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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 8 OCTOBRE 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du mardi 7 octobre 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE

1.  Fin des missions de deux députés «...».
2.  Conséquences sanitaires et sociales de la canicule. - Discussion d'une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête «...».
M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

DISCUSSION GÉNÉRALE «...»

MM.
Claude Leteurtre,
Maxime Gremetz,
Pierre-Louis Fagniez,
Claude Evin,
Pierre Lasbordes,
Jean-Marie Le Guen,
Georges Colombier,
Mme
Paulette Guinchard-Kunstler,
M.
Jacques Domergue.
M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement.
Clôture de la discussion générale.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION TENDANT À LA CRÉATION
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE SUR LES CONSÉQUENCES
SANITAIRES ET SOCIALES DE LA CANICULE
Article unique «...»
VOTE SUR L'ARTICLE UNIQUE «...»

Adoption de l'article unique de la proposition de résolution.

CONSTITUTION DE LA COMMISSION D'ENQUÊTE «...»

M. le président.
3.  Ordre du jour de l'Assemblée «...».
4.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE
DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

FIN DES MISSIONS DE DEUX DÉPUTÉS

    M. le président. J'ai été informé par M. le Premier ministre que les missions temporaires précédemment confiées à M. Sébastien Huyghe, député du Nord, et à M. Jean-Claude Flory, député de l'Ardèche, ont pris fin, respectivement le 30 septembre et le 6 octobre 2003.

2

CONSÉQUENCES SANITAIRES ET SOCIALES
DE LA CANICULE

Discussion d'une proposition de résolution tendant
à la création d'une commission d'enquête

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires et sociales de la canicule (n° 1090).
    Le rapport de la commission porte sur les propositions de résolution de :
    - M. Jean-Marc Ayrault et plusieurs de ses collègues tendant à la création d'une commission d'enquête sur les dysfonctionnements du système de santé face à la canicule (n° 711) ;
    - M. Alain Bocquet et plusieurs de ses collègues tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires, économiques, sociales et environnementales de la canicule et sur la gestion par l'Etat de ses effets (n° 172) ;
    - M. Jacques Barrot tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires et sociales de la canicule (n° 1059) ;
    - M. Hervé Morin et plusieurs de ses collègues tendant à la création d'une commission d'enquête sur les causes et les conséquences humaines, politiques, économiques et environnementales de la canicule (n° 717).
    La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, mes chers collègues, notre pays est encore sous le choc de la crise sanitaire et sociale provoquée par un été torride et du nombre de victimes qui en est résulté. Son ampleur a été telle qu'il n'est guère surprenant que l'ensemble des groupes politiques représentés à l'Assemblée nationale aient déposé des propositions de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conséquences de la canicule.
    Ont ainsi été déposées les propositions suivantes : une proposition de résolution de M. Jean-Marc Ayrault, au nom du groupe socialiste, tendant à la création d'une commission d'enquête sur les dysfonctionnements du système de santé face à la canicule ; une proposition de résolution de M. Alain Bocquet, au nom du groupe des député-e-s communistes et républicains, tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires, économiques, sociales et environnementales de la canicule et sur la gestion par l'Etat de ses effets ; une proposition de résolution de M. Jacques Barrot, au nom du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires et sociales de la canicule ; enfin, une proposition de résolution de M. Hervé Morin, au nom du groupe Union pour la démocratie française, tendant à la création d'une commission d'enquête sur les causes et les conséquences humaines, politiques, économiques et environnementales de la canicule.
    Je ne vous ennuierai pas avec les questions de recevabilité : il nous suffit de savoir que toutes ces propositions sont juridiquement recevables.
    Dès lors, deux questions sont à trancher : est-il opportun de créer une commission d'enquête ? Si oui, quel doit être son champ d'investigation ?
    Sur le premier point, il n'existe aucun doute dans mon esprit : la création d'une commission d'enquête est non seulement opportune mais indispensable. On a parfois opposé la démarche lancée par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, consistant à mettre en place une mission d'information et la création d'une commission d'enquête. La première, au mieux ne servirait à rien, au pire ne serait qu'un alibi pour ne pas créer de commission d'enquête. Je m'inscris en faux contre ces deux assertions et je crois que les travaux de la mission d'information comme notre débat d'aujourd'hui montrent que ces craintes n'étaient pas fondées.
    Pourquoi une mission d'information ? Pourquoi dans des délais si brefs ?
    Sans attendre la rentrée parlementaire, le bureau de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a pris, le 26 août, la décision de créer une mission d'information sur la crise sanitaire et sociale déclenchée par la canicule. Cette mission avait pour double objectif de réunir les éléments d'information utiles notamment à la discussion du projet de loi de santé publique, en cours d'examen depuis la semaine dernière, et, éventuellement, du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, ainsi que d'éclairer notre assemblée sur l'utilité et sur le champ des travaux d'une éventuelle commission d'enquête. Ses onze membres, représentant l'ensemble des groupes politiques de notre assemblée, se sont donc vu confier la tâche de procéder à une première analyse de la crise et de proposer des pistes de réflexion afin d'éviter que ne se reproduise un tel drame.
    Pour ce faire, la mission a entamé le 11 septembre un cycle d'auditions qui s'est achevé le 19 septembre. Elle a procédé à trente-trois auditions et entendu quatre-vingt-une personnes : représentants des administrations concernées, services de secours, représentants des professions médicales, paramédicales et médico-sociales. Elle a rendu ses conclusions le 24 septembre dernier et son rapport de 1 602 pages est disponible depuis la semaine dernière.
    L'utilité de la mission me semble indéniable.
    Elle a tout d'abord débouché sur trente-cinq propositions concrètes dont plusieurs se sont traduites par des amendements de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales au projet de loi relatif à la santé publique, notamment quant à notre système de veille et d'alerte sanitaire. Ces mesures étaient urgentes et on ne pouvait pas attendre avril prochain - date de la fin des travaux d'une éventuelle commission d'enquête - pour les prendre.
    La mission jette également les premières bases d'une réflexion à plus long terme. Restons cependant modestes. La brièveté des délais ne permet pas, sur un sujet aussi grave et complexe, de prétendre tirer dès maintenant et de façon définitive l'ensemble des enseignements de la crise.
    Cette réserve étant faite, quelles sont, à ce stade de la réflexion, les principales conclusions ?
    Premièrement, la canicule a constitué une catastrophe naturelle d'une extrême gravité, mais également un phénomène inédit encore mal cerné.
    Deuxièmement, cette catastrophe, dont on peut se demander si elle était ou non prévisible, n'a en tout cas été ni anticipée ni détectée de façon rapide. Elle pose de façon criante la question de la qualité et de l'efficacité de notre système de veille et d'alerte sanitaire.
    Troisièmement, elle a constitué un défi redoutable pour notre système sanitaire et social, dont elle a rappelé ou révélé certaines faiblesses. Sa capacité d'adaptation, réelle mais mise à rude épreuve, appelle sans aucun doute des mesures fortes. La canicule a révélé une crise au moins autant sociale que sanitaire.
    Enfin, les comptes rendus intégraux des trente-trois auditions et les quelque mille deux cent pages de documents annexés permettent à chacun d'entre nous, au-delà des conclusions de la mission, de disposer de l'information brute sur le drame et sa gestion, et d'aborder le présent débat en toute transparence.
    La nécessité de créer une commission d'enquête n'en est pas moins évidente. On ne saurait en effet considérer que le travail est achevé. Tel est d'ailleurs l'un des principaux enseignements de la mission d'information, et ce constat est partagé par l'ensemble de ses membres.
    La commission d'enquête présente, à plusieurs titres, un intérêt majeur.
    Son horizon temporel n'est pas le même et les délais dont elle dispose devraient lui permettre d'aborder de façon plus fouillée l'ensemble des thèmes abordés par la mission d'information. Elle pourra également étudier la pertinence de telle ou telle piste de réflexion proposée par la mission.
    La commission d'enquête disposera de données pour le moment inaccessibles, telles les études épidémiologiques en cours de réalisation. Celles-ci permettront notamment d'apporter des réponses à de nombreuses questions encore en suspens. Ainsi, la mission ne disposait même pas du rapport de l'INSERM sur la surmortalité et encore moins de l'analyse précise des causes de surmortalité, du profil des victimes.
    Elle pourra, notamment grâce aux moyens d'investigation dont elle dispose, éclairer certaines contradictions relevées lors des auditions réalisées par la mission. Je rappelle que les personnes qu'elle décidera d'entendre déposeront sous serment et devront répondre à ses convocations.
    Elle pourra, enfin, aborder des thèmes qui n'ont été qu'effleurés, voire simplement évoqués, par la mission d'information. On citera à titre d'exemple la manière dont nos voisins européens ont traversé la même période, la question du lien entre le climat et la santé, l'incidence sanitaire de la canicule, au-delà des décès qu'elle a provoqués, ses effets sur les actifs et son incidence sur les conditions de travail.
    L'unanimité s'est donc rapidement faite au sein de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur l'utilité de créer une commission d'enquête. Restait à en préciser le champ.
    Quel doit être le champ de la commission d'enquête ?
    Les quatre propositions de résolution portaient toutes sur la canicule, d'où leur examen conjoint. Elles n'en présentaient pas moins des différences significatives quant au champ d'investigation proposé.
    La proposition de résolution de M. Jean-Marc Ayrault portait sur « les dysfonctionnements du système de santé face à la canicule ». Elle semblait trop centrée sur la dimension sanitaire de la crise. Or les travaux de la mission d'information ont montré à quel point cette crise était autant sociale que sanitaire. Le champ de cette proposition est donc apparu comme trop restrictif.
    La proposition de résolution de M. Alain Bocquet proposait, quant à elle, de faire porter les travaux « sur les conséquences sanitaires, économiques, sociales et environnementales de la canicule et sur la gestion par l'Etat de ses effets ». A la différence de la précédente, son champ d'investigation paraissait trop large. Etaient ainsi évoquées non seulement la politique de santé et de protection sociale, mais également « les dispositions mises en oeuvre pour la sécurité civile, la lutte contre les incendies, la protection des personnes et des biens, la production d'énergie électrique et le respect des écosystèmes », ainsi que les conséquences de la canicule pour l'agriculture et l'élevage. Cette observation valait également pour la proposition de résolution de M. Hervé Morin, dont le champ était extrêmement large.
    Il a semblé à la commission que la canicule de 2003 n'était en rien comparable aux canicules antérieures. Il s'agit avant tout d'un drame humain. C'est bien la dimension sanitaire et sociale de ce drame qui doit être au coeur des travaux de la commission d'enquête. Les questions ainsi soulevées sont déjà suffisamment nombreuses et complexes pour que l'on ne courre pas le risque de la dispersion.
    En conséquence, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a retenu, comme base de travail pour la commission d'enquête, le champ d'investigation défini dans la proposition de résolution de M. Jacques Barrot, c'est-à-dire « les conséquences sanitaires et sociales de la canicule ». Toutefois, elle a adopté un amendement de M. Claude Evin...
    M. Claude Evin. Et des membres du groupe socialiste !
    M. Denis Jacquat, rapporteur. ... à l'article unique de la proposition de résolution de M. Barrot, amendement étendant le champ de la commission d'enquête « à l'analyse des dysfonctionnements du système de santé et à la recherche des responsabilités individuelles et collectives à l'origine du manque de réactivité des pouvoirs publics ». La commission a souhaité marquer ainsi la volonté, partagée par l'ensemble des groupes, d'établir un diagnostic complet du déroulement de la crise.
    C'est dans cet esprit, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a adopté, à l'unanimité, le texte de la proposition de résolution qui vous est soumise et que j'invite naturellement l'Assemblée à adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française, ainsi que sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Excellent !

Discussion générale

    M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Claude Leteurtre, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Claude Leteurtre. Comment un si bel été a-t-il pu, en quelques jours, devenir un été meutrier ? C'est une interrogation à laquelle nous avons le devoir de répondre. Ce devoir, nous l'avons d'abord vis-à-vis des 15 000 personnes décédées. C'est une question de mémoire et de respect.
    Ma première réaction, face à ces vies écourtées, fut un profond malaise et une douloureuse interrogation. Comment, dans un pays comme le nôtre dont chacun se plaît à dire qu'il possède le meilleur système de santé au monde, une telle hécatombe a-t-elle pu se produire ? Comment les plus fragilisés d'entre nous peuvent-ils être à ce point dans la solitude et mourir ainsi d'un mal qui aurait pu être évité avec des gestes simples ?
    A ces questions, la réponse réside d'abord dans une responsabilité collective. C'est sans aucun doute toute notre société qui a fauté. C'est le résultat de notre refus collectif d'accepter la vieillesse, parce qu'elle nous plonge inévitablement dans la vision de la mort, cette mort que notre société a soigneusement dissimulée, aseptisée, éloignée le plus possible de son quotidien. Nos modèles de vie refusent la vieillesse, la rejettent comme une déchéance, comme une échéance insupportable. Et pourtant, n'oublions pas qu'elle nous rattrapera tous un jour ! Certes, nous serons plus nombreux à vieillir ensemble, mais la solitude sera-t-elle vaincue pour autant ? La réponse est à l'évidence incertaine, liée en grande partie à la place que nos enfants voudront bien, ou pourront, accorder aux générations qui les précèdent.
    Notre comportement face à cet avenir incertain est d'ailleurs, par bien des côtés, irresponsable. Comment nos enfants pourront-ils être capables demain de dégager les moyens financiers indispensables au bien-être d'une population qui sera de plus en plus vieillissante, alors que le budget de notre pays ne cesse d'accroître un endettement qu'il faudra bien que les générations futures remboursent ? Mais nous, nous n'avons pas cette excuse : 15 000 vies abrégées, c'est réellement insupportable ! Alors, reconnaissons-le, il existe une responsabilité collective de notre société, mais en rester là serait trop court. Il faut rechercher les dysfonctionnements qui ont conduit à une telle hécatombe.
    La rigueur doit l'emporter sur la passion ou la mauvaise foi. Notre mission parlementaire n'a pas eu de renseignements statistiques. Quel paradoxe ! Alors que, le lendemain d'un match de football, on est capable de connaître précisément, quasiment à l'unité près, le nombre de téléspectateurs, il a fallu deux mois pour connaître l'ampleur de ce deuil national. Il est fondamental de savoir avec précision où sont survenus les décès ou, mieux, d'où venaient les personnes décédées : de leur domicile ou d'un établissement. S'agissait-il de personnes complètement isolées, avec ou sans APA ? Quelle pathologie, préexistante ou non, présentaient-elles ? Et clairement, sans vouloir être morbide, peut-on évaluer le nombre de semaines, de mois ou même d'années perdus ? Cette rigueur scientifique est indispensable pour alimenter le devoir de vérité.
    Notre pays dispose d'une institution, l'Institut national de veille sanitaire - l'INVS -, dont le rôle est d'anticiper les scenarii d'urgence sanitaire. Or, de telles catastrophes climatiques sont déjà intervenues à Marseille en 1983, à Athènes en 1987 et à Chicago en 1995. De chacune de ces crises, des conséquences ont été tirées localement, mais manifestement l'INVS n'a pas su en tenir compte, alors que la loi lui donne pour mission de rassembler, d'analyser et d'actualiser les connaissances sur les risques sanitaires, leurs causes et leurs évolutions. On ne saurait être plus clair. Dans cette affaire, l'INVS a laissé l'incrédulité gagner sur la raison et, en l'espèce, c'est un constat d'échec.
    A l'opposé, sur le terrain, le secteur sanitaire a joué son rôle. En ville, les organisations comme SOS Médecins ont fait face aux besoins du milieu urbain, comme à l'accoutumée chaque été. Elles ont bien précisé que toutes les demandes ont été satisfaites. En milieu rural et semi-rural, à quelques exceptions près, la permanence des soins a, là aussi, été assurée. A l'hôpital, les services d'urgence, malheureusement souvent habitués aux improvisations les plus démentielles, n'ont pas failli un seul instant. Leur honneur a été d'assumer avec un dévouement exemplaire, malgré l'absence de lits d'aval disponibles. Il y a là, dans les hôpitaux, un problème parfaitement identifié depuis de nombreuses années. Je veux parler de la nécessité de créer des services de médecine polyvalente où trouveront place les médecins d'urgence et les gériatres. Ce ne serait, d'ailleurs, qu'une juste reconnaissance pour ces professionnels. Cette réorganisation aurait en outre l'avantage de ne pas trop porter ombrage à certaines féodalités existantes et n'entraînerait pas de surcoûts, bien au contraire.
    Force est de s'interroger également sur les conséquences de la mise en place des 35 heures dans le milieu hospitalier, dont tout le monde s'accorde à dire qu'elle est un véritable casse-tête en termes d'organisation des services et, bien évidemment, de permanence des soins. Cette mesure explique la fermeture programmée, mais excessive, de lits d'hospitalisation au cours de l'été. De la même façon, on peut s'interroger sur les conséqences de ces 35 heures sur le personnel présent dans les maisons de retraite pendant cette période de vacances.
    Dans le domaine social, certaines questions devront être abordées. Il semble aujourd'hui que la surmortalité ait surtout frappé les grandes villes. Là encore, c'est collectivement que nous avons fauté. Dans le milieu rural, la solidarité de proximité a joué. A l'opposé, dans les grandes villes, c'est l'anonymat, la solitude, l'abandon et l'indifférence qui ont tué. Insidieusement, au cours des années, les quartiers sensibles des villes ont perdu leur âme. On le constatait avec le désoeuvrement de la jeunesse. Sans que personne n'y prête attention, les personnes âgées se sont enfoncées dans la solitude et la détresse.
    Des instruments existent sur le terrain pour assurer l'indispensable coordination entre le médical et le social. Il s'agit des CLIC - les centres locaux d'information et de coordination gérontologiques -, mais ils sont encore insuffisamment développés. Mon sentiment est qu'il faut renforcer au niveau local ces instruments de coordination entre tous les intervenants auprès des personnes âgées, qu'il s'agisse des médecins, des infirmières, des professions paramédicales, des aides-soignantes ou des aides à domicile. Se pose également le problème de la coordination, au niveau régional, entre le sanitaire et le médico-social. Cela signifie-t-il articulation entre l'ARH et la DRASS ou compétence unique pour un seul pilote ? Beau sujet de réflexion à proposer lors de l'examen du projet de loi sur la santé publique !
    Dans cette rubrique de recherche des faits établis, au cours des auditions, un élément essentiel s'est trouvé mis en évidence et non contesté. Il est certes admis que les prévisions météorologiques sont habituellement fiables à trois jours, mais, en période d'été, lorsqu'un anticyclone est durablement installé sur l'Europe, les prévisions sont globalement établies pour dix jours. D'ailleurs, rappelons-nous les mises en garde pendant tout le mois de juillet ! Alors, pourquoi une telle incrédulité générale devant l'importance de ce phénomène météorologique qui n'est pas nouveau et qui, de plus, était annoncé ? Pourquoi cette totale absence d'anticipation ?
    Le temps est donc venu de trouver des explications à ces dysfonctionnements et d'y remédier. Je ne crois pas qu'il faille chercher des responsables, encore moins des coupables. Ceux qui cherchent des boucs émissaires sont dans l'erreur. Je le pense d'autant plus que l'événement s'est produit dans une période où la France est absente. Nous sommes dans le domaine de l'exception culturelle : du 1er au 20 août, notre pays somnole. Plus qu'à n'importe quel moment de l'année, la France centralisée arrête de fonctionner. L'information remonte difficilement et, lorsqu'elle arrive à destination, il n'y a plus personne pour la recevoir, l'interpréter, la transmettre aux services concernés et prendre les mesures nécessaires. Cette vacuité administrative et politique devait un jour conduire à une telle catastrophe.
    Cela étant, comme trop souvent dans notre pays, nous réagissons dans l'urgence. Je crois pourtant très profondément qu'il nous faut, dans cette affaire qui est aussi le symptôme d'une crise de notre société, prendre le temps de la réflexion. Ne nous leurrons pas, le vrai problème est celui du respect que nous devons aux personnes âgées. C'est d'autant plus évident que l'on n'a nullement de surmortalité due à la canicule chez les nourrissons. Ils sont pourtant plus sensibles encore que les personnes âgées au phénomène de déshydratation dû à la chaleur. Mais eux, fort heureusement, ils étaient entourés !
    C'est donc bien l'indifférence qui a tué. Au-delà des recommandations, en termes d'organisation, que sera amenée à prévoir notre commission d'enquête, cette catastrophe sanitaire doit être l'occasion d'ouvrir un plus vaste débat sur la place que nous acceptons de donner aux personnes âgées dans la France d'aujourd'hui et de demain. C'est aussi un choix de société qu'il faut aborder. La France est-elle prête à tirer les conséquences des progrès de son système de santé, qui permet chaque année de gagner en espérance de vie ?
    La mission parlementaire d'information sur les conséquences de la crise sanitaire et sociale liée à la canicule a bien identifié les dysfonctionnements, et cela d'autant mieux qu'ils ne sont pas nouveaux et qu'il ne s'agit pas seulement d'une question de moyens financiers. A la commission d'enquête parlementaire à présent de faire des propositions.
    L'UDF votera donc sans aucune hésitation la proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires et sociales de la canicule. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le rapporteur, je vous prie de bien vouloir m'excuser, mais les embouteillages m'ont empêché d'arriver à temps pour entendre votre excellente intervention,...
    M. Denis Jacquat, rapporteur. Merci !
    M. Maxime Gremetz. ... que je nuancerai toutefois, car je sais à peu près ce que vous avez dû dire.
    L'été 2003 restera gravé dans toutes les mémoires comme un moment extrêmement douloureux. Notre pays a traversé en ce mois d'août une crise sanitaire et sociale sans précédent, mêlée d'un fort sentiment de flottement. Flottement parce que les professionnels de santé, exemplaires, tiraient la sonnette d'alarme pendant que les pouvoirs publics, absents dans un premier temps, minimisant la situation dans un second temps, n'ont pas pris la mesure de la catastrophe qui se déroulait pourtant sous leurs yeux.
    C'est parce que la situation a mal été appréhendée, malgré des signaux persistants, qu'un drame humain a eu lieu : 15 000 morts, peut-être 20 000. Des personnes âgées isolées, pour la grande majorité d'entre elles, pauvres et vivant en milieu urbain pour beaucoup, sont les principales victimes. L'ampleur du choc nous pousse impérativement à faire toute la lumière sur ce qui s'est réellement passé, car, je vous le dis avec gravité, nous ne nous satisferons pas de conclusions trop faciles comme nous en avons entendues : « C'est la faute aux familles qui ne s'occupent pas de leurs aînés ; c'est la faute aux hospitaliers qui sont aux 35 heures ; c'est la faute aux médecins partis en congé. » Ou encore : « C'est la faute à la société qui ne sait pas faire preuve de solidarité. »
    Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce qui s'est passé est bien plus sérieux. Les raisons sont bien plus complexes et les enjeux qu'il va nous falloir appréhender beaucoup plus larges. La mission d'information qui a commencé à travailler sur ce sujet a mis en évidence l'ampleur de la tâche qui nous attend si nous voulons sérieusement tirer tous les enseignements de ce drame. Cette mission, conduite avec sérieux et honnêteté par notre collègue Denis Jacquat, a travaillé à un rythme élevé durant le temps très limité qui lui était imparti. Ces premiers travaux, avec les premiers documents qui nous ont été transmis - ils sont importants -, nous ont beaucoup appris en données précises sur le déroulement du drame sanitaire. Toutefois, ce travail reste incomplet, car nous ne sommes pas encore, loin s'en faut, en mesure de connaître la réalité sur bien des aspects, encore moins de déduire des enseignements définitifs nous permettant de tirer toutes les conclusions.
    En effet, et je l'ai déjà dit sans esprit de polémique, car il ne peut y avoir de polémique en pareilles circonstances, les travaux de la mission ont montré leurs limites. Son rapport minimise la responsabilité du Gouvernement dans son ensemble. Si le rapport du docteur Lalande était relatif à la responsabilité des administrations dans le drame, n'oublions pas qu'il avait uniquement pour objet les dysfonctionnements administratifs. En revanche, le rapport Jacquat porte avec évidence la responsabilité au niveau ministériel. Effectivement, à la lumière de ces premières auditions, il convient de s'interroger légitimement sur certains « non-agissements » de certains ministres. Ce qui me fait dire - bien entendu, le rapporteur, M. Jacquat, ne peut le dire, car il est tenu par un devoir de réserve bien compréhensible -, mais la commission d'enquête nous éclairera davantage, qu'il y a eu une irresponsabilité collective, une absence de gouvernance pendant que les urgentistes, les pompiers, les personnels hospitaliers, les médecins généralistes, les personnels médico-sociaux se dépensaient sans compter, en improvisant fort à propos dans l'action.
    Par ailleurs, l'écoute attentive des personnes auditionnées atteste que la situation est explosive et latente depuis plusieurs années dans les hôpitaux, les services d'urgences, les maisons de retraite. Explosive faute de moyens humains et financiers, comme l'a d'ailleurs souligné avec force M. Jean-Jacques Tregoat, nouveau directeur de la direction générale de l'action sociale. Tels sont les premiers éléments de réflexion qui nous apparaissent à l'issue de cette mission et qui invitent tout naturellement - tout le monde en convient - à approfondir l'investigation et à poursuivre la recherche des raisons de ce drame. C'est pourquoi nous soutenons sans réserves la création de cette commission d'enquête parlementaire, que nous avions demandée dès le 20 août tant nous avions pris la mesure de ce qui était en train de se passer sous nos yeux.
    Toutefois, cette commission d'enquête, telle que nous la concevons, ne peut pas se limiter aux faiblesses de gouvernance et aux problèmes rencontrés par notre système de santé. Son objet doit être beaucoup plus large. Choqués par les dysfonctionnements et carences découlant principalement de l'insuffisance de moyens disponibles pour les services publics, préoccupés par les conditions d'intervention et le temps de réaction des pouvoirs publics, sceptiques quant à la sincérité et à la transparence des informations qui leur ont été délivrées au fur et à mesure de l'aggravation de ces situations, nos concitoyens exigent aujourd'hui clairement des responsables politiques que soit établi un bilan exhaustif et précis des événements météorologiques, de la façon dont ils ont été, ou non, analysés et pris en compte, et des conséquences humaines, sociales, financières qui en ont résulté, sachant notamment que de nouvelles victimes risquent malheureusement de venir s'ajouter dans les prochaines semaines - je devrais dire : « s'ajoutent chaque jour » - au nombre considérable déjà relevé et qu'il faudra définitivement préciser.
    Ce sont d'abord, bien évidemment, les questions de santé qui sont au coeur des préoccupations de tous et qui suscitent la plus vive et la plus légitime émotion. Comment en effet ne pas s'interroger, face au nombre considérable de décès survenus, sur le lien direct de cette situation avec la pertinence des politiques successives retenues en matière de santé publique, qui se sont donné pour objectif premier de réduire les dépenses au maximum au lieu de rechercher dans la mise à contribution de nouvelles sources de financement les réponses à l'ensemble et à la diversité des besoins ?
    Alors que la taxation des revenus financiers des entreprises au même taux que les salariés dégagerait quinze milliards d'euros et que la suppression de la taxe sur les salaires acquittée par les hôpitaux permettrait de financer 50 000 emplois, c'est au contraire la démarche régressive retenue par le tristement célèbre plan de 1995 - jamais remise en cause sur le fond, malheureusement, malgré nos demandes - qui continue de s'appliquer, malgré les mises en garde lancées par les milieux médicaux, les syndicats et associations du monde de la santé et les usagers, mises en garde exprimées par de nombreux mouvements sociaux ainsi que dans les interventions du groupe communiste à l'Assemblée nationale. L'acharnement mis à réduire les moyens de la santé, la disparition d'hôpitaux de proximité, les milliers de postes de médecins et d'infirmières ni financés ni pourvus, les milliers de lits supprimés, le gel de crédits d'Etat pour la modernisation des maisons de retraite, toutes les déficiences accumulées depuis des années au nom d'une « maîtrise comptable » de la santé des Français, dont témoigne également le désengagement de l'Etat du financement de l'allocation personnalisée d'autonomie, ont pesé très lourd tout au long des ces semaines de canicule.
    Je l'ai dit : l'argument avancé d'une solidarité insuffisante ou perdue des générations entre elles n'est certes pas sans fondement dans la société ultralibérale que nourrit la politique gouvernementale elle-même et qui conduit à l'exclusion, à la division, au « chacun pour soi » à force de déshumanisation des rapports sociaux. Mais cet argument visant à culpabiliser les populations est-il recevable lorsque des milliers de morts surviennent ainsi, brutalement, en quelques semaines ? A l'évidence, les responsabilités sont à rechercher non pas du côté de nos concitoyens, mais bien davantage auprès des pouvoirs publics dans leur conduite des politiques de santé et de protection sociale depuis vingt ans.
    Oui, ce sont bien les choix politiques qui sont en cause ! Ils l'étaient hier, ils le sont aujourd'hui. Et il n'y avait par conséquent pas de fatalité à ces drames humains qui ne sont pas survenus comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. Beaucoup auraient sans doute pu et dû être évités, ainsi que n'ont pas manqué d'en donner témoignage des intervenants du secteur de la santé : médecins, urgentistes, personnels soignants et sociaux.
    Par ailleurs, beaucoup de problèmes économiques, agricoles ou environnementaux résultant de l'exceptionnelle sécheresse auraient dû être affrontés avec davantage de moyens humains ou matériels. Il y a lieu, à ce sujet, de s'interroger sur les carences des politiques publiques trop longtemps mises en oeuvre dans ces divers domaines.
    Cela concerne d'abord les ravages entraînés par les incendies dévastant plus de 80 000 hectares de forêts et plantations du littoral et de l'arrière-pays méditerranéen ou de la Corse. Ces situations ne sont pas nouvelles et font s'interroger, très au-delà des responsabilités directes de pyromanes ou d'incendiaires qu'il faut identifier et poursuivre, sur l'insuffisance criante des décisions engagées alors que cela fait des années que les régions méditerranéennes brûlent.
    Il est nécessaire, là encore, de tirer avec l'ensemble des parties concernées - élus locaux, populations sinistrées, sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, personnels de l'équipement et de l'Office national des forêts dont on diminue les effectifs -, un bilan des manques qui ont pu être relevés, et qui ont directement nui à l'efficacité des luttes contre le feu, engagées avec un extraordinaire courage.
    C'est là encore la politique de service public et d'aménagement du territoire de l'Etat qui est au centre du débat suscité par ces catastrophes et par l'impératif d'en éviter le retour.
    Ces interrogations, qui incitent à poser la question de la contribution de l'Union européenne au titre de la solidarité financière avec les populations sinistrées, concernent également d'autres secteurs de la vie nationale. Celui d'abord de la production d'énergie à l'heure où le Gouvernement ne fait pas mystère de sa volonté de poursuivre avec EDF et GDF un programme de privatisation largement engagé, et la casse du service public.
    Il est indispensable, par conséquent, de faire le point sur les conditions dans lesquelles a été assurée, au coeur de cet été, la production d'énergie indispensable au fonctionnement du pays, à la consommation des ménages et à la vie des entreprises.
    De même, il convient que soit établi et éclairé le problème posé par les exigences de sécurité concernant les centrales électriques classiques et nucléaires. Quelles auront été les conséquences sur les écosystèmes, sur la faune et la flore aquatiques, des dérogations accordées par l'Etat à EDF jusqu'au 30 septembre de cette année pour le rejet des eaux de refroidissement des centrales dans les fleuves ? Quelle politique de gestion des eaux superficielles et du débit des fleuves permettra d'éviter à l'avenir les graves difficultés que nous avons constatées ?
    Enfin, l'agriculture française a été directement frappée par la durée et la violence des phénomènes de sécheresse et de canicule. Les directives exceptionnelles données par des préfectures pour l'enfouissement d'un nombre considérable d'animaux d'élevage morts dans cette période témoignent d'un problème qu'il convient de cerner tant dans ses causes que dans ses conséquences, en particulier pour nombre d'exploitants que préoccupe, en outre, une réorientation de la politique agricole commune favorisant, une fois de plus, la concentration des exploitations pour mieux répondre aux exigences de l'agrobusiness.
    La France a dû affronter au cours de cet été une série de drames et de difficultés qui révèle, à mon sens, l'insuffisance et l'inadéquation des politiques suivies, d'abord en matière de santé et de protection sociale ; ensuite en matière de sécurité civile, de production d'énergie, d'indépendance énergétique et de préservation des écosystèmes ; enfin, pour s'en tenir à des domaines essentiels de la vie du pays, en matière agricole.
    C'est pourquoi les député-e-s communistes et républicains sollicitent la constitution d'une commission d'enquête parlementaire chargée d'investir l'ensemble de ces questions, pour contribuer à l'établissement d'un bilan de ces événements, d'une exceptionnelle gravité et qui ont été douloureusement ressentis par nos concitoyens. Leurs conséquences humaines, sociales, économiques et budgétaires doivent être identifiées d'urgence afin que le Gouvernement prenne les initiatives législatives, financières ou politiques, y compris en direction de l'Union européenne, permettant d'en juguler les suites et d'en éviter le renouvellement.
    S'il est bien normal que cette commission d'enquête s'attache dans un premier temps aux conséquences sanitaires de la canicule de l'été 2003, il conviendra également de mener une réflexion sur les autres catastrophes de cette période, tout aussi dramatiques et préoccupantes pour l'avenir de notre société.
    Je le répète : nous nous sommes prononcés dès le 20 août. Nous avons demandé la création d'une commission d'enquête parlementaire. Nous avons ensuite travaillé sérieusement au sein de la mission d'information parlementaire. Nous proposons donc de voter le principe de cette commission d'enquête parlementaire pour poursuivre et amplifier le travail que nous avons commencé.
    M. le président. La parole est à M. Pierre-Louis Fagniez, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Pierre-Louis Fagniez. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, c'était il y a tout juste deux mois, nous connaissions en France, pour la première fois, une catastrophe sanitaire liée à une canicule exceptionnelle. Les images fortes et dures restent dans notre mémoire et l'on ne peut s'empêcher de penser aux jours et aux nuits de ces personnes âgées qui, lentement, se sont éteintes parce qu'il faisait trop chaud. Brutalement, nous avons découvert que la France savait répondre au froid mais pas au chaud.
    Dans ce pays tempéré, la chaleur de l'été représente un bienfait, synonyme de bien-être et de liberté. Elle est attendue comme le meilleur moment de l'année. Que l'on pense aux grandes vacances des enfants ou aux rhumatismes des personnes âgées, chaque âge y trouve sa part de bonheur.
    Cela explique sans doute pourquoi les circulaires adressées aux DDASS en juillet 2002 et en mai 2003 par le secrétaire d'Etat aux personnes âgées Hubert Falco n'ont eu aucun effet tangible. Pourtant, elles lançaient une alerte forte en direction des professionnels sur les risques encourus par les personnes âgées en période de forte chaleur.
    M. Claude Evin. Une alerte forte : il ne faut pas exagérer !
    M. Pierre-Louis Fagniez. En 2002, ce fut sans conséquence, monsieur Evin, en 2003, ce fut dramatique.
    Dans cet hémicycle, les députés du groupe de l'UMP se sont parfaitement reconnus en François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, lorsque, en réponse à une question de Mme Paulette Guinchard-Kunstler, il a déclaré au nom du Gouvernement : « La nation n'oubliera pas ceux qui sont morts et pense à la douleur de leurs familles. Je veux dire toute notre gratitude aux personnels de santé qui ont fait face à ce drame. »
    C'est vrai que la détresse des victimes a déclenché un formidable mouvement de solidarité et de compassion. Le dévouement et la compétence des personnels des établissements pour personnes âgées, des hôpitaux, des services d'urgence et de secours, des associations et des nombreux bénévoles anonymes, accourus dans cette rude épreuve, doivent être soulignés. C'est un témoin très réconfortant de la capacité de réaction de notre pays. Dans son ensemble, le système d'urgence, avec toutes les difficultés qu'on lui connaît, a répondu à cette demande brutale et imprévisible.
    Avant cette épidémie climatique, on n'avait l'expérience que des ravages infectieux et toxiques. La brutalité du phénomène nous a tous pris au dépourvu.
    Par réaction émotive mal maîtrisée, certains ont cédé à la tentation d'une polémique, polémique indigne au regard de la souffrance des familles, polémique en complet décalage avec les nécessités du moment. La polémique ne pouvait conduire qu'au réflexe classique, la recherche de boucs émissaires. Les cibles ont été nombreuses, mais la cible la plus commode, celle qui permettait à tous de s'exonérer de toute responsabilité, c'était évidemment le ministre de la santé.
    M. Maxime Gremetz. Mais non !
    M. Pierre-Louis Fagniez. Nous tenons à rendre hommage à Jean-François Mattei d'avoir accepté de servir de bouclier moral pour l'ensemble du pays sous le choc.
    M. Alain Néri. Il ne l'a pas fait exprès ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Pierre-Louis Fagniez. Il l'a fait volontairement. Il a accepté le rôle de bouclier, pour vous comme pour moi ! Sous les flèches d'adversaires inconséquents, il a gardé son calme et s'est entièrement consacré à ses responsabilités de ministre et à la recherche de la vérité.
    Jean-François Mattei a, dans les délais les plus brefs, demandé aux experts du CDC - le Center of disease control - d'Atlanta de venir au ministère de la santé exposer les conclusions qu'ils avaient tirées de la canicule meurtrière survenue à Chicago en 1996. Il s'était agi, là aussi, d'un drame ayant entraîné des milliers de morts. Or, après l'onde de choc initiale, il était apparu que, dans cet Etat pourtant bien pourvu en moyens humains et matériels, nombre de décès étaient inévitables. Et, finalement, la recommandation la plus expédiente est de placer les personnes âgées dans un local climatisé trois heures par jour afin de casser le rythme d'exposition à la chaleur, celle-ci sévissant autant le jour que la nuit.
    Le ministre de la santé a aussi immédiatement commandé à l'IGAS un premier rapport dans l'urgence, sous la direction du docteur Françoise Lalande. Parallèlement, un rapport de l'INSERM a été rendu public le 25 septembre. Il en ressort que 14 802 décès ont été enregistrés entre le 1er et le 20 août, ce qui correspond à une surmortalité globale de 60 %. Cette surmortalité, qui a surtout touché les personnes de plus de soixante-quinze ans, est apparue très inégalement répartie sur l'ensemble du territoire, avec deux pics : 127 % à Paris et 171 % dans le Val-de-Marne. Les décès sont survenus pour 45 % dans les hôpitaux et cliniques, 35 % à domicile et 20 % dans les maisons de retraite.
    Outre la décompensation d'affections chroniques, les causes principales de décès sont : la déshydratation, le coup de chaleur et l'hyperthermie.
    Ces faits objectifs attestent du caractère exceptionnel de cette canicule, même si on la compare à celle de 1983 et 1976, où pourtant une surmortalité notable a été un peu oubliée. Aussi loin que l'on remonte dans les annales, on ne retrouve pas d'exemple d'une telle intolérance de la population française à la chaleur ; sinon on ne garderait pas de l'année 1947, comme seuls souvenirs, la qualité du vin et le triomphe de Jean Robic dans le Tour de France. (Sourires.)
    Plus sérieusement, c'est le rôle du Parlement de chercher à faire la lumière sur la spécificité de l'année 2003. Il faut tout mettre en oeuvre pour satisfaire à un devoir de mémoire et répondre aux interrogations de l'avenir.
    Sous l'impulsion du président Jean-Michel Dubernard, une mission d'information, présidée excellemment par Denis Jacquat,...
    M. Denis Jacquat, rapporteur. Merci !
    M. Pierre-Louis Fagniez. ... et composée de membres de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de notre assemblée, s'est mise au travail dès le 26 août et a remis son rapport le 24 septembre. Soyez-en remercié, monsieur le rapporteur.
    Au travers de nombreuses auditions, dont celles des ministres François Fillon, Jean-François Mattei et Hubert Falco,...
    M. Maxime Gremetz. Mais pas Sarkozy !
    M. Pierre-Louis Fagniez. ... les travaux de la mission ont permis l'adoption d'amendements au projet de loi relatif à la santé publique dont nous discutons ces jours-ci, visant notamment à améliorer notre dispositif d'alerte sanitaire.
    D'évidence, cette mission n'a pas disposé du temps nécessaire pour accomplir le travail exhaustif qu'elle souhaitait.
    C'est pourquoi le président Jacques Barrot a déposé au nom du groupe UMP cette proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires et sociales de la canicule.
    M. Maxime Gremetz. Il l'a fait après bien d'autres !
    M. Pierre-Louis Fagniez. Il nous semble que trois objectifs principaux méritent d'être retenus. Premièrement, il faut analyser le fonctionnement des systèmes d'alerte sanitaire durant la canicule. Les changements climatiques et environnementaux en cours pouvant développer des vagues de chaleur, il faut certainement faire une place nouvelle à la dimension climatique dans la définition de la politique du risque sanitaire. La mission d'information a souligné clairement l'importance particulière qu'il convenait d'accorder à la pollution. Tout cela justifie sûrement une réflexion, au minimum à l'échelle européenne. Rappelons-nous que l'Italie du Nord et l'Allemagne ont connu des effets de la canicule comparables à ceux de la France.
    Deuxièmement, il convient de s'interroger sur les effets du vieillissement sur notre société. Le nombre de décès à domicile implique une meilleure prise en charge de proximité. Cela passe par une coordination efficace entre les différents acteurs des services sanitaires et sociaux : acteurs dont il faudrait encourager la vocation par des mesures incitatives.
    Troisièmement, il faut accorder une attention volontariste à l'environnement des personnes âgées et dépendantes. Les grandes lignes du plan gouvernemental en faveur des personnes âgées ainsi que les moyens supplémentaires sans précédent consacrés à la rénovation des urgences vont dans ce sens.
    Les députés du groupe UMP veulent que cette commission d'enquête réponde complètement aux légitimes interrogations de nos concitoyens. Ils l'abordent avec un souci de totale objectivité, seule garante d'efficacité. Ils souhaitent que les travaux de la commission s'accomplissent dans un climat apaisé et serein, comme l'a encore rappelé ce matin sur les ondes notre président, Jean-Louis Debré. Le président de l'Assemblée nationale peut compter sur le groupe UMP. Nous ferons tout pour que cette commission d'enquête soit à la hauteur de l'enjeu, enjeu résumé avec beaucoup de sensibilité dans une chanson de Carla Bruni :
    « Il faudrait que tout le monde réclame
    « Auprès des autorités
    « Une loi contre toute notre solitude
    « Une loi contre toute notre indifférence
    « Et que personne ne soit oublié. » (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Claude Evin, pour le groupe socialiste.
    M. Claude Evin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la nécessité de créer une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires et sociales de la canicule ne fait plus aujourd'hui débat et le groupe socialiste s'en réjouit, lui qui a été le premier à la demander dès la mi-août.
    M. Jean-Marie Le Guen. Eh oui !
    M. Claude Evin. Cette commission d'enquête va donc être créée. Nous pouvons toutefois regretter qu'elle ne l'ait point été plus tôt. Devant l'ampleur des effets de cette canicule et l'émotion que ses conséquences ont soulevée, nous aurions pu imaginer qu'une session extraordinaire soit réunie afin de décider de cette création. La majorité de notre assemblée a d'abord préféré créer une mission d'information. Or je ne pense pas que celle-ci ait rempli l'objectif qu'elle s'était fixé, tant les délais impartis ainsi que ses conditions de travail ne pouvaient lui permettre d'approfondir les auditions auxquelles elle a procédé. Elle n'a pas non plus permis d'ailleurs d'entendre des responsables dont les services ont pourtant été concernés par cette canicule. Il appartiendra donc à la commission d'enquête de reprendre toutes ses auditions dans de meilleures conditions et d'en organiser aussi bien d'autres au cours des six prochains mois.
    Il apparaît ainsi clairement qu'il était nécessaire que cette commission soit créée. Et je n'ai pas saisi les réticences qu'avaient pu exprimer dans un premier temps certains de nos collègues de la majorité. Cette commission, nous la voulions car, face à l'ampleur du problème auquel notre pays a été confronté, nos concitoyens n'auraient pas compris que le Parlement ne cherche pas à faire la lumière sur ce qui s'était passé : faire la lumière pour comprendre mais surtout pour éviter qu'à l'avenir nous ne connaissions à nouveau le même type de situation. En effet, sous réserve d'expertises plus approfondies sur le plan international, il nous faudra bien identifier les raisons pour lesquelles la France a connu dans cette période un nombre de décès nettement plus important que d'autres pays européens.
    En 2000, nous nous sommes tous réjouis, quand nous n'avons pas manifesté une certaine fierté, de voir que l'Organisation mondiale de la santé avait considéré dans son rapport que le système de santé français était le meilleur au monde. S'il convenait déjà de relativiser cette appréciation au regard des critères retenus, les événements de cet été ont montré que notre système souffrait malheureusement de bien des défaillances.
    Plutôt que de se hâter à porter un jugement sur celles-ci, il nous semble nécessaire de prendre le temps d'analyser les dysfonctionnements, de comprendre quelles ont été les réactions des diverses administrations concernées et de leurs responsables durant cette période, et surtout d'expertiser les réponses à apporter à ces défaillances.
    Je suis en effet frappé de la précipitation que met un gouvernement soucieux d'affichage à apporter des réponses à ce qu'il croit être les raisons de cette catastrophe. Comme s'il pouvait aujourd'hui combler par un débordement de mesures ses absences ou ses manquements d'hier, et cela alors que l'expertise n'a pas été conduite à son terme !
    Ainsi, nous avons vu arriver, il y a quelques jours, en commission des affaires sociales des amendements du Gouvernement au projet de loi relatif à la santé publique modifiant les missions de l'Institut national de veille sanitaire. Comme si l'alerte sur les événements de la première semaine du mois d'août et la gestion de la crise dans les jours qui ont suivi ne relevaient que de l'action d'une seule institution. Et comme s'il suffisait de changer les missions que la loi assigne à cette institution pour régler le problème ! Le code de la santé publique prévoit déjà que cet organisme doit « détecter tout événement modifiant ou susceptible d'altérer l'état de santé de la population ». Or, dans ce cas précis, le mécanisme de détection n'a pas fonctionné. Avant d'assigner de nouvelles missions à l'INVS, il aurait été préférable d'examiner pour quelles raisons celles qui sont déjà les siennes n'ont pas permis d'anticiper cette crise.
    Il appert des premiers éléments que nous avons pu recueillir que les informations sont bien remontées à l'intérieur des services du ministère de la santé, et que d'ailleurs ceux-ci se sont immédiatement mobilisés. Nous n'avons pas pu, par contre, apprécier si les informations au sein des autres ministères avaient bien été prises en compte, notamment au sein des services de la sécurité civile et du ministère de l'intérieur. Mais ce qui apparaît déjà de manière évidente, c'est le cloisonnement entre les divers services. Or il ne suffit pas d'inscrire dans la loi qu'il doit y avoir coordination pour qu'il en soit ainsi. Nous touchons-là à des questions de comportements, d'habitudes, qu'il faut naturellement changer, mais sans doute pas de la manière qui est celle du projet de loi de santé publique.
    De même, on aurait tort de confondre le symptôme avec les véritables causes des défaillances de notre organisation sanitaire. Sans vouloir anticiper sur nos futurs travaux, je trouve pour le moins hasardeux de se précipiter, comme l'a fait le Gouvernement, sur la question des urgences, pour, là encore, donner l'apparence qu'il traite les conséquences de la canicule, alors que les tensions qu'ont vécues les urgences durant cette période révèlent plutôt, en amont, des carences dans l'organisation de la prise en charge des personnes âgées, que ce soit en établissement ou en ambulatoire, et, en aval, des pesanteurs dans l'organisation des services hospitaliers.
    Débloquer des crédits pour un plan « urgences » permettra sans doute de donner plus de moyens à ces services - et je m'en réjouis pour les personnels médicaux et paramédicaux qui y travaillent. Mais cela n'empêchera pas que, demain, nous continuerons d'avoir des urgences encombrées de personnes qui, faute d'avoir trouvé une solution en ville, y stagneront parce que les services d'hospitalisation en aval n'auront pas pu dégager de lits en nombre suffisant. Autant que pour les urgences, il m'aurait semblé tout aussi nécessaire que soient dégagés les moyens pour mettre réellement en place des réseaux de soins permettant d'assurer la prise en charge coordonnée des personnes atteintes de pathologies lourdes et de mobiliser autour du malade à la fois la médecine ambulatoire et les établissements de santé, sociaux et médico-sociaux.
    La commission d'enquête devra aussi identifier les responsabilités individuelles et collectives dans l'enchaînement des événements tels qu'ils se sont déroulés dans la première quinzaine du mois d'août. J'avoue avoir été choqué par des propos tenus, à ce moment-là et depuis, par des responsables politiques - dont certains membres du Gouvernement -, tendant à montrer du doigt tel ou tel responsable administratif, comme si les administrations ne dépendaient pas de ministres et comme si leurs éventuels dysfonctionnements ne devaient pas d'abord être assumés par le ministre qui en a la charge. Il sera nécessaire d'examiner la manière dont chacun a assumé l'ensemble de ses responsabilités pendant cette période.
    Ce drame a par ailleurs révélé comment les personnes âgées étaient traitées par notre société. Il est de ce point de vue un peu court de rejeter les responsabilités sur les familles, qui n'auraient pas assumé leur devoir de solidarité. D'abord parce que, dans la très grande majorité des cas, ce n'est pas exact. Ensuite, parce qu'on ne peut pas faire l'économie d'un regard critique sur l'insuffisance des moyens consacrés à la prise en charge des personnes en établissement. Si, comme je le disais tout à l'heure, il est des questions qui auraient mérité davantage d'expertise avant que d'être traitées, débloquer des moyens supplémentaires pour améliorer la prise en charge des personnes âgées ne nécessitait pas une longue réflexion, mais plutôt un minimum de volonté politique. Nous attendons toujours à ce propos la mise en oeuvre du plan « solidarité et vieillissement » qui avait été annoncé pour le 1er octobre.
    Le drame de la canicule doit donc être pour nous l'occasion d'améliorer considérablement l'efficacité de la réponse sanitaire et sociale de notre pays aux situations de ce type, particulièrement en ce qui concerne les personnes les plus fragiles, parce que ce sont les plus exposées.
    C'est dans cet esprit que nous aborderons les travaux de cette commission, avec la volonté de tout mettre en oeuvre pour éviter que, demain, des drames de même nature et de même ampleur, quelle qu'en soit l'origine, se reproduisent. C'est, je crois, ce qu'attendent de nous nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Lasbordes.
    M. Pierre Lasbordes. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la nécessité de mettre sur pied une commission d'enquête parlementaire, conformément au voeu exprimé, le mercredi 24 septembre, par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, est évidente, au regard des conséquences sanitaires, sociales, mais surtout humaines, de la canicule exceptionnelle, par sa durée et par son ampleur, qui a frappé notre pays durant les premières semaines du mois d'août.
    Sans doute aura-t-il fallu un drame de cette nature pour que nous prenions conscience d'un paradoxe de notre société : si le nombre de personnes âgées y est en augmentation constante, grâce notamment à l'accroissement de l'espérance de vie, qui est parmi les plus élevées d'Europe, celles-ci s'enfoncent dans l'isolement, moins à cause de l'indifférence que par suite d'une longue dérive de notre société, incapable de leur apporter une juste considération. Les images de ces patients qui affluent vers les urgences des hôpitaux, celles de ces corps empilés dans les halls frigorifiques de Rungis, celles, enfin, plus choquantes encore, de ceux que personne ne viendra réclamer et qui partageront le sort des plus indigents, ont profondément ému nos concitoyens. Elles nous assignent le devoir de faire la lumière, sans esprit polémique ni partisan, avec humilité, sur ce qui s'est passé, afin de relever les défis sociétaux qui s'imposent désormais à nous.
    La mission d'information a mis en exergue la dimension exceptionnelle de cette canicule, et il faudra encore approfondir notre connaissance de la réalité du phénomène. Elle a ensuite montré un défaut frappant de réactivité et d'anticipation face à l'imprévisible, notamment de notre système de veille et d'alerte sanitaires. Elle a enfin révélé les défaillances de notre système sanitaire et conclu qu'il s'agissait d'une très grave crise sociale. Sans revenir sur le détail de ces conclusions, je souhaiterais souligner quelques points qui me paraissent essentiels.
    La mise en place de dispositifs d'alerte permettant d'informer en amont de la survenue d'une élévation anormale et durable des températures et de mesurer en temps réel les appels aux services d'urgence et l'augmentation de la mortalité suppose l'établissement, comme le recommande l'INSERM, d'un programme de coordination entre les différents ministères et institutions en matière de recherche scientifique, afin de maîtriser les risques majeurs liés aux vagues de chaleur.
    Sur le plan clinique, si les conséquences de la déshydratation sont bien connues, celles de l'hyperthermie, en revanche, le sont beaucoup moins. Ces mécanismes physiopathologiques, liés à une exposition excessive à la chaleur, doivent être mieux compris afin de définir les informations les plus pertinentes et d'en optimiser la prise en charge thérapeutique.
    De même, les phénomènes dits coaggravants, comme la pollution atmosphérique et les complications, notamment respiratoires, qu'elle entraîne, mais aussi certaines combinaisons médicamenteuses, comme les diurétiques et les psychotropes, dont la consommation est forte chez les personnes âgées, constituent pour la recherche un vaste champ d'investigation qu'il est indispensable de parcourir.
    Cette tragédie, comme l'a souligné notre excellent rapporteur, M. Denis Jacquat, est aussi celle de l'isolement des personnes âgées, qu'elles vivent à domicile ou en établissement. La canicule a pesé d'autant plus lourdement sur les structures d'aide à domicile et sur les établissements, malgré les efforts plus que conséquents qui ont été consentis durant la crise, qu'ils n'ont pas été préparés à supporter un tel choc. L'insuffisance de formation des personnels aux risques induits par la canicule, la nécessité d'améliorer le système d'information des dangers, surtout l'inadaptation matérielle de certaines structures, l'absence notamment de climatisation, par crainte de diffusion d'agents pathogènes, ou de salles rafraîchissantes, alors qu'on sait que le bénéfice de ces installations durant quelques heures suffit à faire baisser l'excès de température corporelle, enfin les difficultés de disposer de personnels en période estivale - même si en l'occurrence elles ont été surmontées avec courage -, voilà autant de pistes que la commission d'enquête devra explorer.
    Je voudrais toutefois vous rappeler, mes chers collègues, que, sans être devin, j'avais moi-même proposé, lors de la précédente mandature, la création d'une commission d'enquête parlementaire sur les conditions de vie des personnes âgées, plus particulièrement de celles qui vivent en établissement de soins, ainsi que sur les questions de maltraitance touchant ces personnes. La majorité de l'époque n'avait pas jugé utile d'y répondre favorablement.
    Plus que jamais, je reste convaincu de son utilité, indépendamment de nos travaux de ce matin sur les conséquences de la canicule. De même, je juge nécessaire que notre assemblée dresse un état des lieux de notre système d'accueil et de prise en charge des personnes âgées, des conditions de recrutement et de formation des personnels, et de l'organisation interne des établissements. Plus globalement, il est temps qu'elle se saisisse des enjeux du vieillissement dans notre société.
    Je le répète, mes chers collègues, l'intérêt de cette commission d'enquête est évident. Disposant de données plus importantes, elle pourra approfondir les questions soulevées par la mission d'information et y apporter, je l'espère, des solutions. L'attente de nos concitoyens est forte. Nous avons le devoir de les écouter. Nous avons le devoir d'y répondre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, mes chers collègues, nous l'avons constaté déjà à plusieurs reprises depuis le début de cette session, en particulier lorsque nous avons abordé le débat de santé publique : aucun d'entre nous ne peut traiter ces sujets à cette tribune sans une pensée pour ceux qui, cet été, ont trouvé la mort, de façon évidemment prématurée, dans des conditions qu'il nous appartient, à tous, d'éclaircir et de comprendre, si on veut demain pouvoir faire face à des situations équivalentes.
    Claude Evin l'a rappelé : nous avons eu raison de nous prononcer en faveur de la création d'une commission d'enquête. C'est là le devoir du Parlement, qu'il n'a peut être pas rempli par le passé aussi souvent qu'il aurait fallu. Le Parlement n'a pas toujours su en effet exercer ce rôle de contrôle et de réflexion qui est le sien. Le cadre de la commission d'enquête est juridiquement et politiquement le plus adapté pour tirer toutes les conséquences de la situation que nous avons connue cet été. Car malgré le travail de qualité qui a été effectué par les scientifiques mandatés par le Gouvernement, malgré les efforts utiles de notre collègue Jacquat et le rapport de la mission qui s'est réunie avant la reprise de nos travaux, nous n'avons pas l'impression d'en savoir beaucoup plus que ce que nous savions déjà.
    Il y a donc un travail de fond à mener pour essayer de comprendre cette crise et faire la part des choses loin de toute polémique. Gardons-nous surtout des conclusions prématurées qui fondent de nombreux amendements au projet de loi relatif à la politique de santé publique : si nous comprenons l'intention, le plus souvent bonne, de leurs auteurs, nous ne les trouvons pas toujours parfaitement rédigés, voire opportuns ou du moins à la hauteur des problèmes qui se sont posés cet été.
    C'est dire que beaucoup de travail nous attend. Nous examinerons ces différents points plus précisément à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. A l'évidence, il y a des progrès à accomplir en matière de médicalisation des maisons de retraite, en matière de prise en charge, en matière de réseaux, entre autres pistes. Sur toutes ces questions nous savions déjà avant le mois d'août qu'une politique sanitaire et sociale d'une toute autre ampleur que celle que nous connaissons devrait être mise en oeuvre. Je m'interroge sur la création dans le projet de loi d'un « ONDAM personnes âgées » relativement contestable en termes politiques, de mon point de vue. Mais, en tout état de cause, je suis satisfait de l'évolution sensible de l'ONDAM depuis cet été puisqu'il a atteint des chiffres qui correspondent davantage à la demande que ceux qui étaient initialement prévus par le Gouvernement. C'est une première indication à prendre en compte si on veut résoudre ces questions.
    L'état d'esprit dans lequel nous allons travailler dans les mois qui viennent est essentiel. Je ne vous cacherai pas que nous sommes fort préoccupés. Aujourd'hui, les principaux ministres concernés ne sont pas là pour nous écouter. Seul est présent le secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement.
    M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement. Ça n'est déjà pas mal !
    M. Pierre-Louis Fagniez. C'est très important !
    M. Jean-Marie Le Guen. Certes. D'autant que cela me permet de lui dire que la commission d'enquête aura peu à voir avec les déclarations auxquelles il s'est trop rapidement livré cet été, et dans lesquelles il incriminait le rôle des 35 heures dans ce drame. De tels propos, outre qu'ils sont à côté du sujet, nourrissent une polémique totalement déplacée. Cela fait partie des propos qui m'ont particulièrement choqué cet été...
    M. Jean-Pierre Gorges. Pas nous !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... parce qu'ils traduisaient l'intention, une fois de plus, d'échapper à vos propres responsabilités. L'ambiance dans laquelle nous allons débattre est donc fondamentale, et nous serons attentifs à la façon dont la majorité se comportera au cours de ce débat.
    A toutes les étapes du travail parlementaire accompli depuis la rentrée de septembre - lors de l'audition des ministres, lors de la constitution de la mission, lors des débats sur la nécessité de la création d'une commission d'enquête - Claude Evin, Catherine Génisson, Paulette Guinchard-Kunstler et moi-même sommes intervenus pour exprimer clairement notre état d'esprit. Nous appréhenderons ainsi ces sujets dans leur gravité, dans leur rationalité, dans leur précision, avec le sens des responsabilités qui sont les nôtres et dans le respect du devoir de transparence que nous avons vis-à-vis des Français. Cette exigence d'un état d'esprit sans a priori ne pourra être satisfait si la majorité ne nous suit pas dans cette voie et si elle manifeste, au contraire, l'intention d'esquiver tout travail sérieux ou, pis, de faire de ce sujet un élément supplémentaire de polémique.
    M. Pierre-Louis Fagniez. Ce n'est pas notre genre !
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous me rassurez. Venant de vous, je le prends comme une garantie pour l'avenir.
    M. Pierre-Louis Fagniez. Vous pouvez !
    M. Jean-Marie Le Guen. Si seulement le débat de ce matin pouvait faire comprendre à chacun dans quel état d'esprit nous souhaitons travailler dans les semaines et les mois qui viennent ! Cela éviterait aux représentants de l'opposition d'avoir à appeler avec beaucoup de gravité l'attention des Français sur une éventuelle volonté de la majorité de ne pas assumer sa part de responsabilité dans ce débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Georges Colombier.
    M. Georges Colombier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, j'aurai, moi aussi, une pensée pour toutes les personnes décédées lors de la canicule de cet été et pour leurs familles.
    Après les polémiques dues à la surmortalité estivale, les conséquences de la canicule devaient être examinées. C'est ce que nous avons su faire très rapidement en créant la mission d'information sur la crise sanitaire et sociale déclenchée par la canicule, mission qui a été présidée efficacement par notre collègue Denis Jacquat.
    Au cours de cette mission, dont les travaux, très denses, furent menés à un rythme soutenu, nous avons auditionné de nombreuses personnalités qui nous ont exposé des points de vue très divers. Cela nous a permis de dégager des pistes de réflexion, de faire le point sur ce qui s'est exactement passé cet été, de définir les responsabilités de chacun et d'esquisser les dispositifs de prévention et d'action dans l'urgence à mettre en place à l'avenir.
    Le travail que nous avons effectué constitue une excellente base pour la commission parlementaire d'enquête en faveur de laquelle je plaide.
    Il était également indispensable de répondre au déferlement médiatique et à la polémique autour de cette canicule. Le Gouvernement, s'il a sa part de responsabilité, est loin d'être le seul coupable dans la gestion de cette crise. Les Français ne s'y sont pas trompés et je n'ai pas, dans ma circonscription, entendu de critiques concernant l'exécutif sur la gestion de la canicule.
    Au cours de cette mission d'information, nous nous sommes aperçus qu'il n'aurait pas été possible d'éviter complètement les conséquences de la canicule car les carences étaient beaucoup plus structurelles et sociétales que conjoncturelles. C'est donc l'ensemble de nos dispositifs d'alerte, de prévention, d'urgence médicale, d'accueil des personnes âgées et, bien sûr, de coordination entre les différentes administrations qu'il aurait fallu revoir bien avant cette crise. Mais la volonté de certains de désigner un bouc émissaire était si forte qu'on s'est souvent focalisé sur la paille dans l'oeil du voisin en ignorant la poutre dans le sien.
    Il nous est proposé de créer une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires et sociales de la canicule. La mise en place de cette commission qui s'inscrirait dans la succession de la mission d'information est capitale. Le rapport de cette dernière précise, à plusieurs reprises, la nécessité de créer une structure qui serait amenée à oeuvrer sur une durée plus importante et qui travaillerait plus en profondeur en précisant les réponses déjà apportées.
    Les objectifs de cette commission d'enquête, tels que définis par la proposition de résolution, nous conviennent parfaitement. Je reviendrai sur certains d'entre eux à la lumière des propositions émises lors de la mission d'information.
    Tout d'abord, la résolution suggère de formuler des propositions pour renforcer la coordination entre les différents acteurs du système de soins, afin de garantir une meilleure prise en charge sanitaire et médico-sociale. Il est essentiel de réfléchir à cette problématique. La mission d'information proposait, d'ailleurs, d'instituer des plans locaux de solidarité face aux risques sanitaires, afin d'anticiper ce genre de crise.
    Responsabiliser les acteurs sociaux est certainement la piste la plus sûre à mettre en oeuvre. Tous les commentaires ont, en effet, souligné un manque dramatique de coordination entre les différents intervenants.
    Parmi les auditions auxquelles nous avons assisté, celles des représentants des associations de maintien à domicile de personnes âgées nous ont profondément marqués. Elles ont, en effet, mis l'accent sur la réalité de la vie quotidienne des personnes âgées et sur le rôle très important des auxiliaires de vie et des aides-ménagères. Intégrons d'ores et déjà dans notre raisonnement sur la coordination le rapport 2003 de la Cour des comptes qui relève l'absence de pilotage de la coordination gérontologique et appelle à clarifier les rôles respectifs des CLIC, des équipes APA et des réseaux de santé.
    Je plaide depuis longtemps pour un développement plus rapide des centres locaux d'information et de coordination gérontologiques. Ces structures assez souples sont, à mon avis, les mieux placées pour déclencher l'alerte en cas de crise, diffuser les messages de prévention, répertorier par avance les personnes les plus fragiles et recenser, dans leur entourage, les personnes susceptibles de constituer des réseaux locaux de solidarité.
    Parallèlement, un rôle et des moyens plus importants doivent leur être donnés pour la coordination entre les acteurs en cas d'urgence. Ainsi, la coopération entre les professions de santé et les travailleurs sociaux doit permettre des interventions plus judicieuses et une efficacité accrue.
    Ensuite, la proposition de résolution précise que la commission d'enquête parlementaire pourrait apprécier les conditions de prise en charge des personnes âgées à domicile et en établissements. La prise en charge de personnes âgées a un coût non négligeable. Les récents débats sur le financement de l'APA ont contribué à mettre en lumière les difficultés de financer la dépendance des personnes âgées.
    Je défends depuis plusieurs années l'idée de la création d'une branche spécifique, liée à la problématique du vieillissement au sein de la sécurité sociale, et je ne peux que me réjouir que la mission d'information ait repris cette idée, en conseillant d'engager une concertation nationale en vue de l'instauration d'une nouvelle branche de sécurité sociale, que gérerait la Caisse nationale d'assurance maladie. Il est indispensable que la commission d'enquête réfléchisse à cette problématique du financement, en s'inspirant de nos réflexions.
    En effet, force est de constater que les Français se sentent davantage concernés lorsqu'ils participent au financement de mesures sociales par l'intermédiaire de la solidarité nationale. Peut-être pouvons-nous imaginer que l'instauration d'un « cinquième risque » spécifique, dédié à la problématique du vieillissement, contribuera à la nécessaire sensibilisation de la population sur le sort de ses aînés. Il est, d'ailleurs, probable que la mise en place et le fonctionnement concrets de ce cinquième risque ne soient pas calqués sur le modèle de la protection sociale déjà existante.
    Il convient de rappeler que la réforme de l'APA sous forme de décrets et de lois, votées au mois de mars, n'a pour objet d'assurer la pérennité financière de cette allocation que pour l'année 2003. Au-delà de cette réforme, le financement de la dépendance nécessitera un débat au Parlement, dont on ne pourra pas faire l'économie.
    La crise estivale nous a également montré le cruel déficit en personnels qualifiés dans les établissements et dans les services d'urgence. Pour ces deux types de structures, il semble que le projet de loi sur la santé publique, que notre assemblée examine en ce moment, apportera des réponses concrètes.
    Enfin, le point le plus important selon moi et le plus complexe de la proposition de résolution concerne la lutte contre l'isolement social et le renforcement de la solidarité à l'égard des personnes âgées. C'est, de l'avis de la mission d'information parlementaire, une des données cruciales du problème. Plusieurs personnes auditionnées nous ont dressé un tableau saisissant de la perception par notre société des personnes âgées. Cela nous a rappelé le devoir de solidarité que nous avons tous envers nos seniors.
    Ce défaut sociétal - encore ne faut-il pas mettre tout le monde dans le même panier - de solidarité familiale et intergénérationnelle doit être évalué avec justesse, et les solutions à apporter devront impérativement être traitées par la commission d'enquête parlementaire que nous nous proposons de créer.
    La solidarité à l'égard de nos anciens doit se manifester dans l'attention permanente portée à nos proches. Le fait que des personnes décédées sont restées parfois plusieurs jours sans que des membres de leur famille ne se manifestent doit tous nous interpeller. Cette crise aura sans doute mis en évidence la place insuffisante faite dans notre société aux personnes âgées.
    Nombreuses sont les interrogations qui restent sans réponse. La mission d'information parlementaire ne nous a pas permis de répondre à plusieurs points : ceux-ci restent en suspens car il n'est pas encore possible de disposer d'analyses complètes. Ces nombreux points à approfondir justifient pleinement la création d'une commission d'enquête par notre assemblée, qui disposera alors d'un délai beaucoup plus important pour rendre ses conclusions, dans la sérénité et loin de toute polémique.
    La meilleure des réponses consisterait d'ailleurs en un vote de la présente résolution à l'unanimité : cela monterait que l'avenir de nos anciens dépasse de loin les querelles politiciennes.
    Il est également très important que les membres de cette commission fassent preuve d'humilité et de modestie durant les six mois que durera son travail. Nous savons tous que les responsabilités sont très diffuses et partagées. De plus, les causes de cette crise sont anciennes et structurelles. Il ne serait donc pas de bon aloi d'accuser outre mesure les hommes. Il convient au contraire de se concentrer sur un seul objectif : loin de toute polémique, faire en sorte que cela ne se reproduise pas.
    Je vous invite donc à créer ensemble une commission d'enquête parlementaire sur les conséquences sanitaires et sociales de la canicule, afin que nous puissions tirer les leçons de cette crise. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs, c'est l'esprit plein de questions, pour moi-même et pour les responsables politiques que nous sommes, que je monte à cette tribune. Je crois profondément que si le travail est bien mené, la commission d'enquête peut être un moment très important pour nous, comme pour l'ensemble de la société, et je vais expliquer pourquoi. Mes questions rejoignent celles que les membres de la mission d'information se sont posées.
    Première question : le 15 juin, à Besançon, le responsable du service des urgences alertait la presse et des responsables du plus haut niveau, à la suite de trois morts par hyperthermie. Il m'a expliqué qu'il n'avait pas été entendu. Le dispositif tel qu'il est ne lui a pas permis de faire comprendre ce qui était en train de se passer. La question qui me taraude depuis le mois d'août est : « pourquoi cet homme n'a-t-il pas été entendu ? » Je voudrais comprendre, et ce sera le rôle de la commission d'enquête d'apporter une réponse. C'est pourquoi je ne suis pas complètement d'accord avec vous, monsieur Colombier, même si je pense comme vous qu'il faudra que les membres de la commission travaillent avec une grande humilité et une grande sincérité.
    Des gens savaient en France ce qu'il fallait faire, comme le professeur San Marco à Marseille. Je suis allée début août dans des maisons de retraite et dans les services d'urgence du CHU de Besançon : depuis la mi-juin, des aides-soignants, des infirmières, des médecins gériatres savaient qu'en plus de faire boire il était important d'envelopper les personnes âgées dans des draps humides et de mettre en place des dispositifs d'humidification. C'est d'une simplicité extrême ! C'est à mes yeux la question la plus importante sur laquelle nous aurons à travailler. Concrètement, que s'est-il passé au mois d'août ? Comment expliquer la non-compréhension de la situation, la non-réponse aux dispositifs d'alerte ?
    Comme mes collègues socialistes l'ont dit, la mission d'information n'a fait qu'ouvrir des pistes et soulever des questions. La commission d'enquête devra aller plus loin et comprendre.
    Deuxième question : pourquoi, alors que, depuis la mi-juin, les gériatres et les infirmières dans les services de soins à domicile et dans les maisons de retraite mettaient en place des dispositifs particuliers, n'y a-t-il pas eu d'alerte ? Pourquoi ces personnes se sont-elles senties abandonnées au point de ne pas avoir la réaction d'alerter ?
    Il est une autre question que nous devons nous poser et je la livre aux responsables politiques que sont les membres du Gouvernement, et que nous sommes tous ici : si c'étaient des enfants, des adultes, des handicapés qui étaient morts, je suis intimement persuadée que tout le monde se serait mobilisé et serait rentré de vacances pour se rendre qui dans sa circonscription, qui dans son ministère. Je ne peux m'empêcher de penser qu'il y a eu, à un moment donné, de la part des responsables politiques, absence d'attention à un public traditionnellement fragile.
    Nous sommes tous, monsieur le secrétaire d'Etat, qui représentez aujourd'hui le Gouvernement dans cet hémicycle, vous comme nous les politiques, confrontés à des groupes de pression. Et, très souvent, notre responsabilité politique consiste à faire des choix entre ces différents groupes de pression. Mais, dans certains secteurs fragiles, il n'en existe pas. Et, s'il en est un où il n'y en a pas, c'est celui des personnes âgées dépendantes. Les familles sont toutes seules à se « coltiner », comme disent les psychanalystes, la charge de leurs parents âgés, et les professionnels se sentent depuis très longtemps abandonnés. Comme il n'y a pas de groupes de pression, il est de la responsabilité des politiques de porter attention à ces gens en difficulté.
    Je le dis avec d'autant plus de force que j'ai moi-même eu à souffrir, dans mon parcours politique, de l'attention que je portais aux personnes âgées. Combien de fois ne m'a-t-on pas dit : « Toi, avec tes vieux ! Ce n'est pas important ! »
    Pourquoi le Gouvernement n'a-t-il pas porté attention à ce public fragile ? Quand il n'y a pas de groupe de pression, la responsabilité politique est encore plus grande. Je répète ma question, monsieur le secrétaire d'Etat : si cela avait été des enfants, des adultes, des handicapés, ne croyez-vous pas que les responsables politiques, dans leur grande majorité, seraient rentrés ?
    Non seulement la commission d'enquête doit se donner les moyens d'aller jusqu'au bout des questions techniques concernant l'absence d'alerte, mais elle doit aussi poser les questions essentielles qui relèvent de notre champ de responsabilité à nous, responsables politiques : celui de la décision politique, et celui du changement de regard que notre société doit opérer sur ce temps de la vie qui n'est plus reconnu.
    Personnellement, j'ai été blessée de ce qui s'est passé ici mercredi. Certes, à l'ouverture de la session, M. Debré a demandé à juste titre une minute de silence pour ces 15 000 morts : 15 000 morts, ce n'est pas négligeable ! Mais, au cours de la séance de mercredi, réduite aux questions d'actualité, combien y a-t-il eu de questions concernant les personnes âgées et la canicule ? Une, posée par moi, à la demande de mon groupe ! Une autre portait sur la sécheresse qui, je ne le nie pas du tout, est un vrai problème pour le milieu agricole.
    Comme on le voit, il est de notre responsabilité de changer le regard de la société, des professionnels de santé, des professionnels sociaux, des élus locaux, sur la grande vieillesse, sur les vieillards. Si la commission d'enquête n'est pas capable de montrer l'importance d'assurer un accompagnement de qualité aux grands vieillards, nous aurons profondément failli dans notre rôle de politiques au sens noble du terme et non pas dans son sens partisan. Si elle ne nous permet pas de répondre aux questions que toutes les personnes âgées et tous les professionnels de la gériatrie nous posent - à savoir : quel est le sens de la vieillesse, y compris de la grande vieillesse ? qu'est-ce qu'un être abîmé, dégradé, peut apporter dans la vie individuelle comme dans la vie de la société ? -, nous aurons raté notre travail.
    Je ne sais pas si j'en ferai partie, mais je souhaite profondément - je le dis avec beaucoup de conviction et vous êtes plusieurs dans cet hémicycle à le souhaiter comme moi - que nous soyons enfin en mesure de construire une société capable à la fois d'accompagner les plus fragiles et de redécouvrir l'enrichissement que peuvent apporter les « vieux », non seulement sur le plan financier, mais aussi socialement, culturellement ou tout simplement humainement.
    Comme je l'ai dit de façon un peu violente à M. Fillon lors des travaux de la mission d'information, trois éléments au cours des trois dernières années ont révélé les immenses besoins des personnes âgées en termes sanitaires, sociaux et humains.
    Quand j'étais au Gouvernement, les déplacements que j'organisais attiraient toujours beaucoup de monde. Aux personnes qui s'en étonnaient, je répondais toujours que la raison en était que l'accompagnement des personnes âgées était un vrai problème pour les familles et pour les professionnels, et que les gens voyaient là une évolution profonde de notre société. C'était un premier signe qu'il incombait à cette dernière de prendre en charges ses aînés.
    Le deuxième signe, je l'ai rappelé mercredi dernier à l'Assemblée, a été la montée en charge, plus rapide que prévu, de l'APA. Au lieu d'en faire une utilisation politicienne, nous aurions dû nous rendre compte que cela correspondait à un vrai besoin. Comme nous n'avons pas été capables de le comprendre, les gens âgés nous ont, comme l'a fait remarquer M. Mattei, renvoyé la question.
    Enfin, savez-vous ce que me disent les gens âgés depuis un mois et demi ? Ils s'interrogent sur leur place dans la société et se demandent même s'ils ne doivent pas se culpabiliser d'être vieux dans ce pays.
    C'est à cette question-là que devra répondre la commission d'enquête. Sommes-nous capables de redonner du sens à la vieillesse, y compris à la vieillesse la plus abîmée ? La réponse est importante à la fois pour notre société, pour la cohésion sociale, pour l'ensemble des familles et des professionnels qui s'occupent des personnes âgées, et surtout pour les vieux qui vivent dans ce pays. (Appaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Jacques Domergue.
    M. Jacques Domergue. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la mission d'information sur la canicule, mise en place par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, le 26 août dernier, a mis en lumière la fragilité et le manque de réactivité de notre système d'alerte sanitaire face à une catastrophe climatique, la canicule, qui a été reconnue d'une gravité jamais égalée dans notre pays.
    Pourtant, ces mêmes systèmes de veille s'étaient révélés tout à fait performants lors de l'alerte bactériologique, parfaitement maîtrisée, du SRAS.
    Cette mission d'information a également permis de constater combien l'ampleur et la sévérité du phénomène avaient été mal mesurées sur le terrain. Le nombre de personnes admises aux urgences pour coup de chaleur et hyperthermie - il y a eu des erreurs de diagnostic au début de la période - augmentait. Les personnes âgées affluaient en grand nombre aux urgences mais nul n'aurait pu imaginer que, plus qu'un simple « coup de bourre », comme on dit dans le jargon médical, c'était une catastrophe sanitaire qui se préparait.
    Lorsque le docteur Pelloux, le 10 août, a lancé sur TF1 un cri d'alarme, c'était la première prise de conscience dimensionnée et reconnue - vous l'avez dit, madame Guinchard, le phénomène n'a pas été reconnu. Mais il était déjà trop tard.
    La mission d'information, contrairement à ce que laisse supposer son intitulé, a manqué d'informations, parce qu'elles n'étaient pas disponibles, tant sur la géographie des décès - différence entre les villes et les campagnes, entre le nord et le sud ; pourquoi, ou par quel miracle, certaines villes ont-elles été épargnées ? - que sur leur sociologie : les décès ont-ils eu lieu à domicile ou en maison de retraite ? Y avait-il quelque rapport avec l'APA et avec le degré de dépendance ? Nous n'avons pu savoir non plus si ces décès étaient évitables et les informations manquaient également sur d'éventuels dysfonctionnements, sur le rôle des cofacteurs aggravants, comme la pollution, sur les performances imparfaites de nos systèmes de veille, enfin, sur les capacités d'accueil des services d'urgence et, surtout, sur leur aptitude à s'adapter.
    Oui, monsieur le secrétaire d'Etat, une commission d'enquête sera utile. Les Français ont besoin de savoir - et le ministre de la santé s'est engagé à leur répondre - pourquoi la surmortalité des personnes âgées a été aussi forte et pourquoi nombre d'entre elles sont mortes dans la plus grande indifférence.
    La proposition du président du groupe UMP, Jacques Barrot, répond pleinement à ces interrogations, sans procès d'intention, dans un souci de transparence et dans un but de prévention. Moins polémique que celle de Jean-Marc Ayrault, plus précise que celles d'Alain Bocquet et d'Hervé Morin, elle doit permettre de répondre aux interrogations des Français.
    Les nombreuses familles touchées par cette catastrophe climatique, sanitaire et sociale ont besoin, pour faire leur deuil, de connaître leur part de responsabilité et celle de l'ensemble de la filière sanitaire et sociale.
    Nous ne ferons pas revenir nos morts, mais nous avons, collectivement, le devoir d'éviter qu'un tel drame se reproduise. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement.
    M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les interventions des différents orateurs qui, chacun à sa manière, ont apporté leur contribution à ce débat important et difficile. Il m'a semblé sage que personne, à une regrettable exception près, ne cède à la tentation de la polémique politicienne.
    La France a vécu, avec les conséquences de la canicule, un drame terrible qui a suscité chez chacun d'entre nous beaucoup de tristesse et de compassion. Dans ce contexte, il est de notre devoir à tous de ne jamais oublier et de tirer, en tant que responsables publics, toutes sensibilités confondues, tous les enseignements de ce qui s'est passé.
    Parmi les questions qu'il faut légitimement se poser, il y a celles relatives à l'efficacité de nos systèmes d'alerte et au fonctionnement de nos urgences hospitalières.
    Les événements qui se sont déroulés au mois d'août nous ont montré qu'il y avait lieu de réfléchir, compte tenu de l'organisation actuelle de notre système de santé, y compris - pardon de le redire - dans la législation relative au temps de travail, à la manière d'améliorer les moyens de fonctionner de nos systèmes d'urgence, même s'il faut reconnaître, et je saisis l'occasion de le faire au nom du Gouvernement, que les personnels ont accompli, au cours de ce mois d'août difficile, un travail exceptionnel et fait montre d'un dévouement remarquable.
    Il convenait aussi de réfléchir, de manière plus globale, comme vous l'avez fait, madame Guinchard-Kunstler, à une nouvelle solidarité, nécessaire, entre les générations, je dirai même à une nouvelle forme de fraternité, qu'il nous faut sans doute réinventer en en discutant avec l'ensemble de nos concitoyens - et toute circonstance est légitime pour le faire car le débat dépasse largement le cadre de cet hémicycle.
    L'Assemblée nationale a souhaité, par cette résolution, constituer une commission d'enquête, dans le prolongement de la mission d'information remarquablement diligentée par M. Jacquat. Cette démarche est pleinement conforme à l'esprit et à la lettre de nos institutions. Au nom du Gouvernement, je salue cette initiative légitime, qui témoigne de son souci de transparence à l'égard de nos concitoyens. Le Gouvernement se tiendra à l'entière disposition de cette commission.
    M. le président. La discussion générale est close.
    J'appelle maintenant l'article unique de la proposition de résolution dans le texte de la commission.

Proposition de résolution tendant à la création
d'une commission d'enquête sur les conséquences
sanitaires et sociales de la canicule

Article unique

    M. le président. « Article unique. - Conformément aux articles 140 et suivants du règlement de l'Assemblée nationale, il est créé une commission d'enquête parlementaire de trente membres chargée :
    « - d'analyser les dysfonctionnements de notre système de santé et de faire toute la lumière sur la chaîne de responsabilités individuelles et collectives à l'origine du manque de réactivité des pouvoirs publics face à la canicule de cet été ;
    « - d'évaluer l'efficacité des dispositifs existants en matière de prévention et d'alerte contre les risques sanitaires climatiques ;
    « - d'apprécier les conditions de prise en charge des personnes âgées, à domicile et en établissement ;
    « - de formuler des propositions pour renforcer la coordination entre les différents acteurs du système de soins (médecine de ville, soins spécialisés, services sociaux, système hospitalier...) afin de garantir une meilleure prise en charge sanitaire et médico-sociale ;
    « - d'évaluer les difficultés de recrutement dans le secteur social et médico-social et de formuler des propositions pour y remédier, notamment en matière de formation et de validation des acquis ;
    « - d'évaluer l'organisation et le fonctionnement des services d'urgence au sein du système de soins ;
    « - de formuler des propositions pour lutter contre l'isolement social et renforcer la solidarité à l'égard des personnes âgées. »

Vote sur l'article unique

    M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
    Je mets aux voix l'article unique de la proposition de résolution.
    (L'article unique de la proposition de résolution est adopté.)

Constitution de la commission d'enquête

    M. le président. Afin de permettre la constitution de la commission d'enquête dont l'Assemblée vient de décider la création, MM. les présidents des groupes voudront bien faire connaître, conformément à l'article 25 du règlement, avant le mardi 14 octobre 2003, à dix-sept heures, le nom des candidats qu'ils proposent.
    La nomination prendra effet dès la publication de ces candidatures au Journal officiel.

3

ORDRE DU JOUR DE L'ASSEMBLÉE

    M. le président. L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au vendredi 24 octobre 2003 inclus a été fixé ce matin en conférence des présidents.
    Cet ordre du jour sera annexé au compte rendu de la présente séance.

4

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :
    Questions au Gouvernement ;
    Suite de la discussion du projet de loi, n° 877, relatif à la politique de santé publique :
    M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport n° 1092).
    A vingt et une heures trente, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à onze heures vingt.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
ORDRE DU JOUR
ÉTABLI EN CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
(Réunion du mardi 7 octobre 2003)

    L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra du mardi 7 au vendredi 24 octobre 2003 inclus a été fixé ainsi :
    Mardi 7 octobre 2003 :
            Le matin, à 9 h 30 :
    Discussion des conclusions de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires et sociales de la canicule (n° 1090).
            L'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 h 30 :
    Suite de la discussion du projet de loi relatif à la politique de santé publique (n°s 877, 1092).
    Mercredi 8 octobre 2003 : l'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 h 30 :
    Suite de la discussion du projet de loi relatif à la politique de santé publique (n°s 877, 1092).
    Jeudi 9 octobre 2003 :
            Le matin, à 9 heures :
    Débat sur les suites du sommet de Cancún.
    (Séances d'initiative parlementaire.)
            
L'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 h 30 :
    Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause applicable à certains produits chimiques et pesticides dangereux qui font l'objet d'un commerce international (ensemble cinq annexes), faite à Rotterdam le 10 septembre 1998 (n°s 651, 981) ;
    Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention sur les polluants organiques persistants (ensemble six annexes), faite à Stockholm le 22 mai 2001 (n°s 652, 981) ;
    Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'adhésion de la France au protocole de 1996 à la convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion des déchets, fait à Londres le 7 novembre 1996 (n°s 653, 982) ;
    Discussion du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Afrique du Sud relatif à la coopération dans le domaine de la défense, signé au Cap le 28 mai 1998 (n°s 185, 979) ;
    Discussion du projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d'Andorre relative aux bureaux à contrôles nationaux juxtaposés, faite à Andorre-la-Vieille le 11 décembre 2001 (n°s 812, 999) ;
    Discussion du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Argentine relatif à la coopération dans le domaine de la défense, signé à Paris le 14 octobre 1998 (n°s 186, 979) ;
    Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la décision du Conseil du 25 juin 2002 et du 23 septembre 2002 modifiant l'acte portant élection des représentants au Parlement européen au suffrage universel direct, annexé à la décision 76/787/CECA, CEE, EURATOM du Conseil du 20 septembre 1976 (ensemble en annexe) (n°s 944, 998).
    (Ces sept projets de loi faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée en application de l'article 107 du règlement.)
    Suite de la discussion du projet de loi relatif à la politique de santé publique (n°s 877, 1092).
    Vendredi 10 octobre 2003 : le matin, à 9 h 30, l'après-midi, à 15 heures, et, éventuellement, le soir, à 21 h 30 :
    Suite de la discussion du projet de loi relatif à la politique de santé publique (n°s 877, 1092).
    Mardi 14 octobre 2003 :
            Le matin, à 9 h 30 :
    Questions orales sans débat.
            L'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 h 30 :
    Explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi relatif à la politique de santé publique (n°s 877, 1092) ;
    Discussion générale et discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093).
    Mercredi 15 octobre 2003 : le matin, à 9 h 30, l'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 h 30.
    Jeudi 16 octobre 2003 : le matin, à 9 h 30, l'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 h 30.
    Vendredi 17 octobre 2003 : le matin, à 9 h 30, l'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 h 30 :
    Suite de la discussion générale et de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093).
    Mardi 21 octobre 2003 :
            Le matin, à 9 h 30 :
    Discussion de la proposition de résolution sur la diversité linguistique dans l'Union européenne (n°s 907, 1020) ;
    Discussion de la proposition de résolution sur le second paquet ferroviaire (n°s 712, 897).
            L'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 h 30 :
    Explications de vote et vote par scrutin public sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093) ;
    Discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093) :
    - agriculture et pêche ; BAPSA.
    Mercredi 22 octobre 2003 : l'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 h 30 :
    - outre-mer.
    Jeudi 23 octobre 2003 :
            Le matin, à 9 h 30 :
    - communication.
            L'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 h 30 :
    - aménagement du territoire ;
    - fonction publique, réforme de l'Etat, services généraux du Premier ministre, SGDN.
    Vendredi 24 octobre 2003 : le matin, à 9 h 30, l'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 h 30 :
    - culture ;
    - écologie et développement durable ;
    - équipement et transports ; budget annexe de l'aviation civile.