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Deuxième séance du mardi 6 juillet 2004

12e séance de la session extraordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

    1

SOUHAITS DE BIENVENUE
À UN NOUVEAU DÉPUTÉ

M. le président. Chers collègues, j'ai le plaisir de saluer, en votre nom à tous, l'arrivée dans l'hémicycle de M. Laurent Wauquiez, nouveau député de la première circonscription de la Haute-Loire, élu le 4 juillet 2004. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

    2

ASSURANCE MALADIE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie (nos 1675, 1703).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'amendement n° 8410 portant article additionnel après l'article 2.

Après l'article 2
(amendements précédemment réservés)

(suite)

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour soutenir l'amendement n° 8410.

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le président, je vais d'emblée faire accélérer le débat : je retire mon amendement car il a été satisfait par l'amendement n° 33 qui a déjà été adopté.

M. le président. L'amendement n° 8410 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 8411.

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le soutenir.

M. Jean Dionis du Séjour. Je souhaite, comme l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, ouvrir avec cet amendement le débat sur le statut des notes personnelles du médecin - même si je ne suis pas sûr que nous puissions le clore aujourd'hui.

Il s'agit de savoir si elles relèvent en priorité du code de déontologie, qui, à notre avis, a sur ce point une valeur réglementaire, ou bien de la loi « informatique et libertés ». Nous proposons de mettre fin à cette contradiction en précisant que « les dispositions de la loi du 6 janvier 1978 [...] ne s'appliquent pas aux notes des professionnels de santé qui ne sont pas destinées à être conservées, réutilisées ou le cas échéant échangées... »

Je souhaiterais connaître la position de la commission et de M. le ministre de la santé sur ce sujet.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 8411.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. Nous avons eu de longs débats lors de la discussion de la loi de mars 2002 relative aux droits des malades et ces notes ont déjà un statut particulier.

Avis défavorable à titre personnel.

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Les dispositions de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, dont nous parlons beaucoup depuis hier, s'appliquent de plein droit au dossier médical personnel. Il en est ainsi notamment des dispositions combinées des articles L.1111-7 et L.1111-8 du code de la santé publique issus de cette loi, aux termes desquels les données de santé ayant vocation à être intégrées au dossier médical personnel s'entendent des seules informations qui sont formalisées et ont contribué à l'élaboration et au suivi du diagnostic et du traitement, ou d'une action de prévention, ou qui ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, telles que les résultats d'examens, les comptes rendus de consultation, d'intervention, d'exploration ou d'hospitalisation, ce qui exclut notamment les notes et fiches personnelles tenues par les professions de santé, conformément à l'article 45 du code de déontologie médicale.

Je partage donc l'avis de la commission.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je confirme que le cas des notes des médecins est déjà prévu dans la loi relative aux droits des malades et je me félicite que l'on se rende compte de son existence à l'occasion de l'examen de ce projet de loi.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Nous n'avons pas cessé de la citer !

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Mon intention était de permettre de tracer une frontière entre les données relevant de la loi du 6 janvier 1978 et les autres. À cet égard, M. le ministre serait bien inspiré de reprendre la définition de ces notes que donne l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé. Mais sa réforme me convient et je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 8411 est retiré.

L'article 3 a été examiné au cours de la séance du vendredi 3 juillet au soir.

Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l'article 3.

Après l'article 3

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 724 à 735.

La parole à M. François Liberti.

M. François Liberti. Ces amendements visent à supprimer le numerus clausus à l'entrée des études de médecine pour plusieurs raisons, à commencer par les besoins de formation des personnels de santé.

Le rapport Berland de novembre 2002 a mis à jour les problèmes de démographie médicale. Il souligne à la fois le mouvement de décrue des professionels de santé et l'augmentation générale de la population française - 6 % à l'horizon 2020 d'après les projections de l'INSEE - et plus particulièrement des personnes âgées, dont les besoins de soins sont plus importants. C'est donc la conjugaison des deux courbes qui pose problème.

L'ensemble des projections à vingt ou quarante ans montre que le nombre de médecins en exercice diminuera d'ici à 2010-2012, compte tenu de la baisse régulière depuis vingt ans du numerus clausus à l'entrée à la faculté et de la durée des études de médecine. Parallèlement, une note produite par le ministère de l'emploi et de la solidarité, datant de mars 2002, signale que la densité médicale chutera inéluctablement à 305 médecins pour 100 000 habitants en 2012. Si l'on voulait la maintenir à ce niveau plus longtemps, il faudrait porter immédiatement le numerus clausus à 9 250 étudiants pour dix ans au moins. Et pour conserver notre densité médicale actuelle, il faudrait le relever encore davantage. Nous sommes donc encore très loin du compte avec l'annonce d'un contingent de 7 000, sans que soit précisé par ailleurs quelque délai que ce soit.

Autre élément à prendre en compte dans l'évolution à long terme de la couverture médicale de la population, notamment sur le plan hospitalier : le vieillissement du corps médical. Plus de 40 % des médecins auront cinquante-cinq ans ou plus en 2013, et l'âge des médecins sera de cinquante ans en 2011. Ce vieillissement pourrait affaiblir brutalement la couverture et l'activité hospitalière au moment des départs massifs à la retraite des générations les plus nombreuses, vers 2015-2020. Dès à présent, les premières spécialités médicales touchées par ce non-renouvellement sont la pédiatrie, la gynécologie, l'anesthésie-réanimation et la chirurgie. Le risque est donc grand de voir disparaître à terme de nombreuses filières de compétences médicales.

C'est pourquoi notre groupe a déposé ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a repoussé ces amendements. Elle considère qu'il ne faut pas supprimer le numerus clausus, mais le moduler.

Rappelons-nous le passé. En 1970, M. Edgar Faure ouvrait largement les portes des universités, et le nombre d'étudiants en médecine et de médecins a augmenté de façon impressionnante. En 1983, si mes souvenirs sont exacts, un ministre, qui s'appelait Jack Ralite, a réintroduit le numerus clausus pour diminuer le nombre de médecins. Par la suite, les gouvernements successifs ont continué à l'abaisser, au point de rendre impossible toute projection dans l'avenir.

Il ne faut pas supprimer le numerus clausus, mais le moduler en anticipant et en tenant compte d'éléments quantitatifs et qualitatifs : le nombre de généralistes et de spécialistes ; les spécialités défavorisées que vous avez rappelées, telles l'obstétrique, la chirurgie et l'anesthésie ; les disparités géographiques ; le vieillissement ; et aussi la féminisation de la profession, qui est très marquée.

En tout état de cause, la commission ne pense pas qu'on puisse supprimer le numerus clausus aujourd'hui. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Le Gouvernement est tout à fait d'accord avec la commission.

Je tiens à saluer à mon tour, au nom du Gouvernement, l'arrivée dans cet hémicycle de M. Laurent Wauquiez et me réjouir de son élection. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Votre arrivée est remarquée, monsieur Wauquiez.

M. Guy Geoffroy. Et remarquable !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, qui va peut-être, lui aussi, féliciter M. Wauquiez. (Sourires.)

M. Jean-Marie Le Guen. Je félicite volontiers notre nouveau collègue d'avoir réussi à franchir le numerus clausus de l'Assemblée nationale. (Sourires.)

M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !

M. Jean-Marie Le Guen. Je suis sensible à la proposition de nos collègues communistes. La mobilisation contre le numerus clausus a marqué ma jeunesse d'étudiant en médecine. Je ne pense pas néanmoins que nous puissions passer de la situation actuelle, marquée par un véritable blocage, à une situation dans laquelle le nombre d'étudiants en médecine ne serait plus du tout maîtrisé.

Cependant, les chiffres qui ont été annoncés par le ministre, et qui sont incertains - vous l'avez souligné, monsieur Liberti -, n'ont pas encore été validés par le ministère de l'éducation nationale - sauf information contraire de M. le ministre. Nous nous heurtons toujours aux mêmes difficultés, qui ne sont d'ailleurs pas le fait de ce gouvernement. Chaque fois que des impulsions politiques tendent à ouvrir le secteur des études médicales, des difficultés d'application surgissent pour des raisons obscures. La moins obscure d'entre elles tient sans doute à Bercy, qui, ayant à arbitrer l'ensemble des formations supérieures, se trouve conduit, en raison d'une enveloppe budgétaire contrainte, à faire de petits arbitrages qui portent sur de grandes choses, en dehors de toute transparence.

On ne saurait non plus se satisfaire du gâchis humain que représente trop souvent la première année des études de médecine. Chaque année, par centaines, des étudiants et des étudiantes qui ont des compétences certaines - et dont souvent les notes sont très supérieures à la moyenne - ne sont pas reçus au concours. Une année est ainsi perdue, voire deux, ce qui entraîne de grandes déceptions. Les études de médecine ne sont adaptées aux besoins ni des étudiants ni de la population. Elles sont beaucoup trop dépendantes du cadre hospitalo-universitaire. Nous devons être capables de faire évoluer les études de médecine, notamment les premiers cycles, en visant à l'intégration du cursus d'autres professions de santé, à l'exemple de ce qui se fait pour les chirurgiens-dentistes. Quelques pas ont été faits, notamment en direction des sages-femmes. Il convient de repenser les premiers cycles et l'ensemble des études médicales en vue de les transformer en de véritables premiers cycles de santé et de les rendre ainsi plus fluides. C'est ce qui se fait dans la plupart des pays modernes. Une telle évolution est loin d'être incompatible avec des niveaux de formation scientifique élevés.

De la même façon, il nous appartient d'ouvrir l'éventail des compétences valorisées. Les compétences scientifiques - physique, chimie ou mathématiques - sont très utiles, parfois nécessaires, mais l'approche scientifique ne doit pas être exclusive d'autres compétences. Le concours est encore trop marqué par une approche qui fait de la science un simple facteur de sélection, et non un facteur de valorisation des carrières.

Les problèmes de démographie existent, mais ils ne doivent pas occulter les problèmes de fluidité et de solidarité des professions de santé. Des questions se posent sur la formation et les carrières, notamment hospitalo-universitaires.

Mes propos suscitent l'hilarité de M. Accoyer. J'imagine que c'est la joie d'être à côté de M. Wauquiez, vainqueur aux élections. Ce n'est pas tous les jours, effectivement, que l'UMP a des raisons de se réjouir.

M. Bernard Accoyer. Je ne vois pas le rapport avec la question du numerus clausus !

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. L'amendement de nos collègues communistes a le mérite de poser le problème du numerus clausus. Comme l'a si bien rappelé M. le rapporteur, ce n'est pas la suppression du numerus clausus qui résoudra les problèmes de démographie extrêmement préoccupants auxquels nous sommes actuellement confrontés, à la fois dans le domaine de la médecine et dans celui des professions paramédicales. Nous pouvons effectivement nous demander qui, demain, nous soignera et qui nous opérera. L'année dernière, à l'internat de Paris, seuls deux internes ont choisi la chirurgie digestive, ce qui ne laisse pas d'inquiéter.

La réactivité a été insuffisante, les années précédentes, si bien que les problèmes démographiques liés au vieillissement des médecins installés, à la féminisation de la profession médicale et au souhait des praticiens de bénéficier d'une plus grande liberté dans leur mode de vie n'ont pas été pris en compte. Les difficultés à venir sont extrêmement préoccupantes.

Il s'agit d'aller vers une meilleure prise en compte des besoins. C'est la raison pour laquelle nous penchons pour un numerus clausus régional par spécialité. C'est au plan régional que l'on pourra le mieux prendre en compte les besoins des années à venir et que le problème posé par le numerus clausus sera le plus aisément résolu.

Les spécialités pénibles, qui sont aujourd'hui en partie désertées, voire sinistrées, exigent, quant à elles, que le mode de rémunération des praticiens soit revu. Selon l'UDF, le statut unique actuel des praticiens hospitaliers doit être reconsidéré et il convient d'aller vers une contractualisation qui prenne en compte la pénibilité et la responsabilité de chaque profession.

Un numerus clausus régional par spécialité et la contractualisation permettraient de mieux résoudre les difficultés qui nous attendent et qu'il nous appartient de garder présentes à l'esprit, de peur que nous ne laissions, comme ces dernières années, la situation dériver.

M. le président. Sur le vote des amendements identiques nos 724 à 735, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

......................................................................

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les amendements identiques nos 724 à 735.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

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M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 116

              Nombre de suffrages exprimés 104

              Majorité absolue 53

        Pour l'adoption 15

        Contre 89

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 6594 à 6608.

La parole est à M. Alain Claeys.

M. Alain Claeys. Ces amendements visent à reprendre la discussion, entamée à l'ouverture de nos débats, sur la rémunération du médecin traitant.

La rémunération du médecin traitant demeure fondée principalement sur le paiement à l'acte. Mais si nous souhaitons rester cohérents avec les propos que nous avons tenus et reconnaître le rôle spécifique du médecin traitant, consécutif à la réorganisation des soins, il est nécessaire d'envisager des rémunérations complémentaires à la rémunération à l'acte.

Les années qui viennent donneront à chacun l'occasion de vérifier que, dans les secteurs démographiques les plus touchés par la pénurie médicale, le médecin traitant, dans le cadre des réseaux de soins, aura à jouer un rôle de santé publique de plus en plus grand.

Si nous voulons que les médecins traitants, qui joueront déjà ce rôle, puissent également en jouer un dans le cadre de la prévention, il est normal que nous nous interrogions sur les rémunérations complémentaires à la rémunération à l'acte. Ces amendements visent à instaurer une démarche de transparence. On ne saurait vouloir attribuer aux médecins traitant de nouvelles fonctions et ne pas s'interroger avec eux, par voie conventionnelle, sur des rémunérations complémentaires.

Telle est la raison pour laquelle nous interrogeons le Gouvernement. Chacun peut le constater sur le terrain : cette préoccupation chemine aujourd'hui chez les médecins libéraux. Nous devons en tenir compte dans le cadre du présent projet de loi si nous souhaitons donner tout son sens à la réorganisation des soins sur l'ensemble du territoire, notamment dans les territoires les plus défavorisés, qu'ils soient ruraux ou urbains.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Le projet de loi ne tire pas les conséquences, sur le plan de la rémunération, de la création, à laquelle nous sommes favorables, du médecin traitant. La proposition d'une rémunération complémentaire correspond à la reconnaissance du rôle spécifique du médecin traitant. Il aura en effet à assumer un travail spécifique - il suffit de lire le projet de loi -, qui le fera choisir par ses patients. La question de la rémunération tant de ce travail que des autres missions que notre collègue Alain Claeys a évoquées, notamment celle de prévention, que nous appelons tous de nos vœux, mérite d'être prise en considération.

L'existence d'une rémunération complémentaire, à côté du paiement à l'acte, est-elle encore une question d'actualité, ou du moins une question qui peut faire débat ? Non, parce que le principe en est déjà inscrit dans le code de la sécurité sociale, à l'article L. 162-5.

Pour autant, on ne peut pas nous opposer cet article, dans la mesure où il ne peut pas prendre en compte le rôle du médecin traitant, créé par le texte que nous examinons.

On peut citer des cas dans lesquels la nature de cette rémunération a été prise en considération. Je pense notamment à la convention relative aux chirurgiens-dentistes. Mais il me semble important qu'on inscrive le principe même dans la loi, quitte à en préciser les modalités dans la convention.

Il est cohérent de reconnaître le rôle important et spécifique du médecin traitant, et d'inviter, par ailleurs, à faire en sorte que, dans le cadre de la négociation, les missions particulières de ce médecin traitant se traduisent dans sa rémunération.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Depuis le début de la discussion, nos collègues de la majorité et les représentants du Gouvernement font de nous des adversaires du paiement à l'acte. Cela n'a pas de sens. Ils deviennent du même coup les défenseurs intégristes du paiement à l'acte. Or ils font fausse route.

Une telle position ne correspond à aucune philosophie, ne s'appuie sur aucune raison économique liée au fonctionnement de notre système de santé et ne répond pas aux aspirations des professionnels de santé.

Nous sommes aujourd'hui à une période charnière. Du fait du numerus clausus, la pyramide des âges est telle qu'aujourd'hui de nombreux médecins ont autour de cinquante ans. Ceux-ci ont construit leur clientèle et mis en place leur pratique, mais ils aspirent maintenant à travailler autrement. Ils connaissent les limites qu'il y a à multiplier les actes et ils sont ouverts à une évolution qualitative de leurs pratiques.

Leurs consoeurs et confrères, plus jeunes et moins nombreux, ont depuis toujours un rapport différent au travail. Ils ne souhaitent pas se lancer dans la suractivité. Ils souhaitent qu'on reconnaisse la valeur de leur travail et de leur formation, mais aussi les conditions de travail dans lesquelles ils veulent exercer.

Les quelques « jongleries » auxquelles le paiement à l'acte intégral conduisait leurs prédécesseurs ne les intéresse pas vraiment. Ils désirent intégrer et valoriser certaines activités qui vont au-delà du recours aux soins : la prévention, le dépistage, l'éducation pour la santé. Ils veulent pouvoir consacrer plus de temps avec un malade. Cela doit être considéré comme largement équivalent à des convocations multiples qui ne justifient pas toujours une rémunération complète.

Toutes ces évolutions sont en cours. Elles sont d'ailleurs nécessaires.

Les deux tiers des médecins français ont une activité salariée. Cela n'a jamais abouti à remettre en cause leur pratique et leur liberté. Ce n'est certainement pas le cas de nos nombreux collègues PU-PH ici présents, qui ne sont pas venus parmi nous pour trouver la liberté de prescription. Ils l'avaient déjà...

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est de la provocation ! (Sourires.)

M. Jean-Marie Le Guen. Cette évolution est liée au fonctionnement de notre système de santé, qui n'est pas soumis aux auspices du marché, mais qui ne doit pas fonctionner comme une administration.

Nous souhaitons développer à l'hôpital, comme dans l'ensemble de notre système de santé, une rémunération mixte : une rémunération forfaitaire et une rémunération à la tarification, à l'activité. Cette rémunération mixte nous permettra de nous engager vers les évolutions qui nous semblent utiles : la médecine de groupe, la médecine en réseau, la fusion des activités médicales et des activités hospitalières.

Une approche plus pragmatique de la rémunération du médecin apportera davantage de qualité et d'efficacité à notre système de santé.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Nous ne sommes pas opposés au principe du paiement à l'acte. Nous en sommes même aujourd'hui les meilleurs défenseurs !

J'ai rencontré récemment le président de la Confédération syndicale des médecins français. Celui-ci vient de réaliser un sondage auprès des étudiants de dernière année, d'où il ressort que deux tiers d'entre eux souhaitent exercer sur un mode salarié - mode salarié exclusif, en l'occurrence. Si ces intentions se confirmaient lorsque ces étudiants viendront à exercer, l'existence de la médecine libérale serait menacée et nous n'aurions aucun moyen de pallier son dépérissement.

Nous sommes conscients que le paiement à l'acte a certaines vertus, tout comme le colloque singulier, le choix du médecin auquel les Français sont attachés. Cela dit, l'exercice a ses limites, évidentes, que M. Le Guen nous a fort bien décrites.

Notre système de soins est excellent au niveau de l'acte curatif, mais il ne prend pas suffisamment en compte d'autres dimensions - santé publique, prévention, éducation sanitaire.

Le mode de rémunération de la médecine libérale doit évoluer. Il s'agit précisément de prendre en compte d'autres préoccupations de santé publique, ou d'autres éléments concourant à la qualité de la médecine de ville, comme la formation continue du médecin ou le respect de protocoles, qui nécessitent des périodes d'évaluation.

Nous sommes très attachés à cet objectif, certes indicatif, mais qui correspond à notre volonté de voir évoluer notre système de soins : que 30 % de l'activité médicale libérale soit rémunérés sur une base forfaitaire.

M. le président. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. Tout à l'heure, M. Dubernard a évoqué Jack Ralite et sa politique. Je rappellerai qu'une des mesures principales du gouvernement de l'époque fut de prendre en charge certaines inégalités dans le domaine de la santé qui avaient été constatées sur le terrain. On le fit à travers des outils de promotion de la santé, qui distinguaient les régions bien dotées des régions mal dotées.

L'amendement qui vous est présenté permet de dégager deux notions essentielles, qui rétabliraient un peu plus d'équité entre les patients : la notion de formation et la notion de prévention.

Nous savons que les pratiques médicales, notamment dans le domaine libéral, sont fort différentes les unes des autres. Tel médecin reçoit quatre, cinq ou six malades en une heure. Tel autre en reçoit seulement un ou deux et prend le temps du colloque singulier, comme certains l'ont évoqué.

Il nous paraît important de reconnaître le travail particulier que font déjà certains médecins, et de leur rendre hommage, mais aussi de pousser ceux qui n'y passent pas le temps nécessaire à suivre une formation ou à faire de la prévention en direction de leurs patients.

Il nous paraît important, également, de mettre en place un dispositif incitatif. Cela aurait des conséquences positives : une plus grande unification des pratiques professionnelles sur l'ensemble du territoire ; une prise en charge similaire de tous les malades. Un malade averti exigera de son médecin certaines informations que tel autre, ignorant les arcanes du système, n'osera pas demander.

Une politique de santé publique digne de ce nom, si on entend préserver le caractère libéral de la médecine, ne peut pas s'exonérer d'un certain nombre de mesures générales, collectives, même mises en œuvre dans le cadre de protocoles ou de conventions définis avec les médecins libéraux.

Autre conséquence positive : la réduction des dépenses. Si la prévention se généralise, si le colloque singulier se développe au bénéfice de tous les malades, et non pas d'une minorité, certaines pathologies n'apparaîtront pas et les dépenses curatives s'en trouveront considérablement amoindries.

On sait à quel point le système de santé reste inégalitaire. Les différences d'espérance de vie sont importantes selon les catégories socio-professionnelles. Cela est dû à des différences de conditions de travail, mais aussi au fait que l'accès des uns et des autres à la médecine libérale est plus ou moins facile. Par ailleurs, les actions de prévention sont souvent négligées.

Enfin, si l'on impose à certains médecins libéraux de passer le temps nécessaire pour dialoguer avec ses malades, il ne pourra pas les « expédier », comme cela se fait dans certaines zones.

Notre amendement devrait concourir à la fois à la réduction des dépenses et à l'amélioration de la prise en charge des malades. Au-delà de la prévention, les actions de formation qui pourront être menées seront importantes. Il arrive encore trop souvent que certains médecins ne se soient pas mis à jour, que des dérapages, des retards dans la prise en charge, voire des erreurs médicales se produisent. Certains autres l'ont fait, parce qu'ils sont plus disponibles ou parce qu'on les a aidés et ils se trouvent ainsi favorisés. Nous suggérons ainsi, à travers cet amendement, d'instituer une plus grande équité entre les médecins.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable. Je rappelle, mes chers collègues, que l'article 5 renvoie la détermination du mode de rémunération du médecin traitant à la convention, c'est-à-dire aux partenaires conventionnels. On pourrait leur faire confiance...

Vous me permettrez tout de même de m'interroger...

M. Jean-Marie Le Guen. C'est un début !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je ne suis pas un intégriste du paiement à l'acte, pas plus que mes collègues PU-PH...

M. Jean-Marie Le Guen. Non, vous en êtes un ayatollah !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Pourquoi avoir déposé ces amendements avant l'article 3, et non à l'article 5, ce qui eût été leur place normale ? N'est-ce pas pour mettre en exergue ce raisonnement, qui pourrait être interprété comme une remise en cause du paiement à l'acte ?

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. C'est insidieux !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Pourquoi autant d'amendements, ces derniers jours, et de discours dans la discussion générale ont-ils mis le doigt sur la part forfaitaire ? Cette insistance signifierait-elle que vous souhaitez voir progressivement le paiement forfaitaire remplacer le paiement à l'acte, ce dernier ne devenant plus que complémentaire du forfait ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marie Le Guen. C'est encore plus grave !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. À l'article 1er, n'est-ce pas un amendement socialiste qui tendait à supprimer toute référence à l'assurance maladie pour ne mentionner, à tous les niveaux d'intervention, que l'État ?

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. C'est l'étatisation à l'anglaise !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Les médecins libéraux, généralistes et spécialistes, qui nous écoutent ou qui liront nos débats auront, comme moi, lieu de s'interroger.

M. Jean-Marie Le Guen. Ah !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Le plaidoyer de M. Bapt en faveur du paiement à l'acte n'était - c'est le moins qu'on puisse dire - guère convaincant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Les choses sont simples : la loi prévoit que la convention détermine le mode de rémunération et les missions particulières des médecins traitants. Il n'est pas souhaitable qu'elle intervienne directement dans un domaine qui doit rester au cœur de la relation conventionnelle. Nous croyons à la démocratie sociale, y compris avec les syndicats des professions de santé. Ces amendements doivent être rejetés.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. L'interrogation politique de M. le rapporteur, sans grande consistance, est amusante.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Elle est pourtant très sérieuse !

M. Jean-Marie Le Guen. Il est dommage - mais peut-être pas étonnant - de laisser entendre qu'on puisse prendre les médecins français pour des gogos. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est vous qui les prenez pour des gogos !

M. Jean-Marie Le Guen. Alors que nous discutons de leur statut et de leur rémunération, vous voulez leur faire peur, comme aux petits enfants à la veillée. Cette attitude paternaliste vis-à-vis du corps médical est totalement déplacée, caricaturale et irrespectueuse.

Faut-il renvoyer à la convention ? Nous vous le dirons souvent au cours du débat : vous renvoyez tout à la convention, tant il est vrai que le maître mot très libéral du Gouvernement est de ne surtout pas prendre de responsabilité, de laisser les choses se faire en dehors de la structure politique. Certains sujets doivent, certes, être renvoyés à la convention. Mais nous pensons, sans qu'il soit question d'en fixer le niveau, que la rémunération est un élément structurant de l'offre de santé.

M. Xavier de Roux. Que veut dire « structurant » ?

M. Jean-Marie Le Guen. C'est ce qui induit un type de comportement plutôt que d'autres, mon cher collègue. Cela veut dire aussi que si nous voulons que soient pris en compte les éléments de qualité, dont nous admettons tous, en principe, qu'ils contribuent à faire évoluer la pratique médicale, il faut introduire cette dimension, et ne pas simplement la laisser dans le champ du dialogue conventionnel. Sur ce sujet, comme sur d'autres éléments de qualité, comme l'évaluation ou la formation, nous souhaitons que l'État garantisse les éléments fondateurs du fonctionnement de notre système de santé.

M. Xavier de Roux. Comprenne qui pourra !

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. J'aimerais savoir ce que, dans cette affaire, devient le médecin référent que vous aviez créé .

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Pas nous !

M. Maxime Gremetz. En tout cas, vous ne l'avez pas supprimé. Nous aurons donc désormais un médecin référent et un médecin traitant. Et quoi encore ?

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Un médecin de famille !

M. Maxime Gremetz. Je pose, monsieur le ministre, une question précise à laquelle j'attends une réponse précise : que devient le médecin référent ? Vous l'avez jeté à la poubelle ?

M. Xavier de Roux. Au cercueil !

M. Jean-Marie Le Guen. Que devient Jacques Barrot ?

M. Gérard Bapt. À Bruxelles !

M. Maxime Gremetz. Si je peux me permettre, monsieur le ministre, vous êtes plus convaincant dans la brochure que vous avez fait éditer que vous ne l'êtes dans l'hémicycle.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. Vous êtes plus attentif quand vous lisez la brochure !

M. Maxime Gremetz. Je ne sais pas qui l'a écrite, mais, au moins, elle est lisible. J'y comprends quelque chose !

M. Bernard Deflesselles. Bonne nouvelle !

M. Maxime Gremetz. Si je comprends, tout le monde peut comprendre. D'ailleurs, je vais vous la lire et répondre ainsi, à la place du ministre, aux questions de nos collègues :

« Pourquoi un médecin traitant ?

« Le médecin traitant, ce sera celui qui connaît le mieux le patient. Il appréhendera globalement l'individu dans toutes ses dimensions. Cette relation de confiance permettra au médecin traitant d'orienter le patient, avec son accord, au mieux de ses besoins.

« Le médecin traitant respectera-t-il le principe de la liberté de choix ?

« Bien sûr. Le patient demeurera libre non seulement de choisir ou non un médecin traitant, mais aussi d'accéder à un médecin spécialiste en dehors de l'orientation par son médecin traitant. »

Bizarre ! On nous dit que le malade devra absolument consulter un médecin traitant, mais qu'il pourra ne pas tenir compte de son avis et aller voir un spécialiste. L'efficacité du dispositif me semble limitée.

Mais voyons la suite :

« Quel sera son rôle ?

« Généraliste ou spécialiste, le médecin traitant coordonnera le dossier médical personnel, et adressera le patient, avec son accord, vers le professionnel de santé le plus apte à traiter sa situation spécifique.

« Qui pourra être médecin traitant ?

« Le médecin traitant pourra être n'importe quel médecin qui l'accepte, généraliste ou spécialiste. Ce sera le médecin que le patient verra le plus souvent et qui le connaîtra le mieux. »

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est l'article 4, monsieur le président !

M. Maxime Gremetz. Si je comprends bien, pour être médecin traitant, le médecin devra voir très souvent son patient.

Je poursuis :

« Quelle sera la procédure de choix du médecin traitant ?

« Le patient choisira lui-même son médecin traitant en accord avec celui-ci, et en informera sa caisse d'assurance maladie. »

Si tout le monde est suffisamment éclairé, je passe à une autre question :

« Pourra-t-on imposer un médecin traitant ?

« Non, la réforme garantira le libre choix du patient et le libre accès aux soins.

« Un patient pourra-t-il changer de médecin traitant ?...

« Le patient pourra modifier son choix à tout moment et librement en informant personnellement et par écrit son médecin et sa caisse primaire d'assurance maladie. »

Autrement dit, le patient peut changer de médecin traitant tous les jours. C'est extraordinaire !

Ou encore : « Un patient pourra-t-il avoir plusieurs médecins traitants ? » (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Je tiens à faire part à mes collègues de ces questions- réponses que les médecins ont reçues avant nous. Ils ont déjà entre les mains cette brochure qui leur explique une loi qui n'est pas encore votée, qui n'en est d'ailleurs qu'au début de sa discussion. Et la représentation nationale ?

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Je réponds à la place du ministre. Si j'ajoute ses réponses à mon temps de parole, cela me donne droit à dix minutes ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Vous ne pouvez pas répondre à la place du ministre.

M. Maxime Gremetz. Vous ne voulez pas que j'informe la représentation nationale ?

M. le président. Je vous rappelle, monsieur Gremetz, que nous discutons des amendements nos 6594 à 6608.

M. Maxime Gremetz. C'est bien cela !

M. le président. Vous avez dépassé les cinq minutes qui vous sont imparties. Je vous prie donc de conclure votre propos.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, ne me bousculez pas !

Écoutez plutôt la conclusion, qui est aussi remarquable qu'intéressante (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) :

« Un patient pourra-t-il décider de ne pas recourir à un médecin traitant ou de ne pas suivre ses prescriptions d'orientation ? »

M. le président. Monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. C'est important, monsieur le président !

« Chacun conservera sa liberté... Néanmoins, les patients qui ne souhaiteraient pas s'inscrire dans ce dispositif se verront appliquer une majoration de la part restant à leur charge. » (« Et voilà ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) C'est bien là le problème !

Mme Muguette Jacquaint. La belle liberté !

M. Maxime Gremetz. Pour toutes ces raisons, et puisqu'on refuse de nous entendre, je demande un scrutin public. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Monsieur Gremetz, je souhaite que chacun puisse s'exprimer, sans abuser.

M. Maxime Gremetz. Tout à fait !

M. le président. Vous fréquentez cette maison depuis assez longtemps pour savoir que vous pouvez disposer de cinq minutes - non de huit - pour répondre au Gouvernement ou à la commission.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je souhaite informer gentiment M. Gremetz qu'il a parlé de l'article 4 du début à la fin de son intervention. Cela signifie peut-être qu'il n'interviendra pas audit article.

M. le président. Sur le vote des amendements n os 6594 à 6608, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Richard Mallié.

M. Richard Mallié. M. Gremetz a bien mal employé ses cinq minutes de temps de parole. Il aurait mieux fait de développer ses propres arguments plutôt que de répondre à la place du ministre.

Quant à M. Jean-Marie Le Guen, je le trouve incohérent. Depuis hier, il nous dit que nous ne respectons pas la liberté des patients avec le dossier médical personnel. Puis, il nous reproche de les laisser choisir leur médecin traitant. Du reste, il oublie avec un certain culot que, pendant cinq ans, ses amis ont fait voter des textes sans les avoir soumis à concertation. Les mots d'ordre de notre majorité sont, en revanche : action et concertation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Maxime Gremetz. Vous ignorez la concertation !

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Certains collègues s'étant posé la question, je précise, tout d'abord, que nous allons voter les amendements du groupe socialiste. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Cela étant dit, nous avons été interpellés par M. le rapporteur, qui nous a accusés d'incohérence parce que nous ne cessons depuis le début du débat de vouloir renvoyer à l'État ce qui, selon lui, relève de l'assurance maladie. Mais, monsieur Dubernard, la santé publique est bien de la responsabilité de l'État. M. le ministre de la santé n'a-t-il pas dit lui-même, à plusieurs reprises, que celui-ci était garant des grandes orientations de santé publique dans notre pays ? Par ailleurs, si l'on part du constat, qui est partagé, selon lequel la prévention et l'éducation sanitaire ne sont pas suffisamment prises en compte par notre système de santé, comment renvoyer des éléments aussi importants de la santé publique à une simple négociation conventionnelle, qui, tout le monde le sait, ne porte que sur des questions matérielles telles que les niveaux de rémunération ? Comment renvoyer à un simple dialogue entre le gestionnaire et les représentants syndicaux de médecins une dimension essentielle de la santé publique que le ministre lui-même nous dit ressortir avant tout de la garantie de l'État ?

Monsieur le rapporteur, si je suis un mauvais avocat, c'est peut-être parce que je suis médecin. Néanmoins, l'art de la répétition devrait vous conduire à comprendre cet argument de base qui fonde notre raisonnement dans ce débat.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je ne suis pas sûr, monsieur Bapt, de bien comprendre ce que vous voulez dire. Mais, premièrement, je m'interroge sur votre insistance à affaiblir le paiement à l'acte dans notre système de santé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Gérard Bapt. Nous ne voulons pas l'affaiblir !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Deuxièmement, pour revenir à mon intervention de tout à l'heure, j'ai rappelé, pour m'en étonner à nouveau, qu'un amendement du groupe socialiste sur l'article 1er tendait à supprimer toute référence au régime d'assurance maladie et aux partenaires sociaux, bref à l'originalité de notre système d'assurance maladie à la française. Voilà ce qui me pousse à m'interroger et je pense que les médecins libéraux, spécialistes et généralistes, s'interrogeront également.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les amendements identiques nos 6594 à 6608.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur les amendements :

              Nombre de votants 177

              Nombre de suffrages exprimés 177

              Majorité absolue 89

        Pour l'adoption 38

        Contre 139

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Article 4

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 4.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. L'instauration d'un médecin traitant prévue par l'article 4 est, selon nous, une excellente initiative. En effet, pour améliorer la qualité des soins, grâce à une meilleure coordination, il est souhaitable de disposer d'un médecin traitant, que l'on pourrait appeler aussi, comme l'avait signalé notre mission spéciale, médecin pivot et qu'à une certaine époque nous appelions médecin de famille. Il connaît son patient, ses antécédents, ses modes de vie, et a sa confiance. En cas de nécessité, il l'adresse au spécialiste, qui lui fait part de ses constatations et propose un traitement adapté.

Jusque-là, nous sommes certainement tous d'accord. Comme pour le dossier médical personnel, les difficultés commencent avec le volet économique du dispositif et, notamment, avec l'obligation de passer par le médecin traitant. Que faire en cas de non-respect de cette obligation ? Vous proposez, à l'article 5, d'imposer dans ce cas des honoraires supérieurs et un moindre remboursement.

M. Maxime Gremetz. Voilà !

M. Jean-Luc Préel. Cette obligation est-elle adaptée à tous les cas de figure ? Qu'en est-il, par exemple, quand le patient est en vacances ou en déplacement, quand c'est le médecin qui est en vacances, ou encore en cas d'urgence ? La difficulté s'accroît lorsque vous reconnaissez que le médecin traitant peut, dans certains cas, être un spécialiste.

Qu'une jeune femme choisisse comme médecin traitant son gynécologue est bien compréhensible mais est-ce ce dernier qui lui conseillera d'aller voir un autre spécialiste en cas de nécessité, par exemple, un ORL ou un cardiologue ? Le généraliste, de son côté, ne peut-il prescrire lui-même une contraception et réaliser des frottis ? Les généralistes s'en déclarent capables.

Le médecin traitant pourra être un pédiatre, mais les généralistes peuvent très bien soigner également les enfants. Un ophtalmologiste peut être désigné comme médecin traitant en cas de problèmes de vue, un neurologue en cas de maladies neurologiques, un cardiologue en cas d'insuffisance cardiaque ? Dans le cas de maladies chroniques, chaque spécialiste peut être considéré comme médecin traitant. Mais le propre de celui-ci n'est-il pas d'être essentiellement compétent dans sa spécialité ? Certes, il est prévu que l'accès direct au spécialiste sera possible dans le cas d'un protocole - par exemple l'examen ophtalmologique périodique d'un diabétique dans le cadre d'un contrat de soins.

Nous reverrons à l'article 5 la question de la liberté d'honoraires en cas de non-respect des dispositions de l'article 4. Il s'agit là d'une demande forte des médecins spécialistes, dont les honoraires n'ont pas été relevés depuis plusieurs années, alors que leurs frais ont augmenté de façon importante : je pense notamment au coût des assurances. Mais, si l'on est convaincu de l'intérêt d'un médecin traitant, ne vaudrait-il pas mieux favoriser le parcours de soins et, par conséquent, mieux rémunérer le médecin et mieux rembourser le patient qui s'engage dans un tel parcours, plutôt que de pénaliser celui qui souhaite déroger à cette procédure ? Le rapporteur, lui-même, écrit dans son rapport, page 132, d'une part, que « des mesures coercitives, qui subordonneraient de manière stricte l'accès au médecin spécialiste à une consultation de médecin généraliste, se heurteraient au principe du libre choix du praticien par le malade », et, d'autre part, que cet article vise à « modifier les comportements par des mécanismes incitatifs et structurants ». La sanction d'un moindre remboursement me paraît plus coercitive qu'incitative. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Gérard Bapt et M. Maxime Gremetz. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Comme précédemment pour le dossier médical personnel, l'instauration d'un médecin traitant paraît relever d'une bonne idée mais le flou qui l'entoure montre qu'elle suit une même ligne directrice qui est : comment faire des économies ? Les articles 4 et 5 pourraient d'ailleurs s'appeler : de la difficulté de faire des choix.

La France est un des pays où l'on compte le plus de spécialistes exerçant en ville et où, par conséquent, beaucoup de patients ont pris l'habitude d'aller les consulter directement. Vous nous expliquez aujourd'hui que tout cela a des conséquences financières, que le recours au spécialiste est une source d'inflation des dépenses et qu'il faut donc le contrôler.

Vous déclarez aussi vouloir, par l'instauration du médecin traitant, lutter contre le nomadisme médical, source, lui aussi, d'inflation de dépenses et d'actes inutiles.

L'instauration d'un médecin traitant est, en soi, une bonne idée. Nous avons déjà connu le médecin référent, dont nous aurions aimé que vous tiriez un bilan plus exhaustif que celui qui figure dans le rapport, afin de voir ce qui valait la peine d'être gardé et ce qu'il fallait supprimer.

Le mieux, à nos yeux, aurait été une réflexion sur l'organisation globale des soins. Mais, depuis le début du débat, nous déplorons son absence alors qu'elle aurait dû être la colonne vertébrale de votre projet de loi.

Il n'y a pas de place non plus, nous venons de le voir, pour un débat sur le type de rémunérations. Vous avez décidé d'en rester au paiement à l'acte, comme si celui-ci était gravé dans le marbre, alors que des compléments de rémunération seraient concevables. Pour l'instant, rien de tout cela n'est prévu dans le projet de loi.

Finalement, l'instauration du médecin traitant aura pour seul résultat de permettre, d'un côté, de moindres remboursements aux patients et, de l'autre, des majorations de rémunérations pour les médecins, sauf pour les patients à payer plus cher leur complémentaire puisque, comme l'a indiqué le rapporteur, les assurances complémentaires pourront prendre en charge, si elles le désirent, la majoration de la participation de l'assuré.

M. François Liberti. Eh oui, d'un côté, moins de soins et, de l'autre, des honoraires plus élevés !

Mme Martine Billard. On aboutit à cette situation paradoxale que certains spécialistes auront tout intérêt à ce que les patients ne respectent pas l'obligation du médecin traitant pour pouvoir augmenter leurs revenus,...

M. Gérard Bapt. Eh oui !

Mme Martine Billard. ...tandis que d'autres, comme les pédiatres, que l'on pourra consulter directement, ne pourront appliquer de majoration.

M. Francis Delattre. Leurs honoraires ont été revalorisés !

Mme Martine Billard. Vous introduisez donc des inégalités à la fois entre les patients et entre les médecins.

Je ne suis pas contre l'idée de limiter l'accès aux spécialistes. Pour aller chez un ophtalmologiste ou un dentiste, il n'y a évidemment pas besoin de passer par son médecin, mais dissuader d'aller consulter un spécialiste dès l'apparition des premières douleurs me semble, du point de vue de la santé, une bonne idée. L'ennui, c'est que ce n'est pas vraiment cette bonne idée que vous avez puisque vous laissez la possibilité à ceux qui en ont les moyens d'aller, s'ils le souhaitent, consulter un spécialiste au moindre bobo, du moment qu'ils payent.

Ainsi, votre système tourne à l'absurde.

M. Xavier de Roux. Ce n'est pas du tout absurde !

Mme Martine Billard. Si, car de deux choses l'une : soit vous instaurez le médecin traitant pour améliorer la santé de nos concitoyens et l'organisation de notre système de santé et, dans ce cas, il ne faut pas prévoir de mieux rémunérer les spécialistes qui accepteraient de recevoir des patients directement, soit vous ne cherchez qu'à diminuer les dépenses publiques au détriment de ceux qui n'ont pas les moyens de payer des spécialistes, en faisant payer plus ceux qui voudraient garder leur liberté, et vous permettez aux spécialistes - ce que vous n'osez pas faire officiellement - d'augmenter leurs rémunérations. Il est à noter d'ailleurs - et il faudrait avoir également un débat sur cette question - que nombre de spécialistes, notamment en médecine ambulatoire, dépassent largement le tarif de base. Je veux bien qu'il soit possible pour une femme de choisir sa - ou son - gynécologue comme médecin traitant, mais, vu le tarif des gynécologues en médecine de ville, cela supposera d'avoir de sacrés revenus. Ce n'est pas la caissière de supermarché payée au SMIC qui pourra se le permettre.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. On parle des gynécologues médicaux !

Mme Martine Billard. Bref, l'instauration d'un médecin traitant est une bonne idée dont il ne sort rien, parce que vous ne l'envisagez que sous l'angle financier.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. L'article 4 a pour objet d'offrir à tout assuré ou ayant droit âgé de plus de seize ans la possibilité de choisir un médecin traitant de son choix. D'une façon coercitive, les patients qui ne souhaiteraient pas s'inscrire dans ce dispositif ou qui consulteraient un autre médecin sans prescription du médecin traitant et en dehors de protocoles de soins pourraient se voir appliquer une majoration de la part restant à leur charge, dans des conditions fixées par décret et par décision de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie. Je trouve, monsieur le ministre, que l'on fait mieux dans le domaine des libertés.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Vous êtes mal placée pour parler de liberté !

Mme Muguette Jacquaint. Nous avons bien évidemment déposé un certain nombre d'amendements sur cet article, mais je voudrais évoquer les conséquences de cette disposition sur l'accès à la gynécologie médicale.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Ah !

Mme Muguette Jacquaint. Plus de 60 % des femmes en France consultent une fois par an un gynécologue. Cette statistique concerne 69 % des femmes de famille modeste. La liberté de choix du médecin dans ce domaine particulièrement intime est absolument fondamentale.

Lors d'une réunion avec le comité de défense de la gynécologie médicale, vous avez assuré, monsieur le ministre, que, dans le projet de loi, l'accès direct à cette spécialité était maintenu, et ce dans les conditions actuelles de remboursement.

Monsieur le ministre, ce n'est pas ce que prévoit l'article 4. Le renvoi au décret n'offre aucune garantie. Il est à craindre que le respect des objectifs de dépenses ne l'emporte sur les promesses faites.

À partir de ce moment-là, votre responsabilité est grande, car vous allez délibérément affaiblir cette spécialité si précieuse pour la santé des femmes.

Comme cela avait été le cas pour les retraites, les femmes sont les grandes perdantes du projet de loi.

M. Maxime Gremetz. C'est vrai !

Mme Muguette Jacquaint. Comment oublier que cette exception française qu'est la gynécologie médicale, grâce à une prise en charge personnalisée et efficace, fait que 6,7 % seulement des femmes ont subi une hystérectomie, contre 30 % à 50 % dans d'autres pays occidentaux ?

En France, on constate l'un des meilleurs taux de survie après un cancer du sein : 80,5 % à cinq ans contre 69 % en Angleterre, et le nombre des cancers de l'utérus a été divisé par quatre en vingt ans !

Alors que la lutte contre le cancer est une priorité nationale, vous risquez de détruire un système de prévention qui, compte tenu du rapport privilégié des femmes de tous âges avec leur gynécologue, a fait ses preuves, depuis de nombreuses années. Nier cette évidence, c'est porter atteinte à la santé, aux droits fondamentaux des femmes et notamment au respect de leur intégrité physique.

Nous défendrons des amendements sur ce sujet. Si vous n'apportiez pas une attention suffisante à ce point, cela engagerait, monsieur le ministre, votre responsabilité et ce serait très grave. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Le Gouvernement réinvente, avec l'article 4, le médecin référent.

Nous sommes d'autant plus tranquilles pour dénoncer ce point que nous nous étions opposés à cette conception de l'accès au médecin référent lors de sa création dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998.

En effet, cette conception de l'accès à la médecine n'est pas la nôtre. Nous ne pouvons pas conditionner le niveau de remboursement des soins, comme le fait le présent projet de loi, ou l'ouverture de la dispense d'avance de frais, comme le prévoit le dispositif du médecin référent, au passage devant un médecin préalablement désigné.

Nous nous sommes intéressés à l'argumentation développée à l'époque. Il s'agissait d'« organiser des systèmes de soins », de « faciliter l'accès aux soins », mais aussi « d'assurer à chacun un suivi médical », de « participer, grâce à une coordination renforcée, à l'optimisation des dépenses de santé ».

Nous retrouvons aujourd'hui les mêmes arguments. Je lis l'exposé des motifs de l'article 4 du projet de loi : « favoriser la coordination et le suivi des soins, qui sont des conditions essentielles de la qualité des soins et d'un accès optimisé au système de santé ».

Nous pouvons observer que les mêmes justifications servent des mesures déjà utilisées par le passé. Une différence notable doit tout de même être soulignée : le médecin référent n'intervenait que sur le tiers payant et n'était pas obligatoire.

Dans le cas présent, la sanction est beaucoup plus lourde. Le patient qui ne respecterait pas le circuit imposé se verrait pénalisé. J'en veux pour preuve l'exposé des motifs que je me permets de citer de nouveau : « Les patients qui ne souhaiteraient pas s'inscrire dans ce dispositif ou qui consulteraient un autre médecin sans prescription du médecin traitant pourraient se voir appliquer une majoration de la part restant à leur charge. »

J'en reviens à la phrase lancée par M. le ministre de la santé : « Je ne serai pas le ministre des déremboursements. » Que signifient les termes : « une majoration de la part restant à leur charge », sinon une réduction du niveau de prise en charge par l'assurance maladie et une part d'honoraires supplémentaire ?

Les mêmes justifications vont provoquer les mêmes résultats. Les notions de médecin référent et de médecin traitant répondent à la même logique : il faut contenir l'offre médicale et contrôler le recours aux médecins, sous prétexte de déficit. Mais quelle est la part véritable du nomadisme dans les dépenses ? Ajouté au dossier médical personnel, vous instaurez là un nouvel outil permettant de rationner les dépenses de santé.

Comment peut-on réaliser des économies en matière de dépenses de santé en obligeant un patient connaissant l'affection dont il souffre à passer devant son médecin traitant au lieu de filer directement chez le spécialiste concerné ? Ce passage obligé entraînera une double visite et une double ordonnance. C'est une mesure de simple bon sens.

Faut-il être devin pour imaginer l'impact de cette mesure ? Le ministère des finances nous a déjà donné une indication. Il a divisé par deux, et même plus, les chiffres d'économies prévisibles sur les dépenses de santé que vous aviez annoncées triomphalement et donné comme prévisible l'échec du médecin traitant - comme l'a d'ailleurs estimé le Conseil de l'Ordre, que vous semblez ne pas aimer, ou ne plus aimer.

Les vieilles recettes ne font pas de miracle. Elles sont vouées aux mêmes résultats.

Enfin, monsieur le ministre, vous allez imposer une nouvelle contrainte au patient : vous restreignez ses possibilités de choisir un médecin. Vous le reconnaissez implicitement, puisque vous vous sentez obligé de prévoir des dérogations à l'obligation de passage devant un médecin traitant avant toute sollicitation d'un spécialiste.

C'est de cette façon que commence la médecine à deux vitesses. Ceux qui ont, comme vous, les moyens financiers (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Vous avez les mêmes !

M. Maxime Gremetz. ...de dépasser cette contrainte de moindre remboursement continueront de consulter comme ils le désirent ; ceux qui ne le peuvent pas s'inscriront dans la démarche du médecin traitant. Il s'agit vraiment d'une médecine à deux vitesses.

Ce n'est pas notre conception d'un système de santé de qualité et accessible à tous. Nous avons donc déposé des amendements, pour corriger en profondeur la rédaction de cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. L'article 4 concernant le médecin traitant pourrait être présenté comme la mesure la plus sympathique et la plus intéressante de ce projet de loi.

En matière de farces et attrapes, on appellerait cela une dragée au poivre. (Sourires.) Effectivement, derrière une enveloppe sympathique et relativement attirante, nous devons avaler, d'une part, le fameux « un euro » et, d'autre part, la fin du caractère opposable des visites de spécialistes.

Cet article 4 doit être examiné dans son contexte. Il rend obligatoire - avec l'esprit extrêmement libéral qui vous caractérise - la notion de médecin traitant. Tous ceux qui ont essayé, précédemment, d'avancer sur ce terrain s'étaient cantonnés au volontariat, avec un succès relatif, sur lequel il conviendrait de s'interroger.

Vous parvenez à la notion de médecin traitant, appelé par d'autres « médecin pivot ». C'est souvent le généraliste, le médecin de famille. Ce peut être aussi, dans un certain nombre de cas, un spécialiste. Nous reviendrons sur ce point, afin d'éviter les dérives du système.

Le médecin traitant a toutes les vertus que devait avoir le médecin référent. Ce dernier avait été mis en place par Jacques Barrot, juste avant que vous ne déployiez une énergie considérable à démolir cette initiative. Il est vrai que c'est nous qui lui avons permis de « vivre ».

Monsieur le ministre, avec cet article 4, il me semble que vous mettez fin à la notion de médecin référent. Vous le copiez dans un premier temps, puis vous le supprimez. La coexistence du médecin traitant qui a exactement les mêmes fonctions et pratiquement les mêmes responsabilités que le médecin référent, sans revêtir les mêmes avantages, ni pour le patient, ni pour le médecin, n'est évidemment pas intéressante.

Je parie que vous ne pourrez pas maintenir dans les mois qui viennent la notion de médecin référent qui est substantiellement rémunéré pour remplir cette fonction, alors que vous allez demander à l'ensemble des praticiens de faire la même chose sans percevoir de rémunération. Le système du médecin référent avait des avantages pour le patient, en termes de prise en charge notamment, et il n'en sera pas de même pour le médecin traitant.

Bref, existence ou coexistence, vous n'avez pas le courage de le dire, mais vous avez dans la pratique bel et bien programmé, par pure idéologie, la fin du médecin référent. Le médecin référent, c'est plus de 10 000 généralistes qui se sont lancés dans l'aventure, c'est aussi plus de 1 200 000 patients.

Certes, il n'y a rien dans la loi, me direz-vous. J'entends bien. Mais comme vous allez précipiter la mise en place de la convention en faisant en sorte qu'elle ne maintienne pas la notion de médecin référent, vous aurez beau jeu de vous défausser de vos responsabilités : « Ce n'est pas nous... » Reste que vous avez bel et bien prévu la fin du médecin référent. Ou alors, il vous reste une possibilité : l'article 40 nous l'interdit, mais vous, vous avez parfaitement le droit d'inscrire la notion de médecin référent, non pas dans un avenant à la convention, comme c'est le cas aujourd'hui, mais dans la loi. Si vous le faites, nous pourrons croire que vous êtes décidé à défendre les médecins référents. Mais si vous ne le faites pas, c'est bien que vous avez décidé de laisser se dérouler les événements pour mieux étrangler cette expérience à tous égards extrêmement intéressante.

L'examen des amendements à l'article 4 nous donnera l'occasion de vous poser une série de questions : comment choisit-on son médecin traitant, comment le garde-t-on, quelles sont les responsabilités du praticien, etc. Mais nous n'oublierons pas pour autant le contexte et l'esprit dans lequel s'inscrit le couple formé par les articles 4 et 5 : l'objectif, défendu par la frange la plus radicale des professionnels libéraux, était bien de trouver le moyen d'obtenir le droit au dépassement et de généraliser le secteur 2. Pour faire passer la pilule, vous avez inventé ce double mécanisme, ce lien pervers qui consiste à imposer le médecin traitant pour mieux permettre au spécialiste de passer en secteur 2... Là était l'astuce politique (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), tout le monde l'a bien compris ; mais lorsque vous l'aurez mise en œuvre, nul doute que vous rencontrerez un franc succès auprès de la majorité des médecins français, généralistes et spécialistes, qui, par conviction ou par nécessité, n'ont aucunement l'intention de rejoindre le secteur 2 !

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Notre collègue Le Guen vient excellemment de démontrer comment ce texte totalement muet sur le médecin référent signe en fait son acte de décès à brève échéance. Et puisque nous parlons de décès, évoquons le souvenir : le médecin référent avait été créé par une convention de mars 1997 à laquelle tenait d'ailleurs beaucoup notre collègue Jacques Barrot. Peut-être n'est-ce pas un hasard si on l'a expédié à Bruxelles : n'était-ce pas le meilleur moyen d'effacer un des aspects positifs de son héritage ?

M. Richard Mallié. Facile !

M. Gérard Bapt. Mais sans doute son successeur et ancien suppléant aura-t-il l'occasion de nous faire part de son avis.

La convention de 1997 avait défini, dans un esprit très volontariste, la notion de médecin référent comme l'amorce d'un nouveau mode d'organisation de la médecine de ville que le pouvoir politique comme la CNAM et plusieurs syndicats représentatifs de médecins appelaient de leurs vœux. Tous insistaient dans cette convention sur l'importance de la coordination des soins et sur la nécessité de redonner un rôle central au généraliste. Point d'entrée obligé dans le système de soins, point de passage pour l'accès aux spécialistes et point de référence pour les patients, le généraliste y était décrit comme le premier étage du système de soins, rejoignant l'idée que nous défendons du « médecin pivot ». Sans doute une évaluation était-elle nécessaire ; sans doute pouvait-on également regretter l'abandon progressif, au fil des avatars qu'a connus la convention, de bon nombre des obligations qui s'imposaient aux médecins référents, dans le domaine de la formation médicale continue et de l'évaluation notamment. Mais certains engagements forts demeuraient, en particulier pour ce qui touche à l'utilisation des génériques, sujet d'actualité immédiate s'il en est.

Après avoir fait le tour de ce sur quoi les articles 4 et 5, intimement liées, restent muets, parlons maintenant de ce qu'il y a dedans.

Pour commencer, la preuve en est faite une nouvelle fois, monsieur le ministre : à chaque fois que ce gouvernement intervient, c'est pour permettre des déremboursements. « Je ne serai pas le ministre des déremboursements », avez-vous dit,...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Eh non, je ne serai pas le ministre des déremboursements...

M. Gérard Bapt. Reste qu'à chaque article de votre texte, nous tombons sur des opportunités de déremboursement ! Évidemment, vous vous défaussez à chaque fois, soit sur la future autorité de l'UNCAM, soit sur la convention...

Et le patient ? Que fera-t-il, celui qui, pour des raisons professionnelles ou de mobilité, n'aura pas pu choisir un médecin traitant particulier ? Il va tomber sous le coup d'une double peine, dans la mesure où il risquera tout à la fois d'être moins remboursé lorsqu'il ira voir un généraliste, et astreint au dépassement d'honoraires lorsque ce généraliste, parce qu'il n'est pas son médecin traitant, l'enverra chez un spécialiste ! Une fois de plus, le parcours de soins que vous prétendez mettre en place apparaît comme un moyen de contourner la convention et de libérer le secteur 2 et, derrière ses prétendus aspects de contrainte et de responsabilisation de l'assuré, d'ouvrir la porte aux déremboursements.

Prenons un exemple. Vous voulez inciter les patients à choisir un médecin traitant en les prévenant : s'ils n'en choisissent pas un, ils seront pénalisés par un moindre remboursement, selon un barème de réfaction déterminé par l'UNCAM. Mais, dans la mesure où il s'agit d'une incitation, pourquoi n'avoir pas pris le chemin inverse en augmentant le taux de remboursement pour les patients qui choisiront un médecin traitant et en conservant un taux de base inchangé pour l'ensemble des assurés, y compris pour ceux qui, pour une raison ou une autre, n'auront pas de médecin traitant attitré ?

Malheureusement, l'approche que vous avez retenue est devenue systématique. Elle est du reste conforme à la politique générale du Gouvernement, dont l'attitude consiste en permanence à renvoyer les responsabilités aux prédécesseurs - c'est l'« héritage » - ou à se défausser sur les successeurs pour ce qui a trait aux dettes et aux additions. La seule responsabilité que vous prenez, c'est de donner des compétences élargies à l'UNCAM : son directeur général aura tout loisir de procéder à des déremboursements ou de réduire les taux de prise en charge ! Pour le reste, vous vous défaussez : ce sera la faute de la convention ou des caisses...

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, l'article 4, tout comme l'article 5, subséquent, ne correspondent en rien à l'idée que nous défendons et qui consistait à réorienter, autour du médecin pivot, du médecin de famille, la médecine de ville.

M. le président. La parole est à M. Alain Claeys.

M. Alain Claeys. L'objectif, si je comprends bien, est d'insérer un patient dans une organisation de soins.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est exact.

M. Alain Claeys. Or l'article 4, de même que l'article 5, repose sur une logique de pénalités financières, une double pénalité pour le patient, tout à la fois moins bien remboursé lorsqu'il ira voir le généraliste et astreint au dépassement d'honoraires lorsque ce généraliste l'adressera à un spécialiste.

J'ai à ce propos, monsieur le ministre, deux questions précises à vous poser, qui pourraient éclairer nos débats comme le jugement de celles et ceux qui nous écoutent. Premièrement, quelle est la différence entre le médecin traitant et le médecin référent ? Comment vont-ils concrètement cohabiter ? Le premier supprimera-t-il le second ? Deuxièmement, pourquoi avoir choisi la pénalisation plutôt que l'incitation ? Voilà les deux questions qui me viennent à l'esprit au moment où nous souhaitons, les uns comme les autres, mieux organiser les soins sur le territoire et insérer chaque patient dans la nouvelle organisation.

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Guigou.

Je vous fais remarquer, madame, qu'il n'est pas autorisé d'amener des boissons dans l'hémicycle. Si tout le monde fait cela...

Mme Élisabeth Guigou. Tout le monde ne fait pas cela, monsieur le président !

M. Gérard Bapt. C'est de la Vittel !

M. le président. On peut boire aux bancs des commissions et du Gouvernement, mais pas sur les autres bancs.

Mme Élisabeth Guigou. Une injustice de plus ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. C'est navrant !

Mme Élisabeth Guigou. J'apporte ma contribution personnelle à la lutte contre l'alcoolisme et à la prévention.

M. le président. Revenons-en à l'article 4, madame.

Mme Élisabeth Guigou. L'article 4 oblige les assurés à choisir un médecin traitant, sous peine de déremboursement.

Certes, il est important de définir un point d'entrée fixe dans le dispositif de soins pour garantir au patient un parcours de soins cohérent et de qualité, dans l'intérêt de sa propre santé, et le plus économe possible pour l'assurance maladie. C'est là une idée que nous partageons et qui avait inspiré la création du médecin référent, dont vient de parler Gérard Bapt, dans la convention de 1997. Cette bonne idée a été au fil des ans améliorée jusqu'à la loi du 6 mars 2002 qui a prévu une rémunération forfaitaire pour les médecins traitants.

Malheureusement, votre projet de loi dénature cette bonne idée en pénalisant, une fois de plus, le seul assuré. En effet, c'est sur lui que vont peser, de manière très déséquilibrée, les contraintes et les sanctions alors que rien n'est demandé aux médecins. Si l'on restreint la liberté des patients dans l'accès au système de soins, il faut prévoir une contrepartie : l'encadrement de la liberté d'installation géographique des professionnels de santé. Or, cet équilibre que nous réclamons, nous ne le retrouvons pas dans cet article, tout comme nous ne l'avons pas retrouvé avec le dossier médical personnel.

Le titre de médecin traitant devrait à nos yeux avoir pour contrepartie des engagements précis du praticien en termes de qualité des soins, à l'image que ceux auxquels devaient s'astreindre les médecins référents et qui couvraient, rappelons-le, les actes de prévention, la prescription d'un minimum de génériques, les bonnes pratiques, le respect des tarifs opposables, la pratique du tiers payant et le respect d'un seuil d'activité.

Je note au passage que le texte du projet de loi ne dit rien sur le devenir des médecins référents. L'expérience conventionnelle du médecin référent suivait une tout autre démarche en récompensant ces praticiens comme les patients, les premiers par le biais de la rémunération forfaitaire, les seconds par la dispense de l'avance de frais, de façon à encourager le respect du parcours de soins et des normes de qualité.

Ce mécanisme n'a pas, c'est vrai, été suffisamment développé. Il aurait mérité d'être simplifié et renforcé dans ses incitations financières pour devenir plus attractif, mais certainement pas d'être abandonné. Vous préférez tourner le dos à cette logique : vous ne rémunérez pas mieux les médecins traitants qui s'engagent à améliorer la qualité des soins. Contrairement à ce qu'a laissé entendre à plusieurs reprises le rapporteur ces derniers jours, il ne s'agit pas pour nous de supprimer le paiement à l'acte, mais de favoriser la rémunération mixte en développant la rémunération forfaitaire en contrepartie d'engagements particuliers. Enfin, vous sanctionnez le seul patient en oubliant de faire le lien avec le parcours de soins.

Au surplus, vous renvoyez à un futur décret la définition des spécialistes en accès direct. Vous avez cité les pédiatres et les ophtalmologues ; quelles assurances pouvez-vous donner à toutes les femmes de ce pays qu'elles auront encore le libre accès au gynécologue de leur choix ? Et c'est à la négociation conventionnelle que vous renvoyez la définition précise du médecin traitant - son statut, ses obligations, sa coordination avec l'hôpital et les autres professionnels de santé.

Pour finir, ce mécanisme extrêmement déséquilibré accroîtra encore l'injustice avec l'article 5 - nous y reviendrons, mais la combinaison de ces deux articles est véritablement une machine infernale -, qui libéralise les tarifs des spécialistes. Passons sur le clientélisme d'une mesure qui permettra de fixer ses tarifs en toute liberté tout en donnant droit au remboursement par la sécurité sociale ; l'injustice de ce dispositif réside surtout dans le fait que les malades aisés, bien assurés par une complémentaire généreuse, pourront contourner sans frais le médecin traitant, tandis que les moins riches seront lourdement pénalisés.

Les assurances complémentaires pourront en effet prendre en charge la totalité de la majoration de la participation de l'assuré qui n'est pas passé par le médecin traitant, contrairement à votre dispositif de franchise par consultation - c'est l'article 11 - qui dissuade fortement les assurances complémentaires de couvrir la majoration des coûts pour l'assuré.

La porte est alors grande ouverte entre le dossier médical personnel, le dispositif de l'article 4 et de l'article 5, et celui de l'article 11. On voit bien dans quelle direction vous allez. Non seulement vous pénalisez les patients sans rien demander aux médecins, mais vous instaurez une médecine à deux vitesses ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Chantal Robin-Rodrigo.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. L'article 4, ainsi que le suivant, concerne le médecin traitant. Nul ne conteste l'importance pour les patients de s'inscrire dans un parcours de soins dont les médecins traitants seraient les pivots. Mais la façon dont vous les concevez conduira à la mise en place d'une médecine à deux vitesses. Nous n'avons d'ailleurs cessé de le dénoncer depuis bientôt une semaine : cette loi est injuste et pénalisante pour les plus faibles.

En effet, il s'agit bien d'une étatisation de notre système de santé et, de ce fait, de la mise en place progressive d'une médecine à deux vitesses. Vous instituez l'obligation d'avoir un médecin traitant, qui devra être consulté avant de pouvoir s'adresser à tout autre médecin. Ce médecin pourra d'ailleurs aussi être un spécialiste.

L'idée est de contraindre le patient et, s'il n'obtempère pas, de diminuer ses remboursements. Le résultat ne fait aucun doute : les plus aisés pourront contourner le dispositif et auront accès aux spécialistes sans recommandation. Les autres devront s'y plier et on peut craindre que les listes d'attente ne s'allongent.

Avec cet article, comme avec le précédent, nous sommes dans le flou le plus total. M. le rapporteur me dira sans doute que tout se réglera par la négociation conventionnelle. Il serait cependant utile que nous ayons des précisions quant à la forme que prendra le rattachement au médecin traitant. Si, comme Maxime Gremetz, j'avais eu, non le petit livre rouge, mais le petit livre jaune, j'aurais vraisemblablement trouvé des réponses à mes interrogations. Avant de vous les livrer, je voudrais vous faire remarquer, monsieur le ministre, que c'est à nous, élus de la nation, qu'il revient de légiférer. Et alors même que nous sommes en train d'élaborer la loi, on laisse penser que ce document « est » la loi définitive. Je vous le demande : à quoi servons-nous ?

J'en viens à mes questions.

Avez-vous prévu une formule d'abonnement ?

Les assurés qui passent par le médecin traitant verront-ils leurs remboursements revalorisés ?

S'agira-t-il d'un forfait pour les médecins qui s'impliqueraient dans une véritable coordination des soins ?

Nous avons cru comprendre que l'UNCAM peut décider de majorer la participation des assurés dans le cas où le patient n'a pas de médecin traitant !

Quid d'un patient qui ne se trouve pas dans sa zone géographique habituelle ? Un mécanisme de co-médecin, par exemple, généraliste et gynécologue, est-il prévu ?

Lorsque vous nous parlez, monsieur le ministre, d'amélioration de la qualité et de coordination de soins, nulle part il n'est fait mention de ces objectifs dans la mise en place du médecin traitant.

De même, je n'ai noté nulle part le lien avec le médecin référent. Que devient-il ?

Or, nous connaissons tous la différence entre médecin référent et médecin traitant. Le premier dispense l'assuré de faire les avances de frais. La notion de médecin traitant ne s'accompagne d'aucune contrepartie, contreparties prévues pour le médecin référent en termes de qualité de soins : prescription minimum de génériques, recommandations de bonnes pratiques, respect des tarifs opposables, seuils d'activité - 7 500 actes maximum -, etc. En sera-t-il de même pour le médecin traitant ? Je vous pose la question, monsieur le ministre.

On voit bien quelle est l'intention du Gouvernement. Il s'agit ni plus ni moins de mettre en place un mécanisme de pénalisation des assurés. Le rapport de la Cour des comptes cité dans le rapport de la commission spéciale - page 139 - rappelle cette différence.

La possibilité de compensation par les mutuelles complémentaires du moindre remboursement, en cas d'accès direct au spécialiste, est un signe d'incohérence interne au projet, et fait planer le risque d'un accès à deux vitesses aux spécialistes. Comme le souligne le rapport - page 135 - : « Les assurances complémentaires pourront prendre en charge - si elles le décident - la majoration de la participation de l'assuré» alors que la mesure mettant en place le fameux « euro » de M. Raffarin prévoit une forte désincitation fiscale au remboursement par les mutuelles, équivalant à une quasi-interdiction.

Vous le voyez, monsieur le ministre, l'article 4 nous pose problème, et, dans la discussion, nous ne manquerons pas de faire des propositions, tout particulièrement sur ce que j'appellerai la « double peine » du déremboursement. Nous souhaitons aussi avoir des précisions sur le rôle du médecin traitant. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Le Guen.

M. Jacques Le Guen. Engager un véritable dialogue avec les professionnels de santé est la seule condition pour faire évoluer l'organisation des soins, des usages et des pratiques, mais aussi le contenu des prescriptions.

Nous savons que l'encadrement de la médecine ambulatoire passe par des mécanismes d'accompagnement et de partenariat, non par des sanctions collectives. À cet égard, l'accord national de bon usage des soins d'août 2002, entre la CNAMTS et les médecins généralistes, est un exemple de ce qui peut être fait.

L'idée d'un « parcours de santé » doit être défendue, parce qu'elle s'inscrit dans cette démarche de partenariat.

La conception du médecin traitant telle que nous l'entendons est très éloignée de celle du médecin référent, car nous combattons l'idée du médecin traitant « distributeur de tickets » pour accéder aux spécialistes - sorte de médecine administrée.

Notre conception, c'est celle de la coordination des soins.

Le dispositif que vous proposez à l'article 4 est un bon dispositif parce qu'il permet d'être incitatif tout en préservant la liberté du patient.

Incitatif d'abord : à partir de seize ans, tout assuré aura la possibilité de choisir librement un médecin. Les patients qui ne souhaiteraient pas s'inscrire dans ce dispositif pourraient se voir appliquer une majoration de la part restant à leur charge par une décision de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie.

En effet, la loi prévoit que les médecins de certaines spécialités pourront pratiquer des dépassements pour les patients qui ne leur seraient pas adressés au préalable par un médecin traitant.

La loi renvoie la mise en œuvre concrète du dispositif à la convention. Pour que le dispositif soit incitatif, il ne suffit pas qu'il repose sur un mécanisme de sanction.

En effet, il faut aussi qu'en contrepartie, le patient qui joue le jeu puisse bénéficier des avantages du système conventionnel de remboursement. Il est clair qu'une concertation avec les professionnels de la santé sur les questions de tarifs opposables et de bonne prise en charge sont indispensables.

Ensuite, le dispositif qui nous est proposé est bon parce qu'il préserve la liberté du patient.

S'il est clair - mais il faut avoir le courage de le dire - que le dispositif a pour objet de freiner l'accès anarchique aux soins spécialisés de deuxième intention, comme les radiographies et autres examens, il n'est pas question de remettre en cause la liberté des patients.

Il n'est pas question de remettre en cause l'accès direct aux spécialistes : d'une part, le médecin traitant pourra lui-même être un spécialiste choisi par le patient ; d'autre part, certains spécialistes, comme les ophtalmologues, les gynécologues ou les pédiatres, pourront être consultés directement.

En réponse à Mme Billard, je précise que, dans le domaine de l'endocrinologie par exemple, une organisation en réseau permettra une rationalisation des examens, donc des coûts. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Domergue.

M. Jacques Domergue. S'il y a un article sur lequel je pensais que nous serions d'accord, c'est bien l'article 4 ! Je suis donc surpris par les réactions de certains à l'égard du médecin de famille.

M. Maxime Gremetz. Médecin traitant !

M. Jacques Domergue. La réforme vise à modifier les comportements tout en maintenant la liberté d'accès au médecin de son choix. C'est l'élément important.

On déplore aujourd'hui que la médecine soit trop cloisonnée, que le spécialiste ne prenne en charge qu'un secteur de la pathologie ou qu'une partie du corps des individus. Notre système de soins doit donc être mieux coordonné, et cela passe par le médecin de famille.

M. Maxime Gremetz. M. Domergue vient de créer une troisième catégorie de médecins !

M. le président. Monsieur Gremetz...

M. Maxime Gremetz. Après le médecin référent et le médecin traitant, le médecin de famille !

M. le président. Monsieur Gremetz, laissez l'orateur s'exprimer !

M. Jacques Domergue. Peut-on continuer à favoriser un accès anarchique aux médecins spécialistes, comme cela se produit aujourd'hui ?

En revanche, dans certaines circonstances, et ce sera précisé pour certaines spécialités - ophtalmologie, gynécologie, psychiatrie -, l'accès direct à ces médecins sera possible et le spécialiste pourra être le médecin de référence.

Nous avons voulu induire une modification des comportements. Si nous réussissons, le pari sera gagné. Mais si vous campez sur vos positions, la réforme n'apportera pas les bénéfices que l'on est en droit d'en attendre pour l'ensemble du pays.

M. Maxime Gremetz. Ce sont les médecins qui parlent.

M. Jacques Domergue. Vous faites, mesdames, messieurs de l'opposition, un procès d'intention aux médecins spécialistes : ces derniers ne pratiqueront pas automatiquement des dépassements d'honoraires.

M. Maxime Gremetz. Ça se fait déjà !

M. Jacques Domergue. Le tact, la mesure, monsieur Gremetz, ça existe ! C'est la conception même de l'activité médicale. Un médecin spécialiste qui recevra directement un patient n'appliquera pas de dépassement d'honoraires si son patient ne peut y faire face. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Maxime Gremetz. Il a raison : l'utopie nourrit la révolution !

M. le président. Monsieur Gremetz !

M. Jacques Domergue. Monsieur Gremetz, cela se voit tous les jours et les médecins qui sont présents ici vous le diront. Donc, de grâce : pas de procès d'intention !

M. Richard Mallié. Très bien !

M. Jacques Domergue. Nous ne sommes pas dupes face à l'obstruction systématique que vous pratiquez. Vous auriez dû réfléchir avant de vous opposer à un article aussi fondamental, qui aurait pu faire l'objet d'un consensus, car il va dans l'intérêt de tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Comme pour chaque article, je souhaite replacer les choses dans leur contexte et répondre aux questions qui ont été posées.

Je remercie M. Gremetz de m'avoir communiqué la photocopie d'un document que je n'avais pas reçu.

Celui-ci répond aux questions que l'on peut se poser sur le projet de réforme. Ce n'est pas le texte de loi. J'ai noté qu'il y avait quatorze excellentes questions sur le médecin traitant et quatorze réponses, qui me paraissent satisfaisantes. Et je remercie à nouveau M. Gremetz d'avoir apporté ce document, qui nous sera très utile dans le débat concernant cet article.

L'article 4 est un élément essentiel, monsieur le ministre, et je vous remercie de l'avoir placé immédiatement après le dossier médical personnel dans le projet de loi. Il va dans le sens d'une meilleure coordination des soins - personne ne peut dire le contraire -, et donc d'une meilleure qualité des soins, favorisant les filières de soins, les réseaux, les protocoles, auxquels nous sommes tous très attachés.

Je salue les propos de M. Domergue, car je crois également qu'un consensus était possible au sujet du médecin traitant. Le projet maintient le libre choix du médecin.

Pour nous, la qualité doit primer, les aspects économiques ne venant qu'au second plan. Mais si nous obtenons indirectement des économies en réduisant le nomadisme médical, dont chacun sait qu'il existe sans en connaître exactement l'impact, qui ne s'en réjouira ?

Quant aux médecins référents que certains ont remis en question, il en existe déjà. Ils sont plus de dix mille, et plus d'un million et demi de patients sont inscrits chez eux.

M. Jean-Marie Le Guen. Et vous voulez les supprimer !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Non ! Il n'en est pas question. Finissez-en avec les procès d'intention ! C'est la litanie de l'opposition depuis le début de l'examen du texte.

M. Jean-Marie Le Guen. Attendons ce que dira le Gouvernement !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Mes chers collègues, le libre choix du médecin n'est pas remis en cause. (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Maxime Gremetz. En payant !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est un des éléments clés de cet article.

M. François Liberti. La liberté a un prix !

M. le président. Messieurs, je vous en prie !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. En outre, nous proposons de revaloriser l'activité du médecin généraliste.

M. Jean-Marie Le Guen. Ah bon ? Où cela figure-t-il ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. En devenant le médecin traitant privilégié, il est très revalorisé.

M. Jean-Marie Le Guen. Il va être content !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Monsieur Le Guen, vous ne pouvez pas vous opposer à cela. Les gouvernements précédents se sont attachés à revaloriser l'activité des médecins généralistes et leur formation par la mise en place de l'examen classant. Les missions du médecin traitant seront définies par la voie conventionnelle.

Enfin, l'Union nationale des caisses d'assurance maladie jouera un rôle clé dans la négociation conventionnelle.

M. Jean-Marie Le Guen. Ah !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Nul ne peut s'opposer à ce que les partenaires sociaux retrouvent leur rôle, sauf à soutenir, comme le font nos collègues de gauche, une étatisation rampante. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Il s'agit donc d'un article clé du projet de loi, qui devrait donner lieu à une discussion intéressante.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Comme l'a indiqué M. Dubernard, après le dossier médical personnel, nous abordons le médecin traitant.

M. Préel dit approuver l'idée du médecin traitant. Tous les praticiens savent que la coordination des soins sert l'intérêt du malade. Il est bon de connaître ses antécédents personnels et familiaux, les traitements qu'il a subis. Quelqu'un doit faire la synthèse. Ce sera le médecin traitant que M. Préel a justement qualifié de « pivot » et de « pierre angulaire » du nouveau système. Je l'en remercie.

Actuellement, mesdames et messieurs les députés, notre système de santé est un système solidaire qui concilie la socialisation des dépenses et la totale liberté de choix du malade.

M. Maxime Gremetz. Oh !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Avec le médecin traitant, nous souhaitons le structurer pour le préserver, sans pour autant revenir sur la liberté de chacun, en choisissant l'incitation plutôt que la contrainte.

M. Gérard Bapt. Sauf pour les patients !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. J'y reviendrai.

Soyons clairs, si nous n'incitons pas nos concitoyens à un usage raisonné de l'offre de soins, l'équilibre de notre modèle national sera menacé.

M. Préel a parlé de « liberté d'honoraires ». Il n'en est pas question, puisque l'UNCAM les réglementera. Nous aurons l'occasion d'en reparler lors de la discussion des amendements.

Mme Billard a indiqué que 32 % des Français se rendent directement chez un spécialiste, ce qui est exact. Mais n'insinuez pas que, demain, les Français pourraient restreindre leur recours aux spécialistes pour des raisons financières.

M. Jean-Marie Le Guen. C'est déjà le cas !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est faux, puisque nous proposons que chaque patient puisse aller consulter un spécialiste après être passé chez son médecin traitant et, surtout, s'il en a besoin.

Mme Martine Billard. Et s'il en a les moyens !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Mme Jacquaint a évoqué la gynécologie médicale. Je rappelle que nous avons pris l'engagement d'accepter plusieurs amendements visant à maintenir la possibilité de visite gynécologique en première intention, comme ce sera le cas pour le pédiatre et l'ophtalmologiste, qui jouent un rôle important dans le système de prévention et de soins.

M. Gremetz a abordé la question de l'option médecin référent-médecin traitant. Un certain nombre de médecins et de patients ont adhéré au dispositif du médecin référent et jugent le système satisfaisant. Pourquoi alors le supprimer ? Monsieur Le Guen, nous n'avons pas l'intention de le supprimer.

M. Jean-Marie Le Guen. C'est pourtant ce que vous allez faire !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Non. D'autres médecins et d'autres patients jugent le système trop contraignant, notamment parce qu'il prévoit un abonnement d'un an. C'est pourquoi nous proposons l'institution du médecin traitant, système plus souple et à même d'améliorer la coordination des soins.

Monsieur Gremetz, le passage chez le médecin traitant ne sera pas obligatoire dans le cadre d'un protocole ou d'un réseau de soins. Monsieur Bapt et monsieur Le Guen, je le répète, nous incitons simplement le patient à y recourir.

S'agissant du secteur 2, monsieur Le Guen, vous êtes mal placé pour donner des leçons de morale. Les gouvernements que vous avez soutenus ont bel et bien accepté le maintien d'un secteur 1 et d'un secteur 2. Si une femme de la région parisienne souhaite consulter un gynécologue, elle est obligée de se rendre chez un spécialiste en secteur 2. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Marie Le Guen. Vous êtes donc favorable à sa généralisation ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Mais non ! Il n'en est pas question puisque nous instituons un parcours personnalisé de soins. Ceux qui opteront pour le médecin traitant pourront aller consulter un spécialiste avec un remboursement conventionnel à vingt-cinq ou à vingt-trois euros. J'en prends l'engagement. Cela est conforme à la justice et à l'équité. Mais si un patient préfère un accès direct au spécialiste, l'UNCAM fixera le montant du remboursement...

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n'est pas rassurant, car c'est le MEDEF !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. ...dans une fourchette définie par un décret en Conseil d'État.

M. Gérard Bapt. Donnez-nous des indications !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Monsieur Claeys, le médecin référent est différent du médecin traitant. Je vous rappelle que le médecin référent est arrivé...

M. Jean-Marie Le Guen. Le Zorro de Barrot ! (Sourires.)

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. ...en 1999. Cinq ans plus tard, c'est un échec. Il y a 6 751 médecins référents, dont seulement 5 654 ont vu un patient optant pour ce système durant l'année 2002.

M. Jean-Marie Le Guen. Donc, vous allez le supprimer !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Non, mais c'est un échec. Un million de malades seulement sont soignées par environ 6 700 médecins référents. Nous voulons aller plus vite et plus fort, avec un système plus souple. C'est notre choix.

M. Jean-Marie Le Guen. Que faites-vous des médecins référents ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ils continuent. Vous aimeriez qu'on le remette en question. Si les Français refusent de s'adresser à eux, ce n'est pas ma faute.

M. Jean-Marie Le Guen. Vous allez les y aider !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Vous êtes contre le dossier médical, nous sommes pour.

Madame Robin-Rodrigo, contrairement à vos collègues, vous n'êtes peut-être pas une spécialiste. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n'est guère aimable !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Vous ne pouvez pas à la fois nous reprocher d'étatiser l'assurance maladie et critiquer le fait que nous souhaitions que les partenaires conventionnels définissent plus précisément les modalités d'un dispositif qu'ils vont précisément faire vivre.

M. Jean-Marie Le Guen. C'est du pipeau !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Puisque vous parlez de médecine à deux vitesses, qu'avez-vous fait, madame Robin-Rodrigo, sous le gouvernement socialiste que vous souteniez, pour éviter une médecine à deux vitesses et le dérapage des dépenses de l'assurance maladie ?

M. Camille de Rocca Serra. Rien !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. M. Jacques Le Guen, lui, a souligné l'importance du volontariat et M. Jacques Domergue celle de la coordination des soins. Tous deux ont eu raison, car ce qui nous intéresse au premier chef, ce n'est ni l'assurance maladie, ni le médecin, ni le ministère de la santé, mais le malade. Or, pour mieux soigner, il faut créer le dossier médical et renforcer la coordination des soins.

Je profite de l'occasion pour saluer M. Jacques Domergue, président du Conseil national de la chirurgie. Nous attendons beaucoup de lui dans les prochaines semaines.

M. Jean-Marie Le Guen. Quelle maladresse après une semaine de débats ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. J'ai confiance dans la capacité des médecins à changer l'organisation des soins par le dossier médical personnel et une nouvelle coordination des soins. Je crois dans le médecin traitant, je crois dans le médecin de famille. J'invite l'opposition à voter cet article, car j'espère qu'elle croit aussi à la coordination des soins. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je demande la parole.

M. le président. Est-ce pour défendre les amendements de suppression de l'article ?

M. Maxime Gremetz. Non, c'est pour répondre au ministre.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. M. Gremetz n'a pas à répondre au ministre.

M. Maxime Gremetz. M. le ministre nous a répondu, nous pouvons bien faire un commentaire.

M. le président. Vous répondrez au ministre lors de la discussion des amendements.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, ne compliquez pas les choses, ou cela va vous jouer des tours ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Richard Mallié. Des menaces ?

M. le président. Monsieur Gremetz, je ne complique pas les choses, j'applique le règlement.

M. Maxime Gremetz. On ne peut pas laisser un ministre dire n'importe quoi !

M. le président. Monsieur Gremetz, j'applique le règlement !

M. Maxime Gremetz. Peut-être, mais le ministre ne répond jamais lors de l'examen des amendements. Pour une fois qu'il s'exprime, permettez-nous de lui répondre.

M. le président. Je vous donne la parole, à condition que vous défendiez en même temps les amendements de suppression...

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, nous ne savons toujours pas qui fait quoi, du médecin de famille, du médecin traitant et du médecin référent. Par lequel d'entre eux faudra-t-il passer pour avoir accès à un spécialiste ?

Je suis d'accord avec vous : le système du médecin référent n'a pas marché. Nous nous étions opposés à la création d'un tel dispositif, précisément parce que, dès le départ, nous savions que ce serait un échec. Nous estimons qu'il en sera de même pour le médecin traitant.

Monsieur le ministre, je vais lire ce que vous avez écrit : « Un patient pourra-t-il décider de ne pas recourir à un médecin traitant ou de ne pas suivre ses prescriptions d'orientation ? Chacun conservera sa liberté de ne pas avoir recours au médecin traitant ou de ne pas respecter ses prescriptions d'orientation. Néanmoins, les patients qui ne souhaiteraient pas s'inscrire dans ce dispositif se verront appliquer une majoration de la part restant à leur charge. »

M. le président. Monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. « En outre, pour inciter à une prise en charge coordonnée des soins, la convention nationale pourra éventuellement permettre aux médecins de certaines spécialités, si les parties conventionnelles le souhaitent, de pouvoir pratiquer des dépassements, dans certaines limites fixées par la convention. »

Autrement dit, c'est bien la double peine. Il faudra avoir de l'argent pour acheter la liberté : voilà la vérité !

M. le président. Monsieur Gremetz, puis-je considérer que vous avez défendu les amendements de suppression ?

M. Maxime Gremetz. Pas du tout ! J'ai simplement répondu au ministre. Et, puisqu'on ne me laisse pas m'exprimer, je demande une suspension de séance. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Monsieur Gremetz, ce débat se passe bien...

M. Maxime Gremetz. Eh bien, je demande une suspension de séance pour qu'il se passe mieux ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt, est reprise à dix-sept heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, pour un rappel au règlement.

M. Gérard Bapt. Monsieur le président, nous essayons de faire tous ensemble, sur un sujet important - l'assurance maladie, c'est-à-dire la santé de nos concitoyens -, un travail sérieux. Nous nous efforçons d'aller au bout des problèmes, en posant des questions auxquelles nous attendons absolument des réponses qu'attendent également, outre la représentation nationale, tous les professionnels et les assurés.

Je suis donc stupéfait de découvrir dans une dépêche de l'AFP les propos du président du groupe UMP de l'Assemblée nationale, qui dénonce chez les députés socialistes une « attitude de ralentissement, si ce n'est d'obstruction ». Est-ce notre faute si nous avons longuement examiné l'article 2, en soulignant nombre de doutes, de dangers et d'interrogations, le Gouvernement ayant lui-même accepté un certain nombre d'amendements ou de sous-amendements améliorant son texte ?

Toujours selon M. Accoyer, l'opposition ne présente pas de propositions alternatives. Or nous ne cessons de proposer des alternatives à des mesures que nous jugeons dangereuses !

Monsieur le président, puisque nous avons encore devant nous plusieurs journées et plusieurs nuits de débat sur ce texte, convenons de faire ensemble un travail constructif et sérieux. Il ne s'agit, de notre part, ni d'obstruction, ni d'aucun autre ralentissement que celui qu'implique un travail parlementaire sérieux. Nos concitoyens doivent être éclairés.

M. le président. Monsieur Bapt, si vous en êtes d'accord, nous n'allons pas commenter toutes les dépêches de l'AFP.

M. Jean-Marie Le Guen. Lorsqu'elles nous insultent, nous ne les laisserons pas passer !

Reprise de la discussion

M. le président. Je suis saisi de douze amendements, nos 736 à 747, visant à supprimer l'article 4.

La parole est à M. Michel Vaxès...

M. Maxime Gremetz. Puisque vous avez voulu nous faire rentrer vite, nous allons tous intervenir !

M. le président. Monsieur Gremetz, je n'ai pas voulu vous faire « rentrer vite », mais je me suis efforcé de respecter la durée de cinq minutes convenue pour la suspension de séance.

M. Maxime Gremetz. Vous ne laissez même pas le temps aux collègues de faire ce qu'ils ont à faire ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Monsieur Gremetz, laissez parler M. Vaxès !

M. Michel Vaxès. Rassurez-vous, monsieur le président, cela ne me perturbe pas.

Dans leur ensemble, les interventions faites de ce côté-ci de l'hémicycle ont démontré que la suppression de l'article 4 était nécessaire. Je me contenterai donc d'y ajouter quelques illustrations.

À propos de l'article 4, on lit dans l'exposé des motifs du Gouvernement : « Afin de favoriser la coordination et le suivi des soins, qui sont des conditions essentielles de la qualité des soins et d'un accès optimisé au système de santé, il est offert à tout assuré ou ayant droit âgé de plus de seize ans la possibilité de choisir un médecin traitant de son choix. » Merci, mais c'est déjà fait ! Les médecins sont nombreux dans cet hémicycle, et nous sommes tous des patients : nous savons tous que, dans leur grande majorité, les patients ont choisi un médecin traitant ! Vous nous le rappelez, et déclarez que votre intention est l'amélioration des soins et un accès optimisé aux services de santé. Nous souscrivons, certes, à cette intention, mais la réponse que vous apportez à la question au deuxième alinéa de l'article 4, procède d'une autre intention : celle d'introduire la sanction. Il y a donc une certaine malhonnêteté intellectuelle - pardon de devoir employer ce terme - à vouloir faire croire que cet article 4 est destiné à améliorer, comme le disait tout à l'heure le ministre, la coordination des soins !

Nous ne sommes pas, du reste, les seuls à le dire : le docteur Ducloux, président du Conseil de l'Ordre des médecins, note ainsi que « le projet de loi envisage un espace de liberté tarifaire offert aux spécialistes, dès lors que leurs patients n'auront pas consulté préalablement en première intention le médecin traitant. Cette disposition ne peut être acceptée en l'état, car elle fait de la liberté tarifaire une sanction qu'un médecin spécialiste infligerait à son patient en raison du comportement de ce dernier. » Ce n'est pas le groupe communiste qui le dit, ni Maxime Gremetz ou Michel Vaxès, mais le Conseil de l'Ordre des médecins ! Vous affirmez que vous voulez améliorer la coordination, mais c'est pour introduire la possibilité d'une sanction.

Il faut nous fournir des explications car cet article, s'il était adopté, pourrait avoir des effets contre-productifs.

D'autre part, les patients, je le rappelais tout à l'heure, ont aujourd'hui un médecin traitant. J'estime assez le corps médical pour penser que la majorité de ces médecins s'efforcent de travailler dans le sens que vous dites nécessaire. Mais certaines pratiques médicales qui vont parfaitement dans ce sens seront en difficulté : les centres de santé. Ceux-ci pratiquent une médecine d'équipe : quel que soit le médecin qui vous y reçoit, la coordination des actions, l'échange d'information, la concertation et la cohérence des propositions est assurée. Dans l'avenir, lequel de ces médecins sera le médecin traitant ? Il faut répondre à cette question car le médecin ne fait pas le choix d'un médecin, mais d'une équipe. C'est un problème sérieux.

M. Pascal Terrasse. C'est vrai !

M. le président. Monsieur Vaxès, veuillez conclure.

M. Michel Vaxès. Les médecins savent quelle est l'habitude des patients.

J'évoquerai, pour conclure, l'exemple d'une patiente âgée qui, depuis vingt ans, avait l'habitude de consulter exclusivement son médecin traitant - cette pratique est déjà une réalité, et vous n'innovez donc pas, mais vous en faites un prétexte ! Cette patiente se plaignait de douleurs de dos. Durant des semaines, son médecin traitant, qui avait l'habitude de la trouver un peu souffreteuse, a conjecturé un bec-de-lièvre, une arthrose ou une arthrite. L'entourage de la patiente, redoutant qu'il y ait une autre cause, finit par lui imposer de choisir un autre médecin traitant,...

M. le président. Monsieur Vaxès, veuillez conclure.

M. Michel Vaxès. ...ce qu'elle finit par accepter. Ce nouveau médecin traitant la renvoya à un spécialiste, qui posa le diagnostic. Trois semaines plus tard, la patiente décédait : il s'agissait d'un mésothéliome ! Il doit rester possible de consulter un autre médecin traitant sans encourir de sanction.

La dichotomie qui sépare l'intention que vous affichez et la réponse que vous apportez est inacceptable. Ainsi, tout en partageant votre intention, nous demandons que soit supprimé l'article 4, qui n'y répond pas. Je l'ai dit et je le répète : il s'agit d'une escroquerie intellectuelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour cinq minutes.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, mes collègues m'ont cédé leur temps de parole.

M. le président. Monsieur Gremetz, les temps de parole ne sont pas cumulables. Douze amendements identiques sont en discussion, et vous ne pouvez pas ajouter à votre temps de parole onze fois cinq minutes !

M. Maxime Gremetz. Alors, mes collègues parleront chacun à leur tour !

M. le président. Je n'en vois aucun lever la main.

M. Maxime Gremetz. Vous verrez, ils parleront, puisqu'ils ne peuvent pas me céder leur temps de parole. Il y en aura pour vingt minutes !

M. le président. Revenons-en aux amendements identiques nos 736 à 747.

M. Maxime Gremetz. Vous l'avez compris, ces amendements visent à supprimer l'article 4. Pourquoi ? La question se passe même de réponse.

Je ne sais toujours pas ce que font respectivement le médecin de famille, le médecin référent et le médecin traitant. Faut-il payer les trois avant d'aller, éventuellement, consulter le spécialiste ? C'est une bizarre façon de faire des économies ! Même en ne recourant qu'à un seul médecin avant de consulter le spécialiste, les deux actes - car je suppose que les deux seront payés - coûteront plus cher que la seule consultation du spécialiste. Au lieu de réduire les dépenses de santé, la multiplication des intermédiaires coûte plus cher ! Bizarre !

M. Pascal Terrasse. Vous avez dit : « Bizarre » ?

M. Maxime Gremetz. On ne comprend plus le rôle de tous ces intervenants. On déclare que les médecins référents demeurent, mais on les laisser mourir de leur belle mort, et on passe au médecin traitant. Je reprendrai une explication que j'ai déjà fournie, en me référant au petit livre jaune du ministre. Je vous apporterai ce texte, que je ferai photocopier en envoyant la facture à l'Assemblée nationale,...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Oh, le pingre ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. ...puisqu'il s'agit de la bonne information de tous les députés. Le président et le rapporteur n'ont cette brochure que parce que je la leur ai donnée. Même le ministre ne l'a pas, et ne sait pas comment on l'a faite !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. J'aimerais bien l'avoir en couleurs !

M. Maxime Gremetz. Je n'en ai qu'un seul exemplaire en couleurs. Cette brochure est explicite : un patient peut changer de médecin traitant quand il le veut, éventuellement tous les jours. Il suffit qu'il envoie une lettre à son médecin et à la caisse d'assurance maladie. Mais comment appelle-t-on le médecin traitant que son patient quitte au bout d'une seule journée ? Un médecin maltraitant ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Yves Besselat. C'est de mauvais goût !

M. Maxime Gremetz. C'est à n'y rien comprendre ! Il est écrit noir sur blanc dans ce document que le patient a la liberté de changer tous les jours de médecin traitant. Monsieur le secrétaire d'État, en avez-vous un exemplaire ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. Bien sûr.

M. Maxime Gremetz. Alors soyez moins égoïste et passez-le aux députés de la majorité. Ils pourront au moins essayer de préparer leurs arguments !

Par ailleurs, je vous rappelle un point essentiel : le ministre a déclaré que la liberté sera totale. Mais pour des libéraux, vous êtes des drôles ! Certes, le patient aura le droit de choisir son médecin, mais à condition d'avoir de l'argent ! En principe, la liberté n'a pas de prix ; mais ici, elle en a un : il faut payer pour avoir cette liberté de choix.

Il faut même payer doublement. La brochure indique que « chacun conservera sa liberté de ne pas avoir recours au médecin traitant ou de ne pas respecter ses prescriptions d'orientation. » Vous voyez que c'est vraiment un régime libéral, et même ultra-libéral. Il est en outre précisé : « Néanmoins, les patients qui ne souhaiteraient pas s'inscrire dans ce dispositif se verront appliquer une majoration de la part restant à leur charge. » Cela veut bien dire qu'ils seront moins remboursés.

Et puis, il y a ce que j'appelle « la double peine », puisque, « pour inciter à une prise en charge coordonnée des soins, la convention nationale pourra éventuellement permettre aux médecins de certaines spécialités, si les parties conventionnelles le souhaitent, de pouvoir pratiquer des dépassements » d'honoraires. Il y a donc bien deux peines : la première, c'est le moindre remboursement ; la seconde, c'est le dépassement d'honoraires.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Voilà, messieurs, votre conception du libéralisme : la liberté pour les patrons, pour le MEDEF, pour les riches, tandis que les pauvres doivent l'acheter, alors qu'ils n'ont pas le sou.

Avouez que vous avez tout de même une sacrée conception du rationnement des soins et de la réduction des dépenses de santé - objectif tout à fait louable en soi. En l'occurrence, il s'agit encore une fois d'une discrimination intolérable et inacceptable.

Vous qui avez de bons salaires, de bonnes situations, (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Comme vous !

M. Maxime Gremetz. Non, monsieur Bur : vous, vous êtes chirurgien-dentiste.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Je suis député comme vous, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Pas comme moi, qui gagne 14 000 francs par mois !

M. le président. Monsieur Gremetz, nous ne sommes pas à une réunion de questure ! Revenons aux amendements !

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je tiens à répéter combien ce dispositif est terriblement injuste. Ce sont encore les plus pauvres, ceux qui n'ont pas d'argent, qui vont être pénalisés ! C'est la sélection par l'argent, y compris dans le domaine de la santé. C'est une honte !

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements. Comme nous l'avons clairement expliqué, l'article 4 renforce la coordination des soins.

Le groupe communiste serait-il contre la coordination des soins, contre le décloisonnement entre les spécialistes et les généralistes, contre un meilleur suivi du patient en général ? En l'espèce, il est bien écrit à l'article 4 du projet de loi que la liberté du patient est préservée.

Je m'interroge aussi sur certains aspects de l'exposé des motifs de ces amendements : « nouveau genre de médecin référent » est-il écrit. Nous avons eu l'occasion d'en parler et le ministre a déjà répondu sur ce point. Ce médecin est qualifié d'« administratif », alors qu'au contraire il s'agira principalement du généraliste, placé au cœur de ce nouveau parcours de soins que nous souhaitons tous.

Quant à la convention, le groupe des député-e-s communistes et républicains y serait-il opposé ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie, pour donner l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. L'avis du Gouvernement est défavorable.

Monsieur Gremetz, il y aurait une sélection par l'argent si notre système d'assurance maladie n'était pas modernisé.

M. Maxime Gremetz. Nous, on propose de procéder autrement, et vous le savez !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Si nous ne faisons rien, nous aurons effectivement un système de santé à plusieurs de vitesses, ce que nous ne voulons pas.

Monsieur Vaxès, je réponds oui à votre question : un amendement sera déposé qui proposera la liberté de choisir comme médecin traitant le praticien exerçant dans un centre de santé.

Messieurs, n'oubliez pas que, dans le cadre de la coordination et de la qualité des soins, vous ne pouvez pas débattre du système du médecin traitant sans prendre en compte le dossier médical personnel et les protocoles de soins. Je vous le rappelle pour vous montrer que la qualité des soins constitue bien l'enjeu principal du dispositif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je donnerai maintenant la parole à un orateur pour répondre à la commission et à un autre pour répondre au Gouvernement. J'ai une demande d'intervention de M. Jean-Marie le Guen, et une autre de M. Richard Mallié.

M. Daniel Paul. Je demande la parole, monsieur le président !

M. le président. Vous aurez l'occasion d'intervenir sur beaucoup d'autres amendements, monsieur Daniel Paul.

M. Richard Mallié. Je lui cède la parole, monsieur le président !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. M. Douste-Blazy s'est tout à l'heure engagé en des termes contradictoires. D'une part, il a dit vouloir maintenir le médecin référent et, d'autre part, il l'a attaqué au pas de charge en disant que cette formule était un échec.

Par ailleurs, je constate que le Gouvernement demande la renégociation en urgence de la convention. Plusieurs milliers de médecins référents et les plus de 1 200 000 patients qui bénéficient de la dispense d'avances de soins ont besoin de savoir quelles sont les intentions du Gouvernement. Nous ne voulons pas de propos généraux, mais des intentions précisément exprimées. Le Gouvernement s'engage-t-il à défendre le système du médecin référent ? Si la réponse est oui, les médecins traitants pourront-ils devenir médecins référents ?

Voilà deux questions précises.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Jean-Jacques Descamps. Monsieur Paul, vous pourriez remercier M. Mallié !

M. Daniel Paul. Merci, cher collègue Mallié, mais je pense que vous devriez également avoir le droit de vous exprimer. Il est suffisamment rare qu'un représentant de la majorité prenne la parole dans ce débat pour que, s'il la demande, il ait le droit de s'exprimer comme il l'entend.

M. Richard Mallié. Monsieur Paul, cela fait une semaine que je siège continûment, et j'ai parlé quand je le voulais !

M. Daniel Paul. Monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, ma question sera très précise.

Si j'ai un médecin traitant et que je veuille consulter un spécialiste sans qu'il y ait d'accord avec mon médecin traitant sur le type de spécialiste - cela se produit notamment dans le cas de certaines maladies génétiques aux conséquences extrêmement graves -, que se passe-t-il ? Suis-je remboursé intégralement ou non ?

Monsieur le secrétaire d'État, suite aux interventions de M. Gremetz et de M. Vaxès, vous vous êtes fait menaçant, disant que si rien ne bougeait, on en verrait les conséquences. Or la seule conséquence que nous voyons pour le moment, c'est que vous introduisez, avec cette notion de médecin traitant ou de médecin référent, la discrimination par l'argent. Vous évitez soigneusement, depuis près d'une heure, d'évoquer ce point.

M. Gremetz et M. Vaxès ont posé des questions précises. Premièrement, le médecin traitant dans le cadre d'un centre de santé, est-ce le médecin ou le centre de santé ? Deuxièmement, s'il y a litige entre le médecin traitant et le patient, qui a le choix définitif et quelles en sont les incidences sur le remboursement ? Troisièmement, en cas de maladie complexe, le patient a-t-il oui ou non la liberté, non pas de faire du nomadisme médical, mais de choisir son spécialiste ? Chacun sait que le patient a un rapport de nature particulière avec le spécialiste. Nous ne nous situons pas dans la sphère des contingences uniquement matérielles, mais dans une relation de malade à médecin. Il est important de savoir si cela a des incidences financières.

M. le président. La parole est à monsieur le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. S'agissant de la question de M. Jean-Marie Le Guen, je précise que le système du médecin référent va perdurer ; la possibilité de rejoindre ce système est prévue dans la convention.

Cela étant, M. Douste-Blazy et moi-même pensons que l'idée et la pratique du médecin référent n'ont pas rencontré le succès escompté et qu'il convient de préserver non seulement l'égalité d'accès aux soins, mais aussi la liberté de choix. C'est davantage dans les traditions de notre système de santé et nous y sommes profondément attachés.

S'agissant de la question posée par M. Vaxès, je précise une fois encore qu'il s'agit du lien entre le patient et le médecin exerçant dans un centre de santé, et non pas le centre lui-même.

M. Michel Vaxès. Vous ne répondez pas à la question !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Par ailleurs, monsieur Paul, en cas de conflit entre le médecin et le patient, c'est bien évidemment le patient qui fait son choix. Je me mets à la place du patient. je pense d'ailleurs que, depuis quelques jours, nous sommes la patience incarnée. (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Daniel Paul. C'est un peu facile !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Toujours est-il que si je choisis un médecin traitant, c'est parce que c'est un médecin de confiance et que je le pense certainement mieux placé que moi pour me dire qui je dois aller consulter. Si cette relation de confiance disparaît, que je suis en désaccord avec lui, le dispositif prévoit que je puisse changer de médecin traitant.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. C'est du bla-bla, monsieur le secrétaire d'État !

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je voudrais apporter une précision, monsieur le président. M. Douste-Blazy n'étant pas là, je vais vous donner sa réponse à lui. Comme ça, vous saurez tout.

On lui a posé la question suivante : « Le médecin traitant sera-t-il libre d'orienter le patient vers le professionnel de santé de son choix ? » Voici la réponse du ministre : « Le médecin traitant orientera librement le patient vers le professionnel de santé de son choix. Le choix se fera de concert avec le patient. »

« Que se passe-t-il si le patient n'est pas d'accord sur l'identité du professionnel ? » : c'est votre question, cher collègue. Je vais vous donner la réponse du ministre, car M. Bertrand n'y a pas répondu. Écoutez bien, cher collègue, c'est une réponse formidable : « La décision se fera conjointement, au terme du dialogue indispensable entre le patient et le médecin. »

Mme Chantal Robin-Rodrigo. C'est du bla-bla !

M. Maxime Gremetz. Vous voyez ce que ça donne ! Et s'ils n'arrivent toujours pas à se mettre d'accord, qui tue l'autre ? Comment ça se passe ? Nous n'avons pas la réponse.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié, pour un rappel au règlement.

M. Richard Mallié. Sauf votre respect, monsieur le président, nous étions convenus qu'après le secrétaire d'État, deux orateurs devaient s'exprimer. Un orateur communiste a souhaité le faire. Je lui ai volontiers cédé ma place pour qu'il défende son amendement. Le secrétaire d'État a répondu. Mais si les réponses du secrétaire d'État ne sont que l'occasion de lui poser de nouvelles questions, on ne s'en sort pas !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il a raison !

M. Richard Mallié. Il faut arrêter ! Vous intervenez après le secrétaire d'État, chers collègues communistes, et après cela on n'en parle plus ! Mais si vos interventions visent à poser de nouvelles questions au secrétaire d'État, on ne s'en sort plus !

M. le président. Je pense que vous avez raison, monsieur Mallié. J'ai fait preuve de trop de laxisme jusqu'ici. C'est la raison pour laquelle nous allons appliquer le règlement...

M. Maxime Gremetz. Ah bon, c'est comme ça ? On va appliquer le règlement ? Eh bien soit, on va appliquer le règlement !

Reprise de la discussion

M. le président. Nous en revenons aux amendements nos 736 à 747.

Je mets aux voix par un seul vote...

M. Maxime Gremetz. Je demande un scrutin public !

M. le président. Le vote a déjà commencé, monsieur Gremetz.

Je mets aux voix, disais-je, les amendements identiques nos 736 à 747.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je demande une suspension de séance en raison de ce que vous venez de faire.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Quel dictateur, celui-là !

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, j'ai été insulté ! Je demande que vous demandiez à M. Bur de retirer ce qu'il a dit. Le dictateur, ce n'est pas moi. Le dictateur, il est chez vous !

M. le président. M. Bur a sûrement fait référence à un film célèbre de Charlie Chaplin, et non pas...

M. Maxime Gremetz. Non, non ! Et même si c'était le cas, ce serait encore plus grave ! Monsieur le président, je demande à M. Bur de retirer ses propos !

M. le président. Monsieur Gremetz, s'il y a fait un personnel, il sera évoqué en fin de séance,...

M. Maxime Gremetz. Non !

M. le président. ...mais je crois que M. Bur souhaite apporter une rectification à ses propos.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Monsieur le président, je veux bien retirer le terme, mais je souhaite que M. Gremetz n'utilise pas tous les artifices de procédure ...

M. Maxime Gremetz. J'applique le règlement, c'est tout !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. ...pour retarder les débats. À force d'être retardés, les débats perdront en intérêt. Et je ne souhaite pas, monsieur Gremetz, que vous appliquiez au président le terme que j'ai utilisé à votre propos, car il ne fait qu'appliquer le règlement.

M. le président. Mes chers collègues, je crois que nous avons conduit depuis plusieurs jours un débat serein et constructif, auquel ont contribué les groupes de la majorité comme ceux de l'opposition.

C'est la raison pour laquelle nous allons le poursuivre. Nous aborderons le fait personnel...

M. Maxime Gremetz. C'est réglé, monsieur le président.

M. le président. Bien. Nous poursuivons donc l'examen des amendements.

Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 6982 à 6996.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous nous situons ici dans la logique de la mise en place des réseaux de santé. Tous les Français étant obligés d'avoir un médecin traitant, nous proposons que ces réseaux en tant que tels puissent être l'équivalent du médecin traitant.

M. le président. La parole est à M. Jean Le Garrec.

M. Jean Le Garrec. Je voudrais pour ma part réitérer une question qui a été posée il y a déjà un bon moment et à laquelle nous n'avons pas eu de réponse claire.

Monsieur le secrétaire d'État, vous avez dit que le médecin référent n'était pas vraiment une réussite. Vous remplacez le mot...

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Non !

M. Jean Le Garrec. D'accord, vous ne le remplacez pas. Je corrige : vous ajoutez le mot « médecin traitant ». Le ministre a dit que cela se ferait avec souplesse. Et il y a en effet une certaine souplesse dans la mesure où le patient peut changer de médecin traitant en écrivant à sa caisse. Mais cette souplesse se traduit par une véritable rigueur pour le malade. Car si, pour une raison ou pour une autre, qui peut être une raison valable, le malade a changé de médecin traitant sans passer par sa caisse, il sera pénalisé financièrement. C'est prévu à l'article L. 322-2 du code de la sécurité sociale. Si je me trompe, vous me corrigerez, mais je crois que c'est bien de cet article qu'il s'agit. C'est un véritable problème.

Le mot souplesse ne convient pas, me semble-t-il, pour décrire ce que vous êtes en train de mettre en place. C'est le malade qui supportera le poids des efforts, et c'est lui qui, à terme, risque d'être pénalisé.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Nos amendements ont également l'avantage de contourner une difficulté.

Je m'explique. Le médecin traitant, qui sera le plus souvent le médecin généraliste, le médecin de famille, sera parfois un spécialiste de la gynécologie médicale, un spécialiste du diabète ou un cardiologue. Mais un patient souffrant d'une affection lourde et de longue durée peut être pris en charge par un réseau de santé qui associe des médecins exerçant sous des formes différentes, dans des cadres différents - par exemple des médecins hospitaliers et des médecins de ville. Dans ces cas-là, il est possible, et je pense notamment au cas de l'oncologie, que le médecin traitant soit un spécialiste, ou qu'il soit le médecin coordinateur du réseau, lorsque du moins celui-ci fonctionne harmonieusement.

Voilà pourquoi nous proposons que le réseau puisse être la référence du patient dans le cadre de votre dispositif.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements, et elle l'a fait avec un argument, qui vient d'être donné par M. Bapt lui-même.

Ces amendements prévoient que le patient choisisse un médecin traitant ou un réseau de santé. Un réseau, c'est quoi ? C'est une structure. On ne peut pas parler avec un réseau. On ne peut pas avoir un colloque singulier avec un réseau. Par contre, si le médecin traitant est un des médecins du réseau, il n'y a aucun problème.

La commission a donc rejeté les amendements parce qu'elle n'est pas d'accord pour que le médecin traitant soit un réseau. Le réseau, ce n'est pas un homme, c'est une structure anonyme, administrative. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marie Le Guen. Autrement dit, c'est le goulag !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Mais non, nous sommes autant favorables que vous aux réseaux, monsieur Le Guen. Mais vous connaissez comme moi les réseaux : êtes-vous capables d'en citer cinquante ? Non.

Je répète que le médecin traitant peut être l'un des médecins du réseau, le médecin coordinateur, comme l'a très bien dit M. Bapt.

Avis défavorable de la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Le Gouvernement souhaite que ces amendements soient rejetés. En plus des raisons qui viennent d'être exposées, je rappelle qu'un amendement de M. Évin va être examiné prochainement, qui a été adopté par la commission. Il montre bien que nous avons la même volonté. La seule question qui nous sépare peut-être est celle des réseaux de soins. Nous avons fait la démonstration que nous y croyons. Depuis quelques années, les fonds qui leur sont alloués ont été multipliés par cinq. Comme je l'ai dit clairement il y a quelques jours en réponse à une question de M. Le Guen, nous avons en la matière une vraie volonté politique.

Cela étant, n'oublions pas que la relation de confiance fondamentale est celle qui existe entre le patient et le médecin. M. le rapporteur vient de l'expliquer. La relation n'est pas entre le patient et le réseau de soins. Cette relation n'a d'ailleurs pas d'existence juridique. Par contre, rien n'empêchera de choisir comme médecin traitant un médecin adhérant à ce réseau de soins.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le secrétaire d'État, je voudrais vous poser une question en profitant de ce que vous êtes en pleine effervescence et disposé à parler, ce qui est une bonne chose. Il vous faut un peu de temps pour la mise en route, mais après, ça va.

Je veux vous poser une question très importante, à laquelle il n'a pas été répondu, au sujet des centres de santé. Car je vous rappelle que, dans les centres de santé, on ne désigne pas un homme : on désigne une équipe.

M. Jean-Marie Le Guen. Évidemment ! Mais d'après eux, c'est du soviétisme !

M. Maxime Gremetz. Or vous ne répondez pas à cette question.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Si, j'ai répondu.

M. Maxime Gremetz. Non, M. Vaxès, M. Paul, tous mes collègues se posent la même question. Je ne veux pas vous embêter, mais j'aimerais avoir une réponse précise parce nous tenons aux centres de santé. Ils seront d'ailleurs de plus en plus nécessaires. Comment les traite-t-on ? Vous dites que le médecin traitant doit être un homme...

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Ou une femme !

M. Maxime Gremetz. Ou une femme, bien sûr. Ce doit être une personne. Or dans les centres de santé, c'est une équipe. Alors, est-ce que les dispositions qui s'appliquent au médecin traitant s'appliquent à l'équipe ? J'aimerais avoir une réponse, monsieur le secrétaire d'État, à cette question que tous mes collègues se posent.

M. le président. Monsieur Gremetz, je crois que le M. le secrétaire d'État a déjà répondu...

M. Maxime Gremetz. Il faut qu'il précise sa réponse.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Une idée est dans l'air depuis longtemps, celle d'un médecin correspondant, d'un accueil, d'un parcours de soins, non pas pour tous les patients, non pas pour tous les assurés, mais pour les fameux 5 % d'assurés qui consomment 60 % des frais, ceux qui sont installés dans la chronicité. Ce sont eux qui constituent notre cœur de cible, si j'ose dire. Ce ne sont pas ces jeunes gens en pleine santé qui n'ont pas un seul rapport avec leur médecin pendant deux, trois, quatre ou cinq ans. Ceux-là, ils occasionneront des tâches administratives pour la sécurité sociale, qui va être obligée de recevoir des listes de médecins traitants.

Mais nous faisons de la prose sans le savoir. Autrefois, il y avait le médecin de famille, qui était repéré dans le village ou dans le quartier. Aujourd'hui, les choses évoluent, et la notion de médecin de famille se dissout, parce qu'il y a plus de mobilité, parce que la vie urbaine crée moins d'individualité.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. N'oubliez pas que 90 % des Français ont un médecin de famille !

M. Jean-Marie Le Guen. Ne dites pas n'importe quoi, ne récitez pas des statistiques bidon ! La réalité, elle est ailleurs. Dans les zones urbaines, la notion de médecin de famille n'existe plus - malheureusement, d'un certain point de vue - et si elle existait encore, nous ne serions pas en train de mettre au point un certain nombre de dispositions. Qu'est-ce que c'est que le « médecin traitant » si ce n'est un artefact, parfaitement légitime,...

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Légitime, oui !

M. Jean-Marie Le Guen. ...qui vise à recréer l'accueil médical qu'offrait le médecin de famille ?

Parallèlement, d'autres structures ont été mises en place - je pense aux centres de santé ou aux réseaux -, au sein desquelles le patient est en rapport avec une organisation, c'est-à-dire des personnes en qui il a confiance et qui connaissent son dossier. Ce que nous voulons, c'est le parcours de soins. Et celui-ci est naturellement en relation avec un centre de santé ou avec un réseau.

Maintenant, comment va-t-on faire - et vous ne nous avez pas donné d'informations très précises sur ce point - quand le médecin traitant sera en vacances ? Je ne parle pas du cas où le patient lui-même sera en vacances, ou dans une autre zone, parce que j'imagine que vous avez prévu les cas d'urgence : je parle des cas où le médecin traitant lui-même sera en vacances. Votre système va compliquer les choses. Pourquoi ? Parce que vous généralisez des procédures, que vous rendez opposables et systématiques, au lieu de créer des démarches positives.

C'est toujours la même chose : d'un côté l'obligation, de l'autre, la sanction. Il vous est, par ailleurs, difficile de gérer la situation ainsi créée.

Je n'ai pas lu votre brochure, mais je peux vous affirmer, monsieur le secrétaire d'État, que les Français attendent des réponses précises. À partir du moment où vous donnez l'image d'une obligation, d'un caractère systématique et pénalisant, vous devez dire comment les choses se passeront. Parlez-nous des vacances des médecins, des travaux en équipe, des centres de santé, des maisons médicalisées, des médecins remplaçants ! Comment se présentera le fichier ? Où sera-t-il disponible ? Parlez-nous de la réalité et donnez-nous des réponses précises !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Nous sommes attachés au colloque singulier entre le patient et son médecin.

M. Maxime Gremetz. Et le travail d'équipe ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Les Français le sont aussi. Ne détruisons pas le sens de la médecine qui remonte à des années ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Maxime Gremetz. Il est contre la médecine d'équipe ! C'est incroyable ! Quel aveu !

M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.

M. Michel Vaxès. Monsieur le rapporteur, on ne peut pas admettre votre réponse. Oui ou non, la médecine d'équipe est-elle une réponse adaptée aux besoins actuels ? En effet, en médecine comme ailleurs, il n'existe pas de dieu infaillible ! À plusieurs, on est plus intelligent que tout seul.

M. Maxime Gremetz. Tout à fait !

M. Michel Vaxès. C'est vrai pour toutes les professions.

La médecine d'équipe est-elle, oui ou non, une bonne réponse à l'intention affichée dans la première partie de l'article 4 ? Si oui, il ne faut pas désigner le médecin, mais le centre de santé, comme référent. Lorsque le patient se rend dans un centre de santé, il n'est pas spécifiquement attaché à tel ou tel médecin et il accepte de consulter le médecin disponible pour lui à ce moment-là. Vous le savez, le médecin traitant, notamment dans les grands centres urbains, n'est pas toujours disponible. Il faut bien en appeler un autre lorsqu'il lui est impossible de se déplacer.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Certains d'entre nous trouveront que nos questions sont répétitives et que le temps que nous passons à les poser est un peu long, mais il est normal que nous demandions des explications précises au Gouvernement à partir du moment ou celui-ci crée une obligation.

Nous comprendrions que le Gouvernement nous dise que tel ou tel point sera réglé par décret ou circulaire, mais nous avons besoin qu'il nous donne des précisions sur la mise en place du système. Nous ne demandons rien d'autre. Nous sommes relativement déçus, c'est le moins que l'on puisse dire, d'être obligés de poser ces questions à l'occasion de l'examen de chaque amendement ! Lors de la discussion normale d'un projet de loi, le ministre doit expliquer ce qui relève de la loi, du décret, du règlement ou de la circulaire. Nous le comprenons ! Mais si les quarante-cinq millions de Français âgés de plus de seize ans risquent de ne pas être remboursés, faute d'être intégrés dans un système, le moins que l'on puisse exiger est d'obtenir une feuille de route précise couvrant les différents cas de figure qui peuvent se présenter.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je voudrais dire à M. Vaxès que je suis pour la médecine d'équipe et ce d'autant plus que je travaille moi-même en équipe. Je suis pour les réseaux qui représentent des équipes. Les centres de santé regroupent également des équipes.

Rappelons-nous les débats auxquels a donné lieu la loi de mars 2002. Il avait alors été décidé de désigner, au sein de chaque équipe, un médecin correspondant affecté aux patients afin d'éviter l'anonymat d'une équipe. Je suis exactement sur la même longueur d'onde. Au sein du réseau, il peut y avoir un médecin - le médecin traitant - qui supprime cette notion d'anonymat et qui garde ce contact parfois nécessaire. Vous ne pouvez pas toujours dire certaines choses devant trois ou quatre personnes ou successivement à trois, quatre ou cinq personnes, alors que vous pouvez parfaitement les expliquer à une seule. C'est ce que l'on appelle le colloque singulier auquel tous les médecins et les patients de France sont très attachés. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Louis Fagniez.

M. Pierre-Louis Fagniez. Je me retrouve tout à fait dans ce que vient de dire M. le rapporteur.

Il se trouve que je dirige une équipe d'une quinzaine de médecins. Je ne vois pas en quoi je devrais être responsable de tout et tout diriger alors que chaque médecin de mon équipe - je suis sûr qu'il en va de même dans celle de M. Dubernard - a en charge des malades pendant tout leur circuit. Il est hors de question de chercher à les placer dans un réseau. Sur cent malades, c'est seulement le cas d'un ou de deux. Donc, nous demandons aux quatre-vingt-dix-huit autres, après les avoir opérés pour ce qui me concerne, qui est leur médecin traitant et, s'ils n'en ont pas, nous leur en trouvons un, car nous sommes bien contents de pouvoir établir un contact direct entre un membre de l'équipe et ce médecin traitant. J'exerce dans la région parisienne et je peux vous assurer que nos malades s'en trouvent très bien et souhaitent vivement avoir un contact avec un médecin à l'hôpital, leur médecin traitant, tout en étant suivis par une grande équipe ! (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Où en sommes-nous à ce moment précis ? Nous sommes en train de discuter le deuxième amendement différent concernant l'article 4. Donc, je souhaiterais que nous puissions discuter de cet article le plus sereinement possible et sans procès d'intention.

Nous avons eu un vrai dialogue et avons eu à cœur de répondre aux questions précises. Pour la troisième fois, je réponds à M. Vaxès que, oui, nous croyons à la médecine d'équipe - et vous verrez comment nous entendons la favoriser dans ce texte de loi - et que, oui, le lien se fera avec le médecin traitant. Il s'agit de ce colloque singulier qu'évoquait à l'instant le président Dubernard.

A priori, d'après ce que j'ai entendu, nous sommes tous d'accord sur le principe du médecin traitant. Huit Français sur dix ont le même sentiment. À la fin de la discussion de cet article, en fonction des réponses précises aux différentes questions, chacun prendra ses responsabilités pour le voter ou non mais, de grâce, évitons, en attendant, les procès d'intention ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Je vous demande d'être bref, cher collègue !

M. Michel Vaxès. Oui, monsieur le président, mais le débat est important et autant clarifier les choses !

M. le président. J'applique le règlement !

M. Michel Vaxès. J'entends bien ce qu'a dit M. Fagniez sur l'intérêt du travail d'équipe et sur la nécessité d'avoir, en même temps, un médecin traitant. C'est ce qui se passe aujourd'hui ! Je me satisfais de cette précision. Nous sommes d'accord sur le travail d'équipe. Mais je pose la question suivante : si le patient consulte un membre de l'équipe autre que le médecin traitant, sera-t-il sanctionné ou non, en vertu de la seconde partie de l'article 4 ?

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 6982 à 6996.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt-cinq amendements, n°s 3922 à 3933, n° 78 et nos 3934 à 3945 rectifiés, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 3922 à 3933 sont identiques.

Les amendements no 78 et nos 3934 à 3945 rectifiés sont identiques.

La parole est à M. Daniel Paul, pour défendre les amendements n°s 3922 à 3933 et 3934 rectifié à 3945 rectifié.

M. Daniel Paul. Les premiers amendements que nous venons de discuter tendaient à supprimer l'article 4.

Nous ne sommes pas convaincus par les arguments du rapporteur et du secrétaire d'État.

M. Gérard Bapt. Ce sont souvent des arguties !

M. Daniel Paul. J'ai hésité à employer le mot « arguments », mais, eu égard à nos interlocuteurs, j'ai préféré le conserver.

La tournure que prennent les choses nous inquiète. En effet, nous voyons se profiler le danger d'injustice sociale, que ce soit au niveau de la médecine collective, des centres de santé, des centres de soins et du recours aux spécialistes.

Un autre danger serait que les complémentaires ou les assurances privées auxquelles les patients, qui en auront les moyens, recourront leur répondent qu'ils peuvent continuer à se promener de médecin en médecin et de spécialiste en spécialiste, sans s'occuper de la façon dont les choses se passeront par ailleurs. Nous sommes prêts à vous prendre au mot et, dans l'attente de déconnecter le niveau de prise en charge du passage devant le médecin traitant désigné par l'assuré social, nous souhaitons que soit réaffirmé qu'il ne s'agit pas d'un nouvel outil de maîtrise comptable, mais d'un facteur d'amélioration de la qualité des soins. C'est pourquoi nous proposons d'insérer les mots : « Afin d'assurer la coordination des soins, ».

Nous rejetons cette vision purement comptable et, tout en proposant de supprimer les dispositions relatives au remboursement, nous souhaitons rappeler que peut être envisagé le passage devant un médecin habituel pour améliorer la qualité des soins.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 78 et donner l'avis de la commission sur l'ensemble des autres amendements en discussion.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté les amendements identiques nos 3922 à 3933.

Elle a, en revanche, adopté les amendements identiques n°s 78 et 3934 rectifié à 3945 rectifié, qui tendent à insérer les mots : « Afin de favoriser la coordination des soins, ». Cette disposition, votée par la commission, à l'unanimité, enrichit le texte. Sans doute, M. Paul pourrait-il retirer les amendements nos 3922 à 3933.

M. le président. Retirez-vous ces amendements, monsieur Paul ?

M. Daniel Paul. Absolument, monsieur le président !

M. le président. Les amendements nos 3922 à 3933 sont retirés.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements restant en discussion ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements no 78 et nos 3934 à 3945 rectifiés.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 3946 à 3957.

La parole est à M. Gilbert Biessy.

M. Gilbert Biessy. Nos amendements tendent à apporter une précision importante : la démarche initiée par l'article 4 peut être bonne si elle vise des objectifs de santé et non de comptabilité.

Cet article prévoit que chaque assuré social choisit un médecin référent, qualifié de « médecin traitant qu'il a choisi ». Il ne s'agit en fait que de faire passer le patient dans un filtre afin de conditionner le niveau des remboursements qu'il percevra comme le niveau des honoraires du professionnel de santé.

Ce système sanctionne uniquement les modestes, qui ne pourront supporter une majoration des frais, contrairement aux plus aisés, qui auront les moyens d'assumer seuls la charge supplémentaire ou de prendre une assurance complémentaire prévoyant cette prestation.

Nous rejetons cette vision purement comptable et, tout en proposant de supprimer les dispositions relatives au conditionnement des remboursements, nous rappelons que le passage devant un médecin habituel peut être envisagé pour améliorer la qualité des soins.

Tel est le sens de nos amendements.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté cette série d'amendements. On aurait d'ailleurs pu demander à M. Biessy de la retirer, car elle est peu compatible avec celle - déjà déposée par le groupe communiste - que nous venons d'adopter.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 3946 à 3957.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 3958 à 3969.

La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Ces amendements tendent à insérer, au début du premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale, les mots : « Afin de favoriser la continuité des soins, ». Je vous épargnerai une nouvelle lecture de l'exposé des motifs car ils ont déjà été excellemment défendus par mon collègue Gilbert Biessy. J'en profiterai tout de même pour vous poser une question qui taraude nos esprits : que deviennent les médecins référents et leurs missions spécifiques ? Vous nous certifiez que les médecins référents ne vont pas disparaître mais, en même temps, vous montrez clairement que vous ne croyez pas en l'intérêt de leurs missions - pour preuve, le projet de loi les ignore. Si vous doutez des bienfaits de leur action, pourquoi n'en tenez-vous pas compte et ne traitez-vous pas ce problème dans la loi ?

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je considère que ces amendements sont désormais sans objet et que vous auriez pu les retirer. Quoi qu'il en soit, la commission les a rejetés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 3958 à 3969.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 3970 à 3981.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Pardonnez-moi de le répéter, monsieur le président de la commission, monsieur le secrétaire d'État, mais nous n'avons pas confiance dans la façon dont vous envisagez le devenir de la protection sociale.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Vous avez tort !

M. Daniel Paul. C'est sans doute la raison pour laquelle nous persistons dans nos réactions, dans nos questions et dans nos propositions. Après avoir vainement tenté de supprimer l'article 4, nous parviendrons peut-être au moins à limiter la casse, si je puis dire. Nous proposons ainsi d'ajouter, au début du premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale, les mots : « Afin d'améliorer le recours au système de soins, ».

Vous continuez à affirmer qu'il faut garantir la qualité d'accès aux soins. Nous vous entendons et, à la limite, nous ne demanderions qu'à vous croire, mais nous remettons en cause la façon dont la majorité et le Gouvernement envisagent le devenir de l'assurance maladie, même si, croyez-le bien, ce ne sont pas vos personnes qui sont en cause.

Le déficit de la sécurité sociale n'est le fait ni des assurés sociaux, qui consommeraient trop de soins ou trop de médicaments, ni de médecins ne connaissant pas leur métier, qui prescriraient trop. Voulez-vous contenir les fraudeurs ou suppléer au manque de professionnalisme des médecins ? Nous ne comprenons pas bien la façon dont vous enclenchez le processus, ou plutôt nous le comprenons trop bien.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté cette série d'amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 3970 à 3981.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 3982 à 3993.

La parole est à M. Gilbert Biessy.

M. Gilbert Biessy. Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale, nous proposons de substituer les mots : « peut indiquer » au mot : « indique ».

Nous rejetons la vision purement comptable et, tout en proposant de supprimer les dispositions relatives aux remboursements, nous souhaitons rappeler que le passage devant un médecin habituel peut être envisagé pour améliorer la qualité des soins.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements. Pour que le médecin traitant ait une existence, le patient doit indiquer de qui il s'agit. Si l'on se contentait d'ouvrir une possibilité, l'ensemble du système se dégraderait très rapidement. Du reste, très franchement, la notion de « médecin habituel », que vous défendez dans votre exposé des motifs, n'est guère éloignée de celle de médecin traitant.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 3982 à 3993.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L'amendement n° 7553 n'est pas défendu.

L'amendement n° 7554...

M. Gérard Bapt. Monsieur le président !

M. le président. Vous avez la parole, monsieur Bapt.

M. Gérard Bapt. Mme Billard avait eu la bonne idée de penser aux difficultés que pourrait rencontrer un assuré juste après son affiliation à un régime de sécurité sociale, en attendant d'avoir un médecin référent. Il aurait été intéressant, après le mot : « indique », d'insérer les mots : « , dans l'année qui suit son affiliation, ». L'assuré aurait alors pu passer par un ou plusieurs colloques singuliers, avec un ou plusieurs praticiens, avant d'accorder sa confiance à l'un d'eux, en toute connaissance de cause, en le choisissant comme médecin traitant.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 7554 ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement, considérant qu'il relevait du décret.

M. Gérard Bapt. Mais êtes-vous d'accord avec le principe ?

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis que la commission. Cela relève effectivement du domaine réglementaire, et cette demande sera complètement satisfaite par les décrets d'application.

M. Gérard Bapt. Ah !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Merci, monsieur le secrétaire d'État !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Allons-nous devoir nous torturer la cervelle sur chaque cas de figure qui pose un problème pratique concernant la mise en place du médecin traitant, ou bien le Gouvernement admettra-t-il, à un moment quelconque, de donner un début de réponse aux questions les plus élémentaires ?

Cela ne peut durer. Je tiens à vous le dire, monsieur le président, parce que c'est vous qui en subirez évidemment les conséquences, ou du moins qui en serez informé ! En plus de la présence de M. le ministre de la santé,...

Mme Martine David. Mais où est-il ?

M. Jean-Marie Le Guen. ...nous demandons une intervention complète du Gouvernement. Alors que cette réforme rend obligatoire le recours à un médecin traitant, nous ne pouvons accepter que les parlementaires - ceux de l'opposition, en tout cas, mais je pense que ceux de la majorité éprouvent le même sentiment - ne soient pas informés des conditions dans lesquelles le dispositif sera mis en place.

Pour commencer, je demande un quart d'heure de suspension de séance. Vous ne m'accorderez peut-être que cinq minutes, mais c'est un coup de semonce : nous exigeons que le Gouvernement intervienne pour nous dire ce qu'il a l'intention d'écrire dans les décrets ; et nous serions heureux que le ministre de la santé défende en personne un article qu'il juge si fantastique et remarquable.

Mme Martine David. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je vous répondrai sans passion, monsieur Le Guen : j'ai le sentiment de m'être exprimé clairement tout à l'heure. Vous étiez alors absent de l'hémicycle, pour une bonne raison sans doute (Protestations sur les bancs du groupe socialiste),...

Mme Martine David. Et le ministre, il est là, lui ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. ...mais j'ai bien expliqué que nous progresserions au fil des amendements et que, à la fin, chacun prendrait ses responsabilités ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Nous apprécions ce texte dans sa globalité - il est mauvais et nous avons déposé beaucoup d'amendements pour l'améliorer et le modifier radicalement - mais ce n'est pas facile car vous naviguez au fil de l'eau, au coup par coup, sans aucune cohérence. Pour les retraites, ce n'était pas du tout pareil : le ministre explicitait systématiquement l'avis du Gouvernement, y compris sur les amendements, tout en présentant sa vision globale.

Vous savez, quand on avance au coup par coup, on se casse souvent la figure, c'est ainsi. Il faut savoir dans quel sens on veut aller, quelle cohérence, quelle architecture on veut donner à son texte et comment les amendements s'y intègrent.

Je soutiens donc la demande de suspension de séance. Nous en avons assez de supplier en permanence le Gouvernement pour qu'il s'explique. Le secrétaire d'État n'est même pas capable de nous répéter ce qui est écrit dans sa brochure !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je vous le dis en mieux !

M. Maxime Gremetz. Il pourrait au moins nous la lire ! Mais non, c'est moi qui suis obligé de le faire ! Je ne suis tout de même pas payé comme ministre ! (Rires.) Je ne peux pas faire le député et le ministre en même temps !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Dieu merci ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Ce n'est plus possible ! Je vais être obligé de demander une compensation !

En tout cas, les journaux seraient bien inspirés de publier cette brochure, afin que tout le monde sache à quoi s'en tenir.

Je soutiens la demande de suspension de séance et je demande que le ministre nous donne des informations globales sur la direction que l'on veut nous faire prendre.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7554.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Monsieur Le Guen, je vais vous accorder cinq minutes de suspension de séance...

M. Jean-Marie Le Guen. J'accepte car je suis très tolérant ! (Sourires.)

M. le président. Je vous en remercie !

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Mes chers collègues, vous aurez eu, en réalité, une suspension de dix minutes !

Nous poursuivons l'examen des amendements à l'article 4.

Je suis saisi d'un amendement n° 56 rectifié.

La parole est à M. Hervé Mariton, pour le soutenir.

M. Hervé Mariton. Cet amendement, qui a été accepté par la commission au titre de l'article 88 du règlement, prévoit que « le choix du médecin traitant suppose, pour les ayants droit mineurs, l'accord de l'un au moins des deux parents ou du titulaire de l'autorité parentale ».

L'article 4 stipule que « tout assuré ou ayant droit âgé de seize ans ou plus indique à son organisme gestionnaire de régime de base d'assurance maladie le nom du médecin traitant qu'il a choisi ». C'est une bonne chose mais il nous semble que, dès lors que l'ayant droit est mineur, le choix doit se faire avec l'accord de l'un des parents. Cela n'a rien à voir, bien sûr, avec les conditions de déroulement de la consultation médicale, qui doivent être appréciées à la fois par le jeune et par le médecin. Dans nombre de cas, il doit y avoir - surtout quand il s'agit d'un adolescent - un dialogue direct entre eux.

Nous nous plaçons, en l'occurrence, sur le plan du principe général. Il ne nous semble pas qu'il y ait lieu d'instaurer une sorte de « majorité médicale » à seize ans. La responsabilité des parents dans le choix du médecin traitant est importante. Le jeune mérite d'être guidé dans son choix.

Tel est l'objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a, en effet, accepté cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. A priori, cet amendement ne me semble pas indispensable car nous nous situons dans le cadre de l'autorité parentale telle que la définit le code civil. Par conséquent, le médecin doit obtenir le consentement du ou des détenteurs de cette autorité parentale avant toute intervention médicale sur un mineur.

Cela étant, je comprends l'argument selon lequel, faute d'une telle précision, on pourrait penser qu'il existe une « majorité médicale » à seize ans. D'ailleurs, la loi prévoit d'ores et déjà des dérogations, notamment en matière de contraception.

Il est donc tout à fait légitime que la question puisse préoccuper. C'est pourquoi le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. En effet, monsieur le secrétaire d'État, s'agissant notamment de contraception, l'accord des parents sur le choix du médecin traitant peut poser problème.

Cela dit, je m'interroge sur l'intérêt réel qu'il y a à obliger un jeune de moins de dix-huit ans - mais comme c'est l'amendement de M. Mariton qui me conduit à y réfléchir, je ne me suis pas encore fait mon opinion sur ce point - à avoir un médecin traitant.

Si l'on décide que, s'il n'en a pas, il ne sera pas remboursé, il n'y a là aucun avantage, bien au contraire, puisqu'on limite son accès aux soins. Or aucun d'entre nous ne pense que les adolescents de seize à dix-huit ans pratiqueraient un nomadisme médical qui poserait problème.

Quel est donc l'intérêt de créer une espèce de « majorité médicale » à seize ans, plutôt que d'attendre que l'intéressé ait dix-huit ans et le plein exercice du choix ? Au surplus, indiquer « seize ans » ne conférerait pas un droit supplémentaire, mais en enlèverait plutôt un, je le répète : si le jeune ne va pas chez son médecin traitant, il ne sera pas remboursé !

Je me demande si vous ne devriez pas, monsieur le secrétaire d'État, prendre l'initiative de faire en sorte que l'affiliation à un médecin traitant ne se fasse qu'à dix-huit ans, lorsque la personne dispose de la pleine responsabilité juridique.

Je ne trouve aucun avantage à la disposition de l'article 4 mais j'en vois bien l'inconvénient pour certains jeunes qui seraient obligés d'aller voir le médecin choisi par leurs parents pour être remboursés !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il ressort du débat que nous avons eu en commission sur cette question que plusieurs éléments interfèrent. D'abord, seize ans est l'âge auquel on sort du système scolaire. Ensuite, et cela relève, si je ne me tromple, d'un décret, la limite d'âge est de seize ans pour l'accueil en pédiatrie. Enfin, les mineurs peuvent être émancipés à l'âge de seize ans.

Telles sont les questions soulevées par l'amendement de M. Mariton, qui mériterait d'être adopté.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Je ne remets pas en cause la référence à l'âge de seize ans, qui peut être celui où l'on commence l'apprentissage du nouveau système de santé que nous construisons. Par ailleurs, ce seuil est cohérent avec les propos que vient de tenir le rapporteur et avec certaines dispositions de ce texte.

Je ne conteste pas le libre accès des jeunes mineurs à des prestations de santé dans des conditions particulières : je pense notamment au Planning familial ou à d'autres structures du même type.

Mais si les cas particuliers, s'agissant de contraception, par exemple, sont traités dans des structures bien définies, nous ne devons pas pour autant ériger un principe nouveau, celui de la majorité médicale à seize ans, pour résoudre les problèmes individuels. C'est un point fondamental de la politique familiale, laquelle participe de notre vision de la société. Nous devons affirmer qu'il n'y a pas de majorité médicale à seize ans, car un glissement de sens risquerait de se produire subrepticement.

Cela étant, nous ne remettons nullement en cause l'accès à la pilule ou aux services de gynécologie, qui doit être envisagé au cas par cas. Mais la responsabilité du législateur est de poser les principes généraux, et celui qui est évoqué par cet amendement est essentiel.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Lorsqu'on veut, à l'occasion d'un texte, préciser un principe général qui a le mérite de la clarté, on risque de créer de la confusion.

Or le principe, aujourd'hui, est clair : c'est celui de l'autorité parentale telle que la définit le code civil. Dans cet esprit, ce qui peut s'appliquer en matière médicale, notamment en matière de contraception, reste fixé comme précédemment. Dans ces conditions, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 6865 à 6879.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Ces amendements sont très importants, car ils vont nous permettre de prolonger la discussion que nous avons eue tout à l'heure sur la définition du médecin traitant.

Pour améliorer la qualité et l'efficience de l'offre de soins, chaque patient choisit un médecin traitant, qui peut être un généraliste - c'est-à-dire un médecin de famille classique - ou un médecin spécialiste dans le cadre d'un protocole de soins. Il peut s'agir également d'un médecin spécialiste qualifié en médecine générale car, ne l'oublions pas, la médecine générale peut aussi donner accès à une spécialisation.

Ces amendements reflètent parfaitement l'état d'esprit qui nous anime : en effet, il faut tenir compte du fait qu'une fois diagnostiquées, certaines pathologies lourdes sont prises en charge de façon permanente par un spécialiste - diabétologue, oncologue, cardiologue, ou spécialiste de médecine interne s'agissant de l'hypertension artérielle.

Nos amendements ne devraient pas, dans leur formulation, susciter d'opposition de principe.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a accepté ces amendements. Mais n'est-il pas un peu restrictif de préciser qu'il s'agit de médecins spécialistes « dans le cadre d'un protocole de soins » ?

Accepteriez-vous, monsieur Bapt, de les rectifier en supprimant les termes « dans le cadre d'un protocole de soins » ? Cela laisserait davantage de liberté et supprimerait l'incompatibilité avec l'amendement n° 7887 de Mme Poletti, qui va venir en discussion. Sinon, il faudrait sous-amender votre amendement afin de préciser que cela peut être dans le cadre d'un réseau, d'un service hospitalier ou d'un centre de soins.

Cela étant, la rédaction de l'amendement n° 7887, qui dispose que le médecin traitant choisi peut être un généraliste ou un spécialiste, me semble plus simple.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. En réalité, nos amendements visent à ce que le patient puisse choisir un spécialiste qu'il consulte régulièrement comme médecin traitant, même si sa spécialité ne figure pas dans le décret établissant la liste des spécialités en accès direct. Ainsi, une personne atteinte de sclérose en plaques pourra être suivie par un neurologue, sa spécialité étant retenue dans le cadre d'un protocole de soins.

En matière de gynécologie, la situation est différente, puisqu'un protocole n'est pas nécessaire.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je ne vois pas l'intérêt d'une telle précision à ce stade. Je préfère l'amendement de Mme Poletti, dont nous pourrons éventuellement affiner la rédaction.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. J'irai dans le sens du rapporteur, car il est vrai que les termes « dans le cadre d'un protocole de soins » posent problème.

En réalité, nous pensons tous la même chose : une fois la pathologie diagnostiquée, il n'y a pas lieu d'imposer à un patient devant être pris en charge par un spécialiste de retourner chez un généraliste.

Mais le protocole de soins, une fois le diagnostic posé...

M. Jean-Marie Le Guen. C'est redondant !

M. Jean-Pierre Door. Je suis d'accord avec le rapporteur : j'estime que nous devrions modifier la terminologie.

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié.

M. Richard Mallié. J'irai également dans le sens du rapporteur.

Les amendements nos 6865 à  6879 précisent que le médecin traitant peut être un médecin généraliste. Nous sommes tous d'accord sur ce point. Mais la notion de « protocole de soins » est trop restrictive. On peut en effet consulter une fois par an un ophtalmologiste ou un radiologue pour une mammographie dans le cadre de la prévention. J'ai d'ailleurs déposé un amendement à ce sujet à la fin de l'article 4.

Par ailleurs, j'émets quelques réserves sur la notion de « médecin spécialiste qualifié en médecine générale »...

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est la réforme en cours !

M. Richard Mallié. L'amendement n° 7887, que j'ai l'honneur de soutenir et qui vise à ce que le médecin traitant choisi puisse être un généraliste ou un spécialiste, semble avoir une portée plus générale.

M. le président. Je viens d'être informé que l'amendement n° 7887 de Mme Poletti a été retiré.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a apporté des réponses à ces questions, mais de manière fragmentaire et parcellaire. Un amendement de M. Évin tend à préciser que le médecin traitant peut être un médecin hospitalier, un autre prévoit qu'il puisse appartenir à un centre de soins.

Je ne veux pas engager de polémique, mais nous ne pouvons accepter les amendements défendus par M. Bapt, qui disposent que le médecin traitant peut être un médecin spécialiste dans le cadre d'un protocole de soins. Ces amendements sont trop restrictifs.

Je propose à M. Bapt et à ses collègues de retirer leurs amendements en attendant que nous en fassions la synthèse. Car ils sont si nombreux que nous ne nous y retrouvons plus nous-mêmes !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements en discussion ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Nous partageons la même volonté.

Tel qu'il est rédigé, l'article ouvre la possibilité à tout médecin d'être médecin traitant, qu'il soit généraliste ou spécialiste, à condition qu'il adhère à la convention.

Dans un souci de simplification, le Gouvernement redépose l'amendement n° 7887 de Mme Poletti, qui clarifie les choses en indiquant que le médecin traitant est soit spécialiste, soit généraliste. Ce sera écrit noir sur blanc.

Par ailleurs, un amendement n° 8278, auquel le Gouvernement sera favorable, va venir en discussion. Comme l'a souligné le rapporteur, cet amendement élargit la faculté d'être médecin traitant aux médecins salariés des centres de santé ainsi qu'aux services sociaux et médico-sociaux.

Avec cette architecture - l'article lui-même et les deux amendements -, non seulement nous répondons à votre préoccupation, mais nous allons même au-delà.

M. Édouard Landrain. Très bien !

M. le président. Je précise que l'amendement n° 7887 a été retiré par son auteur, Mme Poletti.

Je suis saisi par le Gouvernement d'un nouvel amendement, qui reprend celui de Mme Poletti et qui porte le numéro 8445, auquel M. Mallié a souhaité s'associer.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Un des axes forts de la réorganisation du système de santé consiste, selon nous, à faire du médecin traitant, du médecin de famille, un médecin pivot. Donner le choix entre un généraliste et un spécialiste conduirait à sortir de cette logique. Si les amendements n°s 7951 à 7965 précisent que le médecin traitant peut être un médecin hospitalier, c'est pour ouvrir la porte aux médecins salariés. Il en est de même lorsque M. Liberti réclame qu'il puisse s'agir d'un médecin provenant d'un centre de santé. Mais ni dans un cas, ni dans l'autre, il n'est prévu qu'un spécialiste soit le médecin traitant.

Le médecin pivot, celui qui joue un rôle de coordonnateur, peut-il être un spécialiste ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Un psychiatre, par exemple ? Ou un ophtalmologue ? C'est possible, mais dans le cadre d'un protocole de soins. Dans le cas d'une affection longue durée, d'une pathologie lourde, on peut envisager que le médecin traitant soit, par exemple, un psychiatre. Et encore, celui-ci risque d'être limité dans sa vision de l'exercice médical. De même, un ophtalmologue pourrait se trouver dans cette situation - la médecine interne, nous le savons, a de nombreuses incidences sur l'ophtalmologie.

En tout état de cause, nos amendements nous semblent soulever un réel problème. Si nous ouvrons la fonction de médecin traitant à n'importe quel spécialiste, nous sortons de la logique qui fait de celui-ci un pivot, un coordonnateur des soins offerts au malade pris dans sa globalité.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 6865 à 6879.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8445.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, n°s 7951 à 7965.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Ces amendements sont dans la continuité des précédents.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable.

M. le président. Afin d'éviter une répétition, il conviendrait cependant de rectifier ces amendements en remplaçant les mots « Le médecin traitant » par le mot « Il ». (Assentiment.)

Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 7951 à 7965 ainsi rectifiés.

(Ces amendements, ainsi rectifiés, sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, n°s 8278, 7784 et 8020.

L'amendement n° 8278 fait l'objet du sous-amendement n° 8443.

L'amendement n° 7784 n'est pas défendu, non plus que l'amendement n° 8020.

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 8278.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Dans le même esprit que les précédents, et pour tenir compte à la fois des remarques formulées en commission et du débat que nous venons d'avoir, cet amendement prévoit que le médecin traitant peut être un médecin salarié d'un centre de santé ou d'un établissement ou service social ou médico-social. Il existe en effet, dans certains de ces centres, des médecins prenant en charge des patients porteurs de maladies telles que la maladie d'Alzheimer.

L'amendement a été adopté à l'unanimité par la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable, sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 8443. En effet, si la convention nationale fixe les missions du médecin traitant lorsque celui-ci est médecin libéral, ce n'est pas le cas pour un médecin salarié. Un arrêté est donc nécessaire pour préciser ces missions.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Beaucoup de mes collègues, monsieur le secrétaire d'État, sont rompus à ce genre de débat car ils sont eux-mêmes médecins. Pour ma part, je suis un béotien. Pourriez-vous être plus précis quant à la nécessité de prendre un arrêté pour fixer les missions des médecins salariés ? Pouvez-vous, en particulier, me confirmer que les médecins salariés des centres de santé situés dans nos quartiers pourront, sans difficulté, sans qu'il soit besoin pour eux de changer de statut ni de sortir de leur rôle actuel, devenir médecins traitants ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je ne suis pas certain de le dire pour la première fois, et j'espère que la répétition suffira à vous convaincre, monsieur Paul : clairement, la réponse est oui. Cet arrêté n'est ni plus ni moins qu'une nécessité juridique, afin que soient bien précisées les missions que ces médecins salariés devront remplir en tant que médecins traitants.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 8443.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8278, modifié par le sous-amendement n° 8443.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 7555 rectifié n'est pas défendu.

Je suis saisi de quinze amendements identiques, n°s 6880 à 6894.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Le médecin traitant doit être avec le patient au cœur du dispositif du dossier médical personnel. Nous proposons donc d'insérer l'alinéa suivant :

« Le médecin traitant participe à la mise en place et à la gestion du dossier médical personnel prévu à l'article L. 160-40 du code de la sécurité sociale. »

Pour le cas, notamment, où le dossier médical personnel serait ouvert par un établissement hospitalier, il nous semble logique et conforme au rôle que nous souhaitons donner au médecin traitant que celui-ci participe à la mise en place et, bien entendu, à la gestion du dossier, même si l'essentiel de son contenu résulte de données hospitalières.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Elle a repoussé ces amendements, en considérant qu'ils pouvaient être satisfaits par décret. Toutefois, l'excellente argumentation de M. Bapt me donne à réfléchir. À titre personnel, je n'y serais finalement pas opposé.

Il reste que le mot « participe » me gêne. Avis ambigu de la commission, donc... (Sourires.)

M. le président. Allez-vous lever cette ambiguïté, monsieur le secrétaire d'État ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. J'ai entendu nombre de députés socialistes exprimer leur accord sur le principe du médecin traitant, et même sur celui du dossier médical personnel. Nous avons l'occasion de lier les deux principes. Si une contradiction apparaît, vous ne la trouverez pas chez le Gouvernement.

Il nous semble important, en effet, de souligner la vocation du médecin traitant à s'investir dans la gestion du dossier médical de ses patients.

Le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse de l'Assemblée. Je constate que nous avançons ; il convient de faire preuve d'ouverture.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Monsieur Bapt, je suis contraint de vous demander un immense effort : les amendements n° 6880 à 6894 doivent être rectifiés, car la numérotation du code de la sécurité sociale a été modifiée par un autre amendement. Comme me l'ont fait savoir des administrateurs de la commission aussi efficaces que précis, le texte auquel il est fait référence n'est plus l'article L. 160-40, mais l'article L. 161-36-1.

M. Gérard Bapt. Je suis d'accord.

M. le président. Il convient en conséquence de remplacer, dans les amendements nos 6880 à 6894, les mots : « L. 160-40 du code de la sécurité sociale », par les mots : « L. 161-36-1 du présent code ».

Ces amendements sont ainsi rectifiés.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 6880 à 6894 tels qu'ils viennent d'être rectifiés.

(Ces amendements, ainsi rectifiés, sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7764.

La parole est à M. Gérard Bapt, pour le soutenir.

M. Gérard Bapt. Vous ne pourrez pas dire que nous n'avons pas de suite dans les idées, que nous manquons de fermeté dans nos convictions et que nous ne sommes pas attachés à un certain nombre de principes de base pour la réorganisation du système de soins !

Il s'agit en l'occurrence de prévention. Le rôle pivot du médecin traitant doit être reconnu. La coordination des soins doit s'accompagner d'un renforcement de la confiance entre le médecin traitant et ses patients afin de leur permettre d'exercer un choix libre et éclairé.

Nous souhaitons donner explicitement au médecin traitant une mission de prévention et, par ailleurs, prévoir sa formation continue et l'évaluation de sa pratique.

Cette disposition favoriserait la mise en place d'une orientation dégagée par le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie : garantir l'information de l'assuré.

Toujours droits dans nos bottes, comme dirait quelqu'un, nous continuons d'affirmer la nécessité d'introduire les dimensions de prévention, de formation médicale continue et d'évaluation de la qualité du service rendu aux patients.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a bien compris l'esprit de l'amendement.

On va retrouver de nombreux éléments à l'article 8, monsieur Bapt, notamment l'évaluation des pratiques, les conditions dans lesquelles cette évaluation est rendue publique. Pour le reste, c'est un décret qui devrait fixer les conditions d'application de l'article 4. À mon grand regret, je dois donc vous dire que la commission a repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. N'y voyez pas une quelconque agression, monsieur Bapt, mais vous et vos collègues avez aussi déposé sur cet article un amendement n° 8115 pour demander que ce soit un décret en Conseil d'État qui détermine les modalités de mise en œuvre des dispositions du premier alinéa. Entre ces deux options diamétralement opposées, l'une qui privilégie le dialogue conventionnel et l'autre qui recourt à la voie réglementaire, laquelle choisissez-vous ? En tout cas, je suis d'accord avec la commission pour demander à l'Assemblée de rejeter l'amendement n° 7764.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Ce n'est pas à moi de choisir, c'est au ministre, et son choix va déterminer le vote de sa majorité. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Nous allons rouvrir le débat sur l'objet de cette loi. Est-ce l'assurance maladie ou le système de santé ? Si c'est le système de santé, nous préférons la voie du décret. Si ce n'est vraiment que l'assurance maladie, nous préférons la convention. Comme nous ne sommes pas sûrs que vous recourrez au décret, nous voulons au moins que le contenu de la convention soit amélioré.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7764.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    3

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1675, relatif à l'assurance maladie :

Rapport, n° 1703, de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission spéciale.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot