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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 30 OCTOBRE 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du mercredi 29 octobre 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Questions au Gouvernement «...».

CANDIDATURE DU SITE DE CADARACHE
POUR L'IMPLANTATION D'ITER «...»

MM. Richard Mallié, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.

SUPPRESSION D'UN JOUR FÉRIÉ «...»

Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

ASSURANCES DES MÉDECINS «...»

MM. Olivier Jardé, Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

REVENU MINIMUM D'ACTIVITÉ «...»

M. Maxime Gremetz, Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.
2.  Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire étrangère «...».
3.  Questions au Gouvernement (suite) «...».

JUSTICE DE PROXIMITÉ «...»

MM. Emile Blessig, Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice.

CLASSES DE DÉCOUVERTE «...»

Mme Béatrice Pavy, M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire.

AGENCES DE L'EAU «...»

M. Daniel Vaillant, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.

LUTTE CONTRE LE SIDA «...»

MM. Alain Marty, Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

AUGMENTATION DES LOYERS HLM «...»

MM. Gérard Hamel, Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

COMMISSIONS LOCALES D'INFORMATION NUCLÉAIRE «...»

MM. Bernard Madrelle, François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.

CITOYENNETÉ EUROPÉENNE «...»

M. Bernard Schreiner, Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes.

COMMERCE EXTÉRIEUR «...»

MM. Claude Gatignol, François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE DE Mme HÉLÈNE MIGNON

4.  Loi de financement de la sécurité sociale pour 2004. - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

Rappel au règlement «...»

Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Suspension et reprise de la séance «...»
DISCUSSION GÉNÉRALE (suite) «...»

MM.
Gérard Bapt,
Xavier Bertrand,
Jean-Pierre Blazy,
Marc Bernier,
Simon Renucci,
Jean-Pierre Door.
Clôture de la discussion générale.

MOTION DE RENVOI EN COMMISSION «...»

Motion de renvoi en commission de M. Alain Bocquet : Mme Muguette Jacquaint, MM. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées ; Christian Jacob, ministre délégué à la famille.

Rappels au règlement «...»

Mmes Marie-Françoise Clergeau, Paulette GuinchardKunstler.

Reprise de la discussion «...»

MM. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles ; Jean-Paul Bacquet, Jean-Luc Préel, Maxime Gremetz. - Rejet.

Rappel au règlement «...»

M. Yves Bur, Mme la présidente.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
5.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Nous commençons par une question du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.

CANDIDATURE DU SITE DE CARADACHE
POUR L'IMPLANTATION D'ITER

    M. le président. La parole est à M. Richard Mallié.
    M. Richard Mallié. Monsieur le Premier ministre, au début de l'année, vous avez confirmé que la France était candidate pour accueillir le projet ITER sur le site de Caradache, en Provence, situé sur le territoire de la communauté du pays d'Aix, dont la présidente, notre collègue Maryse Joissains-Masini, s'associe à moi pour poser cette question.
    Si l'Union européenne, la Russie, le Japon, les Etats-Unis, la Chine, la Corée et le Canada mènent ensemble ce grand projet dont le but est de recréer et de maîtriser sur terre l'énergie du soleil, c'est bien parce que les perspectives de la fusion sur les plans énergétique, technologique, industriel sont majeurs pour l'avenir de notre planète. Les enjeux environnementaux, eux aussi, sont forts.
    Dans notre région Provence-Alpes-Côte d'Azur, nous espérons très vivement, comme vous vous en doutez, que Cadarache accueillera ce grand centre de recherche, non seulement pour renforcer notre excellence scientifique, mais aussi parce que nous attendons beaucoup de la construction et du fonctionnement d'ITER pour l'économie et l'emploi.
    C'est pourquoi les ministres de votre gouvernement originaires de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, l'ensemble de mes collègues parlementaires de cette région et les collectivités territoriales se sont mobilisés en faveur de ce projet. Cette mobilisation est d'autant plus essentielle que le Canada, le Japon et l'Espagne veulent également accueillir ITER.
    Nous savons que le Gouvernement, grâce à l'action de votre ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies, Claudie Haigneré, a promu et défendu la candidature française devant nos partenaires européens et internationaux. Cependant, l'Union européenne tarde à choisir un des deux sites candidats en Europe. Si ce choix n'était pas opéré, il faudrait craindre que les autres partenaires internationaux ne décident pour nous.
    Après tant d'efforts locaux et nationaux, qui durent depuis presque huit ans, puisque ce projet avait été lancé avec Jean-Claude Gaudin, alors président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et ministre de l'aménagement du territoire, ce serait pour tout le monde une immense déception. Alors, monsieur le Premier ministre, quand cette décision va-t-elle intervenir ? Pouvez-vous réaffirmer solennellement votre engagement en faveur de la candidature française ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, je confirme ici devant la représentation nationale l'engagement de la France pour ITER à Cadarache. Je le fais avec détermination. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Albert Facon. Changez de disque !
    M. le Premier ministre. Je suis sûr que c'est ce dont la France a besoin pour ce début du xxie siècle (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), d'autant qu'il faudra bien fournir à la planète l'énergie dont elle aura besoin.
    Avec l'ensemble de ses partenaires mondiaux, la France a une carte à jouer et nous la jouerons avec détermination. Dans chacun des contacts que nous avons au niveau international, le Président de la République, le ministre des affaires étrangères et moi-même présentons ce dossier pour gagner, une à une, les adhésions et les soutiens au projet français ITER.
    Je rappelle qu'il s'agit de trouver un moyen de doter la planète de l'énergie dont elle aura besoin à l'horizon 2050. Je suis persuadé que, scientifiquement et techniquement, le lieu que nous avons choisi est à la hauteur de ce projet.
    Le Gouvernement est d'ailleurs engagé autour de Claudie Haigneré sur ce sujet avec Nicole Fontaine et l'ensemble des acteurs. Je souligne d'ailleurs que les collectivités territoriales, de droite comme de gauche, ont déjà mobilisé 500 millions d'euros pour participer au financement de ce projet ambitieux pour la nation.
    La France du xxie siècle n'a pas à choisir entre l'arrogance ou le déclin. Elle doit affirmer son ambition pour l'avenir, son goût pour le progrès, comme l'a fait en son temps le président Pompidou en lançant de grands projets pour la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    C'est pour cela qu'elle défend ITER, qui est un grand projet. De même, dans le domaine aéronautique, la réalisation de l'A 380 est un grand projet. La liaison Lyon-Turin par TGV est aussi un grand projet. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Galileo est encore un grand projet. Le plan cancer ou celui relatif aux véhicules propres sont de grands projets qui doivent mobiliser nos chercheurs, nos élus, nos industriels, l'ensemble de la population, la nation tout entière pour faire en sorte que le monde comprenne bien que la France, elle aussi, a le goût de l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

SUPPRESSION D'UN JOUR FÉRIÉ

    M. le président. La parole est à Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, pour le groupe socialiste.
    Mme Sylvie Andrieux-Bacquet. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
    M. Michel Delebarre. Très bien ! (Sourires.)
    Mme Sylvie Andrieux-Bacquet. Monsieur le Premier ministre, à propos des financements des mesures en faveur des personnes âgées après les conséquences dramatiques de la canicule de cet été, vous ne cessez de tergiverser sur la suppression éventuelle d'un jour férié. Un jour c'est oui, un jour c'est non, un jour il est impossible de savoir.
    M. Albert Facon. A la Saint-Hubert !
    Mme Sylvie Andrieux-Bacquet. Permettez-moi de vous soumettre trois éléments de réflexion.
    Premièrement, il y a une différence fondamentale entre la générosité et la solidarité. Nous connaissons la générosité naturelle des Français, nous la mesurons lors des quêtes publiques et elle s'exprime d'ailleurs dans un sondage où 75 % d'entre eux se disent prêts à donner l'équivalent financier d'une journée de travail. Néanmoins, nous savons aussi que la générosité fait toujours appel aux mêmes et qu'elle est particulièrement inégalitaire. En revanche, la solidarité doit être organisée par les pouvoirs publics. Il existe en ce domaine bien des solutions.
    Pour justifier la baisse des impôts de 1,9 milliard d'euros, votre argument, cent fois répété, est qu'il ne faut pas décourager le travail.
    M. Yves Bur. Ne mélangez pas tout !
    Mme Sylvie Andrieux-Bacquet. Avec la suppression d'un jour férié non payé pour les salariés, vous taxeriez à 100 % le travail productif pour une somme à peu près identique.
    M. Jacques Myard. Au boulot !
    Mme Sylvie Andrieux-Bacquet. Bien entendu, il ne s'agit pas des mêmes personnes : d'un côté, les plus fortunés, de l'autre, les travailleurs. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Or, pour jouer la solidarité, pour mieux assurer l'égalité, il faut que l'effort concerne l'ensemble des citoyens.
    Deuxièmement, la mise en application d'une telle mesure sera extrêmement compliquée. Elle risque même d'entraîner mécaniquement la suppression de 20 000 à 30 000 emplois. (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Troisièmement, ayons le courage de la transparence. Nous savons bien que l'apport financier d'une telle mesure serait très insuffisant pour prendre en compte la problématique des personnes âgées. Il serait donc bon, monsieur le Premier ministre, que le Parlement et la nation connaissent la réalité de vos intentions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Michel Delebarre. Il n'est pas à la hauteur ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Madame la députée, personne ne doute qu'il faille revoir la loi de 1975 sur les personnes handicapées. Le Gouvernement présentera, avant la fin de l'année, un projet de loi reposant sur le principe du droit à compensation du handicap. Il s'agit d'une nouvelle forme de solidarité donnant des droits nouveaux, mais elle exige aussi des moyens nouveaux.
    M. François Hollande. Ce n'est pas le sujet !
    M. Augustin Bonrepaux. Répondez à la question ! Oui ou non ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Personne ne doute qu'il faille mieux prendre en compte les conséquences du vieillissement au regard de la perte d'autonomie des personnes âgées. Le maintien à domicile, les aides techniques et humaines notamment, demandent des moyens nouveaux pour cette solidarité dont les besoins sont croissants. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean Glavany. En créant du chômage !
    M. Augustin Bonrepaux. La question !
    M. Michel Delebarre. On dirait M. Falco hier !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Au fil du temps, les situations des personnes handicapées et des personnes âgées se retrouvent sur la problématique de la dépendance. Il faut donc une grande réforme moderne. (« La question ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Au fur et à mesure de son élaboration, le Gouvernement réfléchit (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) aux moyens nouveaux nécessaires pour la mener à bien.
    Vous avez donc évoqué l'idée de la suppression d'un jour férié, comme l'ont fait nos voisins allemands. C'est une hypothèse intéressante.
    M. Jean Glavany. Pour créer du chômage !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Pourquoi cette option ne serait-elle pas envisageable puisqu'elle a été prise chez nos voisins ?
    Cela étant, il ne s'agit pas de la seule hypothèse.
    M. Michel Delebarre. Deux jours fériés ! (Sourires.)
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. D'aucuns ont proposé la suppression d'un jour de réduction du temps de travail.
    En tout état de cause, cela ne suffirait pas, car la solidarité doit relever non seulement des salariés et des employeurs, mais aussi de la nation tout entière.
    M. Michel Herbillon. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est pourquoi le Premier ministre, lorsque son choix aura été finalisé, se prononcera et annoncera ce qui sera une grande réforme, une réforme moderne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Michel Delebarre. J'avais bien dit qu'il n'était pas à la hauteur !

ASSURANCES DES MÉDECINS

    M. le président. La parole est à M. Olivier Jardé, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Olivier Jardé. Monsieur le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, la loi About sur la responsabilité civile professionnelle a permis que tous les médecins français soient assurés en 2003. Or ces contrats sont actuellement dénoncés par plusieurs compagnies d'assurances. Conscient du problème, vous avez institué un bureau central de la tarification, mais les médecins préféreraient une solution définitive, à la hauteur de leurs préoccupations.
    Aujourd'hui, certains médecins envisagent de renoncer à pratiquer certains actes médicaux, afin de diminuer le montant de leur prime d'assurance, ce au détriment de la santé de nos concitoyens. Pourriez-vous, monsieur le ministre, m'indiquer si vous comptez prendre les mesures nécessaires pour que tous les médecins puissent soigner tous les malades, sans se soucier de leur niveau de prime d'assurance ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le député, notre droit de la responsabilité est bâti, depuis plus de deux siècles, sur le principe de la réparation. La loi du 4 mars 2002 a entériné cet élement de jurisprudence et il n'est évidemment pas question d'y revenir.
    M. François Goulard. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il n'en demeure pas moins qu'il faut trouver des solutions applicables à la situation actuelle, sous peine de déstabiliser certaines spécialités médicales. En concertation avec les assureurs, nous avons assoupli, dans la loi du 30 novembre 2002, les conditions contractuelles. En contrepartie, les assureurs avaient pris des engagements mais, manifestement, aujourd'hui, ils ne donnent pas le sentiment de vouloir les respecter. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean Glavany. Quelle surprise !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Francis Mer et moi avons demandé une inspection conjointe de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des affaires sociales sur le marché de la responsabilité civile médicale, et, surtout, sur les modalités de calcul des cotisations d'assurance, lesquelles nous paraissent pour le moins opaques. Ses conclusions nous seront remises début novembre. En toute logique, le groupement temporaire d'assurance médicale devrait cesser ses activités à la fin du mois. Quant au bureau central des tarifications, il est en place et il fonctionne. J'en appelle donc solennellement à la responsabilité des assureurs. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés-e-s communistes et républicains.)
    Mme Martine Billard. Ça va sûrement marcher !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Ils doivent naturellement respecter leurs engagements.
    La situation est suivie régulièrement et je peux vous garantir que les professionnels de santé et les établissements de soins seront assurés en 2004, comme ils l'ont été en 2003, tout simplement parce qu'il ne peut pas en être autrement ! (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

REVENU MINIMUM D'ACTIVITÉ

    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    Pour une fois, il va prendre la parole quand je la lui donne ! (Rires.)
    M. Maxime Gremetz. Je vous remercie, monsieur le président, mais ce n'est pas la première fois, vous le savez bien !
    Monsieur le Premier ministre, vous osez dire que vous faites du social (« Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et que vous êtes à l'écoute des plus fragiles (« Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Prenez-vous les Françaises et les Français pour des demeurés ? (« Non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Hausse du gazole, du tabac, du forfait hospitalier, déremboursement de médicaments, attaques sans précédent contre les chômeurs en fin de droits et contre les RMistes. En semant la colère sociale et la précarité généralisée, vous favorisez l'extrémisme. Avec le RMA, vous réussissez le tour de force de mettre à la disposition de vos amis du MEDEF des salariés au SMIC qui ne leur coûteront que 325 euros par mois au lieu de 622 euros. Le baron Seillière (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) rêvait d'une main-d'oeuvre à bon marché digne du Moyen Age ! Avec le RMA, vous l'avez fait ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Il aura en effet à disposition un salariat qui ne lui coûtera pratiquement rien, car nos concitoyens financeront le RMA par une nouvelle augmentation des impôts, départementaux notamment. C'est scandaleux. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Le RMiste sera en effet obligé d'accepter, sous peine de se voir exclu du RMI, n'importe quel emploi sous forme de contrat de six mois renouvelable trois fois, sans formation et avec des droits sociaux limités. Par exemple, une année de RMA ne validera qu'un trimestre pour la retraite ! Evidemment, le patronat favorisera le RMA au détriment de l'emploi stable et durable.
    M. Charles Cova. La question !
    M. Maxime Gremetz. Nous n'avons jamais vu, dans notre pays, un emploi si précaire et un tel cadeau au MEDEF !
    Voilà votre conception de l'insertion : être taillable et corvéable à merci pour une misère ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Je comprends et partage la colère des associations. Et que dire des allocataires en fin d'ASS ? (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Vous leur promettez le RMA, mais vous les trompez. Il leur faudra d'abord percevoir le RMI. (« La question ! La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Or tel ne sera pas le cas et ils se retrouveront sans rien ! C'est inhumain !
    M. le président. Posez votre question, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Par conséquent, monsieur le Premier ministre, comme vous le propose très justement Mme Boutin (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...
    Mme Muguette Jacquaint. Très bien, madame Boutin !
    M. Maxime Gremetz. ... rapporteure UMP du texte (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française),...
    M. le président. Monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. ... allez-vous suspendre immédiatement ce funeste projet ? (Vives exclamations et claquements de pupitre sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Monsieur Gremetz, c'est terminé !
    M. Maxime Gremetz. Si vous n'avez pas l'habitude de nous écouter,...
    M. le président. Monsieur Gremetz, posez votre question !
    M. Maxime Gremetz. ... entendez au moins votre majorité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste. - Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.
    Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Monsieur Gremetz, je vous réponds en l'absence de François Fillon qui effectue, aujourd'hui, un déplacement à l'étranger.
    Je veux d'abord rappeler que, au-delà de l'assistance et de la solidarité, les politiques sociales doivent être des politiques d'action positive et d'aide active à l'autonomie et à la responsabilité.
    M. François Goulard. Très bien !
    Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Précisément, à propos du RMI et du RMA, je vous rappelle que la date prévue pour la mise en place de cette réforme sera...
    M. Michel Delebarre. Le lundi de Pentecôte ! (Rires.)
    Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. ... respectée : il s'agira du 1er janvier 2004. Néanmoins, les préfets seront, sans attendre, saisis pour préparer le transfert de compétences dans de bonnes conditions. Ils mèneront, avec les présidents de conseils généraux, toutes les négociations utiles à cette fin.
    M. François Hollande. Ce n'est pas le sujet !
    Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Techniquement, la gestion des paiements et de l'instruction des demandes continuera d'être assurée par les CAF. Il n'y aura donc pas de risques pour les bénéficiaires du RMI. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    En ce qui concerne le RMA, on ne peut évidemment attendre des départements qu'ils mettent la même rapidité dans la mise en oeuvre de ce dispositif.
    Mme Martine David. Bien sûr il n'a pas été voté par le Parlement !
    Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Cependant cet outil d'insertion professionnelle, qui est très favorable...
    M. Albert Facon. Au MEDEF !
    Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. ... et qui correspond à un réel besoin...
    M. Daniel Paul. Non !
    Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. ... sera mis en place et le Gouvernement est persuadé que les départements s'en saisiront pour compléter les actions d'insertion dans lesquelles ils ont déjà été largement engagés. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. François Hollande. On ne l'a même pas voté !
    Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Quant à la réforme de l'ASS, qui entre aussi dans vos préoccupations, je rappelle qu'elle ne produira son effet, pour l'essentiel, qu'au second semestre de 2004. Elle n'interviendra donc qu'au moment où le RMA sera pleinement opérationnel.
    M. Albert Facon. Après les régionales !
    Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Le Gouvernement acceptera du reste que, par amendement au projet de loi, le passage direct de l'ASS au RMA soit possible.
    Mme Martine Billard. Non, ce n'est pas possible !
    Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Enfin, monsieur le député, laissez-moi vous dire, en ce qui concerne les moyens budgétaires et en personnel qui sont liés à la décentralisation du RMI, que le Gouvernement mettra en oeuvre en 2004 les dispositions désormais constitutionnelles qui subordonnent toute décentralisation à la stricte compensation des charges transférées. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

2

SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
ÉTRANGÈRE

    M. le président. Je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation parlementaire, conduite par M. Rory O'Hanlon, Président du Dail Eireann, chambre des députés de la République d'Irlande. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

3

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT
(suite)

    M. le président. Nous reprenons les questions au Gouvernement.

JUSTICE DE PROXIMITÉ

    M. le président. La parole est à M. Emile Blessig, pour le groupe UMP.
    M. Emile Blessig. Monsieur le garde des sceaux, les juridictions de proximité ont été créées pour répondre aux besoins de justice et d'accès au droit de nos concitoyens dans les petits litiges de la vie quotidienne et permettre ainsi une meilleure efficacité au service public judiciaire. Illustration d'une volonté du Président de la République, la mise en oeuvre de cette justice de proximité fait l'objet d'un certain nombre de réserves parmi les magistrats dont la presse s'est fait l'écho.
    Dans ces conditions, et pour répondre à ces prises de position souvent contradictoires, il serait utile, monsieur le garde des sceaux, que vous puissiez faire le point sur la situation et informer la représentation nationale sur le nombre et le rythme de recrutement des juges de proximité,...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Allô ?
    M. Emile Blessig. ... sur les modalités d'installation de ceux-ci dans les tribunaux d'instance et sur les améliorations procédurales envisagées afin de faciliter l'intégration de la juridiction de proximité dans l'ordre judiciaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, vous avez rappelé à juste raison que la mise en place des juges de proximité a résulté du débat national que nous avons eu avec les Français il y a maintement un an et demi...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Quel débat ?
    M. le garde des sceaux. ... et correspond à un engagement ferme du Président de la République et du Gouvernement pour simplifier la vie des Français et rendre la justice plus accessible et plus rapide.
    En effet, les juges de proximité, dont j'ai accueilli la première promotion à l'Ecole nationale de la magistrature le 16 septembre, permettront de traiter de petits litiges entre particuliers, ainsi que de petits délits à caractère pénal.
    Pour répondre à la préoccuption exprimée par l'Assemblée nationale lors de la discussion de ce texte, voici un peu plus d'un an, je puis vous confirmer que les élèves de cette première promotion - plus d'une trentaine - ont des origines professionnelles très variées, quoique toujours, bien sûr, à caractère juridique. Pour ce qui est des candidatures, plus de 5 000 dossiers ont été retirés dans les services du ministère, 2 000 dossiers sont actuellement traités dans les cours d'appel, et 1 000 seront transmis à la chancellerie par les cours d'appel avant la fin de l'année, ce qui représentera probablement un rythme trimestriel d'environ 150 nominations par le Conseil supérieur de la magistrature, nous permettant ainsi d'atteindre l'objectif de 3 000 à la fin de la législature.
    Vous avez évoqué à très juste titre la nécessité d'accompagner la mise en place des juges sur le terrain, et nous veillons, naturellement à ce que des postes de greffiers ou de fonctionnaires supplémentaires accompagnent l'arrivée de ces nouveaux juges dans les juridictions.
    En matière de procédure, j'envisage une simplification, dont nous aurons l'occasion de parler dans quelques semaines ici même, et qui permettra aux juges d'instance d'exercer sans autre formalité, en l'absence de juges de proximité, les fonctions de ceux-ci. Il s'agit, en d'autres termes, de suivre ce fil rouge auquel je me tiens depuis un an et demi : rendre la justice plus simple et plus accessible. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

CLASSES DE DÉCOUVERTE

    M. le président. La parole est à Mme Béatrice Pavy, pour le groupe UMP.
    Mme Béatrice Pavy. Monsieur le ministre délégué à l'enseignement scolaire, la Ligue de l'enseignement vient de célébrer le cinquantième anniversaire de l'organisation de la première classe de découverte. Cet anniversaire intervient au moment où une étude menée par le ministère sur l'organisation des classes de découverte démontre à la fois une diminution du nombre de séjours et une réduction de leur durée par rapport à la dernière étude, qui portait sur les départs de l'année scolaire 1994-1995.
    A peine 10 % des élèves du primaire bénéficient de classes de découverte. Or celles-ci constituent des travaux pratiques de terrain utiles à la pédagogie et une formation citoyenne, en permettant aux enfants de découvrir d'autres territoires et d'autres modes de vie, découvertes qui facilitent, notamment, la compréhension entre le monde rural et le monde urbain. Ces classes ont, en outre, une utilité sociale irremplaçable, en permettant aux enfants issus de milieux défavorisés de sortir du cadre familial et de se construire des souvenirs inoubliables.
    Face à cette diminution, qui a pour origine l'accroissement de la réglementation, la mise en cause de la responsabilité des enseignants et accompagnateurs en cas de problèmes et le départ en retraite d'enseignants impliqués dans l'organisation de ces classes, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.
    M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Il est vrai que les classes de découverte ne sont pas une fin en elles-mêmes, mais un moyen de participer à des apprentissages. Et peut-être l'obsession des apprentissages fondamentaux a-t-elle fait oublier un peu leur importance. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Il est vrai aussi que, depuis 1993-1994, nous ne disposions pas d'une évaluation de ces classes. Nous avons donc souhaité en faire une, cette année. Qu'avons-nous constaté ? Tout d'abord, comme vous le dites, madame Pavy, que leur nombre est en diminution et, surtout, que les séjours sont plus courts, puisque la moitié d'entre eux durent moins de cinq jours ; ensuite que ces classes ont évolué vers la spécialisation, puisqu'elles ont plutôt pour thème la découverte de l'environnement, en particulier de l'environnement proche, ou de la mer, ou des découvertes culturelles ; enfin, que celles qui présentent davantage de risques, par exemple les classes de découverte montagne, ont sensiblement reculé.
    En effet, ainsi que vous l'avez dit, nous avons publié, le 21 septembre 1999, à la suite de divers incidents, une circulaire comportant certain nombre de mesures relativement draconiennes en matière de sécurité. Du coup, les professeurs se sentent peut-être moins rassurés et ils ont besoin que nous les encouragions à reprendre des initiatives.
    C'est ce que nous allons faire, pour répondre à votre question,...
    M. Jean-Claude Lefort. Enfin !
    M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. ... et ce de plusieurs manières.
    D'abord, nous allons encourager nos inspecteurs d'académie à susciter une collecte de projets de qualité et faire en sorte que des formations initiales soient proposées dans ce secteur.
    M. Daniel Paul. Et les moyens financiers ?
    M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Nous allons également encourager la diversification des classes d'environnement et, surtout, nous allons solliciter le concours d'associations complémentaires de l'éducation nationale pour dresser avec elles une sorte de bilan et établir un projet commun. Je réunirai d'ailleurs bientôt à cet égard l'encadrement du système éducatif, pour débattre de cette question spécifique.
    Il faut également que l'on s'efforce d'utiliser l'année scolaire de manière complète. Les trois quarts des classes de découverte ont lieu entre février et la fin de l'année, comme si l'automne et l'hiver n'étaient pas propices.
    Bref, il faut relancer les classes de découverte...
    M. André Chassaigne. Et les moyens ?
    M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. ... et revivifier leur réseau. C'est ce que nous allons faire dans les semaines qui viennent, et puisque vous vous intéressez à cette question, madame Pavy, nous essaierons de vous associer à ce projet général. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

AGENCES DE L'EAU

    M. le président. La parole est à M. Daniel Vaillant, pour le groupe socialiste.
    M. Daniel Vaillant. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre ou, à défaut, à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Depuis leur création, en 1964, les agences de l'eau prélèvent auprès des usagers, principalement des ménages, des redevances distribuées aux différentes collectivités territoriales, aux industriels et aux agriculteurs pour lutter contre la pollution de l'eau et des milieux naturels. L'autonomie budgétaire des agences était garantie jusqu'à ce jour. Elle est joujourd'hui remise en cause.
    M. Philippe Briand. C'est une découverte ?
    M. Daniel Vaillant. A la demande de Mme la ministre, les conseils d'administration des agences votent ces jours-ci des fonds de concours à l'Etat pour environ 210 millions d'euros. Alors que l'on s'apprête, paraît-il, à inscrire dans la Constitution le droit à un environnement de qualité, on retire aux agences de l'eau les moyens d'appliquer ce principe, contre l'avis des personnels, des élus de gauche et des consommateurs. J'en veux pour preuve la démission du président du conseil d'administration de l'agence Rhin-Meuse à l'issue de ce vote. Bel exemple de mystification, alors que le Président de la Répulique ne cesse de clamer son attachement à la préservation de l'environnement ?
    M. Jean Glavany. Tu parles !
    M. Daniel Vaillant. Quel manque d'intérêt pour nos concitoyens ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Tous les usagers sont concernés, y compris les plus modestes. Demain, ils paieront la facture.
    M. Michel Bouvard. C'est une question fleuve !
    M. Daniel Vaillant. Sur les 210 millions d'euros ponctionnés par vous, 135 iraient au financement de l'ADEME, dont vous coupez les vivres pour 2004, le solde servant à financer les dispositifs de dépollution dans les secteurs agricoles les plus productivistes et pollueurs.
    Ainsi, vous remettez en cause le principe pollueur-payeur.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Non !
    M. Daniel Vaillant. Monsieur le Premier ministre, une fois de plus, vous ponctionnez les Français les plus modestes. C'est devenu une habitude pour ce gouvernement, presque une manie. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Ma question est simple : allez-vous laisser les usagers et les élus locaux assumer vos choix budgétaires, quand ils sont aussi désastreux pour la France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le ministre Vaillant, je regrette le ton inutilement polémique de votre question. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) En effet, j'ai décidé d'activer la trésorerie des agences de l'eau.
    Mme Nadine Morano. Bravo !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Dois-je rappeler, mesdames et messieurs les députés, que celle-ci est actuellement d'un milliard d'euros, dont 574 millions placés en bons du Trésor ?
    M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas vrai !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. J'ai donc demandé, par fonds de concours, un prélèvement de 210 millions d'euros sur la trésorerie des agences, en veillant, d'une part, à ce que ce prélèvement permette aux agences de respecter leurs projets, tels que consacrés par le huitième programme d'investissement des agences de l'eau, et d'autre part, à ce que ce fonds de concours permette de poursuivre la baisse prévue des redevances des agences de l'eau, dont je rappelle qu'il ne constitue que 15 % du prix de l'eau.
    Enfin, cet argent, monsieur Daniel Vaillant, sera entièrement consacré à des politiques environnementales qui auront une conséquence directe sur la qualité de l'eau : dépollution des nappes, traitement des déchets, prise en compte des zones humides et traitement des inondations.
    M. Philippe Briand. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Voilà, monsieur Daniel Vaillant, une vraie politique environnementale (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), conforme aux engagements de la République : activer des crédits inutilisés en faveur de la protection de notre environnement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

LUTTE CONTRE LE SIDA

    M. le président. La parole est à M. Alain Marty, pour le groupe UMP.
    M. Alain Marty. Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. J'y associe M. Jean-Claude Lefort, qui est président du groupe d'études sur le sida de notre assemblée. Cela montre qu'un certain nombre de sujets transcendent les clivages politiques de cet hémicycle.
    M. Gérard Charasse. Très bien !
    M. Alain Marty. Quelques chiffres sur le sida : 45 millions de personnes sont touchées dans le monde. On recense 6 millions de nouveaux cas par an. En France, on dénombre entre 100 000 et 130 000 séropositifs et de 1 500 à 5 000 cas nouveaux par an. Il semble bien qu'en ce moment, le nombre de cas nouveaux augmente.
    Ces chiffres prouvent la nécessité de poursuivre avec force une politique de prévention. Monsieur le ministre, le rôle de l'Etat a été confirmé dans la loi de santé publique. Quels sont les moyens et les actions que vous envisagez de conduire pour lutter contre ce fléau à un moment où on sent une démobilisation, où les associations s'essoufflent et où il y a un relâchement des préventions ?
    N'est-il pas temps de faire de la lutte contre le sida une cause nationale ? (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Second point : nous savons que les pays en développement ont besoin de traitements et de prévention. Or le nombre des personnes qui cherchent conseil et dépistage augmente dès lors qu'un traitement peut leur être proposé. Je n'aborderai pas, monsieur le ministre, l'accès des pays du Sud aux médicaments car cela ne dépend pas de votre ministère. Mais je souhaite savoir si l'engagement pris par le Président de la République de doter le Fonds mondial de lutte contre le sida de 150 millions d'euros sera respecté. Il y va de la parole de la France et beaucoup attendent ce signal.
    La solidarité doit être pour nous une ardente obligation. Il ne s'agit pas uniquement d'un problème de santé. C'est bien de la sécurité du monde et du développement de la planète qu'il est question. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française, et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur Marty, monsieur Lefort, soyez rassurés, c'est l'honneur de la France que de rester résolument engagée dans la lutte contre le sida. Sur le plan international, je vous confirme que, conformément à la volonté du Président de la République, la participation de la France au fonds mondial de lutte contre le sida sera triplée dès l'an prochain, et passera de 50 à 150 millions d'euros.
    M. Bernard Accoyer. Très bien.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. J'ajoute que je mène un travail de conviction permanente auprès de la Commission européenne car il serait vraiment enthousiasmant que l'Union européenne suive la même démarche au niveau du fonds mondial.
    Enfin, le ministère de la santé a décidé, avec l'accord du Premier ministre, de poursuivre le programme de jumelage hospitalier entrepris par Bernard Kouchner dans le cadre du plan ESTHER. Les crédits inscrits à cet effet sont maintenus.
    Sur le plan national, nous pouvons tous nous réjouir que l'agence nationale de recherche sur le sida ait été renouvelée pour six ans, c'est-à-dire jusqu'en 2010.
    Par ailleurs, les efforts réalisés sur le plan de la thérapeutique font considérablement diminuer la mortalité, mais ce n'est pas assez. C'est pourquoi l'un des objectifs de la loi relative à la santé publique est de baisser de 20 % l'incidence du sida en France dans un délai de cinq ans.
    J'ajoute que la France est en train de mettre en place un des systèmes les plus performants sur la surveillance de l'infection par VIH, sur la base d'un dispositif épidémiologique original de double anonymisation que beaucoup de pays nous envient.
    Enfin, la journée mondiale du sida, le 1er décembre, sera l'occasion d'une nouvelle campagne de prévention organisée par l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé.
    Nous n'avons pas l'intention de relâcher notre attention dans la lutte contre cette terrible maladie. C'est un défi qui est l'honneur de la France et de ceux qui, au travers de la représentation nationale et du monde des soignants et des associations, y contribuent de toutes leurs forces et de tout leur coeur. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

AUGMENTATION DES LOYERS HLM

    M. le président. La parole est à M. Gérard Hamel, pour le groupe UMP.
    M. Gérard Hamel. Monsieur le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, 10 millions de nos concitoyens les plus modestes vivent dans un logement social qui a pu être réalisé et financé essentiellement grâce à des fonds publics. Le Gouvernement fait déjà beaucoup pour le logement (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), notamment grâce au plan Borloo, dans les quartiers difficiles.
    Mais, compte tenu de la vocation sociale de ce parc, il serait légitime que les pouvoirs publics soient particulièrement vigilants sur la manière dont les organismes HLM font évoluer leurs loyers. En effet, le logement constitue bien souvent le premier poste de dépense des ménages. Une évolution trop brutale des prix peut déstabiliser un budget familial. Or si, dans le secteur privé, l'évolution des loyers est encadrée et ne peut progresser plus vite que l'indice du coût de la construction, dans le secteur HLM, les propriétaires ont toute liberté et certains n'hésitent pas à faire progresser leur loyer jusqu'à 10 % par semestre et 21 % par an, ainsi que le prévoit la réglementation. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Augustin Bonrepaux. C'est faux !
    M. Gérard Hamel. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire ce que compte faire le Gouvernement ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Gille de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je vous remercie, monsieur Hamel, de mettre l'accent sur un problème de société particulièrement délicat et douloureux pour des millions de Français. Comme vous le savez, le gouvernement précédent s'était engagé à sortir d'un plan de gel des loyers en douceur et très progressivement. Or nous disposons aujourd'hui des chiffres : en 2001, l'augmentation des loyers dans le secteur HLM a atteint - hélas ! - 3,3 % quand, dans le secteur libre, elle ne s'élevait qu'à 2,7 %.
    M. Augustin Bonrepaux. Et cette année ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Or le Gouvernement ne peut pas se satisfaire d'une augmentation des loyers aussi importante, surtout lorsqu'elle touche les personnes les plus modestes logées dans le secteur HLM.
    C'est la raison pour laquelle j'ai interpellé l'Union sociale de l'habitat et lui ai demandé de bien vouloir répercuter auprès de tout le réseau, une modération des loyers : l'augmentation ne doit pas excéder l'indice INSEE du coût de la vie.
    M. Augustin Bonrepaux. Et pour le secteur privé, que fait le Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je suis sûr que le secteur HLM répondra à cette invitation. J'ai néanmoins écrit aux préfets pour leur demander de veiller à ce que cette limitation soit respectée.
    Mesdames et messieurs les parlementaires, il n'est ni sain ni juste que dans notre pays celles et ceux qui ont les revenus les plus modestes les voient amputés excessivement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains)...
    M. Pierre Cohen. C'est vous qui les amputez !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. ... par des loyers des HLM. J'ai cependant toute confiance dans le secteur HLM. Je suis sûr qu'il suivra ces recommandations car il fait partie du réseau de la solidarité nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

COMMISSIONS LOCALES D'INFORMATION NUCLÉAIRE

    M. le président. La parole est à M. Bernard Madrelle, pour le groupe socialiste.
    M. Bernard Madrelle. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, vous avez pris, le 24 juillet 2003, un arrêté stipulant que toutes les matières nucléaires et leurs connexions, qu'il s'agisse des mesures de surveillance des installations, des renseignements relatifs aux transports, des données touchant à la vulnérabilité des systèmes et à leur protection ou des plans d'exercice de crise, relèvent désormais du secret défense.
    Cette mesure s'avère impossible à concilier avec l'activité des commissions locales d'information que Pierre Mauroy avait créées en décembre 1981 et dont l'objectif est de promouvoir un réel partage des responsabilités entre les collectivités locales, les régions et l'Etat, et de modifier les procédures d'information des populations et des élus.
    La circulaire du 15 décembre 1981 précisait que le fonctionnement des CLI était conditionné par le respect du secret de la défense nationale et des impératifs de sécurité publique visant la prévention d'actes de malveillance. Mais elle imposait en même temps au Gouvernement de veiller à ce que cette réserve ne soit appliquée qu'au strict nécessaire.
    En imposant le secret défense, de façon autoritaire, vous paralysez l'exercice des commissions locales d'information - certaines d'ailleurs ont cessé leur activité, vous prenez le risque de raviver les inquiétudes et vous portez atteinte au droit à l'information alors que, je vous le rappelle, un projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité nucléaire est toujours en attente d'examen au Sénat.
    Or l'exposé des motifs de ce projet énonce clairement que le droit à l'information des citoyens est complété par des dispositions visant à conforter le rôle des commissions locales d'information et à garantir l'indépendance. Dont acte !
    Ma question (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...
    M. le président. Voyez l'impatience de vos collègues !
    M. Bernard Madrelle. ... est la suivante. Avez-vous, monsieur le ministre, l'intention de retirer cet arrêté (« Non, non ! » sur les bancs du goupe de l'Union pour un mouvement populaire) ou bien de rendre obsolètes les commissions locales d'information ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au commerce extérieur.
    M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur Madrelle, nous avons conscience de l'énorme travail que fournissent les commissions locales d'information. Nous savons l'importance de leur rôle et tout l'intérêt qui s'attache à la transparence dans ce domaine.
    Nous souhaitons d'ailleurs vous rassurer sur ce point : il n'est pas question du tout de remettre en cause la politique de transparence voulue par le Gouvernement dans le domaine nucléaire. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    C'est la raison pour laquelle, au début de l'année prochaine, nous vous soumettrons un projet de loi sur la transparence nucléaire qui viendra renforcer considérablement le droit d'accès à l'information dans ce domaine.
    Mais il ne vous aura pas échappé que la transparence, l'information, le débat, sont une chose, la sécurité, les malveillances et l'ordre public en sont une autre. Un arrêté a effectivement été pris, cet été, par le haut fonctionnaire de défense, pour protéger les données qui auraient pu permettre à des personnes malveillantes de s'attaquer à des matières nucléaire civiles ou militaires, ou de les voler.
    La portée réelle de cet arrêté a été sans doute mal interprétée.
    M. Noël Mamère et Mme Martine Billard. Et le procès des deux militants verts !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. C'est pourquoi nous avons demandé au haut fonctionnaire de défense de bien expliquer ce dispositif aux associations et aux commissions locales d'information.
    Il s'est rendu à cette fin au comité d'orientation de La Hague et il se rendra à la conférence de l'association nationale des présidents de commission locale d'information, le 26 novembre prochain.
    Mme Martine Billard. Annulez le procès du 19 novembre !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. De plus, pour dissiper toute ambiguïté, et parce que cette affaire est importante, nous lui avons demandé d'élaborer un nouvel arrêté précisant que seules les informations dont la divulgation est de nature à nuire à la protection des matières nucléaires seront couvertes par le secret de la défense nationale.
    Mme Martine Billard. Arrêtez le procès !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. Le Gouvernement a donc deux objectifs : d'une part il entend garantir la transparence de l'information et, d'autre part, être vigilant quant à la protection de nos concitoyens contre le vol des matières nucléaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

CITOYENNETÉ EUROPÉENNE

    M. le président. La parole est à M. Bernard Schreiner, pour le groupe UMP.
    M. Bernard Schreiner. Le choix fait par la Convention sur l'avenir de l'Europe d'intituler son projet « Constitution » est porteur d'espoir mais également lourd de conséquences. En effet, créer une constitution européenne, c'est bien reconnaître que nous sommes des citoyens européens, de même que nous sommes devenus des citoyens français lorsque la Révolution française a doté la République naissante d'une Constitution.
    Parce que nous sommes citoyens européens, nous sommes appelés aux urnes en juin prochain pour élire un Parlement dont les prérogatives, notamment politiques et législatives, sortent considérablement renforcées des travaux de la Convention sur l'avenir de l'Europe.
    Mais bien souvent, les Français n'ont pas conscience de ces enjeux, si abstraits lorsqu'on les compare aux difficultés bien concrètes rencontrées dans l'application de certains textes communautaires.
    Ma question est donc la suivante : que compte faire le Gouvernement (« Rien ! » sur les bancs du groupe socialiste) pour permettre cette prise de conscience, et que compte-t-il faire...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Rien !
    M. Bernard Schreiner. Oh, certainement beaucoup plus que vous n'avez fait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Que compte-t-il faire pour permettre à la France d'être à la hauteur du grand défi européen qu'elle s'est fixé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.
    Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le député, vous avez tout à fait raison de le souligner : à l'heure de la Constitution européenne, non seulement l'Europe doit se faire, mais elle doit se faire au plus proche des citoyens.
    M. Philippe de Villiers. Référendum !
    Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. C'est d'ailleurs le sens de la régionalisation du mode de scrutin, que le Gouvernement a voulu pour les prochaines élections européennes du 13 juin.
    M. Arnaud Montebourg. Référendum !
    Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. C'est aussi pourquoi nous nous réjouissons que plusieurs mesures aient été prises dans le cadre du projet de constitution, souvent à notre demande : par exemple, l'extension des compétences du Parlement européen, mais aussi, vous le savez, l'association directe - et c'est nouveau - des parlements nationaux au contrôle de la subsidiarité,...
    M. Arnaud Montebourg. Référendum !
    Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. ... ainsi qu'une innovation très importante, le droit d'initiative citoyenne, qui permettra, si un million de signatures sont réunies,...
    M. Arnaud Montebourg. Référendum, référendum !
    Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. ... d'obliger la commission à engager une procédure législative.
    A la demande et sous l'autorité du Premier ministre, j'ai établi un plan d'action pour rendre l'Europe plus citoyenne et plus proche de nous.
    Plusieurs députés du groupe socialiste et M. Noël Mamère. Il faut donc un référendum !
    Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. Ce plan se décline en trois thèmes : la pédagogie, qui implique l'écoute, le civisme et les symboles.
    La pédagogie, d'abord, bénéficie de la coopération de Xavier Darcos et Luc Ferry, et implique l'enseignement d'une langue étrangère dès l'école primaire,...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Non, la pédagogie, c'est le référendum !
    M. Jacques Myard. Référendum !
    Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. ... l'introduction de l'Europe dans les programmes de toutes les classes élémentaires. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Edouard Landrain. Et les jardins d'enfants ?
    Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. Ici, il y a une classe qui n'est même pas élémentaire, mais sous-élémentaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Enfin, cela suppose aussi la multiplication des sections européennes, notamment dans les lycées professionnels.
    Quant au civisme, il suppose écoute, modestie, faculté de compréhension et d'adaptation. Le Gouvernement a décidé que serait délivré à tous les jeunes, à l'âge de leur majorité, lors de la journée d'appel à la préparation de la défense, un livret du citoyen européen,...
    M. Arnaud Montebourg. Les citoyens veulent un référendum !
    Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. ... dont le contenu sera défini en liaison avec Michèle Alliot-Marie. Il détaillera les droits, mais aussi les devoirs des citoyens, et sera bien entendu personnalisé et remis à la suite d'un entretien explicatif.
    Parmi les symboles, il y a surtout le drapeau européen. C'est pourquoi nous allons demander, Jean-François Lamour, Hamlaoui Mekachera et moi-même (« Un référendum ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste), aux instances sportives qu'il figure sur le brassard des sportifs et soit hissé lors des compétitions sportives. Le sport est populaire. L'Europe doit l'être aussi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

COMMERCE EXTÉRIEUR

    M. le président. La parole est à M. Claude Gatignol, pour le groupe Union pour un mouvement populaire.
    M. Claude Gatignol. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué au commerce extérieur.
    Monsieur le ministre, s'il est un domaine où les entreprises françaises, performantes et innovantes, doivent être présentes, c'est bien le marché à l'étranger, c'est-à-dire l'exportation, le commerce extérieur. C'est une démarche difficile, qui comporte des risques. Aussi est-il important que le Gouvernement ait une action efficace d'information, de soutien et d'accompagnement, en liaison avec nos ambassades.
    La majorité parlementaire a voté, il y a quelques semaines, une bonne loi, la loi d'initiative économique, qui a prévu la création de l'agence UBIFRANCE pour aider le développement international des entreprises. Parmi les moyens de l'agence, il est prévu des postes de « volontaire international en entreprise », qui constituent pour les jeunes une opportunité très intéressante. C'est, en effet, une formation pour le moins stimulante, qui débouche dans 70 % des cas à un CDI et, surtout, offre un accès privilégié à des métiers internationaux et permet d'exercer tout de suite des responsabilités au sein même de l'entreprise.
    Ma question est double : quel développement envisagez-vous de donner à ces missions appelées VIE et quand le décret d'application concernant UBIFRANCE sera-t-il publié ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Un député du groupe socialiste. Demain matin !
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au commerce extérieur.
    M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le député, vous avez souligné combien il est important d'apporter à notre commerce extérieur ce dynamisme dont ont besoin les emplois et la croissance dans notre pays. Pour cela, nous avons déjà un dispositif public, que nous pouvons améliorer. Nous avons pris la décision de fusionner les deux organismes qui soutenaient ce dispositif public, suite à l'adoption de la loi sur l'initiative économique.
    Le décret d'application relatif à la mise en place d'UBIFRANCE est actuellement examiné au Conseil d'Etat. Il entrera en vigueur dans quelques semaines. Ce nouveau dispositif apporte des améliorations en fournissant un soutien à la fois plus important, plus efficace et plus concret aux PME, qui n'assurent aujourd'hui que le tiers de l'exportation française.
    Deuxièmement, nous devons procéder à une réorientation géographique de nos priorités. Nous sommes traditionnellement très forts en Europe et en Afrique, mais nous avons besoin de nous ouvrir davantage vers les pays d'Asie et d'Amérique.
    Enfin, il est nécessaire de donner à nos jeunes le goût de l'international. C'est la raison pour laquelle nous avons mis en place ce dispositif du volontaire international en entreprise, qui accueille actuellement 2 198 jeunes. Nous en ferons partir environ 200 au mois de novembre, et nous espérons doubler ce chiffre d'ici l'an 2005. Le dispositif est d'une très grande souplesse. Il permet aux jeunes de partir dans d'excellentes conditions, et fournit aux entreprises, notamment les PME, les conditions nécessaires pour établir des bases dans de nouveaux pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de Mme Hélène Mignon.)

PRÉSIDENCE DE Mme HÉLÈNE MIGNON,
vice-présidente

    Mme la présidente. La séance est reprise.

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LOI DE FINANCEMENT
DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2004

Suite de la discussion d'un projet de loi

    Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 (n°s 1106, 1157).
    Hier soir, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

Rappel au règlement

    Mme la présidente. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler, pour un rappel au règlement.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Mon rappel au règlement est fondé sur l'article 58, alinéa 1.
    Je demande, madame la présidente, la présence du Premier ministre et du ministre des affaires sociales.
    Comme l'ont souligné plusieurs orateurs dans la discussion générale, l'épisode dramatique que nous avons connu cet été a montré l'importance des besoins en matière de prise en charge des personnes âgées, en particulier en établissement. Nous venons de recevoir, avec un certain nombre de mes collègues du groupe socialiste, les représentants des directeurs de maisons de retraite et d'établissements d'accueil pour personnes âgées. Ils nous ont confirmé, monsieur le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, ce que je vous ai dit hier : concrètement, il n'y a aucun élément nouveau dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
    C'est d'ailleurs ce que vous avez dit vous-même, puisque les 300 millions d'euros que vous avez annoncés ne correspondent, sur le fond, qu'aux économies que vous avez faites dans le cadre du budget 2003 : 200 millions de crédits dits « débasés », supprimés du budget pour 2002 par rapport à celui pour 2003, et 100 millions de crédits supprimés sur le plan pluriannuel. Ce qui veut dire, concrètement, qu'il n'y a aucune mesure nouvelle pour les maisons de retraite, pour les services de soins à domicile, pour le plan Alzheimer, pour l'accueil de jour. Concrètement, ce qui nous est dit, notamment depuis un mois, autour du plan en direction des personnes âgées ne pourra pas se mettre en place, et ce malgré les annonces dont nous attendons les effets réels depuis un moment. Un grand plan allait être mis en place, disiez-vous - vous l'avez encore rappelé tout à l'heure -, mais étant donné qu'il n'y a rien dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, aucune mesure concrète ne pourra être réalisée l'année prochaine. Cela ne pourra être le cas qu'en 2005.
    Le drame que nous avons vécu cet été, qui a été douloureux pour tout le monde, a posé beaucoup de questions sur la place des personnes âgées dans notre société et sur le regard que nous portons sur elles. Mais les choix du Gouvernement sont tels que rien ne sera mis en place. Je sais bien, et d'ailleurs je l'ai dit, qu'il faudra trouver des financements supplémentaires. Nous ne sommes pas d'accord, je ne suis pas d'accord avec le jour férié, mais il est clair qu'il faudra des financements supplémentaires. Or rien n'est inscrit dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cela veut dire, je le répète, qu'il y a un grand risque pour qu'en 2004, il n'y ait aucune mesure nouvelle.
    Dans ces conditions, vous comprendrez que nous ne pouvons qu'alerter officiellement l'ensemble de cette assemblée sur cette situation. Que rien, concrètement, ne soit inscrit pour l'année 2004, vous en prenez la responsabilité. Cela veut dire que la France, que le Gouvernement, que les responsables politiques que vous êtes, vont rater un rendez-vous avec la population, un rendez-vous avec la société pour que change notre regard sur la grande vieillesse et sur la prise en charge. Je pense en particulier aux personnels, qui, depuis des années, attendent qu'un certain nombre de mesures soient prises - ce que j'avais commencé de faire - pour améliorer la qualité de prise en charge des personnes âgées.
    Dans ces conditions, nous ne pouvons que demander la venue du Premier ministre et du ministre des affaires sociales, chargé officiellement des personnes âgées, afin qu'ils s'expliquent sur ce qui sera fait, concrètement, l'année prochaine, pour les personnes âgées. Je dis bien concrètement : les effets d'annonce ne suffisent pas, parce que ce qui pourra être réalisé ne pourra l'être que si le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit des moyens pour cela. Or rien n'est prévu.
    Je demande donc, madame la présidente, au nom du groupe socialiste, une suspension de séance de dix minutes, afin que nous puissions regarder tous ensemble comment réagir de façon plus forte à cette incapacité du Gouvernement à mettre en place quelque chose de concret en direction des personnes âgées.
    Mme la présidente. La suspension est de droit. La séance reprendra à seize heures trente.

Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente.)
    Mme la présidente. La séance est reprise.

Discussion générale (suite)

    Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. Madame la présidente, monsieur le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, monsieur le ministre délégué à la famille, mes chers collègues, en attendant la réforme de l'assurance maladie, prévue pour 2004, on nous présente, un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui vise à contenir le déficit de 10,9 milliards d'euros, après les 10,6 milliards qu'il est prévisible que nous constaterons cette année.
    Il ne s'agit encore que de contenir - ou de « colmater », selon votre propre terme, monsieur le ministre - ce déficit abyssal, par un ensemble de mesures disparates que l'on peut ranger en deux catégories. Les unes sont des taxations supplémentaires sur les entreprises du secteur, qu'il s'agisse des laboratoires pharmaceutiques ou des répartiteurs, et elles sont en contradiction avec le discours général du Gouvernement, plus particulièrement avec vos propos d'hier, selon lesquels il serait inutile de « remplir un panier percé ». Les autres consistent en des déremboursements de médicaments ou d'actes de médecine de ville, ainsi qu'en l'augmentation de 22 % du forfait hospitalier. Elles pèseront sur les ménages, soit directement, soit par le biais de l'augmentation, de l'ordre de 10 %, des cotisations des mutuelles, en contradiction, là aussi, avec votre refus d'augmenter la CSG au prétexte de ne pas affaiblir la consommation intérieure.
    Mais il est des occasions, monsieur le ministre, où vous contribuez vous-même à l'aggravation de ce déficit abyssal que vous prétendez vouloir « colmater ». En examinant l'article 82 rattaché au budget de la santé dans le projet de loi de finances pour 2004, j'ai constaté que vous comptiez mettre en place un forfait unifié de prise en charge des dépenses de couverture maladie universelle complémentaire relevant d'une caisse d'assurance maladie, comme cela existait déjà pour les mutuelles et les assurances. Déjà l'an dernier, vous aviez, par un amendement très tardif, réalisé une économie de l'ordre de 32 millions d'euros par la modification de la date d'ouverture des droits et des modalités de revalorisation du plafond de ressources, ainsi que par un meilleur contrôle des déclarations de ressources. Ces mesures n'avaient donc pas eu de conséquences sur l'assurance maladie.
    Pour 2004, par contre, vous présentez une mesure d'économie globale de 117 millions d'euros pour le budget de l'Etat par transfert de 128 millions d'euros sur le budget de l'assurance maladie. En effet, vous proposez une revalorisation à 300 euros par bénéficiaire de la déduction censée compenser, pour les mutuelles, les frais de gestion des dossiers des 12 % de bénéficiaires concernés. Le régime général, lui, qui est chargé de 85 % des dossiers de couverture maladie universelle complémentaire, est remboursé jusqu'à cette année de l'intégralité des montants versés, les caisses assurant une simple avance de trésorerie à l'Etat. Les sommes correspondantes apparaissent dans les comptes de la Caisse nationale d'assurance maladie des travaileurs salariés, conformément à cette règle. Les caisses agissent pour le compte de l'Etat, alors que les complémentaires concluent des contrats.
    La mesure que vous proposez pour 2004 implique une transformation des caisses primaires d'assurance maladie en assureurs complémentaires, porteurs d'un risque financier, alors que ce n'est ni leur vocation ni leur métier. Vous supprimez le remboursement à l'euro près des dépenses supportées par les caisses au titre des 85 % de dossiers qu'elles gèrent, en réalisant au passage un transfert de charges de 128 millions d'euros du budget de l'Etat vers le budget de l'assurance maladie. Il s'agit donc bien de dépenses nouvelles pour l'assurance maladie, qui seront imputées au FNASS, le Fonds national d'action sanitaire et sociale. Cela réduit de 20 % l'action sociale des caisses dans les domaines du maintien à domicile des personnes handicapées, du développement des soins palliatifs, ou encore de l'éducation sanitaire, toutes réductions d'actions allant à l'encontre des priorités du Président de la République comme des objectifs affichés par la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, Mme Boisseau, ou par vous-même, monsieur le ministre, en matière de santé publique, puisqu'il s'agit d'éducation sanitaire.
    Mais au-delà de cette mesure, je vois là les prémices d'un basculement complet de la couverture maladie universelle complémentaire dans le champ assurantiel privé, fût-il mutualiste. Il s'agit là du début d'une privatisation de l'assurance maladie. Car, sur le principe non plus, ce glissement n'est pas mineur ! En effet... Je vous vois sourire, monsieur le ministre, mais considérez cet argument !
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je considère tout ce que l'on me dit !
    M. Gérard Bapt. En effet, disais-je, la Commission européenne, comme la Cour de justice des Communautés, n'exonère les caisses de l'application du droit de la concurrence qu'en raison de la mission de service public qui leur est confiée par l'Etat. Il n'est donc pas exclu que le basculement des caisses vers un fonctionnement assurantiel, dans le cadre de la couverture maladie universelle complémentaire, n'entraîne l'application automatique des directives communautaires relatives à l'assurance. Il s'agit là du projet du MEDEF de mise en concurrence des caisses, des mutuelles et des assurances privées. Cela commence par la couverture maladie universelle !
    Vous-même aviez déclaré, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 : « Pourquoi, puisque tout le reste a déjà été essayé, ne pas introduire de la concurrence dans la gestion de l'assurance maladie ? » Ma question est donc simple : y sommes-nous ? Venez-vous, monsieur le ministre, d'enclencher les processus de mise en concurrence des différents organismes de couverture et donc le processus de privatisation de l'assurance maladie ? Cette question revêt, pour le groupe socialiste, une importance capitale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Bertrand.
    M. Xavier Bertrand. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, le vote du PLFSS prend cette année un relief tout particulier. Il prend place entre la réforme des retraites, adoptée cet été, et la réforme de l'assurance maladie qui sera adoptée dans maintenant moins d'un an.
    En effet, alors que notre pays les réclamait depuis de nombreuses années, les réformes n'ont pas vu le jour. Le Gouvernement et la majorité qui nous ont précédés se sont contentés de commander des rapports, qui tous, d'ailleurs, soulignaient cette urgence. Mais après les rapports, il y a eu les reports.
    M. Jean-Pierre Blazy. Oh ! Bravo !
    M. Emile Zuccarelli. Que c'est beau !
    M. Xavier Bertrand. Nous avons eu, à l'époque, la croissance, et même une forte croissance. Nous n'avons pas eu les réformes. Il est vrai que nous n'avons pas tout à fait la même notion des responsabilités. Les Français nous ont donné un mandat au printemps 2002, à l'issue d'élections législatives particulièrement claires : réformer notre pays. Et c'est ce que nous faisons.
    Je voudrais vous parler, plus spécifiquement, de la branche vieillesse, dans laquelle se traduit la réforme des retraites votées cet été.
    Celle-ci aura été menée par le Gouvernement et la majorité avec une détermination sans faille, et ce en trois temps : d'abord, le temps du constat, du diagnostic partagé ; ensuite, le temps du dialogue, de la consultation ; enfin, le temps de la décision.
    A chaque étape de cette réforme, nous avons su prendre nos responsabilités, ce qui nous a permis de tourner le dos délibérément aux trois scénarios qui avaient été présentés par le Conseil d'orientation des retraites, scénarios qui n'ont jamais été contestés par quiconque dans ce pays. Le COR avait indiqué que sans réforme, les futurs retraités n'auraient, en 2040, que trois possibilités : soit cotiser neuf années de plus, ce qui était impensable ; soit accepter de payer jusqu'à 60 % de cotisations en plus, ce qui était impossible ; soit se résoudre à voir baisser le niveau des pensions de moitié, ce qui était, pour tous les Français, inacceptable. La réforme qui est devenue réalité et qui voit sa traduction dans ce PLFSS nous a permis de dire non à ces scénarios catastrophes.
    La réforme a été guidée par trois principes.
    Premier principe : la sécurité. Plutôt que d'augmenter les impôts ou la CSG, comme le réclamait déjà le parti socialiste - mais il est vrai que la nouvelle doctrine du parti socialiste est aujourd'hui la réhabilitation de l'impôt -, nous avons fait, nous, le choix de l'allongement de la durée de cotisation, qui est un choix de bon sens.
    M. Jean-Marie Le Guen. On en reparlera !
    M. Xavier Bertrand. C'est le choix qui a été fait par tous les pays européens qui ont réformé. C'est d'ailleurs également le choix qui était prôné par Lionel Jospin, alors Premier ministre.
    Deuxième principe de cette réforme : l'équité. Les Français nous ont clairement fait part de leur souhait de voir introduire par la réforme davantage d'équité et de justice sociale dans ce système de retraite. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).
    M. Jean-Marie Le Guen. Si vous comptez sur le Gouvernement pour cela, vous faites une erreur de casting !
    M. Xavier Bertrand. A cet égard, la convergence des durées de cotisation, l'indexation des pensions, ou encore la création d'une décote égale pour tous sont autant de mesures qui assurent un effort partagé, car l'équité ne se résume pas à l'harmonisation entre les régimes publics et privés. Elle passe notamment par une meilleure prise en compte des situations profondément injustes. Je pense notamment à la situation des retraités agricoles, à celle des veuves, dont il était bien question dans cette réforme, même si nous avons entendu hier le contraire de la part d'orateurs socialistes, à celle des salariés à bas revenus, envers lesquels nous avons porté une attention particulière, ou encore à celle des handicapés, pour lesquels nous avons pris des mesures spécifiques.
    Une autre mesure concrète figure dans ce texte : la revalorisation des pensions vieillesse. L'article 27 prévoit qu'elle sera supérieure à l'inflation, puisque l'augmentation sera de 1,7 % en 2004, soit 0,2 point de plus que l'inflation. Nous avions indiqué à l'époque que le pouvoir d'achat des retraités était garanti par la loi : ce projet de loi de financement de la sécurité sociale en apporte la preuve.
    Mais le meilleur exemple de cette justice sociale et de cette équité, c'est la prise en compte des carrières longues : les salariés qui ont commencé à travailler très jeunes - à quartorze, quinze ou seize ans -, qui incarnent la valeur du travail, vont pouvoir cesser leur activité avant l'âge de soixante ans.
    Le sort de ces salariés avait souvent été évoqué ici, notamment en novembre 2001, à l'initiative des députés communistes, et le 11 mars dernier, toujours à l'initiative des mêmes députés. Le gouvernement de M. Jospin leur avait toujours opposé une fin de non-recevoir ; nous, nous avons fait de cette revendication une réalité, et cette disposition va prendre effet au début de l'année 2004. Les décrets, qui concernent des centaines de milliers de salariés, vont être publiés. Comme vous le savez, une négociation a d'ores et déjà été ouverte par les partenaires sociaux afin d'adapter le régime complémentaire pour permettre à ces salariés de partir en retraite dans des conditions optimales. Nous avons tenu nos engagements.
    Dernier pilier majeur de cette réforme : la liberté et la souplesse. Cela suppose nécessairement une meilleure information. C'est ce que prévoit ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, avec la mise en place, dès 2004, d'un groupement d'intérêt public destiné à faciliter l'échange de données entre les régimes. Il s'agit là d'une première étape vers l'instauration d'un véritable service national d'information sur les retraites permettant à chaque Français de connaître très tôt et très précisément le montant de sa retraite, et de disposer de l'information à laquelle il a droit. Bien évidemment, c'est le système suédois qui doit servir de référence.
    Cette réforme des deux retraites, qui entrera en vigueur de façon progressive dès le début de l'année 2004, permet d'assurer le financement de la branche vieillesse de la sécurité sociale et trouve place à côté d'une politique familiale ambitieuse. Il s'agit d'une nouvelle traduction de la volonté politique qui s'est exprimée par le vote qui a été émis en juillet dernier, dans cet hémicycle.
    Dans l'action politique, il est important de dire ce que l'on va faire, de faire ce que l'on a dit et, surtout, d'assumer ses choix.
    M. Jean-Pierre Blazy. Ah ?
    M. Xavier Bertrand. C'est ce que nous avons fait avec la réforme des retraites, que nous assumons la tête haute devant les Français, et c'est avec la même détermination que nous nous attacherons à réformer notre système d'assurance maladie, afin de nous donner les moyens d'en garantir l'avenir. Dans ce domaine, comme dans beaucoup d'autres, la pire des choses serait l'immobilisme. Nous préférons le mouvement, et nous avançons.
    M. Jean-Pierre Blazy. En arrière !
    M. Emile Zuccarelli. Sus à l'immobilisme !
    M. Xavier Bertrand. Messieurs les ministres, nous voterons ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Vous pouvez compter sur notre soutien pour relever les vrais défis de société. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
    M. Emile Zuccarelli. Enfin un discours progressiste !
    M. Jean-Pierre Blazy. Madame la présidente, messieurs les ministres, chers collègues, la catastrophe sanitaire de cet été a mis en évidence la gravité de la crise que connaissent les hôpitaux publics et les établissements médico-sociaux publics, particulièrement en Ile-de-France. C'est - sans position partisane - un véritable signal d'alarme qu'il faut lancer. Le problème que nous avons à résoudre ne peut, aujourd'hui, se résumer en termes essentiellement comptables, mais bien plutôt, d'abord, en termes de politique globale de santé.
    Pour ce qui concerne le système hospitalier public, auquel je consacrerai l'essentiel de mon intervention, il faut aujourd'hui être conscient des risques de paralysie à court terme, en raison des pénuries de personnel dont il souffre. Sur ce point, le problème est aujourd'hui largement médiatisé, notamment la question des urgences, qui se pose depuis plusieurs années, comme l'a réaffirmé, avant-hier encore, le docteur Patrick Pelloux dans un grand quotidien du matin.
    Nous sommes d'abord confrontés à une pénurie d'infirmières : il en manquerait près de 10 000 dans les hôpitaux. Ce phénomène s'explique par les nombreux départs en retraite, lesquels vont s'accélérer au cours des prochaines années - près de 50 % des effectifs vont partir - plus qu'à l'effet de la RTT. Rappelons, sur ce dernier point, que les créations d'emplois nécessaires avaient été prévues et que, par ailleurs, le gouvernement précédent avait déverrouillé ce que le gouvernement Juppé avait cadenassé en matière de formation des personnels infirmiers.
    Bien évidemment, les prévisions en matière de quotas de formation ont été tardives, mais je rappelle que ces quotas sont passés de 18 000 à 25 000 en 2000 et à 30 000 cette année, grâce au gouvernement précédent. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est incontestable !
    M. Bruno Gilles, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance maladie et les accidents du travail. C'est vous qui le dites !
    M. Jean-Pierre Blazy. Je rappelle également que le temps de formation d'une infirmière est de trois ans minimum, ce qui rendait ces mesures inefficaces à court terme.
    En outre, au-delà d'une simple crise conjoncturelle - et je voudrais insister sur ce point -, on constate une réelle crise des vocations. Il y a une urgence absolue, monsieur le ministre, à traiter cette crise, sans doute en partenariat avec l'éducation nationale, à intéresser les jeunes à ces métiers essentiels et à communiquer de façon très forte sur ce sujet.
    Nous sommes également confrontés à une pénurie de médecins. Depuis la fin des années 70, le numerus clausus est malthusien. Les responsabilités sont certes partagées au niveau politique...
    M. Xavier Bertrand. Ah bon !
    M. Jean-Pierre Blazy. ... mais elles incombent également à la profession elle-même, qui considérait à l'époque que le nombre de médecins était trop important.
    Actuellement, la situation est donc véritablement aberrante, puisque nous observons, d'une part, une augmentation du nombre de médecins étrangers exerçant en France et, d'autre part, le début de l'organisation, au sein de nos consulats dans certains pays du Sud, de concours visant à recruter une partie des médecins de demain. Ainsi il manquerait déjà plus de 3 000 médecins dans les hôpitaux, surtout des spécialistes. Certes, la situation de la démographie médicale a été aggravée par la mise en place de la RTT en 2002 («Ah !» sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), mais elle l'a aussi et surtout été par la directive 93/104 relative au temps de travail que vous vous êtes engagé à appliquer dès janvier 2003.
    Le rapport de la mission d'études et de propositions sur la démographie des professions de santé, que vous avez confié en juin 2002 au professeur Berland, monsieur le ministre, dresse un constat inquiétant de la situation de la démographie médicale, puisqu'il annonce que le nombre de médecins va baisser de près de 20 % d'ici à 2020. Que comptez-vous faire pour faire face à cette baisse ? Il est à craindre que, faute de médecins, se reproduisent dans les années qui viennent des situations du type de celle que connaît actuellement Saint-Affrique.
    Enfin, nous sommes confrontés à une pénurie de certains personnels paramédicaux, notamment d'aides-soignantes, de masseurs kinésithérapeutes et de manipulateurs radio. Ainsi, le fonctionnement de l'IRM toute récente de l'hôpital de Gonesse est entravé, faute de manipulateurs radio. Cette situation est inacceptable. Elle ne peut être comprise de nos concitoyens, usagers de notre système de santé publique.
    Je souhaiterais maintenant appeler votre attention, monsieur le ministre, sur la situation difficile des hôpitaux franciliens et sur les risques graves qu'elle fait peser sur la santé publique dans notre région. Le président de l'UHRIF, Yves Tavernier, nous alerte, une fois de plus, sur cette situation. Non seulement l'assainissement auquel il aurait fallu procéder au terme de six années de péréquation interrégionale - certes nécessaire, mais qui a rapidement atteint ses limites - n'a pas eu lieu, mais l'agence régionale de l'hospitalisation a procédé en 2003 à l'amputation de nombreux crédits par la suppression de l'enveloppe exceptionnelle de 100 millions de francs des crédits du fonds pour la modernisation des établissements de santé et des aides d'urgence accordées à de nombreux établissement d'Ile-de-France. La situation financières des hôpitaux franciliens, comme celle de l'Assistance publique, s'est donc à nouveau dégradée en 2003.
    L'Assistance publique bénéficiera d'une aide, certes conditionnée et étalée sur plusieurs exercices, de 230 millions d'euros, afin de lui permettre de faire face à ses engagements. Soit ! Toutefois, il semble logique et équitable que les hôpitaux franciliens, qui ont connu les mêmes difficultés, puissent bénéficier eux aussi d'une aide exceptionnelle leur permettant de solder les comptes du passé. Ce « rebasage » budgétaire est d'autant plus urgent, monsieur le ministre, que la mise en oeuvre de la tarification à l'activité au 1er janvier prochain risque de fragiliser à nouveau notre tissu sanitaire régional. Les événements tragiques de l'été, ressentis avec une particulière acuité en Ile-de-France, ainsi que la fuite massive de personnels soignants qualifiés vers la province ont bien démontré la nécessité d'un traitement adapté pour notre région, laquelle connaît des surcoûts de fonctionnement structurels que l'on peut évaluer à au moins 10 % et qui doivent être pris en compte dans le nouveau régime tarifaire.
    Monsieur le ministre, ces questions appellent des réponses claires et nécessitent de véritables engagements. Après la crise sanitaire sans précédent de cet été qui a provoqué la mort de 15 000 personnes âgées, votre projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 nous inquiète, car vous laissez filer le déficit de la sécurité sociale et l'ONDAM nous apparaît insincère. Surtout, votre avant-projet de réforme de l'assurance maladie, réforme annoncée pour l'année prochaine, nous fait redouter le pire pour une majorité de nos concitoyens. Pourtant, monsieur le ministre, nous aimerions nous tromper.
    Répondez-nous, rassurez-nous, notre système de santé est aussi un des fondements de notre cohésion sociale, de notre contrat social, comme le dit le Président de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est tout à fait vrai !
    Mme la présidente. La parole est à M. Marc Bernier.
    M. Marc Bernier. Madame la présidente, messieurs les ministres, madame la rapporteure, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le vieillissement de la population française est un phénomène inéluctable qui concerne au premier chef notre système de sécurité sociale, puisque le maintien d'un niveau de vie et les soins prodigués à l'endroit des personnes âgées ont représenté près de 136 milliards d'euros l'année 2002.
    Or si les plus de soixante-cinq ans représentent aujourd'hui 16 % de la population, les projection de l'INSEE les estiment à 21 % à l'horizon 2020 et à 29 % vers 2050.
    Somme toute, il est indispensable d'appréhender ce problème au regard de la gestion de notre système de protection sociale.
    Même si les personnes âgées sont en moyenne en meilleure santé qu'autrefois, il n'en demeure pas moins que les dépenses de soins remboursées par la sécurité sociale augmentent progressivement avec l'âge, notamment pour les plus de soixante-cinq ans. C'est plus particulièrement à partir de quatre-vingts ans qu'un seuil est franchi dans l'état de santé de nos aînés, lequel s'accompagne généralement d'un surcroît de soins, et donc d'une progression des remboursements par l'assurance maladie.
    Il importe donc de veiller à la rationalité de ces dépenses inhérentes à l'allongement de la durée de la vie et à son adéquation au besoins exprimées par les personnes âgées.
    De nombreuses mesures allant dans ce sens ont été étudiées et prises par le Gouvernement. Elles ont pour objectif non seulement de faciliter l'accès des personnes âgées vivant à leur domicile aux prestations de santé, mais aussi de réorganiser les soins afin de moderniser les réseaux sanitaires. Cela est essentiel pour promouvoir un maintien dans le milieu familial, moins coûteux et majoritairement souhaité par les personnes âgées et leurs familles.
    En effet, quoi de plus naturel et de plus humain que de faire tout ce qui est possible pour maintenir ces personnes dans leur cadre de vie, y compris à l'issue d'un séjour hospitalier ? Encore faut-il que leur domicile leur permette et que le patient soit assuré de pouvoir bénéficier des soins et des services que l'âge requiert avec plus ou moins d'acuité.
    Pour ce faire, vous avez confirmé un certain nombre de mesures visant à améliorer le réseau de santé prenant en charge des personnes âgées et vous en avez révisé d'autres. Ainsi, vous avez coordonné des structures, des services et des financements gérontologiques, sans pour autant diminuer la qualité des soins prodigués. Parmi ces mesures figurent bien évidemment l'allocation personnalisée d'autonomie - l'APA - et la constitution de coordinations locales gérontologiques.
    Toutefois, de telles aides doivent nécessairement passer par la présence de travailleurs sociaux à domicile, par la formation de personnels qualifiés en nombre suffisant, et par un travail partenarial des équipes médico-sociales et des associations autour de la personne âgée.
    Pour ce qui est des réseaux gérontologiques, une trentaine d'entre eux bénéficient actuellement d'un plan de financement du fonds d'aide à la qualité de soins de ville - le FAQSV - dont l'article 38 du projet de loi de financement de la sécurité sociale vise à améliorer les conditions de ressources et à compléter les missions.
    Ce programme permettrait ainsi de préserver l'autonomie des personnes âgées, tout en garantissant leur prise en charge globale par les branches maladie et retraite de la sécurité sociale.
    En revanche, il est regrettable que la prise en compte de l'habitat et de ses enjeux posés par la sécurisation et son adaptation ne soit pas toujours intégrée ou ne le soit que marginalement.
    Le maintien ou le retour à domicile après hospitalisation pourrait considérablement interférer sur l'efficacité des politiques de santé et gérontologique.
    L'absence de réponse cohérente - ce qui est trop souvent le cas - provoque le placement précipité en maison de retraite, lequel s'accompagne de conséquences financières et pathologiques évidentes qui vont souvent à l'encontre de la volonté des personnes concernées.
    Ne conviendrait-il pas de rendre obligatoire, par voie réglementaire, un volet logement dans les schémas gérontologiques départementaux ? Ne pourrait-on pas concevoir à l'échelle nationale un programme expérimental visant à une meilleure prise en charge des personnes âgées, en vue de leur retour à domicile dans un habitat adapté, ce qui serait moins onéreux que le maintien en service hospitalier ou gériatrique ? Enfin, ne serait-il pas possible d'élaborer un cadre d'intervention financier sous la forme de fonds d'aide d'urgence départementaux pour les personnes âgées sortant de l'hôpital ?
    Quoi qu'il en soit, la politique menée par votre ministère tend de plus en plus vers une prise en charge cohérente des personnes dépendantes en leur permettant soit de choisir de rester à domicile, tout en étant aidées, soit d'entrer en institution.
    La viabilité de notre système de protection sociale, qui doit faire face au vieillissement de la population, passe nécessairement par des mesures destinées à moderniser les méthodes de soins, afin d'économiser des prestations coûteuses qui ne seraient plus adaptées aux attentes des patients.
    La modernisation de l'assurance maladie et l'amélioration de la prise en charge des personnes âgées, tout en maîtrisant les prélèvements obligatoires, font partie de vos priorités.
    Convaincu, monsieur le ministre, de votre détermination à sauver notre système de protection sociale, je voterai avec conviction le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Simon Renucci.
    M. Simon Renucci. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, présenté à la moitié de la présente législature, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 permet, vous en conviendrez, de juger de l'action du Gouvernement.
    Voilà, un an, certains de mes collègues vous avaient fait remarquer, messieurs les ministres, que le financement de la sécurité sociale n'était pas assuré. Permettez-moi de reprendre leurs propos en disant aujourd'hui que ce projet de loi de financement ne l'assure toujours pas. Le déficit s'est même aggravé : alors qu'il était de 9 milliards d'euros - 60 milliards de francs -, il atteindra 11 millards d'euros, soit plus de 70 milliards de francs.
    Si le PLFSS de 2003 n'était déjà pas bon, avouez que celui pour 2004 n'est pas meilleur. La situation de l'assurance maladie est encore plus catastrophique, alors qu'elle constitue la préoccupation majeure de nos compatriotes. N'oublions pas que c'est elle qui conditionne l'égalité d'accès aux soins et la distribution de soins de qualités.
    A propos du budget de 2003, vous parliez l'an dernier, monsieur le ministre, d'un budget de transition, et vous nous incitiez à patienter. Mais pouvons-nous considérer sérieusement deux budgets successifs, engageant des masses financières aussi considérables, comme transitoires ? Ce ne serait sérieux ni à l'égard du travail législatif, ni à l'égard de votre propre action.
    Nous savons tous, pourtant, que plus on attend, plus le traitement des causes se révélera difficile, coûteux et douloureux pour les Français. Il y avait urgence à ne pas laisser filer notre système vers une crise sans précédent. La situation actuelle est-elle voulue ? Est-elle subie ? Etait-il nécessaire de prendre encore du temps pour évaluer, d'attendre de nouveaux travaux, un énième rapport ?
    C'est une tâche que vous avez confiée au Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, aux travaux duquel vous avez fixé une orientation libérale que traduisent bien les mots prononcés par le Premier ministre lors de l'installation de cet organisme, le 13 octobre dernier : « Des mécanismes personnalisés doivent venir renforcer l'assurance maladie dans sa gestion des mécanismes de solidarité. »
    La responsabilité individuelle est votre doctrine. Elle n'est pas en soi critiquable, mais mesurons bien les mots, leur sens et leur portée. Le sens du propos : chacun se prend en charge. Sa portée : la privatisation de l'assurance maladie. C'est l'opposé exact des principes de solidarité et d'égalité qui fondent notre assurance maladie.
    Notre devoir est d'alerter les Français, et, avec eux, de s'opposer à la mise en application d'une telle doctrine. L'enjeu est en effet considérable. La sécurité sociale, c'est-à-dire l'assurance face à la maladie, n'est pas seulement un pilier de la cohésion sociale, elle en est aussi un grand symbole, qui nous renvoie à ce qu'il y a de plus commun entre les hommes : la maladie, la souffrance et la mort. Touchez à ce sentiment d'absolu et de fragilité, et vous touchez au sentiment fondateur de l'égalité. L'idée que face à la souffrance, à l'ultime échéance, un être humain serait traité différemment selon qu'il ait ou qu'il n'ait pas fait preuve de responsabilité individuelle nous est insupportable. Nous touchons ici, j'ose le dire, au sacré.
    Pourtant, nous nous orientons malgré nous vers une protection sociale à trois vitesses.
    La première des protections relève de la solidarité nationale, est financée par l'impôt et garantit des couvertures minimales aux populations les plus démunies. On peut citer comme exemple la couverture médicale généralisée, pour laquelle la participation de l'Etat, devenue forfaitaire cette année, à diminué.
    La deuxième protection de base est assurée à partir de l'emploi. Mais les risques couverts se réduisent : citons le déremboursement de certains médicaments et l'augmentation du forfait hospitalier.
    Le troisième niveau de protection est assuré par les assurances complémentaires - tout au moins pour l'instant - privées. Il relève de plus en plus du choix personnel des individus et est soumis à concurrence.
    On dessine ainsi, lentement, le passage d'un état social universel à un état social reposant sur la discrimination, fût-elle parfois positive.
    La charge symbolique contre la sécurité sociale est donc fondamentalement idéologique.
    L'augmentation des dépenses est sans doute inéluctable, en raison, comme chacun le sait, des progrès de la médecine et de la technologie ainsi que de l'allongement de l'espérance de vie. Mais si un contrôle doit exister, il ne doit pas porter atteinte à l'égalité d'accès aux soins et à la liberté de choix.
    S'il est possible d'estimer que la société ne peut plus ou ne veut plus prendre en charge telle ou telle dépense, on peut également choisir une autre voie, celle qui permettrait de dégager de nouveaux moyens en répartissant autrement la richesse nationale, laquelle progresse. On peut encore estimer que les acteurs de santé doivent devenir de vrais partenaires, respectés et responsables. Je suis convaincu que les Français, très conscients des problèmes, sont aussi prêts à l'effort, à condition qu'il soit justement réparti. Or sur ce point, le doute est permis.
    Le choix est éminemment politique et sociétal - le Préambule de 1946 affirme le principe d'universalité de la protection sociale. Aussi ai-je déposé, avec ma collègue Catherine Génisson, un amendement à l'annexe de votre loi, qui réaffirme solennellement que jamais l'assurance privée ne devra couvrir les dépenses du régime de base. Je garde l'espoir, monsieur le ministre, que vous défendrez ce principe fondateur. Car sans égalité, il n'y a pas de justice sociale. Et sans justice sociale, il n'y a pas de fraternité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Emile Zuccarelli. Très bien !
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door, dernier orateur inscrit.
    M. Jean-Pierre Door. Madame la présidente, Messieurs les ministres, mes chers collègues, s'agissant du bien le plus précieux dont chacun dispose, en l'occurrence la santé, il est sage que le Gouvernement se penche à son chevet et s'impose un délai pour mener à bien, dans le dialogue et la concertation, cette évolution majeure qu'est la modernisation de notre régime d'assurance maladie.
    Cette démarche est la seule qui puisse permettre de parvenir à un projet partagé sur ce sujet difficile, mal compris de la population à qui il est difficile de faire admettre que l'on ne peut toujours demander plus sans payer plus.
    Depuis plus d'un quart de siècle, l'assurance maladie a vu se multiplier des plans de sauvetage mais aucun n'a produit de résultats durables. Chacun s'accorde d'ailleurs à regretter l'incurie du précédent gouvernement qui, pendant cinq années, s'est félicité du retour à l'équilibre des comptes grâce aux recettes, mais qui n'a rien fait pour maîtriser les dépenses.
    Vous ne vous êtes pas laissé prendre au piège, monsieur le ministre, de ceux qui ont cherché, par leurs déclarations ou leurs écrits, à nous entraîner dans une voie contraire à l'idée que nous nous faisons, sur les bancs de l'UMP, de la santé à la française. Dans l'attente du futur débat sur l'assurance maladie, vous présentez, dans ce PLFSS, des mesures d'urgence.
    Le récent rapport de la Cour des comptes signale des incertitudes de la gestion du risque. Cette incertitude demeure forte particulièrement sur des postes de dépenses en augmentation rapide.
    Je voudrais cibler mes interventions sur la forte augmentation du nombre de personnes atteintes d'une affection de longue durée.
    Le chiffre est éloquent : 5,7 millions de personnes sont touchées par ces affections. En 2001, le taux de personnes en ALD était estimé à environ 12 % de la population totale du régime général. Après soixante-quinze ans, pratiquement une personne sur deux est en ALD, et bénéficie donc à ce titre d'une prise en charge en général à 100 % pour l'affection en cause. Au final, le coût des ALD représente 50 % des dépenses de santé.
    Le nouvel article 31 que vous allez nous proposer par voie d'amendement est un bon outil. La médicalisation des critères d'exonération du ticket modérateur et une prédéfinition du périmètre des soins considérés comme particulièrement nécessaires dans le cadre d'une ALD vont dans le sens de la responsabilisation.
    L'appréciation médicale et le protocole de soins sur la base desquels sont déclenchées l'exonération et une définition plus claire des prestations exonérées doivent bien entendu être précisés dès le départ, mais également suivis dans la durée. Chaque professionnel a l'expérience d'exonérations pour ALD qui se poursuivent sur des années alors que leur motif médical n'est plus de mise. Or il s'avère que la prise en charge des malades en ALD explique l'essentiel de la dérive des dépenses de santé. Ils ont engendré 62 % - les deux tiers ! - de l'augmentation des dépenses de soins de ville et 75 % de l'évolution de la dépense totale de médicaments en 2001.
    La croissance des effectifs atteints d'une ALD s'accentue au fil des ans, avec une progression plus prononcée actuellement que dans les années précédentes, durant lesquelles elle était malgré tout de l'ordre de 4 %. Sur la période 1995-2001, le nombre des nouveaux bénéficiaires a ainsi augmenté de 6,4 % par an en moyenne. Ce sont les admissions au titre du diabète qui ont augmenté le plus rapidement, avec un taux de croissance annuelle moyen de près de 10 %. Viennent ensuite l'ensemble des maladies cardio-vasculaires, autour de 8 %, les tumeurs malignes, qui enregistrent une progression de 6 %, et enfin les psychoses et troubles graves de la personnalité en croissance de 4 %. C'est donc à une nette augmentation du nombre de nouveaux bénéficiaires de l'exonération du ticket modérateur au titre d'une ALD qu'il faut faire face.
    Par ailleurs, la prise en compte de l'amélioration du protocole interrégime d'examen spécial s'avère indispensable.
    D'une part, l'information du patient sur le périmètre des soins considérés comme liés à son affection et médicalement justifiés est explicitement reconnue. C'est un droit pour le patient de disposer des informations sur sa prise en charge.
    D'autre part, la décision des caisses s'opère dans une plus grande transparence. Jusqu'ici, pour chaque affection de longue durée, le Haut Comité de la sécurité sociale établissait des recommandations qui étaient utilisées par le service médical. Mais celles-ci n'avaient pas de caractère véritablement opposable au plan juridique, ni pour le médecin conseil, ni pour le médecin traitant. Et le patient n'est, à ce jour, pas informé dans le détail de ces critères : ainsi, le médecin conseil de Corse - en hommage au précédent orateur - pouvait considérer que les recommandations sur l'« insuffisance respiratoire chronique grave » n'avaient pas le même sens que pour le médecin conseil de Lille. Désormais, ces recommandations seront opposables et pourront être invoquées par le patient en cas de différend avec les caisses.
    Enfin, le protocole de soins devient un outil qui facilite la compréhension par le médecin - ce n'est pas nécessairement celui qui l'a élaboré - du plan de soins du patient : ce dernier remettra au médecin, lors de chaque consultation, son protocole, de façon que la stratégie thérapeutique et la gestion de sa pathologie soient correctement signalées et respectées.
    L'objet de l'article 31, que vous voulez rectifier par voie d'amendement, monsieur le ministre, est avant tout de donner une base législative plus claire à ce protocole de soins. Ce souci paraît légitime et responsable concernant un dispositif qui concerne plus de 5,7 millions de personnes et représente plus de 60 milliards d'euros de dépenses.
    Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, je soutiendrai et voterai ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La discussion générale est close.

Motion de renvoi en commission

    Mme la présidente. J'ai reçu de M. Alain Bocquet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 7, du règlement.
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour une intervention qui ne pourra excéder une heure trente.
    Mme Muguette Jacquaint. Messieurs les ministres, mes chers collègues, « Un plan d'économies de bric et de broc pour la sécu », « La sécu tout au fond du trou », « Panique sur les finances de la sécurité sociale », « Remèdes escamotés », voici un petit florilège des compliments adressés à votre projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004. Je dois reconnaître d'emblée que nos travaux en commission n'ont pas permis d'atténuer ces jugements ni, par voie de conséquence, de lever l'inquiétude sur l'avenir de notre protection sociale. Ces qualificatifs recensés dans la presse illustrent bien le contenu de ce projet, tout à la fois indigent et réformant.
    En fait, votre projet de loi de financement, monsieur le ministre, a un double visage. En effet, à l'image du Gouvernement, il communique sur des points de détail pour mieux masquer des réformes structurantes pour l'avenir tout en laissant volontairement filer le déficit, pour ensuite faire accepter à nos concitoyens une privatisation rampante de notre protection sociale. En laissant s'aggraver le déficit, vous créez en réalité un trou idéologique pour mieux imposer aux seuls assurés sociaux les sacrifices exigés.
    Si nous savons que des réformes sont nécessaires pour permettre à la sécurité sociale de continuer d'assurer sa mission, dans l'esprit de sa création, où chacun participe selon ses moyens pour que chacun utilise selon ses besoins, et donc qu'il faut se donner le temps de la concertation, nous considérons que des mesures devraient être prises dès cette année pour dégager des recettes nouvelles, et ainsi engager une réforme sur des bases financières plus saines.
    Car nous connaissons tous la situation financière de la sécurité sociale. L'année 2002 a été marquée par le retour des déficits, après trois années d'excédent. L'absence de croissance économique, due pour beaucoup aux choix budgétaires et sociaux de votre gouvernement, a provoqué un net ralentissement de la progression des recettes de la sécurité sociale : plus 2,8 % en 2002 contre 6,3 % en 2001. Dans le même temps, les dépenses d'assurance maladie ont encore augmenté, mais quoi de plus normal compte tenu de l'évolution de notre société ? Ainsi, les dépenses entrant dans le champ de l'ONDAM ont progressé de 7,2 % en 2002, après 1,5 % en 1997, 4 % en 1998, 2,6 % en 1999 et 5,6 % en 2000 et 2001.
    Alors qu'en 2002, la branche famille et la branche vieillesse ont conservé une situation excédentaire, le déficit de la branche maladie s'est fortement creusé, atteignant 6,1 milliards d'euros. Les tendances actuelles pourraient le porter autour de 11 milliards d'euros en 2003 selon la Cour des comptes. Au total, les déficits cumulés de la branche maladie depuis 1997 pourraient approcher les 29 milliards d'euros.
    Devant l'ampleur du déficit, on ne peut pas se permettre de proposer de simples mesures correctrices, comme vous le faites avec ce PLFSS, monsieur le ministre. La vraie question est de savoir s'il y a un excès de dépenses, ou une pénurie de recettes. Il faudrait bien répondre à cette question une bonne fois pour toutes.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est vrai !
    Mme Muguette Jacquaint. Nous ne tomberons pas dans le piège que vous nous tendez de la promotion du déficit de la sécurité sociale. Cette stratégie délibérée consiste à dire aux Français qu'une réforme structurelle, fondée sur des droits moindres, est nécessaire et même inévitable. En réalité, vous instrumentalisez le déficit, et pour mieux masquer cette manoeuvre, vous vous contentez de mesurettes pour colmater les fuites. Celles-ci sont pour l'essentiel supportées par les assurés, ce qui est inacceptable. Il n'y a pas que M. le président de la République qui puisse prétendre que, dans ce pays, des choses sont inacceptables. D'autant que derrière cette attitude coupable, un véritable plan structurel autour de la protection sociale, calqué sur le rapport Chadelat, se prépare pour 2004. Vous avancez masqué, mais vous avancez.
    L'accroissement des dépenses relève plus d'une crise du financement du système de santé et de protection sociale que d'une irresponsabilité des assurés sociaux. Ne leur faites pas endosser une faute qui est, en fait, la conséquence d'un dogme économique selon lequel le coût du travail est trop élevé dans notre pays, et les charges trop lourdes, à tel point qu'il faudrait continuellement les diminuer.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est pourtant vrai !
    Mme Muguette Jacquaint. C'est principalement la crise économique qui a entraîné celle du financement de la protection sociale, et notamment de la branche maladie. On entend souvent dire que les Français ne payent pas, mais c'est faux, ils payent des cotisations. En fait, le financement assis sur les cotisations en fonction des salaires a subi de plein fouet la montée du chômage, ainsi que les exonérations de charges dites sur les bas salaires, qui étaient censées constituer un remède au chômage. Cela explique largement l'évolution du déficit de la sécurité sociale depuis 1980.
    En effet, au total, le taux de cotisations des employeurs au niveau du SMIC est passé, en dix ans, de 30,2 % à 4,2 %. La part du financement des cotisations en faveur de la protection sociale ne cesse de diminuer. Mais les effets positifs de ces allégements restent à démontrer. En dehors du fait qu'ils plombent les comptes sociaux et qu'ils tirent les salaires vers le bas, je ne vois pas où est l'intérêt de telles exonérations patronales à moins qu'il ne s'agisse pour le patronat de bénéficier d'effets d'aubaine servant ses propres intérêts et ceux de la haute finance, ne vous en déplaise.
    Ainsi, si le déficit de la branche maladie ne s'élevait en 1992 qu'à 6,27 milliards, il explose à partir de 1993 avec 27,3 milliards, dans un contexte de récession et de forte augmentation du taux de chômage - 12,6 %. Le déficit atteint 31,5 milliards en 1994, 39,7 milliards en 1995 et encore 35,9 milliards en 1996.
    M. Claude Gaillard, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la famille. Vous oubliez l'héritage que vous avez laissé !
    Mme Muguette Jacquaint. La situation se redresse ensuite, mais au prix de nombreuses restrictions de dépenses et de sacrifices, toujours pour épargner le patronat et la finance.
    Rappelez-vous, on disait qu'il y avait trop de médecins, trop d'infirmières et qu'il fallait fermer des lits, ce à quoi on est parvenu. Ne formant plus assez d'infirmières et plus assez de médecins, il n'y avait bien sûr plus assez de personnel, d'où la suppression de lits.
    D'une part, le déficit du système de santé est lié en priorité à une insuffisance de recettes plutôt qu'au seul problème des dépenses. D'autre part, le dépassement systématique et croissant de l'ONDAM depuis 1998 a mis en évidence une défaillance des instruments et procédures de régulation ainsi que des actions structurelles sur les comportements des professionnels, des patients, et sur l'organisation des soins.
    J'entends le ministre délégué à la famille siffler...
    M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille. Mais c'est d'admiration, madame la députée.
    Mme Muguette Jacquaint. Je trouve que vous me manquez vraiment de respect, monsieur le ministre de la famille, en vous comportant ainsi, alors que je suis en train de donner des chiffres que personne ne peut contester, sur une situation aussi grave ! Ne vous inquiétez pas, les gens sauront apprécier ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Yves Bur. Pendant cinq ans, vous avez soutenu un gouvernement qui n'a rien fait !
    Mme la présidente. Je vous en prie, tout le monde a intérêt à rester calme, ministre compris.
    Mme Muguette Jacquaint. Le déficit est aussi l'échec des réformes fondées sur la maîtrise comptable des dépenses. Souvenons-nous du Livre blanc sur le système de santé et d'assurance maladie présenté en 1994 par Raymond Soubie, qui a constitué la trame de tous les plans de réforme des systèmes de santé des années 1990.
    Ce rapport a contribué à répandre l'idée que l'assurance maladie devait être certes maintenue, mais à la condition d'être réduite dans l'optique d'une réduction des prélèvements obligatoires, en particulier des prélèvements sociaux pesant sur les entreprises. Le plan Juppé a repris ce raisonnement en procédant à l'accroissement massif des prélèvements sur les salaires et les revenus de transferts concernant les retraités et les chômeurs. Il a organisé la réduction drastique des prestations à partir d'une nouvelle organisation du système de santé et institutionnalisé une nouvelle montée de la fiscalisation reportée sur les ménages avec la CSG et la CRDS, afin de réduire les cotisations patronales censées peser sur l'emploi.
    Les plans de réforme du système de santé depuis 1994 ont revêtu deux formes essentielles : des mesures d'économies au sens strict, et des réformes structurelles. Ces dernières ont institutionnalisé la maîtrise comptable des dépenses de santé, tout en affichant un objectif de maîtrise médicalisée des dépenses. De manière générale, les mesures d'économies ont tenté de limiter simultanément la demande et l'offre de soins en sacrifiant à la logique dominante selon laquelle celles-ci seraient trop élevées en raison de la socialisation de la dépense de santé.
    Toutefois, ces plans, en dépit de leur radicalité, ne réussissent pas à dégager une véritable régulation efficace du système de santé. Ils organisent un rationnement aveugle qui réduit à court terme les dépenses et produit, finalement, leur reprise à moyen terme. En effet, le taux de croissance des dépenses de santé s'est réduit à la suite des mesures, disons-le, du plan Veil en 1993 et en 1994, puis de celles du plan Juppé de 1995 à 1996. Mais il est nettement reparti à la hausse dès 1998 - plus 3 % - et 1999 - plus 3,2 % - pour atteindre 7 % aujourd'hui, ce qui prouvait l'impuissance des seules mesures de maîtrise comptable face aux besoins réels de santé dans notre pays.
    Ainsi, les maux d'hier restent ceux d'aujourd'hui.
    Depuis 1996, en application des ordonnances Juppé, un objectif national de dépenses d'assurance maladie, l'ONDAM, est fixé dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale. Cet objectif a été régulièrement dépassé et, en 2002, les dépenses d'assurance maladie ont augmenté de 7,2 % - au lieu des 3,5 % pris en compte dans l'ONDAM. Cela ne fait que démontrer l'impossibilité de décréter un taux directeur des dépenses de santé. Ces rationnements ont asphyxié les hôpitaux publics, les conduisant au bord de la rupture. Le numerus clausus, aussi bien dans le secteur hospitalier qu'en médecine de ville, a engendré une insuffisance criante du nombre de médecins et de personnels dans de nombreuses disciplines. On manque de généralistes, de gynécologues-obstétriciens et d'urgentistes. A l'hôpital, de nombreuses spécialités sont sinistrées.
    La façon dont les 35 heures ont été appliquées à l'hôpital a révélé l'insuffisance criante d'emplois. Partout s'impose la nécessité de créer des emplois en quantité, mais aussi en qualité. Il faut former les futurs médecins et les personnels de santé. Il est donc urgent de sortir de l'insuffisance criante de moyens de financement et de faire sauter cette enveloppe globale limitée. C'est incontournable !
    Cette politique s'est traduite par de nombreux dysfonctionnements et par un profond malaise des médecins et des personnels de santé, tant à l'hôpital public que pour les soins de ville.
    En définitive, les particularités du système de santé français ont certes contribué à sa vitalité, mais celui-ci traverse aujourd'hui une crise profonde, en relation avec celle du système économique et social et avec les politiques de rationnement comptable. Ces défauts conjugués ont abouti à l'absence de régulation efficace et à des carences dans l'évaluation. Face au profond malaise des médecins et des personnels de santé, tant à l'hôpital public que dans le secteur des soins de ville, face aux nombreux besoins qui émergent dans la crise actuelle, des réformes de progrès et d'efficacité sont incontournables.
    Cependant, les plans du MEDEF - qui sont aussi ceux qui guident la politique gouvernementale -, s'appuyant sur des problèmes réels, tendent à imposer des réformes régressives du système de santé français d'une gravité sans précédent.
    Dans ce contexte, votre projet de loi de financement est coupable : non seulement il ne prend pas la mesure du défi qui se pose dès aujourd'hui mais, quand il prétend le faire, c'est sur les assurés sociaux que tout le poids est reporté, pour mieux les acculer.
    En ce qui concerne les recettes, alors qu'il faut dès cette année apporter des réponses pour éviter que le déficit ne se creuse davantage, vous vous contentez de colmatages. A cet effet, vous faites les fonds de poche - mais pas de n'importe quelles poches : de celles des assurés sociaux -, sans apporter de garantie réelle quant à l'amélioration des comptes sociaux.
    Ainsi, vous relevez le forfait hospitalier payé par le patient. Cette hausse est un transfert de charges pur et simple, qui ne profitera même pas directement à l'assurance maladie, mais qui soulagera surtout les hôpitaux, chaque année toujours plus serrés dans leurs budgets, faute de moyens. En revanche, l'assuré y sera davantage de son porte-monnaie, à la fois en subissant cette augmentation et en finançant sa couverture complémentaire, s'il en a une.
    Pour tenter de sauver la face, vous appliquez ou majorez quelques taxes et contributions à la charge de l'industrie pharmaceutique afin de récupérer quelques centaines de millions d'euros. Le prix du tabac va également grimper mais, là encore, l'efficacité de la mesure laisse à désirer. En effet, en 2003, la chute des ventes consécutive à la hausse des taxes sur le tabac et du développement du marché parallèle a été telle que le bénéfice pour la sécurité sociale a été cinq fois moindre que prévu, comme le remarque la Cour des comptes.
    Toujours dans une démarche d'économies de bouts de chandelle destinées, selon vous, à assurer l'équilibre l'an prochain, vous incitez les caisses d'assurance maladie à améliorer le « recours contre les tiers » ; c'est-à-dire à réclamer systématiquement à l'auteur d'un accident ou à son assureur le remboursement des frais médicaux engagés par la victime. Le gain de la mesure s'élève à 100 millions d'euros.
    A côté de ces recettes, vous engagez encore une vague d'économies pour l'assurance maladie, dont les victimes seront encore et toujours les assurés sociaux : restriction dans les affections de longue durée, chasse aux arrêts de travail, poursuite du déremboursement des médicaments - je connais certains pharmaciens et assurés sociaux qui expriment déjà leur mécontentement -, poursuite de la définition d'un panier de soins, restriction du champ des soins remboursables. A cela s'ajoute, une réforme qui ne porte pas son nom : celle du financement des établissements de santé avec la tarification à l'activité. Elle est expérimentée jusqu'à la fin de l'année, mais vous n'attendez même pas de nous en présenter un bilan pour en faire la règle dès 2004.
    Pourtant, il s'agit d'une réforme d'ampleur et lourde de conséquences. D'un point de vue conceptuel, il s'agit de faire passer les établissements de santé de la sphère du sanitaire à la sphère de l'économie. Si les établissements sont aujourd'hui des entités administratives assurant un service sanitaire, la tarification à l'activité a l'ambition de les faire devenir des entités économiques gestionnaires. En termes appropriés, il s'agirait de « faire passer les établissements de santé de l'état de centre de coût à celui de centre de profits ». Cela signifie, sur le plan fonctionnel, que les établissements de santé ne seront plus abondés financièrement en fonction des objectifs de dépenses pour satisfaire la population, mais qu'ils seront dotés d'un financement calculé en fonction de leurs recettes : soyez rentables et vous vivrez ! Or ces recettes seront elles-mêmes le résultat d'une évaluation moyenne nationale des tarifs des prestations de soins exécutées par tous les établissements de santé, indépendamment de leur spécificité et de leur environnement, évaluation calculée à partir de la technique des groupes de malades homogènes et des pratiques homogènes de soins.
    Plus concrètement, les établissements de santé seront confrontés à une réduction, et non plus à une rationalisation de leurs ressources de fonctionnement.
    Dans un premier temps, cette réduction des budgets va provoquer une catastrophe sociale. L'expérience allemande a fait diminuer parfois jusqu'à 70 % le budget des hôpitaux.
    Comment fonctionner dans ces conditions ? La seule variable immédiate étant le personnel, c'est à coups de suppressions d'emplois que l'équilibre budgétaire peut se restaurer. Dans un second temps, les établissements seront confrontés à un dilemme : ou bien ils accepteront l'endettement et continueront de dispenser uniformément, comme aujourd'hui, les soins utiles à la population, ou bien ils se spécialiseront dans les secteurs de soins où ils assureront un maximum de recettes pour pouvoir au moins équilibrer leurs comptes.
    Quant aux établissement désireux de dégager des profits, il n'auront qu'à se spécialiser dans les secteurs extrêmement rentables.
    On voit bien la logique à l'oeuvre et ses conséquences pour les malades. Cette volonté de transformer en centres de profits les établissements de santé conduira ces derniers à rechercher un minimum de retours sur investissements. Or les conséquences de ces pratiques sont connues : la sélection des malades selon les pathologies, entre autres. Les pathologies financièrement lourdes seront délestées du développement de l'établissement. Et avec les pathologies, se sont les malades qui seront eux aussi exclus des soins. L'expérience étrangère, notamment celle de la Grande-Bretagne, en est une bonne illustration.
    Par ailleurs, cette nouvelle technique de gestion risque aussi de peser sur le réseau sanitaire d'établissements. Si l'on peut attendre au mieux une spécialisation des établissements selon les spécialités dans les régions où la densité de population permet d'attendre une rentabilisation des investissements, il y aura peu de chance, lorsque cette densité ne sera pas au rendez-vous, pour que les établissements bien fournis restent en activité. Dès lors, c'est aussi au détriment des régions les plus pauvres que se mettra en place la tarification à l'activité.
    Enfin, il y a fort à parier que cette spécialisation se fera aussi sur la qualité des prestations médicales. Le raisonnement le plus évident consiste à imaginer, comme cela se fait dans d'autres secteurs d'activité, que les établissements se feront une guerre des salaires pour attirer les meilleures compétences et les meilleurs matériels.
    Le fait que ces établissements apparaissent comme des pôles de compétences n'aura pas seulement pour conséquence de créer des files d'attente à leurs portes, mais aussi de vider les autres établissements de leur demande propre. On risque, là encore, de déséquilibrer le jeu entre l'offre et la demande de soins dans certaines zones géographiques, et cela toujours au détriment des malades.
    Quant au reste, le projet de loi est pour l'essentiel creux. Il ne prévoit rien pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles, pour laquelle vous vous contentez de reconduire les dotations aux différents fonds d'indemnisation. Quel est, par exemple, l'état de votre réflexion sur la notion de réparation intégrale et sur l'interprétation du rapport Yahiel ? Quelles actions comptez-vous mener pour lutter contre ces fléaux ? En effet, la situation n'est en rien réglée : le risque d'accident par heure travaillée est toujours bien présent dans l'entreprise et la durée moyenne des arrêts de travail pour incapacité temporaire s'est accrue, tandis que la fréquence des accidents de trajet et le nombre de maladies professionnelles ont augmenté.
    Les chiffres font froid dans le dos : selon la FNATH, la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés, un ouvrier de trente-cinq ans sur quatre sera mort à soixante-cinq ans, alors qu'un cadre sur dix connaîtra le même sort. J'ajoute que 25 % des mises en invalidité sont dus à des maladies psychiatriques liées au travail, ainsi qu'un tiers des suicides.
    Pour ne citer que les chiffres de la Caisse nationale d'assurance maladie, le nombre des maladies professionnelles est passé de 34 000 en 2001 à 35 919 en 2002. Mais la réalité est bien plus terrible puisque l'on sait qu'il y a une sous-déclaration des accidents du travail, sans parler des « mises au placard » qui en découlent souvent ou, hélas, des licenciements déguisés destinés à se débarrasser d'un salarié devenu « inapte » au travail.
    La santé au travail n'est pas toujours reconnue à sa juste valeur dans les politiques de santé publique. J'en veux pour preuve, monsieur le ministre, votre texte relatif à la santé publique, qui met volontairement de côté l'entreprise, et pour lequel vous avez refusé toutes nos propositions visant à mieux garantir, par la prévention, la santé au travail - notamment en prévoyant, dans chaque entreprise, qui ne dispose pas d'un CHSCT, l'élection d'un délégué santé. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale fait également le choix de ne pas se préoccuper de ces questions.
    Sur la branche vieillesse, c'est le silence. Rien ou presque dans le PLFSS, alors que les inquiétudes montent à propos des projets de décrets d'application de la réforme, en particulier de celui qui concerne le dispositif de cessation anticipée d'activité pour les salariés ayant commencé à travailler très jeunes.
    Pour nous, la réforme des retraites reste à faire, tant les choix opérés diffèrent de ceux que nous défendons, que la France attend et que vous avez rejetés, tant le contenu de votre réforme, même s'il ne dit pas son nom, devient apparent pour nos concitoyens.
    Sur la branche famille, nous avons déjà dit beaucoup de choses et nous y reviendrons au cours du débat, car la prestation d'accueil du jeune enfant est loin d'être la réforme attendue, digne d'une politique de la famille ambitieuse.
    Mais revenons à l'assurance maladie. Pensez-vous sérieusement que les ajustements prévus permettront de stabiliser le déficit ? D'ailleurs est-il normal de se fixer seulement la stabilisation pour objectif ? En réalité, tout nous laisse à penser que cette stratégie ne sert que la cause idéologique de la privatisation de la sécurité sociale.
    Le déficit de l'assurance maladie fournit, en effet, un alibi majeur à votre stratégie de privatisation partielle du système de santé. Les dysfonctionnements nombreux qui sont la conséquence des restrictions budgétaires, notamment le malaise des personnels hospitaliers, viennent également nourrir le réquisitoire de ceux qui ont entrepris de « désolidariser » le système de santé. Ainsi, dans un document diffusé dès novembre 2001, Pour une nouvelle architecture de la sécurité sociale, le MEDEF affirme, bien avant que le déficit de 2002 ne soit connu ni même envisagé, que le système de santé serait à bout de souffle et que ses dépenses seraient « en dérive permanente ».
    Ce document du MEDEF va marquer le retour en force des postulats libéraux concernant l'organisation des systèmes de santé. Ainsi, le nôtre serait invariablement inflationniste autant qu'inefficient. La croissance des dépenses de santé, devenue « incontrôlable », exigerait, afin de limiter les dépenses publiques, qu'on laisse croître la part des dépenses à la charge des ménages, ceux-ci ayant alors pour seule ressource de se couvrir par l'assurance privée. N'est-ce pas ce qu'a voulu exprimer le Premier ministre lors de l'installation du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, le 13 octobre dernier ?
    Afin de limiter l'augmentation des dépenses, l'argumentation ultralibérale se fonde sur la thèse selon laquelle la multiplicité d'« opérateurs de soins » mis en concurrence permettrait, en laissant jouer les règles du marché, d'obtenir un meilleur rapport coût-efficacité des soins. Dans cette optique, il s'agirait de pousser la concurrence à deux niveaux : entre les assureurs eux-mêmes, puis entre les offreurs de soins dans le cadre des conventions qu'ils signeraient avec des assureurs.
    Dans la réaction en chaîne de la privatisation qui vise à faire éclater le système de santé solidaire, le « panier de soins » fait office de détonateur. L'idée du panier de soins a en effet retrouvé une vigueur singulière dans les propositions du MEDEF, avant d'alimenter les projets de réforme du Gouvernement.
    Comme le principe du panier de soins est fondé sur l'articulation entre soins couverts par une couverture de base et soins assurables uniquement par le privé, vous avez, dès octobre 2002, nommé Jean-François Chadelat à la tête d'un groupe de travail chargé de réfléchir sur les conditions d'un nouveau « partage des responsabilités » entre assurance maladie de base et assurances complémentaires. C'est tout le sens que vous voulez donner à la réforme, quand le Premier ministre s'interroge sur le champ de prise en charge d'une fracture qu'on se fait à ski ou en tombant dans la rue. Le panier de soins, instrument privilégié de la privatisation !
    Instaurer un panier de soins revient à spécifier les soins pris en charge par une assurance maladie de base remodelée, selon une liste, par essence limitative, établie et modifiée périodiquement par le Parlement. Mais, du coup, la couverture des soins « hors panier » nécessiterait la souscription, auprès d'une mutuelle ou d'une compagnie d'assurance privée, d'une assurance complémentaire santé fondée sur un principe différent de nos complémentaires actuelles. En effet, ce n'est plus pour la prise en charge d'un ticket modérateur qu'il s'agirait de se couvrir, mais pour pouvoir bénéficier, dès le premier euro, de la prise en charge des soins sortis du panier de base.
    En entraînant le développement spectaculaire des complémentaires santé, cette logique aboutirait à l'instauration d'une sorte de couverture maladie universelle généralisée, plus ou moins minimalisée selon le contenu du panier de soins. Bien entendu, ce projet ne peut être annoncé sans détours, si bien que les argumentations en faveur du panier de soins sont paradoxales. Ainsi, il s'agira de faire appel à la « responsabilisation » de l'usager, afin de le convaincre que la limitation des dépenses de santé remboursables serait une nécessité. Cela résonne comme un écho aux propos de M. le Premier ministre.
    La notion de panier de soins est parfaitement ambiguë. Pour s'en convaincre, il suffit de se reporter aux préconisations de l'Organisation mondiale de la santé, pour laquelle son instauration constituerait dans les pays en développement une avancée importante en imposant une couverture minimale de soins. Mais pour les pays européens qui avaient mis en place des systèmes de santé performants, le panier de soins représenterait une régression très sensible. Il n'est pas anodin de constater que, dans le même temps, le fameux Accord général sur le commerce des services de l'Organisation mondiale du commerce encourage la promotion d'assurances maladie privées dans tous les pays industrialisés. C'est bien une convergence éminemment redoutable qui se laisse entrevoir : elle combinerait une couverture santé socialisée minimaliste, avec un panier réduit aux soins de base et des assurances privées pour les soins exclus de ce panier. On s'oriente ainsi, comme nous le disons depuis des années, vers une santé à deux vitesses.
    En fait, la méthode du panier de soins peut revêtir des formes diverses dont le dénominateur commun est la volonté de limiter les dépenses de santé remboursables. Séparer les soins pris en charge par une couverture de base et les soins couverts par une complémentaire santé constitue la plus simple de ces méthodes. C'est ainsi que le MEDEF propose, en s'appuyant sur le modèle néerlandais, d'établir une dichotomie entre « gros » risques et « petits » risques de santé, projet que l'on a retrouvé d'ailleurs dans les propos de l'ex-ministre des affaires sociales, M. Jacques Barrot, aujourd'hui président de l'UMP.
    M. François Goulard, rapporteur pour avis de la commission des finances. Homme remarquable !
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Et excellent président !
    Mme Muguette Jacquaint. Votre méthode de panier aboutirait à définir, par pathologie, le montant des soins pris en charge par la couverture de base tandis que les soins dépassant cette limite seraient sortis du panier. Les références médicales opposables fourniraient une base prétendument objective à cette distinction puisqu'elles visent à déterminer un coût de traitement par pathologie considéré socialement légitime. Sans que l'on ait parlé précisément à l'époque de panier de soins, nombre de médecins ont tenté de résister à la logique des RMO, nées du plan Juppé, car ils avaient clairement perçu le danger potentiel que celles-ci représentaient. Mais vous n'en tirez, monsieur le ministre, aucun enseignement, puisque la réforme du financement des hôpitaux sera calquée sur cette logique.
    Une architecture en deux paniers successifs est tout aussi envisageable ; elle imposerait une assurance maladie à trois étages. C'est à cette formule que tend le récent rapport Chadelat : une couverture de base aux contours définis à la fois par des tickets modérateurs et un certain nombre de soins pris en charge à 100 %, mais dont la liste serait par nature limitée ; une couverture complémentaire de base aux contours précisément définis par les pouvoirs publics où viendrait se greffer l'aide à l'accès à une complémentaire proposée par le Gouvernement ; des contrats privés d'assurance maladie personnalisés susceptibles de couvrir les dépenses restant à la charge des ménages. Bien évidemment, comme je l'ai dit, cette diversité des couvertures supposerait de facto un système de santé multivitesses.
    M. Yves Bur. Mais non !
    Mme Muguette Jacquaint. La notion de panier de soins se conjugue à celle de responsabilisation des usagers pour aller jusqu'à porter des coups très graves à l'assurance maladie.
    M. Yves Bur. Vous exagérez !
    Mme Muguette Jacquaint. En clair, le mot « responsabilisation », qui revient souvent dans la bouche du Président de la République, signifie qu'il faut faire monter la part des dépenses couvertes par les complémentaires de santé.
    M. Yves Bur. Prôneriez-vous l'irresponsabilité ?
    Mme Muguette Jacquaint. Certains, dans les rangs de la majorité, imaginent même une participation directe des assureurs privés dans la gestion de la couverture de base...
    M. Yves Bur. C'est ce que font depuis longtemps plusieurs mutuelles.
    Mme Muguette Jacquaint. ... reprenant le vieux rêve exprimé par Claude Bébéar, lorsqu'il était président d'AXA, de gérer l'assurance maladie dès le premier franc : c'est ce que l'on appelle la « gouvernance ».
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Pourquoi pas ? La délégation de service public, ça existe !
    Mme Muguette Jacquaint. N'affirmait-il pas d'emblée que l'augmentation des dépenses « rend nécessaire une distinction claire entre les charges assumées par la collectivité et celles qui relèvent de la responsabilité individuelle », distinction que permettraient l'institution d'un panier de soins - nous y revoilà - limités et remboursables à 100 %, et, en conséquence, le rejet vers les complémentaires de santé de tous les autres soins ? M. le Premier ministre, toujours le 13 octobre, a repris la problématique dans des termes identiques. Faut-il y voir un signe pour l'avenir ?
    La gestion de la couverture de base universelle devrait, selon l'organisme patronal, revenir indifféremment aux caisses d'assurance maladie, aux mutuelles, aux institutions de prévoyance ou aux assurances privées. Les salariés seraient inscrits d'office au contrat-groupe de leur entreprise, qui « aurait à choisir avec ses salariés, sur appel d'offres, l'opérateur de soins le plus efficace ». Les non-salariés, quant à eux, auraient le choix de l'organisme d'affiliation, comme dans le cadre de la CMU actuelle. Il s'agirait donc de faire tomber le monopole d'affiliation des caisses primaires d'assurance maladie et de remettre en cause l'existence même de la CNAM.
    M. Yves Bur. Vous avez mal compris, madame !
    Mme Muguette Jacquaint. Les opérateurs de soins - caisses primaires d'assurance maladie, mutuelles, caisses de prévoyance et assureurs privés - recevraient un forfait par personne inscrite.
    M. Yves Bur. Et les mutuelles ?
    Mme Muguette Jacquaint. Je les ai citées !
    En insistant sur la couverture de soins à 100 %, vous tentez de faire croire que le panier de soins favoriserait l'accès aux soins. Mais comment prétendre prendre en charge intégralement des soins tout en organisant la baisse des dépenses de santé, sans que la définition des soins inclus dans le panier soit limitative ? Le mirage de la couverture intégrale masque la réduction drastique des dépenses de soins socialisées, telle que la souhaite l'organisme patronal, que vous relayez de façon certes plus feutrée, mais toujours avec le même objectif.
    Souvenons-nous d'ailleurs de vos premières préoccupations, monsieur le ministre, lors de votre entrée en fonction. Vous teniez à peu près ce langage : « Il faut cesser de dire qu'il faut maîtriser, contenir. (...) La croissance des dépenses de santé dans le budget des ménages est inéluctable. (...) Les ressources publiques ne sont pas infinies. [La] nouvelle politique à définir est celle qui assure que les dépenses couvertes par l'assurance maladie sont celles qui sont les plus légitimes médicalement (...) et une politique qui responsabilise toutes les parties prenantes. »
    M. Jean-Pierre Door. C'est vrai !
    Mme Muguette Jacquaint. Certains médecins ont ensuite renchéri avec une vigueur exceptionnelle : nous serions sur « une lancée folle de consommation effrénée, irréfléchie, toujours plus chère », « aux lendemains (...) cruels », si bien qu'il faudrait « alerter (...) les citoyens que le recours au système de soins est une chance fragile qui ne peut être longtemps gâchée par un laxisme irresponsable ». Le premier coupable en cette affaire serait « le progrès technique [de la médecine] qui génère une demande croissante ». Les auteurs en viennent alors à fustiger le principe même de solidarité, jugé déresponsabilisant et inflationniste : « L'offre est limitée et (...) fondée sur un principe de bienfaisance. » Selon cette conception, le principe de solidarité et d'accès aux soins - à tous les soins - pour l'ensemble de la population relèverait de « l'idéologie », alors que se soumettre aux lois du marché échapperait par nature à toute considération idéologique. C'est quand même curieux !
    Avec ces gens-là, monsieur le ministre - peut-être sont-ils vos amis ou ne le sont-ils pas - vous véhiculez l'idée selon laquelle chacun croit qu'il peut s'exposer sciemment à un risque parce qu'il sera protégé et, par conséquent, comme pour la réforme des retraites, vous cherchez à dresser les unes contre les autres les catégories d'usagers et les générations, en même temps que les personnels de santé.
    Dans le cadre de la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, M. Jacques Barrot ne disait-il pas, le 30 octobre 2002 à l'Assemblée, qu'il faudrait en venir « afin de cesser d'être hypocrite », à une distinction entre les « maladies graves », celles que l'assurance sociale continuerait de prendre en charge, et les « petits risques », pour lesquels le recours au privé serait nécessaire ? Mais où commencent les maladies graves ? Où finit le petit risque ? Qui décide ?
    Pris au dépourvu, mais n'en pensant pas moins, monsieur le ministre, vous avez d'abord semblé désavouer M. Barrot devant cette assemblée en indiquant qu'il n'y a pas de différence entre le gros risque et le petit risque, mais pour déclarer quelques jours plus tard, le 17 novembre 2002, au Journal du Dimanche : « Il faut sortir du tout gratuit (...) et proposer des couvertures variables selon la volonté de s'assurer pour tel ou tel risque. »
    Conscients de la difficulté de défendre l'idée selon laquelle la solidarité du système de santé ne serait pas entamée, les partisans du panier de soins, dont le Premier ministre, se sont empressés d'arguer que des dispositions adaptées seraient prises pour que chacun bénéficie d'une complémentaire santé quel que soit son revenu. Toutefois est-il sérieux de prétendre qu'une assurance complémentaire santé gratuite pour les personnes à bas revenus serait identique aux assurances complémentaires payantes ?
    En réalité, dans une logique de rentabilité financière, les complémentaires santé, y compris celles proposées par les organismes mutualistes, tendraient à différencier, plus encore qu'actuellement, leurs garanties en fonction des cotisations payées. L'instauration de paniers de soins institutionnaliserait un sytème de santé à plusieurs vitesses. C'est une évidence ; affirmer le contraire est une contre-vérité.
    On ne peut non plus passer sous silence l'enjeu que représentent ces projets de réforme pour les fédérations mutualistes. Celles-ci, désormais régies par le code de la mutualité de 2001, se voient appliquer les directives européennes qui les condamnent à une concurrence directe avec les assurances privées. Les mutuelles comme les assurances attendent donc du développement des complémentaires santé un rôle accru dans la nouvelle gouvernance de l'assurance maladie. Cette expression est d'ailleurs étrange car, quand on voit le rôle que jouent les assurances privées, on ne peut pas être certain qu'il s'agit d'une véritable gouvernance. On est même fondé à se demander qui gouverne ?
    M. Bruno Gilles, rapporteur. Le MEDEF, sans doute ?
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Parlez-nous du baron !
    Mme Muguette Jacquaint. Absolument ! Nous voyons bien, en effet, se profiler le MEDEF derrière les assurances privées.
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. M. Brard aurait parlé de Mme Bettencourt !
    Mme Muguette Jacquaint. Les mutuelles, les assurances auront la gouvernance, mais, en fin de compte, qui gouvernera la gouvernance ?
    La distinction entre mutuelles et assurances privées tend à s'atténuer, car un consensus s'est établi entre assurances mutualistes et assureurs privés pour que soit promue, au-delà d'une couverture de base minimale, la part des complémentaires santé dans l'assurance maladie. Inévitablement, les mécanismes de marché accentueraient la différenciation des couvertures, en fonction d'une segmentation de la clientèle liée au revenu.
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. C'est une experte en marketing !
    Mme Muguette Jacquaint. Ce serait donc bien, au bout du compte, un principe de sélection des risques qui organiserait alors le partage du marché entre prestataires d'assurances complémentaires santé. La gestion serait assurée par les caisses primaires d'assurance maladie pour la quasi-totalité de la CMU complémentaire, par les mutuelles et les complémentaires santé pour une partie des classes moyennes, et par les assurances privées pour les personnes à moyens et hauts revenus. Or chacun sait, notamment à travers l'exemple des Pays-Bas, qu'une augmentation de ce type s'opère invariablement au détriment des plus défavorisés et des classes moyennes.
    C'est tout cela que préparent votre projet d'aujourd'hui et votre action au quotidien. Vous laissez volontairement s'enliser la situation, vous réformez avant l'heure, en dehors de toute concertation, pour mieux imposer demain vos choix ultralibéraux au service de ceux que vous servez, c'est-à-dire le grand patronat.
    Devant les dangers qui guettent notre système de protection sociale, nous nous inscrivons dans cette année de la concertation pour, nous aussi, rencontrer les partenaires sociaux, afin de réfléchir avec eux aux fondements d'une réforme progressiste. Nous avons quelques propositions que nous souhaitons enrichir et faire partager. Il nous semble que la réforme à venir doit s'appuyer sur cinq axes : démocratie, prévention, accès de tous aux soins, mesures exceptionnelles pour l'hôpital et nouveaux financements.
    La démocratie doit être le premier pilier de la politique de santé et de protection sociale. La question est cependant de savoir qui la détermine et comment. Encore des questions qu'il faudra trancher. La définition des orientations et des actions prioritaires dans le domaine de la santé publique, des moyens et de l'organisation sanitaire, des niveaux de couverture sociale ainsi que l'évaluation des budgets nécessaires et le choix des modes de financement doivent sortir des cercles étroits de décisions. Est-ce aux parlementaires de décider seuls ?
    Chaque année, le Gouvernement nous demande de voter un objectif de dépenses - l'ONDAM - que nous savons tous délibérément sous-estimé, tout en nous interdisant pratiquement de nous intéresser aux recettes de la sécurité sociale.
    Les médecins et autres professionnels de santé, quant à eux, sont sommés de réduire ou de limiter leur activité. Ils sont peu à peu entrés dans un état d'amertume et de conflit permanent. Les établissements de soins, corsetés dans des enveloppes budgétaires délibérément sous-dimensionnées, sont contraints à des réorganisations drastiques, à des fermetures de lits ou de services, par les bras armés de cette politique comptable de la santé que sont les ARH, sorte de préfectures sanitaires, qui taillent, coupent et redessinent le tissu sanitaire régional et national, au mépris des avis et demandes des personnels et des populations concernés.
    Les conséquences de ces politiques ont été dramatiquement visibles cet été, monsieur le ministre. La canicule a bien mis en exergue le manque de moyens dans les établissements, dans les hôpitaux en particulier, où les services des urgences ont été débordés. Le drame est que nous avons eu de nombreuses victimes. Que se passerait-il si nous avions un hiver rigoureux, si se produisaient des épidémies ? Personne ne pourrait prétendre que nous n'étions pas au courant. Nous ne pourrons continuellement nous en remettre au dévouement des personnels et compter sur leur esprit de sacrifice ! C'est pourquoi nous devrions discuter des recettes pour répondre mieux encore aux besoins de la population.
    En 1998-1999, pourtant, un formidable espoir de rompre avec cette logique infernale s'était levée : six mois durant, dans le cadre des Etats généraux de la santé, quelque 150 000 personnes avaient participé à plus d'un millier de réunions à travers tout le pays, exprimé leurs critiques, leurs attentes, leurs besoins dans de nombreux domaines à l'égard du système sanitaire. Malheureusement cette première et formidable expérience de démocratie sanitaire est restée pratiquement sans lendemain. La seule retombée concrète positive a été la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades mais son application est actuellement au point mort.
    Une conclusion s'impose : l'élaboration de la politique de santé publique d'assurance maladie doit devenir l'affaire des citoyens. Il ne suffira pas de régionaliser le système de santé, comme le voudraient certains dans le but limpide d'en faire supporter partiellement le coût aux contribuables, au risque d'ailleurs d'accentuer les inégalités déjà fortes entre régions. Il faut impulser une démocratie participative associant, à tous les échelons, du local au national, les assurés sociaux, les experts, les élus, les représentants des syndicats et associations, les professionnels de santé, afin de faciliter l'expression des besoins et de préparer les meilleurs choix. Faudrait-il, pour cela, créer de nouvelles structures, ou modifier, en l'élargissant, la composition de celles qui existent, réunir périodiquement des Etats généraux ouverts à toute la population ? Je ne sais pas, mais le débat est ouvert.
    La prévention doit être le deuxième pilier de la réforme, car mieux vaut prévenir que guérir. L'adage n'a rien perdu de son actualité. Produit d'une longue histoire, la santé reste aujourd'hui largement perçue comme un état de non-maladie. En pratique, le volet curatif l'emporte sur le préventif. Certes les discours mettent plus volontiers l'accent sur la prévention, mais celle-ci reste encore le parent pauvre des politiques sanitaires. Et lorsque, dans la dernière loi de santé publique, vous lui consacrez un chapitre, il se résume essentiellement au dépistage des maladies. Cela constitue évidemment un progrès, mais il est bien maigre. Nous sommes loin du compte, d'autant que nous ne voyons toujours pas l'ombre d'un euro venir financer cette loi.
    Nous sommes également loin de ce qu'appellerait la pleine prise en compte de la définition plus juste donnée de la santé par l'Organisation mondiale de la santé : un état complet de bien-être physique, psychique et social. Dans une telle optique, l'environnement économique et social, les conditions de vie et de travail et pas seulement les comportements individuels, jouent un rôle clé comme déterminants de l'état sanitaire de la population, même si la lutte contre le tabagisme doit être soutenue.
    S'agissant du travail, par exemple, source de maladies dont un grand nombre ne sont toujours pas reconnues, et cause d'accidents, il s'agirait de donner aux salariés et aux syndicats toute latitude pour négocier les conditions de son exercice et son organisation, chaque fois que celles-ci risquent de mettre en danger la santé. À cet égard les méfaits de la précarité, du travail en intérim ou dans la sous-traitance devraient être reconnus, et ces systèmes d'abaissement du coût du travail, au prix de la santé des gens, combattus. Pour cela, encore faudrait-il que la médecine du travail soit revalorisée, son indépendance à l'égard du patronat garantie et le nombre de ses médecins accru. En effet la faiblesse de leurs effectifs - environ 6 000 équivalents temps plein - leur interdit souvent de se rendre sur les postes de travail. Il existe une pénurie similaire du côté des inspecteurs du travail, qui sont un peu plus de 400 pour 14 millions de salariés.
    Un effort semblable devrait être engagé en faveur de la médecine scolaire, compte tenu du rôle de véritables sentinelles de la santé que jouent dans ce secteur médecins et infirmières ? Aujourd'hui, on en compte, en tout et pour tout, 6 700 pour 8 000 collèges et lycées, 55 000 écoles primaires et maternelles.
    Enfin, pour que la prévention devienne un droit pour tous, ne faudrait-il pas trouver les moyens d'assurer une visite annuelle pour les chômeurs, les exclus et les retraités ? J'ajoute, monsieur le ministre, que cette visite pourrait être étendue aux femmes victimes de violences. Parfois en effet leur compagnon leur prend tous leurs papiers, ce qui leur interdit pratiquement d'avoir recours à des soins. On le voit, une véritable politique de prévention appelle un investissement humain et financier considérable.
    L'accès de tous aux soins doit être un troisième pilier.
    Pour cela il faut faire sauter les barrières qui freinent l'exercice de ce droit et dont la liste est longue : baisse des taux de remboursement des médicaments, instauration du secteur II pour la médecine libérale autorisant les dépassements d'honoraires au-delà du tarif couvert par la sécurité sociale, mise en place du forfait hospitalier, blocage à un niveau aujourd'hui ridiculement bas des prix de référence de la sécurité sociale pour les lunettes et les prothèses dentaires, alors que les prix du marché se sont envolés.
    La démonstration que je viens de faire sur le sens caché de votre projet pour la protection sociale met en évidence une barrière de plus.
    La politique dite de responsabilisation conduira tout droit à une aggravation des inégalités devant l'accès aux soins. D'ores et déjà, 14 % de la population déclarent renoncer à des soins pour des raisons financières. Ce pourcentage grimpe à 23 % dans la catégorie des plus bas revenus - moins de 750 euros - et à 30 % parmi les chômeurs. Les enquêtes qualitatives montrent également que les plus démunis ont tendance à consommer moins de soins de ville et plus fréquemment des soins hospitaliers et infirmiers, plus coûteux. En effet la difficulté d'accéder aux soins les conduit à retarder le recours au système sanitaire, qui intervient alors quand leur état de santé est plus dégradé.
    Au demeurant, la santé des plus démunis ne s'améliore pas, comme a pu le constater l'organisation humanitaire Médecins du monde. Elle a constaté que la moitié des 15 à 20 % de population pauvre ne bénéficie ni de la CMU ni d'une mutuelle : pas assez pauvre pour avoir droit à la première, pas assez fortunée pour se payer la deuxième !
    La dérive actuelle vers un système de soins à l'accès de plus en plus payant cumule les préjudices. Elle est source d'inégalités, facteur de détérioration de la santé, et elle s'avère financièrement contre-productive. Or vous voudriez mettre à profit le déficit de l'assurance maladie pour tordre définitivement le cou au principe fondateur et sacré de la sécurité sociale, gage jusqu'ici de son efficacité. La cause de la santé publique impose que l'on mette ce projet en échec, que l'on renverse la tendance en renforçant le rôle de service public de la sécurité sociale et en reprenant la marche vers la gratuité, celle-ci pouvant, dans un permier temps, s'appliquer aux soins découlant de la médecine préventive afin d'accroître son efficacité, mais aussi aux soins aux personnes dépendantes, âgées ou non, dont l'état de santé nécessite un recours intensif au système sanitaire.
    L'accès aux soins implique aussi l'accès au médicament. Aujourd'hui, l'industrie pharmaceutique choisit l'orientation de ses recherches ou, selon son bon vouloir, elle en sacrifie des domaines entiers, au mépris des besoins. Elle commercialise sous le nom d'innovations des principes actifs à peine remaniés, échappant, par cette entourloupe, à la tombée dans le domaine public de ses molécules les plus rentables. Elle détermine seule, depuis le mois de juillet, le prix de vente de ses nouveautés.
    L'industrie pharmaceutique a, de tout temps, brillé par son sens des affaires. En France, la complexité de la réglementation qui entoure la mise sur le marché des médicaments et le contrôle de leur efficacité facilite sa liberté de mouvement. Les firmes ont, en tout cas, repéré les failles du système et elles les exploitent à l'envi.
    Le dispositif d'attribution de l'AMM et le contrôle du SMR est insatisfaisant et conduit à cette aberration : les firmes pharmaceutiques peuvent faire entrer dans les officines des produits dénommés médicaments sur la base de tests qu'elles réalisent elles-mêmes, produits que la commission de transparence classe ensuite parfois dans des catégories de médicaments les plus médiocres pour justifier un remboursement minimal. Dans tous les cas, le malade paie pour une régulation mal organisée, ce qui fait naître le doute sur la qualité des médicaments proposés à la prescription. Depuis l'été, cela se double d'une liberté de prix pour les innovations qui ravit les pofessionnels du médicament.
    Ajoutée à la liberté, depuis longtemps acquise, des prix des nouveaux médicaments à l'hôpital, consécutive à l'absence de concurrence sur des molécules très pointues, cette disposition alourdit la facture de la branche maladie de la sécurité sociale, comme le pointe la Cour des comptes, qui consacre un chapitre important à cette question hautement sensible.
    La santé publique comme le souci des finances de la Sécu exigent une véritable maîtrise publique de l'industrie pharmaceutique. Au niveau de la recherche, il ne devrait plus être possible qu'une firme sacrifie un domaine d'investigation d'intérêt général pour de stricts motifs de rentabilité, comme vient de le faire Aventis avec son grand centre de Romainville et sa recherche sur les anti-infectieux. Sur ce sujet aussi, nous vous ferons des propositions à application immédiate car nous ne pouvons plus attendre.
    Le développement du service public hospitalier doit être une priorité.
    Monsieur le ministre, vous répétez à l'envi qu'il faut favoriser, pous des raisons d'économie, les méthodes du privé, tant du point de vue de la gestion du personnel que de celui du traitement des patients. Votre plan Hôpital 2007 est fondamentalement calqué sur ce modèle : le financement de l'hôpital public en fonction de ses activités et de leur prix, une collaboration facilitée avec les médecins spécialistes libéraux, un rapprochement entre le public et le privé, une plus grande indépendance des équipes médicales et des directions d'hôpitaux figurent au menu de la réforme, étalée sur cinq ans. Vous défendant de remettre en cause l'égal accès de tous aux soins, vous ne donnez pourtant que peu de garantie sur ce plan. La mission publique liée à l'hôpital public semble loin de vos préoccupations car vous restez obnubilé par les déficits de l'assurance maladie, occasion en or de promouvoir un recul de la solidarité nationale.
    Je le répète, je ne veux pas utiliser la canicule parce que cela a été un drame, mais ses conséquences ont, malheureusement, révélé bien des insuffisances. Elles ont aussi montré la nécessité de former immédiatement du personnel en nombre suffisant pour pallier les pénuries de professionnels de santé des prochaines années. Vous avez d'ailleurs - et nous nous en félicitons quoique vous le fassiez encore très timidement - relevé le numerus clausus. Les rapports officiels évaluent en effet à 9 250 le nombre de médecins à former d'ici à cinq ans et à 40 000 celui des infirmières.
    Nous renouvelons donc notre proposition concernant ces dernières : il faut rendre leur formation plus attractive et plus accessible en leur payant un salaire et en leur proposant de prendre en charge leur hébergement dès leur entrée en école. Cela se fait pour d'autres professions, pourquoi pas pour elles ?
    Enfin, le financement est le nerf de la guerre et la base de la solidité de ces piliers. On le voit bien aujourd'hui.
    D'ailleurs, chacun l'admet, y compris M. Raffarin, la croissance des dépenses de santé est inéluctable. Mais le chef du Gouvernement a déjà tranché : en installant, lundi, le Haut Conseil chargé de préparer un diagnostic de l'assurance maladie,...
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Très bonne décision, ce Haut Conseil !
    Mme Muguette Jacquaint. ... il a écarté la possibilité d'augmenter les prélèvements obligatoires, autrement dit d'accroître la part de la richesse nationale créée chaque année et consacrée à la santé. Du coup, ses préférences en matière de réforme vont dans le sens que le MEDEF appelle de ses voeux depuis longtemps : une bonne part des risques devrait basculer sur les assurances privées, dont le financement incombe aux individus. La couverture assurée par la sécurité sociale, seule à garantir l'égalité des droits, quels que soient la situation sociale et les revenus, s'en trouverait rétrécie d'autant.
    Une telle perspective ferait immanquablement proliférer le cancer des inégalités qui mine déjà la société. Garantir l'avenir du service public de l'assurance maladie en lui donnant les moyens d'affronter les nouveaux besoins liés, en particulier, à l'allongement de l'espérance de vie implique donc impérativement de relever le défi : peut-on, oui ou non, apporter d'importantes ressources supplémentaires, de manière pérenne, dans les caisses de la sécurité sociale ? Cette question renvoie avant tout à celles de l'emploi et de la croissance économique. C'est la remontée du chômage qui, ces deux dernières années, a creusé le trou de la sécurité sociale. De ce point de vue, la politique gouvernementale consistant à comprimer les dépenses publiques et sociales et, ainsi, à plomber la consommation, principal ressort de la croissance, n'augure évidemment rien de bon. Or il faut savoir qu'un point de produit intérieur brut en moins signifie un manque-à-gagner de deux milliards d'euros de cotisations sociales. Et 100 000 chômeurs de plus représentent 2,5 milliards d'euros de perdus pour la sécurité sociale, entre recettes en moins et prestations chômage en plus.
    M. Raffarin, comme M. Seillière, balaye d'un revers de main toute idée de prélèvement supplémentaire à la source sur la richesse créée par le travail, en arguant - sans toutefois jamais fournir de véritable démonstration - que cela jouerait contre l'emploi. Et si, au contraire, il était envisageable d'affecter une plus grande part de cette richesse à la santé tout en développant l'emploi ? Cette réforme comporterait deux volets. Le premier consisterait en une taxation des revenus financiers des entreprises qui, aujourd'hui, échappent à toute cotisation sociale. Ces revenus, pour l'essentiel produits des jeux de la Bourse, représenteraient la bagatelle de 165 milliards d'euros en 2002.
    S'ils étaient soumis à une cotisation du même taux que celle prélevée sur les salaires pour la sécurité sociale, celle-ci engrangerait d'un coup près de 16 milliards d'euros de ressources nouvelles. Cette recette serait certes aléatoire, ces profits pouvant fortement fluctuer d'une année à l'autre. Mais ce prélèvement n'en aurait pas moins une haute portée, en incitant les entreprises à se détourner de la spéculation et à s'orienter vers des investissements productifs.
    Le second volet de la réforme, le plus important, serait une refonte de la cotisation patronale. Aujourd'hui, plus une entreprise embauche et verse des salaires élevés, plus elle paie de cotisations. A l'inverse, une société qui comprime l'emploi, limite les salaires et privilégie la croissance financière contribuera moins à la protection sociale. Ainsi le système actuel pénalise-t-il les entreprises et industries de main-d'oeuvre, comme le BTP ou la métallurgie, tout en avantageant des secteurs comme celui des assurances et des banques. Notre réforme consiste à renverser cette logique. Il s'agit de pratiquer un taux de cotisation amoindri pour les entreprises qui augmentent la part des salaires dans la valeur ajoutée, mais alourdi pour celles qui diminuent cette part.
    Une telle réforme aurait le mérite d'enclencher une nouvelle logique d'efficacité fondée non pas sur la baisse des coûts salariaux, mais sur le développement des dépenses humaines, sociales et d'innovation, autrement dit sur la croissance de l'emploi, et l'élévation des salaires et de la formation. Ce serait une manière de « responsabiliser », non plus seulement les individus, mais aussi les employeurs vis-à-vis des finances de la sécurité sociale, en pesant sur le mode de gestion des entreprises. Tout en assurant des ressources durables à la protection sociale, cette réforme aurait enfin le mérite de « réhabiliter » véritablement le travail.
    Toutes ces questions n'ont pas été assez travaillées en commission. Les amendements que nous avons déposés n'ont, bien sûr, pas reçu l'aval de votre majorité. Votre texte doit être repris en fonction des insuffisances manifestes que j'ai relevées afin que, le temps de la décision ayant été repoussé à l'été 2004, celle-ci puisse être prise dans la sérénité.
    Notre commission a travaillé dans l'urgence : le projet de loi a été déposé tardivement, le rapport nous est parvenu seulement lundi et nous n'avons eu que deux petits jours de travaux en commission. C'est largement insuffisant. Compte tenu de la situation des comptes de la sécurité sociale, cela ne permet pas de travailler la question qui est prioritaire cette année : celle du financement et des recettes à dégager. Nos propositions ont été balayées, comme je l'ai dit, d'un revers de main. Vous n'en avez proposé aucune de nouvelle, vous contentant des mesurettes que j'ai rappelées. Or l'une des questions majeures est bien celle du déficit de la sécurité sociale.
    Telles sont les raisons qui nous conduisent à vous demander de renvoyer ce texte en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je ne m'attarderai pas trop sur les différents articles, comme celui relatif à la tarification à l'activité, préférant balayer l'ensemble des propos pour tenter de recadrer le débat et redresser un certain nombre de fausses vérités.
    Je tiens tout d'abord à remercier M. Morange pour son rapport. Il s'est largement appuyé - et il a eu raison - sur le travail de la Cour des comptes. Il a d'ailleurs souligné que le rapport de la Cour des comptes, qui est extrêmement critique, est en réalité un réquisitoire contre les années qui précèdent 2002.
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Absolument !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Vous voyez donc à qui s'adressent les principaux reproches du rapport !
    J'adresse également à Bruno Gilles tous mes remerciements. Il a présenté un bon résumé des mesures et des enjeux et a notamment ouvert le champ de la discussion sur la question de la maîtrise médicalisée, question qui a été reprise ensuite par plusieurs orateurs.
    Mme Guinchard-Kunstler s'étant absentée, je vais attendre son retour dans l'hémicycle pour lui répondre.
    François Goulard a été, comme à son habitude, incisif et juste.
    M. Claude Gaillard, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la famille. Remarquable !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il s'est interrogé sur la portée réelle des projets de loi de financement de la sécurité sociale. Je rappelle d'abord que c'est une avancée considérable du plan Juppé. Le Parlement est enfin intéressé à la discussion portant sur des sommes supérieures au budget de l'Etat. Mais l'interrogation de M. Goulard n'est pas sans fondement. Lorsque nous votons un objectif national de dépenses d'assurance maladie - ONDAM - lorsque nous fixons un budget en essayant d'équilibrer les recettes et les dépenses, l'exécution en revient pour la majeure partie aux caisses d'assurance maladie. Nous avons ensuite à expliquer le résultat de la gestion de ces caisses et, éventuellement, le déficit et à prendre la responsabilité des nouvelles recettes.
    Je ne critique personne, ni aucune gestion en particulier, mais c'est néanmoins un exercice assez étonnant que celui qui consiste à fixer des dépenses, à en confier l'exécution à des organismes puis à en assumer le bilan devant la représentation nationale. C'est l'exercice du Gouvernement !
    Il est des moments où l'on pense qu'il est très important d'amorcer une véritable réforme.
    M. Goulard a également souligné, avec juste raison, la confusion qui existe dans la plupart des esprits entre sécurité sociale et assurance maladie. Il faut vraiment que nous en ayons conscience. Nous avons fait procéder à de nombreuses analyses d'opinion pour savoir quel était le degré de compréhension des Françaises et des Français de leur système de santé. Pour eux, l'assurance maladie, c'est la « sécu » ! Nous savons bien pourtant - j'y reviendrai à propos de l'intervention de M. Jacquat - qu'il existe quatre branches, dont les objectifs sont extrêmement différents. Cela signifie, pour relever la remarque tout à fait pertinente de M. Goulard, que nous avons un travail de pédagogie considérable à accomplir pour expliquer qu'il ne s'agit pas de la même chose. Les choses sont déjà engagées : que ce soit sur la retraite ou la famille, c'est essentiellement l'assurance maladie qui doit nous retenir.
    M. Goulard a également souligné l'importance de répondre à la coupure ville-hôpital. C'est, à mon sens, l'une des questions fondamentales sur lesquelles devront travailler le Haut Conseil, puis les groupes de travail. Notre système de santé cherche sa cohérence : il faut veiller à la fongibilité des enveloppes, c'est-à-dire, pour reprendre l'expression bien connue, marier la ville et l'hôpital.
    Or, il est clair que l'hôpital obéit à la logique d'une fonction publique sous la responsabilité de l'Etat, et la médecine de ville à un système de partenariat géré par les caisses, et que l'un des enjeux importants de la réforme est l'articulation des deux mondes que sont l'hôpital et la ville.
    M. Dubernard, le président de la commission, a de nouveau souligné - à juste titre, car nous ne devons pas l'oublier - le tableau sociologique, en rappelant que les Français sont tout à fait conscients des gaspillages, des abus, des excès et de la consommation excessive de médicaments. En effet, 90 % des Français pensent que beaucoup trop de médicaments sont consommés en France et 90 % des Français estiment que c'est le voisin qui en consomme trop ! On voit la difficulté de faire aboutir de véritables réformes.
    Vous avez évoqué aussi, monsieur Dubernard, les deux écueils menaçant la réforme que sont l'étatisation et la privatisation, que j'évoquerai plus tard dans mes réponses. Vous avez eu raison de souligner que, quel que soit le système, le plus important reste de garantir la qualité des soins, qui est probablement le meilleur instrument de notre régulation.
    Vous avez ensuite évoqué toute une série d'économies possibles, sur lesquelles nous reviendrons peut-être dans le courant de la discussion.
    Claude Evin s'est excusé auprès de moi car il siège en ce moment même dans la commission d'enquête sur la canicule. Comme pour Mme Guinchard-Kunstler, j'attendrai son retour pour lui répondre.
    Monsieur Le Guen, vous avez dit que « l'explication reposant sur l'héritage devient ridicule ». Permettez-moi de vous dire que je ne partage pas votre point de vue, et cela pour plusieurs raisons. D'abord, parce que, dans le domaine de la santé, où la formation d'une infirmière dure de trois à quatre ans et celle d'un médecin de huit à dix ans, où la construction d'un hôpital demande plusieurs années et où, cette année encore, l'enveloppe consacrée à la réduction du temps de travail dans l'ONDAM hospitalier est assez importante, nous sommes véritablement solidaires les uns des autres. Cette solidarité ne s'exerce, d'ailleurs, pas à sens unique : vous avez assumé pour une part le plan Juppé...
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est vrai !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... et nous assumons aujourd'hui votre héritage. Je ne crois donc pas qu'il faille nous reprocher de parler d'héritage : la question est de savoir comment on en parle, et vous avez pu remarquer que, dans mon intervention liminaire, je n'ai pas voulu être polémique.
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous en êtes sûr ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il est normal d'être critique, parce que le consensus mou n'a jamais fait avancer personne. Mais je fais une différence entre la critique et la polémique partisane.
    Je n'ai à aucun moment voulu céder à la polémique partisane parce que mon état d'esprit est aujourd'hui de rappeler que nous avons - nous, les Français, sans qu'il soit question d'appartenance partisane - créé la sécurité sociale, d'une manière consensuelle, en 1945, et l'avons confortée avec les ordonnances de 1967, et que, dans la période particulièrement difficile que nous vivons, nous devrions, tous ensemble et sans le moindre dogmatisme - car je vais m'appliquer à démontrer que les choix du Gouvernement ne procèdent ni de l'idéologie ni du dogmatisme -, travailler à développer à nouveau, de manière consensuelle et en nous efforçant de prendre en compte les arguments des uns et des autres, ce service que nous aurons, les uns et les autres, au gré de l'alternance, à gérer pour assurer le mieux-être des Français.
    Je me trouve donc vraiment dans un état d'esprit d'ouverture et d'écoute, et quand vous aurez compris que nous sommes sincères lorsque nous disons que nous voulons écarter l'étatisation comme la privatisation - je le démontrerai non seulement maintenant mais tout au long de la discussion - vous constaterez que nous nous retrouvons assez souvent.
    Néanmoins, je n'accepte pas que vous laissiez accroire que nous aurions attendu sans rien faire depuis dix-huit mois comme M. Renucci nous l'a reproché, ajoutant que l'heure aurait dû être au bilan. Je ne rétorquerai pas en évoquant le retard accumulé quant à la réforme de la retraite, puisque, en cinq ans, les choses n'avaient pas beaucoup avancé. Je préfère vous lire, à propos du problème de la sécurité sociale, quelques passages d'un hebdomadaire paru au mois de juin 1999 (Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), c'est-à-dire au moment du plan Johannet.
    M. Jean-Marie Le Guen. Qui avait été approuvé sur les bancs de l'actuelle majorité !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Même si vous me l'attribuez aujourd'hui, je n'ai pas inventé le qualificatif d'« abyssal ».
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous vous l'attribuez vous-même, monsieur le ministre !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je l'ai certes utilisé...
    M. Jean-Marie Le Guen. Ah ! Tout de même !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... mais, en 1999, déjà, on pouvait lire : « sans rappeler les déficits abyssaux des années de crise économique ... ». C'est dire si le terme est éculé !
    M. Jean-Marie Le Guen. Ne qualifiez pas ainsi vos propos !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je poursuis : « Dès l'automne 1998, le Gouvernement socialiste nous l'avait promis, les comptes de la sécurité sociale devaient enfin atteindre l'équilibre en 1999. Encore raté ? En quelques mois, le ciel s'est assombri. Selon le pronostic de la commission des comptes, réunie lundi 31 mai, le déficit prévisionnel... ».
    Le plan Johannet a tenté de remédier à cette situation, ce qui s'est soldé par le départ de son auteur. Je n'ai pas de commentaires à faire. Je dis simplement, avec humilité et modestie, que vous avez rencontré des périodes difficiles dans la gestion de l'assurance maladie, alors que vous étiez en période de croissance. Nous rencontrons des difficultés bien supérieures encore dans une période bien plus délicate. Aussi, plutôt que de nous jeter des anathèmes, essayons de construire ensemble.
    Parce que je suis d'un tempérament actif, je n'accepte pas que l'on affirme que j'ai laissé faire, que j'ai subi et laissé filer !
    M. Claude Gaillard, rapporteur pour la famille, et M. François Goulard, rapporteur pour avis. Très bien !
    M. Jean-Marie Le Guen Vous laissez tout de même filer : 11 milliards de déficit !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Et pour vous le démontrer, j'entrerai un peu dans le détail.
    Vous avez utilisé, monsieur Le Guen, un ton proche de l'imprécation à propos de la privatisation et de l'étatisation. Dans une belle envolée, vous avez démontré ladite privatisation en vous fondant sur la CMU complémentaire, les médicaments, le TFR, le forfait hospitalier et le financement de l'hôpital public. Cette énumération m'a un peu étonné car ce n'est pas nous qui avons inventé la CMU complémentaire, ni fait des complémentaires les partenaires obligés de la couverture maladie universelle. C'est vous qui l'avez fait et ce n'était d'ailleurs pas une mauvaise idée.
    Du reste, ce que nous avons critiqué, ce n'est pas tant l'idée de la couverture maladie universelle, que le seuil.
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Tout à fait !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Mme Jacquaint en a parlé assez longuement tout à l'heure. J'y reviendrai, bien entendu.
    Concernant le tarif forfaitaire de responsabilité applicable aux médicaments, je souhaite répondre aux différents orateurs, dont Mme Jacquaint. Il faut être cohérent. Je suis de votre avis, l'expression « panier de soins » est quelque peu péjorative.
    Mme Muguette Jacquaint. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Elle donne l'impression qu'il y a quelque chose dedans et autre chose dehors, ...
    M. Jean Le Garrec. C'est très bien que vous le disiez, monsieur le ministre !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... et surtout en sous-entendant que ce qui est obligatoire est dedans et ce qui est complémentaire dehors. Je n'approuve pas cette terminologie globale. Il est regrettable qu'elle soit entrée dans les moeurs et dans les usages, d'autant qu'elle fait venir à l'esprit l'image, pas très bonne, du panier dont on fait valser l'anse !
    M. Jean-Pierre Blazy. Et a fortiori du panier percé !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Bien sûr !
    M. Jean-Marie Le Guen. Il y a aussi celui du Petit Chaperon rouge ! (Sourires.)
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur Le Guen, méfiez-vous-en, vous qui voulez lutter contre l'obésité : il contenait un pot de confiture et des galettes !
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Et un pot de beurre !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Prenez garde de céder à la gourmandise !
    M. Denis Jacquat. Et gare au méchant loup ! (Sourires.)
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Revenons sur la notion - importante - de service médical rendu. Vous le savez, je l'ai toujours admise et reconnue, lorsque Martine Aubry, en 1999, a chargé la commission de la transparence d'évaluer les médicaments en fonction du service médical rendu, indispensable et important, modéré et faible, insuffisant ou nul - je ramène les cinq catégories initiales à trois, cela suffit amplement pour se comprendre. C'était une bonne décision. Mme Guigou en a commencé la mise en oeuvre.
    M. Yves Bur. Cela n'engageait à rien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il est dommage que du fait de sa fragilité, le texte ait été annulé par le Conseil d'Etat. La responsabilité n'en incombait pas au politique mais probablement au rédacteur. Le fait est que si l'on s'arrête à ces deux décisions, et puisque nous sommes d'accord avec l'idée du service médical rendu, nous avons là un point de convergence important...
    M. Jean Le Garrec. Deux !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il y en a bien plus ! J'ai analysé le document du parti socialiste et surligné nos points de convergence et de divergence.
    M. Jean Le Garrec. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je ne poursuivrai pas sur le sujet, faute de temps, mais c'est dommage parce que c'est un vrai débat.
    M. Jean Le Garrec. Nous y reviendrons, monsieur le ministre !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je vous le confirme : nous sommes favorables à la notion du service médical rendu. Sur les médicaments, les critiques portent essentiellement sur le fait que siégeaient dans la commission de la transparence à la fois des experts, en trop petit nombre, et des administratifs, voire des représentants des caisses, avec voix délibérative, et que cela pouvait éventuellement entacher le seul avis scientifique que l'on souhaitait recueillir.
    J'ai donc procédé à une réforme complète de la commission de la transparence durant l'été, profitant du départ du président Dupuis qui avait terminé son mandat. Il n'y a désormais plus que les experts qui ont été nommés ès-qualité. Ceux qui sont des libéraux sont rétribués, ce qui permet une meilleure assiduité. Nous allons poursuivre cette politique du service médical rendu.
    M. Yves Bur. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Mais au lieu de nous approuver en reconnaissant que nous nous situons dans la continuité, vous nous accusez de procéder à des déremboursements,...
    M. Yves Bur. C'est incohérent !
    M. Jean-Marie Le Guen. On vous expliquera !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ..., de faire payer davantage les gens et d'aller ainsi vers une médecine à deux vitesses. Je vous le dis sans animosité, j'essaie de comprendre.
    M. Jean-Marie Le Guen. On vous expliquera !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Mais si ces médicaments sont sans effet, on peut les dérembourser sans nuire à la qualité des soins, nous devrions être tous d'accord. Nous poursuivons ce que Mme Guigou avait commencé : dérembourser, en faisant passer le taux de 65 à 35 % pour tout un volet de médicaments.
    S'agissant des génériques, quand les caisses ont accepté, avec l'accord du Gouvernement, de porter la consultation à vingt euros en échange de leur prescription, vous nous avez approuvé rappelant que c'était vous qui aviez lancé cette politique. Dont acte.
    Dès lors, pourquoi nous reprocher aujourd'hui les tarifs forfaitaires de responsabilité qui consistent à rembourser au tarif du générique la même molécule pour la même efficacité que celle de la molécule princeps ?
    M. Pierre Morange, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour les recettes et l'équilibre général. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. J'aimerais maintenant rappeler pour Mme Jacquaint, Mme Fraysse et quelques orateurs du groupe socialiste, l'historique du forfait hospitalier.
    Mme Muguette Jacquaint. Je le connais !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. M. Paul-Henri Cugnenc l'a fait en partie hier.
    Le forfait hospitalier, madame Jacquaint, a été créé par M. Ralite dont vous étiez la suppléante. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Muguette Jacquaint. Je le sais ! Ce n'est pas pour cela que j'étais d'accord. (Sourires.)
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Madame Jacquaint, je ne vous critique pas, j'essaie de rétablir la vérité. C'est le député que vous avez remplacé qui, devenu ministre de la santé, a créé le forfait hospitalier par la loi du 1er avril 1983 !
    Ensuite, il a été augmenté le 1er janvier 1984, le 1er janvier 1985, le 1er janvier 1986. Nous avons continué à le faire.
    Vous avez fait de même au 1er janvier 1989. Mais il se passe ensuite quelque chose de très intéressant, dont je vous prie d'informer M. Evin, qui n'est pas là.
    M. Jean Le Garrec. On le lui dira !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Au 1er janvier 1990, augmentation de 7 %, au 1er janvier 1991, augmentation de 6,5 % ; mais six mois plus tard, le 1er juillet 1991, augmentation de 51,5 %. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) On n'avait jamais vu ça !
    M. Jean-Marie Le Guen. N'approuviez-vous pas cette augmentation, à l'époque, monsieur le ministre ? Rappelez-vous les applaudissements avec lesquels vous l'avez accueillie !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je n'en avais pas parlé dans mon intervention liminaire, mais puisque vous avez critiqué l'augmentation du forfait hospitalier que nous proposons après sept ans,...
    M. Jean-Marie Le Guen. Ce qui veut dire que nous ne l'avons pas augmenté pendant cinq ans !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... il était normal que je vous réponde en vous rappelant ce que nous avons fait les uns après les autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Toujours sur cet équilibre entre privatisation et étatisation, monsieur Le Guen, vous nous avez dit que cela n'avait de toute façon pas de sens : aux Etats-Unis, le système est privatisé, mais, avec, Medicaid et Medicare, il est aussi étatisé, et la Grande-Bretagne, où le système est étatisé, a en réalité un système parallèle de médecine privatisée.
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. C'est vrai ! Les deux analyses sont justes !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Ce en quoi vous avez parfaitement raison.
    En France, on ne peut faire de distinguo formel entre la part de l'Etat et la part des gestionnaires dans la politique de santé, pour la bonne raison que l'Etat est le garant de la qualité, des objectifs et de l'égalité d'accès aux soins et qu'il continuera de prendre toute sa part dans la définition de la politique de santé du pays parce que c'est de sa responsabilité ; et vous pourrez naturellement toujours dire que, par conséquent, le système est étatisé. Mais s'il est géré par les partenaires sociaux pour l'ambulatoire et si les complémentaires - mutuelles, instituts de prévoyance et assurances - y prennent toute leur part, vous pourrez aussi dire que c'est privatisé. Avec ce distinguo un peu fallacieux, vous avez redécouvert le fil à couper le beurre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Attention aux accidents domestiques !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est d'une telle évidence ! On ne peut pas avoir de débat là-dessus : l'Etat et les gestionnaires interviennent !
    Monsieur Bur, oui, vous avez eu raison de le souligner - et je reprends vos termes parce que je les approuve - la situation est grave ! Oui, la réforme est nécessaire ! (« Bravo, monsieur Bur ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Et vous avez raison aussi : l'urgence n'est pas la meilleure des situations pour réformer. C'est sans animosité que je le répète : il aurait été préférable de profiter des années de croissance à 3,5 et 4 % pour réformer l'assurance maladie dans la durée,...
    M. Gérard Bapt. Nous y avez-vous aidés ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... que de nous placer en situation de la faire rapidement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Puisque vous avez le plan Johannet, appliquez-le !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je l'ai rappelé en aparté à quelques-uns, la position qui est la vôtre, dans l'opposition, est toujours confortable, car quels que soient les choix du Gouvernement, vous avez la répartie. Si nous avions procédé à la réforme dès maintenant, vous nous auriez reproché de le faire sans concertation, sans dialogue, à l'aveuglette.
    M. Pierre-Louis Fagniez. A la va-vite !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est d'ailleurs ce qu'on nous oppose sur la tarification à l'activité, puisque j'ai entendu déplorer que l'on n'ait pas le rapport de l'expérimentation.
    Mme Muguette Jacquaint. Ce qui est vrai !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. La critique aurait d'ailleurs été fondée.
    Nous avons décidé, clairement, d'essayer d'aller vers une démarche consensuelle. Après tout, ce que les Allemands ont fait, nous sommes peut-être capables de le faire, si ce n'est sur le fond, du moins dans la forme. Toutes leurs réformes ne sont pas applicables en France. En revanche, je salue le fait que majorité et opposition ont pu se retrouver sur des problèmes d'intérêts nationaux.
    M. Jean-Marie Le Guen. Parce que la majorité n'y a pas tous les pouvoirs !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Pouvons-nous espérer nous aussi nous rapprocher à cet égard ?
    Je répondrai à Mme Génisson, un peu plus tard.
    Monsieur Préel, vous avez formulé deux voeux : que nous écoutions et que nous réussissions.
    M. Gérard Bapt. Réussir en écoutant !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Nous essayerons de réussir. Quant à vous écouter, je m'y suis appliqué (Sourires) et j'ai à peu près compris, je crois, votre distinction entre les bons éléments, sur lesquels je ne vais pas m'attarder, et vos sujets d'inquiétudes dont l'un est largement partagé. Je vais tenter d'apaiser celle qui concerne l'ONDAM, notamment l'ONDAM hospitalier.
    Vos chiffres, permettez-moi de vous le faire remarquer, datent d'avant l'été. Vous vous êtes tous référés au calcul proposé par la fédération hospitalière de France...
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Absolument ! C'est obsolète !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... c'est-à-dire un taux d'ONDAM de 4,48 demandé au mois de juin. Depuis, nous avons naturellement pris un certain nombre de mesures. Et je vous invite à ne pas vous contenter de critiquer et à vous arrêter aux chapitres intéressants. « Les spécialités pharmaceutiques sont remboursées en sus des prestations d'hospitalisation » : cela signifie que nous avons sorti de l'ONDAM hospitalier les médicaments innovants, ce qui nous fait faire un gain de l'ordre de 0,40. Avec l'augmentation du forfait hospitalier, nous y ajoutons un gain d'à peu près 0,40. Nous sommes à 0,80.
    Je vous fais grâce des détails, j'y reviendrai au cours de la discussion.
    En clair, nous aurions pu présenter un ONDAM hospitalier à 3,6, et cela en parfait accord avec les exigences de la fédération hospitalière de France. Nous ne l'avons pas fait. Nous proposons un ONDAM hospitalier à 4,2. D'ailleurs, sur les dépenses encadrées, nous serons à 4,4. Par conséquent, nous sommes très près de ce que souhaitait la FHF.
    Je comprends assez mal également que vous trouviez le budget hospitalier insuffisant. En effet, l'ONDAM de l'hôpital a été augmenté d'environ 1,7 par an pendant les quelques années où vous avez été aux affaires, alors que nous, nous passons à 4,2 !
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Bravo !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. L'effort est considérable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler, rapporteure pour l'assurance vieillesse. M. Goulard organise la claque ! (Sourires.)
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Vous vous inquiétez aussi, monsieur Préel, de l'ONDAM à 4 en regrettant celui de l'année dernière - 5,3 - qui était, selon vous, plus réaliste. « D'ailleurs, vous étonnez-vous, comment faites-vous pour passer à 4 cette année puisque vous êtes sur un tendanciel de 5,5 ? ». Vous êtes plusieurs à avoir repris cet argument.
    C'est très simple : la maîtrise médicalisée fait économiser 800 millions d'euros, le forfait journalier 180 millions d'euros, le plan médicament, 290 millions d'euros. En tout, les économies atteindront 1,870 milliards d'euros. C'est d'une clarté absolue, je ne crois pas du tout que cela puisse se contester.
    Enfin, monsieur Préel, vous vous interrogez sur la gouvernance, et vous dites qu'il faut convaincre. Nous allons en discuter dans les mois qui viennent. Qui doit diriger ? Avec quel niveau de responsabilité ? Avec quel cahier des charges, défini par qui ? Avec quelles relations pour les professionnels de santé ? Nous avons fait un diagnostic pendant trois mois, un groupe de travail a travaillé pendant trois mois, puis il y a eu trois mois de négociation avant d'aboutir, en juin ou juillet, à un avant-projet de loi qui, je l'espère, pourrait nous rassembler. Il y a des questions très importantes auxquelles il faudra répondre : les responsabilités respectives de l'Etat et des partenaires ; ...
    M. Jean Le Garrec. C'est vrai !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... la nature des financements : d'où viennent-ils, qui les décide, et qui en rend compte ; la part et le rôle respectifs des régimes obligatoires et des régimes complémentaires ; la nature des relations conventionnelles entre les professionnels de santé et les gestionnaires ; et l'articulation entre ville et hôpital, naturellement. Vous voyez bien que les enjeux sont très importants.
    Vous abordez enfin une question qui vous est chère, et je n'ai pas encore réussi à bien comprendre où vous situiez la répartition des responsabilités : je veux parler de la régionalisation. Je vous le dis très clairement, je n'accepterai pas l'idée qu'il y ait vingt-six politiques de santé en France,...
    M. Jean Le Garrec. Nous sommes d'accord !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... vingt-six politiques de santé publique définies dans chacune des régions.
    M. Jean-Pierre Blazy. Mais on en veut tout de même une !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il y aura une politique définie par l'Etat et votée par le Parlement.
    M. Jean-Pierre Blazy et M. Jean Le Garrec. D'accord !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Qu'après, nous ayons au plus près, et notamment en région, une déclinaison tenant compte de spécificités régionales, en incluant éventuellement pour la politique de santé publique le conseil régional s'il le souhaite, en considérant les départements comme des opérateurs possibles, en donnant toute leur responsabilité aux ARH, et éventuellement en nous avançant vers l'agence régionale de santé, alors oui, naturellement, mais je ne veux pas d'ambiguïté quand vous parlez de régionalisation, car cela évoque ce qui se passe en Espagne, en Allemagne, ou en Italie, c'est-à-dire des politiques différentes selon les régions, ce qui n'est pas compatible avec l'idée que nous nous faisons de l'égalité de tous les Français devant l'accès aux soins. (Applaudissements sur divers bancs.)
    Madame Jacquaint, je vous ai écoutée avec une très grande attention, mais, à un moment donné, je me suis dit que ce n'était pas possible ! J'entends la thèse du complot : avec la complicité sournoise du MEDEF, faire main basse sur le magot pour soigner les riches qui peuvent payer et laisser mourir les pauvres qui n'ont que peu d'intérêt !
    Mme Muguette Jacquaint. C'est tout à fait cela !
    Mme Jacqueline Fraysse. C'est bien la stratégie adoptée !
    M. Yves Bur. S'il y avait un magot, ça se saurait !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Les mains jointes, j'ose espérer que nos idéaux sont plus proches que vos propos ne le laissent penser.
    Mme Muguette Jacquaint. Nous ne demandons qu'à vous croire !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il est vrai que nous avons des divergences profondes s'agissant de l'organisation de l'économie du pays, mais, je pense que vous pouvez nous en faire crédit comme je vous en fais crédit, notre ambition, notre objectif, est de soigner chaque Français en fonction de ses besoins et pas en fonction de ses moyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Muguette Jacquaint. Mais comment ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Comme vous défendez l'idée de l'économie administrée, qui a d'ailleurs partout échoué, vous nous proposez des formules de financement qui ne sont pas applicables, car c'est le principe des vases communicants. Quand vous voulez trop taxer une entreprise,...
    Mme Muguette Jacquaint. Pas trop, un peu !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... que ce soit par les taxes, les charges, des contraintes sur les licenciements ou autres, vous savez très bien ce qui se passe : vous avez soit un dépôt de bilan et un plan social, soit une délocalisation.
    Mme Muguette Jacquaint. Vous n'avez rien empêché !
    Mme Jacqueline Fraysse. On les a, monsieur Mattei ! On les a les plans de licenciement ! On les a les chômeurs !
    M. Yves Bur. Regardez l'état des systèmes de santé dans les pays de l'Est !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Toute la difficulté politique est de se donner les moyens économiques de financer ce que vous comme nous, nous souhaitons !
    Tous les pays qui nous entourent, y compris ceux qui sont gouvernés à gauche, se sont convertis à une économie...
    Mme Muguette Jacquaint et Mme Jacqueline Fraysse. Ultralibérale !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... qui respecte l'initiative et l'entreprise. Le tout est de savoir fixer les règles du pacte social, et je pense que nous pourrons nous entendre sur les objectifs, y compris sur la santé au travail, mais je crains que nous ne puissions jamais nous entendre sur les modalités de financement, puisque vous nous resservez toujours les recettes d'une économie administrée à laquelle nous ne croyons pas et qui n'a pas marché.
    Mme Muguette Jacquaint. La santé à crédit, ça ne marche pas !
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Quand on pense que c'est vous qui avez inventé le forfait hospitalier !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Madame Fraysse, vous avez fait une longue intervention, extrêmement intéressante. Je vais évoquer la tarification à l'activité, sans trop m'y attarder, j'y reviendrai.
    Lorsque vous prétendez que nous voulons à terme privatiser l'hôpital public, je suis à la fois consterné et stupéfait. Notre ami Yves Bur ou Bernard Accoyer,...
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. On ne voit pas la différence. (Sourires.)
    Mme Muguette Jacquaint. Ce sont vos amis, pas les nôtres !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... a rappelé que 50 % des établissements privés avaient des difficultés de paiement, que le Gouvernement venait de déclencher un plan d'investissement de 10 milliards, essentiellement pour l'hôpital public, que nous avons repris la promesse du précédent gouvernement de créer 45 000 postes à l'hôpital, plus 4 500 postes de praticiens hospitaliers pour l'hôpital public.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Nous nous sommes assez battus pour les avoir !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. J'avais donc le sentiment, au contraire, que nous menions une politique qui essayait d'abord et avant tout de restaurer l'hôpital public dans ses fonctions du service public.
    M. Gabriel Biancheri. Il en avait besoin !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Les investissements lourds, les IRM, les PET-scans, où vont-ils, sinon en très grande majorité dans les établissements publics, ce qui d'ailleurs nous est parfois reproché ? Les médicaments innovants payés en sus, c'est encore dans les établissements publics qu'on les trouve.
    J'accepte parfaitement vos critiques, je vous l'ai déjà dit, je les entends comme des mises en garde. Je n'ai pas la même philosophie politique et économique que vous, mais j'ai un passé dont je suis fier. Pendant trente-cinq années, j'ai été praticien dans l'hôpital public, et mon but est évidemment de sauver l'hôpital public de la situation dramatique dans laquelle il se trouve aujourd'hui.
    Mme Jacqueline Fraysse. Cela ne suffira pas !
    Mme Muguette Jacquaint. C'est comme le dévouement des infirmières, ça ne suffit pas !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur Accoyer, la T2A est évidemment pour nous la réforme tant attendue.
    Mme Jacqueline Fraysse. J'aurais souhaité plus d'explications sur la tarification à l'activité.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Madame Fraysse, je ne veux pas allonger le débat. Vous vous exprimerez problablement sur les différents articles, je vous répondrai alors point par point.
    Mme Guigou a évoqué hier la libéralisation des prix, notamment pour les molécules innovantes. Je voudrais tout de même qu'on s'explique sur ce point car tel n'est pas le cas. Pour les médicaments innovants, dont le public qui en a besoin, les patients qui l'attendent, doivent bénéficier le plus vite possible,...
    M. Yves Bur. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... plutôt que de passer des semaines de négociation entre le comité économique des produits de santé et les industriels, nous acceptons le prix proposé, à condition qu'il soit eurocompatible, c'est-à-dire se trouve compris dans la fourchette basse des prix pratiqués pour les mêmes molécules en Europe. Vous savez très bien comme moi que l'Union européenne vient de créer l'agence du médicament européenne, située, à Londres, qui va désormais donner les autorisations de mise sur le marché.
    Mme Muguette Jacquaint. Et alors ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. L'objectif est donc d'avoir des prix à peu près équivalents car, s'ils sont trop différents, des marchés noirs s'organisent, achetant là où c'est le moins cher pour revendre un peu plus cher. C'est ce que l'on appelle tout simplement la concurrence déloyale, contre laquelle nous avons voulu agir.
    Mme Muguette Jacquaint. Comme pour les cigarettes !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Nous voulons surtout, je vous le répète, permettre aux gens d'avoir accès plus rapidement aux médicaments dont ils ont besoin.
    Je ne peux laisser dire qu'il y aura une liberté totale. J'ajoute que désormais - cela n'a pas été facile, j'ai même dû l'imposer à certains -, le prix du médicament sera aussi administré à l'hôpital alors qu'il était libre et que l'hôpital pouvait rétrocéder à la ville les médicaments, ce qui me paraissait être un détournement puisque les prix sont encadrés dans les pharmacies. Mais de cela, vous ne parlez jamais. Des mesures de justice, des mesures d'égalité, vous ne parlez jamais !
    Vous m'avez également reproché de ne pas engager plus rapidement de réformes de structure. Contrairement à ce que certains croient, il n'y a pas, je le répète, de plan caché. Nous souhaitons une nouvelle délégation de gestion aux partenaires sociaux, selon une nouvelle configuration. Puisque le MEDEF a dit qu'il ne reviendrait pas, il va bien falloir s'en accommoder. Il faudra bien reconfigurer un paritarisme nouvelle formule. Notre idée, c'est un cahier des charges très précis, une intervention de l'Etat au départ et pour contrôler la qualité, naturellement. Si nous n'y arrivons pas, il faudra bien trouver d'autres solutions. C'est la raison pour laquelle nous sommes extrêmement ouverts.
    Pardonnez-moi, mais il n'y a pas de clivage politique sur ce point. Je sais très bien que, sur les bancs de la gauche, notamment du groupe socialiste, certains ne sont pas très favorables au maintien de la délégation de gestion et pensent qu'une agence détachée de l'Etat mais sous son contrôle serait peut-être une solution. J'ai discuté avec d'éminents spécialistes du groupe socialiste qui défendent cette idée. Nous avons également sur nos bancs certains qui pensent que la délégation de gestion aux partenaires sociaux seraient une nouvelle aventure.
    A mon sens, notre pays se doit de donner une nouvelle chance à ce modèle français...
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Absolument !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... qui, pour le moment, n'a pas fait la preuve qu'il était plus mauvais que les autres et a même montré qu'il était meilleur quant à l'égalité d'accès aux soins.
    C'est la raison pour laquelle nous voulons moderniser le système. En 1999, et je me tourne vers M. Le Garrec, président de la commission à l'époque,...
    M. Gaëtan Gorce. Excellent président !
    M. Jean Le Garrec. Nous en avions débattu, en effet !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... nous avions eu des conversations sur les systèmes de concurrence et vous m'aviez dit que c'était le coeur du sujet. A l'époque, je n'en disconviens absolument pas, puisqu'il y avait une pensée unique, j'avais voulu provoquer un débat en apportant une certaine contradiction, et j'avais évoqué le modèle néerlandais notamment et d'autres qui s'étaient orientés vers la concurrence. Depuis, il s'est passé un certain nombre de choses qui n'ont échappé à personne. Le système hollandais, qui avait fait appel à la concurrence, n'est pas au mieux de sa forme, et, qu'ils soient fondés sur la concurrence ou sur l'étatisation, aucun de ces modèles n'a vraiment fait la preuve de sa supériorité. Comme nos difficultés économiques ne sont pas tellement pires que celles des autres - nous avons un peu plus de difficultés à nous réformer, c'est vrai, ce sera le sujet - et que nous sommes meilleurs en matière d'égalité, je souhaite que nous gardions le système à la française,...
    M. Gérard Bapt. Vous avez tempéré votre libéralisme !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... un système juste et solidaire.
    Mme Muguette Jacquaint. C'est un souhait, mais comment y parvenir ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Néanmoins, et ce n'est pas contradictoire, je confirme mon impression que les dépenses de santé vont croître inéluctablement.
    Mme Jacqueline Fraysse et Mme Muguette Jacquaint. Oui !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Une réunion, tenue récemment à mon initiative avec douze ministres de la santé de l'OCDE, m'a conforté dans cette idée. Je ne vais pas vous en faire le compte rendu mais, que ce soit le ministre hollandais, le ministre australien, le ministre allemand, le ministre suisse, le ministre des Etats-Unis ou d'autres, ils ont tous dit que leurs dépenses de médicaments avaient été multipliées par deux, trois ou quatre en l'espace de dix ans, que leurs dépenses représentaient aujourd'hui entre 9 % et 10 % du PIB - nous sommes à 9,5 % - et qu'ils avaient la charge très difficile de trouver de nouveaux modes de financement. Nos problèmes ne sont donc pas différents de ceux des autres.
    Mme Jacqueline Fraysse. Quels sont les nouveaux modes de financement ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il nous faudra trouver les réponses. Nous en sommes convaincus, Monsieur Préel, la santé est un bien supérieur et il ne saurait être question de la compromettre pour des motifs comptables. Il faudra donc trouver les moyens financiers pour répondre à ces besoins et financer la croissance des dépenses de santé.
    Mais là, il y a un problème qui rejoint l'éthique, monsieur Claeys. Je veux parler de l'éthique de l'allocation des ressources. Quand, dans un pot commun, il y a l'argent de la collectivité et qu'après qu'on y a puisé il n'y en a plus, on en redemande. Alors, chacun se pose la question de savoir si les dépenses ont été justes, sans excès, contrôlées, raisonnables, empreintes de bon sens et de sagesse. Avant d'en redonner, les gens veulent comprendre comment cela s'est passé.
    Mme Jacqueline Fraysse. C'est normal ! Je ne vous le fais pas dire !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il nous faudra donc instaurer des systèmes de contrôle, et il nous faudra distinguer, sans parler du panier de soins, ce qui est réellement utile pour la santé, comme avec la notion du service médical rendu, de ce qui l'est moins.
    M. Yves Bur. Tout à fait !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Car il est évident que la solidarité nationale consiste à prendre en charge les soins de celui qui n'a rien pour payer, et non pas à rembourser certains besoins superficiels ou subsidiaires, ce que certains réclament, alors qu'ils ne relèvent pas de la solidarité nationale. Nous aurons une vraie discussion sur ce point. Il y a ce qu'il convient de rembourser et ce qu'il convient de ne pas rembourser. Je pense que même vous, mesdames, messieurs les députés de l'opposition, vous serez d'accord pour écarter un certain nombre de ces dépenses.
    Mme Muguette Jacquaint. Il faut rembourser la prévention du cancer, quand même !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. J'en viens justement aux propos de M. Claeys. La sécurité sociale est un bien commun, a-t-il dit. D'accord. Il a l'intuition que le consensus est remis en cause. C'est une mauvaise intuition, ou alors c'est que je me suis mal exprimé. Je pense qu'il faut aborder le débat avec un a priori d'honnêteté réciproque, croire ce que chacun dit...
    Mme Jacqueline Fraysse. Et voir et ce que chacun fait !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... et ne pas lui prêter des arrière-pensées dissimulées.
    Vous avez dit, monsieur Claeys, et certains ont dit après vous, que les Français étaient inquiets du trou de la sécurité sociale. Que certains Français soient inquiets, je le comprends. Mais permettez-moi de vous dire que ce qui nous désespère, au Gouvernement ou à la commission, c'est de voir les résultats que donnent les sondages répétés, qualitatifs et quantitatifs, que nous faisons depuis des mois pour tenter de savoir ce que les Français pensent.
    Et je vais vous le dire, ce qu'ils pensent : ils pensent que la sécurité sociale est en déficit, que le trou de la sécurité sociale a toujours existé... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains).
    M. Gérard Bapt. Non !
    Mme Muguette Jacquaint. Ce sont des inconscients qui pensent cela !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Mais, mesdames, messieurs les députés, vous savez bien que le trou de la sécurité sociale, cela a commencé en 1977. Il fait partie du paysage quotidien des Français. Je ne vous dis pas que c'est bien, je vous dis simplement que les gens pensent qu'on en parle depuis 1977, et qu'ils n'y croient plus. Ils y voient un simple épouvantail. Et toute la difficulté pour moi est de montrer la gravité de la situation.
    Mme Jacqueline Fraysse. Nous, en tout cas, nous en sommes conscients !
    Mme Muguette Jacquaint. Vous croyez vraiment que les Français sont tous des inconscients, monsieur le ministre ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il faut faire de la pédagogie pour faire comprendre aux gens que la santé va coûter plus cher et qu'il faudra donc que chacun paie évidemment davantage.
    M. Denis Jacquat. Très juste !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur Jacquat, vous avez abordé un sujet important, celui de la cinquième branche.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler, rapporteure pour l'assurance vieillesse. La cinquième branche ou le cinquième risque ? Ce n'est pas du tout la même chose !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Sur ce point, je voudrais aussi clarifier les choses. Lorsqu'on parle de cinquième branche, notamment pour les personnes âgées, il ne s'agit pas de transférer une partie de l'assurance maladie des personnes âgées. Il ne s'agit pas de discriminer, dans une branche qui serait plus dépensière, les personnes âgées qui seraient plus malades et qui coûteraient plus cher. L'assurance maladie doit prendre en charge, de la naissance à la mort, tout ce qui touche à la maladie.
    M. Denis Jacquat. Et à la perte d'autonomie.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Par contre, comme je l'ai dit cet après-midi dans les questions d'actualité, la dépendance qui apparaît avec le vieillissement pose de nouveaux problèmes de maintien à domicile, d'aide humanitaire, d'aide technique. Et cela nous amène à découvrir une nouvelle solidarité, à laquelle la structure actuelle et le financement actuel de la sécurité sociale ne nous permettent pas de faire face aujourd'hui. Je préfère éviter, quant à moi, de parler de cinquième branche, parce que cela laisserait penser qu'il faut à nouveau organiser un paritarisme et ajouter une branche à la sécurité sociale.
    M. Denis Jacquat. Oui ! Il faut s'appuyer sur ce qui existe.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Mais ce que je pense, c'est qu'il nous faut un moyen très clairement identifié de financer la dépendance en utilisant tous les financements qui existent - ceux des collectivités territoriales et de l'Etat - et auxquels il faut ajouter des moyens nouveaux, qui s'avèrent nécessaires. C'est ce sur quoi le Gouvernement travaille actuellement : il faut que nous identifiions la dépense relevant de cette nouvelle solidarité qu'exige la dépendance.
    M. Denis Jacquat. Je dirais plutôt : la perte d'autonomie, en général.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est cela, la perte d'autonomie, qu'il s'agisse de personnes handicapées ou de personnes âgées.
    M. Domergue a fait une excellente démonstration sur l'homéopathie. Je pense que vous êtes tous convaincus, je n'y reviens pas.
    Jean-Marie Rolland a plaidé de nouveau pour la maîtrise médicalisée, et je le comprends parfaitement.
    Quant à M. Baguet, je pense que ses propos ont probablement dépassé sa pensée.
    M. Yves Bur. Cela lui arrive souvent.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je voudrais quand même lui répondre sur un point. Il nous dit que nous nous sommes fait admonester par les instances européennes en raison des déficits. Il n'a pas tort, mais, dans le même temps, il ne parle pas de l'admonestation qui entraînerait une augmentation indue des prélèvements obligatoires. Il faudra donc surveiller à la fois le niveau des déficits et celui des prélèvements obligatoires ! C'est bien le problème que nous essayons de régler. J'espère que nous allons le régler ensemble. Car s'il est vrai qu'on peut parfaitement dépasser des limites dans un domaine, peut-on pour autant augmenter sans arrêt les prélèvements obligatoires ?
    La question est posée. Et c'est d'ailleurs pour moi l'occasion de répondre aux orateurs qui ont parlé de la CSG en me disant en substance - et c'est une proposition qui a été faite y compris par des orateurs du groupe UDF, m'a-t-il semblé - qu'une augmentation d'un point de la CSG serait un élément de solution. Mais, je le répète ici après l'avoir déjà dit en commission : quelle facilité ce serait pour le ministre de venir dans cet hémicycle après qu'une telle augmentation aurait été décidée ! Cela lui permettrait de dire aux députés : « Voilà, nous faisons 3 milliards d'économies, un point de CSG en plus nous rapporte 10 milliards. Avec 13 milliards au total, nous atteignons l'équilibre. Tout va bien, tout est parfait, le film est terminé. » Eh bien non, nous n'avons pas voulu faire ce choix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Gérard Bapt. Et les 10 % pour les mutuelles ?
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Que vous ne soyez pas d'accord, mesdames et messieurs les députés de l'opposition, c'est une chose, mais...
    M. Maxime Gremetz. Ça non ! Nous ne sommes pas d'accord !
    M. Charles Cova. Tout ce que proposent les communistes, c'est d'augmenter les impôts, une fois de plus !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Mais, monsieur Gremetz, je respecte votre opposition ! Vous vous êtes exprimés pendant trois heures et demie de discussion générale, et certains d'entre vous m'ont demandé pourquoi le Gouvernement n'a pas fait le choix d'une augmentation d'un point de CSG. J'essaie simplement de leur répondre. Nous ne l'avons pas voulu pour deux raisons.
    Il y a d'abord une raison d'ordre économique. Avec une croissance qui va tourner autour de 0,2 % ou 0,3 %, aller ponctionner 10 milliards dans la poche des ménages risque évidemment de compromettre la consommation et donc la croissance.
    M. Gabriel Biancheri. Exactement !
    Mme Jacqueline Fraysse. Là, nous sommes d'accord !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Deuxièmement, mettre 10 milliards dans un système dont on n'a pas fixé les nouvelles règles, dont on n'a pas réformé les structures, dont on n'a ni établi les objectifs, ni fixé le cahier des charges, ni défini les responsabilités, cela, pour le coup, m'est apparu irresponsable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Même si c'est difficile, nous avons fait ce choix. Je l'assume, la majorité l'assume. Et ce faisant, nous avons pris le risque, c'est vrai, de lire ici et d'entendre là que le Gouvernement « laisse filer les déficits »
    Mme Jacqueline Fraysse. Il y avait d'autres mesures à prendre ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Yves Bur. Pour Mme Fraysse, c'est facile : il suffit que Mme Bettencourt soit mise à contribution !
    M. Maxime Gremetz. Les mesures que vous prenez, vous les avez déjà prises, et elles ont échoué !
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Appelons Mme Bettencourt, faisons payer le MEDEF, et tout sera réglé !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il aurait suffi d'augmenter d'un point la CSG, et nous n'avions plus de problème ? Eh bien, non, nous avons fait d'autres choix !
    Mme Jacqueline Fraysse. Non, vous n'avez pas fait d'autres choix ! Vous laissez filer les choses, c'est tout.
    M. Maxime Gremetz. Vous faites les mêmes en pire ! Voilà ce que vous faites !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je réponds maintenant, ce qui intéressera particulièrement, parmi ceux qui sont intervenus sur le sujet, M. Gremetz et Mme Jacquaint, sur la santé au travail. Je rappelle que dans la loi relative à la santé publique, nous avons retenu cinq thèmes prioritaires. Je vous les rappelle : le cancer, que vous avez bien voulu citer, les uns et les autres ; la violence, avec toutes ses déclinaisons, le suicide, la drogue, l'insécurité routière, etc. ; la santé et l'environnement ; les maladies orphelines ; et l'amélioration de la qualité de vie des malades atteints de maladie chronique.
    En ce qui concerne la santé et l'environnement, nous avons voulu concevoir un plan, comme nous l'avons fait pour le cancer. Et nous avons identifié le travail comme étant, précisément, un environnement dans lequel nous vivions entre sept et huit heures par jour.
    M. Gérard Bapt. Vous avez eu raison !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. François Fillon, Roselyne Bachelot et moi-même avons donc installé une commission d'orientation, qui doit nous remettre en janvier tous les éléments pour bâtir, comme nous avons bâti un « plan cancer », un plan « santé et environnement ». Trois commissions sont au travail : une pour les facteurs physiques, une pour les facteurs chimiques et une pour la santé au travail. Par conséquent, nous aurons, je vous le promets, un débat concernant ce plan.
    Mais je veux m'attarder, plus spécifiquement, sur l'amiante.
    M. Jean Le Garrec. Ah !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. D'après les éléments statistiques fournis lors du conseil d'administration du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante réuni le 21 octobre dernier, c'est-à-dire très récemment, la situation est la suivante : au 31 août 2003, le fonds avait fait 1 961 offres d'indemnisation ; 97 % des offres ayant reçu une réponse de la part des victimes ont été acceptées. Au 30 septembre 2003, le FIVA avait versé 85,5 millions d'euros d'indemnisation aux victimes : 36,2 au titre des 1 520 offres d'indemnisation acceptées et 49,2 au titre des provisions.
    Pour ce qui concerne les prévisions, 6 500 dossiers ont été reçus par le FIVA, qui devront faire l'objet d'une indemnisation d'ici à la fin de l'année 2003, pour un montant évalué à 400 millions d'euros pour 2003. Le nombre moyen de dossiers que recevra le FIVA est estimé entre 550 et 650 par mois à partir de septembre 2003. Le montant de l'indemnisation qu'il versera aux victimes est estimé, pour l'année 2004, à 468 millions d'euros, pour environ 7 000 dossiers traités.
    Nous avons donc abondé le FIVA de 100 millions d'euros, par l'assurance-maladie. Les provisions s'élèvent à 1 milliard d'euros. Je ne vois pas la nécessité pour ce fonds de disposer de telles provisions d'avance,...
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Evidemment !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... alors que, comme je viens de vous le dire, les indemnisations versées en 2003 et 2004 s'élèveront approximativement à 800 millions d'euros. Mais je prends l'engagement que tous les dossiers qui seront vus, qui seront reçus, feront l'objet d'une indemnisation. Il s'agit là d'un engagement de l'Etat, qui exprime la continuité de l'Etat.
    Avant de conclure, je souhaiterais quand même répondre à M. Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. Ah ! Quand même !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je vous le dis avec le sourire, monsieur Blazy, mais vous m'avez interrogé en présentant les choses, sur un sujet qui me touche de près, d'une manière particulièrement...
    M. Charles Cova. Socialiste !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Non, non. D'une manière qui n'est pas très honnête.
    M. Pierre-Louis Fagniez. Oui, c'est bien ça : d'une manière socialiste.
    M. Dominique Tian. Mais oui, c'est la même chose !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je vais vous dire pourquoi, monsieur Blazy. Bernard Kouchner avait commencé à augmenter le quota d'infirmières. Il l'avait fixé, l'année précédant mon arrivée au ministère, à 26 000. Or, le nombre d'inscrits n'avait été que de 24 000, et vous aviez raison, alors, de parler de « crises de vocations ». J'ai maintenu, l'année suivante, le nombre de places à 26 000 et des poussières. Toutes les places ont été remplies. C'est la raison pour laquelle, cette année, j'en ai fixé le nombre à 30 000, et j'ai bon espoir qu'elles seront toutes remplies, car le métier d'infirmière est un métier qui suscite toujours une certaine passion, pour ne pas dire une réelle vocation.
    S'agissant maintenant de la formation des médecins, vous avez été honnête...
    M. Jean-Pierre Blazy. Vous voyez que je suis honnête !
    M. Charles Cova. Honnête, un socialiste ?
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Cela arrive par intermittence !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... en disant que nous partageons, les uns et les autres, la responsabilité du numerus clausus qui a été en vigueur pendant une quinzaine d'années. Vous me demandez ce que nous avons fait ? Je vais vous répondre en neuf points.
    Premièrement, nous avons régulièrement augmenté le numerus clausus. L'année prochaine, 5 600 étudiants seront admis en première année, soit une augmentation de 500. Même chose pour la pharmacie, pour la kinésithérapie, pour les infirmières et pour les odontologistes.
    Deuxièmement, nous avons agi sans attendre sur les filières, sachant que, contrairement à ce qu'on dit, il ne faut pas douze ans pour former un spécialiste. Il faut huit ans pour former un généraliste, et quatre ans pour former un spécialiste.
    Mme Jacqueline Fraysse. Quatre ans plus huit ans !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Ainsi, dans quatre ans, les effectifs auront déjà augmenté pour satisfaire les besoins qui se font sentir dans certaines spécialités, notamment en chirurgie, en psychiatrie, en anesthésie et en pédiatrie.
    La troisième action, nous la partageons. Il s'agit de la réforme de l'internat, que j'avais proposée en 1997 juste avant un changement de majorité, et cette proposition a été reprise en 2002. L'internat sera donc réformé en 2004. Désormais, tous les médecins seront internes, et la formation des généralistes sera de la même qualité que celle des spécialistes, ce dont je suis très heureux.
    Quatrièmement, nous allons ouvrir la première année de médecine à l'ensemble des professionnels de santé - les infirmières, les kinés, les sages-femmes et tous les autres -, afin que cette année universitaire valorise leur parcours. Nous voulons instaurer la solidarité dans le corps des professions de santé, quels que soient les métiers.
    Cinquièmement, nous avons voulu mettre en oeuvre la validation des acquis de l'expérience.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler, rapporteure pour l'assurance vieillesse. Très bien !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Nous avons été très volontaristes dans ce domaine. Ainsi, 14 % des nouvelles infirmières sont d'anciennes aides-soignantes. Nous les avons aidées à devenir infirmières en complétant leurs connaissances pratiques par des enseignements théoriques.
    Sixièmement, nous avons pris des mesures d'incitation à l'installation, que je ne détaillerai pas.
    Septièmement, nous avons créé un nouveau statut de médecin attaché à l'hôpital.
    Huitièmement, nous avons développé les hôpitaux locaux ; des projets sont en cours de construction.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler, rapporteure pour l'assurance vieillesse. Très bien ! Nous avions d'ailleurs commencé à le faire !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Enfin, grâce à un autre rapport du professeur Berland, nous avons décidé de mener des expérimentations afin de repousser la frontière des métiers paramédicaux. Il n'est pas normal, dans la filière santé, qu'il n'existe pas de diplômes intermédiaires, sanctionnant un bac plus cinq ou six, entre le diplôme d'infirmière, par exemple, à bac plus trois ou quatre - et celui de médecin - bac plus huit ou dix. Il nous faut donc créer des spécialités vers lesquelles les infirmières, les sages-femmes ou les kinésithérapeutes pourront s'orienter afin de venir en aide, notamment, aux spécialités médicales déficitaires. Pour ce faire, nous mènerons toute une série d'expérimentations. Je vous indique que le rapport de M. Berland est consultable sur le site Internet du ministère de la santé. C'est un des points sur lesquels nous nous sommes beaucoup impliqués ces temps derniers.
    Mesdames, messieurs les députés, j'espère que ceux d'entre vous que j'aurais omis de citer me pardonneront. Mais il est déjà très tard et j'aurais encore beaucoup à dire. Je préfère donc réserver mes interventions pour la discussion des articles, que nous entamerons dès ce soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la famille.
    M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille. Je voudrais d'abord vous remercier, mesdames, messieurs les députés, pour vos interventions, et remercier également Mme et MM. les rapporteurs, notamment Claude Gaillard, rapporteur pour la famille, dont le rapport est excellent.
    M. Pierre-Christophe Baguet. Excellent, c'est le mot !
    M. le ministre délégué à la famille. Il a largement contribué, avec beaucoup d'autres parlementaires, d'ailleurs - certains ont pu s'exprimer, d'autres n'ont pas pu le faire -  à la préparation de la conférence sur la famille et donc à toutes les mesures qui entreront en application après le vote du PLFSS. Ces propositions sont le fruit de la contribution importante que chacun à apporté à son niveau.
    Vous avez tous, notamment Bernard Perrut, qui a évoqué la politique familiale, mais aussi Martine Aurillac et d'autres encore, articulé vos propos autour du trépied qui a été le fondement de cette réflexion : simplifier - j'aurais l'occasion d'y revenir dans un instant -, renforcer le pouvoir d'achat des familles, et développer l'offre de garde. C'est autour des ces trois concepts que nous avons bâti ces propositions qui, je crois, donnent globalement satisfaction et surtout répondent largement à l'attente légitime des familles dans ce domaine.
    Je remercie également M. Préel pour son soutien appuyé.
    Je répondrai à quelques-unes des interrogations de M. Baguet, dont je partage d'ailleurs un certain nombre. Comme vous, monsieur Baguet, je suis favorable au déplafonnement total des aides et au principe de l'universalité de la politique familiale, mais il convient de prendre en compte les contraintes budgétaires. Nous avons néanmoins réalisé des avancées importantes. La prestation la plus universelle l'APJE, l'allocation parentale au jeune enfant, concerne actuellement 1,4 million de familles. Leur nombre passera à 1,9 million de familles. Autrement dit 90 % des familles françaises bénéficieront de la prestation de base de l'APAJE, c'est-à-dire à la fois de la prime à la naissance de 800 euros versée au septième mois de grossesse et d'une prestation renouvelable de 160 euros jusqu'au troisième anniversaire de l'enfant. Seules les 10 % des familles ayant les revenus les plus élevés n'en bénéficieront pas. Si nous n'avons pas été plus loin, c'est pour une raison de coût. L'estimation est simple : 450 millions d'euros. Vous voyez que l'effort est important.
    Vous avez également exprimé des inquiétudes sur la prise en compte du congé de maternité dans la période d'activité lors de la mise en place du complément « libre choix d'activité » de l'APAJE. Effectivement, les critères ont été réduits, notamment à partir du deuxième enfant. On passera de deux ans dans les cinq ans d'activité à deux ans dans les quatre ans.
    Sur ce point, je voudrais tout de suite vous rassurer.
    M. Richard Mallié. Merci, monsieur le ministre.
    M. le ministre délégué à la famille. Il n'y a pas le moindre souci. On va peut-être même aller plus loin que ce que vous espérez. Seront pris en compte les périodes de congés maternité, le congé parental rémunéré, les arrêts maladie, les périodes de chômage, les périodes de formation professionnelle. Voilà ce que l'on entend par activité. Il n'y a donc aucune restriction dans ce domaine. Cela fait partie des points qui ont été largement évoqués avec les mouvements familiaux. Si vous aviez une crainte à ce sujet, elle doit être levée avec ces éléments de réponse.
    Autre interrogation, celle soulevée par un amendement que vous souhaitiez déposer et qui vise à supprimer le taux de transfert de 60 % permettant les majorations de pension. Je me permets d'appeler votre attention sur le fait que si cet amendement était adopté par l'Assemblée, le transfert ne serait plus de 60 % mais de 100 %. A ce moment-là, l'intégralité des majorations de pension reposerait sur la branche famille. Il faut bien mesurer les conséquences qui peuvent résulter d'une telle adoption.
    Selon vous, la majoration de pension pour les familles ayant trois enfants et plus permettait de financer des choses « qui n'ont rien à voir avec la politique familiale ». Je ne suis pas d'accord, une telle disposition est tout de même liée à cette politique familiale. Nous avons le souci de conduire une action de solidarité en direction des familles les plus nombreuses.
    M. Richard Mallié. Oui !
    M. le ministre délégué à la famille. C'est pour cela que je souhaite que cette majoration perdure. Un tel amendement ne doit pas être déposé compte tenu des risques que j'ai évoqués.
    Et si cette majoration n'était pas financée par la branche famille, elle le serait par une autre. En tout cas, cela relève tout de même de la politique familiale.
    S'agissant de votre proposition de verser les allocations familiales jusqu'à vingt-deux ans,...
    M. Pierre-Christophe Baguet. L'année prochaine !
    M. le ministre délégué à la famille. ... il faut savoir qu'une telle mesure coûterait 1,2 milliard d'euros.
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas cher !
    M. le ministre délégué à la famille. Tout est relatif. Je sais que M. Gremetz considère, en spécialiste budgétaire averti, que ce n'est pas cher,...
    M. Charles Cova. A gauche, ils distribuent facilement l'argent !
    M. Maxime Gremetz. Par rapport à un milliard d'exonérations pour M. Seillière, ce n'est pas grand-chose !
    M. le ministre délégué à la famille. ... mais il faut tout de même prendre la mesure de l'importance de l'engagement financier qu'impliquerait une telle mesure.
    Nous avons mis en place depuis le 1er juillet dernier la mesure « grands enfants », votée lors du dernier PLFSS, qui permet aux familles de trois enfants et plus, dont l'aîné a désormais atteint l'âge de vingt ans, de continuer à percevoir pendant un an des allocations familiales pour cet enfant, et ce à hauteur de 70 euros. Cela permettra d'éviter la perte brutale de revenus qui survient lorsqu'on ne touche plus les allocations que pour deux enfants, alors que le troisième est toujours à charge.
    Vous souhaiteriez qu'un rapport d'évaluation sur le dispositif du complément du libre choix d'activité soit déposé. Je pense qu'il faut avoir une vision plus large et qu'il faudra faire le point de l'ensemble de la politique familiale avec les mouvements familiaux, les partenaires sociaux et les parlementaires. Une telle évaluation se fera notamment dans le cadre de la conférence de la famille, à laquelle participent tous ceux que je viens de citer. Il faut avoir la vision la plus objective possible de l'engagement très fort du Gouvernement en direction de la politique familiale. Je vous rappelle qu'en matière de garde d'enfant le Gouvernement a consenti un effort sans précédent. Il faut revenir vingt ans en arrière pour trouver un tel engagement financier de la part d'un gouvernement en matière de politique familiale.
    Mme Marie-Françoise Clergeau. En faveur de qui ? Précisez !
    M. le ministre délégué à la famille. Je vais y venir, ne vous inquiétez pas, madame Clergeau ! Je ne vous oublie pas !
    Je voudrais revenir sur les interventions de MM. Evin et Le Guen, les vôtres, madame Clergeau, celle de Mme Fraysse et les procès d'intention que les uns et les autres ont pu parfois me faire.
    Tout d'abord, M. Evin s'est interrogé sur le budget, demandant quel serait le financement de la politique familiale. C'est très simple : les crédits correspondants sont dans le PLFSS. Dès l'instant où vous aurez voté ce PLFSS, ce dont je ne doute pas, vous aurez contribué à la mise en place de cette politique familiale.
    Ainsi, en 2004, 140 millions d'euros seront réservés pour la PAJE, environ 50 millions pour le plan crèches et 10 millions pour la modification du statut des assistantes maternelles. Notre engagement est qu'en 2007 l'ensemble des financements s'élèvera à 1 milliards d'euros en année pleine, somme à laquelle il faut ajouter 200 millions pour le plan crèches. Reste que dès cette année les financements sont là, inscrits dans le PLFSS.
    Plusieurs d'entre vous se sont interrogés sur la simplification, la soupçonnant de n'être qu'un faux-semblant. Ce n'est pas le cas. Il y avait six prestations : l'APJE courte, l'APJE longue, l'APE, l'AFEAMA, l'AGED, l'allocation d'adoption. Elles sont rassemblées en une seule.
    Mme Marie-Françoise Clergeau. Non, quatre !
    M. Maxime Gremetz. En effet, nous n'arrivons pas au même résultat !
    M. le ministre délégué à la famille. Nous pouvons compter ensemble, si vous voulez ! (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pour ma part, j'en compte six !
    Jusqu'à présent, il existait des formulaires pour chaque prestation - un pour l'URSSAF, un pour la CAF -, et les délais de remboursement atteignaient parfois trois mois. Aujourd'hui, tout cela est rassemblé dans un chèque PAJE. On ne peut pas trouver plus simple. Il suffit d'inscrire le nom de la personne qui garde l'enfant, son numéro de sécurité sociale, ainsi que le nombre d'enfants gardés, leur âge, et le remboursement a lieu dans un délai d'un mois. En matière de simplification, on ne peut pas faire plus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Selon vous, madame Clergeau, la PAJE et le libre choix, c'est pour les riches.
    Mme Marie-Françoise Clergeau. Eh oui !
    M. Claude Gaillard, rapporteur, pour la famille. Elle n'a pas compris !
    M. le ministre délégué à la famille. Je me garderai bien d'être désagréable en vous disant que vous aimez tellement les familles les plus défavorisées que l'essentiel de votre action politique a été d'en créer chaque jour davantage pendant les cinq ans où vous avez été au gouvernement ! (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Qui plus est, la première mesure que vous demandez est l'universalité, alors même que je vous explique que nous prévoyons que la PAJE sera perçue par 90 % des familles françaises, et que seuls les 10 % qui disposent des revenus les plus élevés n'en bénéficieront pas. Voilà votre première demande. Cela dit, ça ne me choque pas sur le fond car c'est aussi la mienne. Mai j'ai un peu de mal à trouver la cohérence de vos propos.
    Mme Marie-Françoise Clergeau. C'est que vous les déformez !
    M. le ministre délégué à la famille. Deuxièmement, vous affirmez que notre tentative pour développer l'accueil individuel serait réservé aux riches. Pour ma part, je considère qu'il n'est pas de la responsabilité de l'Etat de choisir où l'enfant doit être gardé. C'est la responsabilité individuelle de chaque famille.
    Mme Marie-Françoise Clergeau. A condition qu'elle en ait le choix !
    M. le ministre délégué à la famille. Vous avez une position bien tranchée : le collectif, c'est pour les familles les plus démunies ; l'accueil individuel, c'est pour les riches. Quel archaïsme !
    Mme Marie-Françoise Clergeau. Je le répète, vous déformez mes propos ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le ministre délégué à la famille. Au contraire, laissons le choix le plus ouvert possible. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Maxime Gremetz. Ça devient intéressant ! Ça commence à venir !
    M. le ministre délégué à la famille. Il faut avoir une vision à la fois objective, ouverte et pragmatique, et permettre aux familles les plus démunies d'accéder à la liberté de choix. Prenons le cas d'une famille dont les deux parents travaillent pour un revenu mensuel équivalent au SMIC : si elle souhaite faire garder son enfant par une assistante maternelle, cela lui coûtera 30 % de son revenu. Bien évidemment, elle n'a pas de liberté de choix. C'est pourquoi nous mettons en place une prestation qui permettra de réduire le coût du mode de garde à 10 % ou 12 % du revenu, que l'enfant aille dans une crèche ou chez une assistante maternelle. Dans l'un ou l'autre cas, le coût sera le même. Voilà un geste fort en direction des familles les plus démunies et qui ont les plus bas revenus afin de leur permettre d'accéder à la liberté de choix, ce que vous avez toujours refusé, par archaïsme et par dogmatisme. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Marie-Françoise Clergeau. Oh !
    M. le ministre délégué à la famille. Vous nous avez demandé ce que nous avons fait pour les assistantes maternelles. Mais vous, qu'avez-vous fait pour elles durant les cinq ans ou vous avez été au pouvoir ? (« Rien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Rien, en effet !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. On reste sans voix !
    M. le ministre délégué à la famille. De plus, vous les stigmatisez en disant qu'elles n'accueillent que les enfants de riches. C'est faux !
    Mme Marie-Françoise Clergeau. Je n'ai jamais dit cela ! Vous déformez mes propos ! C'est malhonnête !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Quel macho, ce ministre !
    M. le ministre délégué à la famille. Les parents souhaitent avoir une liberté de choix en matière d'accueil.
    A cette fin, nous mettons en oeuvre des mesures en faveur des assistantes maternelles. Ainsi, la modification de l'agrément permettra d'accroître de 15 % les possibilités de garde d'enfant. Une telle disposition a déjà été votée au Sénat, et je ne doute pas que l'Assemblée apportera son soutien à ce bon projet au moment de le voter.
    Nous sommes également en train de mettre en place la validation des acquis de l'expérience pour les assistantes maternelles, de façon à redonner des perspectives à ce métier qui en manquait.
    M. Maxime Gremetz. C'est nous qui avons inventé ce système !
    M. le ministre délégué à la famille. Nous installons le fonds du paritarisme et mensualisons les salaires. Nous créerons en 2005 une caisse de prévoyance maladie et accident du travail. Enfin, les assistantes maternelles disposeront d'un véritable contrat de travail. Sur tous ces points, vous n'avez apporté aucune réponse aux assistantes maternelles durant cinq ans. Nous, nous leur apportons une réponse on ne peut plus claire.
    S'agissant du plan crèches, il bénéficiera de 200 millions d'euros dont 40 millions dès 2004. Il permettra la création de 20 000 places des crèches.
    M. Maxime Gremetz. Vous prévoyez beaucoup, vous ne faites jamais !
    M. le ministe délégué à la famille. Je vous rappelle que le précédent plan crèches d'une telle ampleur n'avait mobilisé que 13 millions d'euros la première année. Nous, nous en prévoyons 40, ce qui nous permettra d'être réactifs face aux demandes.
    Mme Marie-Françoise Clergeau. Ça fait seulement quelques centaines de  places par département !
    M. le ministre délégué à la famille. Puisqu'il faut vraiment mettre les points sur les i, je signale que c'est nous qui avons financé le dernier plan crèches annoncé par le gouvernement précédent. (Eh oui ! sur les bancs de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    S'agissant de la politique familiale, vous pourriez considérer que nous manquons un peu d'objectivité - ce qui n'est pas le cas, bien entendu. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Aussi, je vais rappeler quels ont été les votes du conseil d'administration de la CNAF sur les PLFSS présentés par la gauche : en 1999, vote défavorable ; en 2000, vote défavorable ; en 2001, vote défavorable !
    Pour notre part, nous bénéficions depuis deux ans d'un vote favorable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Marie-Françoise Clergeau. Une seule fois !
    M. le ministre délégué à la famille. Les partenaires sociaux et les mouvements sociaux vous ont condamnés. Je n'y peux rien !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. C'est inacceptable de la part d'un ministre !
    M. le ministre délégué à la famille. Peut-être considérez-vous que nous manquons d'objectivité, mais vous ne pouvez sans doute pas porter le même jugement sur les mouvements familiaux et les partenaires sociaux !
    Je vous remercie de votre attention et de votre contribution au débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Rappels au règlement

    Mme Marie-Françoise Clergeau. Madame la présidente, je demande la parole !
    Mme la présidente. Vous voulez faire un rappel au règlement, madame Clergeau ?
    Mme Marie-Françoise Clergeau. Plutôt pour un pour fait personnel. M. Jacob a totalement déformé les propos que j'ai tenus, hier. Il m'a ouvertement accusée en prenant un exemple précis, d'avoir menti. Toutefois, il n'a pas démontré le contraire de ce que j'avançais.
    Par ailleurs, je considère qu'il a tenu des propos machistes. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je demande la parole pour un rappel au règlement, madame la présidente.
    M. Richard Mallié. Sur quel article ?
    Mme la présidente. Vous avez la parole, madame Guinchard-Kunstler, pour faire un rappel au règlement.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Ce que vient de dire Mme Clergeau est exact. Je n'ai jamais vu un ministre attaquer ainsi personnellement un député, ni déformer autant ses propos. Je tiens à le dire fermement.
    M. Eric Woerth. Ce sont sont vos arguments qu'il à attaqués !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. J'ajoute que je n'ai jamais vu non plus une telle attitude de moquerie systématique de la part des membres du cabinet assis derrière le ministre.
    M. Jean-Paul Bacquet. Oui, c'est une honte ! Ils sont tenus au devoir de réserve !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je trouve cela vraiment incroyable. Les commissaires du Gouvernement ne sont là que pour aider les ministres. L'attitude qu'ils ont aujourd'hui est inacceptable,...
    Mme Muguette Jacquaint. Ils n'ont pas respecté leur devoir de réserve !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ... je tenais à la dénoncer solennellement. (Exclamations sur les bancs du du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Charles Cova. Laissez les fonctionnaires tranquilles !

Reprise de la discussion

    Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Mes chers collègues, avant de m'exprimer sur la motion de renvoi en commission, je voudrais remercier tous les députés présents dans l'hémicycle, qui ont participé à un débat parfois un peu vif, j'en conviens, mais globalement très intéressant.
    M. Maxime Gremetz. Le débat a dérapé !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Je tiens à remercier en particulier - vous le comprendrez tous - les membres de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mes remerciements vont aussi à Pierre Morange, le rapporteur pour les recettes et l'équilibre général, à François Goulard, le rapporteur pour avis de la commission des finances, à Bruno Gilles, le rapporteur pour l'assurance maladie, à Claude Gaillard, le rapporteur pour la famille, et à Paulette Guinchard-Kunstler,...
    M. Jean-Louis Dumont. Qui n'a même pas été saluée par le ministre délégué à la famille ! Quel scandale !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. ... que je cite en dernier, non pour une question d'ordre alphabétique ou pour une quelconque raison machiste, mais tout simplement parce que les crédits de la vieillesse sont les derniers dans l'ordre d'examen. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Le ministre délégué à la famille ne m'a même pas cité !
    Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous en prie !
    Finissez votre intervention, monsieur le président. Il est temps que la séance soit levée, parce qu'il s'est tout de même produit un certain nombre de faits assez désagréables.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Avant de m'exprimer sur la motion de procédure, je tiens à faire deux remarques.
    Premièrement, je ne regrette pas d'avoir fait « tourner » les rapporteurs. La qualité des rapports présentés par les nouveaux rapporteurs pour avis fait honneur à leurs prédécesseurs - et je vois là Yves Bur et Denis Jacquat. Ces équipes compétentes qui se mettent en place permettent à l'Assemblée de beaucoup mieux travailler.
    Deuxièmement, je ne regrette pas non plus d'avoir demandé au bureau de la commission de désigner les rapporteurs en janvier. Ce délai leur a permis de bien préparer leurs rapports, de procéder à des auditions, et c'est sans doute une des explications de la qualité des rapports qui nous ont été présentés.
    Pour ce qui est de la motion de renvoi en commission, je tiens à citer quelques chiffres qui montrent à quel point notre commission a bien travaillé.
    Mme Muguette Jacquaint. Pas sur les recettes, je regrette !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. En cinq séances, la commission a procédé à deux heures d'audition, s'est réunie treize heures quinze, a examiné 220 amendements,...
    M. Maxime Gremetz. Article 40 ! Article 40 ! Article 40 !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. ... en a adopté 113, dont 100 émanant des rapporteurs, neuf du groupe UDF, trois du groupe UMP et un du Gouvernement, le parti socialiste ayant présenté peu d'amendements au cours du premier examen des cinquante-neuf articles que comporte le PLFSS.
    Mme Muguette Jacquaint. Nous, nous avions présenté des amendements mais ils n'ont pas été adoptés !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. A cette occasion nous avons voté à l'unamité, je tiens à le souligner, monsieur le ministre, la création du comité des finances sociales, et ce à l'iniative de Pierre Morange.
    M. Denis Jacquat. Excellente initiative !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. En effet, c'est une excellente initiative, car elle nous permettra d'y voir plus clair dans les années à venir.
    Lors de la réunion tenue hier, en application de l'article 88 soixante-six amendements ont été examinés, trente-sept été ont repoussés, trois rectifiés, vingt-six acceptés dont deux du groupe socialiste et trois du groupe UDF.
    La commission a donc bien travaillé. Je propose à l'Assemblée de prendre en compte les résultats des délibérations de la commission, et je lui demande de rejeter la motion de renvoi en commission. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-Paul Bacquet, pour le groupe socialiste. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est le règlement !
    M. Jean-Louis Dumont. On peut interdire l'opposition pendant qu'on y est !
    M. Jean-Paul Bacquet. Eh oui, il faut prendre votre mal en patience.
    Monsieur le ministre, vous appelez au consensus ? Pourquoi pas ? Vous appelez au rassemblement ? Pourquoi pas, s'il s'agit de sauver la protection sociale ? Mais, pour finir, vous dites qu'il est facile à l'opposition de s'opposer - il est vrai que vous êtes un expert en la matière. Puis-je vous rappeler qu'il y a un peu plus d'un an, je vous posais une question d'actualité, que vos collègues de la majorité huèrent copieusement. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire).
    M. Pierre-Louis Fagniez. Pas nous !
    M. Jean-Paul Bacquet. Ils pensaient qu'elle venait de moi quand, à la fin de la question, j'ai indiqué que cette question était mot à mot celle que vous aviez posée au ministre précédent.
    M. Denis Jacquat. Oui, je me souviens.
    M. Jean-Paul Bacquet. Votre majorité s'était alors trouvée en difficulté, même si je dois reconnaître que vous m'aviez fait une réponse élégante, mais vous ne pouviez guère faire autrement vis-à-vis de la majorité, qui avait hué votre propre question.
    M. Denis Jacquat. Vous aviez oublié deux mots !
    M. Jean-Paul Bacquet. Bref, si nous n'étions pas a priori hostiles à la recherche d'un consensus, nous ne voyons pas comment nous pourrions y parvenir après les propos caricaturaux de votre collègue Jacob. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le ministre délégué à la famille. Allons !
    M. Jean-Paul Bacquet. Des propos inacceptables. (Protestations sur les mêmes bancs.)
    M. Yves Bur. Quel acteur !
    M. Jean-Paul Bacquet. Pour préparer ce débat, j'ai lu l'intégralité de vos déclarations sur tous les précédents PLFSS, toutes les questions d'actualité et toutes les question écrites que vous avez posées depuis que vous êtes parlementaire.
    M. Yves Bur. Oh là là ! Ça a dû vous occuper un bout de temps !
    M. Dominique Tian. Quel admirateur !
    M. Jean-Paul Bacquet. Très honnêtement, je crois que vous avez trop parlé et trop écrit lorsque vous étiez dans l'opposition.
    M. Pierre-Louis Fagniez. Quel exégète !
    M. Jean-Paul Bacquet. Je le répète, nous ne sommes pas contre le consensus. Le problème, c'est que nous n'avons pas la même conception de la solidarité en matière de protection sociale et que nous faisons une différence majeure entre la solidarité et la générosité, comme cela vous a été rappelé tout à l'heure pendant les questions d'actualité.
    Vous avez fait appel tout à l'heure à l'humilité et à la modestie. Venant de vous, qui disiez très modestement, ici même : « Tout reste à faire en matière de santé publique, et nous le ferons »...
    M. Claude Gaillard, rapporteur pour la famille. Oui. Nous sommes volontaires !
    M. Jean-Paul Bacquet. ... j'apprécie. Vous qui, en permanence, évoquiez l'héritage, qui critiquiez sans vergogne dans le PLFSS 2000...
    M. Yves Bur. C'était justifié !
    M. Jean-Paul Bacquet. ... la décision d'augmenter le prix du tabac pour financer la sécurité sociale, et qui, aujourd'hui, adoptez un dispositif similaire. Vous qui nous reprochiez de considérer la croissance comme une providence, et qui, aujourd'hui, comptez sur celle-ci pour participer à l'équilibre des chiffres. Vous qui, aujourd'hui, évoquez la démographie, mais ne vous avions pas entendu critiquer la mise en place - nous vous avions en effet précédés dans ce domaine - du MICA, mécanisme d'incitation à la cessation anticipée d'activité des médecins.
    M. Richard Mallié. Qu'allez-vous voter ?
    M. Jean-Paul Bacquet. Vous qui venez de rappeler qu'il fallait dix ans pour former un médecin, et quatre ans de plus pour former un spécialiste, vous aviez voté sans hésiter le départ de 28 000 médecins dans le cadre du MICA, le plan Juppé et la maîtrise comptable. Je pourrais continuer mon énumération.
    Ainsi, tout à l'heure, à la tribune...
    M. Richard Mallié. Assez de rappels historiques ! Expliquez votre vote !
    M. Jean-Paul Bacquet. ... vous avez dit vouloir souhaiter garder « le système de sécurité sociale à la française ». Je veux bien vous croire mais je ne peux pas oublier que, dans le PLFSS 1999, vous aviez déclaré : « Pourquoi ne pas introduire, comme d'autres pays l'ont fait, de la concurrence dans la gestion de l'assurance maladie ? » Alors, monsieur le ministre, sortez de l'ambiguïté.
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est ce que je viens de faire.
    M. Jean-Paul Bacquet. Ou il s'agit d'un reniement de tout ce que vous avez dit jusqu'à présent, ou vous nous cachez quelque chose. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Yves Censi. Sophiste !
    M. Jean-Paul Bacquet. C'est pourquoi nous voterons la motion de renvoi en commission.
    Mais je voudrais, pour finir, revenir sur ce qui a suscité de ma part un rappel au réglement hier et un autre à l'instant de la part de Mme Guinchard-Kunstler. Jamais, des collaborateurs ne s'étaient permis ce qu'ils se sont permis dans cette enceinte pendant ce débat. Jamais, des collaborateurs ne sont sortis de leur obligation de réserve comme ils l'ont fait pendant ce débat. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous pouvez protester, messieurs, vous êtes les premiers, dans vos circonscriptions, à critiquer le pouvoir des technocrates qui, quelquefois, méprisent le Parlement. Nous en avons eu ici un bel exemple et je souhaite, monsieur le ministre, parce que je vous crois homme d'honneur, que vous fassiez le vide parmi ces collaborateurs et que vous les rappeliez à leur obligation de réserve. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Jean-Luc Préel. Je voudrais remercier M. le ministre de son intervention, même si beaucoup de points méritent encore d'être clarifiés, concernant notamment le déficit, qui est important, ou la nouvelle gouvernance, que vous avez évoquée.
    Mme Jacqueline Fraysse. Sans faire aucune proposition !
    M. Jean-Luc Préel. Mais nous aurons l'occasion d'en discuter dans les prochains mois, et même sans doute au cours de ce débat.
    Ce qui, aujourd'hui, me paraît important, c'est de trouver la solution pour financer le différentiel entre l'augmentation du PIB et l'augmentation des dépenses de santé, la santé étant, comme vous l'avez rappelé tout à l'heure, un bien supérieur.
    Mme Jacquaint s'est exprimée longuement, je l'ai écoutée avec la plus grande attention.
    Mme Muguette Jacquaint. J'en suis ravie !
    M. Jean-Luc Préel. Mais elle ne m'a pas convaincu malgré la qualité de sa plaidoirie.
    Mme Muguette Jacquaint et Mme Jacqueline Fraysse. C'est bien dommage !
    M. Jean-Luc Préel. Nous voterons donc contre le renvoi en commission.
    Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains. Rapidement.
    M. Maxime Gremetz. J'ai droit à cinq minutes, et je vais les utiliser. Nous avons le temps, nous avons jusqu'à dimanche matin. En effet, article 40 ou pas, nous défendrons tous nos amendements par tous les moyens. Et nous interviendrons très souvent, croyez-moi.
    M. Denis Jacquat. Comme d'habitude !
    M. Maxime Gremetz. Vous allez payer cher le refus de nos amendements. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Dominique Tian. C'est la dictature !
    M. Pierre Morange, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général. Ce sont des menaces qui mériteraient un rappel au règlement !
    M. Maxime Gremetz. Mme Jacquaint a fait une remarquable démonstration, d'une part sur la nocivité des projets qui existent aujourd'hui, d'autre part, sur les nouveaux besoins en termes de santé, compte tenu du vieillissement de la population, des nouvelles maladies notamment professionnelles, des accidents de travail, etc. Pour satisfaire ces besoins nouveaux, il faudra, comme vous l'avez si bien dit, monsieur le ministre, des financements nouveaux. Or, pour l'instant, j'ai beau chercher, je ne vois aucune proposition, fût-elle minime, de nouveaux financements.
    M. Pierre Micaux. Qui a laissé les milliards de dettes ? C'est bien vous !
    M. Richard Mallié. Deux minutes de passées !
    M. Maxime Gremetz. Tout ce que vous proposez pour essayer de limiter un peu le déficit, c'est de faire supporter aux usagers, au nom de la responsabilisation, l'essentiel des 1,8 milliard d'euros que vous escomptez.
    Dans le même temps, vous jugez les financements que nous proposons inadaptés, dignes d'une économie planifiée. Non, monsieur Mattei, ne prenez pas les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages ! (Rires et exclamations sur divers bancs.)
    M. François Goulard, rapporteur pour avis. Ah ! La chasse !
    M. Hervé Mariton. Vous n'avez pas une tête d'enfant de choeur !
    M. Richard Mallié. Trois minutes !
    M. Maxime Gremetz. Je vous en prie, pas ça, pas vous !
    Les propositions que vous faites depuis des dizaines d'année en termes de financements nouveaux ou d'organisation sont toujours les mêmes. On ne peut pas dire que vous fassiez preuve de beaucoup de créativité. Ce n'est pas en reprenant toujours les mêmes recettes que nous pourrons en sortir, quel que soit le gouvernement.
    Vous dites ne pas vouloir augmenter la CSG. Nous non plus ! Voilà un point d'accord important. Nous avons voté contre l'instauration de la CSG parce que nous ne voulons pas faire dépendre le financement de la sécurité sociale de la fiscalité. Nous voulons qu'il repose sur les cotisations patronales et salariales, sur les richesses produites dans le pays.
    M. Charles Cova. Sur le patronat évidemment !
    M. Richard Mallié. Il reste une minute !
    M. Maxime Gremetz. On prétend frapper un petit peu les profits financiers à travers la CSG ? Mais 87 % de son produit sont payés par les salariés. Nous ne voulons pas que les salariés supportent une charge supplémentaire. Nous sommes donc d'accord avec vous quand vous refusez d'augmenter la CSG.
    M. Richard Mallié. Il reste trente secondes !
    M. Maxime Gremetz. Encore que, dans la presse ce matin, vous sembliez hésiter et ne pas rejeter, à terme, l'idée de toucher à la CSG. Mais c'est comme la suppression d'un jour férié, un jour c'est oui, un jour c'est non, un jour c'est peut-être.
    Mme Muguette Jacquaint. C'est le flou !
    M. Richard Mallié. Quinze secondes !
    M. Maxime Gremetz. Ensuite, monsieur le ministre, j'attire votre attention sur ce fait,...
    M. Richard Mallié. Dix secondes !
    M. Maxime Gremetz. ... ce projet de santé publique est rempli de bonnes intentions sans résolution.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Cinq, quatre, trois, deux, un, zéro !
    M. Richard Mallié. Ça y est ! Cinq minutes ! Et cinq minutes bien pleines !
    Mme la présidente. Non, je surveille !
    M. Maxime Gremetz. Madame la présidente, je vous demande de faire en sorte que l'on ne m'interrompe pas. C'est très désagréable.
    M. Jean-Louis Dumont. La parole au peuple !
    Mme la présidente. En effet, c'est pénible pour tout le monde et vous ne faites que retarder l'heure de la levée de séance. Quant à vous, monsieur Gremetz, veuillez conclure rapidement, s'il vous plaît.
    M. Maxime Gremetz. Non, quand on me dit ça sur ce ton, je ne termine jamais ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. Monsieur Gremetz, le temps est le même pour tout le monde. Je vous demande de respecter les cinq minutes imparties.
    M. Charles Cova. Il les a largement dépassées !
    M. Maxime Gremetz. D'accord, mais faites en sorte alors que je puisse parler en toute quiétude.
    Nous, nous sommes les seuls à faire des propositions de financement solides, qui s'attaquent vraiment à la racine du mal, qui permettent de ne pas laisser filer les déficits et surtout d'empêcher qu'on se dirige, comme le disait fort justement Mme Jacquaint, vers la privatisation déguisée. Même si ce n'est pas le terme qui sera employé, nous n'en voulons pas. C'est pourquoi nous voterons des deux mains, évidemment, la motion de renvoi en commission de Mme Jacquaint. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix la motion de renvoi en commission.
    (La motion de renvoi en commission n'est pas adoptée.)

Rappel au règlement

    M. Yves Bur. Madame la présidente, je demande la parole pour un rappel au règlement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Yves Bur, pour un rappel au règlement.
    M. Yves Bur. Je voudrais simplement m'indigner que l'on profite du fait que les collaborateurs des ministres n'ont pas droit à la parole pour les attaquer et leur faire des procès d'intention. C'est inadmissible. Faut-il que les propositions soient creuses pour qu'on s'attaque maintenant aux collaborateurs et qu'on demande, comme l'a fait notre collègue Bacquet, au ministre de faire le vide ! En tout cas, nous jugeons cette attaque scandaleuse et nous ne l'acceptons pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Muguette Jacquaint. Mais certains comportements manquent de respect !
    Mme la présidente. Il ne me paraît pas utile de rouvrir le débat sur des incidents que je considère comme clos. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il reste que j'ai moi-même constaté certaines choses. (Nouvelles protestations sur les mêmes bancs.) Chacun a pu se faire son opinion et l'exprimer. J'espère que, ce soir, les débats retrouveront un peu de sérénité.
    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

5

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heure quarante-cinq, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, n° 1106 :
    MM. Pierre Morange, Bruno Gilles, Claude Gaillard et Mme Paulette Guinchard-Kunstler, rapporteurs au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tomes I à V du rapport n° 1157) ;
    M. François Goulard, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis n° 1156).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à vingt heures quinze.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT