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Séance du mardi 13 juillet 2004

30e séance de la session extraordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.)

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ASSURANCE MALADIE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie (nos 1675, 1703).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'article 27.

Article 27

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 27.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Monsieur le président, monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, mes chers collègues, la réforme de la tarification des établissements de soins était très attendue, car le budget global avait atteint depuis longtemps ses limites. La tarification à l'activité sera mise en œuvre de manière différente dans les établissements publics et privés : totale dans les établissements privés dès cette année, elle ne se mettra en place que progressivement dans les établissements publics, avec une demande de plafonnement. Beaucoup doutent d'un passage réel à la tarification à l'activité dans les établissements publics, puisque l'on va buter très vite sur des problèmes de personnel. Alors qu'il représente à peu près 65 % du budget, les établissements disposeront d'un budget en diminution.

L'article 27 prévoit de modifier les sanctions appliquées aux établissements qui feraient de fausses déclarations. Le principe même des sanctions ne saurait être remis en cause. Celles-ci relèvent, jusqu'à présent, de la compétence du directeur de l'ARH, nommé en conseil des ministres et représentant l'État. Il est prévu de transférer cette compétence à la COMEX, c'est-à-dire à la commission exécutive de l'ARH, afin d'accorder un semblant de pouvoir dans ce domaine à l'assurance maladie, censée être le payeur. Personne n'est dupe de cette qualité fictive, l'assurance maladie n'étant en rien propriétaire des recettes provenant de la CSG et autres taxes, impôts et cotisations. De plus, l'ONDAM est réparti par le Gouvernement en enveloppes, notamment hospitalières. En quoi les partenaires sociaux en seraient-ils responsables, monsieur le ministre ?

M. Jean-Pierre Brard. Très bonne question !

M. Jean-Luc Préel. Quant à transférer la responsabilité des sanctions à la COMEX, ce n'est qu'un effet d'annonce. En cas de conflit, les représentants de l'État apportent leurs voix au directeur de l'ARH, lui assurant la majorité. Lorsqu'il est arrivé que des représentants de l'État, voulant faire preuve d'indépendance, votent selon leur opinion personnelle, ceux-ci ont été rapidement rappelés à l'ordre et sanctionnés. Je ne vois pas très bien ce qui changera avec cet article : aujourd'hui, c'est le DARH qui sanctionne après avis de la COMEX ; demain, même si la COMEX en a la responsabilité, c'est aux représentants de l'État « coachés » par le DARH qu'il reviendra de prendre la décision.

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Monsieur le ministre, cet article 27 est assez singulier, puisqu'il vise à transférer à l'assurance maladie la responsabilité des sanctions applicables aux établissements de santé ne respectant pas les nouvelles procédures de tarification à l'activité. Il s'agit en fait, comme l'a prévu la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 en son article 25, de mettre les hôpitaux au pas de cette réforme injuste.

Ce nouveau mode de tarification aura pour conséquence, selon nous - mais pas seulement selon nous, puisque tous les spécialistes de la santé que nous avons rencontrés le pensent également - d'organiser le rationnement et la pénurie de l'offre de soins, en particulier dans les hôpitaux publics, afin de limiter le niveau des dépenses de santé.

Compte tenu des conséquences néfastes pour notre système hospitalier, et notre système de santé en général - public en particulier -, pourquoi vouloir appliquer la tarification à l'activité ? Tout simplement pour répondre à l'objectif de responsabilisation des assurés sociaux - de culpabilisation, est-on tenté de dire - que vous vous êtes fixé dès votre entrée en fonctions, afin de relayer autant que faire se peut le projet du MEDEF. Dans son document, le MEDEF affirme d'emblée que l'augmentation des dépenses « rend nécessaire une distinction claire entre les charges assumées par la collectivité et les charges qui relèvent de la responsabilité individuelle ».

Cette option permettrait alors aisément d'introduire l'idée d'un « panier de soins » remboursable à 100 % par l'assurance maladie, et de renvoyer vers les assurances complémentaires de santé tous les autres soins. D'ailleurs, les complémentaires de santé et les assurances sont prêtes. M. Bébéar est très attentif à ce qui peut se passer car il s'agit, comme chacun le sait, d'un formidable marché !

C'est bien cette idée d'un « panier de soins » que vous tentez de mettre en application, y compris au travers de la tarification à l'activité des établissements de santé. N'est-ce pas votre gouvernement qui déclarait que la croissance des dépenses de santé dans le budget des ménages est inéluctable, et qu'il faudrait en tenir compte en distinguant les dépenses légitimes de l'assurance maladie de celles qui ne le sont pas, et qui devront alors être à la charge individuelle des assurés sociaux ?

Vous voilà à pied d'œuvre pour mettre en application ces déclarations. Comment ne pas voir les conséquences désastreuses pour les patients d'une tarification à l'activité appliquée avec un tel état d'esprit ?

En réduisant l'offre de soins des hôpitaux, non seulement vous condamnez les usagers à la pénurie, mais de plus vous les encouragez à se retourner vers la sphère privée pour assurer les soins qui ne pourraient être assumés par le système public de soins.

Vous organisez la sélection des patients en fonction de leurs pathologies et de leurs revenus : ceux qui auront les moyens de recourir à une prise en charge complète de leur pathologie bénéficieront des meilleurs soins, les autres devront se contenter de ce qu'ils pourront obtenir, suivant leurs moyens. « Selon que vous serez puissant ou misérable... »

Quant aux établissements qui refuseraient, ils seraient sanctionnés comme le prévoient les dispositions de l'article 27.

Vous prétendez, mesdames, messieurs, agir pour simplifier la vie des Français mais, tels des peintres naïfs, par petites touches successives, vous défigurez notre système de protection sociale et portez sérieusement atteinte au pacte républicain.

Si, en apparence, vous ne remettez pas en cause le fait que nous vivions dans une société du risque, il n'en reste pas moins qu'avec vous, demain, la possibilité de se protéger qu'auront les individus sera conditionnée par leur plus ou moins grande solvabilité. C'est ce que nous refusons et continuerons de refuser, avec des millions de Françaises et de Français attachés à l'hôpital public, hôpital qu'il faut doter de moyens, moderniser et rendre capable de dispenser des soins de qualité.

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. À l'occasion de l'examen de l'article 27, j'aimerais élargir le débat en vous interrogeant, monsieur le ministre, sur un sujet que nous n'avons pas abordé en dépit de ses nombreuses implications dans ce projet de réforme de l'assurance maladie et de son financement.

À la suite de la canicule de l'an dernier, le Premier ministre a annoncé la mise en œuvre d'un plan « Vieillissement et solidarités », et confié à MM. Briet et Jamet la mission de rédiger un rapport sur les modalités d'organisation de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Ce rapport, remis la semaine dernière à M. Raffarin, est intéressant à de nombreux points de vue. Ses auteurs y affirment, notamment, que la problématique dont ils traitent a toute sa place dans le débat sur l'assurance maladie. Pour ma part, j'estime essentiel de bien distinguer ce qui relève des dépenses de soins, des dépenses de santé, de ce qui relève de la prise en charge de l'autonomie. J'aimerais donc connaître votre position au sujet de certains points de ce rapport.

Tout d'abord, il est proposé de confier l'ensemble du financement de l'ONDAM médico-social pour les personnes âgées et les personnes handicapées - plus de 20 milliards d'euros - aux conseils généraux. Il me semble que vous avez indiqué à Claude Évin et à Danièle Hoffman-Rispal, au début de la discussion, que, selon vous, la prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées devait continuer à relever du droit commun, c'est-à-dire de l'assurance maladie. J'aimerais savoir quelle est la position exacte du Gouvernement sur cette question dont les implications financières sont considérables.

La deuxième question que m'inspire le rapport est celle de savoir si, à la suite du transfert du financement de l'ONDAM médico-social, celui-ci continuera d'être voté à l'Assemblée nationale, ou si une somme fixe sera versée aux départements.

La troisième proposition du rapport bouleverse, elle aussi, profondément le système de l'assurance maladie en ce qui concerne la prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées. Je ne sais pas, mes chers collègues, si vous avez lu attentivement ce document... (M. Yves Bur, président de la commission spéciale montre un document à Mme Guinchard-Kunstler.) Je vois que M. Bur a les mêmes lectures que moi, et que lui aussi a dû passer le week-end à prendre connaissance de ce rapport (Sourires.)

Il est proposé qu'il revienne aux départements de fixer la tarification des soins dans les maisons de retraite et les maisons d'hébergement des personnes handicapées, ce qui est complètement nouveau. Jusqu'à présent, l'État et l'assurance maladie évaluaient conjointement le niveau de soins nécessaire à prendre en charge.

En quatrième lieu, le rapport Briet-Jamet propose, dans le cadre de la décentralisation complète du système de prise en charge des soins en hébergement, et même à domicile - les SSIAD et les SESSAD sont en effet inclus -, de faire appel à la TIPP pour financer la partie soins.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ce ne sont que des propositions !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. C'est précisément pour en savoir plus que j'interroge le ministre car toutes ces propositions, qui auraient dû faire l'objet d'un débat ces jours-ci, commencent à trouver leur traduction dans le cadre de la loi de décentralisation, de la mise en place de la CNSA, de la loi sur le handicap. Les conseils généraux ont-ils au moins été consultés ?

On voit bien que l'ensemble du plan « Vieillissement » et de financement des maisons de retraite du Gouvernement était fondé sur la mise en place rapide de la Caisse nationale de solidarité et d'autonomie. M. Falco avait en effet indiqué que la suppression d'un jour férié - qui n'est pas forcément un jour férié - devait permettre de signer quelque 2 000 à 2 500 conventions tripartites pour commencer à combler les retards et les diminutions de crédits qu'avait connus ce secteur depuis deux ans. Or 170 seulement ont été signées depuis le 1er janvier. Nous sommes donc très loin des chiffres annoncés. Et comme la CNSA ne va pas être mise en place très rapidement compte tenu de l'importance des questions soulevées par le rapport Briet-Jamet, je crains que les établissements pour personnes âgées ne reçoivent pas de crédits cette année.

En tout cas, monsieur le ministre, c'est la proposition visant à faire appel à la TIPP pour financer une partie des soins qui me choque le plus. Un amendement sera présenté tout à l'heure par M. Bur - le nôtre a été refusé - tendant à distinguer clairement le financement du personnel de santé, d'une part, et celui du personnel d'hébergement et d'autonomie, d'autre part. Un travail de fond avec les conseils généraux est absolument nécessaire. Mais on peut d'ores et déjà constater que certaines propositions du rapport Briet-Jamet remettent profondément en cause le principe d'universalité de la sécurité sociale et de l'assurance maladie.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Comme Mme Paulette Guinchard-Kunstler vient de le souligner, le financement de l'assurance maladie fait l'objet d'une grande confusion. Ainsi, un article paru ce matin dans Le Parisien nous apprend qu'un certain nombre de contribuables ont demandé à l'État de ne plus payer la CSG et la CRDS sous prétexte qu'ils avaient contracté une assurance privée.

Certes, monsieur le ministre, vos services ont d'ores et déjà fait savoir qu'à leur avis c'était tout à fait impossible et que le système de sécurité sociale français s'imposait à tous les résidents français. Mais, dans le même temps, malheureusement, les services du ministère de l'économie et des finances - le journal publie le double du courrier adressé à l'un de ces contribuables - ont accepté l'idée qu'un salarié français, dès lors qu'il aurait contracté une assurance privée, pourrait ne plus avoir à acquitter la CRG et la CRDS.

Ce document officiel du ministère de l'économie et des finances remet en cause le caractère obligatoire de l'assurance maladie. Les offensives menées par les assurances privées, auxquelles nous sommes très attentifs, pourraient donc porter atteinte au principe de la solidarité.

Monsieur le ministre, nous attendons que vous réaffirmiez la position de votre ministère. Nous souhaitons aussi que vous nous donniez l'assurance que le Gouvernement agira de façon résolue et définitive afin que des fonctionnaires du ministère de l'économie et des finances ne puissent pas accréditer la thèse qu'il serait possible de substituer des assurances privées à l'assurance maladie obligatoire.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Mon intervention portera sur deux points. Je reviendrai tout d'abord sur les propos de M. Préel, que j'ai déjà écouté attentivement hier. Il est très intéressant, en effet, d'écouter l'UDF, qui essaie de donner dans le pays l'image de l'opposition à Sa Majesté. Qu'en est-il en réalité ? Que dit vraiment M. Préel ?

M. Jean-Luc Préel. Merci de vous faire mon interprète, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. Il faut faire de l'exégèse, parfois. Je n'en suis pas encore aux Évangiles, cependant...

Que vous demande M. Préel, monsieur le ministre ? Il vous demande si vous allez tenir bon. Votre proconsul, qui est en fait un homme politique déguisé en fonctionnaire, saura-t-il résister lorsque vous voudrez dérembourser ? Pourrez-vous ne pas dérembourser ? L'UDF est en réalité plus extrémiste que vous. La rupture d'égalité dans le droit à la santé ne la gêne absolument pas.

Je tenais à le souligner car la façon dont M. Préel est intervenu hier, comme un disque rayé pour dire toujours la même chose, reconnaissant, en substance, que vous n'allez pas assez loin, était significative. Et vous savez bien, vous, monsieur le ministre, qui êtes un ami personnel du président de l'UDF, qu'il faut toujours dire la vérité, même quand elle fait mal.

Dans un second temps, je veux donc insister sur le fait que vous êtes en train de rompre l'égalité républicaine. L'égalitarisme que vous prônez n'est qu'apparent. La politique de sanction s'appuyant sur la tarification à l'activité que vous voulez mettre en œuvre ne tient aucun compte, en effet, des situations particulières.

Monsieur le ministre, vous êtes venu visiter l'hôpital dont je préside le conseil d'administration. Vous êtes vous-même médecin de formation comme le professeur Dubernard ou comme M. Bur, dans son registre particulier - M. Bur est un homme mordant (Sourires). Vous avez pu ainsi constater que les situations sont différentes selon les types de population. Vous savez donc que nous avons raison lorsque nous disons que, dans les faits, il y aura sélection des patients. Il est évident que les conseils d'administration des hôpitaux seront poussés à retenir les activités en fonction de leur tarification. Des services fort utiles aux populations mais insuffisamment rentables pour les budgets des hôpitaux risquent bel et bien de disparaître.

Or si la population de ma ville, qui n'est pas privilégiée - je suis maire de Montreuil, pas de Neuilly -, a le droit aujourd'hui de se soigner, c'est grâce à la santé publique.

M. Hervé Mariton. Il n'y a que des bo-bos, à Montreuil !

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur Mariton, je vous propose une visite guidée de Montreuil pour votre édification.

M. Jean-Marie Le Guen. Ça va lui faire bobo, à Mariton !

Mme Élisabeth Guigou. Il peut aussi venir visiter ma ville !

M. Jean-Pierre Brard. Je ne sais à qui vous pensez quand vous parlez de bo-bos. En tout cas, vous pourrez à Montreuil toucher du doigt les conséquences concrètes de la politique du Gouvernement : chômeurs, exclus de la CMU...

M. le président. Restez-en à votre propos, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. Je n'ai pas vraiment dévié, monsieur le président, puisque je mettais en cause la rupture de l'égalité républicaine dans le droit d'accéder aux soins et de bénéficier des mêmes services de qualité partout.

Il est vrai que cette démarche est cohérente avec l'ensemble de la politique gouvernementale. Vous êtes ainsi en train de désintégrer l'État républicain avec la régionalisation, qui n'a qu'un objectif : faire payer aux contribuables régionaux ce que l'État ne veut plus payer.

M. Hervé Novelli. L'État est en ruine !

M. Jean-Pierre Brard. On sait, monsieur le ministre, comment fonctionnent actuellement les ARH. Or, avec le dispositif que vous mettez en place, vous aurez M. Charpy comme proconsul national et des proconsulats régionaux, et donc un double verrouillage qui vous exonérera de votre responsabilité politique en même temps qu'il ouvrira la porte aux assurances privées. Les aristocrates fortunés du genre de M. Seillière devront nous expliquer comment s'exerce la « responsabilité individuelle », pour reprendre une formule qui lui est chère, d'un RMIste ou d'un smicard. Il est vrai que lorsqu'on habite le 16e ou l'un des nombreux châteaux qui appartiennent à sa famille...

M. Maxime Gremetz. En Picardie, par exemple !

M. Jean-Pierre Brard. ...ce sont là des préoccupations tout à fait triviales. Elles n'ont qu'un lointain rapport avec les soucis de ceux dont l'esprit n'est occupé que par le contenu de leur coffre-fort.

M. le président. La parole est à M. Jean Le Garrec.

M. Jean Le Garrec. Ma question prolongera d'une certaine manière celle qui a été posée par mon collègue Jean-Marie Le Guen.

Notre débat, depuis quelques jours, porte sur l'équilibre entre les dépenses et les recettes de la sécurité sociale, ces dernières étant liées en grande partie à l'évolution de la masse salariale. Or nous venons d'apprendre que les salariés de Bosch à Vénissieux vont devoir travailler six jours de plus sans être payés. Je ne porte pas de jugement de valeur sur l'accord. Les salariés se battent, la rage au cœur, pour conserver les emplois.

M. Jacques Desallangre. Ils cèdent au chantage !

M. Jean Le Garrec. Le ministre Sarkozy a d'ailleurs dénoncé ce chantage à l'emploi et, pour une fois, je suis d'accord avec lui. Il a même déclaré que ce chantage à la délocalisation serait inacceptable en France. Les mots sont forts, et je les répète ici, mais j'aimerais connaître votre sentiment, monsieur le ministre, car vous êtes également concerné, le Gouvernement parlant d'une seule voix.

Il est vrai que le Gouvernement a donné d'une certaine manière le mauvais exemple à l'occasion du débat sur la journée de solidarité en introduisant, dans le code du travail, et c'est sans précédent, le principe d'une journée de travail non rémunéré.

Alors que nous discutons en ce moment de la protection sociale, le Premier ministre va-il intervenir ? Il me semble qu'après ce qui vient de se passer à Vénissieux, le Gouvernement pourrait faire passer quelques messages forts. Le Président de la République aura-t-il l'occasion de s'exprimer sur ce point lors de son intervention du 14 juillet ?

Le problème est très préoccupant. Il faut donc une réaction très forte du Gouvernement pour éviter que ce chantage ne se répète et ne mette en cause non seulement les acquis sociaux des salariés, mais aussi l'évolution de la masse salariale. C'est un problème d'une extraordinaire gravité.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Tout à fait !

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. L'article 27, qui vise à associer davantage l'assurance maladie dans la procédure de sanction applicable aux établissements, s'il n'est pas un des éléments fondamentaux du projet de loi, justifie néanmoins notre démarche et notre proposition de créer des agences régionales de santé, laquelle, malheureusement, a été refusée au titre de l'article 40 de la Constitution.

Monsieur le ministre, je voudrais revenir sur une question que je vous ai posée hier à propos du sida. Je souhaiterais connaître les conséquences budgétaires de l'engagement pris par le Président de la République au sommet du G8 à Évian concernant la participation de la France au Fonds mondial de lutte contre le sida.

Nous lisons dans la presse qu'à l'occasion de la conférence qui se tient actuellement la coalition mondiale des associations de lutte contre le sida est très inquiète pour l'avenir de l'aide internationale, qui n'a de sens que si elle est pérenne. J'ajoute que, d'après nos informations, le représentant du Gouvernement français, M. Darcos, aurait été fraîchement accueilli à cette conférence.

Nous lisons également que la coalition internationale des ONG, dans la perspective de découvrir un vaccin efficace, propose aux pays riches une contribution annuelle et obligatoire, calculée sur la base de leur produit national brut.

Pour ma part, monsieur le ministre, je pense qu'une telle contribution permettrait de sortir de la situation contradictoire que nous connaissons aujourd'hui. Un certain nombre de pays prennent des engagements dans le cadre de réunions internationales à grand retentissement, mais ils peinent ensuite à les respecter. La mise en place d'une contribution annuelle, régulière et obligatoire de l'ensemble des pays développés serait beaucoup plus adéquate, car le Fonds mondial ne peut aujourd'hui s'appuyer que sur des recettes pérennes.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, j'espère que vous allez répondre à nos questions, parce que l'article paru dans un journal du matin et cité par M. Le Guen se fonde sur un courrier officiel du Trésor public.

On peut y lire qu'une personne ayant contracté une assurance complémentaire ou privée pourrait ne plus payer la CSG et la CRDS. Vous devez nous répondre car cette information fausserait notre débat. En effet, l'augmentation de la CSG est l'une de vos principales recettes. Permettre à ceux qui contractent une assurance privée de s'exonérer du paiement de la CSG remettrait tout en question. Vous n'étiez déjà pas bon en matière de chiffres, mais votre grande réforme de l'hôpital n'est même pas discutée ici : elle n'apparaît pas nulle part alors que l'hôpital public représente plus de 50 % des dépenses de santé ! L'hôpital public est au cœur du dispositif original qu'est le système de santé français.

Vous nous dites que votre réforme est formidable et que le paiement à l'activité va permettre d'économiser 1,6 milliard d'euros. Malheureusement, là encore, vous êtes fâché avec le ministère des finances qui, lui, parle d'une économie de 400 millions. Il y a une marge ! Oh, il faut avouer qu'elle n'est pas très importante : vos chiffres passent simplement du simple au triple. On pourra toujours s'y retrouver !

Soyons sérieux : nous sommes en face du gouvernement de la France, d'un gouvernement qui remet en cause une réforme fondamentale pour la solidarité dans notre pays, une réforme qui a été initiée par le Conseil national de la Résistance, le général de Gaulle, les communistes, les démocrates ! Vous la remettez tranquillement en cause en nous assurant qu'avec le paiement à l'activité, ce sera beaucoup mieux.

En quoi le paiement à l'activité sera-t-il beaucoup mieux ? Pour ma part, j'en doute, comme tous les médecins, à l'exception de ceux qui siègent ici, sur les bancs de la majorité, et ils sont nombreux. Ils sont venus, ils sont tous là, comme dit la chanson !

Comment les choses se passaient-elles auparavant ? Le budget global correspondant aux besoins déterminés par ces grand-messes qu'étaient les conférences régionales était fixé par la conférence nationale, qui fixait l'enveloppe globale pour répondre aux besoins de santé et des hôpitaux.

Désormais, que dit-on aux hôpitaux - dépassons le discours très policé et soyons clairs, car les médecins et les directeurs d'hôpitaux se demandent ce qui les attend ? On leur dit : « Plus vous ferez d'actes rentables, plus vous obtiendrez de l'argent de l'État ». C'est écrit !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale. Mais non !

M. Jacques Desallangre. Si, c'est écrit !

M. Maxime Gremetz. Et même si ce n'était pas écrit, cela correspondrait bien à votre philosophie ! Les médecins sont capables de comprendre cela, comme les directeurs d'hôpital que vous avez rencontrés. Je ne vais tout de même pas vous transmettre leurs déclarations, monsieur le ministre, mais je tiens à votre disposition les articles que j'ai cités hier. Nous, nous avons des références indiscutables, mais vous, vous ne répondez jamais et vous ne nous donnez aucun document. Ce n'est pas sérieux !

M. Richard Mallié. Il n'y a pas de discussion, d'après vous ?

M. Maxime Gremetz. Vous voulez appliquer à l'hôpital public les critères de rentabilité financière qui régissent aujourd'hui les cliniques privées. Or, quels sont les patients qui sont soignés dans les cliniques privées ? Ce sont les cas les plus...

M. Jacques Desallangre. Rentables !

M. Maxime Gremetz. Oui, les cas les plus rentables ! L'hôpital public, lui, a pour rôle de soigner n'importe quel patient, qu'il soit riche ou qu'il soit dans la misère. C'est cela le service public, l'hôpital public ! Or, c'est précisément ce que vous voulez changer !

Votre réforme, sous prétexte de rentabilité financière, va priver du droit à la santé des millions de gens. Eh bien, ce n'est pas une bonne façon d'utiliser l'argent public. Aux États-Unis, qui dépensent pour la santé 14 % de leur PIB, soit beaucoup plus que nous, 40 millions de personnes ne peuvent pas se soigner par manque d'hôpitaux publics et parce que les établissements privés s'occupent des cas les plus rentables en laissant de côté ceux qui ne le sont pas.

C'est la loi du marché, et vous, vous considérez la santé comme une marchandise, au même titre que les autres. Ce n'est pas acceptable !

M. le président. Monsieur Gremetz...

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, j'ai été patient, j'ai attendu mon tour !

M. le président. Vous étiez le quatrième orateur inscrit mais, quand est venu votre tour, vous étiez sorti !

M. Maxime Gremetz. Faites attention, je peux sortir mon minuteur pour vérifier mon temps de parole ! Il y a les montres des patrons et les montres des ouvriers, et en général elles n'indiquent pas la même chose !

M. le président. Concluez, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, nous sommes résolument opposés à cette réforme. Au moins, répondez à nos questions ! Ce n'est pas un hasard si les associations de directeurs d'hôpital et les médecins qui exercent dans l'hôpital public dénoncent cette réforme que vous engagez sans concertation.

On discute actuellement de l'assurance maladie. L'hôpital correspond à 50 % des dépenses de santé et il ne figure même pas dans ce projet de loi ! Et vous prévoyez de procéder par ordonnances ! Il faut le rappeler en effet, les mesures pour l'hôpital public seront prises par ordonnances, sans débat démocratique...

M. Édouard Landrain. On ne peut pas trouver de débat plus démocratique !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Il y a eu des négociations avec les syndicats !

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, je vous demande instamment de répondre aux questions claires et précises que nous vous avons posées hier ainsi qu'à celles posées par M. Le Guen, sur lesquelles j'insiste car le sujet est extrêmement grave. Sans réponse de votre part, nous ne savons pas de quoi nous parlons.

M. Richard Mallié. Monsieur le président, il a fait son temps !

M. Maxime Gremetz. En guise de cadeau, monsieur le ministre, puisque votre documentation n'est pas complète, je vais vous faire remettre les documents que je vous ai promis.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel.

M. Philippe Vitel. J'ai écouté avec attention notre ami Maxime Gremetz. On ne peut laisser dire tout et n'importe quoi. Je pense qu'à son corps défendant, il n'a pas dû visiter un établissement privé depuis très longtemps.

Monsieur Gremetz, aujourd'hui les établissements privés sont des établissements de grande qualité, dans lesquels travaillent des praticiens et des personnels hautement qualifiés.

M. Maxime Gremetz. Je n'ai pas parlé de cela !

M. Philippe Vitel. Ces établissements sont contraints à une rigueur technique et sanitaire qu'ils respectent sans problème puisque de cela dépend leur accréditation. Après les restructurations qui leur ont été imposées par les ARH, et qui allaient dans le bon sens, ces établissements sont aujourd'hui performants.

M. Maxime Gremetz. Et voilà !

M. Philippe Vitel. Ce sont des établissements sérieux, gérés de façon très stricte.

M. Jacques Desallangre. C'est sûr, puisqu'ils prennent les meilleurs cas et laissent les autres !

M. Maxime Gremetz. Tout à fait, et ils laissent les difficultés à l'hôpital public !

M. Philippe Vitel. C'est peut-être dans la gestion que réside la différence entre l'hôpital public et ces établissements, qui présentent une image positive de la médecine française.

Ces établissements, monsieur Gremetz, reçoivent tous les patients qui se présentent. Aucune discrimination financière n'est effectuée à l'entrée d'un établissement privé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jacques Desallangre. Ce n'est pas vrai !

M. Philippe Vitel. On ne peut pas vous laisser dire le contraire !

M. Maxime Gremetz. Vous êtes des défenseurs du privé !

M. le président. La parole est à M. Yves Bur, président de la commission spéciale.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il faut cesser d'opposer l'hôpital public et l'hôpital privé.

M. Maxime Gremetz. Je n'oppose rien, je constate simplement !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. L'ensemble des acteurs hospitaliers de notre pays concourt à la bonne santé de nos concitoyens.

M. Jean-Marie Le Guen. Tout le monde ne peut pas aller à l'hôpital américain !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Il n'y a pas d'hôpital américain partout, monsieur Le Guen !

M. Jean-Marie Le Guen. Il y en a un à Neuilly, chez M. Sarkozy !

M. Maxime Gremetz. Les choses se font toujours au détriment de l'hôpital public !

M. le président. S'il vous plaît !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Cessons de caricaturer l'hôpital privé. Je pense que l'hôpital privé est tout aussi nécessaire à notre pays que l'hôpital public. Il est stupide et vain de les opposer.

Madame Guinchard-Kunstler, le rapport Briet-Jamet ne contient que des propositions. Toutefois, l'une d'entre elles est importante car elle précise l'objectif d'une meilleure prise en charge de la compensation individuelle. La compensation individuelle nécessite la présence d'un acteur de proximité. Or le département pourrait bien être cet acteur, en réseau avec les communautés de communes et les villes. Telle est l'orientation principale de ce rapport et je la trouve, pour ma part, tout à fait respectable.

Je voudrais également rappeler, pour ne pas donner le sentiment que nous nous orientons dans une mauvaise direction, que le fait de transmettre des financements à une collectivité territoriale pour mieux coordonner l'intervention ne signifie nullement que l'assurance maladie ne prendra plus en charge les frais dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui.

Nous aurons peut-être l'occasion d'entendre M. le ministre à ce sujet car, comme un certain nombre d'entre nous, j'ai déposé un amendement portant article additionnel après l'article 27 pour que les choses soient claires : l'assurance maladie doit continuer à prendre en charge le personnel médical et paramédical dans les établissements. Il ne doit pas y avoir de confusion sur ce point.

Le rapport Briet-Jamet est extrêmement important car il permettra de simplifier les démarches de l'usager en matière de droit à compensation, démarches qui sont actuellement d'une redoutable complexité. La proposition d'un travail en réseau bien piloté est intéressante, et en ce sens le rapport est utile.

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Monsieur le président, je souhaite répondre aux différents orateurs, et tout d'abord à M. Le Guen, qui a soulevé un problème important après avoir lu un article paru dans Le Parisien.

Je voudrais tout d'abord lui rappeler les termes de l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale : « Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes, quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou à quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat. » Cet article est très clair.

L'affiliation au régime général de sécurité sociale est obligatoire pour tous les salariés, travailleurs indépendants et retraités de notre pays. L'ensemble des personnes physiques qui résident en France et qui sont affiliées à un régime obligatoire français d'assurance maladie sont assujetties à la CSG, selon les termes de l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale. La CSG s'impose donc à tous.

M. Jean-Marie Le Guen. Est-ce ce que pense Bercy ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Sans vouloir être désagréable, je pense, monsieur Le Guen, que vous connaissez trop ce domaine pour ne pas comprendre de quoi il s'agit. Lisez bien le texte de l'article de presse auquel vous vous êtes référé : il s'agit du cas d'un médecin français qui a souscrit en mars dernier une assurance individuelle maladie et complémentaire auprès d'une compagnie anglaise. Selon la note de Bercy, il convient dans ce cas de fournir, à l'appui de la demande d'exonération, une attestation de régime de sécurité sociale étranger. Or ce médecin n'est pas dans ce cas de figure puisqu'il est français.

M. Maxime Gremetz. C'est le régime de sécurité sociale qui doit être français !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je vous dis, moi, que ce monsieur ne relève pas d'un régime de sécurité sociale étranger. Vous ne pouvez donc pas aujourd'hui vous appuyer sur une note de Bercy pour jeter la suspicion. Si vous avez maintenant compris, tout va bien. Mais si vous aviez déjà compris, ce serait beaucoup plus grave. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Il est vrai qu'il existe quelques exceptions, liées au travail frontalier. Les travailleurs frontaliers sont en effet assujettis à un régime de sécurité sociale étranger dans le cadre de la coordination des régimes de sécurité sociale européens.

Vous avez posé, monsieur Brard et monsieur Gremetz, une question importante sur l'hôpital.

On croirait à vous entendre, monsieur Gremetz, que vous regrettez le budget global. Vous seriez bien le seul en France.

M. Maxime Gremetz. Nous ne voulons pas qu'on soumette l'hôpital aux exigences de rentabilité financière.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je pourrais vous citer beaucoup d'exemples d'hôpitaux qui, à cause du budget global, devaient reporter sur janvier-février des interventions programmées en novembre-décembre. Ce n'est pas non plus l'idéal.

M. Maxime Gremetz. Rien n'est idéal quand on n'a pas de moyens !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je peux ensuite vous affirmer, monsieur Brard, que les services hospitaliers non rémunérateurs ne disparaîtront pas. Vous qui m'avez présenté un projet de maison médicalisée, vous ne pouvez pas penser sérieusement que la tarification à l'activité s'appliquera à des domaines comme les urgences, la médecine interne, ou le traitement de certaines maladies infectieuses, qui ne demandent pas tant des gestes techniques que des gestes humains, d'accompagnement, ou des soins de suite.

Comme je l'ai dit encore hier soir à M. Évin, et vous étiez là, 50 % des budgets relèveront de la T2A, et 50 % de missions d'intérêt général de service public hospitalier.

Monsieur Le Garrec, je suis tout autant que vous opposé au chantage. Même si je pense que ce n'est pas le lieu de parler des 35 heures, je vous ferai simplement observer qu'étant donné la stagnation salariale qu'a entraînée cette réforme, de plus en plus de personnes souhaitent pouvoir avoir le choix.

M. Jean Le Garrec. Ils n'auront sûrement pas le choix !

M. Maxime Gremetz. Ils n'auront qu'un choix possible, celui de travailler plus !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Vous ne pouvez pas en vouloir à des gens qui veulent gagner plus en travaillant plus.

Je m'engage, monsieur Bapt, à vous répondre très exactement sur la participation financière de notre pays au Fonds mondial de lutte contre le sida. Je n'aurai pas la cruauté de vous rappeler quel était le niveau de la contribution française à ce fonds sous les gouvernements que vous avez soutenus.

Monsieur Préel, le premier objectif des mesures prévues, qui visent à renforcer la place de l'assurance maladie dans l'application des sanctions, est d'améliorer la cohérence et l'efficacité du dispositif. En effet, les caisses d'assurance maladie sont les organismes payeurs ; elles sont en outre chargées de la récupération des indus. À ce titre, il importe qu'elles soient associées à la programmation des contrôles et aux décisions de sanction. Le texte de l'article précise clairement à cet égard que la sanction relève de la compétence de la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation, au sein de laquelle sont représentées les caisses de l'assurance maladie, à parité avec l'État, et non de la compétence du directeur de l'ARH.

Le deuxième objectif de l'article 27 est de donner un fondement législatif à la programmation coordonnée des contrôles au niveau régional, sous l'égide, encore une fois, de la commission exécutive de l'ARH.

Enfin, il est apparu que la rédaction actuelle de l'article L.162-22-18 du code de la sécurité sociale ne permettait pas de cibler les contrôles sur certains séjours présentant des caractéristiques communes. Le présent projet vise à préciser le texte sur ce point.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour une brève intervention.

M. Jean-Marie Le Guen. Je ne suis pas certain, monsieur le ministre, qu'il faille avoir une lecture aussi optimiste que la vôtre de la note de Bercy. Ceux qui auront souscrit une assurance individuelle dans un pays où l'assurance privée couvre les risques pris en charge en France par la sécurité sociale pourraient donc devoir demain disposer d'un certificat garantissant qu'ils sont bien couverts dans ces pays en ce qui concerne le risque maladie.

Ensuite, le problème soulevé par cet article de presse concerne non seulement les travailleurs frontaliers, mais aussi les intérimaires. Dans plusieurs secteurs d'activité cette forme d'emploi donne lieu à des pressions considérables. Dans le secteur agricole, la Mutualité sociale agricole a dû attirer elle-même l'attention de la justice, car les procureurs n'avaient pas bougé - par parenthèses, le parquet devrait se montrer beaucoup plus vigilant sur ces questions -, sur l'emploi de travailleurs agricoles intérimaires. Elle avait d'ailleurs l'impression d'être un peu isolée dans ce combat.

Je pourrais citer d'autres cas. Ainsi, certains chantiers navals de Loire-Atlantique ont eu recours à des travailleurs étrangers intérimaires. La justice a jugé à cette occasion qu'une société française ayant une filiale à l'étranger pouvait employer des intérimaires étrangers. Il suffira donc à une société française de créer une filiale en Pologne, par exemple, pour avoir le droit d'utiliser en France une main-d'œuvre recrutée en Pologne. Le même problème se pose dans le secteur des transports routiers.

Il serait légitime, monsieur le ministre, que vos services se penchent sur ce type de questions. On voit en effet que des brèches sont ouvertes dans notre législation sociale, afin d'introduire sur notre territoire des pratiques de dumping social. L'Assemblée nationale pourrait également y travailler, en consacrant un rapport à ces questions, par exemple. Nous devons vérifier que notre droit social est respecté : il s'agit d'éviter le détournement frauduleux de réglementations qui avaient en leur temps leur justification, lequel aboutit aujourd'hui à fragiliser les bases des cotisations à nos régimes.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Là, on est totalement en dehors de la problématique de l'article du Parisien, tout le monde le comprend bien. Pour en revenir au cas évoqué par l'article, le médecin en cause relève bien du régime de la sécurité sociale, aux termes de l'article L. 311-2, que je vous ai lu. Ce sujet est donc clos.

Vous posez maintenant une autre question, en effet très importante, relative à l'emploi intérimaire. À cet égard, l'article 40 du projet de loi permet aux régimes de sécurité sociale de s'opposer aux pressions qui s'exerceraient sur les travailleurs intérimaires, et même de se substituer au parquet dans le cas de petites infractions.

Je veux profiter de l'occasion pour répondre à une remarque formulée hier soir par M. Bapt.

Monsieur Bapt, vous reconnaissez le vigoureux plaidoyer politique du gouvernement français en faveur de la lutte contre le sida dans les pays en développement. La France consacrera en 2004 près de 140 millions d'euros au Fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose. Sa contribution s'élèvera à 150 millions par an à partir de 2004, dont 100 serviront à la lutte contre le sida. Cette contribution fait de la France le deuxième bailleur de ce fonds, derrière les États-Unis, et lui assure de siéger au conseil d'administration.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je constate que mon agresseur a disparu.

M. Gérard Bapt. Encore un agresseur qui disparaît !

M. Maxime Gremetz. Il m'agresse, et puis il s'en va courageusement.

M. Jean-Pierre Brard. Il est caché sous la table !

M. Maxime Gremetz. Je ne sais pas où il s'est caché.

M. Gérard Bapt. Il va falloir attendre les enregistrements de la vidéosurveillance !

M. le président. Monsieur Gremetez, pensez-vous que ce genre de remarque soit utile au débat ?

M. Maxime Gremetz. Il faut le faire, quand même : oser nous dire que, parce que nous défendons l'hôpital public, nous sommes contre les cliniques privées. On n'a pas le droit d'utiliser des arguments aussi simplistes, même quand on n'en a pas d'autre. Si des cliniques privés veulent s'installer chez moi, elles le peuvent ! Je souhaite simplement qu'elles fassent bien leur travail - ce qu'elles font en général. Ce que je ne veux pas, c'est qu'on les aide au détriment de l'hôpital public, et je vois que c'est ce qui se passe.

On nous dit que les cliniques privés acceptent n'importe quel patient.

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est le cas !

M. Maxime Gremetz. C'est une plaisanterie ! D'ailleurs vous souriez tous ! Vous savez tous qu'ils n'acceptent que les patients rentables, et les autres, ils les renvoient à l'hôpital. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Il faut savoir que les cliniques privées n'ont aucune responsabilité de suivi ; elles n'ont pas de plateau technique. C'est si vrai que, lorsque ça ne va pas, elles renvoient leurs patients vers l'hôpital public, qui a tout. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Eh oui, la sécurité des Français a un prix.

Je me garderai donc bien, pour ma part, d'opposer les deux, d'autant moins dans une situation où tout le monde n'a pas accès à la santé. Mais ce que nous refusons, c'est qu'au nom de la tarification à l'activité, on impose aux hôpitaux publics les critères de rentabilité qui sont ceux des cliniques privées. Avec une telle politique, les hôpitaux seront tenus de faire du résultat, sous peine de sanctions qui prendront la forme de moindres dotations de l'État. Il s'agira de culpabiliser tous les directeurs des hôpitaux publics en leur disant qu'ils gaspillent, qu'ils ne font pas ce qu'il faut, et que c'est pour ça qu'on baisse la dotation de l'État.

Qui soignera alors ceux qui n'ont rien, ceux qui ne peuvent pas aller se faire soigner ailleurs ? Les cliniques privées leur diront qu'elles ne le peuvent pas, que ce n'est pas leur spécialité, qu'elles n'ont pas le temps ou, que sais-je, qu'ils n'ont qu'à aller à l'hôpital public, aux urgences.

Je vais prendre l'exemple de la Picardie - et, monsieur le secrétaire d'État, vous ne me démentirez pas, puisque c'est une réalité que vous connaissez. Votre politique de tarification à l'activité s'y traduira par l'édification de mastodontes hospitaliers, au détriment d'une bonne couverture du territoire par les hôpitaux publics. Tous les moyens seront consacrés à des projets pharaoniques, au lieu de maintenir un hôpital public à Saint-Quentin ou ailleurs. Si c'est ça que vous voulez, ne venez plus nous parler de proximité ! Quand je ne sais quel grand homme voudra laisser son nom dans l'histoire, il préférera lancer un projet gigantesque, au lieu de permettre à 40 000 habitants des quartiers nord d'Amiens d'avoir leur hôpital, afin de ne pas avoir à faire des kilomètres pour se faire soigner. Excusez-moi du peu !

Voilà quel sera le résultat de votre politique, et c'est pourquoi nous nous y opposons résolument et que nous proposons tout à fait autre chose. Mais vous ne voulez pas entendre...

M. le président. Il faut conclure maintenant.

M. Maxime Gremetz. C'est bien dommage, parce qu'il n'y aura pas de réel débat sur la question. Vous préférerez décider par ordonnances.

M. le président. Nous en venons aux amendements.

Je suis saisi de treize amendements nos 1648 à 1659 et n° 7503, tendant à supprimer l'article 27.

La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Ces amendements tendent en effet à supprimer l'article 27 car, selon nous, le Gouvernement mène une véritable politique de chantage à l'égard de l'hôpital qui est, pour certains, ce pelé, ce galeux.

Je m'explique.

Monsieur le ministre, lors de votre venue au traditionnel rendez-vous « Hôpital expo », vous avez fait des annonces budgétaires en les conditionnant au respect d'une réforme, la T2A. Vous avez annoncé une avance de 150 millions d'euros sur les budgets 2004 pour, dites-vous, « remettre les compteurs à zéro ». Alors que bon nombre d'hôpitaux souffrent d'un endettement massif, certains étant même au bord de la faillite, mais aussi de lourds reports de charges, les réponses des ARH sont souvent incompréhensibles et laissent penser qu'elles ont déjà tiré un trait sur les petits hôpitaux de proximité. J'ai des exemples chez moi, et mon collègue Maxime Gremetz également.

Devant ces situations préoccupantes, vous avez proposé « tout simplement d'annuler [les] dettes dès cet été » des établissements pour un montant de « 300 millions d'euros ». Mais, et c'est en ce sens que j'ai employé le terme « chantage », le financement sera toutefois accordé au cas par cas. En effet, pour bénéficier de cette aide, les établissements devront passer un « contrat de retour à l'équilibre » avec les ARH et, surtout, appliquer deux mesures : la nouvelle organisation interne des hôpitaux et, je le disais, le passage progressif à la T2A. Or, à l'heure actuelle, les hospitaliers refusent cette réforme en l'état.

La Fédération hospitalière de France a même précisé que la T2A risquait de porter gravement atteinte aux missions d'intérêt général de l'hôpital, comme la recherche ou les urgences.

Nous ne cessons de dénoncer cette situation depuis la mise en expérimentation de cette forme de financement de l'hôpital. Or, comme si cela ne suffisait pas, vous reprenez, en la transférant à l'assurance maladie, la procédure de sanction en cas de non-respect des règles de la tarification à l'activité.

Après avoir conditionné la bouffée d'oxygène financière des hôpitaux au respect de la T2A, vous ajoutez une contrainte supplémentaire avec cet article.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons ces amendements de suppression.

(M. Yves Bur remplace M. François Baroin au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. YVES BUR,

vice-président

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Tout à l'heure, le président ne m'a pas redonné la parole, et je l'ai fort regretté parce qu'un débat s'était instauré sur deux sujets très importants.

D'abord, l'opposition entre l'hôpital public et l'hôpital privé telle que l'a soutenue tout à l'heure notre collègue de droite est tout à fait insupportable ! Notre position n'a jamais été de dire que les bons médecins étaient dans le public et les mauvais dans le privé, mais de mettre en exergue l'insuffisante mise en cohérence du réseau privé avec le réseau public. À cet égard, le plus insupportable dans cette maison, c'est l'intervention des lobbies : des collègues ignorent l'intérêt général pour défendre l'intérêt de leur corporation d'origine !

Vos mimiques, chers collègues de droite, prouvent que vous n'allez pas oser dire ouvertement ce que vous pensez intimement !

M. Jean-Marie Le Guen. Surtout sur l'article 28 !

M. Jean-Pierre Brard. Sur l'article 28 certes, mais aussi sur bien d'autres !

Je le dis à l'intention des journalistes qui nous écoutent, bien sûr, mais aussi pour les universitaires qui seraient tentés par la lecture du Journal officiel : il y a des travaux à confier à de jeunes étudiants pour repérer quels sont les députés qui travaillent pour des lobbies ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Hervé Novelli. Inquisiteur !

M. Jean-Pierre Brard. Attendez la suite !

En effet, en lisant les comptes rendus des débats de l'Assemblée nationale, mais aussi les questions écrites, publiés au Journal officiel, ils pourront débusquer ceux des députés qui, oubliant l'intérêt général, défendent des intérêts particuliers, agissant en cela de façon tout à fait insupportable !

Monsieur le secrétaire d'État à l'assurance maladie, vous êtes un homme méticuleux et, me rappelant vous avoir entendu prendre position en commission des finances, je sais que vous êtes favorable à la transparence. Pour faire taire l'opposition entre le public et le privé, le mieux est de tout mettre sur la table. Intéressez-vous, avant de décider des sanctions d'une façon aveugle, à la durée moyenne de séjour, par exemple.

Vous le savez : l'administration fait pression pour réduire la durée moyenne de séjour dans nos hôpitaux publics où - je prends l'exemple de l'hôpital que je connais le mieux, celui de Montreuil - la durée de séjour à la maternité pour les femmes venant d'accoucher est parfois inférieure à trois jours. Vous reconnaîtrez avec moi que, notamment pour un premier enfant, c'est trop court !

Monsieur le secrétaire d'État, je le répète : pour faire taire l'expression des lobbies, il faut tout mettre sur la table ! Plutôt que d'ouvrir la voie à une répression indistincte, aveugle, accepteriez-vous, par exemple, de rendre publique la durée moyenne de séjour dans les établissements publics et celle dans les établissements privés ? Pourriez-vous nous renseigner sur les contrôles qui sont effectués dans telle ou telle clinique qui obligeamment autorise les patients à rentrer chez eux le samedi et le dimanche en oubliant de faire enregistrer ces absences par l'administration ? Je peux vous donner un exemple, monsieur le secrétaire d'État, qui va, j'en suis sûr, intéresser vos services : la clinique des Jockeys de Chantilly.

Donc, si tout était mis sur la table, nous pourrions progresser.

Deuxième sujet important : tout à l'heure, notre collègue Yves Bur - qui, à son siège de président de séance, est maintenant réduit au silence, mais je vais essayer de ne pas trahir sa pensée pour ne pas le frustrer - évoquait le transfert de gestion à une collectivité territoriale. La politique gouvernementale est très cohérente et ceux qui affirment qu'elle est en échec se trompent ! Il y a un projet gouvernemental : le démembrement de notre système républicain, qui repose sur l'égalité, et non pas sur l'égalitarisme ! Par des prestations ouvertes à tous et qui tiennent compte du niveau de fortune des uns et des autres, notre système républicain de santé garantit une qualité de service qui, à l'arrivée, est égale pour tous.

Or le Gouvernement est en train de démembrer l'État. On l'a vu à propos de la formation professionnelle. On le voit aujourd'hui sur les questions de santé. Ainsi, par exemple, les régions pourront - certes, ce ne sera pas une obligation, mais une faculté - se substituer à l'État dans l'exercice de ses compétences en matière de santé. Autrement dit, selon les choix politiques ou la situation budgétaire de telle ou telle région, des services seront assurés tandis que d'autres ne le seront plus.

Monsieur le président, c'est ainsi qu'on est en train de rompre l'égalité républicaine, et je pense que vous y êtes très sensible, vous qui êtes un vrai républicain, mais aussi - et ce n'est pas contradictoire - un vrai Alsacien. Mais je soupçonne votre naïveté alsacienne de ne pas voir les turpitudes qui sont à l'œuvre du côté gouvernemental !

M. le président. Ne jugez pas de l'esprit alsacien, monsieur Brard ! Laissez cela aux Alsaciens eux-mêmes !

La parole est à M. Maxime Gremetz, à qui je demande d'être bref car beaucoup de choses ont déjà été dites...

M. Jacques Desallangre. Il y a tellement à dire !

M. le président. Je le sais bien !

M. Maxime Gremetz. Empêchez-nous de nous exprimer, pendant que vous y êtes, et tout sera décidé par ordonnances ! Permettez-nous au moins, pendant le peu de temps qui nous est accordé, de parler de l'hôpital public et de la réforme de l'hôpital, car ce sujet mérite qu'on en discute, et longuement !

D'ailleurs, monsieur le rapporteur, vous vous trouvez là dans une situation bien paradoxale ! Le président de la commission spéciale n'étant plus au banc de la commission, vous ne pouvez quand même pas être juge et partie ! Vous, vous êtes rapporteur du texte et il y a un président de la commission spéciale qui est M. Bur, et si je voulais faire appliquer le règlement...(Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Si M. Bur est obligé de tenir deux rôles en même temps, c'est sans doute que le groupe UMP commence à fléchir !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Non !

M. Maxime Gremetz. Eh oui, monsieur Bur ! Vous ne vous faites même pas remplacer au fauteuil de la présidence de la commission. Vous ne respectez pas le règlement !

M. le président. Monsieur Gremetz, j'ai déjà remplacé temporairement à la présidence de la séance des collègues de l'UMP comme du groupe socialiste !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Vous perdez du temps, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Monsieur Dubernard, vous en avez perdu beaucoup hier soir !

M. Jean-Pierre Brard. Vous voulez faire taire M. Bur, chers collègues de droite !

M. le président. Monsieur Gremetz, venz-en aux amendements de suppression !

M. Maxime Gremetz. D'accord, monsieur président !

M. le président. Très bien ! Je sais que vous êtes...

M. Maxime Gremetz. Un républicain !

M. le président. ...respectueux du règlement ! Allez-y, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. L'article 27 vise à modifier le pouvoir de sanction des autorités sanitaires vis-à-vis des établissements de santé ne respectant pas les règles de tarification en vigueur ! Sitôt la tarification à l'activité décidée, nouvelle brigade, nouveau contrôle ! C'est normal ! La commission de contrôle des fonds publics accordés aux entreprises a été supprimée ! Et aujourd'hui, à chaque article de ce projet de loi, on ajoute une brigade de contrôle et de répression ! Tout cela créera un peu d'emploi, mais ne sera pas très productif, c'est clair !

Selon la législation en vigueur, c'est le directeur - ou la directrice - de l'agence régionale de l'hospitalisation qui est investi du pouvoir de sanction. L'article 27 déplace ce pouvoir de sanction vers la commission exécutive de l'ARH, dans laquelle les régimes de l'assurance maladie sont représentés, le motif invoqué étant la nécessité de renforcer la place de l'assurance maladie et de l'associer davantage dans la procédure de sanction applicable aux établissements de santé. Autrement dit, l'assurance maladie, on la pille ! Elle n'est plus gérée démocratiquement, mais autoritairement, et, de plus, on lui demande de ne plus s'occuper uniquement des malades, mais aussi des sanctions à l'encontre de ceux qui ne respectent pas la tarification à l'activité ! Il est quand même extraordinaire de voir comment on détourne le rôle de l'assurance maladie et de la sécurité sociale dans ce domaine ! On voit bien quel est le sens de cet article, et c'est pourquoi nos amendements visent à le supprimer purement et simplement !

Ce glissement de prérogatives s'inscrit dans une démarche qui vise à faire de l'assurance maladie un gendarme des dépenses de santé en matière d'hospitalisation, ce qui n'est pas son rôle. Comme si ce gouvernement n'était pas déjà, en permanence, un gendarme répressif !

Au-delà des critères de rentabilité financière que j'ai évoqués, il y a dans cette réforme un côté destructeur pour la société, qui plus est pour les Françaises et les Français les plus modestes ! La mise en place de tous ces moyens de répression et de sanctions est là pour faire payer les pauvres ! Les riches, eux, seront exonérés : ils ne sont pas gênés pour choisir entre le public et le privé, ceux-là ! Vous l'avez dit : tout le monde doit avoir la liberté de choisir ! Mais je vous assure que les riches ne vont pas à l'hôpital public !

Je vais être plus précis en citant les dix premiers du CAC 40, les Lindsay Owen-Jones, Édouard Michelin, Daniel Bernard, Antoine Zacharias, Daniel Bouton, Igor Landau, Patrick Le Lay, Thierry Desmarest, Martin Bouygues, Frank Riboud ! Mais il y en a d'autres, la liste est longue ! Ceux-là ne vont pas à l'hôpital public ! Mme Bettencourt encore moins, c'est évident !

M. le président. Monsieur Gremetz...

M. Maxime Gremetz. Et M. Bur non plus, j'en suis sûr ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Claude Évin. N'importe quoi !

M. le président. Monsieur Gremetz, je ne vous permets pas de porter un tel jugement !

M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas un jugement, c'est une certitude ! (Nouvelles protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur Gremetz, vous ne pouvez pas interpeller ainsi le président de séance !

M. Maxime Gremetz. Je suis sûr que M. Bur ne va pas à l'hôpital public !

M. le président. La question ne se pose pas : je suis en bonne santé et vous n'arriverez pas à me rendre malade.

Monsieur Gremetz, vous avez épuisé votre temps de parole.

M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas vous attaquer que de dire que vous préférez le privé au public ! Tout le monde a le droit de choisir, en tout cas ceux qui ont de l'argent !

M. Richard Mallié. On ne peut pas laisser dire cela !

M. Claude Évin. Tout est affaire d'appréciation, monsieur Gremetz ! On peut ne pas penser comme vous !

M. Maxime Gremetz. Monsieur Évin, pensez ce que vous voulez ! Lorsque vous avez proposé, hier, un amendement choquant, moi, je n'ai rien dit !

M. le président. Monsieur Gremetz, vous avez épuisé votre temps de parole !

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Dans une étude remarquable, M. Brard s'est tout à l'heure essayé à l'exégèse de ma pensée et de celle de l'UDF. Je le félicite par votre intermédiaire, monsieur le président, bien que je ne me sois en rien reconnu dans son analyse.

M. Jean-Pierre Brard. Pourquoi ? Il n'y a pas de pensée ?

M. Jean-Luc Préel. Celle que je tâche de défendre n'est pas celle que vous avez décrite !

Monsieur Brard, vous avez souhaité que les journalistes, les étudiants et les universitaires se penchent sur les diverses déclarations que l'on entend dans notre assemblée. Ils seraient très étonnés de constater la capacité qu'ont certains à dire n'importe quoi pour soutenir un amendement.

M. Maxime Gremetz. Ça aussi, c'est affaire d'appréciation !

M. Jean-Luc Préel. Depuis quelque temps, on entend des digressions extraordinaires, sans aucun rapport avec les articles et les amendements en discussion. C'est sans doute une forme d'obstruction, tendant à retarder la conclusion des débats, mais cela n'est pas souhaitable.

Si, pour notre part, nous avons déposé un amendement tendant à supprimer l'article 27, c'est parce que cet article prévoit de transférer le pouvoir de sanctionner du directeur à la commission exécutive de l'ARH, et que nous ne voyons pas ce que cela apportera. Nous ne contestons pas qu'il faille sanctionner les fraudeurs et les établissements qui font de fausses déclarations. Cependant, le directeur de l'ARH, aujourd'hui responsable des sanctions, est nommé par l'État et préside la commission exécutive. Y siègent, à parité, des représentants de l'État et des représentants de l'assurance maladie : les premiers votant de façon unanime et le directeur de l'ARH ayant voix prépondérante, c'est toujours l'État qui, dans les faits, obtient satisfaction. Simple effet d'annonce, cet article ne changera donc rien.

En outre, il semble qu'il réduise le rôle des ARH, ce qui est une erreur. Il serait préférable de les transformer en agences régionales de santé, pour qu'elles soient responsables à la fois de l'ambulatoire, des établissements, de la formation et du médico-social, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Nous souhaitons évoluer vers une non-fongibilité des enveloppes et donner plus de pouvoir aux ARS.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. J'aurais beaucoup à dire sur ce que j'ai entendu, mais je me contenterai de rappeler que cet article a beaucoup de sens, que sa suppression entraînerait celle de la coordination − que nous souhaitons au contraire renforcer − entre l'assurance maladie qui finance et l'État tutelle du système hospitalier. La commission a donc rejeté ces amendements.

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 1649, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Rappel au règlement

M. Richard Mallié. Je demande la parole pour un rappel au règlement ?

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié, pour un rappel au règlement.

M. Richard Mallié. Monsieur le président, je voudrais dire à notre collègue Maxime Gremetz que le règlement lui accorde un temps de parole et qu'il ne saurait être question de l'en priver.

M. Maxime Gremetz. Si vous pouviez, vous ne vous gêneriez pas !

M. Richard Mallié. Pour autant, il n'a pas le droit de dire n'importe quoi et surtout pas de formuler des attaques personnelles à l'encontre du président de la commission spéciale, qui préside en ce moment notre séance.

M. Maxime Gremetz. Ah bon ? Dire qu'il va dans une clinique privée, c'est une attaque personnelle ? Vous avez honte de fréquenter les cliniques privées ?

M. Richard Mallié. Vous pouvez faire du remplissage si cela vous chante, mais vous n'avez pas le droit de dire n'importe quoi !

M. Maxime Gremetz. La vérité vous gêne ?

M. Richard Mallié. Je souhaiterais que notre collègue se calme un peu. Il peut gagner du temps en demandant tous les scrutins publics qu'il veut : nous acceptons cela, car notre règlement l'autorise. Mais nous ne pouvons tolérer des propos aussi scandaleux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, vous le savez, le groupe socialiste doit se réunir à onze heures. Nous demandons donc une suspension de séance de vingt minutes afin que nous puissions nous rendre à cette réunion.

M. le président. Avant de suspendre la séance, je vais donner la parole à M. le secrétaire d'État, puis mettre les amendements de suppression aux voix.

Reprise de la discussion

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie, pour donner l'avis du Gouvernement sur les amendements de suppression nos 1648 à 1659 et n° 7503.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, si la qualité des soins est pour nous une priorité dans les établissements de santé, la qualité du codage et de la facturation en sont une autre, tout aussi importante. Chaque fois que 1 euro est dépensé dans un établissement de santé, ce doit être au mieux, au service de la qualité des soins.

Monsieur Brard, vous m'avez interpellé au sujet de la transparence. Nous sommes persuadés que la tarification à l'activité y contribuera très concrètement. J'en veux pour preuve que le financement par tarification est désormais la règle majoritaire en Europe...

M. Jacques Desallangre. Ce n'est pas une raison !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. ...puisque des pays comme l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Danemark, l'Irlande, l'Italie et le Portugal l'ont adopté.

M. Jean-Pierre Brard. Le mimétisme n'a jamais été une politique !

M. Maxime Gremetz. Quels modèles ! Ils n'ont jamais eu la sécurité sociale, eux !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Ce sont en effet des modèles, et vous pouvez constater que, dans ces pays, ces politiques ont été menées par des gouvernements aux couleurs politiques très diverses.

M. Maxime Gremetz. Vous avez cité les pires exemples !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. C'est bien la preuve que ce système s'impose par sa logique.

Vous demandiez la transparence : nous la déclinons au travers de la T2A, pour l'activité réelle, du comité de l'hospitalisation − dont la création a été votée hier −, pour le financement, et de l'ANAES, pour la mise en œuvre. À titre expérimental, cette année, une trentaine d'établissements ont une démarche novatrice en matière de qualité. À partir de 2005, ils seront une centaine. Vous le voyez, monsieur Brard, pour une fois − je serais même tenté de dire : une fois de plus −, le Gouvernement peut exaucer vos vœux : cette transparence que vous réclamiez, nous la proposons.

M. Jean-Pierre Brard. Je ne vous donne pas l'absolution !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Votre bénédiction nous suffira ! (Sourires.)

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les amendements identiques nos 1648 à 1659 et n° 7503, tendant à supprimer l'article 27.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 49

              Nombre de suffrages exprimés 47

              Majorité absolue 24

        Pour l'adoption 5

        Contre 42

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures dix, est reprise à onze heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 4618 à 4629.

La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Ces amendements tendent à supprimer le I de l'article 27, article qui vise à transférer à l'assurance maladie la procédure de sanction applicable aux établissements de santé ne respectant pas les nouvelles procédures de tarification des prestations hospitalières.

La loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004 a profondément modifié les principes de tarification des prestations hospitalières en prévoyant une application graduelle de la tarification à l'activité, modalités de financement que le groupe communiste et républicain a été le seul à rejeter en votant contre.

L'article 25 de cette loi de financement a institué une procédure permettant de sanctionner les établissements ne respectant pas les nouvelles règles de tarification, pouvoir de sanction qui passe de l'État à l'assurance maladie avec le présent projet. Ce faisant, on nie les inquiétudes qui sont les nôtres et qui sont partagées notamment par le président de la FHF, qui, dans son discours d'inauguration du salon Hôpital Expo, dénonçait les conditions « suicidaires » d'application de la T2A et réclamait notamment une réévaluation à la hausse de l'enveloppe destinée à couvrir les missions de service public des hôpitaux. Sans quoi, disait-il, l'hôpital public sortirait inévitablement affaibli de l'opération.

Il ajoutait, avec raison, que la France serait bien inspirée de prendre modèle sur les pays où ce mode de financement s'applique déjà et n'a jamais pu couvrir la moitié du budget hospitalier. « L'application de la tarification à l'activité ne peut se faire à marche forcée » continuait-il. C'est pourquoi nous refusons cette procédure de sanction reprise par l'article 27.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Rejet.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4618 à 4629.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8379.

Cet amendement est-il défendu ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Oui, monsieur le président. Cet amendement de M. Jean-Marie Le Guen a été accepté par la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8379.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8306.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8306.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 4630 à 4641.

La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Ces amendements visent à supprimer le II de l'article 27. En effet, le glissement de prérogatives opéré par celui-ci s'inscrit dans une démarche qui vise à faire de l'assurance maladie un gendarme des dépenses de santé en matière d'hospitalisation, ce qui n'est pas son rôle.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Rejet.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4630 à 4641.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 27, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 27, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 27

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8307, portant article additionnel après l'article 27.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir cet amendement.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Cet amendement concerne la démographie des professions de santé. Un décret de juin 2003 a créé l'Observatoire national de la démographie des professions de santé, qui comporte en son sein des comités régionaux. Il s'agit d'aller un peu plus loin en associant l'assurance maladie et les doyens des facultés de médecine à la décision consistant à fixer le numerus clausus.

La question de la démographie médicale est essentielle. Les variations du numerus clausus ont été telles qu'il a fallu faire venir des médecins non européens dont la qualification est parfois discutable. Parmi eux, figurent certes des champions de la chirurgie - j'ai un nom à l'esprit -, mais ils ne peuvent s'intégrer correctement dans notre système hospitalier, et d'autres n'ont pas les compétences nécessaires. Tous les gouvernements successifs, depuis quinze ou vingt ans, se sont penchés sur le problème et ont mis en place des mécanismes de régulation qui sont efficaces. Nous atteignons en effet un niveau correct d'appréciation de ces médecins, dont nous avons besoin - il faut le reconnaître - et qui font vivre nombre d'hôpitaux locaux. Il n'en reste pas moins que le fait d'être obligé de faire appel à eux traduit un défaut d'anticipation impressionnant.

L'exemple des infirmières est significatif. Nous en avons un besoin accru pour mettre en place les 35 heures à l'hôpital et nous sommes obligés de faire appel à des infirmières étrangères, espagnoles notamment. Il y a donc là un véritable problème. C'est pourquoi cet amendement vise à rendre plus efficace l'Observatoire national de la démographie des professions de santé.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Claude Évin.

M. Claude Évin. La question de la démographie médicale est en effet sensible et l'Observatoire permet de prévoir les besoins, mais ce n'est pas en se contentant d'observer l'évolution démographique concernant les professions de santé que nous pourrons régler le problème. Il nous faudrait surtout des mesures de régulation des installations. M. Mattei a déjà évoqué cette question, comme l'avaient déjà fait non seulement le précédent gouvernement, encourant les foudres de l'opposition d'alors, mais aussi des organisations syndicales de médecins et du Conseil de l'ordre. Donc, les choses évoluent dans les esprits, mais, si nous voulons vraiment garantir une offre de soins de qualité répartie équitablement sur l'ensemble du territoire, il faudra bien prendre des décisions. Nous y reviendrons lors du débat sur les agences régionales de santé.

Je m'étonne au passage que la composition de ce comité, un de plus - en voilà un septième ! -, soit inscrite dans le code de l'éducation nationale. Certes, il n'est pas inintéressant de vouloir associer les doyens et la question du numerus clausus relève en effet du code de l'éducation nationale, mais je trouverais choquant que la composition d'un comité de la démographie médicale ne figure pas dans le code de la santé. Cela dit, l'opposition ne va pas faire tout votre travail !

En outre, je ne vois pas l'intérêt de créer un énième comité. Nous pourrions mettre en place des commissions sans qu'il soit nécessaire de légiférer. Il sera intéressant de voir si le Gouvernement ou le Sénat formule des propositions en la matière en deuxième lecture, mais il est pour le moins bizarre de ne pas traiter de ce sujet dans le code de la santé publique.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il est logique de traiter du numerus clausus dans le cadre de l'assurance maladie, qui est directement concernée par cette question. Il y a quelques années, les freins au relèvement du numerus clausus provenaient à la fois de l'assurance maladie et des syndicaux médicaux.

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié.

M. Richard Mallié. Qu'une telle disposition figure dans le code de l'éducation ne me choque pas, monsieur Évin, au contraire. En effet, c'est aujourd'hui l'éducation nationale qui a malheureusement la maîtrise de la formation des futurs médecins. Cela dit, c'est une grande question sur laquelle il conviendrait de se pencher, car, à mon avis, il y a quelque chose à faire.

Je suis très favorable à l'amendement, mais je tiens à rappeler à notre rapporteur, qui est un éminent PUPH - professeur des universités, praticien hospitalier -, et à M. le ministre que les doyens ont trop souvent tendance -c'est humain - à vouloir que leur faculté soit toujours la première, la meilleure, qu'elle accueille le plus grand nombre d'étudiants. Or, les études de médecine sont longues - elles durent six ans minimum, voire dix ou douze ans - et je suis persuadé, pour en avoir fait moi-même l'expérience, qu'un jeune médecin a tendance à s'établir dans la région où il a fait ses études. Ce n'est pas un hasard si les villes qui comptent les plus grosses facultés de médecine sont aussi celles qui ont le plus de médecins. À mon sens, c'est une erreur. Le nombre de médecins devrait être modulé en fonction de la demande qui existe dans le territoire sur lequel est implantée la faculté.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. La question de la démographie médicale est en effet d'une grande importance pour la qualité des soins. La création d'un comité est intéressante, même si je ne suis pas certain qu'il soit nécessaire d'y associer l'assurance maladie.

En revanche, l'UDF plaide depuis longtemps pour l'instauration d'un numerus clausus régional par spécialité. C'est en effet au niveau régional que l'on peut le mieux évaluer les besoins pour savoir combien il faut former de chirurgiens orthopédistes, de spécialistes en chirurgie digestive, de neurochirurgiens, de pédiatres, etc. Se fier à un numerus clausus national est une erreur. La pénurie d'infirmières en témoigne. Dans les Pays de la Loire, lorsque nous avons naguère alerté le ministre sur le manque criant d'infirmières qui s'annonçait, on nous a répondu qu'il s'agissait d'un problème national et qu'il n'y avait aucune raison de ne pas diminuer leur nombre ! C'était une erreur, tout le monde le constate aujourd'hui.

Enfin, c'est vrai, la plupart des étudiants nouent leurs amitiés et leurs relations sociales et professionnelles dans la région où ils ont été formés et où ils s'installent pour 85 % d'entre eux. S'ils s'y marient, ils ont toutes les raisons d'y rester, sauf lorsqu'ils veulent fuir leur belle-mère, ce que l'on peut comprendre. (Sourires.)

M. le président. Mais cela n'est pas du ressort de la loi ! (Sourires.)

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je suis personnellement opposé - et je pense que nous sommes nombreux ici dans ce cas - à un numerus clausus régional qui imposerait des règles trop rigides aux jeunes professionnels de santé. En revanche, il est évident que les besoins régionaux devront être plus précisément évalués, notamment par les missions régionales de santé et les conférences régionales de santé. Nous en reparlerons lors de la discussion de l'article 36.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement signale un problème, mais ne l'aborde pas de la bonne façon. Il s'agit avant tout d'un problème politique, et les politiques doivent s'y investir. S'il faut vraiment créer un comité, la moindre des choses serait qu'il soit présidé par le ministre, car c'est lui qui doit porter une politique, et, à elles seules, les coordinations administratives interministérielles ne nous mèneront pas très loin.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. L'amendement prévoit qu'un avis est rendu aux ministres.

M. Jean-Marie Le Guen. L'observatoire devrait déjà fournir certains résultats. Si l'objectif est de favoriser la convergence et de donner de la solennité à la décision, le ministre devrait présider ce comité.

Par ailleurs, les problèmes liés la démographie médicale sont très insuffisamment pris en compte. L'exercice médical n'est pas seul en cause et ces problèmes démographiques se posent aussi aux professions de santé liées aux actes de soin. Les propositions du rapport Berland et l'évolution des techniques - sans parler du contexte économique et financier qui s'imposera au système de santé - rendront de plus en plus indispensable la coordination des métiers. Aucun métier, serait-ce celui de médecin, ne pourra être considéré indépendamment des autres. Il nous faut donc adopter une vision plus large.

En même temps, cette vision doit aussi se resserrer, car les problèmes de démographie médicale se déclinent à l'échelle des régions et des spécialités.

Enfin, et surtout, le temps est venu de reconsidérer la réforme Debré, qui avait pourtant représenté, voici plus de quarante ans, un progrès indiscutable en associant la recherche, l'enseignement et la pratique hospitalière. Aujourd'hui, c'est la formation des étudiants - non pas en amont, au niveau du numerus clausus, mais en aval, à celui des spécialités - qui fournit à l'hôpital les internes et chefs de clinique dont il a besoin pour fonctionner. Or, notre système de formation ne devrait pas être assujetti aux besoins hospitaliers à court terme - si objectives que soient ces contraintes.

Nous devons nous engager dans une réflexion bien plus large sur la formation. Certaines initiatives ont déjà été lancées, avec des formations de santé qui ne se limitent pas aux médecins ou aux chirurgiens dentistes - c'est, par exemple, le cas des sages-femmes. Il nous faut faire converger les formations et revoir la définition de l'hôpital et de la recherche, car tous les médecins généralistes ne sont pas destinés à être des chercheurs !

Il faut sortir du moule de la réforme Debré, qui a eu en son temps des effets positifs, mais qui est aujourd'hui dépassée. Il faut revoir toute la problématique hospitalo-universitaire et les problèmes de formation qui en découlent, tant au niveau des spécialités qu'à celui du numerus clausus. Monsieur le président de la commission des affaires sociales, ce serait un beau travail pour le Parlement que de commencer à défricher ce sujet, pour faire avancer la réflexion collective dans notre pays.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Monsieur Le Guen, le comité mis en place par l'amendement n° 8307 n'est pas chargé de décider, mais de donner un avis aux ministres, à qui revient de prendre la décision.

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Je prends note de cette déclaration avec beaucoup de satisfaction !

On trouve dans l'exposé des motifs de l'article additionnel proposé bien des phrases qui nous conviennent. Nous souscrivons à l'idée que « la fixation du numerus clausus est une décision éminemment politique », qu'« elle a un effet structurant sur le système de santé par son action sur l'offre de soins » et qu'« elle doit continuer à relever comme telle de la compétence ministérielle ». C'est pourquoi, pensant aux effets que cela pourrait avoir sur l'offre de soins, j'ai proposé par un amendement la suppression du numerus clausus, mais vous avez répondu que l'éducation nationale ne serait pas en mesure d'accueillir un trop grand nombre d'étudiants supplémentaires. Monsieur Mallié, compte tenu de l'importance de ce problème, il faut certes s'y pencher, mais c'est encore trop peu.

J'ai également défendu un amendement proposant une régulation à l'installation, que vous avez jugée trop contraignante et autoritaire. La mesure que vous proposez me paraît, bien qu'insuffisante, aller dans le bon sens.

Par ailleurs, et contrairement à ce que semble craindre un de mes collègues, augmenter le nombre de médecins n'aura pas automatiquement pour effet d'augmenter les dépenses de santé.

M. Richard Mallié. Formidable !

M. Jacques Desallangre. Je fais confiance à la responsabilité politique et j'espère que ce comité de démographie médicale - même si c'est un comité de plus ! - donnera au ministre un avis qui le conduira à relever le numerus clausus dans des proportions spectaculaires. Nous reviendrons ultérieurement sur notre proposition de régulation à l'installation, qui requiert un grand volontarisme politique - mais je ne suis pas sûr que vous l'ayez.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Monsieur Desallangre, nous reviendrons sans doute sur ce point lors de l'examen de l'article 29.

Pour ce qui est du comité de la démographie médicale, sa création me semble positive. En tout état de cause, il revient aux ministres de la santé et de l'enseignement supérieur de fixer le numerus clausus.

Des mesures d'incitation ont été prises, mais les résultats de leur évaluation ne sont pas encore connus. Le décret définissant les zones médicalement désertifiées ne concerne qu'une très petite partie du territoire national, qui devrait être bien plus grande, à en croire les élus locaux et les médecins.

M. Claude Évin. Et les patients !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Bien entendu !

D'abord, l'amendement adopté à propos des maisons médicalisées doit nous permettre d'apporter les premières réponses au problème. Il conviendrait de mettre en place, très rapidement après le vote de cette loi, des expérimentations dans le domaine de l'assurance maladie, voire, dans certains endroits, de nouveaux modes de financement.

Par ailleurs, la coordination des métiers s'impose. Dans le traitement du diabète, par exemple, on observe que les patients sont mieux soignés lorsqu'ils sont suivis dans la durée par des infirmières que lorsqu'ils n'ont affaire qu'à des médecins. Le rapport de M. Berland souligne bien que cette approche n'est pas dans la culture de nos médecins - notamment des ophtalmologistes. Il y a là une révolution à faire, et nous devons la faire ! On ne peut admettre de voir, d'une part, s'allonger les listes d'attente et, d'autre part, baisser la qualité des soins.

Enfin, certaines disciplines manquent de spécialistes. C'est, bien sûr, le cas de la chirurgie, monsieur Domergue, mais aussi de l'anesthésie, de la pédiatrie,...

M. Richard Mallié. De la gynécologie.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. ...ou, en effet, de la gynécologie.

Il faut poursuivre la démarche engagée par Bernard Kouchner : pourquoi aurait-on peur de fixer, lors des examens classants, le nombre de places affectées aux différentes spécialités ? Le ministère pourrait ainsi définir le nombre de dermatologues, de chirurgiens ou de cardiologues requis,...

M. Jean-Marie Le Guen. Sans penser seulement aux services hospitaliers !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. ...sans penser seulement, en effet, aux services hospitaliers, mais à la démographie médicale dans son ensemble.

Quant à la réforme de Robert Debré, elle a fait passer la France de l'âge des hospices à celui des grands hôpitaux. Cette vision a donné naissance à des professions hospitalo-universitaires très attractives, associant recherche, soins et enseignement. Après plus de quarante ans, le moment est aujourd'hui venu de revoir cette organisation, sans remettre en cause ce qui fonctionne bien.

Je suis très favorable à la contractualisation. Ayant été nommé professeur de médecine en 1989, je sais bien qu'une fois parvenu à ce titre, on n'est plus jamais remis en cause. Or, il faut avoir le courage d'envisager, pour les hospitalo-universitaires aussi, une contractualisation, notamment dans certains hôpitaux généraux - j'en connais ! - dont les services mériteraient d'avoir des étudiants. Il ne s'agit pas de tout remettre en cause, mais d'engager, plus de quarante ans après la réforme Debré, une réflexion prudente. Sans abîmer notre hôpital universitaire, qui est de bon niveau, il est très important d'ouvrir de nouvelles pistes. Nous y reviendrons à propos de l'article 29.

Depuis l'époque où j'étais ministre délégué auprès de Simone Veil, il y a dix ans, la position tant des médecins que de l'ensemble des Français a évolué et on commence à envisager, à terme, de filiariser le traitement de la démographie médicale - ce qui suppose que nous prenions nos responsabilités politiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8307.

M. Jacques Desallangre. Je tiens à signaler que je m'abstiens sur cet amendement.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 8247, 8419 et 8432, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 8247.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. J'ai l'honneur de défendre un amendement du président de la commission spéciale, relatif à la répartition des enveloppes de l'ONDAM. Cet amendement propose notamment d'établir par décret une liste des financements nécessaires aux prescriptions, au matériel et aux rémunérations des professionnels inscrits au code de la santé publique et des professionnels qui collaborent avec les auxiliaires médicaux - M. Bur songeait notamment aux aides-soignants et aides médico-psychologiques.

On peut se demander si ce dispositif ne devrait pas relever plutôt du code de la sécurité sociale, mais cet amendement, que la commission a accepté, a du moins l'intérêt de vous permettre, monsieur le ministre, de préciser le rôle du secteur médico-social par rapport à l'assurance maladie.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Le projet de loi relatif à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées vient d'être adopté par le Parlement, et la loi est entrée en vigueur au 1er juillet 2004, comme le Gouvernement s'y était engagé. Celle-ci fait suite à l'élaboration du plan pluriannuel « vieillissement et solidarité », présenté lors du conseil des ministres du 6 novembre 2003, et pose les fondements d'une prise en charge plus efficace de la perte d'autonomie des personnes âgées, fragilisées et durement frappées en août 2003 par une surmortalité liée à l'hyperthermie. Par ailleurs, un projet de loi pour l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées, qui réforme la loi fondatrice de 1975, sera examiné en deuxième lecture à la rentrée.

La loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées crée un nouvel organisme de protection sociale, la CNSA, destiné notamment à organiser le financement de la perte d'autonomie. À cette fin, des financements nouveaux sont affectés à cet organisme, notamment le produit de la journée de solidarité instaurée à compter du 1er juillet 2004.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose d'une expertise complémentaire, afin de mener à bien la seconde étape de cette importante réforme. En effet, en décembre 2003, une mission a été confiée par M. le Premier ministre à M. Raoul Briet, conseiller à la Cour des comptes, et à M. Pierre Jamet, DGS du département du Rhône, afin d'éclairer le Gouvernement sur l'organisation et les missions de la CNSA, dans le cadre d'un futur projet de loi. Une large consultation a permis à ces hauts fonctionnaires de recueillir les avis tant des acteurs du terrain que des associations, des professionnels, des collectivités territoriales et de toutes les parties associées à ce dossier, c'est-à-dire les partenaires sociaux, les organismes de sécurité sociale et les experts des administrations centrales.

Les orientations du rapport Briet-Jamet sont les suivantes : transférer un ensemble significatif de responsabilités, afin de faire émerger un gestionnaire local de proximité, le département, doté des moyens nécessaires, et accompagner cette organisation des responsabilités au plan local de la mise en place au niveau national d'une institution forte, dotée de la légitimité et des moyens nécessaires, pour satisfaire à l'exigence d'un traitement équitable sur l'ensemble du territoire et, surtout, garantir la cohérence des politiques menées.

Compte tenu de leur impact possible dans le champ de l'assurance maladie, les propositions contenues dans ce rapport sont actuellement étudiées avec beaucoup d'attention par le Gouvernement dans le cadre d'expertises complémentaires menées par les administrations compétentes.

Pour répondre à la question que vous m'avez posée ce matin, madame Guinchard-Kunstler, je souhaite évidemment que toutes les dépenses d'assurance maladie des personnes âgées continuent de relever de l'assurance maladie. Le Gouvernement entamera, la semaine prochaine, une concertation avec l'ensemble des acteurs, associations et acteurs institutionnels. En tout état de cause, je le répète, il est hors de propos que les soins administrés aux personnes âgées ou aux personnes handicapées sortent du champ de l'assurance maladie.

Chercher à améliorer la gestion des financements importants accordés pour le soutien de l'autonomie est important. Maintenir notre système de sécurité sociale est fondamental.

M. le président. Donnez-vous un avis favorable à l'amendement, monsieur le ministre ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Pour les raisons que j'ai exposées, je demande le retrait de cet amendement.

M. le président. Sur le vote des amendements n°s 8247, 8419 puis 8432, je suis saisi par le groupe socialiste de demandes de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler, pour soutenir l'amendement n° 8419.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Monsieur le ministre, vous venez de répondre en grande partie aux questions que j'ai posées ce matin. Savoir qui prendra en charge, au-delà du droit à compensation, les soins aux personnes âgées et aux personnes handicapées, qu'elles soient en établissement ou à domicile, est une vraie question politique, et non technique. Je vous ai entendu affirmer que le droit commun devait s'appliquer et l'assurance maladie primer, mais vous comprendrez que nous ne puissions qu'être profondément inquiets du rapport de MM. Briet et Jamet, qui osent proposer que les dépenses de santé des personnes âgées et des personnes handicapées soient prises en charge par les conseils généraux et financées par la TIPP. Cela constituerait une véritable rupture dans l'organisation de notre système sanitaire et de protection sociale. J'aimerais que vous nous répondiez également sur ce point, monsieur le ministre.

Par ailleurs, M. Bur m'a répondu tout à l'heure que les conseils généraux permettraient d'assurer la proximité. Or, qu'il s'agisse des personnes âgées ou du diabète, ce sont les réseaux de soins qui ont permis de découvrir l'importance du rôle des infirmières. Bien maîtrisé, le niveau national est donc capable de faire de la proximité.

Enfin, monsieur le ministre, dans les pays du Nord notamment, l'État a choisi de se décharger de l'organisation sanitaire et sociale sur les collectivités locales, lesquelles ont fermé les maisons de retraite, si bien que cela a abouti à une augmentation de la prise en charge par les systèmes sociaux nationaux.

Encore une fois, la question de savoir si les soins concernant les personnes âgées et les personnes handicapées doivent continuer de relever de l'assurance maladie est une question politique fondamentale. La réponse que vous nous avez apportée est importante, mais il me semble que nous devons aller beaucoup plus loin, car ce qui est en jeu, c'est l'organisation des soins et la continuité entre le médico-social et le sanitaire.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour soutenir l'amendement n° 8432.

M. Jean-Luc Préel. Je suis heureux de constater que l'UMP, le groupe socialiste et le groupe UDF ont déposé trois amendements semblables, pour demander des éclaircissements au Gouvernement. En effet, le projet de loi ne comporte aucune disposition explicite quant à la répartition précise des financements et des emplois qui doivent continuer d'émaner de l'assurance maladie et de la répartition de l'ONDAM, d'une part, et des crédits qui seront apportés en complément au titre de l'aide à la vie quotidienne en relation avec la perte d'autonomie par la nouvelle caisse, la CNSA, d'autre part.

L'amendement n° 8432 a pour objet de distinguer clairement les responsabilités respectives de l'assurance maladie et de la CNSA, en indiquant que la rémunération des professionnels inscrits au code de la santé publique, de même que celle des professionnels qui collaborent avec les auxiliaires médicaux, leurs prescriptions éventuelles et les matériels qui leur sont nécessaires ressortissent exclusivement à l'assurance maladie.

Il est important que le Gouvernement garantisse le maintien des ONDAM médico-sociaux des personnes âgées et des personnes handicapées dans l'ONDAM voté par le Parlement. La maladie d'Alzheimer, par exemple, est, comme son nom l'indique, une maladie. Pourtant, les personnes qui en souffrent sont dépendantes et sont hébergées dans des établissements médico-sociaux.

Monsieur le président, je suis heureux de me rallier à votre amendement, que nous pourrions cosigner. Je ne doute pas que nos collègues, très sensibles à la situation des établissements médico-sociaux et des personnes dépendantes, le voteront à l'unanimité.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Michel Dubernard. Le ministre a apporté des éclaircissements importants quant à la place du médico-social dans la répartition de l'ONDAM. Dès lors, avec l'accord de son auteur, je retire l'amendement n° 8247.

M. Jean-Pierre Brard. Je le reprends, au nom de ma vieille complicité avec M. Bur ! (Sourires.)

M. le président. L'amendement n° 8247 est donc repris par M. Brard.

La parole est à M. Jean Le Garrec.

M. Jean Le Garrec. Mme Guinchard-Kunstler, qui connaît parfaitement le dossier, vient d'expliquer avec talent combien il est nécessaire de rassurer. Monsieur le ministre, je ne doute pas de votre bonne volonté lorsque vous indiquez que le maintien de la prise en charge des soins aux personnes âgées dans le droit commun est une nécessité absolue. Mais puisque l'opinion publique s'interroge, le moins que vous puissiez faire est de vous en remettre à la sagesse de l'Assemblée. Je suis convaincu que ces amendements similaires, qui émanent de tous les groupes - le groupe communiste et républicain ayant repris celui de M. Bur - seraient votés à l'unanimité.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, il est fort dommage que, siégeant si haut, vous ne puissiez défendre vous-même un amendement de grande qualité, qui résulte certainement de votre bonne connaissance du terrain, dans votre circonscription et au-delà.

Notre collègue Jean Le Garrec disait qu'il était nécessaire de rassurer. J'ajouterai qu'il faut assurer et garantir. Certes, on ne peut douter de la bonne foi et de la bonne volonté de personne, mais chat échaudé craint l'eau froide, et nous savons ce que peuvent devenir les bonnes intentions. Vous avez fait preuve, monsieur le ministre, de compassion envers les victimes de la canicule de l'été dernier, mais la compassion et la sollicitude ne sauraient suffire. Puisqu'il subsiste un doute, une interrogation, pourquoi ne pourrions-nous pas voter cet amendement qui pourrait recueillir un consensus ? C'est au regard de la position des uns et des autres que la bonne foi sera attestée ou mise en doute.

M. Claude Évin. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Ce débat important était nécessaire, mais le ministre nous a apporté une réponse satisfaisante quand il a dit que les enveloppes seraient distinguées.

M. Jacques Desallangre. Inscrivons-le dans la loi !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Par ailleurs, si la consultation qu'il a évoquée aboutit à des conclusions satisfaisantes avant l'automne, nous pourrions éventuellement intégrer ces notions dans le PLFSS pour 2005.

M. Jacques Desallangre. Il serait plus simple de le faire aujourd'hui !

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Il s'agit d'un enjeu essentiel pour l'organisation du travail et des soins. Sont en effet concernés non seulement les infirmières et le personnel paramédical des maisons de retraite et des maisons d'accueil spécialisées - les MAS -, mais aussi les services de soins à domicile, les SESSAD. Nous n'avons pas cessé de dire que nous étions favorables à un parcours de soins et à une organisation en réseau. Opérer une séparation serait, à mon sens, profondément dangereux.

Quant à l'enjeu financier, je rappelle que les ONDAM médico-sociaux des personnes âgées et des personnes handicapées représentent, hors financements de l'État, 11 milliards d'euros. S'ils sont exclus de l'assurance maladie, tous les tours de passe-passe financiers seront possibles.

Vous avez dit, monsieur le ministre, que l'ONDAM continuerait à être voté ici. Cela me semble important, si l'on ne veut pas aboutir à un dispositif figé.

Un transfert vers les conseils généraux serait extrêmement dangereux quand on connaît les immenses besoins des personnes âgées, besoins qui risquent de s'accroître dans les années à venir.

L'enjeu est politique. En acceptant cet amendement, vous apaiseriez les inquiétudes, ce qui pourrait être utile, notamment au moment des consultations que vous allez engager sur ce débat. Il est d'ailleurs dommage que celui-ci n'ait lieu que maintenant, car il est au cœur même de l'organisation de notre système de santé comme de notre système d'assurance maladie, en particulier au niveau financier.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Cette discussion est tout à fait surréaliste ! Tout le monde est d'accord. M. Dubernard nous dit qu'il a entendu le ministre, mais il est tellement convaincu qu'il faut légiférer qu'il nous renvoie à une disposition législative dans le prochain PLFSS. Mais pourquoi ne pas faire aujourd'hui ce qu'il propose de faire demain ?

M. Claude Évin. Tout à fait !

M. Jean-Pierre Brard. Sinon, monsieur Dubernard, vous allez instiller dans cette assemblée le doute sur votre bonne foi. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Or personne n'a envie de douter de votre parole.

Pourquoi donc ne consentez-vous point à faire aujourd'hui ce que, d'un seul coup, vous éprouvez le besoin de renvoyer au PLFSS ?

Les journalistes vous regardent et vous écoutent. Comme c'est le cas pour les ministres, vous ne serez pas jugé à vos paroles, mais à vos actes. Ici, accomplir des actes, c'est adopter des textes, et non renvoyer à la Saint-Glinglin des dispositions que nous pouvons adopter aujourd'hui.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. J'interviendrai dans le même esprit que celui des interventions précédentes. Ce débat est intéressant et sérieux. On a pu noter des divergences très importantes, mais il y a aussi, parfois, des convergences.

Sur ce point précis, il apparaît que des amendements sont venus de tous les bancs. Monsieur Bur - mais vous ne pouvez pas vous exprimer sur ce sujet maintenant, compte tenu de vos obligations de président -...

M. Jean-Marie Le Guen. On l'a mis président pour le faire taire ! (Sourires.)

M. Jean-Marc Ayrault. ...vous l'aviez fait vous-même. Et vous aviez appliqué, d'une certaine façon, le principe de précaution qu'on nous a demandé d'intégrer à la Constitution s'agissant de l'environnement.

Monsieur le ministre, la suggestion qui vous a été faite par M. Le Garrec, qui est de vous en remettre à la sagesse de l'Assemblée, est tout à fait constructive. Si vous êtes vraiment sincère - et il n'y a pas de raison de vous faire de procès d'intention -,...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Merci !

M. Jean-Marc Ayrault. ...laissez faire l'Assemblée, qui, aujourd'hui, est prête à légiférer à l'unanimité, pour que les choses soient claires et pour que ce soit inscrit dans la loi. Ainsi, nous ne prenons aucun risque.

Si vous vous y opposez, le doute subsistera. (« Ah oui ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et vous finirez par justifier certaines arrière-pensées.

Il y a une manière très simple de nous rassurer : remettez-vous en à la sagesse de l'Assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Nous allons maintenant procéder aux trois scrutins qui ont été annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 8247, repris par M. Brard.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement n° 8247 :

              Nombre de votants 71

              Nombre de suffrages exprimés 68

              Majorité absolue 35

        Pour l'adoption 21

        Contre 47

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Le monde politique souffre d'un véritable déficit de crédibilité. Les Français attendent de nous que les hommes et les femmes politiques fassent concrètement ce qu'ils disent qu'ils feront. Or, concrètement, vous venez de faire la démonstration que vous n'étiez pas prêts à mettre en accord vos actes et vos paroles.

Concernant les catégories de populations que Mme Paulette Guinchard-Kunstler a fort bien décrites tout à l'heure, voyez à quel sort vous les destinez !

Il fallait que cela fût acté : le vote que nos collègues de l'UMP est très démonstratif de la sincérité de leurs engagements.

M. le président. Nous en venons au deuxième scrutin.

Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8419.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement n° 8419 :

              Nombre de votants 67

              Nombre de suffrages exprimés 67

              Majorité absolue 34

        Pour l'adoption 19

        Contre 48

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Nous en arrivons au troisième scrutin.

Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8432.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement n° 8432 :

              Nombre de votants 67

              Nombre de suffrages exprimés 67

              Majorité absolue 34

        Pour l'adoption 25

        Contre 42

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Avant de donner la parole aux orateurs inscrits sur l'article 28, je vous informe que M. le président de l'Assemblée nationale dévoilera à douze heures quarante-cinq le timbre choisi par le Président de la République parmi les dix Mariannes retenues par les Français.

M. Claude Évin. Ne pourrait-on pas renvoyer la discussion sur l'article 28 à jeudi ?

M. le président. Soit.

La suite de la discussion du projet de loi est donc renvoyée à la prochaine séance.

    2

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président. Jeudi 15 juillet 2004, à quinze heures, première séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1675, relatif à l'assurance maladie :

Rapport, n° 1703, de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission spéciale.

À vingt et une heures trente, deuxième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures vingt-cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot