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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 9 OCTOBRE 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du mercredi 8 octobre 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Questions au Gouvernement «...».

PROCESSUS D'APPROBATION
DE LA FUTURE CONSTITUTION EUROPÉENNE «...»

MM. Pierre Albertini, Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères.

RÔLE DE L'UNION EUROPÉENNE
AU PROCHE-ORIENT «...»

MM. Jean-Claude Lefort, Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères.

CONTENU DE LA CONSTITUTION EUROPÉENNE «...»

MM. Pierre Lequiller, Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères.

TCHÉTCHÉNIE «...»

MM. Pierre Bourguignon, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.
2.  Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire étrangère «...».
3.  Questions au Gouvernement (suite) «...».

EXPLOSION DE SAINT-ROMAIN-EN-JAREZ «...»

MM. Dino Cinieri, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

POLITIQUE DE LUTTE CONTRE LE BRUIT «...»

Mmes Marcelle Ramonet, Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.

POLITIQUE DE L'EMPLOI «...»

MM. Marcel Dehoux, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

MÉTHODE D'APPRENTISSAGE DE LA LECTURE «...»

Mme Cécile Gallez, M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

CONTINUITÉ TERRITORIALE OUTRE-MER «...»

Mmes Gabrielle Louis-Carabin, Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer.

GIAT INDUSTRIES «...»

Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants.

ORPHELINS DES VICTIMES DE LA BARBARIE NAZIE «...»

MM. Patrick Beaudoin, Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants.

FEMMES VICTIMES DE VIOLENCES CONJUGALES «...»

Mme Joëlle Ceccaldi-Reynaud, Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES

4.  Politique de santé publique. - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Article 15 «...»

M. Jean-Luc Préel, Mmes Martine Billard, Muguette Jacquaint, MM. Jean-Marie Le Guen, Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, rapporteur ; Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
Amendement n° 58 de la commission des affaires culturelles : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 301 de M. Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, le rapporteur, le ministre, Alain Claeys, René Couanau, vice-président de la commission des affaires culturelles. - Rejet.
L'amendement n° 250 de Mme Greff n'est pas soutenu.
Amendement n° 250 repris par M. Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 300 de M. Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, le rapporteur, le ministre, Gérard Bapt. - Rejet.
Amendements identiques n°s 59 de la commission et 449 de M. Leteurtre : M. Claude Leteurtre. - Retrait de l'amendement n° 449.
MM. le rapporteur, le ministre, Jean-Marie Le Guen. - Adoption de l'amendement n° 59.
Amendement n° 302 de M. Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, le rapporteur, le ministre, Mme Catherine Génisson. - Rejet.
Amendements identiques n°s 60 de la commission et 448 de M. Leteurtre : MM. Claude Leteurtre, le rapporteur, le ministre.
Amendement n° 562 du Gouvernement : MM. le rapporteur, Claude Leteurtre. - Retrait des amendements n°s 60 et 448 ; adoption de l'amendement n° 562.
Amendement n° 421 de M. Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, le rapporteur, le ministre, Bertho Audifax, Gérard Bapt, Mme Catherine Génisson, M. Jean-Louis Bernard. - Rejet.
Adoption de l'article 15 modifié.

Après l'article 15 «...»

Amendements identiques n°s 63 de la commission et 305 de M. Evin et amendement n° 547 rectifié du Gouvernement : MM. le rapporteur, le ministre, Mme Catherine Génisson - Retrait des amendements n°s 63 et 305 ; adoption de l'amendement n° 547 rectifié.
Amendements identiques n°s 61 de la commission et 304 de M. Le Guen : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendements identiques n°s 62 de la commission et 303 de M. Le Guen : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Article 16 «...»

Mme Muguette Jacquaint.
Amendement n° 64 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
L'amendement n° 450 de M. Leteurtre n'a plus d'objet.
Amendements identiques n°s 65 de la commission et 306 corrigé de M. Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, le ministre, le rapporteur. - Rejet.
Adoption de l'article 16 modifié.

Après l'article 16 «...»

Amendement n° 365 de M. Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, le rapporteur, le ministre, Serge Poignant, Xavier de Roux, Mme Martine Billard. - Rejet.
Amendement n° 366 de M. Le Guen : MM. Jean-Marie Le Guen, le rapporteur, le ministre, Yves Bur, Charles de Courson, Mmes Muguette Jacquaint, Catherine Génisson. - Rejet de l'amendement n° 366 rectifié.
Amendements n°s 422 de M. Le Guen et 560 du Gouvernement : MM. Jean-Marie Le Guen, le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 422.
M. le rapporteur. - Adoption de l'amendement n° 560.

Article 17 «...»

M. Charles de Courson.
Amendement n° 66 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 310 de M. Le Guen : Mme Catherine Génisson, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 266 rectifié du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 267 rectifié du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur, Charles de Courson, Mme Catherine Génisson, M. Xavier de Roux. - Rejet.
Amendement n° 67 de la commission, avec le sous-amendement n° 534 de Philippe Armand Martin, et amendement n° 308 de M. Le Guen : MM. le rapporteur, le ministre, Philippe Armand Martin,
Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Paul Dupré, Jean-Claude Perez, Mmes Catherine Génisson, Martine Billard. - Adoption du sous-amendement n° 534.
Sous-amendement n° 563 de Mme Génisson. - Rejet du sous-amendement n° 563 et des amendements n°s 67 et 308.
Adoption de l'article 17 modifié.

Après l'article 17 «...»

Amendement n° 337 de M. Le Guen : Mme Catherine Génisson, MM. le rapporteur, le ministre, François Vannson, Frédéric Reiss, Mmes Martine Billard, Catherine Génisson, MM. Michel Raison, René Couanau, vice-président de la commission des affaires culturelles. - Rejet.

Article 18 «...»

Amendement de suppression n° 451 de M. Préel : MM. Claude Leteurtre, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements identiques n°s 68 de la commission et 311 de M. Le Guen : MM. le rapporteur, le ministre, Mme Catherine Génisson. - Retraits.
Amendement n° 564 du Gouvernement. - Adoption.
Amendements identiques n°s 69 de la commission et 312 de M. Le Guen : MM. le rapporteur, le ministre, le vice-président de la commission. - Retraits.
Amendement n° 565 du Gouvernement : M. le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 253 du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 252 du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article 18 modifié.

Après l'article 18 «...»

Amendement n° 282 de M. Door : MM. Jean-Pierre Door, le rapporteur, le ministre, Mme Catherine Génisson. - Adoption.
Amendement n° 70 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Mme Catherine Génisson, M. Bernard Accoyer, Mme Martine Billard, M. Claude Leteurtre, Mme Muguette Jacquaint. - Adoption.
Amendements n°s 71 de la commission et 336, deuxième rectification, de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur. - Retrait de l'amendement n° 71.
M. le ministre, Mme Catherine Génisson. - Adoption de l'amendement n° 336, troisième rectification.
Amendement n° 452 de M. Leteurtre : MM. Claude Leteurtre, le rapporteur, le ministre, Mme Catherine Génisson. - Rejet.

Article 19 «...»

Mme Martine Billard, M. le président, Mme Muguette Jacquaint, M. le ministre.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
5.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Je vous rappelle, mes chers collègues, qu'il a été convenu que les quatre premières questions seraient réservées à des sujets européens.
    Nous commençons par une question du groupe UDF.

PROCESSUS D'APPROBATION
DE LA FUTURE CONSTITUTION EUROPÉENNE

    M. le président. La parole est à M. Pierre Albertini.
    M. Pierre Albertini. Monsieur le président, ma question, adressée à M. le Premier ministre, concerne le processus d'approbation de la future constitution européenne.
    Depuis quelques jours, depuis le 4 octobre très exactement, des négociations au niveau de l'Europe élargie sont engagées pour déterminer le contenu de cette future constitution. Le texte qui en sortira n'aura évidemment rien de commun avec les autres puisqu'il constituera, sans doute pour longtemps, la charte fondamentale de l'Union européenne, charte qui définira les principes directeurs de l'Union, ceux qui gouverneront sa politique ; déterminera les compétences propres de l'Union et les compétences partagées entre elle et les Etats membres ; enfin s'efforcera de mettre en oeuvre le principe de proximité, que l'on appelle, à tort, le principe de subsidiarité.
    Depuis 1945, la tradition constamment respectée en France est que tous les textes fondamentaux dans le domaine constitutionnel sont soumis à référendum. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Ai-je besoin de rappeler que le traité de Maastricht a également été soumis, en 1992, par le Président de la République de l'époque à un référendum ?
    M. Albert Facon. C'est exact !
    M. Pierre Albertini. La position de l'UDF est en tout cas très claire sur ce sujet : nous sommes farouchement attachés à l'idée de référendum sur la question de la future contitution européenne (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste), pour trois raisons. D'abord, ce procédé est le plus conforme à la démocratie, car il met en oeuvre la souveraineté populaire. Ensuite, il offre l'occasion d'un grand débat sur l'Europe, au moment où elle est notre horizon à tous. Enfin, la seule manière d'apaiser le débat sur ce sujet est de donner la parole aux citoyens.
    Je voudrais donc connaître la position du Gouvernement sur ce point,...
    M. Christian Bataille. Il n'en a pas !
    M. Pierre Albertini. ... sachant que l'initiative d'un référendum appartient au Premier ministre ou aux deux assemblées. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
    M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, je partage votre flamme européenne et je comprends votre impatience. Viendra, certes, le temps de la ratification, mais nous n'en sommes aujourd'hui qu'à celui de la négociation et du débat entre européens.
    M. Patrice Martin-Lalande. Très bien !
    M. le ministre des affaires étrangères. Ainsi que vous l'avez rappelé, la constitution européenne est un grand enjeu pour toute l'Europe. Il s'agit de fixer le cadre de nos institutions et de nos politiques communes et d'en déterminer l'esprit. A l'issue des travaux de la convention, l'objet de la conférence intergouvernementale est d'aboutir à un accord sur le texte final de la constitution. Cette discussion se déroule dans un contexte où l'Europe est placée au coeur de nos préoccupations, avec l'élargissement, les controverses sur nos politiques communes budgétaires et la croissance dans la zone euro.
    Comment allons-nous ratifier ce texte constitutionnel ?
    Selon les termes de la Constitution française, la souveraineté appartient au peuple et elle peut s'exprimer soit directement par référendum, soit à travers la représentation nationale. Les deux voies sont aussi éminentes l'une que l'autre, puisque, dans les deux cas, la souveraineté populaire prévaut. Réjouissons-nous car nous bénéficions d'un choix que tous nos partenaires n'ont pas. Tous ceux qui en disposent n'ont d'ailleurs pas encore tranché et plusieurs pays ont déjà indiqué qu'ils ne recourraient pas au référendum. Ces divers éléments devront être appréciés par la France, le moment venu.
    M. Dominique Strauss-Kahn. Quel courage !
    M. le ministre des affaires étrangères. Vous avez exprimé votre point de vue, monsieur Albertini, et je vous en remercie, mais, comme vous le savez, la décision finale appartiendra au Président de la République. (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

RÔLE DE L'UNION EUROPÉENNE AU PROCHE-ORIENT

    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lefort, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Jean-Claude Lefort. Monsieur le ministre des affaires étrangères, il y a aujourd'hui alerte rouge au Proche-Orient, comme en attestent les derniers événements tragiques et les frappes aériennes sur la Syrie. Une trêve salvatrice de cinquante et un jours a été brisée par des opérations militaires ciblées, entraînant, en retour, des actions kamikazes sanglantes. Nous les condamnons les unes et les autres. Nous condamnons aussi la construction d'un mur, qui s'enfonce en Cisjordanie, un mur dont le tracé n'a rien à voir avec les frontières de 1967, un mur d'insécurité. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Il s'agit en fait de développer la stratégie d'annexion territoriale des autorités israéliennes, comme viennent de le déclarer les Nations unies. La feuille de route est maintenant en miettes, et le désastre peut s'étendre à toute la région.
    Il est clair que des leçons doivent être tirées des échecs passés. Ainsi on ne peut laisser les seuls Etats-Unis dominer le processus ; on ne peut laisser piétiner les résolutions de l'ONU sans réagir ; on ne peut laisser les deux parties face à face, sans présence internationale. La période qui s'ouvre outre-Atlantique poussant à un attentisme renforcé, l'Europe est désormais plus fortement convoquée par l'histoire.
    Je vous pose donc une seule question, monsieur le ministre : quelles initiatives la France va-t-elle prendre avec l'Union européenne, au sein du « Quartet » ou à l'ONU, pour qu'une conférence internationale se tienne enfin, et pour qu'une présence internationale soit mise en place sur le terrain ?
    L'existence d'un Etat palestinien en 2005 était l'objectif proclamé de la feuille de route. La paix, la justice et la sécurité de chacun en dépendent. Il est urgent de faire preuve de volonté. A l'Europe de donner aujourd'hui toutes ses chances à la paix ; à la France de montrer le chemin. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
    M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, vous avez raison : il est urgent d'agir. Voilà pourquoi la France intervient directement auprès des parties pour enrayer la spirale de la violence et pour qu'elles sortent de la logique des préalables ; auprès des Européens parce que l'Europe doit assumer toutes ses responsabilités, d'autant, je le rappelle, qu'elle est le premier partenaire économique de la région ; auprès de l'ensemble de la communauté internationale, pour que le « Quartet » dont la dernière réunion a déçu retrouve son rôle d'impulsion, et pour que tous les pays de la région soient mobilisés en vue d'une paix globale incluant la Syrie et le Liban.
    Si l'on veut que l'agenda ne soit pas dicté par les extrémistes, il faut reprendre d'urgence l'initiative et accélérer l'application de la feuille de route. C'est pourquoi nous proposons la tenue d'une conférence internationale de paix, le déploiement rapide d'une force d'interposition et l'établissement d'un mécanisme de suivi associant l'ensemble des parties. Ces propositions françaises, vous le savez, se heurtent encore à de nombreuses résistances, mais l'aggravation de la situation les rend plus que jamais d'actualité.
    En Irak aussi, car les problèmes sont fortement interdépendants dans la région, il faut changer d'approche et affirmer le principe de la souveraineté irakienne comme point de départ de la reconstruction, et non comme point d'arrivée. La dégradation globale de la situation doit nous convaincre qu'il y a un intérêt général à agir : intérêt des parties, intérêt de la région, intérêt de la communauté internationale. C'est donc dans un esprit de lucidité et de responsabilité que la France veut aborder l'ensemble de ces questions. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

CONTENU DE LA CONSTITUTION EUROPÉENNE

    M. le président. La parole est à M. Pierre Lequiller, pour le groupe UMP.
    M. Pierre Lequiller. Monsieur le ministre des affaires étrangères, samedi dernier nous sommes entrés dans la deuxième phase de l'élaboration de la constitution européenne, celle de la conférence intergouvernementale. Contrairement à tous les pronostics, la convention, remarquablement présidée par Valéry Giscard d'Estaing, a abouti à un texte à la fois ambitieux et équilibré. Associant, pendant dix-huit mois, 105 parlementaires nationaux et européens, commissaires et représentants des gouvernements, elle aura eu un aspect historique par sa méthode, par l'ampleur du travail effectué, et par son résultat unanimement salué à Thessalonique.
    Pourtant, depuis quelques semaines, certains gouvernements semblent vouloir remettre en cause ce résultat. A Rome, où j'étais hier, tous les présidents de commissions et de délégations européennes des parlements de l'Union ont signé une résolution commune de soutien au texte de la convention, ce que notre délégation avait déjà fait avec nos homologues allemands, lors d'une réunion conjointe à Paris, une semaine auparavant. Nous sommes en effet convaincus que le bouleversement de l'harmonie du texte de la convention mettrait l'Europe en panne.
    Quelles actions le gouvernement français compte-t-il mener auprès de nos partenaires européens pour les convaincre de notre responsabilité historique commune et pour faire adopter le traité dans les meilleurs délais, éventuellement en l'améliorant, mais sans le bouleverser ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
    M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, la convention, vous l'avez rappelé, a proposé un projet ambitieux pour l'Europe et pour les Européens. Pour la France, il constitue un bon texte, car il répond à nos grands objectifs : apporter à l'Union plus de démocratie, plus de transparence et plus d'efficacité. Il bénéficie d'ailleurs d'une légitimité forte, car il a été adopté par une centaine d'Européennes et d'Européens de tous horizons - parlementaires, ministres, représentants de la société civile - qui se sont prononcés par consensus. Je tiens d'ailleurs à rendre hommage à nos conventionnels, en particulier à vous-même, et à Jacques Floch, qui représentiez l'Assemblée nationale.
    A Rome, chacun a pu mesurer l'importance des enjeux et le poids des responsabilités. Aujourd'hui, l'Europe a une grand rendez-vous avec l'histoire, comme en témoigne l'ampleur des défis qu'il lui faut relever : réforme institutionnelle, élargissement, problèmes internationaux. L'Europe doit faire entendre sa voix et peser de tout son poids. Le monde a besoin de plus d'Europe et nous avons besoin d'une bonne et ambitieuse constitution européenne.
    Certains pays ont certes des revendications fortes, en particulier quant à leur représentation au sein de la Commission et au poids de leur vote au Conseil. Au cours des prochains mois, nous allons multiplier les contacts avec nos partenaires. Ne doutez pas que la France s'engage avec détermination dans cette négociation, avec une méthode rigoureuse : préserver les acquis et ne modifier le texte actuel que par consensus, au nom d'une vision exigeante de l'Europe, fondée sur le bon équilibre entre le principe d'égalité entre les Etats et la volonté d'efficacité. (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe UDF).

TCHÉTCHÉNIE

    M. le président. La parole est à M. Pierre Bourguignon, pour le groupe socialiste.
    M. Pierre Bourguignon. Même à Moscou pour affaires, on ne peut oublier que la défense des droits de l'homme dépasse les frontières de l'Union européenne, surtout quand on est en Russie, pays membre du Conseil de l'Europe. Or, de Moscou, M. le Premier ministre a fait la leçon aux Français en déclarant qu'ils ne travaillaient pas assez et que les 35 heures étaient un grand malheur ! (« C'est vrai ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le Premier ministre nous a même rappelé hier que, à Moscou, il était surtout préoccupé par les marchés des entreprises. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Pour le reste, monsieur le Premier ministre, vous avez souligné la stabilité politique en Russie et vous avez botté en touche sur ce qui continue de se dérouler en Tchétchénie. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Yves Fromion. Vous, vous étiez communiste autrefois !
    M. Pierre Bourguignon. Pas un mot sur les atrocités commises dans la région ; pas un mot sur la mascarade des élections présidentielles qui venaient de s'y dérouler. Face aux questions répétées de la presse sur ce sujet, vous vous êtes réfugié derrière un communiqué vieux de dix jours, rédigé par la présidence italienne de l'Union européenne, qui se disait « préoccupée » par les risques d'élection faussée en Tchétchénie.
    En tant qu'Européen, en tant que représentant éminent de la France, nous aurions aimé vous entendre...
    M. Pierre Lellouche. On n'a pas entendu Jospin !
    M. Pierre Bourguignon. ... à propos de ces élections inacceptables et antidémocratiques qui ont porté au pouvoir Akhmad Kadyrov, l'homme de Moscou, plus connu pour ses exactions contre la population tchétchène et les opposants à son pouvoir que pour son intégrité morale et ses vertus démocratiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Les nécessités économiques et diplomatiques ne vous empêchaient pas de rappeler à Vladimir Poutine que la France souhaite une solution politique, dans le respect du droit et en protégeant les populations civiles.
    M. Jean-Pierre Blazy. Très bien !
    M. Pierre Bourguignon. Etait-ce le voyage d'un Premier ministre de la France ou le déplacement d'un commis voyageur ? (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    En tout cas, ce voyage aura été celui de la honte pour nous tous ! (Claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Expliquez-vous, monsieur le Premier ministre ! Expliquez-nous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations puis huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, croyez-vous que vous grandissez la fonction parlementaire en caricaturant la réalité de la sorte ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Etiez-vous à mes côtés quand j'ai eu, une heure durant, M. Poutine en face de moi ? En tout cas je vous remercie de me donner l'occasion de dire la vérité, seule façon de répondre à des caricatures mesquines et partisanes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Je vous sais, monsieur le député, suffisamment attentif aux classes populaires...
    Mme Martine David. Contrairement à vous !
    M. le Premier ministre. ... pour ne mépriser ni les commis ni les voyageurs, qui, dans ce pays, ont autant besoin de respect que les autres (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), Monseigneur ! (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. S'il vous plaît, arrêtez !
    M. le Premier ministre. Quand je représente les intérêts de la France en compagnie de dirigeants d'entreprises françaises, ceux qui font la qualité France, qui se battent pour les travailleurs de France et pour l'emploi en France, j'ai l'impression d'assumer mon devoir et je m'y donne autant que je le peux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Et je ne me laisserai pas faire par ceux qui n'ont une vision des problèmes internationaux que mondaine et bien loin des réalités qui concernent la France et les Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Martine David. Et la Tchéchénie ?
    M. le Premier ministre. En ce qui concerne la Tchétchénie (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), personne ne peut être indifférent au drame qu'elle vit. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. François Hollande. Qui est responsable ?
    M. le Premier ministre. Personne ne peut être indifférent aux violences exercées contre des femmes, contre des enfants...
    Mme Martine David. Bla-bla-bla !
    M. le Premier ministre. ... violences aveugles dans un terreau où se développe le terrorisme.
    Nous sommes tous conscients, ici, de cette réalité qui porte atteinte aux droits de l'homme. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. François Hollande. La faute à qui ?
    M. le Premier ministre. Reçu plus d'une heure durant par M. Poutine, je lui ai donc fait part avec détermination des convictions de la France (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) d'abord en soulignant qu'il ne saurait y avoir d'autre solution au problème tchétchène que politique à l'issue d'un processus.
    Mme Martine David. Bla-bla-bla !
    M. le Premier ministre. J'ai rappelé l'existence d'une constitution et la nécessité d'organiser des élections démocratiques tant pour les représentants régionaux (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) que pour les parlementaires !
    J'ai aussi rappelé les engagements du 16 mars auxquels nous sommes attachés car ils sont, pour nous, la seule façon de réconcilier l'ensemble des territoires de la Fédération de Russie...
    Mme Martine David. Rien de tout cela n'a été publié !
    M. le Premier ministre. ... dans le respect des droits de l'homme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Je l'ai dit avec la force qui est la nôtre, celle de la France qui s'est engagée.
    Je lui ai dit aussi, avec attachement, en lui demandant très précisément que les organisations non gouvernementales - les ONG - et la presse puissent avoir accès au pays.
    Un député du groupe socialiste. Qu'a répondu Poutine ?
    M. le Premier ministre. Je lui ai demandé que les débats sur ce projet politique puissent être démocratiquement ouverts...
    Mme Martine David. On en voit le résultat !
    M. le Premier ministre. ... et que les représentants internationaux puissent assister à l'ensemble de ces processus. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Enfin, je lui ai exposé clairement les positions de l'Union européenne...
    Mme Martine David. Rien n'a été publié !
    M. le Premier ministre. ... en lui expliquant que la France y avait adhéré pour faire respecter nos convictions et les processus démocratiques.
    Je reste attaché aux droits de l'homme. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous sommes engagés pour veiller à ce que le droit s'impose dans le monde.
    N'oublions pas que vous avez soutenu notre démarche quand nous avons défendu aux Nations unies le droit et la paix. Et le président Poutine, dans ce combat, était à côté de vous !
    N'oublions pas que vous avez défilé pour la paix...
    M. François Loncle. C'est un naufrage !
    M. le Premier ministre. ... parce qu'il nous faut un droit international ! La France, c'est son honneur, défend ce droit ! Je l'ai fait de toute ma force ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Je regrette que l'opposition, aujourd'hui, cherche, sur ce terrain, les messages qu'elle ne trouve pas ailleurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) La Russie et la France sont deux nations amies qui se sont quelquefois retrouvées pour le bien de leurs peuples, ce qui nous permet aujourd'hui de nous parler en toute franchise !
    Mme Martine David. Pourquoi tout cela n'a-t-il pas été rendu public ?
    M. le Premier ministre. C'est ce que j'ai fait ! Cela me permet d'affirmer que je défends l'honneur de la France et ses valeurs, monsieur le député ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

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SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
ÉTRANGÈRE

    M. le président. Je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation parlementaire, conduite par M. Tadeus Mackala, président du groupe d'amitié Pologne-France de la Diète de Pologne. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)
    Bienvenue à l'Assemblée nationale !

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QUESTIONS AU GOUVERNEMENT
(suite)

    M. le président. Nous reprenons les questions au Gouvernement.

EXPLOSION DE SAINT-ROMAIN-EN-JAREZ

    M. le président. La parole est à M. Dino Cinieri, pour le groupe UMP.
    M. Dino Cinieri. Ma question s'adresse à M. Nicolas Sarkosy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    Le 2 octobre dernier, le village de Saint-Romain-en-Jarez, dans la Loire, a vécu une soirée de cauchemar lorsque a explosé un entrepôt contenant des produits chimiques agricoles.
    Ainsi que vous avez pu le constater à l'occasion de votre visite sur les lieux dès le lendemain, monsieur le ministre, plus de vingt pompiers, professionnels et volontaires, ainsi que des civils, ont été grièvement blessés. Des biens immobiliers ont été durablement endommagés, et c'est toute une communauté villageoise qui est traumatisée.
    Aujourd'hui, avec Pascal Clément, président du conseil général de ce département, je me fais le porte-parole de la population sinistrée, des sapeurs-pompiers durement éprouvés et des élus locaux concernés, notamment mon collègue François Rochebloine, député de la circonscription, pour vous demander d'ajouter la disposition suivante à la loi de modernisation de la sécurité civile, que vous présenterez devant le Parlement...
    Mme Chantal Robin-Rodrigo. Faites un amendement !
    M. Dino Cinieri. ... et dont les sapeurs-pompiers, avec leur famille, apprécient la pertinence.
    Nous vous demandons, en effet, de favoriser la création d'un registre des bâtiments, agricoles ou non, renfermant des substances chimiques. Après actualisation régulière, celui-ci serait transmis aux services départementaux d'incendie et de secours et, de manière complémentaire, un panonceau pourrait être apposé sur les bâtiments à risques. Ainsi, les sapeurs-pompiers appelés à intervenir seraient mieux informés sur les dangers qu'ils courent.
    Je vous remercie, monsieur le ministre, de nous donner votre sentiment sur cette suggestion, en espérant qu'elle recueille l'assentiment de tous nos collègues. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, le métier de sapeur-pompier est extrêmement dangereux et nous avons pu constater qu'il n'existait pas d'opération bénigne.
    Il s'agissait, en l'occurrence, d'un entrepôt agricole. Plusieurs sapeurs-pompiers ont été blessés, l'un d'entre eux est encore, à la minute où nous parlons, entre la vie et la mort.
    Votre proposition consiste à faire, pour les entrepôts agricoles, ce qui existe déjà pour les camions qui transportent des matières dangereuses. C'est une proposition de bon sens, le Gouvernement la reprendra à son compte dans le projet de loi sur la modernisation de la sécurité civile. (« Très bien ! » sur de nombreux bancs.)
    Finalement, ce que vous nous demandez, monsieur le député, c'est une démarche de simple bon sens : un « retour sur expérience » pour que, après chaque catastrophe, on prenne les voies et les moyens pour qu'elle ne se reproduise pas. Nous le devons aux sapeurs-pompiers et à leur famille. C'est ce que le Gouvernement fera à l'automne avec ce texte de loi.
    Une fois encore, nous aurons travaillé pour que les sapeurs-pompiers puissent revenir dans leur famille sains et saufs car la mort ne doit pas faire partie des risques de leur métier ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

POLITIQUE DE LUTTE CONTRE LE BRUIT

    M. le président. La parole est à Mme Marcelle Ramonet, pour le groupe UMP.
    Mme Marcelle Ramonet. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. Ne vous impatientez pas !
    Mme Marcelle Ramonet. Madame la ministre, le bruit est une des premières sources de mécontentement dans la vie en société, selon une enquête de l'INSEE d'octobre 2002. Les nuisances sonores liées aux infrastructures de transport, le bruit au quotidien, celui de nos villes, celui des activités économiques ou du voisinage, sont mal vécus par nos concitoyens. Il existe aussi, nous le savons, un lien fort entre inégalités sociales et inégalités écologiques. Il nous appartient d'y répondre par des mesures concrètes. Tel est l'objet du plan national d'action contre le bruit que vous avez dévoilé devant le Conseil national du bruit, montrant ainsi votre attachement à cette institution que je préside. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Dix ans après la mise en oeuvre de la loi sur le bruit, il s'agit de donner un nouvel élan à cette loi, de compléter le dispositif et de mieux le faire appliquer.
    Ce plan bruit novateur engage une démarche volontariste et pragmatique. Il recherche avant tout l'efficacité et prend en compte l'ensemble des nuisances, y compris celles qui ont jusqu'à présent été sous-estimées, comme le problème des deux-roues. Enfin, des moyens financiers sans précédent ont été mobilisés.
    Pouvez-vous, madame la ministre, indiquer à la représentation nationale quelles sont les axes de cette nouvelle politique de lutte contre le bruit ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Madame la députée, le Conseil national du bruit, que vous présidez (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), a bien montré que le bruit était la nuisance la plus fortement ressentie par nos concitoyens et qu'elle était particulièrement violente pour les plus fragiles et les plus défavorisés d'entre nous : 40 % des habitants des zones urbaines sensibles se plaignent des nuisances sonores.
    Le plan bruit, que j'ai élaboré avec vous-même et votre Conseil, madame la présidente, s'attaque à toutes les problématiques du bruit.
    Pour ce qui concerne le bruit dont souffrent les riverains des grandes infrastructures de transport, la taxe sur les aéroports passera de 17 millions à 55 millions d'euros ce qui permettra d'insonoriser 8 800 logements, alors que 3 000 seulement l'étaient chaque année, soit un triplement. En outre, aux abords des grandes infrastructures routières et ferroviaires, 50 000 logements seront insonorisés dans le cadre de ce plan. Bien entendu, ce volet du plan antibruit a été préparé avec Gilles de Robien et Jean-Louis Borloo, dans le cadre des opérations de réhabilitation urbaine.
    Outre le bruit dû aux grandes infrastructures de transport, il s'agit de lutter contre le bruit au quotidien dont souffrent beaucoup de nos concitoyens. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Albert Facon. On n'entend rien !
    M. le président. Si vous faisiez un peu moins de bruit, vous entendriez mieux !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. En effet !
    Pour inciter les collectivités territoriales à les faire insonoriser, nous allons subventionner à 50 % les travaux nécessaires dans 500 crèches, 500 salles de repos dans les maternelles, 500 cantines scolaires et 250 salles de sport afin de permettre une meilleure scolarité, particulièrement pour les enfants des quartiers défavorisés.
    S'agissant de l'éducation à l'environnement, 30 heures y seront consacrées, dont une grande partie au civisme sonore. Ensuite, nous allons, bien entendu, avec Nicolas Sarkozy (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), préparer un décret qui permettra la destruction des pots d'échappement illégaux, lesquels font particulièrement souffrir nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Enfin, nous préparons l'avenir. A cette fin, 5,6 millions seront consacrés à la recherche dans la lutte contre le bruit. Des cartes de bruit seront établies dans les villes et une action permettant de contrôler le niveau sonore des poids lourds sera entreprise.

POLITIQUE DE L'EMPLOI

    M. le président. La parole est à M. Marcel Dehoux, pour le groupe socialiste.
    M. Marcel Dehoux. Monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, il y a un an exactement, en octobre 2002, face à l'inquiétante augmentation du chômage, vous avez désigné un « monsieur prévention des plans de licenciements ».
    Lorsqu'on relit vos déclarations et celles de M. le Premier ministre, on pouvait penser à l'époque que vous aviez trouvé là l'alpha et l'oméga en matière de lutte contre le chômage. A vous écouter également, toutes les mesures législatives que vous avez imposées à la France du travail depuis juin 2002 allaient dynamiser l'emploi. J'en passe et des meilleures !
    Or, un an après, en octobre 2003, le nombre de chômeurs ne fait qu'augmenter et nous n'avons aucune nouvelle de ce chef de MIM, cette mission interministérielle sur les mutations économiques. Un comble : il aurait été licencié !
    Nous pensons, avec bon nombre de Français, que cette mission n'a servi à rien et que c'était un gadget supplémentaire, une annonce de plus.
    M. Jean-Michel Fourgous. Et les 35 heures, c'était un gadget ?
    M. Marcel Dehoux. Autre annonce, plus récente : le 21 septembre, à la télévision, j'ai entendu M. le Premier ministre souhaiter « un droit à l'information pour tous les salariés, notamment dans les PME » : c'était simplement l'article 100 de la loi de modernisation sociale que vous avez abrogé le 3 janvier.
    Beaucoup plus inquiétante est la proposition, j'allais dire la provocation, du MEDEF, de remonter le seuil de l'obligation des plans de licenciements, de dix à vingt salariés, avec une négociation raccourcie au-delà de vingt.
    M. Thierry Mariani. Caricature !
    M. Marcel Dehoux. Monsieur le ministre, pouvez-nous nous dresser un bilan définitif de l'action de « monsieur anti-licenciements » ? Comme la réponse sera sûrement rapide, pouvez-vous nous dire ce que vous pensez de la proposition de M. le premier ministre de revenir sur votre loi de destruction sociale du 3 janvier et de celle du MEDEF de relever le seuil de dix à vingt salariés ?
    En un mot, qu'allez-vous faire...
    M. Michel Vergnier. Rien !
    M. Marcel Dehoux. ... pour inverser la courbe du chômage, comme l'avait fait le gouvernement de Lionel Jospin ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, la France vit malheureusement avec les plans sociaux depuis longtemps. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il y en a eu 1 053 en 2001 et 1 086 en 2002. Il y a eu 206 000 licenciements économiques en 2001 et 118 000 pour les sept premiers mois de 2003.
    M. Bernard Roman. Et combien de créations d'emplois ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est d'ailleurs un de ces plans sociaux qui avait fait dire au Premier ministre de l'époque que l'Etat ne pouvait pas tout faire.
    Mme Martine David. Ce n'est pas ce qu'on vous demande !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Certes, l'Etat ne peut pas tout faire, mais nous, nous pensons qu'il peut faire mieux. Et c'est pour que l'Etat fasse mieux que j'avais souhaité la mise en place d'une mission chargée de la coordination des services interministériels et des collectivités locales en matière de restructurations industrielles.
    Cette mission a été mise en place par Claude Viet.
    M. Maxime Gremetz. Il n'a rien fait !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il a été remplacé par M. Aubert, qui avait déjà lui-même la responsabilité, depuis plusieurs années, de la restructuration des métiers de la défense.
    M. Maxime Gremetz. Ce sont des sièges éjectables !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. M. Aubert va poursuivre l'action qui a été engagée, notamment en désignant, dans chaque région, un correspondant de cette mission (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et en mettant en oeuvre les recommandations du rapport sur les restructurations industrielles que vous lui aviez commandé lorsque vous étiez aux affaires, mais que vous n'avez jamais appliquées.
    Nous réunirons ensuite, le 21 octobre prochain, les présidents de région et les partenaires sociaux pour regarder comment mieux articuler l'action des collectivités locales, celle des partenaires sociaux et celle de l'Etat en matière de plans de restructuration et de plans sociaux.
    M. Christian Bataille. C'est du pipeau !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Enfin, les partenaires sociaux, comme vous l'avez vous-même indiqué, sont au travail pour définir ensemble - ce n'est pas le MEDEF qui le fera (« Mais si ! » sur les bancs du groupe socialiste) mais les partenaires sociaux ! - les contours d'une nouvelle législation en matière de restructuration industrielle.
    Il est très facile de railler sur ces sujets difficiles.
    M. François Hollande. Et de brailler !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous, nous préférons agir...
    M. François Lamy. Nous, nous l'avons fait !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... pour faire mentir un ancien Président de la République, qui avait dit : « Face au chômage, on a tout essayé. » (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

MÉTHODE D'APPRENTISSAGE DE LA LECTURE

    M. le président. La parole est à Mme Cécile Gallez, pour le groupe UMP.
    Mme Cécile Gallez. Ma question s'adresse à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.
    Monsieur le ministre, face au trop fort pourcentage de jeunes en grande difficulté de lecture - de 15 à 25 % des élèves entrant en classe de sixième, et ce pourcentage ne diminue malheureusement pas depuis des années -, je vous ai posé, en mai dernier, une question sur les actions que vous comptiez entreprendre pour lutter contre l'illettrisme. Vous m'aviez alors fait part de votre intention, pour la rentrée 2003, d'élargir votre expérimentation de dédoublement de classes de CP pendant le temps d'apprentissage de la lecture.
    Cette expérimentation dont, par ailleurs, je ne conteste pas le bien-fondé, m'amène à vous poser cette question toute simple mais, me semble-t-il, fondamentale : quelle est la méthode la plus appropriée pour apprendre à lire ? Il en sera sans doute longuement débattu au sein de la commission du débat national sur l'avenir de l'école que M. le Premier ministre et vous-même avez mise en place le 15 septembre dernier. Mais de plus en plus de voix s'élèvent - associations de soutien scolaire, parents d'élèves, enseignants, tous acteurs de terrain - pour que soit renforcée à l'école la méthode syllabique du b a-ba, qui a largement fait ses preuves (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), et semble souvent abandonnée au profit des méthodes globale et semi-globale sur l'efficacité desquelles on peut s'interroger.
    Monsieur le ministre, vu l'ampleur du problème de l'illettrisme qui devrait être abordé par tous hors de toute querelle partisane et avec pour seul objectif l'avenir de chacun de nos enfants, quelle est votre analyse sur ces méthodes de lecture et quelles mesures comptez-vous prendre les concernant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.
    M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Madame la députée, vous avez raison : la méthode globale est très mauvaise et même calamiteuse ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Cela dit, depuis l'année dernière une instruction officielle la déconseille fortement. Elle n'est d'ailleurs plus guère utilisée depuis un certain nombre d'années. Le vrai problème, celui que vous soulevez, tient aux méthodes mixtes, les méthodes semi-globales, qui consistent à commencer par l'apprentissage global - on demande, par exemple, aux enfants du cours préparatoire d'entourer leur nom et de le reconnaître avant même d'avoir décomposé par syllabes -...
    M. Christian Bataille. Raffarin est une victime de la méthode globale !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation et de la recherche. ... et à poursuivre par l'apprentissage syllabique, le b a-ba, pour dire les choses simplement.
    Dans le livret du CP dont j'ai demandé la rédaction et l'envoi à tous les maîtres de ces classes, nous recommandons que soit réduite la part de l'apprentissage par la méthode globale au bénéfice de l'apprentissage syllabique dont vous avez raison de souligner qu'il marche mieux et notamment qu'il évite, par la suite, des difficultés en orthographe.
    Reste que si la méthode est importante, elle n'est pas seule en cause. C'est cette année qu'entrent en vigueur, au cours préparatoire, les nouveaux programmes dans lesquels j'ai demandé que deux heures et demie soient consacrées chaque jour aux exercices d'apprentissage de la lecture et de l'écriture.
    Quant aux dédoublements des classes de CP, ils concernent aujourd'hui 70 000 enfants qui vont, par conséquent, apprendre à lire par groupes de dix. Il faut que nous profitions de ces dédoublements pour mettre en place les méthodes d'apprentissage de la lecture qui permettront de produire les meilleurs résultats.
    Sur ce sujet, il fallait un changement de cap. C'est chose faite ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

CONTINUITÉ TERRITORIALE OUTRE-MER

    M. le président. La parole est à Mme Gabrielle Louis-Carabin, pour le groupe UMP.
    Mme Gabrielle Louis-Carabin. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'outre-mer.
    Au mois de juin 2003, madame la ministre, vous avez eu le courage de défendre la loi programme pour l'outre-mer, soutenue par un gouvernement d'action et par des élus responsables, dans la lignée des engagements du Président de la République, Jacques Chirac.
    Cette loi, je l'ai votée car elle affirme pour mes compatriotes un principe républicain fort, celui de la continuité territoriale, qui a pris déjà sa dimension avec le passeport " mobilité en faveur de nos jeunes. J'ai voté la création de la dotation de continuité territoriale, contrairement à d'autres qui n'ont rien fait durant des années sinon accepter en 2002 que seule la Corse en bénéficie. L'action pragmatique vaut mieux que la gesticulation opportuniste et partisane ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Désormais, la continuité territoriale n'est plus un concept vide de sens pour l'outre-mer. Aujourd'hui, il est important pour nos compatriotes de savoir quand sera pris le décret d'application de ce dispositif.
    M. Maxime Gremetz. Elle a raison. On fait des lois, mais on attend longtemps les décrets d'application.
    Mme Gabrielle Louis-Carabin. Comment sera répartie la dotation entre les collectivités ? De plus, pouvez-vous leur dire quelles mesures seront prises pour que soit enfin imposée une véritable concurrence sur la desserte aérienne de l'outre-mer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'outre-mer.
    Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. Madame la députée, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin est le premier à avoir donné un contenu concret à la notion de continuité territoriale (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste),...
    M. Jean Glavany. Le décret n'est pas paru !
    Mme la ministre de l'outre-mer. ... ce qui était un engagement du Président de la République. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Vous avez raison de parler d'un principe républicain fort, car nos compatriotes d'outre-mer ont une attente légitime sur cette question.
    Certains, à gauche, diront qu'on n'en fait pas assez. Je leur rappelle qu'ils n'ont jamais rien fait en ce domaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Et s'ils avaient voulu qu'on en fasse plus, ils n'auraient pas tenté de faire annuler le dispositif par le Conseil constitutionnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    S'agissant de cette dotation, je souhaite que l'aide versée aux résidents des collectivités d'outre-mer soit destinée aux populations les plus fragiles et qu'elle soit optimisée. Sa répartition fera l'objet d'un décret qui est d'ores et déjà prêt (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste) et qui sera soumis aux assemblées locales dans quelques jours, les critères de répartition étant l'éloignement, le nombre d'habitants, le caractère archipélagique de certaines collectivités, comme la Guadeloupe, ou le fait que d'autres, comme la Guyane, n'ont qu'un seul transporteur pour les desservir. Mon objectif est que l'ensemble du dispositif soit en vigueur dès le 1er janvier prochain. (« Le décret ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Vous évoquez ensuite le problème de la concurrence de la desserte aérienne de l'outre-mer. Avec Gilles de Robien, Dominique Bussereau et Léon Bertrand, nous ne ménageons pas nos efforts pour mettre fin à cette situation inacceptable de monopole ou de quasi-monopole. Là encore, ce gouvernement a innové en mettant dans la loi de programme des mesures d'exonération de charges sociales...
    M. Maxime Gremetz. Encore ? Je rêve !
    Mme la ministre de l'outre-mer. ... pour les compagnies aériennes qui desservent l'outre-mer, avec déjà quelques effets. A la Réunion, la situation s'est sensiblement améliorée, et nous espérons que, sur les Antilles et surtout sur la Guyane, nous aurons bientôt une véritable concurrence.
    Soyez assurée, madame la députée, que le Gouvernement continuera à accorder à cette question une grande priorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

GIAT INDUSTRIES

    M. le président. La parole est à Mme Chantal Robin-Rodrigo, pour le groupe socialiste.
    Mme Chantal Robin-Rodrigo. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
    Monsieur le Premier ministre, vous vous présentez comme le champion du dialogue social. (« Oui ! » sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais, en réalité, comme le dit un grand leader syndical, vous n'écoutez rien. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est exactement ce qui se passe pour le dossier du GIAT.
    Un accord de méthode a permis aux syndicats de présenter des propositions industrielles alternatives au plan de restructuration prescrit par l'industriel avec votre accord, plan qui supprimerait, je le rappelle, plus de 3700 emplois. Ces expertises sont maintenant en votre possession. Elles stipulent en outre que le plan de Mme Alliot-Marie et de M. Vigneron présente des incohérences de positionnement et de stratégie qui auront des conséquences désastreuses pour le bon fonctionnement de nos armées...
    M. François Grosdidier. Vous refusez les crédits militaires !
    Mme Chantal Robin-Rodrigo. ... notamment si le maintien en conditions opérationnelles des chars Leclerc est sous-traité dans le privé. Elles indiquent surtout que des centaines d'emplois pourraient être préservés.
    Demain, à Tulle, des milliers de salariés se rassembleront pour manifester avec leurs élus leur angoisse face à l'avenir, leur colère devant votre inertie.
    M. François Grosdidier. C'est vous qui avez réduit les crédits d'armement !
    Mme Chantal Robin-Rodrigo. Alors, s'il vous plaît, monsieur le Premier ministre, ne nous faites pas le coup des « Vous n'avez rien fait ! »... ou « C'est la faute aux 35 heures ! » L'heure est grave ! Les salariés de GIAT et leurs familles... Si M. le Premier ministre voulait bien m'écouter au lieu de bavarder... (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Poursuivez, Madame.
    Mme Chantal Robin-Rodrigo. Les salariés de GIAT et leurs familles attendent de vous une réponse claire. Allez-vous rester sourd à leur exigence de voir étudier ces nouvelles propositions industrielles ou allez-vous enfin donner l'ordre à l'entreprise d'ouvrir de véritables négociations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ecoutez la réponse, ne manifestez pas avant !
    M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Madame la députée, je vais essayer de vous répondre le plus sérieusement du monde (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)...
    M. le président. Ecoutez la réponse, ne criez pas !
    M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. ... car ce sont des sujets graves...
    M. Jean-Pierre Kucheida. Ce n'est pas normal que ce soit lui qui réponde !
    M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. ... qui ne prêtent pas à la polémique. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - « Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. S'agissant de GIAT Industries, les objectifs gouvernementaux restent évidemment d'actualité.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Vous n'y connaissez rien ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Le projet industriel est solide et pérenne. L'accompagnement social repose sur les meilleures pratiques. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) L'aménagement du territoire accompagnant la reconversion du bassin est également en marche.
    M. Jean Glavany. Ce n'est pas la question !
    M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. La méthode retenue porte déjà ses fruits. Chacun doit jouer son rôle. L'entreprise est chargée de la gestion et du dialogue social. Quant à l'Etat, il fixe les orientations et tient ses engagements, vous le savez très bien. L'ensemble des organisations syndicales ont passé des accords avec l'entreprise. Nous souhaitons bien évidemment qu'ils soient respectés.
    M. Jean Glavany. Ils ne le sont pas !
    M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Concernant le volet industriel, l'Etat-client a donné des suites favorables aux propositions des experts...
    M. Jean Glavany. Ce n'est pas vrai !
    M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. ... en apportant 170 millions d'euros de commandes supplémentaires...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Ce n'est pas vrai !
    M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Si ! Ils s'ajoutent aux 2 milliards d'euros annoncés cet été.
    Mme Martine David. Surréaliste !
    M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. La direction de l'entreprise, quant à elle, sait tirer parti de ces marges de manoeuvre pour aménager sensiblement le plan. Au total, 250 emplois supplémentaires ont été préservés. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Vous ne couvrirez pas ma voix en faisant de la polémique, je vous l'ai déjà dit. C'est la réalité et vous ne voulez pas le reconnaître, comme d'habitude ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Concernant l'aménagement du territoire, la mobilisation des pouvoirs publics est un succès. Vous en êtes vous-même témoins, simplement vous ne voulez pas l'avouer (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) parce que cela ne se fait pas. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

ORPHELINS DES VICTIMES DE LA BARBARIE NAZIE

    M. le président. La parole est à M. Patrick Beaudouin, pour le groupe UMP.
    M. Patrick Beaudouin. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Un peu de silence, je vous prie.
    M. Patrick Beaudouin. Monsieur le secrétaire d'Etat, à la suite des travaux d'une commission présidée par M. Dechartre, ancien ministre et ancien résistant, le Gouvernement a pris la décision d'étendre aux orphelins des victimes de la barbarie nazie une indemnisation identique à celle dont bénéficient au titre du décret du 13 juillet 2000 les orphelins dont les parents ont été victimes des persécutions antisémites.
    Cette décision a été accueillie avec satisfaction par tous les orphelins en cause. En effet, alors que la France célèbrera en 2004 le soixantième anniversaire de sa libération, il était naturel et équitable qu'elle accorde une juste compensation pour le sacrifice consenti par leurs parents. Cependant, ils souhaitent dès maintenant connaître les parties prenantes éligibles à ce nouveau dispositif et la date à laquelle il sera mis en oeuvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants.
    M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Monsieur le député, le sujet est grave et délicat. Le décret du 13 juillet 2000 est fondé sur un motif sérieux et légitime, mais, dès sa parution, il a suscité une forte émotion dans le monde combattant, émotion qui a été relayée par tous les groupes de votre assemblée.
    Au terme d'une longue concertation, et après avoir pris connaissance des conclusions de la mission Dechartre, le Premier ministre a décidé d'accorder aux orphelins de victimes de la barbarie nazie - déportés, fusillés, massacrés - ne indemnisation identique à celle dont bénéficient les orphelins victimes de la Shoah. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Notre mission est désormais d'éviter qu'une telle décision, dont vous mesurez tous l'importance, ne suscite à nouveau des sentiments d'injustice. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs.) C'est la raison pour laquelle le Premier ministre m'a confié la mission d'étudier son périmètre d'éligibilité. Dès les travaux achevés, un décret sera publié. Je ne peux évidemment pas vous donner dès aujourd'hui de délai, puisqu'ils commencent à peine, mais nous ferons en sorte que la décision soit juste et que sa dimension juridique soit incontestable. Nous sommes fidèles à ce que nous avons toujours dit : là où il y a de l'iniquité, nous apporterons les rectifications qui s'imposent. C'est ce que nous faisons aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

FEMMES VICTIMES DE VIOLENCES CONJUGALES

    M. le président. La parole est à Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud, pour le groupe UMP.
    Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud. Ma question s'adresse à la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.
    Madame la ministre, je souhaiterais attirer votre attention sur la nécessité de mieux protéger les femmes qui subissent des violences conjugales. Dans ce combat, vous proposez une mesure efficace : à votre initiative, la future loi sur le divorce devrait permettre l'éloignement du conjoint auteur de violences. Les femmes vous approuvent, mais elles attendent plus pour que leurs craintes soient apaisées.
    La tragique disparition, cet été, de Marie Trintignant, donne à penser que les mesures envisagées méritent d'être renforcées. Vous connaissez les chiffres : une femme sur dix subirait des sévices conjugaux, et 400 femmes - une tous les jours ! - meurent chaque année sous les coups portés par leur mari ou leur concubin.
    Pouvez-vous préciser les mesures indispensables contenues dans le projet de loi sur le divorce ? Quelles dispositions législatives supplémentaires envisageriez-vous pour renforcer la protection que les femmes violentées vous demandent en urgence ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.
    Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Merci, madame la députée, d'avoir mis l'accent sur cet anachronisme criant qui frappe la société française, comme tant d'autres sociétés, du reste.
    La souffrance n'est pas une fatalité, et la société est pleinement dans son rôle quand elle répond à la violence. Toute maltraitance est illégitime et condamnable, et le domicile privé n'échappe pas à la loi.
    Depuis notre arrivée au gouvernement, à l'initiative du Premier ministre, qui m'a accompagnée dans les lieux d'écoute et d'accueil des femmes battues, nous agissons pour que cette violence cesse et que la France devienne en Europe et dans le monde un exemple d'une société juste, ouverte au partage des responsabilités et à l'égalité.
    Nous devons d'abord répondre par la solidarité, et je rends hommage à toutes les associations qui font un travail exemplaire dans ce domaine, que nous renforçons et que nous assistons, aux services sociaux, mais aussi à l'action menée par le ministre de l'intérieur et le garde des sceaux, pour que la police et la gendarmerie prennent en compte la gravité des actes commis.
    La réponse, c'est aussi le droit. Vous avez tout à fait raison, l'éviction du conjoint violent est une mesure qui participe de la pédagogie de la responsabilité : la victime est placée devant ses droits, l'auteur de la faute devant la conséquence de ses actes. Nous allons élargir cette disposition aux concubins et aux personnes liées par un PACS, mais nous irons encore plus loin, pour rendre plus efficace l'ensemble des procédures. Nous avons à l'esprit une directive de politique pénale qui permettrait de mieux prendre en compte les blessures et préjudices, auxquels l'ITT ne permet pas de rendre les juges suffisamment sensibles.
    J'ajoute deux dimensions. Il y a l'image, et nous travaillons avec les professionnels de la publicité pour que toutes les images qui comportent de la violence soient mieux gérées - c'est une question de responsabilité partagée -, et il y a aussi l'éducation, car la politique ne saurait s'abstraire du long terme, de la durée et de la volonté que nous avons de construire une société plus ouverte à l'égalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Rudy Salles.)

PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES,
vice-président

    M. le président. La séance est reprise.

4

POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE

Suite à la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la politique de santé publique (n°s 877, 1092).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Hier soir, l'Assemblée s'est arrêtée après l'examen des amendements portant articles additionnels après l'article 13.
    Les amendements portant articles additionnels avant l'article 14, l'article 14, le rapport annexé et les amendements portant articles additionnels après l'article 14 ayant été réservés à la demande du Gouvernement, nous abordons l'article 15.

Article 15

    M. le président. Je donne lecture de l'article 15 :

Chapitre II
Cancer et consommations à risque

    « Article 15. - I. - Le chapitre V du code de la santé publique devient le chapitre V-A.
    « II. - Dans le titre Ier du livre IV de la première partie du code de la santé publique (partie Législative), il est inséré après le chapitre V-A un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« Lutte contre le cancer

    « Art. L. 1415-2. - L'Institut national du cancer est chargé de coordonner les actions de lutte contre le cancer. A ce titre, il exerce notamment les missions suivantes :
    « 1° Observation et évaluation du dispositif de lutte contre le cancer ;
    « 2° Définition de référentiels de bonnes pratiques et de prise en charge en cancérologie ainsi que de critères d'agrément des établissements et des professionnels de santé pratiquant la cancérologie ;
    « 3° Information des professionnels et du public sur l'ensemble des problèmes relatifs au cancer ;
    « 4° Participation à la mise en place et à la validation d'actions de formation médicale et paramédicale continue des professions et personnes intervenant dans le domaine de la lutte contre le cancer ;
    « 5° Mise en oeuvre, financement, coordination d'actions particulières de recherche et de développement, et désignation d'entités et d'organisations de recherche en cancérologie répondant à des critères de qualité, en liaison avec les organismes publics de recherche concernés ;
    « 6° Développement et suivi d'actions communes entre opérateurs publics et privés en cancérologie dans les domaines de la prévention, de l'épidémiologie, du dépistage, de la recherche, de l'enseignement, des soins et de l'évaluation ;
    « 7° Participation au développement d'actions européennes et internationales ;
    « 8° Réalisation, à la demande des ministres intéressés, de toute expertise sur les questions relatives à la cancérologie et à la lutte contre le cancer.
    « L'Institut national du cancer établit un rapport d'activité annuel qui est transmis au Gouvernement.
    « Art. L. 1415-3. - L'Institut national du cancer est constitué, sans limitation de durée, sous la forme d'un groupement d'intérêt public constitué entre l'Etat et des personnes morales publiques et privées intervenant dans le domaine de la santé et de la recherche sur le cancer.
    « Sous réserve des dispositions du présent chapitre, ce groupement est régi par les dispositions de l'article 21 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France.
    « Art. L. 1415-4. - Le directeur de l'Institut national du cancer est nommé par arrêté conjoint des ministres chargés de la recherche et de la santé.
    « Il n'est pas nommé de commissaire du gouvernement auprès de l'Institut.
    « Art. L. 1415-5. - L'Institut national du cancer peut bénéficier du produit de quêtes ou campagnes d'appel à la générosité publique, ainsi que de dons et legs.
    « Art. L. 1415-6. - Le personnel de l'Institut national du cancer comprend :
    « 1° Des agents régis par les titres II, III et IV du statut général des fonctionnaires ou des agents publics régis par des statuts particuliers, placés en position de détachement ;
    « 2° Des agents contractuels de droit public mis à disposition par les parties selon les conditions fixées par la convention constitutive ;
    « 3° Des personnels régis par le code du travail. »
    Plusiers orateurs sont inscrits sur cet article.
    La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, le groupe UDF est très favorable à la création de l'Institut national du cancer prévu par l'article 15. En effet, tout doit être fait pour mobiliser l'ensemble des acteurs, pour coordonner leur action afin de mener le combat contre le cancer, ou plutôt contre les cancers, car ils sont différents selon l'organe qu'ils touchent ou leur forme histologique, et pour gagner ce combat.
    La création de l'Institut national du cancer s'inscrit dans le plan cancer, priorité fixée par le Président de la République et soutenue par l'UDF.
    Nous approuvons les huit missions distinctes attribuées à l'Institut, avec la volonté affirmée qu'il coordonne les actions, en ayant notamment pour mission d'évaluer le dispositif de lutte contre le cancer, de définir des référentiels de bonnes pratiques ainsi que de critères d'agrément, d'assurer l'information des professionnels et du public sur l'ensemble des problèmes relatifs au cancer ou de participer à la formation, domaine dans lequel beaucoup de choses restent à faire.
    Toutefois, monsieur le ministre, permettez-moi de vous poser deux questions. La première concerne le financement de cet institut. Quels sont les moyens prévus par l'Etat pour le financer ? Le texte prévoit que l'Institut puisse bénéficier du produit de dons, de legs et des quêtes sur la voie publique. Dans ces conditions, quel devenir envisagez-vous pour la Ligue contre le cancer et l'ARC, associations qui vivent de l'appel aux dons publics, notamment du produit des quêtes sur la voie publique ? Si l'Institut est autorisé à faire des quêtes sur la voie publique, que restera-t-il pour la Ligue contre le cancer et pour l'ARC ?
    Ma seconde question, monsieur le ministre, ne sera pas moins importante : puisque vous pensez que l'Institut national du cancer est nécessaire pour mieux lutter contre cette maladie, devons-nous envisager de créer des instituts nationaux par grandes pathologies ou consacrés aux affections d'un organe particulier ? Dans l'affirmative, quelles sont les maladies particulières auxquelles vous pensez ? Quelles sont celles auxquelles vous réserverez les coordinations ?
    M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. Qu'il faille créer un institut spécifique du cancer ou que le plan cancer doive ou non relever de l'INSERM, les Verts n'ont pas d'a priori : ce qui nous intéresse plus, c'est la logique retenue, quel que soit l'outil.
    L'annonce du plan cancer a le mérite de mettre sur la place publique l'enjeu que représente la véritable explosion de cette maladie, en France comme dans la plupart des pays développés, et de rompre avec le discours convenu des dernières décennies. On sait en effet que les progrès de la lutte contre le cancer sont moins rapides que les développement de la maladie elle-même : un homme sur deux et une femme sur trois sont, ou seront, atteints d'un cancer. Il est donc bien temps de mettre cette question au coeur de notre politique de santé.
    Jusqu'à présent, la stratégie adoptée a surtout été centrée sur la recherche thérapeutique. Les résultats miracles que l'on espérait n'ont pas été au rendez-vous et nombre de voies d'expérimentation sont apparues comme de fausses pistes.
    A la lecture des missions du futur Institut national du cancer, j'ai le sentiment qu'on en reste toujours au dépistage, au traitement, à l'information, sans prendre en compte l'ensemble des facteurs de risque ni la prévention de ces risques.
    Parmi les principaux facteurs de risque retenus comme favorisant l'apparition de cancers figurent certes le tabac, la mauvaise hygiène alimentaire et l'excès d'alcool. Mais, sans nier le bien-fondé de la lutte contre ces pratiques individuelles à risques, dont les effets sur l'apparition de cancer sont évidents, je m'étonne que, depuis le début de ce débat, on ait oublié toutes les autres causes de cancer, telles que la toxicomanie, alors même que la toxicologie, qui est à la base de l'évaluation des risques, est sinistrée en France.
    La progression du cancer n'est pas seulement liée au vieillissement de la population. Il existe aussi une progression intrinsèque liée à d'autres causes qu'il nous faut mettre en évidence. En France, les chiffres montrent qu'entre 1978 et 2000 la progression brute a été de 63 % et, à population comparable, de 35 %.
    Le lien avec les facteurs de risque que sont le tabac et l'acool n'est pas démontré pour les cancers qui progressent le plus : mésothéliome, mélanome, cancers de la prostate, du rein, du cerveau et du sein. On sait que la progression du mésothéliome est clairement liée à l'amiante.
    Vous comprendrez donc, monsieur le ministre, mon obstination, depuis le début de ce débat, à vouloir intégrer la question de la santé au travail dans la politique de santé publique puisque elle est l'un des aspects les plus importants de la lutte contre la progression des cancers.
    Au point 13 du plan cancer, vous indiquez vouloir « mieux impliquer la santé au travail dans la prévention du cancer ». Mais ce point comporte des dispositions qui, selon nous, correspondent au fonctionnement normal des institutions, et rien de plus, comme le contrôle des substances cancérogènes par l'inspection du travail, déjà prévu dans un décret de février 2001.
    S'agissant des mesures réglementaires, le plan fixe deux valeurs professionnelles, concernant les rayonnements ionisants et le benzène. Pour le benzène, il s'agit de la transcription d'une directive européenne, ce qui est positif mais ce qui n'apporte rien de nouveau. Certaines organisations considèrent cependant que le taux limite prévu est encore trop élevé. Quant aux poussières de bois, pour lesquelles la même directive fixait des valeurs limites, rien n'est indiqué.
    De façon plus générale, on peut s'étonner qu'on en reste à ces deux valeurs alors que l'enquête SUMER - surveillance médicale des risques professionnels - commandée par le ministère de l'emploi et publiée en 1998 avait montré que 8,5 % de l'ensemble des salariés étaient exposés à des produits reconnus cancérogènes sur leur milieu de travail, tels que le plomb, les éthers de glycol, le chrome et les solvants en général.
    Il nous apparaît par conséquent nécessaire d'appliquer, le principe de précaution, qui devrait apparaître dans la charte de l'environnement, et de mettre en oeuvre des mesures de protection des salariés plus efficaces ainsi que des mesures d'interdiction d'utilisation des substances dangereuses.
    J'ai lu les titres figurant dans le plan cancer, que vous avez eu l'amabilité de nous envoyer, monsieur le ministre : « rendre de plus en plus difficile l'accès au tabac », « faire appliquer l'interdiction de fumer dans les lieux collectifs », « faire appliquer l'interdiction de la promotion du tabac ». Je ne peux qu'être d'accord, d'autant que je ne fume pas. (Sourires.) Mais dans le chapitre « mieux impliquer la santé au travail », on en est encore à « systématiser la surveillance », à « mieux connaître les cancers », sans avancer sur le retrait ou l'interdiction de produits que l'on soupçonne aujourd'hui fortement de favoriser le développement du cancer.
    De même, on ne trouve rien sur les pesticides. Or on sait que l'utilisation massive de pesticides est une des causes du développement actuel des cancers dans les millieux agricoles, qu'il s'agisse des exploitants agricoles ou des ouvriers agricoles travaillant dans les vignes.
    Donc, oui à la création de l'Institut du cancer, si cela doit faire avancer sur la lutte contre le cancer...
    M. le président. Veuillez conclure, chère collègue.
    Mme Martine Billard. Je conclus, monsieur le président.
    Il reste que si l'on ne met pas en oeuvre de véritables politiques de prévention qui visent à interdire, en tout cas à réduire l'exposition aux facteurs de risque dans le cadre de la santé au travail, je crains que l'on ne doive élaborer un nouveau plan dans quelques années.
    M. le président. La parole est à Mme MuguetteJacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le président, mesdames, messieurs, le Président de la République a présenté, le 24 mars dernier, les différentes mesures du plan cancer. L'Institut national du cancer y est décrit sans ambiguïté ni conditionnel comme un institut autonome, une agence de moyens, placée sous la double tutelle des ministères de la santé et de la recherche, comme l'INSERM.
    Cet institut sera financé par l'Etat, il pourra gérer des fonds privés, notamment associatifs, et il aura la possibilité de recruter des personnels. Sa vocation est d'organiser la recherche en la coordonnant, par la création de « cancéropoles » régionaux, associant des centres cliniques de référence et des laboratoires - INSERM, CNRS, CEA, laboratoires universitaires -, de faire émerger des pôles d'envergures internationale et de financer des programmes.
    Pour ce qui est de l'articulation avec les organismes de recherche, il est précisé que la recherche médicale s'appuie principalement sur la connaissance des mécanismes du cancer dans les laboratoires de l'INSERM et du CNRS, puis sur la recherche clinique.
    Dans ces conditions, monsieur le ministre, existe-t-il encore la moindre possibilité que l'Institut du cancer soit placé d'une façon quelconque sous la tutelle de l'INSERM, sachant que l'ANRS vient d'être « recréée » en tant qu'agence autonome ?
    Si des instituts thématiques comme l'INCA se généralisent à l'ensemble de la recherche biomédicale, que restera-t-il de l'INSERM, surtout s'ils ont une puissance financière telle qu'ils pourront financer en totalité les laboratoires qu'ils auront labellisés ? Si l'INSERM est maintenu en dépit de la création de ces grands instituts, lui et les autres organismes de recherche seront-ils au moins associés à la décision des programmes ? Quels seront, s'il existent, les évaluateurs extérieurs de ces instituts ?
    On peut réellement craindre que la création d'instituts autonomes pour tous les champs majeurs de la recherche biomédicale n'entraîne la fin de l'existence de l'INSERM et, très vraisemblablement, du département « sciences de la vie » du CNRS. A terme, c'est l'organisation multidisciplinaire de la recherche publique qui serait ainsi remise en question. Or le cloisonnement des recherches par grandes pathologies n'est pas favorable aux recherches interdisciplinaires. En effet, les premières greffes du rein ont conduit à d'importants développements en immunologie et certains médicaments mis au point pour des pathologies bien précises se sont révélés efficaces dans un tout autre cadre.
    Ce sera aussi la porte ouverte à des évaluations disparates, puisque les laboratoires des différentes disciplines ne pourront plus faire l'objet de comparaisons. Quel sera l'avenir des chercheurs dans de telles structures ?
    La thématisation, c'est-à-dire le ciblage très précis des axes des recherche par des programmes, en toute première intention, dirigés vers l'application clinique, qui est la mission première de l'INCA, risque d'aboutir, dans les laboratoires, à un déséquilibre entre la recherche cognitive et la recherche plus appliquée.
    Les instituts tels que l'INSERM et le CNRS permettent la cohabitation de ces deux aspects de la recherche. Est-il nécessaire de créer des instituts autonomes pour optimiser les recherches dans les différents champs cliniques et rapprocher la recherche des laboratoires de celle du millieu hospitalier ? La mise en place d'une coordination entre formations de recherche dépendant de l'INSERM, du CNRS, ou d'autres organismes de recherche, et la recherche hospitalière ne le nécessite pas. La création d'instituts, en plus d'ajouter une couche supplémentaire et inutile de structures administratives, ne permettrait ni une réelle évaluation, compte tenu de la taille limitée de chacun, ni des échanges entre les différentes disciplines. Par contre, la coordination entre les différents organismes de recherche et les universités, comme elle se pratique en partie déjà puisqu'un nombre non négligeable de chercheurs du CNRS sont affectés à des unités INSERM, et vice-versa, peut être bénéfique à condition qu'elle fasse l'objet d'une concertation entre les différents acteurs.
    M. le président. Veuillez conclure, madame Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. J'en termine, monsieur le président.
    L'INSERM avait d'ailleurs considérablement oeuvré en ce sens en lançant des actions thématiques coordonnées qui permettaient un financement souple et rapide d'accès, sur des projets faisant intervenir différents partenaires ainsi que le secteur privé.
    L'organisation de la recherche biomédicale en France est donc arrivée à un tournant. Va-t-on garder une structuration autour des grands organismes actuels, capables d'« inter-évaluer » les laboratoires, des projets, les personnels, et de coordonner des actions avec les partenaires ? Cela nous paraîtrait de loin préférable à un saucissonnage d'empires disciplinaires sans intercommunications.
    C'est pourquoi nous émettons de grandes réserves sur l'article 15.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Il faut bien comprendre les parlementaires, notamment ceux de l'opposition, car l'article 15 est le seul à nous offrir l'occasion de débattre d'une annonce majeure - elle se veut en tout cas comme telle - des pouvoirs publics, du Gouvernement et, singulièrement, du Président de la République : le plan cancer.
    En effet, ce plan utilisera financièrement et d'une façon importante les finances sociales. Il correspond très légitimement à une priorité de santé publique, il aura un effet tout à fait restructurant, du moins je l'espère, sur notre appareil de santé. Malheureusement, nous n'abordons ces questions fondamentales qu'à travers l'article 15.
    Le Gouvernement se prive ainsi des commentaires, qui pourraient être souvent positifs, de l'opposition. Il a donc tort de ne pas utiliser la tribune parlementaire. Il se prive aussi de nombre de remarques complémentaires parfaitement utiles à l'efficacité que nous souhaitons tous voir donner à ce plan.
    M. René Couanau, vice-président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Il est dommage que la précédente majorité se soit privée d'exercer ce talent !
    M. Jacques Le Guen. Si la précédente majorité a mené un certain nombre d'actions, c'est bien dans la lutte contre le cancer.
    A l'occasion de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 15, j'évoquerai différents éléments qui, nous semble-t-il, permettraient d'améliorer le plan cancer. Car si ce plan présente des aspects positifs, ses aspects négatifs suscitent quelques inquiétudes.
    Ce n'est pas la première fois en 2002 que la France s'est posé le problème d'une action collective contre le cancer. Le Gouvernement précédent a eu l'occasion de mettre en oeuvre des politiques qui sont plus ou moins prolongées par ce fameux plan cancer, de la même façon que le plan Nixon qui, en son temps, a donné, sur le plan international, peu de résultats en ce qui concerne le cancer, mais beaucoup dans d'autres domaines. Tout cela devrait nous ramener à une vision à la fois plus relative et plus critique, dans le bon sens du terme, du plan qui nous est proposé.
    Je distinguerai, parmi les éléments positifs, d'une part, la mobilisation que le plan présuppose et, d'autre part, tout ce qui touchera aux soins avec l'intégration de la prévention et de la problématique de la prise en charge globale, psychologique, sociale et curative. Si toutes ces actions pouvaient être menées à bien, nous aurions alors, avec le plan cancer, un élément important et restructurant de notre appareil de santé que j'approuverais très fortement.
    J'en viens à l'Institut national du cancer, dont la création est prévue à l'article 15.
    D'abord, je suis favorable à ce que se manifeste de temps en temps un volontarisme politique. Il me semble assez légitime que le Président de la République décide de donner l'impulsion politique qui s'impose.
    Mais on introduit un peu de confusion lorsque l'impulsion, la volonté politique venue d'en haut se transforme en décisions quelque peu arbitraires sur les moyens d'atteindre l'objectif. A vrai dire, cette confusion, très française, n'est pas spécifique à ce quinquennat. D'autres ont pu, à certains moments adopter la même attitude.
    Autant je pense qu'il faut une impulsion, autant je regrette, une fois de plus, qu'il n'y ait pas eu de temps pour la discussion scientifique et politique au bon sens du terme.
    L'Institut national du cancer est quand même sorti du chapeau : ce n'est ni la communauté scientifique ni, dans sa grande masse, la communauté médicale qui ont porté l'idée de sa création. On s'est présenté un jour avec un plan cancer comportant dix propositions plus une : la création d'un institut national du cancer. D'où vient cette dernière proposition ? On a tout simplement voulu copier ce qui existe aux Etats-Unis, nous dit-on, avec l'institut national du cancer américain, qui est lui-même, première chose qu'il faut rappeler, une subdivision du National Health Institute : il ne s'agit pas d'une structure extérieure ce qui équivaudrait en France à l'INSERM. L'institut américain n'est pas off shore si je puis dire.
    M. le président. Monsieur Le Guen, je vous invite à conclure...
    M. Jean-Marie Le Guen. J'ai peur de ne pas en avoir terminé, monsieur le président. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Si cela vous dérange que l'on parle de ce sujet, je peux me taire. Si je ne peux pas conclure dès à présent, j'y reviendrai à un autre moment comme certains de mes aînés me l'ont appris. Mais étant donné son importance, j'ai bien l'intention de prendre le temps qu'il faudra pour m'expliquer, ce qui est, me semble-t-il, tout à fait légitime.
    Je ne crois pas faire de l'obstruction : mon souci est au contraire d'éclairer l'Assemblée. (Sourires.)
    Les choix qui ont été faits nous semblent particulièrement dangereux. Je ne reprendrai pas l'argumentation développée par Mme Muguette Jacquaint sur les structures et sur la manière dont nous devons organiser la recherche dans notre pays. Mais il faudra, monsieur le ministre, que vous nous donniez quelques réponses. En commission, on nous a dit que l'Institut ne serait qu'une « tête de réseau » : c'est l'expression qui a été employée, puisque, depuis le début de ce débat, il s'agit ici de science administrative, qui est chose assez précise - je parle sous le regard très professoral d'un de nos collègues. (Sourires). Pouvez-vous nous dire ce qu'est une « tête de réseau » d'un point de vue administratif ? Quelles sont exactement les fonctions de celle-ci et comment s'articule-t-elle avec d'autres instituts de recherche, notamment avec l'INSERM ?
    Par ailleurs, comment allez-vous faire pour refuser à d'autres grandes familles de pathologies, comme les affections cardiovasculaires ou neuropsychiatriques, ce que vous aurez accordé au cancer avec son institut national ? A ce sujet, des demandes commencent déjà à se faire entendre.
    Enfin, s'agissant du financement, vous nous parlez du tabac, toujours du tabac ! Bravo pour l'augmentation des prix du tabac, mais celle-ci peut-elle financer à la fois le plan cancer, le déficit de la sécurité sociale, le BAPSA, etc ? Le tabac est-il le tradéridéra que l'on repasse pour régler tous les besoins de financement en matière de santé publique ? J'espère donc, monsieur le ministre, que vous pourrez d'ores et déjà nous donner des indications chiffrées sur le financement et sur le fléchage des crédits.
    M. le président. J'espère que vous serez plus bref sur vos amendements, monsieur Le Guen, puisque vous vous êtes largement exprimé !
    La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, rapporteur. Je souhaite procéder à une mise au point avant d'aborder l'examen de cet article 15 qui vise à créer l'Institut national du cancer et représente un autre point fort de ce projet de loi.
    Je veux rappeler, d'abord, que c'est une volonté politique forte du Président de la République qui est traduite par ce texte. Vous avez dit vous-même, monsieur Le Guen, que vous n'étiez pas hostile au volontarisme politique.
    Par ailleurs, sur le principe, il existe indiscutablement un consensus parmi nous, parce que nous sommes tous très directement concernés par ces dizaines de milliers de personnes qui meurent chaque année, alors que l'on pourrait l'éviter.
    A la suite des réunions et des auditions de la commission et de diverses démarches que les différents groupes de pression ont engagées auprès de certains députés, il faut remettre les choses en place.
    Premièrement, l'Institut national du cancer sera effectivement une tête de réseau, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, dans votre présentation devant la commission, une « agence de moyens », pour reprendre l'expression de Mme Jacquaint. Mais relisons le texte ! Il est hors de question qu'une structure hospitalière, qu'elle soit participant au service public hospitalier - PSPH - privée ou publique, mette la main sur toute l'activité de cancérologie, comme certains ont cru le discerner dans le texte.
    Deuxièmement, il n'est pas question de voir disparaître toute l'activité recherche de l'INSERM, du CNRS, de l'INRA et d'autres, car nombreux sont les instituts de recherche qui ont une activité plus ou moins directement liée au cancer. Pour bien fixer les idées, je vais vous lire les missions de l'Institut national du cancer :
    « 1° Observation et évaluation du dispositif de lutte contre le cancer. » Tout le monde est d'accord.
    « 2° Définition de référentiels de bonnes pratiques et de prise en charge en cancérologie... » Tout le monde est d'accord. On l'a déjà entendu dans la discussion générale.
    « 3° Information des professionnels et du public sur l'ensemble des problèmes relatifs au cancer. » Là encore tout le monde est d'accord.
    « 4° Participation à la mise en place et à la validation d'actions de formation médicale et paramédicale continue... » Qui peut s'y opposer ?
    « 5° Mise en oeuvre, financement, coordination d'actions particulières de recherche et de développement, et désignation d'entités et d'organisations de recherche en cancérologie répondant à des critères de qualité... »
    « 6° Développement et suivi d'actions communes entre opérateurs publics et privés en cancérologie dans les domaines de la prévention, de l'épidémiologie, du dépistage, de la recherche, de l'enseignement, des soins et de l'évaluation. » Vous avez là toutes les réponses à vos questions, madame Billard. Je suis désolé, mais la toxicologie fait partie de ce que l'on peut appeler la prévention, l'épidémiologie.
    « 7° Participation au développement d'actions européennes et internationales. » Qui peut s'y opposer ?
    « 8° Réalisation, à la demande des ministres intéressés, de toute expertise sur les questions relatives à la cancérologie et à la lutte contre le cancer. »
    Enfin, il est prévu que l'Institut établisse un rapport d'activité annuel qui sera transmis au Gouvernement.
    Je me suis permis de prendre le temps de relire ces éléments, car je crois qu'ils répondent à toutes les questions qui ont été posées. Oui, il s'agit d'une tête de réseau ! Oui, il s'agit d'un progrès considérable pour la coordination et la mise en cohérence des recherches dans d'autres pays.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est quoi une tête de réseau ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. C'est facile à comprendre ! Regardez dans le dictionnaire au mot « réseau » et vous constaterez qu'un réseau comporte toujours une tête.
    M. Jean-Marie Le Guen. Elle a un carnet de chèques, la tête de réseau ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Certains orateurs ont regretté qu'il n'y ait qu'un article pour aborder un sujet aussi important que le plan cancer.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est vrai !
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur Le Guen, je souhaite vous répondre, ainsi qu'à Mme Billard, Mme Jacquaint et à tous ceux qui, dans la majorité, m'ont apporté leur soutien tout au long de la discussion de ce plan cancer. Je vais resituer l'Institut national du cancer dans l'ensemble du plan cancer.
    Ce plan cancer se singularise des autres par trois caractéristiques. D'abord, c'est la première fois qu'un chef d'Etat s'engage, en France, sur un sujet de cette envergure. C'est un engagement personnel devant le pays. Ensuite, c'est la première fois qu'un plan cancer approche globalement la maladie en plaçant le malade au centre. Ce plan concerne non seulement le soin et la recherche, mais aussi toute la prise en charge psychosociale, ce qui introduira un peu d'humanisme supplémentaire dans une épreuve bien difficile à traverser. Enfin, troisième caractéristique, c'est la première fois qu'il y a un financement dans la durée et un calendrier.
    Je ne partage pas les critiques selon lesquelles ce serait « imposé », un peu « contraint ». « On y va en force », ai-je même entendu dire. Permettez-moi de vous le rappeler, après que le Président de la République eut annoncé, le 14 juillet 2002, que le plan cancer était l'un de ses trois chantiers, a été organisée, dès le mois de septembre, la commission d'orientation pour préparer ce plan cancer à laquelle ont été largement associés, dans un premier temps les seuls cliniciens et chercheurs, puis, dans un second temps, les associations de patients dont la Ligue et d'autres. Ce plan cancer est issu d'une consultation et d'une concertation de cinq mois avec l'ensemble des acteurs. Je ne crois pas qu'on pouvait faire beaucoup mieux.
    M. Jean-Marie Le Guen. Ce n'est pas ce qu'ils disent !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le malade est au centre. En amont, il y a la prévention, l'éducation et le dépistage. Je n'y reviendrai pas, cela fait déjà quelques jours que nous travaillons à la définition de la santé publique au travers des actions de prévention, d'éducation et de dépistage. Naturellement, cela n'est pas déconnecté ; il y a toute l'action de santé publique en amont.
    Ensuite, on entre malheureusement dans la maladie au travers d'un bilan, d'un diagnostic et d'une mise en route de traitement. Cela doit se faire dans des services hospitaliers, publics ou privés, qui ont été accrédités, car ils possèdent les compétences, les équipements, car ils ont l'expérience pour ce faire. Ce sont ces structures, publiques ou privées, qui vont bénéficier en priorité de l'aide aux médicaments innovants et de l'aide à l'acquisition d'équipements lourds. C'est dans ces structures que vont être créées les commissions de coordination de cancérologie pour que le patient puisse être pris en charge au cours de sa déambulation entre services et laboratoires.
    Lorsque les choses sont bien installées, le patient se voit annoncer le diagnostic et nous allons travailler sur la création de la consultation d'annonce, qui sera d'ailleurs non pas une seule consultation, même agrandie, mais un temps privilégié où plusieurs acteurs interviendront, apportant chacun leur compétence. Le malade se verra également confier un projet personnalisé de soins décrivant ce qu'on va lui faire, quand on va le faire, et lui donnant deux référents, un médecin référent et un référent associatif, ce qui lui permettra de contacter à tout moment, en cas d'inquiétude ou d'angoisse, quelqu'un qui sera son correspondant.
    Quand le patient quittera l'hôpital, il sera pris en charge avec un dossier médical commun, en ambulatoire, par un système de réseau, réseau ville-hôpital, pouvant éventuellement se décliner jusqu'au réseau de bassin de vie, avec la participation des médecins généralistes, des infirmières, des kinésithérapeutes, des psychologues qui naturellement auront reçu la formation complémentaire pour cela. Cela veut dire que nous développerons dans le même temps l'hospitalisation à domicile, la possibilité de faire de la chimiothérapie à domicile et l'accompagnement psychosocial. Car ce que nous ne voulons pas perdre de vue, c'est qu'il ne sert à rien de guérir quelqu'un d'un cancer, si c'est pour le rendre à la vie de l'exclusion. Il faut naturellement, tout au long de cette épreuve, lui permettre de garder le contact avec la vie qu'il est appelé à retrouver après sa guérison.
    Naturellement, autour de cela, il y a la recherche et je vais tenter d'apporter à vos questions légitimes des réponses susceptibles de vous rassurer. Ce plan ne peut concerner uniquement l'INSERM, les CHU, les centres de lutte contre le cancer ou la médecine ambulatoire. C'est un tout. Il fait appel aux complémentarités et aux compétences additionnées des uns et des autres. Nous sommes dans une logique de projet, ce qui ne revient en aucune façon à dénier les compétences de tel ou tel service, de tel ou tel enseignant, de telle ou telle équipe de recherche. Nous souhaitons simplement associer tous ceux qui contribuent, chacun à leur niveau, à la lutte globale contre le cancer.
    Ce qui est jugé comme un atout considérable et un apport sans précédent par les associations, c'est que cet Institut national du cancer va permettre de suivre pas à pas la bonne tenue, le bon respect du calendrier et de vérifier que les moyens sont en accord avec les ambitions. Les médecins, les chercheurs et les patients vont travailler ensemble, dans une maison commune, sur toutes les missions qui ont été rappelées par M. le rapporteur et sur lesquelles je ne reviens pas.
    Il est vrai que l'INSERM s'est inquiété, mais permettez-moi de vous dire qu'il s'est aussi inquiété quand on a créé l'Association nationale de recherche contre le sida. Or si on a créé celle-ci, c'est parce qu'il n'y avait pas de lisibilité à l'INSERM sur le sida. J'ai suffisamment longtemps dirigé des équipes dans des unités INSERM pour savoir comment cela fonctionne. Les équipes travaillent bien, mais parfois il n'y a pas de lisibilité. Je pourrais vous parler à brûle-pourpoint de l'immunologie. Il se fait beaucoup de choses en la matière, que ce soit chez M. Fischer ou chez d'autres, à Nantes ou ailleurs, mais qui le sait ? Il n'y a pas de lisibilité en raison du système de commissions, qu'elles soient disciplinaires ou transversales. Le résultat, c'est qu'au bout du compte, quand l'ANRS est arrivée au bout de son contrat et que l'INSERM a manifesté le désir de la récupérer, on a bien vu que c'était un tel succès que ce n'était pas envisageable et elle a été reconduite pour six ans. Mais cela n'enlève rien ni à l'INSERM ni au CNRS ni au CEA ni aux équipes de recherche universitaire. Tout cela s'additionne. Nous voulons qu'il y ait une référence commune et que tous ceux qui travaillent sur le cancer puissent, à un moment ou à un autre, se retrouver pour tenter de coopérer et de coordonner leurs actions.
    Qu'il y ait, à l'avenir, un institut consacré aux affections cardio-vasculaires, pourquoi pas ? Qu'il y ait un institut de neuropsychiatrie, pourquoi pas ? Vous avez fait allusion tout à l'heure au système américain - ce n'est pas le NHS, c'est le NIH. Figurez-vous que le NCI, c'est-à-dire l'institut du cancer, a précédé de dix ans la création de l'Institut national de santé aux Etats-Unis. Si la création de l'Institut national du cancer pouvait conduire l'INSERM à revenir un peu plus vers de la médecine et du soin, si l'on pouvait véritablement tenter de restructurer avec notre Institut national de recherche en santé et avec les satellites qui représenteraient tel ou tel domaine, nous n'y serions pas du tout opposés. Nous attendons les résultats de la mission menée par Claude Griscelli sur le sujet. Je ne suis pas sûr que nous rendions service à la recherche en opérant ce morcellement entre l'INSERM, le département des sciences de la vie du CNRS, le CEA et d'autres. Pour avoir été dans les jurys de recrutement, je sais que si un chercheur n'est pas pris au CNRS, il va à l'INSERM ou ailleurs. En définitive, il n'y a pas de véritable spécificité. Or, il faut que nous y arrivions. Si le cancer pouvait être, comme vous le disiez vous-même monsieur Le Guen, le paradigme permettant de réorganiser les soins dans le cadre du réseau ville-hôpital, la ville entrant à l'hôpital et l'hôpital se poursuivant à domicile, nous aurions fait un progrès considérable. Le dossier médical commun, c'est considérable. Il faudrait pouvoir l'étendre à d'autres pathologies.
    Donc, personne n'a rien à craindre de l'Institut national du cancer. C'est un endroit où l'on va veiller à ce que le programme se déroule, se mette en place, à ce que chacun des acteurs y prenne sa part. Tout le monde aura à y gagner. En tout cas, s'il en est un qui a à y gagner, c'est bien le malade. C'est le seul pour lequel nous essayons aujourd'hui de construire cet outil. Voilà ce que je peux dire. M. le rapporteur a essentiellement répondu à Mme Billard.
    J'en viens à la question du financement. Nous n'avons pas encore discuté le PLFSS, mais nous avons prévu, pour l'année qui vient, 11 milliards d'euros pour la mise en place de cet Institut national du cancer. Cela n'est pas rien ! C'est une ambition fédératrice qui devrait nous rassembler les uns et les autres sur une belle et bonne cause. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. M. Dubernard, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, a présenté un amendement, n° 58, ainsi rédigé :
    « Substituer aux trois premiers alinéas de l'article 15 les deux alinéas suivants :
    « I. - Dans le titre Ier du livre IV de la première partie du code de la santé publique (partie Législative), il est inséré après le chapitre V un chapitre V-1 ainsi rédigé : »
    « Chapitre V-1 ».
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 58.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Jean-Marie Le Guen et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 301, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi la première phrase du premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 1415-2 du code de la santé publique :
    « Il est créé au sein de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, un institut national du cancer chargé de coordonner les actions de luttre contre le cancer ».
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, dans votre argumentation, vous passez sans arrêt de la problématique soins à la problématique recherche. J'entends bien qu'il y a une interpénétration, mais il est faux de dire que l'on peut mettre dans la même structure l'ensemble de la recherche, des soins, de l'action sociale. Qu'il y ait des liens, c'est certain. Qu'il faille développer de l'interrelation beaucoup plus qu'à l'heure actuelle, je vous l'accorde. Mais on ne peut passer sans arrêt d'un discours à l'autre.
    Cela dit, votre discours a été implicitement relativement critique vis-à-vis de l'INSERM. Vous lui reprochez d'être trop loin des soins. Vous avez évoqué le caractère répétitif du CNRS, de l'INSERM et du CEA. Donc, indépendamment de la problématique cancer, vous avez tenu sur l'Institut national du cancer un discours restructurant autour d'un certain nombre de thématiques. Cela ne me choque pas en matière de soins, mais s'agissant de la recherche, c'est aux interfaces entre les problèmes que l'on trouve le plus souvent des solutions et pas toujours dans une seule direction sur des recherches qui sont immédiatement thématisées. Le plan Nixon sur le cancer, par exemple, a donné d'autres éléments que ceux concernant directement le cancer, et des innovations ont été recherchées aux interfaces de la problématique de recherche.
    Je pense qu'en multipliant les innovations, dont certaines me semblent contestables - c'est un autre aspect de mon argumentation -, vous rendez la réalisation encore plus difficile. C'est d'ailleurs un défaut classique de l'esprit français : l'adoption d'un modèle théorique absolument pur finit par compliquer la mise en oeuvre. En créant cet institut, vous allez provoquer des compétitions dans la recherche de budgets, d'équipes, d'influence scientifique, celle-ci étant parfaitement légitime, de même qu'il est légitime que des débats divisent les scientifiques sur la défense de telle hypothèse plutôt que de telle autre. Au lieu de simplifier, vous allez compliquer les choses. C'est pourquoi cet amendement vise à préciser que si pôle il doit y avoir - nous ne sommes pas opposés à l'idée d'un pôle thématique -, il doit être créé au sein de la maison-mère de la recherche médicale, à savoir l'INSERM. On ne saurait d'ailleurs reprocher à celui-ci de se détacher de la recherche clinique si, dans le même temps, on ne lui donne pas les moyens de s'accrocher à des secteurs comme la cancérologie ou l'oncologie, qui font partie de ceux où la problématique de soins est la plus intégrée à la recherche.
    Dernier argument : à la différence des Etats-Unis, nous n'avons pas de masse critique nous permettant de disposer d'instituts autonomes sur chacun de ces thèmes. Par exemple, nous n'avons pas suffisamment d'épidémiologistes pour créer sept ou huit départements d'épidémiologie dans chaque institut. Nous n'en avons pas encore la capacité humaine, financière et scientifique. L'Europe l'aura peut-être demain. Mais aujourd'hui, à elle seule, la France ne l'a pas.
    Nous insistons donc pour que l'Institut national du cancer ne soit pas l'occasion d'une bataille picrocholine. Posons le problème du cancer, ne posons pas le débat que mènent à droite certains libéraux pour essayer de mettre à bas l'INSERM et le CNRS, les sciences dites fondamentales de la fonction publique étant considérées comme non productives par rapport à d'autres recherches thématiques.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Monsieur le président, je ne vais pas relire la liste des missions de l'Institut national du cancer. J'ai fait l'effort de le faire, mais M. Le Guen ne m'a visiblement pas entendu. Ces missions ne se limitent pas à la recherche.
    M. Jean-Marie Le Guen. Mais la recherche en fait partie.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. La logique d'institut que certains d'entre nous connaissent très bien, qui est inspirée du NIH, du National Institute of Health,...
    M. Jean-Marie Le Guen. Adressez-vous plutôt à M. Couanau : il a dit qu'il ne savait pas ce que c'est !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Je ne pourrais accepter que vous mettiez en cause le vice-président de la commission !
    M. René Couanau. Merci !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Cette logique d'institut, inspirée des Etats-Unis, a une grande importance, monsieur Le Guen. Lorsque vous avez parlé de la masse critique, vous alliez peut-être à l'encontre de cette logique, en ne considérant que l'échelon français. Or c'est à l'échelon européen que l'avenir devrait se dessiner.
    Je suis de ceux qui considèrent que la création d'un Institut national du cancer peut être un élément déclenchant qui fera évoluer non seulement l'INSERM, mais aussi toutes les autres structures qui, dans ce pays, s'occupent du cancer.
    Pour toutes ces raisons, la commission a rejeté l'amendement n° 301.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Sans doute chacun restera-t-il sur ses positions. Néanmoins, monsieur Le Guen, je vous répète que l'Institut national du cancer n'a pas pour vocation à constituer un nouvel établissement public de recherche. Il ne recrutera pas de chercheurs...
    M. Jean-Marie Le Guen. Le carnet de chèques...
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. En revanche, il aura la possibilité, comme le fait déjà l'Association française de lutte contre la myopathie, de lancer des appels d'offres, éventuellement financés, auprès des équipes de l'INSERM, du CNRS, et équipes universitaires, des équipes du CNRS. Ce sera un plus pour les équipes qui resteront sous le statut de l'INSERM, du CNRS, des universités ou du CEA.
    Vous me faites un mauvais procès ! Encore une fois, il n'y aura ni compétition, ni concurrence, ni opposition entre l'Institut national du cancer et l'INSERM, bien au contraire.
    Par ailleurs, je trouve un peu étonnant que vous nous demandiez par amendement de créer à l'intérieur de l'établissement public qu'est l'INSERM un Institut national du cancer. On ne va pas rééditer le coup des poupées russes ! L'INSERM a un directeur général. Ce dernier peut rassembler les énergies, mais je ne crois pas que la logique d'organisation de l'INSERM, aujourd'hui, soit une logique par pathologie.
    M. Jean-Marie Le Guen. Le regrettez-vous ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je ne dis pas que j'ai nécessairement raison, mais un organisme qui n'évolue pas au fil du temps et qui ne trouve pas de logique nouvelle de fonctionnement et d'orientation risque de passer à côté de complémentarités indispensables. C'est bien la raison pour laquelle Mme Haigneré et moi-même avons confié à Claude Griscelli une mission pour étudier comment nous pourrions réorganiser et redynamiser la recherche sur le cancer.
    Monsieur Le Guen, il ne faut pas s'opposer pour s'opposer.
    M. Jean-Marie Le Guen. Ce n'est pas ce que je fais !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Vous avez été parmi les premiers à avoir pris contact avec moi pour défendre l'ANRS lorsqu'elle a été mise en cause. Certains souhaitent que l'INSERM le récupère. Beaucoup pensaient que le travail qu'elle avait mené dans la lutte contre le sida était magnifique et qu'elle devait être maintenue telle quelle. L'ANRS est-elle pour autant concurrente de l'INSERM ? Sûrement pas, ni du CNRS non plus.
    Nous souhaitons rassembler la volonté de travailler sur des thématiques et sur des pathologies. Après, chacun - l'INSERM, le CNRS et les autres structures - y apportera ce qu'il pourra y apporter. A terme, nous disposerons autour d'un grand institut national de santé d'instituts par pathologie qui marieront à la fois la recherche, le soin et l'intervention des patients. Voilà ce que nous voulons faire.
    Le Gouvernement donne un avis défavorable à l'amendement n° 301. Et il considère que la synthèse menée à l'article 15 satisfait l'ensemble des acteurs de la lutte contre le cancer.
    M. le président. La parole est à M. Alain Claeys.
    M. Alain Claeys. Monsieur le président, je ne veux pas prolonger le débat, mais je pense que le sujet est important. Notre collègue Jean-Marie Le Guen a eu raison de l'aborder.
    Monsieur le ministre, vous avez dit à la tribune - et vous venez de le répéter - que vous aviez confié une mission pour évaluer les modes de fonctionnement de l'INSERM, du CNRS et du CEA. J'ai le sentiment, aujourd'hui, que vous avez déjà conclu sur cette mission...
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. C'est un procès d'intention !
    M. Alain Claeys. ... et que vous décrivez en séance les insuffisances de l'INSERM, du CEA et du CNRS.
    Pour ma part, je ne veux pas défendre telle ou telle structure. Mais je constate que les sciences de la vie manquent de crédits - nous y reviendrons dans le débat budgétaire. Je constate aussi que l'INSERM joue un rôle pilote.
    Que vous me disiez que l'INSERM puisse améliorer son fonctionnement interne, je suis prêt à l'entendre. Mais je peux vous assurer - je suis arrivé hier de Bruxelles - que lorsqu'on parle au commissaire chargé de la recherche, on se rend compte que l'INSERM a des références.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Bien sûr.
    M. Alain Claeys. L'INSERM s'est mobilisé sur des projets européens concernant le sujet dont nous traitons aujourd'hui. Voilà pourquoi je pense qu'aujourd'hui il serait utile, peut-être après en avoir débattu avec ses responsables, de lui confier cette mission.
    M. le rapporteur a indiqué tout à l'heure que le cinquième objectif de l'Institut national du cancer serait de choisir les programmes de recherche. Mais comment concilier concrètement le travail que fera cet Institut avec le travail que fera la division sciences de la vie de l'INSERM ? A vouloir créer une structure nouvelle, vous n'allez pas simplifier mais plutôt compliquer les choses.
    La bonne méthode serait peut-être, monsieur le ministre, d'attendre les conclusions de l'étude que vous avez demandée. Certes, le CNRS, le CEA et l'INSERM travaillent sur des sujets voisins. Mais conclure dès maintenant ajoutera de la complexité à celle que vous pointez déjà du doigt.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je voudrais essayer de recentrer le débat, qui est en train de dériver de la santé à la recherche : je ne suis pas aujourd'hui le ministre de la recherche, je suis ministre de la santé et je défends la prise en charge, le diagnostic, le soin et le traitement du cancer. Pour cela, il faut collaborer avec la recherche ! Mais nous n'allons pas confier le diagnostic du cancer à l'INSERM !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Bien sûr !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Nous n'allons pas non plus lui confier le traitement du cancer ! Nous n'allons pas confier ces projets de soins à l'INSERM, même si j'ai pour cet institut le même respect que celui que vous venez de témoigner. Je suis un membre d'une équipe INSERM, et j'ai évidemment beaucoup de mal à dire que cet organisme ne travaille pas ou travaille mal. Mais il y a un moment où il faut rapprocher le soin de la recherche et mettre le malade au centre.
    M. Jean-Marie Le Guen. Nous sommes d'accord.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Eh bien, c'est ce que nous faisons, et vous ne pouvez pas aujourd'hui nous entraîner sur une discussion portant sur la restructuration globale des organismes de recherche.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est tout de même ce que vous faites !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Non. Au contraire ! J'ai pris la précaution de dire qu'il n'y aurait pas de carrières, qu'il n'y aurait pas de thématiques de recherche propres, mais que, selon des axes choisis par ceux qui travailleront à l'Institut du cancer, il pourrait y avoir des appels d'offres venant en complément des crédits normalement attribués au cancer dans le cadre des établissements publics. Exactement comme l'a fait l'AFM dans le domaine de la génétique.
    M. Jean-Marie Le Guen. Cela n'a rien à voir. C'est une démarche de la société civile.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur Le Guen, l'AFM ou le Généthon ont apporté énormément et n'ont pas pour autant diminué l'importance de l'INSERM en génétique. C'est un plus, ce n'est pas un moins. N'imaginez pas que chaque fois que l'on fait quelque chose, on enlève quelque chose à quelqu'un pour le donner à quelqu'un autre. Nous sommes dans une logique de complémentarité et de cohérence.
    M. Jean-Marie Le Guen. Mais cela n'a rien à voir !
    M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission.
    M. René Couanau, vice-président de la commission. Merci, monsieur le président, de me donner la parole pour répondre en quelques secondes à M. Le Guen qui, manifestement, mélange les problèmes de recherche et les problèmes de santé.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est vous qui les mélangez !
    M. René Couanau, vice-président de la commission. Je voudrais vous inciter, monsieur Le Guen, à ne pas utiliser dans le débat des discussions que nous avons en commission sur un autre sujet. Vous voulez faire feu de tout bois. Essayez d'abord de réconcilier les éléments de votre propre pensée avant de synthétiser les éléments de la pensée des autres. (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mes interventions sur les problèmes de réseau et de têtes de réseau concernaient l'Ecole des hautes études en santé publique. Et j'avais posé la question - mais nous y viendrons aux articles 40 et 41 - de savoir comment l'ancienne ENSP s'articulait sur la notion de réseau. Nous nous étions alors opposés sur la notion juridique de réseau et la notion de tête de réseau.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 301.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Greff a présenté un amendement, n° 250, ainsi rédigé :
    « Après le quatrième alinéa (3°) du texte proposé pour l'article L. 1415-2 du code de la santé publique, insérer l'alinéa suivant :
    « 3° bis Mise en oeuvre de campagnes de sensibilisation sur les comportements à risque ; ».
    Cet amendement n'est pas défendu ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Il est repris, monsieur le président !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. On ne va pas se laisser intimider !
    M. le président. Monsieur Le Guen, vous n'êtes pas privé de parole dans cet hémicycle ! Ne me faites pas un procès d'intention. Chacun peut s'exprimer largement.
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, merci de me donner la parole.
    Monsieur Couanau, la tête de réseau n'est pas liée au projet.
    M. le président. Monsieur Le Guen, défendez l'amendement que vous avez repris.
    M. Jean-Marie Le Guen Je fais ce que je veux, monsieur le président, quand j'ai la parole. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Monsieur Le Guen, vous avez repris un amendement...
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous vous faites juge de mes propos, et ce n'est pas la première fois.
    M. le président. Non !
    M. Jean-Marie Le Guen. Je fais ce que je veux, et j'argumente comme je veux !
    M. le président. Dans ce cas, présentez l'amendement n° 250, que vous avez repris.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je présente les amendements comme je l'entends !
    M. le président. Je vous prie de prendre un autre ton pour vous adresser à la présidence. Je suis très correct avec vous et je vous demande de faire de même.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je suis moi aussi très correct, monsieur le président.
    M. le président. Sinon, le fait personnel sera de mon côté, et pas du vôtre !
    M. Jean-Marie Le Guen. Mais je vous en prie, n'hésitez pas. C'est la première fois que vous présidez notre débat...
    M. le président. Non, j'étais là hier soir, monsieur Le Guen !
    M. Jean-Marie Le Guen. Je sais bien qu'ici, certains collègues sont pressés. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Non, pas du tout...
    M. Jean-Marie Le Guen. Je le comprends, mais je souhaite d'aller jusqu'au bout d'une discussion où certains fuient leurs responsabilités.
    J'imagine que la mise en oeuvre des campagnes de sensibilisation sur les comportements à risques, proposée par notre collègue, ne revient pas à l'Institut national du cancer, mais à l'INPES. Ce qui veut dire que, a contrario, certaines tâches, notamment les tâches de financement de la recherche, lui seront confiées. Et que l'on attribue ou non ces missions à cet institut, on lui donnera concrètement plus ou moins de responsabilités.
    Je pose donc la question au ministre : y aura-t-il ou non, dans les crédits INSERM, de l'argent qui continuera à arriver pour financer la recherche sur le cancer ? J'ajoute que la comparaison avec le Téléthon n'a pas lieu d'être : le Téléthon, c'est une initiative de la société civile qui recherche de l'argent en plus de celui qu'apporte l'Etat. Ici, on parle de l'argent de l'Etat, n'est-ce pas ?
    Monsieur le ministre, soyons au moins clairs. Comment sera financé l'INC ? Cela affectera-t-il les crédits d'autres organismes de recherche ?
    Mme Muguette Jacquaint. Qui finance l'INC ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Si je vous entends bien, aucun centime ne sera retiré à aucun des autres organismes de recherche ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Absolument !
    M. Jean-Marie Le Guen. Cet argent viendra « en plus ». Merci de nous le confirmer et de nous indiquer l'origine des fonds.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je vous l'ai dit ; c'est dans la loi !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 250.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Jean-Marie Le Guen et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 300, ainsi rédigé :
    « Avant le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 1415-2 du code de la santé publique, insérer l'alinéa suivant :
    « Les actions en matière de recherche, de soins et de prévention financées par l'Institut national du cancer sont subordonnées à un engagement préalable d'évaluation de ces actions. »
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Les phrases qui ont été prononcées aujourd'hui apportent un éclairage tout à fait particulier sur ces questions à tous ceux qui s'intéressent aux problèmes de recherche dans ce pays. En effet, et quoi qu'on en dise, c'est bien d'une restructuration des appareils de recherche dans notre pays qu'il s'agit.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Absolument pas !
    M. Jean-Marie Le Guen. S'agissant des soins, ce plan est parfaitement positif. Je souhaite seulement que la notion d'évaluation soit toujours incluse dans ces actions. Si on cherche à mettre en oeuvre des problématiques d'excellence, ce qui est plutôt l'orientation qui est prise en matière de soins, il faut que les actions menées soient systématiquement évaluées. C'est une garantie de qualité des actions. Lorsqu'on parlera du dépistage, on verra que, là encore, il s'agit sans doute moins de faire du chiffre que d'essayer de faire de la qualité.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Rejet. Je renvoie M. Le Guen à l'article L. 1415-2 qui précise bien quelle est la première mission de l'INC, à savoir l'observation et l'évalution du dispositif de lutte contre le cancer. Cet amendement paraît donc totalement inutile.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il faudrait revenir à un peu de bon sens. Vous me dites que nous remettons en cause l'architecture de la recherche. Il n'en est rien : nous ne touchons ni à l'INSERM, ni au CNRS, ni au CEA. Nous ne leur enlevons pas un sou ! Nous apportons un plus, grâce aux dons et legs dont pourra bénéficier l'Institut du cancer.
    Vous avez, dans le texte lui-même, ce que vous réclamez. Vous demandiez l'évaluation ? C'est dans le 1° : « Observation et évaluation du dispositif de lutte contre le cancer ». Vous demandiez le financement ? C'est à l'article L. 1415-5 : « L'institut national du cancer peut bénéficier de la générosité publique » - nous reviendrons dessus par un amendement - « ainsi que de dons et legs ».
    Tout est prévu, tout est dit ! M. Le Guen, que vous ne soyez pas tout à fait d'accord sur tel ou tel équilibre, je le comprends. Mais ne nous accusez pas de ne pas dire des choses qui sont écrites dans le texte.
    M. Jean-Marie Le Guen. Que les dons et les legs ! Il n'y a rien d'autre ? Pas un sou d'argent public ? C'est une plaisanterie !
    M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. Malgré les réponses que M. le ministre a faites à M. Le Guen, on constate toujours, à la lecture de l'article 15, une grande imprécision en ce qui concerne la composition de la direction de l'Institut national du cancer : l'Etat et des personnes morales et privées publiques intervenant dans le domaine du cancer.
    Il se trouve que, ce matin, j'ai assisté à un petit-déjeuner organisé par un grand laboratoire pharmaceutique dont je tairai le nom, mais dont le centre de recherche est situé, à sa grande gloire, en France.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Pas loin de Toulouse ! (Sourires.)
    M. Gérard Bapt. A une question que lui posait le directeur de la recherche de ce laboratoire, la déléguée interministérielle pour la lutte contre le cancer a répondu que participeraient au groupement d'intérêt public l'Etat, bien entendu, des entreprises privées, la CNAM, qu'elle a failli oublier, ainsi que la Ligue contre le cancer, censée représenter les usagers. Or ce n'est pas tout à fait ce que j'ai entendu ici. A l'évidence, il subsiste un grand flou sur la constitution du GIP et donc sur les missions qui lui seront imparties, sur la façon dont seront déterminés et évalués les programmes de recherche.
    Voilà pourquoi, monsieur le président, cette discussion a une réelle importance.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 300.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 59 et 449.
    L'amendement n° 59 est présenté par M. Dubernard, rapporteur, MM. Préel, Leteurtre et Jardé, l'amendement n° 449 est présenté par MM. Leteurtre, Jardé et Préel.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Compléter le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 1415-2 du code de la santé publique par les mots : "et au Parlement. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 59.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Je laisse le soin à M. Leteurtre de défendre ces amendements dont il a pris l'initiative.
    M. le président. Je vous en prie, monsieur Leteurtre.
    M. Claude Leteurtre. Voilà un amendement qui fera plaisir à la présidence. Nous l'avions présenté au nom du groupe UDF, mais le bon sens qui l'inspire a convaincu la commission de le reprendre à son compte. Je retire donc notre amendement au profit de celui de la commission.
    M. le président. L'amendement n° 449 est retiré.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 59 ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. J'approuve bien entendu cet amendement qui demande en quelque sorte à l'INC de rendre des comptes au Parlement.
    Cela dit, l'engagement du Gouvernement est-il de financer l'Institut national du cancer essentiellement ou entièrement par des dons et des legs ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je viens de l'annoncer : le budget dévolu à l'INC est de 11 millions d'euros.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Le ministre est même monté à la tribune pour le dire !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est dingue, ce refus d'entendre !
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur Mattei, je comprends que vous soyez énervé par les temps qui courent, mais tout de même...
    Vous dites 11 millions, mais le problème n'est pas la somme !
    M. Jean Le Garrec. Il avait même dit 11 milliards !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Et personne n'avait moufté ! (Sourires.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Oh ! vous savez, monsieur le ministre, étant donné toutes les promesses qui sont faites autour de cet institut, plus rien ne nous étonne !
    En réalité, la question que je pose est simple, compréhensible et n'a rien de polémique. La représentation nationale souhaite être consultée, comme le soulignent les deux amendements que nous examinons. Elle aimerait donc savoir d'où viendront ces 11 millions. Pouvez-vous prendre l'engagement que telle équipe de l'INSERM ou du CNRS qui travaille déjà sur des recherches oncologiques continuera de toucher ses crédits, et par le même canal ? Ou bien y aura-t-il un transfert et le financement sera-t-il assuré, à l'avenir, par l'Institut national du cancer ? Autrement dit, l'argent destiné à la recherche sur le cancer passera-t-il désormais uniquement par l'INC ? Encore une fois, la question est simple. Je ne parle pas du statut des personnels ni du fonctionnement de l'institution, mais du détenteur du carnet de chèques pour la recherche.
    M. le président. Monsieur Le Guen, le ministre a compris la question, il va y répondre.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je vous remercie, monsieur le président, d'avoir déjà deviné que le ministre avait compris !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur Le Guen, il n'y aura aucun transfert des financements de la recherche publique sur l'Institut national du cancer. C'est d'une clarté absolue !
    Mme Muguette Jacquaint. Alors, où seront pris les 11 millions ?
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 59.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Jean-Marie Le Guen et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 302, ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article L. 1415-4 du code de la santé publique par l'alinéa suivant :
    « Le conseil d'administration de l'Institut national du cancer est composé pour moitié de représentants désignés par le conseil d'administration de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, pour moitié de personnalités qualifiées nommées par le ministre de la santé incluant au moins trois représentants des associations d'usagers aux sens des dispositions de l'article L. 1114-1 du présent code. »
    C'est à vous, monsieur Le Guen, il faut suivre !
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, tant de questions se posent que j'ai le sentiment que mon esprit fonctionne moins bien ! (Sourires.)
    Je me dis la chose suivante : l'argent n'est pris sur aucun budget, c'est super ! Mais j'ai cru entendre qu'il y avait parfois des phénomènes de régulation budgétaire, qui affectent notamment le budget de la recherche. Alors vous conviendrez, mes chers collègues, qu'il n'est pas illégitime que je me pose des questions sur l'origine de ces fameux 11 millions, compte tenu des difficultés actuelles de l'Etat et du fait que le budget de la recherche est un des premiers lieux où s'effectue la régulation budgétaire.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Ce n'est pas vrai cette année !
    M. Jean-Marie Le Guen. D'où viendront ces 11 millions, disais-je ? J'avais cru entendre qu'ils viendraient du tabac. Mais dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui a été présenté ce matin, le tabac est aussi mis à contribution. Est-ce que le tabac est bon en tout et pour tout ? Est-ce que, demain, lorsque Bruxelles nous demandera où en est notre déficit, nous lui répondrons : « Le tabac, le tabac vous dis-je ! »... à la place du poumon ? (Sourires.)

    Pour le reste, je n'ai pas le sentiment, monsieur le ministre, que le mouvement qui a contribué à l'élaboration de ce plan soit tel que tous les acteurs de la santé publique dans ce pays soient rassurés sur leur participation à l'Institut national du cancer. Quand j'entendais M. Bapt rapporter des propos tenus ce matin par la déléguée interministérielle, je me disais : « Tiens, il manque déjà une autre association de lutte contre le cancer. » Et puis les associations de malades ne sont pas toutes thématisées. Peut-être les associations généralistes devraient-elles aussi être représentées dans l'Institut.
    Au-delà des questions de financement, sur lesquelles j'attends toujours des réponses, l'objet de mon amendement n° 302 est de poser le problème de la représentation des usagers du système de santé dans le fonctionnement de nos politiques de santé publique, et en l'occurrence de lutte contre le cancer.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement. Je ne vais pas argumenter à nouveau, car les choses sont claires. Le débat n'a plus de sens quand il atteint ce degré de...
    M. Pierre-Louis Fagniez. ... mauvaise foi !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. ... d'illogisme.
    Je salue à nouveau la vision dirigiste de M. Le Guen qui veut que la loi définisse la composition du conseil d'administration. Et puis je m'interroge : pourquoi l'INSERM serait-il le seul organisme de recherche représenté au conseil d'administration ? Et le CNRS ? Et le CEA ? Et l'INRA ? Et les autres structures qui s'occupent de la recherche sur le cancer ? On se demande d'où vient cet amendement ?
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je m'arme de patience et confirme à M. Le Guen que les 11 millions d'euros seront pris sur le budget du ministère de la santé, chapitre « santé publique ».
    L'année dernière, en 2003, dans le projet de loi de finances, nous avions déjà affecté 35 millions d'euros au plan cancer et il y aura cette année 11 millions de plus, dévolus à l'Institut national du cancer.
    Après toutes mes explications, ce serait désormais de la mauvaise foi - mais je ne veux pas vous prêter cette intention - que de continuer à vouloir présenter l'Institut national du cancer comme un organisme prioritairement de recherche. Sa tâche prioritaire est de veiller à ce que le dossier médical soit le même partout, à ce que les réseaux soient accrédités, à ce que la formation des professionnels - généralistes ou paramédicaux - soit correcte, à ce que les associations soient convenablement reçues et obtiennent les réponses à leurs questions, à ce que l'information soit correctement transmise aux patients. Bref, l'institut a pour mission de faire fonctionner ensemble le monde de la lutte contre le cancer.
    Pardonnez-moi de le redire, la recherche n'est qu'une toute petite partie de sa tâche. C'est loin d'être son obsession. Il y a pour cela des établissements publics qui fonctionnent très bien et le seul but, dans le domaine de la recherche, de l'Institut national du cancer, c'est d'essayer quelquefois de jouer les fédérateurs en lançant un appel thématique à partir de fonds qui pourraient provenir de dons et de legs. C'est à peu près tout le rôle qui lui revient en matière de recherche. Ne prêtez pas à cet institut des fins qu'il n'a pas.
    M. Pierre-Louis Fagniez. C'est très clair !
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. Monsieur le rapporteur, je ne pense pas du tout que notre amendement soit d'inspiration dirigiste puisque le projet de loi lui-même précise, d'une part, à l'article L. 1415-3, que « l'Institut national du cancer est constitué, sans limitation de durée, sous la forme d'un groupement d'intérêt public constitué entre l'Etat et des personnes morales publiques et privées intervenant dans le domaine de la santé et de la recherche sur le cancer », et définit, d'autre part, à l'article L. 1415-4, le statut du directeur de l'institut. Il est donc légitime et fondamental de préciser dans la loi que les associations de malades, thématiques ou non, doivent être représentées au conseil d'administration.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 302.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 60 et 448.
    L'amendement n° 60 est présenté par M. Dubernard, rapporteur, MM. Leteurtre, Préel et Jardé ; l'amendement n° 448 est présenté par MM. Leteurtre, Préel et Jardé.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le texte proposé pour l'article L. 1415-5 du code de la santé publique. »
    La parole est à M. Claude Leteurtre.
    M. Claude Leteurtre. L'article L. 1415-5 qui nous est proposé indique que « l'Institut national du cancer peut bénéficier du produit de quêtes ou de campagnes d'appel à la générosité publique, ainsi que de dons et legs ».
    C'est une noble mission qui est confiée à l'Institut et on voit mal qu'il soit mis, en quelque sorte, en concurrence avec la Ligue contre le cancer et l'ARC. Ces structures participent depuis longtemps de manière très efficace à la recherche de fonds. Elles ont soutenu de nombreux projets, tant dans le domaine de la recherche que de l'action quotidienne. Elles ont des relais locaux nombreux et puissants dont les initiatives permettent souvent de pallier les insuffisances du système de soins.
    Si l'on maintenait cet article de code, l'INC imposerait à ces associations une concurrence que j'estime inégale et déloyale. Pour la renommée même de l'Institut national du cancer, il faut supprimer l'article.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement n'est que partiellement favorable à cet amendement, car il ne souhaite pas supprimer toutes les dispositions de l'article L. 1415-5. Il dépose donc lui-même un amendement tendant à rédiger ainsi cet article :
    « L'Institut national du cancer peut bénéficier de dons et de legs. »
    Si cette faculté me paraît justifiée, il n'en est pas de même pour la quête sur la voie publique. Il ne faut pas mélanger les genres.
    M. le président. Cet amendement du Gouvernement reçoit le numéro 562.
    Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. A titre personnel, avis favorable.
    M. le président. Vous retirez donc l'amendement de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Et vous, monsieur Leteurtre, le vôtre ?
    M. Claude Leteurtre. Je le retire également.
    M. le président. Les amendements n°s 60 et 448 sont retirés.
    Je mets aux voix l'amendement n° 562.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Jean-Marie Le Guen et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 421, ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 15 par l'alinéa suivant :
    « Art. L. 1415-7. - Pour pouvoir exercer des actes de chirurgie oncologique, tout praticien doit se voir délivrer un agrément par le ministre de la santé, après consultation de l'Institut national du cancer. Cet agrément est délivré pour chaque type d'acte chirurgical aux praticiens qui en font la demande sur la base d'un dossier fourni par l'intéressé. Il en est de même pour les services et les établissements chirurgicaux où sera mené ce type d'opération. Cet agrément n'est pas obligatoire en cas d'urgence vitale. »
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Pour ce qui concerne l'organisation des soins et de la prévention, l'existence de l'INC ne me pose aucun problème.
    S'agissant de la recherche, tout le monde convient - car l'idée est juste - qu'il faut la rapprocher des soins. Mais il en résulte une ambiguïté : où se situe alors la frontière entre les soins et la recherche ? En tout cas, monsieur le ministre, il est clair que la France ne va pas se contenter de dépenser 11 millions d'euros à la fois pour la recherche sur le cancer - j'espère qu'elle recevra à elle seule beaucoup plus - et pour la coordination des soins.
    Mais j'en viens à mon amendement, qui concerne la chirurgie oncologique. Il y a ici, d'ailleurs, des gens qui connaissent le sujet beaucoup mieux que moi et qui pourraient s'exprimer, s'ils le souhaitent, puisque cet amendement n'a rien de politique.
    Le problème est simple : trop souvent, dans certains hôpitaux, certains chirurgiens, par ailleurs parfaitement compétents, sont amenés à pratiquer des actes de chirurgie oncologique sans être au fait des protocoles et méthodes applicables et sans disposer de compétences suffisantes en ce domaine. De ce fait, si les témoignages que j'ai entendus sont vrais, on voit souvent arriver dans les services spécialisés de chirurgie oncologique des patients traités par ces très bons chirurgiens, certes, mais qui n'exercent pas dans des services maîtrisant les protocoles de cancérologie avec tout ce que cela suppose d'alliances avec la chimiothérapie et la radiothérapie, bref, dont le savoir-faire n'est pas suffisant pour assurer la qualité de tels actes.
    Il nous faut donc envisager un agrément délivré par l'INC - qui sera le centre de référence pour la qualité des soins - aux praticiens aptes à pratiquer des actes de chirurgie oncologique, ainsi qu'aux services spécialisés. On pourra ainsi assurer un accès véritablement égal de tous les Français à la qualité des soins, l'un des principes revendiqués par le plan cancer et auquel nous sommes tous très attachés.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Elle a repoussé l'amendement. Le rôle de l'INC est de définir les critères et les référentiels, et non d'accréditer. C'est l'ANAES qui accrédite.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Même avis.
    M. le président. La parole est à M. Bertho Audifax.
    M. Bertho Audifax. Je m'élève contre ce dirigisme qui voudrait s'appliquer à tous les actes médicaux. Imaginez que vous êtes chirurgien, monsieur Le Guen. Que faites-vous si, en pratiquant une biopsie extemporanée d'un sein, vous trouvez un cancer ? Vous refermez et vous renvoyez la malade dans un centre anticancéreux ?
    Cela n'a pas de sens. Il faut être un peu raisonnable. La médecine est beaucoup plus complexe. Pour les actes d'oncologie, tous les chirurgiens savent quand ils doivent passer la main et adresser leurs patients à des services spécialisés aptes à mettre en oeuvre les protocoles de traitement des cancers. Mais pour les actes de base, on ne peut pas tout régler par la loi. Ce n'est pas réaliste. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. Monsieur Audifax, il s'agit non pas de tout régler par la loi, mais d'adopter des codes de bonne conduite et des procédures qui ont fait l'objet de recherches, d'évaluations, de constructions en réseaux, notamment oncologiques. Il n'est pas admissible, cher collègue, que des études comme celle que j'ai citée dans la discussion générale révèlent que, dans une région particulière, près de 50 % des interventions sur le cancer du sein soient faites en dehors des procédures de bonne conduite, donc en dehors des réseaux et des prises en charge qui donnent aujourd'hui les meilleures chances aux malades. L'égalité d'accès aux soins doit signifier aussi pour nos concitoyens avoir l'assurance lorsqu'on s'adresse à un chirurgien qui va pratiquer un acte oncologique, d'être placé dans les meilleures conditions de guérison, ce qui suppose un certain nombre d'éléments que M. le ministre a d'ailleurs très bien résumés tout à l'heure.
    Certes, l'INC n'est peut-être pas le bon organisme pour agréer. On peut en discuter. On pourrait décider que c'est l'ANAES ou le réseau régional oncologique qui décernera ce genre d'agrément à partir du moment où les praticiens, notamment les chirurgiens, s'accorderont à entrer dans des réseaux pluridisciplinaires et à transmettre les dossiers. On connaît maintenant ces procédures, qui ne sont malheureusement pas suffisamment respectées. Mais, en tout état de cause, on ne peut pas dire que le problème n'existe pas. Il y va de l'égalité des chances de tous ceux qui se confient à un médecin pour traiter un cancer.
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. Je suis entièrement d'accord avec mon collègue Gérard Bapt. Il est incroyable que 50 % des prises en charge des cancers du sein se fassent encore hors protocole oncologique. Cela va complètement à l'encontre du plan cancer que M. le ministre nous a présenté.
    En ce qui me concerne, j'approuve entièrement l'amendement n° 421 à l'exception de sa dernière phase : « Cet agrément n'est pas obligatoire en cas d'urgence vitale. » Certes, je comprends bien quel est l'objectif poursuivi. Toutefois, cela pourrait laisser entendre qu'en cas d'urgence vitale, à la rigueur, on n'a pas besoin d'être compétent. Il me semble que la rédaction de cette phrase devrait être modifié.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Bernard.
    M. Jean-Louis Bernard. Selon moi, cet amendement n'a absolument aucun sens car il sous-entend que, lorsqu'un chirurgien intervient, il a, a priori, un diagnostic précis de cancer. Or, tel n'est pas le cas, souvent. Ainsi, pour certains cancers ORL, pour des cancers de la thyroïde, le chirurgien, même pendant l'intervention, n'a pas le diagnostic exact et c'est parfois en extemporané, voire quelques jours plus tard, que celui-ci est révélé.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Evidemment !
    M. Jean-Louis Bernard. Comment voulez-vous, en quelque sorte, arrêter la main du chirurgien alors que le diagnostic n'est pas fait ?
    Allons plus loin : supposons un chirurgien digestif qui va être amené à traiter x types de cancers - vésicule, foie, pancréas et j'en passe. Il faudrait qu'il ait un certificat d'aptitude pour opérer tout ou partie de tous les organes de la cavité abdominale ou pelvienne ! On voit là la complexité de ce genre de dispositions. Alors, faisons confiance au chirurgien !
    En outre, les protocoles sont très différents, que ce soit à Curie, à Villejuif ou à la Mayo clinique et parfois même, les chirurgiens sont très gênés pour décider quel protocole thérapeutique français ou étranger ils seront amenés à appliquer.
    Enfin, puisque vous parliez de cancer du sein, je vous signale que, malgré les progrès de la science, on a très peu gagné en mortalité depuis l'opération princeps de Halstedt en 1882 par rapport à 2002.
    Mme Catherine Génisson. Alors, il ne faut pas faire de plan cancer !
    M. Jean-Louis Bernard. Alors, arrêtez de toujours vouloir légiférer ! Faites donc confiance aux chirurgiens qui sont capables de décider tout seul de suivre une formation continue et d'agir au mieux de l'intérêt de leurs patients. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 421.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 15, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 15, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 15

    M. le président. Je suis saisi de trois amendements, n°s 63, 305 et 547 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements n°s 63 et 305 sont identiques.
    L'amendement n° 63 est présenté par M. Dubernard, rapporteur, M. Evin et les commissaires membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 305 est présenté par M. Evin et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements son ainsi libellés :
    « Après l'article 15, insérer l'article suivant :
    « L'article L. 3511-7 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les infractions au présent article sont constatées et poursuivies par le représentant de l'Etat dans le département dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. »
    L'amendement n° 547 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
    « Après l'article 15, insérer l'article suivant :
    « Après l'article L. 3512-2 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3512-4 ainsi rédigé :
    « Art. L. 3512-4. - Les agents habilités et assermentés, mentionnés à l'article L. 1313-1, les médecins inspecteurs de la santé publique et les ingénieurs du génie sanitaire veillent au respect des dispositions de l'article L. 3511-7 ainsi que des règlements pris pour son application, et procèdent à la recherche et à la constatation des infractions prévues par ces textes.
    « A cet effet, ils disposent, chacun pour ce qui les concerne, des prérogatives qui leur sont reconnues en matière de contrôle ou de constatation des infractions par les articles L. 1313-1, L. 1421-2, L. 1421-3 et L. 5413-1 et par les textes pris pour leur application. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Cet amendement vise à déterminer l'autorité compétente pour constater et sanctionner les infractions aux dispositions de la loi du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme dans les lieux à usage collectif et les moyens de transports collectifs. Cette loi, plus encore que d'autres, doit absolument être appliquée.
    M. le président. La parole est à M. le ministre pour donner l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements et pour présenter l'amendement n° 547 rectifié.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement est favorable aux objectifs poursuivis par les amendements n°s 63 et 305. Il invite néanmoins l'Assemblée à adopter l'amendement n° 547 rectifié car, pour des raisons juridiques, il est indispensable de créer un nouvel article dans le chapitre consacré aux dispositions pénales de lutte contre le tabagisme.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. L'amendement du Gouvernement répond à mes préoccupations et à celles de M. Evin. A titre personnel, j'y suis favorable.
    M. le président. L'amendement n° 63 est-il retiré ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Oui.
    M. le président. L'amendement n° 305 est-il également retiré ?
    Mme Catherine Génisson. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Les amendements n°s 63 et 305 sont retirés.
    Je mets aux voix l'amendement n° 547 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques n°s 61 et 304.
    L'amendement n° 61 est présenté par M. Dubernard, rapporteur, M. Jean-Marie Le Guen et les commissaires membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 304 est présenté par M. Jean-Marie Le Guen et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Après l'article 15, insérer l'article suivant :
    « Il est créé un comité national consultatif du cancer.
    « Ce comité est une instance consultative composée de représentants des professionnels de la santé, des établissements, de l'assurance maladie et des associations de malades, chargée de promouvoir le débat et de formuler des propositions touchant les grands enjeux de la politique de lutte contre le cancer. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Cet amendement vise à créer un comité national consultatif du cancer, pour permettre une meilleure concertation dans la mise en oeuvre de toutes les actions de lutte contre le cancer. La commission l'a adopté, pensant que nous avions effectivement besoin d'un lieu de débat et de concertation.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée. La préoccupation est bonne, mais cet amendement propose en fait la légalisation de l'actuel Conseil national du cancer, créé par arrêté du 30 avril 2002.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 61 et 304.
    (Ces amendements sont adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques n°s 62 et 303.
    L'amendement n° 62 est présenté par M. Dubernard, rapporteur, M. Jean-Marie Le Guen et les commissaires membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 303 est présenté par M. Jean-Marie Le Guen et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Après l'article 15, insérer l'article suivant :
    « Les mesures de dépistage du cancer comporteront un programme spécifique destiné à favoriser l'approche et le suivi des populations les moins sensibles aux politiques de prévention. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Cet amendement vise à limiter les discriminations sociales préoccupantes que l'on peut observer dans l'accès au dépistage, notamment en ce qui concerne les personnes les plus démunies.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Sagesse.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 62 et 303.
    (Ces amendements sont adoptés.)

Article 16

    M. le président. « Art. 16. - I. - L'article L. 3511-2 du code de la santé publique est complété par un second alinéa ainsi rédigé :
    « Sont également interdites la vente, la distribution ou l'offre à titre gratuit de paquets de moins de dix-neuf cigarettes. »
    « II. - A l'article L. 3512-1 du même code, il est ajouté un second alinéa ainsi rédigé :
    « Peuvent exercer les mêmes droits : les associations de consommateurs mentionnées à l'article L. 421-1 du code de la consommation ainsi que les associations familiales mentionnées aux articles L. 211-1 et L. 211-2 du code de l'action sociale et des familles pour les infractions aux dispositions prévues à l'article L. 3512-2 et pour celles prises en application de l'article L. 3511-7. »
    « III. - Au premier alinéa de l'article L. 3512-2 du même code, il est ajouté : "L. 3511-2, avant : "L. 3511-3.
    « IV. - Après l'article L. 3512-2 du même code, il est créé un article L. 3512-3 ainsi rédigé :
    « Art. L. 3512-3. - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables, dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal, des infractions prévues à l'article L. 3512-2.
    « La peine encourue par les personnes morales est l'amende dans les conditions prévues par l'article 131-41 du code pénal.
    « En cas de propagande ou de publicité interdite, la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 3512-2 est applicable.
    « En outre, les deuxième, troisième, cinquième et sixième alinéas de l'article L. 3512-2 sont applicables, en cas de poursuites pénales engagées contre une personne morale ou de condamnation prononcée contre celle-ci. »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint, inscrite sur l'article.
    Mme Muguette Jacquaint. Cet article poursuit la lutte contre le tabagisme engagée depuis plusieurs années. Permettez-moi, monsieur le ministre, de faire plusieurs constats à ce sujet.
    Le tabac est le produit psychoactif dont les conséquences sanitaires sont les plus importantes. Il est considéré comme responsable de 60 000 décès par an, soit plus d'un décès sur neuf. Les pathologies principalement liées au tabac sont les cancers des voies aérodigestives supérieures, les maladies cardio-vasculaires et les maladies respiratoires. On estime que, pour près d'une hospitalisation sur six, le tabagisme est un facteur de risque.
    La mortalité est actuellement très masculine : 95 % des 60 000 décès liés au tabac concernent les hommes, d'où l'importance d'avoir une approche populationnelle plutôt que pathologique en matière de santé publique. Toutefois, selon les récentes études cette caractéristique se modifie au cours du temps avec l'évolution de la consommation féminine qui tend à rejoindre les niveaux relevés pour les hommes. Pour les femmes, la mortalité liée au tabac progresse, et continuera de progresser au cours des 20 prochaines années, plus vite que celle des hommes.
    Ce premier constat montre que le chemin est encore long vers une société sans tabac. Les différentes augmentations des taxes ont certes eu une influence sur le niveau de la consommation, mais cela reste encore très marginal. Voilà qui nous invite sérieusement à nous tourner vers d'autres stratégies en termes de politique publique. J'en veux pour preuve l'analyse suivante issue du « Baromètre santé 2000 » qui précise que le prix du paquet de cigarette ne représente que 10 % des motivations pour l'arrêt du tabac.
    Je n'insisterai pas sur les deux autres limites d'une politique de fiscalisation accrue du tabac : le développement - malheureusement l'actualité le montre - de la contre-bande et l'affectation des recettes qui ne contribue en rien à la santé publique, à moins que des informations nous soient données, monsieur le ministre.
    Nous croyons très sérieusement qu'il convient d'accompagner les politiques de sensibilisation au danger, les mesures d'interdiction et d'augmentation récurrente du prix du tabac, d'une politique ambitieuse de soutien à l'arrêt.
    Les prises en charge relatives au tabagisme sont encore relativement marginales, sans aucune proportion au regard de l'importance des conséquences sanitaires précédemment exposées. Le nombre de fumeurs pris en charge par la médecine de ville ou les structures spécialisées sont de l'ordre de quelques dizaines de milliers seulement. Pas étonnant alors que près de trois fumeurs quotidiens sur cinq aient déjà essayé d'arrêter de fumer sans succès.
    Selon une étude de l'INSEE très instructive, sur les quelque 12 millions de fumeurs âgés de quinze ans ou plus, plus de trois sur cinq ont déjà essayé d'arrêter de fumer au moins une fois, mais sans succès. Parmi ceux-ci, un quart a eu recours à diverses aides dans leur dernière tentative. Les plus fréquentes sont les substituts mais, en raison de leur coût, beaucoup n'y ont pas accès ou alors ne peuvent assumer la totalité de la durée du traitement. Quand on sait qu'un traitement d'une semaine coûte 24 euros, on comprend mieux - notons au passage que le prix est malheureusement libre pour ces produits vendus chez les pharmaciens.
    Prenons encore les situations sociales les plus fragiles : on observe très vite que l'accès aux substituts est impossible. Par exemple, 52 % des chômeurs sont fumeurs selon une étude de l'OFDT.
    C'est pourquoi, d'une façon générale, le sevrage sec et brutal reste le moyen le plus utilisé.
    Le résultat est là : parmi l'ensemble des personnes qui ont essayé d'arrêter de fumer au cours des trois dernières années, sept sur dix environ ont repris une consommation quotidienne, ce qui est énorme ! Le taux d'échec reste donc très important.
    Nous sommes persuadés qu'il convient de se pencher sérieusement sur l'opportunité d'assurer la prise en charge des substituts nicotiniques. Nous avons déposé un amendement à cet effet - ce n'est d'ailleurs pas la première fois, et nous avions eu le sentiment d'avoir été entendus - mais il est bien sûr tombé sous le coup de l'article 40. A quoi servent donc les taxes sur le tabac ?
    Enfin, j'aurais une dernière question à poser à monsieur le ministre : dans la loi du 31 juillet 2003 visant à restreindre la consommation de tabac chez les jeunes, l'article 8 précise que, dans un délai de six mois après la promulgation de la loi, le Gouvernement doit transmettre au Parlement un rapport évaluant, d'une part, l'intérêt, en termes de santé publique, de la prise en charge par l'assurance maladie des substituts nicotiniques en faveur des mineurs de moins de dix-huit ans et, d'autre part, le coût de cette mesure. Allez vous tenir les délais ? Qui sera chargé de cette mission ?
    M. le président. M. Dubernard, rapporteur, M. Jean-Marie Le Guen et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 64, ainsi rédigé :
    « Supprimer le I de l'article 16. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de cohérence avec le texte de la loi du 31 juillet 2003.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 64.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, l'amendement n° 450 de M. Leteurtre n'a plus d'objet.
    Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 65 et 306 corrigé.
    L'amendement n° 65 est présenté par M. Dubernard, rapporteur, M. Jean-Marie Le Guen et les commissaires membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 306 corrigé est présenté par M. Jean-Marie Le Guen et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi libellés :
    « Rédiger ainsi le II de l'article 16 :
    « II. - Peuvent exercer les mêmes droits : les associations de consommateurs mentionnées à l'article L. 421-1 du code de la consommation, les associations familiales mentionnées aux articles L. 211-1 et L. 211-2 du code de l'action sociale et des familles, ainsi que les associations agréées au sens des dispositions de l'article L. 1114-1 du code de la santé publique pour les infractions aux dispositions prévues à l'article L. 3512-2 et pour celles prises en application de l'article L. 3511-7. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Je laisse à M. Le Guen le soin de présenter ces deux amendements.
    M. le président. Monsieur Le Guen, on vous supplie de prendre la parole. (Sourires.).
    M. Jean-Marie Le Guen. Cela permet de montrer à tous nos collègues qui n'en sont pas membres que le travail que nous avons fait en commission s'est révélé assez positif. Nous avons pu avancer sur bien des sujets.
    Il s'agit par ces amendements de préciser le droit des associations de malades et d'usagers du système de santé, et de les autoriser à se porter partie civile en matière de lutte contre le tabagisme.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement n'est pas favorable à ces amendements, car le projet de loi prévoit déjà un élargissement conséquent de la capacité d'ester en justice. Celle-ci est actuellement réservée par l'article L. 3512-1 aux associations dont l'objet statutaire comporte la lutte contre le tabagisme, mais l'article 16 l'étend aux consommateurs et aux associations familiales.
    L'extension à des associations de malades permettrait à des associations qui n'ont aucun lien avec la lutte contre le tabagisme d'ester en justice sur des sujets dont elles n'ont pas la maîtrise, ce qui aurait pour conséquence d'augmenter l'activité des tribunaux sans pour autant améliorer la vigilance judiciaire sur le respect de la réglementation antitabac. Si les associations de malades dont les pathologies sont provoquées par le tabac souhaitent élargir leur champ d'intervention à la lutte contre le tabagisme, elles ont la possibilité de modifier leur statut en conséquence. C'est pourquoi je suis défavorable à ces amendements qui risquent d'encombrer les prétoires sans donner des moyens d'action nouveaux aux associations de malades qui luttent réellement, parce que c'est leur objet, contre le tabac et l'alcool.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 65 et 306 corrigé.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 16, modifié par l'amendement n° 64.
    (L'article 16, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 16

    M. le président. M. Jean-Marie Le Guen a présenté un amendement, n° 365, ainsi rédigé :
    « Après l'article 16, insérer l'article suivant :
    « Dans le quatrième alinéa (3°) de l'article L. 3323-2 du code de la santé publique, après les mots : "et d'enseignes, sont insérés les mots : "à l'exclusion de l'affichage commercial sauf dans les zones de production définies par décret. »
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement propose une avancée sur l'un des problèmes majeurs de santé publique dans notre pays qui n'est pratiquement pas abordé dans le projet de loi, à savoir la lutte contre l'alcoolisme. En la matière, en effet, nous agissons peu et notre bilan n'est pas excellent. Certes, des mesures fort difficiles ont été mises en oeuvre qui ont un peu changé la psychologie. Je pense en particulier à la loi Evin, qui comportait un volet alcool ; elle a donné et donne toujours lieu à des polémiques. Néanmoins, il est indéniable que la santé publique, même si elle est unanimement promue et défendue sur les estrades, est souvent battue en brèche lorsqu'il s'agit de faire des arbitrages, parfois difficiles, avec des intérêts économiques.
    Chacun d'entre nous peut comprendre leur légitimité, mais, dans le domaine en question, la santé publique est fréquemment oubliée lorsque certaines dispositions risqueraient de gêner des lobbies économiques. En conséquence, les problèmes d'alcoolisme sont ramenés à des cas individuels et à la responsabilité de chacun. Il arrive même qu'on les considère comme un mal tout à fait supportable dans notre pays parce que la consommation d'alcool fait partie de notre culture, ce qui est malheureusement vrai.
    Or c'est précisément parce que nous sommes dans un pays où existent des problèmes d'alcoolisme que nous devrions être encore plus déterminés dans la lutte contre ce fléau. Cet amendement et quelques autres sont des éléments symboliques d'une avancée. Leur adoption montrerait que nous ne voulons pas privilégier le statu quo, sinon la marche arrière comme cela est parfois le cas.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement est du même avis que la commission, mais le sujet mérite quelques mots de commentaire car la préoccupation de M. Le Guen est tout à fait compréhensible. Je dois d'ailleurs reconnaître que je la partage totalement.
    Il existe néanmoins une différence entre le tabac et l'alcool. L'organisation mondiale de la santé, elle-même, préconise non pas l'absence de consommation d'alcool, mais une consommation faible.
    M. Xavier de Roux. Modérée.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Dans le cadre des actions de santé publique à venir, il convient évidemment de mener des campagnes appelant l'attention sur les risques d'une consommation excessive d'alcool. En revanche, interdire totalement sa publicité par voie d'affichage me semble un peu excessif et je ne suis pas certain que nous serions totalement suivis.
    M. Pascal Clément et M. Xavier de Roux. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Serge Poignant.
    M. Serge Poignant. Monsieur le président, nous allons aborder une série d'amendements relatifs à l'alcool et traitant de publicité, d'affichage, de consommation. A cet égard nous n'allons pas reprendre un débat qui a déjà eu lieu deux fois l'an dernier. En effet, tout le monde est évidemment d'accord pour condamner l'alcoolisme mais il ne faut pas négliger les aspects économiques du problème.
    Mme Catherine Génisson. Cela vaut aussi pour le tabac ! Ce n'est pas un argument !
    M. Serge Poignant. Il convient en tout cas de faire preuve de cohérence au regard de la publicité qui se fait à l'étranger et des produits étrangers importés chez nous. Ainsi quel serait l'intérêt de n'autoriser la publicité que dans les zones de production ? Economiquement, en effet, l'impact est forcément plus grand à l'extérieur.
    Mme Catherine Génisson. Il y a aussi des arguments oenologiques !
    M. Serge Poignant. Le débat est ailleurs. En fait il s'agit de savoir comment éduquer à la consommation de vin ou d'alcool et de mener une véritable réflexion sur notre économie car l'importance de ce secteur est une spécificité de la France, sans perdre de vue le fait que l'alcoolisme est une maladie grave. Il faut traiter ces problèmes de façon spécifique qu'il s'agisse d'affichage, de publicité ou de mécénat.
    Mme Muguette Jacquaint. C'est bien une question d'économie !
    M. le président. La parole est à M. Xavier de Roux.
    M. Xavier de Roux. Le débat qui s'engage sur ces amendements relatifs à la publicité sur les alcools a déjà eu lieu à de très nombreuses reprises. D'abord il ne faut pas confondre l'abus d'alcool avec la production de vins et de spiritueux. Nous sommes un pays leader pour ces produits qui constituent une véritable richesse économique pour des régions entières. Je suis un élu de la région du cognac...
    Mme Muguette Jacquaint. Voilà !
    M. Xavier de Roux. ... dont les exportations représentent 10 milliards de francs. Si l'on décidait brutalement de dire que le cognac est un poison violent, cela porterait sans doute préjudice à un produit qui n'est pratiquement plus consommé en France, mais qui l'est massivement à l'étranger.
    S'il faut tenir compte de la santé publique, qui implique justement certains équilibres, il convient aussi de ne pas oublier l'économie de régions entières.
    M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. J'ai été étonnée par les propos que je viens d'entendre et selon lesquels s'il est bon de définir une politique de santé publique, il faut s'arrêter dès qu'elle risque de mettre en cause certains intérêts économiques.
    M. Xavier de Roux. Mais vous n'êtes pas pour le chômage, madame ! Vous passez votre temps à nous reprocher de ne pas créer assez d'emplois et vous voulez en supprimer !
    Mme Muguette Jacquaint. Arrêtez !
    Mme Martine Billard. Oui, laissez-moi parler. Je ne vous ai pas interrompu !
    M. le président. Seule Mme Billard a la parole.
    Mme Martine Billard. Si l'on avait suivi un tel raisonnement, il aurait fallu, pour des raisons économiques, continuer à autoriser la production d'amiante, puisque la France était bien placée dans ce secteur, ce qui aurait évité de mettre des salariés au chômage. A un moment donné, il vaut mieux penser en termes de reconversion.
    Vous avez tenu un discours général, monsieur de Roux, mais cela est dangereux car, si l'on vous suivait, il n'y aurait plus de politique de santé publique possible, puisque sa mise en oeuvre serait interrompue dès qu'elle risquerait de mettre en cause des intérêts économiques !
    M. Serge Poignant. Ce n'est pas ce que nous avons dit !
    Mme Martine Billard. Le problème se pose aujourd'hui au sujet du tabac, avec la fermeture des lieux de production d'Altadis. Or je n'ai pas entendu dire, sur ces bancs, qu'il fallait baisser le prix du tabac pour accroître les ventes, donc la production en France, et pour défendre l'emploi. En l'occurrence il convient de réfléchir en termes de reconversion des usines de production de tabac. J'ai d'ailleurs entendu que les salariés de l'un des lieux de production proposaient de passer à la production de chanvre.
    M. Charles de Courson et M. Xavier de Roux. Le chanvre indien ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est insupportable ! Quel niveau !
    Mme Martine Billard. Cela n'a évidemment rien à voir. Simplement le chanvre est un très bon produit pour l'isolation des bâtiments, par exemple. Une telle reconversion permettrait ainsi à la fois de sauvergarder l'emploi et d'assurer le développement durable. Il faut savoir dépasser les idées reçues. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)
    M. Jean-Marie Le Guen. Il y a 60 000 morts par an à cause de l'alcoolisme ! Prenez le sujet au sérieux !
    M. le président. Monsieur Le Guen, laissez s'exprimer Mme Billard !
    Mme Martine Billard. Notre pays est un producteur d'alcool. Il a été fait beaucoup pour améliorer la qualité ; c'est une bonne chose. Cela étant on ne saurait vouloir aujourd'hui pousser les gens à consommer plus d'alcool. Il faut en rester à des consommations raisonnables et éviter les excès qui provoquent des accidents de la route, donc des morts sur les routes, ou des accidents du travail, donc des morts au travail.
    Le choix est simple : soit on mène une politique de santé publique et on limite la consommation d'alcool à des quantités raisonnables...
    M. René Couanau, vice-président de la commission. C'est-à-dire ?
    Mme Martine Billard. ... soit on se bouche les yeux, et on continue à compter les morts de la route, les morts du travail et les morts d'alcoolisme.
    Mme Muguette Jacquaint. Je demande la parole.
    M. le président. C'est fini, madame Jacquaint. Nous allons arrêter le débat.
    Mme Muguette Jacquaint. J'interviendrai sur l'amendement suivant.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 365.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Jean-Marie Le Guen a présenté un amendement, n° 366, ainsi libellé :
    « Après l'article 16, insérer l'article suivant :
    « Le dernier alinéa de l'article L. 3323-2 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée : "Toute opération d'animation ou de financement de manifestation par des entreprises de boisssons alcoolisées en direction des jeunes est interdite. »
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Les arguments avancés contre l'amendement précédent me semblent totalement déplacées. Il ne faudrait pas oublier que nous sommes dans un débat de santé publique. En effet, le Gouvernement a présenté un texte proposant des objectifs de santé publique et je les ai pris au sérieux. Chacun devrait donc respecter le contexte dans lequel nous sommes et non se borner à défendre des inérêts économiques, même s'ils ne sont pas illégitimes.
    Il est des moments où il faut savoir prendre ses responsabilités.
    D'ailleurs mes amendements ne visent pas spécifiquement le vin, qui n'est pas le problème majeur dans notre pays. Vous savez tous, en effet, que ceux qui utilisent largement les techniques d'affichage ou le sponsoring dont je vais parler plus tard sont les producteurs d'alcools forts, et même pas ceux des alcools traditionnels de nos régions. Très souvent, d'ailleurs, les milieux viticoles nationaux sont manipulés par ces alcooliers qui les mettent en avant pour faire beaucoup de bruit, notamment auprès des groupes politiques, alors qu'en fait, les intérêts économiques qui seraient le plus touchés seraient ceux des producteurs de boissons très fortes, qui n'ont rien à voir avec les productions françaises.
    M. Xavier de Roux. C'est-à-dire ?
    M. Jean-Marie Le Guen. J'aimerais que tous nos collègues qui sont proches de la viticulture, mais qui sont aussi porteurs de l'intérêt général de ce pays en soient conscients.
    Quand M. de Courson a proposé plusieurs amendements dont nous aurons à discuter tout à l'heure...
    M. Charles de Courson. Nous allons y venir !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... M. Laffineur - il appartient à la majorité -, qui a passé une semaine dans les services d'urgence et de réanimation, nous a indiqué que 30 % des personnes reçues avaient des problèmes liés à l'alcoolisme. Cela démontre que le sujet est très sérieux.
    Certes, je ne prétends pas qu'il existe une solution miracle, mais je voudrais que chacun réfléchisse bien à la question. Il faudrait que ceux de nos collègues qui sont proches de la viticulture n'oublient pas qu'ils doivent défendre aussi l'intérêt général et disent aux viticulteurs qu'ils prennent garde aux manipulations dont ils sont souvent victimes de la part de milieux qui défendent non les intérêts de la viticulture, mais une certaine conception du marketing en faveur de produits qui n'ont rien à voir avec la viticulture.
    C'est pourquoi je vous propose cet amendement, après que vous avez refusé celui sur l'affichage dans lequel, pourtant, je ne mettais pas en cause les zones de production, de façon à ce que l'information concernant la viticulture puisse être donnée. Vous savez pourtant tous très bien quels sont les produits massivement promus par ces campagnes d'affichage. Vous savez aussi qui organise les soirées pour les jeunes, sponsorisées par des marques d'alcool fort.
    Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est pourquoi j'attends de notre hémicycle et du Gouvernement qu'ils acceptent que cette loi de santé publique porte aussi la marque d'une volonté de lutter contre l'alcoolisme et contre l'emprise des milieux de l'alcool sur notre vie sociale.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. La commission a repoussé l'amendement, mais elle comprend bien la préoccupation de M. Le Guen.
    M. Charles de Courson. C'est inapplicable !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Néanmoins sa rédaction est mauvaise.
    M. Jean-Marie Le Guen. J'accepte tous les sous-amendements !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. En effet que recouvrent exactement les termes « manifestations », « entreprises », « jeunes » ? (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Martine Billard. En effet qui sont les jeunes ? (Sourires.)
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Madame Billard, vous savez qu'il y en a plusieurs catégories !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement comprend bien le sens de la proposition de M. Le Guen. La valorisation de l'image des boissons alcoolisées doit effectivement être combattue, particulièrement auprès des jeunes.
    Cela étant je rappelle que les opérations de parrainage par des entreprises du secteur des boissons alcoolisées sont déjà interdites par le code de la santé publique. De plus, dans l'amendement n° 67, le Gouvernement proposera de rétablir l'encadrement réglementaire des opérations de mécénat, qui avait été supprimé par la loi du 1er août 2003. Je porterai aussi une attention particulière aux opérations en direction de la jeunesse, lors de l'élaboration du décret qui fixera les conditions dans lesquelles les entreprises du secteur des boissons alcoolisées pourront mener des opérations de mécénat.
    J'ajoute que l'action du Gouvernement en matière de prévention de la consommation d'alcool est vigoureuse et visible.
    Les préoccupations exprimées par M. Le Guen sont donc déjà prises en compte. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est du même avis que la commission.
    M. le président. La parole est à M. Yves Bur.
    M. Yves Bur. Il est bon que nous ayons ce débat sur la prévention des risques liés à l'alcool, qui tue 60 000 personnes par an, au même titre que nous menons une politique dure contre le tabac. Il faut prendre conscience de la nécessité d'être beaucoup plus actifs dans la prévention de la consommation d'alcool et faire en sorte que le Gouvernement et l'ensemble de ses partenaires agissent plus fortement qu'aujourd'hui, notamment en direction des jeunes.
    À cet égard je suis tout à fait Jean-Marie Le Guen car ils sont de plus en plus la cible des vendeurs d'alcool. D'ailleurs la consommation des jeunes évolue vers de nouveaux mélanges, beaucoup plus destructeurs,...
    Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !
    M. Yves Bur. ... parce qu'ils recherchent souvent l'ivresse rapide sans chercher forcément le plaisir.
    Nous devons prendre en compte l'ensemble de ces préoccupations. C'est pourquoi, monsieur le ministre, on ne pouvait pas ne pas avoir un débat prolongé sur cette question à l'occasion de ce texte sur la santé publique.
    Il est indispensable de prendre ce problème à bras-le-corps, de mener une politique globale qui prenne en compte à la fois la nécessité d'éduquer les consommateurs et le fait que ce secteur tient une place importante dans notre économie. En tout cas nous ne pouvons pas passer sous silence les méfaits de l'alcool et ne stigmatiser que ceux du tabac.
    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Techniquement, cet amendement ne tient pas la route.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est un amendement qui a bu !
    M. Charles de Courson. A la limite, il pourraitt apparaître comme une incitation à mener des telles opérations en direction de ceux qui ne sont pas jeunes. Telle n'est évidemment pas votre intention, mon cher collègue. Il faut voter contre cet amendement. (Sourires.)
    Mme Martine Billard. C'est un argument un peu fallacieux !
    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Je trouve effectivement un peu fallacieux les propos tenus par M. de Courson contre l'amendement de M. Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est du cynisme intégral !
    Mme Muguette Jacquaint. Certains se posent même la question de savoir qui sont les jeunes. Tout le monde, sait quand même qui sont les jeunes, monsieur le rapporteur !
    Je suis contente que le sérieux ait repris le dessus dans ce débat concernant la lutte contre l'alcoolisme et sa prévention. En effet, depuis des années, les médias citent le nombre des morts dus à l'alcool et soulignent les dégâts humains occasionnés. Les statistiques des hôpitaux et des généralistes témoignent du nombre élevé de personnes victimes de l'alcoolisme.
    C'est pourquoi je n'apprécie pas, monsieur le ministre, que, quand on parle de santé publique, de prévention et de lutte contre l'alcoolisme, certaines demandent que l'on fasse attention aux enjeux économiques ! Je veux bien qu'ils soient pris en considération, mais lorsqu'il s'agit d'une question aussi importante il faut y regarder de plus près et ne pas hésiter à engager une vaste campagne.
    Certains prétendent que l'on ne peut comparer l'alcool au tabac, mais je constate qu'il a autant de conséquences néfastes sur la santé. Il faut donc prendre toutes les dispositions nécessaires pour lutter contre l'alcoolisme, d'autant que les campagnes et les produits se sont diversifiés. Actuellement, dans les soirées les jeunes consomment essentiellement de la bière dans laquelle on a introduit d'autres produits alcoolisés. La publicité en est faite largement.
    Nous devons donc être beaucoup plus vigilants face à cette situation et que l'on ne vienne pas à tout instant mettre en avant d'éventuelles conséquences économiques.
    Il peut arriver ainsi que, parmi les victimes de l'alcoolisme, se trouvent des personnes licenciées, qui doivent affronter le chômage, parce qu'on n'aura pas pris en considération cette dimension industrielle. En ce cas les conséquences économiques ne sont pas prises en compte de la même manière.
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. Je suis très surprise de la façon dont évolue le débat, car nous nous sommes tous retrouvés, sur l'ensemble de ces bancs, pour lutter contre le tabagisme, en particulier chez les jeunes, sachant que de mauvaises habitudes prises dès l'âge de seize ans entraînaient une intoxication qui devenait chronique tout au long de la vie. Il y a tout de même chaque année 40 000 morts dues au tabac et 60 000 à l'alcoolisme ! Nous ne pouvons pas ignorer l'intoxication progressive par l'alcool ni occulter la nécessité de prendre des mesures importantes en direction des jeunes.
    Cet amendement est donc fondamental parce qu'on sait très bien que ce qu'il vise, ce sont des entreprises qui font la promotion de boissons très fortement alcoolisées auprès des jeunes dans les boîtes de nuit. C'est de cela qu'il s'agit monsieur de Courson ! Cette attitude est criminelle !
    M. Xavier de Roux. Oh !
    Mme Catherine Génisson. Nous sommes bien loin de la mobilisation et de la sensibilisation des jeunes, que l'on pourrait initier à l'oenologie, leur permettant de profiter de la richesse de la production de nos terroirs ! En l'occurrence, il s'agit d'inciter les jeunes à consommer tout au long de leur vie : on en connaît les conséquences. Il faut donc prendre cet amendement au sérieux.
    Et, monsieur le ministre, si c'est une des premières préoccupations de votre Gouvernement, comme nous vous l'avons entendu dire, pourquoi avoir diminué de 30 % les crédits de la MILDT cette année ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, je voudrais rectifier mon amendement en ajoutant après le mot « jeunes » les mots « de moins de dix-huit ans », de façon à éviter toute ambiguïté juridique sur ce sujet.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 366, tel qu'il vient d'être rectifié.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Apparemment, ceux qui sont contre sont tous des spécialistes de la santé publique !
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 422 et 560, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 422, présenté par M. Jean-Marie Le Guen, est ainsi libellé :
    « Après l'article 16, insérer l'article suivant :
    « L'article L. 3323-2 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les infractions au présent article sont constatées par le représentant de l'Etat dans le département dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. »
    L'amendement n° 560 présenté par le Gouvernement est ainsi libellé :
    « Après l'article 16, insérer l'article suivant :
    « Après l'article L. 3351-7 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3351-8 ainsi rédigé :
    « Art. L. 3351-8. - Les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, habilités et assermentés, veillent au respect des dispositions de l'article L. 3323-2 ainsi que des règlements pris pour son application, et procèdent à la recherche et à la constatation des infractions prévues par ces textes.
    « A cet effet, ils disposent des prérogatives qui leur sont reconnues en matière de contrôle ou de constatation des infractions par l'article L. 141-1-II et IV du code de la consommation. »
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour soutenir l'amendement n° 422.
    M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement a pour objet, en parallèle avec tout ce qui a été discuté sur le tabac, de permettre à l'Etat, qui est impliqué dans la santé publique comme on ne cesse de nous le dire, de mettre en oeuvre une politique de santé publique dans tous ses aspects, et d'en assumer le leadership.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. La commission a accepté cet amendement.
    M. le président. La parole est à M. le ministre pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 422 et présenter l'amendement n° 560.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le Gouvernement est favorable à l'amendement de M. Le Guen, mais il lui propose une rédaction alternative qui lui paraît beaucoup plus complète et opérationnelle.
    Si l'amendement du Gouvernement devait être retenu, il y associerait naturellement l'ensemble des auteurs de l'amendement précédent.
    L'amendement du Gouvernement permet surtout de déterminer les agents de l'administration qui seront compétents pour rechercher et constater les infractions aux dispositions encadrant la publicité.
    M. le président. Monsieur Le Guen, retirez-vous l'amendement n° 422 ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Oui, monsieur le président, je fais confiance au Gouvernement et je souscris à la démonstration qui vient de nous être faite.
    M. le président. L'amendement n° 422 est retiré.
    Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 560 ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 560.
    (L'amendement est adopté.)

Article 17

    M. le président. « Art. 17. - A l'article L. 3355-1 du code de la santé publique, il est ajouté un second alinéa ainsi rédigé :
    « Peuvent exercer les mêmes droits : les associations de consommateurs mentionnées à l'article L. 421-1 du code de la consommation pour les infractions prévues au chapitre Ier du présent titre ainsi que les associations familiales mentionnées aux articles L. 211-1 et L. 211-2 du code de l'action sociale et des familles pour les infractions prévues aux chapitres Ier et III du présent titre. »
    La parole est à M. Charles de Courson, inscrit sur l'article.
    M. Charles de Courson. Si je prends la parole sur l'article 17, c'est que j'ai été choqué par un amendement du Gouvernement, l'amendement n° 267 rectifié. En effet, il revient sur un vote quasi unanime de l'Assemblée dans le cadre du récent texte sur le mécénat. Le décret d'application de la loi Evin avait été annulé pour des raisons de forme et, depuis, jamais aucun gouvernement n'en avait sorti d'autres pour encadrer le mécénat des entreprises de boissons alcoolisées. L'amendement dont j'étais l'auteur, et qui a été adopté, avait pour seul objet de sortir de cette situation qui avait abouti à tuer en France le mécénat de ces entreprises. Il s'agissait, en outre, de préciser que si des entreprises voulaient soutenir une action culturelle, par exemple la rénovation d'un bâtiment, elles ne pouvaient que faire figurer leur nom : « Ce bâtiment a été rénové avec la contribution de l'entreprise X. » C'est cela que nous avions voté. Je suis étonné que l'on revienne dessus et je le redirai car je reprendrai la parole sur l'amendement n° 267 rectifié.
    M. le président. M. Dubernard, rapporteur, M. Jean-Marie Le Guen et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 66, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 17 :
    « L'article L. 3355-1 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Peuvent exercer les mêmes droits : les associations de consommateurs mentionnées à l'article L. 421-1 du code de la consommation pour les infractions prévues au chapitre Ier du présent titre, les associations familiales mentionnées aux articles L. 211-1 et L. 211-2 du code de l'action sociale et des familles, ainsi que les associations agréées au sens des dispositions de l'article L. 1114-1 du code de la santé publique pour les infractions prévues aux chapitres Ier et III du présent titre. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Cet amendement a pour objet de permettre aux associations de malades et d'usagers du système de santé de se porter partie civile en matière de lutte contre l'alcoolisme.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Défavorable. Le projet de loi prévoit déjà un élargissement de la capacité d'ester en justice puisque celle-ci est actuellement réservée par l'article L. 3355-1 aux associations dont l'objet statutaire comporte la lutte contre l'alcoolisme, et que l'article 17 l'étend aux associations de consommateurs et aux associations familiales. En réalité, c'est l'amendement symétrique de celui concernant le tabac.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Je retire l'amendement n° 66.
    M. le président. L'amendement n° 66 est retiré.
    M. Jean-Marie le Guen et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 310, ainsi libellé :
    « Après les mots : "Chapitre Ier du présent titre, rédiger ainsi la fin du dernier alinéa de l'article 17 : "les associations familiales mentionnées aux articles L. 211-1 et L. 211-2 du code de l'action sociale et des familles, ainsi que les associations agréées au sens des dispositions de l'article L. 1114-1 du code de la santé publique pour les infractions prévues aux chapitres Ier et III du présent titre. »
    Cet amendement est-t-il défendu ?
    Mme Catherine Génisson. Il est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 310.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 266 rectifié, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 17 par le paragraphe suivant :
    « II. - 1. A la fin du dernier alinéa de l'article L. 3323-4 du même code, les mots précisant : "que l'abus d'alcool est dangereux pour la santé sont remplacés par les mots : "répondant à des conditions fixées par arrêté des ministres chargés de la santé et de l'agriculture.
    « 2. Les dispositions prévues au 1 entrent en vigueur six mois après la publication au Journal officiel de la République française de l'arrêté pris pour leur application. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Les connaissances scientifiques sur la nocivité de l'alcool ont largement progressé ces dernières années. Les recommandations de l'Organisation mondiale de la santé et de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale invitent à communiquer en termes de consommation faible et non plus d'abus, tel que le prévoit le texte actuel.
    La disposition proposée permettra d'améliorer l'information du consommateur et de faire évoluer le contenu des messages en fonction de l'évolution des connaissances. L'arrêté sera cosigné par le ministre chargé de la santé et le ministre chargé de l'agriculture.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 266 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 267 rectifié, ainsi libellé :
    « Compléter l'article 17 par les trois paragraphes suivants :
    « III. - L'article L. 3323-6 du code de la santé publique est supprimé.
    « IV. - L'article L. 3323-2 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les conditions dans lesquelles les opérations de mécénat sont autorisées sont définies par décret en Conseil d'Etat.
    « V. - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article L. 3351-7 du code de la santé publique, les mots : "à L. 3323-6 sont remplacés par les mots : "et L. 3323-5. »
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il s'agit de l'amendement qui a été mis en cause par M. de Courson.
    La nouvelle rédaction de l'article L. 3323-6, issue de la loi du 1er août 2003 sur le mécénat, abroge une disposition importante de la loi du 10 janvier 1991 dite loi Evin, l'année même où le Gouvernement lance son plan de mobilisation contre le cancer. En effet, est ainsi supprimée la possibilité pour le Gouvernement de fixer, par voie réglementaire, les conditions dans lesquelles les initiateurs d'opérations de mécénat peuvent faire connaître leur participation à de telles actions. De fait, est ouverte la possibilité de publicité indirecte en faveur des boissons alcoolisées, en dehors des supports exclusivement autorisés par l'article L. 3323-2. En effet, certains fabricants d'alcools n'hésitent pas à utiliser leur nom, qui peut également être celui d'une marque connue, pour faire la promotion d'un de leurs produits phares grâce à la publicité organisée à l'occasion du soutien à une manifestation culturelle ou artistique, en particulier quand celle-ci est populaire auprès des jeunes.
    C'est pourquoi, d'un point de vue de santé publique, il convient de prévoir un encadrement de ces pratiques tout en permettant un soutien financier aux manifestations culturelles.
    Le présent amendement vise donc à réglementer les opérations de mécénat. Il s'agit d'autoriser ces opérations en renvoyant la définition de leurs conditions de mise en oeuvre à un décret en Conseil d'Etat.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Je veux intervenir sur la partie de l'amendement qui concerne l'annulation de la disposition issue de la loi du 1er août 2003 sur le mécénat.
    Je crois que le Gouvernement commet une erreur en revenant, dans son dispositif, sur la loi Evin, qui contrairement à ce qui est souvent indiqué, n'avait pas du tout interdit les opérations de mécénat des entreprises produisant des boissons alcoolisées, mais les avait encadrées en renvoyant à un décret. Lorsque ce décret est sorti, comme il était très mal fait, il a été annulé par le Conseil d'Etat. Depuis, il n'y avait plus de texte. Résultat : les entreprises françaises produisant des boissons alcoolisées ont arrêté tout mécénat, pour éviter des recours qui auraient pu entraîner leur condamnation.
    Nous sommes intervenus, dans la loi sur le mécénat, en mettant en place un dispositif extrêmement restrictif. En effet, la seule mention que peuvent indiquer les entreprises produisant de l'alcool, lorsqu'elle subventionnent une manifestation - par exemple artistique ou musicale, ou la rénovation d'un bâtiment - se limite à ceci : « Financée avec le concours de ».
    Je suggère donc à ceux qui disent qu'une telle disposition incite à la consommation d'alcool de faire des études de marketing. Quand vous visitez un château qui est propriété d'une commune et a été sponsorisé par une coopérative viticole ou par un producteur de cognac ou de champagne, et que vous lisez dans un petit coin « cette restauration a été financée avec la contribution de telle entreprise », cela vous incite-t-il à consommer ? Et quand vous allez écouter de la musique et que vous lisez sur la plaquette : « Financé - ou sponsorisé - par telle entreprise », cela vous incite à consommer de l'alcool ? Ce n'est pas sérieux !
    Ce que je crains, monsieur le ministre, c'est que, de nouveau, on renvoie à des textes réglementaires et qu'on entre, de nouveau, dans des définitions dont on ne pourra plus sortir.
    Le texte que nous avions voté, à la quasi-unanimité, je le rappelle, était simple et clair. J'appelle donc nos collègues à voter contre l'amendement n° 267 rectifié.
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. En ce qui me concerne, je voterai l'amendement du Gouvernement. Mais M. le ministre pourrait-il déjà nous donner des indications sur la teneur du décret en Conseil d'Etat ?
    M. le président. La parole est à M. Xavier de Roux.
    M. Xavier de Roux. Je crois que la question qui vient d'être posée éclaire bien la difficulté de cet amendement, puisque, comme le disait très justement M. de Courson, il y a un instant, le texte que nous avons voté sur le mécénat encadrait, lui dans la loi - non dans un texte réglementaire - les conditions du mécénat des entreprises viti-vinicoles. Cette disposition était très claire, et a été votée à la quasi-unanimité. On sait exactement ce que les entreprises ont le droit de faire.
    Aujourd'hui, on veut annuler cette disposition, déjà restrictive, pour renvoyer à un décret qui aura beaucoup de mal à faire plus « étroit » que la loi. Nous allons donc entrer de nouveau dans une incertitude juridique, alors qu'on prétend, sur les bancs de cette assemblée, faire des lois claires et savoir ce que l'on va faire à partir de ces lois.
    On va supprimer une restriction établie par la loi aux règles du mécénat - car c'est à cela que revient l'amendement du Gouvernement - pour renvoyer à un décret qui va lui-même restreindre l'exercice de ce mécénat par une certaine catégorie d'entrepreneurs.
    On marche sur la tête ! Le Parlement a donné clairement son avis, et même plus, puisqu'il a voté un texte. Je crois qu'il convient de l'appliquer.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 267 rectifié.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je sais saisi de deux amendements, n°s 67 et 308, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 67 présenté par M. Dubernard, rapporteur, M. Jean-Marie Le Guen et les commissaires membres du groupe socialiste est ainsi libellé :
    « Compléter l'article 17 par le paragraphe suivant :
    « II. - Après l'article L. 3335-11 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3335-12 ainsi rédigé :
    « Art. L. 3335-12. - La vente de boissons des groupes 2 à 5 définis à l'article L. 3321-1 est interdite dans les stations-service sur les autoroutes. »
    Sur cet amendement, MM. Philippe Armand Martin, Suguenot, Garraud et Poignant ont présenté un sous-amendement, n° 534, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 67, après la référence : "L. 3321-1, insérer les mots : ", à l'exception des produits régionaux de l'Union européenne,. »
    L'amendement n° 308, présenté par M. Jean-Marie Le Guen, est ainsi libellé :
    « Compléter l'article 17 par le paragraphe suivant :
    « II. - Après l'article L. 3335-11 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3335-12 ainsi rédigé :
    « Art. L. 3335-12. - La vente de boissons des groupes 2 à 5 définis à l'article L. 3321-1 est interdite dans les stations-service sur les autoroutes, sauf dans les zones de production définies par décret. »
    La parole est à M. le président de la commission pour soutenir l'amendement n° 67.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. La commission a adopté cet amendement dont M. Le Guen avait l'initiative.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Sagesse.
    M. le président. La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour soutenir le sous-amendement n° 534.
    M. Philippe Armand Martin. Ce sous-amendement a le mérite de mettre en avant les produits régionaux.
    Aujourd'hui, dans les stations-service, il est interdit de vendre des boissons alcoolisées de 22 heures à 6 heures du matin, sous prétexte d'éviter que les jeunes ne puissent aller acheter des boissons alcoolisées à n'importe quelle heure. Car cela peut être dangereux pour la santé.
    A mon avis, ce n'est pas une bonne méthode. En tout état de cause, il faut exclure de cette interdiction les produits régionaux, notamment ceux qui ont une AOC et qui sont des produits d'exception.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable à ce sous-amendement pourtant excellemment défendu par M. Martin.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Même avis.
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour soutenir l'amendement n° 308.
    Mme Catherine Génisson. Il est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Sagesse.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Dupré.
    M. Jean-Paul Dupré. Ces amendements sont extrêmements restrictifs. Chacun sait ici que, sur certaines aires d'autoroutes, existent de véritables centres commerciaux, qui sont totalement indépendants des stations-service. Je demande à l'Assemblée de réfléchir à la rédaction de cet amendement car nous risquons des contentieux.
    Il y a des maisons de produits régionaux et des centres commerciaux qui n'ont rien à voir, je le répète, avec les stations-service. La vente des boissons des groupes II et V y sera-t-elle autorisée ?
    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Perez.
    M. Jean-Claude Perez. J'approuve totalement le sous-amendement présenté par M. Martin, qui est clair et précis. Il me paraît très important que les différents produits régionaux de l'Union européenne, dont ceux issus de la viticulture, soient écartés du dispositif.
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. On sait très bien que, sur les autoroutes, circulent des voitures et des camions et que c'est un lieu très accidentogène.
    M. Jean-Marc Nudant. Non !
    Mme Catherine Génisson. Si !
    M. Jean-Marc Nudant. Beaucoup moins que les routes !
    Mme Catherine Génisson. Moi, je propose un sous-amendement à l'amendement n° 67 pour préciser que la vente est interdite dans les aires de stations-service sur les autoroutes, ce qui, je pense, répond à la demande de M. Dupré. Cela permet d'interdire la vente de ces boissons non seulement dans les stations-service mais également dans les maisons de vente de produits régionaux. Il faut avoir l'honnêteté intellectuelle de dire que cet amendement ne s'adresse pas aux jeunes mais à l'ensemble de la population, cela en particulier qui circule sur les autoroutes.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Dupré.
    M. Jean-Paul Dupré. Je confirme en mon nom et en celui de Jacques Bascou que nous soutenons le sous-amendement présenté par MM. Martin, Suguenot, Garraud et Poignant, qui permet de continuer à vendre les produits régionaux de l'Union européenne, dont ceux de la viticulture.
    M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. Arrêtons l'hypocrisie ! Soit on refuse l'amendement n° 67, soit on l'accepte, et on ne présente pas de sous-amendement. Si je comprends bien, il sera interdit de vendre de la tequila, boisson mexicaine, ou de la vodka, tant que la Pologne n'est pas entrée dans l'Union européenne.
    M. Xavier de Roux. Oui !
    Mme Martine Billard. Un peu de sérieux ! Assumez votre position, dites que vous êtes contre toute limitation de la vente de boissons alcoolisées, ce serait plus honnête vis-à-vis de la représentation nationale et de l'ensemble des Français que d'inventer cette exception culturelle viticole dont on peut tout de même douter du sérieux !
    L'amendement n° 67 répond à une vraie inquiétude : le fait qu'on puisse acheter de l'alcool sur les autoroutes et le consommer risque d'être à l'origine d'accidents. En même temps, il y a un vrai problème. Il m'arrive de circuler sur autoroute et d'acheter des produits régionaux, comme tout le monde - on ne peut que savourer un certain nombre d'entre eux -... mais je ne les consomme pas sur place...
    Peut-être faut-il réfléchir à une formule - j'avoue que je n'ai pas la solution à l'heure qu'il est - qui permette de limiter les ventes d'alcool sur autoroute, parce que c'est une incitation à la consommation, sans toutefois brimer les produits régionaux.
    En l'occurrence, il s'agit de lutter contre l'alcoolisme au volant, et c'est bien le sens de l'amendement n° 67. Je suggère donc à mes collègues de retirer leur sous-amendement, car cela frise le ridicule.
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 534.
    (Le sous-amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement proposé par Mme Génisson, n° 563, qui, dans l'amendement n° 67, tend à remplacer les mots : « stations-service » par les mots : « aires de stations-service ».
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 67, modifié par le sous-amendement n° 534.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 308.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 17, modifié par l'amendement n° 266 rectifié.
    (L'article 17, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 17

    M. le président. M. Jean-Marie Le Guen et les membres du groupe socialiste appartenant à la commission des affaires culturelles ont présenté un amendement, n° 337, ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article 315 du code général des impôts est ainsi rédigé :
    « Art. 315. - Sont considérés comme bouilleurs de cru les propriétaires, fermiers, métayers ou vignerons qui distillent ou font distiller des vins, cidres ou poirés, marcs, lies, cerises, prunes et prunelles provenant exclusivement de leur récolte et qui ne se livrent pas au commerce des alcools dans le canton du lieu de distillation et les communes limitrophes de ce canton.
    « Est admise également sous le régime des bouilleurs de cru la distillation de vins, marcs et lies provenant de vendanges ou de moûts chaptalisés dans les limites et conditions légales.
    « Sont seules admises à bénéficier des dispositions du présent code relatives aux bouilleurs de cru les personnes assujetties au régime de la mutualité sociale agricole en application des articles L. 731-25 à L. 731-29 et L. 741-2 à L. 741-7 du code rural et dont l'exploitation agricole constitue l'activité principale.
    « Toutefois, par dérogation à l'alinéa précédent, le régime des bouilleurs de cru est maintenu au profit des personnes qui en ont bénéficié au cours de l'une au moins des trois campagnes ayant précédé la campagne 1952-1953. »
    « II. - L'article 316 du même code est ainsi rédigé :
    « Art. 316. - Sont soumis au même régime que les bouilleurs de cru, mais ne bénéficient pas de l'allocation en franchise, les producteurs qui, n'exerçant pas le commerce des alcools dans le canton du lieu de distillation et les communes limitrophes de ce canton, mettent en oeuvre des fruits frais autres que ceux énumérés à l'article 315 et provenant exclusivement de leur récolte. »
    « III. - L'article 317 du même code est ainsi modifié :
    « 1. Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
    « a) Dans la deuxième phrase, sont supprimés les mots : "pour une durée de cinq années à compter du 1er janvier 2003 ;
    « b) Dans la deuxième phrase, sont supprimés les mots : ", pour une durée de cinq années à compter du 1er janvier 2003 ;
    « 2. L'avant-dernier alinéa de cet article est supprimé.
    « 3. Le dernier alinéa est ainsi modifié :
    « a) Après les mots : "En cas de métayage, l'allocation, les mots : "ou la réduction d'impôt sont supprimés ;
    « b) Les mots : "de rétrocéder une partie des alcools concernés sont remplacés par les mots : "d'en rétrocéder une partie ;
    « c) Après les mots : "dont celui-ci bénéficie en franchise, les mots : ", ou au titre de la réduction d'impôt le cas échéant sont supprimés.
    « IV. - Dans le premier alinéa de l'article 324 du même code, après les mots : "En sus de l'allocation en franchise, les mots : "ou de la réduction d'impôt mentionnés à l'article 317 sont supprimés.
    « V. - Dans le premier alinéa de l'article 403 du même code, après les mots : "En dehors de l'allocation en franchise, les mots : "ou de la réduction d'impôt mentionnés à l'article 317 sont supprimés.
    « VI. - Dans le premier alinéa de l'article 406 du même code, après les mots : "à titre d'allocation familiale, les mots : "ou de la réduction d'impôt mentionnés à l'article 317 sont supprimés. »
    Cet amendement est-il défendu ?
    Mme Catherine Génisson. Il est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Sagesse.
    M. le président. La parole est à M. François Vannson.
    M. François Vannson. Mes chers collègues, je voudrais réaffirmer un principe : la lutte contre l'alcoolisme fait partie des priorités de tous les députés sur tous les bancs de cette assemblée. Nous partageons sans aucune équivoque la volonté du Gouvernement de lutter contre ce fléau national. Cependant, il faut en priorité concentrer nos efforts sur les réelles causes du développement de l'alcoolisme et non sur ces productions marginales que sont les productions réalisées par les bouilleurs de cru, qui représentent 0,14 % de la consommation nationale. Pour lutter contre l'alcoolisme, il faut concentrer nos efforts sur le reste.
    L'année dernière, j'avais déposé un amendement visant à supprimer le privilège des bouilleurs de cru dans cinq ans et à harmoniser ensuite les taxes sur les dix premiers litres d'alcool pur avec celles de nos principaux voisins européens. L'Assemblée l'avait accepté. Nous avions trouvé un dispositif équilibré et équitable. Retenir l'amendement de M. Le Guen, c'est revenir à l'ancienne législation. Je souhaite qu'on respecte ce qui a été voté l'année dernière, un dispositif parfaitement équilibré, répondant aux attentes du monde rural. Je propose donc qu'on repousse l'amendement de M. Le Guen.
    M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.
    M. Frédéric Reiss. Je veux à mon tour réaffirmer que, dans le cadre de la politique de santé publique, la lutte contre l'alcoolisme est indispensable, mais il ne faut pas se tromper de cible.
    L'amendement que notre assemblée a adopté l'année dernière dans le projet de loi de finances de 2003 a été accueilli avec beaucoup de satisfaction dans le monde rural et notamment dans les milieux d'arboriculteurs.
    La production d'alcool par les bouilleurs de crus par des méthodes artisanales est marginale par rapport à la consommation globale d'alcool. C'est tellement simple de s'approvisionner en alcool, et souvent de mauvaise qualité, dans les supermarchés !
    L'un des aspects du dispositif adopté en 2002, c'est son impact positif sur l'avenir de nos vergers. Il est indéniable que la filière de distillation incite non seulement les arboriculteurs mais aussi les particuliers, notamment les retraités, à entretenir et à exploiter, voire à replanter des arbres fruitiers. Que seraient nos vergers sans les mirabelles de Nancy ou les quetsches d'Alsace ? Les vergers, avec des arbres à haute tige, contribuent à maintenir des ceintures vertes autour de nos communes et à préserver les paysages. La diversité des arbres fruitiers est importante pour la faune et pour la flore de nos campagnes. Ce sont donc des arguments non seulement économiques mais également environnementaux qui me font appeler à voter contre l'amendement proposé par M. Le Guen.
    M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. J'avoue que, par moments, j'ai du mal à garder mon sérieux ! Je suis une récente députée puisque j'ai été élue en juin 2002. J'avais souvent lu dans la presse les débats qui avaient lieu à l'Assemblée sur les questions d'alcoolisme. Je suis contente d'être là ce soir, d'y participer en direct et de voir tout d'un coup une présence presque massive dans cet hémicycle pour défendre les intérêts de fond de la santé publique.
    La lutte contre l'alcoolisme est indispensable. Je propose d'ailleurs que l'on dépose tous ensemble un amendement qui l'affirme, je pense que nous pourrions l'adopter à l'unanimité.
    A propos des arbres fruitiers, je suis d'accord, mais j'irai un peu plus loin car, si j'ai bien compris, les fruits ne servent qu'à produire de l'alcool !
    M. Jean-Marc Nudant. Mais non !
    Mme Martine Billard. C'est drôle ! Pour moi, ils se mangent frais. Il me semble d'ailleurs qu'une des campagnes menées dans le cadre de la lutte contre le cancer consiste à convaincre nos concitoyens d'augmenter leur consommation de fruits et de légumes frais. J'en ai vu récemment, et cela figure dans le plan de M. le ministre. On peut aussi en faire des compotes ou des confitures.
    M. Yves Bur. Oui, mais cela ne se boit pas !
    Mme Martine Billard. ... autant de produits qui sont justement excellents pour la santé.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Il y a du sucre !
    M. Gaëtan Gorce. On peut faire des jus !
    Mme Martine Billard. On peut même en faire des jus de fruits bio. J'espère d'ailleurs que mes collègues qui s'opposent si fortement à la moindre remise en cause de toutes les campagnes de promotion en faveur de l'alcool voteront l'amendement qui sera présenté après l'article 14 pour promouvoir les jus de fruits bio ! (« Certainement ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il contribue justement à défendre la production de fruits dans nos campagnes.
    Cela dit, j'ai aussi compris que, finalement, on défendait les alcools... Ce ne sont plus les alcools français, on en est aux alcools européens. On veut bien taxer et limiter la consommation d'alcool venant de pays hors Europe - évidemment, cela fait de la concurrence aux nôtres -, mais quand il s'agit des nôtres, on est tout de même plus gêné. Alors, franchement...
    Oui, je suis pour une consommation raisonnée, raisonnable, de bons produits ("Ah ! sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...
    M. François Vannson. Il n'y a pas de publicité pour ces produits !
    Mme Martine Billard. ... mais il faut aussi savoir limiter les publicités et tout ce qui favorise l'alcoolisme. On est tout de même face à un drame. Aujourd'hui, on a énormément de mal à faire reculer l'alcoolisme dans ce pays, et finalement, j'aurais entendu plus d'arguments pour défendre la production et la consommation d'alcool que le contraire.
    M. Jean-Marc Nudant. 0,15 % !
    M. le président. Après que Mme Billard nous a mis l'eau à la bouche, la parole est à Mme Catherine Génisson. (Sourires.)
    Mme Catherine Génisson. Je suis très surprise de l'argumentation que j'ai entendue. On nous dit que c'est une production marginale et qu'elle n'est donc pas dangereuse. Mais qu'en fait-on ? On la met dans les réservoirs des voitures ou on la consomme ?
    M. François Vannson. On en fait de la pâtisserie !
    M. Jean-Marc Nudant. Des sorbets !
    Mme Catherine Génisson. Il faut tout de même retrouver son sérieux ! Le sujet, c'est l'alccolisme, qui est responsable de 60 000 morts par an...
    M. Bernard Schreiner. Pas à cause des bouilleurs de cru ! Quel amalgame !
    Mme Catherine Génisson. ... et pas seulement dans des accidents de la route. Comme l'indiquait Mme Jacquaint, des personnes en grande difficulté sociale s'adonnent parfois à l'alcoolisme.
    C'est un sujet sérieux et, quand on parle d'arbres fruitiers et de production marginale, il faut tout de même imaginer les conséquences que cela a au bout.
    Cela fait cinquante ans qu'on veut rétablir le statut des bouilleurs de cru. On est arrivé, je pense, à une législation correcte à ce sujet. L'amendement de M. Le Guen est important. Respectons un peu l'enjeu de la loi de santé publique que nous défendons depuis la semaine dernière, je le rappelle à certains de mes collègues qui sont venus spécialement ce soir se mobiliser sur le sujet de la lutte contre l'alccolisme.
    M. le président. La parole est à M. Michel Raison.
    M. Michel Raison. Je ne voudrais pas allonger les débats, mais revenons aux réalités. Je suis prêt à inviter mes collègues dans ma circonscription, je paierai le voyage, car un tel amendement traduit une méconnaissance totale de ce qu'est un bouilleur de cru.
    Mme Catherine Génisson. Je connais !
    M. Michel Raison. Un bouilleur de cru entretient, toute l'année son verger, taille ses arbres et ramasse ses fruits. Que permet de fabriquer l'amendement que nous avons adopté l'année dernière ? Dix litres de goutte. Mme Génisson se demande ce qu'en fait chaque ménage ! Déjà les femmes nous en demandent tout le temps pour les pâtisseries, et il ne nous en reste plus que cinq litres, ce qui, soyons sérieux, est vraiment marginal. On s'en sert pour faire un cadeau à un Parisien, ou même à un préfet qui s'en va.
    Mme Martine Billard. C'est donc la faute aux préfets.
    M. Michel Raison. Il n'en reste plus beaucoup à boire ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. René Couanau.
    M. René Couanau, vice-président de la commission. Je suis un peu moins nouveau que Mme Billard, mais je suis aussi étonné qu'elle de la façon dont nous abordons toujours le problème de la lutte contre l'alcoolisme à l'Assemblée nationale, à la sauvette, à la faveur d'amendements partiels, sur des sujets un peu mythiques, comme les bouilleurs de cru, ou sur des réalités non fondées sur le plan scientifique, comme l'interdiction de vente d'alcool sur les autoroutes. Qu'on me donne des chiffres pour me démontrer que c'est la vente dans des stations d'autoroute qui a causé le plus de morts !
    M. François Vannson. Exactement !
    M. René Couanau. Tout cela n'est pas sérieux. Or le sujet est sérieux. Veut-on suggérer que, d'un côté de l'hémicycle, se trouveraient ceux qui seraient indifférents à la mortalité sur route causée par l'alcool et, de l'autre, ceux qui seraient complètement purs et vierges sur ce point ?
    Mme Catherine Génisson. Non, des deux côtés de l'hémicycle, des amendements ont été déposés sur le sujet.
    M. René Couanau, vice-président de la commission. Si l'opposition avait voulu régler le problème, elle aurait pu présenter un bon projet de loi bien établi et bien fondé, qui fasse la part des choses. Cela n'a jamais été le cas.
    M. Serge Poignant. Absolument.
    M. René Couanau, vice-président de la commission. C'est toujours à la faveur d'amendements partiels ou de sous-amendements que l'on essaie de traiter le problème, avec le seul objectif de gêner les uns et les autres. Véritablement, le travail de l'Assemblée sur le sujet n'est pas sérieux.
    Si l'opposition souhaite encore présenter un projet sérieux dans ce domaine, elle dispose de niches parlementaires. J'attends une proposition signée de la totalité du groupe socialiste sur l'organisation de la lutte contre l'alcoolisme de façon à traiter définitivement le problème. On n'en est pas là. Que la sagesse de l'Assemblée, à laquelle s'en est remis le ministre, s'exprime donc au moins au cours de ce débat.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 337.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    (De nombreux députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire quittent l'hémicycle. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Catherine Génisson. Bravo ! Au revoir !

Article 18

    M. le président. « Art. 18. - I. - Les deux derniers alinéas de l'article L. 5121-12 du code de la santé publique sont remplacés par les dispositions suivantes :
    « Pour les médicaments mentionnés au a, l'autorisation est subordonnée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à la condition qu'elle soit sollicitée dans le cadre d'un protocole d'utilisation thérapeutique et de recueil d'informations établi avec le titulaire des droits d'exploitation et concernant les conditions réelles d'utilisation, les caractéristiques de la population bénéficiant du médicament ainsi autorisé, et son coût pour l'assurance maladie. L'autorisation peut être suspendue ou retirée si les conditions prévues au présent article ne sont plus remplies, ou pour des motifs de santé publique. »
    « II. - Le dernier alinéa de l'article L. 5126-2 du code de la santé publique est remplacé par les dispositions suivantes :
    « Les pharmacies à usage intérieur peuvent délivrer à d'autres établissements mentionnés à l'article L. 5126-1, ainsi qu'à des professionnels de santé libéraux participant à un réseau de santé mentionné au troisième alinéa de l'article L. 6321-1, des catégories de préparations magistrales ou de préparations hospitalières définies par arrêté du ministre chargé de la santé, après avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. Cet arrêté fixe également les modalités de facturation de ces préparations. Les préparations hospitalières susmentionnées peuvent être également délivrées par un établissement pharmaceutique créé au sein d'un établissement public de santé en application de l'article L. 5124-9.
    « Les pharmacies à usage intérieur peuvent assurer tout ou partie de la stérilisation de dispositifs médicaux pour le compte d'un autre établissement ou, dans le cadre des dispositions prévues à l'article L. 3114-6, pour les professionnels de la santé et les directeurs de laboratoires de biologies médicale exerçant en dehors des établissements de santé. »
    « III. - L'article L. 5126-3 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
    « Art. L. 5126-3. - Les activités prévues aux deux derniers alinéas de l'article L. 5126-2 sont assurées sur autorisation de l'autorité administrative mentionnée à l'article L. 5126-7, délivrée pour une durée déterminée après avis de l'inspection compétente et au vu d'une convention qui fixe les engagements des parties contractantes. »
    MM. Préel, Leteurtre et Jardé ont présenté un amendement, n° 451, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 18. »
    La parole est à M. Claude Leteurtre.
    M. Claude Leteurtre. L'objectif des autorisations temporaires d'utilisation est de permettre un accès précoce des patients à de nouveaux traitements lorsqu'il y a un réel besoin de santé publique, c'est-à-dire pour des patients atteints de pathologies graves et en situation d'impasse thérapeutique. Ce dispositif pallie les délais administratifs français de mise à disposition des innovations internationales.
    L'autorisation est délivrée par l'AFSSAPS sur la base de critères scientifiques. L'agence scientifique n'a pas pour vocation d'évaluer le coût pour l'assurance maladie de ses décisions. Une disposition économique dans le code de la santé publique, et de surcroît dans une loi consacrée à l'organisation du dispositif de santé publique français, semble un précédent difficilement compréhensible sur le plan international et de nature à obscurcir la visibilité de cette particularité française que sont les ATU.
    Les autres informations devant être apportées à l'AFSSAPS, le projet d'article, dans un texte spécifique au cancer, devient totalement inutile.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Défavorable. S'il apparaît opportun d'amender l'article, et la commission le propose avec l'amendement n° 68, il ne paraît pas du tout nécessaire de le supprimer.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 451.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n° 68 et 311.
    L'amendement n° 68 est présenté par M. Dubernard, rapporteur, M. Jean-Marie Le Guen et les commissaires membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 311 est présenté par M. Jean-Marie Le Guen et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « A la fin de la première phrase du deuxième alinéa du I de l'article 18, supprimer les mots : ", et son coût pour l'assurance maladie. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 68.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Cet amendement, auquel je viens de faire allusion, a pour objet de supprimer, à l'article L. 5121-12 du code de la santé publique, la référence au coût pour l'assurance maladie. En effet, l'AFSSAPS a pour mission non d'évaluer les coûts, mais de faire respecter les impératifs de sécurité sanitaire.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable, sous réserve de l'adoption du sous-amendement déposé par M. Dubernard et M. Le Guen sur cet amendement.
    M. le président. La présidence n'est pas saisie d'un tel sous-amendement, mais le Gouvernement vient de me faire parvenir un amendement, n° 564, dont je donne lecture :
    « I. - Dans le deuxième alinéa du I de l'article 18, après le mot : "concernant, insérer le mot : "notamment et après les mots : "conditions réelles d'utilisation, insérer le mot : "et.
    « II. - Dans le deuxième alinéa du I de cet article, supprimer les mots : ", et son coût pour l'assurance maladie. »
    Vous avez la parole, monsieur le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Cet amendement répond à la préoccupation exprimée par M. Dubernard et vise à supprimer la référence au coût pour l'assurance maladie, mais sa rédaction est beaucoup plus simple et beaucoup plus explicite que celle des amendements n°s 68 et 311, même si à la lecture cela ne paraît pas tout à fait évident.
    M. le président. Je propose à M. Dubernard de retirer l'amendement n° 68, et à M. Le Guen de retirer l'amendement n° 311, lesquels sont satisfaits par l'amendement du Gouvernement.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Je retire l'amendement !
    M. le président. M. Le Guen est absent, mais je suppose qu'il aurait également retiré son amendement.
    Les amendements n°s 68 et 311 sont retirés.
    Je mets aux voix l'amendement n° 564.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 69 et 312.
    L'amendement n° 69 est présenté par M. Dubernard, rapporteur, M. Jean-Marie Le Guen et les commissaires membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 312 est présenté par M. Jean-Marie Le Guen et les membres du groupe socialiste.
    Les amendements sont ainsi rédigés :
    « Compléter le I de l'article 18 par l'alinéa suivant :
    « Le demandeur de l'autorisation pour les médicaments mentionnés au a adresse systématiquement à l'Agence toute information recueillie après mise sur le marché concernant les conditions réelles d'utilisation et les caractéristiques de la population bénéficiant du médicament ainsi autorisé. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Cet amendement vise à développer l'évaluation, après les autorisations de mise sur le marché.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le président, je crains que nous n'ayons le même problème : là encore, l'avis favorable du Gouvernement est conditionné par l'adoption d'un sous-amendement déposé par M. Dubernard et M. Le Guen sur cet amendement.
    M. le président. Comme précédemment, je vous propose, monsieur le ministre, de déposer un amendement et de m'en faire parvenir le texte.
    La parole est à M. René Couanau.
    M. René Couanau, vice-président de la commission. Ces sous-amendements qui surgissent me paraissent étranges : ils ne figurent pas sur la feuille de séance, n'ont pas été examinés en commission, mais le Gouvernement les a en sa possession. Si M. Dubernard en était le seul signataire, je comprendrais, mais que M. Le Guen le soit également, je commence à me poser des questions. (Sourires.)
    M. le président. Nous allons enquêter, monsieur Couanau.
    Je viens d'être saisi d'un amendement, n° 565, présenté par le Gouvernement.
    Cet amendement est ainsi rédigé :
    « Compléter le I de l'article 18 par l'alinéa suivant :
    « Le demandeur de l'autorisation pour les médicaments mentionnés au a adresse systématiquement à l'Agence, après l'octroi de cette autorisation, toute information concernant notamment les conditions réelles d'utilisation et les caractéristiques de la population bénéficiant du médicament ainsi autorisé ; il adresse également périodiquement au ministre chargé de la santé des informations sur le coût pour l'assurance maladie du médicament bénéficiant de l'autorisation octroyée. »
    M. le président. Je propose que les amendements n°s 69 et 312 soient retirés.
    Monsieur Dubernard, êtes-vous d'accord ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Je suppose que M. Le Guen aurait fait de même.
    Les amendements n°s 69 et 312 sont retirés.
    Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 565 ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 565.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 253, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 18 par le paragraphe suivant :
    « IV. - 1° Dans le premier alinéa de l'article L. 5126-1 du code de la santé publique, après les mots : "les groupements de coopération sanitaire, sont insérés les mots : ", les hôpitaux des armées.
    « 2° En conséquence, dans le deuxième alinéa du même article, après les mots : "au syndicat interhospitalier, sont insérés les mots : ", dans les hôpitaux des armées. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Les articles L. 5126-1 et suivants du code de la santé publique, qui traitent des pharmacies à usage intérieur, énumèrent les établissements, organismes et structures autorisés à disposer de telles pharmacies. Les hôpitaux des armées n'y figurent pas. Il nous paraît normal et fondé d'étendre cette autorisation aux hôpitaux des armées : tel est l'objet de cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 253.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 252, ainsi libellé :
    « Compléter l'article 18 par le paragraphe suivant :
    « IV. - L'article L. 5126-7 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Pour les hôpitaux des armées, les autorisations mentionnées au présent article sont délivrées par le ministre de la défense, après avis du ministre chargé de la santé. »
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le présent amendement prévoit que les créations, transferts ou suppressions des pharmacies à usage intérieur des hôpitaux des armées font l'objet d'une autorisation du ministre de la défense après avis du ministre chargé de la santé.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 252.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 18, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 18, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 18

    M. le président. M. Door a présenté un amendement, n° 282, ainsi libellé :
    « Après l'article 18, insérer l'article suivant :
    « L'article L. 312-16 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Un cours d'apprentissage sur les premiers gestes de secours est délivré aux élèves de collège et de lycée, selon des modalités définies par décret. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Door.
    M. Jean-Pierre Door. Chaque année de nombreuses morts subites pourraient être évitées si les personnes proches de la victime au moment du drame connaissaient les premiers gestes d'urgence, que celui-ci se produise dans l'environnement familial, sur un terrain de sport ou dans le vestiaire d'un stade. C'est pourquoi il semble nécessaire d'apprendre aux jeunes, dans les collèges et dans les lycées, les premiers gestes de secours. Je propose donc qu'une telle disposition, qui répond à une demande expresse que fait depuis des années la Fédération française de cardiologie et de son président, le professeur Daniel Thomas, soit inscrite dans le code de l'éducation.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. La commission a repoussé l'amendement, considérant que cette disposition ne relève pas de la loi.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Même avis que celui de la commission : défavorable.
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. En ce qui me concerne, je voterai cet amendement. Il s'agit en effet d'un sujet important dont nous parlons régulièrement. Ainsi, l'apprentissage des premiers gestes de secours, des cinq gestes qui sauvent, a été largement évoqué lors de l'examen de la loi de sécurité routière.
    En France, si nous sommes de bons soignants, nous sommes de mauvais secouristes. Ainsi, si les médecins américains arrivent à ranimer beaucoup plus de victimes d'un arrêt cardiaque que les médecins français, c'est parce qu'ils ont une bien meilleure connaissance que ces derniers des gestes de secourisme.
    Par conséquent, à mon avis, il convient de mettre en oeuvre toute mesure susceptible de favoriser l'apprentissage des premiers gestes qui sauvent. C'est pourquoi je soutiens l'amendement n° 282.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je ne veux pas qu'il y ait d'ambiguïté, monsieur Jean-Pierre Door. Vous avez eu raison de soulever le problème. Toutefois, comme l'a très bien indiqué le rapporteur, une telle disposition ne relève pas du domaine de la loi.
    Je signale que, le 17 juillet dernier, j'ai signé avec le ministère délégué à l'enseignement scolaire un contrat cadre de santé publique qui indique les objectifs prioritaires pour l'année scolaire, parmi lesquels figure précisément la généralisation de la formation de secouriste. Autrement dit, la mesure proposée est déjà prévue dans l'accord cadre qui lie le ministère de la santé et le ministère délégué à l'enseignement scolaire.
    Je le répète, je ne pense pas qu'une telle mesure soit d'ordre législatif, même si je suis absolument d'accord avec la préoccupation de M. Door.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 282.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Dubernard, rapporteur, et M. Accoyer ont présenté un amendement, n° 70, ainsi libellé :
    « Après l'article 18, insérer l'article suivant :
    « Le chapitre II du titre Ier du livre III du code de l'éducation est complété par une section 10 ainsi rédigée :

Section 10
« Prévention et information sur les toxicomanies

    « Art. L. 312-17. - Une information est délivrée sur les conséquences de la consommation de drogues, notamment concernant les effets de la consommation de cannabis sur la santé mentale, dans les collèges et les lycées à raison d'au moins une séance annuelle, par groupes d'âge homogène. Ces séances pourront associer les personnels contribuant à la mission de santé scolaire, ainsi que d'autres intervenants extérieurs conformément à l'article 9 du décret n° 85-924 du 30 août 1985 relatif aux établissements publics locaux d'enseignement. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Cet amendement, que j'ai cosigné avec M. Accoyer, est relatif à la prévention et à l'information sur les toxicomanies. Il est proposé que soit délivrée, dans les collèges et dans les lycées, une information sur les conséquences de la consommation de drogue, notamment de cannabis, sur la santé mentale. L'argumentation que M. Accoyer a excellemment présentée en commission s'appuie sur les faits suivants.
    La consommation de substances suscitant l'addiction constitue un grave problème de santé publique. Au cours des années 90, la consommation de cannabis a fortement augmenté. Les effets de la consommation habituelle de ce produit sont mieux connus depuis la publication d'études scientifiques reprises dans l'expertise collective de l'INSERM en novembre 2001. Ainsi, au-delà de l'effet cancérigène, les conséquences sur les bronches et le cerveau d'une telle consommation sont maintenant scientifiquement établies.
    Au niveau psychologique, la consommation de cannabis entraîne des complications graves allant des troubles de l'attention et de la mémoire au désintérêt social, voire pire.
    Quoi qu'il en soit, cette information paraît nécessaire et la commission a adopté l'amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Favorable.
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. Cet amendement est tout à fait intéressant. Cela dit, je ne souhaite pas me prononcer sur le fond, mais uniquement sur la forme.
    En effet, le Gouvernement nous a annoncé que nous allions examiner prochainement un texte de loi visant à réviser complètement la législation de 1970 concernant la lutte contre la toxicomanie. Par conséquent, il me paraît peu judicieux de traiter de la toxicomanie en commençant à l'examiner par le petit bout de la lorgnette, si j'ose dire.
    Le sujet est grave. Il est nécessaire de le travailler, de revoir la loi de 1970, mais celle-ci doit être revue pour ce qui est tant de l'aspect préventif que de l'aspect répressif. En effet, il est difficile de dissocier les deux. Bref, commencer à aborder le sujet de la toxicomanie de la façon qui nous est proposée me semble très réducteur par rapport aux graves problèmes qu'il pose.
    Du reste, l'amendement n'évoque que la consommation de cannabis. Or nous savons que les jeunes ne consomment pas que ce produit. Certes, celui-ci est de consommation très courante, mais les drogues de synthèse sont aussi toxiques que le cannabis. Pourtant, l'amendement n'y fait pas référence. Personne ne conteste la nécessité de traiter du sujet, mais, je le répète, l'examiner par le petit bout de la lorgnette me paraît très réducteur.
    Par ailleurs, s'agissant de l'alcoolisme et du tabagisme, ils ont fait l'objet de la loi Evin. On ne peut donc pas prétendre que la gauche n'a pas traité de ce sujet. En revanche, permettez-moi de souligner que l'amendement sur les bouilleurs de cru a été voté à la sauvette, une nuit, l'année dernière, lors de l'examen de la loi de finances !
    M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.
    M. Bernard Accoyer. J'ai souhaité - et mes collègues de la commission des affaires sociales m'ont suivi - « cibler » dans ce texte relatif à la santé publique un des principaux problèmes de santé de la jeunesse, lequel est lié à la consommation de substances addictives et, en particulier, des drogues.
    Chacun sait que le cannabis est, de loin, la substance la plus consommée par les jeunes. En ce domaine, la France détient le record de consommation des pays développés chez les jeunes, qui sont d'ailleurs de plus en plus jeunes. Or nous savons que les effets de cette drogue sont d'autant plus graves que le cerveau est jeune.
    Depuis un certain nombre d'années, nous avons assisté à une certaine banalisation de la consommation de cannabis - et je ne porte pas de jugement sur ce phénomène. Pourtant, comme vient de le rappeler le président de la commission, les effets de cette substances sont plus dangereux que ceux du tabac, qu'il s'agisse des effets cancérigènes, de ceux sur le cerveau ou de ceux sur le comportement - personne ne conteste le fait que la dépendance entraîne une certaine désocialisation, voire parfois des troubles psychiatriques sur des terrains prédisposés, mais qu'il est impossible d'identifier au préalable.
    La banalisation de la consommation de cannabis dans notre pays, associée au fait que les jeunes estiment que les dangers du cannabis sont équivalents à ceux du tabac - des études en attestent -, crée une situation très grave. Au reste, s'agissant du tabac, nous approuvons, bien entendu, les mesures qui sont actuellement prises pour lutter contre sa consommation. Nous vous soutenons totalement dans cette lutte, monsieur le ministre. Il n'empêche que nous considérons que la consommation de cannabis est plus toxique que celle du tabac en termes de santé publique.
    Cet amendement ne vise pas à sanctionner mais à délivrer une éducation sanitaire.
    M. Yves Bur. Très juste !
    M. Bernard Accoyer. Nous sommes là au coeur d'une méthode de santé publique que nous pensons être la meilleure. L'information des jeunes et de leurs parents ainsi que la prévention sont aujourd'hui absolument indispensables.
    Nous sommes nombreux dans cet hémicycle à rencontrer, dans nos communes, dans nos circonscriptions, des jeunes qui, en raison d'un état de dépendance, sont devenus victimes d'une désocialisation, d'une déscolarisation. Certains jeunes intellectuellement très brillants sont même en rupture de cursus universitaire, tant la dépendance à laquelle ils sont soumis agit sur leur assiduité, sur leur motivation et les éloigne de la voie qu'ils ont choisie.
    Cet amendement n'a pas d'autre intention que d'informer les jeunes et leurs parents sur les conséquences à la consommation de drogue. L'Assemblée aurait intérêt à l'adopter car il va dans le sens de la santé publique de la jeunesse.
    M. René Couanau. Très bien !
    M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. Je suis favorable à la délivrance d'une information sur la consommation de toutes les drogues : tabac, alcool, cannabis, ecstasy...
    M. Bernard Accoyer. C'est écrit !
    Mme Martine Billard. Je sais lire, monsieur Accoyer, sinon je ne serais pas là !
    M. Bernard Accoyer. La démocratie y aurait perdu !
    Mme Martine Billard. Cela dit, j'évoquerai rapidement la campagne d'information qu'avait lancée la préfecture de police de Paris voilà quelque temps. Celle-ci avait fait distribuer des petites plaquettes d'information, qui traitaient notamment des dangers du cannabis. Or cette campagne n'avait pas fonctionné car, dans ces plaquettes, le cannabis, l'héroïne et le crack y étaient présentés de la même façon, alors que les consommateurs de cannabis savent bien que cette substance n'a pas les mêmes effets que l'héroïne ou la cocaïne. Mais peut-être ces plaquettes ont-elles été modifiées depuis.
    Puisque le Gouvernement a annoncé que la loi de 1970 serait révisée et que s'engagerait à cette occasion un débat sur la toxicomanie, nous devrions traiter de la question à ce moment-là, mais pas maintenant.
    On parle des effets de la consommation de cannabis, mais il faut aussi informer sur l'ecstasy qui circule dans les soirées où vont les jeunes.
    Je préférerais donc que l'on aborde tous ces points lors du débat annoncé.
    M. le président. La parole est à M. Claude Leteurtre.
    M. Claude Leteurtre. On ne peut qu'adhérer à l'exposé des motifs de l'amendement n° 70. Tout le monde a conscience du danger des conduites addictives.
    Nul n'ignore que la consommation de cannabis et d'ecstasy est extrêmement dangereuse. Mais on risque, avec l'amendement, de se donner bonne conscience à peu de frais et d'escamoter le débat.
    Il s'agit d'un problème de santé publique majeur qui ne peut pas être traité par le biais d'un amendement de ce type. Au surplus, cet amendement va nous empêcher d'engager un grand débat, pourtant nécessaire.
    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Je souscris à ce qui vient d'être dit sur l'amendement de M. Accoyer et de M. Dubernard.
    On parle du cannabis, mais il existe malheureusement de nombreuses autres drogues qui ne sont pas citées dans l'amendement.
    J'ai la même inquiétude que mes collègues, bien que je sois persuadée qu'il faille lutter contre les drogues - je dis biens : les drogues.
    Je crains qu'après avoir adopté l'amendement nous n'ayons pas le débat concernant les drogues en général. Tel est mon sentiment, et je tiens à l'exprimer.
    M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.
    M. Bernard Accoyer. L'amendement précise bien qu'une information est délivrée « sur les conséquences de la consommation de drogues, notamment concernant les effets de la consommation de cannabis ». Il demeure que les drogues ne se limitent pas au cannabis. On connaît les ravages dont elles sont responsables dans la jeunesse, et ces ravages méritent bien entendu d'être portés à la connaissance et des jeunes et de leurs parents.
    Quoi qu'il en soit, le problème est suffisamment grave pour qu'on puisse reconnaître l'urgence qu'il y a à prendre une première mesure qui ne remettra absolument pas en cause le travail très important que le Gouvernement, dont vous-même, monsieur le ministre, conduit et que je salue, sur tous les problèmes que posent les substances addictives.
    M. le président. L'Assemblée me semble suffisamment éclairée.
    Je mets donc aux voix l'amendement n° 70.
    (L'amendement est adopté.)

    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 71 et 336, deuxième rectification, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 71, présenté par M. Dubernard, rapporteur, et M. Accoyer, est ainsi libellé :
    « Après l'article 18, insérer l'article suivant :
    « Après l'article L. 4111-7 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 4111-8 ainsi rédigé :
    « Art. L. 4111-8. - Les psychotérapies sont des traitements médico-psychologiques de souffrances mentales. Comme toutes thérapeutiques, leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifiés en psychiatrie, de psychologues cliniciens et de médecins ayant suivi les formations requises. Les professionnels non titulaires de ces diplômes ou qualifications qui dispensent des psychothérapies depuis plus de cinq ans à la date de promulgation de la présente loi pourront poursuivre cette activité thérapeutique, après évaluation de leurs connaissances théoriques et pratiques par un jury composé d'universitaires et de professionnels dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. »
    L'amendement n° 336, deuxième rectification, présenté par M. Accoyer, est ainsi rédigé :
    « Après l'article 18, insérer l'article suivant :
    « I. - Dans le livre II de la troisième partie du code de la santé publique, il est créé un titre III intitulé "Dispositions particulières, comprenant un chapitre unique intitulé "Psychothérapies.
    « II. - Dans le titre III du livre II de la troisième partie du code de la santé publique, est inséré un article L. 3231 ainsi rédigé :
    « Art. L. 3231. - Les psychothérapies constituent des outils thérapeutiques utilisés dans le traitement des troubles mentaux.
    « Les différentes catégories de psychothérapie sont fixées par décret du ministre chargé de la santé. Leur mise en oeuvre ne peut relever que de médecins ou de psychologues ayant les qualifications professionnelles requises fixées par ce même décret. L'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé apporte son concours à l'élaboration de ces conditions.
    « Les professionnels actuellement en activité et non titulaires de ces qualifications, qui mettent en oeuvre des psychothérapies depuis plus de cinq ans à la date de promulgation de la présente loi, pourront poursuivre cette activité thérapeutique sous réserve de satisfaire dans les trois années suivant la promulgation de la présente loi à une évaluation de leurs connaissances et pratiques par un jury. La composition, les attributions et les modalités de fonctionnement de ce jury sont fixées par arrêté conjoint du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de l'enseignement supérieur. »
    La parole est à M. Bernard Accoyer.
    M. Bernard Accoyer. Ces amendements sont dans la ligne du travail effectué au sein de la commission des affaires sociales et dans cet hémicycle. Ils visent à sécuriser la pratique des psychothérapies.
    Les psychothérapies sont de natures diverses mais, surtout, elles peuvent aujourd'hui être conduites en France sans le moindre contrôle sur ceux qui se déclarent capables de les conduire. Aussi bizarre que cela puisse paraître, il y a donc un vide juridique, qui fait que n'importe qui peut visser sur la façade d'un immeuble sa plaque en s'arrogeant le titre de psychothérapeute.
    Les populations qui suivent des psychothérapies sont plus fragiles que d'autres puisqu'elles ont besoin d'une aide, d'un soutien psychologique. Or elles peuvent être l'objet d'erreurs de diagnostic, des traitements inadaptés peuvent leur être prescrits et les personnes à qui elles ont affaire sont susceptibles de ne pas identifier des affections plus graves déviant vers des maladies de type psychotique, ce qui présente des risques pour les malades eux-mêmes et pour leur entourage.
    Par ailleurs, des dérives commerciales ont été observées. La mission interministérielle de lutte contre les sectes a même identifié des dérives sectaires qui constituent autant de dangers.
    Il convient de préciser que les psychothérapies ne peuvent être mises en oeuvre que par des médecins psychiatres ou par des psychologues cliniciens formés préalablement.
    Mon amendement n° 336, deuxième rectification, prévoit précisément que les personnes qui conduisent des psychothérapies mais qui n'appartiennent pas à ces professions et qui n'ont pas les qualifications requises pourront poursuivre leur activité thérapeutique à la condition d'exercer depuis cinq ans et sous réserve de satisfaire, dans les trois années suivant la promulgation de la loi, à une évaluation de leurs connaissances et de leurs pratiques par un jury dont la composition serait fixée par arrêté.
    Je souhaiterais, monsieur le président, apporter une légère rectification à cet amendement, en rédigeant ainsi la deuxième phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 3231 du code de la santé publique : « Leur mise en oeuvre ne peut relever que de médecins psychiatres ou de médecins et psychologues ayant les qualifications professionnelles requises par ce même décret. »
    M. le président. Cet amendement devient donc l'amendement n° 336, troisième rectification.
    M. Bernard Accoyer. Ces dispositions sont l'aboutissement d'un très long travail, qui a commencé sous la précédente législature, avec le ministre de la santé de l'époque, Bernard Kouchner, et son cabinet. Ce travail n'avait pu aboutir alors que nous n'étions pas loin du but.
    Je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, de bien vouloir accepter cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement n° 336, troisième rectification, l'amendement n° 71 étant retiré.
    M. le président. L'amendement n° 71 est retiré.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 336, troisième rectification ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Tout à fait favorable !
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. Bien évidemment, nous voterons cet amendement, qui s'inscrit dans une recherche de démarche « qualité » et qui, comme l'a dit M. Accoyer, comble un vide juridique.
    M. Yves Bur. Ce n'est pas faute de l'avoir présenté à plusieurs reprises !
    Mme Catherine Génisson. Comme notre collègue l'a justement rappelé, le travail avait été très largement entamé lors de la législature précédente. Mais un certain nombre d'événements se sont produits - le ministre qui avait initié ce travail n'a pas été reconduit dans ses fonctions et a été remplacé par un autre ministre, qui a donné un avis très favorable à l'amendement de M. Accoyer.
    Nous ne pouvons que souscrire à cette disposition, qui s'inscrit dans une démarche « qualité » protectrice d'une population particulièrement fragile.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 336, troisième rectification.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. MM. Leteurtre, Préel et Jardé ont présenté un amendement, n° 452, ainsi rédigé :
    « Après l'article 18, insérer la division, l'intitulé et l'article suivants :

« Chapitre III
« L'alcoolisme

    « Art. 18 bis. - A compter de 2004, le Gouvernement déposera sur le bureau de l'Assemblée nationale et sur celui du Sénat un rapport faisant état du besoin de créer un institut national de prévention de l'alcoolisme. Les informations données par ce rapport devront permettre de mieux apprécier les besoins en termes de prévention et de traitement de la dépendance alcoolique. »
    La parole est à M. Claude Leteurtre.
    M. Claude Leteurtre. Je crains que cet amendement ne soit qu'un voeu pieu.
    Nous proposons que le Gouvernement dépose sur le bureau de l'Assemblée nationale et du Sénat un rapport faisant état du besoin de créer un institut national de prévention de l'alcoolisme.
    M. Couanau a rappelé qu'il fallait tenir un grand débat sur l'alcoolisme et, surtout, sur la prévention de l'alcoolisme. Sur le terrain, on voit qu'il y a un combat entre les producteurs, si je puis dire, et les consommateurs, mais qu'aucune vraie politique de prévention de l'alcoolisme n'est menée. D'ailleurs, il n'y a pas de financement.
    Un rapport du Gouvernement aurait le mérite de rappeler, dans la perspective d'une grande loi sur la prévention de l'alcoolisme, que l'alcoolisme est un véritable fléau.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.
    M. Claude Leteurtre. Vous avez parlé de « voeu pieu ». S'agissant de votre amendement, je parlerai plutôt d'« ambition pieuse ». Je vous rappelle en effet que l'INPES a dans ses compétences toutes les missions que vous voulez voir attribuer à votre institut.
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. M. Leteurtre pose un problème important. Son amendement permettrait de débattre de façon objective de l'alcoolisme. Pour autant, je comprends l'argument de notre rapporteur.
    Je ne proposerai pas de sous-amender l'amendement de notre collègue, mais j'inviterai notre assemblée à demander qu'un rapport sur l'acoolisme et ses conséquences soit chaque année remis au Parlement afin que, lorsque nous discutons du projet de loi de financement de la sécurité sociale ou du budget de la santé, nous puissions travailler en toute connaissance de cause, dans la mesure où l'alcoolisme est un véritable fléau national. Je le reconnais d'autant plus volontiers que, dans ce domaine, la région Nord - Pas-de-Calais est souvent la première.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Le débat rebondit avec l'intervention de Mme Génisson.
    Je précise à M. Leteurtre que la prévention de l'alcoolisme est actuellement prise en charge par la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, d'une part, et par l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé. On dispose donc de deux volets : celui de la MILDT, concernant l'ensemble des opérations à conduire, et celui de l'INPES. Ce n'est donc pas la peine d'ajouter une structure supplémentaire.
    Il importe de rappeler, au terme de cette discussion, que, dans l'esprit du Gouvernement et, je pense, dans celui du Parlement, le tabac et l'alcool sont l'un et l'autre considérés comme des drogues et qu'ils relèvent donc de la compétence de la MILDT.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 452.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 19

    M. le président. Je donne lecture de l'article 19 :

Chapitre III
Santé et environnement

    « Art. 19. - I. - Le chapitre II du titre Ier du livre III de la première partie du code de la santé publique devient le chapitre III du même titre, et les articles L. 1312-1 et L. 1312-2 deviennent les articles L. 1313-1 et L. 1313-2.
    « II. - Le chapitre II du titre Ier du livre III de la première partie du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Chapitre II

« Plan national de prévention des risques
pour la santé liés à l'environnement

    « Art. L. 1312-1. - Un plan national de prévention des risques pour la santé liés à l'environnement est élaboré tous les cinq ans.
    « Art. L. 1312-2. - Un plan régional ou territoritial de prévention des risques pour la santé liés à l'environnement est établi par le représentant de l'Etat dans la région, la collectivité territoriale de Corse et à Saint-Pierre-et-Miquelon suivant la même procédure que celle prévue aux articles L. 1411-11 et L. 1411-12. »
    La parole est à Mme Martine Billard, inscrite sur l'article.
    Mme Martine Billard. Je ne peux que me féliciter de la mise en place d'un plan national de prévention des risques pour la santé liés à l'environnement.
    J'ai déposé un amendement qui précise les pistes utiles pour l'élaboration d'un tel plan. Le Gouvernement en a, quant à lui, déposé un d'une portée plus générale.
    Quoi qu'il en soit, je constate que l'on avance sur ces questions. Il y a quelques années encore, on taxait les écologistes de catastrophisme quand ils dénonçaient les risques liés à l'environnement pour la santé. Aujourd'hui, tout le monde admet qu'il y a dans l'environnement un certain nombre d'éléments qui peuvent présenter des risques pour la santé. Tout cela est donc positif.
    J'ai cependant une petite réticence concernant le plan régional, qui serait établi « par le représentant de l'Etat dans la région », ce qui est un peu court. J'aurais préféré que le travail soit un peu plus collectif...
    M. le président. Madame Billard, faites-vous allusion à l'amendement n° 269 du Gouvernement ?
    Mme Martine Billard. Non, monsieur le président. Je n'ai fait que citer le dernier alinéa de l'article 19.
    M. le président. Je vous indique que l'amendement du Gouvernement a été retiré.
    Mme Martine Billard. Je le regrette profondément...
    M. le président. Mais votre amendement n° 202 demeure. (Sourires.)
    Mme Martine Billard. Je ne sais pas si le Gouvernement s'y ralliera. Si tel n'est pas le cas, on aura un plan national de prévention des risques pour la santé liés à l'environnement sans aucune précision sur la nature de ces risques. Il serait pourtant important d'aller plus loin. Pour l'instant, on n'en est qu'à la définition et il y a peu de prévention.
    On a vu cet été que la canicule et la pollution liée à la canicule avaient des conséquences sur la santé. Il est donc important de préciser les objectifs du plan national.
    J'aimerais savoir, monsieur le ministre, dans quel cadre de concertation seront élaborés les plans régionaux ?
    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le ministre, vous introduisez l'environnement dans la bataille.
    Le rôle de l'environnement, envisagé sous toutes ses dimensions physiques, sociales et économiques, dans l'apparition ou le déclenchement de certaines pathologies est dorénavant confirmé par l'ensemble des organismes intervenants et des recherches entreprises depuis plusieurs dizaines d'années. L'environnement est effectivement conçu comme un ensemble de facteurs pathogènes.
    A ce titre, l'élaboration d'un « plan national de prévention des risques pour la santé liés à l'environnement » constitue sans aucun doute une initiative positive. Elle permettra de graver dans le marbre une piste d'intervention volontaire des pouvoirs publics en matière de santé environnementale.
    Pourtant, force est de constater que, si l'ambition est intéressante, la pratique est faible : vous avez omis d'introduire dans votre démarche de santé publique des pans entiers de l'environnement.
    Par exemple, rien n'est prévu en matière de pollution de l'air où en matière de lutte contre le bruit, même si la ministre de l'écologie a affirmé cet après-midi que des mesures seraient prises. Rien non plus sur les nouvelles technologies, et peu sur la sécurité alimentaire ! Rien sur l'impact des déchets sur la santé ! Rien sur les accidents domestiques !
    Cela fait quand même beaucoup de manques pour un article qui devrait précisément exposer ce que l'on veut faire en ce domaine.
    En effet, l'élaboration d'un plan national de prévention des risques liés à l'environnement implique une vision globale qui, selon moi, n'apparaît pas dans votre texte.
    Monsieur le ministre, la volonté de prévenir le risque sanitaire environnemental n'apparaît pas comme une priorité de votre projet de loi, d'autant que les choix budgétaires inscrits dans la loi de finances 2004 interdisent tout espoir de concrétiser vos espérances : sur les presque 322 millions d'euros prévus en 2004 pour la santé publique et la sécurité sanitaire, vous comptez n'y consacrer que 22 millions d'euros, soit la même somme qu'en 2003 ; par ailleurs, vous réduisez de 72 000 euros les subventions de fonctionnement de l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale.
    Je comprends bien le souci exprimé dans ce texte. Mais les moyens ne permettront pas d'aller au bout de la démarche.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Au point où nous sommes, je voudrais faire deux observations.
    Premièrement, je suis très heureux d'entendre les intervenants souligner que c'est la première fois qu'on aborde, dans la loi, le lien direct entre santé et environnement.
    Mme Martine Billard. Ce n'est pas la première fois !
    Mme Catherine Génisson. Il y a une agence, quand même !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est la première fois que, dans une loi de santé publique, on fait le lien entre la santé et l'environnement. Le sujet avait déjà été abordé en 1996 dans un rapport de l'office parlementaire des choix scientifiques et technologiques que j'avais eu le plaisir de conduire. Depuis, la conférence de Londres de 1999 sur la santé et l'environnement a conduit la France a s'engager, aux côtés de cinquante et un autres pays européens, à développer des plans d'action en santé environnementale.
    Il n'y a pas de débat partisan. Nous nous inscrivons dans une continuité. La France s'est engagée à développer des actions en santé environnementale. Nous l'introduisons donc clairement dans cette loi de santé publique.
    Deuxièmement, vous ne pouvez que vous féliciter qu'on ouvre un chapitre II, qui reflète très clairement la volonté du Gouvernement : « Un plan national de prévention des risques pour la santé liés à l'environnement est élaboré tous les cinq ans. » C'est ainsi qu'il y a trois semaines, François Fillon pour le ministère du travail, Roselyne Bachelot pour le ministère de l'écologie et du développement durable, et moi-même pour le ministère de la santé avons installé une commission d'orientation destinée à nous fournir les éléments du plan santé et environnement. De la même façon, l'année dernière, nous avions mis en place la commission d'orientation sur le cancer.
    Cette commission d'orientation santé-environnement est constituée de trois groupes de travail : un sur la santé au travail, car le travail fait partie de l'environnement quotidien de la personne.
    Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... au même titre qu'on pourrait parler de l'environnement scolaire et de la médecine scolaire ; un deuxième groupe sur tous les agents physiques que sont les radiations, le nucléaire, les ondes électromagnétiques, etc. ; un troisième groupe sur la toxicologie, et la biologie, en particulier les risques biologiques et toxicologiques.
    Nous affirmons donc une volonté et nous proposerons au début de l'année 2004 un plan national santé-environnement.
    Madame Billard, ne vous faites pas de souci : le retrait par le Gouvernement de son amendement n'enlève rien au fait que nous souhaitons que soient déclinés en région, avec l'ensemble des partenaires, et notamment les groupements régionaux de santé publique dont nous avons voté la création, des plans régionaux santé-environnement en fonction des spécificités de chacune des régions ; ces plans viennent s'ajouter, selon notre logique, à la déclinaison du plan national.
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion du projet de loi, n° 877, relatif à la politique de santé publique :
    M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport n° 1092).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures quarante-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT