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Première séance du lundi 12 juillet 2004

27e séance de la session extraordinaire 2003-2004


PRÉSIDENCE DE JEAN LE GARREC,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

    1

RAPPEL AU RÈGLEMENT

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, pour un rappel au règlement.

M. Gérard Bapt. Toute la France s'est émue de l'épouvantable agression, à caractère antisémite, perpétrée sur une jeune femme accompagnée de son bébé, vendredi, dans un RER.

Plusieurs organisations politiques et des assemblées élues ont prévu des rassemblements. Monsieur le président, notre assemblée ne pourrait que s'honorer en organisant à l'initiative de la présidence, une manifestation symbolique.

M. le président. Monsieur Bapt, hier, l'Assemblée a témoigné sa solidarité aux victimes et a dénoncé, avec les mots qu'il fallait, cette agression. Toutes les organisations politiques se sont exprimées à ce sujet, et M. Le Guen ce matin encore.

Votre remarque sera bien sûr transmise au président de l'Assemblée, mais il ne nous appartient pas d'en décider maintenant.

    2

ASSURANCE MALADIE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie (nos 1675, 1703).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Hier après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'article 20.

Article 20

M. le président. Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, monsieur le secrétaire d'État à l'assurance maladie, mes chers collègues, avec l'article 20, nous poursuivons l'examen des dispositions relatives à la Haute autorité, et plus précisément de son articulation avec les structures compétentes dans ses domaines d'attribution.

L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, la commission de la transparence et d'autres agences, notamment l'ANAES, avaient déjà mis en œuvre des politiques visant à donner au Gouvernement des avis autorisés, sur des bases scientifiques, pour l'aider dans ses arbitrages, qu'il s'agisse de la détermination des médicaments remboursables ou de la mise en place de protocoles qui peuvent aider les praticiens à augmenter la qualité de l'offre de soins et à permettre une maîtrise médicalisée de cette offre.

Parce que cette Haute autorité n'apporte pas véritablement de valeur ajoutée, qu'elle vient se surajouter à des structures existantes - ANAES, AFSSAPS -, de sérieuses difficultés d'organisation des pouvoirs se posent. D'autant que l'AFSSAPS remplit des fonctions de sécurité sanitaire, puisqu'elle est à même de dire quelle est la qualité intrinsèque des produits. Il faut donc déterminer ce qui est du ressort de la sécurité sanitaire et de la préconisation d'emploi.

Par ailleurs, le Fonds de promotion de l'information médicale et médico-économique, - le FOPIM - créé par la loi du 4 mars 2002, serait également rattaché à la Haute autorité.

Depuis deux ans, le FOPIM a été neutralisé. Aucune information indépendante n'a circulé en direction des médecins. Son fonctionnement a donc été bloqué. Les fonds alloués ne l'ont été pas véritablement. Nous avons perdu deux ans.

Aujourd'hui, le Gouvernement pense utile d'attribuer le pilotage de ce fonds d'information à la Haute autorité, ce qui va compliquer le système. On peut s'interroger sur la légitimité de cette Haute autorité à piloter une information sur les médicaments.

On peut également s'interroger sur les ressources qui lui seront allouées. On pourra toujours dire que la Haute autorité fait mal son travail, surtout si aucun fonds ne lui en donne les moyens.

Nous nous interrogeons sur cet article qui n'apporte qu'une confusion supplémentaire là où il faudrait une volonté politique.

M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.

M. Michel Vaxès. L'article 20, que l'on pourrait faire passer pour un article de cohérence, est loin d'avoir une portée réduite. En effet, comme le souligne le rapport, il vise à préciser les conditions de mise en place de la Haute autorité, et plus particulièrement son articulation avec les structures compétentes dans la classification des médicaments et les décisions de remboursement.

C'est ainsi que la Haute autorité se verra attribuer les fonctions de l'AFSSAPS relatives à l'admission au remboursement et des missions concernant la gestion du FOPIM.

Quand on regarde de plus près ces transferts de compétences, on observe qu'il s'agit du transfert d'un pôle scientifique vers un pôle politico-scientifique. Je ne reviendrai pas sur les débats que nous avons eus hier sur les conditions de désignation des membres de la Haute autorité de santé. Ce transfert éclaire davantage sur le rôle de l'organisme en question. Cette Haute autorité sera chargée de questions essentielles pour l'avenir de la prise en charge collective des besoins.

Vous démembrez des institutions indépendantes et précieuses en matière d'accès aux soins. Certes, ce n'était pas toujours parfait, mais les conditions de la transparence et de l'indépendance sont davantage garanties au sein de l'AFSSAPS et du FOPIM.

En effet, nous avons eu à déplorer certaines décisions quant au remboursement des médicaments. Nous en avons débattu à l'occasion de l'examen de nos amendements sur le médicament. Toutefois, il s'agissait d'une décision politique. Il appartiendra ensuite au ministre d'inscrire ou non ces médicaments au remboursement.

Vous transférez ces missions à la Haute autorité de santé, en dehors de tout contrôle, pour mieux les imposer en faisant croire à l'indépendance de la décision.

Nous ne pouvons accepter une telle architecture et défendrons plusieurs amendements en ce sens.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Cet article nous donne l'occasion de revenir sur la création de la Haute autorité de santé et de demander des précisions sur les liaisons entre cette Haute autorité et un certain nombre d'agences, dont l'AFSSAPS.

Il est exact, monsieur le ministre, comme vous l'avez déclaré hier, qu'un certain nombre de ressources de cette agence seront transférées, tout comme pour les deux commissions qui passeront sous la tutelle de la Haute autorité.

Les ressources de la Haute autorité, indépendamment des problèmes de relations avec les industriels, proviendront de produits divers, de dons et de legs. De quoi s'agit-il ?

Enfin, monsieur le ministre, je vous ai interrogé hier sur la déontologie. Votre texte reste elliptique sur le secret et la discrétion professionnels qui devront régir la conduite des futurs membres de la Haute autorité, et l'établissement, lors de leur entrée en fonctions, d'une déclaration faisant état de leurs relations avec les entreprises ou établissements dont les produits entrent dans le champ de compétence de la Haute autorité.

Je vous avais également demandé comment une éventuelle procédure d'impeachment pourrait être déclenchée à l'encontre de personnalités liées à des entreprises citées dans le rapport de M. Dubernard.

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié.

M. Richard Mallié. Après avoir voté l'article 19 créant la Haute autorité, nous abordons sa mise en place et son fonctionnement. On parlait de transparence et de coordination, les voilà à l'œuvre.

Monsieur le ministre, je souhaiterais que vous répondiez à une question que j'ai déjà posée en commission, celle de la simplification. Quelles commissions seraient supprimées ?

L'article 20 prévoit le remplacement de l'AFSSAPS par la Haute autorité, et je m'en félicite, mais pourriez-vous nous apporter des précisions supplémentaires ?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission spéciale.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale. La Haute autorité de santé est nécessaire pour mieux coordonner l'organisation médicale, qu'il s'agisse des produits de santé ou des actes médicaux, Elle permettra de coordonner l'action de l'ANAES et de l'AFSSAPS, ainsi que celle de la commission d'évaluation des produits et prestations et de la commission de la transparence, qui sont clairement appelées, dans le cadre du projet de loi, à être des commissions spécialisées de cette Haute autorité.

Le FOPIM, évoqué par M. Le Guen, représente un progrès indiscutable, mais il n'a pas encore su trouver sa place et son démarrage a été très lent. L'information objective qu'il doit fournir aux professionnels de santé sur les produits admis au remboursement est indispensable et des actions utiles ont d'ailleurs déjà été engagées, comme la mise en place d'un site Internet et l'élaboration de fiches sur les nouveaux médicaments. La suppression du FOPIM n'est pas envisageable. Il convient au contraire de l'intégrer à l'AFSSAPS, afin de permettre à l'information d'atteindre non seulement les professionnels de santé, mais aussi le public.

Monsieur le ministre, je tiens à saluer la structure scientifique que vous mettez en place. Si M. Bapt répète qu'elle répond à des intérêts économiques, c'est parce qu'il n'a pas lu tout le rapport.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Il est de mauvaise foi !

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Dans tout ce débat, M. Bapt est toujours là pour intervenir sur la forme, mais il est le grand absent sur le fond !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Dans une première partie, en effet, le rapport analyse cette dimension économique, supprimée ensuite par un amendement de la commission - ; si vous ne vous en êtes pas encore rendu compte, vous ne tarderez pas à le faire quand nous y parviendrons.

M. Jean-Marie Le Guen. On n'est pas là pour se faire engueuler !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Une telle structure est nécessaire pour mieux diffuser les référentiels médicaux et les recommandations de bonnes pratiques, ainsi que pour mieux apprécier l'utilité des actes et des produits de santé.

M. Jean-Marie Le Guen. On est à peine arrivés qu'il nous engueule déjà !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Quand, par miracle, le président accepte de donner un peu de temps de parole au rapporteur, je m'empresse de saisir l'occasion !

M. Jean-Marie Le Guen. C'est parce que le président a changé !

M. le président. Mes chers collègues, veuillez écouter le rapporteur !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Pour revenir brièvement sur le débat que nous avons eu hier à propos des affections de longue durée, je rappellerai que le rôle essentiel de la Haute autorité concernera la prise en charge des ALD, qui représentent plus de 50 % des dépenses et dont le traitement doit pouvoir être qualitativement amélioré. On ne peut mettre sur le même plan trente affections aussi diverses que le diabète, les cancers, les insuffisances respiratoires chroniques ou l'insuffisance rénale, ni, pour chacune de ces affections, celles qu'on peut traiter et guérir facilement lorsque le diagnostic est précoce, comme le cancer de la prostate, et d'autres, comme le cancer du pancréas, qui évolue très rapidement.

Dans ce domaine, une analyse scientifique fine est nécessaire. À ce titre, le recours aux représentants des sociétés savantes est indispensable, mais c'est à partir des données fournies par les professionnels spécialisés et les experts qu'on pourra le mieux déterminer la prise en charge de ces affections de longue durée et, pour chacune d'entre elles, définir des catégories susceptibles de bénéficier d'une prise en charge de meilleure qualité.

L'organisation de la Haute autorité en commissions spécialisées, comme on vient de le rappeler à propos de la commission d'évaluation des produits et prestations et de la commission de la transparence, est très judicieuse. Il n'y a pas lieu de caricaturer, comme cela a été fait hier, le collège qui dirigera cette Haute autorité : il est clair que les personnalités qui y siégeront ne seront pas chargées de définir le traitement des différentes affections, mais d'identifier les experts qui devront fournir des informations à cet égard. On peut comparer son fonctionnement à celui de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, mis en place voici deux ans et dont le fonctionnement est très satisfaisant : celui-ci comporte un comité d'experts restreint à six membres, qui fait appel à d'autres experts, susceptibles de répondre aux questions que nous leur posons.

La Haute autorité de santé représentera un progrès indiscutable. Monsieur le ministre, nous espérons qu'elle sera installée et mise en place, comme vous l'avez annoncé, dès le début de l'année 2005, car il faut agir vite et bien.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Bravo !

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Contrairement aux allégations de nos collègues de l'opposition, la structuration de la Haute autorité de santé représentera une avancée considérable. Elle rendra possible un pilotage réel et dynamique face à l'évolution permanente de la pharmacologie et des protocoles mis à la disposition des praticiens et des établissements, et permettra la meilleure utilisation des moyens de l'assurance maladie. L'article 20 dessine le périmètre de la compétence de cette Haute autorité, qui inclura le secrétariat de la commission d'évaluation des produits et prestations et de la commission de la transparence, le recouvrement des redevances d'inscription des médicaments et des dispositifs médicaux - actuellement du ressort de l'AFSSAPS -, ainsi que le Fonds de promotion de l'information médicale et médico-économique.

Ainsi se met en place, pour la partie relevant de la Haute autorité, une initiative permettant de généraliser le dispositif d'évaluation dans un système d'assurance maladie qui a, jusqu'ici, péché surtout par sa fragmentation et par un certain immobilisme. Les ministres de la santé successifs qui ont entrepris d'examiner la situation des médicaments soumis à remboursement ont constaté qu'un grand nombre de produits étaient dépassés, et que, pour certains, le service médical rendu était notoirement insuffisant. Il est particulièrement heureux que se mette en place, avec la Haute autorité, un dispositif incontestable et incontesté permettant de répondre, pratiquement au jour le jour, à l'évolution des protocoles et des traitements.

Par ailleurs, la Haute autorité introduit dans le mécanisme de direction de l'assurance maladie une simplification qui vise à une meilleure efficacité.

M. Claude Évin. Ça, c'est moins évident !

M. Bernard Accoyer. La simplification est toujours un progrès, et tout particulièrement dans le domaine administratif. Ce progrès profitera immédiatement aux assurés sociaux et à leurs ayants droit, qui pourront bénéficier du meilleur soin, évalué en permanence. Quant aux moyens, ils seront eux aussi utilisés au mieux.

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. M. le rapporteur a très justement souligné que la Haute autorité permettra la définition de protocoles plus précis pour les affections de longue durée - question qu'il connaît bien pour y avoir beaucoup travaillé - et contribuera à améliorer la prise en charge des maladies chroniques.

Pour ce qui est du collège, le mode de nomination de ses membres permet de garantir leur qualité.

Monsieur Mallié, le regroupement de la commission de la transparence, de la CEPP et du Haut comité médical de la sécurité sociale, qui va dans le sens de la simplification et de la clarification, permettra en outre des économies d'échelle.

Monsieur Le Guen, j'ai évoqué hier, en répondant notamment à M. Évin, le lien entre la Haute autorité et les autres agences. Le regroupement que nous opérons donnera plus de cohérence et plus de force à l'expertise portant sur l'utilité médicale des actes et des prestations qui demandent leur remboursement.

Pour ce qui est des compétences de sécurité sanitaire de l'AFSSAPS, un amendement de la commission permet de dissiper l'éventuelle ambiguïté qui pourrait subsister.

Quant au FOPIM, créé en décembre 2000 et doté d'un budget de plus de 20 millions d'euros, il ne s'était toujours pas réuni en janvier 2002. En 2002, son articulation avec l'AFSSAPS, qui n'avait toujours pas été trouvée, a été assurée. Il nous est donc apparu plus qu'utile de confier à la Haute autorité cette mission de promotion et d'information médicale.

Monsieur Vaxès, loin de remettre en cause le travail de la commission de la transparence, nous renforçons celle-ci en l'intégrant à la Haute autorité. Quant au FOPIM, comme je viens de l'indiquer en réponse à M. Le Guen, la diffusion d'une information neutre sur le médicament est une mission centrale que nous avons voulu renforcer en la confiant à la Haute autorité.

Enfin, monsieur Bapt, nous avons prévu, en matière de déontologie, toutes les dispositions utiles : l'article L. 161-42 indique clairement que le renvoi aux dispositions de l'article L. 52-23-4 garantit la déontologie des membres de la Haute autorité.

M. le président. Je suis saisi de treize amendements identiques, nos 1264 à 1275 et 7022.

M. le président. La parole est à M. François Asensi, pour soutenir les amendements nos 1264 à 1275.

M. François Asensi. L'article 20 tire les conséquences des dispositions prévues à l'article précédent. Il contient en effet un ensemble de dispositions organisant la mise en place de la Haute autorité qui prévoient le transfert à celle-ci des missions exercées aujourd'hui par l'AFSSAPS et par le FOPIM, ainsi que des dispositions transitoires visant à garantir que les procédures engagées devant la commission de la transparence ou la commission d'évaluation des produits ou prestations de santé soient menées à leur terme au sein de la Haute autorité.

Contestant la création de la Haute autorité de santé, nous proposons, par cohérence, la suppression de l'article 20.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies, pour soutenir l'amendement n° 7022.

M. Alain Vidalies. On ne peut aborder l'article 20, qui prévoit, entre autres dispositions, le transfert de certaines compétences à l'AFSSAPS, sans se référer aux questions posées, avant même la publication du projet de loi, quant la coordination entre l'AFSSAPS et la Haute autorité et quant à la cohérence même de la démarche.

Lorsque la question de la nécessité de cette coordination a été posée par la mission d'information, le directeur de l'AFSSAPS, interrogé par M. Dubernard, a déclaré : « J'ai simplement voulu dire qu'il existait déjà une commission de la transparence et le CEPP pour les dispositifs médicaux, et qu'il était souhaitable que la Haute autorité apporte une valeur ajoutée quand elle procédera à l'évaluation du rapport bénéfices-risques et du service rendu. Je serais plus à l'aise avec une Haute autorité qui ne reproduirait pas ce qui existe déjà. »

Vous nous présentez la Haute autorité comme susceptible de répondre à certaines déficiences mais, en fait, vous lui transférez simplement des pouvoirs déjà exercés par d'autres organismes. La question de la plus-value qu'apporterait la Haute autorité se pose manifestement toujours, même avec l'article 20. C'est pourquoi notre amendement n° 7022 tend à supprimer cet article.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements. La coordination entre les autres agences et l'AFSSAPS est indispensable pour permettre à cette dernière de se recentrer sur ses missions, ce qui n'est pas le cas actuellement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 1264 à 1 275 et n° 7022.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Le rapporteur vient de critiquer l'AFFSAPS,...

M. Bernard Accoyer. Il ne l'a pas critiquée !

M. Jean-Marie Le Guen. ...alors que le ministre n'a fait que se louer des services de cette agence. Il faudrait donc que le rapporteur nous en dise un peu plus sur ses griefs contre l'AFSSAPS. Cela montre que le dispositif proposé, qui ne modifie pas le fonctionnement de l'AFSSAPS, ne lui convient pas. En cas de dysfonctionnement de l'AFSSAPS, est-ce à la Haute autorité de santé de régler le problème ?

M. le président. La parole est à M. rapporteur

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Monsieur le Guen, vous connaissez aussi bien que moi les tensions qui ont existé entre plusieurs agences au moment où l'AFSSAPS a été mise en place. Je pense notamment aux tensions entre l'Établissement français des greffes et l'AFSSAPS lorsque celle-ci a pris position sur les transplantations, ce qui n'était pas de mise et ne relevait pas de sa compétence.

Cette coordination permettra de remettre chacune de ces agences à sa place exacte et de la concentrer sur ses missions. Vous devez convenir qu'il est indispensable de coordonner l'AFSSAPS, l'ANAES et les autres agences qui existent dans ce domaine.

M. le président. La parole est à M. Claude Évin.

M. Claude Évin. Hier, j'ai interrogé le ministre sur l'articulation entre, d'une part, la Haute autorité et, d'autre part, l'AFSSAPS et l'ANAES. Il m'a répondu que la Haute autorité aurait une fonction de coordination.

Nous sommes en total désaccord avec la démarche intellectuelle qui sous-tend cette position. Si les agences portent une appréciation scientifique et médicale en toute indépendance, il n'est dès lors point besoin de coordonner leur expression. Ainsi, monsieur le rapporteur, quand l'AFSSAPS formule une appréciation sur certaines greffes, elle est dans son rôle.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il y a un Établissement français des greffes pour ça !

M. Claude Évin. Cela ne relève pas de la mission de l'Établissement français des greffes. Et l'AFSSAPS ne s'est pas exprimée sur l'ensemble de la problématique des greffes, mais sur des problèmes ponctuels, en restant dans son rôle.

Il appartiendra ensuite aux responsables politiques d'apprécier les avis formulés sur le plan scientifique et d'en tirer les conséquences.

Votre démarche n'est pas cohérente. S'il y a des problèmes nécessitant de repréciser les missions de telle ou telle agence, il fallait que votre projet propose d'y remédier.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Nous opérons une mise en cohérence.

M. Claude Évin. En créant une sorte de superstructure pour coordonner les agences existantes, vous n'irez pas vers une clarification et vers une simplification, mais vers une plus grande confusion.

M. le président. Mes chers collègues, je vous fais remarquer que vous relancez le débat sur l'article 20. Mais j'ai bien compris que c'était utile pour éclairer la discussion.

La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est là un débat de fond. Je comprends très bien votre position, monsieur Évin. Mais j'ai simplement évoqué la nécessaire coordination en matière de référentiels de bonne pratique. Vous savez que l'ANAES élabore un certain nombre de référentiels, l'AFSSAPS également. Il est donc nécessaire d'avoir une stratégie globale en ce domaine, laquelle sera définie par la Haute autorité de santé.

Il est vrai qu'il y a aujourd'hui des agences indépendantes les unes des autres mais, comme le dit M. le rapporteur, il faut une meilleure cohérence. Maintenant, il y aura un dénominateur commun : les référentiels de bonne pratique. La valeur ajoutée de la Haute autorité consistera dans son évaluation de la stratégie thérapeutique de ces bonnes pratiques qui englobe les médicaments, les actes et les dispositifs médicaux.

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, n°s 4462 à 4473, des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains.

La parole est à M. François Asensi.

M. François Asensi. Ce sont des amendements de cohérence.

Le I de l'article 20 a pour objet de modifier la rédaction de l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale relatif à la commission d'évaluation des produits et des prestations dont les travaux portent essentiellement sur les dispositifs médicaux et qui est actuellement gérée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, mais aussi sur les propositions d'admission au remboursement.

Or ces organismes n'ont pas failli, ou alors donnez-nous les justifications d'une telle modification. D'ailleurs, un article de presse notait avec satisfaction le travail de l'AFSSAPS sur la notation des médicaments. Le problème que nous avons soulevé en matière de remboursements relève du circuit et non pas du travail de cette agence.

Certains médicaments considérés comme utiles n'ont pas été remboursés ou ne le sont pas actuellement, car la demande n'a pas été faite par l'entreprise exploitante. Dès lors, certains laboratoires ayant obtenu une AMM ne déposent pas de demande en vue de leur remboursement par les régimes d'assurance maladie. Cette démarche permet virtuellement que des médicaments à SMR important soient placés en dehors des procédures visant à autoriser le remboursement et à fixer le prix des médicaments. Dans ce cas de figure, le prix est donc libre. Il est même souvent trop élevé pour les personnes en difficulté ou disposant de faibles revenus. C'est ici que commence la médecine à deux vitesses, évolution néfaste de notre système de santé et que nous condamnons.

Les amendements que nous avons proposés visent à rendre concordants la demande d'AMM et le dépôt d'une demande d'inscription sur la liste des médicaments remboursables. Cette procédure éviterait ainsi que des médicaments à SMR important passent à côté de l'impérieuse nécessité médicale et thérapeutique de leur remboursement aux assurés sociaux. Nous insistons sur le fait que le Gouvernement doit jouer son rôle pour qu'à l'issue de la procédure il donne rapidement son aval à l'inscription du médicament sur la liste de ceux qui sont remboursables si l'ASMR ou le SMR sont attestés.

Avec cette procédure, le problème est politique. Et le transfert à la Haute autorité ne résoudra rien en matière d'amélioration de la prise en charge. En revanche, le contrôle et le rationnement seront à l'honneur.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4462 à 4473.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies, pour un rappel au règlement.

M. Alain Vidalies. Monsieur le ministre, pendant que nous parlons de l'avenir de l'assurance maladie et de la protection sociale des Français, se tient, à Bangkok, la conférence internationale sur la lutte contre le sida. La protection de millions de personnes est concernée. Un des problèmes soulevés dans cette réunion, c'est l'évolution, prévisible et annoncée, du prix des génériques. Cette question, au centre de nos réflexions, n'est donc pas franco-française, elle s'inscrit dans une perspective mondiale. Suite au procès de Pretoria et à la position indigne qui avait été prise par l'industrie pharmaceutique, on a changé son fusil d'épaule. Compte tenu des accords de l'OMC sur les produits de santé, tout le monde pense que, au titre de la protection de la propriété industrielle, le prix des génériques va augmenter dans les années à venir.

Je ne crois pas qu'il soit possible de poursuivre ce débat en ne tenant compte que de nos petits problèmes, dans notre pré carré. La santé et l'avenir de centaines de millions d'hommes peuvent dépendre de ce qui va être décidé, dans le cadre de l'organisation internationale ONUSIDA, pour le prix des génériques. Il serait utile que le Gouvernement s'exprime sur cette question d'une importance et d'une gravité considérables.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. M. Vidalies a raison de dire qu'on ne peut pas discuter du projet de loi sur l'assurance maladie et parler des médicaments, notamment des génériques, en ignorant ce qui se passe à Bangkok. L'exemple du Brésil montre que la baisse du prix des génériques entraîne une diminution extraordinaire de la mortalité et de la morbidité dues au sida. Il faut trouver à tout prix une solution. Il est impossible de laisser les choses en l'état.

Deuxièmement, votre assemblée a adopté hier, à l'initiative de M. Mallié, un amendement tendant à ce que la qualité des génériques soit évaluée. En effet, s'il importe de développer l'usage des génériques, il faut également veiller à ce qu'ils soient de bonne qualité. La pire chose qui puisse arriver, dans la lutte contre le sida comme dans la lutte contre d'autres maladies qui dévastent l'hémisphère sud, serait que des copies de médicaments, des faux médicaments, soient commercialisées.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies, pour une rapide intervention.

M. Alain Vidalies. Je serai très bref, monsieur le président.

Je remercie M. le ministre de m'avoir répondu immédiatement. Dans le cours du débat, il serait bon que le Gouvernement puisse s'exprimer sur la question très précise du prix, qui est une préoccupation qui s'exprime dans le monde et non pas seulement à l'Assemblée nationale française. La question du prix du générique semble au cœur du débat à Bangkok, compte tenu de l'accord international qui est intervenu, lequel détourne la question en l'abordant par le biais de la protection de la propriété intellectuelle. À l'échelle globale, du point de vue de la protection de la santé de l'humanité, c'est un problème considérable. Il serait donc tout à fait utile de connaître la position du Gouvernement français sur le sujet particulier du prix et sur la mise en application de cet accord international.

Reprise de la discussion

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 4474 à 4485.

La parole est à M. Michel Vaxès.

M. Michel Vaxès. Le paragraphe II de l'article 20 porte principalement sur les compétences actuellement confiées à la commission de la transparence.

Le 1° de ce paragraphe, qui modifie l'article L. 5123-3 du code de la santé publique, prévoit ainsi de confier à une commission spécialisée de la Haute autorité de santé le soin de proposer la « liste des produits agréés », c'est-à-dire la liste des médicaments utilisés par les collectivités publiques qui sont pris en charge par l'assurance maladie.

Cette liste, qui est actuellement proposée par la commission de la transparence, est ensuite établie par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Le présent article précise également que la composition et le fonctionnement de la commission seront fixés par décret en Conseil d'État.

De même que pour la CEPP, les dispositions de l'article L. 5123-4 du code de la santé publique prévoyant le dépôt au Parlement du rapport d'activité de cette commission sont supprimées. On perd en transparence, ce qui est extrêmement dommageable.

Par cohérence avec l'article 19 du projet de loi, le 2° abroge le dernier alinéa de l'article L. 5123-4, qui précise actuellement que les modalités d'inscription sur la liste des produits agréés sont fixées par le règlement intérieur de la commission.

Le 3° propose par ailleurs de transférer de l'AFSSAPS à la Haute autorité de santé le recouvrement des redevances d'inscription au remboursement des médicaments et des dispositifs médicaux respectivement prévus par les articles L. 5123-5 et L. 5211-5-1.

Enfin, le 4° du II supprime les dispositions prévues par le 5° de l'article L. 5311-2 qui confient à l'AFSSAPS le fonctionnement de la commission de la transparence.

Évidemment, nous ne partageons pas l'objectif de ces transferts de compétences. C'est pourquoi nous proposons la suppression du paragraphe II.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4474 à 4485.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8290.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8290.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 4486 à 4497.

La parole est à M. Michel Vaxès.

M. Michel Vaxès. Nous l'avons déjà dit, l'article 20 est un article de conséquence des dispositions prévues à l'article précédent.

En effet, cet article contient un ensemble de dispositions organisant la mise en place de la Haute autorité. Elles prévoient le transfert à la Haute autorité des missions exercées aujourd'hui par l'AFSSAPS - secrétariat de la commission d'évaluation des produits ou prestations et de la commission de la transparence, recouvrement des redevances d'inscription des médicaments et des dispositifs médicaux - et par le FOPIM. Il contient également les dispositions transitoires visant à garantir que les procédures engagées devant la commission de la transparence ou la commission d'évaluation des produits ou prestations de santé sont menées jusqu'à leur terme au sein de la Haute autorité.

Contestant la Haute autorité de santé, les auteurs de ces amendements proposent, par cohérence, la suppression de l'article 20.

Le paragraphe III vise à transférer à la Haute autorité de santé certaines compétences du FOPIM, ce que nous refusons. C'est pourquoi nous proposons ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4486 à 4497.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7873.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Cet amendement est l'occasion de revenir sur le problème du FOPIM et de l'information. Nous proposons de prévoir que « la Haute autorité de santé succède à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé dans ses droits et obligations au titre du fonds de promotion de l'information médicale et médico-économique ».

En effet, il est très important que, malgré la modicité de ses moyens, l'action du FOPIM soit enfin effective.

D'autre part, sur le plan de la cohérence, il est paradoxal que le même article supprime le FOPIM tout en attribuant sa tutelle à la Haute autorité de santé.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7873.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8291 rectifié.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Amendement de précision.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8291 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 7711 n'est pas défendu.

Je suis saisi d'un amendement n° 7874.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement vise à compléter le dispositif que nous souhaitons voir mettre en place en faveur de la prescription en DCI, ou dénomination commune internationale.

Il est tout à fait de la responsabilité du FOPIM, et donc de la future Haute autorité de santé, de mettre en place les moyens d'une prescription en DCI. Car c'est le seul moyen réel de libérer les prescripteurs, et donc les praticiens de notre pays, de la pression commerciale qui s'exerce violemment sur eux. Comme le rappelait notre rapporteur, plus de 20 000 euros par médecin - 23 000, je crois - sont annuellement dépensés pour des visites médicales qui ne visent pas à lui fournir une information équilibrée puisqu'il s'agit en fait d'une démarche commerciale. Il est absolument fondamental que la pression des marques de médicaments ne s'exerce pas. C'est pourquoi il faut que les praticiens puissent prescrire en DCI.

Pour que cela soit possible sans que cela pose des problèmes par rapport aux habitudes des patients et des médecins, il est nécessaire que ceux-ci soient dotés d'un logiciel indépendant - et non pas d'un logiciel conçu par les laboratoires pharmaceutiques -, de façon à pouvoir établir une correspondance entre la prescription en noms de marques et la prescription en DCI.

Jusqu'à présent, les dispositions de ce texte qui ont été adoptées sont tout à fait insuffisantes. Il a été prévu que la Haute autorité de santé aurait un droit de regard sur les logiciels de prescription et veillerait à leur qualité scientifique. Mais le problème n'est pas là. Le problème est de savoir si ces logiciels sont véritablement indépendants des démarches commerciales, des démarches marketing qui lient en permanence le médicament à son nom de marque plutôt qu'à son nom générique. Ce qui importe, ce n'est pas simplement de garantir la neutralité de la Haute autorité de santé, c'est de lui permettre d'exercer une autorité sur la prescription en donnant une véritable garantie par rapport au système des marques. Nous demandons que la Haute autorité soit clairement mandatée à cet effet.

Je signale par ailleurs que cet amendement avait été adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale et le Sénat lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, et qu'il a été retiré en commission mixte paritaire à la demande du Gouvernement précédent.

Sur cet amendement très important, nous demandons un scrutin public, monsieur le président.

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 7874, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement.

L'objectif est bien sûr compréhensible, puisqu'il s'agit de mettre en place plus rapidement une base de données qui a été prévue par la loi de financement de la sécurité sociale et qui n'est toujours pas mise en place.

L'amendement confie cette mission au FOPIM, mais celui-ci est intégré à la Haute autorité de santé par le présent projet de loi. C'est la raison principale qui nous a conduits à rejeter cet amendement.

M. Jean-Marie Le Guen. Très drôle !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je vous confirme, monsieur Le Guen, ce que Jean-François Mattei avait annoncé : la base d'informations sur les produits de santé se constitue. C'est cependant un projet complexe, puisque nous avons l'ambition de fournir un ensemble cohérent d'informations aux différents intervenants : les médecins, les pharmaciens et les autres. Or, aujourd'hui, l'information existe, mais elle est éclatée entre les caisses d'assurance maladie, l'AFSSAPS et le Centre national d'information sur les médicaments hospitaliers.

Notre méthode consiste à avancer par étapes. La première, largement entamée, consiste à fusionner la base de données de l'assurance maladie, MEDISOC, qui donne les informations tarifaires nécessaires au remboursement, avec la base Thériaque, maintenue jusqu'ici par le Centre national d'information sur les médicaments, qui donne, comme vous le savez, diverses informations identifiant chaque médicament.

Pour organiser cette fusion, un groupement d'intérêt économique a été constitué à la fin de l'année dernière, le GIE SIPS. Vous voyez que les choses avancent.

Parallèlement, l'AFSSAPS progresse dans le renseignement de la base qu'elle maintient pour que soient disponibles l'ensemble des résumés des caractéristiques des produits, les RCP, issus de la procédure d'AMM et des avis de la commission de la transparence.

L'étape suivante consistera donc à fusionner la base de l'AFSSAPS et celle développée au sein du GIE SIPS. Voilà ce que nous souhaitons faire. La transformation du GIE en groupement d'intérêt public, pour y intégrer l'AFSSAPS, est actuellement à l'étude.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour répondre au Gouvernement.

M. Jean-Marie Le Guen. J'ai bien entendu la réponse du ministre et je ne doute pas des progrès qu'il décrit. Mais la question qui se pose est la suivante : est-ce que les médecins français auront à leur disposition un logiciel gratuit ? Car c'est bien de cela qu'il s'agit, il faut dire les choses comme elles sont : c'est une aide à la qualité, ainsi qu'à la maîtrise des dépenses. Est-ce qu'ils auront à leur disposition, d'ici quelques semaines ou quelques mois, un logiciel d'aide à la prescription qui fera clairement apparaître une prescription potentielle en DCI ? Cela permettrait de restructurer complètement l'offre de médicaments et leur distribution dans notre pays, et donc d'alléger l'offre commerciale.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il y a deux choses, monsieur Le Guen. Le plus important est à mon avis la question de savoir s'il sera possible de mettre à la disposition de chaque médecin un logiciel indépendant. La réponse est oui, puisque nous allons certifier, pour la première fois,...

M. Jean-Marie Le Guen. Il fera quoi, ce logiciel ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Attendez. Pour la première fois, disais-je, nous allons certifier les réponses.

Vous posez ensuite une deuxième question, qui est différente, à savoir celle de la gratuité. La réponse est qu'il n'y aura pas de gratuité. Les logiciels ont un prix, et je ne peux donc pas dire qu'ils seront gratuits. Je peux dire, en revanche, qu'ils seront certifiés par le ministère.

M. Jean-Marie Le Guen. Et ils permettront la prescription en DCI ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Oui.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais mettre aux voix l'amendement n° 7874.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 40

              Nombre de suffrages exprimés 40

              Majorité absolue 21

        Pour l'adoption 12

        Contre 28

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'article 20, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 20, ainsi modifié, est adopté.)

Avant l'article 21

M. le président. Je signale d'ores et déjà que, sur le vote de l'amendement n° 8292 portant article additionnel avant l'article 21, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, je vous demande - et, là, très sérieusement - une brève suspension de séance. En effet, les amendements que nous allons examiner et les votes qui interviendront ensuite sont fondamentaux. Or nous n'avons pas eu le temps de nous concerter au cours du débat avec la majorité, alors même que nous avions entrevu une possibilité d'accord en commission. Nous aimerions en conséquence entendre les points de vue des uns et des autres et pouvoir échanger nos arguments hors de l'hémicycle avec nos collègues.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures trente, est reprise à onze heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

Mes chers collègues, je crois utile de faire le point.

Je vous rappelle que le groupe socialiste a demandé un scrutin public sur l'amendement n° 8292 de la commission spéciale.

Le président de la commission spéciale vient de m'informer que le sous-amendement n° 8466 de M. Morange est retiré.

M. Gérard Bapt. Ce sous-amendement était scandaleux !

M. le président. Par ailleurs, un amendement n° 8476 de M. Dubernard vient de vous être distribué.

Sur le vote de cet amendement, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

M. Jean-Marie Le Guen. Dans quel ordre les deux amendements seront-ils soumis au vote, monsieur le président ?

M. le président. Dans l'ordre où je les ai cités, monsieur le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je ne comprends pas.

M. le président. Mais si ! Ne faites pas semblant !

M. Jean-Marie Le Guen. Vous venez d'annoncer un scrutin public sur l'amendement n° 8476 alors que nous n'avons pas encore voté sur l'amendement n° 8292 ! Est-il bien réglementaire d'annoncer un nouveau scrutin avant d'avoir procédé au scrutin précédent ?

M. le président. Absolument ! C'est mon droit le plus strict...

M. Alain Bocquet. Annoncez tous les votes de la journée, pendant que vous y êtes !

M. le président. ...et vous avez eu tort de m'interrompre, monsieur Le Guen. Les deux amendements seront successivement mis au voix par scrutin public. Je crois avoir été suffisamment clair.

Les amendements nos 8292 et 8476 ayant une cohérence d'ensemble, je vais demander à la commission de les soutenir en commun.

La parole est à M. le président de la commission spéciale, pour soutenir l'amendement n° 8292.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Je vous rappelle que nous avons débattu, en commission spéciale, du contrôle parlementaire exercé sur les finances sociales. Considérant que le budget de la sécurité sociale pèse de plus en plus lourd, au point d'excéder le budget de l'État, les sensibilités politiques présentes ont unanimement jugé utile que le contrôle démocratique du Parlement soit renforcé.

L'amendement n° 8292 affirme cette volonté parlementaire en lui donnant une certaine solennité. Le renforcement du contrôle exercé sur les structures de l'assurance maladie est d'autant plus important que leurs responsabilités seront accrues, en particulier à travers la création de l'UNCAM, dont le directeur général sera tenu de faire valider des propositions budgétaires.

M. Édouard Landrain. Très bien !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. M. le rapporteur va compléter cette présentation en détaillant le mode opératoire du contrôle, précisé dans son amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Dubernard, pour soutenir l'amendement n° 8476.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Le président de la commission spéciale a bien expliqué cet élément très important du dispositif que nous proposons. Le projet de loi améliore indiscutablement, monsieur le ministre, le pilotage financier du système, en confiant des responsabilités accrues à l'assurance maladie en matière budgétaire, notamment à travers la création de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et celle du comité d'alerte, lequel prend une dimension particulière au vu de l'ensemble du texte.

Il nous semble nécessaire, parallèlement, que le contrôle parlementaire sur les finances sociales soit renforcé. Aujourd'hui, comment fonctionne-t-il ? La commission des affaires culturelles, familiales et sociales étudie et vote le projet de budget de la sécurité sociale, la commission des finances donne son avis, mais nous n'avons pas de pouvoir réel. En tout cas, la commission des affaires sociales ne possède pas d'organe équivalent à la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances.

L'amendement n° 8476 a précisément pour objet de renforcer le contrôle parlementaire en créant, au sein de chacune des commissions des affaires sociales de l'Assemblée et du Sénat qui est saisie au fond des projets de loi de financement de la sécurité sociale, « une mission d'évaluation et de contrôle chargée d'assurer l'évaluation permanente de ces lois ».

J'ajoute qu'à l'instar de la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances, cette mission d'évaluation et de contrôle des finances sociales sera coprésidée par un membre de la majorité et un membre de l'opposition.

M. Gérard Bapt. Ça, c'est bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Premièrement, avons-nous la possibilité de déposer un sous-amendement ?

M. le président. Oui !

M. Jean-Marie Le Guen. Un de nos collègues fera donc usage de ce droit.

M. Gérard Bapt. J'y compte bien !

M. Jean-Marie Le Guen. Deuxièmement, nous nous demandons si l'adoption de l'amendement n° 8476 ferait tomber notre série d'amendements suivante, qui tend à créer un office parlementaire ; mais je pense que non.

M. Claude Évin. Les deux dispositifs ne s'insèrent pas dans le même texte de loi.

M. le président. En effet : vos amendements ne tomberont pas.

M. Jean-Marie Le Guen. Même si la proposition du président de la commission des affaires sociales est intéressante, nous souhaitons naturellement pouvoir défendre la nôtre.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 8292 et 8476 ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Oh ! je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée. (Sourires.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet, pour un rappel au règlement.

M. Alain Bocquet. Plus on avance, plus la brousse s'épaissit. Pour y voir clair, je demande une suspension de séance d'un quart d'heure.

M. le président. Encore !

M. Alain Bocquet. Cela devient de plus en plus compliqué, monsieur le président. Afin que mon groupe puisse réfléchir à la question, une réunion d'au moins dix minutes s'impose.

M. le président. La suspension de séance étant de droit lorsqu'elle est demandée par un président de groupe, je vais vous l'accorder, mais je vous signale que le sujet a déjà donné lieu à une heure de suspension de séance.

M. Jacques Brunhes. Mais nous venons seulement de découvrir le second amendement de la commission !

M. Alain Bocquet. La majorité a choisi d'appeler l'Assemblée à siéger en période estivale, et nous étions présents hier, un dimanche. Nous n'y pouvons rien si elle fait prendre du retard au débat. Ce n'est pas notre faute si l'UMP est traversée par des divergences, des contradictions, des rébellions internes !

M. Richard Mallié. Oh !

M. le président. Je vais suspendre la séance pour cinq minutes, ce qui laissera à M. Bapt le temps de me remettre son sous-amendement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à onze heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

Je crois bon de refaire le point, dans une situation éminemment évolutive.

Je suis saisi d'un amendement n° 8292 de la commission, sur le vote duquel un scrutin public est demandé, et d'un second, n° 8476, de M. Dubernard. Ils ont été soutenus respectivement par le président de la commission spéciale et son rapporteur. Sur ces deux amendements, le Gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée.

Sur le second amendement, n° 8476, je suis saisi de deux sous-amendements que nous examinerons un peu plus tard, l'un de M. Bapt, le n° 8477, l'autre de M. Brard, le n° 8478 rectifié. Ces deux sous-amendements feront l'objet d'une discussion commune.

Pour l'heure, nous en sommes encore à la discussion des deux amendements, que j'ai voulue conjointe car ils traitent du même sujet.

La parole est à M. Claude Évin.

M. Claude Évin. Nous abordons l'examen des articles traitant de l'organisation institutionnelle du système d'assurance maladie. Nous allons pouvoir constater à cette occasion que la décision reposera uniquement sur le directeur de l'UNCAM. En effet, le futur conseil des caisses de sécurité sociale, qui, d'ailleurs, ne sera plus conseil d'administration, aura beaucoup moins de pouvoir que n'en a aujourd'hui le conseil d'administration des caisses.

Tout va donc reposer, disais-je, sur le directeur de la caisse nationale d'assurance maladie, qui sera en même temps directeur de l'UNCAM. Nous y reviendrons, mais nous tirons, pour notre part, une première conclusion de cette situation : c'est qu'il est nécessaire de renforcer les pouvoirs de contrôle du Parlement sur la masse financière considérable que représentent les dépenses de santé - 130 milliards d'euros. C'est la raison pour laquelle nous avons souhaité que soit créé un Office parlementaire de contrôle et de suivi de l'assurance maladie, qui serait permanent, à l'image de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, dont on ne peut que se louer. Cet organisme aurait une position institutionnelle forte et serait doté de moyens de fonctionnement substantiels.

Nous étudierons cette proposition en examinant l'amendement n° 7279. Si je l'évoque dès maintenant, c'est qu'elle constitue un élément de référence nécessaire pour comprendre notre position sur l'amendement de M. Dubernard et les raisons qui motivent le sous-amendement de M. Bapt.

Nous avons débattu en commission de la création d'un tel office. La majorité estime qu'elle ne serait pas opportune - sans doute nous expliquera-t-elle à nouveau ce qui justifie cette opinion. En revanche, elle serait favorable à la création d'une mission d'évaluation et de contrôle à l'image de celle qui existe à la commission des finances. Pour nous, c'est notoirement insuffisant, mais ce peut être considéré comme une amélioration par rapport à la situation actuelle.

Par conséquent, parce que nous voulons avancer, et sans renoncer pour autant à demander la création de l'office, nous pouvons accueillir de manière positive l'amendement n° 8292. Je tiens à rappeler que les rapporteurs de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, saisie au fond de la loi de financement de la sécurité sociale, ont d'ores et déjà un pouvoir de contrôle sur pièces et sur place lors des travaux préparatoires à ladite loi. L'amendement propose d'étendre ces compétences à l'ensemble de la commission. Cet élargissement peut être lui aussi considéré comme une amélioration. À défaut d'office, nous pourrions donc accepter cet amendement, car il est nécessaire pour fonder ensuite la création d'une mission d'évaluation et de contrôle. Cependant, je précise à nouveau que, pour nous, c'est loin d'être suffisant.

Nous serions également favorables à l'amendement de M. Dubernard - sous réserve de l'acceptation du sous-amendement de M. Bapt - qui tend précisément à créer « au sein de la commission de chaque assemblée saisie au fond des projets de loi de financement de la sécurité sociale une mission d'évaluation et de contrôle chargée d'assurer l'évaluation permanente de ces lois ».

Il ne s'agit pas d'instituer une nouvelle commission permanente, ce qui ne saurait être envisagé, l'Assemblée et le Sénat en ayant déjà six. Il n'est question que de renforcer les pouvoirs de contrôle du Parlement sur les lois de financement de la sécurité sociale grâce à la création, dans chaque assemblée, d'une mission d'évaluation et de contrôle de la commission des affaires sociales, similaire à la MEC de la commission des finances pour les lois de finances.

Voilà les positions que nous défendrons, même si l'organisation proposée est loin de répondre à nos désirs.

Quant à ma dernière remarque, elle devrait rallier également les membres de la majorité, notamment ceux qui ont assumé des responsabilités dans les commissions : tout cela ne sera possible que si cette mission et les rapporteurs des commissions saisies au fond disposent de moyens de fonctionnement suffisants pour agir et exercer réellement leurs pouvoirs de contrôle.

Certains d'entre nous ont exercé la fonction de président de la commission des affaires sociales ou celle de rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Sans vouloir créer un conflit entre les commissions, je dois dire que celle des affaires sociales qui a vu, depuis les lois organiques de 1996, ses pouvoirs élargis en matière de contrôle du budget social, n'a pas vu ses moyens abondés en conséquence...

M. Bernard Accoyer. C'est vrai !

M. Claude Évin. ...contrairement à ceux de la commission des finances en matière de contrôle des lois de finances.

M. Gérard Bapt. Ces moyens sont néanmoins insuffisants !

M. Claude Évin. Mon cher collègue, je ne souhaite pas provoquer un débat entre les deux commissions. Pour l'heure, nous parlons des moyens affectés à la commission des affaires sociales.

Les missions des rapporteurs, notamment les contrôles sur pièces et sur place, ne pourront être pleinement efficaces que si elles bénéficient des collaborations nécessaires. Au-delà des changements de majorité, nous devons tous prendre conscience de la nécessité de doter ces missions des moyens leur permettant d'atteindre les objectifs que nous leur assignons.

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié.

M. Richard Mallié. Nous sommes favorables aux deux amendements du rapporteur mais, je suis d'accord avec M. Évin, la mission d'évaluation et de contrôle doit avoir les moyens de travailler.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Nous avons écouté avec beaucoup d'intérêt les propos de M. Bur, qui est connu pour sa rigueur et sa rectitude. Il sait également faire preuve de courage, en particulier contre les lobbies, comme nous avons pu le constater à propos de la distribution des boissons alcoolisées dans les établissements scolaires.

M. Richard Mallié. Venez-en au fait ! Qu'est-ce que cela cache ?

M. Jean-Pierre Brard. Rien, car je n'ai pas besoin de me cacher pour dire ce que je pense !

Je pourrais aussi faire l'éloge du professeur Dubernard.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je serais sans doute moins facilement canonisé !

M. Jean-Pierre Brard. Comment deux collègues aussi brillants peuvent-ils s'embrouiller dans des explications aussi alambiquées ? Si nous en avions le pouvoir, monsieur Dubernard, nous vous décernerions un doctorat en antiphrases, car vous pourriez soutenir une thèse sur la distinction entre les vessies et les lanternes !

M. Jérôme Rivière. Et vous êtes maître en la matière, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. Vos amendements visent, soi-disant, à renforcer le contrôle de l'Assemblée nationale. Et vous sentant pousser des ailes, vous avez même créé un néologisme : nous allons « solenniser » les nouvelles possibilités qui nous sont offertes !

Je ne veux pas relancer la querelle entre les commissions, mais en quoi le contrôle sera-t-il amélioré puisque tous nos collègues de l'Assemblée ne pourront y participer ? M. Bapt a déposé un sous-amendement à ce propos, comme je l'ai fait moi-même, sans pour autant aller aussi loin que l'a si justement proposé M. Évin, prenant pour référence l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, qui a fait la preuve de son efficacité. Car outre le fait qu'il réunit sénateurs et députés, il dispose du temps et des moyens nécessaires, ainsi que du concours de personnalités scientifiques, concours indispensable à la conduite d'une réflexion de fond.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. L'amendement n° 8292 de M. Dubernard était en complète contradiction avec le consensus dégagé en commission spéciale pour renforcer le contrôle parlementaire et créer un organe chargé du contrôle permanent de notre système d'assurance maladie, et plus largement de protection sociale. À présent, avec son amendement n° 8476, le rapporteur nous propose de limiter cette fonction à la commission des affaires sociales. Je rappelle que le rapporteur pour avis du PLFSS exerce une charge importante, comme le prouve la nomination récente au Gouvernement du dernier titulaire de cette fonction.

M. Claude Évin. C'est un marchepied !

M. Gérard Bapt. Et c'est M. Bur qui a été désigné la semaine dernière pour le remplacer.

M. Richard Mallié. Très bon choix !

M. Claude Évin. Lui aussi sera bientôt au Gouvernement !

M. Gérard Bapt. Il est donc aberrant d'écarter un organe aussi important que la commission des finances du contrôle de lois qui mettent en jeu plus de 120 milliards d'euros de prélèvements obligatoires et qui posent la question du programme pluriannuel de rétablissement des finances publiques, tel qu'il a été proposé à la Commission européenne par le Premier ministre.

Voilà pourquoi je vous propose, par le sous-amendement n° 8477, dont la forme diffère quelque peu de celui de M. Brard, de supprimer les termes « au fond », afin d'établir la compétence conjointe des membres de la commission des affaires sociales et de la commission des finances.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au premier des scrutins qui ont été annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 8292.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 55

              Nombre de suffrages exprimés 53

              Majorité absolue 27

        Pour l'adoption 52

        Contre 1

L'Assemblée nationale a adopté.

L'amendement n° 8476 a été présenté par M. Dubernard, et nous en venons aux deux sous-amendements en discussion commune.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir le sous-amendement n° 8478 rectifié.

M. Jean-Pierre Brard. L'éloge que j'ai fait tout à l'heure de M. Bur était sincère, et nos collègues le connaissent suffisamment pour apprécier ses qualités. Mais comment admettre que M. Bur puisse se retrouver, du fait de sa récente nomination à la commission des finances, rapporteur spécialisé dans les chrysanthèmes ?

M. Claude Évin. On ne fait pas un sous-amendement pour M. Bur, tout de même !

M. Jean-Pierre Brard. Il mérite mieux que cela, et je ne doute pas que M. Dubernard ne soit solidaire de M. Bur !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ne personnalisez pas le dossier, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. On m'objecte que la tradition constitutionnelle s'oppose à ce qu'une sorte de mission mixte puisse être commune à deux ou à plusieurs commissions. Nous avons seulement aujourd'hui, il est vrai, la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances, dont l'excellent travail est reconnu par tous. Mais pourquoi se substituer au Conseil constitutionnel et décider à sa place de ce qui serait constitutionnel ou non ?

Chacun se souvient de notre ancien collègue Pierre Mazeaud, qui a toujours su distinguer entre l'esprit et la lettre. Pierre Mazeaud, qui est un vrai gaulliste, et il n'y en a plus beaucoup...

M. Édouard Landrain. Dites plutôt un gaulliste historique !

M. Jean-Pierre Brard. Oh ! Vous ne ferez croire à personne que c'est un fossile !

Pierre Mazeaud, donc, en bon gaulliste, connaît parfaitement l'esprit de la Constitution et il sait que la Constitution est un corps vivant dont la lecture doit évoluer au fil du temps.

Et puis, nous sommes la représentation nationale, pas le Conseil constitutionnel. Légiférons donc au mieux, et laissons le Conseil procéder à une lecture positive de nos travaux. Il ne manquera pas de faire évoluer utilement l'interprétation de notre loi fondamentale en ce qui concerne la pratique parlementaire.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, pour défendre le sous-amendement n° 8477.

M. Gérard Bapt. Si l'amendement de M. Dubernard était voté en l'état, il est clair que la fonction de rapporteur pour avis de la commission des finances sur le PLFSS deviendrait sans objet. Dans ce domaine, le seul moyen d'influence dont disposerait encore la commission des finances serait le rapporteur spécial du budget de la santé et de la protection sociale. Et le rapport sur le budget de la santé serait discuté dans une commission n'exerçant pas une mission permanente de contrôle budgétaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux sous-amendements ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. À titre personnel, j'y suis défavorable : ils sont contraires à l'esprit de mon amendement.

Monsieur Brard, nous avons beaucoup de plaisir à vous retrouver, avec votre verve et votre finesse. Néanmoins, porter ce débat au niveau constitutionnel ne me paraît pas avoir beaucoup de sens. M. Évin l'a bien rappelé, il ne s'agit pas de créer une commission permanente supplémentaire, mais simplement de renforcer le pouvoir de contrôle du Parlement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. S'agissant de questions qui relèvent de l'organisation de l'Assemblée, le Gouvernement s'en remet à sa sagesse.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Ce que vient de dire M. le rapporteur n'est pas du tout convaincant. Premièrement, je ne vois pas en quoi notre proposition peut entrer en contradiction avec le contenu de son amendement. Deuxièmement, je lui rappelle, à lui qui a tenté d'anticiper la décision du Conseil constitutionnel, qu'aucun renouvellement des membres de cette institution n'est prévu dans l'immédiat, et qu'il est donc inutile de postuler prématurément. (Sourires.)

Le PLFSS porte sur des sommes considérables. Au nom de quel principe la commission des finances serait-elle dessaisie du pouvoir qu'elle a vocation à exercer en la matière, à égalité avec la commission des affaires sociales ? Les propos de notre rapporteur semblent cacher une sorte de corporatisme pour le moins malvenu et désuet.

M. le président. La parole est à M. Claude Évin.

M. Claude Évin. J'ai une question précise à poser. Si la commission s'est déjà exprimée à ce sujet, sans doute avais-je l'esprit ailleurs.

Monsieur le rapporteur, vous êtes également président de la commission des affaires sociales, et votre parole a donc un certain poids. La mission d'évaluation et de contrôle sera-t-elle bien coprésidée par la majorité et l'opposition ? En prenez-vous l'engagement ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je m'y suis déjà engagé à deux reprises. Cette mission doit fonctionner sur les mêmes bases que celle de la commission des finances.

M. Claude Évin. Merci, monsieur le rapporteur.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 8478 rectifié.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 8477.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous allons maintenant procéder au second des scrutins précédemment annoncés.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 8476.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 55

              Nombre de suffrages exprimés 55

              Majorité absolue 28

        Pour l'adoption 50

        Contre 5

L'Assemblée nationale a adopté.

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 7279 à 7293.

Sur le vote de ces amendements, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Claude Évin.

M. Claude Évin. Le groupe socialiste est désireux de renforcer considérablement le pouvoir de contrôle du Parlement sur le financement de l'assurance maladie. En la matière, la réforme constitutionnelle de 1996 a permis un progrès en prévoyant le vote, chaque année, d'une loi de financement de la sécurité sociale. De même, la nouvelle rédaction de l'article L. 111-9 du code de la sécurité sociale que nous venons d'adopter à l'initiative de M. Dubernard étend les pouvoirs des présidents des commissions saisies au fond et des rapporteurs du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Cela étant, nous estimons que seul un Office parlementaire de contrôle et de suivi de l'assurance maladie serait à même de permettre au Parlement d'assumer pleinement ce pouvoir de contrôle. Il s'ajouterait à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui remplit dans son domaine de compétences une mission particulièrement appréciée de l'Assemblée nationale et du Sénat. C'est ainsi que lors du débat sur la mise en place de la carte Vitale, nous avons bénéficié de ses lumières.

Un tel office constituerait une assise institutionnelle forte et permettrait d'engager les importants moyens que requiert le suivi de l'assurance maladie.

Lors de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, vous avez souhaité, monsieur le rapporteur, l'institution d'un Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, l'OPEPS, sur le modèle de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, même s'il ne lui est pas tout à fait comparable. Sa vocation est de réfléchir aux grandes problématiques concernant la santé publique. Je vous propose, afin de ne pas multiplier le nombre de ces organismes, de confier au futur Office parlementaire de contrôle et de suivi de l'assurance maladie les missions actuellement assumées par l'OPEPS et les moyens mis à sa disposition. En effet, le contrôle et le suivi de l'assurance maladie ne concernent pas seulement le financement de la santé, mais aussi les politiques susceptibles d'être mises en place au regard des moyens disponibles.

Cet amendement va bien au-delà de ceux que nous avons adoptés tout à l'heure. Nous avions indiqué ne pas être opposés, à défaut d'un office parlementaire ad hoc, au renforcement des moyens de contrôle des commissions saisies sur la loi de financement de la sécurité sociale et à la création d'une mission d'évaluation et de contrôle. Il reste que la création d'un office parlementaire nous semble indispensable. C'est l'objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je me réjouis que cet amendement ne soit pas tombé et vienne en discussion, car il me permet de mettre les choses au point.

L'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé a été mis en place il y a deux ans, avec l'objectif d'éclairer, en matière de santé publique, les débats parlementaires sur la loi de financement de la sécurité sociale. Son mode de fonctionnement est beaucoup plus léger que celui de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. Nous avons en effet décidé de ne nous entourer que de six experts permanents. Nous commandons par ailleurs à des spécialistes des études qui permettent à des députés membres de la commission des affaires sociales, au Sénat et à l'Assemblée, de rédiger, avant l'examen de chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale, un rapport sur un thème précis.

Ainsi, cette année, deux rapports d'excellent niveau ont été officiellement présentés au Sénat le 7 juillet. Le premier, de notre collègue Marc Bernier, dont je vous conseille vivement la lecture,...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Moi aussi !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. ...s'intéresse au rapport coût-efficacité du dépistage du cancer du sein. Le second, signé par le sénateur Francis Giraud, et qui est aussi d'excellente qualité, porte sur la prévention des handicaps de l'enfant. Nous avons décidé que les rapports présentés à l'occasion du PLFSS pour 2005 seraient consacrés à la maladie d'Alzheimer - c'est notre collègue Cécile Gallez qui s'en chargera - et la prévention de l'obésité, un sujet cher à Jean-Marie Le Guen, sur lequel travaillera le sénateur Gérard Dériot. C'est donc bien dans le domaine de la santé publique que l'OPEPS déploie ses compétences.

Je vous demande, monsieur Évin, de retirer ces amendements qui ont reçu une réponse - partielle, certes, mais solide - avec l'adoption du précédent.

M. Claude Évin. Très partielle, et donc incomplète !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Ma philosophie à ce sujet est simple : l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé est bien lancé, mais il doit encore entrer dans les habitudes de nos deux assemblées. Quant à la mission d'évaluation et de contrôle dont nous venons de décider la création, elle reste à installer. Lorsque ces deux structures auront atteint leur vitesse de croisière, nous pourrons envisager de les rapprocher.

L'avis de la commission est donc défavorable à ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. À vous entendre, monsieur le rapporteur, vous plaidez également pour la mise en place d'un office.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il en existe déjà un !

M. Gérard Bapt. Vous venez de rappeler, d'une part, votre attachement au contrôle parlementaire - ce qui, de la part d'un président de commission, est la moindre des choses - et, d'autre part, l'intérêt d'un organisme du type de l'OPEPS. C'est un avis que je partage, pour avoir moi-même assisté, la semaine dernière, à la présentation des rapports annuels de cet office. Et pourtant, vous en concluez : « Nous verrons plus tard. » Or nous avons déjà acquis de l'expérience en ce domaine.

Il existait en effet un Office d'évaluation des politiques publiques, mis en place par les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. Il travaillait également sur des thèmes faisant l'objet de rapports rédigés alternativement par des députés ou des sénateurs. Cet office a fini par montrer ses limites, en termes de moyens et d'ancrage dans l'actualité. C'est pourquoi il a été remplacé, dans notre assemblée, par la MEC de la commission des finances. Il constitue cependant un exemple de collaboration entre l'Assemblée nationale et le Sénat.

Le second argument, c'est le travail très intéressant de l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques. M. Évin a parlé à l'instant de sa contribution à la conception de la carte Vitale. Nous en avons vu aussi tout l'intérêt lorsque M. Dionis du Séjour a présenté des amendements sur l'extension de l'offre de soins grâce à la télémédecine, notamment dans les zones déshéritées, dont cet office était la source et qui ont été adoptés à l'unanimité par l'Assemblée. Ces deux exemples, l'un passé et l'autre actuel, montrent bien, monsieur le rapporteur - mais vous parliez plutôt en tant que président de commission -, que votre raisonnement s'arrête au milieu du gué.

Je trouve dommage qu'à l'occasion de discussions sur le contrôle parlementaire dans le cadre d'une réforme aussi fondamentale de l'assurance maladie, nous laissions passer cette occasion de mettre en place un véritable organisme de contrôle parlementaire sur un budget qui, on le sait bien, est appelé à croître beaucoup plus vite que le PIB.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Votre réponse, monsieur le rapporteur, est partielle et, pourtant, nous pouvons raisonner par analogie.

L'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, présidé par Claude Birraux et auquel j'ai le privilège d'appartenir, accomplit un travail méticuleux, approfondi, pérenne, et ne s'intéresse pas seulement à la gestion quotidienne. Si j'ai bien compris, l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé apporte juste un éclairage au moment du vote du PLFSS. C'est bien, mais c'est « petit bras ».

L'office proposé par nos collègues socialistes pourrait réfléchir à des sujets comme le vieillissement, le maintien à domicile, la prévention, la nutrition et la question de l'obésité, ou encore le statut de l'industrie pharmaceutique, et je vois que cela vous intéresse, monsieur Bertrand. Nous avons dans notre pays une situation tout à fait étonnante. Qui est le client de l'industrie pharmaceutique ? La sécurité sociale. D'une certaine manière, c'est donc l'État qui paie. Nous avons une industrie d'État avec un statut privé. Il y a là matière à réflexion, ne serait-ce que pour mettre un zeste de transparence là où il n'y en a pas du tout actuellement.

Pour l'instant, monsieur le rapporteur, vous vous obstinez à refuser tout geste sur des amendements pouvant pourtant faire l'objet d'un consensus, geste qui montrerait que votre esprit est plus ouvert qu'une huître ! En plus, cela ne coûterait rien au budget. Vous avez dit tout à l'heure que l'Office d'évaluation des politiques de santé jouait modeste, avec seulement six experts. L'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques n'est pas aussi contraint. Quand on vous entend, ce n'est même plus de la modestie, c'est du masochisme. Vous ne voulez pas étendre les moyens permettant au Parlement de participer à la définition des grandes politiques de notre pays et non pas seulement à une gestion du quotidien, aussi importante soit-elle. On sait pourtant que, sur ces sujets très importants, garder le nez sur le guidon, c'est s'interdire d'avoir des ambitions dans l'avenir.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. J'ai un grand respect, monsieur Brard, pour l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. J'en ai fait partie et je connais les mérites de cette structure. L'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé s'inspire de son esprit,...

M. Jean-Pierre Brard. Alors c'est du chewing-gum sans sucre !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. ...très tourné vers l'intérêt général, mais pas de son mode de fonctionnement, inspiré de celui d'un office équivalent aux États-Unis, machine assez lourde à l'origine, mais qui a également modifié son organisation pour réduire le nombre de personnels travaillant en permanence sur les thèmes scientifiques et aller vers la désignation d'experts recrutés, le temps d'une mission, pour leur compétence spécifique dans les champs étudiés.

Par ailleurs, la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale aura une vision purement financière, au moins au départ.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été précédemment annoncé.

Je vais donc mettre aux voix les amendements identiques nos 7279 à 7293.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 53

              Nombre de suffrages exprimés 53

              Majorité absolue 27

        Pour l'adoption 9

        Contre 44

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Article 21

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, premier orateur inscrit sur l'article.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le ministre, l'article 21, peut-être est-ce le seul, part de bonnes intentions, mais même l'enfer en est pavé : je ne l'apprendrai pas à l'ancien maire de Lourdes. Il vise en effet à associer les caisses à la préparation du budget de l'assurance maladie. Nous portons bien sûr la revendication forte de leur donner davantage de place dans l'élaboration de la loi de financement, mais cela suppose qu'elles fassent l'objet d'une adaptation démocratique, ce qui est totalement oublié par votre projet de loi.

Pour nous, l'État doit demeurer le garant de la politique de santé et du maintien de la protection sociale. Pour cela, nous avons besoin d'une véritable démocratie sanitaire et sociale, ce qui suppose des institutions rénovées, seules à même de garantir l'efficacité et la légitimité des décisions qu'elles prendront.

Nous n'avons pas dans notre pays de réelle démocratie sociale, ou plutôt nous n'en avons plus, et nous ne pensons pas que la réflexion ait été suffisante pour remédier à cette carence, notamment en ce qui concerne l'organisation de la sécurité sociale. Pour que les acteurs qui la font vivre aient une légitimité incontestable, il faut que des processus incontestables soient à l'origine des mandats qui leur sont confiés. Nous regrettons pour notre part qu'ait été abandonnée l'élection régulière des représentants des assurés sociaux dans les conseils d'administration de la sécurité sociale ; cela a certainement contribué à couper le citoyen de l'institution. Cette situation perdure depuis vingt ans, à tel point que de nombreux Français, notamment les plus jeunes, ignorent son fonctionnement et ne savent pas, par exemple, que des représentants syndicaux sont censés siéger dans ses instances et prendre des décisions en leur nom. C'est pourquoi nous plaidons pour le rétablissement de l'élection des représentants des assurés sociaux.

À partir d'un conseil d'administration renouvelé, le partenariat avec les pouvoirs publics, par exemple pour l'élaboration du budget de la sécurité sociale, est beaucoup plus envisageable qu'en l'état. Vous confiez aux caisses une responsabilité supplémentaire qui va dans le bon sens, mais vous restez au milieu du gué puisque vous ne modernisez pas les institutions.

M. Dubernard précise dans son rapport que cette participation à la préparation du budget a valeur de test de la capacité des caisses à gérer effectivement le système. Mais, depuis l'origine, les caisses l'ont toujours géré, jusqu'en 1995. Ce n'est donc pas un cadeau que vous leur faites mais un juste retour des choses. Il faut consentir un effort supplémentaire en rétablissant les élections. Quelles sont, messieurs les ministres, vos intentions à ce sujet ?

Cet article, qui fait partie des revendications d'une organisation syndicale, aurait pu recevoir notre assentiment mais, parce que vous n'êtes pas allés jusqu'au bout de cette démarche et que vous en avez dénaturé le sens, nous ne pourrons pas vous suivre entièrement. Vous savez bien que l'organisation syndicale dont je parle est la première du pays ; vous ne pouvez pas rester autistes face à ses demandes.

M. le président. La parole est à M. Claude Évin.

M. Claude Évin. Avec l'article 21, nous abordons de manière plus précise les missions des caisses de sécurité sociale, puisque vous proposez que, chaque année, elles élaborent une proposition de budget. Comme M. Brard, mais peut-être pas avec les mêmes arguments et la même conclusion, je pense, monsieur le ministre, que vous n'êtes pas allé au bout de votre démarche. Vous laissez naturellement au Parlement, et nous vous en savons gré, le soin de voter l'ONDAM mais, très concrètement, n'est-ce pas une démarche illusoire que de dire aux caisses de sécurité sociale qu'elles pourront faire des propositions sur les recettes et les dépenses ? C'est d'ailleurs un débat récurrent sur la gouvernance de l'assurance maladie. Quelle est en fait la responsabilité des caisses et quelle est celle de l'État et du Parlement ?

Pour dire les choses clairement, vous n'avez pas bien conduit ce débat. Vous vous êtes laissé enfermer dans une vision de l'assurance maladie qui réduit son rôle à la seule gestion de l'offre de soins de la médecine ambulatoire, et plus particulièrement des professions de santé libérales. Et peut-être les caisses de sécurité sociale, dont l'une des missions est de négocier les conventions avec les professions libérales, se sont-elles enfermées, elles aussi, dans ce type de problématique. Ce travers réapparaît, au fil du texte, dans toutes les propositions qui concernent l'organisation institutionnelle des rapports entre l'État et les caisses.

Or, pour que les caisses soient en mesure de faire une préparation budgétaire prévoyant l'évolution des charges et des produits, il faudrait qu'elles aient autorité sur l'ensemble de l'offre de soins, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Certes, vous essayez progressivement d'étendre leur champ de compétence, mais sans clarifier pour autant leurs responsabilités.

J'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises à la tribune de l'Assemblée, et je n'ai jamais varié sur ce point : vous auriez dû aller jusqu'au bout de votre démarche et regrouper dans une même instance l'État et les caisses de sécurité sociale, pour assurer un pilotage unique de l'offre de soins. Cette position aurait été plus cohérente et plus respectueuse de la responsabilité des caisses de sécurité sociale que celle que vous adoptez aujourd'hui, qui consiste en fait à leur donner un pouvoir sans les laisser assumer réellement leurs responsabilités. Comment pourraient-elles, à la moitié de l'année, prévoir de manière définitive les besoins de financement pour l'exercice suivant ?

Tel est, monsieur le président, notre point de vue sur l'article 21. Il justifie les amendements de suppression que M. Bapt soutiendra tout à l'heure.

M. le président. Me voilà prévenu ! J'espérais que vous les aviez déjà défendus... (Sourires.)

M. Claude Évin. Comme vous l'avez compris, je laisserai ce soin à mon collègue.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Je m'adresse solennellement au rapporteur. Depuis le début de ce débat, nous lui expliquons que nous ne croyons ni à l'efficacité des mesures qu'il propose ni à la réalité des économies qu'il escompte. Nous ne sommes pas les seuls à le dire : après le vote du projet de loi, il faudra bien qu'interviennent encore une restriction du périmètre de soins, une augmentation de la CSG ou de la CRDS, et d'autres mesures tout aussi désagréables.

Depuis l'origine, l'objectif du Gouvernement est de mettre en place un système dans lequel ces décisions ne seront pas prises par le pouvoir politique, mais par d'autres que lui, en l'occurrence, le fameux « proconsul » ou une instance scientifique quelconque.

Or j'appelle l'attention de l'Assemblée sur les déclarations du rapporteur relatives à l'article 21, qui figurent, dans le rapport, à la page 223. Les propos, qu'il tient, j'imagine, en parfaite connaissance de cause, montrent que nos craintes sont fondées. Ils éclairent en outre le projet de loi sous un jour bien particulier : « C'est une responsabilité très étendue qui est ainsi confiée aux caisses et il faut souhaiter qu'elles l'utilisent à plein. D'une certaine manière, cette procédure a valeur de test de la capacité des caisses à gérer effectivement le système. Leurs conseils, à la composition désormais très large, auront ainsi chaque année la possibilité de proposer au ministre, en temps utile pour la préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale, dans l'hypothèse plus que probable d'une nécessaire réduction du déficit de l'assurance maladie : une augmentation des cotisations d'assurance maladie pesant sur les salariés et/ou les employeurs, un relèvement de la CSG ou des autres recettes affectées à l'assurance maladie, une réduction du périmètre de prise en charge des soins ou toute autre mesure de rationalisation de l'offre, voire de réduction du niveau de remboursement. »

On croit rêver ! Voilà qui dépasse de loin nos craintes les plus alarmistes !

En somme, dans son pronostic, le rapporteur - semblable en cela à la majorité de la commission, puisqu'il ne peut s'agir uniquement d'un sentiment personnel - est bien plus pessimiste que nous. Il envisage en effet une rationalisation de l'offre de soins, une réduction du niveau de remboursement, un relèvement de la CSG ou des cotisations salariales et patronales. Bref, il ressort de cette sorte d'apocalypse qu'il n'attache aucune crédibilité à l'hypothèse que le projet de loi puisse aboutir à un équilibre des comptes. Si l'on se place dans cette perspective très sombre, le nouveau pouvoir des caisses prend évidemment tout son sens.

À un moment donné, il faut tout de même avoir un débat sincère sur ce qui va se passer dans les prochaines années. Qu'on nous renvoie à nos craintes et à notre rôle de représentants de l'opposition, c'est une chose. Mais nous ne pouvons poursuivre ce débat si le rapporteur avoue lui-même que toutes les mesures financières prévues dans le projet de loi ne sont pas satisfaisantes et qu'il envisage précisément les augmentations de cotisations, les limitations de remboursements et les changements de périmètre des soins que nous ne cessons d'évoquer depuis le début de la discussion.

Puisque M. le rapporteur semble partage nos craintes à ce sujet, nous attendons de sa part quelques explications.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je suis très heureux et très fier que le rapport soit lu en détail par nos collègues de l'opposition.

M. Gérard Bapt. Tantôt vous nous reprochez de ne pas le lire, tantôt vous trouvez que nous le lisons trop !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je vous rappelle, monsieur Bapt, que les rapports contiennent des commentaires d'articles.

M. Gérard Bapt. Bien entendu !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. À la différence de M. Vidalies, dont la question est parfaitement claire, vous aviez occulté dans une précédente intervention le fait que la commission, à laquelle, d'ailleurs, vous n'avez pas beaucoup participé,...

M. Claude Évin. Qu'est-ce que c'est que cette remarque ?

M. Gérard Bapt. Vous feriez mieux de ne pas trop insister sur le problème de l'assiduité aux travaux de la commission !

M. Jean-Pierre Brard. Vous n'êtes pas expert en dialectique, monsieur le rapporteur !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur.... avait adopté un amendement visant à supprimer la partie de mon commentaire d'article que vous aviez critiquée.

Quant à M. Vidalies, je l'engage à relire l'avant-dernière phrase du paragraphe dont il a cité le début : « Encore le conseil de chaque caisse devra-t-il trouver en son sein un accord sur les mesures à proposer. »

Au reste, pour vous donner mon opinion devant le ministre et le secrétaire d'État, je suis convaincu que ce projet de loi représente notre dernière chance de sauver notre système d'assurance maladie.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale et M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Absolument !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je crois par conséquent que nous avons l'obligation d'agir. De plus, je suis favorable au paritarisme. Je fais donc confiance aux partenaires sociaux.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale et M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Nous aussi !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je sais qu'ils sauront prendre leurs responsabilités.

M. Claude Évin. Dans ce cas, pourquoi ne pas les leur donner pleinement ?

M. le président. Je suis saisi de vingt-huit amendements identiques, nos 1276 à 1287 du groupe des député-e-s communistes et républicains, 7294 à 7308 du groupe socialiste, et 7607 de M. Préel.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Parce que, pour ma part, je crois aux vertus du débat, j'aimerais, monsieur le rapporteur, que vous puissiez nous répondre de manière plus fluide. Vous plantez des banderilles, ou ce que vous pensez en être, et l'instant d'après, nous passons à autre chose. On ne peut pas procéder ainsi.

Vous parlez de paritarisme. Soit ! Mais je pense que, si l'on vous faisait récrire le dictionnaire de la langue française, on économiserait du papier, car vous altérez totalement le sens des mots. Ou alors, il faudrait au contraire prévoir un addendum...

M. Édouard Landrain. Après le français, le latin ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Le paritarisme dont vous parlez est frelaté, dans la mesure où il n'est pas assis sur la légitimité du suffrage des salariés. Loin de nous l'idée de remettre en cause la qualité de telle ou telle personne, mais vous savez bien que, leur représentativité étant discutable, les postes qu'on leur accorde font figure de prébendes.

Pour en revenir aux amendements que je défends, nous souhaitons que notre position soit bien comprise. Nous sommes de farouches partisans de la démocratie sociale, dont vous parlez si volontiers, monsieur le ministre et monsieur le secrétaire d'État, sans jamais passer à l'acte. Il est vrai que vous êtes, sur le plan philosophique, de parfaits idéalistes, qui s'intéressent aux idées sans jamais se préoccuper de les concrétiser.

Depuis de nombreuses années, nous demandons le rétablissement des élections à la sécurité sociale. Dans ce domaine, vous aviez l'occasion d'envoyer au pays un signal fort. Vous ne l'avez pas saisie.

Vous comprendrez que, pour notre part, nous soutenions tout ce qui participerait à redonner aux caisses leur rôle d'antan. Et la gestion fait partie de ce rôle. Mais, sur ce point, vous êtes restés frileux. Pire, vous vous êtes abstenus, parce que vous n'êtes pas convaincus de la nécessité de développer la démocratie sociale.

L'article 21 prévoit que les caisses nationales proposeront au Gouvernement un projet de budget avant le 30 juin. Une délégation plus large en matière de gestion impliquerait qu'elles puissent intervenir aussi sur les recettes. Mais, parce que vous envisagez la gestion en épiciers, vous risquez de limiter l'intervention des caisses à la seule gestion de la pénurie. Pourquoi ne pas leur faire confiance, non seulement sur la gestion des dépenses, mais aussi sur celle des recettes ?

Le texte prévoit que le projet budgétaire des caisses devra comporter les « mesures nécessaires pour atteindre l'équilibre prévu par le cadrage financier pluriannuel des dépenses d'assurance maladie ». Cela suggère que le projet devra s'insérer dans un cadrage pluriannuel s'imposant aux caisses et défini par le Parlement. Ainsi, le dispositif que vous prévoyez est une sorte de chausse-pied destiné à gérer l'avenir de l'assurance maladie. Normalement, c'est la proposition des caisses elles-mêmes qui devrait être définie de manière pluriannuelle.

Le texte que vous proposez est complété par les explications du rapporteur, déjà citées par M. Vidalies, qui ont de quoi laisser perplexe. Je les résume : les « conseils [des caisses] auront chaque année la possibilité de proposer au ministre, dans l'hypothèse plus que probable d'une nécessaire réduction du déficit de l'assurance maladie, » une série de mesures correctrices : « une augmentation des cotisations, un relèvement de la CSG, une réduction du périmètre de prise en charge des soins ou toute autre mesure de rationalisation de l'offre, voire de réduction du niveau de remboursement. »

Ces propos appellent plusieurs remarques.

Tout d'abord, les caisses devront s'inscrire dans un cadre financier préétabli. Elles ne pourront pas apporter de nouvelles perspectives de financement, ni de nouvelles sources de recettes.

Ensuite, cette perspective de déficit permanent révèle que le rapporteur ne croit pas lui-même à l'impact de la réforme, puisqu'il souligne que l'intervention des caisses se fera dans « l'hypothèse plus que probable » du déficit.

Si, comme semble l'attester cette phrase citée avec beaucoup de pertinence par M. Vidalies, vous ne croyez pas davantage que nous au bien-fondé des mesures contenues dans la réforme, il faut suspendre nos travaux immédiatement.

Par ailleurs, on renvoie aux caisses les décisions que le Gouvernement n'osera pas prendre, puisque les mesures correctrices reposeront essentiellement sur des déremboursements ou sur une réduction de la prise en charge des soins.

J'ajouterai une dernière remarque inspirée par le même rapport, qui précise que le directeur général jouera un rôle « crucial ».

M. le président. Monsieur Brard...

M. Jean-Pierre Brard. On sait déjà à quel point les directeurs des agences régionales de l'hospitalisation permettent au Gouvernement de se cacher derrière son petit doigt quand il s'agit de prendre des mesures désagréables. Le directeur général n'aura aucune légitimité, puisqu'il sera nommé par un directeur général lui-même nommé par un ministre. Ce sera donc un directeur général politique qui sera l'homme fort d'un exécutif fort !

Au total, si la reconnaissance aux caisses d'un pouvoir d'initiative pour le PLFSS est une bonne chose,...

M. le président. Merci, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard. ...la rédaction actuelle de l'article 21 ne nous donne pas satisfaction, en ce sens qu'elle travestit l'attente des organisations syndicales. Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de cet article.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Les amendements nos 7294 à 7308 sont également de suppression.

Je veux souligner, dans le prolongement des interventions de Claude Évin et Alain Vidalies, que l'article 21, qui tend à associer les caisses à l'élaboration des lois de financement de la sécurité sociale, apparaît bien entendu fondé dans son principe, mais qu'il est inopportun, et ce pour deux raisons.

Premièrement, nous sommes encore dans le flou au sujet du secteur médico-social car, en cette matière, les choses dépendent non seulement des textes relatifs à la protection sociale, mais aussi des lois de décentralisation. Or l'ONDAM, sur lequel les caisses auront à s'exprimer, concerne notamment ce secteur. Par qui les décisions seront-elles prises et quels seront les moyens de financement dans ce domaine qui recouvre notamment le handicap et la dépendance ?

M. Claude Évin. Le rapport Briet-Jamet n'est pas clair de ce point de vue !

M. Gérard Bapt. Deuxièmement, nous voyons réapparaître, à l'article 21, la notion de cadrage financier pluriannuel des dépenses d'assurance maladie, que l'Assemblée a sagement supprimée, à la demande de notre groupe, à l'article 19, mais qui est également présente à l'article 28, lequel concerne la modification des règles conventionnelles. On nous demande de confier une nouvelle mission à l'UNCAM sans savoir ce qu'il en est de ce cadrage. Quand nous avons posé la question aux ministres lors de leur audition par la commission spéciale, ceux-ci nous ont répondu qu'une modification de la loi organique du 22 juillet 1996 devait prochainement intervenir et prévoir explicitement la définition d'un cadrage pluriannuel, afin de dépasser la stricte annualité des lois de financement, mais nous ne connaissons pas encore ce texte, dont on nous promet qu'il sera soumis à la commission dès le mois de septembre.

En outre, le II de l'article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale prévoit que seule une loi de financement de la sécurité sociale ou une autre loi organique peuvent modifier le contenu de la loi de financement. Or, en confiant aux caisses une mission dévolue au Parlement par la loi organique, l'article 21 modifie, de fait, ce contenu.

Pour cette raison de forme et pour cette raison constitutionnelle, nous demandons la suppression de l'article.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements de suppression ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Bien qu'il paraisse, monsieur Brard, que je sois fermé comme une huître et que ma culture se limite à la conchyliculture, les arguments de nos collègues, qui manient parfaitement la dialectique,...

M. Jean-Pierre Brard. Nous n'avons pas tous bu le même lait !

M. Jean-Michel Dubernard.... ne m'empêcheront pas de me demander pourquoi le groupe communiste et républicain et le groupe socialiste ne souhaitent pas que les partenaires sociaux jouent un rôle plus important dans une structure qui a été créée sur la base du partenariat.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Avis évidemment défavorable à ces amendements.

Monsieur Brard, le Gouvernement a mené, pendant plusieurs mois, une concertation avec les partenaires sociaux, qui n'ont, du reste, jamais demandé le retrait du projet de loi. La question de la mise en place des élections à la sécurité sociale a été soulevée et nous sommes arrivés à la même conclusion que les différents gouvernements depuis 1983 : nous disposons, grâce aux élections professionnelles et à l'existence de confédérations représentatives des syndicats de salariés, d'éléments importants sur la légitimité des syndicats.

Monsieur Évin, la répartition des compétences est claire. L'État, à travers le Parlement et le Gouvernement, est garant de la santé publique, de l'accès aux soins et de l'équilibre financier à moyen terme. Pour que l'assurance maladie puisse assumer sa délégation de gestion,...

M. Claude Évin. Il n'y a pas de délégation de gestion !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. ...il est important qu'elle participe à la définition des objectifs financiers en recettes et en dépenses.

Par ailleurs, je rappelle que l'article 30 du projet de loi prévoit que les propositions seront arrêtées par le conseil. Ainsi, les partenaires sociaux assumeront pleinement leurs responsabilités. Il n'y a donc pas, contrairement à ce que vous affirmez, de tutelle de l'État sur ces propositions. En revanche, l'Etat - Gouvernement et Parlement - assumera toutes les responsabilités, car c'est bien lui qui préparera les objectifs de dépenses et de recettes, éclairé par les propositions des caisses.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour une très brève intervention. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, le texte que nous examinons est suffisamment important pour que l'on ne confonde pas efficacité et précipitation.

M. le président. Vous avez pu vous exprimer largement, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Personne n'a jamais douté qu'un texte était nécessaire, monsieur le ministre. Ce qui est en cause, c'est le contenu de celui que vous nous proposez. Vous dites qu'il existe « des éléments importants sur la légitimité » des organisations de partenaires sociaux. Vous ne devriez pas avoir besoin de recourir à des circonlocutions. Soit on est légitime, soit on ne l'est pas. Jusqu'à nouvel ordre, seules les élections confèrent la légitimité. À cet égard, le système qui régit actuellement la gestion de l'assurance maladie est trop opaque et éloigné des Français pour être satisfaisant.

Par ailleurs, vous fixez tellement de critères que même le code de la route est moins contraignant. Si bien que je ne vois pas pourquoi vous avez besoin de représentants des organisations syndicales pour les appliquer : quelques énarques pourraient s'en charger.

Enfin, vous dites de manière un peu fallacieuse que les partenaires sociaux vont participer à la définition des objectifs financiers, notamment des recettes. En vérité, vous ne leur donnez pas la possibilité de décider de nouvelles recettes.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ils ne veulent pas !

M. Jean-Pierre Brard. Comment cela, ils ne veulent pas ? Je vous mets au défi de le leur proposer, monsieur le ministre !

M. le président. Ne vous engagez pas trop dans cette voie, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Et vous ne retiendrez, alors, comme confédérations représentatives, que celles qui acceptent d'assumer jusqu'au bout la responsabilité de la gestion, y compris des recettes. Banco, monsieur le ministre ?...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est à voir ensemble ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Comme sœur Anne...

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les vingt-huit amendements de suppression.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    3

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures quinze, deuxième séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1675, relatif à l'assurance maladie :

Rapport, n° 1703, de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission spéciale.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures dix.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot