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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 2 OCTOBRE 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mercredi 1er octobre 2003


SOMMAIRE
POLITIQUE DE L'EMPLOI

1.  Questions au Gouvernement «...».

POLITIQUE DE L'EMPLOI «...»

MM. Jacques Barrot, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.

POLITIQUE SOCIALE «...»

MM. Jean-Marc Ayrault, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.

DÉFICITS PUBLICS «...»

MM. Charles de Courson, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

POLITIQUE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE «...»

MM. Alain Bocquet, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.

INCENDIES DANS LE VAR «...»

MM. Jean-Michel Couve, Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

SAPEURS-POMPIERS VOLONTAIRES «...»

MM. Francis Saint-Léger, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

POLITIQUE BUDGÉTAIRE «...»

MM. Didier Migaud, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

CONSÉQUENCES DE LA SÉCHERESSE
SUR L'AGRICULTURE «...»

MM. Alain Marleix, Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

COMMERCE DU TABAC «...»

MM. Bruno Gilles, Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.

POLITIQUE EN FAVEUR DES PERSONNES ÂGÉES «...»

Mme Paulette Guinchard-Kunstler, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

POLITIQUE D'ACTIONNARIAT DE L'ÉTAT «...»

MM. Jean Proriol, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

POLLUTION À L'OZONE «...»

M. Eric Diard, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.
2.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)
    M. le président. Mes chers collègues, permettez-moi d'abord de vous dire ma joie de vous retrouver.

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Nous commençons par une question du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

POLITIQUE DE L'EMPLOI

    M. le président. La parole est à M. Jacques Barrot.
    M. Jacques Barrot. Monsieur le Premier ministre, la France subit les effets du ralentissement économique qui frappe l'ensemble de l'Europe. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Elle les subit d'autant plus durement que la croissance française d'hier n'a pas été utilisée pour apurer les dettes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Albert Facon. Le disque est rayé !
    M. Jacques Barrot. Nos compatriotes veulent que tout soit mis en oeuvre pour que, demain, la France tire le meilleur parti possible du retour de la croissance. Ils ont besoin de mesurer les progrès et les chances que vont offrir les nouvelles démarches dont vous avez pris l'initiative. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    Vous avez allégé les prélèvements sur le travail, vous avez augmenté la prime pour l'emploi pour encourager tous ceux qui contribuent au dynamisme de notre l'économie nationale. (Aplaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Vous avez appelé à un renouveau du dialogue social. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jacques Desallangre. Pitoyable !
    M. Jacques Barrot. Renouant avec les démarches fructueuses des années soixante-dix, les partenaires sociaux ont décidé, hier, de signer un grand accord sur la formation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Ils ouvrent ainsi l'accès de tous, et surtout des salariés les moins qualifiés, à la formation tout au long de la vie. C'est l'une des clés les plus sûres du retour à l'emploi des salariés les plus menacés par le chômage.
    M. Pierre Lellouche. Eh oui !
    M. Jacques Barrot. Pouvez-vous, monsieur le Premier ministre, nous confirmer votre volonté de tirer pleinement parti de cet accord dans la lutte pour l'emploi ? (Approbations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Pouvez-vous nous confirmer votre volonté d'amplifier encore ce renouveau du dialogue social, bien préférable à l'hyper-réglementation qui freine l'initiative et le dynamisme de notre économie ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le Gouvernement est, lui aussi, très heureux de vous retrouver tous ici, sur tous les bancs de cette assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Je voudrais dire à M. le président Jacques Barrot à quel point ce retour à un dialogue social fertile est, pour nous, une bonne nouvelle. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) En effet, depuis 1970, nous attendions un grand accord des partenaires sociaux, qui réunisse l'ensemble des entrepreneurs aussi bien que des syndicats de salariés - y compris la CGT, qui s'était, jusqu'à présent, montrée réservée pour signer des accords importants et stratégiques. Nous voilà aujourd'hui avec un accord à la hauteur de celui qui, signé en 1970, déboucha sur la loi de 1971, préparée par Jacques Delors et défendue par Jacques Chaban-Delmas et Jacques Delors. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    C'est un accord très important, un accord historique, parce qu'il rassemble tout le monde et qu'il crée ce droit nouveau qu'est le droit individuel à la formation tout au long de la vie. Nous en parlions depuis longtemps. Aujourd'hui, les partenaires sociaux rendent possible cette avancée sociale majeure : la formation comme une nouvelle sécurité sociale, capable de protéger le salarié contre toutes les insécurités qui le menacent.
    C'est une étape essentielle que nous vous proposerons, dès les semaines prochaines, de prolonger en vous présentant une grande loi de la formation professionnelle et de l'emploi, qui tienne compte de tout ce que nous devons faire pour valoriser la formation comme levier de l'emploi.
    Le Gouvernement reste mobilisé pour réhabiliter le travail, car, pour lutter contre le chômage, il faut d'abord créer du travail. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    C'est pour cela que nous avons augmenté le SMIC dans des proportions jamais atteintes depuis vingt ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    C'est pour cela que nous faisons en sorte que les crédits affectés à la prime pour l'emploi soient abondés de près de 500 millions d'euros dans les prochaines semaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean Le Garrec. Arrêtez !
    M. le Premier ministre. C'est pour cela que nous proposerons une réforme du revenu minimum d'activité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) En effet, le RMI, auquel nous sommes les uns et les autres attentifs, ne tient pas sa promesse quand il ne débouche pas sur l'insertion. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous voulons donc le transformer en revenu minimum d'activité afin de marquer que l'emploi est une priorité nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

POLITIQUE SOCIALE

    M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste.
    M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, le chômage poursuit sa progression inexorable. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Pierre Lellouche. Depuis Jospin !
    M. Jean-Marc Ayrault. A plusieurs reprises, et à l'instant encore, vous avez dit vouloir réhabiliter la valeur travail. (« Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais, mes chers collègues, qu'est-ce que la valeur travail quand, à la fin de l'année, 10 % de la population active sera sans emploi ? Qu'est-ce que la valeur travail pour les salariés d'Alstom, de Comilog, de Levi's, de GIAT, de Pechiney, de Metaleurop, ou pour leurs collègues des petites, moyennes ou grandes entreprises, victimes de plans de licenciements en cascade ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « C'est la faute aux 35 heures ! » sur plusieurs bancs de ce groupe.)
    Qu'est-ce que la valeur travail pour votre gouvernement qui, après avoir supprimé tous les dispositifs de soutien public à l'emploi (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), a réalisé le plus grand plan social de soutien à l'emploi des jeunes avec la suppression des emplois-jeunes, diminué les crédits du ministère de l'emploi et ne trouve rien de mieux à faire que d'annoncer la déréglementation du code du travail ?
    M. Michel Delebarre. Eh oui !
    M. Jean-Marc Ayrault. A vous suivre, monsieur le Premier ministre, les salariés n'auraient comme choix que la précarité ou le chômage.
    La seule initiative prise en faveur de l'emploi depuis dix-huit mois - elle vient d'être évoquée par M. Barrot et vous-même - a émané des partenaires sociaux, avec l'accord, que je salue ainsi que les membres de mon groupe, qui institue le droit individuel à la formation.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Grâce au Gouvernement !
    M. Jean-Marc Ayrault. Votre initiative à vous, c'est tout simplement d'attendre la reprise venant des Etats-Unis.
    Que valent vos promesses d'une loi sur le reclassement des licenciés alors que vous avez remis en cause le dispositif similaire de la loi de modernisation sociale ?
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est faux !
    M. Jean-Marc Ayrault. De quel poids est votre compassion à l'égard de ceux que vous appelez les blessés de la vie quand vous diminuez les allocations chômage, quand vous supprimez le dernier filet de sécurité pour les chômeurs en fin de droits, l'allocation spécifique de solidarité (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains) et que vous les condamnez au RMI, que vous appelez, pour la bonne cause, le RMA ? Ce sont 800 000 personnes qui sont ainsi marginalisées dans notre pays. Cela, c'est inacceptable ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Vous dites, monsieur le Premier ministre, vouloir favoriser les revenus du travail plutôt que ceux de l'assistance. Mais où est le travail ? Croyez-vous vraiment que les chômeurs de longue durée le sont par choix, qu'ils sont contents d'être assistés, qu'ils préfèrent toucher les 406,80 euros par mois de l'ASS plutôt qu'un salaire ?
    Monsieur le Premier ministre, ma question est simple, et grave : annulez votre décision inique de suppression de l'ASS et, surtout, mettez-vous enfin au travail pour mettre en oeuvre la vraie politique de l'emploi que les Français attendent. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. S'il vous plaît, mesdames, messieurs les députés ! J'aimerais que nos débats débutent dans le calme.
    La parole est à M. le Premier ministre.
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je ne veux pas parler des chômeurs comme d'une statistique.
    M. Claude Bartolone. Il ne s'agit pas de statistiques mais de votre bilan !
    M. le Premier ministre. Je sais qu'aujourd'hui un grand nombre de Françaises et de Français sont victimes d'une situation économique difficile.
    Mme Chantal Robin-Rodrigo. De plus en plus !
    M. le Premier ministre. Je comprends, monsieur le président Ayrault, que vous vous exonériez de toute responsabilité et je ne chercherai pas à faire le procès du passé. Mais sachez que, dans mon emploi du temps, tous les jours, il faut que je m'occupe de France Télécom, d'Alstom et d'un certain nombre de grands groupes qui ont été extraordinairement fragilisés par les politiques du passé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Notre logique est simple : je souhaite que nous puissions, comme en Allemagne, parler ensemble de ces questions de manière raisonnable.
    Mme Martine David. Commencez par être raisonnable vous-même !
    M. le Premier ministre. Je suis très ouvert à un débat sur l'emploi entre la majorité et l'opposition, parce qu'il s'agit là d'un sujet qui touche toutes les Françaises et tous les Français. Je n'ai aucun esprit partisan. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Je crois simplement que c'est en libérant les charges qui pèsent sur le travail, comme en Allemagne et en Angleterre, que l'on crée du travail et qu'on lutte contre le chômage. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Henri Emmanuelli. Démagogie !
    M. Jacques Floch. C'est du pipeau !
    M. le Premier ministre. C'est pour favoriser l'emploi que nous avons cherché à alléger les charges qui pèsent sur le travail dans les entreprises, de plus de 3 milliards d'euros depuis seize mois. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Martine David. On voit les résultats !
    M. le Premier ministre. Vous oubliez que 1,5 million d'emplois ont été créés ces derniers mois, dans l'industrie notamment. Il y a certes des destructions, mais il ne faut pas oublier tous ceux qui, par la qualité de leur travail, le courage de leurs décisions, créent aujourd'hui des emplois. Nous avons besoin de leur énergie et de leur talent.
    M. Henri Emmanuelli. Augmentez leurs salaires, alors !
    M. le Premier ministre. Ce n'est pas en les assommant ou en les critiquant que l'on pourra les mobiliser. Or toutes les forces vives de ce pays doivent être mobilisées pour créer du travail et de l'emploi.
    Enfin, je voudrais vous dire, monsieur le président Ayrault, que je suis comme vous très ouvert au dialogue social.
    M. Henri Emmanuelli. La question porte sur l'ASS !
    M. le Premier ministre. Comme vous, je crois que l'on peut, par le dialogue social, trouver des solutions pour essayer de dégager, entreprise par entreprise, des forces d'avenir capables de développer l'économie.
    Mme Martine David. Baratin !
    M. le Premier ministre. Mais notre démarche est à l'opposé de la démarche autoritaire qui a été adoptée pour les 35 heures (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française), cette démarche autoritaire, sans discussion, sans dialogue social, qui, hier, a fragilisé notre industrie et aujourd'hui nous coûte en emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

DÉFICITS PUBLICS

    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Charles de Courson. Monsieur le Premier ministre, le groupe UDF est profondément attaché à la poursuite de la construction européenne et au respect des engagements budgétaires de la France, gage de son influence en Europe.
    Le groupe UDF regrette que le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances pour 2004, du fait de l'insuffisante maîtrise des dépenses publiques, ne permettent pas à notre pays de respecter ses engagements, avec un déficit public à 3,6 % du produit intérieur brut, au lieu des 3 % autorisés, et un niveau de l'endettement public à 63 % du produit intérieur brut, soit 16 000 euros par Français, au lieu des 60 % autorisés.
    Certes, cette situation est pour une large part le fruit d'une gestion budgétaire laxiste de la gauche entre 1997 et 2002. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais il faut bien que la majorité actuelle assume, une nouvelle fois, et pour la troisième fois en dix-huit ans, ce très lourd héritage.
    Le groupe UDF, persuadé que la maîtrise durable des dépenses publiques passe par de grandes réformes structurelles, comme celles engagées en matière de retraite et de décentralisation, vous demande, monsieur le Premier ministre, si le Gouvernement est prêt à mettre en oeuvre, sans tarder, la réforme de l'assurance maladie, la réforme des 35 heures et la réforme de l'Etat. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur de Courson, je vous rassure : le Gouvernement est tout à fait prêt à poursuivre son oeuvre de réforme.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Tout va très bien, madame la marquise !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Quelle que soit la conjoncture, c'est en consolidant les bases de la société et de l'économie française que nous ferons notre devoir.
    Ce devoir, nous avons commencé à le faire - vous l'avez rappelé - avec la réforme des retraites. C'est une bonne mesure (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) qui, potentiellement, peut avoir de fortes retombées en matière d'amélioration, d'assainissement de nos finances.
    Cela dit, il est clair qu'avec Jean-François Mattei et quelques autres, nous avons un sujet majeur à traiter : il faut restaurer un équilibre raisonnable de nos dépenses de santé, sans que cela se traduise par une détérioration de la qualité des soins. Ce sujet est suffisamment important, parce qu'il touche tous les Français, pour que nous prenions le temps de concevoir une bonne réforme.
    Nous ne savons peut-être pas travailler sur plusieurs réformes à la fois - c'est sans doute une de nos faiblesses ou de nos incompétences - mais, dès lors que nous avons décidé de faire quelque chose, nous savons le faire en temps utile.
    La réforme de la santé sera adoptée et mise en oeuvre au plus tard l'été prochain.
    M. Bernard Roman. Pour quoi faire ?
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Avec la décentralisation et la réforme de l'Etat, nous aurons ainsi consolidé les quatre piliers pour assurer au système français une croissance durable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

POLITIQUE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

    M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Alain Bocquet. Monsieur le Premier ministre, la France vient de vivre un été meurtrier, au sens propre comme au sens social du terme. Il a marqué particulièrement l'esprit de nos concitoyens ; il a renforcé leur mécontentement, leur colère et, je le dis, leur ras-le-bol de votre politique, toute vouée aux intérêts du MEDEF. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

    Non seulement vous mettez en oeuvre son programme, mais vous allez au-devant de ses exigences. Vous êtes le Père Noël pour les plus fortunés, la haute finance et le grand patronat, ainsi qu'en témoigne votre persistance cynique à baisser leurs impôts...
    Mme Chantal Robin-Rodrigo. C'est vrai !
    M. Alain Bocquet. ..., à leur allouer des cadeaux fiscaux et des exonérations de cotisations sociales patronales.
    M. Jacques Desallangre. Absolument !
    M. Alain Bocquet. En revanche, vous êtes le Père Fouettard pour l'immense majorité des Français (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), le monde du travail, les plus démunis et les plus faibles. Chômage en hausse, vie de plus en plus chère, conditions de travail de plus en plus dures, protection sociale remise en cause, multiplication des atteintes aux droits des salariés et à leur liberté syndicale, et j'en passe : force est de constater que vous et votre gouvernement n'y allez pas de main morte. Entre la loi rétrograde sur les retraites votée en juillet et les restrictions d'indemnisation du chômage, entre les privatisations, la casse des services publics et votre budget de super austérité pour 2004, c'est la même logique de défiguration de la France que vous poursuivez (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains) : on passe de la fracture sociale à la rupture sociale. (« Eh oui ! » sur les mêmes bancs.)
    Votre politique ultralibérale impitoyable fait beaucoup de mal à la France et à son peuple. Les Françaises et les Français ne veulent plus de ces choix qui placent l'argent au-dessus de tout, en lieu et place des êtres humains. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Allez-vous entendre l'appel du pays ? Il est grand temps de changer de cap. Les Français peuvent compter sur le groupe des député-e-s communistes et républicains... (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Les Françaises et les Français peuvent, disais-je, compter sur le groupe des députés communistes et républicains pour s'opposer à votre politique et proposer des solutions alternatives pour l'emploi, la santé, la justice sociale et fiscale, le développement économique de la France (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), et ce en liaison constante avec le mouvement social, dont nous nous ferons ici les interprètes fidèles des aspirations à vivre mieux dans une société de progrès partagé par tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur Bocquet, je vous répondrai plus en votre qualité de président de groupe qu'au nom de la pertinence de vos propos. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Mme Muguette Jacquaint. C'est incroyable !
    M. le Premier ministre. Il est normal que nous ne soyons pas d'accord et il n'y a rien de nouveau à cela.
    M. Patrick Braouezec. Allez dans les quartiers !
    M. Bernard Roman. Rendez donc visite à la « France d'en bas » !
    M. le président. Monsieur Roman, je vous en prie !
    M. le Premier ministre. Je voudrais vous dire deux choses très importantes.
    La première est que je partage votre appel pour que l'humain domine l'argent. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Henri Emmanuelli. Ça alors !
    M. le Premier ministre. Mais, durant les cinq ans où vous avez participé au pouvoir, je ne vous ai pas trouvés particulièrement sévères les fois, très nombreuses, où se sont imposées les logiques de l'argent, eu égard à la financiarisation de notre économie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Je ne vous ai pas vus non plus vous battre comme se sont battus les députés de la majorité en faveur de l'augmentation du SMIC ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Je tiens à vous dire que je suis fier d'être le chef du gouvement qui, en trois ans, aura permis à un million de smicards de toucher le treizième mois ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Henri Emmanuelli. Et les autres ?
    M. le Premier ministre. Je suis très heureux de cette initiative. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Je suis fier aussi - à chacun ses fiertés - que ceux qui ont travaillé dès quatorze, quinze ou seize ans aient vu avancer l'âge de leur retraite. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean Glavany. Et l'allocation spécifique de solidarité ?
    M. le Premier ministre. Je n'ai pas entendu ceux qui prétendent avoir une conscience sociale faire ces choix populaires.
    Mme Martine David. Et la CMU ?
    M. le Premier ministre. Je pense également à ce que nous venons de faire avec la prime pour l'emploi, pour aider davantage ceux qui ne paient pas d'impôt, avec 500 millions d'euros supplémentaires...
    Mme Martine David. Seulement !
    M. le Premier ministre. Tout cela me paraît très important pour les milieux populaires. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Enfin, je voudrais vous dire que vous avez tort de penser que l'impôt sur le revenu ne touche qu'une catégorie limitée de la population. Dans 16 millions de foyers, des Français travaillent et aspirent à tirer profit de leur travail.
    M. Christian Bataille. Vous êtes le défenseur des riches !
    Mme Martine David. Parlez-nous des impôts locaux ?
    M. le Premier ministre. Si nous voulons assumer les valeurs de la République, il faut aussi assumer celle du mérite, essentielle pour pour tous ceux qui font des efforts. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Voilà pourquoi, monsieur le député, je crois sincèrement que le combat, qui est celui de mon gouvernement, pour l'emploi et pour le travail, est un combat pour tous les Français. C'est un combat populaire ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

INCENDIES DANS LE VAR

    M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Couve, pour le groupe UMP.
    M. Jean-Michel Couve. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
    Monsieur le ministre, comme vous le savez, le département du Var et ma circonscription en particulier ont été une fois de plus, cet été, tristement endeuillés par les feux de forêt. La mort de sept personnes, dont trois de nos plus valeureux pompiers, dont je tiens à saluer la mémoire, témoigne du caractère violent et dramatique de ces incendies.
    S'il ne fait pas de doute que les mises à feu sont criminelles, le fait déterminant qui explique le caractère extensif et la gravité du phénomène réside à n'en pas douter dans les excessives inflammabilité et combustibilité de la biomasse, des broussailles et du maquis : ce sont 20 000 hectares qui ont brûlé cette année, soit la surface du Grand Paris, en dépit du courage et du professionnalisme exemplaire de nos pompiers.
    Ce type de catastrophe se répétant depuis tant d'années, depuis des décennies malgré les importants moyens mis à disposition, il faut impérativement revoir la politique de préservation en y intégrant une démarche d'aménagement et de valorisation, c'est-à-dire de développement durable, laquelle ne peut se concevoir qu'avec des aides publiques et en partenariat entre les services de l'Etat, les élus locaux ainsi que les acteurs économiques et associatifs concernés. C'est un tel projet de développement durable que je défends à travers la constitution du pays des Maures, constitution en butte à quelques difficultés en dépit de la participation active à ce projet de vingt-sept communes et de onze organismes socioprofessionnels.
    Nous pourrions ainsi, à l'instar du programme de réhabilitation écologique des rives du lac du Bourget, mettre en oeuvre un programme pluriannuel fondé sur une charte forestière en cours de rédaction.
    Connaissant l'intérêt que vous portez à la préservation et à la mise en valeur de nos massifs forestiers, nous serions particulièrement heureux, monsieur le ministre, de vous recevoir dans notre département afin de vous présenter ce projet. Qu'en pensez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, qui vient d'être invité dans le département du Var. (Sourires.)
    M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur Couve, nous avons vécu durant l'été des drames épouvantables. Bien évidemment, notre reconnaissance va aux soldats du feu et notre compassion à toutes les victimes - habitants, sauveteurs et sapeurs-pompiers -, comme l'a rappelé le ministre de l'intérieur au conseil des ministres de ce matin.
    Le Premier ministre s'est rendu sur le terrain, dans le massif des Maures. Il a demandé que le ministère de l'agriculture, le ministère de l'intérieur et celui de l'écologie et du développement durable mettent en place une politique de reconstruction forestière durable.
    Vous avez raison, monsieur le député : il convient de réunir tout le monde autour de la table, afin que les élus, les propriétaires forestiers, les agriculteurs et les associations de protection de l'environnement travaillent ensemble.
    Nous pouvons, dans le pays des Maures, bâtir une charte forestière de territoire. Les causes de la propagation des incendies sont multiples : non-respect de l'obligation de débroussaillement, malveillance, mitage de l'urbanisation. Il convient de mettre en oeuvre une politique de long terme, pour laquelle la charte forestière me semble être un outil adapté. L'ensemble du Gouvernement et moi-même sommes à votre disposition pour travailler dans ce sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

SAPEURS-POMPIERS VOLONTAIRES

    M. le président. La parole est à M. Francis Saint-Léger, pour le groupe UMP.
    M. Francis Saint-Léger. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    Monsieur le ministre, ce matin, vous avez présenté en conseil des ministres une communication sur le bilan de la campagne « feux de forêt » de cet été. Il y a quelques jours, vous avez annoncé, à l'occasion du congrès de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, une série de mesures concrètes en leur faveur. Ces mesures étaient très attendues.
    M. Henri Emmanuelli. Il n'a pas dit comment il les financerait !
    M. Francis Saint-Léger. Vous n'avez eu de cesse, depuis votre entrée en fonctions, de rappeler que la sécurité civile doit être plus forte et mieux reconnue, à la fois pour les 235 000 sapeurs-pompiers que compte notre pays et pour les 60 millions de Français qu'ils protègent.
    Durant l'été, à l'occasion d'un déplacement en Lozère, vous avez tenu à souligner l'importance pour notre pays du véritable engagement civique que constitue le volontariat des sapeurs-pompiers. Nous connaissons l'intensité des attentes qui se sont manifestées à cet égard, tout comme l'ardeur du combat en faveur d'une consécration de celui-ci.
    Monsieur le minitre, il y a urgence à pérenniser enfin le volontariat des sapeurs-pompiers et à reconnaître concrètement leurs mérites et leur dévouement.
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les dispositions que vous comptez prendre pour faciliter la vie des volontaires au quotidien et pour les fidéliser ?
    Pouvez-vous également nous donner plus de précisions sur les principes qui vous guident dans la préparation du projet de loi de modernisation de la sécurité civile que vous présenterez prochainement au Parlement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Saint-Léger, 80 % des 240 000 sapeurs-pompiers de France sont des volontaires. Dans un département comme le vôtre, il y a 750 volontaires et seulement dix professionnels. Mais sur le terrain, face au feu, on ne fait pas la différence entre les militaires, les professionnels et les volontaires.
    Cela fait des années que les sapeurs-pompiers volontaires attendaient une reconnaissance financière. Ils ne sont pas payés...
    M. André Gerin. C'est faux !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cette reconnaissance financière ne doit pas peser sur la responsabilité des seuls élus. Il ne doit pas y avoir, d'un côté, l'Etat qui annonce de bonnes nouvelles et, de l'autre, les départements qui les payent ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. Henry Emmanuelli et M. Jean Glavany. Bravo !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est la raison pour laquelle les sapeurs-pompiers volontaires disposeront désormais d'un complément de retraite, financé à parité par l'Etat et par les départements. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Ceux qui ont travaillé pendant vingt ans au sein des sapeurs-pompiers ont droit à la reconnaissance de la nation. Cette reconnaissance ne doit pas s'exprimer simplement devant les cercueils, par une médaille que l'on remet à une famille éplorée parce qu'elle a perdu l'un des siens.
    En deuxième lieu, nous avons décidé que l'on pourrait devenir sapeur-pompier volontaire dès l'âge de seize ans. Car un jeune refusé à seize ans ne se représente pas forcément à dix-huit.
    M. Jean-Paul Charié. Très juste !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. En troisième lieu, nous avons, avec le ministre de l'éducation nationale, décidé que, sur le livret d'examen scolaire mis à la disposition des jurys, la qualité de sapeur-pompier volontaire serait désormais mentionnée.
    M. Jean-Paul Charié. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le temps est en effet venu d'exprimer notre reconnaissance à ceux qui se dévouent pour les autres (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et de parler un peu moins de ceux qui n'ont comme seule ambition que d'empoisonner la vie de leurs concitoyens !
    Grâce à ces mesures et à bien d'autres encore, il y aura plus de volontaires ! Ce sera bien pour la sécurité des Français !
    M. Henri Emmanuelli. Démago !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, je transmettrai ce terme aux 240 000 sapeurs-pompiers, à leurs familles et à tous ceux qui les représentent ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Je leur dirai qu'il a été prononcé par un élu socialiste, ce qu'ils seront ravis d'entendre ! (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. André Gerin. M. Emmanuellli a raison !
    (M. Henri Emmanuelli se lève. - Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Monsieur Emmanuelli, vous n'avez pas la parole et je vous prie de vous rasseoir !

POLITIQUE BUDGÉTAIRE

    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste.
    M. Didier Migaud. Monsieur le Premier ministre, la situation budgétaire, économique et sociale de la France est de plus en plus dégradée. C'est la conséquence directe de vos choix fiscaux et budgétaires. L'opposition n'est d'ailleurs pas la seule à le souligner : la Commission européenne et la Cour des comptes disent à peu près la même chose.
    Vos décisions sont non seulement injustes, mais elles n'ont aucun effet positif sur la croissance, elles ont contribué à augmenter le chômage, à amputer le pouvoir d'achat du plus grand nombre, à casser la consommation. Parallèlement, la dette publique explose et nos finances publiques sont tombées sous la tutelle européenne.
    En dépit de cette situation, le projet de budget pour 2004 que vous soumettez au Parlement ne propose rien d'autre que de persévérer dans l'erreur et d'accentuer l'injustice.
    Ce n'est plus de la détermination, monsieur le Premier ministre : c'est de l'obstination aveugle.
    Votre politique est injuste : elle réserve à un petit nombre des largesses fiscales que vous faites payer à tout le monde au moyen d'un endettement accru, d'une augmentation des impôts locaux et de taxes diverses. La vérité, c'est que les impôts des Français augmentent ! D'un côté, des centaines d'euros d'impôt en moins pour moins de 5 % de foyers aisés, mais de l'autre, rien ! Cinq euros seulement pour les bénéficiaires de la prime pour l'emploi ! (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    La grande majorité de nos concitoyens va subir des augmentations d'impôts et de taxes sur le gazole et les tabacs. L'UMP devient de plus en plus l'« Union pour une minorité de privilégiés » ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Votre politique est inefficace et dangereuse. Elle hypothèque l'avenir en abandonnant des pans entiers de politiques publiques utiles à l'emploi et à la croissance, comme le logement, les transports publics, la recherche ou l'éducation.
    M. Michel Herbillon. Ce n'est pas brillant !
    M. Didier Migaud. Ma question, monsieur le Premier ministre, sera simple : pourquoi vous obstinez-vous à mettre en oeuvre une politique à contre-emploi, injuste, inefficace et dangereuse, néfaste pour les Français ?
    Nous vous demandons solennellement de revenir sur vos décisions, qui consistent à prendre au plus grand nombre pour donner au plus petit nombre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Pourquoi nous obstinons-nous, monsieur Migaud ? La réponse est simple : parce que nous avons raison (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et parce que nous savons que les conditions de la croissance et donc de l'emploi dans notre pays dépendent fondamentalement d'un contrôle des dépenses de l'Etat,...
    M. Augustin Bonrepaux. C'est la méthode Coué !
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, je vous en prie !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... contrôle que nous exerçons et que nous continuerons d'exercer. Elles dépendent aussi d'une accélération de l'initiative entrepreneuriale, que nous continuerons d'encourager.
    Pour le cas où vous ne le sauriez pas, je vous rappelle que, dans un pays dont le taux démographique est nul et où il sera bientôt négatif, la croissance provient de deux choses : de la productivité, c'est-à-dire là encore de l'effort de toutes les entreprises pour faire plus avec moins, et du renouvellement de l'offre, c'est-à-dire là encore d'un effort des entreprises, et de la recherche publique et privée, afin d'apporter au marché, et pas uniquement au marché français, un renouveau de produits et de services. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
     Telle est notre politique, et cette politique est la bonne. Nous la poursuivrons, et vous verrez qu'elle paiera ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

CONSÉQUENCES DE LA SÉCHERESSE SUR L'AGRICULTURE

    M. le président. La parole est à M. Alain Marleix, pour le groupe UMP.
    M. Alain Marleix. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
    Monsieur le ministre, notre pays a connu cet été une sécheresse d'une ampleur exceptionnelle qui, on le sait, a aussi frappé durement les agriculteurs, et notamment les éleveurs. Après la crise de l'ESB, c'est un nouveau défi majeur auquel est confrontée l'agriculture française. Les conséquences ont été nombreuses et ont touché de plein fouet cinquante-cinq départements.
    Face à cette crise, le Gouvernement a réagi rapidement et concrètement. Il faut vous en féliciter personnellement car votre mobilisation et celle de votre ministère ont été totales et efficaces : aides massives à l'affouragement, avances de trésorerie aux exploitations, mise en place rapide du Fonds des calamités.
    Toutefois, de nombreux problèmes demeurent : la sécheresse a réduit à néant la production estivale des prairies et les éleveurs ont très largement entamé leur stock d'aliments d'hiver. Beaucoup doivent aujourd'hui faire face à une véritable pénurie de fourrage. Aujourd'hui, 350 000 tonnes de paille ont été contractualisées, mais pas forcément livrées, et il reste au moins 200 000 tonnes à transporter. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Posez votre question, monsieur Marleix !
    M. Alain Marleix. Mes questions, monsieur le président, seront simples.
    Premièrement, comment faire monter en puissance, à des prix acceptables, tous les moyens de transport, routier, ferroviaire, et éventuellement militaire ?
    Deuxièmement, comment couvrir les besoins des 55 départements touchés jusqu'au printemps prochain ?
    Troisièmement, le Fonds des calamités, principal vecteur d'indemnisation, sera-t-il abondé suffisamment par l'Etat ? Des efforts ont été faits en ce sens.
    Enfin, pour les agriculteurs qui ne sont pas éligibles, le Fonds d'allégement des charges sera-t-il lui aussi abondé à la hauteur des besoins ?
    Merci, monsieur le ministre, de bien vouloir répondre à ces interrogations sur les mesures prises et à prendre. Vos réponses conditionnent en grande partie l'avenir immédiat de plusieurs milliers d'exploitations dans toutes les régions de France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
    M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le député, la sécheresse à laquelle nous sommes confrontés est en effet l'une des plus difficiles que nous ayons connues depuis un siècle.
    Je voudrais tout d'abord saluer les paysans de France, qui font face avec beaucoup de courage et de dévouement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    La solidarité agricole est au rendez-vous, mais la solidarité nationale l'est aussi. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Dès le début du mois de juillet, nous avons pris au fur et à mesure les dispositions qui s'imposaient, à savoir : l'autorisation de pâturer les jachères, obtenue de Bruxelles ; une aide au transport de foin et de paille ; la possibilité d'anticiper à hauteur de 2 milliards d'euros le versement des aides européennes ; enfin, les mesures annoncées par le Premier ministre le 22 août dernier, à hauteur de 500 millions d'euros.
    La solidarité nationale est donc au rendez-vous. Il s'agit de faire face aux conséquences des calamités agricoles et de venir en aide aux agriculteurs en difficulté. Nous avons tenu hier encore une réunion au sujet des calamités agricoles ; elle a rendu éligibles 70 départements, et prévu d'abonder de 100 millions d'euros le Fonds d'allégement des charges en octobre de cette année, avant les mesures qui seront examinées lors du collectif budgétaire.
    S'agissant du transport de la paille et du foin, un point très important,...
    M. Maxime Gremetz. Dans la Somme et en Picardie, parlons-en !
    M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. ... nous avons défini deux priorités.
    Premièrement, il faudra veiller à l'approvisionnement en fourrage pendant l'automne et l'hiver prochains puisque la sécheresse et ses conséquences ne sont pas terminées. Une cellule de crise travaille en permanence sur ce problème.
    Deuxièmement, avec Gilles de Robien, qui s'est mobilisé sur ce dossier, nous avons, dès le début de l'été, accordé des dérogations aux transporteurs pour travailler dans des conditions exceptionnelles.
    M. Maxime Gremetz. Mais ça fait des mois !
    M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Nous avons mis en place une bourse pour le transport. Nous avons également mobilisé la SNCF dans un dispositif qui monte en puissance : trente convois déjà organisés, une quarantaine en préparation.
    Enfin, nous avons obtenu un premier concours des armées.
    M. le président. Merci, monsieur le ministre...
    M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentaion, de la pêche et des affaires rurales. Mais il faut aller plus loin : c'est absolument indispensable pour la survie de nos éleveurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

COMMERCE DU TABAC

    M. le président. La parole est à M. Bruno Gilles, pour le groupe UMP.
    M. Bruno Gilles. Ma question, à laquelle j'associe mes collègues Yves Bur et Richard Mallié, s'adresse à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
    Le Gouvernement a déclaré la guerre au tabac. C'est un véritable enjeu de santé publique. L'augmentation du prix des cigarettes qui a eu lieu en janvier 2003 a déjà permis un recul sensible des ventes. La nouvelle hausse, prévue en octobre, de l'ordre de 18 à 20 %, accentuera ce phénomène. Nous avons donc tout lieu d'être satisfaits. Sauf que, parallèlement, nous assistons au développement de la contrebande et des ventes transfrontalières et à la sauvette. En effet, l'augmentation du prix du paquet de cigarettes a accentué le différentiel de prix avec les pays voisins. Les buralistes français ont ainsi vu une partie parfois importante de leur clientèle s'approvisionner dans les bureaux de tabac à l'étranger sans que leur manque à gagner puisse être compensé. Et le développement de la contrebande et de la vente à la sauvette est encore plus grave d'un point de vue de santé publique.
    Le manque à gagner est certain pour Bercy comme pour le réseau des débitants de tabac. Selon la commission des comptes de la sécurité sociale, alors que la hausse prévue des droits sur les tabacs aurait dû être de 1 milliard d'euros, son rendement ne devrait atteindre cette année que 200 millions d'euros.
    En conséquence, monsieur le ministre, je vous demande ce que vous envisagez de faire pour lutter efficacement contre la contrebande et la vente à la sauvette, et si vous prévoyez des mesures en faveur des buralistes afin de ne pas fragiliser davantage ces commerces de proximité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
    M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le député, le Gouvernement est très attentif aux difficulités que rencontrent les buralistes (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), en particulier les buralistes frontaliers, à la suite de la hausse du prix des tabacs. C'est la raison pour laquelle il envisage de prendre très prochainement des mesures en faveur de ceux qui sont les plus touchés ; mais ces mesures devront être bien ciblées car l'évolution du prix du tabac a eu aussi pour effet de favoriser certains débitants qui ne sont pas en situation de concurrence défavorable.
    Monsieur le député, le rôle que les buralistes jouent en province, à la campagne, dans les quartiers,...
    M. François Hollande. Pas à Paris ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. En ville aussi, bien sûr. Le rôle que jouent ces auxiliaires de l'Etat au service de la société, disais-je, doit être reconnu et ils méritent mieux que des plaisanteries. Nous allons les encourager. Il faut absolument qu'ils trouvent des compléments d'activité lorsque leur équilibre économique l'exige.
    Le deuxième aspect de votre question est relatif à la fraude. Monsieur le député, le Gouvernement va, pour reprendre votre expression, « déclarer la guerre » à la fraude. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Les mesures les plus fermes seront prises contre les ventes à la sauvette. Les sanctions seront renforcées ; je vous proposerai, d'ailleurs, un amendement en ce sens à l'occasion de la loi de finances. Des opérations « coup de poing » seront organisées et nous demanderons aux GIR d'intervenir.
    M. Jean-Pierre Brard. Grâce à Nicolas, Alain va triompher !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Voilà ce que je voulais vous dire, monsieur le député. Le Gouvernement est très attentif à cette question. Vous pouvez compter sur lui pour qu'il agisse avec fermeté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

POLITIQUE EN FAVEUR DES PERSONNES ÂGÉES

    M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler, pour le groupe socialiste.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, notre session s'ouvre après un été où des milliers d'hommes et de femmes fragiles, pour la plupart très âgés, ont quitté la vie de manière dramatique, certains dans la solitude, ou accompagnés d'aides-soignants, de médecins généralistes, d'infirmières, d'aides à domicile, de leur famille pour la plupart, et de bénévoles. A ceux-ci la représentation nationale doit exprimer toute sa sollicitude. (Applaudissements sur divers bancs.)
    La commission d'enquête, dont les auditions devront être ouvertes à la presse, aura la responsabilité de comprendre, d'identifier les dysfonctionnements qui ont conduit à ce drame. La recherche de la vérité est un devoir pour qu'un tel événement ne se reproduise pas.
    En plein mois d'août, la France a découvert la grande fragilité et l'immense besoin d'accompagnement des personnes âgées dépendantes. Monsieur le ministre, je souhaiterais vous interroger sur la situation des personnes âgées dans notre pays. Vous n'avez pas compris que la montée en charge rapide des demandes d'allocation personnalisée d'autonomie était l'expression d'un grand besoin des personnes âgées fragiles. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. André Schneider. Scandaleux !
    M. René Couanau. Amalgame !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Pourquoi le Gouvernement a-t-il suspendu, en début d'année, les crédits destinés à rattraper le manque de personnel dans les maisons de retraite ? Pourquoi n'a-t-il pas soutenu les réseaux de soins gérontologiques et la coordination gérontologique ? Pourquoi ne pas avoir continué à assurer le soutien de la formation des professionnels et l'installation de la gériatrie dans les hôpitaux ? En modifiant les règles de l'allocation personnalisée d'autonomie, vous avez renvoyé sur les familles et sur les collectivités locales des charges qui relèvent de la solidarité nationale.
    Parce que la question des personnes âgées est un sujet majeur dans notre société, les responsables politiques doivent être obligatoirement ceux qui s'en préoccupent.
    M. Jean-Michel Ferrand. Qu'avez-vous fait pendant cinq ans ?
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Pourtant, Monsieur le ministre, vous avez, pendant cette période, été bien éloigné de ce qui se vivait en France. (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Après ce drame, faites en sorte que la dignité des personnes âgées fragiles soit à nouveau au coeur des préoccupations de la société française ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Mme la députée, nous avons connu cet été un drame d'une exceptionnelle ampleur.
    M. Patrick Lemasle. Où étiez-vous ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je voudrais, au moment où l'Assemblée nationale se réunit pour la première fois, dire toute notre gratitude et toute notre reconnaissance à tous les personnels des services de soins qui ont fait face aux difficultés de cet été. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Mais je voudrais dire aussi que la nation n'oubliera pas ceux qui sont morts. Elle pense aujourd'hui à leurs familles, à leur douleur, et veut, par les actes que nous allons, dans les semaines qui viennent, vous proposer, faire en sorte que jamais plus nous ne nous retrouvions dans une pareille situation.
    A la canicule exceptionnelle s'est en effet ajoutée une absence...
    M. Jean-Pierre Blazy. De gouvernement ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... de système d'alerte, qui est très largement à l'origine de la gravité de la situation. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Maxime Gremetz. C'est la faute au Gouvernement ! Il était en vacances !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Notre pays, dans bien des domaines, est exemplaire en matière d'alerte sanitaire ; on l'a vu par exemple à l'occasion de l'épidémie du SRAS. Mais jamais nous n'avions imaginé que la chaleur, dans un pays comme le nôtre, puisse tuer. C'est pourquoi il n'existait pas en France de véritable système d'alerte fondé sur des données météorologiques.
    La première des responsabilités du Gouvernement, c'est donc de vous proposer dans les meilleurs délais - et c'est ce que fera M. Mattei - de mettre en place un système d'alerte avant la fin de l'année.
    Mais au-delà de ce problème d'alerte, cette canicule, et vous avez raison de le souligner, madame, a montré à quel point notre société avait de la peine à prendre en compte les effets du bouleversement que représente le vieillissement. Nous avons commencé à le faire sur un point fondamental, celui des retraites (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), et nous allons continuer avec la prise en charge de la dépendance. (Mêmes mouvements.)
    Je ne crois cependant pas qu'un simple ajustement des dispositifs actuels permettra de répondre à l'ampleur du défi que nous devons relever. C'est la raison pour laquelle le Premier ministre a demandé à M. Falco, à M. Mattei et à moi-même de présenter un plan sur le vieillissement et la solidarité,...
    M. Jean-Pierre Blazy. Tu parles !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... qui sera articulé autour de quatre priorités. La première priorité porte sur le maintien à domicile des personnes âgées, parce que c'est incontestablement leur aspiration première ; la deuxième tient à la modernisation des maisons de retraite ; la troisième porte sur le recrutement des personnels dont nous avons besoin. Quant à la quatrième priorité, mesdames, messieurs les députés - et c'est là qu'il faut du courage politique -, elle a trait au financement de la dépendance. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il faut que la nation sache - et nous reviendrons devant le Parlement présenter nos projets - que l'on ne pourra pas assumer les charges considérables du vieillissement sans un effort de travail supplémentaire (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), c'est-à-dire en produisant plus de richesses pour mettre en place un système de protection sociale plus efficace ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Henri Emmanuelli. Alors, il ne fallait pas faire baisser les impôts ?

POLITIQUE D'ACTIONNARIAT DE L'ÉTAT

    M. le président. La parole est à M. Jean Proriol, pour le groupe UMP.
    M. Jean Proriol. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    Au fil du temps et des républiques, l'Etat est devenu actionnaire de très nombreuses sociétés - on parlait de 3 500 il y a vingt ans, on parle de 1 500 de nos jours -, d'importance très diverse.
    M. Jacques Desallangre. On liquide !
    M. Jean Proriol. Nous sommes tous conscients que l'ère de la capitalisation des sociétés par des capitaux d'Etat est derrière nous,...
    M. Maxime Gremetz. Alstom !
    M. Jean Proriol. ... surtout lorsqu'il s'agit de fabriquer des bicyclettes, des ordinateurs, des automobiles ou des cocottes-minute. En revanche, il y aura toujours des industries stratégiques où l'Etat doit être présent. (« Ah ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.) Je pense à EADS pour notre défense, mais aussi à d'autres, dans le transport...
    M. Maxime Gremetz. Air France !
    M. Jean Proriol. ... ou l'énergie. De même l'Etat doit-il tendre la main pour participer à des restructurations ou à des sauvetages vitaux pour l'emploi.
    Plusieurs opérations industrielles ou capitalistiques survenues durant la période estivale montrent que le Gouvernement a mis en oeuvre une démarche, faite de pragmatisme et adaptée à la situation de chaque entreprise : cession de 10 % du capital de Renault, sortie de l'Etat du capital de Dassault, participation de l'Etat au plan de financement d'Alstom élaboré avec les banques créancières de l'entreprise, en respectant les sacro-saintes lois de Bruxelles. Nous semblons être sortis de l'Etat-Léviathan pour passer à l'Etat-stratège. Il était temps ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. Quelle est votre question, monsieur Proriol ?
    M. Jean Proriol. Monsieur le ministre, expliquez-nous les choix qui ont prévalu, en fonction des enjeux, et tracez-nous l'horizon de l'Etat-actionnaire.
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Proriol, il n'est pas facile d'expliquer une succession de cas particuliers. La politique que nous menons dans ce domaine est empreinte de pragmatisme et d'opportunisme. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et bien sûr, lorsque des grenades explosent, nous essayons d'empêcher la propagation des effets négatifs.
    L'Etat-actionnaire peut intervenir en pensant aux contribuables. Et lorsque nous cherchons à mettre sur le marché telle ou telle participation ou entreprise, nous avons la volonté de le faire dans les meilleures conditions possibles.
    L'Etat-actionnaire peut aussi intervenir, vous le reconnaissez, comme Etat-stratège. Nous avons alors la volonté de créer les meilleures conditions pour aider certaines entreprises dans leur évolution stratégique. Le plus bel exemple,...
    M. Jacques Desallangre. Ce n'est pas Alstom ? Rassurez-moi !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... c'est quand même Air France-KLM. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Mais il y a eu d'autres opérations, comme Alstom. Malgré une certaine difficulté, dont vous vous souvenez, nous avons réussi récemment à empêcher l'irréparable, à savoir qu'une très belle entreprise, non seulement française mais européenne, voire mondiale, ne tombe à cause de deux ou trois erreurs de management - certes majeures.
    M. Jacques Desallangre. Quelques dizaines de milliards chacune.
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous avons aidé cette entreprise à ne pas tomber. Mais cela ne signifie pas que nous envisageons d'y rester « collés ». Je vous rappelle que notre effort a pris la forme d'un prêt et que cet argent, qui sera remboursé, porte intérêt. Par ailleurs, les banques ont fait un effort triple de celui de l'Etat.
    M. Jacques Desallangre. Oh là là ! Comme pour Eurotunnel ?
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Trente-deux banques, de toutes nationalités, dont seulement sept françaises, sont intervenues. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

POLLUTION À L'OZONE

    M. le président. La parole est à M. Eric Diard, pour le groupe UMP.
    M. Eric Diard. Madame la ministre de l'écologie et du développement durable, pendant l'été 2003, notre pays - et plus particulièrement la région Provence-Alpes-Côte d'Azur - a connu un nombre de pics de pollution à l'ozone sans équivalent jusqu'alors. En effet, soixante pics de pollution à l'ozone dépassant les niveaux d'information et de recommandation, ont été enregistrés jusqu'au 23 septembre 2003, notamment dans les Bouches-du-Rhône et sur le pourtour de l'étang de Berre.
    La pollution à l'ozone est principalement liée à l'activité humaine et elle se traduit par des effets néfastes sur la santé. Les personnes âgées, les enfants et les asthmatiques y sont particulièrement sensibles. Cette pollution se développe sous l'action conjuguée du soleil, de la circulation des véhicules et des activités industrielles.
    Le 25 juin 2003, le Président de la République a proposé aux Français une charte de l'environnement adossée à la Constitution, qui consacre un droit : celui de vivre dans un environnement équilibré et favorable à la santé, et un devoir : celui de prendre part à l'amélioration de l'environnement. Nous devons en effet améliorer la qualité de l'air pour garantir aux générations futures un environnement préservé.
    Madame la ministre, quelles mesures envisagez-vous de prendre en prévision de l'été 2004 afin de réduire la production d'ozone ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député, nous avons vécu un été paradoxal : jamais les émissions des activités polluantes n'ont été aussi basses et jamais la pollution n'a été aussi élevée, sous le triple effet de l'ensoleillement, de la température et de l'absence totale de vent. Dans votre région, nous avons dépassé pendant cinquante-cinq jours le seuil d'information, avec les conséquences sur la santé que vous avez signalées.
    Quelles actions privilégions-nous ?
    D'abord, une action de fond : dès le mois de juin, j'ai élaboré un programme d'intervention qui nous permettra, d'ici à 2010, de diminuer par deux les précurseurs de l'ozone, les oxydes d'azote et les composés organiques volatiles. Les arrêtés sont prêts et nous sommes en négociation avec les autorités européennes en ce qui concerne les normes relatives aux automobiles.
    Le deuxième point concerne l'information du public. Je regrette de constater, à propos de la pollution par l'ozone, une certaine banalisation, car cette forme de pollution - vous l'avez signalé, Monsieur Diard - est extrêmement néfaste pour les asthmatiques et les cardiaques. Dès le début du mois d'août, nous avons multiplié les informations à ce sujet.
    Le troisième point porte sur les mesures d'urgence. Nous savons que leur efficacité est faible, puisqu'elles ne font baisser que de 3 % les précurseurs de l'ozone. Elles restent néanmoins nécessaires et il faut donc continuer de prévoir, dans les régions polluées, aussi bien la réduction des vitesses autorisées que celle de l'activité des usines polluantes.
    Bien entendu, monsieur le député, tout ce dispositif n'a de sens que s'il s'applique au niveau européen, et je ne peux que regretter que la France et le Luxembourg aient été les seuls Etats à anticiper sur les directives européennes. Car nous savons bien que, dans la région parisienne, par exemple, 50 % de la pollution par l'ozone vient d'Allemagne et d'Angleterre. C'est la raison pour laquelle j'alerterai mes collègues au prochain conseil européen de l'environnement et je ferai une communication sur ce sujet au conseil des ministres fin octobre.
    M. le président. Mes chers collègues, nous avons terminé cette première séance de questions et nous voici rassurés sur votre bonne forme.

2

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique (*) :
    Fixation de l'ordre du jour ;
    Discussion du projet de loi, n° 983, portant règlement définitif du budget de 2002 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 1089).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à seize heures.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT

    * Lettre de M. le secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement en date du 18 septembre 2003.