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Première séance du jeudi 6 novembre 2003

51e séance de la session ordinaire 2003-2004


PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2004
DEUXIÈME PARTIE

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004 (n°s 1093, 1110).

ANCIENS COMBATTANTS

M. le président. Nous abordons les crédits du ministère des anciens combattants.

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat aux anciens combattants, mes chers collègues, ce n'est pas la première fois que je prends la parole à cette tribune mais, quand il s'agit d'intervenir pour parler des anciens combattants, c'est toujours l'émotion qui m'étreint. Elle trouve un écho particulier chez moi, petit-fils d'ancien combattant et élu d'un département, l'Aisne, théâtre de nombreux conflits, où le sang a coulé et qui a beaucoup donné à la France. De plus, cette discussion budgétaire intervient à quelques jours seulement de l'anniversaire de l'armistice de la Grande guerre et les poignants témoignages des derniers poilus parus ces derniers jours dans la presse dépeignent une réalité et une vérité qui ne doivent jamais être oubliées.

Le budget des anciens combattants est donc l'occasion d'exprimer notre attachement à ce double devoir de mémoire et de réparation que le nombre des visiteurs dans les tribunes est là pour nous rappeler le cas échéant.

Au travers de cette présentation, je veux montrer combien le budget est le fruit d'une méthode de travail dynamique, alliant dialogue, concertation et esprit de décision. En arrivant aux responsabilités, vous avez fait le choix, monsieur le secrétaire d'Etat, d'ouvrir tous les dossiers, de poser les problèmes, de chiffrer les solutions et de décider des priorités.

C'est ainsi que l'an dernier, le plafond majorable de la rente mutualiste a été relevé de sept points et demi, que le contentieux sur les cures thermales a été réglé. Et surtout, le principe de décristallisation, consacré dans le collectif budgétaire, va trouver sa traduction concrète avec la publication, cette semaine, des décrets d'application.

M. Jacques Desallangre et M. Alain Néri. Il était temps !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Depuis 1959, il était temps, en effet.

Cette année encore, malgré une situation économique tendue et notre volonté de maîtriser les dépenses publiques, le budget qui vous est présenté permet de réels progrès pour le monde combattant. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Avec des crédits qui s'élèveront en 2004 à 3,39 milliards d'euros, non seulement nous confortons les piliers de l'action en direction des anciens combattants - action sociale, solidarité nationale, réparation et mémoire -...

M. Alain Néri. On en reparlera !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. ...mais nous pouvons également répondre à des demandes légitimes et récurrentes. La dotation par partie prenante est en augmentation de 1,58 %, contre 0,68 % l'an dernier, ce qui permet d'engager plusieurs mesures nouvelles qui sont autant d'avancées majeures.

Tout d'abord, l'amélioration de la situation des veuves d'anciens combattants. L'augmentation de quinze points d'indice des pensions des veuves de guerre, des veuves d'invalides et de grands invalides, concernera dès 2004 près de 130 000 personnes. Elle fait l'objet d'une inscription de 12 millions d'euros.

L'attribution de la carte du combattant des guerres d'Afrique du Nord pour quatre mois de séjour est une mesure d'équité qui était particulièrement attendue. Son coût sera de 3 millions d'euros l'année prochaine. Je ne m'attarderai pas sur le régime incohérent et injuste qui résultait des décisions de 2001, lesquelles réservaient cette disposition aux seuls rappelés et membres des forces de police. Les choses sont aujourd'hui en ordre et l'équité a repris ses droits.

L'action sociale de l'ONAC, l'Office national des anciens combattants, est enfin garantie dès le projet de loi de finances initiale avec une inscription de 12,135 millions d'euros. Nous n'avons plus besoin d'attendre la discussion parlementaire pour ajuster a posteriori les crédits par voie d'amendement. L'an dernier, j'avais souhaité ici même que soit mis un terme à cette pratique utilisée depuis 1998. C'est désormais chose faite, et nous vous remercions, monsieur le secrétaire d'Etat, d'être parvenu à rendre enfin la lisibilité nécessaire aux actions de solidarité en direction des anciens combattants et des veuves en proie à des difficultés financières.

Ce budget nous permet aussi de prolonger d'autres actions. La revalorisation des droits de chaque ancien combattant va permettre de garantir le pouvoir d'achat. Les crédits de la retraite du combattant augmenteront de 30,74 millions d'euros, avec une provision de 562 000 euros pour financer une éventuelle revalorisation du point qui interviendrait en 2004. Il faut reconnaître qu'il s'agit désormais d'une priorité, même si nous devons bien en mesurer les enjeux financiers : augmenter d'un seul point la retraite du combattant équivaut à un effort estimé entre 15  et 16 millions d'euros par an.

Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit ensuite la consolidation de moyens de fonctionnement des établissements publics. Si l'ONAC connaît une baisse de ses crédits de 2,3 %, c'est simplement la conséquence financière de l'application du contrat d'objectifs et de moyens qui assure la pérennité des missions d'un office auquel nous sommes tous attachés. Cette évolution ne doit pas masquer la progression de la part de la subvention de l'Etat qui, en passant de 384 487 euros en 2003 à 759 728 euros pour 2004, permettra de conforter son action de proximité auprès de ses ressortissants.

La dotation de l'Institution nationale des Invalides pour 2004 progresse de 9,2 % après une hausse de 4,2 % l'an dernier. Ces crédits vont lui permettre de poursuivre sa modernisation après son intégration dans le service public hospitalier depuis juin 2001. Nous pouvons, à cet égard, nous réjouir de l'accréditation délivrée par l'ANAES en novembre 2002.

L'effort pour la mise en sécurité et l'habitabilité des maisons de retraite s'intensifie avec une subvention d'investissement aux deux établissements publics qui s'établira à 4,7 millions d'euros en autorisations de programme, contre 1,524 million en 2002, soit une progression de 208 %.

Le projet de loi de finances consolide également l'effort de mémoire. Si les crédits semblent diminuer, c'est tout simplement parce que la dotation inscrite pour 2003 a permis la réalisation du mémorial de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie, quai Branly à Paris, et celle du Centre européen du résistant déporté du camp du Struthof.

Je tiens à saluer, monsieur le secrétaire d'Etat, le volontarisme politique qui est le vôtre. Le Gouvernement vient en effet d'apporter des réponses à plusieurs questions essentielles restées malheureusement trop longtemps en suspens.

Tout d'abord, l'extension annoncée du décret du 13 juillet 2000 à l'ensemble des orphelins de la barbarie nazie. M. Philippe Dechartre, ancien résistant et ancien ministre, a remis un rapport à ce sujet. C'est sur la base de ses conclusions que le Premier ministre a décidé, le 8 septembre dernier, que tous les orphelins, ceux des déportés, des fusillés et des massacrés, allaient bénéficier d'une indemnisation identique à celle destinée aux orphelins des déportés de la Shoah. Ce n'est que justice, diront certains, et ils ont raison. Mais il était aussi nécessaire de prendre les décisions. Il reste à définir précisément le périmètre d'éligibilité de cette mesure.

M. Alain Néri et Mme Chantal Robin-Rodrigo. Et à la financer !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Une décision qui se veut réparatrice ne doit pas être porteuse de nouvelles injustices. Nous souhaitons donc que le décret d'application soit rédigé dans les meilleurs délais afin de répondre à une impatience légitime de la part des bénéficiaires.

Je ne veux pas non plus éluder une question sensible dont la solution a été trop longtemps repoussée : le choix d'une date pour rendre l'hommage de la nation aux combattants français morts pour notre pays pendant la guerre d'Algérie, bien sûr, mais aussi dans les combats du Maroc et de la Tunisie. Plus de 20 000 de nos compatriotes ont perdu la vie dans ces conflits. Il était naturel de décider, plus de quarante après, d'une date officielle pour leur rendre hommage. Plusieurs dates étaient avancées : le 19 mars, date du cessez-le-feu en Algérie,...

M. Alain Néri. Elle est incontestable !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial.... ou le 16 octobre, anniversaire de l'inhumation du soldat inconnu de la guerre d'Algérie. Plusieurs associations d'anciens combattants ont d'ailleurs fait de l'une de ces dates leur journée d'hommage,...

M. Alain Néri. Toutes ne sont pas du même avis !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial....ce qu'elles continueront certainement à faire. Cependant, sans entrer aujourd'hui dans le débat autour de l'attachement légitime à l'une ou l'autre, je crois que le temps de l'apaisement est venu.

M. Alain Néri. On ne peut pas dire que vous ayez réussi ! C'est scandaleux !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. L'instauration de cette journée nationale d'hommage doit nous permettre de nous rassembler enfin autour de tous nos compatriotes morts pour la France au cours de ces conflits. Ils méritent un hommage solennel et national. A l'image de ceux qui ont été unis face au feu, il serait bon aujourd'hui que, dans cet hémicycle, nous puissions tous nous retrouver, au lieu de continuer à nous diviser durablement sur cette question.

M. Alain Néri. Vous n'allez pas nous donner des leçons alors que vous insultez la troisième génération du feu !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Si le moment de la décision politique approche, je regrette qu'il ne soit pas venu plus tôt pour différentes raisons sur lesquelles je ne m'étendrai pas.

La reconnaissance, la réparation et la mémoire sont des objectifs nobles et justes, et nous ne ferons jamais assez.

La mémoire est un devoir de la représentation nationale, mais les élus locaux, les acteurs associatifs, voire économiques, doivent aussi se sentir concernés. A cet égard, la loi sur le mécénat votée en 2003 offre de nouvelles perspectives fiscales qui peuvent stimuler les initiatives privées sans dénaturer en rien l'esprit qui doit inspirer l'œuvre de mémoire.

Dans ce domaine, l'année 2004 sera exceptionnelle : quatre-vingt-dixième anniversaire de la victoire de la Marne, soixantième anniversaire des débarquements et de la Libération, cinquantième anniversaire de la bataille de Diên Biên Phu.

M. Alain Néri. Paroles, paroles, paroles...

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Ces commémorations permettront d'honorer ceux qui ont donné leur vie pour notre patrie, de rendre hommage aux anciens combattants et de transmettre à tous ceux qui n'ont pas connu ces combats le sens des valeurs qui étaient défendues et l'importance des sacrifices consentis.

Je ne voudrais pas conclure mon propos sans insister sur la nécessaire réforme de l'Etat. Elle repose tout autant sur la transformation des structures que sur la maîtrise des dépenses publiques. La mise en œuvre de la LOLF ne va pas seulement modifier nos habitudes budgétaires, elle va contribuer à davantage de transparence, elle nous apportera donc une meilleure compréhension des actions menées. Aujourd'hui, certains crédits affectés aux anciens combattants sont gérés par deux départements ministériels, d'autres, consacrés notamment aux actions liées à la mémoire, ne sont pas suffisamment identifiables. Par ailleurs, la répartition des missions entre l'ONAC et les services déconcentrés du ministère de la défense doit être clarifiée. Je vous invite, monsieur le secrétaire d'Etat, à mettre en œuvre la LOLF de manière ambitieuse et dynamique.

Mes chers collègues, depuis maintenant près d'un an et demi, de nombreux dossiers ont été réglés alors qu'ils étaient restés en suspens pendant des années.

M. Alain Néri. Quel culot !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. D'autres demeurent, nous le savons, mais ils seront résolus dans le cadre d'une démarche responsable et partenariale. Pour ce faire, vous avez notre confiance, monsieur le secrétaire d'Etat, ainsi que celle du monde combattant. C'est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à voter les crédits du secrétariat d'Etat aux anciens combattants.

Mme Maryvonne Briot. Très bien !

M. Jean-Louis Dumont. Ce n'est pas vraiment l'enthousiasme dans vos rangs!

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Patrick Baudouin, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la présentation du budget des anciens combattants n'est pas tâche facile car il est par nature contradictoire : comme nous tous, hélas ! les bénéficiaires sont mortels et les gouvernements sont toujours tiraillés entre le souci d'apporter aux anciens combattants et victimes de guerre les justes réparations des sacrifices consentis et des dommages subis, et la tentation de profiter de la démographie pour les financer à un moindre coût.

Monsieur le secrétaire d'Etat, l'année dernière, en prenant vos fonctions, vous avez clairement et courageusement annoncé que vous aborderiez les problèmes avec la volonté de les résoudre...

M. Alain Néri. Nous attendons toujours !

M. Patrick Baudouin, rapporteur pour avis....dans une démarche déterminée fondée sur la concertation et le souci d'une planification jusqu'en 2007. Le présent budget en porte la marque : il est lucide et responsable dans un contexte économique difficile.

Malgré une diminution des crédits due en partie à la démographie, la dotation rapportée au nombre des parties prenantes augmente de 1,58 %, contre 0,68 % en 2003.

Si, dans les années à venir, le budget était maintenu en euros constants, il serait possible d'adapter, et même au-delà, le droit à réparation à l'évolution de notre société. J'y reviendrai.

Mon collègue Xavier Bertrand vient de vous exposer, excellemment et dans le détail, les dispositions financières de ce budget qui, avec 3 390 millions d'euros en dépenses, demeure important puisqu'il est le douzième de l'Etat.

Les avancées du droit à réparation sont de deux ordres.

Elles résultent d'abord des actions nouvelles prévues dans le budget liées à la mise en application de deux mesures antérieures.

L'article 73 du projet de loi de finances prévoit d'augmenter de manière uniforme de quinze points d'indice toutes les pensions de veuves d'invalides pensionnés. Demandée depuis longtemps, cette mesure améliore le sort de 130 000 veuves qui se sont dévouées durant toute leur vie auprès de leur mari.

L'article 74 dispose que la qualité de combattant et la carte qui va avec seront délivrées aux personnels militaires et à certaines catégories de personnels civils justifiant de quatre mois de présence en Afrique du Nord. Il satisfait ainsi une demande d'équité du monde combattant. A ce titre, 15 000 à 20 000 personnes supplémentaires devraient se voir attribuer cette carte, pour un coût de 3 millions d'euros.

Une ambiguïté demeure toutefois, monsieur le secrétaire d'Etat. La période du 1er janvier 1952 au 2 juillet 1962 doit être considérée comme s'appliquant aussi bien à la Tunisie qu'au Maroc et à l'Algérie.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Votre rapporteur et plusieurs de ses collègues ont déposé des amendements tendant à apporter cette précision, mais ils ont été rejetés en vertu de l'article 40. Ils n'avaient d'autre but, monsieur le secrétaire d'Etat, que de vous inciter à résoudre ce problème dès 2004.

M. François Rochebloine. C'est l'équité.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. S'agissant de l'extension des mesures de réparation du décret du 13 juillet 2000 concernant les orphelins de parents victimes de la barbarie nazie, le Gouvernement a suivi les conclusions de la commission présidée par M. Philippe Dechartre, qui a conclu, par souci, là encore, de légitime équité, à son extension aux déportés résistants et aux déportés politiques, massacrés ou fusillés. Un décret est en préparation, qui doit préciser clairement le périmètre d'éligibilité, sans ouvrir de nouvelles injustices. Votre rapporteur et la commission souhaitent qu'il soit publié dans les délais les plus rapprochés.

En ce qui concerne la décristallisation des pensions des anciens combattants de l'Union française, on peut se féliciter que, malgré un an de longue mise au point administrative, le décret d'application ait été publié avant-hier, mardi 4 novembre, ainsi que l'arrêté portant exécution pour la comptabilité publique du versement aux ayants droit avant la fin de l'année.

M. Jacques Desallangre. Ouf !

M. Jean-Louis Dumont. C'est vous qui aviez cristallisé les crédits, marquant ainsi votre mépris pour les anciens combattants.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. La seeconde démarche positive dans ce budget est l'action sociale poursuivie par le secrétariat aux anciens combattants. L'évolution de la démographie des anciens combattants aurait pu conduire à revoir à la baisse le rôle de l'ONAC. Il n'en est rien. Si la mission d'attribution des statuts va en s'amenuisant, sa présence comme soutien et aide morale et sociale reste essentielle et primordiale.

En premier lieu, l'ONAC et ses directions départementales restent un lieu d'accueil et de conseil permanent pour tous, en aidant pour toute démarche administrative.

En deuxième lieu, neuf écoles spécialisées offrent 2000 places aux travailleurs adultes handicapés et aux militaires encore en fonction. Ces écoles s'adaptent aux mutations professionnelles. Un service nouveau a été créé afin de passer de 40 militaires formés par an à 450 en 2007.

En troisième lieu, l'ONAC apporte une contribution importante pour l'accueil des victimes de guerre âgées. Il gère directement neuf maisons de retraite disposant de 980 lits. Le conventionnement tripartite de ces maisons avec les départements et l'Etat est en cours. L'ONAC poursuit également une politique de labellisation des établissements extérieurs afin d'y accueillir des anciens combattants. Le but est d'avoir un établissement par département. Votre rapporteur souhaite que s'accélèrent ces deux processus.

Pour accomplir ces tâches, l'ONAC poursuit sa restructuration dans le cadre du premier contrat d'objectifs et de moyens qu'il a passé avec l'Etat pour les cinq années à venir, en pleine concertation avec le personnel.

M. Jacques Desallangre. Oh !

M. Jean-Louis Dumont. C'est vite dit !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Mes chers collègues, le conseil d'administration a approuvé ce contrat avant-hier.

L'Etat augmente de 1,5 million d'euros sa contribution aux dépenses sociales de l'office, qui atteindront ainsi plus de 12 millions d'euros par an en 2004.

Il convient de souligner que cette contribution nouvelle de l'Etat ne fait, en apparence, que remplacer la contribution volontaire apportée chaque année par le Parlement sur sa réserve parlementaire. La nuance est cependant fondamentale, car elle prouve la volonté du Gouvernement de pérenniser l'institution ONAC. Votre rapporteur en prend acte.

M. Alain Néri. Nous verrons lors de l'examen de mon amendement si vous êtes aussi courageux !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Pour le projet de rénovation de l'Institution nationale des invalides, des objectifs ambitieux à la fois dans le domaine de la recherche, des soins et de l'accueil des pensionnaires ont été fixés au service des victimes de guerre. Fort de l'avis favorable de l'Agence nationale d'accréditation des établissements de santé et d'un budget en hausse de 10 %, l'Institution présentera prochainement son contrat d'établissement.

Le devoir de mémoire est, aujourd'hui, une des missions du secrétariat d'Etat qui se développent fortement. Les crédits de 24 millions d'euros prévus pour 2004 financeront la collecte, la conservation et la transmission de la mémoire, ainsi que le programme de commémoration.

La politique de la mémoire est confiée pour partie, vous le savez, à l'ONAC et celui-ci est en train de mettre en place les moyens de sa mission. Sur les 100 postes délégués à la mémoire prévus dans le contrat, 67 seront opérationnels dès 2004. Ce sont des postes de catégorie A qui permettront une action de qualité en partenariat avec les associations d'anciens combattants, les armées, l'éducation nationale, la culture et les collectivités territoriales.

La politique de la mémoire s'exercera aussi au niveau international grâce au concept de la mémoire « partagée », que vous avez conçu avec nos alliés ou nos adversaires d'hier : des accords seront signés prochainement avec l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Vietnam ou la Corée du Sud.

Le ministère poursuit quatre actions principales et denses : la rénovation des lieux de mémoire et de sépulture en France et à l'étranger, la réalisation des relais de mémoire, la création d'un site Internet sur les Morts pour la France et le développement du tourisme de la mémoire

Dans mon rapport figure le programme des cérémonies prévues en 2004 : quatre-vingt-dixième anniversaire du début de la grande guerre, soixantième anniversaire des combats d'Italie, des débarquements et de la Libération de notre France, cinquantième anniversaire de Dien Bien Phu et de la guerre d'Indochine.

Enfin, votre rapporteur prend acte de la décision d'instituer, par décret du 26 septembre 2003, le 5 décembre comme journée nationale d'hommage aux  morts pour la France  de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie.

Je sais que cette décision, prise après une large et positive concertation dans le cadre de la commission Favier, a reçu l'agrément de beaucoup ...

M. Christian Vanneste. Oh oui !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. ... et a été refusée par d'autres.

M. Jacques Desallangre. Oh oui !

M. Jean-Louis Dumont. M. Favier aura droit à une belle médaille en chocolat !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Pour résumer ma pensée, je souhaite vous lire un extrait d'une lettre reçue du président d'une union nationale d'associations d'anciens combattants.

M. Alain Néri. Laquelle ?

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Je le cite : « L'adoption du 5 décembre n'est ni une victoire, ni une défaite pour quiconque : on ne se bat, ne s'affronte ni ne s'invective dans un lieu de recueillement... Au contraire, on s'y rassemble, voire on s'y réconcilie pour mieux honorer les disparus, surtout lorsqu'il s'agit de ses camarades morts pour la France. »

M. Jacques Desallangre. C'est facile !

M. Jean-Louis Dumont. On en oublie quelques-uns !

M. Alain Néri. C'est n'importe quoi. Respectez déjà le 11 novembre et ce sera bien. Prenez en compte toutes les générations du feu, sans exclusive !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Même s'il est très positif, ce budget ne satisfait pas toutes les revendications des anciens combattants. Parmi toutes les demandes légitimes et non satisfaites, qui figurent d'ailleurs dans mon rapport, j'en retiendrai une : la retraite du combattant.

Depuis 1978, cette dernière est fondée sur l'indice 33 des pensions. Cela fait donc vingt-six ans qu'elle n'a pas été augmentée. Elle représente, avec à peine 424 euros par an, plus un témoignage symbolique de reconnaissance qu'une véritable retraite. Ce caractère de récompense est accentué par le fait qu'elle est unique, universelle et égalitaire. Cela explique la difficulté de l'augmenter. Alors qu'elle est d'un faible montant pour chacun, elle représente au total une très forte dépense. Mais le taux de 48 points, soit 15 points de plus, demandé collectivement par les associations, pourrait être atteint si on étalait la dépense sur quelques années. C'est ce qui a été proposé par voie d'amendement.

M. François Rochebloine. C'est ce que nous souhaitons.

M. Alain Néri. Nous l'avions proposé l'année dernière et vous n'avez rien fait. Et cette année encore, rien n'est prévu !

M. Jean-Michel Fourgous. Pendant dix ans, vous n'avez rien fait. Vous n'avez donc rien à dire !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Mais ces amendements ont aussi été rejetés en vertu de l'article 40. Ils n'avaient d'autre but, là encore, monsieur le secrétaire d'Etat, que de vous inciter à progresser.

M. le président. Le temps de la conclusion approche, monsieur le rapporteur.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Mais il faut aussi adapter le budget à notre temps. Je retiendrai de mon rapport les propositions les plus significatives.

Actuellement, l'essentiel du budget des anciens combattants est fondé sur le droit à réparation.

M. Jean-Louis Dumont. M. le rapporteur fait de la provocation.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Mais comment ne pas voir qu'aujourd'hui l'ancien combattant n'est pas seulement un mutilé. C'est aussi un homme ou une femme qui a sacrifié une partie de sa vie au plus beau des services : celui de la France et de la République. Est-il admissible qu'un ancien combattant soit condamné à vivre la fin de sa vie avec des ressources inférieures au SMIC et que sa veuve soit, de ce fait, lors de sa disparition, quasiment réduite à la misère ?

    Garantir à tout ancien combattant un revenu qui, toutes ressources comprises, soit au moins égal au SMIC, me paraît relever d'une démarche de solidarité et de justice.

M. François Rochebloine. Rien ne sert de larmoyer, il faut agir !

M. le président. Veuillez abréger, monsieur le rapporteur.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Personnellement, je suis à peu près certain qu'une telle mesure pourrait être financée par le budget des anciens combattants. De plus, le financement d'une telle mesure pourrait être assuré par le transfert des crédits actuellement alloués au fonds de solidarité...

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. ...et qui, compte tenu de l'arrivée massive des anciens combattants de la guerre d'Algérie à l'âge de la retraite, sont en constante diminution. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé un rapport au Gouvernement.

M. le président. Monsieur Beaudouin ...

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Je termine, monsieur le président.

M. le président. Vous devriez avoir déjà terminé !

M. Alain Néri. Vous avez de la chance que M. Gremetz soit absent !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Pour la transmission de la mémoire, deux démarches me semblent nécessaires. La première est d'organiser la conservation de la mémoire autour de l'écrit, de l'oral et du visuel. J'évoque dans mon rapport les pistes de recherche. La seconde est de créer une journée de la mémoire combattante.

La commémoration des grands événements contemporains, comme le 11 novembre, le 8 mai, la journée de la déportation et bien d'autres, s'amenuise en raison non seulement de la disparition de nos derniers poilus mais aussi - hélas ! - des soldats de 39-45 et, demain, des anciens de Corée, du Maroc, de Tunisie ou d'Algérie. C'est pour cela que je propose que nous réfléchissions, au-delà de toutes les commémorations particulières existantes, au moyen de faire que la France se retrouve un jour par an pour commémorer ce qui était commun à ses citoyens soldats tout au long de son histoire : l'esprit de sacrifice au service de la patrie et la défense des valeurs républicaines.

M. François Rochebloine. Respectons déjà les commémorations qui existent.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Ma démarche n'est pas de division, elle est d'union, d'une union supérieure à nos divergences.

M. le président. Monsieur Beaudouin, tout cela se trouve dans votre rapport. Concluez maintenant !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. J'ai pu constater, lors des auditions, que les associations nationales d'anciens combattants étaient dans leur quasi-totalité en phase de réflexion avancée et positive sur ce sujet.

Le budget qui nous est présenté a été accepté par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Je vous demande, chers collègues, de bien vouloir l'adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous en venons maintenant aux orateurs inscrits sur ce budget.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Jacques Desallangre. Monsieur le secrétaire d'Etat, plus les années passent, plus votre budget régresse. Je n'ai pas chaussé les mêmes verres grossissants que M. Xavier Bertrand.

La baisse était déjà de 4 % l'année dernière. Mais sans doute estimez-vous que c'est encore trop pour les anciens combattants et qu'il faut encore faire des économies sur leur dos et gagner du temps.

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Propos scandaleux !

M. Jacques Desallangre. Je vais donner toutes sortes d'exemples sur ce que j'entends par « gagner du temps », monsieur le rapporteur.

Y a-t-il, monsieur le secrétaire d'Etat, dans les comptes de la nation, un budget aussi mal traité que le vôtre ? Je n'en suis pas certain. Moins 7 % en deux ans : c'est un record ! A défaut de défendre avec vigueur les anciens combattants, vous pouvez vous enorgueillir de détenir le record de la plus forte baisse ! Que ne demandez-vous conseil à M. Fillon, qui a su obtenir 18 milliards pour les patrons ? Demandez-lui ses recettes !

Gagner du temps, voilà la clé de voûte de votre maigre budget.

Gagner du temps sur la décristallisation. N'avons-nous pas voté l'année dernière quelques millions d'euros afin d'apporter une première réponse à ces anciens combattants qui ont risqué leur vie pour la France ?

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Vous êtes mal placé pour le dire !

M. Jacques Desallangre. Ce devait être un premier pas car une réelle décristallisation égalitaire reste à établir. Cela faisait des années que nous réclamions cette décristallisation et c'est uniquement parce que le Conseil d'Etat vous y a contraint que vous vous êtes exécuté. Mais n'avez-vous pas encore traîné les pieds, gagné du temps jusqu'à ce que, acculé, vous acceptiez enfin de signer les décrets pour éviter de vous faire étriller par la représentation nationale ?

M. Christian Vanneste. Pas par la majorité !

M. Jacques Desallangre. Les décrets ont été signés quarante-huit heures avant le débat. Il était temps !

Gagner du temps, c'est aussi votre technique pour ne pas indemniser tous les orphelins des victimes de la barbarie nazie. L'année dernière, Maxime Gremetz et moi-même avons fait adopter un amendement en ce sens, mais une année ne vous a pas suffi pour définir le périmètre ! La vraie raison ? C'est que, plus vous tardez, moins vous payez.

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Et la rétroactivité ?

M. Jacques Desallangre. Si vous voulez nous prouver le contraire, engagez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, à ce que l'indemnisation soit rétroactive.

Enfin, vous gagnez du temps et de l'argent, même lorsque vous semblez faire preuve de générosité à l'égard des veuves pensionnées. Vous attribuez 15 points d'indice mais vous n'appliquez cette revalorisation qu'à compter du 1er juillet et non du 1er janvier. C'est 10 millions d'euros que les veuves d'anciens combattants n'auront pas dans la poche. On est gêné devant de telles mesquineries !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. De votre part !

M. Jacques Desallangre. Gagner de l'argent sur le temps, c'est aussi ce que vous faites pour la carte du combattant.

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Quel culot !

M. Jacques Desallangre. Il est vrai que vous accédez à la demande, que nous avons maintes fois renouvelée, d'attribuer la carte aux anciens combattants d'AFN dès quatre mois de présence. Mais vous ne faites rien d'autre que de respecter le principe très général d'égalité républicaine devant la loi.

    Et, là aussi, vous jouez avec le temps. Vous faites des économies en appliquant des dates différenciées en fonction des conflits en Algérie, au Maroc et en Tunisie. Notre commission ne s'y est pas trompée et a suivi nos recommandations en adoptant un amendement fixant pour l'obtention de la carte les mêmes dates pour tous. J'espère, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous ne vous obstinerez pas à nous opposer l'article 40 et que vous reprendrez à votre compte cette mesure de justice. Si, selon l'expression du rapporteur, votre budget est « lucide et responsable », qu'il soit aussi juste et équitable.

Vous gagnez également du temps et de l'argent en refusant de poursuivre la procédure instaurée depuis 1998 et de revaloriser le plafond majorable de la rente mutualiste. Vous avez fait un petit coup de claquette l'année dernière en le revalorisant de 7,5 points au lieu de 5 %, mais c'était le miroir aux alouettes car, cette année, il n'y a rien, contrairement aux engagements de l'Etat.

Vous gagnez du temps encore sur la retraite du combattant. S'agissant du monde des anciens combattants , gagner du temps, c'est gagner beaucoup d'argent. C'est également spéculer sur ceux qui disparaissent chaque jour.

Monsieur le secrétaire d'Etat, en refusant de revaloriser la retraite du combattant, vous commettez une injustice et une indécence. En effet, il ne faut pas oublier que cette retraite marque le droit à réparation et la reconnaissance de la nation. Or quel est le montant de cette reconnaissance hautement symbolique ? 423 euros, soit moins de 3 000 francs par an. Quand on sait que, lorsqu'elle fut créée, cette pension devait représenter, selon les critères de l'époque, un mois de salaire ouvrier, on mesure toute la perte de pouvoir d'achat et surtout l'érosion de la portée symbolique qu'elle a subie.

Aucune revalorisation spécifique n'est intervenue depuis 1978. Il est donc impérieux que nous corrigions dès aujourd'hui cette offense faite à tous les anciens combattants. Maxime Gremetz et moi-même avons ainsi proposé que son montant passe dès cette année de 33 à 39 points d'indice pour atteindre 48 points dans les deux ans à venir.

Monsieur le secrétaire d'Etat, les anciens combattants revendiquent la reconnaissance de la nation, la force du symbole, pas l'aumône. Vos économies de bouts de chandelle et vos spéculations sur l'extinction progressive des anciens combattants sont indignes d'un Etat en paix avec son histoire et sa mémoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)

M. le président. Pour le groupe UMP, la parole est à M. Georges Colombier.

M. Georges Colombier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, 2004 sera une année riche en commémorations pour le monde combattant puisque nous serons amenés à célébrer de nombreux événements glorieux et douloureux qui ont profondément marqué l'histoire de notre nation et du monde entier.

2004 s'inscrit également, monsieur le secrétaire d'Etat, dans la démarche, fondée sur la concertation et le pragmatisme, que vous avez su engager depuis une année et demie grâce à votre sens de l'écoute et du dialogue. Je vous remercie pour les échanges toujours empreints de confiance et de sincérité que vous avez su entretenir afin d'apporter des réponses adaptées aux besoins du monde combattant.

2004 est aussi une année de restrictions financières, compte tenu d'un contexte économique et budgétaire particulièrement difficile. A l'image des précédents, le budget des anciens combattants pour 2004 accuse une diminution de 3,12 %. Certes, j'ai bien noté que les crédits permettraient une augmentation de 1,58 % des droits procurés à chaque ressortissant, bien supérieure à celle de 0,68 % accordée l'année dernière. Cependant, je regrette qu'une fois de plus, au motif de la diminution du nombre de ressortissants, les crédits votés ne soient pas reportés d'une année sur l'autre pour mettre en œuvre des actions très attendues.

M. François Rochebloine. Très juste !

M. Georges Colombier. Néanmoins, les marges de manœuvre budgétaire ainsi dégagées, dans un contexte économique particulièrement morose, vont permettre de mettre en place des mesures nouvelles, de manifester la solidarité de la nation et de faire progresser l'équité entre les anciens combattants.

Avant d'étudier plus précisément le projet de budget pour 2004, je souhaiterais souligner le travail de qualité que vous avez effectué au cours de l'année précédente sur des questions importantes qui avaient mobilisé le monde combattant et ses associations, mais aussi les parlementaires.

Tel est le cas de l'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie.

Chacun garde en mémoire les réactions bien légitimes des orphelins de déportés non juifs à la publication du décret du 13 juillet 2000, qu'ils avaient estimé contraire au principe d'égalité puisqu'il distinguait la condition des déportés selon qu'ils étaient ou non de confession juive. Le Premier ministre l'a annoncé le 2 septembre au président de l'Assemblée nationale et au président du Sénat : les orphelins des déportés, des fusillés et des massacrés, victimes de la barbarie nazie, bénéficieront d'une indemnisation identique à celle instaurée par le décret du 13 juillet 2000 en faveur des déportés de la Shoah. Je compte sur vous désormais, monsieur le secrétaire d'Etat, pour déterminer le périmètre d'application de cette mesure avec précision, afin qu'une décision qui se veut réparatrice ne suscite pas à nouveau un sentiment d'injustice.

M. Alain Néri. Il faudra le faire rapidement !

M. François Rochebloine . Faites vite !

M. Georges Colombier. Concernant la mise en place d'un processus de décristallisation des pensions, je me réjouis d'apprendre la parution du décret du 3 novembre au Journal officiel du 4 novembre dernier. Ce décret permet l'application de l'article  68 de la loi de finances rectificative pour 2002 instituant un dispositif de révision des prestations versées aux ressortissants des pays placés antérieurement sous la souveraineté française résidant hors de France. Je vous remercie pour toute l'énergie que vous avez déployée avec vos collaborateurs en faveur de tous ceux qui ont combattu sous le drapeau français. C'est une juste reconnaissance. Mais j'insiste, monsieur le secrétaire d'Etat, pour que les fonds soient débloqués dans les plus brefs délais.

Le projet de budget des anciens combattants pour 2004 intègre plusieurs mesures nouvelles.

Il est ainsi proposé d'augmenter de quinze points les pensions des veuves de guerre, des veuves d'invalides et des veuves de grands invalides, ce qui constitue une mesure de justice à l'égard des 130 000 veuves, particulièrement touchées lors des conflits du XXe siècle, et notamment des épouses des grands invalides qui se sont dévouées pour le mieux-être de leur conjoint handicapé.

Je soulignerai ensuite la modification des règles d'attribution de la carte de combattant AFN.

M. Jacques Desallangre. Il ne pouvait en être autrement !

M. Georges Colombier. La légitime demande d'harmonisation des conditions d'attribution de la carte de combattant AFN constituait une priorité exprimée depuis plusieurs années par le monde combattant. Je me réjouis que le Gouvernement ait décidé de mettre fin à un régime disparate et incohérent qui suscitait beaucoup d'aigreurs, cette carte étant uniquement réservée aux policiers et aux CRS justifiant de quatre mois de séjour en Afrique du Nord. Désormais, tous les anciens combattants ayant effectué un séjour de quatre mois et plus en Afrique du Nord pourront se voir attribuer une carte. À cet égard, j'insiste sur le respect de la date du 2 juillet 1962 comme date butoir pour la Tunisie, le Maroc et l'Algérie. .

Par ailleurs, je me permets d'attirer votre attention sur la situation des vétérans des missions extérieures et sur l'évolution du statut d'ancien combattant. En effet, la notion de conflit armé a profondément évolué depuis la guerre d'Algérie. Ainsi, il serait opportun de prendre des mesures de simplification et de rationalisation permettant d'attribuer, dans des conditions claires, l'ensemble des titres pour tous les conflits.

Enfin, je me réjouis des garanties données à l'action de l'ONAC. Le projet de budget pour 2004 porte la contribution de l'Etat à 12, 135 millions d'euros, ce qui évitera le recours à la réserve parlementaire, qui était par définition une démarche précaire et anormale. Après les quelques interrogations que j'avais soulevées, j'ai bien pris note des réponses que vous avez apportées au cours du conseil d'administration de l'office, le 4 novembre dernier, et je souhaite que repartant sur de bonnes bases, le contrat d'objectifs et de moyens assure la pérennité de cet établissement.

Toutefois, je m'inquiète que des sujets d'importance qui mobilisent à juste titre le monde combattant ne trouvent aucune traduction budgétaire.

Tout d'abord, j'évoquerai la revalorisation de la retraite du combattant.

Son montant est actuellement calculé sur l'indice 33 des pensions militaires d'invalidité et les anciens combattants souhaitent avec insistance qu'il soit réévalué. Je souscris pleinement à cette revendication que j'ai déjà soutenue lors des précédents budgets, tout particulièrement l'année dernière en qualité de rapporteur pour avis du budget des anciens combattants.

Sachant qu'une revalorisation d'un point d'indice équivaut à une dépense supplémentaire de 16 à 17 millions d'euros, je pense qu'il convient de procéder par étapes afin d'amorcer cette réforme tant attendue. Je regrette bien sincèrement que le projet de budget ne comporte pas la moindre proposition pour cette mesure qui concerne pourtant toutes les générations d'anciens combattants. Aussi me permettrai-je d'insister à nouveau auprès de vous, monsieur le secrétaire d'Etat, sur l'importance de cette question pour les anciens combattants.

J'ai déposé en commission un amendement qui engage la première étape de cette revalorisation en portant la retraite du combattant de l'indice 33 à l'indice 36 des pensions militaires d'invalidité. Par ailleurs, j'ai cosigné un amendement de mon collègue Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis, dont je salue le travail. Malheureusement, cet amendement est tombé sous le coup de l'article 40. Connaissant tout l'intérêt que vous portez à cette question, je vous serais reconnaissant de bien vouloir le reprendre à votre compte. («  Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. )

M. François Rochebloine. C'est une bonne suggestion !

M. Georges Colombier. Lors du précédent budget, j'avais bien pris note de votre engagement d'ouvrir l'ensemble des dossiers d'ici à la fin de la législature. Je compte donc sur vous pour traiter celui de la retraite du combattant, qui demeure une priorité.

S'agissant du plafond majorable de la retraite mutualiste, le projet de loi de finances de 2003 avait porté l'indice de pension militaire d'invalidité qui le définit à 122,5 points. Certaines associations regrettent que cet effort n'ait pas été renouvelé pour 2004, tout en ayant bien conscience que le montant des cotisations peut s'avérer trop élevé pour les anciens combattants les plus modestes.

M. Jacques Desallangre. Mauvaise excuse !

M. Georges Colombier. Quant au rapport constant, sur lequel se fonde le calcul du point de pension, il doit impérativement être simplifié étant donné la complexité du système actuel, comme je l'ai déjà précisé à plusieurs reprises. Des réunions de travail ont été organisées à ce sujet et je souhaite ardemment que, sous votre impulsion, cette concertation avec les différentes associations puisse être réactivée et aboutir rapidement à un nouveau mode de calcul clair, simple et compréhensible, à condition bien sûr de respecter les intérêts à terme des anciens combattants.

    J'en viens à l'extension aux anciens combattants de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc du bénéfice de la campagne double actuellement attribué, sous certaines conditions, aux seuls anciens combattants de la première et de la deuxième guerre mondiale et anciens combattants de la guerre d'Indochine. Afin qu'une solution soit rapidement trouvée, je souhaite que vous puissiez réunir en urgence une commission tripartite rassemblant les parlementaires, les associations concernées et votre ministère.

M. Philippe Vitel. Bonne idée !

M. Georges Colombier. Pour ce qui est des conditions d'attribution de la carte du combattant volontaire de la Résistance, un renforcement de la commission nationale CVR serait souhaitable. Il est également important que les commissions départementales d'attribution des titres qui statuent sur les demandes de carte de CVR et de carte du combattant puissent se réunir fréquemment. Soulignons par ailleurs que les associations d'anciens combattants renouvellent leur demande d'attribution de la carte du combattant volontaire de la Résistance aux titulaires de la médaille de la Résistance ou de la croix de guerre au titre de la Résistance.

Ces mêmes associations réitèrent leur demande d'attribution du titre de reconnaissance de la nation aux réfractaires du service du travail obligatoire, qui en ont le titre, afin de rendre hommage à ceux qui ont refusé de participer à l'effort de guerre nazi. J'ai d'ailleurs déposé avec quelques collègues une proposition de loi en ce sens.

Quant aux souffrances endurées par les Alsaciens et les Mosellans, elles doivent être prises en compte. Depuis de nombreuses années, on se heurte à une situation de blocage concernant l'indemnisation des victimes des RAD-KHD. J'ai bien pris note de la volonté du Gouvernement de trouver une solution équitable à leur égard. Une réunion a été organisée le 12 mai dernier à Strasbourg. Certes, elle n'a pas encore permis de parvenir à une décision qui réponde à leurs attentes, mais je sais pouvoir compter sur votre ténacité, monsieur le secrétaire d'Etat, pour faire progresser ce dossier.

S'agissant de l'attribution d'une demi-part supplémentaire pour l'impôt sur le revenu, nous souhaiterions que les anciens combattants puissent en bénéficier dès l'âge de soixante-dix ans au lieu de soixante-quinze ans actuellement.

Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, j'attire votre attention sur l'octroi d'une allocation de solidarité aux veuves d'anciens combattants les plus modestes et sur l'augmentation des crédits sociaux pour venir en aide aux anciens combattants les plus démunis. J'insiste également sur le lancement de la collecte des témoignages des anciens combattants en Afrique du Nord, dont j'ai parlé en commission.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Georges Colombier. Telles sont, monsieur le secrétaire d'Etat, les principales remarques que je souhaitais formuler à propos du budget des anciens combattants. Prenant en compte le travail accompli par vos services depuis plus d'une année et demie et les nouvelles mesures prévues, confiant dans votre détermination à faire progresser la cause des anciens combattants, le groupe UMP votera ce budget pour 2004.

M. Jacques Desallangre. C'est en fonction du budget lui-même qu'il faut juger !

M. Maxime Gremetz. Aux actes, camarades !

M. Georges Colombier. Écoutez, dans ce domaine-là, les précédents gouvernements n'ont pas fait grand-chose non plus.

À titre personnel, je ne saurais conclure mon propos sans évoquer la question du choix de la date du 5 décembre comme journée nationale d'hommage aux morts pour la France pendant la guerre d'Algérie et les combats du Maroc et de la Tunisie. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

En tant qu'ancien d'Algérie, je n'ai pas manqué de vous faire part, ainsi qu'au Président de la République et au Premier Ministre, de mon désaccord face à ce choix que je considère comme une erreur. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française, du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Comme vous le savez, je me suis toujours efforcé d'aborder le sujet du choix du 19 mars comme date officielle nationale du souvenir et du recueillement avec dignité et dans un esprit de concorde et de réconciliation.

Mme Claude Darciaux. Très bien !

M. Georges Colombier. Depuis de nombreuses années, j'ai défendu ce droit au souvenir et au recueillement. Or, à mon sens, aucune date autre que celle du 19 mars 1962 n'aurait eu plus de légitimité. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française, du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Non seulement la date du 5 décembre est dépourvue de sens historique, mais elle ne me semble pas de nature à apaiser les crispations et les divisions au sein du monde combattant.

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Georges Colombier. Sans aucune animosité et fidèle à mes convictions et à mes engagements passés, je continuerai à commémorer la date du 19 mars et à rendre hommage aux victimes militaires et civiles qui sont tombées avant et après le 19 mars 1962, date des accords d'Evian qui proclament le cessez-le-feu en Algérie.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Georges Colombier. Cet acte ne saurait effacer les événements tragiques postérieurs, ni les souffrances endurées par les Harkis et les Français rapatriés d'Algérie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Pour le groupe socialiste, la parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi de vous dire qu'avec 3,39 milliards d'euros, votre budget est en net recul par rapport au budget 2003, qui n'était déjà pas brillant. Avec une baisse de 240 millions d'euros depuis 2002, date du dernier budget présenté par la gauche, je crois que vous avez beaucoup à faire pour rattraper votre retard.

Vous ne pouvez d'ailleurs pas tenter de justifier cette évolution par la baisse démographique des effectifs d' anciens combattants. Vous le savez, votre compétence s'étend aux harkis, dont le nombre compense largement cette diminution.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Eh oui !

M. Alain Néri. De plus, en 2003, de gels en annulations, ce sont 134,6 millions d'euros qui ont été retirés aux anciens combattants.

Vous nous annoncez un budget d'équité et de progrès, mais en réalité ce n'est qu'un budget en trompe-l'œil, fait pour tromper les anciens combattants. En effet, sur douze postes principaux, sept voient leurs crédits diminuer de 1,48 % à 20 % et deux conservent les mêmes dotations : l'appareillage des mutilés et les crédits sociaux de l'ONAC. Mais ces derniers régressent en fait à cause de la hausse du coût de la vie. Nous aurons l'occasion d'en reparler.

Certes, trois postes sont en hausse.

Le premier est celui de l'INI. Mais vos crédits ne font que revenir à la hauteur du budget 2001.

Le second concerne la retraite du combattant. Mais l'augmentation des crédits qui lui sont consacrés est purement mathématique. Elle s'explique par celle du nombre d'anciens combattants parvenus à l'âge de la retraite. Vous ne faites donc en réalité aucun effort en leur faveur.

Le troisième poste en hausse porte sur les crédits de la rente mutualiste. Mais ils stagnent à 122,5 points et n'augmentent que par l'effet d'un amendement que j'avais déposé en 1998 et que le gouvernement de l'époque avait adopté. Cet amendement permet de calculer le plafond de la retraite mutualiste en points d'indice, ce qui a pour effet de le revaloriser chaque année. Heureusement ! Car vous avez oublié de l'augmenter en points cette année.

M. Jacques Desallangre. Eh oui !

M. Alain Néri. Monsieur le secrétaire d'État, ce budget n'est pas bon.

M. Jacques Desallangre. Mais M. le secrétaire d'État est persuadé du contraire !

M. Alain Néri. C'est pourquoi nous allons essayer de vous aider.

Vous n'annoncez que deux mesures nouvelles. Avouez que c'est peu. Et peut-être, d'ailleurs, n'est-ce que la conséquence de l'important travail réalisé lors de la législature précédente par Jean-Pierre Masseret et Jacques Floch.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Oui !

M. Alain Néri. Vous qui êtes si prompt à nous parler de l'héritage que nous vous avons laissé, que ne nous parlez-vous de leur héritage à eux ! Ils avaient, en installant le dialogue et la concertation avec les anciens combattants, mis en place un plan pluriannuel pour mieux satisfaire leurs demandes.

La première de ces mesures nouvelles permettra d'attribuer la carte du combattant aux personnels militaires et à certains personnels civils qui justifient de quatre mois de présence en Afrique du Nord durant la guerre d'Algérie et les combats en Tunisie et au Maroc. Vous ne faites, en cela, que reprendre notre idée, ce dont nous vous remercions.

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. C'est pour cela que vous n'aviez rien fait !

M. Alain Néri. La mesure revient à prendre en compte, pour attribuer la carte d'ancien combattant, la durée d'exposition aux risques.

M. Maxime Gremetz. C'est la loi !

M. Alain Néri. Pour notre part, dans un plan pluriannuel, nous avions peu à peu amélioré la situation des anciens combattants, en prenant pour seuil la durée de dix-huit, quinze, douze, puis quatre mois pour les rappelés et les gendarmes, policiers et CRS.

Aujourd'hui, il fallait fixer ce seuil à quatre mois pour tout le monde. C'est la justice et l'égalité républicaine - mais rien de plus !

M. Jacques Desallangre. Exactement !

M. Maxime Gremetz. Eh oui !

M. Alain Néri. Nous avons déposé à ce sujet un amendement. J'espère, monsieur le secrétaire d'État, que vous le reprendrez à votre compte, si vous voulez faire un pas en direction de l'équité réelle. Il propose de retenir, dans tous les cas, la date du 2 juillet 1962 comme date butoir de fin des combats.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Très bien !

M. Maxime Gremetz. Exactement !

M. Alain Néri. La deuxième mesure concerne - pardon de vous corriger, monsieur le rapporteur - non les veuves d'anciens combattants, mais les veuves de guerre. Elle consiste à relever leur pension de 15 points d'indice, pour un montant total de 12 millions d'euros. Cette mesure est intéressante. Mais si attendue et justifiée qu'elle soit, elle n'est que la suite de la politique menée par Jean-Pierre Masseret et Jacques Floch, qui, dans le budget 2002, avaient augmenté de 120 points l'allocation aux veuves des grands invalides.

En outre, ces mesures nouvelles ne sont rendues possibles que par le redéploiement du crédit supprimé par ailleurs. Votre effort n'est donc pas considérable !

J'en viens à votre mesure phare du budget de 2003 : la décristallisation des pensions des anciens combattants de l'Union française. Mais ce qui n'est, à vous en croire, qu'une amorce a - passez-moi l'expression - fait long feu, puisqu'il a fallu attendre le jour de la discussion de votre budget en commission pour que vous sortiez enfin le décret de votre poche !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Nous avons attendu un an !

M. Jacques Desallangre. Ils ont gagné du temps !

M. Alain Néri. De qui se moque-t-on ? Vous avez gagné une année sur le dos dans anciens combattants !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Bien sûr que non, puisque la mesure est rétroactive !

M. Alain Néri. Pourquoi avoir ainsi tergiversé avant de leur donner leur dû ? Pour les punir d'avoir demandé leur indépendance ? Est-ce pour cela que vous aviez cristallisé leur retraite ? Monsieur le secrétaire d'État, une telle attitude est indigne !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. C'est votre manière de parler qui l'est !

M. Alain Néri. L'an dernier, la retraite du combattant était, à vous en croire, une de vos préoccupations essentielles. Tout le monde s'accordait pour dire qu'il fallait passer de 33 à 48 points. N'y étant pas parvenu l'an dernier, vous promettiez de le faire cette année.

M. Jacques Desallangre. On voit ce qu'il en est !

M. Alain Néri. J'ai chaussé toutes sortes de lunettes pour éplucher ce budget. Je n'ai malheureusement trouvé aucune mesure de ce type !

Voilà pourquoi nous avons déposé deux amendements.

Le premier propose que l'on réalise un effort important en passant directement de 33 à 48 points dès 2004. Nous sommes prêts à vous accompagner à Bercy pour plaider cette cause.

Pour vous permettre de rendre justice aux anciens combattants, nous proposons par ailleurs un autre amendement qui tend, lui, à échelonner cet effort sur la législature. Mais il faut prévoir un accroissement de cinq points par an. Car si l'on se contente de trois, on n'arrivera qu'à neuf points en trois ans, au lieu de quinze.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Cela ne fera pas le compte.

M. Alain Néri. Je veux bien vous aider à financer ces cinq points par an, monsieur le secrétaire d'État ! Puisqu'un point représente 16 millions d'euros, ce sont 80 millions d'euros qu'il faut trouver en tout. Or cette somme, vous l'avez, puisque, dès le budget 1998, j'avais déposé un amendement accepté par le gouvernement de l'époque, qui attribuait aux anciens combattants au chômage âgés de moins de soixante ans et disposant de quarante annuités de cotisation une allocation de 5 700 francs par mois.

Mme Catherine Génisson. Exactement !

M. Alain Néri. Étant donné qu'ils ont tous plus de soixante ans aujourd'hui, vous n'avez qu'à récupérer cet argent pour financer l'augmentation de la retraite du combattant, ce qui ne serait que justice.

M. Didier Migaud. Très bien !

M. Alain Néri. Beaucoup d'entre eux, déjà touchés par les mesures iniques de réforme des retraites - ou des pseudo-retraites - mises en place par M. Fillon, percevraient ainsi, non un mois de salaire ouvrier, selon le mot de Jacques Desallangre, mais un treizième mois de retraite dans l'année. Une telle mesure ne serait-elle pas juste ? Ne serait-ce pas un effort bien naturel ? Vous voyez, monsieur le secrétaire d'État, que nous sommes prêts à vous aider dans ce domaine.

Les harkis relèvent également de votre compétence.

M. François Rochebloine. Oui, mais il ne faudrait pas tout mélanger !

M. Alain Néri. Mais ici encore, j'ai eu beau chercher dans votre budget, je n'ai trouvé aucune mesure en leur faveur. Qu'attendez-vous pour appliquer ce que notre collègue Diefenbacher préconise dans son rapport pour leur indemnisation ?

Vous nous annoncez - encore une annonce non suivie de financement  - que tous les orphelins de déportés, de fusillés, de massacrés auront droit au même traitement que les orphelins de la Shoah. Excellente décision ! Mais que penser quand vous nous dites qu'il va falloir définir le périmètre de ces mesures ? Prendrez-vous autant de temps pour y parvenir que pour publier le décret portant sur la décristallisation ?

Mme Chantal Robin-Rodrigo. J'en ai bien peur !

M. Alain Néri. Le décret paraîtra-t-il à la veille du budget 2005 ? Allez-vous encore gagner du temps ?

M. Jacques Desallangre. Et faire marcher la cavalerie ?

M. Alain Néri. Ce serait inacceptable !

Vous devez également prendre en compte le problème des RAD-KHD. Mon ami Armand Jung a eu l'occasion de s'en entretenir avec vous. J'espère que la Fondation franco-allemande trouvera rapidement une solution à ce problème douloureux qui touche nos camarades alsaciens-lorrains.

Parmi les mesures sociales prévues en faveur des anciens combattants, j'aurais souhaité que la demi-part de l'impôt sur le revenu soit accordée aux anciens combattants, non plus à partir de soixante-quinze ans, mais à partir de soixante-dix. Cette mesure permettrait d'améliorer leur situation matérielle, puisque vous n'arrivez décidément pas à relever la retraite du combattant.

Mme Catherine Génisson. C'est vrai !

M. Alain Néri. Le problème de la carte du combattant volontaire n'est toujours pas réglé. Allez-vous enfin prendre les mesures nécessaires pour que les combattants volontaires de la Résistance aient droit à cette carte ? Car on ne peut pas dénier la qualité de combattant volontaire à ceux qui se sont engagés, souvent très jeunes, dans la Résistance et ont contribué ainsi à rendre sa liberté à notre pays et à restaurer la République.  

Enfin l'ONAC, dont les crédits de fonctionnement, tout comme les effectifs, sont en baisse. Vous prétendez conforter cet office ? Pour ma part, je n'ai jamais vu une diminution des crédits de fonctionnement ou des effectifs consacrer la pérennité d'un organisme !

D'autant que les personnels de l'ONAC vont être confrontés à une augmentation de leur charge de travail, puisqu'ils devront gérer les 15 000 à 20 000 cartes d'ancien combattant liées aux mesures que vous avez annoncées : prise en compte de la durée de quatre mois de présence en AFN, de la situation des harkis et de celle des veuves d'anciens combattants.

Pensez-vous réellement que l'ONAC va fonctionner mieux ? Si vous entendez assurer la pérennité de cet organisme, reprenez plutôt notre amendement à votre compte et demandez à votre majorité de le voter !

Mme Catherine Génisson. Oui !

M. Alain Néri. Vous garantirez ainsi la pérennité de cet office au-delà du contrat d'objectifs. On verra bien, alors, si votre programme relève des actes ou des paroles. Car c'est sur les actes que vous serez jugés.

Vous prétendez que les crédits sociaux de l'ONAC sont augmentés. C'est faux ! Ils stagnent simplement au même niveau que l'an dernier. Et puisque vous les aviez alors diminués de 12 %, vous confirmez cette baisse cette année, alors même que l'évolution du coût de la vie ampute encore l'indemnisation des anciens combattants.

Mme Catherine Génisson. Exactement !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. N'importe quoi !

M. Alain Néri. Siégeant dans une commission départementale d'anciens combattants, je mesure quel soutien leur est apporté par les départements. Ils ne parviendraient pas, sans cette aide, à joindre les deux bouts.

J'en viens à une question qui va nous fâcher, monsieur le secrétaire d'État...

M. le président. Il faudrait vous acheminer vers votre conclusion.

M. Alain Néri. Vous vous êtes moqué du monde combattant et vous avez insulté la troisième génération du feu en fixant la journée du souvenir au 5 décembre, qui n'est en rien une date historique. Et pourtant, sur tous les bancs de notre assemblée, nous avons reconnu le fait que la guerre d'Algérie était une guerre à part entière et que cette guerre sans nom ne devait pas rester sans date. Or que représente le 5 décembre ? Rien !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Rien du tout !

M. Alain Néri. Ce n'est assurément ni une date historique ni une date symbolique. Lisant dans un journal que le 5 décembre allait devenir la journée nationale du souvenir, un de mes petits-enfants m'a demandé s'il s'agissait de l'armistice, d'un cessez-le-feu ou de la capitulation allemande. J'ai été forcé de lui répondre : « Mais non ! c'est simplement un jour où M. Chirac avait un moment de libre dans son agenda ! » (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Philippe Vitel. C'est une insulte au Président de la République !

M. Christian Decocq. C'est un scandale !

M. Alain Néri. Qui plus est, ce jour n'est même pas un simple trou dans un emploi du temps, comme le 16 octobre, mais un double trou, puisque l'inauguration du monument du quai Branly devait avoir lieu le 27 novembre et que c'est précisément parce que M. Chirac était indisponible à cette date qu'on est revenu au 5 décembre. De qui se moque-t-on ? (« C'est scandaleux ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Monsieur Néri...

M. Alain Néri. Qui plus est, monsieur le secrétaire d'État, vous vous moquez de la représentation nationale, puisque vous n'avez pas daigné vous présenter devant elle pour débattre de ce sujet important.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Prenez un peu de hauteur !

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Gardez un peu de dignité !

M. Alain Néri. Alors, puisque vous prétendez vouloir respecter le choix des associations, je vous prends au mot ! Vous vous dites démocrate ? Organisez donc une consultation démocratique...

M. le président. Merci, monsieur Néri !

M. Alain Néri....avec les organisations d'anciens combattants en donnant une voix à chacun d'eux.

M. Maxime Gremetz. Oui !

M. le président. C'est terminé, monsieur Néri.

M. Alain Néri. Il ne vous reste qu'une possibilité : faire en sorte que la proposition de loi sur le 19 mars adoptée par l'Assemblée nationale soit votée au Sénat.

M. Jacques Desallangre. Oui !

M. Alain Néri. Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste s'opposera à votre budget. Car vous ne rendez pas hommage aux anciens combattants...

M. le président. Monsieur Néri, votre temps est écoulé ! Je vous demande de vous arrêter.

M. Alain Néri. La troisième génération du feu attend aujourd'hui une véritable reconnaissance. Elle considère que la journée de mémoire et de recueillement ne peut être fixée qu'à la date du 19 mars, parce que c'est la seule date historique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour le groupe UDF.

M. François Rochebloine. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, une nouvelle fois le budget des anciens combattants est décevant ; il est en baisse de 3,12 %. Ce n'est pas la première fois qu'il diminue, me direz-vous, mais c'est regrettable, alors que de nombreux points essentiels du contentieux ancien qui oppose le monde combattant aux pouvoirs publics ne sont toujours pas réglés.

Je vous rappelle en effet, monsieur le secrétaire d'État, qu'il suffirait de maintenir à niveau le budget des anciens combattants durant deux années pour régler définitivement des demandes qui relèvent - ne l'oublions pas - du droit à réparation. Mais celles-ci ont été sans cesse repoussées, au motif récurrent que les contraintes budgétaires du moment ne permettaient pas de répondre à des revendications dont la légitimité n'a par ailleurs jamais été contestée.

Après vous avoir laissé le temps de trouver vos marques et de prendre connaissance des dossiers, l'on était en droit d'attendre un autre budget que celui qui nous est présenté aujourd'hui.

Aussi, avec le plus d'objectivité possible, je vais m'efforcer, au nom du groupe UDF, de vous faire part de notre analyse et de vous démontrer combien ce budget 2004 souffre d'insuffisances et laisse de nombreux problèmes en suspens.

Je le disais à l'instant : il y a peu de mesures nouvelles et j'en trouve seulement deux que je me plaise à qualifier de positives.

Il s'agit, en premier lieu, du relèvement des pensions des veuves de guerre et des veuves d'invalides, pour un coût de 11,84 millions d'euros. C'est une avancée intéressante et il est de notre devoir de poursuivre sans tarder dans cette voie.

En second lieu, vous nous proposez une harmonisation des conditions d'attribution de la carte du combattant, par un alignement à quatre mois de présence en Afrique du Nord pendant la durée des conflits. Cette mesure fait suite à celle qui avait été accordée par votre prédécesseur à la demande du ministre de l'intérieur de l'époque.

Si l'on avait retenu les critères appliqués pour les unités de gendarmerie, nous n'en serions probablement pas là. Nous aurions évité des situations d'inéquité toujours regrettables et, d'une certaine manière, la dévalorisation de la carte du combattant. Du reste, la mesure doit être appréciée à sa juste valeur ; elle n'a qu'une incidence financière très faible, de l'ordre de 3 millions d'euros.

Sur ce point particulier, j'aimerais que vous nous précisiez, monsieur le ministre, si les périodes prises en compte pour l'Algérie, le Maroc et la Tunisie auront bien toutes, comme date butoir, le 2 juillet 1962.

Dans un même souci d'équité, il serait nécessaire d'examiner la situation des anciens combattants de 39-45 qui n'ont pas encore obtenu la carte du combattant et se trouvent de ce fait dans une situation semblable à celle des anciens d'AFN.

M. Georges Colombier. C'est vrai !

M. François Rochebloine. Par ailleurs, qu'en sera-t-il des vétérans des opérations extérieures ?

Toujours au titre des avancées du budget 2004, nous ne pouvons que nous féliciter que soient inscrits d'emblée dans le budget les crédits sociaux de l'ONAC, pour 1,5 million d'euros. Mais il serait abusif de considérer cette inscription comme une véritable mesure nouvelle de solidarité car, si elle évite d'avoir recours à la réserve parlementaire, elle n'apporte pas un euro de plus que l'an passé au monde combattant.

Quant aux orphelins victimes de la barbarie nazie, je me réjouis de la décision de M. le Premier ministre de leur appliquer une mesure d'indemnisation similaire à celle instaurée par le décret du 13 juillet 2000 en faveur des orphelins de déportés juifs. Il reste cependant à définir le périmètre d'application de cette mesure, sans perdre de temps, je l'admets volontiers, mais sans précipitation aucune, toute maladresse risquant de susciter de nouveau un sentiment d'injustice ou d'incompréhension. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de bien vouloir nous préciser dans quel délai ce dossier pourrait aboutir.

L'an passé, sur tous les bancs de cette assemblée, nous nous étions réjouis de la mise en œuvre d'un début de décristallisation pour les pensions des anciens combattants ressortissants des pays membres de l'ex-Union française, avec l'inscription de crédits pour un montant de 75 millions d'euros.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Paroles !

M. François Rochebloine. Le décret d'application vient enfin de paraître, ce 3 novembre : il était temps, vous en conviendrez.

Vous nous avez apporté, en commission, des assurances quant à l'utilisation des crédits inscrits sur le budget, assurances que nous aimerions voir confirmées aujourd'hui dans cet hémicycle.

Par ailleurs, il est dommage que ce début de décristallisation ne soit pas poursuivi en 2004.

J'en viens maintenant à la retraite du combattant, dont il faut rappeler le montant : 423,06 euros par an, soit 2 775 francs, juste de quoi s'offrir, pour un fumeur, cinq cigarettes par jour !

M. Maxime Gremetz. Et encore ! Sans la hausse du prix du tabac !

M. François Rochebloine. Si, avec la hausse, mon cher collègue ! (Sourires.)

L'an dernier, vous aviez laissé entendre qu'une mesure de revalorisation pourrait être envisagée en 2004. Nous constatons malheureusement qu'il n'en est rien, ce qui est profondément regrettable. Le monde combattant, comme les parlementaires, attend un geste significatif de votre part, monsieur le ministre. L'article 40 ne nous permet pas de déposer un amendement proposant une première étape dans la voie d'une véritable revalorisation avec un relèvement d'au moins trois points, pour un coût d'environ 50 millions d'euros. Vous seul, monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez le faire. Résistez à Bercy ! Le monde combattant saluera cette forme de courage.

S'agissant du droit à réparation, d'autres points - nombreux - auraient mérité d'être pris en considération. Cela dit, nous n'ignorons pas que, pour certains, il ne sera pas chose facile de donner entière satisfaction aux intéressés. Reste qu'en ignorant le problème, on entretient un contentieux très ancien dont je vous invite à mesurer les conséquences.

Ainsi, à propos de la simplification du mode de calcul du rapport constant, il n'y a rien de nouveau, sinon des promesses, que l'on renouvelle régulièrement. Depuis des années, Bercy s'arc-boute sur une formule que bien peu d'entre nous pourraient expliquer. Vous-même l'avez reconnu en commission. Sur ce dossier, s'il est une constance, c'est bien de ne rien vouloir changer !

Pour la campagne double, je ne puis que vous renouveler notre demande de création d'une commission tripartite qui permettrait, dans un premier temps, de bien appréhender le coût exact d'une telle mesure.

L'absence de revalorisation, pour cette année, du plafond majorable de la rente mutualiste du combattant, alors même que vous aviez envisagé, là aussi, de porter le plafond à 130 points cette année, sera ressentie dans le monde combattant comme une nouvelle déception, alors même que nous sommes en présence d'une mesure qui ne constitue pas une de ses demandes prioritaires, je me dois de le souligner.

Nous aurions aimé trouver dans ce budget le lancement de la collecte des témoignages des anciens combattants d'AFN. Cette action est indispensable dans la perspective d'une politique de la mémoire en direction de la troisième génération du feu. Nous vous serions reconnaissants de nous faire part de votre sentiment sur ce point particulier.

L'an dernier a été décidée la mise en place, au titre de la prise en compte des psychotraumatismes de guerre, d'un bilan gratuit en matière de santé psychique auprès des médecins spécialisés. Or un rapport publié en novembre 2002, rédigé par cinq médecins militaires, conclut au refus des propositions concrètes formulées par le monde combattant en matière de soins gratuits et de droit à réparation des victimes de traumas psychiques de guerre. Pourriez-vous nous fournir des éléments d'information sur ce dossier ?

Le temps me manque pour évoquer comme il conviendrait la reconnaissance équitable des services accomplis dans la Résistance et la défense des droits des résistants, qui sont inséparables du travail de mémoire. Ne laissons pas ce dossier aux oubliettes.

Je me réjouis, monsieur le secrétaire d'Etat, de l'attribution de la carte de ressortissant de l'ONAC aux veuves d'anciens combattants. Mais envisagez-vous de les faire bénéficier sur le prochain budget de la réversion de la retraite du combattant et du droit d'accès à la rente mutualiste ?

Avant de conclure mon propos, je souhaite revenir au choix de la date du 5 décembre comme journée nationale d'hommage aux morts pour la France pendant la guerre d'Algérie et les combats du Maroc et de la Tunisie.

L'annonce du décret m'a véritablement surpris - je vous l'ai écrit - et a suscité chez moi une réelle incompréhension.

La représentation nationale n'a pas été associée à cette décision, alors que notre assemblée, lors de la précédente législature, avait fait un autre choix. (« Eh oui ! » sur divers bancs.) Ce choix du Gouvernement m'apparaît contestable. Il n'a pas été fait dans cet esprit de concertation que vous aviez pourtant affiché, et encore moins dans un esprit consensuel.

Le Gouvernement a choisi une autre méthode, c'est son droit. Mais je fais observer qu'elle va à l'encontre des engagements du Président de la République, Jacques Chirac,...

M. Jacques Desallangre. Une fois de plus !

M. François Rochebloine. ... qui avait indiqué, le 24 mars 2002, alors qu'il était encore candidat : « La réflexion sur une date de commémoration doit se faire en concertation étroite avec les associations d'anciens combattants pour permettre l'adoption unanime - eh oui ! - d'une proposition de commémoration .»

M. Maxime Gremetz. U-na-ni-me !

M. François Rochebloine. La décision du Gouvernement ne règle rien. Elle ne fait qu'augmenter la confusion et vient alourdir le calendrier des cérémonies commémoratives spécifiques à la troisième génération du feu, en ajoutant une commémoration au 19 mars, qui gardera sa légitimité populaire, et au 16 octobre.

Ce choix imposé nous amène à poser la question du sens que l'on entend donner, à l'avenir, aux cérémonies patriotiques. Le fait que la date officielle n'ait aucun lien avec la réalité historique en fera une commémoration vide de sens, en particulier pour les jeunes générations. (« Très bien ! » sur divers bancs.) Que peut bien représenter le 5 décembre, dans l'esprit de nos concitoyens ?

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Rien !

M. François Rochebloine. Au mieux, rien ! A brève échéance, cette date pourrait donc disparaître du calendrier officiel, sombrer dans l'oubli et l'indifférence générale.

Est-ce ainsi que l'on renforcera la politique de la mémoire ? Est-ce ainsi que l'on parviendra à perpétuer le souvenir et à rendre l'hommage appuyé que l'on doit à la troisième génération du feu, notamment à ces dizaines de milliers de morts tombés pour la France en Afrique du Nord ?

Certainement pas. Aussi, comme beaucoup de mes collègues, toutes sensibilités confondues, je continuerai pour ma part à participer aux cérémonies du 19 mars, mais je ne participerai certainement pas à celles du 5 décembre !

A quelques jours des cérémonies du 11 novembre, auxquelles nous sommes tous très attachés, je ne puis que rappeler le sens qu'avaient voulu donner les poilus à la commémoration de l'armistice : « un acte au service de la paix ». Et ce doit être là le sens premier d'une commémoration.

Par ailleurs, dois-je rappeler que, à ce jour, plus de 20 000 conseils municipaux ont adopté un vœu en faveur du 19 mars, et plusieurs milliers de villes et villages ont une rue ou une place du 19 mars ? Cela devrait nous interroger. Pour en arriver à un tel résultat, et je sais que cette opinion est partagée sur de nombreux bancs de cet hémicycle, il aurait mieux valu ne rien changer à ce qui était fait précédemment.

M. Jean-Christophe Lagarde. Exactement !

M. Alain Néri. C'est vrai !

M. François Rochebloine. Le 5 décembre est-il le fruit du hasard ou d'une volonté que je préfère ne pas connaître ? Cette date n'apporte ni l'apaisement, ni la reconnaissance voulue.

Monsieur le ministre, « le hasard n'est pas mémoire ». Aussi, j'espère que le Gouvernement prendra la mesure du peu d'enthousiasme suscité dans le pays par cette décision.

Le 5 décembre, hasard du calendrier ? Peut-être. Mais savez-vous, mes chers collègues, que c'est aussi le jour anniversaire de la naissance d'un grand parti politique de la Ve République, trop tôt disparu !(Sourires.)

M. Jean-Christophe Lagarde. Récemment disparu !

M. Maxime Gremetz. Lequel  ?

M. François Rochebloine. Je vous laisse deviner, mon cher collègue !

Voilà, monsieur le secrétaire d'Etat, un ensemble de considérations qui font que le groupe UDF ne peut, en l'état, que s'opposer à ce budget. Croyez que c'est à regret que nous le faisons, mais c'est aussi par simple souci de cohérence avec nos choix antérieurs, conscients qu'il ne répond pas aux attentes du monde combattant et ne satisfait pas au droit à réparation que nous leur devons. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française, du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Charasse.

M. Gérard Charasse. Monsieur le secrétaire d'Etat, je me désole d'avoir à rappeler à cette tribune l'importance que devrait revêtir ce budget. Je me désole de devoir vous dire, à vous, que le compte n'y est pas.

Le compte n'y est pas pour à la carte du combattant.

Je pensais que, sur la réconciliation de l'histoire avec la mémoire, il y avait un consensus sur ces bancs. La précédente majorité a donné aux « opérations de maintien de l'ordre en Afrique du Nord » le nom qui revenait à cette violence et à ces déchirements, celui de « guerre ». Nous avons, dans cette voie, ouvert l'accès du TRN et de la carte aux anciens de ces campagnes ; il était du devoir du Gouvernement de continuer sur ce chemin. Arrêter les périodes éligibles pour le Maroc et la Tunisie aux dates correspondant respectivement à la résiliation de l'accord de protectorat de 1912 et à l'accord du 20 mars n'aide pas la réconciliation de l'histoire et de la mémoire.

Le compte n'y est pas non plus pour les retraites.

Vous annoncez 24 millions d'euros supplémentaires. En fait, les mesures nouvelles sont limitées à 3,5 millions d'euros dont 3 seront liés à l'incidence, sur les dépenses, de l'extension, à compter du 1er juillet 2004, de la carte du combattant, mesure que nous avons votée. Il vous reste donc 500 000 euros de marge de manœuvre : cela fait 43 centimes par assujetti ou 0,03 point d'indice. A ce rythme-là, il faudrait exactement 500 ans pour atteindre l'objectif de l'indice 48 ! Les anciens combattants apprécieront.

Le compte n'y est pas non plus pour les mesures sociales. Deux chiffres éclairent ce constat : 11 millions d'euros de moins sur les soins, 15 millions de moins sur la sécurité sociale.

Mais le pire, c'est sans doute ce que j'appelle le « démantèlement » de l'ONAC : je ne trouve pas d'autre mot.

Monsieur le secrétaire d'Etat, c'est lorsque les témoins des périodes de conflits disparaissent, lorsque, sur ce que furent le combat, la Résistance, l'honneur, la parole s'estompe, que l'effort de mémoire doit s'accroître.

Dans mon département de l'Allier, les mesures prises par vos prédécesseurs, M. Masseret et M. Floch, avaient permis de constituer une équipe. De jeunes historiens ont accompagné des anciens combattants, des anciens résistants, des anciens des camps, sur le chemin de leur propre mémoire. Au-delà des récits personnels, le sens de l'histoire, celui de l'engagement, celui du poids de sa propre vie face à la défense de son pays et des valeurs qu'il porte, vont rester. Or, dans l'Allier, l'équipe de sept personnes en perdra quatre. Une trace avait commencé de naître. Je ne peux pas approuver le choix du Gouvernement de l'arrêter là.

M. Maxime Gremetz. Sa décision est lourde à porter !

M. Gérard Charasse. Et pourtant, ce choix était prévisible. Je suis député de Vichy, une ville où l'on sait l'impérieuse nécessité de remettre l'histoire à l'endroit. Dans cette ville, le 10 juillet dernier, je vous avais demandé si vous étiez prêt à nous soutenir pour mener un travail de mémoire tendant à lever des ambiguïtés insupportables ; j'attends encore votre réponse.

Je conclurai sur deux remarques.

Les décrets d'application concernant les orphelins, vivement attendus par les intéressés, comme vous pouvez le comprendre, doivent être publiés rapidement, le rapporteur spécial de la commission des finances l'a dit,...

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. C'est prévu !

M. Gérard Charasse. ... sous peine de devoir discuter, dans quelques années, de mesures rétroactives ou de l'éligibilité des enfants des orphelins.

Deuxièmement, il faut ouvrir le débat sur les anciens des missions extérieures, qui sont aussi des anciens combattants.

Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai le regret de vous dire que les radicaux de gauche de cette assemblée ne voteront pas votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avant de donner mon avis sur le projet de budget pour 2004, je voudrais aborder deux points qui ne peuvent être ignorés.

Premièrement, le Gouvernement, il y a peu, a fait savoir qu'il étendrait l'indemnisation des orphelins de victimes des persécutions antisémites déportées et mortes en camp de concentration à tous les orphelins de victimes du nazisme, conformément à un de mes amendements, adopté par notre assemblée unanime.

M. André Chassaigne. Très bien !

M. Maxime Gremetz. Nous nous en félicitons et demandons, avec l'ensemble du mouvement des anciens combattants et victimes de guerre, que le décret sorte enfin et que tous les orphelins des victimes de la barbarie nazie soient effectivement bénéficiaires de cette indemnisation. Son périmètre ne doit pas être restreint, pour éviter toute nouvelle forme d'inégalité - celles qui existaient déjà, vous le savez, ont déjà suscité suffisamment d'émoi dans le pays et parmi les anciens combattants.

Deuxièmement, le Parlement avait voté, dans la loi de finances pour 2003, 78,4 millions d'euros de crédits pour procéder à une première étape de décristallisation des pensions et retraites des anciens combattants et victimes de guerre des anciennes colonies. Je ne fais de procès à personne mais force est de constater qu'il a fallu attendre jusqu'à la veille de ce débat pour que le décret voie enfin le jour. C'est maintenant chose faite ; il était temps, il était grand temps.

J'en viens maintenant au projet de budget pour 2004 proprement dit. Votre présentation fait état d'une augmentation de 14,10 % des crédits sociaux de l'ONAC, augmentation qualifiée de « remarquable », alors que la dotation budgétaire s'élève à 12 135 000 euros, soit exactement le même montant que dans la loi de finances initiale pour 2003 ! C'est dire, en réalité, qu'elle diminue, tout comme diminuent les crédits d'appareillage, les subventions de fonctionnement de l'ONAC, les remboursements à diverses compagnies de transport, les subventions, indemnités et pécules, le fonds de solidarité en faveur des anciens combattants d'Afrique du Nord, les pensions d'invalidité, allocations et indemnités diverses, les prestations remboursées par l'Etat au titre du régime général de la sécurité sociale des invalides de guerre, les soins médicaux gratuits et même les subventions en faveur des actions de mémoire, en chute de 186 500 euros. C'est incontestable, on ne peut pas dire le contraire.

Il est vrai que votre conception de la mémoire historique est tellement restrictive que votre gouvernement va parfois jusqu'à la soustraire de rendez-vous de l'histoire pourtant incontournables.

Mon ami et collègue Jacques Desallangre m'a laissé le soin de vous dire ce que nous pensons de la date de commémoration. Evidemment, votre commission Favier « sur mesure » vous a bien rendu service pour en finir avec la seule date historique ayant trait à la guerre d'Algérie : celle du 19 mars 1962 ! Je rappelle pourtant que l'Assemblée nationale, dans sa majorité - les témoins sont là -, avait décidé de la retenir. Il est particulièrement regrettable, permettez-moi de le dire, que le gouvernement de l'époque ait décidé d'interrompre le processus parlementaire, sans quoi la question aurait été réglée !

M. Jacques Desallangre. Eh oui !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. C'était le gouvernement Jospin !

M. Jean-Louis Idiart. Allons bon !

M. Maxime Gremetz. C'est vrai ou pas ? Oui, c'est vrai ! On a invoqué la nécessité de dégager une majorité des deux tiers pour légiférer sur ce point. Je ne suis pas d'accord !

M. Jean-Louis Idiart. On pourrait même supprimer le droit de vote...

M. Maxime Gremetz. La majorité, à l'Assemblée nationale, comme partout, c'est 50 % plus une voix. Inutile d'inventer, à la place, un système particulièrement antidémocratique ! C'est trop facile ! Je le dis comme je le pense, parce que j'ai l'habitude de parler clairement.

L'histoire est l'histoire. C'est pourquoi nous avons, pour notre part, déposé à nouveau une proposition de loi, tendant à retenir le 19 mars, qui est la date anniversaire du cessez-le-feu survenu en Algérie en 1962.

J'ai beaucoup de respect pour vous, monsieur le secrétaire d'Etat, mais, pour être honnête, la date choisie est étonnante. J'ai mieux compris après l'intervention de M. Rochebloine : si ce n'est pas l'anniversaire de l'UDF, ce doit être celui du RPR ! (Rires.) Mais je ne sais pas exactement, car ce n'est pas un fait historique...

Quoi qu'il en soit, remettre en cause la date historique du 19 mars est une insulte faite au général de Gaulle.

M. Jean-Pierre Grand. Le 19 mars, c'est la date des porteurs de valise du FLN !

M. Jean-Christophe Lagarde. Vous insultez les anciens combattants !

M. Jean-Pierre Grand. Et vous, vous oubliez les 200 000 harkis assassinés après cette date !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. N'importe quoi !

M. André Chassaigne. C'est un nostalgique du FLN !

M. Jean-Pierre Grand. Je suis gaulliste avant tout, monsieur !

M. Maxime Gremetz. Le général de Gaulle doit se retourner dans sa tombe, si je puis me permettre.

Ainsi se trouve caractérisé votre projet de budget : il tourne le dos à l'histoire et poursuit l'application de contrats d'objectifs et de moyens qui sacrifient les personnels des services départementaux de l'ONAC.

Certes, il contient deux mesures réellement nouvelles, qui résultent de l'action unie des associations d'anciens combattants, de résistants et de déportés victimes du nazisme.

D'une part, il accorde la carte du combattant pour quatre mois minimum de présence en Algérie, Tunisie et Maroc, comme le prévoit la loi. C'est une mesure d'équité, mais encore faudrait-il supprimer les dates butoirs, monsieur le secrétaire d'Etat, afin d'attribuer cette carte pour toute présence reconnue jusqu'au 2 juillet 1962, sans distinguer entre les périodes. L'amendement que nous avions déposé sur ce point a évidemment été rejeté, c'est regrettable.

D'autre part, des crédits sont prévus pour attribuer quinze points uniformes aux pensions de veuve de guerre et de veuve d'invalide ou de grand invalide. Il était temps !

M. Jacques Desallangre. Cette mesure n'interviendra qu'au mois de juillet !

M. Maxime Gremetz. Tout à fait. Merci, monsieur Desallangre, de veiller à la rigueur de mes propos. (Rires.)

M. le président. Vous n'avez pas besoin de souffleur, monsieur Gremetz.

M. Jean-Christophe Lagarde. De souffleur, peut-être pas, mais de directeur de conscience...

M. Maxime Gremetz. L'œuvre de notre groupe est toujours collective.

M. le président. C'est cela. Poursuivez plutôt, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Vous avez bien dormi, monsieur le président, mais pas nous. La séance a duré hier. Alors soyez plus tolérant.

M. le président. Je vous remercie de vous soucier de mon repos.

M. Maxime Gremetz. Soyez gentil, monsieur le président ; si vous m'interrompez, je parlerai toute la matinée !

M. le président. Vous vous interrompez vous-même !

M. Maxime Gremetz. Je ne le dirai pas deux fois ; vous êtes prévenu.

Toutefois, le plus remarquable, dans ce budget, ce sont les absences.

Rien pour le relèvement du plafond  majorable  des rentes mutualistes d'anciens combattants, malgré l'engagement que vous aviez pris devant l'Assemblée nationale.

Rien non plus pour la revalorisation de la retraite du combattant. C'est pourquoi notre groupe a déposé deux autres amendements, visant à obliger le Gouvernement à respecter ses promesses envers ceux qui ont droit à la reconnaissance de la nation. Mais ces amendements, eux aussi, ont été balayés !

Rien, enfin, pour les veuves d'anciens combattants, qui figurent aussi parmi les oubliés de ce budget. C'est pourquoi nous avons déposé un autre amendement, proposant la création d'un fonds national de solidarité en leur faveur. Il a malheureusement connu le même sort que les précédents : balayé !

Monsieur le secrétaire d'Etat, pour satisfaire le droit à réparation, les crédits existent, nous semble-t-il. Il suffirait d'avoir la volonté politique - je ne m'adresse pas seulement à vous, mais à l'ensemble du Gouvernement - d'utiliser les 109 millions d'euros retirés du budget et de les affecter à la satisfaction des légitimes revendications des anciens combattants, victimes de guerre et résistants.

Par respect pour eux, pour défendre leurs droits matériels et moraux à réparation, le groupe des député-e-s communistes et républicains s'abstiendra sur votre budget, s'il reste en l'état. Evidemment, si vous revenez sur vos choix et si vous examinez nos amendements avec intérêt, notre position de vote pourra évoluer positivement. Nous le souhaitons, car ce serait dans l'intérêt de l'ensemble des anciens combattants, mais aussi dans l'intérêt de la nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca.

M. Lionnel Luca. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce budget est un bon budget. Même s'il paraît en baisse, la diminution des crédits, pour la première fois depuis longtemps, est inférieure à l'évolution démographique, ce qui revient, en fait, à une augmentation des dotations.

La situation des veuves pensionnées sera améliorée. Avec 12 milliards de crédits nouveaux, leur indice de pension augmentera de quinze points.

L'harmonisation des conditions d'attribution de la carte du combattant AFN à quatre mois de présence, attendue depuis longtemps, représente 3 milliards d'euros.

M. Daniel Spagnou. Ce ne sont pas des milliards, mais des millions. Pour les veuves pensionnées aussi.

M. Lionnel Luca. En effet. Pardonnez mon euphorie, mais ce budget nous change tellement des précédents... (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. C'est le moins qu'on puisse dire !

M. Lionnel Luca. La différence, c'est que vous, vous appliquiez une diminution des crédits mécanique. C'est facilement vérifiable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Alain Néri. Quand vous voudrez ! Les anciens combattants ne se tromperont pas !

M. Lionnel Luca. La garantie de l'action sociale de l'ONAC est améliorée grâce à l'inscription de plus de 12 millions d'euros.

L'indemnisation des orphelins des victimes de la déportation, mesure d'égalité, met fin à la différenciation établie par le décret du 13 juillet 2000.

Les droits des anciens combattants sont revalorisés et les processus de décristallisation des pensions des anciens combattants originaires des anciens territoires de l'empire sont mis en œuvre.

Depuis votre arrivée au ministère, vous n'avez eu de cesse de réduire les fractures issues du conflit d'Algérie, en instituant une journée nationale d'hommage aux harkis, conformément à la volonté du Président de la République, et, plus récemment, en retenant la date du 5 décembre comme journée nationale d'hommage aux morts pour la France de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie.

Cette date a été choisie par toutes les associations du monde combattant représentées dans la commission présidée par Jean Favier, à l'exception d'une seule, sur la base du jour de l'inauguration du mémorial national.

Je ferai cependant deux remarques, monsieur le secrétaire d'Etat.

Si l'hommage officiel de la nation est désormais rendu chaque 5 décembre, il n'y a aucune raison que les autorités civiles et militaires s'associent à des cérémonies organisées à d'autres dates, qui n'ont plus de raison d'être. En clair, laisser les préfets apprécier l'opportunité de se rendre ou de se faire représenter à des cérémonies créant la confusion serait une erreur. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Claude Beauchaud. C'est une déclaration de guerre !

M. Lionnel Luca. Par ailleurs, il reste des combattants oubliés, qui ont pourtant chèrement payé leur engagement pour la République : ce sont les combattants d'Indochine, aussi bien les victimes des Japonais entre 1940 et 1945 que les soldats martyrisés par le Viêt-minh entre 1946 et 1954. Un hommage leur sera rendu le 7 mai prochain, jour anniversaire de la bataille de Diên Biên Phu, mais il serait souhaitable que cette date soit pérennisée, faute de quoi ils seront bien les seuls à n'avoir aucune journée du souvenir.

M. Philippe Vitel. Tout à fait !

M. Lionnel Luca. Vous affichez, dans votre budget, monsieur le secrétaire d'Etat, une ambitieuse politique de la mémoire, qui est l'une de vos priorités.

Dans ce cadre, il faut encourager la réalisation du mémorial de la France d'outre-mer, à Marseille, pour réhabiliter l'œuvre de la colonisation, qui a été trop souvent contestée, dénoncée ou simplement niée, sous prétexte de remise en cause du colonialisme.

M. Jacques Desallangre. Oh !

M. Lionnel Luca. L'Etat doit pousser ce projet, pour lequel la ville de Marseille peut compter sur le soutien des parlementaires, en particulier de ceux de la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur. Cet hommage est déjà une réalité authentique, vivante et en plein essor, au travers de la francophonie, qui ne serait pas ce qu'elle est s'il n'y avait pas eu la colonisation.

Enfin, toujours sur le thème de la mémoire, à trois jours de la célébration du trente-troisième anniversaire de la mort du général de Gaulle, on peut se demander si certains ne sont pas tentés de vouloir l'enterrer une seconde fois. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. Oui, vous !

M. Lionnel Luca. La parution d'un livre polémique et racoleur qui, sous couvert de vérité historique, n'a qu'un souci, celui de salir la mémoire de l'homme qui a rendu l'honneur et la liberté à la France et aux Français, est particulièrement scandaleuse et mérite d'être dénoncée.

Il est assez plaisant que celui qui veut faire du général de Gaulle « un raciste, sinon un criminel » ait eu jusqu'à présent comme amis politiques bon nombre de ceux qui, en étant les porteurs de valise du FLN, ont trahi nos soldats (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains)...

M. Maxime Gremetz. C'est indigne d'un tel débat !

M. Lionnel Luca. ... et se fasse ainsi l'allié objectif des nostalgiques de Vichy et de Tixier-Vignancourt.

M. Maxime Gremetz. Certains ont refusé d'aller en Algérie ! Il y en a un qui a dit « Je vous ai compris » et qui a donné le droit à l'indépendance !

M. Lionnel Luca. Il n'est d'ailleurs pas innocent que ce livre fasse si aisément référence aux États-Unis et soit publié quelques mois après que son auteur eut publiquement souhaité que la France soit aux côtés des États-Unis en Irak.

M. Maxime Gremetz. Et les résistants, c'était quoi ?

M. Lionnel Luca. Je souhaite que tous les élus de ce pays et les Français se rendent encore plus nombreux devant les stèles et les monuments le 9 novembre prochain, dans quelques jours, pour rendre hommage au général de Gaulle qui nous a redonné la fierté d'être français...

M. Maxime Gremetz. Oui ! Vous le reniez aujourd'hui !

M. Lionnel Luca.... et a refait de la France une grande puissance qui reste aujourd'hui encore une espérance pour la liberté du monde.

M. Maxime Gremetz. Vous n'avez jamais été gaulliste ! Vous ne connaissez pas l'histoire !

M. Lionnel Luca. Ce n'est surtout pas vous qui l'avez toujours combattu qui pouvez donner des leçons à ce sujet ! Lorsque le général de Gaulle est revenu au pouvoir, vous défiliez pour dénoncer le fascisme...

M. Maxime Gremetz. Mais il n'est pas bien ? Il ne faut pas rigoler !

M. Lionnel Luca. ... et le « général factieux ».

M. Maxime Gremetz. Nous avons appelé à voter oui au référendum pour la paix en Algérie ! Nous sommes même allés en prison pour cela !

M. Lionnel Luca. Alors, s'il vous plaît, un peu de décence ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Qu'est-ce que c'est que ce colonialiste ?

M. Lionnel Luca. Et fier de l'être ! Se faire insulter par ceux qui ont trahi la France...

M. Maxime Gremetz. C'est fini l'empire !

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, et lui seul a la parole, monsieur Gremetz !

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je n'entrerai pas, ce matin, dans un débat historique, je me contenterai d'une réflexion à la fin de mon propos.

Vous avez choisi dans votre budget pour 2004, monsieur le secrétaire d'Etat, deux grandes orientations, d'une part, reconnaître les services rendus et réparer l'invalidité et, d'autre part, mettre en œuvre des actions de solidarité à l'attention des anciens combattants et de leurs ayants cause et développer la politique de mémoire.

Si l'on peut se féliciter de ces deux axes, on ne peut que regretter la diminution du budget des anciens combattants de 3,12 % soit, en fait, plus de 5 %, compte tenu de l'inflation, qui fait suite à une diminution de 4 % en 2002. Le simple maintien des crédits avant ces baisses successives aurait pourtant permis de régler nombre de contentieux.

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Jean-Christophe Lagarde. Naturellement, le nombre d'anciens combattants se réduit chaque année, encore que ce ne soit pas le cas pour les ayants droit à la retraite du combattant. De nombreux problèmes demeurent. Aussi suffirait-il de maintenir les crédits au moins au même niveau, comme toutes les associations et de nombreux parlementaires le demandent depuis longtemps, afin de répondre aux attentes légitimes du monde combattant et, dans le même temps, de développer une politique de mémoire ambitieuse. Ne serait-ce que pour ce vice originel, le projet de budget que vous nous présentez aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'Etat, n'est donc pas acceptable et, comme l'a souligné mon collègue François Rochebloine, nous voterons contre.

Trois mesures vont cependant dans le bon sens. La revalorisation de quinze points d'indice pour les 130 000 pensions des veuves est la seule, à mes yeux, qui soit exempte de reproches.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Jean-Christophe Lagarde. Mais si le financement de la  décristallisation  des pensions des combattants des anciennes colonies françaises est bien prévu dans votre budget pour 2004 - je n'oserai dire à nouveau -, je m'indigne que cette décision, pourtant prise dans le précédent budget, n'ait pas reçu d'application en 2003...

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Eh oui !

M. Jean-Christophe Lagarde. ... car le décret d'application n'est sorti que trop tard. Qu'en sera-t-il, monsieur le secrétaire d'Etat, des 78 millions d'euros des crédits 2003 non consommés ? Seront-ils reportés sur 2004 ?

Par ailleurs, on ne peut que se féliciter de l'harmonisation des conditions d'attribution de la carte du combattant au titre de la guerre d'Algérie. Vous rétablissez l'équité entre conscrits, d'une part, et gendarmes et policiers, d'autre part, mais la décision prise par vos prédécesseurs en faveur de ces derniers reste à mes yeux une erreur démagogique.

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Jean-Christophe Lagarde. Il eût mieux valu, comme l'a rappelé François Rochebloine, s'aligner sur les « critères gendarmerie » de l'époque.

Malgré ces trois mesures positives, monsieur le secrétaire d'Etat, le compte n'y est pas. Alors que vous aviez laissé entendre, l'an dernier, qu'une revalorisation progressive du montant de la retraite du combattant était envisagée, rien de tel ne figure dans le projet de loi de finances. Vous savez pourtant quelle est l'attente des anciens combattants à ce sujet. Nous vous demandons donc que cette revalorisation intervienne de façon significative afin qu'à la fin de la législature la retraite des combattants passe de l'indice 33 à l'indice 48. Plus nous retardons la mise en œuvre de cette revalorisation, plus l'effort à fournir sera brutal pour honorer cet engagement, à moins qu'on ne s'apprête à le trahir.

Je souhaite également vous faire part de la préoccupation de toutes les associations d'anciens combattants en ce qui concerne la situation difficile, souvent même critique, de l'Office national des anciens combattants et des services départementaux qui assurent le service de proximité. Les anciens combattants sont particulièrement attachés à ce service, mais les moyens humains et matériels lui font cruellement défaut dans de nombreux départements.

Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, je tiens à vous faire part de mon sentiment en ce qui concerne la décision prise par le Gouvernement de choisir le 5 décembre comme journée nationale d'hommage aux morts pour la France des combattants de l'Afrique du Nord. Cette décision représente une véritable provocation pour la grande majorité des anciens combattants d'Algérie...

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Absolument !

M. Jean-Christophe Lagarde. ... et est en contradiction avec les engagements formels et écrits du candidat Jacques Chirac, qui s'était engagé en 2002 à ne rien faire sans unanimité. Souhaitant enterrer ce problème, vous n'avez fait, en réalité, que l'exacerber...

M. François Rochebloine. Absolument !

Plusieurs députés du groupe socialiste. Eh oui !

M. Jean-Christophe Lagarde. ... et vous allez contribuer, me semble-t-il, à ridiculiser l'Etat.

Monsieur le secrétaire d'Etat, de quel droit cette décision est-elle prise par le seul Gouvernement sans aucune discussion parlementaire, alors même qu'une proposition de loi contraire avait été votée ici, sous la précédente législature ?

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Jean-Christophe Lagarde. Est-ce cela la démocratie ? Au nom de quel mépris peut-on imposer un oukase contre la volonté de l'immense majorité des anciens d'AFN, en se cachant derrière une commission où étaient même appelées à siéger des associations, certes très honorables, mais absolument pas concernées par la guerre d'Algérie, comme les Résistants de la seconde guerre mondiale ?

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Jean-Christophe Lagarde. En démocratie, les voix se comptent par tête, par personne, non par groupe ou par association. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française,du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai beaucoup de respect pour vous, mais, au lieu de régler un problème, vous allez faire coexister deux dates légitimes : le 19 mars, reconnu dans 20 000 villes et villages de France, le 25 septembre, qui nous permet enfin d'honorer les harkis comme ils le méritent, et puis une date sans signification, sans histoire, sans valeur, celle du 5 décembre. Cette date est si vide de sens qu'on pourrait croire à une mauvaise plaisanterie.

Je conclurai mon propos, moi aussi, par une mauvaise plaisanterie, en vous disant que celui qui a pris cette décision connaît bien mal la météo française. En effet, le 5 décembre, il fait froid, il pleut souvent,...

M. François Rochebloine. Et il pleuvait ce jour-là !

M. Jean-Christophe Lagarde. ... ce qui est inconfortable pour commémorer. Pourquoi ne pas demander à Météo France de nous indiquer les meilleures dates, de mai, de juin, de juillet et d'août, puisqu'on ne se rattache plus à rien et plus à l'histoire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. C'est scandaleux de dire cela ! Il faut plus de sérieux sur un tel dossier !

M. Jean-Christophe Lagarde. Cela éviterait des rhumes à ceux qui commémorent et cela éviterait aussi à l'Etat de se ridiculiser un peu plus. Comme de nombreux élus de France, je continuerai à être présent le 19 mars. Le 5 décembre, je me souviendrai plutôt de la mort d'un célèbre peintre français, Claude Monet. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française, du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Didier Quentin.

M. Didier Quentin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, dans le contexte difficile que nous connaissons, ce budget me semble un bon budget, puisque l'effort par ressortissant est en hausse de 1,58 %, même si l'on peut regretter que son niveau ne reste pas identique d'une année sur l'autre en euros constants. Néanmoins, il traduit bien la consolidation des droits des anciens combattants et il répond à des attentes légitimes du monde combattant.

Vous mettez en œuvre de nouvelles mesures pour plus de justice, plus d'équité et plus de solidarité, des mesures réclamées depuis plusieurs années par l'ensemble des associations représentatives.

D'abord, vous augmentez de quinze points d'indice les pensions de veuves d'anciens combattants. Ainsi, 130 000 veuves pourront bénéficier de cette mesure qui permettra d'améliorer les conditions matérielles de personnes qui ont contribué pendant des années au mieux-être de leur conjoint : je pense en particulier aux veuves d'invalides.

Dans le même esprit, vous étendez l'attribution de la carte de combattant d'Afrique du Nord à tous ceux qui ont servi pendant quatre mois et réparez ainsi ce qui était ressenti par beaucoup comme une injustice profonde. Compte tenu des durées moyennes de séjour, ce sont 15 000 à 20 000 anciens d'AFN qui pourront prétendre à la carte du combattant pour un coût de 3 millions d'euros.

Enfin, vous répondez favorablement à la demande des orphelins de déportés, fusillés et résistants quelle que soit leur origine. Sur la base du rapport Dechartre, le Premier ministre a, dans un souci d'équité, pris la décision d'accorder à tous les orphelins des victimes de la barbarie nazie une indemnisation identique à celle dont bénéficient, au titre du décret du 13 juillet 2000, les orphelins de parents victimes des persécutions antisémites.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Jean-Christophe Lagarde. Excellente décision !

M. Didier Quentin. A cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous serais reconnaissant de nous indiquer si vous envisagez de donner un effet rétroactif au décret en préparation, qui vise à étendre cette mesure à tous les orphelins de déportés, fusillés et résistants.

M. François Rochebloine et M. Jean-Christophe Lagarde. Excellente proposition !

M. Didier Quentin. Au-delà de toutes ces mesures nouvelles qui vont dans le bon sens et des demandes formulées par Georges Colombier, que j'approuve, je tiens à me faire l'écho de trois préoccupations du monde combattant.

Premièrement, conformément à ses engagements, le Gouvernement a soumis au Parlement le processus de décristallisation des pensions des combattants originaires de l'ancienne Union française. Je vous serais reconnaissant, monsieur le secrétaire d'Etat, de nous apporter des précisions sur la mise en œuvre de cette mesure qui nous tient particulièrement à cœur.

Deuxièmement, depuis plusieurs années, il est demandé une revalorisation progressive des pensions militaires d'invalidité et de la retraite du combattant de l'indice 33 à l'indice 48 pour les porter de 420 à 611 euros par an. Cette mesure est certes d'un coût élevé, un peu plus de 80 millions d'euros, et nous sommes bien conscients des contraintes budgétaires, mais ne pourriez-vous pas la programmer en plusieurs étapes, sur l'ensemble de la législature ? C'est d'ailleurs l'esprit de l'amendement qui a été défendu en commission par Georges Colombier et que j'ai cosigné. Il vise à amorcer cette revalorisation en portant, dès cette année, de l'indice 33 à l'indice 36 le niveau de la retraite du combattant.

M. François Rochebloine. Très bien ! Nous sommes tous d'accord !

M. Didier Quentin. S'agissant, troisièmement, du devoir de mémoire, beaucoup d'anciens combattants de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc souhaitent l'édification d'un musée qui pourrait se trouver dans le Tarn et rassembler l'ensemble des documents de cette période douloureuse de notre histoire. Pouvez-vous faire le point sur l'évolution de ce dossier ?

Enfin, je ne voudrais pas terminer mon propos sans évoquer l'hommage officiel de la République aux combattants morts pour la France en Afrique du Nord. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous aviez annoncé une démarche reposant sur le dialogue et la concertation et vous vous y êtes tenu, ce qui contraste avec certaines palinodies passées. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

C'est ainsi que, sur la base du rapport de la commission présidée par l'un de nos plus éminents historiens, M. Jean Favier, la date du 5 décembre a été choisie.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Les historiens, c'est mieux que les élus du peuple ?

M. Didier Quentin. Cette date doit pouvoir rassembler l'adhésion du plus grand nombre et il serait désolant que des polémiques se poursuivent à ce sujet. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Gérard Charasse. Qui les alimente ?

M. Didier Quentin. Les Français me semblent avoir suffisamment de sujets de division pour ne pas se déchirer devant les monuments aux morts ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) J'espère donc de tout cœur que l'esprit d'apaisement prévaudra,...

M. Jean-Christophe Lagarde. Pourquoi le 5 décembre ? Pourquoi pas le 12 mai ?

M. Didier Quentin. ... d'autant plus que vous avez fort justement précisé que les autres dates retenues jusque-là, qu'il s'agisse du 19 mars ou du 16 octobre, conserveront leur valeur associative de recueillement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Gérard Charasse. Quel méli-mélo !

M. Didier Quentin. Ainsi donc, monsieur le secrétaire d'Etat, votre budget pour 2004 apporte des réponses à des dossiers prioritaires, tout en faisant - je tiens à le souligner - un effort particulier en faveur des dépenses sociales de l'ONAC, dont la contribution augmente de 14 % par rapport à 2003.

C'est pourquoi je le voterai volontiers en vous assurant de mon plus chaleureux soutien pour accompagner votre action auprès du monde combattant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jacques Desallangre. C'est courageux !

M. Gérard Charasse. Courage, fuyons !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État aux anciens combattants.

M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'État aux anciens combattants. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, les interventions que nous venons d'écouter me confortent dans une conviction : celle de l'attention que votre assemblée porte au monde combattant.

Pour un grand nombre de nos concitoyens, le monde combattant s'éteint avec la disparition des derniers Poilus de la guerre 14-18. Ce débat nous offre l'occasion de rappeler la réalité actuelle du monde combattant, ses attentes, sa générosité, son rôle social.

Il est heureux que les orateurs qui se sont exprimés ce matin, chacun avec sa sensibilité, aient rendu compte de la vivacité de cette communauté, si emblématique, si nécessaire à notre société par les valeurs qu'elle représente, ces valeurs qui ont conduit de nombreuses Françaises et de nombreux Français jusqu'au sacrifice suprême.

Avoir la charge des actions de l'Etat envers le monde combattant est une bien noble tâche, une mission importante. Non, vraiment, ce n'est pas une responsabilité « secondaire », comme certains pourraient le croire.

Exprimer les devoirs de la nation à l'égard des 4,5 millions de ressortissants que compte le monde combattant procède d'une exigence supérieure. Transmettre aux jeunes générations le sens des valeurs qui furent défendues dans les conflits du XXe siècle, c'est un devoir exaltant, croyez-le bien.

Mesdames, messieurs les députés, vos rapporteurs, M. Bertrand et M. Beaudouin, ont relevé les avancées inscrites dans notre projet de budget. Je les en remercie.

En revanche, je voudrais rappeler à M. Néri, à M. Gremetz et à M. Desallangre que la réduction inéluctable des moyens engagés ne saurait constituer la seule grille de lecture de ce budget,...

M. Jacques Desallangre. C'est ce que disent tous les ministres !

M. Maxime Gremetz. Un bon budget est un budget qui baisse !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. ...comme d'ailleurs de ceux qui l'ont précédé.

Je regrette, en effet, sincèrement que cette vision tronquée puisse perdurer depuis des années, comme elle fait peu de cas de l'évolution démographique du monde combattant, comme elle ignore aussi les efforts consentis par la nation pour répondre aux attentes des anciens combattants !

De ces efforts, le projet de budget que j'ai l'honneur de vous présenter ce matin porte maints témoignages.

Non, le droit à réparation ne se résume pas à la reconduite mécanique, d'année en année, de mesures figées qui auraient été décidées par exemple une fois pour toutes au lendemain de la Première Guerre mondiale.

Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, auquel j'ai l'honneur d'appartenir, a une tout autre conception de sa relation avec le monde combattant.

Comme M. Colombier a bien voulu le relever, c'est d'abord une relation fondée sur l'écoute. Ce gouvernement veille à répondre, dans le contexte économique que nous connaissons, aux attentes prioritaires.

Monsieur Bertrand, nous avons aussi cherché à participer au mouvement de rationalisation de l'action administrative. C'est notre devoir. Il faut apporter aux citoyens un service plus lisible, plus efficace et, quand cela est possible, moins onéreux pour les finances publiques.

M. Alain Néri. Encore des économies sur le dos des anciens combattants !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Telle est, depuis le début de l'année 2003, l'ambition du contrat d'objectifs et de moyens de l'ONAC, qui permet de pérenniser cette institution emblématique du monde combattant, et que le précédent gouvernement avait refusé d'agréer.

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Tout à fait !

M. Alain Néri. Alors vous allez accepter mon amendement !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Ce contrat vise à accompagner les évolutions du monde combattant en recentrant les capacités de cet établissement sur les besoins prioritaires qui s'expriment désormais en termes de solidarité et de mémoire.

Les faits ont donné tort à ceux qui, il y a un an, annonçaient la disparition prochaine de l'ONAC, dans les mois qui suivaient, disaient certains. L'ONAC est bien là, bien géré, bien structuré, et il respecte le contrat d'objectifs et de moyens voté à une majorité de 83 % par le conseil d'administration. La mise en œuvre de ce contrat se poursuivra jusqu'en 2007. C'est à son issue, monsieur Charasse, que l'on pourra en dresser un bilan définitif. Cela peut faire sourire, mais c'est la vérité.

Au terme de la première année, nous jugeons les résultats encourageants. Tout indique que le bilan final sera donc positif.

M. Alain Néri. Nous verrons en temps utile.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. La nomination à la tête de l'ONAC d'un nouveau directeur général,...

M. Alain Néri. Qui n'est plus issu du ministère de la défense !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. C'est un haut fonctionnaire !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. ... dont les compétences et l'expérience en matière de gestion sont reconnues, apporte, à cet égard, les meilleures garanties.

Nous avons aussi cherché à simplifier l'action locale de l'Etat dans le domaine de la mémoire.

La superposition des intervenants sur trois niveaux entraînait une certaine confusion. Il était urgent de rationaliser ce dispositif. C'est ce que nous avons fait. Désormais, les interventions en matière de mémoire locale procéderont prioritairement des services départementaux de l'ONAC, ce qui est conforme au contrat d'objectifs et de moyens.

Cette volonté de rationaliser, de dynamiser, de moderniser l'action de l'Etat en faveur du monde combattant s'exprime sans compromis à l'égard de son identité.

La structure retenue dans le cadre de la LOLF en est l'illustration parfaite. Un programme spécifique sera entièrement dédié au monde combattant. Il se déclinera en actions dans les domaines de la réparation, de la reconnaissance et de la mémoire.

De plus, une action relative à la politique de mémoire figure également dans le programme consacré à la relation défense-société.

J'en viens maintenant à la substance même de ce projet de budget pour 2004.

Comme vos rapporteurs et MM. Colombier, Luca et Quentin l'ont indiqué, il procure à chaque ressortissant une augmentation de 1,58 % des droits individuels. C'est sensiblement mieux qu'en 2003, où la progression était déjà de 0,68 %.

M. Alain Néri. Vous ne pouvez pas dire ça !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Mais il propose surtout des mesures nouvelles.

Tout d'abord, une mesure de justice : l'augmentation de quinze points des pensions de veuves de guerre, de veuves d'invalides et de veuves de grands invalides.

Ensuite, une mesure d'équité : l'octroi à l'ensemble des militaires ayant servi en Afrique du Nord la carte du combattant pour quatre mois de séjour sur ces théâtres d'opération, mesure ô combien réclamée les années passées, que le gouvernement précédent, dont certains font l'éloge, n'a pas eu les moyens de mettre en application. C'est chose faite !

M. Alain Néri. Les anciens combattants savent, eux, ce qu'on a fait pour la carte du combattant ! Vous ne les trompez pas !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Comme je l'ai indiqué à M. Beaudouin en commission, le Gouvernement est prêt à examiner la question de la date butoir.

Enfin, une mesure de solidarité : l'inscription de l'ensemble des crédits sociaux de l'ONAC au projet de budget.

Mais résumer ce projet de budget à ces trois mesures nouvelles ne rendrait pas compte de la totalité de l'effort consenti par la nation au profit du monde combattant.

Comme en 2003, nous poursuivrons l'année prochaine...

M. Alain Néri. Vous ne serez plus là !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. ... l'action de modernisation de ces deux piliers emblématiques que sont l'Office national des anciens combattants et l'Institution nationale des invalides.

J'ai déjà évoqué l'action engagée en faveur de l'ONAC. Je n'y reviens pas.

Pour ce qui concerne l'Institution nationale des invalides, le projet de budget propose une augmentation de la subvention de l'Etat. Cet effort supplémentaire permettra de revenir au niveau de 2001. Nous entendons ainsi accompagner la démarche de modernisation engagée par cette institution.

Je souhaite maintenant aborder deux mesures importantes qui ont été abondamment commentées par l'ensemble des intervenants.

La première figurait en tant que mesure nouvelle au budget 2003 : il s'agit de la décristallisation.

Je confirme à M. Quentin que tous les textes sont désormais publiés et applicables. Les crédits nécessaires sont entièrement disponibles. Quant au retard, il n'est pas simplement d'une année, mais de quarante ans. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Didier Quentin. C'est vrai !

M. Alain Néri. Qui a cristallisé les pensions au moment de l'indépendance ? Il ne faut pas falsifier l'histoire !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Quelques mois ont été nécessaires pour élaborer les textes d'application de la loi, mais je rappelle que cette décision fait suite à quarante années d'attente. Je ne voudrais pas alourdir mon intervention en relisant les interventions de certains qui ne laissaient aucun espoir. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. C'est M. Floch qui a mis en place la commission ! Ne racontez pas n'importe quoi !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants Je suis fier d'appartenir au gouvernement qui a mené à bien cette réforme.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je me dois de revenir à une question qui a retenu toute votre attention : l'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie.

Vous vous êtes mobilisés pour obtenir à leur égard un traitement équitable. Il y a tout juste un an, M. Gremetz avait déposé un amendement, adopté à l'unanimité, demandant au Gouvernement de présenter au Parlement un rapport à ce sujet avant le 1er septembre 2003.

Non seulement ce délai a été tenu, mais nous sommes allés au-delà d'une simple présentation juridique de la situation.

M. Jean-Christophe Lagarde. Bravo !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Par un courrier adressé au président de votre assemblée, le Premier ministre vous a informés en priorité de sa décision d'instituer, au bénéfice des orphelins des victimes de la barbarie nazie, un régime de réparation identique à celui instauré par le décret du 13 juillet 2000 pour les orphelins des déportés de la Shoah. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

Les interrogations qui entourent le calendrier de mise en œuvre de cette mesure sont légitimes. Il y a un passage obligé, c'est l'étude du périmètre d'éligibilité des bénéficiaires. Le Premier ministre m'a chargé de cette mission. Je ferai en sorte que les décrets soient publiés au plus vite.

Avec cette mesure essentielle, se précise le panorama des progrès accomplis au cours des seize derniers mois au service du monde combattant.

Permettez-moi de vous rappeler, la mémoire humaine n'étant pas toujours fidèle, les principaux éléments que nous avons souhaité mettre en place et les réponses que nous avons apportées au cours des dix-sept derniers mois :

La décristallisation, un serpent de mer, excusez le terme, qui remonte à plus de quarante ans ; la prise en charge de l'hébergement des cures thermales,...

M. Didier Quentin. Très bien !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. ... qui a pénalisé les plus modestes des anciens combattants ;

M. Alain Néri. La faute à qui ?

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Ils ne pouvaient plus bénéficier de cette possibilité de soins !

Le relèvement du plafond majorable des rentes mutualistes ;

M. Alain Néri. Le plafond n'a pas été augmenté cette année, vous le savez !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. La création de l'observatoire de la santé des vétérans ; l'aide à la détection des névroses traumatiques de guerre, la modernisation de l'ONAC et de l'INI ; la majoration des pensions des veuves ; l'harmonisation des durées de séjour en AFN pour obtenir enfin une harmonisation entre tous ceux qui ont participé à ces opérations qui sont devenues la guerre d'Algérie ; l'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie, le choix d'une date d'hommage aux morts pour la France pendant la guerre d'Algérie et les combats du Maroc et de la Tunisie, même si cela ne correspond pas à ce que souhaitaient certains d'entre vous. Il y a une date qui met fin une fois pour toutes à la polémique sur cette question.

M. Alain Néri. Non, ce n'est pas fini !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Enfin, l'inscription en base budgétaire de l'intégralité des crédits sociaux de l'ONAC.

Vous voudrez bien convenir avec moi que sont ainsi apportées des réponses concrètes à nombre de revendications, ô combien anciennes pour certaines d'entre elles, du monde combattant.

Certes, vous avez regretté que l'augmentation de la retraite du combattant ne figure pas au projet de budget pour l'année 2004.

D'autres choix ont prévalu. (Exclamations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)

M. François Rochebloine. Lesquels ?

M. Alain Néri. Il n'y a aucun crédit nouveau !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Nous avons expliqué dès l'année dernière que notre méthode s'appuie sur deux points essentiels : la concertation et la planification. Nous nous appuyons sur cette méthode et nous continuons à l'appliquer.

M. Jacques Desallangre. Pour gagner du temps !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Certains intervenants ont par ailleurs regretté que le dispositif du rapport constant ne fasse l'objet d'aucune mesure de simplification. Je suis tout à fait favorable à une révision du rapport constant.

M. Jacques Desallangre. Il fallait y réfléchir !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Je me suis engagé à ce que, dans les délais les plus courts possibles, puisse être présenté un modèle plus lisible. Je suis d'accord avec vous : celui qui existe actuellement ne permet pas une transparence tant au niveau de la méthode qu'à celui de la technique. Nous allons y remédier.

M. François Rochebloine. Chiche pour l'an prochain !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Je ne peux pas conclure le thème de la réparation sans m'exprimer sur un sujet qui mobilise l'ensemble des députés alsaciens et mosellans. Il s'agit, bien entendu, de l'indemnisation des RAD-KHD. Le dialogue qui s'est instauré, à mon initiative, entre les parlementaires et les dirigeants de la Fondation de l'Entente franco-allemande a conclu que la France, n'étant pas à l'origine du préjudice, ne saurait être impliquée dans une éventuelle procédure d'indemnisation.

Croyez bien que je reste cependant déterminé à apporter tout mon concours à la conclusion d'un accord sur cette douloureuse question.

Enfin, en réponse à Monsieur Colombier, j'ajouterai que les attentes des réfractaires au STO me semblent mériter un nouvel examen. J'espère que nous pourrons progresser vers une solution positive.

M. Georges Colombier. Merci !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Mesdames, messieurs les députés, j'en viens maintenant à la mémoire.

Vous savez combien elle constitue une mission prioritaire pour l'Etat et pour tous ceux qui sont chargés de la faire évoluer et de la transmettre aux jeunes générations. Nous multiplions les initiatives destinées à répondre notamment aux interrogations de la jeunesse, pour lui proposer des modèles de référence dans une société où, hélas, les repères font quelquefois si cruellement défaut.

C'est par exemple le sens des « Relais de la Mémoire » qui, le 18 juin dernier, avaient pour thème « la modernité des valeurs de la Résistance ».

Tout au long de l'année 2004, cette dynamique de la mémoire s'exprimera autour de trois événements importants : le quatre-vingt-dixième anniversaire de la bataille de la Marne, le soixantième anniversaire des débarquements de Normandie, de Provence et de la libération du territoire, enfin le cinquantième anniversaire de la bataille de Dien Bien Phu. A ce propos, j'assure M. Luca de notre attention à l'égard des anciens d'Indochine. Et, je suis pleinement ouvert au principe d'une éventuelle journée d'hommage qui leur serait spécifiquement consacrée.

Parallèlement, nous progresserons sur trois grands chantiers muséographiques de la plus haute importance : le nouveau musée d'Auschwitz, qui méritait une restructuration et une réfection de qualité. Les chantiers sont en cours. Une commission de spécialistes se penche sur ce projet. Mais aussi le mémorial de Schirmeck et le centre européen du Résistant déporté au Struthof, dont j'ai posé, il y a quelques mois, les premières pierres.

Dans le même esprit, différentes initiatives visent à ouvrir davantage les questions de mémoire sur la société civile. La mémoire partagée : dans quelques jours, je signerai les deux premiers accords de mémoire partagée, avec l'Australie et la République de Corée ; le tourisme de mémoire ; s'il est convenablement valorisé, captera l'attention de nos compatriotes, mais également de nombreux étrangers ; la collecte de la mémoire orale, à laquelle s'est intéressé M. Quentin : nos efforts se concentrent désormais sur la guerre d'Algérie.

A ce propos, la politique de mémoire, c'est aussi la recherche de l'unité dans l'hommage dû aux morts. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. C'est réussi !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Concernant précisément la guerre d'Algérie, plusieurs orateurs se sont exprimés amplement sur le choix du 5 décembre comme date d'hommage national aux « morts pour la France » en Afrique du Nord.

Je remercie ceux qui ont bien voulu saluer la démarche du Gouvernement et des associations.

M. Jean-Pierre Kucheida. Godillots !

M. Alain Néri. C'est une trahison de la troisième génération du feu !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Je n'ai jamais trahi, ce n'est pas aujourd'hui que je commencerai. J'ai rempli mon devoir, monsieur le député ; lisez ma biographie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Je le dis en toute franchise et en toute objectivité à M. Rochebloine et à M. Lagarde : j'ai la conviction que le 5 décembre, seule référence officielle actuellement,...

M. Jean-Christophe Lagarde. Référence à quoi !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. ... rallie déjà le plus grand nombre et je le constate dans tous les départements. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. C'est faux !

Mme Nathalie Gautier. Mensonge !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Quoi de plus naturel puisque cette date résulte d'une démarche de concertation et d'unité avec toutes les associations. Et c'est faussement qu'on a déclaré le contraire. Toutes les associations représentatives ont été consultées. Vous évoquez un mouvement associatif attaché à une autre date. J'ai reçu son président sept fois sur ce sujet.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Et alors ?

M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas correct !

M. Alain Néri. Consultez tous les anciens combattants ! Un homme, une voix ! C'est cela, la démocratie !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Il est normal de faire un tour d'horizon avec toutes les associations. C'est ce que nous avons fait. (Exclamations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur les bancs du groupe socialiste.)

Concertation par le débat, au sein de la commission Favier, qui a travaillé pendant plusieurs semaines et où dix voix sur douze se sont prononcées en faveur du 5 décembre. Dont acte ! (Exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Alain Néri. Cela ne veut rien dire ! Consultez tous les anciens combattants !

M. Jean-Christophe Lagarde. Vous rallumez la guerre !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Le Président de la République a décidé d'être sensible à ce débat, à cette concertation et à l'avis de cette commission, et c'est donc le 5 décembre qui a prévalu.

M. Jean-Christophe Lagarde. C'est ridiculiser l'Etat !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Je vous ferai remarquer qu'en dénonçant cette date du 5 décembre, vous ne tournez pas le dos aux vivants, vous tournez le dos à ceux qui ont sacrifié leur vie...

M. Alain Néri. Et vous, vous tournez le dos à l'histoire !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. ...et qui sont inscrits au fronton de ce mémorial.

M. Jean-Christophe Lagarde. C'est scandaleux !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Unité au sein de la commission Favier, puisque tout le monde était là, sans aucune exception. Le débat a eu lieu en présence de tous, ceux qui étaient favorables à la date du 5 décembre comme ceux qui ne l'étaient pas. (Exclamations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)

Mme Nathalie Gautier. Pourquoi pas un débat devant l'Assemblée !

M. Jean-Christophe Lagarde. Pourquoi avez-vous dessaisi l'Assemblée ? De quel droit ?

M. Alain Néri. Vous méprisez le Parlement !

Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est scandaleux !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Unité enfin, devant le symbole incontestable que représente cette date : l'hommage aux « morts pour la France »...

M. Jean-Pierre Kucheida. Ce que vous dites est malhonnête !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. ... ne peut en aucun cas être source de division.

M. Alain Néri. Scandaleux !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Comme cela été dit tout à l'heure, on ne peut pas avoir des différends devant un monument aux morts lorsque l'on a fait face confraternellement à l'adversité.

M. Didier Quentin. Vous avez tout à fait raison !

M. François Rochebloine. A qui la faute ?

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je conclurai mon intervention en disant l'admiration que m'inspire le monde combattant.

En étant moi-même issu, je pensais le connaître. Pourtant, au cours des seize derniers mois, je le dis avec gravité, j'ai découvert des facettes méconnues de sa générosité.

Jugez-en. Ce fut, au Vietnam, à proximité de Dien Bien Phu, la visite, en présence de petits écoliers vietnamiens, de cette école, créée par l'association des anciens prisonniers français des viets,  quelle générosité !

Mme Hélène Mignon. Et alors ?

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Qu'est-ce que cela a à voir ?

M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Ce fut cette initiative d'une grande association sur le thème « un ancien combattant, une mine en moins », qui finance une campagne contre les mines antipersonnel en Casamance.

M. François Rochebloine. Il y a encore beaucoup à faire dans ce domaine !

M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Nous avons, nous aussi, recherché une utilité internationale aux actions de l'Etat en direction du monde combattant.

C'est le sens de la mission confiée par le Premier ministre à M. Morel-A-L'Huissier, sur le thème de la reconversion du combattant dans les pays en sortie de crise.

Voilà comment nous concevons la politique de l'Etat en direction du monde combattant : moderne, volontariste, tournée vers l'extérieur, conforme, en quelque sorte, à l'exemple que nous offrent aujourd'hui les anciens combattants.

Après avoir déjà tant donné pour la France, ils témoignent encore d'un indéfectible attachement à la patrie et à la collectivité nationale.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, les actions que nous menons ne sont pas toujours spectaculaires, je vous l'accorde. Elles ne donnent pas lieu à de grandes manchettes dans les journaux, mais elles correspondent aux attentes de nos anciens combattants et c'est là l'essentiel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « Non ! » sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)

M. François Rochebloine. Et mes réponses ?

M. le président. Nous en arrivons aux questions.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je demande une suspension de séance.

M. le président. Avez-vous la délégation de votre groupe ?

M. Maxime Gremetz. Vérifiez auprès de vos services, monsieur le président.

M. le président. Je pose la question à qui je veux, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je l'ai et elle est valable pour quinze jours !

M. Alain Néri. Ça promet !

M. Maxime Gremetz. Je demande une brève suspension de séance de cinq minutes au moins pour m'entretenir, après le discours de M. le secrétaire d'Etat, avec les représentants des associations d'anciens combattants présents dans les tribunes. J'aimerais connaître leurs réactions car je ne veux pas prendre tout seul ma décision quant au vote de ce budget.

M. Alain Néri. Nous, nous les avons déjà auditionnés, nous savons ce qu'ils pensent !

M. le président. Je vous accorde cette suspension de séance mais je vous mets en garde, ainsi que l'ensemble de vos collègues : il nous reste une heure un quart et nous sommes loin d'avoir achevé l'examen de ce budget. Si nous retardons trop le débat, nous obligerons les représentants des associations à revenir cet après-midi. J'aimerais que l'on fasse en sorte de terminer dans la matinée si tout le monde est d'accord.

M. Maxime Gremetz. Tout à fait d'accord !

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures quarante-cinq, est reprise à onze heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Dans les questions, nous commençons par le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

La parole est à M. Lucien Guichon.

M. Lucien Guichon. Le budget du secrétariat d'Etat aux anciens combattants pour 2004 présente une mesure de réparation attendue, celle de l'indemnisation des orphelins de la barbarie nazie, indemnisation identique à celle dont bénéficient à juste titre, depuis le décret du 13 juillet 2000, les orphelins des victimes des persécutions antisémites.

Je me réjouis de cette mesure de justice et d'équité à l'égard des orphelins de tous les déportés fusillés et massacrés par les nazis, victimes hélas  nombreuses dans l'Ain, que je représente ici.

Toutefois, je vous demande, monsieur le secrétaire d'Etat, de bien vouloir préciser : premièrement, comment sera déterminée l'éligibilité des ressortissants à l'indemnisation ; deuxièmement, si les orphelins d'un "mort pour la France" seront les seuls indemnisables ; troisièmement, la date à laquelle l'indemnisation pourrait être mise en paiement.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Monsieur le député, je vous remercie de poser cette question, qui préoccupe tous ceux qui sont attachés au principe d'équité que défend le Premier ministre.

Celui-ci a décidé, vous le savez, d'indemniser les orphelins des déportés, des fusillés et des massacrés. C'est une mesure dont vous connaissez toute l'importance. Vous mettez en exergue la qualité de "mort pour la France" ; elle aura toute sa place dans le traitement juridique de cette question. Une étude est actuellement en cours afin de ne pas créer un sentiment d'injustice dans l'application du futur décret.

La question du calendrier a son importance, vous avez raison. Le travail a débuté. Nous souhaitons que cette phase soit la plus courte possible mais nous ne pouvons pas préjuger aujourd'hui le délai qui sera nécessaire à cette étude. Sachez tout de même que nous prendrons toutes les précautions pour qu'aucune autre injustice ne puisse se substituer à celle que nous voulons éliminer.

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. Ma question porte sur le même sujet que la question précédente. Cela prouve qu'elle touche la sensibilité d'une bonne partie de la population. Vous l'avez dit, monsieur le secrétaire d'Etat, un certain nombre de personnes éprouvent un véritable sentiment d'injustice et je souhaitais appeler votre attention sur le problème soulevé par le décret du 13 juillet 2000.

D'une part, ce décret a écarté les orphelins dont les parents non juifs déportés sont morts dans les camps. D'autre part, il a ignoré ceux dont les parents ont été fusillés ou massacrés par les nazis sur le territoire national.

Il n'est pas tolérable, vous le comprenez bien, de créer une distinction entre les victimes des mêmes exactions. C'est pourtant ce que le précédent gouvernement a fait, de manière maladroite.

Monsieur le secrétaire d'Etat, il y a tout juste un an, vous informiez notre assemblée que le Gouvernement confiait à M. Philippe Dechartre une réflexion sur les mesures à prendre en faveur des orphelins dont les parents furent victimes du nazisme. En effet, si chacun approuve à juste titre les dispositions du décret du 13 juillet 2000, ce texte ne doit pas faire oublier le profond chagrin de l'ensemble des orphelins.

A l'appui des conclusions du rapport Dechartre, le périmètre du nouveau dispositif d'indemnisation doit être prochainement examiné. Et je me réjouis que le Premier ministre ait décidé d'étendre le dispositif d'indemnisation à tous les orphelins des victimes de la barbarie nazie. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous en dire davantage sur ce dossier ? L'ensemble des orphelins de résistants, de déportés ou de fusillés seront-ils pris en considération ? J'associe à ma question les membres de la Fédération nationale des fils des morts pour la France, « Les fils des tués », qui ne veulent pas être oubliés une seconde fois.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Monsieur le député, cette inéquité qu'il nous est apparu nécessaire de corriger a été prise en compte dès l'installation de notre gouvernement. Nous avons demandé à M. Philippe Dechartre de nous remettre un rapport à ce sujet, ce qu'il a fait excellemment après avoir reçu tous ceux qui sont concernés, de près ou de loin, par ce dossier.

A la suite de la remise de ce rapport, le Premier ministre a, bien entendu, décidé de mettre fin à cette inéquité, tout en reconnaissant la légitimité de la décision prévue dans le décret du 13 juillet 2000.

Nous avons toujours reconnu la légitimité des bénéficiaires de cette mesure. Néanmoins, cela a suscité à l'intérieur du monde combattant un émoi auquel nous avons cherché à remédier.

Pour ce qui est de la définition du périmètre d'éligibilité, nous sommes en train d'y travailler. Nous faisons en sorte d'aboutir aussi prochainement que possible tout en nous assurant que les modalités d'application ne peuvent donner lieu à aucune injustice

M. le président. La parole est à M. Pierre Lasbordes,

M. Pierre Lasbordes. Monsieur le secrétaire d'État, dans un souci d'équité, le Gouvernement a décidé d'harmoniser les conditions d'attribution de la carte du combattant en Afrique du Nord en ramenant à quatre mois pour tous la durée de la présence minimale requise. Cette mesure répond à une demande forte et légitime du monde combattant. Je ne peux que me féliciter de cette disposition qui s'inscrit dans la démarche que vous avez engagée consistant à liquider par étapes un contentieux qui perdurait depuis longtemps.

Cependant, il demeure une revendication à laquelle il me semble important de répondre afin de satisfaire définitivement les revendications du monde combattant à ce sujet. Il s'agit de la question des dates butoirs pour l'attribution de la carte du combattant aux militaires en présence en Tunisie et au Maroc, dates qui, à ce jour, sont respectivement arrêtées au 20 mars et au 2 mars 1956.

Il est toujours difficile de fixer le point final d'un conflit. Cela s'avère, en l'occurrence, pour les opérations en Afrique du Nord. Par exemple, la médaille commémorative des opérations et du maintien de l'ordre a continué d'être attribuée par le ministère de la défense aux militaires présents au Maroc et en Tunisie jusqu'au 5 mai 1958.

En effet, il est à noter que des accrochages ont continué d'avoir lieu sur les frontières algéro-tunisienne et algéro-marocaine bien après 1956, et des militaires français ont pu se retrouver engagés sur ces territoires dans des opérations concomitantes aux événements en Algérie. Pour mémoire, qu'il me soit permis de rappeler la bataille de Bizerte, en Tunisie, qui s'est déroulée en juillet 1961.

Au vu de ces éléments et compte tenu de votre volonté de liquider les inéquités qui demeuraient en matière d'attribution de la carte du combattant, pouvez-vous m'indiquer, monsieur le secrétaire d'État, quelle est la position du Gouvernement concernant la demande du monde combattant de voir les dates butoirs pour l'attribution de la carte du combattant pour le Maroc et la Tunisie relevées à celle de l'Algérie, qui est arrêtée au 2 juillet 1962 ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Monsieur le député, dans ce dossier, l'essentiel, bien entendu, a été d'harmoniser les catégories de bénéficiaires de la carte du combattant. Je suis heureux de proposer aujourd'hui, en vous présentant ce projet de budget, l'harmonisation à quatre mois pour tout le monde.

Reste la question de la date butoir. Elle a retenu notre attention dès que nous avons eu connaissance du dossier. Le Gouvernement a l'intention de proposer le 2 juillet 1962 comme date butoir pour l'ensemble des combattants des trois territoires.

M. le président. Nous en venons aux questions du groupe socialiste.

La parole est à M. Jean-Pierre Kucheida.

M. Jean-Pierre Kucheida. Monsieur le secrétaire d'État, vous le savez, le Nord-Pas-de-Calais a été, pendant le premier conflit mondial, une région martyre, avec quelques autres, telles la Picardie, la Lorraine et l'Alsace. Nous avons alors connu des exactions inimaginables : dynamitage du château de Coucy, pas très loin de chez M. Desallangre, vergers rasés, ennoyage de toutes les mines, qu'il a fallu remettre en état, et j'en passe.

En 1940, le Nord-Pas-de-Calais a de nouveau subi des pertes effroyables. Je rappelle que la moitié des soldats français tués sont morts pendant la campagne de France dans le Nord-Pas-de-Calais. Louis Mexandeau, votre illustre prédécesseur, vient de publier un ouvrage, fruit d'un travail remarquable auprès des anciens combattants, qui fait revivre ces événements. C'est pourquoi je vous interroge aujourd'hui. Je crois que le pays a un véritable devoir de mémoire à l'égard de cette région.

Vous le savez, le Nord-Pas-de-Calais fut détaché de la France pendant cette période et rattaché à la Kommandantur de Bruxelles, c'est-à-dire que nous n'étions plus Français. Cela provoqué une résistance populaire massive et une répression d'autant plus féroce, entraînant des milliers d'exécutions et pas moins de morts en déportation. C'est donc bien là que la lutte armée contre l'occupant a débuté, avec une topographie différente de celle d'autres régions où la Résistance a sans doute pu être organisée plus facilement à la faveur de la géographie et de la géologie. Cela n'enlève rien, bien entendu, au mérite de la Résistance des autres régions, mais il convient tout de même de souligner les différences.

Cette Résistance première, avec des hommes comme Jacques Piette, Henri Henneguelle, Roger Pannequin, n'a donné lieu, à ce jour, ni à réparation, ni à repentance, ni à actions en justice contre l'inacceptable. Il convient de réparer ce scandale d'Etat, d'autant que la région Nord-Pas-de-Calais, détachée comme elle le fut du territoire national, ne saurait être considérée comme ayant inclus une partie des quarante millions de pétainistes, supposés ou réels.

En outre, avant la Résistance de Jean Moulin, la seule dont on parle aujourd'hui et à laquelle je rends hommage, une Résistance première, populaire et forte, est apparue dans le Nord-Pas-de-Calais. La répression y fut terrible. Pourtant, cette Résistance-là est restée totalement inconnue. Je demande que le secrétariat d'Etat fasse un effort sur ce point. Il importe, monsieur le secrétaire d'Etat, de réparer ce déni de mémoire qui est un scandale à la mémoire de ces morts qui ont résisté au moins autant qu'ailleurs.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Monsieur le député, je ne peux qu'être d'accord avec vous. Tous ceux qui ont offert à notre pays, le plus souvent dans des circonstances dramatiques, le sacrifice suprême doivent être regardés par nous-mêmes et par les générations futures avec le plus grand respect.

C'est pourquoi je me suis rendu, au cours des seize derniers mois, dans cinquante-huit départements, afin d'être au fait de l'histoire locale et nationale, et de rendre l'hommage qui est dû à tous ceux qui ont sacrifié leur vie. Je suis allé dans le Nord-Pas-de-Calais. Je souhaite que les élus, qui sont le ferment actif de ces régions, soient en contact avec nous afin de mettre en relief tout ce qui peut contribuer à transmettre la mémoire aux jeunes générations et à reconnaître, comme vous venez de le souligner, l'honneur qui est dû à ceux qui, hélas, pour la plupart, ne sont plus de ce monde.

Monsieur le député, je ne puis que m'inscrire dans une démarche de valorisation de ceux qui ont donné le meilleur d'eux-mêmes pour que nous vivions dans un espace de liberté.

M. Jean-Pierre Kucheida. Mais avec quels moyens ?

M. le président. La parole est à M. René Rouquet.

M. René Rouquet. Monsieur le secrétaire d'Etat, c'est peu de dire que la plupart des interventions des collègues qui m'ont précédé, y compris parmi vos propres amis, confirment la grande faiblesse de ce budget, qui aura globalement connu en deux ans une baisse de 24 millions d'euros.

Je souhaite à mon tour appeler votre attention sur un sujet auquel je suis, avec mon groupe, très attaché, qui préoccupe particulièrement le monde combattant et qui symbolise, à mon sens, le manque de cohérence entre le discours et les actes de ce gouvernement : la décristallisation des pensions.

Quel fossé, en effet, entre les annonces du site Internet de votre ministère, qui se targuait, ces dernières semaines, d'avoir « réalisé la décristallisation, conformément aux engagements pris », et la réalité, puisqu'il aura fallu attendre l'avant-veille de ce débat budgétaire pour voir publié le décret d'application tant attendu depuis plusieurs mois.

Monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi de dire, à mon tour, que la ficelle est un peu grosse et qu'une telle pirouette pourrait prêter à sourire si elle ne posait pas le problème de la sincérité politique face à un sujet aussi grave, et si ce gain de temps, donc d'argent, ne constituait pas, en définitive, une insulte pour ces combattants de l'armée française ressortissants des anciennes colonies, défenseurs du drapeau tricolore.

Aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande de bien vouloir préciser, non seulement à la représentation nationale, mais aussi au monde combattant légitimement attentif à ce débat, les raisons d'un tel contretemps. Comment les 75 millions d'euros du budget pour 2003 vont-ils être versés, selon quel calendrier d'application ? Comment sera financée la décristallisation pour l'année 2004. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Monsieur le député, je suis un peu surpris que les textes qui entourent cette décision ne vous soient pas connus dans leur substance, alors que vous êtes pourtant très averti. Néanmoins, cela me permettra d'éclairer tous ceux qui ont fait une lecture rapide.

En premier lieu, rien n'est perdu pour les anciens combattants, puisque cette mesure est de caractère rétroactif. La technique juridico-administrative qui nous a été imposée par le sérieux d'un tel texte, qui regroupe les ressortissants de vingt-trois pays, est seule en cause. Par conséquent, la difficulté était d'ordre technique, et je ne voudrais pas laisser croire à nos ressortissants que le délai imposé pour la mise en place du dispositif et la publication des décrets et arrêtés entraînera une perte financière. Il y a une rétroactivité, avec déchéance quadriennale.

En second lieu, la masse financière prévue à cet effet était de 72 millions d'euros mais elle a été augmentée de trois ou quatre millions. Ce n'est pas à vous, parlementaires, que j'apprendrai qu'elle est évolutive. Par conséquent, rien n'est perdu. Ce fonds existe et il correspond à l'objectif fixé par les dispositions législatives.

M. Alain Néri. C'est pour cela que vous n'avez rien prévu pour 2004 !

M. Jean-Claude Beauchaud. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite vous interroger sur les crédits en faveur de la politique de mémoire, qui suscitent des inquiétudes parmi les associations du monde combattant.

Celles-ci m'ayant interrogé, j'ai souhaité m'informer afin de leur répondre de façon honnête et documentée. J'ai donc compulsé les documents qui sont à ma disposition, en commençant par la plaquette que vous nous avez fait parvenir. J'y ai trouvé l'annonce d'un total de 23 millions d'euros. Je me suis alors reporté au fascicule budgétaire - le « bleu » -, pour y trouver les mesures nouvelles qui seraient à l'origine de cette spectaculaire progression des crédits « mémoire ». Je n'y ai rien trouvé. J'ai donc cherché dans l'agrégat 22 « Mémoire et solidarité, ONAC », mais je n'y ai relevé qu'une baisse du montant des interventions publiques.

Reprenant alors le rapport spécial de la commission des finances sur les crédits affectés aux anciens combattants l'année dernière, j'y ai relevé que les crédits consacrés à la mémoire s'élevaient pour 2003 à 14,259 millions d'euros. Une remarque m'a réjoui : le rapporteur spécial déplorait que la nomenclature budgétaire soit « inadaptée », et notamment que « la mémoire ne [fasse] l'objet d'aucune identification par agrégat ».

Je ne saurais mieux dire !

Il notait aussi que les crédits relevant du ministère de la défense étaient complètement noyés dans des articles généraux.

Monsieur le secrétaire d'Etat, pourriez-vous éclairer un modeste parlementaire qui n'est pas parvenu à se retrouver dans l'absconse présentation des crédits qui nous est proposée, et répondre à trois questions ?

Quel est le montant exact des crédits qui seront affectés à la mémoire en 2004 ? Comment se décomposent-ils ? Quelles sont les mesures nouvelles qui justifient l'écart avec l'année passée et qui vous permettent de qualifier l'exercice budgétaire pour 2004 d'« exceptionnel » pour la politique de mémoire, comme vous le faites à la page 41 de la plaquette de présentation de votre budget ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Alain Néri. A question précise, réponse précise !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. En effet, monsieur Néri !

Vous pensez bien, monsieur Beauchaud, que l'on ne peut passer sous silence la question de la mémoire, ni accepter qu'il n'existe pas de moyens budgétaires pour accomplir ce qui est, nous y insistons, une de nos principales missions.

Simplement, votre lecture est parcellaire : une bonne partie des fonds prévus pour la mémoire figure en effet, comme l'exige la nomenclature budgétaire, au budget de la défense. Or celui-ci n'est pas en discussion ce matin.

Je vais cependant satisfaire à votre demande : ces fonds s'élèvent à une vingtaine de millions. Je ne puis être plus précis, car je n'ai pas les chiffres du budget de la défense en tête. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri et M. Jean-Pierre Kucheida. Si vous-même ne le pouvez pas, qui va nous le dire ?

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Quelle agressivité !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Je vous dis simplement qu'il existe 20 millions, répartis, puisque vous voulez entrer dans les détails techniques, entre le titre III et une partie du titre IV du budget de la défense. Vous disposez de tous les documents et pourrez trouver par vous-mêmes le montant exact, à la virgule près, des sommes consacrées aux actions de mémoire. (Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Alain Néri. On n'a jamais vu ça !

M. le président. Nous en venons aux questions du groupe UDF.

La parole est à M. Gilles Artigues.

M. Gilles Artigues. Monsieur le secrétaire d'Etat, comme plusieurs de mes collègues, je me suis réjoui des avancées que votre budget comporte en faveur des veuves, et plus particulièrement de celles qui sont confrontées à des problèmes liés aux pensions de réversion. Il faudrait cependant aller plus loin et aider ces femmes qui, si elles n'ont pas été au front, ont néanmoins joué un rôle important pour la défense de notre pays. Elles aussi ont enduré des souffrances, tout en devant affronter des difficultés d'ordre financier.

Ma question porte donc sur la réversion des rentes mutualistes. Qu'entendez-vous faire en ce domaine ? Quel est votre point de vue sur les ressources que peuvent apporter ces rentes ? Quelles sont vos propositions quant à une réévaluation qui serait aussi, à mon sens, une façon d'exprimer la reconnaissance de la nation ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Vous souhaitez, monsieur le député, que les rentes de réversion servies aux veuves d'anciens combattants et victimes de guerre, lorsqu'elles ouvrent droit à majoration, soient majorées au même taux que si elles l'avaient été pour le conjoint décédé.

Je rappelle que la majoration de la rente mutualiste est instituée par le code de la mutualité en faveur des veuves et des orphelins. Toutefois, il ne saurait être question de majorer la pension de réversion que perçoivent les veuves lorsque le conjoint décédé avait lui-même souscrit un contrat de retraite mutualiste. En effet, la nature de cette pension est différente de celle des rentes souscrites par les veuves.

La situation des épouses des souscripteurs anciens combattants n'est pas pour autant ignorée puisque, dans l'hypothèse où leur mari avait opté pour la formule du capital réservé, le remboursement du capital souscrit, au décès du conjoint, est exonéré des droits de succession.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Gantier.

M. Gilbert Gantier. Monsieur le secrétaire d'Etat, c'est la date du 5 décembre qui a été choisie pour rendre hommage aux morts pour la France lors de la guerre d'Algérie ainsi que dans les combats du Maroc et de Tunisie. Il était en effet indispensable de renforcer la politique de la mémoire en perpétuant l'hommage rendu à l'ensemble de la troisième génération du feu, et tout spécialement à ceux qui sont tombés en Afrique du Nord.

Cette décision a cependant suscité chez les anciens combattants et dans leurs associations représentatives des réactions diverses : aux approbations se sont mêlés quelques signes d'opposition. Plusieurs associations ont déjà manifesté leur intention de faire du 19 mars une autre journée du souvenir. La démarche des responsables politiques ne peut être en aucune façon de créer ou d'alimenter une polémique : ce serait tout à fait indigne, au regard des nombreux morts et blessés dans les combats d'Afrique du Nord. (« Et le rôle du Parlement ? » sur les bancs du groupe socialiste.)

Monsieur le ministre, comment comptez-vous gérer cette double commémoration d'une page douloureuse de notre histoire tout en gardant au passé le respect qui lui est dû ?

M. Alain Néri. C'est au Parlement d'en débattre !

M. Jean-Pierre Kucheida. On ne va pas encore créer un comité Théodule !

M. le président. Messieurs, c'est le secrétaire d'Etat qui répond !

Vous avez la parole, monsieur le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Il est vrai qu'il n'y aurait pas lieu de débattre aujourd'hui si le gouvernement précédent avait été au bout de ses intentions ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Roatta. Très juste !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Grâce à la méthode de concertation mise en place par le Gouvernement, et grâce à la décision du Président de la République d'instituer une journée nationale d'hommage aux morts pour la France en Afrique du Nord, notre pays va enfin - et vous pourrez le constater par vous-mêmes - rendre officiellement hommage aux combattants tombés au champ d'honneur durant ce douloureux conflit.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Faites-le vraiment, alors !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Il est désormais établi que la commémoration du 5 décembre a une valeur officielle et sera organisée par les pouvoirs publics.

M. Alain Néri. Uniquement dans les départements, pas dans les communes !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Mais si ! Naturellement ! Nous sommes dans un pays de liberté, monsieur Néri ! Les dates choisies jusqu'à présent par les associations conserveront le statut associatif qu'elles avaient ou qu'on souhaite qu'elles aient.

M. Alain Néri. Vous ne pouvez pas faire autrement !

M. Jean-Louis Idiart. Les cessez-le-feu ont un statut associatif, maintenant ?

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Je le répète : nous sommes dans un espace de liberté. Aussi n'avons-nous pas à nous immiscer dans des affaires associatives. (« Heureusement ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Toutefois, je ne doute pas que le 5 décembre rassemblera non seulement les anciens combattants, mais tous les Français qui veulent que le monde combattant soit uni dans une cohésion réelle,...

M. Alain Néri. Pour le moment, c'est réussi !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. ...au lieu de se disputer, comme depuis quarante ans, devant un monument aux morts.

M. Alain Néri. Mais il n'y a même pas de manifestations communales ! Vous n'avez pas eu ce courage !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Quarante ans après la guerre d'Algérie, le temps n'est plus aux divisions, je vous le dis très franchement. Moi qui suis un des témoins de cette guerre,...

M. Jean-Pierre Kucheida. Pensez aussi aux autres témoins !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. ...je vous indique simplement qu'on ne peut continuer dans la polémique et dans le désordre. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Monsieur le secrétaire d'Etat, le décret du 13 juillet 2000 répondait enfin à une légitime mais bien trop longue attente des orphelins victimes de la barbarie nazie. Cependant, à cause de sa rédaction, il n'a apporté qu'une réponse partielle et a engendré une profonde inégalité entre les victimes. De nombreuses associations de déportés et d'anciens combattants ainsi que des parlementaires de tous bords s'en sont émus.

Au nom du groupe UDF, Charles-Amédée de Courson et moi-même avions l'année dernière interpellé le Gouvernement à plusieurs reprises sur cette injuste discrimination.

En effet, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2003, notre assemblée avait adopté à l'unanimité, le 15 novembre, un amendement que nous avions déposé. Cet amendement, identique à celui de Maxime Gremetz, visait à étendre le champ d'application du décret à l'ensemble des orphelins de déportés, sans exception. Hélas ! la mesure fut sacrifiée lors de son examen au Sénat.

Le 26 novembre, lors des questions au Gouvernement, le groupe UDF vous avait interrogé sur la réalité de la volonté du Gouvernement d'étendre le décret.

Pour répondre à un souci d'équité légitime et partagé par tous, vous aviez alors chargé l'ancien ministre et résistant Philippe Dechartre d'étudier la possibilité et le coût d'une telle ouverture. En réponse aux conclusions de son rapport, le Premier ministre a annoncé le 2 septembre dernier qu'il étendrait le dispositif d'indemnisation. L'UDF ne peut que se féliciter de cette décision.

Forts de celle-ci, donc, nous avons déposé un nouvel amendement le 17 octobre dernier, dans le cadre de la discussion du projet loi de finances pour 2004. Celui-ci avait un double objet. Il s'agissait tout d'abord de définir le périmètre des futurs bénéficiaires. Nous proposions la définition suivante : « toute personne mineure de moins de vingt et un ans au moment où l'arrestation est intervenue [...], ou dont la mère ou le père, durant l'occupation, a été déporté à partir de la France, a été fusillé ou massacré pour faits de résistance ou pris en otage et a trouvé la mort lors de son arrestation, de sa détention, de son transfert ou de sa déportation ». En second lieu, nous formulions une demande d'inscription budgétaire, sous une forme ou sous une autre, dès 2004.

Or, dans sa réponse, votre collègue le ministre délégué au budget nous a renvoyés à la création d'une commission.

Monsieur le secrétaire d'Etat, le temps presse. Les futurs bénéficiaires se font âgés. Plus vous tardez, plus l'injustice se renforce. On ne peut séparer plus longtemps en deux camps les victimes de la barbarie nazie. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)

Or aucun crédit budgétaire n'est inscrit où que ce soit pour 2004. La seule ligne de crédit, celle qui est inscrite au projet de budget des services généraux du Premier ministre, continue de ne prendre en compte que les cas visés par le décret initial.

Monsieur le secrétaire d'Etat, les familles ne sauraient, pas plus que nous tous, attendre la loi de finances pour 2005. Nous comptons sur vous pour présenter une inscription budgétaire devant le Sénat dès les prochains jours, car il ne serait pas digne d'attendre davantage. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Alain Néri. Vous pouvez toujours espérer !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Comme vous l'avez indiqué, monsieur le député, le Premier ministre a pris la décision de réparer ce qui nous apparaissait comme inéquitable. Un travail juridique vient de commencer. Nous ne connaissons pas encore, bien entendu, le périmètre qu'il nous permettra de retenir. Nous souhaitons que l'application soit, autant qu'il sera possible, exhaustive, de façon à ne pas créer des niches d'oubli, et partant de véritables injustices.

Aussi sommes-nous ouverts à toutes les propositions et suggestions, surtout lorsqu'elles émanent de parlementaires, pour définir un périmètre correspondant aux attentes de tous.

M. Pierre-Christophe Baguet. Faites au moins inscrire des crédits !

M. le président. Nous revenons aux questions du groupe UMP.

La parole est à M. Yannick Favennec.

M. Yannick Favennec. Monsieur le secrétaire d'Etat, je me réjouis que votre budget apporte un certain nombre de réponses concrètes aux attentes légitimes du monde combattant, en particulier sur trois points importants : la revalorisation des pensions des veuves d'anciens combattants, l'attribution de la carte de combattant d'Afrique du Nord pour quatre mois de service et l'indemnisation des orphelins victimes de la barbarie nazie.

Toutefois, de nombreuses associations d'anciens combattants regrettent que certaines demandes auxquelles elles sont attachés n'aient pu à ce jour être satisfaites.

J'attire notamment votre attention sur le décret du 11 janvier 2002 portant simplification administrative en matière de pensions militaires d'invalidité, qui a mis fin à l'allocation provisoire d'attente. Même si les délais de traitement des demandes ont été raccourcis, cette allocation est indispensable lorsque la pension d'invalidité fait l'objet d'une demande pour aggravation.

Quelles dispositions comptez-vous prendre pour remédier aux conséquences négatives de cette mesure pour les invalides de guerre ?

Je souhaite également soulever le problème de la suppression du remboursement de la taxe sur les contrats d'assurance automobile pour les amputés de guerre. Une solution rapide et équitable pourrait-elle être trouvée pour les personnes concernées ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Comme vous le savez, monsieur le député, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre prévoit le versement d'une pension d'invalidité à titre temporaire avant toute décision définitive sur la demande. En effet, en raison de l'afflux des demandes de pension d'invalidité après la Seconde guerre mondiale et de la durée de leur traitement eu égard aux moyens techniques alors disponibles, il fallait mettre en place un dispositif d'attente.

Aujourd'hui, les raisons historiques qui justifiaient la création de l'allocation provisoire n'existent plus. D'une part, le flux des premières demandes est faible ; d'autre part, les traitements sont devenus techniquement suffisamment élaborés pour que l'attente ne soit plus significative. Cela explique la suppression de l'allocation provisoire d'attente. J'ajoute qu'il n'est pas envisagé de revenir au système antérieur pour la bonne raison qu'il vaut mieux essayer d'avancer plutôt que de reculer s'agissant du traitement du dossier.

Par ailleurs, vous avez évoqué le problème de la suppression du remboursement de la taxe sur les contrats d'assurance automobile pour les amputés de guerre. Cette mesure a été prise il y a trois ans par le précédent gouvernement. Il faut être prudent s'agissant de la réouverture de ce dossier, monsieur le député. En effet, il ne faudrait pas que le retour à la situation antérieure se traduise, pour les intéressés, par des augmentations importantes des primes d'assurance. Je suis néanmoins prêt à me pencher sur cette question avec mon collègue du budget. Je vous informerai en temps utile.

M. le président. La parole est à M. Pierre Lasbordes.

M. Pierre Lasbordes. Les associations demandent depuis longtemps que la retraite du combattant soit portée de 33 à 48 points d'indice PMI. Certes, le coût de cette revalorisation de quinze points est important, ...

M. Alain Néri. C'est vrai !

M. Pierre Lasbordes. ... puisque l'augmentation d'un point induit une dépense de 16 millions d'euros. Au vu de cet élément, vous avez choisi de privilégier cette année, dans le contexte budgétaire que nous connaissons, le règlement de questions qui faisaient difficulté, comme l'amélioration de la situation des veuves pensionnées et l'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie, ce dont je me félicite. Cependant, la retraite du combattant est un acte de reconnaissance fort et doit rester un symbole significatif au regard des sacrifices consentis.

Lors de la discussion du PLF pour 2003, vous m'aviez ainsi rappelé que le Gouvernement était, tout comme vous, soucieux de la retraite de nos anciens combattants. Dès lors, monsieur le secrétaire d'Etat , vous serait-t-il possible de nous donner des précisions quant au calendrier de la démarche que vous proposez de mettre en place pour satisfaire cette demande ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Monsieur le député, comme vous l'avez justement souligné, ce n'est pas une opposition de principe qui nous a fait écarter du projet de loi de finances pour 2004 la revalorisation de la retraite du combattant. Nous avons simplement eu le souci de satisfaire les attentes prioritaires du monde combattant, dans une démarche de concertation.

M. Jacques Desallangre. Nous n'avons pas entendu la même chose  s'agissant des attentes du monde combattant !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Cette mesure légitime, qui attire notre attention, n'est donc pas écartée pour toujours. Le Gouvernement y reste attaché, comme vous, mais elle ne pourra être appliquée que progressivement. En effet , une revalorisation d'un point d'indice représente environ 16 millions d'euros. Or, pour qu'une telle revalorisation soit significative pour les intéressés il faut qu'elle soit de l'ordre de deux à trois points d'indice. Trois points d'indice, c'est plus de 50 millions d'euros. Une telle mesure est en concurrence, si je puis dire, avec d'autres. Il faut donc faire un choix budgétaire .

Depuis notre arrivée au pouvoir, nous respectons deux principes : d'une part, la concertation ; d'autre part, la planification. Cette mesure relève bien sûr de la planification et nous avons choisi des priorités, le plus souvent avec l'assentiment des associations représentatives.

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Monsieur le secrétaire d'Etat, je tenais à vous adresser toutes mes félicitations pour les mesures courageuses que vous avez su prendre (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains )...

M. Alain Néri. Il n'y en a pas beaucoup ! Deux, et elles ne sont pas financées !

M. Marc Le Fur....en ce qui concerne les conditions d'attribution de la carte du combattant. Je suis convaincu que cette mesure sera extrêmement appréciée dans mon département des Côtes-d'Armor, qui compte encore beaucoup d'anciens combattants qui ont fait leur devoir en Algérie.

En effet, le critère des douze mois de présence en AFN n'était plus très bien compris par ces personnes dans la mesure où leurs camarades policiers ou CRS pouvaient bénéficier de la carte du combattant dès lors qu'ils avaient effectué des séjours en Algérie totalisant au moins quatre mois de présence. Par, ailleurs, des anciens combattants sans carte  venaient discrètement aux monuments aux morts lors des cérémonies et se sentaient exclus, non reconnus.

Cette mesure est donc extrêmement positive. Mon souci est de connaître le nombre de ses bénéficiaires au plan national et, si possible, dans le département des Côtes-d'Armor.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Monsieur le député, le Gouvernement a en effet décidé d'octroyer la carte du combattant aux militaires présents durant au moins quatre mois en Afrique du Nord durant la guerre d'Algérie et les combats en Tunisie et au Maroc, dans le souci de supprimer l'inéquité qui existait entre les anciens combattants.

L'application de cette mesure au département des Côtes-d'Armor devrait se traduire par la délivrance d'environ un millier de cartes supplémentaires, soit nettement plus que ce qui était attendu pour des départements comparables. Ces cartes seront attribuées à partir de 2004 par le service départemental de l'ONAC aux intéressés qui en auront fait la demande. Le nombre des personnes concernées s'établira entre 12 000 et 15 000.

M. le président. Nous en revenons aux questions du groupe socialiste.

La parole est à Mme Claude Darciaux.

Mme Claude Darciaux. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez répondu à une question concernant la revalorisation de la retraite du combattant. Je regrette que celle-ci n'ait pas été un choix budgétaire prioritaire cette année alors que votre budget est en baisse de 7 % depuis deux ans et que certaines lignes budgétaires nous paraissent insincères.

Prenons l'exemple des crédits alloués au Fonds de solidarité , qui passent de 50 à 40 millions d'euros, alors que la majorité des anciens combattants d'Afrique du Nord a dépassé l'âge de soixante ans et que leur régime actuel basculera dans le régime de la retraite professionnelle. En définitive, une grande partie de cette ligne budgétaire ne sera pas utilisée et retournera dans les caisses de l'Etat. Il en est de même pour la majoration de la ligne budgétaire concernant la rente mutualiste, sachant qu'aucune amélioration du montant de cette rente n'est envisagée.

Ces sommes récupérées ne pourraient-elles pas financer la revalorisation de la retraite du combattant, qui s'élève aujourd'hui, je le rappelle, à 423,6 euros par an, soit 2 775 francs ? Je vous rappelle, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'en 2002 l'augmentation de cette retraite a été de 33 centimes d'euro, soit 2,16 francs. Quelle indécence ! Aucun début de revalorisation n'est prévu, contrairement à vos promesses. Une augmentation des points d'indice serait une étape importante. Je vous demande de faire en sorte que la revalorisation de quinze points d'indice intervienne durant cette législature, donc de prévoir une augmentation de trois fois cinq points d'indice.

La reconnaissance de la nation pour ces hommes qui se sont battus pour la défense de nos valeurs républicaines et pour la liberté ne doit pas être un vœu pieu. Elle doit se traduire par des actes. Quelles mesures envisagez-vous de prendre pour réparer cette injustice ? Peut-on enclencher un processus d'augmentation de la retraite des anciens combattants - vous venez de parler de planification - ? Leurs attentes sont fortes et légitimes . Ne pas y répondre serait leur faire offense. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M.  le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Madame la députée, comme vous venez de le dire, le Gouvernement n'a pas pu inclure la revalorisation de la retraite du combattant dans ses priorités de cette année. Je voudrais à cet égard apporter une précision pour en finir avec une confusion. La retraite du combattant n'est pas une retraite au sens habituel du terme.

M. Alain Néri. C'est vrai, mais cela ne change rien sur le fond !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Nos concitoyens confondent souvent ceci avec cela. Néanmoins, la légitimité de cette demande est entière. Je l'ai dit à maintes reprises ce matin : le Gouvernement tient absolument à lui apporter une réponse en temps utile. Cette revalorisation reste un objectif certain, mais, comme je l'ai également indiqué, le passage de 33 à 48 points ne sera possible que dans le cadre d'une planification adéquate, et c'est ce que nous essaierons de faire. Je rappelle aussi que, pour qu'une telle revalorisation soit significative pour les intéressés, il faudrait qu'elle soit de deux à trois points et de cinq points à la fin de la législature, ce qui représente entre 80 et 90 millions d'euros.

La définition des priorités, s'agissant des mesures en faveur du monde combattant, se fera, pour l'exercice à venir, selon le procédé que nous utilisons depuis le début de cette législature, c'est-à-dire en appliquant les principes de planification et de concertation. Cette mesure figurera parmi les priorités retenues, j'en suis persuadé.(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. Cela fait déjà deux ans de perdus !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Je ne peux pas décider tout seul du haut de la pyramide. Soit on accepte la concertation, soit on ne l'accepte pas. Si on l'accepte, il faut la respecter !

M. Alain Néri. La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a adopté à l'unanimité un amendement visant à revaloriser la retraite de trois points !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Je reste néanmoins très attentif à cette question, qui est l'une des priorités du Gouvernement.

M. Alain Néri. C'est une priorité en paroles !

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Gautier.

Mme Nathalie Gautier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le devoir de mémoire doit rester l'une des priorités du budget attribué aux anciens combattants. Pourtant, le recrutement des 100 « assistants-mémoire » prévu en remplacement des actuels emplois jeunes s'étalera jusqu'en 2007.

En 2004, seuls 67 assistants-mémoire prendront leurs fonctions. Ainsi, les services des archives de nombreux offices départementaux aux anciens combattants seront confrontés à une vacance de poste, ce qui, d'une part, va entraîner la paralysie du travail de classement et d'archivage, indispensable à la mémoire collective, et, d'autre part, retarder le lancement de la collecte des témoignages des anciens combattants d'Afrique du Nord, qu'il avait été convenu de réaliser au plus tôt.

De plus, aucun crédit n'est destiné à l'attribution de matériels supplémentaires pour les offices départementaux aux anciens combattants afin de mener à bien la campagne de regroupement des témoignages de nos anciens combattants, qui est nécessaire à la reconstitution de notre histoire.

Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous m'indiquer comment pourra se poursuivre ce nécessaire travail de mémoire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Louis Dumont. Le devoir de mémoire a été oublié ! On bloque les finances !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Madame la députée, vous venez d'évoquer deux points importants. La mémoire, comme je l'ai expliqué du mieux que j'ai pu dans mon intervention, est une priorité. Nous allons faire en sorte d'harmoniser les travaux des organismes chargés de la recherche, du recueil et de la stabilisation de la mémoire, et de les fixer sur des supports adaptés.

S'agissant de l'ONAC et des moyens qui lui sont consacrés, il y a quelques jours, un conseil d'administration de cet organisme s'est réuni afin d'étudier l'ensemble du budget pour 2004 et l'harmonisation des effectifs, eu égard aux contrats d'objectifs et de moyens. Je peux vous affirmer que cette réunion s'est déroulée dans la plus grande cordialité et sans que survienne la moindre réaction négative.

Je peux vous affirmer également que, dans tous les départements, les choses se mettent en place dans l'esprit du contrat d'objectifs et de moyens, conformément à ce que nous avions prévu.

M. Alain Néri. Oui, dans un esprit de réduction !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. On nous a pourtant prédit que l'ONAC connaîtrait avant trois mois des difficultés insurmontables, voire qu'il ne pourrait plus fonctionner. Or je constate que non seulement le travail se fait dans de bonnes conditions, mais qu'en plus une innovation extraordinaire en matière de mémoire et de solidarité est en train de se mettre en place, dans de très bonnes conditions et dans un esprit constructif de la part de tous les directeurs départementaux.

M. Alain Néri. C'est la méthode Coué !

M. Jean-Louis Dumont. Quand ils existent, car certains départements n'ont pas de directeur !

M. le président. La parole est à Mme Chantal Robin-Rodrigo.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Monsieur le secrétaire d'Etat, la représentation nationale a eu ici, en janvier 2002, un large débat quant au choix de la date la plus appropriée pour honorer et se souvenir de tous ceux qui sont morts pour la France en Afrique du Nord de 1952 à 1962, qu'ils soient civils ou militaires et quelle que soit la date de leur décès.

Notre assemblée a entériné, à une large majorité de 278 voix contre 204, la date du 19 mars.

M. Jean-Pierre Grand. C'est la date du FLN !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Les représentants du peuple avaient tranché. Il vous appartenait, monsieur le secrétaire d'Etat, de tenir compte de ce vote, de faire légiférer le Sénat et d'en finir, quarante ans après, en réconciliant le monde des combattants et en offrant enfin à la jeunesse une journée officielle pour honorer nos enfants morts pour la patrie, ...

M. Bernard Carayon. Pendant vingt ans, vous auriez pu le faire ! Depuis 1981 ! Quelle mauvaise foi !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. ...qu'il s'agisse des appelés du contingent, des militaires de carrière, des harkis ou des pieds-noirs.

La date du 19 mars est une date historique, puisqu'il s'agit de la date de la signature des accords d'Evian par le général de Gaulle. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Bernard Carayon. Journée de la honte !

M. Jean-Pierre Grand. Il y a eu 200 000 morts après cette date, égorgés par le FLN !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. C'est la date de la proclamation du cessez-le-feu ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Alain Néri. De Gaulle, réveille-toi !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Je n'ignore pas qu'il y a eu, après cette date, de terribles massacres. Il ne s'agit pas d'occulter ces drames.

M. Jean-Pierre Grand. C'est insupportable !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Je le sais d'autant mieux que je suis fille d'un militaire de carrière qui s'est battu en Algérie, et j'en suis fière. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Jean-Pierre Grand. C'est sûr ?

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Cela étant, la première guerre mondiale a-t-elle pris fin le 11 novembre et la suivante le 8 mai ? (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

En confiant à la commission Favier le soin de choisir cette nouvelle date, vous avez fait fi de la représentation nationale.

M. Jean-Christophe Lagarde. C'est vrai !

M. Jean-Pierre Kucheida. Un historien de pacotille !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. En entérinant le choix du 5 décembre, jour de l'inauguration du mémorial national par le Président de la République, date qui n'est qu'une date de convenance, un blanc dans l'agenda présidentiel, sans aucune valeur historique, vous avez commis une faute impardonnable.

M. Jean-Pierre Kucheida. En effet, c'est incroyable !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Cette date est une insulte aux anciens d'Afrique du Nord qui, comme les autres générations du feu, ont droit à une date historique et symbolique du souvenir et du recueillement.

M. Jean-Pierre Grand. Il y avait 364 autres jours dans l'année !

M. Bernard Carayon. Vous avez choisi celle de la honte et du déshonneur !

M. Jean-Pierre Kucheida. Vous, vous ne pouvez plus vous regarder dans une glace !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Cette date ne peut être que le 19 mars ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Bernard Carayon. Vous vous moquez des harkis ! Vous êtes complices des tueurs du FLN !

M. Jean-Pierre Grand. C'est scandaleux !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Plus de 20 000 villes ou villages commémorent d'ores et déjà le 19 mars.

M. le président. S'il vous plaît, mes chers collègues !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Des rues, des places portent cette date. La commémoration, instant privilégié du devoir de mémoire, renforce les liens entre les générations.

M. Jean-Louis Léonard. Et l'UNC, c'est quoi ?

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous le demande solennellement au nom de tous ceux qui sont morts pour la France dans cette terrible guerre : allez-vous abroger ce décret et revenir enfin à la raison en demandant non pas à une commission Théodule mais aux représentants du peuple que nous sommes de se déterminer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Rochebloine. Très bien !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Vous vous grandiriez en accomplissant cet acte de devoir et de courage. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Kucheida. Un historien comme Favier, c'est la honte ! Pacotille !

M. Henri Nayrou. Soyez honnêtes !

M. François Brottes. C'est scandaleux !

M. Jean-Pierre Kucheida. L'histoire jugera !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Madame la députée, je ne vais pas laisser dire des choses aussi graves. Je refuse ces invectives à l'encontre de l'historien de grande renommée qu'est Jean Favier. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Kucheida. Il aura la médaille de l'Elysée !

M. Yannick Favennec. Ayez au moins le respect de la personne !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Sur ce sujet, je me suis expliqué longuement et, si vous m'écoutez, peut-être allez-vous apprendre quelque chose. Je vais refaire une citation.

M. Jean-Pierre Kucheida. De Jean Favier sans doute ?

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. La voici : « Je tiens simplement à dire que s'il s'agit de décider qu'une date doit être officialisée pour célébrer le souvenir des victimes de la guerre d'Algérie, tout en laissant les partenaires de la conférence nationale en débattre, cela à mes yeux ne peut pas être le 19 mars, parce qu'il y aura confusion dans la mémoire de notre peuple. » Croyez-vous que ces propos émanent d'une personne de la sensibilité de notre majorité ? Pas du tout !

M. François Rochebloine. Cela n'a rien à voir !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Ils sont de M. François Mitterrand, à l'Elysée, le 24 septembre 1981. (« Bravo ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous voyez, le bon sens n'a pas de couleur !

M. le président. Mes chers collègues !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Vos propos révèlent un esprit partisan que je ne partage pas. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Mes chers collègues, pas d'invectives ! Chacun s'exprime librement. Pensez aux personnes qui vous regardent dans les tribunes !

Mme Nathalie Gautier. Respectez l'Assemblée !

M. le président. Nous en venons au groupe UDF.

La parole est à M. Francis Hillmeyer.

M. Francis Hillmeyer. Monsieur le secrétaire d'Etat, il y a tout juste un an, dans cette même enceinte, à l'occasion de la discussion budgétaire, je vous signalais le cas des anciens incorporés de force dans le RAD-KHD. Ils sont confrontés à la méconnaissance de leur souffrance depuis bientôt soixante années. Je ne suis pas le seul, vous l'aurez entendu ce matin, à être choqué par cet état de fait.

Vous avez fait preuve de bonne volonté en vous rendant à Strasbourg afin d'y rencontrer les parlementaires alsaciens et mosellans et le président de la Fondation de l'Entente franco-allemande, M. André Bord. Vous avez ainsi pu prendre la véritable mesure du problème, à la vérité plus important par le symbole et la reconnaissance que par les sommes en jeu.

Vous venez de dire que la France n'était pas à l'origine de ce problème et qu'elle ne saurait être impliquée dans la procédure d'indemnisation.

Avec tout le respect que je vous dois, je ne suis absolument pas d'accord avec cette vision des choses.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Francis Hillmeyer. Toutes les personnes qui ont été incorporées de force l'ont été parce que la France a laissé tomber l'Alsace pendant cette période. Ce coin de France où toutes les associations, avec ferveur, se retrouvent autour des monuments aux morts lors des cérémonies officielles, a toujours servi de variable d'ajustement entre la France et l'Allemagne.

Ces personnes, essentiellement des femmes, ont été obligées, forcées de travailler dans des usines d'armement au péril de leur vie. Ces personnes, atteintes par l'âge, sont de moins en moins nombreuses. L'Etat tarde. Bientôt, il n'y aura plus personne à indemniser. Seule subsistera cette injustice historique. Serez-vous le ministre qui nous annoncera avoir enfin réglé cette situation douloureuse ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. François Rochebloine. C'est une bonne question !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Monsieur le député, la question que vous venez de poser me tient à cœur. J'ai essayé d'y apporter une réponse. Je me suis rendu en Alsace pour y rencontrer l'ensemble des parlementaires d'Alsace et de Moselle.

Nous essayons de trouver une sphère d'entente cordiale entre la Fondation de l'Entente franco-allemande et les intéressés, les RAD et les KHD.

Je vous le confirme : la France ne se sent pas concernée par la réparation de dommages qui ne sont pas de son fait. C'est tout à fait clair et c'est d'ailleurs un avis que partagent la majorité des parlementaires d'Alsace qui m'ont écrit à ce sujet.

Toutefois, j'ai évoqué ce problème la semaine dernière avec M. le président de la Fondation de l'Entente franco-allemande. Nous allons faire en sorte que les parlementaires et le Gouvernement trouvent un accord et que le préjudice subi obtienne réparation, non pas en ponctionnant les finances étatiques, mais peut-être en s'entendant avec la Fondation de l'Entente franco-allemande.

Or le statut de cette fondation est particulier puisqu'il puise sa substance d'une part dans le droit français et de l'autre dans le droit allemand. Cela rend les choses très complexes. Actuellement, nous étudions une solution afin que ces personnes, majoritairement des femmes, puissent enfin recevoir la réponse qu'il convient. Nous serons présents, croyez-le bien, pour définir les termes d'une entente entre les deux parties.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite tout d'abord saluer la parole tenue : je pense à votre décision d'attribuer la carte du combattant d'AFN à tous ceux justifiant de quatre mois de séjour sur ces territoires. C'était une mesure attendue par le monde combattant.

Ma question concerne la politique de solidarité menée par l'Etat à l'égard des veuves de nos anciens combattants. Je peux témoigner, comme de nombreux parlementaires de toutes sensibilités, que nous sommes très fréquemment les témoins de véritables situations de détresse financière.

Ces situations ne peuvent nous laisser indifférents, même si elles sont, la plupart du temps, vécues avec beaucoup de dignité.

Vous me répondrez que la solidarité à l'égard des veuves de nos anciens combattants n'est pas absente de votre budget, et vous aurez partiellement raison. L'amélioration de la situation des veuves pensionnées, avec la revalorisation de 15 points d'indice pour 130 000 veuves, est une avancée sociale, et je sais que 12 millions d'euros représentent un effort budgétaire.

Mais cette mesure est par définition limitée aux veuves de guerre, aux veuves pensionnées et aux veuves d'invalides.

M. Alain Néri. Eh oui !

M. Jean Dionis du Séjour. Vous me répondrez aussi que la sécurisation de l'action sociale de l'ONAC, par l'inscription de 12,35 millions d'euros prévue dans la loi de finances, permettra au niveau local la prise en compte de certaines détresses exceptionnelles de veuves d'anciens combattants. Ce n'est pas négligeable mais nous attendons pour en juger les effets.

Monsieur le secrétaire d'Etat, pour la plupart des veuves d'anciens combattants dont le mari n'était ni grand invalide ni pensionné, ces mesures, il faut avoir le courage de le dire, ne changeront rien. En effet, les veuves d'anciens combattants ne peuvent obtenir la réversion de la retraite de combattant au décès de leur mari, et c'est normal.

Il y a place, il me semble, pour une vraie politique de solidarité en faveur de l'ensemble des veuves d'anciens combattants. Cette politique pourrait passer par la mise en place d'un fonds de solidarité, alimenté par les fonds rendus disponibles par la diminution rapide des bénéficiaires des fonds réservés aux anciens combattants et par la mobilisation des fonds de l'ONAC au niveau départemental, qui sont aujourd'hui affectés à la prise en compte ponctuelle de certaines détresses exceptionnelles.

Mme Nathalie Gautier. Très juste !

M. Jean Dionis du Séjour. Elle pourrait passer par la mise en place d'une allocation différentielle par rapport à un revenu minimum de solidarité auquel aurait droit chacune des veuves du monde combattant, que leur mari ait été pensionné ou non pensionné, valide ou invalide.

Monsieur le secrétaire d'Etat, le groupe UDF souhaite connaître vos intentions et celles du Gouvernement quant à l'opportunité de la mise en place d'une politique de solidarité à destination de l'ensemble des veuves du monde combattant. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Monsieur le député, merci pour votre question qui montre l'importance que vous portez à la situation des veuves et qui va me permettre de faire le point sur les actions menées en leur faveur.

Je ne reviens pas sur les mesures fortes qui sont inscrites dans le budget au bénéfice des veuves de pensionnés.

Les veuves d'anciens combattants ne sont pas pour autant oubliées. L'inscription en base budgétaire de l'intégralité des crédits sociaux de l'ONAC - 1,5 millons d'euros prélevés les années précédentes sur la réserve parlementaire - leur profitera largement. Près de la moitié de ces crédits sont en effet destinés à secourir celles et ceux qui sont en difficulté, et il y en a.

M. Jean Dionis du Séjour. Créez un vrai régime, monsieur le secrétaire d'Etat !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Comme vous pouvez le constater, le Gouvernement ne ménage pas ses efforts pour exprimer la reconnaissance de la nation à ceux qui sont dans le besoin et font partie de la grande famille des combattants.

M. le président. La parole est à M.Marc le Fur.

M.  Marc Le Fur. J'ai salué les évolutions très positives qui sont intervenues dans le domaine de la carte du combattant.

Permettez-moi de revenir sur la situation des veuves. La troisième génération, les veuves de ceux qui ont servi en Afrique du Nord et notamment en Algérie, est apparue. J'ai bien noté l'effort conséquent que vous avez consenti en leur faveur. Je partage aussi le sentiment qu'il faut prendre en compte deux catégories : les veuves de guerre et les veuves d'invalides de guerre. On ne peut pas laisser pour autant dans l'oubli les simples veuves de combattants. Mon souci est de connaître très concrètement le nombre de personnes concernées, le montant de l'effort budgétaire que vous nous proposez, ainsi que les réalités locales, dans un département comme le mien.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Monsieur le député, vous avez souhaité que le Gouvernement soit attentif à la situation des veuves d'anciens combattants. Les crédits sociaux de l'ONAC dont elles peuvent bénéficier sont désormais intégralement inclus dans le budget des anciens combattants, et je m'en félicite. Cela répond au souhait exprimé l'année dernière au sein de votre assemblée.

Ces crédits permettent un traitement individualisé de chaque veuve en situation de difficulté financière. Je considère néanmoins que le dossier n'est pas clos. Il faut rester attentif à ce que les situations sociales difficiles soient toutes prises en charge, objectif que j'ai fixé à l'ONAC et auquel j'attache la plus grande attention.

M. le président. A vant d'appeler la dernière question, j'indique à l'Assemblée que, sur le vote des crédits du titre III, des crédits du titre IV, de l'article 73, de l'article 74 et de l'amendement n° 124, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

M. Maxime Gremetz. Très bien ! J'allais le faire.

M. le président. Ces scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

M. le président. Nous en revenons au groupe socialiste.

La parole est à M. Jean-Claude Viollet.

M. Jean-Claude Viollet. Monsieur le ministre, alors que la loi du 30 septembre 1942 rendait mobilisables pour le travail forcé en Allemagne les hommes âgées de dix-huit à cinquante ans, qu'un autre texte du 16 février 1943 visait spécialement les jeunes classes, remplaçant le service militaire par le service du travail obligatoire, 600 à 700 000 d'entre eux refusaient de partir ou, contraints et forcés de rejoindre les usines d'outre-Rhin, profitaient de leur première permission en France pour rallier la clandestinité.

Ce sont ces hommes, ayant opté volontairement pour la clandestinité, devenus des hors-la-loi selon les forces allemandes d'occupation et le gouvernement français d'alors, qu'on appelle aujourd'hui les réfractaires. Par leur comportement courageux, ils ont privé la machine de guerre allemande de 1,5 milliard d'heures de travail. Par leur présence dans la collectivité, ils ont contraint l'Allemagne à maintenir en France occupée des milliers d'hommes qui lui ont fait défaut sur les théâtres d'opérations extérieures. Enfin, de nombreux actes de résistance ont été exécutés par des réfractaires, individuellement, sans liaison avec des groupes militairement organisés, dans le prolongement de leur acte premier d'insoumission et de résistance à la réquisition.

Ce faisant, les réfractaires encouraient la déportation, leur famille l'emprisonnement ou la destruction de leurs biens. Ainsi, ceux qui ne purent échapper aux recherches ont parfois servi d'otages à l'armée d'occupation, ont été exécutés ou déportés en représailles aux attentas contre ses soldats.

La loi du 22 août 1950 a établi le statut de réfractaire et reconnu leur mérite dans le combat contre l'occupant nazi. Son article 8, adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale et le Conseil de la République, a précisé que l'opposition aux lois et décrets de Vichy concernant le service du travail obligatoire, ayant porté un grave préjudice et comportant pour son auteur des risques graves, est considérée comme un acte de résistance.

Il est temps que notre pays reconnaisse enfin aux réfractaires leur droit imprescriptible à réparation ...

M. Richard Cazenave. Il faut que nous fassions tout ce que n'ont pas fait les socialistes !

M. Jean-Claude Viollet. ... en leur accordant la reconnaissance de la nation.

Pour ce faire, j'ai déposé, avec le président Jean-Marc Ayrault et l'ensemble des députés du groupe socialiste, une proposition de loi dans ce sens, en septembre 2003, rejoignant ainsi les initiatives déjà prises par nos collègues Gilbert Biessy, Yves Cochet et Georges Colombier.

La démonstration étant ainsi faite que la proposition d'attribuer le TRN aux réfractaires au STO rassemble sur l'ensemble de nos bancs, ne pensez-vous pas, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il est temps d'y satisfaire, comme l'a d'ailleurs suggéré notre collègue Georges Colombier dans le débat général ? Il conviendrait de la reprendre au nom du Gouvernement, dans l'esprit de consensus qui anime la représentation nationale sur ce point. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste .)

M. Richard Cazenave. Dommage que vous ne l'ayez pas fait plus tôt !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants.

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Comme je l'ai indiqué, certes rapidement, dans mon intervention liminaire, je suis conscient de l'attente des réfractaires au STO. En effet, les députés de tous les groupes de votre assemblée m'ont demandé à plusieurs reprises de trouver une solution .

Ces personnes souhaitent se voir attribuer le titre de reconnaissance de la nation. Or le TRN a été attribué officiellement par la loi en 1967 pour les militaires ayant pris part, pendant quatre-vingt- dix jours, aux opérations de « maintien de l'ordre » en Afrique du Nord, à une époque où ces opérations n'ouvraient pas droit à la carte du combattant.

Une loi de 1993 a étendu l'attribution du TRN aux participants à tous les autres conflits. Dès lors, c'est bien la participation à un conflit armé portant un risque d'ordre militaire qui constitue le principal fondement à l'attribution du TRN.

La situation des réfractaires au STO, bien que contraints de vivre dans la clandestinité et dans les conditions pénibles qu'on peut imaginer, ne répond pas à cette définition. J'ajoute que ceux qui ont rejoint la Résistance et ont participé à ses activités au moins pendant trois mois sont admis au bénéfice du titre s'ils présentent les justifications nécessaires.

Cela dit, cette situation mérite, je le dis en mon âme et conscience, un examen nouveau. Il convient de rechercher une réponse plus satisfaisante que celle-ci. Les attentes de ces réfractaires me semblent en effet légitimes.

J'espère que nous pourrons progresser sur ce dossier très important. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française .)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Alain Néri, pour un rappel au règlement.

M. Alain Néri. Mon intervention se fonde sur l'article 58 du règlement.

Je tiens d'abord à dénoncer le fait qu'en commission des affaires sociales, après avoir écouté M. le secrétaire d'Etat, nous n'avons pas pu avoir une discussion générale du projet de budget. En effet, M. le président de la commission nous a fait passer immédiatement aux amendements, ce qui constitue une première dans le fonctionnement de notre assemblée.

M. Richard Cazenave. C'est franchement grave !

M. Alain Néri. Ensuite, monsieur le président, nous venons d'avoir la liasse des amendements. Et je m'étonne de constater qu'un amendement, adopté à l'unanimité par notre commission et qui prévoyait une revalorisation de la retraite du combattant de 33 à 36 points sur proposition du rapporteur, ait été frappé par l'article 40 de la Constitution. Je comprends que vous ne l'avez pas repris à votre compte. Cela se justifie si l'on se réfère au règlement, mais cela ne l'est pas sur le fond. On pourrait penser que, lorsque l'Assemblée se prononce à l'unanimité, elle est entendue !

Enfin, j'avais déposé des amendements qui, certes, avaient été rejetés en commission. Mais je les ai redéposés hier après-midi et les ai transmis au service de la séance. Ces amendements n'ont aucune influence budgétaire.

Le premier visait à reconnaître une réalité que chacun peut constater : il est difficile aujourd'hui de parler uniquement de veuves, mieux vaut parler de « conjoints survivants ». Je ne vois pas ce qui empêchait cet amendement de venir en discussion car il est de bon sens et répond à la réalité.

Le deuxième amendement, qui ne tombait pas non plus sous le coup de l'article 40, visait à rendre hommage à la troisième génération du feu, en prenant en compte le fait que la guerre d'Algérie a effectivement été une guerre : sur les drapeaux et sur les étendards des régiments qui ont participé à la guerre d'Algérie serait inscrit le mot « Algérie ». Qu'un tel amendement ne vienne pas en discussion non plus ne peut que nous indigner !

Je demande donc, monsieur le président, que ces deux amendements soient soumis à la discussion de l'Assemblée nationale.

M. le président. Monsieur Néri, même si un amendement est adopté à l'unanimité en commission, s'il est irrecevable, il reste irrecevable. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. C'est le cas du premier, pas des deux autres.

M. le président. Ils ont été déclarés également irrecevables.

Reprise de la discussion

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je trouve que c'est lamentable ! Quelqu'un a même parlé de mascarade, voire de chambre d'enregistrement. Il n'a pas tort ...

Voyez nos conditions de travail.

Premièrement, nous déposons des amendements en commission et ils ne viennent pas en discussion. Nous en avions préparé quatre, que j'avais pourtant présentés en commission. Sachant qu'ils n'allaient pas être appelés, j'ai décidé de les présenter au moins à M. le secrétaire d'Etat et à l'Assemblée. Or, monsieur le secrétaire d'Etat, vous n'avez répondu à d'aucun. A quoi servons-nous ?

Je rappelle leur objet : revalorisation du plafond des rentes mutualistes ; institution d'une allocation différentielle d'un fonds de solidarité destiné aux veuves d'anciens combattants non pensionnés dans le besoin ; relèvement de trois points de l'indice de la retraite du combattant ; attribution de la carte du combattant d'Afrique du Nord.

Je décide d' exposer ces quatre amendements et vous ne me répondez sur aucun. C'est à vous démoraliser. Autant aller se coucher tout de suite  ! ( « Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais cela ne me démoralise pas, mes chers collègues, car vous allez vous coucher plus souvent que moi ! (Protestations sur les mêmes bancs.)

Deuxièmement, monsieur le secrétaire d'Etat, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, nous savons prendre en compte ce qui a bougé, car nous ne sommes pas des adeptes de la politique du pire. Nous déterminons notre vote en fonction des réponses que vous avez faites à nos propositions d'amendements. Malheureusement, il n'y en a pas eu ! Voilà pourquoi après avoir consulté les associations, nous voterons contre votre budget. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Richard Cazenave. Nous sommes rassurés !

M. le président. La parole et à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Certes, nos questions de fond étaient embarrassantes.

J'avais déposé un amendement sur la revalorisation de la retraite du combattant, proposant dans un premier temps qu'on passe à 48 points cette année ; il n'a pas été adopté en commission. J'avais déposé un amendement de repli, proposant de passer à 38 points ; il n'a pas été adopté en commission. Ces amendements ne viendront pas en séance et je le conçois, dans la mesure où ils ont été frappés par l'article 40.

Mais j'avais déposé deux autres amendements auxquels on ne saurait opposer l'article 40.

Monsieur le président, pour vous être agréable et être utile, pour permettre à l'Assemblée nationale de discuter dans des conditions convenables, je demande au nom du groupe socialiste une suspension de séance d'un quart d'heure afin que M. le secrétaire d'Etat et vous-même nous disiez pourquoi ces deux derniers amendements ne sont pas venus en séance et pour vous laisser le temps de les inscrire dans la discussion. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française .)

M. le président. Monsieur Néri, eu égard aux arguments que vous venez de développer à propos de ces deux amendements, je vous accorde une suspension de séance de cinq minutes. Cela nous permettra de procéder à certaines vérifications et de reprendre le débat dans des conditions normales.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures quinze, est reprise à treize heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

Pour répondre aux interrogations de M. Néri, la parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Compte tenu de la complexité et de la difficulté de compréhension que soulève l'application de l'article 40, je vais expliquer pourquoi ces deux amendements ont été déclarés irrecevables.

Le premier, qui est relatif aux mentions sur les drapeaux, est un « cavalier », c'est-à-dire qu'il n'a pas sa place dans une loi de finances et que, s'il était voté, le Conseil constitutionnel l'annulerait. Qui plus est, cette décision n'est pas de nature législative mais réglementaire. M. le secrétaire d'Etat m'annonce qu'elle est en cours d'étude. C'est pourquoi le président de la commission des finances, comme ses prédécesseurs, est obligé de le déclarer irrecevable.

Quant au second amendement, qui propose de remplacer la mention « veuve » par celle de « conjoint survivant », il vise bien à aggraver une charge publique et l'article 40 lui est opposable. Je m'inscris dans l'exacte continuité des gouvernements précédents. Je rappelle ce que j'ai dit il y a quarante-huit heures : lors des révisions constitutionnelles successives, la question s'est posée d'assouplir l'application de l'article 40 pour donner plus de latitude au Parlement. Mais aucun gouvernement n'a jugé bon de le faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Monsieur le président, je tiens à remercier le président Méhaignerie de me fournir ces explications en personne. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Poursuivez, monsieur Néri.

M. Alain Néri. Vous n'allez tout de même pas me reprocher de remercier M. Méhaignerie !

J'ajoute seulement que son argumentation ne m'a pas convaincu. Le premier amendement ne peut pas tomber sous le coup de l'article 40 puisque l'inscription du mot « Algérie » sur la soie de nos drapeaux n'entraîne pas de dépenses supplémentaires ! Et le second non plus puisqu'il s'agit de prendre en compte une réalité sociologique et démographique. Cet amendement aurait permis de régler la situation des futurs veufs, puisque nos armées comptent désormais dans leurs rangs des femmes qui pourraient être victimes de conflits.

Il arrive que, faute d'arguments, on se contente d'arguties. La représentation nationale prend acte, monsieur le président de la commission, de votre difficulté à apporter une vraie réponse à une vraie question et je prends à témoin ceux qui nous écoutent dans les tribunes.

M. Jean-Pierre Gorges. Démagogue !

M. le président. Pour en finir une bonne fois pour toutes, monsieur Néri, je vous donne lecture l'article 42 de l'ordonnance portant loi organique : « Aucun article additionnel, aucun amendement à un projet de loi de finances ne peut être présenté, sauf s'il tend à supprimer ou à réduire effectivement une dépense, à créer ou à accroître une recette, ou à assurer le contrôle des dépenses publiques. » C'est ce qui justifie le terme de « cavalier ». L'article 121 de notre règlement confirme : « Les articles additionnels et amendements contraires aux dispositions de l'article 42 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 précitée sont déclarés irrecevables dans les conditions prévues aux articles 92 et 98. »

M. Alain Néri. Je demande la parole pour prendre acte de cette réponse.

M. le président. A cette condition, je vous la donne.

M. Alain Néri. Tout le monde peut constater que ma question était suffisamment précise pour justifier des recherches approfondies.

M. le président. Preuve vous a été donnée que les textes qui se sont imposés aux gouvernements précédents avaient été appliqués à la lettre. On aurait pu éviter de perdre du temps.

Nous avons terminé les questions.

J'appelle les crédits inscrits à la ligne : « Anciens Combattants ».

ETAT B

Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

« Titre III : 40 532 euros ;

« Titre IV : 25 417 000 euros. »

Je mets aux voix le titre III.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

...............................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 97

          Nombre de suffrages exprimés 95

          Majorité absolue des suffrages exprimés 48

                Pour l'adoption 71

                Contre 24

L'Assemblée nationale a adopté.

Je mets aux voix le titre IV dans les mêmes conditions.

Le scrutin est ouvert.

...............................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 96

          Nombre de suffrages exprimés 96

          Majorité absolue des suffrages exprimés 49

                Pour l'adoption 71

                Contre 25

L'Assemblée nationale a adopté.

    J'appelle l'article 73 rattaché à ce budget.

Article 73

M. le président. « Art. 73.- L'article L. 51-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre est complété par les dispositions suivantes :

« Ces dispositions ne font pas obstacle à l'application en 2004 d'une majoration uniforme des pensions des veuves calculées en application des dispositions des articles L. 49 à L. 52. »

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial, a présenté un amendement, n° 125, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa de l'article 73, substituer aux mots : « les dispositions suivantes », les mots : « un alinéa ainsi rédigé ».

Quel est l'avis de la commission sur cet amendement rédactionnel ?

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 125.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je mets aux voix l'article 73, modifié par l'amendement n° 125.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

...............................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 96

          Nombre de suffrages exprimés 96

          Majorité absolue des suffrages exprimés 49

                Pour l'adoption 71

                Contre 25

L'Assemblée nationale a adopté.

Après l'article 73

M. le président. M. Beaudouin, rapporteur pour avis, a présenté un amendement, n° 109, ainsi rédigé :

« Après l'article 73, insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement remettra au Parlement, avant le 1er septembre 2004, un rapport qui répertoriera le nombre des anciens combattants âgés de plus de soixante ans dont les ressources sont inférieures au SMIC. Ce rapport envisagera également les moyens juridiques et le coût de la création d'une allocation permettant à chacun d'entre eux, ainsi qu'à leurs veuves, de combler l'écart entre les ressources dont ils disposent et le montant du SMIC. »

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Patrick Baudouin, rapporteur pour avis. Le débat sur la question de veuves a montré qu'il était temps de réfléchir à l'adaptation du droit à la réparation.

Cet amendement, qui a été adopté à l'unanimité par la commission, vise à demander au Gouvernement un rapport sur notre capacité à garantir demain à l'ancien combattant un « statut social » tel que je l'ai évoqué dans mon rapport.

Parce qu'ils se sont battus pour la défense de l'intégrité du territoire national et pour les valeurs de notre République, les anciens combattants et leurs ayants droit méritent de terminer leur vie dans des conditions d'existence décentes. Or force est de constater que ce n'est malheureusement pas toujours le cas. Le temps semble donc venu d'envisager autrement le droit à réparation des anciens combattants en mettant l'accent sur la solidarité nationale.

Ils bénéficieraient d'un statut social qui reposerait sur deux principes : les droits acquis ne seraient pas remis en cause et tout ancien combattant âgé de plus de soixante ans disposerait de ressources au moins égales au SMIC, l'écart éventuel entre ses ressources et le montant du salaire minimum étant comblé par une allocation spécifique. Ce dispositif aurait vocation à être étendu aux veuves.

M. Richard Cazenave. Ce serait une avancée sociale !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. La commission des finances n'a pas examiné cet amendement. A titre personnel, j'y suis tout à fait favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Je reconnais votre souci, monsieur Beaudouin, d'améliorer le dispositif de soutien aux anciens combattants. Comme vous le savez, celui-ci est déjà très complet et efficace. Beaucoup de mesures sont prises en faveur de l'ensemble des ressortissants et, en particulier, de ceux qui rencontrent des difficultés. Cela étant, indépendamment de nouvelles dispositions dont l'impact budgétaire mériterait d'être étudié avec attention, des progrès restent à faire pour rendre plus cohérent et plus lisible le dispositif de réparation dédié à ces derniers. Votre amendement me paraît répondre à un souci légitime. C'est pourquoi j'y suis favorable.

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Le groupe socialiste votera cet amendement. En effet, mettre en place une commission n'est pas une mauvaise chose. Mais cela ne répond pas à nos attentes. Ce ne sont encore que paroles, effets d'annonce et affichage...

M. Richard Cazenave. C'est un expert qui parle !

M. Alain Néri. ... car il n'y a aucun financement de prévu. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Michel Bouvard. La gauche n'a jamais été au pouvoir ?

M. Alain Néri. Nous aurions préféré que vous interveniez plus efficacement et que vous apportiez une vraie réponse aux anciens combattants. Vous en aviez la possibilité, monsieur le secrétaire d'Etat. Je ne dis pas que vous auriez dû adopter nos amendements. Fidèle à la tradition de ce gouvernement de ne tenir aucun compte des propositions de l'opposition, vous n'en avez retenu aucun. Mais vous auriez pu au moins écouter votre majorité et adopter l'amendement du rapporteur qui proposait de relever de trois points la retraite des combattants. C'aurait été un premier pas de franchi.

M. Richard Cazenave. Que ne l'avez-vous fait quand vous étiez au pouvoir !

M. Alain Néri. Nous voterons l'amendement proposé par M. Beaudouin, parce que sa proposition nous paraît intéressante, mais en rappelant bien que ce que nous attendons, ce ne sont pas des mots, ce sont des actes.

M. Richard Cazenave. Et vous, qu'avez-vous fait ?

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Nous sommes favorables à cette pétition généreuse. Je note d'ailleurs qu'elle est formulée avec beaucoup de prudence puisque le rapport ne fera qu'envisager les moyens juridiques et le coût de la création d'une allocation... Mais n'ergotons pas. Nous verrons avec intérêt le temps qui s'écoulera entre le vote de l'amendement et l'entrée en vigueur du dispositif.

Nous espérons, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous ferez le nécessaire pour gagner du temps, non pas en rampant, comme à votre habitude, mais en ...

M. Alain Néri. Allant plus vite !

M. Jacques Desallangre. ... économisant celui-ci au maximum afin que ce gain de temps écarte tout risque d'amoindrir la portée de cette mesure.

M. Alain Néri. Très bien !

M. Maxime Gremetz. Bravo !

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Le groupe UDF est favorable à cet amendement mais je souhaite le sous-amender pour remplacer la date du 1er septembre par celle du 1er juillet. C'est indispensable si nous voulons que le rapport qui sera remis au Parlement soit pris en considération dans la préparation du budget pour 2005. Autrement, les arbitrages et les cadrages budgétaires auront déjà été effectués et je crains que nous ne voyions rien venir l'année prochaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française, du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Je suis saisi d'un sous-amendement à l'amendement n° 109, qui porte le numéro 136 et est ainsi rédigé : « Dans l'amendement n° 109, substituer au mot : "septembre", le mot : " juillet ". »

Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Favorable également.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n°136.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n°109, modifié par le sous-amendement n°136.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

        Article 74

M. le président. « Art .74.- I.- Le dernier alinéa de l'article L. 253 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre est remplacé par un alinéa ainsi rédigé :

« Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre ou dans plusieurs des pays mentionnés au premier alinéa du présent article est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au cinquième alinéa du présent article. »

« II.- La présente disposition est applicable à compter du 1er juillet 2004. »

Nous procédons comme précédemment.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 92

          Nombre de suffrages exprimés 92

          Majorité absolue des suffrages exprimés 47

                Pour l'adoption 67

                Contre 25

L'Assemblée nationale a adopté

      Après l'article 74

M. le président. M. Néri, Mme David, MM. Beauchaud, Floch, Kucheida, Masse, Migaud, Rouquet, Mmes Carrillon-Couvreur, Darciaux, Robin-Rodrigo, M. Viollet et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 124, ainsi rédigé :

«Après l'article 74, insérer l'article suivant :

«L'existence de l'Office national des anciens combattants est garantie et pérennisée au-delà du contrat d'objectifs et de moyens ».

La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Depuis des années - et nous l'avons encore fait au cours de ce débat -, nous affirmons avec force notre attachement à l'ONAC, qui joue un rôle déterminant dans la politique de réparation, de mémoire et de reconnaissance. Nous avons toujours considéré qu'il devait être pérennisé et continuer de relever du secrétariat d'Etat aux anciens combattants.

Or, depuis l'an dernier, nous avons, comme les associations d'anciens combattants, de grandes inquiétudes pour l'avenir de cet office. Les crédits de fonctionnement diminuent. Le contrat d'objectifs prévoit une réduction des effectifs, alors que l'ONAC va prendre en charge, en plus de ses ressortissants habituels, si vous me permettez l'expression, les harkis et les veuves d'anciens combattants. En outre, du fait de l'adoption par l'Assemblée de l'extension de l'attribution de la carte de combattant aux anciens d'AFN dès quatre mois de présence, ...

M. Richard Cazenave. Voilà qui va simplifier !

M. Alain Néri. ... il va devoir délivrer entre 15 000 et 20 000 cartes de combattant supplémentaires, ce qui représentera un important travail.

Nous voulons avoir des garanties quant à la pérennité de l'ONAC, d'autant que la nomination par le secrétariat d'Etat de son nouveau directeur ne laisse pas de nous inquiéter puisque, pour la première fois, il n'est plus issu du ministère de la défense mais est un fonctionnaire du ministère des affaires sociales.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. C'est un excellent haut fonctionnaire !

M. Alain Néri. Nous craignons à terme une dissolution de l'office dans ce ministère. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Michel Bouvard. Vous voulez imposer une traçabilité des fonctionnaires ?

M. Alain Néri. D'où mon amendement, qui devrait recueillir l'unanimité. Puisque vous nous affirmez la main sur le cœur que vous ne voulez pas porter atteinte à l'ONAC, eh bien inscrivons sa pérennité dans la loi !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial. La commission n'a pas adopté cet amendement. Je serais tenté de dire que les termes employés par M. Néri et M. Desallangre à propos de l'amendement précédent le décrivent parfaitement : il est du ressort des « paroles » et de la « pétition » généreuse.

Il y a les paroles et il y a les actes. La mission sociale de l'ONAC est confortée par la mise en application du contrat d'objectifs et de moyens préparé à l'époque par Mme Parly et M. Floch, et la dotation de l'Etat est en progression. Cet amendement est donc inutile.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Comme je l'ai dit dans mon intervention liminaire, c'est l'honneur de ce gouvernement d'avoir garanti l'avenir de l'ONAC. En effet, le précédent gouvernement n'avait pas voulu agréer le contrat d'objectifs et de moyens !

M. Richard Cazenave. Le précédent gouvernement n'a rien fait !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Je suis effaré par vos commentaires sur le nouveau directeur de l'office. La nomination d'un haut fonctionnaire en conseil des ministres obéit à des règles précises.

Vous trouvez à redire au fait qu'il soit issu du ministère des affaires sociales et non de celui de la défense.

M. Alain Néri. C'est contestable !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. Mais quand c'était un préfet, dépendant du ministère de l'intérieur, qui le présidait, vous ne vous en êtes pas ému ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis. Silence éloquent !

M. le secrétaire d'État aux anciens combattants. L'ONAC dispose désormais d'une bonne lisibilité quant à son avenir grâce aux contrats d'objectifs et de moyens. Le conseil d'administration qui a eu lieu avant-hier l'a confirmé : la totalité de ses membres se sont félicités de la restructuration financière, matérielle et structurelle en cours.

J'ajoute que le contrat est respecté et se déroule parfaitement. Vous ne pouvez pas dire le contraire. On ne perçoit pas le moindre frémissement d'un mouvement social. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Votre amendement, monsieur Néri, n'a donc pas de raison d'être et le Gouvernement émet un avis défavorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. J'ai été également saisi d'une demande de scrutin public sur cet amendement.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 91

          Nombre de suffrages exprimés 91

          Majorité absolue des suffrages exprimés 46

                Pour l'adoption 30

                Contre 61

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

    Nous avons terminé l'examen des crédits du secrétariat d'Etat aux anciens combattants.

2

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SEANCES

M. le président. Aujourd'hui, à quinze heures quinze, deuxième séance publique :

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004, n° 1093 :

M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 1110) .

Intérieur

Sécurité intérieure et gendarmerie :

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 27 du rapport n° 1110).

Sécurité intérieure :

M. Gérard Leonard, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (tome II de l'avis n° 1115).

Sécurité civile :

M. Thierry Mariani, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (tome III de l'avis n° 1115).

Administration générale et territoriale :

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 28 du rapport n° 1110).

Collectivités locales :

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 29 du rapport n° 1110).

Administration générale et collectivités locales :

M. Manuel Aeschlimann, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (tome IV de l'avis n° 1115).

Tourisme

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 23 du rapport n° 1110) ;

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome XI de l'avis n° 1112).

A vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures quarante .)

      Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT