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Deuxième séance du mardi 4 novembre 2003

47e séance de la session ordinaire 2002-2003


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe socialiste.

DÉFICIT DE L'ASSURANCE MALADIE

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Depuis deux ans, monsieur le Premier ministre, l'assurance maladie part à la dérive. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Par votre politique de l'emploi, en fait celle du chômage, les recettes s'affaiblissent. Par laxisme, vous laissez s'envoler les dépenses. Aujourd'hui, nous allons voter le projet de loi de financement de la sécurité sociale, et les premières victimes de votre politique seront d'abord les assurés : ils seront moins bien remboursés, que ce soit pour leurs médicaments ou leurs indemnités journalières ; ils seront moins exonérés du ticket modérateur. Bref, cette diminution des prestations prépare votre politique de privatisation.

Les dépenses prévues par votre projet de loi de financement de la sécurité sociale sont abyssales, comme disait M. le ministre de la santé : plus de 30 milliards d'euros de dettes ! Les parlementaires, surtout ceux de la majorité, ont bien compris qu'ils n'auront pas à en assumer le remboursement avant les élections, mais ils se demandent quand et comment vous leur demanderez d'assurer un tel déficit.

Seconde question, le projet que nous allons voter ne comporte pratiquement aucune mesure en faveur des personnes âgées, en dépit de tous les événements de cet été. Vous avez évoqué ces derniers jours la perspective de la suppression de jours fériés, en expliquant que cela pourrait servir à mettre en place une politique en faveur des personnes âgées. Or, selon plusieurs informations, votre gouvernement, à Bruxelles, s'est engagé à ce que cela serve à combler les fameux déficits dont je parlais précédemment. A qui et quand dites-vous la vérité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le député, nous avons hérité du gouvernement précédent une assurance maladie qui n'avait fait l'objet d'aucune réforme de structure (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) alors que c'est pendant les périodes de croissance que l'on procède aux réformes nécessaires. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Si nous ne l'avons pas encore fait, c'est parce que nous considérons que la sécurité sociale fait partie du patrimoine social des Français et que, l'ayant construit ensemble, nous devons la réformer ensemble. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous prenons le temps du dialogue et du diagnostic et nous prendrons le temps de la décision.

Dans une heure, l'Assemblée nationale aura à se prononcer sur le PLFSS. Elle le fera en toute clarté. Monsieur Le Guen, vous savez que nous avons eu un débat respectable, qui a abordé le fond des sujets. Vous ne pouvez pas dire que c'est un PLFSS sans réformes. L'hôpital représente plus de la moitié du budget, et nous réformons toute la tarification hospitalière.

M. Bernard Roman. Cataplasme !

M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Quant à la solidarité qu'impose le vieillissement de la population, le Premier ministre annoncera lui-même les mesures dès lors qu'elles seront arrêtées. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

POLITIQUE BUDGÉTAIRE

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe UDF.

M. Charles de Courson. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, compte tenu de la situation budgétaire extrêmement dégradée de la France, la Commission européenne a déclenché une procédure de déficit excessif à notre encontre. Le ministre des finances a promis hier soir à nos partenaires de la zone euro qu'il allait travailler à un cheminement crédible pour réduire davantage les déficits de 2004. Dans ce cadre, nos partenaires demandent à la France un effort supplémentaire de réduction du déficit de 6 milliards d'euros, et le conseil des ministres des finances de l'Union pourrait accepter un compromis autour de 3 milliards. En tout état de cause, l'alternative est simple, soit augmenter les impôts, soit réduire les dépenses publiques.

En la matière, le groupe UDF tient à rappeler son profond attachement à trois principes : le respect des prérogatives du Parlement en matière de finances publiques, sur lequel insiste régulièrement M. le président de l'Assemblée nationale, le respect de la parole donnée à nos partenaires européens par le vote de notre peuple en faveur du traité de Maastricht, et le respect des principes de bonne gestion des finances publiques et en particulier de la maîtrise des dépenses publiques.

Le Gouvernement envisage-t-il d'augmenter les prélèvements obligatoires, notamment en créant une nouvelle cotisation sur les salaires liée à la suppression d'un jour férié, ou compte-t-il, comme l'a proposé le groupe UDF, diminuer des dépenses publiques et, dans l'affirmative, lesquelles ?

Par ailleurs, respectera-t-il les prérogatives du Parlement en déposant les amendements nécessaires devant l'Assemblée nationale avant le vote du budget en première lecture par notre assemblée le 18 novembre prochain ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.

M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le député, le respect que vous avez évoqué, c'est un principe auquel est attaché le Gouvernement, et sa parole est bien sûr la même à Paris et à Bruxelles.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Laquelle ?

M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Le dialogue avec nos partenaires européens est ouvert, sincère et transparent. Grâce aux efforts de maîtrise de la dépense que nous avons pu réaliser, avec d'ailleurs le soutien de votre assemblée, nous avons, avec les Pays-Bas, la plus forte baisse de déficit structurel en Europe.

De surcroît, la Commission européenne a bien voulu entendre notre souhait de voir reporter à 2005 le retour du déficit en dessous de la barre des 3 %.

M. Bernard Roman. Elle n'a pas répondu !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il n'y aura donc aucune modification du projet de loi de finances qui a été déposé sur le bureau de votre assemblée et qui est en cours de discussion, ni du projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Bernard Roman. Verbiage !

RETRAITE DES SALARIÉS AYANT COMMENCE À TRAVAILLER JEUNES

M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Alain Bocquet. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Vous le savez, j'ai défendu à deux reprises à cette tribune au nom du groupe des député-e-s communistes et républicains, avant comme après le changement de gouvernement, le droit à une retraite pleine et entière pour les travailleurs ayant cotisé quarante annuités avant l'âge de soixante ans (« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs), mesure humaine, de bon sens et de justice attendue par des salariés qui ont souvent connu dès leur plus jeune âge les pires conditions de travail et de rémunération.

A deux reprises, la proposition que nous défendions et qui s'adressait à 800 000 de nos concitoyens a été rejetée au nom de son coût financier. A-t-on, monsieur le Premier ministre, porté la même attention au coût social ? A-t-on pris en compte l'efficacité économique d'un dispositif qui permettrait d'ouvrir le chemin de l'emploi au lieu de celui de l'ANPE à des dizaines de milliers de jeunes confrontés au chômage ?

Le Gouvernement a été contraint d'intégrer une proposition très édulcorée au milieu d'une réforme des retraites particulièrement rétrograde. Les décrets d'application rendus publics en font aujourd'hui une coquille quasiment vide. Vous imposez les conditions les plus restrictives, en exigeant jusqu'à quarante-deux annuités et en ne tenant compte que de façon limitée des périodes de maladie, d'invalidité, de chômage, de service militaire ou de maternité. Les femmes sont une fois encore les plus pénalisées.

De plus, aucune garantie n'est assurée quant aux retraites complémentaires. Allez-vous mettre la pression nécessaire pour imposer au MEDEF, qui renâcle dans les négociations en cours, l'application de ce droit ? Allez-vous revenir sur ces décrets qui déçoivent toutes celles et tous ceux qui ont commencé à travailler à quatorze, quinze ou seize ans et qui ont ainsi participé au développement économique de la France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur Bocquet, je prends acte de votre déclaration et je vous rends hommage. En effet, le groupe communiste s'est battu depuis de nombreuses années pour que quelqu'un qui a commencé à travailler très jeune, à quatorze, quinze, seize ans, puisse partir à la retraite dès qu'il a cotisé le nombre d'années nécessaire. C'était une revendication des communistes, elle avait été refusée par les socialistes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - « Hou ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Si M. Bocquet m'a posé cette question, c'est qu'il attendait cette réponse ! (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

C'est vrai, monsieur Bocquet, que c'est une avancée sociale majeure. Si la situation financière de notre pays était meilleure (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), nous aurions pu l'étendre à plus de 200 000 personnes. (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Mme Martine David. Ce n'est pas vrai !

M. le Premier ministre. Aujourd'hui, grâce aux décrets que nous avons pris, 200 000 personnes qui ont commencé à travailler à quatorze, quinze et seize ans pourront partir avant soixante ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Au fur et à mesure, nous pourrons développer ce type d'approche qui était au cœur de la grande réforme des retraites que nous avons voulue.

En effet, nous faisons pression sur l'ensemble des partenaires sociaux...

Plusieurs députés du groupe socialiste. Le MEDEF !

M. le Premier ministre. ... pour qu'un accord sur les retraites complémentaires vienne renforcer cet acquis social.

Puisque vous soulignez cette dimension sociale de l'action gouvernementale, je voudrais évoquer deux autres grandes réformes qui montrent bien que le Gouvernement mène une action sociale (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), que certains cherchent à caricaturer mais qui est une action en profondeur.

Je veux parler notamment de l'augmentation du SMIC, qui n'avait pas été augmenté dans le passé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Je suis fier d'être à la tête du gouvernement qui va donner l'équivalent d'un treizième mois à un million de smicards. Ça, c'est du vrai social, du social du terrain, du social partagé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Il y a enfin le droit individuel à la formation que les syndicats ont approuvé. Sous le gouvernement précédent, le dialogue social était asphyxié, l'ensemble des partenaires sociaux viennent de donner aux salariés la possibilité de conquérir ce droit à la formation tout au long de la vie, qui est la meilleure des sécurités sociales. Voilà une autre avancée sociale.

Nous sommes très attentifs à ce que, dans cette période très difficile pour les Françaises et les Français, nous soyons en mesure de répondre à ce qui a toujours été la tradition de la République, c'est-à-dire la préoccupation sociale. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

OBSERVATOIRE NATIONAL DE LA DÉLINQUANCE

M. le président. La parole est à M. Jean Tiberi, pour le groupe UMP. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean Tiberi. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Monsieur le ministre, les Françaises et les Français sont de plus en plus rassurés (Rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) par la volonté et la détermination du Gouvernement - et la vôtre en particulier - de rétablir un climat de sécurité dans le pays en réaffirmant l'autorité de l'Etat.

Sous votre impulsion, l'action des forces de l'ordre s'est traduite depuis plus d'un an par une baisse significative des chiffres de la délinquance.

M. Christophe Masse. Toute la délinquance !

M. Jean Tiberi. Nous sommes donc dans la bonne direction, mais il faut poursuivre l'effort avec la même vigilance, la même fermeté sur l'ensemble du territoire.

Dans ce sens, vous avez réuni ce matin pour la première fois le conseil d'orientation de l'observatoire national de la délinquance. (« Allô ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire quelles sont les missions essentielles de cet observatoire et nous préciser le déroulement de cette première réunion ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, un rapport avait été confié par le précédent gouvernement à deux éminents parlementaires, M. le ministre Robert Pandraud et M. Christophe Caresche. Il avait été unanimement reçu comme un rapport de qualité, comportant des propositions intéressantes.

Le précédent gouvernement en avait tiré la conclusion que c'était intéressant... mais qu'il ne fallait rien faire ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin en a tiré la conclusion que puisque c'était intéressant, il fallait le faire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) C'est sans doute une différence de culture, à moins qu'il ne s'agisse d'une question de volonté politique.

De quoi s'agit-il ? De mettre, pour une fois, les statistiques au-dessus de tout soupçon.

M. Daniel Vaillant. Quel aveu !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous aviez rêvé d'un observatoire indépendant de la délinquance. Eh bien, soyez beau joueur, applaudissez, parce que nous l'avons créé ce matin. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) De surcroît, il sera présidé par M. Bauer (Murmures sur les bancs du groupe socialiste)...

Ce n'est pas parce qu'il a appartenu au cabinet de Michel Rocard  qu'il convient de le critiquer ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Dans mon esprit, c'est plutôt un gage d'indépendance et de respect !

Désormais, l'évaluation des résultats se fera en toute transparence. Mais cela ne doit pas nous empêcher de nous réjouir des résultats du mois d'octobre. Monsieur Tiberi, à Paris - et c'est une première -, au mois d'octobre, la délinquance a reculé de 8 % ; la délinquance de voie publique a reculé de 15 % et la délinquance dans les transports et les voies ferrées d'Ile-de-France de 20 %. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Cela aussi, vous en aviez rêvé ! Merci, de nous avoir laissé le faire. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

CENTRES ÉDUCATIFS FERMÉS

M. le président. La parole est à M. Etienne Blanc, pour le groupe UMP.

M. Etienne Blanc. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux.

L'article 22 de la loi du 3 août 2002 crée les centres éducatifs fermés. Ce nouvel outil, mis à la disposition des magistrats, se situe entre les centres éducatifs renforcés et les placements en détention provisoire en maison d'arrêt. Il s'adresse aux mineurs de treize à dix-huit ans, souvent très violents et la plupart du temps réitérants.

Ces centres permettent de garantir la présence effective des mineurs dans un établissement, mais surtout de donner des moyens supplémentaires aux éducateurs et de permettre à ces jeunes de retrouver une formation et d'être accompagnés.

Monsieur le garde des sceaux, au terme d'un an de mise en œuvre de ces centres éducatifs fermés, pouvez-vous nous indiquer combien de ces centres sont aujourd'hui en état de fonctionner, combien de mineurs y ont été placés et, surtout, quel est l'avis des professionnels - magistrats, professionnels de la prévention judiciaire de la jeunesse - sur leur fonctionnement et sur leur efficacité ?

Enfin, pouvez-vous nous faire part des dysfonctionnements éventuels et nous dire, le cas échéant, si vous sollicitez des moyens matériels supplémentaires, voire de nouveaux moyens législatifs, pour faire face au lancinant problème de la délinquance des jeunes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, les centres éducatifs fermés, vous venez de le rappeler, ont été prévus par la loi d'orientation qui a été promulguée en septembre 2002. Cette création répond à un engagement fort du Président de la République et du Gouvernement.

Six centres sont aujourd'hui en place et ils ont accueilli soixante-quatre jeunes ; neuf seront ouverts d'ici à la fin de l'année 2003 et vingt avant l'été prochain.

J'ai réuni, au début de la semaine dernière, les professionnels de terrain - magistrats, juges pour enfants, directeurs de ces centres, responsables des associations, responsables des services régionaux de la protection judiciaire de la jeunesse - qui vivent ces premières expériences.

Quelles sont leurs premières conclusions ? Tout d'abord, les jeunes accueillis sont effectivement des jeunes très difficiles dont, jusqu'à présent, ni les magistrats, ni les professionnels de la réinsertion ne savaient comment les traiter, comment les suivre, comment les accueillir, comment engager un processus positif avec eux, compte tenu de la fréquence de leurs délits.

Ces jeunes sont très souvent dans un état sanitaire et psychiatrique extrêmement préoccupant. Le placement dans les centres fermés permet un redémarrage positif, par le simple fait qu'ils ne sont ni dans la rue, ni en prison et qu'ils ne sont pas susceptibles de commettre de nouveaux délits.

Deuxième observation très importante, après quelques semaines passées dans ces centres, le bilan pour les jeunes qui les quittent, sur décision de justice, est manifestement positif. Un certain nombre d'entre eux ont pu ainsi reprendre un cursus de formation professionnelle tout à fait normal. Ces centres apportent donc une réponse positive en matière de sécurité publique comme en matière de réinsertion.

Deux aspects peuvent être améliorés de façon significative. Tout d'abord, la coordination entre le travail fait à l'intérieur de ces centres et le suivi à l'extérieur. La protection judiciaire de la jeunesse doit pouvoir assurer la continuité de l'accompagnement, au-delà même de la période de placement. Deuxième amélioration que je veux introduire, la création de comités de suivi locaux, avec l'ensemble des responsables - justice, police, élus locaux, milieux économiques -, pour accompagner le travail qui est fait dans ces centres au bénéfice de ces jeunes et au bénéfice de la sécurité.

Monsieur le député, le bilan est positif et encourageant : la sécurité des Français est mieux assurée et ces jeunes ont droit à une deuxième chance. C'était un engagement. Il a été tenu. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

RETRAITE ANTICIPÉE POUR LES LONGUES CARRIÈRES

M. le président. La parole est à M. Alfred Trassy-Paillogues, pour le groupe UMP.

M. Alfred Trassy-Paillogues. Ma question, à laquelle j'associe Christian Vanneste, s'adresse à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

Monsieur le ministre, avec force concertation et conviction, vous avez réformé le système des retraites (« Allô ! » sur les bancs du groupe socialiste) permettant pour les générations qui nous suivent une meilleure justice sociale.

S'il est une mesure qui plaît beaucoup dans nos circonscriptions, c'est bien celle qui touche les personnes ayant commencé à travailler à quatorze ans.

M. Maurice Leroy. Voilà !

M. Alfred Trassy-Paillogues. Nombre de nos administrés ont remarqué que le décret afférent avait été publié la semaine dernière. A quelle date les bénéficiaires potentiels pourront-ils engager leurs démarches ?

M. François Hollande. La question a déjà été posée !

M. Alfred Trassy-Paillogues. Quelles seront les modalités de suivi de cette opération ?

Monsieur le ministre, je vous remercie par avance de l'éclairage que vous nous apporterez. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Mesdames, messieurs les députés, le groupe communiste avait rêvé de permettre à ceux qui ont commencé à travailler très tôt d'anticiper leur départ à la retraite, c'est l'UMP qui l'a réalisé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Cette mesure de justice sociale entrera en application le 1er janvier. Elle se fonde sur des critères incontestables : un début d'activité entre quatorze et seize ans, une condition de durée validée de quarante-deux ans et une condition de durée cotisée de quarante-deux ans à cinquante-six et cinquante-sept ans (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains), de quarante et un ans à cinquante-huit ans et de quarante ans à cinquante-neuf ans. L'objectif est de prendre en compte l'ensemble des longues carrières.

Dire, comme le font certains, que cette mesure ne prend pas en compte le chômage, le service militaire, les périodes de maladie et de manière générale toutes les périodes d'interruption professionnelle, est faux. (Vives protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) La durée cotisée exigée diminue en fonction de l'âge de départ à la retraite et le décret prend en compte, dans la limite d'un an, le service national...

M. Bernard Roman. Un an seulement !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... ainsi que les périodes d'indemnisation, au titre de la maladie et des accidents du travail.

Permettez-moi de donner un exemple clair : un salarié ayant commencé à travailler à l'âge de quinze ans, ayant accompli un an de service national, subi un an de chômage et un an d'arrêt maladie au cours de sa carrière pourra partir à la retraite à l'âge de cinquante-huit ans contre soixante ans aujourd'hui. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jérôme Lambert. La plupart des intéressés ont accompli un service militaire plus long !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Mesdames, messieurs les députés, cette mesure représente un progrès social unique en Europe. Le Gouvernement et la majorité peuvent être fiers de l'avoir fait voter. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

CHÔMAGE

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour le groupe socialiste.

M. Victorin Lurel. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Malgré vos incantations et vos psalmodies, le chômage augmente partout, encore et toujours. Ici, dans l'hexagone, les plans sociaux se sont multipliés sans frein et sans cran d'arrêt mettant sur le pavé des milliers de salariés. En septembre, les nouveaux inscrits à l'ANPE ont augmenté de 7,9 %, ce qui porte le taux de chômage à 9,7 %.

Avec l'actuel sentier de croissance qui est en grande partie le fruit de votre politique, la barre des 10 % risque d'être allégrement atteinte en fin d'année. La rupture avec la période antérieure, au cours de laquelle deux millions d'emplois ont été créés, est nette. Elle prouve, s'il en était besoin, le caractère injuste et erroné de votre politique, laquelle table sur d'hypothétiques retombées de la timide reprise américaine.

Ailleurs, dans l'outre-mer français, qui avait pourtant connu grâce à la loi d'orientation du gouvernement précédent, une croissance de l'emploi de plus de 10 % en deux ans, le chômage repart depuis peu.

La France a mal à cette politique dure, et moi qui vous parle, j'ai eu à connaître la lèpre du chômage et à sentir peser sur moi le regard accusateur et culpabilisant des autres. S'il faut ajouter aujourd'hui la stigmatisation gouvernementale, vous accablez celles et ceux qui sont déjà frappés par le sort. (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le Premier ministre, vous vous êtes transformé en évangéliste du marché (« N'importe quoi ! » sur les sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et vous avez supprimé tout caractère volontariste et interventionniste à votre politique de l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Votre politique économique, dont la matrice fondamentale est l'ultra-libéralisme reagano-tatchérien, (Interruptions sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) est conduite avec dogmatisme, sous un langage compassionnel. Elle fait du salarié une simple variable d'ajustement, spécule sur la transition démographique de 2005-2006 et sur une improbable reprise nationale. Le travailleur est, avec vous, partout dans les fers !

Monsieur  le Premier ministre, vous êtes personnellement responsable du chemin choisi (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française) et, en conséquence, de cette calamité. Puisque vous vous piquez de gérer en « bon père de famille », rendez alors, ici, des comptes à la représentation nationale et dites-nous quand vous entendez inverser la courbe du chômage, comme avait su le faire votre prédécesseur. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Monsieur Degauchy, nous ne sommes pas au spectacle !

La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, vous arrive-t-il de regarder au-delà de nos frontières ? Si vous le faisiez, vous constateriez que l'ensemble des pays développés connaissent la même situation économique, et que cette situation est d'ailleurs en train de se retourner. Vous éviteriez alors de parler de « timide reprise américaine » quand celle-ci atteint 7,2 %.

Vous arrive-t-il, monsieur le député, de faire votre autocritique ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Si c'était le cas, vous avoueriez que depuis 2001, le chômage augmente de manière régulière, et ce malgré les mesures extraordinairement coûteuses que vous et vos amis avez prises et qui étaient censées éviter une telle évolution. Je pense à la réduction du temps de travail et à l'augmentation des emplois précaires dans le secteur public. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Et d'ailleurs, on peut se demander quelle politique alternative vous proposez. Continuer à diminuer la durée du travail pour lutter contre le chômage ? Continuer à créer des emplois précaires dans le secteur public ?

La vérité, monsieur le député, c'est que depuis des années, en matière d'emploi, les performances de notre pays sont moins bonnes que celles de la plupart des pays européens. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Il y a à cela des raisons structurelles : l'absence de fluidité de notre marché du travail,...

M. Philippe Martin (Gers). C'est de la langue de bois !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ...le manque de formation aux besoins de l'économie moderne, les pesanteurs du secteur public et leurs incidences sur le secteur marchand. Et la politique que le Gouvernement conduit est justement destinée à lutter contre ces pesanteurs structurelles.

Nous avons baissé les charges dans des proportions jamais atteintes dans l'histoire récente de notre pays.

M. Alain Néri. Et quel est le résultat ? L'augmentation du chômage !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous avons, comme vient de le dire le Premier ministre, augmenté le SMIC comme cela n'avait pas été fait depuis vingt ans. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) La moitié des personnes payées au SMIC verront leur salaire progresser, sur trois ans, de 11,5 % hors inflation, et de 6 %...

M. Bernard Roman. Mais c'est faux !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Comment pouvez-vous dire que c'est faux alors que c'est la réalité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Pour autant, mesdames et messieurs les députés, nous n'avons pas oublié la nécessité d'un traitement social du chômage. Mais nous l'avons réorienté vers le secteur marchand. C'est ce qu'illustrent les contrats-jeunes - le cent millième contrat a été signé la semaine dernière (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) -, la mise en place du CIVIS, ou encore le revenu minimum d'activité, dont l'Assemblée nationale va débattre la semaine prochaine.

L'objectif de la majorité, ce n'est pas de réduire artificiellement le chômage. C'est de lutter contre les problèmes structurels du marché de l'emploi dans notre pays. Et je peux vous dire qu'après trois ans d'augmentation continue du chômage - 2001, 2002, 2003 -, toutes les prévisions nous montrent que l'année 2004 sera pour la France celle du retour à une création d'emplois (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) qui ira même au-delà des besoins de son marché. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

ACCÈS AUX HAUTES TECHNOLOGIES

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour le groupe UMP.

M. Jean-Claude Lenoir. Chaque jour, le rêve devient réalité : la micro-informatique et le haut débit entrent dans notre quotidien. Le Gouvernement a fixé l'objectif très ambitieux de dix millions d'abonnés en 2007, c'est-à-dire qu'à cette date, si cet objectif était atteint, plus d'un Français sur deux aurait accès au haut débit.

Pour l'atteindre, il faut, à quelques semaines de la fin d'année, c'est-à-dire à un moment où les Français s'apprêtent à faire des achats importants, engager une communication très forte, très ambitieuse, afin de les convaincre qu'il convient de se tourner vers des matériels performants, qui sont utiles à leur vie quotidienne comme ils le sont à la vie de l'entreprise.

Je souhaiterais donc que Mme la ministre déléguée à l'industrie nous indique quels sont les voies et les moyens que le Gouvernement compte mettre en œuvre pour favoriser l'accès à ces technologies nouvelles.

Je voudrais également qu'elle nous éclaire sur les mesures qu'il compte prendre pour que la diffusion du haut débit dans l'ensemble du territoire soit beaucoup plus large. Aujourd'hui, 90 % des Français peuvent avoir accès au haut débit. Pour 10 % d'entre eux, cela pose un réel problème. Par exemple, dans le département de l'Orne, représenté ici par mes brillants collègues Sylvia Bassot et Yves Deniaud ainsi que par moi-même, c'est 73 % de la population qui est raccordée au réseau.

Certes, depuis un an, cinq mois et vingt-neuf jours, c'est-à-dire depuis la nomination de ce gouvernement, un retard important a été comblé (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), mais cela ne nous permettra pas d'avoir une offre suffisante dans les semaines et dans les mois qui viennent.

Je souhaite donc que Mme la ministre puisse entendre notre voix et fasse en sorte que le département de l'Orne, et, d'une façon générale, l'ensemble des Français, que nous représentons tous, puissent avoir accès à ces hautes technologies et que la France se situe à un très bon niveau au plan européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, avec le plan Réseau 2007, le Premier ministre a en effet lancé la France dans une dynamique numérique, ce qui était tout à fait indispensable puisque nous n'étions qu'au vingt et unième rang des pays les plus avancés.

Dès l'été 2002, j'avais suscité une baisse des tarifs de revente de l'ADSL, et cette initiative a marqué un tournant dans le développement du marché français, puisque les tarifs du grand public ont pu ainsi être abaissés à trente euros par mois, ce qui a engendré une croissance fulgurante. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Le marché français de l'Internet à haut débit connaît une croissance de 150 % en rythme annuel, avec d'ailleurs certains effets induits extrêmement significatifs. C'est ainsi que le volume des transactions passant par le commerce électronique a augmenté de 60 % et que le taux d'équipement des ménages en micro-informatique a augmenté de 20 % en un an, pour atteindre 42 %.

Néanmoins, le bilan est contrasté. En effet, l'étude que j'ai fait réaliser a aussi démontré que la France accusait un certain retard par rapport à d'autres pays, comme elle a mis en lumière l'existence d'une fracture numérique, à la fois générationnelle, sociale et géographique.

Et sur ce dernier point, monsieur le député, je puis vous proposer d'examiner avec vous, sur le terrain (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), la façon dont la couverture en haut débit est assurée dans le département de l'Orne.

L'étude dont je parlais à l'instant a également révélé deux freins importants. D'une part, les Français n'ont pas suffisamment conscience de l'utilité de ces équipements informatiques. D'autre part, le coût de ceux-ci reste encore trop élevé. La campagne gouvernementale que nous sommes en train de lancer a pour but d'y remédier, en insistant sur l'utilité de l'ordinateur, qui est un outil d'accès à la connaissance, mais peut aussi apporter une aide dans la vie quotidienne. Elle renforcera opportunément les annonces qui sont traditionnellement faites à la veille des fêtes de Noël.

J'ajoute, enfin, que le secteur des technologies de l'informatique représente 7 % du PIB en Europe, ce qui est considérable dans la perspective du retour à la croissance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

LUTTE CONTRE L'EXCLUSION

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat, pour le groupe UDF.

M. Denis Jacquat. Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion.

Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est qui ?

M. Denis Jacquat. Messieurs, soyez corrects, s'il vous plaît ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Madame la secrétaire d'Etat, l'accès aux droits sociaux est au cœur des préoccupations de l'ensemble des responsables politiques et sociaux des différents pays de l'Union européenne. Cependant, l'existence de ces droits ne veut pas forcément dire qu'ils sont effectifs pour tous les citoyens des pays de l'Union, à tout moment et dans toutes les situations. Un effort considérable reste à faire pour amplifier l'accès à ces droits, notamment pour les personnes les plus démunies.

Hier, madame la secrétaire d'Etat, vous avez organisé, en collaboration avec le Conseil de l'Europe, un colloque sur l'accès aux droits sociaux en Europe.

M. François Hollande. Tout est réglé !

M. Denis Jacquat. Votre initiative est, à n'en pas douter, un excellent moyen de faire avancer notre réflexion sur ce sujet, en faisant partager l'expérience française et en la confrontant aux politiques publiques de nos partenaires européens.

Aussi, madame la secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous indiquer les constats faits lors de cette rencontre et les pistes de réflexion les plus intéressantes qu'elle a permis de mettre en lumière ?

M. François Hollande. Et voilà ! Que font-ils contre l'exclusion ? Des colloques !

M. Denis Jacquat. Par ailleurs, pouvez-vous nous indiquer quelles traductions concrètes vous entendez donner au renforcement de l'accès aux droits sociaux en France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion.

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Monsieur le député, vous l'avez dit, la question de l'accès de tous aux droits sociaux se pose à l'ensemble des pays européens.

J'ai effectivement organisé, en partenariat avec le Conseil de l'Europe, un colloque qui s'est tenu hier afin de faire le point sur une question dont il faut souligner l'extrême importance, car de l'accès aux droits dépend l'accès à la citoyenneté. Notons aussi qu'il s'agit des droits de tous, et non pas de droits qui seraient spécifiques à une catégorie de nos concitoyens. Les différents experts et responsables politiques présents ont mis en évidence que, malgré l'adoption de la Charte sociale européenne - dont il faut préciser que seules la France et l'Italie l'ont ratifiée sans en changer un seul article -, l'accès aux droits demeure difficile. Et le professeur Mary Daly, qui est une grande spécialiste de la question, nous a dit : « Il ne suffit pas qu'un droit existe pour qu'il soit effectif. » Et c'est bien ce que nous avons pu vérifier en France, où l'adoption de la loi de 1998 relative à la lutte contre les exclusions a montré qu'il ne suffit pas d'une loi pour que les exclusions disparaissent.

Et le Conseil de l'Europe a souligné le caractère exemplaire du plan de renforcement de la lutte contre l'exclusion que nous avons mis en place en mars dernier, puisque la France est le premier pays en Europe à appliquer un plan méthodique et organisé pour repérer toutes les difficultés d'accès à l'inclusion sociale. Je crois que cela vaut d'être noté, et surtout qu'il est important de comprendre la méthode que nous suivons.

Des mesures que nous avons proposées en mars dernier, la plupart sont engagées, et 20 % d'entre elles sont déjà réalisées. C'est ainsi que nous avons engagé la simplification des procédures administratives, facilité l'admission à l'aide juridictionnelle, signé soixante-huit chartes départementales de prévention des exclusions, introduit - et c'est une première - l'alimentation parmi les outils d'insertion, et renforcé de façon extrêmement importante la lutte contre l'illettrisme.

Mais il faut aller plus loin : à la demande du Président de la République et du Premier ministre, nous allons évaluer l'impact de la loi de 1998, qui n'est pas effective pour la plupart de nos concitoyens, et qui, de fait, génère des situations d'exclusion. Qui plus est, nous allons le faire, et c'est nouveau, avec les associations, lesquelles le demandaient depuis des années, et avec ceux qui vivent concrètement l'exclusion.

M. Bernard Roman. Vous allez surtout instaurer le RMA !

Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. En outre, nous lancerons au printemps une campagne d'information sur l'accès aux droits, afin que chacun, parmi nos concitoyens, sache que l'accès à la citoyenneté, en France, est une réalité pour tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

ECOLE MATERNELLE

M. le président. La parole est à M. Michel Lefait, pour le groupe socialiste.

M. Michel Lefait. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.

Monsieur le ministre, l'école maternelle joue un rôle essentiel. La nôtre est d'ailleurs considérée comme l'une des meilleures par les pédagogues du monde entier. C'est en effet l'école maternelle qui permet à l'enfant d'acquérir, dès l'âge de deux ans, un certain nombre de notions, de valeurs et d'apprentissages sur lesquels il pourra ensuite construire son cursus scolaire. Bref, l'école maternelle rétablit un tant soit peu l'égalité des chances de tous les petits Français devant la vie.

Or, il se trouve qu'il y a quelques jours, le nouveau recteur de l'académie de Lille a tenu devant un auditoire d'enseignants et de parents d'élèves des propos qui nous font redouter le pire quant à l'avenir de la scolarisation des tout petits. Il a clairement dit qu'un enseignant n'avait pas besoin d'en être à bac + 5 pour regarder des enfants dormir,...

M. Yves Durand. C'est scandaleux !

M. Michel Lefait. ...laissant ainsi entendre que l'école maternelle se résumait à une simple garderie.

De même, l'on répand complaisamment l'idée selon laquelle la scolarisation en maternelle dès l'âge de deux ans profiterait d'abord aux familles favorisées. Venez donc voir, monsieur le ministre, si dans l'académie de Lille - où 65 % des enfants de deux ans sont scolarisés -, disposer de deux modestes salaires dans un foyer vous range dans la catégorie des riches et des privilégiés !

Je vous invite à venir vérifier par vous-même si, dans le Nord-Pas-de-Calais, région sinistrée entre toutes, on n'a pas le plus grand besoin, pour rattraper de nombreux retards, que les enfants bénéficient d'une scolarité précoce !

Monsieur le ministre, face à la menace sournoise et récurrente qui pèse depuis quelque temps sur l'école maternelle, ma question est simple : ...

M. Richard Mallié. Enfin la question !

M. Michel Lefait. ... sauf à vouloir encore transférer des charges supplémentaires sur des communes qui n'en peuvent plus, que comptez-vous faire concrètement, avec le budget 2004 de l'éducation nationale, pour que s'applique partout la loi du 10 juillet 1989, qui a posé les fondements d'une école maternelle à la française, véritablement réductrice de la fracture sociale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le député Lefait, il faudrait éviter de mélanger deux questions. La première concerne l'école maternelle pour les enfants de trois ans.

De nombreux députés du groupe socialiste. Deux ans !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. En France, celle-ci n'est aucunement menacée, malgré ce qu'on essaie, une fois de plus, de laisser croire du côté gauche de l'hémicycle. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Tout autre est la question de la préscolarisation des enfants de deux ans. Vous nous avez interrogés à de nombreuses reprises sur ce point, et je vais vous répéter des choses simples.

D'abord, 32 % des enfants sont aujourd'hui préscolarisés à deux ans, et toutes les observations montrent que cette préscolarisation n'a aucun impact sur le taux de redoublement en CP. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives protestations, puis huées sur les bancs du groupe socialiste.) Toutes les observations - même lorsqu'elles émanent vos amis politiques - montrent qu'elle bénéficie surtout aux enfants de cadres, aux enfants d'immigrés et aux enfants étrangers, et que, dans les milieux modestes, elle n'a pas d'impact sur la suite de la scolarité. (Cris et claquements de pupitre sur les bancs du groupe socialiste.)

Plusieurs députés du groupe socialiste. Non ! C'est faux !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Nous continuerons à accueillir les enfants de deux ans lorsque c'est nécessaire. Vous savez comme moi que la scolarisation des tout-petits s'est faite en fonction des variations de la carte scolaire : lorsqu'on ne voulait pas fermer une école, on accueillait les tout-petits - et on a sans doute bien fait. (Protestations véhémentes sur les bancs du groupe socialiste.)

Tous les hurlements que vous pourrez pousser ne changeront rien aux observations strictes des services de l'éducation nationale. (Huées sur les bancs du groupe socialiste.)

Il est certainement souhaitable que l'école assure l'accueil des tout-petits là où aucun autre moyen d'accueil n'est disponible - mais il s'agit là d'une raison sociale, et non scolaire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Nous assurons cet accueil lorsqu'il répond à des besoins sociaux, mais vous ne devez pas essayer de faire croire qu'il en va de la carrière scolaire des enfants qu'ils soient scolarisés à un âge où ils ne savent même pas leur nom ou à l'âge normal de trois ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Huées sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie, montrez-vous capables d'écouter des opinions différentes des vôtres !

PERSPECTIVES DE LA PÊCHE

M. le président. La parole est à M. Alain Cousin, pour le groupe UMP.

M. Alain Cousin. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

Monsieur le ministre, ma question porte sur les futures adaptations de la politique nationale des pêches, dans le prolongement de la réforme de la politique commune de la pêche adoptée par le Conseil des ministres de l'Union européenne du 20 décembre 2002.

Malgré de fortes contraintes budgétaires, le Gouvernement a lancé, en juillet dernier, un ambitieux plan de renouvellement et de modernisation de la flotte de pêche, qui prouve que la France est déterminée à clarifier les conditions d'exercice de l'activité de ses pêcheurs et atteste la force de votre volonté politique.

Tel est le sens de la charte signée, lors du dernier Conseil supérieur d'orientation des politiques halieutique, aquacole et halio-alimentaire, par les chercheurs, les pêcheurs et votre ministère.

Monsieur le ministre, parce que le monde de la pêche a besoin de véritables perspectives, pouvez-vous nous indiquer la teneur et les finalités de cette charte, et nous préciser vos intentions en matière de gestion des ressources, de maîtrise des marchés des produits de la mer et de modernisation des structures, afin de compléter le programme de modernisation de la flotte de pêche ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le député Alain Cousin, vous avez raison : les pêcheurs de notre pays ont besoin de perspectives. L'année dernière a vu, avec la réforme de la politique commune des pêches, une étape importante, et nous avons obtenu, à Bruxelles, la possibilité de continuer à moderniser et à sécuriser notre flotte. En 2004, 20 millions d'euros seront donc consacrés à ce plan de modernisation, les engagements pouvant s'étendre jusqu'au 31 décembre de l'année prochaine et la réalisation au-delà de cette date.

Il est vrai qu'il nous faut, par ailleurs, travailler aux trois grands chantiers que vous avez évoqués.

Le premier est celui de la gestion de la ressource. Pour réduire, tout d'abord, l'incompréhension entre les scientifiques et les pêcheurs, nous avons signé, il y a quelques jours, cette charte qui associe l'IFREMER, le Conseil national des pêches et le ministère de l'agriculture et de la pêche, en vue d'assurer une meilleure gestion durable de la ressource. A cette même fin, nous cherchons à établir une politique de gestion des quotas, et des liens meilleurs et plus clairs entre les organisations de producteurs et les comités locaux des pêches.

Le deuxième chantier sur lequel nous travaillons est, bien évidemment, celui de l'organisation des marchés. Il faut donner davantage de pouvoir aux organisations de producteurs, dans le respect de la législation européenne, pour permettre une meilleure adéquation entre les attentes du consommateur et l'activité de la pêche.

Enfin, le dernier chantier, que nous menons avec Alain Lambert, est celui de l'environnement économique des entreprises de pêche de notre pays. Les discussions autour des Sofipêche, des déductions pour aléas, des réserves et des mécanismes assuranciels sont autant de points sur lesquels nous progressons.

Voilà, monsieur le député, quelles sont les perspectives de la pêche dans notre pays. Nous voulons assurer une gestion durable de notre ressource halieutique et le maintien de cette activité absolument indispensable à l'économie de nos régions littorales. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

DÉRIVES COMMUNAUTARISTES DANS LE MONDE SPORTIF

M. le président. La parole est à M. Damien Meslot, pour le groupe UMP.

M. Damien Meslot. Ma question s'adresse à M. le ministre des sports.

Monsieur le ministre, lors de votre audition par la commission sur la laïcité, présidée par Bernard Stasi, vous avez mis en garde contre la montée du communautarisme et des dérives qui frappent aujourd'hui les milieux associatifs, où sévissent, selon vous, des pratiques d'exclusion et de prosélytisme, avec l'attribution de créneaux horaires spécifiques pour les femmes dans les piscines et les gymnases, l'interdiction de la pratique sportive pour les filles ou l'essor de clubs sportifs constitués sur des bases exclusivement ethniques. Ces tendances, qui remettent en cause les valeurs républicaines et vont à l'encontre de notre conception du sport comme facteur d'intégration et de brassage social et culturel, sont inadmissibles et extrêmement préoccupantes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le ministre, quelle est exactement la situation, et quelles sont vos intentions pour mettre un terme à ces pratiques qui provoquent, chez bon nombre de nos concitoyens, une véritable exaspération ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des sports.

M. Jean-François Lamour, ministre des sports. Monsieur Meslot, les faits que vous évoquez dans votre question me sont de plus en plus souvent rapportés par des dirigeants bénévoles et des éducateurs.

J'en donnerai deux exemples. D'abord, dans certains quartiers, à partir de l'âge de douze ou treize ans, de moins en moins de jeunes filles ont accès à la pratique sportive en club. Par ailleurs, se constituent, de plus en plus nombreux, des clubs communautaires ou ethniques, désignés comme clubs « de bas de tour », qui participent à des championnats parallèles échappant totalement au circuit des compétitions organisées par les fédérations sportives.

Nous assistons à la transformation de cet espace de liberté, de brassage, de transmission des valeurs éducatives et sociales du sport que sont les clubs sportifs en lieux de repli identitaire et communautaire, voire de prosélytisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

C'est précisément la raison pour laquelle j'ai tenu à être entendu par la commission présidée par Bernard Stasi, et vous vous doutez bien que j'attends beaucoup des conclusions et des préconisations de celle-ci.

En attendant, ma collègue Nicole Ameline et moi-même avons décidé de mettre en place un groupe de travail destiné à mieux décrire les mécanismes qui empêchent les jeunes femmes d'intégrer les clubs sportifs et à aider les dirigeants bénévoles et les élus à mieux comprendre ces mécanismes et à trouver des solutions.

Avec Jean-Louis Borloo, nous mettrons en place, au cours de l'année 2004, dix sites pilotes dans dix villes pilotes - les zones urbaines étant visées en priorité - pour permettre une meilleure accessibilité de la pratique sportive aux jeunes femmes et empêcher la mise en place de ces clubs communautaires.

Enfin, mesdames et messieurs les députés, je demande aux élus locaux que vous êtes - et je vous y aiderai avec les services déconcentrés du ministère des sports - d'être très vigilants quant à la distribution des créneaux horaires et des subventions à des associations sportives qui commenceraient à faire du repli communautaire un acte de prosélytisme. Il me semble très important que nous gardions à l'esprit la fonction de transmission des valeurs éducatives et sociales qui est celle des clubs sportifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française, ainsi que sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

2

LOI DE FINANCEMENT DE LA SECURITE SOCIALE POUR 2004

Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.

Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que le vote aurait lieu par scrutin public en application de l'article 65-1 du règlement.

La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Mesdames, messieurs les députés, votre assemblée a débattu la semaine dernière du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 et je voudrais d'abord remercier les rapporteurs, à qui on transmettra ces remerciements, ainsi que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales dans son ensemble pour la qualité de leurs travaux grâce auxquels nous avons pu débattre en séance dans d'excellentes conditions.

Je voudrais également remercier l'ensemble des intervenants, qui ont contribué à la qualité des débats et qui ont fait des propositions souvent très justes. Même si des divergences importantes subsistent entre les positions des uns et des autres, ce qui est d'ailleurs naturel, nous avons pu, sur un certain nombre de sujets, améliorer le texte et je ne peux que m'en féliciter.

Nos débats ont notamment permis d'adapter le rythme et les conditions de mise en œuvre de la réforme sur la tarification à l'activité à l'hôpital.

M. Bernard Accoyer. Très bien !

M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. De la même façon, les discussions sur l'article 31 relatif aux affections de longue durée comme sur les articles 35 à 37 sur les outils de maîtrise médicalisée ont permis de clarifier les intentions du Gouvernement.

Je l'ai dit en présentant ce projet de loi, la situation financière de la sécurité sociale, et plus particulièrement de l'assurance maladie, est très dégradée. Le faible dynamisme des recettes conjugué au rythme élevé de progression des dépenses de santé conduit à des déficits très importants qui ne sont pas soutenables à moyen terme. Le Gouvernement a donc souhaité engager la modernisation de l'assurance maladie selon un calendrier qui est maintenant bien connu de tous et le Haut conseil installé par le Premier ministre a commencé ses travaux.

Pour bâtir le projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement est resté fidèle à trois principes : premièrement, le refus d'une hausse des prélèvements obligatoires, solution qui lui apparaissait comme une solution de facilité - augmenter la CSG n'aurait fait que retarder les échéances ; deuxièmement, le choix de stabiliser le déficit de l'assurance maladie pour 2004 ; troisièmement, la volonté de ne pas prendre de mesures structurelles anticipant les résultats de la négociation.

Cela ne nous a pas réduits pour autant à l'immobilisme. Le projet de loi que vous avez examiné comporte un certain nombre de mesures importantes. D'abord, il conforte la cohérence de notre action, notamment dans la lutte contre le cancer. Ensuite, il remet de l'ordre dans les finances de la sécurité sociale en supprimant le FOREC. Enfin, il prépare l'avenir, je pense notamment à la tarification à l'activité et à la profonde réforme de l'hôpital qui est désormais entamée.

M. Bernard Accoyer. Très bien !

M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Mesdames et messieurs les députés, l'année dernière, je vous avais présenté un projet de loi de financement de la sécurité sociale de transition. Cette année, je vous propose un projet de loi de clarification qui nous permet d'aller un peu plus avant dans la remise en ordre de l'assurance maladie. L'année prochaine, ce sera un projet de loi de responsabilisation qui vous sera soumis. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Explications de vote

M. le président. Nous en arrivons aux explications de vote.

Je rappelle qu'en vertu de l'article 4, alinéa 3, du règlement, les orateurs ont cinq minutes pour s'exprimer.

La parole est à M. Yves Bur, pour le groupe UMP.

M. Yves Bur. Mes chers collègues, personne ne peut l'ignorer, la sécurité sociale, ou plus précisément l'assurance maladie, se trouve à nouveau au bord de l'abîme. Le déficit se creuse, certes sous l'effet de la crise économique, mais aussi et surtout sous l'effet d'une tendance lourde d'augmentation des dépenses de santé et de soins. Nos dépenses de santé ont augmenté de plus de 25 % entre 1999 et 2003 et cette dérive des coûts menace les fondements de notre pacte social.

Face à cette situation, une seule attitude s'impose : engager enfin avec courage la modernisation de notre système de santé et d'assurance maladie.

Le Gouvernement s'appuiera sur les conclusions que présentera au premier semestre le Haut conseil pour sauver notre système de solidarité face à la maladie et tourner le dos aux approches superficielles dont nos prédécesseurs se sont contentés.

Cependant, ce projet de loi pose les premiers jalons d'une approche nouvelle, fondée sur la responsabilisation de tous les acteurs.

Votre projet de loi, monsieur le ministre, engage d'abord la responsabilité de l'Etat. Après lui avoir confié la mise en œuvre d'une véritable politique de santé publique, l'Etat respecte ses engagements en supprimant le FOREC. Nous revenons ainsi à la logique de la loi votée en 1994, selon laquelle l'Etat devait compenser l'intégralité des exonérations de charges. De cette manière, les circuits financiers sont clarifiés et identifiés et ce qui relève de la compétence de l'Etat et de la sécurité sociale est ainsi parfaitement défini. C'est une condition nécessaire pour que la responsabilité des gestionnaires de la sécurité sociale puisse s'affirmer pleinement.

M. Bernard Accoyer. Très bien !

M. Yves Bur. Dans cet esprit, nous avons décidé de créer un comité des finances sociales qui sera chargé de suivre l'ensemble des finances sociales et les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.

Par ailleurs, le mouvement de responsabilisation de l'hôpital est lancé à travers la généralisation de la tarification à l'activité. Les professionnels de santé sont associés à cette démarche de responsabilisation. Le renforcement de la maîtrise médicalisée doit promouvoir l'efficience des soins. Celle-ci sera redynamisée par la promotion de nouveaux accords ACBUS validés par l'ANAES.

Nous avons également voulu rappeler à l'industrie pharmaceutique sa responsabilité dans la consommation de médicaments, notamment par le biais d'une promotion plus éthique et par un développement accéléré des génériques.

Nos échanges sur l'évolution de la consommation médicale de nos concitoyens nous ont permis de mesurer les difficultés qu'il y avait à corriger certains excès. Pourtant, l'assurance maladie ne peut supporter les dérives de la prise en charge auxquelles nous rend vigilants année après année la Cour des comptes.

Au total, ce PLFSS traduit bien notre volonté de réintroduire de la responsabilité dans un système de solidarité auquel nous tenons car il est pour nous, comme pour tous les Français, l'expression la plus aboutie de la solidarité.

Oui, mes chers collègues, il faut enfin que la solidarité rime avec responsabilité et non plus seulement avec droit. Même si nous tenons tous au respect du droit à des soins de qualité, l'exercice de ce droit ne peut devenir un droit de tirage illimité au nom du droit à la santé. Et c'est parce que nous souhaitons que ce droit devienne un droit universel, accessible à chaque personne, que nous devons avoir conscience que le sauvetage de l'assurance maladie, à l'instar de celui de nos retraites, est un passage obligé, malgré les efforts qui seront exigés de tous les acteurs.

Nous devons nous féliciter par ailleurs du grand retour de la famille et nous accueillons avec une grande satisfaction la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant qui respecte le choix des parents quant au mode de garde et quant à leur décision de poursuivre ou de suspendre leur activité professionnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. François Goulard, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Très bien !

M. Yves Bur. Nous accueillons aussi très favorablement la mise en place d'un statut des assistantes maternelles, les simplifications administratives et les mesures en faveur du développement des crèches ainsi que l'ouverture du secteur de la petite enfance à d'autres acteurs, en particulier privés.

Les dispositions contenues dans ce projet de loi représentent l'effort financier le plus important décidé par un gouvernement depuis vingt ans au bénéfice des familles. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Enfin, je voudrais rappeler à tous les sceptiques de cette assemblée,...

M. Jean-Marie Le Guen. Il y en a un certain nombre.

M. Yves Bur. ... notamment du côté de la gauche,...

M. Jean-Marie Le Guen. Pas seulement.

M. Yves Bur. ... que le décret sur le départ à la retraite anticipée est paru vendredi, apportant enfin une réponse trop longtemps attendue.

C'est parce qu'il s'engage résolument sur ces principes essentiels que sont la solidarité et la responsabilité que le groupe UMP votera le PLFSS pour 2004. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. Avant de donner la parole aux orateurs suivants, je vais d'ores et déjà faire annoncer le scrutin, de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici sur le point de conclure ce débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'année 2004. Il y a tant à dire et tant à faire sur l'assurance maladie et si peu de chose dans ce projet de loi. Et cette distorsion crée, au-delà de nos propres bancs, un véritable malaise - plusieurs d'entre vous en ont témoigné, jusqu'à ces dernières heures encore.

Le gouffre non seulement entre les chiffres mais entre la réalité et ce que vous mettez en œuvre est tellement abyssal que l'on peut parler de mystification.

M. Bernard Accoyer. Oh !

M. Jean-Marie Le Guen. Je voudrais reprendre chacun des points que vous avez évoqués, monsieur le ministre.

Vous dites refuser les hausses de prélèvements. Mais enfin ! Pas un parlementaire, et sans doute bientôt pas un Français, n'ignore que vous ne faites que repousser les déficits. Quand ils auront atteint plus de 30 milliards d'euros, quelle institution financière pourra supporter la charge, parce qu'il faudra bien les régler, sinon l'Etat ? Vous serez alors amenés, mes chers collègues, surtout ceux qui s'apprêtent à voter en faveur de ce projet de loi de financement, à assumer des prélèvements massifs. Je vous rappelle que 30 milliards d'euros, c'est plus de deux points de CSG.

Vous annoncez un déficit stabilisé. Absolument pas. Plusieurs collègues, et pas simplement sur les bancs de l'opposition, sont intervenus pour dire que, au contraire, cette année encore, les dépenses vont dériver, bien au-delà des 11 milliards d'euros de déficit que vous envisagez.

Vous reconnaissez qu'il n'y a pas de réformes structurelles dans ce projet de loi. Je vous en donne acte - au moins pouvons-nous tomber d'accord sur ce point.

Vous parlez de cohérence, mais, alors qu'il y a trois semaines à peine vous nous expliquiez, à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à la santé publique, que vous étiez le premier gouvernement à mettre en œuvre, en vous flattant à vrai dire quelque peu, une politique de santé publique,...

M. Bernard Accoyer. C'est vrai !

M. Jean-Marie Le Guen. ... vous commencez par décider le déremboursement des certificats médicaux, pratique pourtant la plus ancienne de la politique de prévention. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Gérard Bapt. Eh oui !

M. Jean-Marie Le Guen. Cette tradition était ancrée au cœur des familles. Mes chers collègues, comment allez-vous assumer la suppression des certificats médicaux pour les jeunes qui souhaitent pratiquer une discipline sportive ? Comment réussirez-vous à expliquer la logique et la cohérence d'une telle décision avec votre politique de prévention ?

Vous évoquez la réforme de la tarification à l'activité à l'hôpital. L'année dernière, c'est vrai, vous nous aviez expliqué que vous étiez un gouvernement volontariste et donc que cette tarification à l'activité interviendrait dès 2004. Aujourd'hui, nous apprenons, à moitié rassurés, à moitié inquiets, que cette réforme ne sera appliquée que d'ici à une dizaine d'années.

Mes chers collègues, au fur et à mesure de la mise en œuvre de votre politique depuis deux ans, il apparaît clairement qu'elle ne tend qu'à la diminution des droits des assurés. De plus en plus de remboursements leur sont demandés, de moins en moins de droits sociaux leur sont accordés.

Alors que la gauche assurait le financement et le développement des droits sociaux (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) avec, par exemple, l'augmentation de la CMU, aujourd'hui, par le biais des déremboursements, vous préparez la mise en œuvre d'une politique de privatisation programmée. Sans savoir le courage d'assumer cette politique, de fait, vous y participez par le retrait de la couverture obligatoire.

Par manque d'ambition et de volonté politique, vous êtes incapables de réformer notre système de soins. Un tel laisser-aller mène à la destruction de notre protection sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le groupe UDF.

M. Jean-Luc Préel. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 avait été présenté comme un texte de transition. Nous attendions donc avec impatience le projet pour 2004 qui devait traduire vos décisions stratégiques, mais ce projet reste un projet d'attente, avant la réforme que vous annoncez pour 2004.

Or la situation de l'assurance maladie est alarmante et va se dégrader. Pour l'UDF, la réforme est donc urgente.

Ce projet comporte des éléments positifs : la suppression du FOREC, que nous saluons mais qui demandera une grande vigilance pour vérifier que les exonérations prévues par l'Etat sont effectivement compensées, la tarification à l'activité, la politique familiale. Mais il comporte également des éléments inquiétants : le déficit non financé, l'ONDAM sous-évalué et surtout le report de décisions.

Cette loi est importante car elle concerne tous les Français, puisqu'il s'agit à la fois de la politique familiale, des retraites et de la santé.

S'agissant de la politique familiale, l'UDF approuve la simplification des prestations, le principe du libre choix de garde, le plan crèches et la prestation d'accueil jeune enfant. Mais l'UDF demande une réelle politique familiale, clé de notre avenir démographique. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Elle n'accepte pas le maintien du « hold-up » qu'est le prélèvement opéré sur la branche famille pour payer la majoration par enfant, dénoncé, en son temps, par l'opposition dans son ensemble, par l'UDF et par le RPR,...

M. Bernard Accoyer. Eh oui !

M. Jean-Luc Préel. ...notamment par M. Bernard Accoyer qui vient de manifester sa désapprobation. Ce prélèvement, doublé l'année dernière, est maintenu pour 2004. Il est difficilement acceptable de faire financer la retraite par la famille.

Pierre-Christophe Baguet s'est élevé également contre le fait que les familles nombreuses et les femmes ayant des grossesses rapprochées risquent d'être exclues de la nouvelle prestation, dont les conditions de durée de travail ont été durcies, ce qui est particulièrement choquant.

Concernant la santé, vous engagez la réforme de la tarification des établissements. Monsieur le ministre, elle est très attendue et urgente. En effet, le budget global a montré ses limites, assurant une rente de situation à certains établissements mais étranglant ceux dont l'activité croît, parce que les malades et leurs familles leur font confiance.

La tarification à l'activité répond à l'espérance de beaucoup, mais sa mise en œuvre complexe suscite des inquiétudes, avec deux tarifications différentes, pour le public et le privé, une mise en œuvre dès 2004 pour le privé, échelonnée sur huit ans pour le public. Nous avons des doutes sur la convergence des tarifications et, surtout, des inquiétudes quant à la difficulté de sa mise en œuvre, sans rebasage préalable des établissements déficitaires, près de 50 % des hôpitaux et des cliniques. Il eût été nécessaire de partir sur des bases saines, ce qui ne sera pas le cas.

Malgré ces interrogations, l'UDF approuve la réforme de la tarification. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vous proposez, monsieur le ministre, un objectif national des dépenses d'assurance maladie - ONDAM - en augmentation de 4 %. Pour 2003, nous avions salué un ONDAM à 5,3 %, que vous aviez qualifié de « plus réaliste », mais qui sera cependant réalisé à 6,7 %. Cet ONDAM pour 2004 est, pour l'UDF, non médicalisé mais établi sur des bases économiques. Il est très volontariste, manifestement sous-évalué, ce qui aura deux conséquences : son dépassement continuera à le décrédibiliser et, avec lui, la loi de financement tout entière, et, surtout, il conduira à un déficit hélas supérieur aux 14 milliards d'euros que vous prévoyez.

Or ce déficit, que vous avez vous-même qualifié d'« abyssal », n'est pas financé. Sur trois ans, il s'élève déjà à 33 milliards d'euros. Vous proposez d'autoriser l'ACOSS à emprunter un même montant, générant ainsi des frais financiers de 800 millions d'euros. Ce n'est pas raisonnable.

Certes, vous prévoyez quelques recettes de poche, notamment une nouvelle hausse du prix du tabac, tout à fait déraisonnable. Si faire baisser la consommation du tabac dans un but de santé publique est légitime et même un devoir, puisque celle-ci provoque soixante mille décès par an, en revanche, espérer obtenir cette baisse de consommation en augmentant les taxes est illusoire et a des effets pervers : augmentation de la vente transfrontalière, développement de la contrebande, mise en grande difficulté des buralistes. De plus, le produit de la taxe risque d'être bien inférieur à celui attendu, comme nous l'avons déjà constaté en 2003 et comme l'exemple de la Suède le démontre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Mais le regret majeur de l'UDF est le report d'un an de la réforme de la gouvernance. Pour nous, elle est urgente. Vous avez en main de multiples rapports que vous avez vous-même demandés. Gouverner, c'est prévoir, mais c'est aussi décider. La question essentielle est, bien entendu, de financer le différentiel entre l'augmentation des dépenses de santé et celle du PIB, mais il s'agit aussi de définir la gouvernance, c'est-à-dire qui pilote le système.

Pour l'UDF, il convient, grâce à une réelle régionalisation, de rendre chacun acteur et responsable, en l'associant en amont aux décisions et en aval à la gestion, en mettant en œuvre une réelle maîtrise médicalisée des dépenses de santé. C'est la seule voie possible.

La réforme est urgente si nous voulons sauvegarder notre système de soins et permettre l'égal accès de tous à des soins de qualité, en refusant l'étatisation et la privatisation. Or notre système est aujourd'hui totalement étatisé. Cette étatisation déresponsabilisante a atteint ses limites. Le paritarisme n'a pas de légitimité autre qu'historique à gérer la santé.

Vous comprendrez donc, monsieur le ministre, que ce projet de loi nous a déçus, en raison notamment du report des décisions majeures, d'un déficit considérable non financé, de certaines mesures discutables et de tous les problèmes qui n'ont pas été abordés, notamment la permanence de soins et les urgences et la démographie médicale.

Mais je reconnais, monsieur le ministre,...

M. Alain Néri. Ah !

M. le président. Laissez M. Préel terminer !

M. Jean-Luc Préel. ...que les débats se sont déroulés dans un climat apaisé, bien différent de celui qui avait prévalu sur la santé publique.

Monsieur le ministre, tout au long des débats, vous avez répondu à nos questions avec patience et compétence (Murmures sur les bancs du groupe socialiste) et avez accepté quinze amendements de l'UDF.

C'est pourquoi l'UDF, qui souhaite être partenaire de la majorité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), écouté et entendu pour la prochaine réforme très importante de l'assurance maladie, qui désire vous aider à réussir cette difficile réforme (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, face à l'ampleur des déficits que l'on peut qualifier d' « historiques », notamment pour la branche maladie, aucune mesure significative et sérieuse n'a été prise. Pire, les quelques petites mesures proposées amplifieront ces déficits tout en continuant de diminuer la prise en charge des assurés sociaux par la sécurité sociale.

Il est évident que le recours à la fiscalité des tabacs ou de la promotion pharmaceutique n'est guère à même de combler ce déficit structurel. Quant à votre politique de modération des dépenses, elle est semblable à celle de vos prédécesseurs. Vous continuez de faire peser sur les assurés sociaux le coût de cet accroissement et vous osez le faire au nom du principe de responsabilité. Ainsi, vous augmentez le forfait hospitalier, vous continuez de dérembourser les médicaments, vous portez à la charge des familles les visites médicales exigées pour la pratique d'un sport.

Pourtant, chacun sait que la sécurité sociale ne souffre pas d'un excès de dépenses mais d'une grave insuffisance de recettes. C'est pourquoi nous avons tenu, lors de ce débat, à faire des propositions audacieuses de financement.

Là où d'autres ont privilégié le recours à la CSG au détriment des contribuables les plus pauvres, nous vous avons proposé de moduler l'assiette des cotisations afin d'encourager les entreprises créatrices d'emplois.

Nous avons également proposé d'instituer une cotisation additionnelle sur les produits financiers des entreprises, afin de soumettre à contribution sociale des revenus qui en sont toujours exemptés et qui, placés dans les circuits spéculatifs, ne participent pas au développement économique.

Vous n'avez pas voulu entendre ces propositions alternatives qui, pourtant, dégageraient, pour la seule branche maladie, près de 35 milliards d'euros de recettes par an, soit autant que le déficit cumulé en 2003 de toutes les branches de la sécurité sociale.

Monsieur le ministre, par cette attitude, vous laissez filer le déficit et préparez ainsi le terrain en vue de satisfaire à l'ambition de votre Gouvernement et de ses amis du MEDEF de voir privatiser la sécurité sociale.

En effet, si le PLFSS pour 2004 ne répond pas aux besoins de sécurité sociale de nos concitoyens, il n'est pas non plus un simple texte de transition. Il installe de fait et d'emblée, sans aucune concertation, la réforme de la tarification hospitalière, pierre angulaire de la réforme de l'assurance maladie que vous préparez pour l'automne prochain.

Ce nouveau mode de tarification que nous avons été les seuls à dénoncer va obliger les hôpitaux à générer des bénéfices. Dès lors, leur mission sanitaire sera subordonnée à un nouvel impératif de rentabilité. Avec cette mesure, outre la sélection des malades selon les pathologies rentables et la désertification des zones géographiques jugées médicalement non rentables, vous signez la mort de la mission sanitaire du service public.

De surcroît, avec votre majorité, vous avez déposé en séance une série d'amendements culpabilisants qui visent à faire porter aux médecins et aux assurés sociaux le chapeau des déficits, insinuant même qu'ils frauderaient. Cette démarche lamentable et cet esprit de délation sont indignes des valeurs républicaines. Nos concitoyens méritent comme vous et moi le respect. Ce sont des gens responsables.

Monsieur le ministre, ce texte démontre une fois de plus votre refus de travailler avec nous tous au financement de la protection sociale (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), avec la volonté de trouver des recettes nouvelles,...

M. Philippe Briand. Les communistes ont leurs vieilles recettes !

Mme Muguette Jacquaint. ...ce qui est parfaitement possible dans un pays comme le nôtre. Vous refusez toutes propositions alternatives aux vôtres, lesquelles se résument principalement à la taxation du tabac.

Mais surtout, avec ce texte, vous dévoilez explicitement vos ambitions pour la réforme annoncée de la sécurité sociale.

Il est dorénavant très clair que votre politique a pour objectif de presser toujours plus les assurés sociaux au nom de la maîtrise des dépenses de santé et de renoncer à notre système solidaire pour mettre en œuvre un choix de société individualiste et libéral.

Pour toutes ces raisons, le groupe des député-e-s communistes et républicains votera contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs des député-e-s communistes et républicains.)

Vote sur l'ensemble

M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 536

          Nombre de suffrages exprimés 533

          Majorité absolue 267

                Pour l'adoption 372

                Contre 161

L'Assemblée nationale a adopté.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures, sous la présidence de M. Rudy Salles.)

PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES,

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

3

LOI DE FINANCES POUR 2004

DEUXIÈME PARTIE

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004 (n°s 1093, 1110).

JEUNESSE ET ENSEIGNEMENT SCOLAIRE (SUITE)

M. le président. Ce matin, l'Assemblée a commencé l'examen des crédits du ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, concernant la jeunesse et l'enseignement scolaire.

Nous en arrivons aux questions.

Nous commençons par le groupe UMP.

La parole est à Mme Martine Aurillac.

Mme Martine Aurillac. Monsieur le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, dans le cadre de l'année européenne des handicapés, et pour faire suite aux engagements du Président de la République, vous avez annoncé en janvier dernier un plan d'adaptation et d'intégration des élèves handicapés. Vous avez d'ailleurs souligné ce matin toute l'importance que vous attachiez à cette action.

L'enjeu est en effet de poids. Il s'agit de résoudre, à terme, le problème de l'intégration des élèves handicapés à travers une approche différente des dispositifs de scolarisation et la mise en place de solutions innovantes. Dans ce domaine, il est vrai, beaucoup reste à faire.

Outre les plus de 6 000 auxiliaires de vie scolaire pour l'intégration des élèves handicapés, mis en place en liaison avec la secrétaire d'Etat aux handicapés, Mme Boisseau, vous prévoyez notamment de créer 200 unités pédagogiques d'intégration scolaire dans l'enseignement secondaire, ce qui se traduit par l'inscription d'un nouveau contingent d'heures supplémentaires d'enseignement, en plus de la formation adaptée qui sera dispensée aux professeurs.

Pouvez-vous nous détailler, monsieur le ministre, les mesures prévues pour l'année qui vient ? L'effort financier consenti doit permettre d'améliorer les conditions d'accueil de ces élèves et d'intégrer ainsi en milieu scolaire des enfants qui ne pouvaient pas l'être correctement jusqu'à présent.

M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Madame la députée, vous venez de rappeler que 2003 est l'année européenne des personnes handicapées et que le Président de la République a décidé de faire de l'aide à la scolarisation des enfants handicapés une des priorités de son quinquennat. Aussi avons-nous fait cette année un gros effort en faveur de ces enfants.

Comme vous le savez sans doute, le problème majeur que nous devons résoudre est celui de la rupture entre le premier et le second degré. Dans le premier degré, il existe 3 000 classes d'intégration, les CLIS, pour les enfants handicapés ; dans le second degré, nous passons à 300 classes, ce qui constitue un sujet de forte préoccupation, voire d'angoisse, pour les parents : si leur enfant quitte le premier degré, cela ne veut pas dire que, pour autant, il n'aura pas de difficultés dans le second.

Il fallait donc que nous fassions un très gros effort en faveur du second degré.

Comme nous discutons aujourd'hui du budget, je n'entrerai pas dans certains détails, mais permettez-moi de vous livrer quelques chiffres : nous avons créé cette année 297 UPI - unités pédagogiques d'intégration - et 5 000 emplois d'auxiliaire de vie scolaire, alors qu'il n'y en avait que 1 100 auparavant ; nous consacrons 7 millions d'euros de crédits à la fourniture de matériel pédagogique, 0,8 million à l'équipement des CDES - les commissions départementales de l'éducation spéciale - et 1,5 million à l'aide au transport des élèves handicapés ; enfin, 2,5 millions d'euros sont destinés à favoriser l'accès des jeunes handicapés aux centres de loisirs. Au total, près de 48 millions d'euros sont consacrés en 2003 à l'aide aux enfants handicapés scolarisables.

Le projet de budget de l'enseignement scolaire pour 2004 prévoit d'amplifier l'effort : 200 UPI seront créées l'année prochaine ; pour les faire vivre, 100 postes de professeur des écoles spécialisé seront également créés ; nous consoliderons le nombre d'assistants d'éducation auxiliaires de vie scolaire, pour lesquels, comme vous le savez, une formation réelle et importante est prévue ; les personnels enseignants seront également formés ; enfin, un effort important sera engagé en faveur des centres d'accueil des étudiants handicapés : 650 000 euros seront consacrés à une mesure qui me tient à cœur, la création, dans chaque université, d'un guichet unique destiné à accueillir les quelque 7 500 étudiants handicapés que compte l'enseignement supérieur et à répondre à leurs besoins. Au total, 110 millions d'euros seront consacrés, dans la LFI pour 2004, à cet effort d'une importance, mais aussi d'une légitimité toutes particulières.

Rappel au règlement

M. Yves Durand. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Yves Durand, pour un rappel au règlement.

M. Yves Durand. Mon intervention se fonde sur l'article 58 de notre règlement.

Au nom du groupe socialiste mais aussi, j'en suis persuadé, de bon nombre de nos collègues, je voudrais exprimer la préoccupation et, plus encore, la profonde réprobation que nous inspirent les propos que M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire a tenus tout à l'heure, lors des questions au Gouvernement, en réponse à la question posée par notre collègue Michel Lefait sur la scolarisation des enfants de deux ans.

En effet, M. Darcos a affirmé que 32 % des enfants étaient préscolarisés et a prétendu qu'il n'y avait pas lieu, en définitive, de s'en préoccuper particulièrement, puisqu'il ne s'agissait - si j'ai bien entendu, dans le brouhaha légitime que ces propos ont déclenché - que « d'enfants de cadres, d'immigrés ou d'étrangers ».

M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Mais non !

M. François Goulard. Absolument pas !

Mme Martine David. C'est pourtant clair !

M. Yves Durand. De tels propos sont proprement intolérables.

Tout d'abord, monsieur le ministre, cette affirmation est fausse. Comme vous y invitait tout à l'heure mon collègue Michel Lefait, venez voir dans l'académie de Lille quelle est la réalité de la scolarisation des enfants de deux ans. Vous constaterez qu'elle est totalement différente de ce que vous prétendez. Mais quand bien même elle ne le serait pas, cela nous conforterait encore dans notre volonté de défendre la préscolarisation. Car il s'agit bien là d'un véritable travail d'intégration républicaine.

Monsieur le ministre délégué, nous avons entendu en fin de matinée M. Ferry terminer son intervention sur l'ancrage nécessaire de la République dans l'école. Quel crédit peut-on accorder à ce discours quand, quelques heures après, on entend des propos tels que les vôtres, qui, je le crains fort, reflètent réellement et votre pensée, et votre volonté. Les masques sont enfin tombés : vous voulez effectivement détruire l'école maternelle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. François Goulard. C'est du très mauvais théâtre !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.

M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, a-t-on bien entendu ce que j'ai dit ?

M. Yves Durand. Oui !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Le mieux serait d'éviter les brouhahas, qui peuvent empêcher de comprendre...

Ce que j'ai dit, et que je répète, c'est qu'aujourd'hui, en France, 31 % des enfants de moins de trois ans sont scolarisés. On a étudié, sur la totalité du panel, les effets de cette préscolarisation, pour savoir à qui elle est le plus utile et pour quel type d'enfants elle produit des effets non négligeables sur la suite de la scolarité. Ce n'est pas moi qui ai inventé ces données : elles proviennent des services et des techniciens du ministère. S'ils se trompent, il faudra qu'ils recommencent leur travail. Reste que l'on constate que la préscolarisation favorise les enfants de cadres, les enfants néo-arrivants ou primo-arrivants - les enfants d'immigrés ou les enfants étrangers. (« Et alors ? » sur les bancs du groupe socialiste.) Je n'ai pas dit que c'était mal, mais simplement qu'il n'est pas exact d'affirmer que la préscolarisation a un effet immédiat, global et systématique pour tous les enfants de deux ans. C'est un constat !

Mme Martine David. La façon de le dire était explicite !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Je n'ai évidemment jamais condamné la préscolarisation des enfants dès l'âge de deux ans, ni même dit que ce n'est pas souhaitable. J'affirme simplement que la préscolarisation, telle qu'elle est pratiquée aujourd'hui, n'est pas faite pour ceux pour ceux à qui elle serait le plus utile.

Mme Martine David. C'est une retraite en rase campagne !

M. Yves Durand. Ce n'est pas ce que vous avez dit !

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Mais si !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Je suis certain que c'est ce que j'ai dit, monsieur Durand ! Cette question a été posée vingt fois, et à chaque fois j'ai fait la même réponse. L'étude est bien connue et presque banale. Personne ne peut laisser entendre - j'ai moi-même un enfant de deux ans et demi ! - que nous serions les ennemis des enfants âgés de deux à trois ans. Nous affirmons seulement que la préscolarisation, telle qu'elle existe aujourd'hui, ne profite pas à ceux pour qui elle devrait être faite. Nous le regrettons et voudrions que cela change. C'est tout ! N'en inférez pas que nous faisons la guerre au système scolaire. Et, surtout - je voudrais que cela soit bien noté, monsieur le président -, n'en inférez pas que nous touchons en quoi que ce soit à la vraie scolarisation en école maternelle, celle qui commence à trois ans : il n'en est rien.

Mme Martine David. On verra !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Nous sommes les premiers défenseurs de l'école maternelle, exception française qui nous est enviée dans le monde entier et qui fonctionne parfaitement.

Mme Martine David. Pas grâce à vous !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Jamais, en aucune manière, il n'a été question de porter atteinte à la scolarisation en école maternelle. Le débat ne porte que sur la préscolarisation. Il se pose dans les termes que je viens d'exposer et qui ne sont nullement ceux que vous avez entendus.

Mme Martine David. Si !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Je me suis peut-être mal exprimé. Mais il est vrai aussi que le groupe socialiste était dans une telle humeur que je n'ai peut-être pas eu le temps...

M. Alain Néri. Il y avait de quoi !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Ce qu'il y a de mieux, pour bien entendre, c'est encore d'éviter de vociférer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Yves Durand. Nous relirons le compte rendu analytique !

Reprise de la discussion

M. le président. Nous reprenons les questions du groupe UMP.

La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le ministre, vous avez anticipé sur ma question, qui concerne justement la scolarisation des enfants de deux à trois ans.

Si cette scolarisation n'est pas obligatoire en France, des dispositifs de garde existent, que ce soient les crèches, la garde partagée, les assistantes maternelles, les espaces périscolaires, les mesures en faveur de la petite enfance, proposées notamment par les mairies.

En outre, des mesures ont été proposées par la conférence sur la famille et M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a annoncé la création de 20 000 places de crèche supplémentaires.

Cependant, ces dispositions ne sont pas forcément adaptées en milieu rural. Les petites communes ne peuvent pas prendre en charge la garde des enfants. Il est très fréquent que les deux parents travaillent et soient dans l'obligation de confier leur enfant à l'école maternelle.

Le Nord est particulièrement concerné par la préscolarisation. Alors que la moyenne nationale est de 35 % - ou de 31 %, selon les chiffres que vous venez de nous donner, monsieur le ministre -, plus de 60 % des enfants de notre département vont à l'école maternelle dès l'âge de deux ans.

De plus, dans les zones rurales, les enfants sont accueillis dans des écoles à cours et niveaux multiples, où ils se retrouvent dans des classes de plus de trente élèves. Or, l'entrée d'un enfant à l'école doit être personnalisée. L'enfant doit retrouver à l'école maternelle la présence de l'adulte, comme dans son milieu familial.

Pourriez-vous, monsieur le ministre, préciser les moyens et personnels de l'éducation nationale que vous envisagez d'attribuer afin de permettre l'ouverture de classes supplémentaires dans les communes rurales pour l'accueil des enfants de deux ans ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Décidément, je suis amené à me répéter ! Mais c'est une bonne chose, car il y avait, semble-t-il, un malentendu sur ma réponse.

M. Yves Durand. Chacun sait que M. Decool appartient au groupe socialiste ! (Sourires.)

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Je répète donc que nous souhaitons que la préscolarisation se poursuive pour ceux auxquels elle sera le plus utile, c'est-à-dire dans des zones et des réseaux d'éducation prioritaire et partout où les conditions d'accueil et de socialisation peuvent être meilleures à l'école qu'ailleurs. Tel est précisément notre souci : nous voulons que la préscolarisation profite à ceux pour qui elle a été conçue.

En zone rurale, c'est à nos yeux la constitution de réseaux d'écoles structurés qui permettra le maintien dans des conditions matérielles et pédagogiques convenables des classes maternelles et élémentaires. Je présenterai demain, d'ailleurs, un dossier à ce sujet en Conseil des ministres.

S'agissant du financement, les moyens attribués aux inspecteurs d'académie tiennent compte des taux d'encadrement, ainsi que des conditions sociales, économiques et territoriales de chaque département. De ce point de vue, le département du Nord est bien doté.

Mais puisque l'on a décidément fait preuve de beaucoup de sensibilité sur ce sujet aujourd'hui, je répète une dernière fois que nous approuvons la préscolarisation de ceux pour qui elle a été conçue. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. François Goulard. Très bien !

M. Yves Durand. Je ne comprends toujours pas ce que cela veut dire !

M. le président. La parole est à M. André Schneider.

M. André Schneider. Monsieur le ministre, le projet de budget pour 2004 que vous nous présentez aujourd'hui est un bon budget.

Il permettra à nos écoliers, collégiens et lycéens d'engager, chacun à son rythme, un véritable parcours de réussite.

En effet, vingt-cinq ans après la mise en place du collège unique, l'expérience montre que, chaque année, près de 150 000 enfants quittent le collège sans qualification, sans diplôme. Or l'accent que vous entendez mettre sur la formation précoce en alternance, alliée à l'action que vous menez pour combattre l'illettrisme, me paraît être un vecteur fondamental de réussite.

Le dispositif de formation en alternance, dès le collège, entre enseignements généraux et professionnels, en partenariat entre établissements scolaires et entreprises, est une mesure phare.

Cette formation offrira à nos collégiens la possibilité de découvrir le monde de l'entreprise et les métiers qui s'y exercent. Il s'agit incontestablement - et c'est un ex-principal de collège qui vous le dit - d'une excellente mesure qui permettra de mieux préparer l'entrée de certains de nos élèves dans la voie professionnelle.

Dans ces conditions, monsieur le ministre, pourriez-vous rappeler à la représentation nationale quels sont vos objectifs dans cette démarche et les mesures mises en œuvre ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur Schneider, je vous réponds très volontiers sur cette question. Vous savez qu'elle me tient à cœur.

Les ministres qui se sont succédé depuis une vingtaine d'années ont pratiquement tous tenté de revaloriser l'enseignement professionnel. Mais on constate que, dans la réalité, cela n'a jamais véritablement donné des résultats satisfaisants.

Pour revaloriser - ou valoriser - l'enseignement professionnel comme il le mérite aujourd'hui, il faut se débarrasser des idées habituelles des campagnes de communication qui essaient de convaincre les familles que l'enseignement professionnel, c'est aussi bien ou mieux que l'enseignement général - ce qui ne convainc personne.

Il faut permettre aux élèves de découvrir plus tôt la réalité des métiers, sans pour autant les enfermer dans des filières. Voilà pourquoi j'étais hostile - et je le suis toujours - au rétablissement du palier d'orientation en fin de cinquième. Je ne veux pas constituer des filières et enfermer les enfants trop tôt dans la voie professionnelle, ni d'ailleurs trop tard, parce que je crois qu'il doit rester des passerelles. Mais, en même temps, ils doivent découvrir plus tôt la réalité des métiers.

De plus, il faut travailler en aval du lycée et montrer notamment qu'un élève qui entre dans la voie professionnelle peut avoir une panoplie de formations à sa disposition qui, éventuellement, lui permettent d'aller loin. Cela peut être une filière d'excellence. Cela peut aller jusqu'à bac + 3, sinon plus.

L'intérêt du lycée des métiers dans cette perspective, c'est de montrer à des élèves qui ont choisi la voie professionnelle, que ce n'est pas une voie de garage, que ce n'est pas une voie de relégation, que ce n'est pas nécessairement un choix par défaut, mais que l'on peut trouver dans ce lycée une voie d'excellence ; que l'on peut trouver un BTS, un lien avec un IUT, un lien avec une licence professionnelle. Cela peut donc aller fort loin.

Il nous a semblé que c'était une bonne solution de mettre en place, dans cette perspective, des dispositifs en alternance dès le collège, c'est-à-dire des dispositifs qui fassent en sorte que les élèves restent des collégiens et ne soient pas enfermés dans une filière. Ce n'est pas, comme on l'a dit bêtement, une sélection précoce.

M. Yves Durand. Merci pour le « bêtement » !

M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Ils ne sont pas enfermés dans des filières. Ils peuvent aller d'un système à l'autre, de la voie professionnelle à la voie générale. Il y a des passerelles.

L'avantage de ce dispositif est que les enfants découvrent les métiers, tout en restant dans la voie générale, ce qui leur permet d'acquérir la formation de base, qui leur permettra d'aller plus loin, c'est-à-dire, éventuellement, jusqu'à un bac professionnel, voire un BTS ou un IUT. Ils auront alors besoin de cette formation générale, qu'il ne faut pas leur supprimer de façon précoce.

Je ne citerai qu'un chiffre. Nous aurons déjà, l'année prochaine, plus de 30 000 élèves qui seront dans ces dispositifs, par un biais ou par un autre, au niveau de la classe de quatrième ou de la classe troisième. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Rappel au règlement

M. Alain Néri. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Alain Néri, pour un rappel au règlement.

M. Alain Néri. Monsieur le président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention la réponse de M. le ministre de l'éducation nationale.

Je suis tout à fait stupéfait des mots qu'il a pu employer. J'espère que ses mots ont dépassé sa pensée.

M. Yves Durand. C'est effectivement scandaleux !

M. Alain Néri. Car c'est une insulte à la représentation nationale de nous dire...

M. le président. Monsieur Néri !

M. Alain Néri. ... que nous parlons « bêtement ». Qu'est-ce que cela veut dire ?

M. François Goulard. Sur quel article porte le rappel au règlement ?

M. Alain Néri. Qui peut se permettre de parler ainsi à la représentation nationale ?

M. Yves Durand Avec une condescendance permanente !

M. Alain Néri. Nous demandons immédiatement des excuses du ministre.

M. le président. Monsieur Néri, le rappel au règlement doit porter sur le déroulement de nos travaux, non sur le fond.

Reprise de la discussion

M. le président. Nous passons aux questions du groupe socialiste.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur la question des projets éducatifs locaux - les PEL - qui concernent des territoires dont les écoles sont, au moins en partie, en zone d'éducation prioritaire ou en réseau d'éducation prioritaire et dans lesquels on s'efforce de développer la préscolarisation des enfants de deux ans. Cela nous paraît tout à fait indispensable.

Les projets éducatifs locaux doivent permettre, chacun le sait, une mise en synergie des différents partenaires acteurs de l'éducation, à l'intérieur comme hors de l'école.

Je souhaiterais formuler deux observations et poser deux questions sur la mise en œuvre de ces projets éducatifs locaux.

Je vois les difficultés que peuvent avoir les maires pilotes des projets éducatifs locaux à obtenir de l'éducation nationale les éléments statistiques indispensables au diagnostic préalable à la mise en œuvre des projets.

Je suis maire d'une ville de 25 000 habitants, dans la banlieue nord de Paris. Il m'est impossible actuellement d'obtenir des éléments statistiques sur les résultats des évaluations réalisées, tant à l'école élémentaire qu'au collège. Nous ne voulons obtenir - j'insiste sur ce point - que des éléments statistiques, et non une connaissance nominative de ces résultats.

Dans ces conditions, il apparaît difficile d'envisager un partenariat réel si les services de l'éducation nationale n'adoptent pas une attitude plus transparente. Paradoxalement, monsieur le ministre, vous venez de nous adresser l'édition 2003 de la brochure L'Etat de l'école, qui est très intéressante. Elle comporte un grand nombre de chiffres à l'échelle nationale, notamment les résultats des évaluations en CE 2 et en sixième. Mais le maire, dans sa propre commune, ne parvient pas à obtenir les mêmes éléments statistiques.

Je souhaite, monsieur le ministre, que vous nous indiquiez les moyens financiers que l'éducation nationale compte consentir dans le cadre de la mise en œuvre de ces projets éducatifs locaux. A l'heure actuelle, en dehors des emplois jeunes, malheureusement en voie de disparition, ou des moyens débloqués par le ministère de la jeunesse et des sports, les engagements de l'Etat ne semblent pas être à la hauteur des enjeux. On a très peu du ministère de l'éducation nationale, un peu du ministère des sports et du ministère de la ville, et on demande beaucoup aux collectivités locales.

Je souhaite que, sur ces deux points, vous puissiez, monsieur le ministre, nous apporter des précisions rassurantes.

M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur Blazy, je voudrais vous dire qu'en principe - mais nous pourrons en reparler si vous le souhaitez - il existe sur le site Internet du ministère à la rubrique « contrats éducatifs locaux » une base de données où vous pourrez trouver toutes les informations sur le public concerné, sur les activités conduites dans ces contrats éducatifs locaux, enfin sur la qualification des intervenants. Dans ce dispositif, 9 000 communes sont impliquées. Ce site Internet est bien fait - j'ai eu l'occasion de le visiter - et il délivre les informations que vous souhaitez obtenir. Mais, je le répète, je suis à votre disposition pour vous fournir toutes les informations complémentaires que vous pouvez souhaiter.

En ce qui concerne le soutien apporté dans le PLF 2004 à ces contrats éducatifs locaux, une mesure nouvelle de 300 000 euros leur est consacrée. Cinquante nouveaux contrats éducatifs locaux pourront donc être mis en place. Sur ce point, je vous rassure : l'attitude du Gouvernement est positive à l'égard de ces contrats éducatifs locaux. Nous souhaitons d'ailleurs les recentrer au maximum sur la prévention de l'illettrisme et la diffusion de la lecture auprès des jeunes - mais ce n'est évidemment pas exclusif. C'est un des projets que nous souhaitons encourager.

En ce qui concerne le dispositif des emplois jeunes, je pense - sinon pour les collectivités territoriales, en tout cas pour les associations, très présentes dans ces projets éducatifs locaux - que le bon dispositif sera le dispositif CIVIS. Il est maintenant en vigueur. Comme pour les associations d'aide aux handicaps, le dispositif CIVIS pourra permettre de répondre aux besoins des associations qui participent à ces contrats éducatifs locaux.

Rappel au règlement

M. Yves Durand. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. A condition qu'il porte sur le déroulement de la séance, monsieur Durand.

M. Yves Durand. C'est le cas, monsieur le président.

M. le président. Vous avez la parole.

M. Yves Durand. Ce matin, monsieur le président, j'ai souhaité, dans un précédent rappel au règlement, que la commission des finances nous explique pourquoi les amendements que nous avons déposés ont été déclarés irrecevables.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Vous avez eu l'explication !

M. Yves Durand. De quels amendements s'agit-il ? D'amendements qui tendaient non à créer des postes supplémentaires, mais simplement à de ne pas supprimer des postes qui existaient déjà dans le budget 2003. Il s'agit de maintenir des postes - aides-éducateurs, maîtres d'internat, surveillants d'externat, emplois administratifs, enseignants du second degré.

Il ne s'agit donc pas de créer des postes nouveaux, mais de maintenir des postes qui existent.

L'année dernière, ces amendements avaient été jugés recevables. Je ne comprends donc pas pourquoi, cette année, ils subiraient un traitement différent.

M. le rapporteur spécial de la commission des finances nous a fourni une explication, invoquant un système de cliquet, auquel personnellement je n'ai pas compris grand-chose - mais c'était certainement dû à la fatigue.

Je souhaite que M. le président de la commission des finances vienne nous expliquer pourquoi des amendements qui étaient recevables l'année dernière ne le sont plus cette année.

A cet effet, je vous demande une suspension de séance d'une demi-heure.

M. le président. Monsieur Durand, vous avez posé la question ce matin, à l'occasion d'un rappel au règlement. M. Chamard vous a déjà répondu, mais il va le faire à nouveau. Après quoi nous suspendrons la séance pour cinq minutes.

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances de l'économie générale et du Plan.

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Je vais vous rappeler la jurisprudence du président de la commission des finances - au-delà des évolutions politiques - et vous expliquer en quoi les choses sont différentes cette année.

L'an dernier, il y avait suppression de postes MI-SE. Cette suppression ne gageait pas des créations de postes.

Un parlementaire peut toujours revenir à l'état initial. Lorsque le Gouvernement veut descendre de 100 à 80, on peut très bien proposer de rester à 100. L'article 40 n'interdit pas cette pratique.

Cette année, les choses sont différentes : les suppressions de postes - vous l'avez dit vous-même ce matin, à la tribune - permettent de créer des postes.

Si on annule les suppressions de postes, on se retrouve avec un budget supérieur à celui de l'année précédente, puisqu'il y a création de postes. Dans ces conditions, l'article 40 s'applique.

M. le président Méhaignerie n'a fait, je le répète, que reprendre la jurisprudence constante des présidents de la commission des finances, qu'ils soient de gauche, du centre ou de droite.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-sept heures trente-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons les questions du groupe socialiste.

La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Messieurs les ministres, l'examen attentif de votre budget ne peut que nous inquiéter s'agissant de votre réel intérêt pour la jeunesse. En effet, après avoir perdu près de 25 % de ses crédits en 2003, la ligne « Information de la jeunesse » figurant à l'article 10 disparaît en 2004. A l'article 20, la ligne « Actions partenariales pour les initiatives, les loisirs, l'information, l'insertion et les échanges des jeunes » - sujet particulièrement important, vous en conviendrez -, dans laquelle sont transférés les crédits de l'article 10, enregistre une baisse de 7,78 %, c'est-à-dire que ses crédits diminuent de 5,72 millions d'euros. C'est révélateur d'une absence de volonté politique pour ces actions.

Ces tours de passe-passe budgétaires cachent en réalité de bien mauvais coups. En particulier, l'un des principaux outils de l'aide au développement de l'éducation populaire est la possibilité, pour les associations, de bénéficier de postes FONGEP, c'est-à-dire d'un financement servant à rémunérer un emploi permanent. Comme vous le savez certainement, ces postes sont financés pour trois ans par le Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire - appelé plus communément FONGEP -, actuellement à hauteur de 7 300 euros par poste. En 2003, 60 nouveaux postes ont été créés, mais 100 postes FONGEP ont subi un gel de crédits de 906 500 euros en cours d'année. A cela s'est ajoutée une baisse de la prise en charge de l'Etat de 150 euros par poste, qui a créé de réelles difficultés pour les associations. Pour 2004, vous nous annoncez 40 nouveaux postes.

M. le président. Monsieur Néri, vous avez deux minutes pour poser votre question. Votre temps de parole est écoulé. Veuillez conclure, je vous prie !

M. Alain Néri. Je suppose, monsieur le ministre, que vous allez nous donner des précisions facilement, et non pas «bêtement». (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Marie-Jo Zimmermann. N'importe quoi !

M. le président. Monsieur Néri, posez votre question et concluez, ou je vous retire la parole !

M. Alain Néri. En 2003, 100 postes ont été gelés et 450 postes risquent d'être touchés par des gels budgétaires en 2004. C'est donc 550 postes qui auront été supprimés en deux ans. Monsieur le ministre, comment pouvez-vous affirmer préparer l'avenir du pays en sacrifiant de la sorte la politique de la jeunesse ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le député, je voudrais vous rassurer sur la question des postes FONGEP. En effet, l'année dernière, en raison de contraintes budgétaires que vous connaissez aussi bien que moi, la loi de finances 2003 a prévu un gel des postes FONGEP pour 40 équivalents temps plein. Pour l'année 2004, les instructions ont été adressées aux services déconcentrés fixant les orientations et priorités pour l'attribution des postes arrivés à échéance triennale et soumis à évaluation. Les 40 postes sont donc bien prévus dans le projet de loi de finances pour 2004. La différence avec l'année dernière, c'est qu'il n'y aura pas de régulation budgétaire sur la loi de finances 2004 - le ministre du budget s'y est engagé publiquement. Nous avons passé un accord avec lui sur ces questions. Les 40 postes FONGEP sont bien inscrits et seront donc bien au rendez-vous en 2004.

Rappel au règlement

M. Yves Durand. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Yves Durand, pour un rappel au règlement.

M. Yves Durand. L'explication de M. le rapporteur spécial est intellectuellement juste, je le reconnais. Le problème, c'est qu'elle ne correspond pas à la réalité.

M. le président. Monsieur Durand, ce n'est pas un rappel au règlement ! Là, vous êtes sur le fond ! Cela ne concerne pas le déroulement de la séance, je suis désolé !

M. Yves Durand. Alors, je demande une nouvelle suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue pour cinq minutes.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous passons à une question du groupe UDF.

La parole est à M. Gilbert Gantier.

M. Gilbert Gantier. Monsieur le ministre, vous avez fait de la lutte contre l'illettrisme une des priorités de votre action et vous avez raison. Nous vous encourageons dans cette voie, car le nombre d'élèves qui entrent en sixième sans savoir lire couramment est trop élevé - près d'un élève sur six, dit-on.

Mais à un niveau légèrement plus élevé de l'enseignement, il est un autre domaine de formation intellectuelle qui peut paraître anormalement négligé : il s'agit des études classiques.

Or, nous savons tous combien l'apprentissage du latin et du grec facilite l'apprentissage du français, en permettant notamment de mieux comprendre les mécanismes de notre langue tout en faisant découvrir la richesse de l'étude des littératures latine et hellénique, qui ont tant influencé notre littérature et qui constituent également une formation intellectuelle très utile à la préparation aux études scientifiques elles-mêmes.

Cette année, de nombreux cours de latin et de grec ont été supprimés. L'an dernier, pourtant, les effectifs de collégiens apprenant le latin ou le grec étaient en légère hausse.

Quelles mesures comptez-vous prendre, monsieur le ministre, pour favoriser les études gréco-latines, qui ne doivent pas être séparées de l'étude du français et de la littérature, et dont le caractère formateur n'est pas contestable ?

M. Alain Néri. Très bien !

M. Yvan Lachaud. Vous avez raison !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Je vous remercie, monsieur Gantier, de poser cette question à quelqu'un qui aime le latin et qui l'a enseigné. Je vais vous répondre aperto pectore, à cœur ouvert. (Sourires.)

L'offre des langues anciennes au collège, vous le savez, permet surtout de répondre aux demandes des familles. Les moyens dont nous disposons sont tout à fait convenables et les professeurs qualifiés, car qualis magister talis discipulus - tel maître, tel élève - sont en nombre suffisant.

Près de 20 % des collégiens apprennent le latin dès la classe de cinquième. On peut dire, même si cela paraît être un paradoxe, qu'il n'y a jamais eu autant de latinistes en France. Car, dans le passé, le nombre d'élèves dans les petites classes des lycées était extrêmement limité. La situation d'aujourd'hui, en termes de quantité, nous est plus favorable, même si, c'est vrai, une partie très importante d'entre eux, horresco referens - je vous le rappelle avec horreur  - (Sourires) abandonne cette discipline au lycée.

En revanche, de nombreux élèves commencent l'étude du latin ou du grec en classe de seconde et plus tard en hypokhâgne et accèdent ainsi au meilleur niveau en latin. Per aspera ad astra - traverser les difficultés pour atteindre les astres.

Cependant, favoriser les langues anciennes implique une réflexion de fond sur les contenus mêmes des enseignements. Nous avons la volonté d'aider au renouvellement des approches pédagogiques et d'attirer les élèves vers les études classiques. C'est pourquoi une mission a été confiée au professeur Heinz Wismann sur l'enseignement des langues et des cultures de l'antiquité. Le professeur Wismann procédera à des comparaisons à l'échelle européenne, en insistant sur la dimension culturelle des apprentissages. Son rapport nous sera remis au printemps prochain.

En attendant, les nouveaux programmes qui sont mis en place au collège et au lycée rendent plus vivant l'enseignement des langues, afin que l'élève ne soit pas doctus cum libro - savant avec son livre, mais fabricando fit faber - qu'en forgeant il devienne forgeron. (Sourires.) Cela devrait notamment encourager de nombreux élèves à apprendre le latin ou le grec au lycée. Sursum corda - hauts les cœurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. Nous en venons aux questions du groupe des député-e-s communistes et républicains.

La parole est à M. Michel Vaxès.

M. Michel Vaxès. Monsieur le ministre, ma question rejoint la préoccupation exprimée tout à l'heure par notre collègue Jean-Pierre Blazy.

Les contrats éducatifs locaux, mis en place en juillet 1998, ont contribué à améliorer la politique partenariale avec les collectivités locales en mettant en œuvre des projets éducatifs.

Selon une étude descriptive, portant sur 85 % des contrats existants au 1er janvier 2003, les moyens humains engagés dans les contrats éducatifs locaux sont constitués pour un tiers de personnels de l'éducation nationale, essentiellement des aides éducateurs.

Or, 20 000 emplois d'aide éducateur ont déjà été supprimés dans le budget 2003. Quant au budget pour 2004, il prévoit 15 000 fins de contrat, auxquelles s'ajoutent les suppressions de poste des maîtres d'internat et surveillants d'externat.

Les assistants d'éducation, dont le statut a été créé par la loi du 30 avril 2003, ne remplaceront que très partiellement ces aides éducateurs et les maîtres d'internat et surveillants d'externat. Ce sont plus de 10 000 postes d'encadrement qui disparaîtront cette année.

Dans ce contexte, la question se pose de l'effort que compte engager votre ministère pour compenser cette perte de moyens humains et garantir l'avenir des contrats éducatifs locaux.

Je ne prendrai qu'un exemple pour être précis et illustrer les difficultés rencontrées. Dans une commune de ma circonscription, pour l'année scolaire 2001-2002, 4,5 postes d'aide éducateur à temps plein étaient dédiés au CEL, soit près de 7 130 heures d'intervention. Pour l'année scolaire 2003-2004, ce ne sera plus qu'un seul poste à tiers temps ; 19 assistants d'éducation ont été recrutés pour remplacer les 44 aides éducateurs, mais ils ne l'ont été qu'à mi-temps et exclusivement sur le temps scolaire. Ces chiffres parlent d'eux-mêmes.

Monsieur le ministre, j'ai la conviction que l'organisation de l'aide éducative hors temps scolaire et son développement sont plus indispensables que jamais, notamment dans les zones d'éducation prioritaire. Ces contrats éducatifs locaux y participaient, mais vos choix les mettent à mal. Comment entendez-vous compenser le désengagement de votre ministère de ce dispositif, et plus généralement comment entendez-vous favoriser l'action éducative hors temps scolaire ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le député, je suis tout à fait d'accord avec vous sur le fait que l'éducation ne se réduit pas à l'enseignement. J'ajoute que l'éducation au sens large est une chose très importante pour nous. Nous bénéficions désormais de la réunion du ministère de la jeunesse et du ministère de l'éducation nationale. Ceux-ci étant, si je puis dire, réunis, sinon réconciliés, nous pouvons faire cohabiter plus harmonieusement que ce n'était le cas auparavant nos dispositifs d'enseignement et d'éducation. Nous nous inspirons notamment de ce qui se fait en matière de jeunesse et d'éducation populaire au sein des associations qui participent aux contrats éducatifs locaux.

Comme je l'ai dit tout à l'heure à l'un de vos collègues, ces contrats éducatifs locaux bénéficieront d'une mesure nouvelle de 300 000 euros. L'année prochaine, 50 nouveaux contrats seront mis en place, ce qui démontre clairement l'engagement de mon ministère et plus généralement celui du Gouvernement en faveur de ce dispositif. Sur ce point, nous n'avons pas d'inquiétude à avoir.

Nous sommes bien entendu conscients de la difficulté dans laquelle se trouvent les collectivités locales et les associations face au départ des emplois jeunes et c'est précisément pour cette raison que le Gouvernement a prévu la mise en place d'un nouveau contrat, le CIVIS, dont l'un des volets est destiné à accompagner l'insertion des jeunes au travers de projets qui disposent d'un contenu social, caritatif ou sportif.

Si la montée en charge de ce CIVIS est progressive - il a été mis en place cette année - il est clair que les uns et les autres, les collectivités locales comme les associations, pourront s'appuyer sur ce nouveau dispositif dans les mois à venir.

M. le président. La parole est à M. Pierre Goldberg.

M. Pierre Goldberg. Monsieur le président, messieurs les ministres, je dois avant tout prier cette assemblée de pardonner la pauvreté de mon français. J'ai arrêté mes études à l'université de Chouvigny, une petite commune de 300 habitants, et je n'y ai, hélas ! jamais fait de latin, car immédiatement après j'ai été ouvrier agricole.

Messieurs les ministres, il y a quelques mois, le Gouvernement nous a proposé de réformer le statut des maîtres d'internat et des surveillants d'externat et de créer celui d'assistant d'éducation. Ce qu'avait fait M. Jean Zay en 1937 est toujours d'actualité, dans la mesure où la modification de cette loi donnait à des étudiants issus de milieux modestes la possibilité matérielle de poursuivre leurs études.

Or, on s'aperçoit aujourd'hui que votre réforme n'est ni plus ni moins que l'arrêt - j'ose dire la mise à mort - de ce statut ainsi que la disparition programmée des aides éducateurs.

M. Yves Durand. C'est vrai !

M. Pierre Goldberg. Aujourd'hui, ce sont des milliers d'adultes qui manquent dans les établissements scolaires, et pourtant l'hémorragie continue.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Ce n'est pas possible ! Vous êtes fatigant !

M. Pierre Goldberg. Nous compterons l'année prochaine 9 000 suppressions de poste de surveillant et plus de 1 500 nouvelles fins de contrat d'aide éducateur. Cette année, 20 000 postes d'aide éducateur ont été supprimés. Il en reste un peu plus de 30 000, dans les écoles et les établissements, mais de lourdes menaces pèsent sur leur existence.

Dans une France où le taux d'activité des jeunes est l'un des plus bas d'Europe, leur taux de chômage l'un des plus élevés, de même que le taux de pauvreté chez les moins de trente ans, vos réformes dans le domaine de l'éducation constituent un facteur supplémentaire de précarisation.

Nous voyons donc ici se transformer les MI et les SE et les aides éducateurs au profit d'un personnel hybride, flexible à souhait, pouvant exercer dans de vastes domaines, dans l'établissement recruteur comme au dehors, et susceptibles de travailler sur plusieurs lieux.

Monsieur le ministre, il serait judicieux que le Gouvernement communique à notre assemblée l'état d'avancement précis et chiffré de ces nouvelles mesures. Il ne faudrait pas en effet que l'école devienne à son tour « la grande muette ». Ce serait là, vous en conviendrez, un état incompatible avec sa première raison d'être, qui est l'apport de connaissances par l'échange et le dialogue.

M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le député, il ne faut pas confondre la mort d'un statut, celui des MI-SE, avec la mort des personnes qui remplissent ce statut, car ce n'est évidemment pas la même chose, fort heureusement.

Ce statut des MI-SE était calamiteux, tout le monde l'a reconnu, y compris l'auteur d'un rapport qui était membre de votre propre parti, monsieur le député. Il était calamiteux pour deux raisons que vous connaissez aussi bien que moi.

D'une part, les maîtres d'internat et surveillants d'externat se trouvaient en grande difficulté au moment des examens partiels, puisqu'ils étaient devant un choix tragique : ou bien rester dans leur établissement pour continuer à exercer leur métier de surveillant, ou bien aller passer leurs examens, ce qu'ils faisaient la plupart du temps, fort heureusement pour eux, mais ce qui, si je puis dire, «déshabillait» les établissements.

D'autre part, les taux d'échec des surveillants à l'université étaient plus élevés que la moyenne de ceux des étudiants salariés, pour une raison fort simple à comprendre : le statut des MI-SE, qui date de 1937, a été inventé à une époque où il n'existait pas de travaux dirigés ou de travaux pratiques à l'université, mais uniquement des cours magistraux. Le nombre des cours proposés aux étudiants salariés était infiniment moins élevé qu'aujourd'hui.

Voilà pourquoi nous avons proposé un nouveau statut, celui des assistants d'éducation, et surtout pourquoi nous avons proposé d'encourager l'emploi à mi-temps, en le rendant cumulable avec l'octroi d'une bourse de telle sorte que le revenu de ces surveillants soit suffisant pour qu'ils puissent poursuivre leurs études.

Cette solution est infiniment supérieure à celle qui existait auparavant. La preuve la plus simple en est que nous n'avons eu aucune difficulté à pourvoir les postes d'assistant d'éducation qui étaient offerts aux surveillants, puisque nous avons eu quatre candidats pour un poste.

Je vous rappelle une dernière chose, parce que certains font encore semblant de confondre les surveillants et les aides éducateurs. Je m'y étais engagé, c'est fait : chaque poste de surveillant, chaque poste de MI-SE sera remplacé par un poste d'assistant d'éducation.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Ma question s'adresse à M. le ministre en charge de l'enseignement primaire.

Vous avez affirmé le 3 avril dernier, monsieur le ministre, devant le Sénat, que la scolarisation des enfants de moins de trois ans était sans effet sur leur scolarité, ce que vous avez confirmé lors des questions d'actualité, en réponse à un de mes collègues socialistes, au travers de propos inacceptables. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Il est en effet inacceptable d'avoir répondu que cette mesure ne profitait qu'aux jeunes enfants de cadres, aux enfants d'immigrés et aux étrangers. Je ne savais pas, monsieur le ministre, que l'école de la République était une école ségrégative. Je tiens à le dire.

Vous avez aussi affirmé que trois enfants sur dix entrent à l'école de façon précoce. Cette tendance, d'ailleurs, baisse d'année en année. Elle est variable selon les départements, selon les villes, pour des raisons que nous connaissons, qui sont les difficultés que rencontrent les collectivités locales et le manque d'enseignants pour occuper ces postes.

Monsieur le ministre, contrairement à ce que vous déclarez, des études scientifiques ont prouvé que l'apprentissage de la lecture chez un enfant qui a été scolarisé jeune est plus aisé.

La scolarité précoce - vous qui vous dites le champion de l'intégration, vous devriez le reconnaître - est aussi un moyen d'intégration sociale.

M. le président. Posez votre question, madame Jacquaint !

Mme Muguette Jacquaint. L'effet positif de la scolarisation précoce est particulièrement sensible...

M. le président. Posez votre question !

Mme Muguette Jacquaint. Je la pose, monsieur le président.

M. le président. S'il vous plaît !

Mme Muguette Jacquaint. Cet effet positif est particulièrement sensible pour les élèves de milieux défavorisés, qui sont désavantagés principalement ...

M. le président. Votre question !

Mme Muguette Jacquaint....dans leur développement langagier.

Alors je vous pose ma question, monsieur le ministre.

M. le président. Très bien !

Mme Muguette Jacquaint. En restez-vous à la réponse que vous avez faite précédemment, et ne donnerez-vous pas de moyens, ou, comme je vous le demande, en donnerez-vous pour permettre une meilleure réussite scolaire grâce à la scolarisation précoce ? (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste. )

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Madame la députée, je le répète, l'avis que j'ai donné sur les effets de la préscolarisation n'est pas un avis personnel. Je ne l'ai pas inventé. Je ne me suis pas mis subitement à le donner sans raison.

Cette étude n'a même pas été faite sous le Gouvernement actuel. Elle a été faite par la direction des études et de la prospective...

M. Yves Durand. Elle n'aboutissait pas aux mêmes conclusions que vous.

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. ... et elle a été confirmée par un livre, qui n'est généralement pas discuté, signé par M. Joutard et par M. Thélot.

Je me contente de faire le constat de ce qu'ils ont écrit. Je n'ai pas établi moi-même les statistiques, je n'ai pas fait tourner les ordinateurs. Nous savons que la préscolarisation a des effets positifs lorsque le cadre familial accompagne l'enfant. Ne me faites pas dire pour autant, madame Jacquaint, ce qui serait inexact et injuste - vous me feriez alors un procès d'intention ...

Mme Muguette Jacquaint. Vous avez dit tout à l'heure...

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Je me suis expliqué.

Je n'ai jamais dit qu'il n'était pas souhaitable que les enfants de deux ans soient accueillis sous diverses formes au sein des dispositifs existants afin d'y être socialisés et d'y commencer des apprentissages. En revanche, il est vrai que, lorsque l'on étudie, sur des cohortes très importantes, le dispositif de la préscolarisation à deux ans tel qu'il est organisé aujourd'hui et ses effets sur la suite de la scolarité, on s' aperçoit qu'il n'a pas d'effet sur les taux de redoublement en CP - c'est ainsi - et qu'il profite plus à ceux qui, par ailleurs, dans leur milieu familial, sont encouragés.

Mme Muguette Jacquaint. C'est faux !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. C'est un fait. Je ne porte pas de jugement, je ne fais que me référer à une étude statistique qui m'a été fournie. Faisons-en une nouvelle. Nous verrons bien alors si elle aboutit à un résultat contraire. Ces études sont faites par des spécialistes des questions statistiques sur l'école maternelle, ce que je ne suis pas.

Il convient - je suis tout à fait d'accord - que nous continuions à encourager la scolarisation dès l'âge de deux ans pour ceux qui en ont besoin, précisément dans les quartiers dont vous parlez, dans les zones rurales ou dans les endroits où n'existe pas d'accueil social cohérent, de crèches, de jardins d'enfants ou de dispositifs qui permettent aux enfants d'être pris en charge. Lorsqu'il n'y a rien, le service public doit évidemment être présent. Nous voulons que la préscolarisation bénéficie à ceux qui en ont besoin. On ne peut pas dire que ce soit là quelque chose de scandaleux. Personne ne peut trouver à redire à cela.

Mme Muguette Jacquaint. Vous avez fait des distinctions entre les enfants !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Non, madame, je vous ai cité une étude dont je ne suis pas l'auteur.

Mme Muguette Jacquaint. Je ne veux pas que l'on fasse de différence entre les enfants !

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. J'ai cité une étude dont je ne suis pas l'auteur et dont j'ai simplement rendu compte en toute objectivité, sans faire de commentaire.

M. André Schneider. Vous êtes un très bon pédagogue, monsieur le ministre.

M. le président. La parole est à Mme Huguette Bello, au titre des députés non inscrits.

Mme Huguette Bello. Messieurs les ministres, alors que s'achève l'année européenne des personnes handicapées et que s'ouvre le débat national sur l'avenir de l'école, l'intégration scolaire des enfants handicapés doit retenir notre attention.

Je n'insisterai pas sur le devoir qui est le nôtre d'accorder à une telle intégration une importance particulière. La solidarité nationale, comme le souci que nous devons porter à l'égalité de tous les enfants devant l'enseignement nous y obligent. Au cours de votre conférence de presse de rentrée, vous avez annoncé, monsieur le ministre de l'éducation nationale, des mesures visant à favoriser l'intégration des élèves handicapés de la maternelle à l'université. C'est là un aspect de votre action que nous ne pouvons que soutenir. Nous avons à cela des raisons générales et, en tant que Réunionnais, des raisons particulières.

La mission sur l'intégration des enfants handicapés en milieu scolaire, qui a récemment rendu ses travaux, s'est heurtée à de surprenantes difficultés. Son propos est assez accablant. A en croire ses conclusions, les données statistiques sont souvent incomplètes, parfois incohérentes. L'éducation nationale, qui dispose pourtant d'un secteur d'adaptation et d'intégration scolaire, ne semble pas s'y investir en tant qu'institution.

 Un rapport des inspections générales de l'éducation nationale et des affaires sociales avouait déjà que « les faiblesses du système d'information sur les enfants et les adolescents handicapés sont à la fois un symptôme et un frein au bon développement de l'intégration scolaire. » Ce rapport concluait à une « absence d'observation fiable de la scolarisation des jeunes handicapés à tous les niveaux. »

Nous voulons croire, monsieur le ministre, que l'intérêt que vous portez à cette question aura pour effet non seulement de rendre la situation plus lisible, mais surtout de la modifier en profondeur. Le flou artistique mais peu éducatif et peu démocratique qui enveloppe les statistiques nationales ne nous permet pas de comparer terme à terme, sur ce point, la situation globale du pays et la situation à la Réunion. Mais l'éclairage que nous jetterons sur cette dernière ne nous laisse aucun doute sur sa gravité.

M. le président. Je vous prie de poser votre question, madame Bello.

Mme Huguette Bello. Je vous demande de me laisser poursuivre, monsieur le président. 

M. le président. Posez votre question §

Mme Huguette Bello. Un des objectifs que vous vous êtes fixés, monsieur le ministre, est de garantir à tous les jeunes handicapés ou malades ...

M. le président. Posez votre question, madame Bello.

Mme Huguette Bello. ... le droit à la scolarité et à la continuité des parcours scolaires.

M. le président. Votre temps de parole est écoulé, madame Bello.

Mme Huguette Bello. S'il vous plaît, monsieur le président...

M. le président. Madame Bello, votre temps est écoulé. Veuillez poser votre question.

Mme Huguette Bello. Je n'abuse pas de la parole à l'Assemblée nationale !

M. Alain Néri. C'est vrai !

M. le président. Posez votre question !

Mme Huguette Bello. L'état récapitulatif des listes d'attentes établi par le rectorat de la Réunion montre que plus de 1 300 enfants de l'île sont actuellement inscrits sur ces listes, ...

M. le président. Votre question !

Mme Huguette Bello. ... dont 554 sur la liste de l'institut médico-éducatif, 330 sur celle du service de l'éducation spécialisée de soins à domicile ...

M. le président. C'est trop long, ce n'est pas une question !

Mme Huguette Bello. ... et près de 200 sur celle des classes d'intégration scolaire et de l'unité pédagogique d'insertion.

Dites-nous, monsieur le ministre, ...

M. le président. Enfin !

Mme Huguette Bello. ... quelles fortes mesures vous comptez prendre pour que l'accès au savoir ne soit pas parsemé d'obstacles supplémentaires pour ceux à qui la vie de l'esprit est souvent si urgente et si désirable.

Monsieur le président, vous auriez pu me laisser parler et dire ce que j'avais à dire ...

M. le président. Madame, vous n'avez plus la parole.

La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Madame la députée, vous le reconnaissez tout à fait sincèrement, vous êtes mal informée sur la réalité des chiffres concernant l'intégration scolaire des enfants handicapés. Je vais vous en donner de précis. Ce sera un peu technique et fastidieux, mais je répondrai ainsi à votre demande.

L'académie de la Réunion a mis en œuvre une politique de scolarisation des enfants handicapés très dynamique. C'est une des académies qui fait le plus d'efforts dans cette direction. Cette politique a permis l'accueil au cours de l'année scolaire 2002-2003 de 2 126 élèves qui sont intégrés individuellement ou collectivement, c'est-à-dire soit personnellement soit dans des classes CLISS - classes d'insertion scolaire - ou UPI -unité pédagogique d'insertion - dans le premier ou le second degré. C'est ainsi que 596 élèves ont été intégrés individuellement et 1 530 ont bénéficié d'un accueil dans des dispositifs collectifs, CLISS ou UPI. Dans le premier degré, 131 classes d'intégration scolaire accueillent 1 420 élèves et dans le second degré treize unités pédagogiques d'intégration accueillent 110 élèves. Je ne décomposerai pas le détail, mais je le tiens à votre disposition, madame la députée. Ainsi, les statistiques, en ce qui concerne l'académie de la Réunion sont extrêmement précises.

Quant à notre action - c'est le second volet de votre question - sachez qu'à la rentrée 2003 quatre nouvelles UPI ont été ouvertes afin de scolariser quarante élèves supplémentaires présentant des troubles importants des fonctions cognitives notamment. Pour accompagner la scolarité de ces élèves, un objectif cible a été fixé à l'académie de recrutement de 122 auxiliaires de vie scolaire. Il n'est actuellement que partiellement réalisé puisque vingt-trois AVS ont été recrutés pour exercer des fonctions collectives - CLISS ou UPI - et trente-cinq pour des fonctions d'accompagnement individuel. Mais l'objectif sera atteint.

Le dispositif n'est pas encore intégralement mis en place non par un défaut de crédits - les crédits sont là - mais parce qu'il s'agit d'assurer progressivement la transition avec le très important dispositif des 120 emplois jeunes recrutés précédemment dans les associations et les collectivités locales. La transition doit s'effectuer progressivement afin que la mise en place de nos assistants d'éducation ne porte pas préjudice à la présence des emplois-jeunes, notamment dans les associations. En effet, le dispositif des assistants d'éducation, contrairement à ce que l'on a pu dire ici ou là, est tellement attractif que des jeunes qui travaillent dans les associations ont tendance à démissionner en cours de contrat d'emploi-jeune pour aller vers le dispositif des assistants d'éducation .

Les chiffres sont donc très précis - vous pouvez le constater. L'académie de la Réunion fait un travail remarquable et s'inscrit pleinement dans le plan Handicap, qui est celui du ministère cette année.

M. le président. Nous en revenons aux questions du groupe UMP.

La parole est à M. Gérard Voisin.

M. Gérard Voisin. Messieurs les ministres, l'Europe alimentera dans les prochains mois le débat public et nous mesurerons et déplorerons certainement encore l'éloignement des Françaises et des Français des questions européennes.

Face à ce problème, le Gouvernement ne reste pas inactif et Mme Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes, a présenté la semaine dernière en conseil des ministres des mesures visant à renforcer la citoyenneté européenne afin que chaque Français se sente plus européen.

L'effort de pédagogie à fournir est immense. L'école a un rôle essentiel à jouer afin que, très tôt, les jeunes Français acquièrent les moyens d'une communication de base avec les jeunes Européens et les côtoient de manière régulière tout au long de leur scolarité en les accueillant dans leurs établissements et en se rendant dans les leurs. Les initiatives allant en ce sens existent et fonctionnent bien. Je pense notamment aux sections européennes qui se sont développées dans les collèges et les lycées ainsi qu'aux projets soutenus par les programmes européens, en particulier le programme Socrate. Je pense également aux échanges dans le cadre des jumelages.

Cependant, le projet d'un espace culturel et éducatif commun est loin d'être aujourd'hui une réalité pour les enseignants et les élèves. Un saut qualitatif et quantitatif reste à accomplir, me semble-t-il, notamment au collège pour aller vers l'acquisition d'une histoire éducative commune au sein de l'Union européenne. Il est temps en effet de prendre en compte l'acquis de l'apprentissage des langues à l'école primaire afin d'ouvrir plus largement le collège vers l'Europe par un développement de l'enseignement bilingue et une politique de mobilité systématique des élèves en échange avec nos partenaires européens. Les obstacles sont nombreux et tiennent en partie à la rigidité de notre système éducatif et à des questions statutaires.

M. le président. Veuillez poser votre question !

M. Gérard Voisin. Quelles sont les initiatives qui pourraient être prises en coopération avec nos partenaires européens pour intégrer de manière effective une dimension européenne dans l'enseignement secondaire ? Seriez-vous prêts à soutenir la mise en place de collèges européens qui systématiseraient et amplifieraient l'objectif des sections européennes ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le député, j'ai sous les yeux une belle réponse rédigée qui énumère toutes les actions que conduit le ministère, mais, si vous me le permettez, je préfère vous répondre directement sur le fond.

Ma première remarque sera pour vous rappeler que, depuis des années, je suis un chaleureux partisan de l'apprentissage précoce des langues. J'ai participé à l'introduction des langues vivantes à l'école primaire. C'était une idée que j'avais portée comme président du conseil national des programmes.

Nous avons équipé les CM2 et les CM1 et nous achevons actuellement l'équipement des CE2. Nous ne le faisons pas plus vite parce que l'un des bénéfices de l'apprentissage précoce des langues tient à l'excellence des conditions dans lesquelles il se fait. L'idéal est qu'il soit conduit par des natifs, c'est-à-dire des enseignants qui parlent parfaitement la langue, sinon l'avantage se retourne en inconvénient et les tout jeunes élèves apprennent par imprégnation les défauts de prononciation ou de grammaire de ceux qui leur parlent. Il est donc très important que nous placions notamment dans les CE2 des professeurs de très grande qualité. Contrairement à ce que l'on pense habituellement, plus on enseigne une langue précocement, plus on a intérêt à placer des professeurs qui la parlent parfaitement, sinon les petits enregistrent l'inverse de ce que l'on souhaite, à savoir les défauts.

Deuxième remarque : nous n'avancerons pas sur le sujet de l'apprentissage des langues dans le système éducatif si nous ne réglons pas la question de l'anglais. C'est vraiment la question prioritaire.

Le choix des langues appartient aux familles. Or, elles choisissent massivement l'anglais en premier - à plus de 85 % dans les écoles - et en deuxième l'espagnol, parce que c'est la langue la plus parlée dans le monde après l'anglais, en dehors du chinois, et donc la plus utile pour les Européens - c'est du moins la façon dont ils se représentent les choses.

Il convient donc de traiter le problème de l'anglais à part. C'est une langue véhiculaire. Tous les petits Français devraient l'apprendre le plus rapidement possible - c'est ma position - pour passer ensuite aux autres langues, que nous voulons développer dans le cadre européen, je pense notamment à l'allemand, qui est pour moi une question prioritaire.

Troisième remarque : je considère comme vous que l'enseignement dans la langue est préférable à l'enseignement de la langue. Voilà pourquoi il faut privilégier les sections internationales et les sections européennes dans lesquelles on apprend véritablement les langues.

Une étude de l'inspection générale montre ainsi - et ce constat est assez terrible - qu'un élève qui a choisi par exemple l'allemand en première langue n'aura parlé en tout et pour tout que quatre heures de la sixième à la terminale. Imaginez-vous que quelqu'un puisse apprendre l'allemand en quatre heures ? Moi pas.

Nous allons donc développer les sections européennes. Mais nous allons aussi assouplir le dispositif de création des sections internationales en supprimant la condition prévoyant que la langue doit être obligatoirement enseignée par un professeur natif du pays en question. Des professeurs d'allemand français - nous en avons d'excellents en France - pourront ainsi enseigner plus facilement dans ces sections.

Dernier point, enfin, sur ce sujet qui me tient à cœur autant qu'à vous : il faut mener dans les académies une politique volontariste de diversification des langues. C'est la clef du succès, l'anglais étant, qu'on le veuille ou non, une langue à part. (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca.

M. Lionnel Luca. Monsieur le ministre, je poserai la question de M. Bruno Bourg-Broc, qui ne pouvait être présent cet après midi.

Notre collègue tient tout d'abord à saluer votre budget, qui apporte une réponse à la fois quantitative et qualitative. Ce budget, qui est en hausse, présente ainsi l'avantage d'être également structuré. C'est le gage de votre priorité en faveur d'un enseignement de qualité. Il investit en effet dans l'intelligence et vous profitez de l'effort général du Gouvernement pour gérer de façon pragmatique les moyens et les orientations en fonction des besoins et des priorités.

Trop longtemps, le budget de l'éducation nationale n'a été effectivement qu'un empilement de moyens dénués de toute vision politique et ambitieuse. Nous avons, enfin, une stratégie.

C'est dans ce contexte que M. Bruno Bourg-Broc souhaite appeler votre attention sur le dispositif de l'école ouverte, qui consiste à ouvrir les collèges pendant les vacances scolaires, les mercredis et les samedis, et à offrir aux élèves des activités scolaires et éducatives.

Le budget que vous nous présentez aujourd'hui permet à cette opération de bénéficier d'une mesure nouvelle visant à doubler le dispositif dans les deux prochaines années. Des effets positifs ont effectivement été constatés, et les bilans font état d'une meilleure intégration à la vie scolaire et d'un changement de comportement chez les élèves. Les relations triangulaires enseignants-parents-élèves sont également facilitées. La disponibilité des enseignants, qui est récompensée par ces différentes attitudes, doit d'ailleurs être soulignée.

M. Bourg-Broc trouve cependant dommageable de ne pas tirer toutes les conséquences de cette expérience, à savoir faire profiter l'élève des connaissances de l'enseignant en dehors des heures de cours. Il se demande s'il ne serait pas envisageable d'encourager ces relations en incitant les enseignants, qui seraient bien sûr volontaires, à rester quelques heures de plus dans la journée au sein même de l'établissement.

Il suggère ainsi de proposer aux enseignants, pour chaque jour de la semaine, des permanences qui s'organiseraient, tant sur la forme que sur le fond, selon leurs vœux et ceux de la direction de l'établissement. Ecoute, disponibilité, cours de soutien, cours plus soutenus : divers cas de figure pourraient être envisagés sur la base de partenariat volontaire.

Le dispositif « école ouverte » a fait ses preuves et nous devons en tenir compte. Son extension permettrait à chacun de s'investir davantage dans la transmission des connaissances.

Aussi M. Bruno Bourg-Broc souhaiterait-il savoir si des essais ne pourraient pas être envisagés dans quelques départements tests avant d'être étendus à l'ensemble du territoire si les résultats s'avéraient concluants.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Le dispositif « école ouverte » fonctionne très bien, en effet. Nous avons donc pensé qu'il était nécessaire d'en envisager le doublement en deux ans.

Pourquoi le système est-il si efficace ? Au-delà des raisons que vous avez évoquées, il faut noter que les élèves, qui reviennent dans l'établissement sans être installés dans un rapport hiérarchique avec l'institution, modifient leur vision de l'école et des enseignants. Ils se réapproprient finalement le lieu scolaire d'une manière extrêmement positive.

Il faut donc répondre au souhait fort légitime de M. Bourg-Broc. Il faut ainsi envisager de prévoir des expériences dans les collèges afin que des professeurs - volontaires, bien sûr - puissent après les horaires de cours et sur le modèle de l' « école ouverte », consacrer du temps aux élèves qui le souhaiteraient.

Des professeurs assurent d'ores et déjà des heures de soutien aux élèves pendant le temps scolaire, soit dans le cadre de leur service, soit en heures supplémentaires. Les enseignants du premier degré vont même jusqu'à assurer des heures de permanence après la journée de cours.

Alors, où sont les obstacles ? Ils existent particulièrement en milieu rural où se pose le problème des horaires de passage des cars scolaires. Ceux-ci, en effet, sont souvent incompatibles avec la présence d'élèves au collège après seize heures trente.

Il conviendra donc, avant de tenter toute expérience, de consulter le département, qui organise les transports scolaires. Or, en tant que conseiller général vous ne l'ignorez pas, c'est un poste coûteux. Il faudra aussi obtenir l'accord global de la communauté scolaire de tel collège ou de tel groupe de collèges.

En tout cas, et nous l'indiquerons aux inspecteurs d'académie et aux chefs d'établissement, le financement de cette opération expérimentale sera assuré, dans le cadre de répartitions nouvelles des dotations horaires correspondantes.

M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec.

M. Yannick Favennec. Messieurs les ministres, je souhaite appeler votre attention sur les conséquences pour les écoles primaires de l'enseignement privé sous contrat d'association de l'arrêt du dispositif emplois-jeunes.

En effet, les jeunes concernés, qui avaient pour mission d'assister l'équipe éducative, ont permis de développer un accompagnement auprès des élèves des écoles primaires dans le domaine de la surveillance, de l'animation ou de l'aide au devoir.

M. Yves Durand. Eh oui !

M. Yannick Favennec. En ce qui concerne l'intégration individualisée des élèves handicapés, il a été décidé que les auxiliaires de vie scolaire pourraient indifféremment exercer leurs fonctions dans des établissements d'enseignement public et privé sous contrat.

En revanche, s'agissant des autres missions dévolues aux assistants d'éducation, il appartient aux établissements privés de recruter les personnels qui leur sont nécessaires. Certes, vous avez récemment indiqué dans une réponse à une question écrite que je vous avais posée que cette charge était couverte pour les établissements privés du second degré par la subvention du forfait d'externat versée par l'Etat.

Toutefois, la question essentielle se pose au niveau du premier degré où le financement par le biais du forfait d'externat ne peut être appliqué puisque les frais de fonctionnement ne font pas l'objet d'un forfait d'externat national comme pour le second degré.

Or c'est bien à ce niveau de scolarité que se pose le problème de l'encadrement. Les écoles primaires ne sont pas en mesure de financer les emplois disparus sur leurs fonds propres.

Quelle solution pourrait être trouvée pour permettre aux écoles privées sous contrat de bénéficier des assistants d'éducation ? Il s'agit de ne pas créer de nouvelles disparités qui pénaliseraient les enseignants et les élèves.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Très bonne question !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Comme vous venez de le rappeler, monsieur le député, la loi prévoit que les assistants d'éducation sont recrutés par les établissements publics locaux d'enseignement. De ce fait, les établissements privés ne peuvent pas en disposer.

Par exception, les établissements privés peuvent cependant bénéficier du concours des AVS, qui apportent une aide individuelle aux élèves handicapés. Ces AVS sont en effet recrutés par les inspecteurs d'académie et mis à la disposition des établissements, ce qui contourne la difficulté pour ce cas spécifique.

S'agissant des assistants d'éducation, qui remplacent les MI-SE dans le second degré, le financement des personnels des établissements privés exerçant des fonctions de même nature est pris en compte dans le forfait d'externat, pour la part liée à la mise en œuvre du contrat dans les mêmes conditions que, précédemment, pour les MI-SE.

Le premier degré, quant à lui, ne bénéficiait pas jusqu'à présent de personnel de surveillance. La création de postes d'assistant d'éducation dans les écoles publiques exige donc une autre approche. Il ne peut être envisagé de retenir la solution adoptée pour le second degré car il n'existe pas de forfait d'Etat dans le premier degré. Quant aux communes, elles ne sauraient se voir imposer unilatéralement cette charge.

Vous le voyez, nous n'avons pas pour l'instant de solution miracle. Mais nous avons décidé de nous pencher sur cette affaire pour essayer de la régler. Une réflexion est donc conduite pour envisager des solutions qui permettraient de respecter le principe de parité que nous souhaitons appliquer.

Monsieur le député, je vous tiendrai informé des suites qui vont être données à ce dossier. Nous devrions avoir des réponses dans les semaines qui viennent.

M. Yves Durand. Sur quels crédits ?

M. le président. Nous revenons au groupe des député-e-s communistes et républicains.

La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Monsieur le ministre, cette année encore, vous opérez des coupes claires dans les effectifs d'enseignants et d'encadrants. Après 2 600 emplois en 2003, vous allez supprimer, en 2004, 4 000 postes d'enseignant.

M. Yves Durand. Eh oui !

M. Jacques Desallangre. Or vous allez avoir beaucoup de mal à justifier cette suppression en vous réfugiant dans votre conviction qu'un bon budget ne dispose pas forcément de moyens supplémentaires. Ce sera encore plus dur quand sur le terrain, demain, on s'apercevra que l'utilisation de certains artifices de gestion aura alourdi la note. On vérifiera alors l'écart entre réalité et prévisions affirmées, et entre réalité et sollicitudes affichées.

Comment allez-vous justifier cette politique alors que l'avenir de notre pays repose sur la qualité de notre enseignement d'aujourd'hui ? La réduction des effectifs d'enseignants hypothèque l'avenir de notre jeunesse et donc de notre pays.

De même, votre refus de créer des postes d'infirmière, de médecin scolaire, d'assistante sociale est inacceptable au regard de vos engagements. Il laisse présager un inquiétant transfert de charges - non compensé, bien sûr - vers les collectivités locales.

A ce propos, il faut relever votre projet de transférer la gestion des écoles primaires vers les structures intercommmunales. Ce projet illustre votre plaisante définition de ce matin. Il s'agit, selon vous, d'augmenter la capacité d'initiative des collectivités locales. Je parlerai, quant à moi, de transfert de charges.

Le projet, qui va bien au-delà des regroupements pédagogiques existant en milieu rural, risque d'ajouter encore à la désertification de nos campagnes.

Messieurs les ministres, vos projets d'organisation intercommunale des écoles primaires n'ont-ils pas pour réel objet de laisser à d'autres le soin de gérer la pénurie d'enseignants que vous aurez vous-mêmes créée ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le député, oui, nous souhaitons faire en sorte que la gestion des écoles primaires soit de nature à conjurer une évidence : à la fin du XIXe siècle, chaque commune avait son école tandis qu'aujourd'hui moins d'une commune sur deux en a une. C'est un fait incontestable. Et aujourd'hui, il faut trouver un dispositif permettant aux écoles de coopérer entre elles comme cela a été fait avec les groupements pédagogiques intercommunaux. C'est ainsi qu'elles pourront le mieux résister.

Vous craignez que le développement de l'intercommunalité ne précipite la désertification des campagnes. C'est évidemment le contraire que nous souhaitons. Nous voulons en effet maintenir un tissu scolaire de proximité. Mais il faut, bien sûr, qu'il offre les mêmes conditions d'apprentissage en milieu rural et en milieu urbain.

Pour donner quelques exemples, le développement de l'utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication ou celui des langues vivantes ou encore la prévention de l'illettrisme ne peut se faire dans des petites écoles isolées.

Les parents recherchent naturellement l'école qui est capable de leur offrir le maximum de services pendant et après la classe. Ainsi, beaucoup d'entre eux sont-ils tentés, nous le savons tous en tant qu'élus locaux, d'inscrire leur enfant dans une école urbaine plus importante. C'est précisément contre cela que nous voulons agir.

De ce point de vue-là, votre souhait rejoint le nôtre.

La coopération des écoles entre elles avec les collectivités territoriales, en particulier avec les EPCI, est forcément porteuse d'avenir. Elle permettra de maintenir des écoles car elles bénéficieront de la mutualisation des moyens, d'un dynamisme pédagogique plus grand et de services de meilleure qualité.

Non, monsieur le député, les réseaux d'écoles n'ont pas pour objectif de faire des économies de moyens. Il s'agit au contraire par ce biais de mieux utiliser les moyens qui sont aujourd'hui saupoudrés et délégués à partir des académies.

En tout cas, nous sommes convaincus que c'est une chance à saisir pour lutter contre le déclin de nos villages et de leurs écoles, et donc pour sauvegarder, en particulier en milieu rural, la présence de l'école publique.

M. le président. Nous avons terminé les questions.

La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'administration générale et du Plan.

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. C'est le moment de vérité !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'administration générale et du Plan. Plusieurs questions ont été soulevées quant à l'application de l'article 40 de la Constitution. Jean-Yves Chamard, dont chacun reconnaît les grandes compétences,...

M. Yves Durand. Les vôtres sont plus grandes encore ! (Sourires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances.... a déjà répondu à vos interrogations. Mais je mesure parfaitement la complexité de cette disposition et les difficultés de compréhension qui en découlent. Je tiens simplement à replacer dans un contexte global ce qui a déjà été dit.

L'an dernier, des amendements qui paraissaient identiques avaient été jugés recevables parce qu'ils proposaient des suppressions nettes d'emplois. Cette année, et c'est toute la différence, il s'agit de supprimer des emplois qui gagent des créations d'emplois.

M. Yves Durand. Lesquelles ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Nous sommes donc dans une situation différente.

Il apparaît du reste, dans le bleu budgétaire, que les créations sont plus nombreuses que les suppressions d'emplois. Les amendements dont il s'agit cette année aboutissent à un nombre d'emplois supérieurs, tant à l'effectif actuel qu'à à l'effectif prévu par le projet de loi de finances.

En conséquence, je suis dans l'obligation d'appliquer l'article 40, parce qu'il s'agit de dépenses publiques supplémentaires d'initiative parlementaire, lesquelles, à ce titre, sont constitutionnellement irrecevables.

Plus généralement, monsieur Durand, chaque débat aborde ce problème de l'article 40. Dans la précédente législature, il y a eu trois réformes de la Constitution. Lors des débats préparatoires, les tentatives de modifier l'article 40 de la Constitution, pour donner plus de liberté au Parlement, n'ont pas manqué. Or il faut se rappeler que ni le gouvernement, ni la majorité de l'époque n'ont voulu le remettre en cause.

Je suis vraiment - et vos collègues le savent - dans la continuité totale de l'application de l'article 40. Et je m'y emploie, croyez-le bien. Les fonctionnaires sont au service des parlementaires pour les aider éventuellement à rédiger les amendements, mais aussi pour leur expliquer les conditions de l'application de l'article 40.

JEUNESSE, EDUCATION NATIONALE ET RECHERCHE

I.- Jeunesse et enseignement scolaire

M. le président. J'appelle les crédits inscrits à la ligne « Jeunesse, éducation nationale et recherche » :

« I.- Jeunesse et enseignement scolaire »

ETAT B

Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

« Titre III : 464 177 885 euros ;

« Titre IV : 135 185 403 euros. »

ETAT C

Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE V.- INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ETAT

« Autorisations de programme : 84 570 000 euros ;

« Crédits de paiement : 11 972 000 euros. »

TITRE VI.- SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT ACCORDÉES PAR L'ETAT

« Autorisations de programme : 29 030 000 euros ;

« Crédits de paiement : 9 258 000 euros. »

M. Durand et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 79, ainsi rédigé :

      « Sur le titre III de l'état B, concernant la jeunesse, l'éducation nationale et la recherche : I.-Jeunesse et enseignement scolaire, réduire les crédits de 620 000 euros. »

La parole est à M. Yves Durand.

M. Yves Durand. Je tiens d'abord à remercier très sincèrement M. le président de la commission des finances d'avoir suspendu une réunion de la commission pour venir apporter des précisions dans cet hémicycle. Je reconnais aussi que les fonctionnaires de cette Assemblée ont été à notre écoute pour essayer de démêler cet imbroglio de l'article 40.

Je ne remets pas en cause cet article, ni son application - ce serait stupide. Mais, ce que je ne comprends pas, c'est que l'on prétende que les suppressions de postes sont équivalentes, soit en nombre, soit en coût, aux créations de postes.

M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Elles sont gagées.

M. Yves Durand. En lisant le bleu, je ne trouve pas confirmation de cette affirmation. Si, une fois établis, les tableaux des suppressions de postes et des créations de postes sont mis face à face - c'est un peu scolaire, mais c'est le jour - il s'avère que les suppressions sont supérieures aux créations et qu'il y a donc bien des crédits qui restent inutilisés. Sinon, tout le discours que nous avons entendu depuis ce matin sur la nécessité des économies budgétaires n'aurait aucun sens.

Ce débat est d'importance car il porte sur la recevabilité d'un certain nombre d'amendements.

Je vais prendre un exemple significatif : au bas de la page 45 du bleu, à la rubrique « Révision des services votés », nous trouvons à la mesure « Réduction du nombre d'emplois » les 1 200 postes de professeurs certifiés, 300 postes de professeurs de lycée professionnel, c'est-à-dire les 1 500 de l'enseignement secondaire, qui gagent les 1 500 de l'enseignement élémentaire - c'est le fameux vase communicant dont vous parliez ce matin monsieur le rapporteur - mais les 2 500 emplois de personnel stagiaire du second degré, eux, ne gagent rien.

Dès lors, je vous demande, monsieur Méhaignerie, s'il est possible de nous communiquer le tableau attestant qu'il y a équivalence entre les suppressions de postes et les créations de postes gagés.

Vous nous l'avez affirmé d'une manière si ferme que je suppose que ce travail a déjà été fait. Il serait normal que la représentation nationale dispose d'une telle information.

S'il se confirmait que les autres amendements étaient irrecevables, l'amendement n° 79 ne devrait pas être discuté. C'est un amendement qui pousse à faire des économies. Que les ministres n'y voient d'ailleurs pas une atteinte à leur vie privée, bien qu'il ait pour objet de supprimer une augmentation qu'ils se sont accordée. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je ne voudrais que cette proposition apparaisse à mes collègues de droite comme une attaque personnelle. Ce n'est pas le cas,...

M. Guy Geoffroy. Quelle honte !

M. Yves Durand. ...dans la mesure où nos amendements, par leur cohérence, auraient permis de recréer un certain nombre de postes. S'ils sont jugés irrecevables, je considérerai que tous nos amendements le sont et l'amendement n° 79 ne devra pas être discuté.

M. le président. Quel est l'avis de la commission  ?

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. La commission n'a pas examiné l'amendement.

Je vais répondre à notre collègue qui étudie avec attention le bleu, mais pas suffisamment.

M. Yves Durand. Je ne suis pas professeur de maths !

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. Je reconnais que c'est compliqué.

D'abord, les crédits dont vous demandez la suppression ne constituent pas du tout une rémunération pour les ministres. Ce chapitre sert à payer les primes, soumises aux impôts et aux charges sociales, des collaborateurs du ministre.

M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Ce sont les primes de cabinet.

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. En effet, et si vous vous contentez, monsieur Durand, de lire la page 10, vous pouvez avoir l'impression que ces crédits augmentent de 620 000 euros. Mais il faut aussi lire la page 62 : à la septième mesure, « Transferts internes », il est prévu sous la rubrique « Modification d'imputation budgétaire » le  transfert sur le chapitre 31-91, article 10, de crédits précédemment inscrits sur le chapitre 31-90 article 40, pour un montant de 620 000 euros.

Depuis de nombreuses années, les primes des collaborateurs de cabinet n'étaient pas budgétées dans leur intégralité mais, à la moitié de leur coût, au chapitre où c'était nécessaire. Et tous les ans, la droite comme la gauche prenait dans un autre chapitre, où il y avait un peu trop d'argent, un montant équivalant à la moitié non budgétée initialement pour le transférer sur le chapitre où ces crédits étaient consommés. La loi de règlement pour 2002 nous le démontre.

Dans une volonté de transparence, le Gouvernement inscrit cette année, dès la loi de finances initiale, la totalité des crédits. De plus, leur augmentation est quasi nulle compte tenu de l'inflation. Il y a indéniablement un effort de transparence.

M. Lionnel Luca. Très bien !

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. Cet amendement, qui avait à mon avis un autre motif, ne met en évidence aucune augmentation, mais une volonté de clarté que nous devons relever. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Guy Geoffroy. Quel brio !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Je transmettrai à M. Durand et à ses collègues du groupe socialiste les tableaux récapitulatifs, où ils trouveront la réponse à leurs questions.

Plus globalement, je tiens à dire un mot sur ce leitmotiv, qui revient dans certains journaux, concernant le salaire des ministres.

Qu'il soit clair, et je le dis en tant que président de la commission des finances, que le budget a fait des économies grâce la mesure de transparence introduite par le Gouvernement. Les fonds spéciaux alimentaient certains ministres dans des conditions plus importantes que ce qu'ils reçoivent aujourd'hui. (« Absolument ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - MM. les ministres acquiescent .)

C'est un mensonge que de prétendre que les ministres se sont augmentés de 70 %, alors que nous avons, au contraire, assainie une situation (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) que presque tous les parlementaires de tous les bancs reconnaissaient comme particulièrement opaque et malsaine. C'est un progrès. Je lis encore cette assertion dans la presse de temps en temps, et il faut dénoncer ce qui est vraiment un mensonge. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 79 ?

M. Yves Durand. L'amendement ne devant pas être discuté, le Gouvernement n'a pas à donner son avis.

M. le président. Monsieur Durand, je me dois de vous poser la question : l'amendement est-il retiré ?

M. Yves Durand. Monsieur le président, je me suis certainement mal exprimé tout à l'heure, et vous m'en excuserez.

Je remercie M. le président de la commission des finances de nous communiquer les tableaux. J'espère que nous les aurons dans un délai raisonnable de façon à pouvoir examiner les mouvements de crédits tout à fait sérieusement comme nous avons le devoir de le faire.

J'ai déclaré que, si les autres amendements n'étaient pas recevables, pour la raison qui vient d'être rappelée par le président de la commission des finances, c'est-à-dire en vertu d'une interprétation de l'article 40 - le mot « interprétation » n'est pas péjoratif -, l'amendement n° 79 ne serait pas défendu. Je prive donc mes collègues de la majorité du plaisir de faire des commentaires sur cet amendement, dont je leur aurais laissé la responsabilité.

M. Céleste Lett. C'est pas très convaincant !

M. le président. L'amendement n° 79 est retiré.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix le titre III.

(Le titre III est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le titre IV.

(Le titre IV est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)

M. le président. J'appelle l'article 78 rattaché à ce budget.

Article 78

M. le président. « Art. 78.- Les personnels non enseignants en service au 1er septembre 2001 à l'Ecole des métiers Jean-Drouant (sise 20, rue Médéric, Paris 17e arr.) intégrée dans l'enseignement public en application de l'article L. 442-4 du code de l'éducation qui justifient au 1er septembre 2002 de services effectifs dans cette école d'une durée équivalente à un an au moins à temps complet pourront, à compter de cette même date, sur leur demande et dans la limite des emplois budgétaires créés à cet effet par la présente loi, être nommés puis titularisés dans les corps correspondants de la fonction publique de l'Etat.

« Un décret en Conseil d'Etat fixera les conditions d'intégration, de vérification de l'aptitude professionnelle et de classement des personnels intéressés. »

Je mets aux voix l'article 78.

(L'article 78 est adopté.)

M. le président. Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, concernant la jeunesse et l'enseignement scolaire.

Je vais suspendre la séance pour quelques instants.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

DÉFENSE

M. le président. Nous abordons l'examen des crédits du ministère de la défense.

La parole est à Mme la ministre de la défense.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je tiens d'abord à remercier la commission de la défense, les rapporteurs et les futurs orateurs, non seulement pour leur présence ce soir mais aussi pour le travail que nous avons accompli ensemble tout au long de l'année pour suivre l'application de la loi de finances initiale pour 2003 telle qu'elle avait été votée.

Nous avons réussi, au travers de rencontres régulières, à établir des relations de confiance qui ont permis de suivre la consommation des crédits. Cette action de transparence a profité tant à l'Assemblée nationale et à la démocratie en général qu'à la défense nationale.

Sans vouloir empiéter sur les interventions des rapporteurs qui ont fait un très gros travail, je replacerai le budget que je vous présente dans son cadre général et rappellerai sa signification.

Pourquoi la nation consacre-t-elle un budget important à sa défense ?

« La défense, c'est la première raison d'être de l'Etat. Il n'y peut manquer sans se détruire lui-même » disait le général de Gaulle, et cette formule est plus actuelle que jamais. En effet, l'Etat a pour responsabilité première d'assurer la sécurité des Français où qu'ils se trouvent dans le monde, c'est-à-dire sur le territoire national mais aussi à l'extérieur de nos frontières. Or, l'état du monde exige que nous ne baissions pas la garde. Les crises régionales se multiplient, que ce soit en Afrique, au Moyen-Orient ou en Asie centrale. Les menaces terroristes sont plus présentes que jamais et les risques de la prolifération des armes, qu'elles soient nucléaires, bactériologiques ou chimiques, s'étendent à de nouvelles régions.

Telle est la raison fondamentale du budget de la défense.

Mais l'effort de défense ne doit pas être ponctuel, il doit porter sur le long terme parce que le budget de la défense est l'instrument non seulement d'une politique militaire de sécurité, mais aussi d'une politique économique, et d'une politique de présence internationale.

En tant qu'instrument de notre politique militaire, le budget de 2004 s'inscrit strictement dans la poursuite des objectifs de la loi de programmation militaire que vous avez votée à la fin de l'année dernière. C'est pourquoi il s'efforce aussi de faire le meilleur usage possible des crédits, c'est-à-dire d'utiliser au mieux chaque euro qui lui est consacré.

Les objectifs de la loi de programmation militaires sont rigoureusement respectés.

Le premier d'entre eux, je vous le rappelle, c'est la disponibilité des matériels.

L'an dernier, le mauvais état des équipements avait été souligné par plusieurs rapports parlementaires. Il est le résultat des prélèvements effectués les années précédentes sur les budgets de la défense, quand la croissance était pourtant au rendez-vous. En 2002, plus de 50 % de nos avions, de nos hélicoptères, de nos matériels terrestres et de nos navires étaient hors d'usage faute des crédits d'entretien qui auraient permis de se procurer les pièces détachées.

C'est ensemble que nous avons alors décidé de fournir des efforts importants pour accroître la disponibilité des équipements et ils commencent à porter leurs fruits avec une amélioration globale de l'ordre de 15 %, bien que ce taux varie selon les matériels. Pour atteindre l'objectif fixé en trois ans, ces efforts doivent être poursuivis.

Les crédits consacrés à l'entretien des matériels s'élèveront à 2,9 milliards d'euros, en progression de 11 % par rapport à l'an passé, ce qui devrait permettre de renforcer l'entraînement des forces conformément aux objectifs de la loi de programmation militaire. N'oublions jamais que l'entraînement est la condition à la fois de l'efficacité de nos militaires et de leur sécurité. Ainsi, le nombre de jours d'entraînement de l'armée de terre passera de 86 à 94 jours, celui des heures de vol de l'armée de l'air de 165 à 175 tandis que celui des heures de mer des bâtiments de combats de la marine progressera de 6 %.

M. Jacques Myard. Enfin !

Mme la ministre de la défense. Pour ce faire, les crédits d'activité augmenteront de 49,5 millions d'euros.

Mais la vétusté des matériels due aux retards pris par les programmes d'armement renchérit systématiquement leur entretien. Il en est des équipements comme des voitures : un véhicule neuf est moins onéreux à entretenir qu'un véhicule ancien. La charge supplémentaire qui obère le maintien en condition opérationnelle - MCO - met en évidence la nécessité de moderniser les équipements.

La modernisation des équipements figurait d'ailleurs - nous en étions tous convenus - au deuxième rang des priorités de la loi de programmation militaire. Elle doit concerner les composantes de notre politique militaire.

En ce qui concerne la dissuasion, le troisième sous-marin nucléaire lanceur d'engins de nouvelle génération - SNLE/NG - ainsi que le dernier lot de missiles M45 seront livrés.

Autre axe prioritaire, le renseignement et la communication, dont les dernières opérations nous ont montré l'importance pour préserver la capacité de décision autonome de notre pays.

M. Jacques Myard. Très bien !

Mme la ministre de la défense. Nous lancerons le système d'observation HELIOS II et le satellite SYRACUSE III.

La troisième composante, c'est-à-dire la capacité de frappe dans la profondeur, sera renforcée avec l'arrivée des 5 premiers Rafale de 1'armée de 1'air. Une meilleure maîtrise du milieu aéroterrestre sera obtenue grâce à la livraison des 7 premiers hélicoptères Tigre et de 50 chars Leclerc.

La sécurité intérieure, une autre de nos préoccupations, bénéficiera du renouvellement de la flotte d'hélicoptères de la gendarmerie, qui sera achevé d'ici à la fin de l'année.

L'inscription de l'effort de défense dans le long terme exige qu'une attention particulière soit accordée à la préparation de l'avenir. Nous ne pouvons pas nous contenter de poursuivre les programmes actuels, il faut aller au-delà. Plus que toute autre institution, la défense a besoin d'anticiper pour rester au niveau de performance qu'exigent les progrès continus de la technologie. Ainsi, le et le projet de loi de finances pour 2004 consacrera 1,2 milliard d'euros à la recherche-développement.

La politique de recours aux démonstrateurs technologiques va se poursuivre avec le drone de combat UCAV, avec le démonstrateur de satellite d'écoute embarqué sur HELIOS II, avec le démonstrateur de radar de défense aérienne élargie.

Outre les principaux programmes de modernisation de nos matériels, la loi de programmation militaire insiste aussi sur le fait que notre capacité opérationnelle dépend aussi, et peut-être avant tout, des personnels qui servent les matériels et en assurent le soutien.

C'est pourquoi la consolidation de la professionnalisation constitue le troisième objectif de la loi de programmation militaire. Elle couvre les trois composantes de l'armée professionnelle : militaires, civils et réservistes.

Le personnel militaire verra ses effectifs augmenter au profit de l'armée de terre avec 1 000 engagés volontaires - EVAT - du service de santé avec 179 élèves médecins et infirmiers, et de la gendarmerie avec 1 200 postes.

Le fonds de consolidation de la professionnalisation est doté de 27 millions d'euros de mesures nouvelles pour garantir l'attractivité de la défense, en particulier dans les domaines où nous sommes en concurrence forte avec le secteur privé.

Le plan d'amélioration de la condition militaire reçoit 53 millions d'euros de mesures nouvelles.

Le personnel civil, deuxième composante du ministère de la défense, voit son rôle et sa place mieux reconnus, notamment à partir du rapport que j'ai demandé sur ce rôle et cette place, dont les propositions vont faire l'objet de discussions, notamment avec les syndicats, dans les semaines et les mois qui viennent.

Le projet de budget comporte à nouveau des mesures très importantes de reconnaissance professionnelle.

Avec 13,5 millions d'euros, pour la deuxième année consécutive, nous mettons au bénéfice de la reconnaissance professionnelle du personnel civil des sommes supérieures au montant cumulé attribué entre 1997 et 2002. Il s'agit d'un effort qu'il convient de souligner.

Les réservistes, enfin, troisième composante - sur lesquels vous aviez beaucoup insisté l'année dernière, et je sais, monsieur le président de la commission de la défense, tout l'intérêt que vous leur portez - , seront associés plus souvent et en plus grand nombre aux activités opérationnelles, grâce à 37 millions d'euros supplémentaires. En même temps, j'ai tenu à ce que soient mieux définis les postes qui pouvaient leur être confiés, de façon à rendre la réserve plus attractive.

M. Patrick Ollier. Bravo !

Mme la ministre de la défense. Mais comme je vous le disais tout à l'heure, il est évident, et j'en suis consciente, que lorsque la nation fait un effort financier aussi important pour sa défense, il est aussi de notre responsabilité de veiller à ce que chaque euro soit utilisé au mieux.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !

Mme la ministre de la défense. L'amélioration de la capacité opérationnelle et celle de la performance administrative vont de pair.

C'est la raison pour laquelle, comme je vous l'avais indiqué l'année dernière, j'ai engagé toute une série de réformes de fond, qui vont d'ailleurs se continuer en 2004.

Au cours de l'année 2003, de nombreuses mesures de réorganisation ont été menées par les armées et la DGA. La gendarmerie a modifié son implantation et créé des communautés de brigades.

J'ai ouvert quatre chantiers importants, qui vont se dérouler au cours de l'année 2004. Ces chantiers concernent principalement les personnels : les retraites des militaires, la révision de leur statut général, dont vous aurez à discuter vers la fin du premier semestre 2004, le rôle du personnel civil et les réserves.

De la même façon, sur le plan de notre organisation, la stratégie ministérielle de réforme pour 2004, que j'ai eu l'occasion de présenter à la commission des finances de l'Assemblée nationale la semaine dernière, va poursuivre et amplifier ce mouvement. Je veux très rapidement en rappeler les principes.

Le premier principe consiste à clarifier les responsabilités de chacun, afin que l'on sache qui a compétence, et qui est responsable.

Grâce à la mise en œuvre de la LOLF, les responsabilités respectives des hauts responsables du ministère seront ainsi précisées.

Le deuxième principe de ma stratégie ministérielle consiste à mutualiser les moyens. Un certain nombre de redondances ayant été constatées, la mutualisation doit nous conduire à mieux maîtriser les ressources humaines et financières destinées à assurer les besoins communs aux armées.

D'ores et déjà, j'ai engagé sept chantiers qui devront se concrétiser en 2004 : la mutualisation de l'approvisionnement des rechanges aéronautiques, la mutualisation de l'approvisionnement en vivres, y compris en OPEX, les opérations extérieures, avec la création récente de l'économat des armées, qui nos permettra d'ailleurs de réaliser des économies importantes, le regroupement des services d'archives, la mise en cohérence de l'informatique d'administration et de gestion, la gestion centralisée des réseaux informatiques, le regroupement de la fonction immobilière et la création d'un service constructeur unique. Enfin, les cinq corps administratifs de catégorie A, qui représentent 1 100 agents, seront fusionnés en un corps unique.

Le troisième principe prévu dans la loi de programmation militaire, et qui constitue l'un des éléments essentiels de notre rationalisation, est de recentrer l'action du ministère sur ce qui relève de son intervention directe ou exclusive.

Cette démarche va s'accompagner de certaines mesures d'externalisation, non pas dogmatiques, mais simplement pragmatiques. Je pense, par exemple, à l'externalisation de la gestion des logements. Est-il normal que 1 200 gendarmes soient actuellement affectés à gérer les logements ?

Mme Sylvia Bassot. Certainement pas !

M. Patrick Ollier. Très bonne question !

Mme la ministre de la défense. C'est complètement aberrant, d'autant que d'autres, dont c'est le métier, s'acquitteraient plus facilement de cette tâche.

L'amplification des cessions d'immeubles devenus inutiles à la défense du fait des restructurations, sera elle aussi à l'ordre du jour.

De même, la gestion des 25 000 véhicules de la gamme commerciale, ainsi que la fourniture d'heures de vol pour la formation initiale des pilotes d'hélicoptères seront externalisées.

Je crois que cette démarche générale doit répondre à nos objectifs opérationnels, tout en améliorant la gestion - c'est mon but - et l'organisation de nos structures.

Ainsi, les engagements contenus dans la loi de programmation que vous avez votée l'hiver dernier seront respectés.

Voilà comment ce budget entend répondre à notre premier objectif, celui de constituer un instrument au service de notre action militaire et de sécurité.

M. Bernard Deflesselles. Très bien !

Mme la ministre de la défense. Mais s'il est un instrument de notre politique militaire et de sécurité, le budget de la défense est aussi l'instrument d'une politique économique.

Je voudrais insister sur ce point, dont on a, me semble-t-il, insuffisamment conscience.

M. Patrick Ollier. Il s'agit pourtant d'un point très important !

Mme la ministre de la défense. Le budget de la défense est le premier budget d'investissement de l'Etat.

M. Jacques Myard. Enfin !

M. Patrick Ollier. Il est bon de le rappeler !

Mme la ministre de la défense. Il irrigue un secteur économique riche d'industries performantes et d'un important capital humain, scientifique et technologique.

Avec 15 milliards d'euros de commandes annuelles, le budget de la défense permet à nos entreprises de donner de l'activité à 175 000 salariés en emplois directs. Quatre milliards d'euros annuels, provenant des exportations, reviennent, là aussi, enrichir l'économie de notre pays. Et n'oublions pas que la défense, au titre de ces commandes, apporte deux milliards de TVA au budget de l'Etat. L'enjeu économique de la défense est donc considérable.

Il est considérable pour de grandes entreprises, mais il l'est également, et je m'adresse aux élus que vous êtes, pour tout le tissu de PME et de PMI, où se concentre l'essentiel du potentiel national d'innovation...

M. Patrick Ollier. C'est vrai !

Mme Sylvia Bassot. Tout à fait !

Mme la ministre de la défense. ... et qui permet d'avoir des activités sur l'ensemble du territoire, notamment des activités de pointe.

La défense joue aussi un rôle souvent méconnu, bien qu'il s'agisse d'un rôle moteur, dans l'innovation. J'évoquais tout à l'heure la composante Recherche et Développement du budget de la défense. Il faut savoir que celle-ci représente 25 % des budgets de recherche et de développement des entreprises de ce secteur.

On parle souvent de ce que font les Etats-Unis en la matière, mais on oublie que nous faisons exactement la même chose.

Le secteur de la défense représente, enfin, un capital précieux de compétences et de formation. Là aussi, on l'ignore parfois, mais c'est de la défense que dépendent un certain nombre de grandes écoles d'ingénieurs de renommée internationale, dont Polytechnique ou Sup'Aéro, pour ne citer qu'elles. Nous jouons ainsi un rôle important dans la formation de ces cadres, qui vont irriguer à la fois notre tissu industriel, mais également le tissu industriel étranger, avec tout ce que cela peut représenter comme connexions à notre avantage.

C'est également un capital, celui des laboratoires et des centres de recherches tels que l'ONERA et qui eux aussi participent au développement économique de notre pays.

Gérer le budget de la défense, mesdames et messieurs les parlementaires, c'est accomplir un acte de politique économique (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...

M. Yves Fromion. Très bien !

Mme la ministre de la défense. ... car ces richesses sont mises au service d'une politique économique placée elle-même au service de nos intérêts nationaux et de ceux de la défense européenne. J'entends soutenir cette action à partir de trois grands axes.

Le premier, c'est de promouvoir des entreprises performantes et compétitives, capables d'être insérées dans un marché et dans un système de concurrence. L'image caricaturale et archaïque d'un secteur constitué d'arsenaux et d'entreprises non rentables est dépassée. Certaines des entreprises de ce secteur sont aujourd'hui des leaders européens de taille mondiale - c'est le cas d'EADS ou de Thales. Nous voyons là que l'aiguillon de la concurrence et de l'ouverture européenne oblige les entreprises à développer sans cesse leur compétitivité et donc leurs performances.

Le recours à la concurrence doit être encouragé dès lors que nos priorités stratégiques sont respectées.

Il faut inciter les entreprises à unir leurs efforts pour constituer des pôles de compétences à l'échelle du continent, et structurer ainsi le paysage de l'industrie de défense européenne. C'est le pari qui a été gagné avec la constitution d'EADS. D'autres secteurs, notamment dans le domaine naval et dans le domaine de l'armement terrestre, doivent suivre cette voie dans les années qui viennent. Il faut y préparer nos entreprises et leur en donner les moyens.

Le deuxième axe, c'est de maîtriser les enjeux des dépendances technologiques stratégiques. Je vais vous demander toute votre attention sur ce point, mesdames et messieurs les députés. Il nous faut garantir notre accès aux technologies-clés, celles qui nous permettent de faire nos propres choix en matière d'équipement.

M. Yves Fromion. Très bien !

Mme la ministre de la défense. D'où l'importance de la recherche, d'où l'importance des investissements dans certains domaines. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Patrick Ollier. Très bien !

M. Jacques Myard. C'est fondamental !

Mme la ministre de la défense. Mais il s'agit aussi d'assurer notre indépendance en matière de fournitures de composants ou de matériaux indispensables aux armements d'intérêt stratégique.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !

Mme la ministre de la défense. Et pour cela, nous devons renforcer notre situation d'alerte, et éventuellement notre indépendance.

M. Guy Geoffroy. C'est très important !

Mme la ministre de la défense. Pour cela, des outils sont déjà à notre disposition : des procédures de contrôle de certains investissements étrangers - mais peut-être nous faut-il être plus vigilants - ainsi que l'actionnariat de l'Etat, qui permet de bloquer le passage à l'étranger de certaines entreprises sensibles, et le recours à des conventions spécifiques.

J'ai demandé au Conseil économique de défense de se pencher sur ces questions, et d'analyser en particulier le lien entre les enjeux de dépendance et la détention du capital des entreprises de défense. Mais je crois qu'il faut que nous y sensibilisions également les industriels.

Cette réflexion doit être abordée dans une perspective européenne, mais sans perdre de vue les intérêts qui sont aujourd'hui en jeu.

Le troisième axe de cette politique économique, c'est de mieux assumer la préparation du long terme et la fonction de stratège, qui incombent à l'Etat.

La préparation de l'avenir, c'est l'objet de la politique de recherche et de technologie. Il faut que nous disposions d'une base industrielle et technologique à la hauteur des ambitions de l'Europe de la défense.

M. Bernard Deflesselles. Tout à fait !

Mme la ministre de la défense. Il faut donner aux entreprises l'occasion d'acquérir les compétences dont nous aurons besoin pour les programmes futurs. C'est la raison pour laquelle j'ai choisi de donner la priorité aux démonstrateurs à finalités opérationnelles ou industrielles.

Telles sont les perspectives du budget de la défense, envisagé en tant qu'instrument d'une politique économique.

Le budget de la défense est également l'instrument de notre présence internationale, de notre politique diplomatique.

La France entend « contribuer à organiser un nouvel ordre international plus respectueux des identités et plus juste », le Président de la République l'a clairement rappelé.

En reprenant son effort de défense, la France a fait le choix de peser réellement sur les décisions internationales.

M. Patrick Ollier. Très bien !

Mme la ministre de la défense. Dans la lutte contre le terrorisme, nous apportons, cela est reconnu, le poids de notre défense, la qualité de nos militaires dont la compétence a été saluée récemment par les plus hautes autorités militaires de l'OTAN.

M. Bernard Deflesselles. C'est vrai !

Mme la ministre de la défense. Dans l'action en faveur de la stabilité et de la paix, la France est présente au premier rang, aussi bien en Afrique que dans les Balkans. Nous y sommes parce que nous en avons les moyens. Je peux vous dire que, depuis qu'il est connu que, par sa loi de programmation militaire, la France se dote des moyens de son action, les propos que nous tenons dans les réunions internationales sont écoutés avec une qualité d'attention autre qu'auparavant.

M. Patrick Ollier. Très bien !

Mme la ministre de la défense. C'est vrai sur le plan international, c'est vrai également à l'échelle européenne. Les efforts que nous consacrons à nos équipements donnent de la crédibilité à notre ambition pour l'Europe de la défense.

L'Europe de la défense a pris récemment une nouvelle dimension grâce notamment aux opérations que nous avons conduites, la première en Macédoine, la seconde en République démocratique du Congo, en Iturie. Pour la première fois, l'Europe de la défense existait. Pas seulement aux yeux des spécialistes que vous êtes, parce que vous saviez qu'elle avançait, mais aux yeux du grand public.

Demain en Bosnie et sans doute ailleurs, l'Europe s'affirmera comme une puissance militaire capable de faire respecter ses intérêts et ses idéaux. De nouvelles voies de progrès s'ouvrent à elle, concernant notamment la préparation de l'avenir et la planification des opérations européennes. La future Agence européenne de défense répond à la première préoccupation. L'acquisition par l'Union européenne d'une capacité de planification des opérations conduites sous sa responsabilité, y compris celles faisant appel à des moyens de l'OTAN, répond à la deuxième.

Ce qui est vrai à l'échelle européenne l'est également à l'échelle mondiale. Soyez-en persuadés, la considération dont jouit la France serait bien différente si nous n'avions pas les moyens de mettre en œuvre notre vision du monde. Notre siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies s'appuie aussi sur notre capacité à intervenir pour soutenir militairement les décisions de l'ONU. La France est le premier contributeur au Kosovo, l'un des contributeurs majeurs dans l'ensemble des Balkans, et en Afghanistan. C'est vers nous que s'est tourné Kofi Annan quand la MONUC a rencontré des problèmes en Iturie. Notre place en Afrique, nos liens historiques et personnels avec ce continent nous rendent susceptibles de diriger ou d'encadrer des opérations de maintien de la paix. Grâce à la panoplie de nos moyens, nos amis et nos alliés dans le monde savent pouvoir compter sur nous quand il le faut.

Mesdames, messieurs les députés, le présent projet de budget constitue un élément déterminant de la politique de la France. Alors que certains se lamentent sur un prétendu déclin de notre pays, ce budget donne de la France une image bien différente,...

M. Bernard Deflesselles. C'est vrai !

Mme la ministre de la défense. ...l'image d'une France responsable, qui se donne les moyens d'être acteur au sein de la communauté internationale.

M. Jacques Myard. Maîtresse de son destin !

Mme la ministre de la défense. Ce budget donne l'image d'une France riche, inventive, dynamique, soucieuse de faire fructifier le potentiel humain exceptionnel qui est le sien, de développer son économie, ses technologies. Il donne l'image d'une France visionnaire qui cherche à imaginer, à créer un avenir, sans cynisme, sans naïveté, sans défaitisme. Un avenir dont nous puissions être fiers, que nos enfants puissent envisager avec sérénité et optimisme.

C'est cette France à laquelle je suis attachée, comme, je le sais, la plupart d'entre vous. C'est cette France que nos militaires défendent sur tous les théâtres d'opérations extérieures. Merci de leur donner les moyens de continuer. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. François d'Aubert, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, madame la ministre de la défense, mes chers collègues, deuxième budget de l'Etat et premier budget d'investissements publics de la nation, la défense fait l'objet d'un effort rendu nécessaire par cinq années de coupes sombres dans ses crédits d'équipement. Nous nous félicitons que les engagements du Président de la République et du Gouvernement soient parfaitement respectés. A ceux qui douteraient de la pertinence d'un tel effort, je rappelle que le contexte géostratégique multiplie les menaces, marquées notamment par la prolifération nucléaire et le terrorisme de masse. Certains ont cru à l'avènement de la paix et souhaitaient en percevoir les dividendes, sans doute un peu trop rapidement.

M. Michel Voisin. C'est vrai !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. Les outils de défense sont aujourd'hui encore plus nécessaires et souvent, c'est vrai, un peu plus coûteux.

La France, membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, assume avec force, vous l'avez rappelé, madame la ministre, des responsabilités mondiales. Quelle serait sa place sans défense crédible ? Comment imaginer que l'Europe de la défense puisse se construire si la France renonçait à disposer d'une armée forte et efficace ? (« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Face aux menaces diffuses rappelées par le Président de la République en juin 2001, la dissuasion reste indispensable. Nous devons maintenir la sanctuarisation de notre territoire. Bien sûr, face aux Etats voyous, il faut que le Président ait d'autres choix que la logique binaire offerte par une frappe nucléaire. C'est justement pour cela que nous renforçons notre défense. L'augmentation constante du nombre de puissances nucléaires et la doctrine américaine fondée sur la possibilité d'attaques préventives conduisent la France à maintenir son effort, afin de pouvoir soutenir le dialogue avec les Etats-Unis. Je rappelle qu'en 2010, la France et les Etats-Unis seront les deux seules nations à disposer de cet outil essentiel pour la dissuasion qu'est la simulation.

Dans un contexte marqué par la multiplication des crises régionales, le budget de la défense que vous nous proposez, madame la ministre, est à la hauteur des enjeux. La programmation des dépenses d'équipement est respectée et le budget de fonctionnement contenu.

Sur l'ensemble du ministère, 205 emplois sont supprimés, mais les postes de militaires progressent de 647. Les crédits de rémunérations sont stables - plus 0,5 % - à 14,05 milliards d'euros. Le fonds de consolidation permettra le financement de mesures destinées à fidéliser nos militaires. C'est important. En revanche, dans la logique de votre « stratégie ministérielle de réforme » que vous avez exposée à la commission des finances, des économies de fonctionnement sont recherchées et, ajouterai-je, réalisées.

Je n'insisterai que sur les effets vertueux de l' « interarmisation », c'est-à-dire la mutualisation des fonctions communes aux armées. Les seize services d'archives devraient fusionner. La SIMMAD et le SSF, s'ils sont perfectibles, ont permis d'accroître l'efficacité des armées.

L'an dernier, j'avais modestement avancé deux possibilités d'économies de fonctionnement : l'une sur les crédits d'alimentation, l'autre sur les crédits de communication. S'agissant de l'alimentation, j'observe avec plaisir que des économies de gestion ont été effectuées et que de nouvelles sont programmées pour 2004, à hauteur de 12,4 millions d'euros. Le coût de cette fonction aura baissé de plus de 18 millions pour les trois armées, alors que mon amendement ne proposait de le réduire que de 10 millions. J'observe, au passage, que la gastronomie militaire aura sans doute, à l'inverse, progressé. (Sourires.)

Sur la fonction communication, vous avez obtenu 3,6 millions d'euros d'économies pour 2004, sur un coût complet actuel de 76,4 millions d'euros. Je rappelle à nos collègues qui pourraient s'en inquiéter que cette réduction ne touche pas les campagnes de recrutement. Des suppressions de postes sont programmées, 81 dont 20 à la délégation à l'information et à la communication de la défense, qui n'étaient pas, il est vrai, tous pourvus. Sans entrer dans le détail, j'indique simplement que le nombre des revues éditées par la DICOD, mais aussi par chaque armée ou service, devrait être raisonnablement réduit - il dépasse aujourd'hui la cinquantaine - et pas seulement pour des raisons budgétaires : il en va aussi de la lisibilité de la communication de défense.

Au chapitre des économies dégagées pour 2004, les 31 millions d'euros économisés sur les carburants ne doivent pas trop faire illusion : cette diminution n'est due qu'à l'anticipation d'une baisse des cours du pétrole. Elle n'est donc pas tout à fait pérenne, mais n'en est pas moins intéressante.

Au-delà de ces éléments, qui peuvent paraître anecdotiques, j'en conviens, nous nous sommes également penchés sur le coût des postes permanents à l'étranger, les PPE. Au 31 août 2003, 785 militaires et 102 civils étaient en poste dans nos ambassades et auprès des organismes internationaux. Bien sûr, nous ne remettons absolument pas en cause la justification - toutes les justifications - de ce réseau. Simplement, nous nous interrogeons sur son envergure dans certaines ambassades.

D'après les informations transmises, le coût de ce réseau était supérieur à 121 millions d'euros en 2002, dont 105,5 euros au titre des rémunérations et indemnités. A la lecture du bleu budgétaire, les seuls crédits de rémunérations et de charges sociales des PPE s'élèvent à 115,9 millions d'euros en 2003 et à 122 millions d'euros en 2004. Comment s'explique cette progression de plus de 5 % ? En outre, la ligne des indemnités et allocations progresse de plus de 8 %, pour atteindre 9,2 millions d'euros. La commission des finances propose, sans remettre en cause les soldes, de contenir la progression de cette ligne à la moitié de celle prévue au titre des services votés de 2004. Nous aurons l'occasion d'y revenir plus tard et de déplorer également que les propositions faites n'aient pas convenu au ministère des finances, qui comprend parfois assez mal que les économies réalisées par un ministère doivent pouvoir normalement bénéficier pour partie au budget de celui-ci.

Le budget d'équipement que vous nous proposez, madame la ministre, respecte scrupuleusement la loi de programmation militaire. Il atteint 14,9 milliards d'euros. C'est la première fois, historiquement, qu'une programmation est respectée deux ans de suite. Il n'y a pas de raison que cela s'arrête là. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jacques Myard. Bravo, madame la ministre !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. Compte tenu des additions et des soustractions nécessaires pour comparer le montant de la programmation et le montant du budget, je me bornerai à indiquer ici que l'enveloppe est respectée. Pourtant, ce bon budget suscite quelques interrogations.

Tout d'abord, le périmètre des dépenses d'équipement semble un peu souple.

M. François Goulard. La souplesse est une vertu !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. Ainsi, 200 millions d'euros seront affectés au BCRD. On peut douter que cette enveloppe financera uniquement de la recherche intéressant la défense. Mais c'est un vieux problème. De même, le budget d'équipement financera le coût de la transformation de la DCN. Certes, la lourde recapitalisation de 560 millions, dont 420 millions d'euros restent encore à verser, ne pèsera pas sur le budget de la défense. En revanche, les crédits de restructurations atteignent 279,5 millions d'euros ! Cela doit bien peser sur quelque chose, notamment sur certaines activités militaires.

La recherche, vous l'avez souligné, madame la ministre, est très significativement renforcée par la programmation 2003-2008.

M. Jacques Myard. Enfin !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. Elle fait l'objet d'une solide dotation de 1,24 milliard d'euros. Pourtant, je me permets de m'inquiéter d'un certain relâchement de l'effort sur les études en amont. Ce point très particulier est important.

M. Jean-Michel Boucheron. C'est le moins qu'on puisse dire !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. Leur dotation baisse de près de 19 % en crédits de paiement. Or, si la France et, au-delà l'Europe, veulent peser internationalement sur le plan technologique, il faut empêcher que le fossé technologique avec les Etats-Unis ne se creuse.

Vous l'avez souligné, madame la ministre, il faut également que la France conserve sa souveraineté technologique ...

M. Jacques Myard. Très bien !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. ... pour continuer à faire les choix qu'elle souhaite pour sa défense.

Les Etats-Unis favorisent leurs groupes industriels mais aussi leurs PME et PMI. Il serait opportun de proposer qu'une partie des marchés militaires, lorsqu'il s'agit de haute technologie, puisse être réservée à des PME et PMI ...

M. Jacques Myard. Françaises !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. ... spécialisées dans la défense.

M. Jacques Myard. Très bien ! Vous avez mille fois raison.

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. Une telle proposition ne répond peut-être pas à la logique européenne mais il s'agit là de dépenses de défense et de PME et PMI spécialisées dans la technologie militaire.

M. François Vannson. Cela vaut pour le textile !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. Alors que l'ensemble de l'Union européenne a exporté, en 2002, pour 0,8 milliard de dollars de technologies de défense aux Etats-Unis, ces derniers en ont vendu pour un montant de 3,6 milliards de dollars en Europe, soit un résultat tout à fait déséquilibré. Il faut en outre compter avec un prélèvement de plus de 5 milliards de dollars sur les budgets de défense de la Grande-Bretagne, de l'Italie, des Pays-Bas et du Danemark, qui ont fait le choix du JSF F35, choix que d'ailleurs certains gouvernements commencent à regretter...

M. Jérôme Rivière. Tout à fait.

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. ... tant les retombées économiques sont légères et contrôlées par le gouvernement américain.

M. Jacques Myard. Eh oui !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. Les dotations d'équipement devront permettre de relever le taux de disponibilité qui augmente certes, mais lentement, compte tenu de la vétusté de certains matériels et des retards accumulés de 1997 à 2002.

Dans l'optique de la mise en œuvre de la loi organique, il est nécessaire que le Parlement dispose d'indicateurs fiables. Si les pilotes d'hélicoptères de la marine sont supposés voler 220 heures, ceux l'armée de l'air et de l'armée de terre sont supposés voler 180 heures. Pourtant, ce dernier objectif a été ramené à 160 heures pour l'armée de l'air. Si les objectifs varient, comment apprécier les résultats ?

Les coûts de maintenance sont en forte progression, parfois de 25 à 30 %. De nouveau, j'insiste sur la nécessité de recourir aux financements innovants.

M. François Goulard. Très bien !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. J'ai la conviction qu'il s'agit là du meilleur moyen de respecter pleinement la programmation.

La prochaine ordonnance sur les partenariats public-privé ouvre des perspectives prometteuses. Pourtant, je m'inquiète, et je ne suis pas le seul, des retards pris dans son élaboration par le ministère des finances.

De même, alors que la LOPSI a été votée il y a seize mois, les décrets d'application sur la gestion immobilière ne sont toujours pas parus. Ils sont apparemment bloqués au Conseil d'Etat. Le respect du vote des lois implique pourtant que les textes d'application soient pris dans les meilleurs délais.

M. Jacques Myard. Ce qui a été le cas pour les retraites !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. Alors que ce texte a été voté en urgence, cette situation est inacceptable.

Je tiens à évoquer le caractère exemplaire du programme MINREM. En effet, l'Etat achètera un bâtiment avec - si cette option est utilisée - un contrat de maintenance assuré par le prestataire. Il s'engagerait sur un objectif global moyen de disponibilité de 350 jours par an, mesuré à partir de vingt-trois fonctions de base identifiées.

Cette démarche est particulièrement intéressante car la Marine n'aura pas besoin de former des personnels à la maintenance de son bâtiment, optimisant ainsi la gestion de son personnel et ses coûts. Bien évidemment, l'Etat sera le propriétaire du bâtiment.

Vous avez lancé, madame la ministre, cinq chantiers pour 2004 : l'externalisation de la formation des pilotes d'hélicoptères, de la gestion immobilière et du parc automobile, du transport aérien à long rayon d'action ainsi que de la logistique des opérations extérieures. Je n'insisterai que sur deux de ces chantiers.

S'agissant de la formation initiale des pilotes d'hélicoptères de Dax, le ministère de la défense ne procéderait pas à une acquisition d'hélicoptères mais passerait un contrat de service avec une entreprise. La société cocontractante pourrait rentabiliser son investissement en permettant l'usage des hélicoptères - lorsque les armées n'en auront pas besoin - à des fins civiles.

Il est souhaitable que cette externalisation soit menée pleinement. Il convient donc de confier au prestataire une mission globale de gestion de cette école. Pour que ce contrat soit signé dans les meilleures conditions, il faut également que la définition du coût complet de l'école soit la plus exhaustive possible.

Pour ce qui est de la politique immobilière, vous proposez de transférer la gestion des logements à un prestataire privé, ce que nous approuvons. Il est en effet surprenant que 1 200 gendarmes soient affectés à cette tâche qui n'a aucun rapport avec les missions pour lesquelles ils ont choisi d'être militaires.

La commission des finances s'est interrogée sur le problème des cessions, dont le montant nous paraît - c'est un euphémisme - un peu faible : l'occupation des locaux doit être optimisée pour limiter la sous-occupation et réaliser des cessions.

Nous ne méconnaissons pas les difficultés propres à ces cessions s'agissant en particulier de la dépollution et de la désignation des entreprises capables de l'effectuer. Nous souhaitons cependant que le montant des cessions prévues pour 2004 soit augmenté d'une dizaine de millions d'euros. Ce ne serait certainement pas une mauvaise affaire pour le ministère de la défense compte tenu de la réglementation en vigueur en matière de cessions immobilières.

En outre, le délai entre la cession et l'encaissement de son montant par voie de fonds de concours peut atteindre quatre ans. Ce délai pourrait être réduit.

Je tiens à formuler quelques observations sur les perspectives du second porte-avions, dont la nécessité est consacrée par la loi de programmation.

La construction du Charles de Gaulle a généré un surcoût de près de 20 %, compte tenu des retards budgétaires observés, mais aussi des nombreuses modifications apportées en cours de réalisation. Son coût d'entretien est de plus particulièrement élevé.

Récemment, la DCN a proposé un porte-avions à propulsion nucléaire pour un coût de 1,8 milliard d'euros. Pourtant, son document, largement diffusé, sauf auprès de certains parlementaires (Sourires), ne prend pas en compte l'obsolescence de certains systèmes du porte-avions existant. Est-il raisonnable d'imaginer qu'un porte-avions admis au service actif en 2014 soit équipé de radars, voire d'un système de communication intérieure, pour ne citer que ces équipements, d'une conception qui date de trente ans ? Certaines remises à jour techniques et évidemment financières sont sans doute à faire.

En outre, le besoin exprimé par les Britanniques se rapprochant du besoin français, s'agissant notamment de la réduction du tonnage, la coopération devrait être recherchée. Outre les économies budgétaires à en attendre, une telle coopération serait un pas significatif quant à la mise en œuvre, progressive, d'une défense européenne lisible. Les deux seules nations européennes disposant de porte-avions de taille significative peuvent-elles se permettre de lancer deux programmes distincts ?

Je voudrais revenir quelques instants sur la question des avions ravitailleurs.

Il s'agit d'un marché mondial de 500 avions, qui n'a donc rien d'anecdotique. Les Britanniques vont très prochainement choisir entre la formule proposée par Boeing, sur des 767 d'occasion, et par Airbus, sur des A330-200 neufs ou très récents. Il me semble important pour l'Europe que ce marché ne fasse pas l'objet d'un monopole mondial.

M. Jacques Myard. Très bien !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. J'en viens maintenant au déroulement de programmes d'armement en cours.

Les défauts de jeunesse du Rafale livré à la marine sont en voie de résorption et cinq Rafale devraient être livrés à l'armée de l'air. Nos capacités de communication et de renseignement seront de plus renforcées par la mise en orbite des satellites Syracuse III et Hélios II.

Pourtant, deux programmes provoquent quelques inquiétudes, le Leclerc et le VBCI, le véhicule blindé de combat d'infanterie.

Seuls huit chars Leclerc ont été livrés sur les quarante-cinq prévus pour 2003. Certes, l'an dernier à la même date, seuls neuf chars étaient livrés, et, finalement, trente-trois ont pu être réceptionnés, dont une grande partie dans les derniers jours de l'année. La livraison de ces douze chars manquants a été étalée : cinq en 2003, cinq en 2004 et deux en 2005. Donc, si l'on considère que les cinq premières livraisons de 2003 sont, en fait, les livraisons en retard de 2002, les livraisons programmées pour 2003 n'ont concerné au 1er octobre que trois chars !

L'enjeu financier de ces retards n'est pas négligeable : 20 % du montant de chaque char est versé à la livraison. Le coût unitaire actuel étant de 8,33 millions d'euros, les douze chars qui n'ont pu être livrés en 2002 ont généré un report de crédits, ce qui n'est jamais très sain, d'environ 20 millions d'euros.

Ce retard s'explique par un rythme de production de GIAT Industries inférieur aux prévisions et par le rejet de certains chars par la DGA, chargée de les réceptionner, en raison de défauts de qualité. Compte tenu du rythme actuel, nous craignons que les 406 livraisons ne soient pas achevées en 2005.

De même, le programme VBCI a pris au minimum un an de retard à la suite des difficultés rencontrées par les utilisateurs et les acheteurs pour se mettre d'accord sur les spécifications à venir. Pourtant, nous avons voté les crédits au rythme initialement prévu. Quel a donc été leur utilisation ?

Une partie a été logiquement redéployée pour fïabiliser l'AMX 10 P. Plus surprenant, une dotation de 10 à 15 millions d'euros devrait être, par redéploiement de crédits, affectée à des études pour une tourelle à deux hommes, alors que cette possibilité avait été écartée au début du programme.

M. Yves Fromion. Eh oui !

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. Cela conduirait, de fait, à créer une troisième variante du programme. En outre, l'alourdissement du véhicule, qui semble inévitable, risque de remettre en cause la plate-forme fournie par Renault Trucks.

Il s'agit là d'un dysfonctionnement malheureusement classique que l'on rencontre dans le déroulement de certains programmes : modification en cours de programme, difficile communication entre la DGA et l'état-major et difficulté à arrêter définitivement la spécification d'un besoin.

Il est vrai que la situation de GIAT Industries n'est pas étrangère à ces péripéties. Je ne reviendrai pas sur les recapitalisations à répétition qui ont conduit l'Etat à verser depuis 1990 - il faut le rappeler - un total de 4 milliards d'euros à l'entreprise, en faisant ainsi le plus gros programme de la défense. Toutes ces sommes ne se justifient pas uniquement par des arguments technologiques.

M. le président. Je vous demande de bien vouloir conclure, monsieur d'Aubert.

M. François d'Aubert, rapporteur spécial. J'en termine, monsieur le président.

La « participation du ministère de la défense au plan de renouveau de GIAT Industries » justifie l'inscription d'une mesure nouvelle de 56,8 millions d'euros sur les chapitres de personnels du titre III. Cette mesure se décompose en une dotation reconductible - qui serait donc intégrée aux services votés dans le prochain projet de loi de finances - d'un montant de 11,49 millions d'euros et en une dotation non reconductible de 45,32 millions d'euros.

Cette dotation devrait permettre de financer la transformation de 503 emplois, dont 392 emplois à statut ouvrier et 111 emplois de fonctionnaires.

Si les perspectives de DCN laissent quelque espoir, le plan de charge de GIAT paraît nettement plus problématique.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter les crédits de la défense, comme la commission des finances l'a fait, après le vote de l'amendement sur les postes permanents à l'étranger, qui sera discuté tout à l'heure. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Paul Quilès, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.

M. Paul Quilès, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans un contexte budgétaire difficile, le budget de la défense se distingue de celui des autres ministères par l'augmentation importante de ses crédits, supérieure à 4 %.

En ma qualité de rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, j'analyserai plus particulièrement l'adéquation entre ces crédits et l'évolution du contexte stratégique.

Le Gouvernement indique que l'effort budgétaire consenti s'inscrit dans un contexte international particulièrement troublé, marqué par la montée de nouveaux types de menaces. Il est donc légitime de se demander si notre outil de défense, en dépit du volume élevé des crédits qui lui sont consacrés, permet effectivement d'y répondre.

Force est de constater que l'appareil de défense de la France et, plus globalement, celui de l'Europe, semblent encore assez démunis. Si le terrorisme international est en effet considéré aujourd'hui comme une menace majeure pour la sécurité de l'Europe, on peut néanmoins s'interroger sur les mesures concrètes - je veux dire budgétaires - prises pour lutter contre ce fléau depuis le 11 septembre 2001.

En matière de prévention, on n'a pas noté d'effort significatif dans le domaine du renseignement. Quant à la protection du territoire contre d'éventuelles attaques terroristes, notamment par des moyens non conventionnels de défense civile, on peut dire que le 11 septembre n'a eu sur le plan budgétaire quasiment aucun impact.

Et pour ce qui est de la capacité de projection de l'armée française, il faut rappeler, au-delà des propos habituels, qu'elle reste inférieure à celle de l'armée britannique.

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La faute à qui ?

M. Paul Quilès, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Pourtant, le développement des crises régionales requiert de disposer de capacités importantes dans ce domaine, afin de pouvoir faire face à plusieurs crises simultanées.

Enfin, face aux dangers de la prolifération, il serait nécessaire de renforcer les outils d'observation spatiale pour se prémunir contre d'éventuelles attaques - j'y reviendrai.

L'objectif de notre politique de défense, chacun le reconnaît aujourd'hui, doit être de répondre aux carences de l'Europe face aux nouvelles menaces et il faut se demander si ce budget permet de commencer à réduire nos lacunes dans les domaines les plus stratégiques. Il est malheureusement évident qu'il confirme des choix budgétaires essentiellement nationaux, centrés sur une relance « tous azimuts » des grands programmes d'équipement militaire, sans réflexion réelle sur leur utilité pour la défense de l'Europe.

M. Jacques Myard. La défense de la France, c'est la défense de l'Europe !

M. Paul Quilès, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. En effet, on constate des carences inquiétantes dans des domaines stratégiques.

En premier lieu, dans le domaine spatial, les crédits prévus pour 2004 sont tout à fait insuffisants. Ils s'inscrivent, c'est vrai, dans une loi de programmation militaire 2003-2008, qui n'a pas accordé à ce secteur, pourtant hautement stratégique, l'importance qu'il méritait. La part des dépenses d'équipement spatial dans l'ensemble des dépenses en capital de la défense descendra à 3 % en 2008, au lieu de 3,4 % en moyenne entre 1997 et 2002. Cette évolution est paradoxale, alors qu'il est largement admis que le spatial militaire - on l'a vu pour le Kosovo, pour l'Afghanistan, pour l'Irak - est un outil déterminant pour la connaissance et la gestion des crises.

Il n'est pas inintéressant de constater que les Etats-Unis consacrent au spatial militaire 10 % de leur budget de défense et qu'au total, les Américains y consacrent vingt fois plus que les Européens.

Un autre domaine décisif pour la préparation du futur est celui de la recherche de défense. Les principaux pays européens ont réduit leur budget dans ce domaine où, là encore, la domination américaine est totale et s'accentue. La France a été particulièrement touchée par cette tendance à la réduction des crédits de recherche : les dépenses de recherche de défense sont ainsi en baisse de 6,6 % par rapport à 2003, ainsi que l'a relevé tout à l'heure le rapporteur spécial de la commission des finances, M. d'Aubert. Cette baisse a notamment été très forte dans le domaine, stratégique pour le futur, des études amont.

Ces lacunes s'expliquent assez facilement, lorsque l'on analyse les dépenses consacrées au nucléaire, dont le volume provoque un effet d'éviction au détriment des autres types d'investissement.

En effet, les crédits consacrés à la dissuasion sont considérables : ils représentent chaque année plus de 3 milliards d'euros, soit 20 % des crédits d'équipement et 10 % de l'ensemble du budget de la défense. Les Britanniques y consacrent seulement 3 %, alors qu'ils disposent, eux aussi, d'une force de frappe nucléaire.

M. Jacques Myard. Sous contrôle américain !

M. Paul Quilès, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Par ailleurs, ces crédits augmentent sensiblement depuis quelques années. Après avoir logiquement baissé au cours des années 1990, les crédits destinés à la dissuasion ont recommencé à augmenter depuis 2001, de 68,7 % en autorisations de programme et de 37 % en crédits de paiement.

Cette augmentation récente des sommes consacrées à la dissuasion est liée à ce que l'on appelle la « modernisation » de la force de frappe nucléaire de la France, qui n'a pourtant fait l'objet d'aucun débat préalable devant la représentation nationale. Pour ma part, je considère que la mise en œuvre des nouveaux programmes en cours n'est pas nécessaire pour que soient respectés les grands principes de la doctrine nucléaire de la France que sont le concept du « non-emploi » et celui de la « stricte suffisance ».

M. Charles Cova. Le rapport que vous faites a-t-il été approuvé par la commission, monsieur Quilès ?

M. Paul Quilès, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Il faut qu'on nous explique pourquoi notre armement nucléaire - dont on ne connaît d'ailleurs pas la doctrine d'utilisation ou de non- utilisation - doit être de plus en plus sophistiqué.

M. Bernard Deflesselles. Vos propos ne traduisent pas l'avis de la commission des affaires étrangères !

M. Paul Quilès, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Par exemple, quelle est l'utilité du futur missile M51 à longue portée qui doit remplacer, à partir de 2010, l'actuel missile M45 ? Répondra-t-il à un manque de l'actuel système de dissuasion ? Considère-t-on alors que, dans les dix prochaines années, la France devrait avoir à se défendre, seule, contre des ennemis lointains ? Je vous ai entendue, madame la ministre, parler à cette tribune, l'autre jour, de la Corée du Nord ou du Pakistan.

On nous dit que la prolifération des armes de destruction massive justifie la sophistication croissante de notre arsenal nucléaire. Et pourtant, chacun sait que, dans le contexte nouveau des menaces asymétriques, la dissuasion est inopérante. Le principe de la dissuasion consistant à menacer un éventuel agresseur de lui infliger des dommages inacceptables, implique d'abord de pouvoir identifier cet agresseur - le problème se pose dans le cas du terrorisme international. Ensuite, il faut que celui-ci raisonne de façon rationnelle - c'est la question bien connue de l'efficacité discutable de la dissuasion dite « du fort au fou ». On voit bien qu'avec l'évolution que connaît le monde depuis une quinzaine d'années, cette théorie est en passe de devenir une sorte d'objet historique.

C'est pourquoi il me semble urgent de lancer un véritable débat sur l'utilisation des sommes considérables destinées au nucléaire militaire et, plus généralement, sur le rôle du nucléaire dans notre stratégie. Je pense pour ma part que, d'ores et déjà, il est possible de dégager des marges de manœuvre financières importantes. Je présenterai tout à l'heure un amendement dans ce sens.

Pour toutes ces raisons, j'avais recommandé à la commission des affaires étrangères de ne pas adopter ce budget.

M. Richard Mallié. Rêveur ! C'est bientôt Noël !

M. Paul Quilès, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Mais elle ne m'a pas suivi. (« Ah » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)Je vois, chers collègues, que vous êtes très favorables au débat, et je m'en félicite !

M. le président. Poursuivez, monsieur Quilès !

M. Charles Cova. Nous entendons le rapport Quilès, pas celui de la commission !

M. Paul Quilès, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Je viens de rendre compte du rapport qui est déposé, et que vous avez probablement lu dans ses moindres détails - n'est-ce pas, monsieur Cova ? Pour le cas où vous l'ignoreriez, je vous indique que la commission des affaires étrangères a voté contre mes conclusions. Cela ne m'empêche pas de continuer à appeler à une vraie réflexion sur les priorités de notre défense, et tout particulièrement sur la signification de notre armement nucléaire.

Il est normal qu'un consensus soit recherché - comme je l'ai fait lorsque j'étais ministre de la défense ou président de la commission de la défense - autour des grandes orientations de notre politique de défense. Cela ne doit pas se faire par défaut, en évitant soigneusement le débat au fond, en pratiquant la langue de bois, trop souvent utilisée lorsqu'il s'agit de nucléaire, ou en avançant des arguments d'autorité. Sur un sujet aussi sérieux et grave que celui-ci, il ne peut y avoir de domaine réservé dans une démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

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ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004, n° 1093 :

M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 1110) :

Défense ; articles 46 et 47 :

Défense :

M. François d'Aubert, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 40 du rapport n° 1110) ;

M. Paul Quilès, rapporteur pour avis au nom de la com-mission des affaires étrangères (tome VII de l'avis n° 1113) ;

Dissuasion nucléaire :

M. Antoine Carré, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome II de l'avis n° 1114) ;

Espace, communications et renseignement :

M. Yves Fromion, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome III de l'avis n° 1114) ;

Forces terrestres :

M. Joël Hart, rapporteur pour avis au nom de la com-mission de la défense nationale et des forces armées (tome IV de l'avis n° 1114) ;

Marine :

M. Charles Cova, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome V de l'avis n° 1114) ;

Air :

M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome VI de l'avis n° 1114) ;

Titre III et personnels civils et militaires d'active et de réserve :

M. Pierre Lang, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome VII de l'avis n° 1114) ;

Crédits d'équipement :

M. François Cornut-Gentille, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome VIII de l'avis n° 1114) ;

Services communs :

M. Jean-Yves Le Drian, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome IX de l'avis n° 1114) ;

Gendarmerie :

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome X de l'avis n° 1114).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)

      Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

      JEAN PINCHOT