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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 15 JANVIER 2004

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du mercredi 14 janvier 2004


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Décès d'un député «...».
2.  Questions au Gouvernement «...».

RECHERCHE «...»

M. Roger-Gérard Schwartzenberg, Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies.

MALTRAITANCE DES ENFANTS «...»

MM. Olivier Jardé, Dominique Perben, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

REFORMES DES RETRAITES ET ASSURANCE MALADIE «...»

MM. Maxime Gremetz François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
3.  Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire «...».
4.  Questions au Gouvernement (suite) «...»

DÉLINQUANCE «...»

MM. François Scellier, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

DÉPENDANCE «...»

MM. Jean-François Mancel, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

AUTOROUTE FERROVIAIRE ALPINE «...»

MM. Martial Saddier, Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

STATUT D'EDF ET DE GDF «...»

MM. Jean-Yves Le Déaut, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

VOLONTARIAT À L'ÉTRANGER «...»

MM. Bruno Bourg-Broc, Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

CONTRÔLE D'INTERNET «...»

M. Patrice Martin-Lalande, Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.

TRAVAIL «...»

MM. Arnaud Montebourg, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

CINÉMA FRANÇAIS «...»

MM. Édouard Landrain, Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication.

ENSEIGNEMENT DU SKI «...»

MM. Vincent Rolland, Jean-François Lamour, ministre des sports.

ÉNERGIE NUCLÉAIRE «...»

M. Yves Cochet, Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC

5.  Remplacement d'un député décédé «...».
6.  Loi organique sur le statut de la Polynésie française. - Suite de la discussion d'un projet de loi organique adopté par le Sénat après déclaration d'urgence «...».

DISCUSSION DES ARTICLES «...»
Article 1er «...»

MM. René Dosière, Victor Brial.
Amendement n° 195 de M. Dosière : MM. René Dosière, Jérôme Bignon, rapporteur de la commission des lois ; Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. - Rejet.
Amendement n° 75 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 1er.

Articles 2 à 4. - Adoptions «...»
Article 5 «...»

Amendement n° 196 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre, MM. Jean-Christophe Lagarde, Michel Buillard. - Rejet.
Amendement n° 240 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, Mme la ministre. - Retrait.
M. René Dosière.
Adoption de l'article 5.

Article 6. - Adoption «...»
Article 7 «...»

Amendement n° 34 de la commission des lois : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 7 modifié.

Article 8. - Adoption «...»
Article 9 «...»

Amendement n° 241 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 77 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 76 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 35 de la commission : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 9 modifié.

Articles 10 et 11. - Adoptions «...»
Article 12 «...»

Amendement n° 197 de M. Dosière : M. René Dosière. - Rejet.
Amendement n° 78 de M. Dosière. - Rejet.
Amendement n° 36 de la commission : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.
Amendement n° 146 de M. Dosière : M. René Dosière. - Retrait.
Adoption de l'article 12 modifié.

Article 13. - Adoption «...»
Article 14 «...»

Amendement n° 1 de M. Buillard : M. Michel Buillard, Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 2 de M. Buillard : MM. Michel Buillard, le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.
Amendement n° 198 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 199 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 272 du Gouvernement : Mme la ministre, M. le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 273 du Gouvernement : MM. le rapporteur, René Dosière. - Adoption.
Amendement n° 147 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 14 modifié.

Article 15 «...»

M. René Dosière.
Amendement de suppression n° 246 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, Christian Paul, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 289 de M. Lagarde : M. Jean-Christophe Lagarde, Mme la ministre, MM. Michel Buillard, Eric Raout. - Rejet.
Amendement n° 245 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 148 de M. Dosière : M. le rapporteur. - Rejet.
Amendement n° 280 de M. Lagarde. - Rejet.
Amendement n° 243 de M. Lagarde. - Rejet.
Amendement n° 242 de M. Lagarde. - Rejet.
Amendement n° 79 de M. Dosière : M. René Dosière. - Rejet.
Amendement n° 244 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.
Adoption, par scrutin, de l'article 15 modifié.

Article 16 «...»

Amendement n° 3 de M. Buillard : M. Michel Buillard, Mme la ministre. - Retrait.
Adoption de l'article 16.

Article 17 «...»

Amendements n°s 149 et 150 rectifié de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejets.
Adoption de l'article 17.

Article 18 «...»

Amendement n° 4 de M. Buillard : MM. Michel Buillard, le rapporteur, Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 151 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 18.

Article 19 «...»

Amendement n° 200 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 152 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 19.

Article 20 «...»

Amendement n° 7 de M. Buillard : MM. Michel Buillard, le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.
Amendement n° 37 de la commission : M. le rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article 20 modifié.

Articles 21 à 23. - Adoptions «...»
Suspension et reprise de la séance «...»
Articles 24 «...»

M. René Dosière.
Amendement n° 153 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet par scrutin.
Adoption de l'article 24.

Article 25 «...»

Amendement n° 80 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 247 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, Christian Paul, le rapporteur, Mme la ministre, MM. René Dosière, Michel Buillard. - Rejet.
Amendements identiques n°s 111 de M. Dosière et 287 de M. Lagarde : MM. René Dosière, Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, Mme la ministre, M. Christian Paul. - Retrait de l'amendement n° 111.
M. Jean-Christophe Lagarde. - Retrait de l'amendement n° 287.
Adoption de l'article 25.

Article 26 «...»

Amendement n° 154 de M. Dosière : M. René Dosière. - Retrait.
Adoption de l'article 26.

Article 27. - Adoption «...»
Article 28 «...»

Amendement n° 155 de M. Dosière : M. René Dosière. - Retrait.
Adoption de l'article 28.

Article 29 «...»

Amendement n° 248 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 29.

Article 30 «...»

Amendement de suppression n° 112 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Michel Buillard. - Rejet.
Amendement n° 81 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 156 de M. Dosière. - Rejet.
M. Jean-Christophe Lagarde, Mme la ministre.
Amendements n°s 249 et 250 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejets.
Amendements n°s 82 de M. Dosière et 271 de M. Lagarde : MM. René Dosière, le rapporteur Jean-Christophe Lagarde, Mme la ministre. - Retrait de l'amendement n° 82 ; adoption de l'amendement n° 271 de MM. Jean-Christophe Lagarde et René Dosière.
M. Jean-Christophe Lagarde.
Adoption, par scrutin, de l'article 30 modifié.

Article 31 «...»

Amendements n°s 113 et 114 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejets.
Adoption de l'article 31.

Article 32 «...»

Amendement de suppression n° 83 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 157 de M. Dosière : M. René Dosière. - Retrait.
Adoption de l'article 32.

Article 33 «...»

Amendement n° 158 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 33.

Article 34 «...»

Amendement n° 132 de M. Buillard : MM. Michel Buillard, le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.
Les amendements identiques n°s 38 corrigé de la commission et 159 de M. Dosière n'ont plus d'objet.
Adoption de l'article 34 modifié.

Article 35 «...»

Amendement n° 84 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, Mme la ministre, M. Jean-Christophe Lagarde. - Retrait.
Adoption de l'article 35.

Article 36 «...»

Amendement n° 160 de M. Dosière : M. René Dosière. - Retrait.
Adoption de l'article 36.

Article 37 «...»

Amendement n° 219 de M. Dosière : M. René Dosière. - Retrait.
Amendement n° 220 de M. Dosière : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Retrait.
Adoption de l'article 37.

Article 38 «...»

Amendement n° 161 de M. Dosière : M. René Dosière. - Retrait.
Adoption de l'article 38.

Article 39 «...»

Amendement n° 162 de M. Dosière : M. René Dosière. - Retrait.
Adoption de l'article 39.

Articles 39 bis, 40 et 41. - Adoptions «...»

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
7.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

DÉCÈS D'UN DÉPUTÉ

    M. le président. Mes chers collègues, nous avons appris avec tristesse le décès de notre collègue Marcel Cabiddu, député de la onzième circonscription du Pas-de-Calais.
    Je prononcerai son éloge funèbre lors d'une prochaine séance ; mais je souhaite que, en hommage à sa mémoire, nous observions dès maintenant un moment de recueillement. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et observent une minute de silence.)

2

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Nous commençons par une question du groupe socialiste.

RECHERCHE

    M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Madame la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies, la recherche doit être une grande ambition collective, par-delà les clivages politiques. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Je vous en prie !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. De Gaulle et Mendès France, l'un comme l'autre, la considéraient comme la clé de l'indépendance nationale et de l'expansion française.
    En assistant, hier, aux côtés des chercheurs, à la séance de rentrée de l'Académie des sciences, j'ai appris que vous aviez mis en cause notre bilan d'une manière assez peu sereine. Ayant été ministre de la recherche de 2000 à 2003...
    M. Yves Bur. On s'en souvient !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. ... je voudrai simplement rappeler la vérité des faits, mes chers collègues,...
    Mme Chantal Robin-Rodrigo. Très bien !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. ... de manière paisible et non ostentatoire. (Sourires.)
    La recherche, ce sont des résultats obtenus à partir de crédits et d'emplois.
    Nos résultats, vous les connaissez : l'essor de la recherche médicale et de la génomique, le synchrotron, le lancement du projet ITER,...
    M. Michel Bouvard. Venez le dire en commission des finances !
    M. le président. Je vous en prie !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. ... Galileo, pour ne plus dépendre du GPS américain, Ariane 5 Plus, pour rendre notre lanceur encore plus compétitif.
    Par deux fois, en 2001 et 2002, les crédits avaient augmenté de 2,2 %. En revanche, votre budget pour 2003 a baissé et, surtout, les annulations et gels de crédits ont amputé de 30 % les crédits de paiement des organismes de recherche,...
    M. Michel Bouvard. Depuis le début de la législature, on ne l'a pas vu une seule fois en commission des finances, et il parle de budget ! C'est une imposture !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. ... lesquels, de ce fait, ont été contraints d'abandonner de nombreux projets.
    Mme Chantal Robin-Rodrigo. C'est cela la vérité !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Enfin, les emplois : pour permettre aux jeunes de s'insérer dans l'appareil de recherche publique, pour stopper leur expatriation, en particulier vers les Etats-Unis, nous avons créé, en 2001-2002, 805 emplois. Au contraire, vous avez supprimé, en 2003-2004, 700 emplois, pour les remplacer par des CDD de trois à cinq ans, des intermittents de la recherche, ce qui ne sera pas adapté à la recherche fondamentale.
    M. Lucien Degauchy. La question !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Cette situation...
    M. le président. Monsieur Schwartzenberg, pouvez-vous poser votre question ?
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. J'y arrive, monsieur le président. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Michel Bouvard. En commission, c'est plus rapide. Il ne vient jamais !
    M. le président. Monsieur Bouvard !
    M. Jean-Claude Lenoir. M. Bouvard a raison !
    M. le président. Posez votre question, monsieur Schwartzenberg.
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Cette situation inquiète gravement la communauté scientifique. Face à cette inquiétude, les dirigeants de l'Etat proclament chaque jour qu'ils aiment la recherche, mais, en amour comme en politique, les paroles importent moins que les actes. Jean Cocteau disait d'ailleurs : « Il n'y a pas d'amour, il n'y a que des preuves d'amour. » (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Mais quelle est votre question ?
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Ma question est donc simple, monsieur le président. (Mêmes mouvements.)
    M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Les chercheurs attendent des preuves de considération...
    M. le président. Mais vous la posez ou pas ?
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Je la pose !
    M. le président. Alors, allez-y !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Les chercheurs attendent des preuves de considération. Allez-vous les leur donner ? Je le souhaite très vivement. J'ai pour vous, madame le ministre, beaucoup d'estime et d'amitié,...
    M. Jean-Marc Nudant. Ah !
    M. Roger-Gérard Schwartzenberg. ... et je ne crois pas que vous puissiez faire vôtre la phrase prononcée il y a deux siècles : « La République n'a pas besoin de savants. » (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies.
    Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies. Monsieur le député, nous savons tous les deux, pour avoir vécu la recherche de l'intérieur, à quel point cette activité est passionnante, mais aussi complexe, unique par la priorité qu'elle représente. Elle est multiple par les enjeux et les modes de gestion. Les chercheurs sont exigeants en matière de liberté, de droits. Ils sont responsables de leurs engagements, ils sont conscients de leur devoir.
    La priorité à la recherche, vous le savez, est une conviction partagée. Les rapports décrivant les atouts, les faiblesses de notre système, et leurs évolutions, vous les aviez entre les mains. Quand vous êtes arrivé, vous y avez travaillé.
    La recherche fondamentale, c'est mon métier, c'est là que j'ai travaillé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Alain Néri. Alors, ne l'oubliez pas !
    Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies. En France et en Europe, je porte ce message.
    Vous dites avoir enrayé la fuite des cerveaux. Moi, je travaille à faire en sorte qu'ils ne partent pas et, s'ils sont en contrat de postdoctorant, qu'ils reviennent, grâce à des mesures attractives.
    M. Christian Bataille. Vous les laissez partir !
    Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies. Et nous ne devons pas partir nous-mêmes et démissionner ; nous devons être là.
    Pour ce qui est de l'emploi scientifique, vous avez certes mis en place un plan, mais avec une vision trop administrative de la recherche. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Je propose plus de souplesse et de réactivité, en maintenant l'emploi, en le développant si possible et, vous avez raison de le dire, en fondant la reconnaissance du chercheur sur son excellence et sur son projet.
    M. Arnaud Montebourg. C'est votre réponse qui est administrative !
    Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies. Pour les crédits des laboratoires, vous souhaitez la clarté des chiffres. Les chiffres sont publics, les livres sont ouverts, et nous souhaitons les examiner non seulement quantitativement, mais aussi, vous serez d'accord avec moi, sur leur bon usage. Je me contenterai de signaler que, de 2000 à 2003, les dépenses des laboratoires ont augmenté de 30 %.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Grâce à qui ?
    Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies. Au-delà des promesses et des engagements, nous devons parler des véritables enjeux de la recherche. Vous savez que c'est mon engagement, que c'est mon action. Je suis fière d'être en charge du ministère de l'avenir au sein de ce gouvernement.
    Mme Nathalie Gautier. Ce n'est pas une réponse !
    Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies. Les annonces qui ont été faites et les actions mises en oeuvre pour cette année 2004 sont là. Nous avons maintenant une loi d'orientation à préparer, afin de pouvoir avancer ensemble, avec la communauté des chercheurs et la représentation nationale, et définir un cadre qui porte la France au plus haut niveau mondial, car nous en sommes capables. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

MALTRAITANCE DES ENFANTS

    M. le président. La parole est à M. Olivier Jardé, pour le groupe UDF.
    M. Olivier Jardé. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
    Monsieur le ministre, la maltraitance des enfants existe. Elle est inacceptable. La combattre est une des missions essentielles de votre ministère, et vous avez publié, hier, un guide de bonnes pratiques.
    La réponse ne peut être que pluridisciplinaire, et, j'insiste sur ce point, elle doit absolument être uniforme sur le territoire national, afin que tous les drames et les violences dont les enfants sont victimes puissent être traités de la même façon.
    La réponse ne saurait être uniquement judiciaire. Il faut absolument clarifier le rôle de chacun, de façon à ce qu'elle soit identique partout, à Amiens comme à Chalon-sur-Saône.
    Monsieur le ministre, quelle action comptez-vous mener, tant auprès de vos collègues ministres de l'intérieur, de la santé et de l'éducation nationale qu'au niveau des services départementaux chargés de l'enfance, afin que, dans l'accomplissement de cette mission, l'ensemble des initiatives soient harmonisées ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, monsieur le député, le sujet est dramatique et la réponse est simple, c'est celle que nous nous posons chaque fois que nous apprenons la mort d'un enfant par suite de maltraitance : « Comment cela se fait-il ? On ne savait donc pas ? » C'est à cette question qu'il faut apporter une réponse concrète, et voilà pourquoi nous avons diffusé, hier, le « Guide du signalement », élaboré avec des représentants de la police, de la gendarmerie, des magistrats, bien sûr, des services sociaux et des services des ministères de la famille et de l'éducation nationale.
    Les enseignants, les travailleurs sociaux de l'Etat et des conseils généraux, ainsi que les policiers et les gendarmes, auront ainsi à leur disposition un document très pratique qui leur permettra, tout en respectant la loi, bien entendu, de signaler en temps et en heure, à qui de droit, tous les doutes que leur inspirent l'état de santé d'un enfant, son comportement psychologique, son attitude à l'école ou à la cantine, bref, tout ce qui peut laisser supposer qu'il est maltraité. J'ai décidé de diffuser ce guide, avec Christian Jacob, lorsque nous avons appris, comme vous, plusieurs événements dramatiques qui ont débouché sur la mort d'enfants innocents.
    Et, après le signalement, lorsqu'il n'est pas trop tard, lorsque l'enfant n'est pas décédé, il faut savoir l'entendre, l'écouter et faire en sorte que sa parole, au moment où il peut s'exprimer, ne soit pas perdue. C'est pourquoi, afin de donner toute son efficacité à la procédure judiciaire ultérieure, nous mettons progressivement en place, dans chaque département, avec la police, la gendarmerie, les magistrats, les médecins et les psychiatres, des lieux d'écoute de la parole de l'enfant maltraité.
    Il me semble qu'en quelques mois, nous avons fait des progrès décisifs pour mettre fin à ce scandale et ne pas rester impuissant, ne plus jamais dire qu'on ne savait pas. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

RÉFORMES DES RETRAITES ET DE L'ASSURANCE MALADIE

    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le Premier ministre, au fur et à mesure que les décrets d'application tombent, nos concitoyens sont de plus en plus révoltés par votre réforme de régression sociale des retraites (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) : 70 % d'entre eux la rejettent et en exigent une autre, plus juste.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. A quel sondage faites-vous référence ?
    M. Maxime Gremetz. Les salariés, du privé comme du public, font leur compte à partir du contenu réel de votre réforme, dévoilé par une brochure commune aux trois syndicats CGT, FSU et UNSA, dont je vous recommande vivement la lecture, car elle est très bien faite. Ils mesurent de plus en plus que les belles promesses du Gouvernement n'étaient en réalité qu'un véritable mensonge d'Etat. Voici la vérité : allongement de la durée de cotisation, pensions au rabais, remise en cause des avantages familiaux qui fait des femmes les principales victimes de votre réforme rétrograde.
    Et que dire du « décret-mirage » sur la prétendue reconnaissance des longues carrières ? Alors que 800 000 personnes pouvaient légitimement espérer un départ anticipé en raison d'une entrée en activité entre quatorze et seize ans, votre décret ne profite qu'à 70 000 personnes. Vous ne respectez même pas cet engagement !
    Monsieur le Premier ministre, sous couvert de réformes, voilà que vous voulez aussi démanteler la sécurité sociale. Mais vous craignez tellement le mouvement populaire et les propositions dont il est porteur, avec nous, que vous vous apprêtez à éviter le débat dans le pays et au Parlement, en recourant de façon autoritaire aux ordonnances, en pleine période de congés !
    Ainsi, sous la baguette du MEDEF (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), vous détournez le sens de nos institutions à son profit.
    M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le Premier ministre, allez-vous enfin entendre les organisations syndicales et les trois Français sur quatre qui demandent une reprise des négociations pour une réforme de progrès des retraites ? Allez-vous renoncer à cette manifestation de mépris envers le Parlement et nos concitoyens que constituerait le recours aux ordonnances pour casser une conquête sociale majeure née de la Libération ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Gremetz, pour ce qui concerne la dernière partie de votre question, votre campagne sur les ordonnances n'est pas fondée car le Gouvernement, pour le moment, n'a en rien choisi la méthode qu'il utilisera afin de mettre en oeuvre les décisions nécessaires. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-é-s communistes et républicains et du groupe socialiste.) Il est tout entier concentré, et vous devriez l'être aussi,...
    M. Jacques Desallangre. Nous le sommes !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... sur le débat de fond, sur les mesures nécessaires pour sauver notre sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    A propos de la réforme des retraites et du décret concernant les longues carrières, soyez beau joueur, monsieur Gremetz.
    M. Richard Mallié. C'est trop lui demander !
    M. Jean-Claude Leroy. Les retraites, ce n'est pas un jeu !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Vous avez, pendant des années, défendu l'idée que les personnes qui avaient commencé à travailler de bonne heure pourraient partir de manière anticipée, et, à chacune de vos propositions, vous vous voyiez opposer l'article 40 par vos amis politiques. Or nous avons fait voter une réforme des retraites qui va permettre, vous le savez bien, monsieur Gremetz, à 500 000 personnes, d'ici à 2008, de partir en retraite de manière anticipée.
    M. Maxime Gremetz. Non !
    M. Richard Mallié. Vous l'avez voulu, nous l'avons fait !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il ne sert à rien de le nier, car c'est la réalité du vote du Parlement. Votre référence aux 70 000 demandes vient justement conforter ce que je suis en train de vous expliquer : dix jours après la publication des décrets, 70 000 demandes sont déjà instruites par les caisses ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Naturellement, à la fin de l'année, ce seront plutôt autour de 150 000 personnes qui pourront bénéficier de cette réforme. Alors, monsieur Gremetz, soyez beau joueur ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

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SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE

    M. le président. Mes chers collègues, j'ai le plaisir de saluer la présence dans les tribunes d'une délégation parlementaire arménienne, conduite par le président de l'assemblée nationale de la République d'Arménie, M. Arthur Baghdassarian, de souhaiter en votre nom la bienvenue à cette délégation. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

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QUESTIONS AU GOUVERNEMENT
(suite)

    M. le président. Nous reprenons le cours des questions au Gouvernement.

DÉLINQUANCE

    M. le président. La parole est à M. François Scellier, pour le groupe.
    M. François Scellier. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    Monsieur le ministre, l'une des grandes priorités du Président de la République et du Gouvernement est la restauration de l'autorité de l'Etat. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Alain Néri. C'est la Restauration ! (Sourires.)
    M. François Scellier. Cette volonté s'est notamment traduite, dans les faits, dès le mois de mai 2002, par la création des groupements d'intervention régionaux et la modernisation de l'arsenal législatif en matière de lutte contre toutes les formes d'insécurité.
    Au cours des vingt derniers mois, les chiffres concernant la délinquance, désormais communiqués régulièrement, ont démontré l'efficacité de l'action des forces de l'ordre, et tous les Français les en remercient. Ce matin, vous avez présenté les résultats pour 2003 : pour la première fois depuis six ans, les Françaises et les Français peuvent constater une baisse réelle et constante des faits de délinquance qui empoisonnent leur quotidien.
    Je me réjouis, pour ma part, des très bons résultats obtenus dans mon département, le Val-d'Oise. Ceux-ci sont aussi le fruit, me semble-t-il, du travail de prévention qui a été conduit par le conseil général et l'ensemble des collectivités locales, au travers, notamment, d'un contrat cadre signé avec le préfet et le procureur de la République, lequel a permis, entre autres, de mettre en place des actions de prévention et de soutien aux victimes, d'apporter une aide aux communes pour la construction et la réhabilitation des locaux de police nationale et de gendarmerie, de créer ou de renforcer les polices municipales et de mettre en oeuvre des dispositifs anti-tags ou de sécurisation des commerces. Une convention contre la violence scolaire a également été mise en oeuvre.
    Comme vous le rappelez souvent, monsieur le ministre, il reste, bien sûr, beaucoup à faire, mais je crois que la généralisation de ce type d'accords est une solution pour conduire, parallèlement à la répression, des actions de prévention fortes, et de tels dispositifs pourraient être transposés dans d'autres départements.
    M. le président. Cher collègue, vous pourriez peut-être poser votre question ?
    M. François Scellier. Voici ma question : monsieur le ministre, pouvez-vous préciser à la représentation nationale le bilan de votre politique de luttre contre la délinquance pour l'année 2003 et nous dire quels sont les objectifs et les ambitions du Gouvernement pour 2004 ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Plusieurs députés du groupe socialistes. « Allô ! »
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, vous avez raison, 2003, c'est déjà le passé, et la seule chose qui compte, c'est 2004 ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Pour vous, c'est 2007 !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Encore que, si nous avions présenté des chiffres de la délinquance en augmentation de 3,5 %, j'en connais, de ce côté-ci de l'hémicycle, qui nous auraient demandé des comptes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mais, naturellement, comme la délinquance baisse là où ils l'ont laissée prospérer les bras ballants, ils n'en demandent pas ! (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Je vous le confirme donc, monsieur le député, ce qui compte, c'est 2004. (« C'est 2007 ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Que voulons-nous faire en 2004 ? (« En 2007 ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Ne vous inquiétez pas, 2007 viendra en son temps, mais je ne suis pas certain que ce sera une bonne chose pour vous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Pour 2004 (« 2007 » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), l'objectif que j'ai fixé, c'est une baisse de la délinquance de 3 à 4 %, mais même si nous l'atteignons, nous n'effacerons pas le mal que vous avez fait en cinq ans ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) C'est vous dire que, pour une fois, vous avez raison : il faudra aussi que nous soyons là en 2007 pour réparer ce que vous avez fait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Comment y arriver ? Avec M. le garde des sceaux, nous travaillons sur la question des multirécidivistes. Personne ne peut accepter que le policier Lelong ait été tué, laissant une veuve et une gamine de deux ans, par un individu qui avait été arrêté à cinquante-quatre reprises par la police et qui avait déjà été condamné à vingt et une reprises par la justice. Nous devons donc apporter une réponse à la question des multirécidivistes. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Ensuite, je le reconnais bien volontiers, monsieur le député, l'augmentation de 7 % des violences dans les familles est un scandale. La République française n'a pas su faire face aux violences à l'endroit des femmes, des enfants, à la pratique de l'inceste dans les familles. La stratégie policière n'est pas adaptée aux drames dans les familles.
    Enfin, nous devons également lutter contre les violences urbaines. C'est un programme qui me permettra de répondre à d'autres questions d'actualité tout au long de l'année 2004. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

DÉPENDANCE

    M. le président. La parole est à M. Jean-François Mancel, pour le groupe UMP.
    M. Jean-François Mancel. Monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, ce matin vous avez présenté, en conseil des ministres, un très important projet de loi sur la dépendance. Derrière ce mot de dépendance, il y a des centaines de milliers de femmes et d'hommes âgés qui ont besoin de notre fraternité active et concrète. Comme vous le savez, les conseils généraux jouent un rôle très important auprès de ces personnes. Nous sommes prêts à aller plus loin avec le Gouvernement...
    M. Arnaud Montebourg. Comme pour les marchés publics ! (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-François Mancel. ... et à nous engager dans ce projet courageux et responsable, puisque vous en avez organisé le financement alors que vos prédécesseurs n'avaient laissé que la facture ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. Pas vous ! Pas ça ! Et les fausses factures ? (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Continuez, monsieur Mancel ! Ne vous laissez pas interrompre !
    M. Jean-François Mancel. Monsieur le ministre, pourriez-vous exposer à la représentation nationale les aspects prioritaires de cet important projet de loi ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, j'ai en effet présenté ce matin au conseil des ministres un projet de loi sur l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées qui a été préparé par M. Mattéi, Mme Boisseau et M. Falco.
    D'abord, ce texte tire tous les enseignements de la crise que nous avons connue cet été et vise à mettre en place un dispositif d'alerte qui permettra de faire face à toutes les situations de crise, pas seulement à celles liées au climat, pour protéger les personnes dépendantes, qu'elles soient âgées ou handicapées. Ce dispositif d'alerte sera placé sous l'autorité des préfets des départements, mais il sera élaboré en très étroite coopération avec les présidents de conseils généraux, qui auront désormais une compétence générale sur le schéma d'action gérontologique.
    Par ailleurs, ce texte institue une journée de solidarité. Vous avez rappelé à juste titre, monsieur le député, que c'était assez original par rapport à la méthode utilisée ces dernières années. En effet, nous commençons par financer la mesure de solidarité que nous allons ensuite proposer à nos concitoyens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Cette journée de solidarité permettra de dégager 9 milliards d'euros sur quatre ans, somme qui sera, pour l'essentiel, affectée à l'augmentation des moyens destinés à la lutte contre la dépendance. Ces moyens connaîtront, en moyenne, une hausse de 20 % s'agissant des personnels des maisons de retraite, des places nouvelles que nous allons créer, de la modernisation et de l'effort en faveur de la vie à domicile ou de la création de nouveaux droits pour les personnes handicapées par un projet de loi qui sera examiné dans quelques semaines. Outre le fait qu'elle permet d'affecter des moyens supplémentaires à la lutte contre la dépendance, l'instauration de cette journée de solidarité présente aussi l'avantage de ne pas diminuer le pouvoir d'achat de nos concitoyens.
    Enfin, ce projet de loi institue une Caisse nationale de solidarité qui, dans un premier temps, assurera la transparence des financements liés à la lutte contre la dépendance et permettra de mieux associer les présidents de conseils généraux à l'élaboration de ce plan. Mais j'indique tout de suite que cette caisse nationale n'est en rien la préfiguration de la mise en place d'un cinquième risque, c'est-à-dire d'un démembrement de la sécurité sociale.
    M. Henri Emmanuelli. C'est pourtant le cas !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous pensons, en effet, qu'il n'est pas souhaitable d'avoir une sécurité sociale à plusieurs vitesses : pour les personnes âgées et une autre pour les personnes valides.
    M. François Hollande. C'est déjà le cas !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Tel est, monsieur le député, l'esprit du projet de loi qui va bientôt vous être soumis. Avec ce texte, le Gouvernement continue à traiter les problèmes sociaux du monde actuel en alliant l'exigence de solidarité et la nécessité de la responsabilité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Henri Emmanuelli. Après ce qui s'est passé cet été, c'est insupportable !

AUTOROUTE FERROVIAIRE ALPINE

    M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour le groupe de l'UMP.
    M. Martial Saddier. Monsieur le président, ayant appris, il y a quelques heures, qu'un accident d'hélicoptère mortel s'était produit dans ma circonscription, permettez-moi, en préalable à ma question, d'adresser aux familles de M. Poujol, pilote, et de M. Croz, pisteur secouriste, mes plus sincères condoléances et de leur faire part de toute mon émotion. Partis ce matin pour dégager les couloirs d'avalanche, c'est-à-dire pour protéger la vie des autres skieurs, ces hommes ont péri en accomplissant leur mission courageuse. J'adresse enfin tous mes voeux de rétablissement à la troisième victime, un pisteur qui est actuellement entre la vie et la mort à l'hôpital de Sallanches.
    Ma question, à laquelle j'associe mon collègue Michel Bouvard, député de Savoie, s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Depuis le 4 novembre dernier, l'autoroute ferroviaire alpine dédiée au fret, assurant sur 175 kilomètres la liaison entre Aiton en Savoie et Orbassano, dans la banlieue de Turin, est ouverte. C'est une nouvelle étape dans le transport des poids lourds par voie ferrée, et je souhaite vous interroger sur cette expérimentation.
    Payant depuis le 19 novembre, le service assure quatre allers-retours quotidiens jusqu'en 2006. Dans cette phase expérimentale, 7 % du trafic routier transalpin qui traverse aujourd'hui la vallée de la Maurienne devraient se porter sur cette liaison. Les travaux d'adaptation, qui permettront aux camions de gabarit de quatre mètres de passer, doivent être achevés en 2006. Vingt à trente allers-retours sont alors prévus, permettant de capter ainsi 25 % du trafic actuel.
    C'est sous l'effroyable choc du drame du tunnel du Mont-Blanc que les gouvernements français et italiens ont accéléré la mise en oeuvre des projets de Lyon-Turin et d'Aiton-Orbassano. Cette autoroute ferroviaire alpine est une réponse aux problèmes de pollution et d'insécurité routière vécus par les habitants des vallées de la Maurienne et du Mont-Blanc.
    L'Union européenne continue à s'élargir, repoussant ses frontières toujours plus à l'est. Barrière naturelle de la Méditerranée jusqu'à Vienne, le massif alpin représente un obstacle naturel majeur. Son franchissement constitue un enjeu en termes de développement des échanges économiques européens et en termes de recherche de solutions durables.
    M. le président. Cher collègue, pourriez-vous poser votre question !
    M. Martial Saddier. Cette expérimentation grandeur nature permet de tester dans des conditions réelles le fonctionnement du service et son adéquation aux attentes des clients. Quel bilan établissez-vous, monsieur le ministre, après ces premières semaines d'exploitation ? Pourriez-vous faire le point sur l'état d'avancement du projet de liaison Lyon-Turin ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, le Gouvernement s'associe à vos condoléances et à vos paroles de compassion envers ceux qui ont perdu la vie en voulant sauver celle des autres. C'est en partageant votre tristesse que je vais répondre à votre question.
    Vous m'interrogez sur le transport ferroviaire. Lors du CIADT du 18 décembre 2003, le Gouvernement a pris des décisions d'une importance historique en matière de financement du transport ferroviaire. En effet, 70 % des projets adoptés par ce comité sont des projets ferroviaires. C'est la première remarque que je voulais faire.
    Deuxièmement, le Gouvernement soutient le plan de redressement du fret ferroviaire à la SNCF qui fait suite au rapport Veron et va lui consacrer 800 millions sur 1,5 milliard.
    Troisièmement, s'agissant du Lyon-Turin, j'ai signé l'approbation de l'avant-projet pour le tunnel de base le 22 décembre dernier. Vous voyez à quel point le Gouvernement s'engage !
    Enfin, l'autoroute ferroviaire Aiton-Orbassano, longue de 175 kilomètres, a été parcourue en trois heures dès les premières expérimentations par des camions portés sur des plates-formes surbaissées Modalor. Sur le plan technique, cela fonctionne bien. Sur le plan de l'exploitation, il reste des progrès à faire pour accroître la sécurité au tunnel du Fréjus ; améliorer la ligne en général et résoudre les problèmes commerciaux. Lorsque l'exploitation sera parfaite, cette expérimentation représentera un solution alternative de qualité à la route. En tout cas, c'est le voeu que je forme. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

STATUT D'EDF ET DE GDF

    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut, pour le groupe socialiste.
    M. Jean-Yves Le Déaut. Monsieur le Premier ministre, lors de vos voeux, vous avez confirmé votre volonté de modifier le statut d'EDF et de GDF. Je ne comprends pas votre obsession de vouloir privatiser un secteur qui produit et distribue des biens de première nécessité. Les caractéristiques physiques du transport et de la distribution de l'électricité et du gaz ne peuvent s'inscrire dans le champ concurrentiel. La sécurité nucléaire est un impératif absolu. Elle ne peut être soumise aux aléas et aux fluctuations de la Bourse. Le service public énergétique n'est pas soluble dans le tout-libéral, l'accès à l'énergie doit être garanti au même prix pour tous les Français.
    Les exemples de Rome ou de New York, plongées dans le noir pendant de nombreuses heures, nous montrent les dangers d'une politique libérale. La privatisation de ces services publics a conduit à des pénuries énergétiques. N'oublions pas la Californie ! Souhaitez-vous que nous connaissions à notre tour des coupures de courant de grande ampleur ou des coupures tournantes ? Aujourd'hui, EDF et GDF garantissent une stabilité de l'accès à l'électricité dans toute la France. Qu'en serait-il demain avec des entreprises privées ? Pouvons-nous courir le risque de priver nos compatriotes de courant électrique ?
    Vous utilisez les contraintes européennes du sommet de Barcelone comme alibi. Or, ces engagements ne prévoyaient qu'une ouverture mesurée à la concurrence du marché énergétique. Pourquoi êtes-vous allé plus loin ? Les clients domestiques risquent de payer demain plus cher leur facture de gaz et d'électricité.
    M. Claude Goasguen. La question !
    M. Jean-Yves Le Déaut. En aucun cas la directive n'imposait la privatisation totale d'EDF et de GDF. Pourquoi voulez-vous donc anticiper ? Enfin, vous aviez promis une directive sur les services publics assurant l'égalité entre les citoyens et les territoires, ainsi que la péréquation tarifaire. Pourquoi n'en parlez-vous plus ? Ma question est donc la suivante (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) : ne pensez-vous pas que l'ouverture du capital ; que vous soutenez ; dégradera les missions de service public que remplissent très bien aujourd'hui EDF et GDF ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Le Déaut, je suis un peu surpris de vos propos, parce que j'ai lu avec attention les déclarations du Premier ministre et je n'y ai pas du tout trouvé ce que vous dites. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Le Premier ministre a dit et répété, et je le confirme, que d'ici à la fin de cette année, dans l'intérêt à long terme d'EDF et de GDF, le statut de ces entreprises serait modifié.
    M. François Hollande. Pourquoi ?
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il n'a à aucun moment parlé de privatisation. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Par conséquent, je tiens à vous dire, ainsi qu'à ceux qui nous écoutent, que, dans l'intérêt de ces entreprises, dans l'intérêt de leur stratégie, non seulement française, mais aussi européenne, et dans l'intérêt de notre pays, dans le cadre d'une politique énergique et énergétique, nous allons procéder ensemble à l'évolution nécessaire.
    M. Jean-Pierre Dufau. Après les élections, bien entendu !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous allons commencer par débattre dans cet hémicycle de la politique énergique. Et vous savez qu'il ne faut pas compter sur le Gouvernement pour louper le virage, car nous allons conforter, à long terme, les stratégies engagées en 1945 et en 1970. Nous allons le faire ! Dans ce contexte, et dans l'intérêt de ces entreprises qui se trouvent dans un climat de concurrence que vous connaissez très bien, monsieur Le Déaut, et qui correpond à une libéralisation de tous les acteurs à l'intérieur du marché européen.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous avouez !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... au profit du consommateur, y compris privé, nous allons procéder aux changements nécessaires dans le statut de ces entreprises.
    M. François Hollande. Enfin, c'est clair !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je parle non pas du statut du personnel, mais de celui des entreprises. Il s'agit de leur donner plus de chances, y compris en abandonnant le principe de spécialité,...
    M. André Chassaigne. Il a lâché le morceau !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... face à leurs nombreux concurrents européens, sur un marché qui est non plus seulement français, mais aussi européen, et sur lequel ces deux entreprises ont toutes raisons de continuer à réussir comme elle l'ont fait dans notre pays depuis cinquante ans. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

VOLONTARIAT À L'ÉTRANGER

    M. le président. La parole est à M. Bruno Bourg-Broc, pour le groupe de l'UMP.
    M. Bruno Bourg-Broc. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.
    A ce jour, il existe deux régimes distincts permettant l'envoi de volontaires à l'étranger. Le premier est régi par la loi de 2000 qui instaure un volontariat civil auprès des services publics français à l'étranger et auprès des entreprises. Le second est actuellement défini par le décret du 3 janvier 1995. La principale lacune du système actuellement en vigueur réside dans la spécificité du contrat liant une association et un volontaire, qui ne permet pas d'assurer une protection juridique fiable. Les associations s'en sont à juste titre inquiétées.
    Monsieur le ministre, vous avez présenté, mercredi dernier, en conseil des ministres, un projet de loi relatif au contrat de volontariat de solidarité internationale qui semble résoudre ce problème. Ce texte présente également l'avantage d'encourager la présence française dans divers pays, présence qui, depuis la professionnalisation de l'armée, s'est trouvée quelque peu diminuée. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous donner davantage de précisions et nous indiquer quand et de quelle manière le statut des volontaires de la solidarité internationale sera amélioré ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.
    M. Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le député, vous avez donné les grands traits des deux régimes qui existent actuellement en ce qui concerne le volontariat. Je ne parlerai que du second, car le premier, qui concerne les volontaires partant dans des administrations dépendant de l'Etat ou dans des entreprises, fonctionne selon la loi de 2000 dans des conditions globalement satisfaisantes. En revanche, vous l'avez très bien dit, celui dont dépendent les associations et les organisations non gouvernementales qui gèrent le volontariat dit « de solidarité internationale » n'est pas satisfaisant.
    Il était organisé par un décret de 1995 qui ne donnait satisfaction ni aux volontaires ni aux associations qui les envoyaient en mission.
    Le projet de loi dont vous parlez, que j'ai présenté devant le conseil des ministres et que le Gouvernement a accepté, vise à répondre à la nécessité de réformer ce régime, pour le rendre plus sûr et lui permettre d'accueillir davantage de volontaires : plus sûr pour les volontaires en ce qui concerne leurs relations juridiques avec les associations qui les emploient, avec la création d'un contrat d'un type nouveau, le contrat de volontariat de solidarité internationale ; et plus souple, en permettant aux volontaires de ne plus être enfermés dans des missions de longue durée seulement, ce qui était le cas jusqu'à présent. Il sera ainsi possible de faire face, notamment dans le domaine de l'humanitaire, à des missions d'urgence de courte durée. Enfin, il n'y aura pas de limite d'âge.
    Le Gouvernement soumettra ce texte au Parlement. Le Sénat, compte tenu de son ordre du jour, décidera sans doute de l'examiner début mars. L'objectif du Gouvernement est d'envoyer en mission, par ce nouveau système, un nombre beaucoup plus important de jeunes - ou de moins jeunes - Français qui ne demandent pas mieux que de se mettre généreusement à la disposition de ceux qui en ont besoin. (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

CONTRÔLE D'INTERNET

    M. le président. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour le groupe UMP.
    M. Patrice Martin-Lalande. Madame la ministre déléguée à l'industrie, la semaine dernière, notre assemblée a examiné, à l'occasion d'un large débat, le projet de loi sur la confiance dans l'économie numérique.
    Le texte voté est une bonne avancée, qui a permis de clarifier de nombreux aspects concernant l'Internet. Nous avons adopté, notamment, un dispositif fixant le régime de responsabilité et les obligations de surveillance des hébergeurs de sites Internet et des fournisseurs d'accès.
    Nous sommes tous d'accord sur l'objectif : lutter sans faille contre les contenus illicites, en particulier les contenus dont la diffusion est constitutive d'infractions particulièrement odieuses, qu'il s'agisse d'apologie des crimes de guerre, d'incitation à la haine raciale ou de pédophilie.

    Mais de nombreux internautes sont inquiets des nouvelles modalités de ce contrôle.
    Par amendement, j'avais proposé de supprimer l'obligation la plus lourde de surveillance des contenus. En effet, d'ores et déjà, le droit commun offre au juge les fondements juridiques lui permettant d'agir en urgence et de prendre toute mesure utile pour prévenir un trouble, notamment des mesures de surveillance. De telles mesures ont, par le passé, déjà été imposées à plusieurs hébergeurs. En outre, la directive européenne sur le commerce électronique interdit aux Etats membres d'imposer aux prestataires une obligation générale de rechercher activement des faits ou des circonstances révélant une activité illicite.
    Madame la ministre, pour que la confiance dans l'économie numérique soit la plus large possible chez les internautes, pouvez-vous nous confirmer qu'Internet restera bien en France un espace où liberté et responsabilité se conjuguent de manière équilibrée ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, Internet est un formidable instrument de communication et d'information. Nul ne doit en être exclu et, comme vous le savez, le Gouvernement n'a cessé d'assurer son développement à travers de nombreuses initiatives, qui ont d'ailleurs été particulièrement efficaces.
    Internet est un espace de liberté et - je vous rassure tout de suite, monsieur Martin-Lalande - il doit le rester. Mais le Gouvernement et le Parlement ont la responsabilité d'assurer l'intérêt public et de faire en sorte de veiller à ce que cette liberté se concilie avec les autres libertés.
    La disposition que vous avez votée, au sein de cette assemblée, et qui introduit une obligation de surveillance des sites pour les hébergeurs, ne vise que ceux des contenus particulièrement odieux, à savoir le racisme, l'antisémitisme et la pédophilie. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Le débat que vous avez eu, mesdames et messieurs les députés, a été digne et responsable, à la hauteur des enjeux. Aujourd'hui, certains pensent que plutôt qu'une obligation de surveillance, mieux vaudrait attendre que le juge intervienne. Mais permettez-moi de faire deux remarques à ce propos.
    Lorsqu'on assiste à travers Internet, par le texte ou par l'image, à la promotion du nazisme, à l'exhibition d'enfants abusés et exploités sexuellement, à des incitations à la haine raciale - et chacun a conscience de la gravité de tout cela -, les effets sont immédiats et irréversibles, notamment sur les esprits les plus fragiles. Et même si le juge intervient très rapidement, le mal est fait et souvent pour toute une vie. J'ajoute que la difficulté d'identification de certains propriétaires de site et la volatilité de certains sites rendent souvent les poursuites judiciaires hasardeuses.
    M. le président. Merci, madame la ministre...
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. L'achèvement du débat parlementaire permettra de trouver les meilleures solutions à même de concilier les préoccupations de chacun.
    M. le président. Merci, madame la ministre...
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Pour ma part, je recevrai les hébergeurs d'Internet. Le Gouvernement est profondément attaché au respect des valeurs fondamentales de notre démocratie. « Plus jamais cela ! » concerne aussi Internet. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

TRAVAIL

    M. le président. La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour le groupe socialiste. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    S'il vous plaît !
    M. Arnaud Montebourg. Monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, dans de nombreuses et multiples professions de foi, vous répétez avec force vouloir revaloriser le travail. Voilà une juste et bonne intention. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Revaloriser le travail, c'est mieux payer ceux qui travaillent dur, c'est aussi protéger davantage ceux qui, dans les entreprises, sont soumis à la pression productive la plus violente ou à la précarité de leur condition d'homme et de femme au travail.
    M. Michel Bouvard. D'où le relèvement du SMIC !
    M. Arnaud Montebourg. Pourtant, dernièrement, vous avez fait voter, malgré les protestations des organisations syndicales, une loi qui permettra de démanteler progressivement le code du travail. Désormais, des accords pourront être signés avec des « syndicats maison » dans certaines entreprises ; ils dérogeront à la loi du travail et rendront les conditions de travail plus dures encore que celles déjà malheureusement tolérées aujourd'hui. Vous venez de faire disparaître la loi qui protège les plus faibles et le code du travail, qui protège les ouvriers, cadres, employés, risque de devenir un chiffon de papier !
    Progressivement, ces millions de salariés dont vous prétendez revaloriser les efforts, monsieur Fillon, se retrouveront sans défense grâce à votre ingéniosité et à votre talent. Pourriez-vous expliquer aux Français qui nous regardent et nous écoutent jusqu'où vous comptez faire descendre les salaires et les conditions de travail des salariés pour les aligner sur les exigences insatiables de l'économie mondialisée antisociale ? (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Monsieur Montebourg, posez votre question !
    M. Arnaud Montebourg. En clair, nos salariés vont-ils devoir, dans le futur, s'aligner peu à peu sur les salariés non protégés de l'Europe de l'Est, lesquels s'alignent déjà sur les conditions de travail des salariés du Sud-Est asiatique, lesquels sont indignement réduits à l'état d'esclaves ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, s'agissant d'abord des salaires, vous me donnez une nouvelle occasion de rappeler que, contrairement à la politique que vous aviez suivie, nous avons augmenté le SMIC de manière très importante et que nous allons recommencer au mois de juillet prochain. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Ce sera l'augmentation la plus élevée depuis plus de dix ans ! D'ailleurs, l'évolution des salaires et du pouvoir d'achat est aujourd'hui plus importante qu'elle ne l'a été...
    M. François Hollande. Non !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... compte tenu, notamment, des dispositions que vous aviez prises sur les 35 heures. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    S'agissant de la loi sur la démocratie sociale, je suis heureux que M. Montebourg me donne l'occasion de répondre à ce qu'il dit ici et là et que j'ai lu dans la presse.
    Non, la loi que le Parlement vient de voter n'est ni discutable, ni négociable. On ne pourra pas, dans les entreprises, déroger à la loi. Ça, c'est un fantasme de votre imagination ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    De la même manière, lorsque vous dites que l'on pourrait, dans les entreprises, négocier des dérogations à la loi en s'appuyant sur des syndicats « maison », vous oubliez juste un détail : cette loi instaure, pour la première fois dans les entreprises, le principe de l'accord majoritaire ... (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Henri Emmanuelli. Non !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... reposant non sur une majorité d'organisations, mais sur une majorité d'adhérents ! Nous avons ainsi renforcé les droits sociaux dans notre pays en instaurant un nouveau dialogue social dans l'entreprise (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) qui tourne complètement le dos à la caricature que vous en faites ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

CINÉMA FRANÇAIS

    M. le président. La parole est à M. Edouard Landrain, pour le groupe de l'UMP.
    M. Edouard Landrain. Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et la communication.
    Bruxelles s'apprête, semble-t-il, à bousculer notre système d'aides au cinéma. La France, pays d'Europe où l'on produit le plus de films, risque d'être tout particulièrement handicapée et durement déstabilisée dans ce secteur d'activité qui fait notre fierté et notre richesse culturelle. L'industrie cinématographique française pourraît donc être en danger.
    Monsieur le ministre, quelle est votre position ? Comment envisager-vous l'avenir ? Quelles sont vos intentions pour sauver - comme nous l'espérons - ce qui peut encore l'être ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Philippe de Villiers. Merci l'Europe !
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.
    M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député de Loire-Atlantique, comme vous l'avez très justement rappelé, la vitalité du cinéma français doit beaucoup au dispositif de soutien à la création, à la production, à la distribution et à la diffusion des films. Ce modèle a fait école dans l'Europe entière. De nombreux pays se sont alignés sur les positions de la France pour faire renaître leur cinématographie.
     Ces systèmes ont été validés en 2001 par une communication de la Commission européenne. Celle-ci s'est alors proposé de réexaminer en 2004 l'ensemble des dispositifs nationaux de soutien au cinéma, notamment le principe de « territorialisation » des dépenses qui permet à une production de dépenser 80 % de son budget sur le territoire du pays qui la soutient.
    Un document des services de la Commission remet en cause ces dispositifs. Le 9 janvier dernier, ceux-ci ont rencontré, à Bruxelles, les représentants de l'ensemble des pays de l'Union européenne, y compris des pays entrants. Les représentants de ces pays leur ont fait connaître leur opposition à toute modification du régime actuellement en vigueur. On ne voit pas au nom de quel dogmatisme la Commission irait au-delà de la volonté des Etats. En tout cas, la France reste fidèle à sa position sur ce dossier. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe union pour la démocratie françaises.)

ENSEIGNEMENT DU SKI

    M. le président. La parole est à M. Vincent Rolland, pour le groupe UMP.
    M. Vincent Rolland. Monsieur le ministre des sports, je souhaite attirer votre attention sur les conditions d'application de la loi sur le sport et, en particulier, sur le respect des exigences fixées par l'État pour l'enseignement du ski contre rémunération, et ce en vue de garantir la sécurité des pratiquants.
    Les moniteurs professionnels, dûment qualifiés et déclarés auprès des directions régionales et des administrations sociales et fiscales, constatent le développement significatif d'une activité d'enseignement illégale sur les stations françaises. Ces intervenants, issus pour la plupart de la Communauté européenne ou de pays un peu plus lointains et agissant pour leur compte ou pour celui d'agences, posent la question d'une activité illégale et dissimulée, constitutive d'une concurrence déloyale et préjudiciable.
    M. le président. Pourriez-vous poser votre question ?
    M. Vincent Rolland. Si l'on veut conforter la place du travail dans notre société, comme vient de l'affirmer le Président de la République, lors des voeux aux « forces vives », il faut d'abord que les règles existantes soient respectées. S'agissant du ski, quelles mesures pourraient être prises par le Gouvernement pour faire respecter les lois que nous venons de voter ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des sports, pour une réponse brève.
    M. Jean-François Lamour, ministre des sports. Monsieur le député, je partage votre inquiétude sur le travail illégal qui se développe dans nos stations.
    Des groupes de touristes arrivent dans nos stations de montagne, accompagnés de moniteurs de ski dont on peut dire que leur formation est pour le moins « exotique ».
    M. Bernard Accoyer. Tout à fait !
    M. le ministre des sports. Pour lutter contre la remise en cause de notre qualité de formation, mais surtout, comme Martial Saddier le rappelait, parce que des gens meurent pour assurer la sécurité des pratiquants de ski, il nous faut prendre des mesures particulièrement drastiques de contrôle.
    J'ai donc demandé aux préfets des régions concernées par la pratique du ski de nommer un référent au sein des directions régionales de la jeunesse et des sports, qui sera l'interlocuteur privilégié des professionnels de la montagne.
    Une cellule opérationnelle, chargée de faire remonter les informations sera mise en place dans ces régions pour mieux cibler ces contrôles et aller chercher les contrevenants là où ils se trouvent. Le nombre d'agents du ministère des sports aptes à effectuer ces contrôles sera triplé : de soixante actuellement, ils passeront à 180 avant la fin de la saison hivernale.
    Afin de rendre plus lisibles les contrôles, nous rétablirons par ailleurs la carte professionnelle.
    Enfin, nous mettrons en place un pôle des métiers de la montagne pour évaluer les besoins en moniteurs, et définir le mode d'équivalence afin de permettre à certains moniteurs issus de pays de l'Union européenne ou d'autres pays de venir excercer chez nous, en toute sécurité.(Applaudissements sur les quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

ÉNERGIE NUCLÉAIRE

    M. le président. La parole est à M. Yves Cochet, au titre des députés non inscrits.
    M. Yves Cochet. Monsieur le président, j'espère avoir le temps de poser ma question et d'entendre la réponse de Mme Fontaine avant seize heures.
    M. le président. Vous êtes comme tout le monde. Chacun passe à son tour.
    M. Yves Cochet. Non, nous sommes en retard pour la dernière question.
    M. le président. Posez votre question !
    M. Yves Cochet. Comme vous le savez, depuis toujours, entre les sociétés humaines et les énergies qu'elles utilisent, règne une relation telle que le type d'énergie choisi induit le type de société dans lequel on vit. Ainsi, le choix dominant du nucléaire pour la fabrication de l'électricité...
    M. Jacques Myard. Oui !
    M. Yves Cochet. ... induit un type de société centralisée, technocratique, où l'opacité demeure, un type de société où l'information sur le transport des matériaux combustibles fissiles civils relève maintenant du secret défense.
    Il y a là quelque chose d'une société policière et militaire (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), d'une société où le nucléaire ajoute à l'insécurité par les dangers intrinsèques à cette technologie et, évidemment, par les risques d'attentats terroristes sur les centrales ou sur le transport du plutonium.
    En revanche, le choix des énergies décentralisées, des économies, de la sobriété et de l'efficacité énergétiques, le choix des énergies renouvelables implique une société plus décentralisée, plus démocratique, plus transparente et plus proche des citoyens. C'est pourquoi nous organisons et nous appelons nos concitoyens à nous rejoindre à la manifestation organisée à Paris samedi prochain (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) contre la relance du nucléaire préparée par le Gouvernement, et pour la maîtrise de l'énergie.
    M. le président. Y a-t-il une question ?
    M. Yves Cochet. A travers le projet de loi d'orientation pour les énergies vous préparez une relance du nucléaire sans le dire, car vous avez « le nucléaire honteux ».
    Je vous demande d'être clair devant nos concitoyens : le Gouvernement est-il décidé, oui ou non, à lancer la construction d'un nouveau réacteur nucléaire EPR ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. Jacques Myard. C'est lamentable ! Oui au nucléaire !
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, à cette heure tardive, je devrai vous répondre assez rapidement. Comme vous le savez, le Livre blanc que j'ai présenté au nom du Gouvernement est aujourd'hui soumis à une très large concertation. Dans ce cadre, je voudrais vous dire tout l'intérêt que j'ai pris à notre rencontre constructive du 5 janvier dernier. J'espère que nous aurons l'occasion de poursuivre ce dialogue, comme avec tous les groupes de votre assemblée et, naturellement, avec toutes les associations. (Rires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,
vice-président

    M. le président. La séance est reprise.

5

REMPLACEMENT D'UN DÉPUTÉ DÉCÉDÉ

    M. le président. J'ai reçu, en application des articles LO 176-1 et LO 179 du code électoral, une communication de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, en date du mercredi 14 janvier 2004, m'informant du remplacement de notre très regretté collègue et ami Marcel Cabiddu, député de la onzième circonscription du Pas-de-Calais, décédé, par Mme Odette Duriez.

6

LOI ORGANIQUE SUR LE STATUT
DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE

Suite de la discusion d'un projet de loi organique
adopté par le Sénat après déclaration d'urgence

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi organique, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, portant statut d'autonomie de la Polynésie française (n°s 1323, 1336).

Discussion des articles

    M. le président. J'appelle les articles de ce projet dans le texte du Sénat.
    Avant que nous n'abordions l'article 1er, puis-je vous rappeler, mes chers collègues, que nous avons devant nous de longues heures de travail et que la célérité n'est pas contraire à la qualité des débats ?

Article 1er

    M. le président. La parole est à M. René Dosière, inscrit sur l'article.
    M. René Dosière. Monsieur le président, madame la ministre de l'outre-mer, mes chers collègues, je voudrais brièvement indiquer, en préambule, dans quel état d'esprit le groupe socialiste, qui s'exprimera par mon intermédiaire, aborde la discussion des amendements.
    D'abord, nous aurons toujours à l'esprit l'intérêt de la population polynésienne, car c'est naturellement à elle que nous pensons lorsque nous essayons de faire en sorte que les dispositions du projet contribuent à améliorer ses conditions de vie. Et dans la mesure où j'ai cru comprendre que les Polynésiens pouvaient soit nous écouter, soit nous voir, je leur adresse un très cordial salut.
    Je préciserai, ensuite que, bien entendu, le groupe socialiste n'a aucune hostilité à l'égard de l'autonomie. Nous l'avons dit et démontré hier, et nous ne comptons pas le répéter régulièrement. Simplement, nous souhaitons qu'on évite de nous faire ce faux procès. Nous sommes partisans de l'autonomie la plus complète et nous respectons le point de vue des populations polynésiennes. Si elles veulent un jour aller au-delà de l'autonomie, ce sera leur décision, pas la nôtre. Nous ne pourrons qu'en prendre acte.
    J'indiquerai enfin que nos amendements visent principalement à faire en sorte qu'en Polynésie, comme dans l'ensemble des territoires de la République française, la démocratie puisse fonctionner. Il s'agit de prendre en compte la culture polynésienne, mais aussi de faire respecter autant que faire se peut l'Etat de droit. Il ne doit pas y avoir un pouvoir absolu ou royal, comme dans d'autres parties du territoire français où l'on peut parfois parler de pouvoir féodal. Les comparaisons en la matière sont néanmoins quelque peu abusives car la situation en Polynésie est particulière. En tout état de cause, nos amendements tendent à renforcer sur ce territoire des contre-pouvoirs qui, à notre avis, ne fonctionnent pas suffisamment, aujourd'hui.
    Tel est l'état d'esprit qui nous anime. Je souhaite que nos débats soient constructifs. Nous n'essaierons pas de bloquer ou de retarder les choses. J'ai eu l'occasion, hier, en soutenant les deux motions de procédure, de développer le fond de notre pensée. Nous n'y reviendrons donc pas, sinon de manière allusive.
    Je souhaite néanmoins que la discussion ne soit pas bâclée mais, sur ce point, je fais confiance au président. (Sourires.) Je souhaite surtout, madame la ministre, que, sur les points qui restent obscurs et sur lesquels nous aurons l'occasion de vous demander quelques précisions, vous puissiez informer complètement la représentation nationale.
    M. le président. Je vous remercie, monsieur Dosière. Cela nous permettra d'avancer relativement vite sur un certain nombre d'amendements.
    La parole est à M. Victor Brial.
    M. Victor Brial. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les évolutions statutaires successives vécues ces vingt dernières années justifient la volonté des Polynésiens d'accéder à une étape importante du caractère propre de leur autonomie. Cette démarche a été travaillée et mûrie avant tout par les Polynésiens. L'autonomie polynésienne est l'expression d'une vraie politique de responsabilisation du pouvoir élu.
    Je ne peux que féliciter le président Flosse ainsi que les femmes et les hommes qui ont assumé l'initiation et la mise en oeuvre de l'autonomie de la Polynésie française jusqu'à aujourd'hui. La stabilité politique du territoire, le développement économique et social, le développement de la coopération régionale, la promotion régionale et internationale, la formidable réussite de la jeunesse polynésienne, l'animation et l'encadrement culturels et artistiques exceptionnels sont et non des moindres des preuves d'une réussite exemplaire des ambitions de l'autonomie polynésienne.
    En juillet dernier, j'ai été témoin de la grande satisfaction des chefs d'Etat et de Gouvernement de la région présents en Polynésie française à l'occasion de la réunion France-Océanie organisée à l'initiative du Président de la République. Les installations et les infrastructures visitées par les délégations ont suscité des réactions très positives sur l'image et le rayonnement de la France dans la zone Asie Pacifique.
    Nous pouvons sincèrement reconnaître aujourd'hui la réussite de l'autonomie et rendre hommage aux Polynésiens représentés légitimement dans cet hémicycle par nos amis Michel Buillard et Béatrice Vernaudon.
    Mme Béatrice Vernaudon. Merci.
    M. Victor Brial. Je tiens à leur apporter mon total soutien dans ces débats. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 195.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Cet amendement vise à remplacer la dénomination « pays d'outre-mer » par l'expression « collectivité d'outre-mer ».
    La dénomination « pays d'outre-mer » figurait bien dans le projet de révision constitutionnelle de 1999, qui insérait dans la Constitution un titre particulier pour la Polynésie, à laquelle il donnait un pouvoir législatif. Mais ce texte n'a pas été soumis au vote du Congrès. En revanche, la dénomination « pays d'outre-mer » ne figure pas dans la Constitution telle qu'elle résulte de la révision constitutionnelle de 2003. Voilà pourquoi nous considérons qu'il vaut mieux qualifier la Polynésie de « collectivité d'outre-mer ».
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement.
    M. Jérôme Bignon, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. La commission a émis un avis défavorable à cet amendement. Constitutionnellement, il n'est pas discutable que la Polynésie est bien une collectivité d'outre-mer dotée de l'autonomie. L'expression « pays d'outre-mer » est une simple dénomination. D'ailleurs, Mme la ministre a donné hier soir, en réponse à l'exception d'irrecevabilité, une explication très circonstanciée sur toutes les conditions dans lesquelles des termes différents qualifiant une collectivité avaient pu être employés concernant d'autres collectivités : Wallis, Mayotte, les Terres australes, etc. Il ne me paraît donc pas nécessaire d'y revenir.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'outre-mer, pour donner l'avis du Gouvernement.
    Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. Avis défavorable, pour les raisons que j'ai exposées hier.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 195.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 75.
    La parole est à M. René Dosière, pour le soutenir.
    M. René Dosière. Nous proposons de prévoir que « la Polynésie française s'administre » et non pas « se gouverne ». L'expression « se gouverne » s'applique en effet à un Etat, ce que n'est pas la Polynésie. Je trouve étonnant, à cet égard, que le projet de loi adopte une expression que ne rejetterait pas le parti indépendantiste. L'expression « s'administre » est donc mieux adaptée à une collectivité territoriale d'outre-mer et plus conforme à la Constitution qui, dans son article 72, dispose que les collectivités d'outre-mer énumérées à l'article 74 - c'est le cas de la Polynésie - « s'administrent librement ».
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement. L'expression « se gouverne » est reprise de la loi constitutionnelle de 1999, monsieur Dosière, qui avait été adoptée en termes identiques par les deux assemblées.
    En outre, je vous rappelle que l'article 5 du présent projet prévoit que les institutions de la Polynésie comprennent notamment le gouvernement. Or un gouvernement gouverne, il n'« administre » pas. Donc il paraît assez logique que cette terminologie soit utilisée.
    Par ailleurs, et je veux insister une fois pour toutes sur ce point, le statut d'autonomie est un statut différent. On l'a dit, c'est la première fois qu'on applique la réforme constitutionnelle et qu'on va aussi loin en matière d'autonomie. Il ne faut donc pas s'attendre à trouver dans le statut d'autonomie que nous allons voter le décalque exact des collectivités locales de la métropole. Cela n'aurait pas de sens.
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Bien sûr !
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Les Polynésiens attendent une autonomie et un statut particulier. Il n'est donc pas illégitime que la collectivité d'outre-mer qui a été créée par l'article 74 de la réforme constitutionnelle du 28 mars 2003 bénéficie d'un gouvernement qui gouverne. C'est la logique profonde de l'autonomie. C'est un point sur lequel nous divergeons. Mais le débat a été tranché par la commission qui a majoritairement repoussé les amendements proposés par le groupe socialiste.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Très bien répondu !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 75.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.
    (L'article 1er est adopté.)

Articles 2 à 4

    M. le président. En l'absence d'amendements sur les articles 2, 3 et 4, je vais les mettre successivement aux voix.
    (Les articles 2, 3 et 4, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

Article 5

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 196.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Cet amendement vise à supprimer de la liste des institutions de la Polynésie les mots : « le président ». Jusqu'à présent, en effet, on parlait de président du gouvernement et non pas du président de la Polynésie.
    Bien sûr, la Polynésie est une collectivité d'outre-mer dotée d'un statut d'autonomie. Et à ce titre, monsieur le rapporteur, nous n'entendons pas mettre en oeuvre en Polynésie les mêmes institutions et les mêmes règles de fonctionnement que dans n'importe quelle collectivité métropolitaine.
    Quand nous faisons référence à la Constitution, c'est simplement pour insister sur le fait que les règles fondamentales doivent être respectées sur l'ensemble du territoire de la République.
    Cela étant, parler de « président de la Polynésie » ne me paraît pas conforme au statut de cette collectivité. Il y a là une connotation étatique. On recopie la formulation de la Constitution de la République française. Or je ne vois pas ce que cette nouvelle formulation peut apporter en termes d'amélioration dans le fonctionnement des institutions. Madame la ministre, vous nous avez dit hier que les pouvoirs du président du gouvernement, donc du futur président de la Polynésie n'allaient pas évoluer fondamentalement. Dès lors, pourquoi modifier son titre ?
    Certes, dans les faits, cela ne changera pas grand-chose. Lors de notre déplacement en Polynésie, j'ai pu constater en effet que, dans les édifices publics, on trouvait toujours accrochés au mur, dans les mêmes tons et les mêmes dimensions, le portrait officiel du président de la République française, Jacques Chirac, mais aussi celui du président du gouvernement de Polynésie. C'était sans doute une anticipation. (Sourires.)
    En tout cas, madame la ministre, puisque cela n'a fait l'objet d'un commentaire ni dans l'exposé des motifs du projet de loi ni au Sénat, pourquoi passer de l'expression « président du Gouvernement » à celle de « président de la Polynésie » alors même que les pouvoirs du président ne changent pas fondamentalement ?
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Cet amendement a été rejeté par la commission. Il apparaît que le président dispose de pouvoirs propres étendus, qui justifient la rédaction du texte et la position prise par la commission. Je ne reprendrai pas ici les explications que j'ai données précédemment.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Le président est en lui-même une institution !
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. En effet, et c'est peut-être la plus grande nouveauté du statut, le président est en lui-même une institution.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Monsieur Dosière, si nous retenions votre amendement, nous supprimerions une institution de la Polynésie française. Le président, selon les termes de ce statut, a effectivement des pouvoirs propres. Nous ne pouvons donc donner une suite favorable à votre amendement.
    M. le président. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Y a-t-il de nouveaux pouvoirs ? J'avoue ne pas avoir eu le temps d'étudier les dispositions antérieures. S'ils existaient déjà, la justification qui m'est donnée n'est pas bonne. Je précise d'ailleurs, monsieur le rapporteur, que mon collègue et ami Jean-Pierre Sueur, qui a fait cette observation au Sénat, s'est entendu répondre par le sénateur Flosse, qui se trouve être la même personne que le président du gouvernement de la Polynésie, que les pouvoirs de ce président n'étaient pas modifiés par ce texte. Je suis donc perplexe.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Nous touchons là ce que j'ai appelé hier soir la partie cosmétique du texte. Comme l'indique fort justement notre collègue Dosière, les pouvoirs du président n'ont pas changé, ils ne sont pas fondamentalement accrus. On lui confère pourtant un titre différent, qui correspond plus à l'idée qu'on se fait de l'autonomie et d'un « mini-chef d'Etat », d'un « chef d'Etat au petit pied ». (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous avez été un certain nombre ici à dire, avec justesse, que le président actuel de la Polynésie française pouvait avoir la carrure d'un homme d'Etat. Il n'en reste pas moins - je lui souhaite naturellement longue vie - qu'il n'est pas éternel...
    M. Jean-François Mancel. Mettons-le dans la loi ! (Rires.)
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cela me paraît difficile monsieur Mancel !
    M. le président. On ne peut pas mettre l'éternité dans la loi.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Mais demain, et compte tenu des nouvelles modalités d'élection du président de l'assemblée, quelqu'un qui n'aura jamais été élu par les Polynésiens bénéficera de ce mini-statut de chef d'Etat. On créé aujourd'hui un statut qui correspond peut-être à la carrure d'homme d'Etat de M. Flosse, mais je m'inquiète pour le futur. C'est pourquoi je parlais de cosmétique, et cette cosmétique n'était pas forcément indispensable.
    M. René Dosière. Les jeunes pensent à l'avenir !
    M. le président. La parole est à M. Michel Buillard.
    M. Michel Buillard. Bien évidemment cette nouvelle terminologie n'inquiète pas les députés polynésiens. On peut constater que le président voit ses pouvoirs quelque peu renforcés dans la mesure où il pourra promulguer les lois de pays et où il dispose d'un pouvoir réglementaire dérivé. Quant à sa place dans les institutions, n'oubliez pas qu'il a un rôle important à jouer au titre, non seulement de la Polynésie, en tant que Polynésien, mais aussi de représentant de la France dans le Pacifique.
    Or vous connaissez le rôle éminent que le président Flosse a joué dans le dénouement de situations difficiles à une certaine époque. Les socialistes ne l'ont sans doute pas oublié. C'est grâce à lui que les tensions avec les chefs d'Etats indépendants du Pacifique ont été apaisées et que la France a été reconnue dans cette partie du monde. Il est donc tout à fait normal pour un élu polynésien que le président de cette collectivité s'appelle aujourd'hui « le président de la Polynésie française ».
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Au regard tant des articles 15, 16, 17, 38 et 39, qui étendent les pouvoirs propres du président en matière de politique extérieure par rapport au statut précédent - ce que vous allez d'ailleurs contester -, que des pouvoirs propres dont il dispose dans le domaine réglementaire pour lesquels l'article 64 complète et renforce les dispositions du statut antérieur, cette appellation paraît parfaitement légitime.
    Ainsi que M. Lagarde l'a rappelé, deux conceptions s'opposent à cet égard, qui vont nourrir le débat tout l'après-midi et, probablement, une partie de la soirée. Alors que certains essaient en permanence de ramener la Polynésie à une collectivité territoriale de base, nous affirmons qu'il y a une autonomie qui justifie un particularisme, ou des particularismes qui justifient l'autonomie, qu'il s'agisse de l'insularité, de l'éloignement de la métropole, du sens de l'histoire, de l'identité de la Polynésie. Chacun est donc cohérent dans ses positions.
    Certes nous pourrons revenir sans cesse à ce qui oppose fondamentalement la majorité à René Dosière et à ses amis, voire, de temps en temps, dans une moindre mesure, à M. Lagarde et à son groupe, mais il vaudrait mieux trancher une fois pour toutes afin que les discussions sur ce sujet ne soient pas récurrentes, ce qui irait dans le sens de ce que vous avez souhaité, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 196.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 240.
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour le soutenir.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Comme vient de le rappeler notre rapporteur, l'autonomie est une spécificité. Toutefois elle ne saurait être pour autant un alibi à tout. Elle devrait au moins ne pas avoir d'effet négatif sur les possibilités de décentralisation interne en Polynésie.
    Le projet de loi tend à conférer de plus en plus de pouvoirs au parlement, c'est-à-dire à l'assemblée de la Polynésie, et au gouvernement. Il prévoit cependant aussi un accroissement du rôle des communes. Néanmoins, chacun sait - cela a été une partie de l'intérêt de notre visite sur place - que la plupart de ces communes, à l'exception de quelques-unes à Tahiti même, n'ont ni la taille critique, ni la capacité budgétaire, ni une administration suffisante pour jouer un rôle d'équilibre entre les collectivités. Cela peut se comprendre pour des communes situées à plusieurs milliers de kilomètres de la métropole, ayant à peine 800 habitants, des budgets dépendant entièrement des dotations, et des administrations inexistantes.
    Afin qu'elles puissent exister, face aux administrations, face au gouvernement du territoire, il faut leur permettre de se regrouper, ce qui leur a toujours été refusé au niveau local jusqu'à présent. Nous devrions les y autoriser par la loi, de sorte que les communes et les archipels qui souhaiteraient se regrouper pour travailler ensemble, pour déterminer ensemble leur avenir, ne soient plus individuellement « soumises » au bon vouloir du pouvoir central, fût-ce à 20 000 kilomètres de Paris.
    La création de conseils d'archipel libres, comme cela avait été prévu en 1991 - c'est-à-dire à la libre disposition des communes -, ou de toute autre forme d'intercommunalité que les communes souhaiteraient mettre en place, est une réelle nécessité. Cela correspondrait, si j'en crois les entretiens que nous avons eus sur place, à une aspiration forte, tant des membres de la société civile que des maires. Si nous ne le faisons pas, nous risquons d'avoir à faire face à une autre revendication, déjà entendue aux Marquises, où certains ont demandé à revenir dans le droit commun français, afin d'être sous l'égide de l'Etat.
    Il me semble préférable de faciliter le regroupement des communes, mais cela demeurerait une faculté.
    C'est pourquoi j'ai présenté cet amendement et une série d'autres qui le compléteront, tendant à la création de six conseils d'archipel et leur permettant de se réunir, d'exister, de mutualiser leurs moyens.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais, à titre personnel, je veux présenter quelques brèves observations.
    Il va de soi que l'on ne peut qu'être d'accord pour favoriser la coopération intercommunale. On y travaille en métropole avec ardeur depuis très longtemps, et nous sommes, les uns et les autres, conscients que les petites communes, et même les grandes, ont intérêt à coopérer entre elles.
    S'agissant du cas particulier de la Polynésie, je dois cependant souligner que si la loi de 1991 avait prévu des conseils d'archipel, ceux-ci n'ont jamais fonctionné, à tel point qu'ils n'ont pas été repris dans le statut de 1996.
    A cet égard, le texte qui nous est proposé comporte des avancées importantes en faveur des communes : nouvelles compétences, désengagement du gouvernement, loi d'habilitation pour le statut du personnel communal, et quelques moyens financiers nouveaux. Je crois qu'il faut commencer par bien faire fonctionner ce premier étage de la fusée. Lorsque nous aurons constaté, dans trois ou quatre ans, que tel est le cas, il sera temps de rechercher une nouvelle forme de coopération intercommunale moderne qui répondra à un besoin spécifique.
    Actuellement, nous avons le sentiment que, même si cela est parfois critiqué, c'est l'assemblée de la Polynésie, le gouvernement de la Polynésie française, qui jouent ce rôle de fédérateur et d'organisateur de la vie communale, bien souvent parce que les communes sont petites, éloignées les unes des autres, sans moyens. Avant d'aller plus loin, il faut renforcer les communes. Tel est l'objet de la loi organique qui nous est soumise.
    Plus tard, nous pourrons suivre notre collègue Jean-Christophe Lagarde, dont nous partageons largement l'analyse, puisque les membres de la mission ont fait les mêmes constatations que lui et René Dosière. Nous sommes en effet allés dans plusieurs communes, et nous avons rencontré le président du syndicat des communes. Néanmoins il nous semble trop tôt pour avancer dans cette voie. C'est pourquoi je suis défavorable à l'amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Monsieur le député, je n'ai absolument pas de désaccord avec vous sur l'objectif que vous visez dans cet amendement. Cependant, comme l'a rappelé le rapporteur, les conseils d'archipels n'ont jamais fonctionné. Quand on crée une structure à laquelle on ne donne aucun pouvoir et aucune mission, il ne faut pas s'étonner qu'elle ne fonctionne pas. Je crois donc que l'on commettrait une erreur en rétablissant cette institution.
    En revanche, j'ai déjà eu l'occasion de souligner, au cours de la journée d'hier, que nous sommes engagés dans une grande opération de modernisation des communes de Polynésie qui vont enfin entrer dans l'ère de la décentralisation qu'elles n'ont pas connue jusqu'à maintenant. C'est donc dans le cadre de cette réforme des communes qu'il faut y, comme l'a dit M. Bignon, travailler sur l'intercommunalité afin de répondre à votre préoccupation, mais d'une autre façon.
    L'avis du Gouvernement est donc défavorable à la re-création des conseils d'archipels tout en rappelant que nous atteindrons l'objectif qui vous préoccupe à juste titre grâce au nouveau statut des communes de Polynésie et au développement de l'intercommunalité, que nous favoriserons évidemment, comme cela a été fait partout sur le territoire de la République.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. J'indique d'abord que si les conseils d'archipels n'ont jamais fonctionné, c'est tout simplement parce qu'il fallait une délibération de l'assemblée polynésienne qui n'a jamais été prise.
    Cela dit, j'ai bien entendu les arguments à la fois de notre rapporteur et de Mme la ministre, et j'ai constaté que, à l'instar du président de la commission des lois, ils étaient conscients du problème sur lequel ils allaient travailler dans les mois ou les années à venir après avoir laissé aux communes le temps de prendre un peu plus d'ampleur et de place. Des possibilités d'intercommunalité leur seront alors offertes, ce qui constituera un nouveau moyen de développement qui leur sera fort utile. Je souhaiterais cependant que l'Assemblée soit associée aux travaux à ce sujet.
    M. le président. Retirez-vous votre amendement ?
    M. Jean-Christophe Lagarde. Oui, et j'espère que nous pourrons travailler efficacement en faveur de l'intercommunalité parce qu'elle peut constituer un atout essentiel pour le développement économique et démocratique de la Polynésie.
    M. le président. L'amendement n° 240 est retiré.
    La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Le rapporteur a souligné que les conseils d'archipels créés en 1991 n'avaient jamais fonctionné. Pourtant ils avaient des missions bien définies puisqu'ils devaient rendre des avis, notamment sur les contrats de Plan et sur les liaisons aériennes et maritimes.
    Je prends l'exemple des Marquises, où nous avons eu la grande joie de nous rendre ensemble lors de notre mission, monsieur le rapporteur. Elles se trouvent à 1 500 kilomètres de Papeete, c'est-à-dire aussi loin qu'Oslo de Paris, et ne comptent que six communes, correspondant pratiquement chacune à une île. Il n'est d'ailleurs pas très simple de circuler d'une île à une autre, d'autant qu'elles ne disposent pas toutes d'un terrain d'aviation.
    L'une des revendications des élus des Marquises que nous avons pu rencontrer porte sur le besoin de mener une réflexion commune au niveau de l'archipel et pas essentiellement sur les pouvoirs des communes ; nous reparlerons plus tard de l'élargissement des compétences des communes que je considère plutôt virtuel que réel. En tout état de cause, les conseils d'archipels auraient un autre rôle que les communes. Compte tenu des distances, ils seraient très utiles.
    J'ajoute qu'ils n'ont pas fonctionné parce que - comme l'a fort justement souligné Jean-Christophe Lagarde - il aurait fallu que l'assemblée polynésienne prenne une délibération en ce sens. Elle ne l'a jamais fait et cela a permis, en 1996, au président du gouvernement de faire disparaître ces conseils d'archipels qui lui avaient été imposés par la loi de 1991.
    Il est regrettable que ceux là même qui réclament davantage d'autonomie vis-à-vis de la France, ce qui est une bonne chose, refusent toute décentralisation à l'intérieur du territoire.
    M. le président. Je mets aux voix l'article 5.
    (L'article 5 est adopté.)

Article 6

    M. le président. Je mets aux voix l'article 6.
    (L'article est adopté.)

Article 7

    M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 34. La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Il s'agit d'ajouter deux institutions à l'énumération du 1° - le médiateur de la République et le défenseur des enfants - qui avaient été oubliés.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié par l'amendement n° 34.
    (L'article 7, ainsi modifié, est adopté.)

Article 8

    M. le président. Je mets aux voix l'article 8.
    (L'article 8 est adopté.)

Article 9

    M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 241.
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir cet amendement.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cet amendement vise à supprimer l'alinéa qui prévoit qu'en dehors des sessions de l'assemblée, l'avis sur les projets d'ordonnances est émis par sa commission permanente, dans les délais mentionnés à l'alinéa précédent. Il s'agit d'éviter qu'elle soit seule à se prononcer sur les lois et ordonnances, ou sur les actes réglementaires pour lesquels pouvoir sera donné à la Polynésie française, les fameuses « lois de pays ».
    Dans une commission permanente, en effet, ne siègent pas tous les membres de l'assemblée. Or il serait anormal que chaque élu polynésien ne puisse pas se prononcer sur des textes importants puisqu'ils pourront concerner des délégations que nous donnerons à la Polynésie française, d'autant que, dans cette assemblée, les groupes peuvent être relativement éclatés.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement.
    L'assemblée de la Polynésie est, certes, une institution, mais sa commission permanente en est un démembrement. Il n'existe donc aucune objection juridique, au regard de l'article 5 qui énumère les institutions de la Polynésie et de l'article 74 de la Constitution, à ce que la commission permanente joue le rôle qui lui est confié par l'article 9. Cette disposition répond à un souci de pragmatisme. La commission permanente est d'ailleurs constituée à la proportionnelle.
    Risques d'engorgement de l'ordre du jour, éloignement des conseillers territoriaux sont autant de raisons qui justifient la compétence de la commission permanente.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement qui lui paraît contraire à l'esprit de l'article 74 de la Constitution, selon lequel la commission permanente peut être habilitée par la loi organique à donner des avis sur les textes soumis à consultation par l'Etat.
    Les compétences conservées par l'Etat, en application de l'article 14 et la modernisation du droit de l'outre-mer, politique initiée depuis plusieurs années et que j'ai souhaité reprendre, exigeront l'adoption de nombreux textes de nature législative après consultation de l'assemblée de la Polynésie française. Or les avis doivent être rendus dans les meilleures conditions et dans des délais très brefs. Cet amendement ne correspond donc pas à notre objectif de mener une politique active de modernisation du droit de l'outre-mer.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Le sujet est grave.
    La commission permanente d'une collectivité territoriale, en métropole ou en dehors, ne prend généralement que de petites décisions en vertu, la plupart du temps, d'une délibération cadre de l'assemblée : octroi de subventions, autorisations d'engagement de travaux, déblocage de fonds, par exemple. En l'occurrence, il ne s'agira pas de cela.
    L'Assemblée nationale déléguera à l'assemblée de la Polynésie française la possibilité d'élaborer certains textes et d'émettre des avis. Nous ne saurions donc accepter que ce pouvoir soit à son tour délégué à une commission permanente dont le texte ne prévoit même pas la composition a minima. Je présenterai d'ailleurs un amendement sur ce sujet.
    Cela signifie que, en pratique, on empêchera une partie de cette assemblée, selon la pratique voulue ou non par les autorités locales, d'exprimer un avis. De plus, chacun sait que les délibérations d'une commission permanente ne bénéficient pas de la même publicité que celles d'une assemblée plénière.
    M. René Dosière. Hélas !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Nous savons déjà que, avant d'émettre son avis sur le projet de loi qui nous est soumis, l'assemblée de la Polynésie française n'a pas examiné le texte article par article. Seul le conseil économique et social du territoire l'a fait. Accepter que la commission permanente puisse traiter de tout ce que nous nous apprêtons à déléguer à la Polynésie française porterait une atteinte réelle aux droits des cinquante-sept futurs élus de cette assemblée.
    Il s'agit d'un sujet tellement sérieux que plusieurs amendements traitent de ce sujet.
    Nul n'oserait imaginer que, à l'Assemblée nationale, une de nos commissions décide à notre place. C'est pourtant ce que nous nous apprêtons à faire. J'estime que cela n'est pas normal.
    Par ailleurs, cette commission permanente n'est pas comparable à celle d'un conseil général ou d'un conseil régional parce que les décisions ou les avis concernés ne sont pas du tout de même nature.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'outre-mer. Je tiens à ajouter une précision supplémentaire, car les propos de M. Lagarde montrent qu'il y a un risque de malentendu.
    Lorsque l'on consulte l'assemblée de la Polynésie française, actuellement, la plupart du temps on n'obtient pas l'avis que l'on a sollicité pour des raisons de délais. En effet, nous avons de telles contraintes dans l'élaboration des lois au Parlement que nous avons l'obligation de mettre en oeuvre des procédures rapides. Même en utilisant les procédures d'urgence pour la plupart des textes votés ici, nous n'avons pas le temps d'obtenir l'avis de l'assemblée de la Polynésie avant de les faire entrer en vigueur.
    Il vaut donc mieux un avis de la commission permanente que pas d'avis du tout de l'assemblée de la Polynésie.
    D'autre part, je voudrais vous rassurer : il est bien prévu dans les textes que les pouvoirs de la commission permanente seront restreints en matière de lois de pays. Lorsqu'il s'agira d'une loi du pays, il faudra que l'assemblée entière donne son avis.
    Nous essayons de moderniser le droit de l'outre-mer et de ne pas retarder des textes et qui peuvent être très importants pour la Polynésie française. Soyons pragmatiques : mieux vaut un avis de la commission permanente que pas d'avis du tout, ce que nous déplorons trop souvent !
    Je rappelle, une fois de plus, que nous avons veillé à ce que les textes les plus importants, notamment les lois du pays, soient examinés par la totalité de l'assemblée de Polynésie.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 241.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 77.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Je vais, en défendant cet amendement, me montrer moins doctrinaire que M. Lagarde et beaucoup plus pragmatique, ce qui est sans doute une dérive actuelle des socialistes. En tout cas, je soutiens le pragmatisme de Mme la ministre.
    Au fond, mon amendement n'a qu'un objet : faire en sorte que la commission permanente ne puisse pas donner d'avis sur les lois de programme.
    J'ai suivi en cela le rapporteur du Sénat qui disait qu'il faut éviter que des avis importants soient rendus par une formation restreinte.
    C'est vous d'ailleurs, me semble-t-il, madame la ministre, qui avez introduit une disposition interdisant à la commission permanente de rendre des avis sur des lois qui modifient cette loi organique - ce que j'approuve. Les lois de programme - il y en a eu une sur la justice et une autre sur la sécurité, et il pourrait y en avoir d'autres, sur d'autres thèmes - sont des textes assez importants pour justifier que l'assemblée se réunisse.
    Si vous le permettez, monsieur le président, j'aborderai dès maintenant, pour gagner du temps, l'amendement suivant, qui fait référence au même objet et prévoit un autre dispositif. Selon le projet, les avis de la commission permanente ou de l'assemblée doivent être fournis « avant leur adoption en première lecture par la première assemblée saisie ». Mon amendement précise que cet avis doit être fourni d'abord au Conseil d'Etat, lequel émet un avis au titre de l'article 39 sur les projets présentés au conseil des ministres. Il me semble, en effet, que le Conseil d'Etat a besoin de connaître l'avis de l'assemblée territoriale.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 77 ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement, d'abord parce que les lois de programme sont rares, que leur contenu juridique semble prêter à discussion. On ne voit pas bien ce qu'apporterait de plus cet amendement. On comprend bien que, sur la loi organique, l'assemblée de Polynésie soit consultée. Le Gouvernement a entendu limiter cette faculté pour tenir compte des difficultés évoquées par Mme la ministre, il y a quelques instants, et de la spécificité de la Polynésie. Il faut que la consultation de l'assemblée soit un phénomène rare. On ne peut imaginer la consulter à tout instant. Quant à ajouter la loi de programme, la commission a trouvé que c'était inutile. Donc, elle a émis un avis défavorable à l'amendement n° 77.
    M. René Dosière. Si c'est rare, faisons court, monsieur le rapporteur !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Même avis. J'ajoute, à l'intention de M. Dosière, que, dans le statut de la Nouvelle-Calédonie, qu'il connaît bien, il n'y a aucune limite aux pouvoirs de la commission permanente.
    M. René Dosière. Madame la ministre, vous savez qu'il est difficile de comparer la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie. Je ne suis pas sûr, d'ailleurs, que si nous poussions la comparaison trop loin, les responsables polynésiens seraient toujours satisfaits, notamment quant à leur capacité législative.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 77.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 76 que M. Dosière a déjà défendu ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. D'abord, je fais observer que, pour qu'il puisse être adopté, il aurait fallu que l'amendement fasse la distinction entre projets et propositions de lois, ces dernières n'étant pas soumises, que je sache, au passage en Conseil d'Etat.
    Cela dit, la rédaction de l'article 9 reprend l'énoncé de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, datant de juillet 1982. Elle semble donc difficile à contester.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Avis défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 76.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 35, qui est rédactionnel, n'est-ce pas, monsieur le rapporteur ?
     M. Jérôme Bignon, rapporteur. Absolument !
    M. le président. Avis favorable du Gouvernement.
    Je mets aux voix l'amendement n° 35.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié par l'amendement n° 35.
     (L'article 9, ainsi modifié, est adopté.)

Article 10

    M. le président. Je mets aux voix l'article 10.
    (L'article 10 est adopté.)

Article 11


    M. le président. Je mets aux voix l'article 11.
    (L'article 11 est adopté.)

Article 12

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 197.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. L'amendement est défendu. Nous avons eu ce débat tout à l'heure.
    M. le président. Effectivement !
    Avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
    Je mets aux voix l'amendement n° 197.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 78.
    Monsieur Dosière, là encore, nous avons déjà eu ce débat...
    M. René Dosière. En effet, monsieur le président !
    M. le président. Même avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
    Je mets aux voix l'amendement n° 78.

    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 36.
    Monsieur le rapporteur, laisserez-vous M. Dosière le présenter ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. J'allais vous le proposer, monsieur le président !
    M. le président. La parole est à M. Dosière, pour soutenir l'amendement n° 36.
    M. René Dosière. L'amendement n° 36 est l'un des six amendements sur les 150 présentés par les socialistes, qui ont été adoptés par la commission. Je suis très sensible au fait que le rapporteur me laisse le présenter. Chacun en mesurera le caractère fondamental : il s'agit d'ajouter à la liste des personnes qui peuvent saisir le Conseil constitutionnel pour vérifier qu'une loi votée après ce statut n'empiète pas sur les prérogatives de la Polynésie, le président de l'Assemblée nationale et celui du Sénat, les deux lieux où se fabrique la loi, précisément !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Avis favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
    Je suis saisi de l'amendement n° 146. N'est-il pas satisfait, monsieur Dosière ?
    M. René Dosière. Bien sûr ! Je le retire.
    Je me réjouis de ce vote unanime et je souhaite qu'il y en ait beaucoup d'autres, car la Polynésie le mérite !
    M. le président. L'amendement n° 146 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 12, modifié par l'amendement n° 36.
    (L'article 12, ainsi modifié, est adopté.)

Article 13

    M. le président. Je mets aux voix l'article 13.
    (L'article 13 est adopté.)

Article 14

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 1.
    La parole est à M. Michel Buillard, pour soutenir cet amendement.
    M. Michel Buillard. Cet amendement vise à rétablir une compétence dont disposait la Polynésie dans le statut de 1996. Nous avons eu de longues discussions à ce sujet en commission, et selon la réponse qui nous sera fournie par Mme la ministre, s'agissant de régler des problèmes de délivrance d'actes d'état civil, je pourrais le retirer.
    M. le président. Madame la ministre, M. Buillard attend votre réponse...
    Mme la ministre de l'outre-mer. Effectivement, cet amendement a pour objet de rétablir dans le texte de la loi organique une expression qui figurait dans le statut de 1996. En fait, cette disposition n'a pas répondu aux attentes. La remplacer par la mention « actes de l'état civil » apparaît tout à la fois plus clair et plus précis.
    Par ailleurs, cette mention d'« actes de l'état civil » ne réalise aucune extension des compétences de l'Etat au détriment de la Polynésie française. Elle permet d'ailleurs, à l'article 90, de confier à la Polynésie française le soin de mettre à disposition de la population les registres d'état civil.
    En outre, l'article 31 permettra d'associer la Polynésie française à l'élaboration de la réglementation sur les registres de l'état civil.
    J'espère qu'après ces explications rassurantes, cet amendement pourra être retiré.
    M. le président. La parole est à M. Michel Buillard.
    M. Michel Buillard. Je retire l'amendement n° 1.
    M. le président. L'amendement n° 1 est retiré.
    Je suis saisi de l'amendement n° 2.
    La parole est à M. Michel Buillard, pour le soutenir.
    M. Michel Buillard. Il s'agit d'un amendement de précision.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Cet amendement a été adopté par la commission.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 198.
    La parole est à M. René Dosière, pour le soutenir.
    M. René Dosière. L'article 14 énumère les compétences qui sont réservées à l'Etat. Mon amendement tend à laisser la compétence relative aux matières premières stratégiques, en particulier les hydrocarbures liquides et gazeux, sous la responsabilité exclusive de l'Etat, compte tenu du caractère sensible de ce secteur et de son impact sur l'économie.
    L'article 91, alinéa 8, du présent projet de loi donne compétence au conseil des ministres de la Polynésie pour fixer les conditions d'approvisionnement, de livraison, ainsi que les tarifs des hydrocarbures liquides et gazeux.
    On aura donc compris que mon amendement tend à revenir sur ce type de dispositions. Je souhaite que la représentation nationale soit informée des raisons qui motiveraient ce transfert. Je n'ai pas de doute sur le sort qui sera réservé à mon amendement, mais je souhaiterais connaître, je le répète, les raisons de ce transfert ainsi que l'amélioration qui en est attendue, au regard des pratiques en cours dans ce domaine, ces dernières années. Je relève au passage que, sur ce texte, nous ne disposons d'aucune étude d'impact et qu'il est donc particulièrement difficile d'évaluer les conséquences de telle ou telle disposition. Dans ce domaine, les explications font cruellement défaut, hormis le fait que c'est une demande formulée par l'actuel président du Gouvernement, depuis de nombreuses années. Ça ne me paraît pas être une raison suffisante !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement. Se préoccuper des intérêts stratégiques de la République française est tout à fait louable, mais comme l'article 27 dispose que : « La Polynésie française exerce ses compétences dans le respect des sujétions imposées par la défense nationale. », il n'y a pas d'inquiétude à avoir sur ce sujet.
    La Polynésie est compétente en matière de desserte aérienne. Qu'elle le soit en matière d'approvisionnement en hydrocarbures est dont complémentaire : c'est la logique du statut d'autonomie et de l'élargissement des compétences. Il va de soi que le haut-commissaire conservera un droit d'information pour assurer la sécurité civile et qu'il aura même, dans le cadre des installations classées, des droits particuliers à faire valoir s'agissant de la construction des réservoirs et du stockage de l'essence et du kérosène, de telle façon que la sécurité civile soit assurée pour les Polynésiens. Certes, les compétences régaliennes et les compétences territoriales - appelées désormais « compétences de la Polynésie » - peuvent s'entrechoquer mais cela ne devrait pas poser de problèmes car elles sont bien organisées par le nouveau statut.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Monsieur Dosière, je crois vraiment que vos préoccupations, qui sont tout à fait légitimes, sont couvertes, comme l'a dit M. Bignon, par l'article 27 qui vise la défense et les missions de sécurité. Il ne s'agit ici que de donner aux territoires la possibilité de mener une action économique, en termes de compétences d'approvisionnement et de distribution pétrolière. Il n'est nullement question de sécurité et de défense, bien évidemment.
    M. le président. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Compte tenu des explications qui viennent de m'être données, je retire mon amendement.
    M. le président. L'amendement n° 198 est retiré.
    Je suis saisi de l'amendement n° 199.
    La parole est à M. René Dosière pour le soutenir.
    M. René Dosière. Il s'agit toujours de préserver les compétences de l'Etat, en l'occurrence « les principes fondamentaux des obligations commerciales ».
    L'unité du régime applicable en matière commerciale doit être préservée et donc rester de la compétence exclusive de l'Etat. Le transfert de cette compétence à la Polynésie française entraînerait au sein de la République un conflit et une grande confusion entre les lois applicables, ce qui serait préjudiciable à la bonne marche des relations commerciales.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a émis un avis rigoureusement contraire à celui de M. Dosière, précisément parce que le principe d'autonomie doit permettre à la Polynésie, dans le respect d'un certain nombre de principes fondamentaux, d'avoir un droit commercial qui lui soit propre. C'est le principe même du commerce d'être en permanence soumis à des réglementations différentes. Quand vous commercez avec les Allemands ou les Britanniques, vous n'êtes pas soumis aux mêmes règles !
    Autant nous devons être extrêmement attentifs aux prérogatives régaliennes, par exemple l'état civil, autant, compte tenu de la mondialisation, l'autonomie doit être respectée en matière de commerce. Voilà qui ne me pose pas de problème philosophique !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 199.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 272 et 273.
    La parole est à Mme la ministre pour les soutenir.
    Mme la ministre de l'outre-mer. S'agissant de l'amendement n° 272, le terme de « circulation aérienne » peut être interprété de façon restrictive comme s'appliquant uniquement aux « règles de l'air » et à la gestion de l'espace aérien, et donc comme n'incluant pas la réglementation portant sur la navigabilité des aéronefs et la sécurité des aérodromes ainsi que le contrôle de son application, qui doivent demeurer de la compétence de l'Etat. Il nous a donc paru nécessaire de préciser sur ce point le 8° de l'article 14.
    L'amendement n° 273 complète le 10° de l'article 14 par les mots : « dénombrement de la population ».
    La réforme du recensement de la population inscrite aux articles 156 à 158 de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité prévoit qu'en Polynésie française, le dénombrement de la population a lieu tous les cinq ans. L'Institut national de la statistique et des études économiques, l'INSEE, organise cette opération en liaison avec l'institut polynésien compétent et les communes, à la satisfaction des élus et avec une grande efficacité, comme l'a montré le recensement réalisé fin 2002.
    Le présent amendement maintient sans ambiguïté la compétence de l'Etat pour réaliser ces opérations.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 272 ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. A titre personnel, j'y suis favorable, puisqu'il introduit de la clarté et de la précision, et que tout ce qui va dans ce sens est bienvenu.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 272.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 273 ?
    M. Jérôme Bignon. Le recensement est une vieille prérogative régalienne : bien que la Palestine fût, il y a 2000 ans, très autonome, c'est Tibère qui décidait, à Rome, des opérations de recensement. Il y a donc des précédents ! (Rires.)
    M. le président. Mes chers collègues, pas de débat sur Tibère ! (Sourires.)
    La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Puisqu'on a cité l'institut polynésien de la statistique, je veux souligner combien les travaux de cet institut sont particulièrement utiles, j'en ai eu la preuve en préparant ce débat, et je profite de cette occasion pour souhaiter qu'il dispose encore des moyens nécessaires pour continuer l'excellent travail qu'il réalise dans la connaissance des réalités économiques et démographiques de la Polynésie.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 273.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 147.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Cet amendement tend à substituer au mot « universitaire » le mot « supérieur », car l'enseignement supérieur comprend les formations post-baccalauréat dispensées dans les lycées, alors que l'appellation « universitaire » est réduite à l'université stricto sensu. J'ajoute qu'il s'agit de revenir à la version initiale du texte du Gouvernement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement. La Polynésie exerce dès à présent des compétences en matière de formation supérieure sur les classes préparatoires et certaines filières de BTS notamment. Seul l'enseignement universitaire relève, par nature, de l'Etat.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Il convient de laisser à la Polynésie française le soin de définir les filières de formation professionnelle que sont les BTS préparés dans les lycées. Bien sûr, elle assumera cette nouvelle compétence en termes de moyens techniques et humains.
    Nous sommes donc défavorable à cet amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 147.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 14, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 14, ainsi modifié, est adopté.)

Article 15

    M. le président. La parole est à M. René Dosière, inscrit sur l'article 15.
    M. René Dosière. L'article 15 concerne le rôle international de la Polynésie. C'est une disposition nouvelle qui prévoit que la Polynésie française peut disposer de représentations auprès de tout Etat ou territoire reconnu par la République française.
    Depuis 1996, et même avant, la Polynésie avait la possibilité de siéger dans tous les organismes qui s'occupent de la zone du Pacifique, ce qui est parfaitement légitime puisqu'on est au coeur des compétences et de la zone géographique de la Polynésie. Avec l'article 15, nous changeons d'un cran, et, là encore, un parti indépendantiste ne serait pas défavorable à ces dispositions qui permettront à la Polynésie, comme à un Etat, d'ouvrir des représentations, qui ne sont pas autrement précisées, auprès de tout Etat du monde entier, dès lors que cet Etat est reconnu par la République française.
    Si la Polynésie était indépendante, je n'y verrais pas d'inconvénient, mais tel n'est pas le cas, et je pense qu'il y a un risque de dérive. On commencera par une représentation commerciale, cela se doublera ensuite d'une représentation culturelle puis économique, c'est-à-dire qu'elle aura quasiment toutes les attributions d'une ambassade, à l'exception bien entendu d'une représentation militaire, puisque cela fait partie des compétences de la Polynésie, voire peut-être de la diplomatie, mais le lien serait très ténu.
    Je pense qu'il est prématuré de se lancer dans une telle opération et c'est la raison pour laquelle je préfère limiter cette possibilité à la zone Pacifique et ne pas l'étendre à l'ensemble des pays du monde entier.
    J'ajoute que cela aurait un coût assez sensible pour la Polynésie.
    M. le président. Je vous donne la parole sur l'article 15, monsieur Lagarde, mais je pense que vous pourriez en même temps défendre l'amendement n° 246 qui tend à le supprimer.
    M. Jean-Christophe Lagarde. C'est un article important et j'imagine qu'on nous expliquera qu'il ne l'est pas tant que cela.
    Hier, j'expliquais que certains éléments de ce texte étaient de la cosmétique et d'autres pas. Celui-ci n'en est pas un.
    Plus exactement, de deux choses l'une. Ou il s'agit simplement d'ouvrir des bureaux de tourisme, comme il peut en exister à quelques dizaines ou quelques centaines de mètres d'ici boulevard Saint-Germain et, soyons honnêtes, il n'est nul besoin de faire figurer cela dans une loi organique, toute collectivité de la République française peut ouvrir de tels bureaux à Bombay, Calcutta, Nairobi, New York ou au Pérou. Ou alors il s'agit de donner à la Polynésie française la possibilité d'instaurer, hors de toute représentation diplomatique française, des liens pratiquement d'Etat à Etat avec d'autres Etats ou portions d'Etat, et c'est sérieusement inquiétant.
    La rédaction de l'article elle-même est choquante. On expose les droits en la matière du président de la Polynésie française, on condescend à la fin à dire que les autorités de la République seront « informées », même pas consultées !
    Oui, c'est nouveau, oui, c'est spécial, mais est-ce encore réellement un morceau de France qui discute avec un pays étranger ou un autre morceau de pays étranger ? La représentation diplomatique est de la compétence régalienne. S'il s'agit de syndicats d'initiative, d'offices du tourisme ou de relations commerciales, cela n'a rien à faire dans un texte de loi organique. Si c'est autre chose qu'on vise, ou si cela peut évoluer ainsi ultérieurement, cela devient singulièrement gênant.
    J'ai ainsi défendu mon amendement de suppression de l'article, mais j'en défendrai d'autres pour essayer de remettre ça sous contrôle. La formulation est brute, l'objectif peut devenir une véritable dérive pour la Polynésie française.
    M. le président. La parole est à M. Christian Paul.
    M. Christian Paul. C'est l'un des articles qui touchent aux fondements mêmes de notre République dans ses relations avec la Polynésie française.
    De quelle représentation s'agit-il ? Avant de prendre position sur cet article et sur les différents amendements, nous aimerions vous entendre sur ce point, madame la ministre. S'il s'agit d'une représentation culturelle ou commerciale, disons-le dans le texte, même si cela ne relève pas forcément du domaine de la loi. Au moins les choses seront claires. Il ne s'agit pas de la défense et de la sécurité mais j'ai le sentiment que, pour le Gouvernement - ou alors pourquoi tant d'affichage ? -, c'est bien plus qu'un office du tourisme. J'ai le sentiment que nous sommes au-delà de l'article 74 et que nous sommes en train de tracer des périmètres de souveraineté d'une façon qui demande des explications afin que l'on comprenne d'abord quelle est la nature de cette représentation. Si, comme nous en avons le sentiment, c'est une représentation diplomatique, il faudra dire clairement à quoi renonce la République en matière de représentation. Y aura-t-il demain des ambassadeurs de Polynésie, et pas seulement dans le Pacifique puisqu'on a élargi au monde entier la possibilité de déployer de telles représentations ?
    Tout cela paraît extrêmement surprenant, par rapport à l'esprit même du statut que vous défendez et je crois que nous devons aller un peu plus loin dans la discussion.
    Qu'on se comprenne bien, il ne s'agit pas d'avoir une sorte de réflexe jacobin. Ce n'est pas dans cet esprit que nous examinons ce texte. Il n'y a pas si longtemps, quand nous proposions une intensification de la coopération régionale, en particulier autour des départements d'outre-mer, mais aussi autour des territoires d'outre-mer, il y avait parfois dans vos rangs, et même du côté du Président de la République, Mme Girardin s'en souvient parfaitement, l'envie de brider cette coopération. Les départements français d'Amérique qui voulaient faire davantage de coopération régionale se sont parfois heurtés au principe de souveraineté, à la nécessité que ce soit l'Etat qui coordonne la diplomatie de la France, et je me demande si ces principes-là ne sont pas oubliés dans le Pacifique.
    Au fond, madame la ministre, la Maison de la Polynésie à Paris ne sera-t-elle pas demain une représentation diplomatique ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'outre-mer. J'ai l'impression que certains, dans cet hémicycle, ont besoin qu'on leur rafraîchisse la mémoire...
    M. Éric Raoult. Très bien !
    Mme la ministre de l'outre-mer. ... et je vais vous lire le texte que vous avez préparé en 1999, monsieur Paul..
    M. Christian Paul. C'est faux, madame la ministre.
    Mme la ministre de l'outre-mer. ... ou votre prédécesseur.
    M. le président. Monsieur Paul, vous répondrez ultérieurement. Poursuivez, madame la ministre.
    Mme la ministre de l'outre-mer. Certains semblent émus qu'on puisse permetre à la Polynésie d'avoir des représentations diplomatiques. Comme je l'ai expliqué hier à M. Lagarde, les représentations ne sont en rien diplomatiques.
    M. Christian Paul. Ecrivez-le !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Sinon, il y aurait un problème de constitutionnalité,...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Bien sûr !
    Mme la ministre de l'outre-mer. ... puisque la politique étrangère est dans le domaine régalien.
    En 1999, vous aviez préparé un texte de révision constitutionnelle, qui donnait précisément ce que vous me reprochez aujourd'hui de vouloir donner de façon subreptice à la Polynésie française !
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Eh oui !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Je vous lis ce texte que vous aviez fait voter par les deux assemblées : Les conditions dans lesquelles la Polynésie française peut, par dérogation au deuxième alinéa, être membre d'une organisationinternationale, disposer d'une représentation auprès des Etats du Pacifique...
    M. René Dosière. « Les Etats du Pacifique ».
    Mme la ministre de l'outre-mer... et négocier avec ceux-ci, dans son domaine de compétence, des accords d'association. Vous prévoyiez exactement ce que vous me reprochez aujourd'hui. Il s'agissait clairement de donner à la Polynésie des représentations ayant un caractère diplomatique.
    Dans le texte que nous avons préparé, nous ne précisions pas la nature de ces représentations. Elles peuvent être diverses mais elles ne peuvent en aucun cas avoir un caractère diplomatique, parce que là, nous aurions obligatoirement un problème de constitutionnalité.
    Pourquoi donc alors écrire dans une loi quelque chose qui coule de source, monsieur Lagarde ? Tout simplement parce que, dès lors qu'il s'agit de donner des pouvoirs à la Polynésie française, rien n'interdit de le prévoir explicitement dans une loi organique. A partir du moment où on donne à la Polynésie française le pouvoir d'ouvrir des bureaux, des représentations, qui peuvent avoir des caractères différents d'ailleurs selon les pays, en raison des intérêts particuliers de la Polynésie, il faut pouvoir le dire de façon explicite dans le cadre d'une loi organique.
    Vu les explications que je viens de vous donner, les différents amendements qui seront défendus ne peuvent donc évidemment pas recueillir un avis favorable du Gouvernement.
    M. le président. Monsieur Paul, je vous redonne la parole, car c'est un point important. On pourra ensuite aller plus vite.
    M. Christian Paul. Merci, madame le ministre, d'avoir relu ce texte. Cela permet d'éviter qu'on l'évoque sans en donner le contenu. Il était, lui, circonscrit au Pacifique, ce qui n'est pas le cas du texte qui nous arrive du Sénat. C'est d'ailleurs, je crois, contre votre souhait, que le Sénat a voté un amendement permettant à la Polynésie de déléguer des représentations et des représentants sur l'ensemble de la planète. Ça n'était pas dans le texte initial du Gouvernement, me semble-t-il.
    Si votre intention est bien que ces représentations n'aient pas un caractère diplomatique, conformément à l'article 74 de la Constitution, que cela soit clairement dans le texte.
    Mme la ministre de l'outre-mer. Il n'est pas dit que c'est diplomatique !
    M. Christian Paul. Sinon, cela ouvre la voie à un certain nombre de débordements.
    Je crois qu'il était utile de vous demander cette précision. Pour le reste, nous devons en effet préciser dans quelles conditions la Polynésie peut intervenir dans l'espace international. Il n'est pas nouveau que des départements, et a fortiari , bien sûr, des territoires d'outre-mer, participent à des organisations internationales, notamment dans leur espace régional. C'est le cas de la Nouvelle-Calédonie, des départements français d'Amérique, de la Réunion. Nous sommes tout à fait favorables à cette idée d'une présence active dans l'espace régional, mais il faut aussi fixer les limites de ce qui relève de la souveraineté de l'Etat. Vous avez commencé à le faire, et chacun l'a entendu, mais je crois qu'il serait utile, pourquoi pas à la faveur d'un sous-amendement, que cette précision soit apportée.
    M. le président. Le débat sur l'amendement n° 246 a eu lieu.
    Je mets aux voix l'amendement n° 246.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Sur le vote de l'article 15, je suis saisi par le groupe Union pour la démocratie française d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Je suis saisi de l'amendement n° 289.
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir cet amendement.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cet amendement vise essentiellement à faire en sorte que, lorsque représentation il y a, elle soit située, chaque fois que la France est représentée à cet endroit, à l'intérieur de nos ambassades ou de nos consulats. Cela paraît logique. C'est un point d'appui pour toute collectivité territoriale qui souhaiterait se faire valoir, s'il s'agit bien de cela. Sinon, on risque la dérive.
    En vous écoutant, d'ailleurs, je réfléchissais à deux choses.
    Quelle tête fera l'ambassadeur de France à Hong Kong lorsque le représentant du président de la Polynésie française sera reçu par le ministre des affaires étrangères comme un ambassadeur ? Vous n'ignorez pas que c'est celui qui reçoit qui détermine le rang de la personne reçu : ainsi, un ministre - ou un ambassadeur ou quelqu'un qui ne l'est pas - peut parfois être reçue comme un chef d'Etat. Il y a donc là un danger. Voilà pourquoi il semble logique que la représentation de la Polynésie soit installée au sein de nos ambassades ou de nos consulats.
    Certes, le texte prévoit que le président de la Polynésie française nomme des représentants et non des ambassadeurs - sur ce point, il n'y a pas de désaccord entre nous. Toutefois, une telle formulation est une copie troublante de la disposition de la Constitution, qui stipule que le Président de la République nomme les ambassadeurs. Cela n'est pas sans nous inquiéter. S'il ne s'agissait que de représentations commerciales ou culturelles, il ne serait en effet pas nécessaire de préciser que le président de la Polynésie française nomme des représentants, dans la mesure où il nomme à tous les emplois publics du gouvernement de la Polynésie française. Donc, si c'est écrit, c'est sans doute pour une autre raison. Voilà pourquoi je propose une nouvelle rédaction de l'article 15 du projet de loi organique.
    M. le président. La commission a déjà donné son avis sur cet amendement.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 289 ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Monsieur Lagarde, le droit s'exprime de façon positive. J'ai souligné suffisamment depuis hier que ces représentations ne seraient pas des représentations diplomatiques, et cela figurera au compte rendu de nos séances. Les choses sont donc claires. Nous n'allons tout de même pas écrire dans le texte qu'il s'agit de représentations « qui ne sont pas diplomatiques » ! Si nous n'avons pas mentionné qu'elles sont diplomatiques, c'est précisément parce qu'elles ne le sont pas.
    Par ailleurs, monsieur Lagarde, je ne veux pas être désobligeante à votre égard, mais je vous indique qu'il n'y a pas d'ambassade de France à Hong Kong ; celle-ci se trouve à Pékin.
    Enfin, en précisant que ces représentations, qui ont une vocation essentiellement commerciale, économique, culturelle ou touristique, siègent au sein de nos ambassades ou de nos consulats, ne risque-t-on pas d'aboutir au résultat inverse de celui que vous recherchez, car une telle localisation peut justement leur conférer un caractère quelque peu officiel et diplomatique. Votre argument peut donc être retourné, monsieur Lagarde.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Très juste !
    M. le président. La parole est à M. Michel Buillard.
    M. Michel Buillard. Je remercie Jean-Christophe Lagarde d'appeler l'attention de l'Assemblée sur l'importance de cette question. Toutefois, s'il avait été présent quand la commission a examiné les projets de loi qui nous sont soumis, nous aurions pu lui expliquer l'objectif poursuivi par la mise en place des représentations de la Polynésie française dans des pays étrangers. En l'occurence, il s'agit bien d'un objectif commercial.
    De fait, dans cette affaire, deux conceptions s'opposent : celle d'un Etat unitaire, « crispé » sur ses compétences et une autre tout inverse.
    Vous savez bien, monsieur Lagarde, que la compétence économique est une compétence de principe du territoire. Il s'agit, dans une perspective de développement du territoire, il s'agit de faire en sorte de diminuer les transferts de l'Etat par une augmentation de nos ressources propres en exportant des perles, du poisson, ou en développant le tourisme. L'objectif est avant tout économique : la mise en place de représentations à l'étranger - en Chine, par exemple - servira donc nos intérêts.
    Certes, on peut caricaturer le dispositif en disant qu'il s'agit de mettre en place des syndicats de tourisme. Mais, bien évidemment, il ne s'agit pas du tout de cela. Pour ce qui nous concerne, nous voulons assumer nos responsabilités et assurer le développement économique de notre pays, et rien d'autre.
    M. le président. La parole est à M. Eric Raoult.
    M. Eric Raoult. Je ne reviendrai pas sur les arguments de Mme la ministre sur la signification du mot « diplomatique ». Il est évident qu'une représentation diplomatique ne peut être que celle d'un pays.
    Cela dit, lorsque nos compatriotes ont des problèmes avec leurs cartes d'identité numérisées à Los Angeles, est-il préférable, pour résoudre ces problèmes, qu'ils fassent appel au Quai d'Orsay ou à des contacts installés aux Etats-Unis ?
    Lorsque des marins-pêcheurs ont des difficultés avec la Corée ou avec le Japon, est-il préférable, pour régler ces difficultés, qu'ils fassent appel au Quai-d'Orsay ou à des contacts installés dans ces pays ?
    Je rappelle à M. Lagarde que lorsqu'il a été élu dans le département dont nous sommes tous les deux des représentants, ce département avait des contacts directs avec l'Allemagne de l'Est.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Pas moi !
    M. Eric Raoult. Parce que vous n'étiez pas encore maire de Drancy !
    Comme l'a souligné Michel Buillard, ces représentations auront un objectif économique, commercial ou touristique - de nombreux touristes japonais se rendent en voyage de noces en Polynésie, mais la concurrence d'Hawaii et des Etats-Unis, entre autres, est forte.
    La formation politique à laquelle appartient Jean-Christophe Lagarde est très décentralisatrice. Eh bien, la logique de décentralisation qui prévaut en métropole doit également s'appliquer en Polynésie, et nous devons manifester à l'égard du processus de décentralisation la même confiance quand il est mis en oeuvre ici ou quand il est mis en oeuvre là-bas.
    Il n'y aura pas d'ambassadeur de Polynésie à l'ONU, et je ne pense pas que la Polynésie enverra des troupes en Irak !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Pour ce qui concerne l'envoi de troupes en Irak, je suis absolument convaincu que la Polynésie n'en enverra pas.
    S'agissant de la présence d'un ambassadeur de la Polynésie à l'ONU, je ne suis pas du tout convaincu. Certes, je ne vois pas quel serait l'intérêt d'une telle représentation. Toutefois, le texte autorise le gouvernement polynésien à avoir un représentant à l'ONU, puisqu'il y est écrit que la Polynésie française peut disposer de représentations auprès de tout organisme international dont la France est membre.
    J'entends bien les deux représentants de la Polynésie française dire que, pour eux, il s'agit uniquement de commerce. Toutefois, la loi n'étant pas faite pour un seul homme, je ne vois pas ce qui pourra empêcher demain un autre président - moins raisonnable, moins responsable que le président actuel - de décider de nommer un ambassadeur de la Polynésie à l'ONU.
    Par ailleurs, ainsi que l'a rappelé Michel Buillard, nous n'avons pas eu toujours que des amis dans la région. Certains Etats peuvent avoir intérêt à exploiter l'ambiguïté du statut des représentants de la Polynésie française. Je persiste donc à dire que l'article 15 est dangereux. Voilà pourquoi j'ai essayé de trouver les voies et les moyens permettant qu'il le soit moins.
    Madame la ministre, je ne comprends pas trop votre raisonnement. En effet, si les représentants de la Polynésie siègent, comme je le propose, au sein de nos ambassades ou de nos consulats, cela marque clairement qu'ils sont rattachés à la France. Il me déplairait fortement qu'un drapeau de la Polynésie flotte sur un bâtiment situé à côté de ceux où flottent le drapeau des Etats-Unis ou celui de la Grande-Bretagne, rue du Faubourg-Saint-Honoré. De même, je n'aimerais pas me rendre dans une capitale - que ce soit Singapour ou Pékin - et y voir flotter le drapeau de la Polynésie sur un bâtiment voisin de l'ambassade de France !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 289.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 245.
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir cet amendement.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Il s'agit, par cet amendement, d'obliger le président de la Polynésie française à informer l'assemblée de la Polynésie française des démarches qu'il entreprend en vue d'ouvrir une représentation de la Polynésie dans un pays étranger ou auprès d'une organisation internationale.
    M. le président. Nous pouvons considérer que la commission et le Gouvernement ont déjà donné leur avis sur cet amendement et qu'il est défavorable.
    Je mets aux voix l'amendement n° 245.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 148.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Cet amendement a déjà été défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission émet sur cet amendement, comme sur les précédents, un avis défavorable. Elle partage en effet le point de vue du Gouvernement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 148.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 280.
    Il s'agit d'une déclinaison de l'amendement n° 289 de M. Lagarde.
    Le Gouvernement et la commission y sont défavorables.
    Je mets aux voix l'amendement n° 280.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 243.
    Il s'agit également d'une déclinaison de l'amendement n° 289.
    Le Gouvernement et la commission sont contre.
    Je mets au voix l'amendement n° 243.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 242.
    Il s'agit encore d'une déclinaison de l'amendement n° 289.
    Le Gouvernement et la commission y sont défavorables.
    Je mets aux voix l'amendement n° 242.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 79.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Cet amendement est défendu.
    M. le président. Le Gouvernement et la commission y sont défavorables.
    Je mets aux voix l'amendement n° 79.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 244.
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir cet amendement.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cet amendement ne devrait gêner personne, dans la mesure où il ne remet pas en cause l'économie de l'article 15.
    Le texte prévoit que les autorités de la République sont tenues informées de l'ouverture de représentations de la Polynésie auprès de tout Etat ou de tout organisme international. La moindre des choses voudrait que l'assemblée de la Polynésie française soit également informée. Tel est l'objet de cet amendement.
    M. le président. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Je voudrais revenir sur mon amendement n° 79, qui était un amendement de repli, légèrement différent de celui que nous examinons en ce moment. Pour ma part, je proposais que l'ouverture de ces représentations se fasse après accord de l'assemblée de la Polynésie française.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Ce n'est pas pareil !
    M. René Dosière. C'est un peu différent.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Non, c'est franchement différent !
    M. René Dosière. Dans la mesure où l'ouverture d'une représentation peut avoir un coût, il me semblait préférable que l'assemblée donne son accord.
    M. le président. C'est une bonne chose que vous ayez exposé les raisons qui vous ont conduit à déposer cet amendement, monsieur Dosière, même si, à mon avis, cela n'a pas fait changer d'avis M. le rapporteur et Mme la ministre. Quant au vote sur cet amendement, il a déjà eu lieu et il n'est donc pas possible d'y revenir.
    M. René Dosière. Je ne savais pas si M. le rapporteur avait interprété le contenu de l'amendement de la façon dont je viens de le faire.
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Tout à fait !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 244 ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur l'amendement de M. Lagarde, car elle souhaite que l'assemblée de la Polynésie soit informée de l'ouverture de représentations de la Polynésie à l'étranger.
    En revanche, elle avait repoussé l'amendement de M. Dosière qui prévoyait un accord préalable de l'assemblée de Polynésie.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 244 ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 244.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je vais mettre aux voix l'article 15, modifié par l'amendement n° 244, sur lequel j'ai été saisi, je le rappelle, d'une demande de scrutin public.
    Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   43
Nombre de suffrages exprimés   43
Majorité absolue   22
Pour l'adoption   38
Contre   5

    L'Assemblée nationale a adopté.

Article 16

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 3.
    La parole est à M. Michel Buillard, pour soutenir cet amendement.
    M. Michel Buillard. Cet amendement prévoit que la négociation des arrangements administratifs ne sera pas soumise à la procédure lourde de l'article 39 qui régit les accords avec des Etats.
    Si la réponse de Mme la ministre me convainc, je suis prêt à retirer l'amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Cet amendement vise à supprimer deux obligations qui conditionnent la régularité du déroulement d'une procédure d'arrangement administratif : l'obligation d'informer les autorités de la République du projet de négociation et celle de disposer de la part de l'Etat d'un pouvoir permettant de signer l'accord.
    Cet amendement ne peut pas être accepté, car l'exigence de la délivrance préalable d'un pouvoir pour négocier les arrangements administratifs résulte de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Voilà pourquoi le Gouvernement ne peut qu'émettre un avis défavorable.
    M. Michel Buillard. Je retire l'amendement n° 3.
    M. le président. L'amendement n° 3 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 16.
    (L'article est adopté.)

Article 17

    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 149 et 150 rectifié, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir ces deux amendements.
    M. René Dosière. Ces deux amendements ont le même objet et visent à faire en sorte que le président de la Polynésie obtienne l'accord préalable de l'assemblée de la Polynésie avant de négocier des accords de coopération décentralisée.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Pour les mêmes raisons que celles exposées à l'article 15, la commission a rejeté ces deux amendements.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Même avis que celui de la commission : défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 149.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 150 rectifié.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 17.
    (L'article 17 est adopté.)

Article 18

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 4.
    La parole est à M. Michel Buillard, pour soutenir cet amendement.
    M. Michel Buillard. Cet amendement concerne la protection de l'emploi.
    Je rappelle que, chaque année, 3 500 jeunes arrivent sur le marché de l'emploi de la Polynésie et que celle-ci compte 60 000 travailleurs salariés. C'est dire que le marché de l'emploi n'est pas extensible, ce qui a d'ailleurs suscité, dans un passé récent, quelques tensions, surtout dans les quartiers en difficulté.
    Je sais que le critère qui a été retenu pour obtenir un emploi, aussi bien par le Sénat que par la commission, est celui de la résidence. Toutefois, un tel critère revient à exclure des Polynésiens.
    Ainsi, sont exclus les enfants des Polynésiens nés à l'extérieur ou n'ayant pas résidé en Polynésie suffisamment longtemps. L'objet du dispositif mis en place est d'assurer une protection des Polynésiens et non de les exclure.
    De même, les militaires polynésiens partis en métropole - il y en a plusieurs centaines, qui servent dignement le drapeau français sur tous les théâtres d'opérations - ou les Polynésiennes ayant suivi leur époux en métropole ainsi que leurs enfants qui y sont nés sont exclus du dispositif de protection.
    J'estime, pour ma part, que les conditions de nationalité ou de naissance sont aussi importantes que celles de domicile. Aussi, dans un souci de rapprochement familial, je souhaiterais que les principes fondamentaux qui s'appliquent aux fonctionnaires partis outre-mer s'appliquent également aux Polynésiens et que d'autres Polynésiens bénéficient des dispositions de l'article 18. Tel est l'objet de cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement, tout en mesurant la pertinence de la motivation de Michel Buillard. La difficulté qu'il note et les cas qu'il cite sont en effet réels.
    Toutefois, j'ai le sentiment que sa demande est déjà satisfaite par le dernier alinéa de l'article 18, qui renvoie les conditions d'application du présent article à des actes prévus à l'article 139 et dénommés « lois du pays ».
    Ces dernières peuvent en effet prendre en compte les périodes passées en dehors de la Polynésie pour des raisons familiales, professionnelles, médicales ou pour suivre des études.
    Il me semble que les exemples évoqués par Michel Buillard relèvent de ces catégories, et que l'assemblée de Polynésie, dans le cadre d'une loi du pays, pourrait trouver des modalités d'application de l'article 18, qui permettraient de répondre à la difficulté qu'il soulève.
    Je comprends bien le cas de ce jeune Polynésien qui viendrait vivre en métropole et se retrouverait exclu du marché de l'emploi en rentrant en Polynésie parce qu'il n'y aurait pas vécu. Mais on peut imaginer que, quand le gouvernement de Polynésie proposera à l'assemblée territoriale d'adopter une « loi du pays », ce cas sera prévu, car la rédaction du dernier alinéa de l'article 18 est suffisamment large : les motifs qui sont invoqués - raisons familiales et professionnelles - doivent permettre de répondre d'une façon assez complète aux cas que vous évoquez.
    Faire autrement, adopter votre amendement, notamment, comporterait me semble-t-il, un risque d'inconstitutionnalité grave, dans la mesure où l'article 1er de la Constitution nous interdit d'établir des distinctions ayant trait à l'origine. J'estime par conséquent qu'il serait prudent de s'orienter vers une solution « loi du pays » bien adaptée à cette question, plutôt que d'ajouter une catégorie risquant d'être censurée par le Conseil constitutionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. L'article 74 de la Constitution autorise la loi organique à prévoir un dispositif d'accès à l'emploi spécifique à la Polynésie française uniquement si les mesures sont justifiées par des nécessités locales et sont édictées en faveur de la population locale. Les nécessités locales doivent avoir trait à l'objet même de l'article 18, à savoir la protection de l'emploi, et les mesures prises doivent être justifiées par la situation du secteur économique et le type d'activité. Dans ce cadre, les critères du lieu de naissance, du lien de parenté ou de la nationalité ne peuvent être considérés comme pertinents. Par ailleurs, comme vient de le souligner le rapporteur, le dernier alinéa permet de répondre aux préoccupations de M. Buillard.
    M. le président. La parole est à M. Michel Buillard.
    M. Michel Buillard. Je constate qu'il existe une convergence de vues entre le rapporteur et la ministre. Nous avons également le souci de veiller à protéger le marché de l'emploi pour le réserver à nos enfants polynésiens. Etant satisfait des réponses qui viennent de m'être données, je retire mon amendement.
    M. le président. L'amendement n° 4 est retiré.
    Je suis saisi de l'amendement n° 151.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Même si ce n'est peut-être pas le meilleur endroit du texte pour évoquer ce sujet, c'est la première fois que nous y rencontrons l'expression « dénommés "lois du pays ». Je défendrai donc cet amendement, ce qui m'évitera d'intervenir de nouveau par la suite, en particulier aux articles 138 et 139.
    M. le président. Vous pourriez réserver votre intervention pour l'article 138.
    M. René Dosière. Mais nous gagnerons du temps à l'article 138, que nous aborderons peut-être un peu tardivement. Profitons-en pendant que nous sommes tous en pleine forme ! (Sourires.)
    Nous voyons donc surgir l'appellation « lois du pays ». Je me limiterai à rappeler brièvement l'argumentation de fond que j'ai déjà eu l'occasion de développer hier, dans l'exception d'irrecevabilité sur le projet de loi organique.
    Dans la jurisprudence et la doctrine, il a toujours été considéré que les décisions des assemblées délibérantes des territoires d'outre-mer demeuraient des actes administratifs, relevant, à ce titre, du contrôle ordinaire du juge de l'excès de pouvoir. Prendre un acte dans le domaine législatif ne suffit pas à lui donner valeur législative. Et, au cours des débats sur la réforme constitutionnelle de mars 2003, le choix a été fait de ne pas revenir sur ce caractère d'acte administratif.
    Je souligne d'ailleurs, madame la ministre, puisque vous faites souvent référence à la réforme constitutionnelle de 1999 - qui n'a pas pu aller jusqu'au Congrès, sa réunion ayant été annulée deux jours avant la date prévue -, que cette réforme donnait à la Polynésie la possibilité de voter des lois du pays de portée législative. Je ne doute pas, d'ailleurs, que le président de la Polynésie regrette le temps heureux où les socialistes étaient en mesure de lui offrir la possibilité d'adopter des lois de valeur législative, contrairement à ses amis actuellement au pouvoir et qui contrôlent tous les pouvoirs.
    M. Charles Cova. Ça va bien ! Changez de disque !
    M. René Dosière. Quoi qu'il en soit, compte tenu de l'autonomie croissante accordée à la Polynésie, il a été prévu que les actes particuliers évoqués à l'article 139 soient soumis à un contrôle spécifique du Conseil d'Etat, c'est-à-dire à un contrôle administratif, ce qui témoigne de leur spécificité par rapport aux actes administratifs ordinaires. Il est vrai qu'ils sont un peu plus importants ; c'est, du reste, la raison pour laquelle je propose pour ma part, madame la ministre, de les appeler « actes normatifs », afin de bien montrer qu'il s'agit d'actes administratifs, mais de normes un peu plus importantes que des délibérations ordinaires.
    Mais c'est aussi une façon d'affirmer que les lois du pays ne sont pas des actes législatifs, contrairement, je le rappelle, à celles de Nouvelle-Calédonie. Celle-ci reste en effet, dans le Pacifique, une sorte de modèle, que la Polynésie n'a, hélas ! pas encore rattrapé : dans ce territoire, certains actes dénommés « lois du pays » ont une valeur législative et sont directement soumis au contrôle du Conseil constitutionnel. Qualifier de « lois du pays » des actes administratifs, alors que cette appellation correspond, en Nouvelle-Calédonie, à de véritables lois, ne peut être que source de confusion susceptible d'appeler la censure du Conseil constitutionnel. J'ai eu l'occasion, hier, de dire que tel était aussi un peu le sentiment du rapporteur du Sénat. Je le répète, seul le Parlement et, dans certains domaines, le congrès de Nouvelle-Calédonie ont le pouvoir de voter des lois.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Nous avons émis un avis défavorable, le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale étant en déssaccord avec le rapporteur de la commission des lois du Sénat.
    S'il existait un risque de confusion, il est désormais levé : M. Dosière, depuis le début du débat, nous a tellement répété que la loi du pays de Nouvelle-Calédonie et celle de Polynésie étaient différentes que tout le monde l'a compris et que personne ne pourra plus jamais les confondre ! (Sourires.)
    M. Eric Raoult. Bon argument !
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. A mon avis, il a accompli un acte utile de pédagogie : la confusion qui aurait pu conduire le Conseil constitutionnel à sa censure est levée, il n'y a plus aucun risque. Grâce à René Dosière, tout le monde a compris la différence !
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Bravo René !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Merci d'être venu ! Après l'unanimité, la pédagogie !
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Notre collègue est un très bon pédagogue !
    M. René Dosière. Merci, mais j'aurais tout de même aimé être plus convaincant !
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. S'il subsiste encore un risque, je vous renvoie aux explications juridiques extrêmement circonstanciées qui ont été données hier par Mme la ministre, en réponse aux orateurs. Ses explications figurent au compte rendu et je serai sans doute beaucoup moins clair qu'elle. Ce qui donne force à un acte, ce n'est pas la terminologie mais le régime contentieux auquel il est soumis. En l'occurrence, une loi est soumise au contentieux du Conseil constitutionnel, tandis qu'un acte à caractère réglementaire est soumis au contentieux des juridictions administratives, tribunal administratif ou Conseil d'Etat suivant les cas. La distinction est donc parfaitement établie par le régime juridictionnel auquel sont soumis les actes, sans aucun risque de confusion.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Avis défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 151.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 18.
    (L'article 18 est adopté.)

Article 19

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 200.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Je vais essayer d'être meilleur pédagogue encore. (Sourires.) J'apprécie le compliment du rapporteur, quoique je sois un pédagogue bien peu convaincant, ...
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cela arrive aux meilleurs.
    M. René Dosière. ... ce qui m'inquiète ! (Sourires.)
    M. le président. Persévérez, monsieur Dosière, dans la briéveté et la qualité.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Bis repetita placent.
    M. René Dosière. L'amendement n° 200 a un objet précis, la protection du patrimoine. En effet, il prévoit explicitement que le droit de préemption pour la sauvegarde ou la mise en valeur des espaces naturels doit pouvoir jouer, y compris quand il s'agit de transferts de propriété au profit de personnes qui justifient d'une durée de résidence suffisante en Polynésie française ou de personnes morales ayant leur siège social en Polynésie française et répondant à certains critères.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Personne ne peut être plus favorable que moi à la sauvegarde des milieux naturels. Je partage donc l'objectif de fond de notre collègue Dosière.
    M. René Dosière. Je vous ai donc convaincu ?
    M. le président. Mais encore, monsieur le rapporteur ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La protection des milieux naturels est, pour moi, une vieille préoccupation, et je n'ai pas attendu René Dosière pour cela. Seulement, l'environnement est une compétence du territoire, donc, en l'occurrence, de la Polynésie française. Par voie de conséquence, je pense qu'il appartient à la Polynésie française de prévoir, dans sa réglementation, les régimes d'acquisition, de prise de possession de terres ou d'espaces naturels qui seraient à ses yeux exceptionnels.
    De plus, je ne pense pas qu'introduire une exception dans cette disposition serait une bonne idée, car, en matière d'égalité devant la loi et de protection du droit de propriété, il est préférable de limiter la complexité des régimes d'exemption.
    J'estime que la suggestion de M. Dosière ne trouve pas sa place dans la loi organique, mais elle est pertinente et j'en prends bonne note. Je suis convaincu, au demeurant, que les autorités de la Polynésie française y seront sensibles - on a pu se rendre compte, sur place, des efforts exceptionnels menés en matière de mise en valeur des espaces naturels.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Défavorable, pour les mêmes raisons.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 200.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 152.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Compte tenu des propos prononcés par le rapporteur à l'article 18, dont j'ai pris bonne note, j'espère, cette fois-ci, que je vais réussir à le convaincre.
    Je propose en effet de supprimer deux conditions, ajoutées par un amendement sénatorial déposé par le sénateur de la Polynésie, qui tendent à réserver la bénéfice des dispositions préservant le foncier aux personnes « nées en Polynésie française ou dont l'un des parents est né en Polynésie française ». Je ne vais pas développer plus longuement car j'ai déjà souligné, hier, dans l'exception d'irrecevabilité, que ces dispositions concernant le lieu de naissance me paraissaient rompre avec l'égalité garantie par la Constitution et étaient donc susceptibles d'une censure constitutionnelle.
    A l'instant, à l'article 18, en donnant son avis sur l'amendement n° 4 de notre collègue Buillard - que celui-ci a finalement retiré -, le rapporteur avait déclaré, si j'ai bien entendu, que ces dispositions concernant le lieu de naissance étaient de nature à rompre avec le principe d'égalité. Je me permets de le rappeler. C'est une pédagogie qui s'efforce d'être convaincante, et je ne désespère pas de finir par convaincre le rapporteur et l'Assemblée de prendre en compte mes propositions.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission des lois a émis un avis défavorable. Le problème posé n'est pas exactement le même, dans la mesure où la propriété foncière se transmet de génération en génération. L'argument qui consisterait à rompre la chaîne au motif que la personne n'est pas née en Polynésie française poserait des problèmes de succession et de transmission de patrimoine qui rendraient extrêmement complexe l'application de cette disposition. Il y a donc justification spécifique à la matière, qui n'est pas comparable au sujet évoqué tout à l'heure, celui de l'emploi.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre mer. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 152.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 19.
    (L'article 19 est adopté.)

Article 20

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 7.
    La parole est à M. Michel Buillard, pour soutenir cet amendement.
    M. Michel Buillard. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Pas d'objection. Cet amendement a été adopté par la commission.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 37.
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir cet amendement.
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 20, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 20, ainsi modifié, est adopté.)

Articles 21 à 23

    M. le président. Sur les articles 21 à 23, je ne suis saisi d'aucun amendement.
    Je vais les mettre aux voix successivement.
    (Les articles 21 à 23, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
    M. le président. Nous allons suspendre la séance pendant cinq minutes.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures vingt.)
    M. le président. La séance est reprise.

Article 24

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 153.
    Je signale d'ores et déjà que, sur le vote de cet amendement, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir l'amendement n° 153.
    M. René Dosière. L'article 24 concerne les casinos, les cercles de jeu, les loteries, tombolas et paris, domaine particulièrement sensible sur lequel il est important que l'Etat s'efforce de garder un contrôle maximum. Or, l'adoption au Sénat d'un amendement du sénateur de la Polynésie a réduit ce contrôle a minima. L'objet de mon amendement est donc simple. Il s'agit de revenir au texte initial du Gouvernement, qui est le suivant : « Dans le respect de la législation applicable en Polynésie française en matière de jeux de hasard et des décrets en Conseil d'Etat qui fixent, en tant que de besoin, les règles relatives au contrôle par l'Etat de l'installation et du fonctionnement des casinos, cercles de jeux, loteries, tombolas et paris, l'assemblée de la Polynésie française détermine les autres règles applicables à ces jeux. » C'est parce qu'il concerne un domaine sensible que nous avons demandé un scrutin public sur cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Au risque de décevoir René Dosière, je suis favorable au texte du Sénat, qui est parvenu à un partage simple et très lisible. La Polynésie est compétente en matière de réglementation des jeux et l'Etat est compétent pour le contrôle des jeux et la définition des sanctions pénales. Il ne serait évidemment pas admissible que la compétence de l'Etat soit transférée, mais cela n'est pas le cas. Tout cela me paraît très clair et ne soulève pas de difficulté particulière. C'est pourquoi la commission a rejeté cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Le Gouvernement a donné un avis favorable, au Sénat, à l'amendement qui a conduit à la rédaction actuelle de l'article 24, désormais plus clair et dont l'interprétation sera donc facilitée. Comme je l'ai dit au Sénat, il s'agit d'un domaine auquel l'Etat accorde une vigilance particulière. On ne peut évidemment transférer la compétence pour fixer les règles de contrôle, tant de l'installation que du fonctionnement des établissements en question.
    Il est ainsi essentiel de s'assurer de l'honorabilité des responsables avant d'autoriser l'ouverture d'établissements de jeux. Cet objectif implique que l'Etat reste habilité à faire prévaloir la procédure d'agrément instituée par le décret du 11 décembre 1997, qui offre de réelles garanties. Au cas d'espèce, les demandes d'agrément sont prescrites conformément à des normes établies par le haut-commissaire de la République. L'agrément est ensuite donné par le conseil des ministres de la Polynésie française. Le contrôle reste donc de la compétence de l'Etat.
     Cette notion de contrôle est suffisamment forte et précise. Les prérogatives de l'Etat en la matière, tant lors de l'installation que du fonctionnement des établissements de jeux, restent absolument intactes et la réglementation applicable reste en vigueur. Par conséquent, cet amendement n'a pas d'objet. Les craintes sur lesquelles il est fondé sont vaines. Donc, avis défavorable.
    M. le président. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Je maintiens que je préfère la rédaction initiale du Gouvernement. Ce n'est pas parce que celui-ci a donné un avis favorable à un amendement sénatorial d'origine polynésienne que je change d'avis. A chacun de prendre ses responsabilités.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je vais mettre aux voix l'amendement n° 153.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   23
Nombre de suffrages exprimés   23
Majorité absolue   12
Pour l'adoption   5
Contre   18

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    L'amendement n° 290 de M. Lagarde n'est pas défendu.
    Je mets aux voix l'article 24.
    (L'article 24 est adopté.)

Article 25

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 80.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Cet amendement est important, car il concerne l'audiovisuel, et particulièrement RFO. L'article 25 est relatif aux pouvoirs de la Polynésie en matière de production et de diffusion d'émissions audiovisuelles. Actuellement, la communication audiovisuelle est de la compétence de l'Etat. C'est indiqué à l'article 14, donc il n'y a pas d'équivoque. Par dérogation à cette compétence, la Polynésie a obtenu la possibilité de créer une société de production et d'émissions à caractère social, culturel et éducatif. Je ne suis pas sûr que ce qui a été mis en place reste dans le domaine social, culturel, et éducatif, mais quoi qu'il en soit, cette disposition va être dépassée puisque l'article 25 prévoit, dans son I, que « la Polynésie française peut créer des entreprises de production et de diffusion d'émissions audiovisuelles », sans aucune limitation. C'est un transfert de compétence. Je ne dis rien sur ce point.
    En revanche, l'alinéa II de cet article prévoit qu'« une convention conclue entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel et le gouvernement de la Polynésie française associe la Polynésie française à la politique de communication audiovisuelle ». Ainsi, non seulement la Polynésie obtient la possibilité de créer toutes les entreprises et toutes les sociétés audiovisuelles qu'elle veut, ce contre quoi nous n'avons rien, mais en plus elle sera associée à la politique qui doit être définie par le CSA.
    Je propose de supprimer cet alinéa II, car le CSA doit pouvoir déterminer la politique de communication audiovisuelle sans la participation de la Polynésie. En effet, l'information est un contre-pouvoir qui doit fonctionner de manière indépendante en Polynésie. Dans certaines zones du territoire métropolitain, même quand l'information locale est monopolistique, la presse nationale et les diverses chaînes de radio et télévision nationales permettent d'assurer le pluralisme. Mais force est de constater qu'en Polynésie, comme dans d'autres îles d'ailleurs, il n'est pas très facile d'avoir un tel pluralisme, car le territoire est trop petit. Malgré les efforts qui sont faits en matière d'information, on ne trouve pas la même concurrence, la même diversité qu'en métropole.
    A cet égard, je soulignerai que Tahiti Pacifique, revue mensuelle que je lis régulièrement et à laquelle l'Assemblée n'est malheureusement pas abonnée, est la seule revue indépendante de l'île. Elle vit modestement, mais l'on y trouve des informations qui n'ont pas de caractère officiel.
    En matière audiovisuelle, un autre organe doit rester indépendant, c'est RFO, car au fond, c'est le moyen que les Polynésiens auront de disposer d'une autre information à partir du moment où le gouvernement de la Polynésie pour créer ses propres systèmes d'information. Voilà pourquoi je souhaite que le CSA ne soit pas tenu d'associer la Polynésie à sa politique de communication audiovisuelle.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Nous revenons au débat de fond qui nous oppose : donner du sens à l'autonomie ou la vider de sa substance. Avec cet amendement, M. Dosière essaie de la vider de sa substance, y compris en matière audiovisuelle. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous essayons de lui donner du sens. C'est la raison pour laquelle la commission a repoussé cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Même avis que la commission. Je précise en outre que cette compétence ayant été dévolue à la Nouvelle-Calédonie, je ne vois pas pourquoi on la refuserait à la Polynésie française.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 80.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 247.
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir cet amendement.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cet amendement répond à une logique différente, conforme au souhait souvent formulé par notre rapporteur. Il s'agit, là encore, de permettre que les conventions établies dans le cadre de l'autonomie entre le gouvernement de la Polynésie française et des organes de radiodiffusion et de communication soient soumises à l'avis de l'assemblée de la Polynésie française. Nous construisons un statut original, mais il faut que le gouvernement, quelle que soit la réalité que recouvre ce terme, soit tenu de demander des avis à l'assemblée dont il procède, d'autant que le nouveau mode d'élection du président, qui désigne ensuite les membres du gouvernement, devrait renforcer l'importance de l'assemblée. Dans un domaine aussi sensible pour la démocratie que le pluralisme et la diversité de l'information, de la communication audiovisuelle, il est important que l'assemblée de la Polynésie française puisse émettre un avis et que le gouvernement rende compte à ses mandants de ce qu'il fait en matière de communication audiovisuelle.
    M. le président. La parole est à M. Christian Paul.
    M. Christian Paul. Sur cet amendement, et sur tous ceux qui concernent le pluralisme en matière de communication, je voudrais simplement verser un témoignage à nos débats. Je le ferai de façon un peu moins passionnée qu'au cours de l'échange que nous avons eu hier soir avec M. Raoult qui décrivait la démocratie polynésienne en empruntant beaucoup plus au mythe évoqué par René Dosière qu'à la réalité. Quand M. Raoult va en Polynésie, sans doute, n'a-t-il ni le temps ni l'opportunité de rencontrer et d'écouter les acteurs polynésiens dans leur diversité. Le témoignage que je vais vous livrer devrait nous amener à être extrêmement attentifs aux propositions faites par M. Lagarde, par M. Dosière, pour préserver le pluralisme de l'information, de la communication audiovisuelle et pour faire en sorte que la liberté d'expression soit réellement respectée en Polynésie et que l'on ne pose pas, comme l'a fait tout à l'heure le rapporteur de façon très étrange, la question de savoir si cette liberté d'expression s'arrête là où commence l'autonomie.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Ce n'est pas ce que le rapporteur a dit !
    M. Christian Paul. Il a dit, en substance, que puisque l'on rabote un peu l'autonomie, il faut poser des butoirs pour éviter des atteintes à la liberté d'expression.
    M. Christian Paul. Je voudrais simplement, monsieur le rapporteur, verser au débat des témoignages que j'ai recueillis en Polynésie, où je me suis rendu à plusieurs reprises. Et je dois dire que je n'en ai pas recueilli beaucoup d'autres de même nature au cours de ma vie publique. Ils venaient de journalistes, qui n'étaient pas tous favorables à tel ou tel camp, de journalistes de la presse écrite comme de l'audiovisuel, y compris de l'audiovisuel public. Ces journalistes se plaignaient des intimidations et des boycotts dont ils étaient l'objet et qui mettaient en cause à la fois leur déontologie et leur capacité à exercer leur activité et des pressions dont ils étaient victimes. Ils évoquaient également - chacun se fera son opinion - le soutien très fort, financier notamment, dont bénéficiaient d'autres médias dans le paysage audiovisuel polynésien.
    Ces informations vous ont visiblement échappé lors de votre mission, monsieur le rapporteur. Et si je vous les donne, c'est pour que vous ne repoussiez pas trop vite les arguments de ceux qui, comme M. Lagarde ou M. Dosière, vous invitent à vous faire ici le défenseur de la liberté d'expression et du pluralisme, y compris politique, en Polynésie française.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a examiné attentivement cet amendement et l'a rejeté. Le texte n'indique pas que le gouvernement de la Polynésie française établit la politique de communication audiovisuelle sur le territoire. Votre lecture a peut-être été trop rapide, maladroite ou incomplète. C'est le CSA qui est compétent : le texte précise clairement que le gouvernement de la Polynésie française est associé par la voie d'une convention à la politique de communication audiovisuelle.
    J'observe qu'un tel statut est identique à celui de la Nouvelle-Calédonie où d'ailleurs, assez curieusement, cette convention n'a toujours pas été mise en application, depuis 1999 qu'elle existe.
    Je n'ai donc pas le sentiment d'une pression invraisemblable exercée sur les médias et d'une remise en cause de la politique audiovisuelle. Là encore, nous nous situons dans une logique d'autonomie. Le CSA conduit une politique de communication, dans l'indépendance et avec les prérogatives qui sont les siennes. Puis, en application du principe d'autonomie, le gouvernement de la Polynésie est associé à cette politique de l'audiovisuel.
    Un point est essentiel. Notre collègue Lagarde, et c'est l'objet de son amendement, estime que l'avis de l'assemblée de la Polynésie française doit être sollicité pour ratifier cette convention. Cela me paraît inopportun. Si la convention a des effets budgétaires ou des effets justifiant l'élaboration d'une loi de pays, l'assemblée sera nécessairement saisie.
    Nous ne sommes pas dans un régime d'assemblée, mais dans un régime où le gouvernement gouverne. Si on passe son temps à solliciter l'avis de l'assemblée sur tous les sujets, on condamne le gouvernement de la Polynésie française et son président à l'immobilisme. Je ne pense pas que ce soit le but recherché.
    M. Christian Paul. C'est incroyable !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. J'ai exactement la même position que le rapporteur.
    M. Christian Paul. Cela ne m'étonne pas !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Je comprends par moment difficilement les arguments développés par l'opposition.
    Vous nous répétez que la mise en place du statut de la Nouvelle-Calédonie est votre grande réussite outre-mer. Or - et ma réflexion vaut pour le précédent amendement de M. Dosière et pour l'amendement de M. Lagarde - nous avons recopié exactement ici le dispositif calédonien, dont vous étiez le rapporteur, monsieur Dosière. Vous devriez en être heureux. Pourtant, vous nous critiquez.
    Nous n'avons pas essayé d'être originaux, nous nous sommes contentés d'étendre le dispositif calédonien à la Polynésie. Avis défavorable, donc.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. J'ai le privilège de ne pas appartenir à l'opposition et je n'ai pas à m'associer à l'oubli du rapporteur de l'époque, M. Dosière, concernant l'avis de l'assemblée.
    Monsieur Bignon, j'ai apprécié sur place et, depuis, à la lecture du rapport, votre travail. Mais j'aimerais que vous m'indiquiez qui pourrait être gêné par le fait que l'assemblée qui désigne le président, qui lui-même nomme son gouvernement, soit informée et émet un avis.
    En quoi y aurait-il là un régime d'assemblée paralysant le gouvernement ? Si l'on raisonne ainsi, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin serait, lui aussi, en matière de communication audiovisuelle, totalement paralysé en métropole. Or on ne propose rien d'autre ici que ce qui existe pour l'Assemblée nationale française.
    Il paraît logique que le « Parlement polynésien », c'est-à-dire l'assemblée de Polynésie française - puisqu'on veut encore l'appeler comme cela -, puisse au moins discuter. Que coûterait une telle discussion ? Je ne demande même pas que cet avis s'impose au gouvernement de Polynésie française. Qu'au moins il puisse en discuter, en débattre et pas seulement en cas d'implications budgétaires.
    J'observe que le Parlement national discute de la convention passée entre le CSA et le gouvernement de la République française. Que ce ne soit pas le cas en Polynésie française, je trouve cela regrettable !
    M. le président. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. S'agissant de la Nouvelle-Calédonie, je n'ai plus le souvenir de ce que nous avions fait à ce moment-là...
    Mme la ministre de l'outre-mer. La même chose !
    M. René Dosière. Je vous crois, bien entendu, madame la ministre, mais je ne me souviens plus du commentaire qui figurait dans mon rapport. Cela dit, je reconnais, pour avoir vu comment les choses se passent en Nouvelle-Calédonie, qu'il ne s'agit sans doute pas du meilleur article de ce texte. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Je ne dis pas que ce texte est parfait, même s'il a été voté à l'unanimité. Malgré cette réserve, je voudrais tout de même vous rappeler, madame la ministre, que le pouvoir ne s'excerce pas de la même manière en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie.
    En Nouvelle-Calédonie, le gouvernement est pluraliste : les principales forces politiques, notamment les deux groupes signataires des accords de Nouméa, à savoir le FNLKS qui représente plusieurs partis politiques favorables à l'indépendance, et le RPCR de Jacques Lafleur se sont mis d'accord et se sont associés à la conduite des affaires de la Nouvelle-Calédonie. Le gouvernement est élu à la proportionnelle sur un scrutin de liste. Il élit ensuite son président, puis son vice-président. Conformément à l'esprit de la loi organique, lorsque le président est issu du RPCR, le vice-président est issu du FNLKS. Par ailleurs, le haut-commissaire assiste de droit à toutes les réunions du Gouvernement, alors qu'il en est exclu en Polynésie.
    Le système calédonien garantit donc un meilleur pluralisme. Il ne faut donc pas faire trop de comparaisons.
    J'en reviens à la Polynésie, l'alinéa 1 de cet article donne en effet au gouvernement de la Polynésie la possibilité de créer, sans aucune limitation, tout ce qu'il veut en matière d'audiovisuel. L'autonomie est complète et le gouvernement fera ce qu'il voudra.
    L'alinéa 2 concerne la politique de communication audiovisuelle relevant de l'Etat. Dans ce domaine, le pouvoir ne doit pas être partagé. On nous dit qu'il ne l'est pas. Mais s'il s'agit d'une « convention qui associe » ? Pour parvenir à une convention, il faut se mettre d'accord sur les termes, car si l'un des deux signataires ne veut pas signer, il n'y aura pas de convention. Une « convention qui associe » suppose donc bien une négociation, c'est-à-dire des compromis, chacun pouvant dire qu'il ne signe pas si la convention ne contient pas telle ou telle disposition. Mais je ne vais pas faire un dessin...
    Je souhaite donc que la politique de la communication audiovisuelle soit définie par le CSA, dont c'est la compétence, et que la Polynésie n'y soit pas associée.
    J'ai ici le rapport de Dominique Wolton, directeur de recherche au CNRS.
    M. Christian Paul. C'est un excellent spécialiste !
    M. René Dosière. C'est, en effet, l'un des meilleurs spécialistes de la communication. Ce rapport relatif à l'information et à la communication en Polynésie - paru d'ailleurs dans la revue Tahiti-Pacifique que j'ai déjà évoquée - est très clair : « La presse écrite, on l'a vu, réservée à l'élite, joue peu son rôle de contre-pouvoir. Celui-ci est davantage occupé par la radio, beaucoup plus libre de ton, comme dans tous les pays, et, paradoxalement, par RFO. Après avoir été longtemps liée à l'Etat, ... » - en matière d'indépendance de l'information, nous avons connu des heures glorieuses, non seulement en outre-mer, mais aussi en métropole, n'est ce pas ? - ...
    M. le président. Monsieur Dosière, je vous en prie !
    M. René Dosière. « ... RFO, dans l'ensemble des DOM-TOM, avec son nouveau statut et l'apparition des médias privés, conformément à son rôle de service public, assure un rôle essentiel de pluralisme. » Voilà ce que nous voulons préserver.
    M. le président. La parole est à M. Michel Buillard.
    M. Michel Buillard. Je ne peux pas laisser tenir certains propos au sein de cet hémicycle.
    M. Christian Paul. Evidemment, puisqu'ils dérangent !
    M. Michel Buillard. Je viens de prendre la parole et vous m'interrompez déjà ! Avec tout le respect que je dois à l'ancien ministre que vous avez été, je peux vous assurer que la liberté d'expression existe en Polynésie.
    M. Eric Raoult. Evidemment ! Comme dans la Nièvre.
    M. Michel Buillard. Dans le domaine des médias, par exemple, on compte deux chaînes de télévision : TNTV et RFO. Savez-vous que RFO a retransmis intégralement la séance d'hier ? Tous les propos tenus par notre ami Dosière ont été retransmis en Polynésie, en toute liberté et objectivité.
    M. René Dosière. Je vais pouvoir me présenter en Polynésie !
    M. Michel Buillard. Y a-t-il atteinte à la liberté d'expression ? Quand M. Dosière, sur toutes les ondes polynésiennes, se répand en propos à la limite de la diffamation ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    A Tahiti, vous le savez, monsieur Paul, il y a au moins deux journaux crédibles : Les nouvelles de Tahiti et La Dépêche de Tahiti, que lisent tous les Polynésiens.
    M. René Dosière. Que lit l'élite !
    M. Michel Buillard. Je ne peux pas accepter que l'on mette en doute leur indépendance. A aucun moment, il n'a été fait pression sur ces journaux ! Et vos propos, monsieur Dosière, s'y retrouvent intégralement.
    M. le président. Il ne faut pas trop le dire à M. Dosière, parce qu'il va en abuser. (Sourires.)
    M. Michel Buillard. Donc, la liberté d'expression existe bien en Polynésie !
    M. le président. Très bien ! Votre message est retransmis !
    Je mets aux voix l'amendement n° 247.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 111 et 287.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir l'amendement n° 111.
    M. René Dosière. Le débat a eu lieu en commission, mais j'ai maintenu cet amendement pour que l'explication du rapporteur figure au procès-verbal. Et quand il aura donné son explication, je le retirerai.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l'amendement n° 287.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Pour ma part, je n'ai pas pu assister à ce débat et je souhaite savoir pourquoi il y aurait avis sur des nominations individuelles.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Il y a un malentendu chez nos collègues.
    En droit, une décision individuelle se distingue d'une décision réglementaire en ce qu'elle s'applique à un individu, soit un particulier, soit une personne morale, qui demande l'attribution d'un droit, alors que la décision réglementaire crée une norme applicable à tous. Une décision individuelle attribue ou refuse un droit à une personne morale ou physique.
    Dans leur amendement, nos collègues exprimaient leur souci de défendre les libertés individuelles. Je crois qu'ils peuvent accepter cette explication, qui sera très certainement complétée par le Gouvernement.
    M. René Dosière. S'agit-il de nominations ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Il ne s'agit pas de nominations.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Je voudrais éclairer le débat. Monsieur Lagarde, je pense en effet qu'il y a un malentendu. Contrairement à ce que vous semblez croire, il ne s'agit absolument pas de la nomination de journalistes, mais des attributions et des retraits de fréquence pour les radios et les télévisions locales. C'est ce que signifie, en termes juridiques, les décisions individuelles par rapport aux décisions réglementaires.
    M. le président. La parole est à M. Christian Paul.
    M. Christian Paul. Je reconnais, madame la ministre, que je craignais qu'il ne s'agisse de nominations, notamment au sein du service public de l'audiovisuel. Vous nous éclairez sur ce point. Mais pour nous éclairer complètement, je souhaiterais que vous nous indiquiez très clairement quel sera le pouvoir réellement attribué au gouvernement de la Polynésie en matière d'attribution ou de retrait de fréquences. Car nous avons la volonté très ferme de préserver le pluralisme politique en Polynésie.
    Madame la ministre, cet article donne-t-il au gouvernement de la Polynésie la possibilité, par une sorte de veto, d'interdire l'attribution d'une fréquence ? Car ce serait une décision individuelle. Nous souhaitons comprendre.
    Contrairement à ce que semblent penser le rapporteur et, sans doute, quelques-uns de nos collègues de la majorité, nous considérons que le pluralisme politique passe par le pluralisme dans l'audiovisuel. Nous serons intransigeants sur cette question, ainsi que sur quelques autres, dont : la loi électorale. En effet, la démocratie en Polynésie, aujourd'hui, c'est le pluralisme des médias, si nous savons le protéger ; la loi électorale, si vous savez revenir au texte du Gouvernement ; et ce sont des contre-pouvoirs. Mais hélas ! on n'en voit guère apparaître.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'outre-mer. M. Paul me demande de donner une précision supplémentaire. Je croyais que le texte était suffisamment clair. Quand on consulte, c'est pour demander un avis. Donc, le pouvoir du gouvernement polynésien, c'est celui de donner un avis. Encore une fois, nous avons recopié le texte calédonien, dont vous avez la paternité. Je ne vois vraiment pas où est le problème. En droit, les choses sont claires. Quand on consulte pour avis, je ne vois pas en quoi il y aurait droit de veto.
    M. le président. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Je retire mon amendement.
    M. le président. L'amendement n° 111 est retiré.
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le président, étant donné qu'on nous garantit qu'il ne s'agit, en aucun cas, de mesures concernant des nominations de personnes - cela pourra être utile à la jurisprudence, si jamais quelqu'un voulait donner son avis alors qu'il n'a pas à le donner - ni dans les sociétés de production, ni à RFO, ni dans tout autre organisme de radiocommunication audiovisuelle, je retire mon amendement.
    M. le président. L'amendement n° 287 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 25.
    (L'article 25 est adopté.)

Article 26

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 154 présenté par M. René Dosière.
    M. René Dosière. Retiré.
    M. le président. L'amendement n° 154 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 26.
    (L'article 26 est adopté.)

Article 27

    M. le président. Je mets aux voix l'article 27.
    (L'article 27 est adopté.)

Article 28

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 155 présenté par M. René Dosière.
    M. René Dosière. Retiré.
    M. le président. L'amendement n° 155 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 28.
    (L'article 28 est adopté.)

Article 29

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 248.
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Dans la droite ligne des amendements que j'ai défendus précédemment, et dont certains ont reçu l'agrément du Gouvernement puis ont été adoptés, je propose que les représentants de la Polynésie au conseil d'administration ou de surveillance des sociétés d'économie mixte soient désignés non par le conseil des ministres mais par l'assemblée de la collectivité, comme c'est le cas pour les communes, les départements et les régions. En l'occurrence, le prétexte de l'autonomie ne saurait être invoqué. La création d'une SEM n'est pas censée se produire tous les quatre matins, car je ne crois pas que l'intention du gouvernement polynésien soit d'aboutir à une économie totalement administrée. Mais, pour chaque prise de participation, c'est, comme dans toutes les collectivités de la République française, à l'assemblée territoriale et non à l'exécutif qu'il revient de désigner les représentants de la Polynésie. Il me paraîtrait plus sage que l'assemblée conserve son autorité en la matière.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Avis défavorable, précisément parce que la Polynésie française n'est ni une commune, ni un département, ni une région.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Donc elle peut faire ce qu'elle veut !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 248.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 29.
    (L'article 29 est adopté.)

Article 30

    M. le président. J'indique d'ores et déjà que je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public sur l'article 30.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée.
    Je suis saisi d'un amendement n° 112 tendant à la suppression de l'article.
    La parole est M. René Dosière.
    M. René Dosière. Nous avons demandé un scrutin public pour que chacun prenne ses responsabilités.
    Aux termes de l'article 30, « la Polynésie française peut participer au capital des sociétés privées gérant un service public ou d'intérêt général ». Cette disposition est tout à fait admissible, car elle correspond à une pratique générale. En revanche, la seconde phrase est beaucoup plus inquiétante puisqu'elle précise que la Polynésie « peut aussi, pour des motifs d'intérêt général, participer au capital de sociétés commerciales ». Autrement dit, on autorise non pas la nationalisation - le mot n'est pas approprié -...
    M. Christian Paul. La confusion des intérêts.
    M. René Dosière. ... mais, disons, la territorialisation des sociétés privées de Polynésie. Nous ne sommes plus en 1981, au temps où les socialistes procédaient à la nationalisation d'un certain nombre de grandes sociétés. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Eric Raoult. Quel aveu !
    M. René Dosière. Depuis, nous avons compris, nous avons évolué, et je suis surpris de voir ceux qui se prétendent des libéraux, à Paris comme à Papeete, faire le chemin inverse.
    M. Eric Raoult. Nous sommes simplement efficaces !
    M. René Dosière. Ce sont eux, maintenant, qui proposent que les fonds publics puissent s'investir dans tous les domaines.
    Je précise d'ailleurs que nous n'avons jamais pensé nationaliser des sociétés commerciales. Il s'agissait uniquement de grandes sociétés françaises, que l'on a pu ainsi remettre sur pied. Là, ce peut-être une agence immobilière, un hôtel, une société de pêche... Toute entreprise peut tomber sous le contrôle du territoire.
    De plus, lors de l'examen de cet article en commission, le rapporteur avait estimé qu'il ne répondait pas tout à fait aux exigences du libéralisme. Estimant qu'il fallait prendre des précautions supplémentaires, il nous avait dit - n'est-ce pas, monsieur le rapporteur ? - qu'il ferait quelques propositions pour encadrer les prises de participations au capital de sociétés commerciales. Mais nous n'avons rien vu venir et, en l'état, hormis la mention « pour des motifs d'intérêt général », il n'y a aucune limitation d'aucune sorte.
    Je ne me fais pas d'illusions sur le résultat de vote car, même si ma pédagogie n'est pas toujours assez convaincante, je crois que d'autres éléments sont en jeu dans cette affaire. Il est bon, toutefois, que chacun prenne ses responsabilités.
    J'ai déjà fait état hier de mes doutes quant à la constitutionnalité de cette disposition. Le Conseil constitutionnel tranchera. Je tiens malgré tout, mes chers collègues, à appeler votre attention sur le caractère plutôt énorme de cette disposition qui ne fait l'objet d'aucun encadrement, d'aucune limite.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement.
    Je rappelle à M. Dosière que les sociétés nationalisées étaient des sociétés commerciales. Il n'y a pas des petites sociétés qui seraient commerciales et des grandes sociétés qui ne le seraient pas. Renault, avant la guerre, était une société commerciale. Elle a cessé de l'être quand elle a été nationalisée, mais elle était auparavant inscrite au registre du commerce. Il n'y a pas, à cet égard, de distinction qui soit pertinente.
    La justification de l'article 30, c'est qu'il s'applique à la Polynésie, pour laquelle nous sommes en train de mettre en place un statut d'autonomie. Ce statut répond à deux préoccupations essentielles que nous avons longuement évoquées : donner une réponse à nos concitoyens polynésiens sur leur appartenance à la République dans le respect de leurs particularités et permettre à la Polynésie de s'affranchir progressivement des contraintes et des tutelles économiques qui pèsent sur elle.
    M. Christian Paul. Où est le rapport ? Ce n'est pas très clair, ce que vous racontez.
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. C'est au contraire extrêmement précis : la Polynésie doit jouer un rôle dans un certain nombre de secteurs pour assurer son indépendance économique. Le Gouvernement de la République et le gouvernement de la Polynésie pensent que cela peut passer, le cas échéant, par la prise de contrôle de sociétés commerciales. C'est le cas en matière de transports, notamment pour la compagnie Air Tahiti Nui.
    M. René Dosière. Cela, personne ne le conteste !
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Mais il peut s'agir aussi d'une entreprise de pêche, d'une ferme perlicole...
    M. René Dosière. Eh oui !
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. ... dès lors qu'une prise de participation peut être utile au développement. A une certaine époque, que je sache, cela ne vous choquait pas tant que l'Etat intervienne dans l'économie pour la soutenir.
    M. René Dosière. C'était il y a vingt ans ! On a changé d'avis !
    M. Christian Paul. Et le monde a changé !
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Certes, mais les bonnes idées ont la vie dure ! (Sourires.) L'intervention publique peut être utile y compris en métropole : on l'a constaté il n'y a pas très longtemps. Et je crois que le pire, c'est le dogmatisme, qui fige, qui rigidifie, qui inhibe...
    M. Christian Paul. Les principes ne vous étouffent pas ! (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Monsieur Paul !
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. L'argument est facile ! Déjà, vous m'avez accusé de ne pas avoir beaucoup de principes en matière de liberté de la presse. Ces invectives sans aucun fondement n'apportent rien au débat.
    En matière de développement économique, il est utile, j'en suis convaincu, que la Polynésie française puisse, le cas échéant, investir dans des entreprises commerciales, dans la limite des dotations budgétaires qui lui sont attribuées par l'assemblée, sous le contrôle de la chambre régionale des comptes et sous celui des juridictions qui seraient éventuellement saisies des arrêtés de prise de participation. C'est un bon outil. Je comprends qu'on le conteste. Je comprends aussi que vous soyez devenus tellement libéraux que l'intervention publique vous soit maintenant insupportable. Je me réjouis même de votre conversion, mais je pense qu'en ce qui concerne la Polynésie, elle est malvenue.
    M. le président. La parole est à M. Michel Buillard.
    M. Michel Buillard. Nous tenons absolument à ce que l'article 30 soit voté. Compte tenu de la configuration géographique de notre pays et des problèmes spécifiques que pose son développement économique, il y a déjà eu, par le passé, des associations heureuses de capitaux publics et de capitaux privés. C'est le cas, par exemple, pour les huileries de Tahiti ou pour Air Tahiti. Et l'avenir nous promet encore des travaux importants pour l'aménagement de ce territoire en matière de routes, de parkings souterrains, etc. Dans tous ces secteurs, il faut des capitaux publics pour impulser le développement.
    Au demeurant, un encadrement est prévu. L'article fait référence à des services publics, à des motifs d'intérêt général. Nous n'avons donc pas à douter de la crédibilité de ces opérations.
    M. le président. Je vais mettre aux voix cet amendement de suppression...
    M. René Dosière. Nous avons demandé un scrutin public, monsieur le président.
    M. le président. Oui, mais sur l'article, ce qui montre d'ailleurs que vous avez anticipé le résultat du vote sur l'amendement de suppression. (Sourires.)
    M. René Dosière. Vous voyez, je suis bien moins dogmatique que ne le pense le rapporteur. Je suis même très pragmatique.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 112.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Nous en venons à votre amendement n° 81, monsieur Dosière.
    M. René Dosière. Après mes explications sur l'article, je serai bref : l'amendement n° 81 est défendu, ainsi que l'amendement n° 156.
    M. le président. Prenons-les dans l'ordre.
    Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 81.
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 81.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Avis également défavorable de la commission et du Gouvernement sur l'amendement n° 156.
    Je le mets aux voix.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir son amendement n° 249.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Je souhaiterais auparavant, si vous m'y autorisez, poser à Mme la ministre trois questions liées à l'amendement n° 81.
    L'article 30 précise que les prises de participations dans des sociétés commerciales doivent être justifiées par « des motifs d'intérêt général ».
    Premièrement, cette rédaction recouvre-t-elle des sociétés de télévision, de radio, ou encore de presse écrite ? J'entends bien l'argumentation de M. Michel Buillard, qui souhaite, par exemple, que la construction de parkings souterrains à Papeete puisse bénéficier de participations territoriales. Mais, dans le secteur de la communication, cela ne paraît pas franchement nécessaire et pourrait même être gênant. Or la notion d'intérêt général est assez floue. Pensez-vous, madame la ministre, que des outils de communication grand public puissent être ouverts à la participation du territoire ?
    Deuxièmement, qui va juger en droit de l'intérêt général ? Dès lors que le territoire peut prendre des participations, j'imagine qu'une voie de recours est possible. Est-ce le Conseil d'Etat ou le tribunal administratif qui sera chargé d'apprécier si la condition de conformité à l'intérêt général est remplie ?
    Troisièmement, qui pourra intenter un recours contre la décision de prise de participation ? L'ensemble des citoyens de la Polynésie française ou seulement les élus de l'assemblée ?
    Ces trois précisions, madame la ministre, peuvent être utiles pour l'avenir.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'outre-mer. Qui jugera de l'intérêt général, monsieur Lagarde ? Ce sera évidemment le juge pénal, le juge administratif et le juge des comptes, selon les procédures classiques dont nous disposons pour éviter toutes les dérives éventuelles.
    Qui aura la possibilité de recours ? Tout contribuable local, comme c'est le cas sur tout le territoire de la République.
    Ce que nous voulons, c'est permettre à la Polynésie française de soutenir, par exemple, une filière naissante comme celle des flotilles de pêche. Cette activité, embryonnaire il y a peu, n'était pas forcément rentable, mais elle méritait d'être soutenue, car elle pouvait être fortement créatrice d'emplois. Et c'est ainsi qu'elle a connu, en Polynésie, un développement extraordinaire.
    Je ne vois pas comment on peut s'offusquer de cette possibilité pour le gouvernement de la Polynésie de soutenir une activité. Encore une fois, la stratégie de développement économique est de la compétence d'un territoire autonome. S'il considère que tel secteur doit être soutenu et que des activités naissantes ne pourront être créatrices d'emplois que s'il leur accorde un soutien financier et économique, je ne vois pas au nom de quoi on lui interdirait un tel soutien. Et quand la gauche s'offusque d'une intervention publique dans le secteur privé, je dois dire que c'est pire qu'une révolution culturelle !
    M. Éric Raoult. Oh oui !
    M. Jean-François Mancel. Pour sûr !
    M. Frédéric de Saint-Sernin. Très bien !
    M. le président. Maintenant que Mme le ministre vous a répondu, monsieur Lagarde, vous pouvez soutenir l'amendement n° 249 et peut-être, en même temps, l'amendement n° 250.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Volontiers, monsieur le président.
    Je ne m'offusque en rien de l'intervention publique lorsqu'elle a pour objet d'aider au démarrage de secteurs économiques. C'est notamment le remarquable développement de la pêche qui m'a permis de comprendre et de partager cette volonté du gouvernement polynésien.
    Je trouve que les prises de participations ne sont cependant pas suffisamment encadrées. A cet égard, madame la ministre, les précisions que vous venez d'apporter peuvent être utiles, même si vous ne m'avez pas répondu à propos de l'audiovisuel.
    Je vous avais également demandé si la juridiction compétente serait le Conseil d'Etat ou le tribunal administratif. C'est un point très technique sur lequel, je le comprends, on ne peut pas répondre à brûle-pourpoint, mais la question a son importance. Vous me dites que tous les citoyens pourront intenter un recours. Mais, pour le Polynésien qui vit à Rapa, dans les Australes, et qui serait directement concerné par la prise de participation du territoire dans une société de navigation, la saisine du Conseil d'Etat pose tout de même un problème d'éloignement...
    Cela dit, je n'avais aucune intention de remettre en cause le principe. Car le principe peut être bon et même nécessaire à l'aménagement du territoire de la Polynésie. Encore faut-il qu'il soit suffisamment circonscrit.
    Mes deux amendements visent à ce que les participations soient autorisées par une délibération de l'assemblée de la Polynésie. C'est elle qui vote le budget et donc autorise les dépenses. La prise de participation dans une société commerciale est un acte budgétaire important, ne serait-ce que parce que toute activité commerciale présente un risque financier qui n'est naturellement pas prévu dans le budget. L'autorisation de l'assemblée me semble donc la moindre des choses ; c'est aussi le gage de la plus grande transparence.
    L'amendement n° 249 prévoit, en outre, que « ces participations feront l'objet d'un rapport annuel annexé au compte administratif de la Polynésie française examiné annuellement ». C'est le cas dans toutes les collectivités. Il faut que l'on puisse savoir à tout moment quel est le montant global des participations que la Polynésie française aura souscrites et quels sont les risques potentiels ou les bénéfices éventuels que le territoire peut en attendre.
    L'amendement n° 250 est un amendement de repli qui ne mentionne pas le rapport annuel, au cas où il gênerait trop - ce qui me paraîtrait étrange -, et qui s'en tient au principe de l'autorisation par l'assemblée de Polynésie. C'est cela le plus important, parce que la souveraineté des assemblées doit être défendue, notamment lorsqu'il s'agit de l'argent public. L'argent public et les assemblées, en France, c'est une vieille histoire qui remonte à la Révolution.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 249 et 250 ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Ils n'ont pas été examinés par la commission. J'y suis défavorable à titre personnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 249.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 250.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 82 et 271, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir l'amendement n° 82.
    M. René Dosière. Défendu.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l'amendement n° 271.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cet amendement consiste, je l'ai dit, à s'aligner sur la pratique générale des collectivités locales. Je remercie la commission de l'avoir accepté et j'espère que le Gouvernement fera de même.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
    M. Jérôme Bignon. La commission n'a pas examiné l'amendement n° 82. A titre personnel, j'y suis défavorable. En revanche, la commission a effectivement accepté l'amendement n° 271.
    M. le président. Monsieur Dosière, étant donné la similitude de ces deux amendements, acceptez-vous de retirer le vôtre et de vous associer à celui de M. Lagarde ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. C'est quasiment le même.
    M. René Dosière. Soit, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 82 est retiré.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 271 ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Avis favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 271.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Comme je l'ai dit, nous sommes favorables au principe de la participation. Nous considérons cependant que celle-ci n'est pas suffisamment encadrée. Nous nous abstiendrons donc sur l'article 30, même si nous nous félicitons que le Gouvernement et la commission aient accepté de préciser que ces participations feront l'objet d'un rapport annuel annexé au compte administratif. J'imagine que nous aurons la possibilité de revenir sur ce point au cours de la navette. Sur le principe, en tout cas, nous n'avons pas d'objection.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'article 30, modifié par l'amendement n° 271.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   24
Nombre de suffrages exprimés   23
Majorité absolue   12
Pour l'adoption   19
Contre   4

    L'Assemblée nationale a adopté.

Article 31

    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 113 et 114, pouvant faire l'objet d'une présentation commune.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir ces amendements.
    M. René Dosière. Ces amendements sont défendus, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 113.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 114.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 31.
    (L'article 31 est adopté.)

Article 32

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 83.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Je reprendrai, à l'occasion de l'examen de cet amendement de suppression de l'article, ce que j'ai dit hier. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision relative à la Corse, a rappelé que seul le Gouvernement pouvait, pour l'exécution de son programme, recevoir une habilitation législative, et que le législateur ne saurait déléguer sa compétence dans un cas non prévu par la Constitution.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. La participation à l'exercice des compétences de l'Etat est prévue par l'article 74 de la Constitution. C'est probablement l'une des principales caractéristiques du statut d'autonomie qui nous est proposé.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 83.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 157.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Cet amendement est retiré.
    M. le président. L'amendement n° 157 est retiré.
    M. le président. Je mets aux voix l'article 32.
    (L'article 32 est adopté.)

Article 33

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 158.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Je considère qu'il est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 158.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 33.
    (L'article 33 est adopté.)

Article 34

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 132.
    La parole est à M. Michel Buillard, pour soutenir cet amendement.
    M. Michel Buillard. Nous apportons une distinction entre procédure d'agrément et de retrait. Pour ce qui concerne l'agrément, nous proposons une nouvelle rédaction avec une simple information. Pour ce qui concerne le retrait, nous sollicitons une concertation avec les autorités territoriales.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jêrôme Bignon, rapporteur. La commission avait initialement repoussé cet amendement au profit de son amendement n° 38 corrigé. Mais la rédaction de l'amendement n° 132 me semble préférable. Elle pose plus finement le problème qu'il fallait régler. Par voie de conséquence, je suggère à l'Assemblée d'adopter l'amendement n° 132.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Favorable à l'amendement n° 132.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 132.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, les amendements n°s 38 corrigé de la commission et 159 de M. Dosière tombent.
    Je mets aux voix l'article 34, modifié par l'amendement n° 132.
    (L'article 34, ainsi modifié, est adopté.)

Article 35

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 84.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Cet amendement vise à obtenir une explication du rapporteur, voire du Gouvernement. Il s'agit, à l'article 35, d'associer la police municipale aux actions de police de l'Etat. Il est notamment prévu que les agents assermentés peuvent « conduire les contrevenants devant un officier de police judiciaire ». Mais que se passera-t-il en cas de refus du contrevenant ? L'agent de police municipale, qui n'a pratiquement pas de pouvoir, devra-t-il conduire de force le contrevenant, au risque de déclencher une bagarre ? De quels moyens juridiques ou matériels dispose d'ailleurs l'agent en question pour conduire un contrevenant récalcitrant devant un officier de police judiciaire ?
    Si l'on répond à ces questions, je retirerai mon amendement. Si tel n'est pas le cas, cet amendement, qui vise à supprimer les mots : « conduire les contrevenants devant un officier de police judiciaire », aura tout son sens.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement bien que la question posée par notre collègue Dosière soit pertinente. Il semblerait que le texte proposé à l'article 35 reprenne les dispositions applicables aux polices municipales. En effet, quelle serait l'efficacité des polices municipales si les agents assermentés ne pouvaient pas, après avoir constaté une infraction, conduire son auteur devant un OPJ ? J'imagine que les dispositions permettant de le faire doivent être prévues dans le code de procédure pénale. En tout état de cause, je suis convaincu que Mme la ministre va apporter des explications plus précises que les miennes sur ce point.
    M. René Dosière. Ce n'est pas une réponse !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. La disposition de la loi organique reprend exactement les termes de l'article 24 du code de procédure pénale, lequel prévoit que certains fonctionnaires et agents assermentés, comme les gardes champêtres ou les agents des eaux et forêts, qui ont des compétences en matière de police spécialisée peuvent conduire les contrevenants devant un officier de police judiciaire. C'est la reprise textuelle de l'article 24 du code de procédure pénale.
    M. le président. La parole est à René Dosière.
    M. René Dosière. Madame la ministre, vous ne cessez de nous rappeler que la Polynésie est loin de la France. Le tempérament des Polynésiens a ses spécificités. Que se passera-t-il donc - et l'hypothèse n'est pas absurde - si un contrevenant ne veut pas se laisser conduire devant la police judiciaire. Bien sûr, j'ai moins d'expérience que vous mais j'ai le sentiment qu'en Polynésie les discussions s'animent très vite. Mon collègue Buillard semble d'ailleurs m'approuver.
    M. Michel Buillard. Pas du tout !
    M. René Dosière. Dès lors, n'y a-t-il pas risque d'incident ?
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. Voici ce que prévoit l'article 24 du code de procédure pénale : « Les chefs de districts et agents techniques des eaux et forêts et les gardes champêtres des communes conduisent devant un officier de police judiciaire tout individu qu'ils surprennent en flagrant délit. [...] les gardes champêtres peuvent se faire donner main-forte par le maire, l'adjoint ou le commandant de brigade de gendarmerie qui ne pourront s'y refuser. » Main-forte signifie par tous moyens mais dans le respect de la dignité de la personne.
    M. le président. Je crois que M. Dosière commence à être convaincu,
    M. René Dosière. Je vois comment M. Bignon traite les chasseurs dans son département ! (Sourires.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Lors du voyage que nous avons effectué en Polynésie pour la mission parlementaire, nous avons eu l'occasion d'observer le travail organisé par le GIP. Les agents assermentés peuvent-ils composer ce GIP ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Non, monsieur le député.
    M. le président. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Je retire mon amendement.
    M. le président. L'amendement n° 84 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 35.
    (L'article 35 est adopté.)

Article 36

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 160.
    La parole est à M. René Dosière pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Après les explications données tout à l'heure, je retire cet amendement.
    M. le président. L'amendement n° 160 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 36.
    (L'article 36 est adopté.)

Article 37

    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 219 et 220, pouvant faire l'objet d'une présentation commune.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir ces amendements.
    M. René Dosière. Le II de l'article 37 prévoit : « La Polynésie française est associée à la définition par l'Etat de la carte de l'enseignement supérieur et de la recherche... ». Je propose de préciser que l'université de Polynésie française participera à cette définition.
    L'université est en effet un établissement autonome régi par la loi de 1984 ; l'Etat ne peut donc pas parler en son nom. S'il s'agit d'améliorer ou de définir le fonctionnement universitaire de la Polynésie, il me semble souhaitable que l'université puisse être associée à ce processus.
    M. le président. Je crois avoir compris, monsieur Dosière, que l'amendement n° 219 était retiré.
    Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 220 ?
    M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement dont elle n'a pas vu l'utilité. L'autonomie de l'université n'est pas en cause, en effet. Faire figurer l'université en tant que telle dans la loi organique ne présente pas d'intérêt. Il n'y a ni danger ni inquiétude à avoir. Je l'ai déjà dit à M. Dosière qui a cependant préféré maintenir son amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Même avis que la commission.
    M. le président. Monsieur Dosière, maintenez-vous votre amendement ?
    M. René Dosière. Je le retire, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 220 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 37.
    (L'article 37 est adopté.)

Article 38

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 161.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Je le retire, ayant obtenu en commission les explications que je souhaitais. Celles-ci figurent d'ailleurs dans le rapport de la commission.
    M. le président. L'amendement n° 161 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 38.
    (L'article 38 est adopté.)

Article 39

    M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 162.
    La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.
    M. René Dosière. Je le retire, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 162 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 39.
    (L'article 39 est adopté.)

Articles 39 bis à 41

    M. le président. En l'absence d'amendements sur les articles 39 bis à 41, je vais les mettre successivement aux voix.
    (Les articles 39 bis à 41, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

7

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt-deux heures, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion du projet de loi organique, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, n° 1323, portant statut d'autonomie de la Polynésie française,
    Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, n° 1324, complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française.
    M. Jérôme Bignon, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 1336).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexes au procès-verbal
de la 1re séance
du mercredi 14 janvier 2004
SCRUTIN (n° 422)


sur l'article 15 du projet de loi organique, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, portant statut d'autonomie de la Polynésie française (représentation internationale de la Polynésie française).

Nombre de votants

43


Nombre de suffrages exprimés

43


Majorité absolue

22


Pour l'adoption

38


Contre

5

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Pour : 36 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 2. - MM. Charles Cova et Bernard Depierre.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (148) :
    Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 2. - MM. Christophe Caresche et René Dosière.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Contre : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22).
Non-inscrits (13).

Mises au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    MM. Charles Cova et Bernard Depierre, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « pour ».
    M. Christian Paul et Mme Ségolène Royal, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « contre ».

SCRUTIN (n° 423)


sur l'amendement n° 153 de M. Dosière à l'article 24 du projet de loi organique, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, portant statut d'autonomie de la Polynésie française (contrôle de l'Etat en matière de jeux et paris).

Nombre de votants

23


Nombre de suffrages exprimés

23


Majorité absolue

12


Pour l'adoption

5


Contre

18

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Contre : 18 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (148) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30).
Groupe communistes et républicains (22).
Non-inscrits (13).
    Pour : 1. - M. Emile Zuccarelli.

SCRUTIN (n° 424)


sur l'article 30 du projet de loi organique, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, portant statut d'autonomie de la Polynésie française (participation au capital de sociétés privées).

Nombre de votants

24


Nombre de suffrages exprimés

23


Majorité absolue

12


Pour l'adoption

19


Contre

4

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Pour : 19 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (148) :
    Contre : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Abstention : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22).
Non-inscrits (13).