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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 13 NOVEMBRE 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mercredi 12 novembre 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Questions au Gouvernement «...».

LICENCIEMENTS «...»

MM. François Asensi, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

FORUM SOCIAL EUROPÉEN «...»

MM. Eric Raoult, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

SUPPRESSIONS D'EMPLOIS DANS L'INDUSTRIE «...»

MM. Christian Bataille, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

LUNDI DE PENTECÔTE «...»

MM. Yvan Lachaud, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

MEURTRE D'UN GARDIEN DE LA PAIX À PARIS «...»

Mme Françoise de Panafieu, M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

DÉLAIS DE JUGEMENT «...»

MM. Alain Marsaud, Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice.

INTERMITTENTS DU SPECTACLE «...»

M. Patrick Bloche.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE DE Mme HÉLÈNE MIGNON

2.  Loi de finances pour 2004 (deuxième partie). Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

LOGEMENT (suite) «...»

Réponses de M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, aux questions de : MM. Daniel Boisserie, Jean-Louis Dumont, Mmes Annick Lepetit, Sylvie Andrieux-Bacquet.

Equipement, transports, logement, tourisme et mer
Etat B
Titres III et IV. - Adoption des crédits inscrits
aux titres III et IV «...»
Etat C
Titres V et VI. - Adoption des crédits
inscrits aux titres V et VI «...»
Suspension et reprise de la séance «...»
SANTÉ, FAMILLE ET PERSONNES HANDICAPÉES «...»

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial de la commission des finances.
M. Michel Heinrich, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, pour la santé.
Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, pour les personnes handicapées.

PRÉSIDENCE DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE

Mme la rapporteure pour avis pour les personnes handicapées.
Mme
Hélène Mignon,
M.
Jean-François Chossy.

PRÉSIDENCE DE Mme HÉLÈNE MIGNON

M.
Jean-François Chossy,
Mme
Jacqueline Fraysse,
MM.
Jean-Luc Préel,
Jean-Marie Le Guen,
Serge Roques,
Jean-Marc Nesme,
Claude Leteurtre,
Jean-Pierre Le Ridant,
Marc Bernier.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
3.  Nomination de députés en mission temporaire «...».
4.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Nous commençons par une question du groupe des député(es) communistes et républicains.

LICENCIEMENTS

    M. le président. La parole est à M. François Asensi.
    M. François Asensi. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    Depuis juin 2002, près de 180 000 emplois ont été supprimés en France. Chaque jour, la liste des licenciements s'allonge, et votre gouvernement, monsieur le ministre, s'avère incapable de freiner cette catastrophe sociale.
    L'affaire Michelin a révélé au grand public que, désormais, des entreprises pouvaient licencier même en étant prospères. Exiger aujourd'hui un rendement des actions de 10 à 15 %, alors que l'économie ne progresse que de 1%, c'est une entreprise de déstabilisation du travail dirigée contre emploi.
    Les salariés de LU à Calais et Ris-Orangis ont récemment demandé aux juges de Boulogne-sur-Mer l'annulation du plan social car, derrière le prétexte du licenciement économique, s'affiche avec cynisme la nature boursière de ces licenciements. La véritable casse du travail cachée derrière ce plan social vise à favoriser les actionnaires au détriment des salariés. Le prétexte avancé ne respecte pas la définition de la Cour de cassation, qui ne reconnaît la réorganisation pour motif économique que si, et seulement si, elle vise à sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, ce qui suppose une réelle menace.
    Alors que vous prétendez vouloir réhabiliter le travail, vous laissez faire ces pratiques favorisant les rentiers qui s'enrichissent en dormant...
    M. Lucien Degauchy. Changez de disque !
    M. François Assensi. ... et vous refusez de vous opposer aux licenciements de masse.
    D'où la question que vous posent les députés communistes : qui fait la loi dans une démocratie, le marché boursier ou les citoyens et leurs représentants ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Au nom de la défense et de la revalorisation du travail vis-à-vis du capital, je vous demande si vous êtes prêt à engager le ministère public à faire appel auprès des tribunaux de tous ces licenciements boursiers ou si, comme dans l'affaire LU, vous inviterez le procureur à ne pas assister aux audiences. Dans ce dernier cas, vous serez, de facto, l'instrument politique complice de l'affaiblissement de notre pays, au nom d'un libéralisme destructeur qui écrase le travail et plonge les salariés dans la précarité. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Asensi, l'ouverture des marchés et la globalisation des échanges offrent à nos entreprises des potentialités considérables. La croissance économique est d'abord le fruit de l'ouverture de nos économies.
    M. Jacques Desallangre. Non, du travail !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le repli ou la fermeture des différents marchés conduit mécaniquement à la récession, donc au chômage. La tentation des lignes Maginot en matière économique reste malheureusement forte...
    M. Jacques Desallangre. Oh !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... et l'argument des licenciements boursiers est trop facilement invoqué par ceux qui veulent empêcher nos entreprises de rester compétitives. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    La contrepartie de cette adaptation permanente de l'économie, c'est qu'il faut faire face à des restructurations industrielles. Il s'agit alors pour l'Etat d'assumer toutes ses responsabilités et de faire respecter la loi. C'est ce que nous faisons, monsieur le député, comme nous l'avons montré notamment à l'occasion de l'affaire Metaleurop.
    Il s'agit ensuite d'accompagner les salariés frappés par les licenciements en faisant en sorte qu'ils aient un véritable droit individuel à la reconversion. Il convient également de soutenir les bassins d'emploi touchés. Nous nous y employons avec les contrats de site.
    Enfin, et c'est le plus important, il faut développer à moyen terme la formation professionnelle des salariés. Vous serez, dans quelques jours, appelés à vous prononcer sur la création d'un nouveau droit à la formation professionnelle tout au long de la vie.
    Nous avons demandé aux partenaires sociaux de nous faire des propositions sur une gestion sociale plus humaine et plus dynamique des restructurations. Au premier semestre de 2004, le Parlement sera saisi d'un texte à ce sujet.
    Puis-je vous faire remarquer, messieurs de l'opposition, que si vous aviez commencé par demander aux partenaires sociaux de vous donner leur avis sur cette question...
    M. Jacques Desallangre. Ils l'ont donné !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... au lieu de voter la loi de modernisation sociale dans les conditions où vous l'avez fait (Protestations sur les bancs du goupe socialiste), nous aurions aujourd'hui un texte moderne et un texte juste sur lequel nous pourrions nous appuyer ? (Applaudissements sur les bancs du goupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Bernard Roman. Mensonge !

FORUM SOCIAL EUROPÉEN

    M. le président. La parole est à M. Eric Raoult, pour le groupe UMP.
    M. Eric Raoult. Monsieur le ministe des affaires sociales, ma question concerne le Forum social européen, qui se tient jusqu'au 16 novembre dans les départements de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.
    Un forum, c'est, selon la définition que j'ai relevée dans un dictionnaire, un lieu de débat, un lieu où se discutent les affaires publiques. Dès lors, nous comprenons que le Gouvernement, sur le thème de la mondialisation, ait montré un esprit constructif d'ouverture et de dialogue en contribuant à cette manifestation.
    Toutefois, il convient que ce forum ne soit pas kidnappé et qu'on l'aide à ne pas déraper. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Ce forum ne doit pas être kidnappé par des idéologues ou par des partis politiques.
    M. Jean Glavany. Oh !
    M. Eric Raoult. Il ne doit pas non plus déraper. Déraper par des jugements critiques contre le Gouvernement. (« Oh ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean-Claude Lefort. Stalinien !
    M. Eric Raoult. Déraper par des déclarations choquantes ou irresponsables contre les nations occidentales, contre les Etats-Unis, contre l'Europe ou encore contre l'Etat d'Israël.
    M. Maxime Gremetz. C'est le bâillon !
    M. Eric Raoult. A cet égard, le programme de certaines tables rondes peut à juste titre nous inquiéter. Je souhaite donc vous interroger, monsieur le ministre, sur les dispositions qui peuvent être prises pour éviter que ce forum ne devienne un lieu non de discussion, mais d'accusation. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jacques Desallangre. Et alors ? Ce serait justifié !
    M. Eric Raoult. Les démocraties occidentales, dont la France fait partie, veulent un monde de liberté et non de pauvreté, une Europe de progrès et non d'égoïsme, une société ouverte et non repliée sur elle-même. Le Forum social européen mérite donc mieux que de quelconques dérapages.
    Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour que Saint-Denis ne devienne ni Evian ni Durban ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, le Gouvernement observe avec beaucoup d'intérêt tout ce qui se dit et tout ce qui se pense sur la mondialisation. Le sujet est assez important et profond pour ne pas s'en tenir à une pensée unique. On peut cependant se mettre d'accord autour de quelques idées simples.
    D'abord, la mondialisation est une donnée du xxie siècle. Ce n'est pas un projet, c'est le sens de l'histoire. Des nations nouvelles aspirent au développement.
    La mondialisation, ensuite, est porteuse de progrès (« Oh ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains)...
    M. Yves Cochet. Et de dégâts.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... pour beaucoup de pays autour du monde, mais elle est aussi source de fractures sociales et politiques.
    M. Jean-Claude Lefort. Surtout !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous pensons que l'avenir de la planète ne doit pas être dominé par les rapports de force et par l'égoïsme.
    M. Jacques Desallangre. Par le pognon !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est la raison pour laquelle la France, sous l'impulsion du Président de la République, ambitionne de participer à la construction d'un monde qui soit plus juste et plus équilibré. Nous avons fait dans ce sens des propositions que le Gouvernement défend à chaque niveau de responsabilité.
    C'est d'abord une meilleure régulation de la mondialisation au plan stratégique, avec le renforcement de l'Organisation des Nations unies, avec la modification de l'OMC et avec la création d'une Organisation mondiale de l'environnement.
    M. Yves Cochet. Très bien !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous nous battons ensuite pour que l'aide budgétaire au développement soit plus généreuse et que les pays développés fassent un effort considérable dans ce domaine.
    Enfin, nous nous battons pour que l'Europe, en réussissant à trouver une position commune, notamment sur la question du modèle social qu'elle veut porter, puisse peser sur l'équilibre du monde.
    Entre la peur de la mondialisation et la fascination pour la globalisation financière, il existe un espace politique pour la France et pour l'Europe. A nous de nous en saisir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

SUPPRESSIONS D'EMPLOIS DANS L'INDUSTRIE

    M. le président. La parole est à M. Christian Bataille, pour le groupe socialiste.
    M. Christian Bataille. Monsieur le Premier ministre, il ne s'écoule pas une semaine sans que l'on assiste à un désastre industriel. Ces derniers jours, c'est Arcelor qui annonçait des milliers de suppressions d'emplois. L'année qui s'achève a été marquée par une accélération brutale des licenciements partiels ou des fermetures d'entreprises. Cette vague sans précédent de suppressions d'emplois traduit la perte de substance industrielle de notre pays. Dans ma seule région, le Nord - Pas-de-Calais, ce sont près de 10 000 emplois industriels qui ont été supprimés en un an. A côté des grands dossiers emblématiques - Altadis, Metaleurop, Comilog... -, c'est par centaines que les fermetures d'entreprises plus petites viennent accroître la masse des sans-emploi. (« Et les 35 heures ? » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Dans toute la France, ce sont plus de 150 000 emplois qui ont disparu en un an. La liste noire est impressionnante : GIAT Industries, Alstom, Daewoo, Sollac Atlantique, Hewlett-Packard, Matra Automobile à Romorantin, Microelectronics à Rennes, Trouvay & Cauvin au Havre... Et l'on pourrait allonger cette liste considérable encore un bon moment ! Chacun de mes collègues pourrait me dire : vous oubliez Ugine à Isbergues, ou Yoplait, ou Aventis...
    Hélas, le temps m'est compté pour tout dire. Mais nous n'avons pas de souci à nous faire : le monde du travail, encore une fois en première ligne dans ce massacre de l'emploi, aura bien des façons de vous rappeler cette liste cruelle.
    Monsieur le Premier ministre, le Gouvernement a-t-il l'intention d'arrêter cette hémorragie ? Quel rôle l'Etat entend-il jouer ? Quelle politique industrielle veut-il mettre en oeuvre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. (« Encore ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Daniel Vaillant. C'est le Premier ministre qui doit répondre !
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, je vous remercie de cette question, qui va me permettre d'informer comme il se doit l'Assemblée nationale sur la réalité de la situation de notre pays en matière de plans sociaux et de licenciements économiques.
    M. Michel Dasseux. Tout va bien !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il y a eu 1 007 plans sociaux depuis le début de l'année. Au cours de l'année 2002, on en a dénombré 1 086 et 1 053 en 2001. Il y a eu 155 000 licenciements économiques depuis le début de l'année, contre 252 000 en 2002 et 206 000 en 2001.
    Mme Martine David. C'est tout ce que vous avez à répondre ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Pour la période de janvier à septembre, on avait compté 197 000 licenciements économiques en 2002 et 147 000 en 2001.
    La vérité, monsieur le député, vous la connaissez parfaitement : nous sommes engagés depuis l'été dans un cycle de reprise et de croissance. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) La consommation reprend, tout comme la production industrielle.
    M. Bernard Ronan. Certainement pas ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Aujourd'hui, tous les signes montrent que l'économie est sur le point de retrouver un rythme de croissance permettant de créer des emplois. Si le chômage continue d'augmenter,...
    M. Julien Dray. C'est certainement le hasard !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... c'est en grande partie parce que nous avons mis à plat toutes les politiques de l'emploi que vous aviez conduites et qui avaient amené à placer plus d'un million de Français dans une situation précaire, sans perspectives professionnelles.
    Oui, monsieur le député, cette reprise est fragile, mais une chose est sûre : ce n'est pas votre discours qui va la favoriser ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur de nombreux bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

LUNDI DE PENTECÔTE

    M. le président. La parole est à M. Yvan Lachaud, pour le groupe UDF.
    M. Yvan Lachaud. Monsieur le Premier ministre, vous avez présenté la semaine dernière la réforme de solidarité pour les personnes dépendantes, et le groupe UDF ne peut que saluer cet appel à la solidarité nationale pour venir en aide aux plus fragilisés d'entre nous.
    M. Marcel Dehoux. A la solidarité nationale et aux collectivités locales !
    M. Yvan Lachaud. Personnellement sensibilisé au problème du handicap, sujet sur lequel je viens de remettre un rapport, je vous félicite de cette initiative.
    Cependant, si la philosophie du texte demeure louable, les dispositions de son financement restent problématiques. Il eût été surprenant que l'élu nîmois que je suis ne pose pas la question du lundi de Pencôte. Mais, au-delà même de l'émotion, voire de la vive opposition que le choix de ce jour soulève par rapport aux férias de Nîmes ou de Vic-Fezensac, c'est un groupe important de parlementaires, en particulier MM. Rudy Salles, Jean-Marc Roubaud, Etienne Mourrut et Gérard Dubrac, qui vous a récemment adressé un courrier vous demandant de revenir sur cette disposition.
    En effet, pour toutes les villes touristiques de l'arc méditerranéen, mais aussi de la côte atlantique et même de l'arrière-pays, le long week-end de Pentecôte est le premier de la haute saison. Il est étonnant que le Gouvernement n'ait pas davantage mesuré les conséquences économiques dramatiques que la suppression de ce jour férié entraînera.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est scandaleux !
    M. Yvan Lachaud. Pour ne prendre que cet exemple, il en résultera pour la ville de Nîmes une perte économique de 2,3 millions d'euros.
    Enfin, en traitant de façon différente les salariés du secteur public et ceux du secteur privé, nous risquons d'accentuer un peu plus les inégalités de traitement et de les rendre incompréhensibles aux yeux du citoyen, alors qu'il eût été préférable de proposer en lieu et place une vraie loi d'assouplissement des 35 heures. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)
    Pour toutes ces raisons, monsieur le Premier ministre, je vous demande, au nom du groupe UDF, de réétudier les modalités de financement de ce plan. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. (« Olé ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Julien Dray. Nous avons changé de Premier ministre !
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Lachaud, c'est l'honneur du Gouvernement et du Premier ministre que d'avoir eu le courage de choisir une solution enfin durable au problème de la dépendance des handicapés et des personnes âgées. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Nous avions, face à cette question difficile, trois choix possibles.
    Le premier consistait à augmenter les impôts. C'est un choix que nous n'avons pas voulu faire, car il aurait été extrêmement difficile pour l'économie française. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Bernard Roman et M. Michel Dasseux. Et les collectivités locales ?
    M. Marcel Dehoux. Les impôts locaux ont augmenté considérablement !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le deuxième choix, qui avait la faveur de ceux qui crient très fort à gauche, consistait à présenter un plan sans financement. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Nous ne pouvons pas agir ainsi à l'égard des personnes dépendantes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Restait un troisième choix : demander aux Français de faire preuve, en offrant une journée de travail, d'une vraie solidarité envers tous ceux dont la situation est rendue difficile par la dépendance.
    Si nous avons choisi le lundi de Pentecôte, tout en ménageant une souplesse que par ailleurs vous réclamez, c'est parce que cette journée était la plus appropriée. En effet, ce n'est pas une fête religieuse. (« Et alors ? » sur les bancs du groupe socialiste.) Et le 11 novembre ou le 8 mai, jours fériés que certains préconisaient de supprimer, ont une forte signification dans l'histoire de notre pays.
    M. Jean-Pierre Kucheida. Cela n'empêche pas les supermarchés d'ouvrir !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Enfin, s'agissant des corridas, monsieur Lachaud, l'aficionado que je suis (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) préfère donner une journée de travail pour améliorer la vie des personnes dépendantes et ne pense pas qu'on puisse comparer un tel enjeu avec la question des férias du Sud-Est.
    La souplesse que le Premier ministre a ménagée en donnant aux entreprises et aux partenaires sociaux qui le souhaiteront la possibilité de choisir un autre jour, me semble répondre largement à vos précoccupations.
    M. Jean-Pierre Blazy. Vous n'êtes pas convaincant !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il n'y avait pas de solution facile. Nous avons fait un choix difficile. Nous en sommes fiers ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

MEURTRE D'UN GARDIEN DE LA PAIX À PARIS

    M. le président. La parole est à Mme Françoise de Panafieu, pour le groupe UMP.
    Mme Françoise de Panafieu. Monsieur le ministre de l'intérieur, dans la nuit du 6 au 7 novembre, Franck Lelong, jeune gardien de la paix, a été tué boulevard Bessières, alors qu'il regagnait son domicile. Quelques minutes après, le meurtrier a été arrêté par la brigade anticriminalité.
    Au-delà du soulagement que cette arrestation a provoqué dans la population, l'émotion reste vive. Et ce matin, à l'endroit même où Franck Lelong a perdu la vie, un hommage a réuni les habitants et les élus du 17e arrondissement autour de sa famille et de ses collègues. Ce matin aussi, monsieur le ministre, vous avez reçu dans votre bureau la famille de ce jeune policier, et, plus tard dans la matinée, les présidents des associations locales que j'accompagnais. Votre disponibilité, votre écoute, la pugnacité que vous montrez, sont un signe fort pour nous tous. (Murmures sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    En ma qualité de députée-maire du 17e arrondissement, je constate effectivement une baisse de l'insécurité. Mais ce cruel événement nous rappelle la nécessité d'amplifier encore l'effort, tant dans les moyens de lutte contre la criminalité que dans le suivi judiciaire. Comment ne pas s'étonner, en effet, que le meurtrier présumé soit un multirécidiviste ?
    Monsieur le ministre, aujourd'hui, il y a une famille meurtrie et un quartier fragilisé. A travers lui, nombre de quartiers parisiens se tournent vers vous - une fois de plus j'allais dire - pour vous demander de mettre toute votre détermination à leur service. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Madame la députée, Franck Lelong a été assassiné avec son arme de service, même s'il n'était pas en service, et nous en tirerons toutes les conséquences pour l'avenir de sa compagne, et de sa petite fille de deux ans.
    Samedi soir, un homme s'est présenté devant le ministère de l'intérieur, à vingt et une heures : c'était le père de Franck Lelong. Il était dans l'état que chacun peut imaginer et l'entretien entre nous, qui n'était pas prévu, a commencé en ces termes : « Monsieur le ministre, rendez-moi mon bébé ! ». Franck Lelong avait trente-deux ans. Cette émotion, nous la partageons tous. Ce drame nous donne l'occasion de rendre hommage au travail des policiers : Franck Lelong a été lâchement assassiné, et grâce au travail de ses collègues son assassin présumé a déjà été interpellé. Ce dernier, je le dis avec beaucoup de solennité, a été interpellé à cinquante-trois reprises, malgré son jeune âge, et condamné à vingt et une reprises !     Confrontées au même problème, d'autres démocraties que la nôtre ont pris à l'encontre des multirécidivistes des mesures qui se sont avérées efficaces. Il est temps de les évaluer, et peut-être de s'en inspirer sans idéologie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Va-t-on laisser, oui ou non, des multirécidivistes assassiner des gens et se comporter sans aucun respect de la vie des autres ? Franck Lelong est tombé et, dans son sac à dos, il y avait son arme de service qu'a utilisée son assassin pour lui tirer dessus à deux reprises. Alors la question est maintenant posée à la République française : que voulons-nous faire de ces multirécidivistes ? Je souhaite qu'avec le garde des sceaux, nous puissions la poser avec beaucoup de sérénité, mais également beaucoup de fermeté. La mémoire de Franck Lelong le mérite. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

DÉLAIS DE JUGEMENT

    M. le président. La parole est à M. Alain Marsaud, pour le groupe UMP.
    M. Alain Marsaud. Mes chers collègues, ma question s'inscrit dans le prolongement de celle de Mme de Panafieu, à laquelle a répondu M. le ministre de l'intérieur, et a trait à l'actualité judiciaire nationale, mais aussi internationale, qui apparaît fort chargée en cette fin d'année.
    Nous avons ainsi appris que s'est ouvert il y a quelques jours, en Grande-Bretagne, le procès des assassins présumés des deux petites Britanniques Holly et Jessica. Je vous rappelle que ce double meurtre a été commis en août 2002, c'est-à-dire il y quinze mois.
    Dans quelques semaines devrait s'ouvrir en Lituanie le procès criminel concernant les coups mortels dont a été victime l'actrice Marie Trintignant en août 2003.
    Enfin, devant la cour d'assises de Paris, vient de s'ouvrir la semaine dernière le procès en appel des auteurs présumés de trois attentats commis en 1995 à Paris, soit il y a huit ans.
    Certes, il faut comparer ce qui est comparable, et nous sommes en présence de systèmes procéduraux sans doute très différents, les uns d'essence accusatoire, les autres d'inspiration plutôt inquisitoriale. Cependant, nous constatons qu'il faut entre quatre et dix ans à la justice criminelle en France pour rendre une décision...
    M. Jacques Myard. C'est un scandale !
    M. Alain Marsaud. ... et quelques mois seulement à peu près partout en Europe.
    Monsieur le garde des sceaux, vous avez d'ores et déjà engagé d'importantes et courageuses réformes pour améliorer le fonctionnement de notre justice, avec l'institution notamment du juge de proximité, mais cela concerne des contentieux mineurs. N'est-il pas temps de remédier à ces lenteurs qui passeront de plus en plus pour des dénis de justice, et qui, un jour, nous feront peut-être condamner par la Cour européenne des droits de l'homme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, vous évoquez les délais nécessaires pour arriver au procès et donc au jugement. Comme vous l'avez dit vous-même, comparons cependant ce qui est comparable.
    Dans d'autres systèmes que le nôtre, en effet, le procès marque le début de la confrontation des points de vue. De même, toute une partie de la procédure qui, aux Etats-Unis, ne se déroule que pendant le procès, s'effectue en France avant le procès, devant le juge d'instruction. Il faut donc faire attention aux comparaisons en la matière.
    Cela dit, notre justice n'est pas assez rapide. C'est une évidence. C'est d'ailleurs l'une des choses que nous reprochent les Françaises et les Français, non seulement dans le domaine pénal mais aussi dans le domaine civil.
    Alors que faut-il faire ?
    Il importe, premièrement, d'avoir des moyens. A cet égard, le Parlement a donné au Gouvernement, dans le cadre de la loi de programmation sur cinq ans, des moyens substantiels, en effectifs de magistrats et de fonctionnaires, ainsi qu'en crédits de fonctionnement et d'investissement, qui permettront d'améliorer nettement le fonctionnement de la justice.
    Il convient, deuxièmement, de mettre en place ces moyens, ce qui est tout aussi important. C'est la raison pour laquelle je souhaite, cour d'appel par cour d'appel, prévoir des contrats d'objectifs qui permettront, grâce à l'évaluation des performances des différentes institutions et des différentes juridictions, d'affecter les moyens là où ils sont le plus nécessaires.
    Il faut, troisièmement, simplifier et améliorer les procédures. En matière pénale, je vous ai déjà proposé d'élargir les possibilités de composition pénale et je vous présenterai dans un texte encore en cours de discussion un système à la française de reconnaissance de culpabilité pour traiter certaines affaires sans encombrer les salles d'audience. En matière civile, nous vous soumettrons dans quelques semaines une simplification des procédures de divorce car l'attente est également très forte s'agissant du droit de la famille. Rappelons encore que nous travaillons actuellement à une amélioration des procédures concernant les entreprises en difficulté.
    C'est tout cet ensemble de mesures qui nous permettra d'améliorer la justice, son fonctionnement et sa célérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

INTERMITTENTS DU SPECTACLE

    M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche, pour le groupe socialiste.
    M. Patrick Bloche. Monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, demain les partenaires sociaux se retrouveront au siège de l'UNEDIC avec, à nouveau, à l'ordre du jour la modification du régime spécifique de l'assurance chômage des intermittents du spectacle. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) On pouvait espérer de cette initiative qu'elle traduise enfin la prise en compte du rejet massif du mauvais accord du 26 juin par les acteurs culturels de notre pays, artistes et techniciens, et les organisations syndicales les plus représentatives du secteur. Or, cette rencontre, loin de reprendre la négociation sur de nouvelles bases, apparaît purement formelle puisqu'il s'agit de corriger les bidouillages (Protestations sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) intervenus entre l'accord du 26 juin et l'avenant du 8 juillet qui ont conduit au dépôt de plusieurs recours devant les juridictions compétentes.
    Reste, monsieur le ministre, que vous serez à nouveau amené à donner votre agrément alors que la mobilisation des intermittents ne faillit pas comme l'ont encore constaté les téléspectateurs lundi soir. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Pierre Lellouche. Démago !
    M. Patrick Bloche. Plutôt que de renouer avec les moeurs anciennes en convoquant les dirigeants de France Télévision, comme l'a fait votre collègue en charge de la culture, n'est-il pas temps de répondre à la détresse de ces dizaines de milliers de salariés du spectacle vivant qui ne seront plus couverts par l'assurance chômage au 1er janvier 2004...
    M. François Goulard. Mais si, ils le seront ! Vous racontez n'importe quoi !
    M. Patrick Bloche. ... et qui rejoindront ainsi celles et ceux à qui vous supprimez le bénéfice de l'allocation spécifique de solidarité ?
    Allez-vous pour une fois résister aux diktats du MEDEF en prenant enfin en considération les solutions alternatives ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Car elles existent. Ecoutez donc les intermittents et les réalisateurs ! (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ces solutions alternatives, tout en réduisant le déficit des annexes 8 et 10, éviteraient d'ajouter de la précarité à la précarité. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Le Gouvernement va-t-il enfin prendre la mesure du malaise que révèle ce conflit sur la place des artistes et des créateurs dans notre société au risque sinon que les discours les plus officiels sur l'exception culturelle ne soient plus bientôt que des coquilles vides ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.
    (Dans les tribunes, une personne se lève et tente de prendre la parole. - Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Je suspends la séance.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à quinze heures trente, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de Mme Hélène Mignon.)

PRÉSIDENCE DE Mme HÉLÈNE MIGNON,
vice-présidente

    Mme la présidente. La séance est reprise.

2

LOI DE FINANCES POUR 2004

DEUXIÈME PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004 (n°s 1093, 1110).

LOGEMENT (suite)

    Mme la présidente. Nous poursuivons la discussion des crédits du ministère de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer concernant le logement.
    Dans la suite des questions, la parole est à M. Daniel Boisserie, au titre du groupe socialiste.
    M. Daniel Boisserie. Monsieur le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, les propriétaires, les locataires, mais aussi tous les professionnels du bâtiment, mécontents des mesures prises par votre ministère sur le financement des crédits de l'ANAH, sont inquiets. Vous proposez en effet une dotation réduite à 392 millions d'euros, pour seulement 200 000 logements aidés alors que les crédits prévus pour 2003 ont été amputés ou gelés à hauteur de 30 %, ce qui a entraîné des difficultés pour les intéressés et considérablement retardé la réhabilitation des parcs locatifs privés à occupation sociale.
    Il est vrai que le logement en général et le logement social en particulier ne constituent pas la préoccupation première du gouvernement auquel vous appartenez et nous imaginons les difficultés que vous rencontrez pour essayer de défendre un budget en période de régime sec.
    Vous savez pourtant combien il est difficile de gérer les retards dans les notifications de subventions de l'ANAH. En effet, une OPAH étant close au bout de trois ans, les retards dans les interventions de l'ANAH dus aux restrictions imposées par votre gouvernement vouent certaines opérations à l'échec. C'est pourquoi nous vous demandons d'autoriser plus rapidement et plus facilement les prorogations d'OPAH. Vous n'aurez la confiance ni des investisseurs ni des locataires ou des professionnels du bâtiment si, dès aujourd'hui, vous ne vous engagez pas solennellement à ne pas geler, comme vous l'avez fait cette année, un tiers des crédits de l'ANAH.
    Enfin, monsieur le ministre, le gouvernement de Lionel Jospin avait mis en place la TVA à taux réduit pour les travaux de rénovation. Ce dispositif qui soutient l'activité des entreprises et l'emploi, qui requalifie le parc social, peut être remis en cause si vous ne le soutenez pas très fermement. Que se passerait-il alors si le maigre budget de l'ANAH et du logement en général était à nouveau amputé et que la TVA sur ces travaux repasse de 5,5 à 19,6 % ?
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, je dois d'abord réfuter votre assertion selon laquelle le budget de l'ANAH aurait été réduit en 2003. En effet, il se sera élevé à 392 millions d'euros comme en 2002.
    Pour ce qui concerne 2004, il conviendra d'abord, que nous prenions en considération, en bons gestionnaires, l'évolution des recettes. Je ne peux donc pas m'engager aujourd'hui sur un gel ou sur un non-gel ; cela est impossible d'autant que les décisions, en la matière, sont prises par Bercy, mais nous sommes évidemment tenus au courant. Souvenez-vous d'ailleurs que, cette année, j'ai obtenu des dégels importants de crédits concernant l'aide à la pierre. Je ferai en sorte que les gels - si gels il doit y avoir - soient le moins douloureux possible. En tout cas, ils ont été relativement faibles, en ce qui concerne l'ANAH, par rapport à d'autres crédits et à d'autres budgets.
    Par ailleurs, je vous rappelle que si une OPAH dure en général trois ans, elle peut être prorogée, par avenant, pendant cinq ans, notamment pour les opérations en milieu rural ou en zone de rénovation urbaine.
    Enfin, je vous indique que nous défendons la TVA à 5,5 %, car il s'agit d'une bonne mesure et j'ai déjà précisé ce matin que nous faisions tout pour qu'elle soit prorogée. Cela est pratiquement acquis, mais il faut un vote à l'unanimité pour 2004. Nous continuerons à nous battre pour qu'elle soit non plus prorogée, mais pérennisée.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.
    M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le ministre, tout au long des discussions, ce matin, les orateurs qui se sont succédé à la tribune ou qui vous ont interrogé ont souligné la nécessité d'augmenter quantitativement le nombre de logements livrés. Je me permets, à ce propos, de faire référence au rapport du Conseil économique et social présenté en 1993 par M. Marcel Lair, lequel ne saurait être taxé de défiance à l'égard de la majorité actuelle. Il soulignait en effet qu'il fallait mener une action très forte en la matière, en livrant 320 000 logements par an pendant des années. Si l'on ne se réfère qu'à ce chiffre, force est de constater que si, dans le cycle de production de logements, nous avons connu parfois des hauts, parfois des bas,...
    M. Gilbert Meyer. Souvent des bas !
    M. Jean-Louis Dumont. ... la production a toujours été largement inférieure à 320 000 logements.
    Pour construire, il faut évidemment financer. Or, dans les plans de financement, il est très souvent une variable d'ajustement difficile à maîtriser, car elle porte sur un objet spéculatif : je veux parler du terrain sur lequel doit être réalisée la construction. Monsieur le ministre, tant qu'une action en profondeur et sur le long terme ne sera pas menée pour éviter que le coût du foncier dépende des prix des terrains à urbaniser ou à construire, on n'arrivera pas à produire. Il faut absolument sortir de cette spirale de la spéculation et de la variable d'ajustement sur le plan du financement.
    Certes, des efforts ont été déjà été accomplis, ici ou là, en accordant des subventions pour compenser la surcharge foncière mais, surtout en Ile-de-France et beaucoup moins dans les villes moyennes. En effet, pour différentes raisons, les municipalités ou même les intercommunalités, de droite comme de gauche, ne se donnent pas les moyens - sans doute à cause des difficultés que certains ont soulignées ce matin - de fournir le foncier pour construire. Pourtant, il existe des établissements publics fonciers.
    Mme la présidente. Monsieur Dumont...
    M. Jean-Louis Dumont. J'en connais un qui me semble exemplaire : l'établissement public foncier lorrain. Puisque vous serez demain à Pont-à-Mousson, monsieur le ministre, vous pourrez vous renseigner sur cet outil qui a fait ses preuves dans le traitement des friches industrielles et des friches militaires. Il pourra, demain, intervenir aussi bien dans le traitement des friches en milieu rural, où elles sont de plus en plus nombreuses.
    Que comptez-vous faire sur le plan du foncier, qu'il s'agisse de son financement ou de la simplification de l'enchevêtrement des règles administratives le concernant, afin que, demain, on puisse construire sur des terrains qu'il n'aura pas fallu obligatoirement payer et sur lesquels pourraient être passés des baux emphytéotiques ?
    Mme la présidente. Monsieur Dumont !
    M. Jean-Louis Dumont. En référence, prenons ce rapport du Conseil économique et social de 1993 sur ce sujet.
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Oui, monsieur Dumont, vous avez raison, il faut augmenter substantiellement le nombre de logements construits chaque année. Il aura été de 302 000 en 2002 et de 307 000 en 2003, mais nous devons arriver à 320 000. Si le privé s'y met, en tout cas compte tenu de l'ajout prévu en faveur du logement social, on devrait y parvenir, surtout si l'augmentation du logement locatif privé suit la tendance enregistrée cette année.
    Vous avez également raison à propos du foncier, qui est bien l'une des principales clés de la réussite dans le secteur de la construction de logements. En la matière, la loi urbanisme et habitat a permis de libérer des terrains qui étaient gelés par la loi SRU.
    Par ailleurs, le rapport Pommelet a permis de recenser les mètres carrés disponibles, d'abord en Ile-de-France, et nous allons continuer cette action dans les grandes villes et les principales agglomérations. En tout cas, le résultat montre que nous pouvons disposer de 3 millions de mètres carrés immédiatement et de 10 millions de mètres carrés à moyen et long terme.
    Enfin, nous avons augmenté les crédits budgétaires pour compenser à hauteur de 20 millions en 2002, et de 30 millions en 2003, la surcharge foncière, justement pour essayer de limiter son poids dans la réalisation des logements.
    Nous fondons beaucoup d'espoirs sur le rôle des maires et nous leur rappelons qu'ils doivent être des bâtisseurs. Nous rappelons également aux bailleurs sociaux qu'ils doivent être des promoteurs sociaux.
    Nous pensons donc agir à la fois sur le foncier et sur l'offre de logements. Nous ferons les comptes à la fin de l'année 2004, mais je pense que ce sera une très grande année logement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour une seconde question, mais je lui demande de respecter son temps d'intervention.
    M. Jean-Louis Dumont. Je vais essayer de vous obéir, madame la présidente. (Sourires.)
    Mme la présidente. Non, il faut tenir votre temps de parole.
    M. Jean-Louis Dumont. Ce sera plus facile, car je vais lire cette question.
    Monsieur le ministre, cet été, votre collègue, le ministre de l'éducation nationale, a semblé découvrir, à l'occasion de la publication de deux décrets au Journal officiel, qu'il existait une crise du logement pour étudiants. En effet, l'un de ces deux décrets diminuait d'une façon drastique le montant des aides au logement desdits étudiants.
    Dans le même temps, intervenait une réforme du Locapass, qui dénaturait le principe de cautionnement solidaire tel qu'il existait jusqu'alors, pour le transformer en prêt amortissable avec un différé de paiement de trois mois. Aujourd'hui, l'Etat - le Gouvernement -, sous couvert de décentralisation, envisage de céder pour l'euro symbolique le patrimoine des CROUS, ouvrant la voie à la privatisation du logement étudiant.
    Alors que le logement des étudiants prend souvent l'aspect d'un parcours du combattant - on l'a bien vu encore à la rentrée universitaire de 2003, avec la pénurie de logements, l'augmentation des loyers et la saturation des résidences universitaires -, nous ne pouvons qu'exprimer notre grande inquiétude face à l'absence de lisibilité de l'action gouvernementale sur la question centrale du logement des jeunes en général, et du logement des étudiants en particulier. Cela est regrettable car le logement est une étape décisive dans l'accès à l'autonomie.
    Votre ministère n'ignore pas cette situation, d'autant que nombre d'étudiants ne sont pas logés en résidence universitaire. Aussi, monsieur le ministre, avec ma collègue Odile Saugues, auteur de cette question, je souhaite connaître les actions qui seront engagées en 2004 pour que la crise du logement, qui frappe en premier lieu les jeunes, trouve les réponses qu'elle mérite.
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. En effet, monsieur Dumont, le logement des étudiants est un problème crucial et vous avez raison de le souligner encore une fois. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé, avec mon collègue Luc Ferry, à M. Anciaux un rapport précis sur ce sujet. Nous examinerons avec une grande attention ce rapport, qui devrait, en principe, nous être remis très prochainement. On peut signaler deux dispositions déjà prises qui sont positives. D'abord, depuis la loi de finances 2003, le bénéfice du dispositif d'amortissement fiscal dans le neuf est cumulable avec la possibilité de location entre ascendants et descendants, ce qui peut contribuer à décongestionner le logement étudiant. Ensuite, le dispositif fiscal que j'ai annoncé le 3 avril et fait voter par le Parlement dans la loi « urbanisme et habitat » sera ouvert à la gestion déléguée.
    Sur le problème des CROUS, je ne suis pas compétent et je laisse donc le ministre de l'éducation nationale répondre sur ce point.
    M. Jean-Louis Dumont. Nous l'interpellerons à l'occasion ! Merci, monsieur le ministre.
    Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Lepetit.
    Mme Annick Lepetit. Monsieur le ministre, votre projet de budget est inquiétant, ce que nous confirment chacune des réponses que vous nous apportez depuis ce matin. Il va notamment aggraver les inégalités, et c'est sur ce point que je souhaite vous interroger.
    Vous diminuez de près de 4 % la contribution de l'Etat au financement des aides à la personne, ce qui entraînera une baisse de l'allocation de logement familial, de l'allocation de logement social et de l'aide personnalisée au logement. Or, six millions de ménages sont concernés par ces aides dont ils ont réellement besoin pour se loger. Ayant pour la plupart des revenus très modestes, comment feront-ils face à des loyers et des charges en forte hausse, dans un contexte économique difficile ?
    Sans doute nous répondrez-vous que les crédits relatifs au fonds de solidarité pour le logement et à l'aide au logement temporaire augmentent. Mais ces aides ne touchent pas les mêmes populations puisqu'elles concernent des personnes en situation précaire et, du reste, je ne suis pas sûre que l'augmentation de ces crédits, cette année, compense leur importante diminution dans le précédent budget.
    En revanche, les aides que vous diminuez aujourd'hui concernent tous nos concitoyens aux revenus modestes, salariés au SMIC, chômeurs, retraités modestes, etc.
    Par ailleurs, vous tardez à convoquer le Conseil national de l'habitat, qui doit se prononcer sur l'actualisation du barème des aides à la personne. Or, vous le savez, tout retard pénalise fortement les familles. Cette situation s'était déjà produite l'année dernière. Je l'avais signalée par une question écrite, publiée au Journal officiel le 28 juillet dernier. Le 17 octobre, vous m'avez répondu que l'actualisation des barèmes était en cours d'examen. Je profite de notre débat d'aujourd'hui pour vous demander ce qu'il en est maintenant.
    Je terminerai d'un mot sur l'allocation logement étudiant. Certes, on nous a dit que le ministre de l'éducation nationale avait suspendu les décrets annonçant cet été une réforme des conditions d'attribution, aboutissant à la réduction de certaines prestations.
    Monsieur le ministre, confirmez-vous la position du ministre de l'éducation nationale ?
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je vous renvoie, madame, à la réponse que je viens de faire : une mission a été confiée à M. Anciaux, qui doit nous rendre un rapport dans quelques jours. Nous en ferons le meilleur usage.
    Pour le reste, notamment les aides personnalisées au logement, vous dites que ce budget est inquiétant. Serait-ce parce qu'il crève les plafonds d'offre de logements nouveaux et que nous atteignons le fameux seuil des 320 000, et des 80 000 logements sociaux ? Ce que vous n'avez jamais réalisé et qui ne l'a jamais été en France depuis dix ans ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Cela peut vous inquiéter, en effet, mais cela devrait plutôt vous réjouir, au moins intérieurement.
    S'agissant des barèmes des aides personnelles, celles-ci vont être actualisées, avec effet rétroactif au 1er juillet 2003, dans les mêmes conditions que l'année dernière, avec une augmentation de 1,8 % des paramètres de ressources, de 1,2 % des plafonds de loyer, de 1 % du forfait de charges. S'y ajoute un coup de pouce pour la région parisienne de 2,5 % pour les plafonds de loyers qui concernent les familles en zone 1, c'est-à-dire dans les départements de la petite couronne et dans les villes nouvelles d'Ile-de-France, zones dans lesquelles les loyers sont sensiblement supérieurs à ceux du reste de la France.
    Le détail des économies sera présenté au Conseil national de l'habitat dans les meilleurs délais, quelques semaines au plus tard. Je vous rappelle que les aides personnalisées au logement représentent plus de douze milliards d'euros, qui sont financés par l'Etat, par le biais du régime des prestations familiales, et par les entreprises, ce qui justifie que l'aide apportée bénéficie pleinement au locataire. D'où mon exigence, vis-à-vis des organismes de logement social, d'une augmentation des loyers qui soit au plus égale à l'inflation en 2004. Grâce à ces augmentations d'APL jointes à la raisonnable augmentation des loyers à laquelle, je l'espère, les bailleurs sociaux consentiront, la charge du logement ne devrait pas être plus importante en 2004 qu'en 2003.
    M. Jean-Louis Dumont. Mais la marge est mangée !
    Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Andrieux-Bacquet.
    Mme Sylvie Andrieux-Bacquet. Monsieur le ministre, vous nous promettiez, il y a un an, un effort important pour l'amélioration de l'habitat social : 100 000 logements réhabilités en 2003, disiez-vous alors, notamment grâce à une augmentation de la PALULOS. Nous émettions déjà de sérieux doutes et nous avions raison car, depuis, la politique économique hasardeuse du Gouvernement et ses choix antisociaux ont conduit à trois reprises à la suppression ou au gel de crédits de votre ministère.
    Moi qui vis au quotidien la situation dans nos quartiers, croyez que je ne m'en réjouis pas.
    Non seulement, vos réalisations seront en deçà de vos objectifs mais, pire, en deçà des espoirs que vous avez suscités dans les banlieues.
    Cette année, la même ambition de façade nous est resservie, mais vos propres chiffres vous démentent ; plus de 100 millions d'euros destinés à offrir un logement social digne à nos concitoyens ont été supprimés. Vous me direz que cela est dû à un transfert sur le programme de rénovation urbaine de votre collègue M. Borloo. Certes, mais comme l'ont rappelé un certain nombre de mes collègues ce matin, la rénovation urbaine ne concerne que les 720 zones urbaines sensibles que votre gouvernement a déterminées. Près de cinq cents autres quartiers difficiles devront donc se serrer la ceinture.
    Loin de moi, naturellement, l'idée qu'il ne faille pas aider les zones urbaines sensibles. Elles en ont grand besoin. Mais en opposant quartiers prioritaires et quartiers non prioritaires, en diminuant l'aide à ceux qui ne sont pas classés en ZUS, vous ne ferez que contribuer à leur dégradation et les enfoncer un peu plus dans leur misère et dans leur détresse.
    Monsieur le ministre, déshabiller Pierre pour habiller Paul, ce n'est pas la politique du logement que les Français attendent.
    Ma question est donc très simple. Quels engagements prendrez-vous pour que l'aide de l'Etat à la construction et à la réhabilitation des logements sociaux soit accessible dans tous les quartiers, et cela sans distinction fallacieuse ?
    M. Jean-Louis Dumont. Très bien !
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Madame la députée, vous vous trompez, on ne déshabille pas le budget logement pour habiller le budget rénovation urbaine ! Jean-Louis Borloo a su faire, avec l'Agence, un budget pour la rénovation urbaine qui comporte du logement, de la rénovation, du 1 % etc., et le périmètre du budget logement que j'ai l'honneur de vous présenter est identique à celui des années précédentes. Vous ne pouvez donc en aucun cas affirmer que le budget actuel de Gilles est déshabillé par le budget de Jean-Louis (Sourires), pour reprendre, en la modifiant, votre formule !
    M. Augustin Bonrepaux. J'ai pourtant bien peur qu'elle ait raison !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. C'est donc un budget identique. A budget identique, 80 000 logements sociaux seront construits en 2004, dans la mesure, bien entendu, où les bailleurs sociaux voudront bien prendre en charge cette construction, ce qui n'est pas toujours facile, car il y a des problèmes de foncier, comme l'a dit M. Dumont. Mais c'est la première fois que nous pouvons afficher raisonnablement, et compte tenu de la baisse des taux - ce n'est pas nous qui en avons le mérite, c'est vrai - une ambition pour les logements sociaux jamais égalée en France depuis dix ans. Et, je le répète, il n'y a pas de confusion entre le budget Borloo et le budget Robien, entre le budget rénovation urbaine et le budget logement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Louis Dumont. Résistez à Bercy, monsieur le ministre !
    Mme la présidente. Nous en avons terminé avec les questions.

Equipement, transports, logement, tourisme et mer

    Mme la présidente. J'appelle les crédits inscrits à la ligne : « Equipement, transports, logement, tourisme et mer ».

ÉTAT B
Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires
des services civils (mesures nouvelles)

    « Titre III : - 7 359 046 euros ;
    « Titre IV : 330 332 150 euros. »

ÉTAT C

Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE V. - INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programme : 1 609 882 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 723 936 000 euros. »

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENTS
ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programme : 3 232 793 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 1 540 385 000 euros. »
    Je mets aux voix les crédits inscrits au titre III de l'état B.
    (Les crédits inscrits au titre III de l'état B sont adoptés.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix les crédits inscrits au titre IV de l'état B.
    (Les crédits inscrits au titre IV de l'état B sont adoptés.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix les crédits inscrits au titre V de l'état C.
    (Les crédits inscrits au titre V de l'état C sont adoptés.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix les crédits inscrits au titre VI de l'état C.
    (Les crédits inscrits au titre VI de l'état C sont adoptés.)
    Mme la présidente. Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, concernant le logement.
    Je vais suspendre la séance quelques instants.

Suspension et reprise de séance

    Mme la présidente. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à seize heures cinquante-cinq.)
    Mme la présidente. La séance est reprise.

SANTÉ, FAMILLE ET PERSONNES HANDICAPÉES

    Mme la présidente. Nous abordons l'examen des crédits du ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    La parole est à M. Gérard Bapt, le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Gérard Bapt, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, madame la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, la discussion de votre budget pour 2004 est marquée d'un triple sceau :
    Premièrement, le respect global des priorités du Président de la République pour ce qui concerne le cancer et les personnes handicapées - je note à ce propos que ces dernières seraient concernées par le plan « dépendance » qui vient d'être annoncé par le Premier ministre ;
    Deuxièmement, le désengagement de l'Etat du champ social et médico-social, avec la décentralisation de la formation aux métiers sanitaires et sociaux, l'arrêt presque complet de toute politique d'investissement, même lorsque c'est au mépris des engagements conclus dans le cadre des contrats Etat-régions, le transfert du revenu minimum d'insertion aux départements et le basculement de la couverture maladie universelle complémentaire dans le champ concurrentiel ;
    Troisièmement, l'incertitude budgétaire, après la déclaration de M. le ministre de l'économie et des finances, qui indiquait devant la Commission européenne qu'il annoncerait le mois prochain des mesures de réduction du déficit de l'Etat pour 2004.
    En premier lieu, l'exécution budgétaire en 2003 conduit, à l'évidence, à relativiser la validité des discussions que nous avons à l'occasion du projet de loi de finances initiale. En effet, en raison des hypothèses irréalistes sur lesquelles avait été bâti le budget, l'exercice 2003 a été très tôt marqué par de graves difficultés d'exécution. Les premières mesures de gel et d'annulation ont été massives. L'autorisation parlementaire, dans un tel contexte, est réduite à une fiction.
    Mais je souhaite insister sur la grande première qui a consisté, pour le Gouvernement, à prendre des décisions de gel et d'annulations sur des crédits de report, ce qui a créé des tensions, notamment sur les crédits de fonctionnement des ministères sociaux, ou encore sur les subventions d'équipement aux établissements.
    Il est toujours possible de mettre en avant la faiblesse des annulations proportionnellement au total des crédits ouverts. Mais, dans un budget qui se compose essentiellement de transferts - notamment l'allocation aux adultes handicapés -, c'est-à-dire de dépenses obligatoires, ce sont les crédits d'intervention qui ont été affectés par les diverses mesures de régulation. Ainsi, aucune délégation de crédits n'était encore intervenue au 15 octobre au titre des subventions d'investissement pour 2003. Les autorisations de programme ont été divisées par 5,5 en 2003 ; elles le seront encore par 2 en 2004.
    Concernant les crédits consacrés aux personnes handicapées, le ministre délégué au budget avait assuré devant la commission des finances, en février dernier, notamment pour répondre à mon interrogation, qu'ils échapperaient à la régulation budgétaire, une affirmation pourtant démentie en avril, avec le gel de 100 % des reports du chapitre 46-35, gel transformé en annulation à hauteur de 54 % le 3 octobre. De même en a-t-il été au chapitre 66-20 concernant les établissements médico-sociaux pour lesquels 15 millions d'euros sont toujours gelés.
    Dans ce contexte, il est essentiel que le droit de contrôle des rapporteurs spéciaux, provenant de l'article 57 de la loi organique, soit intégralement respecté et utilisé, sauf à ce que le contrôle parlementaire ne soit réduit à une fiction. La lettre du président de la commission, en date du 3 septembre 2003, que j'ai reproduite dans le rapport écrit, doit faire jurisprudence.
    J'en viens pour 2004 au chapitre « Santé publique et sécurité sanitaire », en forte augmentation apparente de 12,3 %.
    La politique de santé publique se veut une préfiguration de la loi organique, avec une mission « santé » regroupant cinq programmes : santé publique-prévention, veille et sécurité sanitaires, offre de soins et qualité du système de soins, protection maladie complémentaire, gestion et évaluation des politiques sanitaires et sociales.
    Le projet annuel de performance est ambitieux.
    L'expérimentation engendre la création d'un chapitre nouveau, 39-01, regroupant les crédits d'intervention, figurant antérieurement au chapitre 47-11, et de fonctionnement - ancien article 42 du chapitre 34-98 - consacrés à la prévention, ainsi que la subvention à l'INPES, l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, mais le programme ne comprend pas de crédits de personnel, ce qui est contraire à la loi organique.
    Ce programme représente un total de 189,1 millions d'euros, en baisse de 630 000 euros à périmètre constant. Les actions financées par l'assurance maladie, via le Fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaire, ainsi que les actions financées par les collectivités locales contribuent à sa performance sans en constituer des actions en tant que telles.
    Avouez, monsieur le ministre, et je m'adresse à votre cabinet, qu'il serait absurde d'évaluer les crédits de l'Etat en santé publique sans regarder ceux qui viennent des autres sources de financement et en premier lieu de la sécurité sociale.
    La mesure nouvelle obtenue en 2004 pour les crédits de prévention concerne le plan cancer, pour 18 millions d'euros, mesure qui, je le regrette, est presque entièrement récupérée sur les PRAPS, les programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins, ce qui vise donc les populations les plus démunies. Il s'agit là d'une mesure budgétaire négative, allant à l'encontre d'un des objectifs annoncés de votre projet de loi de santé publique, dans sa dimension populationnelle, visant à assurer l'accès à la prévention et aux soins des catégories les plus fragiles.
    Je souhaite maintenant traiter de la lutte contre les toxicomanies, dont le plan triennal 1999-2002, arrivé à échéance, a fait l'objet d'un rapport global d'évaluation, présenté en avril 2003, de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies. Un plan quinquennal doit suivre à partir de cet automne. Encore faudrait-il que la MILDT soit dotée des crédits nécessaires à son action, qui se décline en prévention, formation des professionnels, recherche et épidémiologie, prise en charge socio-sanitaire des usagers, ainsi que lutte contre les trafics. La mission interministérielle anime également les groupes de travail sur l'évolution de la loi de 1970, mais ses dotations budgétaires ne sont plus en rapport avec ses missions, ce que j'ai récemment écrit au Premier ministre.
    La dotation de 2003 était déjà en baisse de 12 % par rapport à 2002, à 40 millions d'euros, mais les crédits budgétaires réellement disponibles après annulations et gels, se montent à 27,7 millions d'euros. Les reports 2002 sur 2003, qui s'établissaient à 9 millions d'euros, ont été gelés pour 8,8 millions d'euros, et les décrets d'annulation ont porté sur 3,5 millions d'euros.
    J'ai réclamé au Gouvernement le dégel de 4 des 8 millions d'euros gelés, sous peine de sacrifier les actions déconcentrées. Selon les dernières informations officieuses que j'ai obtenues, un seul million d'euros seraient dégelés. C'est insuffisant eu égard aux enjeux de la loi de santé publique tels que vous nous les avez récemment exposés à cette tribune.
    Mais n'est-ce pas vouloir résoudre la quadrature du cercle que de vouloir en même temps diminuer les impôts, prendre l'engagement de stabiliser les déficits, et se donner les moyens de mener une politique cohérente de lutte contre les toxicomanies ? A Toulouse, dans le cadre du contrat de ville, les crédits sont passés de 486 000 euros en 2002 à 352 000 euros en 2003.
    En 2004, la dotation de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie est affichée à 38 millions d'euros, en baisse de 5 % par rapport aux crédits votés pour 2003.
    Elle devait concerner en priorité les actions en direction des mineurs, qu'il s'agisse du tabac, de l'alcool ou des drogues illicites, en particulier le cannabis, dont les effets nocifs sont désormais mieux connus.
    Mais comment mener réellement ces actions déconcentrées, en liaison avec les ministères de l'éducation nationale et de la justice, lorsque les crédits délégués ne cessent de décroître, passant de 14 millions d'euros en 2000 à 10 millions d'euros en 2001, 5 millions d'euros en 2002, et que 2,5 millions d'euros seulement ont été engagés à ce jour en 2003 ?
    Aggravant cette instabilité budgétaire, une instabilité structurelle vient de se produire avec le transfert de trente-sept emplois de la MILDT sur le budget de la section « santé-solidarité ». Il s'agissait de compenser le rattachement aux services généraux du Premier ministre des quarante emplois du CSA, sans consultation des ministères mettant des agents à disposition de la mission.
    Curieuse logique, curieuse procédure, alors que le caractère interministériel de la MILDT est essentiel et doit être réaffirmé !
    J'en viens à la politique de sécurité sanitaire dont les moyens, en apparence, progressent considérablement, passant de 28 à 75 millions d'euros, mais l'année 2003 a été marquée par une ponction sans précédent sur les fonds de roulement des différentes agences, dont le niveau, qui pouvait certes apparaître comme trop important, était lié néanmoins à leur montée en charge et à des projets immobiliers d'envergure.
    La catastrophe sanitaire de cet été mérite une réflexion approfondie : les travaux de la mission d'information et de la commission d'enquête y contribueront. Les actions à mener, au regard des dysfonctionnements constatés, devront trouver des moyens à hauteur des enjeux. Il n'est pas certain que la faible progression du nombre des emplois à l'Institut national de veille sanitaire - quatre emplois supplémentaires - le lui permette. La seule mise en oeuvre du plan cancer en demanderait dix-sept.
    Sortant un instant de mon rôle de rapporteur spécial, et sur la base de mon propre travail d'enquête réalisé sur la crise caniculaire de cet été dans l'agglomération toulousaine, dont j'ai transmis les conclusions à la direction générale de la santé, je me permets d'insister sur le fait qu'il est important que les agences, la DGS et votre propre cabinet ne soient pas peuplés que de compétences issues des mêmes moules, des mêmes écoles de pensée, et qu'ils soient ouverts aux hommes et femmes de terrain, qu'ils soient fonctionnaires ou soignants, mais qu'ils soient pluridisciplinaires et réactifs. J'avais à cet égard demandé que, dans le cadre du diagnostic des dysfonctionnements apparus à la lumière de la catastrophe sanitaire de cet été, vous procédiez à une vaste consultation de tous vos services déconcentrés, qui , je pense, ont de nombreuses réformes à proposer, qu'il serait souvent possible de réaliser à moyens constants.
    L'Agence française de sécurité sanitaire environnementale, que vous avez inaugurée il y a un an, doit encore trouver sa place, en coordination avec l'INERIS et l'AFSSA, notamment pour que la France rattrape son retard concernant les risques liés aux produits biocides, et pour la mise en oeuvre du plan santé-environnement.
    Le chapitre concernant l'organisation des soins est marqué par le désengagement de l'Etat, avec le basculement de l'investissement hospitalier vers l'assurance maladie et le sabordage des contrats de plan Etat-région.
    Ces transferts posent des questions de droit, l'assurance maladie devant assumer des engagements pris par l'Etat. En outre, l'Etat s'exonère des exigences de performances de la loi organique en externalisant l'investissement.
    Le FIHMO, le fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux, créé pour aider les établissements sous dotation globale à réaliser des opérations de restructuration hospitalière, n'existe plus. Son exécution était particulièrement lourde et centralisée. Les engagements en cours seront assumés en 2004 par l'assurance maladie.
    Aucune autorisation de programme ne sera ouverte en 2004 pour aider aux investissements dans les établissements sanitaires sur le chapitre 66-11. Seuls 11 millions d'euros sont inscrits en crédits de paiement.
    Le pilotage de l'offre de soins ne sera pas réformé en 2004, la transformation des ARH en ARS, agences régionales de santé, étant différée. Des missions nouvelles leur ont néanmoins été assignées pour la mise en oeuvre du plan « Hôpital 2007 » ainsi que pour la tarification à l'activité initiée par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.
    L'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé poursuit sa montée en charge. Son activité est centrée, heureusement, sur la recherche de la qualité et de l'efficience.
    L'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation tarde à se mettre en place. Elle prend en charge depuis l'an dernier l'ensemble du programme de médicalisation des systèmes d'information et participe à la préparation de la tarification à l'activité. Je vous renvoie au rapport écrit pour ce qui concerne l'informatisation du système de soins, le réseau de télémédecine et du programme « SESAM-Vitale ».
    Les subventions aux écoles de formation des professionnels paramédicaux sont mises à niveau, en distinguant celles relevant d'un établissement hospitalier qui sont financées par l'assurance maladie.
    Les promotions de formation menant au diplôme d'Etat d'infirmier passeront de 26 000 à 30 000 cette année.
    Les crédits des stages extrahospitaliers des internes en médecine et pharmacie, inscrits au chapitre 43-32, sont insuffisants, ainsi que ceux concernant l'« année-recherche » des internes.
    Enfin, la formation médicale continue n'est toujours pas mise en oeuvre dans le nouveau dispositif prévu par la loi de mars 2002 relative aux droits des malades, le Gouvernement ayant décidé de la modifier par le texte relatif à la santé publique avant même qu'il ne soit appliqué. Il faut espérer que son ambition ne sera pas revue à la baisse étant donné son importance désormais reconnue par tous, à commencer par vous-même, monsieur le ministre !
    La politique en faveur des personnes handicapées bénéficie de la priorité qui lui a été accordée par le Président de la République. Sa consolidation est un point positif dans le contexte budgétaire actuel.
    Le chapitre 46-35 regroupe 6,15 milliards d'euros dont 185 millions d'euros de moyens nouveaux : 135 millions d'euros pour l'allocation adulte handicapé et 30 millions d'euros pour les centres d'aide par le travail. Les crédits déconcentrés destinés aux centres d'aide à l'enfance, aux auxiliaires de vie et aux sites pour la vie autonome augmentent de 14 millions d'euros en 2004 : ils permettront de financer 514 nouveaux forfaits d'auxiliaires de vie et 500 autres forfaits destinés aux personnes lourdement handicapées. Voilà, madame la secrétaire d'Etat, une mesure qui était bien attendue.
    La grosse masse du budget relève de l'allocation adulte handicapé avec 4,661 milliards d'euros de crédits, en progression de 3 %, du fait notamment de l'intégration des allocataires exploitants agricoles, la progression prévue risquant de ne pas suffire pour couvrir l'augmentation du nombre de bénéficiaires. Cette dotation prend effectivement en compte une économie de l'ordre de 30 millions d'euros attribuée à des améliorations de la gestion du dispositif, selon la réponse apportée par le ministère.
    Il faut espérer que l'accès à l'allocation adulte handicapé ne sera pas restreint en 2004, pour des motifs purement budgétaires.
    L'effort de création de places en maisons d'accueil spécialisées et en CAT a été amplifié cette année. Par contre, l'exécution des contrats Etat-région inscrite au chapitre 66-20 a été calamiteuse, annulations et gel n'ayant permis aucune délégation de crédits à ce jour. Aussi 1 million d'euros en autorisations de programme et 6,2 millions d'euros en crédits de paiement ont-ils été inscrits pour 2004.
    Bénéficiant de la priorité présidentielle, les actions en direction du secteur devraient aussi bénéficier de la mise en oeuvre, à compter du 1er juillet 2004, du plan dépendance qui vient d'être annoncé par le Gouvernement.
    Mais cette politique reste également suspendue à la mise en oeuvre de la réforme de la loi d'orientation de 1975, attendue pour 2004, très attendue par le secteur.
    Madame la présidente, mes chers collègues, la commission des finances, dans sa majorité, a adopté le budget pour la santé, les personnes handicapées et la famille.
    Mme la présidente. La parole est à M. Michel Heinrich, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la santé.
    M. Michel Heinrich, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la santé. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, mon avis porte essentiellement sur le plan Biotox, mais je voudrais auparavant mettre en exergue quelques points qui méritent une attention particulière.
    Tout d'abord, dans le cadre du présent projet, le programme appelé « santé publique-prévention » de la mission « politique de santé » est présenté à titre de préfiguration de ce que seront demain l'ensemble des projets de performance.
    La canicule a mis en évidence des carences en matière de veille sanitaire, auxquelles il faut remédier, d'où la nécessité de dynamiser et de responsabiliser le paysage des agences sanitaires : 75 millions d'euros seront destinés aux agences de veille et de sécurité sanitaire et 35 emplois nouveaux sont inscrits pour consolider le dispositif des agences. Le Gouvernement poursuit un objectif de rationalisation du maillage des agences sanitaires, objectif qu'il faut saluer. Le projet de loi relatif à la bioéthique prévoit d'ailleurs que l'Agence de biomédecine se substituera à l'Etablissement français des greffes, avec un champ de compétences étendu à la greffe, à la médecine de procréation et à la génétique.
    Par ailleurs, le budget permettra une politique de prévention efficace. Les crédits alloués à la politique de prévention, soit 189 millions d'euros, sont principalement destinés au financement d'actions en matière de lutte contre l'alcoolisme et le tabagisme, et plusieurs pathologies au rang desquelles, bien sûr, le cancer et le sida. Des actions sont également prévues dans le domaine de la santé mentale, du suicide ou encore des traumatismes par accident.
    J'attire principalement votre attention sur les moyens mis en place pour la lutte contre le cancer, priorité présidentielle : plus de 59 millions d'euros, dont 18 millions de mesures nouvelles. Ces crédits permettront d'abord d'étendre à tout le territoire le programme de dépistage organisé du cancer du sein. Des efforts seront également faits pour le dépistage du cancer de l'utérus et du cancer colorectal. Le plan de lutte contre le cancer prévoit notamment de développer un système d'information à destination des patients et des familles. Les crédits soutiendront également les associations nationales et les actions de formation professionnelle. Ils contribuent à la mise en place d'un Institut national du cancer, à hauteur de 11 millions d'euros.
    Il faut noter également une nouvelle augmentation des moyens pour la formation des personnels de santé, comme en 2003 : 13 millions d'euros, soit près de 10 %, ce qui permettra d'envisager le recrutement de 30 000 élèves infirmiers au lieu de 26 400 et donnera des moyens supplémentaires importants à la formation initiale des professions médicales et pharmaceutiques ainsi qu'à la formation médicale continue.
    Concernant la CMU, les organismes complémentaires et le régime obligatoire seront sur un pied d'égalité pour la gestion des prestations complémentaires. Le montant du forfait, qui était initialement de 228 euros par an en 2000, est porté à 300 euros dans le projet de loi de finances pour 2004. Enfin, pour rétablir l'équité entre la métropole et les DOM, le plafond de ressources de 566 euros est majoré de 10,8 %.
    J'en viens au plan Biotox, qui doit nous permettre de faire face à des actes de terrorisme utilisant des substances biologiques. Ce n'est que très récemment que les autorités publiques sanitaires nationales ont pris conscience de l'ampleur de la menace terroriste de type biologique ou bactériologique, en septembre 2001. Avant cette date, peu avait été fait pour analyser la menace et préparer des scénarios de réponse, en particulier en ce qui concerne la formation des professionnels de santé. La France était et est toujours en retard par rapport aux Etats-Unis, où la création des Centers for diseases control, CDC, avait répondu à la crainte d'une attaque bioterroriste pendant la guerre froide.
    Le risque bioterroriste ne peut pas être géré de manière totalement indépendante de l'émergence de nouveaux risques sanitaires. L'apparition du SRAS a d'ailleurs été interprétée à son début comme une attaque bioterroriste. La bonne gestion de cette épidémie ne peut nous amener à considérer que le dispositif français est efficient à 100 %. En effet, la contagiosité du SRAS s'est révélée en France moins élevée que prévue.
    Quelle est la menace ? Le but recherché par d'éventuels terroristes peut être de causer des dommages sanitaires maximaux. Les terroristes pourraient aussi souhaiter créer un choc psychologique. Prenons l'exemple de l'alerte à l'anthrax. Si 10 000 enveloppes contenant de la poudre blanche sont envoyées et si une seule contient du charbon, le risque sanitaire est faible. Cependant, le choc psychologique est important et la désorganisation des services sanitaires peut être grande et accroître les dégâts d'une attaque ultérieure.
    Le risque de bioterrorisme peut prendre des formes très diverses et très particulières. Il faut donc adopter une approche par agent toxique utilisé afin d'apporter la réponse spécifique. A partir des agents utilisés, et en fonction des voies utilisées et des milieux visés - l'air, l'eau potable, la nourriture... -, des scénarios ont été élaborés et des exercices menés.
    Aux Etats-Unis, le CDC a hiérarchisé les risques d'agents du bioterrorisme. Cette classification par degré de dangerosité comporte plusieurs niveaux.
    La catégorie A comprend des micro-organismes qui peuvent être disséminés facilement ou transmis rapidement entre les patients. Ils sont susceptibles de causer des réactions de panique : variole, charbon, peste, toxine botulinique, agent de la tularémie, les filovirus et les arénavirus tels que Ebola et Lassa.
    La catégorie B comprend des micro-organismes plus difficiles à disséminer, qui provoquent des maladies moins graves mais nécessitent une surveillance et une capacité de diagnostic spécifiques. Elle inclut la fièvre Q, les rickettsioses, la brucellose, la mélioïdose, les toxines du ricin, le clostridium perfringens et le staphylocoque. Le professeur Raoult recommande à la France d'adopter la même classification, ce qui a d'ailleurs été fait pour l'essentiel.
    Après la menace, la réponse. Celle-ci met directement en cause la responsabilité de l'Etat. Ces enjeux de sécurité civile menacent la vie de milliers de personnes. Le projet de loi relatif à la politique de santé publique, adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, précise les contours de cette responsabilité.
    Le but du dispositif français n'est pas de parvenir à un risque zéro ce qui paraît extrêmement difficile, mais de limiter au maximum les dommages sanitaires causés par une attaque bioterroriste. Ainsi constitue-t-on des stocks mobilisables - matériel médical et de diagnostic, médicaments et vaccins, matériel de vaccination. Chaque préfecture doit prévoir, sur la base de la stratégie définie au niveau national, l'organisation de la distribution de ces médicaments ou vaccins.
    Quant à la DGS, elle effectue la coordination du travail des agences sanitaires, puis participe à la décision lors de réunions interministérielles. Compte tenu de la nature transversale du risque, il n'a pas été jugé opportun de créer, au sein du ministère de la santé, une structure administrative spécifique dédiée à la lutte contre le risque d'attentat bioterroriste. Cependant, une cellule de coordination a été créée et un « coordonnateur Biotox » nommé cet été.
    Quatre types d'actions sont mis en oeuvre : la surveillance et la détection ; la prévention ; l'organisation du système de soins ; l'amélioration de la logistique.
    En matière bioterroriste, l'établissement rapide d'un diagnostic précis est crucial afin d'éviter des épidémies éventuelles. La surveillance et la détection reposent en grande partie sur l'Institut national de veille sanitaire, qui coordonne l'action des centres nationaux de référence, dont certains sont spécifiquement consacrés à la lutte contre le risque bioterroriste. De l'avis des personnes que j'ai auditionnées, les CNR, fonctionnent bien, mais une poursuite de leur financement est absolument indispensable. Il faudrait, de plus, créer de nouveaux CNR, en particulier pour les toxines - ricin, sarin - ainsi que pour les agents d'épidémie animale et végétale.
    La deuxième action concerne donc la prévention. Dans le cas spécifique de la variole, différents niveaux d'alerte ont été définis en fonction de la menace d'attentat ou de la survenue d'un cas dans le monde ou en France. La vaccination d'une équipe nationale multidisciplinaire qui prendrait en charge les premiers cas de variole sur le territoire a déjà été réalisée. D'autres équipes, déjà identifiées, seraient vaccinées en cas de menace précise d'attentat utilisant le virus de la variole, considéré comme le plus grand danger s'il était utilisé dans le cadre d'attaques terroristes. Face à un cas de variole, repéré en France ou dans le monde, le plan Biotox prévoit l'organisation de la vaccination en urgence de tout ou partie de la population résidant en France. La France, qui disposait de stocks de vaccins de première génération, les a complétés en achetant des lots supplémentaires, ainsi que le matériel nécessaire à une administration de masse. Une technique utilisant très peu de vaccin a été validée, permettant désormais de disposer d'un stock suffisant pour assurer, le cas échéant, la vaccination de toute la population.
    Pour le charbon, qui est le risque le plus probable, on ne dispose pas aujourd'hui de vaccin, mais il existe une possibilité de traitement efficace. C'est pourquoi la France a constitué un important stock d'antibiotiques, des quinolones, notamment. Le professeur Raoult conteste ce choix et préconise l'utilisation d'une plus grande diversité d'antibiotiques moins onéreux, qui faciliterait la gestion des stocks, notamment dans les hôpitaux.
    La troisième action est l'organisation adéquate du système de soins. La direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins a mis à jour les « plans blancs » correspondant aux procédures et aux moyens à mettre en oeuvre en cas d'afflux massif de blessés.
    Mme la présidente. Je vous demanderai de bien vouloir vous acheminer vers votre conclusion, mon cher collègue.
    M. Michel Heinrich, rapporteur pour avis pour la santé. Je termine, madame la présidente.
    En outre, la DHOS a identifié neuf hôpitaux dits « de référence » qui, dans chaque zone de défense considérée, seraient les établissements de soins chargés d'assurer la gestion sanitaire de la crise. Des moyens supplémentaires ont été dégagés pour appuyer ce référencement. Le principe d'un don de l'Etat aux établissements a été retenu. Cela permet aux hôpitaux d'intégrer ces matériels dans leur patrimoine, de les amortir et d'en prévoir le renouvellement. L'Etat a ainsi acquis des automates, des extracteurs et des respirateurs. Le professeur Raoult souligne la nécessité de prévoir, à l'avenir, la construction dans les très grandes agglomérations de services complets de maladies infectieuses susceptibles d'être mis en dépression et associés à des laboratoires de type P3, et d'équiper les aéroports internationaux d'infirmeries permettant l'isolement des patients suspects.
    La dernière mesure tend à l'amélioration de la logistique. Le ministère chargé de la santé a participé à deux exercices majeurs dans un cadre international : « Euratox 2002 » et « Exinnat 2003 ».
    Enfin, pour ce qui concerne l'aspect budgétaire, le financement du plan Biotox s'effectue grâce aux crédits d'Etat et aux crédits des régimes de l'assurance maladie, par le biais de fonds de concours en fonction de la nature des opérations à financer. Pour les produits - vaccins, antibiotiques, antidotes et matériels connexes -, la source de financement est l'assurance maladie. Les autres opérations sont financées par les crédits d'Etat, en investissement et en fonctionnement.
    Pour 2004, le programme d'action Biotox fera l'objet de financements spécifiques, répartis entre le budget de l'Etat et les régimes de l'assurance maladie. Ce programme inclut la constitution et le renouvellement de stocks d'antibiotiques, d'immunoglobulines, d'antidotes et de vaccins, afin de faire face à tout événement de grande ampleur. Des financements supplémentaires interviendront également grâce au projet de loi de finances rectificative pour 2003 et par des reports de crédits 2003 non consommés.
    En conclusion, ce budget, qui a été approuvé par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, est un bon, un excellent budget. C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous engage à l'adopter massivement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les personnes handicapées.
    Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les personnes handicapées. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, Dostoïevski nous a enseigné que « vivre sans espoir, c'est cesser de vivre ». Le projet de loi de finances pour les personnes handicapées qui nous est présenté aujourd'hui est un budget d'espoir. Il confirme en effet la rupture amorcée en 2002. La question du handicap ne dépend plus du contexte économique plus ou moins tendu. Le combat pour l'intégration des personnes handicapées dans la société est enfin un combat de coeur.
    En matière d'intégration, vous le savez, la tâche est immense. La loi de 1975, voulue par Jacques Chirac alors qu'il était Premier ministre, était volontariste et courageuse. Depuis, aucune réforme d'envergure n'est venue compléter ces dispositions, et la France a pris beaucoup de retard. La tâche est immense, pour l'accueil des jeunes enfants handicapés en milieu ordinaire, pour le droit au travail en cumulant l'allocation aux adultes handicapés et un salaire, pour l'accès à la culture et au sport, pour la mobilité urbaine, pour les soins à domicile ou en établissement. Ces derniers sont rendus plus coûteux par le passage aux 35 heures du personnel d'accompagnement et par l'augmentation du SMIC. La dépendance augmente avec le vieillissement. Il en est de même des inégalités régionales pour l'offre d'accueil ou le traitement du handicap psychique. Les attentes des associations et des personnes fragilisées sont extrêmement fortes, comme vous le savez, madame la secrétaire d'Etat. Mais, mes chers collègues, ce n'est pas en moins de deux ans d'exercice du pouvoir que nous allons combler un tel retard.
    Le budget 2004 est pourtant un budget d'espoir, qui ouvre de nouvelles perspectives aux personnes fragilisées.
    C'est, tout d'abord, un espoir pour les plus jeunes. Vous le savez, de nombreux adultes restent en institut médico-éducatif car ils ne trouvent pas de place dans des structures spécialisées. Des jeunes de vingt à vingt-cinq ans bloquent ainsi, bien involontairement, ces structures d'accueil pour enfants, en occupant des places normalement réservées aux mineurs.
    (M. Marc-Philippe Daubresse remplace Mme Hélène Mignon au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE
DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE,
vice-président

    Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis pour les personnes handicapées. C'est la raison pour laquelle vous avez multiplié par deux le nombre de places en centres d'aide par le travail, portant leur nombre à près de 100 000. Cette action permet ainsi de libérer des places dans les établissements pour améliorer l'accueil des jeunes enfants.
    C'est aussi un espoir pour les personnes les plus lourdement handicapées. Comme l'a souligné le rapporteur, là encore, l'effort est considérable dans le contexte budgétaire que nous connaissons. Votre budget va permettre de créer 1 000 postes d'auxiliaires de vie en 2004. Parmi eux, 500 forfaits seront « renforcés », c'est-à-dire que les personnes les plus lourdement handicapées pourront bénéficier d'une allocation compensatrice pour tierce personne doublée ou triplée. Dans une perspective plus générale, le nombre des auxiliaires de vie sociale sera passé, entre juin 2002 et janvier 2004, de moins de 3 000 à environ 5 000. C'est un vrai progrès de la solidarité nationale au profit des personnes les plus fragiles.
    C'est encore un espoir pour les personnes qui ont choisi de vivre au milieu de tous, avec et parmi nous. Votre budget aura financé la couverture de l'ensemble du territoire en sites de vie autonome avant la fin de l'année 2005. Nous connaissons, en outre, votre projet de création des « maisons communes » qui se substitueront progressivement aux sites de vie autonome. Les personnes handicapées n'auront plus à frapper qu'à une seule porte pour obtenir l'ensemble des informations et des services dont elles peuvent bénéficier.
    Madame la secrétaire d'Etat, vous êtes en train de redonner espoir aux personnes handicapées en France. Bien sûr, je sais que, sur certains bancs de cette assemblée, on nous reprochera de ne pas aller assez loin. Vous connaissez, comme moi, l'adage selon lequel « Quand je me regarde, je m'inquiète, mais quand je me compare, je me rassure ». Que ceux qui critiquent votre budget se demandent ce qu'ils ont fait dans un contexte économique autrement plus propice.
    Madame la secrétaire d'Etat, votre budget augmente de 3,2 %. Nous savons que vous vous attachez, par ailleurs, à nous présenter un budget non seulement humain, mais sincère. Au moment où plusieurs ministères ont vu certains de leurs crédits gelés par Bercy, les vôtres ont été intégralement réalisés. De plus, votre administration s'avère particulièrement efficace pour employer les ressources qui lui sont allouées. Ainsi, 75 % des crédits prévus en 2003 pour les centres d'aide par le travail ont été utilisés à ce jour. Encore une fois, ces exemples montrent l'attachement très fort du Gouvernement et du Président de la République à la cause du handicap.
    Madame la secrétaire d'Etat, ce budget est également un budget d'espoir parce qu'il laisse entrevoir une refonte de la loi du 30 juin 1975. De nouvelles formes de dépendance seront prises en compte, et les moyens de dépasser leur handicap seront donnés à ceux qui le peuvent.
    Les personnes handicapées attendent notamment beaucoup de la possibilité de cumuler l'allocation aux adultes handicapés avec un revenu d'activité. Elles sont également pleines d'espoir sur tant d'autres sujets : un meilleur dépistage de l'autisme, une meilleure intégration en milieu ordinaire, notamment en milieu scolaire, ou encore la reconnaissance effective du handicap psychique et la mise en place de soins appropriés. Quant à l'accessibilité, elle a fait l'objet d'un rapport très intéressant : il faut un effort de tous, car elle est indispensable à la liberté de circulation.
    Il faudra favoriser les passerelles entre les instituts médico-éducatifs et l'école, entre les lieux d'accueil et d'activité à temps plein et ceux à temps partiel. Cette souplesse donnera une réelle autonomie à la personne handicapée et permettra la prise en compte de ses besoins ou des contraintes familiales qui pèsent sur elle.
    Il vous revient, madame la secrétaire d'Etat, la lourde responsabilité de transformer ces espoirs en réalisations concrètes. Il vous appartient de faire triompher l'action sur la résignation, et de faire que notre société, aujourd'hui trop souvent solitaire, devienne un peu plus solidaire.
    Au-delà de votre engagement, c'est l'ensemble de la société, c'est chacun d'entre nous, qui doit accueillir la différence et être attentif à la solitude des personnes et de leur famille. Ce qu'elles souhaitent, c'est de pouvoir vivre avec nous, et non pas à côté de nous. Ce n'est pas vous ou même le Gouvernement qui pouvez seuls changer notre regard ou notre attitude. C'est tous ensemble, avec les associations, que nous devons agir pour répondre à l'espoir des personnes handicapées.
    Pour toutes ces raisons, vous pouvez compter sur notre appui sans faille. C'est pourquoi la commission des affaires sociales est favorable à votre projet de budget.
    M. le président. Dans la discussion, la parole est à Mme Hélène Mignon.
    Mme Hélène Mignon. Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, le budget consacré au handicap que vous défendez aujourd'hui est un budget figé, ce que, comme l'an dernier, vous justifiez en le présentant comme un budget de transition, sous prétexte qu'il intervient en pleine préparation de la réforme de la loi d'orientation de 1975. Nous ne notons en effet aucune nouveauté, aucune véritable ambition qui donnerait du sens au chantier ouvert par le Président de la République, qui l'avait pourtant présenté comme une priorité de son mandat.
    Il faudrait presque que la représentation nationale se contente de l'annonce de la création de 3 000 places supplémentaires en centres d'aide par le travail... (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-François Chossy et M. François Grosdidier. Ce n'est déjà pas mal !
    Mme Hélène Mignon. ... alors que nous aimerions savoir ce qu'il en est exactement des 3 000 créations déjà annoncées l'an dernier. Je précise au passage que votre effort - louable, bien entendu, et que je ne remets pas en cause - porte sur la création de 1 500 places nouvelles par rapport à ce qui a été fait les années précédentes.
    M. Jean-François Chossy. Ça progresse, madame Mignon !
    Mme Hélène Mignon. C'est vrai !
    M. François Grosdidier. Si on avait ça chaque année !
    Mme Hélène Mignon. Les crédits prévus pour financer la garantie de ressources pour les travailleurs handicapés, qui est le complément de rémunération versé par l'Etat à l'employeur, tiennent compte de ces créations de places : elles ne seront pourtant pas effectives avant la fin de l'exercice 2004. On peut donc s'attendre à un important ajustement négatif et démystificateur, qui ramènera à ses vraies proportions la hausse de ce budget dont vous avez tant de plaisir à présenter l'amélioration, madame la secrétaire d'Etat.
    Vous confirmez, par ailleurs, le sentiment que la politique gouvernementale en matière de handicap se résume à la prise en charge, alors que des millions de personnes attendent que l'accessibilité de la société soit effective pour, enfin, profiter pleinement d'une véritable intégration sociale. Si les quelques dizaines de milliers de places manquantes pour cette prise en charge doivent être créées rapidement, afin de répondre à la demande des familles et poursuivre le travail que nous avions engagé pour rattraper le retard, il n'en reste pas moins que les priorités de votre Gouvernement ne sont pas clairement traduites dans ce projet de budget, et ce n'est pas le peu que vous allouez aux sites pour la vie autonome qui peuvent nous satisfaire.
    L'augmentation des crédits destinés à l'allocation aux adultes handicapés est due à un accroissement du nombre de bénéficiaires et non, malheureusement, à une revalorisation de son montant, qui reste figé, comme c'était déjà le cas l'an dernier dans le projet de loi de finances pour 2003.
    Madame la secrétaire d'Etat, je le sais, vous vous battez chaque jour pour la dignité des personnes handicapées. Aussi, vous conviendrez que pour les personnes qui sont vraiment dans l'incapacité de travailler du fait de leur handicap, le montant de cette allocation est largement insuffisant ; du reste, les associations aimeraient que ce montant se rapproche le plus possible de celui du SMIC.
    Vous annoncez une grande réforme du système allocatif. Nous l'espérons, mais les personnes handicapées interrogées sur ce point sont quelque peu moroses et sceptiques, étant donné l'état actuel du budget.
    En ce qui concerne le plan triennal 2001-2003, il faut admettre qu'il n'a pas été conduit à son terme tel qu'il était prévu en matière d'évaluation et d'orientation. Les 15 millions de francs prévus en 2003 ont été supprimés et l'enveloppe qui accompagne la fusion des sections de COTOREP dans dix départements pilotes n'a été reconduite ni en 2003 ni en 2004. Où est donc la transition dont vous parlez, madame Boisseau, alors que vous annoncez une grande réforme de l'évaluation et de l'orientation des personnes handicapées dans le cadre de votre future loi ?
    D'une manière générale, votre budget ne révèle pas de véritable politique globale et cohérente, même s'il est vrai que la transversalité de la question fait que son traitement budgétaire est a priori éclaté entre différents ministères. C'est le cas, par exemple, du ministère de l'éducation nationale avec lequel vous travaillez. Vous avez annoncé, à plusieurs reprises, de concert avec votre collègue Luc Ferry, la création de 6 000 postes d'auxiliaires de vie scolaire. Pourriez-vous me préciser s'il s'agit réellement de 6 000 postes nouveaux ou si vous comprenez dans ce chiffre les postes déjà existants gérés par les associations ? Il semble par ailleurs que ces 6 000 auxiliaires ne soient pas encore en place sur le terrain. Pourriez-vous nous présenter un premier bilan et nous préciser dans quel laps de temps les associations qui réclament des AVS pourront espérer en disposer ?
    Pour plus de lisibilité et d'efficacité, il serait bon qu'un rapport annuel sur la situation du handicap en France soit soumis à l'appréciation de la représentation nationale. Il impliquerait, entre autres, que chaque ministère présente la traduction budgétaire de ses efforts en matière de handicap.
    L'annonce par le Premier ministre de la création d'une caisse nationale de solidarité pour l'autonomie répond a priori à une demande des associations représentatives de personnes handicapées, sous réserve, bien entendu, de ses modalités de financement, qui doivent être la traduction de la solidarité de l'Etat, et de son fonctionnement. Si cette caisse permet un véritable accompagnement de la personne handicapée dans son projet personnel d'intégration en lui en donnant les moyens, elle sera effectivement dans son rôle.
    Toutefois, cela suppose, madame la secrétaire d'Etat, que le fameux « droit à compensation », que vous souhaitez mettre en oeuvre dans le cadre de la future loi que vous défendrez ici dans quelques semaines, ne soit pas un droit « fourre-tout » dans lequel on ne distinguerait pas ce qui relève de la compensation fonctionnelle - réponse précise à une situation de handicap à un moment donné - et ce qui ressortit à la prise en charge plus conséquente en institution. Et je ne parle pas de votre projet d'y intégrer également l'accessibilité au cadre bâti.
    Cette caisse et ce « droit à compensation » ne devront pas, non plus, effacer la priorité qu'est l'accessibilité de la société. En effet, on ne le répétera jamais assez, une politique de traitement des situations de handicap n'a de sens que si l'on s'attache, en priorité, à assurer l'accès de tous à la cité, c'est-à-dire au cadre bâti, au logement, aux études, à l'emploi et à la culture, entre autres. Pour l'instant, ce ne sont pas les quelques mesures annoncées qui pourront rendre confiance aux handicapés ; du reste, les personnes handicapées rencontrées dans nos permanences les qualifient d'anecdotiques.
    Vous vous engagerez, j'en suis sûre, à ce que la nouvelle loi traduise avec fermeté cet impératif démocratique, mais encore faut-il que vous puissiez nous annoncer quels moyens vous comptez consacrer à la mise en oeuvre de cette accessibilité.
    En revanche, le mode de financement de cette caisse reste bien problématique et est sujet à débat.
    Changer de regard sur les personnes handicapées : cela me semblait être votre leitmotiv - et je suis sûre qu'il le reste -, mais peut-être est-ce le regard du Gouvernement qu'il conviendrait de changer ? Vos nombreux discours empreints de compassion et de générosité font la part belle à l'espoir et à l'acceptation de la différence. Ce n'est pas ce que souhaitent les personnes en situation de handicap, qui attendent beaucoup de votre prochain projet de loi. Vos annonces quant à l'orientation de ce prochain texte, dans lequel vous ne semblez pas prête à abandonner l'expression de « personne handicapée » au profit de celle de « personne en situation de handicap », en heurtent plus d'un, et je les comprends. Je sais aussi que ce sujet fait l'objet ici même de discussions entre nous.
    Pour les personnes qui sont heurtées par l'orientation de votre texte, une personne handicapée est une personne à part entière, placée en situation de handicap du fait de la présence de barrières environnementales - c'est-à-dire architecturales, culturelles, économiques, sociales, voire législatives ou réglementaires - que la personne, en raison de sa ou de ses déficiences, ne peut franchir comme les autres citoyens. Aussi, la politique mise en oeuvre doit viser à supprimer, à réduire, et/ou à compenser dans le même temps, et chaque fois que de besoin, les situations de handicap infinies que rencontrent au quotidien les personnes déficientes.
    Si l'expression « personnes en situation de handicap » ne doit pas devenir la nouvelle appellation politiquement correcte remplaçant la précédente, elle exprime néanmoins plus nettement l'interaction entre les facteurs individuels et les facteurs sociaux, culturels et environnementaux, et apparaît préférable à l'expression « personnes handicapées » en ce sens qu'elle contribue davantage à la non-discrimination que vous appelez pourtant de tous vos voeux.
    Faute d'accepter ces avancées conceptuelles par peur de regarder la réalité en face, vous vous condamnez, madame la secrétaire d'Etat, à construire un budget qui ne répond pas aux aspirations des personnes en situation de handicap.
    M. le président. La parole est à M. Jean-François Chossy.
    M. Jean-François Chossy. Le contenu de mon intervention portant plus particulièrement sur le volet handicap, vous ne m'en voudrez pas, monsieur le ministre, de m'adresser plus directement à Mme Boisseau.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je m'en réjouis !
    (Mme Hélène Mignon remplace M. Marc-Philippe Daubresse au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE Mme HÉLÈNE MIGNON,
vice-présidente

    M. Jean-François Chossy. Madame la secrétaire d'Etat, s'il s'agissait seulement de changer le regard sur le handicap, votre tâche serait, tout compte fait, assez simple. Toutefois, vous avez choisi d'aller plus loin et plus fort dans la démarche, votre objectif étant de faire évoluer et changer les comportements, de faire en sorte que la détresse et le désespoir des familles, la douleur et la fragilité des personnes handicapées n'appellent pas seulement l'émotion et la pitié, mais bien la fraternité et la solidarité.
    Le handicap est une caractéristique de la personne humaine. Demain, cela peut être la caractéristique de chacun d'entre nous et nous pouvons tous être confrontés un jour ou l'autre à un handicap et nous trouver brutalement, du fait d'une maladie ou d'un accident, fragilisés à notre tour. Et, vous le savez bien, mes chers collègues, le monde est sans pitié pour la fragilité.
    Il y a chez les personnes handicapées et chez ceux qui les entourent une grande force et une grande espérance, une envie de vivre le quotidien avec bonheur, un besoin de vivre, tout simplement, l'ordinaire de la vie pour être comme les autres, mais avec des moyens différents. Et le but que vous poursuivez, madame la secrétaire d'Etat, est de faire en sorte que cette vie soit acceptable, réalisable et accessible pour tous et pour tout.
    Le budget que vous nous proposez est un bon budget. Il s'inscrit dans la continuité de celui présenté l'an dernier et qui, je le rappelle, avait fait progresser de près de 6 % les crédits consacrés aux personnes handicapées. Cela s'est traduit, en 2003, par des actions très concrètes, comme la création de 2 200 places supplémentaires en maison d'accueil spécialisées, ou l'ouverture de 3 000 places en CAT et de plus de 500 places en institut médico-éducatif. Quant au maintien à domicile des personnes lourdement handicapées qui ont fait le choix volontaire de bénéficier des soins chez eux, il a été favorisé par vos actions, madame la secrétaire d'Etat, puisque vous avez doublé les effectifs des auxiliaires de vie et augmenté de 30 % les places en service d'éducation spéciale et de soins à domicile.
    Je ne veux pas faire ici l'inventaire des actions passées, mais plutôt me tourner vers celles à venir pour me réjouir des bonnes initiatives que vous nous présentez. En effet, même si tout le monde s'accorde pour dire que ce budget est un budget de transition, par référence à la grande loi en préparation, je tiens à souligner à mon tour que le montant des crédits que vous avez obtenus pour 2004 permettra de consolider les interventions de l'Etat en direction des personnes fragilisées par le handicap.
    Dans l'excellent rapport de notre collègue Chantal Bourragué, je relève que si les crédits du secrétariat d'Etat aux personnes handicapées pour 2004 s'élèvent à 6,123 milliards d'euros, ceux qui sont consacrés à l'allocation aux adultes handicapés représentent 4,661 milliards d'euros, ce qui permettra de rémunérer l'ensemble des bénéficiaires de cette allocation, qui dépassent aujourd'hui les 800 000 - leur nombre est en constante augmentation - et d'absorber l'ajustement dû à la revalorisation de cette allocation.
    Je constate également dans le rapport qu'il est proposé, dans le cadre de la loi de finances pour 2004, la création de 3 000 nouvelles places en CAT et que les crédits destinés aux CAT sont en augmentation significative de 2,7 %, pour atteindre 1,125 milliard d'euros. A ce propos, je veux noter l'importance qu'il y a à apporter un soutien sans failles aux centres d'aide par le travail, dont le rôle social dans l'accompagnement de la personne handicapée est exemplaire. Les CAT proposent en effet à la personne concernée de s'insérer par le travail dans la communauté humaine. La compétitivité étant de plus en plus forte, l'élimination des plus faibles devient un réel péril, d'où le rôle indispensable de ces structures d'insertion.
    Madame la secrétaire d'Etat, dans votre approche du handicap, vous avez souvent démontré votre volonté et votre capacité à prendre en compte l'accompagnement social des enfants, des adolescents et des adultes lourdement handicapés. Pour les polyhandicapés, les personnes autistes, celles et ceux qui sont traumatisés crâniens, comme pour les personnes atteintes d'un handicap psychique, les challenges sont énormes et les attentes des familles ne doivent pas être déçues. Personne, aujourd'hui, ne peut se satisfaire des mots. Tous attendent des actes. Et vous êtes présente à ce rendez-vous. Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit en effet la création de 514 nouveaux forfaits d'auxiliaires de vie, ainsi que 500 autres forfaits plus spécifiquement destinés à des personnes très lourdement handicapées.
    Voilà pour les actes. Mais, au-delà, madame la secrétaire d'Etat, j'aimerais vous interroger sur vos intentions au sujet de l'accueil des personnes handicapées en Belgique. Vous le savez, 3 000 personnes handicapées françaises sont en effet accueillies dans des établissements belges. L'an dernier, lors de la discussion budgétaire, j'avais déjà évoqué ce paradoxe : des Français sont hébergés dans des établissements belges, d'ailleurs ouverts exclusivement pour eux, et le prix de journée est payé par la France, que le financement provienne des conseils généraux ou de la sécurité sociale.
    La Belgique n'est ni l'Eldorado ni la terre promise pour les personnes handicapées. C'est souvent par défaut que nombre de familles françaises sont contraintes de confier leurs enfants à ces instituts. Il en existe une quarantaine, qui fonctionnent certes avec des conventions de principe, mais sans subir les contraintes administratives et réglementaires imposées aux établissements nationaux. Cette préoccupation est d'ailleurs partagée par un rapport récent consacré à l'autisme.
    Je m'interroge sur l'utilité de créer une commission d'enquête parlementaire afin d'aborder clairement les questions liées à l'accueil en Belgique. Doit-on s'engager à rapatrier progressivement l'ensemble des résidents handicapés ou faut-il imposer aux établissements belges les règles strictes et nécessaires applicables en France ?
    Une solution transitoire - de modeste portée dans ce cas, mais tellement utile dans bien d'autres circonstances - serait d'utiliser l'accueil temporaire comme sas de retour, à condition, bien entendu, que les décrets qui autorisent structurellement et financièrement ce nouveau mode d'accueil soient pris rapidement.
    La rapporteure pour avis, Chantal Bourragué, évoque longuement et avec raison dans son rapport les situations qui appellent encore l'action, notamment celles qui concernent l'intégration en milieu scolaire ordinaire. Je n'y reviendrai pas, non seulement parce qu'elles ne relèvent pas directement du présent budget, mais plutôt d'une réflexion partenariale avec l'éducation nationale, mais aussi parce que je préfère vous renvoyer sur ce point à la lecture approfondie du rapport documenté, détaillé, et de ce fait excellent, rendu par Yvan Lachaud, député du Gard. Outre le constat, on y relève des propositions utiles.
    Après nous avoir dit de nouveau, madame la secrétaire d'Etat, ma satisfaction et, bien sûr, celle du groupe UMP, qui votera ce budget, je veux maintenant évoquer la prochaine loi relative à l'égalité des chances des personnes handicapées. En effet, votre budget jette des ponts vers une évolution inévitable et tant attendue de la loi de 1975. Dans ces conditions, il devient impossible de ne pas évoquer aujourd'hui ce que sera notre travail de demain.
    La loi de 1975 portait en elle toute la problématique du handicap. Elle a été présentée et votée « en faveur des personnes handicapées ». Mais il faudra, demain, penser et voter un texte pour l'« intégration » de la personne handicapée. Je dis bien de la « personne handicapée », pas de la personne en « situation de handicap ». Les mots sont importants : si je pose mes lunettes, je suis en situation de handicap (Sourires) car je distingue moins clairement les choses et les gens, mais je ne suis pas handicapé car je ne suis pas aveugle ; si mon interlocuteur me parle en russe ou en chinois, je suis en situation de handicap parce que je ne comprends pas ce qu'il me dit, mais je ne suis pas handicapé car je ne suis pas sourd.
    En fait, la France compte 60 millions de personnes en situation potentielle de handicap par rapport à leur environnement et environ 5 millions de personnes réellement porteuses de handicap. C'est de l'intégration de ces dernières que la loi doit se préoccuper.
    Le texte à venir, madame la secrétaire d'Etat, est attendu. Le président du groupe d'études que je suis en sait quelque chose puisqu'il est, comme vous, à l'écoute constante des associations, des professionnels et des personnes handicapées.
    Le futur texte devra reposer sur quatre socles : la simplification, la personnalisation, la compensation et l'intégration.
    Rien ne se fera sans concertation et, à ce propos, outre votre travail personnel et celui de votre cabinet, je veux saluer et encourager le CNCPH et son président, Jean-Marie Schléret, pour qu'ils poursuivent à bien et à fond la réflexion sur tous les thèmes évoqués.
    En ce qui concerne la simplification, il faudra préciser les contours d'un lieu unique départemental, véritable point de repère pour les familles et les personnes concernées : une maison du handicap, un site à la vie autonome. Cela devra être un lieu identifiable, accessible, capable d'accueillir les familles en déroute, capable d'informer, d'évaluer, d'orienter, d'aider à la recherche d'un financement spécifique, capable de rapprocher les problèmes de leurs solutions.
    Pour ce qui est de la personnalisation, j'ai relevé, madame la secrétaire d'Etat, votre volonté affichée de proposer à toute personne handicapée un projet de vie évolutif et individualisé, construit à partir des potentialités et des choix de la personne, et non plus à partir de ses différences et de ses déficiences.
    S'agissant de la compensation, je suis persuadé, comme la plupart des Français, que, si elle doit bien être d'ordre technique, humaine et financière - sous forme d'une prestation spécifique - et doit garantir les ressources nécessaires à une vie autonome digne, son fondement ne peut s'appuyer que sur la solidarité nationale.
    Il y a quelques mois, 75 % des personnes interrogées à ce sujet étaient d'accord pour que le produit d'une journée de travail soit versé à un fonds national du type de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie proposée dernièrement par le Premier ministre. Certains députés socialistes et communistes, très en pointe, avaient approuvé ce projet en signant l'appel d'une association nationale. D'autres propositions, notamment celle concernant la suppression d'une journée de RTT, ont également été formulées. Alors pourquoi nous laisser croire aujourd'hui que cette idée, bonne hier pour une grande partie de la population, serait aujourd'hui à jeter aux orties ? Ce qu'il faut retenir, au-delà de cette polémique stérile, c'est la grande idée qui consiste à créer une branche dépendance, consacrant ainsi la solidarité nationale.
    Enfin, l'intégration sera la pilier essentiel de ce nouveau texte, de cette loi Boisseau. L'intégration passe essentiellement par le respect d'un droit fondamental, celui de l'éducation et de la scolarisation, mais aussi par l'accès au monde du travail et par l'autonomie sociale. La vie quotidienne doit être facilitée au maximum, l'accessibilité doit être garantie.
    Notre action législative à venir doit envisager la personne handicapée comme l'égal de nous-mêmes, avec nos forces et nos faiblesses, avec nos passions, notre intelligence et nos défauts, avec nos doutes et nos joies.
    Rien ne pourra être fait d'utile et d'important qui ne le sera aussi pour les plus faibles d'entre nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
    Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, le projet de loi de finances 2004 est à nos yeux un texte de rupture. Vous y exposez clairement l'objectif politique de votre gouvernement. Face à l'organisation sociale patiemment construite durant tout le XXe siècle, il s'agit d'installer un libéralisme dépassé, car peu soucieux de l'intérêt général et essentiellement lié aux exigences du marché, un libéralisme qui clive la société civile en fonction de la richesse détenue et impose un retour aux conceptions étroites d'un Etat exclusivement centré sur ses fonctions de justice, d'ordre et de sécurité.
    Le projet de budget pour 2004 du ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées s'inscrit complètement dans cette logique budgétaire globale. Pourtant, à vous entendre, on aurait pu croire l'inverse. Mais c'était oublier un peu vite que jamais les mots ne remplacent les actes, et que c'est sur les actes que l'on doit fonder son opinion.
    Or ce budget ne remplit pas les objectifs de santé publique et de prévention annoncés. On pourrait dire que c'est un budget d'illusionniste !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. De désillusionniste, plutôt !
    Mme Jacqueline Fraysse. Malgré la légère hausse affichée pour 2004, la tendance est à la stagnation. Avec un taux de croissance de 2,2 %, inférieur de moitié à celui des années précédentes, il marque un net ralentissement par rapport à 2003. En fait, cette croissance ne correspond qu'au rattrapage de l'inflation prévue par l'INSEE.
    Lors de la rentrée parlementaire, vous annonciez la mise en place d'une véritable politique de santé publique et de sécurité sanitaire. Toutefois, comme nous l'avions craint lors des débats sur le projet de loi relatif à la politique de santé publique, vos propositions financières ne sont pas convaincantes. Malgré une augmentation de 13 % par rapport à 2003 des dépenses de santé publique et sécurité sanitaire, la part des crédits consacrés à la santé publique dans le total du budget reste pratiquement constante : de 3,3 % en 2002 et en 2003, elle passera à 3,7 % en 2004. Il n'y a donc pas de réel effort du Gouvernement dans le domaine de la santé publique.
    Certes, votre budget contient un nouveau chapitre d'expérimentation de santé publique, qui représente 59 % du budget de l'agrégat, et c'est le moins que vous puissiez faire après vos engagements en matière de santé publique. Mais ces crédits consacrés à la prévention en santé publique pour 2004 présentés comme nouveaux, sont, pour l'essentiel, déjà présents dans les dépenses du budget de 2003. Le total de ces nouveaux crédits s'établira à 194 580 000 euros en 2004, alors qu'il était déjà de 189 710 000 euros en 2003, dont 172 887 400 euros pour l'ancien « programme de prévoyance ». De même, vous oubliez de dire que ces dépenses d'expérimentation sont budgétées sans dépenses de personnels supplémentaires pour 2004.
    Ainsi, vous annoncez une masse d'actions nouvelles à engager, mais vous n'ajustez pas les moyens techniques et en personnels nécessaires à ces ambitions. En réalité, il n'y a pas de moyens nouveaux pour cette politique dite nouvelle de santé publique, et les seules dépenses réellement nouvelles sont les 18 millions d'euros destinés au programme de lutte contre le cancer - chantier présidentiel oblige.
    Même les moyens que vous destinez aux interventions de sécurité sanitaire et aux actions interministérielles de lutte contre la drogue et la toxicomanie accusent une baisse. Les premières perdent 800 000 euros de dotation tandis que les secondes accusent une baisse de plus de 2 millions d'euros.
    Surtout, en guise de nouveau plan de lutte contre la drogue et la toxicomanie, vous revoyez de fond en comble les dépenses et objectifs d'intervention de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, la MILDT.
    Vous réduisez son champ d'intervention à la prévention des jeunes face aux risques liés au tabac et à l'alcool et vous consacrez 35 % de son budget pour 2004, soit 3,634 millions d'euros, au soutien financier des ministères chargés de la répression de l'usage de stupéfiants. En conséquence, les actions classiques de lutte contre la toxicomanie, pourtant soutenues par un fort maillage d'associations efficaces, seront dotées d'un budget divisé par six. Il ne faut pas confondre la répression et la santé !
    Il n'y a donc rien, monsieur le ministre, qui nous permette de considérer que votre « grande politique de prévention et de plans nationaux » soit financée. La réalité des autorisations de crédits n'est pas à la hauteur de vos discours. Ce budget pour 2004 ne sera pas celui d'un rééquilibrage entre le curatif et le préventif pourtant au coeur du débat sur la politique de santé publique.
    S'agissant de l'agrégat « offre de soins et accès aux soins », le projet de budget accuse une perte sèche de près de 30 millions d'euros par rapport à l'année 2003 et revient quasiment à son niveau de 2002.
    Cette évolution négative marque la réduction de la couverture publique de soins et d'accès aux soins pour l'ensemble de la population. Elle signe votre volonté de désengager l'Etat d'une offre publique de soins et de limiter son aide à l'accès aux soins pour les populations les plus pauvres. C'est une philosophie réductrice d'assistance qui n'a rien à voir avec une volonté d'égalité et de solidarité.
    Vous organisez le transfert vers l'assurance maladie des crédits d'Etat pour l'investissement hospitalier. Vous faites disparaître les fonds d'aide à l'adaptation des établissements hospitaliers et vous réduisez les subventions d'équipements sanitaires des hôpitaux, c'est-à-dire que vous entamez des crédits destinés principalement à la modernisation et l'humanisation des centres hospitaliers régionaux, des établissements d'intérêt national et des établissements de soins et de cures. Au total, ces coupes budgétaires atteignent plus de 20 millions d'euros. Compte tenu de l'impact de ces dépenses à la fois sur les conditions de travail et sur les conditions sanitaires d'exercice, et après la catastrophe sanitaire de cet été, de tels choix sont graves.
    Par ailleurs, dans le cadre de l'article 82 rattaché à la loi de finances, vous alignez le mode de prise en charge de la CMU de base sur celui de la CMU complémentaire en généralisant la forfaitisation des remboursements des organismes de sécurité sociale par l'Etat au titre de la CMU. N'assurant plus le remboursement à l'euro près par l'Etat des dépenses de CMU prises en charge par les caisses primaires d'assurance maladie, les CPAM, vous induisez un transfert de cette charge du budget de l'Etat vers les caisses de sécurité sociale. Afin de respecter les engagements de l'ONDAM, les CPAM seront conduites à limiter leur prise en charge CMU au prorata de la dépense individuelle de chaque bénéficiaire de la CMU.
    De cette façon, vous incitez les caisses de sécurité sociale, gestionnaire de 85 % des bénéficiaires de la CMU, donc l'immense majorité, à se comporter comme des assureurs privés, ce qui les place sur le terrain de la concurrence avec les autres acteurs privés de l'assurance maladie. Ce glissement de métier risque fort de conduire la Cour européenne, au nom du respect des règles intra-européennes de concurrence loyale, à supprimer le statut spécial des caisses d'assurance maladie lié à leur mission de service public. On entrerait alors un peu plus dans la privatisation des organismes de sécurité sociale.
    Quant à vos ambitions en matière de famille et de handicaps, ce budget montre, là encore, ses limites. En croissance de seulement 2,6 % contre 5,9 % les années précédentes, l'agrégat accuse, lui aussi, un ralentissement.
    Ainsi, malgré une annonce de grand chantier présidentiel, on peut s'interroger sur la réalité de l'effort public en matière de handicap face au chiffrage des autorisations de crédits pour 2004. Mais j'aurai l'occasion d'y revenir tout à l'heure.
    Concernant la famille et l'enfant, les subventions annoncées sont en baisse de 12 190 300 euros pour 2004. Et aucune mesure nouvelle significative n'y transparaît. En outre, toutes les mesures qui visaient à aider les femmes seules, les femmes victimes de violences conjugales, ou à lutter contre la discrimination sexuelle sont revues à la baisse ou non reconduites, pour un montant de plus de 36 millions d'euros, et la majeure partie de ces réductions de subventions affectera principalement les femmes des milieux défavorisés.
    Dans le cadre de l'aide à l'enfance, les mesures qui bénéficient de moyens financiers nouveaux sont essentiellement de communication et d'information, avec la création d'un observatoire de l'enfance maltraitée et la mise en place d'une médiation familiale.
    Mme la présidente. Madame Fraysse, je vous prie de bien vouloir conclure.
    Mme Jacqueline Fraysse. Je termine, madame la présidente.
    Ces deux mesures sont de bonnes mesures mais vous ne financez rien d'autre pour répondre aux difficultés sociales, économiques et d'insertion des enfants.
    En revanche, vous poursuivez votre implacable logique de dons aux entreprises et utilisez tous les moyens disponibles pour cela. Ainsi, en première partie du budget, vous avez fait adopter un article visant à créer un « crédit d'impôt familles » pour les entreprises qui contribuent à des dépenses d'oeuvres sociales destinées à financer partiellement la garde collective ou individuelle d'enfants en bas âge. Même ici, au prétexte d'aider les familles, vous financez les entreprises.
    On entrerait alors un peu plus dans la privatisation des organismes de sécurité sociale.
    Quant à vos ambitions en matière de famille et de handicaps, ce budget montre, là encore, ses limites. En croissance de seulement 2,6 % contre 5,9 % les années précédentes, l'agrégat accuse, lui aussi, un ralentissement.
    Ainsi, malgré une annonce de grand chantier présidentiel, on peut s'interroger sur la réalité de l'effort public en matière de handicap face au chiffrage des autorisations de crédits pour 2004. Mais j'aurai l'occasion d'y revenir tout à l'heure.
    Concernant la famille et l'enfant, les subventions annoncées sont en baisse de 12 190 300 euros pour 2004. Et aucune mesure nouvelle significative n'y transparaît. En outre, toutes les mesures qui visaient à aider les femmes seules, les femmes victimes de violences conjugales, ou à lutter contre la discrimination sexuelle sont revues à la baisse ou non reconduites, pour un montant de plus de 36 millions d'euros, et la majeure partie de ces réductions de subventions affectera principalement les femmes des milieux défavorisés.
    Dans le cadre de l'aide à l'enfance, les mesures qui bénéficient de moyens financiers nouveaux sont essentiellement de communication et d'information, avec la création d'un observatoire de l'enfance maltraitée et la mise en place d'une médiation familiale.
    Mme la présidente. Madame Fraysse, je vous prie de bien vouloir conclure.
    Mme Jacqueline Fraysse. Je termine, madame la présidente.
    Ces deux mesures sont de bonnes mesures mais vous ne financez rien d'autre pour répondre aux difficultés sociales, économiques et d'insertion des enfants.
    En revanche, vous poursuivez votre implacable logique de dons aux entreprises et utilisez tous les moyens disponibles pour cela. Ainsi, en première partie du budget, vous avez fait adopter un article visant à créer un « crédit d'impôt familles » pour les entreprises qui contribuent à des dépenses d'oeuvres sociales destinées à financer partiellement la garde collective ou individuelle d'enfants en bas âge. Même ici, au prétexte d'aider les familles, vous financez les entreprises.
    Si l'on ajoute à cela la création de la PAJE lors du PLFSS pour 2004, on voit bien que votre logique contribue à refonder les règles d'une politique familiale de garde de l'enfant qui ouvre la porte à l'individualisation et à la privatisation.
    Manifestement, là non plus, ce budget n'est pas à la hauteur des ambitions affichées.
    Monsieur le ministre, ce projet de budget de santé publique pour 2004 est particulièrement inquiétant. Il ne tire aucune leçon, ni de l'épidémie de SRAS, ni de la catastrophe sanitaire de cet été. En stagnation globale et malgré les déclarations de bonnes intentions, il marque la continuité du désengagement de l'Etat des actions de santé et l'ouverture toujours plus grande à la privatisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur le ministre, vous nous présentez un budget de la santé pour 2004 bien modeste, qui ne reflète aucunement la politique de la santé de la nation.
    Nous venons de débattre pendant une semaine du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Les dépenses remboursées par l'assurance maladie sont prévues à 129,7 milliards d'euros et les dépenses courantes de santé du pays sont estimées à 160 milliards d'euros.
    En regard, le budget du ministère de la santé est extrêmement modeste puisqu'il représente 8,6 milliards, chiffre qui correspond essentiellement au budget de fonctionnement pour le ministère lui-même et les agences sanitaires qui en dépendent.
    Aujourd'hui, la santé dans notre pays est totalement étatisée. Vous souhaitez en effet renforcer le rôle de l'Etat à tous les niveaux. Vous êtes responsable des établissements, des hôpitaux et des cliniques, du médicament et de la quasi-totalité de l'ambulatoire. Vous avez également confirmé votre volonté de renforcer le rôle de l'Etat dans la politique de prévention et d'éducation à la santé et dans la santé publique en général. Vous intervenez dans de nombreux domaines par l'intermédiaire d'agences diverses ou commissions de transparence, Institut de veille sanitaire, AFSSAPS, Etablissement français du sang, etc. Vous intervenez également en permanence, jour après jour, par le biais de nombreux décrets et arrêtés sans toujours donner - nous avons coutume de le rappeler - les moyens financiers correspondants, en particulier quand vous prenez des mesures concernant la sécurité sanitaire, pour l'anesthésie ou la périnatalité, par exemple. Bref, le rôle de l'Etat, et donc de votre ministère, dans la politique de la santé est très important. Mais avez-vous les moyens correspondants ?
    Aujourd'hui, tous les secteurs de la santé sont en crise, vous le savez bien, puisque vous êtes sans cesse amené à intervenir pour tenter, parfois non sans succès, d'éteindre les incendies. Vous avez annoncé que 2004 serait l'année de la réforme. Celle-ci est particulièrement urgente pour endiguer le déficit considérable de l'assurance maladie, optimiser les dépenses et améliorer la qualité des soins.
    Deux questions se posent clairement à notre pays.
    Première interrogation, qui pilote la politique de santé ? Aujourd'hui, la réponse est clairement : personne. Quelles sont les relations entre les divers acteurs : l'Etat, le Parlement, l'assurance de base, les assurances complémentaires et les acteurs de terrain ?
    L'année 2004 devrait - du moins nous l'espérons - nous apporter une réponse et permettre de clarifier le rôle de chacun. A ce propos, je vous rappelle, monsieur le ministre, que l'Union pour la démocratie française souhaite être écoutée et, si possible, entendue.
    M. Jean-François Chossy. Quand elle ne dit pas de bêtises !
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous avez déjà voté ; il n'y a donc pas de problème !
    M. Jean-Luc Préel. Je parle de l'action de gouvernance !
    Mais vous avez sans doute des idées particulières sur ce sujet, monsieur Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Très particulières. En effet ! C'est d'ailleurs tout le problème.
    Mme la présidente. Je vous en prie, poursuivez, monsieur Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Nous défendons la place de l'Etat. Celui-ci doit être le garant de l'égal accès de tous à des soins de qualité. Mais, nous voulons aussi rendre chacun acteur et responsable en associant professionnels de santé et associations de malades et d'anciens malades, en amont, aux décisions et, en aval, à la gestion dans des conseils régionaux de santé élus par collège. Seule, de notre point de vue, la responsabilisation des acteurs permettra une réelle maîtrise médicalisée optimisant les dépenses de santé.
    Pour l'Union pour la démocratie française, aujourd'hui, la légitimité du paritarisme en matière de gestion de la santé est loin d'être une évidence.
    Après cette interrogation sur la nouvelle gouvernance dont nous souhaitons qu'elle puisse être définie prochainement, notre deuxième préoccupation est de savoir si vous avez les moyens humains et financiers de tout piloter, de tout décider, de tout contrôler. A considérer les moyens de votre ministère, la réponse est, là encore, négative.
    Comme je vous le proposais il y a un an dans mon rapport, lors de la discussion budgétaire, sur les rapports entre les ARH, les préfets, les DRASS, les DDASS et le ministère, il est grand temps de clarifier et de simplifier le rôle de chacun.
    Vos dernières décisions prises dans le cadre de la loi relative à la santé publique et de la loi de financement de la sécurité sociale risquent d'accentuer les difficultés, en compliquant les relations. En effet, plutôt que de vous orienter vers les agences régionales de santé, vous souhaitez confier, dans le cadre des accords régionaux, la prévention et l'éducation de la santé au préfet de région. Je doute que cela facilite l'harmonisation entre l'hôpital et l'ambulatoire.
    Pour optimiser vos moyens humains et financiers, il est, de notre point de vue, urgent que l'Etat ait, dans chaque région, un seul responsable de la santé pour l'ambulatoire, les établissements, la prévention, l'éducation et la formation et sans doute le secteur médico-social - mais là le problème est un peu particulier et plus difficile à résoudre. Ce responsable pourrait être, bien entendu, le directeur de l'agence régionale de santé. Il resterait, bien entendu, à le contrôler démocratiquement par l'intermédiaire du conseil régional de santé.
    M. Jean-Marie Le Guen. Du centralisme démocratique ? C'est intéressant !
    Mme la présidente. Monsieur Le Guen, vous n'avez pas la parole !
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur Le Guen, je constate qu'une nouvelle fois vous n'avez pas du tout compris ce que l'on proposait. Mais le parti socialiste a certainement des propositions passionnantes à formuler pour transformer la nouvelle gouvernance et clarifier le rôle de l'Etat.
    Mme la présidente. Monsieur Préel, poursuivez, vous perdez de précieuses minutes !
    M. Jean-Luc Préel. Cette nouvelle organisation permettrait de confier aux DDASS la politique de la ville. Vous pourriez ainsi fusionner les DRASS et les DDASS, optimiser les moyens humains et financiers et clarifier le rôle de chacun.
    Monsieur le ministre, votre responsabilité est grande. Vous devez mettre en oeuvre la réforme de la gouvernance de notre système santé, réorienter le rôle de l'Etat, simplifier le rôle des responsables de l'Etat sur le terrain en mettant en place un responsable unique. Vous améliorerez ainsi l'efficacité en optimisant vos maigres moyens humains et financiers. Ne cédez pas à la tentation confortable de l'immobilisme ou à celle de diviser pour mieux régner sur des services éclatés, source de gabegie ! Tel est le premier message que je voulais vous faire passer.
    Le deuxième message concerne la présentation du budget. Chaque année, nous assistons à des modifications de chapitres et de lignes budgétaires, ce qui rend illisible - sans doute est-ce involontaire - la lecture du bleu. Une certaine stabilité serait fort utile. Elle permettrait un meilleur suivi. Par ailleurs, monsieur le ministre, alors que nous passons beaucoup de temps à discuter du budget, à vous féliciter pour les actions nouvelles que vous nous présentez, nous apprenons souvent par la suite que la quasi-totalité des actions nouvelles ont fait l'objet de gel ou d'annulation sans débat parlementaire.
    M. Jean-Marie Le Guen. Très juste !
    M. Jean-Luc Préel. Rapporteur du budget pour 2003, j'ai constaté que la plupart des mesures annoncées pour 2003 avaient été annulées. Je regrette à cet égard que le rapporteur pour avis pour la santé n'ait pas, cette année, dressé le bilan du budget de la santé de 2003. Espérons que le budget pour 2004 pourra être réalisé dans sa totalité et que les mesures nouvelles ne seront ni gelées ni annulées dès le premier trimestre. Je sais, monsieur le ministre, que c'est également votre souhait. J'espère que vous saurez résister à la « pression de Bercy ».
    L'UDF salue la création de l'Institut national pour le cancer, financé par votre ministère à hauteur de 11 millions, auxquels s'ajoutent les 30 millions destinés aux structures de gestion des dépistages du cancer. Il est nécessaire de tous nous mobiliser contre le cancer.
    Cet institut regroupant des compétences devrait permettre de réaliser des progrès. Cependant il est légitime de se demander si, demain, nous continuerons à créer des instituts par pathologie ou par organe sur le même modèle. Est-ce votre souhait ?
    Nous avons salué la volonté de généraliser le dépistage du cancer du sein. J'aimerais savoir, monsieur le ministre, si les mammographies effectuées à l'hôpital dans le cadre du dépistage seront prises en charge, comme prévu à l'origine et comme nous l'avons confirmé par le vote d'un amendement lors de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, par l'assurance maladie et non par les budgets hospitaliers. Depuis 2002, la CNAM demande, en effet, aux ARH d'intégrer ces mammographies dans le budget hospitalier.
    Le budget alloue 95 millions d'euros aux sept agences sanitaires. La dotation de l'AFSSAPS est triplée et s'élève à 18,6 millions. L'agence percevra en outre des taxes et redevances en forte augmentation. Espérons que son efficacité sera à la hauteur de ses nouveaux moyens.
    En revanche, il est étonnant de voir les crédits de l'ANAES réduits de 37 %, à 5,5 millions d'euros, alors que son rôle devrait être accru. L'accréditation et l'évaluation sont pourtant essentielles et nous sommes dans ce domaine encore très en retard. J'avais cru comprendre que vous souhaitiez confier à l'ANAES de nouvelles missions. Aura-t-elle les moyens de les remplir ?
    Concernant la CMU complémentaire, l'article 82 prévoit de porter la déduction forfaitaire à 300 euros par an, aussi bien pour les CPAM que pour les organismes complémentaires, ainsi que plusieurs orateurs l'ont souligné. En opérant un transfert vers les régimes de base, l'Etat devrait économiser 117 millions d'euros, mais ce transfert apparaît peu opportun lorsque l'on connaît le déficit actuel de l'assurance maladie, sans compter que cela remet en cause l'équilibre actuel entre les régimes de base et les régimes complémentaires. Serait-ce les prémices de la réforme que vous proposez ? Cette modification ne préfigure-t-elle pas une nouvelle répartition des rôles entre assurances de base et complémentaires permettant aux CPAM de devenir ainsi des assureurs complémentaires ?
    Un effort particulier est fait en direction des instituts de formation en soins infirmiers qui ne sont pas adossés à un établissement hospitalier, puisque 28 millions d'euros leur sont consacrés, soit une augmentation de 16 %. Je salue, au nom de l'UDF, ce geste indispensable pour ces établissements qui rencontrent de réelles difficultés.
    Mais je voudrais attirer votre attention sur les IFSI qui sont adossés à un établissement. La formation des infirmières, dont le coût représente à peu près 1,5 % du budget hospitalier, est dans ce cas indûment mis à la charge de l'assurance maladie. Ne serait-il pas logique que ce soit l'Etat, par l'intermédiaire des budgets du ministère de la santé et de l'éducation nationale, qui finance cette formation ?
    Par ailleurs, nous avons voté un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, qui vise à améliorer la qualité des soins en prévoyant de mettre en oeuvre une formation continue pour toutes les professions de santé. Comment et quand comptez-vous mettre en oeuvre cette formation continue, nécessaire et urgente pour toutes les professions de santé ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Très bonne question !
    M. Jean-Luc Préel. J'ai noté que la dotation de l'Ecole nationale de santé publique diminue de 3,6 millions, soit une baisse de 23 %. Comment cette école pourra-t-elle, dans ces conditions, faire face à ses missions ? La loi de santé publique prévoit une refonte majeure, mais celle-ci ne sera sans doute pas appliquée avant 2005. D'ici là, l'Ecole nationale de santé publique doit pouvoir fonctionner normalement.
    J'aurais bien d'autres questions à vous poser concernant la démographie médicale et notamment l'organisation de la permanence des soins, mais le temps me manque.
    Claude Leteurtre, que je salue, interviendra sur les crédits concernant les personnes handicapées. Mme Boisseau pourra donc lui répondre tout à l'heure.
    S'agissant de la famille et de l'enfance, les décisions essentielles ont été votées dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, qu'il s'agisse de l'accueil du jeune enfant, de la liberté du choix de garde ou du nouveau projet consacré aux crèches, qui prolonge le précédent.
    Vous nous proposez de reprendre les axes prioritaires retenus lors de la conférence de la famille du 29 avril 2003 à propos de la prévention et du traitement des dysfonctionnements familiaux, avec un soutien apporté aux établissements de formation, de conseil conjugal et familial, et au développement de la médiation familiale.
    Vous prévoyez également un observatoire national pour l'enfance maltraitée, qui doit permettre de mieux la connaître et donc, on peut l'espérer, de mieux lutter contre la maltraitance tout en s'efforçant de la prévenir, ce qui est bien entendu une tâche redoutable.
    Nous avons également compris, monsieur le ministre, qu'en 2004 la conférence de la famille aura pour thème l'adolescent, et que vous nous proposerez l'année prochaine des améliorations dans ce secteur très important de la politique familiale.
    Dans l'attente de vos réponses aux questions que je vous ai posées, l'UDF approuve globalement l'orientation générale de votre budget. Mais nous avons conscience de son faible poids par rapport aux dépenses de santé. Surtout, nous sommes dans l'attente de la réforme urgentissime de la gouvernance et de l'organisation de la santé. L'UDF souhaite être écoutée et nous voulons vous aider à réussir cette réforme indispensable. Puisse-t-elle aller vers une réelle régionalisation, permettant de responsabiliser chacun des acteurs de la santé. Sans cette responsabilisation des acteurs, ni vous, ni nous, monsieur le ministre, ne réussirions la maîtrise médicalisée des dépenses de santé, pourtant indispensable pour éviter des mesures plus douloureuses.
    Monsieur le ministre, nous vous souhaitons bon courage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je vous remercie.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, je consacrerai principalement mon intervention à l'action du ministère de la santé.
    Ce texte est le troisième que vous nous présentez en quelques semaines, après la loi de santé publique et la loi de financement de la sécurité sociale. J'y vois deux aspects un peu paradoxaux : d'un côté, on cherche la logique politique et la cohérence entre ces différents textes ; de l'autre, on est frappé par l'augmentation de la confusion interne de l'action politique et par des mesures aboutissant à des reculs sociaux.
    Sur les reculs sociaux, qui ont déjà été soulignés par plusieurs collègues, je serai bref. Mais, outre la couverture médicale universelle ou l'AME, je tiens à rappeler la situation des programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins, les PRAPS. Ces programmes, qui sont au coeur des nouvelles politiques de santé publique décentralisées, au coeur même de la crédibilité de l'action de l'Etat en matière de santé publique, voient cette année leurs crédits diminuer de 43 %. Il s'agit bien d'un recul, qui affecte des politiques de santé destinées aux populations les plus fragiles ; mais il s'agit aussi d'une incohérence car l'Etat n'a cessé de réclamer ces dernières semaines, à l'occasion de la loi de santé publique, une intervention plus forte. Or, lorsqu'il s'agit de passer à l'acte, l'Etat n'est pas là.
    Nous ne pouvons pas continuer comme cela ! Cette incohérence et cette confusion entraînent nécessairement une perte de crédibilité.
    La confusion, on la retrouve dans les transferts de financement auxquels vous vous livrez régulièrement. Certes, vous n'êtes pas le premier, monsieur le ministre, à opérer des transferts - des politiques de santé sur la sécurité sociale, par exemple. De tels transferts ont été, sont ou seront légitimes. Mais ils le sont moins quand ils prennent un caractère aussi massif et incohérent. Lorsque, à l'occasion de la discussion du PLFSS, on a commencé à dérembourser les visites médicales et que, dans le même temps, on chargeait la sécurité sociale avec le projet Biotox par exemple, il y avait à l'évidence une incohérence majeure.
    Je voudrais à ce propos, tout en soulignant l'excellence du travail de notre rapporteur pour avis M. Heinrich sur le plan Biotox, dire à notre collègue qu'il aurait été utile qu'il intervînt sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, alors même que, je le reconnais, cela n'aurait pas été très orthodoxe. Ce plan avait toute sa place dans l'action de l'Etat, mais son financement est prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, ce qui n'est pas le moindre des transferts d'une responsabilité de l'Etat réalisés cette année. Et ce n'est qu'un transfert parmi d'autres car je pourrais également évoquer ceux concernant les politiques de prévention, et même les investissements hospitaliers.
    La confusion, on la trouve aussi au niveau du budget de l'ANAES, qui est sans doute la structure la plus utile pour le pilotage à venir de notre politique de santé : elle sera la tour de contrôle stratégique des politiques que nous devrons mettre en oeuvre, que ce soit pour la qualité ou pour l'efficience, bien que je préfère nettement que les critères de qualité et d'efficience soient séparés. Quoi qu'il en soit, l'ANAES assume aujourd'hui ces deux fonctions, qui sont fondamentales, d'autant plus que notre retard intellectuel et scientifique en ce domaine est considérable.
    Certes, j'ai bien noté que l'on procédait de la sorte parce que seraient mobilisées des réserves financières existantes. Mais, alors que nous gérons des budgets de 160 milliards d'euros, nous ne sommes pas capables d'investir dans la recherche-développement à hauteur de nos besoins.
    Il y a là une incohérence de l'Etat, qui semble incapable de muscler son cerveau, si je puis dire. Ainsi, on continue à avoir une action lamentable en termes stratégiques.
    On a avancé, mais on n'avance plus ! Sans doute fallait-il aller encore plus vite et plus loin en la matière.
    La confusion, on la voit encore dans le fait que nos collègues de la commission des lois débattent, eu égard à l'initiative du ministre de l'intérieur, de la politique à conduire en matière de toxicomanie. Non seulement le ministère de la santé fait en ce domaine peu de chose - il suffit de voir quels sont les crédits qui sont accordés à la MILDT - mais il ne prononce pas une parole forte sur le sujet. Or une véritable recomposition du discours sanitaire est nécessaire.
    Le débat est aujourd'hui lancé essentiellement sur le plan réglementaire. Il est donc assez logique que des gens qui ont à voir avec le ministère de l'intérieur traitent de ces problèmes d'une façon différente de la nôtre lorsque nous discutons des politiques de santé.
    L'usage du produit est fondamental. Il faut en conséquence mettre en place des politiques populationnelles, au lieu de se contenter de prononcer des interdits généraux à valeur normative.
    Monsieur le ministre, vous avez proclamé à plusieurs reprises votre volonté de rendre à la politique de santé publique une nouvelle dynamique. Mais on ne retrouve cette dynamique ni dans votre budget ni dans les orientations de votre politique.
    Mme la présidente. La parole est à M. Serge Roques.
    M. Serge Roques. Madame la présidente, mesdames, messieurs, je parlerai essentiellement des crédits consacrés aux personnes handicapées.
    Monsieur le ministre, l'amélioration du sort des handicapés constitue l'un des trois chantiers présidentiels du quinquennat. Il est hautement symbolique de constater que le Président de la République ait choisi ces trois chantiers dans votre champ de compétences : la lutte contre le cancer l'est assurément, comme celle contre l'insécurité routière puisqu'elle a pour but de protéger la vie humaine et de diminuer très fortement le nombre des accidents de la route.
    Ces chantiers du Président font contraste avec ceux de son prédécesseur, qui étaient très parisiens et très immobiliers. Jacques Chirac a choisi quant à lui de soulager d'abord la souffrance humaine, et ses chantiers concernent tous les Français, sur toute l'étendue du territoire.
    Votre gouvernement a d'ores et déjà fait passer dans les faits ces directives présidentielles : ce sont plus d'un millier de vies qui ont été épargnées - et combien de handicaps ! - depuis 2002. Le budget consacré à la lutte contre le cancer a été multiplié par dix en deux ans, passant de 5 millions d'euros en 2002 à plus de 50 millions d'euros en 2004, ce qui montre la volonté du Gouvernement dans un contexte budgétaire très difficile.
    Dans le domaine du handicap, votre détermination et votre ambition, madame la secrétaire d'Etat, sont également fortes. Le budget de 2004 est, avez-vous dit, un budget de transition dans l'attente de la réforme de la loi d'orientation de 1975 que vous présenterez prochainement au conseil des ministres.
    Je voudrais souligner en premier lieu l'effort réalisé pour augmenter les places disponibles en CAT : trois mille places supplémentaires en 2003 et trois mille de plus en 2004 - ce ne sont pas des effets d'annonce ! Je sais que vous avez tenu à contrôler vous-même que trois mille places seraient effectivement créées en 2003. Je ne doute pas qu'il en sera de même en 2004.
    L'allocation aux adultes handicapés bénéficiera d'une hausse de 3 %, soit 4,65 milliards d'euros de crédits en 2004. J'ai noté votre souci de ne pas transformer cette allocation en revenu de substitution à un emploi difficile à trouver. Cependant, la lutte contre le handicap doit être transversale et concerner, si l'on veut être réellement efficace et faciliter la vie des personnes handicapées, tous les secteurs de la vie sociale.
    C'est le mérite de votre gouvernement, et le vôtre sans doute aussi, madame la secrétaire d'Etat, que d'avoir convaincu beaucoup de vos collègues de conduire une action solidaire pour lutter contre le handicap. Vous avez travaillé avec eux pour que la lutte contre le handicap soit un projet de l'ensemble du Gouvernement. Ainsi, le ministre de l'éducation nationale vient de créer des postes d'assistant de vie scolaire au bénéfice des élèves handicapés scolarisés. Cela représente une avancée formidable, puisque le nombre de ces postes a été multiplié par six. En outre, ils sont maintenant intégralement financés par l'Etat, alors qu'ils étaient auparavant à la charge des collectivités territoriales.
    De son côté, le ministère de la jeunesse aidera, par le biais du FNDS, d'autant plus les collectivités qu'elles prévoiront des installations pour les handicapés, en particulier pour ce qui concerne les piscines couvertes.
    Le ministère de la culture a mené une réflexion, qui se traduira bientôt dans les faits, afin de répondre de manière concrète aux difficultés rencontrées par les personnes handicapées pour accéder aux activités culturelles.
    Le ministère du tourisme incite les offices de tourisme à s'inscrire dans des démarches de qualité et de label, du type « tourisme et handicap ».
    Le secrétariat d'Etat aux PME réfléchit de son côté aux mesures propres à aider les personnes handicapées à créer de petites ou de très petites entreprises.
    C'est bien parce que l'ensemble du Gouvernement est mobilisé autour du handicap que vous allez faire changer les choses en ce domaine, comme l'avait fait déjà en 1975 Simone Veil, avec sa loi pionnière.
    Il y a beaucoup à faire pour la formation des personnes handicapées et leur intégration professionnelle. Une personne handicapée qui peut travailler est plus heureuse et surmonte mieux son handicap. Ne faudrait-il donc pas, dans cette optique, faciliter le cumul de l'allocation aux adultes handicapés et d'un salaire rémunérant en particulier un emploi à temps partiel ? Ne faudrait-il pas aussi activer, chaque fois que cela est possible, les aides passives ?
    En ce qui concerne les emplois publics, des incitations sont également nécessaires pour favoriser l'embauche - je pense notamment à des exonérations de charges patronales - car on est loin d'atteindre, y compris dans le secteur public qui devrait pourtant être un exemple en la matière, le minimum de 6 % de travailleurs handicapés requis pourtant par la loi.
    Enfin, une fois la vie active passée, un problème nouveau se pose et il angoisse les parents des personnes handicapées : que vont devenir leurs enfants après leur disparition ? Grâce aux progrès de la médecine et de la politique vis-à-vis des handicapés, ceux-ci ont désormais une durée de vie qui tend à se rapprocher de la moyenne et ils survivent à leurs parents. Ne faudrait-il donc pas s'y préparer en créant des maisons de retraite spécialisées pour les handicapés vieillissants ?
    Dans le même ordre d'idée, nous avons à prendre en charge la catégorie de la population qui souffre d'autisme, un handicap pour lequel nous manquons cruellement de structures spécialisées, tout comme nous manquons de structures adaptées pour les traumatisés crâniens.
    On présente souvent les politiques en faveur des personnes handicapées comme une charge. Mais c'est oublier ce qu'elles apportent à la société en matière de vécu et les problèmes de la société française qu'elles pourraient contribuer à résoudre. Par exemple, le travail fourni par les personnes handicapées est souvent très utile aux entreprises ordinaires. Un industriel du bois m'a appris qu'il ne peut produire certains produits que parce qu'un CAT se trouve à proximité de son établissement : les employés de ce CAT effectuent un travail que ses propres ouvriers ne peuvent pas faire.
    Le personnel des CAT, dont on doit louer à la fois le dévouement et la capacité d'initiative, sont capables d'adapter des machines au personnel handicapé. Je suis sûr que nombre des améliorations effectuées pour rendre les machines de production moins stressantes, moins dangereuses et moins bruyantes seraient aussi très utiles pour des ouvriers ordinaires.
    J'évoquerai enfin l'aménagement du territoire.
    Les structures pour handicapés redonnent souvent vie à des secteurs géographiques éloignés des grandes villes par les emplois directs ou indirects qu'ils génèrent. Les handicapés y sont très bien acceptés et très bien considérés. Je connais un chef-lieu de canton qui a aménagé des voies de circulation spéciales pour handicapés sur toute sa commune et il invite ces derniers à toutes les réjouissances et à toutes les fêtes. Où seraient-ils plus heureux ? Où seraient-il plus considérés ?
    Le gouvernement précédent, dans un contexte de forte croissance mondiale, n'a pas su améliorer sensiblement le sort des personnes handicapées dans notre pays. C'est le mérite et l'honneur de ce gouvernement de s'atteler à cette tâche de très grande ampleur, dans un contexte budgétaire très difficile. Nous savons que l'effort sera pérennisé sur tout le quinquennat. Le budget de 2004 le prépare bien. Je voterai donc avec conviction le budget du ministère de la santé pour 2004 car il s'agit d'un budget de justice et d'espoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Nesme.
    M. Jean-Marc Nesme. Le budget que vous nous présentez, madame et messieurs les ministres, est un bon budget, qui contient, mes collègues l'ont montré, des avancées notoires. C'est pourquoi l'UMP le votera des deux mains.
    Mon intervention portera essentiellement sur l'inégalité dans la répartition territoriale des professions de santé, et par conséquent sur l'inégalité des citoyens devant l'offre de soins médicaux et paramédicaux. Le Gouvernement hérite, en ce domaine comme en beaucoup d'autres, d'une situation grave due à l'imprévoyance et à l'inertie du gouvernement précédent, ainsi qu'à une analyse erronée qui voudrait qu'en régulant à la baisse le nombre des médecins et des professionnels de santé, donc des prescripteurs, on réduise les dépenses, et par conséquent le déficit de la sécurité sociale. Comme si l'on pouvait réduire le nombre des malades d'un coup de baguette magique et arrêter l'évolution, forcément coûteuse, des nouvelles techniques.
    Des projections statistiques indiquent qu'à numerus clausus constant, le nombre de médecins devrait décroître à partir de 2005 et que la démographie médicale serait comparable en 2020 à celle de 1980, si rien n'est fait. La crise de la démographie médicale qui se profile à l'horizon se vit déjà au quotidien dans les régions rurales, qui représentent 80 % du territoire national et où habitent 20 millions de personnes.
    Vous vous êtes déjà saisi de ce problème, monsieur le ministre, et avez annoncé diverses mesures qui vont dans le bon sens. Mais comment ne pas y revenir à l'occasion de ce débat ? Notre pays souffre d'une inégalité criante dans la répartition territoriale des professions de santé, qu'il s'agisse de médecine de ville ou de médecine hospitalière. Les écarts moyens varient, selon les régions, de un à quatre. Ils sont encore beaucoup plus importants si l'on se place à l'échelle des arrondissements.
    Ces disparités ne peuvent que s'aggraver sous les effets des transformations socio-économiques qui bouleversent les métiers de santé. J'en citerai quelques-unes : la féminisation des professions, le sentiment d'isolement de plus en plus prononcé dans l'exercice de la profession de santé en milieu rural, la recherche légitime d'une qualité de vie familiale que les gardes répétées interdisent des remplacements problématiques pour les congés, sans parler des successions non assurées lors des départs en retraite.
    Un sentiment d'insécurité sanitaire envahit les campagnes. Le principe d'égal accès aux soins de première urgence est battu en brèche. C'est toute la politique d'aménagement équilibré et harmonieux du territoire national qui est en jeu, car elle passe aussi, et même d'abord, par une répartition égale des services de soins de proximité.
    Faudra-t-il en venir à instaurer, comme pour les pharmaciens, un régime d'autorisations d'installation et prévoir la délivrance d'une licence par les préfets au regard d'un quota de population, pour éviter là le trop-plein, ici la pénurie ? Certains le proposent. Ou bien faudra-t-il mettre en place des mesures incitatives, négociées avec les professionnels de santé dans le cadre d'une stratégie « gagnant-gagnant » pour les professionnels, les financeurs, l'Etat et surtout les patients ?
    J'en énumérerai quelques-unes : faciliter les remplacements temporaires ; encourager et rendre attractifs les stages pour fidéliser en milieu rural les jeunes professionnels de santé ; attribuer des bourses universitaires aux étudiants s'engageant à exercer dans des régions déficitaires pour une période donnée, comme on le fait déjà en Bourgogne pour les infirmières afin de les fidéliser dans les hôpitaux locaux ; autoriser l'ouverture de cabinets secondaires ; développer les incitations fiscales en créant des « zones franches sanitaires » ; décloisonner les secteurs hospitalier et ambulatoire ; aider à la création des maisons médicales pour mutualiser les moyens financiers, techniques, humains, administratifs, médicaux et paramédicaux ; développer les unités mobiles de soins palliatifs dans les hôpitaux locaux et à domicile, etc.
    L'insécurité sanitaire finira par vider de leurs populations les régions rurales, si nous ne prenons pas dans les meilleurs délais les mesures qui s'imposent. Le maintien d'une offre de soins de proximité et de première urgence est la pierre angulaire de la politique publique d'aménagement du territoire national, régional et départemental. C'est la raison pour laquelle, me semble-t-il, l'Etat et les collectivités territoriales doivent mener ensemble, en prenant leur part respective, la politique qui s'impose pour assurer l'égalité dans la répartition territoriale des professions de santé et l'égalité de tous devant l'offre de soins médicaux et paramédicaux.
    Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, comment vous entendez réparer les dégâts occasionnés par l'imprévoyance et l'inertie du gouvernement précédent et assurer, dans notre pays, un accès aux soins égal pour tous, que l'on habite en ville ou en milieu rural ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Claude Leteurtre.
    M. Claude Leteurtre. Madame la présidente, messieurs les ministres, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je souhaiterais que nous nous intéressions quelques instants au budget du handicap. Je constate que l'éclatement des crédits consacrés à cette politique empêche en fait tout vrai débat sur le sujet. Pour une part, nous en discutons au travers du PLFSS, et pour une autre part à l'occasion de l'examen des crédits du travail, de la santé et de la solidarité. D'ailleurs, nous ne connaissons pas précisément le montant de ce budget. Les financements croisés de l'Etat, de la sécurité sociale, des départements et des autres intervenants ne permettent que des approximations.
    En 1993, la Cour des comptes estimait le budget du handicap à 17,5 milliards d'euros. En janvier 2000, devant le Conseil national consultatif des personnes handicapées, le Gouvernement évoquait le chiffre de 24,4 milliards d'euros, ainsi répartis : 7,3 milliards pour l'Etat, 7,5 milliards pour la sécurité sociale, 2,3 milliards pour les départements et 7,3 milliards au titre des pensions militaires d'invalidité et des rentes d'accident du travail.
    Il n'est pas acceptable que l'on en soit encore à de simples approximations. On peut toutefois constater qu'entre 1995 et 2001, les prestations sociales consacrées au handicap ont augmenté de 20 % en francs courants. Sur la même période, elles se maintiennent à 6,2 % de l'ensemble des dépenses de protection sociale. Mais, rapportées au PIB, elles sont passées de 2,1 % en 1995 à 1,7 % en 2001.
    Il nous semble donc indispensable qu'une annexe spécifique à la loi de finances rassemble les informations sur les moyens financiers consacrés par la collectivité à la politique en faveur des personnes âgées et handicapées. J'aimerais connaître votre avis, madame la secrétaire d'Etat, ainsi que celui des ministres concernés par cette proposition. Elle est d'autant plus nécessaire que la réforme de la loi de 1975 sur le handicap loi qui n'a plus aucun contenu, n'aura de sens qu'en fonction des moyens financiers qui lui seront consacrés.
    Le Gouvernement vient d'annoncer, pour 2004, 3 000 places supplémentaires en centre d'aide par le travail. Nous nous en félicitons. Mais pourquoi ne pas avoir pris des engagements à plus long terme, alors que s'est achevé en 2003 le deuxième plan pluriannuel, qui a permis, pendant la période 1999-2003, de créer 10 000 places en CAT ? Une programmation est d'autant plus indispensable que nous sommes loin du compte, puisque près de 30 000 adultes sont encore en attente d'une place. Il ne faut pas oublier que la presque totalité des établissements accueillant des handicapés sont gérés par des bénévoles. La reconnaissance de leur dévouement et de leur efficacité nous oblige à une plus grande efficacité, à moyen et à long terme.
    La situation n'est pas meilleure pour les enfants en attente d'une place dans les instituts médico-éducatifs. A ce sujet, il est indispensable de revenir au plus vite sur la réforme de la procédure d'attribution de l'allocation d'éducation spéciale, qui s'apparente à une véritable inquisition. Cette procédure est humiliante pour les familles. J'aimerais connaître vos intentions à cet égard.
    Les plus hautes autorités de l'Etat ont donné de grands espoirs aux personnes handicapées et à leurs familles. Leurs attentes ne doivent pas être déçues. Il est grand temps que notre pays se dote d'une vraie politique en faveur des handicapés, centrée autour de deux principes : faire du handicapé un citoyen à part entière et assurer une vraie compensation du handicap.
    Enfin, l'annonce faite par le Gouvernement de la suppression d'un jour férié permettra de dégager quelques moyens supplémentaires. Comment seront-ils utilisés pour les handicapés ?
    L'annonce de la création d'une cinquième branche de la protection sociale est-elle une vraie réponse aux chiffres que j'ai cités ? Malheureusement, je n'en suis pas si sûr. Si nous créons une cinquième branche, il est indispensable qu'elle concerne toutes les formes de la dépendance, quelles que soient les raisons de son apparition : handicap ou vieillesse. Il faut que la future Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, annoncée par le Premier ministre le 6 novembre dernier, soit dotée de ressources propres. Les financements qui en seront issus devront désigner clairement les compétences des différents acteurs.
    L'UDF attend avec impatience et vigilance les propositions du Gouvernement à ce sujet. Bien évidemment, madame la secrétaire d'Etat et messieurs les ministres, vous pouvez être assurés de notre collaboration et de notre soutien.
    M. Jean-Luc Préel. Très bien !
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Le Ridant.
    M. Jean-Pierre Le Ridant. Madame la secrétaire d'Etat, je centrerai mes propos sur les crédits concernant les personnes handicapées. En cette fin d'année européenne qui leur est consacrée, permettez-moi tout d'abord de saluer la qualité du budget qui nous est présenté. Il consolide les orientations politiques fortes et les mesures de rattrapage ambitieuses prises en 2003, tout en confirmant, s'il en était besoin, l'importance donnée par le Gouvernement à ce chantier prioritaire défini par le Président de la République.
    Ainsi, en deux ans, dans un contexte économique difficile, le budget de l'Etat destiné aux personnes handicapées a progressé de près de 10 %, sans compter les crédits d'assurance maladie consacrés au handicap dans la loi de financement de la sécurité sociale. Ces chiffres illustrent clairement la volonté du Gouvernement d'avancer, non pas seulement en paroles, mais d'abord en actes, vers une meilleure intégration des personnes handicapées dans notre société. En 2004, l'Etat consacrera plus de 6 milliards d'euros à la promotion de l'autonomie et à l'insertion sociale des personnes handicapées sous toutes ses formes : éducative et professionnelle, à domicile comme en institution spécialisée.
    Le budget qui nous est soumis répond à un triple besoin.
    D'abord, assurer aux personnes handicapées des ressources et des prestations permettant de compenser les conséquences du handicap. A cet égard, permettez-moi de suggérer une évolution de l'allocation aux adultes handicapés. Afin d'éviter certaines situations préoccupantes d'éloignement chronique de l'emploi, il m'apparaît souhaitable, à l'avenir, de différencier une prestation de compensation des conséquences du handicap et un revenu minimal d'existence pour les personnes handicapées qui ne peuvent tirer leur revenu d'une activité professionnelle.
    Deuxième besoin : développer les services de soutien à la vie sociale et à la vie à domicile, afin de favoriser l'autonomie des personnes handicapées. Ainsi, je me réjouis qu'en 2004, davantage de services pour la vie à domicile soient mis en place : développement des services permettant l'intégration scolaire et l'accompagnement des enfants ; augmentation significative du nombre de postes d'auxiliaires pour la vie à domicile avec plus de 1 000 forfaits, dont 500 spécifiquement destinés aux personnes lourdement handicapées ; développement des sites pour la vie autonome dans l'ensemble des départements, afin de faciliter les démarches administratives.
    Troisième besoin, enfin, créer des places supplémentaires au sein des établissements spécialisés. Poursuivant la dynamique engagée en 2003, le projet de budget continue d'augmenter de manière significative le nombre de places en établissement conformément aux voeux des associations et des personnes souffrant d'un handicap. Ainsi, l'augmentation des crédits destinés aux centres d'aide par le travail va permettre de prolonger l'effort substantiel consenti cette année avec 3 000 places créées en 2004.
    Permettez-moi d'insister sur l'importance des CAT malgré les polémiques dont ils ont fait l'objet l'an dernier. Certes, chaque fois que cela est possible, les personnes handicapées doivent être orientées vers le travail en milieu ordinaire. Mais il est des circonstances où la forme ou le degré du handicap ne permet pas cette insertion et oblige à d'autres réponses, comme les ateliers protégés ou les CAT.
    Par ailleurs, les crédits destinés aux maisons d'accueil spécialisées permettront de créer, comme en 2003, 2 200 places supplémentaires. On le sait, l'arrivée d'une personne handicapée, à la suite d'une naissance, d'une maladie ou d'un accident, est toujours un choc qu'il faut surmonter. Et ces établissements, alliant compétence, rigueur et professionnalisme, contribuent fortement à soulager les familles.
    Enfin, dans le cadre de ces créations de places, je me réjouis qu'un effort particulier soit consenti pour les personnes autistes et pour les polyhandicapés, enfants et adultes.
    Si on ne peut que saluer les efforts entrepris pour l'exercice 2004, il importe qu'ils soient poursuivis et encore amplifiés, notamment dans le cadre de la réforme de la loi de 1975, ce budget assurant la transition.
    La France se caractérise par une prise en charge relativement bonne des personnes handicapées grâce à son réseau associatif et institutionnel. Cependant, le rapport Chossy a bien mis en évidence les lacunes de notre système vis-à-vis de certains handicaps, tels le handicap psychique ou l'autisme. Le bilan de l'intégration dans notre société des personnes souffrant de ces handicaps reste mitigé. Je tiens donc à saluer les propositions faites le 6 novembre dernier par le Premier ministre dans le cadre du plan dépendance. En effet, comment ne pas se retrouver dans les trois priorités qu'il a définies en faveur des personnes handicapées ?
    Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.
    M. Jean-Pierre Le Ridant. Dans un instant, madame la présidente.
    Tout d'abord, la création d'un véritable droit à compensation du handicap, quelle que soit la prise en charge.
    Ensuite, le renforcement de l'intégration des personnes handicapées dans la cité par le développement de l'accompagnement et de la personnalisation des aides.
    Enfin, la simplification de l'accès au droit, via la création des maisons des personnes handicapées, véritable dispositif de proximité.
    Oui, il importe de réduire les obstacles et d'offrir aux personnes handicapées les moyens de valoriser leurs aptitudes. Il y va du nécessaire changement de notre regard sur le handicap et les personnes handicapées. C'est pourquoi, madame la secrétaire d'Etat, je tiens à vous assurer de mon soutien sans faille pour l'adoption de ce très bon budget, que je qualifierai sans originalité, après Mme la rapporteure, de budget d'espoir, qui répond aux attentes des personnes handicapées et de leur famille, à l'aube d'une réforme importante et attendue, à laquelle je ne manquerai pas de rester attentif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Marc Bernier, dernier orateur inscrit.
    M. Marc Bernier. Monsieur le président, madame et messieurs les ministres, mes chers collègues, je débuterai mon propos en félicitant Mme et M. le rapporteur pour avis de l'objectivité avec laquelle ils ont su exposer les tenants et les aboutissants de ce budget.
    J'insisterai, pour ma part, sur les moyens consacrés à la formation initiale des professionnels de santé, poste budgétaire qui bénéficie d'une très nette augmentation pour l'année à venir. En effet, monsieur le ministre, vous avez bien voulu consentir un effort de 46 millions d'euros pour la formation extra-hospitalière, notamment pour permettre aux étudiants en médecine d'effectuer un stage de six mois auprès d'un médecin généraliste. Je me réjouis d'une telle mesure qui témoigne de l'importance que vous accordez à la qualité de la formation de nos apprentis-médecins.
    Au demeurant, cette mesure me paraît à certains égards insuffisante, car elle devrait s'accompagner de dispositions complémentaires pour inciter les étudiants à effectuer leur stage dans une zone déficitaire en offre de soins. Vouloir former nos futurs médecins à la pratique de la médecine générale est une chose ; chercher à les attirer dans ces zones qui se dépeuplent de praticiens médicaux en est une autre.
    Le Conseil national de l'ordre des médecins n'a eu de cesse de nous alerter sur ce phénomène inquiétant pour le futur, dès lors que l'égalité d'accès aux soins de tous les citoyens risque d'être compromise. C'est pourquoi je considère que des mesures incitatives, aussi bien financières que fiscales, devraient être prises afin de favoriser l'installation ou le maintien des praticiens dans les zones où l'offre de soins s'amenuise.
    Concrètement, ces mesures complémentaires pourraient se traduire par l'octroi de bourses aux étudiants qui s'engageraient à exercer pendant cinq ans dans une de ces zones ; par un renforcement de l'attractivité des stages ambulatoires dans ces mêmes zones, notamment au moyen de primes indemnisant la charge financière engendrée par l'isolement ; par la création de maisons médicales à l'initiative des collectivités, que le projet de loi sur la ruralité envisage d'encourager ; ou encore par la détermination de zones prioritaires, après avis des acteurs locaux et régionaux. Toutes ces mesures sont contenues dans le rapport sur la démographie des professions de santé que m'a demandé le groupe d'études sur le cancer et la santé publique.
    Même si l'augmentation récente du numerus clausus est un moyen d'anticiper le départ en retraite de près de 100 000 médecins dans les prochaines années, c'est-à-dire la moitié de ceux qui sont en exercice, elle ne remédiera pas au manque de motivation des praticiens pour s'installer en dehors des villes accueillant des grandes structures de soins. C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, je proposerai au Parlement, d'ici à la fin de l'année, une proposition de loi complétant par ces mesures incitatives les mesures budgétaires que vous avez bien voulu nous présenter.
    Hormis ce point particulier, je considère que votre budget a le mérite d'innover en vue de garantir l'équilibre de l'offre de soins sur le territoire national. Je mesure comme vous l'importance majeure que revêt la réforme de la santé publique, imposée par les circonstances malgré un contexte financier difficile. J'apporterai donc mon soutien tant à votre budget qu'à la politique que vous menez avec courage et détermination pour que notre système de santé soit durablement préservé dans l'intérêt de tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Madame la présidente, madame et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, la procédure adoptée aujourd'hui est quelque peu inhabituelle. En tout cas, en treize ans de vie parlementaire, jamais je n'avais vu de discussion budgétaire s'engager sans que les ministres fassent un discours introductif. Compte tenu de cette organisation, me voici maintenant tenu d'exposer la politique générale de mon département ministériel et de répondre en même temps dans le détail à un certain nombre de vos questions. L'exercice étant à mon sens impossible et surtout redondant, eu égard à la procédure des questions, je vais, et personne ne s'en plaindra j'en suis sûr, faire l'économie de l'exposé général de notre politique. Je m'en tiendrai à un simple canevas.
    Je rappellerai tout d'abord que le budget de la santé, de la famille et des personnes handicapées est en progression de 1,4 %. Compte tenu des contraintes budgétaires, c'est probablement un des budgets qui est le mieux traité, pour un montant total de 9,605 milliards d'euros.
    Ce budget poursuit un certain nombre de priorités.
    La première, qui a d'ailleurs été évoquée par les uns et par les autres, est la santé publique. A cet égard, certaines des critiques formulées en ce domaine m'ont paru un peu injustes. Nous avons examiné en effet, voilà peu, dans cet hémicycle, un projet visant à mettre en oeuvre une nouvelle politique de santé publique. C'était la première fois depuis 1902 qu'un texte jetait les bases d'une nouvelle politique en la matière. Et ce texte a fait l'objet de discussions et de critiques, toujours les bienvenues, dans la mesure où elles sont constructives et où elles permettent d'améliorer les choses au fil des navettes.
    Je rappellerai les grands principes de la loi de santé publique. Premièrement, il s'agit de réaffirmer le rôle premier de l'Etat en matière de santé publique et de prévention. C'est une tâche régalienne de l'Etat que d'assurer la santé publique, qui est aussi et d'abord la santé des populations.
    Deuxièmement, il s'agit de mettre en place des groupements régionaux de santé publique, de façon à aller au plus près des services au niveau régional, qui est le plus adapté au plan sanitaire. L'Etat doit avoir un rôle important de coordination entre l'ensemble des opérateurs en région, de façon à mettre un peu de cohérence là où il y a aujourd'hui beaucoup de redondances.
    Troisièmement, il s'agit de mettre sous tension la politique de santé publique, avec la définition d'objectifs, quantifiés, pour beaucoup d'entre eux, ce qui permettra d'élaborer un tableau de bord, et année après année, sur la durée quinquennale, d'évaluer les résultats des politiques mises en oeuvre. Cette méthode est généralement admise sur tous les bancs : on se fixe des objectifs et on évalue les résultats au fur et à mesure pour recadrer la politique.
    La loi sur la politique de santé publique vise également, autant que faire se peut, à ne pas gaspiller l'argent public. Il faut donc rassembler les financements d'Etat, ceux de l'assurance maladie, des différents opérateurs et des collectivités territoriales, non pour les mettre dans un pot commun, mais pour organiser une répartition coordonnée et savoir qui paie quoi. Il faut éviter en effet que plusieurs acteurs ne paient la même chose, comme cela se passe trop souvent aujourd'hui.
    Quelles sont les cibles principales de cette politique de santé publique ? Le cancer, naturellement, le sida, la santé mentale et les traumatismes par accident. Je vous ferai grâce de l'ensemble des opérations qui figurent dans le budget, pour m'arrêter sur deux d'entre elles. Je commencerai par le cancer, que nombre d'entre vous ont évoqué. Oui, la prévention est importante. C'est dans ce cadre notamment que sont entreprises la lutte antitabac et l'action contre l'alcoolisme, qui fait l'objet d'une ligne budgétaire.
    S'agissant du dépistage, je vous confirme, et nous le dirons mieux à la date voulue, que le dépistage du cancer du sein se fera dans l'ensemble des départements métropolitains et d'outre-mer, à l'exception, probablement, de la Guyane, pour des raisons géographiques que chacun pourra comprendre.
    Enfin, l'Institut national du cancer sera créé. Je précise qu'il n'a pas pour vocation, comme certains l'ont craint, de se substituer à l'INSERM, au CNRS ou à un établissement public de recherche. Il sera d'abord et avant tout une agence d'objectifs et de moyens veillant à la mise en oeuvre du plan cancer selon le calendrier annoncé. Cet institut sera la maison commune des patients, des soignants et des chercheurs.
    J'évoquerai ensuite la lutte contre les drogues et les toxicomanies. Un plan quinquenal sera renouvelé à partir de l'année prochaine. Il sera axé sur la prévention - tabac, alcool, drogues illicites, y compris le cannabis. Il faudra revenir par ailleurs sur la loi de 1970, qui est inappliquée. Sa réforme est très attendue.
    Deuxième grande priorité de ce budget : la veille et la sécurité sanitaire. La politique de veille et de sécurité sanitaire s'appuie aujourd'hui sur l'action de six agences : l'AFSSAPS, l'AFSSA, l'AFSSE, l'Etablissement français des greffes, l'Institut de veille sanitaire et l'ANAES. Il s'agit de disposer d'une meilleure évaluation, d'un système de veille efficace, de définir des programmes d'action, de renforcer le dispositif de la gestion de crise et de mieux assurer l'information et l'éducation sanitaires.
    Je vous rappelle également que nous avons commencé à redessiner le paysage des agences avec la création de l'Agence de biomédecine qui est prévue dans la loi de bioéthique dont nous aurons prochainement à débattre à nouveau dans cette enceinte. Je vous confirme aussi que des efforts particuliers sont consentis. Certes, le ressaut budgétaire est dû en partie à l'utilisation, l'année dernière, de fonds de roulement. Néanmoins, trente-cinq emplois nouveaux sont créés.
    Sachez encore que, sur le mode du plan cancer, François Fillon, Roselyne Bachelot et moi avons mis en place une commission d'orientation pour définir ce que sera le plan santé environnemental avec un volet « santé au travail ». J'ajoute que des programmes de prévention spécifique - par exemple contre la tuberculose - sont prévus, de même qu'une opération sur les centres nationaux de référence. Je ne reviendrai sur le détail du plan biotox que le rapporteur a parfaitement décrit et sur lequel je me permettrai simplement quelques commentaires dans un instant.
    Troisième priorité, l'accès aux soins pour les plus démunis. C'est l'optimisation de la CMU, j'y reviendrai dans mes réponses à vos questions.
    S'agissant des mesures portant sur la famille, je répondrai au nom de Christian Jacob, qui a dû s'absenter pour se rendre au Sénat où se déroule un débat sur les prélèvements obligatoires. Eh oui, nous n'avont pas encore le don d'ubiquité ! (Sourires.)
    Ainsi que certains l'ont souligné, les mesures concernant la famille relèvent pour l'essentiel du PLFSS. Je rappellerai cependant que la création de la PAJE s'accompagne de la nécessité de développer fortement l'offre de garde, ce qui m'amène à évoquer le « crédit d'impôt familles » pour les entreprises.
    Ce projet de budget propose en effet un dispositif très incitatif, le crédit d'impôt permettant aux entreprises de récupérer fiscalement 60 % des sommes qu'elles auront versées en faveur de leurs salariés ayant charge de famille. L'objectif de dépense fiscale fixé par le Gouvernement est de l'ordre de 50 millions d'euros à l'horizon 2007.
    Il faut ajouter à cela les mesures relatives aux services aux familles. Les principales propositions du groupe de travail coordonné par Françoise de Panafieu et Hubert Brin, le président de l'UNAF, se trouvent ainsi traduites dans ce projet de loi de finances avec la création des « points info famille », le lancement d'un portail internet de service aux familles, le développement de la médiation familiale et la mise en place de l'Observatoire national de l'enfance maltraitée. Cela représente un effort de 3 millions d'euros en 2004.
    Etrangement, aucune question n'a été posée sur la réforme du ministère et sur la réforme de l'administration. C'est pourtant l'une des tâches que le Premier ministre nous a confiées avec beaucoup de détermination. Nous ferons donc l'économie de ce point.
    J'en viens ainsi aux questions qui m'ont été posées.
    Monsieur Bapt, nous m'avez notamment interrogé sur la réduction des moyens qui étaient alloués aux programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins, les fameux PRAPS.
    Depuis la première année de leur mise en place en 2000, ces programmes régionaux ont développé au sein de chaque région une approche globale des problèmes de santé des publics en difficulté. Reposant sur une approche territoriale, un diagnostic établi au niveau départemental, les objectifs des PRAPS ont conduit à mettre en oeuvre des actions portées le plus souvent par le milieu associatif. Celles-ci ont fait l'objet de cofinancements, mais la part de l'Etat est toujours restée la plus importante - 55 % en 2000, par exemple.
    Le financement de l'Etat était assuré par les crédits déconcentrés au chapitre 47-11-20. En 2002, près de 45 % des crédits de ce chapitre, soit 18 millions d'euros, ont été consommés par les services déconcentrés pour le financement d'actions dans le cadre des PRAPS. Or l'article 2 du projet de loi relatif à la politique de santé publique, adopté en première lecture à l'Assemblée, dispose que chaque plan régional de santé publique comportera un programme régional d'accès à la prévention et aux soins. Cela témoigne de l'importance qui est toujours accordée à la santé des plus démunis. Mais, en 2004, l'adoption de nouvelles règles budgétaires conduira les services à diversifier le financement des actions en directions des plus démunis. Il appartiendra donc aux DRASS de financer les actions entrant dans le cadre des PRAPS sur les crédits attribué aux « déterminants de santé », « pathologie » ou « thématiques » du chapitre 39-01. Les actions qui ne pourront trouver de telles portes d'entrée financières pourront toutefois bénéficier de crédits sur la ligne « Autres programmes de santé publique » du chapitre 39-01.
    Il ne s'agit donc pas d'une question purement financière, mais, en accord avec l'objectif des professionnels et des associations qui est d'éviter le pérennisation de dispositions spécifiques, de permettre la prise en compte de la santé des plus démunis dans les dispositifs de droit commun.
    Voilà, monsieur le rapporteur spécial, pour les PRAPS.
    Vous m'avez également interpellé sur l'ATIH. Sans aller jusqu'à me mettre en accusation - le terme serait excessif -, vous avez souligné que cette agence avait du mal à démarrer. Or, il s'agit, à l'évidence, d'un mal congénital, car l'ATIH, créée par un décret en date du 26 décembre 2000, n'a vu son directeur nommé qu'à la fin de 2001, soit un an après, ce qui n'était probablement pas du meilleur aloi.
    Cette agence est désormais pleinement opérationnelle, depuis novembre 2002 - il a donc fallu encore un an - et réalise un programme de travail important, justifiant les moyens demandés pour 2004. On notera, à cet égard, que les crédits d'Etat affectés à l'ATIH pour l'année 2001 avaient été récupérés, et qu'une partie de la dotation de l'Etat avait été gelée en 2002, puisque l'agence ne fonctionnait pas.
    L'ATIH, je vous le rappelle, a pour principale mission de mettre au point les outils techniques du programme de médicalisation des systèmes d'information - le PMSI - et de traiter les informations produites dans ce cadre par les établissements de santé. Naturellement, l'ATIH va devoir s'impliquer massivement dans la mise en oeuvre de la réforme de la tarification à l'activité, qui constitue un des axes importants du plan Hôpital 2007. L'ensemble de ces travaux va donc mobiliser pleinement les équipes de l'agence, qui, je le répète, est aujourd'hui totalement opérationnelle.
    Vous m'avez également interrogé - et vous n'avez pas été le seul - sur les investissements hospitaliers, en faisant observer qu'ils étaient désormais entièrement basculés vers l'assurance maladie. Pour être tout à fait franc, je ne m'étais pas soucié outre mesure de l'efficacité des financements mis en oeuvre pour les hôpitaux. Mais, à mon arrivée au ministère, j'ai constaté que le FIMHO n'était pas d'une efficacité extraordinaire et que, par ailleurs, les crédits n'étaient pas tous dépensés, alors même que le bâti et l'équipement hospitalier n'étaient pas au meilleur de ce que l'on pouvait attendre.
    Il est donc apparu qu'il fallait revoir les financements. C'est la raison pour laquelle, dans le cadre du plan Hôpital 2007, c'est l'assurance maladie qui assure ce financement, avec 300 millions d'euros pour le volet hôpital. Je rappelle, à cette occasion, que l'assurance maladie comporte essentiellement trois parties concernant respectivement l'hôpital, les médicaments, l'ambulatoire et les dépenses déléguées, et que l'Etat est directement responsable de la partie hôpital.
    Quelqu'un parlait tout à l'heure de confusion - je crois que c'était M. Le Guen - et il est vrai qu'il faut avoir l'esprit clair pour ne pas confondre. Mais ici, la confusion n'est pas possible, si l'on sait que cette partie de l'assurance maladie est gérée par l'Etat. Il faut donc bien reconnaître que l'Etat a décidé de donner 300 millions d'euros de subventions chaque année, par le biais du Fonds de modernisation des établissements de santé, le FMES, financé par l'assurance maladie, auxquels s'ajoutent 70 millions d'euros au titre du fonctionnement, au titre du groupe IV, permettant de rembourser les emprunts, donc de financer à 100 % jusqu'à 6 milliards d'investissements et, sur la globalité des 10,2 milliards qui constituent l'investissement hospitalier, d'assurer un subventionnement de l'ordre de 60 %, ce qui ne s'était jamais vu auparavant.
    Je n'ai pas l'intention de faire le procès du FIMHO ; je dis simplement que l'exécution des opérations prévues dans le cadre du FIMHO s'est heurtée à des difficultés d'exécution, qui se sont traduites par un retard considérable. Je pense donc, monsieur Bapt, avoir apporté les principales réponses à cette interrogation.
    M. Heinrich a parlé du bioterrorisme. Je voudrais l'en remercier, tout en avouant qu'il me place dans une situation difficile, car ce sujet est d'une telle importance qu'il mériterait, à lui seul, une réunion de la commission des affaires culturelles, sociales et familiales.
    On pourrait d'ailleurs y associer la commission des affaires étrangères et celle de la défense, puisque le ministre de la santé que je suis traite notamment de ces sujets avec ses homologues de l'Union européenne. J'étais ainsi à Berlin la semaine dernière avec les ministres de la santé du G 7 et du Mexique. Nous avons essayé de coordonner notre politique en matière de bioterrorisme dans le cadre de notre réunion annuelle.
    Concernant ce sujet majeur, je n'entrerai pas ici dans le détail. Vous avez fait allusion au rapport remis par le professeur Didier Raoult, que j'avais chargé d'une mission, compte tenu de ses compétences en la matière. Il est vrai que nous avons les uns et les autres à tenter de coordonner nos stratégies et probablement de mutualiser nos moyens, qu'il s'agisse de doses vaccinales, d'aiguilles bifurquées pour la vaccination antivariolique, d'immunoglobuline, ou même d'antibiotiques.
    Le professeur Raoult préfère à cet égard, la doxicycline, qui serait moins chère que les quinolones choisis par le ministère de la santé, et conteste le choix opéré. Je souligne cependant que la doxicycline a un spectre moins large que les quinolones et qu'elle n'est plus fabriquée en France, ce qui posait un certain nombre de problèmes. C'est la raison pour laquelle je défends le choix qui avait été fait par le précédent gouvernement. Pour l'achat de médicaments en 2004, toutefois, nous allons mettre au point un comité d'experts, dont sera membre le professeur Raoult, et cette question des antibiotiques sera naturellement examinée.
    En matière de biotox, vous avez cité, monsieur le rapporteur, des exercices en grandeur nature. Je pense qu'il faut les multiplier car on ne se rend compte des difficultés que lorsque l'on est en situation réelle, sur le terrain. Tel a été récemment le cas au niveau international avec l'exercice Global Mercury. Il a en effet été assez éprouvant pour les systèmes de sécurité sanitaire, puisqu'il s'agissait d'un véritable scénario catastrophe dans lequel des terroristes s'étaient inoculé volontairement la variole et débarquaient un peu partout. Il fallait donc les suivre à la trace et repérer leurs contacts éventuels. Cet exercice a été riche d'enseignements. Il a notamment montré que, dans de telles circonstances, les communications internationales pouvaient être défaillantes. En conséquence, nous sommes convenus de mutualiser nos efforts, ce qui constituera une avancée.
    Cela étant, monsieur le rapporteur, vous avez raison de choisir cette thématique. Vous avez également raison de souligner que ce sujet n'avait pas encore été suffisamment discuté et que les parlementaires ne s'étaient pas encore bien approprié cette thématique, qui est pourtant extrêmement importante. Je ne reprendrai pas la liste des fléaux infectieux ou toxiques que vous avez cités, mais vous devez savoir que ce sujet fait partie de nos préoccupations.
    Reste à régler ensuite la question de savoir s'il est justifié ou pas que l'assurance maladie intervienne. Un problème de frontière se pose en effet lorsqu'il s'agit de financer les achats d'immunoglobuline, de vaccins ou d'antibiotiques.
    Par exemple, lorsqu'il a fallu vacciner 350 000 personnes contre la méningite dans trois départements du Sud-Ouest - pas dans le vôtre, monsieur le rapporteur, mais un peu plus bas et un peu plus à l'ouest -, a été posée la question de savoir qui devait payer de l'Etat dans le cadre de la veille sanitaire, de la sécurité sanitaire et de la santé publique, car il s'agissait d'une action de prévention populationnelle, ou de l'assurance maladie. La question était d'autant plus difficile à trancher que les actes médicaux, eux, relevaient bien de l'assurance maladie.
    Même si l'on peut en discuter, je ne crois pas qu'il soit justifié de critiquer ce transfert de charges sur l'assurance maladie, sachant que si le budget de la santé stricto sensu peut être critiquable en la matière, le ministère de la défense et celui de l'intérieur disposent aussi de crédits pour lutter contre le bioterrorisme et contre le terrorisme sous toutes ses formes.
    Mme Fraysse, qui m'a demandé d'excuser son départ, a parlé de budget de rupture et décrit un tableau de privatisation de notre système de santé dans lequel, mesdames, messieurs les députés, je ne me reconnais aucunement. Alors que je viens d'annoncer 10,2 milliards d'investissements, en très grande majorité pour l'hôpital public, que je suis en train d'expliquer comment l'Etat se réapproprie la santé publique, comment l'Etat s'implique dans la prévention, dans l'action cancer, dans la lutte contre la toxicomanie et contre le sida, j'entends que nous aurions un budget de rupture qui conduirait à la privatisation.
    A trop vouloir démontrer, on finit par ne plus être qualifié pour formuler une critique quelconque. Ainsi quand Mme Fraysse - M. Bapt a également abordé le sujet - estime que le basculement de la CMU complémentaire serait les prémices d'une privatisation, il faut faire la part des choses.
    Je vous rappelle que j'ai été, dans cette enceinte, l'un des opposants à la loi créant la CMU, mais sans être hostile au principe lui-même. Tout le monde admet en effet que la couverture maladie universelle est, en soi, un progrès social considérable. Le gouvernement précédent avait d'ailleurs envisagé un système à peu près équivalent, sous une appellation différente : l'AMU.
    Lorsque nous avions indiqué qu'il n'y aurait aucune raison pour que les gens que nous envoyions contracter la CMU à la caisse d'assurance maladie aillent ensuite souscrire une CMU complémentaire auprès des assurances, il nous avait été répondu qu'il ne fallait pas s'inquiéter et que les choix s'équilibreraient à peu près à 50-50. Or tel n'a pas du tout été le cas : 15 % seulement des intéressés ont contracté des assurances complémentaires ; les autres sont assurés par l'assurance maladie. Cette dernière joue ainsi un rôle assez étrange en étant à la fois un assureur de base obligatoire et un assureur complémentaire.
    Certes, je ne critique pas cela fondamentalement, mais j'estime qu'il faut, dans la mesure du possible, rendre aux complémentaires leur fonction. Pour ce faire, il est indispensable d'instaurer une véritable concurrence - permettez-moi cette expression - entre l'assurance obligatoire et l'assurance complémentaire. En effet, il n'y a aucune raison que seuls les assureurs complémentaires doivent limiter le remboursement à un plafond bien défini, lequel a été porté de 228 à 300 après avoir été déjà relevé l'année dernière, alors que cela n'avait jamais été le cas au cours des deux années précédentes. Ainsi, les complémentaires seraient à perte dès lors qu'elles dépasseraient le plafond de dépenses qui leur est accordé, alors qu'il n'y aurait aucun problème pour l'assurance maladie puisque, de toute façon, le trou se creuse. Cela n'est pas correct et c'est pourquoi nous souhaitons que l'assurance maladie ait désormais, elle aussi, un plafond à respecter.
    Pourquoi, en effet, les patients en difficulté économique connaîtraient-ils des situations différentes : les uns traités par une mutuelle devant respecter un plafond assez rigoureux, les autres assurés par la seule assurance maladie qui n'a pas de plafond ?
    Nous agirons en ce sens et nous verrons comment cela sera reçu.
    Nous savons bien qu'une discussion avait eu lieu sur ce sujet à l'époque et que l'Europe avait formulé diverses observations. On peut en effet se demander si la caisse d'assurance maladie ne se mettrait pas ainsi dans une situation de concurrence qui serait contraire à sa vocation première.
    Si cette évolution nous était refusée pour une raison juridique ou pour une autre, nous changerions notre fusil d'épaule, mais il est indéniable que la situation actuelle n'est pas acceptable sur le long terme.
    Oui, il faut que tous ceux qui en ont besoin soient pris en charge totalement pour les soins qu'ils doivent recevoir, mais, si nous voulons, dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie, favoriser la souscription d'une assurance complémentaire, il faudra bien que les complémentaires s'engagent davantage dans la gestion de la CMU complémentaire.
    Monsieur Préel, vous avez abordé de nombreux sujets, mais j'ai surtout été surpris de vous entendre poser une question provocatrice, même si je la comprends bien, quand vous avez demandé qui pilotait. Immédiatement après, vous avez apporté la réponse en disant : personne. Il est en effet un peu surprenant, pour un ministre de la santé, d'entendre cela de la bouche d'un parlementaire expérimenté, comme vous l'êtes en la matière. Je peux, cependant, vous donner une réponse très simple : vous ne savez peut-être pas qui fait, mais moi je sais qui est responsable quand on ne fait pas ! (Sourires.) Par exemple, cet été, quand des problèmes sont survenus, il n'y a pas eu d'hésitation pour désigner celui qui, naturellement, aurait dû faire !
    Par ailleurs, vous plaidez, avec une conviction qui mérite l'estime, en faveur de la régionalisaton. Personne n'y est opposé. Comme je vous l'ai indiqué lors de l'examen du PLFSS, je suis persuadé, avec bien d'autres, que la région est l'entité géographique la mieux adaptée à l'organisation sanitaire. Toutefois, les choses ne sont pas aussi claires dans tous les esprits que dans le vôtre apparemment.
    Ainsi, si l'hôpital relève de la responsabilité de l'ARH, les soins ambulatoires sont placés sous celle des URCAM. Il faudrait donc les rapprocher pour constituer un début d'ARS, au moins sur ce qui est le curatif. En revanche, si vous voulez ajouter la santé publique, puisque vous parlez de prévention, que faites-vous de la sécurité sanitaire dont nous voyons bien qu'elle relève de la santé publique ? Le débat a déjà été ouvert et je n'ai pas encore arrêté une position ferme et définitive. Je suis prêt à tout entendre et à me ranger à des arguments qui emporteraient ma conviction. Actuellement, je pense qu'il est trop tôt pour envisager de rassembler à la fois le curatif et le préventif, le curatif et la santé publique, dans une seule et même organisation, parce que cette dernière, je le répète, relève de la responsabilité de l'Etat qui garantit la prévention et le dépistage sur l'ensemble du territoire national.
    Le schéma est le même pour le cancer du sein, monsieur Préel. Si je n'avais pas trouvé une situation dans laquelle un tiers des départements seulement s'étaient lancés dans son dépistage, je n'aurais pas évoqué la nécessité que l'Etat reprenne sous sa responsabilité la politique de dépistage.
    J'estime donc que, dès que nous aurons redéfini le cadre de l'assurance maladie renouvelée, il faudra constituer les ARS, mais, au départ, uniquement pour le soin. Nous étudierons ensuite l'évolution à suivre, sachant que l'organisation régionale est certainement la meilleure au plan géographique.
    Je peux également vous rassurer en précisant que l'assurance maladie continuera de prendre en charge les mammographies. Il n'a jamais été question de revenir sur cette décision qui est l'une des conditions essentielles de la réussite de notre politique de prévention.
    A propos de l'Ecole nationale de santé publique, vous avez évoqué la mise en place de la nouvelle école qui sera créée par la loi de santé publique. Je vous rappelle, cependant, que cette dernière fonctionnera en réseau et qu'elle restera à Rennes, en conservant ses orientations pédagogiques.
    Vous m'avez également demandé comment sera financé le système en attendant la mise en place du nouvel établissement, car les crédits correspondants baissent considérablement. Je dois donc vous indiquer qu'ils diminuent parce qu'ils avaient augmenté de façon ponctuelle précédemment pour alimenter un investissement exceptionnel. Ce dernier ayant été réalisé, nous reprenons la vitesse de croisière des crédits de fonctionnement de l'ENSP. Nous n'aurons donc aucune difficulté à l'assurer.
    Avec d'autres orateurs, vous m'avez interrogé sur le financement des instituts de formation en soins infirmiers, le sujet ayant été abordé sous des angles différents. Ainsi, M. Bapt a parlé de désengagement de l'Etat, parce que l'on transférait les instituts de formation en soins infirmiers aux régions. Permettez-moi donc d'abord de souligner que je n'ai pas le sentiment que l'Etat se soit désengagé de l'éducation nationale quand il a confié les collèges aux départements et les lycées aux régions. En l'occurrence, il s'agira également d'assurer seulement l'immobilier, l'investissement et le fonctionnement des IFSI, et nullement de s'impliquer dans les programmes ou d'instaurer des diplômes régionaux. L'Etat sera toujours responsable de la fixation d'un quota national, de la nature des programmes et de la validité des diplômes accordés. Il faudra bien que ceux qui suivent des études en Midi-Pyrénées obtiennent des diplômes valables, même s'ils vont ensuite exercer en Bretagne.
    S'il n'y a pas de désengagement de l'Etat, prévaut en revanche le souci de coller au plus près des besoins de la population. En effet, certaines régions ont davantage besoin d'infirmières ou de professions paramédicales ; il est donc bon que les régions concernées consentent des efforts particuliers et qu'elles sachent également, sous leur responsabilité, prendre des mesures de nature à fixer ces élèves infirmières une fois formées. Vous savez d'ailleurs que, lors de la discussion sur le PLFSS, nous avons adopté une disposition qui permettra, notamment dans les zones frontalières - la Savoie, pour ne pas la nommer -, de retenir les infirmières sur leurs lieux de formation, contre l'octroi de bourses pour les études afin de faciliter leur cursus.
    M. Le Guen, qui n'est plus là, a parlé de reculs sociaux et de confusion. Je viens de répondre sur la CMU et sur les PRAPS, mais je tiens à m'exprimer devant vous à propos des visites médicales, car je ne veux pas laisser subsister le moindre doute quant à l'évolution de la prise en charge des certificats médicaux concernant l'activité sportive pour les enfants en âge scolaire. La situation demeure inchangée : conformément aux textes en vigueur, les certificats médicaux ne seront toujours pas remboursés. Néanmoins, chacun sait qu'ils le sont souvent en pratique.
    Cela étant, je vous livre le fond de ma pensée : je souhaite que les consultations avant délivrance d'un certificat d'aptitude au sport soient considérées comme l'une des consultations de médecine préventive prévues par la loi relative à la santé publique. En conséquence, leur financement devrait être inclus dans les contrats de santé publique conclus entre les praticiens et les caisses d'assurance maladie.
    Je veux faire comprendre que nous avons besoin de développer notre médecine préventive. Les gens vont rarement de leur propre chef - sauf à partir d'un certain âge - consulter un médecin à titre préventif. Il faut donc saisir toute occasion d'établir un bilan de santé préventif : examen prénuptiaux, examens pour pratique sportive, pour permis de chasse ou pour permis de conduire. Quand tel sera la cas, nous aurons réalisé un vrai progrès en termes de santé publique.
    M. Le Guen a beaucoup critiqué l'ANAES. Ses propos m'ont étonné, d'autant plus que je m'intéresse à cette agence depuis toujours, et plus particulièrement depuis mon arrivée avenue de Ségur. Comme lui, comme vous tous, je sais qu'elle est notre tour de contrôle chargée de veiller à la qualité des soins. Or celle-ci est le seul régulateur acceptable en matière de dépenses de santé. Certes, j'ai constaté que l'ANAES avait éprouvé quelques difficultés, d'ailleurs bien compréhensibles, à démarrer, mais, en 2002, elle a effectué 208 évaluations, puis 381 actes ont été inscrits à son programme de travail, pour cette année, le nombre de visites d'accréditation réalisées par l'agence a déjà atteint 404, et la programmation en prévoit 600 pour 2003 et 750 pour 2004. Même si cela est encore insuffisant, la montée en puissance est assez remarquable.
    Je tiens donc à souligner, afin que M. Le Guen puisse le lire dans le Journal officiel, que, depuis dix-huit mois, nous avons augmenté le nombre d'accréditations, médicalisé nos processus d'accréditation afin de ne pas s'en tenir au seul respect du protocole méthodologique et développé les référentiels qui serviront aux caisses et aux professionnels médecins à définir les fameux accords de bons usages.
    M. Jean-Marc Nesme et M. Marc Bernier ont judicieusement évoqué le problème de la démographie médicale, qui constitue l'un de mes soucis majeurs. J'ai déjà abordé le sujet avec les uns et les autres ; il en a été question lors de mon audition par la commission des affaires sociales et nous en avons parlé au cours de l'examen des PLFSS cette année et l'année dernière. Nous allons encore augmenté le numerus clausus, qui aura ainsi été porté de 4 700 en 2002 à 5 600 en 2004, soit une progression de 900. Néanmoins, la question porte moins sur le nombre de médecins supplémentaires que sur le point de savoir où ils vont s'installer.
    M. Gérard Bapt, rapporteur spécial. Eh oui !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Pour le moment, la liberté d'installation est l'une des libertés revendiquées par les professionnels de santé. Personnellement, je n'ai rien contre, mais tout ministre de la santé a la responsibilité de garantir l'égalité d'accès aux soins sur l'ensemble du territoire.
    M. François Guillaume. Tout à fait !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. A partir du moment où la liberté d'installation compromet l'égalité d'accès aux soins, il y a deux façons d'agir, qui ne sont pas exclusives l'une de l'autre comme cela a été suggéré.
    La première consiste à mettre en oeuvre des mesures incitatives. Désormais arrêtées, elles seront de trois types : des mesures d'incitation prises par les collectivités territoriales - la loi le permet désormais - des incitations conventionnelles entre les professionnels et les caisses, et, depuis le CIADT du 3 septembre dernier, une exonération de la taxe professionnelle, sur délibération des collectivités locales, pour les professionnels de santé qui s'installent dans les zones de revitalisation, ainsi qu'une aide financière de l'Etat à l'installation.
    Nous avons tout de même obtenu une aide annuelle de 10 000 euros pendant cinq ans. Ce n'est pas rien. Récapitulons : à l'aide financière de l'Etat qui s'élève à 10 000 euros par an pendant cinq ans et la dispense de la taxe professionnelle, s'ajoutent l'aide des caisses par le biais de dispositions conventionnelles et les aides des collectivités territoriales. Nous pensons que ces mesures d'incitation devraient inverser la tendance à la désertification médicale que nous constatons dans certaines zones. Je ne suis pas sûr qu'elles suffisent.
    C'est la raison pour laquelle il faudra probablement avoir recours, un jour ou l'autre, à une disposition plus contraignante. Vous avez évoqué tout à l'heure la comparaison avec les pharmacies. Je vous proposerai un amendement en ce sens lors de la deuxième lecture de la loi de santé publique. Mais ne vous y trompez pas, pour que l'incitation fasse ses preuves, il faut un peu de temps. On ne peut pas changer les règles pour un étudiant en médecine qui s'est inscrit en première année, avec une vision très précise de son avenir : reprendre le cabinet de son père ou s'associer. Il est impossible de changer immédiatement les règles en cours. Il faut se donner dix ans de recul pour voir si les méthodes d'incitation fonctionnent. Mais il faut d'ores et déjà prendre date ! Si, au 1er septembre 2013, les méthodes incitatives n'ont pas modifié les modalités d'installation des professionnels de santé et permis une meilleure répartition et un égal accès de tous aux soins, les modalités d'installation devront alors être définies par un décret en Conseil d'Etat, lequel devra faire l'objet d'une très large concertation entre les professionnels, les caisses et les élus naturellement.
    Je pense, mesdames et messieurs les députés, avoir répondu à l'ensemble de vos questions. Beaucoup portaient sur les personnes handicapées, et j'en suis très heureux. Cela démontre qu'il n'y a pas suffisamment d'occasions, dans nos débats politiques, d'aborder ce problème, et je vais laisser maintenant à Mme Marie-Thérèse Boisseau le soin de répondre à ces questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées.
    Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Comme vient de le dire Jean-François Mattei, j'ai bien noté que, sur les treize orateurs qui se sont exprimés cet après-midi, beaucoup - sept - avaient axé leur intervention essentiellement, voire exclusivement, sur les problèmes du handicap. Je considère que l'intérêt des parlementaires pour ce problème majeur de société est extrêmement encourageant, et sert de résonance aux interrogations et aux attentes de la société dans ce domaine.
    Non, madame Mignon, ce budget n'est pas figé, je le dis très honnêtement et très objectivement. L'existant est consolidé, les instituts nationaux sont mieux pourvus, l'ensemble des dépenses budgétaires est en progression, l'allocation adulte handicapé évolue à un rythme régulier et son articulation avec la retraite a été trouvée. Il y a un effort accentué de création de places. Le plan triennal a atteint ses objectifs et le plan pluriannuel a été amplifié. Ce n'est pas moi qui le dis, mais votre rapporteur M. Bapt, qui parle également de mauvaise exécution - j'atténue les termes qu'il a employés - des contrats de plan Etat-région. Je suis d'accord, mais, cerise sur le gâteau, si j'ose dire, les 6,1 millions d'euros prévus pour les établissements médico-sociaux en 2003 sont dégelés et il reste à les déléguer aux régions.
    Si je considère que le budget que je vous présente est effectivement un bon budget, je ne cherche pas à en tirer gloire, et encore moins à crier victoire, car le chemin est encore long pour arriver à une intégration pleine et entière des personnes handicapées dans la société, comme c'est le voeu et l'une des priorités du Président de la République.
    Beaucoup de questions ont été posées. Je vais essayer d'y répondre succinctement, ne m'en veuillez pas et sachez que je reste à votre disposition pour les approfondir toutes.
    Madame Bourragué, vous avez parlé de l'accessibilité pour les personnes handicapées psychiques. Comme vous le savez, ces personnes n'étaient pas prises en compte dans la loi de 1975, qui ne distinguait que le handicap moteur, le handicap sensoriel et le handicap mental. Elles le seront dans la loi de 2004, dans le volet accessibilité notamment puisqu'il y est question de l'accessibilité de tous, victimes de tous types de handicap, y compris le handicap psychique. Mais c'est une autre histoire.
    Je vous remercie d'avoir aussi parlé de « souplesse ». J'ai coutume de dire que ce qui distingue les personnes handicapées des personnes valides, c'est leur moindre faculté voire leur absence totale d'adaptation au monde qui les entoure. Elles ont donc besoin de réponses extrêmement personnalisées, individualisées, et de beaucoup de souplesse précisément, pour qu'à aucun moment leur situation ne soit figée. La souplesse sera, je vous l'assure, l'une des règles d'or de la prochaine loi et je vous remercie de l'avoir souligné.
    Je parlerai à présent, un peu dans le désordre, des centres d'aide par le travail, des sites de la vie autonome, des auxiliaires de vie, dont ont parlé certain d'entre vous, notamment les deux rapporteurs.
    Il y avait environ 98 000 places ouvertes en centres d'aide par le travail quand nous sommes arrivés aux affaires. Le plan quinquennal les concernant, qui se terminait en 2003, prévoyait 1 500 places supplémentaires. Nous en avons créé 3 000 cette année, du moins 80 % le sont effectivement aujourd'hui et j'espère le reste d'ici à la fin décembre. C'était peut-être plus facile cette année car il s'agissait de compléter des plans déjà existants, de rajouter quelques places ici ou là. Ce sera plus difficile l'année prochaine car il faudra créer de nouvelles structures et cela prendra vraisemblablement du temps.
    C'est pourquoi, madame Mignon, les 3 000 places prévues d'ici à 2005 seront créées sur six mois à partir de juillet 2004 mais seront financées à temps plein en 2005. C'est donc bien encore 3 000 places de CAT qui vont être créées cette année.
    Je crois que nous commençons, dans ce domaine - je le dis avec prudence -, à voir le bout du tunnel. On estime à quelque 15 000, les places qui manquent en CAT. Si nous en créons 3 000 par an en 2003 et en 2004 et si nous poursuivons cet effort, nous pouvons espérer en cinq ans, que la douloureuse liste d'attente soit résorbée et qu'on n'ait plus à parler d'amendement Creton, parce que tous les jeunes âgés de vingt ans sortant des instituts médico-éducatifs et aptes à entrer en CAT y trouveront une place.
    Il s'agit là d'un effort notable et la perspective à moyen terme me semble assez satisfaisante.
    Mme Bourragué, M. Chossy et quelques autres ont parlé des sites de la vie autonome. Ils seront installés en 2004 à raison d'un par département. Le budget 2004 prévoit le financement de chacun d'entre eux ainsi que le fonds pour les aides techniques. Ils constituent les prémices de ce que vous avez été nombreux à souhaiter, à savoir ces maisons départementales du handicap où seront regroupées toutes les informations, évaluations, accompagnements et suivis relatifs aux personnes handicapées.
    Il faut sortir de ce dédale de complications absolument extraordinaires et totalement insupportables quand il s'agit de handicap, et parvenir à ce qu'une personne handicapée, quand elle est atteinte par un handicap - qui est toujours quelque chose de brutal -, ou sa famille, sache à quelle porte frapper et qu'elle y trouve tous les renseignements et les services nécessaires.
    Les auxiliaires de vie - Mme Bourragué et d'autres l'ont noté - vont devenir de plus en plus nécessaires étant donné l'évolution des aspirations des personnes handicapées qui, de plus en plus, souhaitent vivre à domicile, quels que soient le type et la gravité de leur handicap. Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir dans ce domaine. Mais il me semble que, depuis juin 2002, nous avons accompli un effort notable : il y avait à peu près 3 000 forfaits d'auxiliaires de vie à cette période et nous en avons créé 2 000 depuis juin 2002. A la fin de l'année 2004, nous en auront créé 5 500. En d'autres termes, en deux ans et demi, nous aurons pratiquement doublé le nombre de forfaits d'auxiliaires de vie.
    Là encore, il n'est pas question de crier victoire. Ce n'est qu'un début et le cheminement sera long. Il faudra développer ce métier, lui donner un véritable statut et lui offrir des perspectives de carrière, car les auxiliaires de vie vont avoir un rôle de plus en plus important dans notre société, tant pour les personnes handicapées que pour les personnes âgées.
    Enfin, toujours pour répondre à Mme Mignon : non, l'allocation adulte handicapé n'a pas été revalorisée en 2003. Elle ne le sera pas plus en 2004, car priorité a été donnée à des personnes en attente de places en établissement, et à la création de postes d'auxiliaires de vie pour les personnes qui en avaient le plus grand besoin, particulièrement les personnes lourdement handicapées. L'allocation adulte handicapé sera totalement revue dans le cadre de la nouvelle loi qui vous sera proposée d'ici à quelques semaines.
    M. Chossy a parlé de l'accueil temporaire. Je l'en remercie. N'oublions pas que, dans notre pays, trop de familles assument la charge d'enfant ou d'adulte lourdement handicapé, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, 365 jours sur 365 ! Le répit d'un week-end ou de huit jours de vacances est absolument nécessaire. Le décret concernant l'accueil temporaire est à la signature et sortira sous peu.
    M. Jean-François Chossy. Je vous remercie !
    Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Quant aux personnes handicapées accueillies en Belgique, elles sont environ 3 000. Mon opinion à leur sujet est mitigée. Ces personnes, monsieur Chossy, ont une place, même si c'est en Belgique, alors que nous comptons encore trop de personnes handicapées, enfants ou adultes, pour lesquelles, à ce jour, aucune solution n'a été trouvée et auxquelles, je viens de le dire, nous donnons la priorité. Du reste, la Belgique n'est qu'à une heure et demie de Paris, plus proche que ne l'est le sud de la France, par exemple. Quant aux établissements belges, une quarantaine, ils sont très divers et offrent des réponses plus ou moins bien adaptées aux personnes handicapées.
    Il convient donc d'examiner de plus près cette expérience belge, comme vous l'avez fait vous-même, en vous rendant à plusieurs reprises chez nos voisins. Ce peut être pour nous un sujet de réflexion. Certes, les exigences ne sont pas les mêmes en Belgique. Elles mériteraient d'être comparées aux nôtres, afin, peut-être, d'améliorer le système dans l'un et l'autre pays, qui font partie de la même Europe. En tout état de cause, il faut éviter d'engorger les services d'accueil temporaire avec des personnes venant de Belgique. Encore une fois, il me semble préférable de les réserver aux personnes handicapées qui, en France, attendent une prise en charge.
    Simplification, personnalisation, compensation, avez-vous dit. Ce sont les principes qui président à la rédaction de la nouvelle loi.
    Je vous remercie, monsieur Roques, d'avoir évoqué la sécurité routière. Les chiffres sont éloquents. Auparavant, quand on dénombrait 10 000 morts sur les routes, on comptait à peu près 150 000 blessés dont 15 000 blessés lourds, potentiellement handicapés à vie.
    Vous avez dévié, madame Mignon, sur un sujet qui, je le sais, vous tient à coeur tout comme à moi : celui des auxiliaires de vie scolaire. J'ai envie de dire que vous étiez hors sujet en ce qui concerne le budget, puisque ce poste est financé pour l'essentiel par le budget de l'éducation nationale. Mais vous êtes au coeur du sujet quand il s'agit de l'intégration scolaire des enfants handicapés. Le ministre de l'éducation nationale a créé, en septembre 2003, de l'ordre de 5 000 postes d'auxiliaires de vie scolaire dépendant de son département, ce qui porte à 6 000 l'effectif des auxiliaires de vie scolaire, auxquels viennent s'ajouter les 2 500 postes associatifs pour lesquels, vous le savez, un financement du ministère de la santé et des personnes handicapées est prévu afin de compléter les emplois-jeunes. Plus de 7 000 postes d'auxiliaires de vie scolaire ont ainsi été attribué à la rentrée dernière. J'ai suivi ce problème de très près. Globalement, la rentrée scolaire des enfants handicapés s'est bien passée malgré quelques fausses notes ici ou là. On peut considérer que tous les enfants qui avaient besoin d'une auxiliaire de vie scolaire à la rentrée l'ont eue ou sont en passe de l'avoir.
    Encore une fois, il ne s'agit pas de se reposer sur ses « demi-lauriers ». Pour qu'une scolarité soit réussie, il faut, pour beaucoup d'enfants, un accompagnement médico-social, réalisé par les services d'éducation spécialisée et de soins à domicile. En janvier 2002, 22 000 places existaient, nous en avons créé 1 300 en 2003 et nous continuerons, car ce service est essentiel.
    Suite à la régression des accidents de la route, on parle de la diminution de la mortalité, mais pas suffisamment de celle du nombre des personnes blessées. Or c'est essentiel. La lutte contre la violence routière est effectivement transversale ; elle doit être le fait de l'ensemble du Gouvernement, merci de l'avoir souligné.
    Je ne reviens pas sur les auxiliaires de vie scolaire qui dépendent du ministère de M. Ferry, ou sur les actions menées dans le domaine du sport qui sont indispensables à l'intégration des enfants et des adultes handicapés. Nous travaillons conjointement avec M. Lamour pour le développement du sport des enfants handicapés à l'école. Avec M. Aillagon, nous avons inauguré les premières rencontres « Art, culture, handicap », à Bourges et je vous assure que les échanges y ont été extrêmement riches.
    Vous m'interrogez sur la possibilité de cumuler l'allocation aux adultes handicapés avec un travail, même à temps partiel. Nous vous ferons des propositions très précises dans le cadre de l'examen du projet de loi, afin que davantage de personnes handicapées, demain, travaillent, même à temps extrêmement partiel. Nous ferons en sorte qu'elles aient intérêt à travailler, et qu'elles obtiennent une reconnaissance sociale mais aussi financière.
    Le problème des personnes handicapées vieillissantes est un problème émergent. En effet, il y a vingt ans, il ne se posait pas car l'espérance de vie des personnes handicapées était beaucoup plus courte. Ce problème aussi sera abordé dans la nouvelle loi. Il nécessitera des dispositions extrêmement diversifiées. Il faudra partir de chaque cas et offrir une réponse individualisée en fonction du projet de vie, de l'histoire, de l'entourage de la personne. Il faudra sans doute créer des structures spécifiques - il en existe déjàqui fonctionnent remarquablement bien.
    Oui, les personnes handicapées peuvent se faire les agents de l'aménagement du territoire, dans la mesure où les établissements sont répartis de manière harmonieuse sur l'ensemble du territoire, mais aussi à titre individuel. Je pense à ces autistes appartenant un CAT éclaté, dans un village rural, dont ils ont repris, avec l'accompagnement qui sied, bien sûr, la gestion de la boulangerie.
    Merveilleux travail des professionnels de ce CAT et de cette association. J'espère que d'autres expériences de ce type auront lieu sur l'ensemble de notre territoire.
    Il n'y a pas d'engagements sur le long terme, avez-vous déploré, monsieur Leteurtre. Je vous rappelle que 2003 était la dernière année du plan quinquennal et que le budget pour 2004 est un budget de transition.
    M. Pascal Terrasse. Comme l'an passé !
    Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Non !
    M. Pascal Terrasse. C'est ce que vous m'avez répondu l'an dernier !
    Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. C'est aussi un budget de consolidation du budget 2003, et il n'était pas sérieux de mettre un nouveau plan sur pied cette année étant donné que vous allez discuter dans quelques semaines la nouvelle loi sur le handicap qui s'appliquera dès 2005.
    Vous avez parlé de budget éclaté. C'est vrai. On retrouve des crédits en faveur des personnes handicapées un peu partout. Je propose que, l'année prochaine, soit annexé au budget des personnes handicapées un « jaune » regroupant toutes ces dépenses, ce qui permettra d'y voir clair. Je vous signale cependant que la direction de la recherche et des études économiques et statistiques dispose déjà d'un document de ce type dénommé compte social du handicap.
    Les prestations sociales en faveur du handicap représentent bien 1,7 % du PIB, mais la base de calcul a changé depuis 1995. A ce moment-là, on intégrait les dépenses fiscales, et c'est la raison pour laquelle on est passé de 2,1 % à 1,7 %. Selon la DREES, en euros constants, dans la même période de temps, le budget des personnes handicapées aurait augmenté de 11 %. Attention aux chiffres !
    La procédure d'attribution de l'allocation d'éducation spécialisée a déjà été revue. Avait été mis sur pied un questionnaire, inquisitorial je vous l'accorde : quatre pages extrêmement confuses et détaillées. Ce questionnaire a été simplifié. C'est un recto verso, beaucoup plus simple, qui est diffusé par les CDES.
    Selon vous, monsieur Le Ridant, il faudra bien distinguer dans la prochaine loi ce qui relève de la compensation des ressources propres des personnes handicapées. C'est évident. Pour plus de lisibilité, il y aura, d'une part, la compensation du handicap, c'est-à-dire de toutes les dépenses que doit faire une personne handicapée et que n'a pas à faire une personne valide, et, d'autre part, l'allocation spécifique de ressources, qui procédera de la solidarité nationale, en totalité pour les personnes handicapées qui ne peuvent pas du tout travailler, et, pour celles qui peuvent travailler, en complément des fruits de leur travail, avec des conditions de cumul améliorées.
    Vous avez insisté sur la vie à domicile. Mon objectif, c'est de permettre à toute personne handicapée de choisir de vivre soit en établissement, soit à domicile. On peut souhaiter l'une ou l'autre formule, selon sa personnalité ou son handicap. Cela veut dire qu'il faut à la fois créer des places dans les établissements et développer considérablement les auxiliaires de vie et tous les accompagnements médico-sociaux pour les personnes handicapées voulant rester à domicile.
    Quant à la simplification, j'ose espérer que, lorsque nous aurons mis sur pied les maisons départementales des personnes handicapées, nous arriverons à une vraie simplification des démarches, à une coordination, à une mise en synergie pour le meilleur service des personnes handicapées.
    Je ne voudrais pas retenir plus longtemps votre attention. Pardon d'avoir été un peu trop elliptique pour un certain nombre de réponses, mais le temps passe. Je remercie un certain nombre d'entre vous, et Mme Bourragué la première, d'avoir parlé d'espoir. Sans vouloir me glorifier, je crois que ce budget pour 2004 est un bon budget, qui consolide l'effort engagé en 2003 et qui prépare la réforme de la loi de 1975. C'est une belle dame, mais une vieille dame qui, après trente ans, a besoin d'être modernisée et de mieux répondre aux aspirations du moment et à la mentalité de notre XXIe siècle.
    J'ose espérer que, grâce aux propositions du Premier ministre, qui, la semaine dernière, a demandé davantage de solidarité aux Français, par une journée de travail supplémentaire pour ceux qui le peuvent et, pour les autres, par une contribution prélevée sur les revenus du capital, cette loi qui vous sera présentée dans quelques semaines permettra aux personnes handicapées de trouver leur place dans notre société, parmi nous. Il en va de leur dignité et il en va peut-être encore plus de celle de notre société. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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NOMINATION DE DEUX DÉPUTÉS
EN MISSION TEMPORAIRE

    Mme la présidente. J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant de sa décision de charger M. Lionnel Luca, député des Alpes-Maritimes, et M. Yves Bur, député du Bas-Rhin, de missions temporaires auprès de M. le ministre de la santé et de M. le secrétaire d'État aux petites et moyennes entreprises.
    Cette décision a fait l'objet de deux décrets publiés au Journal officiel du mardi 11 novembre 2003.

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ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004, (n° 1093) :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 1110).
    Santé, famille et personnes handicapées ; articles 81 et 82 (suite).
    Santé et personnes handicapées :
    M. Gérard Bapt, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 38 du rapport n° 1110).
    Santé :
    M. Michel Heinrich, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome n° XI de l'avis n° 1111).
    Personnes handicapées :
    Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome n° XII de l'avis n° 1111).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à vingt heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT