremetz. J'en viens à la défense de nos amendements. Mais, je vous rassure, je m'en tiendrai à un résumé !

Ils visent à créer une commission de suivi et de vigilance des risques industriels au plan local, réunissant des citoyens, des élus locaux, des salariés, des directions d'entreprises, des services de la direction départementale de la santé, de la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement et de la préfecture afin d'assurer une information complète et transparente sur l'entretien et le contrôle des différents équipements et sites industriels.

Ce n'est pas du pipeau : on en a vraiment besoin !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Lors de l'examen du projet de loi relatif à la politique de santé publique, nous avons eu, rappelez-vous, monsieur Gremetz, de longs débats sur ce thème. Il est vrai qu'il y a un réel besoin.

Mais, je le répète, ne confondons pas assurance maladie et santé publique, même s'il faut les articuler étroitement. Avis défavorable de la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 568 à 579.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. À la demande de la commission, les amendements nos 8037 à 8051, 8179 et 8180 ainsi que l'amendement n° 8185 sont réservés pour être examinés avec les autres amendements traitant du dossier médical personnel.

Je rappelle que, comme il a été indiqué jeudi soir, l'examen de l'article 2 et des articles additionnels après l'article 2 aura lieu lundi.

La suite de la discussion du projet de loi est renvoyée à la prochaine séance.

    2

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1675, relatif à l'assurance maladie :

Rapport, n° 1703, de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission spéciale.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot