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Deuxième séance du mercredi 5 novembre 2003

50e séance de la session ordinaire 2003-2004


PRÉSIDENCE
DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2004
DEUXIÈME PARTIE

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004 (n°s 1093, 1110).

AFFAIRES SOCIALES, TRAVAIL ET SOLIDARITÉ, ÉGALITÉ PROFESSIONNELLE (SUITE)

M. le président. Nous poursuivons l'examen des crédits des affaires sociales, du travail, de la solidarité et de l'égalité professionnelle.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour un rappel au règlement.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je voudrais faire un rappel au règlement pour que vous compreniez la situation car je préfère que l'on ait un président informé et avisé. Sans doute le président de cet après-midi savait-il que c'est vous qui présideriez ce soir et il aura voulu vous laisser un cadeau.

Je ne rappelle pas les termes de l'article 58 du règlement. Je l'ai lu tout à l'heure. Tout le monde le connaît maintenant.

Contrairement à l'habitude et alors que nous débattons d'un texte de loi important, puisqu'il s'agit du budget, le président de cet après-midi s'est montré très strict sur le respect des temps de parole en faisant deux poids, deux mesures dans l'application du règlement. J'ai vérifié : M. Bernard Perrut a parlé treize minutes.

M. Pierre Cardo. Il disposait de quel temps de parole ?

M. Maxime Gremetz. M. Vercamer a dépassé son temps de parole sans être interrompu. Moi, j'ai dépassé un peu le mien.

M. Jean-Claude Abrioux. Un peu !

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la formation professionnelle. Cela vous arrive si rarement, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Le président m'a brutalement interrompu. J'ai fait un rappel au règlement. Il m'a répondu qu'il appliquait le règlement à tout le monde de la même façon.

Mais, après vérification, je m'aperçois qu'il y a bien eu deux poids, deux mesures. Et les minutes qu'on me vole, j'ai l'habitude de les récupérer à la louche.

M. Pierre Cardo. Cela fait gagner du temps à l'Assemblée !

M. Maxime Gremetz. Je m'étais préparé pour ce soir, pensant que ce serait le même président que cet après-midi. Mais j'ai évidemment quelques scrupules car vous n'y êtes pour rien, monsieur le président.

Je vous demande donc que nous ayons un débat équitable. A vouloir faire respecter le règlement à la minute près et, qui plus est, en étant plus laxiste avec ses amis, on perd beaucoup plus de temps. C'est la conclusion à laquelle nous amène l'expérience commune, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Gremetz, je n'ai pas présidé la séance précédente mais j'ai pu constater les écarts entre les temps de parole et je n'ai pas vu d'injustice flagrante. Mais vous pouvez compter sur moi ce soir pour laisser se dérouler le débat tranquillement.

Suite de la discussion

M. le président. Nous continuons d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion.

La parole est à Mme Catherine Génisson.

Mme Catherine Génisson. Monsieur le président, madame la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle, monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, mes chers collègues, je veux consacrer mon intervention, dans le cadre de l'examen du budget pour 2004 des affaires sociales, du travail, de la solidarité et de l'égalité professionnelle, à l'égalité entre femmes et hommes, principe fondateur de notre pacte républicain.

L'égalité professionnelle entre femmes et hommes est une priorité nationale quand les discriminations perdurent avec tant d'acuité.

Les écarts de salaires entre hommes et femmes sont de 24 % en moyenne en faveur des hommes et de 11 % à parcours et postes équivalents. En dix ans, la hausse de l'emploi féminin a été dix fois plus forte que l'emploi masculin. Mais les femmes représentent 80 % des 3,2 millions de salariés au SMIC ou en-dessous. De plus, près de 30 % des femmes travaillent à temps partiel contre 5 % des hommes, alors même - et vous l'avez vous-même rappelé, madame la ministre - que le travail des femmes participe largement au développement économique de notre pays.

Je souhaite saluer ici l'action de la présidente de la délégation aux droits des femmes, Mme Marie-Jo Zimmermann, avec qui nous menons, au sein de la délégation, un bon travail. Mme Zimmermann a récemment reconnu l'utilité de la loi du 9 mai 2001, ce dont je me félicite.

L'inégalité professionnelle entre les femmes et les hommes est criante. Reconnaissons l'ampleur du sujet mais aussi la difficulté de l'application des solutions.

L'année 1983 a été marquée par la loi Roudy qui a posé deux principes : l'interdiction de toute discrimination au travail et l'égalité professionnelle comme principe fondateur. Vingt ans après, nous voyons les limites de sa mise en oeuvre. Le gouvernement de Lionel Jospin a fait de l'égalité professionnelle entre femmes et hommes une priorité. Si l'enjeu de l'égalité professionnelle se traite sur le lieu de travail, il est néanmoins transversal. Pensons à l'organisation des temps de vie, à l'articulation vie professionnelle-vie familiale, aux politiques familiales, à l'orientation scolaire des filles et des garçons, aux différences d'entrée dans les formations et les études. Félicitons-nous de la reconnaissance de la validation des acquis, qui privilégie majoritairement les femmes.

Pour autant, la modification du code du travail a été nécessaire. D'où la loi du 9 mai 2001 qui oblige à la négociation par deux modes d'entrée : l'analyse de critères pertinents - négociation spécifique sur l'égalité professionnelle avec la mise en place, si nécessaire, d'un plan de rattrapage sur trois ans - et l'intégration dans la négociation, actuellement obligatoire dans l'entreprise, du sujet de l'égalité professionnelle, par exemple en ce qui concerne le salaire, la formation, la promotion.

Oui, c'est une loi contraignante car l'obligation de négocier existe mais l'égalité professionnelle mérite-t-elle moins que les salaires ou la formation d'être concernée  ?

C'est une loi souple dans la mesure où le plan de rattrapage s'étale sur trois ans, délai nécessaire quand on veut traiter de l'égalité d'accès à la formation ou à la promotion, par exemple.

Ce texte a été largement discuté et il a été approuvé par les partenaires sociaux, les associations, les centres d'information des droits des femmes. Et si les organisations patronales, dont le MEDEF, en regrettent le côté contraignant, sur le terrain beaucoup de leurs représentants participent avec l'ensemble des partenaires à sa concrétisation. Permettez-moi d'évoquer quelques exemples d'accords exemplaires dans la région Nord Pas-de-Calais : Peugeot à Valenciennes, Tanis à Cambrai, Française des Mécaniques à Douvrin, Faurecia à Henin-Beaumont, Transpole, et je pourrais continuer la liste. Ces accords ont vu le jour grâce à l'implication forte non seulement des acteurs de l'entreprise mais aussi des services de l'Etat et, en particulier grâce au travail de la délégation régionale aux droits des femmes et à l'égalité, rouage clé dans la concrétisation de ces différents accords.

Dès lors, je ne peux que me réjouir, madame la ministre, que vous prôniez la négociation. Mais je m'étonne que vous n'en prôniez que l'incitation. Je m'étonne encore plus quand vous évoquez l'éventualité d'une nouvelle loi en cas d'échec des négociations. Si la représentativité des femmes comme actrices de la négociation est un vrai sujet, qui doit faire réfléchir sur la nécessité éventuelle d'un support législatif, davantage de contraintes législatives sur le sujet de la négociation ne me semblent pas nécessaires.

J'entends avec intérêt les propositions gouvernementales déclinées sous forme d'objectifs : égal accès aux postes à responsabilité, égalité de rémunération ou encore renforcement de la lutte contre la discrimination au travail. Je souhaite à cet égard rappeler l'importance de la loi du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre toutes les formes de discrimination au travail.

Je trouve également intéressante la future élaboration d'un label égalité destiné à faire connaître les entreprises qui prennent en compte la dimension de l'égalité professionnelle dans la gestion de l'activité ou de la production.

Mais force est de constater, quand on étudie la loi de finances pour 2004, que nous sommes dans le registre de l'annonce et que les actes ne suivent pas.

Mme la rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la solidarité estime en effet que « bien que modestes, les crédits consacrés aux actions en faveur du droit des femmes devront être identifiés grâce à un programme spécifique au sens de la loi organique relative aux lois de finances, ainsi qu'à un projet coordonné de politique interministérielle. Ce projet, dont les objectifs devront figurer dans les projets annuels de performance de chaque ministère concerné, sera un véritable outil de pilotage, allant bien au-delà de l'actuel jaune budgétaire dont la visée est purement informative ».

En effet, alors qu'un ministère existe à part entière pour veiller à la parité et à l'égalité professionnelle, ce dont nous nous félicitons, il faut aller à la pêche à la ligne budgétaire pour appréhender l'ensemble du budget, pêche pour le moins peu productive quand on constate le niveau de celui-ci.

Entre 2003 et 2004, on note une baisse des crédits alloués dans le cadre du budget du travail de 5,9 % hors inflation. Lorsque l'on examine l'état récapitulatif de l'effort financier de l'Etat pour la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes, c'est-à-dire l'effort de tous les ministères, on remarque que les crédits pour 2004 sont de 31 millions d'euros contre 41 millions en 2003.

On voit donc que, dans la réalité, il y a un désengagement de l'Etat alors que les entreprises devraient être soutenues dans la mise en place de plans d'égalité, de contrats de mixité et que les associations et les CIDF, les centres de documentation et d'information des femmes et des familles, devraient être mieux accompagnés dans leur fonctionnement.

Tout cela n'est malheureusement que l'illusion d'un beau discours démenti par les faits.

M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.

M. Pierre Cardo. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'aurais bien voulu vous parler de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes mais, d'une part, le sujet vient de m'être soufflé par Mme Génisson (Sourires)...

M. Christian Paul. Avec talent d'ailleurs !

M. Pierre Cardo. ...et, d'autre part, il est si bien défendu par Mme Ameline que je me dispenserai de l'aborder.

Je parlerai d'autres sujets tout aussi importants, et notamment de l'insertion et des emplois d'insertion.

Nul ne peut remettre en cause, dans cet hémicycle, le rôle essentiel, dans une période de chômage de longue durée, notamment pour les plus exclus de notre système, des emplois d'insertion et des structures qui les créent et les encadrent. Ces dernières viennent en effet en aide aux demandeurs d'emploi de longue durée pour les rendre employables et les ramener vers le marché du travail.

En 2003, vous vous en souvenez, il a fallu une action forte des structures en charge de ces populations, qu'il s'agisse de l'Alliance Ville Emploi ou du Conseil national de lutte contre l'exclusion, et j'en passe, pour maintenir leurs moyens à niveau. Et il a fallu aussi toute votre volonté, monsieur le ministre.

Aussi, mon premier souhait serait que, pour 2004, nous n'ayons pas à reprendre ce combat. C'est, je crois, le souhait de chacun dans cet hémicycle de voir les populations qui s'y préparent au sein de structures d'insertion trouver leur place en entreprise. Ne prenons pas le risque de compromettre cela.

Je souhaite vous parler plus précisément de certains problèmes que rencontrent les entreprises d'insertion. Premier problème : elles sont en quelque sorte le parent pauvre du code du travail. Dans le secteur marchand, les contrats initiative emploi, les contrats de qualification, d'adaptation ou d'orientation, les contrats emploi consolidé et les contrats emploi-solidarité n'entrent pas dans le décompte des seuils légaux pour l'élection des délégués du personnel ou du comité d'entreprise. Dans le secteur de l'insertion, tous les salariés sont pris en compte. On impose aux entreprises d'insertion, qui encadrent une population en grande difficulté, des contraintes dont le secteur privé est libéré pour des contrats similaires. Or, la plupart du temps, les personnes qui sortent de la réinsertion se voient proposer des CES, des CEC ou des CIE, voire des contrats de qualification dans les entreprises privées.

Le Gouvernement peut dorénavant agir par ordonnance. Il conviendrait qu'il puisse simplifier le régime des entreprises d'insertion et que la loi soit harmonisée dans le sens d'un traitement égalitaire des personnes en réinsertion, qu'elles travaillent dans les entreprises d'insertion ou dans le secteur marchand,   où l'on retrouve sensiblement le même type de contrats.

Le deuxième problème que je souhaite soulever s'agissant des entreprises d'insertion concerne le travail dans les prisons. La question relève de l'honnêteté intellectuelle.

Est-il normal que des prisonniers soient sous-payés, rémunérés parfois à la pièce, par des entreprises du secteur privé qui bénéficient de tarifs de main-d'œuvre exceptionnellement bas ? Certes, ces jeunes ou moins jeunes gens, ces jeunes filles trouvent là une occupation et peuvent se constituer un pécule pour leur sortie. Mais ce pécule est insuffisant pour leur réinsertion. Et les conditions qui sont ainsi faites aux entreprises ne permettent pas, malgré le coût habituel d'un prisonnier dans nos établissements pénitentiaires, de payer l'hébergement pour autant.

Ces gens qui sortent de prison, on me demande, en tant qu'élu local, de les réinsérer dans mes structures. La façon dont le système carcéral travaille en relation avec le secteur privé rend captifs des emplois qui devraient bénéficier prioritairement aux structures d'insertion qui, en aval du carcéral, distribuent des salaires tout à fait normaux. Il serait opportun que le système carcéral puisse éviter de concurrencer le secteur de la réinsertion.

Le troisième problème - et je pense que nous ferions quelques économies en fouillant un peu plus ce domaine - concerne les associations de type Emmaüs qui emploient des chômeurs de longue durée pour la récupération de cartons et de chiffons. La transformation des marchandises récupérées permet la création d'emplois tout à fait solvables dès lors qu'ils sont soutenus par des financements de l'Etat. Actuellement, des entreprises françaises et étrangères du secteur marchand utilisent des organismes caritatifs comme la Croix-Rouge, l'Association des paralysés de France ou d'autres, qui font le ramassage gratuitement et qui leur vendent la marchandise à prix extrêmement réduits. Elles concurrencent ainsi nos entreprises d'insertion qui, elles, créent de vrais emplois dans ce secteur.

Monsieur le ministre, ce que je voulais dire ce soir, c'est que le secteur de la réinsertion, en accompagnement de la politique gouvernementale que vous conduisez avec le RMA et d'autres mesures, offre la possibilité de créer de nouveaux emplois, à condition d'y mettre de l'ordre, en s'attachant à approfondir les questions que je viens de soulever.

Je vous remercie de votre attention et j'espère que, sur ces sujets un peu délicats, vous réussirez à faire avancer les choses. De nombreux acteurs comptent sur vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M.  le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, je n'ai que cinq minutes pour intervenir sur deux points.

D'abord, comme beaucoup ici, je pense, je suis très marquée par la publication du rapport du Secours catholique qui me semble correspondre à ce que l'on entend de plus de plus dans l'ensemble des structures associatives ou caritatives de lutte contre l'exclusion telles que le Secours populaire, ATD Quart Monde ou d'autres. Quand je constate que les pauvres sont de plus en plus pauvres, je ne peux que m'interroger sur les décisions prises actuellement par le Gouvernement.

Selon le Secours catholique, l'enjeu est d'accompagner, de soutenir les gens qui sont en difficulté dans la permanence, mais pas avec des dispositifs d'à-coups. La décision que vous avez prise concernant l'allocation de solidarité spécifique va renvoyer de nombreuses personnes, même prises en charge par le dispositif d'aide sociale, dans la grande difficulté, leur faire perdre leur dignité. Je me demande quand le Gouvernement se décidera à renouer un véritable dialogue sur l'emploi, en particulier sur l'emploi des plus démunis.

Nous discuterons bientôt à l'Assemblée nationale du transfert du RMI aux départements et de la transformation du RMI en RMA. J'ai en tête ce que dit depuis des années Bertrand Schwartz : le travail de fond consiste à accompagner, à cheminer, comme disent les associations, dans une longue logique d'insertion couvrant les domaines du logement, de la santé, de la formation professionnelle, ou tout simplement la recherche de la capacité à s'en sortir soi-même. Manifestement, les choix qui sont inscrits dans l'ensemble du dispositif du Gouvernement vont à l'encontre de l'immense travail qui est fait par les associations de lutte contre l'exclusion. C'est la première chose que je voulais dire.

Permettez-moi, monsieur le ministre, de revenir une fois de plus sur un sujet qui m'est cher. Si j'ai bien compris, vous revenez de Matignon où les derniers arbitrages concernant le plan de solidarité vis-à-vis des personnes âgées et handicapées ont dû être rendus. Chacun ici attend de connaître ce qui va être proposé : suppression d'un jour férié, jour flottant ou suppression d'une journée de RTT .

M. Christian Paul. Sur cette affaire, le Gouvernement a un peu flotté !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Quoi qu'il en soit, je vous souhaite sincèrement d'être sorti des difficultés de négociation et de communication que vous avez pu rencontrer.

Je me pose une vraie question. Je l'ai soumise à M. Mattei lors du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, je la repose ici dans le cadre de votre budget, monsieur le ministre : comment les choix que vous allez annoncer pourront-ils être concrètement mis en œuvre en 2004 ? Je ne vois rien d'inscrit, ni dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale ni dans le présent budget. Avez-vous prévu un collectif budgétaire pour que, dès 2004, les décisions que vous prendrez puissent réellement s'inscrire dans un dispositif ? Jamais la sécurité sociale n'a fait l'objet d'un collectif budgétaire. Ce serait là une nouveauté. L'on peut craindre de votre part un simple effet d'annonce qui serait très dommageable pour la problématique de la réponse à apporter aux événements de l'été dernier. C'est, à mes yeux, une question vraiment très importante. Le dossier est d'une telle complexité humaine et politique que, si vous vous contentez d'annonces, vous risquez de fragiliser plus encore la relation des Français aux responsables politiques. Je tiens à alerter et l'opinion et l'Assemblée sur ce point.

Je voudrais comprendre techniquement comment le plan qui nous sera annoncé trouvera une réalisation concrète. Il n'y a rien dans les crédits sur les centres locaux d'information et de coordination gérontologiques, dont nous ne savons d'ailleurs pas si les compétences seront transférées aux départements. Il n'y a rien non plus sur les services de soins à domicile.

M. Christian Paul. C'est désastreux !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. M. Mattei a bien apporté une réponse pour les maisons de retraite, mais il ne s'agit que de la reprise de crédits supprimés en 2002 pour 2003. J'espère donc avoir des réponses complètes ce soir - ce qui serait très bien - ou demain.

Puisquez vous êtes ministre du travail, de la solidarité et de l'emploi, ...

M. Christian Paul. Il est bon de le rappeler !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ...je voudrais vous rappeler combien, dans le champ de la prise en charge des personnes âgées comme des personnes handicapées, est important le travail de fond sur l'emploi et la formation professionnelle. Si, dès à présent, profitant de la mobilisation générale, la dynamique que nous avions lancée n'est pas reprise, il y aura un véritable danger.

Je vous vois hocher la tête en signe de dénégation. Je sais ce que vous allez répondre : l'APA n'était pas financée. Je redis, à vous et à tout le monde, que la loi a été votée sur l'engagement d'adapter les financements. Nous savions qu'il faudrait, dès la fin de 2003, adapter les financements pour la montée en charge.

M. Christian Paul. Bien sûr !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Vous avez choisi de ne pas le faire cette année. Or nous savions fort bien, tous, qu'il fallait le faire dès 2003.

M. Christian Paul. Seul M. Fillon ne le savait pas !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Vous n'avez pas vu que ce dispositif imprimerait une vraie dynamique en termes d'emplois, d'organisation de développement local, d'aménagement du territoire.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Il y a eu un traitement discriminatoire entre les départements en matière de compensations !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Et une dynamique, y compris en direction des femmes, madame la ministre. Parce que dans la vieillesse, ce sont des femmes qui s'occupent de vieilles femmes. Il y avait là une cohérence. Vous ne l'avez pas sentie. J'espère profondément, monsieur le ministre, que, dans le cadre du plan « vieillissement et solidarités », vous saurez appréhender cette cohérence et cette logique.

A tout le moins, si vous pouviez nous aider à lever le doute que j'ai exprimé sur la réalisation concrète de votre plan dès 2004, l'Assemblée nationale serait très intéressée de vous entendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je vais essayer de répondre dans le temps qui m'est imparti à l'ensemble des questions qui ont été posées.

Je voudrais, tout d'abord, remercier les rapporteurs pour le soutien qu'ils apportent à ce budget et pour l'importance du travail qu'ils ont réalisé.

Mme Montchamp s'est beaucoup investie dans la mise en œuvre de la loi organique. Je dois lui redire ce que j'ai déjà dit devant la commission des finances : j'ai la responsabilité d'un ministère qui a des missions très diverses du fait d'une architecture ministérielle qui varie au gré de la constitution des équipes gouvernementales depuis de nombreuses années. Le découpage des missions de ce ministère ne nous facilite pas la tâche pour répondre à l'objectif de la loi d'orientation. En particulier, la question du programme support, qui a fait l'objet de vives critiques de sa part, comme de celle de M. Bouvard, est à la fois liée à cette diversité des missions et au problème de la souplesse dans la gestion des crédits que, par ailleurs, le Parlement souhaite que nous puissions avoir.

Néanmoins, j'ai bien entendu la critique émise sur les orientations de la loi organique. Je précise tout de suite qu'en cas de modification du programme support, je serais favorable à un rattachement à la mission solidarité, que je cogère avec M. Mattei, puisque ce programme nous est commun.

Puis-je me permettre cette audace ? Il me semble qu'il faudra un jour s'interroger sur la question des périmètres des ministères.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Très bien ! Nous avons essayé de le faire, mais nous n'avons pas été suivis !

M. Christian Paul. Nous, c'est le périmètre du chômage qui nous intéresse !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nos habitudes de découpage, compte tenu des alternances assez rapides que nous connaissons dans notre pays, entraînent en effet des sujétions, des charges et des contraintes considérables pour l'administration. Je souhaiterais qu'on puisse inscrire une fois dans un texte l'architecture générale de notre organisation administrative pour qu'elle n'ait plus à être modifiée que lorsque les évolutions de la société l'imposent.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail, et Mme Marie-Anne Montchamp, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la solidarité. Très bien !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ce n'est évidemment qu'un avis personnel.

M. Denis Jacquat a beaucoup insisté sur la nécessité de moderniser la politique d'accueil des demandeurs d'asile. Ses remarques correspondent exactement aux objectifs du Gouvernement. Il a eu raison de souligner que le logement à l'hôtel est la pire des solutions et que l'explosion des demandes d'asile appelle une politique globale. C'est la raison pour laquelle que nous avons décidé de réformer la procédure de l'asile, notamment en réduisant considérablement les délais. Nous avons au surplus décidé d'augmenter de façon considérable le nombre des places en CADA, puisque, de 2002 à 2003, l'augmentation sera de 4 500 places, notre objectif étant à terme que toute personne en demande d'asile soit accueillie dans une structure dédiée et non, comme c'est le cas aujourd'hui, dans des structures qui ne sont absolument pas adaptées aux besoins de ces populations.

C'est également dans cet esprit que nous allons créer une nouvelle agence, née de la fusion de l'OMI et du SSAE, qui sera opérationnelle au premier semestre 2004.

Une nouvelle fois, M. Fourgous a attiré l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'investir dans les compétences de ce qu'il appelle joliment la « Maison France ». Je reviendrai à plusieurs reprises sur son intervention au sujet de la formation professionnelle. Mais je voudrais d'ores et déjà lui indiquer que notre politique d'aide au conseil en gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, qui sera mise en œuvre en 2004, vise à appuyer spécifiquement l'action des petites et moyennes entreprises et des branches, tant pour relever le défi du choc démographique que pour répondre aux difficultés spécifiques de recrutement que connaissent certains secteurs.

M. Ueberschlag, qui a souligné l'inadaptation du mode de financement de la formation professionnelle, a proposé plusieurs réformes de nature à répondre à ses préoccupations. Le Gouvernement est très attentif aux propositions que M. Ueberchlag a formulées. Mais je crois qu'il faut distinguer les inquiétudes légitimes qu'il a exprimées en matière de formation et la dénonciation de certaines dérives. Il faut en effet éviter les amalgames dans un dossier complexe qui exige, si l'on veut en faciliter la lisibilité, un effort de pédagogie.

A ce titre, il importe de distinguer le réseau de collecte des fonds de formation professionnelle et celui qui concerne l'apprentissage. Le premier a fait l'objet d'une réforme profonde, puisque la loi quinquennale de 1993 a conduit à un resserrement important du nombre des collecteurs et à la mise en place d'un dispositif législatif et réglementaire plus encadré et plus transparent. Le second, en revanche - c'est à lui, je pense, que M. Ueberschlag faisait prioritairement référence - fait actuellement l'objet d'une réforme. Celle-ci devrait conduire à limiter le volume d'intervenants et à améliorer la transparence d'une collecte qui souffre d'opacité. J'aimerais que M. Ueberschlag soit convaincu que le Gouvernement est bien décidé à accélérer la mise en œuvre de cette réforme. Même si les moyens de contrôle restent insuffisants, M. Fourgous a, comme la Cour des comptes, noté les progrès accomplis en termes d'effectifs et de hiérarchisation des objectifs.

M. Ueberschlag a également beaucoup insisté sur la validation des acquis de l'expérience. C'est une politique récente que, pour l'instant, nous songeons moins à contrôler qu'à lancer. Elle est encore modeste, puisqu'elle ne représente aujourd'hui que 22 millions d'euros dans le budget, mais elle vient en complément de l'accord interprofessionnel qui vient d'être signé par les partenaires sociaux. Il s'agit de reconnaître les compétences professionnelles pour donner une chance à ceux dont la formation initiale est insuffisante.

Enfin, M. Ueberschlag a souhaité le rétablissement de la Commission nationale des comptes de la formation professionnelle. Cette commission, qui avait été créée en 1995 mais qui ne s'est jamais réunie, a été supprimée sous la législature précédente. Je propose aujourd'hui, compte tenu de l'évolution de l'organisation de la formation professionnelle et de la décentralisation, la création d'une structure permanente qui regrouperait les trois acteurs principaux de la formation professionnelle : l'Etat, les régions et les partenaires sociaux. Cette structure, dont j'ai proposé la création lors de la table ronde consacrée à ces sujets le 21 octobre dernier, qui réunissait les partenaires sociaux et les représentants des régions, serait placée sous la présidence d'une personnalité qualifiée. Elle remplacerait le comité de coordination des programmes régionaux d'apprentissage et le Conseil national de la formation professionnelle. Elle serait donc l'organe unique de consultation et de coordination des actions au plan national.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Très bien ! Il faut diminuer le nombre des structures.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. M. Bouvard a également évoqué longuement la loi organique et posé la question de l'affectation d'une partie des personnels dans les programmes opérationnels. Nous sommes tout à fait décidés à intégrer l'inspection du travail dans le programme « relations du travail » et à mieux afficher la lutte contre le travail clandestin. Dans cet esprit, nous allons rapprocher la délégation interministérielle de la DRT, pour que son action soit mieux intégrée dans le pôle travail.

M. Bouvard a plaidé en faveur de la simplification des dispositifs d'allégement de charges sociales qui s'accumulent et s'enchevêtrent. Nous nous sommes engagés à simplifier le droit et les démarches administratives qui incombent aux entreprises. Dans ce cadre, l'article 24 de la loi d'habilitation à légiférer par ordonnances vise expressément à harmoniser les dispositions législatives relatives aux différents dispositifs d'allégement de cotisations sociales et à réduire le nombre de ces dispositifs. Comme M. Bouvard l'a signalé lui-même, la réforme votée par le Parlement a déjà réduit le nombre des principaux allégements de charge et simplifié leur mise en œuvre. Plusieurs ordonnances qui nous permettront de continuer dans cet esprit sont en cours de préparation.

M. Tian a parlé de l'emploi des travailleurs handicapés. Il s'agit là, vous le savez, d'une des priorités du quinquennat du Président de la République. Elle donnera lieu, avant la fin de cette session, au dépôt d'un texte législatif qui sera débattu à l'Assemblée nationale. Ce texte fait actuellement l'objet d'une étroite concertation, notamment avec les associations représentatives des personnes handicapées. Il comportera naturellement un volet relatif à l'insertion professionnelle.

De fait, en dépit des progrès accomplis depuis la loi du 10 juillet 1987, la situation des personnes handicapées au regard de l'emploi est peu satisfaisante. Ce diagnostic est largement partagé. Nous voulons donc impulser un nouveau dynamisme à la politique d'insertion professionnelle des personnes handicapées. Pour cela, il nous semble que le maintien d'un taux d'emploi obligatoire, que tout le monde juge très largement nécessaire, doit s'accompagner d'un effort pour rendre le dispositif actuel plus incitatif et pour harmoniser et simplifier les formalités imposées aux employeurs.

Nous pensons par ailleurs que le rôle de l'AGEFIPH dans l'élaboration et la mise en œuvre de la politique d'insertion professionnelle des personnes handicapées doit être précisé et conforté.

Il faut enfin nous interroger sur la vocation et le statut des établissements de travail protégé, et des personnes accueillies au sein de ces établissements. Notre but doit être de faciliter leur passage d'un établissement à un autre et d'une structure à une autre. Il faut en outre leur assurer un statut aussi proche que possible du droit commun. Nous débattrons de tous ces sujets avant la fin de l'année.

M. Fourgous et M. Ueberschlag se sont interrogés sur la mise en œuvre de l'accord national interprofessionnel sur la formation professionnelle. Tous deux ont souligné le caractère historique de ce texte, puisque cette réforme - la plus importante intervenue dans ce secteur depuis 1971 - a rencontré un accord unanime. Ce texte crée des droits importants pour les salariés. Il reconnaît l'existence d'un droit individuel à la formation. Il instaure un contrat de professionnalisation qui propose un outil unique d'accès à la qualification, ouvert à la fois aux jeunes, aux demandeurs d'emplois, aux salariés expérimentés, aux femmes reprenant leur activité et aux travailleurs handicapés. Il prévoit enfin l'organisation d'une fonction d'orientation et d'accompagnement tout au long de la vie des dispositifs d'information, d'évaluation des compétences et de validation des acquis de l'expérience.

Les partenaires sociaux ont su, à travers cette négociation, trouver trois équilibres essentiels.

Le premier permet de concilier temps de formation et temps de travail. C'est une grande innovation de ce texte que de permettre qu'une partie de la formation, notamment en ce qui concerne le développement des compétences, puisse s'effectuer en dehors du temps de travail, dans la limite de quatre-vingts heures par année civile, avec l'accord du salarié et contre versement d'une allocation de formation.

Le deuxième équilibre concerne l'effort financier réalisé par l'ensemble des entreprises. En effet, la contribution des entreprises de plus de dix salariés passera de 1,5 % à 1,6 % de la masse salariale - cette différence sera utilisée pour financer le contrat de professionnalisation - et celle des PME, dans lesquelles il y avait un retard considérable en termes de formation, ce qui créait une inégalité avec les grandes entreprises, passera de 0,25 % à 0,4 % puis à 0,55 % au 1er janvier 2005. Un effort considérable est ainsi consenti par les entreprises, en particulier par les PME, en faveur de la formation professionnelle.

Le troisième équilibre intervient entre les branches. Certaines d'entre elles, parce qu'elles disposent de moyens considérables, ont pu développer des programmes de formation très ambitieux. D'autres ont moins de ressources. Le dispositif permet une harmonisation des droits dans ce domaine.

Puisque j'évoque l'accord intervenu sur la formation professionnelle, je réponds tout de suite à M. Christian Paul qui se demande où sont, dans ce budget, les crédits permettant de mettre en œuvre cet accord. C'est faire preuve d'un étatisme forcené que de réclamer déjà des crédits dans le budget de l'Etat de 2004. Les partenaires sociaux ont pris leurs responsabilités. Ils apprécient la manière dont l'Etat va transcrire leur accord dans le projet de loi - c'est du moins ce qu'ils ont dit lors des consultations qui ont été organisées pour préparer cette transcription. Chacun pourra d'ailleurs constater que celle-ci sera presque littérale : il ne s'agira pas de remettre en cause des équilibres, quels qu'ils soient. C'est donc dans le cadre de la loi qui sera débattue dans le courant du mois de décembre qu'apparaîtront en termes budgétaires les modalités d'accompagnement de l'Etat. Le Premier ministre s'est engagé à ce que l'on mette en place un « droit à la deuxième chance », c'est-à-dire un dispositif équivalant à ce droit à la formation professionnelle, tout au long de la vie, pour ceux qui sortent du système éducatif sans qualification. Vous savez qu'ils sont nombreux et qu'ils forment aujourd'hui, avec les jeunes, la catégorie la plus frappée par le chômage.

J'en arrive à l'intervention de M. Vercamer, qui s'est inquiété d'un mouvement de balancier qui nous ferait passer brutalement d'une politique du tout emploi aidé dans le secteur public à une politique du tout emploi aidé dans le secteur privé. Je comprends que M. Vercamer soit un homme du centre et qu'il souhaite à ce titre une politique équilibrée. Or c'est justement le cas de celle que nous conduisons. Car nous avons décidé de réorienter la politique de l'emploi pour donner plus d'importance à l'insertion dans le secteur marchand. Il nous semble en effet que c'est la seule voie d'avenir. D'ailleurs, tous les pays autour de nous optent pour la même politique. Il faudra bien accepter un jour l'idée que nous sommes désormais dans un ensemble européen solidaire et cohérent et qu'on ne peut pas conduire des politiques complètement différentes en matière d'emploi d'un pays à l'autre - je ne parle naturellement que de la zone européenne.

Mais, dans le même temps, nous consacrons toujours une part importante des crédits de la politique de l'emploi aux contrats aidés dans le secteur public, et nous ajoutons même de nouveaux dispositifs, comme le CIVIS - le contrat d'insertion dans la vie sociale -, qui sont appelés à se développer.

M. Pierre Cardo. Très bien !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. En réalité, nous entendons réserver ces dispositifs à ceux qui en ont vraiment besoin, à ceux qui sont vraiment en difficulté. Et on ne me fera pas croire que la totalité des 450 000 CES qui étaient inscrits au budget de l'Etat de 1998, par exemple, étaient destinés aux personnes les plus en difficulté ! On ne me fera pas croire non plus que les 4,5 milliards qui étaient inscrits pour le financement des emplois-jeunes étaient destinés à des publics particulièrement en difficulté ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme Hélène Mignon. Nous y reviendrons !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Une réorientation de cette politique était nécessaire, et nous allons la conduire jusqu'à son terme.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail et M. Guy Geoffroy. Très bien !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. La deuxième remarque de M. Vercamer portait sur l'allocation de solidarité spécifique. Il a eu l'honnêteté de reconnaître que nous ne voulions pas supprimer l'ASS mais la réformer. Actuellement versée sans limitation de durée, à des personnes inscrites au chômage depuis très longtemps, elle n'est assortie d'aucun programme d'insertion. En contrepartie de la réduction de la durée de versement, nous proposons justement quelque chose,...

Mme Martine Billard. Ah bon ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ...à savoir des programmes d'insertion procurant des revenus au moins équivalents au montant de l'ASS - car la différence entre le niveau de l'ASS et celui du revenu minimum d'insertion est très faible.

M. Jacques Desallangre. C'est vrai !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Certains prétendent pourtant que la suppression de l'ASS pour une partie des chômeurs de longue durée se traduira par l'exclusion des intéressés. Ils omettent tout simplement d'admettre que ceux-ci, à peu de chose près, auront toujours le même niveau de ressources puisqu'ils toucheront désormais le revenu minimum. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme Martine Billard. C'est faux !

Mme Hélène Mignon. Cela servira surtout à améliorer les statistiques !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Telle est la réalité ! La différence fondamentale entre l'ASS et le RMI, c'est que le RMI est un dispositif d'insertion...

Mme Muguette Jacquaint. Mais tout le monde n'aura pas le droit au RMI !

Mme Martine Billard. Vous oubliez les moins de vingt-cinq ans, monsieur le ministre !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est vrai, le RMI est réservé aux plus de vingt-cinq ans. Mais vous pensez donc que des jeunes de moins de vingt-cinq ans perçoivent l'ASS,...

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour le travail. Ce n'est pas possible !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... c'est-à-dire qu'ils sont au chômage depuis cinq ans, six ans, voire davantage, et que, pour eux, l'ASS est une bonne solution,...

M. Pierre Cardo. Encore faudrait-il qu'ils aient travaillé suffisamment longtemps pour en bénéficier !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... une solution qu'on leur servira jusqu'à la fin de leur vie professionnelle ? Cela n'a aucun sens.

M. Guy Geoffroy. Vous avez raison !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. La vérité, c'est que le revenu minimum d'insertion est équivalent, en volume, à l'ASS, mais qu'il s'agit d'un programme d'insertion.

Mme Martine Billard. Le RMI est un revenu familial !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Et nous voulons le renforcer en le déléguant aux départements, car quelqu'un qui est au chômage depuis cinq ou six ans a besoin d'un vrai accompagnement, d'un vrai projet de réinsertion.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Tout à fait !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ce projet de réinsertion, il peut le trouver dans le revenu minimum d'insertion, en signant un contrat ; il pourra aussi le trouver dans le revenu minimum d'activité, que le Gouvernement vous proposera de créer.

M. Christian Kert. Absolument !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je vous précise au passage, monsieur Vercamer, qu'il n'y aura pas 50 000 mais 100 000 allocataires du RMA : 50 000 dans le secteur privé et 50 000 dans le secteur public. Enfin, ce n'est qu'une prévision, puisque ce programme n'est pas contingenté. Tout dépendra de la capacité des départements à le mettre en œuvre : s'ils se retroussent les manches rapidement,...

Mme Martine Billard et Mme Muguette Jacquaint. S'ils ont les moyens, surtout !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... dépasser les 100 000 ne posera aucune difficulté, en comptant le secteur associatif, le secteur public, les collectivités locales et - cela me permet de répondre tout de suite à une question qui m'a été posée -, les entreprises d'insertion, qui seront naturellement invitées à participer au dispositif.

Enfin, l'argument selon lequel le Gouvernement limiterait la durée de versement de l'ASS pour des raisons strictement financières ne tient pas. C'est simple, nous nous sommes engagés à compenser financièrement l'intégralité des transferts de charges, et de la manière la plus solennelle qui soit, puisque nous l'avons inscrit dans la Constitution. Par conséquent, un an après l'entrée en application de cette réforme, nous constaterons la réalité des transferts entre l'ASS et le RMI et nous effectuerons les correctifs budgétaires correspondants : l'Etat ne fera aucune économie budgétaire avec la réforme de l'ASS.

Notre conviction profonde, c'est que, au lieu de se contenter de leur verser une allocation, il vaut mieux offrir aux chômeurs de longue durée des programmes d'insertion comme le RMI, le RMA ou le CIE. C'est le seul motif de la réforme.

Monsieur Vercamer, vous avez également abordé la politique d'intégration pour vous inquiéter de la mise en œuvre de l'engagement du Président de la République à propos de l'autorité de lutte contre les discriminations.

Vous le savez, le Président de la République a confié à M. Stasi une mission de préfiguration de cette autorité administrative, qui devrait être créée dans le courant du premier semestre 2004. Elle complétera la politique de contrats d'intégration que nous venons de lancer et que nous voulons progressivement généraliser à l'ensemble du territoire.

M. Gremetz nous a expliqué que tout baissait - tout baisse, mais le budget augmente : allez comprendre. La plupart de ses craintes quant aux suppressions de tel et tel programme sont vaines, et il le sait bien, d'ailleurs, puisque c'est un expert sur ces questions.

Mme Muguette Jacquaint. Il vous répondra !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous avons voulu réorienter la politique de l'emploi. Ce choix peut être critiqué ou approuvé, mais les volumes des programmes demeurent inchangés.

Nous avons, en particulier, choisi de renforcer les mesures d'allégements de charges, qui constituent même la base de notre politique de l'emploi. Vous les combattez, et c'est votre droit, mais vous ne pouvez pas nier l'effort considérable consenti par le Gouvernement en la matière, puisqu'il y consacrera plus d'un milliard d'euros supplémentaires.

M. Jacques Desallangre. Nous doutons du résultat, monsieur le ministre ! Est-ce si efficace ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Vous nous avez expliqué que les allégements de charges sociales ne servaient à rien. La vérité est très différente, chacun le sait : de très nombreuses études de la DARES, de l'INSEE, de la direction de la prévision, ont prouvé que ces mesures avaient pour effet d'enrichir la croissance en emplois. Comme je l'ai répété à plusieurs reprises depuis quelques jours, avant la mise en œuvre des premières politiques d'allégements de charges, il fallait 2,3 points de croissance à la France pour créer de l'emploi dans le secteur marchand ; grâce aux allégements Juppé et aux allégements Aubry, on est descendu à 1,3 point de croissance et, grâce aux mesures que l'Assemblée nationale a votées il y a quelques mois, nous sommes passés au-dessous d'un point de croissance. Toutes les évaluations montrent que les allégements Juppé ont permis de créer autour de 450 000 emplois.

M. Gaëtan Gorce. Ce n'est pas une évidence pour tout le monde ! Vos chiffres me paraissent un peu gonflés !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ces mesures, selon nous, s'imposent à la fois afin de lutter contre le chômage et afin de soutenir la compétition avec nos voisins européens, l'enjeu consistant à maintenir un niveau de performance de l'économie française suffisant pour retrouver la croissance.

M. Perrut a eu bien raison de rappeler la faute qu'a constituée la loi sur les 35 heures.

M. Pierre Cardo. Ah !

M. Gaëtan Gorce. Une « faute» de l'Union pour un mouvement populaire ? Vous émettez là un jugement moral ! Quel mélange des genres !

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial pour la formation professionnelle. Un fiasco, si vous préférez !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Cette faute restera comme un des événements les plus graves des dernières années, surtout si l'on considère le retard qui a été pris en matière de pédagogie de la réforme. Au moment où il fallait expliquer à nos concitoyens les conséquences de la mondialisation, comme le font - je l'ai déjà dit - tous les gouvernements des autres pays européens, quelle que soit leur idéologie, au moment où il fallait leur expliquer que, pour conserver à la fois notre modèle social, notre niveau de vie et notre avance technologique, il fallait se retrousser les manches, mieux organiser notre économie et donc travailler plus et travailler mieux, on leur a envoyé le message contraire. Au-delà de toutes les considérations sur le coût des 35 heures, au-delà des effets des 35 heures sur l'économie, c'est la faute principale : la France, en matière de pédagogie de la réforme, accuse un retard considérable sur les autres pays européens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail, et Mme Marie-Anne Montchamp, rapporteure spéciale pour la solidarité. Très bien !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. M. Perrut a eu également raison de rappeler que ce gouvernement avait considérablement augmenté le SMIC.

M. Guy Geoffroy. Eh oui !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Certains ont parlé, à ce propos, de « réorganisation technique ». C'est pourtant très simple : pour un peu plus de 40 % des salariés payés au SMIC, l'augmentation, hors inflation, atteint 11,5 % ; si on prend en compte le taux d'inflation - 1,5 % -, cela fait pratiquement plus 16,5 % en trois ans. Et, pour l'ensemble des salariés payés au SMIC, l'augmentation, en moyenne, s'élèvera à 6 % ; hausse des prix moyenne comprise, elle sera de l'ordre de 10 % ! Il s'agit donc de bien autre chose que d'une « réorganisation technique ».

Cette décision, vous vous en souvenez, n'a d'ailleurs pas été facile à prendre car elle avait des conséquences sur la compétitivité des entreprises. Mais nous avons pensé que c'était une mesure de justice sociale qui, de surcroît, correspondait à notre conception de la valorisation du travail : le travail doit être rémunéré, il doit être mieux rémunéré que l'assistance.

Plusieurs d'entre vous - MM. Grand, Kert et Vercamer - se sont inquiétés de la politique conduite vis-à-vis des rapatriés. Je voudrais leur répondre que l'action du Gouvernement s'est d'ores et déjà déployée, aussi bien sur le plan de la reconnaissance morale de la nation à l'égard des populations meurtries par l'histoire que sur celui de la réparation de la dette matérielle.

Au titre de la reconnaissance morale, je citerai la pérennisation de la journée nationale d'hommage aux harkis, qui a été célébrée pour la première fois le 25 septembre dernier, et la réalisation prévue, à Marseille, d'un mémorial de l'œuvre française outre-mer.

En outre, le Premier ministre a installé, en mars dernier, le Haut conseil des rapatriés et a confié une mission à l'un de vos collègues, M. Diefenbacher, le chargeant de dresser le bilan des politiques conduites en la matière depuis plus de quarante ans et de proposer au Gouvernement des perspectives pour l'avenir.

Pour répondre à vos interrogations sans attendre les résultats de la mission de M. Diefenbacher, je puis d'ores et déjà vous donner quelques précisions.

D'abord, sur le dossier très complexe de l'indemnisation des rapatriés, les associations portent, depuis dix ans, une revendication qu'elles considèrent comme prioritaire : réparer une différence de traitement entre rapatriés résultant de la superposition de trois lois d'indemnisation différentes. M. Diefenbacher, dans son rapport, a pris position en faveur de la restitution des prélèvements opérés au titre de l'article 46 de la loi du 15 juillet 1970 ; le Gouvernement est très attentif à cette revendication, qui ne lui semble pas illégitime.

M. Jean-Pierre Grand. Très bien !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. M. Grand a rappelé son inquiétude concernant l'avenir des épouses et des veuves de harki. La sécurité des conditions d'existence des harkis et de leurs veuves est également une des préoccupations du Gouvernement. C'est pourquoi, l'an passé, nous avons demandé au Parlement de créer l'allocation de reconnaissance. C'était nécessaire et nous avons la volonté d'améliorer encore les conditions de vie au quotidien des familles de harkis.

M. Jean-Pierre Grand. Très bien !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Pour ce qui concerne les personnes exilées en raison des événements d'Algérie, une solution avait été élaborée, en 1997, pour permettre la reconstitution de leur retraite. Le dossier, depuis lors, est resté en souffrance. Nous avons renoué les fils de cette question, qui pourra être utilement traitée dans le cadre du prochain débat devant le Parlement.

M. Daniel Prévost. Très bien !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Enfin, pour ce qui concerne la clôture de l'étude d'aménagement des dettes des rapatriés, vous avez plaidé l'urgence. Nous avons doté la Commission nationale de désendettement de nouveaux moyens pour accélérer le traitement des dossiers. Les résultats sont déjà là puisque la commission, à ce jour, a examiné l'éligibilité de 1 856 demandes sur les 3 145 qui avaient été déposées avant le 28 février 2002.

M. Gérard Bapt. Dites-nous plutôt combien de demandes ont été honorées !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Gorce, vous avez évoqué le 21 avril et mon obsession, comme celle de tous les démocrates dans notre pays de chercher à traiter les causes de la crise politique et sociale que nous traversons. Vous auriez dû, parce que je sais que vous êtes parfaitement honnête, reconnaître que le 21 avril s'est produit après cinq ans de gouvernement socialiste.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Eh oui !

M. Bernard Perrut. Il faut le rappeler !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Vous avez donc vraisemblablement une part de responsabilité. Je ne vous renvoie pas la balle, mais considérer qu'en matière d'économie les seules solutions valables, qui ont pourtant, pour une part, conduit à ce résultat, sont celles que vous avez appliquées pendant cinq ans...

M. Christian Paul. Attendez mars 2004 !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... est une erreur d'analyse. Reconnaissez que certaines mesures expliquent en partie la crise que nous traversons. Il convient, au moins, de tester d'autres formules que celles qui ont en particulier consisté à partager, comme vous le disiez à l'époque et comme vous ne le dites plus, le travail et à créer beaucoup d'emplois dans le secteur public.

Je ne reviens pas sur l'utilité des allégements de charges, puisque j'ai déjà évoqué cette question. Je retiendrai simplement votre remarque, monsieur Gorce, sur les effets des politiques de l'emploi. Vous qui êtes un lecteur très attentif des rapports des services du ministère du travail, vous avez évoqué les effets négatifs des dispositifs de la politique de l'emploi en 2002. Si vous lisez ce document jusqu'au bout, vous constaterez que ces effets sur l'emploi étaient encore plus négatifs en 2001 dans le secteur marchand du fait de la suppression de l'abattement temps partiel ! La même étude de la DARES précise que l'introduction du contrat jeune en entreprise a permis de compenser pour partie les effets négatifs de cette décision. Mais sans doute n'êtes-vous pas allé jusque-là dans votre lecture !

M. Gaëtan Gorce. Ce que vous dites est inexact, monsieur le ministre !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Vous avez évoqué le taux de chômage. Vous avez fait comme si, pendant les gouvernements Jospin, grâce au bon fonctionnement de la politique de l'emploi, le chômage avait été réduit et qu'il repartait brutalement à la hausse avec l'arrivée de la nouvelle majorité. Vous connaissez parfaitement la réalité des chiffres. Si le chômage s'établissait, en 2001, à 8,8 %, son niveau le plus bas, il était de 9,3 % en 2002. Or cette troublante évolution est identique à celle de l'ensemble des pays européens. Vos mesures n'ont donc eu aucun effet sur l'emploi.

M. Gaëtan Gorce. Pour le coup, le raisonnement n'est pas satisfaisant ! On est dans le sophisme le plus complet !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. La situation dans laquelle nous nous trouvons est directement liée à la croissance économique. Ce ne sont pas vos remèdes qui ont permis de réduire le chômage, mais une croissance extrêmement forte dans l'ensemble des pays développés qui n'a, par ailleurs, pas réduit les handicaps que l'économie française continue de conserver sur le plan de l'emploi.

Mme Marie-Anne Montchamp, rapporteure spéciale pour la solidarité. C'est le cœur du problème !

M. Christian Paul. Vous êtes des conservateurs !

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis pour le travail. Où est Jospin ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous avons naturellement souhaité mener une politique de l'emploi différente qui ne pourra être jugée, et vous le savez parfaitement, qu'au terme de la législature, comme le fut la vôtre. Toutes les conditions étaient réunies grâce à la croissance. Toutefois, le chômage augmente régulièrement depuis 2001, ce qui prouve que les dispositions extrêmement coûteuses de lutte contre ce fléau n'ont servi à rien. Nous avons, quant à nous, choisi une orientation différente. On la jugera sur les cinq ans qui vienne.

Je suis convaincu, je le rappelle une nouvelle fois devant vous, mesdames, messieurs, que l'année 2004 verra un retournement de ces chiffres pour des raisons liées à la conjoncture économique, à la politique de l'emploi et, en particulier, aux allégements de charges.

M. Maxime Gremetz. Qui vivra verra, comme dit la chanson !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. La question essentielle qui se pose à notre pays est de savoir comment aborder les prochains creux de croissance - les cycles risquant de se succéder plus rapidement qu'autrefois, il y en aura d'autres - sans connaître des conséquences aussi rapides, aussi immédiates, aussi graves sur l'emploi, sur le chômage et, donc, sur la pauvreté.

Plusieurs d'entre vous - notamment M. Paul - ont évoqué la politique conduite par le Gouvernement en matière de CES. Vous semblez considérer que vous n'avez cessé d'augmenter le nombre de ces contrats, alors que le Gouvernement, aujourd'hui, les réduirait. En vérité, les CES diminuent régulièrement depuis 1998 !

M. Gaëtan Gorce. Le contexte économique et la situation de l'emploi n'étaient pas les mêmes !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. En 1998, on en comptait 440 000 contre 285 000 en 2002. Cette politique a un sens. Ces 440 000 CES de 1998 révèlent manifestement une utilisation massive de l'argent public, non pour l'insertion, mais pour réduire significativement les chiffres du chômage.

M. Paul a également évoqué l'AFPA. Le projet de loi relatif à la décentralisation prévoit, en effet, le transfert des crédits de l'Etat aux conseils régionaux qui, aujourd'hui, financent les actions de formation en faveur des demandeurs d'emplois menées par les centres de formation relevant de l'AFPA.

M. Christian Paul. Vous transférez les crédits, mais pas l'AFPA !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Comme je l'ai déjà souligné, les conventions tripartites entre l'Etat, la région et l'AFPA préciseront pour chaque région les modalités et le calendrier des transferts qui devront être effectifs au plus tard au 31 décembre 2008...

M. Christian Paul. Avec quelle péréquation ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... ainsi que les évolutions souhaitées par le conseil régional quant au schéma régional des formations de l'AFPA. Ces évolutions ne remettent en cause ni le statut de l'AFPA, qui reste une association nationale tripartite composée des pouvoirs publics, des représentants de l'Etat et des conseils régionaux, et des partenaires sociaux, ni la convention collective actuellement en vigueur applicable aux personnels.

M. Christian Paul. Vous en faites une coquille vide !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ce que vous dites est une véritable insulte à l'égard d'une formidable machine en matière de formation des personnes les plus éloignées de l'emploi.

M. Christian Paul. Vous ne lui garantissez plus rien actuellement !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le fait que l'AFPA ait désormais à négocier avec les conseils régionaux composés d'élus du peuple, donc au plus près du terrain, pour construire la politique de formation professionnelle ne me paraît pas honnêtement être une catastrophe qui mérite les cris que l'on entend sur les bancs de la gauche !

M. Christian Paul. Vous ne donnez aucune garantie ce soir !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Mme Guinchard-Kunstler a évoqué la question de l'ASS, sur laquelle je me suis déjà exprimé, et le projet de loi relatif au RMI et au RMA dont nous allons débattre prochainement. Nous avons, sur ce sujet, une véritable divergence de fond. Nous considérons, pour notre part, que le département et les collectivités locales qui travaillent avec lui, en particulier les villes et les agglomérations, constituent un meilleur échelon pour mener les politiques d'insertion que l'échelon national. Le transfert que nous proposons aura le mérite de maintenir un dispositif identique sur l'ensemble du territoire avec, naturellement, les mêmes niveaux de rémunération, les mêmes règles d'éligibilité au revenu minimum d'insertion, comme au revenu minimum d'activité. Toutefois, le contrat sera discuté, élaboré au plus du terrain et surtout avec un interlocuteur unique.

Tout le monde devrait reconnaître que la façon dont a été conçue la décentralisation dans notre pays pose une vraie difficulté. En effet, plusieurs autorités interviennent en concurrence sur chaque sujet et les responsabilités sont difficiles à assumer.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. C'est certain !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Quant au plan vieillissement, madame Guichard-Kunstler, je peux vous répondre ce soir qu'il permettra de changer littéralement de dimension, y compris de dimension financière, s'agissant de la question de la dépendance des personnes âgées et des personnes handicapées. Chacun a pu constater que les dispositifs élaborés par les uns et les autres au fil des années n'avaient pas permis de prendre la mesure du problème de la dépendance dans notre pays,...

M. Christian Paul. C'est incroyable !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... qu'il s'agisse des financements, sur lesquels on peut toujours s'engager, ou des mesures concrètes mises en œuvre pour faire face à ces difficultés. En disant cela, je ne une critique pas l'action que vous avez conduite,...

M. Gérard Bapt. Vous devriez la poursuivre !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... mais celle de tous les gouvernements qui se sont succédé depuis quinze ans. En vérité, nous n'avions, ni les uns ni les autres, pris la mesure de l'importance du phénomène du vieillissement ni de ses conséquences sur l'ensemble des structures.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Vous ne l'avez pas prise non plus !

M. Christian Paul. Quelle naïveté !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Prétendre aujourd'hui que les dispositifs que vous aviez annoncés étaient suffisants sera apprécié par tous les personnels et par toutes les associations concernés.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je n'ai jamais dit cela !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Vous ne l'avez peut-être pas dit, mais d'autres l'ont souligné sur vos bancs.

Le programme qui sera annoncé demain permettra de changer totalement de dimension. L'effort financier engagé en faveur de la dépendance n'aura strictement rien à voir avec les chiffres dont nous parlons ensemble depuis quelques mois.

M. Christian Paul. Raffarin et Tartarin ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis pour le travail. Où est Jospin ? En vacances ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. M. Cardo a posé trois questions qui montrent l'importance de régler les relations entre les entreprises d'insertion, les entreprises classiques et l'accompagnement social. Les interfaces entre ces différents mondes du travail et de l'insertion nécessitent des réglages permanents. Avec mes services, je suis donc très attentif aux échos du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale et du Conseil national de l'insertion par l'activité économique. Croyez bien que nous traiterons ensemble tous ces points avec le plus grand pragmatisme.

Telles sont, mesdames et messieurs les députés, quelques-unes des réponses que je voulais faire avant que ne s'expriment Mme Ameline et M. Falco.

La gauche - et ce sera ma conclusion - doit se méfier du discours qu'elle tient quant à l'orientation et à l'action du Gouvernement. En effet, il y a six mois, elle nous avait annoncé une apocalypse sur le dossier des retraites. Au lieu de cela, nous avons obtenu un accord,...

M. Maxime Gremetz. Nous en reparlerons ! Ne vous précipitez pas !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... et mené une réforme d'ailleurs aujourd'hui considérée par les pays européens comme l'une des plus généreuse qui ait été mise en place. On nous avait expliqué sur ces bancs, il y a quelques mois, qu'il n'y aurait jamais d'accord sur la formation professionnelle et que, naturellement, tous les efforts du Gouvernement dans ce domaine étaient vains. De la même façon, on nous avait affirmé que les partenaires sociaux ne se retrouveraient jamais autour d'une table ronde pour réécrire la loi de modernisation sociale. On nous avait annoncé des catastrophes sur les retraites complémentaires.

M. Jacques Desallangre. On verra par la suite !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. On nous avait aussi annoncé l'échec du contrat jeune, qui ne devait pas fonctionner, qui devait être limité aux grandes entreprises...

M. Maxime Gremetz. Vous ne voyez vraiment rien ! Vous êtes dans une bulle ! D'autres l'ont été avant vous !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Or il se passe exactement le contraire. Le contrat jeune est une réussite. Il est concentré dans les petites et moyennes entreprises et il donne lieu à la mise en œuvre de formations.

Aujourd'hui, la gauche est contre la politique de l'emploi du Gouvernement. Elle est contre le revenu minimum d'activité. Je trouve que c'est plutôt bon signe ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, vous me permettrez en tout premier lieu d'exprimer ma gratitude à Mme Marie-Anne Montchamp qui, au-delà de la lettre et, dirai-je, plutôt des chiffres, a excellemment traduit l'esprit du budget des droits des femmes et de l'égalité.

Je voudrais également remercier les orateurs qui ont mis l'accent sur cet enjeu fondamental que représente l'égalité entre les hommes et les femmes.

Les crédits inscrits au chapitre 43-02 concernent donc les interventions dans ce domaine et sont destinés, je le rappelle, à soutenir l'ensemble des actions en faveur des droits des femmes, tant au niveau central que local. Ils ont vocation à accompagner sur le terrain l'action normative, informative et d'innovation sociale menée par l'Etat dans ce domaine fondamental.

Ces actions s'exercent dans le cadre du pôle social. Je remercie de son soutien François Fillon et l'ensemble du Gouvernement d'avoir su intégrer cette politique tout à fait centrale de l'égalité.

Je rappelle que les enjeux sont considérables. L'objectif est d'innerver de façon transversale tous les secteurs d'activité et toutes les composantes de la société sur les cinq grands champs d'action que sont l'égalité des chances et la mixité des emplois, la parité et l'accès des femmes aux postes de responsabilité, l'égalité professionnelle et salariale, le respect de la dignité de la personne et la lutte contre les violences, l'articulation de la vie familiale et professionnelle, tant pour les hommes que pour les femmes.

Ces enjeux sont d'abord économiques car le travail des femmes constitue une force exceptionnelle de développement à la fois industriel, commercial, agricole et artisanal de notre pays.

Alors que la situation de l'emploi et l'évolution démographique nous contraignent à mobiliser nos réserves de main-d'œuvre et surtout nos marges de progression en termes de productivité, comment ne pas voir dans ce potentiel, dans cette performance au féminin, l'axe stratégique de la croissance, qui est notre objectif ?

Le champ de l'égalité professionnelle, dont l'action représente près d'un tiers du budget, est tourné vers les entreprises : c'est avec elles - et non sans elles et encore moins contre elles - que peut se développer avec succès une telle politique. Cette action se traduit notamment par la signature des contrats d'égalité ou de mixité, par la mise en œuvre du fonds solidaire de garantie pour l'entreprenariat féminin et l'insertion.

Cette politique sera complétée en 2004 par une démarche exemplaire d'incitation à la création d'entreprises, démarche dans laquelle seulement 30 % des femmes sont engagées, ce qui est insuffisant. Elle doit toucher aussi les jeunes femmes des cités qui aspirent également à bénéficier de cette égalité des chances qui consiste à pouvoir mener un projet professionnel.

Sur l'ensemble des autres champs, l'action passe naturellement par la voie associative.

En ce qui concerne la lutte contre les violences, le financement des numéros d'appels nationaux à la disposition de femmes victimes de violences, et des permanences locales d'accueil et d'écoute, au nombre de 158, représente 20 % du budget.

Par ailleurs, permettez-moi de souligner le poids des centres départementaux d'information des femmes, les CIDF. Plus du tiers de l'enveloppe de notre ministère est consacré au financement des 117 centres destinés à améliorer l'accès au droit de femmes particulièrement démunies.

Le réseau de ces CIDF assume une mission d'intérêt général avec le concours des collectivités territoriales et le recours au bénévolat. Je tiens à saluer l'action de tous ces responsables et animateurs qui constituent une force dotée d'une capacité de gestion de proximité importante et efficace, en dépit des moyens limités dont ils disposent.

Le soutien aux associations généralistes de défense des droits des femmes, y compris dans le domaine de la santé et de l'information, notamment sur la question centrale de la contraception, représente près de 15 % des crédits d'intervention. Ces missions d'intérêt général sont assumées par des associations. Si elles l'étaient par l'Etat, leur coût en serait sans doute plus élevé pour un service rendu moindre.

Rendons hommage à l'action, à l'engagement, à l'efficacité de ces hommes et de ces femmes qui, sur le terrain, apportent un concours actif à la traduction de cette volonté politique.

Madame Génisson, je vous remercie du ton que vous avez employé. C'est vrai, nous partageons cette vision de l'égalité professionnelle comme priorité nationale, comme exigence, comme enjeu de société.

Sans renier nullement le rôle de la loi lorsqu'elle modernise la société, il paraît cependant nécessaire aujourd'hui de voir la conviction l'emporter sur les dispositions contraignantes. C'est l'esprit de la nouvelle gouvernance. Nous souhaitons favoriser le dialogue social sous toutes ses formes afin que cette politique de l'égalité s'accompagne d'une véritable culture de l'égalité, c'est-à-dire qu'elle devienne un principe actif de la société moderne et irrigue l'ensemble des couches de la société, comme cela commence à se passer. Ce dialogue social, que nous avons réactivé après des années de silence, porte aujourd'hui ses fruits. Nous voyons régulièrement les partenaires sociaux et je puis vous assurer que les prochaines semaines seront marquées par des avancées concrètes, résultats d'une concertation, d'un partenariat et d'une volonté de négociation, qui me paraissent très importants au regard de l'objectif que nous poursuivons.

L'efficacité des politiques publiques ne se mesure pas au volume des dépenses qu'elles génèrent.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Très juste !

Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Malgré un exercice contraint, nous pouvons nous appuyer, dans le domaine de l'égalité professionnelle, sur l'ensemble des initiatives, des mesures, des propositions qu'a excellemment rappelées François Fillon et qui sont de nature à servir la cause des femmes.

Par ailleurs, nous avons profité de la décentralisation pour créer de nouveaux partenariats, de nouveaux outils à l'échelon territorial et permettre, dans le cadre d'un réseau de compétences, de mutualisation de moyens et de financements, une approche à la fois renouvelée et plus pragmatique.

Je rappellerai un point de procédure : le projet de budget de 2004 sera voté par missions à l'intérieur desquelles figureront des programmes. La mission « solidarité insertion » comportera donc un programme « égalité » voté par le Parlement.

Par ailleurs, les PCPI, les programmes coordonnés de politique d'interministérielle, auront pour vocation d'apporter une meilleure visibilité des dynamiques en matière d'égalité professionnelle et d'égalité homme-femme en général, dans l'ensemble des ministères.

Je tiens à rappeler, avec une certaine solennité, que le projet de budget pour 2004 porte la ligne budgétaire à 17 millions d'euros, ce qui est le niveau d'étiage. L'objectif poursuivi est triple : contribuer à la maîtrise des dépenses publiques - sachant que nous avons atteint un seuil dont il n'est pas utile de vous préciser la contrainte -, rationaliser l'utilisation des crédits de l'Etat, rechercher des gains de productivité...

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Très bien !

Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. ... en profitant à la fois du renouvellement de la politique de l'emploi et de ses outils et de la décentralisation, d'œuvrer en partenariat plus étroit encore avec l'ensemble des partenaires territoriaux pour faire progresser cette culture et cette politique de l'égalité.

De surcroît, la valorisation du dialogue social, entreprise depuis plusieurs mois permettra de concrétiser, de plus en plus rapidement je l'espère, ce qui est aujourd'hui un droit proclamé mais en aucun cas une réalité quotidienne. Le constat dressé par Mme Génisson, cruel pour les années antérieures, représente un formidable espoir pour l'avenir puisque nous partageons la même volonté, ce qui doit nous permettre de progresser.

Les chances de la France moderne passent par la mobilisation de tous ses talents, de tous ses potentiels. Les femmes sont certes solidement ancrées dans cette réalité du travail mais n'en ont jamais réellement été récompensées. La performance au féminin n'a pas été accompagnée comme elle aurait dû l'être. C'est l'enjeu central des années à venir.

Le modèle social français est marqué par un taux d'activité féminin élevé et un taux de natalité qui l'est tout autant. Il convient de le préserver, de le moderniser, de le développer afin que, dans cet ensemble européen moderne et cohérent que nous appelons de nos vœux, la France soit un exemple.

Enfin, il s'agit d'un enjeu de valeurs car personne ne peut douter dans cet hémicycle que c'est sur le terrain de l'égalité que progresseront nos démocraties. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées.

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, M. Georges Colombier a mis l'accent sur le dispositif des centres locaux d'information et de coordination dont il a dit avec raison qu'ils étaient des lieux de ressources, ô combien essentiels.

Nous avons pérennisé le financement des CLIC pour 2004. Mais au-delà, c'est un vaste plan de prise en charge de la dépendance, que le Premier ministre dévoilera dès demain. Les CLIC y auront toute leur place et nous allons les développer.

Favoriser le maintien à domicile des personnes âgées est pour nous une priorité, comme en témoignera le plan vieillissement et solidarité.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour un rappel au règlement.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le Président, M. le ministre des affaires sociales m'a mis en cause personnellement. Il a dit que je savais parfaitement que ce que j'affirmais était faux !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je n'ai pas dit cela !

M. Maxime Gremetz. Si, monsieur le ministre ! Et je ne peux pas le laisser passer.

Vous m'avez accusé de mauvaise foi parce que j'ai affirmé que l'on arrivait en fin de cycle et que l'utilisation massive d'exonérations de cotisations patronales ne créait pas d'emploi !

Oui ou non, depuis des années - cela ne date pas d'aujourd'hui -, alors que nous multiplions les exonérations de cotisations patronales, le chômage a-t-il continué de progresser ?

Oui ou non, ces exonérations atteignent-elles 18 milliards d'euros ? Avec quel résultat ? Nous frisons les 10 % de chômeurs. Cela veut dire que ce n'est pas efficace.

Quant au dispositif en faveur des jeunes, il n'est pas non plus efficace puisque c'est leur taux de chômage qui augmente le plus.

Vous ne créez rien. Cette politique-là a été suivie précédemment. Or vous vous y engouffrez.Vous en rajoutez même.

La ristourne Juppé sur les bas salaires, toutes les entreprises en profitent. Lorsque vous portez le SMIC à 1,8 au lieu de 1,3, toutes les entreprises, qu'elles soient grandes ou petites, qu'elles créent de l'emploi ou de la formation, qu'elles fassent des profits ou qu'elles soient condamnées pour licenciements boursiers, en profitent !

Oui ou non, est-il vrai qu'une étude a démontré que cette politique n'est pas créatrice d'emplois mais de profits ? Cela explique pourquoi ce sont les patrons français qui gagnent le plus en Europe.

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial pour la formation professionnelle. La baisse des charges n'est pas créatrice d'emplois ! L'ensemble des pays est d'accord là-dessus ! Pauvre M. Gremetz !

M. Maxime Gremetz. J'ai mes fiches ! Oui ou non, est-ce que ce sont bien les patrons français qui en Europe gagnent le plus ? Est-ce que ce n'est pas en France que le taux de profit est le plus élevé ?

M. le président. Monsieur Gremetz, vous n'intervenez pas dans le cadre d'une une motion de procédure et vous ne faites pas un rappel au règlement ! Veuillez conclure.

M. Maxime Gremetz. Je vais conclure, monsieur le président.

Oui ou non, la productivité du travail n'est-elle pas plus élevée en France qu'aux Etats-Unis ou dans d'autres pays ?

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial pour la formation professionnelle. Pas globale, horaire !

M. Maxime Gremetz. Les travailleurs français savent travailler. Ce qu'ils veulent, c'est utiliser leurs compétences, leur formation, leur savoir-faire !

Je vous donne un dernier chiffre, que j'ai sur une fiche : les profits des entreprises sont passés de 25 % en 1982 à 31,6 % en 2002. Est-ce que c'est moi qui ai inventé ce chiffre ou est-ce que c'est les études économiques qui le montrent ? Cela veut dire quelque chose du point de vue des choix que vous faites. Continuez comme ça, vous allez voir !

Quant aux retraites, je vous le dis tout de suite, ne pensez pas que la page est tournée : on n'en est qu'au début, croyez-moi !

Les décisions que le Gouvernement multiplie sont telles que vous ne devriez pas donner trop de leçons. Parce qu'elles favorisent, d'une part, l'abstention, et d'autre part, ce que vous appelleriez « les extrêmes », et que j'appelle, moi, « l'extrême », c'est-à-dire l'extrême droite.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis pour le travail. Et l'extrême gauche, qu'est-ce que vous en faites ?

M. Maxime Gremetz. Par conséquent, vous n'améliorez pas la situation politique.

Voilà, j'ai terminé, monsieur le président. Quand même, quand on est mis en cause, on a le droit de répondre !

M. le président. Oui, et cela s'appelle un fait personnel, monsieur Gremetz,...

M. Maxime Gremetz. C'est ce que j'ai dit !

M. le président. ...qui a sa place en fin de séance, vous le savez pertinemment puisque vous connaissez le règlement aussi bien que moi.

M. Maxime Gremetz. Justement, la séance est terminée ! Parce que les questions, c'est tout à fait autre chose.

M. le président. Mais non, la séance n'est pas terminée.

Reprise de la discussion

M. le président. Nous en venons à présent aux questions.

Nous commençons par le groupe Union pour la démocratie française.

La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Monsieur le ministre, je poserai cette question au nom de notre collègue Rodolphe Thomas, qui n'a pu être présent aujourd'hui.

En avril dernier, le Gouvernement a provoqué un climat de vive tension et de vive inquiétude en annonçant le gel des reports de crédits pour l'insertion économique en 2003. Nombre de structures, d'entreprises, d'associations d'insertion se sont senties menacées par cette annonce, d'autant plus qu'il s'agissait de crédits déjà accordés. Elles ont donc réduit leurs missions d'insertion jusqu'à l'annonce du dégel de ces crédits le 17 juin dernier.

Plus généralement, je tiens ici à me faire le relais de ces structures, qui, chaque année, sont confrontées à des difficultés de trésorerie en partie dues aux retards de paiement des subventions de l'Etat. Or, comme vous le savez, pour les structures commerciales ou associatives, il est important d'avoir une gestion prévisionnelle, seul gage de leur réussite.

Aussi, monsieur le ministre, ma question est la suivante : envisagez-vous de mensualiser les aides de l'Etat pour garantir une plus forte stabilité en termes de création d'emplois et de mise en place de missions d'insertion, ainsi qu'un meilleur suivi des actions de toutes ces structures, afin de leur permettre de planifier des projets sur les long et moyen termes ?

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je veux d'abord rassurer M. Gremetz : tout à l'heure, je voulais au contraire célébrer sa connaissance parfaite des dossiers relatifs au droit du travail, et non pas l'accuser de mensonge, même si, naturellement, je conteste complètement les analyses qu'il fait sur le résultat des allégements de charges.

La vérité, c'est que si l'on devait supprimer aujourd'hui les allégements qui ont été décidés par trois ou quatre gouvernements successifs, le taux de chômage dans notre pays ferait un bond considérable. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Comme je vous l'ai dit, nous étions arrivés à une situation où le seuil de croissance au-dessus duquel on crée des emplois et au-dessous duquel on en détruit était inférieur à 1 % : avec le niveau de croissance que nous avons connu en 2003, je vous laisse imaginer ce que serait la situation de l'emploi si ces mesures d'allégement de charges n'avaient pas été prises.

Je réponds maintenant à M. Vercamer, et à travers lui à M. Thomas : comme il l'a reconnu lui-même, l'ensemble des crédits nécessaires au versement des aides de l'Etat aux structures d'insertion par l'économique ont à ce jour été délégués aux directeurs départementaux du travail et de l'emploi. Leur montant correspond aux besoins exprimés au plan local. Les mesures de gel n'ont donc pas eu d'incidence sur le financement des structures d'insertion par l'économique, puisque le dégel de ces crédits est intervenu dès le mois de juin.

Cela étant, au-delà de cette question du gel, qui revient chaque année, il est vrai que la procédure de versement des aides aux associations est caractérisée par des lourdeurs qui leur posent des problèmes de trésorerie et qui sont incompatibles avec leur rythme de fonctionnement. C'est pourquoi nous avons entrepris, en liaison avec le ministère de l'économie et des finances, de réformer ce système de financement. L'objectif de cette réforme, que je souhaite voir aboutir très prochainement, c'est-à-dire en 2004, est de rendre mensuel ou trimestriel le versement des aides de l'Etat aux entreprises d'insertion et aux entreprises de travail temporaire. Je crois que c'est la seule bonne réponse que l'on puisse apporter - avec la simplification - à la question tout à fait judicieuse que vous posez, monsieur le député, et qui avait naturellement attiré l'attention du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Gilles Artigues.

M. Gilles Artigues. Madame la ministre, monsieur le ministre, je voudrais aborder une question sur laquelle il a déjà été demandé à plusieurs de vos collègues de s'exprimer, mais je l'envisagerai ici sous l'angle du travail et de l'emploi. Il s'agit de l'augmentation des taxes sur le tabac. Faire la guerre au tabac est évidemment un impératif de santé publique. Mais outre que l'on peut douter que des mesures de ce type puissent faire baisser la consommation si, dans le même temps, on ne s'attaque pas vraiment à la contrebande, il reste qu'il y a une différence entre déclarer la guerre au tabac et déclarer la guerre aux buralistes. Ceux-ci sont des commerçants de proximité, qui jouent un rôle important, en particulier dans le monde rural.

Prenez-vous en compte dans votre budget les difficultés qu'ils rencontrent ? Des aides venant de votre ministère sont-elles prévues ? Comment envisagez-vous, d'autre part, l'harmonisation européenne, et ne pensez-vous pas que des compensations sont nécessaires, en particulier pour les buralistes les plus en difficulté, c'est-à-dire ceux qui se trouvent dans les zones frontalières ?

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, cette question est plutôt de la compétence de mon collègue de la santé. C'est donc un peu en son nom que je vous réponds.

Il faut d'abord rappeler l'objectif des mesures relatives au prix du tabac : elles sont liées à la politique de santé publique que conduit le Gouvernement. Il faut également rappeler que des discussions sont en cours au plan européen pour parvenir rapidement à l'harmonisation que vous appelez de vos vœux.

Mais en attendant d'arriver à cette harmonisation, et compte tenu du choc que peut constituer cette augmentation pour l'activité des buralistes, notamment en milieu rural, le Gouvernement a proposé trois mesures.

Premièrement, pour les débitants de tabac dont le chiffre d'affaires aura baissé en 2003 par rapport à 2002, le Gouvernement compensera entre 50 % et 80 % de la baisse.

Deuxièmement, une remise additionnelle sera accordée aux débitants. Elle constituera une aide directe à leur rémunération, qui équivaudra, par exemple, à 15 % pour un chiffre d'affaires de 400 000 euros, et à 23 % pour un chiffre d'affaires de 200 000 euros.

Enfin, le Gouvernement souhaite signer, à la fin du premier trimestre 2004, une charte avec les représentants de la profession. Nous souhaitons y inscrire le thème de la sécurité des débits - ce qui inclut donc la question de la lutte contre la contrebande -, ainsi que les nouvelles missions de service public qui pourront leur être confiées, par exemple la mise à disposition de formulaires. Il y a aussi les nouveaux marchés, comme le point Poste, ou la vente de produits de la Française des Jeux, qui pourraient être de nature à améliorer les revenus des buralistes, permettant ainsi le maintien de cette activité en milieu rural.

M. le président. Nous en venons aux questions du groupe des député-e-s communistes et républicains.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Madame la ministre, monsieur le ministre, la délégation aux droits des femmes et les différentes organisations syndicales ont constaté que le mouvement vers l'égalité professionnelle engagé par la loi du 9 mai 2001 est trop lent depuis la parution des décrets d'application des 12 septembre et 8 novembre 2001.

Si j'approuve totalement les dix recommandations faites par cette même délégation, je souhaiterais aussi évoquer la question de la précarisation du travail féminin. Celle-ci revêt des dimensions essentielles : temps partiel, chômage, difficulté d'accéder à une formation professionnelle, bas salaires. L'encouragement au temps partiel comme moyen de concilier vie professionnelle et vie familiale nous ramène à une conception dangereuse du salaire féminin, selon laquelle il serait un salaire « d'appoint ». C'est d'autant plus grave quand il s'agit de familles monoparentales.

Car le temps partiel ne signifie pas seulement un peu plus de temps à consacrer à sa famille. Il signifie surtout des horaires déréglés et de bas salaires. De récentes statistiques d'Eurostat indiquent que les salaires horaires des salariés à temps partiel ne représentent que 71 % de ceux des personnes travaillant à temps plein.

Madame la ministre, s'il y a actuellement en France 2,6 millions de chômeurs, il y a également 3,2 millions de salariés pauvres, dont 80 % sont des femmes.

Aujourd'hui, il y a donc plus de travailleurs pauvres que de chômeurs. Si les femmes constituent 45 % de la population active, elles représentent aussi 52 % des chômeurs. En d'autres termes, le taux de chômage masculin est de 10 %, alors que celui des femmes est de 14 %. C'est une source de précarisation importante. Or, si l'on parle du chômage des cadres, des jeunes, des plus de cinquante ans, des travailleurs non-qualifiés, on ne parle jamais, d'une manière statistique, du chômage des femmes, et en particulier de celles qui sont les moins qualifiées.

On constate donc une féminisation accrue de l'exclusion. C'est le constat que font les travailleurs sociaux et toutes les associations caritatives. Les quelques chiffres que j'ai cités montrent la paupérisation de cette partie du salariat féminin. N'est-ce pas là, madame la ministre, le résultat d'un manque de volonté ? Je veux parler de la volonté de mener une politique encore plus incitative pour l'emploi des femmes, de lutter pour une véritable égalité professionnelle et de procéder à une revalorisation générale des bas salaires.

Madame la ministre, quelles mesures vont-elles être prises pour mettre un terme à cette situation ? Au regard du budget alloué pour aller dans ce sens, il est permis de nourrir quelques inquiétudes.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.

Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Madame la députée, vous ne pouvez pas douter un instant de la volonté du Gouvernement ni de ma détermination personnelle à réduire tous les effets de précarisation qui touchent les femmes - et je pense en particulier à l'évolution de certaines situations familiales, car le temps partiel concerne souvent des femmes qui sont à la tête de familles monoparentales. Nous avons naturellement le souci d'inclure ces situations de précarité dans les dispositifs généraux.

Les écarts entre hommes et femmes tendent à se réduire du point de vue du taux de chômage. Mais il est de fait que, dans la tranche de la population comprise entre vingt-cinq et quarante-neuf ans, un différentiel important subsiste. Nous devons consacrer nos efforts à le réduire. Pour cela, un objectif clair doit être poursuivi : lever l'ensemble des obstacles à l'emploi. Car il s'agit aussi, souvent, d'un problème d'articulation des temps de vie et de travail. C'est là un des objets fondamentaux du dialogue social.

Le ministère conduit des actions tout à fait spécifiques. Je voudrais en rappeler quelques-unes, si vous me le permettez. Tout d'abord, la priorité étant de faciliter l'accès ou le retour des femmes à l'emploi, le plan national d'action pour l'emploi développe une stratégie visant à réduire de 5 % le nombre des demandeuses d'emploi pour l'année 2004. A cet égard, j'attache une attention toute particulière aux femmes qui ont pu être victimes de plans sociaux.

Par ailleurs, nous menons un effort sans précédent pour favoriser l'accès du public féminin aux métiers soumis à des difficultés de recrutement ou qui ont besoin de renforcer leur attractivité vis-à-vis des femmes, voire qui ne sont pas du tout féminisés. Je pense en particulier au secteur du bâtiment. J'ai récemment signé une convention allant dans ce sens avec la CAPEB, la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment.

Nous renforçons également la lutte contre la discrimination au travail. L'autorité indépendante qui va être installée en 2004 favorisera elle aussi l'insertion des femmes et leur maintien dans l'emploi.

S'ajoutent à tout cela l'ensemble des actions que nous menons pour impliquer les entreprises dans cette politique de l'égalité. Cet effort de conviction commence à porter ses fruits, puisque plus des deux tiers des entreprises de plus de cinquante salariés se disent désormais sensibles aux exigences de mixité et d'égalité professionnelle. Il y a encore quelques années, pour ne pas dire quelques mois, ces entreprises considéraient ces exigences de manière lointaine.

Je soulignerai encore deux points. Le premier est l'importance de la qualification, que vous avez évoquée à juste titre. Il s'agit d'un enjeu majeur, et nous devons absolument permettre aux femmes de construire leur projet professionnel et d'accéder à la qualification - qui sera, en outre, l'un des facteurs essentiels de la lutte contre l'exclusion.

A cet égard, j'ai fait en sorte, avec le soutien de François Fillon et en accord avec les partenaires sociaux, que, dans le dispositif de la formation professionnelle, les femmes puissent être directement bénéficiaires de cette formation professionnelle continue. En effet, comme vous le savez, l'écart que vous relevez dans le domaine de l'emploi se retrouve aujourd'hui dans le domaine de la formation professionnelle. Il faut donc que nous agissions dans ces deux domaines pour que l'égalité des chances soit de plus en plus réelle, et que l'ensemble de ces réponses concoure à la mettre en œuvre.

Le deuxième point sur lequel j'insisterai est l'articulation des temps de vie et de travail, qui me semble pouvoir être, aujourd'hui, l'une des causes de la précarité que vous évoquez.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, je tiens à vous alerter sur les conséquences du protocole d'accord du 20 décembre 2002, portant sur le régime d'assurance chômage et agréé par votre ministère par arrêté du 5 février 2003.

A compter du 31 décembre 2003, 850 000 personnes sans emplois verront les droits qui leur sont ouverts au titre de l'assurance chômage considérablement amputés, voire suspendus.

En effet, le Plan d'aide au retour à l'emploi, le PARE, auquel les demandeurs d'emploi ont souscrit dans la période couverte par la convention UNEDIC pour 2001-2003, leur donnait droit à une certaine durée d'indemnisation. Or, cette durée d'indemnisation est revue à la baisse par l'application rétroactive, à compter du 1er janvier 2004, d'un avenant apporté à la convention 2001-2003 par un protocole du 20 décembre 2002.

Il s'agit là d'une attaque sans précédent à l'encontre des demandeurs d'emploi, qui, comme vous le savez, sont confrontés, dans leur recherche d'emploi, au rétrécissement croissant du marché du travail.

Ces chômeurs, s'ils ne retrouvaient pas d'emploi à la fin de cette période où leurs droits sont réduits, pourraient prétendre à l'ASS ou au RMI. Il est inacceptable de faire sortir du régime d'assurance chômage des salariés privés d'emploi et en pleine recherche d'emploi, pour les orienter vers le revenu de minima sociaux tels que le RMI. Cette situation les fragiliserait encore plus dans leur retour à l'emploi, et particulièrement dans le cas du RMA que vous voulez mettre en place.

Le caractère rétroactif de cette mesure est un procédé injuste, qui rompt le contrat PARE assurant le versement des allocations d'assurance chômage dans des conditions bien définies par la convention en vigueur en 2001-2003.

Un mot du RMI et du RMA, qui feront bientôt l'objet de discussions et pour lesquels des modalités précises seront fixées : je dois avouer que je n'ai jamais vu offrir aux patrons un contrat aussi superbe ! Ce dispositif est sans précédent dans notre pays. D'abord, les employeurs peuvent recourir à un contrat de vingt heures au minimum, renouvelable tous les six mois - quelle précarité extraordinaire ! D'autre part, les départements leur versent le RMI. On n'a jamais vu ça ! Les patrons paient le différentiel entre ce qui est versé par le RMI et les vingt heures - ou un peu plus - et ne cotisent, évidemment, que sur la base de ce différentiel. Ils peuvent embaucher des salariés à 2 400 francs ! C'est extraordinaire ! En plus, ils ne paient pas de cotisations sur le RMI versé par le département ! Et on vient nous parler du déficit de la sécurité sociale !

Monsieur le ministre, devant cette situation intolérable, avez-vous l'intention de suspendre ces mesures qui s'appliquent rétroactivement à la convention relative à l'assurance chômage, et d'inciter les partenaires sociaux à renégocier ?

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, il ne vous a certainement pas échappé que cette décision a été prise par les partenaires sociaux dans le respect des règles qui s'appliquent, dans notre pays, au fonctionnement des organismes paritaires, et qu'elle s'inscrit, d'ailleurs, dans la philosophie qui a été celle du PARE. Le Gouvernement n'avait donc aucune raison de ne pas agréer cette décision.

Les chômeurs dont la situation changera du fait de la réduction des filières voulue par les partenaires sociaux face aux menaces que faisait peser sur l'existence même du dispositif, si rien n'était fait, le déficit considérable de l'UNEDIC, auront plusieurs possibilités. L'une de ces possibilités est l'ASS, qui n'est pas supprimée, mais dont la durée est simplement réduite.

M. Maxime Gremetz. C'est autre chose !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il y a également le RMI, que vous avez évoqué, mais aussi les dispositifs de formation, que nous avons justement renforcés en prévision des effets de cette décision des partenaires sociaux, c'est-à-dire l'allocation de fin de formation, qui est inscrite à mon budget.

Pour ce qui est du RMA, je voudrais rappeler, en réponse aux remarques que vous venez de formuler sur ce contrat, et dans l'attente du débat que nous aurons dans quelques jours, qu'il s'agit d'un contrat à durée limitée, et non renouvelable. C'est un mécanisme d'insertion, qui ne représente pas, pour l'employeur, une solution durable.

Je serais curieux de savoir comment se justifie une position qui, dans notre pays, a prévalu durant de nombreuses années à propos de la politique d'insertion : une intervention en faveur de l'insertion serait toujours bonne quand elle est le fait d'associations ou des structures publiques - dans des conditions identiques, voire moins bonnes, comme c'est souvent le cas - et serait toujours mauvaise quand elle est le fait de structures ou d'entreprises privées ?

M. Maxime Gremetz. Ce sont des emplois précaires.

M. Jacques Desallangre. Il y a un secteur marchand, et un secteur qui ne l'est pas.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Dans votre vision de l'insertion, il y a le bien et le mal. Cette vision n'est pas la nôtre. Nous pensons que le secteur privé offre aujourd'hui de grandes possibilités d'insertion, et nous ne faisons pas de procès d'intention à tous les employeurs en leur prêtant, à propos de l'insertion, la conception que vous leur prêtez. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)

M. Richard Mallié. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur le mauvais fonctionnement d'un dispositif d'aide à la création d'entreprises : celui des chéquiers-conseil et de l'encouragement au développement d'entreprises nouvelles - l'EDEN.

Je m'appuie, pour dresser ce constat, sur mon expérience de présidente de la Maison de l'initiative économique locale - la MIEL - de Seine-Saint-Denis. En effet, cette structure, créée par des collectivités locales et différents partenaires, et qui a pour vocation de conseiller et d'aider des créateurs de petites et très petites entreprises, a été confrontée, en 2002 et 2003, à des interruptions fréquentes et prolongées des aides liées au dispositif EDEN.

Ces dysfonctionnements ont gravement pénalisé les porteurs de projets - demandeurs d'emploi pour la plupart -, à qui le dispositif devait permettre de bénéficier de conseils de spécialistes avant de démarrer leur activité et de recevoir un soutien financier. Ils ont également affecté la crédibilité de notre structure, car nos intervenants n'ont pas été informés des différentes suspensions de ce dispositif et ont continué à orienter les créateurs d'entreprises.

Ces dysfonctionnements semblent s'expliquer par une enveloppe budgétaire insuffisante.

Je vous demande donc, monsieur le ministre, si vous avez prévu d'y remédier pour 2004 - et, tout simplement, si ce dispositif sera reconduit.

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Madame la députée, non seulement le dispositif EDEN sera reconduit, mais nous avons même, dans le cadre de la loi du 1er août 2003 pour l'initiative économique, élargi aux chômeurs de cinquante ans et plus les conditions d'accès à ce dispositif. Nous avons également mis en place un certain nombre de mesures, telles que l'harmonisation du maintien des revenus sociaux, la domiciliation de l'entreprise au domicile personnel ou la déclaration de création par voie électronique, visant favoriser la création d'entreprises par les chômeurs, et en particulier par les personnes en difficulté. A ce titre, le projet de loi de finances pour 2004 a inscrit des crédits à hauteur de 68 millions d'euros, contre 52 millions dans la loi de finances initiale pour 2003.

Nous avons rencontré, il est vrai, des difficultés de financement, qui tiennent à l'augmentation très sensible de la demande, à laquelle nous n'étions sans doute pas parfaitement préparés, et aux difficultés de gestion budgétaire illustrées par les gels successifs subis en 2002 et 2003. J'ai dû ainsi, en 2003, trouver dans des conditions difficiles de nouveaux moyens financiers pour permettre, au total, 11 000 décisions de créations d'entreprises, contre 9 000 prévues dans la loi de finances.

Compte tenu de ces difficultés, nous recherchons un dispositif de gestion plus souple et plus intégré pour toutes les aides à la création d'entreprise. Bien que je ne sois pas certain, connaissant vos convictions sur ce sujet, que cette réponse vous satisfera, j'ajouterai que c'est la raison pour laquelle nous allons proposer, dans le cadre de la loi de décentralisation, de confier aux Conseils régionaux les deux dispositifs que sont EDEN et le chéquier-conseil.

Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le ministre, mes convictions peuvent changer : seul le résultat compte.

M. le président. La parole est à M. François Guillaume.

M. François Guillaume. Monsieur le ministre, l'Aide médicale d'Etat, qui est la plus ancienne des lois d'assistance de notre pays, a été modifiée par l'adoption de la loi de 1999 sur la CMU, pour être réservée désormais aux sans-papiers et aux étrangers non régularisés. Ses bénéficiaires - 70 000 dès la première année - seront au nombre de 170 000 cette année, et la dépense, estimée à 630 millions d'euros en 2003 - soit cinq fois plus qu'en 2000 -, accuse une véritable explosion.

Si le caractère humanitaire de l'AME n'est contesté par personne, ses abus - qui s'apparentent, d'ailleurs, à ceux de la CMU - sont régulièrement dénoncés par les professionnels de santé qui les vivent au quotidien.

Ils sont liés, d'une part, au système de prise en charge -obtenue par simple déclaration sur l'honneur d'absence de ressources de la part des demandeurs - et, d'autre part, à la nature des interventions médicales, couvertes à 100 % par l'AME. Si les soins d'urgence sont justifiés, d'autres le sont moins, comme les prothèses dentaires et auditives ou les lunettes, prises en charge et renouvelées dans des conditions auxquelles même un smicard n'aura jamais accès, comme l'atteste le montant moyen des dépenses par dossier, triple de celui d'un affilié au régime général de la sécurité sociale et supérieur d'un tiers au montant des dépenses engagées en faveur d'un bénéficiaire de la CMU.

M. Richard Mallié. C'est scandaleux !

M. François Guillaume. C'est pourquoi, monsieur le ministre, au moment où le financement de l'assurance maladie doit être repensé afin de responsabiliser les Français dans leur consommation médicale et d'assurer la pérennité de notre système de sécurité sociale, permettez-moi de vous demander quelles mesures vous entendez prendre pour mettre fin de toute urgence à ces dérives intolérables. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Les Français sont vraiment mauvais ! Ils ont tous les défauts !

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, vous avez raison de signaler, comme l'a fait tout à l'heure Mme Montchamp dans l'intervention consacrée à la présentation de son rapport, combien le dispositif de l'AME a été mal conçu, et à quel point cette mauvaise conception risquait, finalement, de remettre en cause un dispositif d'accès aux soins qui est, par ailleurs, absolument nécessaire.

M. Gérard Bapt. Lequel ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ce dispositif était, d'abord, mal conçu, parce qu'il interdisait l'accès immédiat des bénéficiaires de l'AME à la médecine de ville, alors que les personnes restées trois ans sur le territoire en situation irrégulière bénéficiaient de cette possibilité. Cette disposition incohérente ouvrait un droit aux personnes restées suffisamment longtemps en situation irrégulière et contribuait, en outre, à la saturation des services d'urgences des hôpitaux.

Il a été, ensuite, mal organisé : les enfants mineurs d'étrangers en situation irrégulière étaient censés relever d'un régime distinct - celui de la CMU -, ce qui s'est évidemment révélé inapplicable dans les faits.

Il a été, encore, mal estimé : sa dotation initiale, lors de sa création par Mme Aubry, était de 45 millions d'euros, pour une prévision de dépenses que j'estime à 645 millions d'euros pour 2003.

Il a été, enfin, mal contrôlé : la procédure de simple déclaration sur l'honneur quant à l'identité, au domicile et aux ressources des demandeurs, initialement conçue comme exceptionnelle, s'est trop souvent généralisée.

Ce constat a été souligné avec force dans le rapport de l'IGAS consacré à l'évolution de l'aide médicale d'Etat.

Dans ces conditions, le Gouvernement a souhaité mettre en œuvre une réforme de l'AME qui se traduira d'abord par des dispositions permettant d'améliorer le contrôle de l'ouverture des droits. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Les textes réglementaires indispensables - décrets et circulaires - seront présentés dans les plus brefs délais. Ils permettront d'appliquer le contrôle d'accès sur lequel le Gouvernement s'est engagé et qui sera identique à celui auquel sont déjà soumis les assurés. Les demandeurs de l'AME devront donc justifier de leur identité, de leur domicile et de leurs ressources.

M. François Guillaume. C'est normal !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous appliquerons également la disposition relative au ticket modérateur qui a fait l'objet d'un vote par le Parlement,...

M. Maxime Gremetz. Ils sont tellement riches !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... avec un montant plafonné afin de préserver le principe de l'accès de tous aux soins. J'ajoute que, bien entendu, en seront exemptés tous ceux qui doivent l'être, notamment les personnes atteintes de pathologies graves, les femmes enceintes et les enfants mineurs. De même, tous les actes de prévention - les vaccins, le dépistage - continueront d'être intégralement pris en charge.

Le projet du Gouvernement est équilibré. Après cette réforme, le système d'accès aux soins français restera le plus complet et le plus protecteur de l'Union européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Les patrons peuvent être des voyous et dilapider, c'est aux petits que vous vous en prenez !

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard, au titre des députés non-inscrits.

Mme Martine Billard. Monsieur le ministre, ma question porte sur l'une des conséquences de la limitation des droits à l'allocation spécifique de solidarité dont bénéficient actuellement plus de 400 000 chômeurs en fin de droits à l'UNEDIC. Cette décision tombe particulièrement mal, puisqu'elle vient s'ajouter aux conséquences de la convention UNEDIC de décembre 2002.

Ma question est très précise et j'espère que vous y répondrez, car elle traduit une préoccupation partagée par beaucoup de personnes de ma circonscription.

Vous avez annoncé la modification de l'accès au revenu minimum d'activité, afin de prendre en compte les personnes qui vont se voir exclure de l'ASS après deux, voire trois ans d'indemnisation. Mais vous n'avez prévu que 100 000 contrats RMA dans le budget pour 2004, alors que l'on estime à 130 000 le nombre des personnes qui devraient perdre le bénéfice de l'ASS l'année prochaine.

Surtout, pour avoir accès au RMA, il faudra vraisemblablement remplir les conditions d'éligibilité au RMI, puisque ces deux dispositifs sont liés. Or, dans le cadre du RMI, l'ensemble des ressources du foyer - c'est-à-dire celles du conjoint du demandeur, que celui-ci soit marié, concubin ou pacsé, ainsi que celles de l'enfant présent au foyer et qui travaille - sont prises en compte dans le calcul du plafond de ressources. En conséquence, de nombreux allocataires de l'ASS seront exclus du RMI parce qu'ils dépasseront, parfois de très peu - ce sont les effets de seuil bien connus -, le plafond de ressources, alors qu'ils avaient accès à l'ASS, qui est un droit plus individuel. S'agissant des plus de cinquante ans, vous avez déjà un peu anticipé en prévoyant qu'ils pourront conclure des contrats initiative emploi.

Ma question est donc la suivante, monsieur le ministre. Que se passera-t-il pour ceux d'entre eux qui n'obtiendront pas de CIE et pour les moins de cinquante ans, qui ne pourront bénéficier ni du RMA ni du CIE ? Qu'en sera-t-il de leurs revenus et des possibilités qui leur seront offertes d'accéder aux dispositifs d'insertion - conseils du référent RMI ou stage d'insertion - et de formation ? Sur ce dernier point, je rappelle que l'application de la convention UNEDIC peut entraîner, pour certains chômeurs, l'arrêt anticipé du versement de leurs indemnités. En conséquence, il arrive que ceux-ci se voient refuser un stage de formation qui leur avait été accordé dans un premier temps, au regard de leur situation antérieure.

Ces personnes ne risquent-elles pas d'être les grandes oubliées de l'emploi et de la formation ?

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Madame la députée, tout d'abord, la réforme de l'ASS que nous proposons au Parlement de voter ne produira ses effets qu'au 1er juillet prochain. Or, je souhaite que les mesures relatives au revenu minimum d'activité prennent bien effet au 1er janvier, de façon que les départements aient le temps de s'organiser en liaison avec le service public de l'emploi.

Par ailleurs, vous affirmez que 130 000 personnes vont sortir du dispositif de l'ASS, alors que 100 000 contrats sont inscrits au budget. Or aucun contrat n'est inscrit au budget, dans la mesure où, de ce point de vue, le RMA, fonctionne de la même manière que le RMI. Plus les départements seront actifs et imaginatifs, plus il y aura de possibilités de créer des contrats de revenu minimum d'activité. Le chiffre de 100 000 correspond en réalité à l'estimation par les services de l'Etat de la capacité des différents intervenants, notamment les départements, à mettre en place ces contrats dans le courant de l'année 2004. Il n'est donc pas gravé dans le marbre.

Il est exact que les personnes qui sortiront du dispositif de l'ASS et dont les revenus dépasseront les plafonds du RMI n'auront droit ni à celui-ci ni au RMA. Cela semble d'ailleurs assez cohérent avec la politique qui est conduite depuis plusieurs années en matière d'insertion. En revanche, elles auront accès au CIE - qui est ouvert à tous, même si les personnes âgées de plus de cinquante ans bénéficient d'un dispositif particulièrement avantageux -, ainsi qu'aux autres dispositifs d'insertion existants. En tout état de cause, il me paraît tout à fait impensable de réclamer l'accès au RMI si l'on ne répond pas aux critères qui sont appliqués depuis un certain nombre d'années à ce dispositif.

M. le président. Nous revenons au groupe des député-é-es communistes et républicains.

La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Monsieur le ministre, le 13 juin dernier, 81 députés de votre majorité ont déposé une proposition de loi visant à réformer le statut de l'inspection du travail et à en changer la dénomination.

M. Richard Mallié. Très bien !

M. Jacques Desallangre. Selon ses auteurs, ce texte vise à recentrer les activités des inspecteurs sur leurs missions traditionnelles, relatives à la sécurité, à l'hygiène et à la lutte contre le travail au noir.

S'il était adopté, ce texte représenterait une sérieuse mise en cause du droit d'entrée et de visite des inspecteurs, ainsi que leur indépendance, pourtant garantie par la convention 81 de l'Organisation internationale du travail.

Le dépôt de cette proposition de loi a suscité une vive émotion au sein du monde du travail.

M. Christian Paul. A juste titre !

M. Jacques Desallangre. En arguant que la moitié des inspecteurs est employée à des tâches entravant la liberté d'entreprendre, les auteurs s'inscrivent parfaitement dans un contexte intellectuel et idéologique de remise en cause du droit du travail...

M. Christian Paul. C'est le monde à l'envers !

M. Jacques Desallangre. ... et, plus généralement, de toute notion d'ordre public social.

L'inspection du travail telle que nous la connaissons est véritablement née avec la loi du 2 novembre 1892. En, 1910, il y avait 110 inspecteurs pour 3 millions de salariés. En 2003, ils sont 427 pour 15,5 millions de salariés.

M. Christian Paul. Il en faudrait beaucoup plus !

M. Jacques Desallangre. Dès lors, comment pourrait-on faire croire à nos concitoyens que ces quelque 427 inspecteurs du travail, assistés de 813 contrôleurs - soit, au total 1 240 agents pour 1,2 million d'entreprises - ont les moyens d'entraver la liberté d'entreprendre ? Ce n'est pas sérieux.

Les inspecteurs du travail sont dans l'incapacité la plus totale, faute de moyens suffisants, de mener à bien leurs missions, qui consistent à protéger les salariés et à réprimer la délinquance patronale. Alors que tous les employeurs responsables, respectueux de la légalité républicaine, savent à quel point ils ont intérêt à ce que le contrôle de l'application de la législation du travail soit efficient, nous sommes en droit de nous demander, au vu d'un tel projet, si l'entreprise est appelée à devenir une zone de non-droit.

Monsieur le ministre, pouvez-vous vous engager dès à présent à ce que cette proposition de loi ne soit pas inscrite à l'ordre du jour de notre assemblée ou, si elle devait l'être, à vous y opposer ?

M. Christian Paul. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, premièrement, le Gouvernement n'a pas de projet de réforme de l'inspection du travail.

Deuxièmement, nous n'avons pas, les uns et les autres, la même conception de la vie économique. Tout au long de nos débats, vous nous avez montré que vous avez des relations entre les acteurs économiques une vision largement dépassée, qui non seulement ne correspond pas à la réalité (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains), mais explique bien des handicaps et des blocages de notre économie qui ont des conséquences dans des domaines que vous affectionnez d'évoquer, tels que l'insertion, la pauvreté ou l'exclusion. C'est notamment parce que notre système économique est à ce point bloqué et a autant de difficultés à réagir aux évolutions de la conjoncture que nous avons aujourd'hui à nous plaindre de si grandes difficultés sur le plan social.

M. Jacques Desallangre. Et les licenciements économiques ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Les nombreux rapports qui ont été faits sur l'inspection du travail convergent et définissent trois objectifs prioritaires auxquels le Gouvernement travaille : l'augmentation de la présence de l'inspection du travail sur les lieux de travail et dans les entreprises, la programmation et la mesure de l'action collective et le renforcement de la lisibilité de l'action. Dans cet esprit, j'ai défini, dans le cadre d'une instruction ministérielle datée du 12 mars 2003, quatre orientations prioritaires pour l'action des services déconcentrés de l'inspection du travail.

La première priorité est l'accompagnement des PME dans la mise en œuvre du droit du travail qui est actuellement, dans notre pays, d'une complexité extrême.

La deuxième est la connaissance et la prévention des risques à effets différés.

La troisième est l'approfondissement de la maîtrise des organisations complexes du travail et la sécurisation des relations du travail qui concernent la sous-traitance et les prestations de services.

Enfin, la quatrième priorité est la prévention des discriminations et des phénomènes d'exclusion au travail.

Tel est le sens de la politique que je conduis à la tête de mon ministère.

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions.

M. Maxime Gremetz. Je demande la parole, monsieur le président ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Pour un rappel au règlement, monsieur Gremetz ?

M. Maxime Gremetz. Oui, monsieur le président.

J'ai ici, monsieur le ministre, le texte sur le RMI-RMA. Or il indique que le contrat d'insertion au revenu minimum d'activité peut être renouvelé, le cas échéant, deux fois, que sa durée, les conditions de sa suspension et de son renouvellement sont fixées par décret et - écoutez bien, monsieur le ministre : vous n'avez pas l'air de connaître ce texte (Exclamations sur les mêmes bancs) - que cette durée ne peut excéder dix-huit mois, renouvellement compris.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Voilà : pas plus de dix-huit mois !

M. Maxime Gremetz. Dix-huit mois, soit trois fois six mois. Or vous m'avez répondu que ce contrat n'était pas renouvelable.

M. le président. Monsieur Gremetz, ce n'était pas un rappel au règlement.

M. Maxime Gremetz. Non, monsieur le président, ...

M. le président. Comme d'habitude !

M. Maxime Gremetz. ... mais cette précision était utile.

TRAVAIL, SANTÉ ET SOLIDARITÉ

I. - Travail

M. le président. J'appelle les crédits inscrits à la ligne : « Travail, santé et solidarité : I. - Travail ».

ETAT B

Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

« Titre III : 14 335 811 euros ;

« Titre IV : 16 562 609 610 euros. »

ETAT C

Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE V.- INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ETAT

« Autorisations de programme : 10 000 000 euros ;

« Crédits de paiement : 3 000 000 euros. »

TITRE VI.- SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENTS ACCORDÉES PAR L'ETAT

« Autorisations de programme : 78 140 000 euros ;

« Crédits de paiement : 36 770 000 euros. »

M. Gorce, M. Bapt et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 115, ainsi rédigé :

    « Sur le titre III de l'état B, réduire les crédits de 353 616 euros. »

La parole est à M. Gaëtan Gorce.

M. Gaëtan Gorce. L'amendement vise à réduire - pardonnez-nous cette irrévérence - les crédits destinés aux rémunérations des ministre, ministres délégués et secrétaires d'Etat qui sont dans ce ministère. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. François Guillaume. C'est lamentable ! Pourquoi ne l'avez-vous pas fait il y a cinq ans ?

M. le président. Monsieur Guillaume, laissez M. Gorce défendre son amendement.

Poursuivez, monsieur Gorce.

M. Gaëtan Gorce. Il s'agit d'aligner ces rémunérations sur la situation qui est réservée aux actuels bénéficiaires de l'ASS qui vont passer au RMI, et j'espère que vous réagirez avec la même indignation quand vous pourrez mesurer les conséquences d'une telle décision.

M. Bernard Perrut et M. François Guillaume. C'est une provocation !

M. Richard Mallié. Ce n'est pas le cirque, ici, monsieur Gorce !

M. Gaëtan Gorce. Cet amendement - dont je constate qu'il vous irrite, ce qui prouve que nous avons eu raison de le déposer - a pour but de souligner combien ce que vous appelez une réforme de l'ASS est en réalité une régression considérable pour toutes celles et tous ceux qui sont privés d'emploi depuis longtemps.

M. François Guillaume. C'est faux !

M. Gaëtan Gorce. En effet, un grand nombre d'entre eux - plus de 130 000 - vont être exclus du bénéfice de l'ASS, tandis que d'autres verront le montant de leur allocation réduit, puisque vous supprimez notamment la majoration pour les bénéficiaires les plus âgés.

M. Richard Mallié. Et vous, vous payiez des ministres au noir !

M. Gaëtan Gorce. Tout à l'heure, monsieur le ministre, vous avez expliqué à Mme Billard que vous étiez dans l'incapacité d'assurer que l'ensemble des bénéficiaires de l'ASS pourraient réellement bénéficier du RMI, et pour cause : les modalités de calcul ne sont pas les mêmes.

La situation est à peu près aussi favorable pour un bénéficiaire de l'ASS que du RMI, dites-vous. Pardonnez-moi, monsieur le ministre, mais, si on faisait le calcul, on s'apercevrait que ce n'est pas aussi évident : quelques dizaines d'euros quand on est dans une situation difficile, cela compte à la fin du mois !

Penchons-nous sur une autre conception des choses, amorcée lors de la convention de l'UNEDIC qui a été modifiée, à savoir l'idée selon laquelle ceux qui sont privés d'emploi après avoir eu un contrat de travail sont pris en charge non par l'UNEDIC, système d'assurance professionnelle auquel ils ont cotisé, mais par l'Etat et les systèmes qui ont été mis en place pour lutter contre l'exclusion.

Nous ne considérons absolument pas satisfaisant que lorsqu'on a perdu son travail et bien qu'on ait cotisé, on relève d'un système qui est destiné à lutter contre l'exclusion. C'est une dérive tout à fait inacceptable.

Cette décision que vous niez avoir prise, pour des raisons financières, rapportera au budget de l'Etat un peu plus de 100 millions d'euros cette année, 800 millions un peu plus tard. Une telle décision est socialement injuste et humainement choquante.

Nos collègues de l'UDF ont eu raison de la combattre comme ils l'ont fait dans les débats précédents.

M. Bernard Perrut. Ils n'avaient pas compris. Maintenant, c'est fait.

M. Gaëtan Gorce. Ils ont eu raison aussi de déposer un amendement visant à rétablir le dispositif antérieur, amendement que nous voterons. Vous avez beau mettre en avant votre souci de l'intégration, votre volonté d'assurer la cohésion sociale, vous montrez en prenant des mesures de cette nature, le vrai visage de votre politique, visage peu agréable puisque vous pénalisez ceux qui sont le plus en difficulté.

Cette situation est inadmissible. C'est la raison pour laquelle, nous avons tenu à déposer symboliquement cet amendement.

M. Richard Mallié. Provocateur !

M. Daniel Prévost. Ridicule !

M. Gaëtan Gorce. Nous protestons pour ceux qui sont pénalisés par vos réformes ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 115.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le travail. La commission des finances n'a pas examiné cet amendement. Si elle l'avait fait, l'image qu'elle se fait du gouvernement la République et de la dignité de la représentation nationale l'aurait conduite à le repousser. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Guy Geoffroy. Très bien !

M. Gaëtan Gorce. C'est symbolique.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, le visage que vous montrez se reflète dans cet amendement.

Etait-il nécessaire, pour aborder la question importante de la réforme de l'ASS, de tomber dans le poujadisme et dans la provocation ? Je ne le crois pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Grand. Ils tiennent le même raisonnement que le Front national !

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Il n'était sans doute pas très intelligent, monsieur Gorce, de présenter cet amendement provocateur. Si vous aviez proposé une baisse de 40 % du traitement des ministres de plus de cinquante-cinq ans ou une réduction de leur mandat, vous auriez obtenu une majorité. Le groupe UDF s'opposera à votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. C'est un amendement de provocation, mais vous, que faites-vous sinon des provocations en stigmatisant les pauvres, les chômeurs, les RMIstes ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Grand. C'est limite Front national.

M. Maxime Gremetz. Vous vous montrez sous un jour si exécrable que je voterai cet amendement que je n'aurais pas voté sinon, et, de plus, je demande un scrutin public. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Cela suffit de toujours stigmatiser. Ce sont les malades, les médecins qui sont responsables. Ce sont les RMIstes, qu'il faut envoyer au travail parce qu'ils ne veulent pas travailler. Arrêtez avec cela. Vous faites le jeu de Le Pen. Vous êtes contents ? Eh bien, c'est parfait. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Grand et M. Camille de Rocca Serra. Ce sont les communistes qui font le jeu de Le Pen !

M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.

M. Gaëtan Gorce. Monsieur le président, je peux concevoir que la nature de cet amendement fasse réagir. Tel était d'ailleurs son objet et il a été atteint.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis pour le travail. Cet amendement est stupide.

M. Gaëtan Gorce. Ce que je ne peux, en revanche, pas accepter, et avec moi le groupe socialiste, c'est la réponse du ministre. Il ne répond pas sur le fond, mais il nous traite de poujadistes !

M. Guy Geoffroy. C'est ce que vous méritez.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis pour le travail. Vous faites le lit du Front national.

M. Gaëtan Gorce. C'est une accusation tout à fait scandaleuse. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

S'il ne la retire pas, je demande, au nom de mon groupe, une suspension de séance d'un quart d'heure.

M. Richard Mallié. Le ministre a raison.

M. le président. Je vais donc mettre aux voix ...

M. Gaëtan Gorce. J'ai demandé une suspension de séance. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je vous accorde une suspension de séance de deux minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante, est reprise à vingt-trois heures cinquante-deux.)

M. le président. La séance est reprise.

Je mets aux voix l'amendement n°115.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits inscrits su titre III de l'état B.

(Les crédits inscrits au titre III de l'état B sont adoptés.)

M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 98, ainsi rédigé :

    « Sur le titre IV de l'état B :

    « Réduire les crédits de 15 000 000 euros ;

    « Majorer les crédits de 30 000 000 euros. »

La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Par l'amendement n° 98, le Gouvernement tient l'engagement pris devant l'Assemblée il y a déjà quelques jours à l'égard de ceux d'entre vous qui s'interrogeaient sur les conséquences de la réforme de l'ASS : il porte de 80 000 à 110 000 le nombre des CIE prévus pour 2004.

Nous avions prévu, je vous le rappelle, 70 000 CIE en 2003. Les crédits des années passées n'ont pas été totalement consommés, faute d'une priorité suffisamment forte accordée à ce dispositif.

Nous avons donc demandé un effort aux services de l'emploi et nous avons modifié les conditions de versement du CIE aux entreprises. Nous constatons qu'il y a un engouement très fort en faveur de cette mesure. Je vous propose donc d'adopter cet amendement, lequel représente un surcoût de 30 millions d'euros qui sera financé par redéploiement.

M. Maxime Gremetz. Je demande la parole, monsieur le président.

M. le président. Pour un rappel au règlement, monsieur Gremetz ?

M. Maxime Gremetz. J'avais demandé un scrutin public sur l'amendement n° 115 !

M. le président. Monsieur Gremetz, vous n'avez pas de délégation de votre groupe.

M. Maxime Gremetz. Dans ces conditions, je demande une suspension de séance. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je ne puis davantage vous l'accorder, faute de cette même délégation.

M. Maxime Gremetz. Le règlement dispose que la suspension est de droit ! Serait-ce un coup de force ?

M. le président. Monsieur Gremetz, la demande de suspension est de droit "à la demande d'un président de groupe ou de son délégué".

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 98 du Gouvernement ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. La commission des finances n'a pas examiné cet amendement. A titre personnel, j'y suis favorable, et je souhaite saluer l'initiative prise par le Gouvernement de redéployer des crédits dont nous savons déjà - le constat est fait aujourd'hui - qu'ils ne seront pas consommés sur l'exercice 2004.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis pour le travail. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.

M. Gaëtan Gorce. Je ne peux pas laisser le ministre nous dire que les crédits destinés aux CIE auraient été insuffisants : 90 000 CIE étaient inscrits en 2001, c'est-à-dire plus que ce que vous aviez prévu initialement pour l'an prochain.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est le contraire.

M. Gaëtan Gorce. Vous relevez le nombre de CIE. Dont acte !

Force est de constater - et je le dis d'autant plus librement que nous avons critiqué ce dispositif à de nombreuses reprises - qu'il produit de meilleurs résultats que nous ne le pensions les uns et les autres, même s'il reste très coûteux. Pour autant, j'essaie d'avoir une approche équilibrée sur le sujet. Mais je ne peux pas manquer de remarquer que vous avez tardé à relancer un dispositif que vous jugez prioritaire.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis pour le travail. Il connaît un grand succès.

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Le groupe UDF est satisfait de la relance du CIE. Il y a quelques années, j'ai été conseiller prud'homme et j'ai constaté, lors de sa mise en œuvre, que ce dispositif, par sa complexité, était l'origine de nombreux litiges. Il a donné lieu à quantité de jugements en défaveur des entreprises, ce qui a quelquefois coûté cher aux artisans ou aux petites entreprises.

Je veux donc alerter le Gouvernement et je lui demande de veiller à ce que de semblables problèmes ne se produisent pas avec la mise en place de nouveaux dispositifs, comme le CIVIS ou le RMA, car cela fait très mal à l'économie française.

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement est très sensible à la remarque de M. Vercamer.

Monsieur Gorce, vous ne m'avez pas compris. Je n'ai pas dit qu'il n'y avait pas assez de crédits. J'ai dit que les crédits n'étaient pas consommés en totalité, faute de vraie priorité. Il a fallu à la fois modifier les conditions de mise en œuvre du CIE et donner les instructions nécessaires pour que ce programme devienne une priorité du service public de l'emploi et on en voit aujourd'hui les résultats.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 98.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 99, ainsi rédigé :

    « Sur le titre IV de l'état B :

    « Réduire les crédits de 36 020 000 euros ;

    « Majorer les crédits de 36 020 000 euros. »

La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Cet amendement vise à mettre en œuvre le financement du contrat d'insertion dans la vie sociale.

Je rappelle que ce contrat d'insertion s'organisera autour de trois volets.

Premier volet, un contrat associatif, mis en œuvre par voie réglementaire, qui permettra d'aider des jeunes peu qualifiés qui ont un projet de travail au service d'une association dans le domaine social, humanitaire, sportif, et uniquement au service de ces associations.

Ce programme fera l'objet d'un financement à 66 % par l'Etat, les 34 % restant étant à la charge des collectivités locales et principalement de la région qui sera l'interlocuteur de l'Etat dans ce domaine.

Les deux autres volets du CIVIS, ce sont l'aide à la création d'entreprise et la reprise intégrale du dispositif TRACE, qui a été évoqué plusieurs fois au cours de cette soirée.

Pour permettre la mise en œuvre de ce dispositif, il est nécessaire de légiférer. C'est l'objet du présent amendement, qui crée le contrat d'insertion dans la vie sociale en tant que tel et ses différents volets, l'accompagnement professionnel renforcé, l'orientation vers un emploi ou l'aide à la création d'entreprise.

Conclu entre un jeune rencontrant des difficultés d'insertion professionnelle et la région, le CIVIS est signé pour deux ans. Une convention doit organiser le partenariat entre la région, les collectivités locales concernées et le réseau des missions locales.

Dans le cadre de la décentralisation, la région est appelée à jouer un rôle pilote dans sa mise en œuvre et, plus généralement, dans l'organisation des actions d'insertion professionnelle et de formation pour les jeunes. C'est l'objet des cinq premiers alinéas qui adaptent les dispositions de la loi du 29 juillet 1998.

Enfin, les alinéas 14 et suivants mettent en œuvre, conformément à la Constitution, le principe de compensation des charges liées aux transferts et à la création par le CIVIS de compétences nouvelles pour les régions. Le CIVIS montera progressivement en charge jusqu'en 2006, au moment où les jeunes actuellement engagés dans le programme TRACE arriveront au terme de leur parcours. L'évolution des montants transférés aux régions suivra le même rythme.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. La commission est favorable à l'amendement n° 99 - et, à titre personnel, je le suis également à l'amendement n° 100 rectifié, qu'a présenté M. le ministre. Les deux amendements sont liés, puisque le n° 99 concerne le financement de la mesure que développe le n° 100 rectifié. Je demanderai néanmoins tout à l'heure quelques précisions sur ce dernier amendement.

M. le président. Nous examinons pour l'instant l'amendement n° 99, même si le ministre a voulu, à juste titre, présenter le dispositif dans sa globalité.

La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Il est difficile de parler du premier amendement sans évoquer le second.

J'avoue ma surprise : je ne comprends pas le but recherché. S'agit-il simplement de remplacer le programme TRACE par le dispositif CIVIS, qui est pratiquement identique, à quelques défauts supplémentaires près ? Depuis sa nomination, le Gouvernement nous explique qu'il veut décomplexifier les procédures. J'ai plutôt l'impression que, là, il en rajoute une couche - passez-moi l'expression. Après le RMA - nouveau contrat -, voici le CIVIS. Il comporte trois volets, dans le même chapitre du budget du travail. Mais on commence à nous présenter un CIVIS à un volet, et l'on nous dit qu'un autre volet figure ailleurs, qui n'est en fait que la reprise de TRACE, dont il ne se distingue que par un nouveau nom, la suppression de l'aide au logement et, surtout, le transfert à la région.

En tant qu'écologiste, je suis en général assez favorable à la décentralisation, mais, cette fois, en tant que contribuable, je commence à m'inquiéter. On nous dit que tous ces transferts à la région seront compensés, mais j'ai remarqué que, pour le transfert du RMI, la rectification n'aura lieu qu'en fin d'exercice : en attendant, les départements devront donc faire l'avance de fonds pour servir l'allocation aux nouveaux bénéficiaires qui ne manqueront pas de se déclarer, entre les intermittents du spectacle à qui l'on va refuser les ASSEDIC, les sorties d'ASSEDIC et les sorties d'ASS. J'ai peur que l'année 2005 ne s'accompagne de très fortes augmentations d'impôts locaux.

M. Christian Paul. Ce sera l'impôt Raffarin !

Mme Martine Billard. Oui, ce sera l'impôt Raffarin-Fillon.

Telles sont mes inquiétudes. Je ne vois pas, monsieur le ministre, ce que l'amendement n° 99 apporte de plus que le programme TRACE, en dehors du transfert aux régions.

M. le président. La parole est à Mme Hélène Mignon.

Mme Hélène Mignon. Je suis, moi aussi, un peu étonnée de l'amendement n° 100 rectifié. Depuis plusieurs mois, monsieur le ministre, nous attendions vos propositions concernant le CIVIS, mais, en étudiant les documents budgétaires, je n'avais pas l'impression que ce serait dès ce soir à l'ordre du jour. Quand on examine ce que vous nous soumettez, on ne peut, comme Mme Billard, que s'interroger.

Dans une étude récente sur le programme TRACE, la DARES considérait elle-même que ce dispositif d'accompagnement facilitait, pour beaucoup de jeunes en grande difficulté, l'accès à des emplois de plus en plus nombreux et stables. En découvrant les mesures que vous nous présentez, j'ai l'impression que, à quelques exceptions près, dont je parlerai tout à l'heure, le CIVIS est exactement la même chose que TRACE. A quoi bon remplacer l'un par l'autre ? S'agit-il seulement de transférer tout le financement de TRACE à la région, y compris ce qui constituait autrefois la bourse d'accès à l'emploi et qui était un geste de solidarité nationale envers ces jeunes ?

Mme Billard a signalé la disparition de l'aide au logement, qui pouvait être utile dans des périodes difficiles, car on sait que, sans appartement, sans adresse, il n'est pas aisé d'acquérir de la stabilité. L'intégration dans le milieu du travail et l'insertion sont fortement conditionnées, pour les jeunes comme pour les plus âgés, par la mise à disposition de logements décents.

Pourquoi cet amendement arrive-t-il brusquement, ce soir, et pourquoi refaire ce qui existe depuis la loi de 1998 sur le parcours TRACE ?

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Madame la députée, vous l'avez dit vous-même, pour le volet qui correspond à TRACE, le CIVIS marque une innovation : il transfère à la région la gestion de l'ensemble des dispositifs destinés à la formation et à l'insertion des jeunes. C'est la philosophie globale du projet de loi de décentralisation que nous renforçons avec ce texte. Il y a donc bien une simplification : nous n'aurons plus qu'un dispositif là où nous en avions toute une série.

Pourquoi avoir présenté cet amendement ce soir ? Le calendrier parlementaire ne nous aurait pas permis de discuter d'un texte autonome sur un tel sujet avant très longtemps. Or, nous souhaitons que le CIVIS puisse fonctionner dans les meilleurs délais.

Vous avez exprimé votre crainte à propos des transferts de charges : je comprends vos inquiétudes, car, dans ce domaine, vous avez une longue expérience.

Mme Martine Billard. A gauche comme à droite !

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Si des gens ont une responsabilité dans l'augmentation de la fiscalité locale, ce sont bien ceux qui, pendant les cinq années de la dernière législature, ont transféré des charges considérables aux collectivités locales sans assurer l'équilibre financier de ces opérations.

Nous avons choisi de faire voter par le Parlement une disposition extrêmement contraignante, puisqu'il s'agit d'une garantie inscrite dans la Constitution. Elle s'impose donc au Gouvernement et, comme pour le transfert du RMI aux départements, nous aurons l'obligation de veiller à ce que toutes les charges qui seront transférées aux régions soient compensées.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Monsieur le ministre, comprenez notre surprise : cet amendement n° 100 rectifié, qui compte un nombre respectable de pages, nous arrive ce soir, alors que, jeudi dernier en commission des finances, le rapporteur spécial de votre budget, M. Bouvard, nous parlait du CIVIS sans pouvoir nous donner les précisions qu'apporte votre amendement. On peut en conclure que la décision et la mise en forme sont intervenues au cours des tout derniers jours.

M. Christian Paul. C'est improvisé !

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis pour le travail. Non, c'est enrichi !

M. Christian Paul. M. Bouvard n'est pas dans la confidence !

M. Gérard Bapt. Sans doute un élément nouveau a-t-il précipité la mise en place du CIVIS qui nous était annoncé depuis dix-huit mois. Seraient-ce les données qui ont été publiées le mois dernier sur l'évolution du nombre de demandeurs d'emploi et le record des moins de vingt-cinq ans ?

Une concertation a-t-elle eu lieu avec les présidents de région ? Sans doute étiez-vous bien placé pour la conduire. Ce dispositif, qui s'inscrit dans le volet concernant la création ou la reprise d'une activité salariée par les jeunes, est entièrement nouveau, bouscule tous les dispositifs déjà mis en place, contredit une mesure déjà adoptée par le Parlement et reprend la proposition de votre collègue, M. Dutreil, qui voulait transformer la prime donnée aux allocataires de minima sociaux en avance remboursable. Il s'agira donc d'une rémunération versée, dans le cadre d'un contrat, à des jeunes de moins de vingt-cinq ans peu qualifiés et qui seraient en situation de créer ou de reprendre une entreprise.

Nous sommes en droit d'attendre de vous, monsieur le ministre, des explications complémentaires sur les conditions dans lesquelles les régions devront, dès le 1er janvier prochain, mettre cette mesure en œuvre.

M. le président. Je vous informe que, sur le vote de l'amendement n° 99, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Bapt, la concertation avec les présidents de région a eu lieu, et le projet a été présenté au conseil national des missions locales, qui sont évidemment très concernées par le dispositif. Il devra être mis en œuvre par les régions et je ne vois pas quels obstacles pourraient s'opposer à ce qu'il le soit dès le 1er janvier prochain. Ce dispositif a été un peu long à mettre au point, je le reconnais. Il y a, à cela, toute une série de raisons, notamment l'encombrement du calendrier parlementaire et la nécessité d'attendre l'examen du texte sur la décentralisation. Nous voulons renforcer le rôle des régions pour tout un bloc de compétences, dans le domaine de la formation et de l'insertion des jeunes. Nous aboutissons ce soir à ce résultat. Il ne me semble pas que le dispositif entraîne de difficultés dans les relations entre l'Etat et les régions. Vos craintes ont beau être légitimes, compte tenu de la rapidité avec laquelle cet amendement a été déposé, elles n'en sont pas moins vaines. Le CIVIS est le point de départ d'une politique de contractualisation avec les régions qui me paraît extrêmement prometteuse pour l'insertion des jeunes.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 99 du Gouvernement.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Je vais vous laisser quelques instants pour regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement n° 99 :

      Nombre de votants 42

      Nombre de suffrages exprimés 41

      Majorité absolue 21

          Pour l'adoption 32

          Contre 9

L'Assemblée nationale a adopté.

M. Gorce, M. Bapt et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 116, ainsi rédigé :

    « Sur le titre IV de l'état B, réduire les crédits de 1 046 330 000 euros. »

La parole est à M. Gaëtan Gorce.

M. Gaëtan Gorce. La progression du budget de l'emploi ne repose en réalité que sur le transfert des allégements de cotisation et cache une augmentation de ces allégements, qui suit d'ailleurs le rythme normalement prévu, alors que les moyens accordés à d'autres politiques sont, eux, en forte réduction. A travers cet amendement de principe, nous voulons dénoncer une fois de plus le fait que, au moment où l'emploi diminue en France - les chiffres du premier semestre et les prévisions sur l'ensemble de 2003 laissent en effet penser que nous allons perdre au minimum 90 000 emplois -, on demande à ceux qui connaissent les plus grandes difficultés de faire un effort supplémentaire en supprimant les emplois aidés non marchands, les CES ou l'ensemble des mesures de soutien aux publics en difficulté, comme les stages destinés aux chômeurs de longue durée.

Cette situation nous paraît tout à fait injuste. Elle souligne également le décalage avec le discours du Gouvernement qui, en nous parlant de soutien à l'emploi marchand, de préférence à d'autres, cherche à créer un clivage entre les dispositifs sur lesquels, au contraire, il faut s'appuyer de manière complémentaire.

Cette vision de la politique de l'emploi visant à opposer ces deux catégories nous paraît beaucoup trop caricaturale, car il faut souvent passer d'un dispositif à l'autre.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. La commission n'a pas examiné ces amendements, puisqu'ils ont été déposés après l'examen du budget en commission.

A titre personnel, je constate que ces amendements et les suivants consisteraient à remettre en cause la démarche du Gouvernement, visant à réintégrer dans le budget de l'Etat, les dispositifs d'allégement au lieu et place du FOREC.

Après avoir rappelé, tout à l'heure, quelle était l'importance de la réintégration du dispositif FOREC dans le budget général de l'Etat et après que la commission des finances ait déjà, l'an dernier, souhaité cette réintégration dans le budget, pour une meilleure transparence, je ne peux émettre qu'un avis défavorable sur cet amendement et les suivants.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Cet amendement vise, en réalité, plusieurs points clefs de la politique de l'emploi du Gouvernement.

D'abord, l'augmentation de 1,2 milliard des allégements de charge, ce qui - vous en conviendrez - n'est pas négligeable et correspond aux engagements que le Parlement lui-même a pris à l'occasion du vote de la loi sur l'assouplissement des 35 heures et l'harmonisation du SMIC.

Ensuite, nous voulons, à travers ce budget, assurer une plus grande transparence à la politique en matière d'allégement de charges. Chacun se souviendra comment ont été financés les allégements de charges dans le passé, pour une très large part sur le dos de la sécurité sociale.

Avec le dispositif que nous proposons aujourd'hui ceci ne pourra plus se reproduire. Le Parlement devrait être extrêmement attentif à cette question.

Je souhaite donc qu'il repousse cet amendement, ainsi que les suivants.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Votre argumentation, monsieur le ministre, serait plus recevable, si, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, vous n'aviez pas fait honorer une dette de l'Etat, au travers du FOREC, dette qui remonte aux années 2000-2001, sur la CADES. En fait, la charge, même si elle est retardée, pèse sur la sécurité sociale.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Qu'est-ce que vous avez laissé comme dettes !

M. Gérard Bapt. Monsieur le ministre, la réintégration du FOREC va donner une charge de travail supplémentaire à vos services. (Rires.)

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis pour le travail. Quel argument !

M. Gérard Bapt. On peut faire un peu d'humour !

D'après la note, que vous avez cosignée avec M. Mattei, révélée dans un hebdomadaire satirique du mercredi, les conditions de fonctionnement des ministères sont de plus en plus précaires du fait de la paupérisation de leurs moyens. Je me permets de signaler cela en tant que rapporteur du budget de la santé et des personnes handicapées puisqu'il s'agit d'un service commun au ministère du travail et au ministère de la santé.

On apprend qu'il y a des retards, des dettes, auprès de France-Télécom et d'Orange. Vous auriez récemment échappé de peu à une coupure d'eau au ministère !

Comment la DARES continuera-t-elle de fonctionner une fois son passif apuré ?

M. Christian Paul. C'est la clochardisation du ministère de M. Fillon !

M. Gérard Bapt. Les frais de contentieux augmentent parce que des entreprises et notamment des PME - vous vous en étiez inquiétés à juste titre - attendent d'être payées. Elles vont avoir droit à des compensations.

Comment les études de la DARES pourront-elles être reprises ? Tous les ministères ont besoin d'études et d'évaluations précises, tant en ce qui concerne l'emploi qu'en ce qui concerne la santé.

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il est piquant, monsieur Bapt, que vous nous reprochiez de payer les dettes que votre propre gouvernement a laissées.

Quant au fonctionnement de mon ministère, vous me donnez l'occasion de rendre hommage au personnel, qui accomplit dans des conditions difficiles un travail remarquable. Ces personnels assumeront la prise en charge du FOREC et continueront de procéder à des études, dont vous êtes d'ailleurs très nombreux à vous prévaloir lors des débats parlementaires.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 116.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Mme Mignon, M. Gorce et M. Bapt et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 117, ainsi rédigé :

    « Sur le titre IV de l'état B, réduire les crédits de 170 000 000 euros. »

La parole est à M. Christian Paul.

M. Christian Paul. Cet amendement n° 117 vise à réduire de 170 millions d'euros la dotation destinée à la réduction dégressive des cotisations sociales patronales sur les bas salaires.

Cela vous permettrait, monsieur le ministre, puisque, visiblement, les arbitrages budgétaires vous ont été extrêmement défavorables ces derniers mois, d'utiliser ces crédits pour maintenir les conditions de versement de l'allocation de solidarité spécifique, financée par le fonds de solidarité.

C'est une suggestion, car nous savons que nous ne pouvons pas abonder les crédits. Nous vous proposons là une bouffée d'oxygène.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 117.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. M. Gorce, M. Bapt et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 118, ainsi rédigé :

    « Sur le titre IV de l'état B, réduire les crédits de 149 210 000 euros. »

La parole est à M. Gaëtan Gorce.

M. Gaëtan Gorce. Cet amendement vise à démontrer les incohérences du Gouvernement, qui se prive de moyens dans un certain nombre de domaines.

Nous essayons de lui fournir la solution, pour revenir à des dispositifs qui paraissent plus adaptés.

Cet amendement a pour but de réduire les crédits de 149 millions d'euros, ce qui correspond à la diminution des crédits alloués au CEC.

Lorsqu'on tient tout un discours, à travers différents dispositifs, visant à favoriser l'insertion et que le chômage, notamment des publics les plus en difficulté, augmente, il est incompréhensible que le Gouvernement nous propose une diminution du nombre de CEC - on passe en effet de 25 000 à 15 000 contrats.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 118.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. M. Gorce, M. Bapt et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 119, ainsi rédigé :

    « Sur le titre IV de l'état B, réduire les crédits de 78 200 000 euros. »

La parole est à M. Gaëtan Gorce.

M. Gaëtan Gorce. L'amendement n° 119 vise à réaliser une économie de 78 millions d'euros, qui correspond à la baisse des crédits appliquée notamment au CES.

Nous avons du mal à suivre la logique de la politique du Gouvernement, puisque les CES subissent des mouvements descendants et ascendants sans rapport avec la situation économique.

M. Christian Paul. Et pour cause ! Il n'y a pas de logique gouvernementale.

M. Gaëtan Gorce. M. le ministre a indiqué que les emplois aidés dans le secteur non marchand avaient diminué entre 1998 et 2001. Cela a été vrai sur certains budgets, mais le contexte économique n'était pas le même.

Nous étions dans un contexte économique et social de création d'emplois et de réduction du chômage, ce qui pouvait justifier la diminution des moyens d'insertion.

Il est paradoxal, pour ne pas dire totalement déraisonnable, de les diminuer au moment où l'on manque d'emplois.

Les mesures que vous avez prises sur le budget 2003 et que vous prendrez en 2004 auront une contribution nette négative sur la situation de l'emploi dans notre pays. Ce qui n'a pas été le cas des mesures prises en 1997, 1998, 1999, 2000, 2001 et pour 2002.

Vous citiez les chiffres de la DARES. Les aides apportées par l'Etat aux emplois non marchands n'ont pas eu d'effet négatif sur la création d'emplois. On peut comparer les tableaux. En tout cas, je voulais rétablir la vérité.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n°119.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. MM. Christian Paul, Gorce, Bapt et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 120, ainsi rédigé :

    « Sur le titre IV de l'état B, réduire les crédits de 48 640 000 euros. »

La parole est à M. Christian Paul.

M. Christian Paul. Vous pourrez vérifier, grâce aux technologies modernes, l'exactitude des chiffres que je vais citer.

Cet amendement tend à réduire de plus de 48 millions d'euros la dotation destinée à la réduction dégressive des cotisations sociales patronales sur les bas salaires.

L'augmentation de cette dotation de plus de 12 %, soit plus de 1,7 milliard d'euros, laisse penser que la proportion des salariés percevant des bas salaires devrait encore s'accroître de manière très importante au cours de l'année 2004. Vous conviendrez, je pense, avec moi que ce n'est pas souhaitable.

L'économie de 48 millions d'euros que nous vous proposons permettrait de redonner du souffle aux contrats de qualification, dont vous allez, pour la deuxième année consécutive, provoquer l'effondrement.

Cette réduction des exonérations de cotisations pour ces contrats de près de 12 %, soit 48,6 millions d'euros, est prévue, selon vous, pour procéder à un ajustement des besoins.

On est un peu perdu dans le domaine des contrats de qualification. Chaque année, monsieur le ministre, vous nous donnez des chiffres qui ne se réalisent pas. Sans doute en sera-t-il de même pour ceux-ci.

On constate une chute des contrats de qualification, cannibalisés, comme nous l'avions annoncé dès l'été 2002, par les contrats jeunes en entreprise, qui n'apportent aucune garantie de formation aux jeunes, puisque vous avez soigneusement interdit que l'on puisse entourer ces contrats, de garanties en matière de formation.

Nous vous donnons une occasion historique de relancer les contrats de qualification.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 120.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Mme Mignon, M. Gorce, M. Bapt et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 121, ainsi rédigé :

    « Sur le titre IV de l'état B, réduire les crédits de 27 400 000 euros. »

La parole est à Mme Hélène Mignon.

Mme Hélène Mignon. La réduction de crédits de 27,4 millions d'euros que nous vous proposons correspond, dans notre esprit, à l'amélioration du programme TRACE et à tout ce qui en découle, notamment la bourse pour l'accès à l'emploi.

Après les propos de M. le ministre tout à l'heure, permettez-moi de dire qu'il s'agit d'un amendement in memoriam.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Défavorable. De profundis !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 121.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. MM. Christian Paul, Gorce, Bapt et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 122, ainsi rédigé :

    « Sur le titre IV de l'état B, réduire les crédits de 5 000 000 euros. »

La parole est à M. Christian Paul.

M. Christian Paul. Vous pouvez, monsieur le président, rappeler au ministre qu'il a la possibilité d'argumenter son avis. Nous serions heureux que, de temps en temps, il daigne le faire.

Cet amendement vise à réduire de 5 millions d'euros la dotation destinée à la réduction dégressive des cotisations sociales patronales sur les bas salaires.

Je ne reviendrai pas sur les raisons qui nous laissent penser que cette amputation est possible. Cette réduction de 5 millions d'euros vous permettrait d'éviter - ce que vous avez prévu dans votre budget - de réduire de 5 millions d'euros la commande publique à l'AFPA, en raison, dites-vous, de la réduction des coûts des prestations, pour tenir compte des gains de productivité, ce qui, dans le domaine de la formation, me paraît extrêmement difficile à démontrer et sans doute aussi à opérer.

Vous ne nous avez pas rassurés, pas plus que les 12 000 agents de l'AFPA. Près de 500 millions d'euros de crédits destinés à l'AFPA vont être déconcentrés. Cela peut entraîner un risque majeur : qu'il n'y ait plus de pilote dans l'avion. (Sourires.)

Comment allez-vous assurer une péréquation entre les régions ?

Comment l'AFPA va-t-elle être pilotée, quand on sait qu'un certain nombre de formations se déroulent dans une région au profit de plusieurs autres ? Il faudrait donc, au minimum, prévoir un système de conventions pour assurer la coopération nécessaire. Mais, là encore, rien n'est prévu.

De plus, - et je me fais l'écho des déclarations de M. Devedjian au Sénat lors du débat sur la décentralisation - on sent que, pour le Gouvernement, l'APFA n'est plus et ne sera plus - au pire dans les toutes prochaines années, au mieux, selon vous, à partir de 2008 - un service public.

Pouvez-nous nous expliquer comment, dans le système décentralisé que vous mettez en place, qui devra répondre à des appels d'offres, à des consultations des régions - vous avez été président d'une région et je crois savoir que vous aspirez à le redevenir -, l'AFPA pourra se situer dans un contexte de concurrence sur le marché de la formation professionnelle ? L'AFPA ne constitue visiblement plus pour vous un service public.

Comment pouvez-vous donner à l'AFPA la garantie qu'un certain nombre de régions ne devront pas renoncer totalement à utiliser ses services, puisqu'il ne s'agira plus, apparemment, d'un service public mais d'un simple prestataire de formation ?

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Juste un mot, monsieur le président, parce qu'il s'agit là de fantasmes véhiculés pour des raisons évidentes. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Premièrement, la commande publique, comme vous le savez, ne fait pas l'objet d'appel d'offres. Elle est simplement transférée aux régions.

Deuxièmement, à périmètre constant, le budget de l'AFPA reste le même - il y a des transferts, mais pas de diminution.

Troisièmement, je vous ai indiqué lors de mon propos introductif que nous mettions en place un dispositif de conventions tripartites entre l'Etat, la région et l'AFPA. C'est naturellement à travers ce dialogue à trois que nous allons répondre à l'ensemble des questions que vous évoquez. Une telle démarche montre non seulement le souci de l'Etat de rester un acteur stratégique de régulation du dispositif, mais aussi l'implication grandissante des régions, ce qui correspond d'ailleurs à la philosophie d'un gouvernement que vous souteniez lorsque celui-ci avait transféré à cet échelon la compétence en matière de formation professionnelle. Nous franchissons une nouvelle étape en ce domaine tout en préservant l'AFPA, un outil national auquel le Gouvernement est extrêmement attaché.

M. le président. La parole est à M. Christian Paul.

M. Christian Paul. J'aimerais répondre au Gouvernement et essayer, sur deux points, d'obtenir de réelles garanties pour l'AFPA.

Dès cette année est opérée, non une décentralisation, mais une déconcentration des crédits. Or nous constatons en 2004 une réduction des crédits déconcentrés de l'AFPA par rapport à 2003. La question que je pose au Gouvernement me permet d'ailleurs d'informer les députés de la majorité, qui pourront également l'observer dans leurs régions respectives : cela augure-t-il une diminution des crédits lorsqu'ils seront décentralisés ?

Par ailleurs, vous tentez de nous rassurer pour 2004, mais ce qui est sans doute vrai au moment de la déconcentration des crédits vaudra-t-il aussi après la décentralisation de l'AFPA ? Garantirez-vous le périmètre d'intervention de cette association, ou bien les prestations qu'elle propose seront-elles, après la décentralisation, soumises à la concurrence, dans un système d'appel d'offres ? Je le répète, votre réponse paraît valoir pour 2004, mais sur un sujet aussi important, vous devez avoir le courage de nous indiquer ce qui se passera dans l'avenir.

Sur ce sujet, l'approche de M. Devedjian est très généraliste. Peut-être ne connaît-il pas dans le détail la façon dont fonctionne l'AFPA, mais sa déclaration au Sénat selon laquelle l'association n'est pas un service public a fortement inquiété non seulement son personnel, mais aussi tous ses partenaires.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 122.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. M. Gorce, M. Bapt et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 123, ainsi rédigé :

    « Sur le titre IV de l'état B, réduire les crédits de 3 050 000 euros. »

La parole est à M. Gaëtan Gorce.

M. Gaëtan Gorce. La réduction des crédits proposée par l'amendement n° 123 correspond à la baisse des moyens accordés à l'ANPE à travers différentes mesures d'annulations de crédits intervenues en 2003 et non compensées par les mesures nouvelles présentées dans le budget pour 2004.

Nous nous interrogeons à deux titres sur les missions de l'ANPE.

Premièrement, nous avons lu dans le rapport de M. Bouvard que le transfert du RMI aux conseils généraux et la création du RMA se traduiraient par une diminution de sa subvention de l'ordre de 25 millions d'euros. Nous aurions voulu que vous nous expliquiez pourquoi l'ANPE se voit, d'une certaine manière, ainsi pénalisée. Le travail d'insertion en direction des publics visés par le RMA ne la concernerait-il plus directement ?

La deuxième question ne porte pas sur la mise en concurrence - ce n'est évidemment pas la question - mais, là encore, sur l'information selon laquelle vous souhaiteriez faire intervenir sur le « marché », entre guillemets, du placement en entreprise et de la recherche d'emploi des structures à caractère privé susceptibles d'intervenir en concomitance avec l'ANPE. Tel qu'il nous a parfois été décrit, le système pourrait constituer une sorte d'appel d'offres, dans lequel des missions comprenant des objectifs à atteindre seraient confiées à ces structures.

Un tel système aurait peut-être de l'intérêt, mais on voit surtout les dérives auxquelles il pourrait conduire : ces structures pourraient en effet être tentées de privilégier les chômeurs les plus facilement « réemployables », si j'ose dire, et laisser une fois de plus de côté ceux qui connaissent les plus grandes difficultés. L'amendement vise également à appeler l'attention sur ce risque.

M. le président. J'informe l'Assemblée que, sur le vote des crédits inscrits aux titres V et VI de l'état C, je suis saisi d'une demande de scrutin public par le groupe des député-e-s communistes et républicains.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. le rapporteur spécial pour le travail, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 123 ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 123.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits inscrits au titre IV de l'état B, modifiés par les amendements adoptés.

(Les crédits inscrits au titre IV de l'état B, ainsi modifiés, sont adoptés.)

M. le président. Nous allons maintenant procéder aux scrutins qui ont été annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les crédits inscrits au titre V de l'état C.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Je vais vous laisser quelques instants pour regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur ces crédits :

      Nombre de votants 39

      Nombre de suffrages exprimés 37

      Majorité absolue ....... 19

          Pour l'adoption 28

          Contre 9

L'Assemblée nationale a adopté.

Je vais maintenant mettre aux voix, par scrutin public, les crédits inscrits au titre VI de l'état C.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur ces crédits :

      Nombre de votants 37

      Nombre de suffrages exprimés 35

      Majorité absolue ........ 18

          Pour l'adoption 28

          Contre 7

L'Assemblée nationale a adopté.

J'appelle l'article 80 rattaché à ce budget.

Article 80

M. le président. « Art. 80. - I. Le 1° du paragraphe V de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est remplacé par les dispositions suivantes :

« 1° Avec l'aide prévue à l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail. En ce cas, le montant de la réduction mentionnée au II est minoré d'un montant forfaitaire fixé par décret. Cette possibilité de cumul n'est ouverte que jusqu'au 31 mars 2004. »

« II. Le 1. du paragraphe VI de l'article 10 de la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi est remplacé par les dispositions suivantes :

« 1. Le bénéfice des dispositions des articles 39 et 39-1 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle est cumulable, jusqu'au terme des accords ou conventions conclus au titre de la loi susmentionnée, avec celui de la réduction de cotisations prévue au présent article. »

« III. Il est inséré au paragraphe VI de l'article 10 de la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi un 3. ainsi rédigé :

« 3. A compter du 1er avril 2004, le bénéfice des dispositions de l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail est exclusif pendant la durée de l'aide prévue à cet article de toute autre exonération totale ou partielle de cotisations patronales. Les entreprises qui bénéficient des dispositions prévues à l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 peuvent opter jusqu'au 31 mars 2004 pour le bénéfice, à compter du 1er avril 2004, de la réduction de cotisations sociales prévue au présent article. Cette option, qui s'applique à l'ensemble des salariés de l'entreprise, est irrévocable. En cas d'option, les dispositions de l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 cessent d'être applicables à compter du 1er avril 2004. »

Je mets aux voix l'article 80.

(L'article 80 est adopté.)

M. le président. En accord avec la commission des finances, j'appelle maintenant deux amendements tendant à insérer un article additionnel après l'article 80.

      Après l'article 80

M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 100 rectifié, ainsi rédigé :

    « Après l'article 80, insérer l'article suivant :

    « I. Les régions et la collectivité territoriale de Corse sont compétentes pour l'organisation d'actions d'accompagnement personnalisé et renforcé ayant pour but l'accès à l'emploi des jeunes de seize à vingt-cinq ans révolus en difficulté et confrontés à un risque d'exclusion professionnelle.

    « Ces actions comprennent notamment des mesures ayant pour objet l'acquisition d'une expérience professionnelle, l'orientation et la qualification, et sont assorties, si nécessaire, de toute autre action, notamment culturelle ou sportive. Elles visent également à assurer l'égalité d'accès des jeunes gens et jeunes filles à ces actions et la mixité des emplois.

    « Les jeunes sans qualification, de niveau VI et V bis, bénéficient en priorité de cet accompagnement.

    « Les jeunes bénéficiaires des actions d'accompagnement sont affiliés au régime général de la sécurité sociale dans les conditions prévues aux articles L. 962-1 et L. 962-3 du code du travail, pour les périodes pendant lesquelles ils ne sont pas affiliés à un autre titre à un régime de sécurité sociale.

    « II. L 'article 5 de la loi d'orientation n° 98-657 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions est abrogé.

    « III. Les régions et la collectivité territoriale de Corse peuvent conclure avec les jeunes ayant des difficultés d'accès à l'emploi un contrat d'insertion dans la vie sociale. Ce contrat prévoit les engagements du jeune pour la mise en œuvre d'un projet d'insertion professionnelle, les actions engagées par la région ou la collectivité territoriale à cet effet et les modalités de leur évaluation.

    « Le contrat est conclu pour une durée maximale de deux ans, non renouvelable, avec des jeunes de seize à vingt-quatre ans révolus, dont le niveau de qualification est inférieur ou équivalent à un diplôme de fin de second cycle long de l'enseignement général, technologique ou professionnel ou n'ayant pas achevé le premier cycle de l'enseignement supérieur et rencontrant des difficultés particulières d'insertion sociale et professionnelle. Il peut être précédé d'une période d'orientation de trois mois au cours de laquelle est élaboré le projet d'insertion.

    « Le contrat prévoit, pour les jeunes majeurs, le versement par la région d'une allocation, incessible et insaisissable, pendant les périodes durant lesquelles les intéressés ne perçoivent ni rémunération au titre d'un emploi ou d'un stage, ni une autre allocation. Cette allocation peut être suspendue ou supprimée en cas de non-respect du contrat par son bénéficiaire après que celui-ci a été mis à même de présenter des observations. Le montant, les conditions d'attribution et les modalités de versement de cette allocation sont fixées par décret.

    « Les actions mentionnées ci-dessus peuvent prendre la forme :

    « 1° De l'accompagnement personnalisé et renforcé prévu au premier alinéa du I du présent article ;

    « 2° De l'orientation vers un emploi, notamment dans le cadre des dispositifs prévus aux articles L. 117-1, L. 981-1, et L. 322-4-6 du code du travail, ou au sein d'un organisme privé à but non lucratif développant des activités d'utilité sociale dans les conditions prévues par décret ;

    « 3° D'une assistance à la réalisation d'un projet de création ou de reprise d'une activité non salariée.

    « Le président du conseil régional ou le président du conseil exécutif de Corse peuvent organiser par une convention passée avec les maires, présidents de conseil général et présidents des missions locales pour l'insertion professionnelle et sociale des jeunes instituées à l'article 7 de la loi n° 89-905 du 19 décembre 1989 les modalités de leur action commune pour la passation, la mise en œuvre et le suivi des contrats d'insertion dans la vie sociale.

    « IV. Les charges résultant pour les régions et la collectivité territoriale de Corse de la création de compétences prévue par le présent article sont compensées par une majoration des crédits transférés par l'Etat en application du 1° de l'article L. 4332-1 du code général des collectivités territoriales.

    « Le montant de cette compensation est fixé à 79,88 M€ en 2004. Ce montant évolue chaque année, dès 2005, comme la dotation globale de fonctionnement.

    « Toutefois, en 2004 et 2005, le montant total de la compensation versée aux régions et à la collectivité territoriale de Corse est respectivement égal à 30,98 % et 92,49 % du montant fixé à l'alinéa précédent.

    « Les charges résultant pour les régions et la collectivité territoriale de Corse du transfert de compétences prévu par le présent article sont compensées par une majoration des crédits transférés par l'Etat en application du 1° de l'article L. 4332-1 du code général des collectivités territoriales.

    « Le montant de cette compensation est égal au montant de la dépense consacrée par l'Etat en 2003 à l'exercice de cette compétence. Ce montant évolue chaque année, dès 2004, comme la dotation globale de fonctionnement.

    « Toutefois, en  2004 et 2005, le montant total de la compensation versée aux régions et à la collectivité territoriale de Corse est respectivement égal à 25 % et 75 % du montant tel que calculé en application de l'alinéa précédent.

    « Le montant est réparti entre les régions et la collectivité territoriale de Corse en proportion du nombre de jeunes de seize à vingt-cinq ans et de leur situation à l'égard du marché du travail, selon des modalités fixées par décret.

    « Les régions, la collectivité territoriale de Corse et, lorsqu'une convention a été conclue en application du dernier alinéa du III du présent article, les autres collectivités territoriales et organismes concernés transmettent régulièrement, dans des conditions fixées par voie réglementaire, au représentant de l'Etat dans la région :

    « 1° Des données agrégées portant notamment sur les caractéristiques des bénéficiaires ;

    « 2° Des données mensuelles relatives au nombre de contrats d'insertion dans la vie sociale signés et en cours ;

    « 3° Dans le respect des dispositions de l'article 7 bis de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques et de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, des fichiers de données relatives aux personnes physiques destinés à la constitution d'échantillons statistiquement représentatifs en vue de l'étude des situations et des parcours d'insertion des bénéficiaires.

    « Le ministre chargé de l'emploi transmet aux collectivités territoriales les résultats issus de l'exploitation des données et en assure la publication statistique régulière. »

Sur cet amendement, M. Vercamer a présenté deux sous-amendements, n°s 127 et 128.

Le sous-amendement n° 127 est ainsi rédigé :

    « Dans le premier alinéa de l'amendement n° 100 rectifié, supprimer les mots "et confrontés à un risque d'exclusion professionnelle". »

Le sous-amendement n° 128 est ainsi rédigé :

    « Compléter la première phrase du deuxième alinéa de l'amendement n° 100 rectifié par les mots "ou humanitaire". »

Le Gouvernement s'est déjà exprimé en ce qui concerne l'amendement n° 100 rectifié.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. En effet, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir les sous-amendements n°s 127et 128.

M. Francis Vercamer. Je vous rassure d'abord, monsieur le ministre : le groupe UDF approuve la création du CIVIS. Nous ne pouvons que nous satisfaire d'un contrat destiné à remettre les gens dans l'emploi.

Néanmoins, sur la forme, je note, à l'instar d'un de nos collègues, qu'il paraît curieux de présenter, au détour d'un amendement et à l'occasion de l'examen des crédits du ministère des affaires sociales, un dispositif qui devrait être d'une grande ambition. On aurait pu, sur un tel sujet, s'attendre à un véritable débat à l'Assemblée nationale, mais aussi à une communication en direction de ceux qui vont en bénéficier. Le dispositif le mérite.

Sur le fond, je me pose un certain nombre de questions.

D'abord, j'éprouve la même crainte que celle dont j'ai déjà fait part à propos du CIE. On ne sait pas trop si le CIVIS est un contrat, s'il s'agit d'un contrat de travail, si le code du travail est applicable plutôt que le droit public. Nous risquons la confusion, voire le litige. J'aimerais donc, monsieur le ministre, que vous puissiez nous apporter quelques précisions à ce sujet.

Par ailleurs, vous nous avez indiqué qu'une couverture maladie était prévue. Qu'en est-il des droits à la retraite, à l'heure où nous nous dirigeons vers un allongement de la durée du travail ? La durée du contrat sera-t-elle prise en compte dans leur calcul ?

Quels sont les droits des bénéficiaires de ces contrats ? On parle de leurs devoirs, ou des droits des employeurs. Mais qu'en est-il, je le répète, des bénéficiaires ? Peuvent-ils prétendre aux avantages accordés par le code du travail ou à l'encadrement du licenciement ? Quelles seraient les conséquences d'une rupture du contrat ?

J'en parle par expérience : le CIE, lors de sa création, a été envisagé comme un contrat de travail de deux ans et présenté comme tel. Résultat : les entreprises qui le rompaient au bout de trois mois devaient payer la différence, c'est-à-dire les vingt et un mois restants, ce qui a posé beaucoup de problèmes, voire envoyé par terre quelques- unes d'entre elles.

Quels sont les modes d'expression autorisés aux bénéficiaires ? Pourront-ils adhérer à un syndicat ? Auront-ils des droits sociaux ? Sur ce point non plus, le texte n'est pas très clair.

Il est précisé en outre que le montant de l'allocation sera fixé par décret. J'aimerais que l'on puisse avoir une idée de ce chiffre.

J'en viens à mes sous-amendements.

Le premier est rédactionnel. Je crois en effet qu'un jeune de seize à vingt-cinq ans révolus en difficulté est souvent confronté à des risques d'exclusion professionnelle. La formulation me paraît donc un peu redondante. Un jeune en difficulté a le droit de se voir réinséré dans la société, notamment par le travail - et donc grâce au CIVIS.

Quant au sous-amendement n° 128, il propose d'ajouter le domaine humanitaire à l'énumération des actions d'accompagnement. Un jeune peut également nourrir de bons projets en ce domaine, et une telle disposition lui permettrait notamment de travailler avec les ONG, sur le territoire national ou hors de France.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 100 rectifié et sur les sous-amendements n°s 127 et 128 ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. La commission n'a pas examiné l'amendement du Gouvernement, mais, ayant voté la mise en place du dispositif CIVIS, je vois mal comment elle aurait pu s'y montrer défavorable. A titre personnel, en tout cas, je l'approuve.

Je pense toutefois qu'il serait bien que vous puissiez préciser quelques points, monsieur le ministre, dont certains recoupent d'ailleurs les questions qui viennent d'être posées. Quelles sera la nature du contrat ? S'agit-il d'un contrat de travail ou d'un contrat moral ?

M. Christian Paul. C'est un CIVIS furtif !

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Quel sera le montant de l'allocation due au jeune ? Comment se fera la transition avec le système TRACE, compte tenu de la suppression de l'article 5 de la loi du 29 juillet 1998 ? Enfin, comment les régions vont-elles assumer ces nouvelles fonctions ?

Venons-en aux deux sous-amendements déposés par notre collègue.

Je crains que le sous-amendement n°127 ne soit pas que rédactionnel. Si on supprime les mots : « confrontés à un risque d'exclusion professionnelle », on risque d'en revenir à un public de droit commun et de retourner vers un dispositif de type emploi jeune, dont on connaît les dérives qu'il a générées.

Le sous-amendement n° 128 vise à compléter la première phrase du deuxième alinéa de 1' amendement du Gouvernement par les mots « ou humanitaire ». Je pense que notre collègue a fait une confusion. Les jeunes bénéficiant des actions des régions peuvent profiter d'actions, notamment culturelles ou sportives. Le fait de rajouter « ou humanitaire » n'apporte rien du tout. En tout état de cause, l'objet du contrat lui-même pourrait porter sur un thème humanitaire et, en l'occurrence, ce sera bien le cas.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux sous-amendements ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement a le même avis que le rapporteur sur ces deux sous-amendements, notamment sur le dernier. Le CIVIS a évidemment une forte orientation humanitaire et sociale. C'est la nature même du contrat, mais ce n'est pas à cet endroit-là que cela doit être porté.

Je réponds aux questions qui ont été posées, à la fois par M. Vercamer et par M. Bouvard.

D'abord sur la nature du contrat : ce n'est pas un contrat de travail, c'est un engagement réciproque entre le jeune et la région, comme c'est le cas d'un contrat d'insertion entre le département et le bénéficiaire du RMI.

Ensuite, le montant de l'allocation est renvoyé à un décret. Ce sera un montant interstitiel, versé lorsque le jeune n'est pas en formation ou en contrat aidé. Il sera variable. Notre hypothèse actuelle de travail, que je vous livre, est un maximum de 450 euros sur trois mois et de 300 euros sur un mois.

L'Etat assurera la fin du programme TRACE pour tous les jeunes qui s'y trouvent, et les régions démarreront ensuite avec le CIVIS. Cette transition, comme toute évolution, nécessitera un apprentissage. Le Conseil

national des missions locales me semble être le lieu où ce travail pourra être conduit utilement.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, vous déposez un amendement qui vise à ouvrir le CIVIS aux collectivités territoriales. Nous avons, nous aussi, la volonté d'aider le retour à l'emploi de ceux qui en sont le plus éloignés, notamment les jeunes.

Les régions auront donc la possibilité de participer à l'insertion des plus jeunes chômeurs.

Cela appelle plusieurs observations de notre part.

Pourquoi avoir supprimé les emplois jeunes pour créer les CIVIS, moins intéressants ? En effet, ces derniers auront une durée de deux ans, au lieu de cinq dans le précédent dispositif.

Quelles garanties de formation apporte le CIVIS ? Vous savez bien que de nombreuses collectivités ont mis en place des plans de formation qualifiante. Certains jeunes ont même intégré la fonction publique territoriale.

En ouvrant la création de CIVIS aux régions, vous prévoyez des compensations financières. Pouvez-vous nous en préciser les conditions ?

Enfin, quelle sortie du dispositif prévoyez-vous ? Le dispositif précédent comportait des faiblesses à ce niveau. N'allons-nous pas recommencer la même erreur ?

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Les propos du rapporteur spécial prouvent que les remarques que j'avais exprimées tout à l'heure sur la difficulté à traiter d'un amendement aussi conséquent qui arrive ainsi en séance étaient justifiées.

Monsieur le président, sur le plan de la procédure, je m'étonne du fait que nous découvrions l'amendement n° 100 rectifié en séance et qu'il soit assorti, quelques instants après, de deux sous-amendements, n°127 et n° 128. Si cet amendement n'était pas connu, comment a-t-on pu le sous-amender ?

M. Maxime Gremetz. M. Vercamer est «super-réactif» ! (Sourires.)

M. Gérard Bapt. L'opposition, qui était dans l'ignorance de cet amendement, n'a pas pu l'étudier, ni le sous-amender. Certains députés sont-ils mieux traités que d'autres ?

M. Maxime Gremetz. Ça marche bien, dans la majorité !

M. Gérard Bapt. Cela dit, je partage l'appréciation du rapporteur spécial selon lequel la suppression des mots « et confrontés à un risque d'exclusion professionnelle » enlèverait une certaine dimension à la démarche, dont nous approuvons le principe, même si la forme nous interloque.

De même le mot « humanitaire » n'a-t-il rien à faire dans le second alinéa.

Pour autant, si nous avions eu la possibilité de déposer des sous-amendements sur cet amendement qui nous était inconnu, nous aurions proposé de rajouter non pas « ou humanitaire », mais « ou sociale ». En effet, il se peut que les jeunes concernés soient confrontés à d'autres types de problèmes, notamment de santé ou de logement. La dimension sociale aurait mérité d'être prise en compte par cet amendement.

Cela dit, monsieur le président, je souhaite que vous puissiez nous expliquer comment des sous-amendements à un amendement inconnu ont pu nous parvenir.

M. le président. Monsieur Bapt, l'amendement du Gouvernement a été déposé en fin d'après-midi. Les sous-amendements de M. Vercamer ont été déposés en début de soirée. Tout cela est conforme au règlement de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Que nous ayons été plus réactifs que le groupe socialiste, c'est un événement ! (Sourires.)

M. le président. Eu égard aux explications données, maintenez- vous vos sous-amendements ?

M. Francis Vercamer. Je retire le sous-amendement n°128. En effet, comme nous avons eu l'amendement du Gouvernement à la dernière minute (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), nous avons été un peu rapides. Mais je maintiens le sous-amendement n° 127.

M. le président. Le sous-amendement n° 128 est retiré.

Je mets aux voix le sous-amendement n°127.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n°100 rectifié.

(L 'amendement est adopté.)

M. le président. MM. Bayrou, Morin, Leteurtre, Vercamer et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 93, ainsi rédigé :

    « Après l'article 80, insérer l'article suivant :

    « L'article L.351-10 du code du travail est ainsi modifié :

    « I. - Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « L'allocation est attribuée par périodes de six mois renouvelables. L'allocation est majorée pour les personnes de plus de cinquante-cinq ans dans des conditions fixées par un décret. »

    « IL - A la fin de la première phrase du dernier alinéa, les mots : " et notamment la durée de cette allocation" sont supprimés. »

La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Cet amendement est, pour nous, capital.

Il consiste à remettre à plus tard la réforme de l'ASS, c'est-à-dire à la maintenir telle qu'elle était avant la proposition du Gouvernement.

Comme je l'ai expliqué, il y a plusieurs raisons à cela :

La première est d'ordre pratique, et elle a été évoquée par M. le ministre : certains bénéficiaires de l'ASS ne pourront bénéficier ni du RMA ni du RMI, et vont perdre des avantages. Le Gouvernement va me rétorquer qu'il n'est pas favorable à l'assistanat et qu'il souhaite pousser les gens vers l'emploi. Nous aussi ! Mais les bénéficiaires de l'ASS n'ont rien demandé à personne !

J'en ai plusieurs dans ma circonscription, qui travaillaient dans l'industrie textile. Les entreprises ont fermé et ils n'ont pas retrouvé de travail, en raison de discrimination, en raison de leur âge, en raison du manque d'emplois dans la région...

M. Maxime Gremetz. Non, c'est parce que ce sont des fainéants, diraient vos collègues !

M. Francis Vercamer. Je comprendrais que le Gouvernement décide de supprimer l'ASS à celui qui a refusé le RM A, un CIE ou qui a refusé un travail. Mais lui supprimer sous prétexte qu'il ne veut pas trouver de travail, je ne trouve pas cela très juste.

La deuxième raison est d'ordre symbolique. On a eu un peu l'impression dans ce débat que, d'un côté, on allégeait l'impôt sur le revenu et que, de l'autre, on allégeait l'allocation des chômeurs de longue durée : des pauvres qui payaient pour les « un peu » plus riches.

J'avais rencontré un conseiller de M. le ministre et je lui avais expliqué qu'il fallait travailler la réforme de l'ASS dans le cadre du RMA. On aurait pu envisager, sereinement, des incitations à l'emploi. Et celui qui aurait refusé de lui-même un parcours à l'emploi aurait pu être sanctionné.

Monsieur le ministre, on ne peut pas dire que la suppression de l'ASS va pousser les gens à l'emploi. C'est comme si on disait que la baisse des températures va pousser les SDF au logement. Or les SDF n'auront pas plus de logement si la température baisse que les bénéficiaires n'auront d'emploi parce que l'allocation diminue.

Il faut conserver un principe de solidarité nationale, de fraternité. C'est tout de même la devise de la République . C'est pour cela que l'UDF voudrait maintenir l'ASS dans sa forme initiale.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. La commission ayant approuvé les modifications apportées à l'ASS, est évidemment défavorable à cet amendement.

M. Christian Paul. Quel aveuglement !

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Si j'étais cruel, je dirais à mon collègue Vercamer qu'on peut difficilement déposer un amendement sur une disposition qui a été supprimée. Car il a parlé de suppression de l'ASS, ce qui est totalement faux.

J'ajoute que cet amendement maintiendrait le dispositif actuellement en vigueur, mais empêcherait le cumul de l'ASS avec des revenus d'activité, le maintien du droit à l'ASS pour les personnes qui retrouvent un emploi pendant une courte période et, au moment de l'attribution de l'allocation, une prise en compte plus favorable des charges - trois améliorations qu'apporte le nouveau dispositif.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, nous nous sommes longuement expliqués toute la soirée sur la réforme de l'ASS. Je ne reprendrai pas l'ensemble de l'argumentation du Gouvernement. Je me contenterai de deux remarques en écho aux propos de M. Vercamer.

Première remarque : il ne s'agit pas de supprimer à des chômeurs de longue durée une allocation sous prétexte qu'ils n'ont pas trouvé de travail ou qu'ils ne semblent pas en chercher - je reprends les expressions de M. Vercamer. Il s'agit de faire comprendre à un personne qui est au chômage depuis plus de quatre ans - je vous rappelle que l'ASS est cumulée avec la durée d'indemnisation du chômage, ce qui représente au moins quatre ans de chômage - que ce dont elle a besoin n'est plus une allocation, mais un dispositif de réinsertion, qui comprend certes une allocation, mais également un accompagnement pour un retour vers l'emploi. Il est difficile de contester la philosophie d'une telle mesure, surtout lorsque l'on sait, s'agissant des effets sur les finances des départements, que la compensation sera intégrale et n'occasionnera donc pas d'économies pour le budget de l'Etat.

Deuxième remarque : la comparaison avec la baisse de l'impôt sur le revenu est évidemment facile mais tout à fait malvenue. En effet, nous baissons l'impôt sur le revenu, comme un grand nombre d'autres pays européens, pour hâter la croissance. Sans retour de la croissance, nous n'avons, vous le savez bien, aucune chance de maintenir le modèle social qui est le nôtre.

M. Christian Paul. C'est une fable, monsieur le ministre.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Et ce sont tous les dispositifs dont nous parlons, en matière d'insertion et de sécurité sociale, qui voleront en éclat. Si nous baissons les impôts, comme le font la plupart des autres pays européens, c'est pour soutenir la croissance,...

M. Maxime Gremetz. Non, monsieur le ministre, c'est pour donner plus aux riches. Personne ne croit ce que vous dites.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... permettre à notre pays de produire plus de richesses et donc préserver son modèle social. C'est la raison pour laquelle, s'il est facile de rapprocher ces deux sujets - mais beaucoup d'autres pourraient l'être également -, ce n'est pas rendre service à notre pays d'en tirer prétexte pour faire une pédagogie à l'envers de la réforme nécessaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, j'ai posé des questions précises, auxquelles, évidemment, le ministre n'a pas répondu. Mais il est peut-être fatigué, ce que je peux comprendre.

M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Pas du tout !

M. Maxime Gremetz. Si, puisque vous n'avez pas répondu aux questions précises que je vous ai posées. Je suis donc en droit de supposer que vous êtes fatigué et que vous ne pouvez plus répondre.

L'amendement défendu par M. Vercamer ne me déplaît pas, je le reconnais. La seule chose qui me gêne, c'est la formule : « L'allocation est attribuée par périodes de six mois renouvelables. » Or, vous le savez bien, l'ASS reste un droit tant que le chômeur n'a pas retrouvé un emploi et ne s'est pas réinséré. Je ne comprends pas l'intérêt d'une telle proposition, qui implique des commissions qui examinent et réexaminent les dossiers. Le dispositif s'en trouve alourdi.

Cela étant dit, je comprends bien le souci exprimé. Il y a en ce domaine une cohérence. Mais il n'est pas juste, monsieur le rapporteur spécial, de prétendre que l'amendement indiquerait que le Gouvernement a supprimé l'ASS. Ce n'est pas l'amendement qui le dit ; c'est vous qui l'avez dit en réponse à M. Vercamer.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial pour le travail. Je n'ai pas dit que l'ASS était supprimée. Ce n'est pas vrai.

M. Maxime Gremetz. L'exposé sommaire se contente de préciser : « en maintenant le droit existant que le Gouvernement a l'intention de modifier ». C'est donc indiscutable, mon cher rapporteur.

J'ai également bien retenu le propos de M. Vercamer selon lequel, pour l'UDF, cet amendement est capital. Ce n'est pas, en l'occurrence, Le Capital de Marx (Sourires), mais il s'agit d'un amendement capital. Et, comme tout amendement capital, il doit être évidemment sanctionné par un scrutin public.

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 93, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Quelques mots en attendant le scrutin public.

Monsieur le ministre, grâce à l'intervention du groupe UDF, je passerai sur le caractère pour nous profondément injuste de diverses mesures fiscales et sociales qui se font toujours au profit de certains et au détriment d'autres et que je pourrais longuement énumérer. Alors que, hier, ADT-Quart Monde et le Secours catholique ont noté une augmentation des situations de grande pauvreté, toutes ces mesures qui seront mises en œuvre au cours des prochains mois nous remplissent d'inquiétude si l'on considère l'ensemble des effets qu'elles ne manqueront pas d'avoir.

Cela étant dit, monsieur le ministre, nous ne partageons pas du tout la logique de la politique économique que vous nous avez exposée à l'instant. Nous l'avons dit à maintes occasions : de la même façon qu'en 1997 et 1998, le Gouvernement s'est engagé dans une politique économique à contre-emploi, puisqu'elle porte sur l'offre alors que, lorsque l'investissement des entreprises est au plus bas, comme aujourd'hui, la demande devrait primer. Certes, vous attendez le salut de la reprise aux Etats-Unis et dans le Sud-Est asiatique, mais tous les conjoncturistes et analystes notent que la reprise se fera à effet retardé et mineur si on la compare à celle qu'ont connue les années 1997 à 2001, période durant laquelle les effets de la croissance ont pu se traduire par des créations d'emplois, notamment en France. Or, vous avez aggravé la situation - je pense au déficit -, si bien que le bénéfice d'une éventuelle reprise internationale sera minoré et retardé.

Nous souhaitons néanmoins que votre politique économique réussisse, qu'elle permette des créations d'emplois, que le pouvoir d'achat augmente et que les déficits soient comblés. Les raisons d'un tel souhait sont simples : non seulement cette réussite atténuerait la souffrance sociale dont nous nous inquiétons aujourd'hui, mais également, et de façon plus prosaïque, nous savons que les Français, lorsqu'il s'agit de redistribution, se tournent de préférence vers ceux dont ils savent qu'ils sont meilleurs distributeurs plutôt que vers ceux qui apparaissent comme des accapareurs.

Vous avez affirmé, monsieur le ministre, que votre mesure sur l'ASS avait comme objectif principal le retour à l'emploi et non l'économie budgétaire. On pourrait vous donner le bénéfice du doute, si vous n'aviez pas supprimé par cette mesure la majoration de 40 % de l'allocation pour les chômeurs de plus de cinquante ans. Est-ce vouloir inciter les allocataires sociaux de plus de cinquante ans à revenir au travail que de leur supprimer la majoration de 40 % ? Il s'agit là d'une stricte mesure d'économie budgétaire.

Je terminerai mon intervention par une question, monsieur le ministre. Elle concerne la façon selon laquelle le RMI serait, selon vous, compensé intégralement. Or personne ne sait encore combien, parmi les 140 000 allocataires sociaux actuels, basculeront dans le RMI. Seront-ils 60 000, 70 000, 80 000 ou 90 000 ? Pourriez-vous nous indiquer le mécanisme budgétaire grâce auquel vous pouvez prétendre aujourd'hui compenser intégralement le basculement d'un certain nombre d'allocataires au titre de l'ASS vers le RMI ?

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Je souhaiterais répondre à M. Gremetz que c'est l'article L.351-10 du code du travail qui limite l'aide à six mois, ce qui permet d'analyser la situation de façon régulière.

M. Maxime Gremetz.... et implique des commissions supplémentaires.

M. Francis Vercamer. Ainsi, après six mois, on pourrait supprimer l'aide versée à un bénéficiaire de l'ASS qui n'aurait pas accepté à plusieurs reprises un parcours d'insertion, un RMA ou un CIE. On pourrait effectivement envisager une telle réforme.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 93.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Je vais vous laisser quelques instants pour regagner vos places..

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement n° 93 :

      Nombre de votants 35

      Nombre de suffrages exprimés 35

      Majorité absolue 18

          Pour l'adoption 14

          Contre 21

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.

2

DÉPÔT DE PROJETS DE LOI

M. le président. J'ai reçu, le 5 novembre 2003, de M. le Premier ministre, un projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de l'Inde (ensemble un avenant sous forme d'échange de lettres).

Ce projet de loi, n° 1197, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 5 novembre 2003, de M. le Premier ministre, un projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de l'Inde en matière d'extradition.

Ce projet de loi, n° 1198, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.

3

DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu, le 5 novembre 2003 de MM. Jean-Marc Ayrault, Daniel Vaillant et plusieurs de leurs collègues, une proposition de loi tendant à créer un service civique pour tous les jeunes.

Cette proposition de loi, n° 1199, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 5 novembre 2003 de MM. Jean-Pierre Kucheida, Jean-Marc Ayrault et plusieurs de leurs collègues, une proposition de loi relative à la conversion des anciens bassins miniers.

Cette proposition de loi, n° 1200, est renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, en application de l'article 83 du règlement.

4

DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu, le 5 novembre 2003, de Mme Patricia Adam et plusieurs de ses collègues, un rapport d'information, n° 1196, déposé en application de l'article 145 du règlement, par la commission de la défense nationale et des forces armées sur le mode de propulsion du second porte-avions.

5

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président. Jeudi 6 novembre 2003, à neuf heures trente, première séance publique :

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093).

M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 1110).

Anciens combattants ; articles 73 et 74 :

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (annexe n° 10 du rapport n° 1110).

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome V de l'avis n° 1111).

Intérieur.

Sécurité intérieure et gendarmerie :

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 27 du rapport n° 1110).

Sécurité intérieure :

M. Gérard Leonard, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (tome II de l'avis n° 1115).

Sécurité civile :

M. Thierry Mariani, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (tome III de l'avis n° 1115).

Administration générale et territoriale :

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (annexe n° 28 du rapport n° 1110).

Collectivités locales :

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (annexe n° 29 du rapport n° 1110).

Administration générale et collectivités locales :

M. Manuel Aeschlimann, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (tome IV de l'avis n° 1115).

Tourisme :

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (annexe n° 23 du rapport n° 1110).

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome XI de l'avis n° 1112).

A quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 6 novembre 2003, à une heure dix.)

    Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

    JEAN PINCHOT