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Première séance du mardi 27 juillet 2004

51e séance de la session extraordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

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MOTION DE CENSURE

Discussion et vote

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion et le vote sur la motion de censure déposée, en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, par M. Jean-Marc Ayrault et 124 membres de l'Assemblée, M. le Premier ministre ayant engagé la responsabilité du Gouvernement pour l'adoption, en deuxième lecture, du projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales, dans le texte dont il a donné connaissance au cours de la deuxième séance du vendredi 23 juillet 2004.

Il a été donné lecture du texte de la motion de censure au cours de cette même séance.

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, premier orateur inscrit, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, jamais gouvernement n'aura autant mérité la censure (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), car jamais gouvernement ne se sera si mal comporté à l'égard de la représentation nationale. (Mêmes mouvements.)

M. Michel Delebarre. Bon début !

M. Jean-Marc Ayrault. Depuis deux ans, il est impossible de faire le compte de toutes les avanies que l'Assemblée a endurées :...

M. Richard Mallié. Avec vous, c'était vrai !

M. Jean-Marc Ayrault. ...ordre du jour improvisé et surchargé, textes expédiés à la va-vite, débats tronqués avec ordre donné au groupe majoritaire de ne pas prendre la parole (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), intolérance vis-à-vis de l'opposition dont l'avis et les propositions sont systématiquement ignorés,...

M. André Schneider. C'est le bilan du gouvernement Jospin !

M. Jean-Marc Ayrault. ...jusqu'à l'utilisation de l'article 49-3, alors que vous disposez d'une majorité écrasante. Tous les progrès réalisés par le gouvernement de Lionel Jospin (Huées sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) pour réhabiliter le travail parlementaire et refuser l'utilisation des procédures contraignantes sont réduits à néant. L'Assemblée nationale est aujourd'hui humiliée, outragée, marginalisée dans une indifférence complète. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Dans quelle démocratie tolérerait-on qu'en un mois, il faille délibérer et voter quatorze textes engageant, excusez du peu, l'avenir de notre système de santé, la souveraineté énergétique de notre pays, la croissance économique ou la recherche sur le vivant ?

M. Gérard Hamel. Pas d'hypocrisie, de l'action !

M. Jean-Marc Ayrault. Dans quelle démocratie accepterait-on que l'exécutif décide sans vote du partage des pouvoirs entre l'État et les collectivités locales ?

M. Arnaud Lepercq. Il y a déjà eu une première lecture !

M. Jean-Marc Ayrault. Extraordinaire, notre session ne l'a été que par le joug que vous avez imposé à nos travaux.

Invoquer l'obstruction de l'opposition (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) pour justifier le recours à l'article 49-3 relève de la malhonnêteté intellectuelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) De quel autre moyen disposait l'opposition pour briser le mur de votre indifférence ? (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) À aucun moment, vous n'avez tenu l'engagement pris au lendemain des régionales de retravailler votre projet de loi avec le Parlement et les nouveaux présidents de régions et de départements. (« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) À aucun moment, vous n'avez entendu notre demande, pourtant bien modeste, de renvoyer à l'automne l'examen de ce texte.

Mme Martine David. Il n'écoute rien !

M. Jean-Marc Ayrault. À aucun moment, vous n'avez tenu compte des critiques du président de l'Assemblée nationale et d'une partie de votre majorité. Vous imposez votre projet seul contre tous ! Vous inventez le 49-3 de caprice personnel ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

« C'est la plus grande des faiblesses que de craindre trop de paraître faible » disait Bossuet. Voilà votre malheur et celui de notre assemblée, monsieur le Premier ministre. Votre coup de force institutionnel est la marque de votre faiblesse politique. Censuré trois fois par le peuple français, vous avez cru bon de l'ignorer en vous accrochant à votre fauteuil. Votre seul programme est de « durer et d'endurer ». Vous vous êtes même fixé un horizon : conduire la campagne pour le oui à la Constitution européenne. Au regard de votre collection de revers électoraux, le plus grand service que vous puissiez rendre à l'Europe serait de vous en abstenir (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) car un pouvoir sans légitimité est un pouvoir sans autorité. La vôtre relève désormais d'une fiction. À quoi sert un Premier ministre qui se résigne à n'être plus que l'exécutant des directives contradictoires d'un président omnipotent ? (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Patrick Lemasle. Très bien !

M. Jean-Marc Ayrault. À quoi sert un chef de gouvernement qui n'a plus la confiance ni de ses ministres, ni de ses députés, ni de ses élus ? (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) À quoi sert un Premier ministre qui n'est même pas en mesure de briguer la présidence de son parti ? (Mêmes mouvements.)

M. Francis Delattre. De quoi je me mêle ?

M. André Schneider. Regardez ce qui se passe chez vous !

M. Jean-Marc Ayrault. Vous n'êtes désormais à votre poste que par la volonté d'un seul, le président de la République. Et cette confiance s'érode à mesure que s'accélère la sarabande des prétendants.

M. Jean-Pierre Kucheida. Bonne formule !

M. Jean-Marc Ayrault. Le « gouvernement de mission » n'est plus qu'un gouvernement en rémission qui étouffe dans une atmosphère de fin de règne. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

L'État, et le sujet est grave, est aujourd'hui l'otage d'une incroyable guerre des clans au sein de l'exécutif. Le Président de la République et son ministre d'État rejouent sans pudeur la grande guerre des « amis de trente ans » : le budget de la défense, le temps de travail deviennent l'objet de surenchères personnelles sans aucune considération d'intérêt général. Seuls comptent la présidence de l'UMP et son trésor électoral. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

C'est là une parfaite illustration des conceptions et de la pratique du pouvoir, comme c'était déjà le cas il y a quelques années, du temps d'autres Présidents de la République de même sensibilité : régenter l'État, le mettre au service d'un clan, d'une bande, d'une faction. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Et sous Mitterrand ?

M. Jean-Marc Ayrault. Toutes les grandes institutions, tous les grands corps de l'administration sont soumis aux nominations partisanes : il suffit d'un conseil des ministres pour changer la moitié des recteurs, le parquet est repris en main par la Chancellerie à tous les échelons, les contre-pouvoirs sont écrasés ou marginalisés.

M. Richard Mallié. C'est l'hôpital qui se moque de la charité !

M. Jean-Marc Ayrault. Cette dérive de l'esprit public fait peser une sourde menace sur les libertés : des lois Perben qui font de tout citoyen un suspect à la réforme de la CNIL qui élargit leur fichage, de la prise de contrôle de la presse et de l'édition par des groupes de l'armement et de la finance proches du pouvoir et vivant de la commande publique jusqu'au retour de la tutelle politique sur l'audiovisuel public, vous organisez un dangereux maillage de la société.

M. Richard Mallié. C'est scandaleux !

M. Gérard Hamel. Est-ce que vous y croyez ?

M. Jean-Marc Ayrault. Et quand le droit s'oppose à cette mainmise, vous le changez, sans aucune pudeur, en pleine nuit, comme vous l'avez fait au Sénat en présentant un amendement pour permettre à vos amis de prendre la présidence d'EDF. Voilà la réalité de vos pratiques !

M. Gérard Hamel. C'est lamentable !

M. Jean-Marc Ayrault. Un tel climat de partialité engendre, c'est vrai, un sentiment d'impunité et d'irresponsabilité au plus haut niveau de l'État. Vous êtes passé maître dans l'art de vous défausser de vos échecs sur vos prédécesseurs et de renvoyer vos difficultés à vos successeurs.

M. Gérard Hamel. Et vous ?

M. Richard Mallié. Nous n'avons pas de leçon à recevoir !

M. Jean-Marc Ayrault. On l'a vu sur la pseudo-réforme de l'assurance maladie, qui n'est qu'un cataplasme. Elle n'avait d'autre but que de laisser la réforme du système de soins à ceux qui vous succéderont et de reporter la dette sur les générations à venir (Vives protestations sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), et nous ne sommes pas les seuls à l'avoir dénoncée. Quant au projet de loi de décentralisation, tout le monde a bien compris qu'il est utilisé pour décharger l'État de ses déficits sur les collectivités locales.

M. Lucien Degauchy. Il récite sa leçon !

M. Jean-Marc Ayrault. Et c'est la troisième raison de notre censure. Comme vous avez dévoyé le mot « réforme », vous êtes coupable, monsieur le Premier ministre, de défigurer la décentralisation, et même de la rendre impopulaire. Les lois Mauroy-Defferre avaient été le symbole d'une nouvelle liberté. Elles avaient conçu un audacieux partage des pouvoirs et des responsabilités. Qu'en avez-vous fait ?

L'acte II que vous venez d'écrire est un acte manqué, un tissu d'inégalités, de complexités et d'incohérences. Là où il fallait simplifier, vous avez multiplié les entrelacs de compétences. Entre les compétences à la carte, les compétences délégables, les fusions de collectivités, les confusions entre subsidiarité, collectivités chefs de file et expérimentations, le citoyen et l'élu se retrouvent en quelque sorte devant un échangeur autoroutier sans avoir le plan d'accès. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Vous qui vous présentiez comme le promoteur de la région, monsieur le Premier ministre, vous avez multiplié les transferts de responsabilités aux départements et fait supprimer par le Sénat le rôle pilote des régions en matière d'initiative économique. Petite vengeance politique visant à handicaper des majorités régionales qui ne vous plaisent pas !

M. Patrick Lemasle. C'est mesquin !

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, la République des proximités que vous avez tant revendiquée devient la République des coups fourrés !

Dans ce domaine, vos tentatives aussi maladroites que répétées de contester l'élection de notre collègue Didier Migaud à la présidence du Comité des finances locales relèvent purement et simplement de l'acharnement partisan. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Philippe Auberger. Propos inadmissibles !

M. Jean-Marc Ayrault. En réalité, vous redoutez qu'apparaissent trop clairement les mécomptes de votre réforme, à savoir un gigantesque transfert des déficits de votre budget sur les collectivités locales. Vous leur confiez 11 milliards de dépenses nouvelles sans leur garantir les financements correspondants. Ni le transfert d'une part fixe de la TIPP, ni a fortiori le remplacement de la taxe professionnelle par on ne sait quelle ressource, ne leur permettront d'assumer leurs nouvelles responsabilités. L'autonomie financière que vous avez inscrite dans la Constitution est délibérément violée. Les collectivités locales vont se retrouver devant le choix impossible d'augmenter les impôts locaux ou de diminuer le service rendu jusque-là par l'État. Mme Thatcher avait inventé la poll tax, vous inventez l'impôt Raffarin. La République des responsabilités devient la République des iniquités.

M. Jean Leonetti. Menteur !

M. Jean-Marc Ayrault. Là est le cœur de notre opposition. La décentralisation est pour nous le levier d'une nouvelle démocratie participative, un partenariat entre des collectivités mieux à même de représenter la diversité des territoires et un État garant de l'égalité des chances.

M. Philippe Auberger. Mais vous ne faites aucune proposition !

M. Jean-Marc Ayrault. Votre projet relève d'une tout autre philosophie. Son objet est clairement de réduire l'État, de contraindre les collectivités à prendre en charge les missions de solidarité, d'éducation ou d'aménagement du territoire qu'il ne veut plus, ou qu'il ne peut plus assumer. La dévolution aux départements du RMI-RMA, du fonds de solidarité pour le logement, des routes nationales, le transfert des personnels éducatifs ou de la formation professionnelle aux régions, l'envolée de leurs charges de fonctionnement, l'absence de toute péréquation vont creuser la fracture entre territoires riches et pauvres. Vous allez faire de la République des solidarités la République des inégalités !


Comment, dès lors, s'étonner de l'hostilité générale qui, du président de notre assemblée au plus modeste élu local, accompagne votre projet ? « La mère de toutes les réformes » illustre votre incapacité à écouter et à tirer la leçon de vos échecs.

Je n'en referai pas aujourd'hui l'accablant inventaire. Tous les Français connaissent la hausse continue du chômage, le creusement de déficits records, l'austérité salariale, l'augmentation des taxes, les coupes dans les budgets sociaux, la pénalisation des chômeurs et le retour d'une pauvreté de masse.

M. Hervé Mariton. C'est votre bilan que vous décrivez !

M. Philippe Auberger. Voilà un étrange procureur !

M. Jean-Marc Ayrault. Non, monsieur le Premier ministre, ce triste bilan n'est pas le tribut payé à l'héritage de vos prédécesseurs. Il n'est pas la conséquence des 35 heures (« Si ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...

M. Jean Leonetti. Sujet tabou !

M. Jean-Marc Ayrault. ...ou de la dévalorisation du travail - toutes ces sornettes du prêt à penser conservateur !

M. Alain Gest. C'est nul !

M. Jean-Marc Ayrault. Il est, monsieur le Premier ministre, l'enfant de votre gestion de bon père de faillite, de vos baisses d'impôts injustes et inutiles et de votre absence de politique de l'emploi. (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Alain Gest. Même le groupe socialiste n'applaudit pas, tellement c'est faible !

M. Jean-Marc Ayrault. L'honnêteté consisterait tout simplement à assumer votre politique. Le courage serait d'en changer. Telle n'est pas votre conception de la responsabilité. La vôtre relève de l'entêtement et de la fuite en avant. Chacun peut le voir dans vos orientations économiques. Certes, après avoir plombé les finances de l'État par un programme de baisse d'impôts aussi injuste qu'inefficace, vous vous retrouvez contraint de décréter la pause. Mais, dans le même temps, vous dilapidez les 5 milliards de plus-values fiscales, que rapporte le surplus de croissance, dans la création de nouvelles niches fiscales en faveur de vos clientèles électorales et des mieux lotis.

Plusieurs députés de l'Union pour un mouvement populaire. Et la cagnotte ?

M. Jean-Marc Ayrault. Tel est encore le choix que vous avez fait !

M. Arnaud Lepercq. Où avez-vous vu ça ?

M. Jean-Marc Ayrault. Vos arbitrages budgétaires deviennent ainsi une équation insoluble. Là où il faudrait stimuler le pouvoir d'achat, vous augmentez les taxes et les prélèvements sociaux payés par le plus grand nombre. Là où il faudrait favoriser l'emploi, vous n'avez d'autre idée que de tailler dans les effectifs de la fonction publique.

M. Édouard Landrain. Heureusement !

M. Jean-Marc Ayrault. Là où il faudrait soutenir l'investissement, vous amputez les crédits d'intervention dans tous les ministères. Mes chers collègues, cette politique porte un nom : l'austérité, que vous cherchez à imposer à la France.

M. Hervé Mariton. Il n'y a rien de neuf chez vous !

M. Jean-Marc Ayrault. Le plan de cohésion sociale, qui devait symboliser la deuxième étape de votre action, en est la première victime. M. Borloo avait promis 12 milliards d'investissements sur cinq ans pour l'emploi, le logement et la lutte contre les ghettos urbains.

M. Richard Mallié. Il va le faire !

M. Christian Bataille et M. Michel Delebarre. Des promesses, toujours des promesses !

M. Jean-Marc Ayrault. Un seul milliard figurera au budget 2005 !

M. Michel Delebarre. Et encore !

M. Jean-Marc Ayrault. Pauvres moyens pour une pauvre volonté ! Le social n'est décidément pas votre tasse de thé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Comment sinon expliquer qu'il vous ait fallu attendre plus de deux ans pour présenter au Parlement un projet de loi sur l'emploi ? Et comment ne pas voir les contradictions entre les intentions qu'il affiche et la réalité des mesures qu'il propose ?

M. Jean Leonetti. Quel discours médiocre !

M. Pierre Micaux. Oui, il est mauvais !

M. Jean-Marc Ayrault. Après avoir vilipendé et supprimé la plupart des dispositifs d'emplois aidés, vous créez le contrat d'activité pour les jeunes qui ressemble à s'y méprendre au SMIC jeune, ce SMIC au rabais qu'avait tenté d'instituer votre prédécesseur Édouard Balladur. Après avoir tenté en vain de radier les recalculés de l'UNEDIC, vous voulez obliger les chômeurs à accepter tous les emplois qui leur seront proposés sous peine de voir leurs allocations amputées.

Après avoir prévu de faciliter les règles d'embauche et de licenciement, vous voulez contraindre les entreprises à renégocier les 35 heures.

M. Lucien Degauchy. Oui !

M. Jean-Marc Ayrault. Mais, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les membres du Gouvernement, mesdames et messieurs les membres de la majorité, c'est vous qui avez ainsi ouvert la porte au chantage aux délocalisations, chantage qu'utilisent désormais certaines sociétés pour contraindre leurs salariés à travailler plus longtemps et gratuitement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Édouard Landrain. Ce sont les 35 heures !

M. Jean-Marc Ayrault. Alors, ne venez plus nous dire que l'assouplissement de la RTT sera une revalorisation du travail et du pouvoir d'achat ! Aujourd'hui, ce que l'on veut imposer aux salariés français, c'est le retour du travail gratuit. Vous avez vous-même donné l'exemple, avec la suppression d'un jour férié. Travailler sans être payer : c'est vous qui avez donné le ton. Aussi, n'essayez pas de jouer les pleureuses, aujourd'hui que le mal est fait. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le Premier ministre, n'allez pas chercher dans l'élargissement de l'Europe un prétexte facile. Il vous suffit de mettre comme condition à la négociation sur les fonds structurels ou sur l'adhésion à l'euro un engagement de nos partenaires à une harmonisation fiscale et sociale progressive. L'Europe des délocalisations n'est, trop souvent, que le fruit de vos résignations.

M. René André et M. Philippe Auberger. N'importe quoi !

M. Arnaud Lepercq. Voilà vingt ans que cela a commencé !

M. Jean-Marc Ayrault. Faut-il alors s'étonner que le retour de la croissance, dont vous vous targuez, soit si fragile et si tributaire de l'environnement international ? Vous n'inspirez plus la confiance. Même les experts les mieux disposés à votre endroit ne voient pas se profiler de véritable amélioration de l'emploi ou des déficits. À cette crise de confiance, vous opposez la ritournelle de l'action, comme si le mouvement seul comptait et non le sens qu'on lui donne !

M. Jean Leonetti. C'est vraiment mauvais !

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les membres du Gouvernement, les Français ne vous reprochent pas d'agir ni de faire des réformes : c'est la mission première de tout dirigeant politique. Encore faut-il que ces réformes soient justes et efficaces. Ce qu'ils vous reprochent, c'est la distance entre vos paroles et vos actes. Le « plan climat », avec ses vraies promesses et ses fausses mesures, en est le dernier avatar.

M. Jean Leonetti. Envoyez Fabius !

M. Jean-Marc Ayrault. Tous vos discours chantent les grands principes, que le Président de la République ne cesse de reprendre sur le même ton : le pacte social, le pacte républicain, l'égalité des chances ou le développement durable.

M. Richard Mallié. Vous avez l'air de vous ennuyer !

M. Jean-Marc Ayrault. Mais toutes vos réformes sont porteuses de leurs contraires : la dureté sociale, l'érosion des droits, l'abandon des protections collectives ou la soumission aux lobbies !

M. Jean Leonetti. C'est vraiment mauvais !

M. Pierre Micaux. Très mauvais !

M. Hervé Mariton. On demande un autre orateur du groupe socialiste !

M. Jean-Marc Ayrault. Mesdames et messieurs les députés, oui, la France est malade de ce trou noir de la politique. Elle est malade d'un régime désavoué par son peuple et qui n'en tire aucune conséquence. Elle est malade de l'exercice solitaire du pouvoir par un Président versatile et désinvolte. Elle est malade d'une politique avec un petit p, conduite par un gouvernement sans chef et sans horizon.

M. Hervé Mariton. Voilà qui est inattendu !

M. Jean-Marc Ayrault. Elle est malade des pratiques d'un clan qui accapare l'appareil d'État et se perd en querelles de sérail. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.). Remplacer un homme par un autre n'y changera rien. Vous partagez les mêmes politiques et les mêmes pratiques. Voilà la réalité que subissent les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Nos concitoyens veulent pour le pays une direction qui assume ses paroles et ses actes. Ils attendent une volonté qui rompe avec le conservatisme néolibéral et qui ose des solutions novatrices. Ils aspirent à un projet collectif qui transcende la société et réinvente une communauté de destin.

M. Hervé Mariton. Vous, vous ne transcendez rien du tout !

M. Jean Leonetti. Il n'y a rien dans tout cela, c'est creux !

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, quelles que soient vos qualités personnelles d'abnégation, d'endurance ou de dévouement, vous ne pouvez être l'homme d'un tel renouveau. Trop d'occasions ont été manquées. Trop d'injustices ont été commises. Le désenchantement de notre pays aujourd'hui rappelle à la France une autre époque, celle de la Restauration, décrite par un auteur contemporain que je me permets de citer pour conclure : « Dans ce cimetière des illusions perdues et des légitimités défuntes, [...] partout rôde le spectre du désenchantement, tandis que les âmes rongées "portent le soleil noir de la mélancolie". (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cette marée basse du cœur et de la raison fait le lit d'un universel scepticisme, d'un étrange attentisme, à rebours des passions qui ont ponctué notre histoire ».

M. Lucien Degauchy. Citez Bernard Tapie, ça vous conviendrait mieux !

M. Jean-Marc Ayrault. Étrange et pathétique résonance, monsieur le Premier ministre, avec votre propre entreprise de restauration. À défaut de subir notre censure aujourd'hui, vous trouverez dans l'auteur de ces lignes inspirées l'un des hommes qui rêvent peut-être de vous succéder : il s'appelle Dominique de Villepin et son livre s'intitule Les cent jours ou l'esprit de sacrifice. Vous y puiserez peut-être matière à méditation au moment où nous demandons à l'Assemblée nationale de censurer votre gouvernement. Mesdames et messieurs les députés, mes chers collègues, quand un régime est malade, les hommes passent, mais l'alternance est en dehors de lui. (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Comparini, pour le groupe UDF.

Mme Anne-Marie Comparini. Monsieur le Premier ministre, en février 2003, lors de la précédente motion de censure, François Bayrou vous disait du haut de cette tribune : « Si 82,5 % des Français de tous bords ont voté Jacques Chirac, s'ils vous ont donné une large majorité, c'était pour renforcer la démocratie. »

M. Maxime Gremetz. Où est votre ministre UDF ? (Exclamations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Mme Anne-Marie Comparini. Mon intervention d'aujourd'hui sera dans le droit fil de ce discours, tant il est vrai que le vote des Français du 21 avril 2002, véritable appel au secours, trouvait son origine dans les défaillances de plus en plus manifestes de la relation entre gouvernants et gouvernés.

Depuis ce discours, dix-huit mois ont passé. Le ciel a été zébré par l'éclair des élections régionales puis par celui des européennes. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) D'aucuns ont prétendu qu'il s'agissait d'élections intermédiaires. Leur résultat n'en révèle pas moins que le courant ne passe toujours pas et que rien de nouveau n'est intervenu pour recréer le lien de confiance défait entre le peuple et les élus et pour susciter un sentiment collectif qui, reposant sur les aspirations de nos concitoyens, soit tourné vers le développement de notre pays.

Nos concitoyens attendent toujours qu'on agisse avec eux, par le débat véritable, par le référendum et par une action publique plus proche.

À y regarder de près, les soubresauts de notre histoire commune, durant la dernière décennie, démontrent que la philosophie du « faire avec le peuple » est perdue,...

M. Francis Delattre. Trouvée !

Mme Anne-Marie Comparini. ...alors qu'elle n'a jamais été aussi nécessaire. Ces derniers jours, monsieur le Premier ministre, vous pouviez saisir l'occasion de refonder notre démocratie territoriale. Mais vous l'avez laissé passer.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Il en est incapable !

M. Jean-Pierre Kucheida. Il ne le veut pas !

M. Jean-Pierre Blazy. Il n'en a pas la carrure !

Mme Anne-Marie Comparini. C'est pourquoi tous ceux qui, décentralisateurs dans l'âme, ont suivi l'évolution d'un tel projet garderont en mémoire le goût amer d'une occasion gâchée, symbole de tous les rendez-vous manqués avec nos concitoyens.


Mais revenons un instant sur l'occasion gâchée d'un véritable débat parlementaire.

M. Maxime Gremetz. M. de Robien n'est même pas là ! Ce n'est pas courageux de déserter ainsi !

Mme Anne-Marie Comparini. Monsieur le ministre de l'intérieur, vous nous aviez invités en avril dernier « au dialogue et à la concertation ». Mais la discussion de ce projet de loi sur les libertés et les responsabilités locales, qui, de surcroît, aurait permis l'exercice des libertés et des responsabilités parlementaires, n'aura pas lieu dans cet hémicycle. Il ne nous aura pas été possible, comme nous le souhaitions vivement, d'améliorer un texte sur lequel il y a beaucoup à dire.

M. Jean-Jacques Descamps. Et la première lecture ?

Mme Anne-Marie Comparini. Il convenait déjà de réaffirmer les principes de la vision prospective de cette réorganisation de notre pays, lesquels semblent faire querelle.

Clarifier, c'est rapprocher les Français des décisions qui les concernent. Ce n'est même que cela !

Reconnaître le rôle considérable des régions, c'est agir en faveur du dynamisme de notre vie économique. La croissance venue d'ailleurs, c'est bien ; mais il serait temps de savoir créer la nôtre !

Mettons fin aux concurrences entre institutions locales : les redondances sont un luxe que les finances françaises ne peuvent plus se permettre.

Seulement voilà : à chaque lecture, les féodalités de toutes sortes ont agi pour effacer les quelques dispositions originales qui auraient pu clarifier notre organisation territoriale, la rendre efficiente et plus réactive. Elles ont fait vaciller les convictions gouvernementales sur la place et le rôle des pouvoirs émergents que sont les régions et l'intercommunalité.

De ce fait, au lieu d'imaginer l'architecture d'une nouvelle France, la montagne parlementaire va accoucher d'un texte qui maintient l'enchevêtrement des compétences et l'inadaptation des institutions aux réalités économiques actuelles. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Nous pensions pourtant que le rapport remis par notre collègue Christian Blanc sur l'écosystème de la croissance vous avait convaincu, monsieur le Premier ministre : la compétitivité, dans un modèle économique mondialisé et bâti sur l'innovation, se construit désormais à l'échelle régionale.

Nous pensions aussi que le fait de donner à la région la responsabilité du développement économique n'avait rien d'iconoclaste : la responsabilité n'a jamais fait obstacle à la coordination.

Et qui peut nier que mettre fin aux partenariats croisés ferait gagner du temps dans un monde en accélération et qui requiert de la réactivité.

En tenant ces propos, ce n'est pas la cause régionale que je défends, mes chers collègues, mais la cause nationale. Nous le savons tous, il n'y a pas d'États forts sans régions fortes. À travers cette cause nationale, donc, il s'agit aussi de donner à l'Europe les outils nécessaires à son rayonnement. Une région forte, au service d'une économie nationale forte, c'est la garantie d'une Europe économique qui pèse.

Mais les enjeux de politique politicienne auront été plus forts. La « mère des réformes » que nous attendions restera lettre morte, puisque sa réussite passait par la clarification de notre architecture institutionnelle.

Ce débat, monsieur le Premier ministre, vous n'avez pas souhaité le trancher. Le premier rendez-vous manqué sera celui de la démocratie locale. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Jean-Jacques Descamps. Courage, Bayrou !

Mme Anne-Marie Comparini. Le second sera celui de la démocratie nationale, avec le spectacle désolant auquel nous assistons depuis quelques jours dans cet hémicycle. Car la responsabilité est, hélas ! partagée, comme le montrent les différents actes de cette mauvaise pièce.

Premier acte : l'inscription des deux textes, loi organique sur le financement et loi simple sur les compétences, à l'ordre du jour de la session extraordinaire. Monsieur le Premier ministre, quelle urgence y avait-il à légiférer, au cœur de l'été, sur ces textes qui méritaient un débat approfondi, patient et serein ? Franchement, nous ne comprenons pas. Quelques semaines supplémentaires n'auraient pas fondamentalement retardé le calendrier et n'auraient pas été superflues pour redonner du sens au principe de l'autonomie financière, perdu au détour de la définition des ressources propres.

M. Arnaud Lepercq. Il fallait vous le faire expliquer !

Mme Anne-Marie Comparini. Attendons donc la décision du Conseil constitutionnel, qui devient, comme le dit fort bien Charles de Courson, le dernier rempart de cette liberté ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Deuxième acte : le dépôt de 4 800 amendements en deuxième lecture, qui promettaient d'allonger le débat. Quelle image comptiez-vous donner, mesdames et messieurs de l'opposition, en multipliant les artifices de procédure ou en déposant plusieurs dizaines de fois le même amendement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Franchement, cette attitude n'était pas à la hauteur de l'enjeu. La ficelle était bien grosse ! Il ne faut pas être grand spécialiste du débat parlementaire pour voir que le dépôt d'un aussi grand nombre d'amendements n'avait d'autre but que le déclenchement du 49-3. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française. - « Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Troisième acte : l'utilisation de la procédure du 49-3. Je ne sais pas très bien quelle interprétation donner au recours à cette procédure expéditive : constat d'échec, ou tout simplement volonté d'abréger le débat sur un texte qui, à en croire les interviews parues dans la presse, ne recueillait pas l'assentiment de tous les parlementaires de la majorité ?

Quoi qu'il en soit, nous estimons qu'il n'est jamais de bonne méthode d'empêcher le débat, qu'il s'agisse de la volonté d'obstruction de l'opposition ou de l'usage du 49-3 par le Gouvernement.

M. Jean-Jacques Descamps. Ponce Pilate !

Mme Anne-Marie Comparini. C'est la deuxième fois que cet article est utilisé pour un texte lourd, institutionnel. Nous le regrettons car l'organisation territoriale de la France n'est pas un sujet qui se prête à la précipitation. Au contraire, il faut laisser vivre ces textes. Les débats doivent prendre de l'ampleur et les réformes doivent mûrir. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Quatrième et dernier acte : la motion de censure. Suite logique aux yeux de certains - déclaration du Premier ministre à 15 heures et dépôt de la motion à 15 heures 10 ! -, mais sûrement pas aux yeux de l'opinion qui, une fois de plus, pensera que ce n'est pas avec ce type de politique que l'on réformera le pays. Car la motion préfigure le retour des vieux démons et des vieux réflexes idéologiques. Surtout, elle apporte la preuve que le bipartisme est synonyme de pauvreté, voire d'inexistence du débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Arnaud Lepercq. Et l'Angleterre ? Et les États-Unis ?

Mme Anne-Marie Comparini. On va nous ressortir le vieux couplet du manichéisme, comme vient de le faire l'orateur précédent : pour les uns, stratégie d'obstruction, manœuvres de retardement,...

M. Maxime Gremetz. Ne nous regardez pas comme cela : nous ne nous sentons pas concernés !

Mme Anne-Marie Comparini. ...pour les autres, coup de force, politique brutale, grave atteinte au respect de la représentation nationale...

Que de grands mots, mes chers collègues ! Voilà une bien mauvaise réponse à une bien mauvaise manière !

Pour nous, à l'UDF, la censure n'est pas le sujet, et nous ne la voterons pas (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.), car l'important est et restera de faire participer les Français en tant qu'acteurs aux transformations de notre pays, par une réforme claire et par la mise en place d'une réelle société de la délibération.

M. René Couanau. Quelle sincérité !

Mme Anne-Marie Comparini. Au cours de cette discussion, ce sujet n'a pas été abordé. Nous n'avons vu que la bonne vieille fracture gauche-droite. Nous avons même eu le sentiment que seuls les jacobins centralisateurs de tous les bords avaient gagné (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française), et qu'en réalité cela arrange tout le monde, le groupe majoritaire comme les groupes de l'opposition.

Mes chers collègues, au bout du compte, ce sont bien nos concitoyens qui jugeront cette parodie de débat. Triste fin pour une ambition présentée avec un grand « A » mais qui sort par la petite porte ! (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Alain Bocquet. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, « le Premier ministre vient de sortir le 49-3 pour en finir avec la loi de décentralisation ; le groupe socialiste a déposé une motion de censure qui n'a aucune chance d'être adoptée ; le gouvernement Raffarin ne court aucun risque ». Tel est le constat édifiant dressé par la presse. Notre Assemblée nationale apparaît peu à peu comme un théâtre d'ombres où le faux-semblant n'a d'égal que le déni de démocratie que vous voulez pérenniser.

Après avoir traité par le mépris les camouflets successifs de trois défaites électorales...

M. Francis Delattre. Parole d'expert !

M. Alain Bocquet. ...et toutes les luttes sociales et syndicales qui contestent quotidiennement votre politique, vous utilisez à présent l'article 49-3 de la Constitution pour jeter une chape de plomb sur le débat relatif aux lois de décentralisation.

Cette décision est un pur scandale, qui vient s'ajouter à celui du dispositif que vous envisagez de mettre en œuvre au détriment de l'aménagement équilibré des territoires, de l'égalité des citoyens, du statut et de la situation de dizaines de milliers de fonctionnaires, des ressources des collectivités territoriales, et par conséquent des programmes sur lesquels leurs responsables ont été démocratiquement élus.

Déni de démocratie, mépris du Parlement, politique du bulldozer...

M. Francis Delattre. Comme à Vitry ?

M. Alain Bocquet. ...votre gouvernement tente de passer en force pour imposer un transfert de charges supplémentaires aux collectivités sans leur donner les moyens de les assumer. C'est bien la démocratie qui est en jeu : vous entendez faire de ces collectivités les servants de la politique qu'exige le grand patronat (« Ah ! Le MEDEF ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), alors que beaucoup d'entre elles sont des pôles de résistance à l'ultralibéralisme et à l'Accord général sur le commerce et les services, et constituent des points d'appui aux revendications populaires.


A la vérité, nous avons affaire aujourd'hui à la politique d'une majorité autoritaire qui veut mettre en œuvre, au pas de charge et coûte que coûte, les choix programmatiques et idéologiques du MEDEF. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. - « Et voilà ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. François Liberti. La réaction de l'UMP est un aveu !

M. Alain Bocquet. On voudrait faire de la France un « Medefland » que l'on ne s'y prendrait pas autrement ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Que les 160 000 adhérents d'une association patronale dictent la loi en lieu et place de 60 millions de citoyens français, ce n'est plus acceptable ! Cela ne peut plus durer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

La France n'appartient pas à une petite caste avide de profits financiers. La France appartient à son peuple et à lui seul ! (Nouveaux applaudissements sur les mêmes bancs.)

Les deux années qui se sont écoulées depuis votre désignation ont été marquées par une offensive généralisée des forces réactionnaires que vous représentez. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

La reprise du chômage vous a conduit à repousser, semestre après semestre, l'annonce cynique de jours meilleurs. Et ce n'est pas l'annonce, ces jours-ci, du dépôt de bilan de Valiance dont 3 000 salariés sont menacés, ou des 2 000 suppressions d'emplois à la caisse d'assurance maladie...

M. Maxime Gremetz. C'est Douste-Blazy !

M. Alain Bocquet. ...qui va arranger les choses.

M. Francis Delattre. L'Humanité aussi licencie !

M. Alain Bocquet. Nous avons assisté à l'extension de la précarité : aggravation générale des conditions de vie de nos concitoyens ; chute du pouvoir d'achat des salaires et des pensions, tandis que s'effritent les minima sociaux ; accroissement des difficultés pour les familles, les foyers monoparentaux, les personnes âgées et les personnes handicapées ou pour les jeunes - étudiants compris - dont les associations caritatives constatent avec angoisse, l'afflux croissant dans leurs permanences d'urgence sociale.

Devant ces réalités et ce constat des pertes de valeurs et de repères qui accompagnent ces dégradations, nombre de Françaises et de Français s'interrogent sur la société qui sera léguée en héritage à leurs enfants et petits enfants.

Devant les faits divers anxiogènes relayés par les médias, les interrogations sur la justice, la délinquance qui repart de plus belle, les haines racistes, xénophobes, antisémites et la voyoucratie rampante (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), devant l'opulence affichée par les riches tandis que l'écart se creuse entre les habitants de ce pays, on est en droit de vous réclamer des comptes, vous dont la politique magnifie la vénération du dieu Argent ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Francis Delattre. Vous préférez le goulag !

M. Alain Bocquet. L'économie est en recul. Ses difficultés accompagnent et nourrissent la stagnation de la croissance, dans un pays qui recense deux millions et demi de chômeurs et se trouve au bord de la récession.

Faut-il rappeler, même brièvement, quelques-unes des mesures phares qui ont jalonné votre sans-faute ultralibéral depuis vingt-quatre mois ?

C'est la suppression des emplois jeunes. C'est la casse du système solidaire des retraites. C'est le passage à la trappe de la loi de contrôle des fonds publics aux entreprises. C'est la suspension de la loi de modernisation sociale. C'est l'augmentation des exonérations de cotisations sociales patronales : 20 milliards d'euros par an, qui font le bonheur du CAC 40 et de Wall Street, à défaut de créer des emplois.

M. Maxime Gremetz. Eh oui !

M. Alain Bocquet. C'est aussi votre refus de toute revalorisation des salaires dans la fonction publique, refus déjà accompagné d'une première vague de réduction des effectifs. Et vous voyez grand, en prévoyant dès l'an prochain 20 000 suppressions d'emplois supplémentaires.

Votre bilan est également marqué par les gels et les coupes opérés dans les budgets sociaux de l'État - des dizaines de milliards d'euros -, qui se répercutent sur l'éducation nationale, la santé et l'hôpital public, les transports, le logement social, la culture et bien d'autres domaines encore !

Vous avez multiplié les attaques contre le code et le droit du travail. Vous avez permis la mise en accusation systématique des salariés en lutte pour la défense de l'emploi, l'arrestation et la détention de délégués syndicaux. Cette attitude, vous entendez la porter à une autre échelle, avec les dispositions du rapport Mandelkern, pour saper le droit de grève dans les transports - et ce n'est qu'un début !

M. Maxime Gremetz. Le ministre des transports n'est même pas là. Quel manque de solidarité !

M. Alain Bocquet. Quel mépris, quand on sait que les salariés du secteur public ont toujours répondu présents dans toutes les circonstances difficiles, les catastrophes naturelles ou industrielles, pour aller au bout de leur mission et de leurs tâches !

Mais la revanche sociale que vous mettez en oeuvre ne s'arrête pas là !

Vous vous en prenez aux chômeurs, aux intermittents du spectacle victimes d'un protocole d'accord que vous avez avalisé, aux bénéficiaires de la couverture maladie universelle et de l'aide médicale d'État, aux familles que vous pénalisez une fois encore, et ce au moment des congés d'été, moment propice pour mesurer la dégradation des conditions de vie de nos concitoyens. Ce sont 16 millions de Français qui ne partiront pas en vacances en 2004. Un enfant sur trois ne connaîtra cet été ni la mer, ni la montagne, ni la campagne. C'est insupportable !

M. Jean-Jacques Descamps. Mais ce n'est pas vrai !

M. Alain Bocquet. Cependant, rien ne vous arrête. Vous voulez nous faire avaliser de nouveaux coups portés aux acquis sociaux, aux services publics et aux ressources des Français ; ou encore aux collectivités territoriales déjà plombées : les départements, par vos désengagements sur l'allocation personnalisée d'autonomie...

M. Guy Geoffroy. Ah non, ça, c'étaient les socialistes !

M. Alain Bocquet. ...et le revenu minimum d'insertion ou les communes et les régions, par vos retraits des contrats de plan État-Région.

Ces nouveaux coups, c'est d'abord l'offensive de privatisation d'EDF et de GDF, leur mise en concurrence après l'adoption par une majorité aux ordres d'un projet de loi qui va au-delà des exigences de la Commission européenne et menace de se traduire pour nos concitoyens, pour nos régions et nos territoires, pour les salariés et les deux entreprises elles-mêmes, de la même manière qu'à France Télécom. Les conséquences pour les usagers ne se feront d'ailleurs pas attendre, puisque votre gouvernement étudie une augmentation des tarifs EDF de 2,5 %, à compter du 1er août.

Autre exemple de dispositions engagées contre la volonté des Français qui, à 70 %, en rejetaient l'éventualité : la casse de la sécurité sociale qui vous vaudra, nous l'avons dit dans notre explication de vote contre votre projet, d'être sanctionnés par nos concitoyens, comme vous l'avez déjà été pour la casse des retraites.

Vous avez pris une responsabilité considérable devant le pays, en vous attaquant aux dispositions construites au fil des générations et après des décennies de travail.

Il était possible et nécessaire, car les besoins de santé ne cessent de croître, de développer la prévention, d'améliorer la couverture socialisée des attentes et de donner un nouvel élan à la démocratie de gestion.

II était possible de modifier le financement, en faisant appel aux profits boursiers...

M. Maxime Gremetz. Absolument !

M. Alain Bocquet. ...ou à une vraie politique économique porteuse de recettes. Or une politique de l'emploi fait aujourd'hui cruellement défaut.

Vous avez fait le choix inverse et injuste de boucler sur le dos des usagers et des malades un énième plan d'austérité, un plan de compression des dépenses de santé et de réduction des soins remboursables. Vous augmentez la CSG pour les retraités, vous élargissez la ponction opérée sur les salariés. Vous allez sanctionner les plus malades et plus modestes. Je renouvelle aujourd'hui l'opposition totale des députés communistes à de tels choix, qui préparent la privatisation du « marché » de la santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Votre ministre de la santé a dû reconnaître publiquement que nous avions été les seuls à développer dans cette assemblée un projet alternatif au vôtre, ...

M. Jean Leonetti. C'est vrai !

M. Alain Bocquet. ...à savoir un projet en rupture avec une gestion comptable des besoins de santé, maintenue depuis vingt ans sous tous les gouvernements sans que jamais la situation de la sécurité sociale et de l'hôpital public en ait été améliorée.

Résister, tel est aussi notre mot d'ordre au moment où vous engagez le fer contre les 35 heures et sur l'emploi. Vous avez évoqué, monsieur le Premier ministre, « la liberté de travailler plus pour gagner plus ». Chez Bosch, c'est travailler plus pour gagner la même chose, en utilisant l'odieux chantage à la délocalisation.

M. François Liberti. C'est une honte !

M. Alain Bocquet. Mais si vous voulez qu'il y ait davantage d'heures travaillées dans le pays, qu'attendez-vous pour engager et exiger du MEDEF une politique de l'emploi permettant à près de 5 millions de chômeurs, RMIstes et autres précaires de notre pays, de travailler au moins 35 heures hebdomadaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Savez-vous que cela ferait au moins 160 millions d'heures de travail par semaine gagnées pour le pays ? On imagine l'immensité des richesses supplémentaires ainsi crées. Et la liberté de travail serait assurée pour tous.

La France a la meilleure productivité horaire du monde, supérieure à celle des États-Unis, du Japon et de 30 % à celle de la Grande-Bretagne. Qu'attendez-vous pour mettre ce résultat au service du développement de l'emploi ?

Aujourd'hui, la responsabilité du Gouvernement est engagée pour lutter contre le dumping social et contre le chantage des délocalisations. Vous avez refusé la proposition de loi du groupe des député-e-s communistes et républicains relative aux délocalisations, alors qu'aux États-Unis des mesures équivalentes à celles que nous suggérons ont été adoptées par plusieurs États et par le Congrès. Vous êtes donc plus libéraux encore que les pires des libéraux ! C'est dire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Paul Anciaux. C'est nouveau chez vous, de prôner le modèle américain !

M. Alain Bocquet. Oui, il vous appartient de rappeler les entreprises à leurs responsabilités sociales en suspendant les plans de licenciements liés à des investissements à l'étranger, en mettant en place des commissions locales spécifiques, en mettant fin au versement d'aides publiques sans contrepartie, en dissuadant les investissements directs à l'étranger correspondant à des délocalisations et en pénalisant les importations des biens produits dans des conditions sociales inacceptables. !

Qu'attendez-vous pour substituer aux exonérations de cotisations sociales patronales, multipliées par 20 en vingt ans sans que la situation de l'emploi en ait été modifiée pour autant, une politique d'abaissement des charges financières pesant sur les entreprises, en particulier les PME ?

Une baisse sélective, liée à des créations d'activités et d'emplois, permettrait de réduire les taux d'intérêt des crédits bancaires pour l'investissement. Pourquoi ne pas y affecter ces 20 milliards d'euros d'allégements de cotisations sociales qui nourrissent la spéculation boursière ?

M. Maxime Gremetz. Absolument !

M. Alain Bocquet. Pourquoi ne pas intervenir au sein des institutions européennes en faveur d'une réorientation du rôle de la Banque centrale européenne ? Pourquoi ne pas définir une politique de coopération d'entreprises pour favoriser le développement industriel, le développement de services, l'essor de la recherche ? Pourquoi ne pas exiger des entreprises qui font du chantage à l'emploi ou à la délocalisation qu'elles s'inscrivent dans une telle politique économique ou alors, si elles s'y dérobent, qu'elles restituent les fonds publics locaux, nationaux et européens dont elles ont bénéficié ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Votre réponse à ces questions est connue d'avance. Elle figure, notamment, dans votre plan dit de cohésion sociale récemment annoncé mais dépourvu de moyens, et soutenu par un Président de la République plus prompt à rappeler les chômeurs à leurs devoirs que le patronat à ses responsabilités sociales.

Le « grand juillet social » que vous nous promettiez, et que prolongera un grand volet supplémentaire d'austérité avec la loi de finances pour 2005, n'est donc rien d'autre que la poursuite accélérée de la restauration d'une France où on n'aurait pas d'autre choix que de travailler beaucoup pour gagner peu, dans l'insécurité de l'emploi et l'insécurité sociale, sans avoir jamais voix au chapitre, en face d'un patronat et d'un pouvoir omniprésents et omniscients.

La « France d'en bas » dont vous parliez tant à votre arrivée, vous n'avez cesser de la tirer vers le bas ! Nous, communistes, avons une tout autre ambition pour notre peuple.

La France et son peuple n'ont pas plus besoin de continuité dure que d'alternance douce aux politiques que vous mettez en œuvre, dans l'hypothèse même où il pourrait suffire demain de faire remonter d'un étage un ascenseur social et démocratique que vous faites aujourd'hui chuter brutalement de quinze étages. Au bout, c'est toujours le déclin vertigineux de la société française qui se poursuivrait.

Les résultats électoraux, les luttes et le débat citoyen portent témoignage d'attentes fortes, qui font appel à des transformations de fond de la société française.

Soumise aux exigences de la mondialisation ultralibérale, aux injonctions d'une Europe que son projet de Constitution définit comme « un espace de libre-échange où la concurrence est libre et non faussée », la France est à la croisée des chemins.


Nulle fatalité ne lui enjoint de se soumettre toujours plus aux contraintes qu'imposent les marchés financiers aux politiques budgétaires et de crédit. Notre pays peut jouer un rôle moteur dans la mise en œuvre de nouvelles orientations, tant pour rejeter le pacte de stabilité que pour desserrer le carcan dans lequel la Banque centrale européenne enserre les politiques de prix et de salaires, à seule fin de privilégier les taux de profit des marchés. Et ce rôle moteur peut également s'exercer sur la scène internationale, face à l'hégémonisme américain ou à la tentative de substituer l'OTAN à l'ONU dans la maîtrise des principales zones de conflits, à commencer par le Proche-Orient, où nous devrions impulser les interventions nécessaires à la reprise de négociations de paix.

Le Président de la République a dû se ranger, le 14 juillet, à l'exigence de consultation populaire sur la ratification de la Constitution européenne.

M. Maxime Gremetz. C'est bien !

M. Alain Bocquet. Les députés communistes et républicains, qui l'ont réclamée avec force, se réjouissent du résultat positif ainsi obtenu (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...

M. Maxime Gremetz. Très bien !

M. Alain Bocquet. ...et attendent du Gouvernement l'organisation du vaste débat national que ce choix implique. Un tel débat peut contribuer à faire avancer l'Europe. L'Europe sociale, l'Europe démocratique, l'Europe des peuples, qui n'a pas besoin d'adopter une mauvaise constitution dans l'attente d'une bonne, peut trouver son salut dans la mobilisation de ses forces vives, très loin des gentlemen's agreements qui ont accompagné la désignation du président du Parlement de Strasbourg. Nous disons clairement non à cette constitution,...

M. Maxime Gremetz et M. Jacques Desallangre. Très bien !

M. Alain Bocquet. ...qui fige dans le marbre les principes capitalistes de gestion de la société. Nous réclamons par ailleurs un autre traité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Monsieur le Premier ministre, il n'y a pas d'espoir d'amélioration, ni de changement, ni d'échappatoire aux lois du marché au bout du chemin que vous entendez imposer à nos concitoyens de suivre. Vos décisions les plus récentes, vos projets de décentralisation viciée ou de pseudo-cohésion sociale, l'austérité promise avec la loi de finances pour 2005 vont dans le même sens et méritent d'être sanctionnés. Les députés communistes et républicains, qui inscrivent leur action au service des luttes, des mobilisations et des débats en cours pour la justice et le changement, voteront cette motion de censure de votre gouvernement et d'une politique qui ne peut qu'être résolument combattue et rejetée. Soyez assuré de leur entière détermination à s'y opposer pied à pied. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour le groupe UMP.

M. Bernard Accoyer. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, cette motion de censure résume les méthodes d'action du parti socialiste : détournement de procédure,...

M. Jean-Pierre Dufau. Cela commence bien !

M. Bernard Accoyer. ...caricatures mensongères et affirmations de contrevérités grossières. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Le discours de Jean-Marc Ayrault vient d'en donner confirmation.

M. Jean Le Garrec. Pas vous, monsieur !

M. Bernard Accoyer. Déployées systématiquement, avec démagogie et cynisme (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...

M. Jean Glavany. Qui a inventé l'article 49, alinéa 3 ?

M. Bernard Accoyer. ...ces méthodes n'empêchent heureusement pas le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, grâce aux institutions de la Ve République, de poursuivre son action, indispensable et courageuse, de modernisation de la France avec pour but l'emploi,...

Mme Chantal Robin-Rodrigo. On ne le dirait pas !

M. Bernard Accoyer. ...la sécurité, le niveau de vie et la protection sociale de tous les Français, dans la cohésion d'une République partagée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mais la voie choisie par le groupe socialiste, celle de la prise en otage du Parlement (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et des « murs d'amendements », selon l'expression de son président Jean-Marc Ayrault, est dangereuse pour le Parlement, la démocratie, la France et l'avenir même de nos compatriotes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Glavany. C'est un expert qui parle !

M. Bernard Accoyer. La production informatique de milliers d'amendements, souvent identiques, supplante ainsi le travail des députés. (« Scandaleux ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Il suffit de quelques parlementaires se relayant en séance et répétant sans cesse les mêmes mots pour faire durer à loisir les débats.

M. Jean Glavany. Ce n'est pas vous qui auriez fait cela !

M. Bernard Accoyer. Ces murs d'amendements, l'opposition, et en particulier le groupe socialiste, en a fait, depuis le début de la législature, un usage répété,...

M. Patrick Ollier. Systématique !

M. Jean Glavany. M. Accoyer n'aurait jamais fait cela !

M. Bernard Accoyer. ...déposant, au total, près de 40 000 amendements pour cinq textes ! À raison de dix minutes pour chacun d'entre eux, deux législatures entières n'y suffiraient pas.

M. Jean Glavany. Vous avez la mémoire courte !

M. Bernard Accoyer. Voilà comment les socialistes répondent aux préoccupations de nos concitoyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Quel dévoiement du droit d'amendement,...

M. Jean Glavany. Quelle langue de bois !

M. Bernard Accoyer. ...alors que le président de notre assemblée porte, à juste titre, une grande attention aux droits et à la place de l'opposition dans l'hémicycle. (« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs du même groupe.)

M. Jean Glavany. Laissez-le plutôt parler !

M. Bernard Accoyer. Monsieur Ayrault, comment osez-vous accuser le Gouvernement d'un coup de force quand c'est vous qui le contraignez à user légitimement des dispositions de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Manuel Valls. Commentateur de règlement !

M. Bernard Accoyer. Cet article, vous ne vous êtes d'ailleurs jamais privés de l'utiliser : à onze reprises entre 1981 et 1986, alors que MM. Mauroy et Fabius disposaient d'une large majorité,...

M. Jean Glavany. Jamais sous le gouvernement Jospin !

M. Bernard Accoyer. ...à trente-neuf reprises entre 1988 et 1993, record détenu par M. Rocard, Mme Cresson et M. Bérégovoy.

M. Jean Glavany. Parlez-nous de 1997 à 2002 !

M. Bernard Accoyer. Avec les socialistes, c'est toujours : « Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais » ! (Mêmes mouvements.)

La volonté d'obstruction, se traduisant par le dépôt de 4 200 amendements pour la deuxième lecture de ce texte, est d'autant plus patente que le Parlement a déjà consacré 190 heures, dont 75 heures dans cet hémicycle, à son examen.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. C'est notre droit ! Celui du peuple !

M. Bernard Accoyer. Or ce texte est d'importance puisque, avec la décentralisation, le Gouvernement engage la réforme de l'État, une modernisation qui n'a que trop attendu, plus de vingt ans après les lois Defferre.

Le prétexte invoqué par le parti socialiste pour bloquer nos travaux est que les transferts de compétences conduiraient les régions à augmenter leur fiscalité.

M. Jean Glavany. C'est clair !

M. Bernard Accoyer. En réalité, le parti socialiste veut cacher que, dans les régions, désormais présidées par des socialistes, les dépenses de fonctionnement ont d'ores et déjà explosé ! (Applaudissements et huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Et cela sous le coup de charges nouvelles importantes et non budgétées, de l'augmentation de plus de 50 % du nombre des vice-présidents, de celle du nombre des membres des commissions permanentes et de la hausse des indemnités y afférentes.

M. Jean Glavany. Mensonges !

M. Bernard Accoyer. La hausse des impôts régionaux est désormais inscrite ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Et je ne parle pas des recrutements en nombre dans les cabinets, sur des critères partisans, de véritables commissaires politiques, comme en Rhône-Alpes où ils ne sont pas moins de trente-deux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Glavany. Aboyeur !

M. Pierre Cohen. Menteur !

M. Bernard Accoyer. Faire croire que les transferts de nouvelles compétences obligeraient à augmenter la fiscalité des régions, alors que désormais les ressources correspondantes seront obligatoirement et constitutionnellement transférées : voilà un vrai mensonge.

M. Jean-Yves Le Drian. C'est vous le menteur !

M. Jean Launay. L'aboyeur !

M. Bernard Accoyer. Mais c'est aussi une vraie manœuvre pour cacher la réalité désormais inscrite : la progression inéluctable des impôts dans les régions, déjà acquise par des hausses de dépenses non budgétées, ce qui est habituel avec les socialistes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Glavany. Mensonges !

M. Bernard Accoyer. Le texte décousu de cette motion de censure condamne sans appel tout ce qu'a entrepris le Gouvernement. Pourtant, le groupe socialiste devrait avoir plus de retenue, car il suffit de comparer l'action du gouvernement Jospin sur une période de cinq ans avec celle du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin sur deux ans seulement.

M. François Hollande. Eh bien, comparons !

M. Jean Glavany. En matière de chômage, par exemple !

M. Bernard Accoyer. Le parti socialiste au pouvoir sacrifie l'avenir dans un immobilisme coûteux, absolu, confortable et finalement coupable.

M. Jean Glavany. Qu'en pensent les chômeurs ?

M. Bernard Accoyer. C'est ainsi que les chances de la France ont été sacrifiées en gaspillant les fruits de la croissance,...

M. Francis Delattre. Eh oui !

M. François Hollande. Parlez-nous de la croissance !

M. Bernard Accoyer. ...en précarisant les ménages les plus modestes. Les plus modestes, le parti socialiste en parle beaucoup, mais il ne fait rien pour améliorer leur avenir. Au contraire, il les installe durablement dans le RMI et l'assistance sans perspective, sans espoir et souvent - hélas ! - dans l'exclusion.

M. Philippe Briand. Eh oui !

M. Bernard Accoyer. Il en est de même pour les bas salaires. Ainsi, le SMIC n'a augmenté que de 0,29 % sur les trois dernières années du gouvernement Jospin - une aumône ! -...

Mme Hélène Mignon. Et vous, allez-vous l'augmenter ?

M. Bernard Accoyer. ...puisque vous aviez gelé les salaires, privant les salariés d'une augmentation de 12 % en quatre ans, en raison des 35 heures, qu'ils ne demandaient pas.

À l'inverse, notre politique vise à redonner de l'espoir et du pouvoir d'achat aux salariés, avec l'augmentation sans précédent du SMIC de 11,4 % sur trois ans, soit un treizième mois pour les salariés les plus modestes.

Mme Ségolène Royal. Lisez plutôt Le Monde d'aujourd'hui !

M. Bernard Accoyer. Notre politique, c'est aussi la revalorisation de la prime pour l'emploi de 800 millions d'euros en deux ans pour 8,5 millions de salariés non soumis à l'impôt sur le revenu. C'est la procédure de « rétablissement », qui donne une deuxième chance à 1,5 million de personnes surendettées. C'est une aide à l'acquisition d'une complémentaire santé pour 2 millions de familles.

M. François Hollande. Personne ne s'en est aperçu !

M. Bernard Accoyer. C'est la garantie d'une pension de retraite équivalente à 85 % du SMIC, pour nous en tenir à l'essentiel.

Votre politique de l'emploi, c'était du social éphémère et la multiplication de statuts parkings, sans formation, sans débouché et sans avenir.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. C'est vous la précarité !

M. Bernard Accoyer. Le gouvernement Jospin avait bénéficié d'une croissance moyenne de 3,5 %. Il en a gaspillé les fruits : en cinq ans, 70 milliards d'euros sont partis en fumée pour toujours plus de dépenses publiques, toujours plus de charges pour les contribuables.

M. Philippe Briand. Quel gâchis !

M. Bernard Accoyer. Avec les 35 heures (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), vous prétendiez avoir résolu le problème du chômage.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Et vous, que faites-vous ?

M. Bernard Accoyer. Or, non seulement elles ont fait perdre plus d'emplois qu'elles n'en ont créés (« Menteur ! » sur les mêmes bancs), mais elles ont plombé l'économie, le budget de l'État et de la sécurité sociale et contraint les collectivités à augmenter leurs impôts. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. François Hollande. Supprimez-les !

M. Bernard Accoyer. Ne croyez-vous pas qu'aujourd'hui les salariés français seraient moins la cible d'intolérables chantages à la délocalisation si le temps de travail légal était resté inchangé, si le coût du travail n'avait pas augmenté à cause des 35 heures, si la productivité n'avait pas été affectée et l'image de la France face au travail dégradée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Votre politique, je le confirme, c'était bien du social éphémère. Celle de Jean-Pierre Raffarin, c'est du social durable. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Notre première priorité, c'est la formation. La formation des jeunes sans qualification, d'abord, avec 170 000 contrats jeunes en entreprise déjà signés. La formation tout au long de la vie, ensuite, avec la loi Fillon sur la formation professionnelle.

M. François Hollande. Redites-nous cela !

M. Bernard Accoyer. L'emploi, c'est l'entreprise. Au cours des douze derniers mois, 210 000 entreprises ont été créées grâce à la loi sur l'initiative économique. L'objectif fixé de créer un million...

M. François Hollande. De chômeurs !

M. Bernard Accoyer. ...d'entreprises en cinq ans - chiffre jamais atteint - sera tenu.

M. Jacques Desallangre. En Tchécoslovaquie !

M. Daniel Vaillant. Personne ne vous croit !

M. Bernard Accoyer. Si l'emploi c'est l'investissement et la baisse des charges, c'est aussi le travail récompensé, avec la revalorisation de la prime pour l'emploi pour 8 millions et demi de personnes...

M. François Hollande. Mais pas pour le Premier ministre, qui n'a pas bien travaillé !

M. Bernard Accoyer. ...et la baisse de 10 % de l'impôt sur le revenu pour 17 millions de foyers. Vous, en cinq ans, vous aviez créé dix-neuf taxes et impôts nouveaux !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Un Français sur deux seulement paie des impôts !


M. Bernard Accoyer
. Pire encore que votre bilan en matière économique et sociale est l'état de déshérence dans lequel vous avez laissé notre pacte social et républicain ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. François Hollande. Elle est bien bonne !

M. Bernard Accoyer. Votre absence de courage, votre immobilisme et l'illusion dans laquelle vous avez laissé les Français en reportant les réformes à plus tard sont votre plus grave défaillance.

M. François Hollande. Il en rend Jospin responsable !

M. Bernard Accoyer. Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a le courage de moderniser : le courage de la réforme pour sauver nos retraites par répartition, malgré votre opposition véhémente et votre absence totale de contre-propositions (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) ;...

M. Gilbert Le Bris. Médiocre !

M. Pierre Cohen. Et scandaleux !

M. Bernard Accoyer. ...le courage de la réforme, avec Philippe Douste-Blazy et Xavier Bertrand, pour sauvegarder notre système d'assurance maladie et garantir un égal accès aux soins pour tous (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains)...

M. Christian Bataille. Parlons-en !

M. Bernard Accoyer. ...là encore en l'absence de toute contre-proposition socialiste. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas vrai !

M. Bernard Accoyer. Le courage du Gouvernement est ...

M. François Hollande. De rester !

M. Bernard Accoyer. ...de réformer pour pérenniser et financer l'effort de solidarité en faveur de la dépendance et du handicap. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Votre bilan est encore plus lourd en ce qui concerne la place de l'État.

M. Daniel Vaillant. Le vôtre de bilan est terrible !

M. Bernard Accoyer. Alors que vous vouliez un État omniprésent, il n'était, en réalité, nulle part, en tout cas pas là où il aurait dû être pour protéger nos compatriotes, et, en particulier, les plus faibles d'entre eux.

Ce sont une justice oubliée, une sécurité bafouée,...

M. Patrick Ollier. Des caisses vides !

M. Bernard Accoyer. ...une défense abandonnée que nous avons trouvées il y a deux ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Vous vous inquiétez, dans votre motion de censure, d'éventuels dysfonctionnements de la justice. (« Absolument ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Or c'est le gouvernement Jospin qui a alourdi les procédures, allongé les délais de jugements, laissé la justice sans moyens et démunie. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Paul Anciaux. C'est vrai !

M. François Liberti. Vous pouvez parler. La situation dans les prisons aujourd'hui est honteuse !

M. Bernard Accoyer. Avec les socialistes, les droits des délinquants passent souvent avant ceux de leurs victimes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) L'attitude de la gauche n'a-t-elle pas été particulièrement choquante dans l'affaire de l'assassin Battisti ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

C'est dans cet esprit que vous avez freiné la mise en œuvre du fichier des empreintes génétiques et restreint son utilisation.

C'est toujours dans cet esprit, que vous avez déféré au Conseil constitutionnel le fichier des délinquants sexuels, pour obtenir sa suppression, comme vous aviez déféré en 1994 la loi Méhaignerie sur les peines incompressibles.

Vous parlez de recul des libertés, sans penser à celles des victimes. Quelle hypocrisie ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Au contraire, nous avons rendu moyens et respect à notre justice grâce à plusieurs grands textes défendus par Dominique Perben. (Mêmes mouvements.)

La protection des victimes, c'est aussi la sécurité, un des échecs majeurs du gouvernement Jospin. (Mêmes mouvements.) On a recensé plus de 4 millions d'actes délictueux en 2001 ! Triste record pour notre pays !

Avec Nicolas Sarkozy (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) et Dominique de Villepin, le Gouvernement a su rendre confiance aux forces de police et de gendarmerie en les dotant des moyens législatifs et matériels indispensables à leur action. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Les résultats sont là. La délinquance a fortement diminué, alors que MM. Richard et Vaillant avaient poussé les gendarmes à protester dans la rue. C'était une première dans notre histoire ! (Mêmes mouvements.)

M. Daniel Vaillant. Il y a moins de policiers aujourd'hui !

M. Bernard Accoyer. Dans un monde incertain et confronté au terrorisme international, vous avez abandonné notre défense et laissé les forces armées démoralisées, sous-équipées et avec des matériels hors d'état de marche. (Mêmes mouvements.)

Grâce à la loi de programmation militaire, voulue par Jacques Chirac et mise en œuvre par Michèle Alliot-Marie, le retard est rattrapé, le moral est retrouvé, nos forces sont à nouveau crédibles donnant plus de poids à la politique internationale de la France, à la voix du Président de la République pour la paix et le respect du droit comme en 2003 pour l'Irak. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Une autre de vos contradictions, et non des moindres, est l'Europe.

Sur le projet historique de Constitution européenne, on ne sait ce que veut le parti socialiste, réduit aux contorsions et hésitations de ses présidentiables : « Oui », « oui et », « oui si », « oui ou non ». On ne sait plus ! La sarabande, monsieur Ayrault, elle est là ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, quant à lui, a renoué avec une politique européenne active et largement contribué à l'élaboration de la Constitution européenne fondée sur des principes de droit chers à nos compatriotes.

Cette motion de censure confirme donc la double manœuvre socialiste : détournement de procédure parlementaire et affirmation de contrevérités grossières.

M. Daniel Vaillant. Dans la bouche d'un membre de l'UMP, c'est un hommage !

M. Bernard Accoyer. Mais ces artifices n'occultent pas le bilan douloureux pour la France de trois législatures de gauche comme ils ne cachent pas le vide abyssal des idées et l'absence totale de propositions alternatives. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Paul Anciaux. Ils ne proposent absolument rien !

M. Bernard Accoyer. La vérité est que le parti socialiste et la gauche française restent les plus archaïques d'Europe (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) et qu'ils sont divisés.

Ils ne sont d'accord sur rien : ni sur l'économie de marché,...

M. Maxime Gremetz. Oh !

M. Bernard Accoyer. ...ni sur la place du travail dans la société,...

M. Maxime Gremetz. Oh !

M. Bernard Accoyer. ...ni sur les grands choix énergétiques, ni sur la construction et l'avenir de l'Europe. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Daniel Vaillant. Vous faites le procès de la majorité, là !

M. François Hollande. Laissez-nous la place !

M. Bernard Accoyer. Incapables d'offrir des perspectives réelles pour l'avenir, le PS et la gauche ne savent plus que critiquer, inciter au renoncement et à l'immobilisme, bref à la décadence. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Claude Perez. Rendez-nous Barrot !

M. Bernard Accoyer. Parce que les députés UMP ont pour idéal la France et l'avenir de nos compatriotes, parce que la modernisation de notre pays ne peut plus attendre, nous ne voterons pas cette motion de censure.

Au contraire, le groupe UMP remercie Jean-Pierre Raffarin et son gouvernement et lui renouvelle son entier soutien. (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, permettez-moi, d'abord, d'exprimer ma satisfaction de voir l'Assemblée nationale rassemblée, un 27 juillet, en plein été, au rendez-vous de la démocratie. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Christian Paul. Le Parlement est piétiné !

M. Jérôme Lambert. Bafoué !

M. le Premier ministre. C'est une belle image pour les Françaises et les Français et je remercie chacune et chacun d'entre vous pour sa présence à ce débat. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Christian Paul. Plaisantin !

M. Jérôme Lambert. Vous ne voulez donc pas rester plus longtemps ?

M. le Premier ministre. L'opposition, je vous l'avoue, en déposant une motion de censure, me désole quelque peu, ...

M. Patrick Lemasle. C'est vous qui êtes désolant !

M. le Premier ministre. ...mais elle va me permettre de lui apporter les réponses qu'elle n'a jusqu'ici pas voulu entendre.

J'ai entendu les propos excessifs du président du groupe socialiste (« Ils n'avaient rien d'excessif ! » sur les bancs du groupe socialiste), où les seules traces d'élégance étaient les citations de Dominique de Villepin. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Patrick Lemasle. Ridicule !

M. le Premier ministre. La stratégie de l'opposition me désole profondément parce qu'elle a été celle de l'obstruction plutôt que celle de la proposition. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Édouard Landrain. Oui, c'est une honte !

M. le Premier ministre. Bien sûr, il y a des textes sur lesquels nous n'avons jamais pensé,...

M. François Hollande. Vous n'avez jamais pensé, de toute façon !

M. le Premier ministre. ... ni même souhaité, avoir votre accord, mesdames et messieurs de l'opposition, parce qu'il est juste que les partis s'opposent et parce qu'il est bon qu'ils présentent aux Français des alternatives politiques. («Tout à fait ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

C'est vrai, notre politique économique n'est pas la vôtre.

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Eh oui !

M. le Premier ministre. Notre politique de cohésion sociale n'est pas non plus la vôtre. C'est vrai, et c'est heureux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jérôme Lambert. Les résultats ne sont pas les nôtres, et c'est heureux !

M. le Premier ministre. Je n'ai d'ailleurs jamais prétendu que nos politiques étaient les mêmes. Ce sont les règles de la démocratie et de l'alternance politique.

M. Christian Bataille. Vous avez été censurés par les Français !

M. le Premier ministre. Mais il y a aussi des textes qui méritaient mieux que vos imprécations, voire vos injures. Des réformes auraient mérité, sinon un consensus, comme dans d'autres pays européens, à tout le moins un débat éclairé sur les propositions des uns et des autres.

Nous partageons tous un « devoir de France » (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) et nous devons, ensemble, rassembler nos idées pour être capables de l'assumer.

Nous avons engagé de nombreuses réformes et, puisque M. Ayrault aime citer les bons auteurs, permettez-moi de m'inspirer d'André Malraux : j'étais à la bataille des retraites, j'étais à la bataille de l'assurance maladie, j'étais à la bataille de la décentralisation. Mesdames, messieurs les députés de l'opposition, les Français vous y ont attendus et vous n'êtes pas venus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Où est donc le projet socialiste sur l'assurance maladie qu'on nous avait annoncé ?

Concernant la décentralisation, faut-il rappeler que M. Strauss-Kahn écrivait dans les Cahiers de la Fondation Jean-Jaurès : « L'État est en danger s'il ne se réforme pas » et qu'il prônait déjà une vigoureuse décentralisation ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Je pense aussi à M. Mauroy, (Mêmes mouvements) et j'imagine sa déception, lui qui a proposé, à la demande de M. Jospin, la décentralisation des personnels TOS et des routes,...

Mme Martine David. Vous, c'est la déroute !

M. le Premier ministre. ...la régionalisation de la commande publique à l'AFPA, l'achèvement de la départementalisation de l'action sociale, le transfert aux régions de la TIPP. Tout cela était proposé par M. Jospin, par M. Mauroy ! Pourquoi les socialistes ont-ils changé d'avis depuis ? Pourquoi ce reniement ? Pourquoi, quand nous proposons des réformes qui peuvent rassembler, prenez-vous un malin plaisir à chercher la division ?

Nous proposons une vision d'avenir de la France.

Mme Martine David. Ce n'est pas une vision du vôtre, d'avenir !

M. le Premier ministre. Il est dommage qu'il n'y ait pas de prix Gaston Defferre de la décentralisation car, cette année, il nous aurait été décerné.

Je m'oppose aussi avec force au mensonge fiscal formulé par certains présidents de région. (« Des noms ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Le temps des transferts sans compensation - l'APA et bien d'autres - ...

M. Jérôme Lambert. Pour l'APA, il ne s'agit pas d'un transfert !

M. le Premier ministre. ...que nous avons connu avec la décentralisation socialiste est révolu. Désormais, grâce à la protection de la Constitution, tout transfert sera financé.

M. Augustin Bonrepaux. Menteur !

M. le Premier ministre. Je peux donc dire clairement aux Françaises et aux Français que l'impôt régional sera socialiste ou ne sera pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Patrick Lemasle. Ridicule et faux !

M. le Premier ministre. Vous étiez dans la culture des rapports et des livres blancs, nous sommes dans celle de l'action.

M. Jean Glavany. Laissez les électeurs décider !

M. le Premier ministre. C'est pourquoi j'ai été contraint, à regret, de répondre à vos provocations en engageant la responsabilité de mon gouvernement. (Huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Manuel Valls. La ficelle est grosse !

M. le Premier ministre. J'ai toujours accepté le débat sur ce texte. (« C'est faux ! Menteur ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) N'y a-t-il pas eu deux lectures parlementaires dans chaque chambre, 190 heures de débat, plus de 800 amendements acceptés ?

M. Jean-Pierre Kucheida. Provocateur !

M. Manuel Valls. Rappelez-vous le PACS !

M. le Premier ministre. Au Sénat même (« Au Sénat ! Au Sénat ! » sur les bancs du groupe socialiste), en deuxième lecture, certains orateurs du groupe socialiste ont salué la bonne tenue du débat conduit par Dominique de Villepin et Jean-François Copé.


Nous nous sommes tous réjouis de voir le Gouvernement accepter vingt-sept des amendements socialistes, alors qu'il n'avait accepté que vingt-neuf amendements de sa majorité. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Dans ce contexte, comment pouvez-vous justifier 5000 amendements en deuxième lecture...

M. Patrick Lemasle. Caricature !

M. le Premier ministre. ...si ce n'est par votre goût de l'immobilisme et des manœuvres de retardement qui ont été la stratégie du parti socialiste...

M. Édouard Landrain. Eh oui !

M. le Premier ministre. ... pour empêcher le vote de ce texte ? (Huées sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Liberti. Caricature !

M. le Premier ministre. Je vous le dis avec sincérité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) : je suis fier d'être à la tête d'un gouvernement d'action et d'une majorité qui a rétabli l'autorité de l'État, avec la loi sur la sécurité, avec la loi sur la justice, ...

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Tu parles !

M. le Premier ministre. ...avec la loi de programmation militaire.

M. Guy Teissier. Très bien !

M. le Premier ministre. Une majorité qui, l'année dernière, a pu sauver notre pacte social. (Huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Vous n'aimez pas le mot !

M. François Liberti. C'est grotesque !

M. le Premier ministre. Mais cette majorité a sauvé le pacte social, a sauvé le pacte républicain (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) en préservant notre système de retraite par répartition. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vous aviez, vous et vos amis, annoncé qu'il y avait dans cette réforme de quoi faire tomber plusieurs gouvernements. (« Oui ! Cela va venir ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Mon gouvernement est resté debout. (« Les électeurs ont jugé ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et, cette année, nous avons pu continuer les réformes de progrès.

Vous aviez annoncé des réformes pour les personnes âgées ; nous les avons financées.

Mme Martine David. Les Français vous ont désavoués !

M. le Premier ministre. Vous aviez annoncé une réforme pour les personnes handicapées ; nous l'avons menée. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous aviez annoncé le changement de statut pour EDF ; nous l'avons réalisé. Et nous avons mené la grande réforme de l'assurance maladie. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous avez cherché la provocation. Vous avez voulu organiser les manifestations.

M. Maxime Gremetz. Au mois de juillet ? Arrêtez !

M. le Premier ministre. Dans le calme, le pays a pu participer au débat. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Et aujourd'hui, comme pour la décentralisation, la réforme de l'assurance maladie...

M. Maxime Gremetz. C'est de la provocation !

M. le Premier ministre. ...est une avancée sociale importante pour l'avenir de la France. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Victor Hugo disait : « J'accuse la censure. » Je partage un peu ce sentiment, car, ici et maintenant, cette motion de censure a fait cruellement apparaître l'absence totale de propositions et de vision de ses signataires. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Elle m'offre cependant l'occasion de remercier, chaleureusement et sincèrement (Rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), les députés membres de l'UMP qui ont soutenu notre action de réforme.

Je veux leur dire merci pour avoir choisi le chemin de l'action, le chemin de la proposition, le chemin du mouvement (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) contre celui du déclin. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « Couché ! Couché ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Déjà, la croissance revient et apporte son lot de bonnes nouvelles. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Déjà, les instituts internationaux - vous ne voulez pas voir ces résultats - ...

M. François Hollande. Les électeurs non plus !

M. le Premier ministre. ...saluent tous l'œuvre de redressement national. Il reste, nous le savons, beaucoup à faire. (Mêmes mouvements.)

M. François Hollande. Oui !

M. le Premier ministre. Mais nous pouvons engager une nouvelle phase de l'action. Et je vais décevoir les adeptes des attaques personnelles (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) : je compte bien engager dès le mois de septembre, pour la session 2004-2005, avec ma majorité, unie et déterminée (Rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), une nouvelle phase de l'action gouvernementale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains ; claquements de pupitres.)

Cette étape nouvelle, je vous propose, mesdames et messieurs les députés... (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Le vacarme n'a jamais remplacé les idées !

M. François Hollande. Remarquez le silence de la droite !

M. le Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous propose, pour la rentrée, de structurer notre travail autour de deux axes : la croissance partagée et la préparation de l'avenir. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Nous avons, par notre politique, permis le retour de la croissance. (Rires sur les bancs du groupe socialiste.) Cette croissance, nous l'avions prévue modeste - la modestie est l'une de nos caractéristiques. (« Ce n'est pas vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Le taux de croissance de 1,7 % est largement dépassé. Nous sommes aujourd'hui sur une prévision de 2,3 %.

M. Patrick Lemasle. C'est grotesque !

M. le Premier ministre. Entre 1997 et 2002, les réformes nécessaires à la France ont toujours été différées, alors que, pourtant, la croissance les rendait possibles. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Christian Bataille. C'est la cata !

Mme Martine David. Tout va très bien !

M. le Premier ministre. Pendant cette période où vous étiez au pouvoir, la pauvreté n'a pas reculé, le chômage structurel n'a pas reculé (« Menteur ! » sur les bancs du groupe socialiste) et le tissu social a continué à se déchirer. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Soyez tolérants, mes chers collègues, écoutez le Premier ministre !

M. le Premier ministre. À entendre ce vacarme, j'ai, par moment, le sentiment que Lionel Jospin a été présent au second tour de l'élection présidentielle. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Son échec a tenu à plusieurs raisons.

M. Jean Glavany. Vos propos sont honteux !

M. le Premier ministre. Parmi celles-ci, la déchirure sociale : les plus modestes des Français n'ont pas pu profiter des fruits de la croissance, qui s'est perdue dans les sables de l'appareil d'État. Les 35 heures ont tué la croissance à partir de l'an 2000. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

La croissance, c'est le travail des Françaises et des Français. Nous n'oublions pas cette vérité, et je salue ici le travail effectué sur ce sujet par MM. Ollier et Novelli. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Avec Nicolas Sarkozy (« Où est-il ? » sur les bancs du groupe socialiste) et Dominique Bussereau, nous préparons un budget tout entier tourné vers les Français.

L'État, c'est vrai, se serre la ceinture,...

M. Patrick Lemasle. Pas vous !

M. le Premier ministre. ...d'abord parce qu'il dépense trop, depuis trop longtemps, mais aussi parce qu'il ne faut pas que les Français supportent les efforts à la place de l'État. Nous réduirons le déficit de l'État de plusieurs milliards d'euros au cours de l'année 2005 en maîtrisant les dépenses. Je tiendrai le cap de la croissance zéro des dépenses de l'État. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Nous prendrons également les mesures budgétaires et législatives nécessaires pour rendre du pouvoir d'achat aux Français.

La loi de cohésion sociale qui vous sera présentée à la rentrée par Jean-Louis Borloo marquera notre volonté de partager équitablement les fruits de la croissance. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Tout sera évidemment fait d'abord pour l'emploi. Le service public de l'emploi sera rénové. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - « Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), car on ne peut plus admettre que 300 000 offres d'emplois restent insatisfaites. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Des parcours qualifiants seront mis en place pour amener les chômeurs vers les emplois marchands, ...

M. Alain Vidalies. Et le RMA, c'est quoi ?

M. le Premier ministre. ...plutôt que de les condamner, comme ce fut le cas sous la précédente législature, à des emplois sans issue et sans perspective, à des emplois parkings. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Les chômeurs auront de nouveaux droits, mais aussi de nouveaux devoirs.

M. Jean Glavany. C'est du travail qu'ils attendent !

M. le Premier ministre. C'est cela aussi la réhabilitation de la valeur du travail.

Notre prochain budget portera l'ambition de la relocalisation d'emplois dans notre pays. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jacques Desallangre. Ah bon ?

M. le Premier ministre. La lutte contre les délocalisations sera l'une de mes toutes premières priorités du budget 2005. (Mêmes mouvements.)

Notre deuxième ligne d'action sera de préparer l'avenir, et pour cela, de relever quatre défis : la recherche, l'éducation, les services publics et l'Europe - quatre sujets qui vous seront soumis dès le début de la prochaine session.

Sur la recherche, François Fillon et François d'Aubert présenteront au Parlement une loi d'orientation et de programmation, qui ne se contentera pas d'injecter de nouveaux moyens dans la recherche publique, comme je m'y suis engagé, mais qui dotera les organismes de recherche de meilleurs outils de pilotage et aussi d'évaluation, laboratoire par laboratoire, projet par projet. Nous développerons aussi la recherche privée et nous donnerons toute sa place à l'université dans cette réforme. C'est là un projet pour l'automne. C'est un grand rendez-vous pour l'avenir de notre pays.

Autre grand rendez-vous : la réforme de l'éducation. M. Thélot présentera à la rentrée ses propositions. Nous en débattrons et nous soumettrons au Parlement un texte visant à assurer l'égalité des chances dans notre système éducatif, et notamment à lutter contre l'échec scolaire.

M. François Hollande. Vous avez eu Raffarin ! Vous avez Raffarin ! Vous aurez encore Raffarin !

M. le Premier ministre. L'enjeu est passionnant : il nous mobilise, il engage l'avenir de nos enfants.

Nous poursuivrons notre politique d'adaptation des services publics. Grâce à la décentralisation et à la déconcentration, nous pourrons poursuivre en 2005 une vigoureuse réforme de l'État.

Cette réforme de l'État, nous la menons pour la France que nous aimons, ...

M. François Hollande. L'inverse n'est pas vrai !

M. le Premier ministre. ...nous la menons pour la France que nous voulons, nous la menons pour la France que nous servons.

Notre pays a besoin d'un État fort, d'un État qui sache se rassembler sur ses missions, éviter la dispersion, servir de grandes idées, d'un État à la hauteur de nos ambitions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Nous nous engagerons dans ces réformes. (Mêmes mouvements.)

Je suis heureux, messieurs, de vous voir dans une telle forme ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Si vous aviez dépensé autant d'énergie à faire des propositions, nous n'en serions pas là. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Malgré tout le bruit que vous faites, messieurs, je poursuivrai mon propos.

Nous tiendrons compte des projets et propositions qui ont été formulés.

Vous avez parlé du rapport de M. Mandelkern qui contient des propositions importantes. Nous les étudierons et nous vous les soumettrons après concertation - car, sur ce sujet comme sur d'autres, le Gouvernement est déterminé à agir. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Enfin, préparons-nous au grand débat du second semestre 2005 sur l'Europe. Un débat qui doit toucher le cœur des Françaises et des Français qui doit leur parler de leur nation, de leurs valeurs. Ce grand débat, nous l'engagerons tous ensemble. Il ne s'agira pas d'abord de dire à nos concitoyens s'ils doivent répondre par oui ou par non ; il s'agira de leur expliquer les enjeux de l'élargissement, les enjeux de la Constitution européenne, les grands choix proposés à notre pays pour ce début du xxie siècle. C'est ce qui nous engage, c'est ce que nous voulons faire. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous devons être à la hauteur de ce rendez-vous historique.

Voilà, mesdames et messieurs les députés, ce qui nous attend à la rentrée. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Je le sais, la tâche est difficile ! (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Nous garderons au cœur l'esprit de mission auquel nous appelle le Chef de l'État.

À ceux qui parlent, parfois avec médiocrité, de « caprice » ou de « testament », je rappellerai la conviction exprimée par Pierre Mendès France il y a soixante ans : « C'est en tenant les engagements pris que le régime démontre sa vigueur, sa capacité de réalisation, sa santé. » (« Au revoir ! Au revoir ! » sur les bancs du groupe socialiste. - Mmes et MM. les députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et applaudissent.)


M. le président. Mes chers collègues, je vais mettre aux voix la motion de censure.

Je fais annoncer le scrutin dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vous rappelle que seuls les députés favorables à la motion de censure participent au scrutin.

Le vote se déroulera dans les salles voisines de l'hémicycle.

Les délégations de vote doivent avoir été enregistrées avant l'annonce du scrutin.

Le scrutin va être ouvert pour quarante-cinq minutes : il sera donc clos à dix-sept heures trente.

Je vais maintenant suspendre la séance. Elle sera reprise vers dix-sept heures quarante-cinq.


Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Voici les résultats du scrutin :

Majorité requise pour l'adoption de la motion de censure : 289.

Pour l'adoption : 175.

La majorité requise n'étant pas atteinte, la motion de censure n'est pas adoptée.

En conséquence, est considéré comme adopté le projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

    2

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures, deuxième séance publique :

Fixation de l'ordre du jour.

Suite de la discussion du projet de loi, n° 1680, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, de modernisation de la sécurité civile :

Rapport, n° 1712, de M. Thierry Mariani au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République ;

Avis, n° 1720, de M. Eric Diard au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-sept heures quarante-six.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot