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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 3 DÉCEMBRE 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
3e séance du mardi 2 décembre 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT

1.  Rapatriés. - Suite du débat sur la déclaration du Gouvernement «...».
MM.
Georges Colombier,
Lionnel Luca,
Jean-Pierre Grand,
Rudy Salles,
Daniel Spagnou,
Georges Fenech,
Jean-Pierre Giran,
Roland Chassain,
Jean-Claude Flory.
Clôture du débat.
M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants.

Suspension et reprise de la séance «...»

2.  Accueil et protection de l'enfance. - Discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat «...».
M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille.
Mme Henriette Martinez, rapporteure de la commission des affaires culturelles.
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles.

DISCUSSION GÉNÉRALE «...»

M.
Pierre Goldberg,
Mmes
Martine Aurillac,
Patricia Adam,
M.
Yvan Lachaud,
Mme
Françoise de Panafieu.
Clôture de la discussion générale.
M. le ministre.

DISCUSSION DES ARTICLES «...»
Article 1er A «...»

Mme Patricia Adam.
Amendement de suppression n° 1 de la commission des affaires culturelles : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.
L'article 1er A est supprimé.

Article 1er «...»

Mme Patricia Adam.
Amendement de suppression n° 27 de Mme Adam : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, M. le ministre. - Rejet.
Amendement n° 2 de la commission : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.
Amendement n° 17 de M. Lachaud : M. Jean-Christophe Lagarde, Mme la rapporteure, MM. le ministre, Pierre Goldberg. - Rejet.
Adoption de l'article 1er modifié.

Article 2 «...»

Mme Patricia Adam, M. Pierre Goldberg.
Amendement de suppression n° 28 de Mme Adam : M. Simon Renucci, Mme la rapporteure, M. le ministre. - Rejet.
Amendement n° 3 rectifié de la commission : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.
L'article 2 est ainsi rédigé.
Les amendements n°s 20 et 21 de M. Dutoit n'ont plus d'objet.

Après l'article 2 «...»

Amendement n° 18 de M. Lachaud : M. Jean-Christophe Lagarde, Mme la rapporteure, M. le ministre. - Retrait.

Article 3 «...»

MM. Simon Renucci, Pierre Goldberg.
Amendement n° 29 de Mme Adam : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, MM. le ministre, Pierre Goldberg. - Rejet.
Adoption de l'article 3.

Après l'article 3 «...»

Amendement n° 49 de Mme Adam : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, M. le ministre. - Rejet.
Amendement n° 31 de Mme Adam : M. Simon Renucci, Mme la rapporteure, M. le ministre. - Rejet.

Article 3 bis. - Adoption «...»
Après l'article 3 bis «...»

Amendement n° 4 de la commission: Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.

Articles 4, 5 et 6. - Adoptions «...»
Après l'article 6 «...»

Amendement n° 5 de la commission : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.

Avant l'article 7 «...»

Amendement n° 34 de Mme Adam : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, M. le ministre. - Rejet.

Article 7 «...»

Amendement n° 6 de la commission : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.
Amendement n° 7 de la commission : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.
Amendement n° 36 de Mme Adam : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, M. le ministre. - Retrait.
Amendement n° 22 de M. Dutoit : M. Pierre Goldberg, Mme la rapporteure, M. le ministre. - Rejet.
Amendement n° 37 de Mme Adam : M. Simon Renucci, Mme la rapporteure, M. le ministre. - Rejet.
Amendement n° 8 de la commission, avec le sous-amendement n° 52 de Mme Adam : Mmes la rapporteure, Patricia Adam, M. le ministre. - Retrait de l'amendement n° 8.
Amendement n° 38 de Mme Adam. - Retrait.
Adoption de l'article 7 modifié.

Article 8. - Adoption «...»
Après l'article 8 «...»

Amendement n° 33 de Mme Royal : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, M. le ministre. - Rejet.

Article 8 bis «...»

Amendement n° 9 de la commission : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 8 bis modifié.

Après l'article 8 bis «...»

Amendement n° 39 de Mme Adam : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, M. le ministre. - Rejet.
Amendement n° 41 de Mme Adam : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, M. le ministre. - Retrait.
Amendement n° 48 de Mme Adam : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, M. le ministre. - Rejet.
Amendement n° 10 de la commission : Mme la rapporteure, MM. le ministre, Pierre Goldberg. - Adoption.
Amendements n°s 11 rectifié de la commission et 40 de Mme Adam : Mmes la rapporteure, Patricia Adam, M. le ministre. - Adoption de l'amendement n° 11 rectifié ; l'amendement n° 40 n'a plus d'objet.

Article 9 «...»

Amendement n° 12 de la commission : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 9 modifié.

Article 10. - Adoption «...»
Article 11 «...»

Amendement n° 47 de la commission : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 11 modifié.

Après l'article 11 «...»

Amendement n° 42 de Mme Royal : Mme Patricia Adam.
Amendements n°s 43 et 44 de Mme Royal : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, M. le ministre. - Rejet des amendements n°s 42, 43 et 44.
Amendement n° 13 de la commission : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Retrait.

Article 12 «...»

Amendement de suppression n° 45 de Mme Adam : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, M. le ministre. - Rejet.
Amendement n° 14 de la commission : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 12 modifié.

Après l'article 12 «...»

Amendement n° 15 de la commission : Mme la rapporteure, M. le ministre. - Adoption.
Amendements n°s 46 de Mme Adam et 16 de la commission : Mmes Patricia Adam, la rapporteure, MM. le ministre, Georges Colombier. - Rejet de l'amendement n° 46 ; adoption de l'amendement n° 16.

EXPLICATIONS DE VOTE «...»

Mme
Patricia Adam,
MM.
Yvan Lachaud,
Pierre Goldberg,
Mme
Martine Aurillac.

VOTE SUR L'ENSEMBLE «...»

Adoption de l'ensemble du projet de loi.
M. le ministre.
3.  Saisine du Conseil constitutionnel «...».
4.  Dépôt de rapports «...».
5.  Dépôt d'un rapport d'information «...».
6.  Dépôt d'un avis «...».
7.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

RAPATRIÉS

Suite du débat sur la déclaration du Gouvernement

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite du débat sur la déclaration du Gouvernement sur les rapatriés.
    La parole est à M. Georges Colombier.
    M. Georges Colombier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat aux anciens combattants, mes chers collègues, j'ai été le témoin direct d'une guerre qui, pendant de très nombreuses années, n'a pas dit son nom. J'ai été l'acteur impliqué - et parfois mal compris, - des efforts parlementaires d'abord pour reconnaître cet état de guerre, ensuite pour offrir à nos concitoyens une date officielle de commémoration.
    Mon engagement n'avait pour but que de permettre à la nation tout entière d'exercer son devoir de mémoire à l'égard non seulement des morts et blessés du conflit algérien, mais aussi du traumatisme réel qu'a constitué l'exil des Français d'Algérie. Aussi ne pouvais-je que me réjouir que le Gouvernement offre à la représentation nationale une nouvelle opportunité de débattre à propos de la politique de l'Etat en faveur des personnes rapatriées. Mais je constate que si ce débat fait naître chez les citoyens français des anciens départements d'Afrique du Nord les plus grands espoirs, il suscite en même temps la crainte de perdre, une fois de plus, l'occasion de clore un passé qui ne passe pas.
    Permettez-moi tout d'abord de reconnaître au chef de l'Etat et au Gouvernement, et plus particulièrement à vous monsieur le secrétaire d'Etat, une volonté, jamais démentie, de garantir la poursuite de la solidarité nationale en faveur des rapatriés.
     La création de la mission interministérielle aux rapatriés, en juin 2002, n'est que la partie la plus visible de l'iceberg.
    De nombreux efforts ont été développés récemment : premièrement, pour approfondir le devoir de mémoire, la création de la Journée nationale d'hommage aux harkis le 25 septembre, l'inauguration du Mémorial national de la guerre d'Algérie, quai Branly, ou le soutien apporté par le Gouvernement au Mémorial de l'oeuvre française d'outre-mer à Marseille ; deuxièmement, pour exprimer la reconnaissance matérielle, la création de l'allocation de reconnaissance pour les harkis et leurs veuves, la réactivation d'une initiative prise dans le cadre du plan « harki » et l'octroi d'un délai supplémentaire aux salariés rapatriés pour améliorer leur retraite complémentaire ; troisièmement, pour poursuivre le dialogue avec les rapatriés et préparer enfin l'avenir, l'installation du Haut Conseil des rapatriés, l'attribution à notre collègue Michel Diefenbacher d'une mission de bilan et de prospective sur les politiques conduites en faveur des rapatriés et l'inscription à l'ordre du jour des travaux de l'Assemblée d'un débat portant sur ce sujet.
    Toutes ces actions, qui visent à parachever l'effort de solidarité nationale envers les rapatriés et à promouvoir « l'oeuvre collective de la France d'outre-mer » - pour reprendre l'intitulé du rapport remis par notre collègue à M. le Premier ministre, en septembre dernier - méritent d'être saluées. Elles doivent d'être saluées pour ce qu'elles sont : un effort sans précédent du Gouvernement dans le droit fil des engagements du Président pour améliorer la situation actuelle des rapatriés en général et de la communauté harkie en particulier, cette dernière continuant de payer un lourd tribut si l'on se réfère à la situation d'exclusion qui est trop souvent la sienne et celle de ses enfants.
    Les harkis et leurs descendants ne doivent pas être déçus par le pays dont ils sont amoureux, pour lequel ils ont pris les armes et seraient prêts à les reprendre à nouveau - certains d'entre eux, dans mon département, me l'ont affirmé.
    C'est donc en faveur de cette communauté si fragilisée que doit converger la solidarité nationale à l'heure où, selon un sondage récent, 68 % de la population estime que la France s'est mal comportée à l'égard des harkis après la guerre d'Algérie.
    Une attention toute particulière doit être accordée aux proposition 13 à 17 du rapport Diefenbacher, visant à améliorer l'accompagnement matériel des familles de harkis : choix entre le doublement de l'allocation de reconnaissance et une mesure mixte combinant une majoration de la rente et l'attribution d'un nouveau capital, prolongation des mesures spécifiques d'accompagnement au bénéfice de la première et de la deuxième générations, renforcement des mesures de discrimination positive en matière d'emploi et de logement, aussi longtemps que le taux de chômage de cette communauté restera anormalement élevé.
    Cet accompagnement matériel ne saurait faire oublier notre devoir de mémoire et de reconnaissance envers les sacrifices des harkis. C'est pourquoi j'accorde un grand intérêt à la dernière des trente et une propositions formulées par notre collègue : la création d'une fondation reconnue d'utilité publique dédiée à la mémoire des harkis et à l'intégration de leurs enfants.
    L'établissement d'une priorité reconnue en faveur des familles de harkis n'est évidemment pas incompatible avec la prise en compte de nombreuses revendications légitimes des associations de rapatriés, parmi lesquelles je citerai la poursuite de l'effort de reconstitution des droits à la retraite des salariés rapatriés, ou bien la restitution aux rapatriés des sommes prélevées au titre de l'article 46 de la loi du 15 juillet 1970 et de l'article 3 de la loi du 9 janvier 1978.
    C'est à ce jour que nous pourrons enfin apporter un début d'apaisement à la souffrance de la mémoire collective et associer l'oeuvre française outre-mer, non seulement à un drame humain, mais également à un souvenir assumé.
    Deux expositions récentes, organisées à Paris et dans mon département de l'Isère, me permettent de fonder des espoirs à ce sujet. L'une présentait sous un jour positif l'architecture et la modélisation du paysage urbain d'Alger pendant la colonie, et l'autre mêlait documents photographiques et souvenirs sonores ou olfactifs d'une communauté heureuse, disparue d'un coup, tout en rappelant au travers d'un film le sort des victimes longtemps oubliées : les harkis.
    La France s'est engagée dans un lourd travail de mémoire envers ses enfants tombés lors de la guerre d'Algérie, mais aussi ses enfants déplacés, exilés, déracinés, meurtris, suite à ce conflit. La déchirure occasionnée est encore difficile à imaginer pour les jeunes générations qui n'ont pas vécu ce conflit. Perpétuer la mémoire au-delà des siècles est un devoir que la France doit honorer, et je ne peux que rendre hommage au Gouvernement d'apporter sa pierre à l'édifice du souvenir.
    Je terminerai en soulignant que le souvenir est certes essentiel, mais qu'il convient de poursuivre et de multiplier nos efforts en faveur de la réparation. Réparation pour le sang versé, réparation pour les racines perdues, pour une intégration forcée sur un sol inconnu, mais adoré, où aujourd'hui encore les regards sont méfiants, quand ils ne sont pas désapprobateurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca.
    M. Lionnel Luca. Vendredi prochain aura lieu la première célébration officielle de la fin des combats en Afrique du Nord. Que le choix de cette date par la commission présidée par Jean Favier, à l'unanimité moins une association, soit déconnecté de toute signification historique, est révélateur des passions qu'a engendrées la guerre d'Algérie. Traditionnellement, le jour du cessez-le-feu ou de l'armistice s'impose comme date de célébration nationale. Ainsi en est-il du 11 novembre ou du 8 mai. Mais dans le cas de la guerre d'Algérie, les morts - en particulier chez les civils - ont été plus nombreux après le cessez-le-feu que pendant toute la durée du conflit. C'est si vrai que la représentation nationale a voté à l'unanimité la reconnaissance de la guerre en Algérie et en Afrique du Nord, entre janvier 1952 et le 3  juillet 1962, date de l'indépendance algérienne.
    Il convient donc pour l'Etat de donner toute l'importance qu'elle mérite à cette première célébration, qui est désormais celle de la République.
    Ce dilemme illustre bien le drame subi par tous ceux qui ont vécu ces événements douloureux. Plus de quarante ans après, il est temps que justice soit rendue à toutes les victimes de la raison d'Etat et de la falsification historique. Les Français d'Algérie n'ont pas été défendus comme ils auraient dû l'être. La fusillade de la rue d'Isly et le massacre d'Oran en sont les tragiques illustrations. Les Français d'origine algérienne engagés dans l'armée française comme supplétifs n'ont pas non plus été protégés comme ils auraient dû l'être, et les survivants ont été mis à l'écart dans un pays qu'ils ne connaissaient pas.
    Au-delà de la dette matérielle, c'est désormais la dette morale qui doit être abordée. C'est un devoir de mémoire que la patrie a envers eux, un devoir de reconnaissance envers ceux qui ont bâti l'empire français au prix de leur sueur et de leur sang.
    La France peut et doit être fière de son oeuvre civilisatrice, en particulier en Afrique du Nord !
    M. Jean-Pierre Grand. Bravo !
    M. Lionnel Luca. Sans la France, l'Algérie d'aujourd'hui n'existerait pas. C'est la France qui lui a donné son territoire et son identité, qui l'a organisée et développée.
    L'oeuvre de la France outre-mer reste trop méconnue et déformée, souvent calomniée sous le vocable de « colonialisme. » Nous n'avons pas à rougir de la colonisation, engagée par la gauche de la fin du XIXe siècle au nom des grands principes républicains. Celle-ci doit être réhabilitée, notamment dans les livres d'histoire, car c'est elle qui a donné naissance à la francophonie. Les quelque cinquante Etats qui y participent, sous la houlette bienveillante de la France, sont tous issus de notre empire. Quel plus bel hommage rendu par ceux qui, ayant acquis leur indépendance, acceptent aujourd'hui librement de s'engager aux côtés de l'ancien colonisateur pour la défense de la langue, de la culture, et d'une même idée des droits de l'homme ! Cet hommage doit se concrétiser à Marseille avec le mémorial de l'oeuvre française d'outre-mer. Le rapport de Michel Diefenbacher rend justice de façon exemplaire aux acteurs de cette oeuvre.
    Je souhaiterais qu'un certain nombre de points puissent compléter utilement la réflexion du Gouvernement, par exemple : finaliser définitivement l'indemnisation des Français rapatriés et des harkis de la première génération, sans oublier les supplétifs européens ; favoriser l'accès à l'emploi et au logement pour les enfants de harkis de la deuxième et troisième générations ; obtenir du gouvernement algérien le libre accès de son territoire pour tous ceux qui en sont originaires, l'entretien des cimetières trop souvent abandonnés ou profanés et des informations sur le douloureux problème des enlevés disparus ; ouvrir les archives françaises et algériennes à une commission mixte qui permettrait d'écrire une véritable histoire de l'Algérie française, reconnaître les erreurs, les insuffisances mais surtout témoigner l'hommage de la nation aux survivants de ce drame dont ils ne sont que les victimes.
    Malgré les difficultés de l'heure, il est nécessaire de solder les réparations matérielles que la France doit à ses compatriotes. Il est surtout indispensable que vienne le temps de la réparation morale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
    M. Jean-Pierre Grand. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'associerai à mon intervention mon collègue Robert Lecou, attaché à la cause des rapatriés et des harkis.
    Je conserverai gravé dans ma mémoire le souvenir de l'arrivée de ces familles rapatriées d'Afrique du Nord, à l'accent typique et au comportemment chaleureux. A cet instant, j'ai une pensée pour les maires de ma région qui ont su leur offrir le meilleur accueil possible. Aujourd'hui, quarante ans après, nous avons le devoir moral de reconnaître tout l'apport culturel, économique et humain que les rapatriés ont apporté là où ils se sont installés.
    Ce débat permettra également de rappeler, afin que nul ne l'oublie, combien les Français d'Afrique du Nord, par leur travail et l'amour de leur terre, ont contribué pendant un siècle à l'épanouissement et à l'oeuvre de la France outre-mer. Qu'ils en demeurent fiers et nous reconnaissants.
    Monsieur le secrétaire d'État, je félicite le Gouvernement d'avoir compris qu'il convenait de choisir une autre date que celle du 19 mars pour instituer une journée nationale d'hommage aux morts pour la France pendant la guerre d'Algérie. Chacun peut comprendre que, pour l'immense majorité des rapatriés d'Algérie, cette date résonne encore dans leur mémoire comme la date leur signifiant définitivement le chemin de l'exode. La guerre d'Algérie n'a pas réellement cessé le 19 mars 1962. Après cette date, des milliers et des milliers de vies humaines ont été sacrifiées, souvent de façon barbare. Souvenons-nous des 1 736 disparus. Souvenous-nous des 145 soldats de l'armée française tués et des 102 autres disparus après le cessez-le-feu. Souvenons-nous de l'horrible journée du 5 juillet 1962, véritable génocide contre la population oranaise. Ce jour-là, plus de 2 000 personnes ont été assassinées. Souvenons-nous de l'exécution, aux alentours du 15 juillet 1962, dans les forêts de Tlemcen, de 12 000 harkis.
    Le choix de la date du 19 mars 1962 comme journée du souvenir aurait offensé la mémoire de toutes ces victimes et de leurs familles. L'honneur et la grandeur d'un pays, c'est de savoir distinguer les jours de gloire des jours sombres de son histoire. Le 19 mars 1962 n'a jamais été et ne sera jamais un jour de gloire pour notre nation. Je crois juste aujourd'hui de le rappeler ici, à la tribune de l'Assemblée nationale.
    Dans ce débat, nous devons aborder les dossiers matériels des rapatriés d'Afrique du Nord, qui restent en suspens. Je pense en particulier à l'application de l'article 46 de la loi du 15 juillet 1970. Je souhaite que l'on prenne des mesures urgentes de justice sociale en faveur des 21 000 dossiers de rapatriés d'Algérie, et des 7 500 dossiers de rapatriés du Maroc et de la Tunisie, qui sont entrés dans le champ d'application de cet article 46. Chaque dossier, c'est d'abord une famille et son histoire.
    Cet article 46 est ressenti par nos compatriotes comme une injustice. C'est précisément cette injustice qu'il convient de réparer et, dans tous les cas, d'atténuer. La seule façon pour l'Etat de corriger dans la dignité et dans l'honneur cette injustice, c'est de restituer à ces familles les sommes prélevées précisément au titre de cet article.
    De la même façon, je souhaite vous rappeler toute l'inquiétude qui est la mienne concernant l'avenir des épouses et des veuves de harkis. Elles ont droit, dans la durée, à une sécurité matérielle.
    Aujourd'hui, il n'est ni trop tôt ni trop tard pour poursuivre l'effort budgétaire de solidarité nationale envers les harkis. Il conviendrait, toujours dans un esprit de justice, que l'Etat soit particulièrement attentif aux mesures financières qu'il prendra en leur faveur. Une majoration de la rente garantirait, pour les années à venir, un minimum vital aux épouses de harki. Cette sécurité matérielle, que j'appelle de mes voeux, relève d'une incontournable mesure de solidarité et de reconnaissance de la nation.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite plaider l'urgence qu'il y a à clôturer définitivement les quelques centaines de dossiers d'aménagement des dettes de « réinstallés », actuellement à l'étude devant la commission. Je renouvelle mes remerciements, à vous comme au Premier ministre, d'avoir eu le courage de ce débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Rudy Salles.
    M. Rudy Salles. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le groupe UDF salue la décision du Gouvernement d'organiser un débat sur les rapatriés plus de quarante ans après ce drame et les combats d'une guerre cruelle. Députés UDF, nous sommes tous attachés à la cause de nos frères pieds-noirs ou harkis qui ont connu ces souffrances et auxquels l'Etat a tant tardé à accorder sa reconnaissance. Nous ne pouvons oublier que, dans nos rangs, André Santini, qui fut appelé au Gouvernement en 1986, pour prendre en charge l'épineuse question des rapatriés, sut faire avancer les multiples dossiers restés trop longtemps sans réponse, notamment celui des indemnisations. Nombreux sont aujourd'hui les pieds-noirs et les harkis qui lui sont reconnaissants de l'action qu'il a menée alors.
    M. Kléber Mesquida. C'était un bon, lui !
    M. Rudy Salles. Reconnaissons-le : peu de réformes d'envergure ont été adoptées depuis. Ce débat à l'Assemblée constitue le moyen pour nous de témoigner notre reconnaissance aux rapatriés. Notre pays - leur pays - ne saurait oublier en effet la contribution essentielle qu'ils ont apporté à son développement dans tous les domaines, lorsqu'ils sont arrivés en métropole.
    Aujourd'hui, il est donc indispensable d'accomplir le travail de mémoire à destination des générations actuelles et futures qui n'auront pas connu l'atrocité de ces huit années de guerre civile, où la population a été la cible privilégiée du terrorisme, qui n'auront pas connu non plus les conditions dramatiques de l'exode des pieds-noirs et des harkis, qui, bravant les consignes, ont pu échapper au massacre. Car aujourd'hui encore, les Français rapatriés attendent que justice leur soit rendue. C'est notre devoir de parlementaires, comme c'est un devoir pour le Gouvernement, de faire en sorte que la nation reconnaisse, comme elle a commencé à le faire timidement pour les harkis, les sacrifices qu'elle leur a imposés.
    Les rapatriés attendent aussi qu'elle assume enfin pleinement sa responsabilité et répare les torts qu'elle leur a causés ou qu'elle a laissé leur porter sans les protéger. Si les opinions demeurent partagées sur la nécessité pour la France de renoncer à sa présence en Algérie, le consensus national est en revanche à peu près établi pour reconnaître que les conditions dans lesquelles l'indépendance a été accordée ont gravement lésé les Français d'Algérie, de toute confession. Après le cessez-le-feu, le sang n'a cessé de couler.
    Nous avons tous en mémoire le drame du 26 mars, rue d'Isly, qui a causé une centaine de morts et plus de 200 blessés civils qui manifestaient pacifiquement. Qui n'a pas entendu sans ressentir une profonde révolte les enregistrements sonores de cette fusillade et les appels désespérés d'une population désemparée, lançant des « halte au feu ! » auxquels les armes répondaient ? Aujourd'hui, les yeux des familles de ces victimes innocentes sont encore rougis et l'émotion est intacte, car, faute de réparation, le deuil de cette tragédie n'a pu encore être fait.
    En restreignant les recherches et les interventions sur les disparus, en rapatriant plus d'un million de nationaux au compte-gouttes, dans une totale improvisation, la France n'a pas réussi à protéger les populations civiles des enlèvements ni des massacres. N'a-t-elle pas sacrifié les Français d'Algérie à la raison d'Etat ? La question, certes dérangeante, mérite d'être posée.
    Nous avons pris connaissance des propositions formulées par Michel Diefenbacher, à la demande du Premier ministre. Sur le sujet de l'indemnisation des rapatriés et des harkis, il est évident que le rapport manque d'audace. Si l'introduction est porteuse d'espoir, la suite du rapport a déçu les rapatriés.
    Nous sommes tous convaincus que l'indemnisation matérielle des rapatriés a, dans l'ensemble, été mise en place d'une manière fragmentaire et souvent tardive. Je rappelle à ce titre que, selon les experts, les trois premières lois d'indemnisation n'auraient couvert que 22 % environ des différents préjudices subis par les rapatriés.
    M. Kléber Mesquida. Eh oui !
    M. Rudy Salles. De surcroît, ces lois ont institué des régimes d'indemnisation multiples et complexes. Les procédures y sont longues et ardues, et la frontière entre ceux qui ont droit à une réparation et ceux qui n'y ont pas droit n'apparaît pas toujours logique et raisonnable.
    Comment s'étonner dès lors que nombre de rapatriés soient convaincus qu'aujourd'hui encore le pays n'accorde pas aux femmes et aux hommes qui ont participé à l'histoire de la France outre-mer la place qui leur revient ?
    Il est de fait que, dans la période actuelle, les contraintes budétaires sont fortes. Cependant, nous devons prendre en compte les attentes des rapatriés. A cet égard, nous attirons l'attention du Gouvernement sur le fait que le groupe UDF et le monde rapatrié veulent que la question de l'indemnisation soit réglée une bonne fois pour toutes. C'est en effet un solde de tout compte que les rapatriés attendent. Nous ne voulons pas avoir à voter dans dix ans une nouvelle loi pour compenser les carences et les insuffisances de celle dont nous dessinons aujourd'hui les contours.
    C'est pourquoi le groupe UDF ne cautionnera ni les demi-mesures, ni les indemnités au rabais.
    M. Kléber Mesquida. Très bien !
    M. Rudy Salles. Certes, le rapport de Michel Diefenbacher contient un certain nombre de mesures positives : la restitution aux rapatriés des sommes prélevées au titre des articles 46 de la loi du 15 juillet 1970 et 3 de la loi du 2 janvier 1978, par exemple. La communauté pied-noir attendait depuis longtemps cette mesure qui permettra de corriger l'inégalité entre les rapatriés dépossédés de leurs biens et les autres.
    Le groupe UDF prend également acte de la revalorisation des retraites des anciens cadres de l'Algérie française, injustement amputées.
    Cependant, d'une manière générale, les propositions de ce rapport restent insuffisantes pour les rapratriés. Le rétablissement de la vérité historique n'apparaît pas suffisamment, tandis que les propositions en matière d'indemnisation restent lacunaires. Enfin, les attentes des rapatriés concernant les événements les plus poignants de l'après 19 mars ne sont évoquées que sous forme allusive, à l'exception du sort des disparus, qui ne fait l'objet que d'une avancée fort timide. Ce rapport marque donc une étape, importante certes, mais il reste au Gouvernement à prendre les mesures qui s'imposent et que les rapatriés attendent avec impatience et espoir.
    Par ailleurs, au-delà de la dette matérielle dont la France doit s'acquitter à l'encontre des rapatriés, il est bien évidemment indispensable de rappeler la dette de sang que la République a contracté à l'égard la communauté harkie.
    Je voudrais, à cet égard, revenir sur l'indignation qui fut la nôtre quand le président algérien Bouteflika, en visite en France, avait osé traiter les harkis de « collabos ». C'était une attaque ignoble contre les harkis, mais aussi contre tout le peuple français, puisque les harkis appartiennent à la communauté nationale.
    M. Roland Chassain et M. Kléber Mesquida. Très bien !
    M. Rudy Salles. Nous espérons du moins que, depuis le voyage du Président de la République en Algérie, il y a eu une évolution de la politique algérienne sur ce point.
    Il faut respecter la mémoire de tous, nous en sommes convaincus, et ce n'est qu'à cette condition que nous pourrons construire une société apaisée, plus fraternelle. Et, respecter la mémoire, c'est aussi s'acquitter, enfin, de cette dette de sang. C'est pourquoi le groupe UDF demande qu'un effort financier important soit consacré aux harkis.
    Le rapport Diefenbacher propose l'allocation d'un capital de 20 000 euros en faveur de chaque harki ; c'est insuffisant. Nous ne devons pas oublier, en effet, ces vingt-cinq années d'errance, de souffrance et d'exclusion que les harkis ont endurées dans un pays qui aurait dû, au contraire, leur tendre les mains.
    C'est pourquoi, afin que la dette soit effacée de manière définitive, nous demandons la revalorisaiton de ce capital.
    En outre, il faut prendre en compte le fait que ces indemnités allouées tant aux harkis qu'à la communauté rapatriée dans son ensemble, sont attribuées à des personnes qui, pour la plupart d'entre elles, ont plus de soixante-dix ans. C'est pourquoi, outre l'exonération de l'impôt sur le revenu sur ces indemnités, nous demandons que la communauté harkie et rapatriée dans son ensemble bénéficie d'un taux préférentiel, voire d'une exonération de l'impôt sur les successions.
    Nous récusons, en effet, le système qui consisterait à reprendre par l'impôt les sommes que le Gouvernement allouerait par l'indemnisation. Il s'agit de penser aux générations futures qui doivent elles aussi pouvoir hériter d'une indemnisation substantielle, et non pas d'un reliquat d'indemnités amputé des droits de succession.
    Il est temps de surcroît de songer, pour cette deuxième génération de la communauté harkie, à un dispositif efficace qui lui permette de s'intéger pleinement dans notre société. Or, le rapport Diefenbacher évoque de manière abstraite un dispositif de discrimination positive en faveur de cette deuxième génération.
    Nous demandons des mesures concrètes. Des bourses étudiantes doivent leur être attribuées de manière prioritaire. Il est temps également de songer à un système d'emplois réservés dans l'administration. Le taux de chômage de la communauté harkie est anormalement élevé ; nous devons nous employer à le faire diminuer.
    Pour conclure sur la cause des combattants supplétifs, je souhaiterais évoquer un sujet qui me tient à coeur, la situation des supplétifs de souche européenne.
    A ceux-là, qui comme les musulmans, se sont engagés volontairement sous contrat précaire dans les formations supplétives pour y effectuer des missions extrêmement périlleuses, au service de la nation, on refuse le bénéfice de l'allocation de reconnaissance allouée aux harkis depuis 1987, alors même que des personnes en ont indûment bénéficié par le truchement de la directive du 30 janvier 1989.
    Comme leurs frères musulmans, les supplétifs de souche européenne ont, pour beaucoup d'entre eux, payé de leur vie cet engagement aux côtés de l'armée française. Eux aussi ont été la cible des massacres d'après-guerre et ont connu un exil douloureux suivi d'une intégration difficile en métropole. C'est pourquoi à ceux qui réfutent la communauté de destin qui unit les supplétifs de souche musulmane et les supplétifs de souche européenne, je dis qu'ils ont tort car ils enfreignent un principe constitutionnel fondamental d'égalité entre les citoyens.
    Aujourd'hui, c'est la communauté harkie dans son ensemble qui, d'une seule voix, demande l'attribution de l'allocation de reconnaissance aux supplétifs de souche européenne. Je demande donc au Gouvernement de rendre justice à cette communauté, qui ne dépasse pas les 300 personnes, car les supplétifs de souche européenne méritent aujourd'hui la reconnaissance de la France et non son indifférence ou son ingratitude.
    Enfin, je ne peux éluder la controverse née de la date de commémoration de la fin de la guerre d'Algérie.
    Le choix du 5 décembre pour rendre hommage aux morts pour la France lors de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie, a suscité en effet des polémiques, chez les anciens combattants, dans leurs associations représentatives, et des réactions diverses, des approbations mais aussi des oppositions.
    Il était indispensable de renforcer la politique de la mémoire et de perpétuer l'hommage rendu à l'ensemble de la troisième génération du feu, et tout spécialement à ceux qui sont tombés en Afrique du Nord. Nous regrettons profondément qu'au lieu de trancher ce débat le Gouvernement ait choisi une date qui, au contraire, a contribué à le relancer. (Exclamations sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Nous avions refusé le choix de la date du 19 mars pour plusieurs raisons. D'abord, parce que les morts et les souffrances n'ont pas cessé le 19 mars : nous avons tous en mémoire les drames que j'ai rappelés précédemment, celui du 26 mars à Alger, ou celui du 5 juillet à Oran. Mais nous savons également que la période qui a suivi restera dans l'histoire de notre pays comme une période terrible, couleur de sang, notamment pour la communauté harkie, qui fut véritablement l'objet d'un massacre. Le 19 mars restera dans l'histoire comme la date d'un accord de paix non respecté, c'est-à-dire d'une défaite. Or, on ne célèbre pas les défaites dans notre pays, pas plus que dans aucun autre pays, à ce que je sache.
    Par ailleurs, le choix de cette date du 19 mars laissait à l'écart les rapatriés du Maroc et de la Tunisie.
    Lorsque le précédent gouvernement avait proposé à l'Assemblée la date du 19 mars, proposition à laquelle nous nous étions opposés fermement, nous avions émis le souhait que la date de commémoration retenue soit la plus consensuelle possible, car les monuments aux morts doivent être des lieux où les Français se rassemblent, et non où ils se divisent. Vous avez choisi le 5 décembre, pour faire preuve de la plus grande neutralité. Nous considérons malheuresement que cette date n'a aucune signification, ni sur le plan de l'histoire, ni sur celui de la mémoire. C'est regrettable, et je crains que ce choix ne fasse pas taire la polémique.
    M. Kléber Mesquida. Très bien !
    M. Rudy Salles. La démarche des responsables politiques ne peut en aucune façon viser à créer ou alimenter une polémique qui serait indigne au regard des nombreux morts et blessés des combats d'Afrique du Nord. Sur un tel sujet, nous devons trouver le moyen de commémorer dignement une page douloureuse de notre histoire, en gardant au passé le respect qui lui est dû.
    Avant de conclure, une question mérite encore d'être posée, monsieur le secrétaire d'Etat. La situation des cimetières en Algérie a souvent été évoquée. En effet, faute de la présence des familles, les cimetières sont en état d'abandon, pis, certains ont été profanés, les cimetières juifs, en particulier. Pouvez-vous nous dire quelles actions ont été menées dans ce domaine par la France à l'égard de l'Algérie ?
    En conclusion, je voudrais à nouveau me féliciter, monsieur le secrétaire d'Etat, de l'organisation d'un tel débat ici, aujourd'hui. Il permet de faire le point sur la situation d'un certain nombre de nos compatriotes, qui n'ont pas pu faire leur deuil et tourner la page d'une période douloureuse de leur histoire personnelle, mais aussi de l'histoire de la France.
    Si ce débat a eu le mérite de permettre à la représentation nationale de s'exprimer dans la diversité de ses convictions et de ses engagements, il n'y aura aujourd'hui cependant ni vote ni adoption formelle de mesures concrètes. Or, c'est cela que nos amis rapatriés attendent des pouvoirs publics. C'est pourquoi nous espérons que le Gouvernement va annoncer un calendrier de mesures tendant à mettre un terme à cette attente qui ne peut se prolonger davantage.
    Les rapatriés, eux, n'ont pas attendu pour mettre, dès leur retour en métropole, leur amour de la patrie, leur travail, leurs talents, au service de notre pays. Leur installation sur le territoire métropolitain s'est traduite par des progrès significatifs au bénéfice de toute la collectivité nationale. Au nom de la reconnaissance due et au nom de la justice, nous vous demandons solennellement de répondre à ces demandes en souffrance, afin de pouvoir refermer ce douloureux dossier, et laisser enfin l'histoire faire son oeuvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Daniel Spagnou.
    M. Daniel Spagnou. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cela fait maintenant quarante et un ans que l'une des pages les plus difficiles de l'histoire de notre pays s'écrivait en Algérie, de l'autre côté de la Méditerranée. Personne n'a oublié le lourd tribut payé au lendemain des accords d'Evian par les pieds-noirs et les harkis. Il ne faut pas oublier ces patriotes, braves et combatifs, qui ont fait partie d'unités de la belle et renommée « Armée d'Afrique ».
    Il ne faut pas non plus oublier les sacrifices des milliers de Français d'Afrique du Nord qui, après cent trente années de durs labeurs, et parfois de sang versé, ont été déracinés d'Algérie. Un traumatisme et des souffrances qui aujourd'hui encore suscitent la douleur et une forte demande de reconnaissance et de réparation.
    L'histoire de la France en Algérie, c'est aussi, et avant tout, celle de milliers de familles européennes qui ont bâti la grandeur et la générosité de notre nation dans les territoires d'outre-mer. Ce n'est que justice aujourd'hui de rouvrir le débat sur les rapatriés dans l'enceinte même de la représentation nationale. Au nom de nos concitoyens, des rapatriés et de leurs descendants, je souhaite rendre hommage au Gouvernement, qui est à l'initiative de ce débat pour le moins difficile, et qui répond ainsi à la volonté du Président de la République d'aborder ce sujet avec courage et responsabilité.
    Nous pouvons être fiers de l'action menée depuis dix-huit mois par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, qui a permis de reprendre le dialogue avec l'ensemble des rapatriés dans le prolongement de ce qui a été fait par notre famille politique depuis quarante ans. Je me réjouis que le Gouvernement, rompant avec une logique de saupoudrage, veuille s'attaquer aux problèmes fondamentaux posés par le dossier des rapatriés, bien conscient des grandes difficultés qui les affectent.
    Le Président Chirac lui-même s'est engagé à ce que la nation contribue au soutien qu'ils méritent. L'instauration de la journée d'hommage aux harkis, le 25 septembre, a constitué une première étape. Le pansement d'une blessure morale, c'est d'abord des soins prodigués par le respect et la réparation. Le devoir de mémoire, le devoir de vérité et enfin le devoir de reconnaissance : voici la triple dette d'honneur sur laquelle le Président de la République s'est engagé et sur laquelle le Gouvernement a déjà beaucoup avancé.
    Contrairement à M. Rudy Salles, je trouve remarquable le rapport élaboré par Michel Diefenbacher. Le travail de fourmi réalisé par la mission interministérielle aux rapatriés a permis de renouer le dialogue, d'établir un bilan objectif et précis de ce qui avait été fait par le passé, d'écouter les attentes exprimées par les associations représentatives et, enfin, de formuler des propositions destinées à parachever les efforts de reconnaissance de la nation. Il est grand temps, après tant d'années de refus, d'affronter la tête haute cette page d'histoire, pour que nous puissions nous donner les moyens de la refermer.
    Nous avons à l'égard des générations futures le devoir historique de ne pas laisser passer cette occasion unique. C'est pourquoi une grande loi de programmation permettrait à mes yeux d'aller plus loin que les propositions du rapport Diefenbacher. En se rapprochant également de la proposition de loi Soisson, dont j'ai été cosignataire, elle trouverait son équilibre.
    A la logique d'assistance, privilégions celle de la responsabilité et des initiatives. L'objectif d'une quatrième loi d'indemnisation doit être le pilier de l'action législative que j'appelle de mes voeux. Cette loi doit être généreuse, quitte à étaler son application dans le temps.
    Il nous faut aussi, par souci d'équité, prendre en compte la situation des harkis arrivés individuellement en France - ils n'ont à ce jour perçu aucune indemnité - et s'attacher à effacer les disparités de traitement qui perdurent entre les régions pour l'accession à la propriété. Un élargissement de l'aide à la réinstallation doit aussi nous permettre de répondre aux fortes attentes et à clore définitivement le passé.
    Le patriotisme, la nationalité et la liberté, les harkis et les pieds noirs en connaissent le prix. Ils ont dû travailler dur pour s'en sortir, élever leurs enfants et leur donner une situation meilleure que celle qu'ils ont eux-mêmes connue.
    Plus que jamais, notre pays doit faire face à son histoire, dans le triomphe comme dans les blessures, et regarder l'avenir réconcilié avec lui-même. Telle est l'ambition du rendez-vous législatif que nous ne devons pas manquer dans les semaines à venir.
    Saint-Exupéry faisait dire au Petit Prince qu' « il y a des choses qu'on ne voit bien qu'avec le coeur ». Une fois pour toute, mettons du coeur à cet ouvrage que nous préparons. Ne nous contentons pas de laisser seulement entrevoir la lueur d'un espoir, et donnons le signal du courage et de la conviction pour apurer notre passé, affirmer notre présent et construire notre avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Georges Fenech.
    M. Georges Fenech. Osons le dire, nous avons ce soir, monsieur le secrétaire d'Etat, un débat historique. Je regrette que les bancs soient presque déserts à gauche, et qu'on s'apprête à débattre un peu à la sauvette. Si la majorité n'était pas aussi bien représentée, malgré l'heure tardive, il y aurait eu plus de monde dans les tribunes que dans l'hémicycle.
    M. Kléber Mesquida. Soyez sérieux !
    M. Georges Fenech. Je ne le dis pas dans un esprit polémique, car il s'agit d'un simple constat : jamais la gauche, quand elle a été au pouvoir, n'a rien fait de réellement tangible pour les pieds-noirs et les harkis.
    Mme Hélène Mignon. Arrêtez !
    M. Kléber Mesquida. Ayez un peu de dignité, au lieu de polémiquer !
    M. Georges Fenech. Je ne polémique pas : je réponds à M. Bacquet, notre collègue socialiste que j'ai applaudi tout à l'heure et que j'ai, en effet, retrouvé à Clermont-Ferrand. Je souhaiterais toutefois vous demander pourquoi vous n'avez pas agi quand vous étiez au pouvoir.
    M. Kléber Mesquida. On l'a fait !
    M. Georges Fenech. Pourquoi avez-vous voulu faire adopter la date du 19 mars, alors que le président Mitterrand lui-même y était opposé ?
    M. Kléber Mesquida. Et pourquoi le 5 décembre ?
    M. Georges Fenech. Pourquoi avez-vous, sous Jospin, fait charger les CRS lorsque des harkis manifestaient à côté de l'Assemblée nationale ?
    M. Kléber Mesquida. Et ce que vous avez fait en 1962, l'abandon de 1962, c'était beau ?
    M. Georges Fenech. Alors, sans esprit de polémique, je fais un constat. Je suis fier d'appartenir à cette majorité...
    Mme Hélène Mignon. Et moi, je suis fière d'être socialiste !
    M. Georges Fenech. ... qui, quarante ans après, va enfin reconnaître les injustices subies par ces populations abandonnées.
    M. Kléber Mesquida. Il y a longtemps que nous le disons !
    M. Georges Fenech. Nous sommes là, monsieur le ministre, par la volonté du Président de la République,...
    Mme Hélène Mignon. Et nous, par la volonté du peuple !
    M. Georges Fenech. ... qui a déclaré - et je me plais à le dire - que « quarante ans après la fin de la guerre d'Algérie, après ces déchirements terribles au terme desquels les pays d'Afrique du Nord se sont séparés de la France, notre République doit assumer pleinement son devoir de mémoire ».
    Mme Hélène Mignon. C'est à cause de gens comme vous qu'ils se sont séparés !
    M. Georges Fenech. Laissez-moi parler, s'il vous plaît, chère madame !
    C'est à cet appel que nous répondons, monsieur le secrétaire d'Etat. Vous avez l'occasion historique de mettre en oeuvre cette réforme voulue par le chef de l'Etat et attendue par le pays, qui nous observe aujourd'hui. Malheureusement, à entendre les répliques qui fusent du côté gauche de l'hémicycle, j'ai le sentiment que rien n'est encore réglé. J'ai bien entendu, y compris dans ma circonscription, les appels de certains maires socialistes ou communistes, qui déclarent qu'ils ne pavoiseront pas le 5 décembre. Cela signifie que va se poursuivre une discorde nationale alors que notre débat devrait être beaucoup plus digne, et rassembler tous nos compatriotes derrière la reconnaissance d'une injustice.
    J'attends de voir comment se déroulera ce vendredi de façon à en tirer les conséquences.
    De cette injustice, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous avons beaucoup parlé ce soir, et tout a été dit. La communauté pied-noire n'a pas été reconnue dans l'oeuvre qu'elle a accomplie ; elle le sera bientôt, en 2005-2006, grâce au mémorial de Marseille. Injustice également pour nos amis harkis, abandonnés à un triste sort, à un sort inéluctable, au prix de 100 000 victimes. La France, nous le savons, a failli à son obligation de secours. C'est pourquoi j'émets le voeu - et je crois, monsieur le secrétaire d'Etat, que tel est aussi votre souhait - de voir s'ouvrir enfin les archives.
    Il nous faut aller vers la vérité. Elle est attendue par ces communautés qui ont tant souffert, par les victimes de la rue d'Isly, cette « Saint-Barthélemy oranaise », par les harkis et leurs familles, qui n'ont pas reçu sur notre sol l'accueil qu'ils étaient en droit d'attendre.
    Je tiens, avant de conclure, à saluer la mémoire du capitaine Rabah Khelif, le seul à avoir désobéi aux ordres du général Katz, un grand harki qui a sauvé des centaines de pieds-noirs. Comme vous le savez, il nous a quittés il y a peu de temps.
    Voilà, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce que je souhaitais dire rapidement, beaucoup trop rapidement. Je vous le demande avec tout le coeur qui doit être le nôtre ce soir, monsieur le secrétaire d'Etat : faites une grande loi. Attachez votre nom à une loi historique. La France l'attend pour se réconcilier avec elle-même. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Kléber Mesquida. Nous l'attendons aussi !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Giran.
    M. Jean-Pierre Giran. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, voilà un peu plus de quarante ans, des hommes et des femmes attachés à une terre qui les avait vu naître et qu'ils avaient su faire prospérer, durent quitter, sans délai, leur Algérie natale.
    Voilà plus de quarante ans que ces hommes, leurs femmes et leurs enfants attendent de l'Etat que soit enfin assumé par la communauté nationale le traumatisme sans précédent qu'ils durent subir.
    Voilà notamment plus de quarante ans que la communauté harkie attend légitimement une reconnaissance des sacrifices exorbitants qu'elle décida d'accomplir pour notre pays, payant de plusieurs dizaines de milliers de morts le choix de la France.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, notre dette est immense. Les harkis, comme leurs enfants, ont parfois l'impression que, jouant sur l'écoulement du temps, l'ajournement de décisions pourtant indispensables et urgentes a tenu lieu de politique.
    Comment ne pas rappeler, comme l'a fait Georges Fenech, que seuls les gouvernements issus de notre sensibilité politique ont pris des décisions, comme ce fut le cas en 1987, en 1994 ou en 2001 ? C'est l'honneur du Président de la République et du Gouvernement de vouloir honorer la communauté harkie, et de célébrer le 25 septembre et le 5 décembre le devoir de mémoire. C'est leur honneur de s'engager dans la réalisation d'un mémorial de l'oeuvre de la France outre-mer. Permettez-moi de le dire, cependant : la reconnaissance morale est importante, mais elle ne suffit pas. Notre devoir est de passer des symboles aux actes, à travers ce que j'oserais appeler un véritable plan Marshall pour les harkis, en vue de leur restituer leurs droits et de leur offrir la possibilité, à eux qui aiment tant leur pays, de se sentir enfin considérés comme des Français à part entière.
    Jacques Chirac a rendu hommage aux harkis et à leur sacrifice. A vous, monsieur le secrétaire d'Etat, et à nous d'essayer d'apporter des solutions concrètes aux problèmes qui se posent. Vous me permettrez donc de faire un certain nombre de suggestions.
    La première concerne le capital nouveau qui me paraît devoir être attribué aux harkis. Le rapport de Michel Diefenbacher fait une double proposition : soit un doublement du montant de l'allocation de reconnaissance, soit l'attribution d'un capital de 20 000 euros joint à une augmentation de 30 % de l'allocation. Ce progrès est important, voire décisif. A mes yeux, il est néanmoins quelque peu insuffisant si l'on veut tenter de solder définitivement la situation.
    Peut-être faut-il proposer un « troisième terme », si vous me passez l'expression, à cette alternative, à savoir l'attribution d'un capital un peu plus important, quand bien même le montant de l'allocation de reconnaissance resterait stable. Si je fais cette proposition, ce n'est pas par démagogie, mais parce que je crois que la demande n'émane pas de la première génération de harkis, qui depuis quarante ans, d'une façon ou d'une autre, est parvenue à trouver une place dans notre société et dont les membres, si l'on regarde bien les choses, ont parfois atteint un âge qui ne leur permetra pas de bénéficier très longtemps des allocations. En outre, la demande qui nous est transmise vaut pour l'ensemble de la famille des harkis, toutes générations confondues.
    Ne l'oublions pas : si un juste capital avait été attribué en temps utile, il y a dix, vingt, trente ou quarante ans, la somme, une fois actualisée, serait beaucoup plus importante que celle que nous évoquons aujourd'hui.
    La deuxième suggestion concerne l'accès des harkis au logement, qui doit être encore encouragé et facilité. N'ayons pas peur des mots : il faut pratiquer une discrimination positive, simple compensation de la discrimination négative dont ils ont été longtemps les victimes. Leur accession à la propriété doit être facilitée et des quotas de logement sociaux doivent leur être réservés. Les préfectures et les communes peuvent, à mon sens, s'engager dans cette voie.
    La troisième suggestion, sans doute la plus importante, notamment pour les plus jeunes, concerne l'accès à l'emploi. Il doit être amélioré, ce qui est d'autant plus légitime que les conditions de vie - on devrait plutôt parler, parfois, de conditions de survie - auxquelles les harkis ont été soumis ne leur ont pas permis une scolarité normale.
    Deux orientations peuvent être envisagées. La première consiste à s'appuyer sur les lois de décentralisation pour imposer aux communes et aux conseils généraux de réserver des emplois aux membres de cette communauté.
    M. Kléber Mesquida. Les socialistes l'ont fait !
    M. Jean-Pierre Giran. Cela n'aurait rien de choquant : des mesures similaires ont été prises en faveur d'autres catégories de la population victimes de handicaps physiques, sociaux ou politiques. L'administration de l'Etat devrait d'ailleurs s'imposer à elle-même cette juste obligation.
    Une disposition législative éviterait, de surcroît, les interventions incessantes et humiliantes qui sont notre quotidien et qui consistent à plaider la cause de personnes qui n'ont pas des revendications mais, me semble-il, simplement des droits.
    Une autre orientation en matière d'emploi pourrait consister - vous l'avez, je crois, esquissé, monsieur le ministre - à rendre les membres de cette communauté éligibles à des prêts à taux zéro pour favoriser la volonté des jeunes, en particulier, de créer leur propre entreprise, car ils en ont l'ambition et la capacité. On voit, en effet, trop souvent avorter des initiatives positives, faute de capitaux et de soutiens bancaires, voire pour cause de discrimination.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, la France a rendez-vous avec un épisode sombre d'une histoire si souvent brillante. Jamais nous ne pourrons solder les dégâts psychologiques et humains, mais nous devons faire notre possible pour réparer au mieux les dégâts économiques et sociaux.
    Permettez-nous, monsieur le secrétaire d'Etat - et je sais que nous pouvons compter sur vous -, d'être fiers de la France, cette France que les harkis, plus que tous autres, portent au fond de leur coeur. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Roland Chassain.
    M. Roland Chassain. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, tout d'abord, je tiens à vous dire combien je suis ému d'évoquer dans cet hémicycle la mémoire des harkis et supplétifs de l'armée française en Algérie.
    J'ai en effet la fierté et l'honneur d'être le député de Mas-Thibert, petit village situé sur la commune d'Arles qui a accueilli au lendemain des accords d'Evian, le Bachaga Saïd Boualem, accompagné de membres de sa harka et de leur famille.
    Je veux dire à tous ses descendants, et en particulier à son fils Lacèhne Boualem, combien la France est fière d'avoir pu compter sur de tels hommes, qui se sont battus dans l'honneur par amour pour le drapeau tricolore. Les députés avaient rendu, ici même, cet hommage à leur manière en élisant à l'unanimité et à quatre reprises le Bachaga Boualem à la vice-présidence de l'Assemblée nationale.
    J'ajouterai que de nombreux rapatriés connaissent les Saintes-Maries-de-la-Mer, car dans la commune dont je suis le maire repose l'un des trois généraux qui avaient réfusé d'obéir.
    La France se doit d'apporter réparation, car la nation a une responsabilité dans le terrible drame qui a touché les harkis et leurs familles.
    Pour autant, je dois vous dire que j'ai été choqué par une récente opération que je serai tenté de qualifier de révisionniste, puisqu'elle consistait à travestir l'histoire en essayant de faire passer le général de Gaulle pour un monstre sanguinaire.
    C'est en réalité le FLN qui a joué un rôle central dans ce drame en reniant sa signature et qui porte la responsabilité des massacres de harkis et supplétifs.
    Mme Hélène Mignon. Et l'OAS ?
    Mme Michèle Tabarot. Taisez-vous !
    M. Jean-Pierre Giran. Surtout sur ce sujet !
    M. Roland Chassain. Ceux dont les courants de pensée ont pendant tant d'années manifesté leur amitité pour le FLN feraient mieux de balayer devant leur porte avant de donner des leçons aux autres.
    Je le dis clairement, nous devons aborder l'histoire de la France, aussi douloureuse soit-elle, sans a priori et dans le seul but d'atteindre une juste traduction de la vérité.
    Le Président Jacques Chirac a été le premier à prendre avec détermination d'importantes mesures en faveur des harkis en 1987.
    La loi Romani de 1994, dont le rapporteur était Marie-Thèrèse Aillaud, a poursuivi cet effort.
    Plus récemment, la journée du 25 septembre, instaurée à la demande du Président de la République, a permis à la nation d'affirmer sa reconnaissance envers des hommes qui l'ont servie avec fierté, au péril de leur vie.
    Nous devons maintenant achever notre action par des mesures fortes et définitives.
    La mission qui a été confiée à notre collègue Michel Diefenbacher était difficile, mais ses résultats sont de qualité.
    Cependant, en tant que cosignataire de la proposition de loi de Jean-Pierre Soisson, je souhaiterai que notre Parlement soit appelé à légiférer à partir de cette proposition de loi qui est certes ambitieuse, mais surtout profondément juste.
    Notre assemblée pourra également s'inspirer des propositions contenues dans le texte déposé par Francis Vercamer, en particulier à l'égard des femmes, veuves ou divorcées.
    Je souhaiterais que nous puissions être amenés à légiférer rapidement car, face à un tel drame, qui date de plus de quarante ans, chaque jour qui passe est un jour de trop. Je vous demanderai également, monsieur le secrétaire d'Etat, de bien faire attention au fait que, lorsque nous parlons d'indemnisation ou de réparation, nous devons assumer toutes les conséquences des termes que nous employons. On ne peut fixer de plafond de ressource lorsqu'il s'agit de réparer une faute ou d'indemniser un dommage.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous avons collectivement le devoir de prendre des mesures courageuses et fortes en faveur des enfants, petits-enfants et autres descendants des harkis, qui sont aujourd'hui les premières victimes des tragédies de l'histoire. Nous ne pourrons estimer avoir rempli notre devoir aussi longtemps que ces jeunes compatriotes, qui portent dans leurs veines le sang d'hommes d'honneur, compteront deux fois plus de chômeurs que les autres citoyens français du même âge. Je vous demande également de mettre en oeuvre une mesure particulière en faveur des enfants de harkis, pupilles de la nation.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, nos amis attendent que la vérité soit dite sur l'histoire de leur tragédie, mais également que la représentation nationale leur accordent enfin la place qui leur est due au sein de la communauté nationale et de la République. Je tiens à ce qu'une réponse soit apportée à tous les harkis que j'ai rencontrés dans ma circonscription et dans mon département, je pense notamment à nos amis avec lesquels nous nous sommes recueillis hier sur la tombe du Bachaga Boualem en présence de Renaud Muselier, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. Je tiens, monsieur le secrétaire d'Etat, à vous remercier, ainsi que le Gouvernement, en espérant que le débat nous conduira à adopter une très bonne loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Flory, dernier orateur inscrit.
    M. Jean-Claude Flory. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous connaissons bien, dans cet hémicycle, le parcours des populations harkies et des autres membres des formations supplétives ainsi que leur fort engagement historique. Eux-mêmes, leurs parents ou grands-parents se sont mobilisés sous le drapeau français au péril de leur vie, de celle des membres de leurs familles et ils ont été exposés aux représailles, pendant et après le conflit. N'oublions pas que ces mêmes populations harkies avaient auparavant largement contribué au développement de l'Algérie, territoire de France durant des décennies. Par leur engagement à nos côtés, ils ont tout perdu.
    Par-delà les pertes matérielles, ils ont dû subir le massacre et la mutilation de proches, d'amis, d'une part importante de leur communauté. Ils le portent encore dans leur conscience collective. Pour ceux qui ont pu rejoindre la métropole a commencé alors le parcours, non sans obstacles, de l'intégration sur un sol où ils se sont retrouvés malgré eux et où ils n'étaient pas toujours attendus. Pour ces faits, constatés par tous, nous leurs devons la reconnaissance et le respect qui s'expriment officiellement, depuis deux ans, chaque 25 septembre, date de mémoire arrêtée par le Président de la République.
    En complément, cette dette qu'a la nation française envers la communauté harkie doit aussi se traduire par le prolongement et l'amplification d'actions ciblées, afin de pleinement reconnaître ce préjudice et de favoriser l'insertion professionnelle, donc sociale, des nouvelles générations.
    Dans la droite ligne des dispositions des lois de juillet 1984 et de juin 1994, et en complément de justes dédommagements, il me paraît essentiel d'assurer la formation des nouvelles générations, condition première de leur accession sociale. Si des initiatives ont déjà été prises en ce sens, les résultats n'ont été que très partiels ; l'effort doit donc être maintenu, et même amplifié.
    Depuis des années, depuis des décennies, un constat récurrent s'impose à nous : l'échec scolaire, les difficultés d'insertion professionnelle sont trop souvent les marques de rendez-vous manqués des jeunes générations avec la société française, malgré des cas exemplaires de réussites sociales malheureusement trop rares. Aussi, compte tenu de la volonté nationale exprimée par le Président de la République, par le Gouvernement, par vous-même et par la majorité parlementaire, il me paraît indispensable que nous relevions ensemble les défis de l'insertion sociale des populations harkies, en particulier sur les sites historiques de leurs premières implantations en métropole, là où de nombreuses familles résident encore. Tel est le cas de la commune de Largentière, dans ma circonscription. Nous devons nous impliquer pour y créer et y renforcer toutes les passerelles qui doivent leur faciliter l'accès au savoir, donc au marché du travail. Qu'il s'agisse de suivi scolaire spécifique ou d'actions ciblées d'accès aux savoirs généraux ou professionnels, nombreuses sont les initiatives à développer.
    Le soutien scolaire, organisé d'abord avec l'aide de militaires du contingent en service civil, est bien souvent, lorsqu'il existe encore, assuré par des bénévoles. Sur les principaux sites d'implantation de la communauté, la mise en place d'actions mieux coordonnées et financées dans ce domaine est une nécessité.
    Toujours dans le domaine éducatif, il me paraît nécessaire de pérenniser l'aide apportée pour le suivi de formations qualifiantes, ainsi que l'aide à la mobilité professionnelle. Dans chacune de ces communes, dans chacun de ces bassins de vie, il revient à l'Etat de définir des programmes d'actions ciblés et adaptés aux problématiques rencontrées, en partenariat avec les collectivités locales concernées.
    Pour une action publique partenariale efficace, il est indispensable que le niveau local soit privilégié. Les services déconcentrés de l'Etat doivent être en charge de définir, comme le prévoit la circulaire de février 2003, un programme local d'actions avec un pilotage identifié, assorti d'une évaluation annuelle. Afin de faire face aux besoins légitimes, soit collectifs, soit individuels, des moyens spécifiques doivent être déconcentrés pour garantir une souplesse d'engagement et une réactivité suffisantes.
    La communauté harkie dans son ensemble, les jeunes générations en particulier, veulent vivre comme toutes les familles de France. Il est de notre devoir de les accompagner ; leur histoire, notre histoire commune, le justifie.
    Merci, monsieur le secrétaire d'Etat, d'avoir souhaité ce débat sur les rapatriés, sujet fait d'émotions et de souvenirs, mais aussi de réalités contemporaines vécues par des hommes et des femmes profondément attachés à la France et qui veulent réussir leur avenir au travers de celui de la nation.
    Merci, monsieur le secrétaire d'Etat, d'écouter et de prendre en compte les propositions de notre collègue M. Diefenbacher et de la représentation nationale qui, au contact du terrain, connaît les préoccupations légitimes de la communauté harkie.
    Merci enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, de concrétiser les attentes d'une communauté qui nous a beaucoup donné, et de lui apporter ainsi une reconnaissance justifiée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Le débat est clos.
    La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants.
    M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, permettez-moi, d'abord, de remercier chacune et chacun des orateurs. Tous, selon vos convictions propres, vous avez illustré mon propos introductif. La hauteur, la chaleur des discours qui viennent d'être tenus dans cette enceinte marquent un moment historique pour les rapatriés. Ce moment - est-il utile de le préciser ? - était très attendu.
    J'ai éprouvé, comme vous tous, une intense émotion à l'évocation de ces « pionniers, partis les mains nues » comme les a décrits Michel Diefenbacher, ces pionniers qui ont su porter au plus haut les valeurs de la France, ces femmes et ces hommes fidèles qui ont servi avec courage, et jusqu'au sacrifice suprême, le drapeau français.
    Mesdames, messieurs les députés, vous avez montré combien vous souhaitez apporter des réponses efficaces à leurs attentes, tant matérielles que morales. Je vous confirme que votre volonté rencontre pleinement celle du Gouvernement.
    Je vous assure donc que nous tiendrons le plus grand compte de vos propositions, de vos observations et, surtout, de l'esprit de solidarité nationale et de reconnaissance qui les anime. Je vous confirme aussi notre décision de déposer, comme je l'ai indiqué dans mon propos initial, un projet de loi, afin de faire progresser de façon vraiment significative et solennelle ce dossier ô combien important dont nous mesurons l'intérêt.
    J'adresse des remerciements particuliers à celles et à ceux, nombreux, qui ont bien voulu saluer les mesures déjà prises par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, conformément à la volonté du Président de la République qui, comme vous le savez, suit très attentivement la situation des rapatriés.
    Je vais maintenant concentrer mon propos sur les réponses à vos interventions. Vous comprendrez que je souhaite revenir, en premier lieu, sur les tragédies subies par les rapatriés.
    Vous avez tous évoqué les questions de la vérité historique, de la reconnaissance et des responsabilités, notamment celle de l'Etat français, dans les drames intervenus après le 19 mars 1962. Sur ce sujet, encore très présent dans la mémoire de ceux qui ont souffert, les polémiques ne font pas avancer le débat, croyez-le bien. Les événements douloureux qui ont conduit la France et l'Algérie à séparer leurs destins soulèvent toujours les passions des deux côtés de la Méditerranée, et le silence qui entoure toute cette période devient trop lourd, je vous l'accorde.
    Certes, comme je l'ai déjà souligné, le devoir de mémoire et de reconnaissance a largement été engagé en 1994 et il a été repris activement par ce gouvernement. Néanmoins, le travail de vérité doit s'exercer aussi bien sur les événements dramatiques qui ont malheureusement suivi en Algérie les accords d'Evian que sur les conditions du rapatriement des harkis sur notre territoire et sur l'accueil d'une métropole qui, il faut bien le dire, ne les attendait pas.
    La guerre d'Algérie fut, comme toute guerre qui engage les populations civiles, le théâtre de haines et d'atrocités. Je sais que de nombreuses familles de rapatriés, de toutes origines d'ailleurs, n'ont jamais pu faire le deuil de leurs proches en raison des circonstances et de l'absence d'explications. Elles sont demandeuses de plus de clarté sur ces événements dramatiques. Je partage leur douleur comme vous la partagez certainement. Le Gouvernement souhaite donc que, dans le respect des règles, l'examen des archives par les historiens contribue à éclairer les circonstances de ces drames.
    A cet égard, je précise que le rapport établi par la Croix-Rouge internationale en 1963, sur le sort des prisonniers et disparus en Algérie a été communiqué à des historiens. A la demande du Gouvernement, la direction des archives du ministère des affaires étrangères a identifié plus de trois mille dossiers relatifs à ces événements. Vous savez qu'ils ne seraient normalement communicables qu'après un délai de soixante ans, mais nous étudions actuellement, mesdames et messieurs les députés, les conditions dans lesquelles des dérogations pourraient être accordées aux familles concernées.
    Comme vous le voyez, le Gouvernement n'a pas hésité, pour sa part, à s'engager dans cette voie et à ouvrir les archives de la guerre d'Algérie. Il faut encourager les historiens et les chercheurs à travailler pour que la prise de conscience collective puisse s'exercer en toute transparence et objectivité.
    Le président de la commission de la défense, M. Tessier, M. Merly et M. Salles m'ont interrogé sur les cimetières français en Algérie. Ce dossier sensible a été l'un des thèmes importants de la visite du Président de la République en Algérie en mars 2003. A cet égard, la France et l'Algérie coopèrent activement et des travaux d'envergure ont déjà été réalisés, à l'initiative tant des autorités locales algériennes que des consulats français. Pour coordonner l'ensemble de cette action, un plan de réhabilitation, sur cinq années, a été établi.
    Dans un premier temps, une commission technique franco-algérienne s'est attachée à dresser un audit précis sur l'état des 549 cimetières dénombrés. Dès demain, l'ambassade de France va mettre en ligne sur son site Internet le recensement établi qui porte sur près de 200 cimetières. Je vous invite donc, mesdames, messieurs les députés, à le consulter. De plus, un calendrier de travaux prioritaires va être proposé par le ministère des affaires étrangères, en liaison avec les autorités algériennes, la mission interministérielle aux rapatriés et les associations de rapatriés.
    Pour répondre aux demandes des collectivités territoriales qui ont souhaité participer financièrement au plan de réhabilitation lancé par l'Etat, un fonds de concours sera prochainement ouvert par le ministère des affaires étrangères. Il est important que toutes ces actions soient bien coordonnées pour l'intérêt de l'opération.
    MM. Kert, Diefenbacher, Douste-Blazy, Teissier, Fenech, Grand, ainsi que MM. Luca, Merly, Leonetti et Spagnou, Mme Tabarot, M. Bapt ont tous insisté sur leur attachement à la mise en valeur de l'oeuvre de la France d'outre-mer. C'est une priorité du Gouvernement car il est plus que temps de veiller à conserver et à transmettre un patrimoine historique et les richesses culturelles léguées par les rapatriés.
    Le Premier ministre a donc annoncé, en août dernier, que l'Etat participerait au projet de mémorial lancé à l'initiative du maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin, et apporterait une aide de 5 millions d'euros en crédits d'investissement en faveur de cette réalisation. Monsieur Teissier, je vous assure que le maire de Marseille et moi-même serons attentifs à y associer les rapatriés. Nous disposerons ainsi d'un outil irremplaçable de promotion et de valorisation de l'engagement outre-mer, au nom de notre pays, de générations de femmes et d'hommes de toutes origines. Nous devons vraiment mieux valoriser ce passé dont notre nation peut s'enorgueillir. Tous les Français, et singulièrement les enfants de rapatriés, doivent en concevoir une légitime fierté.
    Monsieur Roubaud, cette période de notre histoire doit être mieux traitée dans les manuels scolaires, je vous l'accorde. Je peux vous assurer que, en liaison avec mon collègue de l'éducation nationale, nous nous y employons déjà et qu'un groupe de travail a été constitué, auquel participent les rapatriés.
    J'en viens au dossier des réparations. A ce propos je remercie ceux qui ont bien voulu se féliciter de ce que nous avons d'ores et déjà accompli.
    Messieurs Kert, Fenech, Roubaud, Lachaud, Douste-Blazy, Diefenbacher, vous avez évoqué les mesures de réparation encore nécessaires à l'égard des harkis et de leurs familles. Le Gouvernement partage cette approche. Tel était déjà l'esprit - rappelez-vous - de la loi Romani de 1994. Il s'agit aujourd'hui d'améliorer la vie au quotidien des harkis ou de leurs veuves par le biais d'une revalorisation forte de l'allocation de reconnaissance, comme je l'ai souligné dans mon discours d'introduction. Je répète donc que, dès le 1er janvier prochain, cette allocation sera portée à 453 euros par trimestre. Elle deviendra ainsi un important complément de retraite pour nos compatriotes, dans le sens de ce qui a été préconisé par le rapport de M. Diefenbacher.
    Nous connaissons aussi les difficultés qu'éprouvent les harkis pour justifier de titres de propriété qui leur auraient permis d'être indemnisés. C'est notamment pour pallier cette carence que les lois de 1987 et de 1994 avaient prévu des allocations forfaitaires, respectivement de 60 000 francs et de 110 000 francs. Le Gouvernement sera attentif à vos préoccupations au sujet d'un nouveau complément aux efforts déjà accomplis et qui sont évidemment significatifs.
    S'agissant des jeunes issus de familles harkies, j'ai été plus particulièrement interrogé par MM. Flory, Kert, Vercamer et Douste-Blazy.
    Je suis personnellement sensible à cette question car l'accès à l'emploi et à un métier est essentiel, me semble-t-il, pour ces jeunes qui souffrent plus que d'autres du chômage. Il s'agit de les accompagner, de façon privilégiée et adaptée, dans tous les dispositifs d'accès à l'emploi et à la formation professionnelle, jusqu'à leur insertion définitive dans le tissu économique et social. Il convient aussi, comme je l'ai déjà souligné, de mobiliser les grands employeurs publics.
    Les premières actions sont actuellement conduites sous le contrôle des préfets. Elles seront suivies, dès 2004, d'opérations ciblées dans les départements les plus concernés. Ainsi que l'a rappelé M. Fenech, très nombreux sont les cas de réussite d'enfants de harkis dans toutes les professions et dans tous les métiers.
    Toutefois, pour que ces réussites soient encore plus nombreuses, il faut, mesdames et messieurs les députés, se battre inlassablement contre un fléau, la discrimination, qui nous interpelle tous.
    Il est souhaitable que nous agissions en évaluant au fur et à mesure les besoins. Ainsi, la question du logement des harkis doit, comme celle de l'emploi, être au centre de nos préoccupations.
    Afin de prendre en compte les revendications légitimes des anciens supplétifs et de leurs familles et de concrétiser les engagements pris, le Gouvernement a décidé de prolonger en 2004 les mesures d'accession à la propriété, le désendettement immobilier et de réactiver également les mesures d'aide à l'amélioration de l'habitat.
    En aidant ainsi les harkis à accéder à la propriété, on leur permet de se faire de nouvelles racines et aussi de transmettre un jour un patrimoine à leurs enfants. Selon les statistiques en notre possession, plus de 50 % des familles de harkis sont propriétaires de leur logement grâce à l'action conduite dans le cadre de la loi Romani.
    La question de la réintégration dans la nationalité française m'a été posée par M. Lachaud.
    Il existe en effet des personnes, essentiellement des veuves mal informées, qui, fautes de maîtriser les démarches administratives, ont conservé la nationalité algérienne. Elles ne peuvent bénéficer de l'ensemble des mesures législatives prises en leur faveur qui nécessitent d'avoir été réintégré dans la nationalité française avant le 10 janvier 1973.
    Le Gouvernement étudie dans quelles conditions des mesures dérogatoires pourraient être mises en place pour leur permettre de recouvrer la plénitude de leurs droits.
    Les présidents Teissier et Salles m'ont interrogé sur la situation des harkis de souche européenne. La volonté du législateur a été de témoigner de la reconnaissance de la nation à l'égard de ceux qui, ayant choisi de lier leur destin à la France, ont été contraints de quitter leur pays, et donc leurs racines, et ont éprouvé des difficultés très spécifiques d'insertion lors de leur accueil en métropole.
    Les harkis de souche européenne n'ont pas connu les mêmes difficultés d'intégration sociale et d'insertion professionnelle, sauf quelques cas particuliers. La reconnaissance de la nation ne peut donc s'exprimer de manière identique. Cette question reste à l'étude.
    L'idée d'une fondation harkie évoquée par MM. Kert, Vanneste et Colombier est portée par plusieurs associations qui souhaiteraient, à travers cette institution, favoriser l'intégration des enfants de harkis et valoriser le travail de mémoire et de vérité sur leur histoire. Le Gouvernement n'est pas défavorable, bien au contraire, à une telle initiative et fera tout pour aider.
    Sachez, monsieur Colombier, que la réflexion est engagée sur ce sujet en liaison avec le Haut Conseil des rapatriés.
    Concernant les crédits en faveur des rapatriés, il me suffira, monsieur Mesquida, de rappeler quelques chiffres. En 1987, Jacques Chirac a proposé au Parlement de voter une loi d'indemnisation : 30 milliards de francs ont été prévus à cet effet. En 1994, la loi Romani a reconnu les sacrifices des harkis et mis en place un plan sur cinq ans pour lequel 2,5 milliards de francs ont été engagés. Mais, comment oublier, monsieur Mesquida, qu'entre 1997 et 2001, les crédits consacrés aux rapatriés ont diminué de 35 % alors que la France se trouvait dans une période de croissance économique ?
    Depuis 2002, les crédits disponibles en faveur des rapatriés ont progressé de 33 %.
    La question de ce qu'il est convenu d'appeler l'article 46 a été abordée, notamment, par MM. Kert, Grand, Colombier, Lachaud, Diefenbacher, Bapt et Mesquida. Je vous confirme que le Gouvernement souhaite que la solidarité nationale s'exprime pour réparer l'injustice née de l'application des lois de 1970 et 1978. Ces législations ont en effet prévu des remboursements anticipés de prêts de réinstallation prélevés sur les certificats d'indemnisation. Ils ont ainsi créé une inégalité entre les rapatriés, certains ayant vu leurs prêts effacés en 1986 et d'autres pas.
    Messieurs Kert et Douste-Blazy, vous avez évoqué le cas des personnes qui, ayant dû s'exiler en raison de leur action politique en Algérie, ont dû quitter leur entreprise ou leur métier. Elles n'ont pu bénéficier des dispositions prévues dans la loi du 3 décembre 1982 pour la reconstitution des carrières des agents du secteur public. Il me paraîtrait normal que ces rapatriés puissent recevoir aujourd'hui une compensation qui améliorerait leurs retraites.
    En ce qui concerne les médecins rapatriés, un accord est intervenu entre les pouvoirs publics et la direction de la sécurité sociale pour leur permettre de racheter les cotisations correspondant aux années d'exercice en Algérie.
    MM. Grand, Bapt et Liberti m'ont interrogé sur les difficultés liées au fonctionnement de la CNAIR. Je rappelle que ce dispositif a été mis en place en 1999 pour prendre la succession de commissions départementales qui étaient en passe d'achever le règlement de cette question. En effet, ce dossier a fait l'objet de mesures successives depuis 1969. Sur les 26 000 dossiers de réinstallation ouverts lors du rapatriement, 800 environ exigent encore un traitement, car ils n'ont pas bénéficié pleinement des dispositifs antérieurs.
    Force est de constater, mesdames, messieurs les députés, que les mesures prises par décret il y a maintenant près de quatre ans n'ont pas été efficaces.
    Jusqu'au troisième trimestre de 2002, le nombre de dossiers traités est resté très faible. Dès son arrivée, le Gouvernement a pris plusieurs mesures.
    Il a tout d'abord été procédé à un renforcement du personnel pour l'instruction des dossiers soumis à la CNAIR. En un an, près de 1 000 dossiers ont été examinés, contre 900 entre 1999 et 2001.
    Par ailleurs, un audit a été demandé par le Premier ministre à l'inspection générale des finances et à l'inspection générale de l'administration. Cet audit vient d'être remis. Les pistes qu'il suggère pour accélérer de manière équitable et humaine le dossier de la réinstallation vont être, je peux vous l'assurer, rapidement étudiées puis mises en oeuvre.
    Dès à présent, le Gouvernement a souhaité l'inscription de crédits significatifs en loi de finances rectificative pour permettre une accélération des aides de l'Etat.
    Mesdames, messieurs les députés, pour conclure d'une manière plus générale, je voudrais, en réponse à MM. Vercamer, Chassain, Spagnou, Salles et Giran, donner des précisions sur les suites qui seront données au rapport remis par M. Diefenbacher et aux propositions de loi déposées par leurs collègues.
    Le rapport de M. Diefenbacher, dont je tiens à saluer encore une fois la qualité aussi bien du constat que des propositions, est un outil qui a nourri la réflexion des pouvoirs publics de manière importante.
    Les propositions de loi que vous avez déposées ces derniers mois ont montré tout l'intérêt que vous portez aux anciens combattants harkis et aux rapatriés. Ces réflexions ont assurément contribué au débat et alimentent également la réflexion du Gouvernement.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, telles sont les premières réponses que je souhaitais vous apporter. J'espère n'avoir oublié aucun d'entre vous, ni aucun sujet important.
    S'ouvre maintenant une nouvelle étape de notre action, qui reposera évidemment sur les très riches propositions et analyses que vous avez faites. Nous allons les étudier en profondeur, grâce à votre aide. Puis nous nous retrouverons pour examiner un projet de loi qui, je le crois, permettra de manifester la reconnaissance et la solidarité de la nation envers nos compatriotes qui ont donné beaucoup à notre pays et parfois quelquefois sans retour. (Applaudissements sur les bancs de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)
    M. le président. La séance est suspendue pour quelques minutes.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à vingt-trois heures, est reprise à vingt-trois heures quinze.)
    M. le président. La séance est reprise.

2

ACCUEIL ET PROTECTION DE L'ENFANCE

Discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à l'accueil et à la protection de l'enfance (n°s 1152, 1249).
    La parole est à M. le ministre délégué à la famille.
    M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille. Monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui est avant tout le résultat d'une large concertation, voulue et encouragée par le Premier ministre comme par Jean-François Mattei.
    La protection de l'enfance, c'est tout d'abord permettre l'accueil de l'enfant dans les meilleurs conditions. C'est l'objet de son article 1er, qui vise à accroître l'offre de garde à destination des familles tout en améliorant la situation des assistantes maternelles.
    La mise en place à compter du 1er janvier 2004 de la prestation d'accueil du jeune enfant, entre autres, a pour objectif de permettre à tous les parents de choisir le mode de garde qui leur convient le mieux, et, bien entendu, à ceux qui le souhaitent de faire garder leur enfant chez une assistante maternelle. Cette demande accrue doit s'accompagner d'une augmentation concominante de l'offre d'accueil, à laquelle une réforme rapide de l'agrément contribuera de manière significative.
    Cette disposition n'est qu'une étape avant le dépôt sur le bureau du Parlement du projet de loi portant réforme du statut des assistantes maternelles, prévu pour le premier semestre 2004.
    Ce projet, d'ores et déjà rédigé, est en cours d'examen par le Conseil d'Etat. Il vous sera présenté au prochain semestre. Fruit d'une longue concertation avec les partenaires sociaux, il saura répondre à l'attente très forte que suscite la réforme du statut de cette profession.
    La protection de l'enfance, c'est aussi assurer le droit effectif à l'éducation de notre jeunesse. L'obligation scolaire, introduite dans la législation républicaine française par la loi du 28 mars 1882, est un véritable droit reconnu à chaque enfant. Il est de notre devoir d'en assurer la plus stricte application. Il est établi que l'absentéisme scolaire est malheureusement une réalité quotidienne.
    C'est pourquoi j'ai installé, il y a un an, avec Nicolas Sarkozy, Luc Ferry et Xavier Darcos, un groupe de travail chargé d'examiner les moyens de soutenir et de responsabiliser les familles, afin de remédier aux manquements à l'obligation scolaire.
    Les conclusions issues de ces travaux vous sont aujourd'hui proposées. Plus juste et plus efficace que la suspension des allocations familiales, ce plan impliquera au premier rang le chef d'établissement scolaire. Cette procédure tout à la fois réactive et plus légère, est destinée à aider les parents à assumer leurs responsabilité de premier éducateur. Si, à l'issue d'une procédure de concertation avec l'ensemble de la communauté éducative - c'est-à-dire l'élève, les parents, les enseignants -, la rescolarisation n'est pas constatée par l'inspecteur d'académie, celui-ci aura la possibilité de saisir le procureur et les parents seront alors passibles d'une amende maximum de 750 euros.
    Par ailleurs, le constat a été établi que le travail illégal d'enfants constitue une des causes des absences graves des élèves. Or les dispositions pénales applicables en la matière se révèlent insuffisantes et incohérentes. Il convient donc de renforcer et d'harmoniser les sanctions pénales encourues pour le travail illégal des enfants soumis à l'obligation scolaire.
    La protection de l'enfance, c'est aussi et surtout repérer la maltraitance, afin de mieux la traiter et de mieux la prévenir. Un travail remarquable est d'ores et déjà réalisé par les départements, dans le cadre de l'office décentralisé de l'action sociale. Néanmoins, notre pays manque d'un organisme pluridisciplinaire destiné à recueillir, sur le plan national, les informations sur ce sujet. Il vous est proposé la création d'un observatoire de l'enfance en danger au sein du groupement d'intérêt public qui abrite déjà le service national d'accueil téléphonique de l'enfance maltraitée, plus connu sous le nom du « 119 », dont tous s'accordent aujourd'hui à reconnaître le travail de qualité.
    Ma préoccupation réside essentiellement dans la prévention de la maltraitance. C'est pour cette raison que l'observatoire aura vocation à effectuer des enquêtes épidémiologiques. Il veillera également à diffuser à tous les acteurs les bonnes pratiques à adopter en fonction des risques.
    Je sais que la prévention passe également par une très étroite collaboration entre tous les services chargés de ces questions. Faire travailler au mieux la police, la gendarmerie, le corps médical, les membres du corps enseignant, les travailleurs sociaux ou encore la justice et les associations, c'est là un objectif essentiel dont dépendra l'efficacité de l'action entreprise.
    Cela dit, que serait la protection de l'enfance sans l'action au quoditien, sur le terrain, du milieu associatif ?
    Je sais, madame la rapporteure, votre engagement aux côtés des associations de défense des droits de l'enfant. Vous souhaitez leur donner la possibilité de développer leurs actions ; cette préoccupation, sachez-le, nous est commune. C'est la raison pour laquelle j'ai proposé à l'article 10 de renforcer les conditions de constitution de partie civile des associations dans le cadre des procédures pénales impliquant des mineurs victimes.
    M. Lionnel Luca. Très bien !
    M. le ministre délégué à la famille. Le Sénat a adopté une rédaction de cet article alliant sagesse et liberté, ce dont je me félicite. Je vous proposerai également une disposition permettant l'expérimentation d'un nouveau mode de financement des mesures de protection juridique des majeurs, qui concernent, vous le savez, un adulte sur quatre-vingts dans notre pays. Notre système de financement actuel mérite une refonte. Une réforme globale de ce dispositif vous sera donc présentée prochainement par le garde des sceaux.
    Les travaux du Sénat sont venus conforter la position du Gouvernement.
    Sur la base d'un amendement de Mme Marie-Claude Beaudeau, sénateur du Val-de-Marne, une disposition visant à faciliter le signalement par les médecins des enfants maltraités a été adoptée. Je me félicite de cette avancée qui a fait l'objet à plusieurs reprises de débats dans cet hémicycle. Je sais que votre commission vous le proposera de parfaire encore ce dispositif et je m'en réjouis.
    Le Sénat a également adopté un amendement de M. Michel Mercier, sénateur du Rhône, visant à dispenser les enfants de toute obligation alimentaire à l'égard de leurs parents lorsque ces derniers ont manqué à leurs obligations éducatives.
    M. Georges Colombier et M. Lionnel Luca. Très bien !
    M. le ministre délégué à la famille. C'est là mesure de bon sens qui m'a semblé juste à l'égard des enfants au sein des services de l'aide sociale à l'enfance.
    Je remercie enfin la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, son président ainsi que sa rapporteure pour la qualité de vos travaux. Les propositions présentées par voie d'amendements viendront utilement améliorer le texte qui vous est soumis et rejoignent les préoccupations du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme la rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familales et sociales. Monsieur le ministre, le projet de loi que vous nous proposez d'examiner ce soir représente une avancée significative pour la protection de l'enfance. C'est en effet le premier projet de loi à traiter clairement de ce sujet difficile, même si plusieurs dispositions législatives avaient déjà été adoptées dans ce sens.
    Il convient de saluer la lisibilité de ce texte qui exprime la volonté du Gouvernement de combattre la maltraitance et je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir pris ce problème à bras-le-corps dès votre arrivée au ministère de la famille.
    Vous aviez instauré la journée des droits de l'enfant et mis en oeuvre à cette occasion des moyens d'information, de prévention, mais également de sensibilisation des élus locaux ; aujourd'hui, vous allez au-delà grâce à ce projet qui résulte d'un travail mené en étroite relation avec les professionnels de l'enfance et les associations de protection de l'enfance qui jouent un rôle fondamental en matière d'information, de prévention et de proposition. Nous voilà donc bel et bien dans l'action.
    Reconnaissons toutefois que ce texte n'est pas sans poser des difficultés, non seulement du fait de la nature du problème qu'il aborde, mais parce qu'il touche à six codes différents : le code de l'action sociale et de la famille, le code du travail, le code civil, le code pénal, le code de procédure pénale et le code de la santé publique. Malgré cette difficulté, il reste un projet de loi émanant clairement du ministère de la famille, quand bien même il complète le travail effectué par vos collègues sur ce sujet. Ce faisant, il s'inscrit dans une volonté générale du Gouvernement de protéger les enfants contre toutes formes de maltraitance - physique, sexuelle, psychologique, exploitation par le travail - exprimée par plusieurs ministères : la famille, bien sûr, mais aussi la santé, l'intérieur, la justice, l'éducation. Je tiens du reste à saluer le travail déjà réalisé à cet égard par Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, et Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, particulièrement impliqués dans la protection de l'enfance.
    Ainsi, le garde des sceaux, qui prépare un projet de loi sur la protection judiciaire de la jeunesse, a déjà permis l'instauration d'un suivi socio-judiciaire et la création d'un fichier national des délinquants sexuels.
    Je salue également l'adoption de l'amendement de Gérard Léonard la semaine dernière, dans le cadre du projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, qui allonge le délai de prescription à vingt ou trente ans pour les délinquants sexuels.
    Je me réjouis que le Gouvernement ait réagi avec force face au problème lourd de la maltraitance, car les chiffres sont accablants pour notre société. Ainsi, l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée a recensé en 2002 18 500 enfants maltraités - soit une progression de 500 enfants - et 86 000 signalements effectués auprès des conseils généraux. Mais, derrière la sécheresse des chiffres, il y a la souffrance individuelle de chaque enfant, souffrance silencieuse, coupable, et le déchirement de ces victimes partagées entre l'amour et la haine lorsque leur agresseur est aussi un de leurs parents. Car le chiffre de l'horreur, c'est bien ce 85 % et plus de cas de maltraitance qui sont le fait d'un membre de la famille proche.
    Cette souffrance et le décalage entre le nombre d'enfants reconnus maltraités et le nombre de signalements posent la question de la pertinence des procédures de signalement sur lesquelles, je le sais, travaille actuellement le garde des sceaux. Celui-ci produira bientôt un guide méthodologique intitulé « Du signalement au procès pénal » dont je salue par avance la sortie car il répond à un véritable besoin d'harmonisation des procédures dans le but d'accroître l'efficacité dans la prise en charge et le suivi des enfants signalés.
    Le problème des signalements se pose également pour ceux qui signalent, et notamment - mais pas seulement - pour les médecins. C'est ainsi que le Sénat a introduit un amendement visant à renforcer la protection du signalant, que je vous proposerai d'améliorer tout à l'heure, mettant en cohérence le code civil et le code de la santé publique,...
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Excellent !
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. ... conformément aux attentes de la profession et en particulier des pédopsychiatres.
    Le texte que nous examinons, en accord avec les professionnels et les associations de protection de l'enfance, porte création de l'Observatoire de l'enfance en danger, intitulé dans le projet de loi initial « Observatoire de l'enfance maltraitée » et judicieusement amendé par le Sénat pour étendre ses compétences à l'indispensable prévention. Cet observatoire, qui sera rattaché au groupement d'intérêt public du SNATEM - le service national d'accueil téléphonique de l'enfance maltraitée - aura pour mission de recueillir et d'analyser les données relatives à la maltraitance des mineurs, en provenance de tous les services de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics et des associations. Au-delà de son rôle d'évaluation, l'Observatoire aura également pour mission de proposer une meilleure politique de prévention de la maltraitance à partir des données collectées, des études menées et de ses analyses, afin d'améliorer les dispositifs et de faire évoluer au besoin la loi.
    Ce texte donne également aux associations des possibilités élargies de se porter partie civile dans les affaires de maltraitance, principalement lorsque les enfants ne sont pas identifiés : c'est le cas pour les photos et les vidéos des sites pédophiles que je préfère appeler pédocriminels.
    Protéger les enfants, c'est aussi les remettre dans le cursus scolaire lorsqu'ils l'ont abandonné et leur permettre ainsi non seulement d'acquérir les savoirs nécessaires, mais aussi de se réinsérer dans une vie sociale, avec toutes les règles que celle-ci suppose. C'est pourquoi le projet de loi comprend un volet sur la lutte sur l'absentéisme scolaire et prévoit un dispositif pédagogique et social gradué de réinsertion scolaire adapté tant aux difficultés de l'enfant qu'à celles de sa famille, première cause souvent de la non-intégration scolaire.
    Ce dispositif prévoit également des sanctions pour le cas où les procédures de concertation auront échoué, lesquelles se substitueront à l'actuel dispositif de suppression ou de suspension des allocations familiales, inadapté, inappliqué et par le fait inefficace.
    Dans le même esprit, le texte se fixe également pour objet de lutter contre le travail clandestin des enfants en renforçant les sanctions pénales applicables aux employeurs en cas d'infractions, notamment dans certains secteurs comme les métiers ambulants et les métiers de mannequinat.
    S'agissant enfin du volet d'accueil de l'enfance, vous nous proposez, monsieur le ministre, d'anticiper sur le projet de loi portant réforme du statut des assistants maternels en modifiant l'agrément accordé aux assistants maternels, afin qu'ils puissent désormais accueillir trois enfants simultanément, ce qui élargira d'autant leurs capacités d'accueil.
    Le but est de prendre en compte le travail à temps partiel des familles et d'adapter la loi afin de répondre d'une part aux préoccupations des parents confrontés à un nombre limité de places, mais également au souhait des assistants maternels de ne pas se voir financièrement pénalisés par l'accueil d'enfants à temps partiel.
    Ce dispositif complète et renforce la politique d'accueil du jeune enfant que vous avez engagée, monsieur le ministre et encourage un mode de garde mieux adapté aux besoins des familles, plus souple en termes d'horaires. Rappelons que 20 % des familles qui privilégient ce système et donnent leur enfant à garder à une personne extérieure.
    Cette mesure va aussi dans le sens d'une meilleure protection de l'enfant, offrant davantage de places sécurisées et agréées, alors de nombreux parents n'ont pour l'heure d'autres possibilités que de recourir à des modes de garde non agréés.
    Ainsi ces différents aspects de la protection de l'enfance répondent au souci du Gouvernement et du Parlement de combattre la maltraitance des enfants, qui déshonore notre société et de prendre en considération, en toutes circonstances, l'intérêt supérieur de l'enfant.
    Nous aurons encore à travailler pour répondre à tous les besoins, à toutes les attentes, à proposer et à légiférer probablement, mais il nous faut aussi mieux appliquer les lois existantes.
    Nous devons aussi nous inspirer de l'exemple donné dans d'autres pays, je pense au Québec, très en pointe sur la protection de l'enfance, la parentalité et la nécessaire interaction des différents services concernés pour une meilleure réactivité et une prise en charge plus efficace de l'enfance en danger.
    J'espère que le débat de ce soir et le vote qui s'ensuivra trouveront sur tous les bancs de notre assemblée le soutien que mérite la cause des enfants.
    Ce qui nous rassemble et nous interpelle ce soir, c'est l'appel que nous lancent les innocentes petites victimes de la maltraitance, leur souffrance, leurs larmes, leur révolte, leur culpabilité, leur incompréhension de ce qui leur arrive, et l'image de leurs petits corps martyrisés, parfois jusqu'à la mort.
    C'est en pensant à eux et à eux seuls que je me suis investie dans cette cause et que je défends ce projet de loi, que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Ce projet de loi aborde des thèmes divers. Qu'il s'agisse de points sensibles comme la protection de l'enfance en danger, de l'assouplissement de l'agrément des assistantes maternelles ou encore du financement des tutelles, vous nous soumettez aujourd'hui, monsieur le ministre, des mesures directement opérationnelles qui, pour la plupart, constituent l'avant-goût de réformes de plus grande ampleur que vous nous avez annoncées.
    En premier lieu, le projet de loi a pour ambition de rénover la lutte contre l'absentéisme scolaire en proposant des sanctions adaptées.
    A l'appui de cette démarche, le rapport remis au Gouvernement en janvier dernier par le groupe de travail mis en place par votre ministère et par le ministre de l'éducation nationale et un constat : la nécessité de mettre davantage l'accent sur la prévention dès le plus jeune âge et l'accompagnement des familles.
    Avec l'augmentation du taux de scolarisation, l'école doit en effet faire face à un problème nouveau : le « désinvestissement » scolaire. L'absentéisme constitue un phénomène inquiétant qui paraît se développer à grande échelle depuis plusieurs années et qui a peut-être été insuffisamment pris en compte. C'est un révélateur essentiel de difficultés familiales ou du mal-être de certaines jeunes.
    Face à ce problème, il fallait actualiser les règles de droit comme les pratiques administratives.
    L'idée directrice du projet est avant tout de responsabiliser les parents par tous les moyens, notamment par la recherche d'un contact et d'un dialogue approfondi avec eux, en privilégiant le travail de médiation et en faisant de la sanction pénale l'ultime recours.
    La seconde préoccupation est la clarification des responsabilités entre l'établissement scolaire et l'inspecteur d'académie, ainsi que la mise en oeuvre d'une instance partenariale au niveau départemental pour élaborer des actions de prévention et promouvoir des actions de soutien à la responsabilité parentale.
    Ce projet clôt une fois pour toutes le débat sur la suppression des allocations familiales. Instauré dans les années soixante, ce mécanisme, qui a encore touché 9 000 familles l'an dernier, s'est en effet révélé inadapté. Les prestations familiales n'ont en effet pas pour seul objet de financer la scolarité de l'enfant. Par ailleurs, la suppression des allocations familiales s'adresse aux familles qui les perçoivent, et cette mesure « élude » 1 300 000 familles qui n'ont qu'un seul enfant. Enfin, cette sanction a été diversement appliquée, en raison notamment des réticences logiques du corps enseignant à signaler certains cas d'absentéisme pour ne pas pénaliser les familles, sans parler des CAF - moins de 20 % d'entre elles y ont recours. Une telle sanction est donc un échec alors que l'absentéisme, on le sait, est un véritable instrument de mesure des difficultés familiales ou scolaires, des violences scolaires, sur lequel on devrait pouvoir se fonder.
    La sanction pénale ne pourra désormais intervenir qu'en toute dernière instance pour les parents qui n'auraient pris aucune mesure pour que leurs enfants suivent normalement l'enseignement secondaire.
    On n'augmente pas les devoirs en diminuant les droits, mais en faisant le rappel au droit et le rappel à la loi. C'est la raison pour laquelle, dans cette démarche de responsabilisation des parents, le texte opte résolument pour une lente graduation pouvant conduire, et ce uniquement dans les cas extrêmes, à l'amende.
    Dans le même domaine, le constat a été fait que le travail illégal des enfants constitue l'une des causes, parmi bien d'autres, des absences répétées des élèves. Le Sénat a fait un ajout bienvenu pour renforcer la protection des enfants au travail, que notre commission a confirmé.
    La deuxième priorité du projet de loi porte sur les conditions d'accueil des jeunes enfants par les assistantes maternelles.
    L'offre de garde est aujourd'hui, en France, encore largement insuffisante pour faire face aux besoins et aux attentes des familles. Et puis, les besoins des familles évoluent. Elles utilisent différemment les équipements, pratiquent volontiers l'accueil à temps partiel ou le multi-accueil. Cela s'explique par la diversifications des horaires de travail, par les amplitudes d'ouverture des équipements qui ne correspondent pas au rythme de vie des parents, enfin par le souci de ces derniers de limiter leurs frais de garde.
    Selon une étude du CREDOC, les Français considèrent que l'assistante maternelle est le mode d'accueil le plus satisfaisant lorsque les deux parents d'un jeune enfant travaillent. Ce système de garde souple est financièrement intéressant pour de nombreuses familles. Il est aussi le moins coûteux pour la collectivité.
    Aujourd'hui, 300 000 assistantes maternelles accueillent 655 000 enfants de moins de six ans, dont 415 000 de moins de trois ans. Elles rendent un service irremplaçable aux familles. Malheureusement, il en manque encore et toujours à l'appel. L'embellie démographique que connaît la France depuis 1995 n'a rien arrangé. La mise en oeuvre de la PAJE l'an prochain devrait induire un surcroît de demande en redonnant du pouvoir d'achat aux familles à revenus moyens et modestes.
    Les assistantes maternelles ne peuvent répondre à la demande, notamment en raison de la rigidité de leur agrément. Actuellement, sauf dérogation, le nombre d'enfants accueillis est de trois au plus, que ce soit à temps plein ou à temps partiel. Il passera à trois « équivalents temps plein de garde », ce qui permettra plus de souplesse et une augmentation potentielle de 15 % de la rémunération des assistantes maternelles.
    Une autre mesure concerne les placements sous tutelle des majeurs vulnérables. Ceux-ci ont triplé en dix ans, pour atteindre 140 000 en 2001. L'expérimentation d'un nouveau financement des associations, gérant les tutelles par dotation globale selon leur activité réelle et non plus selon le nombre de mesures prises, se fera dans quelques départements, avec toutes les associations concernées. Vu la complexité du dossier, nous ne pouvons que soutenir la mise en oeuvre d'une expérimentation pour préparer la réforme prévue pour 2005. Nous attendons beaucoup des travaux en cours. Notre société doit garantir une plus grande qualité d'assistance juridique et d'accompagnement des personnes.
    Vient enfin la mesure phare du texte : la création d'un observatoire national de l'enfance maltraitée, rebaptisé par le Sénat, assez justement, « observatoire national de l'enfance en danger ». Cet observatoire doit être mis en place d'ici au début de 2004. Composé de professionnels de la protection de l'enfance, il sera intégré au groupement d'intérêt public déjà responsable du numéro vert 119 du SNATEM, ce qui limitera son coût de fonctionnement.
    La maltraitance a de nombreux visages, comme Henriette Martinez l'a très bien expliqué. Qu'elle soit physique, psychologique, ou sexuelle, elle a des effets à long terme qui handicaperont toute la vie de la victime.
    Il faut rendre hommage à toutes les personnes qui, notamment au sein des associations, ont les premières alerté l'opinion publique sur l'urgence de la lutte contre la maltraitance. Grâce à elles, la loi du silence couvrant les mauvais traitements et les agressions sexuelles est en train de disparaître et de faire place à une véritable écoute de la victime.
    Les enfants maltraités sont-ils 40 000 chaque année, si l'on se réfère aux plaintes enregistrées par la police, 75 000 comme l'affirment les associations de lutte contre la maltraitance, ou 18 000, comme l'avance l'observatoire décentralisé de l'action sociale ? Ils sont de toute façon toujours plus nombreux.
    Reste qu'un flou un peu coupable entoure cette question dans notre pays.
    Pour mieux identifier ces dizaines de milliers de drames, de bleus, de larmes, mais aussi pour mieux les comprendre et les combattre, ce nouvel organisme permettra d'analyser les causes de la maltraitance pour mieux la prévenir, avec des indications précieuses, par exemple, sur des phénomènes comme le suicide des adolescents ou les liens entre maltraitance et délinquance des mineurs.
    C'est un vieux rêve qui voit le jour pour tous les acteurs de cette lutte. Il s'agira d'un centre national d'analyse de tous les cas repérés d'enfants battus, agressés, abusés, brimés ou livrés à eux-mêmes. C'est un tableau de bord très attendu, qui mettra tout le monde d'accord, car chaque professionnel a forcément une vision réduite de la maltraitance : le policier voit davantage les agressions par des tiers dans la rue, l'assistante sociale davantage les agressions familiales. On va pouvoir enfin savoir où il y a des manques, dans quel département.
    Les associations auront les coudées plus franches pour défendre les enfants puisque le projet prévoit aussi de permettre à celles d'entre elles qui auront cinq années d'existence de se constituer partie civile pour toutes les infractions concernant des victimes mineures dès lors que celles-ci sont atteintes dans leur intégrité physique, psychique ou morale, quelle que soit la forme de cette atteinte.
    La commission a souhaité aussi faciliter le signalement des cas de maltraitance par les médecins. Pour cela, il fallait permettre à ces derniers de faire du dépistage et du signalement sans risque de poursuites, qu'il s'agisse de sanctions ordinales ou de poursuites au pénal. Le texte propose des mesures claires de protection pour ces professionnels de l'enfance.
    En conclusion, ce projet de loi ne prétend aucunement traiter de manière exhaustive tous les problèmes liés à l'enfance. Il n'en reste pas moins que c'est le premier texte spécifique sur la protection de l'enfance. Son objet n'est pas de résoudre totalement les problèmes posés. Vous avez, monsieur le ministre, retenu une démarche pragmatique, solide, qui vous ressemble. (Sourires.) Ce sont des premières mesures concrètes et immédiates, c'est aussi l'aboutissement d'un très long travail de concertation et de discussion avec tous les acteurs concernés, que nous avons beaucoup apprécié. Nous savons qu'il portera ses fruits demain, et nous vous remercions de l'avoir proposé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Bernard Accoyer. Bravo !

Discussion générale

    M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Pierre Goldberg.
    M. Pierre Goldberg. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons à examiner un projet de loi relatif à l'accueil et à la protection de l'enfance. Il s'agit là, chacun en conviendra, de questions graves qui préoccupent l'ensemble de nos concitoyens. Il était donc urgent que notre assemblée tente d'y répondre.
    Chaque année, en France, des milliers d'enfants sont maltraités et victimes d'abus sexuels. Dans un cas sur deux, ils n'ont pas encore atteint l'âge de la puberté et les tout-petits ne sont pas à l'abri. Les décès de nourrissons consécutifs à des sévices représentent désormais dans notre pays - c'est tragique - la deuxième cause de mortalité infantile, passée la première semaine de la vie.
    Deux fois sur trois, ces enfants sont abusés par l'un de leurs parents ou de leurs proches. Ai-je besoin de dire qu'ils restent marqués à vie ? Troubles psychologiques, échec scolaire, dépression, délinquance, toxicomanie, prostitution sont parmi les conséquences de ces traumatismes. Et si ces victimes ne sont pas prises en charge, elles risquent de reproduire le même comportement avec leurs propres enfants.
    Un enfant peut aussi se trouver en situation de danger s'il est exploité au travail et s'il est victime de carences éducatives ayant pour conséquence un absentéisme scolaire régulier. Contrairement à la situation dramatique qui prédomine à cet égard dans les pays en développemet, le travail des enfants en France, du fait notamment de l'obligation scolaire, reste limité à certaines classes d'âge, à certains moments, ou encore à certaines populations spécifiques, mais cette situation se détériore et de plus en plus d'enfants se livrent à de nombreuses activités rémunératrices. On devrait d'ailleurs être particulièrement attentif à l'influence que peut avoir sur les enfants l'évolution du travail vers des statuts précaires et surtout vers le travail à domicile.
    Le cas des mineurs utilisés dans la publicité, les spectacles et les médias pose effectivement problème. Bien que réglementée par la loi du 12 juillet 1990, cette utilisation est encore trop souvent abusive et il convient donc d'améliorer notre législation dans ce domaine.
    Concernant l'absentéisme scolaire, il est tout à fait opportun de se pencher sur ce sujet au moment où l'on examine un projet relatif à la protection de l'enfance. En effet, l'absentéisme doit être considéré comme le signal d'alarme d'un adolescent en souffrance et susceptible de manifester d'autres troubles et conduites à risque. Rappelons que le taux d'absentéisme de la population collégienne se situe entre 2 et 2,5 %, soit un peu plus de 80 000 signalements à l'inspection académique.
    Que cette souffrance soit subie en milieu scolaire, en raison d'un racket par exemple ou d'une orientation mal vécue, ou bien qu'elle résulte de difficultés d'ordre social ou familial, l'obligation d'assiduité s'impose à tous les enfants de six à seize ans inscrits dans un établissement scolaire, aux termes de l'article 511-1 du code de l'éducation.
    Nous pourrions nous féliciter de légiférer aujourd'hui sur ces questions. Pourtant, au regard des quelques mesures proposées par ce texte d'appel transitoire, son intitulé, « accueil et protection de l'enfance », semble bien ambitieux. Pourquoi un texte court alors que d'autres projets plus complets sont d'ores et déjà en préparation, sur le statut des assistantes maternelles notamment ?
    Plus fondamentalement, votre démarche est quelque peu inquiétante. Pourquoi un texte incomplet car transitoire sur des sujets aussi graves ? Pourquoi pas une réforme plus fondamentale, comme l'a souhaité tout à l'heure le président de la commission ? Pourquoi ne pas avoir ouvert un grand débat national pour poser ces questions ? Pour le président de la commission, nous vivons avec votre projet de loi la mise en oeuvre d'un grand rêve. Pour moi, c'est un petit rêve.
    La création de l'observatoire de l'enfance en danger est louable. Cependant, il faut que cette structure dispose de personnels compétents pour faire face à ses missions. D'une façon générale, vouloir appréhender la protection de l'enfance dans son ensemble suppose que l'on alloue au départ à tous les professionnels concernés des moyens suffisants. Les régressions de la législation sociale, notamment dans les domaines de l'emploi, de la santé ou du logement, ne peuvent que nous inquiéter.
    Ce projet de loi aurait été plus cohérent si, au lieu de cette accumulation de mesures, certes pragmatiques, mais trop catégorielles et isolées, un lien avait été créé entre la question de la maltraitance et le manque important de familles d'accueil à titre permanent, comme les assistantes maternelles.
    Cette approche aurait permis de réfléchir à l'injonction paradoxale dont sont victimes les élus : « allez-y, protégez les enfants, mais attention, car cela coûte cher ! ». L'agrément des deux catégories d'assistantes maternelles est quasi identique. Pourquoi ne pas avoir plutôt réfléchi à la modification de l'agrément des assistantes maternelles permanentes ? Une véritable réflexion devrait s'amorcer au sujet des formes de prise en charge des enfants entre le suivi éducatif à domicile et le placement.
    Quant au travail illégal des enfants il n'est pas circonscrit aux seuls secteurs du spectacle, de la mode et de la publicité. Que dire de l'entraide familiale, cette pratique répandue, socialement reconnue et acceptée qui n'est toujours ni définie ni encadrée juridiquement ?
    Concernant le respect de l'obligation scolaire, on peut se féliciter de l'abandon du dispositif de suspension ou de suppression des allocations familiales. En revanche, il existe déjà des modules de soutien à la responsabilité parentale gérés par les caisses d'allocations familiales et les unions des associations familiales pour aider les familles. On peut s'interroger sur l'efficacité des amendes en cas d'absentéisme scolaire et estimer que les enseignants ne seront pas davantage disposés à signaler les absences que dans la situation actuelle.
    Quelles sont donc les mesures réactives et graduées annoncées ? La réforme de l'agrément des assistantes maternelles semble précipitée. Certes - et ce n'est pas paradoxal -, il était urgent de considérer qu'un nombre important d'enfants ne sont accueillis que quelques heures par semaine : cela s'explique notamment par le fait que leurs parents travaillent à temps partiel, bénéficient de la réduction du temps de travail, ou encore par l'entrée de ces enfants à l'école maternelle. Rappelons que près de 30 % des mères de jeunes enfants ont recours au temps partiel. Pourtant, aucune formation supplémentaire n'est prévue pour accompagner l'évolution de l'activité professionnelle des assistantes maternelles. Pourquoi ne pas augmenter plutôt leur nombre en même temps qu'on modifie leur capacité d'accueil ? Pour ce faire, il faudrait rendre cette activité plus attractive - ce que ne fait pas le projet de loi - en se donnant les moyens de vraiment la professionnaliser.
    Pourquoi ne pas prendre en compte, dès maintenant, ce besoin de professionnalisation si souvent affirmé ? On pourrait penser à un système où, après l'obtention de l'agrément, une période de formation, rémunérée par le conseil général, serait organisée sous la responsabilité du CNPFT. Cette année de formation théorique et pratique pourrait alors valider un certificat d'aptitude qui aurait valeur de qualification professionnelle.
    On peut aussi s'inquiéter de la volonté, affichée par le Gouvernement, de ne développer que ce mode de garde individuel, sous prétexte qu'il serait largement plébiscité par les parents. N'oublions pas que, en la matière, le choix se fait souvent par défaut, car la diversité des types d'accueil n'existe pas et que l'accueil collectif ne répond pas toujours à la demande ou aux nouvelles contraintes de vie et de travail des parents.
    Votre projet ne permet donc pas de diversifier l'offre de garde. Il privilégie seulement les modes d'accueil les moins coûteux - les assistantes maternelles employées à la maison - au détriment du développement, faute de moyens, d'équipements, de structures et de services de qualité dans le cadre du service public.
    Pour conclure, si je devais résumer mon propos, je dirais que ce texte contient des mesures qui, de prime abord, semblent positives, mais qui, après examen, s'avèrent gravement incomplètes. Aussi, mon groupe a déposé plusieurs amendements afin que cette ambition d'accueillir et de protéger nos enfants bénéficie d'un projet de beaucoup plus grande envergure. Il s'agit, au fond, de ne pas se dérober devant ces enjeux, et de répondre aux attentes et aux besoins de nos concitoyens.
    M. le président. La parole est à Mme Martine Aurillac.
    Mme Martine Aurillac. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, l'enfant est une personne. Une société peut se juger sur la place qu'elle donne et l'accueil qu'elle réserve à ses enfants. Car si la générosité des associations constitue une aide particulièrement précieuse, voire indispensable, l'Etat a, en la matière, une responsabilité éminente, dont il ne saurait s'affranchir. Vous le savez bien, monsieur le ministre, vous qui, dès votre arrivée, avez tenu, à l'inverse du Gouvernement précédent et conformément au souhait du Président de la République, à redonner ses lettres de noblesse à la politique de la famille. Le PLFSS que nous avons voté a ainsi pu concrétiser le financement de la PAJE, avec la prime à la naissance et les compléments de garde ou d'activité, le développement de l'offre de garde et de nouvelles mesures de simplification.
    M. Bernard Accoyer. Excellent !
    Mme Martine Aurillac. Vous nous présentez aujourd'hui un projet complémentaire sur l'accueil et la protection de l'enfance, premier texte spécifique en la matière.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Tout à fait !
    Mme Martine Aurillac. Je n'insisterai pas sur le dernier volet, contenu dans le titre V, sur le dispositif de protection juridique des majeurs. Celui-ci devrait bénéficier d'une amélioration, grâce à un nouveau mode de financement expérimental pour deux ans dans les services de tutelle. Cette question mérite d'ailleurs une refonte plus globale, vous l'avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre.
    Le volet sur l'accueil comprend essentiellement deux types de mesure. La première concerne l'agrément des assistantes maternelles. Il s'agit de rendre à ces services la souplesse demandée par les parents, dont les rythmes de vie ont beaucoup évolué. C'est pourquoi, dans la limite de trois enfants confiés, il sera offert un accueil continu, le temps partiel étant désormais autorisé, ce qui apporte la flexibilité nécessaire et permet aussi une meilleure rémunération.
    M. Bernard Accoyer. Voilà une bonne mesure !
    Mme Martine Aurillac. Nous attendons encore la nécessaire réforme de leur statut, pour le début de l'année 2004.
    Une deuxième mesure concerne, fort heureusement, l'absentéisme scolaire, avec l'abrogation du dispositif de suppression des allocations familiales, aussi injuste qu'inefficace. Il est remplacé par un dispositif de signalement au niveau de l'établissement scolaire, puis au niveau du conseil général, et par une responsabilisation et un meilleur soutien des familles, la sanction n'intervenant qu'en dernier ressort. Cette mesure est complétée par une lutte accrue contre le travail illégal des mineurs, notamment dans les entreprises de spectacles et de mannequinat : c'est une bonne chose.
    Reste le second volet, concernant la maltraitance. Sur ce point, les chiffres sont cruels : 18 500 enfants maltraités selon les derniers chiffres de l'ODAS, 67 800 enfants « en risque », chiffre en progression, ce qui traduit l'augmentation du nombre de familles fragiles. Parmi les facteurs de risque, les carences éducatives, les conflits de couple, les problèmes psychopathologiques des parents sont largement en cause, la précarité n'arrivant qu'en quatrième position.
    C'est dire combien il importe d'améliorer le dispositif des signalements. C'est l'objet de l'observatoire de l'enfance maltraitée que vous créez et qui doit être relayé par des commissions départementales.
    Recueillir les données de tous les organismes concernés pour les analyser, engager des études précises sur les causes du phénomène, faire connaître les expériences concluantes, mieux orienter les actions de prévention : les objectifs sont clairs et pertinents. Notre commission y a utilement ajouté une mission d'évaluation des dispositifs de protection. Afin d'éviter les doubles emplois, l'observatoire sera rattaché au groupement d'intérêt public qui est déjà responsable du service n° 1 d'accueil téléphonique.
    M. Bernard Accoyer. Excellent !
    Mme Martine Aurillac. Permettez-moi d'insister ici, monsieur le ministre, sur l'impact des violences conjugales, mais aussi sur certaines violences morales parfois faites à l'enfant, tout aussi destructrices que les violences physiques. Le dénigrement, le mépris, l'humiliation, le harcèlement peuvent, nous le savons, casser la construction d'un être très jeune, en devenir. Ces violences peuvent se produire en famille ou à l'école, et doivent aussi être signalées et entendues par les juges.
    La prise en compte et le respect de la parole de l'enfant sont un des principes fondateurs de la Convention internationale des droits de l'enfant, et la commission a eu raison de réécrire l'article 388-1 du code civil.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Tout à fait !
    M. Bernard Accoyer. La commission a bien travaillé, comme d'habitude ! C'est une bonne commission, avec un bon président !
    Mme Martine Aurillac. Par ailleurs, les associations de protection de l'enfance ayant cinq ans d'ancienneté pourront désormais se porter partie civile : c'était une mesure attendue.
    Mais il est, monsieur le ministre, une autre forme d'agression vis-à-vis de l'enfance : il s'agit du déferlement, maintes fois dénoncé, d'images et de messages pornographiques sur Internet.
    M. Bernard Accoyer. A la télévision aussi !
    Mme Martine Aurillac. Nous ne pouvons nous désintéresser de ce type de violences, faites à des enfants parfois très jeunes, dont le jugement et la maturité ne sont, par définition, pas encore formés. C'est la raison pour laquelle il nous faut impérativement renforcer les outils législatifs qui existent - notamment dans la loi du 30 septembre 1986 -, mais qui sont souvent contournés, d'autant plus que, en raison des réseaux mais aussi des sites étrangers, le phénomène est extrêmement volatil. L'article 2 du projet de loi sur la confiance dans l'économie numérique devrait nous y aider grâce à un dispositif spécifique d'engagement de la responsabilité civile et pénale des hébergeurs de sites. Mais il faudrait aussi que l'information des parents abonnés soit mieux et systématiquement organisée par les fournisseurs d'accès tenus d'appliquer l'article 43-7 de la loi de 1986, et donc de leur proposer des moyens efficaces de restreindre l'accès à certains services. Encore faudrait-il en faire ensuite un vrai contrôle.
    Il est un autre souhait dont vous vous préoccupez d'ailleurs, monsieur le ministre : la formation des professionnels de la protection de l'enfance. Enseignants, médecins, travailleurs sociaux, policiers, doivent bientôt recevoir une formation pluridisciplinaire commune qui leur permettra de mieux travailler ensemble. C'est en effet une condition indispensable pour l'efficacité de votre projet. Ainsi, à côté du travail du médiateur des enfants, vous dotez l'enfance de tout un arsenal juridique pour l'accueillir et la défendre. La France, qui, la première, a ratifié le 7 août 1990 la convention internationale des droits de l'enfant, se devait de jouer en la matière un rôle pilote. Vous l'avez pris à coeur, monsieur le ministre, et c'est pourquoi le groupe UMP votera bien volontiers votre projet. (« Excellent ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, contrairement à d'autres sujets, la question de la protection de l'enfance n'a pas vocation à provoquer les clivages que nous constatons habituellement entre nos différentes familles politiques et, malgré des nuances d'approche, chacun ici souhaite assurer à tout enfant les moyens de son développement et de son bien-être. La création de dispositifs d'accueil adéquats pour les jeunes enfants est donc un objectif largement partagé, autant que l'est celui d'assurer aux enfants une protection efficace face aux différentes formes de maltraitance. C'est donc dans un esprit constructif que les députés socialistes ont abordé l'examen de ce projet de loi. Ils ont déposé plusieurs amendements visant à enrichir la législation relative à la protection de l'enfance, qui a aujourd'hui besoin d'une réforme d'ensemble replaçant l'enfant au centre du dispositif, et non de menues mesures n'apportant aucune réponse significative à des problèmes complexes.
    Vous comprendrez donc la déception que nous éprouvons face à un texte qui occulte totalement la problématique essentielle de la protection de l'enfance. Il en est de même de la réflexion et des expérimentations en cours depuis 2000, à la suite des états généraux de l'enfance et du rapport des inspecteurs généraux, MM. Naves, de l'IGAS, et Cathala, des services judiciaires.
    Les états généraux avaient réuni de nombreux intervenants de tous horizons, avaient permis de faire différents constats et de présenter des expériences susceptibles d'être généralisées. Depuis, ces expériences ne demandent qu'à être étendues pour améliorer les prises en charge. Malheureusement, aucun article de ce projet de loi ne tient compte de cette nécessité, aucun n'aborde ces cas où la justice des mineurs est conduite à décider de mesures d'assistance éducative, d'un placement en famille ou en établissement d'accueil pour un enfant victime de maltraitances de la part de son entourage ou d'une situation familiale dommageable. C'est pourtant bien le point central de la question de l'accueil et de la protection de l'enfance.
    Mais peut-être avons-nous eu la réponse à cette interrogation dans le collectif budgétaire adopté en conseil des ministres le 19 novembre : le budget de la protection judiciaire de la jeunesse est frappé d'une annulation de crédits de 29 millions d'euros par rapport à la dotation initiale votée en 2003, soit une baisse de 12 % de son budget. Dans ces conditions, peut-on accorder le moindre crédit à une démarche consistant à réduire les moyens du secteur le plus sensible de la protection de l'enfance en danger et, dans le même temps, à annoncer un projet de loi censé traiter de cette question tout en occultant l'essentiel ?
    Nous nous interrogeons également sur la cohérence d'une démarche qui consiste à examiner dans ce texte des mesures relatives à la situation des assistantes maternelles, sans aborder le statut global de la profession - d'autant plus qu'un projet de loi sur ce thème serait annoncé dans les prochains mois. Mes propos ne font d'ailleurs que confirmer en partie ceux de M. Lorrain, rapporteur de ce même texte au Sénat, qui affirme, à sa manière, que ces dispositions contribuent uniquement à ouvrir la voie à une réforme plus large du statut de cette profession.
    Les articles 1er et 2 du titre Ier, permettant l'accueil simultané de trois enfants par les assistantes maternelles, n'apparaissent toutefois pas d'une grande utilité aujourd'hui, la loi autorisant déjà les présidents de conseils généraux à agir en ce sens lorsque les conditions d'accueil sont satisfaisantes, et beaucoup d'entre eux ayant déjà recours à cet agrément, compte tenu des besoins locaux, souvent importants.
    Nous avons donc demandé le retrait de ces articles et le report de l'examen de ce dossier à un moment plus opportun, dans le cadre d'un texte spécifique qui, nous l'espérons, améliorera de manière significative le statut et les droits de ces professionnels. Les attentes sont fortes et nombreuses dans les départements qui, pour certains, ont su anticiper et améliorer le statut existant de ces personnels, en particulier pour ceux qui relèvent de leur compétence d'employeur. Espérons que le Gouvernement et cette assemblée feront de même, en particulier en termes de formation et d'indemnités, lorsqu'il s'agira de réformer leur statut.
    Les métiers de services à la personne, qui évoluent en nombre, doivent aussi évoluer dans une démarche de qualité, seule garantie d'une bonne réponse aux besoins inhérents à l'évolution de notre société, comme c'est déjà le cas dans le domaine de l'aide à domicile, grâce à l'APA.
    En ce qui concerne le dispositif de lutte contre l'absentéisme scolaire visé au titre II, nous approuvons, bien entendu, les mesures destinées à lutter, par une pénalisation plus forte, contre le travail contraint des enfants d'âge scolaire, pour lesquels l'instruction est non seulement un devoir, mais un droit. Nous déplorons cependant une approche exclusivement centrée sur l'augmentation des amendes sanctionnant ces infractions. Nous aurions, notamment, souhaité voir adopté notre amendement visant à la création de cellules départementales de prévention de l'absentéisme scolaire, copilotées par les inspecteurs d'académie et les présidents de conseils généraux, compétents en matière d'accompagnement social des familles et de prise en charge des mineurs en danger.
    En effet, cette problématique est difficilement dissociable d'une prise en charge plus globale, et éviterait une énième intervention sociale sans concertation et sans cohérence de l'action. Je vous rappelle, monsieur le ministre et chers collègues, que ce type de dispositif existe déjà au titre de la politique de la ville, sous forme de cellules dites de « veille éducative ». Cet amendement aurait, d'ailleurs, trouvé toute sa cohérence à un moment où l'on parle de décentralisation de l'action sociale vers les départements.
    Par ailleurs, tout en étant favorables à la suppression de la possibilité de suspendre ou de retirer les allocations familiales pour cause de non-respect de l'obligation scolaire, nous aurions également souhaité que soit conservée la possibilité de recourir, en pareille situation, à leur mise sous tutelle, afin d'en assurer un usage conforme à l'intérêt effectif de l'enfant, après échec des actions de médiation. Là encore aurait prévalu l'intérêt éducatif, gradué suivant la dimension du sujet, en sachant que les travaux menés sur la tutelle aux prestations sociales devraient, je l'espère, aboutir à une proposition de loi.
    Le titre III porte création d'un observatoire national de l'enfance en danger, idée déjà défendue par votre prédécesseur, monsieur le ministre. Nous n'avons qu'un souhait : puisse cet observatoire être utile à la cause qu'il est censé contribuer à défendre. Pour cela, nous avons proposé qu'il profite également des travaux des pédopsychiatres, des professionnels de l'enfance et des chercheurs, mais la commission n'a pas souhaité retenir notre amendement. Nous avons également suggéré qu'un débat annuel figure à l'ordre du jour du Parlement après la présentation du rapport de cet observatoire. Nous avons enfin proposé la création d'observatoires départementaux et nous prenons acte du choix de la commission, qui a souhaité créer des commissions départementales de l'enfance en danger. Sans nous focaliser sur des querelles terminologiques, nous demeurons particulièrement attentifs aux attributions de ces commissions et à la contribution qu'elles seraient susceptibles d'apporter à la cause de la protection de l'enfance.
    Quant aux départements, ils sauront prendre leurs pleines responsabilités et mettre en place les outils appropriés à cette mission, comme certains ont su le faire jusqu'à présent. Sur ce point, d'ailleurs, des bases de données et des études sérieuses existent, notamment grâce au travail réalisé par l'observatoire national de l'action sociale décentralisée, l'ODAS, qui a déjà été cité à plusieurs reprises par les orateurs précédents, organisme qui, depuis des années, s'attache à recueillir auprès des conseils généraux, mais aussi des parquets des mineurs, les données relatives aux maltraitrances sur enfants. Or, il ne semble pas que ces données aient été prises en compte dans l'élaboration de ce texte - ou elles l'ont été si peu -, pas plus, en tout cas, que les conclusions du rapport Naves-Cathala, commandé par le précédent gouvernement.
    Dans ces conditions, on est en droit de s'interroger sur la logique qui préside à la création d'un observatoire national de l'enfance en danger, présenté comme le point phare de ce texte, alors que les données issues de travaux existants ne sont pas prises en compte. Cela constituerait une grave erreur, car la protection de l'enfance n'a pas vocation à être un terrain de clivage, mais elle ne mérite pas non plus d'être utilisée comme un outil d'affichage.
    Sur le titre III bis relatif au signalement des actes de maltraitance sur mineurs, je ne peux que réaffirmer les propos de mon introduction concernant l'absence totale de dispositions relatives aux mineurs faisant l'objet de placement ou de mesures d'assistance éducative. De même, le traitement de ce dossier ne peut se réduire aux seules dispositions destinées à préserver les médecins de sanctions disciplinaires en cas de signalement de ces actes - mesures que nous approuvons, mais qui restent insuffisantes.
    Nous nous réjouissons en revanche de l'adoption de deux de nos amendements, repris à son compte par Mme la rapporteure, visant, dans le cadre des procédures judiciaires traitant de faits de maltraitance sur enfants, d'une part, à faire primer l'intérêt de l'enfant sur celui de la famille, dans le cas où ceux-ci viendraient à entrer en conflit, et, d'autre part, à mieux faire entendre et prendre en compte la parole et l'état psychologique de l'enfant, quel que soit son âge.
    Par conséquent - et toujours en ce qui concerne ce volet judiciaire -, nous approuvons les dispositions du titre IV permettant aux associations ayant pour objet la protection de l'enfance, de se porter partie civile dans le cadre d'actions entamées devant la justice pour cas de maltraitance sur enfant.
    Cela dit, ces dispositions doivent impérativement s'accompagner de mesures mettant l'intérêt de l'enfant au centre des préoccupations des professionnels, en lui assurant notamment la garantie de disposer d'un suivi des services compétents, au-delà du signalement et de l'action en justice.
    En revanche, nous nous inquiétons des conséquences des dispositions du titre V prévoyant la possibilité d'expérimenter de nouveaux modes de financement des services tutélaires des majeurs protégés. Outre notre étonnement de voir ces dispositions figurer dans un texte relatif à l'enfance, nous contestons le bien-fondé d'une approche exclusivement financière comme réponse à l'augmentation des décisions judiciaires de mise sous tutelle des majeurs, qui semble susciter tant d'inquiétudes. Ne serait-il pas plus sage de s'interroger d'abord sur les raisons conduisant les magistrats à prononcer autant de décisions en ce sens, décisions souvent graves de conséquences ? Là aussi, un article adopté au détour d'un texte de loi, à la fois vide et fourre-tout pour la circonstance, ne remplace pas une réflexion globale sur le sujet.
    De plus, nous ne pouvons que redouter que ne soit introduit, encore une fois par ce biais, l'esprit d'une décentralisation visant surtout à un transfert des charges de l'Etat vers les collectivités, sans les moyens financiers et les compétences techniques nécessaires. Nous savons d'ores et déjà que dix structures départementales ont été choisies. Les présidents de conseils généraux devront y porter attention, car toute diminution des crédits affectés aura pour conséquence de créer des charges supplémentaires, dans l'hypothèse d'un éventuel transfert de la compétence « handicapés ».
    Enfin, un amendement de la commission portant article additionnel après l'article 12, et qui reprend d'ailleurs pour une large part le texte de l'article 1er A introduit par le Sénat, prévoit d'exonérer de l'obligation alimentaire des articles 205 et suivants du code civil pesant sur les enfants envers leurs parents, les personnes dont les parents n'auraient pas eux-mêmes accompli leurs obligations légales et morales à leur égard. Nous approuvons cette disposition. Nous avons cependant proposé, sans obtenir l'aval de la commission, d'ajouter une possibilité d'exonération accordée, sur décision du juge aux affaires familiales, aux personnes ayant des enfants à charge ou poursuivant eux-mêmes des études, considérant qu'en pareil cas la solidarité nationale a son rôle à jouer, afin de ne pas contraindre ces personnes, essentiellement issues de classes moyennes ou modestes, à choisir entre leur devoir d'assistance envers leurs parents et l'avenir de leurs enfants, voire leur propre avenir.
    Au vu de ce panorama général, vous comprendrez donc que, malgré notre réelle volonté d'aborder ce débat dans un esprit constructif, nous ne puissions cacher notre déception face au contenu de ce texte. En effet, celui-ci ressemble surtout à une addition de « mesurettes » sans fil directeur, bonnes, inutiles ou mauvaises selon les cas.
    MM. Bernard Accoyer et Lionnel Luca. Quel culot !
    Mme Patricia Adam. Cette appréciation sans parti pris a conduit les sénateurs socialistes à s'abstenir en première lecture. Aujourd'hui, en revanche, une donnée supplémentaire est venue confirmer nos réserves, à la suite des annulations de crédits touchant la PJJ. Elle ne laisse pas augurer un avenir serein. Une grande majorité de professionnels et d'associations de ce secteur sont aussi déçus, car ils se sentent oubliés par un texte qui est bien loin de répondre à ce besoin de réforme de la législation améliorant la protection de l'enfance. Nous réservons donc notre position, qui dépendra des débats et du sort qui sera réservé à nos amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Yvan Lachaud.
    M. Yvan Lachaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'enfance et la famille devraient être synonymes d'amour et d'affection, d'épanouissement et de joie. Malheureusement, la réalité est souvent cruelle. C'est pourquoi nous avons aujourd'hui à légiférer sur ce sujet, afin de faire en sorte que les outrages et les violences cessent. Nous avons parfois peine à croire que la famille, ce lieu sacré, le foyer parental, puisse être aussi un lieu de violence. C'est un sentiment de honte qui nous étreint quand nous apprenons que la France, pays des droits de l'homme, est également le pays où de trop nombreux enfants sont encore victimes de violences, où des parents maltraitent leurs propres enfants.
    Il nous faut pourtant nous confronter à la réalité. Face à l'enfance maltraitée, nous ne pouvons rester insensibles. Notre rôle de parlementaires, notre devoir même, au-delà de l'indignation que nous pouvons ressentir et de la peine que nous pouvons éprouver, est d'agir pour assurer la protection des enfants. Les principales mesures du texte que vous nous proposez, monsieur le ministre, vont dans le bon sens, nous voulons clairement l'affirmer. Elles permettront de pallier l'irresponsabilité de certains parents, d'adapter la législation aux évolutions de comportement des hommes et, enfin, de protéger les plus faibles. Je citerai en particulier le renforcement de l'offre de garde, qui permettra de répondre à la forte demande des familles, l'amélioration de la situation des assistantes maternelles, la mise en place d'un observatoire national de l'enfance en danger et la réforme visant à rendre plus efficace la lutte contre l'absentéisme scolaire.
    Je voudrais ici revenir sur quelques points. L'observatoire national de l'enfance en danger aura, nous l'espérons, un rôle sans précédent en matière de lutte contre la maltraitance. C'est une innovation qui doit permettre un véritable travail de centralisation d'information et qui contribuera à mettre en cohérence les différentes données. Cet observatoire doit également constituer un moyen de sensibiliser la population à ces drames et de faire comprendre à tous que les enfants ont des droits. Ce sera un moyen d'en appeler à la conscience et au civisme des Français, pour que chacun de nous retrouve cet intérêt pour l'autre et pour que l'indifférence fasse place à l'écoute et au courage. Peut-être alors certains enfants seront-ils sauvés. Pour cela, il faut moins d'égoïsme, plus d'affection. Mais cet observatoire ne sera qu'un outil. Une fois les phénomènes de maltraitance connus, encore faudra-t-il développer les pratiques nécessaires de prévention, de dépistage et de prise en charge de la maltraitance.
    La maltraitance est d'ailleurs plus souvent un problème de comportement social qu'un problème de moyens mis en oeuvre, puisqu'un nombre important de dispositifs existe en faveur des enfants en danger. Mais pour mieux prendre en compte ce phénomène, la responsabilité de chacun doit être engagée, notamment pour éviter, par exemple, la propagation d'images violentes sur Internet et à la télévision, images qui ont parfois des conséquences néfastes, dramatiques, sur les familles. Nous devons donc rester plus que vigilants face à certaines dérives.
    Par ailleurs, nous saluons avec intérêt l'avancée remarquable que constitue la possibilité, pour les associations de protection et de défense de l'enfance maltraitée, de se constituer partie civile lors des poursuites engagées contre les auteurs présumés d'actes de maltraitance sur un mineur. Je voudrais cependant attirer votre attention sur un risque qu'avait soulevé le président de la commission des affaires sociales du Sénat. Il faudra en effet veiller à se prémunir contre le risque d'interventions douteuses de la part d'associations plus ou moins opportunistes, soucieuses de publicité ou, plus grave encore, d'associations qui seraient rattachées à des mouvements sectaires ou portant atteinte aux enfants.
    Ce texte traite également de l'assiduité scolaire des enfants. Cette obligation s'impose aux enfants scolarisés comme à leurs parents et tuteurs depuis l'entrée en vigueur des lois Ferry relatives à l'instruction publique. Mais force est de constater que, depuis 1882, nous n'avons toujours pas réussi à rendre l'école réellement obligatoire, puisque l'absentéisme scolaire atteint aujourd'hui des proportions inquiétantes. On parle de plus de 80 000 cas signalés aux inspecteurs d'académie. Or, les jeunes les plus fragilisés socialement, psychologiquement et culturellement sont aussi les plus touchés par l'absentéisme scolaire, donc par l'échec scolaire. Il faut d'ailleurs remarquer que l'absentéisme n'est pas dépourvu de lien avec la délinquance et le travail illégal des mineurs de moins de seize ans. Il constitue donc un danger pour les jeunes concernés, notamment lorsqu'il est la conséquence de violences en milieu scolaire ou d'une action délibérée des adultes responsables de l'enfant.
    Ce projet de loi a pour ambition de rénover la lutte contre l'absentéisme scolaire en proposant des mesures plus adaptées, puisque le dispositif de suspension des prestations familiales s'est révélé injuste et inefficace. En effet, les prestations familiales n'ont pas uniquement pour objet de financer la scolarité de l'enfant. De plus, cette sanction ne touche ni les familles à enfant unique ni celles attributaires du RMI, puisque ce dernier augmente en proportion de la baisse des prestations. En outre, ce dispositif demeure mal compris par les parents et est rarement appliqué. Il est donc inefficace. Vous proposez de sanctionner les parents par une amende. Il est souhaitable de procéder à une évaluation des résultats que donnerait ce nouveau dispositif de sanction, afin que nous puissions en mesurer l'efficacité et adopter les mesures nécessaires.
    Je voudrais souligner ici que le travail de nos collègues sénateurs du groupe de l'Union centriste a déjà permis d'améliorer ce texte en profondeur. J'évoquerai à mon tour l'amendement de Michel Mercier, qui a pour objet de décharger automatiquement de leur dette alimentaire les débiteurs d'aliments, sous réserve d'une décision contraire du juge.
    La deuxième grande priorité de ce projet de loi porte sur les conditions de garde des jeunes enfants par les assistantes maternelles. Ce mode de garde correspond non seulement aux besoins de nombreux parents, mais aussi aux intérêts de la collectivité, puisqu'il est peu coûteux pour celle-ci. Nous avons déposé, Jean-Christophe Lagarde et moi-même, deux amendements sur cette question au nom du groupe UDF. Le premier vise à ouvrir de nouvelles dérogations à la limite des « trois mineurs accueillis simultanément » par une même assistante maternelle pour les cas de force majeure. Le second tend à permettre aux assistantes maternelles agréées de faire valider les acquis de leur expérience, afin qu'elles puissent avoir accès, notamment, aux emplois proposés dans les structures d'accueil collectives, en particulier les crèches, et qu'elles puissent présenter le concours d'ATSEM - agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles. Cet amendement devrait à la fois favoriser la mobilité professionnelle des assistantes maternelles et accroître l'offre de garde au sein des structures collectives.
    Ce texte ouvre enfin la voie à des réformes que nous attendons avec beaucoup d'intérêt, comme celles du statut des assistantes maternelles ou des tutelles. S'agissant des assistantes maternelles, nous entendons rappeler qu'il convient non pas de privilégier tel ou tel mode de garde par rapport à un autre, mais bien de laisser aux parents le libre choix. Ainsi faut-il veiller à ne pas léser les crèches, qui doivent continuer à être correctement financées.
    L'UDF n'a cessé de défendre la famille en tant que valeur essentielle et pilier de notre société. C'est une valeur à laquelle nous croyons parce qu'elle permet de s'épanouir, de se construire, parce qu'elle permet de grandir et de fixer des repères et des limites. C'est aussi le premier espace de vie où l'enfant apprend à respecter les autres et à se respecter lui-même. Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, le groupe UDF apportera avec enthousiasme son soutien à ce projet de loi relatif à l'accueil et à la protection de l'enfance. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Très bien !
    M. le président. Avant de donner la parole à Mme de Panafieu, j'informe l'Assemblée que notre collègue Jean-Marc Nesme a renoncé à son temps de parole, car il a dû rentrer à Paray-le-Monial en raison de risques d'inondation. En conséquence, Mme de Panafieu reprend son temps de parole, ainsi que celui de M. Estrosi, et dispose donc d'un quart d'heure.
    Mme Françoise de Panafieu. Je vous remercie, monsieur le président, mais compte tenu de l'heure avancée, je ne compte pas utiliser la totalité de ce temps de parole.
    Monsieur le ministre, ce projet de loi traite des questions qui sont au coeur des préoccupations des familles et propose des réponses concrètes, de bon sens, souvent très attendues. Il est d'ailleurs directement issu des mesures annoncées par le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin et vous-même, lors de la conférence de la famille qui s'est réunie au printemps dernier. Ce rendez-vous annuel avait été très préparé, en amont, par un large travail de concertation que vous aviez voulu, qui avait été unanimement salué par la presse et par les associations, et auquel j'avais eu la chance de participer activement, à votre demande.
    Martine Aurillac a rappelé les chiffres de la maltraitance, et elle n'a pas été la seule d'ailleurs. Ils sont effarants. Je n'y reviendrai pas, mais je salue la création de l'observatoire de l'enfance maltraitée. Cette centralisation de renseignements permettra de mieux connaître le phénomène de la maltraitance et de créer des instruments capables de la prévenir et de la détecter.
    Je ne reviendrai pas non plus très longtemps sur l'absentéisme scolaire. Votre propos est extrêmement clair. Vos mesures le sont tout autant. Vous avez raison de les prendre. Je voudrais simplement dire à Pierre Goldberg qu'il ne s'agit pas d'inciter les enseignants, le directeur d'école, le principal ou le proviseur, à convoquer les parents, car ils le font. Ce sont les parents qui n'éprouvent pas le besoin de se rendre aux convocations du proviseur, du principal ou du directeur. Il faut donc trouver le moyen pour qu'ils se sentent obligés de se rendre à ces rendez-vous. Or, c'est ce que fait ce texte.
    Comme Martine Aurillac, je souhaite évoquer un sujet qui me tient à coeur, qui n'est pas abordé dans votre projet de loi, monsieur le ministre, mais qui touche de très nombreux enfants, les met en danger et face auquel les parents sont très démunis. Il s'agit de la protection des mineurs contre la diffusion des messages à caractère pornographique sur Internet. Sans faire de vaines polémiques, nous constatons tous que les enfants, comme les adultes d'ailleurs, se trouvent très fréquemment confrontés à l'apparition inopinée de sites pornographiques sur leurs écrans. Des techniques inadmissibles sont utilisées : ouverture automatique de fenêtres - les fameux popups -, impossibilité de fermer certains sites, etc. Cette situation déstabilise l'enfant et le laisse aux prises avec des images qui sont agressives.
    M. Lionnel Luca. Tout à fait !
    Mme Françoise de Panafieu. Sur le plan législatif, il n'y a pas de vide juridique. En effet, la diffusion de messages à caractère pornographique sur Internet, lorsqu'ils sont susceptibles d'être consultés par des mineurs, constitue une infraction pénale. Mais cette législation n'est applicable qu'aux auteurs d'infractions localisés sur le territoire français ou ressortissants de pays aux législations similaires. On voit les limites de l'application de la loi. C'est pourquoi il faut développer les systèmes de contrôle parentaux et surtout en faire une très large publicité. Il faut informer les parents et rendre plus accessibles les différents systèmes existants. A eux, ensuite, de choisir et d'exercer leur responsabilité de parents.
    M. Lionnel Luca. Très bien !
    Mme Françoise de Panafieu. Il est également souhaitable de diffuser plus largement l'adresse du site commun aux ministères de la justice, de l'intérieur, de la défense et de la famille en ce qui concerne la lutte contre la pédophilie et de lutte « contre la fabrication, le transfert et la diffusion de messages à caractères violent ou pornographique susceptibles d'être vus ou perçus par un mineur » - je cite l'article 227-24 du code pénal. Ce site permet des signalements en ligne d'infractions. Il donne, par ailleurs, des conseils aux parents et aux enfants. C'est une mine d'informations à mon avis trop peu connue. Il faut reconnaître que l'adresse est un peu difficile à retenir : http://www.internet-mineurs.gouv.fr. Il faudrait sans doute la simplifier pour que nous la retenions correctement.
    M. Lionnel Luca. C'est un test de mémoire !
    Mme Françoise de Panafieu. Par ailleurs, je pense que l'Association des fournisseurs d'accès et de service Internet - AFA - doit également jouer un rôle déterminant. De nombreuses familles accèdent à Internet en passant par la page d'accueil de leur fournisseur d'accès. Ne serait-il pas possible que, sur cette page d'accueil, s'inscrive de façon bien visible un bandeau informatif à l'adresse des parents, qui permettrait d'accéder facilement aux différents logiciels de contrôle parentaux et aux sites de protection de l'enfance ?
    Une fois encore, il n'est pas question de déresponsabiliser les parents. Ce sont eux qui doivent surveiller leurs enfants. Il s'agit de mettre à leur disposition des outils facilement accessibles leur permettant d'exercer un véritable contrôle. Monsieur le ministre, votre ministère doit travailler en étroite collaboration avec celui de Nicole Fontaine qui nous proposera, au mois de janvier, un projet de loi sur l'économie numérique. Nous comptons sur vous pour examiner ce problème, car nous savons que vous vous sentez très concerné.
    Monsieur le ministre, votre projet de loi, même s'il n'aborde pas le sujet que je viens d'évoquer, apporte des réponses à tous ceux qui luttent pour la protection de l'enfance en danger. Je ne peux que m'en réjouir. Bravo pour tout le travail que vous accomplissez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La discussion générale est close.
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué à la famille. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je souhaiterais répondre au dernier point évoqué par Mme Françoise de Panafieu - ainsi que par d'autres parlementaires, d'ailleurs. Le cours du débat me permettra de revenir aux autres points, et je pourrais, au moment de la présentation des amendements, répondre à chacun des orateurs. Mais comme il n'y a pas d'amendements sur le point précis des systèmes de contrôle sur Internet, je désire en dire un mot.
    Dans quelques semaines, je signerai une convention avec l'Institut national de la consommation, qui sera destinée à rendre publiques les évaluations des différents logiciels parentaux existant sur le marché. Nous y inclurons l'évaluation des logiciels « anti-spam » - les spam étant ces messages qui apparaissent inopinément sur l'écran.
    Nous travaillons également à la mise en place de bandeaux ou de boutons pour permettre un accès immédiat, à partir de n'importe quel système de navigation, à notre site de signalement « mineurs.gouv ». Nous avons engagé, avec Dominique Perben, un important travail de refonte de ce site, dont l'accès sera facilité par une nouvelle présentation et un meilleur référencement.
    En tout début d'année, toujours avec Dominique Perben, nous installerons un groupe interadministratif réunissant justice, police, gendarmerie et familles de façon à mieux connaître l'existence de ce site lorsqu'il aura été revu.
    Enfin, avec l'ensemble des fournisseurs d'accès, qui ont tous répondu favorablement, nous entendons renforcer le système de protection des mineurs. Ce sujet, sur lequel nous travaillons en commun avec le ministère de la justice, avec le ministère de l'intérieur et d'autres services, mérite d'être pris en compte car aujourd'hui, dans ce domaine de la protection des enfants, l'efficacité n'est pas au rendez-vous.

Discussion des articles

    M. le président. J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

Article 1er A

    M. le président. « Art. 1er A. - L'article L. 132-6 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :
    « Art. L. 132-6. - Les personnes tenues à l'obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l'occasion de toute demande d'aide sociale, invitées à indiquer l'aide qu'elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais.
    « Sous réserve d'une décision contraire du juge aux affaires familiales, sont de droit dispensés de fournir cette aide :
    « - les enfants déchargés de l'obligation alimentaire sur le fondement des articles L. 228-1 du présent code et 379 du code civil ;
    « - les enfants qui, après signalement de l'aide sociale à l'enfance, ont fait l'objet d'un retrait judiciaire de leur milieu familial durant une période de trente-six mois cumulés au cours des douze premières années de leur vie.
    « Cette dispense s'étend aux descendants des enfants susvisés.
    « La commission d'admission fixe, en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l'obligation alimentaire, la proportion de l'aide consentie par les collectivités publiques. La décision de la commission peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l'aide sociale d'une décision judiciaire rejetant sa demande d'aliments ou limitant l'obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l'organisme d'admission. La décision de la commission fait également l'objet d'une révision lorsque les débiteurs d'aliments ont été condamnés à verser des arrérages supérieurs à ceux qu'elle avait prévus. »
    La parole est à Mme Patricia Adam, inscrite sur l'article.
    Mme Patricia Adam. Je crois que cet article va être déplacé à la fin du texte. Nous interviendrons à ce moment.
    M. le président. Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 1, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 1er A. »
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Cet amendement a pour objet de permettre de transférer l'article 1er à la fin du texte, avec un titre nouveau, dans un souci de meilleure lisibilité. Il a été adopté par la commission.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Avis favorable, dans un souci de cohérence.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, l'article 1er A est supprimé.

Article 1er

    M. le président. Je donne lecture de l'article 1er :

TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES
À L'AGRÉMENT DES ASSISTANTS MATERNELS

    « Art. 1er. - La dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 421-1 du code de l'action sociale et des familles est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : "Lorsque l'accueil a un caractère permanent, le nombre de mineurs accueillis ne peut être supérieur à trois, sauf dérogation accordée par le président du conseil général. Lorsqu'il n'a pas un caractère permanent, le nombre de mineurs accueillis ne peut être supérieur à six, dans la limite de trois mineurs accueillis simultanément, sauf dérogation accordée par le président du conseil général, notamment pour la garde périscolaire des fratries. »
    La parole est à Mme Patricia Adam, inscrite sur l'article.
    Mme Patricia Adam. Cet article 1er concerne les assistants maternels et le nombre des enfants qu'ils peuvent accueillir, simultanément ou non. Nous proposerons deux amendements de suppression de cet article, pour les raisons que j'ai évoquées tout à l'heure.
    Les modalités introduites par cet article ne se justifient pas. Aujourd'hui, en effet, il suffit que le président du conseil général intervienne en ce sens. Une circulaire pourrait faire l'affaire jusqu'à l'adoption du statut très attendu des assistants maternels.
    M. le président. Mme Adam, Mme Hélène Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 27, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 1er. »
    La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement, considérant qu'il y a urgence à répondre au besoin réel des familles et des assistants maternels en créant des places nouvelles pour les enfants. Le recours à la loi s'impose pour unifier les pratiques sur l'ensemble du territoire.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. L'article 1er vise à renforcer de 15 % environ le nombre des places disponibles. Cet amendement le remet complètement en cause. Avis défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 2, ainsi libellé :
    « Après les mots : "de mineurs accueillis, rédiger ainsi la fin de la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 1er : "simultanément ne peut être supérieur à trois, sauf dérogation accordée par le président du conseil général. »
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Cet amendement tend à revenir à la rédaction initiale du projet de loi, en supprimant la mention de six enfants accueillis, introduite par le Sénat. Cette rédaction, plus simple, permet davantage de souplesse et de pragmatisme.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Avis favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Lachaud et M. Lagarde et les membres de l'Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement n° 17, ainsi rédigé :
    « Compléter la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 1er par les mots : "et pour les cas de force majeure dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat. »
    Je m'interroge sur la compatibilité de cet amendement avec l'amendement n° 2, qui vient d'être adopté. Cela dit, je donne la parole à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Je tiens, malgré l'heure tardive, à défendre cet amendement n° 17. Celui-ci prévoit d'élargir les possibilités d'accueil des assistantes maternelles en cas de force majeure - dont les conditions seraient définies en Conseil d'Etat. Nous pensons aux grèves qui éclatent, malheureusement de façon récurrente, dans l'éducation nationale notamment, et qui peuvent priver les parents de tout moyen de garde. En effet, les assistantes maternelles, même pour des durées limitées, sont contraintes de refuser d'accueillir des enfants supplémentaires. Ce fut le cas cette année encore, et rien ne nous permet de penser que cela ne se reproduira pas dans les années à venir.
    Voilà pourquoi nous suggérons, de façon raisonnable et raisonnée, en laissant le Conseil d'Etat préciser avec le Gouvernement un certain nombre de situations exceptionnelles, de permettre aux assistantes maternelles d'accueillir plus d'enfants lorsque la situation l'impose. Sans cette possibilité, certains parents sont dans l'impossibilité absolue d'aller travailler, ce qui est une grande perte pour le pays, pour eux et pour leurs enfants.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteur. Défavorable. Il convient d'unifier le système des dérogations et non de créer des mini-crèches familiales chez les assistants maternels, dont ce n'est pas la vocation.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Ce n'est pas le sens de l'amendement !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Je comprends, monsieur Lagarde, votre préoccupation. Elle est légitime, dans un certain nombre de cas de force majeure. Et le texte actuel prévoit la possibilité, pour le président de conseil général, d'autoriser une dérogation. Mais cette dérogation ne peut être qu'individualisée. Si elle est d'ordre général, ce n'est plus une dérogation et en cas d'abus, les enfants risquent d'être accueillis en surnombre, ce qui pourrait mettre en cause leur sécurité.
    Voilà la raison pour laquelle je souhaite que cet amendement soit repoussé, ou qu'il soit retiré.
    Aujourd'hui, il est possible d'accueillir jusqu'à trois enfants à temps plein au maximum et ce nombre peut-être dépassé dans des cas particuliers.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Je crains, monsieur le ministre, madame la rapporteure, qu'il n'y ait une légère incompréhension. Il ne s'agit pas de créer des crèches familiales. Il s'agit, pour quelques jours, de permettre à des assistantes maternelles d'accueillir plus de trois enfants simultanément. Imaginez la situation d'une assistante maternelle accueillant des enfants dont les parents ont d'autres enfants à l'école. Si un jour ces derniers ne peuvent y aller, que se passera-t-il concrètement ? Les parents s'arrêteront de travailler pour garder leurs enfants scolarisés et les autres. Et ils perdent leur journée de salaire, tout comme l'assistante maternelle.
    Mais surtout, monsieur le ministre, en tant qu'élu de Seine-Saint-Denis, je tiens à appeler votre attention sur le point suivant : il arrive malheureusement que le président du conseil général soutienne une grève. Il n'aura donc pas envie d'accorder ce type de dérogation.
    Je précise que je ne demande pas de dérogation générale. Je suggère qu'en cas de grève prolongée des modes d'accueil, on accorde une telle dérogation.
    Demain, ailleurs qu'en Seine-Saint-Denis, d'autres présidents de conseils généraux pourraient aussi estimer que la gêne occasionnée aux parents et aux familles ne justifie pas de dérogation, pour gêner tel ou tel gouvernement. Il me semble que c'est arrivé il n'y a pas si longtemps que cela.
    Ce n'est donc pas au pouvoir local d'accorder la dérogation. Cette dérogation doit être la résultante d'une situation, en l'occurrence la grève, qui place certains parents qui ont besoin de travailler dans l'impossibilité de le faire.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Goldberg, pour défendre le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis. (Sourires.)
    M. Pierre Goldberg. M. Lagarde parle au ministre d'une « incompréhension ». Il fait de l'anticipation. Je crois savoir qu'au mois de janvier, dans le cadre d'une niche parlementaire, l'UDF, qui sera peut-être soutenue par l'UMP, va tenter de porter atteinte à un droit constitutionnel : le droit de grève !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Ce n'est pas de l'anticipation, c'est du fantasme !
    M. Pierre Goldberg. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous propose de suivre M. Lagarde et d'accorder une dérogation au seul département de Seine-Saint-Denis (Sourires), puisque son président a l'outrecuidance de soutenir la grève.
    Si cet amendement n'est pas retiré, je voterai résolument contre.
    M. le président. Vous êtes déjà au courant des niches de l'UDF pour le mois de janvier, monsieur Goldberg ? (Sourires.)
    M. Pierre Goldberg. Un député se doit d'être informé !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Mais il n'y a aucune collaboration entre l'UDF et les communistes !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié par l'amendement n° 2.
    (L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Article 2

    M. le président. « Art. 2. - A la demande de l'assistant maternel agréé pour l'accueil de mineurs à titre non permanent antérieurement à la publication de la présente loi, le président du conseil général peut, afin de préciser le nombre d'enfants pouvant être accueillis simultanément, modifier l'agrément en cours de validité, pour la durée de validité restant à courir. La demande précise le nombre et l'âge des mineurs que l'assistant maternel souhaite pouvoir accueillir simultanément. Dans le cas où l'assistant maternel demandeur a suivi la formation prévue à l'article L. 2112-3 du code de la santé publique ou justifie d'une dispense au titre de ce même article, le président du conseil général peut décider que la modification vaut renouvellement de l'agrément.
    « Pendant une période d'un an à compter de la publication de la présente loi, et par dérogation au délai fixé au premier alinéa de l'article L. 421-2 du code de l'action sociale et des familles, la demande est réputée acceptée à défaut de notification d'une décision dans un délai de six mois à compter de la réception de cette demande. »
    La parole est à Mme Patricia Adam, inscrite sur l'article.
    Mme Patricia Adam. Nous souhaitons la suppression de cet article, pour les mêmes raisons que celles invoquées précédemment. Nous considérons qu'il est nul et non avenu, compte tenu de ce qui figure déjà dans les textes.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Goldberg.
    M. Pierre Goldberg. Selon les récents travaux du commissariat général du Plan, plusieurs centaines de milliers d'assistantes maternelles devraient être formées et recrutées d'ici 2010, à la fois en raison des départs en retraite et pour répondre à la demande.
    Des efforts auraient dû être engagés en matière de formation afin de professionnaliser les métiers de la petite enfance et de créer, pour ceux qui les exercent, des débouchés et des possibilités de mobilité. Un ensemble de mesures aurait pu concourir à qualifier davantage ces métiers et à les rendre plus attractifs.
    Quelle est aujourd'hui la situation de la formation, à laquelle ce projet de loi ne va pas remédier ? Les assistantes maternelles indépendantes sont aujourd'hui les plus nombreuses - 337 000, si mes chiffres sont exacts. Elles ne bénéficient pas du même suivi que leurs homologues en crèche familiale. Leur agrément, délivré par le conseil général, peut être aléatoire, leur formation n'est que de soixante heures, réparties sur cinq années.
    La reconnaissance pleine et entière de leur profession reste donc à faire. Cette reconnaissance passe par une formation qualifiante, une revalorisation salariale conséquente, un déroulement de carrière, des droits pour une vraie retraite, la prise en compte de la spécificité de leur profession qui, exercée à leur propre domicile, engage leur propre famille.
    Dans ce cadre, une réforme de la formation initiale et continue, la validation des acquis, la création du cursus dans le cadre de l'éducation nationale sont de première urgence, alors même que des problèmes de recrutement et d'engagement se posent de manière cruciale dans ces professions.
    Ce projet de loi est bien en deçà de toutes ces préoccupations - que nous jugeons légitimes.
    M. le président. Mmes Adam, Mme Hélène Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 28, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 2. »
    La parole est à M. Simon Renucci.
    M. Simon Renucci. Légiférer aujourd'hui sur des points particuliers du statut des assistantes maternelles est peu justifié dans la mesure où l'examen d'un projet de loi portant sur l'ensemble du statut de cette profession devrait normalement avoir lieu dans le courant de l'année 2004. Dans cette perspective, une réflexion globale sur le statut des assistantes maternelles pourra être engagée dans quelques mois et l'adoption précipitée de dispostions isolées concernant cette profession se justifie d'autant moins. Par ailleurs, rien n'empêche aujourd'hui les départements, au vu des textes actuels, d'agréer les assistantes maternelles pour trois enfants.
    Les assistantes maternelles ont besoin de reconnaissance. Sans faire d'amalgame, n'existe-t-il pas des assistantes maternelles pour les enfants dont le cadre familial, sans être parfait, est normal ou du moins ne pose pas de problème social ni économique ?
    Ces assistantes maternelles - encore une fois - ont besoin de reconnaissance : toute forme de reconnaissance est une forme de rémunération. Mais l'essentiel, pour elles, serait de pouvoir bénéficier d'une formation adéquate, qui tienne compte tant des impératifs que de la nature de la garde qu'elles ont à effectuer.
    Il est vrai que, souvent, l'enfant qu'elles accueillent et dont elles sont amenées à faire la « guidance » vient d'une famille en difficulté. Et il est dommage de passer rapidement sur des thèmes aussi ardus que ceux évoqués dans ce projet de loi, qui cible l'ensemble des difficultés les unes après les autres. Certes, ce texte a le mérite d'exister. Mais en même temps, il n'offre pas de prise en charge globale du problème.
    Souvent, quand une famille est en difficulté, on a plutôt besoin, avant d'aller plus loin, d'un bilan social et d'une coordination. Les assistantes maternelles ont donc besoin d'une formation pluridisciplinaire.
    On le voit : le débat sur les assistantes maternelles, faute d'aborder de manière globale le problème de la famille, ne parvient à proposer que des solutions imparfaites.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement pour les raisons déjà évoquées lors de l'examen de l'article 1er. Il convient de créer les places nécessaires le plus rapidement possible.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 3 rectifié, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 2 :
    « Le président du conseil général modifie l'agrément en cours de validité des assistants maternels agréés pour l'accueil de mineurs à titre non permanent afin de préciser le nombre d'enfants pouvant être accueillis simultanément, pour la durée de validité restant à courir.
    « Dans le cas où l'assistant maternel a suivi la formation prévue à l'article L. 2112-3 du code de la santé publique ou justifie d'une dispense au titre de ce même article, la modification, sous réserve de la vérification de son état de santé, vaut renouvellement de l'agrément.
    « Le président du conseil général dispose d'un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi pour procéder aux modifications d'agrément. Au-delà de ce délai, les agréments sont réputés modifiés.
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Cet amendement vise à assouplir la procédure du texte voté par le Sénat en dispensant les assistants maternels de faire la demande de modification de l'agrément auprès du président du conseil général. Il en résultera une meilleure lisibilité et une mise en pratique plus rapide de ce texte.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Avis très favorable du Gouvernement. Cet amendement de simplification va en effet faciliter la mise en oeuvre des dispositions transitoires.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé.
    Les amendements n°s 20 et 21 de M. Dutoit n'ont plus d'objet.

Après l'article 2

    M. le président. MM. Lachaud et Lagarde et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 18, ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « Tout assistant maternel agréé en activité depuis dix ans est en droit de faire valider les acquis de son expérience professionnelle en vue de l'acquisition du certificat d'aptitude professionnelle "petite enfance ou de tout autre certificat équivalent.
    « Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent article. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cet amendement tend à permettre à un assistant maternel agréé en activité depuis dix ans de faire valider les acquis de son expérience professionnelle en vue de l'acquisition du certificat d'aptitude professionnelle « petite enfance », nécessaire aux collectivités locales qui souhaitent recruter des ATSEM - agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles.
    Il me paraît tout à fait légitime que des personnes auxquelles on a accepté de confier des enfants pendant dix ans n'aient pas à repasser un examen. L'agrément vaut reconnaissance de la compétence professionnelle. En outre, cette disposition permettrait de résoudre les problèmes que peuvent rencontrer les communes pour recruter des ATSEM.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Avis défavorable. Cet amendement renvoie au futur statut des assistants maternels qui sera prochainement voté.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Monsieur Lagarde, ce très bon amendement sera satisfait par un texte actuellement soumis au Conseil d'Etat sur le statut des assistants maternels. Ce projet, qui vous sera présenté au premier semestre 2004, ouvrira en effet tous les concours de la fonction publique aux assistants maternels et leur apportera une légitime reconnaissance. Vos préoccupations seront ainsi prises en compte. Je souhaiterais donc, monsieur Lagarde, que vous retiriez votre amendement.
    M. le président. Monsieur Lagarde, retirez-vous ce très bon amendement ?
    M. Jean-Christophe Lagarde. Compte tenu des engagements que vient de prendre le ministre, le groupe UDF retire cet amendement. Nous reviendrons voter cette disposition avec enthousiasme dans quelques mois.
    M. le président. L'amendement n° 18 est retiré.

Article 3

    M. le président. Je donne lecture de l'article 3 :

TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES
À LA LUTTE CONTRE L'ABSENTÉISME SCOLAIRE

    « Art. 3. - L'article L. 552-3 du code de la sécurité sociale est abrogé. »
    Plusieurs orateurs sont inscrits sur cet article.
    La parole et à M. Simon Renucci.
    M. Simon Renucci. Cet article, qui tend à alléger les amendes pour absentéisme et à stigmatiser l'emploi de mineurs de plus de treize ans, est très important. Ces dispositions, qui correspondent à une attente forte, auraient cependant nécessité la mise en place de cellules de suivi et de cellules éducatives.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Goldberg.
    M. Pierre Goldberg. Je tiens à saluer l'abrogation du texte permettant de priver une famille de ses allocations en raison de l'absentéisme de l'un de ses enfants. Vous mettez fin ainsi, monsieur le ministre, à une mesure injuste, inefficace. Pourtant, je reste quelque peu réservé sur votre façon d'appréhender l'absentéisme scolaire à travers ce projet de loi.
    Pour combattre cet absentéisme, en effet, vous ne proposez que des sanctions pénales, alors que le rapport remis en janvier 2003 à MM. Ferry, Darcos et vous-même est riche d'enseignements sur ce sujet. Le phénomène de l'absentéisme scolaire est dû à un certain nombre de causes qu'il convient d'aborder toutes, sans en stigmatiser ni en exclure aucune si l'on souhaite pouvoir apporter des solutions. Certes, il faut commencer par chercher du côté de la famille. Il faut donc insister sur la nécessité d'engager des actions de prévention et de responsabilisation des parents. Mais la création d'un délit d'absentéisme scolaire - étonnant - sanctionné par une contravention de quatrième classe, sera tout aussi inefficace que la suppression des allocations familiales.
    A cet égard, il faut rappeler qu'il existe déjà dans le code pénal des sanctions réprimant les carences éducatives. Pourquoi ne pas rappeler combien l'institution scolaire a, elle aussi, toute sa responsabilité en ce domaine ? Elle est, quant à elle, responsable de l'absentéisme du fait des dysfonctionnements du système, par manque de moyens financiers et humains le plus souvent. Nombre de jeunes ont des difficultés à trouver un sens et un intérêt à l'école, en particulier lorsqu'ils subissent une orientation non désirée, c'est-à-dire une orientation par l'échec. Il faut donc privilégier le dépistage précoce des causes de l'absentéisme de l'enfant, l'engagement d'un dialogue entre les parents et l'institution, l'application de mesures préventives et de soutien éducatif.
    Pourquoi ne pas affirmer la nécessité d'assurer pleinement le remplacement des professeurs absents, de revoir l'organisation du temps scolaire afin d'accueillir les élèves ? Pourquoi ne pas défendre la cohérence des emplois du temps ? Pourquoi ne pas assurer la présence dans tous les établissements de conseillers d'orientation, de surveillants, d'infirmières scolaires, d'assistantes sociales ?
    Nous aurons l'occasion de revenir sur ces sujets très prochainement. En attendant, nous aurions souhaité que cette question grave de l'absentéisme scolaire soit abordée d'une tout autre manière.
    M. le président. Mme Adam, Mme Hélène Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 29, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 3 :
    « L'article L. 552-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
    « Art. L. 552-3. - Tout manquement injustifié à l'obligation scolaire entraîne la mise sous tutelle des prestations familiales versées aux parents. »
    La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Nous ne pouvons que nous réjouir de la suppression du principe de suspension ou d'interruption du versement des allocations familiales. Cette disposition, qui n'était pas pertinente, n'a d'ailleurs jamais été appliquée. Il nous semble cependant nécessaire de prévoir des mesures contraignantes pour les cas où l'absentéisme scolaire persisterait. A cet égard, la mise sous tutelle des prestations familiales présenterait un caractère à la fois contraignant et éducatif. Cet amendement permettrait d'établir une gradation dans la médiation conduite auprès des parents.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement, qu'elle a jugé contraire à l'esprit du texte. Celui-ci vise en effet à responsabiliser les parents, plutôt qu'à les mettre sous tutelle.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Défavorable, également. En effet, en matière d'absentéisme, nous visons à responsabiliser les parents et à les accompagner dans leur démarche éducative, et non pas à les mettre dans une situation de dépendance.
    Par ailleurs, vous nous proposez, si j'ai bien compris, une mise sous tutelle des prestations sociales pour enfants. Or, ce système - la TPSE - existe déjà. Il est tout à fait possible, aujourd'hui, de l'utiliser, et il l'est, du reste, dans un certain nombre de cas.
    Je profiterai également de cet amendement pour répondre à M. Goldberg, qui est intervenu sur l'article. Nous proposons non pas une simple sanction pénale, mais un système progressif d'accompagnement, qui se déroule en plusieurs temps. Dans un premier temps, on rassemble autour du chef d'établissement la communauté éducative, c'est-à-dire l'élève, les parents et les enseignants. Ce n'est que passé un délai maximum d'un mois sans évolution de la situation, que l'inspecteur d'académie a la possibilité de saisir le procureur et de déposer plainte, après avoir mobilisé, avec le préfet, l'ensemble des services de l'Etat pour accompagner la famille. Il s'agit donc toujours d'une logique d'accompagnement. En cas de refus absolu de la famille, ou de négligence grave, en effet la sanction peut tomber. S'il n'y a pas de sanction, le système est inutile. Mais la sanction doit être l'aboutissement du processus, lorsqu'on se trouve face à des familles réellement récalcitrantes. Dans les autres cas, c'est l'accompagnement qui s'impose.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Goldberg.
    M. Pierre Goldberg. Monsieur le ministre, les députés communistes se sont toujours opposés à la suppression des allocations familiales aux parents. Nous ne changerons pas d'avis ce soir. Si je peux suivre votre raisonnement, je comprends mal que vous vouliez créer une nouvelle pénalité, puisque le code permet déjà la sanction. Je ferai une comparaison pour détendre l'atmosphère.
    M. le ministre délégué à la famille. Elle n'est pas très tendue !
    M. le président. En effet !
    M. Pierre Goldberg. J'ai ouï dire qu'un parlementaire avait suggéré une journée sans Sarkozy. Ne pourrait-on pas avoir une journée sans esprit de matraque ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Je préciserai simplement, monsieur le ministre, que je ne demande évidemment pas qu'une tutelle aux prestations sociales soit mise en place dès qu'il y a manquement à l'obligation scolaire. J'ai bien précisé que cette possibilité devait être offerte à la fin...
    Le ministre délégué à la famille. Elle existe ! C'est la TPSE !
    Mme Patricia Adam. La TPSE existe, bien sûr, mais elle ne peut être accordée et prononcée par un juge pour enfants que lorsque les conditions d'alimentation, de logement et d'hygiène sont manisfestement défectueuses. Elle ne s'applique pas aux conditions d'éducation. Ce n'est donc pas possible aujourd'hui. Notre amendement vise simplement à mettre un moyen supplémentaire à la disposition des professionnels. Bien sûr, je suis tout à fait d'accord pour privilégier d'abord les mesures à caractère pédagogique.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué à la famille. Je vous rappellerai simplement, et très respectueusement, madame la députée, les termes de votre amendement : « Tout manquement injustifié à l'obligation scolaire entraîne la mise sous tutelle des prestations familiales versées aux parents. » D'où mon avis défavorable.
    M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Un amendement n° 30, qui n'apparaît pas sur la feuille de séance devait préciser justement la portée de cet amendement n° 29.
    M. le président. Certes. Mais l'Assemblée doit à présent se prononcer sur le numéro 29.
    Je mets aux voix l'amendement n° 29.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 3.
    (L'article 3 est adopté.)

Après l'article 3

    M. le président. Mmes Adam, Mignon, Guinchard-Kunstler, Darciaux, M. Renucci et les membres du groupe socialiste appartenant à la commission des affaires culturelles ont présenté un amendement, n° 49, ainsi rédigé :
    « Après l'article 3, insérer l'article suivant :
    « Dans l'article L. 552-6 du code de la sécurité sociale, après le mot : "défectueuses, sont insérés les mots : "ou dans le cas où il serait porté atteinte aux conditions de leur éducation, notamment à travers le non-respect de l'obligation scolaire,. »
    La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Au temps pour moi : l'amendement n° 30 dont je vous parlais réapparaît ici sous le numéro 49. Et cet amendement précise les cas où les allocations familiales pourraient être mises sous tutelle.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que celles exposées précédemment.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Adam, Mme Hélène Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 31, ainsi rédigé :
    « Après l'article 3, insérer l'article suivant :
    « Est instituée dans chaque département une "cellule départementale de prévention de l'absentéisme scolaire coprésidée par le président du conseil général et l'inspecteur d'académie, chargée de recenser les situations de non-respect de l'obligation scolaire, de les étudier et de les traiter.
    « Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de mise en oeuvre de ces commissions. »
    La parole est à M. Simon Renucci.
    M. Simon Renucci. Il s'agit, par cet amendement, d'insister sur l'importance de l'échelon départemental. La mise en place des cellules départementales a pour objectif de lutter plus efficacement contre l'absentéisme scolaire, en associant les principaux acteurs concernés. Ces cellules pourront s'inspirer des résultats obtenus à l'échelle de certaines villes à la suite de la mise en place des unités de veille éducative copilotées par les maires et les présidents de conseils généraux.
    Certes, l'absentéisme scolaire est un phénomène familial, mais c'est aussi un phénomène de société qui ne concerne donc pas uniquement la communauté éducative. Nous accordons donc une grande importance au bilan social effectué dans les familles et au suivi de ces familles car nous savons très bien que c'est ainsi qu'on peut éviter la répétition des mêmes comportements. C'est la raison pour laquelle, le suivi de ces familles étant assuré par le conseil général, à travers notamment les assistantes sociales, nous considérons que des cellules de veille éducative sont nécessaires pour traiter le problème en continu et pallier toutes les difficultés et les échecs, souvent très nombreux.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure, La commission a rejeté cet amendement. Certes, il s'agit d'une excellente idée. Mais ces cellules existent déjà depuis septembre 2003. Dirigées par le préfet dans le cadre du plan de lutte gouvernemental contre l'absentéisme scolaire, elles ont pour but d'élaborer des actions de prévention et de promotion, des actions de soutien à la responsabilité parentale, notamment par la création d'un module de soutien à cette responsabilité parentale.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Même avis que la commission. J'ajoute que ces cellules sont placées sous la responsabilité du préfet, qui peut mobiliser l'ensemble des services de l'Etat, ce que ne pourrait pas faire le président du conseil général.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 3 bis

    M. le président. « Art. 3 bis - L'article L. 211-6 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « L'emploi d'un mineur de plus de treize ans, en vue d'exercer les activités définies aux deux premiers alinéas, est subordonné à son avis favorable écrit. »
    Je mets aux voix l'article 3 bis.
    (L'article 3 bis est adopté.)

Après l'article 3 bis

    M. le président. Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 4, ainsi libellé :
    « Après l'article 3 bis, insérer l'article suivant :
    « L'article L. 131-12 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
    « Art. L. 131-12. - Les modalités du contrôle de l'obligation, de la fréquentation et de l'assiduité scolaires sont déterminées par décret en Conseil d'Etat. »
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Amendement de coordination dans le code de l'éducation.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.
    (L'amendement est adopté.)

Article 4

    M. le président. « Art. 4. - Au premier alinéa de l'article L. 261-2 du code du travail, les mots : "d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 3 750 EUR sont remplacés par les mots : "de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende. »
    Je mets aux voix l'article 4.
    (L'article 4 est adopté.)

Article 5

    M. le président. « Art. 5. - L'article L. 261-4 du code du travail est ainsi rédigé :
    « Art. L. 261-4. - Toute infraction aux dispositions de l'article L. 211-6 est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende.
    « Est punie d'une amende de 3 750 EUR et, en cas de récidive, d'une peine d'emprisonnement de quatre mois et d'une amende de 7 500 EUR, toute personne qui a remis directement ou indirectement aux enfants visés à l'article L. 211-6 ou à leurs représentants légaux des fonds au-delà de la part fixée, comme il est dit à l'article L. 211-8. »
    Je mets aux voix l'article 5.
    (L'article 5 est adopté.)

Article 6

    M. le président. « Art. 6. - I. - L'article L. 362-3 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Toutefois, en cas d'emploi dissimulé d'un mineur soumis à l'obligation scolaire, les peines encourues sont de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende. »
    « II. - L'article L. 341-1 du code du travail applicable dans la collectivité départementale de Mayotte est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Toutefois, en cas de travail clandestin d'un mineur soumis à l'obligation scolaire, les peines encourues sont de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende. »
    Je mets aux voix l'article 6.
    (L'article 6 est adopté.)

Après l'article 6

    M. le président. Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 5, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 227-19 du code pénal, il est inséré un article 227-20 ainsi rédigé :
    « Art. 227-20. - Le fait de provoquer un mineur à la mendicité est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende. »
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Cet amendement consiste à harmoniser le quantum pénal des infractions pouvant être à l'origine d'un absentéisme scolaire en ce qui concerne la mendicité. Il s'agit d'appliquer à la mendicité les mêmes sanctions pénales que pour les emplois non autorisés de l'enfant.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.
    (L'amendement est adopté.)

Avant l'article 7

    M. le président. Je donne lecture du libellé du titre III :
    « Titre III. - Dispositions relatives à l'Observatoire national de l'enfance en danger. »
    Mme Adam, Mme Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 34, ainsi rédigé :
    « Avant l'article 7, compléter l'intitulé du titre III par les mots : "et aux observatoires départementaux de l'enfance en danger. »
    La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Cet amendement est en cohérence avec l'amendement visant à créer, dans chaque département, un observatoire départemental de l'enfance en danger. Je l'ai dit, nous approuvons la création de l'observatoire national de l'enfance en danger. Mais il nous semblerait utile que son action soit relayée au niveau des départements afin d'assurer le suivi des enfants victimes de maltraitance. Nous disposerions ainsi d'une analyse beaucoup plus fine et plus pertinente des situations et d'une meilleure remontée des informations recueillies sur le terrain.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement, afin de ne pas alourdir, par la mise en place d'observatoires départementaux, un dispositif qui a été validé par les associations et leur donne satisfaction.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Avis défavorable. Il convient de laisser aux départements le maximum de souplesse dans leur organisation destinée à faire remonter les informations.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 7

    M. le président. « Art. 7. - L'article L. 226-6 du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
    « 1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
    « L'Etat, les départements et des personnes morales de droit public ou privé constituent un groupement d'intérêt public pour gérer un service d'accueil téléphonique gratuit ainsi qu'un observatoire de l'enfance en danger afin d'exercer, à l'échelon national, les missions d'observation, d'analyse et de prévention des mauvais traitements et de protection des mineurs maltraités prévues au présent chapitre. » ;
    « 2° Dans la première phrase du deuxième alinéa, les mots : "Ce service sont remplacés par les mots : "Le service d'accueil téléphonique ;
    « 3° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « L'Observatoire de l'enfance en danger contribue au recueil et à l'analyse des données et des études concernant la maltraitance envers les mineurs, en provenance de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics, des fondations et des associations oeuvrant en ce domaine. Il contribue à la mise en cohérence des différentes données et informations, à l'amélioration de la connaissance des phénomènes de maltraitance et recense les pratiques de prévention, de dépistage et de prise en charge de la maltraitance, dont les résultats ont été jugés concluants, afin d'en assurer la promotion auprès de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics, des fondations et des associations oeuvrant dans ce domaine. Il présente au Gouvernement et au Parlement un rapport annuel rendu public. »
    Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 6, ainsi rédigé :
    « Dans la deuxième phrase du dernier alinéa du 3° de l'article 7, après les mots : "prise en charge, insérer les mots : "médico-sociale et judiciaire. »
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. L'observatoire doit recenser l'ensemble des mesures prises par les services sociaux ou par les services judiciaires.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Avis favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 7, ainsi rédigé :
    « Dans la deuxième phrase du dernier alinéa du 3° de l'article 7, après les mots : "les résultats, insérer le mot : "évalués. »
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. L'observatoire doit avoir une mission d'évaluation des dispositifs de protection de l'enfance.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. C'est un amendement de bons sens. Avis favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Mme Adam, Mme Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 36, ainsi rédigé :
    « Compléter la deuxième phrase du dernier alinéa du 3° de l'article 7 par les mots : "des services de pédopsychiatrie des centres hospitaliers et des institutions de soins, des professionnels de l'enfance et des chercheurs. »
    La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Nous demandons que l'observatoire prenne en compte les données et les études émanant des services de pédopsychiatrie des centres hospitaliers et des institutions de soins, des professionnels de l'enfance et des chercheurs. Eu égard à leurs compétences, une telle précision apparaît naturelle, sauf si vous me démontrez que le texte le permet déjà.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Cet amendement a été rejeté par la commission. En effet, il appartiendra au GIP de définir lui-même la composition de l'observatoire et il est évident que celui-ci aura à travailler avec les pédopsychiatres. Se lancer dans une énumération conduirait certainement à oublier des catégories socioprofessionnelles qui s'occupent activement de la protection de l'enfance.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Même avis, monsieur le président. Madame la députée, je comprends et je partage votre volonté, mais nous devons nous méfier des inventaires à la Prévert : à chaque fois que l'on veut dresser une liste de professions ou de services, on en oublie un. Pour cette raison, nous avons délibérément choisi des expressions génériques telles que services de l'Etat, des collectivités locales, etc. Je propose donc à l'Assemblée de repousser cet amendement, à moins qu'il ne soit retiré.
    M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Je réponds à la demande de M. le ministre. En revanche, je souhaite vivement que la pédopsychiatrie soit représentée, pour la simple raison que cette discipline a très souvent été laissée de côté dans la protection de l'enfance. Or le travail dans ce domaine, compte tenu du manque actuel de praticiens, est très difficile, ce qui est très dommageable pour le suivi des enfants. Les pédopsychiatres apportent un avis pertinent et leurs connaissances nous sont très précieuses. J'espère vivement que le GIP pourra leur permettre d'être présents au sein de l'observatoire.
    M. le président. L'amendement n° 36 est retiré.
    M. Dutoit, Mme Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains appartenant à la commission des affaires culturelles ont présenté un amendement n° 22, ainsi rédigé :
    « Avant la dernière phrase du dernier alinéa du 3° de l'article 7, insérer la phrase suivante : "Il participe à l'évaluation des dispositifs de protection de l'enfance. »
    La parole est à M. Pierre Goldberg.
    M. Pierre Goldberg. Nous le savons très bien : quel que soit le nombre de dispositifs mis en place, on ne voit pas clair sans une évaluation. Cet amendement est donc de bon sens : il est nécessaire d'offrir à l'observatoire la possibilité d'évaluer les dispositifs de lutte contre la maltraitance des enfants afin de mettre en avant, le plus rapidement possible, les dysfonctionnements les plus importants, tels que le manque de familles d'accueil.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. L'amendement est satisfait par l'amendement n° 7 qui vient d'être adopté. Rejeté.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Même avis. Un amendement de bon sens : c'est précisément de cette manière que j'ai qualifié l'amendement n° 7, qui est exactement le même, puisqu'il prévoit une évaluation.
    M. le président. Monsieur Goldberg, maintenez-vous votre amendement ?
    M. Pierre Goldberg. Qu'il est dur de se faire entendre ! Non, je ne le retire pas. Nous en avons clairement débattu en commission. Cet amendement est infiniment plus précis et va plus loin que celui de la commission.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué à la famille. Monsieur le président, peut-être allez-vous devoir juger...
    M. le président. Je ne juge rien : je préside la séance, c'est tout !
    M. le ministre délégué à la famille. Disons : apprécier la différence. L'amendement n° 7 proposait d'ajouter le mot « évalués ». Celui de M. Goldberg est totalement différent : il emploie le mot : « évaluation » ! Nous en avons adopté un. Est-il vraiment nécessaire de bégayer ? (Sourires.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.

    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Adam, Mme Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 37, ainsi rédigé :
    « Compléter le dernier alinéa du 3° de l'article 7 par la phrase suivante : "Ce rapport donne lieu à un débat parlementaire annuel, dans chacune des deux chambres du Parlement. »
    La parole est à M. Simon Renucci.
    M. Simon Renucci. Instituer un débat annuel sur le rapport de l'observatoire permettrait de mieux prendre en compte les travaux de ce dernier afin d'aboutir à une réflexion plus large ou, le cas échéant, d'adopter les mesures législatives qu'il préconise.
    L'observatoire est en effet un outil attendu, susceptible de porter au jour un certain nombre de dysfonctionnements. Il est cependant dénué de moyens pour y remédier. La meilleure façon de le rendre actif et lisible est donc de permettre aux députés de s'emparer de ces questions. Aujourd'hui, face à une situation très difficile, qui nous émeut et nous effraie parfois, il est important que le Parlement puisse faire le point une fois par an.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Pour la commission, le Parlement a davantage vocation à voter des textes plutôt qu'à organiser des débats sur des rapports. L'amendement a donc été rejeté.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Défavorable. Nous mettons en place l'observatoire. Un rapport sera établi et rendu public. A partir de là, libre à l'Assemblée, au moment où elle le souhaite, d'ouvrir un débat sur le sujet.
    M. le président. La parole est à M. Simon Renucci.
    M. Simon Renucci. Votre réponse, monsieur le ministre, montre bien où se trouve la difficulté. L'observatoire, comme son nom l'indique, va relever, selon des critères qu'il reste à définir, un certain nombre de dysfonctionnements et suggérer des solutions. N'est-ce pas au Parlement de les concrétiser ? Dans le cas contraire, on demeurerait dans l'observation, et non dans le traitement des problèmes.
    Il est nécessaire de fonder un observatoire. Mais le fait de refuser - car il s'agit d'un refus - de débattre, puis de décider des mesures qu'il pourrait préconiser suscite mon incompréhension. Peut-être est-ce ma qualité de praticien, de professionnel qui me pousse à voir ainsi, mais nous ne réalisons que la moitié du traitement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 8, ainsi rédigé :
    « Compléter le 3° de l'article 7 par l'alinéa suivant :
    « Dans chaque département est créée une commission départementale de l'enfance en danger, coprésidée par le président du conseil général et le représentant de l'Etat dans le département, chargée d'exercer les missions d'observation, d'analyse et de prévention des mauvais traitements sur mineurs et de protection de ceux-ci. »
    Sur cet amendement, Mmes Adam, Mignon, Guinchard-Kunstler, Darciaux, M. Renucci et les membres du groupe socialiste appartenant à la commission des affaires culturelles ont présenté un sous-amendement n° 52 ainsi rédigé :
    « Compléter l'amendement n° 8 par l'alinéa suivant :
    « Est instituée au sein de chaque commission départementale de l'enfance en danger une "cellule départementale de prévention de l'absentéisme scolaire coprésidée par le président du conseil général et l'inspecteur d'académie, chargée de recenser les situations de non-respect de l'obligation scolaire, de les étudier et de les traiter. »
    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 8.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Il s'agit de créer des commissions départementales de l'enfance en danger, réunissant tous les acteurs de la protection de l'enfance dans les départements, et coprésidées par le représentant de l'Etat et le président du conseil général. A l'instar des commissions départementales de lutte contre les violences faites aux femmes, ces commissions, en mettant autour de la table différents acteurs de la protection de l'enfance, pourraient permettre, en coordination avec l'observatoire national, d'assurer un meilleur suivi de l'enfance maltraitée et en danger.
    M. le président. La parole est à Mme Adam pour soutenir le sous-amendement n° 52.
    Mme Patricia Adam. Le sous-amendement n° 52 vise à instituer au sein de chaque commission départementale de l'enfant en danger une « cellule départementale de prévention de l'absentéisme scolaire » coprésidée par le président du conseil général et l'inspecteur d'académie. Il est en effet difficile de dissocier l'enfance en danger et l'absentéisme scolaire.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 52 ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Avis défavorable. J'ai déjà répondu à ce sujet : de telles commissions existent.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 8 et le sous-amendement n° 52 ?
    M. le ministre délégué à la famille. Je souscris à votre préoccupation, madame la rapporteure. Simplement, nous sommes là dans un domaine qui relève plus du décret que de la loi. Par ailleurs, deux commissions existent déjà, la commission départementale de protection de l'enfance et le groupe de coordination départementale, qui permet d'améliorer l'efficacité des signalements et de favoriser et la cohérence de la prise en charge et le droit des familles. Je me propose de rassembler ces deux commissions par voie de décret, ce qui permettra de répondre à votre préoccupation, tout en évitant d'empiéter sur le domaine réglementaire.
    En conséquence, je vous demande, madame la rapporteure, de bien vouloir retirer votre amendement.
    M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Monsieur le ministre, à la lumière de vos explications, et compte tenu des précisions que vous avez apportées sur ces deux commissions dont je ne connais pas le fonctionnement - elles ne doivent pas exister dans tous les départements -, je retire l'amendement n° 8 à titre personnel.
    M. le président. L'amendement n° 8 est retiré.
    M. le président. Mme Adam, Mme Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 38, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 7 par l'alinéa suivant :
    « 4° Dans chaque département est créé, sous l'autorité du conseil général, un observatoire départemental de l'enfance en danger chargé d'exercer, à l'échelon départemental, les missions d'observation, d'analyse et de prévention des mauvais traitements et de protection des mineurs maltraités prévues au présent chapitre. »
    La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Je retire cet amendement, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 38 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 7, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 7, ainsi modifié, est adopté.)

Article 8

    M. le président. « Art. 8. - I. - Dans la première phrase de l'article L. 226-9 du code de l'action sociale et des familles, après les mots : "du service d'accueil téléphonique, sont insérés les mots : "et de l'Observatoire de l'enfance en danger.
    « II. - Dans la première phrase de l'article L. 226-10 du même code, les mots : "du service sont rempacés par les mots : "du service d'accueil téléphonique et de l'Observatoire de l'enfance en danger. »
    Je mets aux voix l'article 8.
    (L'article 8 est adopté.)

Après l'article 8

    M. le président. Mme Royal, Mme Adam, M. Ayrault, Mme Mignon, Mme Génisson, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 33, ainsi libellé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « Après le premier alinéa de l'article 25 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Le barreau garantit la présence d'avocats formés à l'assistance aux justiciables victimes de violences sexuelles, notamment mineurs. »
    La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Nous avons proposé cet amendement afin de permettre aux enfants victimes de violences sexuelles d'être assistés d'un avocat formé à l'assistance aux justiciables victimes de violences. Cette garantie indispensable n'existe pas pour le moment. Or, on imagine bien les difficultés que représentent pour la défense des dossiers aussi complexes et délicats à traiter. Cette proposition vise donc à améliorer la défense des enfants.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez. Cet amendement a été rejeté. En effet, il nous paraît hors sujet, puisqu'il traite de la formation des professions judiciaires, qui relève plutôt des compétences du ministère de la justice.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. C'est un avis défavorable, monsieur le président.
    Permièrement, ce point relève plutôt du domaine de compétence du garde des sceaux.
    Deuxièmement, le dispositif proposé aurait pour conséquence d'obliger les avocats, profession libérale, à se soumettre à un cadre de formation, et ce sans aucune concertation préalable. Or, le respect de l'indépendance professionnelle entre en contradiction avec l'obligation d'acquérir une spécialisation dans un domaine déterminé.
    Je pense par conséquent que, si ce point devait être revu, ce serait dans le cadre d'un texte présenté par le garde des sceaux, après avoir fait l'objet d'une concertation préalable avec les professionnels concernées.
    M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. J'entends ce que vous me dites, mais je sais, pour en avoir discuté avec eux, que les professionnels le demandent. C'est un élément qui me semble très important, compte tenu, comme je l'ai précisé tout à l'heure, de la très grande difficulté à traiter ce type de sujets.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 8 bis

    M. le président. Je donne lecture de l'article 8 bis :

TITRE III bis
DISPOSITIONS RELATIVES AU SIGNALEMENT
DES ACTES DE MALTRAITANCE

    « Art. 8 bis. - L'article 226-14 du code pénal est ainsi rédigé :
    « Art. 226-14. - L'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n'est pas applicable :
    « 1° A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes sexuelles dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;
    « 2° Au médecin qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République les sévices ou privations qu'il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques ou sexuelles de toute nature ont été commises. Lorsque la victime est mineure, son accord n'est pas nécessaire.
    « Le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions prévues au présent article ne peut faire l'objet d'aucune sanction disciplinaire. »
    Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 9, ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du 2° du texte proposé pour l'article 226-14 du code pénal, substituer aux mots : "ou sexuelles, les mots : ", sexuelles ou psychiques ».
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Il s'agit simplement d'ajouter l'adjectif « psychiques » pour qualifier les violences commises contre les enfants.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 8 bis, modifié par l'amendement n° 9.
    (L'article 8 bis, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 8 bis

    M. le président. Mme Adam, Mme Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 39, ainsi libellé ;
    « Après l'article 8 bis, insérer l'article suivant :
    « L'article 375 du code civil est ainsi rédigé :
    « Art. 375. - Si la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation sont gravement compromises, des mesures d'assistance éducative peuvent être ordonnées par justice à la requête des père et mère conjointement, ou de l'un d'eux, de la personne ou du service à qui l'enfant a été confié ou du tuteur, du mineur lui-même ou du ministère public. Le juge peut se saisir d'office à titre exceptionnel. Elles peuvent être ordonnées en même temps pour plusieurs enfants relevant de la même autorité parentale. La décision fixe la durée de la mesure, sans que celle-ci puisse, lorsqu'il s'agit d'une mesure éducative exercée par un service ou une institution, excéder deux ans. La mesure peut être renouvelée par décision motivée. »
    La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Cet amendement propose de supprimer la limitation à deux ans que prévoit l'article 375 du code civil pour les mesures d'assistance éducative afin d'éviter une remise en cause trop fréquente des décisions prises par une juridiction, notamment au gré des mutations de magistrats. En effet, ces répétitions tous les deux ans sont quelquefois un peu difficiles à vivre pour les enfants au-dessus desquels est ainsi suspendue une espèce d'épée de Damoclès alors qu'ils vivent généralement bien leur placement.
    En fait, nous proposons une simplification en laissant néanmoins la possibilité au juge d'intervenir au cas où un événement majeur justifierait la modification de ce placement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Il est également défavorable, car le fait de revoir les mesures d'assistance éducative tous les deux ans est très intéressant.
    J'entends bien qu'il peut exister des cas particuliers, dont certains ont été récemment évoqués par le professeur Berger de manière tout à fait légitime. Néanmoins, il n'est pas judicieux d'en prendre prétexte pour vouloir établir une règle générale. En effet, la possibilité de revisiter tous les deux ans les procédures permet de voir les évolutions qui sont intervenues au sein de la famille. De plus une mesure décidée à un âge donné de l'enfant peut ne plus lui être applicable ensuite quand il grandit. Ainsi un enfant change beaucoup entre treize et quinze ans par exemple. Compte tenu de son évolution et des changements dans ses rapports avec ses parents, il est donc intéressant de pouvoir faire le point tous les deux ans, sans perturber le placement outre mesure.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Adam, Mme Mignon, M. Renucci, et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 41, ainsi libellé :
    « Après l'article 8 bis, insérer l'article suivant :
    « Le 2° de l'article 375-3 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée : "S'agissant de personnes morales définies comme des structures d'accueil non traditionnelles au sens de la circulaire n° 83/3 du 27 janvier 1983, recevant l'habilitation du président du conseil général pour l'organisation de séjours de rupture à l'étranger pour des mineurs faisant l'objet de mesures d'assistance éducative, celles-ci doivent également recevoir l'agrément du ministère de la justice pour l'organisation de ce type de séjour lorsque ceux-ci concernent des mineurs confiés à la protection judiciaire de la jeunesse. »
    La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Cet amendement tend à préciser l'article 375-3 du code civil qui traite des séjours de rupture, dont certains ont malheureusement fait l'actualité ces derniers temps, dans notre pays. Ils sont en effet souvent utilisés actuellement par les juges pour enfants sans que leur habilitation soit parfaitement définie par les textes. Ce vide juridique étant préjudiciable, il y a urgence à légiférer.
    Certes, un rapport de l'IGAS, qui sera prochainement diffusé, présentera des propositions en la matière. Cependant, cet amendement est justifié car il propose que l'habilitation pour ces séjours de rupture soit accompagnée de l'agrément du ministère de la justice. Aujourd'hui en effet, les conseils généraux n'ont pas les moyens pour évaluer la qualité de ces séjours qui se passent à l'étranger, souvent très loin.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Avis défavorable, car cet amendement relève effectivement, madame la députée, du ministère de la justice et de la protection judiciaire de la jeunesse.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Madame la députée, j'ai certes été sensible à cet amendement. Cependant, nous avons pris ensemble, avec le garde des sceaux, l'initiative d'organiser une mission conjointe de l'IGAS et de l'inspection générale des services judiciaires dont le rapport devrait nous être rendu au printemps. Il formulera peut-être la même proposition que vous, mais il me semble préférable d'attendre ses conclusions avant de se prononcer sur le sujet.
    M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. J'ai bien entendu la réponse de M. le ministre, mais j'espère simplement que ces résultats seront connus très prochainement parce que je suis très dubitative devant certains de ces placements.
    M. le président. Retirez-vous l'amendement n° 41 ?
    Mme Patricia Adam. Oui, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 41 est retiré.
    Mme Adam, Mme Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 48, ainsi libellé :
    « Après l'article 8 bis, insérer l'article suivant :
    « Avant le premier alinéa de l'article 388-1 du code civil, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Tout mineur a le droit d'être entendu dans le cadre d'une procédure le concernant ou, à défaut - si notamment en raison du jeune âge du mineur son audition par le juge apparaît inutile à la manifestation de la vérité -, de bénéficier d'une expertise médicale ou pédopsychiatrique dont les résultats sont présentés au juge. »
    La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. L'audition de tout mineur est importante. Or elle n'est pas souvent effective et nombre de mineurs ne sont pas entendus parce qu'ils sont trop jeunes, et n'ont la possibilité ni d'être représentés par un avocat ni de bénéficier d'une expertise médicale ou pédopsychiatrique, seul moyen, souvent, de faire apparaître sa souffrance.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement malgré son intérêt mais son objet rejoint celui de l'amendement n° 13 qui sera examiné plus tard.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Je comprends bien l'intérêt de pouvoir entendre l'enfant, mais je pense aussi que le fait d'imposer son audition peut être une fausse réponse et aboutir à ajouter un traumatisme à un autre traumatisme. En effet, le fait d'obliger des enfants à prendre parti ou à juger leurs parents peut les mettre dans des situations extrêmement difficiles. Le travail de juger n'appartient qu'aux juges.
    Si je souhaite que l'enfant puisse être entendu à chaque fois que cela sera possible et conforme à son intérêt, je crains que la généralisation de cette possibilité dans la loi ait des conséquences dramatiques sur l'équilibre de certains enfants. C'est pourquoi je la refuse.
    M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Je comprends vos réticences, monsieur le ministre, mais l'expertise médicale ou pédopsychiatrique est trop rarement utilisée dans ce domaine.
    Les situations dans lesquelles l'enfant n'est pas entendu, sous une forme ou sous une autre, sont encore trop nombreuses. Je suis d'accord avec vous sur le fait que son audition peut parfois être un tramatisme pour un enfant, mais le fait qu'il ne soit pas représenté, ou que sa souffrance ne puisse pas être exprimée au moins par une expertise médicale, est une grave lacune. La parole de l'enfant est trop peu présente aujourd'hui dans les textes concernant la protection de l'enfance. J'insiste particulièrement sur ce point.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué à la famille. Madame la députée, les remarques que vous venez de formuler relèvent aussi de la formation des juges, domaine en faveur duquel Dominique Perben consent de gros efforts, notamment pour que les juges utilisent tous les moyens à leur disposition, qu'il s'agisse d'expertises ou d'auditions par des spécialistes, chaque fois que cela semble nécessaire afin d'étayer leur jugement.
    S'il faut effectivement préserver l'intérêt de l'enfant, il convient aussi d'éviter de le traumatiser en l'obligeant à prendre parti, alors qu'il est d'abord une victime, sans aucune responsabilité dans la situation vécue.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 48.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 10, ainsi rédigé :
    « Après l'article 8 bis, insérer l'article suivant :
    « L'avant-dernier alinéa de l'article L. 4124-6 du code de la santé publique est abrogé. »
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Il s'agit d'un amendement de cohérence. En effet, l'article 8 bis introduit par le Sénat avec l'avis favorable du Gouvernement précise que le signalement par les médecins aux autorités compétentes ne peut faire l'objet d'aucune sanction disciplinaire. Il convient donc de supprimer l'alinéa du code de la santé publique qui oblige la juridiction ordinale à surseoir à statuer et prévoit que des sanctions pourront être exercées à l'encontre des médecins qui signalent.
    Cet amendement renforcera la protection des mineurs victimes de maltraitances en confortant le médecin qui signale. Cette disposition est très attendue par l'ensemble de la profession, notamment par les pédopsychiatres qui pourront désormais signaler en toute bonne foi les maltraitances qu'ils constatent sur les enfants.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Il s'agit d'un excellent amendement qui enrichit le texte et permettra de protéger les médecins. En effet, sachant qu'ils ne pourront plus être l'objet de sanctions disciplinaires, ils seront plus enclins à signaler les cas de maltraitance.
    Cela étant, en cas d'erreur, ils pourront toujours faire l'objet de poursuites au pénal ou au civil.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Goldberg.
    M. Pierre Goldberg. J'approuve cet amendement et vous allez comprendre pourquoi.
    Dans son intervention liminaire, M. le ministre a bien voulu souligner la contribution d'une sénatrice communistre, Mme Beaudeau. Or cet amendement a été voté pour la première fois en 2001 au Sénat, sur proposition du groupe communiste et républicain, dans des termes complètement identiques.
    M. le président. Il n'y a pas de droit d'auteur en matière d'amendements. Je suis désolé. (Sourires.)
    M. Pierre Goldberg. Je n'ai rien demandé !
    M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Monsieur Goldberg, j'ai travaillé avec Mme Beaudeau sur cette question des signalements. Nous nous sommes rencontrées, bien avant l'examen de ce projet de loi. Il est donc tout à fait normal que nous ayons eu la même vision des choses. Chacun peut ainsi constater que la protection de l'enfance dépasse les clivages politiques et je m'en réjouis.
    M. le président. C'est une maternité conjuguée ! (Sourires.)
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué à la famille. Lorsqu'il y a maternité, monsieur le président, il y a aussi paternité. Je crois donc que le premier qui avait eu cette idée, il y a quelques années, était Jean-François Mattei. (Sourires.)

    M. le président. Revenons-en tout de même à l'amendement n° 10 que je mets aux voix.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
    Je suis saisi de deux amendements, n°s 11 rectifié et 40, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 11 rectifié, présenté par Mme Martinez, rapporteure, Mme Adam et les commissaires membres du groupe socialiste est ainsi rédigé :
    « Après l'article 8 bis, insérer les dipositions suivantes :

« TITRE III ter
« DISPOSITIONS RELATIVES
AUX DÉCISIONS DE JUSTICE

    « Art. 8 ter - Le dernier alinéa de l'article 375-1 du code civil est complété par les mots : "et se prononcer en stricte considération de l'intérêt de l'enfant. »
    L'amendement n° 40, présenté par Mme Adam, M. Ayrault, Mme Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    Après l'article 8 bis, insérer l'article suivant :
    « Le dernier alinéa de l'article 375-1 du code civil est complété par les mots : "et se prononcer en stricte considération de l'intérêt de l'enfant. »
    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 11 rectifié.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. L'ajout proposé affirme l'intérêt supérieur de l'enfant tel que défini par la convention internationale des droits de l'enfant.
    M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l'amendement n° 40.
    Mme Patricia Adam. Nous partageons exactement le même avis sur ce sujet avec Mme Martinez.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Je suis un peu désolé, sinon de rompre cet élan d'unanimité, du moins de me contenter d'en appeler à la sagesse de l'Assemblée. En effet, la disposition proposée peut laisser sous-entendre qu'un juge pour enfant pourrait intervenir sans prendre en considération l'intérêt de l'enfant, puisqu'on lui demande explicitement de se prononcer « dans le strict intérêt de l'enfant ». Telle est bien la vocation du juge pour enfants. Alors pourquoi le préciser davantage ? Cela laisse planer un climat de suspicion qui me gêne.
    Je m'en remets donc à la sagesse de l'Assemblée.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, l'amendement n° 40 tombe.

Article 9

    M. le président. Je donne lecture de l'article 9 :

TITRE IV
DISPOSITIONS RELATIVES À LA CONSTITUTION
DE PARTIE CIVILE DES ASSOCIATIONS
OEUVRANT DANS LE DOMAINE
DE L'ENFANCE MALTRAITÉE

    « Art. 9. - L'article 2-2 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
    « Art. 2-2. - Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, dont l'objet statutaire comporte la lutte contre les violences sexuelles ou contre les violences exercées sur un membre de la famille, peut exercer les droits reconnus à la partie civile, en ce qui concerne les atteintes volontaires à la vie et à l'intégrité de la personne, les agressions et autres atteintes sexuelles, l'enlèvement et la séquestration et la violation de domicile réprimés par les articles 221-1 à 221-4, 222-1 à 222-18, 222-23 à 222-33, 224-1 à 224-5, 226-4 et 432-8 du code pénal lorsque la victime de ces infractions était majeure à la date des faits. Toutefois, l'association ne sera recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accord de la victime. Si celle-ci est un majeur protégé, l'accord doit être donné par son représentant légal ou, à défaut, par le juge des tutelles. »
    Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 12, ainsi libellé :
    « Après le mot : " majeur , rédiger ainsi la fin de la dernière phrase du texte proposé pour l'article 2-2 du code de procédure pénale : " en tutelle, l'accord doit être donné par son représentant légal. . »
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Cet amendement a pour objet de préciser que seul le majeur en tutelle dispose d'un représentant ayant le pouvoir de donner son accord et non l'ensemble des majeurs protégés. C'est un amendement de précision rédactionnelle.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié par l'amendement n° 12.
    (L'article 9, ainsi modifié, est adopté.)

Article 10

    M. le président. « Art. 10. - L'article 2-3 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
    «Art. 2-3. - Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits et dont l'objet statutaire comporte la défense ou l'assistance de l'enfant en danger et victime de toutes formes de maltraitance peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les atteintes volontaires à la vie et à l'intégrité, les agressions et autres atteintes sexuelles commises sur la personne d'un mineur et les infractions de mise en péril des mineurs réprimées par les articles 221-1 à 221-5, 222-1 à 222-18-1, 222-23 à 222-33-1, 223-1 à 223-10, 223-13, 224-1 à 224-5, 225-7 à 225-9, 225-12-1 à 225-12-4, 227-1, 227-2, 227-15 à 227-27-1 du code pénal, lorsque l'action publique a été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée.
    « Toute association, inscrite auprès du ministère de la justice dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, est recevable dans son action même si l'action publique n'a pas été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée en ce qui concerne l'infraction mentionnée à l'article 227-23 du code pénal. Il en est de même lorsqu'il est fait application des dispositions du second alinéa de l'article 222-22 et de l'article 227-27-1 dudit code. »
    Je mets aux voix l'article 10.
    (L'article 10 est adopté).

Article 11

    M. le président. « Art. 11. - Les dispositions des articles 9 et 10 sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans le îles Wallis-et-Futuna. »
    Mme Martinez, rapporteure, et Mme Vernaudon ont présenté un amendement, n° 47, ainsi rédigé :
    « Dans l'article 11, après le mot : "articles, insérer les mots : "8 bis,. »
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Cet amendement vise à introduire une nouvelle référence afin que l'article 8 bis modifiant les dispositions du code pénal relatives au signalement des actes de maltraitance puisse être appliqué dans les territoires ultramarins.
    Cet amendement a été présenté sur l'initiative de Mme Vernaudon.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Bien évidemment favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 47.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 11, modifié par l'amendement n° 47.
    (L'article 11, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 11

    M. le président. Mme Royal, Mme Adam, M. Ayrault, Mme Mignon, Mme Génisson, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 42, ainsi libellé :
    Après l'article 11, insérer les dispositions suivantes :
    « Titre IV bis. - Dispositions portant protection des femmes victimes de violences.
    « Article... - Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
    « I. - Après l'article 53-1, est inséré un article 53-2 ainsi rédigé :
    « Art. 53-2. - L'accueil des victimes de violences conjugales et sexuelles et le traitement des procédures judiciaires qui découlent de ces actes font l'objet d'une attention particulière. Les parquets sollicitent du magistrat instructeur les mesures de sûreté nécessaires à la garantie de la sécurité des victimes. »
    « II. - Après l'article 138, est inséré un article 138-1 ainsi rédigé :
    « Art. 138-1. - Dans les cas où il existe des présomptions sérieuses et concordantes tendant à prouver l'implication d'un individu dans un viol ou une autre agression sexuelle, et dans le but de protéger la victime de ladite agression, le juge des libertés et de la détention peut ordonner le placement du suspect dans un foyer situé sur le territoire d'une commune autre que celle dans laquelle réside la victime. »
    Madame Adam, accepteriez-vous compte tenu de l'heure, de défendre en même temps les amendements n°s 43 et 44, qui relèvent de préoccupations communes ?
    Mme Patricia Adam. Bien entendu, monsieur le président.
    M. le président. Je suis en effet saisi de deux amendements, n°s 43 et 44, présentés par Mme Royal, Mme Adam, M. Ayrault, Mme Mignon, Mme Génisson, M. Renucci et les membres du groupe socialiste.
    L'amendement n° 43 est ainsi libellé :
    « Après l'article 11, insérer les dispositions suivantes :
    « Titre IV ter. - Dispositions relatives à la prescription en matière de violences et d'agressions sexuelles.
    « Article... - Le code pénal est ainsi modifié :
    « I. - L'article 222-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Par dérogation aux dispositions de l'article 8 du code de procédure pénale, le délai de prescription ne commence à courir qu'à partir de la révélation de l'infraction lorsqu'il s'agit d'agressions sexuelles. »
    « II. - Après l'article 222-16-1, est inséré un article 222-16-2 ainsi rédigé :
    « Art. 222-16-2. - Par dérogation aux dispositions de l'article 8 du code de procédure pénale, le délai de prescription ne commence à courir qu'à partir de la révélation de l'infraction lorsqu'il s'agit de violences. »
    L'amendement n° 44 est ainsi libellé :
    « Après l'article 11, insérer les dispositions suivantes :
    « Titre IV quater. - Dispositions visant à permettre le maintien des femmes à domicile en cas de violences conjugales.
    « Article... - Le deuxième alinéa de l'article 257 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée :
    « Dans le cas où des présomptions sérieuses de violence d'un conjoint sur l'autre existent, le juge donne, dans le cadre des pouvoirs qui lui sont conférés par l'article 255 du présent code, la pleine jouissance du domicile conjugal au conjoint victime de ces violences, sauf demande contraire de ce dernier. »
    La parole est à Mme Patricia Adam, pour défendre ces trois amendements.
    Mme Patricia Adam. Ces amendements visent à étendre les mesures de protection des victimes de violences conjugales et sexuelles. Nous demandons que les procédures judiciaires qui en découlent fassent l'objet d'une attention particulière et, notamment, que le conjoint victime de violences puisse, avec ses enfants, garder le domicile conjugal, sauf demande contraire de sa part. Cela faciliterait la protection des enfants dans de telles situations, qui, on le sait, sont très importantes en France. Une journée a été consacrée, la semaine dernière, à ce problème.
    Si nous présentons ces amendements dans le cadre de l'examen d'un texte sur la protection de l'enfance, c'est parce que violences conjugales et maltraitance des enfants sont souvent liées. Les études réalisées dans ce domaine montrent que, dans huit cas de placements d'enfants en urgence sur dix, il y a violence au sein du couple.
    Voilà pourquoi nous demandons que les magistrats instructeurs puissent prendre les mesures de sûreté nécessaires à la garantie de la sécurité des victimes et, en particulier, accorder à ces dernières la pleine jouissance du domicile conjugal, ce qui n'est malheureusement que très rarement le cas actuellement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 42, 43 et 44 ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. La commission a rejeté ces amendements au motif qu'ils n'ont pas leur place dans le présent projet de loi.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Avis défavorable sur ces trois amendements.
    Ils soulèvent un vrai problème et c'est un sujet de préoccupation que je partage avec vous, madame Adam, mais dans le texte sur le divorce qui sera présenté au Sénat fin janvier, plusieurs articles traitent spécifiquement de ce sujet.
    Par ailleurs, dans le cadre des travaux de l'observatoire sur l'enfance maltraitée, je proposerai, comme nous l'avait d'ailleurs recommandé Pierre Naves, la réalisation d'une étude sur les conséquences pour les enfants des violences conjugales.
    M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Je maintiens malgré tout ces amendements parce que je considère qu'il y a véritablement urgence à légiférer en ce domaine. Les dispositions que nous proposons donnent du sens à ce projet sur la protection de l'enfance. Les cellules départementales sur les violences conjugales ont montré que les deux problèmes sont liés et nous avons suffisamment d'éléments aujourd'hui pour légiférer en la matière.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 42.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 43.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 44.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 13, ainsi libellé :
    « Après l'article 11, insérer l'article suivant :
    « L'article 388-1 du code civil est ainsi rédigé :
    « Art. 388-1. - Dans toute procédure le concernant, le mineur est entendu par le juge ou la personne désignée par le juge à cet effet.
    « Il est entendu seul, avec un avocat ou une personne de son choix. Si ce choix n'apparaît pas conforme à l'intérêt du mineur, le juge peut pocéder à la désignation d'une autre personne. L'audition du mineur ne lui confère pas la qualité de partie à la procédure. »
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Cet amendement tend à préciser que : « Dans toute procédure le concernant, le mineur est entendu par le juge ou la personne désignée par le juge à cet effet. » Nous réclamons à nouveau la prise en compte de la parole de l'enfant.
    J'ai bien conscience de la difficulté d'entendre des mineurs, quel que soit leur âge, mais je ne trouve pas normal que, dans la plupart des procédures, les mineurs ne soient pas entendus, ni même l'administrateur had hoc désigné pour le représenter, et que leur parole ne soit pas prise en compte par le juge chargé de prendre une décision les concernant.
    Voilà pourquoi, même après avoir entendu vos arguments, monsieur le ministre, je défends cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Je reste défavorable au fait de rendre obligatoire l'audition d'un mineur par le juge, pour les raisons de protection de l'enfance que j'ai expliquées tout à l'heure. Autant, je le répète, le juge a la liberté, chaque fois qu'il est nécessaire, de donner à l'enfant la possibilité de s'exprimer, autant il me paraît très dangereux de rendre cette procédure obligatoire. En effet, dans un certain nombre de cas, on va faire peser sur l'enfant la responsabilité d'un choix qu'il devra faire, parfois, entre deux de ses parents, ce qui peut être très perturbant pour lui.
    J'ajoute que notre législation, avec l'actuel article 388-1, qui correspond exactement à l'article 12 de la Convention relative aux droits de l'enfant, nous met en parfaite conformité avec cet instrument. Ne prenons pas le risque de rendre obligatoire l'expression de l'enfant : elle peut, dans certains cas, lui être préjudiciable.
    M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Monsieur le ministre, j'entends vos arguments. Des auditions répétées peuvent en effet être sources de problèmes pour les enfants. Tout en regrettant cependant que les juges n'aient pas toujours la sagesse d'entendre les enfants quand ils le peuvent, à titre personnel, je retire donc, pour répondre à votre attente, cet amendement.
    M. le président. L'amendement n° 13 est retiré.

Article 12

    M. le président. Je donne lecture de l'article 12 :

TITRE V
DISPOSITIONS RELATIVES
À L'EXPÉRIMENTATION
DE DOTATIONS GLOBALES DE FINANCEMENT
DANS LES SERVICES TUTÉLAIRES

    « Art. 12. - Le Gouvernement est autorisé, à compter de la publication de la présente loi et pour une période n'excédant pas deux ans, à expérimenter un mode de financement prévoyant, suivant des modalités fixées par décret, le versement de dotations globales de financement aux personnes morales publiques ou privées à qui le juge des tutelles confie l'exercice des mesures de protection juridique mentionnées aux articles 491, 492 et 508 du code civil et de tutelle aux prestations sociales des personnes majeures définies au chapitre VII du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale ainsi qu'aux établissements de santé et aux établissements sociaux ou médico-sociaux dont un préposé a été nommé par le juge des tutelles, en application de l'article 499 du code civil, gérant de la tutelle.
    Les dotations sont versées respectivement par l'Etat, pour le financement des mesures de protection juridique mentionnées aux articles 491, 492, 499 et 508 du code civil et par l'organisme mentionné à l'article L. 167-3 du code de la sécurité sociale, auquel incombe dans le département le règlement des frais du plus grand nombre de mesures de protection juridique définies au chapitre VII du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale, pour le financement desdites mesures.
    La liste des personnes morales publiques ou privées admises à participer à l'expérimentation est fixée par arrêté des ministres en charge de la famille et de la sécurité sociale.
    Avant l'expiration du délai de deux ans mentionné au premier alinéa, le Gouvernement présente au Parlement un rapport dressant le bilan de l'expérimentation. »
    Mme Adam, Mme Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 45, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 12. »
    La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. Si nous demandons la suppression de l'article 12, c'est parce que, dans le domaine de protection des majeurs - domaine qui est déjà étranger à ce texte consacré à la protection de l'enfance - des propositions de textes sont actuellement à l'étude après que des travaux importants ont été menés aveec un certain nombre de spécialistes. Il me semble qu'il y a véritablement, si je puis dire, urgence à attendre que le projet de loi annoncé nous soit soumis. Nous pourrons à cette occasion en examiner les conditions de financement.
    Comme je l'ai dit dans ma première intervention, j'ai quelques inquiétudes sur l'expérimentation envisagée, dont dix structures départementales doivent se charger. Je n'ai rien contre le principe de la dotation globale qui se pratique déjà, après tout, dans un certain nombre de structures et dans un certain nombre de départements. C'est peut-être une bonne mesure de simplification. Cependant, le nombre de tutelles prononcées par les juges a augmenté de manière exponentielle ces dernières années et il faut rappeler que ces mesures ont des conséquences très importantes, puisqu'elles privent les personnes concernées du droit de vote. Ces décisions ne sont donc pas prises à la légère mais sur la base de nombreux rapports et, en particulier, d'expertises médicales.
    Il me semble que l'évolution de notre société, l'allongement de la durée de vie, le développement de maladies telles que la maladie d'Alzheimer, la sortie de nombreux malades mentaux des hôpitaux rendent ces mesures nécessaires tant sur le plan juridique que social. Je crains que la mise en place de la dotation globale soit un moyen de réduire le financement des services de tutelle et que l'on se tourne ensuite vers les départements pour assurer les missions qu'ils ne pourront plus exercer.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Henriette Martinez, rapporteur. Cet amendement a été rejeté par la commission.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Avis évidemment défavorable.
    Nous devons faire face, comme vous l'avez dit, madame Adam, à une augmentation exponentielle des mises sous tutelle, et le sujet n'avait pas été traité comme avaient pu l'être la création d'un observatoire, ou encore le statut des assistantes maternelles. J'ai donc mis en place trois groupes de travail avec l'ensemble des partenaires sociaux et des associations concernés. Dominique Perben et moi voulons expérimenter la dotation globale afin de voir si elle permet de répondre aux besoins des associations. En 2005, lors de la discussion du projet de loi portant réforme des tutelles et curatelles, nous saurons si ce système est bon ou non.
    En attendant, gardons-nous de prendre des positions fermes et définitives en ce domaine. Les professionnels du droit et les associations sont favorables à cette expérimentation.
    Je le répète et je le dis sans aucun esprit polémique, rien n'avait été fait. Nous avons pris le problème à bras-le-corps. Laissez-nous expérimentez la dotation globale. Nous verrons dans un an, à la lumière de ces essais, si ce système est à retenir ou non. Mais n'ayons pas de position tranchée sur un sujet aussi compliqué.
    M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.
    Mme Patricia Adam. J'entends vos arguments, monsieur le ministre. Expérimentez donc mais laissez-moi mes craintes.
    Cela étant, vous ne pouvez pas dire que rien n'avait été fait ! A ma connaissance, Marylise Lebranchu avait constitué un groupe de travail sur ce sujet, qui avait présenté un certain nombre de propositions.
    M. le ministre délégué à la famille. On n'en a pas trouvé trace !
    Mme Patricia Adam. Ces textes existent. Je les ai.
    M. le ministre délégué à la famille. Il serait intéressant que vous nous les montriez !
    Mme Patricia Adam. Par ailleurs, je ne pense pas que les professionnels que vous avez consultés soient différents de ceux qui avaient déjà travaillé sur ce sujet.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 45.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 14, ainsi rédigé :
    « I. - Dans le deuxième alinéa de l'article 12, substituer aux mots : "l'organisme mentionné, les mots : "celle des personnes morales mentionnées »
    « II. - En conséquence, dans le même alinéa de cet article, substituer au mot : "auquel, les mots : "à laquelle. »
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Il s'agit d'un amendement rédactionnel. Le mot "organisme au singulier ne prend pas en compte les différents services concernés : conseils généraux, CAF et tous les organismes sociaux gérant des prestations sociales pour les personnes placées sous tutelle. C'est pourquoi nous proposons son remplacement par "personnes morales.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 12, modifié par l'amendement n° 14.
    L'article 12, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 12

    M. le président. Mme Martinez, rapporteure, a présenté un amendement, n° 15, ainsi rédigé :
    « Après l'article 12, insérer la division et l'intitulé suivants :

« TITRE VI

« Dispositions relatives
à l'obligation alimentaire »

    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Cet amendement est la conséquence de l'amendement que nous avons adopté à l'article 1 A.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué à la famille. Avis évidemment favorable, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 46 et 16, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 46, présenté par Mme Adam, Mme Mignon, M. Renucci et les membres du groupe socialiste est ainsi libellé :
    « Après l'article 12, insérer l'article suivant :
    « L'article L. 132-6 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :
    « Art. L. 132-6. - Les personnes tenues à l'obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l'occasion de toute demande d'aide sociale, invitées à indiquer l'aide qu'elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais.
    « Sous réserve d'une décision contraire du juge des affaires familiales, sont de droit dispensés de fournir cette aide :
    « - les enfants déchargés de l'obligation alimentaire sur le fondement des articles L. 228-1 du présent code et 379 du code civil ;
    « - les enfants qui, après signalement de l'aide sociale à l'enfance, ont fait l'objet d'un retrait judiciaire de leur milieu familial durant une période de trente-six mois cumulés au cours des douze premières années de leur vie.
    « Cette dispense s'étend aux descendants des enfants susvisés.
    « Peuvent également être dispensés totalement ou partiellement de l'exécution de l'obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil, sur décision du juge aux affaires familiales saisi d'une requête émanant des débiteurs de cette obligation :
    « - les descendants ayant à leur charge des enfants de moins de 25 ans, si ceux-ci ont la qualité de demandeur d'emploi ou se trouvent en situation de poursuivre des études ou toute formation qualifiante reconnue, ou si les débiteurs de l'obligation prévue par les articles 205 et suivants du code civil se trouvent eux-mêmes dans cette situation, dans l'hypothèse où l'exécution de ladite obligation serait de nature à précariser la situation du ménage ou à compromettre la poursuite de ces études ou de cette formation dans des conditions matérielles normales.
    « Un décret en Conseil d'Etat prévoit la liste des filières et formations pouvant permettre l'octroi de cette dispense, ainsi que les conditions de saisine du juge aux affaires familiales par les débiteurs de l'obligation alimentaire instituée par les articles 205 se suivants du code civil.
    « La commission d'admission fixe, en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l'obligation alimentaire, la proportion de l'aide consentie par les collectivités publiques. La décision de la commission peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l'aide sociale d'une décision judiciaire rejetant sa demande d'aliments ou limitant l'obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l'organisme d'admission. La décision de la commission fait également l'objet d'une révision lorsque les débiteurs d'aliments ont été condamnés à verser des arrérages supérieurs à ceux qu'elles avait prévus. »
    L'amendement n° 16, présenté par Mme Martinez, rapporteure, est ainsi libellé :
    « Après l'article 12, insérer l'article suivant :
    « L'article L. 132-6 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :
    « Art. L. 132-6. - Les personnes tenues à l'obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l'occasion de toute demande d'aide sociale, invitées à indiquer l'aide qu'elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais.
    « Sous réserve d'une décision contraire du juge aux affaires familiales, sont de droit dispensés de fournir cette aide : les enfants qui, après signalement de l'aide sociale à l'enfance, ont fait l'objet d'un retrait judiciaire de leur milieu familial durant une période de trente-six mois cumulés au cours des douze premières années de leur vie.
    « Cette dispense s'étend aux descendants des enfants susvisés.
    « La commission d'admission fixe, en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l'obligation alimentaire, la proportion de l'aide consentie par les collectivités publiques. La décision de la commission peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l'aide sociale d'une décision judiciaire rejetant sa demande d'aliments ou limitant l'obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l'organisme d'admission. La décision de la commission fait également l'objet d'une révision lorsque les débiteurs d'aliments ont été condamnés à verser des arrérages supérieurs à ceux qu'elle avait prévus. »
    La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l'amendement n° 46.
    Mme Patricia Adam. L'amendement n° 46 tend à étendre la possibilité de dispenser de l'obligation alimentaire envers les parents aux descendants poursuivant des études ou ayant à leur charge des enfants se trouvant en cette situation. Certaines familles modestes ont en effet des difficultés à remplir leurs obligations lorsqu'elles ont à charge des enfants et des parents âgés.
    M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 46 et défendre l'amendement n° 16.
    Mme Henriette Martinez, rapporteure. Avis défavorable sur l'amendement n° 46 : on ne peut pas entrer dans des situations spécifiques en matière de dispense de l'obligation alimentaire. Celle-ci doit avoir un caractère plus général.
    L'amendement n° 16 propose en revanche de dispenser de l'obligation alimentaire « les enfants qui, après signalement de l'aide sociale à l'enfance, on fait l'objet d'un retrait judiciaire de leur milieu familial durant une période de trente-six mois cumulés au cours des douze premières années de leur vie. »
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
    M. le ministre délégué à la famille. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 46 qui, alors que l'amendement du Sénat présenté par M. Mercier reposait sur des carences éducatives des parents, concerne des difficultés matérielles. Une telle exonération est prévue mais elle doit être prononcée par le juge.
    Avis favorable sur l'amendement n° 16, qui est un amendement de cohérence.
    M. le président. La parole est à M. Georges Colombier.
    M. Georges Colombier. L'amendement n° 16 concerne les enfants qui ont fait l'objet d'un retrait judiciaire de leur milieu familial. Que se passe-t-il lorsqu'un enfant abandonné par sa mère est élevé par sa grand-mère ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué à la famille. Dans le cadre d'une décision judiciaire et donc d'un placement, ce cas entre dans le champ de l'application de l'amendement Mercier, mais non s'il s'agit d'un accord à l'amiable.
    M. Georges Colombier. Merci, monsieur le ministre.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.
    (L'amendement est adopté.)

Explications de vote

    M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à Mme Patricia Adam, pour le groupe socialiste.
    Mme Patricia Adam. Je suis une fois encore la première, monsieur le président, mais il est vrai que mon nom m'y prédestine. (Sourires.)
    La protection de l'enfance mérite un consensus ; nos débats auront en tout cas démontré qu'il était possible de dégager un accord sur plusieurs points. Je regrette toutefois que certains de nos amendements, à nos yeux pertinents, n'aient pas été acceptés par le ministre et par la rapporteure. C'est d'autant plus dommageable qu'ils allaient dans le bon sens, sans avoir d'impact financier important. Certes, monsieur le ministre, vous nous avez répondu que des travaux étaient en cours, que des propositions de loi seraient déposées et que plusieurs textes nous seraient présentés en 2004 ou en 2005. Nous y seront évidemment très attentifs et nous vérifierons à cette occasion si les propositions que nous avons formulées auront été reprises.
    Le sujet qui devrait revenir le plus rapidement en discussion est à mon avis celui du statut des assistantes maternelles. C'est un dossier très important qui suscite énormément d'attentes, qu'il s'agisse de la reconnaissance de ce métier, comme de celle de la nécessité d'une professionnalisation accrue, ce qui pose le problème des moyens, de la formation, mais également des indemnités car l'un ne va pas sans l'autre. Si nous n'y prenons garde, nous n'aurons plus d'assistantes maternelles, ou en tout cas pas suffisamment, dans les années qui viennent. C'est déjà le cas dans plusieurs départements. Le travail des femmes a en effet bien progressé et c'est une bonne chose. Mais le niveau de revenu des assistantes maternelles étant ce qu'il est, ce métier ne reste souvent qu'une activité professionnelle de complément. Sitôt qu'elles peuvent espérer un salaire plus rémunérateur, bon nombre d'assistantes maternelles quittent la profession, ce qui oblige à créer d'autant plus de places en crèches collectives. J'espère, monsieur le ministre, que le statut que vous nous présenterez ne restera pas dans la généralité et qu'il s'agira bien d'un statut au sens plein du terme, qui traitera également du revenu et de la formation des assistantes maternelles, qui à mes yeux vont de pair.
    Au total, nous avons eu la satisfaction de voir aboutir quelques dossiers, mais beaucoup de nos propositions ont été refusés. Ainsi nous abstiendrons-nous. Nous restons un peu sur notre faim, en particulier sur un sujet qui me tient à coeur, la représentation de l'enfant et la nécessité de le mettre au coeur du dispositif de protection de l'enfance. Il est bon de l'affirmer, mais également bon de l'écrire, car le droit français, avant tout familial, ne défend pas l'intérêt strict de l'enfant comme c'est désormais le cas dans bon nombre de pays, à l'exemple du Québec que Mme Martinez a cité tout à l'heure. Nous devrions nous en inspirer, d'autant que les coûts de la protection de l'enfance y sont bien inférieurs aux nôtres.
    M. Simon Renucci. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Yvan Lachaud, pour le groupe UDF.
    M. Yvon Lachaud. Monsieur le ministre, nous regrettons que vous n'ayez pas retenu notre amendement permettant une dérogation au nombre limite de trois mineurs susceptibles d'être accueillis simultanément par une assistante maternelle. Mais nous avons bien pris note de votre engagement ferme sur la validation des acquis des assistantes à l'occasion du projet à venir. Nonobstant ce petit regret, votre texte va dans le bon sens. Nous le voterons. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Goldberg, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Pierre Goldberg. Nous rêvions d'une grande loi sur l'enfance, sujet important, grave et qui est, parmi d'autres, un des traits de la modernité d'une société.
    Nous avons examiné un projet de loi qui touche certes à des questions sensibles, mais qui, loin d'y apporter des solutions appropriées, comporte beaucoup d'affichage. Vous créez un observatoire sans moyens ; vous ne prévoyez rien pour les assistantes maternelles, notamment pour ce qui touche à la formation et au salaire, même si vous leur faites miroiter un futur projet de loi ; vous aggravez enfin bien inutilement le volet répressif.
    Plusieurs se sont félicités de l'ambiance qui a présidé à nos débats. Or pas un des amendements que nous avons défendus, pourtant sérieux et constructifs, n'a été retenu !
    Malgré ces insuffisances, considérant que ce texte peut représenter, dans certains cas, une avancée dans le domaine de l'accueil des enfants et de la protection de l'enfance, nous ne nous opposerons pas à son adoption et nous nous abstiendrons.
    M. le président. La parole est à Mme Martine Aurillac, pour le groupe UMP.
    Mme Martine Aurillac. Je me réjouis du climat serein qui a présidé à cette réunion, ce qui prouve que la protection de l'enfance peut dépasser très largement les clivages politiques.
    Aux yeux du groupe UMP, ce texte apporte des avancées très sensibles. Je veux insister sur le souhait de ma collègue, Mme de Panafieu, et de moi-même de voir porter une attention toute particulière aux violences faites aux enfants par le biais d'Internet. Vous nous avez d'ores et déjà, monsieur le ministre, apporté quelques apaisements à cet égard. Mais nous devons continuer à réfléchir ensemble au renforcement de nos outils législatifs, en liaison avec votre collègue Mme Fontaine.
    Pour le reste, qu'il s'agisse de l'agrément des assistantes maternelles, du signalement ou du rôle du nouvel observatoire de l'enfance maltraitée, ce texte apporte des réponses très positives. C'est la raison pour laquelle le groupe UMP votera votre projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vote sur l'ensemble

    M. le président. Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
    (L'ensemble du projet de loi est adopté.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué à la famille. Monsieur le président, je tiens en conclusion à remercier l'ensemble des parlementaires présents ce soir et tous les membres de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour leur contribution. Je me félicite de la qualité du travail réalisé par Mme la rapporteure, et également, monsieur le président, de la façon dont vous avez conduit nos débats - mais personne ne doutait de vos qualités dans ce domaine (sourires) - et plus généralement de l'ambiance dans laquelle s'est déroulé l'examen de ce texte.

3

SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

    M. le président. J'ai reçu de M. le président du Conseil constitutionnel une lettre m'informant qu'en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, plus de soixante députés ont saisi le Conseil constitutionnel d'une demande d'examen de la conformité à la Constitution de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.

4

DÉPÔT DE RAPPORTS

    M. le président. J'ai reçu, le 2 décembre 2003, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, le rapport n° 1266 fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan sur le projet de loi de finances rectificative pour 2003 (n° 1234).
    J'ai reçu, le 2 décembre 2003, de M. Loïc Bouvard un rapport n° 1268, fait au nom de la commission des affaires étrangères sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement français et le Gouvernement macédonien en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (n° 549).
    J'ai reçu, le 2 décembre 2003, de M. René Rouquet, un rapport n° 1269, fait au nom de la commission des affaires étrangères, sur les projets de loi :
    - autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République argentine pour la prévention, la recherche et la sanction des infractions douanières (n° 1147) ;
    - autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Surinam pour la prévention, la recherche, la constatation et la sanction des infractions douanières (n° 1148) ;
    - autorisant l'approbation de l'accord d'assistance mutuelle douanière entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Malte pour la prévention, la recherche, la constatation et la sanction des infractions douanières (n° 1150).

5

DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

    M. le président. J'ai reçu, le 2 décembre 2003, de M. Pascal Clément, un rapport d'information, n° 1270, déposé en application de l'article 45 du règlement par la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République en conclusion des travaux d'une mission d'information constituée le 16 octobre 2002 sur la réforme du droit des sociétés.

6

DÉPÔT D'UN AVIS

    M. le président. J'ai reçu, le 2 décembre 2003, de M. Marc Joulaud, un avis n° 1267, fait au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2003 (n° 1234).

7

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Aujourd'hui, à quinze heures, première séance publique :
    Questions au Gouvernement (cf. note 1) .
    Discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2003 (n° 1234) :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 1266) ;
    M. Marc Joulaud, rapporteur pour avis, au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (avis n° 1267).
    A vingt et une heures trente, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée, le mercredi 3 décembre 2003, à deux heures vingt.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
CONSEIL D'ORIENTATION POUR LA PRÉVENTION
DES RISQUES NATURELS MAJEURS
(3 postes à pourvoir)

    M. le président de l'Assemblée nationale a nommé, le 2 décembre 2003, Mme Claude Darciaux, M. Alain Venot et M. Jacques Pélissard comme membres de ce conseil.

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
Transmissions

    M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale les textes suivants :

Communication du 28 novembre 2003

E 2224, annexe 8. - Avant-projet de budget rectificatif n° 8 au budget 2003 - SEC (2003) 1297 FINAL.

Communication du 2 décembre 2003

E 2453. - Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de l'accord sous forme d'échange de lettres entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc concernant les mesures de libéralisation réciproques et le remplacement des protocoles agricoles n°s 1 et 3 de l'accord d'association CE/Royaume du Maroc - COM (2003).

NOTE (S) :

(1) Les quatre premières questions porteront sur des thèmes européens.