Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus intégraux (session ordinaire 2003-2004)

 

Première séance du jeudi 22 janvier 2004

131e séance de la session ordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

DÉVELOPPEMENT DES TERRITOIRES RURAUX

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux (n°s 1058, 1033).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'amendement n° 1351 de M. Bonrepaux portant article additionnel après l'article 1er.

Après l'article 1er (suite)

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour soutenir l'amendement n° 1351.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, monsieur le ministre de l'agriculture, mes chers collègues, hier, j'ai eu l'occasion de rappeler la situation dramatique dans laquelle se trouvent de plus en plus souvent les zones rurales, qui souffrent de la disparition d'un certain nombre de services publics -Banque de France, Poste, trésoreries, gendarmeries- sans bénéficier pour autant de la concentration des entreprises publiques, qui se fait toujours autour des agglomérations. Les zones rurales subissent par ailleurs les mêmes catastrophes économiques que les zones urbaines en cas de disparition d'entreprises.

Cela se produit un peu partout en France. Je suis donc un peu surpris que nous soyons les seuls, sur les bancs du groupe socialiste, à soulever ces problèmes. On dirait qu'il ne se passe rien et que personne ne se rend sur le terrain !

Hier, le ministre en charge de l'aménagement du territoire nous a expliqué que les zones de revitalisation rurale n'avaient pas apporté beaucoup. Pourtant, au lieu de laisser, comme vous le faites, les créations d'entreprises à la charge des collectivités, nous avons, en 1998, allégé la taxe professionnelle des artisans qui s'installaient et, en 1999, nous avons pris des mesures de défiscalisation pour la construction de résidences de tourisme dans les zones de revitalisation rurale. Nombre de résidences de tourisme se sont ainsi créées dans des régions où elles ne se seraient jamais installées auparavant !

Vous pourriez vous inspirer de ce dernier exemple, monsieur le ministre, puisque, finalement, la défiscalisation ne coûte que si elle s'applique. Et encore, elle ne se traduit par un manque de recettes que pendant quelques années. N'est-ce pas une bonne mesure ?

On nous a dit que les zones franches étaient un succès, à tel point qu'on en a doublé le nombre sur le territoire. Pourquoi une mesure qui serait bonne pour les zones urbaines ne le serait-elle pas pour les territoires ruraux ?

Aujourd'hui, on assiste à une accumulation de moyens sur les agglomérations se trouvant autour des zones franches : contrats de sites, multiplication des PALULOS dans les banlieues en difficulté. C'est peut-être bien, mais cela se fait au détriment des zones rurales. Remarquez également que l'ANRU est financée par un prélèvement sur les offices HLM, y compris ceux des zones rurales. Sans inverser la tendance, il serait bon de rétablir un certain équilibre en faveur de ces dernières. C'est une question d'égalité et l'égalité est un principe républicain que le Gouvernement se doit d'appliquer. Qu'il traite au moins les zones rurales comme il traite aujourd'hui les zones urbaines. Cela éviterait que la désertification des campagnes ne s'aggrave.

M. le président. Monsieur Bonrepaux...

M. Augustin Bonrepaux. C'est important, monsieur le président, car j'ai tout lieu d'être inquiet. Hier, la majorité a refusé, et ce fut symbolique, un amendement tendant au développement du télétravail.

M. le président. Votre temps de parole est expiré ! Vous aurez l'occasion d'y revenir...

M. Augustin Bonrepaux. Aujourd'hui, à la radio, nous avons entendu que l'Estonie était un des territoires les plus en avance en matière de télétravail et de télécommunications. Et nous, en France...

M. le président. Défendez votre amendement ! Nous ne sommes plus dans la discussion générale.

M. Augustin Bonrepaux. Notre amendement est simple : il tend à créer en milieu rural l'équivalent de ce qui s'est avéré efficace pour les zones urbaines, à savoir des zones franches rurales.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 1351.

M. Yves Coussain, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur Bonrepaux, les élus socialistes ne sont pas les seuls à se préoccuper du monde rural. Et les combats du Cantal et de l'Ariège sont à peu près les mêmes.

Dans votre amendement, vous proposez de procéder à des augmentations « à la louche » : de 20 % de la DDR, de je ne sais plus combien de la DFM. Le sujet mérite un examen beaucoup plus précis et sérieux, ...

M. Augustin Bonrepaux. Nous sommes là pour ça !

M. Yves Coussain, rapporteur. ...auquel il sera procédé lorsque nous aborderons le projet de loi sur les responsabilités locales ou d'autres textes sur la décentralisation.

La commission, considérant que le Cantal et l'Ariège n'étaient pas l'Estonie, a repoussé cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, pour donner l'avis du Gouvernement.

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Même avis. Un projet de loi, qui est en cours d'élaboration, sera déposé par le ministre de l'intérieur et le ministre délégué aux libertés locales sur les dotations des collectivités locales.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le président, il est important que les amendements soient défendus. Sinon, tout le monde s'inscrira sur les articles et on risque d'y passer beaucoup de temps.

M. le président. Monsieur Brottes, je vous signale que les amendements sont largement défendus.

M. François Brottes. Je voudrais répondre à la commission et au Gouvernement. Nous renvoyer à un texte futur sur la décentralisation, pourquoi pas ? Sauf qu'on nous renvoie à la loi de modernisation agricole pour l'agriculture, à la loi sur La Poste pour les services publics, à la loi de réforme de l'Etat pour ce qui concerne les dotations de fonctionnement... Or le sujet est majeur. Comme vient de l'indiquer M. Bonrepaux, sans moyens supplémentaires, les territoires ruraux ne pourront pas respirer.

J'appelle nos collègues à la raison. Pourront-ils rentrer dans leur circonscription en disant : nous avons voté des dispositions nouvelles, mais il n'y a pas un sou en plus ?

Cette majoration de dotations n'a rien d'indécent, au vu des dispositions qui ont été adoptées pour les villes. Il ne peut y avoir deux poids deux mesures. Il est donc nécessaire de redorer le blason des finances rurales. Nous le disons à travers cet amendement. Nous le répéterons à travers d'autres, car nous ne désespérons pas de convaincre nos collègues de la majorité.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Nous abordons la question du soutien aux zones rurales, et donc de la péréquation. Ce soutien est légitime et notre majorité souhaite, bien entendu, l'apporter au monde rural.

Deux conceptions s'opposent en la matière. En tant que président de la commission, je tiens à rappeler quelle a été sa position pour que nos collègues qui n'en font pas partie soient parfaitement éclairés.

La stratégie de notre majorité et du Gouvernement est la suivante : grâce aux chantiers que le Gouvernement a ouverts et à travers un certain nombre de textes sur lesquels nous travaillons, nous nous efforçons d'avoir une politique cohérente.

Il est exact que de grandes réformes sont engagées, s'agissant notamment des finances locales et de la péréquation. La politique gouvernementale en la matière se lit à travers un texte que M. Devedjian a déposé et nous aurons l'occasion, dans moins de quinze jours, d'en discuter. Ce n'est pas occulter le débat sur la péréquation que de le renvoyer à l'examen d'un texte spécifique, qui permettra d'analyser clairement la politique du Gouvernement. Monsieur le ministre, je vous remercie de l'avoir précisé.

Mais il y aura aussi la loi de modernisation agricole, dont vous avez rappelé l'importance. Voilà pourquoi nous avons reporté au futur débat sur ce texte tous les amendements qui concernent l'agriculture elle-même.

Il ne faudrait pas, je le dis pour la presse notamment, que, systématiquement, on nous reproche d'occulter le débat. Non seulement, nous ne l'avons pas occulté, mais nous nous y sommes engagés totalement. La portée des réformes que nous voulons réaliser est, j'ose le dire, considérable. Vous le verrez lorsque nous aborderons le système de péréquation. Il ne s'agit donc pas de refuser le débat, mais simplement de poursuivre une politique gouvernementale cohérente que, bien entendu, la majorité soutient totalement.

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. M. le président de la commission nous invite à attendre quinze jours. J'ai regardé l'ordre du jour prévu sur un mois : j'y ai bien vu le projet de transfert de charges, surtout sur les départements et les régions, avec des compensations insuffisantes, mais aucun projet sur la péréquation.

Vous renvoyez toujours à des projets futurs. La péréquation, vous en parlez bien. Avec la loi de 1995, nous devions déjà vous voir la mettre en œuvre. En 1997, il n'y avait pas le moindre début de péréquation.

M. Yves Simon. Qu'avez-vous fait, vous ?

M. Augustin Bonrepaux. Aujourd'hui, vous nous dites : « Vous allez voir ce que vous allez voir !  ». Moi, je vois, dans la loi de finances, ce que vous nous proposez pour 2004 : une augmentation de la dotation de solidarité rurale inférieure à l'inflation. La solidarité par la péréquation, DSR et DSU, envers les communes les plus pauvres de ce pays augmente moins que l'inflation !

M. Yves Simon. Rien à voir avec le débat !

M. Augustin Bonrepaux. Vous prétendez les aligner sur l'inflation, en oubliant qu'on récupère sur ces collectivités, ce qui n'avait jamais existé auparavant, la compensation de la taxe professionnelle. Où est la péréquation ?

Moi, je peux vous en donner des exemples de péréquation. Qui a créé le fonds de dotation minimale pour les départements pauvres ? La gauche. Qui a créé les dotations de solidarité urbaine et de solidarité rurale ? La gauche.

M. Yves Simon. C'était le moins que vous puissiez faire en vingt ans !

M. Augustin Bonrepaux. Qui a créé la dotation de développement rural ? La gauche.

M. Jean-Claude Lemoine. Qui a vidé les caisses ?

M. Augustin Bonrepaux. Mais vous, qu'avez-vous fait en matière de péréquation ?

Aujourd'hui, monsieur Ollier, vous nous annoncez une grande péréquation. Seulement, vous la ferez en remettant dans le circuit tous les procédés que nous avons mis en œuvre et auxquels j'ai, pour ma part, fortement contribué, peut-être, d'ailleurs, en les réduisant. J'ai quelques craintes pour les zones les plus pauvres, car nous voyons bien que vous n'hésitez pas à leur infliger des prélèvements.

M. Yves Simon. Combien a coûté l'APA ?

M. Augustin Bonrepaux. Savez-vous, monsieur Simon, que les offices HLM de votre département vont être taxés pour financer le projet sur les banlieues ? Le leur expliquerez-vous ? Quant à l'APA, si vous la contestez, faites-le de préférence en période de canicule.

Nous ne pouvons pas accepter vos incessants renvois au futur alors qu'il y a des problèmes immédiats à traiter, auxquels nos propositions remédieraient. Sans cela, ce n'est pas du développement que connaîtront les zones rurales, mais bien de la désertification.

M. Didier Migaud. C'est sûr  !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. A ce moment du débat, je voudrais faire quelques remarques.

D'abord, le logement est un problème sensible, dans les banlieues et les zones urbaines comme dans les zones rurales. Il faut donc se féliciter de l'engagement des pouvoirs publics, sous plusieurs gouvernements d'ailleurs, pour réhabiliter notre parc de logements dans les zones urbaines, particulièrement dans les quartiers difficiles. Faut-il pour autant abandonner la politique du logement dans le monde rural ? Bien évidemment non. C'est la raison pour laquelle, tant dans les décisions du CIADT du 3 septembre dernier que dans le projet de loi, figurent des dispositions en faveur du logement en milieu rural.

Je n'aurai pas la cruauté, monsieur Bonrepaux, de vous rappeler l'évolution des crédits des OPH en faveur du monde rural sous le précédent gouvernement. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Gabriel Biancheri. Voilà ce qu'est la solidarité pour les socialistes !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Nous avons tous vécu dans nos départements une baisse drastique des crédits pour les OPH.

M. Yves Simon. Pas moins de 30 % !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Je l'ai vécue comme élu local ; j'imagine que vous l'avez vécue dans votre département de l'Ariège.

Avec Gilles de Robien, nous voulons relancer la politique de rénovation de l'habitat en milieu rural. On sait que le manque de logements est souvent un frein à la création d'activités et à l'implantation d'entreprises puisque les salariés et les cadres ne peuvent pas se loger.

M. Yves Simon. Tout à fait !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. La souplesse que préconisait Jean Auclair, la nuit dernière, pour l'intervention des communes là où l'initiative privée est défaillante en matière de logement est une suggestion frappée au coin du bon sens. Je crois que, sur tous les bancs de l'hémicycle, chacun partage cette vision.

Deuxième observation, le projet de loi est articulé avec, d'une part, d'autres textes législatifs, d'autre part, les mesures réglementaires. Certaines mesures ne figurent pas dans cette loi rurale tout simplement parce qu'elles sont d'essence réglementaire. Ces décisions ont été prises dans le cadre des deux CIADT du 3 septembre et du 18 décembre. Nous avons collaboré avec la DATAR à une brochure qui met en cohérence les décisions réglementaires et les décisions législatives que nous proposons à votre assentiment. Tout cela forme un ensemble. C'est un argument de mauvaise foi de prétendre que tel sujet n'est pas traité parce qu'il n'est pas dans la loi, alors qu'il a fait l'objet, par ailleurs, de décisions de politique gouvernementale et de mesures réglementaires.

S'agissant de l'articulation avec les autres lois, nous avons beaucoup hésité, avec les organisations professionnelles et syndicales, sur l'importance à donner aux mesures spécifiquement agricoles dans cette loi. Au tournant de l'été 2002, nous avions imaginé un volet agricole plus substantiel. Puis, nous avons décidé de le reporter à une loi de modernisation de l'agriculture pour deux raisons.

La première, c'est la réforme de la politique agricole commune qui est intervenue le 26 juin de l'année dernière à Luxembourg. Cette réforme va se traduire par la création d'un certain nombre de mécanismes et par des décisions importantes dont il faudra tenir compte.

La deuxième raison, c'est qu'en matière agricole, s'agissant tant de la politique des structures que de politique foncière, nous vivons pour l'essentiel sur des lois fondatrices des années soixante, notamment les lois d'orientation de 1960 et de 1962. Or la France de 2004 - c'est un truisme - n'est pas celle des années soixante. Il nous a semblé que ces questions importantes de la politique des structures et de la politique foncière, il fallait prendre le temps d'en examiner les aspects à fond. Nous voulons écrire la politique agricole des vingt prochaines années, ce qui implique beaucoup de travail et de concertation.

Voilà pourquoi le projet qui vous est proposé est une loi rurale sans être essentiellement agricole, même si elle comporte des dispositifs en faveur de l'agriculture auxquels nous reviendrons. S'agissant notamment de la « désocialisation », par exemple l'exonération de cotisations sociales de la dotation jeune agriculteur, je pense que personne ne peut s'opposer à ces mesures qui vont dans le bon sens.

Ma troisième observation aura trait à la question des finances locales. Beaucoup d'élus locaux siègent sur les bancs de cet hémicycle, qui connaissent parfaitement le sujet. De quelque côté que nous nous trouvions, nous devons tous faire preuve d'humilité. L'Etat a su moderniser sa fiscalité, notamment en créant la TVA il y a cinquante et un ans, mais il a laissé aux collectivités décentralisées les impôts les plus archaïques et les plus injustes.

M. Charasse, quand il était ministre du budget, avait eu le courage de se lancer dans la révision des bases de la fiscalité locale, révision longue et coûteuse puisqu'elle était revenue à 2 milliards de francs au début des années quatre-vingt-dix. Depuis, aucun gouvernement, ni de l'actuelle ni de l'ancienne majorité, n'a osé tout remettre sur la table. On sait très bien, en effet, que la révision d'une fiscalité injuste, même si elle introduit des bases plus justes, n'enchante pas ceux qui en tirent avantage et incitent à s'exprimer bruyamment ceux qui en subissent les inconvénients. De cette incapacité à trouver une fiscalité moderne pour les collectivités locales sont nées les difficultés que nous connaissons aujourd'hui.

De ce point de vue, la « généalogie » de la dotation globale de fonctionnement est extrêmement éclairante. Elle est née de la suppression, en 1943, d'un impôt indirect local, l'octroi, dont restent aujourd'hui comme témoins les bâtiments, sans les barrières. On a remplacé l'octroi par la taxe locale, sorte de TVA communale qui pouvait varier d'une commune à l'autre. Sur les livres des années cinquante et soixante, figure le prix imposé du livre plus « TL », pour taxe locale. Cet impôt indirect local représentait une ressource importante pour les communes. En 1968, la généralisation de la TVA au commerce a conduit à la suppression de la taxe locale pour éviter la redondance des impositions. Pendant quelques mois, on a affecté aux communes la taxe sur les salaires. Mais, après mai 1968, l'augmentation du SMIC a été partiellement compensée par la suppression de la taxe sur les salaires, sauf pour les associations et les banques. C'est ainsi qu'on en est arrivé au versement représentatif de la taxe sur les salaires, le VRTS, qui est l'ancêtre de la dotation globale de fonctionnement, où on a maintenant un préciput sur les recettes de TVA en faveur des collectivités locales.

Cette histoire montre combien il est difficile d'inventer pour les collectivités locales des ressources modernes, en phase avec l'activité économique.

M. Jean Launay. Le problème c'est la péréquation !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. De là le travail sur la péréquation, comme vous le dites avec justesse, qui consiste en une espèce d'ouvrage que l'on reprend sans cesse pour l'améliorer.

Les débats en cours sur la décentralisation témoignent des divers aspects de la péréquation. D'abord, dans le cadre de la réforme de la Constitution, des garanties constitutionnelles ont été données sur le plan financier aux collectivités locales. C'est extrêmement important.


Deuxièmement, vous savez que, dans le cadre du transfert des nouvelles compétences aux collectivités décentralisées, un volet fiscal donnera à celles-ci des compensations liées à l'accroissement des charges, mais aussi des ressources assises sur une base dynamique et non plus sur des impôts statiques et obsolètes tels qu'on les connaît aujourd'hui.

Troisièmement, la question de la péréquation est au cœur des lois de finances locales qui sont en cours d'élaboration. D'ailleurs, je sais que votre commission des finances, devant laquelle j'ai été auditionné dans le cadre de la stratégie ministérielle de réforme, y travaille également afin d'apporter une contribution constructive.

Alors, je veux bien que l'on polémique à ce sujet et que l'on s'envoie des arguments à la figure. Je pourrais moi-même me livrer à cet exercice et revenir sur les compensations de la décentralisation Mauroy du milieu des années quatre-vingt pour constater qu'aujourd'hui, les départements, en matière de transports scolaires, doivent consacrer cinq à huit fois plus de moyens que ceux qui leur sont dévolus au titre de la compensation.

M. Gabriel Biancheri. Sans oublier les collèges !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Je pourrais rappeler que, s'agissant des collèges pour les départements et des lycées pour les régions, les rapports se situent de un à deux, voire de un à trois. Oui, tout cela, pendant des dizaines et des dizaines de minutes, je pourrais vous le rappeler.

Pour ce qui est de la période plus récente, je pourrais aussi rappeler que le transfert de charges pour la prestation autonomie, prestation que nous nous honorons tous de mettre en œuvre, n'a pas été compensé pour les départements.

M. Gabriel Biancheri. Une vraie catastrophe !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Et la décision du législateur de mettre en place les 35 heures a entraîné pour les conseils généraux des dépenses importantes.

M. Yves Simon. Plus de 10 % d'augmentation !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Je pourrais encore revenir sur les services départementaux d'incendie et de secours. Là aussi, le législateur a pris des décisions dont le volet financier n'était pas compensé.

M. Yves Simon. Et après, ils se permettent de nous donner des leçons !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Cet inventaire à la Prévert, je pourrais le poursuivre encore et encore. Si vous le voulez, je le ferai même avec force détails, force arguments et force chiffres. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mais mieux vaut, je crois, avancer dans la bonne direction. Ce projet de loi n'est pas un projet de loi de finances locales. Les ressources des collectivités rurales pauvres sont un élément majeur de la politique de développement rural, chacun en convient. C'est la raison pour laquelle nous donnons rendez-vous rapidement à la représentation nationale pour que cette question soit traitée dans le cadre de l'aspect financier de la décentralisation.

Nous sommes les uns et les autres suffisamment conscients de ces problèmes, au-delà de nos différences, pour avoir une approche positive des choses, dont, pour ma part, j'essaie de ne jamais me départir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1351.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 919.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux pour le soutenir.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le ministre, ce débat est intéressant mais il ne suffit pas de critiquer le précédent gouvernement. Il faut aussi faire des propositions concrètes.

Je prendrai l'exemple du logement. Vous nous dites que le CIADT a annoncé des mesures en ce domaine, mais vous n'en précisez aucune. Rappelons pourtant que les crédits de l'ANAH ont diminué l'année dernière de 30 % et qu'il est bien exact, même si vous n'en avez rien dit, que l'on taxe les offices HLM des zones rurales, c'est-à-dire les locataires, pour financer le plan Borloo. C'est certes indispensable, mais mieux vaudrait éviter de faire des prélèvements sur les plus défavorisés, car ces crédits sont nécessaires pour financer les logements sociaux. Dans l'Ariège, où il faut consacrer plus de 100 000 francs à chaque logement, l'office HLM a bien besoin de ces moyens. Et on le taxerait ?... Est-ce cela la nouvelle solidarité ?

Vous nous dites que pour l'agriculture, ce n'est pas tout à fait satisfaisant. Le problème, c'est qu'en dehors de l'agriculture, il n'y a pas grand-chose dans cette loi. Surtout, il n'y a aucune mesure structurante pour les zones rurales, alors que tous les moyens poussent à la concentration.

Monsieur le ministre, je ne vais pas m'étendre sur la péréquation, mais si vous-même ou le président de la commission des finances aviez cité un exemple de dispositif de péréquation initié par votre gouvernement ou un précédent gouvernement auquel votre majorité participait, j'en aurais été très heureux. Le fait est que la plupart des moyens de péréquation à destination des départements, des régions, des zones rurales, ont été mis en place par des gouvernements que j'ai soutenus. D'ailleurs, j'y ai fortement contribué, notamment pour la DSR, la DFM, la DDR.

« Nous allons le faire », dites-vous, mais vous vous êtes lancé dans un brillant historique de la DGF sans que l'on voie où les choses vont aller désormais. En 1985 a été mise en œuvre une excellente réforme de la DGF, malheureusement arrêtée en 1993. Aujourd'hui, le Comité des finances locales serait en train d'étudier la question de la péréquation. Mais que constatons-nous ? Qu'il faudrait sans doute revenir à la réforme de 1985 parce qu'elle avait fortement accru la péréquation de la dotation forfaitaire.

Il nous semble que si l'on veut donner des moyens et un peu d'espoir aux zones rurales, c'est en ce domaine qu'il importe d'agir. Il ne s'agit pas d'attendre une fois de plus une loi de réforme des dotations comme vous en faites à chaque fois que vous arrivez au pouvoir. Ce n'est que pur affichage : vous voulez donner l'impression qu'il y aura une amélioration, mais en réalité, il n'en est rien.

S'agissant des SDIS, que vous avez évoqués, je ferai une comparaison très simple. Avant 2002, ils étaient financés à hauteur de 22 % au titre de la DGE. L'an dernier, M. Sarkozy nous a annoncé une nouvelle dotation. Nous aurions pu nous réjouir si, à la fin de l'année 2003, nous n'avions pas constaté qu'elle était limitée aux seuls achats de matériel.

M. le président. Monsieur Bonrepaux, veuillez conclure.

M. Augustin Bonrepaux. Autrement dit, les départements qui revalorisent les centres de secours n'ont rien eu. Pour le département de l'Ariège, cela représente 1,5 % des investissements. Alors comparez : 22 % d'un côté, un peu plus de 1 % de l'autre.

Notre amendement renforce la péréquation en proposant de donner davantage de moyens aux zones de revitalisation rurale, notamment en majorant la dotation de développement rural. C'est la meilleure solution pour accompagner les projets de développement.

M. le président. Merci, monsieur Bonrepaux !

M. Augustin Bonrepaux. Aujourd'hui, en effet, l'Etat est complètement démuni pour soutenir ce type de projets puisque les crédits du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire ont été réduits.

S'il n'y a pas d'amélioration de la DDR, nos projets ne pourront être réalisés et ce projet de loi n'atteindra pas son objectif.

M. le président. Monsieur Bonrepaux, je vous le dis à vous comme à tous nos collègues, nous avons devant nous un débat long et difficile. Quand vous défendez un amendement, vous pouvez reprendre la parole après que la commission et le Gouvernement ont donné leur avis. Alors, soyez gentils de respecter votre temps de parole sinon nous ne nous en sortirons pas. Nous avons certes du temps, mais il faut que tout le monde puisse s'exprimer.

Sur l'amendement n° 919, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?

M. Yves Coussain, rapporteur. Pour les raisons déjà exposées, la commission a rejeté cet amendement qui a pour objet d'augmenter la DDR de 20 %, la DFM de 10 % et la DSR de 15 %.

Cela dit, au nom de mes collègues, je précise que nous nous associons à la logique qui le sous-tend. Il faudra bien, à un moment ou à un autre, donner aux communes ou aux communautés de communes de nos ZRR, qui, par définition, ne sont pas parmi les plus riches, les moyens de tirer parti de toutes les possibilités qui leur sont ouvertes par ce projet de loi.

M. Augustin Bonrepaux. Vœu pieux !

M. Yves Coussain, rapporteur. Mais n'oublions pas qu'il y aura prochainement une loi qui développera la péréquation.

M. Augustin Bonrepaux. Vous y croyez, vous ?

M. Yves Coussain, rapporteur. M. le ministre nous a donné une bonne explication. Toutefois, les députés dans leur ensemble aimeraient trouver quelques apaisements avant la fin de la discussion de ce projet de loi.

M. Augustin Bonrepaux. C'est le moment !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Avis défavorable pour les mêmes raisons que pour l'amendement précédent.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. M. le ministre a raison : il est inutile de polémiquer de façon stérile. Simplement, lorsqu'on refait l'histoire de part et d'autre de l'hémicycle, il faut prendre garde au fait que nous sommes dans un contexte différent de celui qui prévalait il y a cinq ans ou dix ans. Aujourd'hui, nous connaissons une dérégulation de l'ensemble des services publics. Des milliers et des milliers de postes de fonctionnaires qui étaient au service de nos territoires ruraux sont supprimés. Confrontées à ce défaut de moyens en nature, si j'ose dire, de la part de l'Etat et de ses entreprises publiques, les communes rurales se trouvent de plus en plus déshéritées. Elles ont donc plus besoin aujourd'hui qu'hier de dotations spécifiques de solidarité.

Par ailleurs, quand on nous dit que la Constitution, récemment modifiée, accorde aux territoires ruraux des garanties nouvelles, je crois qu'il y a confusion des genres. Et je vois bien qu'il y a quelque malice à mélanger les notions.

Autonomie des collectivités locales : nous n'y sommes pas opposés. Il faut bien sûr qu'elles puissent prendre comme elles l'entendent certaines décisions fiscales.

Transferts de charges équitables : voilà une volonté que nous approuvons. Nous ferons les comptes après, mais ne faisons pas de procès d'intention : considérons que cet engagement sera tenu.

Mais ce n'est pas parce que ces deux principes figurent dans la Constitution qu'il nous est interdit de développer la péréquation au nom de la cohésion sociale, chère à cette même Constitution : il faut donner plus à ceux qui ont moins. C'est d'ailleurs un principe qui a été rappelé à plusieurs reprises par le président Ollier. Cela implique, en vertu de la solidarité, de donner des fonds aux territoires les plus fragiles afin qu'ils disposent de moyens complémentaires. Sans cela, ils ne s'en sortiront pas.

C'est tout le sens de cet amendement. Et si nous avons demandé un scrutin public, c'est pour que chacun fasse les comptes, conscient des responsabilités qu'il exerce. Ainsi, lorsque nous aurons un débat avec les maires des communes rurales après l'adoption de ce texte, car il y a toujours un service « après-vote », nous pourrons expliciter clairement quels ont été les enjeux et les prises de position pendant nos discussions.

M. le président. Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Nous allons maintenant procéder au scrutin sur l'amendement n° 919.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 52

          Nombre de suffrages exprimés 52

          Majorité absolue 27

      Pour l'adoption 16

      Contre 36

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.


Je suis saisi d'un amendement n° 1271.

La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier, pour le soutenir.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Je tiens d'abord à remercier M. le ministre de sa mise au point sur l'articulation du projet de loi dont nous débattons avec les autres textes gouvernementaux qui seront consacrés à l'agriculture et aux finances locales. Elle intervient à point car nous avons besoin de bien connaître ce dont nous parlons.

L'article L. 2251-3 du code général des collectivités territoriales prévoit, en cas de défaillance de l'initiative privée, que les communes rurales puissent intervenir pour assurer le maintien des services de première nécessité. L'amendement n° 1271 tend à élargir cette faculté à la création de tels services. La commune de Saint-Juéry, dans ma circonscription, est confrontée à ce délicat problème, et ce n'est certainement pas la seule.

Si vous acceptez cet amendement, mes chers collègues, vous conforterez une jurisprudence qui, pour ouverte qu'elle soit, n'en reste pas moins aléatoire et vous donnerez plus de lisibilité à l'article L. 2251-3.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. La commission n'a pas examiné cet amendement. Comme il s'agit d'étendre l'intervention des communes à la création de services indispensables pour répondre aux besoins de la population en milieu rural, j'y suis favorable à titre personnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Le groupe UDF trouve cet amendement excellent et le votera.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1271.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 914 et 913, pouvant faire l'objet d'une présentation commune.

La parole est à M. François Brottes pour les soutenir.

M. François Brottes. L'Assemblée vient d'adopter un amendement, sur lequel nous nous sommes abstenus, donnant une nouvelle possibilité d'intervention aux communes. Dont acte ! Autonomie des collectivités locales oblige ! Mais il n'est toujours pas prévu de mesures d'accompagnement pour leur permettre d'agir.

Les amendements n°s 914 et 913 tendent à augmenter la DDR dont bénéficient les départements éligibles à la DFM et relèvent donc de la même argumentation que les précédents. Donner des pouvoirs supplémentaires sans moyens supplémentaires devient insupportable. Il faut vraiment que nous nous ressaisissions et que, comme le souhaite d'ailleurs le rapporteur, nous soyons à même de fournir aux communes les moyens dont elles ont besoin pour assumer leurs nouvelles responsabilités.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. Pour les mêmes raisons que celles précédemment exposées, la commission a repoussé ces deux amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 914.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 913.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 1328.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux pour le soutenir.

M. Augustin Bonrepaux. La majorité vient de refuser des amendements importants puisqu'ils tendaient à augmenter la dotation de développement rural. Je reviens donc à la question que je ne cesse de poser et qui rejoint d'ailleurs celle du rapporteur : quels moyens prévoyez-vous, monsieur le ministre, pour le développement des territoires ruraux, objet du projet de loi dont nous discutons ? Il serait quand même important, comme l'a fait remarquer le rapporteur, que nous le sachions avant la fin de ce débat. Pour le moment, nous ne voyons pas comment ce développement pourrait se réaliser si vous refusez la plupart des amendements que nous proposons alors qu'ils ne coûteraient pas grand-chose et seraient fortement incitatifs.

L'amendement n° 1328 tend à favoriser le développement rural en simplifiant et rééquilibrant les dotations dont bénéficient les EPCI : celles des communautés de communes bénéficiant de la DGF bonifiée seraient augmentées et celles des autres communautés de communes seraient harmonisées.

Le projet de loi transfère aux départements une grande partie de l'aménagement foncier. Il est intéressant qu'ils y contribuent, mais cela s'accompagne pour eux d'un transfert de charges important. Et je ne vois pas ce que ce transfert de compétences apportera si, en dehors de la compensation, il n'est prévu aucun moyen financier pour inciter au développement des zones rurales.

Sans connaissance précise, je le répète, des moyens prévus par le Gouvernement, nous n'aurons, pendant deux semaines, fait que parler et échanger des points de vue, certes intéressants, mais, en dehors de quelques améliorations et simplifications, nous n'aurons rien décidé de concret.

En quoi ce texte va-t-il servir au développement des territoires ruraux ? Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous donniez une réponse précise à cette question.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. A même logique, même argumentation. Cet amendement a été repoussé par la commission.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Patrick Ollier, président de la commission. J'interviens à nouveau, monsieur le président, parce que je tiens à ce que nos collègues sachent que la commission n'a aucune intention d'occulter le débat. D'ailleurs j'ai le souvenir que ces questions ont donné lieu, en commission, à des discussions très constructives, auxquelles ont pris part des représentants de tous les groupes de cette assemblée.

Nous sommes d'accord, sur le fond, avec nombre de principes invoqués, mais notre position sera la même sur tous les amendements du type de ceux qui viennent d'être défendus. Nous considérerons la réponse très complète de M. le ministre sur la politique du Gouvernement comme une réponse globale à ces amendements et nous nous bornerons à dire que nous y sommes opposés.

N'y voyez, monsieur Bonrepaux, aucune volonté de notre part de ne pas vous répondre. Mais nous l'avons déjà fait en commission dans un débat de qualité, et nous le ferons à nouveau à l'occasion des textes à venir.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Je voudrais, à la suite de l'intervention de M. Bonrepaux, apporter de nouvelles précisions concernant le cadre budgétaire et financier du développement rural.

Quand on regarde les moyens publics affectés à ce développement, on constate qu'il existe des crédits européens, des crédits nationaux et des crédits locaux, à savoir les budgets communaux, auxquels s'ajoutent les subventions des conseils généraux et des conseils régionaux pour les politiques territoriales des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale.

Les crédits communautaires se répartissent en deux paquets : le paquet agricole et le paquet lié à la politique régionale.

Le premier représente environ 10 milliards d'euros par an, ce qui n'est pas rien, et ces aides contribuent pleinement à maintenir un tissu agricole vivant dans l'ensemble du monde rural et de la montagne. On sait bien qu'en l'absence de ce soutien à la multifonctionnalité de l'agriculture européenne, le phénomène de désertification de nos campagnes serait encore plus fort. D'ailleurs, la réforme qui va intervenir dans les prochains mois s'accompagnera d'un renforcement du deuxième pilier, c'est-à-dire des crédits pour le développement rural. De ce point de vue, le modèle agricole européen que nous avons défendu et que nous continuons à défendre dans les enceintes internationales participe pleinement de la politique en faveur des territoires ruraux.

Concernant les fonds régionaux, le commissaire en charge de la politique régionale, M. Barnier, et le commissaire en charge de la politique agricole, M. Fischler, sont en train d'opérer un reclassement pour bien distinguer les crédits du développement rural, au sens strict du terme, des crédits de la politique régionale. Des confusions entre les deux secteurs rendaient nécessaire ce travail de clarification.

Comme le faisait remarquer Marc Le Fur la nuit dernière, un grand combat est en cours sur la nature de la politique régionale européenne après 2006. Certains commissaires et certains Etats membres voudraient qu'il n'y ait plus du tout de politique régionale dans les quinze Etats membres actuels et que les crédits qui lui sont dévolus soient uniquement affectés aux dix Etats qui vont nous rejoindre au printemps 2004. Comme Jean-Paul Delevoye, qui est en charge de ces questions au Gouvernement, l'a rappelé à plusieurs reprises, la France milite pour le maintien d'une forte politique régionale européenne. Je ne peux rien dire de plus aujourd'hui puisque les négociations sont en cours.

J'en viens aux concours de l'Etat. Il ne vous a pas échappé, monsieur Bonrepaux, que la politique constante des gouvernements qui se sont succédé depuis les lois de 1982 consiste à transférer des compétences aux départements et aux régions, et ce avec une forte dimension donnée à la politique territoriale. C'est la raison pour laquelle, il faut, dans les mécanismes de péréquation, maintenir et renforcer l'aide différenciée pour les collectivités les moins favorisées.

Dans le même temps, il est clair que l'Etat doit garder un rôle éminent en matière d'aménagement du territoire, notamment par la voie des infrastructures - le CIADT du mois de décembre y a pourvu ; l'honnêteté intellectuelle empêche quiconque de dire le contraire - et par un certain nombre d'interventions budgétaires, qu'elles proviennent de la DATAR ou du ministère de l'intérieur.

Vous m'interrogez, monsieur Bonrepaux, sur les moyens financiers prévus dans le projet de loi. Je suis tenté de vous répondre que l'effort public sera d'autant plus important que les mécanismes que nous mettons en place et que nous renforçons seront attractifs. Ce n'est pas au membre chevronné de la commission des finances que vous êtes, que j'apprendrai que les dépenses fiscales sont, par définition, évaluatives et constatées ex post. Un certain nombre de dispositifs fiscaux sont prévus en faveur de la création d'emplois et d'activités dans les zones rurales. Et je souhaite personnellement que ce soit, en différentiel, le plus coûteux possible pour les finances publiques car cela voudra dire que ces mesures ont fonctionné.

Nous ne sommes pas du tout dans la logique malthusienne qui a prévalu ces dernières années. Au contraire, non seulement nous dopons les zones de revitalisation rurale mais nous en faisons la promotion. Sous la législature précédente, elles étaient en quelque sorte au placard : Patrick Ollier le rappelait cette nuit. Quand Jean-Paul Delevoye et la DATAR ont procédé à une évaluation des ZRR, ils ont été très étonnés de voir qu'en réalité, elles n'avaient intéressé personne pendant des années et que l'outil n'avait pas été promu. Non seulement nous refondons et musclons les ZRR mais nous en faisons la promotion parce que nous souhaitons que ce dispositif fonctionne.

Les statisticiens présentent des comptes consolidés de l'effort public en faveur de la politique régionale et du développement rural. Nous pouvons toujours nous lancer dans une querelle de spécialistes en nous fondant sur des nomenclatures de l'INSEE. Mais chacun sait bien que ce qui compte, c'est la volonté d'impulser une politique dynamique et vivante pour nos territoires ruraux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le ministre, vous ne cessez de nous renvoyer à une réforme des collectivités locales. Je serai au rendez-vous. Mais qui nous dit que le ministre n'aura pas changé ou qu'il ne me renverra pas encore à autre chose ?

Il est intéressant de reprendre les réponses que vous nous avez données au sujet des moyens publics. Aujourd'hui, dans les territoires ruraux il existe des projets de développement. Beaucoup de territoires sont engagés dans des contrats de pays qui permettent d'associer les moyens de l'Etat, les moyens de l'Europe et les crédits locaux des conseils généraux, des conseils généraux et des communes.

Vous nous dites : « Nous avons les crédits de l'Europe. » Dans le département de l'Ariège, quatre contrats de pays ont été signés l'année dernière ; ils couvrent pratiquement tout le territoire. L'Etat s'est engagé à financer un certain nombre de projets. Or que constatons-nous ? Ni l'Etat ni l'Europe n'ont tenu leurs engagements. Aujourd'hui un projet de développement coûteux est réalisé, mais il ne manque - par hasard - que les crédits du FNADT et de l'Europe. Pourquoi ? A la fin de l'année dernière, les crédits FNADT étaient épuisés et le préfet a donc été dans l'impossibilité de signer l'arrêté. Quant aux crédits européens destinés à la région Midi-Pyrénées, ils auraient déjà été consommés.

M. Yves Simon. Qui a signé les contrats de plan ?

M. Augustin Bonrepaux. En 2004, on financera les projets 2003 ; en 2005, on financera les projets 2004. En 2006, vous l'avez dit, il n'y aura plus de crédits européens. Que ferons-nous ?

Il ne suffit pas de nous renvoyer à l'Europe. Que fait l'Etat dans le cadre de la solidarité nationale ?

Vous invoquez les transferts de compétences passés, mais vous oubliez un élément qui fait toute la différence : vous avez, sur la base de vos promesses électorales, inscrit dans la Constitution le principe de l'autonomie des collectivités.

Or que constatons-nous au fur et à mesure ? Que ces transferts ne sont pas compensés à la hauteur des dépenses générées. Je ne reprendrai pas le débat que nous avons eu sur le RMI. Nous avons démontré que la charge du RMI va entraîner une augmentation des dépenses et donc de la fiscalité locale.

Vous prétendez, monsieur le ministre, que le principe d'autonomie vous interdit de compenser les allégements de taxe professionnelle destinés à inciter les entreprises à s'installer, car la Constitution ne le permet plus. Or le Président de la République a annoncé, il y a quelques semaines, une baisse de la taxe professionnelle.

M. Jean Auclair. Très bien !

M. Augustin Bonrepaux. Je comprends mal cette contradiction entre vos propos et ceux du Président de la République.

Par ailleurs, vous nous informez qu'une réforme de la fiscalité locale sera entreprise. Sur quelle base ? La Constitution ne permet pas de toucher aux moyens des collectivités locales, sauf en instituant, à la place, un autre impôt - c'est le cas pour le RMI. Le fait pour les collectivités locales de ne pouvoir moduler les taux des impôts n'est-il pas en contradiction avec le principe d'autonomie ?

Enfin, vous prétendez ne pas pouvoir évaluer le coût des mesures prévues dans ce projet de loi. Comment les services du ministère des finances ne seraient-ils pas capables de connaître le coût de la prorogation, sur deux ans, d'une mesure qui existe depuis plusieurs années ?

M. le président. Monsieur Bonrepaux, je vous prie de conclure.

M. Augustin Bonrepaux. Il suffit de faire une règle de trois - c'est du niveau du CM 1 et, j'ose le croire, à la portée des services de Bercy. (Sourires.) Sur ce point au moins, vous auriez pu nous répondre avec plus de précision.

M. le président. La parole est à M. Yves Simon.

M. Yves Simon. Vous faites fort en prônant l'assistance financière à crédit, monsieur Bonrepaux ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

J'ai en charge les finances d'un département depuis 2001 et je fais parfois le centième, c'est-à-dire que je prends les dépenses nationales divisées par cent pour apprécier la situation. Les dépenses à crédit de vos gouvernements font qu'aujourd'hui, si je prenais le centième des frais financiers de la dette nationale, le budget du département de l'Allier passerait de 2 milliards à 4,5 milliards. Vous nous proposez de financer à crédit. Vous voudriez encore accroître le déficit ! Auriez-vous le souci de condamner le Gouvernement à l'échec ?

M. André Chassaigne. C'est le contraire !

M. Yves Simon. Nous voulons limiter les prélèvements pour augmenter notre réactivité.

Le transfert des charges depuis 2001, dans un département comme l'Allier, a entraîné 15 % d'augmentation des taux d'imposition pour l'APA ; 3 %  pour la RTT et 2 % pour le SDIS.

M. Jean Auclair. Il faut le dire !

M. Yves Simon. Nous devons supporter au total 20 % d'augmentation par votre faute. Plutôt que de charger encore la barque, essayons d'être réactifs et de donner de la liberté aux territoires.

Quant aux crédits européens qui soutiennent les contrats de plan, si vous n'avez pas été « bon », il faut l'avouer, mais ne niez pas l'utilité du FEDER. Ne soyez pas pessimistes : c'est un système qui marche si l'on est réactif. Dans l'Allier, le FEDER nous a apporté 19 millions d'euros affectés à divers programmes. Montrez-vous optimistes et, pour cela, soyez dynamiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Le débat s'installe. Je voudrais venir en aide à M. le ministre de l'agriculture qui se donne beaucoup de mal, comme l'excellent président de notre commission, M. Ollier. Ils doivent tenir compte de Bercy et de la Communauté européenne.

Le préfet de mon département m'a dit qu'il était inutile de déposer des projets, car en 2006, il n'y aura plus rien, et aujourd'hui il ne reste plus grand-chose.  Le problème est donc vite réglé.

M. Augustin Bonrepaux. Enfin quelqu'un d'honnête !

M. Jean Lassalle. La tâche n'est pas facile pour les ministres, mes chers amis socialistes, reconnaissez-le. Mais ils font très bien les choses.

Je propose un traitement de cheval : transférer Bercy  pour trois ans à Lourdios-Ichère ; cela fera évoluer les esprits. En effet, si on n'injecte pas d'argent d'une manière ou d'une autre, cela n'aura pas d'effet d'entraînement et n'apportera pas le souffle attendu.

M. Borloo a pleuré pendant six mois, menaçant de démissionner deux fois par jour, et il a obtenu de l'argent. (Sourires.)

M. Patrice Martin-Lalande. Qu'attend le ministre ?

M. Jean Lassalle. M. Gaymard a trop de travail pour avoir le temps de le faire. (Rires.)

Il faut donc trouver une solution. On met de bons mécanismes en place, mais il manque un peu - comme on dit au Pays basque - de chocha. (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Le Gouvernement a sans doute la volonté de développer les territoires ruraux, mais avec l'argent des autres ! Vous passez votre temps, monsieur le ministre, à mettre la main dans notre poche. Mais vous ne vous contentez pas de ce geste, vous essayez, par vos raisonnements, d'agir sur nos cerveaux. Vous tentez de nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Vous multipliez les démonstrations à n'en plus finir, pour nous convaincre de faire des efforts pour développer les territoires ruraux.

Croyez-vous véritablement à l'avenir des territoires ruraux ? Actuellement, vous nous faites payer la morphine, pour accompagner ce que j'appellerai « la mort lente ». Je pense qu'une politique novatrice pour le développement des territoires ruraux mériterait que l'Etat mette la main à la poche. La solidarité nationale devrait jouer.

M. Patrick Ollier, président de la commission. La poche de l'Etat, c'est la nôtre !

M. André Chassaigne. La solidarité nationale, monsieur Ollier, ne se situe qu'au niveau des mots. Sur le plan des actes, il n'y a aucune volonté forte de l'Etat.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Toujours l'Etat providence !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1328.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous en venons à votre amendement n° 915, monsieur Brottes. Le même problème ayant été évoqué lors de l'examen de l'amendement n° 919, je pense que vous serez bref.

M. François Brottes. N'en doutez pas, monsieur le président, mais quelques mots d'explication sont nécessaires.

Nous venons de consacrer l'importance de l'intercommunalité. Lier les ZRR à l'intercommunalité, c'est marquer la reconnaissance d'une dynamique qui est maintenant bien installée sur le territoire, grâce à des textes que nous avons votés, les uns ou les autres, selon les majorités au pouvoir. Reconnaissons que tant les démarches d'EPCI à taxe professionnelle unique que les démarches de pays fonctionnent aujourd'hui assez bien sur le territoire.

Cet amendement n° 915 tend à revaloriser la dotation des communautés de communes. En effet, plus de liberté signifie plus de pouvoirs pour investir dans le logement, dans l'accueil d'entreprises, pour le maintien des services au public qui disparaissent progressivement. Tout cela génère des charges nouvelles. Il faut, pour y faire face, donner à ces intercommunalités les moyens nécessaires.

Hier, M. Ollier nous disait : « Le Gouvernement est coincé entre le marteau de M. Barnier et l'enclume de M. Mer. » Si j'ai bien compris, il parlait du marteau de l'Europe et de l'enclume de l'Etat. Il ne faut pas se défiler pour autant. L'Etat a pris des engagements : les contrats de plan ont effectivement été signés par le précédent gouvernement, mais la continuité de l'Etat et sa parole doivent être respectées. J'aimerais donc savoir quelle est la proportion des crédits du FNADT dépensés en 2003 conformément aux contrats de plan. C'est un exercice récent et cela demandera un gros travail statistique. Nous pourrons donc attendre jusqu'à la semaine prochaine, mais nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour nous faire un état de la situation.

Nous avons tous des exemples, comme le rappelaient MM. Lassalle, Chassaigne, Bonrepaux, de crédits attendus qui ont été reportés. Vous prenez des engagements et il n'y a pas de raison de ne pas y croire. Mais on ne peut les mesurer qu'à l'aune de ceux qui ont été ou non tenus dans un passé récent. Il est donc important, pour la suite de notre débat, pour la crédibilité de votre argumentation, que nous puissions disposer de ces éléments de réflexion.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. Pour les raisons évoquées précédemment, la commission a rejeté cet amendement qui prévoit d'augmenter de 15 %, pendant cinq ans, les dotations des communautés de communes. Ce taux est d'ailleurs arbitraire.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Permettez-moi de faire deux observations, monsieur Brottes.

La première, c'est que M. Ollier n'a jamais dit que M. Barnier était le « marteau » dans cette affaire.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Jamais !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. M. Ollier a parlé de l'Union européenne et de Bercy. Il n'a pas comparé M. Barnier à un marteau.

M. François Brottes. Moi non plus !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. C'est d'autant moins le cas que, comme vous le savez, M. Barnier se bat avec beaucoup d'énergie en faveur d'une politique régionale européenne. Je tenais à clarifier ce point.

M. Patrice Martin-Lalande. Très bien !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Deuxième observation et ce faisant je réponds aussi à M. Chassaigne, - mais Yves Simon a déjà donné des éléments de comparaison et de référence extrêmement intéressants sur ces questions budgétaires générales qui concernent aussi bien le budget de l'Etat que celui des collectivités décentralisées -, il faut avoir le courage de regarder les choses en face.

En ce moment même, j'imagine qu'il y a quelque part en France, en métropole ou dans l'outre-mer, un enfant qui naît et qui est déjà chargé de dettes.

M. Yves Simon. Plus de 100 000 francs !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Il est déjà endetté parce que ses parents, ses grands-parents n'ont pas eu le courage de regarder les choses en face. Vous avez parlé de « morphine », monsieur Chassaigne, on ne peut pas indéfiniment compter sur la « morphine » de la dépense publique ! On ne peut pas indéfiniment pousser la poussière sous le tapis. Or c'est ce qui a été fait depuis vingt ans. Je vous rappelle qu'au début des années 1980, les déficits budgétaires s'élevaient à une vingtaine de milliards de francs par an et qu'en 1993, ils atteignaient, excusez du peu, 360 milliards !

Tout cela s'accumule et a pour effet que le premier poste budgétaire de l'Etat, c'est aujourd'hui le poste de la dette au lieu d'être celui des dépenses d'avenir pour l'investissement, l'éducation, etc.

M. Gabriel Biancheri. Malheureusement !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Je le dis sans esprit polémique, sans esprit partisan : toujours compter sur la « morphine » de la dépense publique  pour tout régler, c'est, nous le savons, tourner le dos au développement et au dynamisme économique.

M. Patrice Martin-Lalande. C'est même mortel !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Ce qu'il faut, c'est redonner l'envie d'entreprendre partout, y compris dans les territoires ruraux. C'est la raison pour laquelle nous avons prévu ces différentes dispositions.

L'Etat, bien évidemment, ne se dérobe pas et honore ses engagements, même quand ils ont été pris sous une autre législature. J'en sais quelque chose : dans le ministère que j'ai l'honneur d'animer, j'ai dû, depuis vingt mois, me livrer à quelques travaux pratiques pour honorer la parole de l'Etat et trouver à financer des engagements pris mais non budgétés, qui frôlent le milliard d'euros.

Nous connaissons désormais nos arguments respectifs et le débat a été fort intéressant. Pour l'ensemble de ces considérations, le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 915. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean Auclair.

M. Jean Auclair. Mes chers collègues de l'opposition, après vous avoir longuement écoutés hier soir et à nouveau ce matin, j'en suis réduit à conclure que, soit la mémoire vous fait défaut, soit elle est bien sélective ! En effet, qui a voté la loi Voynet si ce n'est vous ? Cette loi a ouvert la possibilité aux petites communes rurales de maintenir le bureau de poste tenu par un commerçant ou le secrétaire de mairie, lorsque sa fermeture était prévue. Or, quand vous avez voté la loi, avez-vous, comme vous le demandez aujourd'hui, revalorisé la dotation des collectivités ? Pas du tout ! Vous n'avez strictement rien fait !

M. Yves Simon. Vous avez tout laissé à la charge des communes !

M. Jean Auclair. Pourtant, lorsque vous gériez le pays, la croissance était exceptionnelle.

Alors, cessez de pratiquer la politique du cocktail Molotov et de la sébile ! Cela commence à bien faire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je suis au regret, monsieur Auclair, de vous renvoyer à vos tablettes. Il se trouve que je suis l'auteur des amendements Poste dans la loi Voynet et rien, dans cette loi, ne correspond à ce que vous venez de dire. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Auclair. J'invente, peut-être ?

M. François Brottes. Il était question de péréquation, de distribution du courrier six jours sur sept.

M. Jean Auclair. Je connais la loi.

M. François Brottes. Vous pouvez le penser, mais ce n'est pas dans les textes. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le ministre, s'il vous a semblé que j'aie pu être irrévérencieux à l'égard de M. Barnier, je m'en excuse. Telle n'était pas du tout mon intention. M. Ollier a parlé du marteau et de l'enclume, de l'Europe et de Bercy,

M. Patrick Ollier, président de la commission. Ce n'est pas ce que j'ai dit non plus.

M. François Brottes. J'y ai mis des noms pour que cela frappe les esprits. (Sourires.)

Mais je rends cette justice à M. Barnier : il se bat pour le maintien des fonds structurels. Il a même, en votre présence, dans une assemblée fort intéressante en Savoie, demandé au Gouvernement de faire davantage afin que la montagne soit éligible aux fonds structurels. Je sais qu'il mène ce combat. Je lui rends hommage pour sa détermination et je souhaite qu'il poursuive dans cette voie. Nous comptons sur son appui. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Patrice Martin-Lalande. C'est mieux !

M. Patrick Ollier, président de la commission. Très bien, monsieur Brottes.

M. François Brottes. Cela dit, il y a dette et dette, la bonne et la mauvaise. Il est normal de s'endetter pour réaliser des investissements à long terme, construire des chemins de fer, favoriser la recherche, accorder davantage de moyens à l'éducation, créer des routes, aménager des espaces en vue d'y réaliser des équipements publics,...

M. Yves Simon. Tout à fait d'accord !

M. François Brottes... afin de ne pas faire porter sur une seule génération les dépenses afférentes à un investissement qui s'étalera sur trente, quarante, cinquante ans ! Chacun peut en convenir et c'est de la bonne gestion que de pratiquer ainsi. Tout dépend de ce que la dette recouvre. Quand il s'agit d'endettement lié à des investissements à long terme, il n'est pas forcément inutile de les engager.

M. Yves Simon. Aujourd'hui, l'Etat emprunte pour son fonctionnement !

M. François Brottes. J'ai bien noté, monsieur le ministre, que si vous n'avez pas répondu sur l'évaluation du FNADT en 2003, c'est parce que M. Delevoye est en charge de cette question. J'ose espérer que lorsqu'il reviendra en séance, il nous communiquera les précisions que nous lui avons demandé de nous fournir.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 915.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 779.

La parole est à M. Antoine Herth pour le soutenir.

M. Antoine Herth. Cet amendement vise à simplifier une mesure existante, à savoir la possibilité pour les coopératives d'utilisation de matériel agricole d'assurer, dans une limite de 25 % de leur chiffre d'affaires, des prestations pour le compte de petites communes. Il s'avère que cette mesure votée en juillet 2001 est très peu utilisée, parce qu'elle est soumise à de lourdes formalités administratives, comme l'obligation de double comptabilité. Aussi souhaitons-nous simplifier ces procédures pour les CUMA situées dans les zones de revitalisation rurale.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Yves Coussain, rapporteur. Cet amendement dont nous avons longuement discuté en commission relève plutôt de la prochaine loi de modernisation agricole. De plus, il risque d'accroître la concurrence entre les CUMA et les entreprises de travaux agricoles, ce qui ne nous semble pas opportun. Aussi a-t-il été rejeté par la commission.

M. Yves Simon. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. François Guillaume.

M. François Guillaume. Sur le principe, cet amendement est un bon amendement. Il tend à permettre aux CUMA d'intervenir au niveau des travaux communaux, ce que généralement elles font, mais il permettrait de régulariser les choses.

Cette possibilité leur est déjà ouverte. Leur statut de coopérative leur permet de réaliser de telles opérations, mais dans la limite de 20 % du chiffre d'affaires. En ce qui me concerne, je souhaiterais, dans un souci d'harmonisation et pour ne pas créer de distorsions entre les coopératives, en rester à 20 %. D'autant plus que si, au printemps prochain, le ministre de l'agriculture décide de revoir le statut de la coopération dans le cadre d'une loi sur la modernisation agricole, ce pourcentage pourrait être porté à 50 %

Je suis favorable à l'amendement de notre collègue Herth sous réserve d'un sous-amendement qui ramènerait le taux de 25 % à 20 %.

M. le président. La parole est à M. Jean Auclair.

M. Jean Auclair. La majorité est riche de sa diversité parce que moi, mes chers collègues, je vous demande surtout de ne pas voter un tel amendement. Ce serait rouvrir la guerre entre les coopératives et les entreprises privées.

Cet amendement est une atteinte à la liberté d'entreprendre. D'un côté, le Gouvernement prend des mesures favorisant la création d'entreprises ; de l'autre, si on suivait les démonstrations de M. Herth et de M. Guillaume, on tuerait un peu plus dans ce pays la liberté d'entreprendre.

Les CUMA, si je ne me trompe, touchent des subventions importantes des collectivités territoriales pour acheter du matériel. Ce serait créer une distorsion de concurrence avec les entrepreneurs privés. Il faut savoir ce que l'on veut pour les zones de revitalisation rurale. Souhaite-t-on des entreprises vivantes pour rendre service à tout le monde ou veut-on la mort des entrepreneurs privés ? Je crois, au contraire, qu'il faut les protéger. De surcroît, les agriculteurs ont suffisamment à faire dans leur propre exploitation pour ne pas avoir besoin de réaliser des travaux ailleurs.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Ce n'est pas parce que M. Auclair a tenu des propos véhéments à mon égard que je ne peux pas être d'accord avec la démonstration qu'il vient de faire. (Sourires.)

Comme je suis l'auteur de la disposition à laquelle il est fait référence dans la loi de juillet 2001, je veux rappeler, sans vouloir m'en prévaloir, car elle a été votée à l'unanimité, que nous avons recherché le juste équilibre.

Dans un certain nombre de territoires, en effet, il n'y avait pas d'entreprises de travaux forestiers ou agricoles. Les collectivités avaient donc besoin de faire appel aux agriculteurs locaux. Ce sont des cas très spécifiques. La mesure qui a été votée proposait une mesure d'équilibre visant à ne pas concurrencer déloyalement les entreprises qui existent à proximité. Je suis donc partisan de ne pas voter cet amendement pour ne pas aller au-delà et ne pas franchir ce Rubicon. Car les CUMA doivent, théoriquement, intervenir sur le territoire de leurs adhérents. Aller au-delà et faire de la prestation de services, ce serait entrer dans une logique de concurrence déloyale pour les entreprises, car elles supportent plus de charges.

M. Gabriel Biancheri. Exactement !

M. le président. La parole est à M. Yves Simon.

M. Yves Simon. Sur certains territoires, il y a insuffisance, carence, comme dans le haut débit. La question du pourcentage est posée. Néanmoins, autoriser brutalement les CUMA à intervenir, sans discernement, serait dangereux.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. Il me semble, monsieur Brottes, que le juste équilibre n'a pas été complètement atteint puisque la mesure que vous avez proposée et qui paraît intéressante, je le souligne, est très peu utilisée dans la pratique. Il reste des blocages.

Cela dit, je retire mon amendement et je vais me mettre en rapport avec M. Guillaume pour étudier une nouvelle disposition que nous présenterons dans le cadre de la loi de modernisation de l'agriculture.

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 779 est retiré.

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements, n°s 825 rectifié, 1072, 883, 997 et 1080, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les trois derniers sont identiques.

La parole est à M. Yves Coussain, pour soutenir l'amendement n° 825 rectifié.

M. Yves Coussain, rapporteur. Cet amendement a pour objet de renforcer le dispositif fiscal et social dont le Gouvernement entend faire bénéficier les zones de revitalisation rurale. Il est proposé de prolonger de un à cinq ans la durée d'exonération des charges patronales dans les zones de revitalisation rurale pour les nouvelles embauches, comme c'est le cas dans les zones franches urbaines.

La commission y est favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, même s'il n'est pas contre la philosophie du dispositif.

Il s'agit de porter de un à cinq ans la durée d'application de l'exonération totale de cotisations patronales de sécurité sociale dans la limite de 1,5 fois le SMIC applicable aux créations d'emplois par les entreprises en zone de revitalisation rurale. Cette proposition a perdu une grande partie de son intérêt depuis la mise en place, le 1er juillet 2003, de la mesure générale de réduction des cotisations patronales de sécurité sociale qui atteindra, au plus tard le 1er juillet 2005, 26 % du salaire au niveau du SMIC horaire contre 30 % dans le cadre de l'exonération applicable en zone de revitalisation rurale. En effet, le salaire brut moyen à l'embauche, dans ces zones où prédominent les bas salaires, ce qui n'étonnera personne, est proche de 1,05 SMIC.

Dès lors, au 1er juillet  2005, la nouvelle réduction représentera, pour ce salaire moyen à l'embauche, 76 % des cotisations patronales de sécurité sociale et 86 % pour un salarié rémunéré au SMIC horaire, les cotisations patronales de sécurité sociale restant à acquitter après allégement représentant respectivement 7 et 4,2 points de cotisation.

En outre, alors que le bénéfice de la mesure générale présente l'avantage de la simplicité et de la lisibilité pour les employeurs, puisqu'elle n'est subordonnée à aucune autre condition que celle tenant au niveau de rémunération, l'exonération applicable en ZRR est assortie de multiples exigences : taille, secteur d'activité, nature du contrat de travail, activité du salarié, limitation dans le temps et procédure déclarative.

L'adoption d'une nouvelle mesure créerait une complexité supplémentaire dans la gestion quotidienne de la paie. D'un intérêt tout relatif pour l'employeur, elle serait contraire à la démarche de rationalisation des exonérations engagée par l'ordonnance de simplification.

J'ai souhaité vous faire une réponse détaillée afin de montrer que, sur le fond, le Gouvernement n'est pas opposé à cet amendement, qu'il juge intéressant. Mais il me semble que le dispositif arrêté par mon collègue François Fillon atteint en grande partie l'objectif visé.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert, pour soutenir l'amendement n° 1072.

M. Jean Gaubert. Monsieur le ministre, nous avons compris votre argumentation, mais elle nous semble très partielle. Elle ne répond pas à toutes les questions posées par l'amendement ou, en tout cas, à celles auxquelles nous voulons répondre.

Elle vaut pour les bas salaires et les salaires proches du SMIC. Vous l'avez dit vous-même et nous ne le contestons pas. Mais dans nos régions, en particulier dans les zones de rénovation rurale, se pose le problème de l'embauche de jeunes techniciens et, parfois, de jeunes cadres. Or ce que vous venez de dire ne s'applique pas au renforcement de l'encadrement et de la maîtrise dont beaucoup de jeunes entreprises ont besoin pour survivre. Il convient donc que vous révisiez votre position, au moins sur ce point.

Dans ce débat, nous allons continuer d'insister sur le fait que, s'il est bien d'afficher des intentions, il est mieux d'y mettre les moyens. Nous voyons que vous êtes contraint de vous opposer à toute proposition de moyens formulée par l'opposition et même, parfois, par vos troupes de la majorité. Je conçois que votre position n'est pas facile à tenir mais, au moins sur cette disposition sans forte incidence financière puisqu'elle ne toucherait que quelques embauches, vous pourriez accepter nos propositions et celles qui sont soutenues par le rapporteur.

Enfin, je profite de l'occasion pour constater que la majorité a été mal inspirée en refusant, hier, mon renvoi en commission, car la preuve a été faite durant toute la soirée et ce matin encore qu'il n'aurait pas été inutile.

M. le président. Nous en venons à l'examen des trois amendements identiques soumis à la discussion commune.

La parole est à M. Jean Lassalle, pour soutenir l'amendement n° 883.

M. Jean Lassalle. Notre amendement modifie les conditions d'exonération des cotisations patronales concernant respectivement les assurances sociales, les allocations familiales ainsi que les accidents du travail pour les embauches effectuées par les entreprises situées en zone de revitalisation rurale.

Les modifications proposées portent sur deux points : d'une part, la durée de l'exonération est portée d'un an à cinq ans, mais avec une dégressivité pour la quatrième année : 70 % du salaire, et la cinquième : 40 % ; d'autre part, elles en ouvrent le bénéfice aux associations d'aide à domicile agréées, qu'elles soient publiques ou privées, notamment les aides à domicile pour personnes âgées en milieu rural, dont l'impact est très important.

Sans citer de noms, car M. Barnier est un excellent homme que je connais depuis longtemps, je maintiens qu'aujourd'hui, dans nos campagnes, l'Europe apparaît un peu comme le marteau et Bercy comme l'enclume. Si cette image n'est pas corrigée, les extrêmes, notamment le Front national, verront leurs résultats s'envoler lors des prochaines élections. Aujourd'hui, l'Europe n'apparaît à nos côtés que pour imposer Natura 2000 dans toutes les ZRR. (Sourires.) Quant au ministère de Bercy, je réitère ma proposition de l'installer pour trois ans à Lourdios-Ichère, dans les Pyrénées-Atlantiques, à proximité de la frontière espagnole. (Rires.)

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez, pour soutenir l'amendement n° 997.

Mme Henriette Martinez. Compte tenu des explications du ministre, je le retire.

M. le président. L'amendement n° 997 est retiré.

La parole est à M. François Vannson, pour soutenir l'amendement n° 1080.

M. François Vannson. Je suis sensible aux arguments développés par le ministre, mais je voudrais appeler son attention sur le fait que les zones rurales doivent faire face à une multitude de handicaps, notamment structurels. Les baisses de charges sociales sont un moyen de rendre leur attractivité à ces territoires et de permettre aux entreprises qui y sont implantées de poursuivre leur activité. L'enclavement est une source de coûts supplémentaires.

Cela dit, je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 1080 est retiré.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements restant en discussion hormis le vôtre, monsieur le rapporteur, c'est-à-dire l'amendement n° 1072, de M. Gaubert, et l'amendement n° 883, de M. Lassalle.

M. Yves Coussain, rapporteur. La commission a émis un avis favorable à ces deux amendements presque identiques à celui que j'ai moi-même déposé.

Toutefois, après avoir entendu M. le ministre nous préciser que l'ordonnance de simplification concernait 90 à 95 % des cas et, soucieux de simplifier la vie dans nos campagnes - les ZRR ont mal fonctionné ou n'ont pas fonctionné aussi bien qu'on l'aurait voulu après 1995, parce qu'elles étaient d'une lecture trop compliquée -, à titre personnel, je ne voterai pas ces amendements.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Même avis défavorable que précédemment.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Monsieur le président, je m'en tiendrai à la décision initiale de la commission. J'ai écouté M. le ministre de l'agriculture et j'entends bien que M. Fillon a mis en place un dispositif. Mais aujourd'hui, l'urgence est telle qu'on ne peut pas se contenter de laisser les problèmes se résoudre d'une autre manière. Nous ne cessons de répéter qu'il convient de donner un signe fort à nos campagnes. Celui-ci n'est pas coûteux. Je demande à tous mes collègues, y compris à ceux que j'ai aidés à faire adopter quelques amendements hier soir (Sourires) de bien vouloir me suivre.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Mes chers collègues, redonnons un peu de dignité à nos travaux. Nous avons fait en commission un travail certes insuffisant, comme le remarquait M. Gaubert, mais relativement long. M. le président Ollier s'est félicité de la qualité de nos échanges et la commission a émis des votes. Je trouve indigne que notre rapporteur n'appelle pas à soutenir les amendements adoptés par la commission. Je n'ai jamais vu cela !

M. Patrice Martin-Lalande. Il faut tenir compte des explications du ministre !

M. François Brottes. Que l'Assemblée, après une reprise en main, en décide autrement, cela peut se comprendre : c'est la règle de la majorité.

M. Jean Auclair. Vous êtes des orfèvres en la matière. Rappelez-vous la loi « chasse » !

M. François Brottes. Mais, à tout le moins, que le rapporteur défende les positions de la commission. Sinon, délibérons directement dans l'hémicycle, cela allégera la charge de travail du président Ollier.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Monsieur Brottes, les compliments que vous me faites confinent à la provocation.

Que les choses soient claires : j'approuve entièrement le rapporteur. Je reconnais la part très importante prise par votre groupe...

M. François Brottes. Comme les autres !

M. Patrick Ollier, président de la commission....- oui, l'UDF et l'UMP, par exemple - aux trente heures de travail approfondi de la commission. Mais personne - ni vous, ni moi - n'a évoqué l'ordonnance de M. Fillon. Mea culpa, il convient de le reconnaître honnêtement.

M. Patrice Martin-Lalande. Très bien !

M. Patrick Ollier, président de la commission. La disposition de simplification proposée, qui couvre 95 % des cas, s'applique jusqu'à 1,7 fois le SMIC. Dans les zones de revitalisation rurale, c'est une mesure forte qui touchera les bas salaires et même bien au-delà. L'argument du ministre, qui nous a fait prendre conscience d'une lacune dans nos travaux doit aussi, monsieur Brottes, au nom de l'honnêteté intellectuelle, nous conduire à revoir notre position. Je ne pense pas que les membres de la commission des affaires économiques puissent nous en faire grief.

Je pense donc que la majorité va faire en sorte de rétablir les choses par son vote.

M. Patrice Martin-Lalande. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Yves Coussain, rapporteur. J'ai bien rappelé que la commission avait donné un avis favorable mais, après avoir entendu le ministre, à titre personnel, je souscris à son argumentation.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 825 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1072.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 883.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 35.

La parole est à M. Louis Cosyns pour le soutenir.

M. Louis Cosyns. Cet amendement vise à exclure les entreprises paysagistes qui réalisent au moins 50 % de leur chiffre d'affaires en travaux paysagers du champ d'application de la caisse de congés payés des travaux publics.

Ce seuil d'activité minimale de 50 % correspond déjà à l'affiliation des salariés au régime de la mutualité sociale agricole. Le secteur des entreprises paysagistes représente 10 % de la masse salariale agricole, 15 % des cotisations MSA et 33 % des versements à la caisse de retraite complémentaire des cadres de l'agriculture.

L'Union nationale des entrepreneurs du paysage précise que cette affiliation aux caisses de congés payés du BTP génère pour ces entreprises un surcoût de 40 %. Il est donc important, à la fois pour ce secteur d'activité et pour la MSA, de maintenir l'affiliation de ce secteur d'activité à la MSA.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement pour une raison de forme. L'article D 732-21 du code du travail relève du domaine réglementaire. Il appartient donc au Gouvernement d'apporter une réponse à cette question.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Je partage entièrement la préoccupation qui a présidé à la rédaction de cet amendement. Je n'ai aucune objection de fond à lui opposer. Mais, comme vient de le dire le rapporteur, il s'agit d'une mesure d'ordre réglementaire. Le ministère des affaires sociales a été chargé de rédiger et de publier le plus rapidement possible le décret correspondant.

Ce décret sera publié dans le trimestre qui vient. De ce fait, l'amendement est doublement sans objet : sur le plan juridique et quant au fond, puisque je prends ici l'engagement que l'affaire sera réglée.

M. le président. La parole est à M. Louis Cosyns.

M. Louis Cosyns. Compte tenu des éléments fournis par la commission et par le ministre, je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 35 est retiré.

La parole est à M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Je suis un peu choqué de voir que les auteurs des amendements portant sur les zones de revitalisation rurale proposent comme gage une augmentation des droits de consommation sur les tabacs prévus par les articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Bien souvent, les zones de production de tabac sont classées en zone de revitalisation rurale. Or les auteurs des amendements, soi-disant pour renforcer les possibilités de développement de ces zones, proposent d'augmenter des droits qui pèsent principalement sur les agriculteurs et les producteurs qui sont dans ces zones de revitalisation rurale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Gabriel Biancheri. Ce sont des amendements fumants !

M. Jean Launay. Si les revenus de ces agriculteurs dépendaient des taxes sur le tabac, ça se saurait !

M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 1450.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement est extrêmement important. Nous aimerions avoir, comme le rapporteur tout à l'heure, un semblant d'espoir.

Mes chers collègues, certains d'entre vous demandaient tout à l'heure ce que nous avions fait entre 1997 et 2002 en matière de solidarité. Je vous répondrai d'abord que la dotation du fonds national de péréquation a augmenté de 30 % en 1998. L'avez-vous oublié ? Ensuite, la DSR a augmenté régulièrement - et vous pouvez consulter les chiffres - de 5 % chaque année. Enfin, jamais on n'a réduit la DCTP.

Ce qui est nouveau maintenant, c'est qu'on prélève même sur les collectivités les plus pauvres.

M. Yves Simon. On paie les intérêts, maintenant !

M. Augustin Bonrepaux. Vous prétendez qu'il n'y avait rien dans la loi Voynet. Mais la loi suivante prévoyait de faire passer la dotation aux communautés de communes de 100 à 170 francs par habitant. 70 % d'augmentation pour les communes à TPU et à compétence nouvelle, voilà qui n'était pas négligeable ! Quand vous en aurez fait autant, alors vous pourrez parler !

Jusqu'à présent, nous vous avons donné des exemples concrets. M. le ministre, pour sa part, se borne à des intentions.

Vous évoquez les charges liées à l'APA. Je vous ferai remarquer que l'APA a créé des services, appréciés par la population, ainsi que des emplois. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Dionis du Séjour. Et des impôts !

M. Augustin Bonrepaux. Je n'ai jamais dit qu'on pouvait créer un service sans trouver de financement. En outre, le financement doit être équilibré entre le département et l'Etat.

M. Daniel Garrigue. Il ne l'était pas !

M. Augustin Bonrepaux. C'est vrai, l'Etat a fait défaut.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Eh oui !

M. le président. Mes chers collègues !

M. Augustin Bonrepaux. L'Etat a fait défaut parce qu'il n'a pas prévu de contrepartie jusqu'à présent.

Quand vous transférez le financement du RMI, quel service nouveau cela apporte-t-il à la population ? Cela crée des charges nouvelles. Voilà toute la différence.

Vous nous reprochez d'avoir transféré la responsabilité des SDIS au département. Je trouve que c'est plutôt une bonne formule. Je vous rappelle que cette mesure avait été inspirée par l'un de vos collègues à l'époque. Nous l'avons prise parce que c'est une mesure de solidarité.

Là, nous proposons de donner vraiment aux zones rurales les moyens de leur développement à travers des mesures de défiscalisation.

Nous avons proposé des moyens pour les collectivités locales, nous avons proposé des moyens pour le développement à travers la DDR. Maintenant, nous disons qu'il est possible de donner un espoir aux zones rurales en proposant ce qui a été fait pour les résidences de tourisme. Monsieur le ministre, si vous faites une enquête sur les résidences de tourisme en zone rurale, vous constaterez qu'elles n'auraient pas pu se développer sans les mesures adoptées en 1998 dans le cadre de la loi de finances. Sur le même modèle, nous proposons des mesures de défiscalisation.

Je ferai remarquer à M. le président de la commission qu'il avait considéré, à l'époque, que la proposition de loi que je défendais était une bonne mesure et qu'on pourrait s'en inspirer lors de la loi concernant le développement rural. Nous y sommes. Si l'on veut que cette loi soit une loi de développement, il ne faut pas nous renvoyer à un autre texte, car vous aurez du mal à trouver un projet du Gouvernement qui corresponde à ce que nous proposons. En reprenant ne serait-ce que quelques-unes de nos propositions, nous pourrions apporter aux zones rurales les moyens de leur développement, car nous sommes aussi soucieux que vous, monsieur le ministre, des dépenses de l'Etat. Et cela ne coûterait pas beaucoup à l'Etat.

M. le président. Monsieur Bonrepaux !

M. Augustin Bonrepaux. Tout à l'heure, j'ai écouté vos réponses, monsieur le ministre. Vous avez parlé de la coopération avec les pays étrangers. Très bien. Mais vous avez oublié que si l'Etat manque de moyens aujourd'hui, c'est bien parce que vous avez une politique de réduction des recettes (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire).

M. Yves Simon. Vous avez planté les finances publiques !

M. Augustin Bonrepaux. Or, quand on réduit les recettes, on ne peut pas augmenter les dépenses !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. A titre personnel, j'y suis défavorable.

M. Augustin Bonrepaux. Vous prenez une lourde responsabilité ! Vous aurez du mal à expliquer cela aux Cantaliens !

M. Yves Coussain, rapporteur. Ce qui sera difficile à expliquer aux Ariégeois, c'est que vous voulez faire disparaître les ZRR, comme indiqué dans votre exposé sommaire.

En fait, on retrouve là la proposition de loi sur les PARI qu'avait faite M. Bonrepaux et qui avait été rejetée. Il revient sur cette question à travers un amendement qui remet en cause tout le travail accompli en commission sur l'article 1er et toute la discussion que nous avons ici depuis quelques heures maintenant sur les ZRR.

D'ici à une quinzaine de jours, la commission sera saisie d'un projet de loi sur les collectivités locales.

M. Augustin Bonrepaux. Ça n'a rien à voir !

M. Yves Coussain, rapporteur. Si, et vous venez de nous en parler, monsieur Bonrepaux !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

D'abord, nous avons déjà eu un long débat sur le sujet lors de l'examen de la proposition de loi de M. Bonrepaux.

Ensuite, dans la définition des territoires concernés, nous avons décidé de doper les zones de revitalisation rurale.

Enfin, les dispositifs fiscaux envisagés par M. Bonrepaux sont moins favorables sur certains sujets que les dispositions qui figurent dans ce projet de loi. Je pense notamment à l'amortissement et à l'exonération d'impôt sur les sociétés.

M. Gabriel Biancheri. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Monsieur le président, je voudrais répondre à M. Bonrepaux s'agissant de la période 1997-2002.

J'ai vécu en Lozère un véritable cauchemar lorsque les socialistes étaient au pouvoir : suppression du fonds de gestion de l'espace rural, suppression de la PAT -le département le plus symbolique a été exclu de la PAT de par la volonté du gouvernement socialiste-...

M. Yves Simon. Eh oui !

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. ... dislocation du zonage européen pour la Lozère - c'est la première fois que la ville de Mende a été exclue de ce zonage -,...

M. Yves Simon. Eh oui !

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. ... suppression de 117 postes d'agents publics.

M. Yves Simon. Eh oui !

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Mon canton compte dix communes et 1 500 habitants, ces communes allant de 36 à 320 habitants. Quatre écoles publiques ont été fermées en quatre ans. Je suis conseiller général ; il a fallu assumer. Personne ne s'y est intéressé.

Monsieur Bonrepaux, on en a marre des incantations ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Cher collègue, préparez-vous à faire d'autres annonces, parce que ça va être pire ! (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Yves Simon. Ce n'est pas possible !

M. Augustin Bonrepaux. Si votre département perçoit la DFM, c'est aux socialistes qu'il le doit. S'il perçoit la DDR, c'est aux socialistes qu'il le doit. S'il perçoit la DSR, c'est aux socialistes qu'il le doit. Alors, regardez avant de parler !

M. Jean-Claude Lemoine. S'il y a du déficit, c'est aux socialistes qu'on le doit !

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le ministre, vous dites vouloir doper les ZRR. Vous avez là des propositions pour le faire. Vous avez la possibilité de reprendre une partie de cet amendement. Si vous voulez l'inscrire dans le dispositif des ZRR, j'y souscris volontiers. Mais pour l'heure, après avoir beaucoup parlé des ZRR, au terme de près de deux jours de débat, nous retenons comme seule mesure nouvelle la prorogation pendant deux ans d'un dispositif d'amortissement qui existait déjà, l'amortissement pour la création d'activités industrielles. C'est cela votre mesure de « dopage » ? Avec une telle mesure, les zones de revitalisation rurale ne vont pas se développer trop rapidement !

Je vous propose peut-être un catalogue, mais vous pouvez y puiser, et ce au profit soit du Gouvernement, soit de la commission. Nous ne cherchons qu'à faire des propositions. Si vous voulez vraiment doper les zones rurales, si vous voulez vraiment leur apporter des moyens de développement, c'est bien ici qu'il faut puiser. Et même si vous n'en reteniez qu'une partie, ce serait extrêmement significatif. Cela montrerait la volonté du Gouvernement d'assurer le développement. Sinon, ce que vous programmez aujourd'hui, c'est plutôt le dépérissement que le développement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1450.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, n°s 876, 992 et 1073.

L'amendement n° 1073 fait l'objet d'un sous-amendement n° 1424.

La parole est à M. Jean Lassalle, pour soutenir l'amendement n° 876.

M. Jean Lassalle. Il s'agit de revenir à l'esprit et à la lettre de la loi Pasqua et à l'excellent travail qu'avait réalisé à l'époque l'actuel président de la commission.

Les dispositions de la loi du 4 février 1995 ont été modifiées par la loi du 25 juin 1999, dite loi Voynet. Depuis, Mme Voynet a été mise au piquet.

M. Patrice Martin-Lalande. Elle sait pourquoi !

M. Jean Lassalle. La loi Pasqua avait prévu de compléter la loi, et notamment de développer les activités économiques, le logement, la vie culturelle, la pluriactivité, la valorisation du patrimoine, le pastoralisme, etc. Il s'agissait de dire comment on allait s'y prendre concrètement pour engager ce grand plan de renouveau des campagnes de France, comme cela se fait aujourd'hui pour les villes.

Il s'agit donc de revenir à l'esprit et la lettre d'une loi pour laquelle, monsieur le président de la commission, vous vous étiez investi corps et âme. Je sais pouvoir compter d'ores et déjà sur votre soutien.

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez, pour soutenir l'amendement n° 992.

Mme Henriette Martinez. Comme l'a dit M. Lassalle, il s'agit de reprendre l'article 61 de la loi Pasqua qui prévoyait de faire voter dans un délai de dix-huit mois une autre loi complétant les mesures prévues en faveur des ZRR. Il énumérait ensuite les domaines concernés et fixait les objectifs généraux. Cette loi, malgré cet engagement formel et l'attente ainsi créée chez les populations de ces territoires, n'a jamais vu le jour d'autant que la loi Voynet de 1999 en a supprimé l'obligation. Il est donc proposé de tenir maintenant les promesses qui avaient été faites, dont je prends Patrick Ollier, qui était rapporteur de la loi, à témoin.

Les orientations retenues dans l'amendement donnent un cadre plus large à la politique d'aménagement rural et affirment notre volonté de l'inscrire dans la durée.

M. le président. La parole à M. François Vannson pour défendre l'amendement n° 1073.

M. François Vannson. J'ajoute seulement que cet amendement est très important dans la mesure où il permettra de mettre un terme à une période d'atermoiements en redéfinissant clairement par la loi le périmètre d'intervention de la politique de revitalisation rurale.

M. le président. La parole est à M. François Brottes pour défendre le sous-amendement n° 1424.

M. François Brottes. Pour compléter l'excellent amendement de M. Vannson, nous avons souhaité que la loi précise que les communes classées en zone de revitalisation rurale sont de droit bénéficiaires de l'assistance technique de l'Etat. Peut-être avez-vous l'impression que nous enfonçons une porte ouverte, tant cela semble une évidence, mais cela ne va pas de soi du fait de l'évolution des directions départementales de l'équipement et de l'agriculture. En effet, un grand nombre d'élus ruraux se plaignent continuellement auprès de nous, où que nous siégions sur ces bancs, de ne plus bénéficier de la même assistance qu'auparavant de la part des services de l'Etat et de ne plus pouvoir s'en sortir.

M. Yves Simon. Ce n'est pas faux !

M. François Brottes. Il faut donc garantir par une disposition particulière un service minimum aux zones de revitalisation rurale.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements et sur le sous-amendement n° 1474 ?

M. Yves Coussain, rapporteur. La commission ne pouvait être que favorable à l'hommage mérité que rendent ces amendements au président de la commission pour le travail qu'il fait il y a huit ans, voire davantage, lors de l'examen de la loi Pasqua. (Approbations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

En revanche, je suis défavorable au sous-amendement de François Brottes que la commission n'a pas examiné car, paradoxalement, la précision qu'il voudrait apporter me paraît floue et de nature à susciter des conflits.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Favorable aux trois amendements et défavorable au sous-amendement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Après avoir remercié M. Lassalle, Mme Martinez et M. Vannson, qui ont de bonnes lectures, à savoir la loi Pasqua, je voudrais seulement rappeler, à force d'entendre à longueur de séance les leçons qui nous sont données en matière d'aménagement du territoire, que nous ne serions pas obligés de revenir aujourd'hui sur ces dispositions si elles n'avaient pas été supprimées.

Certains d'entre vous regrettent qu'il en ait été ainsi et je ne veux pas les mettre en contradiction avec les décisions qui ont été prises en 1999, car nous sommes fondamentalement d'accord sur la manière d'aborder les choses. Mais le constat est là.

Il a tout de même fallu dix ans, ou presque, pour rétablir dans la loi les objectifs de la politique d'aménagement du territoire destinée aux territoires les plus défavorisés.

En abrogeant les dispositions de la loi Pasqua, Mme Voynet a cassé une dynamique. En effet, et Mme Martinez a eu raison de le souligner, plusieurs lois devaient s'échelonner sur une période de dix ans pour achever la mise en œuvre. Autrement dit, l'arrêt brutal du dispositif prévu par la loi Pasqua, du moins l'essentiel, nous a fait perdre un temps considérable !

Alors, je veux bien qu'on discute, encore que, sur le fond, je partage votre point de vue, monsieur Bonrepaux, en particulier sur la nécessité d'intervenir en affectant des moyens pour développer l'activité et la richesse.

M. Augustin Bonrepaux. Voilà une bonne parole !

M. Patrick Ollier, président de la commission. Mais je ne peux que déplorer que, malgré votre détermination et votre bonne volonté, vous n'ayez pas su à l'époque convaincre Mme Voynet.

M. Augustin Bonrepaux. Parlons d'aujourd'hui : la situation est calamiteuse !

M. Patrick Ollier, président de la commission. Nous étions solidaires à l'époque mais minoritaires dans l'hémicycle et la majorité d'alors a supprimé le dispositif !

Je vous remercie, mes chers collègues, de vouloir réintroduire ces dispositions dans le texte et je souhaiterais, monsieur le ministre, que le Gouvernement soutienne cette excellente initiative ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Nous sommes tous d'accord pour soutenir ces amendements et nous les voterons, même si je regrette que notre sous-amendement ne recueille pas le soutien de nos collègues.

Mais il est quelque peu caricatural de dire, monsieur le président de la commission, qu'à la loi Pasqua a succédé le néant. N'oublions pas que la loi Voynet est un amendement à la loi Pasqua...

M. Patrice Martin-Lalande. Amendement destructeur !

M. François Brottes.... et que les deux textes se sont conjugués, même si certaines dispositions ont disparu pour être remplacées par d'autres.

J'attire l'attention de nos collègues sur le fait qu'au moment où nous avons voté la loi Voynet, il n'existait quasiment pas de pays alors qu'aujourd'hui, tous les territoires ruraux, ou presque, sont constitués en pays, avec des dynamiques très fortes. Il faut tout de même en prendre acte. De même, hier, on a reconnu que la délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire de notre assemblée avait été créée par cette loi et que c'était une bonne chose.

Chaque loi, chaque ministre, chaque gouvernement, chaque majorité apporte sa pierre à l'édifice avec des initiatives intelligentes. Pas forcément intelligibles, j'en conviens. (Sourires.) Il faut donc ensemble faire une œuvre d'intérêt général, pour avancer, plutôt que de condamner le travail de ses prédécesseurs par des remarques aussi caricaturales que : « après eux, ce fut le déluge » ou « ils ont pratiqué la politique de la terre brûlée ». Vous ne nous aviez pas habitués, monsieur le président de la commission, à de tels propos que je regrette.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1424.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 876, 992 et 1073.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Je suis saisi de trois amendements identiques, n°s 877, 991 et 1074.

La parole est à M. Jean Lassalle, pour défendre l'amendement n° 877.

M. Jean Lassalle. Il s'agit une fois encore de revenir à la loi Pasqua qui avait décidément prévu beaucoup de choses, en l'occurrence que les organismes qui « interviennent dans les domaines de l'aide au logement, de l'amélioration de l'habitat, de l'action médico-sociale, de la santé publique, de l'insertion, prennent en compte dans leurs décisions d'attribution des concours financiers et de prestations en nature ainsi que dans les schémas qu'ils établissent pour guider leurs interventions, l'existence des zones de revitalisation rurale. »

Dans le champ social, en particulier quand il s'agit de logement, les difficultés des campagnes passent au second plan, derrière celles des villes. Mais tout le monde ici sait qu'il est extrêmement difficile de construire des logements sociaux chez nous. Pourtant, nous ne sommes pas non plus à l'abri des problèmes et des mesures d'accompagnement sont absolument indispensables.

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez, pour soutenir l'amendement n° 991.

Mme Henriette Martinez. L'amendement propose une nouvelle rédaction de l'article 62 de la loi Pasqua. L'expression « priorité » paraissant plus adaptée aux réalités des zones urbaines, il est proposé de la remplacer, quand il s'agit de ZRR, par celle de « meilleure prise en compte » des aspects sociaux spécifiques dans l'attribution des différents crédits destinés au logement social. En effet, dans les campagnes, les difficultés sont plus silencieuses, plus cachées, en tout cas, moins médiatiques. Elles n'en sont pas moins réelles, graves sur le plan social et douloureuses sur le plan humain. Il faut donc intervenir.

M. Jean Lassalle. Très juste.

M. le président. La parole est à M. François Vannson, pour présenter l'amendement n° 1074.

M. François Vannson. Je concède que nous faisons de la sémantique mais nous profitons de cet amendement pour attirer l'attention du Parlement sur les difficultés réelles du logement en milieu rural. Certes, elles sont moins médiatisées que celles des zones urbaines. Il n'en demeure pas moins qu'il faut corriger la tendance pour nous conformer à la volonté du Gouvernement de revitaliser les zones rurales. Pour ce faire, il faut commencer par fixer les populations en leur procurant des logements de qualité.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements identiques ?

M. Yves Coussain, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Favorable également.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Je souhaiterais faire passer un message à M. le ministre. Nous rencontrons en zone rurale des difficultés dans les opérations programmées d'amélioration de l'habitat, les OPAH, menées en « rural profond » par l'ANAH. L'Agence nationale d'amélioration de l'habitat bloque tout ce qui est locatif libre. Or, pour une action forte dans le domaine du logement, il ne faut pas d'a priori idéologique et accepter un peu de tout : du locatif conventionné, du social, du locatif libre. Je demande donc à M. le ministre de se faire notre porte-parole auprès de son collègue du logement pour donner cette impulsion et convaincre l'ANAH d'accepter un peu de diversité car, aujourd'hui, les directives très restrictives données à l'administration bloquent les opérations en ZRR.

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Je suis un peu surpris d'entendre parler de problème de logement alors qu'on nous a expliqué hier que tout était résolu grâce aux mesures fortes prises en ce domaine par le CIADT. Le ministre ne les a pas énumérées, et pour cause : elles sont très limitées ! Mais nos trois collègues de la majorité viennent de soulever un problème qui devrait, nous a-t-on dit, être réglé par l'allégement de la taxe foncière pendant quinze ans. Hier, vous paraissiez ravis ! Pourtant, ce qui a été voté ne servira à rien puisque l'exonération est à la charge des collectivités locales !

Face à un problème qui existe bel et bien, vos mesures CIADT se distinguent surtout par leur discrétion. En revanche, la réduction des crédits de l'ANAH, tout comme la taxation des offices HLM, sont une réalité.

La nouveauté, c'est que maintenant le ministre accepte des amendements. On pourrait s'en réjouir ! Mais, à leur lecture, on se rend compte que l'on en reste aux intentions. Afficher ses intentions, c'est bien, mais se donner les moyens de ses intentions, c'est mieux ! Or, dans ces amendements que nous ne manquerons pas de voter, il n'y rien de concret ! Ils pourront susciter de l'espoir, voire des illusions, mais ils n'apporteront rien, monsieur le ministre !

M. Yves Coussain, rapporteur. Reconnaissez quand mêmes les bonnes intentions !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 877, 991 et 1074.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, n°s 878, 993 et 1075.

La parole est à M. Jean Lassalle pour soutenir l'amendement n° 878.

M. Jean Lassalle. Dans un retour à l'esprit de la loi Pasqua, cet amendement vise à permettre, dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 42, à l'Etat de « conclure avec le département une convention particulière de revitalisation rurale. Les régions sont associées à ces conventions. Ces conventions peuvent s'insérer dans des contrats de plan Etat-région [...] portant réforme de la planification. Elles ont pour objet de renforcer l'action publique dans les territoires ruraux les plus défavorisés, en assurant la convergence des interventions, en accroissant l'engagement des partenaires et en adaptant les actions à la spécificité locale. » L'amendement précise la façon dont les mesures qui sont proposées pourront être mises en œuvre.

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez pour soutenir l'amendement n° 993.

Mme Henriette Martinez. L'amendement, dans un souci de continuité avec la loi Pasqua qui énonçait le principe de « contrat particulier », propose que, dans les zones de revitalisation rurale, l'Etat puisse signer des conventions de partenariat de développement rural et que les régions y soient associées. Il vise à permettre une meilleure cohérence des politiques contractuelles conduites, dans les zones rurales, par les différents partenaires en vue d'une meilleure solidarité en faveur des territoires ruraux, comme c'est déjà le cas pour les villes et pour les zones de revitalisation urbaine.

M. le président. La parole est à M. François Vansson pour soutenir l'amendement n° 1075.

M. François Vannson Cet amendement s'inscrit dans la nécessaire redéfinition de la politique contractuelle. Il vise à se rapprocher des dispositifs qui existent déjà pour les zones de revitalisation urbaine.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. Avis défavorable. La commission a en effet estimé que ces trois amendements apportaient peu d'éléments à la rédaction actuelle de l'article 63 de la loi du 4 février 1995. La rédaction actuelle est même préférable à celle proposée par ces trois amendements dans la mesure où elle permet d'associer plusieurs niveaux de collectivités dans la dynamique des ZRR, ce que ne permettrait plus la nouvelle rédaction qui restreindrait les partenaires des conventions à l'Etat et à la région.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Tout en étant soucieux de leur objet, le Gouvernement est défavorable à ces amendements pour deux raisons : la première est que l'état actuel des textes permet déjà ce qu'ils proposent. Jean-Paul Delevoye, qui est chargé de ces questions, exposerait mieux que moi la seconde raison. Mais il préside ce matin le conseil supérieur de la fonction publique, ce qui explique son absence - information que je livre maintenant, ayant oublié de le faire en début de séance. Nous sommes en train de redéfinir les modes de contractualisation entre l'Etat et les collectivités décentralisées, notamment à la lumière des transferts de compétences liés aux lois de décentralisation. Cette période de redéfinition rend prématurée toute modification portant sur le sujet, d'autant plus que ces conventions peuvent être déjà conclues à législation constante.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Une fois n'est pas coutume, mais je partage presque mot pour mot le point de vue de M. le ministre sur la question. Le débat a eu lieu en commission : les zones de revitalisation rurale sont des territoires qui bénéficient en principe de dispositions, certes insuffisantes de notre point de vue, mais qui sont différenciées des autres secteurs. Faut-il pour autant que ces seuls territoires qui contractualisent soient des territoires de projet isolés, ou ne faut-il pas au contraire veiller à ce qu'à l'intérieur d'un département ou d'un pays, ils conjuguent leurs efforts avec des territoires voisins pour porter des projets de contractualisation avec le département ou la région ? Nous aurons à rouvrir ce débat qui mérite une réflexion plus poussée parce que la stratégie d'isolement des ZRR n'est pas nécessairement une bonne stratégie.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendement n°s 878, 993 et 1075.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, n°s 879 corrigé, 994 corrigé et 1076.

La parole est à M. Jean Lassalle pour soutenir l'amendement n° 879 corrigé.

M. Jean Lassalle. Monsieur le président, je ne maîtrise pas encore très bien la façon dont est organisée la présentation des amendements et sous-amendements. C'est la raison pour laquelle je reviendrai brièvement sur une discussion que nous avons eue tout au long de la matinée. Le fait que les amendements soient présentés de cette manière révèle un véritable problème.

Monsieur le ministre de l'agriculture, vous avez la chance d'appartenir à une génération exceptionnelle, tout comme le président Ollier et M. Delevoye. Ils doivent laisser leurs noms dans l'histoire.

M. François Brottes. Une génération vraiment exceptionnelle !

M. Jean Lassalle. Oui, une génération exceptionnelle, car elle tient entre ses mains la dernière chance de nos campagnes. En effet, si nous n'adoptons pas aujourd'hui les bonnes mesures, les générations qui suivront ne pourront plus rien faire parce qu'il ne restera plus rien à faire.

Je fais un peu mal au cœur à M. le ministre de l'agriculture, je le sais. Mais c'est afin de lui faciliter la tâche en l'aidant à trouver des financements pour faire fonctionner toutes les dispositions que nous mettons en place dans les ZRR. Si nous le laissions tout seul, le marteau de Bruxelles et l'enclume de Bercy jouant à plein, il ne pourrait rien faire, il serait complètement coincé. Il s'agit pour nous, sur tous les bancs de l'Assemblée, de l'aider en reconnaissant qu'il existe un vrai problème et en y remédiant par un ensemble de dispositifs. Reconnaissons que le gouvernement précédent n'a pas été très efficace sur la question, et qu'il nous appartient, dès à présent, de faire mieux. Monsieur le ministre Gaymard, vous allez repartir d'ici renforcé...

M. Henri Nayrou. Ils n'ont pas encore compris !

M. Jean Lassalle.... ce qui vous permettra de trouver les moyens qu'exige la situation. Si les campagnes sont relancées, c'est l'ensemble du pays qui se portera mieux et la France abordera le troisième millénaire debout, en marche et prête à redonner confiance au reste du monde.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier pour défendre l'amendement n° 994 corrigé.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. François Vannson pour défendre l'amendement n° 1076.

M. François Vannson. Défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. Défavorable. La commission a repoussé ces amendements parce que le dispositif proposé est beaucoup trop complexe.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Défavorable, monsieur le président, pour les raisons déjà évoquées en début de matinée sur la question des péréquations des moyens financiers attribués aux collectivités locales, péréquations qui font l'objet d'un traitement dans la loi sur les finances locales.

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Nous n'avons pas déposé ces amendements, mais il s'agit de bons amendements.

M. François Vannson. Ah !

M. Augustin Bonrepaux. Ce sont les premiers qui proposent des moyens. Il est symptomatique que, dans la discussion de ce texte, le Gouvernement soit favorable aux seules déclarations d'intention. Cela s'est produit par deux fois ce matin. Il est vrai que les déclarations d'intention ne coûtent rien. On peut toujours être favorable à la solidarité, comme dans l'amendement de M. Morel-à-l'Huissier, en début de séance, ou à l'affirmation contenue dans deux autres amendements, selon laquelle il faut s'occuper des territoires. Tout cela ne coûte rien. On peut toujours y être favorable. Mais dès que se présente une mesure concrète et ciblée, le Gouvernement change d'attitude. Il s'agit en effet d'aider les communes de moins de 7 500 habitants et les communautés de communes de moins de 60 000 habitants dont le potentiel fiscal est inférieur à la moyenne nationale et dont 80 % du territoire au moins sont situés en zone de revitalisation rurale, ainsi que les départements éligibles à la dotation de fonctionnement minimal, en majorant exceptionnellement les concours financiers de l'Etat qui leur sont attribués à compter du 1er janvier 2005 jusqu'au 31 décembre 2009, c'est-à-dire durant une période limitée. L'amendement propose une simple majoration, rien de plus normal.

Monsieur le rapporteur de la commission, vous nous expliquez que c'est compliqué ! Je ne pense pas que vous ayez lu attentivement ce dispositif...

M. Yves Coussain, rapporteur. Si !

M. Augustin Bonrepaux.... qui est simple et qui permettrait de donner aux collectivités des zones les plus défavorisées de France des moyens supplémentaires. Même si la mesure n'était qu'indicative, même si vous sollicitiez que ce soit une simple orientation pour la future loi de réforme des collectivités locales, ce serait déjà un progrès. Mais non ! Chaque fois que vous est proposée une dépense, chaque fois que des moyens vous sont demandés - et pour une fois c'est votre majorité qui vous les demande - vous refusez. Monsieur le ministre, je comprendrais que vous refusiez les propositions de l'opposition même lorsqu'elles sont bonnes - et elle vont toutes dans le même sens. Mais que vous refusiez des propositions qui proviennent de tous les bancs de votre majorité, c'est tout de même paradoxal ! Que ces propositions viennent de sa part, cela prouve bien qu'elle est consciente que ce texte est vide et qu'elle cherche à le muscler.

Monsieur le ministre, vous le savez vous-même, j'en suis certain, ce projet de loi est vide. Mais vous êtes tenu par la solidarité gouvernementale. Vous êtes un élu de la montagne, vous connaissez les problèmes. Vous souhaiteriez les résoudre. Mais vous êtes retenu par une politique qui conduit à réduire les dépenses. Vous l'avez reconnu : il ne faut pas trop dépenser. même pour les zones les plus défavorisées de notre pays.

Faites un geste en direction de votre propre majorité et nous, nous vous soutiendrons.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Monsieur le président, compte tenu des explications de M. le rapporteur et de M. le ministre, je retire l'amendement n° 994 corrigé.

M. le président. L'amendement n° 994 corrigé est retiré.

M. Augustin Bonrepaux. Je le reprends, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 994 corrigé est repris par M. Bonrepaux.

M. François Vannson. On ne trouvera pas les crédits sous le sabot d'un cheval !

M. le président. La parole est à M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Je souhaiterais faire observer à M. Bonrepaux que ces amendements visent à donner plus à certaines collectivités en prélevant sur les autres. C'est vrai que des réajustements sont peut-être à effectuer dans l'attribution des dotations aux collectivités mais je comprendrais mal qu'on le fasse à l'occasion d'un texte particulier.

Nous sommes élus de départements - c'est le cas du mien, peut-être est-ce celui du vôtre, monsieur Bonrepaux, en tout cas, ça l'est de nombreux départements français - où coexistent des zones de revitalisation rurale exigeant assurément des moyens supplémentaires et des villes moyennes, ou plus importantes, dont les quartiers connaissent également de graves problèmes. Si les amendements présentés sont adoptés, l'Etat prélèvera l'argent nécessaire sur les dotations des villes moyennes, ou des banlieues des grandes villes qui sont confrontées à des problèmes tout aussi difficiles. On ne peut traiter une question aussi grave à l'occasion d'un texte particulier. Comme l'a rappelé le ministre de l'agriculture, c'est à l'occasion d'un texte d'ensemble sur la répartition des dotations que la représentation nationale peut traiter ce genre de question, non pas au détour d'un texte concernant une catégorie particulière de collectivités.

M. Augustin Bonrepaux. Vous me faites rire !

M. le président. La parole est à M. François Vannson.

M. François Vannson. Nous sommes tout à fait conscients du fait que le ministre ne peut pas trouver les crédits nécessaires à cette mesure sous le sabot d'un cheval. Convaincus par ses arguments, nous n'opterons pas pour la politique du coup pied de l'âne. En conséquence, monsieur le ministre, nous retirons notre amendement.

M. le président. L'amendement n° 1076 est retiré.

M. Augustin Bonrepaux. Je souhaiterais défendre l'amendement que j'ai repris, monsieur le président.

M. le président. Non, monsieur Bonrepaux. L'amendement a déjà été défendu. Vous le reprenez sans le défendre à nouveau.

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Nous pourrions accepter la logique consistant à attendre le texte sur la décentralisation afin d'examiner de façon globale les questions concernant la péréquation. Seulement,...

M. François Vannson. Très bien.

M. Jean Dionis du Séjour.... nous avons peut-être mal lu l'avant-projet de loi sur la décentralisation, mais nous n'y trouvons aucun volet sur la péréquation. Je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, si le texte dont nous avons eu le draft - ce dernier n'évoque que les compétences - comprend ou non le volet péréquation. Nous craignons en effet que le calendrier ne repousse à long terme le volet péréquation alors qu'il y a vraiment urgence à porter remède au monde rural qui souffre. En introduction, j'ai voulu faire la différence entre le rurbain et le rural qui souffre. Compte tenu des informations que nous avons sur le calendrier parlementaire, nous craignons que le volet péréquation ne soit renvoyé très loin. Monsieur le ministre, pourriez-vous nous donner des informations sur le calendrier ? Compte tenu de ce que nous avons déjà pu lire de l'avant-projet de loi sur la décentralisation, nous maintenons notre amendement.

M. Augustin Bonrepaux. C'est vrai : l'avant-projet ne contient rien sur la question !

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Je comprends mal notre rapporteur. Selon lui, notre amendement manquerait de précision. Mais, comme l'ont déjà fait observer certains orateurs, il est au contraire très précis. Il ne propose pas n'importe quoi. Il vise à aider concrètement les zones rurales et les collectivités préalablement définies Des dates sont fixées : 1er janvier 2005 ; 31 décembre 2009.

Ce que nous proposons est en outre bien peu de chose par rapport à ce qui a été attribué, fort légitimement d'ailleurs, aux banlieues en très grande difficulté. En ce qui concerne le rural, nous ne pouvons pas reculer. Si les dispositions prévues par notre amendement ne sont pas adoptées, comment pourrons-nous nous défendre ? De plus, soutenir jusqu'au bout ces amendements, c'est renforcer la politique du ministre. C'est la raison pour laquelle je demande un scrutin public.

M. le président. Je suis saisi de deux demandes de scrutin public : l'une, sur l'amendement n° 879 corrigé, est déposée par le groupe Union pour la démocratie française, l'autre, sur l'amendement n° 994 corrigé, est déposée par le groupe socialiste.

Ces deux scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. On nous affirme que la péréquation sera renvoyée au texte sur les responsabilités locales. Je confirme pour ma part, en tant que porte-parole du groupe socialiste sur ce projet, qu'il ne contient aucune disposition sur la péréquation. C'est vous qui avez raison, monsieur Dionis du Séjour.

J'attire donc l'attention de mes collègues de la majorité, et notamment de M. Garrigue, sur le fait qu'en matière de péréquation, si l'Etat n'apporte rien, le peu que l'on donne en plus aux territoires en difficulté est pris à d'autres, et c'est d'ailleurs là toute la difficulté. A en juger par votre réaction, monsieur Garrigue, l'avenir de la péréquation est bien sombre, puisque vous voulez prendre à d'autres ce que vous souhaitez donner aux zones rurales. Mais peut-être avez-vous une autre conception : nous attendons dans ce cas vos explications.

Reste que si la péréquation n'est que cela, il serait justifié d'accorder quelques moyens supplémentaires, comme le proposent M. Dionis du Séjour et M. Lassalle et comme l'adoption de l'amendement que j'ai repris, et sur lequel nous demandons un scrutin public, le permettrait.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. J'en appelle à tous mes collègues ici présents, et surtout à ceux de la majorité. Je suis d'accord avec M. Garrigue lorsqu'il parle de péréquation, mais il s'agit ici de villages de 100, 300 ou 500 habitants dont il ne restera plus rien dans dix ans si nous n'intervenons pas de manière significative.

Nous proposons simplement d'apporter, durant les cinq prochaines années, quelques moyens à des communautés de communes rurales qui en sont strictement dépourvues. La France éternelle est-elle incapable d'apporter ce minimum d'aide qui donnerait un peu de sens à notre politique ?

J'invoque là ce que nous avons au plus profond de nous-même : ces campagnes dont nous sommes tous issus. Il faut faire quelque chose ! La France peut tout de même s'autoriser certaines adaptations pour relancer une vraie politique rurale.

M. André Chassaigne. Bravo ! Ce sont là paroles d'humaniste !

M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je mets aux voix l'amendement n° 879 corrigé.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 46

          Nombre de suffrages exprimés 46

          Majorité absolue 24

      Pour l'adoption 14

      Contre 32

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 994 corrigé.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 44

          Nombre de suffrages exprimés 44

          Majorité absolue 23

      Pour l'adoption 12

      Contre 32

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements, n°s 887, 923, 1000, 1081 corrigé et 922, pouvant être soumis à une discussion commune.

Quatre de ces amendements, n°s 887, 923, 1000 et 1081 corrigé, sont identiques.

La parole est à M. Jean Lassalle, pour soutenir l'amendement n° 887.

M. Jean Lassalle. Par cet amendement, très voisin de ceux qui viennent d'être défendus, nous proposons que l'on se donne un délai de cinq ans pour la mise en œuvre de cette nouvelle politique de revitalisation rurale, ce qui revient à proroger les mesures d'exonération existantes. Au terme de ce délai, un bilan sera dressé et de nouvelles décisions seront prises en fonction des résultats.

Au surplus, une telle disposition constituerait sans doute un élément important dans les négociations avec les instances européennes.

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour soutenir l'amendement n° 923.

M. François Brottes. Ce texte suscite une véritable inquiétude. Le président de la commission nous a déjà quelque peu rassurés : cet amendement permettra à M. le ministre de le faire également.

Le soutien de l'Europe au dispositif des ZRR devrait s'arrêter, sauf erreur de ma part, à la fin de 2006. Il s'agit, avec cet amendement, de veiller à ce que les mesures que nous sommes en train de voter perdurent au-delà de cette échéance.

Il faut en effet prendre en considération le temps que nous allons consacrer à l'examen de ce texte, puis le temps que l'on mettra à promulguer la loi et à élaborer les décrets : la mise en application pourrait n'avoir lieu qu'en 2006. Ce n'est pas, j'imagine, pour prendre fin au terme de cette même année. Il n'y a déjà pas grand-chose dans le texte, mais ce serait, pour le coup, parfaitement caricatural !

Cet amendement tend donc à conférer une lisibilité dans la durée aux dispositions de ce texte, que l'on nous dit par ailleurs excellentes. Puisqu'elles sont ainsi assumées par la majorité, n'hésitons pas à leur donner du sens sur le long terme.

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez, pour soutenir l'amendement n° 1000.

Mme Henriette Martinez. Mon argumentation est identique à celle de M. Lassalle. Il s'agit de proroger les mesures existantes pour pouvoir dresser un bilan de leur application et, le cas échéant, orienter les décisions en fonction des résultats. Plus précisément, nous souhaitons déterminer si les zones qui sortent du dispositif peuvent avoir accès à d'autres aides, notamment de l'Union européenne.

Il convient donc de se donner le temps et de ne pas fermer soudainement le robinet, car les zones concernées s'en trouveraient fortement pénalisées.

M. le président. L'amendement n° 1081 corrigé est-il défendu ?

M. François Vannson. Oui, monsieur le président, avec la même argumentation.

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour soutenir l'amendement n° 922.

M. François Brottes. Je m'étonne quelque peu, monsieur le président, que vous me demandiez de défendre dès maintenant cet amendement de repli, où il est proposé un délai de quatre ans au lieu de cinq. Il serait bon, me semble-t-il, de voter d'abord sur la période de cinq ans.

M. le président. Il s'agit d'une discussion commune. Le vote aura lieu après que la commission et le Gouvernement auront donné leur avis.

Quel est l'avis de la commission, monsieur le rapporteur ?

M. Yves Coussain, rapporteur. La commission a rejeté l'ensemble de ces amendements pour deux raisons.

Dans leur rédaction, tout d'abord, on ne sait à quelle « présente section » ils font référence.

Quant au fond, je rappelle que tous les amendements du Gouvernement qui créent ou prorogent des exonérations fiscales précisent bien l'échéance de ces mesures. Il faudrait donc les reprendre si l'on adoptait les présents amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Défavorable. Au-delà de la question de forme soulevée par le rapporteur, je souhaite revenir sur le fond.

Il nous semble en effet que nous répondons aux légitimes préoccupations qui sont à l'origine du dépôt de ces amendements. Le régime actuel d'exonération en faveur des entreprises nouvelles, qui s'applique notamment à la création d'activités dans les ZRR, est d'ores et déjà applicable aux entreprises créées d'ici au 31 décembre 2009 : ainsi en a décidé le Parlement lors de l'adoption de la loi de finances pour 2004. En conséquence, l'échéance du 31 décembre 2009 figure déjà dans notre droit positif.

En matière de taxe professionnelle, je rappelle que les exonérations actuellement en vigueur dans les ZRR sont pérennes. Elles ne sont liées en rien à l'échéance européenne de 2006.

Je l'affirme très clairement devant la représentation nationale, afin de la rassurer sur ce point : les mesures fiscales en faveur des ZRR ne sont pas liées, dans leur pérennité, aux réformes de la politique européenne en 2006.

Il n'existe donc pas de divergence de fond : c'est pourquoi je tenais à apporter ces précisions.

M. le président. Sur l'amendement n° 923, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

......................................................................

M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 887, 923, 1000 et 1081 corrigé.

Le scrutin est ouvert.

.....................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 42

          Nombre de suffrages exprimés 40

        Majorité absolue 21

      Pour l'adoption 16

      Contre 24

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. François Brottes. Je retire l'amendement n° 922, monsieur le président. J'ai pris acte des indications que M. le ministre nous a apportées. Puisque certaines des mesures sont confortées jusqu'en 2009, il ne saurait être question pour nous de ramener l'échéance à 2008 !

M. le président. L'amendement n° 922 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 394.

La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. En même temps que cet amendement, je défendrai le n° 395, qui lui est lié.

Le rapport de l'instance d'évaluation des politiques de développement rural, que j'ai déjà eu l'occasion de mentionner hier, préconise, entre autres propositions, de donner des moyens à l'animation et à la formation des acteurs locaux. Il considère en effet qu'il est nécessaire d'avoir dans les territoires ruraux une animation qui doit stimuler l'implication des habitants dans toutes les étapes de l'élaboration des programmes de développement, y compris dans la phase d'évaluation, et demande de mobiliser à cet effet des moyens spécifiques.

Cette animation, absolument déterminante, est assurée par des développeurs aux appellations diverses : agents développement, chefs de projet, animateurs développement, animateurs pays ou aménageurs. Or de nombreuses communautés de communes, depuis quelque temps, éprouvent d'immenses difficultés à recruter des cadres titulaires sur ces postes et sont dans l'obligation de faire appel à des contractuels.

M. Jean Lassalle. C'est vrai.

M. André Chassaigne. Cette question inquiète d'autant plus les élus des communautés de communes que la plupart de leurs délibérations tendant à recruter, mais aussi à renouveler, voire à intégrer des agents sont rejetées par les services du contrôle de légalité, des cas semblables pouvant d'ailleurs faire l'objet de décisions divergentes d'un département à l'autre, voire d'un arrondissement à l'autre. Certains salariés se voient donc contraints à quitter le territoire sur lequel ils ont agi. Pour les retenir, il conviendrait d'offrir des emplois fonctionnels correspondant à ce type d'activité.

Mes deux amendements ont pour objet de créer un cadre d'emploi spécifique, une filière de développement local, qui répondrait à une véritable attente, à un véritable besoin, et lèverait l'inquiétude des élus. Il deviendrait possible d'intégrer les salariés concernés et de pérenniser leur poste. J'espère au moins faire avancer la réflexion sur ce sujet.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 394 et 395 ?

M. Yves Coussain, rapporteur. La commission a repoussé ces amendements de notre collège Chassaigne...

M. André Chassaigne. Comme tous nos amendements, d'ailleurs !

M. Yves Coussain, rapporteur. Laissez-moi poursuivre, monsieur Chassaigne. Quoique, sur le fond, je m'associe, à titre personnel, à votre demande de clarification du statut des agents de développement local,...

M. Augustin Bonrepaux. Louable intention !

M. Yves Coussain, rapporteur. ... la commission n'a pu accepter l'amendement n° 394, qui ne relève pas du domaine législatif, mais incontestablement du domaine réglementaire, puisqu'il tend à modifier un décret. Toutefois, je le répète, j'approuve, sur le fond, la démarche de M. Chassaigne.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 394, qui constitue une intrusion dans le domaine réglementaire, comme il vient d'être dit.

Cela étant, M. Chassaigne pose une vraie question. Le CIADT du 3 septembre dernier contient précisément un volet complet consacré au développement de l'ingénierie de projet dans les territoires ruraux, et plusieurs mesures ont d'ores et déjà été adoptées pour améliorer l'appui aux équipes de développement local, mobiliser les compétences de l'État pour le développement rural, réorganiser les outils d'appui au développement local et, enfin, apporter un soutien aux dynamiques de structuration des territoires par les petites villes.

Ces mesures très détaillées, que je vous ferai appliquer, répondent en grande partie, me semble-t-il, aux préoccupations légitimes que vous venez d'exprimer.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. M. Chassaigne soulève là un problème de fond réel auquel nous sommes tous confrontés et qui a plusieurs causes. Je l'en remercie.

La montée en charge des centres de gestion de la fonction publique territoriale est très positive pour gérer les personnels communaux et intercommunaux, si ce n'est que ces derniers ont un peu trop tendance à se replier sur eux-mêmes : entre une ville de 20 000 habitants et une communauté de communes de 3 000 habitants, leur choix est vite fait ! Or tout le monde sait que c'est aussi la matière grise qui nous permettra de nous en sortir. On peut avoir les meilleurs élus du monde - et Dieu sait que les élus ruraux sont bons -, s'ils n'ont pas quelqu'un pour tenir le porte-plume, comment voulez-vous qu'ils s'y prennent pour faire face à toutes les obligations auxquelles chaque collectivité du pays est aujourd'hui soumise ? Les grandes villes, elles, sont équipées en conséquence et disposent de tout un staff technique ; plus que jamais, c'est le pot de terre contre le pot de fer.

Nous avons été amenés, très récemment, à rechercher un chargé de développement qui devait avoir le statut d'agent territorial. Mais les trois lauréats du concours départemental ont tous préféré aller en ville. Et que faisons-nous, pendant ce temps ? Nous attendons.

J'ai entendu la réponse de M. le ministre, et je la comprends, mais j'estime qu'il doit en parler à son collègue Devedjian pour que ce très gros problème soit réglé dans la loi sur la réorganisation de la fonction publique.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. En réalité, deux questions se posent.

Premièrement, comment retenir en milieu rural des agents de qualité, souvent attirés, effectivement, par les financements plus conséquents dont disposent les grandes agglomérations ?

Deuxièmement, un projet de territoire, au départ, a souvent une forme associative, puisque c'est la manière de procéder la plus souple, et les personnels de l'association en question donnent beaucoup de temps, font preuve de beaucoup de passion et de compétence. Mais lorsque vient le jour où l'on conforte le dispositif en créant ici un syndicat mixte, là une communauté de communes, le préfet nous tape sur les doigts, à juste raison, du reste : il nous enjoint de ne pas abuser des contractuels et de prendre des fonctionnaires territoriaux dûment patentés. Il faut donc absolument offrir une passerelle vers la fonction publique territoriale aux agents en place, qui se sont donné tant de mal, au côté des élus, pour faire émerger le projet, dans des conditions difficiles, surtout quand il couvre un nombre élevé de communes.

Que les modalités de l'amendement ne conviennent pas, soit, mais le Gouvernement, au-delà de l'aide à l'ingénierie - j'ai bien entendu M. le ministre nous parler de tels financements, qui incombent à l'État et surtout à la région -, doit rendre possible l'intégration dans la fonction publique territoriale des agents qui ont lancé un projet avec les élus dans une association loi de 1901.

M. Jean Lassalle. Absolument ! J'avais oublié d'évoquer cet aspect.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je souhaite apporter une précision. En formulant cette demande, je m'appuie sur un problème réel, tous les intervenants l'ont souligné. Malheureusement, dans le cadre de la résorption de l'emploi précaire prévue par la loi du 3 janvier 2001, les agents dont nous parlons, ne pouvant intégrer la filière attachés option administration, souhaiteraient être recrutés sur des postes d'attachés option animation. Mais, en l'absence de corps d'emploi spécifique, les préfets, faisant jouer le contrôle de légalité, rejettent les délibérations prises par les communautés de communes. Mon préfet m'écrit par exemple : « Considérant que les fonctions exercées ne correspondent pas à la mission telle que figurant dans les contrats, j'ai décidé d'en saisir le tribunal administratif. »

Dans ma grande candeur, je croyais que l'amendement n° 395 aurait permis, par une décision législative, de régler le problème. S'il est impossible d'emprunter la voie législative, si le jeune député que je suis n'a pas compris comment cela fonctionne, j'imagine que le problème pourra être réglé par la voie réglementaire dans les jours qui viennent. Et tout cas, je le répète, l'attente est forte.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour une courte intervention.

M. Jean Dionis du Séjour. Je me sens d'autant plus concerné que je suis élu d'Agen, où se trouve l'Institut du développement local.

M. Jean Lassalle. Eh oui !

M. Jean Dionis du Séjour. Il avait même été imaginé, pendant un temps, d'y créer une université spécialisée sur ce thème ; l'idée n'avait pas plus à M. Allègre, mais elle resurgira.

Le statut professionnel des agents de développement est effectivement un problème majeur, auquel il convient d'apporter une réponse, et je remercie M. Chassaigne de l'avoir soulevé. Notre collègue a raison : le préfet conteste tous les recrutements de chefs de projet contractuels. Mais faut-il traiter la question exclusivement par la voie de l'intégration dans la fonction publique territoriale ? Je n'en suis pas sûr. J'ai entendu des choses intéressantes à propos du contrat de mission. Après tout, pourquoi ne pas imaginer que des agents de développement soient employés sous un tel contrat ? Nous ne réglerons pas forcément le problème dans l'immédiat, mais cette piste mérite peut-être d'être creusée par le Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 394.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 395.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 918.

La parole est à M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Il s'agit de reprendre, dans ce texte relatif au développement de territoires ruraux, une disposition de la loi Voynet - laquelle modifiait la loi Pasqua - tendant à rendre prioritaires, dans la politique des services publics, les zones de revitalisation rurale.

M. Jean Auclair. Ce n'est pas une mauvaise idée.

M. Joël Giraud. En réaffirmant cette priorité, nous donnerons un signe fort en direction des zones de revitalisation rurale, signe d'autant plus attendu alors que, depuis quelque temps, le phénomène des départs de services publics s'accélère.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. J'attire votre attention sur le fait que nous avons adopté, tout à l'heure, deux amendements rappelant les objectifs de la politique de l'État et des collectivités territoriales en zone de revitalisation rurale, notamment en matière de services publics et de services de proximité.

Par ailleurs, en commission, il a été plusieurs fois rappelé qu'il n'était pas bon de centrer toutes les politiques d'aménagement du territoire sur les ZRR, et les dispositifs visés par le présent amendement, aux articles 29 et 29 bis de la loi du 4 février 1995 et aux articles 30 et 30 bis de la loi du 12 avril 2000, concernent l'ensemble du territoire.

La commission a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 918.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 638.

La parole est à M. Jean Auclair.

M. Jean Auclair. Lorsque l'on parle de services publics, on ne peut comparer une perception, un bureau de poste et une école primaire. L'amendement n° 638, qui a été déposé par Arnaud Lepercq, est excellent, puisqu'il vise à abaisser de 20 %, en ZRR, les seuils des effectifs scolaires en dessous desquels des classes sont fermées.

Dans les écoles primaires, vous le savez, à dix-neuf élèves, on ferme une classe, à vingt et un, on la maintient. Réduire le seuil de 20 % serait très positif car vous savez combien les transports sont longs et coûteux, sans parler des frais d'internat.

Pour les lycées, l'idée des pôles de compétence, imaginée par le précédent gouvernement, est absolument catastrophique en milieu rural. Nos enfants ont droit à un enseignement de proximité et à un enseignement diversifié.

D'autre part, il est à noter que les enseignants responsables de regroupements de sections sont particulièrement motivés et détiennent un savoir-faire précieux. Dans certains lycées, des classes sont aussi regroupées, pour les cours de latin, d'allemand ou d'anglais, par exemple. Et, dans les lycées professionnels, le maintien de sections diversifiées, même si les effectifs sont faibles, est très important, car c'est le moyen de faire rester sur place nos jeunes et par conséquent de fournir à l'industrie locale la main-d'œuvre dont elle a besoin.

Il faut que tous les députés présents s'unissent pour soutenir cet amendement, il faut absolument qu'il soit voté.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. L'amendement n'a pas été examiné par la commission. Il s'agit, là encore, d'un amendement qui est manifestement du domaine réglementaire. Donc, à titre personnel, avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Cela relève en effet du domaine réglementaire. Le Gouvernement est défavorable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Il s'agit là d'un bon amendement, qui pose un problème de fond, celui de la spécificité des zones de revitalisation rurale et des difficultés d'adaptation qu'elles peuvent connaître en matière de carte scolaire.

Il me paraît important de réfléchir, à moyen terme - ce sera l'objet d'autres amendements que j'ai déposés - à un véritable partenariat entre l'éducation nationale et les acteurs locaux sinon pour accorder un moratoire du moins pour ménager un délai d'adaptation. Quand il y a menace de fermeture, qu'on laisse la faculté, pendant par exemple trois ans, d'examiner l'évolution en matière scolaire dans la zone. On sait, en effet, que si les seuils d'effectifs donnant lieu à une fermeture sont très rigides, ils sont beaucoup plus élevés pour une éventuelle réouverture. Ce qui est perdu l'est souvent irrémédiablement.

Adapter les décisions aux contraintes et aux situations locales est une bonne chose. L'amendement n° 638 va dans le bon sens.

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Même si je pense qu'un seuil en valeur absolue serait plus pertinent qu'un pourcentage, le progrès serait considérable pour les zones de revitalisation rurale.

Il faut être bien conscient de la situation des ZRR.

Moi qui suis élu d'une ZRR qui est aussi classée en zone d'éducation prioritaire, je constate que l'on y ferme toutes les classes qui comptent moins de vingt élèves. Dans pareille situation, on se rend bien compte que la catastrophe est au bout du chemin.

Nous voterons cet amendement qui va dans le bon sens.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Bien que je sois d'accord sur le principe, je trouve que l'amendement ne colle pas à la réalité en ce qui concerne les collèges et les lycées. Dans ces derniers, on ne tient pas compte du nombre d'élèves par classe. La dotation horaire globalisée, dont ont entendu parler mes collègues qui siègent au conseil d'administration de ces établissements, est établie en fonction de différents critères, l'effectif n'étant pris en compte qu'au niveau de l'établissement. Par le passé, d'autres critères existaient, fondés en particulier sur le retard scolaire, le taux de chômage ou la ruralité.

Il faudrait, et cela pourrait faire l'objet d'un sous-amendement, que dans les collèges et les lycées des zones de revitalisation rurale, la ruralité soit prise en compte comme critère : des points supplémentaires seraient accordés, ce qui permettrait d'augmenter la dotation horaire et, par voie de conséquence, d'améliorer les conditions de travail et, surtout, de dispenser un enseignement approprié à ce milieu spécifique.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Nous trouvons, nous aussi, l'amendement de M. Le Percq remarquable.

Certes, monsieur Gaymard, ces problèmes doivent être traités par la réglementation, mais si nous voulons donner un signe fort, et puisque nous examinons une loi sur l'avenir des territoires ruraux, il faut y inscrire un message qui soit compris par tous, y compris par l'administration. Ce qu'a évoqué M. Giraud, on pourrait le retrouver un peu partout. Ce n'est pas en continuant à fermer des classes parce qu'il manque un ou deux enfants, qu'on va réussir !

Il faut vraiment inclure dans la loi des choses significatives qui vont donner une direction nouvelle et que l'administration, en particulier la haute administration - nous discutons en présence de quelques éminents fonctionnaires - entende, de façon que cela soit suivi d'effet.

M. André Chassaigne. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Comme mes collègues Folliot, Lassalle et Auclair, c'est un véritable électrochoc que je souhaiterais pour tout le système de l'éducation nationale. Voilà pourquoi je soutiens fortement cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Je ne veux pas m'exprimer en lieu et place de mes collègues, chargés des services publics, Jean-Paul Delevoy, et de l'éducation, Luc Ferry et Xavier Darcos.

Je formulerai néanmoins deux remarques.

Sur la forme, je le répète, c'est indubitable, irréfutable, comme aurait dit Alexandre Vialatte, cher à André Chassaigne, il s'agit d'une disposition d'ordre réglementaire et non d'ordre législatif. Quand on est respectueux de la majesté de la loi, on n'y fait pas figurer une telle disposition !

Sur le fond, nous sommes tous élus de zones rurales ou de montagne et nous connaissons bien les problèmes qu'y pose l'organisation scolaire. Il faut effectivement, à cet égard, distinguer l'école primaire, d'une part, les lycées et collèges, d'autre part.

Pour les écoles primaires - et cette politique remonte à la législature précédente, depuis une circulaire du début 2001 - dans chaque département, une concertation est organisée entre l'inspecteur d'académie et l'ensemble des parties prenantes, y compris les élus, pour examiner le mouvement annuel des ouvertures et fermetures de classes. Nous y participons tous, chaque année, de manière récurrente.

S'agissant des lycées et des collèges, c'est le schéma régional des formations qui fait l'objet d'une consultation de l'ensemble des acteurs concernés, y compris, là encore, les élus locaux, qui ont un rôle éminent à jouer.

J'ajoute que le débat national sur l'école et les expérimentations décidées par Jean-Paul Delevoye dans un certain nombre de départements nous offrent un cadre pour travailler utilement sur la mise en réseau des établissements scolaires, la réflexion sur la taille optimale des classes, la question de l'affectation des options. En effet, ces dernières années, à cause de leur multiplication, il n'a pas été facile d'offrir les options partout pour satisfaire un maximum de demandes.

Nous nous situons dans le cadre d'une vraie démarche de qualité, et nous continuerons, en faveur de notre enseignement. J'entends bien et je partage les arguments qui viennent d'être développés, n'en doutez pas, mais je ne suis pas sûr que l'adoption de cet amendement, compte tenu de sa nature réglementaire, apporte quelque chose.

M. François Brottes. J'aimerais répondre au Gouvernement, monsieur le président.

M. le président. Il est, en effet, possible de répondre au Gouvernement, monsieur Brottes, mais ce n'est pas obligatoire ! Vous vous êtes suffisamment exprimés sur cet amendement, mes chers collègues, je vais le mettre aux voix.

Je mets aux voix l'amendement n° 638.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je demande une suspension de séance de quelques instants.

M. le président. Monsieur Brottes, il nous reste deux amendements à examiner avant d'interrompre nos travaux jusqu'à quinze heures : poursuivons, si vous le voulez bien.

M. François Brottes. J'ai demandé la parole pour répondre au Gouvernement, vous me l'avez refusée. Je vous demande donc une suspension de séance !

M. Augustin Bonrepaux. Elle est de droit. Vous ne pouvez pas la refuser ! Nous n'en avons pas demandé beaucoup !

M. le président. Monsieur Bonrepaux, tout le monde s'est exprimé librement et amplement.

M. Augustin Bonrepaux. C'est vrai !

M. le président. Vous avez pu constater que, sur les amendements, j'ai accepté plus d'intervenants que je n'aurais dû : un contre, un pour répondre à la commission et un pour répondre au Gouvernement, selon le règlement. Tout le monde a donc pu s'exprimer. Nous avons travaillé ce matin dans un très bon climat. Je vous propose donc d'achever la séance sur ces deux derniers amendements.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je  suspends  ma demande de suspension, pour être agréable à mes collègues et je note avec intérêt que vous souhaitez, monsieur le président, que nos débats se déroulent dans le meilleur climat, avec la possibilité pour chacun de s'exprimer, y compris pour répondre au Gouvernement !

M. le président. En effet, le débat s'est bien déroulé jusqu'à présent. Il faut que cela continue !

Je suis saisi d'un amendement n° 1270.

La parole est à M. Jean Auclair.

M. Jean Auclair. Vous avez raison, monsieur le ministre : il faut distinguer les écoles primaires des collèges et lycées. Au niveau départemental, les CDEN sont des structures où la concertation est forte entre l'inspection académique, les parents d'élèves et les professeurs. Cette concertation n'existe pas au niveau des lycées. Mon amendement vise à l'instaurer.

En Limousin, il vient de se passer quelque chose d'assez extraordinaire : le rectorat a annoncé, d'une manière quasi dictatoriale, une mesure de restructuration, visant ni plus ni moins qu'à la suppression de sections, ce qui est très dommageable en ZRR. Mme le recteur prétend avoir fait ces annonces pour faire réagir la population ! Elle a mis les professeurs, les élèves, les parents d'élèves et les élus dans la rue !

M. Jean Lassalle. C'est gagné !

M. Jean Auclair. Avant de faire réagir ainsi les gens, il serait bon qu'on grave dans le marbre que le rectorat est obligé de mettre en place un système de concertation avec tous les acteurs locaux, y compris les députés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. La commission a accepté cet amendement qui vise à engager une concertation des élus, préalable à toute modification du service public.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Sagesse.

M. le président. La parole est à M. Louis Cosyns.

M. Louis Cosyns. Il est en effet important que tous les acteurs de terrain soient consultés avant toute modification de la carte scolaire. Si nous voulons recréer un dynamisme dans nos zones rurales et y maintenir nos jeunes, il est nécessaire et urgent de répondre au besoin de formation, même si une section peut connaître une baisse passagère de ses effectifs. D'où l'importance de l'amendement n° 638 de M. Lepercq.

M. Jean Auclair. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. La portée juridique de cet amendement ne vous échappera pas. Les juristes apprécieront sans doute de voir gravée dans le marbre la création de cette commission de concertation ! Cela étant, j'estime qu'elle est particulièrement justifiée dans la situation actuelle. Nous voterons donc cet amendement.

M. Jean Auclair. Très bien !

M. Augustin Bonrepaux. Ces dernières années, nous avons assisté à la disparition des services publics, alors qu'ils devaient être maintenus.

Revenons à l'éducation. Tout à l'heure, nous avons voté un amendement. Nous verrons ce qu'il en adviendra après la seconde délibération. Monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, il peut y avoir un vote bloqué. Toujours est-il que cet amendement a été adopté, traduisant ainsi le souci des parlementaires - du moins certains d'entre vous - de préserver les zones rurales.

Mais la meilleure des formules, pour aider les zones rurales, ce serait plutôt de ne pas réduire les effectifs d'enseignants que de se préparer à affronter le mécontentement par le biais d'une commission de concertation. Vous tenterez d'expliquer que ce n'est pas votre faute, mais vous ne pourrez l'imputer ni à l'Europe ni à l'Amérique ! Alors, à qui va-t-on attribuer la réduction des effectifs ?

M. le président. Monsieur Bonrepaux, si vous n'êtes pas bref, je ne pourrai pas donner la parole à un deuxième orateur du groupe socialiste.

M. Augustin Bonrepaux. Je termine, monsieur le président.

Le pire est à venir en matière de service public, avec le budget que vous avez voté. Car il y a de nombreuses suppressions de postes, particulièrement dans les zones rurales. Certes, cet amendement vous protégera un peu. Mais, malheureusement, les difficultés seront au rendez-vous et vous aurez du mal à vous en dédouaner.

M. le président. La parole est à M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Je partage totalement le souci du maintien des services publics en milieu rural et je me félicite des expérimentations en cours. C'est un sujet que nous aborderons d'ailleurs un peu plus tard au cours de ce débat et sur lequel j'ai moi-même déposé des amendements.

Cela étant, l'amendement qui nous est proposé ne me paraît pas vraiment répondre aux problèmes qui se posent, pour deux raisons.

D'une part, les périmètres de recrutement d'un établissement scolaire et d'une zone de revitalisation rurale ne se recoupent pas.

D'autre part, pourquoi ne pas instaurer une procédure de concertation dans les territoires qui ne sont pas en ZRR ?

Cet amendement propose une usine à gaz supplémentaire, comme s'il n'y en avait pas suffisamment dans notre législation !

M. Henri Nayrou. La commission Théodule !

M. Daniel Garrigue. Si l'on veut défendre le service public en milieu rural, il faut des solutions simples, il faut des possibilités de concertation et d'arbitrage.

M. Augustin Bonrepaux. Et des moyens !

M. Daniel Garrigue. Mais nous ne résoudrons pas les problèmes avec une telle procédure, lourde et inapplicable.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Monsieur le président, comme il est douze heures cinquante et que nous avons tous l'estomac dans les talons, je ferai une intervention que je qualifierai d'alimentaire. (Rires.)

Cet amendement reprend un plat qui nous a été longtemps servi, celui des élus qui ont un double langage. Quand ils votent ici la loi de finances sur le budget de l'éducation nationale, ils applaudissent et ils la votent sans même souligner le manque de moyens. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Auclair. Vos propos sont scandaleux !

M. André Chassaigne. Ensuite, avec trois œufs, ils voudraient faire une omelette pour douze convives ! En définitive, les moyens dont disposent les rectorats et les inspections académiques, c'est-à-dire le nombre d'œufs dont ils disposent pour faire l'omelette qui sera servie, ce sont tout simplement les moyens accordés dans le budget. Il est incroyable qu'une fois encore, on ait ce double langage où l'on vote un budget au plan national et où l'on essaie de se dédouaner localement, avec quelques artifices.

M. Jean Dionis du Séjour. Bien sûr, les communistes n'ont jamais fait cela !

M. André Chassaigne. Ce qui est importe, puisqu'il faut bien arriver au dessert, c'est d'avoir suffisamment de biscuits, c'est-à-dire assez de moyens. Quand on donnera des moyens aux rectorats et aux inspections académiques, sans doute la répartition pourra-t-elle se faire de façon beaucoup plus satisfaisante au regard des besoins. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Monsieur Chassaigne, à mon goût, votre intervention était nourrie et épicée ! (Sourires.)

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je ne vais pas resservir le même plat que M. Chassaigne, même si je partage son argumentation !

M. Garrigue a tort de s'emporter et de considérer que les zones rurales n'ont pas à bénéficier d'un traitement particulier. Car, vous le savez, en matière de services et d'équipement, il pleut toujours là où c'est mouillé. Les agglomérations et les zones à forte densité ne posent pas problème, puisque c'est là que viennent s'installer les entreprises. Par conséquent, la concertation s'impose moins.

En revanche, dans les zones rurales, c'est la désertification qui s'organise. Par exemple, on nous explique qu'il faudrait délocaliser les établissements de santé parce qu'ils sont trop éloignés des villes. Ou encore, qu'il faut délocaliser telle ou telle entreprise parce que les transports ont du mal à y acheminer les marchandises.

Même chose pour les lycées. Or, un lycée constitue un équipement structurant pour un territoire rural. C'est même un équipement phare, qui permet, outre un certain nombre d'activités économiques, de se regrouper à la périphérie de ces équipements. Par conséquent, la concertation revêt une plus grande importance dans ce secteur.

De plus, avec la décentralisation, les régions et les départements auront de plus en plus de prérogatives. Sans concertation, notamment avec les parlementaires, la situation s'aggravera.

Cela étant, nous voterons cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Je suis un peu surpris par les propos de certains de mes collègues de l'opposition, qui ramènent tout aux moyens.

Pourtant, entre 1980 et 2000, le budget de l'éducation nationale a doublé. Pour autant, les problèmes liés à l'enseignement dans les ZRR ont-ils été réglés ? Non, sinon, nous ne serions pas là en train d'en parler. Le Gouvernement a le courage de poser le problème du devenir de l'éducation dans son ensemble. Cela étant, je doute fort que, lors des vingt prochaines années, nous pourrons continuer à faire le même effort budgétaire que ces vingt dernières années. Il faut utiliser au mieux les moyens disponibles.

Nous devons veiller à ce qu'il y ait des instruments de concertation spécifiques aux territoires ruraux. Mais ce n'est pas en posant le problème en matière de moyens que nous allons le résoudre.

M. Henri Nayrou. Les moyens, cela aide quand même !

M. le président. La parole est à M. Jean Auclair.

M. Jean Auclair. Nos collègues de l'opposition ne peuvent pas dire n'importe quoi. Nous avons voté le budget de l'éducation nationale et nous en sommes fiers.

M. André Chassaigne. Allez voir sur le terrain !

M. Jean Auclair. Ce budget, contrairement à ce que vous prétendez, est en augmentation de 2,8 %.

M. Patrick Ollier, président de la commission. C'est vrai !

M. Jean Auclair. C'est vous et le précédent gouvernement qui avez créé les pôles de compétence dans les lycées. Aujourd'hui, c'est nous qui payons les conséquences de votre inconséquence. Cessez de dire n'importe quoi !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1270.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle pour soutenir l'amendement n° 884.

M. Jean Lassalle. Tout le monde connaît le rôle des associations, en particulier dans les territoires ruraux, où elles remplacent les églises, les loges maçonniques, les bistrots, les gendarmes, les perceptions et les cellules du parti communiste. (Sourires.) Elles sont les seules à s'adapter et à créer du lien social.

M. Philippe Folliot. Très bien !

M. Jean Lassalle. Il y a toujours eu des animateurs formidables pour les conduire. L'amendement n° 884 propose d'exonérer de charges patronales les emplois associatifs, afin que leurs employeurs, souvent modestes, puissent continuer à faire appel à eux.

M. Jean Dionis du Séjour. C'est excellent !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. La commission n'a pas examiné cet amendement...

M. le président. Et elle le regrette !

M. Jean Auclair. Oui, c'est dommage ! Il aurait mérité un long débat !

M. Yves Coussain, rapporteur....qui vise à créer des liens sociaux dans nos zones rurales.

A titre personnel, j'y suis défavorable, malgré tout l'intérêt des associations. Il ne me paraît pas opportun de créer, dans les zones de revitalisation rurale, une catégorie supplémentaire d'emplois qui seraient exonérés de toutes les cotisations. Je vois mal comment ils pourraient coexister avec les autres emplois.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Le Gouvernement est également défavorable.

Cet amendement propose la création d'une exonération pérenne de toutes les cotisations patronales de sécurité sociale, du versement transports et des cotisations au FNAL, dans la limite de 1,5 fois le SMIC, pour tous les salariés employés par les associations implantées en ZRR.

Cette proposition est d'un intérêt très réduit pour les bas et moyens salaires depuis la mise en place au 1er juillet 2003 de la mesure générale de réduction des cotisations patronales de sécurité sociale, qui atteindra, au plus tard au 1er juillet 2005, 26 % du salaire au niveau du SMIC horaire contre 30 % dans le cadre de l'exonération dont vous envisagez la création.

L'adoption d'une nouvelle mesure créerait une complexité supplémentaire dans la gestion quotidienne de la paie, alors que la mesure générale, qui n'est subordonnée à aucune autre condition que celle tenant au niveau de rémunération offre l'avantage de la simplicité et de la lisibilité.

En outre les associations peuvent déjà bénéficier d'exonérations très avantageuses pour l'embauche de publics en difficulté, dans le cadre, notamment, du nouveau RMA, mais aussi du CES ou du CEC.

En revanche, monsieur Lassalle, j'ignore si toutes les associations sont couvertes. Vous avez cité une liste très exhaustive. Aussi, je ne suis pas certain que toutes les associations auxquelles vous avez fait référence soient concernées par la mesure. Cela demande à être précisé.

Nous pensons que la création d'une nouvelle exonération serait d'un intérêt très réduit et contraire à la démarche de rationalisation des exonérations engagées par l'ordonnance de simplification.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Ces mesures ont été adoptées pour les ZRU, qui bénéficient déjà du dispositif Fillon.Elles constituent donc un avantage. Pourquoi n'en serait-il pas de même pour les ZRR ?

Un effort cohérent a été fait en faveur des banlieues. Nous demandons qu'il y ait symétrie, avec des mesures fortes pour les campagnes. Jean Lassale a fort bien parlé du rôle joué par les associations en milieu rural. Nous vous mettons en garde : faites attention au message que vous envoyez. J'ai vécu, en 1992, dans le Lot-et-Garonne, de véritables jacqueries paysannes. Prenez garde à la façon dont ce texte sera perçu s'il n'y a pas symétrie.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je tiens à m'associer à cet amendement présenté par notre ami Jean Lassalle.

Je pourrais relever l'allusion qu'il a faite. Je crois avoir entendu que M. Lassalle parlait des cellules du parti communiste en milieu rural.

Eh bien, je trouve que la meilleure réponse est une nouvelle citation d'Alexandre Vialatte, d'autant plus que, cette semaine, au restaurant de l'Assemblée nationale, nous avons des menus auvergnats, que je recommande d'ailleurs à tout le monde !

Cette citation est tirée de La Basse Auvergne : « ...L'Auvergnat n'est pas communiste, à moins, comme en certain hameau, qu'il n'imagine le communisme comme une sorte d'entreprise municipale éminemment capitaliste au seul profit de la commune. Il paraît qu'on peut se faire élire en des coins assez reculés sur ce facile calembour. Je n'en jure pas... ».

Ce petit clin d'œil ne m'empêche pas de soutenir totalement cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Je soutiens fermement cet amendement cosigné par MM. Dionis du Séjour, Sauvadet et Folliot.

Monsieur le ministre, je crains que nous ne nous soyons mal compris. Je n'ai pas dit que ces associations travaillaient pour le compte de tous les organismes que j'ai cités et qui, pour la plupart d'entre eux, ont quasiment disparu. J'ai dit qu'elles s'y substituaient, et que sinon il ne resterait plus qu'un désert. Et elles le font bien, parce que, d'une certaine manière, on arrive à maintenir une société à peu près équilibrée à un moment où, comme le dit la chanson, tout fiche le camp.

Je ne comprendrais pas que l'on n'applique pas au milieu rural des dispositions qui ont été adoptées, à l'occasion de la loi Borloo, en faveur des banlieues. Les associations sont les mêmes et ce sont les mêmes travailleurs sociaux qui les animent.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Je voudrais juste, en écho à M. Chassaigne, citer à nouveau Alexandre Vialatte : « L'Auvergne produit des volcans, des fromages et des ministres. » (Sourires.)

M. Jean Dionis du Séjour. Et des présidents de la République !

M. le président. C'est le mot de la fin.

Je mets aux voix l'amendement n° 884.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SEANCES

    M. le président. Cet après-midi à quinze heures, deuxième séance publique :

    Suite de la discussion du projet de loi, n° 1058, relatif au développement des territoires ruraux :

    MM. Yves Coussain, Francis Saint-Léger et Jean-Claude Lemoine, rapporteurs au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (rapport n° 1333).

    À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

    Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures.)

      Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

      jean pinchot